La Commission de la population et du développement termine son débat général en écoutant la voix de la société civile
Cet après-midi, la Commission de la population et du développement a fini son débat général avec les interventions d’une vingtaine d’organisations de la société civile, après avoir également entendu les représentants de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et d’ONUSIDA. Ces organisations, qui opèrent au plus près des populations, ont été nombreuses à souligner l’importance de l’accès à la santé sexuelle et reproductive en tant que facteur déterminant pour l’émancipation des femmes et leur place sur le marché du travail.
Alors que les jeunes représentent 42% de la population mondiale, Advocates for youth a fait un vibrant plaidoyer pour l’autonomisation et l’éducation des jeunes, en exigeant plus particulièrement une éducation sexuelle complète. « Les jeunes ont droit à une éducation fondée sur des données probantes qui leur permette de devenir des acteurs économiques à part entière, ayant un pouvoir sur leur production économique, leur reproduction et leur participation à la société. »
Dans la même veine, International Sexual and Reproductive Rights Coalition (ISRRC) a rappelé que l’autonomisation des femmes et des filles, ainsi que la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, recoupent les trois dimensions centrales du développement durable - économique, sociale et environnementale. Dans ce contexte, la reconnaissance et la redistribution des travaux ménagers et des soins directs non rémunérés ont été jugées essentielles pour atteindre une croissance économique inclusive, propice au bien-être des femmes et de leurs familles. Les gouvernements doivent donc favoriser l’accès des femmes à un travail décent, assurer une protection sociale universelle et collecter des données solides et ventilées sur l’activité économique nationale.
Pour sa part, C-Fam, Inc, une coalition internationale de plus de 200 organisations qui se consacrent à la protection de la famille, a constaté que le lien entre politiques démographiques et croissance économique soutenue et inclusive est largement « ignoré par l’establishment international de la population ». La faible fécondité et le vieillissement posent des défis sans précédent, auxquels le monde n’est pas préparé, a fait remarquer son représentant, or « sans croissance démographique, il ne peut y avoir de croissance économique soutenue ». Le thème choisi cette année permet enfin de dépasser les vieux débats controversés sur les mœurs sexuelles ou la santé sexuelle et reproductive, dans lesquels cette commission s’est, selon lui, trop souvent « enlisée » ces dernières années.
Le Comité international catholique des Infirmières et Assistantes Médico-Sociales (CICIAMS) a également évoqué la problématique du vieillissement de la population mondiale. Les pays développés à revenu élevé affichent une croissance démographique faible à négative, alors que les populations des pays en développement à faible revenu sont en expansion. En tant que porte-parole du secteur des soins formels, la représentante de CICIAMS a aussi mis l’accent sur la « pénurie mondiale de 5,9 millions d’infirmiers ». Elle a recommandé des investissements dans la formation, les emplois et le leadership en soins infirmiers axés sur la promotion de la santé et la prévention des maladies, y voyant la clef de la sécurité sanitaire pour éviter les infirmités, les décès inutiles, le gaspillage de ressources vitales et l’augmentation des coûts de gestion des maladies.
En effet, comme l’a signalé l’International Federation of Medical Students Association (IFMSA), dans un monde de presque 8 milliards de personnes, il ne faut pas perdre de vue que le développement durable requiert des populations en bonne santé. « La santé doit donc rester au cœur de toutes les politiques et de tous les agendas, en particulier démographiques. »
Abondant en ce sens, la fondation FEMM qui dédie son action à l’éducation sanitaire, à la recherche médicale et à l’amélioration des programmes de santé reproductive pour faire progresser la santé des femmes et des filles, a martelé que le développement durable passe par des soins qui s’adressent à leurs besoins spécifiques, surtout en milieu rural. Les femmes se sont résignées au fait que les saignements irréguliers, les règles, les crampes, les migraines, la dépression, les sautes d’humeur, l’acné et la prise de poids sont les « luttes » normales d’une femme, a regretté leur représentante. On ne leur dit pas assez souvent que cela peut être lié à des déséquilibres hormonaux qui peuvent affecter leur santé globale à long terme, parfois de manière irréversible. « Cette réalité ne devrait pas être la norme », s’est-elle impatientée.
Lors de la troisième table ronde organisée ce matin sur la population et le développement durable, en particulier une croissance économique soutenue et inclusive, les panélistes ont discuté des liens entre dynamique démographique et croissance économique, en analysant les dernières tendances et ce qu’elles impliquent pour la planification du développement.
La Commission reprendra ses travaux jeudi 28 avril, à partir de 10 heures.
MESURES POUR LA POURSUITE DE LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT AUX NIVEAUX MONDIAL, RÉGIONAL ET NATIONAL - POINT 3 A) - E/CN.9/2022/4
LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE, EN PARTICULIER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE SOUTENUE ET INCLUSIVE - POINT 3 B) - E/CN.9/2022/2, E/CN.9/2022/3
Table ronde multipartite sur la population et le développement durable, en particulier une croissance économique soutenue et inclusive.
S’il existe des signes de convergence de la fécondité et de la mortalité entre des groupes de pays à différents niveaux de développement, une grande hétérogénéité persiste entre les pays et en leur sein, ce qui entraîne une diversité dans les structures par âge des populations, a observé Mme SARA OFFERMANS(Pays-Bas), Vice-Présidente de la Commission, qui animait cet échange. Cela étant posé, les panélistes ont discuté des liens entre dynamique démographique et croissance économique, en analysant les dernières tendances et ce qu’elles impliquent pour la planification du développement.
Se tournant tout d’abord vers M. MANSOUR NDIAYE, responsable mondial de la croissance inclusive au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Mme Offermans lui a demandé de définir les principaux défis pour parvenir à une croissance économique soutenue et inclusive. Malgré d’immenses efforts mondiaux et nationaux, la protection sociale reste à la fois insuffisante et inadéquate, a répondu M. Ndiaye. Insuffisante, car la moitié de la population mondiale est exclue des programmes. Inadéquate parce que la plupart des politiques de protection sociale ont mis l’accent sur les transferts de liquidités temporaires à court terme plutôt que de garantir un accès durable aux services, aux actifs et aux capacités. Outre la protection des personnes, « beaucoup reste à faire pour donner aux gens les moyens de passer de la pauvreté à la prospérité », a-t-il ajouté, jugeant à cet égard que l’augmentation du chômage représente un défi majeur. Selon les estimations de l’Organisation mondiale du Travail (OIT) pour 2022, le chômage affecte 207 millions de personnes dans le monde, contre 186 millions en 2019, et il devrait rester au-dessus des niveaux pré-COVID-19 dans les années à venir.
