En cours au Siège de l'ONU

Première Commission: les désaccords entre Occidentaux et russes s’affichent en matière de cybersécurité

Soixante-dix-septième session,
29e séance plénière – matin
AG/DSI/3704

Première Commission: les désaccords entre Occidentaux et russes s’affichent en matière de cybersécurité

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a poursuivi ce matin l’examen des projets de résolution et de décision qui lui sont soumis, en examinant les textes consacrés au chapitre « Autres mesures de désarment et sécurité internationale », lequel comprend notamment les questions liées aux technologies de l’information et des communications (TIC) et à la cybersécurité, ainsi que la coopération internationale et le contrôle des armements.  La séance a été consacrée exclusivement à des déclarations générales et des explications des futurs votes, lesquels doivent avoir lieu demain.

En ce qui concerne la cybersécurité, la présentation de propositions portées par la France et la Fédération de Russie a donné lieu à l’expression de positions opposées sur une question considérée par la majorité des États Membres et le Secrétaire général de l’ONU comme une priorité du désarmement multilatéral.

La France, soutenue en particulier par l’Union européenne, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Ukraine, a présenté un texte proposant l’établissement d’un programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale.  Mis en place à l’issue des discussions dans le cadre de l’actuel Groupe de travail à composition non limitée sur les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale (2021-2025), ce programme aurait pour objectif d’établir aux Nations Unies un mécanisme permanent afin de poursuivre les échanges sur les enjeux de sécurité internationale liés à l’usage des TIC et sur les bonnes pratiques. 

« Ce projet ne nous plaît pas », a commenté le représentant de la Fédération de Russie, qui a rejeté catégoriquement un texte « politisé » qui intervient trois ans avant la fin du mandat du Groupe, les Occidentaux ayant pour objectif, selon le représentant russe, de remplacer le format actuel pour imposer un autre mécanisme non consensuel de prise de décisions.  La Fédération de Russie a présenté son propre projet de résolution, intitulé « Progrès de l’informatique et des télécommunications et sécurité internationale », qui demande notamment aux États de continuer de participer de manière constructive aux négociations du Groupe de travail, lequel, conformément à son mandat, « lui présentera des recommandations qui auront été adoptées par consensus ». 

Réagissant à ces présentations, l’Égypte, aux côtés de la France dans le projet d’élaboration du programme d’action, a souhaité que la question des TIC dans le contexte de la sécurité internationale fasse l’objet d’un examen unique à l’ONU.  Des pays comme la Malaisie ont quant à eux apporté leur soutien aux deux projets de résolution, avançant que ceux-ci soulignent de manière égale le rôle capital du Groupe de travail. 

La Fédération de Russie a présenté un autre texte, sur le renforcement et le développement du système de traités et d’accords sur la maîtrise des armements, le désarmement et la non‑prolifération.  Alors que l’Union européenne dénonçait un document « qui contredit ce que montre la réalité, à savoir les violations du droit international de la Russie en matière de contrôle des armements », la France et le Canada ont annoncé qu’ils voteraient pour ce texte.  Les représentants de ces pays ont promptement expliqué que leur vote n’était en rien un soutien à la Russie -dont ils ont condamné l’attitude brutale, irresponsable et contraire au droit international en Ukraine-, mais l’expression de leur engagement en faveur de la réalisation des objectifs internationaux que rappelle le texte.

Un autre texte a été au cœur des nombreuses déclarations générales et explications de vote avant le vote, celui de la Chine sur la promotion de la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a reçu le soutien de l’Iran, du Pakistan et de la Syrie, ces délégations considérant que son application permettrait la tenue d’échanges francs à des fins pacifiques sur le progrès technologique et la sécurité internationale.  Le Royaume-Uni et l’Australie ont annoncé qu’ils se prononceraient contre un texte qu’ils ont jugé déséquilibré quant aux deux objectifs qu’il se propose de réaliser. 

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 3 novembre, à partir de 10 heures.  Les délégations procéderont d’abord à l’adoption des projets de résolution sur les autres mesures de désarmement. 

DÉCISION SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DÉPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE

Groupe thématique 4 - Armes classiques (suite)

Droits de réponse

Le représentant d’Israël a réagi aux propos de la République arabe syrienne, indiquant que le seul programme d’armes de destruction massive problématique et meurtrier au Moyen-Orient est celui conduit illégalement par ce pays.

Le représentant des États-Unis a rejeté les accusations russes infondées quant à des activités militaires biologiques de son pays en Ukraine. 

La Türkiye a rejeté les propos de la Syrie à l’encontre de son pays, qu’elle a qualifié de tissus de mensonges. 

La République arabe syrienne a exhorté Israël d’adhérer aux instruments dont il accuse les autres États de ne pas respecter.  Le représentant a de nouveau accusé la Türkiye d’être un allié des groupes terroristes sévissant dans son pays, dont l’État islamique. 

Le représentant de la Fédération de Russie a affirmé que Washington continue de répondre à côté des questions de son pays quant aux activités militaires biologiques « et chimiques » américaines en Ukraine. 

Le représentant de la Türkiye a rejeté les allégations de la Syrie, qui utilise la Première Commission pour se répandre en mensonges. 

Explications de vote après le vote sur les projets de résolution et de décision relatifs aux armes classiques

Cuba a indiqué s’être abstenue sur le projet de résolution relatif au registre sur les armes classiques, dont sa délégation ne souhaite pas l’élargissement à des catégories d’armes dont son pays et d’autres ont besoin pour assurer leur légitime défense. 

Singapour a dit avoir voté en faveur des projets de résolution L.40 et L.68, l’utilisation des mines et d’armes à sous-munitions entraînant toujours de grandes souffrances et sapant le développement socioéconomique des populations. 

La Fédération de Russie a dit compter sur le respect, par tous les États Membres, de la pleine application du Traité sur le commerce des armes.  Pour elle, le principe de transparence n’est pas respecté.  La Fédération de Russie a notamment déploré que l’OTAN et l’Union européenne approvisionnent en armes l’Ukraine, laquelle bombarde avec ces armes occidentales le Donbass et tue des civils.  La Fédération de Russie s’est donc abstenue sur le projet de résolution L.39. 

Israël a indiqué avoir appuyé les projets de résolution L.39 (Traité sur le commerce des armes), L.50 (trafic illicite d’armes légères et de petit calibre) et L.51 (stocks de munitions), ajoutant que la question des munitions devait être traitée au sein du groupe de travail dédié à celles-ci. 

L’Égypte a notamment expliqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.51, en dépit d’un libellé par endroit équivoque. 

La Suisse a dit appuyer fermement les objectifs, y compris humanitaires, du projet de résolution L.41 sur les engins explosifs improvisés, adopté sans vote. 

La Pologne a soutenu le projet de résolution L.40 (Convention d’Ottawa), l’utilisation de mines en Ukraine ayant pour effet calamiteux d’empêcher toute activité agricole dans des régions entières du pays. 

Groupe thématique 5 - Autres mesures de désarmement général et sécurité internationale

Déclarations générales

La représentante de la France a défendu son projet de résolution L.73 (Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale) pour renforcer les capacités des pays pour prévenir les cyberattaques.  Son but principal est de renforcer la résilience des États Membres qui le demandent, et de diminuer la fracture numérique entre États.  Le « Programme d’action cyber », soutenu par un large groupe transrégional d’États, permettrait des échanges entre États et avec le secteur privé.  Le Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre a servi de référence.  Il a fallu trois ans pour le mettre sur pied, c’est pourquoi la France lance l’initiative du Programme d’action cyber dès maintenant.  Des consultations avec les organisations régionales complémentaires seraient organisées sous l’égide su Bureau de désarmement. 

Le représentant de la Chine a axé sa déclaration générale sur son appui au droit de tous les pays à se développer, et en particulier le droit des pays en développement à utiliser la science de manière pacifique pour leur développement, un secteur trop négligé, selon la Chine.  Les projets de résolution parrainés par la Chine, dont celui relatif au domaine de l’information et des technologies de l’information et des communications (TIC) dans le contexte de la sécurité internationale, sont basés sur le « multilatéralisme véritable », le respect mutuel et l’intérêt commun de tous les pays en développement, a ajouté le représentant. 

Le représentant de Cuba votera en faveur du projet relatif au domaine de l’information et des TIC dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a aussi demandé aux délégations d’appuyer le projet L.56, (« Promotion de la coopération internationale à des fins pacifiques dans le contexte de la sécurité internationale »), un projet particulièrement pertinent dans un contexte où les restrictions indues perdurent.  Cuba estime essentiel de poursuivre le dialogue multilatéral.

Le représentant de la Fédération de Russie s’est dit convaincu de la nécessité de renforcer la coopération internationale pour maintenir le système actuel d’accord dans le domaine du contrôle des armements, du désarmement et de la non-prolifération.  Mais il s’est dit déçu que le projet L.66 (« Renforcement et développement du système de traités et d’accords sur la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération ») doive être mis aux voix, « probablement pour des raisons politiques », tant la Russie a pris de précautions pour parvenir à un consensus, en tenant compte du principe d’égalité des États Membres et de non-ingérence dans les affaires intérieures.  Le représentant a critiqué l’attitude de ses collègues occidentaux, qui ont présenté un document destiné à saper les autres travaux en fonction de leurs propres intérêts.  « Voter pour le projet L.66, ce n’est pas voter pour la Russie: c’est voter pour renforcer la paix et la sécurité », a-t-il insisté.

Le représentant du Kirghizistan s’est exprimé au sujet du projet L.14 (« Journée internationale de sensibilisation au désarmement et à la non-prolifération »).  Il a appelé à empêcher la prolifération d’armes de destruction massive et a proposé que les représentants des gouvernements des universités de la société civile puissent mettre en œuvre les recommandations du rapport du Secrétaire général A/57/124 adopté par consensus.

Les représentants de la République islamique d’Iran et du Pakistan ont indiqué qu’ils appuyaient le projet de résolution L.56, (« Promotion de la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques dans le contexte de la sécurité internationale ») dont l’application pourrait permettre la tenue d’échanges francs et constructifs à des fins pacifiques sur le développement technologique et la sécurité internationale.  Les nouvelles technologies doivent avoir accès aux informations sur ce développement, tant pour assurer leur sécurité que pour avancer sur la voie du développement durable, a-t-il été dit.  Le représentant de la République arabe syrienne a annoncé qu’il voterait le projet de résolution L.56, présenté par la Chine. 

La représentante de l’Arabie saoudite a indiqué que sa délégation appuiera le projet de résolution L.18 (« Femmes, désarmement, non-prolifération et maîtrise des armements »), qui a été présenté par le représentant de la Trinité-et-Tobago, dont le pays s’efforce d’assurer un traitement égal entre hommes et femmes, y compris dans les sphères diplomatiques, politique et économique.  Le représentant de la Trinité-et-Tobago a souligné que la version 2022 du projet de résolution L.18 réitère l’appel à une féminisation accrue de la diplomatie du désarmement.  Il reconnaît le rôle clef de la société civile pour promouvoir le rôle des femmes dans ce domaine, a-t-il aussi dit. 

Le représentant de l’Égypte a souhaité la mise en place d’un programme d’action traitant seul des questions des TIC dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a toutefois annoncé que son pays appuiera le projet de résolution L.73 de la France.  Le représentant de l’Union européenne a également appelé à voter en faveur de ce texte.  Il a en outre souligné que l’agression de l’Ukraine par la Russie exige des délégations une réponse en faveur d’un ordre international fondé sur le droit et non sur la force.  C’est pourquoi il a rejeté le texte présenté par la Russie sous la cote L.66, qui contredit ce que montre la réalité, à savoir les violations du droit international de ce pays en matière de contrôle des armements. 

Le représentant du Bélarus a appuyé le projet L.56 présenté par la Chine, jugeant important de continuer de renforcer la coopération internationale dans le domaine de l’utilisation pacifique dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a critiqué l’emploi de mesures coercitives unilatérales par certains États Membres envers d’autres -restrictions aux exportations, mesures politiques, entre autres- en violation flagrante du droit international.

Explications de position avant le vote

Le Canada s’est exprimé au sujet du projet russe L.66 « Renforcement et développement du système de traités et d’accords sur la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération »).  Il a annoncé qu’il voterait en sa faveur mais a bien précisé qu’il ne s’agissait en aucun cas d’un plébiscite des actions russes en Ukraine et ailleurs.  Le Canada votera pour, parce qu’il croit en ce projet, et a appelé la communauté internationale à tout faire pour que ces accords demeurent forts et pertinents.  Mais la détermination de la Russie à abuser des procédures du consensus demeure en contradiction directe avec le paragraphe 8 de sa propre résolution.  Le consensus n’est pas un nom de code pour le veto et n’encourage pas la prise de décisions pour des intérêts nationaux étroits.  Si la Russie voulait respecter les règles et les accords, elle mettrait fin sans attendre à son invasion de l’Ukraine, a souligné le Canada.  Quant au projet L.56 (« Promotion de la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques dans le contexte de la sécurité internationales »), le Canada ne peut l’appuyer et invite tous les États Membres à voter contre.

Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), le Canada a annoncé que ces pays voteraient contre le projet L.23/Rev.1 présenté par la Russie.  Le groupe CANZ continuera à travailler de bonne foi avec tous les partenaires pour renforcer la paix et la stabilité dans le cyberespace.  Toutefois, il regrette que l’esprit de consensus de 2021 ne se soit pas manifesté cette année, sous de prétextes de politisation de la situation.  La Russie cherche à diviser les États Membres, elle appuie beaucoup de paragraphes litigieux qu’une majorité des États Membres n’accepteront pas et le projet est devenu trop clivant.

L’Égypte votera en faveur du projet de résolution L.56.  Elle a souhaité une collaboration accrue entre États Membres dans le domaine du nucléaire.

La Malaisie aurait préféré l’adoption d’un document unique au sujet du point relatif aux progrès de l’informatique et télécommunication dans le contexte de la sécurité internationale.  Elle votera en faveur du L.23/Rev.1 présenté par la Russie.

Le Mexique votera en faveur du projet de résolution L.66, bien qu’il estime que le paragraphe 8 ne représente pas correctement les faits.  « Le consensus est une aspiration, ce n’est pas une règle ou un droit de veto qui pourrait paralyser l’action des organismes et mécanismes de développement », a insisté le Mexique. 

Cuba s’associera au consensus sur le projet de décision L.54 portant sur le Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation (2021-2025).  Cuba a cependant réaffirmé son inquiétude face aux références excessives faites au rapport du Groupe d’experts gouvernementaux de 2021, y compris la reprise inadéquate de textes que Cuba n’appuie aucunement.

Le Japon a annoncé qu’il voterait contre le projet de résolution L.56, car créer un conflit inutile saperait les efforts de la communauté internationale pour appliquer les mesures empêchant la prolifération des armes de destruction massive.  Des contrôles rigoureux des exportations ne mettent pas à mal les relations entre États Membres, bien au contraire, ils renforcent la confiance.  Le projet L.56 pourrait saper les relations internationales, a prévenu le Japon.

Les États-Unis voteront eux aussi contre le projet L.56.  Des mécanismes de contrôle sont remis en question dans le projet, alors qu’ils sont complémentaires des accords sur la non-prolifération.  Les États-Unis soutiennent l’échange de technologies nucléaires, pour la médecine par exemple, mais ces échanges ne doivent en aucun cas être détournés à d’autres fins.  Les États-Unis voteront également contre le projet de résolution L.23 présenté par la Fédération de Russie, estimant qu’il ne répond à aucun objectif et sert seulement les intérêts d’un seul pays.

La Fédération de Russie a expliqué sa position sur le projet L.73 présenté par la France.  « Ce document ne nous plaît pas », a-t-elle indiqué tout de go.  Il n’est rien autre pour la Russie qu’une tentative d’utiliser les TIC à des fins politiques.  « Pourquoi proposer ce document en ce moment alors qu’il y a encore trois ans pour un mandat? » a demandé le représentant.  Pour la Fédération de Russie, si ce texte est adopté, l’Assemblée générale préjugera des décisions qui pourraient être prises.  C’est pour la Fédération de Russie, une « position illogique » venant de la volonté des délégations occidentales d’imposer leurs vues à toutes les autres par le biais d’un mécanisme non consensuel, et d’imposer leurs intérêts politiques contre la cybersécurité de tous les autres pays.  Les trois ans qu’il reste avant la fin du mandat sont pourtant largement suffisants pour parvenir à un accord.  La base conceptuelle du Programme d’action, qui n’inclue pas de mécanisme de responsabilité, ne fait aucun sens, a martelé la Fédération de Russie, pour qui ce projet ne contribuera en rien au renforcement de la sécurité et ne fera qu’amplifier les divisions.

L’Ukraine a déclaré au sujet du projet L.66 que la Russie l’avait attaquée et avait tenté d’annexer des territoires ukrainiens, en violation totale avec le droit international.  La Russie doit retirer immédiatement ses forces.  Elle a violé de façon constante tous les traités depuis de nombreuses années.  « La Russie est la seule responsable de l’érosion continue de l’architecture internationale du contrôle des armes », a accusé l’Ukraine qui, pour ces raisons, votera contre le projet de résolution L.66 et appelle les autres États Membres à faire de même.

L’Australie a indiqué qu’elle voterait contre le projet de résolution L.56, plaidant pour un partage de bonnes pratiques pour renforcer la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques dans le contexte de la sécurité internationale.  Le Royaume-Uni a également fait savoir que sa délégation voterait contre le même texte, jugé « déséquilibré sur les deux objectifs qu’il se propose de réaliser ».  Ces deux pays ont rappelé leur engagement à faciliter le développement et le partage des technologiques de manière pacifique et pour accélérer la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  La Tchéquie, au nom de l’Union européenne, a, elle aussi, appelé à voter contre ce texte au libellé jugé équivoque.

La France a indiqué qu’elle voterait pour le projet de résolution L.66, ce qui ne signifie en rien qu’elle soutient l’attitude irresponsable, brutale et contraire au droit international du pays ayant présenté ce texte, la Russie. 

Le Brésil a appuyé le projet de résolution L.73, soulignant l’importance de privilégier des approches complémentaires et non concurrentes en matière cybersécurité. 

Les Pays-Bas ont indiqué, au nom de l’Union européenne, qu’ils voteront contre le projet de résolution L.23, un texte déséquilibré qui inclut en outre des notions vagues comme « espace d’information ». 

La République islamique d’Iran a indiqué qu’elle votera contre le projet de résolution L.73, pour les mêmes raisons que celles invoquées par la Fédération de Russie.  Elle votera en revanche en faveur du projet de résolution L.23, qui promeut la tenue d’un dialogue ouvert, transparente et inclusif sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale. 

Le Nicaragua a annoncé qu’il voterait en faveur du projet de résolution L.23 et a loué la souplesse de la Russie dans l’élaboration du projet.  Il votera contre le projet L.73, car une telle résolution créerait un processus parallèle à trois ans de la fin du mandat établi par le Groupe de travail à composition non limitée.

Droit de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté les allégations « sans preuve » des États-Unis et de leurs alliés au sujet du respect des traités par la Russie.  La Russie respecte, selon lui, pleinement les traités, et en a fourni la preuve.  Les États Membres souhaitent renforcer les mesures de contrôle à l’exportation, or ce sont souvent les États-Unis et leurs alliés qui s’opposent à un tel renforcement: les exemples sont nombreux, a poursuivi le représentant.  Ainsi, dans le cadre sur la Convention sur l’interdiction des armes biologiques, les États-Unis empêchent depuis 2001 –plus de 20 ans- le renouvellement des négociations au sujet d’un instrument contraignant et d’un mécanisme de contrôle efficace, a accusé le représentant, pour qui les exemples abondent, y compris des tentatives de limiter d’autres traités.  Face à de telles « insinuations cyniques », la Fédération de Russie propose aux États-Unis et aux autres États Membres de prendre part à des négociations pour réellement travailler au renforcement des instruments internationaux dans le domaine de la maîtrise des armements.

Le représentant russe a également rejeté toute tentative de traiter « l’intervention russe en Ukraine » comme injustifiée.  Cette opération est tout à fait conforme au droit international y compris au droit international humanitaire, a-t-il assuré, dénonçant une tentative de plus des Occidentaux de détourner les crimes commis par les forces armées ukrainiennes avec leur soutien, ce qui inclut des attaques d’infrastructures nucléaires et l’utilisation de civils comme boucliers humains.  Des navires russes ont été attaqués, empêchant la poursuite de l’Initiative céréalière de la mer Noire, et ce, avec l’aide technique de l’OTAN, a encore accusé le représentant.  Il en va de même pour l’attaque de gazoduc Nord Stream, une attaque terroriste planifiée par les forces navales de la Grande-Bretagne, a affirmé le représentant, qui a également cité les tirs sur les centrales nucléaires de Koursk et de Zaporojie ainsi que l’attaque du pont reliant Krasnodar à la Péninsule de Crimée.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Haut-Commissaire pour les réfugiés alerte le Conseil de sécurité sur le nombre record de personnes réfugiées et déplacées dans le monde

9178e séance - matin
CS/15093

Le Haut-Commissaire pour les réfugiés alerte le Conseil de sécurité sur le nombre record de personnes réfugiées et déplacées dans le monde

Plus de 103 millions de réfugiés et de personnes déplacées dans le monde.  Tel est le constat alarmant que M. Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a dressé ce matin au Conseil de sécurité, appelant la communauté internationale à coopérer d’urgence afin d’inverser la trajectoire actuelle et de faire émerger des solutions.

L’invasion russe en Ukraine a entraîné l’exode le plus massif et le plus rapide depuis des décennies, avec environ 14 millions de personnes qui ont été forcées de quitter leur foyer depuis le 24 février.  Mais cette crise n’est pas la seul, le Haut-Commissariat ayant répondu au cours des 12 derniers mois à 37 situations d’urgence dans le monde.  Parmi les plus graves, M. Grandi a mentionné les plus de 850 000 déplacés en Éthiopie et les 500 000 au Myanmar au cours des six premiers mois de l’année, sans oublier 200 000 nouveaux déracinés en République démocratique du Congo.

Au-delà de la situation de détresse de ces populations et de l’aide dont ils ont besoin, le Haut-Commissaire a attiré l’attention sur les multiples facteurs expliquant ces phénomènes.  Ils ne relèvent en effet pas seulement des conflits, mais aussi de la pauvreté, d’une faible gouvernance et des changements climatiques, qui détruisent les ressources nécessaires aux populations, créant des tensions, voire des conflits, et entraînant des déplacements.  Et, face au nombre sans précédent d’urgences humanitaires, le HCR est confronté à un important déficit de financement pour certaines de ses opérations essentielles, a mis en garde M. Grandi.

Toutes les délégations se sont alarmées de la hausse continue du nombre de réfugiés et de déplacés dans le monde résultant de conflits armés, de l’instabilité politique, de la violence, de crises économiques et des effets des changements climatiques.  La Norvège s’est inquiétée en particulier du nombre élevé d’enfants et de jeunes forcés au déplacement et qui sont souvent non-accompagnés.  Ils sont alors la proie de groupes armés qui les exposent à des risques de recrutement, de traite humaine et d’abus sexuels et sexistes.

Comme l’ont fait remarquer le Kenya, le Ghana ou la Chine, 83% des réfugiés dans le monde sont accueillis par des pays en développement, et plus de 26% en Afrique subsaharienne.  Or, l’accueil d’un grand nombre d’entre eux dans des contextes socioéconomiques et écologiques fragiles s’accompagne de grandes difficultés, notamment la surexploitation des ressources rares, la détérioration de l’environnement ou encore la concurrence entre réfugiés et communautés d’accueil, en raison de la diminution des ressources et les conflits qui en découlent.  De l’avis du Kenya, l’expérience montre en outre que des groupes terroristes se sont servis des camps de réfugiés pour recruter et radicaliser des malheureux.

La France a fait observer que, depuis le début de l’agression illégale de la Russie en Ukraine, l’Europe connaît le plus grand déplacement de populations à travers le monde, le plus important depuis la Seconde Guerre mondiale, avec 7,5 millions de réfugiés et 6,5 millions de déplacés.  Mettant l’accent sur le principe selon lequel l’État qui provoque un conflit doit payer, les États-Unis ont dit que la Russie a contraint plus de 14 millions d’Ukrainiens à quitter leur foyer, l’accusant de se servir de l’hiver comme d’une arme.

Outre les conflits, les changements climatiques sont de plus en plus à l’origine de déplacements dans plusieurs régions du monde, notamment au Sahel et dans la Corne de l’Afrique, a relevé le Gabon.  En Somalie, par exemple, le nombre de personnes déplacées cette année, principalement à cause de la sécheresse, approche le million de personnes, et près de 500 000 autres ont été déplacées en raison du conflit et de l’insécurité, a fait observer le Ghana.

Le retour en toute sécurité des réfugiés a également été évoqué à plusieurs reprises.  Par exemple, M. Grandi a fait savoir que les conditions du retour au Myanmar de près d’un million de Rohingya réfugiés au Bangladesh sont loin d’être réunies.  La France a évoqué le cas de la Syrie, où « le régime fait un tri, poursuivant ainsi par d’autres voies sa politique d’ingénierie démographique soigneusement mise à l’œuvre depuis le début du conflit », raison pour laquelle les conditions pour un retour digne, sûr et volontaire ne sont pas réunies.  Le représentant a jugé essentiel que le HCR puisse assurer un suivi effectif des réfugiés syriens de retour et des conditions dans lesquelles se déroule ce retour.

Fortes de ces constats, les délégations ont mis l’accent sur la coopération et le devoir de solidarité.  De l’avis du Gabon, la communauté internationale n’en fait pas assez pour répartir équitablement le coût de la protection en faveur des personnes en quête d’asile.  Le délégué a plaidé pour, sans plus attendre, une « véritable coopération de partage équitable de responsabilités », qu’il considère comme « une exigence de la conscience universelle et une priorité absolue ». 

Pour sa part, le Brésil s’est interrogé sur la façon dont le Conseil pourrait réagir au contexte actuel dominé par des allégations de politisation croissante de l’assistance humanitaire.  À l’instar de l’Inde et des Émirats arabes unis, plusieurs délégations ont rappelé qu’il est essentiel de fournir des services équitables et sans discrimination à tous les réfugiés.  Le droit d’asile étant le plus emblématique des droits humains, refuser d’accueillir ou discriminer les demandeurs d’asile, c’est par conséquent violer les droits de la personne, a martelé le Gabon, qui a appelé à une réponse urgente sur les plans politique, sécuritaire, financier, logistique et humanitaire, qui ne soit pas à géographie variable.

La France a annoncé qu’elle coparrainera le prochain Forum mondial sur les réfugiés, fin 2023, qui devra permettre davantage de coopération pour l’accueil des réfugiés et le renforcement des systèmes d’asile dans le monde.  Comme l’a rappelé le Ghana, la communauté internationale peut aussi s’appuyer sur les instruments juridiques internationaux, notamment le pacte mondial sur les réfugiés. 

EXPOSÉ DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a demandé aux membres du Conseil de sécurité de regarder la multiplicité des défis mondiaux du point de vue des plus de 103 millions de réfugiés et de personnes déplacées, qui sont les plus touchés par la hausse des conflits, l’urgence climatique, la pandémie et les crises énergétiques et alimentaires.  Dans un tel contexte, il est urgent que la communauté internationale coopère afin d’inverser la trajectoire actuelle et de faire émerger des solutions.

L’invasion russe en Ukraine a entraîné l’exode le plus massif et le plus rapide depuis des décennies.  Environ 14 millions de personnes ont été forcées de quitter leur foyer depuis le 24 février.  Le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) tâche d’aider les personnes déplacées et, parmi les pays voisins, le Moldova a besoin d’une attention particulière en raison de sa vulnérabilité.  L’Union européenne a adopté une approche commune pour accueillir les réfugiés, s’est félicité M. Grandi.  Et compte tenu de la nature probablement prolongée du conflit militaire, le HCR maintient un haut niveau de préparation à de nouveaux mouvements de population, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, en tenant compte des différents scénarios possibles et de la portée et des limites de l’aide humanitaire.

La crise en Ukraine n’est pas la seule, a poursuivi M. Grandi, et le HCR a répondu au cours des 12 derniers mois à 37 situations d’urgence dans le monde.  Il est aux côtés du peuple d’Éthiopie, où plus de 850 000 personnes ont été déplacées au cours des six premiers mois de l’année.  Le Haut-Commissaire a prié le Conseil de tout faire pour aider à trouver une issue positive aux pourparlers entre les parties en Afrique du Sud, faute de quoi la situation va encore s’aggraver et restreindre davantage la capacité du HCR d’atteindre ceux qui en ont besoin, au Tigré et dans d’autres régions.

Le HCR est également présent au Myanmar, où quelque 500 000 personnes ont été déplacées au cours des six premiers mois de cette année et où l’accès humanitaire reste difficile.  En outre, les conditions du retour de près d’un million de réfugiés rohingya du Bangladesh sont loin d’être réunies.  Le HCR est en République démocratique du Congo (RDC), où des attaques brutales et la violence sexuelle contre les femmes ont ajouté plus de 200 000 personnes aux 5,5 millions qui sont déjà déplacées dans le pays.

Ces crises, et bien d’autres encore, dont les innombrables situations prolongées comme celles des réfugiés afghans et syriens, et certains des flux de population multiples et complexes dans les Amériques, ne font plus autant l’objet de l’attention des médias, et font les frais de l’inaction mondiale, a déploré le Haut-Commissaire.

M. Grandi a évoqué les changements climatiques qui ravagent les ressources nécessaires aux populations, ce qui crée des tensions, souvent de nature intercommunautaire, en particulier dans des contextes déjà fragiles où les gouvernements n’ont pas les moyens de soutenir des programmes d’adaptation et de résilience.  Le Haut-Commissaire a dit craindre que, faute de financements supplémentaires pour la prévention, l’adaptation et un soutien à la gouvernance, les tensions, les frustrations et la concurrence augmenteront et généreront des conflits, avec leurs conséquences catastrophiques, dont le déplacement de populations.  Le Haut-Commissaire a, par exemple, évoqué les réfugiés somaliens évacués dans des régions du Kenya touchées par la sécheresse.  La crise des réfugiés est très complexe, a fait observer M. Grandi.

Extrêmement inquiet de la situation au Sahel, M. Grandi a indiqué que les changements climatiques, la pauvreté, et une faible gouvernance face à l’action de groupes armés ont déjà déplacé trois millions de personnes.  Il est donc évident, selon lui, que les réponses aux changements climatiques doivent tenir compte de leur lien avec les conflits et les déplacements qu’ils provoquent, ce qui sera fait, a-t-il espéré, lors de la COP27 et de la COP28.

Pour conclure, M. Grandi a attiré l’attention du Conseil de sécurité sur les ressources dont le HCR a besoin, l’aide humanitaire étant soumise à une énorme pression.  Malgré un niveau record de revenus, dont un milliard de dollars provenant de donateurs privés, le HCR est confronté cette année à un important déficit de financement pour certaines de ses opérations essentielles.  Il s’agit également de préserver la coopération au développement en tant qu’outil essentiel pour rendre les communautés résilientes et immunisées contre les chocs des crises cycliques, en brisant la terrible spirale des catastrophes, des conflits et des déplacements.

Pour le HCR, il est essentiel de renforcer sérieusement la consolidation de la paix, essentielle pour résoudre le problème des déplacements, par exemple en permettant aux réfugiés de rentrer chez eux, et pour prévenir la récurrence des conflits.  L’action humanitaire doit être mieux protégée, d’abord du point de vue sécuritaire, puisque les menaces à l’encontre des humanitaires sont en hausse, et pour préserver le caractère civil des lieux d’accueil des réfugiés.

M. MICHAEL KIBOINO (Kenya) a jugé très préoccupante l’augmentation continue du nombre de réfugiés dans le monde résultant de conflits armés prolongés, de crises économiques et des effets des changements climatiques.  Aujourd’hui, 83% des réfugiés dans le monde sont accueillis par des pays en développement, les moins développés offrant l’asile à 7 millions de personnes, soit 27% du total mondial des réfugiés.  Par ailleurs, au début de cette année, la communauté internationale a été témoins d’une vague de réfugiés ukrainiens en raison du conflit dans leur pays, mais a aussi reçu des rapports inquiétants faisant état de systèmes d’admission racialisés, caractérisés par un traitement différentiel des réfugiés d’autres origines, y compris des Africains.

Le Kenya qui a fourni une protection internationale aux réfugiés de toute la région pendant plus de trois décennies et accueille actuellement plus d’un demi-million de réfugiés et de demandeurs d’asile, sait que l’accueil d’un grand nombre de réfugiés, en particulier dans des contextes socioéconomiques et écologiquement fragiles, s’accompagne de grands défis, notamment la surexploitation des ressources rares, la détérioration aiguë de l’environnement ou encore la concurrence entre réfugiés et communautés d’accueil en raison de la diminution des ressources et les conflits qui en découlent.  L’expérience montre en outre que des groupes terroristes opportunistes ont utilisé les camps de réfugiés comme refuges pour le recrutement, la radicalisation et la planification.

Sa délégation a constaté en outre que la communauté internationale a constamment sous-financé les appels lancés par les pays en développement et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) dans le cadre des efforts de secours aux réfugiés.  Elle appelle donc à un financement suffisant pour permettre au HCR et aux autres agences humanitaires sur le terrain de fournir une aide vitale à ceux qui en ont besoin.  Mais les pays les plus riches peuvent faire beaucoup plus, a estimé le représentant, qui a demandé que les personnes d’ascendance africaine se rendant en Europe via la Méditerranée soient traitées humainement.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a espéré que les membres du Conseil allaient appuyer l’initiative du Haut-Commissaire tendant à la création d’une exception humanitaire dans le cadre des régimes de sanctions.  Elle a dit sa fierté que son pays soit le principal contributeur mondial à l’assistance humanitaire et mis toutefois l’accent sur le principe selon lequel si vous avez provoqué un conflit, vous devez payer.  La Russie, par exemple, a obligé plus de 14 millions de personnes à quitter leur foyer en Ukraine, a-t-elle dit, et ce pays fait de l’hiver une arme pendant les mois les plus froids.  Les États-Unis ont pour leur part accueilli plus de 174 000 Ukrainiens, dont certains, à l’occasion d’entretiens avec Mme Thomas-Greenfield à Chicago, ont fourni des détails atterrants sur ce qu’ils ont vécu, mais également manifesté leur espoir de vivre en paix aux États-Unis.  Nous avons agi tôt pour fournir 850 millions de dollars à la Somalie, en particulier pour la lutte contre la sécheresse.  Les difficultés des communautés touchées par la sécheresse en Éthiopie sont également insoutenables, a poursuivi la représentante.  De surcroît, les travailleurs humanitaires ont dû se retirer du nord du Tigré en raison des hostilités ce qui fait que les enfants souffrent de malnutrition aiguë.  Passant aux souffrances indescriptibles de la population syrienne, elle a dénoncé le fait que certaines des personnes ayant choisi le retour soient soumises à des mauvais traitements et à la torture.  Les besoins humanitaires sont immenses en Syrie et l’assistance humanitaire à travers les frontières reste absolument indispensable, a-t-elle affirmé.  Les États-Unis ont également alloué 2,7 milliards de dollars d’aide pour alléger la crise au Venezuela depuis plus de cinq années maintenant.  Elle s’est félicitée de la nouvelle initiative du HCR sur la reddition de comptes et demandé de quelle façon les États-Unis pourraient l’appuyer.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a souligné que, dans le contexte actuel de crise, le mandat du HCR demeure plus fondamental que jamais.  Depuis le début de l’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine, a-t-il poursuivi, l’Europe connaît le plus grand déplacement de population dans le monde, le plus important depuis la Seconde Guerre mondiale, avec 7,5 millions de réfugiés et 6,5 millions de déplacés.  En réponse à cette tragédie, la France s’est engagée à fournir une aide humanitaire de 200 millions d’euros, a accueilli plus de 100 000 Ukrainiens et scolarisé plus de 20 000 enfants qui ont fui la guerre.  Toutefois, le soutien à l’Ukraine ne diminue en aucun cas l’attention portée aux autres crises humanitaires, notamment au Sahel et au Moyen-Orient, a fait valoir M. de Rivière.  Dès 2021, la France a doublé ses contributions volontaires et est désormais au huitième rang des donateurs, considérant que « porter assistance aux personnes contraintes à l’exil est un devoir ».  De l’avis du représentant, ce n’est qu’à travers une approche solidaire que la communauté internationale parviendra à améliorer la prise en charge des réfugiés et des personnes déplacées.  En outre, les menaces qui pèsent sur la sécurité alimentaire et la nutrition imposent un devoir de solidarité.

La France coparrainera le prochain Forum mondial pour les réfugiés, fin 2023, qui devra permettre davantage de coopération pour l’accueil des réfugiés et le renforcement des systèmes d’asile dans le monde, a annoncé le délégué.  Au sujet des principes fondamentaux concernant le retour des réfugiés, il a évoqué le cas de la Syrie, où « le régime fait un tri poursuivant ainsi par d’autres voies sa politique d’ingénierie démographique soigneusement mise à l’œuvre depuis le début du conflit », raison pour laquelle les conditions pour un retour digne, sûr et volontaire ne sont pas réunies.  Il est essentiel que le HCR puisse assurer un suivi effectif des réfugiés syriens de retour et des conditions de ce retour, a recommandé le représentant.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a considéré que la coopération et la solidarité sont fondamentales pour des réponses humanitaires globales et soutenues, mettant l’accent sur le principe de responsabilité partagée.  Tout en reconnaissant que les effets des changements climatiques aggravent toutes les urgences humanitaires, M. de Almeida Filho a néanmoins estimé qu’il faut intégrer cette dimension dans les discussions autour des questions humanitaires d’une manière qui n’occulterait pas la recherche de solutions politiques aux conflits contemporains, qui demeurent les principaux moteurs du déplacement.

Au niveau national, le Brésil, a indiqué le représentant, a offert une protection aux personnes affectées par les conflits en Afghanistan et en Ukraine grâce à sa politique de visas humanitaires, de même qu’aux Haïtiens et aux Syriens touchés par la guerre.  Il a vivement remercié le HCR de son soutien à Operação Acolhida, ou « Opération Bienvenus », une équipe multisectorielle chargée de l’intégration, la réception et la réinstallation volontaire des Vénézuéliens à sa frontière septentrionale.  Ainsi et depuis 2018, plus de 770 000 migrants, réfugiés et demandeurs d’asile vénézuéliens ont bénéficié d’une forme d’assistance ou d’une autre de la part du Brésil dans le cadre de l’Opération Bienvenus, qui accorde une attention particulière, à l’arrivée, aux autochtones, aux personnes âgées, aux femmes, aux enfants et aux personnes handicapées.

Le délégué a, en outre, mis l’accent sur la responsabilité particulière du Conseil dans la protection des civils en situation de conflits, tout en insistant sur les défis posés par les sanctions de l’ONU à l’assistance humanitaire.  Il a ensuite fortement appuyé l’initiative des États-Unis et de l’Irlande, invitant vivement le Conseil à tomber d’accord sur les voies et moyens de revoir l’assistance humanitaire dans tous les régimes de sanctions de l’ONU.  Dans la perspective du prochain Forum mondial sur les réfugiés, il a encouragé à conjuguer les efforts pour accélérer l’acheminement de l’aide conformément au principe de responsabilité partagée.  Il s’est interrogé, en conclusion, sur la façon dont le Conseil pourrait réagir au contexte actuel dominé par des allégations de politisation croissante de l’assistance humanitaire.

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déclaré que si le HCR fait son travail, le Conseil de sécurité, lui, ne fait pas le sien: il échoue à prévenir les conflits dans le monde, qui sont eux-mêmes source de crises de réfugiés.  Citant les chiffres alarmants sur le nombre de réfugiés dans le monde, il a dit que son pays avait accueilli sa part de réfugiés ukrainiens obligés de fuir leur pays à cause de la guerre injustifiée menée par la Fédération de Russie.  Le représentant a également abordé le lien qui existe entre les changements climatiques et la crise des réfugiés, estimant que le Conseil de sécurité doit ouvrir ce débat.  Il doit également se pencher sur les restrictions et violences subies par les travailleurs humanitaires qui cherchent à faire leur travail, a-t-il recommandé.  De plus, le représentant a dit qu’il ne faut pas rejeter les réfugiés haïtiens qui tentent de fuir la violence des gangs.  Alors qu’il faut imposer un régime de sanctions sur Haïti, il faut veiller aux exceptions humanitaires, a demandé le représentant, ajoutant avoir travaillé à cet objectif avec les États-Unis.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a reconnu que la situation des réfugiés, des rapatriés et des déplacés dans le monde est très préoccupante.  Outre les conflits, les changements climatiques sont de plus en plus à l’origine de déplacements dans plusieurs régions du monde, notamment au Sahel et dans la Corne de l’Afrique.  Le nombre sans précédent de personnes déplacées est insoutenable, s’est alarmé M. Biang, estimant que la communauté internationale n’en fait pas assez pour répartir équitablement le coût de la protection en faveur des personnes en quête d’asile.  De plus, le financement de l’action humanitaire ne permet pas de faire face aux différents défis qui se posent à la communauté internationale, notamment l’insécurité alimentaire, les épidémies, l’accès à l’eau potable, la sécurité des femmes, en particulier dans les camps de réfugiés, et l’accès à l’éducation pour les plus jeunes.  Le représentant a plaidé pour, sans plus attendre, une « véritable coopération de partage équitable de responsabilités », qu’il considère comme « une exigence de la conscience universelle et une priorité absolue ».

La guerre en Ukraine a redonné plus de pertinence et de validité aux principes clefs de la Convention relative au statut des réfugiés, à savoir le droit de demander l’asile en vertu du droit international et l’interdiction des retours vers la persécution et le danger.  À cet égard, M. Biang a salué les voisins de l’Ukraine qui ont fait montre d’un effort de solidarité remarquable en accueillant prima facie la plupart des demandeurs d’asile fuyant la guerre.  Malheureusement, a-t-il nuancé, de nombreux pays continuent de donner la priorité à des politiques destinées à dissuader les demandes d’asile.  Face à la crise de solidarité dans le monde, M. Biang a appelé à une réponse urgente sur le plan politique, sécuritaire, financier, logistique et humanitaire, qui ne doit surtout pas être à géographie variable.  Il a rappelé que le droit d’asile est le plus emblématique des droits humains.  Par conséquent, refuser d’accueillir ou discriminer les demandeurs d’asile, c’est violer les droits de la personne.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a déclaré que l’aide aux réfugiés était une composante indispensable aux efforts tendant à la paix, à la sécurité et à la stabilité internationales.  Son pays, a-t-il dit, s’efforce au mieux de veiller aux intérêts des réfugiés et respecte les objectifs du pacte mondial sur les réfugiés.  L’essence et la portée géographique des conflits, la pauvreté et la crise économique sont les principaux facteurs sous-jacents des migrations et déplacements, a-t-il reconnu, avant de fustiger les pays ayant spolié les ressources naturelles des pays africains, décimé la Libye par une intervention militaire, et détruit la Syrie.  Le délégué a ensuite souligné l’importance d’œuvrer au retour des réfugiés syriens, invitant le HCR à persévérer dans l’initiative du retour volontaire des Syriens.  Évoquant la situation en Ukraine, il a rappelé que pendant huit ans, le pilonnage par Kiev des villes du Donbass avait contraint au déplacement de 4,5 millions d’habitants en Russie.  Il a mis en exergue la fourniture gratuite d’aide médicale à ces populations, la simplification de leur statut juridique en Russie et du droit de travailler, sans permis ni autorisation.  Le représentant a insisté sur l’accueil digne réservé à ces personnes en Russie, avant de réitérer l’appui de son pays au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie), s’exprimant sur la crise des réfugiés ukrainiens fuyant la guerre menée par la Fédération de Russie, a déclaré que les efforts de la communauté internationale doivent aussi se concerter sur les autres réfugiés aux quatre coins du monde et ne pas les oublier.  Les causes de ces mouvements de population doivent faire l’objet de prévention, a-t-elle recommandé.  La déléguée a fait valoir que les financements doivent également être au rendez-vous, y compris pour les retours volontaires des réfugiés dans leur pays d’origine.  Il est à espérer que le pacte mondial sur les réfugiés soit mis en œuvre et que la pratique des exceptions humanitaires soit plus étendue, a plaidé l’oratrice.

Selon Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis), ce n’est pas seulement le nombre de difficultés qui devrait alarmer la communauté internationale, mais aussi leur ampleur et leur intensité.  Pour la première fois cette année, le monde a enregistré le grave record de plus de 100 millions de personnes forcées de quitter leur foyer pour trouver la sécurité.  À ce propos, la représentante a souligné la nécessité pour tous les réfugiés d’avoir un accès équitable aux services de base, comme les services de santé, la nourriture et l’eau potable, et d’être protégés contre toutes les formes de violence, notamment la violence sexuelle et fondée sur le genre.  Les Émirats continuent de fournir une assistance humanitaire dans le monde entier, notamment aux réfugiés syriens et rohingya, ainsi qu’aux personnes déplacées en Éthiopie, a-t-elle assuré.

De son avis, s’attaquer aux causes profondes et aux facteurs qui contribuent aux déplacements forcés doit rester la première approche pour prévenir leur apparition.  Pour mettre fin aux conflits de manière pacifique, les solutions politiques, le dialogue et le soutien à la désescalade doivent rester les éléments fondamentaux des efforts de la communauté internationale, a-t-elle conseillé.  Elle a dit en outre que cette approche est plus efficace et rentable, car elle garantit que les plus vulnérables peuvent rester chez eux dans des conditions sûres.  Dans le même temps, a-t-elle fait remarquer, fournir une éducation aux personnes déplacées de force peut atténuer le risque de les laisser de côté et renforcer leurs capacités à se construire un avenir.  À cette fin, elle a signalé que les Émirats ont cherché à investir dans des outils éducatifs innovants, comme l’école numérique lancée cette année pour former les éducateurs et fournir un apprentissage à distance aux enfants, notamment dans les camps de réfugiés.

M. GENG SHUANG (Chine) a mis l’accent sur l’instabilité sur les marchés internationaux, les répercussions de la pandémie et les conflits dans le monde, autant de facteurs qui se chevauchent dans la crise actuelle.  Préoccupée par les besoins humanitaires croissants, par la pénurie de financement, et par le fait que les agences humaines ont été contraintes de réduire leur intervention dans des situations d’urgence, la Chine a observé que les pays en développement accueillent plus de 80% des réfugiés dans le monde et que les pays développés n’ont pas tout à fait honoré leurs engagements en termes de financement.  Il a cependant invité à une révision de la notion de réfugiés, car il existe à présent des criminels qui se fondent parmi les populations réfugiées.  Le délégué a exhorté à privilégier la recherche de solutions pacifiques, à soutenir les opérations de paix, et à renforcer la coopération avec la Commission de la consolidation de la paix pour créer des conditions favorables à leur retour digne et en toute sécurité.

S’agissant de l’Ukraine, la Chine a félicité les pays limitrophes et voisins pour l’accueil de millions de réfugiés, insistant sur la nécessité de pourparlers de paix sous l’égide de la communauté internationale.  Au Moyen-Orient, des millions de réfugiés palestiniens ont été jetés sur les routes de l’exil, leurs droits bafoués et à présent, faute de pourparlers de paix, les Palestiniens n’ont aucune perspective, a-t-il remarqué, exhortant à la recherche d’une solution durable.  D’autre part, 7 millions de Syriens ont été forcés de quitter leur pays, pour se rendre en Jordanie ou au Liban, petits pays qui ont beaucoup de mal à accueillir autant de réfugiés.  S’agissant de l’Afghanistan, le délégué a appelé la communauté internationale à rester constructive avec les autorités dans ce pays, notamment en trouvant une solution au gel des avoirs à l’étranger aux fins d’épargner de nouvelles souffrances à la population.  Concernant l’exode forcé des Rohingya au Bangladesh, il a salué la reprise du dialogue avec le Myanmar, et assuré que son pays fournira un effort particulier pour faciliter le retour des réfugiés rohingya.  Le représentant a enfin appelé le HCR à continuer de faire de l’Afrique une priorité.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a indiqué que son pays a accueilli des millions de réfugiés du Bangladesh, puis du Pakistan oriental, lorsque la « terreur génocidaire » s’est déchaînée contre eux.  Un grand nombre de réfugiés continuent par ailleurs de séjourner en Inde et sont entièrement accueillis sur les propres ressources de l’Inde, qui s’est aussi engagée à faciliter le retour digne, sûr et durable de ces ressortissants étrangers dans leur pays d’origine, conformément aux lois nationales et à un accord mutuel avec le pays concerné.  L’Inde a également aidé les réfugiés palestiniens en s’associant à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) en plus d’avoir augmenté sa contribution annuelle, passant de 1,25 million de dollars à 5 millions en 2018.  L’Agence a ainsi reçu 20 millions de dollars au cours des quatre dernières années, en comptant la contribution de cette année, a précisé le représentant.

Le délégué a estimé, cependant, alors que la responsabilité première de protéger et d’aider les déplacés incombe aux États concernés, l’action internationale doit rester dans les limites de la notion de souveraineté et, par conséquent, ne devrait se faire qu’à la demande du pays concerné.  La communauté internationale devrait aussi s’efforcer d’empêcher que des personnes ne soient forcées de quitter leur pays d’origine, notamment par le biais de la prévention des conflits armés, la lutte contre le terrorisme, l’édification et le maintien de la paix.  Il a jugé également crucial de maintenir les principes d’humanité, d’impartialité et de neutralité dans le traitement des questions relatives aux réfugiés, mais aussi de fournir des services équitables et sans discrimination à tous les réfugiés.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a relevé que la violence, l’instabilité politique et le manque de moyens de subsistance sont souvent les causes qui expliquent les tendances actuelles au déplacement forcé, que ce soit à l’intérieur des frontières ou à l’étranger.  Le conflit en Ukraine explique la hausse mondiale du nombre de personnes déplacées, plus d’un tiers de la population de ce pays ayant dû fuir en raison de la guerre, a-t-il rappelé.  Outre ce conflit et celui en Éthiopie, le représentant a constaté une nouvelle vague de déplacements dans des régions souffrant de conflits prolongés.  La résurgence du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo et l’intensification de l’activité de groupes extrémistes dans le Sahel, ces derniers mois, ont forcé des communautés entières à se déplacer, entraînant une détérioration de la situation humanitaire.  De plus, les effets des changements climatiques, comme les inondations au Soudan du Sud et la sécheresse en Somalie, aggravent la violence intercommunautaire.

Le représentant s’est dit convaincu de la nécessité d’élaborer des diagnostics qui tiennent compte de la diversité des facteurs qui obligent des personnes à chercher refuge ou à se déplacer dans leur pays.  Seule une compréhension complète de ces phénomènes permettra à la communauté internationale de trouver des solutions fondées sur la coopération et la solidarité.  Après avoir salué le travail du HCR, M. de la Fuente Ramírez a réitéré son appel à intégrer de manière systématique les services de santé et psychiatrique ainsi que l’accompagnement psychosocial dans les plans de riposte régionaux et nationaux.  Enfin, il a indiqué qu’en 2021, le Mexique a été le troisième pays récepteur de demandes d’asile dans le monde, dont 72% ont reçu une réponse positive.

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est inquiétée du nombre élevé d’enfants et de jeunes forcés au déplacement et qui sont souvent non-accompagnés, faisant d’eux la proie de groupes armés qui les exposent à des risques de recrutement, de traite humaine et d’abus sexuels et sexistes.  Rappelant que les conflits et la persécution sont les principales causes du déplacement, elle a également relevé que la guérilla urbaine tue aussi et blesse des civils, détruit des logements, des écoles et des hôpitaux, tout en privant de l’accès aux services de base et de moyens de subsistance.  Elle a évoqué, à cet égard, l’effroyable exemple de l’Ukraine.  Elle a estimé que la communauté internationale devrait faire preuve de solidarité, en impliquant davantage les institutions financières internationale et le secteur privé d’une part, mais également par le biais d’un financement souple et non conditionné.  La Norvège appuie aussi le programme du Secrétaire général sur le déplacement interne ainsi que la nomination d’un conseiller spécial sur cette question.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dit faire écho à l’horreur exprimée par d’autres délégations face aux dernières atrocités en date de la guerre en Ukraine où les frappes contre des cibles civiles, avant l’hiver, ne servent qu’à tenter de semer la terreur.  Et pourtant la crise en Ukraine n’est qu’un exemple parmi d’autres de la nécessité de s’attaquer aux facteurs de déplacement des populations.  L’ONU, avec le soutien des États Membres, doit se concentrer sur la recherche de solutions aux crises, notamment par le biais de la prévention.  Le Conseil de sécurité doit pour sa part continuer à veiller, non seulement à ce que les acteurs sur le terrain puissent mener à bien leur travail, mais aussi au retour volontaire, sûr et digne des réfugiés.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a reconnu que si la guerre contre l’Ukraine est un facteur majeur de la crise des réfugiés, la situation est préoccupante dans de nombreuses régions du continent africain, en particulier en Afrique subsaharienne qui héberge plus de 26% des réfugiés du monde.  Il a observé que la récente visite du Haut-Commissaire Filippo Grandi dans la Corne de l’Afrique a révélé la gravité de la situation.  En Somalie, par exemple, le nombre de personnes déplacées cette année, principalement à cause de la sécheresse, approche le million de personnes, et près de 500 000 autres ont été déplacées en raison du conflit et de l’insécurité.  Il est donc essentiel que la communauté internationale, y compris le Conseil, s’unisse et n’épargne aucun effort pour aider les pays d’Afrique à briser le cycle des conflits et des crises climatiques, a plaidé le délégué.

