La Troisième Commission constate la pérennité du racisme systémique, malgré de timides avancées, et débat d’une définition contestée de l’antisémitisme

Soixante-dix-septième session
39e & 40e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4362

La Troisième Commission constate la pérennité du racisme systémique, malgré de timides avancées, et débat d’une définition contestée de l’antisémitisme

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a examiné aujourd’hui les points de son ordre du jour portant sur l’élimination du racisme et le droit des peuples à l’autodétermination, à l’occasion de dialogues avec la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et six titulaires de mandat spéciaux, suivis d’une discussion générale. L’un des dialogues, centré sur la définition de l’antisémitisme, a donné lieu à un vif échange entre la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée et plusieurs délégations, en majorité occidentales.   

À l’issue de la présentation effectuée par Mme Tandayi Achiume, Israël et le Guatemala, suivis des États-Unis, du Canada, de l’Uruguay et de plusieurs pays européens, dont la Hongrie, se sont opposés catégoriquement au libellé d’un paragraphe de son rapport appelant les États Membres à suspendre à la promotion de la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA). Les Nations Unies ne peuvent cautionner un rapport qui, en essence, infirme le mandat de son auteur, ont fait valoir les contradicteurs de la Rapporteuse spéciale. Celle-ci leur a répondu que la lutte contre les discours antisémites, et plus généralement contre la xénophobie et l’intolérance, relève plus que jamais de son mandat et que son rapport ne fait qu’appeler à un processus ouvert, transparent et inclusif pour lutter correctement contre l’antisémitisme.   

Mme Achiume a d’autre part déploré que les condamnations de l’injustice et de l’inégalité raciales, consécutives aux manifestations de 2020, n’aient pas engendré une réorganisation fondamentale du droit, de la politique et de l’économie au niveau mondial. Face aux demandes de justice, certains États Membres ont apporté des réponses qui semblent, au mieux, s’apparenter au statu quo, a-t-elle regretté, fustigeant à ce titre le Royaume-Uni, qui, lors de la cinquante-et-unième session du Conseil des droits de l’homme, s’est opposé à une résolution qui réclamait des réparations pour la traite des esclaves et le colonialisme.  

Faute de réelle volonté politique, l’élaboration de normes complémentaires à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale n’a guère progressé, a renchéri la Présidente-Rapporteuse du Comité spécial chargé d’élaborer ces normes. Mme Kadra Ahmed Hassan s’est toutefois félicitée du dialogue entamé entre son comité et des experts à propos de l’impact historique du colonialisme sur toutes les formes contemporaines de discrimination fondée sur la religion ou la croyance.  Elle a par ailleurs appelé à l’élaboration d’un Protocole additionnel à la Convention, un projet qui a divisé les États Membres.   

La Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine s’est, pour sa part, réjouie des progrès enregistrés dans quelques États, notamment sous l’impulsion de la Déclaration et le Programme d’action de Durban.  Pourtant, a-t-elle relevé, malgré l’attention mondiale accrue suscitée par la mort violente de George Floyd, aux États-Unis, l’usage excessif de la force et les meurtres de personnes d’ascendance africaine par les forces de l’ordre se poursuivent dans nombreux pays, et ce en tout impunité.  Réitérant ses appels aux États Membres pour qu’ils abandonnent toute tentative de dissimulation du racisme, Mme Catherine S. Namakula a appelé de ses vœux l’élaboration d’un « indice international de justice raciale », qui refléterait les réalités vécues par les personnes d’ascendance africaine.  

De son côté, la Présidente du Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban s’est alarmée de la méconnaissance du public et des idées fausses véhiculées sur le « véritable contenu » des textes de Durban, y voyant des pierres d’achoppement à l’adhésion de nombre d’États.  Mme Edna Maria Santos Roland a également estimé que l’une des principales faiblesses du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est l’absence d’un engagement fort pour éliminer le racisme systémique, lequel a été considérablement aggravé par la crise liée à la COVID-19, selon la Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargée de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  

Mme Marie-Chantal Rwakazina a ainsi rappelé que les personnes appartenant à des minorités ethniques, notamment les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, ont été victimes de violences et de menaces accrues pendant la période pandémique.  Selon elle, la création du Groupe de travail intergouvernemental a toutefois permis des échanges de bonnes expériences entre différentes parties du monde, ce qui a donné lieu à de nouvelles recommandations, dont celle d’un projet de déclaration des Nations Unies sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine. Une déclaration qui, si elle se concrétisait, permettrait de réparer plus efficacement les violations et les injustices passées, a-t-elle plaidé.  

Notée par Mme Rwakazina, l’exacerbation des discours de haine racistes pendant la pandémie a aussi été pointée par la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, qui a mis l’accent sur leur propagation sur Internet et les réseaux sociaux.  Les expressions racistes et xénophobes de certaines personnalités publiques ont ainsi contribué à alimenter la haine et la violence racistes contre les minorités nationales et ethniques, en particulier les personnes d’ascendance africaine et asiatique, les peuples autochtones, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile, a déploré Mme Verene Shepherd.

Dans ce contexte, la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et Directrice du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a encouragés les États à collecter davantage de données au sujet des crimes de haine ou de la représentation déficitaire des personnes d’ascendance africaine. Ces données désagrégées, parfois volontairement négligées, devraient constituer le socle des lois combattant la discrimination, a fait valoir Mme Ilze Brands Kehris, qui a aussi rappelé la corrélation entre le droit à l’autodétermination et les droits humains.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 1er novembre, en dialoguant avec le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE ET DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

Mme ILZE BRANDS KEHRIS, Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et Directrice du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté trois rapports du Secrétaire général, les deux premiers portant sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, le troisième ayant trait au droit des peuples à l’autodétermination.

Le premier rapport, intitulé « Appel mondial à l’élimination totale du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et mise en œuvre intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban » (A/77/294), donne des exemples de mesures prises par les États Membres, les mécanismes de suivi de Durban et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) pour mettre en œuvre les textes de Durban et lutter contre la discrimination raciale, a précisé Mme Brands Kehris.  La Sous-Secrétaire générale s’est félicitée des progrès réalisés en la matière par certains États, en partie grâce à la promulgation ou à la modification de protections constitutionnelles et législatives.  Ces efforts bienvenus contre le racisme systémique et le recours à la force gagneraient toutefois à être soutenus par la coopération internationale et un financement à tous les échelons, du local à l’international, a-t-elle souligné. 

Le deuxième rapport du Secrétaire général, intitulé « Mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine’ (A/77/333) se concentre sur la collecte et l’utilisation de données désagrégées dans le cadre des efforts de promotion et de protection des droits humains des personnes d'ascendance africaine, a poursuivi Mme Brands Kehris.  Il s’appuie sur les observations et recommandations formulées par les mécanismes internationaux des droits de l’homme et sur les contributions reçues de six États Membres, a-t-elle expliqué.  La Sous-Secrétaire générale a encouragé les États à collecter des données, parfois ignorées, concernant notamment les crimes de haine et la représentation des personnes d’ascendance africaine aux postes décisionnels, mais aussi la santé, le logement, l’éducation et d’autres secteurs sociaux.

Les données désagrégées doivent être à la base des lois combattant la discrimination, a fait valoir Mme Brands Kehris.   Selon elle, un obstacle sur cette voie est la réticence de certains États à recueillir des données ventilées, de crainte que ces informations n’exposent les groupes raciaux ou ethniques marginalisés à davantage de discriminations.  Cette fragmentation risque d’entraver les efforts de lutte contre le racisme, a-t-elle averti, plaidant pour une approche fondée sur les droits humains et prévoyant le recueil de données avec le consentement exprès des personnes et avec des garanties de confidentialité et de sécurité.

Le troisième rapport du Secrétaire général, dédié au « droit des peuples à l’autodétermination » (A/77/265), examine les développements concernant la réalisation universelle de ce droit dans le contexte des principaux organes des Nations Unies et des mécanismes relatifs aux droits de l’homme, a indiqué Mme Brand Kehris.  Il fournit en outre des indications sur la manière dont le droit à l’autodétermination est actuellement interprété et attire l’attention sur les liens qui existent avec d’autres droits de l’homme.  Le nombre de références à ce droit dans les rapports, résolutions et décisions des principaux organes et mécanismes des Nations Unies témoigne, selon la Sous-Secrétaire générale, de l’engagement du système des Nations Unies sur la question.  Cela démontre également l’importance continue du droit à l’autodétermination comme moyen de parvenir à la pleine jouissance des droits de l’homme, ainsi qu’à une paix et un développement durables, a-t-elle conclu.

Dialogue interactif

À la suite de l’exposé de Mme Brands Kehris, les États-Unis se sont inquiétés de la situation des droits humains au Bélarus, au Myanmar, au Venezuela, en Iran, en Éthiopie, en Syrie, en Afghanistan, en Ukraine et en Chine.  Ils ont appelé cette dernière à libérer les prisonniers arbitrairement détenus et ont condamné les « atteintes ignobles » commises par les forces russes en Ukraine.  La délégation a par ailleurs salué les conclusions de la Sous-Secrétaire générale pour ses conclusions concernant les violations des droits humains des femmes et des filles en Afghanistan.

La Chine a souhaité répondre aux « allégations » américaines.  Les États-Unis utilisent Hong Kong, le Tibet et d’autres dossiers pour « semer la désinformation » au lieu d’aborder leurs questions nationales ou des situations dans lesquelles ils ont des responsabilités, notamment en Afghanistan, a dénoncé la délégation chinoise.  Une position partagée par la Fédération de Russie, qui a dénoncé l’attitude « non constructive » des États-Unis, avant de féliciter la Sous-Secrétaire générale pour son travail dans le cadre de la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.

La Namibie a, pour sa part, fait observer que les impacts du colonialisme demeurent après le départ des occupants, avant de rappeler que 79 territoires à l’ordre du jour des Nations Unies restent non autonomes à ce jour.  Elle a d’autre part réitéré son engagement en faveur de la solution des deux États au Proche-Orient et sa solidarité avec ses « frères Sahraouis ».  Les Nations Unies doivent faire davantage pour promouvoir le droit des peuples à l’autodétermination si elles veulent éviter d’être accusées de laxisme, a-t-elle ajouté.

Répondant à ces observations, la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme a attiré l’attention de la Troisième Commission sur les recommandations figurant dans les rapports qu’elle a présentés, qui portent sur la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, sur le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et sur les conclusions concernant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Exposé

Mme Catherine S. NAMAKULA, Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, a rappelé que deux ans se sont écoulés depuis le meurtre de George Floyd par la police aux États-Unis et les protestations mondiales contre le racisme.  Pourtant, a-t-elle déploré, malgré l’attention mondiale portée à cette question, l'usage excessif de la force et les meurtres de personnes d’ascendance africaine par les forces de l’ordre se poursuivent en toute impunité dans de nombreux pays.  Elle a, par conséquent, jugé nécessaire d’adopter des approches multisectorielles ciblées qui mettent l’accent sur la responsabilité afin de faire cesser cette tendance.  Réitérant ses appels aux États Membres pour qu’ils abandonnent toute tentative de dissimulation du racisme, la Présidente a également appelé à l’élaboration d’un indice international de justice raciale reflétant les réalités vécues par les personnes d’ascendance africaine, en vue de mesurer les performances des États dans ce domaine.

Les États Membres devraient en particulier faire preuve de prudence et de diligence dans le traitement des réfugiés, des migrants et des demandeurs d’asile d'ascendance africaine et garantir leur accès à la sécurité, au développement et à la justice, a notamment recommandé Mme Namakula, saluant à cet égard les mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d'action de Durban, le programme d’activités de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine et l’agenda pour un changement transformateur en faveur de la justice et de l'égalité raciales établi par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).  En outre, elle s’est félicitée de l’opérationnalisation du Forum permanent des personnes d’ascendance africaine, de la création du Mécanisme d’experts indépendants sur l’application des lois et de la capacité accrue du siège et des bureaux de terrain du HCDH à répondre à ces préoccupations.

Rappelant avoir discuté de la situation des enfants d’ascendance africaine lors de la session publique du Groupe de travail en mai de cette année, Mme Namakula a fait observer que ces enfants continuent de subir la discrimination raciale issue des héritages non résolus du commerce et de la traite des Africains réduits en esclavage, du colonialisme, de l’apartheid post-colonial et de la ségrégation.  Les enfants d’ascendance africaine ne sont pas du tout considérés comme des enfants, a-t-elle constaté, faisant état de « faux stéréotypes raciaux » sur la criminalité, la culpabilité et la dangerosité.  Par ailleurs, les forces de l’ordre sont en conflit avec les enfants d’ascendance africaine, a dénoncé la Présidente, selon laquelle ces enfants sont représentés de manière disproportionnée dans le système de justice pénale.  Elle a donc appelé les États à « réduire l’empreinte de la police dans la vie des enfants d’ascendance africaine », notamment en adoptant une approche de la sécurité publique axée sur la santé publique.  Dans de nombreux États, on constate des disparités raciales persistantes dans les interventions auprès des familles par les agences de protection de l’enfance et les services sociaux, y compris le retrait des enfants et la résiliation des droits parentaux, qui impliquent souvent des décisions et des résultats racialisés, a-t-elle relevé.

Évoquant ensuite l’élaboration de la Déclaration sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine, la Présidente a souhaité qu’elle réitère l'appel lancé aux États pour qu'ils assurent la protection du droit à la vie, à l'intégrité physique et mentale, à la liberté et à la sécurité de ces personnes, sans aucune discrimination, et qu’ils adoptent des mesures pour prévenir les actes de violence à motivation raciale à leur encontre.  Enfin, Mme Namakula a exprimé sa préoccupation quant au traitement effroyable des migrants et des travailleurs migrants africains et aux graves violations de leurs droits fondamentaux.  La tragédie de l’esclavage ne peut se répéter, a-t-elle mis en garde, faisant notamment référence à la manifestation de formes contemporaines d’esclavage au Moyen-Orient et dans les États du Golfe.

Dialogue interactif

Dans la foulée de cette présentation, la Côte d’Ivoire a voulu connaître les recommandations du Groupe de travail d’experts quant à la nécessité d’initiatives telles que l’octroi de bourses d’études et de renforcement des capacités pour les enfants d’ascendance africaine.  L’Union européenne s’est ensuite interrogée sur la façon de faire davantage de sensibilisation dans le milieu scolaire à propos de la discrimination raciale.  À son tour, le Portugal, observant que les manuels scolaires ne reflètent pas la réalité de l’histoire du racisme, s’est demandé ce que peut faire le secteur privé pour s’assurer que les massacres de personnes d’ascendance africaine ne soient pas oubliés dans l’enseignement.  De son côté, le Brésil a assuré sensibiliser sa population à la couleur de peau et la protection des droits humains des personnes d’ascendance africaine.

Le Cameroun s’est interrogé sur les mesures recommandées pour lutter contre les stéréotypes négatifs dans les discours politiques et les médias qui présentent les enfants d’ascendance africaine comme des délinquants.  L’Algérie a souhaité savoir comment veiller à ce que les politiques publiques soient conformes à ce qui est prévu dans la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour lutter correctement contre le racisme.

À la suite des États-Unis, qui ont voulu savoir comment collaborer davantage avec le Groupe de travail d’experts et la société civile pour aborder les problématiques touchant les personnes d’ascendance africaine, la Fédération de Russie a dénoncé les crimes odieux commis pendant l’époque coloniale par «  es pays occidentaux civilisés « , appelant à ce qu’il y ait des enquêtes à ce sujet.  Les dommages encourus doivent donner lieu à réparation, a jugé la délégation, déplorant aussi le sort des migrants qui tentent de traverser la Méditerranée.  La République arabe syrienne a, pour sa part, relevé que le rapport reproche aux États-Unis d’éviter d’ouvrir les yeux sur l’oppression dont les familles d’ascendance africaine sont victimes.

Dans sa réponse aux délégations, la Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine a rappelé la nécessité d’adopter une approche multisectorielle.  On voit que des stéréotypes négatifs se répètent, a-t-elle signalé, avant d’appeler à éviter que ces préjugés atteignent les enfants en leur inculquant des valeurs dès le début de l’enseignement.  Cette tendance se fait jour dans différentes parties du monde, a constaté Mme Namakula, qui a indiqué qu’au Moyen-Orient, par exemple, certaines personnes d’ascendance africaine sont victimes de trafics d’organe ou de formes contemporaines d’esclavage.

La Présidente a également jugé préoccupant que les organisations d’ascendance africaine disposent de peu de financement.  Il est essentiel qu’elles participent davantage aux discussions sur les sujets qui les concernent, a-t-elle plaidé.  Enfin, s’agissant de ses recommandations, elle a appelé à les transposer dans des cadres juridiques internes, pour permettre notamment aux requérants de déposer plainte et d’obtenir réparation.

Exposé

Mme EDNA MARIA SANTOS ROLAND, Présidente du Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a expliqué que le rapport du Groupe n'est pas encore disponible, mais qu’il fait état d’une profonde préoccupation face à la désinformation constante et au manque de connaissances du public sur le véritable contenu de la Déclaration de Durban.  Cette situation est notamment à l’origine du boycott de plusieurs États de la réunion de haut niveau commémorant le vingtième anniversaire de la Déclaration en septembre 2021, a-t-elle déploré.

Au cours de sa huitième session, a poursuivi la Présidente, le Groupe s’est penché sur le lancement de lois, de campagnes d’éducation et d’information publique inspirés du Programme d’action.  Une discussion sur le racisme lié aux urgences mondiales, aux catastrophes naturelles, aux crises sanitaires et à la justice climatique a également eu lieu, de même que sur la discrimination accrue à l’égard des réfugiés, des migrants, des personnes déplacées et sur les récents développements mondiaux qui l’aggravent davantage.  Le Groupe a également exploré les liens entre le racisme et l’intolérance religieuse, a-t-elle ajouté, notant que leur absence du Programme 2030 témoigne d’un manque d’engagement à éliminer le racisme systémique.  Soulignant l’importance du soutien du Conseil des droits de l’homme dans le renouvellement du mandat du Groupe d’experts indépendants, elle a salué la création de l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine, et les résultats les plus concrets de la Déclaration de Durban.

Dialogue interactif

À la suite de son exposé, l’Afrique du Sud a voulu savoir ce que pouvaient faire les États Membres afin de lutter contre la campagne de désinformation délibérée contre la Déclaration et le Programme d’action de Durban.  Jugeant peu reluisant le bilan de la Déclaration et du Programme d’action, la Côte d’Ivoire a expliqué ce résultat par la persistance de pratiques millénaires qui résistent encore à l’épreuve du temps.  Dans ce contexte, la délégation a exhorté la communauté internationale à redoubler d’efforts pour faire face à ce fléau qui n’épargne aucune région du monde.  Le Chili a lui aussi reconnu que beaucoup reste à faire en matière d’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, les difficultés ayant été exacerbées par la pandémie de COVID-19.  L’Algérie a pointé du doigt le manque de volonté politique et de ressources dédiées, déplorant elle aussi le niveau de désinformation qui circule sur le contenu de la Déclaration et du Programme d'action de Durban.  Quelle a été la contribution de la célébration du 20ème anniversaire de la Déclaration à la résolution de ces problèmes?  La Fédération de Russie a tancé les États Membres ayant boycotté la célébration du vingtième anniversaire de la Déclaration, critiquant leur mauvaise interprétation des objectifs et contenu de ces documents.  Cette position, selon la délégation, torpille tous les efforts internationaux de lutte contre le racisme.  Le Brésil a indiqué, pour sa part, avoir fourni davantage de possibilités aux brésiliens d’ascendance africaines créant ainsi un modèle fructueux ce qui a permis de lutter directement contre les stéréotypes négatifs.

Exposé

Mme MARIE CHANTAL RWAKAZINA, Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a présenté le rapport de la dix-neuvième session du Groupe de travail intergouvernemental en appelant les États à adopter et mettre en œuvre des plans d’action nationaux complets contre la discrimination raciale.  En effet, la responsabilité de la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée incombe principalement aux États, a insisté la Présidente, selon laquelle les plans d’action nationaux devraient promouvoir la diversité, l’égalité, l’équité, la justice sociale et l’égalité des chances.  Les États sont également invités à intensifier leurs efforts pour favoriser la coopération bilatérale, régionale et internationale dans la mise en œuvre des plans d’action nationaux, a-t-elle ajouté, avant de plaider pour que les programmes nationaux d’éradication de la discrimination raciale, de la pauvreté et de la réduction des inégalités sociales soient centrés sur les besoins, les expériences et les recommandations des personnes qui en sont victimes.

Mme Rwakazina a ensuite relevé avec inquiétude l’impact disproportionné de la pandémie de COVID-19 sur les inégalités existantes au sein des sociétés et entre les pays.  Elle a regretté que, dans ce contexte, les personnes appartenant à des minorités raciales et ethniques, notamment les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, et en particulier les femmes et les filles, aient été victimes de violences racistes, de menaces de violence, de discrimination et de stigmatisation.  La Présidente du Groupe a exhorté les États à s’attaquer à ce problème et ne laisser personne de côté, conformément à la promesse du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle a d’autre part indiqué qu’en tant que mécanisme de suivi, le Groupe de travail intergouvernemental a apporté une contribution précieuse à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et à la promotion de l’égalité raciale en général.  Depuis la création du Groupe de travail, a-t-elle poursuivi, il a été procédé à un échange de bonnes expériences de différentes parties du monde, ce qui a abouti à l’adoption de recommandations tournées vers l’avenir.  Mme Rwakazina s’est félicitée à ce propos que le Groupe de travail soit parvenu à une compréhension commune de questions parfois difficiles. 

Bien que le rapport de la vingtième session du Groupe de travail intergouvernemental ne soit pas encore prêt, cette session ayant eu lieu il y a seulement deux semaines, la Présidente a partagé certains développements importants, relatifs notamment à la décision de l’Assemblée générale de charger le Groupe d’élaborer un projet de déclaration des Nations Unies sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine.  À ses yeux, cette déclaration fournira un cadre mondial pour aborder la nature systémique du racisme qui affecte la vie de millions de personnes d’ascendance africaine dans le monde.  Elle contribuera, en outre, à confronter et à réparer plus efficacement les violations et les injustices passées et leurs conséquences actuelles en encourageant des actions concrètes, a souligné Mme Rwakazina.  De surcroît, cette déclaration constituera une orientation cruciale pour l’édification de sociétés égales et justes pour les personnes d’ascendance africaine et renforcera l’état de droit, la démocratie, la paix et le développement de manière plus générale, ce qui profitera à l’ensemble des sociétés, a-t-elle assuré, avant de rappeler que le programme de lutte contre le racisme appartient à tous et que la réalisation de la dignité humaine et de l’égalité est un devoir collectif. 

Dialogue interactif

Suite à cet exposé, la Fédération de Russie a regretté que les personnes d’ascendance africaine ne peuvent toujours pas jouir de leurs droits humains, décriant les fruits d’un passé colonialiste et des crimes commis par l’Occident.  La Déclaration et le Programme d’action du Durban permettront de lutter contre cette réalité honteuse, a espéré le délégué, à condition que soit inclue une réflexion sur les conditions profondes favorisant l’apparition du racisme systémique.  

Répondant à ces observations, la Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban a rappelé que son projet de déclaration est encore en cours de discussions, lesquelles se poursuivront lors de la vingt et unième session du groupe de travail sur la Déclaration et le Programme d’action de Durban.

Débat général

Mme RABIA IJAZ (Pakistan), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine, s’est inquiétée de la résurgence alarmante du racisme dans les sociétés.  Malgré des efforts déployés pour éliminer le racisme, la discrimination raciale ou encore la xénophobie, des formes historiques et nouvelles d’injustice persistent dans tous les milieux, a-t-elle déploré.  La représentante s’est dite particulièrement préoccupée par l’incitation croissante à la haine et à l’intolérance, ainsi que par le profilage racial et les stéréotypes négatifs.  En outre, elle a condamné l’utilisation abusive des technologies de l’information et des communications (TIC) et d’Internet, qui servent de refuge aux groupes prônant la supériorité raciale, l’intolérance, les discours de haine et l’incitation à la haine.  Appelant les dirigeants politiques, religieux et les personnalités des médias à assumer leurs responsabilités dans la lutte contre les discours de haine et les stéréotypes, elle a souligné le rôle essentiel joué par l’éducation pour lutter contre la diffusion de messages de racisme et de discrimination raciale. 

Estimant d’autre part que la Déclaration et le Programme d’action de Durban de 2001 restent une base solide pour lutter contre le racisme, la représentante a souhaité que les mécanismes de suivi soient dotés des ressources nécessaires à leur fonctionnement.  Enfin, elle a indiqué que, comme chaque année, le Groupe des 77 et la Chine présentera lors de cette session une résolution sur l’« Appel mondial à une action concrète en vue de l’élimination du racisme et de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, et de l’application intégrale et du suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban ». 

Au nom du groupe de 50 pays, M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a exprimé sa grande préoccupation face à la situation des droits humains en Chine, en particulier les violations continues des droits humains des Ouïghours et des autres minorités majoritairement musulmanes du Xinjiang.  La publication récente du rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) corrobore cette inquiétude de manière impartiale et objective, a-t-il estimé.  Les cas de détention arbitraire dont souffrent ces minorités pourraient constituer des crimes internationaux, notamment des crimes contre l’humanité, a souligné le représentant, selon lequel des violations aussi graves et systématiques des droits humains ne peuvent être justifiées par la lutte contre le terrorisme.  Déplorant que la Chine ait jusqu’à présent refusé de discuter de ces conclusions, il a appelé le pays à respecter ses obligations internationales et à prendre des mesures pour libérer toutes les personnes arbitrairement privées de liberté au Xinjiang.  Il a également enjoint la Chine à clarifier de toute urgence le sort des personnes disparues. 

Au nom d’un groupe de 66 pays, M. ALEJANDRO GONZÁLEZ BEHMARAS (Cuba) a appelé au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États, rappelant qu’il s’agit là de principes consacrés par la Charte des Nations Unies.  Il a également souligné l’importance de la non-ingérence dans les affaires intérieures des pays, qui est une norme essentielle régissant les relations internationales.  À cet égard, les situations au Xinjiang, à Hong Kong et au Tibet relèvent des affaires intérieures de la Chine, a fait valoir le représentant, qui a fustigé la politisation des droits humains et d’autres politiques « à géométrie variable ». 

Mme VICTORIA LIETA LIOLOCHA (République démocratique du Congo), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) s’est alarmée de la résurgence du racisme, de l’intolérance et de la montée des discours de haine.  Elle a réaffirmé l’importance de l’application intégrale et effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et a appelé à la ratification universelle de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. 

La représentante s’est ensuite félicitée de l’adoption, par le Conseil des droits de l’homme, de la résolution intitulée « De la rhétorique à la réalité: Appel mondial en faveur d’une action concrète contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée » qui demande notamment que soient renforcées les campagnes de sensibilisation afin d’accroître la visibilité du message de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Elle a dit attendre avec intérêt l’adoption du projet de résolution intitulée: « Appel mondial pour une action concrète en vue de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et de l’application intégrale et du suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban », qui sera proposé à la présente session de la Commission.

M. STAN ODUMA SMITH (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes, a rappelé que le fléau de l’héritage de l’esclavage et du colonialisme continue de saper le droit au développement, les principes de la Charte des Nations Unies et de la Charte internationale des droits de l’homme.  Le racisme et la discrimination raciale empêchent les personnes d’ascendance africaine de tirer le meilleur parti de leur potentiel économique, a-t-il souligné, déplorant la persistance de l’exclusion économique, l’augmentation de la pauvreté et l’inégalité dans les pays où vivent des personnes d’ascendance africaine.

Par ailleurs, il a fait observer que la pandémie de COVID-19 a affaibli les principes des droits humains et a gravement élargi le fossé économique et financier qui a affecté de manière disproportionnée les pays en développement, principalement les personnes d’ascendance africaine.  Il a également pointé du doigt les effets des changements climatiques, de la sécurité alimentaire et de l’instabilité des prix de l’énergie, plus durement ressentis par les personnes d’ascendance africaine.  En outre, les pratiques et politiques financières et économiques établies par les pays développés, les donateurs et les institutions ne sont pas adaptés pour répondre efficacement aux besoins des personnes d’ascendance africaine, a-t-il estimé. 

L’éradication du « racisme économique et financier » est plus qu’une correction morale, c’est un bien mondial et une dette due depuis longtemps aux personnes d’ascendance africaine, a-t-il martelé, exhortant les États Membres et autres acteurs à examiner d’un œil critique l’étendue et l’impact de la discrimination raciale économique et financière.  Enfin, le délégué s’est réjoui de la création récente de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine, attendant avec impatience sa première session, du 5 au 8 décembre 2022, à Genève. 

Au nom du Système d’intégration d’Amérique centrale, Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a rappelé qu’aucun État ne peut faire face seul à la question de la migration.  Ces dernières années, a-t-elle relevé, la migration intrarégionale a considérablement augmenté.  Cette tendance devrait se poursuivre, notamment dans le contexte de la pandémie de COVID-19, a indiqué la représentante, selon laquelle il convient d’aborder la question de la migration, notamment la migration irrégulière, de manière conjointe, par le biais de la coopération et du dialogue.  Elle a également fait valoir que les personnes migrantes contribuent à répondre aux défis de la baisse démographique ainsi que de la pénurie de main d’œuvre. 

La déléguée a ensuite exprimé sa préoccupation face au nombre croissant d’enfants et d’adolescents non accompagnés sur les routes migratoires.  Alertant contre les risques de traite des personnes, elle a plaidé pour une riposte concertée et une coopération renforcée entre les pays d’origine, de transit et de destination.  Elle s’est par ailleurs alarmée de la mobilité accrue des populations en raison des effets des changements climatiques sur les moyens de subsistance, appelant à faire preuve d’une plus grande solidarité, en particulier dans les situations d’urgence.  La représentante a exhorté les États, les organisations et les différents acteurs à se pencher sur les conséquences des urgences humanitaires sur les personnes migrantes, mais aussi à développer des politiques et programmes internationaux incluant la dimension de genre.  Enfin, elle a invité les États à intégrer la migration dans leurs stratégies de développement, en s’acquittant de leurs obligations en matière de protection des personnes migrantes.

Au nom d’un Groupe de pays, M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie Saoudite) a exhorté les États Membres et groupes régionaux à entreprendre des démarches préventives pour parvenir à un dialogue et à un échange fructueux des idées pour la promotion des droits de la personne.  Il a encouragé à travailler main dans la main afin de renforcer la coopération en appui aux droits humains, appelant à prendre en compte les circonstances nationales et locales auxquelles les différents pays font face.  Il a également appelé à respecter, également, la diversité culturelle, religieuses, civilisationnelle entre les sociétés et les États. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, Mme TEBOHO JULIAH BABEDI (Afrique du Sud) s’est dite inquiète du fait que le Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban fassent état d’une mise à l’écart de ce processus en raison de défis permanents, y compris la pandémie de COVID-19.  Constatant que le travail du Groupe d’éminents experts indépendants a connu des complications au cours des deux dernières années, la représentante a ainsi déploré les boycotts continus d’importantes réunions de haut niveau des Nations Unies sur ces questions et la désinformation généralisée sur le contenu et le contexte historique de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  À l’instar du rapport du Secrétaire général, a-t-elle ajouté, le Groupe des États d’Afrique juge nécessaire de mener des campagnes pour améliorer l’éducation aux droits humains dans le monde entier, en particulier auprès des jeunes, afin de faire largement connaître et comprendre les instruments internationaux des droits de l’homme, y compris les objectifs de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Pour finir, la déléguée a invité la communauté internationale à continuer d’appuyer la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine avant son expiration en 2024.

M. EDBROOKE (Liechtenstein) a rappelé son attachement au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, avant de souligner l’importance de l’autodétermination en tant qu’élément de prévention des conflits.  Alors que nombre de conflits découlent d’un manque d’autonomie, il a estimé que le droit à l’autodétermination ne saurait être circonscrit au seul contexte de la décolonisation.  Le délégué a ainsi fait état d’études selon lesquelles le fédéralisme est une des réponses aux conflits découlant de problématiques autonomistes.  Mieux comprendre le lien entre l’autodétermination et les conflits permettrait de prévenir des violations des droits humains, a fait valoir le représentant en faisant mention de la guerre en Ukraine. 

Mme AHAMED MOHAMMED (Kenya)a rappelé le lien entre conflits et exclusion, exhortant les organisations multilatérales à tout mettre en œuvre pour le combattre.  À ce titre, la déléguée a estimé que les Nations Unies se doivent de donner l’exemple, en excluant tout d’abord le harcèlement et la discrimination au sein de l’Organisation.  Les États Membres doivent quant à eux prendre des mesures concrètes et mesurables pour lutter contre le racisme, notamment dans le domaine de l’éducation et de l’emploi, a-t-elle plaidé.  Enfin, après avoir fustigé des comportements biaisés à l’encontre des personnes d’ascendance africaine, elle a invité l’ensemble des États Membres à mettre en œuvre le Mécanisme de suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  

M. DAI BING (Chine) a rejeté les accusations des États-Unis et d’autres pays occidentaux, estimant que ces déclarations mensongères ne sauraient effacer les progrès considérables réalisés dans la région du Xinjiang.  Ces pays veulent déstabiliser la Chine et maintenir leurs hégémonies, a accusé le représentant, avant de dénoncer l’hypocrisie des accusateurs.  Le délégué a ainsi évoqué la mort de l’Afro-Américain George Floyd aux États-Unis ainsi que la situation dans la prison de Guantanamo.  Beaucoup d’anciennes puissances coloniales se targuent aujourd’hui d’être pionnières en matière des droits humains, alors qu’elles ne savent même pas améliorer le quotidien de leurs citoyens dans le contexte actuel d’inflation rampante, a-t—il ajouté. 

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela), qui s’est exprimé au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, est revenu sur la valeur que le Groupe donne à la lutte contre les diverses formes de racisme.  La domination de certains groupes par d’autres constitue une dette qui doit être réparée une fois pour toutes, sans plus attendre, a-t-il insisté.  Il a exhorté tous les États à criminaliser toute manifestation de haine, et condamné la résurgence de tendances fascistes et autres qui supposent la supériorité de certains êtres humains sur d’autres.  Il a notamment jugé immoral que certains gouvernements, tout en essayant de donner des leçons de bonne gouvernance au reste du monde, aient été incapables de garantir pleinement le droit à la non-discrimination de leurs propres citoyens, tout en le promouvant activement par l’imposition illégale de mesures coercitives unilatérales, qui touchent aujourd’hui plus d’un tiers de l’humanité.  Les principes de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a ajouté la délégation constituent la feuille de route du Groupe des Amis sur le chemin de la mise au ban du racisme et phénomènes liés.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), a constaté que 20 ans après l’adoption de la Déclaration et Programme d’action de Durban, certaines formes de racisme continuent de prévaloir dans le monde entier.  Nous avons fait fi des mécanismes et des accords que nous avions nous-même élaborés, a-t-il déploré, rappelant que ces structures avaient pour objectif de permettre à la communauté internationale de réfléchir au racisme.  Nous avons au contraire prononcé des jugements de valeur qui contreviennent à ces instruments, a-t-il affirmé, dénonçant une politisation qui permet à certains États de se cacher derrière leur petit doigt. 

Il a ainsi appelé à aborder les causes systémiques du racisme et à éviter la politisation de la question de race.  Certains utilisent cette thématique pour attaquer d’autres États, a-t-il remarqué.  Il a également exhorté à ne plus ignorer que le racisme a imprégné toutes les formes de développement économique et social.  Nous l’avons vu dans la pandémie et dans la façon dont on lutte contre les changements climatiques, a-t-il souligné.  Aujourd’hui, nous vivons dans un monde économique et social vraiment inégal, a-t-il déploré, regrettant que cette tendance n’ait jamais été abordée comme elle l’aurait dû être. 

M. STEPAN Y. KUZMENKOV (Fédération de Russie) a dénoncé les accusations formulées par le Canada et d’autres pays occidentaux à l’encontre de la Chine sur la question du Xinjiang, les qualifiant d’« absurdes et sans fondement ».  Hélas, a-t-il déploré, le rapport « déplacé et biaisé » du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) sur le Xinjiang a contribué à la propagation de ces fausses accusations.  Le représentant a également pointé la campagne de haine sans précédent menée cette année contre son pays.  Il s’est inquiété du fait que cette « russophobie assumée », avouée même par certains acteurs politiques de l’Union européenne, ne soit plus une pratique marginale mais une tendance de fond, au point de se transformer en un élément de politique gouvernementale.  Les victimes de ces manifestations sont notamment des enfants qui sont exposés à un harcèlement pur et simple, même dans les écoles, tant de la part de leurs camarades de classe que des enseignants et de l’administration des établissements d’enseignement, a-t-il fait observer.  Avant de conclure, le délégué a exhorté le HCDH et le Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur les formes contemporaines de racisme à prêter une attention accrue à cette pratique « honteuse et inacceptable ».

M. HELENA NDAPEWA KUZEE (Namibie) a insisté sur l’importance de l’autodétermination, considérant que l’inscription de dix-sept territoires non autonomes à l’ordre du jour de l’ONU appelle à redoubler d’efforts pour faire avancer la décolonisation.  Il a dénoncé les injustices que continue de subir le peuple palestinien, y voyant la nécessité urgente d’une solution à deux États.  Il a ensuite déploré le manque de progrès dans la mise en œuvre des résolutions sur le Sahara occidental, arguant de l’impératif moral d’être solidaires des Sahraouis jusqu’à ce que leur droit à l’autodétermination soit réalisé.

M. IGOR PILIPENKO (Bélarus) a déploré que le racisme et ses dérivés soient devenus des instruments politiques sciemment utilisés et cultivés par certains États.  Les violations des droits humains sur la base de l’appartenance ethnique ou nationale se sont accrues, a constaté le délégué, précisant que le Bélarus en est également la cible.  Il a notamment rappelé que le pays fut aux prises de l’Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale.  Or, certains pays européens couvrent des criminels coupables de génocide au Bélarus lors de cette guerre, a fustigé le délégué, qui s’est ainsi félicité de voir son pays déclarer l’absolue nécessité d’éliminer la réhabilitation du nazisme.  Le délégué a soutenu à ce titre la Russie, qui a proposé une résolution en ce sens.  La lutte contre le racisme sert aussi de prétexte à certains États pour s’immiscer dans les affaires intérieures des autres, a en outre regretté le délégué, prenant la défense de la Chine.

Reprise des déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

Mme VERENE SHEPHERD, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a présenté le rapport annuel de son organe en précisant qu’il traite en premier lieu de la persistance et de l’augmentation des discours de haine raciste et des crimes de haine, en particulier sur Internet et les réseaux sociaux.  Ce phénomène a été exacerbé par la pandémie de COVID-19, a-t-elle constaté, rappelant que certains groupes spécifiques ont été accusés de propager le virus et que certaines personnalités publiques se sont livrées à des expressions racistes et xénophobes qui ont contribué à alimenter la haine et la violence racistes contre les minorités nationales et ethniques, en particulier les personnes d’ascendance africaine, les peuples autochtones, les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d'asile.  Le Comité a, d’autre part, suivi de près la situation des personnes d’ascendance africaine, des peuples autochtones et des autres minorités, s’intéressant à la marginalisation et la discrimination auxquels font face ces groupes de population, notamment en termes d’accès à l’emploi, à l’éducation, au logement, aux services de santé et sociaux, et aux affaires publiques et politiques.  Enfin, a-t-elle indiqué, le Comité s’est penché sur la situation préoccupante des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile, notant qu’un grand nombre d’entre elles se sont vu refuser ou ont eu un accès limité aux services de base.

Mme Shepherd est amplement revenue sur les activités du Comité, déplorant à cet égard que la présentation tardive et la non-présentation de rapports restent un défi: au moment de l'adoption du présent rapport annuel, 84 rapports d’États parties étaient en retard, a-t-elle relevé, avant d’encourager les États parties dont les rapports sont en retard à opter pour la procédure de rapport simplifiée, qui permet d’économiser temps et ressources pour toutes les parties concernées.  La Présidente a ensuite regretté que, depuis l'année dernière, aucun nouvel État partie n’ait reconnu la compétence du Comité pour examiner des communications individuelles au titre de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Cette procédure offre pourtant un moyen supplémentaire aux victimes de discrimination raciale d’obtenir justice lorsque les voies de recours internes sont incapables de le faire, a-t-elle fait valoir.

Le Comité, a-t-elle poursuivi, a également initié trois commissions de conciliation interétatiques ad hoc et, dans le cadre de la procédure d’alerte rapide et d’action urgente, a examiné des situations concernant huit.  Les situations examinées concernaient les droits fonciers des peuples autochtones, la discrimination dans l’éducation à l’encontre des minorités ethniques et le recours excessif à la force par les forces de l’ordre contre les personnes d’origine africaine. 

La Présidente a ensuite salué la décision des présidents des organes de traité d’établir un calendrier prévisible d’examen sur huit ans, se disant convaincue qu’il apportera un certain nombre d’avantages à toutes les parties prenantes, et notamment l’égalité de traitement entre tous les États parties.  Pour le mettre en œuvre, une augmentation des ressources allouées aux organes de traité sera toutefois inévitable, a-t-elle averti, invitant l’ONU à ne pas faire échouer ce « changement de paradigme » en raison de contraintes financières.  Selon Mme Shepherd, l’augmentation du nombre de traités, de ratifications et de la charge de travail qui en découle au fil des ans a créé des arriérés auxquels, malgré des injections occasionnelles de ressources, les organes de traité et leurs « petits secrétariats » ne peuvent tout simplement pas faire face avec le niveau de ressources actuel.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, les États-Unis ont salué les recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale présentées en août dernier à Genève, qui invitent les États Membres à s’attaquer aux problèmes d’injustice « chez eux ».  Comment la communauté internationale et les États parties peuvent-ils contribuer à l’universalité de la Convention, s’est enquise l’Union européenne, qui a également souhaité connaître certaines bonnes pratiques s’agissant de l’implication de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme dans la rédaction des rapports des États parties.  La Convention demeure le socle universel pour prévenir, combattre et éliminer le racisme, a fait valoir la France, avant d’indiquer qu’elle rendra compte devant le Comité à Genève dans deux semaines.  De quelle façon les injustices raciales peuvent-elles être prises en compte, s’est interrogée la Jamaïque, tandis que le Royaume-Uni souhaitait savoir quelles étaient les pratiques optimales pour lutter contre le racisme. 

De son côté, la Fédération de Russie a voulu attirer l’attention du Comité sur la situation en Lettonie, où les pressions et les politiques discriminatoires contre la population russophone se poursuivent.  Que peut faire le Comité pour remédier à de tels actes, a demandé la délégation russe.  Dans quelle mesure peut-on lutter contre le profilage racial pratiqué par les forces de l’ordre dans certains pays, s’est, pour sa part, enquis le Cameroun.  L’Arménie s’est quant à elle inquiétée du sort des minorités arméniennes, avant de demander comment la société civile pourrait être intégrée aux mécanismes d’alerte précoce en matière de discrimination raciale.  S’agissant des minorités religieuses, des demandeurs d’asile et des réfugiés, l’Azerbaïdjan a, conseillé à l’Arménie de suivre les recommandations que la Convention formule à l’adresse à tous les États Membres. 

Le Cambodge a ensuite salué les efforts de la Chine en matière de promotion et de protection des droits humains, grâce à une approche centrée sur les personnes.  À sa suite, la République démocratique populaire lao a salué la manière ouverte avec laquelle la Chine a accueilli l’ancienne Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, soulignant que le Xinjiang, Hong Kong et le Tibet relèvent des affaires internes de ce pays.  La Chine a, elle, jugé essentiel que le Comité s’acquitte de son mandat de façon impartiale et indépendante, et l’a invité à s’abstenir de toute politisation. 

En réponse aux délégations, la Présidente du Comité pour l’élimination de discrimination raciale a appelé les États à redoubler d’efforts pour parvenir à faire de la Convention un instrument universel.  Elle a ensuite rappelé que la société civile joue un rôle prépondérant dans l’action du Comité, non pas pour minimiser ce que les États ont à dire, mais parce qu’il est essentiel d’avoir « plusieurs sons de cloche ».  Mme Shepherd a également relevé que la pandémie de COVID-19, qui a perturbé les travaux de son organe, a mis en lumière des discriminations raciales structurelles dans de nombreux pays, les groupes les plus touchés étant les populations autochtones et d’ascendance africaine ou asiatique.  Évidemment, a-t-elle poursuivi, le colonialisme a laissé des traces.  C’est aux États qui laissent se perpétuer ces stigmates et le colonialisme jeter une ombre au tableau de prendre des mesures pour inverser cette tendance, a exhorté la Présidente. 

Mme Shepherd a par ailleurs précisé que le fonctionnement des procédures d’alerte prévoit la présence d’une équipe d’experts juridique, chargée d’examiner les plaintes individuelles et de déterminer leur recevabilité.  Elle a également tenu à rappeler que les États parties à la Convention doivent présenter un rapport dans un délai d’un an après la comparution devant le Comité, ajoutant que des rapports de suivi seront présentés en conséquence.  Enfin, après avoir souligné les dangers que représentent les discours de haine en ligne et hors ligne, elle a estimé que la Déclaration et le Programme d’action de Durban constituent des jalons permettant de corriger les erreurs du passé et d’aborder les problématiques avec la plus grande urgence. 

Exposé

Mme E. TENDAYI ACHIUME, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, qui présentait ses deux derniers rapports, a tout d’abord relevé que dans de nombreux cercles, y compris les plus puissants sur le plan géopolitique et les plus influents sur le plan institutionnel (tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des Nations Unies), l’injustice et l’inégalité raciales sont jugées dignes de déclarations et de rhétoriques de condamnation sans fin, mais « indignes » d’une réorganisation fondamentale du droit, de la politique et de l’économie aux niveaux mondial et national. 

Face aux soulèvements et demandes pour la justice raciale en 2020, certains États Membres ont, deux ans plus tard, apporté des réponses qui semblent, au mieux, s’apparenter au statu quo, a regretté la Rapporteuse.  Elle a pointé du doigt, à cet égard, le Royaume-Uni qui, lors de la cinquante et unième session du Conseil des droits de l’homme, a fait une déclaration « alarmante » pour expliquer son vote contre une résolution qui cherchait à mobiliser des actions concrètes contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance. 