Mettre fin à la pauvreté nécessite, selon lui, une transformation radicale de notre modèle de développement vers des économies plus vertes et des sociétés plus diversifiées et inclusives. Le changement démographique est, bien sûr, un facteur clef pour les trajectoires de développement des pays, étant donné que la population mondiale devrait croître d’environ 2 milliards d’individus ces 30 prochaines années pour atteindre 9,7 milliards d’ici à 2050 et 11 milliards d’ici à la fin du siècle. Pour l’expert, il est essentiel que les pays qui souhaitent exploiter leur dividende démographique utilisent les capacités de travail des femmes, en mettant en place des politiques de réduction des écarts entre les sexes sur le marché du travail, lesquels représentent plus de 90 milliards de dollars de pertes annuelles de PIB en Afrique. D’autre part, de nombreux pays, en particulier les plus riches, ont des populations qui diminuent et vieillissent. D’ici à 2050, toutes les régions du monde, à l’exception de l’Afrique, auront plus de 25% de leur population âgée de 60 ans ou plus. De nombreux pays auront donc besoin de politiques innovantes pour renforcer leurs systèmes de protection sociale et de retraite tout en garantissant la viabilité budgétaire. Ces politiques devraient être sensibles au genre, car les problèmes de vieillissement sont souvent liés au genre, a-t-il précisé.
Pour accélérer les progrès vers une croissance économique soutenue et inclusive dans l’ère post-COVID-19, M. Ndiaye a préconisé une combinaison de choix politiques et d’investissements dans quatre domaines : la protection sociale et l’aide aux travailleurs du secteur informel, l’économie verte via une transition juste et créatrice d’emplois bien rémunérés, la numérisation pour faciliter les transferts monétaires vitaux et la gouvernance, au travers d’un contrat social renouvelé.
La modératrice a ensuite demandé à Mme AGNIESZKA CHLON-DOMINCZAK, Directrice de l’Institut de statistique et de démographie à l’École d’économie de Varsovie, de préciser les problèmes politiques qui doivent être résolus pour recueillir les dividendes démographiques. L’intervenante a indiqué que, dans la petite enfance, la protection sociale permet de combler les écarts d’inégalité grâce à l’accès à des programmes liés à la nutrition, à la santé, à l’éducation et aux soins. Pendant l’enfance et l’adolescence, elle soutient le capital humain par l’accès à l’éducation et le développement des compétences. Au cours de la phase active, l’un des principaux défis, en particulier dans les pays à faible revenu, est l’informalité persistante, conduisant de nombreux travailleurs à des emplois à faible productivité. Il faut donc des programmes universels de protection sociale, a-t-elle affirmé, relevant cependant que les situations varient en fonction de l’évolution démographique, des régions comme l’Asie de l’Est étant confrontées au vieillissement de leur population, tandis que d’autres n’en sont qu’à la fin du premier dividende démographique.
Sur le plan des solutions, Mme Chlon-Dominczak a souligné l’importance des investissements destinés à renforcer la résilience à des stades ultérieurs, ce qui comprend le soutien aux familles et aux enfants, l’accès aux soins de santé et la bonne distribution des programmes. Plus globalement, elle a plaidé pour une couverture sociale plus universelle qui soutienne les travailleurs quel que soit leur statut formel, une meilleure adaptation aux chocs, qu’il s’agisse du climat, de la pandémie ou des conséquences de la guerre en Ukraine, et des financements durables.
Interrogée sur le rôle des femmes dans la sphère économique et la reconnaissance de leur travail non rémunéré, Mme MERCEDES D’ALESSANDRO, Directrice en charge de l’économie, de l’équité et du genre au Ministère des finances de l’Argentine, a pour sa part constaté que le faible emploi des femmes et leur précarité sur le marché du travail génère une féminisation de la pauvreté et des obstacles à l’accès à la retraite à la fin de leur cycle productif. Interrogée sur le rôle des femmes dans la sphère économique et la reconnaissance de leur travail non rémunéré, Mme MERCEDES D’ALESSANDRO, Directrice en charge de l’économie, de l’équité et du genre au Ministère des finances de l’Argentine, a pour sa part constaté que le faible emploi des femmes et leur précarité sur le marché du travail génèrent une féminisation de la pauvreté et des obstacles à l’accès à la retraite à la fin de leur cycle productif. Pour répondre à ces défis, elle a prôné des politiques sexospécifiques pour renforcer le tissu social, améliorer les opportunités d’emploi, augmenter les revenus et réduire les inégalités. Pour ce qui est de reconnaître les contributions marchandes et non marchandes des femmes, y compris les soins non rémunérés et le travail domestique, la responsable a jugé que l’amélioration de l’emploi des femmes est une nécessité, ce qui implique de renforcer les systèmes de soins, d’améliorer les infrastructures comme les jardins d’enfants et les écoles, de mieux protéger socialement la petite enfance et de garantir la sécurité alimentaire des femmes en charge d’enfants et d’adolescents. Parallèlement, il est impératif de revaloriser le travail de soins pour les travailleurs domestiques et de promouvoir l’emploi des femmes dans les secteurs productifs tels que l’industrie, la technologie ou l’énergie.
À la question de savoir comment protéger les enfants et les adolescents dans les pays ayant une population jeune, notamment en Afrique subsaharienne, Mme LUCIE CLUVER, professeure en science de la famille et de l’enfance à l’Université d’Oxford, a fait valoir que la protection sociale est un accélérateur clef de la croissance inclusive. Elle a relevé, à ce sujet, que les transferts monétaires peuvent apporter de multiples avantages aux adolescents, notamment en termes de santé, d’éducation et de réduction de la violence. Citant des exemples de tels transferts au Pakistan et en Afrique du Sud, elle a assuré que ces politiques en direction des jeunes ont des retours sur l’investissement. Une étude de la Banque mondiale a ainsi démontré qu’aider les filles à terminer 12 années d’études pourrait générer plus de 15 000 milliards de dollars grâce à une productivité et des revenus accrus. Mettre fin à la violence contre les enfants pourrait également augmenter le PIB de 8% dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Comment, dans ces conditions, assurer une protection sociale inclusive à tous les groupes générationnels, à mesure que les populations vieillissent ? Pour Mme Cluver, de simples combinaisons d’argent et de soins peuvent donner d’excellents résultats. Les gouvernements, même ceux de pays à faible revenu, peuvent y recourir à grande échelle, a-t-elle soutenu, estimant que les nouvelles technologies, notamment l’argent mobile, sont essentielles pour y parvenir.
