Conseil de sécurité: la Syrie continue de rejeter les conclusions de l’OIAC sur l’utilisation présumée d’armes chimiques dans ce pays

8990e séance – matin
CS/14826

Conseil de sécurité: la Syrie continue de rejeter les conclusions de l’OIAC sur l’utilisation présumée d’armes chimiques dans ce pays

Onze jours à peine après sa dernière intervention devant le Conseil de sécurité sur l’élimination du programme d’armes chimiques de la République arabe syrienne, la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement a déclaré, ce matin, que le manque de coopération des autorités de ce pays ne permet toujours pas de répondre aux questions en suspens concernant la fabrication et l’utilisation de telles armes dans le cadre du conflit en Syrie. 

Mme  Izumi Nakamitsu a ainsi confirmé que le Secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), chargé de vérifier l’élimination de ce programme, n’a toujours pas reçu de la Syrie la déclaration demandée concernant tous les types et quantités non déclarés d’agents neurotoxiques produits et/ou militarisés dans une ancienne fabrique d’armes chimiques qui avait été déclarée par Damas comme n’ayant « jamais » été utilisée à cette fin. 

Pareillement, les éléments complémentaires demandés au sujet des dégâts causés lors de l’attaque du 8 juin 2021 dans une installation militaire abritant une ancienne fabrique d’armes chimiques déclarée, n’ont toujours pas été transmis par les autorités syriennes.  Ni ceux en rapport avec le mouvement non autorisé des restes de deux cylindres détruits lors de l’incident à l’arme chimique qui a eu lieu à Douma le 7 avril 2018, a précisé Mme Nakamitsu.  

En outre, le Secrétariat technique de l’OIAC n’est toujours pas en mesure de mener le vingt-cinquième cycle de consultations à Damas entre les autorités syriennes et l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’OIAC, en raison du refus persistant de la Syrie de délivrer un visa d’entrée à l’un de ses membres, a rapporté Mme Nakamitsu qui a souligné que la pleine coopération de la Syrie avec le Secrétariat technique est essentielle pour clore toutes les questions en suspens. 

En raison de ces « lacunes, incohérences et divergences » qui ne sont toujours pas résolues, le Secrétariat technique de l’OIAC continue donc d’estimer que la déclaration présentée par la République arabe syrienne « ne peut être considérée comme exacte et complète », a résumé Mme Nakamitsu. 

Ces conclusions ont été appuyées par plusieurs membres du Conseil, de la France au Mexique, en passant par les États-Unis, qui ont relevé que le Conseil a reçu pas moins de 101 rapports sur le sujet, sans que des progrès véritables aient pu être accomplis, imputant la faute à l’obstruction du « régime syrien ». 

La Chine a pour sa part appelé le Secrétariat technique de l’OIAC à faire preuve de plus de flexibilité et à envoyer des experts avec des visas valables en Syrie pour pouvoir évaluer la déclaration initiale de la Syrie sans tarder. 

Sur ce point, la République arabe syrienne a affirmé que c’est le Secrétariat technique de l’OIAC qui porte l’entière responsabilité du retard pris dans la tenue de la vingt-cinquième série, les prétextes allant de la trop grande chaleur en été au refus d’octroi d’un visa d’entrée à l’un des membres de l’Équipe.  La Syrie a demandé le remplacement de ce membre et cela ne devrait pas retarder la visite de l’Équipe, a fait valoir la délégation pour qui ce blocage serait le reflet des pressions exercées sur son pays. 

La délégation syrienne a également déploré que suite à l’attaque chimique perpétrée selon elle par des terroristes le 19 mars 2013 sur la zone de Khan al-Assal, l’équipe technique indépendante ne s’est jamais rendue sur le site de l’incident et aucune investigation n’a été menée.  « Certains pays bien connus » dissimulent les crimes d’organisations terroristes, dans le but d’instrumentaliser et de politiser le « soi-disant dossier chimique syrien », a-t-elle accusé. 

Selon elle, le même « procédé » est à l’œuvre avec la mission d’établissement des faits de l’OIAC, qui n’a pas tenu compte des demandes d’enquête formulées par son gouvernement concernant l’utilisation par des groupes terroristes de produits chimiques toxiques contre la population civile et les forces gouvernementales. 

En l’absence de changement « sur le terrain » ou au sein de l’OIAC, il n’y a pas lieu de tenir une séance sur la question des armes chimiques en Syrie si peu de temps après la précédente, a tranché la Fédération de Russie qui a rejeté comme la Chine la périodicité « absolument artificielle » de ces réunions.  La délégation russe a aussi mis en cause l’intégrité du Secrétariat technique de l’OIAC coupable selon elle de « fraude directe » dans l’élaboration du rapport portant sur l’enquête sur l’incident à Douma. 

Tant que la mission d’établissement des faits n’aura pas fait toute la lumière sur cet incident, il n’y a pas lieu pour le Directeur général de l’OIAC de publier un nouveau rapport, a estimé la Chine qui, à l’instar de la Fédération de Russie, a souhaité que ce dernier s’adresse en personne aux membres du Conseil de sécurité. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/181)

Déclarations

Onze jours après sa dernière intervention sur le sujet, Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, a informé le Conseil de sécurité des avancées dans l’élimination du programme d’armes chimiques de la République arabe syrienne, dont la vérification est assurée par le Secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Ce dernier n’a pas encore reçu de la Syrie la déclaration demandée concernant tous les types et quantités non déclarés d’agents neurotoxiques produits et/ou militarisés dans une ancienne fabrique d’armes chimiques qui avait été déclarée par Damas comme n’ayant jamais été utilisée pour produire et/ou militariser des agents de guerre chimique, a-t-elle relevé. 

Le Secrétariat technique de l’OIAC n’a pas non plus reçu les informations et documents complémentaires demandés concernant les dégâts causés lors de l’attaque du 8 juin contre une installation militaire abritant une ancienne fabrique d’armes chimiques déclarée.  De même, il n’a pas reçu de réponse à la demande d’informations concernant le mouvement non autorisé et les restes de deux cylindres détruits liés à l’incident d’arme chimique qui a eu lieu à Douma le 7 avril 2018.  La Haute-Représentante a donc demandé à la République arabe syrienne de répondre aux demandes du Secrétariat technique de l’OIAC avec toute « l’urgence nécessaire ». 

En outre, le Secrétariat technique de l’OIAC n’est toujours pas en mesure de mener le vingt-cinquième cycle de consultations à Damas entre les autorités syriennes et l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’OIAC, « en raison du refus persistant de la Syrie de délivrer un visa d’entrée à l’un de ses membres».  La pleine coopération de la Syrie avec le Secrétariat technique est essentielle pour clore toutes les questions en suspens, a souligné Mme Nakamitsu.  Elle a précisé qu’en raison des lacunes, incohérences et des divergences identifiées qui ne sont toujours pas résolues, le Secrétariat technique continue d’estimer qu’à ce stade, la déclaration présentée par la République arabe syrienne ne peut être considérée comme exacte et complète conformément à la Convention sur les armes chimiques. 

Après avoir fait savoir que le Secrétariat technique de l’OIAC a l’intention d’effectuer, en 2022, une inspection des installations de Barzé et Jamraya du Centre syrien d’études et de recherches scientifiques (CERS), Mme Nakamitsu a regretté que la République arabe syrienne n’a pas encore fourni d’informations ou d’explications techniques suffisantes qui permettraient de clore la question liée à la détection d’un produit chimique du tableau 2 dans les installations de Barzé du CERS en novembre 2018.  Sur une note plus positive, elle a noté que les préparatifs de la réunion en personne entre le Directeur général de l’OIAC et le Ministre syrien des affaires étrangères et des expatriés se poursuivent. 

Par ailleurs, la mission d’établissement des faits de l’OIAC a conclu que de l’ypérite au soufre avait été utilisée à Marea le 1er septembre 2015 et qu’un cylindre de chlore a été utilisé comme arme à Kafr Zeita le 1er octobre 2016.  Le déploiement de la mission d’établissement des faits en Syrie, prévu du 22 janvier au 4 février, a été repoussé en raison de cas positifs confirmés de COVID-19 identifiés au sein de l’équipe de soutien à Damas.  L’équipe d’enquête et d’identification poursuit quant à elle ses enquêtes sur les incidents dans lesquels la mission d’établissement des faits a déterminé que des armes chimiques avaient été utilisées ou probablement utilisées en Syrie.  Elle publiera d’autres rapports en temps voulu, en fonction de l’évolution de la pandémie de COVID-19, a ajouté la Haute-Représentante. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a relevé que le Conseil a discuté du « dossier » des armes chimiques syriennes il y a 10 jours et que depuis, aucun changement n’a eu lieu, ni « sur le terrain », ni en termes de situation au sein de l’OIAC.  Ceci est confirmé par la présentation d’aujourd'hui qui est en fait le rapport du Directeur général de l’OIAC pour le mois de février, a-t-il fait observer.  À ses yeux, cet état de fait confirme que le calendrier actuel de discussion du dossier syrien au Conseil, en particulier la question des armes chimiques, est absolument artificiel.  Les délégations n’ont tout simplement rien à discuter aussi fréquemment, a-t-il argué.  Il a rappelé que sa délégation avait suggéré d’ajuster le calendrier afin de permettre au Conseil de travailler sur ce sujet plus efficacement.  Cela a été réclamé à plusieurs reprises également par la délégation chinoise, a-t-il noté, tout en regrettant que ces propositions n’aient pas été soutenues par les collègues occidentaux.  Une telle approche ne fait que saper la crédibilité de notre organisme, a—t-il déploré. 

M. Polyansky a relevé que les Occidentaux sont focalisés sur la Syrie, alors même qu’il y a d’autres points chauds comme la Libye qui a un nouveau Premier Ministre depuis le 10 février et où on y note des enlèvements de ministres et une situation chaotique qui fait craindre les risques d’un double pouvoir de facto. Mais « les parrains du complot libyen au Conseil de sécurité » prétendent qu’il ne se passe rien de spécial, a-t-il dénoncé, faisant remarquer que personne n’a suggéré d’ajuster le calendrier établi des réunions sur la Libye qui ont lieu tous les deux mois.  En revanche, nous sommes obligés de discuter chaque mois de la Syrie uniquement parce que c’est important pour nos collègues occidentaux, a-t-il déploré, décriant une autre manifestation du « deux poids, deux mesures ».  

Revenant au dossier chimique syrien, le délégué russe a réitéré ses accusations de politisation du travail de l’OIAC, notamment la violation, par le Secrétariat technique, de la méthodologie de travail de la Convention sur les armes chimiques, ainsi que des faits révélés de fraude directe dans la préparation du rapport de la mission de l’enquête sur l’incident à Douma.  Il a également dénoncé les activités de l’équipe « illégitime d’enquête et d’identification, l’accusant d’avoir conclu de manière délibérément biaisée sur la « culpabilité » de Damas, tout en ignorant l’utilisation d’armes chimiques par des terroristes.  Le représentant a aussi dénoncé « le manque de volonté de la direction de l’OIAC de corriger cette situation déplorable.  Le Directeur général de l’OIAC doit trouver « dans son emploi du temps soi-disant chargé », du temps pour informer le Conseil et répondre à toutes les questions posées précédemment par la délégation russe, a insisté le délégué.  Sinon, nos soupçons que le Secrétariat technique a quelque chose à cacher ne vont que s’intensifier. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a jugé fondamental que le Conseil de sécurité soit informé à intervalles réguliers du travail effectué par l’OIAC en Syrie.  Il a rappelé que le Conseil a déjà reçu 101 rapports du Directeur général de l’OIAC et que, malgré cette profusion d’informations, peu de progrès ont été enregistrés.  Le cent-unième rapport et la dernière réunion d’information du Secrétariat technique de l’OIAC à La Haye ont confirmé que la Syrie ne respecte toujours pas ses obligations en vertu de la résolution 2118 (2013), a constaté le représentant.  De plus, a-t-il relevé, le Gouvernement syrien continue de refuser d’octroyer des visas à tous les membres de l’Équipe d’évaluation des déclarations, ce qui retarde encore les travaux de cette dernière.  Soulignant que le Gouvernement syrien ne peut choisir les experts participant à ces évaluations, le délégué a enjoint Damas à coopérer pleinement avec l’OAIC.  Il a affirmé que le « régime Assad » continue de détenir des preuves concernant la destruction de deux cylindres de chlore liés à l’attaque perpétrée en 2018 à Douma.  Il n’a pas été en mesure d’expliquer pourquoi ces cylindres avaient été déplacés et détruits.  Or, il ne pouvait le faire sans l’accord de l’OIAC, a-t-il souligné, y voyant un refus flagrant de coopérer.  Pour le représentant, la Syrie n’a pas non plus été honnête sur la portée et l’ampleur de son programme chimique lors de sa déclaration initiale. 

Rappelant que l’Équipe d’évaluation des déclarations a déterminé que la Syrie a utilisé à trois reprises des armes au chlore contre sa population à Ltamenah en mars 2017, il a écarté les accusations de Damas et de ses alliés selon lesquelles les experts de cette équipe seraient motivés politiquement.  En tentant de justifier la « guerre inutile » qu’elle mène en Ukraine, la Fédération de Russie prouve qu’on ne peut lui faire confiance lorsqu’elle parle du dossier des armes chimiques en Syrie, a-t-il martelé.  À ses yeux, l’incapacité de la Syrie de s’acquitter de ses obligations « fait que tout le monde est en danger ».  Il a donc une nouvelle fois appelé le « régime Assad » à coopérer pleinement avec l’OIAC, en particulier avec l’Équipe d’évaluation des déclarations et l’équipe d’enquête et d’identification. 

M. JISHENG XING (Chine) a estimé que le Conseil de sécurité devrait réduire le nombre de réunions sur le « dossier chimique syrien ».  Un autre rapport du Directeur général de l’OIAC lui a été présenté la semaine dernière, a-t-il rappelé, soulignant qu’il n’y a pas eu, depuis, de nouveaux développements.  Il a estimé que, tant que la mission d’établissement des faits n’aura pas fait toute la lumière sur l’incident de Douma, il n’y a pas lieu de publier un nouveau rapport.  En outre, le représentant a appelé le Secrétariat technique de l’OIAC à faire preuve de plus de flexibilité et à envoyer des experts avec des visas valables en Syrie pour pouvoir évaluer la déclaration initiale de la Syrie sans tarder.  Il a insisté sur l’idée que le dossier des armes chimiques syriennes ne peut être réglé qu’à travers la coopération et le dialogue.  Le Secrétariat technique doit en outre veiller à la non-politisation de son travail, a souhaité le représentant qui a conclu en émettant l’espoir de voir le Directeur général de l’OIAC se déplacer pour s’adresser en personne aux membres du Conseil. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dénoncé le manque de coopération de la Syrie concernant sa déclaration d’armes chimiques et sa violation de la résolution 2118 (2013).  Le représentant a appelé le régime syrien à respecter la Convention sur les armes chimiques.  Le délégué a ensuite fait le parallèle entre l’action de la Fédération de Russie en Ukraine et ses agissements en Syrie, appelant à mettre un terme aux campagnes de désinformation de Moscou.  La Russie a une longue histoire de déni de la vérité et la volonté de faire obstruction en ce qui concerne les armes chimiques.  En 2017, a rappelé le représentant, l’équipe d’enquête et d’identification et le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU avaient conclu que le régime d’Assad était responsable d’avoir commis des attaques chimiques. 

Poursuivant, le représentant a noté que la Fédération de Russie a présenté 40 versions différentes de l’attaque à l’arme chimique à Salisbury, ainsi que différentes versions de l’attaque au Novitchok contre Alexeï Navalny.  La question qui se pose est de savoir si l’on doit croire un État qui utilise des armes chimiques et qui refuse de répondre aux questions sur les attaques du régime Assad ou croire une organisation internationale indépendante qui a mené des enquêtes rigoureuses et attribué les responsabilités.  Affirmant que le Conseil de sécurité a entendu suffisamment de mensonges sur les armes chimiques de la part de la Fédération de Russie, le délégué a appelé à arrêter de faire semblant que le régime d’Assad agit en toute bonne foi. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a affirmé qu’il avait une obligation morale, au cours de cette réunion consacrée à la Syrie, d’aborder la question de Marioupol, une ville de 500 000 habitants victime d’une brutale attaque russe depuis deux semaines.  C’est une ville assiégée, complètement coupée, que l’agresseur n’a pas pu prendre et qu’il bombarde sauvagement.  C’est une ville que l’agresseur a laissé sans électricité, eau, nourriture, tout ce qui est nécessaire pour vivre et ses habitants, où les civils coupent des arbres pour lutter contre le froid, font fondre la neige pour boire et ne pas mourir de déshydratation.  Autrefois centre de l’industrie et de l’éducation en Ukraine; Marioupol est maintenant une terre brûlée, le visage de l’agression russe, a déploré le représentant qui a notamment condamné « l’attaque délibérée » hier, contre un hôpital. 

En venant à la question des armes chimiques, il a dénoncé le manque délibéré de coopération de la part de la Syrie de répondre aux demandes clairement formulées dans la résolution 2118.  Il a relevé que depuis presqu’un an, l’équipe d’experts de l’OIAC n’a effectué aucune vérification sur le territoire syrien, affirmant que la Syrie « se mure dans une réponse qui n’est ni exacte, ni complète conformément à la Convention sur les armes chimiques ».  Il a exigé une coopération pleine et sans équivoque des autorités syrienne avec le Secrétariat technique de l’OIAC et rejeté tout effort de discrédit ou de politisation de leur travail.  La Syrie n’a le droit de décider ni des règles de procédure ni du choix des inspecteurs, a-t-il souligné. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé que depuis 2013, le « régime syrien » a utilisé au moins à huit reprises des armes chimiques contre sa propre population.  « Cela a été démontré sans aucune ambiguïté par les enquêtes de l’OIAC et de l’ONU. »  Or, depuis plus de huit ans, aucun progrès n’a été effectué, a constaté à regret le représentant, qui a souhaité revenir sur trois points.  Premièrement, il a salué la publication, il y a quelques semaines, des deux rapports de la mission d’établissement des faits, qui démontrent que des armes chimiques ont été utilisées à Marea en 2015 et à Kafr Zeita en 2016.  Ensuite, il n’est pas acceptable, a dit le délégué, que le « régime » continue de faire obstruction au travail de l’OIAC, en refusant de délivrer les visas nécessaires au déploiement de l’équipe d’évaluation de la déclaration initiale.  M. de Rivière a accusé la Syrie d’utiliser des prétextes fallacieux pour entraver les missions du Secrétariat technique, « qui fait preuve de ténacité et d’un grand professionnalisme ».  Les campagnes de désinformation à son encontre sont odieuses et doivent cesser, a-t-il plaidé.  Enfin, il a souligné que les mesures prises en avril 2021 lors de la Conférence des États parties ne sont pas irréversibles: les droits et privilèges suspendus peuvent être rétablis, à condition que la Syrie s’acquitte de ses obligations.  « Mais soyons clairs: il n’y aura pas de répit pour les criminels de guerre qui utilisent ces armes choquantes et bannies par le droit international », a mis en garde le représentant. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a insisté sur le fait que la République arabe syrienne doit remplir ses obligations conformément à la Convention sur les armes chimiques et la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité.  Elle a rappelé qu’il y a 20 questions en suspens en rapport avec la déclaration initiale de la Syrie qui restent non résolues.  Nous exhortons la Syrie à fournir suffisamment d’informations techniques et d’explications pour combler ces lacunes en suspens, a-t-elle plaidé.  Elle a regretté des retards persistants dans la délivrance des visas aux membres de l’Équipe d’évaluation des déclarations.  Elle a souligné l’obligation de la Syrie de coopérer pleinement avec l’OIAC.  Mme Heimerback a également rappelé que l’OIAC a demandé des informations complémentaires sur une attaque signalée contre une ancienne installation de production d’armes chimiques qui contenait apparemment des équipements pertinents à une enquête en cours de l’OIAC.  Enfin, elle a jugé essentiel que la Syrie achève de prendre les mesures nécessaires pour que puisse être levée la suspension de ses droits et privilèges en tant qu’État partie à la Convention sur les armes chimiques.  Elle a, pour finir, appelé à la coopération, qui est « essentielle pour régler tous les problèmes non résolus ».

Dénonçant les efforts visant à politiser les conclusions de l’OIAC, Mme Geraldine Byrne Nason (Irlande) a appelé le Conseil de sécurité à être uni et clair dans son appui à l’OIAC et dans son rejet de la désinformation.  Les efforts de la Syrie et d’ « autres » visant à saper le travail de l’OIAC ont de graves conséquences, a-t-elle souligné.  Elle a ainsi rappelé que 20 questions restent en suspens et qu’il a été démontré que la Syrie n’a pas correctement déclaré ses activités de développement d’armes chimiques.  De plus, des preuves ont été apportées sur des attaques perpétrées par le régime syrien contre sa population, qui ont causé la mort de centaines de personnes.  Elle a jugé impératif que le Conseil fasse respecter ses décisions et continue d’appuyer les activités de l’OIAC qui visent à faire en sorte que les stocks syriens d’armes chimiques soient détruits de manière vérifiable.  Pour cela, la Syrie doit pleinement coopérer, c’est l’unique moyen d’avancer sur ce dossier, a insisté la déléguée, avant d’appeler les autorités de Damas à appuyer la réunion prévue entre le Directeur général de l’OIAC et le Ministre syrien des affaires étrangères et des expatriés.  La Syrie doit également fournir sans délais les précisions nécessaires sur toutes les questions en suspens et cesser de bloquer le déploiement de l’Équipe d’évaluation des déclarations, a-t-elle ajouté, soulignant que Damas a l’obligation de fournir un accès immédiat à l’ensemble du personnel de l’OIAC.  Plutôt que de retarder ces travaux, la Syrie doit prendre des mesures constructives pour que les inspections se poursuivent, a-t-elle dit. 

M.  TAINÃ LEITE NOVAES (Brésil) a noté que cela ne fait que 10  jours, que le Conseil s’est réuni pour discuter des mêmes rapports du Directeur général de l’OIAC et de la mission d’établissement des faits.  Pour lui, la périodicité de ces réunions devrait être mieux discutée entre les membres, au risque de diminuer l’importance que les États membres et d’autres acteurs attachent au dossier des armes chimiques syriennes.  Il a réitéré que le Brésil condamne, dans les termes les plus fermes, l’utilisation d’armes de destruction massive, y compris les armes chimiques, n’importe où, par n’importe qui, et en n’importe quelles circonstances.  Par conséquent, son pays soutient une OIAC forte, transparente et indépendante.  Quant aux enquêtes menées par la mission d’établissement des faits, le représentant a estimé que, compte tenu de la gravité des faits, elles doivent être impartiales, équilibrées, techniques et exhaustives.  Plaidant en faveur du rétablissement de la confiance entre l’OIAC et la République arabe syrienne, le représentant a dit qu’il s’agit d’une étape fondamentale pour surmonter la « regrettable politisation » qui a sapé la culture du consensus au sein de l’Organisation et de ses organes de décision. 

Mme VIDISHA MAITRA (Inde) a réitéré l’attachement de sa délégation à la Convention sur les armes chimiques.  Elle a affirmé « soutenir » les efforts déployés par les parties pour veiller à ce que la crédibilité et l’intégrité de cette Convention soient maintenues.  Toute enquête sur l’utilisation d’armes chimiques devait être impartiale, crédible et objective, a demandé la représentante.  Une telle enquête devrait suivre scrupuleusement les dispositions et procédures inscrites dans la Convention, a-t-elle insisté.  Elle a mis en garde contre la possibilité que des entités terroristes aient accès à des armes chimiques, y compris en Syrie.  Les rapports de l’UNITAD ont également fait référence aux déploiements répétés d’armes chimiques par des groupes terroristes interdits par l’ONU et ceux affiliés à Daech contre des populations civiles entre 2014 et 2016, a rappelé la représentante.  Elle a, enfin, encouragé à faire des progrès sur les voies politique et humanitaire, ce qui faciliterait à son avis les processus de paix et politique en Syrie. 

Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya) M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est dit préoccupé par les divergences qui persistent entre les positions de l’OIAC et des autorités syriennes concernant les lacunes non comblées, les incohérences et les questions en suspens dans les soumissions initiales et ultérieures de la Syrie conformément à la Convention sur les armes chimiques.  Il a estimé que des progrès significatifs peuvent être accomplis vers la mise en œuvre intégrale du programme d’élimination grâce à des relations renforcées et à une coopération de bonne foi entre l’OIAC et ses organes de mise en œuvre, d’une part, et « l'Autorité syrienne », d’autre part.  Il a estimé que la rencontre en personne proposée entre le Ministre des affaires étrangères syrien, M. Faisal Mekdad, et le Directeur général de l’OIAC pourrait être une occasion de renforcer la confiance et d’obtenir un réengagement de la Syrie envers ses obligations. 

En ce qui concerne le déploiement sur le terrain de l’équipe d’évaluation de la déclaration initiale, le représentant de l’A3 a exhorté la Syrie à se conformer à ses obligations en accordant un accès libre et sans entrave à son territoire pour tous les membres de l’équipe, et à collaborer en matière de communication et d’échange d’informations.  Après avoir pris note du soutien continu du Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS) dans le cadre de l’accord tripartite conclu avec l’OIAC et les autorités syriennes, le représentant a rappelé les difficultés posées par la pandémie de COVID-19 aux travaux de l’OIAC en Syrie. 

Il a dit que le Groupe A3 continuera à soutenir les mesures de responsabilisation pour tenir les auteurs responsables et renforcer les normes internationales contre l’utilisation d’armes chimiques et d’autres armes de destruction massive.  Dans ce contexte, il a particulièrement salué le travail « essentiel » de la mission d’établissement des faits et de l’équipe d’enquête et d’identification visant à identifier les auteurs, avant de souligner la nécessité pour ces structures de rester indépendantes, transparentes et impartiales.  Il a, en conclusion, réitéré la position de principe de l’Afrique contre l’utilisation d’armes chimiques n’importe où, par n’importe qui et dans n’importe quelles circonstances, avant de rappeler qu’aucune cause ne pouvait justifier une utilisation.  C’est pourquoi, il a exprimé son soutien à tous les efforts visant à conclure rapidement l’élimination du programme d’armes chimiques de la Syrie. 

M.  ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTINEZ (Mexique) a constaté que des incohérences persistent dans la déclaration initiale de la Syrie.  Il a regretté en outre que, malgré de nombreuses tentatives, il n’ait pas été possible de tenir le vingt-cinquième cycle de consultations en raison du refus de Damas de délivrer des visas à tous les membres de l’Équipe d’évaluation de la déclaration initiale.  Il a demandé aux autorités syriennes de permettre le déploiement, en temps utile, de ladite équipe dans les installations du Centre d’études et de recherches scientifiques de Barzé et de Jamraya.  Le délégué a également réitéré la demande de clarification des faits concernant la conservation et le transfert non autorisés de cylindres de chlore liés à l’attaque de Douma en date d’avril 2018. 

M. Ochoa Martínez a regretté que la Syrie continue de ne pas se conformer aux obligations énoncées par les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et par la Convention sur les armes chimiques elle-même.  Rappelant l’avoir mentionné lors de la réunion de février dernier, il a pris note que les enquêtes de la mission d’établissement des faits ont permis d’établir qu’il existe des « motifs raisonnables » de croire que des produits chimiques ont été utilisés comme armes à Marea et à Kafr Zeita.  La possibilité que des acteurs non étatiques, y compris ceux inscrits par ce Conseil sur la liste des entités terroristes, puissent avoir accès à des produits chimiques est « très préoccupante », a-t-il conclu. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a estimé que tout progrès tangible dans le dossier des armes chimiques de la crise syrienne nécessite de combler les lacunes existantes.  Il a donc encouragé à mener un dialogue constructif et significatif entre l’OIAC et la République arabe syrienne.  En outre, les modalités de leur coopération devraient être améliorées, conformément aux principes sur lesquels l’OIAC a été créée, et en tenant compte de sa nature technique et des principes de consensus et non-politisation, a-t-il recommandé. « Nous croyons que faciliter le voyage de l’Équipe d’évaluation de la déclaration en Syrie contribuera à la réalisation de ces objectifs. »  Il a également insisté sur l’importance d’empêcher les terroristes présents en Syrie d’obtenir des armes chimiques, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  En conséquence, il a souligné l’importance de continuer à combattre Daech en Syrie, pour l’empêcher de réorganiser ses rangs ou d’acquérir des armes chimiques. 

Réagissant à la déclaration du représentant de l’Albanie au sujet d’un soi-disant bombardement d’un hôpital à Marioupol le représentant de la Fédération de Russie a expliqué que sa délégation a distribué une lettre officielle au Conseil de sécurité en date du 7 mars au sujet de l’opération spéciale en Ukraine.  Il a affirmé que l’hôpital était occupé par le bataillon nationaliste Azov qui utiliserait la population de Marioupol comme bouclier humain.  « Il n’y avait plus de femmes attendant d’accoucher dans cette installation depuis longtemps », a insisté le délégué russe avant d’exhorter les délégations à vérifier la source de leurs informations, et de cesser de diffuser des informations falsifiées au cours de réunions du Conseil de sécurité.  Illustrant son propos il a indiqué que des vidéos circulant sur les médias sociaux permettent de voir une actrice jouer le rôle de trois différentes femmes enceintes. 

Le représentant de la Chine a demandé à son tour que les déclarations à venir évitent de soulever des questions sans rapport avec le sujet à l’ordre du jour, de manière que le Conseil puisse examiner et délibérer des questions pertinentes « normalement et rapidement ». 

M. KOUSSAY ALDAHHAK (République arabe syrienne) a rappelé qu’il y a neuf ans, le 19 mars 2013, des éléments terroristes ont tiré un missile contenant des produits chimiques toxiques sur la zone de Khan al-Assal, dans la province d’Alep, causant la mort par asphyxie de 25 membres des forces armées syriennes et de 110 autres personnes.  Suite à cette attaque, a-t-il indiqué, le Gouvernement syrien a pris l’initiative de demander au Secrétaire général de l’ONU d’alors de former une équipe technique indépendante pour enquêter sur les faits.  Or, après des mois d’atermoiements, cette équipe n’a jamais visité le site de l’incident et aucune enquête n'a été menée, a-t-il déploré, y voyant la preuve que « certains pays bien connus » cachent les crimes d’organisations terroristes, ce qui a contribué à la manipulation et à la politisation du « soi-disant dossier chimique syrien ».  Selon le représentant, le même « procédé » s’est ensuite reproduit avec la mission d’établissement des faits de l’OIAC, qui n’a pas tenu compte des demandes d’enquête formulées par le Gouvernement syrien concernant l’utilisation par des groupes terroristes de produits chimiques toxiques contre la population civile et les forces gouvernementales. 

De surcroît, a poursuivi le délégué, la mission d’établissement des faits a eu recours à des méthodes de travail « erronées et dangereuses », parfaitement incompatibles avec les dispositions énoncées dans sa feuille de route.  Il a notamment cité le fait que la mission accepte de recevoir des échantillons de parties tierces anonymes venant de l’extérieur de la Syrie au lieu de procéder elle-même à la collecte des échantillons.  La Syrie, a-t-il insisté, a volontairement adhéré à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.  Elle s'est débarrassée de tous ses stocks d’armes chimiques et a détruit leurs installations de production.  S’agissant des questions qui restent en suspens, il a assuré que le Comité national syrien a facilité la coopération avec l’OIAC, comme en attestent les 24 séries de consultations avec l’Équipe d’évaluation de la déclaration.  Pour le représentant, c’est le Secrétariat technique de l’OIAC qui porte l’entière responsabilité du retard pris dans la tenue de la vingt-cinquième série, les prétextes allant de la trop grande chaleur en été au refus d’octroi d’un visa d’entrée à l’un des membres de l’Équipe.  La Syrie a demandé le remplacement de ce membre et cela ne devrait pas retarder la visite de l’Équipe, a-t-il fait valoir, considérant que ce blocage est le reflet des pressions exercées sur son pays et des tentatives visant d’abuser de sa coopération. 

Dans le cadre de sa coopération, a ajouté le représentant, la Syrie a également soumis son quatre-vingt-dix-neuvième rapport mensuel sur les activités liées à la destruction de ses armes chimiques et de ses installations de production.  Le Gouvernement syrien s’emploie en outre à préparer la tenue d’une rencontre de haut niveau entre le Ministre des affaires étrangères et des expatriés et le Directeur général de l’OIAC, notamment en convenant d’un ordre du jour qui permette d’avancer sur un certain nombre de questions liées aux pratiques erronées des équipes de l’OIAC.  Celle-ci ne pourra accomplir son mandat avec succès en imposant des « diktats » à la Syrie, en politisant le travail de ses équipes et en poussant le Conseil à inciter la Conférence des États parties à geler les droits et les privilèges de la Syrie au sein de l’OIAC.  Le succès, a-t-il conclu, ne pourra être atteint que si le Secrétariat technique fait le bilan complet de ses « mauvaises méthodes de travail » et respecte la nature « purement technique » des activités de l’OIAC, sans en faire un « outil » au service des desseins de certains pays et au détriment du régime de non-prolifération. 

M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a déclaré que politiser la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques et exploiter l’OIAC à des fins nationales motivées par des considérations politiques, a des conséquences négatives majeures pour l’autorité et la crédibilité de la Convention et de l’OIAC.  Il a renouvelé l’appel de l’Iran à une mise en œuvre complète, efficace et non discriminatoire de la Convention et à la sauvegarde de l’autorité de l’OIAC.  À ses yeux, la Syrie s’est conformée de bonne foi à ses obligations au titre de la Convention et continue de coopérer avec l’OIAC, comme en témoigne le fait qu’elle a soumis son quatre-vingt-dix-huitième rapport sur les opérations liées à la destruction d’armes chimiques et de sites de production associés sur son territoire le 17 janvier 2022.  En outre, la Syrie fournit régulièrement des informations au Secrétariat technique de l’OIAC et au Secrétariat général de l’ONU sur la possession et l’utilisation de matières chimiques par certaines organisations terroristes, ainsi que sur les incidents chimiques créés de toute pièce dans le but de les imputer ensuite à l’armée syrienne, a également souligné le délégué.  Conscient des répercussions désastreuses et horribles de l’utilisation d’armes chimiques par Saddam Hussein, « l’ex-dictateur iraquien », lors de son agression contre l’Iran, le délégué a réitéré son opposition à l’utilisation de telles armes par qui que ce soit et en aucune circonstance.  Le représentant a conclu en disant que consacrer une réunion mensuelle du Conseil à la répétition de positions et d’allégations infondées contre le Gouvernement syrien ne va pas dans le sens de l’efficacité du Conseil de sécurité. 

Pour M. ÖNCÜ KEÇELI (Turquie) le régime syrien continue de fouler aux pieds ses obligations au titre de la Convention sur les armes chimiques.  Il a déploré les lacunes, incohérences et disparités dans la déclaration sur les armes chimiques de la Syrie, notant que les demandes d’informations de l’OIAC restent sans réponse.  En outre, le régime syrien manipule la question de la délivrance de visa et refuse de coopérer et de fournir un accès à l’Équipe d’enquête et d’identification. 

Selon le représentant, des preuves scientifiques de plus en plus nombreuses prouvent que le régime syrien ne s’acquitte pas de ses obligations internationales.  Les violations de la Convention sur les armes chimiques ont des répercussions très graves pour la paix et la sécurité internationales, a-t-il prévenu.  Condamnant l’utilisation d’armes chimiques par le régime syrien, le délégué a appelé à identifier les auteurs de ces attaques et les faire comparaître devant les tribunaux le plus vite possible.  L’impunité pour des crimes contre l’humanité aussi horribles ne peut pas et ne saurait être tolérée, a-t-il affirmé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Cinquième Commission se penche sur la gestion des ressources humaines et l’expansion des relations commerciales de l’ONU avec les pays en développement 

Soixante-seizième session,
11e séance plénière – matin
AG/AB/4380

La Cinquième Commission se penche sur la gestion des ressources humaines et l’expansion des relations commerciales de l’ONU avec les pays en développement 

Le Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, s’est penchée, aujourd’hui, sur la gestion des 36 800 membres du personnel du Secrétariat de l’ONU et a réfléchi aux moyens de multiplier les chances des pays en développement de devenir fournisseurs de l’Organisation, un marché de 2,7 milliards de dollars en 2020.

L’atout le plus précieux de l’ONU, ont dit en chœur les délégations, ce sont l’expertise et les compétences de son personnel.  Une gestion moderne et rationalisée des ressources humaines, permettant de disposer d’un personnel hautement performant, est donc d’une importance capitale pour une Organisation efficace, efficiente, flexible et axée sur les résultats, a souligné la Suisse, qui parlait aussi au nom du Liechtenstein.  Comme les autres intervenants, la Suisse a regretté que la Commission n’ait pas été capable, ces dernières années, de donner, à travers une résolution consensuelle, des orientations « claires » au Secrétaire général. 

Consensus?  L’iniquité actuelle de la répartition des postes entre les différentes régions du monde a continué d’être dénoncée par plusieurs délégations.  Le Groupe des États d’Afrique a relevé que les hauts responsables du Secrétariat sont toujours loin d’avoir atteint l’objectif d’au moins 50% de ressortissants des États non représentés et sous-représentés dans leur personnel.  Nous avons du mal à comprendre cette situation, ont avoué le Groupe des 77 et la Chine, insistant sur le paragraphe 3 de l’Article 101 de la Charte des Nations Unies qui parle de « l’importance de recruter le personnel sur une base géographique aussi large que possible ».  L’objectif assigné, ont-ils souligné, est de recruter un personnel international, talentueux, géographiquement diversifié, véritablement paritaire et représentatif des peuples pour lesquels l’Organisation travaille. 

Au nom de plusieurs pays de sa région, la Fédération de Russie s’est inquiétée des approches du Secrétaire général sur la mobilité du personnel et le Programme des jeunes professionnels qui risquent de transformer l’ONU en « club fermé ».  Au mal de la mauvaise répartition géographique, le Syndicat du personnel du Secrétariat de l’ONU a ajouté ceux des faibles perspectives de carrière et du détournement de la délégation de pouvoirs.  Il a, en particulier, appelé à la levée des obstacles à l’avancement professionnel du personnel appartenant à la catégorie des services généraux, accusant le Secrétariat de s’appuyer de plus en plus sur les consultants au lieu de miser sur les compétences internes.  

Dans son rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) conseille d’ailleurs aux délégations de demander au Secrétaire général d’actualiser sa « Stratégie de gestion des personnes 2021-2025 » publiée en août 2021, pour traiter les insuffisances des processus de sélection du personnel, du rajeunissement des effectifs, de l’égalité de traitement des candidats externes et internes, de la répartition géographique équitable, de l’équilibre entre les sexes, de la nécessité d’améliorer l’évaluation et la notation et d’un cadre de responsabilisation approprié pour la gestion des ressources humaines.   

Tout en reconnaissant les efforts déployés pour promouvoir les relations commerciales entre l’ONU et les fournisseurs des pays en développement, le Groupe des 77 et la Chine ont invité le Secrétaire général à aller plus loin et à explorer des moyens innovants.  Dans un souci d’équité linguistique, ils ont réclamé la traduction dans les six langues officielles de l’ONU du Manuel des achats.  Les mesures supplémentaires proposées par le Secrétaire général devraient, a espéré la Fédération de Russie, permettre aux potentiels fournisseurs de saisir « la logique » des procédures d’achat de l’Organisation et de répondre massivement aux appels d’offres. 

La prochaine réunion de la Cinquième Commission, qui tient la majeure partie de sa reprise de session à huis clos, sera annoncée dans le Journal des Nations Unies

GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur les données démographiques relatives au personnel du Secrétariat de l’ONU (A/73/733

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/76/570 et A/76/570/Corr.1).  Il recommande d’emblée que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de lui présenter, à sa soixante-dix-septième session, une stratégie des ressources humaines actualisée, traitant des irrégularités dans le processus de sélection du personnel, du rajeunissement des effectifs, de l’égalité de traitement des candidats externes et internes, de la répartition géographique équitable, de l’équilibre entre les sexes, de la nécessité d’améliorer l’évaluation et la notation et d’un cadre de responsabilisation approprié pour la gestion des ressources humaines.

La stratégie devrait également inclure des informations détaillées sur l’impact des enseignements tirés de la pandémie de COVID-19 sur la gestion des ressources humaines, les examens en cours des modalités de travail et toute initiative ou proposition connexe.  La stratégie devrait, en outre, tenir compte de l’application des recommandations du Comité des commissaires aux comptes.

Le Comité compte également que le Secrétaire général veillera à ce que les définitions, objectifs, initiatives et stratégies figurant dans les différents rapports et documents, dont la « Stratégie de gestion des personnes 2021-2025: notre feuille de route pour l’avenir », publiée en août 2021 par le Bureau des ressources humaines, soient pleinement conformes aux résolutions pertinentes de l’Assemblée.

Notant que le Secrétariat comptait 36 827 fonctionnaires au 31 décembre 2020, le Comité relève, dans le rapport, l’absence d’analyse sur la possibilité offerte par le nombre élevé de départs à la retraite prévus pour la période 2020-2040 pour réaliser des progrès en ce qui concerne la répartition géographique équitable, l’équilibre entre les sexes et le rajeunissement des effectifs.  Il se déclare préoccupé par le nombre important de postes vacants soumis au principe de la répartition géographique, dont un grand nombre est occupé à titre temporaire par des fonctionnaires n’ayant pas ce statut et engagés pour une durée déterminée. 

Le Comité consultatif note tout de même qu’au cours de la période allant de 2016 à 2020, le nombre d’États Membres se situant dans la fourchette optimale pour ce qui est de la représentation aux postes soumis au principe de la répartition géographique a augmenté, passant de 102 à 109, et le nombre d’États Membres sous-représentés a diminué, passant de 44 à 37.  Toutefois, le Comité note également que le nombre d’États Membres non représentés a augmenté, passant de 18 à 20, et que le nombre d’États Membres surreprésentés est resté élevé, oscillant entre 29 et 27.

Il note que la Stratégie en matière de représentation géographique du Secrétaire général devrait paraître sous peu et espère qu’elle contiendra des objectifs clairs assortis de délais et d’indicateurs de réalisation allant au-delà des fourchettes optimales.  Le Comité recommande à nouveau que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de redoubler d’efforts pour améliorer la parité des genres à tous les niveaux au Secrétariat.  Au 31 décembre 2020, le pourcentage de femmes par rapport à l’ensemble du personnel du Secrétariat était de 38,6%, ce qui représente une augmentation de 0,2% par rapport au 31 décembre 2019. 

Par ailleurs, l’âge moyen du personnel du Secrétariat a augmenté de 2 ans, passant de 44,8 ans à 46,8 ans entre le 31 décembre 2016 et le 31 décembre 2020.  Le Comité consultatif souligne donc qu’il importe de prendre en compte les départs à la retraite prévus jusqu’en 2028.  Il note aussi le nombre excessif de postes aux échelons supérieurs: au 31 décembre 2020, 152 fonctionnaires du Secrétariat avaient rang de secrétaire général(e) adjoint(e) ou de sous-secrétaire général(e) contre 153 fonctionnaires au 31 décembre 2019, 150 au 31 décembre 2018 et 2017, et 157 au 31 décembre 2016.

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur les activités du Bureau de la déontologie (A/76/551)

Pour établir son rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/76/76) qui montre l’évolution du nombre de demandes de services adressées au Bureau et la ventilation des demandes par lieu d’affectation et par entité.  Les demandes de conseils en matière de déontologie constituent 41% du total des demandes et ont continué de représenter la majorité des demandes adressées au Bureau en 2020.  Comme pour les périodes précédentes, la majorité de ces demandes de conseils concernaient les activités extérieures.

En 2020, 691 demandes de conseils et avis en matière de déontologie ont été reçues en 2020, soit une diminution de 26% par rapport aux 934 demandes reçues en 2019.  La ventilation de ces 691 demandes était la suivante: activités extérieures (341); questions liées à l’emploi (45); vérification des antécédents avant le recrutement (69); conflits d’intérêts, relatifs notamment aux placements et avoirs personnels et aux restrictions applicables après la cessation de service (79); procédures de signalement des manquements (65); dons et distinctions honorifiques (47); intégrité institutionnelle (45).

Le Comité consultatif estime que l’augmentation du nombre de celles qui concernent l’intégrité institutionnelle témoigne d’une prise de conscience croissante des risques d’atteinte à la réputation de l’Organisation.  Il recommande par conséquent que les risques liés à cette intégrité fassent l’objet d’un suivi et qu’un point sur la situation soit fait dans le prochain rapport du Secrétaire général.

Le Comité consultatif se félicite de l’augmentation constante de la participation à l’initiative de déclaration publique volontaire et compte que le Secrétaire général prendra toutes les mesures nécessaires pour traiter les conflits d’intérêts potentiels de sorte que le principe de responsabilité soit appliqué et continuera d’encourager les hautes et hauts fonctionnaires qui ne l’ont pas encore fait à rendre public un récapitulatif de leur patrimoine lors des prochains cycles. 

En revanche, le Comité consultatif constate que la mise en place d’un registre centralisé en ligne de tous les dons n’a guère avancé et rappelle une fois de plus qu’il a recommandé d’analyser les avantages du projet pilote, les enseignements à en tirer et les éléments nécessaires au développement d’un tel registre avant qu’une mise en service soit envisagée dans le Secrétariat.  Il note également qu’il est impératif de pouvoir surveiller, suivre et contrôler comme il convient la réception, la conservation et la cession des dons dans le registre mondial en ligne ainsi que les pouvoirs dont disposent les différents chefs d’entités en la matière. 

Quant à l’indépendance du Bureau de la déontologie, le Comité note que les trois propositions soumises à l’Assemblée générale demeurent inchangées: le rapport annuel serait présenté à l’Assemblée générale directement par le Bureau de la déontologie; le Comité consultatif indépendant pour les questions d’audit aurait un rôle plus important, ce qui permettrait de renforcer le dispositif d’application du principe de responsabilité, puisque l’on ajouterait à sa compétence l’examen consultatif des plans de travail annuels du Bureau et la participation à l’évaluation de la performance du chef du Bureau, et l’on autoriserait le Bureau à consulter le Comité sur les questions pour lesquelles le Secrétaire général peut avoir un conflit d’intérêts; le chef du Bureau aurait un rang plus élevé, à savoir celui de sous-secrétaire général.

En ce qui concerne la présentation du rapport annuel du Bureau de la déontologie directement à l’Assemblée générale et le rattachement hiérarchique du Bureau, le Comité consultatif note qu’aucun élément nouveau ne lui a été présenté pour justifier le besoin de modifier les structures existantes et il réaffirme que toute modification visant à donner plus de poids au Bureau ou tout changement concernant le rattachement hiérarchique et la structure de gouvernance du Bureau pourraient avoir des conséquences non négligeables sur le Secrétariat et sur l’Organisation dans son ensemble.

S’agissant du rôle du Comité consultatif indépendant pour les questions d’audit, le Comité consultatif note que ce dernier est un organe subsidiaire de l’Assemblée qui ne rend pas compte au Secrétaire général.  L’ajout d’un lien hiérarchique avec le Bureau de la déontologie reviendrait à faire évoluer le mandat et la charge de travail du Comité consultatif indépendant et à assimiler le Bureau aux organes de contrôle indépendants, ce qui aurait des répercussions sur les fonds et programmes des Nations Unies. 

Quant à la proposition de reclasser le poste D-2 du chef du Bureau de la déontologie pour en faire un poste de sous-secrétaire général, le Comité souligne que la crédibilité du rôle consultatif du Bureau ne réside pas dans la classe du poste mais plutôt dans le mandat et les fonctions.  Il recommande donc de ne pas approuver cette proposition.

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur la pratique suivie par le Secrétaire général en matière disciplinaire et en cas de faits constitutifs d’infraction pénale (A/76/724)

Pour l’examen de son rapport qui couvre la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2020, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/76/602).  Le Comité consultatif rappelle qu’au lieu d’être renvoyés au chef d’entité concerné, les cas de conduite prohibée, en particulier par les membres du personnel d’encadrement, devraient être traités par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI), de manière à garantir l’indépendance et l’intégrité des enquêtes.  Le Comité compte que dans son prochain rapport, le Secrétaire général fournira davantage de données sur le traitement de ces affaires par le BSCI et les chefs d’entités, y compris des tableaux distincts.  Le Comité recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de faire le point sur les dossiers en attente et le traitement des affaires dans son prochain rapport.

Mme MONA FATTAH WAHIDI, Syndicat du personnel du Secrétariat des Nations Unies, a affirmé que depuis plus de deux ans, le personnel du Secrétariat de l’ONU à tous les niveaux, y compris sur le terrain, a déployé des efforts « exceptionnels » pour maintenir les activités et répondre aux attentes des États Membres, ne rechignant pas devant les longues heures de travail à distance, dans des circonstances difficiles.  Cette période « stressante et précaire » a été un énorme fardeau pour la santé physique et mentale du personnel.  La représentante a appelé au soutien des États pour améliorer les capacités de l’Organisation s’agissant de la sécurité et de la santé du personnel appelé à revenir au Siège.  Elle a également plaidé pour des arrangements flexibles.

S’agissant des initiatives liées à la gestion des ressources humaines, Mme Wahidi a pointé le doigt sur le manque de clarté quant à l’avenir, avant de dénoncer les dérives actuelles dans le recrutement, l’insuffisance des perspectives de carrière, le détournement de la délégation de pouvoir et la mauvaise répartition géographique.  À certains égards, le personnel est consulté, mais de façon « symbolique », a—t-elle tranché.  Elle a insisté sur la levée des obstacles à l’avancement professionnel du personnel appartenant à la catégorie des services généraux et catégories apparentées, « clef » d’une véritable réforme légitime.  Elle a appelé à la poursuite du projet pilote proposé par le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) consistant à permettre à ces personnels de postuler aux postes de la catégorie des administrateurs, en dehors de ceux réservés aux jeunes professionnels.  L’Organisation s’appuie de plus en plus sur les consultants au lieu de miser sur l’expertise et les compétences internes, a-t-elle fait observer.  La représentante a aussi plaidé pour l’octroi de contrats permanents au personnel éligible « dans toutes les catégories » et pour un meilleur recours aux listes de réserve.  Sur les questions disciplinaires, elle a alerté sur le fait que les abus d’autorité et le harcèlement se produisent encore dans divers lieux d’affectation où le personnel choisit parfois de se taire pour éviter les représailles et des processus « longs et stressants ». 

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. MUHAMMAD JAWAD AJMAL (Pakistan) a estimé que l’ONU doit s’appuyer sur un personnel international, talentueux, géographiquement diversifié, qui soit véritablement paritaire et représentatif de tous les peuples pour lesquels l’Organisation travaille.  Or, le déséquilibre persistant dans la représentation géographique, au sein du Secrétariat, demeure une préoccupation majeure, compte tenu du paragraphe 3 de l’Article 101 de la Charte qui parle de « l’importance de recruter le personnel sur une base géographique aussi large que possible ».  Le représentant a dit ne pas comprendre l’échec de l’Organisation à ouvrir ses portes aux candidats des pays non représentés ou sous-représentés, notamment les pays en développement.  Il a demandé au Secrétaire général d’intensifier ses efforts et d’accorder toute l’attention voulue à la représentation des pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police.  