Le Royaume-Uni a déclaré clairement qu’il n’était pas d’accord avec l’appel à des réparations pour la traite des esclaves et le colonialisme, au motif que de telles revendications « détournent l’attention des défis urgents que sont la lutte contre le racisme contemporain et les inégalités mondiales », jugeant en outre que « la manière la plus efficace aujourd’hui de répondre à la cruauté du passé est de s’assurer que les générations actuelles et futures n’oublient pas ce qui s’est passé », a regretté Mme Achiume.  Ceci est d’autant plus choquant qu’il s’agit d’une nation qui, a-t-elle rapporté, a payé l’équivalent de 16 milliards de livres en valeur actuelle pour indemniser environ 3 000 familles propriétaires d’esclaves pour la perte de leurs « biens » lorsque l’esclavage a été aboli.  Pour elle, cet état de fait ne « peut être dissocié » de l’héritage persistant du commerce transatlantique des personnes asservies et du colonialisme, notant que de nombreuses nations qui ont largement profité de ces régimes insistent pour que le passé reste pleinement dans le passé.

Venant ensuite à son rapport consacré à la crise écologique, la justice climatique et la justice raciale, la Rapporteuse a déclaré qu’il ne peut y avoir d’atténuation ou de résolution significative de la crise écologique mondiale sans action spécifique pour lutter contre le racisme systémique, et en particulier contre les héritages raciaux historiques et contemporains du colonialisme et de l’esclavage. 

En plus de documenter les zones de sacrifice racial, son rapport met en lumière les déplacements forcés et l’immobilité dans le contexte de la crise écologique et la manière dont les groupes marginalisés sur le plan racial, ethnique et national sont soumis de manière disparate à cette coercition et à cette immobilité.  Elle a également appelé les États Membres d’adopter une approche tenant compte du fait que la justice climatique repose sur la justice raciale et vice versa.

Quant à son deuxième rapport consacré à la lutte contre la glorification du nazisme, du néonazisme et des idéologies connexes, il met en lumière des tendances « inquiétantes », dont l’élargissement des groupes néonazis aux nationalistes blancs et aux mouvements populistes d’extrême droite, ainsi que l’utilisation des nouvelles technologies pour faire progresser le néonazisme et le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui y sont associés.  De même, elle a relevé une recrudescence de l’antisémitisme en Europe et en Amérique du Nord, ainsi que du racisme anti-asiatique et anti-noir, de l’islamophobie et des attaques contre les non-nationaux, en relation avec la COVID-19.  S’agissant de l’instrumentalisation de l’antisémitisme en particulier, la Rapporteuse spéciale a exhorté le système des Nations Unies et les États Membres à lancer un processus ouvert et inclusif pour identifier une réponse améliorée à l’antisémitisme. 

Dialogue interactif

À l’issue de cette présentation, plusieurs délégations telles que le Canada, l’Uruguay, ainsi que des États européens, ont, à l’instar du Guatemala et Israël, refusé catégoriquement le libellé de son rapport qui appelle les États Membres à suspendre l’adoption et la promotion de la définition de l’antisémitisme tel que proposé par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste.  Les Nations Unies ne peuvent pas prendre note de ce rapport qui, en essence, contredit le mandat de son auteur, ont-elles ajouté.  À l’heure où l’antisémitisme est en hausse, la définition de l’Alliance est essentielle pour aider à éduquer sur ce qu’est l’antisémitisme, et comment et où il se manifeste, a insisté la Hongrie, appuyée par l’Albanie.  Les États-Unis ont accusé la Rapporteuse spéciale de « tentative de politisation » de son mandat, suivis de la Roumanie qui a appelé à trouver une définition « commune », une position également soutenue par l’Italie qui s’est targuée d’avoir mis sur pied une stratégie contre ce phénomène.

De nombreuses délégations à l’instar, de l’Australie, l’Union européenne, et du Royaume-Uni, ont par ailleurs dénoncé l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, notant en outre que Moscou a justifié cette agression en invoquant la lutte contre le néonazisme.  Il s’agit là d’une instrumentalisation et d’une violation des droits humains, a dénoncé la Tchéquie, décriant un abus de langage.  

De son côté, Cuba s’est alarmée des violations policières aux États-Unis contre les minorités.  À l’instar de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), la République démocratique populaire lao a réfuté toute tentative de politiser les droits humains pour s’ingérer dans les affaires de la Chine dont la délégation a regretté que, dans beaucoup de pays, les minorités ne disposent pas de système judiciaire vers lequel se tourner en cas d’abus.

Après l’Indonésie, qui s’est opposée au concept de peuple autochtone, le Pakistan a décrié l’occupation du Jammu-et-Cachemire par l’Inde, pour ensuite dénoncer l’islamophobie et exhorter à une intensification des efforts internationaux pour promouvoir une culture de la tolérance.  Une position appuyée par le Qatar, ainsi que l’Azerbaïdjan au nom du Mouvement des pays non alignés.

Pour finir, la Fédération de Russie a interpellé la Rapporteuse spéciale au sujet des récents propos du Haut Représentant de l’Union européenne, M. Joseph Borell, selon lesquels l’UE est un jardin entouré par la « jungle » du reste du monde.  N’est-ce pas là une déclaration raciste?

En réponse aux questions et observations des États Membres, la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée s’est tout d’abord élevée contre les déclarations du Guatemala et d’Israël, affirmant avoir travaillé d’arrache-pied pour lutter contre les discours antisémites et de façon plus générale tous les discours de xénophobie et d’intolérance.  Elle a expliqué que, dans son rapport, elle appelle de ses vœux un processus ouvert, transparent et inclusif pour lutter correctement contre l’antisémitisme.

Elle a regretté les propos de la délégation des États-Unis, indiquant qu’elle s’attendait à un échange transparent « pour renforcer nos approches » destinées à mieux lutter contre l’antisémitisme.  Dans son rapport, elle invite justement les Nations Unies à être un espace sûr et ce n’est malheureusement pas le cas, a-t-elle déploré.  Pour combattre l’antisémitisme, la Rapporteuse spéciale a recommandé de tenir compte de l’histoire d’un pays pour comprendre ce qui sous-tend la xénophobie et le racisme en son sein.  Elle a également conseillé de lutter contre l’intolérance et le racisme institutionnels.  L’approche multidimensionnelle est une autre approche défendue par la Rapporteuse qui a encouragé d’aborder cette question « depuis la base jusqu’au sommet » pour comprendre ce que vivent les communautés les plus touchées par ce fléau.

Exposé

Mme KADRA AHMED HASSAN, Présidente-Rapporteuse du Comité spécial chargé d’élaborer des normes complémentaires, a présenté son travail réalisé au cours des deux dernières années sur la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Nous sommes tous conscients que, par le passé, l’élaboration des normes complémentaires à la Convention n’a pas progressé, a-t-elle reconnu.  En effet, pendant de trop nombreuses années, il a semblé qu’il n’y avait pas de volonté politique d’aller de l’avant et de travailler à l’accomplissement du mandat du Comité, a-t-elle poursuivi, se disant cependant heureuse de constater qu’au cours des dernières années, et malgré certains retards, les travaux du Comité ont progressé. 

Rappelant la tenue de la première partie de sa onzième session en décembre 2021, elle a indiqué qu’elle avait été consacrée à l’examen du rapport de la consultation intersession d’experts juridiques, y compris sur la diffusion des discours de haine.  Cette année, lors de la douzième session, le Comité a entendu des présentations et tenu des discussions avec des experts sur l’impact historique du colonialisme sur le droit ainsi que sur toutes les formes contemporaines de discrimination fondée sur la religion ou la croyance, a-t-elle également détaillé, ajoutant avoir poursuivi l’élaboration d’un protocole additionnel.  La troisième session est prévue en avril 2023, a-t-elle par ailleurs indiqué, se félicitant par ailleurs du consensus dégagé au sein du Comité en dépit de divergences de vue. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Afrique du Sud a souligné que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale n’a jamais été actualisée, contrairement à d’autres instruments historiques, relevant en outre que beaucoup d’États n’ont pas pu participer à son élaboration, n’étant pas libres à l’époque.

L’Union européenne a estimé qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un protocole additionnel étant donné que la Convention est un document flexible et vivant.  Le seul problème est sa mise en œuvre, a souligné la délégation, appelant à des efforts en ce sens. 

La Fédération de Russie a indiqué de son côté soutenir l’activité du Comité, l’élaboration de nouvelles normes étant importante.  Par ailleurs, la délégation a déploré une campagne de grande ampleur dirigée depuis février contre les Russes et russophones. 

Reconnaissant qu’il reste beaucoup de travail, la Présidente-Rapporteuse a espéré que la Troisième Commission saura faire preuve de la volonté politique nécessaire pour aller de l’avant.  Le racisme dans ses nombreuses manifestations reste une question urgente partout, a-t-elle appuyé, affirmant que des événements récurrents et tragiques rappellent sans cesse l’urgence de l’éliminer, de même que l’importance cruciale du travail du Comité spécial.  Il s’agit également d’un test de la crédibilité du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale, à savoir si la volonté politique peut être convoquée pour combattre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, a-t-elle estimé.

Débat général

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a expliqué que son gouvernement conçoit et met en œuvre différentes politiques impliquant les voix des personnes oubliées, les peuples autochtones avant tout.  Le Gouvernement colombien travaille à l’intégration de différentes visions du monde dans l’élaboration de politiques conformes à la nature multiculturelle de la nation colombienne, a-t-elle souligné, avant de faire état de mesures de réparation et de discrimination positive.  La Commission nationale intersectorielle pour les réparations historiques a d’ailleurs été créée pour surmonter les effets du racisme, de la discrimination raciale et du colonialisme sur les peuples autochtones de Colombie, a précisé la représentante.  Le Gouvernement a d’autre part mis en place un observatoire contre la discrimination raciale et le racisme, et progresse dans la mise en œuvre du volet ethnique des accords de paix, a-t-elle ajouté, estimant que cette stratégie à vocation pédagogique permettra de réduire le risque que les victimes et les personnes désengagées du conflit se retrouvent discriminées dans leur processus de réintégration dans leur communauté d’origine.

M. ASHISH SHARMA (Inde) a déclaré qu’en tant que pays soumis à la domination coloniale pendant près de deux siècles, l’Inde est consciente des effets néfastes du racisme et de la discrimination raciale.  Le fléau de ce que le Mahatma Gandhi qualifiait de « vestige de l’esclavage » a touché des millions d’Indiens, chassés de leur mère patrie par les puissances coloniales vers des rivages lointains en qualité de travailleurs sous contrat, a-t-il rappelé.  Depuis l’indépendance, la lutte contre le racisme et la décolonisation ont été les pierres angulaires de la politique étrangère de l’Inde, a ajouté le représentant, rappelant qu’en 1946, son pays a été le premier à élever sa voix contre l’apartheid aux Nations Unies. 

La Constitution indienne prévoit des garanties contre le racisme et la discrimination raciale, garanties encore renforcées par un cadre juridique complet, « avec un système judiciaire indépendant et impartial, un système politique pluraliste, une société civile dynamique et des médias libres », a affirmé le délégué.  Pour l’avenir, l’Inde parie sur l’éducation et le numérique pour promouvoir les valeurs de la citoyenneté mondiale tout en luttant contre la face sombre des médias sociaux, « devenus une chambre d’écho de la haine raciale et des idées discriminatoires ».  Pour l’Inde, a-t-il poursuivi, la Déclaration et le Programme d’action de Durban continuent de fournir un cadre global pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  La pleine mise en œuvre des textes de Durban est cruciale pour atteindre les ODD, a conclu le représentant d’Israël.

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a estimé que toute doctrine s’appuyant sur la différenciation raciale est scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste, en plus d’être dangereuse.  À ses yeux, il n’existe aucune justification à la discrimination raciale, en théorie comme en pratique, où que ce soit.  La représentante s’est par ailleurs interrogée sur la manière d’appréhender le passé pour aller de l’avant.  Aussi douloureux qu’il soit pour les uns ou déshonorant pour les autres, ce passé, qui se trouve à l’origine du racisme contre les Noirs, se doit d’être confronté, a-t-elle estimé. 

M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a souligné les efforts entrepris par son pays dans la lutte contre la désinformation et sa coopération internationale en la matière, notamment dans le cadre du Groupe des Amis pour la lutte contre la désinformation.  Parmi les dernières manifestations de désinformation dans le monde, il a fustigé la campagne étatique menée par le Gouvernement indien « pour servir ses objectifs stratégiques ».  Citant les données du journal en ligne IFLA, qui a fait état de 9 000 cas de désinformation dans le monde entre janvier et mars 2021, il a accusé l’Inde d’être « la championne des ‘fake news’ sur les réseaux sociaux ».  Le Pakistan en est la cible numéro un, a-t-il dit, ajoutant que New Delhi présente les activistes de paix au Jammu-et-Cachemire comme des terroristes.  Selon le délégué, le Gouvernement indien, mu par un « hindouisme extrémiste », oppresse en outre 200 millions d’Indiens musulmans, ciblés par des appels au génocide.

Mme HEBA MOSTAFA MOSTAFA RIZK (Égypte) s’est dite très préoccupée par la résurgence et l’augmentation de la xénophobie, l’islamophobie et la prolifération des discours de haine, pointant du doigt le rôle des plateformes numériques dans ce domaine.  Les États ont une responsabilité à contrôler ces technologies numériques, a-t-elle insisté.  Par ailleurs, elle a rappelé le soutien de son pays à la création de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine.  La Déclaration et le Programme d’action de Durban sont une base pour des réformes dans ce domaine, a-t-elle ajouté, appelant à des progrès supplémentaires pour l’élaboration de normes complémentaires à ce sujet. 

Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) a déploré l’usage disproportionnée de la force qui mène à la mort de milliers de Palestiniens.  Cela a lieu tous les jours et cela se poursuit sans reddition de comptes, a-t-elle décrié, dénonçant le régime israélien qui commet ces atrocités en sachant très bien qu’il ne subira aucune conséquence.  Par ailleurs, elle a dénoncé la politique de deux poids, deux mesures par les États-Unis et des pays occidentaux à l’égard des personnes d’ascendance africaine, s’inquiétant en outre de la hausse de l’islamophobie.  Enfin, elle a critiqué les mesures coercitives unilatérales qui mènent à des discriminations contre les populations visées, avant de dénoncer les violations des droits humains dans plusieurs pays, y compris au Canada et au Royaume-Uni.

M. NIZHAN FARAZ BIN RIZAL (Malaisie) a défendu le multiculturalisme et la coexistence pacifique entre différentes communautés, et a indiqué que son gouvernement a mis sur pied un plan d’action pour promouvoir une société malaisienne prospère.  Le multilatéralisme consacré dans la Charte est chéri par de nombreuses nations mais de nombreuses autres refusent de le mettre en œuvre, a-t-il ensuite déploré.  Il a pris pour exemple la politique d’Israël dans les territoires palestiniens occupés.  Il a dénoncé le fait qu’Israël ait carte blanche pour perpétuer son régime d’apartheid, faisant fi de la solution des deux États.  Il a aussi plaidé pour que la Palestine devienne un État Membre de l’ONU à part entière.

M. VANDERMUNTERT (Luxembourg) s’est alarmé de la résurgence des tendances racistes, antisémites et xénophobes à travers le monde.  Il a estimé que la lutte contre le racisme mérite toute l’attention de la communauté internationale, notamment pour combattre les campagnes de désinformation et les discours incitant à la haine, qui affectent en particulier les populations migrantes.  Cette lutte nécessite des cadres internationaux efficaces, a-t-il ajouté, plaidant pour une coordination des efforts pour la tolérance et la justice raciale assuré par un système multilatéral fort et solidaire centré sur les Nations Unies.  Pour le représentant, cette lutte doit aussi être inclusive, car le racisme et l’intolérance ne peuvent être combattus avec succès que si la société civile est pleinement engagée.  Il a ensuite assuré que son pays se soumet pleinement aux mécanismes et instruments des droits humains.  À la suite de l’Examen périodique universel de 2018, le Luxembourg a ainsi accepté 12 recommandations relatives à la lutte contre le racisme qui lui ont été adressées et s’est engagé à renforcer ses efforts pour combattre toutes les formes de discrimination raciale et de xénophobie, a-t-il indiqué, faisant également état de la préparation d’une stratégie interministérielle de lutte contre le racisme.  

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a dénoncé les actes d’agression, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et violations des droits humains perpétrés par les forces israéliennes dans le Golan syrien et autres territoires arabes.  Le représentant a exhorté Israël à mettre un terme à l’occupation de ces territoires.  Par ailleurs, il a rappelé sa position concernant la souveraineté des États, à savoir ne pas s’ingérer dans les affaires internes d’autres pays.  Ainsi la situation au Xinjiang, au Tibet ou à Hong Kong concerne la Chine, a-t-il appuyé, soulignant que la Chine a beaucoup fait dans le domaine du droit humanitaire.  Enfin, il a appelé à faire de l’État de la Palestine un membre à part entière des Nations Unies. 

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a rappelé le plan d’action mis en œuvre dans le pays, couvrant la période 2021 à 2025.  Nous allons bientôt créer un outil complémentaire à notre commission de lutte contre le racisme et la xénophobie, a-t-elle indiqué.  Elle a par ailleurs détaillé les formations en matière de droits humains pour les forces de sécurité, notamment pour qu’elles rendent des comptes en cas de manquement.  Elles disposent également désormais de caméras embarquées, a indiqué la représentante.

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE) a réaffirmé que le racisme et la discrimination raciale vont à l’encontre des principes de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, d’état de droit et de respect des droits humains qui sous-tendent l’UE et qui sont des valeurs communes à tous ses États membres.  L’action de l’UE dans ce domaine, a-t-il précisé, s’appuie sur un cadre juridique solide qui a été développé au fil des ans sur la base de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de la directive de 2000 sur l’égalité raciale de l’UE, qui interdit toute discrimination directe ou indirecte fondée sur l’origine raciale ou ethnique.  Parmi les mesures importantes prises par l’UE dans ce domaine, le représentant a cité l’adoption en 2020 par la Commission européenne du premier plan d’action européen contre le racisme et la nomination en 2021 d’un nouveau coordinateur antiracisme.  Par ailleurs, en ce qui concerne les discours de haine véhiculés par les plateformes numériques, un accord historique a été atteint au sein de l’UE sur la nouvelle loi sur les services numériques, qui consacre le principe selon lequel ce qui est illégal hors ligne doit l'être également en ligne, a indiqué le délégué.  L’UE a, en outre, mis en place un plan d’action contre le racisme 2020-2025, dont la mise en œuvre a été débattue lors du Sommet européen contre le racisme de 2022.  Plaidant enfin pour le débat sur la Déclaration et le Programme d’action de Durban soit inclusif et fondé sur le consensus, le représentant a appelé à éviter la prolifération de mécanismes et d’instruments dédiés à l’élimination du racisme.  Pour l’UE, a-t-il conclu, les normes, telles qu’elles sont prévues par la Convention, et la structure institutionnelle du système des droits de l’homme des Nations Unies, offrent un « cadre adéquat ».   

M. KARL LAGATIE (Belgique) a constaté qu’en matière de lutte contre le racisme, la communauté internationale a déjà adopté un grand nombre d’initiatives, qu’il s’agisse de mécanismes, de groupes d’experts, de programmes, de conventions et de résolutions.  Cela signifie que des outils sont disponibles et à notre disposition pour améliorer la situation, a-t-il dit, jugeant que l’heure est à présent à la mise en œuvre complète et effective des résultats et des recommandations.  Dans ce domaine, la Belgique est et restera active, tant au niveau national qu’international, a affirmé le représentant.  Conformément à l’engagement qu’il a pris lors de la Conférence de Durban en 2001, le Gouvernement fédéral belge a adopté cet été un nouvel ensemble de mesures, dont l’un des principaux objectifs est d’optimiser le suivi et l’étude du racisme en améliorant la collecte différenciée de données qualitatives et quantitatives, a précisé le délégué.  Il a par ailleurs appelé à la ratification universelle et à la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, demandant également aux États qui ont des rapports en retard de les soumettre dès que possible

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, le représentant de l’Inde a interpellé le Pakistan, l’accusant d’avoir détourné la question de la décolonisation pour parler de la question du Jammu-et-Cachemire et dissimuler les violations du Pakistan envers sa propre population.  Le Jammu-et-Cachemire fait partie de l’Inde, a maintenu le délégué indien. 

Le représentant du Pakistan a répondu à l’Inde en déclarant que le Jammu-et-Cachemire n’a jamais fait partie de l’Inde, prenant appui sur de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité selon lesquelles ce territoire est disputé.  Dénonçant les mensonges et les affabulations de l’Inde à ce sujet, il l’a également accusée de violer le droit international en refusant d’accorder au peuple du Jammu-et-Cachemire le droit à l’autodétermination.  Le délégué a conclu son intervention en affirmant que les minorités en Inde sont victimes de discriminations évidentes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale salue le rôle central de la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité des auteurs de crimes les plus graves

Soixante-dix-septième session,
22e & 23e séances, Matin & après-midi
AG/12462

L’Assemblée générale salue le rôle central de la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité des auteurs de crimes les plus graves

Le Président de la Cour pénale internationale (CPI) a présenté, ce matin, à l’Assemblée générale, le rapport annuel sur les activités de la Cour en 2021/22.  « En cette période difficile, nous voyons combien il est important de maintenir l’état de droit et de le défendre », a affirmé le Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi, saluant la CPI comme une institution clef du système de justice internationale.  Plus d’une cinquantaine de délégations se sont exprimées à ce sujet et ont reconnu le niveau sans précédent d’activité judiciaire de la CPI. 

Rappelant que la Cour fêtait ses 20 ans, le Président de la CPI, M. Piotr Hofmański, a déclaré qu’elle avait dépassé les attentes.  Depuis sa création, la Cour a été saisie de 31 affaires impliquant 50 suspects ou accusés.  Des enquêtes ont été ouvertes à l’égard de 17 situations sur quatre continents.  Cinq affaires sont en cours cette année, « un record dans l’histoire de la CPI », a-t-il rapporté. 

Les Pays-Bas ont introduit le projet de résolution sur le rapport de la CDI sur lequel l’Assemblée se prononcera le 2 novembre. 

L’ouverture, le 5 avril dernier, du premier procès sur renvoi du Conseil de sécurité́, concernant Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, ancien commandant Janjaouid au Darfour, a été saluée par de nombreuses délégations, États-Unis en tête.  Ces derniers ont encouragé les autorités soudanaises à transférer les suspects toujours en liberté à la Cour.  À l’instar du Mexique, un grand nombre de délégations se sont préoccupées de l’absence d’exécution de 15 mandats d’arrêt délivrés par la CPI et ont appelé tous les États Membres à coopérer avec la Cour. 

Le Bureau du Procureur a ouvert des enquêtes sur les situations aux Philippines et au Venezuela, a informé le Président de la CPI.  Il a également ouvert une enquête sur la situation en Ukraine, dont il a été saisi par 43 États parties au total.  « Le Bureau du Procureur est actif dans ce pays depuis le début du conflit », a précisé le Président.  De nombreuses délégations ont justifié cette démarche, au premier rang desquelles l’Ukraine qui a estimé que la Cour pouvait créer un « précédent historique face aux crimes haineux perpétrés par les occupants russes ».  Rejointe par d’autres délégations, notamment celles qui font partie des États ayant déféré la situation à la Cour, l’Ukraine a indiqué que l’enquête comprenait toutes les allégations de crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide, commis sur son sol à partir de novembre 2013.  Pour le crime d’agression, a-t-elle ajouté, il conviendrait de compléter les activités de la CPI par le biais d’un tribunal spécial pour punir ceux qui ne peuvent pas être atteints par la Cour. 

Sur une note discordante, la Fédération de Russie a considéré que la CPI poursuit sa « décadence » et qu’il ne reste rien des nobles idéaux de la justice qui ont présidé à la rédaction du Statut de Rome.  Le délégué russe a accusé la Cour de se livrer à des « falsifications » et de suivre une approche « sélective et politisée » sur diverses affaires.  D’après lui, les pays occidentaux appellent à collaborer avec la CPI pour punir la Russie, dans le cadre d’une « rhétorique russophobe ». 

Un grand nombre de délégations ont tenu à souligner que la CPI est une cour de dernier recours qui ne se substitue pas aux instances judiciaires nationales.  Les Philippines et le Venezuela ont indiqué avoir souhaité déférer les enquêtes ouvertes par la Cour à leurs autorités nationales, mais le Procureur a demandé́ à la Chambre préliminaire l’autorisation de poursuivre ses enquêtes dans la première situation et signalé son intention de faire de même dans la seconde.  Les Philippines ont dénoncé le « zèle » du procureur, estimant sa décision contraire au principe de complémentarité entériné par le Statut de Rome, dont elles se sont retirées en dénonçant une politisation des droits humains.  « L’ombre de la Cour est un encouragement aux autorités nationales pour qu’elles agissent contre l’impunité », a pourtant affirmé le Président de la Cour. 

S’exprimant au nom des États africains parties au Statut de Rome, la Côte d’Ivoire a salué les efforts de la CPI pour promouvoir le principe de complémentarité.  Insistant à son tour sur le fait que la CPI est la « cour de dernier ressort », elle a appelé à renforcer la capacité des systèmes judiciaires nationaux à faire face aux crimes.  Elle a également souhaité que soit traitée la question de la représentation géographique équitable du personnel de la CPI.  La Côte d’Ivoire s’est félicitée des progrès réalisés par le mécanisme de révision de la CPI, lequel aborde, entre autres, la question de sa politisation.  De son côté, le Mexique a souligné l’importance d’ouvrir des enquêtes dans toutes les régions du monde en insistant sur la vocation universelle de la CPI. 

Le Président de la CPI a informé l’Assemblée que quatre affaires en sont au stade de la réparation aux victimes, un autre motif de satisfaction.  Notant que le Statut de Rome donne aux victimes une place plus importante que les tribunaux internationaux par le passé, M. Hofmański a expliqué que la CPI leur fournit une aide juridique gratuite et que le Fonds au profit des victimes permet d’offrir des réparations même lorsque les condamnés ne sont pas en mesure de le faire. 

À l’instar de très nombreuses délégations, les Pays-Bas, qui accueillent la CPI, ont salué la mise en œuvre des recommandations du Groupe d’experts indépendants et plaidé en faveur de l’universalisation du Statut de Rome.  Ils ont aussi appelé à lui fournir un budget à la hauteur de ses activités, jugeant justifiée une augmentation substantielle du budget de la Cour pour 2023.  Comme d’autres délégations, le Costa Rica s’est inquiété de l’absence de dotation stable et prévisible et de ressources suffisantes pour la CPI. 

Par ailleurs, L’Assemblée générale a suivi la recommandation de sa Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires et ouvert, pour cette année, des crédits supplémentaires d’un montant de 131 345 300 dollars pour la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), dont le mandat s’achève le 17 mars 2023.

L’Assemblée générale examinera le Rapport du Conseil des droits de l’homme, demain, à partir de 10 heures.

RAPPORT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

Déclarations

M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, a déclaré que la Cour pénale internationale (CPI) avait été fondée sur le socle d’une cuture universelle soutenant le respect des droits humains, et dans l’objectif de lutter contre l’impunité, de rendre justice et d’offrir réparation aux victimes des crimes les plus graves.  Aujourd’hui, la CPI est une institution clef du système de justice internationale, a-t-il souligné.  Et en cette période difficile, nous voyons combien il est important de maintenir l’état de droit et le défendre.  Le Président a salué les réformes engagées ces dernières années par la CPI, appelant à une Cour plus efficace et à un modèle de gouvernance et de culture juridique.  De ce fait, il a plaidé pour une CPI qui traduise en justice les auteurs des crimes les plus graves et vienne en appui aux juridictions nationales.  Il a enfin souhaité voir une ratification universelle du Statut de Rome. 

M. PIOTR HOFMAŃSKI, Président de la Cour pénale internationale (CPI), a présenté le rapport annuel de la CPI sur ses activités en 2021-22.  La CPI célèbre, cette année, ses 20 années d’activité, a-t-il rappelé.  Elle a accompli plus que beaucoup de gens n’attendaient, avec des enquêtes menées dans 16 pays sur quatre continents, et 31 affaires traitées ou en cours, impliquant 51 suspects ou accusés.  De plus en plus de preuves scientifiques montrent en outre que le Statut de Rome a un effet dissuasif sur la commission de crimes internationaux dans les États parties au Statut de Rome, a ajouté M. Hofmański. 

Cinq affaires sont en cours cette année, « un record dans l’histoire de la CPI », a rapporté le Président, notant que deux d’entre elles concernent la République centrafricaine.  Le procès dans l’affaire Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman s’est ouvert le 5 avril 2022 : il s’agit du premier procès sur renvoi du Conseil de sécurité́.  Concernant la deuxième situation en République centrafricaine, le Président a précisé que la présentation des moyens de preuve par le Bureau du Procureur dans le procès d’Alfred Yekatom et de Patrice-Edouard Ngaïsonna s’est poursuivie, que Maxime Jeoffroy Eli Mokom Gawaka a été remis à la Cour et que la date de l’ouverture du procès de Mahamat Said Abdel Kani a été fixée au 26 septembre 2022.  Évoquant la situation au Mali, il a indiqué que le procès d’Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud s’est poursuivi.  Il a aussi rappelé que le procès de Paul Gicheru pour des infractions présumées de subornation de témoins au Kenya s’est ouvert, et que les conclusions ont été présentées.  Enfin, évoquant la situation en Géorgie, il a précisé que des mandats d’arrêt ont été délivrés contre David Georgiyevich Sanakoev, Gamlet Guchmazov et Mikhail Mayramovich Mindzaev pour des crimes qui auraient été commis pendant le conflit armé de 2008 entre la Fédération de Russie et la Géorgie. 

M. Hofmański a informé que quatre affaires en sont à l’étape de la réparation aux victimes, ce qui constitue là aussi un record.  Par ailleurs, trois nouvelles enquêtes ont été ouvertes aux Philippines, au Venezuela et en Ukraine.  La situation en Ukraine a été référée à la Cour par 43 États et le Bureau du Procureur est actif dans ce pays depuis le début du conflit, a précisé le Président.  Il a aussi indiqué que les Philippines et le Venezuela avaient souhaité déférer les enquêtes aux autorités nationales, mais que le Procureur avait demandé́ à la Chambre préliminaire l’autorisation de reprendre les activités d’enquête dans la première situation et signalé son intention de faire de même dans la seconde.   « L’ombre de la Cour est un encouragement aux autorités nationales pour qu’elles agissent contre l’impunité » a-t-il affirmé. 

Notant que le Statut de Rome donne aux victimes une place plus importante que les tribunaux internationaux par le passé, M. Hofmański a expliqué que la CPI leur fournit une aide juridique gratuite et que le Fonds au profit des victimes permet d’offrir des réparations même lorsque les condamnés ne sont pas en mesure de le faire.  Il a précisé que 21 000 victimes ont participé aux procédures de la CPI et que 3 000 d’entre elles ont bénéficié de réparations.  Il a appelé les États parties au Statut de Rome à contribuer au Fonds au profit des victimes et tous les États n’ayant pas encore adhéré au Statut de Rome à le faire, dans « l’intérêt de l’humanité » et leur propre intérêt. 

Le Président s’est félicité de la coopération entre la CPI et l’ONU et a salué l’accord entre la Cour et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui sera la base juridique d’accords plus concrets avec les bureaux du PNUD dans chaque pays.  Il aussi souligné l’importance de la coopération avec les États, regrettant que 15 mandats d’arrêt n’aient pas été exécutés.  L’obligation de coopérer concerne les États parties au Statut de Rome, ainsi que le Soudan et la Libye, sur la base du renvoi opéré par le Conseil de sécurité.  Le Président a enfin noté que les États qui ne sont pas parties au Statut de Rome coopèrent souvent en vertu du droit international coutumier. 

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, a appelé tous les États à pleinement coopérer avec la CPI, qu’il s’agisse des enquêtes ou de l’exécution des mandats d’arrêt délivrés par cette dernière.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à ne pas faire usage du droit de veto en cas d’atrocités de masse et à user de son droit de renvoyer une situation à la Cour.  Elle a rappelé qu’un tel renvoi à la CPI par le Conseil permet à la Cour d’exercer sa compétence pour les quatre crimes visés par le Statut de Rome, y compris le crime d’agression, pour les États parties comme pour les États non parties. 

La déléguée a plaidé pour une universalisation du Statut de Rome et pour « une protection accrue de la Cour contre toute interférence politique afin de maintenir son intégrité judiciaire ».  Rappelant la persistance de la violence sexuelle, elle a appelé la CPI à renforcer ses efforts d’établissement des responsabilités pour tous les civils agressés en raison de leur genre pendant un conflit.  « Le dédommagement des victimes de crimes internationaux est la raison d’être de la CPI », a conclu Mme Popan.

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) au nom des pays baltes, a exhorté les États à coopérer avec la CPI pour l’arrestation des personnes contre lesquelles un mandat d’arrêt a été émis.  Le représentant a appelé les États à ratifier le Statut de Rome et à accepter la compétence de la Cour pour enquêter sur les crimes d’agression.  Les États baltes, a-t-il indiqué, ont rejoint l’équipe commune d’enquête sur les crimes internationaux présumés en Ukraine mise en place par Eurojust.  Le représentant a également souligné le rôle du Conseil de sécurité pour répondre aux violations graves du droit international et encouragé la « synergie » entre cet organe et la CPI.  À ce titre, il a appelé à ne pas utiliser le droit de veto en cas d’atrocités de masse et à référer à la CPI les situations dans lesquelles un crime international semble avoir été commis.  Le représentant a, enfin, souligné l’importance du Fonds au profit des victimes et invité les États à y contribuer.

Mme ELINA KALKKU (Finlande), au nom des pays nordiques, a déclaré que la Cour pénale internationale (CPI) continue de guider la reddition de comptes pour les crimes internationaux les plus graves, après avoir parcouru un long chemin depuis sa création il y a 20 ans.  La Cour, a-t-elle souligné, intervient dans un nombre toujours croissant de situations et enregistre un nombre record d’affaires en cours.  Évoquant l’affaire Al-Rahman, dont le procès s’est ouvert en avril de cette année, Mme Kalkku a rappelé que la situation au Darfour avait été la première à être déférée à la CPI par le Conseil de sécurité, en 2005.  Elle a également rappelé que l’Ouganda avait été le premier État à déférer sa situation à la CPI en 2004 mais que Joseph Kony, le chef de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), était toujours en liberté et que l’affaire Ongwen était actuellement en suspens devant la Chambre d’appel. 

Notant que certaines affaires avaient atteint le stade des ordonnances de réparation, la déléguée a souligné l’importance du Fonds au profit des victimes auquel contribuent les pays nordiques.  Elle a aussi rappelé que les pays nordiques avaient participé au renvoi collectif de la situation de l’Ukraine à la CPI et que ce type de renvoi renforçait le rôle de la CPI.  Plaidant en faveur de l’universalité du Statut de Rome, elle a exhorté tous les États à envisager de le ratifier.  La CPI, a indiqué la déléguée, est une cour de dernier recours qui ne remplace pas les systèmes judiciaires nationaux, mais elle les renforce et les complète.  Enfin, elle a encouragé l’ONU à envisager de partager la charge financière relative aux situations que le Conseil de sécurité a déférées à la CPI.

Mme EVA NIAMKE (Côte d’Ivoire), s’exprimant au nom des États africains qui sont parties au Statut de Rome, a constaté que la Cour pénale internationale (CPI) a ouvert 31 affaires dans 17 situations, la plupart dans des pays touchés par des conflits armés.  Cela confirme, a-t-elle relevé, la pertinence continue de la Cour dans la recherche de la paix et de la justice internationales.  Évoquant le processus pour l’élection du Greffier de la Cour, elle a insisté sur l’importance pour la CPI que son personnel reflète son caractère universel par la représentativité géographique de son leadership.

Mme Niamke a salué le rôle du Fonds au profit des victimes.  En effet, les victimes sont au cœur du système du Statut de Rome et la Cour doit défendre toutes les victimes, a-t-elle argué.  Elle a demandé que la justice soit appliquée de la même manière dans toutes les situations considérées par la Cour, y compris dans l’allocation des ressources à toutes les affaires.  Les États parties africains appuient les efforts en cours au sein de la CPI pour promouvoir le principe de la complémentarité judiciaire, l’épine dorsale du système du Statut de Rome, a-t-elle précisé.  La déléguée a donc appelé à renforcer cette complémentarité en renforçant la capacité des systèmes judiciaires nationaux à faire face aux crimes.  En effet, la responsabilité première d’enquêter et de poursuivre les crimes relevant du Statut de Rome appartient aux États, a-t-elle rappelé, insistant sur le fait que la CPI est la « Cour de dernier ressort » et qu’elle n’intervient que lorsque les États ne veulent pas ou ne peuvent pas véritablement mener des procédures nationales.  Les États parties Africains constituant le plus grand groupe régional de l’Assemblée des États parties, la déléguée a indiqué que ces États sont attachés à l’universalité du Statut de Rome.  Elle s’est félicitée des progrès réalisés par le mécanisme de révision de la CPI, lequel aborde, entre autres, la question de la politisation de la Cour.  Elle a encore souhaité que soit traitée la question de la représentation géographique équitable du personnel de la CPI.

Mme BEATRICE MAILLE (Canada) a rappelé qu’un engagement soutenu est nécessaire pour permettre à la Cour pénale internationale (CPI) de remplir sa mission.  Elle a appelé les États à exécuter les mandats d’arrêt émis par la Cour et de coopérer aux enquêtes en cours.  Elle a insisté sur le lien entre la Cour et le Conseil de sécurité et a demandé à ce dernier à saisir la CPI de la situation actuelle au Myanmar.  La représentante s’est en outre félicitée des efforts déployés par la société civile mais a rappelé le rôle premier des États.  S’inquiétant des problèmes de trésorerie de la Cour, elle a appelé les États parties à payer l’intégralité de leurs contributions et de leurs arriérés.  La représentante s’est, enfin, réjouie du legs de la CPI s’agissant de la participation des victimes aux procédures judiciaires et a réitéré le soutien continu de son pays au Fonds au profit des victimes.

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a apporté un soutien sans réserve à la CPI qui joue un rôle crucial dans la lutte contre l’impunité.  Elle a souligné la nécessité de respecter le principe de complémentarité entre CPI et juridictions pénales nationales, la Cour ne pouvant se substituer à ces dernières.  Elle a plaidé pour une interaction accrue entre la CPI et le Conseil de sécurité, ainsi que pour un meilleur suivi des situations renvoyées par le Conseil à la Cour.  La déléguée a rappelé que la prévention et la répression des crimes contre l’humanité incombe aux États Membres.  Elle a exhorté les États à renforcer la coopération avec la CPI, avant de demander que celle-ci jouisse des ressources nécessaires à l’exécution de son mandat.  Enfin, elle a plaidé pour l’universalisation du Statut de Rome.

M. MATUS KOŠUTH (Slovaquie) s’est félicité de ce que l’examen indépendant lancé en 2018 donne déjà des résultats dont la stratégie de réponse aux menaces et attaques externes.  Il a souligné que la faculté de la Cour à exécuter pleinement son mandat dépend de l’universalisation de son Statut.  En attendant, il a noté avec satisfaction l’appui renouvelé des États parties à l’établissement des responsabilités pour les crimes les plus graves, en réaction à la multitude d’atrocités commises en Ukraine agressée brutalement par la Fédération de Russie.  Il a estimé que le vingt-cinquième anniversaire du Statut de Rome doit être l’occasion pour les États parties de réexaminer leurs relations avec la CPI et pour les États non parties de s’engager dans un dialogue constructif, basé sur les valeurs communes du Statut de Rome, pour continuer à renforcer la justice pénale internationale, avec comme issue naturel et logique, la ratification dudit Statut.  La Slovaquie, a dit le représentant, poursuivra ses discussions avec la Cour sur certains arrangements en appui aux opérations de cette dernière.  Il a aussi appelé le Conseil de sécurité à user de son pouvoir de saisine chaque fois qu’un des quatre crimes prévus par le Statut de Rome est commis et que les autorités nationales ne sont pas en mesure d’enquêter.  Il n’a pas manqué d’exhorter les membres du Conseil à renoncer à leur droit de veto en cas d’atrocités de masse et à assurer le suivi des renvois à la Cour, y compris en obtenant la coopération des États.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a salué le rôle du Fonds au profit des victimes, avant de rappeler que le principe de complémentarité est un élément essentiel du Statut de Rome.  Il a milité pour l’universalisation dudit Statut et demandé à l’ONU d’offrir un soutien conséquent à la CPI, notamment quand le Conseil de sécurité la saisit.  Il a salué le processus d’examen du fonctionnement de la Cour, tout en mettant en garde contre des modifications non consensuelles du Statut de Rome. 

M. GIANLUCA GRECO (Italie) a affirmé que son pays, fervent défenseur de l’ordre international fondé sur des règles, s’engageait pleinement à soutenir la Cour pénale internationale (CPI) et à promouvoir l’obligation de rendre des comptes, en particulier à « une époque où les principes fondamentaux du droit international sont ignorés de manière flagrante ».  Il s’est inquiété des graves difficultés auxquelles la Cour continue de se heurter en ce qui concerne ses demandes de coopération, notamment pour l’exécution de ses mandats d’arrêt en suspens, et a appelé les États parties à respecter les obligations qui leur incombent en vertu du Statut de Rome.  L’Italie, a précisé le délégué, s’est engagée à fournir à la CPI une contribution volontaire exceptionnelle en financement et en personnel; elle a en outre déposé son instrument de ratification des amendements de Kampala en janvier dernier, renforçant ainsi la capacité du système du Statut de Rome à promouvoir la responsabilité, y compris pour le crime d’agression.  Le délégué a aussi rappelé que l’Italie avait déféré la situation en Ukraine au Procureur de la CPI le 2 mars dernier, aux côtés de plus de 40 États.  Se félicitant de l’importance que les réparations aux victimes prennent dans les travaux de la Cour, il a rappelé qu’environ 13 000 d’entre elles avaient participé à des affaires devant la Cour pendant la période considérée et que l’Italie avait décidé de contribuer au fonds qui leur est dédié.

M. LIU YANG (Chine) a indiqué que la Cour pénale internationale (CPI) et le Conseil de sécurité jouent des rôles différents mais complémentaires s’agissant de la lutte contre l’impunité.  Il a appuyé la CPI et le Conseil de sécurité, dans l’exécution de leurs mandats respectifs.  Il a souhaité que la Cour « se concentre sur les affaires renvoyées par le Conseil de sécurité », avant de noter les contacts noués par la CPI avec le Soudan et le Nigéria.  Le délégué a espéré que la Cour entendra davantage les pays concernés par les situations sur lesquelles elle a compétence.  Il a noté que certaines pratiques de la Cour ont soulevé des difficultés juridiques, notamment en exerçant ses compétences à l’endroit d’États non parties au Statut de Rome.  Ce n’est pas une bonne application des textes, a déploré le délégué, en appelant au respect du consentement des États et en souhaitant des éclaircissements sur cette question.  Enfin, il a invité la Cour à agir de façon « impartiale » dans le strict respect du droit international.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a remercié la Cour pénale internationale (CPI) pour ses mises à jour concernant l’enquête sur la situation du dossier Bangladesh/Myanmar.  Il a rappelé que le 17 juillet 2021, le Myanmar a déposé une déclaration en vertu de l’article 12(3) auprès du Greffier de la Cour, acceptant la compétence de la Cour sur les crimes commis sur son territoire depuis le 1er juillet 2002.  Par cette déclaration, le peuple du Myanmar a bon espoir que la Cour ouvrira un examen préliminaire ou élargira la portée de son enquête actuelle, a déclaré le représentant.  Le peuple du Myanmar a un besoin urgent de reddition de comptes pour les crimes graves commis par les militaires, a-t-il poursuivi, arguant que le système judiciaire national a échoué depuis que l’armée a mené un coup d’État illégal en février 2021.  « Au moment où je parle, l’armée fasciste continue de commettre des violations systématiques et généralisées des droits de l’homme, y compris des massacres, des frappes aériennes contre des civils et des incendies criminels. »  Le représentant a rappelé qu’en septembre dernier, 13 personnes, dont sept enfants, ont été tuées quand l’armée de l’air a attaqué une école dans le village de Lat Yat Kone, dans la région de Sagaing.  De même, la semaine dernière, des avions de combat militaires ont bombardé des civils au cours d’un concert à A Nang Pa, dans l’État de Kachin.  Il a évoqué une centaine de morts, dont des artistes, des femmes et des enfants, ainsi que de nombreux blessés.  Le représentant a appelé le Conseil de sécurité à s’appuyer sur ces preuves d’atrocités commises par l’armée afin de déférer la situation à la CPI.

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a souligné l’importance de la décision du Procureur de la Cour, M. Karim Khan, d’ouvrir une enquête sur la situation en Ukraine, laquelle lui a été déférée par 43 États parties au Statut de Rome.  Le Mexique réitère l’importance d’ouvrir des enquêtes sur d’éventuels crimes relevant de la compétence de la Cour dans toutes les régions du monde, a dit le délégué, en insistant sur la vocation universelle de la CPI.  Il a dit son appréciation de l’approche du Procureur, qui a cherché à obtenir la coopération des États ayant compétence dans les situations soumises à l’enquête de la Cour, en application du principe de complémentarité.  Nous notons néanmoins avec préoccupation que 15 mandats d’arrêt délivrés par la Cour n’ont pas encore été exécutés, a déclaré le délégué, en appelant les États à coopérer avec la CPI.  Enfin, il a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à rejoindre le Statut de Rome, avant de souligner l’importance du Fonds au profit des victimes.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a souligné l’importance du principe de complémentarité avec les juridictions nationales pour renforcer la lutte contre l’impunité dans les crimes les plus graves.  Elle a également souligné que l’une des composantes du travail de la Cour pénale internationale (CPI) sont ses ordonnances de réparation.  Elle s’est félicitée du Fonds au profit des victimes, arguant que la réparation doit s’ancrer dans une approche intersectionnelle, prenant en compte les besoins spécifiques des différents groupes qu’il s’agisse des besoins liés au genre, à l’orientation sexuelle, au handicap ou encore au statut migratoire.  La représentante a conclu en rappelant que son pays coordonne le Groupe de travail sur l’aide judiciaire.