S’agissant des interactions entre les dynamiques démographiques et les changements climatiques, M. ROMAN HOFFMANS, chercheur à l’Institut international d’analyse appliquée des systèmes à Vienne, a expliqué, sur la base de ses propres recherches, qu’un stress thermique accru affecte la morbidité et la mortalité, frappant particulièrement les groupes de population vulnérables, notamment les pauvres, les personnes âgées et celles qui ont des problèmes de santé préexistants. Dans de nombreuses régions du monde, a-t-il ajouté, les changements climatiques sont aussi liés aux dynamiques migratoires, de nombreuses personnes se déplaçant vers les zones urbaines voire vers l’étranger. De plus, ces changements peuvent conduire à des conflits, ce qui exacerbe encore les pressions migratoires. Interrogé sur les moyens d’exploiter les tendances démographiques pour évoluer vers des modes de consommation et de production durables, le chercheur a estimé qu’à leur niveau, les individus peuvent changer leurs habitudes alimentaires et adopter des modes de vie moins énergivores. Les responsables politiques doivent, eux, montrer la voie sur le plan législatif et réglementaire, tandis que les entreprises peuvent apporter des solutions innovantes. « Ensemble, nous devons avancer vers une transition climatique durable et juste, ce qui suppose de réduire les inégalités pour mieux accompagner les groupes vulnérables, singulièrement dans les pays du Sud qui sont les plus durement touchés. »
Lors du débat interactif qui a suivi, la Fédération de Russie a souhaité en savoir plus sur les ajustements diététiques prônés par M. Hoffmans pour lutter contre les effets des changements climatiques en tenant compte des tendances démographiques. Le Paraguay s’est interrogé sur les moyens d’assurer l’intégration effective des femmes dans le marché du travail et de les faire sortir du secteur informel. La Suède a, quant à elle, demandé des précisions sur les combinaisons « argent plus » préconisées par Mme Cluver pour les adolescents. Comment lutter contre le chômage tout en exploitant au mieux le dividende démographique, s’est enquis le Japon. La voix des populations marginalisées est-elle prise en compte dans la planification, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des décisions politiques, a demandé la représentante d’Action by Churches Together-ACT Alliance.
En réponse à ces questions, M. Hoffmans a dit avoir évoqué les besoins diététiques dans une optique de consommation durable. Dans certains pays occidentaux, la consommation représente 25% des émissions carbonées, il y a donc des possibilités de réduction, a-t-il dit, avant de plaider pour une modification des modes de consommation alimentaire, viande en tête. Pour ce qui est de l’intégration économique des femmes, Mme Chlon-Dominczak en a appelé à une répartition équitable des tâches au sein des foyers, faute de quoi il ne sera pas possible d’assurer la participation des femmes au marché du travail. Pour les adolescents, Mme Cluver a souligné que les aide couplées « argent plus » permettent dans de nombreux pays de faire reculer les grossesses non désirées et la contamination au VIH/sida en favorisant l’accès à l’éducation et à l’emploi des femmes. Quant aux populations les plus vulnérables, M. Ndiaye a jugé essentiel de ne pas les considérer seulement comme des bénéficiaires mais comme des acteurs du changement. C’est ce que s’efforce de faire le PNUD au travers de son laboratoire d’accélération.
Débat général (suite)
Mme LETICIA ADELAIDE APPIAH, Directrice exécutive du Conseil national de la population du Ghana, a expliqué que le recensement sur la population et l’habitat de 2021 au Ghana a révélé une nouvelle baisse de la fécondité et de la mortalité, une dépendance à l’âge et une population vieillissante. Le taux de grossesse chez les adolescentes est resté inchangé. Selon la déléguée, il faut continuer à donner la priorité à l’exploitation du dividende démographique en investissant dans la jeunesse ghanéenne. L’accent est mis sur quatre secteurs clefs, à savoir l’économie, la santé, l’éducation et la gouvernance. L’objectif du Gouvernement, a-t-elle expliqué, est de veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte dans ces secteurs. Elle a mentionné le programme de soutien aux entreprises déployé dans le cadre de la lutte contre la COVID-19 à hauteur de 600 millions de GHS: il fournit des fonds de secours d’urgence et une assistance technique aux moyennes, petites et micro-entreprises afin d’atténuer l’impact de la pandémie. Le Ghana a aussi finalisé le registre national des ménages pour renforcer la protection des personnes vulnérables en cas d’urgence. Il a mis en place un programme de mentorat pour l’autonomisation des filles, et élaboré des « boîtes à outils » sur l’intégration de la dimension de genre et le travail de soins non rémunérés. En outre, un projet de loi sur l’action positive –pour l’égalité des sexes- a été approuvé par le Cabinet, en attendant l’approbation du Parlement.
M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a estimé que la croissance soutenue et durable est indispensable pour la réalisation du Programme 2030. Il s’agit toutefois d’un grand défi pour le Nicaragua, qui se remet de la pandémie et fait face aux effets de la crise climatique, a-t-il souligné, avant de dénoncer les mesures unilatérales qui attentent à la souveraineté de son pays. Il faut qu’elles cessent pour que nous puissions assurer la croissance de notre économie et le bien-être de notre peuple, a plaidé le représentant. Dans ce contexte, le Gouvernement nicaraguayen mène une politique sociale en direction des femmes, des jeunes et des travailleurs, notamment en milieu rural. Il met aussi l’accent sur l’élimination de la pauvreté sur la base de l’égalité entre les sexes. Pour le représentant, la pauvreté et la marginalisation ne pourront être éliminées que dans le cadre du principe de dignité de l’être humain et « lorsque les pays développés honoreront leurs engagements vis-à-vis pour les pays en développement ». Le Nicaragua, a-t-il dit, continuera à mettre en œuvre le Programme 2030 en s’appuyant sur son modèle chrétien solidaire et son plan national de lutte contre la pauvreté et pour le développement humain 2020-2026, lequel prévoit des services de santé et d’éducation gratuites, ainsi que des vaccins pour tous contre la COVID-19. En conclusion, il a invité la Commission à travailler sur « un nouveau contrat social postpandémie basé sur l’égalité respectueuse entre les États ».