Le représentant a rappelé le système des fourchettes optimales, établi en 1960, pour évaluer les progrès accomplis dans la répartition géographique équitable.  Nous sommes prêts, a-t-il dit, à nous engager dans des négociations pour faire progresser ce mécanisme vieux de 60 ans.  Tout en se félicitant de l’augmentation continue du nombre de femmes parmi le personnel, il a noté avec inquiétude que le nombre total de femmes occupant des postes de direction reste inférieur à 50%.   Il est également décourageant de constater que le pourcentage de femmes originaires des pays en développement à ces postes est disproportionnellement faible.  Le représentant s’est ensuite dit préoccupé par le fait que l’âge moyen du personnel du Secrétariat continue d’augmenter et que les postes aux échelons P1 et P2 continuent de diminuer, ce qui limite la marge de manœuvre pour rajeunir l’Organisation et attirer de nouveaux talents, en provenance des États Membres en développement non représentés et sous-représentés.  Quant aux compétences linguistiques, elles constituent un facteur important dans les processus de sélection, de même que la nécessité de respecter l’égalité entre les deux langues de travail du Secrétariat.  Une bonne maîtrise des langues officielles dans les lieux d’affectation spécifiques devrait être dûment prise en compte dans les processus de recrutement, a conclu le représentant.

M. THIBAULT CAMELLI, de l’Union européenne, a estimé que le personnel de l’ONU doit continuer de répondre aux plus hautes exigences de professionnalisme, de compétence et d’intégrité, tout en reflétant, par sa composition, celles et ceux pour qui il travaille.  Il a demandé des efforts à l’échelle du système des Nations Unies en vue de parvenir à une parité entre les genres, y compris sur le terrain, et souligné l’importance de rajeunir l’Organisation.  Il a aussi souhaité que la diversité linguistique soit reflétée au niveau du personnel.  Le délégué a salué la Stratégie globale sur les ressources humaines du Secrétaire général pour instaurer une culture organisationnelle axée sur les résultats et la responsabilisation.

Le délégué a salué l’approche actualisée en ce qui concerne la mobilité du personnel, laquelle est « capitale » pour l’ONU car elle permet audit personnel de développer de manière continue les compétences nécessaires pour s’adapter à un environnement de travail en mutation, a déclaré le délégué.  Il a également insisté sur l’importance de la formation du personnel et sur une transition moins « heurtée » pour passer de la catégorie G à la catégorie P.  Le délégué a jugé essentiel de respecter strictement le principe de responsabilité et souhaité, à ce titre, le renforcement de l’indépendance du Bureau de la déontologie.  Enfin, M. Camelli a assuré du soutien de l’UE pour parvenir à une résolution consensuelle.

Également au nom du Liechtenstein, M. MIKE MARTIN AMMANN (Suisse) a souligné que l’atout le plus précieux de l’ONU, ce sont l’expertise et les capacités de son personnel, pour une bonne exécution des mandats.  Une gestion moderne et rationalisée des ressources humaines, permettant de disposer d’un personnel hautement performant, est donc d’une importance capitale pour une Organisation efficace, efficiente, flexible et axée sur les résultats, a insisté le représentant.  Il a donc regretté l’incapacité de la Commission de parvenir à un accord sur ce point de l’ordre du jour, et ce, depuis plusieurs sessions.  Parmi les décisions importantes à prendre, il a mis l’accent sur trois domaines « cruciaux ».  Saluant d’abord la Stratégie globale du Secrétaire général pour la gestion des ressources humaines, le représentant a ensuite appuyé, les approches du Secrétaire général en matière de recrutement et l’idée de développer et de maintenir un personnel mobile et orienté vers le terrain, hautement performant, multilingue et diversifié. 

À cet égard, il a félicité le Secrétaire général pour avoir identifié les causes profondes du manque de diversité dans le recrutement et pour avoir lancé une Stratégie relative à la représentation géographique équitable.  Il a cependant jugé opportun de continuer à accorder une attention particulière à l’égalité des genres, notamment pour les postes de direction, et au rajeunissement des effectifs.  Enfin, le représentant a rappelé que la mobilité du personnel est essentielle pour constituer une main-d’œuvre hautement qualifiée, dynamique et polyvalente, capable d’interagir avec différents acteurs dans différents contextes, tout en offrant aux employés des possibilités d’apprentissage et un développement de carrière attrayants.  

Après les diverses initiatives, stratégies et adaptations des règles et règlements, le représentant a estimé qu’il incombe maintenant aux États Membres de fournir des orientations « claires » dans une résolution, tout en laissant au Secrétaire général la flexibilité requise pour gérer les ressources humaines de manière efficace.

Également au nom du Bélarus, du Kazakhstan et du Turkménistan, M. EVGENY V. KALUGIN (Fédération de Russie) a souhaité que les membres de la Cinquième Commission s’entendent sur un projet de résolution ce mois-ci afin que le Secrétaire général dispose enfin d’un « document fondamental » sur la gestion des ressources humaines.  Il a estimé que les recommandations pertinentes du CCQAB constituent un bon point de départ pour parvenir à un compromis et a assuré que les pays qu’il représente entendent participer de manière constructive aux négociations.  À cet égard, a-t-il indiqué, nous partageons pleinement l’avis du Secrétariat selon lequel le paragraphe 3 de l’Article 101 de la Charte définit le principe du recrutement.  Sur cette base, de nouvelles stratégies devraient être développées et celles en vigueur, optimisées, a-t-il avancé, jugeant logique, à ce stade, de se concentrer sur l’amélioration de la répartition géographique.  Il a toutefois mis en garde contre les nouvelles approches qui n’ont pas été approuvées par les États Membres.  Toutes les mesures prises par le Secrétariat doivent être en tout point conformes aux résolutions et décisions de l’Assemblée générale, a souligné le représentant.   

Il s’est ensuite dit préoccupé de la quasi-impossibilité des candidats externes de postuler à l’ONU.  Certaines idées du Secrétaire général sur la mobilité du personnel ou le Programme des jeunes professionnels risquent encore de réduire les chances des candidats externes, a-t-il averti.  Nous sommes prêts, a-t-il dit, à examiner les propositions pertinentes si nous avons la preuve que le Secrétariat de l’ONU ne se transformera pas en « club fermé ».  Il a par ailleurs attiré l’attention sur les paramètres clefs de la diversité du personnel développés par la Commission de la fonction publique internationale (CFPI) et approuvés par l’Assemblée générale lors de la soixante-treizième session.  Le représentant a insisté sur l’importance des aspects culturels, du multilinguisme et de la représentation des différentes générations et des personnes à capacités réduites.  Or force est de constater que le concept actualisé de diversité n’est pas entièrement conforme au cadre établi par la CFPI, a observé le délégué, qui s’est cependant dit ouvert à d’autres discussions spécifiques et détaillées sur les propositions soumises par le Secrétaire général. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. FELIX-FILS EBOA EBONGUE (Cameroun) a estimé que l’ONU devrait mieux représenter la riche diversité de ses membres, notamment par une représentation géographique équitable.  Il a regretté, qu’en dépit de l’engagement de son groupe et du Groupe des G77, aucune discussion de fond n’ait eu lieu.  Cette année est la bonne, a encouragé le représentant, appelant à la « volonté collective » d’engager des négociations « franches et sincères » pour parvenir à un résultat positif.  Il a également noté avec préoccupation que les hauts responsables des départements et bureaux du Secrétariat sont loin d’avoir atteint l’objectif d’au moins 50% de ressortissants des États non représentés et sous-représentés dans leur personnel, alors que c’est stipulé dans leur contrat de mission.  Le représentant a insisté sur la répartition géographique équitable et la nécessité d’améliorer rapidement la représentation des pays en développement, à tous les niveaux et en particulier aux échelons supérieurs.  À cet égard, il a dénoncé le nombre élevé des postes soumis à la répartition géographique mais aussi le fait qu’ils soient occupés temporairement.  En ce qui concerne l’équilibre entre les sexes, il a reconnu les efforts du Secrétaire général et l’a encouragé à aller de l’avant, en particulier dans les opérations de terrain.

M. RICHARD CROKER (Royaume-Uni) a d’emblée réitéré ses propos de vendredi dernier en condamnant « l’agression russe » contre l’Ukraine et en appelant la Fédération de Russie à y mettre un terme.  Venant à la gestion des ressources humaines, il a souligné, à son tour, que l’ONU a besoin d’un personnel doté des capacités et des compétences nécessaires pour répondre aux défis du XXIe siècle et réaliser ses mandats « vitaux ».  Pour ce qui est de la mobilité, il a estimé qu’une approche moderne et intégrée, qui mette en valeur l’expérience du terrain et des différents bureaux, tout en permettant au personnel d’effectuer une rotation hors des lieux d’affectation les plus difficiles, profitera à l’Organisation.  L’avancement professionnel et les récompenses sont une partie importante d’un tel plan.

Il a encouragé l’ONU à n’épargner aucun effort pour renforcer la diversité des points de vue géographique, du sexe, de l’âge, de l’ethnie, du contexte socioéconomique, de l’orientation sexuelle, sans oublier les personnes handicapées.  M. Croker a insisté sur l’importance de recruter le personnel, en évaluant non seulement les années d’expérience et les qualifications, mais aussi sur les compétences uniques que les gens apportent, comme le prévoit la Charte.  Pour que le personnel se sente motivé, il faut, a poursuivi le représentant, un système efficace de gestion de la performance, à tous les niveaux.  Cela signifie que l’excellence soit encouragée et récompensée, et la sous-performance, punie.  Notant qu’actuellement, 99,6% des membres du personnel répondent ou dépassent les attentes, le représentant a douté d’un tel système d’évaluation.  Le personnel est l’atout le plus important de l’ONU qui doit avoir, a insisté le représentant, les bonnes personnes avec les bonnes compétences, au bon endroit et au bon moment.  Il y a bien longtemps que la Commission aurait dû fournir des orientations claires au Secrétariat sur cette question, a-t-il conclu.

Mme HIND JERBOUI (Maroc) a souligné la nécessité pour l’ONU de se doter d’un personnel qualifié et diversifié.  Ce personnel doit continuer de répondre aux plus hautes exigences de professionnalisme, de compétence et d’intégrité.  La représentante a salué les recommandations relatives au traitement égalitaire des candidats internes et externes et a demandé des efforts en vue de parvenir à une parité entre les genres.  Elle a plaidé pour qu’un plus grand nombre de postes à responsabilités échoient à des femmes.  Le Maroc, a dit la représentante, est prêt à travailler à une résolution consensuelle sur ce point très important de l’ordre du jour.

M. KAWASAKI YUTA (Japon) a, à son tour, regretté que les États Membres n’aient pas réussi à donner des orientations claires au Secrétaire général qui s’efforce de mettre en place une Organisation plus efficace et plus inclusive.  Il leur a demandé de redoubler d’efforts et de tirer parti des négociations sectorielles et des discussions plus ciblées sur la gestion des ressources humaines.  Notre priorité commune, a rappelé M. Kawasaki, est de parvenir à une Organisation plus diversifiée, conformément à l’Article 101 de la Charte des Nations Unies, qui affirme « l’importance de recruter du personnel sur une base géographique aussi large que possible ».  Il s’agit donc aujourd’hui de relever le défi persistant de la sous-représentation et de la non-représentation de certains États.  En attendant, M. Kawasaki a salué l’amélioration continue de la parité hommes-femmes dans la composition du personnel.

S’agissant du rajeunissement du personnel, il a constaté le déséquilibre entre le nombre de postes professionnels débutants et le nombre de postes de niveau supérieur.  Une telle répartition des postes « alourdit » l’Organisation.  Il faut faire plus pour rajeunir le personnel et promouvoir la planification de la relève. 

M. RONG SICAI (Chine) a pris note des progrès accomplis en matière de répartition géographique équitable entre 2016 et 2020, comme en témoigne le rapport du Secrétaire général.  Cependant, en comparant avec les dernières données disponibles pour 2022, nous regrettons une perte d’élan, a nuancé le représentant.  À l’heure actuelle, non seulement le nombre d’États Membres non représentés et sous-représentés est plus important, mais la sous-représentation s’est encore accentuée, avec des écarts croissants et disproportionnés dans les postes géographiques soumis à la répartition géographique, au détriment des pays en développement.  Le représentant a appelé le Secrétaire général à des mesures ciblées et à un mécanisme de responsabilisation pour assurer leur application, afin de réaliser la représentation géographique équitable d’ici à 2030.  S’agissant de l’analyse des effectifs, le représentant a espéré que le Secrétariat pourra, dans les années à venir, fournir davantage de données croisées entre différentes catégories, faire le point sur les progrès et les succès en matière de recrutement, identifier les causes profondes des problèmes persistants de la gestion des ressources humaines et proposer les mesures qu’il faut.

M. ENKHBOLD (Mongolie) a invité la Commission à accorder une attention prioritaire à la question des postes vacants soumis à des critères géographiques.  À cet égard, il a estimé que tous les États Membres devraient être représentés au Secrétariat.  Se disant convaincu que la stratégie du Secrétaire général en matière de représentation géographique sera adoptée, le délégué a plaidé pour l’élaboration d’un calendrier de discussions clair.  Pour ce qui est de la parité, il s’est félicité de la volonté affichée par le Secrétaire général de recruter davantage de femmes au sein de Secrétariat.  Il a cependant formé l’espoir que nombre d’entre elles viendront de pays actuellement sous-représentés.  Il s’est par ailleurs réjoui que des efforts de communication soient faits afin de donner aux candidats des pays en développement la possibilité de postuler sur un pied d’égalité.  Enfin, après avoir applaudi les efforts déployés par le Secrétaire général pour améliorer la gestion des ressources humaines, il a souhaité que les États Membres parviennent à un consensus sur cette question. 

Mme MARIVIL VILLA VALLES (Philippines) a espéré que les améliorations dans la gestion des ressources humaines continueront à rendre l’ONU plus pertinente pour les pays en développement.  Soulignant l’importance d’un personnel inclusif, « un élément clef » de la réforme du Secrétaire général, la représentante a salué les progrès dans la parité entre les sexes, en particulier aux postes à responsabilités, tout en encourageant le Secrétariat à faire encore mieux, y compris sur le terrain.  Le maintien de la paix, s’est-elle expliquée, a évolué au fil des ans et la participation des femmes a eu « un impact véritablement positif ».  Après avoir réclamé des informations actualisées sur la mise en œuvre de la stratégie d’inclusion des personnes handicapées, la représentante s’est inquiétée du nombre élevé des postes de rang supérieur et demandé au Secrétaire général d’éviter les chevauchements.  Elle a conclu sur la nécessité d’assurer la diversité parmi les stagiaires de l’ONU. 

M. CHRISTOPHER P. LU (États-Unis) a salué le dévouement du personnel de l’ONU, avant de dénoncer l’agression de la Russie contre l’Ukraine, qui est une violation flagrante de la Charte.  Les discussions d’aujourd’hui paraissent bien des horreurs en Ukraine, pourtant elles y sont liées, car une ONU dotée d’un personnel compétent permet de réagir aux crises les plus graves.  Le représentant a insisté sur l’instauration d’une culture de responsabilité au sein de l’ONU et appuyé l’idée de laisser aux gestionnaires une plus grande marge de manœuvre.  Il a aussi appuyé le renforcement de l’indépendance du Bureau de la déontologie.

Réagissant à une déclaration des États-Unis, la Fédération de Russie a rejeté les allégations sur son « opération militaire spéciale » en Ukraine.  Notre position est connue et a été présentée à plusieurs reprises à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité, a-t-elle dit, avant de demander au Président de la Cinquième Commission de rappeler aux délégations leur mandat strictement administratif et budgétaire.  Il existe d’autres instances pour débattre des questions politiques, a souligné la Fédération de Russie.  

EXAMEN DE L’EFFICACITÉ DU FONCTIONNEMENT ADMINISTRATIF ET FINANCIER DE L’ONU

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur le renforcement de l’application du principe de responsabilité au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies (A/76/728

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/76/644) qui rappelle que le principe de responsabilité est le principe selon lequel le Secrétariat et ses fonctionnaires doivent répondre de toutes les décisions et mesures prises et du respect de leurs engagements, sans réserve ni exception.  

Il s’agit notamment d’atteindre les objectifs et de produire des résultats de haute qualité, dans les délais fixés et de manière économique, dans le cadre de la mise en œuvre intégrale de toutes les activités prescrites au Secrétariat par les organes intergouvernementaux de l’ONU, dans le respect de toutes les résolutions, de toutes les règles, de tous les règlements et de toutes les normes déontologiques; de faire rapport avec honnêteté, objectivité, exactitude et ponctualité des résultats obtenus; et de gérer les fonds et autres ressources de manière responsable.  Tous les aspects de la performance sont visés, notamment l’existence d’un système clairement défini de récompenses et de sanctions; il est dûment tenu compte de l’importance du rôle des organes de contrôle, et les recommandations acceptées sont pleinement respectées. 

Dans ses commentaires, le Comité consultatif dit attendre avec intérêt des informations détaillées et une évaluation de l’effet que le dialogue en cascade annuel et le manuel relatif au dispositif d’application du principe de responsabilité ont sur l’instauration d’une culture de la responsabilité dans l’Organisation.  En outre, en ce qui concerne le Référentiel de valeurs et de comportements de l’ONU, il compte que le Secrétaire général communiquera des informations plus détaillées, notamment des informations sur le calendrier et le coût de l’établissement du Référentiel. 

Le Comité note que le Secrétariat présente fréquemment des documents en retard et rappelle que l’Assemblée générale a redit que la présentation de ces documents en temps voulu constitue un aspect important des obligations du Secrétariat vis-à-vis des États Membres.  Elle a aussi prié le Secrétaire général de veiller à ce qu’un indicateur continue de figurer dans les contrats de mission des hauts fonctionnaires et de lui donner des informations sur la manière dont cet indicateur est utilisé. 

Le Comité se dit aussi préoccupé par le fait que le Secrétaire général n’a pas donné suite aux résolutions ni aux demandes répétées de l’Assemblée générale concernant la présentation de solutions viables pour la mise en place d’un système centralisé de gestion de la trésorerie et des placements dans le système des Nations Unies et la définition de critères raisonnables aux fins de l’établissement des montants minimum et maximum des réserves opérationnelles du système des Nations Unies.  

Il réaffirme qu’il importe d’appliquer intégralement et dans les meilleurs délais les recommandations des organes de contrôle, celles-ci faisant partie intégrante du dispositif d’application du principe de responsabilité, notamment celles qui ont trait aux opérations de trésorerie et à la délégation de pouvoirs.  Le Comité consultatif recommande de nouveau que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de veiller à ce que le Bureau des services de contrôle interne fasse également porter son évaluation sur les aspects pratiques de la responsabilité institutionnelle et individuelle, y compris sur la mise en œuvre des procédures et mesures visant à promouvoir l’application du principe de responsabilité, et rende compte des résultats obtenus.  

Par ailleurs, le Comité consultatif recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de fournir des informations et d’expliquer en quoi la gestion axée sur les résultats et la budgétisation axée sur les résultats, plus précisément leur mise en œuvre et leur éventuelle mise en concordance pour chacune des trois sources de financement, peuvent converger pour constituer un dispositif d’application du principe de responsabilité global et s’inscrivant dans la durée.  Le Comité estime en outre qu’il convient d’élargir les principes de l’Organisation en matière de résultats et d’établir une approche à trois volets, comprenant la gestion axée sur les résultats; la budgétisation axée sur les résultats; et la performance axée sur les résultats. 

Le Comité consultatif note que le nouveau modèle de contrat de mission des hautes et hauts fonctionnaires comprend cinq parties et compte trouver des informations sur sa mise en œuvre opérationnelle, notamment en ce qui concerne la déclaration relative au contrôle interne, dans le prochain rapport d’étape.  Pour que le dispositif d’application du principe de responsabilité individuelle et institutionnelle ait une portée globale et s’inscrive dans la durée, le Comité se dit d’avis qu’il faut relier les activités approuvées à la budgétisation et à la gestion axées sur les résultats, mais aussi définir clairement des indicateurs de succès axés sur les résultats et des points de comparaison dans les contrats de mission des hautes et des hauts fonctionnaires et dans les plans de travail des membres du personnel.  

Le Comité consultatif ajoute que la répartition actuelle des appréciations ne reflète pas fidèlement la performance de l’Organisation et que les appréciations attribuées à la plupart des fonctionnaires peuvent ne pas refléter objectivement la performance réelle.  Il convient, dit-il, d’établir une distinction plus nette entre les appréciations, en particulier les appréciations « performance dépassant les attentes » et « performance répondant aux attentes », en rehaussant le niveau de performance attendue pour une appréciation donnée.  Le Comité recommande que l’Assemblée prie le Secrétaire général d’évaluer le système de notation afin de garantir que les entités se fondent sur des informations crédibles et comparables pour attribuer une appréciation. 

Le Comité consultatif souscrit à la recommandation du Comité des commissaires aux comptes, à savoir qu’il convient de mettre en place un mécanisme d’application du principe de responsabilité plus robuste destiné aux chefs d’entités occupant un poste de la classe D-2 ou d’une classe inférieure.  Le Comité consultatif considère que, nonobstant la nature intangible du concept de responsabilité, il importe de cerner les incidences financières globales, en particulier en ce qui concerne les coûts et les avantages ainsi que l’effet des diverses activités et initiatives qui ont été mises en œuvre dans le cadre du dispositif d’application du principe de responsabilité.  Il attend avec intérêt de recevoir de plus amples informations à ce sujet dans les prochains rapports d’étape. 

Rapport du Comité consultatif sur les questions administratives et budgétaires relatif aux activités de la chaîne d’approvisionnement au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies (A/76/722) 

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/76/613) qui donne une vue d’ensemble des activités du Bureau de la gestion de la chaîne d’approvisionnement.  Le Comité consultatif estime néanmoins qu’il serait utile de disposer de davantage de données et d’analyses concernant certains aspects de la gestion de la chaîne d’approvisionnement, en particulier les activités d’achat du Secrétariat de l’ONU.  

Le Comité consultatif compte que, dans son prochain rapport, le Secrétaire général reviendra en détail sur les innovations mises en œuvre dans le domaine des achats, notamment sur le projet de système d’appel d’offres électronique, ainsi que sur leurs incidences financières et leurs avantages.  Il compte que le Secrétaire général fera également état des mesures prises pour prendre contact avec les fournisseurs qui n’auraient pas accès au système.  

Le Comité consultatif se dit préoccupé par le faible niveau de coopération et d’harmonisation observé dans la chaîne d’approvisionnement à l’échelle du système, notamment dans le domaine des achats.  Il recommande à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général d’évaluer les possibilités à exploiter et les difficultés à surmonter, notamment dans le contexte du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination. 

Le Comité prend note des efforts déployés pour favoriser l’accès aux procédures de passation de marchés des fournisseurs issus de pays en développement, notamment des pays les moins avancés et des pays en transition.  Il recommande à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général de poursuivre ses efforts et de continuer à chercher des moyens novateurs de favoriser l’attribution de marchés à des fournisseurs issus de ces groupes de pays et de faire figurer dans son prochain rapport des informations actualisées sur la question, notamment une analyse des mesures prises et de leurs effets sur les principaux biens et services. 

Le Comité consultatif réaffirme qu’il est de la plus haute importance d’assurer l’égalité des six langues officielles de l’Organisation des Nations Unies et recommande à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général de faire traduire le Manuel des achats dans les trois autres langues officielles, dans la limite des ressources disponibles.  Il rappelle la recommandation formulée par le Comité des commissaires aux comptes, qui tendait à ce que soit lancée sans plus tarder une série enrichie d’indicateurs clefs de performance couvrant tous les risques dûment recensés, notamment le manque de séparation entre les fonctions d’achat et le recours excessif à des méthodes informelles d’appel à la concurrence.  

Le Comité consultatif recommande à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général de donner, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur cette série d’indicateurs clefs de performance et sur la version révisée de l’instrument de délégation de pouvoirs en matière d’achats, notamment sur les résultats obtenus et les enseignements tirés.  Il recommande de nouveau à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général de fournir, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur le dispositif d’application du principe de responsabilité en matière d’achats, sur le cadre institutionnel type et sur le rôle que joue le Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité dans le suivi et l’évaluation de la fonction achats.  

RAPPORT SUR LES ACTIVITÉS DU BUREAU DES SERVICES DE CONTRÔLE INTERNE (BSCI)

Rapport du BSCI sur l’audit de l’application des restrictions limitant l’acceptation d’un emploi par un ancien fonctionnaire ayant participé aux activités d’achat (A/76/139) 

Dans ce rapport, le BSCI explique que l’audit avait pour objectif d’évaluer l’efficacité des mesures instituées pour appliquer les restrictions limitant l’emploi des anciens fonctionnaires des Nations Unies ayant participé aux activités d’achat de l’Organisation.  Il rappelle la circulaire du Secrétaire général sur ces restrictions et souligne que, faute de ressources suffisantes, l’Organisation n’a pas été en mesure de mettre en place des procédures permettant de recenser à l’échelle mondiale les anciens fonctionnaires qui enfreignent les dispositions de ladite circulaire.  

Des contrôles préventifs forts, notamment des activités de formation et de sensibilisation du personnel, sont donc nécessaires pour informer le personnel des dispositions de la circulaire et atteindre les objectifs qui y sont énoncés.  Mais, dit le BSCI, les contrôles faits en la matière se sont révélés inefficaces en raison de l’inadéquation des procédures de mise en œuvre et de l’absence de données sur les fonctionnaires qui devraient faire l’objet de ces interventions.  En outre, la circulaire ne contient pas de définition de certains termes clefs qui permettraient de clarifier le champ d’application de ses dispositions et d’en limiter l’application à un groupe restreint sur la base d’une évaluation des risques. 

Le Bureau a formulé cinq recommandations pour traiter les problèmes recensés au cours de l’audit.  Le Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité et le Département de l’appui opérationnel ont accepté les recommandations et ont pris des mesures pour assurer leur application. 

Rapport du BSCI sur l’audit de la planification de la demande et de l’approvisionnement dans les opérations de paix (A/76/595) 

Dans ce rapport, le BSCI indique qu’il a effectué des audits au Siège de l’Organisation à New York, aux Missions des Nations Unies en République centrafricaine, au Mali, à Abyei, à Chypre et au Liban, sans oublier la Force chargée d’observer le désengagement.  La fonction de planification de la demande et de l’approvisionnement, explique le BSCI, consiste à prévoir les besoins des entités en biens et services et à planifier la gestion des sources d’approvisionnement, des acquisitions et des livraisons afin que les biens et services soient obtenus en temps voulu et au moindre coût.  

Au moment des audits, il s’est avéré que les missions n’étaient pas en mesure d’établir des plans de la demande qui soient suffisamment réalistes pour servir de base aux projets de budget et d’un degré de granularité suffisant pour être utilisés efficacement aux fins de la planification des acquisitions et des livraisons ainsi que de la gestion par catégorie, approche systématique visant à gérer une gamme de biens et de services similaires ou connexes sur la base d’une meilleure connaissance des besoins des clients et de la dynamique des marchés d’approvisionnement.  

Le nombre élevé d’achats effectués en fin d’exercice et l’utilisation non optimale des possibilités d’approvisionnement interne et des contrats-cadres indiquaient que les stratégies relatives à la demande et à l’approvisionnement restaient inefficaces.  Afin de remédier aux problèmes recensés dans les audits, le BSCI a adressé 9 recommandations au Département de l’appui opérationnel et 16 recommandations aux six missions concernées.  Toutes les recommandations ont été acceptées et quatre d’entre elles ont été appliquées. 

CORPS COMMUN D’INSPECTION 

Rapport du Corps commun d’inspection sur l’examen des pratiques actuellement suivies par les organisations du système des Nations Unies en matière d’externalisation des services (A/75/551) 

Le Corps commun d’inspection explique qu’il a évalué les points forts et les points faibles de l’externalisation et les possibilités et risques liés au recours à cette option et passé en revue les législations et les politiques pertinentes à cet égard.  L’objectif de cet examen est d’aider les organes délibérants et les chefs de secrétariat à mieux comprendre la situation actuelle de l’externalisation et de fournir aux entités un ensemble d’outils permettant d’améliorer la manière dont l’externalisation des services à des prestataires privés est conduite et gérée. 

Dans ses observations générales, le Corps commun d’inspection indique que les entités notent que la coordination de certaines activités par le Réseau achats du Comité de haut niveau sur la gestion, en particulier dans le cadre des initiatives d’harmonisation et de reconnaissance mutuelle, sera essentielle pour éviter les doubles emplois et permettre à celles qui ont rarement recours à l’externalisation actuellement de bénéficier des compétences déjà disponibles dans l’ensemble du système des Nations Unies.  

Mais les entités émettent certaines réserves quant aux ressources et au temps limités dont elles disposent pour respecter les délais proposés et font remarquer qu’elles auraient besoin de davantage de temps pour organiser les consultations et la coordination internes et pour faire en sorte que toute modification des cadres réglementaires soit dûment soumise à l’approbation des organes directeurs. 

Plusieurs entités notent aussi qu’en raison de leurs activités de lutte contre la pandémie de COVID-19, il pourrait être difficile d’appliquer intégralement les recommandations dont la mise en œuvre est demandée pour 2021.  Elles soulignent que l’absence d’une définition claire de l’externalisation peut compromettre la mise en place de mesures de suivi en temps utile et notent que la définition d’une conception commune par le biais du Réseau achats serait essentielle à la mise en œuvre des recommandations.  En ce qui concerne d’autres recommandations, elles estiment, que, du point de vue des opérations d’achat, il n’y a aucune différence entre l’externalisation et une opération classique d’achat de services.  Elles n’ont pas souscrit à toutes les recommandations du Corps commun d’inspection. 

Les observations du Secrétaire général et celles du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination sont présentées en détail dans la Note (A/76/551/Add.1). 

Au nom du Groupe des 77 et de Chine, M. MUHAMMAD JAWAD AJMAL (Pakistan) a dit que la responsabilité est essentielle à la viabilité et à l’efficacité de toute organisation, y compris l’ONU.  Il a promis d’accorder une attention particulière à la manière dont les réformes contribueront à l’amélioration du mécanisme de responsabilisation.  Le représentant a prié le Secrétaire général de continuer à renforcer le contrôle interne des dépenses afin de mettre pleinement en œuvre les mandats et programmes convenus, avant d’appuyer les recommandations du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB).  Avant de conclure, il a prié le Corps commun d’inspection de reprendre l’examen de la gestion et de l’administration de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

Également au nom du Liechtenstein, M. MIKE MARTIN AMMANN (Suisse) a rappelé que la résolution 72/266 de l’Assemblée générale souligne que la responsabilité est un principe central de la réforme de la gestion, tant aux plus hauts niveaux de direction que pour l’ensemble du personnel.  Il a exprimé son soutien à un système solide de délégation de pouvoirs et de responsabilité qui « fonctionne vraiment ».  Il a dit attendre avec intérêt le prochain rapport du Secrétaire général sur la question.  Il s’est également félicité des efforts déployés par le Corps commun d’inspection, le Comité des commissaires aux comptes et le CCQAB, ainsi que des résultats du système de responsabilisation actuel.  À cet égard, il a souligné que la présentation des documents dans les délais est un élément important de la responsabilité.

Au nom des États membres de l’Union économique eurasienne ainsi que de l’Ouzbékistan, du Tadjikistan et du Turkménistan, M. EVGENY V. KALUGIN (Fédération de Russie) a rappelé que la question des achats au Secrétariat est un « processus constant ».  Il s’est dit favorable aux mesures supplémentaires proposées par le Secrétaire général en matière de responsabilité et de transparence et a espéré qu’elles permettront aux fournisseurs de saisir la logique des procédures d’achat, en vue de leur participation aux appels d’offres.  Dans ce cadre, a-t-il précisé, il importe que soient respectés les principes fondamentaux des achats, tels que prévus par le Règlement financier et règles de gestion financière de l’ONU.  Le représentant a par ailleurs espéré que, dans son prochain rapport, le Secrétaire général prendra en compte les recommandations formulées par le CCQAB. 

Il a également invité le Secrétaire général à publier des rapports sur l’impact écologique des achats.  En outre, il conviendrait, selon lui, que le Secrétaire général fournisse aux États Membres des détails sur la mise en œuvre des nouvelles mesures, diversifie le nombre des fournisseurs et garantisse l’accès des pays en développement et en transition aux appels d’offres.  À cet égard, le délégué a appelé de ses vœux des analyses comparatives sur les appels d’offres actuels.  Enfin, il a jugé prématuré de parler d’un élargissement de la pratique des appels d’offres et de présenter à l’Assemblée générale une décision concernant les recommandations des Commissaires aux comptes.  Il s’est toutefois déclaré prêts à participer de manière constructive aux discussions sur ce point de l’ordre du jour.   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité débat de l’inclusion et la participation économiques des femmes comme outils essentiels d’instauration de la paix

8989e séance – matin & après-midi
CS/14825

Le Conseil de sécurité débat de l’inclusion et la participation économiques des femmes comme outils essentiels d’instauration de la paix

En cette Journée internationale des femmes, le Conseil de sécurité, présidé par la Ministre des changements climatiques des Émirats arabes unis, Mme  Mariam Al Mheiri, a tenu un débat public en partant du constat que l’inclusion économique des femmes dans les zones touchées par un conflit est insuffisante, alors que leur participation aux activités économiques est un moyen reconnu pour instaurer et faire durer la paix.  L’occasion pour plusieurs orateurs d’exprimer leur solidarité avec les femmes et filles d’Ukraine. 

Investir dans l’autonomisation économique des femmes rapporte d’énormes dividendes pour la paix et la prospérité, a déclaré d’emblée la Directrice exécutive d’ONU-Femmes.  À l’inverse, les pays où les femmes sont économiquement marginalisées et exclues de la population active sont beaucoup plus susceptibles d’entrer en guerre.  Mme  Sima Bahous a également signalé que l’inégalité entre les sexes entraîne des pertes économiques s’élevant à 2,5 milliards de dollars dans plus de la moitié des pays fragiles et touchés par des conflits.  « La solution est donc claire. »  Nous avons besoin de plus d’engagement, d’une plus grande responsabilisation et d’une responsabilité partagée, a dit la responsable d’ONU-Femmes. 

Mme  Bahous s’est adressée notamment au Conseil de sécurité car elle a noté que certaines de ses résolutions qui couvrent largement la question « les femmes et la paix et la sécurité », comme celles sur la République centrafricaine et la République démocratique du Congo, contiennent des paragraphes sur la sécurité économique, le développement et l’exploitation illégale des ressources naturelles, mais ne tiennent pas compte du genre.  Elle a donc suggéré au Conseil d’utiliser ces textes pour demander l’inclusion significative des femmes non seulement dans les efforts de consolidation de la paix, de prévention des conflits et de relèvement, mais aussi dans la prise de décision, l’analyse de genre et le suivi des dépenses. 

La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a invité à s’inspirer des actions de son agence pour rectifier la donne.  Elle a cité l’initiative multipartite « Génération Égalité » grâce à laquelle on dispose maintenant d’un Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire.  Le Pacte compte à ce jour 158 signataires, dont plusieurs membres du Conseil, mais nous devons faire davantage pour atteindre les banques multilatérales de développement et le secteur privé, a recommandé Mme Bahous.  Elle a également évoqué le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire qui a financé plus de 500 organisations de femmes dans plus de 26 pays depuis 2016. 

L’une des bénéficiaires de ce fonds était là, justement, pour en témoigner.  Mme  Moussokoro Coulibaly, Présidente d’un réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, a expliqué comment son réseau s’emploie à mettre en relation des initiatives locales de femmes avec des partenaires financiers.  De 2012 à 2019, des crédits ont ainsi été octroyés à 200 femmes dans les domaines de l’agriculture et de l’artisanat, aidant les bénéficiaires à sortir du secteur informel et à gagner la reconnaissance de leurs communautés et, partant, à influer sur le règlement des conflits communautaires. 

Le Fonds monétaire international (FMI) joue aussi son rôle, a renchéri sa Directrice générale, Mme  Kristalina Georgieva.  Le FMI met l’accent sur le financement des services sociaux, un outil efficace pour promouvoir l’éducation des femmes, la qualité des soins et in fine la parité dans la société.  Même son de cloche du côté de la Vice-Ministre aux affaires multilatérales et droits humains du Mexique qui a appelé à investir dans les mécanismes financiers existants pour soutenir les organisations de femmes et les défenseuses des droits humains, lesquelles contribuent à un climat de stabilité dans leurs communautés. 

Après avoir évoqué les efforts déployés par l’Union africaine pour favoriser l’inclusion financière et économique des femmes, le Kenya a souhaité que les organes et agences compétents des Nations Unies en fassent un suivi dans l’optique d’assurer la durabilité de la paix et du développement.  Au nom des 56 États membres du Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité, le Canada a invité le Conseil à renforcer sa coopération dans ce domaine avec la Commission de consolidation de la paix et le Conseil économique et social, ainsi qu’avec les organisations régionales. 

De nombreuses initiatives menées à travers le monde pour garantir l’inclusion économique des femmes ont été évoquées par la soixantaine de participants au débat.  Les Émirats arabes unis ont, par exemple, indiqué avoir consacré 50 millions de dollars pour soutenir près de 300 000 femmes entrepreneurs d’Iraq, du Yémen et d’Éthiopie.  La Turquie a insisté sur les opportunités d’emploi, faisant remarquer que le simple fait d’augmenter le nombre de femmes occupant un emploi rémunéré ferait augmenter considérablement le PIB.  Le Viet Nam a, pour sa part, suggéré de consacrer un minimum de 15% de l’aide publique au développement à l’égalité des genres dans les pays en conflit. 

Des arguments juridiques ont aussi été présentés.  Au nom des pays nordiques et des pays baltes, la Suède a assuré que la protection des femmes ne sera pas possible tant que les législations discriminatoires et les entraves à leur autonomisation économique ne seront pas démantelées.  Dans cette veine, l’Inde a proposé d’élaborer un cadre institutionnel mondial permettant aux femmes d’accéder aux opportunités économiques et aux partenariats. 

L’inclusion économique n’est cependant pas une protection contre les balles et les bombes, a noté le Royaume-Uni en évoquant les souffrances, maintes fois mentionnées au cours du débat, des femmes et enfants d’Ukraine.  La Fédération de Russie a rétorqué que « depuis huit ans, les femmes sont persécutées à Donetsk et Louhansk par des radicaux ukrainiens, dans un silence assourdissant de la communauté internationale ».  L’Ukraine, elle, a dénoncé le fait que les habitants se voient interdire de partir et que l’aide humanitaire ne puisse pas arriver.  « Si les gens partent, les Russes les tuent. »  Pour les femmes qui arrivent à partir, elle a demandé leur intégration économique dans les pays d’accueil. 

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ (S/2022/175)

Déclarations

Mme SIMA BAHOUS, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a rappelé que lorsque la pandémie avait vidé la salle du Conseil de sécurité il y a près de deux ans, le Secrétaire général de l’ONU avait appelé à un cessez-le-feu mondial.  Elle a rappelé que, face à un ennemi commun, il y avait l’espoir de voir un regain de coopération internationale, l’espoir que nous investissions dans la science, la santé et la protection sociale pour tous, en particulier les plus vulnérables, au lieu de dépenser de l’argent dans des armes.  Au lieu de cela, a-t-elle déploré, nous avons eu plus de dépenses militaires, des coups d’état militaires, des prises de pouvoir par la force et un système multilatéral renvoyé dans les cordes.  Ce même Conseil a passé les 10 derniers jours dans de multiples réunions d’urgence sur la situation en Ukraine, a-t-elle noté, rappelant les propos du Secrétaire général: « les gens exigent la paix », « nous devons donner une chance à la paix ». 

La Directrice d’ONU-Femmes a également souligné les acquis perdus, après des décennies d’efforts, notamment en matière d’égalité des sexes.  « Il nous reste moins de neuf ans avant 2030, mais nous ne sommes pas sur la bonne voie pour atteindre les objectifs de développement durable. »  Elle a ajouté que la COVID-19 nous a encore fait reculer dans l’ensemble des objectifs, notamment en matière d’égalité des sexes, de pauvreté et de climat.  En cette journée internationale de la femme, nous avons l’opportunité de faire les choses différemment, a-t-elle clamé, appelant à un modèle de leadership différent. 

Selon de nombreuses études, investir dans l’autonomisation économique des femmes rapporte d’énormes dividendes pour la paix et la prospérité, tandis qu’à l’inverse, les pays où les femmes sont économiquement marginalisées et exclues de la population active sont beaucoup plus susceptibles d’entrer en guerre, a cité Mme Bahous.  « Nous savons que les femmes sont plus susceptibles de consacrer leurs revenus aux besoins familiaux et de contribuer davantage au rétablissement. »  Et pourtant, a constaté la haute fonctionnaire, la reconstruction et les investissements à grande échelle après un conflit sont dominés par les hommes et profitent massivement aux hommes, pendant que l’exclusion, la discrimination et les normes de genre désuètes éloignent les femmes de l’emploi, de la terre, de la propriété, de l’héritage, du crédit et de la technologie.  Ce scénario se joue dans toutes les zones de conflit et situations à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, a-t-elle fait remarquer en citant la situation d’exclusion des femmes en Afghanistan et au Yémen: dans ces pays, une réduction des écarts entre les sexes sur le marché du travail aurait pu faire augmenter le PIB du Yémen de 27%. 

La Directrice exécutive a signalé que les pertes économiques dues à l’inégalité entre les sexes s’élèvent à 2,5 milliards de dollars dans plus de la moitié des pays fragiles et touchés par des conflits examinés par la Banque mondiale.  Elle a expliqué que peu de pays touchés par un conflit disposent de données sur la propriété foncière des femmes, et qu’ils sont très faibles quand ils existent.  Au Mali par exemple, les femmes possèdent 3% des terres.  En Haïti, où plus de 45% des ménages sont dirigés par des femmes, la pandémie a entraîné une baisse de 24% de l’emploi des femmes, a enchaîné Mme Bahous en se désolant que, comme dans de nombreux autres pays, les stratégies pour faire face aux retombées économiques de cette crise restent largement aveugles au genre.  Passant à l’Ukraine, elle a noté que les besoins humanitaires se multiplient et s’étendent d’heure en heure, sachant que la majorité des 1,5 million de personnes qui ont fui sont des femmes et des enfants.  Ici aussi, nous risquons un recul des droits des femmes et de l’accès des femmes à l’emploi et aux moyens de subsistance, a-t-elle averti. 

De nombreuses femmes militantes invitées à prendre la parole devant ce Conseil de sécurité nous ont dit que les acteurs privés, y compris les multinationales, font souvent partie du problème alors qu’ils pourraient faire partie de la solution, a-t-elle encore regretté.  Et ce n’est pas seulement le cas des industries extractives et des grandes entreprises agroalimentaires, mais de plus en plus de plateformes de télécommunications qui ont un rôle majeur à jouer pour faciliter l’inclusion et prévenir les discours de haine et les représailles ciblées. 

Pour la Directrice exécutive, la solution est donc claire.  Nous avons besoin de plus d’engagement, d’une plus grande responsabilisation et d’une responsabilité partagée.  Certaines des résolutions qui couvrent le plus largement les femmes et la paix et la sécurité, comme celles sur la République centrafricaine et la République démocratique du Congo, contiennent plusieurs paragraphes sur la sécurité économique, les questions de développement et l’exploitation illégale des ressources naturelles mais ne tiennent pas compte du genre, a remarqué Mme Bahous.  Elle a donc suggéré au Conseil de sécurité d’utiliser ces résolutions pour demander l’inclusion significative des femmes non seulement dans la consolidation de la paix, la prévention des conflits et le relèvement, mais aussi dans la prise de décision, l’analyse de genre et le suivi des dépenses.  De même elle a invité, dans toutes les initiatives de reconstruction et de relèvement, à donner la priorité aux entreprises dirigées par des femmes dans les services de première ligne et du secteur soins. 

Mme Bahous a par ailleurs présenté quelques initiatives d’autonomisation économique des femmes.  D’abord le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire qui a financé plus de 500 organisations de femmes dans plus de 26 pays depuis 2016.  Elle a salué la présence au Conseil de Mme Coulibaly, du Mali, qui est partenaire de ce fonds.  Nous avons déployé beaucoup d’efforts pour impliquer le secteur privé, à la fois les donateurs et les partenaires bénévoles, mais il y a beaucoup plus à faire pour multiplier par cinq le financement des organisations de femmes en situation de crise d’ici à 2030, a-t-elle prévenu.  Elle a ensuite parlé de « Génération Égalité », grâce à laquelle on a maintenant un  pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire, une initiative multipartite visant à faire bouger les choses au cours des cinq prochaines années. 

Le Pacte compte à ce jour 158 signataires, dont plusieurs membres du Conseil, mais nous devons faire davantage pour atteindre les banques multilatérales de développement et le secteur privé, a souhaité Mme Bahous.  Pour elle, cela comprend le renforcement des mécanismes de protection sociale, la promotion des entreprises –notamment sociales- appartenant à des femmes, la lutte contre la législation et les pratiques discriminatoires qui entravent l’autonomisation économique des femmes et la garantie que l’égalité des sexes est une priorité dans les stratégies nationales, régionales et mondiales de paix et de développement.  Nous avons le plan et l’analyse de rentabilisation pour soutenir l’inclusion économique des femmes, a-t-elle constaté.  Ce dont nous avons besoin, a-t-elle conclu, c’est d’une volonté politique pour y parvenir. 

Pour Mme KRISTALINA GEORGIEVA, Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), l’heure est venue de réfléchir au pouvoir des femmes face à l’adversité, aux guerres et à la destruction. Dans bien des endroits leur puissance ne cesse d’être mise à mal, alors même que dans tous les conflits, les femmes se sacrifient pour leurs pays et leurs communautés a dit Mme Georgieva, en rendant hommage aux femmes ukrainiennes. Les femmes payent un tribut disproportionné en temps de guerre, a-t-elle souligné, et dans le même temps elle représentant le plus grand espoir pour la paix. 

Qu’il s’agisse de conflits, de pandémie ou de crise économique, tous ces scenarios mettent en jeu les progrès réalisés à ce jour en termes d’autonomisation des femmes, s’est inquiété la Cheffe du FMI. Elle a notamment relevé que deux fois plus de femmes ont perdu leur emploi pendant la pandémie, alors qu’elles étaient déjà 20% moins présentes sur le marché du travail que les hommes. Le destin des filles est encore plus menacé, puisque 20 millions d’entre elles risquent tout simplement de ne pas aller à l’école au lendemain de la pandémie, ce qui signifie qu’elles seront exclues des forces vives de leurs sociétés.  

Sur une note positive, Mme Georgieva a noté que cette crise offre cependant une possibilité de favoriser l’émancipation des femmes et de renforcer l’égalité entre les sexes « ce qui est fondamental pour la résilience et la croissance ».  Lorsqu’une femme ou une fille peut réaliser tout son potentiel, leur pays et leur communauté se portent mieux, et les sociétés dans lesquelles il y a plus de parité entre les sexes sont plus protégées de la menace d’un conflit, a-t-elle souligné. Lorsque les femmes participent aux processus de paix et aux processus de reconstruction de l’État, la solidité des institutions et la pérennité de la paix ont plus de chances. « Pourtant, les femmes restent encore souvent exclues de ces processus », s’est-indignée en déclarant que « nous avons tous une responsabilité pour remédier à cela ».  Elle a indiqué que sous sa houlette, l’un des axes sur lequel le FMI travaille avec ses membres, dont 25% sont des pays en situation fragile, sont les services sociaux, un outil efficace pour promouvoir l’éducation des femmes, la qualité des soins et in fine la parité dans la société.  Le FMI met aussi explicitement l’accent sur l’égalité entre les sexes parce que cela permet aux femmes et aux sociétés de devenir plus résilientes, y compris aux changements climatiques, a-t-elle expliqué.  

Les femmes et les filles sont des agents puissants du changement, elles sont la base d’un avenir meilleur pour tous, comme l’ont montré les expériences de l’Irlande du Nord, du Liberia et de la Colombie.  S’adressant à toutes les femmes et filles du monde, elle a déclaré : « croyez en vous et luttez pour réaliser votre potentiel », parce que le pouvoir entre les mains des femmes est synonyme d’un monde plus prospère pour tous. 

Mme MOUSSOKORO COULIBALY, Présidente d’un réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, a rappelé que son pays est confronté depuis 2012 à une grave crise sécuritaire et économique, aggravée par les retombées de la pandémie de COVID-19, qui a des effets dévastateurs sur les conditions de vie des familles et des communautés, même si celles-ci sont restées résilientes et solidaires grâce aux efforts des femmes.  Pour cette représentante de la société civile, il est clair qu’il ne peut y avoir de paix durable sans développement économique et sans inclusion des femmes dans les processus de prise de décision.  Or, les femmes sont toujours tenues à l’écart, a-t-elle regretté, avant de dénoncer des pratiques néfastes aux droits des femmes dans la société malienne, ainsi que des difficultés structurelles d’accès aux emplois stables et aux financements, notamment dans les zones fragilisées par les conflits.  « Ces défis ne nous font pas peur car nous sommes des piliers de nos familles », a assuré Mme Coulibaly, insistant sur le rôle décisif joué par les femmes pour la paix et la cohésion sociale, ainsi que pour l’accueil de déplacés et l’accompagnements des survivantes de violences sexuelles et sexistes. 

Mme Coulibaly a expliqué que, pour contribuer à l’autonomisation des femmes, son réseau s’emploie à faciliter les mises en relation avec des partenaires financiers et à assurer un dialogue afin que ces services soient adaptés aux besoins des femmes.  De 2012 à 2019, ce dialogue a permis l’octroi de crédits à 200 femmes dans les domaines de l’agriculture et de l’artisanat, aidant ainsi les bénéficiaires à sortir du secteur informel, s’est-elle enorgueillie.  Cette autonomisation leur a aussi permis de gagner la reconnaissance de leurs communautés et d’influer sur les conflits communautaires, a ajouté la représentante, saluant au passage la contribution des Nations Unies, en particulier d’ONU-Femmes, et des bailleurs de fonds à la promotion des droits des femmes dans les pays en situation de conflit. 

Jugeant toutefois ces efforts insuffisants, Mme Coulibaly a appelé à mobiliser davantage les acteurs du secteur privé et à garantir la participation effective des femmes dans le domaine de la paix.  De même, il est essentiel que la communauté internationale dans son ensemble facilite l’accès des femmes et des organisations de femmes à des financements durables et à des secteurs économiques où les femmes sont les plus actives.  Cela peut être assuré par la mise en place de fonds garantis adaptés et de programmes d’autonomisation prévoyant des facilités fiscales, a-t-elle soutenu, non sans plaider pour un dialogue accru entre le secteur privé et les représentantes de la société civile.  Si vous voulez aider mon pays à parvenir à une paix durable, a-t-elle conclu, « aidez les femmes à participer aux systèmes économiques et à avoir une voix dans les décisions qui se prennent ». 

Mme MARIAM AL MHEIRI, Ministre des changements climatiques des Émirats arabes unis, a déploré que la pleine participation des femmes à la vie économique et sociale soit toujours entravée.  Elle a estimé que le PIB mondial augmenterait de 26% d’ici à 2025 avec une réelle réduction des inégalités de genre dans le monde du travail et une augmentation du nombre de femmes dirigeantes.  Elle a souhaité que les femmes jouent un rôle de chef de file dans les efforts de consolidation de la paix.  La Ministre a souligné l’importance de s’appuyer sur le secteur privé pour réaliser les objectifs transformateurs du programme « les femmes et la paix et la sécurité ». 

La Ministre a ensuite fait quatre propositions pour une plus grande autonomisation des femmes dans les contextes de conflit.  « Premièrement, afin de rebâtir des sociétés durables, inclusives et équitables, les femmes et les filles doivent être au cœur des efforts économiques post-conflit. »  Elle a précisé que son pays a consacré 50 millions de dollars afin de soutenir près de 300 000 entrepreneuses en Iraq, au Yémen ou encore en Éthiopie.  « Deuxièmement, toutes les parties prenantes doivent mieux comprendre et tirer profit de leurs synergies. » Elle a ainsi invité les États Membres, l’ONU et les organisations locales de femmes à mettre en relation le secteur privé avec les femmes vivant au sein des communautés touchées par un conflit. 