M. Agyeman a ensuite recommandé à la communauté internationale de s’appuyer sur les instruments juridiques, internationaux notamment le pacte mondial sur les réfugiés.  Il a aussi plaidé pour une coopération plus étroite entre l’ONU et les arrangements régionaux en Afrique, se félicitant, à cet égard, du renforcement de celle entre l’ONU et la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique.  Le délégué a également demandé d’accorder une attention cruciale aux facteurs d’instabilité, qui aggravent la situation des réfugiés, comme les déficits de gouvernance et de développement en Afrique qui ont conduit à des changements anticonstitutionnels de gouvernement.  Il a requis une action urgente pour y faire face, notamment en Afrique de l’Ouest et au Sahel, citant aussi le problème d’insécurité accrue dans la plupart des régions du continent, résultant de la multiplication des attaques terroristes. Les autres facteurs aggravants comme la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques, ont été les autres préoccupations du représentant qui l’a conduit à demander un engagement plus fort de la communauté internationale.  Enfin, il a mis l’accent sur l’importance de pouvoir compter sur un financement humanitaire accru et misé sur le prochain Forum mondial sur les réfugiés en 2023 pour traiter de manière adéquate la situation des réfugiés.

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a relevé la prise en considération du lien entre conflits et déplacements dans toutes les prochaines conférences de l’ONU, notamment la COP27.  Il a néanmoins estimé que « nous ramassons après vous lorsque vous ne parvenez pas à une solution politique », en exhortant le Conseil à faire tout son possible pour trouver des solutions aux conflits, sans oublier les déplacements générés par les effets des changements climatiques.

La trajectoire n’est pas toujours négative, car une fois qu’une solution politique est mise en œuvre, on peut avancer, a justifié M. Grandi, en citant l’exemple de la Côte d’Ivoire après les violences postélectorales.  La réponse à la crise des réfugiés en Ukraine a été tout à fait exemplaire, a-t-il indiqué, en reprenant les dires de certains membres du Conseil.  Il a insisté que cette réponse devrait devenir une « référence et un modèle » pour le traitement des réfugiés, où qu’ils soient.  Au sujet de l’appui aux autres institutions humanitaires, il a insisté pour qu’il n’y ait pas de retour en arrière, comme en Somalie, et plaidé en faveur de financements prévisibles et durables.  Cette année a connu 37 crises, a-t-il noté, en indiquant que son personnel était éparpillé partout dans le monde, à mesure qu’une crise explose dans une région ou un pays donné.  Il y a urgence à régler rapidement la pénurie de financement, a-t-il tancé, ajoutant que faute de quoi, le HCR se résignera à réduire ses interventions, à moins qu’il obtienne des financements supplémentaires substantiels, car le coût des opérations est très élevé, surtout avec l’envolée actuelle des prix.

L’Éthiopie est un très grand pays d’accueil, a-t-il reconnu, en invitant à une bonne volonté pour régler le problème au Tigré pour que le HCR puisse travailler.  Il a rappelé l’aspect fondamental de l’action humanitaire qui consiste à négocier avec les forces sur place: aidez-nous, a encore déclaré M. Grandi à l’adresse des États.  Il a aussi repris à son compte l’appel du Mexique quant à la nécessité de faire davantage sur la question de la santé mentale des réfugiés et déplacés.  Le haut fonctionnaire a aussi indiqué avoir longuement évoqué la situation humanitaire en Syrie en Troisième Commission hier et demandé que davantage soit fait.  Il a affirmé à la Russie qu’il travaillera de manière constructive pour faciliter le retour des réfugiés.  Il a aussi reconnu le fardeau que portent la Jordanie, le Liban ou encore la Türkiye.  M. Grandi a annoncé qu’il lancera appel à tous les États ayant des Haïtiens sur leur territoire pour qu’ils ne les expulsent pas tant que la situation est dangereuse dans ce pays.  Les réfugiés ukrainiens sont maintenant partout dans le monde mais l’accès et les opérations sont limités en Russie, a remarqué le Haut-Commissaire, qui a parlé de consultations avec la Russie, entre autres, pour l’aide aux Ukrainiens.

La coopération entre le Myanmar et le Bangladesh autour de la question de la communauté rohingya est fondamentale, a-t-il affirmé, en exigeant des garanties pour le retour des Rohingya, d’autant plus que la donne politique a entièrement changé avec le coup d’État militaire.

Pour M. Grandi, l’action de l’UNRWA au Moyen Orient est à la fois importante et précieuse dans le contexte politique difficile de cette région.  Il a salué la mention d’outils comme le pacte mondial sur les réfugiés et le Pacte sur les migrations.  Le Forum mondial sur les réfugiés se réunira à nouveau en fin d’année prochaine, a-t-il ajouté, en précisant que c’est une réunion au niveau ministériel à laquelle tous les États sont instamment invités à participer.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: appel à préserver la cohésion du régime commun des Nations Unies face à la persistance de deux différents coefficients d’ajustement de poste au coût de la vie à Genève

Soixante-dix-septième session,
10e séance - matin
AG/AB/4398

Cinquième Commission: appel à préserver la cohésion du régime commun des Nations Unies face à la persistance de deux différents coefficients d’ajustement de poste au coût de la vie à Genève

Ce n’est un secret pour personne que le régime commun des Nations Unies est confronté aujourd’hui à un défi important à Genève, a déclaré le Pakistan, toujours aussi « perplexe » devant la situation actuelle.  La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires a rouvert aujourd’hui le dossier lié à la coexistence, dans la ville suisse, de deux différents coefficients d’ajustement de poste au coût de la vie, compte tenu des arrêts contradictoires du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et du Tribunal d’appel des Nations Unies. 

Saisi par des fonctionnaires de cinq organisations basées à Genève, le Tribunal administratif de l’OIT a annulé en 2017, la décision de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI) sur un nouveau coefficient d’ajustement de poste, arguant qu’elle a dépassé son mandat.  Un avis contraire est venu du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies auquel le Tribunal d’appel a donné raison et après lui, l’Assemblée générale.  En conséquence, cinq des organisations du régime commun à Genève n’appliquent toujours pas le coefficient d’ajustement de la CFPI qui, inférieur au précédent, s’est traduit par une réduction de la rémunération des fonctionnaires de la catégorie des administrateurs et des fonctionnaires de rang supérieur.  

Il est primordial, a dit aujourd’hui la Suisse, que les organisations du régime commun des Nations Unies disposent d’un personnel qualifié, motivé et bénéficiant d’une rémunération appropriée.  Comment sortir de l’impasse?  Le Bureau international du Travail (BIT) propose la modification de deux articles du Statut de la CFPI.  Cette proposition présente des avantages mais l’amendement d’un statut ne doit pas être pris à la légère, ont prévenu les États-Unis.  Sommes-nous sûrs qu’un tel amendement produira le résultat escompté?  Personnellement, j’en doute, a avoué la Fédération de Russie. 

 Le Secrétaire général fait quant à lui trois propositions: faciliter la présentation par la CFPI d’observations aux tribunaux lors des litiges relatifs à ses recommandations ou décisions; permettre à la Commission de donner des orientations à la suite d’arrêts ou jugements dans des affaires concernant lesdites recommandations ou décisions; ou créer une chambre conjointe du Tribunal administratif de l’OIT et du Tribunal d’appel des Nations Unies, qui rendrait des décisions interprétatives, préliminaires et/ou en appel dans des affaires concernant ces recommandations et décisions.  

Favorables à cette dernière solution, les États-Unis ont insisté sur une analyse « prudente » afin de déterminer les coûts avec précision.  Nous risquons, a contré la Fédération de Russie, de voir un mécanisme de coordination « de plus » et dont les recommandations seront, de toute façon, ignorées par les entités des Nations Unies.  Elle a prévenu les chefs de ces entités que ce serait « une grave erreur » de prendre pour acquis les avantages du régime commun et de la Caisse commune des pensions, comme en témoigne leur refus d’appliquer une décision de la CFPI, dûment entérinée par l’Assemblée générale. 

Le ton utilisé par certains ne donnent pas beaucoup d’espoir, ont commenté les États-Unis, alors que « après toutes ces années de turbulences », seules la coopération et la bonne foi permettront de sortir de l’impasse avant la fin de la session, au mois de décembre.  La solution est entre les mains des États Membres, a souligné le Royaume-Uni.  

La Cinquième Commission a prévu une autre séance publique ce vendredi 5 novembre, à partir de 10 heures, pour pourvoir aux postes vacants dans les organes subsidiaires. 

PROJET DE BUDGET-PROGRAMME POUR 2023

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur les conditions d’emploi et de rémunération des membres de la Cour internationale de Justice et du Président et juges du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (A/77/7/Add.7)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné celui du Secrétaire général (A/77/346).  Suivant l’avis de ce dernier, le CCQAB propose que l’Assemblée générale maintienne le système de rémunération actuel et autres conditions d’emploi des membres de la Cour internationale de Justice et du Président et des juges du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux ainsi que le régime de pension actuel des juges soit maintenu.  Il recommande également que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de continuer à affiner l’examen du régime de pension, y compris la possibilité, dans le cadre de l’option consistant à utiliser la somme forfaitaire pour acheter une rente sur le marché libre auprès d’un assureur-vie.

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. JIBRAN KHAN DURRANI a noté des améliorations dans les conditions générales de service des membres de la CIJ, du Président et des juges du Mécanisme international, dont la révision du système d’allocation pour frais d’études et l’actualisation du règlement relatif aux frais de voyage.  Prenant note des quatre options pour le régime de retraite, le représentant s’est félicité de ce que la réflexion se soit faite avec l’expertise interne.  Il faut faire appel à cette expertise chaque fois que c’est possible, a-t-il estimé.  

Rapport du CCQAB sur l’état d’avancement du projet de rénovation du bâtiment nord de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) à Santiago (A/77/7.Add.8)

Après examen du rapport du Secrétaire général (A/77/315), le Comité consultatif sait gré au pays hôte, le Chili, de l’appui qu’il continue d’apporter à la CEPALC et compte que le Secrétaire général continuera de collaborer avec lui pour assurer la réussite du projet.  De plus, il encourage le Secrétaire général à poursuivre les efforts faits pour solliciter des contributions volontaires, y compris des contributions en nature, et d’autres formes d’appui auprès d’autres États Membres.  Il souligne de nouveau qu’il importe que la CEPALC et le Secrétariat à New York, et en particulier le Service de la politique de gestion mondiale des biens, mettent en place une étroite coordination, afin que le projet soit correctement supervisé et géré dans tous ses aspects. 

Poursuivant, le Comité consultatif se déclare préoccupé par le fait que l’achèvement des travaux de construction a été retardé d’un an, les travaux devant commencer en avril 2023, au lieu de mars 2022, et prendre fin en octobre 2024, au lieu de septembre 2023.  Il compte qu’aucun autre retard ne sera accusé et que les aménagements visant à garantir l’accessibilité aux personnes de toutes aptitudes continueront d’être pris en compte dans la conception.  Le Comité note que la quatrième et dernière analyse en date de la gestion des risques, effectuée en mai 2022, a fait apparaître que le niveau de confiance est tombé de 30% en 2019 à 14% en 2022 et que le projet devrait coûter environ 15,4 millions de dollars, soit 1,1 million de dollars de plus que le budget prévu. 

Il note que les prévisions de dépenses révisées présentent les dépenses annuelles prévues pour la durée du projet, mais il estime que l’inclusion d’un tableau distinct, comprenant des colonnes indiquant les prévisions de dépenses initiales et les prévisions de dépenses révisées pour chaque année, contribuerait à faciliter l’examen par les États Membres du rapport dans son ensemble.  Le Comité consultatif constate aussi que l’inflation et les problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement mondiale ont une incidence sur le coût global du projet et compte que le Secrétaire général continuera de s’assurer que le taux d’indexation moyen actuellement retenu convienne. 

Il recommande à l’Assemblée générale d’ouvrir un crédit de 640 400 dollars au titre du projet pour 2023, à imputer sur le fonds de réserve de 1 091 300 dollars duquel un montant de 63 300 a déjà été ponctionné.  Le projet de rénovation de la CEPALC est financé dans le cadre d’un compte pluriannuel, en vertu duquel le financement n’arrive pas à expiration à la fin d’un exercice budgétaire.  À la fin du projet, les États seront informés des dépenses et des montants inutilisés qui leur seront restitués.

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. JIBRAN KHAN DURRANI (Pakistan) a pris note du rapport du Secrétaire général et encouragé ce dernier à n’épargner aucun effort pour atténuer les risques liés à l’appel d’offres en cours et à la phase de planification de la construction, afin de conclure le projet d’ici la fin de 2024.

Au nom de 16 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, M. MONTSERRAT GONZÁLEZ CARRILLO, (Chili) a déclaré que l’objectif du projet de rénovation du bâtiment nord de la CEPALC est de proposer un espace rénové, dans un bâtiment sûr du point de vue sismique, et fonctionnel qui contribue à un environnement de travail plus productif, plus vert, avec une durée de vie 40 à 50 ans.  Il s’agira d’un bâtiment à haut rendement énergétique qui entraînera une réduction des émissions de gaz à effet de serre et des économies, a insisté le représentant.  Il a rappelé que le coût estimatif du projet reste inchangé, soit 14 330 200 dollars.  

Le représentant a aussi pris acte des raisons qui ont conduit à l’annulation du processus d’appel d’offres et émis l’espoir que le nouveau processus sera accepté pour pouvoir commencer les travaux de construction en avril 2023 et les achever à la fin de 2024.  Par conséquent, il a encouragé le Secrétaire général à tout mettre en œuvre pour atténuer les risques liés à la fois au processus d’appel d’offres en cours et à la phase de construction du projet.  Le délégué a soutenu la proposition du Secrétaire général d’allouer un montant de 640 400 dollars US pour le projet en 2023 et de maintenir le poste temporaire de responsable des achats (P3) pour la période de janvier à avril 2023.

RÉGIME COMMUN DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’examen des questions de compétence au regard du régime commun des Nations Unies (A/77/531)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/77/222) qui rappelle que l’année dernière, l’Assemblée générale s’est inquiétée du problème posé par la coexistence de deux systèmes juridictionnels administratifs indépendants ayant une compétence concurrente parmi les organisations appliquant le régime commun, à savoir le Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Travail, et les tribunaux des Nations Unies (le Tribunal du contentieux administratif et le Tribunal d’appel des Nations Unies).

Le Secrétaire général rappelle aussi qu’à la suite de son enquête de 2016 sur le coût de la vie dans divers lieux d’affectation, la Commission de la fonction publique internationale a fixé un nouveau coefficient d’ajustement applicable à Genève.  À partir de 2017, le nouveau coefficient d’ajustement, inférieur au précédent, a été appliqué par les organismes appliquant le régime commun, ce qui s’est traduit par une réduction de la rémunération des fonctionnaires de la catégorie des administrateurs et des fonctionnaires de rang supérieur.

Donnant favorablement suite à des requêtes déposées par des fonctionnaires de cinq organisations appliquant le régime commun basées à Genève, le Tribunal administratif de l’OIT a annulé les décisions contestées au motif que la Commission n’a pas le pouvoir de fixer le nouveau coefficient d’ajustement, mais seulement de faire des recommandations à l’Assemblée générale.  Le Tribunal a en conséquence ordonné aux cinq organisations de ne pas appliquer le nouveau coefficient d’ajustement.

En revanche, le Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies a rejeté les requêtes déposées par des fonctionnaires et a estimé que la Commission était dûment habilitée par son statut à fixer le coefficient d’ajustement, une décision confirmée par le Tribunal d’appel et entérinée par l’Assemblée générale.

Face à cette situation, le Comité consultatif souligne de nouveau qu’il importe de préserver l’unité, l’homogénéité et la cohérence du régime commun des Nations Unies et rappelle les rôles respectifs que l’Assemblée générale et la Commission jouent dans l’approbation, la réglementation et la coordination des conditions d’emploi et des prestations offertes à tous les fonctionnaires des organisations appliquant le régime commun des Nations Unies. 

Il prend note des trois solutions envisageables proposées par le Secrétaire général dont la première consiste à faciliter la présentation par la Commission de la fonction publique internationale d’observations aux tribunaux lors des litiges relatifs à des requêtes découlant de ses recommandations ou décisions.  La proposition vise à simplifier la procédure actuelle et à gagner en cohérence en introduisant des étapes, qui devront être suivies par les services juridiques des organisations défenderesses et le secrétariat de la Commission et qui représentent la pratique la plus favorable. 

La deuxième proposition est de permettre à la Commission de donner des orientations à la suite d’arrêts ou jugements rendus par les tribunaux dans des affaires concernant ses recommandations ou décisions.  Enfin la troisième proposition du Secrétaire général consiste à créer une chambre conjointe du Tribunal administratif de l’OIT et du Tribunal d’appel des Nations Unies, qui rendrait des décisions interprétatives, préliminaires et/ou en appel dans des affaires concernant des recommandations ou des décisions de la Commission.

Parmi les autres solutions, le Secrétaire général suggère l’intensification des échanges entre les tribunaux ou la désignation d’un seul tribunal pour régler les litiges découlant des décisions administratives fondées sur les décisions ou recommandations de la Commission, sur le modèle des dispositions juridictionnelles de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies. 

En conclusion, le Comité consultatif recommande l’approbation des ressources nécessaires d’un montant de 505 000 dollars pour permettre la mise au point définitive des propositions pour 2023.

Ce n’est un secret pour personne que le régime commun est confronté aujourd’hui à un défi à Genève, a déclaré M. JIBRAN KHAN DURRANI (Pakistan), au nom du Groupe des 77 et la Chine.  Les arrêts contradictoires des Tribunaux menacent l’existence même du régime, tel que nous le connaissons.  Le représentant n’a pas caché sa perplexité devant l’avis du Tribunal administratif de l’OIT selon lequel la Commission de la fonction publique internationale n’a pas le pouvoir de décider du niveau de l’indemnité de poste dans un lieu d’affectation.  Depuis sa création en 1975, la Commission, a-t-il rappelé, a constamment établi des coefficients d’ajustement de poste pour les lieux d’affectation dans le monde entier, conformément aux articles 10 et 11 de son Statut.

Également au nom du Liechtenstein, Mme GINA ANDREA SCHMIED (Suisse) a regretté la fragmentation du régime commun des Nations Unies, provoquée par des arrêts contradictoires de deux instances juridiques.  Nous avons tous intérêt à ce que les différentes entités onusiennes réunies dans le régime commun, agissent de concert, a-t-elle déclaré.  Elle a regretté que les clarifications de l’Assemblée générale concernant la question des indemnités de poste sur la base du coefficient d’ajustement n’aient pas permis de résoudre ce problème.  Elle a souhaité procéder aux clarifications juridiques nécessaires et aux consultations avec toutes les parties impliquées, afin que la Cinquième Commission et l’Assemblée générale disposent de toutes les informations pour avancer ensemble.  

La représentante a salué le rapport du Secrétaire général sur la manière de gérer les systèmes de justice parallèles et les questions de compétence.  Elle a souligné que des échanges plus étroits entre les Tribunaux seraient bénéfiques.  Il est primordial que les organisations du régime commun des Nations Unies disposent d’un personnel qualifié, motivé et bénéficiant des conditions-cadres et d’une rémunération appropriée, a-t-elle dit.  L’équilibre entre l’exécution efficace des mandats et l’utilisation efficiente des ressources, ainsi que la capacité d’attirer le personnel adéquat dans un marché de plus en plus concurrentiel, doit être préservé, a-t-elle conclu.

Mme REBECCA VINEY (Royaume-Uni) s’est dite gravement préoccupée par l’application de deux coefficients d’ajustement de poste à Genève, qui entretient des divergences dans les conditions d’emploi du personnel et compromet la viabilité du régime commun.  La CFPI a le pouvoir d’établir des coefficients d’ajustement de poste pour les lieux d’affectation du régime commun, a insisté la représentante.  Il faut rapidement trouver une solution pour résoudre les divergences actuelles, a-t-elle dit, en saluant l’engagement et le leadership du Président de la CFPI et du nouveau Directeur général de l’OIT.  Elle a proposé d’examiner toutes les solutions, y compris celles relatives à l’autorité de la CFPI afin qu’aucun tribunal ni aucune organisation ne puisse introduire un certain degré d’ambiguïté.  À plus long terme, a encore suggéré la représentante, il faudra trouver une solution pour éviter que la situation actuelle ne se reproduise.  Elle s’est dite favorable à l’examen des propositions du Secrétaire général sur la structure juridictionnelle et des options proposées.  La solution est entre les mains des États Membres, a souligné la représentante.

M. DANIIL A. DEVYATKIN (Fédération de Russie) a estimé que ce qui lie les conversations du Secrétariat de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la modification du statut de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI), d’une part, et l’analyse des propositions du Secrétaire général pour améliorer la structure juridictionnelle du régime commun des Nations unies, d’autre part, ce sont des décisions telles que celle du Tribunal administratif de l’OIT de 2019.  Mais si le problème peut être résolu en modifiant le statut de la CFPI, pourquoi le Bureau international du Travail (BIT) n’a-t-il pas proposé cette solution avant?  Sommes-nous sûrs que la modification du statut modifié de la CFPI produira un résultat?  « Personnellement, j’en doute », a déclaré le représentant.

Concernant l’arrangement juridictionnel, il a estimé que cela risque de devenir un mécanisme de coordination de plus, doté d’un ensemble très limité de fonctions de recommandation, dont les décisions interprétatives ou préliminaires seraient ignorées par les organisations internationales.  Le fait que les chefs de secrétariat des entités du régime commun n’appliquent pas pleinement les décisions de l’Assemblée générale sur les recommandations de la CFPI montrent qu’ils considèrent comme acquis les avantages du régime commun et de la Caisse commune des pensions.  C’est une grave erreur de leur part, a prévenu le représentant. 

Mme OLGA ROMANOVA (États-Unis) a rappelé que depuis le début de l’application de deux coefficients d’ajustement de poste divergents à Genève, l’Assemblée générale est priée d’établir l’autorité de la CFPI.  Il est temps de trouver des solutions viables pour mettre en terme à des pratiques qui sapent la cohésion du régime commun, s’est impatientée la représentante.  Elle a noté qu’une proposition vise à amender le statut de la CFPI pour affirmer son autorité.  Cette proposition présente des avantages mais l’amendement du statut de la Commission ne doit pas être pris à la légère, a prévenu la représentante.   

Appelant toutes les parties prenantes à faire confiance au processus, elle a préconisé l’unité pour rétablir la cohésion du régime, après des années de turbulences.  La coopération et la bonne foi de toutes les parties prenantes nous permettront de prendre une décision avant la fin de la session principale, a dit la représentante, en se déclarant favorable à la proposition de créer une chambre conjointe du Tribunal administratif de l’OIT et du Tribunal d’appel des Nations Unies.  Tous les éléments de la proposition doivent être considérés de manière prudente afin de déterminer les coûts potentiels.  La représentante a conclu, en regrettant le ton utilisé par certains acteurs qui ne donnent pas beaucoup d’espoir quant à leur volonté de coopérer.  Cela doit changer, a-t-elle martelé.

COORDINATION ADMINISTRATIVE ET BUDGÉTAIRE ENTRE L’ONU, LES INSTITUTIONS SPÉCIALISÉES ET L’AGENCE INTERNATIONALE DE L’ÉNERGIE ATOMIQUE (AIEA)

Note du Secrétaire général sur la situation budgétaire et financière des entités des Nations Unies (A/77/507)

Dans ce rapport, qui va de 2016 à 2021, le Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination (CCS) présente le montant total des produits des 46 entités des Nations Unies par type de fonds, à savoir les contributions statutaires; les contributions volontaires aux ressources de base (contributions non préaffectées); les contributions volontaires aux ressources autres que les ressources de base (contributions préaffectées); et les produits provenant d’autres activités. 

Partout où la budgétisation axée sur les résultats est appliquée, tous les fonds reçus sont consacrés à l’activité de l’entité, quelle que soit leur définition comptable.  Les charges sont réparties entre les quatre principales fonctions exercées par les entités du système des Nations Unies, à savoir l’aide au développement; l’aide humanitaire; les opérations de paix; et le Programme mondial et assistance spécialisée.

Toutes les entités des Nations Unies ont mis les Normes comptables internationales pour le secteur public (normes IPSAS) en application avant ou pendant la période de présentation de l’information financière 2014-2015, à l’exception du Fonds international de développement agricole (FIDA), qui établit ses états financiers conformément aux Normes internationales d’information financière.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission adopte 21 nouveaux projets de texte, marqués par l’opposition entre Occidentaux, Chine et Fédération de Russie

Soixante-dix-septième session,
27e & 28e séances plénières – matin & après-midi
AG/DSI/3703

La Première Commission adopte 21 nouveaux projets de texte, marqués par l’opposition entre Occidentaux, Chine et Fédération de Russie

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale), a adopté aujourd’hui 21 projets de résolution et de décision relatifs aux autres armes de destructions massive (non nucléaires), aux aspects de désarmement de l’espace extra-atmosphérique et aux armes classiques.  Seuls quatre de ces textes ont pu être adoptés sans vote.  La Première Commission a en outre rejeté un projet de résolution présenté par la Fédération de Russie et portant sur un « Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques ».

Concernant les armes de destruction massive non nucléaires, le projet de résolution présenté lundi par la Pologne et relatif à l’application de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction a finalement été adopté à une très large majorité de 156 voix pour, 6 contre et 18 abstentions, après six votes séparés.  Ont notamment voté contre la Fédération de Russie, la Chine, la République arabe syrienne et la République islamique d’Iran.  Lors des explications de vote, un groupe de pays a déploré que, 25 ans après l’entrée en vigueur de la Convention, il faille encore constater le recours à de telles armes en Syrie, en Russie, en Iraq et en Malaisie, ainsi que dans le cadre d’un attentat au Royaume-Uni.  En réaction, le représentant de la Fédération de Russie s’est dit inquiet que les États-Unis n’aient toujours détruit l’ensemble de leur stock d’armes chimiques et a constaté qu’ils étaient le seul État, avec Israël, à ne pas avoir voté en faveur du projet de résolution sur les « mesures visant à renforcer l’autorité du Protocole de Genève de 1925 ».

Le projet de résolution rejeté avait été présenté lundi par le représentant de la Fédération de Russie comme un moyen de tenir compte de l’évolution dans le domaine de la science et de la technologie afin de garantir le bon fonctionnement du mécanisme du Secrétaire général pour ce qui est de la sécurité chimique et biologique.  Mais les États-Unis et l’Union européenne ont dénoncé une nouvelle tentative –la troisième en trois ans- de la Fédération de Russie de remettre en cause l’indépendance d’un instrument international.  Il ne devrait pas être nécessaire d’obtenir l’accord du Conseil de sécurité pour enquêter sur une allégation d’utilisation d’armes chimiques, ont notamment fait valoir ces pays, pour qui « l’objectif de la Russie n’est pas de renforcer le mécanisme d’enquête mais de l’affaiblir ». 

Dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique, les votes ont reflété le débat thématique de la semaine écoulée.  La Première Commission a adopté le projet de décision portant sur les moyens de « réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable ».  Le projet de résolution sur la « prévention d’une course aux armements dans l’espace » a été adopté sans vote, de même que celui portant sur les « mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales ».  En revanche, le nouveau projet, présenté par les États-Unis, qui vise à demander aux États de prendre l’engagement de ne pas procéder à des essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice a dû être mis aux voix du fait de l’opposition notamment de la Chine et de la Fédération de Russie, qui le jugent « hypocrite ».  Le projet russo-chinois sur le « non-déploiement d’armes dans l’espace en premier », a lui aussi été adopté, par 123 voix pour, 50 voix contre et 4 abstentions, du fait de l’opposition des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Union européenne, qui considèrent que le texte ne répond pas de façon adéquate aux menaces, notamment parce qu’il ne définit pas ce qu’est une « arme dans l’espace ». 

Même s’il a fallu recourir à des votes sur neuf des projets présentés au titre des « armes classiques », la plupart des textes ont été adoptés à des majorités écrasantes et, pour plusieurs d’entre eux, sans opposition ouverte.  Exception, le vote de la Fédération de Russie contre le projet de résolution sur la « mise en œuvre de la Convention sur les armes à sous-munitions ».  La Fédération de Russie a dénoncé les dispositions discriminatoires de cette convention, l’accusant de n’avoir cherché qu’à autoriser certains types de sous-munitions de pointe, ce qui profite aux seuls États producteurs, avant d’ajouter que le problème de ces armes ne découle pas de l’arme en elle-même mais bien de son utilisation. 

Comme chaque année, le projet de résolution relatif au Traité sur le commerce des armes (TCA) a ainsi été adopté sans vote contre mais avec 22 abstentions de pays qui, comme la République islamique d’Iran ou l’Égypte, estiment que ce traité tend à être manipulé par un certain nombre d’États producteurs d’armes.  De même, le projet de résolution relatif à la mise en œuvre de la Convention sur les mines antipersonnel, dite d’Ottawa, n’a vu s’abstenir que 16 États qui évoquent généralement des besoins particuliers ou de longues frontières pour expliquer leur position. 

La Première Commission poursuivra demain, mercredi 2 novembre, à partir de 10 heures, l’examen des projets de résolution et de décision qui lui sont soumis.

DÉCISION SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DÉPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE

Groupe thématique 2 - Autres armes de destruction massive 

Explications de votes avant le vote

Le représentant des États-Unis a expliqué son opposition au projet de résolution L.69 (« Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques ») présenté par la Fédération de Russie, en dénonçant notamment son article 3, de nature à saper l’indépendance et l’impartialité du mécanisme d’enquête créé en 1987 et doté de modalités et procédures techniques en 1990. 

Au nom de l’Union européenne, la représentante de la République tchèque s’est également opposée au projet de résolution L.69 en précisant que c’est la troisième année de suite que la Fédération de Russie essaie de remettre en cause l’indépendance d’un instrument international chargé d’enquêter sur le recours à des armes chimiques ou biologiques.  Il ne devrait pas être nécessaire d’obtenir l’accord du Conseil de sécurité pour enquêter sur une allégation d’utilisation d’armes chimiques.  « L’objectif de la Russie n’est pas de renforcer le mécanisme d’enquête mais de l’affaiblir », a affirmé la représentante, avant de mentionner plusieurs exemples pour illustrer ses propos.

La représentante de la République arabe syrienne s’est opposée au projet de résolution L.55 (Application de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction) présenté par la Pologne hier en regrettant qu’il ne mentionne pas que des groupes terroristes ont utilisé des armes chimiques contre la population et l’armée syrienne.  Elle a aussi demandé le retrait d’un libellé qui n’a été adopté que par 45% des États parties de la Convention sur les armes chimiques (CIAC), en contradiction avec la tradition de consensus.  Elle a dénoncé la contradiction d’un texte qui fait la part belle à un mécanisme d’enquête conjoint qui a cessé d’exister il y a cinq ans et qui, selon elle, s’appuie sur des méthodes de travail contestables.  Elle a également reproché au texte de ne pas mentionner le fait que certains États parties à la CIAC possède encore des armes chimiques qu’ils étaient pourtant tenus de détruire avant une certaine date.  Parce qu’il s’agit d’un texte subjectif nous voterons contre les paragraphes politiques de ce texte, dont « l’alinéa 6 du préambule » a insisté la représentante. 

Le représentant de Cuba a annoncé l’abstention de son pays sur le projet de résolution L.55 en attendant que ce texte reprenne un libellé plus équilibré.  Il s’est dit opposé à l’alinéa 6 du préambule, ainsi qu’aux paragraphes 2 et 3 du dispositif qui accusent des pays en particulier sans preuves sérieuses.  Cuba estime en outre que les éléments contenus aux paragraphes 4, 5 et 18 n’ont pas fait l’objet d’un consensus au sein des États parties de la Convention et ne devraient donc pas être mentionnés dans un projet de résolution en Première Commission.

Le représentant de la Fédération de Russie a rappelé que son pays faisait partie des fondateurs de la Convention sur les armes chimiques, ajoutant que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, malheureusement, est désormais victime d’une politisation consécutive à la révision de son mandat par les Occidentaux.  Il a appelé à rétablir le principe du consensus au sein de l’Organisation et également à la Première Commission où, cette année, de nombreuses délégations menées par les États-Unis ont refusé d’amender le texte du projet de résolution L.55, refusant de prendre en compte les propositions constructives de rééquilibrage de sa délégation.

Le représentant de l’Inde a indiqué que sa délégation voterait en faveur du projet de résolution L.55 dans son ensemble, tout en regrettant que le texte soit de plus en plus politisé.  Sur le projet de résolution L.74, il a estimé que la pleine mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques est essentielle pour que les pays en développement puissent tirer profit, pour leur essor socioéconomique, des progrès biologiques dans les domaines industriels et de la santé. 

Le représentant de la Malaisie a fait savoir que sa délégation s’abstiendrait contre les paragraphes du projet de résolution L.55 qui vont dans le sens d’une politisation inacceptable de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques.  Elle votera en faveur du projet de résolution dans son ensemble et du paragraphe 6 du dispositif. 

Le représentant de la Nouvelle-Zélande a indiqué que son pays voterait contre le projet de résolution L.69, qui essaie de saper la légitimité du Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques et présente de fausses informations sur la Syrie. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a déploré la politisation accrue du projet de résolution L.55, un texte qui renforce année après année les divisions entre États parties à la Convention sur les armes chimiques.  Il a notamment jugé inacceptable que le projet de résolution condamne un État partie à la CIAC qui démontre « une coopération remarquable » avec les organes de celle-ci.

Vote sur les projets de résolution

Mesures visant à renforcer l’autorité du Protocole de Genève de 1925

Aux termes du projet de résolution A/C.1/77/L.11, intitulé « Mesures visant à renforcer l’autorité du Protocole de Genève de 1925 », et adopté par 182 voix pour, zéro contre et 2 abstentions (États-Unis et Israël), l’Assemblée générale demanderait de nouveau à tous les États de se conformer strictement aux principes et objectifs du Protocole concernant la prohibition d’emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques, et réaffirme qu’il est vital de donner effet aux dispositions de cet instrument.  Elle engagerait les États qui maintiennent leurs réserves au Protocole de Genève de 1925 à les retirer.

Application de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction

Aux termes du projet de résolution intitulé « Application de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction » (A/C.1/77/L.55), adopté par 156 voix pour, 6 contre (Chine, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua, République arabe syrienne et Zimbabwe) et 18 abstentions, l’Assemblée générale réaffirmerait qu’elle condamne dans les termes les plus vigoureux l’emploi d’armes chimiques par quiconque et en quelque circonstance que ce soit, soulignant que l’emploi d’armes chimiques en tout lieu, à tout moment, par quiconque et en quelque circonstance que ce soit est inacceptable et qu’il constitue ou constituerait une violation du droit international, et se déclare fermement convaincue que les personnes responsables de l’emploi de ces armes doivent ou devraient répondre de leurs actes.

Elle condamnerait dans les termes les plus vigoureux l’utilisation comme arme d’un produit chimique toxique contre Alexeï Navalny en Fédération de Russie, l’emploi d’armes chimiques en Iraq, en Malaisie, en République arabe syrienne et au Royaume-Uni, depuis 2012.

L’Assemblée générale prendrait note avec une profonde préoccupation des rapports de la mission d’établissement des faits de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques concernant les faits qui se seraient produits à Latamné (République arabe syrienne), à Saraqeb (République arabe syrienne) et à Douma (République arabe syrienne), ainsi que concernant les faits qui se seraient produits à Marea11 (République arabe syrienne) et à Kafr Zeïta (République arabe syrienne), dans lesquels la mission a conclu qu’il existait des motifs raisonnables de croire qu’un produit chimique.

L’Assemblée générale prendrait note de la décision C-26/DEC.10 de la Conférence des États parties en date du 1er décembre 2021, intitulée « Accord relatif à l’utilisation en aérosol de produits chimiques agissant sur le système nerveux central à des fins de maintien de l’ordre ».

Elle prendrait note également de la création d’un groupe de travail à composition non limitée en vue de commencer les préparatifs de la cinquième session extraordinaire de la Conférence des États parties chargée d’examiner le fonctionnement de la Convention sur les armes chimiques, qui doit se tenir du 15 au 19 mai 2023, et appelle les États à s’engager dans une collaboration constructive et à veiller à ce que ce travail d’examen débouche sur un résultat tangible.

Votes séparés

Alinéa 6 du préambule: adopté par 117 voix pour, 7 contre (Cuba, Fédération de Russie, Iran, Kazakhstan, Nicaragua, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 33 abstentions; 

Paragraphe 2 du dispositif: adopté par 88 voix pour, 10 contre et 63 abstentions;

Paragraphe 3 du dispositif: adopté par 114 voix pour, 9 contre (Bolivie, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Kazakhstan, Nicaragua, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 31 abstentions;

Paragraphe 4 du dispositif: adopté par 114 voix pour, 8 contre (Bolivie, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 33 abstentions;

Paragraphe 5 du dispositif: adopté par 107 voix pour, 9 contre (Bolivie, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua, République arabe syrienne, République démocratique populaire lao et République populaire démocratique de Corée) et 38 abstentions;

Paragraphe 6 du dispositif: adopté par 117 voix pour, 5 contre (Chine, Iran, Fédération de Russie, Nicaragua et République arabe syrienne) et 31 abstentions;

Paragraphe 18 du dispositif: adopté par 111 voix pour, 7 contre (Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée) et 38 abstentions

Mesures visant à empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive

Par ce projet de résolution intitulé « Mesures visant à empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive » (A/C.1/77/L.60), adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait à tous les États Membres d’appuyer l’action menée au niveau international pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive et leurs vecteurs.  Elle lancerait un appel à tous les États Membres pour qu’ils envisagent d’adhérer sans tarder à la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire et de la ratifier, et encouragerait les États parties à la Convention à examiner l’application de celle-ci.

L’Assemblée générale prierait instamment tous les États Membres de prendre des mesures au niveau national pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive, leurs vecteurs et les matières et technologies liées à leur fabrication.  Elle prierait le Secrétaire général d’établir un rapport récapitulant les mesures déjà prises par les organisations internationales sur des questions en rapport avec les liens entre la lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive, de solliciter les vues des États Membres sur les mesures supplémentaires à prendre, y compris au niveau national, pour faire face à la menace que l’acquisition d’armes de destruction massive par des terroristes ferait peser sur le monde, et de lui faire rapport à ce sujet à sa soixante-dix-huitième session.

Prévention de l’acquisition de sources radioactives par des terroristes

Aux termes du projet de résolution intitulé « Prévention de l’acquisition de sources radioactives par des terroristes » (A/C.1/77/L.64), adopté par 180 voix pour, zéro contre et 2 abstentions (Iran et République arabe syrienne), tel qu’oralement amendé, l’Assemblée générale, notant avec une profonde inquiétude les conséquences des conflits armés sur la sûreté et la sécurité des sources radioactives qui pourraient conduire à la perte ou au vol de ces sources et augmenter le risque de trafic de ces sources, demanderait aux États Membres de soutenir les efforts internationaux visant à prévenir l’acquisition et l’emploi par des terroristes de sources radioactives et, si nécessaire, de réprimer ces actes, conformément à leur droit interne et au droit international. 

L’Assemblée générale exhorterait les États Membres à renforcer leurs capacités nationales et à prendre et à renforcer les mesures qui s’imposent au plan national pour prévenir l’acquisition et l’emploi par des terroristes de sources radioactives ainsi que les attentats terroristes contre des centrales et installations nucléaires qui entraîneraient des émissions radioactives et, si nécessaire, à réprimer ces actes, en particulier en prenant des mesures efficaces pour comptabiliser, contrôler, sécuriser et protéger physiquement ces installations, ces matières et ces sources, en conformité avec leur droit interne et leurs obligations internationales.

Elle engagerait les États Membres à renforcer leurs capacités en se dotant de moyens de détection et de structures et systèmes connexes appropriés, y compris en faisant appel à la coopération et à l’assistance internationales, conformément au droit international et à la réglementation internationale, en vue de prévenir et de repérer le trafic de sources radioactives et d’y remédier.

Elle prierait instamment tous les États de s’employer à suivre les orientations contenues dans le document juridiquement non contraignant qu’est le Code de conduite sur la sûreté et la sécurité des sources radioactives de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), y compris, en tant que de besoin, les Orientations complémentaires pour l’importation et l’exportation de sources radioactives et les Orientations complémentaires sur la gestion des sources radioactives retirées du service, et encouragerait  les États Membres à notifier au Directeur général de l’AIEA leur intention de le faire. 

Elle encouragerait les États Membres qui le souhaitent à participer au programme de l’AIEA concernant la Base de données sur les incidents et les cas de trafic.

Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques

Aux termes de ce projet de résolution intitulé « Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques » A/C.1/77/L.69), rejeté par 65 voix contre, 30 pour et 77 abstentions, l’Assemblée générale se serait dite consciente des nouveautés dans le domaine de la science et de la technologie qui concernent le Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques et que la situation en matière de désarmement chimique et biologique a évolué depuis la création du Mécanisme en 1987 et l’adoption de ses modalités et procédures techniques en 1990.

Elle aurait redit que le Secrétaire général devrait revoir périodiquement, avec l’aide de ses experts consultants désignés, les modalités et procédures techniques figurant dans l’annexe I du rapport qu’il avait établi en 1989, en tenant compte des modifications proposées par les États Membres, et les réviser selon que de besoin, pour les lui soumettre sur demande.

L’Assemblée générale aurait prié le Secrétaire général de solliciter les vues et les suggestions des États Membres concernant les dispositions des modalités et procédures telles qu’elles figurent actuellement à l’annexe I du rapport établi par le Secrétaire général en 1989 et les mises à jour qui pourraient y être apportées et de lui présenter, à sa soixante-dix-huitième session, un rapport de fond accompagné d’une annexe contenant ces vues, dans la perspective de futurs débats entre les États Membres.

Vote séparé

Paragraphe 3 du dispositif: rejeté par 63 voix contre, 27 voix pour et 70 abstentions

Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction

Aux termes de ce projet de résolution intitulé « Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction » (A/C.1/77/L.74), adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait à tous les États parties de participer à l’échange d’informations et de données sur les mesures de confiance, conformément aux décisions issues des conférences d’examen, et les inviterait à se servir de la nouvelle plateforme pour communiquer les informations et les données par voie électronique, s’ils le souhaitent, le choix de la méthode employée pour les communiquer étant laissé à leur discrétion.

Elle encouragerait les États parties à rendre compte au moins deux fois par an des mesures qu’ils auront prises aux fins de l’application de l’article X de la Convention et à collaborer pour offrir aux États parties qui en font la demande, laquelle doit revêtir une forme précise, une assistance ou des activités de formation afin de les aider à se donner les moyens, législatifs et autres, de se conformer à la Convention. 

L’Assemblée générale rappellerait qu’à la réunion des États parties tenue à Genève en décembre 2018, il a été constaté que les difficultés financières concernant la Convention découlaient principalement du non-versement des contributions par certains États parties, des retards dans le versement des contributions par d’autres États parties et des besoins de financement de l’ONU au titre d’activités non financées par son budget ordinaire, et demanderait aux États parties d’envisager de toute urgence des moyens de surmonter ces graves difficultés.

L’actualisation de 2022 du texte réside dans le préambule, dans lequel L’Assemblée générale note que la réunion de consultation officielle des États parties à la Convention, dont la convocation avait été demandée par la Fédération de Russie, s’est tenue à Genève le 26 août 2022 puis du 5 au 9 septembre 2022 et prend note de la présentation par la Fédération de Russie de sa demande de consultations au titre de l’article V au sujet des questions en suspens posées par la Fédération de Russie aux États-Unis d’Amérique et à l’Ukraine concernant le respect de leurs obligations respectives au titre de la Convention s’agissant de l’exploitation de laboratoires biologiques en Ukraine, des réponses faites par les États-Unis d’Amérique et l’Ukraine, du fait qu’aucun consensus n’a été atteint concernant les résultats de la réunion de consultation officielle et du rapport final de la réunion de consultation officielle.

Explications de vote après le vote

La République islamique d’Iran a expliqué son vote sur le projet de résolution L.64 (« Prévention de l’acquisition de sources radioactives par des terroristes »), par son appui à l’objectif principal d’une approche exhaustive, et pas seulement aux cas de conflits armés.  Pour l’Iran, le sujet est déjà couvert par le projet de résolution L.60 sur les mesures visant à empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive.  L’Iran encourage les États Membres à éviter d’introduire des questions techniques qui ne devraient relever que de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).  Par ailleurs, l’Iran a voté en faveur du projet de résolution L.69 (« Mécanisme permettant au Secrétaire général d’enquêter sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et biologiques »), car celui-ci contient des paragraphes très positifs, comme l’interdiction de l’utilisation de produits biologiques ou à toxines en tant qu’armes.  Il a exhorté les États parties à la Convention sur les armes biologiques (CIAB) à adopter un protocole non discriminatoire.  Il a souligné que le monde a connu des abus de la part du Conseil de sécurité.  L’indépendance et l’impartialité du mécanisme du Secrétaire général doit être garanti, a-t-il déclaré. 

L’Inde a rappelé qu’elle avait toujours soutenu la Convention sur les armes chimiques (CIAC) et la Convention sur les armes biologiques (CIAB).  Elle estime que les questions relatives aux armes chimiques doivent être abordées dans le contexte des conventions pertinentes et c’est pourquoi elle s’est abstenue sur le projet de résolution L.69.

L’Algérie, expliquant son vote sur le projet de résolution L.55, a rappelé l’importance de l’universalisation de la Convention sur les armes chimiques (CIAC).  L’Algérie est convaincue de la nécessité de détruire les stocks d’armes chimiques partout dans le monde.  Malheureusement, elle n’a pu appuyer le projet de résolution et s’est abstenue lors des votes séparés sur les paragraphes 6, 4, 3 et 18 du dispositif, qui ne sont pas équilibrés et ne reposent pas sur des questions consensuelles.  En dépit des appels lancés par les États Membres, la politisation de ce projet de résolution ne fera qu’affaiblir le projet, a ajouté l’Algérie.  S’agissant des armes chimiques, il est impératif de montrer un esprit positif avec une collaboration fondée sur le consensus.  La politisation dont témoigne le vote n’est pas dans l’intérêt collectif des États. 

La Chine a estimé que le projet de résolution L.55 « Application de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction » prévoyait la destruction totale des armes chimiques dans des délais fixés, que certains pays n’ont pas respectés.  Elle a également estimé que la politisation de la question des armes chimiques syriennes était problématique et qu’il fallait apporter des amendements au projet de résolution, sans quoi il serait contre-productif.  Conformément aux dispositions de la Convention, il faut des faits probants sur l’affaire Navalny plutôt que des suppositions, a encore estimé le représentant.  La Chine s’oppose à des menaces d’utilisation d’armes chimiques par quelque partie que ce soit et pour quelques raisons que ce soit.  Mais pour atteindre un monde sans armes chimiques, il faut un consensus. 

Israël a expliqué son vote sur le projet de résolution L.55 et a dénoncé la possession d’armes chimiques par la République arabe syrienne, laquelle a été démontrée dans de nombreux rapports du Secrétaire général.  En outre, des acteurs non étatiques s’efforcent d’acquérir des armes chimiques.  Il faut empêcher toute utilisation d’armes chimiques y compris par des acteurs étatiques et non étatiques et les capacités récentes d’armes chimiques en Syrie doivent être démantelées. 

Le Mexique a regretté que l’objectif affiché du projet de résolution L.69 ne puisse être atteint.  Il a rappelé sa condamnation la plus ferme des armes chimiques et biologiques, et réaffirmé son soutien au travail de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).

Intervenant au nom de 48 États qui ont appuyé le projet de résolution L.55, les États-Unis ont salué la capacité de ce texte de favoriser la recherche de la vérité pour attribuer des responsabilités à l’égard du recours à des armes chimiques ou bactériologiques.  Ces pays regrettent que, 25 ans après l’entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques, il faille encore déplorer le recours à de telles armes en Syrie, en Russie, en Iraq et en Malaisie, sans oublier l’attentat de Salisbury au Royaume-Uni.  Ils exhortent tous les États à adhérer au partenariat international contre l’impunité en cas de recours aux armes chimiques.  Citant quatre cas d’utilisation avérée d’armes chimiques par la Commission d’enquête en sus des quatre autres relevés par le passé, le représentant des États-Unis a rappelé que la communauté internationale attend depuis deux ans les explications de la Russie au sujet de l’empoisonnement de M. Navalny. 

L’Argentine a appuyé toute disposition ayant une incidence positive sur le mécanisme d’enquête du Secrétaire général pour faire suite à des plaintes qui lui sont soumises en cas de recours à des armes chimiques et bactériologiques. 

Les Philippines ont dit avoir appuyé le projet de résolution L.69 qui met l’accent sur l’indépendance du mécanisme d’enquête du Secrétaire général pour faire suite à des plaintes qui lui sont soumises en cas de recours à des armes chimiques et bactériologiques. 

La Fédération de Russie a appuyé le projet de résolution L.11 concernant le Protocole de Genève de 1925, qui prohibe l’emploi à la guerre de gaz asphyxiants ou toxiques, parce qu’il est un élément important de l’architecture internationale de contrôle de ces armes.  La Fédération de Russie rejette les accusations des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN et exprime son inquiétude après l’abstention des États-Unis sur le projet de résolution L.11 intitulé « Mesures visant à renforcer l’autorité du Protocole de Genève de 1925 ».  Le représentant a demandé aux États de se conformer strictement aux principes et objectifs du Protocole concernant la prohibition d’emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques.  Le représentant russe a également rappelé que les États-Unis demeurent le dernier État à ne pas avoir détruit leur stock d’armes chimiques comme les y contraint pourtant la Convention sur les armes chimiques. 

La Türkiye a indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.55, le cas de la Syrie demeurant préoccupant quant à l’utilisation d’armes chimiques.  Elle a par ailleurs salué l’autorité et l’indépendance du Secrétariat de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, qui reste le moyen le plus sûr de combattre l’impunité à l’égard de ces armes.  Elle a également rappelé le régime syrien à ses obligations en tant que membre de la Convention sur les armes chimiques. 

La Suisse a indiqué avoir voté contre le projet de résolution L.69, ce texte ne pouvant en rien renforcer le Mécanisme de vérification du Secrétaire général. 

Groupe thématique 3 - Espace extra-atmosphérique (aspects de désarmement)

Déclarations générales

La représentante des États-Unis a indiqué que le projet de résolution L.62 (« Essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice »), porté par sa délégation, a reçu cette année plusieurs améliorations techniques et est désormais fort de près de 50 coauteurs.   Ce texte répond en toute transparence à l’une des menaces spatiales les plus immédiates, à savoir les tirs de missiles antisatellites à ascension directe et à visée destructrice, a-t-elle dit.

Le représentant de la Fédération de Russie s’est inquiété du placement dans l’espace d’armes, ouvrant la possibilité d’une course aux armements et d’une militarisation dans l’espace extra-atmosphérique.  Plaidant pour l’interdiction totale d’une mise en orbite d’armes et en faveur de la conclusion d’un instrument juridiquement contraignant en ce sens, il a appelé les délégations à soutenir le projet de résolution L.67 (« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier »), que la Chine et son pays présentent à la Conférence du désarmement et à la Commission depuis 2014, et le projet de résolution L.71 relatif aux mesures de confiance et de transparence pour les activités dans l’espace.   Le représentant a également défendu la pertinence du projet de résolution L.70 (« Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace »), lequel propose de constituer un groupe d’experts gouvernementaux composé de 25 États Membres « chargé d’examiner les éléments fondamentaux d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace ».

Le représentant de Cuba a appuyé les propos de la Fédération de Russie, soulignant de plus la nécessité que les pays en développement puissent bénéficier d’une utilisation pacifique de l’espace extraatmosphérique.

Le représentant de la Chine a appuyé la déclaration de la Fédération de Russie concernant et du projet de résolution L.67(« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier »).  Il a notamment appuyé les libellés portant sur la création d’un groupe d’experts et a déploré que des États aient demandé des votes séparés sur ces dispositifs.  Ces États sont animés par une idéologie datant de la guerre froide et veulent l’hégémonie au sein des Nations Unies, a-t-il accusé.  L’utilisation de l’espace doit se faire dans le sens des bienfaits pour l’humanité et la majorité des États Membres va dans ce sens, a-t-il déclaré.  Le représentant a par ailleurs estimé que les délégations avaient mené des discussions de fond des paragraphes 8 à 12 du projet de résolution L.70 relatifs à de « nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace » et portant sur la restauration du Groupe des experts gouvernementaux.  Malgré les résultats utiles des discussions, les États-Unis ont fait obstacle, a déploré la Chine, accusant les États-Unis de systématiquement s’opposer à ses propositions.  Le Groupe de travail à composition non limitée et « l’autre groupe d’experts » peuvent se compléter, a estimé le représentant de la Chine, qui a vu dans les tentatives cyniques de s’opposer à ce groupe d’experts une volonté d’hégémonie. 

Explications de vote avant le vote

L’Inde a expliqué qu’elle avait toujours défendu l’espace en tant que zone de coopération internationale et considère le traité de 1967 sur l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique comme le seul instrument valide pour ces questions.  L’Inde s’abstiendra sur le projet de résolution L.27 « Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles etdeprincipes de comportement responsable ». 

La Fédération de Russie a estimé que l’adoption du projet de résolution L.62 (« Essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice ») ne présuppose pas le refus de travailler sur des systèmes antisatellites.  Or, ce texte ne prévoit pas le refus de ne pas les utiliser, ne contient pas de moratoire sur l’utilisation de ces armes ni la destruction des armes préexistantes.  Pour la Fédération de Russie, les États-Unis remplacent les négociations diplomatiques par des discussions qui ne riment à rien.  La Fédération de Russie demande aux États-Unis de ne pas déployer les premiers d’armes dans l’espace.  La Fédération de Russie votera contre le projet de résolution L.62 et appelle tous les États à faire de même.

La République islamique d’Iran a expliqué qu’elle voterait contre le projet de résolution L.27 (« Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable »).  Elle a ensuite jugé le projet de résolution L.62 insuffisant et discriminatoire, car le texte ne renonce pas à la production des systèmes antisatellites et n’envisage pas l’élimination des armes de ce type existantes.  La République islamique d’Iran est attachée à la négociation d’un instrument contraignant dans le cadre du traité de 1967 et exhorte les États Membres à envisager la rédaction d’un tel instrument.  En revanche, la République islamique d’Iran a annoncé qu’elle voterait en faveur des projets de résolution L.67 et L.71.