M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) a estimé que l’élimination de la pauvreté reste le principal défi aux efforts de développement, car la pauvreté s’accompagne souvent du chômage, de la malnutrition, des inégalités, de risques environnementaux et d’un manque d’accès aux services sociaux et de santé, y compris les services de santé sexuelle et productive. Il est évident que la pandémie de COVID-19 a creusé les écarts existants entre nos pays, mais qu’elle a également eu un fort impact sur la récession de nos économies, a dit le délégué. À l’avenir, il a proposé de penser en termes d’approches multiples, en favorisant le renforcement des capacités productives, la dynamique du commerce intérieur et les exportations. « De nombreux pays en développement sont confrontés à un dilemme : donner la priorité à la mise en œuvre du Programme 2030 ou assurer le service de la dette », a poursuivi le délégué. Il est pour lui essentiel de convenir d’un mécanisme de renégociation et de restructuration de la dette qui favorisera un développement durable, inclusif et équitable. Il faut également mettre en œuvre des mesures urgentes pour atténuer les changements climatiques et apprendre à s’y adapter, dans le cadre du principe des responsabilités communes mais différenciées. Sachant que le développement durable repose sur la collecte de données précises, la Bolivie a décidé de réaliser un recensement de la population et de l’habitat en novembre prochain qui permettra de concevoir des politiques économiques et sociales pour la prochaine décennie.
Mme SARAG CRAGGS, représentante de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a souligné que les migrants internationaux ne représentent qu’un peu plus de 3,6% de la population mondiale, mais qu’ils génèrent environ 9% du produit intérieur brut (PIB) mondial. « C’est dire l’impact économique global de la migration et la contribution des migrants à la croissance économique. »
Or, a-t-elle déploré, les migrants sont plus susceptibles de souffrir de diverses formes d’inégalités, en termes de revenu, de genre, de race, des dimensions rurales et urbaines, de l’accès au numérique ou de la capacité à mener une vie décente dans un environnement sain. Pourtant, a fait valoir la représentante, « la mobilité humaine unit les sociétés, les économies et les marchés d’une manière qui s’est avérée résiliente malgré les perturbations de la COVID-19 ». Selon l’OIM, il faut exploiter le potentiel de travail et le capital humain des migrants par le biais du développement des compétences, des partenariats de mobilité et des voies de migration légale pour répondre aux pénuries de main-d’œuvre. La représentante a cité à titre d’exemple un projet mis en œuvre avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) qui soutient les efforts des gouvernements tunisien et suisse pour tirer parti des partenariats de mobilité des compétences. De même, a-t-elle témoigné, le Canada et l’Allemagne excellent dans le recrutement de ressortissants de pays tiers pour combler les pénuries de main-d’œuvre.
Elle a aussi évoqué le cas des migrants sans papiers travaillant dans les secteurs informels qui ont été les plus touchés pendant la pandémie. Pour y remédier, au Brésil, l’OIM, l’UNICEF et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) se sont associés pour faciliter l’accès en ligne aux informations sur les services de base et les possibilités d’apprentissage pour les migrants. En Asie centrale, l’OIM a travaillé avec les institutions financières et les femmes bénéficiaires de transferts de fonds afin de promouvoir l’utilisation d’outils numériques.
M. CESAR NUNEZ, représentant du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), a appelé à créer des emplois pour tous, y compris les personnes ayant contracté le VIH, pour que la croissance soit véritablement inclusive. Il a souligné qu’avec un traitement, ces personnes peuvent travailler, mais qu’elles restent trop souvent encore stigmatisées. Il faut impérativement propager le traitement antirétroviral le plus largement possible pour lutter contre la discrimination sur le lieu de travail notamment, a argué le représentant pour lequel « discrimination et stigmatisation sont toujours des obstacles majeurs au développement durable ». Malheureusement, les femmes et les filles sont touchées par le VIH/sida en grande partie parce qu’elles sont victimes de la violence et mal informées pour se protéger, a-t-il regretté. Tant qu’il y aura de telles inégalités, l’on ne pourra pas mettre fin au VIH/sida.
M. JOSE A. VASQUEZ, représentant de l’International Federation for Family Development (IFFD), a expliqué qu’il s’agit d’une organisation présente dans 70 pays sur tous les continents dont l’activité principale au niveau local est centrée sur l’éducation parentale avec le renforcement des compétences par des programmes pour aider les sociétés à faire face aux changements qui ont affecté les familles à bien des égards. Une alliance d’organisations non gouvernementales travaille sur une déclaration de la société civile, a-t-il fait savoir, pour intégrer les besoins familiaux dans les différentes mégatendances proposées par les Nations Unies, dont l’urbanisation. La Fédération recommande notamment de placer les familles urbaines au centre des politiques publiques pour une croissance économique inclusive. Pour cela, il faut mettre en œuvre des politiques actives de l’emploi, y compris un salaire minimum adéquat; concevoir des politiques familiales au niveau national, mais mises en œuvre au niveau régional; définir un ensemble de mesures visant à modifier la façon dont la population change; former les familles à être de bons éducateurs et offrir des possibilités d’éducation pour les chômeurs, notamment les femmes.