M. MAREK ZUKAL (République Tchèque) a estimé que le nombre actuel de 123 États parties est une preuve de grande pertinence et de l’autorité de la CPI.  Il a appelé les États ne l’ayant pas encore fait à ratifier le Statut de Rome, estimant que cela permettrait de mettre fin à l’impunité pour les crimes les plus graves au regard du droit international.  Selon le délégué, les enquêtes de la CPI sur les crimes commis en Ukraine à la suite de l’agression de la Russie, prouvent une fois de plus qu’un système de justice pénale internationale efficace est plus important que jamais.  Il a invité le Conseil de sécurité à user de ses pouvoirs de renvoi à l’égard de toutes les situations qui méritent une enquête de la CPI, de manière cohérente.  La situation en Syrie est certainement l’une d’elles, a-t-il dit.  Le délégué a déploré les cas de non-coopération avec la Cour, avant de suggérer que la meilleure façon de promouvoir l’universalité du Statut de Rome est, tout simplement, l’existence d’une Cour efficace, indépendante et impartiale. 

Nous sommes témoins de violations flagrantes du droit international, d’actes d’agression et d’atrocités généralisées, a affirmé M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie), regrettant que des crimes internationaux continuent d’être perpétrés dans de nombreuses régions du monde, comme en témoigne l’ampleur du travail de la Cour pénale internationale (CPI), qui compte désormais 31 affaires, 17 enquêtes et 2 enquêtes préliminaires.  Après la guerre d’agression illégale et injustifiée lancée par la Fédération de Russie, la situation en Ukraine fait désormais partie du travail de la Cour, a relevé le représentant.  Il a réaffirmé sa confiance à cette dernière et appelé les États parties à contribuer à son budget ordinaire ainsi qu’au Fonds au profit des victimes, comme le fait son pays.  Il a aussi appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome qui doit à tout prix être universel.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (République bolivarienne du Venezuela) a réaffirmé son attachement au Statut de Rome et rappelé qu’en février 2020 son pays avait saisi la Cour pénale internationale (CPI) à propos des sanctions unilatérales des États-Unis prises à son encontre, considérant qu’elles représentaient un crime contre l’humanité.  La CPI est un tribunal de dernière instance, a-t-il réaffirmé, et les autorités nationales ont la responsabilité première de juger les crimes signalés.  À cet égard, le délégué a assuré que la justice vénézuélienne a réalisé des réformes importantes.  Il a aussi demandé de repousser toute tentative de « politisation » de la CPI. 

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a énuméré les défis considérables que la Cour a dû relever en 20 années d’existence: retraits du Statut de Rome, longueur des procédures ou bien encore manque de coopération.  En tant qu’État partie, nous n’épargnons aucun effort pour aider la Cour à relever ces défis, tout en respectant son indépendance et impartialité, a assuré le délégué.  Rappelant l’importance d’établir les responsabilités pour répondre à la guerre de la Russie en Ukraine, il a appuyé l’ouverture en mars dernier d’une enquête par le Procureur de la CPI, qui doit bénéficier des moyens nécessaires pour s’acquitter de sa tâche.  « L’Allemagne fait partie des 43 États parties à avoir déféré la situation en Ukraine au Bureau du Procureur de la CPI. »  Cela permet au Procureur de diligenter immédiatement des enquêtes concernant toute allégation de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide commis sur tout le territoire ukrainien après le 21 novembre 2013, sans besoin de l’autorisation de la chambre préliminaire de la Cour, a conclu le délégué.

M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a réitéré le principe de complémentarité de la Cour pénale internationale (CPI) et a soutenu son approche axée sur les survivants des crimes sexuels et fondés sur le sexe.  Le Fonds au profit des victimes, s’est-il réjoui, représente un véritable changement pour les victimes et leurs familles.  Le représentant a regretté que le Conseil de sécurité n’ait saisi la Cour que deux fois et en a profité pour appeler les membres permanents dudit Conseil à renoncer à leur droit de veto en cas d’atrocités de masse.  À cet égard, il s’est réjoui que l’Assemblée générale ait décidé de contourner les blocages du Conseil de sécurité chaque fois que ce droit est exercé.  Le représentant a conclu en exhortant les États à coopérer avec la Cour, notamment pour l’exécution des mandats d’arrêt.  L’enquête actuelle sur la situation en Ukraine montre l’importance d’une Cour internationale indépendante et impartiale, a-t-il ajouté.

M. JOSÉ EDUARDO PEREIRA SOSA (Paraguay) a plaidé pour l’universalisation de la Cour pénale internationale (CPI) et appelé les pays ne l’ayant pas encore fait à ratifier le Statut de Rome.  Il a aussi lancé un appel pour le renforcement des liens de coopération entre la Cour et les gouvernements.  Pour le délégué, le rôle de la Cour, en tant qu’organe de défense des valeurs considérées comme essentielles par la communauté internationale, nous oblige à fournir les efforts collectifs nécessaires pour renforcer et affirmer son cadre institutionnel.  Il s’agit aussi de faire en sorte que l’exercice de son mandat s’effectue dans le respect des normes les plus élevées de professionnalisme, d’indépendance et d’impartialité.  Le délégué a affirmé qu’une indemnisation adéquate des victimes constitue un élément important dans l’accomplissement des travaux de la Cour.

M. HARIS CHRYSOSTOMOU (Chypre) s’est félicité de l’élection de deux nouveaux procureurs adjoints et a affirmé que son pays n’épargne aucun effort pour renforcer la Cour pénale internationale (CPI).  Il a appelé les États parties à adhérer à l’amendement de Kampala sur le crime d’agression, comme son pays l’a fait.  Il a aussi demandé au Conseil de sécurité de saisir la Cour des crimes internationaux les plus graves et soutenu l’initiative franco-mexicaine visant à ce que les membres permanents du Conseil renoncent à leur droit de veto en cas d’atrocités de masse. 

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a redit l’attachement de son pays à la CPI, le Bangladesh étant partie au Statut de Rome.  Il a fait observer qu’un million de civils se sont réfugiés dans son pays, avant d’évoquer l’enquête de la Cour pénale internationale (CPI) sur la situation Bangladesh/Myanmar.  Indiquant que le Bangladesh coopère pleinement avec la CPI, le délégué a exhorté le Myanmar à en faire de même et à poursuivre les auteurs des atrocités commises contre les Rohingya.  Il a souligné l’importance du Fonds au profit des victimes et salué la diversification de ses activités, avant de prier les États de contribuer au Fonds.  En conclusion, le délégué a souhaité un renforcement de l’enquête de la CPI au Myanmar et appelé à une universalisation du Statut de Rome.

Mme SILVA WALKER (Cuba) a constaté avec inquiétude le retrait de certains États du Statut de Rome.  Elle a déploré que l’institution de la Cour pénale internationale (CPI) soit « loin d’être indépendante », compte tenu des pouvoirs dont dispose le Conseil de sécurité.  S’agissant du renvoi des affaires à la CPI, elle a dénoncé un « traitement sélectif sur la base de considérations politiques ».  Elle a donc plaidé pour la mise en place d’une juridiction impartiale, juste, non sélective et indépendante qui ne soit pas asservie à des intérêts politiques.  La Cour doit respecter les principes relatifs au consentement de l’État, a en outre rappelé la représentante.  À ce titre, elle s’est dit préoccupée par les précédents dans lesquels la Cour a entamé des procédures contre des ressortissants d’États non parties qui n’ont pas accepté la juridiction de la CPI. 

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a estimé qu’en dépit des évolutions positives dans le travail de la Cour, des points restent à améliorer, en particulier, une politique de renvoi cohérente et un suivi effectif des résolutions de renvoi par le Conseil de sécurité.  Au-delà des Nations Unies, la coopération des États est fondamentale pour le déploiement des activités de la CPI, celle-ci n’ayant aucun moyen d’exécution qui lui soit propre.  La représentante a donc regretté que les mandats d’arrêt contre 15 personnes soient toujours en suspens.  Seule, a-t-elle martelé, la coopération pleine et entière des États peut permettre à la Cour de remplir son mandat et de s’assurer que justice soit rendue aux victimes des crimes les plus graves. 

La lutte contre l’impunité appelle un soutien universel et il en va de même de la Cour, a poursuivi la représentante qui a invité tous les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome et rappelé que la Cour est complémentaire aux juridictions nationales.  Pour qu’elle puisse accomplir son travail, elle doit également pouvoir se fonder sur un Statut solide.  Ces dernières années, l’Assemblée des États parties a fait des efforts importants, en consacrant la compétence de la Cour sur le crime d’agression et en ajoutant de nouveaux crimes dont certains relatifs à l’usage d’armes spécifiques et le crime de famine intentionnel de civils dans les conflits armés non internationaux.  La Suisse, qui avait initié cet amendement sur la famine, est heureuse d’annoncer qu’elle l’a ratifié cette année, a conclu la représentante, en demandant à l’Assemblée générale de refléter ces changements importants dans sa résolution sur la CPI. 

Mme MARIA CECILIA CÁCERES NAVARRETE (Chili) a insisté sur la complémentarité judiciaire comme principe fondamental de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI).  La complémentarité, a-t-elle expliqué, n’est pas seulement une question de recevabilité dans le Statut de Rome, mais également un principe directeur de la relation de la CPI avec les juridictions nationales, dans le but de lutter activement contre l’impunité.  Évoquant l’importance de la coopération des États, la déléguée a souligné la nécessité de créer des passerelles entre la CPI et les États impliqués dans des enquêtes, afin d’en assurer le succès.  Le fait que la CPI ne dispose pas de force de police ni de territoire propre la rend dépendante des États parties au Statut de Rome, a-t-elle expliqué.  En ce sens, le succès de la CPI sera déterminé par le niveau de coopération qu’elle reçoit des États.  La déléguée a rappelé que le Chili était associé à la saisine de la CPI sur la situation en Ukraine, avec pour but l’ouverture d’une enquête indépendante et impartiale, afin de rendre des comptes et de punir les responsables.  La représentante a ensuite mis l’accent sur la coopération entre la CPI et le Conseil de sécurité, avant de souligner la nécessité de compter sur la société civile, en tant que soutien constant du travail de la Cour.  Elle s’est dit préoccupée par les récentes informations faisant état de menaces et d’actes d’intimidation à l’encontre de certaines organisations de la société civile qui coopèrent avec la CPI.  Elle a enfin appelé à tenir compte de l’avis de la société civile dans le cadre du travail du Mécanisme d’examen de la CPI qui est chargé d’évaluer les recommandations contenues dans le rapport du groupe d’experts indépendants.

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) s’est félicité de la poursuite des activités de la Cour pénale internationale (CPI) en dépit de la pandémie de COVID-19.  Les réussites de la Cour sont le fait de tout son personnel, a-t-il reconnu.  Le délégué a plaidé pour un budget adéquat afin de faciliter le bon fonctionnement de la Cour, ainsi que pour davantage de contributions au Fonds en faveur des victimes.  Il a appuyé les programmes de bourses pour les juristes du monde entier, dans la mesure où elles participent à la vulgarisation du Statut de Rome.

En ce vingtième anniversaire du Statut de Rome qui coïncide avec le soixantième anniversaire de l’entrée de son pays à l’ONU, M. DENNIS FRANCIS (Trinité-et-Tobago) a tenu à saluer la contribution de son compatriote.  Dans sa biographie, feu Arthur N. R. Robinson, ancien Premier Ministre, raconte comment dès 1971, il a commencé à militer avec d’autres universitaires et personnalités éminentes pour la création de la Cour.  Son rôle a été dûment reconnu en 2002, à Racine, dans le Wisconsin, devant l’épicéa, symbole de la résilience, qu’il avait planté 30 ans auparavant.  Il avait alors déclaré « ma conviction est que malgré l’opposition actuelle ou future, la Cour sera saluée comme un des accomplissements les plus importants de l’humanité ».

Le représentant a applaudi le rôle vital de la Cour dans le renforcement des institutions nationales.  La Cour pénale internationale (CPI) étant une lueur d’espoir pour les victimes d’atrocités, il a exhorté les États à coopérer avec elle, y compris par l’exécution des mandats d’arrêt.  Nous savons, a-t-il poursuivi, que certains voient la Cour comme une menace à leur souveraineté mais nous n’en voyons pas la preuve, d’autant moins que ces États semblent oublier le principe de complémentarité et celui de la présomption d’innocence.  En conséquence, aucun individu ni aucun État ne devrait craindre la Cour qui est un organe de dernier recours.  Le représentant a aussi salué les initiatives progressistes de la Cour sur l’égalité des sexes, se réjouissant de la parité parfaite parmi les 18 juges dont sa compatriote, Mme Althea Alexis-Windsor.  Saluant aussi le Fonds au profit des victimes, il a conclu en indiquant que son pays s’est porté coauteur de la résolution sur le rapport de la CPI.

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a insisté sur l’importance du rôle de la Cour face aux crimes internationaux commis par la Russie dans le cadre de la guerre en Ukraine.  Il a estimé que ce contexte souligne le besoin d’une application universelle du Statut de Rome afin que la compétence de la CPI puisse s’étendre aux allégations de crimes internationaux commis « par toute personne en tout lieu ».  Il a donc exhorté les États ne l’ayant pas fait à adhérer au Statut de Rome.  Le représentant a aussi mis l’accent sur l’importance de la coopération entre la Cour et les États.  Il a, à ce titre, insisté sur la nécessité de garantir les financements nécessaires afin de permettre à la Cour de remplir ses fonctions.

M. CHANAKA WICKREMASINGHE (Royaume-Uni) s’est félicité du fait que la CPI ait été en mesure de s’acquitter de son mandat en dépit des défis posés par la pandémie.  Il a également salué le nombre « impressionnant » de victimes ayant participé à ses travaux durant la période à l’examen.  Il a insisté sur l’importance de la reddition de comptes et a appelé à renforcer la Cour afin qu’elle puisse servir au mieux la justice internationale.  Il a appuyé le souhait du Procureur d’établir des partenariats avec les autorités nationales sur la base du principe de complémentarité ainsi que la priorisation des cas renvoyés par le Conseil de sécurité, de même que son désir de renforcer les liens avec le Conseil de sécurité.

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a déclaré que la création du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie est un rappel de l’obligation du Conseil de sécurité d’agir pour assurer la reddition de comptes pour les crimes d’atrocité.  Il a appelé à s’abstenir d’utiliser le droit de veto dans les cas d’atrocités de masse, exhortant le Conseil à user de son droit de les renvoyer à la Cour pénale internationale (CPI), le cas échéant.  La demande de 43 États, dont la Croatie, que la CPI agisse sur les crimes qui sont commis en Ukraine, est une tentative claire de faire avancer la lutte contre l’impunité et d’empêcher que de tels crimes ne se reproduisent partout dans le monde, a-t-il ajouté.

Le représentant a jugé important pour la Cour de s’engager et de coopérer avec d’autres mécanismes internationaux d’établissement des faits liés à des allégations de violations des droits humains et du droit international humanitaire.  Il a également exhorté les États à assurer une pleine coopération avec la Cour.  Ne pas coopérer avec la Cour compromet l’administration efficace de la justice et l’ordre international fondé sur des règles, a prévenu le délégué qui a exhorté à ne pas remettre en question les principes fondamentaux du Statut de Rome.

M. CHOI TAEEUN (République de Corée) a souligné que l’architecture du système de justice internationale établie par le Statut de Rome partage les responsabilités entre la Cour et les États.  La coopération reste donc « un domaine d’importance vitale » pour l’efficacité judiciaire de la CPI, a-t-il estimé.  Il a également rappelé que le succès dans la lutte contre l’impunité repose sur l’universalité du Statut de Rome, notant le rôle joué par la République de Corée à cette fin.  Le représentant a salué les efforts des différents acteurs pour mettre en œuvre les recommandations du Groupe d’experts indépendants afin de surmonter les obstacles auxquelles la Cour est confrontée.  Il a, à ce titre, rappelé l’importance d’une représentation géographique équilibrée dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations.

M. GUSTAVO ADOLFO RAMÍREZ BACA (Costa Rica) a souligné l’importance du droit pénal international comme tout dernier recours lorsque l’ensemble du système punitif a déjà échoué à répondre aux crimes les plus graves.  Il s’est félicité de l’ouverture à la Cour pénale internationale (CPI) du premier procès sur renvoi du Conseil de sécurité, qui met en lumière la complémentarité entre les deux entités lorsque la Cour n’est pas directement compétente.  Selon le délégué, l’absence de dotation stable et prévisible et de ressources suffisantes met en danger le principal instrument pour la prévention et la suppression des atrocités.  Il a noté que les contributions volontaires sont complémentaires et ne remplacent pas les obligations des États parties.  La prochaine Assemblée des États parties fournira une nouvelle opportunité de développer l’architecture de collaboration avec la CPI et de promouvoir l’universalisation du statut de Rome, a-t-il estimé.  Il est nécessaire, a-t-il néanmoins conclu, de confronter les menaces et les attaques dirigées contre la société civile et les défenseurs des droits de l’homme qui coopèrent avec la CPI.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein)a estimé que la portée de la Cour est toujours limitée par l’absence de progrès dans l’universalité de son texte fondateur et l’impasse politique au Conseil de sécurité qui ne l’a plus saisie depuis plus d’une décennie, malgré la nécessité évidente et urgente de le faire.  Le représentant s’est réjoui que l’Assemblée générale ait fini par actualiser sa résolution sur la coopération entre les Nations Unies et la Cour.  Fruits d’une négociation dynamique et constructive, les changements convenus étaient attendus depuis longtemps.  Ces derniers mois, a poursuivi le représentant, ont mis en lumière la pertinence la plus immédiate du Statut de Rome qui contient une définition internationalement agréée du crime d’agression.  L’Assemblée générale a d’ailleurs déterminé que des actes d’agression ont été commis contre l’Ukraine, en violation de la Charte des Nations Unies, compte tenu de leur caractère, leur gravité et leur ampleur. 

Le représentant a donc regretté que la Cour ne puisse pas exercer sa compétence sur le cas de l’Ukraine, en raison de sa compétence limitée sur le crime d’agression.  Combler cette lacune sera la tâche des États parties qui vont se réunir dans un mois et en attendant, il faut garder à l’esprit que la Conseil de sécurité peut saisir la Cour d’un crime d’agression et que dans le cas d’une veto « prévisible », l’Assemblée générale peut jouer un rôle central un créant un tribunal spécial.  Il faut espérer, a dit le représentant, qu’à l’occasion du 25e anniversaire du Statut de Rome, l’année prochaine, les ratifications des Amendements de Kampala se multiplieront.  Défenseur de l’intégrité du Statut de Rome, le Liechtenstein, a-t-il souligné le représentant, réaffirme son attachement à ses deux principes clefs: le principe d’indépendance qui exige des États qu’ils défendent la Cour lorsqu’elle est attaquée, comme elle l’a été régulièrement par le passé, qu’ils protègent des représailles les organisations de la société civile qui coopèrent avec elle.  Le deuxième principe, a rappelé le représentant, c’est celui de la complémentarité.

Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a indiqué qu’en plus de sa contribution annuelle au budget de la Cour pénale internationale (CPI), la France a versé une contribution volontaire et mettra du personnel à disposition du bureau du Procureur pour l’aider à faire face à l’accroissement de ses activités.  Elle a invité les États à s’acquitter de leurs obligations à cet égard.  Elle a également insisté sur le caractère essentiel de la coopération, de l’assistance et de l’appui des États afin que la CPI puisse s’acquitter de sa mission, appelant, en particulier, à exécuter les mandats d’arrêt.  Elle a salué les recommandations des experts indépendants et réitéré son appui aux réformes qui contribuent à rendre plus efficace les travaux de la Cour et à renforcer sa crédibilité.  La représentante a, enfin, souligné l’importance du multilinguisme et de l’équilibre des traditions juridiques. 

M. DECLAN SMYTH (Irlande) a déclaré que la nécessité d’un système international de justice pénale a rarement été plus apparente.  Il s’est préoccupé des informations faisant état de menaces et d’actes d’intimidation dirigés contre certaines organisations de la société civile coopérant avec la Cour.  Il a pris note de l’augmentation récente du mandat de réparation du Fonds au profit des victimes, celui-ci supervisant désormais les programmes de réparation dans cinq cas.  Il a également fait savoir que l’Irlande, en étroite coopération avec le Gouvernement ougandais, a dirigé une mission de visite de 13 États et de l’Union européenne pour observer le travail du Fonds dans le nord de l’Ouganda, le mois dernier.

Poursuivant, le représentant a appelé les États parties et autres à fournir l’assistance nécessaire à la Cour pour procéder à l’arrestation et la remise des personnes faisant l’objet de mandats d’arrêt de la CPI.  Il a également appelé à doter la Cour de ressources suffisantes provenant du budget ordinaire pour lui permettre de faire face à sa charge de travail croissante.  Il a aussi fait part de son appui au processus d’examen visant à renforcer davantage le système de la CPI et du Statut de Rome.

M. ALAIN GERMEAUX (Luxembourg) a insisté sur le lien entre justice et paix qui apparaît de manière encore plus évidente à la lumière des développements survenus durant l’année en cours.  S’agissant de la situation en Ukraine, il a regretté que l’enquête de la CPI ne couvre pas le crime d’agression, pour lequel, a-t-il rappelé, le Conseil de sécurité a le pouvoir de saisir le Procureur de la Cour.  Si le Conseil n’est pas en mesure d’exercer ce pouvoir, il conviendra d’examiner d’autres options pour que cet acte d’agression contre un État souverain ne reste pas sans redevabilité des responsables.  Le représentant a fait observer que 14 mandats d’arrêt restent ouverts, dont six concernent des situations dont la Cour a été saisie par le Conseil de sécurité.  Il est essentiel, a-t-il martelé, que le Conseil assure un suivi effectif à cet égard. 

Il a plaidé pour l’universalité du Statut de Rome, des amendements de Kampala sur le crime d’agression et du récent amendement incluant le fait d’affamer délibérément des civils comme méthode de guerre parmi les crimes de guerre pour lesquels la Cour est compétente dans les conflits armés ne présentant pas un caractère international.  Après avoir insisté sur le caractère complémentaire de la Cour, le représentant s’est félicité des avancées faites sur les recommandations issues de l’examen par les experts indépendants.  Le mécanisme d’examen constitue un outil important pour renforcer encore les capacités de la Cour à rendre justice, a-t-il estimé, sans oublier de saluer l’action de la société civile qui a joué un rôle important dans l’établissement la Cour et qui continue de défendre son mandat impartial et indépendant. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est félicitée de ce que le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) ait ouvert de nouvelles enquêtes, y compris sur la situation en Ukraine.  Elle a salué la coopération de la Cour et de l’ONU sur diverses questions, en particulier l’aide opérationnelle offerte à la Cour par les entités des Nations Unies sur le terrain.  En tant que futur membre du Conseil de sécurité pour les deux prochaines années, Malte, a-t-elle dit, appelle au renforcement de la coopération entre la CPI et le Conseil.  La représentante s’est en effet désolée de ce que le Conseil n’ait saisi la Cour que de deux situations, à savoir le Darfour et la Libye.  Elle a par ailleurs souligné que les organisations de la société civile sont des partenaires essentiels dans les efforts conjoints en faveur de la justice.  Les activités qu’elles entreprennent pour faire connaître la Cour et promouvoir la ratification universelle du Statut de Rome sont louables, a-t-elle estimé.  Elle a enfin rappelé que les victimes sont et doivent rester au centre du cadre du Statut de Rome et elle s’est réjouie de ce que les réparations continuent de gagner en importance dans le travail de la Cour.

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a rappelé l’attachement de son pays à la Cour pénale internationale (CPI) et à l’exécution impartiale de son mandat.  Il a souligné la nécessité de respecter la diversité géographique au sein du personnel de la CPI et noté le développement des activités de la CPI malgré les contraintes découlant de la pandémie.  Il a en effet souligné les avancées notables sur le plan judiciaire, avec notamment l’ouverture de nouvelles enquêtes.  Le délégué a rappelé que le travail de la CPI se fait au nom des victimes, avant d’appuyer le Fonds au profit des victimes.  Il a indiqué que son pays brigue un siège de membre non-permanent au Conseil de sécurité pour la période 2024-2026 et insisté sur l’importance de la coopération entre ce dernier et la Cour.  En tant que membre, nous soutiendrons la lutte contre l’impunité et la promotion d’une culture d’établissement des responsabilités, a conclu le délégué.

M. MARTINSEN (Argentine) a estimé que la CPI est la garantie que personne n’est au-dessus de la loi, indépendamment de la position officielle ou du degré de pouvoir.  Compte tenu des pressions extérieures, il faut donner à la Cour tout le soutien nécessaire pour garantir son intégrité et son indépendance, a dit le représentant, qui a insisté sur l’universalité du Statut de Rome pour surmonter le sentiment de sélectivité dans la justice pénale internationale.  En tant que tribunal international, la CPI ne peut se maintenir sans la coopération active des multiples parties prenantes, en particulier les États parties au Statut de Rome.  De même, une plus grande coopération entre la Cour et le Conseil de sécurité est particulièrement impérative en cas de non-coopération des États dans les situations renvoyées par le Conseil.  Le représentant a rappelé que ce sont les États qui ont la responsabilité première d’enquêter et de poursuivre les auteurs des crimes internationaux les plus graves, conformément au principe de complémentarité qui est la colonne vertébrale du Statut de Rome.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a déclaré: « Vous avez entendu de douces paroles sur la CPI, maintenant vous allez entendre la vérité ».  Il a indiqué que la CPI poursuit sa « décadence » et qu’il ne reste rien des nobles idéaux de la justice qui ont présidé à la rédaction du Statut de Rome.  Il a accusé la Cour de s’être livrée à des « falsifications » dans le cadre du dossier libyen et de suivre une approche « sélective et politisée » pour les autres affaires.  Les pays occidentaux disent qu’il faut désormais coopérer avec la CPI pour punir la Russie, la CPI étant chargée de rendre des comptes politiques, a poursuivi le délégué.  Il a estimé que le coupable des enquêtes ouvertes par la CPI est connu d’avance, en fustigeant une parodie de justice.  Dénonçant la « rhétorique russophobe », le délégué a également fait part de son sentiment de déjà vu puisque les allégations de distribution de viagra à des soldats russes pour perpétrer des actes de violence sexuelle avaient déjà été entendues, en 2011, à propos du dossier libyen.  Il a rappelé que le colonel Kadhafi avait été accusé d’avoir fait appel à des « mercenaires à la peau noire » pour violer des centaines de femmes lors de la répression, en 2011.  Rien de tout cela n’a été confirmé et personne n’a été accusé de falsification de preuves, a tonné le délégué.  Il a ensuite déploré que les violations commises par des soldats britanniques, en Iraq, et par des soldats américains, en Afghanistan, n’aient pas fait d’objet d’enquêtes approfondies, attestant du caractère sélectif de la justice rendue par la CPI.  Enfin, il s’est dit opposé à un examen régulier des activités de la Cour à l’ONU.  « Nous ne voulons rien avoir à faire avec cette institution », a conclu le délégué.

M. PHILIP OCHEN ANDREW ODIDA (Ouganda) a salué le travail mené par le Fonds au profit des victimes.  Il a rappelé que les victimes sont au cœur du Statut de Rome.  Il a évoqué le rôle du Greffier de la Cour dont l’élection approche, insistant sur l’importance de cette fonction pour le bon fonctionnement de la CPI.  Le délégué a assuré que son pays et d’autres États parties sont engagés dans le processus d’examen du fonctionnement de la CPI.

M. ANDRIS STASTOLI (Albanie)a regretté que la Cour pénale internationale (CPI) continue de ne pas opérer convenablement en raison de contraintes structurelles et politiques, notamment une compétence limitée, des ressources insuffisantes et un manque de coopération étatique.  Pourtant, a-t-il ajouté, la CPI constitue, pour les populations vulnérables, « la seule option réaliste pour la reddition de compte et la justice », en particulier quand il s’agit de violences sexuelles et sexistes.  Il s’est félicité du travail du Bureau du Procureur et de l’extension des opérations de la CPI, qui constituent « la réponse la plus claire aux accusations de sélectivité et de deux poids, deux mesures ».  Le représentant a appelé les États à soutenir l’universalité de la Cour en ratifiant le Statut de Rome et en le mettant en œuvre à l’échelle nationale.  Il a également souligné le « rôle précieux » joué par la société civile.  Le représentant a salué l’intensification de la coopération entre la CPI et l’ONU, tout en notant le potentiel pour une plus grande coopération, notamment par le renvoi d’affaires devant la Cour par le Conseil de sécurité.

Mme ALESSANDRA FALCONI (Pérou) a pris note des activités de la Cour en dépit des obstacles liés à la pandémie de COVID-19.  Elle a insisté sur l’importance des réparations, soulignant à ce titre le rôle du Fonds au profit des victimes.  Elle s’est ensuite inquiétée du manque de ressources et invité les États Membres à verser des contributions volontaires au Fonds.  La représentante s’est félicitée du premier procès sur une affaire renvoyée par le Conseil de sécurité, rappelant l’importance de la coopération entre ledit Conseil et la Cour.  Insistant sur le principe de complémentarité, elle a rappelé les autorités nationales à leur responsabilité première d’enquêter et de traduire en justice les auteurs des crimes identifiés dans le Statut de Rome.  Il est indispensable que les États améliorent leurs mécanismes de coopération avec la Cour, a-t-elle ajouté, avant d’indiquer que son pays vient de ratifier l’amendement relatif au crime d’agression et de prendre note des recommandations du rapport du groupe d’experts indépendants.  Nous nous engageons à n’épargner aucun effort pour les mettre en œuvre, a-t-elle promis.

M. GVARAM KHANDAMISHVILI (Géorgie) a indiqué que l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie montre une nouvelle fois la nécessité absolue d’établir les responsabilités pour les violations du droit international.  Il a déclaré que la coopération de son pays avec la Cour pénale internationale (CPI) a abouti à des résultats tangibles.  Le 30 juin 2022, la CPI a délivré des mandats d’arrêt à l’encontre de trois individus pour crimes de guerre commis pendant l’agression militaire de la Fédération de Russie contre la Géorgie en 2008, a précisé le délégué.  La Cour a ainsi confirmé la responsabilité russe pour des violations flagrantes du droit international contre des Géorgiens, telles que les actes de torture, les traitements inhumains, les prises d’otage ou encore les déplacements forcés.  Nous espérons que le jugement que la Cour européenne des droits de l’homme a rendu en 2021 et par lequel elle a reconnu la responsabilité de la Fédération de Russie pour les crimes commis en août 2008 en Géorgie, aura un impact significatif sur l’enquête de la CPI, a conclu le délégué.

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a réaffirmé le soutien indéfectible de son pays à une Cour pénale internationale (CPI) chargée d’établir les responsabilités pour les crimes internationaux les plus graves.  En conséquence, la Nouvelle-Zélande, a-t-elle rappelé, fait partie du groupe de pays qui ont officiellement saisi la Cour de la situation en Ukraine.  Compte tenu des quatre nouvelles enquêtes, notre souci, a-t-elle dit, est de veiller à ce que la Cour ait les ressources qu’il lui faut pour travailler de manière indépendante et impartiale.  La Nouvelle-Zélande est donc heureuse d’avoir pu cette année verser des fonds additionnels au Bureau du Procureur et au Fonds au profit des victimes, et prêter un expert à la Cour.  La représentante a aussi salué l’aide précieuse de la société civile et souligné la nécessité de protéger tous ceux qui coopèrent avec la CPI.  Insistant sur le principe de complémentarité, elle a encouragé les États parties à incorporer les crimes et les principes énumérés dans le Statut de Rome dans leur législation nationale.  Elle a conclu en militant pour l’universalisation dudit Statut.

M. KARL LAGATIE (Belgique) a souligné que pour pouvoir mener à bien le combat contre l’impunité, les États doivent juger eux-mêmes les crimes, la Cour n’intervenant que de façon complémentaire aux juridictions nationales.  Il les a également appelé à coopérer avec la Cour à tous les stades de la procédure lorsque c’est la Cour qui poursuit et juge; respecter et veiller au respect des principes fondamentaux d’impartialité et d’indépendance de la Cour; et, enfin, payer à temps leur contribution obligatoire au budget annuel de la Cour afin qu’elle puisse remplir correctement sa mission.  Le représentant a également indiqué que le soutien apporté à la Cour ne peut pas être sélectif.  Les victimes de toutes les situations relevant de la compétence de la Cour ont toutes les mêmes droits à être reconnues en tant que telles et à accéder à la justice, a-t-il appuyé.

M. DIAKITE (Sénégal) a souligné que la Cour ne peut exercer sa mission sans une coopération renforcée des États parties.  À ce propos, il a indiqué que la coopération entre la Cour et les États a été au cœur des questions évoquées lors de la Conférence régionale de Dakar, tenue du 23 au 25 mai 2022, et qui a été l’occasion pour les participants de discuter du renforcement du système de justice pénale internationale et de la lutte contre l’impunité.  Il a appelé à préserver l’indépendance et l’intégrité de la Cour et a souligné que la ratification universelle du Statut de Rome et l’intégration de ses normes dans le droit interne des États sont des conditions essentielles pour permettre aux victimes des crimes internationaux d’obtenir la justice. 

M. MYKOLA PRYTULA (Ukraine) s’est félicité de la décision du Procureur de la CPI d’ouvrir une enquête sur les crimes commis en Ukraine, à la demande des États parties.  La CPI peut créer le « précédent historique d’une réponse face aux crimes haineux perpétrés par les occupants russes », a-t-il estimé, disant « croire en cette cour de dernier recours ».  Il a rappelé que l’Ukraine a reconnu la compétence de la CPI pour les crimes commis sur son territoire par le biais de plusieurs déclarations dont il a réaffirmé qu’elles ont été faites pour une durée indéfinie.  L’enquête ouverte comprend toutes les allégations de crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide, commis en Ukraine à partir de novembre 2013, a précisé le représentant.  Pour le crime d’agression, il convient de compléter les activités de la CPI par le biais d’un tribunal spécial pour punir ceux qui ne peuvent pas être atteints par la CPI.  À ce titre, le représentant a invité les États à œuvrer pour établir un tel tribunal.

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a tenu à se dissocier du projet de résolution sur le rapport de la CPI auquel il a reproché de se référer aux activités de la Cour concernant des allégations de crimes aux Philippines.  « Nous trouvons très regrettables les actions du Procureur, ainsi que son zèle s’agissant de l’enquête sur la situation dans mon pays », a tranché le délégué.  Il a rappelé qu’une mission a été établie par les autorités de son pays pour enquêter sur les cas de décès liés à la campagne contre les stupéfiants, en ajoutant que cette mission poursuit son travail.  Nous avons demandé au Procureur de s’effacer devant cette enquête nationale, a-t-il rappelé.  Il a ainsi estimé que la décision du Procureur est contraire au principe de complémentarité entériné par le Statut de Rome.  Nonobstant notre retrait du Statut de Rome, qui s’explique par notre position de principe contre tous ceux qui « politisent les droits humains », les Philippines affirment leur engagement en faveur de la lutte contre l’impunité, a conclu le délégué.

M. SHUNSUKE NAGANO (Japon) a indiqué que son pays est déterminé à promouvoir l’état de droit dans le monde entier, ajoutant que le Japon est le plus grand contributeur au budget de la Cour pénale internationale (CPI).  Le délégué a encouragé la Cour à promouvoir l’universalité du Statut de Rome.  Il a salué les activités de vulgarisation que mènent le Président et le Procureur de la Cour et a promis que le Japon poursuivra sa collaboration avec tous les acteurs engagés dans la promotion de l’état de droit. 

M. ANDREW WEINSTEIN (États-Unis), notant le niveau sans précédent d’activité judiciaire de la Cour pénale internationale (CPI), a estimé que la Cour avait fait progresser de manière significative la justice pour les victimes du monde entier.  Il s’est félicité de l’ouverture du procès de l’ancien commandant Janjaouid, connu sous le nom d’Ali Kosheib, rappelant qu’il s’agissait du premier procès contre un haut dirigeant pour des crimes commis par le régime d’Omar el-Béchir à la suite du génocide au Darfour.  Il a également salué la CPI pour ses progrès significatifs concernant les atrocités commises en République centrafricaine (RCA).  Qualifiant la CPI de « pièce maîtresse de l’architecture mondiale de la reddition de comptes », il a rappelé que les États-Unis soutenaient une série d’enquêtes internationales sur les atrocités commises en Ukraine, notamment celles menées par la CPI, l’ONU et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Le délégué s’est dit préoccupé par le grand nombre de mandats d’arrêt non exécutés et a encouragé les autorités soudanaises à transférer les suspects à la Cour.  Il a rappelé que son pays offrait toujours une récompense financière pour toute information menant à l’arrestation du chef de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), Joseph Kony.  Il a également appelé tous les États à coopérer pour que Mahamat Nouradine Adam, accusé de crimes contre l’humanité en RCA, soit traduit en justice.  M. Weinstein a annoncé que les États-Unis avaient l’intention de participer à la prochaine assemblée des États parties au Statut de Rome, en tant qu’observateurs.  Bien que les États-Unis maintiennent leurs préoccupations concernant la CPI « dans certains domaines bien connus », ils estiment que la meilleure façon d’y répondre est de dialoguer avec toutes les parties prenantes.  Enfin le délégué a salué les efforts en vue d’une révision générale de la CPI sur la base des travaux des experts indépendants. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a constaté que la charge de travail de la Cour pénale international (CPI) s’est considérablement alourdie, citant notamment la crise en Ukraine.  Il a appelé à prévoir un budget durable à long terme pour faire face à une charge de travail toujours croissante et traiter d’urgence la question des arriérés afin de trouver une solution efficace concernant le recouvrement des contributions financières impayées des États parties.  Il a insisté sur l’importance de la coopération entre les États parties, la Cour et toutes les autres parties prenantes.  À ce sujet, il a estimé que le renvoi par le Conseil de sécurité de situations, qui ne relèveraient pas autrement de la compétence de la CPI, contribuerait de manière significative à la prévention des atrocités criminelles, ainsi qu’à l’amélioration de l’efficacité et de la crédibilité de la Cour.  Le représentant a également engagé les États parties à prendre des mesures concrètes pour assurer l’exécution des mandats en suspens et mettre en œuvre le principe de complémentarité.

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) s’est félicitée de décision du procureur de fermer l’examen préliminaire engagé pour régler la situation en Colombie, estimant que cette décision permet d’appuyer les institutions chargées de rendre la justice dans son pays.  Elle a informé les États Membres qu’une équipe du Bureau du procureur s’est rendue à Bogota et y a rencontré une série d’acteurs dans le cadre de l’accord de coopération.  La représentante a ensuite insisté sur les progrès réalisés par les institutions colombiennes dans la recherche de la justice.  L’accord de coopération entre la Colombie et la Cour pénale internationale (CPI) marque un moment nouveau et reflète une « association novatrice » qui constitue un exemple de complémentarité positive, a affirmé la déléguée.  En effet, a-t-elle ajouté, l’action de la CPI a contribué au système de justice et de transition et représente une voie à suivre pour d’autres pays.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’OACI et des États Membres condamnent le déroutement du vol Ryanair FR 4978 en mai 2021, en désignant le Bélarus comme responsable

9175e séance - matin
CS/15088

Conseil de sécurité: l’OACI et des États Membres condamnent le déroutement du vol Ryanair FR 4978 en mai 2021, en désignant le Bélarus comme responsable

Le Conseil de sécurité s’est réuni, ce matin, à l’initiative de l’Albanie, des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni, pour examiner le rapport de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits sur le déroutement du vol Ryanair FR 4978 du 23 mai 2021, dont les conclusions ont été présentées par le Président de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).  M. Salvatore Sciacchitano a ainsi déclaré que le déroutement sur Minsk de ce vol avait été « orchestré par des hauts responsables du Bélarus ».  Si plusieurs membres du Conseil se sont élevés contre cet acte qui a mis en danger la vie de 122 passagers et membres de l’équipage, en violation du droit international, le Bélarus a déclaré ne pas accepter un rapport « infondé et dépourvu d’informations clefs de plusieurs parties impliquées ».

L’atterrissage forcé de l’appareil, qui reliait Athènes à Vilnius, a été décidé sur la base d’informations fournies par le contrôleur aérien bélarussien sur une alerte à la bombe à bord de l’appareil, a expliqué M. Sciacchitano.  Cet événement a immédiatement soulevé des doutes et des inquiétudes chez plusieurs États membres de l’OACI qui ont appelé cette organisation à l’action.  Après l’atterrissage, deux passagers ont été arrêtés à Minsk, a-t-il rappelé, avant de présenter l’Équipe d’enquête qui a été créée le 27 mai 2021 en vertu de la Convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale.

Dans cette enquête, l’Équipe a appris que les pilotes de l’appareil, en dépit de leur demande d’être mis en contact avec le centre d’opération de l’OACI, n’ont pas obtenu satisfaction auprès du centre régional de contrôle de Minsk.  Elle a aussi découvert, après recoupement, que sur les deux messages d’alerte à la bombe envoyés par le Bélarus à l’équipage, un seul a été envoyé du centre de contrôle régional de Minsk.  De plus, aucun enregistrement de téléphone portable du personnel impliqué, enregistrant l’heure et la durée des appels et la personne ou l’entité contactée, n’a été mis à disposition par le Bélarus pour étayer la séquence d’événements liés à la transmission d’informations sur l’alerte à la bombe.

M. Sciacchitano a ajouté qu’avant la publication du rapport, en janvier 2022, l’Équipe d’enquête n’a pas été en mesure de rencontrer ni de s’entretenir avec le contrôleur aérien de Minsk affecté au vol Ryanair, mais que celui-ci a pu finalement être interviewé avec l’aide des États-Unis.  Son témoignage reflète l’implication d’un individu non identifié qui avait eu accès au centre de contrôle de Minsk.  Les informations supplémentaires recueillies ont conduit à la conclusion que de hauts responsables bélarussiens avaient orchestré le déroutement délibéré du vol sous le prétexte fallacieux d’une alerte à la bombe, a déclaré le Président de l’OACI.  Il a dénoncé les interventions du Bélarus qui ne sont autres que l’utilisation de l’aviation civile à des fins incompatibles avec les objectifs de la Convention de Chicago, et qui constituent donc une violation de la Convention.

Le rapport de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits de l’OACI n’a pas été accepté par la délégation du Bélarus qui a avancé les raisons suivantes: il a été rédigé à la hâte, sous pression de certains occidentaux; il n’est ni consensuel ni objectif; il est même particulièrement partial; et il est dépourvu d’informations clefs de plusieurs parties impliquées et donc infondé.  Aucune information complémentaire n’a été sollicitée du Bélarus, a aussi relevé la délégation, qui a jugé inadmissibles les informations fournies d’une source non fiable en référence à un soi-disant enregistrement audio fourni par les États-Unis.  Selon le représentant bélarussien, le commandant du vol a décidé de son propre chef d’essayer d’atterrir à Minsk, ce qui élimine l’implication de Bélarus.

La décision d’atterrir à Minsk a été prise par l’équipage de l’avion de manière indépendante, a lui aussi affirmé le représentant de la Fédération de Russie, pour qui le processus de soi-disant « établissement des faits » n’était rien de plus qu’un règlement de comptes des États occidentaux contre les pays qu’ils n’aiment pas.  Il a développé les mêmes arguments que le Bélarus -ce rapport n’inspire aucune confiance quant à son objectivité, car il utilise une source anonyme présentée comme étant un contrôleur aérien et des enregistrements audios non vérifiés-, regrettant le blocage par les pays occidentaux d’informations transmises par le Bélarus à l’Équipe d’enquête.  Pour la Norvège cependant, les informations manquantes dans l’enquête, soulignées par le Bélarus, sont dues au fait que les autorités bélarussiennes, elles-mêmes, n’ont pas pleinement coopéré de bonne foi.

La compagnie Ryanair étant enregistrée en Irlande, la représentante de ce pays a condamné l’intervention illicite commise par le Bélarus en forçant l’atterrissage du vol Ryanair FR 4978, qui a mis en danger la vie des passagers et de l’équipage, en violation du droit de l’aviation civile internationale.  La France n’a pas hésité à parler d’« un acte de piraterie aérienne » en le dénonçant.

L’alerte à la bombe transmise par le Bélarus était délibérément mensongère, a accusé la Lituanie, pays de destination finale du vol.  À l’instar du Brésil, la Lituanie a suggéré que les violations des droits internationaux par les hauts responsables du Bélarus soient examinées par le Conseil des droits de l’homme.  La Grèce, pays de départ du vol, a mis en garde le Bélarus que son comportement ne saurait être toléré ni être sans conséquences.  Elle a salué la condamnation prononcée par le Conseil de l’OACI de cet acte.  Les États-Unis ont appelé le Conseil de sécurité à faire de même.  Le Royaume-Uni a exhorté le Bélarus à exiger des auteurs de cet incident qu’ils rendent des comptes.

La France a salué la décision du 18 juillet 2022 du Conseil de l’OACI, ainsi que la résolution adoptée par son Assemblée qui reconnaissent la responsabilité́ des autorités bélarussiennes dans le déroutement vers Minsk du vol Ryanair FR 4978.  « Les faits sont graves », a tranché le représentant en accusant le « régime bélarussien » d’avoir orchestré ce déroutement dans le seul but d’arrêter un journaliste d’opposition, Roman Protassevitch, et sa compagne Sofia Sapega.  La Lituanie a souhaité que le Conseil de sécurité reste saisi de la situation. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. SALVATORE SCIACCHITANO, Président de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), après avoir rappelé le travail de son organisation, a passé en revue l’atterrissage forcé du vol Ryanair FR 4978 demandé par le Bélarus, le 23 mai 2021, vol en provenance d’Athènes et à destination de Vilnius (Lituanie).  L’avion, qui a été dérouté au-dessus de l’espace aérien bélarussien, a atterri à l’aéroport de Minsk, à la suite des informations fournies par le contrôleur aérien sur une alerte à la bombe à bord de l’appareil.  Cet événement a immédiatement soulevé des doutes et des inquiétudes chez plusieurs États membres de l’OACI, qui ont appelé à l’action de cette Organisation, d’autant plus que deux passagers ont été arrêtés après avoir atterri à Minsk.  Le 27 mai 2021, le Conseil de l’OACI a décidé d’entreprendre une enquête sur l’événement en application de la Convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale.