Les États-Unis ont annoncé qu’ils ne s’opposeraient pas au projet de résolution L.3 (« Prévention d’une course aux armements dans l’espace »).  Pour les États-Unis, les activités dans l’espace impliquent des normes qui doivent indiquer des activités qui sont en cours.  Ils encouragent donc les États Membres à examiner les mesures de confiance et de transparence.  Pour les États-Unis, l’espace doit rester à l’abri de tout conflit, mais ils ajoutent que la Chine et la Fédération de Russie veulent étendre leurs armements dans l’espace et proposent donc des projets de résolution vides de sens pour détourner l’attention. 

Au nom également du Royaume-Uni et des États-Unis, la France a expliqué que les trois pays voteraient contre les projets de résolution L.67 « Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier » et L.70 « Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace », ajoutant qu’ils encourageaient les autres États Membres à également voter contre.  Le but de ces résolutions devrait être de renforcer la sûreté de l’environnement spatial, a expliqué la France.  Or, pour favoriser ce processus, c’est la résolution proposée par les États-Unis qui offre des moyens supplémentaires de lutte.  En revanche, les résolutions présentées par la Fédération de Russie ne répondent pas de façon adéquate aux menaces.  Ainsi, elles ne définissent pas ce qu’est une « arme dans l’espace ».  Or, un satellite civil peut être utilisé comme arme.  Le projet russe contient aussi des termes sans aucun rapport avec le sujet, par exemple « des efforts communs pour une communauté d’avenir partagé pour l’humanité », ce qui ne veut rien dire. 

Au nom de l’Union européenne, la République tchèque a appuyé le projet de résolution L.3 concernant la prévention d’une course aux armements dans espace extra-atmosphérique.  Concernant le projet L.67, elle a toutefois cité la difficulté à définir « une arme dans l’espace » en raison de l’ambiguïté concernant les capacités de certains objets orbitant dans l’espace et de l’intention réelle de leur utilisation.  S’inquiétant des menaces de la Fédération de Russie de cibler des satellites commerciaux, l’Union européenne salue en revanche le nouveau projet de résolution 62 (« Essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice ») pour lutter contre de tels essais.  Elle estime par ailleurs que la création d’un nouveau groupe d’experts gouvernementaux tel que proposé par le projet de résolution L.70 saperait les travaux en cours au sein du Groupe de travail à composition non limitée actuel. 

La Chine a annoncé qu’elle voterait contre le projet L.27 (« Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable ») car elle y voit une « initiative hypocrite » qui nous écarterait du consensus international sur la nécessité d’éviter la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. 

Le Pakistan s’est interrogé sur la capacité du projet de résolution L.62 à pouvoir contribuer à empêcher une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique et a annoncé qu’il s’abstiendrait.  Il a notamment souligné des faiblesses de ce projet en citant le paragraphe 3 du dispositif et a regretté que l’exploration de l’espace extra-atmosphérique pour le bien de toute l’humanité n’y soit pas mentionnée.

L’Égypte a annoncé son vote en faveur du projet de résolution L.62, car elle estime que cette initiative peut être une première étape vers des mesures juridiquement contraignantes de pacification de l’espace.

Prévention d’une course aux armements dans l’espace

Aux termes du projet de résolution A/C.1/77/L.3, intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace », adopté sans vote, l’Assemblée générale réaffirmerait qu’il est important et urgent de prévenir une course aux armements dans l’espace, objectif commun à la réalisation duquel tous les États sont prêts à contribuer, conformément aux dispositions du Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique.  Elle constaterait une fois encore que le régime juridique applicable à l’espace ne suffit pas, à lui seul, à garantir la prévention d’une course aux armements dans ce milieu.

L’Assemblée générale demanderait à tous les États, en particulier aux États dotés de capacités spatiales importantes, de contribuer activement à la réalisation de l’objectif qui consiste à utiliser l’espace à des fins pacifiques et à prévenir la course aux armements dans l’espace, et de s’abstenir d’actes incompatibles avec cet objectif et avec les traités en vigueur en la matière. 

L’Assemblée générale réaffirmerait que la Conférence du désarmement, seule instance multilatérale de négociation sur le désarmement, a un rôle primordial à jouer dans la négociation d’un ou de plusieurs accords multilatéraux, selon qu’il conviendra, visant à prévenir une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects, et elle l’inviterait à créer aussi tôt que possible un groupe de travail au titre du point de son ordre du jour intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace ».

L’Assemblée générale constaterait, à cet égard, qu’il existe une convergence de vues de plus en plus grande sur l’élaboration de mesures visant à renforcer la transparence, la confiance et la sécurité dans le domaine des utilisations pacifiques de l’espace, sans préjuger des efforts déployés en vue de la conclusion d’un ou de plusieurs accords multilatéraux effectifs et vérifiables sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Ainsi, elle prierait instamment les États qui mènent des activités dans l’espace, ainsi que les États désireux d’en mener, de tenir la Conférence du désarmement informée du déroulement, le cas échéant, de négociations bilatérales ou multilatérales sur la question, de manière à lui faciliter la tâche. 

Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable

Aux termes du projet de décision A/C.1/77/L.27, adopté par 165 voix pour, 7 voix contre (Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua, République arabe syrienne, République populaire démocratique de Corée) et 5 abstentions (Bélarus, Guinée équatoriale, Inde, Pakistan et Tadjikistan), l’Assemblée générale déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-dix-huitième session, au titre de la question intitulée « Prévention d’une course aux armements dans l’espace », la question subsidiaire intitulée « Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable ».

Essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice

Aux termes du projet de résolution intitulé « Essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice » (A/C.1/77/L.62), adopté par 154 voix pour, 8 voix contre (Bélarus, Bolivie, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Iran, Nicaragua et République arabe syrienne) et 10 abstentions, l’Assemblée générale demanderait à tous les États de prendre l’engagement de ne pas procéder à des essais de missile antisatellite à ascension directe et à visée destructrice .

L’Assemblée générale considérerait qu’un tel engagement constitue une première mesure à prendre d’urgence pour éviter que des dommages ne soient causés au milieu spatial, tout en contribuant à l’élaboration d’autres mesures de prévention d’une course aux armements dans l’espace.

Elle demanderait à tous les États de continuer de débattre au sein des organes compétents, d’établir de nouvelles mesures pratiques à prendre et de les développer, afin de permettre la réduction des risques, d’empêcher que des conflits n’aient lieu dans l’espace et de prévenir une course aux armements dans l’espace; il pourrait s’agir, entre autres, de mesures de transparence et de confiance et de moratoires supplémentaires, ce qui pourrait contribuer à l’élaboration d’instruments juridiquement contraignants sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects.

Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier

Aux termes du projet de résolution A/C.1/77/L.67, intitulé « Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier », adopté par 123 voix pour, 50 voix contre et 4 abstentions (Bosnie-Herzégovine, Côte d’Ivoire, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Suisse), l’Assemblée générale réaffirmerait qu’il importe au plus haut point de prévenir une course aux armements dans l’espace et que les États doivent sans plus de retard manifester la volonté de contribuer à la réalisation de cet objectif commun.

L’Assemblée générale réaffirmerait également que la Conférence du désarmement, seule instance multilatérale de négociation sur le désarmement, a un rôle primordial à jouer dans la négociation d’un, ou le cas échéant, de plusieurs accords multilatéraux visant à prévenir, sous tous ses aspects, une course aux armements dans l’espace.  Elle demanderait instamment que des travaux de fond débutent au plus tôt, sur la base du projet révisé de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace et de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux, présenté par la Chine et la Fédération de Russie à la Conférence du désarmement en 2008, au titre du point de l’ordre du jour intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace ». 

L’Assemblée générale soulignerait qu’en l’absence d’un tel accord, d’autres mesures peuvent contribuer à faire en sorte que des armes ne soient pas déployées dans l’espace.  Elle engagerait tous les États, en particulier ceux qui mènent des activités spatiales, à envisager la possibilité de prendre l’engagement politique de ne pas être les premiers à déployer des armes dans l’espace.

Votes séparés

Alinéa 5 du préambule: adopté par 111 voix pour, 50 contre et 6 abstentions (Bosnie-Herzégovine, Côte d’Ivoire, Djibouti, Haïti, Malawi et Suisse);

Alinéa 9 du préambule: adopté par 115 voix pour, 48 contre et 4 abstentions (Bosnie-Herzégovine, Côte d’Ivoire, Malawi et Suisse);

Alinéa 11 du préambule: adopté par 115 voix pour, 42 contre et 9 abstentions (Belgique, Bosnie-Herzégovine, Canada, Côte d’Ivoire, Espagne, Italie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République de Corée et Suisse). 

Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace

Aux termes du projet de résolution intitulé « Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace » (A/C.1/77/L.70), adopté par 124 voix pour, 48 contre et 9 abstentions (Bosnie-Herzégovine, Brésil, Chili, Fidji, Géorgie, Guatemala, Honduras, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Suisse), l’Assemblée générale proclamerait qu’il est de la responsabilité historique de tous les États de veiller à ce que l’exploration de l’espace se fasse exclusivement à des fins pacifiques au profit de l’humanité.  Elle déclarerait que le fait que l’espace échappe à la course aux armements et soit réservé à des fins pacifiques devrait devenir une règle contraignante de la politique des États et une obligation internationale universellement admise.

L’Assemblée générale demanderait à cette fin à tous les États et, en premier lieu, à ceux qui disposent de capacités spatiales importantes de prendre des mesures d’urgence afin de prévenir pour toujours le déploiement d’armes dans l’espace et la menace ou l’emploi de la force, depuis l’espace contre la Terre comme depuis la Terre contre des objets spatiaux; et de s’efforcer, par la négociation, d’élaborer rapidement des accords multilatéraux appropriés, fiables et vérifiables, et juridiquement contraignants.

L’Assemblée générale prierait le Secrétaire général de constituer un groupe d’experts gouvernementaux composé de 25 États Membres chargé d’examiner les éléments fondamentaux d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et, entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace, et de formuler des recommandations à ce sujet.  Elle déciderait que ce nouveau groupe d’experts gouvernementaux travaillera sur la base du consensus, sans préjudice des positions respectives que chaque État adoptera dans le cadre de futures négociations, et tiendra à Genève deux sessions de deux semaines chacune, l’une en 2023 et l’autre en 2024.

L’Assemblée générale prierait instamment la Conférence du désarmement d’adopter et de mettre en œuvre dès que possible un programme de travail équilibré et global prévoyant l’ouverture immédiate de négociations sur un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et, entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace et la menace ou l’emploi de la force dans l’espace, depuis l’espace vers la Terre comme depuis la Terre vers des objets spatiaux.  Elle déciderait que, si la Conférence du désarmement adopte et met en œuvre un tel programme de travail, le nouveau groupe d’experts gouvernementaux mettra fin à ses travaux et en présentera le résultat au Secrétaire général pour transmission à la Conférence du désarmement. 

Votes séparés

Alinéa 5 du préambule: adopté par 110 voix pour, 47 contre et 8 abstentions (Bosnie-Herzégovine, Chili, Géorgie, Madagascar, Malawi, Mozambique, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Suisse);

Paragraphe 8 du dispositif: adopté par 97 voix pour, 46 contre et 17 abstentions;

Paragraphe 9 du dispositif: adopté par 98 voix pour, 46 contre et 16 abstentions;

Paragraphe 10 du dispositif: adopté par 99 voix pour, 46 contre et 17 abstentions;

Paragraphe 11 du dispositif: adopté par 99 voix pour, 46 contre et 17 abstentions;

Paragraphe 12 du dispositif: adopté par 100 voix pour, 46 contre et 16 abstentions.

Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales

Aux termes du projet de résolution intitulé « Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales » (A/C.1/77/L.71/rev.1), adopté sans vote, l’Assemblée générale soulignerait l’importance du rapport du Groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales qu’elle a examiné le 5 décembre 2013.

Elle encouragerait les États Membres qui le souhaitent à continuer d’examiner et de mettre en œuvre, dans toute la mesure possible et compte tenu de leurs intérêts nationaux, les mesures de transparence et de confiance proposées dans ce rapport, dans le cadre de mécanismes nationaux adaptés.

Elle encouragerait également les États Membres à avoir, conformément aux recommandations figurant dans le rapport, des échanges de vues réguliers dans le cadre du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, de la Commission du désarmement et de la Conférence du désarmement, sur les perspectives de l’application des mesures de transparence et de confiance, le but étant de la promouvoir.

L’Assemblée générale prierait le Secrétaire général de solliciter les vues et les propositions des États Membres sur l’application des mesures de transparence et de confiance dans l’espace conformément aux dispositions du rapport du Groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales de 2013, et de lui présenter, à sa soixante-dix-huitième session, un rapport de fond assorti d’une annexe contenant ces vues, dans la perspective de futurs débats entre les États Membres.

Explications de vote après le vote

La Fédération de Russie a indiqué, au sujet du projet de décision L.27, que le texte était lacunaire et faisait doublon avec d’autres résolutions de l’Assemblée générale.  Nous ne voyons pas en quoi ce texte vise la prévention d’une militarisation de l’espace, a dit le représentant.  L’initiative du Royaume-Uni étant une tentative de détourner l’attention des États Membres de l’ONU vers un sujet subalterne, la Fédération de Russie a voté contre ce texte.

Les Philippines ont indiqué s’être abstenues sur le projet de résolution L.70, car le groupe prévu, une fois établi, n’aurait pas de mandat clair pour négocier un instrument juridiquement contraignant de prévention de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique.

La Suisse a indiqué s’être abstenue sur les projets de résolution L.67 et L.70, des progrès supplémentaires étant requis pour contrer les menaces spatiales.  La référence à certaines armes n’est pas claire et la cohérence entre instruments de sécurité spatiale existants n’est pas souligné dans le libellé de ces textes. 

Le Mexique a indiqué avoir voté pour le projet de résolution L.62, étant attaché à la préservation de l’espace à des fins exclusivement pacifiques.  Le Mexique a par ailleurs regretté que le projet de résolution L.67 ne comporte pas d’interdiction expresse du placement d’armes dans l’espace.  C’est pourquoi il s’est abstenu sur ce texte.

Sri Lanka a remercié les délégations d’avoir accepté une adoption sans mise en voix du projet de résolution L.3, un texte corédigé avec l’Égypte.  Il a indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.67, le maintien du groupe à composition non limitée répondant à la nécessité de s’engager sur la voie d’un traité juridiquement contraignant contre la course aux armements dans l’espace. 

L’Indonésie a également indiqué avoir voté en faveur du projet de résolution L.67 pour les mêmes raisons que son homologue sri-lankais. 

Israël a indiqué avoir appuyé le projet de résolution L.62, qui promeut des mesures de confiance reflétant un comportement responsable dans l’espace.  Israël s’est toutefois abstenu sur le paragraphe 3 du dispositif, qui souligne la nécessité de mettre au point des instruments juridiquement contraignants pour la sécurité spatiale. 

Les États-Unis ont notamment rejeté les projets de résolution dont la Russie est le principal porte-plume, demandant à ce pays de mettre fin à son agression illégale contre l’Ukraine et de respecter le droit international. 

Cuba a dit avoir voté contre le projet de résolution L.62 parce qu’il comporte des insuffisances notables, exhortant seulement les États à des engagements sans valeur juridique.  Pour Cuba, ce texte ne décourage pas les essais de missiles à ascension directe.

Le Viet Nam a dit avoir voté en faveur du projet de résolution L.62 car il est en faveur du droit de chaque pays d’explorer l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques. 

La Nouvelle-Zélande a salué la teneur du projet de résolution L.71.  En revanche, la Nouvelle-Zélande est opposée au projet de résolution L.67 car ce texte risque d’offrir une autorisation tacite de placement en deuxième ou troisième d’armes dans l’espace extra-atmosphérique.  Tout en appuyant l’urgence de mesures volontaires et contraignantes de prévention de la course aux armements dans l’espace, la Nouvelle-Zélande estime que les projets de résolution L.67 et L.70 n’offrent pas de solutions productives en la matière.

Le Costa Rica juge inacceptable le déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique et regrette l’absence d’une interdiction claire.  C’est pourquoi le Costa Rica a appuyé le projet de résolution L.70, qui propose une enceinte de délibération sur les comportements responsables.

L’Inde a dit partager les préoccupations quant aux dangers émanent de débris spatiaux, mais estime que cette question des débris relève du Comité des utilisations pacifiques de l’ espace extra-atmosphérique.  L’Inde a voté en faveur du projet L.67 et s’est abstenue sur le projet L.62. 

Le Japon a expliqué s’être opposé au projet de résolution L.70 en s’inquiétant d’activités spatiales insuffisamment transparentes qui pourraient être sources de malentendus, voire de menaces.  Pour le Japon, la question du double usage des matériaux spatiaux devrait être dûment vérifiée.  Le Japon juge importantes les mesures de transparence et de confiance.  Il appelle à éviter de multiplier les groupes d’experts ou autre groupe à composition non limitée et rappelle que la Commission du désarmement, qui doit se réunir en avril 2023, est déjà chargée de produire un rapport sur la prévention de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique.

Groupe thématique 4 - Armes classiques

Déclarations générales

Le représentant de la République de Corée a présenté le projet de résolution L.39 sur le Traité sur le commerce des armes qui a vocation à réduire la souffrance humaine.  Le TCA Traité sur le commerce des armes est une réalisation historique pour éviter le commerce illicite et le détournement, a-t-il affirmé.  Il a noté des mises à jour techniques par rapport à la résolution adoptée l’année précédente.  Il a émis l’espoir que la résolution soit adoptée avec un large soutien. 

Le représentant de l’Australie, au nom également de la France, a présenté le projet de résolution L.41 sur la menace que représentent des engins explosifs improvisés (EEI).  Ceux-ci continuent de causer la mort et représentent 43% des victimes mondiales d’armes explosives.  Ainsi, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a perdu 90 soldats de la paix en raison de ces EEI.  C’est pourquoi il faut réglementer de manière efficace.  La résolution a été adoptée sans vote depuis sa création, a rappelé le représentant.  Toutefois, une délégation a demandé un vote sur les alinéas 8 et 9 du préambule qui reconnaissent l’importance de la pleine participation et la possibilité de la participation des femmes et des hommes dans la lutte contre les menaces des EEI.  Ce libellé, qui faisait l’objet d’un consensus depuis des années, fait à présent l’objet d’une volonté de politiser cette question par une délégation, a-t-il regretté.  Il a demandé à voter pour ces alinéas et a émis l’espoir de restaurer le plein consensus. 

La représentante de la Colombie, au nom également du Japon et de l’Afrique du Sud, a présenté le projet de résolution L.50, un texte sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects.  Ces armes ont un fort impact sur l’économie mondiale, que ce soit en raison du trafic de stupéfiants ou des drames qu’elles causent.  Aucun pays n’est à l’abri de ce fléau.  Par conséquent, il faut faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre fin à cette tragédie, a déclaré la représentante.  Le projet de résolution vise à favoriser le dialogue, a ajouté la représentante, qui a demandé l’adoption de la résolution sans mise aux voix. 

La représentante de la Colombie a aussi présenté le projet de résolution L.40 sur l’emploi, le stockage et la destruction des mines antipersonnel.  La grande majorité des nombreuses victimes sont des civils et la moitié sont des enfants, a-t-elle rappelé.  Nous connaissons les conséquences de ces mines antipersonnel sur la vie des civils, sur le développement durable.  Ce projet de résolution a pour but un monde exempt de mines antipersonnel, a ajouté la représentante, qui a répété qu’il y a lieu d’inclure les questions de genre dans l’élaboration de politiques en reconnaissant le rôle fondamental des femmes dans l’établissement de la paix.  Il y a de nombreux paragraphes et la représentante a fait part de sa surprise que certains fassent l’objet d’une mise au vote séparée. 

Explications de vote avant le vote

La République islamique d’Iran a annoncé qu’elle s’abstiendrait lors du vote du projet de résolution L.39 car le Traité sur le commerce des armes ne fait que servir les intérêts économiques et politiques des pays exportateurs d’armes auxquels il confère rang de priorité.  Le Traité n’interdit pas l’exportation d’armes vers des pays commettant des actes répréhensibles.  En conséquence, la République islamique d’Iran juge inacceptable l’appel à l’universalisation du Traité sur le commerce des armes, compte tenu également des profondes lacunes de ce document et du fait que certaines parties au Traité violent les dispositions sur les exportations de ces armes, comme Israël, qui s’en sert contre les Palestiniens.  Par ailleurs, l’Iran s’est joint au consensus sur le projet L.76 mais a tenu à préciser que sa position sur les mentions faites au Traité sur le commerce des armes reste la même que pour le projet de résolution L.39.  La République islamique d’Iran entend également s’abstenir sur le projet L.48 (Transparence dans le domaine des armements) car ce mécanisme n’est pas équilibré en raison même du rôle d’Israël.  Elle a regretté qu’après de nombreuses années d’application du registre des armes, il n’y ait pas eu d’inclusion des armes nucléaires et a appelé à une transparence dans le désarmement, s’agissant notamment des armes de destruction massive. 

L’Inde a annoncé son abstention sur le projet de résolution L.40 relative à la mise en œuvre de la Convention sur les mines antipersonnel.  L’Inde est déterminée à parvenir à leur élimination et est partie contractante aux divers engagements des États, en particulier ceux ayant de longues frontières.  Elle a respecté l’arrêt de la production des mines non détectables.  Concernant le déminage et l’accompagnement des victimes, l’Inde a apporté toute l’aide requise.  Par ailleurs, l’Inde entend s’abstenir sur le projet L.39 relatif au Traité sur le commerce des armes.  Elle a mis en place un mécanisme de contrôle très solide, tandis que son système d’exportations répond aux objectifs du TCA. 

L’Égypte, s’exprimant sur le projet de résolution L.39 (Traité sur le commerce des armes), a déclaré qu’elle a toujours été et continue d’être le chantre des efforts de lutte contre le trafic illicite d’armes.  L’Égypte a participé aux négociations et à l’adoption au TCA mais certains États continuent à le manipuler, ce qui entraîne une mise en œuvre sélective de ses dispositions.  D’autre part, le Traité néglige à dessein des bénéficiaires non étatiques comme les groupes armés.  L’Égypte s’abstiendra donc sur le projet de résolution L.39.  Elle s’abstiendra également sur les projets de résolution L.48, L.50 et L.76.  Elle émet par ailleurs des réserves sur le déséquilibre de l’instrument relatif aux mines terrestres et estime que la Convention d’Ottawa n’assure pas l’équilibre entre les aspects humanitaires et les besoins légitimes des États.  Enfin, l’Égypte a rappelé qu’elle comptait encore des millions de mines terrestres sur son territoire depuis la Seconde Guerre mondiale. 

La Fédération de Russie a dit respecter les efforts visant à réduire les effets des armes à sous-munitions sur les civils.  Néanmoins, le document L.68 (« Application de la Convention sur les armes à sous-munitions ») est ambigu et a été préparé à la hâte hors du cadre des Nations Unies et sans consultations.  La Fédération de Russie a dénoncé les dispositions discriminatoires de cette Convention, qui ne visaient qu’à autoriser certains types de sous-munitions de pointe, ce qui profite aux seuls États producteurs.  Le représentant a énuméré les lacunes du document, parmi lesquelles la possibilité de les utiliser.  Le problème ne découle pas de l’arme en elle-même mais bien de son utilisation inadéquate, a-t-il affirmé, en faisant part de son intention de voter contre le projet de résolution L.68. 

Cuba a annoncé son abstention sur le projet de résolution L.39, le Traité sur le commerce des armes affirmant que le Traité avait été approuvé par un vote prématuré, ce qui explique son caractère déséquilibré, favorable aux pays exportateurs d’armes.  Cuba estime que le Traité est incompatible avec le droit des pays d’acquérir des armes à des fins de légitime défense.  Cuba a aussi annoncé son abstention sur le projet de résolution L.40, estimant que tant que la politique d’hostilité des États-Unis à son encontre se poursuivra, Cuba ne pourra pas renoncer à l’utilisation à des fins défensives de mines antipersonnel pour protéger son intégrité territoriale. 

La Guinée équatoriale a indiqué qu’elle voterait en faveur de tous les projets de résolution relatifs aux armes classiques, tant le marché illicite de ces armes, « fabriqués dans d’autres pays que les nôtres », alimente la violence et l’instabilité en Afrique. 

Traité sur le commerce des armes

Aux termes du projet de résolution intitulé « Traité sur le commerce des armes » (A/C.1/77/L.39), adopté par 159 voix pour, zéro contre et 22 abstentions, l’Assemblée générale accueillerait avec satisfaction les décisions prises à la huitième Conférence des États parties au Traité sur le commerce des armes, tenue du 22 au 26 août 2022, le thème choisi par la présidence étant les contrôles après expédition dans le contexte du contrôle du détournement, et noterait que la neuvième Conférence se tiendra à Genève du 21 au 25 août 2023.  L’Assemblée générale saluerait les progrès que ne cessent d’accomplir, aux fins de la réalisation de l’objet et du but du Traité, le groupe de travail permanent sur l’application efficace du Traité, celui sur la transparence et l’établissement de rapports et celui sur l’universalisation.

L’Assemblée générale se déclarerait préoccupée par le fait que les contributions mises en recouvrement auprès des États n’ont pas été acquittées intégralement et par les répercussions que cette situation pourrait avoir sur les mécanismes relatifs à l’application du Traité, et prierait les États qui ne l’ont pas encore fait de s’acquitter, dans les meilleurs délais, des obligations financières que leur impose le Traité.

L’Assemblée générale prendrait note du document final de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, adopté en juillet 2022, et des éléments de complémentarité pouvant exister avec le Traité.  Elle accueillerait avec satisfaction la réunion inaugurale du Forum d’échange d’informations sur le détournement, qui s’est tenue le 24 août 2022, et encouragerait les États parties et les États signataires à recourir pleinement au Forum.

Votes séparés

Alinéa 9 du préambule: adopté par 150 voix pour, une voix contre (Fédération de Russie) et 14 abstentions

Alinéa 10 du préambule: adopté par 145 voix pour, zéro contre et 19 abstentions. 

Mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction

Aux termes du projet de résolution intitulé « Mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction » (A/C.1/77/L.40) et adopté par 170 voix pour, zéro contre et 16 abstentions, l’Assemblée générale, notant avec un profond regret que des mines antipersonnel continuent d’être employées dans des conflits dans diverses régions du monde, où elles causent des souffrances humaines et entravent le développement après les conflits, inviterait tous les États qui n’ont pas signé la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction à y adhérer sans tarder.  Elle exhorterait le seul État qui a signé la Convention mais ne l’a pas encore ratifiée à le faire sans tarder.  L’Assemblée générale demanderait de nouveau à tous les États et aux autres parties concernées de collaborer pour promouvoir, soutenir et améliorer les soins dispensés aux victimes des mines, de même que leur réadaptation et leur réinsertion sociale et économique, les programmes de sensibilisation aux dangers des mines et de réduction des risques liés à celles-ci, ainsi que l’enlèvement et la destruction des mines antipersonnel disséminées ou stockées dans le monde.

Lutter contre la menace que représentent les engins explosifs improvisés

Aux termes du projet de résolution intitulé « Lutter contre la menace que représentent les engins explosifs improvisés » (A/C.1/77/L.41), adopté sans vote, l’Assemblée générale, se déclarant vivement préoccupée par les ravages résultant de l’utilisation croissante d’engins explosifs improvisés par des groupes armés illégaux, des terroristes et d’autres utilisateurs non autorisés, qui touchent un grand nombre de pays et font des milliers de victimes, tant civiles que militaires, encouragerait vivement les États, s’il y a lieu, à élaborer et à adopter une politique nationale de lutte contre les engins explosifs improvisés.  Elle demanderait instamment aux États Membres d’appliquer pleinement toutes les résolutions de l’Organisation des Nations Unies sur la question, notamment celles qui portent sur les moyens visant à empêcher des groupes terroristes d’utiliser et d’acquérir des matériaux pouvant servir à fabriquer des engins explosifs improvisés.  L’Assemblée générale prierait instamment les États qui sont en mesure de le faire de contribuer au financement des divers domaines d’activité nécessaires pour traiter efficacement la question des engins explosifs improvisés.

Votes séparés

Alinéa 8 du préambule: adopté par 174 voix pour, zéro contre et 4 abstentions (Fédération de Russie, Iran, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée); 

Alinéa 9 du préambule: adopté par 174 voix pour, zéro contre et 4 abstentions (Fédération de Russie, Iran, République arabe syrienne et République populaire démocratique de Corée).

Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination

Aux termes du projet de résolution intitulé « Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination » (A/C.1/77/L.43), adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait à tous les États qui ne l’ont pas encore fait de prendre toutes les mesures voulues pour devenir parties le plus tôt possible à ladite convention et aux protocoles y afférents, tels que modifiés, afin que le plus grand nombre possible d’États y adhèrent sans tarder et que ces instruments deviennent à terme universels.  L’Assemblée générale soulignerait l’importance de l’universalisation du Protocole relatif aux restes explosifs de guerre.  Elle rappellerait les décisions adoptées par la sixième Conférence des Hautes Parties contractantes chargée de l’examen de la Convention, notamment poursuivre les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux à composition non limitée chargé d’étudier les questions ayant trait aux technologies émergentes dans le domaine des systèmes d’armes létaux autonomes, créé par la décision 1 de la cinquième Conférence d’examen des Hautes Parties contractantes à la Convention.  L’Assemblée générale demanderait à toutes les Hautes Parties contractantes de s’acquitter intégralement et rapidement de leurs obligations financières au titre de la Convention et des Protocoles y annexés, et soulignerait qu’il est essentiel que les femmes participent pleinement, sur un pied d’égalité avec les hommes, à la prise de décisions et à l’application de la Convention.

Transparence dans le domaine des armements

Aux termes du projet de résolution intitulé « Transparence dans le domaine des armements » (A/C.1/77/L.48), adopté par 158 voix pour, zéro contre et 24 abstentions, l’Assemblée générale, saluant le trentième anniversaire de la création du Registre, élément important de la contribution de l’Organisation à la paix et à la sécurité internationales, réaffirmerait qu’elle est résolue à veiller à la bonne tenue du Registre.  Elle demanderait aux États Membres, en vue de parvenir à une participation universelle, de fournir chaque année au Secrétaire général, le 31 mai au plus tard, les données et les informations demandées pour le Registre.  L’Assemblée générale inviterait également la Conférence du désarmement à envisager de poursuivre ses travaux sur la transparence dans le domaine des armements 

Vote séparé

Alinéa 7 du préambule: 135 voix pour, une contre (Eswatini) et 34 abstentions.

Le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects

Par son projet de résolution A/C.1/77/L.50, intitulé « Le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects », adopté sans vote, l’Assemblée générale, soulignerait que le problème du commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects nécessite de mener une action concertée aux niveaux national, régional et international en vue de prévenir, de combattre et d’éliminer la fabrication, le transfert et la circulation illicites de ces armes, et que leur prolifération incontrôlée dans de nombreuses régions du monde a des conséquences humanitaires et socioéconomiques très diverses et constitue une grave menace pour la paix, la réconciliation, la sûreté, la sécurité, la stabilité et le développement durable aux niveaux individuel, local, national, régional et international.

L’Assemblée générale demanderait à tous les États d’appliquer l’Instrument international visant à permettre aux États de procéder à l’identification et au traçage rapides et fiables des armes légères et de petit calibre illicites (Instrument international de traçage).

L’Assemblée générale souscrirait au document final de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, tenue à New York du 27 juin au 1er juillet 2022.  Elle confirmerait qu’elle a décidé d’organiser en 2024, sur une période de deux semaines (20 réunions), la quatrième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis dans l’exécution du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, qui sera précédée, au début de la même année, d’une réunion du comité préparatoire d’une durée de cinq jours (10 réunions).

L’Assemblée générale soulignerait qu’il importe d’appliquer le Programme d’action et l’Instrument international de traçage de manière intégrale et effective aux fins de la réalisation de l’objectif 16 et de la cible 16.4 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle insisterait sur la nécessité d’assurer une participation égale, pleine et effective des femmes à tous les mécanismes de décision et de mise en œuvre concernant le Programme d’action et l’Instrument international de traçage.

L’Assemblée générale déciderait d’établir, dans le cadre du budget ordinaire de l’Organisation des Nations Unies, un programme permanent de bourses de formation spécialisées concernant les armes légères et de petit calibre afin de renforcer les connaissances et compétences techniques et pratiques des fonctionnaires directement chargés de la mise en œuvre du Programme d’action et de l’Instrument international de traçage, en particulier dans les pays en développement, de façon à dispenser chaque année à partir de 2024, dans quatre régions, une formation en présentiel d’une durée de quatre semaines, à laquelle participeront 15 boursiers par région et qui sera précédée d’un cours préparatoire en ligne que chacun pourra suivre à son rythme.  Elle prierait le Secrétaire général de mettre en application la présente décision et de lui faire rapport à ce sujet à sa quatre-vingtième session, puis périodiquement pour en assurer le suivi.

L’Assemblée générale prierait le Secrétariat d’établir une analyse complète des progrès accomplis en ce qui concerne les tendances, difficultés et possibilités liées à la mise en œuvre du Programme d’action et de l’Instrument international de traçage, et de présenter cette analyse à la quatrième Conférence d’examen pour examen et suite à donner.

Vote séparé

Alinéa 23 du préambule: adopté par 150 voix pour, zéro contre et 22 abstentions. 

Problèmes découlant de l’accumulation de stocks de munitions classiques en surplus

Aux termes du projet de décision A/C.1/77/L.51, relatif aux problèmes découlant de l’accumulation de stocks de munitions classiques en surplus, adopté par 173 voix, zéro contre et 6 abstentions (Cuba, Fédération de Russie, Iran, Guinée équatoriale, Nicaragua et République arabe syrienne), l’Assemblée générale déciderait que le groupe de travail à composition non limitée sur les munitions classiques qu’elle a créé par sa résolution 76/233 du 24 décembre 2021 se réunira en 2023, outre sa session déjà de cinq jours à Genève, pour une session supplémentaire de cinq jours à New York pour achever ses travaux.  Elle prierait le Secrétaire général de fournir l’appui nécessaire à la tenue de cette session supplémentaire.

Information sur les mesures de confiance dans le domaine des armes classiques

Aux termes du projet de résolution intitulé « Information sur les mesures de confiance dans le domaine des armes classiques » (A/C.1/77/L.53), adopté sans vote et identique en substance à sa résolution A/RES/75/54, l’Assemblée générale engagerait les États Membres à continuer d’adopter des mesures de confiance dans le domaine des armes classiques et de les appliquer.

Elle inviterait les États Membres à communiquer au Secrétariat, à titre volontaire, des informations sur les mesures de confiance dans le domaine des armes classiques.  L’Assemblée générale engagerait les États Membres à instaurer un dialogue sur les mesures de confiance dans le domaine des armes classiques ou à poursuivre le dialogue en cours.

L’Assemblée générale se féliciterait que la base de données du Secrétariat contenant les informations communiquées par les États Membres continue de fonctionner, et prie le Secrétaire général de la tenir à jour et d’aider les États Membres qui en font la demande à mener des activités de renforcement des capacités et à organiser des séminaires, des cours et des ateliers visant à faire connaître les progrès accomplis dans ce domaine.

Application de la Convention sur les armes à sous-munitions

Aux termes du projet de résolution (A/C.1/77/L.68) intitulé « Application de la Convention sur les armes à sous-munitions », adopté par 145 voix pour, une voix contre (Fédération de Russie) et 35 abstentions, l’Assemblée générale se déclarerait vivement préoccupée par le nombre d’allégations, de rapports et d’éléments concrets portés à sa connaissance, selon lesquels des armes à sous-munitions seraient utilisées dans plusieurs parties du monde, feraient des victimes civiles et auraient d’autres conséquences empêchant la réalisation du développement durable.

L’Assemblée générale inviterait et encouragerait tous les États intéressés, l’Organisation des Nations Unies, les autres organisations et institutions internationales compétentes, les organisations régionales, le Comité international de la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales concernées à participer à la onzième Assemblée des États parties à la Convention sur les armes à sous-munitions, qui se tiendra à Genève du 11 au 14 septembre 2023, et à contribuer au programme des réunions à venir des États parties à la Convention.

L’Assemblée accueillerait avec satisfaction le dialogue engagé par le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, qui a présidé la dixième Assemblée des États parties à la Convention sur les armes à sous-munitions, avec les États non parties, notamment le dialogue entre militaires, en faveur de l’adhésion universelle à la Convention, et consciente des efforts entrepris en vue de trouver des solutions financières innovantes qui permettraient d’aider les pays touchés à s’acquitter des obligations que leur impose celle-ci.

Assistance aux États pour l’arrêt de la circulation illicite et la collecte des armes légères et de petit calibre

Aux termes du projet de résolution intitulé « Assistance aux États pour l’arrêt de la circulation illicite et la collecte des armes légères et de petit calibre » (A/C.1/77/L.76), identique en substance à la résolution adoptée l’an dernier par l’Assemblée générale, adopté sans vote, celle-ci engagerait le Secrétaire général à poursuivre son action dans le cadre de l’application de sa résolution 49/75 G en date du 15 décembre 1994 et des recommandations des missions consultatives des Nations Unies pour l’arrêt de la circulation illicite et la collecte des armes légères et de petit calibre dans les États concernés qui en feront la demande, avec l’appui du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique et en étroite collaboration avec l’Union africaine.

Elle engagerait la communauté internationale à appuyer la mise en œuvre de la Convention de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes.

Elle engagerait les pays de la sous-région sahélo-saharienne à faciliter le bon fonctionnement des commissions nationales qui luttent contre la prolifération illicite des armes légères et de petit calibre et, à cet égard, inviterait la communauté internationale à leur apporter son appui chaque fois que cela est possible.

Elle engagerait les organisations et associations de la société civile à collaborer aux efforts des commissions nationales dans la lutte contre la circulation illicite des armes légères et de petit calibre et la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.

Elle engagerait les organismes publics, les organisations internationales et la société civile à coopérer pour soutenir les programmes et les projets visant à lutter contre la circulation illicite des armes légères et de petit calibre et à les collecter.

Votes séparés

Alinéa 16 du préambule: adopté par 152 voix pour, zéro contre et 22 abstentions.

Explications de vote après le vote

L’Indonésie a déclaré s’être abstenue concernant la résolution sur les armes légères et de petit calibre.  Elle s’est déclarée pour la réglementation des armes légères et de petit calibre et a estimé que le Traité sur le commerce des armes (TCA) ne devrait pas générer de restrictions potentielles pour les pays en développement. 

Le Brésil a dit s’être abstenu lors du vote sur la résolution concernant les armes à sous munitions.  Le Brésil n’a pas pris part au processus d’Oslo, comme on l’appelle, et il estime que des lacunes jonchent le processus.  De plus, l’efficacité de la Convention est minée par l’article connu comme l’article de l’interopérabilité. 

L’Arménie a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.39 sur le Traité sur le commerce des armes.  Elle est partisane d’un régime contraignant permettant de prévenir le détournement des armes à des fins de violation des droits humains.  Concernant les préambules et principes de la résolution, l’Arménie réitère les principes d’égalité de droit.  Le Traité peut être interprété comme limitant l’accès à la légitime défense. 

La République de Corée s’est abstenue concernant les projets de résolution sur l’application de la Convention de l’interdiction de la production des mines antipersonnel et sur la Convention sur les armes à sous-munitions, bien que déterminée à lutter contre les souffrances liées au mines antipersonnel.  La République de Corée est partie à des conventions sur les armes classiques, si bien qu’elle participe déjà à cette lutte.  De même, sur le plan interne, le Gouvernement continue son déminage au niveau national et il a prêté assistance pour déminer à des pays amis.  S’agissant du projet de résolution sur la Convention des armes à sous munition, la République de Corée partage les conclusions s’agissant des effets environnementaux et humains de ces armes.  Mais, eu égard à la position particulière de la péninsule de Corée, une directive sur les armes à sous-munitions a été prise en 2008, qui s’ajoute à des dispositifs de sécurité. 

L’Inde, prenant la parole sur le projet de résolution L.48, a estimé que la transparence est essentielle pour assurer la confiance entre les États.  Les mesures visant à promouvoir la transparence dans le domaine des armes devrait être adoptées par tous les États, sans pour autant négliger le droit à la légitime défense.  En outre, elle a appuyé le registre sur les armes classiques. 

Chypre a dit s’être abstenue concernant la résolution L.68 sur les armes à sous-munitions.  Chypre espère que la situation particulière de l’île sera réglée dans un futur proche pour qu’elle puisse voter en faveur du texte à l’avenir. 

Le Mexique a dit avoir voté pour la résolution L.39 sur le Traité sur le commerce des armes.  Il a dit appuyer le système mis en place sur le commerce des armes.  Il aurait toutefois aimé que le texte inclue un appel aux entreprises qui fabriquent ces armes. 

Les États-Unis ont expliqué s’être abstenus sur le projet de résolution L.40 (Convention d’Ottawa), cette résolution n’étant applicable que par les États parties à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel.  Les États-Unis déploient des efforts importants pour, à terme, adhérer à ladite convention. 

Le Pakistan a indiqué que sa délégation avait appuyé le projet de résolution sur le Traité sur le commerce des armes, tout en signalant les insuffisances du Traité en ce qui concerne les pays exportateurs d’armes et la prise en compte des souffrances des victimes, y compris dans les pays occupés illégalement.  Le Pakistan s’est abstenu sur le projet de résolution L.40, tenant à ce que les mines terrestres qu’il doit utiliser pour sa défense aux frontières n’occasionnent aucune souffrance civile.  Le Pakistan s’est également abstenu sur le projet de résolution L.68.

La République islamique d’Iran a indiqué s’être abstenue sur le projet de résolution L.40, la Convention d’Ottawa ne tenant pas assez compte des besoins militaires de nombreux pays disposant de ressources limitées pour protéger leur territoire.  La République islamique d’Iran s’est également abstenue sur le projet de résolution L.41 et sur le projet de résolution L.68.  Concernant ce dernier texte, la République islamique d’Iran n’est pas signataire de la Convention sur les armes à sous-munitions, qui a été négociée en dehors de l’ONU.

Droits de réponse

La représentante de la République arabe syrienne a demandé au représentant d’Israël d’adhérer aux accords qu’il demande à d’autres États de respecter.  Elle a également rejeté toutes les allégations infondées proférées par les États-Unis contre son pays et conseillé à ce pays de détruire ses armes de destruction massive.  À la Türkiye, elle a demandé de retirer ses forces du territoire syrien et de cesser de soutenir des groupes terroristes dirigés contre son pays. 

Le représentant de la Fédération de Russie a notamment invité les Occidentaux à cesser d’accuser son pays de mener des campagnes de désinformation sur la Syrie, eux qui violent le cadre réglementaire de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et en politisent le fonctionnement. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: alertant sur le sort des Ukrainiens, le Haut-Commissaire pour les réfugiés appelle à ne pas oublier pour autant les nombreuses autres crises

Soixante-dix-septième session   
41e & 42e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4363

Troisième Commission: alertant sur le sort des Ukrainiens, le Haut-Commissaire pour les réfugiés appelle à ne pas oublier pour autant les nombreuses autres crises

L’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie a entraîné l’une des crises de déplacement les plus rapides au monde depuis la Seconde Guerre mondiale, a alerté aujourd’hui le Haut-Commissaire pour les réfugiés devant la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles ce mardi.  Évoquant la situation très préoccupante des Ukrainiens restés dans le pays, M. Filippo Grandi a cependant exhorté à ne pas faire l’impasse sur les nombreuses autres crises dans le monde, avant d’alerter sur les difficultés financières inédites du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR). 

Quatorze millions de personnes ont dû fuir leur foyer en Ukraine à la suite de l’invasion russe, a signalé M. Grandi au début de son exposé, notant par ailleurs que le monde compte plus de 103 millions de personnes déplacées.  La réponse aux réfugiés en Europe a été excellente, a-t-il estimé, affirmant que cela avait donné tort aux nombreux politiciens qui affirmaient que l’opinion publique ne soutiendrait pas l’accueil des réfugiés.  Celui-ci est ainsi possible, même en grand nombre, et surtout lorsqu’il y a une approche partagée, a-t-il observé.  Le Haut-Commissaire a également mis l’accent sur le sort des personnes qui demeurent à l’intérieur de l’Ukraine, confrontées à la destruction jour après jour des infrastructures civiles et menacées par le froid de l’hiver. 

Mais attention à ne pas détourner le regard des nombreuses autres crises en cours en se concentrant sur l’Ukraine, a mis en garde M. Grandi qui s’est notamment inquiété de l’aggravation de la situation au Tigré, en Éthiopie qui a causé la fuite en six mois de plus de 850 000 personnes; des centaines de milliers de déplacés au Sahel; des 2 millions de déplacés au Burkina Faso ou encore 1 million de déplacés au Myanmar depuis le coup d’État des militaires l’an dernier.  De même, il a appelé à ne pas oublier aussi les souffrances humaines causées par les changements climatiques, encourageant à faire davantage face à l’urgence climatique, surtout à l’approche de la COP27 à Charm el-Cheikh. 

La question des financements a aussi été abordée par M. Grandi, d’autant que la guerre en Ukraine a augmenté le budget du Haut-Commissariat de plus d’un milliard de dollars.  Ainsi, malgré la générosité des donateurs, il a déploré un déficit de 700 millions de dollars dans un certain nombre d’opérations essentielles.  Leur arrêt causerait de graves difficultés aux réfugiés, a-t-il prévenu, précisant que le HCR n’a pas connu ce genre de difficultés financières depuis des années.  Son intervention devant la Troisième Commission a donc été l’occasion de lancer un appel aux États pour apporter des contributions supplémentaires afin d’éviter des coupes douloureuses. 

Une présentation qui a donné lieu à de nombreuses réactions des délégations qui ont partagé, pour certaines, les inquiétudes de M. Grandi face au manque de moyens et de financements du HCR.  La question du partage des responsabilités a également été évoquée, l’Indonésie rappelant, par exemple, que 86% des réfugiés du monde vivent dans des pays en développement, tandis que l’Égypte s’est demandé comment établir un partage plus équitable, relevant qu’un nombre limité de pays assume un fardeau migratoire sans cesse plus lourd. 

La générosité avec laquelle le monde a accueilli les réfugiés ukrainiens ne saurait rester une exception mais doit devenir la nouvelle norme internationale, a estimé le Canada, tandis que le Liechtenstein s’est inquiété des violations du principe du non-refoulement. 

Auparavant, les États Membres ont dialogué avec la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.  S’intéressant au recours croissant aux sociétés privées de sureté maritime, Mme Sorcha Macleod a fait état d’une utilisation croissante de navires maritimes pour transporter des armes à des fins mercenaires, ainsi du transfert maritime de recrues mercenaires forcées depuis certains pays, alertant d’un possible lien avec la traite des êtres humains. 

La Présidente-Rapporteuse a également dit avoir reçu des informations sur l’usage non réglementé et disproportionné de la force en mer, décriant en outre l’absence de reddition de comptes pour les violations des droits humains, qu’elles soient perpétrées par des mercenaires ou des sociétés privées de sûreté maritime, ainsi que l’absence de recours pour les victimes.  Il est donc impératif que les États comblent ces lacunes en réglementant efficacement la sphère maritime, a-t-elle appelé. 

À la suite du dialogue interactif, les États Membres ont conclu leur discussion générale sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associé.  À cette occasion, plusieurs délégations, notamment africaines, ont apporté leur soutien à la Chine en rappelant l’importance du principe de non-ingérence dans les affaires internes d’un autre État, en particulier sur la situation dans le Xinjiang. 

Au cours de cette séance, les délégations ont par ailleurs entamé leur discussion générale sur les réfugiés, les rapatriés et les déplacés.

La Troisième Commission reprendra ses travaux demain, mercredi 2 novembre, à partir de 10 heures. 

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE ET DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION

Déclaration liminaire suivie d’un dialogue interactif

Exposé

Mme SORCHA MACLEOD, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d'empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a indiqué continuer à recevoir des allégations de violations des droits humains et du droit humanitaire découlant des activités de mercenaires ou d’acteurs liés, ainsi que de sociétés militaires et de sociétés de sécurité privées.  Présentant son rapport thématique, elle a rappelé que la piraterie est depuis longtemps l’un des principaux moteurs du recours croissant aux sociétés privées de sûreté maritime.  En outre, l’utilisation de navires pour la traite des êtres humains, la migration irrégulière, le trafic de drogue et le trafic d’espèces sauvages et de produits dérivés suscite des inquiétudes en matière de sécurité, a-t-elle relevé.  Si elle a reconnu que le recours à ce type de sociétés peut assurer un transit maritime plus sûr, elle a cependant rappelé qu’il a un cout pour les droits humains des marins, du personnel de sécurité privé et d’autres personnes.  

Elle a indiqué que le Groupe de travail a reçu des informations sur l’usage non réglementé et disproportionné de la force en mer, sur les violations du droit à la vie, à la liberté et à l’intégrité physique, ainsi que sur les violations des garanties d’une procédure régulière et du droit du travail.  Ces violations s’intensifient, a-t-elle déploré, en raison de la concurrence accrue entre les sociétés, qui s’accompagne d’une baisse de la qualité des services de sécurité privée fournis et par conséquence, d’effets négatifs sur les droits humains.  La faiblesse des régimes de contrôle et de formation, la prolifération des armes et le manque de suivi et de surveillance du secteur contribuent également à ces violations, a-t-elle ajouté.  Ainsi, elle a exhorté à adopter une réglementation et une surveillance internationales et nationales cohérentes à cet égard, soulignant que les États du pavillon, les États côtiers et les États du port jouent un rôle réglementaire particulièrement important.  

La Présidente-Rapporteuse a ensuite mis en garde contre la tendance troublante et évolutive à l’hybridation des services de sécurité en mer, où des acteurs publics et privés se combinent pour assurer la sécurité maritime, ce qui peut poser des problèmes particuliers en matière de suivi, de contrôle et de responsabilité.

En outre, si l’abus du droit du travail du personnel de sécurité privé en mer est courant, toute initiative législative doit également porter sur les violations des droits humains en mer de manière plus générale, a-t-elle indiqué, estimant qu’un cadre législatif et réglementaire efficace doit garantir un accès à la justice et aux recours pour les victimes.  

Mme MacLeod s’est par ailleurs inquiétée des informations faisant état d’une utilisation croissante de navires maritimes pour transporter des armes à des fins mercenaires, ainsi que du transfert maritime de recrues mercenaires forcées depuis certains pays, alertant d’un possible lien avec la traite des êtres humains.  Également préoccupée par l’opacité qui entoure l’utilisation de navires pour soutenir des activités liées au mercenariat, elle a appelé à renforcer la collecte de données et la recherche dans ce domaine.  Elle a aussi décrié l’absence de reddition de compte pour les violations des droits humains, qu’elles soient perpétrées par des mercenaires ou des sociétés privées de sûreté maritime, ainsi que l’absence de recours pour les victimes.  Il est donc impératif que les États comblent ces lacunes en réglementant efficacement la sphère maritime, a-t-elle appelé.  

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, l’Union européenne a estimé que la directive de la sécurité dans les ports offre un cadre législatif pour contrer les menaces et assurer le meilleur niveau de sécurité possible pour le transport maritime.  Elle a également exhorté les États Membres à soutenir le Document de Montreux qui renvoie les États à leurs obligations en matière de droits humains et du droit international humanitaire en ce qui concerne les opérations des entreprises militaires et de sécurité privées pendant les conflits armés.

Prenant la parole, Cuba a accusé les États-Unis d’encourager l’emploi de mercenaires pour intervenir dans les affaires interne des pays et déstabiliser des gouvernements démocratiquement élus.  La Chine, s’est, pour sa part, inquiétée du nombre important d’entreprises de sécurité opérant en mer, et appelé à surveiller leur activité aussi bien sur terre qu’en mer, les pressant à se conformer à la législation. De plus, la délégation a regretté l’absence de transparence et de responsabilisation en matière de sécurité et de défense, accusant ses entreprises de tuer des civils non armés et cela dans l’impunité.  Il faut lancer des enquêtes et identifier les auteurs de ses actes, a-t-elle ajouté.

Répondant à ces questions et remarques, la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur l'utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a fait observer que les entreprises de sécurité et de défense privées peuvent mener des opérations de sécurité légitime, tout en violant le droit humanitaire dans d’autres contextes.

Lorsque des mercenaires sont déployés dans le contexte d’un conflit, plusieurs phénomènes se produisent, et aucun n’est bon pour les civils : le conflit a tendance à s’inscrire dans la durée, le niveau de violence augmente, et dans certains cas, elle cible la population civile, victime de massacres, torture, ou violences sexistes. Fait aggravant, les mercenaires agissent impunément, a-t-elle ajouté. Elle a exhorté les États Membres à entériner le Document de Montreux, notant qu’en mer, l’accès à la justice est limité et il est d’autant plus difficile de contrôler les violations des droits humains, qui sont pourtant des plus graves.  

Elle a déploré que seuls 37 États sont partie à la Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l’instruction de mercenaires alors que l’application de ce texte permettrait de pénaliser les activités des mercenaires, via les juridictions nationales.  Elle a également appelé les États à élaborer un instrument international juridiquement contraignant qui sanctionne le mercenariat sur terre comme sur les mers.