Mme EVI VAN DEN DUNGEN VAN DEN DUNGEN, représentante du centre international d’expertise Rutgers sur les droits en matière de santé sexuelle et reproductive, basé aux Pays-Bas, « où les taux de grossesse chez les adolescentes sont les plus bas du monde », a vanté l’impact de l’éducation sexuelle sur le bien-être et la santé des jeunes. Une éducation complète est dispensée dans la plupart des écoles, avec l’implication des parents et du planning familial. En investissant dans ce domaine, les pays peuvent contribuer à leur capital humain, a-t-il affirmé. De plus, les femmes qui ont été scolarisées sont plus susceptibles de se marier plus tard, d’utiliser le planning familial et de pouvoir accéder aux soins de santé. Chaque année supplémentaire de scolarité des filles améliore leur employabilité. En revanche, le mariage d’enfants et les grossesses d’adolescentes interrompent la fréquentation scolaire et nuisent à la mobilité sociale et économique à long terme des jeunes femmes. L’éducation complète à la sexualité permet également de prévenir la violence sexiste, le mariage des enfants et les grossesses chez les adolescentes, a poursuivi le représentant. Elle promeut les droits humains et l’égalité des sexes, et combat les stéréotypes sexistes nuisibles. En donnant aux jeunes les moyens d’agir, une telle éducation devrait faire partie des politiques lorsque l’objectif est une croissance économique soutenue et inclusive.
M. STEFANO GENNARINI, représentant de C-Fam, Inc, une coalition internationale de plus de 200 organisations qui se consacrent à la protection de la famille, s’est félicité du thème choisi cette année qui permet de dépasser les vieux débats controversés sur les mœurs sexuelles ou la santé sexuelle et reproductive, dans lesquels cette commission s’est, selon lui, trop souvent « enlisée » ces dernières années. Le lien entre les politiques démographiques et une croissance économique soutenue et inclusive est largement « ignoré par l’establishment international de la population », a regretté l’intervenant. La faible fécondité et le vieillissement posent des défis sans précédent, auxquels le monde n’est pas préparé, or « sans croissance démographique, il ne peut y avoir de croissance économique soutenue ». Pendant des décennies, a dit le représentant, les experts mondiaux en matière de population se sont concentrés sur la réduction de la fécondité dans les pays en développement en encourageant la contraception, l’avortement et la norme de la famille restreinte. De nombreux pays en développement ont salué ces efforts et investi leurs propres ressources limitées pour ralentir la croissance de la population dans l’espoir de récolter un « dividende démographique ». Malheureusement, ces pays, dont certains ont parmi les taux de fécondité les plus faibles au monde, n’ont pas encore vu ce dividende se matérialiser, ou n’ont vu qu’une réalisation partielle de cette théorie. « De nombreux pays vont vieillir avant d’avoir une réelle chance de se développer », a averti C-Fam. Les systèmes fiscaux et de protection sociale, qui vacillent déjà, seront au bord du gouffre. La protection de la famille, conformément aux obligations des États Membres en vertu du droit international des droits de l’homme, est une composante nécessaire des politiques démographiques requises pour parvenir à une croissance économique soutenue et inclusive, a insisté le représentant. Convaincu que « la plus grande menace démographique qui pèse sur l’humanité ne vient pas de la surpopulation », il a appelé le système des Nations Unies à sensibiliser sur ces politiques démographiques négligées. « Le temps est venu de changer de cap et de construire un monde où toute vie est célébrée et protégée, de la conception à la mort naturelle. »
La représentante d’International Sexual and Reproductive Rights Coalition (ISRRC) a mis en exergue les liens étroits qui existent entre les paradigmes des « droits » et du « développement », notamment en ce qui concerne la santé, l’éducation, l’égalité des sexes, la dynamique démographique, l’urbanisation, la migration et les programmes de recherche et de développement technologiques. Ces liens essentiels contribuent, selon l’intervenante, à faire en sorte que nous puissions atteindre les objectifs de développement durable de manière inclusive. L’autonomisation des femmes et des filles, ainsi que la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation recoupent les trois dimensions centrales du développement durable - économique, sociale et environnementale. Dans ce contexte, elle a jugé essentielles la reconnaissance et la redistribution des travaux ménagers et des soins directs non rémunérés pour les ambitions de croissance économique inclusive, y compris le bien-être des femmes et de leurs familles.
C’est pourquoi l’ISRRC appelle les gouvernements à favoriser l’accès des femmes à un travail décent, à assurer une protection sociale universelle, à collecter des données solides et ventilées sur l’activité économique nationale, et à adopter des lois et des politiques qui garantissent la participation des femmes et des filles à l’économie formelle. En outre, la pandémie de COVID-19 continue d’avoir un impact dévastateur sur les groupes les plus vulnérables et marginalisés, notamment les femmes, les filles, les travailleurs informels et non qualifiés, tout en exacerbant les inégalités au sein des pays et entre eux. Il faut donc allouer les fonds nécessaires à « la mise en œuvre d’efforts de résilience holistiques et intégrés » qui couvrent les secteurs du climat, de la santé et de l’égalité des sexes.
Mme PATRICIA SAYERS, représentante du Comité international catholique des Infirmières et Assistantes Médico-Sociales (CICIAMS), a dressé un bilan de la situation de la population mondiale consécutive à la pandémie de COVID-19, qui a causé la mort de près de trois millions de personnes en 2020. D’après la Banque mondiale, la pandémie a plongé 97 millions de personnes dans l’extrême pauvreté, et selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), les coûts de la COVID-19 atteindront 12 500 billions de dollars d’ici à 2024. Face à une « pénurie mondiale d’infirmiers », estimée à 5,9 millions, la représentante a recommandé des investissements dans la formation, les emplois et le leadership en soins infirmiers axés sur la promotion de la santé et la prévention des maladies. Les sciences en la matière et la prestation de soins infirmiers sont, à ses yeux, les clefs de la sécurité sanitaire pour éviter les infirmités, les décès inutiles, le gaspillage de ressources vitales et l’augmentation des coûts de gestion des maladies. Un autre constat d’importance pour le CICIAMS est le vieillissement de la population mondiale. Les pays développés à revenu élevé affichent une croissance démographique faible à négative, alors que les populations des pays en développement à faible revenu sont en expansion. Les deux modèles de population entraînent des déséquilibres de production/consommation, a fait observer la représentante. Enfin, elle a mis en garde contre la tendance des centres urbains à devenir des poches d’emplois et de services peu rémunérés et de pauvreté concentrée qui augmentent les risques de maladie et les dommages environnementaux. En conclusion, elle a proposé une décentralisation de l’emploi pour éviter l’appauvrissement des communautés qui n’ont que peu de possibilités d’éducation de qualité et de mobilité ascendante.