Poursuivant son récit, M. Sciacchitano a indiqué que, le 3 juin 2021, une équipe d’enquête d’établissement des faits a été instituée.  Avec le soutien et la coopération de nombreux États liés à l’événement, l’OACI a rassemblé une quantité considérable d’informations et de matières, et a eu l’occasion de se rendre dans divers États pour mener des entretiens avec des acteurs et des témoins, malgré les difficultés liées à la COVID-19.  Elle a établi qu’après l’entrée de l’appareil dans l’espace aérien du Bélarus, les pilotes ont été informés par le contrôleur du centre de contrôle régional de Minsk d’une alerte à la bombe à bord et du fait que cette bombe pourrait exploser au-dessus de Vilnius.  Les pilotes ont été invités à atterrir à Minsk, sans leur laisser d’autre option.  Toutefois, ils ont demandé à être mis en contact avec leur centre d’opérations afin de coordonner la prise de décisions.  Or, a révélé le Président de l’OACI, aucune approche n’a été faite par le centre de contrôle régional de Minsk.

Selon les autorités du Bélarus, a-t-il informé, un premier courriel a été reçu à 09 h 25 en temps universel suivi d’un deuxième courriel à 09 h 56 en temps universel.  Les deux courriels contenaient des informations identiques sur l’alerte à la bombe.  En revanche, les informations obtenues auprès du prestataire de services de messagerie montrent que seul le deuxième e-mail a été envoyé à l’aéroport de Minsk à 09 h 56, soit 26 minutes après que l’information a été communiquée par le contrôleur aux pilotes, a poursuivi le Président.  L’Équipe d’enquête n’a pas été en mesure de vérifier que le Bélarus a reçu l’e-mail d’alerte à 09 h 25, e-mail qui aurait déclenché les actions de ses autorités, car ni les journaux du serveur de messagerie ni les fichiers d’e-mails dans leur format d’origine, y compris leurs métadonnées, citant leur effacement, n’ont été fournis conformément à la politique de conservation des données du Bélarus.

En outre, aucun enregistrement de téléphone portable du personnel impliqué, enregistrant l’heure et la durée des appels et la personne ou l’entité contactée n’a été mis à disposition par le Bélarus pour étayer la séquence d’événements liés à la transmission d’informations sur l’alerte à la bombe du personnel de l’aéroport de Minsk au centre de contrôle régional de Minsk.  Ces déclarations ne pouvaient être étayées par des preuves, a constaté le Président de l’OACI.

Le rapport de l’Équipe d’enquête, qui a été présenté pour la première fois au Conseil de l’OACI, en janvier 2022, n’a pas identifié les responsabilités à ce stade.  Compte tenu des nouveaux développements rendus publics par deux États vers la même période, le Conseil a décidé que l’enquête devait se poursuivre.  Avant la publication du rapport, en janvier 2022, l’Équipe d’enquête n’a pas été en mesure de rencontrer ni de s’entretenir avec le contrôleur aérien de Minsk affecté au vol Ryanair.  Les autorités du Bélarus ont informé l’Équipe d’enquête que cet individu ne s’était pas présenté à son travail après son congé d’été et qu’elles n’avaient aucune information sur son sort et aucun moyen de le contacter.  Mais avec l’aide des autorités des États-Unis, l’Équipe d’enquête a pu interroger le contrôleur dont le témoignage contredit les informations et les documents fournis par les autorités du Bélarus sur les événements du 23 mai 2021, notamment l’origine de l’information sur l’alerte à la bombe.  Son témoignage reflète l’implication d’un individu non identifié qui avait eu accès au centre de contrôle de Minsk.

L’Équipe d’enquête a eu accès aux enregistrements audio réalisés par le contrôleur aérien lors de l’événement et à leurs retranscriptions.  Ces supports confirment les déclarations par des preuves matérielles et ont été comparés à ceux déjà en possession de l’Équipe d’enquête.  Les informations supplémentaires recueillies ont permis de combler certaines des lacunes restantes et ont conduit à la conclusion que de hauts responsables bélarussiens avaient orchestré le déroutement délibéré du vol sous le prétexte fallacieux d’une alerte à la bombe.  Les actions du Bélarus ne sont autres que l’utilisation de l’aviation civile à des fins incompatibles avec les objectifs de la Convention de Chicago, en particulier son article 4.

En conséquence, le Conseil de l’OACI a conclu que les mesures prises par le Gouvernement du Bélarus constituent une infraction à la Convention de Chicago et décidé d’en informer son Assemblée.  Le rapport final devait être transmis au Secrétaire général de l’ONU pour son information et toute autre mesure qu’il juge appropriée, ce qui a été fait le 12 août 2022, a indiqué le Président de l’OACI.  Il a fait savoir que lors de sa quarante et unième session, tenue du 27 septembre au 7 octobre, l’Assemblée de l’OACI a reconnu qu’il y avait eu une infraction à la Convention de Chicago relative à l’aviation civile par le Bélarus.  Elle a adopté une résolution qui condamne les agissements du Bélarus pour être intervenu de façon à commettre un acte d’intervention illicite mettant délibérément en danger la sûreté et la sécurité du vol Ryanair FR 4978 et la vie des personnes à son bord.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a indiqué que le Conseil avait débattu, le 26 mai 2021, du déroutement du vol, faisant remarquer que cet incident avait eu lieu dans le seul objectif d’arrêter un dissident russe, et avait prié l’OACI d’enquêter.  Il a remercié tous les États ayant participé à l’enquête et fourni des informations dans ce contexte.  Il a relevé que le rapport confirme le rôle actif et l’implication du Bélarus dans le déroutement du vol dans le but unique d’arrêter un journaliste russe dissident et sa compagne, sous prétexte d’une alerte à la bombe à bord.  Cette menace à la bombe a été fabriquée de toutes pièces et Minsk n’était pas l’aéroport le plus proche, a relevé le délégué albanais, précisant qu’un aéroport polonais aurait été plus indiqué dans ces circonstances.  La menace à la bombe était inexistante, a-t-il insisté, ajoutant qu’il s’agit d’un déroutement dicté et mené par l’État bélarussien, ce qui est une violation flagrante de plusieurs conventions internationales, notamment la Convention de Montréal (Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, de 1971), laquelle est on ne peut plus claire sur ce type d’agissement.  « Le Bélarus a commis un acte violant le droit international. »

Le représentant albanais a ensuite renvoyé le débat à la question de la répression des manifestations pacifiques et de la liberté d’expression, ainsi qu’à l’érosion des droits humains au Bélarus.  Le représentant a aussi rappelé que l’Albanie a condamné l’implication du Bélarus dans la guerre en Ukraine, en particulier l’invasion de chars bélarussiens sur le territoire de ce pays, ce qui est caractéristiquement une agression, qui de plus va à l’encontre de l’opinion générale de la population bélarussienne.  Il a réitéré une mise en garde après la création par la Russie d’une force conjointe avec le Bélarus, « ce qui représente une grande menace ».

Notant les résultats de l’enquête, Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a souligné que les mesures prises par l’État du Bélarus ont menacé la sécurité d’un vol passager et la vie de toutes les personnes à bord, en violation flagrante des Conventions de Chicago et de Montréal.  Le recours à une menace terroriste supposée afin de détourner un aéronef a également sapé les mesures prises par la communauté internationale afin de contrer de véritables menaces qui pèsent sur l’aviation civile.  Par conséquent, a poursuivi Mme Woodward, le régime de Loukachenko a enfreint le droit international, créé un grave risque pour la vie de passagers innocents et a fragilisé la sécurité de l’aviation civile, montrant que ce pays est irresponsable sur la question de la paix et de la sécurité internationales, tout ça pour bâillonner un journaliste d’opposition et entraver ce qui restait de la liberté d’expression au Bélarus.  Tout cela a été aggravé par son rôle de facilitateur de l’invasion de la Russie en Ukraine.  Mme Woodward a exhorté le Bélarus à exiger des auteurs de cet incident qu’ils rendent des comptes, à renoncer à tout autre acte illicite et à mettre un terme à l’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a invité toutes les personnes encore sceptiques à consulter les conclusions de l’enquête de l’OACI, après que certaines délégations avaient exprimé le souhait de ne pas tirer de conclusions hâtives avant qu’elles soient menées à leur terme.  Or, le rapport de l’OACI démontre clairement que les autorités du Bélarus ont sciemment fabriqué une alerte à la bombe dans le seul but d’arrêter un journaliste d’opposition, violant ainsi la Convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale, mettant en danger la sécurité des passagers et minant aussi la confiance entre pilotes et contrôleurs aériens.  Dans ce contexte, le délégué s’est félicité de la condamnation par l’Assemblée générale de l’OACI de cet acte, appelant ensuite le Conseil de sécurité à faire de même, car, a-t-il dit, les responsabilités doivent être établies.  Le Conseil de sécurité a également le devoir de dénoncer les acteurs étatiques qui violent de manière flagrante leurs obligations et menacent la paix et la sécurité internationales, a-t-il ajouté en conclusion.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a salué la décision du 18 juillet 2022 du conseil de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), ainsi que la résolution adoptée par son Assemblée lors de sa quarante et unième session, qui reconnaissent la responsabilité des autorités bélarussiennes dans le déroutement vers Minsk du vol Ryanair FR 4978, le 23 mai 2021.  « Les faits sont graves », a tranché la France.  L’enquête conduite par l’OACI a démontré que le Bélarus a organisé une fausse alerte à la bombe et la conclusion de cette affaire est extrêmement préoccupante: le « régime bélarussien » a orchestré ce déroutement dans le seul but d’arrêter un journaliste d’opposition, Roman Protassevitch, et sa compagne Sofia Sapega.  Ce faisant, il n’a pas hésité à mettre en danger la sécurité des passagers et du personnel de bord.  Le représentant a condamné cette violation flagrante du droit aérien international et cette menace à la sécurité et la sûreté de l’aviation civile internationale.  Il ne s’agit rien de moins que d’un acte de piraterie aérienne, a insisté M. de Rivière.

Selon le représentant, cet acte irresponsable est une des nombreuses déclinaisons de la répression brutale que conduit le « régime bélarussien » à l’encontre de toute voix jugée dissidente depuis l’élection truquée d’août 2020 dénonçant l’instrumentalisation par les autorités de Bélarus des migrants aux frontières européennes.  Le Bélarus n’avait pas hésité à mettre en danger la vie d’individus vulnérables à des fins politiques.  Il a condamné la complicité de ce pays dont le territoire continue d’être utilisé pour des frappes de missiles ou de drones visant les infrastructures civiles d’Ukraine.  Falsification du scrutin d’août 2020, répression et étouffement de la société civile, détournement du vol Ryanair FR 4978, instrumentalisation des migrants, participation à la guerre contre l’Ukraine: le Bélarus multiplie les violations du droit international, a établi le représentant, en saluant le courage des citoyens bélarussiens qui se sont exprimés contre le régime de M. Loukachenko.  Il a appelé les autorités de Bélarus à abandonner toutes les poursuites judiciaires engagées à l’encontre de Roman Protassevitch et de Sofia Sapega, ainsi que des autres prisonniers politiques actuellement en détention.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a toujours dit que ces incidents doivent faire l’objet d’enquêtes indépendantes menées par l’OACI sur la base des faits et sans ingérence politique.  Les mesures menant à l’exclusion provoqueront des retards de nature à mettre en danger la sûreté des passagers, a mis en garde le représentant.

M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) a condamné l’acte d’ingérence illégal commis par le Bélarus en contraignant à l’atterrissage le vol Ryanair FR 4978, qui a mis en danger la vie des passagers et de l’équipage, en violation du droit de l’aviation civile internationale.  Il a condamné la détention du journaliste et de sa compagne et les mesures scandaleuses prises par le régime pour faire taire une presse libre et indépendante.  Sans aucune légitimité démocratique, le régime de Loukachenko s’appuie sur la répression et les menaces pour se maintenir au pouvoir au détriment de la prospérité de son pays et des droits humains de son peuple, a lancé le représentant.  L’Irlande a condamné la violence d’État contre des manifestants pacifiques, les détentions arbitraires et les restrictions à la liberté de réunion et des médias au Bélarus, exigeant qu’il y soit mis fin immédiatement.  Avec la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, a poursuivi M. Mythen, il est clair que les actions de Loukachenko ne se limitent pas aux frontières du Bélarus.  L’Irlande condamne l’implication du Bélarus dans cette guerre illégale et injustifiée.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a commencé par regretter la décision du Président du Conseil de sécurité d’inviter plusieurs délégations de pays de l’Union européenne, alors que la réunion de ce matin ne les concernent pas, selon lui.  « Faisant ainsi, vous faîtes le jeu politique des pays occidentaux et violez les règles de procédure du Conseil de sécurité. »  Il a dit attribuer cette décision au manque d’expérience du Président du Conseil et à la lassitude de son excellente présidence par ailleurs, qui s’achève aujourd’hui, a-t-il rappelé.

Revenant au fond du sujet, il a déclaré que le tableau qui est présenté dans l’enquête prétendument objective de l’OACI est très éloigné de la réalité: nous avons toutes les raisons de croire que le processus de soi-disant « établissement des faits » n’était rien de plus qu’un règlement de comptes largement pratiqué par les États occidentaux contre les pays qu’ils n’aiment pas.  Le document comporte de nombreuses questions que certains États préfèrent étouffer, a dit le délégué.

Souhaitant évoquer les faits, il a relaté que, le 31 janvier, le Conseil de l’OACI a tenu une discussion sur le rapport « final », comme on disait alors, sur l’incident avec l’avion de Ryanair.  Le groupe est alors arrivé à la conclusion qu’il n’y avait pas eu d’escorte ni d’interception du vol Ryanair par un MIG-29 bélarussien.  La décision d’atterrir à Minsk a été prise par l’équipage de l’avion de manière indépendante, a affirmé le délégué.  Selon lui, les pays occidentaux ont utilisé leur majorité au Conseil de l’OACI pour forcer le groupe à poursuivre l’enquête.  Le rapport, qui aurait être final, ne l’était plus et a, après un changement radical, condamné les actions du Bélarus et répété les déclarations des pays occidentaux, a décrit le représentant.

Ce rapport, qui contredit totalement l’original, n’inspire par ailleurs aucune confiance quant à son objectivité, a-t-il poursuivi, arguant qu’il utilise désormais, outre une source anonyme présentée comme étant un contrôleur aérien, des enregistrements audios non vérifiés, alors que les informations transmises par les autorités bélarussiennes sont tout simplement ignorées.  Il y a maintenant de gros doutes sur l’impartialité de l’OACI, a dit l’orateur, regrettant que, contrairement à la réputation de longue date de cette Organisation en tant qu’organe technique, son Assemblée ait été utilisée comme plateforme pour faire avancer les intérêts politiques de chaque pays.

Pour Mme MONA JUUL (Norvège), le rapport de l’OACI indique clairement que le régime bélarussien a forcé l’atterrissage du vol Ryanair prétextant de faux problèmes de sécurité.  Le régime porte la responsabilité de mettre inutilement en danger la sécurité des passagers et de l’équipage, a conclu la représentante.  Les informations manquantes dans l’enquête, soulignées par le Bélarus, sont dues au fait que les autorités bélarussiennes, elles-mêmes, n’ont pas pleinement coopéré de bonne foi, a-t-elle argumenté.  Ce sont, selon elle, des actes qui constituent une menace pour la sécurité européenne et qui sapent le droit international et la sécurité collective.  Elle a rappelé que cet acte a eu lieu en conjonction avec la facilitation active par les autorités de Bélarus des flux migratoires à travers ses frontières avec la Pologne, la Lituanie et la Lettonie pour, selon elle, déstabiliser et mettre la vie des gens en danger.

L’atterrissage forcé du vol Ryanair a constitué une menace, a-t-elle estimé, en ajoutant que c’était aussi un signe clair du mépris total du Bélarus pour la paix et la sécurité mondiales et les normes internationales.  Depuis cet incident, le régime de Loukachenko a contribué à faciliter l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, a ajouté la représentante.  Elle a dit être préoccupée face à cette escalade, aux informations faisant état d’un renforcement supplémentaire de l’Armée russe sur le territoire du Bélarus et par l’oppression en Bélarus.  Elle a appelé les autorités de ce pays à cesser leur politique d’intimidation et de harcèlement de la société civile, des journalistes, des membres du mouvement prodémocratie et des défenseurs des droits humains.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déclaré que son pays avait activement pris part aux discussions du Conseil de l’Organisation internationale de l’aviation civile (OACI) autour de la question du vol Ryanair FR 4978 et réitéré son appui aux efforts de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits dans la mise à jour d’informations essentielles pour faire la lumière sur cet incident.  Il s’est alarmé des informations relatives aux violations, par le Bélarus, de la Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, soulignant que le fait d’altérer le plan d’un vol à des fins politiques constitue un précédent qui sape l’intégrité et la sûreté de l’avion civile internationale.  Le rapport de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits devait être entendu comme un appel à tous les États de s’abstenir de telles pratiques à l’avenir.  La gravité de cet épisode est indéniable, a-t-il affirmé, tout en estimant que cette question relève des droits de l’homme et de la sûreté de l’aviation civile internationale.  Il a proposé une réflexion pour savoir si le Conseil de sécurité est l’organe le plus indiqué pour en discuter.  Il a en conséquence appuyé la soumission du rapport au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, enceinte idoine et plus compétente pour traiter de cette problématique au sein du système de l’ONU.

Mme TRACY WANJIRU MBABU (Kenya) a estimé que l’interception d’un vol civil au Bélarus est très préoccupante et a créé un dangereux précédent de nature à entraîner des restrictions inutiles à l’aviation civile et à réduire la confiance dans les trajets aériens.  Les États ont le devoir de respecter les juridictions, les normes et le droit des passagers, établis au niveau international, a-t-elle insisté.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a exprimé son inquiétude face à la gravité de toute intervention illicite dans l’aviation civile, avant de faire remarquer que l’incident du vol Ryanair FR 4978 avait, d’ores et déjà, été analysé par le Conseil et l’Assemblée de l’OACI, organes compétents pour traiter de cette question.  Sur la base des informations contenues dans le rapport de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits, il a réitéré sa condamnation de tout acte contraire à la Convention de Chicago.  Cette interférence est une violation des normes de l’aviation civile internationale et a mis en péril la sécurité d’un vol commercial de passagers et la vie des personnes à bord, a-t-il ajouté, précisant, en conclusion, que cet incident, de même que la détention d’un journaliste, devraient plutôt être abordés dans le cadre des organes compétents pour ce qui est de l’aviation civile et des droits humains.

M. GENG SHUANG (Chine) a douté de la pertinence de la saisine du Conseil de sécurité par un petit nombre de membres pour débattre de cet incident se demandant si cela conduira à un règlement de la question ou si c’est une façon appropriée pour le Conseil d’assumer ses responsabilités de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  « On peut en parler », a dit le représentant, prenant note du document transmis par le Bélarus à la soixante-seizième session de l’Assemblée, le 26 juillet, qui s’oppose au rapport final de l’OACI concernant le déroutement du vol par le Bélarus.  Ce document explique que les informations sur lesquelles se basent les conclusions du rapport sont erronées et n’ont pas été vérifiées auprès des autorités bélarussiennes, a noté le représentant, en constatant par ailleurs que les informations données par le Bélarus n’ont pas été reprises dans le rapport d’établissement des faits de l’OACI.  Le représentant a estimé que l’incident devrait être examiné conformément aux principes de la Charte de Nations Unies, du droit international et des normes internationales sur la base de faits et de preuves, sans ingérences politiques ni sélectivité ni partialité.

L’OACI devrait respecter les buts et principes de la Convention de Chicago relative à l’aviation civile, a demandé le délégué, avant de dire que le rapport de l’Équipe d’enquête d’établissement des faits devrait exclure toute ingérence de facteurs politiques et entendre pleinement la position des différentes parties prenantes afin de comprendre la situation.  Elle devrait traiter des préoccupations de toutes les parties sur un pied d’égalité et procéder à une analyse sérieuse et indépendante et professionnelle, a-t-il insisté, en demandant qu’elle tire des conclusions qui résistent à l’épreuve du temps.  Il s’est opposé aux sanctions unilatérales imposées par le Conseil de sécurité au Bélarus, notamment les restrictions en matière d’aviation, qui nuisent au développement de l’aviation civile internationale.  Ces sanctions devraient être levées immédiatement, a-t-il exigé.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a dit que son pays, membre du Conseil de l’OACI, accorde la priorité au bon fonctionnement et à la sécurité de l’aviation civile internationales.  L’Équipe d’enquête d’établissement des faits et son rapport ont un but louable, a-t-elle affirmé, estimant que cette question doit être traitée sous un angle technique, mais qu’il faut aussi veiller à la protection des liens interpersonnels, qui figurent au cœur des activités de l’aviation civile internationale.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a souligné que la perturbation du transport aérien par des autorités non habilitées à le faire pose un grave danger, non seulement pour les passagers, mais aussi pour la communauté internationale dans son ensemble.  Prenant note des conclusions du rapport de l’OACI, Mme Hackman a relevé que l’atterrissage forcé du vol Ryanair FR 4978, ainsi que des incidents précédents, sont incompatibles avec les normes internationales pertinentes et méritent condamnation internationale.  Rappelant que les engagements des États parties de ne pas utiliser l’aviation civile internationale à des fins incompatibles avec les objectifs de la Convention de Chicago, la représentante a souligné l’urgente nécessité de renforcer la coopération entre les États parties et l’OACI pour protéger l’environnement aéronautique contre toutes les formes de menaces.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit prendre note des conclusions de l’enquête mettant en évidence l’absence de bombe à bord de l’avion contraint à l’atterrissage par le Bélarus à son départ comme à son arrivée à Vilnius.  Compte tenu de la gravité des faits, il a appelé toutes les parties au dialogue et à la coopération afin de garantir la sécurité des vols civils et des passagers, dans le plein respect de la Convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale, a-t-il dit.

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a insisté sur le fait que le déroutement du vol Ryanair par les autorités du Bélarus le 23 mai 2021 a mis en danger la vie de 122 personnes de différentes nationalités.  Il a salué la contribution de tous les pays qui ont collaboré avec l’Équipe d’enquête de l’OACI en fournissant des informations pour aider à établir les faits.  Le représentant a pris note des conclusions du rapport, selon lesquelles l’incident était contraire à la Convention de Montréal et à la Convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale.  Selon lui, l’alerte à la bombe était délibérément mensongère.  Il a dénoncé l’implication des hauts responsables gouvernementaux du Bélarus dont le seul objectif était d’arrêter une personnalité de l’opposition.  La Lituanie, a indiqué le délégué, a mené une enquête sur cet atterrissage forcé et en a informé les autres États impliqués dans l’incident aux fins d’entraide judiciaire.  Le délégué a condamné les actes du Bélarus, appelant à ce que les violations des droits à l’occasion de cet incident soient soumises à l’examen du Conseil des droits de l’homme.  Le Bélarus devrait être contraint de fournir des informations à l’Équipe d’enquête de l’OACI, a demandé le représentant, en exprimant le souhait que le Conseil de sécurité reste saisi de la question.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a indiqué que son pays et les organismes nationaux compétents ont coopéré avec l’Équipe d’enquête d’établissement des faits de l’OACI.  Il était temps que le Conseil se saisisse de cet incident car l’atterrissage forcé de ce vol n’est qu’un exemple de la conduite condamnable de Bélarus, a-t-il déclaré, rappelant que les autorités de ce pays avaient transmis une fausse information concernant une alerte à la bombe sur ce vol, alors que la seule raison était d’arrêter un journaliste indépendant russe et son épouse à bord de ce vol.  Le représentant a insisté sur le fait que les mesures prises et les sanctions imposées par l’Union européenne à l’encontre de Bélarus étaient idoines.  La situation entre la Pologne et le Bélarus est devenue insoutenable, ce dernier pays ayant sciemment promis, et à tort, à des migrants qu’ils pouvaient traverser la frontière.  La migration a été utilisée dans le seul objectif de détourner de la guerre en Ukraine, a accusé le délégué.  Il a aussi pointé la répression des autorités de Minsk à l’encontre de ses citoyens, ce qui a aussi conduit à des déplacements de populations vers la Pologne.  Il a dénoncé plusieurs pratiques illégales des autorités biélorusses, comme des assassinats ciblés et des exactions visant journalistes et représentants de la société civile.  Le représentant a souligné que sans démocratisation de la situation politique au Bélarus, il n’y aura pas de stabilité dans la région, a-t-il mis en garde.  D’autre part, les troupes russes passent librement dans le territoire ukrainien, ce qui fait de Bélarus une partie délibérément impliquée dans la guerre que la Russie mène contre l’Ukraine.

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie), s’exprimant également au nom de la Tchéquie et de l’Estonie, a réitéré sa condamnation de l’atterrissage forcé du vol Ryanair à Minsk le 23 mai 2021.  Cet acte délibéré du « régime Loukachenko » était une atteinte flagrante à la sécurité de l’aviation civile internationale, au mépris du droit international.  Il l’a qualifiée de méthode terroriste et non pas de méthode d’acteurs responsables des relations internationales.  La confiance du public vis-à-vis de la sécurité du transport aérien est indispensable, a-t-il poursuivi, priant le Conseil de sécurité de continuer de se concentrer sur la sécurité de l’aviation civile et d’exiger que les responsables rendent pleinement des comptes.

Les tentatives du régime de Loukachenko de bâillonner l’opposition politique et les journalistes indépendants n’étaient pas une exception mais sont bien une politique délibérée, notamment après le simulacre d’élections présidentielles d’août 2020, a martelé le représentant.  Grâce au soutien de la Russie, le régime a pu garder son pouvoir de facto au mépris des droits humains fondamentaux.  Par ailleurs, le Bélarus a facilité l’agression russe contre l’Ukraine et laissé la Russie utiliser son territoire pour l’attaquer.  Le représentant a exhorté le Bélarus à cesser son appui à la Russie et à remettre en liberté tous les prisonniers politiques, exigeant que les Forces armées russes se retirent de tout le territoire de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues.

Mme MARIA THEOFILI (Grèce), dans une brève allocution, a dit que depuis le début, son pays avait envoyé un message très clair en direction du Bélarus, en indiquant qu’un tel comportement ne saurait être toléré ni être sans conséquences.  C’est pour cette raison que la délégation a salué la condamnation prononcée par le Conseil de l’OACI de cet acte, a-t-elle dit.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a pris note du rapport de l’OACI qui atteste du déroutement et de l’atterrissage forcé du vol Ryanair par le Bélarus, prétextant une fausse alerte à la bombe communiquée sur instruction des hauts responsables gouvernementaux du Bélarus.  Pour la représentante, le seul objectif de cet acte scandaleux, qui a mis en danger la sécurité des passagers et de l’équipage, était l’arrestation d’un journaliste.  Cet incident a montré la véritable nature du régime bélarussien qui fait tout pour réduire au silence les voix du peuple après avoir truqué l’élection présidentielle d’août 2020 et avoir réprimé la dissidence, a-t-elle déclaré.  Elle a accusé le « régime » de mener une campagne d’intimidation contre l’opposition politique et la société civile.  Estimant qu’il y a plus de 1 300 prisonniers politiques en Bélarus, la représentante a informé le Conseil de l’appui de son gouvernement pour la société civile au Bélarus.  Elle a fait remarquer que cet incident du vol Ryanair FR 4978 montre que la répression ne s’arrête pas aux frontières du Bélarus.  Le « régime Loukachenko » alimente la guerre en Europe centrale contre la volonté de la grande majorité des citoyens bélarussiens, en soutenant la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, a dénoncé la représentante.  Elle a donc exhorté le Gouvernement du Bélarus à choisir le bon côté de l’histoire et à cesser immédiatement de soutenir la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine.

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a dénoncé une guerre politique, économique et de l’information menée par les États occidentaux, y compris une guerre économique pour étrangler l’économie bélarussienne et sa population.  Il a rappelé que le Bélarus avait renoncé à la possession de toutes les armes les plus modernes.  Il a estimé que les informations du rapport de l’Équipe de l’OACI a été rédigé à la hâte, sous pression de certains occidentaux, et qu’il n’est ni consensuel ni objectif, et donc particulièrement partial.  Le Bélarus n’acceptera jamais le rapport, a-t-il annoncé, le jugeant infondé et dépourvu d’informations clefs de plusieurs parties impliquées.  Aucune information complémentaire n’a été sollicitée du Bélarus et les informations fournies d’une source non fiable restent inadmissibles, a-t-il dit.  Il a notamment fait état de soi-disant enregistrement audio fourni par les États-Unis, qui est faux, selon lui.  Il a affirmé que le capitaine du vol de Ryanair a décidé de son propre chef d’essayer d’atterrir à Minsk, ce qui élimine l’implication de Bélarus.  Il a notamment rappelé que certains pays ont interdit aux compagnies aériennes de survoler l’espace aérien bélarussien.  Au contraire, a-t-il encore rappelé, le Bélarus a, lui, aidé au transport des citoyens de ces mêmes pays aux premiers jours de la pandémie de COVID-19.  Le représentant a regretté le blocage par les pays occidentaux d’informations transmises par le Bélarus à l’Équipe d’enquête.  Passant à M. Protasevich, il a signalé que celui-ci avait posté une vidéo contenant sa propre déclaration dans laquelle il dit avoir en sa possession, à son domicile, une décision d’un tribunal, car, contrairement à tout ce qui est dit, le Bélarus est un État de droit.

Le représentant a aussi réfuté les versions « tout à fait exotiques » entendues sur la situation des droits de l’homme au Bélarus.  Il a riposté que les sanctions contre les engrais agricoles ne sont pas les gages de bonnes récoltes.  Il a prévenu que cela constitue un problème grave, qui débouchera sur une famine, le Bélarus produisant le tiers de ces engrais.  « Vous avez ensuite le front de nous faire la leçon sur le respect des droits de l’homme comme vous le concevez. »  Il a prévenu que, tôt ou tard, ces pays seront renversés par les personnes même qu’ils ont affamées à cause des sanctions, qui iront réclamer leur droit à la vie.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

​​​​​​​La Quatrième Commission conclut son débat sur les utilisations pacifiques de l’espace en adoptant deux projets de résolution sur l’espace et la santé

Soixante-dix-septième session,
17e séance plénière – après-midi
CPSD/763

​​​​​​​La Quatrième Commission conclut son débat sur les utilisations pacifiques de l’espace en adoptant deux projets de résolution sur l’espace et la santé

La Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a achevé cet après-midi son débat consacré à la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace en adoptant, sans vote, deux projets de résolution appelant notamment les États Membres des Nations Unies à resserrer leur coopération dans les domaines de l’espace et de la santé mondiale. 

Aux termes du projet de résolution portant sur l’espace et la santé mondiale, l’Assemblée générale engagerait les entités des Nations Unies, les organisations intergouvernementales, les gouvernements et le secteur privé à rechercher une coordination efficace dans les activités spatiales en rapport avec la santé mondiale.  Elle encouragerait à cette fin les États Membres à instaurer un climat politique permettant de lever les obstacles à l’utilisation des techniques spatiales au service de la santé mondiale, notamment au moyen d’une plateforme spécialisée et mondialement accessible basée à Genève. 

En adoptant le projet de texte sur la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace, tel qu’amendé oralement, l’Assemblée générale noterait avec satisfaction la mise en place du Groupe de travail sur les aspects juridiques des activités relatives aux ressources spatiales du Sous-Comité juridique.  Elle noterait avec satisfaction la création de la Plateforme sur l’espace et la santé mondiale, chargée de promouvoir une collaboration effective entre les États Membres sur les questions ayant trait à l’espace et à la santé.  Si elle venait à adopter ce texte, l’Assemblée générale réaffirmerait en outre l’importance de l’échange d’informations concernant la détection et la surveillance des objets géocroiseurs potentiellement dangereux. 

L’Assemblée générale déciderait par ailleurs d’admettre le Guatemala et l’Ouzbékistan au sein du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), et approuverait la décision de celui-ci d’accorder le statut d’observateur à l’Association pour le développement de l’Atlantic International Research Centre, à l’Access Space Alliance, à The Hague Institute for Global Justice et à l’International Peace Alliance (Space). 

La Tchéquie, s’exprimant au nom des États membres de l’Union européenne, s’est félicitée du caractère consensuel qui a pu être maintenu au sein de la Commission à propos de ce texte, en dépit du contexte mondial actuel, caractérisé par l’« agression russe ».  Elle s’est toutefois dissociée, comme le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni, de son paragraphe 28 concernant l’affiliation aux Nations Unies d’un centre régional de formation aux sciences et technologies de l’espace pour la région eurasienne sur la base de l’Entreprise d’État pour les activités spatiales « Roscosmos », situé en Fédération de Russie. 

Bien que ce paragraphe ait été modifié pour le rendre « plus neutre », il continue selon le délégué tchèque de mettre en exergue les évolutions dans un seul État Membre, ce qui est à ses yeux « discriminatoire et incohérent ».  Pour le Royaume-Uni, la Fédération de Russie, après avoir envahi son voisin, a perdu le respect de ses partenaires. 

La Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 1er novembre 2022, à 15 heures, avec l’étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects. 

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE TEXTE CONCERNANT LA COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE

L’espace et la santé mondiale (A/C.4/77/L.6)

Par ce projet de résolution, adopté sans vote, l’Assemblée générale engagerait les entités des Nations Unies, les organisations intergouvernementales, les gouvernements et le secteur privé à rechercher une coordination efficace dans les principales activités spatiales en rapport avec la santé mondiale.  Elle encouragerait les États Membres à instaurer, compte dûment tenu des questions juridiques et déontologiques, un climat politique propice et des mécanismes de gouvernance permettant de lever les obstacles à la promotion d’une utilisation efficace des techniques spatiales au service de la santé mondiale, notamment des solutions de télémédecine et autres technologies récentes.  Elle encouragerait en outre les États Membres à permettre l’interopérabilité organisationnelle et technique et à promouvoir les activités axées sur la recherche et l’innovation afin de faciliter le développement des sciences et techniques spatiales et leur application dans le secteur de la santé. 

L’Assemblée générale se féliciterait de la mise en place d’une plateforme spécialisée, coopérative, mondialement accessible et multiforme, basée à Genève, afin de promouvoir, sur les questions relatives à l’espace et à la santé mondiale, une collaboration effective entre les États Membres, les entités des Nations Unies, d’autres organisations internationales et les acteurs concernés.  Elle soulignerait encore à cet égard la nécessité de suivre et de répertorier chaque année l’ensemble des activités essentielles, documents de référence et plans d’action émanant des entités des Nations Unies, en intégrant les activités, documents et plans issus de l’Organisation mondiale de la Santé, d’autres organisations internationales, des États membres du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et, dans la mesure du possible, d’organisations non gouvernementales et d’autres acteurs non gouvernementaux. 

Elle prierait par ailleurs le Bureau des affaires spatiales d’améliorer, dans la limite des ressources existantes, la dotation en capacités et le travail en réseau en Afrique, en Asie et dans le Pacifique, et en Amérique latine et dans les Caraïbes, dans le cadre de projets régionaux de coopération technique, et d’accompagner les projets sur le terrain visant à renforcer la collaboration entre le secteur spatial et celui de la santé mondiale, comme stratégie efficace visant à faciliter l’accès des États bénéficiaires aux services de santé mondiale. 

Coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace (A/C.4/77/L.7)

Aux termes de ce projet de résolution, adopté sans vote, l’Assemblée générale approuverait le rapport du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique sur les travaux de sa soixante-cinquième session et conviendrait que celui-ci devrait, à sa soixante-sixième session, examiner les questions de fond recommandées, en tenant compte notamment des préoccupations des pays en développement.  Elle noterait avec satisfaction l’établissement, dans le cadre du plan de travail quinquennal, du Groupe de travail sur les aspects juridiques des activités relatives aux ressources spatiales du Sous-Comité juridique. 

L’Assemblée générale noterait que le rapport du Groupe de travail sur l’espace et la santé mondiale fournit une importante source d’informations et des orientations utiles pour faire avancer l’utilisation des sciences et des techniques spatiales aux fins de la santé mondiale par les puissances spatiales et les nouvelles nations spatiales.  Elle noterait en outre avec satisfaction la création de la Plateforme sur l’espace et la santé mondiale, basée à Genève, chargée de promouvoir une collaboration effective sur les questions ayant trait à l’espace et à la santé mondiale parmi les États Membres et les entités des Nations Unies, en particulier l’Organisation mondiale de la Santé et le Bureau des affaires spatiales, ainsi que les organisations internationales et les acteurs concernés, et se féliciterait de la création du Réseau sur l’espace et la santé mondiale, dont les travaux devraient être facilités par le Bureau des affaires spatiales. 

Par ce texte, l’Assemblée générale réaffirmerait l’importance de l’échange d’informations relatives à la détection, à la surveillance et à la caractérisation physique des objets géocroiseurs potentiellement dangereux afin de faire en sorte que tous les pays, en particulier les pays en développement, soient conscients des menaces potentielles, soulignerait la nécessité de renforcer les capacités pour une intervention d’urgence et la gestion des catastrophes, et se réjouirait de l’action que mènent le Réseau international d’alerte aux astéroïdes et le groupe consultatif pour la planification des missions spatiales pour renforcer la coopération internationale à cet égard, avec l’aide du Bureau des affaires spatiales, qui assure le Secrétariat permanent du groupe consultatif. 

Elle prendrait note avec satisfaction de l’adoption par le Comité du préambule et des 21 lignes directrices aux fins de la viabilité à long terme des activités spatiales, tels qu’ils figurent dans l’annexe II du rapport du Comité sur les travaux de sa soixante-deuxième session, et de l’établissement, dans le cadre d’un plan de travail quinquennal, du Groupe de travail sur la viabilité à long terme des activités spatiales du Sous-Comité scientifique et technique. 

L’Assemblée générale jugerait en outre indispensable que les États Membres, en particulier ceux qui utilisent des sources d’énergie nucléaire, prêtent davantage attention au problème de la probabilité de plus en plus grande de collisions d’objets spatiaux avec des débris spatiaux et aux autres aspects de la question des débris spatiaux, et demanderait que les recherches sur cette question se poursuivent au niveau national, que les techniques de surveillance des débris spatiaux soient améliorées et que des données sur ces débris soient rassemblées et diffusées.  Elle engagerait vivement tous les États Membres, surtout ceux qui sont particulièrement avancés dans le domaine spatial, à s’employer activement à empêcher une course aux armements dans l’espace, condition essentielle pour promouvoir la coopération internationale en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques. 

Si elle adoptait cette résolution, l’Assemblée générale noterait encore que la Fédération de Russie continue d’œuvrer à la mise en place d’un Centre régional de formation aux sciences et technologies de l’espace pour la région eurasienne sur la base de l’Entreprise d’État pour les activités spatiales « Roscosmos ».  Elle demanderait instamment aux gouvernements, aux organismes compétents du système des Nations Unies, aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales, aux institutions, aux entreprises et entités du secteur privé ainsi qu’aux particuliers de verser des contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale à l’appui du Programme des Nations Unies pour les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique. 

Elle déciderait enfin d’admettre le Guatemala et l’Ouzbékistan au Comité, et approuverait la décision de celui-ci d’accorder le statut d’observateur à l’Association pour le développement de l’Atlantic International Research Centre, à l’Access Space Alliance, à The Hague Institute for Global Justice et à l’International Peace Alliance (Space). 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC élargit la composition du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti et du Comité exécutif du Programme du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

Session de 2022       
3e séance plénière – après-midi
ECOSOC/7106

L’ECOSOC élargit la composition du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti et du Comité exécutif du Programme du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

Trois projets de décision ont été adoptés par consensus au Conseil économique et social (ECOSOC), rassemblé ce lundi pour sa troisième réunion plénière de la session en cours, sans aucune répercussion prévue sur le budget-programme de l’ONU.  Avant de lancer les procédures, la Présidente de l’ECOSOC, Mme Lachezara Stoeva, de la Bulgarie, a présenté ses condoléances aux peuples de la République de Corée, de la Somalie et de l’Inde pour les événements tragiques survenus ces derniers jours.

L’ECOSOC a, tout d’abord, décidé de nommer le Représentant permanent du Kenya auprès des Nations Unies en tant que membre supplémentaire du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti (E/2023/L.3, à paraître).  Avant l’adoption, le Secrétariat a précisé en détail aux délégations pourquoi cette décision n’aurait pas de répercussions sur le budget-programme.  Si des frais de voyage du nouveau membre pour des missions à Washington D.C. et en Haïti vont être engagés, le voyage en Haïti ne devrait pas avoir lieu en 2022, a précisé la Secrétaire de l’ECOSOC.  Elle a donné les montants des frais de déplacement des représentants à Washington D.C. et en Haïti, qui seront de 900 dollars en 2022 et de 2 800 dollars en 2023, des dépenses déjà couvertes par les ressources existantes pour 2022 et par celles actuellement proposées pour 2023. 

Après l’adoption, le représentant du Canada, Président du Groupe consultatif ad hoc, s’est dit « ravi » d’accueillir le représentant du Kenya, et a dit attendre avec impatience ses contributions pour le relèvement économique d’Haïti.

Par sa deuxième décision, l’ECOSOC a pris note du Rapport du Comité d’experts sur la gestion de l’information géospatiale à l’échelle mondiale concernant les travaux de sa douzième session (E/2023/46) et décidé que la treizième session dudit Comité se tiendrait à New York du 2 au 4 août 2023. 

La représentante du Mexique s’est félicitée de l’adoption du rapport, compte tenu de l’importance prise par l’information géospatiale à l’échelle mondiale « pour la production de données, la géographie, la cartographie, la géologie, entre autres ».  La déléguée a saisi cette occasion pour appeler à renforcer l’action du Comité d’experts.

La troisième et dernière décision adoptée par l’ECOSOC, ce lundi, concerne l’élargissement de la composition du Comité exécutif du Programme du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (E/2023/L.2).  L’ECOSOC a pris note de la demande d’élargissement de 107 à 108 États en intégrant l’Angola, qui avait proposé cet élargissement.  La représentante de ce pays, Mme Maria de Jesus dos Reis Ferreira, a mis en avant ses atouts: État partie à la Convention sur les réfugiés de 1961 (principal traité international visant à prévenir et à réduire l’apatridie) et au Protocole relatif au statut des réfugiés de 1967, le pays s’’appuie sur ces politiques ainsi que sur le droit international et le droit international humanitaire pour orienter sa politique migratoire, a-t-elle fait valoir, rappelant au passage son rôle crucial dans l’accueil de réfugiés de la République démocratique du Congo. 

Dans ce contexte, Mme dos Reis Ferreira a expliqué avoir soumis ce projet « afin d’apporter son expérience en matière d’accueil de réfugiés depuis plus de 30 ans », ayant démontré ses efforts en matière d’accueil, de fourniture de troupes de police au sein de la force onusienne.  La présence de l’Angola au sein du Comité exécutif permettra au pays « d’asseoir son engagement », a-t-elle assuré.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: l’adoption des derniers projets de texte consacrés aux armes nucléaires confirme les profondes divergences entre États

Soixante-dix-septième session,
25e séance (reprise) & 26e séance plénières – matin
AG/DSI/3702

Première Commission: l’adoption des derniers projets de texte consacrés aux armes nucléaires confirme les profondes divergences entre États

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a poursuivi ce matin l’examen des 75 projets de texte dont elle est saisie en adoptant les trois derniers projets de résolution et de décision sur les armes nucléaires, sur lesquels elle n’avait pas eu le temps de se prononcer vendredi.  Elle a aussi, en fin de réunion, entamé l’examen des textes consacrés aux autres armes de destructions massives.

Révélateur des profondes divergences qui continuent de saper le désarmement multilatéral, les trois projets présentés aujourd’hui ont dû être mis aux voix, comme 16 des 20 textes adoptés vendredi.  Le cas le plus emblématique de ces désaccords a été le projet intitulé « Mesures visant à établir un plan d’action commun pour l’avènement d’un monde exempt d’armes nucléaires » présenté par le Japon, qui a dû être soumis à 17 votes séparés.  Le texte presse les États dotés d’armes nucléaires d’appliquer l’article VI du TNP relatif à l’élimination de leurs arsenaux et, « tous les États, y compris les huit visés à l’annexe 2 du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), à s’efforcer immédiatement de faire cesser toutes les explosions expérimentales d’arme nucléaire et toutes autres explosions nucléaires comme il est demandé dans le Traité ». 

Le projet de résolution a finalement été largement adopté par 139 voix pour, 6 contre -dont la Chine et la Fédération de Russie– mais aussi 31 abstentions.  Tout en saluant la valeur ajoutée du projet de résolution « parce qu’il reprend de nombreux éléments abordés lors de la dernière Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le Mexique a ainsi expliqué son abstention sur plusieurs alinéas du préambule ou paragraphes du dispositif en raison de l’insuffisance de mesures concrètes de désarmement nucléaires de dispositions axées de manière excessive sur les seules mesures de réductions de risques.  À l’instar de l’Indonésie, il a notamment regretté la mention de « garanties négatives de sécurité dans le cadre d’accords bilatéraux » alors qu’il a jugé indispensable que de telles garanties soient contraignantes et négociées au sein d’une instance multilatérale en tenant compte des responsabilités particulières des États nucléaires.  Pour sa part, la République islamique d’Iran a « salué la bonne volonté » des auteurs du projet de résolution mais considère que des décennies d’expérience ont montré que les solutions intermédiaires ne font que permettre aux États dotés de ne pas respecter leurs engagements en matière de désarmement.  Il a également jugé insuffisantes les dispositions relatives aux efforts visant à parvenir à un traité interdisant la production de matières fissiles. 

Les deux autres textes sur les armes nucléaires adoptés aujourd’hui sont des projets de décision visant, pour le premier, à inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée générale un point intitulé « Vers un monde exempt d’armes nucléaires: accélération de la mise en œuvre des engagements en matière de désarmement nucléaire », contre lequel ont voté l’Inde, la Fédération de Russie et Israël tandis que les autres pays dotés, officiellement ou non, de l’arme atomique figuraient parmi les 23 abstentions; et pour le second, un texte intitulé « Hémisphère Sud et zones adjacentes exempts d’armes nucléaires » qui n’a rencontré d’opposition que celle de la Fédération de Russie, 18 États s’abstenant dont la Chine, les États-Unis, la France, Israël et le Royaume-Uni. 