Suite et fin de la discussion générale

Mme AMINATA LY DIOP (Sénégal) a appelé à combattre tous les actes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie, tout en constatant que ces phénomènes sont en croissance et touchent « à des degrés disproportionnés » les personnes d’ascendance africaine, les peuples autochtones, les minorités linguistiques, ethniques et religieuses ainsi que les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés.  Pour la représentante, une politique d’éradication des phénomènes sociaux négatifs ne devrait pas uniquement reposer sur des dispositifs coercitifs renforcés mais devrait accorder une importance capitale à la sensibilisation et au brassage des peuples et des cultures, afin de briser la « spirale des préjugés » sur l’appartenance raciale, ethnique, religieuse et culturelle.  Réitérant l’appui de son pays aux efforts internationaux de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, elle a cependant estimé que les différences raciales, culturelles et cultuelles ne doivent sous-tendre ni la haine ni le rejet de l’autre, mais plutôt renforcer et promouvoir les liens d’humanisme et d’amitié.

Mme PATRICIA CHAND (Fidji) a indiqué qu’il y a à peine 10 ans, le système politique du pays était corrompu par la notion que la valeur d’un vote dépendait de celui qui l’avait émis.  Depuis, la Constitution accorde une valeur égale à tous les votes des citoyens des Fidji et protège le droit des peuples autochtones, notamment dans le domaine foncier.  Et le système éducatif assure l’enseignement du Fidjien, du Hindi et des langues iTaukei.  Le pays doit cependant lutter contre les plateformes de médias sociaux qui propagent le racisme et l’intolérance.  Nous ne pouvons pas se laisser se propager les algorithmes qui récompensent la haine et le ressentiment, a-t-elle dit, appelant à se montrer plus proactif pour évaluer comment l’intelligence artificielle risque de déchirer davantage les sociétés.  La représentante a également alerté que les changements climatiques aggravent les inégalités et a appelé à établir un système financier pour protéger les droits des déplacés et des réfugiés climatiques.

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé que le racisme repose sur la croyance déformée selon laquelle une personne est supérieure à une autre, ce qui contraste fortement avec le principe fondamental selon lequel « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ».  Si le racisme manifeste est facilement identifié et condamné à juste titre, les préjugés raciaux, eux, prennent souvent des formes plus subtiles, notamment dans les politiques, les pratiques et les attitudes sur le marché du travail, ainsi que dans les systèmes d’éducation et de justice pénale, a constaté l’Observateur, selon lequel les réponses à ces phénomènes doivent prendre comme point de départ un engagement renouvelé envers une éducation de qualité.  Attirant par ailleurs l’attention sur le sort des migrants, des réfugiés et de leurs familles, il a regretté que ces personnes souvent issues d’un milieu culturel différent continuent de faire l’objet d’attitudes racistes et xénophobes.  Une vigilance accrue s’impose face à de telles attitudes, qui ne font qu’aggraver la souffrance et l’angoisse de ces hommes, femmes et enfants qui ont quitté leur foyer en quête de paix, de prospérité et de sécurité, a-t-il plaidé, estimant en conclusion que la lutte contre le racisme exige une prise de conscience non seulement enracinée dans la vérité et la dignité humaine, mais aussi dans la famille, première éducatrice des valeurs humaines, et cultivée à l’école et dans la société. 

M. NNAMDI OKECHUKWU NZE (Nigéria) a indiqué s’opposer à toute discrimination, qu’elle soit à l’encontre des Nigérians, des Africains ou d’autres personnes.  Nous avons beaucoup sacrifié pour lutter contre le colonialisme et l’apartheid en particulier en Afrique, a-t-il confié.  Affirmant continuer à subir des attaques racistes et xénophobes ces dernières années, il a indiqué préférer pourtant le dialogue à la confrontation.  Il a déploré que les objectifs de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine n’ont pas encore été atteints et a appelé la communauté internationale à unir ses forces pour lutter contre les discriminations à l’égard des personnes d’ascendance africaine, en particulier les migrants qui, s’est-il alarmé, vivent une situation rappelant l’horreur de l’esclavage.  Enfin, il a réaffirmé son soutien au Pacte mondial sur les migrations qui représentent les efforts collectifs en ce domaine. 

M. WEERASEKARAGE CHATHURA RAMYAJITH WEERASEKARA (Sri Lanka) a rappelé que la Constitution de son pays stipule qu’aucun citoyen ne doit faire l’objet de discrimination fondée sur la race, la religion, la langue, la caste, le sexe, l’opinion politique ou le lieu de naissance.  À cette aune, il a jugé que toute doctrine de supériorité raciale est scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste.  Le représentant a ensuite constaté que les plateformes en ligne sont utilisées pour prôner la haine et promouvoir le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  Dénonçant les formes de terrorisme et de violence que véhicules ces plateformes, il a appelé les nations à renforcer leurs cadres législatifs nationaux afin d’y faire face.  Il a par ailleurs indiqué que son gouvernement maintient une politique de tolérance zéro à l’égard de tout acte de haine ou d’intolérance religieuse et a pris des mesures pour les combattre, notamment la loi de 2007 sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  En tant que pays multiethnique, multireligieux et multiculturel, le Sri Lanka a aussi adopté le concept de « vivre et laisser vivre », guidé par les principes bouddhistes d’amour bienveillant, de pardon et de compassion, a encore souligné le délégué, qui a rappelé que des personnes qui étaient autrefois connues comme des acteurs non étatiques ont été réhabilitées afin qu’elles puissent, elles aussi, contribuer au développement du pays.  Il a toutefois regretté que certains attisent la haine contre son pays, comme en témoignent selon lui les récents troubles civils alimentés et financés depuis l’intérieur et l’extérieur du Sri Lanka.

M. DANIEL AGYEKUM NSOWAH (Ghana) a relevé que la recrudescence des conflits à l’échelle mondiale continue d’aggraver les malheurs des réfugiés et des migrants en les rendant plus vulnérables à diverses formes de racisme et d'intolérance. Il a également déploré le rôle d’autres facteurs aggravants tels que la pandémie de COVID-19 qui, entrainant une utilisation croissante de plateformes en lignes, a exposé de nombreux groupes vulnérables à diverses formes de discrimination. 

Il a réaffirmé son engagement à mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban ainsi que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Ces instruments sont indispensables pour progresser vers une réponse systémique au racisme systémique, a-t-il estimé, encourageant les États qui ne l’ont pas encore fait à adopter la Convention.

En outre, il a déploré l’augmentation des discours de haine, la stigmatisation et l’intolérance qui y est associée, via des plateformes en ligne.  Il a également insisté sur l’importance de la coopération entre les États, le système des Nations Unies et les organisations régionales ainsi qu’avec les parlements nationaux, la société civile et le secteur privé.  Enfin, il a appelé au respect du principe de souveraineté des États, soulignant que l’évaluation des droits humains doit être impartiale.  Malheureusement ce n’est pas le cas, a-t-il déploré, jugeant « pas très orthodoxe »” la façon dont le rapport sur la situation au Xinjiang en Chine a été élaboré.  

M. DAHMANE YAHIAOUI (Algérie) a estimé que la Déclaration et le Programme d’action de Durban permettent de faire face de façon efficace et collective au racisme et phénomènes associés, et incluent des solutions adéquates pour les victimes.  Il a fait part de son appui aux peuples qui luttent pour leur émancipation politique et leur indépendance économique, précisant que le respect du droit des peuples à l’autodétermination est un principe directeur de la politique étrangère algérienne.  Il a également soutenu les efforts du Secrétaire Général et des organes principaux des Nations Unies qui œuvrent en faveur du droit des peuples à l’autodétermination.

Mme OLIMPIA RAQUEL OCHOA ESPINALES (Nicaragua), a indiqué que la révolution populaire sandiniste de 1979 et la Constitution de la République du Nicaragua de 1987 ont reconnu pour la première fois le caractère multiethnique et pluriculturel de la nation nicaraguayenne, jetant les bases de l’approbation du statut d’autonomie des régions autonomes.  Elle a relevé que le racisme et la discrimination ont des manifestations multiples et complexes, et sont particulièrement préjudiciables aux filles, aux garçons, aux femmes, aux personnes LBGT et aux personnes handicapées qui appartiennent à un groupe ethnique ou racial particulier.  Elle a fait savoir que le Gouvernement de réconciliation et d’unité nationale a établi des lois et des politiques garantissant la protection et la participation effective des groupes les plus vulnérables.  En conséquence, le Nicaragua est actuellement le pays le plus équitable d’Amérique latine et des Caraïbes en termes de participation politique, sociale et économique des femmes, s’est enorgueillie la représentante.  Elle a par ailleurs appelé à respecter les affaires intérieures des États, sans recourir à l’intervention étrangère ou à la pression extérieure, et a défendu la Chine face à l’ingérence dont elle serait victime en matière de questions relatives aux droits humains. 

Mme EUNICE TEO (Singapour) a indiqué que Singapour a tiré les enseignements de la période de tensions communautaires et de violentes émeutes raciales qui a précédé son indépendance, citant notamment les dangers de la méfiance et des divisions intercommunautaires.  Aujourd'hui, Singapour a « édifié une société très diverse mais harmonieuse », s’est-elle enorgueillie.  Environ 15 % des mariages entre Singapouriens sont interethniques, et 29 % sont transnationaux, a détaillé la diplomate, énumérant les différentes religions observées dans son pays, dont le bouddhisme, le christianisme, l’hindouisme, l’islam, le judaïsme et le taoïsme.  De même, il n’est pas permis d’exploiter la liberté d'expression pour dénigrer d'autres groupes et la loi sur le maintien de l’harmonie religieuse veille à ce que les dirigeants ou les groupes religieux n’incitent pas à des sentiments d’hostilité pour des raisons religieuses, ou n’abusent pas de la religion à des fins politiques.

M. NICHOLAS HILL (États-Unis) est revenu sur les efforts déployés par son pays en faveur de l’égalité raciale, sur le territoire national comme à l’international.  « Notre force c’est notre diversité » s’est félicité le délégué, ajoutant que les mesures nationales pour favoriser l’accès des communautés les plus vulnérables à la santé ou à la justice environnementale sont en accordance avec la politique étrangère des États-Unis.  Il a fait part de son appui à l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine, et a appelé tous les États Membres de se joindre aux États-Unis dans leur combat international contre la xénophobie.

M. ALEJANDRO GONZÁLEZ BEHMARAS (Cuba) s’est dit très préoccupé par le fait que certains pays développés continuent de mépriser la Déclaration de Durban, ainsi que du fait qu’aux États-Unis, on continue de justifier la promotion d’idées racistes et suprématistes au sein de l’appareil politique.  Il a jugé inconcevable qu’un pays comme les États-Unis qui se présente comme symbole du respect des droits humains n’arrive pas à résoudre le problème du racisme systémique dont souffrent les minorités.  Il a relevé que l’autodétermination continue d’être un rêve impossible pour de nombreux peuples soumis à l’occupation étrangère ou au colonialisme et que certains pays se voient imposer des mesures unilatérales coercitives.  C’est parce qu’on a osé exercer ce droit que les États-Unis nous ont imposé le blocus financier et économique le plus long de l’histoire, a-t-il dénoncé, déplorant une tentative d’asphyxier le peuple cubain

Mme AYSE INANÇ ÖRNEKOL (Türkiye) s’est dite profondément préoccupée par la montée inquiétante du racisme, de la xénophobie, de l’islamophobie, de l’antisémitisme et des discours de haine dans le monde.  À cet égard, elle a salué l’adoption de la résolution consacrant le 15 mars « Journée internationale de lutte contre l'islamophobie ».  Elle a également estimé que l’Alliance des civilisations des Nations unies, menée par la Türkiye et l’Espagne, est un outil précieux pour encourager une meilleure compréhension interculturelle et favoriser une atmosphère de respect mutuel.   La représentante a aussi mis en avant le Processus d’Istanbul qui vise à contribuer aux efforts de lutte contre les diverses formes d’extrémisme, de haine et de discrimination raciale.  

Mme ELAINE CRISTINA PEREIRA GOMES (Brésil) a rappelé que son pays, qui abrite la plus grande population d’ascendance africaine au monde, s’est engagé à lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, et à rechercher la justice et l’égalité raciales, conformément à la Déclaration et au Programme d’action de Durban.  Depuis 1988, a-t-il relevé, la Constitution brésilienne considère le racisme comme un crime soumis ni à caution ni à prescription.  Le Brésil a par ailleurs promulgué en 2010 une loi qui définit l’architecture de la lutte contre le racisme et de la promotion de l’égalité raciale dans le pays, a ajouté le représentant, faisant également état du lancement en 2021 d’initiatives destinées à protéger les droits des personnes d’ascendance africaine, notamment l’éducation aux droits humains des agents des forces de l’ordre et des programmes de protection des jeunes victimes de violence.  Afin d’offrir plus d’opportunités à ces personnes, le pays aussi a adopté un vaste système d’action positive et de quotas dans les universités publiques et la fonction publique, a encore indiqué le délégué.  Enfin, il a réitéré le soutien du Brésil aux négociations sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine et a invité les autres États à faire de même.

Mme ELIZABETH NORALMA MENDEZ GRUEZO (Équateur) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.  Elle a indiqué que son gouvernement a mis en place des politiques publiques afin de réaliser les objectifs prévus par la Décennie.  Rappelant d’autre part la visite du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine en Équateur en octobre 2020, la déléguée s’est félicitée que le Groupe ait reconnu les efforts consentis par l’État équatorien, notamment en ce qui concerne l’accès à la justice.  Les personnes d’ascendance africaine ayant les indicateurs socioéconomiques les plus faibles au sein de la population équatorienne, elle a jugé essentiel de concevoir des politiques encourageant le bien-être et la dignité des Afro-Équatoriens.

Mme NARMIN AHANGARI (Azerbaïdjan) s’est élevée contre la propagande de haine, les discours de suprématie ethnique et les politiques visant à semer la dissension entre les peuples.  Elle a également dénoncé les tentatives d’utilisation du passé comme d’une arme pour transformer l’histoire. 

L’Azerbaïdjan est un pays multiethnique, où tous les citoyens et résidents jouissent pleinement de leurs droits humains et libertés de façon égale et sans discrimination, a souligné la déléguée, rappelant que son pays a récemment présenté son rapport dans le cadre de l’Examen périodique universel et agit pour mettre en place des lois interdisant la discrimination raciale et l’incitation à la violence.  L’Azerbaïdjan s’emploie aussi à préserver son patrimoine historique et culturel, notamment dans les territoires libérés où il reconstruit la communauté multiethnique et diverses qui existait avant l’occupation, a expliqué la représentante.  En conclusion, elle a assuré qu’en dépit des conséquences de la guerre menée contre l’Arménie et des atrocités et souffrances subies par son peuple ces 30 dernières années, l’Azerbaïdjan compte poursuivre ses efforts pour promouvoir l’inclusivité et le multiculturalisme.

Mme EKATERINE LORTKIPANIDZE (Géorgie) a déclaré que la signalisation des crimes commis sur la base de l’intolérance constitue l’un des éléments les plus importants dans la lutte contre la discrimination.  Elle a évoqué la signature, au niveau national, d’un mémorandum de coopération pour la création d’une base de données conjointe des crimes commis sur la base de l’intolérance.  Elle s’est inquiétée de la situation « alarmante » des droits humains dans les régions géorgiennes d'Abkhazie et de Tskhinvali sous occupation russe.  Elle s’est élevée contre la discrimination fondée sur des motifs ethniques, citant la torture et d'autres formes de mauvais traitements, les enlèvements, les restrictions imposées à la liberté de mouvement et la violation du droit à recevoir un enseignement dans sa langue maternelle dans les deux régions géorgiennes occupées.

Mme HALLEY CHRISTINE YAPI NÉE BAH (Côte d’Ivoire) a appelé à s’attaquer aux causes profondes du racisme et à mettre en place des mesures pour lutter contre l’ignorance qui entretient l’illusion de la race supérieure ainsi que l’intolérance et l’utilisation des médias sociaux comme vecteur de messages haineux et suprématistes.  À cet égard, la mise en place de mécanisme de reddition des comptes, y compris au niveau international, de réparations ainsi que d’assistance judiciaire et psychologique pour les victimes sont indispensables.  Par ailleurs, à moins de deux ans du terme de la Décennie internationale des peuples d’ascendance africaine, l’appel du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine à reconnaitre et à payer des réparations pour les siècles de préjudices causes à celles-ci par l’esclavage et le colonialisme demeure pertinent, a-t-il estimé.

M. KIM NAM HYOK (République populaire démocratique de Corée) s’est dit profondément préoccupé par la situation « désastreuse » des droits humains dans plusieurs pays occidentaux, à commencer par les États-Unis, où le droit à la vie est, selon lui, gravement violé et malmené en raison du racisme et de la discrimination raciale généralisés.  Dans ce pays, la violence policière a coûté la vie à des milliers de Noirs américains innocents et le nombre de personnes tuées par la police depuis 2020 s'élève à plus de 2 500, a-t-il poursuivi, dénonçant un climat de peur pour les non-blancs et les minorités.  Face à cette « tragédie », le représentant a exigé que le mécanisme international des droits de l’homme mène une enquête approfondie sur les violations généralisées commises par les États-Unis et d’autre pays occidentaux et leur demande des comptes pour « crimes contre l’humanité ».  Il a d’autre part dénoncé les tentatives de certains pays d’utiliser à mauvais escient les questions liées au Xinjiang et à Hong Kong pour s’immiscer dans les affaires intérieures de la Chine.  Nous apprécions les efforts et les réalisations de la Chine dans le domaine des droits de l’homme, a indiqué le délégué, réaffirmant le soutien de la RPDC à la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale de ce pays.

Mme MARISKA DWIANTI DHANUTIRTO (Indonésie) a fait valoir que chaque État a le droit de mener ses propres politiques en vue de protéger sa population.  Elle a également estimé que le travail des Nations Unies, et notamment de la Troisième Commission de l’Assemblée générale, devrait s’appuyer sur le principe essentiel de l’impartialité.  De plus, les efforts multilatéraux devraient donner la priorité à l’assistance à fournir aux États pour les aider à promouvoir les droits humains, a ajouté la déléguée.  Enfin, elle a appelé les États Membres à une meilleure compréhension mutuelle, condition sine qua non, selon elle, du développement des droits humains à l’échelle mondiale.

Mme JOSELYNE KWISHAKA (Burundi) a dit apprécier l’engagement constructif, les efforts et les contributions de la Chine dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent au Xinjiang.  Il a estimé que l’évaluation des préoccupations en matière de droits humains au Xinjiang par le Haut-Commissariat des droits de l’homme sans, ni le mandat du Conseil des droits de l’homme, ni le consentement du pays concerné constitue une violation grave des principes d’universalité́, d’objectivité́, de non-sélectivité et de non-politisation.  Les questions liées au Xinjiang, à Hong Kong et au Tibet sont des matières relevant purement et simplement des affaires intérieures de la Chine, a souligné le représentant qui a noté que la mise en œuvre par la Chine de « un pays, deux systèmes » dans la région administrative spéciale de Hong Kong a produit des résultats positifs pour le retour de la paix et de la stabilité́.

Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a rappelé la « longue tradition » de son pays en matière de tolérance, de coexistence, de respect de l’autre et de promotion du dialogue interculturel et interreligieux.  Elle a également vanté la politique d’accueil des migrants au Maroc, relevant que ces personnes ont pu bénéficier d’une vaccination gratuite contre la COVID-19.  Le Maroc, a-t-elle poursuivi, a été à l’origine de plusieurs documents onusiens et internationaux dédiés à la lutte contre la xénophobie, parmi lesquels le Plan d’action de Rabat sur l’interdiction de l’appel à la haine nationale, raciale ou religieuse.  La représentante a ajouté que son pays a toujours attribué à sa société civile un rôle de partenaire dans la promotion des droits humains ainsi qu’un rôle de veille en vue de dénoncer les atteintes faites à ces droits fondamentaux.

M. ALSERKEEK (Libye) a déploré qu’en dépit de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, des formes contemporaines de racisme continuent d’exister.  Nous devons nous attaquer à cette question de façon globale, a-t-il encouragé, dénonçant au passage les discriminations que subissent les personnes sous occupation coloniale ou étrangère.  Au cours de l’histoire, des millions d’Africains ont été déportés de l’autre côté de l’Atlantique pour être réduits en esclavage et les habitants du continent africain continuent à en subir les conséquences aujourd’hui, a martelé le délégué, avant d’appeler les États responsables à compenser les anciens pays colonisés.  Enfin, après s’être alarmé de la progression inquiétante du racisme à motivation religieuse, il a réaffirmé le soutien de son pays au peuple palestinien et dénoncé les violations flagrantes du droit international perpétrées par Israël. 

M. JOHN MARTIN PANGIPITA (Tanzanie) a jugé essentiel de respecter la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale des États et ne pas s’ingérer dans les affaires internes d’autres États souverains.  Ces principes sont des normes fondamentales qui régissent les relations internationales, a-t-il rappelé, avant d’exprimer son rejet de toute politisation des questions liées aux droits humains.  Selon le représentant, la situation des droits humains dans la région du Xinjiang, au Tibet ou à Hong Kong relève strictement des affaires internes de la Chine.  À cet égard, il a salué les efforts déployés par le Gouvernement chinois pour protéger et améliorer les moyens de subsistance de sa population et pour faire reculer la pauvreté. 

M. PAR LILJERT, de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a dénoncé l’utilisation faite ces dernières années des technologies et les plateformes numériques dans la diffusion de la rhétorique xénophobe et racialement discriminatoire et l’exclusion des migrants.  Notant que la stigmatisation de personnes d’origines différentes et la diffusion virtuelle de discours de haine ont toujours des conséquences dans le monde réel, il a plaidé pour l’inclusion de ces plateformes dans les efforts de sensibilisation sur la façon dont de tels discours et attaques contre les titulaires de droits, y compris les migrants, ont un impact direct sur toute la société.  En l’absence de tolérance et d’empathie, les inégalités, la discrimination et l'intolérance envers les autres vont se développer, a-t-il averti.  Le représentant a en outre souhaité que les technologies numériques fournissent de nouveaux moyens pour défendre, défendre et exercer les droits et que, conformément à la feuille de route du Secrétaire général pour la coopération numérique, toutes les personnes puissent être connectées, respectées et protégées à l'ère numérique.

Mme YANIQUE NISSAN DACOSTA (Jamaïque) a indiqué que les personnes d’ascendance africaine représentent 90% de la population du pays et que les effets résiduels de l’esclavage et de l’exploitation font partie du quotidien.  Elle a reconnu la complexité de cette « question sensible » et a appelé à prendre des mesures audacieuses et créatives pour être à la hauteur du moment, tout en notant l’élan grandissant au sein des Nations Unies pour améliorer la vie des personnes d’ascendance africaine.  Elle a notamment évoqué l’adoption, en 2021, d’une résolution appelant à une action concrète en faveur de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associé, ainsi qu’au suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Elle a appelé les États Membres à participer à un dialogue franc et inclusif afin d’identifier les moyens pragmatiques permettant de réaliser une justice réparatrice.

M. TIGRAN GALSTYAN (Arménie) a estimé qu’un débat public ouvert avec la société civile et des médias libres sont des éléments essentiels pour assurer la protection contre la haine.  Le délégué a d’autre part indiqué que son pays ne connaît que trop bien les graves conséquences de la xénophobie.  Un siècle après le génocide, nous continuons d’être victimes d’incitation à la haine, a-t-il dénoncé, pointant du doigt l’Azerbaïdjan.  Il a notamment dénoncé des exécutions sommaires de prisonniers de guerre et des mutilations commises lors de l’invasion du pays par l’Azerbaïdjan.  Enfin, il a déploré que cette situation ne fasse l’objet que de condamnations sélectives de la part de la communauté internationale. 

Mme MICAEL (Érythrée) a estimé important de rappeler que l’esclavage et le colonialisme ont un impact de très longue durée pour des sociétés comme la sienne, notamment du point de vue économique.  Malgré la Déclaration et le Programme d’action de Durban et en dépit des efforts consentis pour trouver des solutions, les manifestations de racisme et de xénophobie contribuent toujours à la pauvreté et aux discours de haine, a-t-elle constaté, déplorant en outre l’interdiction induite pour certains groupes d’exercer librement leur religion.  Face à ces phénomènes, la représentante a appelé à plus de volonté politique pour réformer les structures juridiques existantes.  Enfin, elle a exhorté les États à éviter toute politisation de ces questions, exprimant ainsi son opposition aux critiques faites à la Chine.  Celle-ci a fait preuve d’ouverture en accueillant la visite de Mme Michelle Bachelet, alors Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a jugé la déléguée. 

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, le représentant de la Chine a accusé les États-Unis d’utiliser la tribune de la Troisième Commission pour diffamer son pays.  C’est la onzième fois que cela se produit depuis qu’ont commencé les débats de cette session, a-t-il dénoncé, constatant que les Etats-Unis se soucient davantage des droits humains en Chine que dans leur propre pays.  Les États-Unis sont-ils si vertueux?  Respectent-ils leurs propres minorités?  La réponse est non, a-t-il tranché, qualifiant de « méprisable » le bilan des États-Unis en matière de droits humains.  Selon lui, Washington entend freiner le développement de la Chine et maintenir son hégémonie américaine en proférant des mensonges.  Le délégué a rappelé, en outre, que, le 6 octobre, le Conseil des droits de l’homme a rejeté le projet de résolution préparé par les États-Unis sur la question du Xinjiang.  Leur « complot » a donc été déjoué, a conclu le délégué, selon lequel la déclaration de Cuba montre qu’une majorité de délégations condamnent l’ingérence américaine dans les affaires intérieures d’autres pays. 

La représentante de l’Azerbaïdjan a, pour sa part, souhaité répondre à l’Arménie, qui, selon elle, continue de refuser d’assumer sa responsabilité pour les nombreux crimes de guerre commis et essaie de se présenter comme un pays de tolérance, alors qu’elle s’est livrée à des « nettoyages ethniques ».  Des organes internationaux ont fait part de leurs inquiétudes quant aux discours des haine en Arménie, a rappelé la déléguée, mentionnant les conclusions de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance. 

De son côté, le représentant de l’Arménie a accusé l’Azerbaïdjan de s’être engagé dans des discours de propagande contenant en leur cœur une xénophobie anti-arménienne.  Nous sommes tous capables de faire la différence entre les allégations faites et les événements réels, a-t-il indiqué, avant de rappeler que, dans le cadre de l’Examen périodique universel, il a été recommandé à l’Azerbaïdjan de prendre des mesures pour combattre la promotion de la haine. 

La représentante de l’Azerbaïdjan a repris la parole pour réfuter toute activité de propagande de la part de son pays.  Elle a ensuite constaté une nouvelle fois que l’Arménie refuse d’assumer sa responsabilité pour les crimes de guerre qu’elle a commis, mais aussi de punir les auteurs de ces crimes et d’offrir des recours pour les atteintes avérées.  De plus, a-t-elle ajouté, l’Arménie diffuse des messages d’intolérance, comme l’ont relevé des organes pertinents des Nations Unies.

Reprenant à son tour la parole, le représentant de l’Arménie a dénoncé les accusations sans fondement de l’Azerbaïdjan.  Il n’y a pas de preuve étayant des activités de nettoyage ethnique commises par l’Arménie, a-t-il dit, jugeant ironique que ces allégations soient formulées par l’Azerbaïdjan, étant donné les nombreuses violations des droits humains perpétrées par ce pays contre des minorités nationales.  Selon lui, l’Azerbaïdjan ferait mieux de mettre en œuvre les recommandations des organes des droits de l’homme de l’ONU pour faire face au niveau élevé de xénophobie et de haine dans sa sphère publique, lequel représente une menace pour la paix et la sécurité dans la région. 

QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES

Déclaration liminaire suivie d’un dialogue interactif

Exposé

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a pris acte de « l’échec de la communauté internationale à travailler ensemble », ce qui, a-t-il dit, a des conséquences « extrêmement graves », notamment pour les plus de 103 millions de personnes – contre 41 millions il y a dix ans – contraintes de quitter leurs foyers.  Si le dérèglement du climat, les effets durables de la pandémie et la crise du coût de la vie ont tous une responsabilité, l’incapacité de la communauté internationale à prévenir ou à résoudre les conflits reste, selon lui, le principal facteur des déplacements. 

Le Haut-Commissaire a ainsi relevé que l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie a entraîné l’une des crises de déplacement les plus rapides depuis la Seconde Guerre mondiale, forçant environ 14 millions de personnes à quitter leurs foyers.  La réponse aux réfugiés en Europe a été « excellente », a-t-il néanmoins salué, y voyant une illustration de l’approche « à l’échelle de la société » que les États Membres ont adoptée en approuvant en 2018 le Pacte mondial sur les réfugiés.  Cette réponse a aussi donné tort aux nombreux politiciens, qui, ces derniers temps, affirmaient que l’Europe était pleine, que la relocalisation était impossible et que l’opinion publique ne soutiendrait pas l’accueil des réfugiés, a-t-il constaté, estimant que l’accueil des réfugiés, même en grand nombre, est possible lorsqu’il y a un leadership, des politiques raisonnables, une bonne gestion et surtout une approche partagée. 

M. Grandi s’est aussi dit profondément préoccupé par le sort des personnes à l’intérieur de l’Ukraine.  En effet, a-t-il dénoncé, des infrastructures civiles sont détruites, jour après jour, et beaucoup reste à faire pour éviter les pires effets de l’hiver.  Cela étant, la concentration nécessaire sur la réponse à la crise en Ukraine ne doit pas détourner la communauté internationale des autres crises, comme c’est malheureusement souvent le cas, a-t-il alerté.  Le Haut-Commissaire a cité, entres autres exemples, la situation au Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, et le sort des personnes déplacées au Burkina Faso ou encore au Myanmar et au Bangladesh.  Des dizaines de milliers de personnes continuent d’être chassées de chez elles par les combats en République démocratique du Congo, sans que la communauté internationale n’y prête attention, a-t-il également déploré, avant d’évoquer les plus de cinq millions de réfugiés syriens présents en Turquie, en Jordanie, au Liban et dans d’autres pays de la région, ainsi que les mouvements de populations complexes à travers les Amériques.  Avec le concours du Programme alimentaire mondial (PAM), le HCR s’emploie à faire face à l’insécurité alimentaire dans les sites de réfugiés, a-t-il indiqué, formant le vœu, à cet égard, que les négociations en cours permettront de poursuivre l’Initiative céréalière de la mer Noire, « vitale » pour des millions de personnes. 

Le Haut-Commissaire a par ailleurs évoqué les différents phénomènes météorologiques extrêmes dans le monde.  Si le monde a vu les dévastations causées par les inondations au Pakistan, moins d’attention a été prêtée à la souffrance humaine causée par les changements climatiques dans la Corne de l’Afrique ainsi qu’au Sahel, en Amérique latine, en Asie du Sud-Est, au Moyen-Orient et ailleurs, a-t-il noté.  En Somalie, j’ai vu de mes propres yeux comment l’urgence climatique associée au conflit entraîne des déplacements, a-t-il dit, signalant que ce phénomène a des répercussions sur les pays voisins.  M. Grandi a indiqué que le HCR continue d’intensifier sa réponse climatique liée aux déplacements, notamment en renforçant la résilience aux chocs climatiques dans les zones d’accueil.  Mais il est clair, a-t-il reconnu, surtout à l’approche de la COP27 à Charm el-Cheikh, que nous devons faire davantage pour répondre à cette urgence afin d’aider les personnes déplacées ou menacées de le devenir. 

Par ailleurs, M. Grandi s’est penché sur la crise du coût de la vie, qui affecte dramatiquement les personnes déplacées et autres personnes vulnérables.  Nous avons vu des personnes recourir à des voyages dangereux en mer, et nous savons aussi comment la pauvreté prive les gens, en particulier les femmes et les filles, de leur dignité et de leurs droits, a-t-il souligné, précisant que le HCR s’efforce de compenser les tendance macro-économiques les plus dures, via ses activités de secours traditionnelles mais aussi d’un travail auprès d’institutions comme le Fonds monétaire international (FMI) afin qu’elles considèrent le déplacement forcé comme un facteur pertinent dans la planification de leur soutien aux États.  Les quelque 3,3 milliards de dollars de fonds de développement bilatéraux qui sont injectés chaque année dans les situations de réfugiés s’ajoutent ainsi aux 2 milliards de dollars par an déboursés par les banques multilatérales de développement et aux ressources humanitaires mobilisées par le HCR et ses partenaires, a précisé le Haut-Commissaire.  Cela doit se poursuivre et se développer, a-t-il ajouté, en particulier sous la forme de subventions pour soutenir les pays et les communautés d’accueil qui assument une part disproportionnée de la responsabilité de la communauté internationale à l’égard des réfugiés.

Le HCR, a poursuivi M. Grandi, a recueilli des fonds importants cette année, notamment auprès des donateurs privés.  Des partenariats nouveaux et innovants sont également en place, notamment dans le domaine de la philanthropie islamique.  Il a cependant averti que la guerre en Ukraine a augmenté le budget de l’agence de plus d’un milliard de dollars.  Malgré la générosité des donateurs, le HCR se retrouve ainsi confronté à un déficit de 700 millions de dollars dans un certain nombre d’opérations essentielles dont l’arrêt causerait de graves difficultés aux réfugiés, a-t-il prévenu, précisant que l’agence n’a pas connu ce genre de difficultés financières depuis des années.  Il a donc appelé à des contributions supplémentaires dans les jours et les semaines à venir pour éviter des coupes douloureuses dans l’aide de base aux réfugiés. 

Enfin, après avoir rappelé que son mandat a été prolongé jusqu’en 2025 par le Secrétaire général afin de mener à bien les réformes en cours au HCR, le Haut-Commissaire s’est félicité qu’à l’occasion du Forum mondial sur les réfugiés en 2019, plus de 1 400 engagements aient été pris pour mettre en œuvre le Pacte mondial sur les réfugiés, suivi depuis lors par des centaines d’autres.  Le deuxième Forum aura lieu en décembre 2023, a-t-il indiqué, encourageant « tout le monde » à participer et à s’engager.  « En ces temps difficiles, votre soutien est plus nécessaire que jamais », a-t-il déclaré en conclusion. 

Dialogue interactif 

Réagissant à l’exposé du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, la Fédération de Russie a rappelé que, depuis février dernier, plus de 4,5 millions de personnes ont volontairement gagné la Russie depuis les territoires des « républiques populaires » de Donetsk et de Lougansk, ainsi que des régions ukrainiennes de Kherson et de Zaporojie.  Elle a assuré que tout est mis en œuvre pour garantir l’assistance nécessaire à leur installation.  Elle a par ailleurs insisté sur l’importance à ses yeux du retour volontaire des réfugiés syriens, appelant à une approche non politisée pour résoudre ce problème.  De leur côté, les États-Unis ont rappelé leur soutien au HCR, avec un récent versement de 2,2 milliards de dollars, soit la plus grande contribution depuis l’existence de l’agence.  La délégation a ajouté que 125 millions de personnes ont été accueillies sur le territoire américain lors de l’exercice fiscal précédent et a appelé les autres États Membres à s’engager eux aussi en faveur des migrants. 

Le Mexique a ensuite demandé à M. Grandi de quelle manière les membres des Nations Unies peuvent relever les défis qui contribuent à l’augmentation du nombre de réfugiés.  La Suède, s’exprimant au nom des pays nordiques, a déploré que certaines cibles du HCR n’aient pu être atteintes du fait d’un sous-financement, considéré comme un des plus grands obstacles au travail du Haut-Commissariat.  Revenant sur les crises migratoires frappant son pays, le Guatemala a qualifié le HCR d’allié stratégique aux côtés des institutions guatémaltèques sur le front humanitaire.  La Pologne a, elle, rappelé qu’elle a accueillie sur son sol 2 millions de réfugiés ukrainiens, leur apportant assistance et accès au marché du travail, sur un pied d’égalité avec les Polonais.  La générosité avec laquelle le monde avait accueilli les réfugiés ukrainiens ne saurait rester une exception mais devrait devenir la nouvelle norme internationale, a estimé le Canada, tandis que le Liechtenstein réitérait ses préoccupations au sujet des violations du principe du non-refoulement et demandait à M. Grandi comment les combattre. 

À la suite du Qatar, qui a fait mention des millions de dollars octroyés par son gouvernement à la gestion de crises humanitaires, notamment en Afghanistan, l’Égypte a rappelé la présence sur son territoire de 290 000 réfugiés et de 9 millions de migrants originaires, qui tous vivent librement dans le pays.  Déplorant le nombre limité de pays qui assument un fardeau migratoire sans cesse plus lourd, elle a demandé à M. Grandi comment établir un partage plus équitable à ce sujet.  Une question reprise par le Liban, qui a rappelé le nombre de migrants et de réfugiés présents sur son territoire, dont 2,8 millions de Syriens.  La communauté internationale se doit d’élaborer une feuille de retour pour favoriser le retour sûr et digne de ces personnes dans leur pays d’origine, a-t-il plaidé.  El Salvador a loué à son tour les efforts déployés par son pays pour garantir les droits des migrants, regrettant toutefois que les institutions nationales se trouvent démunies face à cette problématique.  Comment garantir l’égalité de traitement de tous les migrants, et comment relever ce défi tout en gérant celui que représentent les changements climatiques, s’est pour sa part interrogé le Bangladesh

Le Portugal a exhorté les États Membres à s’engager contre l’apatridie, avant de demander au Haut-Commissaire comment mieux inclure l’objectif de l’éducation des enfants migrants dans la riposte internationale aux défis migratoires.  À sa suite, l’Algérie a regretté que le rapport du HCR ne traite réellement pas des conséquences économiques et sociales de la présence de réfugiés dans les pays hôtes, surtout ceux qui en accueillent un grand nombre et depuis longtemps.  Déplorant l’aggravation de la crise migratoire à l’échelle mondiale, la Türkiye a souhaité savoir, à l’approche du deuxième forum d’examen des migrations internationales, s’il serait possible de maintenir la dynamique positive du premier.  Après avoir dénoncé les conséquences humanitaires de la guerre en Ukraine, l’Albanie s’est félicitée des rapatriements de Syriens et d’Afghans présents sur son sol.  À cet égard, elle s’est enquise du suivi des réfugiés dans les régions transfrontalières.  Le Myanmar s’est, lui, inquiété de la grave crise humanitaire née du coup d’État militaire de 2021 et du conflit qui sévit depuis, faisant état de cas de suicide de réfugiés.  Certains ont cherché la protection du HCR dans des pays voisins mais ont été refoulés vers leur pays, comme beaucoup de victimes qui cherchent la protection internationale sans pouvoir l’obtenir, a-t-il déploré. 

L’Ordre Souverain de Malte a fait valoir que la prise en charge des réfugiés ne peut se limiter à leur acceptation mais doit aller jusqu’à leur intégration.  La délégation a fait part de projets encourageants menés en Ouganda auprès de migrants sud-soudanais.  L’Italie a, elle, rappelé sa contribution de 71,2 millions de dollars au financement du HCR, avant de demander au Haut-Commissaire de préciser ses recommandations quant à la protection des personnes déplacées hors des frontières de leur pays.  L’Union européenne a ensuite détaillé les axes de son engagement pour répondre aux crises humanitaires à l’origine de déplacements massifs, notamment dans la Corne de l’Afrique, au Soudan du Sud ou en Ukraine.  Dans ce pays, la guerre a forcé 13 millions de personnes à quitter leurs foyers et a déclenché la pire crise de réfugiés en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, a-t-elle souligné.  Rappelant qu’elle a accueilli plus de 100 000 Ukrainiens fuyant l’agression russe, la France a exposé les points saillants de son engagement en faveur des réfugiés, mentionnant entre autres la promotion des voies légales d’accès à l’eau et un programme de réinstallation dans plusieurs pays d’Afrique et du Moyen-Orient.  Le Bélarus a lui aussi évoqué l’accueil des réfugiés en provenance d’Ukraine, mais depuis 2014, a-t-il précisé, assurant avoir toujours rempli de bonne foi ses obligations au titre de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.  Il a par ailleurs demandé au Haut-Commissaire une évaluation de l’impact des mesures coercitives unilatérales sur la capacité du HCR à soutenir efficacement les réfugiés.  Pour sa part, le Honduras a rappelé qu’entre 2014 et 2018, environ 250 000 personnes ont été déplacées à l’intérieur de ses frontières.  Il s’est félicité, dans ce contexte, d’avoir rejoint le Cadre régional intégré pour la protection et les solutions (MIRPS) en 2017. 

En tant que co-hôte du prochain Forum mondial sur les réfugiés, la Suisse a demandé à M. Grandi comment s’assurer que le partage des charges et des responsabilités soit à la fois équitable et efficace.  D’autres délégations ont insisté sur ce partage du fardeau, à l’instar de l’Afrique du Sud, qui, parlant au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé qu’un tiers des déplacements forcés ont lieu sur le continent africain.  Elle s’est aussi inquiétée du grand nombre de programmes nationaux humanitaires en manque de financement.  Sur cette même ligne, la République islamique d’Iran a déclaré ne pas pouvoir assumer seule la charge des défis migratoires, lesquels devraient être partagés avec la communauté internationale.  La délégation a plaidé en faveur d’un mécanisme efficace pour suivre les coûts liés à la prise en charge des réfugiés.  Indiquant avoir alloué 400 millions de dollars à la riposte humanitaire depuis 2018, le Brésil a lui aussi appelé à un meilleur partage des responsabilités, rejoint sur ce point par le Nigéria et l’Indonésie, celle-ci rappelant que 86% des réfugiés se trouvent dans des pays en développement et invitant la communauté internationale à aider le HCR à accélérer les processus de réinstallation.  La Thaïlande a soutenu à son tour le principe d’un partage équitable pour aider les communautés d’accueil à maintenir leur niveau d’assistance humanitaire.  Elle a aussi souhaité qu’un mécanisme plus systématique soit mis en place pour distinguer les personnes ayant des besoins de protection internationale des migrants économiques. 

De son côté, le Maroc s’est interrogé sur la façon dont le HCR suit la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre du Pacte mondial pour les réfugiés.  Il l’a en outre appelé à déployer plus d’efforts pour que l’assistance puisse toucher les migrants.  Le Malawi a, lui, affirmé recevoir 400 réfugiés supplémentaires par mois, ce qui entraîne une surpopulation dans les camps et favorise la transmission de la COVID-19 et d’autres maladies.  La délégation a voulu savoir comment les États Membres peuvent accueillir des réfugiés qui représentent une menace pour la sécurité nationale.  Enfin, le Cameroun a demandé à M. Grandi des détails sur sa collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) dans le cadre des déplacement internes et des mouvements migratoires mixtes.  Il a d’autre part souhaité savoir si la Déclaration de Malabo signée par l’Union africaine peut apporter au HCR des perspectives intéressantes. 

En réponse aux questions et observations des États Membres, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés a tout d’abord estimé que le traitement des réfugiés en Europe est un exemple de bonnes pratiques, qui fait écho à d’autres mesures de protection temporaires prises notamment en Colombie, en Équateur, en République dominicaine et au Brésil, où il y a des programmes de régularisation de réfugiés et de migrants.  En Afrique, a-t-il poursuivi, des pays comme le Niger et l’Ouganda fournissent des services à des centaines de milliers de réfugiés, et ce en dépit de ressources limitées.  M. Grandi a également cité le cas du Kenya, qui a pris des initiatives très ambitieuses visant à intégrer dans des communautés locales des réfugiés du Soudan du Sud et de Somalie.  Revenant au « très bon exemple » que constitue selon lui l’accueil et l’acceptation des réfugiés ukrainiens, il a salué la façon avec laquelle la Pologne met en œuvre concrètement la directive temporaire de l’Union européenne.  En autonomisant les réfugiés, ce système donne à ces derniers davantage de liberté tout en représentant un moindre fardeau pour les autorités. 

Le Haut-Commissaire a ensuite abordé les questions liées à la protection des groupes vulnérables, indiquant que le HCR compte y prêter une attention toute particulière, notamment en accordant la priorité aux activités de lutte contre l’exploitation sexuelle et la violence fondée sur le genre.  Il a ajouté que la santé mentale fait également partie des priorités de son agence.  Nous continuerons d’agir sur ce front et sur celui de l’éducation car il faut veiller à ce que les acquis obtenus pour garantir aux réfugiés et aux personnes déplacées l’accès aux services éducatifs ne soient pas perdus en raison des pressions socioéconomiques actuelles, a-t-il précisé. 

Évoquant la question du non-refoulement, il a rappelé qu’il s’agit d’un principe fondamental sur lequel repose l’action du HCR pour protéger les réfugiés.  Malheureusement, le refoulement et les déportations continuent de se produire, a-t-il regretté, saluant à cet égard les propos de l’Indonésie, qui, a-t-il dit, a parlé de façon « très convaincante » des réfugiés du Myanmar.  Il faut éviter les déportations qui se sont produites dans cette région, a-t-il insisté, appelant à ne pas oublier non plus le sort des Rohingya qui avaient fui vers le Bangladesh avant le coup d’État militaire de 2021. 

Avant de conclure, M. Grandi a indiqué qu’il compte aborder demain, mercredi, lors de son intervention devant le Conseil de sécurité, l’accès aux personnes placées sous la responsabilité du HCR ainsi que la question de la menace pour la sécurité que peuvent représenter certains réfugiés. 

Discussion générale

M. GONZATO (Union européenne) a constaté que l’année écoulée a établi des records, avec plus de 100 millions de personnes déplacées fin mai.  Dans la Corne de l’Afrique, a-t-il relevé, près d’un million de Somaliens ont été déplacés depuis le début de 2021 en raison de la sécheresse et le Soudan du Sud, avec un total de 4,5 millions de personnes toujours déplacées, est également en première ligne de la crise climatique.  La guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine a déplacé à elle seule 13 millions de personnes et déclenché la pire crise de réfugiés en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, a rappelé le représentant, précisant que l’UE et ses États membres restent pleinement mobilisés pour faire face aux conséquences des crises prolongées et émergentes dans le monde, y compris en Europe, où 4 millions de demandes de protection temporaire ont été enregistrées. 

L’UE, a-t—il ajouté, reste un donateur de premier plan pour les interventions d’urgence, en associant les efforts humanitaires et de développement conformément à sa politique en matière de déplacement.  Saluant les efforts déployés par le HCR pour assurer la mise en œuvre des engagements pris lors du premier Forum mondial sur les réfugiés en 2019, il a dit attendre avec impatience le deuxième Forum l’année prochaine.  Ce sera l’occasion de renforcer la solidarité mondiale et le partage des responsabilités dans un véritable esprit de partenariat, y compris avec les réfugiés et les organisations dirigées par des réfugiés, a affirmé le délégué, qui a appelé le HCR à mobiliser davantage les acteurs du développement et les institutions financières internationales afin de travailler à des solutions plus durables.

S’exprimant au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a tout d’abord appelé à traduire en justice ceux qui commettent des crimes contre le peuple palestinien.  Il a ensuite dénoncé les tendances unilatérales et les conceptions « exceptionnalistes », y voyant la principale source des déplacements dans le monde, notamment en raison d’intérêts économiques.  Le représentant a dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui privent un tiers de l’humanité de ses droits humains et entravent la réalisation des objectifs de développement durable.  Il a aussi souligné qu’il importe d’éviter tout amalgame entre les migrants d’un côté, et les déplacés et les réfugiés de l’autre, amalgame dont certains États peuvent se servir pour nier les droits des personnes déplacées de force. 

Au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a d’emblée souligné l’aide apportée par le CCG pour fournir une aide aux réfugiés conformément aux principes humanitaires et sur la base de l’enseignement de la sagesse de l’Islam.  Il a fait part de sa préoccupation face à l’augmentation du nombre de réfugiés dans le monde qui dépasse les 100 millions aujourd’hui.  Les États du CCG ont une « position claire », mettre en œuvre toutes les possibilités pour fournir des soins de santé, et des services d’aide aux réfugiés, avec l’aide du HCR, a indiqué le délégué, rappelant que les pays du CCG sont à la pointe en matière d’aide humanitaire.

M. STEPAN Y. KUZMENKOV (Fédération de Russie) s’est félicité de la diminution continue du nombre d’apatrides en Russie, précisant que son pays continue d’appuyer les efforts du HCR sur cette voie.  Il a indiqué que depuis le mois de février 2022, 4,5 millions de réfugiés sont arrivés « chez nous volontairement » depuis les républiques populaires de Donetsk et Lougansk et d’autres régions « dont celle de l’Ukraine », affirmant que ces personnes fuient le régime nationaliste de Kiev.  Il a assuré que la Russie prend toutes les mesures pour les aider, y compris en simplifiant et facilitant les procédures pour officialiser leur séjour sur le territoire. 

M. KHALED ALY AWADALLA HASSAN (Égypte) a indiqué que 300 000 réfugiés de 60 nationalités vivaient en Égypte où ils avaient accès aux services de base.  Il a aussi fait savoir qu’une plateforme pour les réfugiés et les migrants avait été créée dans son pays avec les agences des Nations Unies concernées sous l’égide du Coordonnateur résident.  Il s’est inquiété au déficit de financement du HCR et a appelé à assurer son financement. 

M. WANG LIXN (Chine), a appelé à permettre aux réfugiés de rentrer chez eux et à les aider à accéder aux vaccins en les intégrant aux plans nationaux de relèvement après la pandémie, ajoutant que la Chine contribue largement à ces efforts.  Il a ensuite assuré qu’elle continuerait de collaborer avec le HCR. 

M. ANDREW ODHIAMBO BUOP (Kenya) a assuré que son pays continuera de respecter ses obligations d’accueil et de protection des réfugiés.  Il a cependant réitéré son appel en faveur d’un partage de la charge et des responsabilités, conformément au Pacte mondial sur les réfugiés.  Réaffirmant l’engagement du Kenya à défendre les principes de la protection internationale des réfugiés au niveaux international, régional et national, il a indiqué qu’une nouvelle loi, entrée en vigueur en février dernier dans son pays, renforce la gestion de ces populations en consolidant les dispositions de plusieurs instruments juridiques internationaux.  Toutefois, a ajouté le délégué, le Kenya fait face, en tant que grand pays hôte de réfugiés, à des défis croissants, notamment la surexploitation de ressources rares, la dégradation aiguë de l’environnement, le stress exercé sur les moyens de subsistance des communautés d’accueil et, dans certains cas, les conflits entre ces communautés et les réfugiés.  À cela s’ajoutent la faiblesse des crédits budgétaires pour répondre à cette pression et l’exploitation des camps de réfugiés par les terroristes.  De fait, a-t-il conclu, le moyen le plus efficace de traiter le problème des réfugiés reste de s’attaquer aux causes profondes des conflits, des déplacements forcés et de promouvoir la paix et la sécurité, de soutenir les efforts visant à réduire la pauvreté, de réduire les risques de catastrophe et de fournir une aide humanitaire et une aide au développement aux pays d’origine et d’accueil. 

Mme MORUKE (Afrique du Sud) a indiqué que les réfugiés s’intègrent dans la société sud-africaine et peuvent jouir de droits fondamentaux tels que l’éducation, la santé et l’accès à la justice.  Toutefois, a-t-elle relevé, si les réfugiés gagnent en autonomie grâce à leur inclusion économique au sein des communautés, celles-ci sont elles-mêmes pauvres et luttent pour trouver un emploi.  De fait, la concurrence accrue pour des ressources limitées a pour conséquence involontaire des tensions sociales au sein de la société, a fait observer la déléguée, plaidant pour des efforts plus intégrés de collaboration et de coopération de la part du HCR et de la communauté internationale pour prévenir ces problèmes.  Elle a ajouté que son pays est préoccupé par l’augmentation des déplacements, exacerbés par l’impact des changements climatiques dans le monde, en particulier sur le continent africain.  L’Afrique du Sud reste néanmoins engagée à soutenir le travail du HCR et appelle à une plus grande collaboration au niveau local, régional et mondial pour sauvegarder la vie des personnes contraintes de quitter leurs foyers.

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) s’est félicité que son pays co-organise le prochain Forum mondial sur les réfugiés, qui se tiendra en 2023 à Genève.  Ce forum, a-t-il dit, représente une occasion précieuse de faire le point sur les progrès, les défis et les nouvelles opportunités dans la recherche d’une réponse globale pour les demandeurs d’asile, les réfugiés, les communautés d’accueil et les autres personnes concernées.  À cette occasion, des bonnes pratiques seront partagées et nouveaux engagements seront pris pour alléger les pressions sur les pays d’accueil et à développer l’autonomie des réfugiés, a précisé le délégué.  Il a par ailleurs exprimé sa préoccupation concernant le nombre croissant de migrants et de réfugiés qui traversent la région du Darién, jugeant impératif de rechercher des solutions durables et soutenables. 

Il est temps d’imaginer des stratégies qui s’attaquent structurellement aux causes qui génèrent ces déplacements dans des conditions dangereuses et qui créent des vulnérabilités pouvant donner lieu à des violations des droits de l’homme, a-t-il alerté. 

Mme JEANNE MRAD (Liban) est revenue sur les lourdes répercussions du conflit syrien sur le Liban.  Alors que nous vivons la plus grave crise économique et financière de notre époque moderne, nous continuons d’accueillir le plus grand nombre de réfugiés dans le monde comparé à notre population, a-t-elle expliqué.  La déléguée a fait état de 2,2 millions de réfugiés syriens sur son sol, ce qui représente plus de la moitié de la population libanaise.  Cette crise crée des répercussions négatives sur le Liban, sur le plan économique, social, environnemental ou encore sécuritaire, a-t-elle mis en garde, alertant également sur le fléau du choléra qui laisse présager une catastrophe sanitaire.  Par ailleurs, elle a indiqué que le Liban a repris les voyages de retour volontaire, après une halte en 2020 à cause de la pandémie, insistant sur le caractère volontaire de ces retours.  En effet, depuis 1948, le Liban n’a jamais expulsé un déplacé ou un réfugié, a-t-elle affirmé. 

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a indiqué que 4 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire au Cameroun, notamment des déplacées et des réfugiées.  La lutte contre la secte islamiste Boko Haram, les effets de l’asséchement du lac Tchad, les répercussions de la crise économique et les vulnérabilités chroniques contribuent à un niveau élevé d’insécurité alimentaire et à un risque élevé d’épidémie et de chocs climatiques, a-t-elle mis en garde.  Elle a fait part du lancement au Cameroun du Pacte d’assistance humanitaire d’urgence, et d’opérations d’identification et d’enregistrement bioéthique des réfugiés vivant dans le pays. 