« Troisièmement, le secteur privé bénéficie de sociétés pacifiques et stables, il doit donc contribuer à l’avènement de telles sociétés. »  Elle a ainsi insisté sur l’importance d’un « entreprenariat social », dont pourraient bénéficier les communautés.  « Enfin, nous devons faire en sorte que les femmes bénéficient d’un accès égal à tous les services leur permettant de participer à la vie économique », a conclu la Ministre, en soulignant l’importance de remédier aux inégalités numériques. 

M.  SIMON COVENEY, Ministre des affaires étrangères et de la défense de l’Irlande, a tout d’abord salué le courage des femmes et les filles ukrainiennes, notant que ce conflit aura un impact grave sur elles.  Il a ensuite appelé à renforcer le programme sur les femmes et la paix et la sécurité , s’inquiétant des écarts entre les objectifs de ce programme et la réalité sur le terrain, lesquels se sont creusés pendant la pandémie de COVID-19.  L’autonomisation économique des femmes ne peut être réalisée qu’en même temps que leur autonomisation politique et sociale, a-t-il souligné, s’alarmant que 21  ans après son adoption, le cœur du programme est sérieusement remis en question, y compris au Conseil. 

À ses yeux, les femmes doivent être impliquées directement et substantiellement dans les processus de paix et politiques dirigés par l’ONU.  Mais cet objectif n’a pas été atteint et le combat continue pour éliminer les obstacles sociétaux et structurels qui empêchent les femmes d’assumer la place qui leur revient aux tables de négociation et de prise de décision, a déploré M. Coveney qui s’est par ailleurs dit choqué que la violence sexuelle liée aux conflits reste une arme de guerre et que les survivants luttent toujours pour la justice.  Le Ministre a également dénoncé l’érosion continue des droits des femmes en Afghanistan par les Taliban, tout en saluant le fait qu’elles continuent de se battre pour leur droit d’être entendues. 

Soulignant que les progrès ne se produisent pas dans le vide, le Ministre a demandé une coopération plus étroite entre le Conseil, la Commission de consolidation de la paix, le Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire et toutes les autres initiatives et organismes consacrés à la promotion de l’égalité des sexes et des droits des femmes.  Il a appelé à aider les femmes à traiter et se remettre de la douleur et des blessures causées par les conflits.  Les soutiens financiers et, l’accès à la justice et aux services de santé sexuelle sont également essentiels pour donner aux femmes les moyens de répondre à leur traumatisme, a-t-il ajouté, notant que les partenariats public-privé peuvent faire une différence en matière d’aide et de relèvement.  Il a également appelé à appuyer les organisations locales de femmes et les femmes bâtisseuses de paix. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a considéré qu’il est impossible de parler du programme pour les femmes et la paix et la sécurité aujourd’hui sans reconnaître les conséquences horribles pour les femmes de la « guerre de choix » non provoquée et injustifiable que mène la Russie contre le peuple ukrainien. « Comme dans d’autres conflits, les femmes sont contraintes de faire des choix inimaginables - elles sont obligées de fuir leur foyer en raison de menaces de violence imminente alors qu’elles continuent à soutenir leur communauté, leur famille et leurs proches. »  Nous devons témoigner, en particulier, de l’extraordinaire douleur des mères pendant cette terrible période.  Des mères qui ont été forcées d’accoucher dans des abris antibombes.  Des mères qui ont été obligées de faire monter leurs enfants, « seuls et terrifiés », dans des trains bondés quittant le pays.  La mère qui court après la couverture bleue tachée de sang qui contenait son enfant de 18 mois, maintenant mort à cause des bombardements russes.  « Vous avez tous vu les images de leur douleur », a ajouté la représentante. 

Bien sûr, de nombreuses femmes s’unissent courageusement pour défendre leurs maisons, leurs communautés et leur pays.  Et ce sont les femmes qui mènent les efforts de l’Ukraine face à la nouvelle catastrophe humanitaire déclenchée par Moscou, tout comme elles ont joué un rôle essentiel dans la construction d’une société démocratique naissante au cours des huit dernières années en Ukraine.  « Si la Russie choisit un jour de renouer avec le dialogue et la diplomatie, les femmes doivent y être associées de manière significative et cohérente », a souligné Mme Thomas-Greenfield qui a noté que la participation pleine, égale et significative des femmes accroît la probabilité de garantir une paix durable et à long terme.  

Rappelant qu’une économie ne peut tout simplement pas espérer être compétitive sans la moitié de sa main-d’œuvre, elle a déploré que les femmes sont encore tenues à l’écart du marché du travail et encore plus sous-représentées et exclues des opportunités économiques dans les pays fragiles et touchés par les conflits, où leur accès aux institutions financières reste également extrêmement limité.  Et cela est devenu plus évident avec l’impact de la COVID-19 au cours des deux dernières années.  Ces pratiques discriminatoires non seulement privent les femmes de leurs droits fondamentaux, mais sapent aussi les efforts visant à créer des sociétés fortes, sûres et prospères.  Mais lorsque vous donnez aux femmes l’accès au capital, aux services financiers et aux opportunités économiques, cela crée de la richesse et de la résilience, ce qui, à son tour, génère une paix et une sécurité à long terme. 

Mme Thomas-Greenfield a ensuite indiqué qu’au Sénégal, les États-Unis ont favorisé la résilience économique et la résistance à la radicalisation en donnant une autonomie économique à 5 000 petits exploitants ruraux, dont 60% de femmes. Ces femmes ont été exposées à l’extrémisme violent, mais ont été mieux à même d’y résister parce qu’elles ont vu une meilleure voie à suivre.  C’est ce genre d’approche que nous devons adopter à plus grande échelle, a insisté la représentante, pour qui ces programmes doivent être associés à des plans clairs visant à lutter contre la violence sexiste et à améliorer la sécurité et l’égalité d’accès des femmes et des filles aux secours et à l’aide au relèvement ainsi qu’aux opportunités. 

Mme MARTHA DELGADO PERALTA, Vice-Ministre aux affaires multilatérales et droits humains du Mexique, a rappelé que son pays accorde une priorité à la mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité » dans une approche ancrée dans l’indivisibilité et l’universalité des droits humains et des libertés fondamentales des femmes et des filles dans toute leur diversité.  Notant que la pandémie de COVID-19 a touché de manière disproportionnée les femmes par la perte d’emplois et, par conséquent, de revenus, elle a appelé à des efforts de relèvement qui suivent une approche sexospécifique.  Elle a aussi souligné l’importance des efforts de prévention des conflits, de consolidation de la paix et de reconstruction garantissant l’inclusion économique pour réduire l’écart et la ségrégation sur le marché du travail.  Il faut aussi, a-t-elle ajouté, créer des emplois décents avec accès à des systèmes complets de protection sociale, y compris des services de santé sexuelle et reproductive, conditions essentielles pour construire une paix durable. 

La Vice-Ministre a souligné l’importance des actions du secteur privé qui adoptent une approche genre.  Elle a appelé à investir dans les mécanismes financiers existants pour soutenir les organisations de femmes et les défenseurs des droits humains, qui contribuent à un climat de stabilité dans leurs communautés.  Elle a aussi jugé indispensable de soutenir les femmes artisanes de la paix des groupes les plus défavorisés tels que les femmes handicapées, les réfugiées, les jeunes femmes, les femmes chefs de famille ou membres de la communauté LGBTI.  Il faut faciliter l’accès des organisations féminines locales aux technologies numériques, qui aujourd’hui peuvent également contribuer à la prévention de la violence et au fonctionnement de l’alerte précoce, a-t-elle aussi recommandé avant d’inviter à promouvoir la participation des coopératives communautaires de femmes ou entreprises dirigées par des femmes, dans des délibérations sur les questions de relance économique et de reconstruction post-conflit. 

Enfin, elle a cité le Forum Génération Égalité qui a donné naissance en 2021 au Pacte femmes, paix et sécurité et action humanitaire, auquel le Mexique a adhéré.  Les États Membres, des entités des Nations Unies, des organisations régionales, la société civile et le secteur privé qui participent à ce forum développent des actions dans cinq domaines thématiques, dont la sécurité économique des femmes et leur accès aux ressources et autres services essentiels. Enfin, elle a jugé essentiel que les missions de maintien de la paix garantissent que les processus de consolidation de la paix post-conflit incluent la diversité des femmes locales dans les processus de secours et de relèvement. 

M.  SANJAY VERMA, Secrétaire au Ministère des affaires étrangères de l’Inde, a salué la vision de Mme  Hansa Mehta, déléguée indienne qui avait insisté, au cours de la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948, pour qu’on reformule l’expression «  Tous les hommes naissent libres et égaux  » en « Tous les êtres humains naissent libres et égaux ».  Il a également fait observer qu’avec plus de 1,3  million de femmes élues, lesquelles constituent près de 44% du total des élus de la vie politique et prennent des décisions au niveau local, l’Inde est l’un des rares pays à avoir eu des femmes comme Président, Premier Ministre, Ministre de la défense, Ministre des finances et Ministre des affaires étrangères. 

Dans l’optique de l’autonomisation socioéconomique des femmes, il a fait part de la nécessité d’élaborer, comme prérequis, un cadre institutionnel mondial, notamment juridique, permettant aux femmes d’accéder aux opportunités économiques et aux partenariats.  En Inde, des initiatives numériques ont permis de minimiser le clivage entre les genres, et le pays a tiré parti des technologies numériques pour fournir un meilleur accès des femmes à la finance, au crédit, à la technologie et à l’emploi.  Nous avons ouvert des comptes bancaires en ligne pour plus de 445 millions de personnes dont plus de 55% étaient des femmes, et pendant la pandémie de COVID-19, cette initiative a contribué au transfert direct de fonds à près de 200 millions de femmes, a-t-il indiqué.  De même, le Gouvernement fournit des prêts sans garantie pour encourager l’entrepreneuriat et le travail indépendant.  Environ 70% des bénéficiaires sont des entreprises détenues et exploitées par des femmes.  Les femmes sont ainsi devenues économiquement autonomes et fournissent également des emplois à d’autres.

Pour ouvrir ces opportunités économiques, l’égalité d’accès à l’éducation est fondamentale, a relevé le Ministre des affaires étrangères.  Il s’est enorgueilli de voir qu’un grand nombre de femmes en Inde s’engagent dans des filières des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques, précisant qu’environ 27% des postes de direction clefs de la « mission Mars Orbiter » sont tenus par des femmes indiennes.  M. Verma a estimé que l’embauche d’un plus grand nombre de femmes policières et de femmes Casques bleus peut faire changer « notre réponse collective à la résolution des conflits ».  Il a rappelé comment le déploiement, en 2007 par l’Inde, de la toute première équipe de police entièrement féminine dans le cadre de Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), avait entraîné une multiplication par trois du recrutement de femmes dans la police au Libéria. 

M.  Verma a jugé que la démocratie, le pluralisme et l’état de droit sont des conditions préalables nécessaires à l’autonomisation socioéconomique des femmes et leur participation aux processus de prise de décision.  Il a souligné l’importance d’une approche inclusive et d’une gouvernance représentative en Afghanistan, avec une participation significative des femmes, exhortant en outre à la protection des droits des femmes, conformément à la résolution 2593 (2021). 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a indiqué que son pays travaille en étroite collaboration avec les gouvernements partenaires, les organisations multilatérales et le secteur privé pour aider les femmes des économies fragiles à jouer un rôle égal dans l’économie, à accéder aux avantages du commerce mondial et à établir des partenariats économiques, car ce sont « des leviers pour la parité ».  Elle a cité en exemple la Jordanie, où les femmes sont confrontées aux effets combinés du conflit, des déplacements et de la pandémie et où les programmes de développement britanniques fournissent des transferts en espèces aux femmes réfugiées et aux femmes jordaniennes à risque.  La représentante a aussi indiqué que le Royaume-Uni et ses partenaires du G7 ouvrent la voie en mobilisant des investissements publics et privés pour faire progresser l’égalité entre les sexes et combler les lacunes dans les opportunités économiques des femmes, telles que l’accès aux actifs numériques et financiers.  L’année dernière, sous la présidence britannique du G7, British Investment International et ses partenaires se sont engagés à investir 15 milliards de dollars sur la période 2021-2022 pour faire avancer ce programme dans les pays en développement.  Mais dans les États fragiles où seulement 25% des femmes ont des comptes bancaires, elle a recommandé d’envisager des interventions innovantes comme le microcrédit pour les femmes. 

Elle a dit « ne pas pouvoir terminer son propos sans énoncer l’évidence »: l’inclusion économique n’est pas une protection contre les balles et les bombes. Pas plus tard qu’hier, cela a été horriblement clair, s’est-elle indignée en évoquant le bombardement russe qui a tué une mère ukrainienne et ses deux enfants alors qu’ils cherchaient à évacuer la ville d’Irpin.  Ils n’étaient pas les premières victimes et, tragiquement, ils ne seront pas les dernières, a mis en garde la représentante.  Des hommes, des femmes, des enfants, aussi bien russes qu’ukrainiens, continueront de souffrir jusqu’à ce que la Russie mette fin à cette guerre brutale, non provoquée et illégale, a-t-elle conclu. 

M.  MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a souligné l’impact déterminant des femmes dans le règlement des conflits.  Cependant, les inégalités culturelles et structurelles limitent souvent leur capacité de participer de manière égale, pleine et significative à la paix et aux processus au sein de leurs sociétés, a-t-il déploré, appelant à une collaboration stratégique renforcée avec les réseaux locaux de femmes et les femmes artisanes de la paix.  Il a également insisté sur l’importance de l’inclusion économique et la réintégration des femmes, y compris des ex-combattantes, des réfugiées et des victimes de conflits, pour assurer la stabilité à long terme, la résilience économique et la cohésion sociale.  Au niveau national, a-t-il relevé, le Kenya a vu l’avantage que représente l’inclusion des femmes dans le développement économique du pays.  Il l’a fait dans le cadre de sa « Vision 2030 », qui prévoit une stratégie économique centrée sur les femmes et leur autonomisation.  À l’échelle régionale, le principe de systèmes financiers inclusifs et la reconnaissance de l’égalité des sexes constituent des piliers essentiels pour faire avancer le développement du continent africain, a expliqué le délégué, ajoutant que ces engagements trouvent une illustration pertinente dans la nomination, le mois dernier, de Mme  Nardos Bekele Thomas comme première femme Présidente du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). 

Après avoir évoqué les efforts déployés par l’Union africaine pour favoriser l’inclusion financière et économique des femmes, M.  Kiboino a souhaité que les organes et agences compétents des Nations Unies en fassent un suivi en ce qui concerne la durabilité de la paix et du développement.  Il a également appelé à élever au rang de priorité l’intégration des femmes dans les cadres économiques nationaux et les industries nationales pour assurer la durabilité économique.  Cela nécessite la sécurisation des ressources, la promulgation de lois et de politiques pertinentes et le développement de programmes qui font progresser l’égalité des sexes dans tous les secteurs de la vie publique, a-t-il soutenu.  Il a d’autre part jugé essentiel d’améliorer l’accès des femmes aux plateformes numériques et de renforcer leur formation technique et professionnelle grâce à un partenariat entre les entrepreneuses locales, les agences de développement et les institutions financières internationales et régionales.  Il faut aussi garantir la participation des femmes à la formulation de plans nationaux intégrés de financement axés sur le financement des priorités de développement, tout en prévoyant des indicateurs de mise en œuvre sur le terrain.  Enfin, le délégué a appelé à renforcer le rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix (CCP), saluant à cet égard l’avis présenté par cette dernière en faveur d’un indicateur de mise en œuvre de l’égalité des sexes.  À  ses yeux, le soutien de la CCCP aux efforts nationaux et régionaux de promotion des entrepreneuses et d’autonomisation économique des femmes constituent des « repères importants pour la paix et de l’édification de la nation ». 

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a reconnu que 21 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) les femmes continuent de payer un lourd tribut, notamment dans les États fragiles et en situation de conflit.  Il importe que le plaidoyer en faveur de l’autonomisation des femmes s’amplifie à tous les niveaux dans les sphères de la société, a plaidé la représentante.  Elle a estimé que le premier défi consiste à remédier au manque d’opportunités et de ressources économiques qui affaiblit le rôle et la capacité de leadership des femmes.  « Le Gabon est en Afrique l’épicentre du leadership des femmes en tant qu’agentes de changement et artisanes de paix », a dit la représentante en rappelant que les postes de Premier Ministre, de la Présidence du Sénat et de la Présidence de la Cour constitutionnelle sont occupées par des femmes.  Le Gabon est pleinement conscient qu’une pleine participation des femmes aux processus de prévention et de résolution des conflits contribue à une paix durable, a-t-elle assuré.  Enfin, la déléguée a demandé le renforcement du partenariat entre l’ONU et les organisations régionales dans ce domaine, ainsi que la création de mécanismes de financement flexibles pour soutenir les initiatives de consolidation de la paix entreprises par les femmes. 

Après avoir exprimé son appui et sa solidarité aux femmes et aux filles ukrainiennes, Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que la pandémie de COVID-19 a rappelé que les droits des femmes et des filles ne sont jamais pleinement acquis.  L’impact économique a été particulièrement lourd pour les femmes, très présentes dans les secteurs les plus touchés par la crise ainsi que dans l’emploi informel et précaire, a-t-elle relevé.  Les efforts pour reconstruire en mieux doivent s’appuyer sur une participation égale, pleine, substantielle et effective des femmes à l’économie, a-t-elle suggéré. 

En Afghanistan, a poursuivi la représentante, les Taliban multiplient les exactions, notamment à l’encontre de militantes afghanes, ainsi que les violations inacceptables des droits des femmes.  L’exclusion des Afghanes de la vie politique, sociale et économique du pays est un affront à la conscience humaine, s’est-elle indignée.  La représentante a ensuite appelé à une mise en œuvre holistique des piliers du programme pour les femmes et la paix et la sécurité associant droit et inclusion économiques.  Seule cette approche complète peut permettre la construction d’une paix durable, juste et inclusive, a-t-elle souligné. 

De son côté, la France continuera de promouvoir une diplomatie féministe ambitieuse et résolue, a fait savoir la représentante qui, évoquant le Forum Génération Egalité, a appelé toutes les parties prenantes à s’engager pour assurer la mise en œuvre du « plan d’accélération mondial » en matière d’égalité et ses 40 milliards de dollars d’engagements financiers. 

Mme MELINA ESPESCHIT MAIA (Brésil) a estimé que les partenariats public-privé peuvent jouer un rôle très important dans la promotion de la participation pleine, égale et significative des femmes à la prévention des conflits, la consolidation de la paix et la reconstruction post-conflit, permettant à celles-ci de devenir des moteurs de changement.  En effet, l’inclusion économique des femmes, en particulier dans la population active, est une stratégie rationnelle et rentable de prévention des conflits et peut s’avérer essentielle dans la reconstruction post-conflit et la reprise économique. 

Néanmoins, a constaté la représentante, la participation des femmes au marché du travail continue d’être inférieure à celle des hommes, les écarts salariaux entre les sexes sont élevés et les femmes surreprésentées dans le secteur informel et parmi les pauvres.   Dans de nombreux pays, des restrictions juridiques persistent et empêchent les femmes de développer pleinement leur potentiel économique.  Et une fois le conflit terminé, elles subissent des pressions pour accepter les tâches ménagères et quitter leur travail rémunéré. 

Pour la déléguée, le Conseil peut œuvrer à travers diverses stratégies correctives, en rédigeant et révisant les mandats des opérations de maintien de la paix afin qu’ils soient plus explicites dans la promotion de l’inclusion économique et de l’autonomisation des femmes, conformément à la résolution 2242 (2015).  Le Conseil pourrait en outre veiller à ce que les voix des femmes soient davantage entendues dans le cadre des missions politiques spéciales et continuer à soutenir la Commission de consolidation de la paix (CCP) dans ses efforts pour promouvoir l’inclusion et la participation économiques des femmes.  Elle a ensuite salué la décision de la CCP d’allouer au moins 25% des ressources du Fonds pour la consolidation de la paix à des projets visant à autonomiser les femmes et les jeunes. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a indiqué que l’Albanie a réalisé des progrès significatifs dans l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres à tous les niveaux.  Illustrant son propos, il a dit le rapport 2021 du Forum économique mondial sur l’écart entre les genres classe l’Albanie au vingt-cinquième rang sur 156 pays, soulignant des progrès notables dans le domaine de l’autonomisation politique et de la participation et des opportunités économiques.  L'une des politiques dont nous sommes le plus fiers est l’intégration du genre à toutes les étapes de la budgétisation publique, au niveau central et local, faisant de l’Albanie le premier pays de la région à inclure la budgétisation sensible au genre comme outil de promotion du financement transformateur pour l’égalité et l’autonomisation des femmes, s’est félicité le représentant.  Et en novembre dernier, avec l’appui de l’Agence française de développement et la Banque Mondiale, l’Albanie a commencé la mise en œuvre d’un projet majeur, à hauteur de 51 millions d’euros, visant à accompagner et promouvoir une croissance plus inclusive et équitable en agissant sur les facteurs qui privent les femmes d’opportunités économiques égales à celles des hommes.  Notant que 20 à 50% du potentiel de PIB est perdu par les pays en raison de l’accès limité des femmes au marché du travail, il a jugé urgent d’aller au-delà des mots et des engagements et à ne plus perdre de temps pour mettre en valeur le potentiel des femmes en tant qu’acteurs de la paix et de la prospérité, dans l’intérêt de la sécurité, la consolidation de la paix et le développement économique. 

M. JUN ZHANG (Chine) a évoqué des initiatives de soutien économique des femmes dans des pays partenaires de la Chine.  Ainsi, au Soudan du Sud, l’ambassade de Chine a offert 100 machines de tissage afin de renforcer l’autonomisation socioéconomique des femmes.  Il a également parlé de cette Rwandaise qui a répliqué la formation qu’elle a reçue en Chine dans le domaine de l’agriculture circulaire, ainsi que de Concilia, la première conductrice de train kenyane qui arpente le tronçon Nairobi-Mombassa grâce à une formation chinoise. 

Le délégué a invité la communauté internationale à miser davantage sur le développement, notamment en investissant dans la reconstruction des zones sortant de conflit, afin d’y jeter les bases de l’autonomisation des femmes.  Il a également appelé à aider les femmes qui font face à des difficultés du fait de la pandémie de COVID-19.  Grâce au renforcement des coopérations Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire, on peut œuvrer davantage à l’épanouissement des femmes, a-t-il argué.  Il a aussi invité le secteur privé et les institutions financières internationales à s’engager.  Le FMI pourrait par exemple encourager les États développés à céder leurs droits de tirages spéciaux (DTS) à des États plus fragiles, a-t-il suggéré, expliquant que cela pourrait contribuer à l’essor socioéconomique des couches vulnérables, y compris les femmes.  Sur la question de la « crise ukrainienne », il a appelé les Nations Unies à accélérer l’assistance humanitaire dans le pays, plaidant pour le renforcement des initiatives diplomatiques pour parvenir au plus vite à la paix. 

Le délégué a ensuite passé la parole à une représentante de la mission chinoise qui a fait part de la maxime selon laquelle « les femmes chinoises portent la moitié du ciel ».  Elle a salué la contribution des Chinoises dans la lutte contre la pauvreté, ainsi que leur participation active aux délibérations politiques.  Elle a terminé en rendant hommage à Wang Yaping, une astronaute chinoise qui est en orbite en ce moment autour de la terre, portant ainsi le rêve de nombreuses femmes. 

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné le rôle essentiel des femmes en tant qu’artisanes de la paix et de la reconstruction.  Il a regretté que cette facette de la coopération internationale soit souvent oubliée et relayée au second plan.  Il a plaidé pour le renforcement du rôle des femmes dans la paix et la reconstruction, en leur donnant accès à une émancipation économique et financière.  L’accent doit être mis sur l’élimination de la pauvreté, l’émancipation des femmes et l’accès croissant à l’éducation, a-t-il ajouté en recommandant que ces questions soient au cœur des travaux du Conseil de sécurité et de la Commission de consolidation de la paix afin d’œuvrer constamment à la cause des femmes. 

Cette année, le 8 mars intervient sur fond de bouleversement de l’ordre mondial, a constaté le représentant russe.  Depuis huit ans, les femmes sont persécutées à Donetsk et Luhansk par des radicaux ukrainiens, dans un silence assourdissant de la communauté internationale, « même quand les chaines de télévision ukrainiennes montrent des personnes brulées vivantes à Odessa », a-t-il déploré.  Cette situation ne pouvait se poursuivre indéfiniment, a martelé le représentant en assurant que la paix en Ukraine sera rétablie.  Revenant sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité, il a dit que la tâche consiste à ne pas enterrer dans des divergences politiques la valeur de la coopération dans le cadre de cette cause. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a estimé qu’assurer les droits économiques des femmes nécessite leur participation aux processus, mécanismes et institutions de prise de décision, y compris économiques et financiers, et l’accès et le contrôle des ressources sur un pied d’égalité avec les hommes.  Pour un pays en crise ou en conflit, garantir les droits économiques des femmes peut être un moyen de parvenir au développement, à la stabilité et à la paix à long terme, a-t-elle assuré, reconnaissant toutefois que c’est souvent dans les pays fragiles et touchés par des conflits que les femmes sont confrontées à l’exclusion économique la plus grave.  Citant la dernière édition de l’Indice mondial sur les femmes, la paix et la sécurité, la déléguée a noté que les femmes et les filles déplacées sont plus exposées aux formes de violence sexiste et de marginalisation économique.  Elles rencontrent notamment des obstacles à l’accès à l’emploi et aux opportunités de subsistance qui résultent de facteurs croisés affectant leurs droits.  De plus, a-t-elle déploré, les mariage forcés et précoces, et l’absence d’identification légale figurent parmi les plus grands contributeurs à la pauvreté dans les ménages dirigés par des femmes déplacées.  À cet égard, elle a tenu à réitérer la condamnation par la Norvège de « l’agression injustifiée de l’Ukraine par la Fédération de Russie » et s’est déclarée « préoccupée par les effets de cette guerre sur les femmes et les filles ukrainiennes ». 

Plus généralement, la représentante a observé que les conflits et les crises peuvent perturber les normes traditionnelles et créer des opportunités pour les femmes.  Il est impératif que ces opportunités soient reflétées dans les dispositions relatives au genre dans les accords de paix, les réformes et les nouvelles législations, a-t-elle affirmé, plaidant pour des consultations larges et inclusives avec une diversité de femmes dans les domaines de la consolidation de la paix, de la démobilisation, de la réintégration, du relèvement et des programmes économiques au niveau national et communautaire.  Elle a d’autre part souhaité que le Conseil de sécurité  et toutes les « présences » de l’ONU sur le terrain, y compris les opérations de paix, insistent sur l’influence directe des femmes dans les décisions qui affectent leur vie et leur avenir.  Elle a également appelé à des partenariats avec le secteur privé pour exploiter des opportunités sous-utilisées, notamment en matière d’emploi, de comblement de la fracture numérique et de solutions innovantes à des problèmes complexes, tels que les moyens de paiement et la pauvreté énergétique.  Pour Mme Juul, les conflits et les crises ne diminuent pas la nécessité de se concentrer sur la participation et les droits des femmes, y compris leurs droits économiques, « tout au contraire ». L’inclusion, a-t-elle conclu, exige à la fois de la créativité et un engagement solide. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a estimé qu’un nouvel élan doit être insufflé au programme « les femmes et la paix et la sécurité », en accordant notamment une attention accrue aux dimensions négligées de ce programme, telles que l’inclusion économique des femmes comme élément la clef de la paix.  La déléguée a souligné l’importance des apports du Fonds pour la consolidation de la paix et du Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire pour une plus grande égalité entre les genres dans le monde.  Ce sont de bons exemples des avancées possibles lorsque tous les acteurs clefs du programme précité mettent en commun leurs ressources au service du bien commun, a dit la déléguée.  Elle a aussi rappelé que des organisations telles que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ou encore l’Union africaine (UA) ont érigé des aspects cruciaux de ce programme en objectifs stratégiques.  L’objectif d’une autonomisation des femmes adopté par ces deux organisations exige l’appui de la communauté internationale pour être réalisé, a plaidé la représentante. 

Mme Oppong-Ntiri a suggéré une diminution des dépenses militaires pour dégager davantage de ressources en faveur du programme précité.  « Malheureusement, la situation mondiale actuelle va probablement conduire les pays à augmenter leur budget défense. »  Elle a ensuite plaidé pour le développement de politiques d’autonomisation des femmes au niveau national, avec la participation notamment des autorités traditionnelles et des médias.  Enfin, la déléguée a demandé qu’un appui technique et financier soit fourni aux initiatives d’autonomisation des femmes dans les régions faisant face à la menace terroriste, en particulier au Sahel et en Afrique de l’Ouest. 

M. AHMED KHALEEL, Ministre d’État des affaires étrangères des Maldives, a suggéré que lorsqu’un conflit, une catastrophe ou d’autres crises frappent, les interventions immédiates et les actions de relèvement à plus long terme doivent se concentrer sur la situation et les besoins des femmes et sur leur inclusion dans la prise de décision.  Dans un petit pays comme les Maldives, a fait observer le Ministre, une catastrophe naturelle peut anéantir des décennies de progrès en matière de développement en un clin d’œil et ces situations créent des environnements où les femmes sont marginalisées.  En réponse aux conséquences de la COVID-19, les Maldives ont fourni une allocation de soutien du revenu aux travailleuses qui ont perdu leur emploi, en particulièrement celles qui travaillaient dans le secteur informel, a informé M. Khaleel citant aussi d’autres initiatives de son gouvernement comme l’inclusion et la collecte de données afin d’identifier plus rapidement et de mieux comprendre les défis auxquels les femmes sont confrontées. 

Pour assurer une action sur le terrain qui tienne compte des femmes, le Ministre a recommandé la participation pleine, égale et significative des femmes aux rôles de leadership.  C’est ainsi que les Maldives ont adopté une loi visant à attribuer 33% des sièges au Parlement aux femmes lors des élections locales, a-t-il signalé en ajoutant qu’un tiers des postes ministériels sont occupés par des femmes.  Pour la première fois, nous avons des femmes juges à la Cour suprême, s’est-il enorgueilli en ajoutant que ce sont des femmes qui dirigent la Commission du service juridique et la Commission des droits humains.  Pour la première fois, en avril 2021, des femmes ont été élues pour occuper un tiers des sièges des conseils locaux, a-t-il aussi indiqué. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a souligné le rôle important que jouent les femmes dans la consolidation de la paix et la promotion du développement durable.  Il a indiqué que son pays, qui a participé à de multiples réunions sur les femmes, la paix et la sécurité, y compris lorsqu’il présidait l’Union africaine, reconnaît que les femmes sont des artisanes de la paix.  Son gouvernement met d’ailleurs en œuvre un plan national connexe, conforme aux dispositions de la résolution 1325 (2000).  Des ressources sont toutefois nécessaires pour en assurer la mise en œuvre complète, a fait observer le représentant.  Récemment, a-t-il fait valoir, le Forum d’Assouan a permis de formuler une série de recommandations à l’intention des pays africains pour, entre autres, renforcer le rôle des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix.  Il a ensuite souhaité que soit favorisée une approche consensuelle sur toutes les questions liées au programme pour les femmes et la paix et la sécurité. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est dite persuadée que l’inclusion des femmes dans la paix et la sécurité apporte de meilleurs résultats et que la présence des femmes à la table des négociations renforce la responsabilisation pour la mise en œuvre.  Elle a jugé en outre indispensable la participation des femmes dans toutes les activités de promotion de la paix au regard de l’impact disproportionné des conflits sur les femmes et filles.  Elle a cité en exemple l’Ukraine, l’Afghanistan, la Syrie, l’Éthiopie et le Myanmar, notant que les femmes subissent notamment des formes de discrimination multiples et croisées en conséquence des conflits.  Dans un souci d’inclusion économique, elle a prôné la fourniture aux femmes des compétences nécessaires pour obtenir un emploi bien rémunéré et participer plus activement à leur société.  Elle a aussi conseillé d’amender les législations pour permette aux femmes d’hériter et de posséder des terres.  Permettre la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects des processus de paix et de leur mise en œuvre est une priorité essentielle pour Malte, a-t-elle ajouté, citant aussi à ce titre la mise en œuvre du programme les femmes et la paix et la sécurité qui est au centre des partenariats de Malte avec ses partenaires multilatéraux et régionaux.

M. OMAR HILALE (Maroc) a déclaré qu’il ne saurait avoir de paix sans développement et vice-versa.  Il a appelé à des partenariats réussis pour pérenniser la paix, notant que le secteur privé peut y apporter une grande contribution.  Il a souligné que les entreprises locales sont très souvent dirigées par des femmes qui occupent une place centrale dans la société.  Le représentant a ensuite proposé d’établir un état de lieux de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, notamment pour ce qui est de la participation des femmes dans le secteur économique, avec l’aide de marqueurs qui permettraient d’identifier les écarts afin de prendre des mesures pour combler les fossés.  Il serait aussi opportun, a souligné M. Hilale, que des rapports périodiques du Secrétaire général sur la mise en œuvre de ladite résolution tiennent compte de l’autonomisation socioéconomique des femmes.  Enfin, il a appelé, dans le contexte post-COVID-19, à exploiter et mettre à profit les meilleures pratiques de l’ONU en matière d’autonomisation socioéconomique des femmes dans le cadre de la pérennisation de la paix. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a souligné que la participation pleine, égale et significative des femmes à l’aide d’urgence, à la reconstruction et à la consolidation de la paix reste fondamentale, en faisant fond sur les nombreuses entrepreneuses, bâtisseuses de ponts impressionnantes qu’elle a rencontré tout au long de sa carrière – au Mozambique, en Égypte, au Népal ou dans son propre pays.  À la question de savoir quel était le principal obstacle à leur pleine participation aux processus de consolidation de la paix, une réponse revenait fréquemment: la pauvreté.  « Est-ce surprenant?  Non! » L’autonomisation et l’indépendance économique sont les moteurs d’une participation plus effective des femmes aux processus de paix et de reconstruction, mais également aux processus politiques, ce qui est souligné dans le Plan d’action national de la Suisse.  Elle a invité tous les pays à développer leur propre plan d’action national et à y mettre un accent sur l’autonomisation économique des femmes. Renforcer la position socioéconomique des femmes est aussi un sujet clef de la coopération suisse, a-t-elle ajouté, précisant que son pays soutient notamment des femmes gérantes de petites et moyennes entreprises transfrontalières dans la région des Grands Lacs. 

Poursuivant, la représentante a salué la priorité accordée par le Fonds pour la consolidation de la paix de l’ONU au financement d’initiatives favorisant la participation et l’autonomisation des femmes, et vu dans le Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire « un bon exemple d’un multilatéralisme moderne et efficace ».  Le Conseil de sécurité a également un rôle à jouer en améliorant ses partenariats grâce à la promotion de réseaux, ce qu’il peut faire lors de visites sur le terrain en rencontrant des actrices de la paix, ou en coopérant davantage avec des organisations régionales, les institutions financières internationales et la société civile.  Mme Baeriswyl a conclu en soulignant l’importance des synergies entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix dans ce domaine. 

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a tout d'abord exprimé sa vive préoccupation face à la détérioration de la situation humanitaire en Ukraine et dans les pays voisins, évoquant en particulier les conséquences désastreuses de l’ « agression russe » sur les femmes et les filles.  Tout en appelant à un rétablissement rapide du « statu quo ante bellum » en Ukraine, il a fait observer que survivre à une crise n’est que la « pointe de l’iceberg » du vaste programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Les femmes doivent être au centre de tous nos efforts pour construire des sociétés pacifiques et résilientes, a souligné le représentant, constatant que les femmes sont capables de résoudre les problèmes par des moyens pacifiques et sans la tentation de modifier le statu quo  par la force.  De fait, a-t-il insisté, la participation des femmes est « la clef de la prévention des conflits », ce qui implique de la promouvoir par le biais d’une approche globale et de mesures spécifiques, comme l’autonomisation et le renforcement des institutions, dans le cadre de partenariats efficaces entre les parties prenantes. 

Pour illustrer son propos, le délégué a indiqué que son pays a récemment soutenu un projet dirigé par ONU-Femmes dans la région du lac Tchad, qui visait à l’autonomisation des femmes touchées par les conflits violents provoqués par Boko Haram.  Dans ce cadre, a-t-il précisé, ONU-Femmes a agi en partenariat avec l’association Sasakawa Africa, une organisation de la société civile japonaise qui aide les petits exploitants agricoles en Afrique depuis plus de 30 ans.  En collaboration avec les autorités locales du Cameroun et du Nigéria, Sasakawa a offert aux agricultrices locales des formations à l’agriculture intelligente face au climat et aux activités génératrices de revenus afin de leur permettre d’assurer leur autonomie économique.  Qualifiant ce projet de « succès », le représentant a souligné qu’un partenariat efficace exige une complémentarité efficace, ce qui passe par une amélioration du partage d’informations et des interactions entre les différentes parties prenantes, à savoir les organisations de la société civile, les institutions, le secteur privé et bien sûr les gouvernements et les entités des Nations Unies, singulièrement en situation de conflit.  À cet égard, il a estimé que le Pacte sur les femmes, la paix, la sécurité et l’action humanitaire, dont le Japon est signataire, pourrait servir de plateforme utile pour renforcer la coopération dans le cadre de partenariats. 

M. ROBERT KEITH RAE (Canada), au nom des 56 États membres du Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité, a exprimé sa pleine solidarité avec les femmes et les filles en Ukraine et déploré les pertes en vie humaine à la suite de l’agression de la Russie.  Il a souhaité que les livraisons d’aide humanitaire prennent en compte la perspective de genre, en soulignant la nécessité que les besoins des femmes et des filles soient satisfaits.  Le délégué a encouragé les États Membres à accroître leur soutien aux initiatives promouvant l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes, en particulier dans les situations de conflit et post-conflit.  Il a aussi invité le Conseil à reconnaître l’importance de l’inclusion économique des femmes, de leurs familles et de leurs communautés. Le Conseil devrait par ailleurs renforcer sa coopération dans ce domaine avec la Commission de consolidation de la paix et le Conseil économique et social, ainsi qu’avec les organisations régionales, a souhaité le représentant.  Il a insisté sur le rôle du secteur privé pour accroître la participation économique des femmes dans les contextes de conflit, par le biais notamment d’un démantèlement des entraves systémiques et de la création d’emplois décents.  « Nous devons chaque jour nous rappeler de notre responsabilité de pleinement mettre en œuvre le programme les femmes et la paix et la sécurité. » 

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a d’emblée salué le courage et la résilience des femmes ukrainiennes.  Elle a constaté que dans de nombreux contextes, le rôle des femmes est sous-estimé en raison de la persistance de pratiques discriminatoires, s’inquiétant en outre des répercussions des violences sexuelles et sexistes, des conséquences des changements climatiques, et de la pandémie de COVID-19 en particulier dans les zones touchées par les conflits.  À cet égard, a estimé la représentante, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité constitue une approche holistique avec ses quatre piliers.  Elle a appelé à établir des partenariats avec le secteur privé, la société civile et les femmes journalistes, pour ensuite insister sur l’importance de la parité dans la gouvernance.  La Grèce entend d’ailleurs accélérer la parité dans le pays et a adopté un plan d’action national à cette fin, a-t-elle indiqué. 

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a déclaré que les femmes sont toujours confrontées à des défis qui entravent leur pleine participation à l’économie, notant que le renforcement de leur autonomisation économique entraînerait des avantages directs pour les femmes et leurs communautés.  Il a indiqué que femmes ne représentent que 21% de la population active et 18% du PIB de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord où le taux d’emploi des femmes a chuté en raison de la pandémie de COVID-19.  Le représentant a indiqué que la Jordanie s’est dotée d’un plan d’action économique quinquennal pour les femmes qui vise à accroître leur participation dans la vie active.  La Jordanie a également introduit une série d’amendements à ses lois pour renforcer la participation des femmes à la promotion des politiques sur le travail flexible, tandis que la stratégie nationale des femmes de la Jordanie pour 2020-2025 vise à accroître la participation économique des femmes, y compris les femmes réfugiées. 

M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a dit que la Journée internationale des femmes ne devrait pas être consacrée aux fleurs ni à des conférences sur le sujet, mais à la lutte pour les droits des femmes.  Alors que le monde célèbre cette journée au milieu des souffrances des femmes qui vivent des conflits, le représentant a exprimé sa solidarité avec le peuple ukrainien, qui fait face à des attaques odieuses, non provoquées, de la part de la Fédération de Russie.  « Les civils font face à des bombardements et des millions de personnes doivent fuir les assauts russes », a-t-il dénoncé.  Prenant note de la récente résolution de l’Assemblée générale déplorant l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le représentant de l’Allemagne s’est félicité de l’unité affichée par 141 États Membres qui se sont levés pour défendre la Charte des Nations Unies et l’ordre international fondé sur des règles.  Il a exhorté la Russie à arrêter l’agression et à retirer ses forces. Passant à l’Afghanistan, il s’est dit préoccupé de l’exclusion des femmes sous le régime taliban.  Il a exprimé l’espoir que la Journée internationale puisse être célébrée sans soucis l’année prochaine. 

Mme AYSE INANÇ ÖRNEKOL (Turquie) a dit sa solidarité avec les femmes et filles d’Ukraine qui font preuve de résilience et de courage face à « un acte d’agression injustifié, illégal et illégitime de la part de la Fédération de Russie ».  Elle a relevé que les événements récents en Ukraine ainsi qu’en Afghanistan et dans de nombreux autres endroits du monde montrent l’importance cruciale du programme pour les femmes et la paix et la sécurité dont la mise en œuvre efficace nécessite de se concentrer sur ses quatre piliers: participation; prévention des conflits; protection; secours et relèvement.  L’autonomisation économique est un élément essentiel de la participation pleine et effective des femmes, ainsi qu’un catalyseur pour renforcer la résilience globale de la société, a précisé la représentante.  Au contraire, la discrimination à l’égard des femmes dans le contrôle et l’accès aux ressources économiques, aggravée par le fardeau disproportionné du travail de soins non rémunéré, compromettent la résilience des femmes et des filles dans les situations de conflit et de post-conflit. 

La déléguée a demandé de reconnaître les femmes comme des agents du changement, plutôt que comme des bénéficiaires passives de l’aide.  Elle a recommandé de soutenir les femmes artisanes de la paix, les défenseuses des droits humains et les représentantes de la société civile afin qu’elles puissent s’engager et participer pleinement à tous les aspects de la vie publique et politique.  Elle a assuré que le simple fait d’augmenter le nombre de femmes occupant un emploi rémunéré pourrait faire augmenter considérablement le PIB des pays.  La violence à l’égard des femmes, en revanche, coûte à l’économie mondiale plus de 12 000 milliards de dollars chaque année en raison des pertes de productivité dues au manque de bien-être des femmes.  « Nous sommes heureux de voir que, travaillant en partenariat avec les gouvernements, les agences des Nations Unies et la société civile, un nombre croissant d’entreprises privées investissent dans l’autonomisation des femmes. »  En plus des initiatives nationales d’autonomisation économique des femmes, la Turquie mène des projets en Afghanistan et en Somalie, notamment dans les domaines de l’éducation et des services de santé.  La représentante a également indiqué que la Turquie a été un refuge sûr pour près de 4 millions de Syriens, dont des femmes et des filles.  Nous continuerons à tout mettre en œuvre pour soutenir ces femmes et ces filles et s’assurer de leur bien-être social et économique, a-t-elle assuré. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a souligné la nécessité d’accorder la priorité aux « agents clefs de la paix » : les femmes.  Pour cela les femmes devraient faire partie de tous les efforts de prévention des conflits, de rétablissement et de consolidation de la paix, a-t-il déclaré.  Pendant la reconstruction post-conflit, la participation des femmes doit être assurée dans tous les programmes et activités de secours et de redressement en vue d’assurer leur autonomisation économique et leur inclusion, a plaidé le représentant pour qui les femmes devraient être en première ligne en tant que planificatrices, décideuses et exécutantes dans tous les secteurs de la société.  De plus, selon M. Akram, les partenaires internationaux, y compris les institutions financières internationales et le secteur privé, devraient promouvoir des approches soutenues, sensibles au genre et axées sur la communauté pour veiller à l’inclusion et à la participation économiques des femmes.   Le représentant a ajouté que les pays touchés par des conflits ont besoin d’un accompagnement qui soit sensible à leur culture dans le façonnage de leurs secteurs judiciaire, législatif et administratif pour l’autonomisation des femmes. 

Il est impératif pour le Conseil de relever les défis immédiats posés aux femmes et aux filles dans de nombreuses situations de conflit à travers une approche holistique et de manière efficace et non discriminatoire.  Notant que les situations de conflit en Ukraine ou en Afghanistan où les femmes et les filles sont en danger et leurs droits fondamentaux bafoués font l’objet d’un intérêt certain du Conseil de sécurité, il a regretté que la violence contre les femmes et les filles dans des lieux occupés comme la Palestine et le Jammu-et-Cachemire occupés soit moins visible dans ses débats.  À l’occasion de la Journée internationale de la femme, le Pakistan a donc appelé le Conseil à demander à l’Inde de mettre en œuvre ses résolutions pertinentes en accordant le droit à l’autodétermination aux Cachemiris afin que les millions de femmes cachemiriennes puissent vivre dans la dignité, et sans violence ni abus. 

Mme  ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a soutenu que, face aux défis des crises humanitaires causées par les conflits, les changements climatiques ou encore la pandémie actuelle, les femmes jouent un « rôle indéniable », notamment en matière de promotion du dialogue et de la confiance.  « C’est un fait bien connu qu’encourager les femmes à s’engager dans les processus de paix augmente les possibilités de paix », a-t-elle insisté.  En conséquence, leur participation et leur inclusion dans ces processus augmentent l’efficacité de l’aide humanitaire, améliorent la protection des civils, contribuent au règlement politique des différends et au maintien de la paix à long terme, et accélèrent la reprise économique.  Observant que de nombreuses résolutions de l’ONU soulignent l’importance de l’autonomisation des femmes dans la prévention et, la résolution des conflits, et la stabilisation post-conflit, elle a souhaité que la promotion des droits et de la dignité des femmes fasse partie des conditions préalables pour le développement de toutes les sociétés. 

Dans cet esprit, a poursuivi Mme  Ershadi, l’Iran a toujours considéré la promotion du statut culturel, social, économique et politique des femmes et des filles comme un élément clef de ses politiques, de sa législation et de sa planification.  La déléguée a ainsi fait état de « réalisations remarquables » dans ce domaine, malgré les sanctions américaines « illégales et inhumaines » qui ont eu des effets négatifs sur les programmes du Gouvernement, de la société civile et du secteur privé.  Elle a par ailleurs attiré l’attention du Conseil sur le sort des femmes dans sa « région fragile », qui font face aux effets des conflits armés, de l’extrémisme violent, des agressions étrangères et des attaques terroristes.  Elle a notamment évoqué la situation des femmes et les filles palestiniennes, qui continuent de souffrir de l’occupation et de violations de leurs droits humains.  Elle s’est aussi déclarée inquiète de la situation en Afghanistan, qui a gravement affecté les droits des femmes, y compris leurs droits politiques et socioéconomiques.  Les Taliban devraient, selon elle, tenir compte de l’appel de la communauté internationale à protéger les droits humains, et en particulier les droits des femmes.  Enfin, elle a réaffirmé la position de principe de son pays, selon laquelle les questions concernant les femmes et les filles sont du ressort de l’Assemblée générale, estimant que le Conseil de sécurité ne devrait traiter de cette question qu’en cas de lien direct avec le maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Mme ANNA KARIN ENESTRÖM (Suède), au nom des pays nordiques et des pays baltes a exprimé sa pleine solidarité avec les femmes et les filles en Ukraine, avant de condamner dans les termes les plus forts l’invasion de l’Ukraine par la Russie.  Elle salué le courage et la résilience dont les femmes ukrainiennes font montre dans la réponse politique, militaire et humanitaire.  Elle a exhorté le Conseil à rester concentré sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité lors de l’examen des points inscrits à son ordre du jour, notamment la situation très préoccupante pour les femmes et les filles en Afghanistan.  La protection des femmes ne sera pas possible tant que les législations discriminatoires et les entraves à leur autonomisation économique ne seront pas démantelées, a souligné la représentante qui a appelé à promouvoir des mesures transformatives qui remédient aux structures de pouvoir qui perpétuent l’exclusion des femmes et l’inégalité entre les genres.  La déléguée a aussi insisté sur l’importance du secteur privé dans la pleine mise en œuvre du programme précité.  Les femmes s’autonomiseront d’elles-mêmes dès lors que les obstacles qui les entravent si injustement auront été levés, a conclu la représentante. 

Pour M. ANDRES EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) la résolution 1325 (2000) souligne l’importance de promouvoir la participation des femmes à la paix et à la sécurité et la création d’un environnement propice à cet égard.  Il a appelé à renforcer la capacité des missions de paix à protéger le personnel féminin, à lutter contre l’impunité et à prévenir les violences, demandant en outre à accroître la synergie entre le programme pour les femmes et la paix et la sécurité et les résolutions 2493 (2019) et 2538 (2020). 

Le représentant a ensuite indiqué que dans la zone frontalière entre l’Équateur et la Colombie, son gouvernement a mis en œuvre avec l’appui de l’ONU, des programmes de renforcement des capacités des femmes et des filles pour privilégier une approche préventive.  Le délégué a demandé à financer ces programmes y compris par le biais de partenariats public-privé.  Il a conclu en appelant à la cessation immédiate des hostilités et au rétablissement rapide de la paix, seul moyen, selon lui, de rendre hommage à toutes les femmes et à toutes les filles victimes de l’agression armée contre l’Ukraine. 

Mme MARÍA DEL ROSARIO ESTRADA GIRÓN (Guatemala) a expliqué que la fragilité et l’instabilité qui caractérisent souvent les environnements post-conflit affectent négativement les femmes et les filles, plus vulnérables à la violence et à l’exploitation.  « Lorsque le conflit prend fin, les femmes continuent être exposées à un risque accru d’être victimes de violences sexuelles, d’exploitation et de traite des êtres humains, surtout si elles ont été forcées de migrer en raison du conflit », a indiqué la représentante.  C’est pourquoi, elle a jugé crucial d’adopter une perspective de genre qui intègre les besoins spécifiques des femmes et filles à toutes les étapes des efforts de reconstruction post-conflit afin de réparer le tissu social des sociétés fracturées.  Elle a fait le lien entre développement économique, réduction de la pauvreté et autonomisation des femmes, soulignant que les partenariats sont fondamentaux pour maintenir la paix et sécurité internationales. 

Près de 22 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, la déléguée a constaté que les États ont encore un long chemin à parcourir pour se conformer aux dispositions de cette résolution et des résolutions suivantes sur les femmes, la paix et la sécurité.  Elle a noté que les conséquences de la pandémie de COVID-19 ont apporté des fardeaux supplémentaires pour les femmes et les filles dans les situations post-conflit, mettant l’accent sur la situation particulière des femmes déplacées, migrantes ou réfugiées, s’inquiétant par ailleurs des conséquences de l’agression russe en Ukraine sur la situation des femmes.  Elle a appelé à investir dans l’inclusion économique des femmes par le biais de politiques publiques qui offrent des possibilités de garde d’enfants et améliorent l’accès à l’éducation et aux services tels que l’eau, l’électricité, et les transports, afin que les femmes puissent participer à des activités économiques aux bénéfices considérables. 