Les explications d’après vote concernaient aussi les textes adoptés vendredi.  En son nom et au nom des États-Unis et du Royaume-Uni, la France a expliqué son opposition au projet de résolution sur le « Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 » par le fait qu’il ne reflète pas l’intégralité du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) mais seulement son article VI.  Les États-Unis ont quant à eux expliqué leur opposition au projet de résolution appelant à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient en raison des divergences majeures entre les pays de la région pour parvenir à cet objectif.  Dans l’attente, les États-Unis jugent essentiel de préserver le dispositif de sécurité régionale existant en renforçant les capacités régionales de non-prolifération.  Enfin, seul pays à avoir voté contre le projet de résolution relatif au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), la République populaire démocratique de Corée a affirmé que son statut d’État nucléaire était « devenu irréversible en raison du danger et du chantage américains » et a dénoncé un « texte politique ne visant qu’à la diaboliser ». 

Par ailleurs, les représentantes de la France, de Djibouti et du Costa Rica au nom du Groupe des Amis de la langue espagnole, ont jugé inacceptable que la séance du vendredi se soit terminée en anglais sans interprétation dans les cinq autres langues officielles.  Elles ont rappelé que le multilinguisme était un pilier du multilatéralisme avant de demander le plein respect des articles du Règlement intérieur de l’Assemblée générale garantissant l’interprétation dans le plein respect des six langues officielles.  De son côté, le représentant de la Guinée équatoriale s’est dit choqué d’avoir eu l’impression d’être remis en cause dans ses compétences parce qu’il n’avait pas souhaité que la réunion se poursuive uniquement en anglais.

En toute fin de séance, la Première Commission a abordé l’examen des projets de résolution et décision portant sur les « autres armes de destruction massive ».  Au titre des déclarations générales, le représentant de la Pologne a présenté le projet de résolution sur la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction et, dans une déclaration conjointe, la France et l’Allemagne ont appelé à soutenir en particulier un projet de résolution sur la prévention de l’acquisition de sources radioactives par des terroristes.

La Première Commission doit se prononcer sur les projets de résolution portant sur les « autres armes de destruction massive », demain, mardi 1er novembre, à partir de 10 heures.

DÉCISION SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DÉPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE

Groupe thématique 1 - Armes nucléaires (suite)

Mesures visant à établir un plan d’action commun pour l’avènement d’un monde exempt d’armes nucléaires

Aux termes de ce projet de résolution intitulé « Mesures visant à établir un plan d’action commun pour l’avènement d’un monde exempt d’armes nucléaires » (A/C.1/77/L.61), adopté par 139 voix pour, 6 contre (Afrique du Sud, Chine, Fédération de Russie, Nicaragua, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 31 abstentions, l’Assemblée générale demanderait aux États dotés d’armes nucléaires, en attendant l’élimination totale des armes nucléaires, d’honorer et de respecter toutes les assurances de sécurité existantes auxquelles ils ont souscrit et de ne pas employer ou menacer d’employer des armes nucléaires contre des États non dotés d’armes nucléaires parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, conformément à leurs déclarations nationales respectives.

Elle demanderait à tous les États, en particulier aux États dotés d’armes nucléaires, d’appliquer les principes d’irréversibilité, de vérifiabilité et de transparence dans l’exécution des obligations que leur impose le Traité; d’œuvrer sans délai en faveur du renforcement des mesures de transparence en communiquant des informations, conformément à la mesure numéro 21 du plan d’action de 2010; de présenter des rapports fréquents et détaillés sur l’application du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et de donner la possibilité de débattre de ces rapports.

L’Assemblée générale demanderait à la Conférence du désarmement d’entamer immédiatement et de conclure dans les meilleurs délais des négociations sur un traité non discriminatoire, multilatéral et internationalement et effectivement vérifiable interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, conformément au document CD/1299, et aux États dotés d’armes nucléaires de déclarer ou de continuer d’appliquer des moratoires volontaires sur la production de matières fissiles destinées à la fabrication d’armes ou d’autres dispositifs explosifs nucléaires.

Elle demanderait à tous les États, en particulier aux États dotés d’armes nucléaires, de s’engager à continuer de définir, d’étudier et de mettre en œuvre les mesures concrètes de réduction des risques nécessaires pour atténuer les risques d’emploi d’armes nucléaires à la suite d’une erreur de calcul, d’une perception erronée, d’un malentendu ou d’un accident, notamment, d’intensifier le dialogue entre les États dotés d’armes nucléaires et entre ces États et les États non dotés d’armes nucléaires, d’élaborer des dispositifs, des mécanismes et des outils de prévention et de gestion des crises efficaces et tout faire pour les mettre en œuvre, de continuer de ne pas se prendre mutuellement pour cible et de ne pas prendre pour cible tout autre État à l’aide d’armes nucléaires et de maintenir ces armes au niveau d’alerte le plus bas possible.

Elle demanderait également à tous les États de renforcer le soutien apporté aux initiatives visant à développer la vérification multilatérale du désarmement et le renforcement des capacités à l’appui du désarmement nucléaire et en tant qu’étape concrète vers la réalisation des objectifs énoncés à l’article VI du Traité, et de poursuivre les travaux conceptuels et pratiques sur la vérification du désarmement nucléaire, en tenant compte de l’importance que revêtent les partenariats entre les États dotés d’armes nucléaires et les États non dotés d’armes nucléaires sur cette question, et encourage une large participation de tous les États.

L’Assemblée générale demanderait à tous les États d’apporter leur concours à l’action menée dans le domaine de l’éducation au désarmement et à la non-prolifération nucléaire.

Votes séparés

Alinéa 3 du préambule: adopté par 120 voix pour, 3 contre (Afrique du Sud, Inde et Pakistan) et 27 abstentions; 

 Alinéa 5 du préambule: adopté par 96 voix pour, 5 contre (Afrique du Sud, Chine, Cuba, Fédération de Russie et Nicaragua) et 51 abstentions; 

Alinéa 6 du préambule: adopté par 122 voix pour, 4 contre (Afrique du Sud, Nicaragua, Fédération de Russie et République arabe syrienne) et 28 abstentions; 

Alinéa 10 du préambule: adopté par 145 voix pour, une contre (Israël) et 6 abstentions (Guinée équatoriale, Inde, Iran, Myanmar, Namibie et République arabe syrienne); 

Alinéa 11 du préambule: adopté par 111 voix pour, 6 contre (Afrique du Sud, Autriche, Égypte, Indonésie, Irlande et Jamaïque) et 35 abstentions; 

Alinéa 13 du préambule: adopté par 136 voix pour, 3 (Chine, Fédération de Russie et République populaire démocratique de Corée) contre et 13 abstentions; 

Alinéa 14 du préambule: adopté par 138 voix pour, une contre (Fédération de Russie) et 14 abstentions; 

Alinéa 16 du préambule: adopté par 154 voix pour, 2 contre (Iran et Fédération de Russie) et 2 abstentions (Guinée équatoriale et Sénégal) 

Paragraphe 1 du dispositif: adopté par 133 voix pour, une contre (Égypte) et 22 abstentions;

Paragraphe 2 du dispositif: adopté par 133 voix pour, 15 contre et 39 abstentions;

Paragraphe 3 du dispositif: adopté par 143 voix pour, 2 contre (Chine et Fédération de Russie) et 11 abstentions;

Paragraphe 4 du dispositif: adopté par 127 voix pour, zéro contre et 30 abstentions;

Paragraphe 5 du dispositif: adopté par 151 voix pour, 2 contre (Inde et République populaire démocratique de Corée) et 6 abstentions (Arabie saoudite, Bhoutan, Égypte, Guinée équatoriale, Iran et Israël);

Paragraphe 6 du dispositif: adopté par 135 voix pour, 4 contre (Chine, Fédération de Russie, Iran et Pakistan) et 15 abstentions;

Paragraphe 7 du dispositif: adopté par 136 voix pour, 2 contre (Afrique du Sud et Jamaïque) et 21 abstentions;

Paragraphe 9 du dispositif: adopté par 129 voix pour, 2 contre (Afrique du Sud et Iran) et 26 abstentions;

Paragraphe 10 du dispositif: adopté par 132 voix pour, 4 contre (Chine, Fédération de Russie, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 22 abstentions.

Vers un monde exempt d’armes nucléaires: accélération de la mise en œuvre des engagements en matière de désarmement nucléaire

Aux termes du projet de décision A/C.1/77/L.65, intitulé « Vers un monde exempt d’armes nucléaires: accélération de la mise en œuvre des engagements en matière de désarmement nucléaire », adopté par 154 voix pour, 3 contre (Fédération de Russie, Inde et Israël) et 23 abstentions, l’Assemblée générale déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-dix-huitième session, au titre de la question intitulée « Désarmement général et complet », la question subsidiaire intitulée « Vers un monde exempt d’armes nucléaires: accélération de la mise en œuvre des engagements en matière de désarmement nucléaire ».

Hémisphère Sud et zones adjacentes exempts d’armes nucléaires

Aux termes du projet de décision intitulé « Hémisphère Sud et zones adjacentes exempts d’armes nucléaires » (A/C.1/77/L.72), adopté par 161 voix pour, une contre (Fédération de Russie) et 18 abstentions, l’Assemblée générale, déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-dix-huitième session, la question intitulée « Hémisphère Sud et zones adjacentes exempts d’armes nucléaires ».

Déclarations générales

Le Costa Rica, qui préside le Groupe des amis de la langue espagnole, a regretté que la réunion de vendredi dernier se soit poursuivie dans une seule langue officielle, ce qui est contraire au Règlement.  La représentante a demandé que soit garantie la mise à disposition des interprètes pour toutes les séances de la Commission, le multilinguisme étant un pilier du multilatéralisme. 

Le Président de la Commission a répondu qu’à l’avenir, les langues seront pleinement respectées et traitées sur un pied d’égalité. 

Explications de vote après le vote

Les Philippines ont indiqué avoir voté en faveur des projets de résolution L.17, L.45 et L.61, des textes qui privilégient la voie du dialogue pour aller de l’avant après l’échec de la Conférence d’examen des États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, conférence, a dit la représentante, « dont il convient de préserver l’équilibre ». 

L’Autriche a indiqué avoir appuyé le projet de résolution L.61 dans son ensemble, saluant la volonté du Japon d’intégrer des éléments du document final de la dernière Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Toutefois, comme ces éléments ne constituent pas un consensus, nous nous sommes abstenus sur le paragraphe 5 du préambule, a notamment dit le représentant.  Le désarmement nucléaire entraîne une amélioration de la sécurité pour tous, États dotés comme États non dotés, a-t-il par ailleurs noté. 

Le Ghana a déclaré avoir appuyé le projet de résolution L.61 dans son ensemble, estimant qu’il convient d’adopter des approches plus pragmatiques pour parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires. 

La République tchèque, au nom de l’Union européenne et d’autres pays, a indiqué que la mise en œuvre du projet de résolution L.1 reste un moyen crédible de parvenir à une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Le processus en cours à New York de la Conférence pour la création d’une telle zone doit être inclusif, et l’Union européenne se tient prête à épauler le dialogue entre tous les pays de la région, a souligné la représentante tchèque. 

Les Pays-Bas, au nom d’un groupe de pays, ont indiqué avoir voté contre le projet de résolution L.7, regrettant que les éléments positifs des précédentes conférences de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement n’apparaissent pas dans le texte.  Depuis la réunion de haut niveau de 2013, nos préoccupations ne sont pas prises en compte pour ce texte, a indiqué le représentant. 

La Nouvelle-Zélande a indiqué au sujet du projet de résolution L.61 que certains libellés laissent entendre qu’il existe une hiérarchie dans la pertinence des mesures prévues en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  La représentante a en outre regretté que d’autres traités ne soient pas mentionnés, ajoutant qu’en raison de ces réserves, sa délégation s’était notamment abstenue sur les alinéas 3 et 5 du préambule.  La Nouvelle-Zélande a toutefois voté en faveur du projet de résolution dans son ensemble, avec l’espoir que le libellé des futures versions soient amélioré. 

Expliquant son abstention sur le projet de résolution L.61, le Brésil a félicité le Japon pour avoir présenté cette résolution.  Certains éléments sont une amélioration, a déclaré le représentant, mais le nombre élevé de vote sur les paragraphes montre la difficulté à s’accorder.  Il y a vu le témoignage de la fragmentation politique en matière de désarmement nucléaire.  Cette adoption a été faite sous conditions du régime stricte du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  En dehors de ce contexte, il faut examiner toute proposition face à nos positions nationale. 

L’Algérie, s’exprimant après le vote sur le projet de résolution L.61, a estimé que la création d’un plan d’action commun pour un monde exempt d’armes nucléaire devait comprendre une approche exhaustive et humanitaire appuyé par la vaste majorité des États.  Pour elle, on aurait pu mieux garantir l’équilibre du texte en s’inspirant du langage convenu et en évitant le plus possible des libellés polémiques. 

Le Pakistan a expliqué avoir voté contre le projet de résolution L.2 sur la « Suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires », en raison des références faites au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui est un traité discriminatoire.  De même, le Pakistan a voté contre le projet de résolution L.17 relatif au « Traité sur l’interdiction des armes nucléaires », car il n’est lié par aucune obligation de ce traité.  Concernant le projet de résolution L.52 (« Traité d’interdiction complète des essais nucléaires »), le Pakistan aurait pu voter en faveur de cette résolution, mais étant donné sa position de longue date, il a été dans l’obligation de s’abstenir concernant l’alinéa 7 du préambule.

Israël a expliqué avoir voté contre le projet de résolution L.17 (« Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ») et s’est déclaré préoccupé par les mesures de désarmement qui ne font pas de différence au regard des situations régionales.  Alors que des progrès ont été faits au niveau mondial, Israël estime qu’il reste des lacunes concernant le Moyen-Orient.  Pour Israël, le fait qu’un groupe régional soit paralysé depuis plus de 20 ans en raison de membres extrêmes est inexcusable. 

Tout en saluant la valeur ajoutée du projet de résolution L.61 « parce qu’il reprend de nombreux éléments abordés lors de la dernière Conférence d’examen du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) », le Mexique a expliqué qu’il s’est abstenu sur plusieurs paragraphes en raison de l’insuffisance de mesures concrètes de désarmement nucléaire et de dispositions axées de manière excessive sur les seules mesures de réductions des risques.  Le Mexique appelle à davantage de consultations de nature à faire avancer les positions des différentes parties sur les paragraphes incriminés.  Il regrette notamment la mention de « garanties négatives de sécurité dans le cadre d’accords bilatéraux » alors qu’il juge indispensable que ces garanties négatives de sécurité soient contraignantes et négociées au sein d’une instance multilatérale. 

La République populaire démocratique de Corée a expliqué son opposition au projet de résolution L.52 relatif au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, car il s’agit selon elle d’un « texte politique » visant à la diaboliser.  La RPDC a dénoncé une politique de deux poids deux mesures alors que les États-Unis procèdent à des essais nucléaires depuis 70 ans en toute impunité.  Le représentant a cité les menaces américaines qui exacerbent les extensions sur la péninsule coréenne avant de souligner le droit de son pays de se défendre.  Pour la RPDC, les États-Unis sont les principaux responsables de l’absence de paix dans la péninsule de Corée et dans le reste du monde.  « Le statut d’État nucléaire de la RPDC est devenu irréversible en raison du danger et du chantage américains », a conclu le représentant.

Singapour a expliqué son abstention sur le projet de résolution relatif au Traité d’interdiction des armes nucléaires et tous les autres paragraphes d’autres résolutions mentionnant ce texte parce que les préoccupations de Singapour n’ont pas été entendues lors de l’adoption de ce traité en 2017.  Singapour souhaite que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires n’exerce pas une mauvaise influence sur les positions des pays concernant les autres traités, dont le TNP et le TICE ou tous les traités régionaux portant sur la création de zone exempte d’armes nucléaires. 

La Guinée équatoriale a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.61 parce que ce texte s’éloignait de l’esprit original défendu par le Japon.  En outre, le représentant a jugé inadmissible que la dernière séance de la Première Commission n’ait pu se terminer avec l’interprétation dans les six langues officielles et trouvé choquant que l’on ait laissé entendre que les délégations qui se sont déclarées gênées par ce monolinguisme souffraient d’un « handicap ». 

La République islamique d’Iran a expliqué son abstention à plusieurs alinéas du préambule ou paragraphes du dispositif du projet de résolution L.61.  L’Iran appuie les décisions prises par consensus au sein des forums de désarmement mais demande que celles-ci soient cohérentes.  Il estime que le libellé du texte ne reflète pas le point de vue des États non dotés de l’arme nucléaire et devrait identifier clairement les cas de menaces proférées par certains État dotés contre d’autres qui ne le sont pas.  De même, le projet de résolution prévoit des conditions pour l’octroi de garanties négatives de sécurité, ce qui n’est pas acceptable.  Enfin, le texte ne trouve pas l’équilibre entre non-prolifération et désarmement.  La République islamique d’Iran salue la bonne volonté des auteurs du projet de résolution mais considère que des décennies d’expérience ont montré que les solutions intermédiaires ne font que permettre aux États dotés de ne pas respecter leurs engagements en matière de désarmement. 

La Suisse a indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.2 et s’être abstenue sur le projet de résolution L.17, et ce, pour les mêmes raisons que celles données en séance en 2019.  Elle a en outre expliqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.61 dans son ensemble, mais pas de certains des alinéas ou paragraphes mis aux voix. 

La République de Corée a indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.61 dans son ensemble.  Néanmoins, le représentant a regretté que le libellé de plusieurs paragraphes utilise des termes ne répondant pas à des préoccupations de sa délégation, ce qui explique qu’elle n’ait pas voté en faveur des paragraphes 3 et 5 notamment.

L’Inde a indiqué à avoir contre le projet de résolution L.17, puisqu’elle ne signera jamais le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ni n’en reconnaîtra la validité.  Elle a ensuite indiqué s’être abstenue sur les paragraphes du projet L.61 mentionnant notamment le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, la nécessité d’instaurer des moratoires et le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, puisqu’elle n’y est pas partie.  Elle a en outre expliqué avoir voté contre le projet de résolution L.46, la nature éthique ou non des armes nucléaires devant être appréciée par les États. 

La Fédération de Russie a indiqué avoir voté pour le projet de résolution L.26 tout en ajoutant que le Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner plus avant les questions de vérification du désarmement nucléaire devait respecter strictement son mandat sans tenter de procéder à des négociations de fond portant sur des questions annexes à celui-ci. 

L’Indonésie a indiqué s’être abstenue sur le projet de résolution L.61, qui traite de nombreuses questions de manière discriminatoire et laisse entendre que le désarmement nucléaire pourrait être soumis à des conditions, ce qui est inacceptable.

Les États-Unis ont expliqué leur opposition au projet de résolution L.1, « Création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient », en raison des divergences majeures entre les pays de la région pour parvenir à cet objectif.  Dans l’attente, les États-Unis jugent essentiel de préserver le dispositif de sécurité régionale existant en renforçant les capacités régionales de non-prolifération.  « Nous le faisons car il faut préserver le dispositif de sécurité international et nous continuerons d’appuyer les objectifs de la résolution, mais il n’est pas possible de voter en faveur, étant données les différents points de vue des acteurs de la région », a déclaré le représentant. 

L’Espagne, à propos du projet de résolution L.30 portant sur le « Traité sur une zone exempte d’armes nucléaires en Afrique », a rappelé avoir toujours manifesté son soutien au Traité de Pelindaba.  En outre, l’Espagne aide au développement de l’Afrique.  Elle estime que le Traité de Pelindaba ne contient aucune disposition contre le désarmement nucléaire. 

L’Argentine a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.17 (« Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ») par le fait qu’elle a lancé un processus de l’évaluation de l’impact du Traité sur le TNP.  Par ailleurs, l’Argentine a voté pour le projet de résolution L.61 (« Mesures visant à établir un plan d’action commun pour l’avènement d’un monde exempt d’armes nucléaires ») dans son ensemble.  Néanmoins, à propos de l’alinéa 5 du préambule, le représentant a rappelé que c’est l’Argentine qui a assumé le défi de la présidence de la dixième Conférence d’examen du TNP et a déploré qu’il n’ait pas été possible d’adopter un document final adopté par consensus.  Concernant le paragraphe 2 du dispositif, les conséquences des déclarations interprétatives des États dotés de l’arme nucléaire ont pour conséquence que l’Argentine ne peut se joindre à un vote positif. 

L’Irlande, expliquant son vote sur le projet de L.61, a dit avoir voté en faveur de cette résolution mais, à propos de la référence à la dixième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), a regretté la décision d’un seul État membre de bloquer le consensus.  L’Irlande se félicite par ailleurs que le projet de résolution intègre une référence à la problématique de genre. 

Le Kazakhstan, s’exprimant sur le projet de résolution L.61, a dit apprécier les tentatives du Japon, en tant que seul État ayant subi les conséquences de l’arme nucléaire, de combler les lacunes du texte.  Il a souligné que les armes nucléaires ont deux dimensions vitales et que les essais peuvent entraîner des conséquences catastrophiques.  Le Kazakhstan juge regrettable que certains éléments visant l’assistance aux victimes n’aient pas été repris dans le texte car cette question est primordiale.  Il est également surpris de l’absence de référence aux zones exemptes d’armes nucléaires.

Le Japon a appuyé le projet de résolution L.16 sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires avant d’expliquer son vote contre le texte relatif au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Tout en notant que ce traité constitue un texte important, le Japon regrette qu’il ne mentionne pas la « collaboration essentielle avec les pays dotés de l’arme nucléaire pour parvenir à un monde sans armes nucléaires ».  Enfin, le japon souhaite que le projet de document final de la dernière Conférence d’examen du TNP –bien qu’il n’ait pu être adopté en raison de l’opposition russe- serve de base utile pour aider la communauté internationale à avancer vers le désarmement des armes nucléaires. 

La Colombie a considéré que la résolution L.61 ne pouvait être appréhendée au détriment des responsabilités liées au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Elle juge fallacieux l’argument selon lequel la sécurité collective serait liée à l’existence des armes nucléaires car ce raisonnement ne tient pas compte des conséquences humanitaires potentielles de ces armes. 

Djibouti, au nom de la francophonie, a joint sa voix à celles des délégations qui ont regretté aujourd’hui le non-respect du multilinguisme.  La représentante a appelé au respect de l’article 51 du Règlement intérieur de l’Assemblée générale, qui rappelle que le multilinguisme de nos réunions est un pilier du multilatéralisme. 

La France a expliqué que les projets de résolution L.1 et L.24 doivent s’entendre dans le respect de l’architecture issue du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, qui reste la pierre angulaire du désarmement nucléaire, dont la primauté et l’autorité ne sauraient être mises en cause. 

Intervenant ensuite également au nom des États-Unis et du Royaume Uni, la France a expliqué son opposition au projet de résolution L.7 (« Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 ») parce qu’il ne reflète pas l’intégralité du TNP mais seulement son article VI.  Après avoir précisé les réserves des trois pays concernant les projets de résolution L.65 et L.72, la représentant de la France s’est jointe aux déclarations des délégations qui ont regretté aujourd’hui le non-respect du multilinguisme en appelant au respect de l’article 51 du Règlement intérieur de l’Assemblée générale. 

L’Égypte a indiqué s’être abstenue sur le projet de résolution L.61 dans son ensemble et sur certains de ses paragraphes qui affaiblissent le libellé général du texte, ceux notamment traitant des éléments du document final de la Conférence d’examen des États parties du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ou du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires.  Le représentant a par ailleurs indiqué avoir voté contre le projet de résolution L.20, sa délégation étant convaincue que le Code de conduite de La Haye n’est ni équilibré dans son approche ni clair dans sa portée.  

Kiribati a indiqué s’être abstenu sur le projet de résolution L.61 dans son ensemble, qui mentionne le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires mais devrait prendre en compte à l’avenir ses préoccupations en matière de justice nucléaire et d’assistance aux victimes de détonations nucléaires. 

Droits de réponse

La Fédération de Russie a déploré les désaccords croissants sur la mise en œuvre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, ce qui a empêché de parvenir à un consensus lors de la Conférence d’examen du Traité en août dernier.  C’est cela qui explique le soi-disant échec de la Conférence, a ajouté le représentant, qui a appelé les délégations qui s’en prennent à son pays de cesser leurs accusations et à se concentrer sur les travaux pour renforcer le Traité. 

Le Japon a répondu à la Fédération de Russie et à la République populaire démocratique de Corée que la politique nationale de son pays ne doit pas faire l’objet de commentaires accusateurs et mensongers dans le cadre des débats de la Commission ni des adoptions de ses projets de résolution et de décision. 

La République populaire démocratique de Corée a estimé que le Japon trompe la communauté internationale dans cette instance, un pays qui se transforme en un pays prêt à mener une guerre. 

Le Japon a rappelé que la politique de défense de son pays est bien cela, une politique de défense uniquement. 

Groupe thématique 2 - Autres armes de destruction massive

Déclarations générales

Le représentant de la Pologne a présenté un projet de résolution L.55 intitulé « Mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction ».  Il a souligné que ces dernières années, la communauté internationale a vu de nombreuses entorses aux principales interdictions d’utilisations d’armes chimiques.  Il est clair que l’interdiction de ces armes de destruction massive, notamment des armes chimiques doit être renforcée.  Le projet de résolution donne la possibilité d’atteindre cet objectif, a estimé le représentant.  En raison des polarisations actuelles, la résolution n’est plus consensuelle, a-t-il regretté, mais il s’agit d’un document majeur, appuyé par la majorité des États membres.  Nous avons mis en œuvre toutes les consultations possibles, nous avons tenu compte de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et des points de vue souvent différents des délégations pour ce texte, a assuré le représentant, qui a appelé tous les États Membres à appuyer le projet de résolution.

La représentante de la France, dans une déclaration conjointe avec l’Allemagne, a déclaré soutenir l’ensemble des conventions internationales abordées dans le segment traité, à savoir la convention sur les armes chimiques (CIAC), sur les armes biologiques (CIABT), ou encore le Protocole de Genève de 1925, ainsi que les initiatives visant à prévenir l’acquisition, par des terroristes, d’armes de destruction massive.  « C’est pourquoi la France et l’Allemagne présentent conjointement depuis plusieurs années une résolution sur la prévention d’acquisition de sources radioactives par les terroristes », a-t-elle déclaré, en référence au projet L.64.  La représentante a rappelé l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1540 (2004), qui prévoit que tous les États doivent s’abstenir d’apporter un appui, quelle qu’en soit la forme, à des acteurs non étatiques qui tenteraient de mettre au point, de se procurer, de fabriquer, de posséder, de transporter, de transférer ou d’utiliser des armes nucléaires, chimiques ou biologiques ou leurs vecteurs, en particulier à des fins terroristes.  La résolution que la France et l’Allemagne présentent rappelle les instruments pour lutter contre l’acquisition de sources radioactives par des terroristes, mais aussi l’importance des orientations adoptées par la conférence générale de l’AIEA, dont ses récentes résolutions de septembre 2022 sur la sûreté nucléaire et radiologique, et sur la sécurité nucléaire, ainsi que des outils gérés par l’Agence pour prévenir l’acquisition illégale de sources radioactives.  En conclusion, la représentante a invité tous les États à voter positivement sur cette résolution. 

Le représentant de la Fédération de Russie a déclaré avoir contribué à l’examen des questions de désarmement, notamment s’agissant du projet de résolution L.69 (« Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques »).  Ce projet a pour objectif de garantir le bon fonctionnement du mécanisme du Secrétaire général pour ce qui est de la sécurité chimique et biologique, a-t-il affirmé.  S’agissant de l’utilisation pratique du mécanisme, ce projet apporte une valeur ajoutée vis-à-vis des procédures telles que consacrées par le document A 46/71.  Toutefois, celles-ci n’ont plus été mises à jour depuis l’adoption de la résolution 45/57c de 1990, a-t-il déclaré.  Or, 30 ans plus tard, ces principes adoptés ne correspondent plus aux techniques d’aujourd’hui.  Afin de renforcer le mécanisme, le représentant a proposé que le Secrétaire général demande l’avis des États Membres concernant le statut actuel des principes et procédures en vigueur ainsi que de la possibilité de les mettre à jour.  Il a demandé au Secrétaire général qu’il présente à la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale un rapport complet avec en annexe les points de vue des États membres sur cette question. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité renouvelle le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) jusqu’au 31 octobre 2023

9177e séance - matin
CS/15090

Le Conseil de sécurité renouvelle le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) jusqu’au 31 octobre 2023

Le Conseil de sécurité a prorogé, aujourd’hui, jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat et les tâches de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), tels que définis dans la résolution 2158 (2014) et la résolution 2592 (2021).  Adoptée par 14 voix pour, zéro voix contre et une abstention (Chine), la résolution  2657 (2022) demande à la MANUSOM de maintenir et de renforcer sa présence dans l’ensemble de la Somalie et de continuer à renforcer sa coopération avec la Somalie et la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS).

Préoccupé par toutes les violations du droit international humanitaire ainsi que par les violations des droits humains et les atteintes à ces droits, y compris celles qui sont associées aux violences sexuelles et fondées sur le genre en période de conflit, le Conseil de sécurité demande de nouveau à toutes les parties de respecter les obligations que leur impose le droit international, notamment le droit international humanitaire, pour ce qui est de la protection des civils et des biens à caractère civil.  Il exige en outre que toutes les parties au conflit prennent des mesures appropriées pour faire cesser et prévenir les violations et les atteintes dont sont victimes les enfants, y compris la poursuite du recrutement et de l’utilisation d’enfants dans le conflit armé.

Prenant note de la reprise des opérations contre les Chabab, le Conseil de sécurité engage, dans la résolution adoptée ce jour, la MANUSOM à aider la Somalie à veiller à ce que des plans soient mis en place pour protéger les civils et les communautés dans les zones qui font l’objet d’opérations militaires, ainsi qu’à assurer un soutien opportun et équilibré aux zones nouvellement ou récemment reprises aux Chabab.

Le Secrétaire général devrait faire au Conseil un point régulier sur la situation en Somalie et l’exécution du mandat de la MANUSOM, « y compris sur les indicateurs établis dans l’examen stratégique » qu’il salue et dont il approuve les recommandations.  Le Secrétaire général devra en particulier présenter au moins un rapport écrit avant le 15 février 2023 et au moins deux autres par la suite, tous les 120 jours.  Il devra également faire « en temps utile », un point des progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans l’examen stratégique.

Auteur du projet de résolution, le Royaume-Uni a fait observer que la MANUSOM a joué un rôle important depuis sa création et a espéré, à l’instar des États-Unis, qu’elle pourra continuer d’aider la Somalie à accomplir ses réformes dans les domaines prioritaires.  Les délégations qui se sont exprimées ont unanimement condamné les attentats terroristes perpétrés par les Chabab à Mogadiscio le 29 octobre.  Les Émirats arabes unis ont souligné l’importance du travail de la MANUSOM dans la lutte contre les Chabab, tandis que le Kenya demandait de soutenir le Gouvernement de la Somalie et les États fédéraux pour qu’ils puissent armer la police et l’armée et tarir les sources de financement de ce groupe.

Si elle s’est déclarée favorable à la prorogation de la MANUSOM, la Chine a expliqué s’être abstenue, car elle aurait souhaité voir améliorés certains points dans le projet de résolution, tels que les changements climatiques, la protection des civils et des enfants.  La Fédération de Russie, qui a voté pour le texte, a également regretté un manque d’équilibre dans le mandat de la MANUSOM, notamment en ce qui concerne la question humanitaire et les droits humains, ce qui limite sa capacité d’action.  Pour elle, la priorité de la MANUSOM doit être d’assurer le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance du pays.

Invitée à s’exprimer en tant que pays concerné, la Somalie a attiré l’attention sur les progrès vers la paix et la stabilité enregistrés dans le pays, qui doivent encore être consolidés, en particulier dans la lutte contre les Chabab.  Le représentant a appelé les Nations Unies à renforcer la coordination et la cohérence entre les différentes entités et agences de l’ONU et d’autres partenaires régionaux et internationaux.

Pour la Somalie, il est essentiel de réunir les conditions propices aux initiatives du Gouvernement visant à garantir la stabilité politique, la sécurité et le développement durable du pays.  En outre, la présence de l’ONU doit être axée sur la préservation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Somalie, et la stratégie de la MANUSOM doit être claire et coordonnée avec le Gouvernement fédéral, notamment en ce qui concerne la stratégie de sortie.

LA SITUATION EN SOMALIE

Lettre datée du 26 septembre 2022, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général - (S/2022/716) 

Lettre datée du 15 octobre 2022, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution 751 (1992) sur la Somalie - (S/2022/766) 

Texte du projet de résolution - S/2022/812 

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions et toutes les déclarations de sa présidence sur la situation en Somalie,

Réaffirmant son attachement à la souveraineté, à l’intégrité territoriale, à l’indépendance politique et à l’unité de la Somalie,

Engageant la Somalie à saisir l’occasion qui lui est offerte d’avancer dans la réalisation de ses priorités nationales, soulignant qu’il importe, à cet égard, que le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération collaborent, réaffirmant qu’il est important pour la stabilité en Somalie qu’aient lieu un dialogue sans exclusive et des processus locaux de réconciliation, et soulignant que la participation pleine, égale et véritable des femmes contribuera à faire progresser les priorités nationales et à appuyer la réconciliation, la sécurité et la transition de l’appui international en matière de sécurité, conformément au Plan de transition de la Somalie et au dispositif national de sécurité,

Se déclarant favorable à la reprise du dialogue entre le Gouvernement fédéral somalien et le Somaliland pour instaurer la confiance et renforcer la coordination politique,

Saluant le soutien apporté par l’Union africaine, par l’intermédiaire de la Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), désormais appelée Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) ; par l’ONU, par l’intermédiaire de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), du Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS) et de ses organismes, fonds et programmes ; par le Groupe d’experts sur la Somalie, à la Somalie mais aussi au Comité 751, et par les partenaires bilatéraux de la Somalie,

Soulignant que son objectif fondamental est de maintenir la paix et la stabilité en Somalie, en soutenant l’édification de l’État et la consolidation de la paix et en faisant avancer les priorités nationales,

Encourageant le Gouvernement fédéral somalien à poursuivre le dialogue engagé avec la Commission de consolidation de la paix en vue d’améliorer le soutien apporté au niveau international aux objectifs de consolidation de la paix en Somalie,

Se déclarant profondément préoccupé par la grave menace que le groupe terroriste des Chabab continue de représenter pour la paix, la sécurité et la stabilité en Somalie et dans la région, et se déclarant par ailleurs préoccupé par la présence continue en Somalie de groupes affiliés à l’EIIL (Daech),

Condamnant dans les termes les plus énergiques les attaques terroristes en Somalie et dans les États voisins, se déclarant profondément préoccupé par les pertes en vies humaines parmi les civils que provoquent ces attaques, et réaffirmant qu’il est déterminé à appuyer les efforts généraux visant à dissiper la menace posée par les Chabab,

Soulignant qu’il importe d’adopter une démarche globale pour combattre le terrorisme et l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme, dans le respect des dispositions applicables du droit international, ainsi que des mesures tenant compte des aspects du problème liés à la gouvernance, à la sécurité, aux droits humains et au développement ou ayant trait aux dimensions humanitaires et socioéconomiques, comme l’emploi des jeunes et l’élimination de la pauvreté, et soulignant l’importance de la coopération régionale et internationale pour lutter contre le terrorisme, désorganiser le financement du terrorisme et les flux financiers illicites et mettre un terme au trafic d’armes,

Saluant le rôle joué par le Gouvernement fédéral somalien, les États membres et les organisations régionales pour réprimer la piraterie et les vols à main armée au large des côtes somaliennes, et prenant note du rôle joué par la MANUSOM dans la facilitation de l’adoption d’une approche coordonnée, sous la conduite de la Somalie, pour développer le secteur de la gouvernance maritime de la Somalie, notamment par la formation du Groupe de travail sur la marine et les garde-côtes somaliens, ainsi que du soutien apporté aux institutions maritimes de la Somalie,

Se déclarant vivement préoccupé par la situation humanitaire en Somalie, encourageant tous les États à apporter un soutien humanitaire plus large à la Somalie, et demandant à toutes les parties au conflit d’autoriser et de faciliter, conformément aux dispositions pertinentes du droit international, notamment du droit international humanitaire applicable, et aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence (résolution 46/182 de l’Assemblée générale), notamment les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire nécessaire pour prêter secours aux personnes dans le besoin en Somalie,

Condamnant fermement le fait de prendre délibérément pour cible des civils, y compris des membres du personnel humanitaire, et des biens civils dans des situations de conflit, ainsi que l’utilisation aveugle d’armes dans des zones peuplées et leurs conséquences pour la population civile, demandant à toutes les parties au conflit en Somalie de s’abstenir de telles pratiques conformément aux obligations qui leur incombent en vertu du droit international, notamment du droit international humanitaire,

Soulignant l’importance de la coordination du Gouvernement fédéral somalien et des États membres de la fédération avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires pour assurer une distribution de l’aide humanitaire en fonction des besoins, y compris une aide alimentaire en nature, et un ciblage approprié des groupes marginalisés, qui peuvent se heurter à des obstacles spécifiques pour accéder à l’assistance et à la protection, à l’appui du plan des Nations Unies pour la prévention de la famine, et l’importance de la collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour élaborer une stratégie interministérielle visant à permettre une adaptation appropriée, à réduire les risques et à atténuer les effets des changements climatiques en Somalie,

Constatant les effets défavorables des changements climatiques, de la dégradation de l’environnement, d’autres changements écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, sur la stabilité en Somalie, qui se manifestent notamment par les inondations, la sécheresse, la désertification, la dégradation des terres et l’insécurité alimentaire, et rappelant sa déclaration présidentielle (S/PRST/2011/15), la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris,

Notant l’importance d’une communication efficace et stratégique pour l’application du mandat de la MANUSOM, notamment en ce qui concerne la consolidation de la paix, l’édification de l’État, la réconciliation, la prévention des conflits, la lutte contre l’extrémisme violent propice au terrorisme, l’éducation civique, l’inclusion des femmes dans les processus politiques, la protection des droits humains et le programme relatif aux jeunes et à la paix et à la sécurité, et soulignant la nécessité de continuer de renforcer les capacités de la MANUSOM à cet égard,

1.    Rappelle qu’il a autorisé l’ATMIS dans sa résolution 2628 (2022) et se félicite de la coopération renouvelée entre toutes les parties prenantes afin que soit exécuté son mandat à l’appui du Plan de transition de la Somalie et du dispositif national de sécurité, et donner à la Somalie les moyens d’assumer progressivement une plus grande part de responsabilité en ce qui concerne sa propre sécurité;

2.    Salue l’examen stratégique de la MANUSOM et approuve les indicateurs proposés dans l’annexe de son rapport (S/2022/716) et les recommandations énoncées au chapitre V du rapport; 

3.    Se félicite de la coopération entre la MANUSOM, le BANUS, l’équipe de pays des Nations Unies et l’ATMIS, souligne l’importance de la collaboration entre l’Organisation des Nations Unies, l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), d’autres partenaires multilatéraux et bilatéraux et la Somalie, et encourage toutes les entités à continuer de renforcer les relations à tous les niveaux, notamment par le biais du Forum de coordination des hauts responsables;

4.    Décide de proroger jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat et les tâches confiés à la MANUSOM en Somalie, tels que définis dans la résolution 2158 (2014) et la résolution 2592 (2021);

5.    Prend note de la stratégie environnementale pour les opérations de paix du Département de l’appui opérationnel (phase II), qui met l’accent sur une bonne gestion des ressources et un héritage positif de la Mission, et fixe pour objectif une utilisation accrue des énergies renouvelables dans les missions afin de renforcer la sûreté et la sécurité, de réaliser des économies, d’offrir des gains d’efficacité et de profiter à la Mission; 

6.    Demande à la MANUSOM de maintenir et de renforcer sa présence dans l’ensemble de la Somalie et de continuer à renforcer sa coopération avec la Somalie et l’ATMIS, dans le respect des normes de sécurité fixées par l’Organisation et si les conditions de sécurité le permettent, et sait que le contexte actuel en Somalie sur le plan politique et dans le domaine de la sécurité affectera la capacité de la MANUSOM de s’acquitter de son mandat; 

7.    Prend note de la reprise des opérations contre les Chabab et engage la MANUSOM à aider la Somalie à:

a)    veiller à ce que des plans soient mis en place pour protéger les civils et les communautés dans les zones qui font l’objet d’opérations militaires, avant, pendant et après les engagements;

b)    accélérer l’application de la Stratégie nationale de stabilisation de la Somalie et des plans de stabilisation des États;

c)    promouvoir la prise de décision, l’appropriation et le contrôle par les autorités civiles dans le cadre de la planification et de la coordination des mesures de stabilisation;

d)    étendre la gouvernance et la prestation de services dans les zones et les districts qui demeurent fragiles, notamment à l’appui du Plan de transition de la Somalie et des mécanismes de planification conjointe pertinents; 

e)    assurer un soutien opportun et équilibré aux zones nouvellement ou récemment reprises aux Chabab;

8.    Encourage le Gouvernement fédéral somalien à renforcer la coopération et la collaboration à tous les niveaux, notamment à:

a)    appliquer le dispositif national de sécurité, mener à bien le Plan de transition de la Somalie, promouvoir la réconciliation politique, nationale et locale, et faire des progrès en vue de finaliser la constitution, et lutter contre les Chabab afin de garantir la paix et la sécurité sur l’ensemble du territoire;

b)    instaurer un climat politique et des conditions de sécurité propices à des processus démocratiques plus inclusifs dans l’ensemble du pays et à tous les niveaux, afin de favoriser le pluralisme politique, et prendre des mesures pour inclure les partis politiques légalement constitués, y compris les partis d’opposition;

c)    promouvoir la participation pleine, égale et véritable des femmes à tous les niveaux de la prise de décisions, y compris dans le cadre de la consolidation de la paix, des processus de réconciliation et de la réforme du secteur de la sécurité;

d)    promouvoir la participation des personnes appartenant à des clans minoritaires et à des groupes sous-représentés, des jeunes et des personnes handicapées;

e)    respecter les droits à la liberté d’expression, d’association, de réunion pacifique et de circulation, y compris la possibilité pour les journalistes de travailler sans entraves, et condamner les discours haineux et les incitations à la violence; et 

f)    renforcer le contrôle exercé par les autorités civiles sur les forces de sécurité, continuer à adopter et à appliquer des procédures appropriées de vérification des antécédents de tout le personnel de défense et de sécurité, en particulier en ce qui concerne le respect des droits humains, et enquêter sur les violations du droit international, notamment du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, ainsi que sur les violences sexuelles et fondées sur le genre dans les situations de conflit et d’après conflit et en poursuivre les auteurs comme il convient, et rappelle à cet égard l’importance de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme instituée par le Secrétaire général s’agissant de l’appui fourni par l’Organisation des Nations Unies aux forces de sécurité somaliennes et à l’ATMIS;

9.    Se déclare préoccupé par toutes les violations du droit international humanitaire ainsi que par les violations des droits humains et les atteintes à ces droits, y compris celles qui sont associées aux violences sexuelles et fondées sur le genre en période de conflit, demande de nouveau à toutes les parties de respecter les obligations que leur impose le droit international, le cas échéant, notamment le droit international humanitaire, pour ce qui est de la protection des civils et des biens à caractère civil, réaffirme qu’il est urgent et impératif de traduire en justice tous les auteurs de violations du droit international humanitaire et de violations des droits humains et d’atteintes à ces droits, et souligne qu’il importe de protéger et de promouvoir le droit à la liberté d’expression et de protéger les journalistes, les autres professionnels des médias et le personnel associé;

10.   Constate avec inquiétude le nombre élevé de cas établis ayant trait aux « six violations graves » commises contre des enfants recensés dans le rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés (S/2022/493) et exposés dans le rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé en Somalie (S/2022/397) et le nombre élevé de violations graves attribuées aux Chabab, et:

a)    Exige que toutes les parties au conflit prennent des mesures appropriées pour:

i)    faire cesser et prévenir les violations et les atteintes dont sont victimes les enfants, y compris la poursuite du recrutement et de l’utilisation d’enfants dans le conflit armé, conformément aux obligations que leur impose le droit international;

ii)   identifier les auteurs de ces violations et atteintes et faire en sorte qu’ils répondent de leurs actes;

iii)  considérer principalement comme victimes les enfants associés aux forces armées et groupes armés ou qui ont été libérés ou autrement séparés de ces forces ou de ces groupes, en application des Principes de Paris auxquels a souscrit le Gouvernement fédéral somalien; et

iv)   cesser, lorsque la pratique contrevient au droit international, de détenir des enfants pour atteinte à la sécurité nationale;

b)    Demande au Gouvernement fédéral somalien d’appliquer dans son intégralité la Convention relative aux droits de l’enfant de 1989 et les deux plans d’action qu’il a signés en 2012, la feuille de route signée en 2019 et les instructions permanentes sur la prise en charge et la remise d’enfants, de renforcer le cadre juridique et opérationnel relatif à la protection de l’enfance en Somalie, et de veiller à ce que la législation interne sur les enfants soit conforme aux obligations qui lui incombent en vertu du droit international et des engagements qu’il a pris en faveur de la protection des enfants;

11.   Condamne fermement tout détournement de l’aide humanitaire et tout acte empêchant cette aide en violation du droit international, notamment les attaques visant le personnel humanitaire et médical, les moyens de transport et le matériel que celui-ci utilise, ainsi que les hôpitaux et autres installations médicales, et:

a)    enjoint à toutes les parties d’autoriser et, conformément au droit international humanitaire applicable, de faciliter pleinement l’acheminement rapide, en toute sécurité et sans entrave de l’aide destinée aux personnes dans le besoin en Somalie, conformément aux principes humanitaires, notamment en vue de l’application du plan de lutte contre la sécheresse et de prévention de la famine et du plan de réponse humanitaire révisé, par l’adoption des mesures suivantes:

i)    démantèlement des points de contrôle illégaux;

ii)   levée des obstacles administratifs et bureaucratiques; et

iii)  protection des acteurs humanitaires et des populations contre toute mesure punitive ou de représailles pour avoir négocié un accès avec les parties au conflit ou fourni une assistance humanitaire ou médicale, conformément au droit humanitaire international;

b)    souligne l’importance de la transparence et du principe de responsabilité dans la fourniture de l’aide humanitaire;

c)    est conscient du rôle que peuvent jouer les États membres de la fédération, les chefs de clan et les chefs religieux pour faciliter et négocier l’accès humanitaire dans toute la Somalie, recommande que les acteurs humanitaires internationaux et nationaux et les responsables locaux bénéficient d’un soutien constant et qu’ils soient protégés contre toute forme de représailles pour avoir cherché à accéder à des zones non contrôlées par le Gouvernement à des fins humanitaires; et

d)    rappelle que le Comité créé par la résolution 751 (1992) peut désigner des personnes ou des entités qui font obstacle à l’acheminement de l’aide humanitaire vers la Somalie, à l’accès à cette aide ou à sa distribution en Somalie; 

12.   Demande au Gouvernement fédéral somalien, aux États membres de la fédération et à tous les acteurs concernés de faciliter, de soutenir et, le cas échéant, d’appliquer des solutions durables au problème des personnes déplacées, y compris des solutions passant par l’intégration locale ou la réinstallation, et de créer des conditions propices à un retour volontaire et pérenne, en toute sécurité et dans la dignité, des réfugiés et des déplacés, en consultation avec ces derniers et conformément aux cadres nationaux et obligations internationales applicables, avec le soutien de la communauté internationale;

13.   Rappelle que le Gouvernement fédéral somalien doit continuer de mettre en place et rendre opérationnels la Commission nationale des droits de l’homme, la Cour constitutionnelle et le Conseil supérieur de la magistrature, conformément à la Constitution provisoire et à la législation applicable et demande au Gouvernement fédéral somalien de faire ce qui suit:

a)    assurer la protection et la promotion des droits des personnes en situation de handicap et des personnes appartenant à des groupes minoritaires, et assurer l’application de lois visant à protéger les droits humains et à rechercher et poursuivre les responsables de violations des droits humains, d’atteintes à ces droits, de violations du droit international humanitaire et de violences sexuelles et fondées sur le genre dans les situations de conflit et d’après conflit;

b)    veiller à ce que la législation sur les infractions sexuelles soit conforme aux obligations incombant à la Somalie en vertu du droit international et des engagements pris en faveur de la protection des enfants et des femmes;

c)    donner effet le plus rapidement possible au Communiqué conjoint, avec le concours de l’Organisation des Nations Unies, et adopter et appliquer le nouveau plan d’action national visant à mettre fin aux violences sexuelles commises en période de conflit;

14.   Souligne que l’Organisation des Nations Unies, le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération doivent prendre en compte les conséquences négatives des changements climatiques, de la dégradation de l’environnement, d’autres changements écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, dans leurs programmes en Somalie, notamment en procédant à des évaluations globales des risques et en élaborant des stratégies de gestion des risques liés à ces facteurs, en tenant compte de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris;

15.   Demande les rapports suivants au Secrétaire général:

a)    un point régulier sur la situation en Somalie et l’exécution du mandat de la MANUSOM, y compris sur les indicateurs établis dans l’examen stratégique, sous forme d’exposés et au moyen de trois rapports écrits au moins, le premier devant lui être présenté le 15 février 2023 au plus tard et les autres tous les 120 jours par la suite; et

b)    un point en temps utile des progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans l’examen stratégique (S/2022/716);

16.   Affirme qu’il continuera de suivre la situation en Somalie et se tiendra prêt à examiner les mesures énoncées dans la présente résolution, à tout moment selon les besoins, à la lumière de l’évolution de la situation politique et de la situation dans le pays;

17.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: le partage des connaissances scientifiques et technologiques alimente les discussions sur les utilisations pacifiques de l’espace

Soixante-dix-septième session,
16e séance plénière – matin
CPSD/762

Quatrième Commission: le partage des connaissances scientifiques et technologiques alimente les discussions sur les utilisations pacifiques de l’espace

Aujourd’hui encore, les pays émergents ont mis en avant le droit de tous les États au progrès et au développement, y compris dans le domaine spatial, à l’occasion du débat général de la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, consacré aux utilisations pacifiques de l’espace. 