La représentante a estimé centrale la coordination humanitaire entre les différentes parties prenantes, le Gouvernement et les agences des Nations Unies.  Elle a également appelé à prendre en compte les spécificités nationales de chaque État, un modèle standard ne pouvant pas fonctionner.  Enfin, elle a rappelé l’importance du principe d’indépendance et de neutralité de tous les acteurs humanitaires, estimant urgent que soit renforcé le nexus entre les programmes de développement et d’assistance humanitaire. 

Mme ISABELLA REGINA RIVERA REYES (Honduras) a indiqué qu’entre 2014 et 2018, 250 000 personnes avaient été déplacées de force au Honduras.  Elle a ajouté que le pays reconnaissait le statut des déplacés, notamment en raison de la violence des groupes criminels, et avait adhéré au cadre régional pour les déplacés de 2017.  Elle a ensuite appelé à mettre en place des systèmes de protection des déplacés et réfugiés. 

M. IGOR PILIPENKO (Bélarus) a souligné sa bonne coopération avec le HCR qui a ouvert un bureau dans le pays en 2015.  Il a indiqué que son pays avait adapté sa législation nationale, accueilli des réfugiés ukrainiens en 2014 et 2022 et n’avait jamais fermé ses frontières.  Il s’est inquiété de la discrimination à l’égard des réfugiés dans certains pays voisins du Bélarus l’année dernière alors que ces mêmes pays ont accueilli des millions d’Ukrainiens sans difficulté cette année.  Le problème semble surtout être la provenance des réfugiés, a-t-il relevé.

M. AZRIL BIN ABD AZIZ (Malaisie) a indiqué que son pays abrite 200 000 réfugiés, auxquels le Gouvernement, en partenariat avec le HCR, a assuré une importante couverture vaccinale contre la COVID-19 et autres soins.  Il a insisté sur l’éducation des enfants de réfugiés, notant que les pays d’accueil pourraient s’en trouver culturellement enrichis.  L’afflux continu de réfugiés est massif a déploré le délégué, ajoutant que beaucoup sont dans le pays depuis plusieurs années, ce qui représente un fardeau pour la Malaisie.  Le délégué a ainsi exhorté les États parties à la Convention de 1951 d’honorer leurs obligations juridiques de réinstaller les migrants issus de leurs territoires.  Il a également plaidé en faveur du principe du partage des responsabilités.

M. VATHAYUDH VICHANKAIYAKIJ (Thaïlande) s’est prononcé en faveur d’un mécanisme systématique permettant de faire la différence entre les personnes ayant besoin d’une protection internationale et les migrants économiques afin d’allouer les ressources à ceux qui en ont le plus besoin.  Il a indiqué que la Thaïlande travaille à une feuille de route pour retirer sa réserve à l’article 22 de la Convention relative aux droits de l’enfant qui porte sur les enfants réfugiés.  Il s’est également associé à l’appel lancé par le HCR pour mettre fin à l’apatridie, précisant que son pays se mobilise pour le faire reculer. 

M. AKAD YASAR MOHAMMAD AL-KASAWNIH (Jordanie) a souligné que son pays a toujours été une terre d’asile, qui compte le plus grand nombre de réfugiés proportionnellement aux citoyens jordaniens, soit 3,7 millions de 53 nationalités, la plupart étant des Palestiniens et des Syriens.  Il a reconnu les difficultés de son pays pour faire face à cet afflux de réfugiés en raison de la rareté des ressources.  Il a précisé que la situation des Palestiniens dans son pays n’a rien à voir avec le mandat du HCR, mais relève de celui de l’UNRWA.  Il s’est inquiété des problèmes financiers de l’Office qui limitent ses efforts pour aider les réfugiés palestiniens. 

M. ALABHOUL (Koweït) a mis en avant le soutien apporté aux réfugiés grâce à la non-politisation de la fourniture de l’aide.  Pour lui, le problème des réfugiés est le symptôme des conflits armés avec leurs lots de crise économiques et sociale.  S’agissant des réfugiés palestiniens, il a fustigé l’occupation illégale par Israël des territoires palestiniens, ainsi que l’implantation et l’expansion des colonies de peuplement dans le but de changer le caractère démographique des territoires occupés.  Il a demandé à la communauté internationale d’agir pour mettre un terme à cette occupation. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: face aux transformations géopolitiques, les opérations de paix doivent s’appuyer sur une orientation stratégique intégrée

Soixante-dix-septième session,
18e séance plénière – après-midi
CPSD/764

Quatrième Commission: face aux transformations géopolitiques, les opérations de paix doivent s’appuyer sur une orientation stratégique intégrée

La Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a fait le point, cet après-midi, sur les orientations stratégiques et opérationnelles prises par les opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour relever les défis géopolitiques émergents, dans le cadre de son débat sur la question des opérations sous tous leurs aspects. 

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix a fait état des défis croissants auxquels sont confrontées les Nations Unies dans leurs efforts visant à maintenir la paix dans le monde, du fait des changements géopolitiques et économiques « spectaculaires » qui s’opèrent sur fond de tensions régionales, des inégalités et des vulnérabilités climatiques.  Nous continuons également d’être confrontés à l’action des groupes armés non étatiques, à des attaques asymétriques, à l’exploitation des ressources naturelles et à la criminalité transnationale organisée, s’est inquiété M. Jean-Pierre Lacroix, tandis que les Casques bleus sont victimes d’attaques ciblées, notamment à l’aide d’engins explosifs improvisés. 

Pour faire face à ces problèmes, les sept priorités d’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) continuent de fournir une orientation stratégique aux opérations de maintien de la paix.  Parmi celles-ci, M. Lacroix a cité la cohérence collective derrière la stratégie politique, par laquelle les missions de maintien de la paix mettent à profit leurs bons offices et leurs partenariats pour soutenir les solutions politiques aux conflits, avec les organisations régionales telles que l’Union africaine. 

L’intégration stratégique et opérationnelle ainsi que le renforcement des capacités ont également permis de réaliser des progrès importants, grâce au système de préparation des capacités de maintien de la paix et à la mise en place de forces de réaction rapide, de forces spéciales, d’hôpitaux de campagne et d’hélicoptères dans au moins quatre missions sur le terrain.

Pour M. Atul Khare, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, la formation est essentielle pour renforcer les capacités existantes et générer de nouvelles compétences parmi le personnel en uniforme.  Près de 13 000 membres du personnel en uniforme ont été ainsi été formés dans les domaines de l’ingénierie, de la médecine, du commandement, des communications, de l’informatique, des renseignements et de la reconnaissance dans le cadre d’un programme de partenariat du Département. 

Toutefois, alors que les décès de Casques bleus dus à des actes de malveillance ont presque doublé l’an dernier, passant de 13 en 2020 à 25 en 2021 puis à 29 cette année, les missions de paix s’efforcent d’affaiblir les groupes armés responsables, d’améliorer leurs connaissances de la situation sur le terrain et de prévoir et d’éviter les menaces. 

En tant que pays contributeur de troupes, le Guatemala s’est dit préoccupé que les forces de maintien de la paix soient de plus en plus la cible d’acteurs hostiles et soient confrontées à des menaces asymétriques et complexes dans des environnements politiques et sécuritaires en constante détérioration.  Selon son représentant, l’ONU doit mettre à jour les principes du maintien de la paix pour refléter le fait que « le casque bleu et le drapeau n’offrent pas une protection naturelle », mais constituent plutôt une cible.  L’Organisation et les pays contributeurs de troupes et de police doivent en outre planifier les opérations en se fondant sur l’évaluation des menaces de l’environnement spécifique, et non sur des politiques davantage adaptées au maintien de la paix traditionnel. 

Si la mort d’un seul soldat de la paix est une mort de trop, aucun décès ne devrait jamais survenir en raison de l’absence de soins médicaux adéquats, a fait valoir le Secrétaire général adjoint au Département de l’appui aux missions.  À cette fin, celui-ci déploie, dans les missions à haut risque, des solutions de télémédecine entre le théâtre d’opérations militaires et les installations médicales. 

L’Uruguay a pour sa part souligné l’importance d’actualiser les recommandations afin que les opérations de maintien de la paix et les Casques bleus puissent remplir leurs mandats tout en renforçant leur sécurité et leur formation.  Son représentant a appelé à l’adoption de nouvelles approches afin d’assurer la protection des civils, tout en reconnaissant le rôle unique du Comité spécial des opérations de maintien de la paix en tant que plateforme permettant de réaliser des actions concrètes dans ce domaine. 

Afin de permettre aux opérations de maintien de la paix de réaliser leur mandat, M. Lacroix a souligné l’importance d’assurer une meilleure compréhension des mandats du Conseil de sécurité par les principales parties prenantes, de même que la pleine coopération des pays hôtes.  Pour le Mouvement des pays non alignés, dont les membres constituent 90% des troupes déployées au sein d’opérations de paix, le Conseil de sécurité doit formuler des mandats clairs, ciblés, réalistes et réalisables, fondés sur l’appropriation nationale et soutenus par un processus de paix global, en consultation avec les États hôtes ainsi qu’avec les pays contributeurs de troupes et de police. 

Comme l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), le Mouvement a par ailleurs d’exhorté le Secrétariat à veiller à ce que les pays contributeurs de troupes et de police soient remboursés en temps voulu pour leurs contributions au maintien de la paix. 

En tant que questions transversales cruciales, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité de même que le maintien de la paix axé sur la technologie et les données guident nos actions dans les sept domaines prioritaires de l’Action pour le maintien de la paix Plus, a encore dit le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix.  Les communications stratégiques, sixième priorité de l’Action pour le maintien de la paix Plus, revêtent en outre une importance particulière à une époque caractérisée par des tensions géopolitiques accrues, où les conflits sont de plus en plus complexes et où les mandats des missions de maintien de la paix sont parfois mal compris. 

La Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 2 novembre, à 15 heures. 

ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS

Déclarations liminaires

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a fait état des défis croissants auxquels sont confrontées les Nations Unies dans leurs efforts visant à maintenir la paix dans le monde, notamment du fait des changements géopolitiques et économiques « spectaculaires » qui s’opèrent sur fond de tensions régionales, des inégalités et des vulnérabilités climatiques.  Nous continuons également à être confrontés à des groupes armés non étatiques, à des attaques asymétriques, à l’exploitation des ressources naturelles et à la criminalité transnationale organisée, tandis que les technologies émergentes constituent une arme à double tranchant.  De plus, les Casques bleus continuent d’être directement visés, a ajouté le Secrétaire général adjoint, en s’inquiétant de la menace des engins explosifs improvisés.  Toutefois, l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) continue de fournir notre orientation stratégique. 

En ce qui concerne la première des priorités d’A4P+, la cohérence collective derrière une stratégie politique, M. Lacroix a indiqué que les missions de maintien de la paix mettent à profit leurs bons offices et leurs partenariats pour soutenir les solutions politiques aux conflits, entre autres avec les organisations régionales telles que l’Union africaine.  Il a cité l’exemple du Mali, où l’Union africaine, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) ont soutenu le Médiateur de la CEDEAO.  S’agissant de la deuxième priorité, l’intégration stratégique et opérationnelle, le Secrétaire général adjoint a fait état de progrès substantiels au sein des missions et avec les agences, fonds et programmes des Nations Unies.  Toutes les opérations de maintien de la paix disposent désormais des plans de mission ou des cadres de résultats du système global de planification et d’évaluation des performances (CPAS), a-t-il assuré en ajoutant que l’analyse et la planification passent notamment par la mise en place d’unités de planification intégrée. 

En ce qui concerne la troisième priorité, les capacités et les mentalités, M. Lacroix a signalé des progrès importants, grâce au Système de préparation des moyens de maintien de la paix (PCRS).  Nous avons ainsi fourni des Forces de réaction rapide, des forces spéciales, des hôpitaux de campagne et des hélicoptères à au moins quatre missions sur le terrain, a-t-il noté, tout en renforçant les capacités d’alerte précoce et de réaction rapide sur le terrain.  En ce qui concerne la quatrième priorité, soit la responsabilité à l’égard des soldats de la paix, M. Lacroix a déclaré que l’amélioration de la sûreté et de la sécurité du personnel de maintien de la paix reste une priorité absolue pour le Secrétariat.  Toutefois, les décès de Casques bleus dus à des actes de malveillance ont presque doublé l’an dernier, passant de 13 en 2020 à 25 en 2021, alors que ce chiffre s’élève à 29 en 2022, notamment du fait d’attaques utilisant des munitions explosives et des engins explosifs improvisés.  La MINUSMA, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) s’affairent à affaiblir les groupes armés responsables, à améliorer la connaissance de la situation et à prévoir et éviter les menaces.  M. Lacroix a demandé à cet effet un investissement soutenu dans l’équipement, la formation et la maintenance, en particulier à la MINUSMA. 

Pour ce qui est de la cinquième priorité, la responsabilisation des soldats de la paix, nous continuons à nous concentrer sur le renforcement des performances conformément au Cadre intégré de performance et de responsabilisation en matière de maintien de la paix, a assuré le Secrétaire général adjoint.  Les communications stratégiques, la sixième priorité, revêtent une importance particulière à une époque caractérisée par des tensions géopolitiques accrues, où les conflits sont de plus en plus complexes et où les mandats des missions de maintien de la paix sont parfois mal compris. 

S’agissant de la septième priorité, soit la coopération avec les pays hôtes, M. Lacroix a souligné l’importance d’assurer une meilleure compréhension des mandats du Conseil de sécurité par les principales parties prenantes.  La coopération pleine et entière des pays hôtes reste en effet nécessaire pour permettre aux opérations de maintien de la paix de mettre en œuvre leur mandat.  En tant que questions transversales cruciales, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité de même que le maintien de la paix axé sur la technologie et les données guident nos actions dans les sept domaines prioritaires d’A4P+, a-t-il ajouté.  L’augmentation du nombre de femmes en uniforme déployées, à tous les niveaux et dans toutes les fonctions et la création d’environnements de travail inclusifs restent des priorités essentielles pour le maintien de la paix des Nations Unies, a encore dit le Secrétaire général adjoint.  Le maintien de la paix des Nations Unies est un symbole puissant de la manière dont le multilatéralisme peut continuer à œuvrer pour la paix et la sécurité à une époque marquée par de nouveaux défis et des divisions géopolitiques, a conclu M. Lacroix. 

M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, est intervenu pour donner des exemples de progrès réalisés dans les trois priorités du Programme A4P+ les plus pertinentes pour son Département: capacités et état d’esprit, responsabilités à l’égard des soldats de la paix, et responsabilités des soldats de la paix.  Concernant les capacités et l’état d’esprit, le Département de l’appui aux missions reste déterminé à faire en sorte que les capacités des unités déployées correspondent aux tâches qui leur sont confiées.  En s’appuyant sur les éléments fournis chaque trimestre par chacune des missions sur le terrain, le Département contrôle divers paramètres de performance.  Ces rapports trimestriels constituent la base de la communication périodique avec les pays contributeurs de troupes et de police pour leur demander de remédier aux lacunes identifiées dans le matériel déployé appartenant aux contingents.  La formation est essentielle pour renforcer les capacités existantes et générer de nouvelles compétences parmi le personnel en uniforme, ce qui permet d’améliorer les performances.  Grâce à un programme phare de partenariat triangulaire, le Département dispense des formations dans les domaines de l’ingénierie, de la médecine, le commandement, les communications, l’informatique, les renseignements, la surveillance et la reconnaissance, entre autres.  Près de 13 000 membres du personnel en uniforme d’Afrique, d’Asie du Sud-Est ont été formés dans le cadre de ce programme.  M. Khare a saisi l’occasion pour encourager les délégations à contribuer à son financement. 

Concernant la responsabilité envers les soldats de la paix, M. Khare a souligné que si la mort d’un seul soldat de la paix était une mort de trop, aucun décès ne devrait jamais survenir en raison d’une absence de soins médicaux adéquats.  À cette fin, en plus d’améliorer continuellement le service des hôpitaux de terrain et ses pratiques d’évacuation des blessés, le Département déploie des solutions de télémédecine, notamment des capacités de télésanté entre les lieux des blessures et les installations médicales dans quatre missions à haut risque: la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  M. Khare a aussi abordé la question de la santé mentale du personnel de maintien de la paix.  Les environnements de plus en plus difficiles dans lesquels il opère ont augmenté le stress psychologique des Casques bleus.  Avec le soutien de plusieurs États Membres et d’un Comité consultatif d’experts en santé mentale, le Département de l’appui aux missions prépare une stratégie de soutien à la santé mentale du personnel en uniforme: « un projet est attendu d’ici la fin du mois de mars 2023 », a-t-il déclaré.  Concernant la numérisation, la plateforme « UNITE Aware » continue de s’appuyer sur les capacités déployées dans le cadre de la MINUSCA.  Le « Partenariat pour la technologie dans le maintien de la paix » continue de fournir une plateforme pour l’engagement technologique entre l’ONU et ses États Membres.  En juin 2022, le dernier symposium du Partenariat s’est tenu sur le continent africain; il s’est concentré sur le maintien de la paix, la sûreté et la sécurité, la formation, la responsabilité écologique et la télémédecine.  Le prochain symposium dudit Partenariat, prévu en 2023, sera accueilli par le Népal.  Tirant parti des technologies numériques pour renforcer la sûreté et la sécurité, le Département s’efforce d’améliorer la protection des bases de l’ONU en s’appuyant sur un large éventail de technologies: radars, systèmes de détection de tirs indirects et drones, entre autres.  Le déploiement de ce type de technologies n’est possible que grâce à l’engagement des États Membres, a bien précisé M. Khare. 

La troisième priorité soulignée par le Secrétaire général adjoint concerne les responsabilités environnementales des missions.  En fournissant un soutien technique pour l’eau, les eaux usées, les déchets solides, l’énergie, les systèmes de gestion environnementale, l’ONU a continuellement amélioré les systèmes de suivi des performances et des risques.  Il y a toutefois un domaine où il faut faire davantage, celui de la transition vers les énergies renouvelables sur le terrain.  Actuellement, seuls 6% de l’électricité utilisée par les missions proviennent de sources d’énergie renouvelables.  « Nous étudions les moyens d’accélérer cette transition, notamment en faisant appel à des fournisseurs privés ou publics », a déclaré M. Khare. 

M. MIGUEL MOURATO GORDO, Directeur de la Division des stratégies et des politiques mondiales, Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité (DMSPC), a déclaré que la question de la responsabilité des Casques bleus est une priorité constante pour le Secrétariat qui tire sans cesse des leçons de notre expérience collective en matière de prévention et de traitement des risques de violations des normes de conduite.  Le Département, a-t-il dit, collabore activement avec les États Membres, y compris les pays contributeurs de troupes et de police, pour partager les bonnes pratiques innovantes en matière de prévention, de répression et une approche centrée sur les victimes pour soutenir les victimes d’exploitation et d’abus sexuels.  Récemment, les États Membres avaient encouragé à partager les bonnes pratiques en matière de conduite et de discipline.  Le DMSPC a documenté les bonnes pratiques et les a publiées sur le site Web « Conduite dans les missions de terrain des Nations Unies ». 

Le Département continue de progresser dans les réparations faisant suite à des demandes de paternité et de pension alimentaire en souffrance découlant d’allégations d’exploitation et d’abus sexuels.  Il a mis en place un groupe de travail interdépartemental qui examinera les bonnes pratiques et les leçons apprises pour élaborer un cadre d’action.  Le DMSPC gère le Fonds d’affectation spéciale pour le soutien aux victimes d’exploitation et d’abus sexuels pour aider les victimes.  En 2021-2022, le Fonds d’affectation spéciale a soutenu la mise en œuvre de huit projets, dont un premier projet au Soudan du Sud.  Dans le cadre des activités visant à garantir la responsabilité des Casque bleus, le Département s’efforce d’améliorer le système de suivi de la gestion des cas, y compris le développement d’un portail des États Membres pour améliorer l’accès aux informations sur la conduite et la discipline. 

S’agissant de l’évaluation des performances, le DMSPC coopère avec les missions de maintien de la paix pour établir des contrats entre les Chefs de missions et le Secrétaire général en 2022-2023 qui faciliteront les évaluations de performances et la collecte de données, a indiqué M. Gordo.  Dans le cadre de la politique de tolérance zéro à l’égard de la fraude et de la corruption au sein de l’Organisation, le Secrétariat publiera à l’occasion de la Journée internationale de la lutte contre la corruption, le 9 décembre, un manuel complet de sensibilisation à la fraude et à la corruption, a-t-il encore annoncé. 

En ce qui concerne la gestion financière, la DMSPC continue d’aider les missions à élaborer des propositions budgétaires responsables en améliorant les méthodologies existantes, la discipline budgétaire, la transparence.  De plus, le Département développe une architecture de données qui améliorera les capacités de données et d’analyse dans l’ensemble du Secrétariat, y compris sur le terrain, a relevé le Directeur.  En ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité, le DMSPC s’efforce d’atteindre la parité à tous les niveaux d’ici 2028 et de fidéliser les talents.  À cette fin, il donne des plans d’action et des données essentielles pour aider les entités onusiennes à réaliser la parité entre les sexes et continuera de prendre des mesures pour mettre en œuvre les Directives et recommandations énoncées dans la Stratégie sur la parité entre les sexes et les Directives d’ONU-Femmes. 

Déclarations

M. OMAR HILALE (Maroc), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé que l’amélioration de l’efficacité du maintien de la paix est une entreprise qui nécessite l’engagement conjoint de toutes les parties prenantes.  Il a réitéré son appel au Secrétariat pour qu’il veille à ce que les politiques soient soumises à l’examen des États Membres avant leur mise en œuvre, au moyen d’un processus de consultation intergouvernemental.  Il a rappelé la contribution de la « feuille de route du Caire pour l’amélioration des performances des opérations de maintien de la paix » à la mise en œuvre d’Action pour le maintien de la paix.  M. Hilale a exprimé son mécontentement quant au fait que la dernière session du Comité spécial des opérations de maintien de la paix n’a pas été en mesure d’adopter un rapport substantiel.  Après avoir rappelé l’engagement du Mouvement à soutenir les efforts visant à assurer l’efficacité des opérations de maintien de la paix, le représentant a réitéré ses positions de principe, notamment son appel à se conformer strictement aux buts et principes de la Charte des Nations Unies et du maintien de la paix, à savoir le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force sauf en cas de légitime défense et de défense du mandat, en plus des principes d’égalité souveraine, d’indépendance politique, d’intégrité territoriale des États.  Le Conseil de sécurité doit formuler des mandats clairs, ciblés, réalistes et réalisables, en consultation avec les États hôtes ainsi qu’avec les pays contributeurs de troupes et de police.  Ces mandats devraient en outre être fondés sur l’appropriation nationale et soutenus par un processus de paix global.  Le délégué a souligné à cet égard le rôle important de la Commission de consolidation de la paix et du Fonds pour la consolidation de la paix dans le renforcement de l’intégration entre le maintien et la consolidation de la paix.  Le soutien financier, humain et logistique adéquats sont tout aussi essentiels aux missions de maintien de la paix que les capacités militaires, a-t-il noté. 

Le Mouvement des pays non alignés continue par ailleurs d’exhorter le Secrétariat à veiller à ce que les pays contributeurs de troupes et de police soient remboursés en temps voulu pour leurs contributions au maintien de la paix.  Le représentant a condamné dans les termes les plus forts les menaces et attaques perpétrées contre les soldats de la paix de l’ONU, en demandant au Secrétariat et aux pays hôtes de travailler en étroite collaboration pour assurer la lutte contre l’impunité.  En tant que plus grand contributeur de troupes, à hauteur de 90%, la sûreté et la sécurité du personnel des missions de l’ONU sont une préoccupation majeure du Mouvement.  Alors que le renseignement en matière de maintien de la paix contribue à renforcer la connaissance de la situation et le partage de l’information, M. Hilale a pris note de la Stratégie pour la transformation numérique des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Les États détiennent la responsabilité première de la protection des civils, a encore dit le représentant, en soulignant la nécessité de poursuivre les consultations avec les États Membres sur la protection du personnel et des installations des missions de maintien de la paix.  Il a de plus réitéré son soutien « total » à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général en matière d’exploitation et d’abus sexuels et condamné fermement toute forme d’exploitation et d’abus commis par le personnel de l’ONU.  Dans ce contexte, le représentant a exprimé son appui au renforcement de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine, y compris dans le domaine du maintien de la paix, sur la base des avantages comparatifs de chaque organisation.  Les opérations de maintien de la paix doivent en outre faire en sorte de ne laisser aucun impact environnemental négatif de leur présence, comme le veut la Stratégie environnementale applicable aux missions sur le terrain. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a souhaité évoquer certains points, le premier étant de rappeler la nécessité d’adopter de bonnes méthodes de travail et des recommandations claires et spécifiques: l’Association a déploré à cet égard que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, également connu sous le nom de Comité des 34, ne soit pas parvenu à un consensus dernièrement.  L’orateur a ensuite insisté sur l’importance pour le Conseil de sécurité de donner des « mandats clairs » aux missions et de procéder en amont à des consultations précoces et rapides avec les parties prenantes ainsi qu’avec les pays fournisseurs de contingents.  En troisième lieu, l’ASEAN a exhorté l’ONU à rembourser de manière immédiate les pays fournisseurs de troupes et à leur fournir un matériel adéquat.  Il a salué l’interaction entre l’ASEAN et l’ONU, et rappelé l’importance du rôle des organisations régionales.  Le représentant a aussi insisté sur le renforcement de la sécurité des Casques bleus, et remercié l’ONU d’avoir appuyé un projet trilatéral en Indonésie et pour ses efforts visant à faciliter les capacités d’évacuation des opérations de maintien de la paix.  Il a enfin loué la contribution et l’efficacité des femmes Casques bleus.

La représentante de l’Union européenne (UE) a rappelé que l’UE déploie près de 5 000 hommes dans des opérations de paix.  Elle est le deuxième contributeur au budget du maintien de la paix avec un engagement financier de près de 1,5 milliard d’euros chaque année.  L’UE mobilise deux missions de paix dont l’IRINI qui met en œuvre l’embargo sur les armes de l’ONU et empêche l’exportation illicite de pétrole depuis la Libye, et EUFOR ALTHEA en Bosnie-Herzégovine qui aide les autorités à maintenir un environnement sûr dans un contexte politiquement difficile.  L’UE contribue en outre à plus de 60% du budget du Fonds pour la consolidation de la paix.  Elle a alloué 1,5 milliard d’euros pour soutenir les efforts de prévention des conflits et de sécurité en Afrique subsaharienne pour la période de 2021 à 2027.  La déléguée a dit être préoccupée par les menaces croissantes contre les soldats de la paix par des acteurs malintentionnés, y compris des mercenaires et par les actions peu coopératives des États hôtes.  Face à ces défis, elle soutient l’initiative « Agir pour le maintien de la paix », a déclaré la représentante. 

L’UE soutient « Action pour le maintien de la paix Plus », a souligné la représentante, qui a ensuite fait six recommandations.  En premier lieu, la nécessité de répondre à la menace croissante des engins explosifs improvisé afin de garantir que les soldats de la paix soient correctement formés et équipés.  Deuxièmement, il faut limiter la diffusion de la désinformation.  Des officiers de communication plus stratégiques devraient être déployés à la fois dans les composantes civiles et militaires des opérations de maintien de la paix.  L’UE soutient la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie numérique triennale pour le maintien de la paix, qui devrait conduire à la fois à une sécurité renforcée pour les soldats de la paix et à une meilleure exécution de leur mandat.  Troisièmement, a ajouté la représentante, le rôle des femmes doit être renforcé à tous les niveaux des opérations de maintien de la paix.  Quatrièmement, les changements climatiques devenant un facteur de conflits, il faut inverser cette tendance et respecter les engagements financiers pour l’atténuation et l’adaptation aux effets des changements climatiques.  Cinquièmement, s’agissant des transitions, il faut assurer un transfert plus fluide des tâches des opérations de maintien de la paix aux équipes de pays des Nations Unies, en mobilisant l’ensemble du système des Nations Unies et les institutions financières internationales.  Enfin, a terminé la représentante, il faut renforcer les composantes des droits humains des missions de maintien de la paix, car elles jouent un rôle vital dans la documentation des violations et la protection de leurs victimes, contribuant ainsi à la lutte contre l’impunité. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a salué les efforts déployés par le Département des opérations de paix pour concevoir une stratégie tenant compte de la santé mentale et du bien-être psychosocial de son personnel, notamment les troubles de stress post-traumatique, dans l’exercice de ses fonctions.  Le Mexique a proposé à cet égard d’accroître la visibilité des questions de santé mentale dans les opérations de maintien de la paix, de fournir une meilleure formation concernant la reconnaissance précoce des conditions qui peuvent affecter la santé mentale, de favoriser une culture de soutien psychosocial pendant les déploiements et de faire en sorte que le personnel reçoive le soutien psychosocial requis.  Le Mexique, a poursuivi le représentant, compte passer à une nouvelle étape en matière d’opérations de maintien de la paix en fournissant de l’équipement pour l’exploitation de drones et en participant au niveau ministériel au Sommet des chefs de police des Nations Unies.  En ce qui concerne le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, le délégué a indiqué que son pays continuera à défendre la participation pleine, égale et significative des femmes aux négociations et aux processus de paix.  Conformément à ses engagements, 25% du personnel mexicain déployé est actuellement composé de femmes, et le Mexique continuera de plaider en faveur de la parité des sexes dans les missions de paix, a précisé le représentant. 

Selon M. JOSÉ ALFONSO BLANCO CONDE (République dominicaine), dans un contexte de crises multidimensionnelles, des mesures supplémentaires sont nécessaires pour renforcer la formation des soldats de la paix préalablement à leur déploiement, afin de garantir un accomplissement optimal de leurs tâches et une mise en œuvre efficace des mandats confiés par le Conseil.  Dans les pays où la fragilité institutionnelle se prolonge, « nous devons nous demander avec honnêteté quand les conditions sont mûres pour le transfert des responsabilités aux autorités nationales », a analysé le délégué.  Trop souvent, ces décisions sont prises sur la base de considérations essentiellement financières, finissant par entraîner des rechutes et des pertes de gains en termes de maintien de la paix. 

Si la pleine participation des femmes aux processus de paix est essentielle pour obtenir des résultats durables et viables, il est aussi crucial de reconnaître et gérer les vulnérabilités particulières des femmes et des filles dans les conflits pour les protéger efficacement, a relevé l’oratrice.  C’est pourquoi il est de la plus haute importance pour la République dominicaine de déployer davantage de conseillères en question de genre et de protection des femmes dans les missions de maintien de la paix.  Un signe des progrès réalisés dans ce domaine est selon lui la coordination accrue entre les pays fournisseurs de troupes et de policiers et les pays fournisseurs de personnels judiciaire et pénitentiaire. 

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a condamné dans les termes les plus forts les actes de violence commis contre les Casques bleus, en soulignant que la responsabilité première de la sécurité du personnel et des biens de l’ONU incombe à l’État hôte.  En tant que pays contributeur de troupes, le Guatemala est préoccupé par le fait que les forces de maintien de la paix sont de plus en plus la cible d’acteurs hostiles et sont confrontées à des menaces asymétriques et complexes dans des environnements politiques et sécuritaires qui se détériorent.  Selon la déléguée, l’ONU doit mettre à jour les principes du maintien de la paix pour refléter le fait que « le casque bleu et le drapeau n’offrent pas une protection naturelle », mais constituent plutôt une cible.  L’ONU et les pays contributeurs de troupes et de police doivent en outre planifier les opérations en se fondant sur l’évaluation des menaces de l’environnement spécifique, et non sur des normes et des politiques plus adaptées au maintien de la paix traditionnel. 

Le Secrétariat doit selon elle demander aux missions de maintien de la paix de documenter systématiquement les violations des accords sur le statut des forces (SOFA), ainsi que toute limitation de la liberté de mouvement, y compris l’entrée d’équipements, d’armes, de munitions et de personnel dans le pays hôte.  La Commission de consolidation de la paix (CCP) doit poursuivre son rôle d’organe consultatif stratégique auprès du Conseil de sécurité des Nations Unies, de l’Assemblée générale des Nations Unies et du Conseil économique et social (ECOSOC), a considéré la déléguée, afin de promouvoir une approche cohérente, coordonnée, intégrée et stratégique de la consolidation et du maintien de la paix, tout en mettant l’accent sur les situations de transition.  Elle s’est félicitée de la mise en œuvre du système global de planification et d’évaluation des performances dans toutes les opérations de maintien de la paix, en tenant compte des contextes politiques, sociaux et culturels afférents à chaque mission. 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a souligné l’urgence d’accélérer les réformes des missions de la paix pour assurer la paix et la sécurité internationales.  Son pays, qui déploie quelque 14 000 Casques bleus, a décidé de mettre en œuvre l’initiative « Action pour le maintien de la paix Plus », a indiqué le représentant, qui a également dit que les Philippines appuient la politique de tolérance zéro contre les abus sexuels et s’engage à former les troupes sur cette question préalablement à leur déploiement.  Des conseillers sur ce sujet seront également intégrés, a poursuivi le délégué, en encourageant la collaboration ONU/ASEAN pour mettre en œuvre la Déclaration conjointe sur le maintien de la paix.  Il a exhorté à augmenter les contributions pour la consolidation de la paix et s’est dit favorable au financement pluriannuel prévisible proposé par le Secrétaire général.  Les Philippines ont quant à elles versé 50 000 dollars américains au Fonds pour la consolidation de la paix en 2022.  Selon le représentant, le succès des opérations doit être mesuré à l’aune de leur capacité à protéger les civils, en particulier des enfants.  Il a suggéré d’investir dans les solutions politiques locales aux conflits et de protéger les civils contre les menaces.  Il faut en outre selon lui donner la priorité à la sûreté des Casques Bleus par le partage de l’information et le renforcement de capacités, combattre la désinformation et la mésinformation et renforcer la participation des femmes aux opérations de paix. 

M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a souligné l’importance d’actualiser les recommandations afin que les opérations de maintien de la paix et les Casques bleus puissent remplir leurs mandats tout en renforçant leur sécurité et leur formation.  Le représentant a appelé à l’adoption de nouvelles approches afin d’assurer la protection des civils, tout en estimant que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix a un rôle unique à jouer en tant que plateforme permettant de réaliser des actions concrètes.  Il est également essentiel selon lui de renforcer le rôle des communautés afin qu’elles génèrent leurs propres systèmes de protection et qu’elles soient conscientes de leurs droits.  S’agissant du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, l’Uruguay demeure engagé à assurer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, à renforcer les droits des femmes et des filles, à éliminer les obstacles structurels qui empêchent leur participation égale à la société et à autonomiser les femmes en tant qu’agents de transformation, éléments essentiels à ses yeux pour parvenir à un développement et une paix durables.  Au niveau national, l’Uruguay a mis en place des politiques visant à favoriser l’accès des femmes aux Forces armées et à la police et adopté, en juillet de cette année, son premier plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité, a-t-il ajouté. 

L’Uruguay est le premier pays à disposer de rapports sur la méthodologie d’évaluation des opportunités pour les femmes dans les opérations de paix, au Ministère de la défense nationale comme au Ministère de l’intérieur, dans le cadre de l’Initiative Elsie, s’est enorgueillie le délégué.  En outre, a-t-il rappelé, l’Uruguay a coorganisé la Conférence ministérielle sur le maintien de la paix qui s’est tenue les 7 et 8 décembre dernier.  L’Armée nationale s’affaire maintenant à planifier une force de réaction rapide et a confirmé ses engagements au titre du Système de préparation des moyens de maintien de la paix, qui garantit la participation des troupes jusqu’au 30 juin 2023. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) s’est dit préoccupé par l’augmentation du nombre des attaques contre les Casques bleus cette année, son pays ayant perdu sept ressortissants au Mali.  Il a appelé le Secrétariat à fournir les capacités financières et pratiques aux missions, à évaluer les données face aux menaces sécuritaires, et à veiller à ce que de tels incidents ne se répètent pas.  Le délégué a aussi plaidé en faveur de mesures de renforcement des capacités des pays hôtes pour que les Casques bleus puissent assumer leurs responsabilités sans obstacle.  Des ponts doivent aussi être bâtis avec les pays hôtes pour expliquer aux populations la nature du maintien de la paix, en sachant gérer les attentes des communautés locales et en se mettant à l’écoute de leurs préoccupations.  Le délégué a souligné la nécessité pour le Conseil de sécurité d’adopter une approche équilibrée à l’égard du maintien de la paix, comprenant des mandats clairs et réalistes, ainsi que la responsabilité de l’Assemblée générale d’allouer des ressources suffisantes.  Il a aussi demandé d’allouer des ressources suffisantes à la composante consolidation de la paix, de maximiser les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales -l’Union africaine et l’ONU-nouent un partenariat crucial à cet égard dans la lutte contre le terrorisme.  Enfin, concernant la participation des femmes, l’orateur a appelé à éviter la mise en place de quotas qui ne seraient pas réalistes. 

M. HOANG GIANG DANG (Viet Nam) a souligné son appui à la mise en œuvre de l’initiative « Action pour le maintien de la paix » et des réformes visant à renforcer l’efficacité du maintien de la paix.  Il a insisté sur l’importance pour les opérations d’avoir des mandats clairs, adaptés aux objectifs et réalistes, en phase avec les réalités du terrain, et leur élaboration impliquer les pays hôtes.  Selon lui, assurer la sûreté et la sécurité des soldats de la paix est une autre exigence vitale.  À cet égard, les Casques bleus doivent recevoir les formations nécessaires et être dotés des capacités suffisantes.  Les missions doivent être équipées d’outils appropriés pour permettre aux Casques bleus de s’acquitter efficacement de leurs mandats et de se protéger des menaces.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Il a terminé en rappelant que des Casques bleus vietnamiens sont actuellement déployés au sein de la MINUSS et de la MINUSCA, outre une unité du génie nouvellement déployée à Abyei.  Le Viet Nam continue d’abriter un Centre international de formation en Asie du Sud-Est pour améliorer la préparation et l’efficacité des soldats de la paix dans la région et dans le monde, a précisé le délégué, qui a également indiqué que les femmes représentent 20% des Casques bleus vietnamiens de la MINUSCA et de la MINUSS. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: le Président du Conseil des droits de l’homme salue le travail des 12 derniers mois, malgré une géopolitique de plus en plus complexe

Soixante-dix-septième session,
24e & 25e séances, Matin & après-midi
AG/12463

Assemblée générale: le Président du Conseil des droits de l’homme salue le travail des 12 derniers mois, malgré une géopolitique de plus en plus complexe

Venu devant l’Assemblée générale présenter le rapport annuel du Conseil des droits de l’homme (CDH), couvrant la période du 1er octobre 2021 au 7 octobre 2022, son Président, M. Federico Villegas, s’est satisfait des actions du CDH au cours d’une période marquée par une géopolitique de plus en plus complexe.  C’est d’ailleurs conscient de ce « contexte de crises imbriquées auxquelles notre monde est confronté » que le Président de l’Assemblée générale a réaffirmé le rôle important et vital de l’organe pour prendre des mesures efficaces et rapides en faveur des droits de la personne. 

Justement, des mesures rapides ont été prises au cours des 12 derniers mois.  Le Président du CDH a rappelé que le Conseil a répondu rapidement aux situations des droits humains qui méritaient son attention urgente, en organisant trois sessions et deux débats d’urgence.  Il a tenu une session extraordinaire sur la situation des droits humains au Soudan, en octobre dernier, avant d’organiser une autre, en décembre dernier, sur la situation des droits humains en Éthiopie, ce qui a débouché sur l’adoption d’une résolution condamnant, dans les termes les plus forts, toutes les violations et abus des droits de la personne et violations du droit international humanitaire et du droit international des réfugiés dans le nord de l’Éthiopie.  De même, le 3 mars de cette année, une semaine seulement après l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Conseil a tenu une réunion d’urgence et décidé de créer une Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine.  

En outre, au cours de ses trois sessions ordinaires, le Conseil a adopté au total 100 résolutions, déclarations et décisions du Président, dont 67 sans vote.  Le CDH a également entendu les rapports de 14 mandats de procédures spéciales spécifiques à un pays, 45 mandats thématiques et 10 mécanismes d’enquête.  En mars dernier, a rappelé M. Villegas, le Conseil a désigné le premier Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques.  Plusieurs délégations, dont les Maldives, ont salué cette nouvelle tendance de mise en relief des droits environnementaux.  Le Président s’est par ailleurs félicité du niveau élevé de participation de la société civile aux travaux du Conseil, précisant qu’en 2022, le CDH a entendu plus de 2 400 interventions orales d’ONG.  

Après avoir appelé les États à coopérer avec les procédures spéciales, M. Villegas a indiqué que l’Examen périodique universel (EPU) continue de bénéficier de 100% de participation, et qu’à chaque cycle, les États Membres, en acceptant les recommandations, s’engagent sur une feuille de route de développement des droits humains.  Là encore, de nombreuses voix ont salué cet exercice entre États, avançant néanmoins quelques suggestions et critiques sur le travail global du CDH.  C’est ainsi qu’au nom des pays nordiques, la Finlande a rappelé le devoir du Conseil de défendre l’exercice des droits humains de chaque individu, en particulier les femmes, les filles, les personnes LGBTIQ+, les peuples autochtones, les personnes handicapées, les minorités religieuses ou ethniques, les défenseurs des droits humains ou encore les pauvres.  Abondant en ce sens, l’Union européenne a appelé le CDH à ne pas fermer les yeux sur certaines situations de violations de droits humains.

Selon le Pakistan, le CDH devrait examiner les situations des droits humains propres à chaque pays sur la base de critères universels et impartiaux, l’engageant en outre à intensifier la lutte contre l’islamophobie.  Même son de cloche pour la Malaisie qui, comme un certain nombre d’États, a attiré l’attention sur les violations des droits humains et l’oppression systémique des Palestiniens et des Rohingya, pointant « le refus de certains membres du Conseil de sécurité qui sont également membres du CDH ».  Le Myanmar a rappelé que le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar ayant déclaré qu’il existe de plus en plus de preuves de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis par la junte, il serait temps de passer à des actions efficaces.  

Pour sa part, l’Ukraine s’est dite prête à coopérer avec la Commission d’enquête pour les crimes commis par la Fédération de Russie en Crimée.  Ce dernier État a en revanche rejeté fermement la résolution du CDH l’incriminant, puisque basée, selon lui, sur de fausses accusations.  La délégation russe a également accusé l’Occident de vouloir transformer le CDH en un club fermé de soi-disant « vraies démocraties » qui veulent établir les règles du jeu pour le reste du monde.  Le Venezuela n’a pas dit le contraire quand il a exprimé sa vive inquiétude face à la prolifération de mécanismes et de procédures prétendant procéder à des évaluations « impartiales » de la situation des droits humains dans certains États.  La délégation qui s’exprimait au nom du Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations Unies a appelé le CDH à donner la priorité à la coopération avec les États et à empêcher son instrumentalisation par des acteurs externes qui cherchent à promouvoir des « intérêts de nature douteuse ».

De même, les États-Unis ont dit leur opposition à l’attitude partiale du CDH concernant Israël, dénonçant le caractère vague du mandat consacré à cette situation.  Ciblés par un droit de réponse de la Chine, les États-Unis se sont vus reprochés de pratiquer une « justice à géométrie variable », comme d’autres pays occidentaux qui passent sous silence leurs propres violations des droits humains.  La délégation chinoise a en outre qualifié le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la région autonome du Xinjiang de « tissu de mensonges ».  

Faisant aussi part de ses récriminations, la Syrie s’est étonnée de voir que les rapports sur la situation des droits humains dans le pays ne mentionnent pas l’agression et l’occupation par des forces étrangères, et encore moins les effets sur les droits humains de sanctions unilatérales à l’encontre du pays. 

Le Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba a, lui aussi, décrié le fait que les violations commises par des pays riches sont passées sous silence alors que d’autres pays, parfois victimes de mesures coercitives unilatérales, sont stigmatisés.  Le cas du blocus sur Cuba sera justement au menu du débat de l’Assemblée générale demain, mercredi 2 novembre, à partir de 10 heures.

RAPPORT DU CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME - A/7753A/77/53/ADD.1

Débat général

En introduction du débat, le Président de l’Assemblée générale, M. CSABA KŐRÖSI, a déclaré que la communauté internationale a parcouru un long chemin pour la promotion et la protection des droits humains, tout en soulignant que la paix et le développement durable ne pourront être garantis que si les droits humains sont garantis pour tous.  Dans le contexte de crises imbriquées auxquelles notre monde est confronté, il a réaffirmé le rôle important et vital du Conseil des droits de l’homme pour prendre des mesures efficaces et rapides en faveur des droits de la personne.  Il a salué la nature globale du travail entrepris par le Conseil qui a su mobiliser tous les acteurs des droits humains et servir de catalyseur des progrès, citant notamment la prise en compte de nouveaux droits en rapport à l’environnement et aux changements climatiques.  Le travail accompli par le Conseil des droits de l’homme est l’indicateur par lequel on pourra mesurer les progrès réalisés par nos sociétés en matière de droits humains, a-t-il estimé.  Il a enfin invité tous les pays à prendre part à l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme. 

M. FEDERICO VILLEGAS, Président du Conseil des droits de l’homme, a présenté le rapport annuel du Conseil des droits de l’homme (CDH), couvrant la période du 1er octobre 2021 au 7 octobre 2022, période marquée par une géopolitique de plus en plus complexe.  Au cours de ses trois sessions ordinaires, le Conseil a adopté au total 100 résolutions, déclarations et décisions du Président, dont 67 sans vote.  Le CDH a également entendu les rapports de 14 mandats de procédures spéciales spécifiques à un pays, 45 mandats thématiques et 10 mécanismes d’enquête.  Le CDH a également entendu les rapports de 14 mandats de procédures spéciales spécifiques à un pays, 45 mandats thématiques et 10 mécanismes d’enquête.  En mars dernier, a rappelé M. Villegas, le Conseil a désigné le premier Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques qui a présenté son premier rapport au Conseil en juin.  Par ailleurs, le Conseil continue de contribuer aux débats sur l’accès aux vaccins et la réponse à la pandémie de COVID-19.

Au cours de la période couverte par le rapport, le Conseil a répondu rapidement aux situations des droits humains qui méritaient son attention urgente, en organisant trois sessions et deux débats d’urgence.  Lors de sa trente-deuxième session extraordinaire sur la situation des droits humains au Soudan, le Conseil a condamné, dans les termes les plus fermes, le coup d’état militaire du 25 octobre, et a demandé au Haut-Commissaire aux droits de l’homme (HCDH) de désigner sans délai un expert en droits de la personne pour surveiller l’évolution de la situation jusqu’au rétablissement d’un gouvernement civil.  En décembre dernier, le Conseil a tenu sa trente-troisième session extraordinaire portant sur la situation des droits humains en Éthiopie qui a débouché sur l’adoption d’une résolution condamnant, dans les termes les plus forts, toutes les violations et abus des droits de la personne et violations du droit international humanitaire et du droit international des réfugiés dans le nord de l’Éthiopie.

De même, le 3 mars de cette année, une semaine seulement après l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Conseil a tenu une réunion d’urgence sur la situation des droits humains en Ukraine et décidé de créer une Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine.  Le Conseil s’est à nouveau penché d’urgence sur cette situation, en mai de cette année, lors de sa trente-quatrième session extraordinaire, et a demandé à la Commission d’enquête internationale indépendante d’examiner les événements qui ont eu lieu fin février et en mars 2022, dans les régions de Kiev, Tchernihiv, Kharkiv et Soumy.  Le Conseil a, en outre, demandé au HCDH de présenter une mise à jour orale sur les graves atteintes aux droits de l’homme et la situation humanitaire à Marioupol à sa cinquantième session, en juin.

En juillet, le Conseil a tenu un débat d’urgence sur les droits fondamentaux des femmes et des filles en Afghanistan.  La résolution issue de ce débat appelle à soutenir les femmes et les filles et à garantir que les organisations de défense des droits des femmes et les organisations locales dirigées par des femmes puissent continuer à œuvrer dans tout l’Afghanistan.  M. Villegas a également évoqué la mise sur pied d’un groupe de trois experts chargés d’enquêter sur toutes les violations présumées des droits humains commises au Nicaragua depuis avril 2018.  Le Conseil a également décidé de nommer un nouveau rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Fédération de Russie et prolongé les mandats nationaux existants.

Lors de sa récente session de septembre, a poursuivi M. Villegas, le Conseil a adopté trois nouvelles résolutions relatives à l’impact des technologies émergentes sur les droits humains, notamment les neurotechnologies, la cyberintimidation et les nouvelles technologies dans le domaine militaire.  Le CDH a également demandé au HCDH de préparer un rapport sur les obstacles à la pleine réalisation des droits humains des peuples des Îles Marshall, en rapport avec l’héritage nucléaire de l’État.  Parmi les autres nouveaux domaines thématiques abordés par le Conseil, cette année, figurent le rôle des États pour contrer l’impact négatif de la désinformation sur la jouissance et la réalisation des droits humains.  Le CDH a également eu l’occasion de réfléchir aux réalisations et leçons apprises depuis sa création, lors d’un événement commémoratif de haut niveau à l’occasion de la cinquantième session.

Après avoir appelé les États à coopérer avec les procédures spéciales, M. Villegas a indiqué que l’Examen périodique universel (EPU) continue de bénéficier de 100% de participation, et qu’à chaque cycle, les États Membres, en acceptant les recommandations, s’engagent sur une feuille de route de développement des droits humains.  Un autre élément clef du travail du CDH est le niveau élevé de participation de la société civile aux travaux, a-t-il ajouté.  Leur diversité de points de vue est essentielle pour comprendre la situation des droits humains sur le terrain, tandis que leurs rôles d’agents de changement les rendent indispensables aux efforts de coopération et de renforcement des capacités.  Il a précisé qu’en 2022, le CDH a entendu plus de 2 400 interventions orales d’ONG.

Le Président a aussi souligné que la presse est un acteur essentiel des activités du Conseil qui court également d’énormes risques pour s’assurer que les histoires de violations des droits de la personne soient mises au jour.  Il a rapporté que, cette année, à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, les Présidents de l’Assemblée générale, de la Conférence générale de l’UNESCO, et du Conseil des droits de l’homme ont, pour la première fois, publié une déclaration commune rappelant l’importance de garantir que les journalistes et autres professionnels des médias puissent exercer librement leur travail, en toute autonomie et en toute sécurité, sans obstacles, menaces ou représailles.

Cette année, le Conseil a du reste adopté plusieurs résolutions contenant des recommandations faites à l’Assemblée générale lui recommandant notamment de soumettre des rapports sur les situations des droits humains au Myanmar et en République arabe syrienne au Conseil de sécurité pour qu’il y donne suite.  Enfin, dans la résolution portant sur la lutte contre le racisme et la xénophobie, le Conseil a demandé à l’Assemblée générale de limiter le mandat des experts éminents à quatre ans, avec une seule possibilité de renouvellement.

S’exprimant au nom du Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a dit attacher la plus grande importance à la promotion et à la protection des droits humains, dans le respect des principes d’impartialité, d’objectivité, de transparence, de non-sélectivité, de non-politisation et de non-confrontation, et en respectant le principe de souveraineté, notamment l’obligation de s’abstenir d’intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale de tout État.  Le Conseil des droits de l’homme devrait donc donner la priorité à la coopération avec les États et empêcher son instrumentalisation par des acteurs externes cherchant à promouvoir des « intérêts de nature douteuse », a-t-il estimé. 

M. Pérez Ayestarán a indiqué que l’Examen périodique universel (EPU) était le mécanisme le plus approprié pour des discussions constructives sur les situations des droits de l’homme dans le monde.  Réaffirmant son rejet catégorique des deux poids, deux mesures, il a exprimé sa vive inquiétude face à la prolifération de mécanismes et de procédures prétendant procéder à des évaluations « impartiales » de la situation des droits humains dans certains États.  Il a regretté qu’elles se déroulent souvent sans le consentement de l’État en question et que leurs rapports se fondent sur des sources secondaires, tertiaires ou autres, transformant ces documents en simples pamphlets de propagande.

Le délégué a réaffirmé sa ferme condamnation des mesures coercitives unilatérales visant à promouvoir des programmes de déstabilisation qui ont un impact dramatique sur la pleine jouissance des droits de plus d’un tiers de l’humanité.  Il a affirmé qu’elles entravent l’accès à la nourriture, aux médicaments, aux traitements médicaux, aux services financiers, à l’éducation, aux avancées technologiques, aux sources d’énergie, tout en fournissant une prétendue couverture légale pour la confiscation des ressources souveraines déposées dans les systèmes bancaires nationaux concernés.  Il a dénoncé des « agressions cruelles et inhumaines » qui affectent gravement les politiques sociales de plus de 30 pays dans le monde, ainsi que la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). 

M. Pérez Ayestarán a jugé « immoral et totalement contradictoire » pour certains gouvernements de se présenter comme des champions des droits humains alors qu’ils appliquent « illégalement » des mesures coercitives unilatérales et commettent quotidiennement des violations massives -voire des crimes contre l’humanité– des droits humains de milliards de personnes dans le monde.  Concluant son propos, il a estimé essentiel d’éliminer les pratiques de politisation des droits humains pour éviter que le Conseil ne connaisse le même sort que son prédécesseur, la Commission des droits de l’homme. 

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne, a affirmé que les États membres de l’Union ont toujours appuyé le Conseil des droits de l’homme et continueront de le faire.  Ils appuient de même ses procédures et mécanismes comme l’Examen périodique universel et les procédures spéciales.  L’UE, qui est pleinement engagée dans ses travaux, a par exemple initié plusieurs résolutions thématiques ou de pays, comme celles relatives aux situations au Bélarus ou au Myanmar ou aux droits de l’enfant ou des femmes. 