Mme MONTSERRAT GONZALEZ CARRILLO (Chili) a présenté son pays comme un leader régional en matière de mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité » puisque le Chili a lancé le premier plan d’action national de la région en 2009 et a été le premier pays à lancer son deuxième plan national en 2015, qui intègre des objectifs mesurables et actualisables en fonction des contextes.  La représentante a jugé important de souligner le travail accompli par la société civile pour renforcer et étendre la mise en œuvre de ce programme.  « Nous avons maintenant la possibilité de préparer un troisième document qui intégrera une perspective holistique et intersectorielle afin de renforcer notre réponse aux défis émergents tels que la crise sanitaire actuelle, les catastrophes naturelles auquel le Chili est si sujet, les conflits sociaux et la plus grande prévalence de la violence sexiste dans tous ces scénarios. » 

Mettant l’accent sur la valeur ajoutée des femmes pour réaliser le maintien et la consolidation de la paix, elle a appelé à investir dans le développement des compétences de médiation et négociation des femmes, la promotion de politiques et de programmes sensibles au genre et des connaissances sur les garanties internationales en matière de droits humains.  L’autonomisation économique des femmes est aussi un facteur important des stratégies de consolidation de la paix à long terme, a-t-elle poursuivi, non seulement pour contribuer à la pérennité des communautés, mais aussi parce que la participation des femmes à l’économie dans les pays fragiles et touchés par des conflits les rend moins vulnérables et donc moins susceptibles d’être victimes de violence.  De même, elle a estimé que la participation des femmes aux économies locales contribue à inverser les causes structurelles des conflits comme la pauvreté, y compris la féminisation de la pauvreté.  Elle a jugé pertinent de promouvoir une approche de construction de la paix à partir des territoires, dans laquelle la paix est comprise non pas comme l’absence de conflit mais comme la création de conditions de base permettant aux sociétés de prospérer dans un état de droit. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République Tchèque) a déploré le sort des femmes et filles ukrainiennes qui souffrent de la guerre.  Il a condamné les informations faisant état de viols d’Ukrainiennes par des soldats russes, avant d’appeler à l’arrêt des combats et de rendre hommage aux Ukrainiennes courageuses qui défendent leurs êtres chers.  Il a également salué le courage des journalistes qui rendent compte du conflit malgré les risques pour leur vie.  La République Tchèque appuie, a-t-il dit, les quatre piliers du programme pour les femmes et la paix et la sécurité. 

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a constaté que les conflits armés font peser un fardeau particulier sur les femmes et les filles et provoquent le recul des acquis en termes d’égalité entre les sexes, et « la guerre en Ukraine ne fait pas exception ».  Garantir la participation pleine, égale et significative des femmes à toutes les étapes de la prise de décision est aussi important pour l’égalité entre les sexes que l’investissement dans des domaines où elles sont notoirement discriminées ou négligées, a estimé la représentante.  À ce titre elle a cité l’accès limité des femmes aux ressources et leurs difficultés financières, arguant que leur exclusion économique est à la fois la cause et la conséquence de l’inégalité entre les sexes.  Les femmes représentent une part disproportionnée de la population mondiale non bancarisée, les inégalités dans l’emploi et les revenus limitant leur capacité à ouvrir des comptes bancaires.  Et dans les situations de conflit, l’autonomisation économique des femmes est encore plus restreinte. 

La représentante a ensuite fait savoir que le Liechtenstein s’est associé au secteur privé dans le but de lutter contre l’esclavage moderne et la traite et atteindre les objectifs de développement durable.  Un partenariat avec d’autres gouvernements, le secteur privé et l’Université des Nations Unies, a débouché sur la création de Finance Against Slavery and Trafficking Initiative qui a pour vocation d’inciter le secteur financier à lutter contre la traite et l’esclavage, notamment en améliorant l’inclusion financière des femmes et des filles.  Elle a invité tous les États Membres, le système des Nations Unies, les institutions financières internationales et les acteurs financiers à se joindre à cet effort. 

« Cette Journée internationale des femmes n’est pas un moment de fête », a déclaré M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE), qui a appelé les États Membres à réaffirmer leur plein soutien à l’Ukraine et à son peuple, en particulier aux femmes ukrainiennes qui font preuve de résilience et de courage dans ce « conflit non provoqué ».  Rappelant à cet égard que les femmes et les filles sont particulièrement touchées par les conflits et les déplacements, et qu’elles font face à un risque accru de violence, notamment sexuelle et sexiste, il s’est dit consterné par les informations faisant état de viols massifs perpétrés par les forces armées russes.  Il a également condamné les attaques de la Russie contre des installations civiles, notamment les hôpitaux, qui privent les Ukrainiens de l’accès aux services de santé essentiels, y compris les services de santé sexuelle et reproductive.  Le représentant a également rendu hommage aux femmes qui, dans de nombreuses villes russes, manifestent pour la paix au péril de leur liberté.  « Nous sommes à vos côtés, vous soutenons et vous remercions pour votre mobilisation dans un contexte difficile et dangereux. »

Le représentant a ensuite indiqué que l’UE reste particulièrement préoccupée par la situation des femmes et des filles en Afghanistan.  Depuis août 2021, leurs droits connaissent un recul brutal, a-t-il constaté, avant de dénoncer l’exclusion des femmes de la vie publique afghane et les restrictions qui leur sont imposées en matière d’éducation, de déplacements et d’accès aux services de santé, à l’emploi et aux responsabilités politiques.  L’UE demande que la participation pleine, égale et significative des femmes et des filles soient garanties dans la société afghane, a-t-il souligné, en se félicitant du lancement récent du cadre d’engagement transitoire de l’ONU, qui envisage, entre autres mesures, un financement immédiat des services sociaux comme la santé et l’éducation.  Il a ajouté que, le 10 mars, l’UE accueillera un forum de dirigeantes afghanes à Bruxelles afin de veiller à ce que les femmes afghanes soient associées aux efforts de dialogue politique dans leur pays. 

Ces développements récents confirment, selon lui, l’importance de placer le programme pour les  femmes et la paix et la sécurité au centre de tous les efforts, notamment dans le cadre du Conseil de sécurité.  Nous savons que les inégalités, perpétuées et renforcées par l’exclusion des femmes et des filles de la prise de décision, des opportunités, des services et de la sécurité, sont des « moteurs de conflit » et peuvent conduire, entre autres, à un risque accru de violence sexuelle et sexiste.  Nous savons également que la promotion de l’autonomisation économique de toutes les femmes et les filles est un moyen de renforcer la résilience sociétale globale, qui à son tour est essentielle à la prévention, à la résolution des conflits et à la consolidation de la paix à long terme, ainsi qu’à la réponse aux effets des crises, y compris la crise climatique.  C’est pourquoi, a-t-il dit, la promotion des droits économiques des femmes et de la justice économique est au centre des efforts de l’UE en faveur de l’égalité des sexes.  Enfin, jugeant inacceptable que des femmes dirigeantes de la société civile, des artisanes de la paix et des défenseuses des droits humains ainsi que les femmes journalistes continuent de faire l’objet de menaces et de représailles sexospécifiques, il a pressé le Conseil de sécurité à mettre en place un mécanisme efficace de protection de ses informateurs de la société civile. 

Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a déploré les entraves à la pleine participation des femmes dans les contextes de conflit et souhaité que les processus de paix remédient à ces difficultés.  Elle a aussi appelé à assurer l’autonomisation des femmes grâce à une promotion de leurs droits.  Les femmes doivent être encouragées à jouer un rôle de chef de file, a-t-elle insisté., exhortant à lutter contre les normes sociales qui entravent une pleine participation des femmes.  La représentante a aussi mentionné le sort des femmes en Ukraine, dont les souffrances s’ajoutent à celles éprouvées par les femmes au Yémen ou encore en Afghanistan.  Notant que les femmes et les filles sont toujours les plus touchées lors des conflits, elle a appelé la Russie à cesser les hostilités, à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Charte. 

Dénonçant les nombreuses restrictions qui sont imposées aux femmes et aux filles à travers le monde, M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a voulu que l’on lutte contre l’impunité dont bénéficient ceux qui les imposent.  Le représentant a souligné l’importance de la prévention et de l’établissement des responsabilités, avant de saluer les femmes et les filles d’Ukraine, du Yémen, d’Afghanistan et du Myanmar.  Défenseur acharné de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes, il a souligné que cette autonomisation est un moteur pour le développement et l’égalité des revenus, dans laquelle l’éducation joue un rôle essentiel.  L’autonomisation des femmes est également un moteur pour une contribution des femmes plus à la paix et à la sécurité, a aussi souligné le représentant. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a considéré que les femmes sont des artisanes de paix, et que leur émancipation et leur autonomisation constituent un véritable investissement dans l’avenir et la stabilité des sociétés.  Il reste, a-t-il avoué, beaucoup à faire pour que les femmes puissent pleinement réaliser leur potentiel de transformation sociale et communautaire, compte tenu des inégalités persistantes.  Aussi le représentant a-t-il préconisé de promouvoir l’éducation et la formation professionnelle des femmes et leur garantir l’accès aux financements.  Leur intégration économique passe également par des partenariats public-privé, a-t-il souligné, avant de recommander le renforcement des alliances avec les institutions financières internationales. 

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a fait part de la volonté de son pays d’investir dans la participation des femmes dans tous les secteurs de la société, précisant ensuite que l’assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine a décidé, en janvier 2020, de consacrer la décennie 2020-2030 à l’inclusion économique des femmes africaines.  Elle a appuyé les partenariats entre l’ONU et l’UA pour promouvoir l’autonomisation des femmes et la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité du Conseil de sécurité.  La représentante a également appelé à renforcer les mandats des Nations Unies et des missions de maintien de la paix en matière d’autonomisation des femmes.  En tant que membre de la Commission de consolidation de la paix (CCP), l’Afrique du Sud souhaite renforcer le rôle du secteur privé dans la consolidation de la paix, a indiqué la déléguée pour qui les partenariats public privé doivent être l’occasion de promouvoir des politiques sexospécifiques. 

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a salué le courage des femmes ukrainiennes et a condamné « l’aveuglement » de la Fédération de Russie. Plus d’un million de personnes ont déjà franchi la frontière polonaise, en provenance d’Ukraine dans ce qui risque d’être la plus grande crise humanitaire du siècle, en Europe, a prévenu le représentant. Il a également déploré les violations des droits des Afghanes, depuis l’an dernier, avant de rappeler que son pays est membre du Groupe des Amis des femmes afghanes.  Il a appelé à des partenariats robustes avec le secteur privé et les organisations locales de femmes dans les zones de conflit.  Il a aussi appelé les femmes russes à s’impliquer pour mettre fin à la guerre, en plaidant auprès de leur mari et de leurs fils. C’est d’ailleurs, a indiqué le représentant, l’objectif de « #femme russe, mets fin à la guerre », une campagne sur les réseaux sociaux. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a remarqué que bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans l’exécution du programme pour les femmes et la paix et la sécurité au cours de ses 22 années, le maillon manquant reste le lien concret et tangible entre les entreprises publiques et privées, en particulier celles qui travaillent dans des environnements de conflit et de post-conflit.  À ses yeux il y a deux mondes cloisonnés: d’un côté celui des entreprises qui adoptent de plus en plus une politique d’emploi sous l’angle du genre et s’engagent en faveur de l’égalité hommes-femmes, et de l’autre le monde où l’ONU et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité soutiennent des initiatives d’entreprises telles que « Business for Peace » et le « Pacte mondial des Nations Unies ».  Il a relevé que selon le rapport sur l’écart entre les sexes publié par le Forum économique mondial, les entreprises fondées par des femmes génèrent des revenus plus élevés -plus de deux fois plus par dollar investi-que les entreprises dirigées par des hommes.  Il y est aussi dit que combler l’écart entre les sexes ajouterait plus de 4 milliards de dollars au PIB mondial.  Dès lors, le représentant a estimé que ces chiffres plaident en faveur de la participation et de l’inclusion des femmes dans les entreprises, en particulier dans les zones de conflit. 

Le délégué a également noté que malgré les progrès importants réalisés depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), la participation et la représentation directes des femmes dans les processus de paix formels reste le seul domaine qui accuse un retard.  Entre 1992 et 2019, les femmes n’ont représenté que 6% des médiateurs, 6% des signataires et 13% des négociateurs des processus de paix dans le monde, a-t-il regretté.  Pourtant, l’absence de femmes aux tables de négociation minimise la possibilité de politiques justes et inclusives.  Or, lorsqu’elles sont présentes et participent aux négociations formelles et moins formelles, elles permettent d’aborder les problèmes de manière différentes y compris les approches du règlement des conflits, a-t-il fait valoir. 

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a appelé la communauté internationale à ne pas revenir en arrière s’agissant des acquis pour les droits des femmes.  Si beaucoup a été fait en la matière ces dernières décennies, de nombreux jalons n’ont pas encore été mis en œuvre, a observé le représentant, qui a encouragé le Conseil de sécurité à honorer ses engagements et à appuyer les initiatives de coopération.  Rappelant d’autre part que le programme pour les femmes et la paix et la sécurité  est multidimensionnel et interdisciplinaire, il a estimé que le Conseil ne peut être la seule enceinte onusienne où ces questions sont traitées.  Selon lui, des contributions importantes émanent d’autres organes des Nations Unies, notamment en ce qui concerne l’inclusivité économique et les partenariats public-privé.  Il a également plaidé pour un renforcement du rôle des femmes au sein des missions de maintien de la paix de l’ONU, conformément aux dispositions de la résolution 2538 (2020) portée par la diplomatie indonésienne.  À cet égard, le délégué a insisté sur la nécessité d’un cadre institutionnalisé pour les femmes Casques bleus.  Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à travailler davantage avec les réseaux nationaux et régionaux de femmes négociatrices et médiatrices, attirant l’attention sur les capacités du réseau en place en Asie du Sud-Est. 

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a indiqué que les femmes souffrent en Ukraine, qui est le théâtre d’attaques indiscriminées, relevant que la plupart des deux millions de réfugiés en Ukraine sont des femmes.  Il a condamné l’agression de l’Ukraine par la Russie, ainsi que les attaques conduites contre les civils le long des couloirs humanitaires.  Il a constaté la poursuite en Ukraine des tendances déjà observées en Géorgie, avant de se dire « atterré » par la situation humanitaire en Ukraine ainsi que par les violations massives des droits humains. Il a ensuite rappelé que deux régions géorgiennes sont occupées par la Russie et que les femmes dans ces régions continuent de souffrir de graves violations. Enfin, le délégué a demandé à la Russie de se retirer de l’Ukraine et de respecter la pleine souveraineté de l’Ukraine, ainsi que de la Géorgie. 

M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a souligné que l’autonomisation des femmes et la promotion de l’égalité des sexes dans les situations fragiles, de conflits et vulnérables peuvent transformer les cercles vicieux en cercles vertueux qui conduiront à la paix et au développement durable.  La participation économique, le développement socioéconomique et l’autonomisation durable des femmes dans les situations de conflit doivent être renforcés, a insisté le délégué pour qui le développement économique et humanitaire de chaque segment de la société devrait aller de pair pour prévenir la fragilité et l’instabilité.  À cet égard, les collaborations entre les États Membres, les agences des Nations Unies, les ONG et les organisations des jeunes et le secteur privé doivent prendre en considération le contexte local et culturel ainsi que les priorités et les politiques nationales, a-t-il estimé. 

Le représentant a indiqué que la Malaisie continue de fournir une aide financière à ONU-Femmes et qu’au niveau régional, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) est en train d’élaborer le plan régional d’action pour les femmes, la paix et la sécurité.  La Malaisie prépare également son plan d’action national sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Le délégué a ensuite appelé à nommer plus de femmes médiatrices et d’envoyées spéciales dans les pays ou les régions en conflits, soulignant que l’inclusion et la participation des femmes sont essentielles pour prévenir et répondre aux conflits et à consolider la paix. 

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a déclaré que la situation des femmes en Ukraine, en Afghanistan, en Syrie, au Yémen, en Libye ou en Éthiopie rappelle la nécessité de donner pleinement effet au programme pour les femmes et la paix et la sécurité, ainsi qu’à la résolution 1325  (2000).  Il a indiqué que l’Italie se trouve d’ailleurs dans la phase de mise en œuvre de son quatrième plan d’action national sur la question, pour la période 2020-2024, et participe à l’initiative du Réseau des femmes médiatrices de la Méditerranée, qui regroupe désormais 61  femmes compétentes issues de de 21  pays de la sous-région.  En outre, il est nécessaire de renforcer la contribution de la société civile et du secteur privé, a estimé le représentant, en encourageant les initiatives multipartites comme le Forum Génération Égalité et son Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire. 

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est félicité de la participation accrue des femmes dans tous les domaines de la prévention des conflits à la consolidation de la paix 21  ans après l’adoption du programme pour les femmes et la paix et la sécurité par le Conseil de sécurité.  Néanmoins, il a noté que les femmes continuent de faire face à de nombreux défis en soulignant qu’elles ont été particulièrement affectées par les conséquences de la pandémie de COVID-19, en particulier dans les régions touchées par des conflits.  Le représentant a dit que le rôle des femmes reste essentiel pour assurer la prospérité, la stabilité économique à long terme et la croissance de toutes les nations.  Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à encourager le renforcement des capacités des femmes aux niveaux local, national et international afin de contribuer à assurer une consolidation de la paix et une autonomisation économique des femmes en ligne avec la résolution 1889  (2009) du Conseil de sécurité.  Il a jugé important de consacrer un minimum de 15% de l’aide publique au développement (APD) à la promotion de l’égalité des genres dans les pays touchés par des conflits. 

Après avoir mis l’accent sur la valeur ajoutée des partenariats entre l’ONU, les États Membres et les acteurs non gouvernementaux en matière d’autonomisation des femmes, le représentant a demandé que les mandats des missions de l’ONU appuient la participation des femmes dans les activités de consolidation de la paix et reconstruction post-conflit.  Le représentant a indiqué que la mise en œuvre du programme pour « les femmes et la paix et la sécurité » est une priorité du Viet Nam, qui continuera d’être un fier partenaire de la communauté internationale pour l’inclusion économique et l’autonomisation des femmes. 

M.  SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a rappelé que les femmes sont des actrices actives dans les processus de paix.  Elles doivent donc être incluses dans la prise de décision à tous les niveaux et ce, à participation égale.  Soulignant que les femmes Casques bleus ont largement contribué au succès aux opérations de maintien de la paix, il a attribué ce fait à leur faculté d’accéder aux communautés, dans une relation de confiance, ce qui est « un atout précieux ».  Le délégué a insisté sur le caractère « crucial » des partenariats pour faire avancer le programme pour les « femmes et la, paix et la sécurité ».  Il a appelé au renforcement de ces partenariats au sein du système des Nations Unies mais aussi avec les organisations régionales et autres parties prenantes, y compris la société civile et le secteur privé. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a relevé que la pandémie a exacerbé les contraintes financières qui entravent la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et souligné que le secteur privé peut contribuer à la construction de la paix, notamment en termes d’investissement et de création d’entreprises dirigées par des femmes et d’emplois pour les femmes.  Deux décennies et 10 résolutions plus tard, « nous n’avons pas suffisamment exploré le rôle du secteur privé dans ce programme », a-t-elle regretté en plaidant pour plus de partenariats public-privé dans le contexte du relèvement post-conflit des communautés locales, mais aussi pour créer un environnement commercial stable, autonomiser les femmes et encourager leur participation politique.  Les efforts actuels dans ce domaine sont dispersés et ne parviennent pas à maximiser ce potentiel, a-t-elle déploré. 

La représentante a également mis en exergue la question du veuvage qui concerne 50% de la population féminine dans les contextes post-conflit, et qui n’est pas explicitement mentionné dans les résolutions sur les femmes, la paix et la sécurité.  L’inclusion économique des veuves est à la fois un rempart contre la montée des inégalités, a-t-elle dit, mais s’inscrit aussi dans le respect et à la protection proactive de leurs droits humains.  Elle a ensuite encouragé le Conseil de sécurité et les États Membres à diversifier leurs partenariats, en orientant leur soutien financier vers des organisations non gouvernementales qui ont une expertise thématique et peuvent avoir un fort impact grâce à leur investissement économique et social.  Mme Chan Valverde a également insisté sur l’importance de reconnaître, réduire et redistribuer le travail et les soins non rémunérés et l’impératif d’éradiquer la stigmatisation du travail informel.  Notant que cela suppose des investissements des secteurs public et privé, elle a demandé aux États, au secteur privé et à la société civile de soutenir et de reconnaître les organisations de travailleurs informels, telles que les coopératives et les associations bénévoles, et d’améliorer les données et les analyses sur les questions qui revêtent une importance particulière pour l’autonomisation économique des femmes, tels que le travail non rémunéré, le travail informel, le travail à temps partiel et le travail domestique. 

Mme ALYA AHMED S. AL-THANI (Qatar) a rappelé qu’il y a 22 ans, la résolution 1325 du Conseil de sécurité avait souligné le lien essentiel entre l'égalité des sexes, la paix et la sécurité.  Depuis, le Programme 2030 a confirmé le caractère central de l’égalité des sexes et de la nécessité d’intensifier les efforts d’autonomisation économique des femmes, qui contribuent à la stabilité et à la prospérité mondiales, a-t-elle relevé avant d’assurer que le Qatar s’emploie à accroître la participation des femmes à la population active.  « Quand plus de femmes travaillent, notre économie grandit », a-t-elle résumé, avant de réaffirmer l’engagement de son pays en faveur de la participation des femmes aux processus de paix et de sécurité.  La déléguée a noté à cet égard qu’en janvier dernier, le Qatar a coorganisé avec la Finlande, la Colombie et l’ONU, la Conférence mondiale de haut niveau sur les processus de paix inclusifs pour les jeunes pendant laquelle les participants ont souligné la nécessité d’investir dans les efforts des jeunes femmes artisanes de la paix. 

La représentante a ensuite mis l’accent sur les partenariats, précisant que son pays finance plusieurs agences et départements des Nations Unies impliqués dans la mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité ».  En outre, a-t-elle ajouté, le Fonds du Qatar pour le développement donne la priorité à l’autonomisation économique des femmes et des filles dans les situations de conflit et post-conflit, notamment en œuvrant avec des partenaires stratégiques et à la participation des femmes aux activités économiques à grande et à petite échelle, en accompagnant les institutions de microfinance, en augmentant les opportunités d’emploi pour les femmes déplacées, en améliorant les services éducatifs et sociaux dans les camps de réfugiés et en mettant en place des modèles économiques localisés générateurs de revenus pour endiguer la pauvreté.  Ce même fonds et le Fonds digital citoyen, a encore indiqué Mme Al-Thani, ont signé en avril 2021 une convention de subvention pour un projet de formation de femmes afghanes axé sur l’expertise numérique, tandis que la Fondation Silatech, basée au Qatar, soutient les jeunes femmes en situation de conflit ou post-conflit en leur proposant une orientation professionnelle. 

Mme ZAHRAA M. SALIH MAHDI NASSRULLAH (Iraq) a souligné le rôle crucial joué par les femmes iraquiennes dans le relèvement de son pays.  Elle a ensuite énuméré les « prouesses » accomplies par les autorités iraquiennes afin d’accroître la participation des femmes à la vie politique, économique et sociale de l’Iraq.  Le Parlement iraquien compte 96 femmes, a-t-elle notamment déclaré.  Elle a aussi mentionné l’étroite association des femmes aux processus de consolidation de la paix, ainsi que les prêts à taux avantageux réservés aux femmes entrepreneuses. Enfin, la déléguée a insisté sur l’importance du rôle d’ONU-Femmes et appuyé tous les efforts pour une plus grande inclusion économique des femmes. 

Mme  AMAL MUDALLALI (Liban) a considéré que le Conseil de sécurité se réunit aujourd’hui à un moment particulièrement délicat où les femmes, la paix et la sécurité sont mises à rude épreuve par les guerres qui font rage de part et d’autre.  Or, malheureusement, femmes et enfants sont souvent ceux qui paient le coût le plus élevé des situations de conflit.  La représentante a fait observer qu’entre 1992 et 2019, les femmes représentaient en moyenne à peine 13% des négociateurs, 6% des médiateurs et 6% des signataires des accords de paix à travers le monde.  En 2021, le nombre de femmes parlementaires ne s’est accru que de 0,6%, passant à 26,1%, un progrès modeste, qui remet en mémoire la conclusion de la dernière édition du rapport sur les disparités entre les sexes.  À ce rythme, soulignait le rapport, il faudra 135,6 ans pour surmonter le fossé existant au niveau international.  La représentante a réclamé une place pour les femmes à la table des négociations de la prochaine Conférence d’examen des parties au Traité sur la non-prolifération, qui se tiendra en août.  Les femmes doivent pouvoir pleinement jouer leur rôle dans les questions de désarmement et dans la « diplomatie nucléaire ». 

M. MARTIN JUAN MAINERO (Argentine) a déclaré que la Journée internationale des femmes est une occasion de dresser le bilan de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Il a rappelé qu’une étude menée en 2015 a fait ressortir que le manque de ressources freine la participation des femmes à la consolidation et au maintien de la paix.  De plus, les nombreuses activités non rémunérées auxquelles s’adonnent les femmes limitent le renforcement de leurs capacités et les empêche de tirer pleinement parti des opportunités d’emploi et des services sociaux. 

M. Mainero a regretté que les femmes restent largement absentes des organes de prise de décision et des processus de paix dans leurs pays et communautés.  Dans ce contexte, il a recommandé que les processus de paix et de reconstruction qui incluent des dispositions spécifiques sur le genre se traduisent par des programmes concrets et des réformes tangibles.  Il a également déploré que peu d’États donateurs se sont engagés à consacrer 15% de leur financement des activités de consolidation de la paix de l’ONU au genre, les exhortant à le faire. 

M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a plaidé pour que, dans l’esprit de la résolution 1325, on poursuive les efforts pour assurer l’inclusion systématique des femmes dans les négociations de paix, le maintien de la paix, la consolidation de la paix et le processus de reconstruction post-conflit en vue de parvenir à une paix durable.  Il a expliqué qu’en tant que pays sortant d’un conflit, et au cours des années qui ont suivi la signature de l’Accord de paix global en 2006, le Népal a opéré une transformation historique en garantissant la participation des femmes à l’architecture de la gouvernance et leur autonomisation économique par le biais de dispositions constitutionnelles et juridiques pertinentes.  La Constitution du Népal garantit 33% des sièges aux parlements fédéral et provincial et 40% des sièges du gouvernement local aux femmes représentantes.  Des incitations ciblées ont également été mises en place, comme des prêts gratuits ou à faible taux d’intérêt pour les femmes entrepreneurs afin de les autonomiser économiquement, a précisé M. Rai.  Il a également rappelé que le Népal, en 2011, a été le premier pays d’Asie du Sud et le deuxième d’Asie à adopter son Plan d’action national pour la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820 du Conseil.  La participation des femmes à la prise de décision, au leadership politique, à la paix et à la sécurité, l’accès aux ressources et la création d’emplois figuraient parmi les principales priorités du premier Plan d’action, a précisé le représentant alors que le deuxième met l’accent sur les questions de justice pour les femmes et les filles touchées par le conflit, l’amélioration de leurs moyens de subsistance et la sécurité des femmes et des enfants. 

Mme  NATALIIA MUDRENKO (Ukraine) a souscrit à la déclaration de l’Union européenne, avant de rappeler que son pays siégeait au Conseil de sécurité lorsque la résolution 1325  (2000) a été adoptée.  Même dans le contexte actuel de guerre, l’Ukraine, a-t-elle affirmé, reste engagée à promouvoir le programme pour les  « femmes et la, paix et la sécurité ».  La représentante a fait état de progrès significatifs en la matière, au fil des ans, grâce aux partenariats entre le Gouvernement et la société civile.  Mais, a-t-elle accusé, l’invasion « scandaleuse » de la Fédération de Russie, y compris à partir du Bélarus, a bouleversé nos vies et les femmes font désormais partie des groupes vulnérables.  Elle a rappelé que plus de deux millions personnes ont déjà fui à l’étranger et que, chaque jour, des femmes et des enfants meurent sous les balles et les abus de l’armée russe. 

Depuis le début de cette agression, plusieurs dizaines d’enfants ont perdu la vie, a insisté la déléguée, selon laquelle la situation dans des villes comme Marioupol, Mykolaïv ou encore Butcha, près de Kiev, devrait faire l’objet de mesures immédiates des dirigeants du monde, de l’ONU et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  On interdit aux habitants de partir et à l’aide humanitaire d’entrer, a-t-elle dénoncé, ajoutant que « si les gens partent, les Russes les tuent ».  Les accords sur les « couloirs humanitaires », a-t-elle poursuivi, sont sapés par les militaires russes, qui placent des mines sur les itinéraires convenus.  « Justice sera rendue tôt ou tard pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité perpétrés en Ukraine », a-t-elle promis. 

Alertant par ailleurs sur le manque cruel d’eau dans de nombreuses localités, la représentante a indiqué qu’une fillette est morte hier de déshydratation après que sa mère a été tuée par des obus.  Elle a aussi fait état de cas de violences sexuelles commises par l’occupant russe.  Dans ce contexte de conflit, la représentante a appelé à l’intégration économique des femmes ukrainiennes forcées de fuir leurs maisons et leur patrie.  Elle a aussi appelé à une aide juridique pour permettre aux réfugiées de bénéficier d’une protection sociale.  La guerre, a-t-elle souligné, a mis en exergue le rôle des femmes dans la défense du pays.  Beaucoup d’entre elles rejoignent aujourd’hui l’armée nationale et les forces de défense territoriales.  En  2020, l’on comptait quelque 57  000 femmes dans l’armée ukrainienne, soit 22,8% des effectifs, et aujourd’hui « ce chiffre est nettement plus élevé ».  Ces femmes, s’est enorgueillie la représentante, prouvent qu’elles n’ont pas peur de prendre les armes pour défendre leurs enfants et leur terre » et « ce n’était pas le cas avant que les Russes veuillent les priver de leur avenir ». 

M. FRANCOIS JACKMAN (Barbade), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a indiqué que, dans sa région, les femmes jouent un rôle de chef de file dans la réponse à l’insécurité écologique, environnementale, climatique, sanitaire et économique.  Mais nous sommes à un point de bascule, tant les gains de l’égalité des sexes sont sapés, a prévenu le représentant, en appelant à promouvoir les principes du programme « Les femmes et la paix et la sécurité ».  Il faut, a-t-il insisté, poursuivre en justice les responsables de violences à l’encontre des femmes et apporter aux victimes un soutien financier et psycho-social.  Comme la violence à l’égard des femmes ne cesse de s’aggraver, il est essentiel, a estimé, M. Jackman, de renforcer la participation féminine dans tous les efforts de maintien et de consolidation de la paix.  Il a conclu, en pressant la communauté internationale d’accorder une attention accrue à la pleine mise en œuvre du programme « Les femmes et la paix et la sécurité ». 

Mme GABRIELA LILIÁN GONZÁLEZ HERNÁNDEZ (Uruguay) a souligné que l’autonomisation économique des femmes est confrontée à des obstacles persistants, en particulier en temps de crise.  Les écarts entre les sexes s’agissant des emplois, de l’intégration financière, de l’impact de la pandémie de COVID-19 ou encore de l’accès à l’éducation rendent encore plus difficile la participation des femmes, en particulier celles des communautés locales, aux processus de paix.  La représentante a annoncé que son pays lancera, au mois d’avril prochain, son premier Plan d’action « Les femmes et la paix et la sécurité ».  L’année dernière, l’Uruguay avait déjà donné le coup d’envoi, avec l’Argentine, le Brésil, le Chili et le Paraguay, du Réseau régional de médiateurs de l’hémisphère Sud pour promouvoir une plus grande participation des femmes aux négociation de paix et à la médiation, dans les situations humanitaires, de conflit ou post-conflit. 

L’Uruguay, s’est enorgueilli la représentante, a également mis en place une politique pour ouvrir aux femmes l’accès à l’armée et à la police nationales ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Elle a souligné l’attachement de son pays à la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), au renforcement des droits des femmes et des filles, à l’élimination des obstacles structurels qui empêchent leur égale participation égale à la vie publique et à l’autonomisation des femmes, en tant qu’agent d’un changement « essentiel » pour parvenir au développement et à une paix durables. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a plaidé en faveur de partenariats renforcés à tous les niveaux pour promouvoir le rôle des femmes dans la prévention et la résolution des conflits, sur un pied d’égalité, et surtout au moment de la conclusion des accords de paix.  Même si les femmes chefs de file ont fait la preuve de leurs talents à maintes reprises, elles continuent d’être tenue en marge des processus de paix et de transition, a regretté le représentant.  Il a par ailleurs vivement encouragé tous les États Membres à combattre l’impunité et à traduire en justice les responsables des violences à l’égard des femmes; l’établissement des responsabilités étant la condition sine qua non d’une paix durable.  Le représentant a indiqué que son gouvernement a fait de ses politiques en matière de sécurité un domaine prioritaire dans lequel les femmes peuvent faire entendre leur voix.  Il a en conclusion réitéré son soutien à tous les efforts internationaux déployés pour promouvoir la participation des femmes dans les domaines humanitaire et du développement. 

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh)a déclaré que la parité entre les genres constitue une condition sine qua non de la consolidation de la paix et affirmé, dans ce cadre, que son pays n’a jamais cessé de promouvoir le programme « Les femmes et la paix et la sécurité ».  Le Bangladesh, a-t-il dit, a toujours promu l’émancipation des femmes et leur autonomisation économique.  Il a cité les lois sur la promotion de la femme et sur la discrimination positive, avant de mentionner des initiatives visant à faciliter l’émergence de femmes entrepreneures.  Aujourd’hui, a-t-il conseillé, il faut tenir compte du fait que la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques ont touché les femmes de manière disproportionnée.  En tant que pays vulnérable à ces changements, le Bangladesh a vécu des déplacements de population et insiste aujourd’hui sur des investissements massifs dans la résilience des femmes. 

Reprenant la parole, la représentante de l’Inde a tenu à préciser que le Jammu-et-Cachemire fera toujours partie intégrante du territoire indien et ce, quelles que soient les convictions du Pakistan. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Coordonnateur des secours d’urgence enjoint les parties au conflit en Ukraine à épargner les civils et à garantir l’arrivée de l’aide

8988e séance, après-midi
CS/14823

Conseil de sécurité: le Coordonnateur des secours d’urgence enjoint les parties au conflit en Ukraine à épargner les civils et à garantir l’arrivée de l’aide

Pour la deuxième fois en l’espace d’une semaine, le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, pour examiner la situation humanitaire résultant de 12 jours de conflit armé en Ukraine.  Face à cette « escalade de la violence, de la peur et de la douleur », le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a fait le point sur le dispositif d’urgence mis en place par les Nations Unies, tout en appelant les belligérants à épargner les civils et à garantir l’acheminement de l’aide.  Un appel partiellement entendu par les délégations russe et ukrainienne, qui se sont mutuellement accusées de l’échec patent de l’ouverture de « couloirs humanitaires ».

« Nous n’avions pas besoin d’une autre guerre, avec des conséquences aussi rapides et un impact aussi considérable », a déploré M. Martin Griffiths dans son exposé au Conseil, rappelant qu’au 6 mars, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme faisait état de 1 207 victimes civiles, dont au moins 406 morts.  Un chiffre vraisemblablement sous-évalué, alors que le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) rapporte que plus de 1,7 million de personnes ont déjà fui le pays. 

Sous la direction du Coordonnateur des Nations Unies pour la crise dans le pays, M. Amin Awad, l’ONU a élaboré de nouveaux plans de livraison dans les zones où les besoins humanitaires sont les plus aigus, notamment à Marioupol, Kharkiv et Kherson, et ce, en renforçant la réponse à partir des centres de Vinnutsya, Uzhorod et Lviv, a expliqué le Coordonnateur des secours d’urgence.  Dans le même temps, a-t-il précisé, le Programme alimentaire mondial (PAM) a mis en place des chaînes d’approvisionnement visant à fournir une aide immédiate en nourriture et en espèces à 3,5 millions de personnes à l’intérieur de l’Ukraine, tandis que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) expédiait du matériel médical d’urgence et le HCR des produits de première nécessité. 

Pour M. Griffiths, trois « priorités immédiates » s’imposent, la première étant la protection des civils, qui doivent pouvoir quitter en toute sécurité les zones d’hostilités dans la direction de leur choix.  Il a demandé en deuxième lieu aux belligérants de garantir un passage sûr pour les fournitures humanitaires, conformément à leurs obligations prévues par les « lois de la guerre », avant d’appeler de ses vœux la mise en place d’un système de communication constante avec les parties au conflit.  Affirmant avoir transmis ces trois points à l’Ukraine et à la Fédération de Russie, il a indiqué que son bureau avait envoyé une équipe à Moscou pour travailler à une meilleure coordination humanitaire. 

À sa suite, la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a constaté que la menace pesant sur les 7,5 millions d’enfants ukrainiens ne cesse de s’accroître, après huit années de conflit en Ukraine qui leur ont déjà infligé des dégâts profonds et durables.  « Pour beaucoup, la vie se passe désormais sous terre, dans des refuges, des stations de métro ou des sous-sols, des heures durant », a relaté Mme Catherine Russell, selon laquelle le personnel de l’agence et de ses partenaires locaux travaille 24 heures sur 24, souvent dans des conditions de sécurité difficiles, pour acheminer par camion de l’eau potable, fournir des services médicaux d’urgence et offrir un abri et une protection aux personnes déplacées. 

En Ukraine même, l’UNICEF est très préoccupé par la sécurité et le bien-être de près de 100 000 enfants, dont la moitié sont handicapés, qui vivent dans des institutions et des pensionnats, a alerté Mme Russell.  Alors que nombre de ces enfants sont aujourd’hui transférés dans des pays voisins, elle a souhaité que leurs parents ou tuteurs légaux soient contactés.  Elle a d’autre part mis en garde contre les risques qu’encourent les enfants à cause des mines terrestres et restes explosifs de guerre, rejointe notamment par la Norvège. 

Après avoir conseillé à l’UNICEF d’agir de manière « impartiale », la Fédération de Russie a une nouvelle fois accusé les « nazis et extrémistes ukrainiens » de prendre en otage la population, imputant l’échec des couloirs humanitaires à des « bataillons nationalistes » qui ont reçu l’ordre de « tirer dans les jambes des civils qui veulent fuir ».  Si les Ukrainiens jugent « inacceptables » les couloirs envisagés par la Russie, c’est parce qu’ils ont peur que les réfugiés disent la vérité sur la violence des « radicaux », a-t-elle renchéri, avant d’annoncer des cessez-le-feu locaux à partir de demain matin, le 8 mars, ainsi que des couloirs humanitaires pour évacuer les civils de Kiev, Soumy, Kharkov, ou encore Marioupol.

Balayant ces accusations dans un échange acrimonieux, l’Ukraine a, à son tour, accusé l’armée russe d’empêcher les évacuations de civils, notamment à Kharkiv, Donetsk et dans la région de Kherson, ainsi que l’acheminement de l’aide humanitaire par les organisations internationales.  Une aide entravée également par les frappes de missiles qui détruisent des infrastructures essentielles, a-t-elle ajouté, appuyée par les États-Unis, qui ont appelé la Russie à consentir à l’ouverture de couloirs humanitaires et à accepter la proposition ukrainienne en faveur d’une circulation en toute sécurité des biens humanitaires. 

Prudente, la Chine a recommandé aux parties de faire preuve de « bon sens » au lieu d’ajouter « de l’huile sur le feu ».  Elle a jugé important de s’en tenir au dialogue, aux négociations et à toute mesure susceptible d’apaiser la situation, en prenant en compte la « problématique » de l’expansion vers l’est de l’OTAN.  L’Inde a réitéré son appel à un passage sûr et ininterrompu pour tous les civils innocents, « y compris les ressortissants indiens restés en Ukraine ». 

Face à ce « drame humanitaire », la France a rappelé qu’elle porte avec le Mexique un projet de résolution qui demande de garantir la protection des civils et l’accès humanitaire sur tout le territoire ukrainien, « tant pour les civils qui peuvent partir que pour ceux qui restent ».  Le Mexique a souhaité que les consultations prévues après cette séance permettent d’avancer sur ce texte.

Tout en plaidant lui aussi pour que des garanties de sécurité soient apportées aux civils, le Kenya a averti que l’impact humanitaire de ce conflit se fera sentir bien au-delà de l’Ukraine, ce pays étant un important producteur de produits agricoles essentiels, en particulier de céréales et d’engrais.  Les fortes hausses de prix qui en résulteront risquent, selon lui, de plonger de nombreux pays dans l’insécurité alimentaire, voire dans d’éventuelles turbulences politiques. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

« Nous n’avions pas besoin d’une autre guerre, avec des conséquences aussi rapides et un impact aussi considérable », a déclaré M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, à l’entame de son exposé centré sur les retombées humanitaires de la guerre en Ukraine.  Dans le contexte de cette crise, les organisations humanitaires « ne dorment pas », a-t-il souligné, rappelant que, ces huit dernières années, elles ont fourni « sans tambour ni trompette » de l’aide à 1,5 million de personnes dans le Donbass et continuent à le faire dans la mesure du possible.  Bien sûr, a ajouté le haut fonctionnaire, elles se sont aussi préparées au pire, même si peu anticipaient le scénario « imprévisible » d’un conflit armé.  Malgré cela, la communauté humanitaire a planifié son action, sous l’impulsion du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et des ONG partenaires.  Nous avons fait une estimation de qui pourrait être dans le besoin, qui pourrait être en déplacement ou quelles personnes vulnérables pourraient avoir besoin d’aide à domicile, a-t-il expliqué, ajoutant que, dans le même temps, le Programme alimentaire mondial (PAM) mobilise sa logistique pour faire fonctionner les chaînes d’approvisionnement. 

Dans les jours qui ont précédé le début de l’offensive, tous les organismes humanitaires, y compris son bureau, ont envoyé du personnel d’appoint, a poursuivi M. Griffiths.  Et lorsque « l’impensable est devenu réalité », l’ONU et ses partenaires humanitaires ont lancé une opération « évolutive et agile, adaptable et résiliente ».  Le Secrétaire général a immédiatement nommé M. Amin Awad, expert en opérations rapides, y compris dans cette région, au poste de Coordonnateur des Nations Unies pour la crise.  Appuyé par M. Osnat Lubrani, Coordonnateur résident et humanitaire, M. Awad se trouve en Ukraine au moment où nous parlons, a-t-il précisé.  Tout en passant leurs journées et leurs nuits à travailler dans des bunkers et des sous-sols, nos personnels ont réussi à produire les deux plans de réponse robustes lancés la semaine dernière à Genève, a fait valoir le Secrétaire général adjoint. 

Abordant ensuite la situation sur le terrain après « 11 jours d’escalade de la violence, de la peur et de la douleur », M. Griffiths a évoqué ces millions de vies « brisées », ces habitants qui ne peuvent rester chez eux, les magasins fermés, les coupures d’électricité et d’eau, les pluies d’obus et les lignes téléphoniques coupées.  Ces gens ne peuvent pas trouver ce dont ils ont besoin, même s’ils ont de l’argent pour payer, et beaucoup ne peuvent même pas fuir en toute sécurité, a-t-il relevé.  Au 6 mars, a-t-il indiqué, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme faisait état d’au moins 1 207 victimes civiles, dont au moins 406 morts.  Avertissant que le chiffre réel pourrait être nettement plus élevé, il a ajouté que, selon le HCR, plus de 1,7 million de réfugiés ont déjà fui le pays.  Dans ces conditions, l’aide humanitaire s’est poursuivie dans toutes les zones où la sécurité était assurée.  Sous la direction du Coordonnateur pour la crise dans le pays, nous avons élaboré de nouveaux plans de livraison dans les zones où les besoins humanitaires sont les plus aigus, notamment dans les villes de Marioupol, Kharkiv et Kherson, a-t-il dit, faisant état d’un renforcement de la réponse à partir des centres de Vinnutsya, Uzhorod et Lviv.  Alors que l’ONU et ses partenaires ont déjà fourni de la nourriture à des centaines de milliers de personnes, le PAM met en place des chaînes d’approvisionnement pour fournir une aide immédiate en nourriture et en espèces à 3,5 millions de personnes à l’intérieur de l’Ukraine, a encore indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence.

Parallèlement, a-t-il ajouté, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a envoyé des équipements de traumatologie, du matériel chirurgical d’urgence et d’autres fournitures qui aideront des milliers de personnes.  De son côté, le HCR apporte son aide à travers un réseau de commerces à Marioupol, en collaboration avec des ONG.  Il fournit des milliers de couvertures, de matelas et d’autres articles de secours en provenance de Pologne et les expédie vers des centres de transit, a détaillé M. Griffiths, avant de renvoyer à l’exposé de Mme Catherine Russell pour ce qui est du « travail vital » accompli par l’UNICEF pour venir en aide aux enfants victimes de ce conflit.  La Croix-Rouge ukrainienne a également distribué une aide humanitaire à des milliers de personnes via ses stocks d’urgence, a-t-il noté, saluant au passage les plus de 4 000 bénévoles de cette organisation ainsi que tous les travailleurs communautaires des ONG locales et les camionneurs qui transportent des produits de première nécessité dans les zones instables.

Face à ces souffrances auxquelles nous assistons « en temps réel », le Coordonnateur des secours d’urgence a déterminé trois « priorités immédiates », la première étant que les parties doivent constamment veiller à épargner les personnes, les habitations et les infrastructures civiles dans leurs opérations militaires.  Pour cela, il importe, selon lui, de permettre aux civils de quitter en toute sécurité les zones d’hostilités actives sur une base volontaire, dans la direction qu’ils choisissent.  En deuxième lieu, il a demandé de garantir un passage sûr pour les fournitures humanitaires dans les zones d’hostilités actives.  Des civils se trouvant dans des lieux comme Marioupol, Kharkiv et Melitopol ont désespérément besoin d’aide, en particulier de soins médicaux vitaux.  « De nombreuses modalités sont possibles, mais cela doit se dérouler conformément aux obligations des parties en vertu des lois de la guerre. »  Troisièmement, a-t-il poursuivi, nous avons urgemment besoin d’un système de communication constante avec les parties au conflit et d’assurances concernant la livraison de l’aide humanitaire.  Affirmant avoir transmis ces trois points à l’Ukraine et à la Fédération de Russie, il a indiqué que son bureau a envoyé une équipe à Moscou pour travailler à une meilleure coordination civilo-militaire-humanitaire, à la suite d’une conversation téléphonique intervenue vendredi dernier entre le Secrétaire général de l’ONU et le Ministre russe de la défense.  Les équipes de l’ONU ont eu une première réunion technique avec les représentants du Ministère russe, a-t-il précisé, saluant la coopération des deux parties.  « J’espère sincèrement qu’elle continuera de progresser dans les heures à venir. »

Avant de conclure, M. Griffiths a souhaité alerter sur l’impact de ce conflit sur le reste du monde.  Soulignant les conséquences sur les personnes vulnérables vivant à l’autre bout de la planète, il a observé que les prix des denrées alimentaires flambent et que les approvisionnements sont incertains.  « Nous n’avions pas besoin de cela », a-t-il répété, avant de rappeler que les populations du Sahel, du Yémen, de la Corne de l’Afrique, de l’Afghanistan et de Madagascar, entre autres, sont déjà confrontées à une profonde insécurité alimentaire.  Les prix record du carburant signifient que la vie devient encore plus difficile dans des pays comme Le Liban, a-t-il fait remarquer, ajoutant que « nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de voir l’attention politique et le financement des donateurs détournés d’autres crises humanitaires urgentes ».  Dans l’immédiat, a insisté M. Griffiths, nous avons la capacité et le savoir-faire pour répondre aux besoins les plus urgents en Ukraine, « si les parties coopèrent ».  Cela étant, « nous sommes incapables de répondre aux besoins des civils aujourd’hui », a-t-il constaté.  « J’espère que nous ne les décevrons pas demain. »

Mme CATHERINE RUSSELL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a constaté que la menace immédiate et très réelle qui pèse sur les 7,5 millions d’enfants ukrainiens ne cesse de s’accroître, après huit années de conflit en Ukraine qui ont déjà infligé des dégâts profonds et durables aux enfants.  Maisons, écoles, orphelinats et hôpitaux ont été attaqués, tandis que les infrastructures civiles comme les installations d’eau et d’assainissement sont touchées, laissant des millions de personnes sans accès à l’eau potable, a-t-elle déclaré.  « Pour beaucoup, la vie se passe désormais sous terre, dans des refuges, des stations de métro ou des sous-sols, des heures durant. »  Mme Russell a relaté que des femmes accouchent dans des maternités de fortune où les fournitures médicales sont limitées, que la plupart des magasins sont fermés, ce qui rend difficile l’achat d’articles de première nécessité pour les enfants comme les couches et les médicaments.  Et même si les magasins étaient ouverts, des millions de personnes craignent trop de s’aventurer à l’extérieur pour trouver de la nourriture ou de l’eau en raison des bombardements et des tirs incessants, a expliqué la haute fonctionnaire.

Dans ce contexte, elle a assuré que l’UNICEF et ses partenaires travaillent 24 heures sur 24 pour répondre aux besoins humanitaires qui s’intensifient rapidement en Ukraine et dans les pays voisins.  Il s’agit d’acheminer par camion de l’eau potable pour la consommation et l’hygiène, de fournir des services médicaux d’urgence et d’offrir un abri et une protection aux personnes déplacées de leur domicile, a détaillé Mme Russell.  Elle a indiqué que 135 personnes travaillent à l’heure actuelle pour l’UNICEF en Ukraine et que d’autres vont être envoyées pour répondre aux besoins du pays.  Elle a parlé des équipes mobiles de protection de l’enfance soutenues par le Fonds qui viennent en aide aux enfants partout où elles le peuvent.  Mais l’environnement opérationnel en Ukraine est extrêmement complexe, a relevé la Directrice exécutive. 

Mme Russell a également tenu à mettre en lumière les partenaires locaux et les autres acteurs humanitaires locaux, qui continuent d’opérer dans des conditions de sécurité extrêmement difficiles, en particulier ceux qui travaillent dans les oblasts de Donetsk et de Louhansk.  Elle a aussi mentionné la collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui a permis de déployer des équipes en Pologne, en Hongrie, en République tchèque et en Slovaquie, ainsi que le renforcement de la présence de l’UNICEF en Roumanie, en République de Moldova et au Bélarus pour répondre aux besoins urgents des enfants.  Les deux organisations ont d’ailleurs exhorté tous les pays d’accueil à prendre des mesures pour identifier et enregistrer les enfants non accompagnés et séparés qui fuient l’Ukraine, après leur avoir permis d’accéder à leur territoire, a-t-elle informé.

En Ukraine même, l’UNICEF est très préoccupé par la sécurité et le bien-être de près de 100 000 enfants –dont la moitié sont handicapés– qui vivent dans des institutions et des pensionnats, a poursuivi Mme Russell.  Elle a fait part d’informations selon lesquelles les institutions cherchent, à juste titre, à mettre les enfants en sécurité dans les pays voisins et au-delà.  Or, beaucoup de ces enfants ont des parents ou des tuteurs légaux vivants, a-t-elle noté.  Tout en reconnaissant que des évacuations humanitaires peuvent s’avérer nécessaires pour sauver des vies, elle a prôné des mesures spéciales pour contacter les parents et obtenir leur consentement pour déplacer ces enfants en lieu sûr et pour pouvoir les réunir avec leurs familles lorsque la menace est passée.