Mme ANYA MANSUR, représentante de Advocates for Youth, a rappelé la jeunesse de la population mondiale qui compte 42% de personnes ayant moins de 25 ans. Le Programme d’action de la CIPD a reconnu le droit des individus de décider du nombre, de l’espacement et du moment de la naissance de leurs enfants et leur droit d’avoir les informations et les moyens de le faire, sans discrimination, coercition ou violence. Tout en reconnaissant les progrès réalisés, Advocates for Youth reste d’avis que beaucoup reste à faire pour les jeunes, les femmes et les filles, et d’autres groupes marginalisés. L’organisation appelle à l’action pour l’autonomisation et l’éducation des jeunes, en particulier une éducation sexuelle complète. « Les jeunes ont droit à une éducation fondée sur des données probantes qui leur permette de devenir des acteurs économiques à part entière ayant un pouvoir sur leur production économique, leur reproduction et leur participation à la société. » Ces services, a argué le représentant, devraient respecter la diversité des jeunes, y compris l’orientation sexuelle, l’identité de genre, les capacités, le niveau d’éducation et l’expérience. Advocates for Youth a appelé à travailler pour éliminer les politiques discriminatoires et les pratiques traditionnelles néfastes contre les jeunes, dont les personnes LGBTQIA.
Mme KLAUDIA SZYMUŚ, représentante de l’International Federation of Medical Students Association (IFMSA), a dit que dans un monde de presque 8 milliards de personnes, il ne faut pas oublier que le développement durable requiert des populations en bonne santé. La santé doit donc rester au centre de toutes les politiques et de tous les agendas. Cependant, force est de constater que sur la voie de l’autonomisation de tous les groupes de population, il manque une approche multisectorielle qui refléterait le rôle de l’ensemble des parties prenantes - gouvernements, ONG, secteur public, secteur privé, réseaux familiaux - pour garantir un monde meilleur et plus sain pour tous. La pandémie de COVID-19 a exacerbé des inégalités existantes, a poursuivi la représentante, en plus de créer de nouvelles inégalités qui entravent la progression vers le Programme de développement durable à l’horizon 2030, y compris une croissance économique durable et inclusive. L’IFMSA souligne le besoin urgent de dialogues inclusifs avec tous ces partenaires clefs, dont les jeunes. Il faut réfléchir à la pandémie, aux leçons apprises et aux plans d’action potentiels pour la prévention, la préparation et la réponse, non seulement pour faire face aux futures pandémies, mais aussi pour les déterminants sociaux, économiques, environnementaux et commerciaux de la santé. La Fédération appelle les États Membres et les acteurs non étatiques à travailler à la création de plans régionaux et nationaux de suivi des travaux de l’actuelle session.
Mme SOFIA PIECUCH, représentante de la World Youth Alliance, une coalition de jeunes âgés de 10 à 30 ans, a dit aborder la croissance soutenue et inclusive en partant du postulat que les êtres humains constituent la plus grande ressource du monde et que la créativité humaine est un « catalyseur de développement ». À cette aune, elle a appelé les États Membres à accorder la priorité à plusieurs principes, à commencer par la dignité humaine, qui va de pair avec un avenir durable. La deuxième priorité doit, selon elle, concerner la promotion de familles prospères. La famille est en effet la cellule centrale de la société, a fait valoir la représentante, en se disant inquiète du recul du taux de fécondité de plus de la moitié des pays du monde en dessous des niveaux de remplacement au cours des dernières années. « Il faut encourager les sociétés favorables à la famille », car celles-ci forment les individus qui assureront un développement durable et une croissance économique inclusive, a-t-elle souligné, avant de préconiser des politiques prévoyant un soutien ciblé aux parents qui travaillent et aux femmes enceintes, ainsi que des systèmes de garde d’enfants et des congés maternité et paternité. La troisième priorité est une économie au service des personnes, les décideurs politiques devant reconnaître que la personne humaine est bien plus qu’un simple consommateur. Les gouvernements qui se concentrent uniquement sur l’économie en matière de planification sociale ignorent la liberté et évaluent les décisions individuelles en fonction de résultats financiers. Or, selon l’Alliance, l’économie a pour vocation de servir l’épanouissement humain et non l’inverse.
Mme ANNIE FRANKLIN, représentante de Global Helping to Advance Women and Children, une organisation qui préside le Caucus des droits de la famille des Nations Unies, avec des membres dans 170 pays, a mis l’accent sur la centralité de la famille en tant que véritable point de départ de la politique de population et de développement. En tant qu’unité de base de la société, la famille contribue énormément au développement national et à la réalisation des principaux objectifs de toute société, notamment l’élimination de la pauvreté, la protection des enfants, le droit à l’éducation et à la santé, l’autonomisation des femmes et des filles et la création de sociétés stables, pacifiques et sûres. Les nations ont le droit fondé, voire l’obligation de placer la protection et le soutien de la famille au cœur de leurs politiques de développement, a argué la représentante. Elle a donc encouragé les gouvernements à formuler des politiques sensibles à la famille dans les domaines du logement, du travail, de la santé, de la sécurité sociale et de l’éducation, en reconnaissant le rôle primordial des parents dans l’éducation de leurs enfants.
Mme MAUREEN MAGUIRE, Présidente de Soroptimist International, une ONG qui œuvre dans 121 pays avec les communautés pour améliorer la vie des femmes et des filles, a pointé du doigt les inégalités croissantes qui ont frappé les femmes et les filles pendant la pandémie de COVID-19. Elle a concentré son propos sur le rôle de l’éducation et de la formation dans la construction du capital humain. Au cours de la pandémie, les femmes ont quitté le système éducatif et le marché du travail en grand nombre, en raison de responsabilités plus lourdes ou parce qu’elles travaillaient dans des secteurs informels.
Dans les pays à faible revenu, 92% des femmes travaillent dans le secteur informel. Dans certaines sociétés, a constaté l’intervenante, cela a entraîné une augmentation des grossesses non désirées et des mariages précoces ou forcés. Offrir des possibilités d’éducation et de formation aux femmes et aux filles est donc l’une des actions les plus puissantes pour promouvoir des économies durables, a-t-elle insisté. Le monde du travail évolue à un rythme tel qu’il faut qu’elles aient accès à la technologie et à des possibilités de formation tout au long de leur vie pour rester compétitives.