Malgré la multiplication des activités et des acteurs spatiaux dans des secteurs aussi divers que l’aviation, le transport maritime, la cartographie, la gestion des risques de catastrophe, les communications, la télémédecine, l’environnement et les ressources naturelles, seuls quelques pays ont pu réaliser des avancées notables dans ce domaine, tandis que les pays émergents commencent à peine à développer leurs programmes spatiaux, a noté l’Éthiopie.  Afin de combler ce fossé scientifique et technologique, elle a appelé, comme le Cameroun et le Bangladesh, à renforcer les transferts technologiques et les capacités des pays en développement. 

Pour Singapour, les petits États ont un rôle à jouer dans l’exploration spatiale et peuvent apporter des contributions significatives à la promotion des utilisations pacifiques de l’espace.  En tant que nation spatiale émergente, ce pays a établi une coopération étroite avec ses partenaires internationaux, en collaboration avec les entreprises spatiales locales, afin de renforcer leurs capacités techniques et de forger des partenariats commerciaux.  Singapour accueille chaque année à cet effet la Convention mondiale de l’espace et de la technologie, et sera l’hôte, en 2023, du cinquième Symposium du Comité de la recherche spatiale (COSPAR). 

Les Émirats arabes unis ont quant à eux lancé leur premier programme d’exploration spatiale il y a 25 ans et fondé, en 2006, un centre de sciences et de technologies spatiales, grâce au transfert de connaissances et de technologie avec la République de Corée.  Le droit à la prospérité, au développement et au progrès appartient à tous les peuples, a fait valoir à son tour le Bahreïn, qui a créé, en 2014, « en s’inspirant des États pionniers qui nous ont précédé sur cette voie », l’Agence nationale des sciences spatiale, qui lancera sous peu un premier satellite afin de suivre les rayonnements gamma ayant un impact sur la santé humaine. 

Pays fortement exposé aux changements climatiques, le Bangladesh accorde pour sa part la priorité à la surveillance environnementale, par le biais d’une agence de télédétection dont l’action porte sur la géologie, la cartographie et la gestion des ressources hydriques, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER). 

Alors que les entités non gouvernementales sont désormais en mesure de participer aux activités spatiales, la Chine a proposé d’interdire l’appropriation nationale des ressources spatiales.  À cet égard, les États doivent renforcer la gouvernance commune de l’espace extra-atmosphérique, en assurant notamment la représentation sur un pied d’égalité de tous les pays, quel que soit leur degré de développement. 

Dans cette optique, l’Inde, « nation spatiale » qui a coopéré au fil des années avec 61 pays en matière d’application des sciences et des technologies spatiales, et qui continue de partager ses installations et son expertise, a annoncé des réformes visant à accroître la participation du secteur privé aux activités spatiales.  Pour ce faire, elle a créé un centre national de promotion et d’autorisation de l’espace, avec pour mandat d’encadrer, d’autoriser et de superviser les activités spatiales des entités privées. 

Comme d’autres pays avancés, le Canada a pour ambition de mener des explorations au-delà de l’orbite terrestre basse, vers la Lune puis vers Mars.  Il été l’un des premiers signataires, en 2020, des accords d’Artémis, qui prévoient notamment le partage des données scientifiques et la réduction au minimum des débris spatiaux.  « Un élément clef des opérations spatiales durables est la nécessité d’utiliser les ressources spatiales in situ, qu’il s’agisse de l’eau, de l’air ou de la propulsion », a expliqué sa déléguée. 

La Commission poursuivra ses travaux le lundi 31 octobre 2022, à partir de 15 heures. 

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE

Déclarations

M. KHALID MOHAMMED H. H. FELEMBAN (Arabie saoudite) a appelé à des efforts concertés de la communauté internationale afin d’utiliser l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques.  Pour ce faire, le Royaume a ratifié de nombreux traités depuis les années 70 et participé aux travaux du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) pour l’intérêt de tous les pays du monde.  La politique de l’Arabie saoudite en ce qui concerne l’espace extra-atmosphérique vise à assurer le développement économique, l’innovation, le développement du capital humain, ainsi que le renforcement de la sécurité nationale et de la coopération internationale, a indiqué son représentant.  À cette fin, son pays a créé, en 2018, l’Autorité saoudienne pour l’espace extra-atmosphérique afin de renforcer ses capacités satellitaires, le transport orbital et les communications.  Selon le délégué, l’espace extra-atmosphérique doit être strictement réservé à des usages pacifiques afin d’éviter sa militarisation et, partant, toute menace à la paix et la sécurité internationales. 

Mme YUMIRKA FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) s’est opposée à la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, en particulier les réseaux de satellites espions qui sont contraire au développement et polluent l’espace.  Elle a demandé que soit combattue cette tendance dans le cadre de l’ONU.  La représentante a ensuite revendiqué le droit des pays en développement à l’utilisation et l’exploration à des fins pacifiques de l’espace, qui reste un rêve inatteignable pour eux.  Malgré l’embargo imposé par les États-Unis contre Cuba, son Gouvernement accorde la priorité à la technologie spatiale dans le cadre notamment de la recherche météorologique pour mieux prévoir les cyclones, mieux gérer les ressources naturelles et anticiper les catastrophes naturelles. 

M. JOHN YING (Singapour) a déclaré que les applications spatiales sont devenues un élément indispensable de la vie quotidienne dans le monde moderne.  Les services et industries s’appuient aujourd’hui sur les infrastructures et les technologies spatiales pour relever les défis émergents, ainsi l’aviation, le transport maritime, la navigation, la cartographie et l’arpentage, la gestion des catastrophes, la sécurité alimentaire, les communications, la télémédecine, la surveillance environnementale et la gestion des ressources naturelles.  Il est donc impératif selon lui que les États Membres œuvrent ensemble à préserver l’espace extra-atmosphérique en tant qu’un bien mondial commun et pacifique.  Les petits États ont un rôle à jouer, a-t-il noté, et peuvent apporter des contributions significatives à la promotion des utilisations pacifiques de l’espace. 

En tant que membre du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et participant au Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes et de principes de comportement responsable, Singapour appuie les discussions sur les meilleures pratiques et les règles qui s’appliquent aux activités spatiales, a poursuivi le délégué.  À cette fin, a annoncé son représentant, Singapour accueille chaque année la Convention mondiale de l’espace et de la technologie, et sera bientôt l’hôte du cinquième Symposium du Comité de la recherche spatiale (COSPAR).  En tant que nation spatiale émergente, Singapour établit une coopération étroite avec ses partenaires internationaux et l’industrie, en collaboration avec les entreprises spatiales locales, afin de renforcer leurs capacités techniques et de forger des partenariats commerciaux, a expliqué M. Ying.  Cette coopération, a-t-il ajouté, est soutenue par le Programme de développement des technologies spatiales, lancé par l’Office de la technologie spatiale et de l’industrie de Singapour pour faciliter la transformation de la recherche en produits commerciaux viables. 

M. GULED ABDO MOHAMMED (Éthiopie) s’est félicité de la contribution de la recherche et du développement dans le domaine des sciences et des technologies spatiales au développement durable et à la protection de l’environnement.  Bien que les activités continuent d’augmenter et que les acteurs spatiaux se multiplient, seuls quelques pays ont pu réaliser des avancées notables dans les activités spatiales, tandis que les pays en développement commencent à peine à développer leurs programmes spatiaux.  Le représentant a donc appelé à renforcer les capacités et l’assistance technique afin de permettre aux pays en développement de réaliser des progrès dans ce domaine.  Afin de maintenir dans l’espace un ordre fondé sur des règles, le délégué a plaidé pour l’élaboration d’un droit international, de normes et de lignes directrices de l’espace.  Il s’est félicité à cet égard de l’adoption, en 2021, de la résolution 76/3 sur le Programme « Espace 2030 », dont la mise en œuvre contribue à la réalisation des objectifs de développement durable et au renforcement de la coopération internationale, notamment dans les pays en développement.  Pour développer ce secteur, l’Éthiopie a mis en place l’Observatoire et le centre de recherche d’Entoto, qui sert également d’institut de formation pour l’Afrique de l’Est, tandis que l’Institut éthiopien des sciences et technologies spatiales (ESSTI) s’efforce d’élargir la coopération internationale afin de faire progresser le développement de l’astronomie. 

Pour Mme KELLER (États-Unis), les principes du Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 et les autres obligations internationales applicables régissent toute la palette des activités spatiales publiques et privées, y compris l’atténuation de l’impact des débris spatiaux, la viabilité à long terme des activités spatiales ou encore l’utilisation des ressources spatiales.  La déléguée américaine a dit que son pays se tenait prêt à parler avec le COPUOS du Programme Artemis, un effort des États-Unis partagé avec vingt autres nations portant sur la manière de gérer un environnement spatial sûr pour le bien-être toute l’humanité. 

Mme YANRUI ZHAO (Chine) a souligné l’importance de l’appropriation nationale de l’utilisation et de l’exploitation des ressources spatiales.  Elle a estimé que la coopération spatiale peut rapprocher de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Proposant d’améliorer le Traité sur l’espace extra-atmosphérique, la représentante a défendu le principe de règles relatives à la gestion des débris spatiaux.  Pour ce faire, elle a préconisé un multilatéralisme et une représentation équitable de tous les pays dans la gouvernance de l’espace extra-atmosphérique.  La déléguée a également suggéré d’adopter de nouvelles manières d’interagir avec les entités non gouvernementales dans ce domaine.  Il faut en outre approfondir la coopération internationale pour mettre la technologie spatiale au service du développement et de la lutte contre la pauvreté, a insisté la représentante.  À cet égard, a-t-elle précisé, la station spatiale chinoise est ouverte à la coopération internationale et un prochain partenariat sera annoncé en temps opportun.  La représentante s’est en conclusion enorgueillie du bouquet satellitaire chinois lancé pour la recherche météorologique et la lutte contre les changements climatiques. 

Mme ABDULRAHMAN (Bahreïn) a noté qu’alors que notre monde est aujourd’hui témoin de tensions accrues dans l’exploration de l’espace extra-atmosphérique, nous devons promouvoir les utilisations pacifiques de l’espace en avançant sur différents fronts permettant de préserver la paix et la sécurité internationales.  Le droit à la prospérité, au développement et au progrès est un droit de tous les peuples.  À cet égard, le maintien de la paix et de la sécurité doit être une priorité, en s’appuyant sur les textes juridiques relatifs aux activités d’explorations spatiales, notamment le Traité sur l’espace extra-atmosphérique.  La représentante a ensuite souligné l’importance de l’utilisation de la technologie spatiale à des fins de développement durable et de protection environnementale, qui doit faire à ses yeux l’objet d’une analyse plus fine afin de s’attaquer au défi émergent des changements climatiques.  En 2014, le Bahreïn a lancé l’Agence nationale des sciences spatiales afin d’identifier les meilleures pratiques scientifiques et applications technologiques dans le domaine spatial, en s’inspirant des États pionniers qui l’ont précédé sur cette voie, ce qui a mené la conception d’un premier satellite national, qui sera mis sur orbite en 2023, afin de suivre les rayonnements gamma et de faciliter la navigation aérienne. 

M. YAARB AHMED NASER AL-TEMEMY (Iraq) a défendu l’utilisation pacifique de l’espace.  Les applications évoluent rapidement, et l’Iraq y est attentif.  Le pays souhaite que soient diffusées ces technologies au sein de ses universités et centres de recherches, car elles garantissent progrès et développement.  Le délégué a donc réclamé davantage de renforcement de capacités pour les pays en développement; le COPUOS est l’instance à privilégier pour les échanges sur ces questions selon lui.  L’orateur a donné des exemples nationaux d’applications spatiales: exploitation de données pour faciliter l’accès aux logements, avec un accompagnement des municipalités; un meilleur aménagement du territoire, notamment dans les zones iraquiennes libérées de l’emprise de Daech.  L’Iraq développe un programme spatial et un cursus d’ingénierie spatiale a été créé dans l’un de ses centres de recherche.  Différents instruments spatiaux sont utilisés pour l’analyse du territoire, identifier les sécheresses et étudier comment évoluent les zones marécageuses, a précisé le délégué.  Les applications spatiales facilitent le recensement, la réhabilitation des bidonvilles et la traçabilité des véhicules gouvernementaux.  La question des « nanosatellites » est également suivie de près par l’Iraq, en tant qu’outils pour lutter contre la désertification, a encore indiqué le représentant, avant d’annoncer qu’un satellite de communication iraquien devrait être placé sur orbite « d’ici peu ». 

Pour M. AHIDJO (Cameroun), il n’y a pas de développement sans exploitation efficace des données géospatiales.  Il a défendu l’utilisation et l’exploration spatiale pour identifier des solutions pour le développement, faire face aux changements climatiques et réaliser les objectifs de développement durable.  Le représentant a dit être préoccupé par la course aux armements dans l’espace et l’éparpillement des débris spatiaux.  Ces questions interpellent la communauté internationale, a-t-il rappelé, en invitant à l’utilisation sûre et viable de l’espace et à relever ensemble les défis qui se posent dans l’exploitation de l’espace extra-atmosphérique.  Il a recommandé de renforcer la coopération internationale et sauvegarder l’ordre paisible de l’espace.  L’ONU constitue la plateforme de discussions à ces problèmes, a estimé le représentant, qui a encouragé le Bureau des affaires spatiales et le COPUOS dans leur travail. 

M. AL QASIM (Émirats arabes unis) a souligné l’importance du dialogue afin d’assurer l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique et de combler les lacunes existantes dans les systèmes spatiaux.  Les Émirats arabes unis ont lancé leur premier programme d’exploration spatiale il y a 25 ans, a-t-il rappelé, et fondé un centre des sciences et des technologies spatiales en 2006, chargé de développer les capacités d’observation terrestre, grâce à un transfert de connaissances et de technologies avec la République de Corée.  Le premier astronaute émirati est revenu il y a peu de temps de la Station spatiale internationale.  Bientôt, les Émirats arabes unis lanceront leur première mission lunaire, afin notamment d’étudier les conditions plasma dans l’atmosphère lunaire et d’analyser les poussières lunaires.  Le délégué a reconnu le droit de chaque État Membre de développer son programme spatial, tout en appelant au désarmement, à la non-prolifération et au développement durable dans l’espace.  À cette fin, il a appelé les États Membres à encadrer les partenariats publics-privés.  Il a invité en terminant les délégations à participer au débat spatial Abou Dhabi, qui sera consacré à la durabilité de l’environnement spatial. 

Mme AQNEW (Canada) a déclaré que la coopération internationale dans l’espace constitue un outil idoine pour la paix et la diplomatie entre les nations.  Le Canada s’est engagé, le mois dernier, à partager les pratiques optimales en matière de missions CubeSat avec l’Agence nationale spatiale de l’Ukraine.  Selon la représentante, le consensus sur le préambule et les 21 lignes directrices pour la durabilité des activités spatiales reste l’une des réalisations internationales les plus importantes pour promouvoir la sécurité et la durabilité des activités spatiales.  Après huit années de travail, le Groupe d’experts sur la météorologie spatiale a formulé une série de six recommandations visant à améliorer la coordination internationale des services de météorologie spatiale, s’est félicitée la déléguée.  De même, la résolution sur l’espace et la santé mondiale présente des recommandations pratiques qui renforcent le rôle des solutions spatiales dans les initiatives sanitaires à l’échelle mondiale. 

Afin d’examiner les façons de travailler de manière sûre et durable dans l’espace lointain, le Canada a été l’un des premiers signataires, en 2020, des accords d’Artémis, qui se veulent la mise en œuvre concrète des principes énoncés dans le Traité sur l’espace extra-atmosphérique et d’autres textes fondamentaux.  Ces principes comprennent notamment l’engagement à respecter les dispositions du Traité sur l’espace extra-atmosphérique, à réduire au minimum les débris spatiaux, à partager les données scientifiques, à protéger notre patrimoine commun et à mener les opérations de manière à éviter les interférences nuisibles, a-t-elle expliqué.  Un élément clef des opérations spatiales durables est la nécessité d’utiliser les ressources spatiales in situ, qu’il s’agisse d’eau, d’air ou de propulsion, a précisé la représentante. 

M. MD SHOWEB ABDULLAH (Bangladesh) a appelé au partage de l’utilisation de l’espace pour le développement économique et social des pays en développement.  Le Bangladesh a lancé un programme satellitaire pour la surveillance de ses ressources naturelles dès son indépendance.  Il a créé une agence de télédétection dont l’utilité s’étend à la géologie, la cartographie, les ressources hydriques, la gestion des terres et les sciences de l’éducation, entre autres.  Alors que le Bangladesh est en procédure de reclassement vers la catégorie des pays à revenu intermédiaire, le pays a lancé son premier satellite de télécommunications en 2018, lui permettant de proposer à sa population des services bancaires, de télémédecine, de communication à distance, entre autres.  Cela aide grandement à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  D’une manière générale, les technologies spatiales contribuent à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ainsi qu’à respecter l’Accord de Paris, a souligné le délégué du Bangladesh.  En tant qu’un des pays les plus exposés aux changements climatiques, le Bangladesh accorde la priorité à leur surveillance environnementale, et soutient à ce titre le Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER). 

Mme HANA BINTI NORDIN (Malaisie) a déclaré qu’il est plus que jamais crucial pour la communauté internationale d’empêcher la militarisation de l’espace extra-atmosphérique et de veiller à ce qu’il soit exempt de tout type d’armes.  Elle a souligné la nécessité d’une plus grande transparence et d’un échange d’informations entre tous les acteurs concernés.  La Malaisie, a annoncé la représentante, est déterminée à ratifier et à adhérer aux traités internationaux régissant l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique.  À cet égard, le Gouvernement a élaboré la politique spatiale nationale 2030 et, en janvier dernier, publié la loi de 2022 sur le Conseil spatial.  Plaidant pour une utilisation durable de la science, de la technologie et de l’espace extra-atmosphérique, la Malaisie a utilisé des images satellites pour améliorer l’efficacité de la prestation de ses services publics durant la pandémie de COVID-19, a fait valoir Mme Nordin.  Le 22 juin 2022, elle a lancé le satellite de communication MEASAT-3d à l’aide d’une fusée Ariane 5 afin d’améliorer encore l’empreinte des TIC dans la région.  Elle a ajouté que la viabilité des activités spatiales ne peut être assurée que par le développement de technologies et d’applications spatiales fondées sur le principe d’avantages équitables et mutuels ainsi que sur le plein respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des États. 

M. NITISH BIRDI (Inde) a déclaré que son pays est une grande nation spatiale et a un intérêt vital dans le développement de l’espace.  Nous soutenons et défendons la nécessité de préserver l’espace extra-atmosphérique en tant que patrimoine commun de l’humanité, a-t-il ajouté, y compris pour les États qui aspirent à développer leurs connaissances dans ce domaine.  Le programme spatial indien a toujours eu pour objectif l’intégration des avancées en matière de technologies et d’applications spatiales aux objectifs de développement national et au renforcement des capacités des véhicules de lancement, des satellites et des applications spatiales pour répondre aux besoins de la nation, a assuré le représentant.  De fait, a-t-il noté, l’Organisme indien de recherche spatiale travaille avec 60 ministères et départements à la promotion des applications technologiques spatiales.  Au fil des ans, l’Inde a signé plus de 260 documents de coopération spatiale avec 61 pays et cinq organismes multinationaux en vue de l’utilisation pacifique de l’espace.  L’Organisme indien de recherche spatiale continue de partager ses installations et son expertise en matière d’application des sciences et technologies spatiales avec des partenaires internationaux en organisant des formations par l’intermédiaire de l’Institut indien de télédétection (IIRS) et du Centre de formation aux sciences et techniques spatiales pour l’Asie et le Pacifique (CSSTEAP), affilié aux Nations Unies.  Le Gouvernement indien a par ailleurs annoncé des réformes dans le secteur spatial dans le but d’accroître la participation du secteur privé aux activités spatiales, a expliqué le délégué.  Dans cette optique, un centre national indien de promotion et d’autorisation de l’espace a été créé, avec pour mandat de promouvoir, d’encadrer, d’autoriser, de contrôler et de superviser les activités spatiales des entités privées non gouvernementales et d’accorder les autorisations nécessaires conformément aux dispositions réglementaires. 

Mme SHIRAZI (Israël) a déclaré que la pandémie de COVID-19 avait encouragé et même accentué la dépendance aux applications spatiales.  Israël compte parmi les quelques pays capables à titre national de faire fonctionner ses propres satellites, a-t-elle précisé.  Le pays a signé le Programme Artemis et réitéré sa volonté de collaborer avec d’autres États Membres dans les applications spatiales, ayant d’ailleurs participé à la première mission Artemis sur la Lune.  Israël souhaite mettre à profit différentes avancées diplomatiques au Moyen-Orient, notamment les ccords d’Abraham, pour promouvoir la collaboration spatiale entre les pays de la région et lutter de concert contre les changements climatiques à l’échelle régionale, a poursuivi l’oratrice.  La première mission israélienne sur la Lune en 2019 a été couronnée de succès, s’est-elle enorgueillie, une seconde mission étant prévue pour 2025, dans le cadre de laquelle Israël souhaite coopérer avec d’autres nations. 

Mgr GABRIELE CACCIA, du Saint-Siège, a dit que l’encombrement de la partie de l’espace extra-atmosphérique la plus proche de la Terre par des satellites et des débris crée une concurrence pour les orbites accessibles, menaçant son utilisation pacifique.  Il faut donc nouer des accords sur un système de gouvernance et créer des arrangements institutionnels de façon à promouvoir ce bien commun et le protéger des abus.  S’agissant de la viabilité future des activités spatiales, cela exige que tous les États coopèrent pour limiter la création de nouveaux débris spatiaux, a estimé l’observateur, en encourageant à éliminer les débris existants.  Ravi de la tendance actuelle, il a salué l’utilisation éventuelle future de vaisseaux spatiaux et satellites passant par un système circulaire. 

Il a proposé de trouver un équilibre entre intérêts commerciaux et recherche scientifique.  L’observateur a dit s’inquiéter de la volonté d’exploiter les astéroïdes et la Lune pour en extraire des minerais rares.  Avant de mener toute opération de ce genre, un système international de réglementation devrait être mis au point pour éviter l’accaparement de ces ressources, et en particulier veiller à ce que l’approche de ces corps célestes se fasse en pleine conscience de la valeur inhérente à ces éléments.  Il faut à cet égard préserver les zones d’importance particulière afin de les protéger des changements apportés par l’intervention humaine, a encore recommandé l’observateur.  Il a demandé que soit renforcée la collaboration pour examiner comment l’espace extra-atmosphérique contribue à la réalisation des ODD, y compris grâce à une surveillance environnementale, à des systèmes d’alerte précoce des catastrophes naturelles, à un contrôle de la mise en œuvre des accords environnementaux et de l’assistance à la santé mondiale. 

Droit de réponse

En référence aux propos tenus par l’Union européenne sur la situation en Ukraine, la Fédération de Russie a déploré s’être heurtée, au cours des débats de la Commission, à la politisation du dialogue sur l’espace extra-atmosphérique, alors qu’elle s’y est toujours opposée.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission accueille la Présidente de la CIJ et entame l’examen de nouveaux chapitres du rapport de la CDI, dont l’élévation du niveau de la mer

Soixante-dix-septième session,
26e & 27e séances plénières, Matin & après-midi
AG/J/3672

La Sixième Commission accueille la Présidente de la CIJ et entame l’examen de nouveaux chapitres du rapport de la CDI, dont l’élévation du niveau de la mer

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a reçu ce matin la visite traditionnelle de la Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ), Mme Joan Donoghue, qui a présenté hier le rapport annuel de la Cour internationale de Justice (CIJ) à l’Assemblée générale.  Le Président de la Sixième Commission, M. Pedro Afonso, a rappelé que la jurisprudence de la Cour a été et continue d’être de la plus haute importance pour le développement progressif du droit international. 

Mme Donoghue a choisi de partager avec la Sixième Commission ses réflexions sur le rôle de juge ad hoc nommé conformément à l’article 31 du Statut de la Cour; le rôle de de la CIJ comme cour de première instance; et le rythme des procédures devant la Cour.  « La CIJ n’est pas une cour de cassation ou une cour d’appel chargée uniquement de répondre à des questions de droit », a-t-elle analysé.  À ce titre, la Cour évalue les preuves présentées devant elle et s’inspire à la fois du droit civil et du droit commun. 

Lors du bref échange qui a suivi son intervention, la Présidente a pu répondre à certaines critiques quant au rythme de travail de la Cour.  « La Cour ne se contente plus de traiter une seule affaire à la fois. »  Mme Donoghue a fait valoir que la CIJ a largement rattrapé le retard qu’elle avait pu accumuler par le passé, en dépit d’un greffe dont la taille ne reflète pas l’augmentation du nombre d’affaire qu’elle doit traiter.  Interrogée par M.  Afonso sur l’extension de la compétence de la Cour aux organisations internationales, elle a souligné que, si le Statut de la CIJ devait être révisé, ce point ferait sans doute l’objet d’un consensus rapide dans la mesure ou une telle intervention est déjà permise devant d’autres tribunaux.

Le rôle de la CIJ a également été mentionné dans le cadre des débats qui ont débuté aujourd’hui sur le deuxième groupe de chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI), à savoir l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Sur ce deuxième point, le représentant des Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a soutenu l’initiative de Vanuatu visant à demander à la CIJ un avis consultatif sur les obligations des États face aux changements climatiques et à leurs effets néfastes.  L’élévation du niveau de la mer n’étant plus une préoccupation « hypothétique » mais bien réelle, il a salué le travail de la CDI et de son Groupe de travail dédié, comme une majorité de délégations après lui.

Si l’Union européenne et l’Islande, au nom des pays nordiques, ont rappelé le rôle central et « l’intégrité » de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, l’Iran, rejointe par l’Inde sur ce point, a jugé que cette lex lata était inadéquate face à l’élévation du niveau de la mer et plaidé pour une solution « juste et équitable » face aux modifications territoriales qui en découlent.  La Malaisie a affirmé que « les frontières maritimes doivent être fixées à perpétuité, indépendamment de l’élévation du niveau de la mer », position également partagée par Cuba.  L’Allemagne a, de son côté, estimé que si la Convention donne le droit à l’État côtier d’actualiser ses lignes de base en cas d’élévation du niveau de la mer, il ne s’agit pas d’une obligation.

L’élévation du niveau de la mer constitue une menace « existentielle », a pour sa part estimé Singapour, qui a, à ce titre, soutenu une distinction entre les critères relatifs à l’établissement d’un État et ceux relatifs à la poursuite de son existence. 

À l’instar des États-Unis, de l’Autriche, du Brésil, de la Roumanie, de l’Irlande ou encore de la Hongrie, la Pologne a noté les difficultés posées en cas d’inondation totale du territoire d’un État puisque la circonstance est inédite et qu’il n’existe « pas ou peu de précédent ».  À ce titre, l’Arménie s’est dit favorable à un raisonnement par analogie.  L’Italie a, de son côté, proposé de distinguer les cas où le territoire est complètement submergé et ceux où un État est devenu inhabitable.  L’Iran a, pour sa part, avancé l’idée du transfert de la souveraineté d’un tel territoire à un mécanisme international comme l’Autorité internationale des fonds marins.

El Salvador et le Brésil ont réitéré l’importance de protéger les personnes affectées par l’élévation du niveau de la mer.  La Slovénie a cité les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), selon lesquelles plus d’un milliard de personnes pourrait être touchées par ce phénomène d’ici à 2050.  Les États-Unis ont indiqué envisager les moyens de renforcer l’accueil des personnes « qui fuient les impacts des changements climatiques ».  L’Islande a néanmoins estimé qu’il est encore « trop tôt » pour conclure à la nécessité d’un cadre juridique spécifique sur ce point.

La Sixième Commission reprendra son débat sur ces questions mardi 1er novembre, à partir de 10 heures. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-TREIZIÈME SESSION - A/77/10

Intervention de la Présidente de la Cour internationale de Justice

Mme JOAN E. DONOGHUE, Présidente de la Cour internationale de Justice, a commencé par partager avec la Sixième Commission ses réflexions sur le rôle de juge ad hoc nommé conformément à l’article 31 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Elle a rappelé que, lors de la rédaction du Statut de la Cour permanente de Justice internationale (CPJI), qui a, la première, établi le rôle du juge ad hoc, il était présumé que les États nommeraient l’un de leurs nationaux pour assurer cette fonction.  Si cette pratique a bien été suivie par la CPJI et dans les premières années du fonctionnement de la CIJ, la tendance s’est, depuis, inversée, a remarqué la présidente.  Elle a indiqué que, sur la période 2012-2021, 80% des nouveaux juges ad hoc n’étaient pas des nationaux des États les ayant nommés.  Cette tendance indique, selon elle, que les États ne semblent pas attacher d’importance à l’expertise des juges ad hoc dans le droit interne de l’État qui les désigne.  La Présidente s’est en outre interrogée sur la pertinence de la désignation d’un juge ad hoc pour « neutraliser les vues opposées », notant l’incohérence arithmétique d’une telle logique.  La motivation prévalente de leur nomination, a-t-elle estimé, semble tenir à ce qu’elle garantit, pour les parties qui les nomment, « la présence d’une personne dans la salle pendant les délibérations privées de la Cour qui est particulièrement attentive aux intérêts de cet État, et qui peut apporter ces connaissances dans les échanges confidentiels au sein de la Cour ».  L’objectif est alors de nommer une personne qui, quelle que soit sa nationalité, dispose d’une large connaissance de la Cour et de ses procédures et maîtrise du sujet, et qui soit perçue comme crédible et juste par les autres membres de la Cour.  Mme Donoghue a conclu que le juge ad hoc reste une institution « importante et pertinente ».  Elle a néanmoins regretté que l’essentiel des juges ad hoc nommés soient des hommes issus de pays développés, appelant à plus de diversité et d’équilibre.

La Présidente s’est ensuite tournée vers le rôle de la CIJ comme cour de première instance, comparant sa fonction à celle des juridictions de première instance dans les ordres internes des États.  « La CIJ n’est pas une cour de cassation ou une cour d’appel chargée uniquement de répondre à des questions de droit », a-t-elle déclaré.  À ce titre, la Cour évalue les preuves présentées devant elle.  La CIJ, a précisé Mme Donohue, n’est ni une cour de droit commun, ni une cour de droit civil, et sur la question de la preuve son Statut et son Règlement s’inspirent des deux traditions.  Si la Cour a clairement indiqué que la charge de la preuve repose sur la partie qui invoque un fait, elle a également fait preuve de flexibilité dans certaines circonstances, notamment lorsqu’une telle preuve n’est pas disponible pour la partie qui l’invoque.  Elle a également souligné la réticence de la Cour de fixer une norme spécifique sur la preuve afin, là encore, de maintenir un équilibre entre les deux traditions.

Enfin, Mme Donoghue a évoqué le rythme des procédures devant la Cour.  Elle a rappelé les modalités et les différentes phases de la procédure.  Les deux parties demandent souvent de longues périodes, pouvant aller jusqu’à un an, pour la préparation de leurs plaidoiries respectives, et la procédure écrite est fréquemment interrompue par les procédures incidentes.  Si par le passé la Cour a fait face à un important retard pour la procédure orale, elle a largement rattrapé ce retard grâce aux réformes de ses méthodes de travail, a précisé la Présidente.  La Cour ne se contente plus de traiter une seule affaire à la fois.  Elle s’est néanmoins inquiétée que la taille du greffe ne reflète pas l’augmentation du nombre d’affaires soumises à la CIJ ces dernières années.  La Présidente a estimé que, si la procédure de la Cour pouvait être plus efficace, ce gain d’efficacité affecterait la qualité des jugements.  En conclusion, Mme Donoghue a fait valoir que les critiques dirigées contre la procédure suivie par la Cour ne sont « plus pertinentes ». 

Dialogue interactif avec la Présidente de la Cour internationale de Justice

La représentante de la Colombie a souligné que, lors de la nomination des juges ad hoc, les limitations linguistiques constituent un obstacle à la désignation d’un juge de la nationalité de l’État partie.  En réponse, la Présidente a noté que les deux langues de travail du Secrétariat des Nations Unies sont prévues par la Charte des Nations Unies et que la Cour n’a donc malheureusement pas de marge de manœuvre sur ce point.

Le représentant de l’Égypte a posé une question relative aux règles de procédures et à l’harmonisation des traditions juridiques.  La Présidente a rappelé que le Statut de la CIJ ne peut pas être modifié par la Cour puisqu’il est hérité de la CPJI, mais qu’il reste pertinent car il est général et n’empêche pas la Cour de s’adapter.  Le Règlement de la Cour lui accorde plus de flexibilité, mais là encore, la CIJ n’y a apporté que peu de modifications.  La structure est « durable et raisonnable », a-t-elle estimé.  Cette structure confère également un certain degré de flexibilité sur la question des traditions juridiques, a-t-elle ajouté.  Le représentant de l’Égypte a repris la parole pour demander à la Présidente de clarifier l’influence des traditions juridiques sur la rédaction des arrêts.  La Présidente a reconnu que le processus de rédaction est influencé à la fois par les traditions juridiques et par les préférences des juges.  Elle a néanmoins noté que, les procédures étant collégiales, les jugements sont amendés pour être largement acceptés, à la fois sur la substance et sur le style. 

La représentante du Canada s’est interrogée sur les mesures envisagées pour gérer l’augmentation des demandes en indication de mesures conservatoires.  La Présidente a noté que, si les parties à une affaire demandent un format différent, à l’instar d’une chambre, cela pourrait être envisagé, mais qu’une telle initiative ne devrait pas venir de la Cour.

La représentante de la Grèce est revenue sur la fréquence de l’absence de nomination d’un juge ad hoc et sur la position de la Cour dans ce cas de figure.  La Présidente a noté que, dans certaines affaires, les parties se sont accordées pour ne pas nommer de juges ad hocDans tous les cas, il s’agit d’une décision exclusivement entre les parties.

Le représentant de l’Arménie s’est intéressé aux progrès de l’évaluation des règles de procédure de la Cour par le Comité du Règlement dans le contexte de la charge de travail de la Cour.  La Présidente a noté que le comité du Règlement parvient à conserver un rythme robuste et énergique en dépit de la charge de travail de la Cour.

Le Président de la Sixième Commission a interrogé la Présidente de la CIJ sur l’extension de la compétence de la Cour aux organisations internationales.  La Présidente a estimé que, si le Statut de la CIJ devait être révisé, ce point ferait sans doute l’objet d’un consensus rapide dans la mesure où des instruments plus modernes comme le Tribunal international du droit de la mer (TIDM) permettent déjà une telle intervention.

Débat général sur le module 2: chapitre VI (Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État) et chapitre IX (L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international)

M. THOMAS RAMOPOULOS (Union européenne) a centré son intervention sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Il faut consolider les travaux de la CDI sur ce sujet, a dit le délégué.  Il a réaffirmé l’importance de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et appelé à la préservation de son intégrité.  « C’est la véritable constitution du droit de la mer. »  En conséquence, toute question juridique soulevée par l’élévation du niveau de la mer doit être traitée dans le cadre de la Convention, a-t-il fait valoir.  Le délégué a appelé à la prudence quant à l’examen de la pratique régionale des États.  « Certaines pratiques ne doivent pas amener à la reconnaissance d’un droit coutumier local. »  Il a rappelé que le principe selon lequel « la terre domine la mer » préside à la délimitation des zones maritimes, en soulignant l’importance des lignes de base pour une telle délimitation.  Il faut reconnaître la stabilité des zones maritimes établies par traité ou par adjudication, a-t-il dit. 

M. STAN SMITH (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a rappelé que les États membres de la CARICOM sont en première ligne de la lutte contre les changements climatiques, notamment s’agissant des dommages physiques et de l’élévation du niveau de la mer.  Si la CARICOM convient avec la Commission que la question de l’élévation du niveau de la mer est un phénomène mondial, avec des implications directes pour plus d’un tiers de la communauté internationale, les effets auxquels sont confrontés les petits États insulaires en développement (PEID), y compris ceux de la CARICOM, ne peuvent plus être traités comme un problème pour les générations futures.  M. Smith a apprécié que le Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait reconnu qu’il ne s’agit plus d’une préoccupation hypothétique étant donné le « caractère progressif du phénomène ».  À cet égard, il s’est félicité de l’examen de ces questions par la CDI, notamment les implications juridiques de l’inondation des zones côtières et des îles, car les zones maritimes sont essentielles pour le statut et la stabilité juridique des États côtiers.  Les conséquences pour la qualité d’État au regard du droit international si le territoire et la population d’un État venaient à disparaître, les protections au titre du droit international dont bénéficient les personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer et la question de savoir si le principe de la coopération internationale doit être appliqué pour aider les États à faire face à l’élévation du niveau de la mer, sont autant de questions qui intéressent la CARICOM. 

La CARICOM, a poursuivi M. Smith, a pris acte des préoccupations exprimées quant au fait que le champ d’application des sous-thèmes est trop large et, par conséquent, de la nécessité de réduire le nombre de questions à l’examen.  Il s’est toutefois inquiété du risque de concentrer l’attention sur des sujets dont l’étude et la pratique sont déjà avancées, telles que le droit de la mer et la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer.  Il a donc vivement encouragé la CDI à « éviter de restreindre la portée des sujets et de réduire leur pertinence pour les États Membres ».  Nous attendons avec impatience, a-t-il dit, la présentation par Vanuatu, lors de la présente session de l’Assemblée générale, de la résolution sur le climat qui demande à la Cour internationale de Justice (CIJ) de fournir un avis consultatif sur les obligations des États, en vertu du droit international, de sauvegarder les droits des générations actuelles et futures face aux changements climatiques et à leurs effets néfastes.  Il a espéré que le Groupe d’étude en tiendra compte lors de ses prochaines délibérations.  « Nous restons déterminés à nous engager dans l’avancement du droit international à cet égard. »

Mme ANNA JOHANNSDOTTIR (Islande) au nom des pays nordiques, a souligné le jalon que constitue l’adoption en première lecture du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  La CDI est parvenue à un équilibre entre les intérêts de l’État du for et ceux de l’État du représentant, a-t-elle estimé.  Elle a apporté son appui au projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas), avant de rappeler l’engagement des pays nordiques en faveur du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) et des autres traités énumérés en annexe.  Elle a souligné l’importance d’harmoniser le projet d’articles avec ces traités.  Elle a en particulier salué le libellé du paragraphe 3 de l’article 7 qui permet d’en réduire le potentiel d’utilisation abusive, sans empêcher une application de bonne foi.  La déléguée a considéré que ce projet peut constituer une bonne base pour l’élaboration d’un traité, tout en reconnaissant que la plupart des articles reflètent le droit international coutumier et sont donc juridiquement contraignants pour les États.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, Mme Johannsdottir a rappelé les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur le réchauffement climatique, avant d’insister sur la vulnérabilité des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a réaffirmé l’importance de préserver l’intégrité de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.  Enfin, s’agissant de la protection des personnes affectées par l’élévation du niveau de la mer, la déléguée a estimé qu’il est encore « trop tôt » pour conclure à la nécessité d’un cadre juridique spécifique, tout en invitant la CDI à réfléchir davantage à cette question.

Mme DAPHNE HONG (Singapour) a estimé que si les garanties procédurales sont importantes pour assurer le respect de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, une marge d’appréciation et de flexibilité doit être accordée aux États afin de répondre aux circonstances.  Selon la déléguée, il serait utile que les commentaires clarifient par exemple que l’obligation énoncée au paragraphe 2 du projet d’article 9 (Examen de la question de l’immunité par l’État du for) n’exclut pas l’adoption de mesures nécessaires et proportionnées pour prévenir un préjudice en réponse à un recours imminent et illicite à la force.  Cela devrait s’appliquer de la même manière à l’obligation, prévue au paragraphe 1 du projet d’article 10 (Notification à l’État du représentant), de notifier l’État d’un fonctionnaire étranger avant de prendre des mesures coercitives à son égard. 

Abordant ensuite le chapitre IX du Rapport, la déléguée s’est jointe aux autres petits États insulaires en développement (PEID) pour souligner la « menace très réelle et existentielle » que représente l’élévation du niveau de la mer.  Évoquant les travaux du Groupe d’étude sur ce point, elle a soutenu l’opinion selon laquelle il convient d’établir une distinction entre les critères relatifs à l’établissement d’un État et ceux relatifs à la poursuite de son existence.  Cela dit, cette question et ses implications nécessitent un examen plus approfondi, a-t-elle estimé.  En particulier, nous reconnaissons que la perte prolongée ou permanente d’un territoire affecterait presque inévitablement, dans la pratique, la capacité d’un État à exercer ses droits et à remplir ses obligations en vertu du droit international, a dit la déléguée.  Elle a jugé utile d’examiner les options pratiques qui peuvent être envisagées par les États vulnérables dont l’existence même est actuellement menacée par l’élévation du niveau de la mer. 

M. MARCINIAK (Pologne), abordant le chapitre relatif à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, a estimé qu’un réel effort avait été fait pour élaborer un ensemble de projets d’articles qui reflètent de manière optimale un certain nombre de questions juridiques, notamment l’équilibre à trouver entre le droit relatif aux immunités et la nécessité de combattre l’impunité pour les crimes les plus odieux au regard du droit international.  Le délégué a soulevé la question de la liste des crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas (article 7).  La Pologne, a-t-il dit, doute de la pertinence d’omettre le crime d’agression.  Citant les justifications de la Commission, y compris l’obligation pour les tribunaux nationaux de déterminer l’existence d’un acte d’agression préalable de la part de l’État étranger et la dimension politique particulière de ce type de crime commis par des dirigeants politiques, le délégué a estimé qu’il faut cependant être conscient que, dans une large mesure, « les mêmes arguments pourraient être appliqués aux crimes contre l’humanité et au génocide ».  Il est vrai que le fait de déclarer qu’un représentant d’un autre État a commis un crime a des implications importantes, mais « la pratique indique clairement que le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre comportent tous une dimension politique comparable à celle du crime d’agression ». 