L’extension du conflit est une source de préoccupation pour les risques posés aux enfants par les mines terrestres et les restes explosifs de guerre, a aussi exposé Mme Russell.  Même avant la récente escalade, l’Ukraine orientale était l’une des étendues de terre les plus contaminées par les mines dans le monde, a-t-elle rappelé en prévenant que cette « réalité brutale » s’étend rapidement à d’autres parties du pays.  La crise en Ukraine est aussi une « crise de protection de l’enfance », a-t-elle ainsi analysé avant d’appeler les membres du Conseil à rappeler à toutes les parties leur obligation légale et morale de protéger les enfants et de leur épargner les attaques. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a commencé par remercier l’UNICEF, l’OCHA et les autres agences humanitaires qui opèrent dans la région de l’Ukraine, en soulignant leur rôle salvateur et crucial face aux informations croissantes d’attaques de grande envergure contre des civils ukrainiens.  Ce choix de M. Putin a déjà fait plus de 500 000 réfugiés, s’est-elle indignée en mentionnant en particulier les femmes, les enfants et les personnes âgées.  Elle a salué les efforts de la Pologne, où 100 réfugiés passent la frontière chaque minute, de la République de Moldova et d’autres pays d’accueil limitrophes en assurant que les États-Unis sont déterminés à apporter leur concours humanitaire, sachant que les besoins risquent d’augmenter dans les jours et semaines à venir.  Le monde est hanté par les images d’écoles, d’hôpitaux, d’orphelinats détruits en Ukraine, a poursuivi Mme Thomas-Greenfield en dénonçant les villes assiégées et bombardées, les hôpitaux qui manquent de matériel et les victimes civiles qui vont croissant. 

« Nous avons vu des villes assiégées, d’Alep à Kyïv, et à chaque fois il s’agit de tragédies d’une ampleur incommensurable », a regretté la représentante.  Elle a assuré que les États-Unis coordonnent leurs efforts avec les pays limitrophes de l’Ukraine et les agences onusiennes pour venir en aide aux personnes dans le besoin.  Mais tant que la Fédération de Russie poursuit sa campagne acharnée, les besoins ne vont cesser de croître, a-t-elle prédit en appelant la communauté internationale à répondre présent à l’appel humanitaire.  Il faudra également entendre l’appel de l’OCHA à une trêve humanitaire pour permettre aux civils de partir s’ils le souhaitent, a-t-elle ajouté en réclamant aussi un passage sans entrave en Ukraine pour les acteurs humanitaires.  Reprochant à la Fédération de Russie de refuser la mise en place de couloirs humanitaires, la représentante des États-Unis l’a appelé à accepter la proposition ukrainienne pour la circulation en toute sécurité des biens humanitaires.  De plus en plus inquiète pour la protection des civils dans ce conflit, notamment des femmes, filles, LGBTQ et des personnes âgées, mais aussi des enfants vulnérables, Mme Thomas-Greenfield a tonné que les enfants ne devraient jamais être impliqués dans un conflit.  « Tout ça pour quoi? » a demandé la représentante qui a dit craindre les plaies psychologiques des enfants. 

Mme Thomas-Greenfield s’est dite persuadée que le plan du Président Putin est de détruire et de terroriser l’Ukraine alors que de nombreux soldats russes ne souhaitent pas cette guerre.  Les Ukrainiens se défendent avec bravoure, a-t-elle souligné, reprochant au Président Putin d’être prêt à sacrifier des dizaines de milliers de soldats russes pour venir à bout de son plan.  La Fédération de Russie n’en sortira que plus faible, a-t-elle prévenu tout en appelant à inverser le cap et revenir à la diplomatie et à la négociation.  Quelle que soit la tournure que prendra cette « invasion de l’Ukraine », la communauté internationale doit être prête « à tout faire » et à rester aux côtés des Ukrainiens, a conclu Mme Thomas-Greenfield.

La Fédération de Russie a réussi, en moins de deux semaines, à créer la plus grave et la plus grande crise de réfugiés en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, s’est alarmé M. FERIT HOXHA (Albanie).  Avec son « opération militaire spéciale », elle a plongé les civils sous les décombres et au mieux dans les tunnels et les caves.  Tout en Ukraine est devenu une cible, y compris le Consulat de l’Albanie à Kharkiv, a accusé le représentant.  Des centaines de milliers de personnes n’ont plus accès à l’eau potable et plus d’un million, dont la moitié sont des enfants, ont fui dans les pays voisins.  Le représentant a salué la Roumanie, la Pologne et la Slovaquie qui ont accueilli des centaines de milliers de réfugiés dont des dizaines de milliers d’enfants souvent séparés de leur famille.  Comment peut-on exposer des enfants à une telle violence et à une telle terreur? a demandé le représentant à son homologue russe.  Le droit international humanitaire a-t-il encore un sens pour vous?

Le représentant a condamné tous les actes contraires aux Conventions de Genève qui constituent des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité.  L’Albanie, a-t-il dit, a saisi la Cour pénale internationale (CPI) de la situation en Ukraine.  Il a jugé urgent d’ouvrir des couloirs humanitaires mais aussi de combattre « la guerre sournoise de l’information ».  Il a d’ailleurs rappelé que la Douma vient de restreindre les activités de nombreux médias.  Le premier signe d’une dictature est palpable quand un gouvernement commence à avoir peur de son propre peuple, a commenté le représentant. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a conseillé à l’UNICEF d’agir de manière impartiale.  Il a ensuite prévenu de la tendance à la prolifération d’armes légères chez les « radicaux », qu’il a imputée au Président ukrainien lui-même.  Il a aussi pris note de la « la bataille de l’information » qui se joue autour de l’« opération militaire spéciale ».  L’Occident, chantre de la liberté d’expression, n’a pas hésité à fermer des chaînes russes, s’est étonné le représentant qui, une nouvelle fois, a affirmé que les militaires russes ne tirent pas sur les civils, contrairement aux « nazis et extrémistes ukrainiens » qui prennent les populations en otage.  Des couloirs humanitaires devaient être ouverts près de Marioupol le 5 mars, mais « les extrémistes ukrainiens » ont reçu l’ordre de tirer dans les jambes des civils qui veulent fuir, comme en attestent de nombreuses vidéos.  Le représentant a imputé ces actes aux « bataillons nationalistes », dont le bataillon Azov. 

Nous avions, a-t-il dit, prévu l’ouverture de couloirs humanitaires depuis Kiev, Marioupol et Soumy vers le territoire russe mais les Ukrainiens les ont jugés « inacceptables » parce qu’ils ont peur que les réfugiés disent la vérité sur la violence des « radicaux ».  Le représentant a déploré la politisation de la question de l’évacuation et de l’acheminement de l’aide humanitaire.  Dans les zones contrôlées par la Fédération de Russie, personne, a-t-il affirmé, ne souhaite partir car personne n’est menacé.  Il a pris note des problèmes qu’ont les étrangers, dont les Africaines, pour quitter l’Ukraine vers l’Europe.  Le représentant a aussi déploré la mort d’un étudiant indien aux mains des « radicaux ukrainiens ».  Nous voulons, a-t-il dit, régler les difficultés humanitaires des civils mais malheureusement le déploiement d’armes lourdes, dont des moyens de défense aérienne, est devenu la norme des « bataillons nationalistes ».  Ces agissements, a estimé le représentant, sont « lâches et immoraux », et contraires au droit international, tout comme l’acte d’entraver l’évacuation des civils par les couloirs humanitaires agréés.  Nous demandons à nos « collègues occidentaux » de convaincre les autorités ukrainiennes d’assurer la sécurité des civils menacés par les « combattants nationalistes » et d’ouvrir des couloirs humanitaires, a conclu le représentant. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a fait remarquer que l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie a créé une catastrophe humanitaire, avec 12 millions de personnes qui ont besoin d’aide et des milliers de morts et de blessés.  Elle a relevé que l’utilisation d’armes explosives par l’armée russe détruit des maisons et des infrastructures civiles, que des attaques russes ciblent des sites civils, y compris les maternités et les hôpitaux pour enfants, même des cliniques d’oncologie.  Elle a dit que le Comité internationale de la Croix-Rouge (CICR) a été clair: quoi qu’il soit convenu sur les couloirs humanitaires ou d’autres mesures, les civils et les infrastructures civiles doivent être protégés.  Cela s’applique à la fois à ceux qui choisissent de partir et à ceux qui veulent rester, a-t-elle précisé en soulignant qu’il s’agit d’une obligation fondamentale prévue par le droit international humanitaire.  Chaque violation effrayante du droit international évoque les plus sombres jours du passé de l’Europe, a-t-elle souligné avant de demander à la Fédération de Russie de respecter ses obligations internationales, dont la protection des civils, des établissements de soins et du personnel médical et humanitaire.  Toutes les parties doivent également permettre un passage sûr et un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire, a exigé la déléguée.

Comme dans tous les conflits à travers le monde, les femmes et les filles sont particulièrement vulnérables au fléau odieux des atteintes et de l’exploitation sexuelles, a poursuivi la représentante en appelant à protéger toutes les femmes et les filles en Ukraine contre le viol et la violence sexuelle.  « Nous y veillerons. »  Face à l’exode massif de réfugiés d’Ukraine, elle a salué l’Union européenne et la République de Moldova pour leur générosité et leur solidarité.  Nous appelons tous les pays de la région à maintenir leurs frontières ouvertes à tous ceux qui recherchent sécurité et protection, a plaidé Mme Byrne Nason.  Elle a noté que l’impact humanitaire de cette guerre se fera sentir non seulement sur le continent européen, mais aussi sur la sécurité alimentaire dans des pays fortement tributaires des produits agricoles ukrainiens, en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a estimé que les violations par la Russie des cessez-le-feu humanitaires sont « une abomination ».  « Le monde observe avec horreur la crise humanitaire causée par la guerre du Président Putin contre le peuple ukrainien », a déclaré la représentante rappelant que 1,7 million de réfugiés ont fui l’Ukraine, un nombre qui devrait passer à 4 millions dans les semaines à venir selon l’ONU.  Les missiles et les bombardements russes des villes ukrainiennes ont détruit des appartements, des hôpitaux et des écoles, a-t-elle décrit, faisant remarquer que les gens n’ont ni électricité, ni vivres, ni eau, ni abri.  La représentante a relevé que l’invasion par la Russie s’est heurtée à la résistance « féroce » du peuple ukrainien et que, en réponse, le Président Putin mène une « campagne de violence et de cruauté » contre les civils.  Mme Woodward a promis de demander des comptes à la Russie pour ses actes en menant des enquêtes de manière approfondie sur les allégations de crimes de guerre et de violations du droit international. 

La représentante a annoncé que le Royaume-Uni réservera plus de 285 millions de dollars pour l’aide, dont plus de 155 millions de dollars d’aide humanitaire.  Le public britannique a également levé plus de 130 millions de dollars, a-t-elle ajouté, de l’argent qui aidera les Ukrainiens dans le besoin et soutiendra les pays voisins qui accueillent des réfugiés.  Toutefois, ce dont le peuple ukrainien a vraiment besoin, c’est de la fin de cette invasion, a insisté Mme Woodward appelant son homologue de la Fédération de Russie à rapporter fidèlement à Moscou « l’appel urgent à la paix ».  Elle a terminé en paraphrasant Alexandre Soljenitsyne: « Une vie perdue ne peut plus être récupérée, une conscience ruinée non plus ». 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a estimé que, 12 jours après le début du conflit, la situation humanitaire en Ukraine nécessite une action urgente et coordonnée, avec la participation impartiale des acteurs humanitaires.  « Le défi est immense », a-t-il souligné, rappelant qu’il y a déjà 1,7 million de réfugiés et environ un million de déplacés.  Malheureusement, tout indique que ces chiffres vont continuer à augmenter, a prévenu le représentant, faisant état de circonstances aggravantes telles que les conditions critiques d’accès à l’eau et à la nourriture dans les villes assiégées, et les attaques commises lors de l’évacuations des civils.  Appelant à une cessation immédiate des hostilités, il a souhaité que l’assistance humanitaire ne devienne pas « l’otage de considérations politiques ». 

Pour cela, un accès illimité et sûr doit être garanti à tous les travailleurs humanitaires en Ukraine et dans tous les pays voisins, conformément au droit international humanitaire.  De même, il importe de respecter les dispositions de la résolution 2573 (2021), sur la protection des personnes et infrastructures civiles.  Par ce texte, a rappelé le délégué, le Conseil de sécurité a clairement exigé que toutes les parties à un conflit armé établissent immédiatement une pause humanitaire pour faciliter l’acheminement sûr, sans entrave et soutenu de l’assistance requise, ainsi que la fourniture de services connexes par des acteurs humanitaires impartiaux. 

S’agissant de l’action sur le terrain, le représentant a tout d’abord condamné l’utilisation d’armes à sous-munitions.  Il a ensuite alerté le Conseil sur la situation des mineurs non accompagnés parmi ceux qui fuient le pays en guerre.  Il a voulu que les mécanismes de suivi tiennent compte de ces enfants, avec le concours de l’UNICEF.  Le représentant a d’autre part jugé crucial qu’une pause humanitaire soit décrétée immédiatement pour garantir l’accès humanitaire et que soient mis en place des itinéraires d’évacuation et de transit pour les civils.  Enfin, il a souhaité que l’aide comprenne des services de santé mentale et de soutien psychosocial.  Avec la France, a-t-il conclu, nous insisterons, lors des consultations, pour que le Conseil adopte une résolution humanitaire qui reprenne ces différents points.  Jugeant urgent que le Conseil « prenne en charge cette situation », il a formé l’espoir que cette réunion et les consultations demandées par Paris et Mexico permettront de faire avancer le dialogue, de rapprocher les positions, de parvenir à des accords et d’aider les personnes qui ont besoin d’une aide humanitaire. 

« C’est un véritable drame humanitaire qui se joue sous nos yeux », a déclaré M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France).  Alors que l’Union européenne (UE) a annoncé 590 millions d’euros d’aide humanitaire, nous avons également pris notre part, a-t-il indiqué, faisant état de 100 millions d’euros et de plus de 100 tonnes d’aide humanitaire déjà acheminées par la France.  Il a rappelé avoir vu vendredi dernier le risque d’un accident nucléaire et souligné la nécessité absolue d’assurer le respect de la sûreté et de la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes, disant soutenir les initiatives portées par le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

M. de Rivière a indiqué que la France et le Mexique portent un projet de résolution demandant une cessation immédiate des hostilités et le plein respect du droit international humanitaire, en demandant que la protection des civils et l’accès humanitaire soient garantis sur l’ensemble du territoire, tant pour les civils qui peuvent partir que pour ceux qui restent.  « Je ne connais pas beaucoup d’Ukrainiens qui veulent se réfugier en Russie, c’est un mensonge », a également déclaré le représentant en faisant référence au couloir humanitaire proposé par la Russie vers son territoire.  Enfin, toute la lumière doit être faite sur les allégations de crimes qui, s’ils sont établis, ne doivent pas rester impunis, a exigé le représentant de la France, qui a dit soutenir la Cour pénale internationale et la Commission d’enquête créée par le Conseil des droits de l’homme.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a noté que selon les estimations de l’ONU, 1,5 million de réfugiés ukrainiens ont cherché refuge dans les pays voisins de l’Ukraine au cours des 11 derniers jours.  Cela a conduit à une crise humanitaire urgente qui doit être traitée de toute urgence, a-t-il estimé.  De plus, toujours d’après l’ONU, plus de 140 civils ont été tués à ce jour, dont un jeune étudiant indien.  L’Inde n’a cessé d’appeler à la fin immédiate de toutes les hostilités, a rappelé le représentant, et son premier ministre s’est de nouveau adressé aux dirigeants des deux parties aujourd’hui et a réitéré son appel à un cessez-le-feu immédiat et à la reprise de la voie du dialogue et de la diplomatie.  Il a également réitéré la demande urgente d’un passage sûr et ininterrompu pour tous les civils innocents, y compris les ressortissants indiens restés en Ukraine.  Le représentant s’est dit profondément préoccupé par le fait que malgré ces exhortations répétées aux deux parties, le couloir sûr pour les étudiants indiens bloqués à Soumy ne se soit pas concrétisé.  À ce jour, l’Inde a néanmoins réussi à faciliter le retour en toute sécurité de plus de 20 000 Indiens d’Ukraine et a aidé des ressortissants d’autres pays grâce à plus de 80 vols d’évacuation, a fait savoir le délégué.

Prenant note de l’appel éclair et du plan de réponse régional pour les réfugiés, le représentant a espéré que la communauté internationale y répondra positivement.  Pour sa part, l’Inde a déjà envoyé des fournitures humanitaires à l’Ukraine et aux pays voisins, a indiqué le représentant qui a souligné que l’action humanitaire doit toujours être guidée par les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance et qu’elle ne doit pas être politisée.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a noté que, depuis 10 jours, les combats ont occasionné d’importantes pertes en vies humaines et conduit près d’un million de personnes à quitter le territoire ukrainien pour se réfugier dans les pays voisins.  Il a constaté que les déplacements massifs de personnes, dans des conditions particulièrement difficiles liées au froid, les exposent à des besoins urgents de nourriture, d’eau et d’autres produits de première nécessité.  Le représentant s’est inquiété des dommages causés aux personnes civiles, aux femmes et aux enfants en particulier, dont l’UNICEF évalue à 7,5 millions le nombre de ceux qui seraient en danger.  Il a appelé les belligérants à faciliter l’acheminement rapide, en toute sécurité et sans entrave, de l’aide humanitaire, et à protéger les civils, y compris le personnel humanitaire et les personnes en situation vulnérable, en particulier les femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées et les enfants. 

Par ailleurs, le représentant a salué l’importante mobilisation multiforme de la communauté internationale, qui se reflète par les dons en nature et en financements, des partenaires bilatéraux et multilatéraux notamment la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) qui, dès les premiers jours de la guerre, ont activé leurs mécanismes de financement rapide et promis de mobiliser 3 milliards de dollars, dont 550 millions à très court terme en vue de soutenir l’Ukraine.  Il a appelé au sens de l’humanité de tous pour offrir le même accueil à toutes les personnes en détresse sans distinction d’origine ou de race, y compris les ressortissants et étudiants africains, dont la détresse n’est pas moins grande dans cette situation de confusion et de terreur.  Il s’est inquiété des informations concordantes qui parviennent de diverses sources évoquant la rétention d’étudiants africains dans les lieux à risque.  « Mon pays appelle les belligérants à respecter les dispositions du droit international humanitaire, notamment la Convention de Genève de 1949 et ses protocoles additionnels, à garantir le respect et la protection de l’ensemble du personnel médical et des agents humanitaires », a-t-il dit avant de saluer l’établissement des couloirs humanitaires pour l’évacuation des civils des zones de combats et d’exhorter les parties à tout mettre en œuvre pour un cessez-le-feu immédiat.  Il a demandé de stopper les combats et appelé toutes les parties à s’engager dans des négociations de bonne foi, avec la ferme volonté de mettre fin au conflit et d’en « expurger toutes les racines ».  « Dans ma culture africaine, lorsque deux congénères d’un même village en viennent aux mains, il revient aux proches, voisins et amis respectifs, d’arbitrer et de s’investir dans l’apaisement », a-t-il expliqué.  « L’expérience a souvent montré que plus tôt les amis et proches s’interposent, plus tôt l’accalmie revient. »

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a exhorté les parties à convenir d’un cessez-le-feu et à revenir à la table des négociations.  Les parties doivent pleinement respecter le droit international humanitaire, y compris lors du recours à de nouvelles technologies militaires.  Il les a aussi appelées à créer des couloirs humanitaires, en rappelant la nécessité de respecter le droit international humanitaire « pour ceux qui souhaitent partir comme pour ceux qui souhaitent rester ».  Le droit de la guerre n’est pas optionnel, a-t-il martelé, avant de demander aux pays voisins de laisser ouvertes leurs frontières aux réfugiés, sans discrimination aucune. 

Les enfants ukrainiens doivent être protégés de la guerre et ne doivent, en aucune circonstance, participer à des activités militaires, a poursuivi le délégué, en estimant que le nombre grandissant d’enfants déplacés en Ukraine et réfugiés dans les pays voisins va nécessiter tout le soutien de la communauté internationale.  Les ambassades brésiliennes à Bratislava, Bucarest, Budapest, Prague et Varsovie ont commencé à accorder des visas humanitaires aux Ukrainiens et aux apatrides, a-t-il annoncé.  Il a surtout jugé « capital » que le Conseil parvienne à un consensus sur la réponse humanitaire.  Nous devons travailler collectivement pour élargir les couloirs et l’assistance humanitaires et ouvrir une voie de dialogue et de diplomatie, dans le respect du droit international et des principes de la Charte, a conclu le représentant.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a salué l’engagement conjoint de l’Ukraine et de la Fédération de Russie d’établir des couloirs humanitaires pour le passage en toute sécurité des civils et des fournitures humanitaires, tout en notant qu’au cours du week-end dernier, les couloirs humanitaires de Kyïv, Kharkiv, Soumy et Marioupol ont échoué.  Il est extrêmement important d’assurer des garanties de sécurité nécessaires pour les civils, y compris les ressortissants étrangers, pour leur permettre d’être évacués en lieu sûr, a-t-il plaidé.  Le délégué a salué les actions de l’ONU et de ses agences partenaires pour leurs efforts continus pour fournir une aide humanitaire.  Il s’est notamment félicité de l’identification de quatre pôles humanitaires à Leviv, Vinnytsia, Oujhorod et Tchernivtsi.  Le représentant a également félicité les voisins de l’Ukraine d’avoir ouvert leurs frontières aux réfugiés de plusieurs nationalités, les exhortant à assurer que la protection recherchée soit offerte sans discrimination aucune, notamment en ce qui concerne la race ou la religion. 

M. Kiboino a souligné que l’Ukraine étant un important producteur de produits agricoles essentiels, l’impact humanitaire de ce conflit se fera ressentir bien au-delà du pays en raison du choc subi par l’approvisionnement alimentaire mondial.  Ainsi, la fermeture de ses ports en raison du conflit et la destruction d’infrastructures vont limiter les exportations de céréales et d’engrais, a-t-il signalé, alertant que les fortes hausses de prix qui en résulteraient devraient plonger plusieurs pays dans l’insécurité alimentaire et, par conséquent, d’éventuelles turbulences politiques.  Le monde souffrira aussi beaucoup des sanctions unilatérales et régionales contre la Fédération de Russie, a-t-il relevé.  À cet égard, le représentant kényan a demandé au Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de rendre compte des évaluations de l’impact du conflit en Ukraine et des sanctions contre la Fédération de Russie sur la situation humanitaire dans d’autres pays, notamment en matière de sécurité alimentaire.  De même, « quelles sont les actions préventives qui peuvent être prises par l’ONU et le Conseil de sécurité pour s’assurer que le choc subi par le système d’approvisionnement alimentaire mondial ne se traduira pas par de nouvelles crises? » a-t-il encore demandé. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a souligné que la responsabilité d’assurer la protection de toutes les personnes qui souffrent d’un conflit ne change pas, y compris en Ukraine.  Ne pas l’assumer, c’est commettre une grave violation qui ne peut et ne doit être ignorée.  La représentante a regretté que l’accord sur la création des couloirs humanitaires n’ait pas tenu.  Elle a réclamé une pause humanitaire, en particulier dans les villes de Marioupol et de Kharkiv.  Les hostilités dans les zones densément peuplées doivent cesser et il nous faut un accord sur le passage sûr et sans entrave des convois humanitaires vers toutes les zones où les civils ont besoin d’eau, de nourriture et de soins médicaux.  La représentante a appuyé l’idée des Nations Unies de mettre en place d’urgence un système de notification et une ligne d’urgence avec la Fédération de Russie et l’Ukraine afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire. 

Elle a aussi appelé les parties à s’éloigner de toutes les installations nucléaires et a exhorté l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) à continuer de surveiller le programme nucléaire ukrainien et à mettre en œuvre des mécanismes de prévention pour éviter tout accident.  La représentante a eu une pensée pour les enfants et a avoué que les « ramifications » économiques du conflit se font déjà ressentir dans le monde entier. 

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite gravement préoccupée par le nombre impressionnant des victimes civiles en Ukraine et par le « calvaire » enduré par les enfants.  Appelant la Fédération de Russie à cesser immédiatement son agression et à retirer ses troupes, elle a souligné que les personnes et les infrastructures civiles doivent être protégées, conformément au droit international humanitaire.  Elle a également condamné l’utilisation par les forces russes d’armes à sous-munitions, avant de rappeler que ces « armes aveugles » continuent de tuer et de blesser des enfants longtemps après la fin des conflits.  Les enfants sont aujourd’hui traumatisés par les bombardements, forcés de fuir à travers l’Ukraine et au-delà des frontières et parfois exposés au risque de violences sexuelles et sexistes, a ajouté la déléguée, exprimant son inquiétude au sujet des enfants non accompagnés séparés de leur famille.  Selon elle, les organisations humanitaires doivent accorder la priorité à l’assistance et à la protection des enfants touchés par les conflits, par le biais de services de santé mentale et de soutien psychosocial.  Alors que même des écoles sont attaquées, en violation flagrante de la résolution 2601 (2021), elle a appelé la Fédération de Russie à respecter le caractère civil des établissements d’enseignement, consacré par le droit international humanitaire. 

Appelant à prendre des mesures concrètes pour assurer la protection des civils et l’accès humanitaire, Mme Juul a enjoint les parties au conflit à permettre et faciliter un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave à ceux qui en ont besoin, tout en protégeant les civils en toute circonstance.  Les accords de cessez-le-feu et les « soi-disant couloirs humanitaires » pour évacuer les civils peuvent être des mesures pour y parvenir, a-t-elle relevé, ajoutant que les évacuations de civils doivent être sûres, volontaires et avoir des destinations choisies.  Dans ce contexte, la représentante a félicité les pays voisins pour leur générosité et leur solidarité à l’égard des personnes qui fuient le conflit.  « La porte de la sécurité et de la protection doit rester ouverte, sans discrimination », a-t-elle plaidé, saluant également toutes les organisations humanitaires pour leurs « efforts héroïques ».  Constatant, enfin, que la vie et l’avenir de 7,5 millions d’enfants d’Ukraine sont en jeu, elle a estimé que le dialogue et la diplomatie sont la « seule voie à suivre » pour faire cesser cette guerre. 

M. ZHANG JUN (Chine) a recommandé de faire aujourd’hui preuve de bon sens au lieu d’ajouter de l’huile sur le feu, au risque de faire dégénérer la situation.  Pour lui, cela signifie le respect des principes de la Charte des Nations Unies et le respect de la souveraineté des États.  Le représentant y a ajouté le principe d’indivisibilité de la sécurité et celui de la prise en compte des préoccupations sécuritaires légitimes des parties concernées.  Il est important de s’en tenir au dialogue, aux négociations et à toute mesure susceptible d’apaiser la situation, a préconisé le représentant, en souhaitant que les pourparlers directs entre l’Ukraine et la Fédération de Russie soient couronnés de succès.  Il faut nouer un dialogue « sur un pied d’égalité » avec la Russie et régler les problèmes qui se sont accumulés pendant des années, a encore prôné le délégué.  Il a conclu en demandant de prendre en compte la problématique de l’expansion vers l’est de l’OTAN et de mettre en place en Europe un dispositif de sécurité équilibré et durable.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a parlé d’une situation « catastrophique » en Ukraine où déjà près de 1,7 million de personnes sont soit déplacées soit réfugiées.  Nous devons, a-t-elle dit, essayer d’atténuer les souffrances humaines et de faire cesser le conflit.  La représentante a rappelé aux parties leur obligation de respecter le droit international humanitaire et de protéger les personnes et infrastructures civiles.  Elle a insisté sur l’accès humanitaire et a plaidé pour la création de couloirs humanitaires, « même s’il s’agit d’une solution temporaire et imparfaite ».  La représentante a appelé la communauté internationale à lancer de toute urgence des initiatives « réalistes » pour rétablir la confiance entre les parties, y compris par l’identification des victimes et l’échange d’informations sur les prisonniers de guerre.  Elle l’a aussi appelée à répondre à l’appel éclair et au plan régional pour les réfugiés de l’ONU.  Les Émirats arabes unis, a-t-elle annoncé, vont débloquer une somme de 5 millions de dollars, après les 30 tonnes de produits médicaux qu’ils ont déjà libérés.  La représentante a conclu par un appel à la retenue et à un cessez-le-feu immédiat, mais également à une activation des voies diplomatiques pour trouver une solution à cette crise.

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a expliqué que 12 jours d’invasion de grande ampleur ont conduit l’Ukraine au bord de la catastrophe humanitaire, avant de remercier les pays qui ont déjà accueilli 1,7 million de réfugiés ukrainiens.  Il a parlé de la lettre Z utilisée par les Russes pour marquer les véhicules qui entrent en Ukraine en expliquant que cela correspond à un mot qui signifie « bête sauvage » en russe.  Il a ensuite accusé l’armée russe d’empêcher régulièrement les autorités ukrainiennes d’évacuer des civils et les organisations internationales de porter l’aide nécessaire.  « Aujourd’hui en violation d’un accord, la Russie a, à nouveau, empêché l’évacuation de civils de Kharkiv, Donetsk et de la région de Kherson », a ajouté le représentant avant de dénoncer les frappes de missiles qui détruisent des infrastructures essentielles et empêchent de surcroît les convois humanitaires d’apporter l’aide aux personnes dans le besoin. 

Alors que les audiences ont commencé à la Cour internationale de Justice sur les agissements de la Russie en Ukraine, le représentant a rappelé que la Russie refuse de mettre en œuvre la récente résolution de l’Assemblée générale l’exhortant à cesser ses opérations.  « La Russie doit cesser la désinformation », a-t-il aussi réclamé avant de juger inacceptable de contraindre les civils ukrainiens à se réfugier en Russie ou au Bélarus où ils risquent d’être utilisés comme boucliers humains par les forces russes.  Il a demandé aux États Membres de contraindre la Russie à un cessez-le-feu pour ouvrir des couloirs humanitaires et éviter une catastrophe humanitaire de grande ampleur.  À « la partie russe », il a demandé de revenir aux accords précédents prévoyant que les réfugiés puissent se rendre dans d’autres pays.  Il a informé qu’une centaine de villes et villages de son pays ont été assiégés aujourd’hui. 

Rappelant que 55% de l’huile de tournesol et 60% des produits agricoles ukrainiens sont exportés par les ports, le représentant a expliqué que défendre l’Ukraine revient à protéger le monde contre la faim.  Il a exhorté l’agence centrale d’enquête du CICR à faire un inventaire des soldats russes tombés au combat et à restituer les dépouilles.  Il a expliqué que 211 écoles et 34 hôpitaux ont été endommagés par les attaques en accusant « l’occupant » de tuer des enfants avec cynisme.  Il a ajouté que 2 000 citoyens d’Inde, de Chine, de Turquie, du Pakistan et d’autres pays souffrent aujourd’hui de cette agression aux côtés des civils russes. 

Le délégué ukrainien a remercié la communauté internationale pour avoir déjà fourni 3 500 tonnes d’aide humanitaire à son pays.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à tout mettre en œuvre pour faire face à la pire crise humanitaire en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.  Après avoir déclaré que « ces réunions du Conseil de sécurité sur l’Ukraine s’apparentent une thérapie de groupe visant à ramener un de ses membres à la raison », il a suggéré aux diplomates russes de solliciter « une aide en matière de santé mentale ». 

Le délégué de la Fédération de Russie a repris la parole pour réagir aux propos de son homologue ukrainien sur la lettre Z écrite sur les chars russes, qui serait, selon ce dernier, la première lettre du mot « animal » ou « bête » en russe.  La bête, pour nous, ce sont les bataillons nationalistes ukrainiens, a-t-il dit.  « Ce sont les Ukrainiens qui rejettent notre proposition de cessez-le-feu et de couloirs humanitaires, tandis que les bataillons nationalistes ukrainiens prennent la population en otage. »  Il a accusé le bataillon Azov d’avoir tiré sur des civils.  Enfin, il a annoncé des cessez-le-feu locaux à partir de demain matin, le 8 mars, 10 heures, ainsi que des couloirs humanitaires pour évacuer les civils de Kiev, Soumy, Kharkov, ou encore Marioupol.  « On verra quelle sera la réponse des Ukrainiens », a-t-il dit, en ajoutant que les personnes évacuées pourront choisir là où elles veulent se rendre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour le Soudan du Sud estime qu’il est encore possible de poursuivre la transition démocratique

8987e séance - matin
CS/14821

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour le Soudan du Sud estime qu’il est encore possible de poursuivre la transition démocratique

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, que malgré la lenteur des progrès dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud, il existe encore une fenêtre d’opportunité pour capitaliser sur la stabilité relative du pays afin de poursuivre une véritable transition démocratique.

À l’entame des 12 derniers mois de la période de transition, M. Nicholas Haysom a donc appelé à créer un espace politique et civique propice à un processus électoral libre et équitable afin de mener la période de transition à son terme, insistant notamment sur les prérequis techniques et logistiques et l’élaboration d’un calendrier convenu.  

« Les élections ont le potentiel d’être un moment d’édification de la nation ou de conduire à une catastrophe », a notamment averti le Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) qui a notamment déploré que le projet de loi sur le processus d’élaboration de la constitution est toujours en attente, et que la réunification des forces armées n’a pas encore commencé.

Alertant d’un sentiment de désillusion parmi la population sud-soudanaise, M. Haysom a averti que cette « tendance inquiétante » risque de saper l’Accord de paix.  La lenteur de la mise en œuvre a un prix et les dividendes de la paix restent insaisissables, comme en témoigne la frustration des jeunes marginalisés, dont beaucoup ont rejoint des milices tribales, a-t-il indiqué, relevant en outre que la situation économique « catastrophique » et son impact sur les jeunes a également provoqué une hausse de la criminalité et de la xénophobie à l’égard des humanitaires et des soldats de la paix.

Face à cette situation, le Président par intérim de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, le général de division Charles Tai Gituai, a recommandé au Conseil de sécurité d’engager activement le Gouvernement provisoire d’union nationale à mettre en œuvre les tâches critiques en suspens, en particulier l’unification des forces et le processus d’élaboration d’une constitution permanente, deux éléments fondamentaux, selon lui, pour la tenue d’élections libres, équitables et crédibles.  Il faut encourager le Gouvernement d’union nationale à concilier les divergences entre les partis politiques et à œuvrer de manière collégiale dans l’intérêt du Soudan du Sud et de sa population, a estimé le dignitaire qui a également insisté sur l’importance d’une constitution permanente « dirigée par le peuple et appartenant au peuple », pour préparer la voie à une transition démocratique.

Mais pour la militante de l’ONG Crown The Woman, « le terrain n’est pas mûr » pour assurer la tenue des élections.  Non seulement le cadre juridique et institutionnel nécessaire n’est pas en place à moins d’un an des élections, mais l’insécurité et le manque de confiance actuels des Sud-Soudanais, en raison de l’échec de la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, ne peuvent qu’avoir un impact néfaste sur la légitimité du résultat, a mis en garde Mme Riya William Yuyada, alertant du risque de nouvelles violences.  Pour assurer la tenue d’élections en bonne et due forme, elle a appelé à unifier les forces militaires et les milices alliées sous un commandement central et les former pour devenir une armée professionnelle nationale apolitique capable de défendre le peuple et l’intégrité territoriale.  

Ces mesures sont indispensables pour créer des conditions propices à la tenue des élections et font aussi partie des critères en vue de la révision de l’embargo sur les armes, a relevé la France, la Chine ayant pour sa part réclamé leur levée au plus vite.

Également convaincu que les conditions ne sont pas propices à la tenue des scrutins, le Mexique a déploré le « rétrécissement » de l’espace civique dans le pays, ainsi que les entraves à l’exercice des libertés fondamentales.  Sans garantie que le Gouvernement respectera les libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique, les citoyens sud-soudanais sont inquiets concernant les élections et leurs conséquences, a d’ailleurs fait observer la militante de la société civile. 

Notant pour sa part que les élections ne peuvent à elles seules garantir la stabilité sans une application adéquate des dispositions de l’Accord revitalisé, le Kenya, qui intervenait au nom des A3, a jugé cruciale la « retraite » proposée aux dirigeants du Soudan du Sud pour renforcer la confiance mutuelle et permettre aux parties d’élaborer une feuille de route pour le reste de la période de transition.  De son côté, l’Inde a demandé la reprise rapide de la médiation de la Communauté de Sant’Egidio avec les non-signataires.  La Norvège a pour sa part réclamé des efforts accrus pour lutter contre la corruption, jugeant peu convaincant d’invoquer un manque de ressources pour expliquer les retards dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.

Enfin, les États-Unis ont noté avec inquiétude que 8,9 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire en 2022, soit 600 000 de plus qu’en 2021, notamment en raison de l’instabilité, des aléas climatiques, de l’inflation du prix des denrées alimentaires et de l’absence d’accès aux services fondamentaux.  La délégation s’est également déclarée horrifiée par l’ampleur des violences sexuelles liées au conflit, exhortant le Gouvernement du Soudan du Sud à poursuivre tous les auteurs de ces crimes et plus particulièrement les personnes en situation d’autorité.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD - S/2022/156

Déclarations liminaires

M. NICHOLAS HAYSOM, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud, a indiqué que depuis la création, il y a deux ans, du Gouvernement provisoire d’union nationale revitalisé, le cessez-le-feu tient globalement et le nombre de victimes civiles a considérablement diminué.  Le corps législatif national provisoire et le Conseil des États ont été reconstitués et le projet de loi sur la Constitution a été approuvé.  Il a également salué le débat sur le budget national 2021/22 et l’engagement du Président en faveur de réformes économique et financière.  De même, il s’est félicité de la décision des factions Amum et Malong de l’Alliance des mouvements d’opposition du Soudan du Sud de s’engager avec le Gouvernement dans le cadre de l’initiative de médiation dirigée par la Communauté Sant’Egidio, pour ensuite encourager la faction dirigée par Thomas Cirillo à se joindre à ces efforts.  

À l’entame des 12 derniers mois de la période de transition, le Représentant spécial a appelé à créer un espace politique et civique propice à un processus électoral libre et équitable afin de mener la période de transition à son terme, insistant en outre sur les prérequis techniques et logistiques et l’élaboration d’un calendrier convenu.  Il a relevé que le projet de loi sur le processus d’élaboration de la Constitution est toujours en attente, et que la rédaction d’une nouvelle constitution reste au point mort.  La réunification des forces armées n’a pas encore commencé et aucun accord n’a été trouvé sur une structure de commandement, a déploré M. Haysom.  

Il a noté que la lenteur de la mise en œuvre est une cause de désillusion parmi la population du Soudan du Sud.  Cette tendance inquiétante risque de saper l’Accord de paix, a prévenu M. Haysom.  La lenteur de la mise en œuvre a un prix et les dividendes de la paix restent insaisissables, comme en témoigne la frustration des jeunes marginalisés, dont beaucoup ont rejoint des milices tribales.  La situation économique catastrophique et son impact sur les jeunes a également provoqué une hausse de la criminalité et de la xénophobie à l’égard des humanitaires et des soldats de la paix, a fait savoir le Représentant spécial qui a appelé à examiner ces préoccupations en tenant compte de la voix des jeunes tout en manifestant une tolérance zéro à l’égard des violences contre les humanitaires.   

Poursuivant, le Représentant spécial a indiqué que la violence sous-nationale continue de se propager, notamment à Jongleï et dans la Zone administrative du Grand Pibor ainsi que dans le cadre de conflits transfrontaliers émergents, une situation alimentée notamment par des conflits communautaires sur les terres et les ressources, comme l’illustre la recrudescence des violences intercommunautaires depuis l’arrivée de la saison sèche.  Les besoins humanitaires devraient continuer d’augmenter cette année, les inondations, l’insécurité et l’impact prolongé de la COVID-19 ayant mis à rude épreuve les mécanismes d’adaptation, détruit les terres agricoles, et tué le bétail, provoquant de nouveaux déplacements et un niveau d’insécurité alimentaire sans précédent.

M. Haysom a ensuite passé en revue le travail de la MINUSS des deux dernières années, dont son programme d’assistance aux partis politiques qui vise à faciliter le consensus autour des politiques électorales multipartites.  Depuis 2021, la Mission a établi 200 bases d’opérations temporaires pour prévenir et répondre aux points chauds du conflit et les interventions stratégiques de la Mission ont contribué à une baisse de 42% du nombre de victimes civiles au cours de l’année écoulée, a informé M. Hayson.  De même, la Mission continue de travailler avec la Police nationale sud-soudanaise afin de prévenir et lutter contre la violence sexuelle et sexiste, une préoccupation majeure au Soudan du Sud.  

Il a par ailleurs estimé que l’appel du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine pour une évaluation trilatérale UA-ONU-IGAD des besoins électoraux et constitutionnels du Soudan du Sud permettrait de tirer parti des avantages comparatifs.  La Mission a l’intention d’être un partenaire actif dans cet effort, a-t-il ajouté.

S’agissant du mandat de la Mission, le Représentant spécial a indiqué que la vision stratégique triennale demeure un cadre approprié et que le plafond actuel des troupes de 17 000 soldats de la paix et 2 100 policiers, donne la souplesse nécessaire pour faire face aux imprévus.  Il a appelé à accorder à la MINUSS un mandat suffisamment souple pour appuyer la tenue d’élections libres et équitables, dès que le Gouvernement en fera la demande, tout en notant que cela dépendra des progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.  

« Les élections ont le potentiel d’être un moment d’édification de la nation ou de conduire à une catastrophe », a averti le Représentant spécial.  Les progrès ont été lents mais il existe encore une fenêtre d’opportunité pour capitaliser sur la stabilité relative du pays afin de poursuivre une véritable transition démocratique, a conclu M. Haysom. 

Le général de division CHARLES TAI GITUAI, Président par intérim de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, a indiqué qu’en dépit de certains progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, plusieurs volets d’importance sont en souffrance à un an de la fin de la période de transition.  Depuis sa signature, cet accord a contribué de manière significative à la cessation de la violence à travers le pays et au maintien du cessez-le-feu permanent, de même qu’à l’établissement et à la reconstitution de toutes les institutions pré-transitionnelles.  Mais il n’a pas permis d’aboutir, jusqu’à présent, à l’établissement du Comité ad hoc de réforme judiciaire, mandaté pour étudier et recommander les réformes appropriées, ni à la ratification de huit projets de loi par le corps législatif national provisoire, relatifs à la sécurité, à la constitution et aux partis politiques, a relevé le Président par intérim.  Selon lui, les tâches les plus importantes pour la conduite d’élections libres, justes et crédibles sont l’unification des forces et leur redéploiement, la promulgation de la constitution permanente, l’examen des partis politiques et des lois électorales, et la reconstitution du Conseil des partis politiques et de la Commission électorale nationale.  « Je souhaite souligner l’importance d’une constitution permanente dirigée par le peuple et appartenant au peuple, qui sera la pierre angulaire de l’État du Soudan du Sud, préparant la voie à une transition démocratique par le biais d’élections libres, équitables et crédibles », a déclaré M. Gituai. 

Au nombre des défis qui se posent, a poursuivi le Président par intérim, figurent le manque de ressources suffisantes, tant financières que matérielles, nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord, l’insuffisance de la volonté politique et de l’engagement de certains acteurs ainsi que le déficit de confiance entre les parties.  Il a également évoqué les lacunes en matière de capacités, la violence et les activités des groupes réfractaires, les défections militaires d’une partie signataire, les inondations et la pandémie de COVID-19.  Dans ces conditions, la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée a chargé le Gouvernement provisoire d’union nationale d’élaborer une feuille de route et une stratégie claires sur la manière de mettre en œuvre les tâches en suspens à l’approche de la fin de la période de transition. 

M. Gituai a ensuite recommandé au Conseil de sécurité d’engager activement le Gouvernement provisoire d’union nationale à mettre en œuvre les tâches critiques en suspens, en particulier l’unification des forces et le processus d’élaboration d’une constitution permanente, deux tâches fondamentales pour la tenue d’élections libres, équitables et crédibles. Il faut également encourager le gouvernement d’union nationale à concilier les divergences entre les partis politiques et à œuvrer de manière collégiale dans l’intérêt du Soudan du Sud et de sa population. Le général de division a également appelé à appuyer les efforts du gouvernement d’union nationale pour mobiliser les ressources de la communauté internationale afin de renforcer la mise en œuvre de l’Accord. Dans cette perspective, un fonds spécial de reconstruction devrait être mis en place par le gouvernement et une conférence des donateurs pour le Soudan du Sud convoquée afin de fournir un soutien aux États et aux communautés touchés par le conflit, comme le prévoit l’Accord, a-t-il conclu.

Mme RIYA WILLIAM YUYADA, militante de Crown The Woman, une ONG locale travaillant sur les droits humains des femmes au Soudan du Sud, a indiqué que depuis la signature, il y a plus de trois ans, de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud, peu ou pas de progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre des dispositions cruciales de l’accord sur la réforme du secteur de la sécurité, la réforme constitutionnelle et électorale, la réforme judiciaire et la justice transitionnelle.  Bien que les principales villes, dont la capitale Djouba, restent calmes, la violence a augmenté au niveau local.  Les communautés ne se sentent pas représentées par les fonctionnaires et il n’y a aucune reddition de comptes pour ceux qui abusent de leur autorité, a expliqué la militante.  Il est triste, décourageant et inacceptable que nous continuions à soulever les mêmes questions avec les membres du Conseil, pour ensuite voir la situation continuer à s’aggraver, s’est-elle indignée.  « Nous en avons assez de partager les mêmes histoires de viol, de mariage d’enfants, de guerre, de traumatisme et de perte.   La résilience de mes compatriotes sud-soudanais s’estompe », a mis en garde Mme Yuyada. 

Alors que la période de transition touche à sa fin cette année, et que les élections générales sont provisoirement prévues pour 2023, Mme Yuyada a estimé que le terrain n’est pas mûr pour assurer la tenue d’élections libres, justes et pacifiques.  Non seulement le cadre juridique et institutionnel nécessaire n’est pas en place à moins d’un an des élections, mais l’insécurité et le manque de confiance actuels des Sud-Soudanais, en raison de l’échec de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé, ne peuvent qu’avoir un impact néfaste sur la légitimité du résultat, a-t-elle mis en garde, alertant du risque de nouvelles violences.  Pour assurer la tenue d’élections en bonne et due forme, elle a appelé à unifier les forces militaires et les milices alliées sous un commandement central et les former pour devenir une armée professionnelle nationale apolitique capable de défendre le peuple et l’intégrité territoriale.  Elle a également appelé à mettre en œuvre le programme national de désarmement et de démobilisation et à prioriser l’adoption du projet de loi sur le processus d’élaboration de la constitution. De plus, sans garantie que le Gouvernement respectera les libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique, les citoyens sud-soudanais sont inquiets concernant les élections et leurs conséquences, a-t-elle ajouté. 

Rappelant qu’elle n’est pas la première Sud-Soudanaise à informer les membres du Conseil de sécurité sur la violence basée sur le genre qui fait rage dans son pays, Mme Yuyada a dénoncé le déni de protection et de justice aux survivants de la violence sexiste, qui est le fruit, selon elle, d’une culture d’impunité quasi totale.  Dans tout le Soudan du Sud, il n’existe que deux abris pour femmes maltraitées qui ne peuvent pas gérer le nombre croissant de survivantes, a-t-elle expliqué, dénonçant en outre l’échec à mettre en place un système judiciaire garantissant la responsabilité pour les crimes commis, y compris en vertu du droit international.  La militante a par ailleurs regretté que, plus d’un an après l’adoption du Plan d’action conjoint pour les forces armées sur la lutte contre la violence sexuelle liée au conflit, sa mise en œuvre ne correspond pas à l’immense souffrance et aux besoins du grand nombre de survivants.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à donner suite à son précédent appel au Gouvernement sud-soudanais pour qu’il améliore le système judiciaire et établisse le tribunal hybride pour le Soudan du Sud.  Le Conseil doit aussi appeler à la mise en œuvre rapide du Plan d’action conjoint, en particulier l’identification et l’adoption de mesures pratiques pour protéger les victimes et les témoins.

Déclarations

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a regretté l’absence de progrès au Soudan du Sud en relevant que le rapport du Secrétaire général souligne que les tâches de la mission de maintien de la paix restent pertinentes.  Vivement préoccupée par la précarité de la situation sécuritaire, caractérisée par la persistance de combats entre groupes armées dans une impunité ambiante, Mme Thomas-Greenfield a exhorté les dirigeants locaux à agir et à exiger que les auteurs d’abus des droits humains rendent des comptes.  Par ailleurs, elle a estimé que la protection des civils, dont la protection des femmes et des enfants, et la lutte contre les violences sexuelles doivent figurer au rang des priorités de la mission.  Elle s’est dite horrifiée par l’ampleur des violences sexuelles liées au conflit et par les informations relatant les meurtres de 400 civils impliquant des dirigeants locaux qui ont soutenu les violences et manipulé les groupes ethniques.  Elle a particulièrement dénoncé l’assassinat de 19 femmes qui ont subi des atteintes sexuelles en public avant d’être tuées, dont la plus jeune avait 13 ans.  Le Gouvernement du Soudan du Sud doit poursuivre tous les auteurs de ces crimes et plus particulièrement les personnes en situation d’autorité, a-t-elle exhorté.

Mme Thomas-Greenfield a ensuite appelé le Gouvernement à mettre en œuvre les dispositions clefs de l’Accord revitalisé pour arriver à une réelle démocratie.  Elle l’a appelé à avancer sur les questions de réforme de la gestion des affaires publiques, sur les dispositions de sécurité transitoire, sur la mise en place d’un tribunal hybride et sur des élections libres et régulières.  Préoccupée par la détention abusive de journalistes et défenseurs des droits humains, la représentante des États-Unis a rappelé au Gouvernement du Soudan du Sud que ces personnes doivent être dans la rue et non derrière les barreaux.  Enfin, elle a noté avec inquiétude que 8,9 millions de personnes auront besoin d’aide humanitaire en 2022, soit 600 000 de plus qu’en 2021, notamment en raison de l’instabilité, des aléas climatiques, de l’inflation, du prix des denrées alimentaires et de l’absence d’accès aux services fondamentaux.

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a estimé que les conditions ne sont pas propices à la tenue des scrutins prévus au Soudan du Sud.  Il a déploré le « rétrécissement » de l’espace civique dans le pays, ainsi que les entraves à l’exercice des libertés fondamentales.  Les autorités du Soudan du Sud doivent remédier à de telles restrictions, a réclamé le délégué.  Il a également estimé que la situation sécuritaire est toujours aussi critique dans le pays, des milliers de déplacés continuant de fuir les violences.  Il a fermement condamné la récente attaque contre un convoi du PAM et invité le Gouvernement à s’abstenir de toute ingérence dans le travail des agents humanitaires.  Il a souligné l’importance de s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité.  Le représentant a par ailleurs salué la place laissée dans le rapport du Secrétaire général aux incidences des changements climatiques.  Le délégué du Mexique s’est enfin dit en faveur du renouvellement de la MINUSS.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a noté que l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud continue de fonctionner et que le cessez-le-feu est dans son ensemble respecté.  Elle a salué la volonté des dirigeants sud-soudanais d’organiser des élections en 2023, espérant que la MINUSS sera en mesure de fournir l’assistance nécessaire à la conduite de ces élections en cas de demande de la partie sud-soudanaise.  La déléguée s’est félicitée des contacts entre le Gouvernement et les non-signataires de l’Accord revitalisé, faisant notamment état d’accords avec les dissidents du Mouvement/l’Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition) de la faction « Kitgwang ».  Elle a rendu hommage aux efforts de médiation de l’IGAD dans ce processus, et surtout à ceux du Soudan.  La représentante a dit soutenir l’initiative de l’Ouganda qui s’est dit disponible pour accueillir la réunion des dirigeants sud-soudanais.  Elle a également accueilli favorablement la poursuite de la médiation de la Communauté de Sant’Egidio.