Mme PING HONG, de China Family Planning Association, a expliqué que l’initiative « Chine en bonne santé » du Gouvernement chinois a donné des résultats efficaces pour promouvoir un développement équilibré à long terme de la population. Après des années d’efforts, le taux national de mortalité maternelle est passé de 30 pour 100 000 en 2010 à 16,9 pour 100 000 en 2020. Les ONG en Chine ont joué un rôle efficace dans la promotion des droits des femmes et des enfants à la santé, a-t-elle assuré, en citant l’exemple de son association qui a mis en place divers programmes dont un projet sur trois ans consacré à la promotion de la santé sexuelle et reproductive des femmes et des adolescentes en zones montagneuse. Elle a mentionné le mécanisme de coopération multisectorielle entre la santé, l’éducation et les départements concernés et la formation de sages-femmes et de prestataires de services de santé au niveau local. Par ailleurs, les médias numériques et Internet sont utilisés pour accroître l’accès aux informations et aux services de santé, a-t-elle précisé. L’Association a donc recommandé que les femmes, les enfants et les adolescents soient pris en compte dans l’élaboration du bilan social, économique et démographique national et dans les plans de développement.
Mme ROMERO VILLALBA, représentante de l’Asociación Colectivo Mujeres al Derecho, avec ses réseaux alliés en Amérique latine et dans les Caraïbes, a affirmé que pour réaliser des progrès en matière de population et de développement durable, en particulier une croissance économique soutenue et inclusive, il faut impliquer les femmes, les filles et les communautés marginalisées et isolées du pouvoir. La représentante a exhorté les gouvernements à aller vers les territoires les plus éloignés des centres de pouvoir, à engager un véritable dialogue, et à réfléchir à la diversité des modèles de développement existants, « ancestraux et empiriques ». Une économie féministe et communautaire peut se développer à condition d’investir des ressources suffisantes, a-t-elle témoigné. Elle a également souligné la nécessité de disposer de données et d’indicateurs rendant compte des réalités du monde rural, des femmes et des écosystèmes qui le composent. D’après elle, les données doivent être produites et collectées de manière participative auprès de ces communautés et non à partir de projections d’autres données comme le font actuellement les unités statistiques du pays d’Amérique latine. Les recensements doivent également être conçus de façon à « donner un visage à ce qui n’est pas vu mais ressenti », a dit la représentante, en évoquant « le corps des femmes comme butin de guerre et de dépossession », « les mains des femmes qui travaillent », et celles qui n’ont pas été rémunérées pour leur contribution au développement durable.
Mme ANN BRASSIL, représentante de Family Planning NSW, qui s’exprimait au nom de la Fédération internationale pour la planification familiale, région Asie de l’Est et du Sud-Est et Océanie, MSI Reproductive Choices et SERAC -Bangladesh, a soutenu qu’un développement juste et durable, qui donne la priorité à une croissance économique durable et inclusive pour tous et au développement environnemental et social, ne peut être réalisé sans le respect des engagements nationaux, régionaux et mondiaux en faveur des droits liés à la santé sexuelle et reproductive contenus dans le Programme d’action de la CIPD, le Programme 2030 et celui de Nairobi. La croissance économique durable, l’autonomisation économique des femmes ainsi que la santé et le bien-être des femmes et des filles et des groupes les plus vulnérables ne peuvent se réaliser sans l’égalité des sexes, les droits humains et un accès universel à une éducation sexuelle complète. Les besoins non satisfaits en matière de planification familiale et une discrimination fondée sur le sexe « profondément enracinée » font que les femmes et les filles ont à assumer une grande partie de la responsabilité des soins non rémunérés, comme élever les enfants et s’occuper de la famille, ce qui limite souvent leur accès à un travail rémunéré et aux opportunités économiques. Alors que l’utilisation de la contraception réversible à longue durée d’action augmente lentement dans la région Asie-Pacifique, de nombreuses femmes sont toujours confrontées à des difficultés d’accès en raison d’obstacles économiques, structurels, culturels et géographiques, a regretté la représentante, en appelant les États Membres à remédier à cette situation.
Mme PIERRETTE J CAZEAU, Présidente de la Haiti Cholera Research Funding Foundation Inc, USA » (HCRFF), a préconisé une approche qui examine les différents concepts sociaux liés à l’environnement et à la durabilité dans le contexte de la mondialisation actuelle. Des points tels que la sensibilisation du public, la cohésion sociale, l’équité et la participation sont nécessaires pour établir des liens avec la croissance économique et le développement durable, a estimé la représentante pour qui les directives PRISMA pour les revues systématiques et les méta-analyses et l’’approche analytique RCA peuvent être utilisées pour étudier la croissance de la population mondiale et le développement durable.
« Plus la population est importante, plus nous avons besoin de croissance économique et plus les dommages collatéraux à l’environnement sont importants, car la population utilise davantage de ressources environnementales », a-t-elle constaté. HCRFF juge urgent d’introduire des politiques environnementales durables et des concepts renouvelables dans l’industrie par le biais de modèles d’économie circulaire. La pauvreté et la faim sont toujours plus importantes dans les pays où la croissance démographique est élevée, et pour y mettre fin, HCRFF propose la mise en œuvre de plans de croissance de développement durable liés à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, à l’emploi et aux défis environnementaux avec un développement rapide des infrastructures et une utilisation durable de l’énergie dans tous les secteurs de l’industrie. Quant aux pays riches, ils doivent, selon la représentante, apporter l’aide financière et technique nécessaire aux pays pauvres très peuplés et les former à l’utilisation de ressources renouvelables durables qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre.
Mme ALEXANDRA JOHNS, représentante de Swasti Health Catalyst, organisation membre de l’Alliance Asie-Pacifique pour la santé et les droits sexuels et reproductifs, a félicité les États Membres pour leur engagement à atteindre le développement durable dans ses trois dimensions; économique, sociale et environnementale, et à s’attaquer aux causes structurelles et profondes de l’inégalité. Une croissance économique juste et inclusive ne peut être atteinte qu’en s’attaquant aux formes multiples et croisées de discrimination qui ont un impact injuste sur les femmes, les filles et les autres groupes marginalisés, a-t-elle estimé. Il faut ainsi inclure les adolescents et les jeunes, les personnes trans et de genre différent, les migrants et les réfugiés, les personnes vivant avec le VIH et les travailleurs du sexe, a précisé la représentante, en rappelant que son organisation catalyse le plaidoyer de la société civile au niveau régional.