Le délégué a ensuite abordé le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Il a rappelé les demandes de la Pologne l’an dernier en faveur de la transparence des travaux de la CDI à ce sujet, notamment en faisant la distinction entre la lex lata, la lex feranda et les options politiques.  Cette question préliminaire est d’une importance fondamentale, car son étude peut englober des considérations qui vont potentiellement bien au-delà de la dichotomie traditionnelle entre codification et développement progressif.  Le délégué a donné en exemple les situations où le territoire d’un État subit une inondation totale, une circonstance jusqu’à présent totalement inédite.  Il n’existe aucune pratique étatique à cet égard, et les précédents historiques de perte temporaire de contrôle du territoire d’un État ne sont pas comparables, car ils n’étaient pas causés par des processus naturels et n’avaient pas un caractère permanent, a-t-il fait remarquer.  Il a estimé que le simple fait de déclarer qu’un État continue d’exister, même lorsque son territoire est totalement et définitivement submergé, ne peut suffire sans une explication de son futur modus operandi.  Le délégué a ainsi invité la CDI à se pencher sur le sujet, appelant à envisager sérieusement de le diviser, notamment parce que les piliers du droit de la mer et de la protection des personnes semblent beaucoup plus pertinents et exigent une réponse plus urgente en termes de solutions proposées que le pilier de l’État.

M. MARKO RAKOVEC (Slovénie) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en soulignant le caractère sensible de ce sujet.  Il s’agit ici de « concilier le respect du principe de l’égalité souveraine des États et lutte contre l’impunité », a-t-il expliqué.  Le délégué a pleinement appuyé le projet d’article 7 qui dispose que l’immunité de juridiction pénale étrangère ne s’applique pas pour certains crimes graves.  « Ce n’est pas la gravité des actes qui justifie une telle exception, mais bien la nécessité de protéger les valeurs fondamentales de la communauté internationale. » Il a néanmoins regretté que le crime d’agression ne soit pas inclus dans la liste de ces crimes graves, en rappelant que l’interdiction du crime d’agression revêt le caractère de norme impérative du droit international.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a rappelé les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), selon lesquelles plus d’un milliard de personnes pourrait être touchées par ce phénomène d’ici à 2050.  Il a souligné les situations complexes et inédites entraînées par ce phénomène, avant d’insister sur l’importance du futur travail de la CDI sur la protection des personnes touchées.

M. GUIDE JIA (Chine) a noté qu’un mécanisme de résolution des différends n’a de sens que si le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État a vocation à devenir un traité.  Sur le fond, il a rappelé que la compétence de la CIJ pour régler les différends est fondée sur la volonté des États.  Il a donc suggéré que la Commission envisage deux approches vis-à-vis de la clause compromissoire contenue dans le projet : supprimer la mention relative à la compétence de la CIJ ou autoriser les réserves à cette disposition.  Il a noté que plusieurs crimes pour lesquels l’immunité rationae materiae n’est, selon le projet de la CDI, pas applicable, reposent sur la pratique d’un nombre limité d’États.  Le délégué s’est en outre inquiété de la « politisation » d’un tel instrument, notant les désaccords au sein même de la Commission et le fait que le projet « n’a pas été adopté par consensus ».  Il a demandé de ne pas dresser de liste et de signaler uniquement que ladite immunité ne s’applique pas aux crimes les plus graves.

En ce qui concerne l’élévation du niveau de la mer, le délégué a invité la CDI à reconnaître la complexité du problème et à améliorer ses méthodes de travail.  Il a appelé à la prudence afin d’éviter des débats politiques ou des conflits normatifs.  Il a également estimé que, pour aboutir à un consensus, les études de la CDI ne devraient pas être limitées à un format à huis clos.

Mme UMA SEKHER (Inde) a salué les travaux de la CDI sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en appelant au respect du principe de l’égalité souveraine des États, sur lequel repose cette immunité.  Elle a recommandé de procéder à un examen approfondi de l’arrêt de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans l’affaire des immunités juridictionnelles des États, qui a identifié la pratique des États à cet égard devant les juridictions nationales.  La CIJ a affirmé que les immunités accordées aux fonctionnaires ne le sont pas pour leur bénéfice personnel, mais bien pour protéger les droits et les intérêts de l’État, a précisé la représentante.  Elle a constaté des observations divergentes sur le projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas), en se référant à certaines conventions internationales, y compris le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  Dans ce contexte, elle a souhaité que la CDI trouve une solution pour concilier les vues divergentes de ses membres, se disant convaincue que tout système qui ne fait pas l’objet d’un accord risque de nuire aux relations interétatiques et de compromettre l’objectif même de mettre fin à l’impunité des crimes internationaux les plus graves.  Les dispositions en la matière ne doivent pas être considérées comme une codification du droit international existant, a-t-elle ajouté, ni faire référence au Statut de Rome auquel plusieurs pays ne sont pas parties.

En ce qui concerne le chapitre relatif à l’élévation du niveau de la mer, Mme Sekher a reconnu que, bien que la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 établisse un régime juridique efficace pour la gouvernance des océans, elle ne traite pas explicitement de l’impact de l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques.  La représentante a conclu que toute recommandation éventuelle à cet égard ne devrait être examinée par la Commission qu’après une étude approfondie des principes, sources et règles pertinents du droit international ainsi que de la pratique des États et de l’opinio juris.

M. ZANINI (Italie)a espéré que l’adoption du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État le sujet mènera à l’élaboration d’une convention spécifique qui résoudrait le problème de la fragmentation des pratiques nationales en la matière.  Il a appuyé le projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas).  « Nous envisageons l’inclusion d’une règle ayant le même contenu dans notre code national des crimes internationaux actuellement en cours de rédaction », a-t-il indiqué.  Le délégué a fait quelques remarques au sujet de différents projets d’article, dont l’article 14 (Détermination de l’immunité).  En ce qui concerne le moment où l’immunité doit être déterminée, l’Italie émet quelques réserves sur l’emploi de l’expression générique « avant d’engager des poursuites pénales », qui est également utilisée dans l’article 9 (Examen de la question de l’immunité par l’État du for).  Le délégué a suggéré l’élaboration de deux formulations différentes, celle du projet d’article 14 pouvant fixer plus tard le délai de la détermination de l’immunité, éventuellement avant le début du procès.  Par ailleurs, il a salué l’inclusion d’une clause de règlement des différends dans le projet de la CDI.  Il a toutefois proposé de préciser à l’article 18 que les différends ne peuvent survenir qu’après que les immunités ont été définitivement déterminées par l’autorité judiciaire compétente. 

Ensuite, le délégué a reconnu l’importance et l’urgence d’aborder la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, en raison notamment des conséquences dramatiques auxquelles les États sont confrontés.  Dans le même temps, a-t-il précisé, ces travaux devraient être menés d’une manière qui ne porte pas atteinte au cadre juridique consacré par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Sur le document thématique qui traite de la qualité d’État et de la protection des personnes, le délégué a approuvé la proposition faite de traiter séparément les cas où le territoire d’un État est complètement submergé et ceux où un État est devenu inhabitable en raison d’une réduction partielle de son territoire par suite de l’élévation du niveau de la mer.  Il faut également prendre dûment en considération les effets sur le statut d’État de phénomènes tels que les inondations périodiques et la contamination des eaux douces causées par l’élévation du niveau de la mer.  En conclusion, il s’est dit favorable à la proposition d’élaborer un projet de traité sur une nouvelle forme de protection subsidiaire pour les personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, « un travail exceptionnel ».  Elle a loué l’équilibre de ce projet, qui est de nature à dissiper les tensions entre État du for et État du représentant et à favoriser la stabilité des relations interétatiques.  « Cette immunité ne peut en aucun cas être interprétée comme étant une impunité », a ajouté la déléguée, en saluant la liste proposée de crimes graves justifiant une exception à ladite immunité.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a rappelé que ce phénomène est un fait scientifiquement prouvé qui touche tous les domaines du droit international, pas seulement le droit de la mer.  Il est crucial de protéger les personnes touchées, a-t-elle déclaré, avant d’insister sur la vulnérabilité des petits États insulaires en développement (PEID).  Une coopération entre États sera essentielle dans ce domaine.

M. POPKOV (Bélarus) a rappelé que les immunités des représentants sont conférées pour garantir l’exercice par les États de leurs droits souverains.  Il a mis en garde contre « l’affaiblissement sans fondement » de ces règles, qui affecterait les relations entre États.  Il convient donc de faire en sorte que la sanction des crimes commis par les représentants soit équilibrée avec les principes d’égalité souveraine et de non-ingérence, a-t-il indiqué.  À ces fins, le délégué a suggéré de renforcer la procédure préalable aux poursuites.  Le principal critère relatif à l’engagement de poursuites devrait être la levée de l’immunité par l’État du représentant, a-t-il estimé.  Il a ajouté que des exceptions à ce principe ne peuvent être reconnues que si elles recueillent le soutien d’une majorité d’États et sont reflétées dans la pratique.  À ce titre, il a noté que la pratique des États est hétérogène.  Il a également appelé à garantir la possibilité pour les représentants de formuler un appel contre les décisions qui écartent leur immunité, en particulier dans le cas où les pays hôtes ont limité leur droit d’accès au juge.  Le délégué a également souligné la nécessité d’intégrer un mécanisme de règlement des différends par la conciliation.  La définition des « actes accomplis à titre officiel » n’est pas suffisante, a-t-il en outre estimé.  Il a, enfin, plaidé pour que les personnes bénéficiant de l’immunité ratione personae continuent d’en bénéficier après leur mandat, au motif que l’immunité ratione materiae ne garantit pas un niveau de protection suffisant.  Le représentant a par ailleurs souligné l’importance du travail de la CDI sur la question de l’élévation du niveau de la mer.  Il a plaidé pour l’élaboration d’un instrument juridique international sur ces questions.

Mme SILEK (Hongrie) a estimé que la prévention et les actions visant à ralentir le processus d’élévation du niveau de la mer sont essentielles.  Cependant, a-t-elle dit, il est également nécessaire de se concentrer sur l’adaptation aux changements climatiques.  La représentante a appelé à élaborer des politiques axées sur la résilience et à soutenir les cadres juridiques en vue d’éviter et d’atténuer les crises humaines, telles que les migrations forcées.  La représentante a jugé que le document thématique qui traite des questions liées à l’État et à la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer donne un bon aperçu des pratiques actuelles et soulève des points importants.  L’une de ses principales conclusions, a-t-elle noté, est qu’il est difficile de s’appuyer sur la pratique des États, car les cas liés à la continuité de l’État après une perte partielle de territoire sont rares.  Cependant, nous pensons que la CDI devrait se concentrer principalement sur les questions liées aux droits humains qui sont déjà urgentes.  La représentante a estimé que le document ne fournit pas un aperçu détaillé de la manière dont les conventions et accords généraux et sectoriels relatifs aux droits de l’homme peuvent être appliqués aux différents problèmes découlant de l’élévation du niveau de la mer.  La CDI devrait fixer des priorités à court, moyen et long terme à cet égard, a-t-elle encouragé, suggérant d’analyser pour commencer la manière dont les États touchés peuvent faire face aux défis de la jouissance des droits de l’homme de leurs citoyens, et si ces États ont des obligations au cas où l’élévation du niveau de la mer aurait des effets négatifs sur ces droits.  Pour ce qui est des objectifs à moyen terme, le délégué a jugé inévitable de se pencher sur des questions liées à la migration.  En effet, en raison de l’élévation du niveau de la mer, non seulement les conditions de vie changent de manière défavorable, mais les États doivent également faire face à la perte partielle de leur territoire.  Par conséquent, des questions telles que les devoirs des États tiers découlant de l’élévation du niveau de la mer et l’applicabilité de mesures telles que la protection temporaire, la protection subsidiaire et le principe de non-refoulement doivent être soigneusement analysées, a-t-il insisté.  Pour la représentante, la clef pour trouver des solutions durables est de maintenir la nature universelle des instruments juridiques existants, à savoir la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. 

M. BIGGE (États-Unis) a indiqué avoir des préoccupations de longue date avec des projets d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État qui restent « sans réponse ».  Par exemple, a-t-il dit, nous ne sommes pas d’accord avec le fait que le projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) soit soutenu par la pratique constante des États et l’opinio juris et qu’il ne reflète pas le droit international coutumier.  Le délégué a appelé une nouvelle fois la Commission à travailler par consensus.  Si les articles ne sont pas révisés, il sera important que le commentaire reflète les cas où ces articles correspondent à une proposition de développement progressif du droit plutôt qu’à une codification.  En outre, « si plusieurs des projets d’articles continuent à ne pas refléter le droit international coutumier et à diverger des opinions exprimées par les États, la possibilité que les longs efforts de la Commission aboutissent à des projets d’articles adoptés par les États en tant que convention internationale est fortement réduite. » Il faut donc reconsidérer le projet d’articles dans cette optique, tant sur le fond que sur la forme, a-t-il résumé. 

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a mentionné la nouvelle politique des États-Unis sur l’élévation du niveau de la mer et les zones maritimes.  S’agissant des travaux du Groupe d’étude de la CDI, il a souligné que les problèmes examinés soulèvent des questions juridiques complexes liées à des aspects fondamentaux du droit international.  Étant donné l’absence de pratique étatique applicable dans les domaines concernés, il est difficile de tirer des conclusions définitives sur l’évolution du droit international, a-t-il estimé.  Le délégué a salué l’examen par la Commission de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, rappelant la publication d’un rapport par la Maison Blanche sur l’impact des changements climatiques sur les migrations.  « Nous envisageons des moyens de renforcer l’application des cadres de protection existants, d’ajuster les mécanismes de protection américains pour mieux accueillir les personnes qui fuient les impacts des changements climatiques, et d’évaluer la nécessité de protections juridiques nationales supplémentaires pour les personnes qui n’ont d’autre choix que de migrer. »

Mme OROSAN (Roumanie) a apprécié que le projet d’articles visé au chapitre VI aborde la question de la relation entre l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et l’obligation de coopérer avec les tribunaux pénaux internationaux.  La Roumanie soutient pleinement l’application du principe de responsabilité pour les crimes les plus graves commis contre des civils et le rôle essentiel des tribunaux pénaux internationaux à cet égard, a-t-elle indiqué.  Sur l’article 11 (Invocation de l’immunité), la représentante a demandé plus de clarté quant aux conséquences du défaut d’invocation dans un délai raisonnable.  Compte tenu de la promptitude que les États devraient manifester en exerçant ce droit au stade le plus précoce de la procédure, de bonne foi et sans abuser de leur pouvoir discrétionnaire, nous voyons l’intérêt de prescrire son invocation dès que possible, a-t-elle précisé.  En même temps, le non-exercice de ce droit dès que « l’État a connaissance du fait que la juridiction pénale d’un autre État pourrait être ou est exercée sur le fonctionnaire » ne devrait pas empêcher l’État de l’invoquer à un stade ultérieur. 

Sur le chapitre IX consacré à l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la représentante a réaffirmé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer doit être la « pierre angulaire » des relations entre les États.  La préservation des lignes de base et des limites extérieures des zones maritimes est cruciale pour la stabilité juridique, a-t-elle souligné, précisant ne pas chercher à apporter des innovations ou des modifications juridiques.  S’agissant du document qui traite du statut d’État et de la protection des droits humains, le sujet invite à l’innovation car il n’y a quasiment aucun précédent.  Toutefois, nous ne voyons aucune raison d’être original, a-t-elle indiqué, invitant donc à la prudence.  En ce qui concerne le statut de l’État, la représentante a constaté que l’accent est mis sur la manière dont un État peut continuer à fonctionner si son territoire est affecté par l’élévation du niveau de la mer au-delà de l’habitabilité, plutôt que sur la question de savoir si l’État continue à exister dans un tel cas.  Enfin, elle a relevé de plus en plus de litiges sur la question de l’impact négatif des changements climatiques sur les droits de l’homme. 

Mme NOOR AZMAN (Malaisie) a fait des remarques sur les projets d’article 17 (Consultations) et 18 (Règlement des différends) relatifs à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Si nous sommes généralement d’accord avec le projet d’article 17, nous souhaitons souligner que l’on devrait accepter que la suspension d’une procédure nationale en attendant le règlement d’un différend international sur cette question soit particulièrement déférente à l’égard de l’État du fonctionnaire, a indiqué la déléguée.  Concernant le paragraphe 2, elle a convenu qu’il serait utile de fixer un délai pour éviter tout retard dans le processus de règlement des différends.  Elle a ainsi proposé au Rapporteur spécial de mener une étude approfondie sur les avantages et les inconvénients possibles d’un délai de six mois et d’un délai de douze mois pour une délibération ultérieure. 

Abordant ensuite le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a salué le travail du Groupe d’étude, tout en rappelant son mandat et en exhortant les États à procéder « avec prudence » afin de ne pas modifier le droit international existant, en particulier la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982.  Bien que l’élévation du niveau de la mer et les activités de poldérisation puissent avoir des effets similaires sur l’espace maritime d’un État, ces deux activités doivent être soigneusement distinguées afin d’éviter qu’un État n’en tire parti en élargissant son espace maritime sous prétexte d’élévation du niveau de la mer, a-t-elle par ailleurs recommandé.  Enfin, la déléguée a partagé l’avis de la majorité des États selon lequel « les lignes de base, les limites et les frontières maritimes doivent être fixées à perpétuité, indépendamment de l’élévation du niveau de la mer. »

M. HELMUT TICHY (Autriche) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et souligné son caractère équilibré.  Il a estimé nécessaire de clarifier la notion de « juridictions pénales internationales » visée au paragraphe 3 de l’article 1 sur le champ d’application du projet, afin de savoir s’il s’applique aux tribunaux hybrides ou à ceux créés par le Conseil de sécurité.  Il a appuyé l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) en estimant qu’il s’agit d’un compromis destiné à lutter contre l’impunité.  Tout en comprenant l’esprit de compromis qui a présidé à l’élaboration de cet article, il a toutefois pensé que le crime d’agression aurait dû être inclus dans la liste.  Il a ensuite commenté l’article 10 qui prévoit que l’État du for notifie l’État du représentant avant d’engager des poursuites pénales ou de prendre des mesures cœrcitives contre ledit représentant.  Il a estimé que cette notion de « mesures cœrcitives » est trop large.  Il a espéré qu’une convention sera « rapidement » élaborée sur la base de ce projet.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a noté les difficultés à déterminer une condition étatique « lorsque le territoire d’un État a été complètement submergé ou rendu inhabitable ».  Il s’est enfin félicité que la CDI se penche sur un sujet aussi important.  Nous sommes persuadés que la Commission contribuera de manière significative à la clarification du droit international applicable, a conclu M. Tichy.

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique) a souligné que le texte du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et ses commentaires représentent un effort important pour clarifier les règles du droit international.  Le projet reflète certaines des normes de droit coutumier, a-t-elle relevé.  Elle s’est également félicitée de l’inclusion de dispositions procédurales ainsi que d’une clause relative au règlement pacifique des différends.

L’élévation du niveau de la mer liée au réchauffement climatique constitue « l’une des crises les plus urgentes auxquelles est confrontée l’humanité », a pressé la représentante.  Il s’agit d’un sujet « technique par nature », a-t-elle souligné.  S’il emporte des conséquences sur les droits souverains et économiques des États, la protection des personnes affectées doit également être au cœur de la discussion, a-t-elle estimé.  Elle s’est, à cet égard, félicitée que le Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international envisage ce point.  Son travail sera crucial pour aider et guider la pratique des États.  La représentante a rappelé l’importance du recours aux experts scientifiques et techniques dans ce domaine.

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a souligné que le Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ne devrait pas être empêché de tirer des conclusions pour savoir si le droit international existant serait suffisant ou si de nouvelles règles ou de nouveaux principes sont nécessaires en la matière.  Il a affirmé la pertinence des principes de coopération internationale et de responsabilité commune et différenciée.  En effet, le principe de coopération, via notamment le transfert de technologie et l’échange des meilleures pratiques, pourrait jouer un rôle important pour que les États assurent leur propre préservation, a analysé le représentant, évoquant le coût très élevé des mesures de préservation telles que l’installation ou le renforcement des digues. 

Le représentant s’est ensuite intéressé à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, saluant l’adoption du projet d’articles.  Sur les articles 1 à 18 en général, il a pris note avec intérêt de l’inclusion d’une clause sans préjudice visant à distinguer et à garantir l’indépendance entre ledit projet et le régime spécial applicable aux cours et tribunaux pénaux internationaux par rapport au régime d’immunité applicable au niveau national.  Il a appuyé l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas).  Indépendamment du fait qu’il s’agisse d’une codification ou d’un développement progressif, la clarification apportée par rapport à certains des pires crimes connus du droit international est bienvenue et devrait renforcer la possibilité de rendre justice aux victimes, a-t-il estimé.  En outre, sur le projet d’article 13 (Demandes d’informations), le représentant s’est dit favorable à la suppression de la disposition selon laquelle le fonctionnaire doit être présent dans l’État du for pour déterminer l’immunité en relation avec l’article 7.  Par ailleurs, sur l’article 15 (Transfert des poursuites pénales), il a souhaité que la Commission réexamine le paragraphe 5 afin de restreindre son champ d’application.  Enfin, prenant note de la possibilité qu’un nouveau rapporteur spécial soit nommé pour ce sujet, le représentant a demandé à la Commission de prendre en compte « le besoin de stabilité et de continuité dans la direction du travail actuel ». 

Mme VON USLAR-GLEICHEN (Allemagne) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, avant de redire l’engagement de son pays en faveur de la lutte contre l’impunité.  « La guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine est un rappel tragique de l’importance de cette lutte. »  La déléguée a indiqué que la poursuite des crimes internationaux par les juridictions nationales constitue un élément essentiel de l’architecture pénale allemande.  Ainsi, le code pénal de droit international allemand, adopté en 2002, est la base de la poursuite de tels crimes, selon le principe de compétence universelle.  Elle a déclaré que toute modification substantielle du droit international proposée par la CDI sur cette question devra être agréée par les États par la voie d’un traité.  La déléguée a aussi averti que le libellé de l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) laisse la place à « des interprétations erronées et à des utilisations politiques ».  Les articles de la quatrième partie sur les dispositions et garanties procédurales ne sont pas tous étayés par le droit coutumier international existant, a continué la déléguée, en ajoutant que de telles garanties procédurales ne seront largement acceptées que si elles reflètent les différentes traditions juridiques.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a insisté sur la « menace existentielle » posée par les changements climatiques.  Selon nous, une lecture contemporaine de la Convention sur le droit de la mer donne à l’État côtier le droit d’actualiser ses lignes de base en cas d’élévation du niveau de la mer ou en cas de recul de la ligne côtière sans pour autant obliger ledit État à le faire, a-t-elle conclu. 

M. MOHAMMAD SADEGH TALEBIZADEH SARDARI (République islamique d’Iran) a exprimé ses inquiétudes face à certains projets d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État adoptés par la CDI, en particulier l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas).  Ce texte, a-t-il déploré, ne correspond pas à la pratique des États et ne reflète pas le droit international coutumier.  Il a exprimé son désaccord avec les crimes énumérés dans cet article ainsi qu’avec la liste des traités annexés, signalant que ceux-ci ne sont pas universellement acceptés.  Un mécanisme de règlement des différends n’est pertinent que si le projet d’articles a vocation à devenir un accord, a-t-il argué, en invitant à la prudence.

« Personne ne peut fermer les yeux sur l’importance et les menaces potentielles de l’élévation du niveau de la mer à l’échelle mondiale », a ensuite déclaré le représentant.  Il a émis l’idée du transfert de la souveraineté d’une portion d’un territoire affecté par l’élévation du niveau de la mer à un mécanisme international, par exemple l’Autorité internationale des fonds marins.  Il a, à ce titre, souligné les exemples d’administration d’un territoire par les Nations Unies, tout en les distinguant des territoires sous tutelle.  Le représentant a affirmé que les modifications apportées aux lignes de base en conséquence de l’élévation du niveau de la mer devraient être fondées sur les principes de l’équité et de la justice.  Notant que la lex lata n’est pas satisfaisante sur cette question, il a interrogé la CDI sur son approche sur ce point.  Il a, enfin, estimé que la pratique de la restauration des terres, de la fortification des côtes et d’autres moyens pour maintenir les zones côtières constituent des réponses appropriées à l’élévation du niveau de la mer « tant qu’elles ne créent pas de nouveaux droits pour les États ».

M. VINÍCIUS FOX DRUMMOND CANCADO TRINDADE (Brésil) a estimé que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est importante pour garantir qu’ils puissent exercer convenablement leurs fonctions, en particulier lorsqu’ils ne sont pas protégés par les conventions multilatérales existantes.  En même temps, l’immunité ne doit pas signifier l’impunité, a-t-il affirmé.  Le représentant s’est ainsi dit favorable aux exceptions à l’immunité de juridiction ratione materiae présentées à l’article 7, qui visent à lutter contre l’impunité des crimes internationaux graves, et s’est félicité des garanties présentées dans la quatrième partie du projet d’articles, en particulier la nécessité pour l’État du for d’évaluer les immunités des autorités étatiques avant d’engager des poursuites pénales ou d’adopter une mesure coercitive.  Par ailleurs, il a soulevé la question du règlement des différends qui « doit encore être discutée ».  Si elle est incluse, une telle clause devrait être de nature générale, sans utilisation d’un langage obligatoire, a-t-il fait savoir.

Le représentant a insisté sur le caractère urgent de la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Nous avons une côte de près de 8 000 km et une population côtière de plus de 50 millions de personnes, a-t-il témoigné, invitant donc à améliorer la compréhension des impacts juridiques de l’élévation du niveau de la mer.  Il a réitéré l’importance que les solutions soient conformes à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Évoquant la question particulière du statut d’État, il a fait observer qu’il n’existe « aucune trace de situations dans lesquelles le territoire d’un État a été complètement submergé ou rendu inhabitable ».  Il est donc certainement utile de recourir au droit conventionnel établi, tel que la Convention de 1933 sur les droits et devoirs des États, a-t-il indiqué.  En outre, il a estimé que les États doivent coopérer de bonne foi et en tenant compte de leurs responsabilités communes mais différenciées.  Enfin, sur la question de la protection des personnes, le délégué a jugé pertinent d’explorer les cadres juridiques internationaux existants potentiellement applicables.  Les normes du droit international des droits de l’homme - notamment le droit à une nationalité - et du droit international des réfugiés - comme le principe de non-refoulement - le cas échéant, pourraient s’avérer utiles pour l’examen du sujet par le Groupe d’étude. 

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a, sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, exprimé sa préoccupation au sujet du projet d’article 18 sur le règlement des différends, qu’elle entend comme une acceptation tacite d’un recours judiciaire spécifique.  Dans la mesure où les interprétations de l’immunité de juridiction pénale peuvent varier selon les États, elle a souligné l’importance de compter sur des règles claires tout en respectant la souveraineté et le système juridique de chaque État. 

L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international est un sujet complexe et de la plus haute importance, qui doit, selon la déléguée, être traité « sans délai ».  Après avoir constaté que les effets des changements climatiques sur l’élévation du niveau de la mer sont disproportionnés dans certaines régions, elle a reconnu que l’Amérique latine et les Caraïbes sont particulièrement touchés.  Ainsi, entre 45 et 55 % de la population colombienne sera affectée par l’élévation du niveau de la mer d’ici à 2050, a-t-elle prévenu, en soulignant le caractère « vital » des travaux de la Commission sur ce sujet.  La déléguée a invité le Groupe de travail à se pencher sur toutes les sources du droit international dans son examen de cette question, sans se limiter à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. 

M. MATÚŠ KOŠUTH (Slovaquie) a salué l’adoption, en première lecture, du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et appelé à ajouter le crime d’agression à la liste prévue au projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas).  Il s’est également félicité de l’inclusion de dispositions procédurales dans le projet de la CDI.

S’il a dit partager pleinement l’opinion selon laquelle l’élévation du niveau de la mer est un phénomène mondial qui doit être traité au niveau international, le délégué a demandé à la Commission de se concentrer sur les aspects juridiques de ce sujet, conformément à son mandat, et de « ne pas s’engager sur des questions politiques ».  Il a donc invité à la prudence au sujet de la préservation de la condition étatique sans territoire, dans la mesure où ces solutions sont dépendantes d’un accord politique.  Le représentant a aussi noté que la question de la protection des personnes affectées touche plusieurs domaines du droit international.  Il a donc demandé à la CDI d’envisager si les instruments existants sont susceptibles d’apporter une protection suffisante en prenant compte de la pratique des États et de l’expertise des organisations internationales.

Mme VESKI (Estonie), abordant le projet d’articles de la CDI sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, a salué la disposition portant sur une relation entre le sujet de l’immunité et les cours et tribunaux pénaux internationaux.  Si elle a reconnu que les activités de la Cour pénale internationale (CPI) jouent un rôle particulier, elle a rappelé également l’existence d’autres tribunaux internationaux et hybrides, dont la création contribue également au développement du droit international.  À ce sujet, la représentante a rappelé « les discussions en cours sur la création d’un tribunal spécial pour traiter le crime d’agression commis en Ukraine ».  Elle a douté de la nécessité de l’article 17, expliquant que les consultations entre États constituent un moyen normal de communication diplomatique et devraient toujours être disponibles.  Commentant l’article 18, elle a réaffirmé qu’une clause de règlement des différends ne serait pertinente que si le projet d’articles était destiné à devenir un traité. 

Abordant ensuite le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la représentante a réaffirmé l’importance de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Sur le thème de l’impact de cette élévation sur la qualité d’État, notre objectif principal devrait être la préservation de la stabilité juridique, de la sécurité, de la certitude et de la prévisibilité dans les relations internationales, a-t-elle affirmé.  Elle a rappelé les critères pour le statut d’État généralement énumérés: une population permanente, un territoire défini, un gouvernement et la capacité de nouer des relations avec les autres États ou d’autres sujets du droit international.  Nous sommes également d’accord avec l’idée que, dans certains cas, un État ne pourrait pas disparaître automatiquement parce qu’il ne remplit pas tous les critères mentionnés, notamment la perte du territoire, a-t-elle indiqué.  « C’est ce qui s’est passé dans le cas de mon propre État, la République d’Estonie, lorsque nous avons perdu le contrôle de notre territoire en raison d’une occupation et d’une annexion illégales, mais que notre État a conservé son statut d’État et sa personnalité juridique. »  Enfin, la représentante a signalé que plus de 70 États sont ou sont susceptibles d’être directement touchés par l’élévation du niveau de la mer, soit près d’un tiers de la communauté internationale.  L’élévation du niveau de la mer n’est pas seulement un débat théorique mais aussi une question très pratique.  Quant aux questions relatives aux personnes protégées, la représentante a convenu que la protection des droits des peuples autochtones est une question importante qui mérite une plus grande attention dans le contexte de l’élévation du niveau de la mer. 

M. SARVARIAN (Arménie) a appelé à éviter les conflits d’obligations dans le cadre du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants étrangers, à la fois sur le fond et dans le cadre du règlement des conflits.  Il a soutenu la formulation du projet d’article 7 relatif aux crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.

Le représentant a également souligné l’importance de l’étude par la CDI de l’élévation du niveau de la mer.  Les sujets identifiés par le Groupe d’étude commencent à émerger « alors que la submersion des terres se produit », a-t-il fait remarquer.  Le travail de l’Association de droit international et de relations internationales (ADIRI) est également précieux sur ce point.  Le représentant a jugé important de prendre en compte la pratique par analogie, dans la mesure où l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques est « sans précédent ».  Il a indiqué que le produit de ces travaux pourrait prendre des formes différentes en fonction des sujets abordés.

M. ADAM MCCARTHY (Australie) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  « Nous réitérons notre demande que les commentaires de ce projet indiquent clairement lorsque la CDI a souhaité codifier une règle existante du droit coutumier international ou lorsqu’elle s’est engagée en faveur d’un développement progressif du droit.  » Lorsque la CDI a une intention de codification, elle devrait poursuivre ses efforts en vue de l’identification de la pratique des États pertinente et de l’opinio juris en appui aux articles concernés, a insisté le délégué.  Il a aussi estimé que le débat entamé en 2016 sur l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) n’est toujours pas tranché.

Évoquant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a insisté sur la complexité des questions de la continuité de la condition étatique et de la protection des personnes face à ce phénomène.  Le droit international existant applicable aux personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer est fragmenté et ne prévoit pas le scenario d’une perte potentielle de condition étatique pour cette raison, a souligné le délégué.  Enfin, il a rappelé que les dirigeants du Forum des îles du Pacifique, auquel l’Australie est partie, ont adopté en 2021 une déclaration pionnière sur la préservation des zones maritimes face à cette élévation.  « Cette déclaration appuie l’intégrité de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, tout en clarifiant son interprétation afin de préserver les zones maritimes établies sur son fondement. »

Mme ZINOVIA STAVRIDI (Grèce) a exprimé des réserves en ce qui concerne le texte de compromis adopté sur la relation entre le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et les normes régissant le fonctionnement des tribunaux pénaux internationaux, qui ne semble pas résumer pleinement la pratique récente concernant l’établissement de tribunaux internationaux.  Concernant l’article 11, elle a noté que ni le projet d’article ni son commentaire ne reflètent le point soulevé par plusieurs États selon lequel l’invocation de l’immunité, un droit de l’État du fonctionnaire, n’est pas et ne devrait pas être considérée comme une condition préalable à l’application de l’immunité, puisque celle-ci fait partie du droit international.  La représentante a en outre exprimé sa préoccupation face au projet d’article 12, qui prévoit l’irrévocabilité de la renonciation à l’immunité, étant donné l’absence de pratique étatique dans ce domaine.  Le libellé du projet d’article 18 fait par ailleurs référence à « un différend relatif à l’interprétation ou à l’application du présent projet d’articles », ce qui est une formulation habituellement utilisée lorsqu’un traité est envisagé, et non pour un différend ou une divergence concernant la détermination ou l’application de l’immunité dans un cas particulier, a-t-elle noté.  D’autre part, son libellé s’écarte considérablement de celui des dispositions similaires adoptées récemment par la CDI, à savoir l’article 15 du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, qui est mentionné dans le commentaire pertinent.  À ses yeux, ce projet d’article devrait être formulé comme une recommandation aux États d’essayer de résoudre ces différends le plus tôt possible en utilisant, à leur discrétion, les moyens de règlement pacifique des différends énoncés à l’Article 33 de la Charte des Nations Unies. 

M. MORA FONSECA (Cuba) a plaidé pour la cohérence dans le travail de la CDI, notamment au regard des autres sujets traités, tels la prévention et la répression des crimes contre l’humanité ou les normes impératives du droit international général.  L’obligation de notification en amont de poursuite contre un représentant bénéficiant de l’immunité de juridiction pénale étrangère doit constituer la première garantie, a-t-il estimé.  Il a également appelé à ne pas porter atteinte aux textes existants, notamment la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.

Le délégué a noté que la Conventions des Nations Unies sur le droit de la mer n’apporte « aucune réponse » à l’élévation du niveau de la mer.  Il a estimé que les lignes de base ne devraient pas être modifiées, indépendamment de l’élévation du niveau de la mer.  Quant à l’extinction d’un État en raison de la perte d’un territoire, il convient de faire preuve de prudence, a déclaré le délégué, qui a noté que la coopération internationale joue un rôle vital à ce sujet.  Il a mis l’accent sur l’expérience cubaine pour la protection des populations côtières.

M. KOWALSKI (Portugal) a estimé que le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État dans sa version actuelle est équilibré.  Il est désormais important à nos yeux de clarifier la manière de procéder, à savoir ce qu’il convient de recommander à l’Assemblée générale, a-t-il indiqué, suggérant de procéder à la deuxième lecture en ayant à l’esprit une recommandation visant à utiliser ce projet d’articles comme base d’un futur traité international.  Saluant la solution trouvée pour préserver le statut des tribunaux internationaux dans les textes, le délégué a rappelé que les tribunaux pénaux internationaux sont essentiels dans la lutte contre l’impunité pour les crimes les plus graves de portée internationale.  Par ailleurs, le nouveau paragraphe 3 de l’article 1 sur le champ d’application dudit projet est susceptible d’atteindre trois objectifs très importants, a-t-il estimé, y compris mettre en évidence l’indépendance des régimes applicables à l’immunité devant les juridictions pénales nationales et des tribunaux pénaux internationaux, et présenter un texte applicable à tous les États. 

Concernant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a fait remarquer que l’examen de ce sujet paraît très complexe.  Il a ainsi salué la qualité du deuxième document de réflexion, notamment en ce qui concerne les pratiques existantes et émergentes des États.  L’élévation du niveau de la mer est un phénomène mondial qui ne connaît pas de frontières et qui a un impact sur tous les États et sur plusieurs millions de personnes, a-t-il rappelé.  Si le droit international a un rôle très important à jouer dans la lutte contre cette menace mondiale, il est clair que le cadre juridique applicable est quelque peu fragmenté.  Le délégué s’est félicité que ce sujet soit abordé du point de vue du droit existant et du droit qui doit être développé.  Ces discussions seront pertinentes pour les années à venir, sachant que l’élévation du niveau de la mer pourrait mettre directement en danger plus de 800 millions de personnes dans les villes côtières d’ici 2050. 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a réitéré que la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État doit être abordée sous l’angle du respect de l’égalité souveraine des États et de la protection des représentants de l’État contre l’exercice abusif de la juridiction pénale, tout en tenant compte de la nécessité de lutter contre l’impunité des crimes internationaux. 

Concernant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le représentant a considéré qu’en tant qu’État archipélagique comptant de nombreuses zones côtières de faible élévation, les Philippines estiment nécessaire de continuer de progresser dans l’examen de la condition étatique et de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer.  Il s’est félicité à cet égard de la reconstitution du Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer et de l’échange de vues sur le deuxième document de réflexion, bien qu’il soit de nature exploratoire et qu’il vise à établir une liste des questions de droit international devant être analysées du point de vue de la lex lata et de la lex ferenda.  Les Philippines, a-t-il noté, sont d’avis que ces questions doivent être abordées sur la base de la stabilité juridique, de la sécurité et de la prévisibilité du droit international, en tenant compte des traités, des coutumes et des principes généraux du droit applicables.  La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer constitue en outre le cadre juridique dans lequel doivent s’inscrire les activités menées dans les océans.  S’agissant de la condition étatique, le représentant a estimé que lorsque l’un des éléments de la qualité d’État vient à manquer, par exemple lorsque le territoire de l’État a été complètement submergé, il faut adopter une « approche pragmatique en faveur de la stabilité et de la prévisibilité en droit international, en tenant compte des circonstances spécifiques ».  Il a fait remarquer que le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières engage par ailleurs les États à élaborer des stratégies d’adaptation et de résilience face aux catastrophes naturelles à évolution lente, tout en prônant des approches cohérentes pour faire face aux mouvements migratoires qui en découlent.  Si la pratique des États sur cette question est rare, elle est plus développée parmi les États déjà touchés par l’élévation du niveau de la mer, notamment en Asie du Sud-Est.  Ainsi, tout en prenant acte de l’accent mis par la CDI sur les aspects juridiques de ce sujet, conformément à son mandat, les politiques et instruments des États des régions touchées doivent selon lui être pris en considération pour identifier les pratiques émergentes des États.

M. SMYTH (Irlande) a suggéré que la CDI réduise le nombre de thèmes à l’examen afin de donner aux États davantage de temps pour développer leurs vues.  Il a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Il a exprimé des réserves quant au libellé de l’article 1 sur son champ d’application et estimé nécessaire de clarifier la notion de juridictions pénales internationales visée à son paragraphe 3, afin de savoir s’il s’applique aux tribunaux hybrides ou à ceux créés par le Conseil de sécurité.  Il a souligné l’utilité de l’article 18 relatif au règlement des différends entre l’État du for et l’État du représentant.

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a jugé urgent de réfléchir aux conséquences juridiques complexes de ce phénomène.  « Il n’y a pas ou peu de précédent dans ce domaine », a-t-il conclu, en insistant sur l’importance d’examiner minutieusement la pratique des États.

Mme AAGTEN (Pays-Bas), s’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, a rappelé ses préoccupations quant à l’examen de ces sujets en l’absence d’opinio juris, des préoccupations toujours présentes face à ce projet d’articles. 

Abordant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a indiqué que 26% des territoires fonciers se trouvent au-dessous du niveau de la mer aux Pays-Bas.  Ce pourcentage risque d’augmenter au fur et à mesure, a-t-elle mis en garde, alertant aussi sur la situation des petits États insulaires en développement (PEID).  Selon elle, les critères pour cette condition étatique figurant dans la Convention de 1933 sont le point de départ des débats.  La déléguée a rappelé que ces critères portent sur la création et l’existence d’un État en tant que personne morale internationale.  Néanmoins, la pratique étatique démontre que ces critères ne sont pas appliqués de la même manière en cas de création des États, ou en cas de continuité et d’extinction, a-t-elle relevé.  Pour la déléguée, « il n’y a pas de raison pour qu’un État qui perd son territoire perde automatiquement sa condition étatique ».  Elle a ainsi appelé à étudier plus en détail les critères en question et à organiser davantage de débats au sujet de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission clôture son examen des droits humains en se penchant sur des violations telles que le « pauvrisme » et le « domicide »

Soixante-dix-septième session
37e & 38e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4361

La Troisième Commission clôture son examen des droits humains en se penchant sur des violations telles que le « pauvrisme » et le « domicide »

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a clôturé aujourd’hui son examen de la promotion et de la protection des droits humains en dialoguant avec six titulaires de mandat. Les délégations ont pu débattre avec eux des violations que subissent des droits fondamentaux, relatifs entre autres à l’alimentation, au logement, à l’expression et à l’orientation sexuelle, et se pencher sur de nouveaux concepts comme le « pauvrisme », discrimination frappant les personnes pauvres, et le « domicide », pratique consistant à détruire délibérément des habitations dans le but de causer des souffrances humaines.   

Le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté a donné le ton de cette séance en avertissant que la hausse mondiale des prix de l’énergie et de l’alimentation, combinée aux impacts de la pandémie de COVID-19, précipiteront 75 à 95 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté en 2022.  Dans ce contexte, M. Olivier de Schutter a dénoncé une montée du « pauvrisme », ces attitudes et comportements négatifs à l’égard des personnes vivant dans la pauvreté, estimant que s’il n’est pas combattu, ce fléau limitera considérablement l’accès des personnes en situation de pauvreté à l’emploi, au logement, aux soins de santé, à l’éducation et à la protection sociale.

Le pauvrisme est tellement ancré dans les esprits et les institutions que la seule façon d’avancer est de le rendre illégal, à l’instar du racisme ou du sexisme, a recommandé le Rapporteur spécial. Tout en se félicitant qu’un nombre croissant de pays identifient désormais l’origine sociale ou la propriété parmi les causes possibles de traitement différentiel, M. de Schutter a regretté que cette approche antidiscriminatoire soit encore rarement utilisée par les tribunaux ou les avocats qui conseillent les victimes.  Il a donc pressé les législateurs à aller plus loin, encourageant des politiques de discrimination positive fondée sur la classe sociale. 

Présentant son rapport dédié aux situations de conflit, le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard a, de son côté, défini le concept de « domicide ».  M. Balakrishnan Rajagopal s’est pour cela appuyé sur l’exemple de la Syrie, où un tiers des maisons ont été partiellement ou totalement détruites au cours du conflit en cours, évoquant aussi les 200 villages rohingya incendiés ou détruits au bulldozer au Myanmar et la ville ukrainienne de Marioupol, rasée à 90% par les frappes russes.   

 M. Rajagopal a rappelé que le droit international humanitaire et le droit international pénal permettent de poursuivre la destruction de logements et les expulsions forcées en tant que crime de guerre, crime contre l’humanité ou génocide.  Pourtant, l’impunité reste la norme plutôt que l’exception, a-t-il déploré, soulignant que le domicide est bien plus qu’une simple atteinte aux droits au domicile ou à la propriété « car il déclenche un effet domino sur d'autres droits humains ». Le Rapporteur a, par conséquent, appelé à reconnaître le domicide comme un crime international ou un crime contre l’humanité à part entière. « Combien d’Alep, de Sanaa et de Marioupol allons-nous continuer à accepter ? », s’est-il écrié.    

 Plaçant lui aussi son rapport dans le contexte des situations de conflit, l’expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre a plaidé pour l’inclusion des personnes LGBT dans le programme pour les femmes et la paix et la sécurité des Nations Unies.  De l’avis de M. Victor Madrigal-Borloz, les « imaginaires sociaux et culturels » alimentent les agressions, rendant le recours à la violence contre les communautés LGBT utile pour faire avancer les intérêts des acteurs de conflits armés.  Il s’est réjoui que cette « instrumentalisation des préjugés » ait été examinée par la Commission de la vérité en Colombie pour répertorier les différents types de violence dirigés contre des personnes LGBT pendant le conflit long d’un demi-siècle.   

 Le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation a, pour sa part, centré son rapport sur l’impact de la pandémie sur la sécurité alimentaire. Regrettant l’absence d’un plan d’action mondial piloté par les gouvernements pour faire face à la crise alimentaire, M. Michael Fakhri a appelé à la rédaction d’une résolution robuste s’appuyant sur ses recommandations à cet égard. Il a d’autre part demandé aux États de ne pas mettre fin aux programmes d’aide adoptés pendant la pandémie, qui ont démontré qu’il était possible de réaliser le droit à l’alimentation.   

 Le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association a, lui, exhorté les États à traiter les mouvements sociaux comme des partenaires.  M. Clement Nyaletsossi Voule leur a ainsi demandé de s’abstenir d’imposer des restrictions aux associations, qu’elles soient enregistrées ou non. Au lieu d’attaquer les membres des mouvements sociaux, les États devraient plutôt les impliquer dans l’élaboration de lois, promouvoir leur travail en faveur des droits et garantir leur droit d’accès aux financements, a-t-il soutenu, plaidant en outre pour une liberté de mouvement maximale.

 Pour finir, la Rapporteuse spéciale sur l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille a souhaité que les individus atteints de cette maladie infectieuse soient officiellement considérés comme des personnes handicapées.  À cette fin, Mme Alice Cruz a enjoint les États Membres à reconnaître que ces personnes peuvent prétendre aux droits prévus par la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

La Troisième Commission reprendra ses travaux lundi 31 octobre, à partir de 10 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

M. BALAKRISHNAN RAJAGOPAL, Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu'élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard, a présenté son rapport porte sur la prévention des violations du droit à un logement convenable pendant les conflits.  Il a indiqué que des violations massives du droit à un logement convenable se produisent durant et après un conflit violent, dénonçant le bombardement et les attaques lancés contre les domiciles, la destruction de villes et de villages entiers et le déplacement de millions de personnes. Il a également relevé que l’urbanisation de la guerre avait intensifié la destruction des maisons liée aux conflits.