Mme Evstigneeva a noté la baisse générale du niveau de violence dans le pays, ainsi que la volonté d’un nombre croissant de réfugiés et de déplacés de retourner chez eux.  En même temps, ces personnes sont préoccupées par les rapports faisant état de conflits armés locaux sporadiques, a-t-elle souligné.  Alors que le Conseil de sécurité se prépare, dans les prochains jours, à examiner la prorogation du mandat de la MINUSS, la déléguée a insisté sur le fait que le nouveau mandat doit tenir compte de manière adéquate des besoins réels du pays.  Il ne serait pas approprié, à son avis, que le mandat insiste sur la dimension « droits de l’homme » et renforce de fait la pression exercée sur Djouba sur d’autres questions sous prétexte d’élections.  Pour la Fédération de Russie, cela serait contre-productif.  La représentante a appelé le Conseil de sécurité à consacrer davantage d’attention à l’accompagnement des autorités dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et au renforcement de leurs capacités en matière de règlement de conflits locaux.

Mme GERALDINE BYRNE-NASON (Irlande) s’est félicitée des progrès réalisés dans le processus d’élaboration d’une constitution sud-soudanaise et a appelé à la poursuite de ces efforts.  Elle a, en revanche, regretté que la mise en œuvre de l’Accord revitalisé reste limitée.  À ses yeux, les avancées sont trop lentes, notamment si l’on veut faire de la tenue d’élections l’an prochain un objectif réaliste.  Elle s’est ensuite déclarée choquée par les informations en provenance de Tamboura, qui font état d’une violence infranationale politisée et de graves atteintes aux droits humains, en particulier du recours systématique à la violence sexuelle.  « Nous ne pouvons fermer les yeux face à de tels abus », a-t-elle affirmé, avant de souligner le rôle essentiel que joue la MINUSS dans la surveillance et les enquêtes sur ces violations.  Elle a également salué le déploiement de bases opérationnelles temporaires de la Mission pour soutenir les populations touchées par cette insécurité accrue. 

La représentante s’est également alarmée de l’ampleur des besoins humanitaires au Soudan du Sud, regrettant l’incapacité de l’État à faire face à cette crise.  Appelant toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et à permettre l’accès de l’aide à ceux qui en ont le plus besoin, elle a aussi alerté sur « l’impact indéniable » des changements climatiques sur la paix et la sécurité dans le pays.  Des inondations intenses et de longue durée ont accru les déplacements de population, perturbé l’agriculture et modifié les schémas de migration du bétail, ce qui risque d’intensifier les violences, a-t-elle averti, non sans s’enorgueillir que l’Irlande finance un conseiller en sécurité climatique auprès de la MINUSS afin d’identifier et de traiter les risques de sécurité liés au climat et de soutenir des mesures communautaires de consolidation de la paix.  Elle a d’autre part plaidé pour un élargissement de l’espace civique au profit de la société civile, jugeant crucial, dans la perspective des élections, de garantir un processus démocratique inclusif, qui permette en particulier la participation des femmes.  Enfin, après avoir salué l’engagement des pays voisins et d’acteurs tels que l’Union africaine (UA) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), elle s’est réjouie de l’initiative de médiation du Président de l’Ouganda et de la récente visite du Conseil de paix et de sécurité de l’UA à Djouba, Jongleï et Pibor.  Elle a espéré que ces deux initiatives contribueront à la mise en œuvre effective de l’Accord revitalisé. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) qui s’exprimait aussi au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a exhorté les groupes non-signataires de l’Accord revitalisé à se joindre au processus de la mise en œuvre de l’Accord.  Aux dirigeants politiques, il a demandé de recentrer leurs efforts et leurs ressources sur la mise en œuvre des éléments restants de l’Accord de paix revitalisé.  Le soutien de la communauté internationale à ce processus est indispensable, a fait remarquer M. Kimani qui a prévenu que les élections ne peuvent à elles seules garantir la stabilité sans une application adéquate des dispositions de l’Accord revitalisé.  À cet égard, il a jugé cruciale la « retraite » proposée aux dirigeants du Soudan du Sud pour renforcer la confiance mutuelle et permettre aux parties d’élaborer une feuille de route pour le reste de la période de transition.  

Le groupe des A3 reste préoccupé par les affrontements ethniques et intercommunautaires dans certaines parties du pays, ainsi que par les combats entre factions, a dit M. Kimani qui a demandé aux autorités de mener des enquêtes sur tous les incidents de violence et de veiller à ce que les responsables répondent de leurs actes.  Il incombe en outre aux parties d’accélérer l’unification des forces armées sans plus tarder, a-t-il ajouté.  Préoccupé également par la détérioration de la situation économique et humanitaire au Soudan du Sud, M. Kimani a appelé à une intensification urgente de l’aide humanitaire.  Dénonçant les attaques, les meurtres et les harcèlements des travailleurs humanitaires, il a exhorté le Gouvernement à prendre les mesures appropriées pour protéger les humanitaires et faciliter l’accès à tous ceux qui en ont besoin.  Il a plaidé par ailleurs en faveur de la levée des sanctions et de l’embargo sur les armes contre le Soudan du Sud.  M. Kimani a, enfin, soulevé la question de l’impact des conditions météorologiques extrêmes.  Selon lui, l’élaboration de stratégies d’atténuation des changements climatiques, l’adaptation et le renforcement de la résilience devraient faire partie des efforts de relèvement et de l’aide au développement accordée au Soudan du Sud.  

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a souligné trois problèmes qui méritent selon lui l’attention et l’action du Conseil au Soudan du Sud, en premier lieu la protection des civils.  « Nous savons tous et apprécions que les autorités sud-soudanaises en assument la responsabilité », a déclaré le représentant, pour qui il s’agit également d’une pierre angulaire du mandat de la MINUSS.  En ce sens, il a noté que le rapport récemment publié par la Mission montre clairement que le Soudan du Sud a progressé.  Non seulement les incidents violents à l’encontre des civils ont baissé, mais aussi les pertes humaines, s’est-il félicité, en espérant que cette tendance se poursuive.

La deuxième question cruciale est le processus de paix, selon le représentant du Brésil qui a salué les dispositions transitoires importantes que sont la mise en place de l’Assemblée législative nationale et l’approbation du projet de loi d’amendement de la Constitution.  Cependant, la mise en œuvre de l’Accord revitalisé est lente, a-t-il regretté en exhortant le Soudan du Sud à agir rapidement pour mettre en place les forces unifiées nécessaires.  Enfin, il s’est alarmé de la résurgence de la violence intercommunautaire, en se demandant « si des motifs mesquins et des comportements criminels inconséquents sont les causes de ces incidents ».  Car pour le représentant, ce qui alimente les meurtres et les destructions, ce sont aussi la vengeance, les différends non résolus et une insatisfaction plus générale à l’égard des dispositions transitoires en matière de sécurité que l’Accord revitalisé promettait d’apporter.  Selon lui, le règlement des conflits, la médiation, les bons offices ne seront vraiment efficaces qu’avec des stratégies de développement solides et une distribution équitable des ressources.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué l’adoption récente du projet de loi d’amendement de la Constitution, tout en s’inquiétant de la lenteur des progrès et du coût humain que cela entraîne.  Il s’est également préoccupé de l’absence de progrès dans l’unification des forces et leur redéploiement, ainsi que des rapports faisant état de désertions, pour ensuite dénoncer la situation des droits humains dans le pays, notamment pour ce qui est de la liberté d’expression et d’opinion.  Il a en outre dénoncé l’augmentation des violences sexuelles au Soudan du Sud et exigé que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice, soulignant qu’il appartient au Gouvernement du Soudan du Sud de respecter ses obligations et responsabilités vis-à-vis de son peuple.  Compte tenu de la situation humanitaire qui prévaut dans le pays, le représentant a appelé le Gouvernement sud-soudanais à réduire ses ingérences dans l’assistance humanitaire.  Il lui a également demandé de promouvoir les conditions propices à la tenue d’élections libres et régulières.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a plaidé pour que la protection des civils reste une priorité essentielle de la MINUSS, tout en rappelant que cette protection relève de la responsabilité première du Gouvernement du Soudan du Sud.  Face à la persistance des violences sexuelles et sexistes, des violations des droits humains et des droits des journalistes, la représentante a expliqué que la reddition de la justice est essentielle pour lutter contre l’impunité.  Dans ce contexte, elle a souligné l’importance des audiences foraines soutenues par la MINUSS.  Elle s’est par ailleurs félicitée que le Gouvernement se soit engagé en faveur des futures élections avant de rappeler la nécessité de favoriser la participation égale de jeunes et des femmes à ces élections.  En conclusion, la représentante de l’Albanie a appuyé la prorogation du mandat de la MINUSS avec ces quatre piliers avant d’exhorter toutes les parties à favoriser la mise en œuvre de l’Accord revitalisé, à soutenir la réforme des institutions et à garantir la participation des femmes, des jeunes et de la société civile à tous les efforts de consolidation de la paix.  

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite gravement préoccupée par la situation au Soudan du Sud, où le niveau de violence reste extrêmement élevé.  Elle a demandé une enquête sur les graves violations des droits humains, notamment dans l’État Unité, avant de souligner les progrès accomplis par les autorités dans la conduite des réformes, y compris dans le domaine des finances publiques.  La déléguée a néanmoins réclamé des efforts accrus contre la corruption.  Invoquer un manque de ressources pour expliquer les retards dans la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé n’est pas convaincant, a-t-elle estimé.  La déléguée a ensuite dénoncé les arrestations de défenseurs des droits humains et rappelé qu’il est de la responsabilité du Gouvernement de protéger les civils, y compris les enfants.  Les risques sécuritaires liés au climat doivent être intégrés dans les stratégies du Gouvernement.  Enfin, la déléguée de la Norvège s’est dite en faveur du renouvellement du mandat de la MINUSS.

M. DAI BING (Chine) a appelé la communauté internationale à faire œuvre de patience avec le plus jeune État du monde et à éviter de faire pression sur le Gouvernement.  Il a dit espérer que toutes les parties au Soudan du Sud mettront en œuvre l’Accord revitalisé.  De même, la constitution des forces unifiées doit se poursuivre avec l’accompagnement de la communauté internationale et il faut davantage d’investissements dans le secteur de la sécurité.  Le représentant a également appelé les partenaires internationaux à renforcer leur aide humanitaire au Soudan du Sud.  Il a relevé que les mesures coercitives unilatérales ont aggravé les souffrances du peuple.  Elles doivent être levées au plus vite, a plaidé le délégué.  Il a terminé en rappelant le soutien apporté par la Chine au Soudan du Sud, notamment l’envoi de fournitures médicales, y compris des vaccins contre la COVID-19, ainsi qu’une aide dans le secteur agricole. 

Mme SHERAZ GASRI (France) a salué les avancées dans la mise en œuvre de l’accord de paix, en particulier la reconstitution de l’Assemblée nationale législative de transition, la réduction des entraves à la mobilité de la MINUSS et la protection des personnes déplacées.  Elle s’est toutefois déclarée préoccupée par le retard accumulé alors que la période de transition touche à sa fin.  Notant à cet égard que la mise en œuvre des arrangements sécuritaires reste inachevée, elle a exhorté les parties signataires à trouver un accord sur la composition d’un commandement unifié et à finaliser la formation des combattants.  Ces mesures sont indispensables pour créer des conditions propices à la tenue des élections et font aussi partie des critères en vue de la révision de l’embargo sur les armes, a-t-elle relevé, appelant à la mise en place d’un cadre constitutionnel et juridique pour le scrutin et à une opérationnalisation de la commission électorale nationale.  Nous comptons sur la MINUSS, en coordination avec l’IGAD et l’UA, pour apporter son assistance à ces préparatifs et pour évaluer si les conditions d’un processus électoral crédible sont réunies, a souligné la représentante, selon laquelle la France est prête à renforcer le mandat d’assistance technique de la MINUSS, à condition que les objectifs fixés par le Conseil de sécurité soient atteints par le Gouvernement.

La déléguée a d’autre part estimé que la persistance des violences contre les civils rend nécessaire un renforcement de la lutte contre l’impunité et pour le respect du droit international humanitaire.  Se disant inquiète du niveau élevé des violences, qui touchent des populations déjà fragilisées par les inondations, la crise sanitaire et le manque de services de base, elle a salué la réactivité de la MINUSS et a appelé les autorités sud-soudanaises à poursuivre leur coopération avec la Mission pour faciliter le déploiement de juges et développer des projets de réduction des violences communautaires.  En conclusion, elle a condamné les affrontements entre les parties signataires de l’Accord revitalisé ainsi que les attaques contre les personnels humanitaires et médicaux, rappelant au passage que, pour ces derniers, le Soudan du Sud est l’un des pays les plus dangereux au monde.  « Les auteurs de ces violences doivent être traduits en justice et sanctionnés par ce Conseil. »

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a appelé à accélérer la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, en particulier la formation et l’unification des forces unifiées.  Concernant la préparation des élections, il a espéré que les dirigeants du Soudan du Sud prendront des mesures qui vont dans la bonne direction, notant que la mise en œuvre des dispositions transitoires en matière de sécurité demeure essentielle pour le processus électoral. Il a aussi demandé la reprise rapide de la médiation de la Communauté de Sant' Egidio avec les non-signataires.  

Préoccupé par la précarité de la situation sécuritaire dans certaines régions du Soudan du Sud, le délégué a demandé aux groupes non-signataires de s’engager avec le Gouvernement pour faire partie de la tendance dominante. Il a aussi demandé à la communauté internationale et à l’ONU de combler les lacunes en matière de ressources et de capacités du gouvernement à faire face à la situation humanitaire.  

Il a noté l’amélioration de la communication entre la MINUSS et le Gouvernement, rappelant la responsabilité qu’a l’État hôte de traduire en justice les auteurs de crimes commis contre les Casques bleus.  Le Soudan du Sud a besoin du soutien sans réserve de la communauté internationale, les actions au Conseil devraient encourager les autorités du pays à progresser vers la pleine mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, a-t-il souligné.  

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a considéré que la mise en œuvre de l’Accord revitalisé reste la base pour réaliser la stabilité, la paix, le développement et l’unité au Soudan du Sud.  Elle a espéré que les efforts du Gouvernement à cet égard conduiront à une solution pacifique, qui comprendra un dialogue significatif et complet avec les parties concernées, ainsi qu’une participation accrue des femmes au processus de paix, dans le but d’atteindre les 35% de participation prévus par l’Accord.  En outre, la poursuite des efforts de médiation est nécessaire pour permettre aux parties d’évoluer vers une paix durable, a encouragé la représentante.

Malgré les efforts déployés au niveau politique, la situation sécuritaire dans certaines zones reste source de préoccupation, notamment dans la région du Haut-Nil, a constaté la déléguée pour qui cette situation exige une réponse globale.  Toutes les parties doivent faire preuve de retenue, a-t-elle exhorté.  La représentante a en outre exprimé sa profonde inquiétude face à l’augmentation des besoins humanitaires dans le pays, notant que selon des rapports récents des Nations Unies, environ 8,9 millions de personnes ont besoin de protection et de services de base.  Pour relever ces défis, elle a jugé nécessaire d’intensifier les efforts internationaux et de demander à toutes les parties de garantir l’accès de l’aide humanitaire. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: la situation financière de l’ONU, la gestion des ressources humaines et l’assurance maladie après cessation de service au cœur de la session

Soixante-seizième session,
10e séance plénière – matin
AG/AB/4379

Cinquième Commission: la situation financière de l’ONU, la gestion des ressources humaines et l’assurance maladie après cessation de service au cœur de la session

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, a repris aujourd’hui une session qui, selon les interventions, se concentrera sur les solutions à la situation de trésorerie de l’ONU, la réforme de la gestion des ressources humaines, bloquée depuis cinq ans, et le financement de l’assurance maladie des fonctionnaires après la cessation de service.

S’agissant de la situation de trésorerie, la Commission a été saisie des propositions du Secrétaire général visant, entre autres, à augmenter de 200 millions de dollars la dotation du Fonds de roulement pour la porter à 350 millions de dollars et à reconstituer les ressources du Compte spécial en y versant au moins 63,2 millions de dollars, à savoir 50% des crédits qui doivent être déduits des sommes mises en recouvrement pour 2022, le montant restant devant être constitué par des contributions volontaires.  Le Secrétaire général propose aussi de n’approuver la restitution de crédits au titre du budget ordinaire que si le montant des contributions non acquittées est inférieur à celui des réserves de liquidités du budget ordinaire, et de plafonner le montant des crédits restitués pour qu’il n’excède pas la différence entre les réserves de liquidités et les contributions non acquittées. 

Tout en se félicitant que l’année 2021 ait connu un taux de recouvrement record en 20 ans de 113%, l’ensemble des délégations a dit craindre qu’il ne s’agisse que d’une anomalie conjoncturelle, insistant sur l’obligation des États de payer leurs contributions à temps, en totalité et sans conditions.  Elles ont aussi insisté sur la recherche d’un consensus autour de la gestion des ressources humaines, « pilier » de la réforme plus large des Nations Unies.  Les délégations ont regretté le fait qu’un accord leur échappe depuis cinq ans, alors qu’elles sont toutes d’accord sur la nécessité d’une ONU efficace, flexible et axée sur les résultats. 

L’Afrique du Sud et l’Arabie saoudite ont rappelé la pertinence de l’Article 101.3 de la Charte qui précise « l’importance d’un recrutement effectué sur une base géographique aussi large que possible ».  Si la première a exhorté le Secrétariat de l’ONU à soumettre des recommandations pour rendre les stages à l’ONU plus accessibles aux jeunes des pays africains et des pays en développement en général, la seconde a suggéré une rotation du personnel à l’instar de ce qui existe dans les ministères des affaires étrangères et certains fonds et programmes des Nations Unies.  

Pour ce qui est de l’assurance maladie après la cessation de service, le Secrétaire général propose de maintenir le financement par répartition pour les fonctionnaires recrutés avant le 1er janvier 2023 et pour les autres, une cotisation de 6% à prélever sur la masse salariale et la création d’une réserve financière spéciale.

Réagissant aux nombreuses expressions de solidarité avec l’Ukraine, victime d’une agression russe aux lourdes conséquences humanitaires et économiques, la Fédération de Russie, appuyée par la Syrie, a rejeté les « fausses allégations » sur l’« opération militaire spéciale ».  Elle a prié les délégations de se concentrer sur les questions administratives et budgétaires.

La Cinquième Commission a prévu une autre séance publique mercredi 9 mars, à partir de 10 heures.

ORGANISATION DES TRAVAUX A/C.5/76/L.23

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. MUHAMMAD JAWAD AJMAL (Pakistan) a insisté sur l’accès en temps voulu aux documents.  S’attardant sur la gestion des ressources humaines, il a réaffirmé la volonté de son groupe de dégager un consensus sur une répartition géographique « équilibrée » du personnel, les vacances de postes, les faiblesses dans la sélection du personnel, l’égalité hommes-femmes et la gestion de la performance.  Venant à la situation financière, il a prévenu que toutes les alternatives administratives en matière de gestion des ressources seraient vaines si la tendance aux arriérés de paiement se maintient.  Les États Membres doivent s’acquitter de leur contribution à temps et sans condition, a-t-il martelé, avant de conclure sur le principe de responsabilité qu’il a défini comme une manière de surveiller la mise en œuvre effective des décisions de l’Assemblée générale.  Quelles réformes faut-il pour assurer le respect de ce principe? a demandé le représentant.

M. THIBAULT CAMELLI, de l’Union européenne, a d’abord exprimé l’entière solidarité de l’Union européenne et de ses États membres avec l’Ukraine et le peuple ukrainien.  Il a condamné dans les termes les plus énergiques l’agression de la Fédération de Russie qui viole de manière flagrante le droit international et la Charte des Nations Unies et compromet la sécurité et la stabilité internationales.  Après s’être dit alarmé et horrifié par l’impact humain de cette agression, le représentant a rappelé que la protection des civils conformément au droit international doit rester la priorité absolue.

Il a remercié la Cinquième commission pour avoir adopté les meilleures décisions pour l’Organisation, son personnel et les peuples qu’elle sert.  Face à la multiplication des recommandations dépourvues de base technique, il a espéré que le Président et les membres du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) feront tout remplir leur mandat technique grâce à une expertise neutre, factuelle et transparente et pour publier rapidement leurs rapports afin d’enrichir les travaux de la Commission.

Mettant l’accent sur les priorités de l’UE, M. Camelli a cité trois domaines particulièrement importants.  Il a d’abord appelé à un accord sur un train de mesures relatives à la gestion des ressources humaines parce qu’« il n’est tout simplement plus possible » de différer les décisions.  Il est grand temps, a-t-il insisté, de garantir au personnel des Nations Unies un cadre de travail actualisé et amélioré, une gestion des ressources humaines modernes et efficaces. 

S’inquiétant en outre des dernières tentatives de saper l’indépendance des organes de contrôle et d’entraver leurs enquêtes, le représentant a réitéré son ferme engagement en faveur d’un cadre de responsabilisation solide.  « Pierre angulaire de la réforme de la gestion des ressources et partie intégrante de la délégation de pouvoir, la responsabilité du Secrétariat, mais aussi de toutes les parties prenantes, est essentielle pour favoriser une culture d’éthique et de transparence, et pour prévenir et traiter tous les types de fautes, a insisté le représentant.

Enfin, il a souligné la question de l’amélioration de la situation de trésorerie de l’ONU et le financement de l’assurance maladie après la cessation de service.  Il a exhorté la Commission à résister à la tentation de reporter l’examen de ces éléments importants et de trouver des solutions responsables à ces problèmes structurels.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. FELIX-FILS EBOA EBONGUE (Cameroun) a relevé que malgré les efforts du Secrétariat, la Commission subit toujours des retards dans la publication des documents, dans toutes les langues officielles de l’Organisation, en violation du Règlement intérieur de l’Assemblée générale.  Il s’est félicité que la question de la gestion des ressources humaines soit à l’ordre du jour de cette session.  Il a dit craindre que d’autres questions avec moins ou pas de lien avec celle des ressources humaines trouvent leur place, rendant la session encore plus chargée et empêchant les États Membres d’épuiser le programme de travail ou même d’examiner sérieusement chaque point de l’ordre du jour.  En ce qui concerne le fond de la question des ressources humaines, il a promis de se concentrer sur « la diversification » des fonctionnaires de l’ONU, en insistant sur la répartition géographique équitable, le financement du programme des stagiaires, le processus de recrutement ou encore la mobilité du personnel.  Le statu quo n’est plus une option si nous ne voulons pas que « notre maison commune s’effondre ».  Une gestion obsolète des ressources humaines conduira inévitablement à une Organisation défaillante, a averti le représentant. 

Au nom du groupe CANZ (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), Mme FIONA WEBSTER (Australie) a condamné l’attaque « non provoquée et injustifiée » de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Elle a appelé les autorités russes à cesser les violations du droit international et à retirer immédiatement leurs forces militaires.  S’agissant du principe de responsabilité à l’ONU, de la situation financière et la gestion des ressources humaines, elle a milité pour un personnel agile et fort pour relever les défis de la COVID-19, des changements climatiques ou encore de la paix.  L’ONU doit avoir un personnel qui reflète la diversité géographique des États Membres et la parité hommes-femmes.  Nous voulons, a-t-elle dit, « un personnel efficace, professionnel et intègre ».  Elle a donc regretté, à son tour, que la Cinquième Commission n’ait pas pu trouver un consensus sur la gestion de ressources humaines, au cours des sessions précédentes.  

S’agissant de la situation de trésorerie, elle a souligné que les problèmes structurels nécessitent des solutions sur le long terme.  La représentante a exhorté tous les États Membres à s’acquitter de leurs contributions intégralement, à temps et sans conditions.  Elle a plaidé pour la création de réserves de liquidités et pour des procédures budgétaires « un peu moins rigides ». 

M. TETSUYA KIMURA (Japon) a, à son tour, profité de l’occasion pour exprimer la pleine solidarité de son pays avec le peuple ukrainien et appeler la Fédération Russie à écouter « la majorité écrasante » de la communauté internationale qui s’est exprimée dans la résolution, adoptée avant-hier, par l’Assemblée générale. 

Le représentant a ensuite pris note de l’ordre du jour d’une session de la Commission « relativement courte » qui inclut des questions importantes telles que le principe de responsabilité, la chaîne d'approvisionnement, l’assurance maladie après la cessation de service, l’amélioration de la situation financière de l’ONU et, surtout, la gestion des ressources humaines.  Il a particulièrement mis l’accent sur cette dernière question qu’il a qualifiée « d’élément clef » de l’efficacité et du bon fonctionnement de l’Organisation.  Il a donc regretté que la Commission n’ait pas réussi à donner des orientations adéquates au Secrétaire général, depuis plusieurs années.  Il a appelé les délégations à redoubler d’efforts et à profiter des négociations sectorielles et des discussions plus ciblées sur chaque point de la question liée à la gestion des ressources humaines.  Enfin, il a réitéré l’importance cruciale de préserver le rôle de la Cinquième Commission et sa pratique du consensus.

M. MOHAMMED ABDULAZIZ H. ALATEEK (Arabie saoudite) a aussi mis l’accent sur les questions de la gestion des ressources humaines et de la situation financière de l’Organisation.  Pour ce qui est des ressources humaines, le représentant a milité pour un système qui permette un recrutement compétitif et la rétention du personnel.  La pierre angulaire de cette démarche est décrite à l’Article 101.3 de la Charte qui précise « l’importance d’un recrutement effectué sur une base géographique aussi large que possible ».  Le représentant a aussi appelé le Secrétariat à mettre en place une règle de rotation du personnel à l’instar de ce qui existe dans les ministères des affaires étrangères des États Membres et certains fonds et programmes des Nations Unies.  

S’agissant de la situation financière de l’Organisation, il a exhorté tous les États Membres à verser leurs contributions à temps et dans leur intégralité, avant de souligner la pertinence de la résolution 73/307 de l’Assemblée générale.  Il a aussi dit la nécessité de rembourser dans les meilleurs délais les pays fournisseurs de troupes aux opérations de paix.

M. CHENG LIE (Chine) a rappelé, à son tour, que la Cinquième Commission n’a pas pu adopter de résolution sur la gestion des ressources humaines depuis plusieurs sessions, privant le Secrétariat de directives essentielles.  Il a, à cet égard, défendu le principe d’une répartition géographique équitable et appelé le Secrétariat de l’ONU à prendre les mesures qu’il faut pour recruter davantage de ressortissants des pays en développement.  Venant à la situation de trésorerie, il a souligné que la bonne gestion des fonds reste tributaire de leur disponibilité, ce qui faciliterait d’ailleurs la mise en place des réformes attendues.  Le plus grand contributeur aux budgets de l’ONU, a accusé le représentant, n’a toujours pas versé la totalité de son dû de l’année dernière.  Il s’est aussi insurgé contre les sanctions unilatérales qui empêchent des pays de payer leur contribution.  Pour ce qui est de l’assurance maladie après la cessation de service, il a réclamé une solution « raisonnable », tenant compte du bien-être du personnel et des finances de l’Organisation.  Nous espérons que les préoccupations des pays en développement pour ce qui est des questions liées aux procédures d’achat seront prises en considération, a ajouté le représentant.

M. MASOTSHA MONGEZI MNGUNI (Afrique du Sud) a demandé des efforts pour que les rapports du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) puissent être disponibles à temps dans les six langues officielles.  Il a dit accorder une grande attention à la gestion des ressources humaines, dont les questions de mobilité, de composition du personnel et des programmes de stage.  S’agissant de cette dernière question, il a voulu des éclaircissements sur la manière de rendre les stages plus accessibles aux candidats de l’Afrique et des pays en développement, en général.  Par ailleurs, il a dit attendre des recommandations sur la question de la parité entre les genres et la représentation géographique équitable.  L’Article 101.3 de la Charte stipule, a-t-il rappelé, que « la considération dominante dans le recrutement et la fixation des conditions d’emploi du personnel doit être la nécessité d’assurer à l’Organisation les services de personnes possédant les plus hautes qualités de travail, de compétence et d’intégrité.  Sera dûment prise en considération l’importance d’un recrutement effectué sur une base géographique aussi large que possible ».  Il a aussi demandé des éclaircissements sur la situation du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

M. JESÚS VELÁZQUEZ CASTILLO (Mexique) a d’emblée salué les efforts déployés par le Secrétariat de l’ONU pour résoudre ses problèmes financiers.  La Cinquième Commission, a-t-il dit, doit parvenir à des décisions « fermes et énergiques » pour éliminer les obstacles structurels, offrir une certaine souplesse dans la gestion budgétaire et assurer un financement prévisible, durable et efficace à l’ONU.  Concernant la gestion des ressources humaines, le Mexique, a dit le représentant, espère que la Commission parviendra à un accord.  L’objectif est de progresser vers un système moderne, responsable et de bonne qualité, qui soit en même temps agile, efficient et efficace.  La Cinquième Commission, a-t-il souligné, doit offrir une définition claire des responsabilités du personnel et des départements et éviter les doubles emplois et le gaspillage des ressources.  Ce système doit favoriser la mobilité, la diversité, le rajeunissement et l’excellence qui devraient être marqués par la résilience, l’adaptabilité, la transparence et la responsabilité.  Pour ce qui est du statut du personnel, tout doit être conforme au mandat que les États Membres ont confié au Secrétaire général.  S’agissant du principe de responsabilité, le représentant s’est dit préoccupé par les mauvaises conduites, en particulier sur le terrain.  Il faut mettre en œuvre des mesures de prévention, a-t-il demandé. 

M. RICHARD CROKER (Royaume-Uni) a condamné « les actes répréhensibles du Gouvernement russe » en Ukraine, qui constituent une violation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies.  Il a salué le message clair contenu dans la résolution de l’Assemblée générale adoptée mercredi dernier.  Le délégué a ensuite rappelé que cela fait plus de quatre ans que la Commission n’a pas fourni d’orientations pour renforcer la gestion des ressources humaines.  Il est de notre responsabilité de veiller à ce que l’ONU et son personnel aient des politiques modernes et adaptées, a-t-il clamé.

Le renforcement du système de responsabilisation et l’amélioration de la transparence sont essentiels pour une Organisation efficace, a poursuivi le délégué.  Nous sommes impatients de discuter des progrès et de la manière dont nous pouvons renforcer cette culture de responsabilité à tous les niveaux, a-t-il dit.  À cet égard, M. Croker a salué le fait que la situation financière de l’ONU se soit améliorée.  Nous sommes impatients, a-t-il poursuivi, de progresser sur la question de l’assurance maladie après la cessation de service, une question également importante pour la santé financière de l’Organisation.  Enfin, M. Croker a appelé la Commission à assurer des ressources adéquates au mandat du nouveau mécanisme de surveillance du cessez-le-feu en Libye.  

Mme JUN JI SUN (République de Corée) a vigoureusement condamné l’agression russe en Ukraine qui intervient à une période où le maintien de la paix et de la sécurité internationales est plus important que jamais.  La représentante a ensuite exprimé l’appui « indéfectible » de son pays aux réformes lancées par le Secrétaire général et a réclamé un consensus sur la réforme de la gestion des ressources humaines, « pilier » d’une réforme plus large des Nations Unies et « démarche indispensable » pour disposer d’un personnel hautement performant au service d’une Organisation efficace, flexible et orientée sur les résultats.  La représentante a espéré que cette session permettra d’adopter une résolution sur cette question « cruciale » et a, par ailleurs, dit accorder une attention particulière à l’examen du onzième rapport d’étape du Secrétaire général sur l’application du principe de responsabilité.  Nous attendons avec intérêt des résultats « tangibles » des débats de la Commission pour pouvoir formuler des orientations utiles au Secrétariat.  Enfin, elle s’est félicitée de la bonne situation financière de l’Organisation, rappelant que son pays a versé la totalité de sa contribution à temps.

M. UZAMBUMWANA TONA (Rwanda) a demandé à la Cinquième Commission de donner au Secrétaire général et aux Nations Unies les moyens dont ils ont besoin pour mettre en œuvre les mandats.  Il s’est dit préoccupé par les retards dans le remboursement des pays fournisseur de contingents et de personnels de police aux opérations de paix.  Les arriérés de paiement, a-t-il prévenu, ont une incidence non seulement sur la santé financière de l’Organisation mais aussi sur sa faculté à s’acquitter de ses mandats sur le terrain.

M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a prévenu qu’il accordera une attention particulière aux questions des achats, de la gestion des ressources humaines et de la responsabilité.  Il a regretté le fait que depuis cinq ans, la Commission n’ait pu s’entendre sur un projet de résolution relatif aux achats et à la gestion des ressources, sans oublier que le projet de résolution sur le principe de responsabilité n’a pas pu être adopté, l’année dernière.  Face à ce constat, le représentant a voulu faire preuve d’un « optimisme prudent », avant de réclamer la publication en temps voulu des documents et ce, dans toutes les langues officielles de l’ONU, pour la qualité des réunions formelles et informelles.  Il a aussi réclamé un processus de négociation « inclusif et transparent ».  Il n’a pas manqué de rejeter les « fausses allégations » sur l’« opération militaire spéciale » de son pays en Ukraine.  Concentrez-vous sur les questions administratives et budgétaires de l’ONU, a-t-il conseillé aux délégations de la Cinquième commission.

M. CHRISTOPHER P. LU (États-Unis) a condamné « l’attaque injustifiée » de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Il a ensuite dit espérer un consensus sur la gestion des ressources humaines, arguant que la Commission n’a pas été en mesure de donner au Secrétariat des orientations « fondamentales » depuis plusieurs années, avec un impact sur le fonctionnement de l’ONU.  Sur la question des achats, il a également souhaité des directives claires pour le Secrétariat.  Il a enfin plaidé pour que les enseignements tirés pendant la pandémie de COVID-19 soient appliqués, par exemple, aux modalités de travail flexibles.

M. KATLEGO BOASE MMALANE (Botswana) a plaidé en faveur d’une représentation géographique équitable à tous les niveaux de responsabilité au sein du Secrétariat de l’ONU.  Il a appelé ce dernier à adopter des mesures plus novatrices pour la mobilité du personnel et celle des stagiaires.  Il a enfin estimé que le Corps commun d’inspection est un véritable « artisan du changement » dans la gestion de l’Organisation.

M. ESSAM ALSHAHIN (République arabe syrienne) a fermement condamné les délégations qui ont tenu des « propos hostiles » à l’égard de la Fédération de Russie.  Cette dernière, a-t-il martelé, a le droit de défendre son territoire et sa population.  Notre Commission, a-t-il tenu à rappeler, est chargée des questions administratives et financières et à ce titre, elle ne devrait pas laisser les délégations évoquer des questions politiques qui ne relèvent pas de son mandat.  J’invite le Président de la Commission à prier les délégations de se concentrer sur les questions inscrites à l’ordre du jour, a conclu le représentant.

AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur le projet de budget-programme pour 2022 (A/76/7/ADD.29)

Pour l’établissement de Rapport, le Comité a examiné celui du Secrétaire général (A/76/429) qui rappelle que l’Assemblée générale a approuvé deux des mesures qu’il avait présentées pour les opérations de maintien de la paix, à savoir l’envoi d’avis de mise en recouvrement des contributions pour l’intégralité de l’exercice budgétaire, y compris la période pour laquelle le mandat n’a pas encore été approuvé par le Conseil de sécurité; et à titre expérimental, pour trois exercices budgétaires, l’application du principe de la gestion commune des soldes de trésorerie de toutes les opérations en cours.

Le Comité note que, depuis la présentation du rapport du Secrétaire général qui date du 19 octobre 2021, la situation de trésorerie de l’Organisation s’est améliorée par rapport à 2020, le montant des contributions reçues, y compris de la part d’États Membres dont les arriérés remontent à des exercices antérieurs, ayant été élevé.

Dans ce contexte, le Comité dit douter de la proposition du Secrétaire général de faire passer la dotation du Fonds de roulement de 150 à 350 millions de dollars.  Quant à la proposition de reconstituer les ressources du Compte spécial en y versant au moins 63,2 millions de dollars, à savoir 50% des crédits qui doivent être déduits des sommes mises en recouvrement pour 2022, le montant restant devant être constitué par des contributions volontaires, le Comité se dit d’avis que le Secrétaire général devrait s’attacher à mobiliser des contributions volontaires pour financer le Compte spécial. Le Comité s’oppose aussi à la proposition d’approuver la restitution de crédits au titre du budget ordinaire à condition que le montant des contributions non acquittées soit inférieur à celui des réserves de liquidités du budget ordinaire, et plafonner le montant des crédits restitués pour qu’il ne soit pas supérieur à la différence entre les réserves de liquidités et les contributions non acquittées. 

Venant au budget des opérations de paix, le Comité recommande que l’Assemblée générale approuve le maintien de la gestion commune des soldes de trésorerie de toutes les opérations de maintien de la paix en cours, étant entendu que des comptes séparés seraient conservés pour chaque mission.  Le Comité voit aussi des avantages à la proposition d’assouplir les restrictions applicables à l’utilisation du Fonds de réserve pour le maintien de la paix pour qu’il puisse servir de mécanisme de liquidités, usage qui viendrait s’ajouter à l’usage initial, à savoir appuyer le démarrage des nouvelles missions et l’élargissement des missions existantes.  Il dit craindre que l’assouplissement des restrictions n’entraîne une perte d’intérêts pour le Fonds et recommande que l’Assemblée générale, sous réserve qu’elle donne son aval à la proposition, prie le Secrétaire général de lui présenter des formules qui permettraient de facturer des intérêts sur les avances internes et de définir des modalités de calcul, de facturation, de recouvrement et de comptabilisation des intérêts.

Quant à la proposition d’autoriser le Secrétariat à conserver les intérêts perçus par le Fonds de réserve à concurrence du montant nécessaire pour porter le solde des liquidités du Fonds, intérêts compris, à 150 millions de dollars, le Comité explique qu’étant donné que le Secrétariat propose de conserver le mécanisme de gestion commune des soldes de trésorerie et de se servir du Fonds de réserve pour le maintien de la paix comme d’un mécanisme de liquidités, il ne voit pas le bien-fondé de l’idée.  Sur la proposition de ne porter au crédit des États Membres les soldes inutilisés ou les sommes correspondant à l’annulation d’engagements d’exercices antérieurs, que si toutes les sommes dues et exigibles relatives à cette opération ont été réglées aux pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, le Comité n’en voit pas la nécessité.  Il invoque un effet positif qu’a le dispositif de gestion commune des liquidités des opérations de maintien de la paix en cours et de la proposition qui est faite quant à son maintien, ainsi que de la proposition consistant à utiliser le Fonds de réserve comme un mécanisme de liquidités.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. MUHAMMAD JAWAD AJMAL (Pakistan) a exhorté les États Membres à régler à temps et dans leur intégralité leurs contributions, avant de souligner que l’exécution des mandats dépend de la disponibilité des ressources.  La faculté de l’Organisation d’honorer ses engagements dépend des contributions effectivement perçues, a-t-il insisté, avant de préciser que les arriérés se traduisent aussi par le ralentissement des recrutements et du rythme des dépenses, lequel a des effets délétères sur l’exécution des mandats.  Le représentant s’est également inquiété des déficits dans les opérations de paix clôturées.

M. AXEL VON SCHWERIN, de l’Union européenne, s’est dit soulagé que la situation financière de l’ONU se soit améliorée et que les mesures de conservation mises en place en 2020 et au début de 2021 ne soient plus nécessaires.  Le représentant a tout de même réitéré son appel au paiement des contributions intégralement et à temps.  Dans les cas exceptionnels où le paiement s’avère impossible, a-t-il exhorté, les États doivent communiquer au Secrétariat en temps utile leurs plans de paiement « de manière claire et fiable ».  

Il a dit craindre que l’amélioration de la situation, « quoiqu’incertaine et partielle », ne procure « un faux sentiment » de soulagement.  Il faut, a-t-il conseillé, s’attaquer aux causes structurelles de la « spirale descendante » des liquidités et reconnaître que le cadre réglementaire du budget ordinaire est « rigide », rendant difficile une gestion efficace d’une trésorerie déjà tendue.  L’ONU, a estimé le représentant, est confrontée à un cercle vicieux dans lequel l’obligation de rendre les sommes non dépensées aux États aggrave encore la situation de trésorerie.  En 2023, le déficit pourrait dépasser les 200 millions de dollars, a pronostiqué le représentant.  Il a d’ailleurs regretté que les déficits du budget ordinaire entravent la liquidation des opérations de paix fermées.  Assurer la santé financière de l’Organisation est une responsabilité partagée, fondamentale pour l’exécution des nombreux mandats et missions, a conclu le représentant. 

Au nom de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. TSU TANG TERRENCE TEO (Singapour) a salué l’amélioration de la situation financière de l’Organisation, surtout en ces temps d’incertitudes du fait de la pandémie de COVID-19.  Il a dit espérer que cette « embellie » deviendra la norme et pas une exception.  Le versement en temps voulu et dans leur intégralité des contributions est « la clef » de la stabilité budgétaire et financière de l’ONU, a martelé le représentant.

Également au nom du Liechtenstein, M. MIKE MARTIN AMMANN (Suisse) s’est réjoui qu’au début de cette année, la situation financière soit « plus détendue » que les années précédentes et que les rentrées d’argent aient atteint un niveau record.  Toutes les restrictions sur les dépenses sont désormais levées, s’est félicité le représentant.  C’est la preuve, a-t-il dit, que le paiement des contributions est un moyen efficace d’éviter les crises de trésorerie.  Plus tôt le Secrétariat recevra les contributions, mieux il pourra décider de l’allocation des ressources et limiter les perturbations dans le travail.  Les mandats pourront être exécutés, sans une hiérarchisation exclusivement fondée sur les fonds disponibles, a encore déclaré le représentant.  Il a invité les États Membres à maintenir une tendance, « qui va dans le bon sens », et à mettre en place des mesures dissuasives « claires » pour éviter les arriérés de paiement. 

L’ONU et ses États Membres ne sont pas à l’abri d’une autre crise, a prévenu le représentant.  Les restrictions sur les dépenses autres que les postes n’ont pas suffi à compenser l’insuffisance des fonds.  Sans une intervention « forte et décisive » de l’Assemblée générale, l’on peut s’attendre à un sous-financement systématique des mandats de l’ONU.  En fin de compte, a poursuivi le représentant, la hiérarchisation des tâches par le Secrétariat, compte tenu de la situation de trésorerie, empêchent les États de contrôler comme il se doit l’exécution des mandats.  Il est essentiel, a-t-il martelé, d’examiner les problèmes de liquidités de manière globale et à long terme et de trouver des solutions durables.  Le Secrétaire général doit disposer d’une plus grande marge de manœuvre et être autorisé à réaffecter, selon les besoins, les ressources à différents chapitres du budget, tout en garantissant une responsabilité et une transparence totales à l’égard des États Membres, a plaidé le représentant.

M. TETSUYA KIMURA (Japon) s’est dit heureux d’apprendre que la situation financière de l’Organisation s’est améliorée, grâce à un taux de recouvrement de 113,3% des contributions au budget ordinaire en 2021 ainsi qu’aux efforts continus du Secrétariat pour mieux gérer les liquidités.  Grâce à ces efforts collectifs, l’Organisation pourrait même commencer cette année avec un excédent de plus de 300 millions de dollars, s’est félicité le représentant.  Il a rappelé qu’il incombe à chaque État Membre de régler sa contribution intégralement et en temps voulu, avant de préciser que le Japon a fidèlement rempli ses obligations, même sous l’impact de la pandémie de COVID-19 et la grave situation financière intérieure.  

Après avoir salué une gestion « prudente et efficace » des liquidités, il a néanmoins avoué qu’il reste préoccupé par le budget ordinaire.  Il a donc salué les propositions du Secrétaire général.  Il faut fixer des niveaux de ressources « réalistes » pour l’exécution des mandats confiés, a-t-il dit, tout en prévenant que les contributions des États Membres ne sont pas illimitées.  Il est de la responsabilité partagée des États Membres et du Secrétariat de chercher constamment à améliorer l’efficacité dans l’utilisation des ressources, au nom du contribuable.  Le représentant a insisté sur une discipline financière « indispensable » pour le bon fonctionnement de l’ONU et une mise en œuvre « responsable » de ses mandats.

Mme HIND JERBOUI (Maroc) a rappelé la responsabilité des États Membres de payer les contributions dans leur intégralité et dans les délais afin de permettre à l’ONU de disposer des ressources nécessaires à l’exécution efficace de ses mandats.  Saluant l’amélioration de la situation financière, grâce à l’appel lancé il y a un an par le Secrétaire général, la représentante s’est réjouie de ce que son pays figure parmi les premiers à voir honoré les engagements au titre du budget ordinaire.  Elle a appelé tous les États Membres à faire de même et a renouvelé son soutien aux mesures prises par le Secrétaire général pour doter l’ONU d’une assise financière stable. 

Mme MARIVIL VILLA VALLES (Philippines) a salué l’amélioration de la situation financière de l’ONU.  Si les efforts actuels ont abouti à des liquidités supplémentaires, il n’y a pas eu de réel impact sur l’état général de l’Organisation, a-t-elle relevé.  Elle a appelé à un nouvel examen des propositions du Secrétaire général et à une bonne analyse de la situation, ce qui implique une bonne compréhension des niveaux actuels du Fonds de roulement, du Compte spécial et de la gestion des fonds.  La représentante a également souhaité une mise à jour des initiatives du Secrétaire général pour reconstituer le Compte spécial, s’agissant en particulier des contributions volontaires.  Quant au budget des opérations de paix, elle s’est félicitée de l’idée d’utiliser les fonds des missions pour rembourser les pays contributeurs de contingents et d’effectifs de police.  Elle a invité le Secrétaire général à en minimiser l’impact sur ces missions.  

M. JESÚS VELÁZQUEZ CASTILLO (Mexique) a salué les efforts déployés par le Secrétariat pour résoudre les problèmes financiers de l’Organisation et permettre les remboursements en temps voulu aux pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police.  Il a remercié le Secrétaire général pour ses propositions.  Nous les analyserons attentivement, a-t-il promis, en tenant compte des « précieuses » lignes directrices et recommandations du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB).  L’objectif, a-t-il dit, est de promouvoir des solutions « créatives » qui tiennent compte de l’utilisation « rationnelle », sans provoquer la hausse des contributions des États.  Notant que l’amélioration de la situation financière de l’ONU est liée étroitement au processus de réforme, le représentant a insisté sur la responsabilité des États de soutenir efficacement l’Organisation et de collaborer avec le Secrétariat pour éliminer les obstacles structurels, offrir une flexibilité dans la gestion du budget et assurer un financement prévisible, durable et efficace du budget ordinaire et de celui des opérations de paix.

BUDGET-PROGRAMME DE 2021 

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur la gestion des charges à payer au titre de l’assurance maladie après la cessation de service (A/76/579) 

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité a examiné celui du Secrétaire général (A/76/373).  De façon générale, il considère que le Secrétaire général ne présente pas une proposition complète.  Ayant été saisi d’une nouvelle proposition de financement qui différait de l’approche suivie par l’Organisation, il avoue qu’il s’attendait à trouver des explications plus complètes et des critères clairs concernant l’application de la formule par capitalisation à compter du 1er janvier 2023 par rapport aux formules par répartition actuellement en vigueur, des justifications plus claires concernant les changements apportés par rapport aux propositions faites précédemment et des stratégies de financement et de placement bien établies et cohérentes.  Le Comité juge que des informations et des éclaircissements supplémentaires sont nécessaires pour que l’Assemblée générale puisse examiner les propositions du Secrétaire général. 

Le Comité rappelle sa recommandation concernant le maintien, pour l’instant, du financement par répartition et recommande à l’Assemblée générale de ne pas approuver le financement des engagements concernant les fonctionnaires recrutés à partir du 1er janvier 2023 au moyen d’une cotisation de 6% à prélever sur la masse salariale et d’une réserve financière spéciale; et l’ajustement de la cotisation à prélever sur la masse salariale tous les trois ans visant à tenir compte des écarts enregistrés par rapport au montant qu’il est prévu d’accumuler dans la réserve spéciale. 

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. MUHAMMAD JAWAD AJMAL (Pakistan) a réitéré l’importance du bien-être du personnel des Nations Unies.  Il s’est dit attaché à l’assurance maladie après la cessation de service parce que de nombreux anciens fonctionnaires ne peuvent adhérer aux programmes de sécurité sociale dans leur pays.  Le représentant a néanmoins dit partager les préoccupations de l’Assemblée générale s’agissant de la solvabilité de l’Organisation.  « Conscient » des effets à long terme des décisions sur cette question sur les futurs budgets de l’ONU, il a voulu mieux comprendre ce qui est proposé, soucieux des intérêts « fondamentaux » du personnel et des États Membres, seuls contributeurs au budget de l’ONU.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’AIEA confirme le fonctionnement normal de la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine

8986e séance – matin
CS/14819

Conseil de sécurité: l’AIEA confirme le fonctionnement normal de la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine

Réuni en séance d’urgence à la demande du Royaume-Uni et de ses partenaires, le Conseil de sécurité a entendu ce matin le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) rassurer sur la situation de la centrale nucléaire de Zaporijia, en Ukraine, suite au bombardement qui y a provoqué un incendie la nuit dernière, maitrisé depuis. 

« Nous avons survécu cette nuit à ce qui aurait pu mettre fin à l’histoire de l’Ukraine et de l’Europe », a déclaré l’Ukraine, se faisant l’écho du sentiment de la grande majorité des États Membres, qui, à l’instar des États-Unis, ont souligné à maintes reprises que les infrastructures nucléaires, ne peuvent et ne doivent pas faire partie des cibles du conflit en Ukraine.  « Par la grâce de Dieu, le monde a échappé à une catastrophe nucléaire hier soir », a lancé la délégation américaine. 

Intervenant depuis un aéronef en route pour Téhéran, M. Rafael Mariano Grossi a indiqué qu’au petit matin, l’AIEA a été informée qu’un projectile a touché un bâtiment adjacent aux six réacteurs de la centrale nucléaire de Zaporijia.   Aucun système de sécurité n’a été compromis, les réacteurs n’ont pas été touchés, et il n’y a eu aucune émission de rayonnements, a assuré le Chef de l’AIEA.  

Les opérations de la centrale se poursuivent normalement, même s’il n’y a rien de normal dans cette situation où des forces militaires ont la charge d’un tel site, a encore relevé le Directeur général de l’AIEA qui a précisé que les autorités militaires russes ont confirmé leur présence dans la zone du site, l’AIEA demeurant pour sa part en contact avec les autorités ukrainiennes et avec l’entreprise assurant le fonctionnement de la centrale nucléaire.  

Par ailleurs disposé à se rendre sur place à Tchernobyl pour rencontrer les autorités ukrainiennes, « et si possible les autorités russes », M. Grossi a précisé qu’une telle mission se limiterait uniquement à la question de la sécurité et de la sûreté des sites nucléaires en Ukraine qui sont sous la menace d’incident.  Cette proposition a été appuyée par plusieurs délégations, dont celle de la France. 

Évoquant le tragique accident nucléaire de Tchernobyl, en 1986, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a exhorté les parties à travailler avec l’AIEA pour établir un cadre approprié capable de garantir le fonctionnement sûr, sécurisé et fiable des centrales nucléaires ukrainiennes, soulignant que toutes les centrales nucléaires doivent bénéficier des garanties de sécurité les plus hautes.  Mme Rosemary DiCarlo a aussi insisté sur l’impératif d’assurer un passage sans entraves aux centrales nucléaires en Ukraine au personnel de l’AIEA. 

Principale accusée de l’incident d’hier soir, la Fédération de Russie s’est défendue en arguant qu’elle n’a aucun intérêt à compromettre la sécurité nucléaire d’un pays voisin.  La délégation a indiqué que la région de Zaporijia est, depuis le 28 février, sous le contrôle des forces russes qui ont pour objectif d’empêcher les « nationalistes ukrainiens » d’exploiter la situation dans le but de provoquer des accidents nucléaires ou couper l’électricité. 