Mme SAI JYOTHIRMAI RACHERLA, représentante de l’Asian Pacific Resource and Research Centre for Women (ARROW) et ses 28 partenaires, a souligné que les pays de la région Asie Pacifique continuent de faire face à l’impact de la pandémie de COVID-19 et se trouvent dans des situations épidémiologiques différentes. L’augmentation des besoins en matière de soins non rémunérés a creusé les écarts entre les sexes et pour les groupes marginalisés dans la participation au marché du travail, écarts aggravés par la transition soudaine vers les technologies de la quatrième révolution industrielle. Sur la base des données disponibles dans la région, le pourcentage de femmes qui ont été victimes de violences commises par leurs partenaires intimes au cours des 12 derniers mois en 2021, a atteint 47,6%. En outre, environ 4,5 millions de filles risquent de ne jamais retourner à l’école et sont particulièrement menacées en raison de la détérioration de l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive, y compris une éducation sexuelle complète. Tous ces défis, s’ils ne sont pas résolus, entraveront la croissance économique inclusive dans la région. ARROW appelle donc les États Membres à veiller au respect de l’égalité des sexes, des droits humains, de l’état de droit et de la justice dans les politiques de population et de développement durable. Il faut tirer parti des dividendes démographiques grâce à la restructuration, y compris une rémunération équitable pour le travail de soins et la réduction et la compensation du double fardeau du travail que portent les femmes. Enfin, il faut améliorer les politiques de protection sociale, y compris la couverture maladie universelle.
M. ZEBADIA PAUL MMBANDO, représentant d’Action by Churches Together (ACT Alliance-Tanzanie) a détaillé les priorités de cette coalition qui œuvre à créer un changement positif et durable dans la vie des personnes pauvres et marginalisées, indépendamment de leur religion, politique, sexe, race ou nationalité. La coalition de plus de 130 églises, présente dans quelque 120 pays, défend la justice de genre, y compris la santé et les droits sexuels et reproductifs. En tant qu’alliance fondée sur la foi et les droits, « nous croyons que toutes les personnes sont des détenteurs de droits et nous avons une solide expérience de l’action transformatrice en matière de genre », a fait valoir le représentant. C’est pourquoi, il a réaffirmé l’engagement de l’Alliance par rapport au mandat « intégré et holistique » du Programme d’action de la CIPD, tout comme il l’a fait lors du sommet de Nairobi. Il faut « sa pleine mise en œuvre », a insisté M. Mmbando tout en appelant à une résolution conjointe lors de cette session. La société civile est essentielle, à ses yeux, pour exiger des efforts de responsabilisation pour la mise en œuvre des politiques et l’amélioration de la prestation de services sur l’accès complet à l’information et aux services en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs. Il a invité les États Membres à s’attaquer aux écarts croissants entre les cadres politiques en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs, et les réalités socioéconomiques limitées dans lesquelles ces cadres sont mis en œuvre, notamment en luttant contre les flux financiers illicites.
Mme Mme HAILA AMIN, représentante de FEMM Foundation, a expliqué que sa fondation a développé des programmes de santé pour les femmes basés sur les connaissances, et inspirés par leur droit d’être des acteurs informés de leurs propres soins de santé et de prendre des décisions volontaires. FEMM est dédiée à l’éducation sanitaire, à la recherche médicale et à l’amélioration des programmes de santé reproductive pour faire progresser la santé des femmes. Le développement durable exige des soins de santé qui s’adressent aux personnes mal desservies et aux besoins de santé reproductive des femmes et des filles, a-t-elle argué, notant que rares sont les femmes qui peuvent détecter des anomalies dans leurs cycles menstruels. Pourquoi les filles n’apprennent-elles pas ces connaissances essentielles à l’école? Combien de médecins sont formés pour suivre des schémas d’ovulation sains dans les bilans de santé? Les femmes se sont résignées au fait que les saignements irréguliers, les règles, les crampes, les migraines, la dépression, les sautes d’humeur, l’acné et la prise de poids sont les « luttes » normales d’une femme, a déploré la représentante. On ne leur a pas dit que cela pouvait être des signes de déséquilibres hormonaux qui peuvent affecter leur santé globale à long terme, parfois de manière irréversible, s’est-elle impatientée, en demandant que soient mis en place des systèmes calibrés pour répondre aux besoins réels des femmes. Les chercheurs de FEMM sont à l’avant-garde du réexamen des systèmes de santé des femmes, a-t-elle expliqué. Des médecins sont formés pour diagnostiquer et traiter les problèmes de santé reproductive avec une vision holistique du corps de la femme ».
Mme CHRISTELYN SIBUGON, représentante de Women’s Global Network for Reproductive Rights (WGNRR), a appelé à « mettre fin à la pandémie des inégalités ». Le réseau a constaté que les pays où les dépenses de santé publique sont basses, les filets de sécurité sociale inadéquats et les droits du travail faibles sont particulièrement vulnérables aux impacts de la pandémie. Les régimes de privatisation des soins de santé ont laissé les systèmes de santé totalement démunis face à la pandémie. « Nous ne pouvons pas ignorer les effets de la pandémie sur les femmes et les hommes, qu’il s’agisse du manque d’accès à la santé et aux droits sexuels et reproductifs, de la charge supplémentaire que représentent les soins pour les femmes et les filles, de l’augmentation du nombre de mariages d’enfants ou de la multiplication des cas de violence sexiste », a dit la représentante. Comment parvenir à un développement durable et à une croissance économique soutenue et inclusive quand les femmes et les filles sont confrontées quotidiennement à des problèmes de santé sexuelle et reproductive et à des barrières sociales et économiques ? WGNRR exhorte tous les États Membres à adopter une série de mesures, dont la couverture universelle des soins de santé. Il s’agit aussi d’assurer un salaire égal pour un travail égal ou de valeur égale et une protection contre la violence sexiste sur le lieu de travail, et d’intégrer une approche fondée sur les droits et sensible au genre. Il faut enfin reconnaître le rôle des femmes et des filles dans la sauvegarde des ressources naturelles et des écosystèmes, en plus d’assurer la justice économique, en veillant à ce que les États respectent leurs obligations en matière de droits sociaux et économiques.