Le représentant a également déclaré que tous les auteurs de violations doivent être tenus responsables de leurs actes, notamment celles perpétrées en Ukraine, en Iran, au Myanmar, en Syrie ou au Bélarus.  Nous ne devons pas fermer les yeux ou faire la politique de l’autruche, a-t-il ajouté, se félicitant de l’adoption récente de résolutions relatives à la situation des droits de la personne au Venezuela ou de la création d’un mandat de Rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Fédération de Russie, par exemple.

Le délégué a aussi déclaré que la société civile joue un rôle primordial dans les mécanismes du Conseil des droits de l’homme.  De ce fait, les personnes qui coopèrent avec cet organe doivent être protégées de toutes représailles.  Il a enfin rappelé aux nouveaux membres élus du Conseil leur responsabilité de promouvoir les normes les plus élevées des droits humains et coopérer avec les mécanismes du Conseil, en particulier les détenteurs de mandat de procédures spéciales, qui doivent recevoir des invitations permanentes.

Au nom d’un groupe de pays, M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a axé son intervention sur le conflit en cours au Yémen.  Convaincu que la seule solution durable à la crise dans ce pays est une solution politique sous l’égide des Nations Unies, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité telles que la résolution 2216 (2015), le groupe a souligné qu’en l’absence de progrès, à cet égard, le peuple yéménite allait continuer de souffrir.  Se félicitant de l’adoption par le Conseil des droits de l’homme de la résolution A/HRC/RES/51/39, relative à l’assistance technique et au renforcement des capacités du Yémen dans le domaine des droits humains, le groupe a souhaité saisir l’occasion pour souligner le travail essentiel accompli, à ce jour, par la Commission nationale d’enquête, « en dépit de l’absence d’un système d’alerte précoce » et malgré les défis rencontrés sur le terrain.  Le soutien continu au mécanisme national au Yémen va dans l’intérêt de la population yéménite, par une action de surveillance du respect des droits humains et par des enquêtes, a expliqué le représentant.

Il a ensuite condamné dans les termes les plus vifs la persistance des milices houthistes à refuser à la Commission nationale d’enquête un accès aux informations pertinentes, un accès formel aux zones qu’elles contrôlent, ou même de répondre à sa correspondance.  Il a sommé les milices de coopérer immédiatement.  Profondément déçu de l’échec de la prolongation de la trêve au Yémen, le représentant a affirmé que « les demandes insensées des houthistes », dans les derniers jours des négociations, avaient entravé les efforts de l’ONU, alors même que les six derniers mois de la trêve avaient apporté plus de calme et de sécurité dans le pays, avec une forte réduction du nombre de victimes civiles.  « Sans la trêve, le sort des civils yéménites va se détériorer », a formulé le représentant.

S’exprimant ensuite à titre national, M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a remercié le CDH d’avoir réaffirmé la protection des mécanismes nationaux d’enquêtes sur les violations des droits humains en adoptant une résolution à ce sujet.  Le Yémen a fourni toutes les capacités nécessaires pour que la Commission nationale d’enquête fasse son travail, a-t-il précisé.  L’orateur a condamné les violations pratiquées par les milices houthistes dans les zones qu’elles contrôlent, violations comprenant la torture, les arrestations arbitraires, le recrutement d’enfants soldats, les violences sexuelles et sexistes et le travail forcé dans les mines, entre autres.  Les milices ciblent les infrastructures économiques et civiles dont les infrastructures pétrolières, exacerbant la crise humanitaire dans le pays, a encore dénoncé le représentant du Yémen, en rappelant que le dernier de ces attentats, qui a ciblé le port pétrolier de Hodeïda, a été condamné par le Conseil de sécurité, à la fin d’octobre.  Le représentant yéménite a appelé la communauté internationale à condamner ces attentats terroristes ayant mis fin à la trêve.

Au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), Mme KAARINA AIRAS (Finlande) a salué le leadership neutre et impartial de la présidence du Conseil des droits de l’homme qui est un organe clef du système multilatéral.  Elle a rappelé le devoir du Conseil de défendre l’exercice des droits humains de chaque individu, en particulier les femmes, les filles, les personnes LGBTIQ+, les peuples autochtones, les personnes handicapées, les minorités religieuses ou ethniques, les défenseurs des droits humains ou encore les pauvres.  Elle a pris note de la détermination du Conseil à répondre à l’agression de la Russie contre l’Ukraine, et à la situation profondément préoccupante des droits humaines en Russie, en Afghanistan et en Syrie où le CDH peut, à son avis, faire davantage.

La représentante a regretté qu’une majorité au sein du Conseil ait refusé de donner suite au rapport sur le Xinjiang et que le Conseil n’ait pas été en mesure d’assurer une surveillance et d’établir un rapport, qui soient indépendants et impartiaux, sur la situation au Yémen.  Le CDH devrait prendre en compte les évaluations et les recommandations du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et les procédures spéciales, a recommandé la représentante, qui a ensuite réclamé des ressources prévisibles pour que ces organes puissent remplir leurs mandats respectifs.  La représentante a également soutenu le rôle de la société civile et des défenseurs des droits humains sans lesquels le Conseil des droits de l’homme ne peut remplir son mandat.

Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives) a rappelé que les Maldives avaient conduit leur troisième Examen périodique universel en 2020.  En 2021, elles ont conclu avec succès l’examen de leur sixième rapport à la quatre-vingtième session de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, réitérant leur engagement ferme à mettre en œuvre et à renforcer les mesures pour mettre fin à la violence domestique et sexiste et à la discrimination contre les femmes et les filles, afin de réaliser pleinement les cibles de l’ODD 5.  La déléguée a rappelé que les Maldives ont une longue et fière histoire de plaidoyer pour la question climatique.  Nous préconisons également, depuis longtemps, de tenir compte des implications des changements climatiques sur les droits humains, a-t-elle dit.  À cet égard, a-t-elle indiqué, nous avons fourni des efforts pour la reconnaissance qu’un environnement propre, sain et durable est un droit humain, comme cela fut consacré à travers la résolution historique 48/13 adoptée par le CDH.  Mme Hussain a ensuite déclaré que le peuple palestinien mérite de vivre en liberté dans un État indépendant, plaidant en faveur de la solution des deux États, avec un État palestinien basé sur les frontières d’avant 1967, et avec Jérusalem-Est comme capitale.

Mme MARIA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) s’est félicitée du fait que la présidence du Conseil des droits de l’homme ait été attribuée à son pays, marquant son engagement sur ce dossier.  Elle a rappelé que le Conseil avait organisé une réunion sur les droits humains des personnes âgées les 29 et 30 août derniers en vue de créer un instrument juridiquement contraignant.  La déléguée s’est ensuite félicitée du renouvellement des mandats de l’Expert indépendant chargé de promouvoir l’exercice par les personnes âgées de tous les droits humains et de l’Expert indépendant chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre.  Elle s’est prononcée en faveur de l’universalisation de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Mme NOEMÍ RUTH ESPINOZA MADRID (Honduras) a rappelé que l’élection de son pays, pour la première fois, en tant que membre du Conseil des droits de l’homme (CDH) en 2021, avait été un événement national.  Elle a affirmé que son gouvernement a pour objectif principal de garantir la défense fidèle et la protection des droits de la personne.  La Constitution hondurienne consacre d’ailleurs de nombreux droits en rapport avec le respect de la dignité de la personne humaine.  Pour la Présidente Xiomara Castro, il est vital de procéder à un travail mémoriel et d’apporter justice et réparations pour les victimes de violations de droits humains, afin que les faits ne se répètent pas.  En tant que membre du Conseil, le Honduras, a expliqué la déléguée, a joué un rôle actif pour la défense des droits à travers le monde, s’exprimant avec force dans des situations qui compromettent les droits humains dans le monde et dans lequel le Conseil doit agir, comme le respect des droits des peuples autochtones, des personnes d’ascendance africaine, des personnes LGBTI et des migrants, ainsi que d’autres groupes vulnérables.  Le pays soutient également la promotion des droits des femmes et des filles et reconnaît l’universalité, l’interdépendance et l’interrelation des droits économiques, sociaux, culturels, civils, politiques et des droits au développement.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a déclaré qu’en tant que membre du Conseil des droits de l’homme, le Qatar a accompli de grandes réalisations dans le domaine de la promotion et de la protection des droits humains, et en particulier dans l’élaboration et l’harmonisation de la législation nationale pour qu’elle se conforme au droit international des droits de l’homme.  Le Qatar, a-t-elle poursuivi, s’engage à continuer à jouer un rôle constructif et impartial, notamment par la médiation, pour résoudre les crises dans la région du point de vue des droits humains, tout comme il a placé la réalisation de ces droits au centre de ses généreux programmes internationaux d’aide et de développement mis en œuvre dans de nombreuses régions du monde.

La représentante a également déclaré que la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés reflète la poursuite des violations flagrantes de ces droits à l’encontre du peuple palestinien, dans un climat d’impunité totale.  Faisant référence à l’assassinat de journalistes, notamment Shireen Abu Akleh, la représentante a appelé à l’ouverture d’enquêtes immédiates, complètes, transparentes et impartiales pour s’assurer que les responsables répondent de leurs actes.  Il faut, en outre, assurer au peuple palestinien la jouissance de ses droits inaliénables garantis par le droit international, le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, a-t-elle plaidé.  Enfin, évoquant le tournoi de la Coupe du monde de football 2022 qui se déroule, cette année, au Qatar, elle a fait remarquer que son pays a tenu à accorder l’attention nécessaire au rôle important du sport, en particulier du football, dans la promotion de la paix, du développement et du respect des droits humains, comme prévu par les objectifs de développement durable et dans la résolution 76/259 de l’Assemblée générale.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) s’est dit préoccupé par le nombre croissant de conflits dans le monde et l’aggravation des inégalités face auxquelles les femmes, les enfants, les personnes handicapées et les personnes âgées étaient les plus vulnérables.  Il a aussi dénoncé la montée du racisme, de la discrimination raciale et de l’intolérance, se félicitant de l’adoption de la résolution sur ce sujet lors de la dernière session du Conseil des droits de l’homme.  Il s’est inquiété des oppositions qui persistent au sein du Conseil pour avancer sur ce sujet, notamment concernant l’élaboration de normes complémentaires à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Rappelant que le mandat de la Namibie au Conseil se termine en décembre prochain, il a affirmé qu’elle était particulièrement reconnaissante au Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) pour l’assistance technique fournie qui lui avait permis d’atteindre les dernières étapes de la mise en place de sa base de données nationale de suivi sur les questions concernant les droits humains.

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) s’est félicité que le CDH ait promptement réagi à l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine.  L’établissement de la Commission d’enquête internationale sur l’Ukraine et la création d’un mandat de Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Russie sont des réponses proportionnées et adéquates, a-t-il estimé.  Il a, en revanche, regretté que le Conseil des droits de l’homme n’ait pas accepté de tenir un débat sur la situation des droits humains dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang en Chine, compte tenu de l’évaluation du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, selon laquelle de « graves violations des droits de l’homme qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité » sont commises au Xinjiang.  Il a par ailleurs plaidé pour une reprise du suivi de la situation au Yémen et pour un nouveau mécanisme de reddition des comptes.

Le délégué suisse a enfin déploré « les efforts continus de certains États » pour empêcher les organisations issues de la société civile de participer aux travaux des Nations Unies.  Il a réaffirmé que tout acte d’intimidation et de représailles à l’encontre de celles et ceux qui ont coopéré, coopèrent ou cherchent à coopérer avec l’ONU, était inacceptable.

M. GVARAM KHANDAMISHVILI (Géorgie) a félicité le Conseil pour son engagement continu dans la défense des droits humains à travers le monde, ainsi que pour sa réponse rapide à ces défis, comme le laisse voir la création de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, conformément à la résolution 49/1 du CDH.   En tant que membre du Conseil pour les trois prochaines années, la Géorgie, a expliqué le délégué, entend concentrer ses efforts sur la protection et la promotion des droits des groupes les plus vulnérables, avec un accent sur les femmes et les filles, les enfants et les personnes handicapées, les minorités, les déplacés internes et les personnes affectées par les conflits.  Il a également indiqué que son pays a adressé une invitation permanente à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, et déjà accueilli plusieurs visites.  La Géorgie a en outre fait une contribution financière volontaire d’un montant de 7 000 dollars pour l’année 2022 afin de promouvoir la participation des pays les moins avancés (PMA) et des petits États insulaires en développement (PEID) au travail du CDH.  Le délégué a ensuite regretté que, malgré les appels répétés du Conseil, la Puissance occupante continue d’empêcher le CDH et d’autres organisations internationales de surveillance des droits humains d’entrer dans les régions d’Abkhazie et de Tskhinvali en Géorgie, lesquelles sont occupées par la Russie.

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) s’est vivement félicitée de l’adoption à l’unanimité de la résolution sur l’importance de l’enregistrement des victimes pour la promotion et la protection des droits humains, et a affirmé attendre avec impatience le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) sur la manière dont l’enregistrement des victimes peut contribuer au respect et à la réalisation de leurs droits, notamment le droit à la vérité, le droit d’obtenir un recours effectif et une réparation, et l’accès à la justice.

Elle a estimé que le Conseil a rempli son mandat en condamnant avec la plus grande fermeté les violations des droits humains résultant de la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Elle a évoqué la publication du premier rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine qui fait état de crimes de guerre et de violations du droit international humanitaire.  Elle s’est également félicitée de la décision prise par le Conseil, le mois dernier, de nommer un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie. 

A contrario, elle a déploré les difficultés rencontrées dans le suivi du rapport du HCDH sur la situation des droits humains dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, décriant notamment le rejet d’un projet de décision demandant la tenue d’un débat sur les conclusions troublantes dudit rapport.  Il est regrettable qu’une faible majorité des membres du Conseil ait refusé de débattre à ce sujet, a-t-elle indiqué, rappelant que la résolution fondatrice du Conseil (60/251) prévoit que ses membres doivent respecter les normes les plus élevées en matière de promotion et de protection des droits de l’homme.  La représentante a par ailleurs condamné le meurtre de Mahsa Amini, estimant essentiel que le Conseil envoie un signal fort de solidarité au peuple iranien, en particulier à ses femmes courageuses, qui risquent leur vie en défendant, chaque jour, les droits de la personne.

Mme NATALIIA MUDRENKO (Ukraine) a dit être convaincue que le Conseil des droits de l’homme devrait renforcer sa composante prévention, dans le contexte où de nombreux conflits éclatent dans le monde.  La Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, créée par le Conseil des droits de l’homme, est un exemple de ces mécanismes de prévention que le Conseil devrait continuer à mettre en place, en raison de sa contribution à la lutte contre l’impunité, a recommandé la déléguée.  Elle a noté que la Commission a ainsi documenté de nombreuses violations des droits humains commises par la Fédération de Russie dans la guerre qu’elle mène contre l’Ukraine.  Parmi elles, des attaques aveugles à l’arme explosive dans des zones civiles, des exécutions sommaires et arbitraires, des violences physiques et sexuelles, des détentions ou encore des déportations, a déploré la représentante.  Les auteurs de ces actes ainsi que leurs commandants doivent en répondre, a-t-elle réclamé.  Elle a également exprimé son soutien aux mécanismes de la Commission des droits de l’homme tels que l’Examen périodique universel.  Enfin, elle a assuré que l’Ukraine entend coopérer avec la Commission d’enquête pour les crimes commis par la Fédération de Russie en Crimée.

Mme LI XIAOMEI (Chine) a regretté que certains pays utilisent les droits humains pour s’immiscer dans les affaires internes d’autres pays, et mis en garde contre une politisation excessive du concept de droits humains.  Elle a pris pour exemple la multiplication de résolutions portant sur des pays précis sans leur assentiment.  Certaines missions ont outrepassé leur mandat, adopté une approche sélective et violé les principes élémentaires de neutralité, alors que les questions liées aux droits économiques, sociaux, culturels et au droit au développement sont minorées par le CDH, a reproché l’oratrice.  La déléguée chinoise a affirmé que l’Union européenne, la Finlande, la Suisse, le Liechtenstein, les États-Unis ont fait fi des faits et fabriqué des mensonges au sujet de la région autonome du Xinjiang, qualifiant en outre le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de « tissu de mensonges ».

Reprochant les « deux poids, deux mesures », une « hypocrisie », une « justice à géométrie variable », de la part de pays qui passent sous silence leurs propres violations des droits humains, la déléguée a rétorqué que rien n’avait été dit lorsque le Xinjiang était la cible d’attaques terroristes.  Maintenant que le Xinjiang vit une période de prospérité sans précédent, alors on essaie de salir le nom de la Chine, a tempêté l’oratrice.  Selon elle, ce que traduisent ces rapports et ces allégations, ce ne sont pas des violations des droits humains au Xinjiang, mais les tentatives hégémoniques des pays occidentaux, qui cherchent à empêcher le bon développement de la Chine.  Elle a affirmé que la promotion des droits humains est l’un des principaux objectifs du Parti communiste chinois et du peuple chinois.  Alors que le vingtième Congrès du Parti vient de se terminer, les peuples chinois vigoureux, confiants, vont entamer une nouvelle étape dans la construction de la Chine, pour parvenir à un pays « plus beau, plus prospère, plus harmonieux, au service des peuples et de leur bonheur », a conclu la représentante chinoise.

M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a dit être préoccupé par la politisation des organes des droits de l’homme y compris le « mandat de prévention » du Conseil qui ignore les situations d’occupation et de domination par une puissance étrangère.  L’occupation forcée de territoires et l’oppression des peuples qui l’accompagne sont la principale cause de violations flagrantes, systématiques et généralisées des droits humains, a-t-il souligné.  Le représentant a appelé à prendre des mesures décisives pour prévenir et réparer les violations des droits humains de manière universelle et non sélective, en particulier dans les situations d’occupation et de domination étrangères.  Les puissances occupantes recourent à des lois draconiennes pour créer l’impunité pour leur oppression et leurs crimes et éviter de rendre des comptes, a contesté le représentant.  Il a dénoncé un stratagème colonial qui consiste à dépeindre les luttes légitimes pour l’autodétermination et la libération comme du terrorisme.

Selon le représentant, le CDH devrait examiner les situations des droits humains propres à chaque pays sur la base de critères universels et impartiaux.  Il devrait s’abstenir de viser uniquement des États plus faibles, tout en ignorant les crimes et les atrocités des partenaires stratégiques importants.  Il a regretté que les expressions de haine raciale, de suprématie religieuse et de nationalisme violent soient devenues monnaie courante.  L’islamophobie a été intégrée dans le discours politique de certains partis politiques et gouvernements et est devenue un phénomène omniprésent, a-t-il relevé, en constatant qu’elle se manifeste par des appels à l’expulsion des musulmans, des restrictions sur le hijab et d’autres pratiques musulmanes, des provocations, telles que le fait de brûler le Coran et de détruire des lieux saints et des symboles islamiques, des caricatures et la discrimination et la violence contre les musulmans.  Le CDH doit promouvoir une action spécifique pour lutter contre l’islamophobie, a conclu le représentant.

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a condamné fermement l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, laquelle a dramatiquement détérioré les droits humains dans le pays.  Il a rappelé que, cette année, les États ont décidé que la Fédération de Russie n’appartient pas au Conseil des droits de l’homme, l’organe de l’ONU qui protège et promeut les droits humains.  Nous devrions toujours avoir les moyens de tenir tête aux agresseurs, y compris dans ce domaine, pour montrer que l’agression ne sera pas tolérée, a-t-il plaidé.  La Croatie estime que le travail de la société civile et des défenseurs des droits humains est indispensable dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de la personne aux niveaux national et multilatéral, a-t-il indiqué.  Il a souligné que, dans certaines situations, leurs voix sont les premiers avertissements sur les graves violations et abus des droits humains qui se profilent.  Pour lui, il est de la responsabilité de l’État de fournir un environnement sûr, exempt de représailles et d’intimidations, y compris à l’encontre d’individus ou de groupes coopérant avec l’ONU, ses représentants et ses mécanismes dans le domaine des droits humains.  Il a enfin appelé à envisager sérieusement d’étendre la possibilité de participation de la société civile à l’Assemblée générale et au Conseil économique et social, en droite ligne des bonnes pratiques du CDH.

M. ALHAJERI (Koweït) a souligné que le respect des droits humains était un marqueur de développement.  Il a affirmé que son pays les protégeait et les promouvait, notamment grâce à sa Constitution, et avait déjà atteint la plupart des objectifs de développement durables (ODD).  Il a insisté sur le fait que le Koweït travaillait en faveur de l’égalité entre les genres, indiquant qu’il avait ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  Le délégué a par ailleurs appelé à respecter les droits humains du peuple palestinien et des Rohingya.   

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a déclaré qu’il est de la responsabilité des États de protéger et respecter les droits humains.  Pour cela, les États peuvent et doivent travailler ensemble, y compris avec le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, tout en respectant son indépendance, pour mettre en œuvre l’appel du Secrétaire général en faveur des droits de la personne.  La représentante a également indiqué que son pays est très actif et participe à nombre d’initiatives prises au Conseil des droits de l’homme.  Il promeut des initiatives de lutte contre la lèpre, pour la parité, la diffusion transversale des droits humains, la participation des petits États insulaires, et s’engage contre toutes les formes de discriminations, telles que le racisme, ou encore contre la peine de mort, a-t-elle détaillé.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) s’est inquiété de la polarisation croissante empêchant le bon fonctionnement du CDH et a, dans un second temps, défendu le mécanisme de l’Examen périodique universel.  Les crises en cascade ont des conséquences négatives sur les droits humains et le droit au développement, un droit inaliénable, universel et collectif, a constaté et rappelé le délégué.  Il a regretté le manque de progrès en la matière, et également que le CDH crée de nouveaux mandats qui ne fassent pas consensus.  Il s’est aussi alarmé de la hausse générale de la xénophobie et de l’intolérance, via les réseaux sociaux notamment.  Il a appelé à établir davantage de normes pour régir les plateformes, juguler les agissements de la criminalité organisée transnationale ainsi que des organisations terroristes.

M. AZRIL BIN ABD AZIZ (Malaisie) a appelé le Conseil à promouvoir les valeurs d’engagement constructif, de coopération, d’inclusion, de transparence et de respect mutuel.  Toutes les violations des droits humains devraient être traitées avec la même urgence et vigueur, quel que soit l’endroit où elles se produisent, a-t-il estimé.  Il ne faut pas fermer les yeux sur les violations des droits humains et l’oppression systémique des Palestiniens et des Rohingya à cause du refus de certains membres du Conseil de sécurité, qui sont également membres du Conseil des droits de l’homme.

Le représentant a également regretté les tentatives d’introduire des concepts des droits humains qui sont incompatibles avec les instruments existants.  Le Conseil doit tenir compte des points de vue de tous les groupes régionaux afin d’accroître l’adhésion et d’améliorer le respect des droits humains.  Il a dit être très préoccupé par la politisation croissante des travaux du Conseil, exhortant à éviter de telles actions pour empêcher le Conseil de connaître le même sort que son prédécesseur.

M. PENALVER PORTAL, Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba, a déploré les « deux poids, deux mesures » et les « manipulations politiques » en matière de droits humains, qui, a-t-il averti, affaiblissent les Nations Unies.  La politisation fait rage dans ce domaine, et les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales devraient travailler avec des informations objectives, a-t-il observé.  Les violations commises par des pays riches sont passées sous silence alors que d’autres pays, parfois victimes de mesures coercitives unilatérales, sont stigmatisés, a-t-il notamment déploré.

Appelant avec force à préserver l’Examen périodique universel, le Vice-Ministre cubain a appelé à renforcer le mandat du CDH, mais a aussi intimé au Conseil d’en faire davantage pour œuvrer à l’élaboration d’un ordre international plus juste qui remplacerait l’ordre international actuel, de nature hégémonique, entretenant l’injustice et le sous-développement.  Il a également appelé le Conseil à évaluer l’impact délétère des mesures coercitives unilatérales sur les droits humains.  

Mme JOANNA SYLWIA SKOCZEK (Pologne) a souligné que, dans sa politique étrangère, la Pologne attache une importance particulière au respect des droits des personnes les plus vulnérables, comme les enfants et les personnes handicapées.  Nous plaidons pour la pleine réalisation de la liberté de religion ou croyance pour tous, a-t-elle indiqué.  Elle a assuré que le maintien des normes les plus élevées de bonne gouvernance se traduit directement par une meilleure protection des droits humains.  Elle a condamné la guerre illégale et non provoquée menée par la Russie contre l’Ukraine, laquelle s’est soldée par des violations brutales et horribles des droits humains.  Leurs auteurs doivent être tenus pour responsables, a-t-elle dit.  La représentante a aussi déploré la détérioration de la situation des droits de la personne au Bélarus, notamment les violations des droits des minorités nationales, y compris la minorité polonaise et la communauté catholique.  De même, elle a dit être profondément préoccupée par la détérioration constante de la situation des droits humains en Fédération de Russie, comme l’illustrent les détentions, la législation répressive et le rétrécissement de l’espace d’exercice des libertés fondamentales.  Elle a conclu, en appelant le CDH a accordé une attention particulière à la situation des droits humains en Ukraine, au Bélarus et en Fédération de Russie.

M. AHMED SAHRAOUI (Algérie) a rappelé que son pays était un membre fondateur du Conseil des droits de l’homme et a estimé important de mettre à jour ses méthodes de travail.  Il a appelé à rejeter toute politisation des droits de la personne et à lutter contre les deux poids, deux mesures en matière de droits humains.  Il a souligné la primauté de l’Examen périodique universel (EPU) et l’importance de la complémentarité entre les mécanismes nationaux et internationaux dédiés.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a déclaré qu’aujourd’hui, plus que jamais, le travail du Conseil des droits de l’homme est essentiel pour surmonter les crises et les urgences multidimensionnelles résultant des tensions géopolitiques, des effets durables de la pandémie et des crises dans les domaines économique, social et climatique.  C’est pourquoi la polarisation croissante des travaux de cet organe est préoccupante, tant elle se fait au détriment du développement progressif du droit international des droits de l’homme. 

Elle a jugé essentiel que le Conseil continue d’accorder une attention particulière à la promotion des droits de toutes les personnes en situation de vulnérabilité, telles que les minorités, les enfants et les adolescents, les femmes, les personnes handicapées, les personnes LGBTIQ+, les peuples autochtones, les personnes d’ascendance africaine, les personnes âgées, ainsi que les réfugiés, les personnes déplacées et les migrants, entre autres.  Elle s’est par ailleurs félicité des mesures convenues par les présidents des organes conventionnels à leur trente-quatrième réunion pour renforcer l’efficacité du système, insistant en outre sur l’importance des contributions des organisations de la société civile aux travaux du Conseil des droits de l’homme. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a déclaré que le projet de résolution sur le Myanmar qui sera déposé par des États Membres à la Troisième Commission informera l’Assemblée générale de la situation sur le terrain, en particulier depuis le coup d’état militaire illégal et les crimes odieux commis par l’armée contre le peuple du Myanmar.  Selon le représentant, plus de 2 400 personnes ont été brutalement tuées et près de 16 000 ont été arbitrairement arrêtées par l’armée.  Plus de 1,4 million de personnes ont été déplacées à travers le pays et quelque 15,2 millions sont en situation d’insécurité alimentaire.  En septembre dernier, 13 personnes, dont 7 enfants, ont été tuées par des attaques aériennes de l’armée contre une école du village de LatYatKone.  La semaine dernière, les avions de combat militaires terroristes ont bombardé et attaqué des civils lors du concert de musique organisé à A Nang Pa, pour célébrer le soixante-deuxième anniversaire de la Journée de l’Organisation indépendante Kachin, et tué environ 100 personnes.  Selon des informations crédibles, la junte militaire continuera à mener des frappes aériennes dans l’État de Kachin, a annoncé le représentant.

Le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar a déclaré qu’il existe de plus en plus de preuves de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis par la junte, a indiqué le délégué, estimant que le temps est venu de transformer les preuves en actions efficaces.  Il a demandé au Conseil de sécurité d’utiliser ces preuves par l’armée du Myanmar pour renvoyer la situation à la Cour pénale internationale.  Il a regretté l’impunité dont la junte continue de bénéficier comme si rien de ce que le Conseil des droits de l’homme a décrit dans les résolutions à la communauté internationale ne s’était produit, comme si aucune de ces vies innocentes n’avait d’importance.  Il a exhorté le Conseil des droits de l’homme à explorer d’autres voies notamment la soumission de diverses preuves de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre de l’armée fasciste reçues par le mécanisme d’enquête au Conseil de sécurité afin de sauver la vie du peuple du Myanmar des atrocités de l’armée.  Le CDH doit écouter la voix du peuple du Myanmar et permettre à son représentant de participer aux réunions du Conseil des droits de l’homme.

M. NASEER AHMAD FAIQ (Afghanistan) a indiqué que tous les acquis de l’Afghanistan en matière de droits humains ont été annulés suite à la prise de contrôle de l’Afghanistan par les Taliban le 15 août 2022.  Aujourd’hui, la situation des droits de la personne y est extrêmement préoccupante, a-t-il indiqué, évoquant des exécutions sommaires ou extrajudiciaires, des détentions arbitraires, des déplacements forcés, des punitions collectives, ainsi que des violences contre des manifestants pacifiques et des journalistes.  La situation des femmes et des filles est également très préoccupante, avec notamment l’imposition systématique de politiques discriminatoires par les Taliban pour limiter leurs droits et libertés fondamentaux.

Pour faire face à cette situation, il a appelé à renforcer davantage les mécanismes de surveillance et d’établissement de rapports, notamment par l’intermédiaire de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) et du Rapporteur spécial.  Ce n’est que grâce à un gouvernement inclusif et responsable fondé sur l’état de droit, la justice et la volonté du peuple et l’inclusion pleine, égale et significative des femmes dans tous les segments de la société afghane que la justice, la paix et la sécurité pourront être garanties en Afghanistan, a-t-il souligné.

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a souhaité que le travail du CDH soit toujours empreint de dialogue et de probité.  Il a dit que le travail du Conseil doit se focaliser sur la coopération technique, au lieu de mener des activités de surveillance.  Il a salué l’entame de l’Examen périodique universel qui est un outil dépolitisé et impartial.  En tant que membre du CDH, le Kazakhstan y prend part de bonne foi.  Le délégué a indiqué que son pays entend poursuivre sa collaboration avec les instances onusiennes dans le but de promouvoir les droits humains à l’échelle internationale. 

M. ASHISH SHARMA (Inde) a déclaré qu’alors que ces 16 dernières années, le Conseil des droits de l’homme a renforcé le consensus sur un large éventail de questions thématiques, il doit maintenant chercher un consensus autour de questions telles que la protection des droits humains dans le cyberespace, l’impact de l’intelligence artificielle, de la génétique et d’autres technologies émergentes sur les droits de la personne, de même que sur les questions relatives au terrorisme, qui est devenu l’une des principales menaces à la pleine jouissance de tous les droits de l’homme.

Par ailleurs, a poursuivi le représentant, le travail du Conseil doit se poursuivre de manière équitable dans le respect de la souveraineté nationale, l’intégrité territoriale et la non-ingérence dans les affaires intérieures des États.  Les initiatives spécifiques à chaque pays doivent bénéficier du soutien des États concernés afin qu’elles conduisent à l’impact souhaité sur le terrain, a-t-il souligné.  Par ailleurs, une représentation géographique plus équilibrée dans tous les organes et mécanismes du Conseil est nécessaire pour promouvoir l’objectivité et l’efficacité, notamment parmi les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, a dit le représentant.

M. IGOR PILIPENKO (Bélarus) a posé une série de questions, demandant à l’Assemblée générale si le Conseil des droits de l’homme menait son travail sur une base équitable, en respectant ses principes, en travaillant sur tous les droits humains de la même manière et si ses activités permettaient de prévenir les violations des droits humains.  Il a estimé que la réponse était non dans tous les cas et dénoncé l’utilisation de principes idéalisés, ne prenant pas en compte les niveaux de développement et le contexte des différents pays.  Il a déploré des pressions de la part du Conseil qui ne respecte pas la souveraineté des États et s’ingère dans leurs affaires intérieures.  Il a rejeté le rapport concernant son pays, dénonçant la volonté d’un groupe d’États de servir leurs propres intérêts à son détriment. 

Mme SULAFA HAMID I. MOUSA (Arabie saoudite) a appelé le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à continuer de fournir un appui au Gouvernement yéménite afin de renforcer ses capacités techniques dans le domaine des droits humains.  Elle a condamné les violations commises par la milice terroriste houthiste contre les civils yéménites, y compris des enfants.  Elle a également appelé la communauté internationale à faire pression sur cette milice qui recrute des enfants, affame des civils et assiège des villes et des provinces.  La représentante a ensuite affirmé son soutien à la cause palestinienne, soulignant ensuite l’importance de la question des Rohingya, minorité musulmane qui subit des violations de ses droits au Myanmar.

Mme CAROL LESLIE HAMILTON (États-Unis) a dénoncé les violations commises par la Fédération de Russie en Ukraine et a salué la création d’un poste de rapporteur spécial consacré à la situation des droits humains en Russie.  Elle a insisté sur l’importance de prendre en compte les questions de genre.  Elle a affirmé que des crimes contre l’humanité avaient été perpétrés contre la population musulmane des Ouïghours, précisant qu’une pétition de 57 pays condamnait les violations commises au Xinjiang et dans d’autres région de Chine.  Elle s’est opposée à l’attitude partiale du Conseil des droits de l’homme concernant Israël, dénonçant le caractère vague du mandat consacré à cette situation.  Elle a aussi affirmé que les États-Unis travaillaient contre les discriminations raciales sur leur propre sol.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a regretté qu’au cours de l’année écoulée, le CDH n’a pas su apporter de changements positifs à ses travaux ni contribuer à renforcer le dialogue de la communauté internationale sur les droits humains.  De ce fait, a-t-il dit, le Conseil n’a pas été en mesure d’apporter une contribution significative à l’amélioration de la situation des droits humains tant dans le monde qu’au niveau individuel des pays.  Au cours de l’année écoulée, sous la pression des pays occidentaux, le Conseil a adopté un certain nombre de résolutions ouvertement politiques, a décrié le délégué, précisant qu’en octobre de cette année, le CDH, sous l’initiative de 26 pays membres de l’Union européenne, a approuvé le projet de résolution portant sur « la situation des droits en Fédération de Russie ».  Ce texte a été élaboré sur la base des fictions déjà connues de l’Occident sur la « persécution » imaginaire dans notre pays de représentants de la société civile, de militants et défenseurs des droits humains, ainsi que les minorités sexuelles, a-t-il décrié.  Le représentant a également accusé l’Occident de vouloir transformer le CDH en un club fermé de soi-disant « vraies démocraties » qui veulent établir les règles du jeu pour le reste du monde.  Le délégué a indiqué que la Russie rejette fermement cette résolution basée sur de fausses accusations et refuse de coopérer avec le Mécanisme y relatif. 

Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) a déclaré que le multilatéralisme est maintenant « sapé » par le recours à l’unilatéralisme, qui met à mal les droits humains dans les pays ciblés par des mesures coercitives unilatérales.  Les pays qui les appliquent devraient être tenus responsables de leurs actes, en raison des conséquences de ces sanctions sur les populations vulnérables, dont les femmes et les enfants.  La représentante a vu dans l’Examen périodique universel le mécanisme le plus approprié pour l’examen de la situation des droits de l’homme.  Mais regrettablement, a-t-elle déploré, la politisation et la sélectivité ont pris le pas, avec la pratique de certains États à faire adopter des résolutions ciblant certains pays spécifiques.  Elle a ensuite appelé les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales à faire preuve d’impartialité, de neutralité, de non-sélectivité et de non-politisation.  La représentante a également dit être très préoccupée par les violations des droits humains commises par les États-Unis, le « régime israélien » et les pays de l’Union européenne, notamment la discrimination raciale et l’islamophobie. 

M. CANDIDO (Éthiopie) a estimé que les réformes entreprises en Éthiopie, depuis quatre ans, en matière de droits humains parlaient d’elles-mêmes et a regretté qu’elles n’aient pas été prises en considération par le Conseil des droits de l’homme.  Il a déploré la création d’une commission d’experts du Conseil consacrée à la situation en Éthiopie, dénonçant son manque d’indépendance, d’impartialité et de professionnalisme.  Il a rappelé qu’une équipe d’enquête conjointe avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) et le Conseil éthiopien des droits humains avait été mise en place, estimant que la commission susmentionnée faisait doublon et constituait un gâchis de moyens.  Il a espéré que son mandat ne serait pas renouvelé.

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a rejeté la politisation des mécanismes des droits humains pour cibler certains pays comme la Syrie.  Il a relevé que ces mécanismes disent mener des enquêtes sur des pays, alors même que ces derniers ne coopèrent pas avec eux, et que leurs rapports sont basés sur des sources ouvertes.  Il a dénoncé le dernier rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne qui, a-t-il affirmé, redore le blason de groupes terroristes qui figurent sur la liste de sanctions du Conseil de sécurité, et fait la promotion de groupes armés soutenus par les États-Unis.  De même, le délégué s’est étonné de voir que ces rapports ne mentionnent pas l’agression et l’occupation de la Syrie, ni les effets sur les droits humains de sanctions unilatérales à l’encontre du pays.  Le représentant a par ailleurs plaidé pour le respect des droits des Palestiniens, appelant à l’avènement d’un État palestinien membre à part entière de l’ONU. 

Mme PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) a indiqué que son pays siègera en tant que membre du Conseil des droits de l’homme pour la période 2023-2025.  Elle a reconnu que ce mandat commence dans un climat de tensions internationales, y compris en matière de droits humains.  Elle a cependant estimé que ce contexte ne doit pas faire oublier la nécessité d’un débat, notamment en cas de divergences et différences.  Cela doit se faire dans un esprit de coopération, car la communauté internationale a la responsabilité de promouvoir les droits de tous.  Les différences nationales ou culturelles ne doivent pas nous faire oublier cette responsabilité, a insisté la déléguée.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a rappelé que son pays avait été élu au Conseil des droits de l’homme pour la période 2023–2025 et affirmé qu’il était fermement décidé à défendre l’équilibre des thématiques traitées, soulignant l’importance du droit au développement et de la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance.  Il a rejeté toute politisation des activités du Conseil et rappelé que l’examen de situations spécifiques devait se faire en toute impartialité.

M. OMAR HILALE (Maroc) a appelé à un juste équilibre entre les droits civils et politiques, d’une part, et les droits économiques, sociaux et culturels, d’autre part, au sein du Conseil des droits de l’homme.  Convaincu de l’importance d’un multilatéralisme plus actif et plus inclusif pour relever les défis environnementaux liés au droit humains, le Royaume du Maroc, avec le Costa Rica, les Maldives, la Slovénie et la Suisse, viennent de faire adopter à l’Assemblée générale, après le CDH, une résolution historique qui reconnaît, pour la première fois, l’accès à un environnement propre, sain et durable comme un droit humain universel, a rappelé le représentant.  Il a aussi souligné que le Maroc vient d’être élu membre du CDH pour la période 2023-2025.  Il s’agit, a-t-il dit, du troisième mandat du Maroc au sein du Conseil après un premier mandat (2006-2008) en tant que membre fondateur, occupant le poste de Vice-Président, et un deuxième de 2014 à 2016.

Au sujet de l’Examen périodique universel, il a expliqué que son rôle doit être renforcé et soutenu, notamment à travers l’assistance technique et le renforcement des capacités.  À ce titre, il importe de noter que le Maroc et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme organiseront, le 3 novembre 2022, à 13 h 15, au Siège de l’ONU à New York, un évènement parallèle sur le thème: « Soutenir les États Membres, réaliser leurs droits: le  quatrième cycle de l’Examen périodique universel et le quinzième anniversaire du Fonds de contributions volontaires pour l’assistance financière et technique concernant la mise en œuvre de l’Examen périodique universel ».

M. KIM NAM HYOK (République populaire démocratique de Corée) a déclaré que les droits de l’homme ne doivent jamais être exploités à des fins politiques.  Pour cette raison, il a rejeté d’un revers de main, toutes les résolutions adoptées au Conseil des droits de l’homme contre son pays, qui ne sont, selon lui, qu’un tissu de mensonges, loin de la réalité et issues de la politique hostile et colonialiste de certains États Membres, dont les pays de l’Union européenne.  Ces derniers feraient mieux de balayer devant leurs portes avant de donner des leçons à d’autres pays, a lancé le représentant.

Mme RUXANDRA STANCIU (Roumanie) a rappelé qu’elle avait été réélue pour un troisième mandat au Conseil des droits de l’homme, annonçant qu’elle allait se concentrer sur les sujets sur lesquels elle a une expertise: la lutte contre la discrimination et le racisme, et la lutte en faveur de l’égalité entre les sexes.  Elle a appelé au respect des droits des femmes en Afghanistan comme en République islamique d’Iran et à la protection des journalistes.  La déléguée a appelé à agir en vue de faire cesser les innombrables violations des droits humains.  Elle a condamné la guerre d’agression contre l’Ukraine et les innombrables violations des droits humains que celle-ci a entraînées.  Elle a souligné que 2,6 millions de réfugiés ukrainiens sont passés en Roumanie et rappelé que son pays a été le premier pays européen à adopter une stratégie à moyen et long terme en leur faveur, leur garantissant l’accès à l’emploi, au logement et mettant en œuvre des mesures contre la traite des êtres humains.

Droit de réponse

La représentante de la Chine, réagissant à la déclaration des États-Unis, a dit s’opposer à ces propos « diffamatoires et mensongers ».  Les États-Unis sont-ils vraiment si soucieux d’autrui ou veulent-ils seulement contrecarrer le développement de la Chine? a interrogé la déléguée.  Elle a ensuite rappelé que le 6 octobre dernier, le Conseil des droits de l’homme a rejeté, à l’issu d’un vote, le projet de résolution proposé par les États-Unis et les pays de l’Union européenne sur la situation des droits de l’homme au Xinjiang.  Leur complot a été déjoué et, depuis, ils mènent cette campagne de mensonges devant la Troisième Commission de l’Assemblée générale, a déclaré la représentante.  Elle a dit que si aujourd’hui c’est la Chine qui est dans le viseur des États-Unis, demain ce sera un autre pays en développement. 

Poursuivant, elle a dénoncé l’hypocrisie des États-Unis qui prétendent défendre les droits de l’homme mais maintiennent leur hégémonie.  Ce sont les États-Unis qui ont commis un génocide contre les Amérindiens, qu’ils ont pillés et exterminés, a-t-elle fait valoir avant de parler de la discrimination raciale qui fait rage aux États-Unis et s’est même accrue avec la pandémie sous forme d’une multiplication par centaines des crimes de haine contre les Asiatiques.  « Arrêtez d’être arrogants et de tenter d’imposer aux autres ce qu’ils doivent faire », a lancé en guise conclusion l’oratrice, disant espérer que les États-Unis prendront conscience de leurs méfaits dans le monde.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: appels à la prudence sur la question « sensible » de l’immunité des représentants de l’État et de ses exceptions

Soixante-dix-septième session,
28e & 29e séances plénières - matin & après-midi
AG/J/3673

Sixième Commission: appels à la prudence sur la question « sensible » de l’immunité des représentants de l’État et de ses exceptions

La Sixième Commission a achevé aujourd’hui son examen du second groupe de chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI) relatifs à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et à l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international. 

Les délégations ont appelé à la prudence sur ces deux sujets, les réserves les plus marquées ayant été exprimées à propos du premier, dont le caractère « sensible » et « contesté » a été abondamment souligné.  La Commission a ensuite entamé l’examen du troisième et dernier groupe de chapitres du rapport de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État et les principes généraux du droit.

La délégation du Viet Nam a invité la CDI à envisager toute codification au sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État avec « la plus grande prudence », dans le plein respect de la souveraineté des États.  Même son de cloche du côté de l’Égypte qui a invité la CDI à la codification de la lex lata plutôt que de se pencher sur la lex feranda.

L’article 7 du projet d’articles de la CDI sur ce sujet a été au cœur des interventions des délégations.  Cet article dispose en effet que l’immunité ratione materiae ne s’applique pas pour les crimes de droit international suivants: crime de génocide; crimes contre l’humanité; crimes de guerre; crime d’apartheid; torture et disparitions forcées.

La Fédération de Russie a rappelé qu’il y avait eu un vote en 2017 sur le projet d’article 7 et que certains États avaient voté contre cet article.  « Le fait qu’il n’y ait pas eu de vote cette année ne veut pas dire que ces États ont changé de position », a tranché la déléguée.  Ce projet d’article reste « contesté » tant au sein de la Commission que par certains États, a reconnu la déléguée du Royaume-Uni.

Leur homologue de l’Égypte a, lui aussi, fait part de sa plus grande réserve, en invitant la CDI à éviter sur un sujet aussi sensible toute proposition non-consensuelle de nature à attiser les tensions.  Cette nécessité du consensus a également été soulignée par le délégué du Cameroun, qui a estimé que les exceptions de l’article 7 reposent sur la pratique d’un nombre limité d’États qui ne reflète pas le droit international coutumier. 

Pour la République de Corée, appuyée par Israël, il n’y a pas d’explication claire sur l’existence d’une pratique d’État suffisante dans ce domaine.  Souhaitant que les divergences entre États soient surmontées, le Japon a invité la CDI à fournir une « explication substantielle » sur la marche à suivre.  L’État de Palestine, l’Afrique du Sud et l’Espagne ont en revanche apporté leur soutien à l’article 7, la déléguée palestinienne souhaitant l’inclusion du crime d’agression.

À l’instar de la République de Corée, les intervenants ont également invité la CDI à la prudence s’agissant du point relatif à l’élévation du niveau de la mer.  La déléguée d’Antigua-et-Barbuda, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a salué la poursuite du dialogue avec la CDI pour comprendre, développer et appliquer le droit international de façon à répondre à l’urgence de la crise climatique. 

Si le délégué du Japon a rappelé que la disparition d’un territoire et le déplacement de population en raison de cette élévation ne se sont encore jamais produits dans l’histoire, il a estimé que certains États pourraient ne plus remplir les critères de la condition étatique établies par la Convention de Montevideo de 1933 sur les droits et devoirs des États.

Cette Convention n’est pas pertinente pour la question de la continuation de l’État puisqu’il existe plutôt une présomption fondamentale de la continuation du statut d’État en droit international, a réagi la déléguée d’Antigua-et-Barbuda.  « Il est donc « inéquitable et injuste » de suggérer aujourd’hui que, dans le contexte de l’élévation du niveau de la mer, il faudrait appliquer strictement les critères d’un accord régional signé voici presque un siècle et ratifié par 16 pays. »

« Les critères contenus dans des instruments comme la Convention de Montevideo s’appliquent de manière plus appropriée à la création des États, mais pas à leur extinction », ont renchéri la Papouasie-Nouvelle-Guinée et Samoa, au nom des Petits États insulaires en développement du Pacifique.  Pour sa part, la Fédération de Russie a appuyé la Convention de Montevideo.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux mercredi 2 novembre, à 10 heures. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-TREIZIÈME SESSION - A/77/10

Suite et fin du débat général sur le module 2 : chapitre VI (Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État) et chapitre IX (L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international)

Mme ASHA CHALLENGER (Antigua-et-Barbuda), au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a rappelé que les 39 petits États insulaires en développement (PEID) sont particulièrement touchés par les effets de l’élévation sans précédent du niveau de la mer.  Elle a salué la poursuite du dialogue avec la CDI pour comprendre, développer et appliquer le droit international de façon à répondre à l’urgence face à la crise climatique.  Comme les dirigeants de l’AOSIS l’ont dit dans une déclaration en septembre, les zones maritimes et les droits qui en découlent doivent continuer de s’appliquer sans réduction, nonobstant toute modification physique liée à l’élévation du niveau de la mer due aux changements climatiques.  L’AOSIS est heureuse de constater que d’autres États, y compris certains des plus grands États côtiers, ont adopté une conception similaire du droit international, reconnaissant la nécessité d’assurer la stabilité juridique, la sécurité, la certitude et la prévisibilité.

Mme Challenger a estimé que la pratique de ces dernières années est très claire: la Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des États n’est pas pertinente pour la question de la continuation de l’État puisqu’il existe plutôt une présomption fondamentale de la continuation du statut d’État en droit international.  Il est donc « inéquitable et injuste » de suggérer aujourd’hui que, dans le contexte de l’élévation du niveau de la mer, il faudrait appliquer strictement les critères d’un accord régional signé voici presque un siècle et ratifié par 16 pays.  De l’avis de l’AOSIS, ces critères ne s’appliquent pas à la continuation des États et la perte éventuelle de territoire dans de petites îles en raison de l’élévation du niveau de la mer n’est pas un phénomène naturel mais est due à une cause anthropogénique.  « Nous priver de notre souveraineté est contraire à un siècle de pratique » a asséné la déléguée.  Il s’agit également d’un exercice inacceptable du pouvoir par les grands États, contraire au principe d’autodétermination.  S’agissant de la protection des personnes face à l’élévation du niveau de la mer, là encore les obligations juridiques sont claires, a-t-elle poursuivi, ajoutant qu’il s’agit d’un problème international exigeant une coopération entre les États.  À son avis, le devoir de coopération est un principe général du droit international, qui établit l’obligation pour la communauté internationale d’aider les États les plus touchés par l’élévation du niveau de la mer.  Depuis les années 1960, l’Assemblée générale a joué un rôle de chef de file pour faciliter la coopération sur la réduction des risques de catastrophe et la riposte.  Par ailleurs, si la coopération est une obligation légale, c’est aussi une question d’équité, a fait observer Mme Challenger.  « Les membres d’AOSIS sont parmi les plus faibles émetteurs de gaz à effet de serre qui expliquent les changements climatiques et l’élévation du niveau de la mer, mais ils sont confrontés aux plus graves conséquences. »  Attendre des petits États insulaires qu’ils assument la charge de l’élévation du niveau de la mer sans l’aide de la communauté internationale serait le summum de l’injustice, a conclu la déléguée.

Mme GALIA RIVLIN (Israël) a déclaré que bien que son pays attache une grande importance aux efforts internationaux de lutte contre la criminalité et l’impunité, les règles fondamentales et de longue date relatives à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État sont « à juste titre » fermement établies dans le système juridique international.  Israël continue de soutenir que certains projets d’articles ne reflètent pas l’état actuel du droit international coutumier tel qu’il est soutenu par la pratique des États et l’opinio juris, et constituent plutôt des propositions en vue du développement progressif du droit, « sans le reconnaître ouvertement ».  La représentante a argué que le projet d’article 7, qui propose des exceptions à l’immunité ratione materiae, ne reflète pas non plus l’état actuel du droit international et a été rejeté par des membres de la Commission en 2017, une position qui demeure inchangée.  Elle a en outre réitéré sa demande à la CDI de reconsidérer sa position sur la question de l’immunité ratione personae dans les projets d’articles 3 et 4, estimant qu’en vertu du droit international coutumier, tel que reflété dans la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) et des tribunaux nationaux, la catégorie des représentants de l’État qui jouissent de cette immunité est en fait plus large.  Selon la déléguée, la détermination de l’immunité doit être faite par les autorités compétentes de l’État, qui ne sont pas nécessairement ses tribunaux.  Les décisions relatives à l’opportunité d’engager des poursuites pénales ou de prendre des mesures coercitives à l’encontre d’un fonctionnaire étranger comportent selon elle le risque de violer l’immunité de celui-ci en vertu du droit international coutumier.  En ce qui concerne le règlement des différends, elle a rejeté le mécanisme prévu au paragraphe 2 du projet d’article 18 en vertu duquel l’un des États concernés peut saisir unilatéralement la CIJ, estimant au contraire que le consentement de tous les États concernés est nécessaire.

Mme MATILDA BARTLEY (Samoa), au nom des Petits États insulaires en développement du Pacifique, a pris note des conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) relatives à l’augmentation probable des températures au-delà de 1,5 degrés Celsius.  Elle a rappelé que l’élévation du niveau de la mer n’a pas été envisagée dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  À ce titre, la représentante a réitéré que la Déclaration sur la préservation des zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques, publiée en aout 2021 par les dirigeants du Forum des Îles du pacifique, reflète la position de ses membres sur l’application des règles de ladite Convention.  Il ne s’agit pas de « contourner » cet instrument ou de créer de nouvelles règles du droit international, a-t-elle précisé, mais uniquement d’interpréter les règles contenues dans la Convention sur le droit de la mer. 

La représentante a également estimé qu’il existe une présomption en faveur de la continuité de l’État.  À cet égard, les critères contenus dans des instruments comme la Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des États de 1933 s’appliquent de manière plus appropriée à la création des États, « mais pas à leur extinction ».  Elle s’est, enfin, inquiétée des menaces multidimensionnelles auxquelles les petits États insulaires en développement (PEID) sont confrontés du fait de l’élévation du niveau de la mer, d’autant plus qu’elles ne peuvent pas toujours être atténuées par des mesures d’adaptation et par le renforcement des infrastructures.  En conclusion, la représentante a insisté sur l’obligation de coopérer pour combattre ces menaces.