Il a défini le concept de « domicide »: la destruction massive et délibérée d’habitations dans le but de causer des souffrances humaines.  Un tiers des maisons en République arabe syrienne auraient été ainsi partiellement ou totalement détruites au cours des années de conflit, a indiqué le Rapporteur qui a ajouté que 200 villages rohynga avaient été incendiés ou détruits au bulldozer au Myanmar et que 90% des immeubles de Marioupol, en Ukraine avaient été détruits ou endommagés.  Mais ces violations se produisent aussi par l’intermédiaire de la bureaucratie, par exemple lorsque certaines autorités obligent une population vivant sous occupation à démolir ses propres maisons, a-t-il précisé.

Le Rapporteur a souligné que le droit international humanitaire interdit clairement d’attaquer et de détruire toute habitation civile tant qu'elle n’est pas devenue un objectif militaire légitime.  Il a également appelé tous les États membres à signer la déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, qui sera officiellement adoptée le 18 novembre 2022 à Dublin, en Irlande.  Il est possible d’interdire les mines terrestres et les munitions à fragmentation par le biais d’accords internationaux, d’autant qu’il n'y a aucune excuse pour que les États n’interdisent pas l’utilisation d’armes explosives qui tuent et mutilent chaque année des centaines de milliers de civils dans nos villes, a-t-il ajouté. 

Poursuivant, le Rapporteur spécial a indiqué que le domicide peut être étroitement lié au génocide, lorsque la destruction d’habitation vise à détruire une population précise, comme en Bosnie-Herzégovine ou au Rwanda, et également constituer un crime contre l'humanité.  Le droit international humanitaire et pénal actuel offre d’ailleurs déjà plusieurs possibilités de poursuivre la destruction de logements et les expulsions forcées, soit en tant que crime de guerre, soit en tant crime contre l’humanité, de même qu’en tant que crime de génocide.  Pourtant dans les faits, l’impunité est la norme plutôt que l’exception, a-t-il déploré, soulignant que le domicide est bien plus qu’une simple intrusion dans le droit au domicile ou dans les droits de propriété d’une personne, car il déclenche un effet domino sur d'autres droits humains.  Le Rapporteur a ensuite appelé à reconnaître le domicide comme un crime international ou un crime contre l’humanité à part entière. « Combien d’Alep, de Sanaa et de Marioupol allons-nous continuer à accepter? », s’est ému M. Rajagopal en concluant. 

Dialogue interactif

Réagissant les premiers à cet exposé, les États-Unis se sont émus des violations du droit au logement que subissent les Ukrainiens dans la guerre menée par la Russie, et à ce titre ont demandé ce que peut entreprendre la communauté internationale pour répondre aux besoins des personnes déplacées.  Quelles options permettraient d’inscrire le domicide comme un crime distinct dans le droit international, s’est enquise l’Union européenne.

La Fédération de Russie a fustigé le rapport pour ses allégations concernant l’Ukraine, rappelant d’abord que la région du Donbass, suite « au coup d’État de 2014 » fut bombardée pendant huit ans à l’artillerie lourde par les forces ukrainiennes, rasant des quartiers entiers.  En 2014, 300 domiciles ont été détruits à Donetsk.  Et à Marioupol, le bataillon Azov s’est lui aussi prêté à de multiples expropriations, a accusé la délégation.  Les États-Unis et leurs alliés ont fermé les yeux sur ces faits, mais le Rapporteur spécial devrait, lui au moins, décrire la réalité du terrain, a-t-elle souligné. 

Rappelant qu’un million de réfugiés rohingya ont été recueillis sur son territoire, le Bangladesh a demandé comment mieux gérer les déplacements de masse de ce type, notant par ailleurs que l’urbanisation combinée aux changements climatiques va accroître les flux massifs vers les villes, surtout dans les pays en développement.  La République dominicaine a rappelé de son côté le lien délétère entre les changements climatiques et le droit au logement, et a demandé au Rapporteur des détails sur l’inclusion de cette réalité dans ses travaux. 

Comment s’assurer pendant les conflits que les logements n’ont pas été transformés en base arrière militaire, a demandé le Cameroun.  La Chine a mis en avant ses politiques visant à améliorer le droit au logement sur son territoire, tout comme l’Inde qui a en outre demandé des détails sur l’utilisation des satellites dans la collecte d’informations relatives au droit à un logement convenable. 

La République islamique d’Iran, qui a déploré les violations au droit au logement subies par le peuple palestinien, a voulu savoir ce que le Rapporteur compte mettre en œuvre pour coopérer avec d’autres titulaires de mandat.  La République arabe syrienne a indiqué que le gouvernorat de Raqqa a été intégralement détruit par la coalition contre Daech, déplorant que le rapport n’en fasse pas mention, ce qui remet en doute son objectivité.  Le Mali a ensuite demandé au Rapporteur ce qu’il conseillait à la communauté internationale de faire afin que la satisfaction des droits essentiels des populations les plus pauvres devienne une réalité. 

Réagissant à ces questions et remarques, le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard a d’abord abordé la question du relogement des flux de réfugiés, saluant la réaction européenne à l’afflux de réfugiés ukrainiens et celle du Bangladesh dans la crise des Rohingya.  Notant que ces mouvements massifs de population deviendront la norme sous l’effet des changements climatiques, il a appelé la communauté internationale à s’engager dans une compréhension plus large, et plus durable de ces défis.  Il a ensuite annoncé que, son prochain rapport portera sur les répercussions de la crise climatique sur le droit au logement et examinera la question de l’empreinte carbone de la reconstruction de logements.  

Répondant à la question sur l’utilisation de logements à des fins militaires, il a expliqué qu’il incombait d’exclure catégoriquement de la catégorie du logement civil toute habitation suspectée d’être utilisée dans le cadre de combats, notant qu’il s’agit toutefois là d’une question politique et de stratégie militaire.  Certains édifices culturels et religieux bénéficient d’une protection améliorée du droit international, mais pas les logements « ordinaires », ce qui, au vu de l’interconnexion du droit au logement avec les autres droits humains, n’est pas logique, a aussi analysé le Rapporteur.  Il faut aussi garder à l’esprit que le domicide n’est pas le fait exclusif d’acteurs étatiques officiels, a-t-il ajouté, notant que les acteurs non étatiques devraient avoir la même responsabilité au regard du droit international. 

L’imagerie satellite peut entrer dans le cadre de la prévention, a poursuivi le Rapporteur, expliquant que les satellites permettent d’identifier où et quand les violations du droit au logement risquent de se produire.  Là encore, il a estimé que l’utilisation de ces technologies ne saurait être le seul fait des autorités, plaidant pour une circulation plus libre des informations délivrées par ces technologies, notamment à l’intention des victimes de violation du droit au logement.  Après avoir fait part de son empressement à travailler avec d’autres titulaires de mandat, le Rapporteur a promis d’étudier les « mises à jour » apportées par la délégation syrienne au sujet de la destruction de logements dans le gouvernorat de Raqqa. 

Exposé

M. MICHAEL FAKHRI, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a centré son rapport sur l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la sécurité alimentaire.  Il a mis en exergue le fait que quatre groupes de personnes ont été particulièrement affectés: les femmes, victimes de discriminations; les enfants, dont 160 millions travaillent aujourd’hui, un chiffre qui a connu sa première augmentation en 20 ans; les travailleurs, qui ont été traités comme s’ils étaient jetables; et les peuples autochtones qui ont vu leurs terres volées, occupées et détruites à un « rythme génocidaire ».

Si la crise alimentaire s’est aggravée depuis l’adoption de la résolution sur le droit à l’alimentation l’année dernière, ce droit est de mieux en mieux reconnu, a-t-il constaté, notamment par le Groupe d’intervention mondiale face aux crises alimentaire, énergétique et financière et la plateforme du Sommet sur les systèmes alimentaires.  Il a aussi expliqué avoir informé de manière informelle le Conseil de sécurité sur son mandat, salué une récente déclaration du G7 sur l’importance du droit à l’alimentation et souligné que la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) avait proposé à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de prendre en compte la question du droit à l’alimentation. 

Regrettant l’absence d’un plan d’action mondial piloté par les gouvernements pour faire face à la crise alimentaire, M. Fakhri a appelé à rédiger une déclaration sur le droit à l’alimentation dans les termes décrits dans ses recommandations.  Il a notamment appelé à ne pas mettre fin aux programmes d’aide adoptés pendant la pandémie qui ont su démontrer qu’il était possible de réaliser le droit à l’alimentation.  Il a également insisté sur ses recommandations en vue d’une transition vers l’agroécologie en respectant le droit des travailleurs, en engageant des réformes agraires et dans le domaine des droits fonciers, et en obligeant les entreprises à rendre des comptes. 

Le Rapporteur spécial a estimé que le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) devrait renforcer son rôle de plateforme de coordination, regrettant qu’au début du mois, lors de la plénière annuelle du CSA, les gouvernements n’aient pas pu se mettre d’accord sur une réponse coordonnée à la crise.  Une formulation venant de l’Assemblée générale aiderait à débloquer la situation, a-t-il estimé.  Concluant son propos, il a espéré que la Troisième Commission renouvèlerait sa demande de le voir se concentrer à nouveau sur l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la sécurité alimentaire dans son prochain rapport. 

Dialogue interactif

Prenant la parole au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a rappelé que lors de son sommet de Bakou en 2019 le Mouvement avait considéré que la faim représentait une atteinte à la dignité humaine et appelé de ses vœux le renforcement des systèmes d’alerte et de la collaboration Sud-Sud en vue de lutter contre la faim.  De son côté, le Portugal a regretté que peu de pays prennent réellement en compte le droit à l’alimentation dans leur système juridique. 

La Fédération de Russie a dénoncé les « interprétations » du rapport, affirmant qu’elle n’avait pas bloqué les ports ukrainiens mais qu’ils avaient été minés par l’armée ukrainienne.  Elle a regretté que les corridors humanitaires qu’elle avait ouverts pour les navires commerciaux n’aient pas été utilisés, accusant en outre les pays soutenant l’Ukraine de bloquer 80% des exportations d’engrais russes.  De même, la délégation a estimé que l’Initiative céréalière de la mer Noire profitait surtout aux pays riches, affirmant que selon le Centre conjoint de coordination d’Istanbul, la moitié des exportations venues des ports ukrainiens partaient vers l’Union européenne, le Royaume-Uni et Israël et seulement 3% vers les pays qui en avaient le plus besoin.  L’Union européenne a affirmé pour sa part que l’agression russe en Ukraine avait créé un risque de famine imminente. 

La République dominicaine a voulu savoir comment la déclaration de l’Assemblée générale que le Rapporteur appelait de ses vœux permettrait de faire face à la crise alimentaire et comment l’adapter aux différents contextes.  L’Indonésie a insisté sur l’importance de l’autonomisation des petits agriculteurs, tandis que la République islamique d’Iran a appelé à interdire aux spéculateurs de jouer sur les prix de l’alimentation, s’inquiétant par ailleurs des répercussions des mesures coercitives unilatérales sur le droit à l’alimentation.  De son côté, le Cameroun a appelé à affronter les effets conjugués de la pandémie de COVID-19 et de l’inflation sur le droit à l’alimentation, regrettant que le Sommet sur les systèmes alimentaires de 2021 n’ait pas examiné les effets de la pandémie de COVID-19. 

Le Bélarus a estimé que le rapport ne mettait pas assez en lumière l’impact des mesures coercitives unilatérales sur la sécurité alimentaire et a souhaité que le prochain rapport soit consacré à ce sujet.  Le Japon s’est alarmé du risque de famine en Ukraine et a demandé des éclaircissements sur les effets de la réponse du G7 à la crise alimentaire mondiale actuelle.  L’Angola s’est inquiété de l’impact de la spéculation financière sur les prix alimentaires et a souligné l’importance des programmes d’alimentation scolaire, appelant en outre à la transformation des systèmes alimentaires mondiaux.  Il faut mettre en place un ordre international plus juste défendant la vie plutôt que les dividendes, a plaidé Cuba qui a dénoncé les impacts du blocus des États-Unis sur le droit à l’alimentation du peuple cubain. 

La Chine a rappelé qu’avec 6,6% de l’eau potable et 10% des terres arables de la planète elle réussissait à nourrir 20% de l’humanité et fournissait une assistance alimentaire à 50 pays, profitant à 20 millions de personnes.  Le Nigéria a voulu en savoir plus sur les efforts déployés par le Rapporteur pour s’assurer que le système alimentaire mondial profite à tous sans distinction.  La Syrie a demandé pourquoi le Rapporteur parlait « d’invasion illégale » dans le cas de la Russie en Ukraine et non dans celui des États-Unis sur son territoire qui l’empêche d’accéder à ses récoltes dans le nord-est.  La Somalie s’est inquiétée des problèmes posés par la pêche illicite non déclarée et non réglementée, suivi du Maroc qui s’est interrogé sur le besoin de créer une convention internationale sur le droit à l’alimentation.  Quels seraient les bénéfices d’un nouveau traité contraignant?

Répondant à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation a estimé qu’un nouveau traité n’était pas à l’ordre du jour mais qu’une nouvelle résolution de l’Assemblée générale serait utile.  Il a qualifié « d’absurde » le fait que le Sommet sur les systèmes alimentaires de 2021 n’ait pas tenu compte de la pandémie de COVID-19 ni du droit à l’alimentation.  Il a noté que 110 pays avaient demandé des orientations en matière d’alimentation mais que les débats s’étaient focalisés sur des questions essentiellement nationales, ne permettant pas l’émergence de solutions globales coordonnées.  Énumérant les initiatives diverses du Groupe d’intervention mondiale face aux crises alimentaire, énergétique et financière et du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, ainsi que la déclaration du G7, il a estimé qu’une résolution robuste s’appuyant sur les lignes principales de son rapport permettrait de pousser les gouvernements à mettre au point un plan coordonné qui tienne compte des besoins des populations. 

Concernant les mesures coercitives unilatérales, il a rappelé qu’un Rapporteur spécial travaillait sur cette question et qu’un appel à contribution avait été lancé à Genève.  M. Fakhri a toutefois prévenu que même si les conflits, les mesures unilatérales coercitives et la pandémie disparaissaient aujourd’hui, les choses ne s’amélioraient pas nécessairement car la crise climatique et les dysfonctionnements du système financier international perdureraient.  Évoquant les questions commerciales, le Rapporteur spécial a considéré que l’Accord sur l’agriculture de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) était obsolète et a déploré le peu d’avancées concernant la crise alimentaire au sein de cette organisation. 

Exposé

M. OLIVIER DE SCHUTTER, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a expliqué que son rapport est un appel à faire davantage pour protéger les personnes en situation de pauvreté des diverses formes de discrimination auxquelles elles sont confrontées, évoquant les « attaques » sans précédent contre le pouvoir d’achat des ménages à faible revenu, qui sont les plus touchés par l’inflation mondiale.

Que ce soit en Europe, où l’inflation a atteint un niveau record de 10%, ou en Afrique subsaharienne, où les prix des denrées alimentaires ont bondi de près de 24%, les budgets des ménages du monde entier sont mis à rude épreuve, ce qui signifie, a averti M. de Schutter, qu’un nombre encore plus grand de personnes en situation de pauvreté mourront de faim ou de froid cet hiver si aucune mesure n’est prise immédiatement pour augmenter leurs revenus.  Combinée aux impacts de la pandémie de COVID-19, la hausse mondiale des prix de l’énergie et des denrées alimentaires précipitera 75 à 95 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté en 2022, par rapport aux prévisions de 2019, a-t-il prédit. 

Pourtant, le « pauvrisme », c’est-à-dire les attitudes et comportements négatifs à l’égard des personnes vivant dans la pauvreté, reste très répandu, a-t-il relevé, estimant que s’il n’est pas combattu, il limitera considérablement l’accès des personnes en situation de pauvreté à l’emploi, au logement, aux soins de santé, à l’éducation et à la protection sociale.  Il a dénoncé la situation d’écoliers victimes d’intimidation parce qu’ils sont issus de familles à faibles revenus, découragés par leurs enseignants de poursuivre un enseignement secondaire de qualité, malgré des résultats de tests montrant qu’ils en sont plus que capables, ou se voyant refuser l’accès à certaines écoles.  Il s’est également ému du cas d’un enfant en Belgique qui a été exclu de la photo de classe annuelle parce que ses parents n’avaient pas été en mesure de payer les repas scolaires. 

De même, M. de Schutter a regretté que des propriétaires refusaient de louer des appartements à des locataires bénéficiant de prestations sociales.  Dans le cadre d’une expérience conçue par l’organisation ATD Quart Monde, des candidats en France avaient moins de chances d’être sélectionnés si leur candidature indiquait qu’ils avaient vécu dans un logement temporaire ou travaillé dans une entreprise sociale, deux expériences qui suggèrent un passé de pauvreté.  Et aux États-Unis, les employeurs refusent souvent de prendre en considération les candidats qui vivent dans des foyers pour sans-abri, a-t-il témoigné.  Le Rapporteur spécial a également fait observer que même les juges prononçaient des peines plus sévères sur la base de stéréotypes anti-pauvres, ce qui explique en partie pourquoi les personnes en situation de pauvreté sont représentées de manière disproportionnée dans le système de justice pénale. 

Le « pauvrisme » est tellement ancré dans les esprits et les institutions que la seule façon d’avancer est de le rendre illégal, à l’instar d’autres formes de discrimination telles que le racisme ou le sexisme, a recommandé le Rapporteur spécial.  Il a cité en exemple la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, au Canada, qui inclut la « condition sociale » parmi les motifs de discrimination interdits.  En France, la discrimination fondée sur la pauvreté est interdite par le Code du travail.  Et des mouvements populaires ont lieu en Irlande pour demander que le statut socioéconomique soit couvert par la loi irlandaise sur l’égalité, tandis que le Gouvernement britannique a été exhorté à plusieurs reprises à étendre sa loi sur l’égalité pour y inclure les inégalités économiques.  Cependant, malgré le nombre croissant de pays qui mentionnent « l’origine sociale » ou la « propriété » parmi les motifs suspects de traitement différentiel, cet outil est rarement utilisé par les tribunaux ou les avocats qui conseillent les victimes même lorsque cela serait justifié, a-t-il déploré.

C’est pourquoi, il a pressé les législateurs à aller plus loin, encourageant des politiques d’action positive.  La discrimination positive fondée sur la classe sociale soutiendra les personnes issues de milieux à faibles revenus, quels que soient leur race et leur sexe, a-t-il expliqué, faisant observer qu’en Inde, les opinions négatives à l’égard des enfants pauvres ont diminué après que les écoles d’élite de New Delhi ont été contraintes de réserver davantage de places aux enfants issus de familles à faibles revenus.  D’ailleurs, a-t-il confirmé, une série d’études ont montré que le contact entre les groupes réduisait les préjugés. 

L’action positive a également, à ses yeux, une valeur symbolique importante: elle reconnaît les obstacles spécifiques auxquels les personnes en situation de pauvreté sont confrontées en raison de la persistance du « pauvrisme », remettant en question le discours dominant selon lequel la société distribue les résultats sur la base du « mérite ».  Malgré leur persistance, le sexisme, le racisme, l’âgisme, la transphobie et l’homophobie sont vus pour ce qu’ils sont: des préjugés inacceptables qui n’ont pas leur place dans notre monde.  Le « pauvrisme » doit être combattu avec la même vigueur et la même persistance, a-t-il tranché. 

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, la France, au nom du groupe des coauteurs de la résolution sur l’extrême pauvreté et les droits humains, a voulu savoir quelles premières mesures les États doivent adopter afin de briser le cycle de la pauvreté.  Que faire pour mieux tenir compte et lutter contre le phénomène du « pauvretéisme » au niveau national, mais aussi dans le contexte de l’aide publique au développement, a demandé le Luxembourg.  À sa suite, le Cameroun s’est intéressé aux moyens de lutter contre la discrimination fondée sur l’appartenance à un milieu défavorisé dans un contexte culturellement et socialement diversifié.  Comment parvenir à assurer une meilleure représentation politique des personnes les plus défavorisées, s’est enquise à son tour l’Union européenne

Après l’Angola qui a proposé de détricoter les stéréotypes négatifs sur la pauvreté, la Fédération de Russie s’est félicitée du fait que la proportion de la population russe souffrant de l’extrême pauvreté est inférieure à 1%.  De son côté, la Chine s’est enorgueillie d’avoir contribué à la réduction de 70% de la population pauvre au niveau mondiale.  L’Ordre souverain de Malte a préconisé une redistribution équitable des ressources, tandis que la République arabe syrienne s’est enquise de la méthodologie sur laquelle s’est appuyé le Rapporteur spécial pour élaborer son rapport. 

Répondant aux questions et observations des États Membres, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a rappelé que le droit international des droits de l’homme interdit la discrimination sur la base de l’origine sociale, précisant que son rapport passe en revue les avancées à cet égard, identifie les bonnes pratiques et incite les États à faire davantage pour que les personnes pauvres puissent exercer leur droit d’accès au logement, à l’emploi et à la sécurité sociale.  Ce rapport de droit comparé veut donc accélérer un mouvement, en s’inspirant des meilleurs pratiques disponibles. 

S’agissant des mesures prioritaires à prendre à cet égard, il a préconisé de faire figurer dans la législation de chaque État, la protection contre les discriminations fondées sur le désavantage socioéconomique.  Citant quelques exemples de bonnes pratiques, il a mentionné la France dont le droit interdit de discriminer sur la base de la vulnérabilité économique ou encore la Belgique, où les administrations recrutent des « experts du vécu », à savoir des personnes qui ont connu la pauvreté. 

Si la pauvreté n’est pas une caractéristique immuable, en revanche, elle enferme l’individu dans une situation dont il est parfois très difficile de sortir, a-t-il fait observer, renvoyant les États Membres à son rapport de l’an dernier sur la perpétuation de la pauvreté.  Pour briser ce cycle, il faut un accès effectif à la justice, a-t-il souligné, citant le cas de l’Afrique du Sud qui a mis en place des juridictions spécialisées en matière de lutte contre les discriminations et d’égalité des traitements.  Le Rapporteur spécial a aussi préconisé une approche fondée sur les droits en matière d’accès aux biens et services sociaux dans les projets et programmes de développement afin de protéger les personnes en pauvreté du risque de discrimination et éviter que les stéréotypes négatifs n’affectent leur droit. 

Le Rapporteur a ensuite indiqué que l’année prochaine, il compte s’atteler à la pauvreté chez les travailleurs, informant, à cet égard, que l’Union européenne compte, à elle seule, quelque 20 millions de travailleurs pauvres.  Il s’agit pour lui de s’interroger sur la manière de renforcer la capacité pour les syndicats de protéger le pouvoir d’achat de cette catégorie et le risque que représente la précarisation du travail, en relation notamment avec les contrats précaires.  Abordant, pour finir, la représentation politique de ces personnes, il a expliqué qu’il ne s’agit pas uniquement du droit d’être consulté, ou de prendre part à des élections, mais, du droit de coconstruire des solutions et de prendre part à la décision. 

Exposé

M. CLEMENT NYALETSOSSI VOULE, Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, a présenté un rapport consacré au rôle des mouvements sociaux dans la construction d’un monde meilleur.  Il a relevé que les mouvements sociaux sont souvent des groupes peu organisés, de nature informelle, ce qui leur permet d’offrir une plateforme inclusive à des individus de tous horizons pour la défense de causes communes.  Ces mouvements sociaux jouent un rôle essentiel pour l’engagement social, la participation démocratique et une gouvernance réactive, a-t-il souligné.

M. Voule a ensuite brossé un tableau des avancées politiques, économiques, sociales et environnementales que les mouvements sociaux ont obtenues, citant notamment l’égalité d’accès au droit de vote, le renversement des régimes coloniaux ou autoritaires, et la lutte contre les discriminations raciales.  À titre d’exemples, il a cité le mouvement qui a contribué à faire tomber le régime d’apartheid sud-africain dans les années 1990, les mouvements contre les coups d’État militaires, actifs actuellement au Soudan et au Myanmar, mais aussi Occupy, #MeToo, Black Lives Matter, Extinction Rebellion et Fridays for Future.

Le Rapporteur spécial a constaté que ces mouvements, qui ont contribué au bien-être individuel, collectif et société grâce à l’exercice de leur droit d’association et de réunion pacifique, continuent de faire face à de graves menaces.  Il a dénoncé les lois accordant à l’État des pouvoirs discrétionnaires permettant d’interdire certaines associations et d’imposer des restrictions à celles qu’il autorise.  M. Voule s’est aussi inquiété des représailles contre les acteurs de ces mouvements, dirigeants et participants, exercées par des acteurs étatiques et non étatiques sous la forme d’exécutions extrajudiciaires, de détentions arbitraires et d’agressions.  Il a dénoncé les intimidations dont ces acteurs font l’objet au prétexte qu’ils représenteraient une menace pour la sécurité nationale ou qu’ils seraient des terroristes ou des agents de l’étranger. 

En cas de manifestations de grande ampleur, les États adoptent fréquemment des réponses restrictives, notamment en déclarant l’état d'urgence ou la loi martiale, et en faisant un usage excessif de la force pour disperser les rassemblements, a-t-il déploré, ajoutant que les responsables des abus commis dans de tels contextes n’ont souvent que peu de comptes à rendre.  Il a aussi déploré l’usage de lois « trop larges et trop vagues » qui sont souvent des « objectifs illégitimes », tels que la violation des droits des individus et des groupes à la liberté de réunion pacifique, d’association, d’expression et de participation aux affaires publiques.

Appelant les États à traiter les mouvements sociaux comme des partenaires, M. Voule a proposé des mesures concrètes.  Il a demandé aux États de s’abstenir d’imposer des restrictions aux associations, qu’elles soient enregistrées ou non, et de ne pas attaquer les membres des mouvements sociaux.  Il a suggéré aux États d’impliquer les mouvements sociaux dans l’élaboration des lois, de promouvoir leur travail en faveur des droits et de garantir leur droit d’accès aux financements, qu’il soit public ou privé, national ou étranger.  Enfin, il les a incités à favoriser une liberté de mouvement maximale afin de permettre aux membres des mouvements sociaux de plaider efficacement en faveur du changement aux niveaux local, provincial, national, régional et international.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, le Qatar a mis en avant ses lois, législations et programmes adoptés conformément à ses obligations internationales en matière de libertés individuelles et de respect des droits humains.  Se disant préoccupés par les restrictions imposées aux libertés fondamentales dans de nombreux pays, les États-Unis, se sont enquis des moyens de créer un environnement facilitateur pour les mouvements sociaux et les membres de la société civile.  L’Union européenne a souhaité avoir plus d’informations sur les effets qu’ont les restrictions des mouvements sociaux et la criminalisation des associations non enregistrées sur la mise en œuvre complète du Programme 2030.  Quels partenariats efficaces entre gouvernements et mouvements sociaux peuvent être considérés comme des modèles, a voulu savoir le Royaume Uni, tandis que la République tchèque s’interrogeait sur les indicateurs à surveiller pour mesurer la réduction des libertés des mouvements sociaux.  Comment lutter plus efficacement contre les technologies susceptibles d’être utilisées pour des violations généralisées ou systématiques des droits humains ou pour la répression de mouvements sociaux, a demandé la Suisse.  

Au nom des pays nordiques et des États baltes, la Lituanie s’est alarmée de la situation des défenseurs des droits humains et des journalistes, souvent ciblés par les États.  Quelles mesures peuvent être prises pour les aider à travailler dans les conditions les plus sûres possibles, a-t-elle souhaité savoir.  Quelles sont alors les bonnes pratiques pour des sociétés plus équitables, a ensuite demandé la Belgique, au nom des pays du Benelux.  L’Arabie saoudite a assuré que les libertés d’expression et d’opinion sont protégées et préservées pour tous ses citoyens ainsi que pour tous les résidents, conformément à sa Constitution et au droit international. La Constitution chinoise garantit la liberté d’expression et d’assemblée et elle accorde le droit de manifester à condition que cela ne trouble pas l’ordre public, a précisé la Chine.  À sa suite, la République islamique d’Iran a réfuté catégoriquement les « allégations infondées » contenues à son sujet dans le rapport de M. Voule, avant de demander à ce dernier de préciser sa définition juridique des mouvements sociaux dans des États souverains.  Et comment s’assurer que ces mouvements ne troublent pas l’ordre public?

Le Pakistan a quant à lui appelé M. Voule à se pencher sur la situation dans le Jammu-et-Cachemire occupé, où sévit une violente répression, estimant que cette situation doit faire l’objet d’une attention urgente de la communauté internationale.  Dénonçant ces « accusations infondées  », l’Inde a fait état de violations graves des droits humains au Pakistan, avant de souligner que la région évoquée par la délégation pakistanaise « fera toujours partie de l’Inde, indépendamment de ce que pense le Pakistan ».  Enfin, reprochant au Rapporteur spécial de faire preuve d’impartialité, la Fédération de Russie l’a en outre accusé de se livrer à de la « politisation » et aux « deux poids, deux mesures ».  Elle lui a reproché de ne pas prêter attention à la répression violente, dans les pays de l’Union européenne, de manifestations dénonçant les actions des gouvernements et exigeant la suppression des restrictions économiques imposées à la Russie.  

Réagissant à ces questions et observations, le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association s’est d’abord adressé aux États en désaccord avec son rapport, indiquant qu’il tient bien compte de toutes les opinions et de l’ensemble des pays impliqués. Il a ensuite jugé important que les États puissent réviser leurs lois quand elles criminalisent la liberté d’association et les mouvements sociaux. Les gouvernements doivent s’abstenir de toute attaque contre ceux qui exercent leur liberté de réunion pacifique, a-t-il souligné.  Dans certains pays, a poursuivi M. Voule, « à chaque fois que les gens veulent exprimer leur désapprobation dans la rue, ils sont accusés d’être manipulés par l’Occident ».  Un fait « préoccupant », qu’il a dit avoir relevé à maintes reprises lors de ses travaux.

Le Rapporteur spécial a d’autre part mis en garde contre les effets délétères de la technologie en ce qu’elle facilite la surveillance de la société civile.  Il est important selon lui, que les États observent un moratoire sur la vente d’un certain nombre de technologies qui limitent les libertés.  Il a cité à cet égard le logiciel espion Pegasus ou encore les systèmes de reconnaissance faciale utilisés sous couvert de lutte contre la criminalité. S’agissant de la criminalisation des ONG non enregistrées, il a plaidé pour que ces associations nées de mouvements spontanés opèrent librement.  Selon lui, les gouvernements doivent non seulement les autoriser mais aussi échanger avec elles.  À ce propos, M. Voule a de nouveau exhorté l’Iran à respecter les manifestations organisées au nom de la liberté des femmes de porter ou non le voile. 

Nous faisons également face aux répercussions socioéconomiques liées à la pandémie de COVID-19, a poursuivi le Rapporteur spécial. Face aux manifestations qui expriment l’amertume résultant d’inégalités accrues, les États doivent comprendre que ces mouvements ne sont pas strictement politiques, mais constituent des marches pour la dignité.  Évoquant à cet égard l’instabilité que traverse  le Sri Lanka, il a exhorté les gouvernements écouter le message des manifestants et à se demander comment y répondre, « »avant qu’il ne soit trop tard  ».  Enfin, après avoir salué les avancées permises par les associations pro-avortement ou par le mouvement Black Lives Matter, M. Voule a lancé un dernier appel à divers pays, parmi lesquelles l’Iran, le Tchad et le Myanmar : ? engagez-vous dès aujourd’hui dans un processus de désescalade, car la répression ne saurait et ne peut se pérenniser ».  

Exposé

Mme ALICE CRUZ, Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille, a expliqué que son rapport examine comment la reconnaissance des personnes touchées par la lèpre en tant que personnes pouvant prétendre aux droits prévus par la Convention relative aux droits des personnes handicapées permettrait de protéger leurs droits et constitue une étape importante vers l’élimination de la discrimination systémique à leur égard.  Empêchées physiquement, mais aussi socialement discriminées par la lèpre, les personnes concernées devraient être pleinement reconnues comme des personnes handicapées, conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, a souligné Mme Cruz.

Pourtant, a-t-elle déploré, les personnes touchées par la lèpre et les membres de leur famille ont été largement exclus du débat mondial sur le handicap.  Si le cadre légal et politique à même de protéger les personnes touchées par la lèpre a beau exister dans nombre de pays, son exécution pose problème, a constaté la Rapporteuse.  Elle a mentionné, entre autres, la difficile évaluation des déficiences psychosociales, l’élimination des cadres juridiques et réglementaires discriminatoires, la persistance de stéréotypes erronés sur la lèpre, ou encore les barrières géographiques enfermant les personnes vivant dans des zones éloignées et rurales.  En outre, la protection des personnes vivant dans d’anciennes colonies de lépreux n’est toujours pas abordée, et les personnes touchées par la lèpre fréquentent peu les organisations qui les représentent quand celles-ci existent, du fait, entre multiples freins, d’une discrimination institutionnalisée, ou du faible niveau d’instruction.  De plus, elle a indiqué que les défis découlant des différentes formes de handicap varient, d’où l’importance de consulter tous les groupes de personnes handicapées.

Poursuivant, la Rapporteuse a relevé que des progrès ont été accomplis dans l’élaboration de normes nationales, mais que leur application souffre d’approches paternalistes, qui font parfois fi de l’indispensable promotion d’environnements garantissant le droit des personnes handicapées à bénéficier des mêmes opportunités que les autres.  Elle a appelé à un changement systémique capable de dépasser les cadres juridiques et réglementaires nationaux existants, déplorant le refus systémique d’accès aux opportunités pour les personnes touchées par la lèpre dans des domaines essentiels, y compris l’éducation, le travail, la protection sociale, et l’accès à la justice. Elle a également alerté que ces personnes, en premier lieu les femmes et les enfants, sont l’objet de violences en tous genres qui vont jusqu’au meurtre.  Elle a ensuite appelé les États Membres à reconnaître les personnes touchées par la lèpre comme ayant droit aux droits liés au handicap et de veiller à ce que leur voix soit entendue et prise en compte dans l’élaboration des politiques.  

Dialogue interactif

Réagissant à l’exposé de la Rapporteuse spéciale, l’Union Européenne a demandé comment encourager la participation des personnes touchées par la lèpre au sein des organisations qui les représentent.  Comment promouvoir la participation à la vie sociétale chez les plus vulnérables parmi ces personnes, s’est enquise à son tour la Colombie.  Le Bangladesh a voulu savoir comment la Rapporteuse entendait aider les États qui font face à cette maladie, et lui a demandé de partager son opinion au sujet d’un mécanisme international robuste pour lutter contre la lèpre et soutenir les victimes. 

Le Japon a espéré qu’une reconnaissance du lien entre handicap et lèpre permettra d’amoindrir la souffrance des personnes touchées, et a demandé à la Rapporteuse de faire le bilan de ses priorités passées et celles auxquelles elle compte s’atteler l’année prochaine.  Le Portugal a regretté que les mesures prises par l’Organisation mondiale de la Santé ne portent que sur les aspects physiologiques de la lèpre, et s’est interrogé au sujet d’une prise en compte de la dimension psycho-sociale de la maladie.  Notant en outre que beaucoup de voix s’élèvent en faveur de l’abandon de la dénomination de « lèpre » au profit de « maladie de Hansen », la délégation s’est enquise des enjeux liés à cette question lexicographique. 

L’Angola s’est demandé comment les États peuvent garantir une assistance complète aux personnes touchées par la lèpre sans qu’elles fassent l’objet d’examen approfondis par les organismes médicaux, le rapport déplorant que leur protection demeure souvent surtout sociale.  Préoccupé par la recrudescence de la lèpre sur son territoire, le Népal a demandé comment promouvoir les droits des personnes touchées par la lèpre et éliminer la maladie d’ici à 2030.  La Chine a ensuite passé en revue les mesures mises en œuvre en faveur des personnes touchées par cette maladie au sein de sa société. 

Répondant à ces observations et remarques, la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille a indiqué que sa principale priorité première au cours de ses cinq années de mandat portait sur l’autonomisation des personnes touchées par la lèpre sans laquelle, a-t-elle affirmé, aucun changement n’est possible.  Une autre priorité fut d’aider les États à supprimer les discriminations juridiques, a-t-elle poursuivi, déplorant qu’il reste 100 lois qui marginalisent activement les personnes touchées par la lèpre et des membres de leurs familles. 

Face à la vulnérabilité de ces personnes, la coopération internationale est essentielle, a-t-elle ajouté.  Elle a également appelé les États à renforcer la recherche médicale contre la lèpre, notant qu’il n’existe toujours pas de traitement adapté pour les enfants.  Les personnes touchées par la lèpre souffrent aussi d’un manque d’information, un défi qui rejoint l’épine dorsale de son travail, l’autonomisation.  Elle a fait savoir qu’elle avait remis un rapport au Conseil des droits de l’homme détaillant l’impact disproportionné de la COVID-19 sur les personnes touchées par la lèpre.  À ce sujet « nous ne sommes toujours pas sur la voie du mieux-faire » a déploré la Rapporteuse, qui a par ailleurs recommandé à l’OMS d’adopter un nouveau paradigme incluant les aspects psycho-sociaux, dits « invisibles », de la lèpre. 

La Rapporteuse s’est ensuite réjouie de ce que certains pays aient abandonné la dénomination de « lèpre » au profit de celle de « maladie de Hansen », un virage lexicographique de très grande importance car, a-t-elle estimé, il s’agit de plus qu’une maladie, mais d’une étiquette ternie par des millénaires d’histoire.  Préfériez-vous annoncer à votre famille que vous avez contracté la lèpre, ou la maladie de Hansen? , a-t-elle demandé à son auditoire. 

Exposé

M. VICTOR MADRIGAL-BORLOZ, expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre, a présenté son rapport en affirmant être arrivé à la conclusion que l’orientation sexuelle et l’identité de genre sont des facteurs à l’origine de la violence et de la discrimination liées aux conflits dans le cas des personnes LGBT.  Sur cette base, il a plaidé pour l’inclusion de ces catégories dans la formulation, l’exécution et l’évaluation du programme pour lesfemmes et la paix et la sécurité des Nations Unies.  Il a ensuite indiqué que son rapport se décompose en cinq axes d’analyse, le premier concernant les conflits qui exacerbent les dynamiques discriminatoires et violentes sur le genre et la sexualité sous toutes les latitudes.  Dans le cas des personnes LGBT, ces dynamiques reposent sur une stigmatisation profondément ancrée, a-t-il observé, constatant par ailleurs l’absence de référence à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre dans les cadres mondiaux de paix et de sécurité, y compris dans le programme pour les femmes et la paix et la sécurité. 

Troisième axe d’analyse, la violence liée aux conflits et fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre est souvent de nature structurelle, a-t-il noté, relevant que certains actes sont liés à des schémas discriminatoires plus larges résultant de la criminalisation et/ou de normes sociales d’exclusion, dans lesquels les acteurs du conflit armé voient des « opportunités stratégiques et tactiques » d’infliger des dommages aux forces ennemies ou de soumettre des communautés ou des populations. 

Le Rapporteur spécial a ensuite relevé en quatrième axe que les « imaginaires sociaux et culturels » profondément ancrés alimentent les agressions, rendant le recours à la violence contre les communautés et les populations LGBT utile pour faire avancer les intérêts de ceux qui prennent part aux hostilités, dans les conflits armés, qu’ils soient internationaux ou pas.  Cette relation a donné naissance à un concept émergent, celui de l’ « instrumentalisation des préjugés », également connu sous le nom de « violence par les préjugés », a expliqué M. Madrigal-Borloz, avant de se féliciter qu’en Colombie, la Commission de la vérité ait recouru à ce concept pour résumer les différents types de violence dirigés contre des personnes LGBT pendant le conflit qui a duré plus de 50 ans dans le pays. 

Enfin, son dernier axe d’analyse se penche sur les dynamiques qui ont conduit à l’identification de catalogues spécifiques de la violence, qui décrivent les formes de violence auxquelles les personnes LGBT sont soumises pendant les conflits armés.  Ces catalogues, a-t-il indiqué, incluent le viol et d’autres formes de violence sexuelle, ainsi que la torture, les homicides illégaux, la persécution et d’autres atteintes à l’intégrité physique et mentale des personnes LGBT.  Selon le Rapporteur spécial, la manière dont ces formes de violence sont mises en œuvre révèle souvent leur « intention normalisatrice », comme c’est le cas des viols contre les femmes lesbiennes et bisexuelles, honteusement appelés « correctifs ». 

Pour finir, M. Madrigal-Borloz a précisé que son rapport comprend aussi une analyse du cadre juridique.  Il a rappelé à ce sujet qu’à l’intersection du droit international humanitaire, du droit international des droits de l’homme, du droit pénal international, du droit des réfugiés et du programme pour lesfemmeset la paix et la sécurité, il existe une myriade d’obligations pour les acteurs étatiques et non étatiques dans les situations de conflit armé.  Ces obligations, a-t-il fait valoir, ne vont pas au-delà des normes juridiques existantes en matière de prévention des conflits, de protection, de participation, de réparation, de paix durable et de cadres relatifs au genre.  Dans le cadre d’une approche intersectionnelle du genre, a souligné le Rapporteur spécial en conclusion, les obligations juridiques existantes doivent être interprétées comme s’appliquant à la situation des personnes LGBT et de genre différent dans les conflits. 

Dialogue interactif

Après l’exposé de l’expert indépendant, Israël a voulu savoir comment mieux protéger les personnes persécutées pour leur orientation sexuelle qui fuient leur pays.  Le Mexique, où le mariage pour tous est devenu une réalité la semaine dernière, s’est demandé pour sa part comment appliquer le droit international des droits humains lors des conflits armés.

Malte et le Canada ont tous deux proposé d’intégrer la dimension de genre au programme des Nations Unies pour les femmes et la paix et la sécurité.  Comment faire en sorte que la diversité des genres soit considérée comme un atout pour renforcer la culture de la paix, a voulu savoir le Luxembourg.  Alors que l’Australie, la Belgique et la Colombie s’alarmaient de la situation des personnes et communautés discriminées pour leur orientation sexuelle et leur identité de genre, l’Uruguay qui a voulu connaître des exemples d’implication de la société civile dans la lutte contre ces discriminations en période de transition politique.  Dans quels espaces des Nations Unies les États et la société civile pourraient-ils mieux plaider en faveur de ces communautés, se sont quant à eux interrogés les Pays-Bas.

L’Union européenne s’est enquise des bonnes pratiques en matière de données ventilées dans ce domaine, les États-Unis se demandant plutôt comment aider les bailleurs de fonds dans leur soutien aux communautés victimes de discrimination sexuelle.  Les États pourraient-ils aborder cette violence dans le cadre d’une approche plus uniformisée, a voulu savoir le Royaume-Uni

L’Espagne s’est, elle, penchée sur les mécanismes de recherche de la vérité, de justice transitionnelle et de consolidation de la paix, réclamant des éclaircissements sur leur portée et sur la manière dont les réparations sont conçues pour indemniser les victimes pour le préjudice subi.  De son côté, l’Albanie a demandé si des mécanismes peuvent être élaborés pour mieux protéger ces personnes discriminées en temps de conflit.  Comment protéger ces personnes en l’absence d’accès à de tels mécanismes, ont enchaîné la Géorgie puis l’Allemagne, celle-ci s’exprimant en sa qualité de coprésidente de la Coalition des droits égaux.  Quelles actions concrètes les États peuvent-ils entreprendre à ce sujet et comment s’assurer que les préjudices de genre sont interdits en situation de conflit, a souhaité savoir l’Irlande

À la suite de l’Angola, qui a demandé à l’expert indépendant s’il notait une différence de tendance sur ces questions entre les conflits d’aujourd’hui et d’avant, la République tchèque s’est interrogée sur les façons d’aider les réfugiés et déplacés internes issus de ces communautés discriminées.  Le Portugal a rappelé son opposition à toute forme de violence fondée sur le genre, tandis que le Japon s’intéressait aux manières de signaler et répertorier ces violences.  La Slovénie s’est, pour sa part, enquise des modes d’inclusion des personnes LGBTQI dans les processus d’intervention d’urgence des Nations Unies.  Les droits consacrés dans le droit international humanitaire s’appliquent-ils de façon égalitaire pour les personnes LGBTQI, a ensuite demandé le Chili, tandis que l’Argentine se posait la question de savoir si les mécanismes de réparation prennent en compte les formes multiples et intersectionnelles de discrimination auxquelles sont confrontées les personnes LGBTQI et de genre différent.  Au nom des États baltes, l’Islande a souhaité savoir quelles mesures devraient prendre les États pour garantir l’égalité des sexes et la protection des personnes LGBTQI, y compris les personnes déplacées et les réfugiés.  La France a quant à elle annoncé la nomination d’un ambassadeur chargé de ces questions.

En réponse aux délégations, l’expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre a tout d’abord fait valoir que, grâce à une approche centrée sur les droits humains, il est possible d’aboutir à plus d’inclusivité.  C’est le principe même de la non-discrimination, a-t-il souligné.  Dans ce contexte, il importe selon lui de veiller à la création de mécanismes qui suscitent et instaurent la confiance auprès des communautés LGBTQI.  À ses yeux, l’obligation redditionnelle est un préalable important qui devrait figurer dans les pratiques optimales.  De même, a-t-il ajouté, il est essentiel que l’identité de genre et l’orientation sexuelle soient prises en compte pour traiter les différentes formes de discrimination. 

M. Madrigal-Borloz a ensuite rappelé que les mécanismes de protection et de réparation ont été élaborés en fonction des types de violence, indiquant à cet égard que les femmes lesbiennes sont victimes d’une violence spécifique, appelée « violence corrective ».  La reconnaissance de la violence et de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle peut, à son avis, passer par des politiques publiques.  Il a ainsi cité le cas de la France, qui vient de nommer un ambassadeur chargé de ces questions.  Elle peut aussi passer par l’élaboration de cadres juridiques ou être inscrite dans le programme pour les femmeset la paix et la sécurité, a-t-il ajouté.  Si des cadres exhaustifs et inclusifs sont adoptés, les États trouveront des solutions à ces problématiques, a assuré l’expert indépendant, selon lequel la création de coalitions et de groupes est aussi une approche à envisager.  Pour ce faire, il convient de trouver un objectif commun et de mettre sur pied une stratégie conjointe, a-t-il plaidé. 

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