Les évènements d’hier seraient, selon elle, le fruit d’une attaque visant une patrouille mobile russe près de la centrale nucléaire, qui, a-t-elle confirmé, est « protégée » par les forces russes mais opérée par les employés ukrainiens.   Le poste de combat, qui se trouvait dans le centre de formation, aurait été neutralisé et les « nationalistes ukrainiens » qui s’y trouvaient y auraient mis le feu avant de prendre la fuite.   Les forces russes, qui mettent tout en œuvre pour garantir la sécurité des centrales nucléaires ukrainiennes, font l’objet d’une campagne de désinformation « absurde » dont témoigne très clairement l’incident d’hier, a encore déploré la délégation. 

Fustigeant en revanche un acte de « terrorisme nucléaire », l’Ukraine s’est inquiétée du fait que les régulateurs nucléaires ukrainiens n’aient pas été autorisés à accéder au site, avertissant que toute interruption du processus de refroidissement pourrait entraîner des conséquences environnementales et humaines irréversibles pour l’ensemble de la région.   La délégation ukrainienne a également regretté que dans sa déclaration, le Directeur général de l’AIEA n’ait pas clairement condamné l’attaque sur le site de Zaporijia, appelant dans la foulée le Conseil à créer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de son territoire dans les meilleurs délais. 

Invitant la communauté internationale à garder « la tête froide », la Chine a appelé de son côté les parties concernées à faire preuve de plus de prudence à l’avenir et à collaborer sans faille avec l’AIEA pour garantir la sécurité des installations nucléaires en Ukraine. 

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136)

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué que le Secrétaire général a suivi avec les plus vives inquiétudes les informations faisant état de confrontations autour de la centrale nucléaire de Zaporijia.  Nous comprenons que l’incendie a touché un centre de formation et non le système de refroidissement ou le centre d’alimentation des réacteurs, a-t-elle précisé.  Les opérations militaires autour des sites nucléaires et d’autres infrastructures civiles essentielles sont non seulement inacceptables, mais hautement irresponsables, s’est-elle indignée en rappelant que l’Ukraine ne sait que trop bien ce que signifie un accident nucléaire, évoquant le tragique accident nucléaire de Tchernobyl.  Toutes les centrales nucléaires doivent bénéficier des garanties de sécurité les plus hautes et tout doit être fait pour éviter une quelconque attaque qui les viseraient, a exigé Mme DiCarlo en martelant que ce type d’attaques sont contraires au droit international humanitaire, et plus précisément à l’article 56 du Protocole additionnel I à la Convention de Genève.  Elle a ensuite exhorté l’ensemble des parties à travailler avec l’AIEA pour établir un cadre approprié qui garantira le fonctionnement sûr, sécurisé et fiable des centrales nucléaires ukrainiennes.  Elle a aussi insisté sur l’impératif de garantir un passage sans entraves aux centrales nucléaires en Ukraine au personnel de l’AIEA.  

Saluant ensuite le deuxième cycle de pourparlers entre les parties qui s’est achevé hier et le projet de mettre en place des couloirs humanitaires, Mme DiCarlo a dit espérer que cet accord signalé sera mis en œuvre sans délai et qu’un cessez-le-feu complet et inconditionnel sera rapidement convenu et promulgué.  Nous exhortons les parties à poursuivre les négociations et à faire des progrès urgents sur les questions sécuritaires, humanitaires et autres, a-t-elle ajouté, appelant à revenir sans tarder à la diplomatie pour trouver une solution pérenne à cette crise.  

Le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), M. RAFAEL MARIANO GROSSI, intervenant depuis un aéronef, a indiqué que son agence est en contact avec l’agence nationale de régulation du secteur nucléaire d’Ukraine depuis le début du conflit.  Dans l’ensemble, a-t-il témoigné, les installations nucléaires et les centrales nucléaires sont en sécurité, précisant que le pays compte 15 réacteurs dans 4 sites différents, en plus du site de Tchernobyl.  La semaine dernière, l’AIEA a été informée que les forces spéciales russes avaient pris possession de Tchernobyl, tandis que le personnel de la centrale continue d’assurer son fonctionnement au quotidien. 

Les autorités militaires russes ont également confirmé qu’elles se trouvent dans la zone de la centrale nucléaire de Zaporijia.  Des civils ont fait obstacle à leur progression, et au petit matin, l’AIEA a été informée qu’un projectile a touché le bâtiment adjacent aux six réacteurs de cette centrale.  L’incendie qui qui s’est en suivi a été maitrisé par les pompiers sur place.  Aucun système de sécurité n’a été compromis, les réacteurs n’ont pas été touchés par ce projectile, et il n’y a eu aucune émission de rayonnement, a-t-il assuré.  Les opérations de la centrale se poursuivent normalement, même s’il n’y rien de normal dans cette situation où des forces militaires ont la charge d’un tel site, a encore relevé le Directeur général.  Il a affirmé que l’AIEA reste en contact avec les autorités ukrainiennes et avec l’entreprise assurant le fonctionnement de la centrale nucléaire. 

Le Directeur de l’AIEA a fait part de sa disposition à se rendre sur place à Tchernobyl pour rencontrer les autorités ukrainiennes, et si possible les Russes.  Une telle proposition a d’ailleurs été transmise aux autorités des deux pays, a-t-il indiqué, notant qu’une telle mission de l’AIEA n’aurait rien à voir avec le volet politique et diplomatique de la crise qui relève du Conseil de sécurité.  Cette visite se limiterait uniquement à la question de la sécurité et de la sûreté des sites nucléaires en Ukraine qui sont sous la menace d’incidents, a-t-il précisé. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a indiqué que son pays et ses partenaires ont convoqué cette réunion d’urgence en raison de l’attaque de la plus grande centrale nucléaire d’Europe par les forces russes.  Elle a relevé que c’est la première fois qu’un État attaque une centrale nucléaire en fonctionnement.  Elle a précisé que le droit international impose une protection spéciale aux installations nucléaires, notant que les actions de la Fédération de Russie sont incompatibles avec ses engagements en vertu de ce droit.  Elle a exhorté la Fédération de Russie à éviter les combats près des sites nucléaires et d’en assurer la protection et la sécurité. 

La représentante a par ailleurs estimé que le Président Putin en planifiant « l’opération militaire spéciale » -ou, comme tout le monde l’appelle, « une guerre »– a sous-évalué la force, la résilience et la volonté du peuple ukrainien.  « Il a également sous-estimé la condamnation mondiale de ses actions, comme en témoignent 141 votes à l’Assemblée générale et les sanctions sans précédent contre son pays », a ajouté Mme Woodward avant d’exhorter la Fédération de Russie à mettre fin à la violence, à retirer ses troupes et à engager des négociations de paix sérieuses. 

Deux jours après le vote de l’Assemblée générale, Moscou continue de défier le monde et de le plonger dans l’abysse, a dénoncé M. FERIT HOXHA (Albanie) qui s’est alarmé de l’incendie provoqué la nuit dernière à la centrale nucléaire de Zaporijia par un missile russe.  Il a relevé que cette centrale fournit à l’Ukraine un cinquième de son électricité, et que cette attaque pourrait avoir des conséquences irréparables sur le plan environnemental.  Saluant la réaction rapide de l’AIEA, il a appelé à accorder à l’Agence un accès urgent et sans entrave à la centrale pour lui permettre de vérifier la situation et veiller à la mise en place des garanties.  En ces circonstances difficiles, les centrales nucléaires devraient continuer d’être exploitées par leur personnel habituel, a demandé le délégué, préoccupé par les difficultés persistantes qu’il rencontre pour accéder à ces centrales.  Il a ensuite appelé la Fédération de Russie à retirer ses troupes de l’Ukraine et à cesser d’employer la force pour contrôler les centrales nucléaires et détruire les infrastructures civiles. 

« Par la grâce de Dieu, le monde a échappé à une catastrophe nucléaire hier soir », s’est exclamée Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) qui a salué la bravoure des opérateurs ukrainiens et le travail de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).  L’attaque d’hier soir, a affirmé la représentante, a mis en danger les populations en Fédération de Russie, en Ukraine et en Europe.  Elle a demandé à la Fédération de Russie de retirer ses troupes de la centrale nucléaire et d’y permettre le roulement du personnel afin de garantir son bon fonctionnement.  L’AIEA doit aussi pouvoir y accéder sans entrave. 

Les infrastructures nucléaires, a martelé la représentante, ne peuvent et ne doivent pas faire partie des cibles de ce conflit.  Tout aussi inquiète de la situation à la centrale de Tchernobyl, désormais sous contrôle russe, elle s’est dite préoccupée par l’arrêt du roulement du personnel.  Elle a appelé tous les pays à faire front avec le Directeur général de l’AIEA afin de trouver les moyens pour garantir la sécurité de toutes les installations nucléaires ukrainiennes.  Elle a en outre reproché à la Fédération de Russie de cibler des infrastructures essentielles, comme les centrales électriques ou d’approvisionnement en eau, ce qui aura « d’immenses retombées humanitaires ».  Mercredi dernier, a rappelé la représentante, 141 États Membres des Nations Unies ont clairement appelé le Président Vladimir Putin à mettre fin à cette guerre « injuste et non provoquée ».  « Et voilà, ce qu’il fait à la place. » 

S’adressant à son homologue russe, elle a dit: « Le Conseil de sécurité attend des réponses.  Nous voulons vous entendre dire que cela ne se reproduira pas.  Nous vous appelons à respecter les frontières de l’Ukraine et la Charte des Nations Unies, et à retirer vos troupes au lieu de les envoyer dans une opération-suicide contre une centrale nucléaire.  Le monde exige que la Fédération de Russie s’acquitte de ses obligations au regard du droit international humanitaire et nous demandons une trêve humanitaire.  Il faut mettre fin à cette guerre M. Putin.  Il faut mettre fin à cette folie maintenant.  Le bon sens doit prévaloir. »  La représentante a appelé la communauté internationale à rester unie et à exiger que ces attaques « insensées » cessent. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé que le 24 février, les forces russes sont entrées dans la zone de Tchernobyl.  L’équipe d’exploitation de la centrale a été retenue et réquisitionnée par les militaires russes.  Le 27 février, une forte détonation a été enregistrée près d’un centre d’entreposage de déchets à Kiev.  Ce matin, un incendie s’est déclaré dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe à la suite de l’attaque russe.  Il a condamné cette atteinte à l’intégrité d’une structure nucléaire dont il faut garantir la sécurité, se disant extrêmement préoccupé des conséquences potentiellement dévastatrices pour la santé humaine et l’environnement d’un accident nucléaire résultant de l’agression militaire commise par la Fédération de Russie contre l’Ukraine. 

Le représentant a appelé la Fédération de Russie à cesser immédiatement ses activités illégales et dangereuses afin de rétablir le contrôle des autorités ukrainiennes sur toutes les installations et matières nucléaires à l’intérieur des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine.  La Fédération de Russie doit également autoriser un accès régulier et sans entrave du personnel des installations pour garantir la poursuite de leur exploitation en toute sécurité, a-t-il plaidé, appelant en outre au plein respect de la Convention sur la sûreté nucléaire et des autres conventions pertinentes. 

M. de Rivière a appuyé la proposition du Directeur général de l’AIEA pour la négociation d’engagements entre les parties au conflit armé en Ukraine, afin d’assurer le respect des sept principes établis lors du Conseil des gouverneurs du 2 mars 2022 sur les implications de la situation en Ukraine en matière de sûreté, de sécurité et de garanties nucléaires. 

M. GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a fustigé l’agression injustifiée de la Fédération de Russie qui sème le chaos et la destruction en Ukraine et inflige des épreuves et souffrances énormes au peuple ukrainien.  Il a rappelé aux parties en conflit leur devoir de respecter les normes du droit international humanitaire, en précisant que cela comprend l’obligation de ne pas attaquer les infrastructures civiles.  L’attaque d’hier soir, a-t-il estimé a envoyé un signal « effrayant » dans toute l’Europe, voire dans le monde entier, et elle vient renforcer les préoccupations suscitées par la prise de contrôle des installations nucléaires de Tchernobyl, il y a huit jours.  Le représentant a déclaré que les tirs insensés contre des installations nucléaires pacifiques constituent des violations du droit international, de la Charte des Nations Unies, du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève de 1949 et du Statut de l’AIEA. 

Il a exhorté la Fédération de Russie à respecter les normes de sûreté et de sécurité nucléaires et à autoriser le personnel ukrainien de la centrale à faire son travail en toute sécurité.  Après avoir rappelé les conséquences de Tchernobyl et de Fukushima, le représentant a demandé à la Fédération de Russie de cesser immédiatement les hostilités, de se retirer sans condition de tout le territoire de l’Ukraine et de s’abstenir de nouvelles menaces ou de recourir à la force de quelque nature que ce soit contre l’Ukraine ou tout autre État Membre.  Pour éviter une catastrophe nucléaire, il a appelé à une cessation immédiate des activités militaires près des installations nucléaires ukrainiennes et a demandé que les autorités ukrainiennes compétentes soient autorisées à reprendre rapidement le contrôle total de de la centrale de Zaporijia et de toutes les autres installations nucléaires.  Nous devons encourager le dialogue et une diplomatie de bonne foi, a conclu le représentant. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a condamné les bombardements et les combats à proximité immédiate d’une centrale nucléaire civile.  Cette attaque montre un mépris flagrant pour les vies ukrainiennes, pour les vies russes, et même pour la vie en Europe et au-delà, a dénoncé la représentante qui a souligné que la destruction d’une centrale nucléaire nous mettrait tous en danger et pourrait conduire à un « cauchemar radioactif ». 

Mme Juul a appelé la Fédération de Russie à s’acquitter de ses obligations de protection des civils et des infrastructures civiles en vertu du droit international humanitaire.  Elle a également rappelé la décision de l’AIEA en 2009, selon laquelle toute attaque armée et toute menace contre des installations nucléaires consacrées à des fins pacifiques constitue une violation des principes de la Charte des Nations Unies, du droit international et du statut de l’Agence.  La Russie porte l’entière responsabilité de cet acte d’agression, et de toutes les destructions et pertes en vies humaines qu’elle a causées et continuera de causer, a-t-elle souligné.  La représentante a aussi appelé la Fédération de Russie à retirer immédiatement ses forces du territoire ukrainien et à cesser toute menace et action militaire, y compris à proximité ou dirigées contre des installations nucléaires. 

Pour M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie), la réunion d’aujourd’hui est une nouvelle tentative des autorités de Kiev de susciter artificiellement l’hystérie générale, sous les encouragements de leurs « protecteurs occidentaux ».  Il a qualifié de mensonge l’affirmation selon laquelle les forces russes auraient « attaqué » la centrale nucléaire de Zaporijia.  Cela ne correspond pas à la réalité, a-t-il tranché.  Depuis le 28 février, cette région est sous le contrôle des forces russes qui ont pour objectif d’empêcher les « nationalistes ukrainiens » d’exploiter la situation pour provoquer des accidents nucléaires ou couper l’électricité.  Cette centrale, a martelé le représentant, est protégée par les forces russes et le personnel ukrainien assure son fonctionnement.  La situation est la même à la centrale de Tchernobyl, où la sécurité est garantie conjointement par les forces russes et les opérateurs ukrainiens.  « Les mesures prises sont strictement des mesures de sécurité », a insisté M. Nebenzia. 

Les évènements d’hier sont le fruit d’une attaque contre une patrouille mobile russe près de la centrale nucléaire.  Le poste de combat, qui se trouve dans le centre de formation a été neutralisé et les « nationalistes ukrainiens » qui s’y trouvaient y ont mis le feu avant de fuir.  Ce centre de formation ne se trouve pas sur le terrain même de la centrale qui elle, a affirmé le représentant, continue de fonctionner normalement, dans une sécurité pleinement garantie.  Ses six réacteurs n’ont pas été endommagés, ce qui a été confirmé par l’AIEA qui par ailleurs n’a constaté aucune émission. 

Les forces russes, qui mettent tout en œuvre pour garantir la sécurité des centrales nucléaires ukrainiennes, font l’objet d’une campagne de désinformation « absurde », a accusé le représentant.  Quel intérêt aurait la Fédération de Russie de compromettre la sécurité nucléaire dans un pays voisin?  « Nous sommes un pays voisin de l’Ukraine », a-t-il insisté.  Les forces russes ne représentent aucun danger pour les civils ukrainiens, contrairement aux « nationalistes ukrainiens » et l’incident d’hier le montre très clairement.   Vos tentatives d’en faire un scandale ne laisse aucun doute sur le fait que les « nationalistes radicaux » bénéficient de votre pleine protection.  Nous vous invitons à calmer « vos protégés » qui se cachent derrière les populations civiles.  Notre armée, quant à elle, met tout en œuvre pour garantir l’évacuation des civils, y compris les ressortissants étrangers qui seront rapatriés dans leur pays.  Avant de conclure, le représentant a demandé des précisions au Secrétariat de l’ONU sur les informations diffusées sur le site Telegramm et selon lequel les véhicules de l’ONU seraient réquisitionnées par les « nationalistes ukrainiens ».  Si vous le savez, pourquoi n’en avez-vous pas informé le Conseil de sécurité? s’est étonné M. Nebenzia. 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a dit attacher la plus grande importance à la sûreté et la sécurité des installations nucléaires.  Alors que nous discutons de la dimension nucléaire du conflit, ce Conseil doit aussi reconnaître les besoins humanitaires pressants, a-t-il dit, soulignant que la sûreté et la sécurité des civils, dont plusieurs milliers d’Indiens, en particulier les étudiants, sont en jeu.  Le représentant a dit espérer qu’après le deuxième cycle de pourparlers entre les deux parties les couloirs humanitaires seront mis en place rapidement.  Comme l’a répété mon Premier Ministre dans ses conversations avec certains de ses homologues, y compris ceux de la Fédération de Russie et de l’Ukraine, les divergences doivent être résolues par un dialogue et une diplomatie soutenus, a indiqué le délégué. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) s’est dit particulièrement préoccupé par l’incident à la centrale nucléaire de Zaporijia.  « Bien que les informations qui nous sont présentées indiquent que les réacteurs nucléaires n’ont pas été touchés et que les niveaux de rayonnement n’ont pas augmenté, cela n’enlève rien à la gravité de l’incident », a-t-il souligné.  Il a rappelé que le tir de projectiles sur ou à proximité d’une centrale nucléaire viole le principe fondamental relatif à l’intégrité physique des installations nucléaires, qui, a-t-il rappelé, doivent être maintenues sûres à tout moment et en toutes circonstances.  Qui plus est, le droit international humanitaire interdit expressément l’attaque d’installations nucléaires. 

Le représentant a souligné que la sécurité physique des installations nucléaires doit toujours et en toutes circonstances être sauvegardée et que les éléments qui garantissent la sécurité de ces installations doivent être vérifiés.  « L’incident de Zaporijia s’ajoute à une liste croissante d’attaques directes ou collatérales contre des infrastructures civiles, dont certains bâtiments diplomatiques », a regretté le représentant.  Il a demandé que les actions militaires de la Fédération de Russie sur le territoire ukrainien respectent les principes du droit international et de proportionnalité des actions qui affectent les infrastructures civiles, en particulier les installations nucléaires et les équipements et matières radioactifs. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a dit être gravement préoccupée par l’attaque et le bombardement de sites proches de la centrale nucléaire de Zaporijia et a appelé à déployer tous les efforts pour atténuer le risque d’émissions.  Elle a demandé à l’AIEA d’aider les autorités ukrainiennes à assurer la sûreté des installations et des infrastructures nucléaires avec le personnel sur place.  Elle a également appelé les parties à faire preuve de retenue et à mettre fin à l’usage de la force contre les infrastructures essentielles, y compris les centrales nucléaires, et à respecter leurs obligations internationales de protéger les vies humaines et de prévenir une catastrophe potentielle.  Mme Oppong-Ntiri a par ailleurs pris note des pourparlers diplomatiques en cours entre les parties au Bélarus et salué l’accord sur les couloirs humanitaires permettant l’évacuation de millions de personnes, ainsi que la fourniture de vivres et d’articles médicaux. 

M. JUN ZHANG (Chine) a relevé, en se basant sur les informations de l’AIEA, que les équipements de la centrale nucléaire de Zaporijia demeurent intacts et les niveaux d’émissions, inchangés.  Le représentant a tout de même espéré que les parties concernées feront preuve de plus de prudence à l’avenir et collaboreront sans faille avec l’AIEA pour garantir la sécurité des installations nucléaires en Ukraine.  Il a appelé à redoubler les efforts diplomatiques et salué les deux cycles des pourparlers directs entre la Fédération de Russie et l’Ukraine.  Dans ce cadre, il a espéré que l’accord sur les couloirs humanitaires sera rapidement mis en œuvre pour permettre l’évacuation en toute sécurité des ressortissants étrangers, dont des Chinois.  Le représentant a aussi émis l’espoir de voir rapidement un règlement politique de cette crise.  La communauté internationale, a-t-il dit, doit garder « la tête froide  ».  Toutes les mesures qu’elle prend doivent viser la désescalade et à un règlement pacifique et pas à mettre de l’huile sur le feu. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déploré le fait qu’en plus de la catastrophe humanitaire en cours en Ukraine, vient désormais s’ajouter le risque d’un incident radioactif majeur aux conséquences catastrophiques pour l’Ukraine et toute l’Europe.  La sécurité de millions de personnes est en jeu, a dit le délégué, avant de rappeler que les centrales nucléaires ne peuvent faire l’objet d’attaque.  Cette logique s’applique aussi à d’autres installations militaires se trouvant à proximité de tels sites, a-t-il ajouté.  Le représentant a demandé à toutes les parties d’éviter des actions qui pourraient menacer la sécurité des sites nucléaires en Ukraine.  Il a en outre déploré l’incapacité du Conseil de sécurité à trouver une solution à la situation en Ukraine en dépit de ses multiples réunions sur la question, l’appelant à créer les conditions favorables à la diplomatie. 

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) s’est dite profondément préoccupée par les rapports faisant état d’un incendie à proximité immédiate de la centrale nucléaire de Zaporijia.  Soulignant l’urgence d’un accord entre les parties, elle les a appelées à respecter le deuxième Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatives à la protection des victimes de conflits armés non internationaux, en particulier la partie IV.  L’article 15 de ce Protocole stipule que « les ouvrages d’art ou les installations contenant des forces dangereuses, à savoir les barrages, les digues et les centrales nucléaires de production d’énergie électrique, ne seront pas l’objet d’attaques, même s’ils constituent des objectifs militaires, lorsque ces attaques peuvent entraîner la libération de ces forces et causer, en conséquence, des pertes sévères dans la population civile ». 

La représentante a également cité la résolution adoptée en avril dernier sur « la protection des objets indispensables à la survie de la population civile » qui met en évidence les conséquences sur les civils de la destruction des infrastructures dans de nombreux conflits à travers le monde.  Elle a appelé les dirigeants militaires de l’Ukraine et de la Fédération de Russie à établir des mécanismes pour éviter de cibler les infrastructures essentielles et atténuer les risques d’attaques.  Un tel mécanisme pourrait s’inspirer de l’accord conclu hier par les deux parties sur la création de couloirs humanitaires et sur un cessez-le-feu temporaire, dans certains endroits, pour permettre l’acheminement de l’aide.  Nous encourageons la poursuite de ce dialogue « positif » et appelons la Fédération de Russie à entamer d’urgence des négociations pour régler ce conflit par des moyens pacifiques, a conclu la représentante avant de saluer l’adoption hier par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA d’une résolution relative à cette question. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) s’est inquiétée des informations faisant état d’un incendie à la centrale nucléaire de Zaporijia.  Rappelant Tchernobyl et Fukushima, elle a exhorté à empêcher que de tels accidents se reproduisent.  Les parties doivent garantir la sûreté et la sécurité de la centrale et de ses réacteurs ainsi que des zones avoisinantes, a-t-elle insisté.  Ces installations ne doivent pas être ciblées afin d’éviter des conséquences catastrophiques pour toute la région.  La déléguée a exhorté toutes les parties à coopérer avec l’AIEA pour garantir la protection et la sûreté des installations nucléaires en Ukraine et établir un cadre stable sur le terrain.  La représentante a ensuite salué les pourparlers bilatéraux entre l’Ukraine et la Russie, exhortant en outre le Conseil à tout mettre en œuvre pour éviter une catastrophe nucléaire. 

Répondant à la question de la Fédération de Russie, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué que, d’après des informations obtenues ce matin à 10 heures, les 13 véhicules de l’ONU qui auraient été réquisitionnés se trouvent toujours sur place. 

« Nous avons survécu cette nuit à ce qui aurait pu mettre fin à l’histoire de l’Ukraine et de l’Europe », a déclaré M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) pour qui l’avenir de l’humanité et des générations futures est à présent en jeu.  La Russie est furieuse que la population ukrainienne continue de lutter courageusement pour sa liberté avec l’appui de la communauté internationale.  En réponse à cela, elle commet des crimes de guerre et ne s’en cache même plus, s’est-il indigné en l’accusant de s’en prendre à des civils et à des infrastructures civiles, ajoutant qu’au cours de la seule journée d’hier, 47 civils ont trouvé la mort.  Le 3 mars, c’est également un acte de terrorisme nucléaire qui a été commis en attaquant le site nucléaire de Zaporijia, s’est insurgé le délégué ukrainien. 

M. Kyslytsya a affirmé qu’après l’incendie qui s’est déclaré lors du bombardement russe, la centrale de Zaporijia est désormais sous le contrôle des forces russes.  Il s’est alarmé que plusieurs employés chargés de la sécurité du fonctionnement du site aient été tués et qu’il n’y ait pas eu de rotation du personnel depuis le matin du 3 mars.  Décrivant l’état des six réacteurs de la centrale, il a indiqué que le réacteur 1 est en panne et son enceinte endommagé. Les réacteurs 2 et 3 ont été déconnectés du réseau, le 4 est opérationnel, les réacteurs 5 et 6 sont en cours de refroidissement et les niveaux de rayonnement restent normaux.  Les régulateurs nucléaires ukrainiens n’ont cependant pas été autorisés à accéder au site, a-t-il déploré, avertissant que toute interruption du processus de refroidissement pourrait entraîner des conséquences environnementales et humaines irréversibles pour toute la région. 

Pour ce qui est de la situation des étudiants étrangers en Ukraine, il a demandé à son homologue russe de lancer un appel à sa capitale pour la mise en place d’un couloir sécurisé afin de permettre aux étudiants de quitter la zone, tout en l’exhortant à cesser de propager des mensonges au sein du Conseil.

Revenant à l’attaque d’hier soir sur le site nucléaire de Zaporijia, il a souligné que cet acte va à l’encontre de tous les accords internationaux, y compris du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et de la Convention de lutte contre le terrorisme nucléaire.  Il a averti qu’un incident nucléaire à la centrale nucléaire de Zaporijia dépasserait l’étendue de la dévastation provoquée par l’accident de Tchernobyl en 1986, regrettant que dans sa déclaration, le Directeur général de l’AIEA n’ait clairement condamné l’attaque sur le site de Zaporijia.  Il a appelé le Conseil à réfléchir à la protection des centrales nucléaires et interdire tous les vols au-dessus de l’Ukraine dans les meilleurs délais, exigeant en outre le retrait des forces russes des installations nucléaires ukrainiennes.  Il a également demandé au personnel du Secrétariat de respecter la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 2 mars et de ne pas utiliser le terme « d’opération spéciale militaire russe » au lieu « d’invasion russe ».  Le libellé sur « l’agression contre l’Ukraine » ne doit pas être remplacé par des euphémismes, a-t-il souligné, demandant en outre à toutes les organisations internationales d’expulser les représentants de la Fédération de Russie, « car ils ne méritent pas de siéger parmi les pays civilisés ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À une large majorité, l’Assemblée « déplore dans les termes les plus énergiques » l’agression contre l’Ukraine et exige le retrait immédiat des forces russes

Onzième session extraordinaire d’urgence
5e & 6e séances - matin & après-midi
AG/12407

À une large majorité, l’Assemblée « déplore dans les termes les plus énergiques » l’agression contre l’Ukraine et exige le retrait immédiat des forces russes

C’est sous les applaudissements d’une salle bien remplie que l’Assemblée générale a adopté aujourd’hui la résolution intitulée « Agression contre l’Ukraine » par 141 voix pour et l’opposition du Bélarus, de l’Érythrée, de la Fédération de Russie, de la République arabe syrienne et de la République populaire démocratique de Corée.  Trente-cinq États se sont abstenus.

L’Assemblée tenait depuis lundi dernier, une session extraordinaire d'urgence, la première depuis 40 ans, à la demande du Conseil de sécurité qui voulait surmonter l’impasse provoquée par le veto russe, le 26 février dernier.  « Nous traiterons de cette question à l’Assemblée générale là où le droit de veto n’a pas de poids et où tous les États Membres des Nations Unies peuvent voter », avaient alors promis les États-Unis.

Dans sa résolution, portée par un nombre impressionnant de 90 coauteurs représentant les cinq continents, l’Assemblée ne condamne pas comme le faisait le texte initial du Conseil de sécurité mais « déplore dans les termes les plus énergiques » l’agression commise par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, en violation du paragraphe 4 de l’Article 2 de la Charte qui dit: « tous les États sont tenus de s’abstenir, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies, et de régler leurs différends internationaux par des moyens pacifiques ». 

L’Assemblée exige que la Fédération de Russie cesse immédiatement d’employer la force contre l’Ukraine, s’abstienne de tout nouveau recours illicite à la menace ou à l’emploi de la force contre tout État Membre et retire « immédiatement, complètement et sans condition » toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues.  L’Assemblée exige aussi que la Fédération de Russie revienne « immédiatement et sans condition » sur sa décision relative au statut de certaines zones des régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk.  

L’Assemblée générale exhorte les parties à respecter les accords de Minsk et à œuvrer de manière constructive dans les cadres internationaux pertinents, notamment le format Normandie et le Groupe de contact trilatéral.  Elle demande instamment que le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine soit immédiatement réglé de manière pacifique par le dialogue, la négociation, la médiation et d’autres moyens pacifiques.

Sur le volet humanitaire, l’Assemblée demande instamment à toutes les parties de permettre des voies de sortie sûres et sans restriction du territoire ukrainien, de faciliter l’acheminement rapide, en toute sécurité et sans entrave, de l’aide humanitaire en Ukraine et de protéger les civils, notamment le personnel humanitaire et les personnes en situation vulnérable.

Nous vivons des heures graves qui vont être essentielles pour notre génération, celle qui précisément devait être préservée de la guerre, a déclaré l’Ukraine, en présentant la résolution.  L’enjeu du vote d’aujourd’hui est « très simple », ont ajouté les États-Unis, c’est l’attachement à l’intégrité territoriale des États et à la Charte des Nations Unies.  Le vote « historique » d’aujourd’hui montre clairement l’isolement de la Fédération de Russie, s’est réjouie l’Union européenne, parmi la quarantaine de délégations qui ont expliqué leur vote.  « La décision est claire, le monde a parlé », a-t-elle souligné, en ajoutant qu’au-delà de l’Ukraine et de l’Europe, c’est à la défense d’un ordre international fondé sur des règles que nous avons tous souscrit. 

Nous ne baisserons pas les bras tant que le peuple ukrainien n’aura pas retrouvé la paix dans une nation indépendante et souveraine, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, a promis l’Australie.  Les autorités russes doivent entendre l’appel de la communauté internationale et « appliquer immédiatement » la résolution, a exhorté le Japon.  Après s’être abstenus par deux fois au Conseil de sécurité, les Émirats arabes unis, qui président le Conseil de sécurité pendant le mois de mars, ont cette fois voté « oui » et promis 5 millions de dollars à l’appel humanitaire d’urgence des Nations Unies pour l’Ukraine.  

En 1999, a fait observer la Serbie, l’attaque de l’OTAN contre la Yougoslavie n’avait pas suscité autant de réactions de « notre auguste Organisation » à ce qui était aussi une violation criante de la Charte.  Une Charte, a estimé le Brésil, qui n’est pas assez défendue dans la résolution, les rédacteurs de la résolution préférant « pointer un doigt accusateur ».  Les États-Unis et les pays européens veulent-ils véritablement la désescalade? s’est interrogée la Syrie, tandis que l’Érythrée justifiait son vote négatif par son rejet des sanctions unilatérales qui ne servent qu’à exacerber les tensions, au détriment des populations civiles.  

Parmi les 35 pays à s’être abstenus, la Chine a déploré un texte qui ne tient pas compte de la « complexité du conflit » et de ses « origines » et qui ne souligne pas l’urgence d’un règlement politique et d’une intensification des efforts diplomatiques.  Il faut, a-t-elle dit, se départir de la « mentalité de guerre froide » et cesser tout « élargissement des blocs militaires ». 

Le Bélarus a tenu à rappeler « notre part de responsabilité dans ce qui se passe en Ukraine aujourd’hui ».  Depuis la signature des accords de Minsk, il y a huit ans, « ni le Conseil de sécurité, ni l’Assemblée générale, ni la communauté internationale n’ont pu convaincre les autorités ukrainiennes de les mettre en œuvre ».  Il a catégoriquement rejeté les accusations portées à son encontre et reprises dans la résolution, quant à son association au recours à la force illégitime contre l’Ukraine, avant de dévoiler un « secret effrayant »: nous sommes en effet impliqués mais seulement dans les efforts visant à établir des contacts et à organiser des pourparlers entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, dans l’espoir « sincère » qu’ils seront couronnés de succès.

La résolution adoptée aujourd’hui, a dit craindre la Fédération de Russie, risque d’encourager les « radicaux de Kiev » et les « nationalistes » sur leur voie.  Le texte, a-t-elle dénoncé, ne dit rien sur les méfaits des forces de sécurité ukrainiennes, le « coup d’État illégal » de février 2014, avec la connivence de l’Allemagne, de la France et de la Pologne, les restrictions imposées par les autorités « nationalistes » à l’utilisation de la langue russe et encore moins sur les armes qu’ont envoyées les États-Unis et l’Europe pour aider le « régime de Maïdan » à tuer dans le Donbass.

Voter contre la résolution, s’est expliquée la Fédération de Russie, c’est militer pour une Ukraine apaisée, débarrassée du radicalisme et du néonazisme, et vivant dans la paix avec ses voisins, sans ingérence extérieure.  L’« opération militaire spéciale » a été lancée pour cela, après que nous avons en vain « frappé à toutes les portes » pour alerter d’une guerre qui a fait au moins 14 000 morts, principalement dans les « Républiques populaires de Donetsk et Louhansk ».  L’« opération militaire spéciale », qui s’inscrit dans le cadre de l’Article 51 de la Charte sur le droit de légitime défense, est menée avec succès s’est enorgueillie la Fédération de Russie, en dénonçant les mensonges d’Internet sur de prétendues attaques contre les populations et infrastructures civiles.  

Constructive, la Colombie a proposé, par la voix de sa Vice-Ministre des affaires étrangères, que soit mis sur pied, de toute urgence, un « groupe de médiation » afin de régler les divergences entre la Russie et l’Ukraine et de garantir le respect fidèle des accords de Minsk, « à condition que les actions militaires cessent immédiatement ».  La Turquie a, elle, lancé un appel en faveur d’une « pause humanitaire immédiate » en se disant disposée, en tant que « voisine et amie » de la Russie comme de l’Ukraine, à faciliter le règlement pacifique du conflit.  Dans une lettre ouverte adressée à l’Assemblée générale, les épouses des Présidents de la Pologne et de la Lituanie ont appelé « les politiciens, le clergé, les organisations ainsi que toutes les personnes de bonne volonté à travers le monde » à faire preuve de solidarité avec les enfants ukrainiens, victimes sans défense de ce conflit.

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136)

Suite du débat sur la question

M. NOEL MARTIN MATEA (Îles Salomon) a dit qu’en tant que nation éprise de paix, les Îles Salomon réitèrent leur position de principe pour la coexistence pacifique, la non-ingérence, l’abstention du recours à la menace ou à la force contre l’intégrité territoriale de tout État.  Il a déploré l’intervention en Ukraine de la Fédération de Russie et appelé à une désescalade immédiate de la situation.  À cet égard, le représentant a exhorté les parties à faire preuve d’un maximum de retenue, à mettre de côté toute provocation et à restaurer « notre confiance dans notre ordre international fondé sur des règles » en veillant à préserver et respecter l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Les Îles Salomon appellent toutes les parties à régler les différends internationaux par des moyens pacifiques.  Elles ont salué les pourparlers en cours entre l’Ukraine et la Fédération de Russie et encouragé toutes les parties à s’écouter davantage et à mieux se comprendre.  La délégation a également apporté le soutien des Îles Salomon aux efforts déployés par le Secrétaire général de l’ONU, plaidant pour une approche mondiale unifiée pour soutenir ces pourparlers, en privilégiant la diplomatie et le dialogue.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a condamné l’invasion de l’Ukraine et les attaques non provoquées contre son peuple, voyant dans ces actes une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Il a appelé au respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ainsi qu’à la cessation immédiate des hostilités.  Le peuple du Myanmar, a-t-il souligné, « comprend et partage plus que d’autres » les souffrances que vivent les Ukrainiens car il est confronté à des situations similaires, qui résultent d’actes inhumains, d’atrocités, de crimes contre l’humanité commis par l’armée birmane.  Dans ce contexte, le délégué a félicité les pays voisins de l’Ukraine qui ont ouvert leurs frontières et accueillent chaleureusement des Ukrainiens et d’autres ressortissants qui ont échappé aux attaques terrifiantes.  Nous remercions également tous les États Membres qui soutiennent l’Ukraine de toutes les manières possibles, a-t-il dit avant d’annoncer que son pays votera pour le projet de résolution. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a d’emblée fait part de sa préoccupation devant l’évolution la plus récente de la situation qui reflète, selon lui, l’échec de la diplomatie.  « Nous n’avons eu de cesse d’insister sur la nécessité de la désescalade, la reprise des négociations, un dialogue constant et une diplomatie de chaque instant.  Tous les efforts doivent être déployés pour éviter une nouvelle escalade de la violence, des pertes en vies humaines ainsi que les tensions militaires politiques, économiques susceptibles de constituer une menace sans précédent pour la paix et la sécurité internationales ainsi que sur la stabilité économique mondiale, a insisté le représentant.  En effet, a-t-il fait observer, les pays en développement sont les plus durement touchés sur le plan économique par les conflits, où qu’ils surviennent.  M. Akram a, par ailleurs, fait part de son extrême préoccupation devant le sort des étudiants pakistanais se trouvant en Ukraine, la majorité ayant été évacuée.  Il s’est félicité, à cet égard, de la coopération des autorités ukrainiennes ainsi que de celle démontrée par les Gouvernements polonais, roumains et hongrois dans ce domaine.

M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) a regretté l’agression non provoquée contre l’Ukraine mais également l’incapacité du Conseil de sécurité à agir à l’unisson en raison du veto russe.  Djibouti condamne sans équivoque ce qui constitue une violation flagrante à ses yeux du droit international, a déclaré le représentant, à savoir de s’abstenir du recours ou de la menace du recours à la force dans les relations internationales.  L’Article 33 de la Charte des Nations Unies offre des voies pacifiques pour régler les différends, a-t-il souligné, avant de saluer l’offre de bons offices du Secrétaire général et l’appel de l’UA à la paix et la diplomatie pour « préserver le monde d’un conflit planétaire ».  Le représentant s’est dit effaré par les attaques qui prennent pour cible les civils et les infrastructures civiles en Ukraine avant d’exiger que les parties facilitent un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire.  « Si l’Ukraine ne survit pas, le droit international ne survivra pas », a-t-il mis en garde en appelant à ne pas laisser le multilatéralisme être réduit à néant par cette crise.  C’est pour toutes ces raisons que Djibouti votera pour la résolution.  Avant de conclure, le représentant a toutefois dénoncé la distinction faite entre les réfugiés fuyant les guerres et conflits au Moyen-Orient ou en Afrique et ceux fuyant la guerre en Ukraine.

Mme DOMA TSHERING (Bhoutan) s’est jointe aux appels en faveur du respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Notant que « même les replis de nos puissantes montagnes ne peuvent nous protéger des conséquences d’événements qui se produisent à des milliers de kilomètres », elle a souligné qu’avec la crise ukrainienne, ce sont les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et l’ordre international fondé sur des règles qui sont en jeu.  « Petit pays épris de paix », le Bhoutan ne peut tolérer que des frontières internationalement reconnues soient redessinées de manière unilatérale, a-t-elle affirmé, avant d’indiquer qu’elle appuiera le projet de résolution.  Avant de conclure, la représentante a appelé à la cessation des hostilités et à un règlement pacifique du conflit, déclarant prier pour les familles endeuillées, les centaines de milliers de personnes déplacées et toutes celles qui souffrent de cette situation. 

Épris de paix, mon pays, a dit M. ANOUPARB VONGNORKEO (République démocratique populaire lao), défend fermement les principes de la Charte des Nations Unies et ses obligations en vertu du droit international.  Notre politique étrangère est fondée sur la paix, l’indépendance des États, l’amitié et le renforcement de la coopération.  Ayant lui-même souffert du fléau de la guerre, notre pays, a poursuivi le représentant, n’en connaît que trop bien les conséquences et sait que ce qui est en jeu aujourd’hui ne sert les intérêts d’aucune des parties.  Il a félicité l’ONU pour avoir intensifié son aide humanitaire et a dit douter de l’efficacité des sanctions unilatérales qui ne feront qu’aggraver les souffrances humaines et paralyser le monde entier, en particulier en cette période de pandémie de COVID-19.  Le représentant a donc voulu que l’on évite les actes susceptibles de causer l’escalade des tensions et que l’on donne la priorité à la recherche de solutions pacifiques et au rétablissement de la paix et de la sécurité. 

M. SOVANN KE (Cambodge) a exprimé ses préoccupations face à la situation en Ukraine et s’est dit convaincu qu’une paix pérenne passe par un dialogue et des négociations pacifiques.  L’accès à l’aide humanitaire doit être garanti pendant cette période difficile, a demandé le représentant avant d’appuyer les initiatives et efforts du Secrétaire général pour parvenir à un règlement pacifique de ce conflit.  Le représentant a également insisté sur l’importance du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de toute nation.  Le Cambodge votera en faveur de la résolution, a-t-il annoncé avant de conclure.

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a estimé que la situation alarmante en Ukraine et à proximité nécessite des mesures urgentes pour parvenir à la désescalade et à une solution pacifique.  Regrettant que cette crise fasse de nombreuses victimes civiles, il a appelé les parties au conflit au strict respect du droit international humanitaire, jugeant impératif que les personnes et les infrastructures civiles soient « préservées de tout temps ».  Pour le délégué, cette situation doit être réglée dans le plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États.  En conclusion, il a appelé les parties à dialoguer sans tarder afin que la situation ne dégénère pas davantage, soulignant la nécessité d’engager des négociations directes. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a d’emblée souligné que son pays votera contre le projet de résolution.  Nous avons tous notre part de responsabilité pour ce qui se passe en Ukraine, a-t-il dit, en rappelant, à cet égard, la signature des accords de Minsk, il y a huit ans, entérinés par la résolution du Conseil de sécurité 2202.  « Ni le Conseil de sécurité, ni l’Assemblée générale, ni la communauté internationale n’ont pu convaincre les autorités ukrainiennes de mettre en œuvre les dispositions de ces accords », a-t-il estimé.  Il a regretté le refus des autorités de Kiev de s’asseoir à la table des négociations avec leurs compatriotes de Donetsk et de Louhansk, refusant ainsi de prendre en compte leurs intérêts légitimes.  Aujourd’hui, le paragraphe 8 du projet de résolution appelle de façon « hypocrite » toutes les parties à appliquer les accords de Minsk. 

S’adressant aux auteurs de la résolution, il leur a demandé pourquoi au cours de ces huit années, ils n’ont pas pu forcer Kiev à appliquer les dispositions de ces documents.  Les États-Unis, le Canada, les pays de l’Union européenne, qui estiment être des chantres de la démocratie, ont exercé une pression indue sur l’ONU, l’OSCE, le Conseil de l’Europe et l’ensemble de la communauté internationale, et n’ont pas pu trouver le courage de réagir aux agissements criminels des autorités de Kiev? s’est-il interrogé.

Regrettant que la communauté internationale n’ait pas tiré les enseignements de la Seconde Guerre mondiale, il a affirmé que toute résurgence du néonazisme doit être immédiatement réprimée.  Ce qui se trame aujourd’hui, en cette salle et au-delà, constitue à ses yeux, un exemple criant du deux poids, deux mesures de la part des États-Unis et de leurs alliés, dont les crimes ont déjà fait des centaines de milliers de victimes en Yougoslavie, en Iraq, en Libye et en Afghanistan.  La délégation a rejeté catégoriquement les accusations portées à l’encontre de son pays quant à son association au recours à la force illégitime contre l’Ukraine, avant de dévoiler un « secret effrayant »: en effet, « nous sommes impliqués », a-t-il reconnu.  Le Président du Bélarus a redoublé d’efforts pour établir des contacts entre les parties au conflit.  Notre implication consiste en l’organisation de pourparlers entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, dans l’espoir sincère de voir les participants aboutir à des pourparlers à succès.  Il a regretté que beaucoup de pays n’aient même pas mentionné ces pourparlers, se demandant s’ils ne veulent pas mentionner le Bélarus ou souhaitent tout simplement que ces pourparlers échouent.

Pour finir, il a mis en garde ces pays contre les retombées des sanctions, qui aggraveront les problèmes économiques et sociaux et entraîneront davantage de famine.  Ces sanctions, qu’il a qualifiées de « comble du terrorisme économique et financier », ne sont pas ciblées, mais visent à étouffer l’économie et aggraver les conditions de vie des populations.  Il a de même évoqué les difficultés auxquelles se heurtent les citoyens russes et bélarussiens qui souhaitent quitter l’Ukraine, accusant les autorités ukrainiennes de les détenir en otage.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a tout d’abord salué tous ceux qui se vouent à la défense des idéaux des Nations Unies.  Elle a appelé la Fédération de Russie à cesser cette guerre « non sollicitée et injustifiable » et à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Elle a également appelé le Bélarus voisin à cesser d’appuyer cette guerre, en ouvrant son territoire aux troupes russes.  Nous nous réunissons ici, a poursuivi la représentante, pour demander des comptes à la Fédération de Russie, régler la crise humanitaire et stopper les violations des droits de l’homme qui découlent de cette agression.  Cette session extraordinaire, la première en 40 ans, est « un moment historique », a-t-elle estimé.  L’ONU, a-t-elle rappelé, a été créée pour prévenir les guerres et les arrêter.  Si l’invasion de grande ampleur engagée par le Kremlin a été lancée au moment même où le Conseil de sécurité tentait d’éviter l’escalade, depuis lors, s’est félicitée la représentante, l’Ukraine se défend « avec vigueur » et, comme l’a relevé hier le Président Joe Biden, « Putin rencontre une résistance à laquelle il ne s’attendait pas ». 

La Fédération de Russie, a-t-elle accusé, bombarde des logements, des hôpitaux, des orphelinats et des crèches, provoquant souffrances humaines et déplacements massifs.  Remerciant les pays qui ont « ouvert leurs cœurs et leurs maisons » aux Ukrainiens, la représentante a repris à son compte l’appel du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et a exhorté ces pays à protéger tous les réfugiés sans distinction aucune.  La Fédération de Russie rendant sa campagne « encore plus brutale », nous voyons désormais des vidéos qui prouvent l’utilisation de bombes à sous-munitions et autres armes interdites en Ukraine.  La représentante a également évoqué le convoi de centaines de blindés russes faisant mouvement vers Kiev.  Ces agissements sont contraires à tout ce que défend l’Assemblée générale, a-t-elle martelé, en se félicitant des manifestations de solidarité avec l’Ukraine qui se multiplient dans le monde entier, « et même à Moscou et à Minsk ». 

Partout, les gens exhortent Putin à cesser ses attaques et la population russe elle-même se demande combien de Russes vont encore périr.  Gardez-vous, a-t-elle dit à la Fédération de Russie, de commettre des crimes de guerre.  Déposez les armes et quittez l’Ukraine.  La vérité, a affirmé la représentante, est que cette guerre est celle d’un seul homme, le Président Putin qui a forcé des populations entières à se réfugier dans des caves et des centaines de milliers de personnes à fuir vers les pays voisins.  Après avoir rappelé les sanctions imposées par son pays et ses alliés, elle a estimé que l’enjeu du vote est « très simple »: votez pour si vous croyez au respect de l’intégrité territoriale des États et de la Charte des Nations Unies et si vous pensez que la Fédération de Russie doit rendre des comptes. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a joint la voix du Saint-Siège à celle des nombreux États Membres « et aux millions de personnes à travers le monde » qui demandent la cessation immédiate des hostilités en Ukraine et le retour à la diplomatie et au dialogue.  Rappelant que l’ONU avait été fondée « pour préserver les générations futures du fléau de la guerre » et leur permettre de « vivre en paix les uns avec les autres en bons voisins », il a ajouté qu’il était du devoir de tous les États de chercher à résoudre les différends par la négociation, la médiation ou par d’autres moyens pacifiques, « même lorsque la guerre a commencé ».

L’Observateur permanent a rappelé que le pape François avait déclaré urgent d’ouvrir des couloirs humanitaires et d’accueillir ceux qui fuient.  Il a exprimé sa reconnaissance aux États qui offrent une assistance humanitaire à ceux qui sont dans le besoin, tant en Ukraine que dans les pays voisins, dans lesquels de nombreux Ukrainiens ont cherché la sécurité.  Il a aussi rappelé l’appel lancé par le pape à l’observation, mercredi 2 mars, d’un jour de proximité avec les souffrances du peuple ukrainien, « pour sentir que nous sommes tous frères et sœurs, et pour implorer de Dieu la fin de la guerre ».  

Se disant convaincu qu’il existe « toujours du temps pour la bonne volonté, encore de la place pour la négociation, de la place pour l’exercice d’une sagesse qui peut empêcher la prédominance de l’intérêt partisan, sauvegarder les aspirations légitimes de chacun, et épargner au monde la folie et les horreurs de la guerre », Mgr Caccia a souhaité que cette session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale puisse faire progresser les efforts en ce sens.

L’Observateur permanent de l’Ordre souverain de Malte, M. PAUL BERESFORD-HILL, a expliqué qu’en huit ans de conflit, l’ambassade de l’Ordre en Ukraine avait fourni un soutien, des conseils et une aide matérielle considérables aux citoyens ukrainiens et aux résidents non ukrainiens du pays qui sont dans le besoin.  Alors que la crise actuelle voit plusieurs villes et villages attaqués et bombardés, forçant les familles à quitter leurs maisons et à chercher refuge ailleurs.  Si certains réfugiés disposent de moyens suffisants pour voyager et trouver refuge par eux-mêmes, ou bénéficient de la double nationalité avec des pays voisins, la majorité n’ont pas les ressources nécessaires, a expliqué la représentante.  Les agences des Nations Unies prédisent qu’un exode potentiel de réfugiés de plus de six millions de personnes pourrait résulter de cette crise.

De nombreuses personnes âgées, malades ou handicapées sont incapables d’échapper aux bombardements et au stress et l’Ordre de Malte est autant préoccupé par leur sort que par celui de ceux qui ont réussi à partir.  Son personnel et ses bénévoles, dans les principaux centres de population en Ukraine, continuent de leur fournir de l’aide dans la mesure du possible.  Le long de la frontière avec l’Ukraine, plus de 5 000 personnes, et des dizaines de milliers de bénévoles font leur possible pour offrir aux personnes déplacées des plats chauds et des boissons, dispenser des soins aux victimes de blessures et d’accidents, des conseils et un soutien émotionnel.  L’Observateur permanent a expliqué que l’Ordre coordonne ses activités avec des agences d’aide internationales, telles que la Croix-Rouge et le HCR, et qu’il est engagé dans un programme international de collecte de fonds pour garantir que des ressources adéquates continuent d’être disponibles pour le soutien aux nécessiteux.