M. SERGE NYANID (Cameroun) a abordé le sujet « délicat » de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  « De manière générale, ma délégation réitère qu’elle demeure attachée à la vision de l’immunité, qui est consubstantielle à l’existence de la souveraineté de l’État. »  Ceux qui représentent l’État et expriment sa volonté aussi bien sur le plan interne que sur le plan international ne sauraient être fragilisés par une « épée de Damoclès » qui plane sur leur tête, a développé le délégué.  Il a donc invité la CDI à poursuivre la réflexion sur ce sujet en vue d’une plus grande cohérence.  Il a estimé que la référence aux régimes spéciaux de juridiction pénale internationale pourrait créer un droit pénal spécial, discriminatoire, avant d’appeler à ne pas mettre la pression sur les États et à respecter leur liberté d’exprimer leur consentement à être liés par les conventions de leur choix.  « Les culs-de-sac juridiques » que l’on trouve dans certaines conventions qui sont de véritables camisoles de force juridiques pourraient passer un message inapproprié et faire croire que ces mécanismes dits de lutte contre l’impunité sont orientés et discriminatoires.  S’agissant de l’article 7, il a relevé que plusieurs crimes pour lesquels l’immunité rationae materiae n’est, selon le projet de la CDI, pas applicable, reposent sur la pratique d’un nombre limité d’États qui ne reflètent pas le droit international coutumier.  « Il serait en conséquence souhaitable de revoir cette perspective afin d’obtenir un consensus qui permettrait de donner une suite favorable aux longs efforts de la Commission, à travers l’adoption des projets d’articles par les États en tant que convention internationale. »  En l’état actuel, ma délégation observe que cette perspective a encore du chemin à faire, a tranché le délégué. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, M. Nyanid a rappelé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est « silencieuse sur le sujet », alors même que les États les plus concernés sont en attente de réponses claires afin de pouvoir sécuriser juridiquement leur comportement face à la montée des eaux.  Il a adhéré à l’idée de ne pas imposer de limites à ce sujet afin de permettre au Groupe de travail de parvenir à des conclusions sur la question de savoir si le droit international existant permettait de régler les difficultés rencontrées ou si de nouvelles règles ou de nouveaux principes sont nécessaires pour combler d’éventuelles lacunes.  « À cet égard, ma délégation est d’avis que la Commission devrait approfondir son travail dans le domaine de l’examen ou d’un exposé des problèmes juridiques pertinents découlant des situations engendrées par l’élévation du niveau des mers. »

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a rappelé que son pays a été victime d’un cyclone principalement dû à l’élévation du niveau de la mer provoquée par les changements climatiques.  En dépit des difficultés, son gouvernement a, avec succès, évacué les personnes en danger et distribué les ressources de base nécessaires aux personnes affectées.  Les implications juridiques de ce phénomène sont lacunaires, a-t-il regretté, saluant à ce titre le travail de la CDI sur ce point.  Le représentant a toutefois souhaité approfondir la réflexion sur la condition étatique des États dont le territoire serait complètement recouvert par la mer.  Il a également souligné l’influence de la note thématique sur d’autres projets de la CDI, notamment le projet d’articles sur la protection des personnes en cas de catastrophe.  Le représentant a, enfin, réitéré que les positions de la CDI sur la relation entre l’élévation du niveau de la mer et le droit international doivent s’inscrire dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

Mme LAUZA ALI (Maldives) a rappelé que les Maldives, État insulaire vulnérable aux effets de l’élévation du niveau de la mer, ont accueilli en 1989 la première conférence sur ce phénomène, qui s’est traduite par la Déclaration de Malé sur le réchauffement du globe et la hausse du niveau des mers et a conduit à la création de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS).  L’élévation du niveau de la mer est une menace existentielle pour les États de faible altitude et les petits États insulaires en développement (PEID), a-t-elle dit.  Pour les PEID, cette menace est une question de survie.  Selon les prévisions des scientifiques, « les Maldives seront inhabitables à la fin du siècle, et les habitants seront de fait apatrides ».  Il est donc urgent que la communauté internationale prenne en compte le point de vue de pays comme les Maldives lorsqu’elle formule des stratégies, a fait observer la représentante.  S’agissant de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, envisagée à partir du cadre existant « en cas de catastrophe », elle a souligné que les changements climatiques ne sont pas une catastrophe naturelle mais une catastrophe d’origine humaine.  Selon elle, Les projets d’articles de la CDI peuvent fournir des orientations utiles mais ils devraient être complétés par une analyse tenant compte des dommages transfrontaliers et de la responsabilité internationale selon une approche de « responsabilités communes mais différenciées ».  En outre, les Maldives plaident pour une approche fondée sur les droits humains.  Les effets des changements climatiques et l’élévation du niveau de la mer touchent de manière disproportionnée les segments les plus vulnérables de la population: les femmes, les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées, les personnes de couleur, les groupes autochtones.  Au vu des instruments de droit international relatifs aux populations vulnérables, la représentante a jugé essentiel que le débat adopte une approche intersectionnelle.

Mme THI HA TRANG DAO (Viet Nam) a abordé le sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en invitant la CDI à envisager toute codification avec « la plus grande prudence ».  Elle a insisté sur la nécessité de trouver un équilibre permettant de concilier les avantages de ladite immunité et le respect de la souveraineté des États, en mettant en garde contre toute application abusive des exceptions à ladite immunité. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a indiqué qu’il s’agit d’un sujet pressant pour son pays qui est très exposé à cette élévation.  Il est crucial de poursuivre la codification et le développement de règles sur ce sujet, a tranché la déléguée, en insistant sur la fragilisation de la condition étatique en raison de ce phénomène.  Toute codification en la matière doit prendre en compte le principe d’égalité souveraine des États et respecter la Convention des Nations sur le droit de la mer.  Enfin, elle a invité la CDI à prendre en compte dans ses travaux les principes du droit international de l’environnement.

Mme MOTSEPE (Afrique du Sud) a souligné la nécessité de trouver un équilibre entre le besoin de protéger les représentants de l’État et de lutter contre l’impunité.  « L’objectif de l’immunité n’a jamais été de se soustraire à la responsabilité en matière pénale », a-t-elle rappelé.  Elle s’est dit satisfaite de l’inclusion dans le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État de garanties contre les abus et de l’absence d’effet sur les droits et devoirs existants, notamment à l’égard de la Cour pénale internationale (CPI).  Elle a également apporté son soutien à l’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas. 

La représentante a rappelé que l’élévation du niveau de la mer est un phénomène global qui affecte l’ensemble des États, notamment en Afrique.  Selon elle, les États peuvent rester des sujets du droit international en dépit de la disparition de leur territoire et du déplacement forcé de leur population.  « Aucun critère n’oblige le gouvernement d’un État à être situé sur son propre territoire », a-t-elle fait valoir, notant néanmoins la difficulté pour un tel gouvernement d’exercer ses prérogatives de manière effective.  La représentante a rappelé qu’il appartient aux États Membres de garantir les droits humains des personnes déplacées.  Elle a apporté son soutien à un cadre juridique, voire une convention, sur la question des personnes déplacées.

Mme DEBRA GERSTEIN (Royaume-Uni) a relevé les progrès de la CDI sur le sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Elle a salué la clarification sur le champ d’application de cette question au projet d’article 1, notamment son lien avec certains accords internationaux et d’autres règles spéciales du droit international.  Le Royaume-Uni rappelle que les exceptions à l’immunité proposées au projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) et ses annexes restent « contestés » tant au sein de la Commission que par certains États.  La représentante a réitéré qu’il est d’une importance capitale « que la CDI indique clairement quels sont les projets d’article qui reflètent ou non le droit international ».

Le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, a relevé Mme Gerstein, couvre des questions fondamentales pour de nombreux États, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a indiqué que le Royaume-Uni examinera les travaux du Groupe d’étude avec toute l’attention qu’ils méritent.

Mme MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a évoqué le sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en appelant la CDI à revenir sur certains aspects du projet d’articles en seconde lecture.  Elle a rappelé qu’il y avait eu un vote en 2017 sur le projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) et que certains États avaient voté contre cet article.  « Le fait qu’il n’y ait pas eu de vote cette année ne veut pas dire que ces États ont changé de position », a lancé la déléguée.  Elle a insisté sur la distinction entre le développement de normes et un travail de codification.  La CDI ne doit pas définir son travail sur ce sujet comme relevant de la codification lorsqu’il est évident que la pratique des États et le droit des traités ne prévoient pas les exceptions visées à l’article 7.  Aucune tendance ne se dégage s’agissant de ces exceptions, a dit la déléguée, en rappelant que cette immunité ne dépend pas de la gravité du fait examiné.  « La question de l’immunité doit être tranchée avant tout examen de l’affaire sur le fond », a-t-elle insisté, en invitant la CDI à réviser cet article 7 en seconde lecture.  Elle a estimé que l’obligation de ne pas quitter le territoire de l’État du for ne peut pas s’appliquer à un représentant de l’État, en jugeant excessif tout retrait de passeport.  La déléguée n’a vu aucun inconvénient à rallonger le temps d’examen de ce sujet par la CDI.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a jugé cruciale la question de la condition étatique, avant de se rallier à la définition donnée par la Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des États de 1933.  Il est crucial de prendre des mesures d’atténuation de ce phénomène naturel délétère, a déclaré la déléguée, en appelant notamment au renforcement des côtes.  Enfin, elle a estimé que la question de la protection des personnes est étroitement liée à la condition étatique, en soulignant l’importance de la question de l’apatridie.

Mme MARÍA CECILIA CÁCERES NAVARRETE (Chili) a rappelé que la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est complexe puisqu’elle intègre à la fois des considérations relatives à l’égalité des États et à la lutte contre l’impunité.  Elle a regretté que certaines expressions utilisées dans la quatrième partie du projet d’articles de la CDI ne soient pas claires.  Elle a notamment évoqué l’expression « examinent […] la question de l’immunité », qui ne précise pas quelles sont les obligations minimales qui doivent être prises en compte par les États.  Elle a également estimé que l’article 14 (Détermination de l’immunité) doit inclure la complémentarité avec le respect des obligations de l’État du for.  Elle a également mis en garde contre les retards inutiles générés par la mention d’un délai raisonnable dans l’article 18 (Règlement des différends) et appelé à définir un délai précis.

La représentante a noté que l’élévation du niveau de la mer est l’une des conséquences des changements climatiques, saluant le travail de la CDI à ce sujet.  Même si les conséquences les plus graves ne se feront pas ressentir dans les prochaines années, certains des effets sont déjà là, a-t-elle noté.  Elle a donc demandé à approfondir les mécanismes et cadres juridiques applicables aux personnes affectées par l’élévation du niveau de la mer afin de prévenir et d’atténuer les conséquences les plus imminentes.  Sur la question de la condition étatique, elle a relevé que la plupart des exemples donnés ont vocation à être temporaires, ce qui est différent de la situation « irréversible » des États submergés.  Il faut donc déterminer si la présomption étatique peut être maintenue indéfiniment et selon quels critères, a-t-elle estimé.  Les conséquences liées à la disparition des États doivent également être étudiées, a-t-elle ajouté.  La représentante a noté que l’ordre juridique international dispose déjà de normes générales permettant de protéger les personnes déplacées, tout en attirant l’attention sur les groupes particulièrement vulnérables.  Elle a, enfin, insisté sur le principe de responsabilités communes mais différenciées.

Mme THARARUT HANLUMYUANG (Thaïlande) a souligné la nécessité de trouver un juste équilibre entre l’octroi de l’immunité de juridiction pénale étrangère aux représentants de l’État et la fin de l’impunité, tout en tenant compte du respect du principe de l’égalité souveraine des États dans la détermination et l’application de l’immunité.  Elle a reconnu l’importance d’inclure des garanties procédurales dans la quatrième partie des projets d’articles, qui sont essentielles pour protéger les droits et les intérêts des États tout en assurant la transparence et la régularité de la procédure.

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la représentante s’est dit consciente de la fragmentation des cadres juridiques internationaux existants qui s’appliquent à la protection des personnes touchées par les changements climatiques.  Elle a donc estimé que les travaux sur cette question sont urgents et de la plus haute importance.  De l’avis de la Thaïlande, « les droits des États au regard des zones et des frontières maritimes tels que garantis par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer doivent être protégés ».  Les frontières maritimes établies sont définitives et ne doivent pas être modifiées en raison de l’élévation du niveau de la mer, a commenté la représentante, ajoutant que c’est essentiel au maintien de la paix et de la sécurité internationales ainsi qu’à la stabilité.  Elle a insisté sur la nécessité de mener les travaux sur cette question sur la base d’une pratique des États suffisante et en tenant compte des préoccupations de tous les États Membres, quels que soient leur taille ou leur niveau de développement.

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a évoqué le sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en rappelant l’attachement de son pays à la lutte contre l’impunité.  Il a invité la CDI à faire montre de « la plus grande prudence » lorsqu’elle se penche sur un sujet aussi sensible.  La Commission, a-t-il dit, doit donner la priorité à la codification de la lex lata plutôt que de se pencher sur la lex feranda.  Le délégué a affiché sa plus grande réserve s’agissant du projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas).  Il a insisté sur l’importance d’une distinction entre l’immunité ratione materiae et l’immunité ratione personae, celle-ci étant insuffisamment prise en compte par le projet d’articles.  La CDI doit éviter toute proposition non-consensuelle de nature à attiser les tensions, a averti le délégué.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a appelé à des mesures vigoureuses afin de faire face aux effets des changements climatiques.  Les pays développés doivent honorer leurs engagements au titre du financement climatique, a-t-il notamment demandé.

M. RIPOL CARULLA (Espagne) a estimé que le texte du projet d’articles de la CDI sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est appelé à exercer « une grande influence ».  L’Espagne, a-t-il indiqué, partage la distinction contenue dans ledit projet entre les titulaires de l’immunité et les différents régimes juridiques, qui « correspond à n’en pas douter à la norme ».  Il a jugé opportune l’inclusion d’une liste des crimes graves à l’égard desquels l’immunité ne s’applique pas.  Les règles procédurales inclues dans le projet permettent également d’articuler le droit de l’État à l’immunité et le respect du droit de l’État du for.  À ce titre, il a souligné l’importance de la coopération entre États.

Au sujet du travail de la CDI sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le représentant a estimé qu’il convient de donner priorité à certaines questions, notamment celles concernant la condition étatique et la protection des personnes touchées par ce phénomène.

M. KENNETH WELLES (États fédérés de Micronésie) a fait savoir que la Micronésie, en tant que petit État insulaire en développement (PEID) particulièrement vulnérable et touché par l’élévation du niveau de la mer, ne peut pas accepter quelque interprétation que ce soit du droit international qui le priverait de sa condition étatique et des droits qui en découlent simplement parce qu’il perd des terres en raison de l’action et des omissions des autres, en particulier de pays développés et d’autres grands émetteurs de gaz à effet de serre.  « Les critères de la Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des États ne s’appliquent pas automatiquement au moment de déterminer si la condition étatique persiste une fois qu’elle a été créée. »  Le délégué a noté que le deuxième document de travail énumère plusieurs alternatives possibles qui pourraient permettre à un État de conserver une forme de personnalité juridique internationale sans territoire, comme une association avec un ou plusieurs autres États.  Ces alternatives semblent s’inspirer en partie des trois accords de libre association que la République des Palaos, la République des Îles Marshall et les États fédérés de Micronésie ont signé avec les États-Unis.  Si nombre de disciplines du droit international ont un lien important avec la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, aucun instrument international juridiquement contraignant ou processus intergouvernemental n’est spécifiquement consacré à cette question, a encore fait remarquer le délégué.  La Micronésie est donc ouverte à la discussion sur l’adoption d’un instrument international.

M. MAREK ZUKAL (République tchèque) a estimé que la définition et la portée de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État ratione personae et ratione materiae contenue dans les parties I, II et III du projet d’articles de la CDI reflètent le droit international coutumier actuel.  S’agissant du « très discuté » projet d’article 7, qui prévoit des exceptions à l’immunité ratione materiae, il a considéré qu’il reflète « en principe » correctement les normes existantes du droit international et la pratique basée sur l’absence d’immunité ratione materiae lorsque des crimes de droit international et des crimes dits officiels sont commis.  La non-applicabilité de l’immunité ratione materiae semble à ses yeux être une conséquence de l’incompatibilité normative de cette immunité avec les définitions et obligations du droit international et des conventions internationales pertinentes.  Le délégué a toutefois émis des doutes sur la partie IV du projet portant sur les dispositions procédurales et les garanties.  Il a souligné à cet égard que l’immunité ratione materiae ne s’applique que lorsque les actes de l’agent étranger accomplis en sa qualité officielle font l’objet d’une procédure devant les tribunaux étrangers, ce qui ne semble pas être pris en compte dans les projets de dispositions procédurales.  Les travaux sur les aspects procéduraux de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État devraient être davantage axés sur la pratique des États, a-t-il jugé. 

En ce qui concerne l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, M Zukal s’est attardé sur les travaux menés par la CDI sur la condition étatique et la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, estimant que, pour les États de faible altitude et les petits États insulaires en développement (PEID), la menace est de nature « existentielle » et que, dans le cas des PEID, elle concerne « leur survie même ».  Le délégué a encouragé la CDI à se concentrer sur la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer en s’appuyant sur les rapports d’experts mentionnés au paragraphe 6.  Il a par ailleurs approuvé l’avis exprimé au paragraphe 172 selon lequel les cadres juridiques internationaux existants sur ces questions sont fragmentés et de nature générale, et qu’ils devraient donc être étayés pour répondre aux besoins spécifiques des personnes touchées. 

M. HARIS CHRYSOSTOMOU (Chypre) a fait observer que Chypre, en tant qu’État insulaire, a fait l’expérience de la gravité du phénomène des changements climatiques et de l’élévation du niveau de la mer induite par le climat.  En ce sens, Chypre apprécie le travail du Groupe d’étude de la CDI visant à apporter une clarification juridique quant aux effets possibles de l’élévation du niveau de la mer mais réitère en même temps sa position selon laquelle le Groupe d’étude n’a pas pour mandat de proposer des modifications du droit international, y compris de la nature coutumière de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et en particulier le régime des îles.  « Il est indispensable de respecter totalement l’esprit et la lettre de la Convention », a insisté le délégué.  Pour aborder les effets juridiques de l’érosion côtière, a-t-il suggéré, les États côtiers pourraient définir des lignes de base permanentes conformément à l’article 16 de la Convention sur le droit de la mer.  À cet égard, Chypre apprécie le travail déjà mené par la CDI sur les limites du plateau continental afin d’aider les États à déterminer les lignes de base permanentes et encourage le Groupe d’étude à tenir compte de ses conclusions récentes.  Les effets de l’élévation du niveau de la mer sur les lignes de base ne devraient avoir aucune incidence juridique sur le statut d’un traité maritime déjà conclu, a ajouté le délégué, précisant que les frontières maritimes désignées par des organes judiciaires internationaux devraient rester « inchangées » en cas d’élévation du niveau de la mer.  S’agissant de la condition étatique, le délégué a attiré l’attention sur le principe d’autodétermination qui a été transformé en droit international au cours du mouvement de décolonisation et a toujours été appliqué aux situations de domination coloniale ou d’occupation étrangère.  Le délégué a par ailleurs noté qu’il n’existe aucun instrument international juridiquement contraignant qui traite précisément des mouvements transfrontaliers et de la protection des personnes déplacées de force en raison des effets néfastes des changements climatiques, tels que l’élévation du niveau de la mer.  Chypre est intéressé par le développement d’une initiative à ce sujet, a-t-il fait savoir.

Mme NIDAA HUSSAIN ABU-ALI (Arabie saoudite) a demandé à la CDI de tenir compte, dans le cadre du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, du principe de la souveraineté de l’État et de l’importance de l’immunité pour l’exercice des fonctions des représentants.  Elle a souligné la nécessité de renforcer le droit international coutumier en la matière.  Dans ce contexte, la déléguée a invité la CDI à tenir compte des décisions des tribunaux nationaux et se fonder sur les sources existantes du droit international.  À cet égard, elle a noté que plusieurs projets d’articles n’ont pas été acceptés par des membres de la CDI et par plusieurs États.  Elle a également invité la Commission à intégrer les mesures de coercition prises par les États étrangers, considérant que cela permettrait de garantir la souveraineté de l’État et la non-ingérence dans les affaires intérieures.  S’agissant du projet d’article 11 (Invocation de l’immunité), la déléguée a rappelé que l’immunité était présumée et donc appelé à limiter cet article à la seule hypothèse de la renonciation conformément au projet d’article 12.  Elle a également indiqué que la définition des crimes visés à l’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) est encore débattue et qu’ils ne font pas l’objet d’une adhésion universelle.  Elle a, enfin, réaffirmé que l’État qui souhaite exercer sa juridiction doit disposer de preuves que le représentant a commis un crime et doit référer la procédure à l’État du représentant avant de statuer sur l’immunité.

M. MAEDA (Japon) a salué l’adoption en première lecture du projet d’articles de la CDI relatif à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Les divergences entre États Membres s’agissant du projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) doivent être surmontées, a déclaré le délégué, en espérant que la CDI fournira à ce titre une explication substantielle.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a rappelé que la disparition d’un territoire et le déplacement de population en raison de cette élévation ne se sont encore jamais produits dans l’histoire.  Certains États pourraient ne plus remplir les critères de la condition étatique établies par la Convention de Montevideo de 1933, a-t-il conclu, en appelant à un examen accru du droit applicable sur cette situation sans précédent.

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) s’est félicité que la CDI ait pris en compte le principe de l’égalité souveraine entre les États ainsi que les dispositions qui visent à renforcer la confiance et la coopération entre l’État du for et du représentant dans le cadre du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  D’après lui, ledit projet propose les moyens juridiques nécessaires pour garantir que ces articles ne seront pas exploités « à des fins politiques unilatérales ».  Le représentant a néanmoins émis des réserves par rapport au projet d’article 7 sur les crimes à l’égard desquels l’immunité ne s’applique pas et qui « ne reflète pas le droit international ».  Il a mis en garde contre l’introduction de règles qui sont en contradiction avec le droit international positif, notamment les Conventions de Vienne sur les privilèges et immunités diplomatiques.  Il a également émis ses réserves à l’égard de la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans le projet.

Le représentant a regretté l’absence de cadre juridique relatif aux personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, qui constitue une menace « réelle et effective ».  Il a encouragé le Groupe d’étude sur l’élévation du droit de la mer au regard du droit international à poursuivre son travail et à élaborer des conclusions pratiques pour guider les États.  La CDI doit également poursuivre ses efforts sans porter préjudice au droit des États membres de délimiter leurs espaces maritimes conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-il estimé.

M. ANDY ARON (Indonésie) a déclaré que les scénarios sur l’élévation du niveau de la mer présentés dans le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) représentent un défi « sans précédent » pour l’humanité, insistant sur l’impact sur la biodiversité marine.  Il a donc salué les travaux de la CDI sur ce point, jugeant essentielle une analyse fine de ces enjeux « particulièrement sensibles ».  Il a appelé à distinguer les éléments politiques et ce qui relève du droit international.  Le représentant a en outre souligné que lorsque la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a été négociée, les changements climatiques étaient mal connus.  De plus, la Convention dit peu de choses sur ce point.  Il a appelé la CDI à trouver un équilibre entre la stabilité du droit international de la mer et l’équité en matière de changement climatique.  En conclusion, il a rappelé l’intégrité de la Convention.

M. JOHN MARTIN PANGIPITA (République-Unie de Tanzanie) a fait remarquer que la Tanzanie, qui compte 1 424 kilomètres de côtes et plusieurs îles, dont Zanzibar, attache beaucoup d’importance au travail de la CDI sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  En cela, elle rejoint les petits États insulaires en développement (PEID) pour souligner la nécessité pour la communauté internationale de réfléchir d’urgence à cette question qui touche à l’existence même des îles.  Le délégué a recommandé à la CDI de coopérer avec les agences de l’ONU chargées des affaires humanitaires et des personnes déplacées pour traiter des effets probables de l’élévation du niveau de la mer sur l’humanité.  S’agissant de la condition étatique, il a estimé que la préservation des zones maritimes et des droits qui en découlent doit faire l’objet d’un nouvel examen conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et à ses principes juridiques.  Il a recommandé de prendre également en compte les principes généraux et les règles du droit international, ainsi que les traités bilatéraux et multilatéraux traitant de divers aspects du droit de la mer.

M. RASHED JAMAL IBRAHIM IBRAHIM AZZAM (Émirats arabes unis) a estimé que l’article 7 du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas) ne reflète pas le droit international en vigueur, la pratique internationale et la jurisprudence.  Il a regretté que ce texte n’arrive pas à trouver un équilibre entre la souveraineté des États et la nécessité de poursuivre les auteurs de crimes internationaux.  Toute proposition de développement progressif sur un tel sujet ne peut être présentée « que si elle est consensuelle », a averti le délégué.  En l’état, un tel texte ne pourrait pas être recommandé à l’Assemblée générale.

M. FRED SARUFA (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a rappelé l’importance de la Déclaration du Forum des îles du Pacifique en date du 6 août 2021 sur la préservation des zones maritimes face à l’élévation de la mer en raison des changements climatiques.  Il s’est félicité des échos positifs qu’a reçu cette Déclaration.  Il a déclaré que la Convention de Montevideo s’applique à la création des États, non pas à leur extinction.  Nous pensons qu’il existe une forte présomption de continuité de l’État qui a été établie au sein de la société internationale, a dit le délégué.  Il a rappelé que la préservation des droits maritimes est étroitement liée à la préservation de la condition étatique puisque seuls les États peuvent générer des zones maritimes.  Il a aussi rappelé le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles établi par la résolution 1803 (XVII) de l’Assemblée générale.  Le délégué a invité à répondre aux besoins des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, dans le plein respect de leurs droits.  Enfin, il a pris note des préoccupations exprimées par certaines délégations quant au projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.

Mme SAMANTHA BRAIDY SPENCE (Jamaïque) a estimé que les règles élaborées sur la question de la future condition étatique d’États qui serait submergés en raison de l’élévation du niveau de la mer devraient soutenir le maintien de la stabilité et la protection des États les plus vulnérables.  Mettre en place des mesures d’atténuation et d’adaptation est aussi un élément important de l’effort collectif contre les effets de l’élévation du niveau de la mer.  Pour sa part, la Jamaïque a fait de gros efforts pour renforcer sa ligne côtière, en particulier dans les zones les plus vulnérables à l’érosion.  Mais, si les petits États insulaires en développement (PEID) s’efforcent d’atténuer les effets négatifs de l’élévation du niveau de la mer, la représentante a salué le débat de la CDI et de la communauté internationale sur les diverses manières dont le droit international pourrait aider à remédier aux causes plus larges et aux effets de ce phénomène.  S’agissant de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, elle a estimé que des principes peuvent être tirés des instruments internationaux existants en matière de droits de l’homme, et qu’il est nécessaire de renforcer le cadre existant pour combler les lacunes et faire face à ce phénomène.  La crise climatique touche des droits protégés par le droit des droits de l’homme, a-t-elle ajouté.  Le succès de la coopération internationale dépend de réponses collectives et harmonisées qui tiennent compte de la position de tous les États, y compris les PEID, de manière juste et équilibrée.  S’agissant du champ d’application de la coopération internationale, elle a jugé important que la CDI se penche sur les obligations des États non touchés à qui il serait demandé de coopérer.

M. MATTHEW EDBROOKE (Liechtenstein) a rappelé que les pays les plus directement touchés par l’élévation du niveau de la mer doivent être au cœur des discussions sur la condition étatique.  Il a appuyé la présomption de continuité de la condition d’État.  Il s’est félicité que la question de l’autodétermination soit prise en compte.  Le représentant a noté que le droit à l’autodétermination s’applique aussi aux peuples des territoires non autonomes et a invité la CDI à utiliser ces termes en sus des termes « pays » et « États » lorsque cela est approprié.

M. GADJI RABE (Côte d’Ivoire) a pris note du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Comme il est d’usage à la CDI, ce projet sera soumis par le Secrétaire général aux États Membres, qui auront l’occasion de se prononcer sur leur pertinence, a dit le délégué, en rappelant l’attachement de son pays à la lutte contre toutes formes d’impunité.

S’agissant du point relatif à l’élévation du niveau de la mer, le délégué a informé que les inondations occasionnent de nombreuses pertes en vies humaines et des déplacés parmi la population d’Abidjan, tandis que d’autres grandes villes côtières telles que Grand-Bassam, Fresco, Sassandra et San Pedro se trouvent également menacées.  « Selon une étude de la Banque mondiale, la Côte d’Ivoire occupe le 147e rang sur les 178 pays dont l’indice de vulnérabilité est particulièrement élevé. »  Il a détaillé l’action de son pays face à ce défi.  Le Gouvernement ivoirien s’est résolument engagé dans un ambitieux programme de réduction drastique de ses émissions de CO2 de 28 % ainsi que d’introduction de 42 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique, à l’horizon 2030, a-t-il précisé.  Le délégué a appelé les pays du Nord à davantage de solidarité financière, d’autant plus que l’Afrique n’est responsable que de 4% des émissions de gaz à effet de serre.

Mme ALESSANDRA FALCONI (Pérou) a salué le projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, soulignant particulièrement l’adhésion de son État aux articles 3 à 6 ainsi qu’à l’article 7.  Elle a jugé importantes les garanties procédurales afin d’assurer une « interprétation homogène » des articles.

La représentante a rappelé qu’il est urgent pour la communauté internationale de faire face aux répercussions des changements climatiques, dont l’élévation du niveau de la mer qui pose une « menace existentielle » aux petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a jugé essentiel de poursuivre l’analyse de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer en étudiant les accords en vigueur, notamment ceux relatifs aux droits humains et à la migration.  La représentante a en outre a estimé qu’il sera nécessaire d’envisager des mécanismes de coopération internationale pour les pays touchés et pour les États d’accueil des populations déplacées.  Elle a enfin jugé fondamental de continuer à réfléchir à la question de la condition étatique et de la continuité territoriale. 

M. ALINA J. LLANO (Nicaragua) a soutenu le principe de responsabilités communes mais différenciées dans le cadre de l’examen de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Elle a recommandé d’étudier les solutions juridiques existantes, comme la compensation pour responsabilité internationale.  Quant à la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, la déléguée a recommandé de chercher des solutions globales, pratiques et justes, qui puissent s’appliquer à l’avenir à une situation dans laquelle un État devient complètement ou partiellement inhabitable en raison de l’élévation du niveau de la mer ou de tout autre effet généré par les changements climatiques.  Il faut que les populations touchées puissent jouir d’un environnement propre, sain et durable, mais aussi de leur droit à compensation pour les préjudices subis.

Mme AYDIN-GUCCIARDO (Türkiye) a réitéré sa demande visant à intégrer la phrase « avec le consentement de l’agent de l’État » au projet d’article 12 (Renonciation à l’immunité).  Elle a également demandé la suppression du 5e paragraphe du même projet d’article, qui prévoit que la levée de l’immunité est irrévocable, notant qu’aucun traité ni aucun droit interne ne prévoit cette irrévocabilité et que la pratique sur ce point est limitée.

La représentante a encouragé la CDI à examiner les aspects juridiques de l’élévation du niveau de la mer, notant que la littérature sur cette question est encore immature.  À ce titre, elle a souligné que l’argument présenté dans la note thématique tenant à la préservation des droits des États affectés par l’élévation du niveau de la mer est « exagéré et hypothétique » en raison de l’absence de pratique sur cette question.  Elle a, pour sa part, estimé que lorsque les délimitations n’ont pas eu lieu, l’augmentation du niveau de la mer peut avoir des effets sur la délimitation finale.  L’impact de l’élévation du niveau de la mer sur la condition étatique et les droits relatifs aux espaces maritimes devraient être réglées au cas par cas, a-t-elle recommandé.

M. MOON DONG KYU (République de Corée) a salué l’adoption en première lecture du projet d’articles de la CDI relatif à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Il a estimé qu’il n’y a pas d’explication claire sur l’existence d’une pratique d’État suffisante ou sur l’intention de la CDI de mettre en place des procédures qui soient véritablement souhaitables.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a prôné la prudence.  Il a invité la CDI à se concentrer sur les enjeux juridiques découlant de ce phénomène plutôt que de rechercher des solutions définitives à ce défi.  Il a enfin souligné la nécessité de l’envisager sur la durée puisque l’élévation du niveau de la mer est graduelle.

Mme ZOE RUSSELL (Nouvelle-Zélande) a souligné la complexité de la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international et appuyé le travail de la CDI sur ce sujet.  Elle a rappelé l’importance de la Déclaration du Forum des îles du Pacifique de 2021 sur la préservation des zones maritimes face à l’élévation de la mer en raison des changements climatiques.  Cette Déclaration contient la vision de la région s’agissant de l’application de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer aux zones maritimes face à ce phénomène.  Enfin, la déléguée s’est félicitée qu’un grand nombre d’États, très divers, aient appuyé cette Déclaration.

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a relevé qu’il n’existe pas de traité multilatéral universel régissant toutes les questions ayant trait à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, raison pour laquelle les travaux de la CDI sont essentiels.  Il est très important de préserver des liens pacifiés entre États, a-t-il souligné.  Il a ajouté que l’immunité doit être interprétée à la lumière du droit international, en particulier le droit pénal international qui a caractérisé les délits les plus graves, ce qui a permis à la communauté internationale de lutter contre l’impunité.  Abordant l’aspect politique de la question de l’immunité, le représentant a fait observer que des tensions diplomatiques entre pays peuvent être directement liées à l’immunité de leurs représentants, raison pour laquelle il est important de prévoir un ensemble de mesures permettant un règlement pacifique des différends entre États.

En ce qui concerne l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le représentant a dit que la continuité de l’État doit être prise en compte et que les questions juridiques doivent être traitées par les États et la communauté internationale dans son ensemble.  Quant à la protection des populations touchées par ce fléau, il existe une multitude de règles et de traités, qui doivent faire l’objet d’une analyse fine. 

Mme TZVETY KIRILOVA ROMANSKA (Bulgarie) a centré son intervention sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, en rappelant que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est la « constitution des océans ».  C’est dans son cadre que toutes les activités relatives aux océans doivent être menées.  Toute conclusion juridique sur ce sujet devra respecter pleinement cet instrument, a tranché la déléguée, en soulignant l’équilibre délicat atteint entre droits et devoirs des États dans ce texte.  Enfin, elle a indiqué que ladite Convention ne fait pas obligation aux États parties d’actualiser régulièrement leurs lignes de base et zones maritimes.

Mgr ARCHBISHOP GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé l’importance de l’immunité pour les relations pacifiques et amicales entre les États.  Il a salué l’absence d’exceptions pour les personnes disposant de l’immunité ratione personae, jugeant cette position « réaliste ».  Il a également accueilli les limitations à l’immunité ratione materiae, notant néanmoins que l’article 7 ne codifie pas le droit coutumier, mais constitue un développement progressif.  Il a mis en garde contre la confusion entre le fond et les questions préliminaires.  Il a proposé de limiter les exceptions aux crimes commis de manière systématique et dans le cadre d’une politique étatique, laissant à l’État concerné le soin de juger les crimes individuels.

L’élévation du niveau de la mer n’est pas « abstraite » et constitue une question complexe, a poursuivi l’observateur.  Il a demandé à la CDI de donner la priorité à la protection des personnes touchées par ce phénomène, notant qu’aucun cadre juridique existant ne fournit de protection adéquate.  Le droit existant est fragmenté, non spécifique, et souvent il s’agit de droit souple, a-t-il noté.  L’Observateur permanent a donc encouragé l’établissement de règles à la fois pour les déplacés permanents en raison de la disparition du territoire et pour les migrations causées par les changements climatiques, sur la base d’une approche basée sur les besoins dans le cadre des personnes déplacées.  Les règles relatives à la protection des réfugiés pourraient constituer un cadre pertinent à appliquer aux personnes déplacées en raison des changements climatiques, a-t-il estimé.

Mme LOUREEN O. A. SAYEJ, observatrice de l’État de Palestine, a souligné l’importance de l’établissement des responsabilités pour les violations graves du droit international.  Elle a pris note du projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Si elle a appuyé le projet d’article 7 (Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas), elle aurait toutefois souhaité l’inclusion du crime d’agression dans la liste des crimes pour lesquels l’immunité de juridiction pénale étrangère ne s’applique pas.  Par ailleurs, l’observatrice a noté les enjeux sans précédent liés à l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Les travaux de la CDI sur ce point sont historiques, a-t-elle conclu.

Débat général sur le module 3: chapitre VII (Succession d’États en matière de responsabilité de l’État) et chapitre VIII (Principes généraux du droit)

M. ODD INGE KVALHEIM (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a déclaré que le résumé des travaux accomplis jusqu’à présent dans le chapitre VII du rapport de la CDI constitue une bonne base pour la poursuite des travaux sur ce sujet.  Il a pris note de la décision de la Commission qui établit que les travaux sur ce sujet prendront la forme de projets de directives plutôt que de projets d’articles.  Bien que les pays nordiques, par souci de cohérence avec les travaux antérieurs de la Commission, aient exprimé une légère préférence pour les projets d’articles, ils n’ont « rien contre les projets de directives ».  La forme du résultat n’est pas d’une importance majeure: l’essentiel est d’avoir un ensemble de dispositions bien rédigées et équilibrées, qui seront utiles dans la pratique.  Cependant, la succession d’États étant un phénomène rare et la disponibilité de la pratique des États étant limitée, le délégué a encouragé la CDI à maintenir une approche « prudente ». 

En ce qui concerne les principes généraux du droit, le délégué a jugé le rapport bien documenté et bien structuré.  Il fournit lui aussi une base solide pour ce sujet qui complète les travaux antérieurs de la CDI sur les principales sources du droit international.  Dans l’ensemble, les pays nordiques souscrivent à l’approche du Rapporteur spécial.  Ils conviennent avec lui qu’il n’y a pas de hiérarchie formelle entre les principales sources du droit international.  Ils soulignent tout de même que les principes généraux du droit jouent en pratique un rôle subsidiaire, principalement en tant que moyen d’interprétation, comblant des lacunes ou évitant des situations de non liquet.  Sur un autre plan, le délégué a salué la décision de remplacer le terme « nations civilisées » par « communauté de nations », une expression plus actualisée et appropriée dans le projet de conclusion 2 et le projet de conclusion 7, paragraphe 1.  Il a cependant continué de penser que l’expression « communauté internationale des États » est préférable à l’expression « communauté de nations ». 

Poursuivant son intervention, le délégué a dit que les pays nordiques souscrivent au projet de conclusion 3, selon lequel les principes généraux peuvent soit découler des systèmes juridiques nationaux, soit être formés dans le cadre du système juridique international.  Ils auraient cependant préféré disposer de davantage d’exemples de pratique des États et d’opinio juris pour étayer les conclusions tirées dans le commentaire du projet de conclusion.  Ils sont également d’accord avec l’approche en deux étapes de l’identification des principes généraux découlant des systèmes juridiques nationaux, dans les projets de conclusions 4, 5 et 6.  S’ils conviennent que des principes généraux de droit peuvent également émaner du système juridique international, comme le souligne le projet de conclusion 7, ils considèrent aussi qu’il existe une certaine incohérence entre les formulations des paragraphes 1 et 2 du projet de conclusion 7. 

Les pays nordiques souscrivent aussi aux affirmations des projets de conclusions 8 et 9, selon lesquelles les décisions judiciaires et les enseignements des publicistes les plus qualifiés peuvent servir de moyen subsidiaire pour la détermination des principes généraux du droit international.  Ils pensent néanmoins que leur inclusion en tant que projets de conclusions distincts est inutile et inappropriée. 

Les pays nordiques se félicitent aussi de la formulation proposée au projet de conclusion 10.  Elle reflète fidèlement la fonction réelle des principes généraux du droit dans la pratique juridique internationale.  Les délégations de ces pays encouragent toutefois le Rapporteur spécial et la Commission à examiner s’il ne serait pas préférable de souligner les traits particuliers identifiés dans le projet de conclusion 10, paragraphe 2, lettres a et b, dans les commentaires, plutôt que de les identifier dans le texte d’un projet de conclusion.  Enfin, l’orateur s’est félicité de la structure et de la formulation proposées du projet de conclusion 11.  Elles reflètent fidèlement l’interaction fondamentale entre les principes généraux du droit et les autres sources primaires du droit, les traités et le droit international coutumier.  « Les principes généraux du droit, en tant que source du droit international, ne sont pas dans une relation hiérarchique formelle avec les traités et le droit international coutumier », a conclu l’orateur. 

M. TOH SHIN HAO (Singapour) a estimé, au sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, que la primauté doit être accordée aux accords auxquels les États concernés ont souscrit.  Il est important que le résultat final de la CDI sur cette question soit concis, équilibré et serve d’orientation pratique utile aux États.

S’agissant des principes généraux du droit, le représentant a relevé que la seconde catégorie de principes figurant au projet de conclusion 3 (Catégories de principes généraux du droit), à savoir les principes qui proviennent des systèmes juridiques nationaux, a fait l’objet de « vifs débats ».  De l’avis de Singapour, certains principes fondamentaux du droit international semblent justifier l’existence de cette catégorie, comme l’égalité souveraine des États.  Cela dit, le représentant s’est demandé, à l’instar d’autres délégations, si la pratique des États ou la jurisprudence sont suffisantes pour en justifier l’existence.  La méthode d’identification de cette catégorie de principes devrait être suffisamment stricte pour ne pas affaiblir ou contourner les exigences relatives à l’identification des normes du droit international coutumier.  En même temps, les critères doivent être suffisamment souples pour que la tâche ne soit pas insurmontable.  Le représentant a aussi relevé plusieurs difficultés dans la méthode proposée dans le projet de conclusion 7 (Détermination des principes généraux du droit formés dans le cadre du système juridique international), notamment un manque de clarté dans les critères.  Selon lui, la CDI doit veiller à ne pas confondre cette catégorie avec les traités et le droit international coutumier.

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a douté de l’existence d’une « catégorie » de principes généraux du droit, notant qu’une telle catégorie n’existe que dans la littérature et les écrits académiques et n’est pas soutenue par la pratique et par les avis de la Cour internationale de Justice (CIJ).  « Les exemples mentionnés par le Rapporteur spécial sont, en substance, des exemples de normes coutumières qui sont confondues avec des principes généraux du droit » en raison des termes utilisés par les tribunaux, a-t-il estimé.  Le représentant s’est dit inquiet que les critères de détermination des principes généraux du droit puissent « ouvrir la porte à l’activisme juridique » et servir à court-circuiter les critères d’identification du droit international coutumier.  Il a par conséquent invité la CDI à revoir sa position.

Le représentant a exprimé sa déception quant au produit « hybride » de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État puisqu’elle est passée du texte des projets d’articles au texte des projets de directives.  Là encore, il a invité la Commission à réexaminer ce sujet l’an prochain et à le supprimer de son ordre du jour.

M. WALTER FERRARA (Italie), s’agissant du format des travaux de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, a salué la décision d’adopter provisoirement les textes anciennement appelés projets d’articles sous forme de projets de directives, compte tenu de la rare pratique des États en la matière.  Selon lui, ce choix permet de préserver la cohérence des règles générales de la responsabilité des États et de promouvoir davantage l’élaboration de directives dans des domaines qui n’ont pas encore été réglementés par le droit international.  Il a également partagé le point de vue exprimé dans la conclusion concernant le statut privilégié des accords internationaux entre les États concernés, par rapport au projet de directives.  Le délégué a salué les efforts du Rapporteur spécial dans la recherche d’un équilibre entre la continuité des droits et obligations de l’État prédécesseur à l’État successeur et la doctrine de « l’État propre ».

Abordant le sujet des principes généraux du droit, le délégué s’est félicité de l’adoption des projets de conclusions 1, 2, 3, 4, 5 et 7 et a indiqué suivre avec intérêt le débat sur les autres projets de conclusions.  Mais de manière générale, il a été d’avis que la discussion sur la nature des principes généraux, en tant que source indépendante du droit international et sur la méthodologie pour les identifier, devrait se poursuivre.  L’établissement d’une méthode spécifique est en effet indispensable pour préciser s’il existe une distinction entre les principes généraux du droit et le droit international coutumier.  Par conséquent, une attention particulière devrait être accordée aux différentes exigences nécessaires pour établir l’émergence d’une norme de droit international coutumier et d’un principe général, à savoir l’existence de l’opinio juris, en matière de droit coutumier, et les critères énoncés dans le projet de conclusion 7, en ce qui concerne les principes généraux.

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a dit que « le manque de pratique internationale suffisante et cohérente sur la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État complique tout exercice de codification du droit international ».  Dans ce contexte, il a salué la décision de convertir les projets d’articles en projets de directives, qui peuvent toujours contribuer de manière importante à une meilleure clarté et à davantage de compréhension de cette question.

En ce qui concerne les principes généraux du droit, le représentant a estimé que ce sujet donne la possibilité à la CDI de compléter ses travaux sur d’autres sources du droit international et de fournir des orientations complémentaires sur la nature, l’identification et l’application des principes généraux du droit, ainsi que sur leurs liens avec d’autres sources du droit international.  En ce qui concerne le projet de conclusion 5, le représentant a souligné que les tribunaux nationaux peuvent s’appuyer sur des sources de droit différentes de celles applicables en droit international et que ces différentes sources peuvent s’organiser selon une hiérarchie propre aux différents systèmes juridiques du monde.  Cela doit être pris en compte dans l’analyse des décisions des tribunaux nationaux visant à déterminer l’existence de principes généraux du droit.  Toutefois, la CDI doit éviter d’établir une hiérarchie entre plusieurs sources du droit international.  De l’avis du Portugal, les principes généraux du droit définissent le cadre éthico-normatif des autres normes et ont pour fonction supplémentaire de combler les lacunes et d’éviter les décisions de non liquet.  La délégation a estimé que cette question demande davantage d’analyse par la Commission.

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a appelé à une approche « pondérée et prudente » pour la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, notamment lorsque l’État prédécesseur a cessé d’exister.  Étant donné la complexité de la question et le fait que la succession des États est réglée de façon ad hoc, les accords entre les États intéressés doivent jouer un rôle central, a-t-il estimé.

Le représentant a souligné la nécessité de procéder à une analyse approfondie des principes généraux du droit dans le contexte du droit international.  Ces principes ne doivent pas être des règles secondaires, mais refléter un consensus de la communauté internationale dans son ensemble afin de donner une valeur ajoutée au travail du Rapporteur spécial.  Il s’agit d’une question prometteuse, malgré l’absence de pratique, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Après la suspension par la Russie de l’Initiative céréalière en mer Noire, le Conseil de sécurité résonne d’appels au dialogue

9176e séance - matin
CS/15089

Après la suspension par la Russie de l’Initiative céréalière en mer Noire, le Conseil de sécurité résonne d’appels au dialogue

Alors que la Fédération de Russie a annoncé, le 29 octobre dernier, son intention de suspendre, temporairement, sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire, des appels au dialogue ont été lancés, ce matin, au Conseil de sécurité afin de sauver ce mécanisme vital qui représente une « lueur d’espoir » pour des milliards de personnes, lors d’une séance qui a été émaillée d’échanges assez vifs. 

Le représentant russe, qui avait demandé la tenue de cette réunion, a expliqué que la décision de son gouvernement de suspendre temporairement et de manière « indéfinie » sa participation à l’Initiative est liée aux « agissement de l’Ukraine » en mer Noire, et en particulier aux frappes contre des navires russes, perpétrées à l’aide de drones britanniques et américains.  Des frappes constitutives d’une violation des accords d’Istanbul ayant permis la mise en œuvre de cette initiative, a-t-il ajouté.  Les autorités de Kiev mettent en danger le fonctionnement du corridor humanitaire, qu’elles utilisent à des fins militaires, a argué le représentant russe. 

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, a reconnu que ce serait en effet un « grave abus » si cette initiative était instrumentalisée, de quelque manière que ce soit, pour obtenir un avantage opérationnel militaire, dans un contexte où les exportations de ces « deux greniers mondiaux » que sont l’Ukraine et la Russie sont vitales pour nombre de pays. 

Pour autant, a précisé M. Griffiths, les cargos de l’Initiative peuvent être suivis en temps réel sur des sites Internet publics.  Les données de 9 millions et demi de tonnes d’expéditions ont même été consultées à plus de 70 000 reprises sur le site Internet de l’ONU.  De plus, les inspections rigoureuses du Centre conjoint de coordination (CCJ), comprenant des inspecteurs russes, ont passé au peigne fin les cales de stockage, les salles des machines et les réservoirs des navires plus de 800 fois et n’ont révélé que des manquements mineurs, a encore indiqué le haut fonctionnaire.  

Revenant sur l’aspect économique de la suspension, la Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies pour le développement (CNUCED), Mme Rebecca Grynspan, a déclaré que l’Ukraine et la Fédération de Russie fournissent en effet et à elles seules près de 30% du blé et de l’orge exportés mondialement, 20% du maïs et plus de la moitié de l’huile de tournesol.  Avec le début de la guerre, les prix des produits qui avaient déjà une tendance à la hausse, ont explosé. 

Pour preuve, l’Indice FAO des prix des produits alimentaires a enregistré son plus haut niveau historique: le prix du blé a augmenté de 6%, et celui des engrais de plus de 50%.  Résultat, plus d’un milliard et demi de personnes, dans plus de 90 pays, se trouvent dans une situation d’extrême vulnérabilité.  Avec de tels chiffres, la crise du coût de la vie pourrait devenir une crise d’immense ampleur, a-t-elle mis en garde. 

Plusieurs membres du Conseil et délégations invitées ont rejeté en bloc les accusations de la Fédération de Russie, les jugeant « sans aucune preuve tangible et dénuées de tout fondement ».  La Fédération de Russie se sert du Conseil de sécurité comme d’une plateforme de propagande pour promouvoir ses fausses accusations et son faux récit. 

Cette stratégie est un « prétexte » qui vise à travestir la réalité et à détourner l’attention de la communauté internationale de la responsabilité « unique et exclusive » de Moscou dans la guerre d’agression qu’elle mène contre l’Ukraine, alors que c’est bel et bien la flotte russe en mer Noire qui occupe illégalement les eaux ukrainiennes et que depuis la signature de l’Initiative, la Russie a bombardé des installations portuaires en Crimée à trois reprises, dont l’une seulement un jour après l’entrée en vigueur de l’Initiative. 

En décidant de suspendre sa participation à l’Initiative céréalière, la Russie veut faire le choix délibéré d’un recul et celui de se servir de la faim comme d’un moyen de pression, ont accusé la France, l’Allemagne, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Albanie et l’Ukraine, pour qui, la « seule chose avec laquelle la Russie est capable de nous nourrir, c’est sa désinformation ». 

Au milieu de ce climat d’accusations mutuelles, des voix se sont aussi élevées pour appeler au dialogue afin de résoudre ce problème qui assombrit plusieurs horizons et affecte la sécurité alimentaire à long terme au plan mondial, compte tenu du rôle essentiel de l’Ukraine et de la Russie dans la chaîne alimentaire mondiale et du fait que cette Initiative avait fait briller une lueur d’espoir pour la paix en Ukraine, contribuant aussi à la baisse des prix du blé et d’autres produits de base, en particulier dans les pays du Sud. 

Après huit mois de conflit, l’urgence est de parvenir à une désescalade et de trouver rapidement une issue au conflit.  Alors que le monde fait face à une crise sans précédent, il n’y a pas d’autres moyens qu’une cessation des hostilités et la tenue d’un dialogue de bonne foi, a déclaré la Chine, pour qui la mentalité et les postures de guerre froide ne permettront pas de résoudre ce conflit, seuls la diplomatie et le dialogue y parviendront. 

Les deux parties, leurs alliés et partenaires pourraient recourir aux bons offices du Secrétaire général, ont suggéré les Émirats arabes unis, la Norvège, l’Irlande, l’Inde, la Chine, le Gabon, le Ghana et le Kenya.  Cela est d’autant plus possible que l’Initiative céréalière de la mer Noire a démontré la capacité des parties belligérantes à parvenir à un accord par le dialogue et la coopération, au moins sur les questions humanitaires, ont argumenté le Ghana et le Mexique. 

L’Organisation est prête à répondre aux préoccupations et à écouter les suggestions de toutes les parties, alors que nous approchons de la date à laquelle doit être prorogée cette initiative le 19 novembre, a répondu le Secrétaire général adjoint en conclusion. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré que les nouvelles allégations d’atteinte à la sécurité en relation avec les exportations de céréales ukrainiennes sont préoccupantes et font peser des craintes sur l’initiative céréalière de la mer Noire.  Alors que la Fédération de Russie a annoncé son intention de suspendre sa participation, ce serait un grave abus, si cette initiative était instrumentalisée, de quelque manière que ce soit, pour obtenir un avantage opérationnel militaire.  L’ONU, qui a le privilège d’aider les parties à mettre en œuvre cet arrangement unique est prête à enquêter, avec les États parties à l’Initiative, sur toute preuve présentée, s’est engagé M. Griffiths, ajoutant que le Centre conjoint de coordination (CCJ)–composé de représentants des quatre signataires de l’Initiative– a établi des processus pour de tels incidents et accidents. 

Le Secrétaire général adjoint a ensuite affirmé que les opérations du CCJ sont un livre ouvert, une base de données ouverte: les voyages des cargos de l’Initiative peuvent être suivis en temps réel sur des sites Internet publics.  Toutes les parties partagent les mêmes informations sur les navires, la cargaison, l’inspection et les destinations.  Les données de neuf millions et demi de tonnes d’expéditions sur le site Internet de l’ONU ont été consultées plus de 70 000 fois.  Par ailleurs, des inspections conjointes rigoureuses, comprenant des inspecteurs russes, ont passé au peigne fin les cales de stockage, les salles des machines et les réservoirs des navires plus de 800 fois.  Les perquisitions n’ont révélé que de nombreuses incohérences mineures: documents manquants, sacs de riz d’une précédente cargaison, passeport d’un membre d’équipage mal enregistré. 

Le CCJ a enregistré quelque 60 déviations de navigation, dans plus de 820 voyages facilités par le CCJ et des mesures correctives ont été convenues par consensus.

Cependant, a poursuivi M. Griffiths, dans les jours qui ont précédé la suspension de sa participation par la Russie, le processus s’enlisait déjà, en raison d’une capacité d’inspection insuffisante.  Or, les exportations de ces deux greniers mondiaux que sont l’Ukraine et la Russie sont vitales pour nombre de pays, dans un contexte où les prix du blé ont bondi de 6%.  Chaque augmentation d’un point de pourcentage pousse quelqu’un, quelque part, dans l’extrême pauvreté, a mis en garde le Secrétaire général adjoint.  Les assureurs nous disent que leurs primes pourraient augmenter d’un quart ou de moitié pour les expéditions en mer Noire.  Pour cette raison, l’ONU est encouragée par la déclaration de la Fédération de Russie, selon laquelle elle ne se retire pas de l’Initiative, mais ne fait que suspendre temporairement ses activités de mise en œuvre.  L’Organisation est, pour sa part, prête à répondre aux préoccupations et à écouter les suggestions de toutes les parties, alors que nous approchons de la date à laquelle doit être prorogée cette initiative le 19 novembre, a-t-il conclu. 