Mme SOUREK, observatrice de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA), a vivement condamné l’agression non provoquée lancée par la Fédération de Russie avec le concours du Bélarus contre l’Ukraine, une nation souveraine et une démocratie.  Cette action est une violation des accords internationaux et de l’ordre international fondé sur des règles.  L’observatrice a fait part de sa pleine solidarité avec le peuple ukrainien, « victime innocente » de cette agression, demandant à la communauté internationale d’agir sans délai pour le protéger et atténuer les conséquences humanitaires de l’invasion.  Se tournant, pour finir, vers la Fédération de Russie, l’intervenante a rappelé que l’Ukraine est un pays qui a réussi à atteindre les normes démocratiques au cours de ces 20 dernières années et qu’il n’est pas surprenant que le Président Putin soit effrayé de voir une démocratie aussi dynamique à ses portes.

Présentation du projet de résolution intitulé « Agression contre l’Ukraine » (A/ES-11/L.1)

Nous vivons des heures graves qui vont être essentielles pour notre génération, celle qui précisément devait être préservée de la guerre, a déclaré M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine).  C’est la raison pour laquelle l’ONU a été créée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et aujourd’hui, il nous incombe de nous préserver de la guerre, de la déclarer hors-la-loi et de qualifier l’agression russe de violation grave des traités internationaux.  Les mots qu’a prononcés le juge Robert Jackson, en 1945, au Tribunal de Nuremberg, devraient s’adresser aujourd’hui à MM. Putin et Lavrov, et à des dizaines d’autres dignitaires russes, mais certainement pas aux citoyens ukrainiens qui essayent de préserver leur dignité.  Depuis plus d’une semaine, a dit le représentant, nous nous battons contre ceux qui cherchent à nous priver du droit même d’exister. 

Cette guerre ne vous rappelle-t-elle pas quelque chose?  Il y a plus de 80 ans, un autre dictateur essayait de faire de même, causant la mort de dizaines de millions de personnes.  Sommes-nous prêts aujourd’hui à payer ce prix?  L’Ukraine a remercié tous les pays qui accueillent ceux qui ont fui et qui font preuve de solidarité.  Face à la résistance totale de la population ukrainienne, des missiles balistiques russes ont commencé à pleuvoir, coûtant la vie à des dizaines de civils dont un Indien et un Chinois.  À Kiev, la tour de la télévision a été prise pour cible, tuant cinq personnes.  

L’objectif de la Fédération de Russie n’est pas seulement de nous occuper, mais d’opérer un génocide, a affirmé le représentant, en rappelant avoir saisi la Cour pénale internationale (CPI) qui va ouvrir une enquête officielle, étant donné que les agresseurs continuent de se rendre coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Si l’on tolère le mal, il se poursuivra, a-t-il mis en garde, et ce projet de résolution est un moyen d’éviter cette progression. 

En votant pour, vous, les États Membres, allez réaffirmer votre attachement aux buts et principes de la Charte.  Venez signer « ce petit livre bleu » en sortant de la salle de l’Assemblée générale, a invité l’Ukraine.  La Charte ainsi signée sera remise au Secrétaire général pour qu’il se sente encouragé par cette majorité de nations qui croient encore en elle.  Ne renonçons jamais et ne baissons jamais les bras dans la poursuite des buts et principes de la Charte, a martelé l’Ukraine.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies ne parvient pas à adopter l’entièreté de son rapport annuel en raison de divergences sur le conflit en Ukraine

Session annuelle de 2022,
302e & 303e séances plénières, matin & après-midi
L/3294

Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies ne parvient pas à adopter l’entièreté de son rapport annuel en raison de divergences sur le conflit en Ukraine

Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation n’est pas parvenu à adopter dans son entièreté le rapport annuel de sa session de 2022, même après plusieurs suspensions de séance, en raison des divergences des délégations sur le libellé de certaines dispositions dudit rapport relatives à la situation en Ukraine.  Alors que la délégation de l’Ukraine souhaitait inclure dans ce rapport l’expression « agression russe », celle de la Fédération de Russie faisait, elle, état d’une « opération militaire spéciale ». 

Présenté par la Rapporteuse, Mme Ligia Lorena Flores Soto, d’El Salvador, ce document comprend cinq chapitres couvrant l’ensemble des points à l’ordre du jour (A/AC.182/2022/L.1 à L.11).  Il fait suite aux trois réunions plénières du Comité spécial et aux trois réunions de son Groupe de travail plénier durant cette session de 2022 entamée le 22 février.  Le Comité a conclu ses travaux en adoptant uniquement l’introduction de ce rapport (A/AC.182/2022/L.1), un dénouement qui a été déploré par nombre de délégations. 

Après le chapitre I relatif à l’introduction du projet de rapport, le chapitre II, divisé en six sections et portant sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a fait l’objet de divergences.  Au titre des commentaires généraux, la Géorgie, au nom de de la République de Moldova et de l’Ukraine, a demandé l’inclusion d’un amendement au rapport rappelant que le respect de l’intégrité territoriale est un principe fondamental du droit international.  La délégation, à l’instar de l’Union européenne (UE), a condamné l’agression russe contre l’Ukraine, en rappelant que le recours à la force contrevient à la Charte. 

L’emploi de la force pour modifier les frontières d’un pays n’a pas lieu d’être, a déclaré la délégation de l’UE.  La Lettonie, la Roumanie, la Slovaquie, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Pologne, la République tchèque, les États-Unis, la Bulgarie, le Royaume-Uni, la République de Moldova et le Costa Rica ont aussi condamné l’agression russe et apporté leur soutien au projet d’amendement.  Ces délégations ont disposé sur leur pupitre une écharpe aux couleurs du drapeau ukrainien sur laquelle on pouvait lire en langue anglaise « Nous sommes tous l’Ukraine aujourd’hui ».

La Fédération de Russie a réagi en indiquant que ces considérations sur la situation en Ukraine n’ont pas leur place devant ce Comité, en rappelant que l’Assemblée générale tenait en parallèle une session extraordinaire d’urgence sur le sujet.  Appuyée par la Syrie, elle a dénoncé cette proposition d’amendement, notant que « la crise en Ukraine n’a pas commencé hier, ni avant-hier ». 

« Personne n’a condamné le renversement illégal et sanglant qui a eu lieu en 2014 à Kiev, grâce à la complicité des délégations qui condamnent la Russie aujourd’hui », a fustigé la délégation, évoquant la résurgence de « l’idéologie nazie » en Ukraine.  Nous avons tous une responsabilité dans ce conflit, a renchéri le Bélarus, qui a dénoncé l’invasion de l’Iraq par les États-Unis, en violation de la Charte.  Appelant à suivre la pratique du Comité, la Chine a conseillé de mettre de côté les propositions qui font l’objet d’une divergence. 

C’est ensuite le chapitre III, centré sur la question du règlement pacifique des différends, qui a donné lieu à des échanges acrimonieux et à des divergences de vues qui n’ont pas pu être surmontées.  La République de Moldova, au nom de la Géorgie et de l’Ukraine, a proposé un amendement, jugeant fondamental de mettre en œuvre les décisions des organes judiciaires internationaux.  La situation en Ukraine s’est à nouveau invitée dans les débats, puisque le délégué de ce pays a proposé, à la lumière de la résolution adoptée ce matin à l’Assemblée générale, de remplacer dans le rapport l’expression « opérations militaires menées par la Fédération de Russie » par « agression de la Fédération de Russie ».

Cette proposition a été appuyée par l’Union européenne, la Lettonie au nom de la Lituanie et de l’Estonie, l’Australie au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande, la Turquie, le Japon, le Royaume-Uni, la Pologne ou bien encore les États-Unis.  La Fédération de Russie a, en revanche, rejeté cette expression.  « Pour nous, il ne s’agit pas d’une agression, mais d’une opération militaire spéciale visant à dénazifier l’Ukraine », a insisté la délégation.

La suite des échanges a porté sur le sous-thème choisi en 2022 intitulé « Échange d’informations sur les pratiques des États concernant le recours au règlement judiciaire ».  Les délégations ont ensuite débattu du chapitre V, consacré aux méthodes de travail du Comité spécial et à la définition de nouveaux sujets. 

Le Président du Comité pour cette session, M. Gheorghe Leucă, de la République de Moldova, a suspendu une première fois la séance afin de permettre aux délégations de voter lors de la session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale sur la situation en Ukraine. 

* Les proposition de libellés formulées par les délégations au cours de cette séance et citées dans ce communiqué ne sont pas des traductions officielles.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Représentante spéciale pour l’Afghanistan appelle à doter la MANUA d’un mandat robuste

8984e séance – matin
CS/14815

Conseil de sécurité: la Représentante spéciale pour l’Afghanistan appelle à doter la MANUA d’un mandat robuste

Six mois et demi après la prise de Kaboul par les Taliban le 15 août 2021, le Conseil de sécurité a été appelé, ce matin, à doter la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) d’un mandat robuste pour lui permettre de répondre aux besoins de la population afghane.  Alors que 24 millions d’Afghans -60% de la population- auront besoin d’aide humanitaire en 2022, contre 18 millions en 2021, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour l’Afghanistan a précisé que ce renouvellement de mandat, qui doit intervenir fin mars, devra aider à mettre en œuvre cinq priorités. 

Selon Mme Deborah Lyons, si la MANUA est dotée des ressources nécessaires, elle pourra s’attaquer à la crise économique; travailler avec les Taliban pour assurer l’accès à l’éducation pour toutes les filles et tous les garçons; soutenir le respect des droits humains; et engager une discussion sur l’inclusion politique.  La Mission pourra également soutenir un dialogue politique structuré avec les autorités de facto qui appuie le processus de sécurisation de la légitimité nationale et réponde aux principales préoccupations des membres du Conseil, telles que la lutte contre les stupéfiants, la lutte contre le terrorisme et la sécurité régionale. 

« Il s’agit d’établir une voie pour permettre à l’État afghan de rejoindre la communauté internationale au sens large », a-t-elle indiqué. 

La Chef de la MANUA a également estimé ne pas pouvoir aider le peuple afghan sans travailler avec les autorités de facto, précisant avoir fait part aux Taliban des préoccupations de la communauté internationale s’agissant des restrictions aux droits fondamentaux des femmes et des filles, les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et les détentions arbitraires, le respect des minorités et les libertés de réunion et d’expression.  De leur côté, les Taliban se sentent incompris et estiment notamment qu’ils devraient être davantage reconnus pour la sécurité qui prévaut en Afghanistan, a-t-elle relayé, précisant qu’au cours des six mois qui se sont écoulés depuis le 15 août, le nombre de victimes civiles a diminué de 78% suite à la réduction du conflit.  « Ce choc des perspectives est à la base d’une grave méfiance à laquelle il faut remédier », a-t-elle souligné. 

Dépeignant un sombre tableau de l’état des libertés fondamentales, Mme Mariam Safi, chercheuse afghano-canadienne en matière de consolidation de la paix et membre de la société civile, a expliqué que la liberté d’expression a presque entièrement disparu en Afghanistan, et que la répression des droits des femmes semble être au cœur de la vision des Taliban.  À l’instar de la France, elle a exhorté le Conseil de sécurité à juger les Taliban pour leurs actes et non pour leurs paroles.  Les Taliban doivent prouver qu’ils ont changé et qu’ils sont prêts à rejoindre la communauté internationale, notamment dans le domaine du respect des droits des femmes et la protection des enfants, a-t-elle insisté. 

« La religion ne saurait justifier une quelconque discrimination à l’égard des femmes », a renchérit la représentante des Émirats arabes Unis qui a fait le lien entre parité et économie en expliquant que la discrimination des femmes coûterait 1 milliard de dollars par an à l’économie afghane.  Dans la même veine, la délégation du Kenya a noté qu’au moins 5% du produit intérieur brut (PIB) est perdu lorsque les femmes sont confrontées à des restrictions de travail, avant d’exhorter les Taliban à tenir compte de cette réalité dans l’élaboration de politiques.  « Les droits des femmes et des filles sont indissociables de la prospérité de l’Afghanistan », a résumé la Norvège.  

Le risque d’un effondrement de l’économie afghane a également été la source de multiples préoccupations, l’Iran soulignant notamment que la mise à disposition des avoirs gelés de l’Afghanistan est cruciale pour le rétablissement de l’économie afghane.  Ce sujet a d’ailleurs été l’origine d’une rare joute oratoire entre les représentants de la Chine et des États-Unis.  Ainsi la Chine, à l’instar de la Fédération de Russie, du Pakistan, mais aussi de la représentante de la société civile, a estimé que le gel de 7 milliards de dollars d’avoirs afghans par les États-Unis était une atteinte à la souveraineté de l’Afghanistan et une violation du droit international.  Réserver une partie des avoirs gelés pour indemniser les victimes des attentats terroristes du 11 septembre 2001 est une décision immorale, a dénoncé la Fédération de Russie. 

En tant que pays géographiquement proches de l’Afghanistan, les représentants de l’Inde et de l’Iran se sont particulièrement inquiétés des risques de voir l’Afghanistan redevenir un sanctuaire terroriste.  À l’instar de la France, ces délégations ont fustigé l’insuffisance des mesures prises par les Taliban pour contrecarrer ce fléau, l’Iran ayant notamment relevé que l’État islamique d’Iraq et du Levant-Khorassan (EIIL-K) aurait mené 152 attaques dans 16 provinces entre le 19 août et le 31 décembre 2021. 

Regrettant que « rien ne soit amélioré sur le terrain depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité », le représentant de l’Afghanistan a jugé essentiel l’avènement d’un gouvernement légitime et inclusif nommé par et pour les Afghans et capable de défendre les droits des femmes, des filles et des minorités et de faire face à la crise économique.  Le Pakistan s’est, quant à lui, voulu confiant en estimant que pour la première fois en 40 ans, l’Afghanistan dispose d’un gouvernement qui contrôle l’ensemble du pays sans menace existentielle sur sa survie.  C’est pourquoi, il a exhorté la communauté internationale à aider à stabiliser l’Afghanistan et pérenniser la paix dans le pays et dans la région en évitant de reproduire une erreur commise à deux reprises en 20 ans. 

LA SITUATION EN AFGHANISTAN – (S/2022/64)

Déclarations

Mme DEBORAH LYONS, Représentante spéciale du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a indiqué que les pires craintes d’une famine généralisée en Afghanistan ont été évitées cet hiver grâce aux agences humanitaires de l’ONU qui ont pu fournir une assistance vitale à près de 20 millions de personnes dans 397 des 401 districts afghans.  Il faut néanmoins s’attaquer à la situation économique du pays pour éviter de se retrouver face à la même crise l’hiver prochain.  Alertant que l’on approche d’un point de basculement qui verra plus d’entreprises fermer et plus de personnes au chômage et sombrer dans la pauvreté, elle a remercié le Trésor des États-Unis pour les dispositions mises en place pour faciliter les activités commerciales et financières et permettre de travailler avec toutes les institutions gouvernementales. 

Mais d’autres défis au redressement économique persistent, a-t-elle indiqué, citant notamment l’effondrement de la demande dû à la cessation de l’aide au développement, les restrictions sur les paiements internationaux, le manque d’accès aux réserves de devises fortes, la pénurie de liquidités et les contraintes imposées à la Banque centrale.  De son côté, la MANUA a pris toutes les mesures possibles pour injecter des liquidités dans l’économie, y compris l’importation physique d’espèces, et cherche à établir -sur une base temporaire- une facilité d’échange humanitaire pour permettre une intensification de la programmation humanitaire et donner accès à des dollars américains à des entreprises légitimes pour leur permettre d’importer des marchandises. 

« Nous ne croyons pas pouvoir véritablement aider le peuple afghan sans travailler avec les autorités de facto », a insisté la Représentante spéciale tout en reconnaissant qu’il existe toujours une méfiance persistante entre les Taliban et une grande partie de la communauté internationale.  Elle a indiqué que les Taliban se sentent incompris et se plaignent des rapports qui ne reflètent pas la réalité telle qu’ils la voient.  Ils me disent que nous sous-estimons leurs réalisations et exagérons les problèmes qu’eux-mêmes reconnaissent et prétendent essayer de résoudre, a-t-elle indiqué.  Les Taliban estiment notamment qu’ils devraient être davantage reconnus pour la sécurité qui prévaut en Afghanistan, a-t-elle ajouté, précisant qu’au cours des six mois qui se sont écoulés depuis le 15 août, le nombre de victimes civiles a diminué de 78% grâce à la réduction du conflit.  Ils notent également que leur déclaration d’amnistie a été honorée en grande partie, a-t-elle ajouté, tout en notant la persistance de problèmes de sécurité, dont le meurtre la semaine dernière de huit vaccinateurs contre la poliomyélite dans le nord de l’Afghanistan. 

Selon la Représentante spéciale, les Taliban mettent également en avant les progrès réalisés sur le front économique - notamment des revenus solides malgré une activité économique réduite, la réduction de la corruption gouvernementale et un budget qui ne nécessite pas les ressources des donateurs—ainsi que la réouverture des universités publiques; la finalisation du plan de réouverture des écoles pour filles et garçons; et une politique diplomatique qui consiste à veiller à ce que l’Afghanistan ne devienne pas une arène de concurrence entre différentes puissances.  Selon les Taliban, ces réalisations positives sont sapées par une guerre économique non déclarée contre eux par la communauté internationale dans le but d’étouffer leur économie afin que leur régime s’effondre.  Ce choc des perspectives est à la base d’une grave méfiance à laquelle il faut remédier, a-t-elle souligné. 

Mme Lyons a expliqué avoir fait part aux Taliban des préoccupations de la communauté internationale s’agissant des restrictions aux droits fondamentaux des femmes et des filles, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et des détentions arbitraires, du respect des minorités et des libertés de réunion et d’expression.  La MANUA a également appelé à la libération, le mois dernier, des femmes manifestantes portées disparues et des membres de leur famille. 

Elle a estimé que la mission politique pouvait faire davantage pour travailler avec les autorités de facto sur les principaux problèmes auxquels est confrontée la société afghane.  « Mais une mission politique implique un objectif politique qui est de voir l’Afghanistan réintégrer l’organisation ». Naturellement, a-t-elle ajouté, travailler avec l’autorité de facto ne signifie en aucun cas tolérer tout ce qu’elle fait, mais cela nous donnera l’occasion de contribuer à façonner un avenir pour le peuple afghan, exempt de conflits et où il pourra poursuivre pacifiquement leur quête de prospérité, de participation et de respect de leurs droits. 

Mme Lyons a ensuite indiqué que le Secrétaire général a proposé de doter la MANUA d’un mandat d’un an au lieu de six mois.  Si la MANUA est dotée des ressources nécessaires, elle pourra s’attaquer à la crise économique; travailler avec les Taliban pour assurer l’accès à l’éducation pour toutes les filles et tous les garçons; soutenir le respect des droits humains; et engager une discussion sur l’inclusion politique.  La Mission pourra également soutenir un dialogue politique structuré avec les autorités de facto qui appuie le processus de sécurisation de la légitimité nationale et réponde aux principales préoccupations des membres du Conseil, telles que la lutte contre les stupéfiants, la lutte contre le terrorisme et la sécurité régionale.  Il s’agit d’établir une voie pour l'État afghan de rejoindre la communauté internationale au sens large, a-t-elle souligné, avant d’appeler le Conseil de sécurité à octroyer à la MANUA un mandat robuste permettant de répondre aux besoins de la population afghane qui a trop souffert. 

Mme MARIAM SAFI, afghano-canadienne et membre de la société civile a déclaré être venue au Conseil de sécurité avec « un petit bout » de l’Afghanistan.  « Un peu de terre que j’ai gardée depuis ma première visite en 2007 », a-t-elle dit, expliquant qu’à ses yeux, chaque grain représente une femme, un homme ou un enfant afghan—les dizaines de milliers d’Afghans et d’Afghanes tués, les Hazaras et autres groupes ethniques qui sont encore persécutés, le million d’enfants en proie à la malnutrition, les 24 millions de personnes en besoin d’assistance humanitaire et les dizaines de manifestantes, de représentants de la société civile et de journalistes qui ont été détenus, kidnappés ou tués depuis le 15 août.  « L’Afghanistan ne tient qu´à un fil », s’est-elle alarmée, notant qu’il est du ressort du Conseil de sécurité de prendre des décisions qui pourraient élever le peuple afghan, la région et le monde, et briser le cycle du conflit et de la violence. 

Mme Safi s’est inquiétée de la forte dégradation des droits des femmes engendrée par l’arrivée des Taliban au pouvoir, à commencer par les restrictions à leur liberté d’aller et venir, leurs habits et leur accès à l’éducation et au travail.  Bien que les Taliban aient annoncé la levée de certaines restrictions, la mise en pratique de leurs engagements reste incertaine, et la répression des droits des femmes semble être au cœur de la vision des Taliban pour l’Afghanistan. C’est pourquoi les femmes continuent à manifester à travers le pays, malgré le danger qu’elles encourent.  À l’heure actuelle, a-t-elle fait savoir, les Taliban fouillent les maisons et les bureaux de Kaboul, semant la peur parmi les Afghans ordinaires.  Cette manœuvre d’intimidation, a-t-elle averti, devrait alerter la communauté internationale, surtout celles et ceux qui cherchent à collaborer avec les Taliban qu´il faut les juger pour leurs actes et non pour leurs paroles.  « Une collaboration sans conditions est synonyme de complicité », a-t-elle assené. 

Mme Safi a plaidé pour que la MANUA dispose d’un mandat solide afin d’assurer le suivi et le compte rendu des droits humains et de soutenir la mise en œuvre des obligations internationales de l’Afghanistan.  La nomination d’un Rapporteur spécial chargé de suivre la situation des droits humains en Afghanistan est certes importante, mais elle ne remplace pas la MANUA ni les infrastructures déjà en place avant août, a-t-elle expliqué.  Elle a souhaité voir la MANUA disposer des ressources et des capacités nécessaires pour élargir son champ d’action et pour venir en aide aux organisations locales dans leur mise en œuvre des droits humains.  Elle a également exhorté le Conseil de sécurité à garantir un mandat de la MANUA clairement favorable à la participation entière, sûre, égale et significative des femmes au sein de tous les procédés et à la consultation régulière avec des femmes et avec la société civile en général, y compris la communauté LGBTQI+, les jeunes, les victimes et toutes les communautés ethniques et religieuses. 

La militante a par ailleurs souhaité que l’aide humanitaire soit effectuée en partenariat avec la société civile afghane tout en notant que celle-ci ne peut en aucun cas remplacer une économie nationale forte.  « La décision prise récemment par les États-Unis de partager les 7 milliards de dollars de fonds gelés de l’Afghanistan et d’en priver la population afghane n’est rien d’autre que du vol », a-t-elle déclaré.  Ces fonds appartiennent au peuple afghan, et ils doivent lui être restitués, a plaidé Mme Safi qui a expliqué qu’afin d’empêcher que ces fonds soient utilisés en faveur des Taliban, ils peuvent être libérés progressivement auprès de la Banque centrale, qui se doit de rester indépendante et dirigée par une équipe technique neutre. 

Elle a en outre affirmé que les Taliban ont gardé un lien étroit avec des groupes terroristes étrangers, notamment à travers le réseau Haqqani et Al-Qaida, et ont également créé des bataillons d’attentats-suicides au sein de leurs propres forces armées.  Les Taliban sont en quête d’un émirat islamique, c’est-à-dire un gouvernement formé autour d’un seul chef choisi par un conseil et qui maintient tout le pouvoir.  Or, le peuple afghan doit être en mesure de s’exprimer librement et tous les Afghans doivent être représentés au sein de tout gouvernement futur, a souligné la militante pour qui la communauté internationale doit être prête à retirer son soutien si les attentes ne sont pas respectées. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a constaté que six mois après l’arrivée des Taliban au pouvoir, l’Afghanistan est confronté à l’une des pires crises humanitaires au monde, notant en outre que l’aide humanitaire et l’aide au développement ne seront pas suffisantes pour relever les défis auxquels l’Afghanistan est confronté.  Elle a également dit être préoccupée par la violence, les abus de pouvoir et la situation imprévisible en matière de sécurité dans le pays. 

La représentante a souligné que les droits des femmes et des filles sont inextricablement liés à la stabilité et à la prospérité de l’Afghanistan.  Pour construire un pays stable, résilient et autonome, les filles et les garçons doivent avoir un accès égal à l’éducation et les femmes et les hommes doivent être en mesure de contribuer à tous les secteurs de la société afghane, y compris l’élaboration des politiques, a-t-elle indiqué.  Notant que les décisions des autorités de facto auront un impact immense pour éviter que l’Afghanistan ne demeure dans une crise humanitaire et économique perpétuelle, elle a appelé à les mettre au défi d’atténuer l’urgence humanitaire, d’agir sur le plan des droits humains et de lutter contre le terrorisme international.  Mme Juul a ensuite appelé à doter l’équipe de la Représentante spéciale d’un mandat solide afin de lui permettre de promouvoir le dialogue politique et nouer le dialogue avec les Taliban, de contrôler les droits humains, et faciliter les efforts humanitaires. 

En tant que voisin immédiat de l’Afghanistan, M. T. S. TIRUMURTI (Inde) s’est dit particulièrement inquiet de la situation en Afghanistan, en particulier sur le plan humanitaire.  Il a appelé à une distribution de l’aide humanitaire respectant les principes d’impartialité et de neutralité.  « Cette aide doit arriver en particulier aux plus nécessiteux dont les femmes, les enfants et les minorités », a insisté le représentant avant de préciser que son pays s’est engagé à livrer 50 000 tonnes de blé, 500 000 vaccins et 13 tonnes de médicaments essentiels.  Souhaitant que l’Afghanistan retrouve la paix et la stabilité, il a souligné la pertinence de la résolution 2593 du Conseil de sécurité et appelé à éviter que le territoire afghan soit utilisé par certains groupes pour mener des attaques contre des pays tiers.  Il s’est inquiété des activités de Daech en rappelant que des pays s’inquiètent à la perspective de devenir victimes d’actes terroristes commis par les groupes présents en Afghanistan.  Le représentant a par ailleurs appelé une participation de tous les pans de la société afghane, dont les femmes, en rappelant qu’un gouvernement inclusif est essentiel pour la paix et la stabilité de l’Afghanistan. 

M. JOÃO GENESIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a souhaité que le futur mandat de la MANUA mette l’accent sur le renforcement de la protection des droits humains, s’inquiétant notamment des informations faisant état de violations commises par les forces associées au nouveau régime, y compris des arrestations arbitraires, des enlèvements, des exécutions extrajudiciaires et les restrictions à la liberté d’expression.  La MANUA doit pouvoir surveiller de tels incidents et aider à la consolidation de l’état de droit en Afghanistan.  Il faut également soutenir les droits des femmes et des filles, a-t-il ajouté, déplorant le fait que les militantes continuent d’être persécutées et leur présence dans la vie publique et le marché du travail est limitée.  Il a aussi appelé à défendre la protection des enfants.  À cet égard, la communauté internationale doit élever la voix contre des pratiques telles que le recrutement d’enfants par des groupes, la fermeture des écoles pour filles et l’augmentation des décès résultant de la présence de mines terrestres et d’engins explosifs.  On ne peut rester indifférent au drame de neuf millions de personnes menacées par la faim, a indiqué M.  Almeida Filho, avant de demander que le peuple afghan ait accès à ses avoirs détenus à l’étranger.  Ces ressources ne doivent pas être utilisées sans tenir compte de la volonté, des priorités et des besoins des Afghans, a-t-il souligné. 

L’espoir et le printemps sont encore loin pour le peuple afghan, a déclaré M.  JUN ZHANG (Chine) rappelant la grave crise humanitaire que traverse le pays.  Il a appelé à appuyer la stabilité du pays et l’aide humanitaire, insistant sur l’importance d’accroître l’aide à l’Afghanistan sans condition politique.  Notant que l’aide humanitaire ne suffira pas, il a appelé la communauté internationale à injecter des liquidités, appuyer l’intégration économique régionale, et lever les sanctions économiques et financières sans tarder.  Il a affirmé que les États-Unis ont détourné 7 milliards de dollars du peuple afghan, dénonçant une atteinte à la souveraineté de l’Afghanistan et une violation du droit international.  Ces avoirs permettent de sauver des vies.  Les confisquer, c’est un coup porté à l’Afghanistan, a protesté le représentant qui a appelé Washington à restituer ces avoirs sans conditions et pour ne pas empirer la situation.  Relevant que de nombreux pays travaillent actuellement avec Kaboul, il a salué une tendance prometteuse d’autant qu’il faut une approche pragmatique et équitable pour que l’Afghanistan réintègre sa place au sein de la communauté internationale.  La Chine va coopérer avec l’Afghanistan, contribuer à la paix et au développement à long terme, et promouvoir différentes mesures pour contribuer au relèvement de ce pays, a terminé le délégué.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que depuis leur prise du pouvoir par la force, les Taliban multiplient les exactions et violations des droits, y compris des plus fondamentaux, notant par ailleurs que les Taliban font partie des violateurs persistants de la « liste d’infamie » du rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits.  Elle a appelé à soutenir un volet robuste de suivi et d’évaluation de la situation des droits de l’homme dans le prochain mandat de la MANUA, y compris pour permettre le respect des droits des femmes et la protection des enfants.  De la même manière, elle a jugé essentiel que la MANUA, dans sa mission d’accompagnement politique, travaille avec les Taliban pour la mise en place d’un gouvernement représentatif et légitime aux yeux de la population afghane. 

Face à une situation humanitaire désastreuse, la MANUA doit aussi conserver son rôle de coordinateur de l’aide humanitaire afin que celle-ci soit acheminée à toutes les personnes qui en ont besoin en Afghanistan.  En matière sécuritaire, elle a exhorté les Taliban à couper tout lien, quelle qu’en soit la nature, avec les groupes terroristes, en particulier Al-Qaida et sa filiale régionale dans le sous-continent indien.  Elle a noté que le dernier rapport de l’équipe de surveillance attachée aux comités 1267 et 1988 indique que les Taliban n’ont à ce stade pris aucune mesure pour limiter les activités des groupes terroristes en Afghanistan et que ceux-ci bénéficient d’une liberté inégalée depuis de nombreuses années.  « Le rapport montre que loin d’avoir rompu leurs liens avec Al-Qaida, les Taliban, qui ont intégré des membres de cette organisation terroriste dans leur gouvernement intérimaire, risquent de transformer à nouveau l’Afghanistan en sanctuaire pour ce groupe et pour ses affiliés », s’est inquiétée Mme Broadhurst.  Dans ce contexte, elle a jugé crucial que l’équipe de surveillance puisse se rendre sur le terrain, et que la MANUA travaille de concert avec l’ONUDC pour lutter contre la production et le trafic de drogues en Afghanistan.  « Les Taliban doivent prouver qu’ils ont changé et qu’ils sont prêts à rejoindre la communauté internationale », a souligné la représentante de la France avant de préciser que le rôle d’évaluation et de dialogue de la MANUA sera crucial pour maintenir l’Afghanistan dans le concert des nations. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a estimé que les risques de catastrophe humanitaire demeurent réels et une action urgente est nécessaire pour éviter l’effondrement économique de l’Afghanistan. L’aide britannique à l’Afghanistan a déjà doublé cette année pour atteindre 381 millions de dollars, et le Royaume-Uni a également convenu de coorganiser une conférence des donateurs le 31 mars afin de collecter des fonds pour le Plan de réponse humanitaire de l’ONU en Afghanistan, a-t-il indiqué. Le représentant a appelé la communauté internationale à trouver rapidement des solutions créatives pour faire face à la crise de liquidités et établir des principes et mécanismes pour fournir une assistance au-delà de l’aide humanitaire de base. De leur côté, les Taliban doivent répondre aux préoccupations de la communauté internationale.  À ce sujet, le délégué a marqué sa préoccupation face aux informations faisant état de représailles accrues contre d’anciens agents des forces de sécurité et des représentants de l’ancien Gouvernement, ainsi que d’attaques contre des groupes minoritaires et de détention de membres de la société civile.  Il s’est dit inquiété des récentes arrestations de militantes et de membres de leur famille pour avoir manifesté pacifiquement en faveur des droits des femmes, tout comme des annonces qui semblent restreindre davantage la capacité des femmes à voyager. 

Il a en revanche salué le fait qu’au cours des dernières semaines dans certaines provinces, certaines femmes ont pu retourner à l’université, ainsi que les importants engagements publics pris par les Taliban pour que toutes les filles soient en mesure de retourner à l’école secondaire à la fin du mois de mars lorsque les écoles rouvriront après la trêve hivernale.  Il a ensuite appuyé pleinement une mission des Nations Unies habilitée et efficace chargée de mener la réponse humanitaire; surveiller et défendre les libertés et les droits de tous les Afghans; et promouvoir la stabilité. 

M.  JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a tout d’abord regretté le meurtre, la semaine dernière, de plusieurs responsables de la campagne de vaccination contre la poliomyélite en Afghanistan.  Se disant en faveur du renouvellement du mandat de la MANUA, il a souligné l’importance pour la communauté internationale de soutenir l’action humanitaire de l’ONU avec des ressources, précisant que les États-Unis ont contribué à hauteur de plus de 308 millions de dollars au plan de réponse humanitaire de cette année et au plan de réponse pour les réfugiés. 

L’ampleur de la crise humanitaire exige un appui encore plus fort de la communauté internationale, a déclaré le représentant exhortant les bailleurs de fonds à contribuer généreusement à ces efforts lors de la conférence des donateurs prévue à la fin du mois.  Il a ajouté qu’avec la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement, les États-Unis ont transféré des centaines de millions de dollars afin d’appuyer les travaux de l’ONU en Afghanistan. 

S’agissant du décret sur la protection des avoirs afghans dans des banques américaines signé par le Président Biden le 11 février, le représentant a indiqué qu’aucune décision n’a été prise concernant les bénéficiaires de ces fonds et tout versement se fera en consultation avec un vaste éventail de parties prenantes.  Les tribunaux américains vont aussi devoir déterminer quel montant sera versé au titre du droit américain aux victimes d’attentats terroristes perpétrés par les Taliban.  En vertu de ce décret toutes les réserves relevant de la juridiction des États-Unis sont inaccessibles à la population afghane dans un avenir proche, a-t-il ajouté. 

Réagissant à l’intervention du délégué chinois, le représentant des États-Unis a estimé que celui-ci devrait se concentrer sur les moyens d’aider l’Afghanistan, la contribution de la Chine n’étant pas à la hauteur.  Il a également appelé les Taliban à assumer leurs responsabilités pour garantir la stabilité du pays.  La situation socioéconomique ne doit pas occulter la situation des femmes et des filles et des groupes minoritaires qui doivent pleinement jouir de leurs droits et participer à tous les aspects de la vie sociale et économique en Afghanistan, a-t-il souligné.  Le délégué a également exhorté les Taliban à mettre fin aux assassinats et aux disparitions forcées, et à garantir la liberté d’expression notamment pour les médias. 

Mme  ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est inquiétée qu’une grande partie de la population afghane soit tributaire de l’aide internationale pour survivre.  Face à ce constat, elle a jugé indispensable que l’aide humanitaire puisse se poursuivre sans entrave, y compris sous forme de liquidités pour payer les acteurs sociaux.  La représentante a aussi exhorté les Taliban à honorer les engagements internationaux de l’Afghanistan avant de préciser que ce pays pourra aller de l’avant uniquement sur la base d’engagements fermes pour et par les Afghans.  De même, elle a jugé crucial que les Taliban assurent le respect des droits de la personne.  « C’est indispensable pour le bon fonctionnement de la société de la société afghane » a insisté la représentante avant de demander que les journalistes puissent faire leur travail sans subir des poursuites.  Alors que le terrorisme continue de menacer les efforts de stabilisation de l’Afghanistan et de l’Asie centrale, la représentante de l’Albanie a appelé à tout mettre en œuvre afin de ne pas voir reculer 20 ans de progrès dans la lutte contre Daech et Al-Qaida.  Il est donc indispensable de doter la MANUA d’un mandat robuste et clair, a-t-elle souligné. 

M.  HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a appelé la communauté internationale à faire preuve de solidarité avec le peuple afghan pour l’aider à se stabiliser et à se reconstruire.  Le Conseil devra notamment assumer sa responsabilité en dotant rapidement la MANUA d’un mandat robuste afin d’appuyer efficacement les efforts de reconstruction et de relèvement en Afghanistan.  Il faut notamment appuyer la composante droits humains du mandat afin d’assurer la protection des civils, des minorités et des personnes vulnérables telles que les personnes âgées et celles vivant avec un handicap.  Nous soutiendrons également une MANUA qui sera un gardien des besoins des femmes, des filles et des enfants, a-t-il dit.  Le représentant a salué la coopération croissante entre la MANUA et les autorités de facto et a appelé ces dernières à continuer d’agir de bonne foi et de s’aligner sur les efforts mondiaux pour apporter un soulagement durable aux citoyens afghans, dont beaucoup ont besoin d’une aide humanitaire urgente.  M. Agyeman a aussi appelé les Taliban à s’engager à défendre les libertés fondamentales et les libertés de chaque citoyen afghan, sans discrimination, et de leur assurer l’accès aux services de base. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a pris note des efforts des Taliban pour résoudre les problèmes politiques, socioéconomiques, humanitaires et les questions relatives aux droits humains.  Toutefois, les Taliban doivent achever le processus de réconciliation intra-afghane, créer des structures de pouvoir véritablement inclusives reflétant les intérêts de toutes les forces ethno-politiques du pays et lutter contre les menaces liées à la drogue et aux groupes terroristes. 

La déléguée a jugé impossible de résoudre les problèmes de longue date et des nouveaux défis sans renforcer les capacités nationales. Prenant note de la mise en œuvre de la résolution 2615 (2021), la représentante a estimé que ces mesures ne seront pas suffisantes pour assurer le relèvement durable de l’Afghanistan.  Elle a ensuite dénoncé les tentatives des États-Unis de reporter le dégel des avoirs afghans et qualifié d’immorale la décision de réserver une partie des avoirs gelés pour indemniser les victimes des attentats terroristes du 11 septembre 2001. 

La représentante a affirmé craindre l’effondrement complet de l’Afghanistan qui entraînerait inévitablement une arrivée massive de réfugiés, un regain d’activités terroristes, une augmentation de la production de drogue et une instabilité encore plus grande, y compris dans la région et au-delà.  La Fédération de Russie surveille les offensives en cours du Front de résistance nationale afghane, a indiqué la représentante pour qui transformer la situation actuelle en une guerre civile à grande échelle n’est pas dans l’intérêt du peuple afghan ou de la région dans son ensemble.  Elle a en outre dénoncé les ultimatums imposés avant de discuter avec les nouvelles autorités afghanes. 

Prenant note des recommandations du Secrétaire général sur le renouvellement du mandat de la MANUA, la déléguée a objecté quant aux avis d’y introduire la question des droits humains et du rôle accru de la Mission en matière de surveillance des droits de la personne.  Le bon fonctionnement de la MANUA réside dans de bonnes relations avec le pays hôte et dans la crédibilité de ses responsables, a estimé la représentante. 

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) s’est dit préoccupée par la situation humanitaire désastreuse qui a été aggravée par une sécheresse, laissant plus de 24 millions d’Afghans dépendants de l’aide humanitaire.  Alors que la situation continue de se détériorer, la représentante a appelé toutes les parties prenantes, donateurs internationaux et amis de l’Afghanistan à contribuer généreusement au plan de réponse humanitaire 2022 afin de réduire le déficit de financement de 3,9 milliards de dollars.  Elle a également espéré que tous les efforts seront déployés pour mettre en œuvre le cadre d’engagement transitoire pour aider les Afghans en 2022.  À cet égard, la déléguée a salué la mise à disposition par la Banque mondiale d’1 milliard de dollars à la demande des donateurs du fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan et la communauté internationale pour compléter les efforts de réponse humanitaire.  Après avoir noté que l’effondrement de l’économie reste un grave problème, la représentante du Kenya s’est inquiétée des restrictions à l’impact disproportionné sur l’accès des femmes à l’éducation et au travail.  Relevant qu’au moins 5% du PIB sont perdus lorsque les femmes sont confrontées à des restrictions de travail, la représentante a exhorté les Taliban à tenir soigneusement compte de cette réalité dans l’élaboration de politiques.  En outre, elle a appelé les autorités à donner la priorité à l’élimination de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste et d’autres préjudices sexistes contre les femmes, les filles et les enfants afghans, ainsi qu’à annuler toute action visant à restreindre la liberté de mouvement des femmes. 

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a déploré le fait que pendant 166 jours, les Taliban ont refusé l’accès à l’éducation secondaire aux filles, niant leurs droits humains fondamentaux.  Il a aussi condamné les meurtres de huit agents de vaccination contre la poliomyélite jeudi dernier et appelé à rendre compte.  Alors que les opérations humanitaires continuent d’être entravées par la crise bancaire et de liquidité, il s’est félicité de l’annonce, hier par la Banque mondiale, du déblocage de plus d’1 milliard de dollars pour soutenir le peuple afghan. 

Maintenant que le Conseil de sécurité négocie un mandat pour la poursuite de la présence de l’ONU en Afghanistan, nous avons l’obligation de mettre les besoins fondamentaux et les droits humains du peuple afghan en première ligne, a dit le délégué.  Il est essentiel que l’action humanitaire fondée sur des principes soit pleinement préservée et reste une priorité clef pour le travail vital de l’ONU en Afghanistan, a-t-il poursuivi.  Il a également appelé le Conseil à faire beaucoup plus pour demander des comptes aux Taliban.  L’Afghanistan n’atteindra la stabilité que lorsque les droits et les talents de tout son peuple seront respectés, et lorsqu’il y aura une gouvernance inclusive et représentative, a-t-il indiqué.  Selon lui, le futur mandat de la MANUA doit avoir, à la base, un engagement sans ambiguïté en faveur du plein épanouissement, de l’égalité et de la participation des femmes à tous les processus de dialogue politique.  Nous avons été témoins pendant six mois du mépris des Taliban pour les droits de la personne, aggravant les violations et les abus de deux décennies de guerre, a constaté le délégué.  C’est pourquoi il a appelé à un mandat solide en matière de droits humains pour la MANUA.  Il s’agit, a-t-il expliqué, de sauver des vies et de garantir que ceux qui subissent des violations des droits de l’homme sont entendus et non condamnés au silence. 

M. ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a condamné le meurtre récent de 8 travailleurs humanitaires en Afghanistan.  Soulignant que la protection des droits et libertés fondamentaux des femmes et des filles est une priorité pour le Mexique, il a recommandé, dans le cadre du renouvellement du mandat de la MANUA, de faciliter le dialogue entre les femmes et les autorités de fait, et continuer de faire rapport sur la situation des droits humains. 

Le délégué s’est inquiété des informations faisant état d’une présence accrue de groupes terroristes en Afghanistan, demandant d’empêcher que le pays ne redevienne un refuge pour ces derniers et appelant à prévenir les détournements d’armes.  Revenant sur le renouvellement du mandat de la MANUA, le délégué a secondé la proposition du Secrétaire général d’une structure claire qui divise ses travaux en deux domaines: les affaires politiques et la gouvernance, et l’humanitaire et le développement.  En outre, le maintien de la capacité de surveillance de la mission sur la situation des droits humains doit être une priorité.  Et la fourniture d’informations impartiales concernant la protection des civils est tout aussi vitale.  La MANUA doit aussi conserver la capacité d’interagir avec tous les décideurs pour défendre les libertés et droits fondamentaux, a-t-il ajouté. 

Mme ALLEGRA PAMELA R. BONGO (Gabon) a relevé que six mois après la prise de pouvoir par les Taliban, les minorités tant ethniques, géographiques, politiques que sociales, y compris les femmes, sont maintenues à la périphérie du processus politique.  La stabilisation de l’Afghanistan implique le renforcement de la confiance, la promotion d’une gouvernance transparente et participative, ainsi que la mise en place d’un dialogue politique structuré entre les Taliban et toutes les forces vives afghanes, a—t-elle relevé.  Elle a appelé la communauté internationale à maintenir un dialogue constructif avec les Taliban, notant qu’il en va du bien-être individuel et social des populations. 

Mme Bongo a marqué sa préoccupation face à la condition des femmes et des filles en Afghanistan, dont les libertés et les droits fondamentaux restent à ce jour largement restreints, en dépit d’engagements pris par les autorités de facto de protéger les droits des femmes, notamment le droit à l’éducation.  Il est nécessaire que l’Afghanistan, qui ne compte aucune femme parmi les membres de son gouvernement et de ses 34 gouverneurs de province, restitue aux femmes la place qui leur revient et opte pour une administration inclusive, a-t-elle plaidé.  Sur le plan sécuritaire, la représentante a déploré la stigmatisation de dignitaires de l’ancien régime qui s’accompagne de violations des droits de l’homme, ce qui constitue un frein à la réconciliation nationale.  En dépit des efforts des Taliban d’asseoir leur contrôle des zones frontalières, en vue de restreindre les attaques des groupes extrémistes du sol afghan vers les pays voisins, la présence active des combattants étrangers, sur lesquels les Taliban n’ont manifestement aucun contrôle, est un réel sujet de préoccupation, s’est également inquiétée la déléguée. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a estimé que la coordination des activités des donateurs doit rester une pierre angulaire des activités de la MANUA qui, a-t-elle ajouté, doit jouer un rôle pour minimiser le risque de détournement de l’aide en Afghanistan.  Elle a souligné la nécessité d’aider financièrement l’économie afghane, notamment pour payer les salaires des fonctionnaires, saluant ensuite l’engagement de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) de créer un fonds d’affectation spéciale humanitaire et de lancer un programme pour la sécurité alimentaire en Afghanistan. 

Le mandat de la MANUA devrait en outre refléter la situation des femmes et des filles dont l’exclusion de l’éducation, de la vie publique et de la main-d’œuvre entrave les perspectives de paix et de sécurité ainsi que la prospérité économique dans le pays.  La religion ne peut être utilisée pour justifier la discrimination à l’égard des femmes, a prévenu la déléguée qui a relevé que la discrimination des femmes coûterait 1 milliard de dollars par an à l'économie afghane.  Elle a estimé que l’ONU peut jouer un rôle essentiel en facilitant le dialogue politique avec toutes les parties concernées, y compris les Taliban qui doivent pour leur part améliorer la gouvernance et fournir efficacement des services vitaux au peuple afghan.  La représentante a également demandé aux Taliban de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour lutter contre le terrorisme, notamment en rompant les liens avec tous les groupes terroristes et en empêchant l’utilisation du territoire afghan comme refuge sûr pour le terrorisme. 

Reprenant la parole, le représentant de la Chine a dit comprendre la gêne du délégué des États-Unis face aux nombreuses remarques fustigeant la décision américaine de geler des avoirs du Gouvernement afghan. 

Réagissant à ce propos, le représentant des États-Unis a dénoncé des remarques chinoises à motivation uniquement politique liées aux relations de la Chine avec les Taliban. 

Il est légitime que le peuple afghan soit furieux de voir que ses avoirs sont gelés par le Gouvernement américain, a régit le délégué de la Chine

« Rien ne s’est amélioré sur le terrain depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité » a regretté M. GHULAM M. ISACZAI (Afghanistan) avant de fustiger de nombreuses violations du droit international humanitaire, du droit international des droits de l’homme et du droit islamique par les autorités de facto.  « Ces violations doivent cesser et les auteurs des crimes odieux doivent rendre des comptes » a insisté le représentant avant de saluer l’octroi de permis supplémentaires pour des transactions économiques et commerciales.  S’inquiétant de la situation humanitaire dans le pays, le représentant de l’Afghanistan a exhorté les États Membres à financer le plan d’urgence humanitaire et faciliter la bonne mise en œuvre de tout projet humanitaire par des ONG.  Pour parvenir à une stabilité à long terme, il a jugé essentiel l’avènement d’un gouvernement légitime et inclusif nommé par et pour les Afghans et capable de défendre les droits des femmes, des filles et des minorités et de faire face à la crise économique.  Un nouveau gouvernement composé de personnes compétentes, dont des femmes et des personnes dotées d’une légitimité internationale est indispensable et permettra de préserver les acquis des 20 dernières années et éviter que l’Afghanistan ne sombre dans la crise économique et humanitaire. 

Par ailleurs, le représentant de l’Afghanistan a réitéré son appel à enquêter sur les comptes d’anciens membres de gouvernement impliqués dans des détournements de fonds.  Dans l’optique de la définition du prochain mandat de la MANUA, il a insisté sur l’importance de la contribution de l’ONU et de la MANUA pour promouvoir la paix et la stabilité mais aussi faire le suivi de la question des droits de la personne en Afghanistan. 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) s’est inquiétée des potentielles ramifications désastreuses de la situation sécuritaire et humanitaire en Afghanistan sur la sécurité et la stabilité de la région, en particulier celles des pays voisins.  Si la situation n’est pas gérée efficacement, a-t-elle averti, l’effondrement socioéconomique du pays est possible, et cela entraînerait un dénuement généralisé et un afflux massif de migrants dans les pays voisins qui sont déjà surchargés par des millions de réfugiés.  Elle a exhorté la communauté internationale, en particulier les pays donateurs, à assumer leurs responsabilités envers les voisins de l’Afghanistan afin d’aider les réfugiés et déplacés.  Elle a souligné que les avoirs gelés de l’Afghanistan appartiennent au peuple afghan et leur mise à disposition est cruciale pour le rétablissement de l’économie afghane et pour sauver des vies.  Ces fonds ne devraient pas être politisés ou conditionnés, a-t-elle estimé. 

La déléguée s’est également dite préoccupée par les activités terroristes en Afghanistan, relevant que l’État islamique d’Iraq et du Levant-Khorassan (EIIL-K) aurait mené 152 attaques dans 16 provinces entre le 19 août et le 31 décembre 2021.  Cette tendance souligne, a-t-elle expliqué, l’exigence constante de la communauté internationale de voir les Taliban s’engager à combattre le terrorisme et veiller à ce que l’Afghanistan ne soit plus un refuge pour des groupes terroristes comme Daech et Al-Qaida.  Par ailleurs, les Taliban doivent répondre à la demande de mise en place d’un gouvernement inclusif qui représente véritablement la société multiethnique afghane, a-t-elle plaidé.  Elle les a ensuite invités à tenir compte de l’appel de la communauté internationale à la protection des droits humains, en particulier les droits des femmes et des minorités. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déclaré que pour la première fois en 40 ans, il est possible de promouvoir la paix en Afghanistan avec un gouvernement qui contrôle l’ensemble du pays et sans menace existentielle qui pèse sur sa survie.  La communauté internationale doit aider à stabiliser l’Afghanistan et pérenniser la paix dans le pays et dans la région.  À cette fin, a exhorté le représentant, il faut répondre à la crise humanitaire majeure qui frappe l’Afghanistan et éviter l’effondrement de l’économie afghane.  Il a jugé indispensable de libérer et verser tous les avoirs gelés de l’Afghanistan pour reconstruire les infrastructures détruites, mener à bien des projets de connectivité et construire les voies ferroviaires entre l’Afghanistan et le Pakistan. 

Concernant le renouvellement du mandat de la MANUA, le délégué a exigé qu’il respecte la souveraineté de l’Afghanistan, soutienne les efforts pour la stabilité et aide à améliorer les conditions de vie de la population.  Il a rejeté tout effort visant à créer une structure de gouvernance parallèle au gouvernement actuel alertant du risque d'éroder la confiance entre les Taliban et la Mission.  Le mandat devrait également se concentrer sur le relèvement de l’économie, le renforcement des capacités des institutions afghanes et la promotion d’une gouvernance inclusive.  Renforcer le rôle de la MANUA sur la question des droits humains ne serait pas conforme à son rôle de partenaire du progrès en Afghanistan, a par ailleurs estimé le délégué qui a demandé à la communauté internationale d’appuyer les autorités afghanes afin d’éliminer Daech et les autres groupes terroristes en Afghanistan.  La réussite repose sur la levée des sanctions, la mise en œuvre de la résolution 2543 (2020) et des Accords de Doha. 

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