Mme REBECA GRYNSPAN, Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies pour le développement (CNUCED), a déclaré d’emblée que la réunion se tient dans un contexte de crise à la fois aiguë et prolongée et que, conscient de la gravité de la situation, le Secrétaire général avait créé en mars dernier le Groupe d’intervention mondiale à la crise mondiale.  Nos analyses initiales étaient alarmantes et il a été démontré qu’elles n’étaient pas erronées puisque l’Ukraine et la Fédération de Russie fournissent près de 30% du blé et de l’orge exportés à l’échelle mondiale, le cinquième du maïs, et plus de la moitié de l’huile de tournesol.  Avec le début de la guerre, les prix des produits qui avaient déjà une tendance à la hausse, ont explosé.  En mars, indice FAO des prix des produits alimentaires a enregistré son niveau le plus élevé de l’histoire, a-t-elle rappelé, soulignant que le monde n’avait pas été en mesure d’accuser cette hausse.  Une grande partie du monde n’a pu absorber ce choc extérieur causé par la hausse des prix, exacerbant les inégalités.  Les effets des changements climatiques et de la pandémie COVID-19 avaient d’ores et déjà épuisé la capacité de la plupart des régions du monde à affronter les chocs extérieurs, a-t-elle expliqué.  Il en résulte que, selon la CNUCED, plus de 1,6 milliard de personnes dans plus de 90 pays se trouvent dans une situation de vulnérabilité extrême face une hausse de la pauvreté, de la faim et de la dette.  Il s’agit là du début d’une crise du coût de la vie aux proportions mondiales, a signalé Mme Grynspan. 

D’autre part, il y a eu une hausse des prix partout dans le monde et le plan du Secrétaire général prévoyait deux initiatives parallèles: l’Initiative céréalière de la mer Noire, et le Mémorandum d’entente pour la promotion d’exportations sans entrave des engrais russes aux marchés mondiaux.  Aux côtés de la Türkiye, les deux accords ont été signés le 22 juillet à Istanbul, ce qui a conduit à une amélioration du bien-être.  Ainsi, les exportations de blé de la Russie ont triplé et celles de l’Ukraine quadruplé depuis la période à l’examen.  Les trois quarts du blé sont parvenus aux pays en développement, dont 20% aux pays les moins avancés.  Partant, 100 millions de personnes ont pu échapper à la pauvreté mais les volumes restent inférieurs aux exportations car ces deux pays ont moins produit qu’en 2021.  Elle a pointé la hausse du prix du blé de 6%, sans compter la pénurie d’engrais qui fait que les petits producteurs ne peuvent plus travailler, notamment en Afrique de l’Ouest, où cela dépasse 50%.  La crise du coût de la vie pourrait devenir une crise d’immense ampleur de la disponibilité des produits, a prévenu la haute fonctionnaire.  Ainsi, l’accent est à présent mis sur l’accès aux engrais.  Elle a indiqué que le coût de la transaction sur la prime d’assurance, le transport et le coût d’exportation des produits russes restent très élevés.  La première cargaison d’engrais devrait partir à destination de l’Afrique début novembre, a encore déclaré Mme Grynspan, soulignant les efforts de nombreux pays européens pour appliquer les sanctions.  Elle a demandé des précisions sur l’allègement de ces mesures et encouragé à la reprise des efforts pour réactiver l’Initiative céréalière.  Rappelant la déclaration faite samedi par le Secrétaire général de l’ONU, elle a assuré qu’il ne fallait pas sous-estimer les difficultés mais au contraire les surmonter. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a indiqué avoir demandé cette séance en raison des agissements de l’Ukraine en mer Noire, où elle a frappé des navires de la flotte russe sous couvert d’exportations de céréales.  Les spécialistes russes ont découvert des fragments de drones sous-marins et analysé les modules de navigation de fabrication canadienne, a dit le représentant.  Et, selon le Ministère russe de la défense, ces attaques terroristes ont été menées par Kiev sous la direction de spécialistes britanniques.  M. Nebenzia a également condamné l’utilisation d’un drone de renseignement stratégique américain, qui viole les accords d’Istanbul du 22 juillet et fait une croix sur leur dimension humanitaire.  Les pays occidentaux n’ont même pas exprimé leur étonnement face à ces attaques, a-t-il affirmé. 

Pour la partie ukrainienne, il est évident que le corridor humanitaire en mer Noire est utilisé à des fins militaires, a-t-il assuré.  Il faut donc, selon lui, suspendre pour une durée indéfinie l’Initiative céréalière.  Des représentants de l’ONU, de l’Ukraine et de la Türkiye ont convenu de passages de plusieurs navires, sans participation et sans accord de la Russie, qui doit pouvoir inspecter ces cargos dans le corridor.  Les autorités de Kiev, et non la Russie, mettent en danger le fonctionnement du corridor humanitaire, a martelé M. Nebenzia.  Le représentant a encore dénoncé des tentatives d’utiliser le processus d’inspection à de mauvaises fins et le blocage des exportations russes par Washington.  La Russie a toujours œuvré de bonne foi à garantir l’exportation de denrées agricoles ukrainiennes vers des pays qui en ont besoin et non pas à des fins commerciales.  À qui profite l’Initiative de la mer Noire? s’est demandé M. Nebenzia, rappelant que la Russie avait envoyé des céréales en Afrique. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a regretté que la Russie utilise le Conseil de sécurité comme une plateforme de propagande estimant que ses accusations du samedi 29 octobre contre le Royaume-Uni et l’Ukraine ne s’appuient sur aucune preuve tangible et sont dénuées de tout fondement.  La stratégie russe vise, selon le délégué, à travestir la réalité et à multiplier les allégations outrancières.  Elle vise aussi à détourner l’attention de la communauté internationale sur la responsabilité unique et exclusive de la Russie dans la guerre d’agression qu’elle mène contre l’Ukraine.  Personne ne doit être dupe de l’objectif de la Russie, a averti le représentant rappelant que cela fait maintenant plusieurs semaines qu’elle cherche un prétexte pour se retirer de l’Initiative sur les exportations de céréales en mer Noire.  « Nous connaissons depuis samedi le prétexte qu’elle aura choisi », a dit le représentant. 

Selon le délégué, ladite Initiative est un succès, comme l’a rappelé le Secrétaire général déclarant que 9 millions de tonnes de céréales et d’autres produits alimentaires ont été́ exportées depuis le 22 juillet dernier par voie maritime.  Les prix du blé avaient baissé sous l’effet de la reprise des exportations, a-t-il encore rappelé.  Tout doit être mis en œuvre pour que l’Initiative se poursuive, a prié le représentant constatant que les accords d’Istanbul produisent les effets attendus.  En décidant de suspendre sa participation à la mise en œuvre de ces accords, la Russie choisit d’imposer l’insécurité alimentaire et la malnutrition au monde entier, et en particulier aux pays en développement qui dépendent fortement des exportations ukrainiennes, a prévenu M. de Rivière.  « Elle a fait le choix délibéré de se servir de la faim comme d’un moyen de pression et d’une arme de guerre. »  Elle joue cyniquement le sort de millions de personnes qui seront affectées par les effets de la baisse des récoltes en 2023 et 2024, a encore prévenu le représentant en demandant que cesse ce chantage irresponsable de la Russie.  Les exportations par la mer Noire doivent se poursuivre, a-t-il martelé, appelant encore la Russie à revenir au respect des accords conclus le 22 juillet dernier.  La France mobilisera ses partenaires européens pour la mise en œuvre des « voies de solidarité » qui ont permis l’exportation de près de 13 millions de tonnes de céréales et autres produits alimentaires, a-t-il annoncé en conclusion. 

M. MADHU SUDAN RAVINDRAN (Inde) a déclaré que, alors que l’Initiative céréalière de la mer Noire et la coopération des parties à ce jour avait apporté une lueur d’espoir pour la paix en Ukraine et contribué à la baisse des prix du blé et d’autres produits de base, sa suspension devrait encore aggraver les problèmes de sécurité alimentaire, d’approvisionnement en carburant et en engrais auxquels le monde est confronté, en particulier les pays du Sud.  Pour cette raison, l’Inde soutient donc l’engagement du Secrétaire général avec les parties pour obtenir le renouvellement et la mise en œuvre intégrale de l’Initiative, y compris la facilitation des exportations de denrées alimentaires et d’engrais depuis l’Ukraine et la Fédération de Russie.  Le représentant a également indiqué que l’Initiative céréalière de la mer Noire et sa mise en œuvre réussie au cours des quatre derniers mois sont conformes à la position de longue date de l’Inde, selon laquelle la diplomatie et le dialogue sont la seule solution pour mettre fin à ce conflit en cours. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a déploré la décision de la Fédération de Russie de suspendre sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire, lueur d’espoir pour faire face aux crises mondiales actuelles.  En tournant son dos à cet effort conjoint, la Russie risque d’affamer des millions de personnes, a-t-il prévenu, en exhortant ce pays à revenir sur sa position.  Le représentant a en revanche conseillé la prise de mesures concertées afin que les produits se trouvant dans les entrepôts ukrainiens puissent être transportés vers les ports africains comme l’Éthiopie et le Yémen notamment.  Les parties doivent travailler dans un esprit de dialogue pour préserver cette Initiative à même de sauver des vies, a-t-il plaidé.

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a déploré le retrait de la Russie de l’Initiative sur les exportations de céréales en mer Noire, qui rend la vie de millions de personnes n’ayant rien à voir avec la guerre encore plus difficile.  La sécurité alimentaire mondiale, en particulier pour les pays et les régions les plus fragiles, ne devrait pas être mise en danger par l’attaque contre la flotte de la mer Noire le 29 octobre, a déploré M. Kimani.  Il a donc souhaité que le Secrétaire général crée une mission d’établissement des faits et de vérification sur toute action armée ou tout blocage qui serait lié à la guerre en Ukraine et qui menacerait la sécurité alimentaire mondiale.  Une telle mission permettrait aussi de mettre un terme à la tendance actuelle à utiliser le Conseil comme une plateforme de propagande plutôt que de délibération et de l’aider dans son mandat de protéger la paix et la sécurité internationales, a estimé le représentant.  Enfin, M. Kimani a, une nouvelle fois, proposé que les parties au conflit, ainsi que leurs alliés et partenaires, aient recours aux bons offices du Secrétaire général pour la médiation et le règlement du conflit en Ukraine ainsi que pour stabiliser la sécurité en Europe. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a dit que la suspension de la participation de la Russie à l’Initiative céréalière, ce week-end, signifie que plus de 100 navires demandant l’autorisation d’entrer dans les ports ukrainiens pour charger du grain pour nourrir le monde ne peuvent pas le faire.  Elle a souligné les graves conséquences de cette suspension et insisté sur le fait que, face à la crise alimentaire mondiale, le Royaume-Uni n’a sanctionné ni les exportations russes de denrées alimentaires ni celles d’engrais vers des pays tiers.  Ces mesures d’atténuation sont en place et seront maintenues pour éviter les impacts indirects des sanctions, a assuré la représentante notant qu’il n’y a pas eu de diminution des exportations de céréales russes depuis le début de la guerre de la Russie contre l’Ukraine.  Répondant au « prétexte russe » pour justifier la suspension de la participation à l’Initiative céréalière, la représentante a rappelé que c’est la flotte russe de la mer Noire qui occupe illégalement les eaux ukrainiennes et bombarde des villes ukrainiennes.  Mettre fin à l’Initiative céréalière déclencherait une vague sans précédent de faim et de misère contre laquelle le Groupe de réponse à la crise mondiale du Secrétaire général a mis en garde en juin, a-t-elle rappelé.  En conclusion, la représentante a demandé à la Russie de renouveler sa coopération dans le cadre de l’accord afin que les expéditions de céréales puissent continuer comme avant.  Elle a aussi appelé la Russie à travailler avec toutes les parties pour garantir que l’Initiative céréalière de la mer Noire soit renouvelée ce mois-ci. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a déclaré que l’accord sur le transport des céréales est la preuve que la diplomatie et le dialogue peuvent parvenir à des résultats concrets.  Il est aussi la preuve que les Nations Unies restent pertinentes, a-t-il ajouté.  C’est pour cette raison que la délégation mexicaine espère le retour au bon fonctionnement régulier de l’Initiative céréalière de la mer Noire, dont le blocage aura des conséquences, pour les pays en développement en particulier.  Le représentant a appelé les parties à trouver un accord pour la poursuite de cette initiative. 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a jugé l’annonce russe de se retirer de l’Initiative « préoccupante » et « totalement inacceptable ».  Ce mécanisme vital doit demeurer fonctionnel pour de nombreux pays dans le besoin, alors que plus de 190 millions de personnes se trouvaient déjà en proie à une insécurité alimentaire aigüe avant le début de l’agression russe en Ukraine.  En Afrique, en Asie, en Europe, les pays coopèrent pour lutter contre la faim; à l’inverse de la Russie qui, une fois de plus, montre qu’elle est prête à militariser l’aide alimentaire, a dénoncé l’orateur.

Le représentant, qui se félicite des efforts du Secrétaire général de l’ONU en cette sombre période, a affirmé que toute mesure visant à entraver l’Initiative revenait à augmenter la faim dans le monde, exhortant la Russie à reprendre sa participation et même à l’étendre.  Les États-Unis, a-t-il dit, ont déjà fourni l’équivalent de plus de 6 milliards de dollars d’aide alimentaire depuis le mois de février pour lutter contre la faim dans le monde, ainsi que 2,3 milliards d’aide publique au développement.

Le Gouvernement russe avait, lui, annoncé l’envoi de 500 000 tonnes de céréales aux pays dans le besoin.  « Ce serait bienvenu, cette mesure n’a que trop attendu, mais elle ne peut pas se faire en bloquant des quantités encore plus importantes de céréales depuis l’Ukraine », a pointé l’orateur.  Le délégué américain a rappelé à la délégation russe que les engrais et les céréales étaient exclus des sanctions américaines contre la Russie.  Il a ajouté que depuis la signature de l’Initiative, la Russie avait « omis » de dire qu’elle avait bombardé des installations portuaires en Crimée à trois reprises, dont l’une seulement un jour après l’entrée en vigueur de l’Initiative.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a attiré l’attention sur le rôle essentiel de l’Ukraine et de la Russie dans la chaîne alimentaire mondiale, qui fait que les événements qui s’y produisent ont souvent des répercussions immédiates à court terme sur les prix des denrées de base à l’échelle mondiale.  Cela affecte la sécurité alimentaire mondiale à long terme de personnes dans le monde entier, et en particulier dans les communautés les plus vulnérables d’Afrique et du Moyen-Orient, s’est-elle inquiétée.  Elle a remarqué que les attaques menées au cours du week-end contre des navires russes dans la baie de Sébastopol et la suspension de la Russie de sa participation à l’Initiative de la mer Noire ont déjà fait grimper les prix et peuvent menacer l’approvisionnement en céréales des pays les plus fragiles.  Mme Nusseibeh a jugé vital que toutes les parties gardent leur confiance dans le mécanisme de l’Initiative et qu’elles reprennent le processus.  Alors que le conflit en est à son huitième mois, elle a réitéré l’importance d’une désescalade et de trouver rapidement une issue au conflit.  Pour parvenir à une paix durable, il n’y a pas d’autre solution qu’une cessation des hostilités dans toute l’Ukraine et de mener un dialogue de bonne foi pour un règlement diplomatique, a-t-elle conclu. 

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a déclaré que l’Initiative céréalière de la mer Noire a démontré la capacité des parties belligérantes à parvenir à un accord par le dialogue et la coopération, au moins sur les questions humanitaires.  Elle a donné de l’espoir pour l’avenir, s’est enthousiasmée la représentante.  Pour elle, la réponse internationale à la signature de l’accord a reflété une demande claire d’approvisionnement sans entrave de céréales de l’Ukraine vers d’autres parties du monde pour aider à faire face aux prix alimentaires exceptionnellement élevés.  Rappelant les conséquences positives de l’Initiative, elle a exhorté la Fédération de Russie à reconsidérer sa décision d’en suspendre sa participation.  L’engagement total de toutes les parties à la mise en œuvre de l’accord sur les céréales est crucial pour éviter une inversion des gains notable et un rebond des hausses des prix alimentaires, a-t-elle insisté, craignant l’aggravation de la crise si rien n’est fait pour rétablir l’Initiative à l’approche de l’hiver.  Elle a appelé tous les membres du Conseil et la communauté internationale à soutenir les engagements du Secrétaire général et de la Türkiye pour sortir de l’impasse actuelle.  Enfin, elle a appelé à la retenue contre les actions unilatérales susceptibles de bouleverser la reprise complète de l’Initiative céréalière et son éventuel renouvellement, en novembre. 

M. GENG SHUANG (Chine) a reconnu qu’il n’est pas aisé d’ouvrir un corridor dans une zone de guerre.  C’est pour cette raison que les parties doivent tout faire pour trouver un accord.  La Chine prend donc note de la décision de suspension par la Fédération de Russie en raison d’attaques contre ses navires à Sébastopol.  Sa délégation espère donc que le Secrétaire général permettra de renouer un dialogue entre les parties.  Le représentant a également dit que les engrais russes sont d’une importance vitale pour le reste du monde, en particulier pour les pays en développement.  Pour cette raison, la Chine appelle à la levée des sanctions délétères pesant sur le commerce international pour que le blé et les engrais russes puissent être exportés.  La mentalité et les postures de guerre froide ne permettront pas de résoudre ce conflit, qui ne peut l’être que par la diplomatie et le dialogue, a conclu le représentant.

Mme MONA JUUL (Norvège), soulignant que l’Initiative sur les exportations de céréales en mer Noire devait être pleinement mise en œuvre et renouvelée, a demandé à la Fédération de Russie de lever sa suspension afin de réduire au minimum l’impact de sa décision sur les populations qui dépendent de ces expéditions.  Elle a réclamé, en outre, le maintien d’une ligne de transport qui doit rester ouverte pour assurer la fourniture de nourriture aux personnes et aux pays les plus vulnérables du monde.  La Norvège continue de soutenir les efforts du Secrétaire général pour le dialogue et la médiation entre les parties dans la recherche d’un accord céréalier renouvelé, a-t-elle assuré, souhaitant que cela aboutisse à la paix et la liberté pour le peuple ukrainien, avec le plein rétablissement de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de leur pays.  La Norvège ne reconnaît pas et ne reconnaîtra aucune annexion illégale du territoire ukrainien, y compris la Crimée et la ville de Sébastopol, a-t-elle ajouté.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé que l’Initiative céréalière de la mer Noire représentait une lueur d’espoir dans un océan de désespoir.  Ce mécanisme, qui a fonctionné sans heurt, devrait être prorogé, a estimé le représentant.  La décision de la Russie de se retirer d’un engagement international est un recul, les prix vont s’envoler à nouveau et les pays qui ont faim vont devoir attendre, a-t-il déploré.  Pour quelle raison une poignée de personnes au Kremlin doit décider de qui peut manger ou pas, de dicter le sort de l’Afrique? a lancé M. Hoxha.  La Russie évoque l’attaque de drones mais n’oublions pas que c’est la Russie qui occupe cette partie de la mer Noire, a-t-il asséné. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit profondément regretter la suspension de l’Initiative céréalière de la mer Noire avec des conséquences qui seront dramatiques, en termes de sécurité alimentaire, en particulier pour les pays en développement.  Le simple fait de pointer du doigt les autres ne nous rapprochera pas d’une solution, a dit le représentant, exhortant les parties à retourner à la table des négociations et à renouveler, sans tarder, les engagements de juillet dernier.  Il n’est pas exagéré de dire que la vie de millions de personnes dépend de l’Initiative céréalière, a-t-il affirmé. 

M. Costa de Filho a également dit être conscient que le conflit en Ukraine a des causes complexes, parmi lesquelles l’architecture de la sécurité collective en Europe.  Pour cette raison, il n’est peut-être pas réaliste de s’attendre à une solution à court terme à cette crise, a-t-il reconnu.  Dans ce contexte, des mesures créatives et pragmatiques, telles que les accords d’Istanbul et l’échange de prisonniers de guerre, devraient être encouragées par la communauté internationale.  Et en la matière, le représentant a réitéré la volonté de son pays de contribuer à explorer de nouvelles voies de dialogue.  Le prix à payer pour retarder une solution diplomatique, de bonne foi et sans conditions préalables, est tout simplement trop élevé, a-t-il ajouté en conclusion. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a rappelé que la signature, le 22 juillet dernier, de l’accord sur les céréales sous les auspices des Nations Unies et de la Türkiye a été une source d’espoir dans un contexte de crise, d’incertitudes économiques, de pénurie de vivres, avec un risque avéré d’insécurité alimentaire pour plusieurs pays ou régions fragiles, même si toutes les cargaisons ne sont pas parvenues à destination.  La suspension et la remise en cause de l’Initiative céréalière de la mer Noire relative à l’accord assombrit plusieurs horizons, notamment celui de la sécurité alimentaire pour de nombreuses populations qui dépendent des approvisionnements fournis.  Le représentant a exhorté les parties à utiliser le dialogue qui a servi à la négociation et à la conclusion de l’accord pour pouvoir aborder les questions liées à sa mise en œuvre, et permettre une poursuite sans entrave des exportations.  Le monde fait face à une crise humanitaire sans précédent, a rappelé le délégué, pour lequel chaque partie est responsable de ne pas contrarier le processus de mise en œuvre de l’Initiative céréalière de la mer Noire. 

Dans une reprise de parole de son pays, M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a donné des chiffres différents de ceux présentés par le Centre conjoint de coordination.  Selon lui, au 29 octobre dernier, 409 navires étaient passés par le corridor céréalier dont plus de 40% en partance pour l’Europe.  L’exportation totale de denrées alimentaires était de 9,5 millions de tonnes, dont 43% de maïs et 29% de blé.  Notant que cela ne correspond qu’à un tiers des exportations totales, il a souligné que tout le blé ukrainien n’est pas de qualité alimentaire.  Malgré cela, plus de la moitié des bénéficiaires se trouvaient dans des pays à revenu élevé, la grande majorité étant des pays de l’Union européenne. 

Toujours selon lui, les pays à revenu faible ou même intermédiaire ont reçu moins d’un quart des exportations, a-t-il dit, soulignant qu’en trois mois seulement, 2,3 millions de tonnes ont été exportées, dont seulement 225 000 millions de tonnes, soit 2,3% par le biais du Programme alimentaire mondiale (PAM).  À ce jour, aucune confirmation n’a été reçue des pays de la part de l’Union européenne quant à savoir si ses pays membres transfèrent ou revendent commercialement aux pays pauvres tout ou partie de ces céréales achetées à l’Ukraine. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine), a déclaré que le terrorisme contre les civils est devenu une « marque de fabrique » de la Fédération de Russie dans sa guerre d’agression contre l’Ukraine.  Pour preuve, ce matin même, des missiles et des drones russes ont attaqué des installations énergétiques et d’autres infrastructures civiles cruciales en Ukraine.  Il a ensuite déclaré être « indigné, mais pas surpris » par l’annonce de la Fédération de Russie de suspendre sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire.  Ce pays n’a jamais abandonné ses tentatives d’aggraver la crise alimentaire mondiale pour faire chanter le monde.  La Fédération de Russie bloque effectivement le corridor humanitaire depuis septembre.  Son intention est claire: forcer l’Ukraine à succomber aux exigences du Kremlin en brandissant le spectre de la faim, a-t-il dit.

M. Kyslytsya a aussi souligné que l’engagement de l’Ukraine envers l’Initiative n’avait pas été ébranlé par des attaques et des provocations armées délibérées et régulières, y compris après le bombardement par la Fédération de Russie du port d’Odessa, le lendemain même de la signature de l’Initiative.  L’Ukraine a même fait tout son possible pour assurer le fonctionnement du corridor céréalier malgré les « attaques terroristes » de la Fédération de Russie contre ses infrastructures énergétiques.  L’Ukraine continuera de récolter et d’expédier des produits agricoles pour assurer la sécurité alimentaire mondiale, a-t-il annoncé.  Le représentant a poursuivi en affirmant que la « seule chose dont la Russie est capable de nous nourrir, c’est de sa désinformation ».  Moscou utilise même le Conseil de sécurité pour promouvoir de « faux récits », au risque de le discréditer.  Il faut y mettre un terme, a avancé le délégué ukrainien. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Türkiye) a loué les résultats de l’Initiative, qui a notamment permis de juguler la hausse des prix, tout en prévenant qu’une augmentation des prix conjuguée à l’inflation entraînerait des conséquences catastrophiques sur l’insécurité alimentaire mondiale.  « L’Initiative doit être préservée », a martelé l’orateur turc, qui a appelé à trouver le moyen de venir à bout des difficultés, et au « bon sens », à la « retenue », et à penser aux plus vulnérables.  Il a appelé à ce que les deux accords idoines soient respectés de bonne foi, espérant que « la raison l’emporterait ».

M. THOMAS PETER ZAHNEISEN (Allemagne) a souligné que, contrairement aux fausses accusations entendues, la mise en place de l’Initiative céréalière de la mer Noire a été une réussite: plus de 9 millions de tonnes de céréales ont déjà été livrées, en grande partie à des pays en développement, et l’Initiative a ramené les prix à des niveaux d’avant-guerre.  Malheureusement, ils sont encore trop élevés, a-t-il regretté.  C’est la raison pour laquelle les ministres des affaires étrangères du G7 discuteront en fin de semaine, avec la Commission de l’Union africaine et leurs homologues du Kenya et du Ghana, de la suspension de la Russie de sa participation à l’Initiative, de ses conséquences mondiales potentielles et de la meilleure manière de soutenir les efforts du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et de la Türkiye.  Le représentant a salué la décision prise rapidement par l’ONU, la Türkiye et l’Ukraine de continuer à acheminer des céréales par la mer Noire.  Il a appelé toutes les parties impliquées à contribuer à assurer une circulation des cargos en toute sécurité. 

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a estimé que l’Initiative céréalière de la mer Noire s’est avérée déterminante pour débloquer les exportations de céréales dans la région de la mer Noire, sachant qu’elle a aidé à éviter une pénurie alimentaire pour des millions de personnes dans le monde.  Cette Initiative doit être mise en œuvre et étendue, a prié le représentant qui a condamné la suspension par la Russie de sa participation.  Ce pays doit revenir sur sa décision et reprendre la mise en œuvre de l’Initiative, a-t-il requis.  Rappelant les effets positifs de cette initiative, le délégué a déclaré que son pays fait déjà beaucoup pour soutenir l’exportation de céréales ukrainiennes vers différentes parties du monde en exportant plus de 5,8 millions de tonnes de céréales d’Ukraine via les routes, les chemins de fer et les ports roumains.  Pour accélérer ce processus, a-t-il ajouté, la Roumanie a libéralisé le transport routier bilatéral et le fret en transit avec l’Ukraine, offrant un soutien dans les ports roumains aux navires battant pavillon ukrainien, adaptant la ligne ferroviaire à grand gabarit pour assurer la connexion au transport ferroviaire de marchandises et faciliter l’accès au Danube. 

La Roumanie est devenue un important pays de transit pour les céréales ukrainiennes et continuera à apporter son soutien, a promis le représentant, en plaidant pour la poursuite et la prolongation de l’Initiative au-delà de novembre 2022, afin de permettre à encore plus de personnes de se payer du pain.  Il faut éviter une plus grande crise alimentaire qui affecterait les personnes vulnérables dans le monde entier, a-t-il prévenu. 

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne, a déploré que la décision injustifiée de la Russie de suspendre sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire empêche l’exportation des céréales nécessaires pour faire face à la crise alimentaire mondiale.  La Russie est la seule responsable de la crise alimentaire mondiale qu’elle a créée par sa guerre d’agression non provoquée et injustifiée contre l’Ukraine et son blocus des ports ukrainiens, a asséné le délégué.  Depuis le début de la guerre, les actions délibérées de la Russie, notamment la destruction de stocks, les perturbations de la production et l’imposition de quotas à ses propres exportations d’aliments et de fertilisants, ont aggravé la crise alimentaire mondiale, a ajouté M. Gonzato.  L’Union européenne condamne la suspension de la participation de la Russie à l’Initiative céréalière et l’exhorte à revenir sur sa décision et à reprendre immédiatement sa participation.  Elle soutient fermement l’appel du Secrétaire général à étendre l’Initiative au-delà de sa période initiale se terminant en novembre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission constate la pérennité du racisme systémique, malgré de timides avancées, et débat d’une définition contestée de l’antisémitisme

Soixante-dix-septième session
39e & 40e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4362

La Troisième Commission constate la pérennité du racisme systémique, malgré de timides avancées, et débat d’une définition contestée de l’antisémitisme

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a examiné aujourd’hui les points de son ordre du jour portant sur l’élimination du racisme et le droit des peuples à l’autodétermination, à l’occasion de dialogues avec la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et six titulaires de mandat spéciaux, suivis d’une discussion générale. L’un des dialogues, centré sur la définition de l’antisémitisme, a donné lieu à un vif échange entre la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée et plusieurs délégations, en majorité occidentales.   

À l’issue de la présentation effectuée par Mme Tandayi Achiume, Israël et le Guatemala, suivis des États-Unis, du Canada, de l’Uruguay et de plusieurs pays européens, dont la Hongrie, se sont opposés catégoriquement au libellé d’un paragraphe de son rapport appelant les États Membres à suspendre à la promotion de la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA). Les Nations Unies ne peuvent cautionner un rapport qui, en essence, infirme le mandat de son auteur, ont fait valoir les contradicteurs de la Rapporteuse spéciale. Celle-ci leur a répondu que la lutte contre les discours antisémites, et plus généralement contre la xénophobie et l’intolérance, relève plus que jamais de son mandat et que son rapport ne fait qu’appeler à un processus ouvert, transparent et inclusif pour lutter correctement contre l’antisémitisme.   

Mme Achiume a d’autre part déploré que les condamnations de l’injustice et de l’inégalité raciales, consécutives aux manifestations de 2020, n’aient pas engendré une réorganisation fondamentale du droit, de la politique et de l’économie au niveau mondial. Face aux demandes de justice, certains États Membres ont apporté des réponses qui semblent, au mieux, s’apparenter au statu quo, a-t-elle regretté, fustigeant à ce titre le Royaume-Uni, qui, lors de la cinquante-et-unième session du Conseil des droits de l’homme, s’est opposé à une résolution qui réclamait des réparations pour la traite des esclaves et le colonialisme.  

Faute de réelle volonté politique, l’élaboration de normes complémentaires à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale n’a guère progressé, a renchéri la Présidente-Rapporteuse du Comité spécial chargé d’élaborer ces normes. Mme Kadra Ahmed Hassan s’est toutefois félicitée du dialogue entamé entre son comité et des experts à propos de l’impact historique du colonialisme sur toutes les formes contemporaines de discrimination fondée sur la religion ou la croyance.  Elle a par ailleurs appelé à l’élaboration d’un Protocole additionnel à la Convention, un projet qui a divisé les États Membres.   

La Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine s’est, pour sa part, réjouie des progrès enregistrés dans quelques États, notamment sous l’impulsion de la Déclaration et le Programme d’action de Durban.  Pourtant, a-t-elle relevé, malgré l’attention mondiale accrue suscitée par la mort violente de George Floyd, aux États-Unis, l’usage excessif de la force et les meurtres de personnes d’ascendance africaine par les forces de l’ordre se poursuivent dans nombreux pays, et ce en tout impunité.  Réitérant ses appels aux États Membres pour qu’ils abandonnent toute tentative de dissimulation du racisme, Mme Catherine S. Namakula a appelé de ses vœux l’élaboration d’un « indice international de justice raciale », qui refléterait les réalités vécues par les personnes d’ascendance africaine.  

De son côté, la Présidente du Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban s’est alarmée de la méconnaissance du public et des idées fausses véhiculées sur le « véritable contenu » des textes de Durban, y voyant des pierres d’achoppement à l’adhésion de nombre d’États.  Mme Edna Maria Santos Roland a également estimé que l’une des principales faiblesses du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est l’absence d’un engagement fort pour éliminer le racisme systémique, lequel a été considérablement aggravé par la crise liée à la COVID-19, selon la Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargée de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  

Mme Marie-Chantal Rwakazina a ainsi rappelé que les personnes appartenant à des minorités ethniques, notamment les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, ont été victimes de violences et de menaces accrues pendant la période pandémique.  Selon elle, la création du Groupe de travail intergouvernemental a toutefois permis des échanges de bonnes expériences entre différentes parties du monde, ce qui a donné lieu à de nouvelles recommandations, dont celle d’un projet de déclaration des Nations Unies sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine. Une déclaration qui, si elle se concrétisait, permettrait de réparer plus efficacement les violations et les injustices passées, a-t-elle plaidé.  

Notée par Mme Rwakazina, l’exacerbation des discours de haine racistes pendant la pandémie a aussi été pointée par la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, qui a mis l’accent sur leur propagation sur Internet et les réseaux sociaux.  Les expressions racistes et xénophobes de certaines personnalités publiques ont ainsi contribué à alimenter la haine et la violence racistes contre les minorités nationales et ethniques, en particulier les personnes d’ascendance africaine et asiatique, les peuples autochtones, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile, a déploré Mme Verene Shepherd.

Dans ce contexte, la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et Directrice du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a encouragés les États à collecter davantage de données au sujet des crimes de haine ou de la représentation déficitaire des personnes d’ascendance africaine. Ces données désagrégées, parfois volontairement négligées, devraient constituer le socle des lois combattant la discrimination, a fait valoir Mme Ilze Brands Kehris, qui a aussi rappelé la corrélation entre le droit à l’autodétermination et les droits humains.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 1er novembre, en dialoguant avec le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE ET DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

Mme ILZE BRANDS KEHRIS, Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme et Directrice du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté trois rapports du Secrétaire général, les deux premiers portant sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, le troisième ayant trait au droit des peuples à l’autodétermination.

Le premier rapport, intitulé « Appel mondial à l’élimination totale du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et mise en œuvre intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban » (A/77/294), donne des exemples de mesures prises par les États Membres, les mécanismes de suivi de Durban et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) pour mettre en œuvre les textes de Durban et lutter contre la discrimination raciale, a précisé Mme Brands Kehris.  La Sous-Secrétaire générale s’est félicitée des progrès réalisés en la matière par certains États, en partie grâce à la promulgation ou à la modification de protections constitutionnelles et législatives.  Ces efforts bienvenus contre le racisme systémique et le recours à la force gagneraient toutefois à être soutenus par la coopération internationale et un financement à tous les échelons, du local à l’international, a-t-elle souligné. 

Le deuxième rapport du Secrétaire général, intitulé « Mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine’ (A/77/333) se concentre sur la collecte et l’utilisation de données désagrégées dans le cadre des efforts de promotion et de protection des droits humains des personnes d'ascendance africaine, a poursuivi Mme Brands Kehris.  Il s’appuie sur les observations et recommandations formulées par les mécanismes internationaux des droits de l’homme et sur les contributions reçues de six États Membres, a-t-elle expliqué.  La Sous-Secrétaire générale a encouragé les États à collecter des données, parfois ignorées, concernant notamment les crimes de haine et la représentation des personnes d’ascendance africaine aux postes décisionnels, mais aussi la santé, le logement, l’éducation et d’autres secteurs sociaux.

Les données désagrégées doivent être à la base des lois combattant la discrimination, a fait valoir Mme Brands Kehris.   Selon elle, un obstacle sur cette voie est la réticence de certains États à recueillir des données ventilées, de crainte que ces informations n’exposent les groupes raciaux ou ethniques marginalisés à davantage de discriminations.  Cette fragmentation risque d’entraver les efforts de lutte contre le racisme, a-t-elle averti, plaidant pour une approche fondée sur les droits humains et prévoyant le recueil de données avec le consentement exprès des personnes et avec des garanties de confidentialité et de sécurité.

Le troisième rapport du Secrétaire général, dédié au « droit des peuples à l’autodétermination » (A/77/265), examine les développements concernant la réalisation universelle de ce droit dans le contexte des principaux organes des Nations Unies et des mécanismes relatifs aux droits de l’homme, a indiqué Mme Brand Kehris.  Il fournit en outre des indications sur la manière dont le droit à l’autodétermination est actuellement interprété et attire l’attention sur les liens qui existent avec d’autres droits de l’homme.  Le nombre de références à ce droit dans les rapports, résolutions et décisions des principaux organes et mécanismes des Nations Unies témoigne, selon la Sous-Secrétaire générale, de l’engagement du système des Nations Unies sur la question.  Cela démontre également l’importance continue du droit à l’autodétermination comme moyen de parvenir à la pleine jouissance des droits de l’homme, ainsi qu’à une paix et un développement durables, a-t-elle conclu.

Dialogue interactif

À la suite de l’exposé de Mme Brands Kehris, les États-Unis se sont inquiétés de la situation des droits humains au Bélarus, au Myanmar, au Venezuela, en Iran, en Éthiopie, en Syrie, en Afghanistan, en Ukraine et en Chine.  Ils ont appelé cette dernière à libérer les prisonniers arbitrairement détenus et ont condamné les « atteintes ignobles » commises par les forces russes en Ukraine.  La délégation a par ailleurs salué les conclusions de la Sous-Secrétaire générale pour ses conclusions concernant les violations des droits humains des femmes et des filles en Afghanistan.

La Chine a souhaité répondre aux « allégations » américaines.  Les États-Unis utilisent Hong Kong, le Tibet et d’autres dossiers pour « semer la désinformation » au lieu d’aborder leurs questions nationales ou des situations dans lesquelles ils ont des responsabilités, notamment en Afghanistan, a dénoncé la délégation chinoise.  Une position partagée par la Fédération de Russie, qui a dénoncé l’attitude « non constructive » des États-Unis, avant de féliciter la Sous-Secrétaire générale pour son travail dans le cadre de la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.

La Namibie a, pour sa part, fait observer que les impacts du colonialisme demeurent après le départ des occupants, avant de rappeler que 79 territoires à l’ordre du jour des Nations Unies restent non autonomes à ce jour.  Elle a d’autre part réitéré son engagement en faveur de la solution des deux États au Proche-Orient et sa solidarité avec ses « frères Sahraouis ».  Les Nations Unies doivent faire davantage pour promouvoir le droit des peuples à l’autodétermination si elles veulent éviter d’être accusées de laxisme, a-t-elle ajouté.

Répondant à ces observations, la Sous-Secrétaire générale aux droits de l’homme a attiré l’attention de la Troisième Commission sur les recommandations figurant dans les rapports qu’elle a présentés, qui portent sur la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, sur le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et sur les conclusions concernant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Exposé

Mme Catherine S. NAMAKULA, Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, a rappelé que deux ans se sont écoulés depuis le meurtre de George Floyd par la police aux États-Unis et les protestations mondiales contre le racisme.  Pourtant, a-t-elle déploré, malgré l’attention mondiale portée à cette question, l'usage excessif de la force et les meurtres de personnes d’ascendance africaine par les forces de l’ordre se poursuivent en toute impunité dans de nombreux pays.  Elle a, par conséquent, jugé nécessaire d’adopter des approches multisectorielles ciblées qui mettent l’accent sur la responsabilité afin de faire cesser cette tendance.  Réitérant ses appels aux États Membres pour qu’ils abandonnent toute tentative de dissimulation du racisme, la Présidente a également appelé à l’élaboration d’un indice international de justice raciale reflétant les réalités vécues par les personnes d’ascendance africaine, en vue de mesurer les performances des États dans ce domaine.

Les États Membres devraient en particulier faire preuve de prudence et de diligence dans le traitement des réfugiés, des migrants et des demandeurs d’asile d'ascendance africaine et garantir leur accès à la sécurité, au développement et à la justice, a notamment recommandé Mme Namakula, saluant à cet égard les mesures prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d'action de Durban, le programme d’activités de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine et l’agenda pour un changement transformateur en faveur de la justice et de l'égalité raciales établi par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).  En outre, elle s’est félicitée de l’opérationnalisation du Forum permanent des personnes d’ascendance africaine, de la création du Mécanisme d’experts indépendants sur l’application des lois et de la capacité accrue du siège et des bureaux de terrain du HCDH à répondre à ces préoccupations.

Rappelant avoir discuté de la situation des enfants d’ascendance africaine lors de la session publique du Groupe de travail en mai de cette année, Mme Namakula a fait observer que ces enfants continuent de subir la discrimination raciale issue des héritages non résolus du commerce et de la traite des Africains réduits en esclavage, du colonialisme, de l’apartheid post-colonial et de la ségrégation.  Les enfants d’ascendance africaine ne sont pas du tout considérés comme des enfants, a-t-elle constaté, faisant état de « faux stéréotypes raciaux » sur la criminalité, la culpabilité et la dangerosité.  Par ailleurs, les forces de l’ordre sont en conflit avec les enfants d’ascendance africaine, a dénoncé la Présidente, selon laquelle ces enfants sont représentés de manière disproportionnée dans le système de justice pénale.  Elle a donc appelé les États à « réduire l’empreinte de la police dans la vie des enfants d’ascendance africaine », notamment en adoptant une approche de la sécurité publique axée sur la santé publique.  Dans de nombreux États, on constate des disparités raciales persistantes dans les interventions auprès des familles par les agences de protection de l’enfance et les services sociaux, y compris le retrait des enfants et la résiliation des droits parentaux, qui impliquent souvent des décisions et des résultats racialisés, a-t-elle relevé.

Évoquant ensuite l’élaboration de la Déclaration sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine, la Présidente a souhaité qu’elle réitère l'appel lancé aux États pour qu'ils assurent la protection du droit à la vie, à l'intégrité physique et mentale, à la liberté et à la sécurité de ces personnes, sans aucune discrimination, et qu’ils adoptent des mesures pour prévenir les actes de violence à motivation raciale à leur encontre.  Enfin, Mme Namakula a exprimé sa préoccupation quant au traitement effroyable des migrants et des travailleurs migrants africains et aux graves violations de leurs droits fondamentaux.  La tragédie de l’esclavage ne peut se répéter, a-t-elle mis en garde, faisant notamment référence à la manifestation de formes contemporaines d’esclavage au Moyen-Orient et dans les États du Golfe.

Dialogue interactif

Dans la foulée de cette présentation, la Côte d’Ivoire a voulu connaître les recommandations du Groupe de travail d’experts quant à la nécessité d’initiatives telles que l’octroi de bourses d’études et de renforcement des capacités pour les enfants d’ascendance africaine.  L’Union européenne s’est ensuite interrogée sur la façon de faire davantage de sensibilisation dans le milieu scolaire à propos de la discrimination raciale.  À son tour, le Portugal, observant que les manuels scolaires ne reflètent pas la réalité de l’histoire du racisme, s’est demandé ce que peut faire le secteur privé pour s’assurer que les massacres de personnes d’ascendance africaine ne soient pas oubliés dans l’enseignement.  De son côté, le Brésil a assuré sensibiliser sa population à la couleur de peau et la protection des droits humains des personnes d’ascendance africaine.

Le Cameroun s’est interrogé sur les mesures recommandées pour lutter contre les stéréotypes négatifs dans les discours politiques et les médias qui présentent les enfants d’ascendance africaine comme des délinquants.  L’Algérie a souhaité savoir comment veiller à ce que les politiques publiques soient conformes à ce qui est prévu dans la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour lutter correctement contre le racisme.

À la suite des États-Unis, qui ont voulu savoir comment collaborer davantage avec le Groupe de travail d’experts et la société civile pour aborder les problématiques touchant les personnes d’ascendance africaine, la Fédération de Russie a dénoncé les crimes odieux commis pendant l’époque coloniale par «  es pays occidentaux civilisés « , appelant à ce qu’il y ait des enquêtes à ce sujet.  Les dommages encourus doivent donner lieu à réparation, a jugé la délégation, déplorant aussi le sort des migrants qui tentent de traverser la Méditerranée.  La République arabe syrienne a, pour sa part, relevé que le rapport reproche aux États-Unis d’éviter d’ouvrir les yeux sur l’oppression dont les familles d’ascendance africaine sont victimes.

Dans sa réponse aux délégations, la Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine a rappelé la nécessité d’adopter une approche multisectorielle.  On voit que des stéréotypes négatifs se répètent, a-t-elle signalé, avant d’appeler à éviter que ces préjugés atteignent les enfants en leur inculquant des valeurs dès le début de l’enseignement.  Cette tendance se fait jour dans différentes parties du monde, a constaté Mme Namakula, qui a indiqué qu’au Moyen-Orient, par exemple, certaines personnes d’ascendance africaine sont victimes de trafics d’organe ou de formes contemporaines d’esclavage.

La Présidente a également jugé préoccupant que les organisations d’ascendance africaine disposent de peu de financement.  Il est essentiel qu’elles participent davantage aux discussions sur les sujets qui les concernent, a-t-elle plaidé.  Enfin, s’agissant de ses recommandations, elle a appelé à les transposer dans des cadres juridiques internes, pour permettre notamment aux requérants de déposer plainte et d’obtenir réparation.

Exposé

Mme EDNA MARIA SANTOS ROLAND, Présidente du Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a expliqué que le rapport du Groupe n'est pas encore disponible, mais qu’il fait état d’une profonde préoccupation face à la désinformation constante et au manque de connaissances du public sur le véritable contenu de la Déclaration de Durban.  Cette situation est notamment à l’origine du boycott de plusieurs États de la réunion de haut niveau commémorant le vingtième anniversaire de la Déclaration en septembre 2021, a-t-elle déploré.

Au cours de sa huitième session, a poursuivi la Présidente, le Groupe s’est penché sur le lancement de lois, de campagnes d’éducation et d’information publique inspirés du Programme d’action.  Une discussion sur le racisme lié aux urgences mondiales, aux catastrophes naturelles, aux crises sanitaires et à la justice climatique a également eu lieu, de même que sur la discrimination accrue à l’égard des réfugiés, des migrants, des personnes déplacées et sur les récents développements mondiaux qui l’aggravent davantage.  Le Groupe a également exploré les liens entre le racisme et l’intolérance religieuse, a-t-elle ajouté, notant que leur absence du Programme 2030 témoigne d’un manque d’engagement à éliminer le racisme systémique.  Soulignant l’importance du soutien du Conseil des droits de l’homme dans le renouvellement du mandat du Groupe d’experts indépendants, elle a salué la création de l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine, et les résultats les plus concrets de la Déclaration de Durban.

Dialogue interactif

À la suite de son exposé, l’Afrique du Sud a voulu savoir ce que pouvaient faire les États Membres afin de lutter contre la campagne de désinformation délibérée contre la Déclaration et le Programme d’action de Durban.  Jugeant peu reluisant le bilan de la Déclaration et du Programme d’action, la Côte d’Ivoire a expliqué ce résultat par la persistance de pratiques millénaires qui résistent encore à l’épreuve du temps.  Dans ce contexte, la délégation a exhorté la communauté internationale à redoubler d’efforts pour faire face à ce fléau qui n’épargne aucune région du monde.  Le Chili a lui aussi reconnu que beaucoup reste à faire en matière d’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, les difficultés ayant été exacerbées par la pandémie de COVID-19.  L’Algérie a pointé du doigt le manque de volonté politique et de ressources dédiées, déplorant elle aussi le niveau de désinformation qui circule sur le contenu de la Déclaration et du Programme d'action de Durban.  Quelle a été la contribution de la célébration du 20ème anniversaire de la Déclaration à la résolution de ces problèmes?  La Fédération de Russie a tancé les États Membres ayant boycotté la célébration du vingtième anniversaire de la Déclaration, critiquant leur mauvaise interprétation des objectifs et contenu de ces documents.  Cette position, selon la délégation, torpille tous les efforts internationaux de lutte contre le racisme.  Le Brésil a indiqué, pour sa part, avoir fourni davantage de possibilités aux brésiliens d’ascendance africaines créant ainsi un modèle fructueux ce qui a permis de lutter directement contre les stéréotypes négatifs.

Exposé

Mme MARIE CHANTAL RWAKAZINA, Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a présenté le rapport de la dix-neuvième session du Groupe de travail intergouvernemental en appelant les États à adopter et mettre en œuvre des plans d’action nationaux complets contre la discrimination raciale.  En effet, la responsabilité de la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée incombe principalement aux États, a insisté la Présidente, selon laquelle les plans d’action nationaux devraient promouvoir la diversité, l’égalité, l’équité, la justice sociale et l’égalité des chances.  Les États sont également invités à intensifier leurs efforts pour favoriser la coopération bilatérale, régionale et internationale dans la mise en œuvre des plans d’action nationaux, a-t-elle ajouté, avant de plaider pour que les programmes nationaux d’éradication de la discrimination raciale, de la pauvreté et de la réduction des inégalités sociales soient centrés sur les besoins, les expériences et les recommandations des personnes qui en sont victimes.

Mme Rwakazina a ensuite relevé avec inquiétude l’impact disproportionné de la pandémie de COVID-19 sur les inégalités existantes au sein des sociétés et entre les pays.  Elle a regretté que, dans ce contexte, les personnes appartenant à des minorités raciales et ethniques, notamment les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, et en particulier les femmes et les filles, aient été victimes de violences racistes, de menaces de violence, de discrimination et de stigmatisation.  La Présidente du Groupe a exhorté les États à s’attaquer à ce problème et ne laisser personne de côté, conformément à la promesse du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle a d’autre part indiqué qu’en tant que mécanisme de suivi, le Groupe de travail intergouvernemental a apporté une contribution précieuse à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et à la promotion de l’égalité raciale en général.  Depuis la création du Groupe de travail, a-t-elle poursuivi, il a été procédé à un échange de bonnes expériences de différentes parties du monde, ce qui a abouti à l’adoption de recommandations tournées vers l’avenir.  Mme Rwakazina s’est félicitée à ce propos que le Groupe de travail soit parvenu à une compréhension commune de questions parfois difficiles. 

Bien que le rapport de la vingtième session du Groupe de travail intergouvernemental ne soit pas encore prêt, cette session ayant eu lieu il y a seulement deux semaines, la Présidente a partagé certains développements importants, relatifs notamment à la décision de l’Assemblée générale de charger le Groupe d’élaborer un projet de déclaration des Nations Unies sur la promotion et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine.  À ses yeux, cette déclaration fournira un cadre mondial pour aborder la nature systémique du racisme qui affecte la vie de millions de personnes d’ascendance africaine dans le monde.  Elle contribuera, en outre, à confronter et à réparer plus efficacement les violations et les injustices passées et leurs conséquences actuelles en encourageant des actions concrètes, a souligné Mme Rwakazina.  De surcroît, cette déclaration constituera une orientation cruciale pour l’édification de sociétés égales et justes pour les personnes d’ascendance africaine et renforcera l’état de droit, la démocratie, la paix et le développement de manière plus générale, ce qui profitera à l’ensemble des sociétés, a-t-elle assuré, avant de rappeler que le programme de lutte contre le racisme appartient à tous et que la réalisation de la dignité humaine et de l’égalité est un devoir collectif. 

Dialogue interactif

Suite à cet exposé, la Fédération de Russie a regretté que les personnes d’ascendance africaine ne peuvent toujours pas jouir de leurs droits humains, décriant les fruits d’un passé colonialiste et des crimes commis par l’Occident.  La Déclaration et le Programme d’action du Durban permettront de lutter contre cette réalité honteuse, a espéré le délégué, à condition que soit inclue une réflexion sur les conditions profondes favorisant l’apparition du racisme systémique.  

Répondant à ces observations, la Présidente du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban a rappelé que son projet de déclaration est encore en cours de discussions, lesquelles se poursuivront lors de la vingt et unième session du groupe de travail sur la Déclaration et le Programme d’action de Durban.

Débat général

Mme RABIA IJAZ (Pakistan), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine, s’est inquiétée de la résurgence alarmante du racisme dans les sociétés.  Malgré des efforts déployés pour éliminer le racisme, la discrimination raciale ou encore la xénophobie, des formes historiques et nouvelles d’injustice persistent dans tous les milieux, a-t-elle déploré.  La représentante s’est dite particulièrement préoccupée par l’incitation croissante à la haine et à l’intolérance, ainsi que par le profilage racial et les stéréotypes négatifs.  En outre, elle a condamné l’utilisation abusive des technologies de l’information et des communications (TIC) et d’Internet, qui servent de refuge aux groupes prônant la supériorité raciale, l’intolérance, les discours de haine et l’incitation à la haine.  Appelant les dirigeants politiques, religieux et les personnalités des médias à assumer leurs responsabilités dans la lutte contre les discours de haine et les stéréotypes, elle a souligné le rôle essentiel joué par l’éducation pour lutter contre la diffusion de messages de racisme et de discrimination raciale. 

Estimant d’autre part que la Déclaration et le Programme d’action de Durban de 2001 restent une base solide pour lutter contre le racisme, la représentante a souhaité que les mécanismes de suivi soient dotés des ressources nécessaires à leur fonctionnement.  Enfin, elle a indiqué que, comme chaque année, le Groupe des 77 et la Chine présentera lors de cette session une résolution sur l’« Appel mondial à une action concrète en vue de l’élimination du racisme et de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, et de l’application intégrale et du suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban ». 

Au nom du groupe de 50 pays, M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a exprimé sa grande préoccupation face à la situation des droits humains en Chine, en particulier les violations continues des droits humains des Ouïghours et des autres minorités majoritairement musulmanes du Xinjiang.  La publication récente du rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) corrobore cette inquiétude de manière impartiale et objective, a-t-il estimé.  Les cas de détention arbitraire dont souffrent ces minorités pourraient constituer des crimes internationaux, notamment des crimes contre l’humanité, a souligné le représentant, selon lequel des violations aussi graves et systématiques des droits humains ne peuvent être justifiées par la lutte contre le terrorisme.  Déplorant que la Chine ait jusqu’à présent refusé de discuter de ces conclusions, il a appelé le pays à respecter ses obligations internationales et à prendre des mesures pour libérer toutes les personnes arbitrairement privées de liberté au Xinjiang.  Il a également enjoint la Chine à clarifier de toute urgence le sort des personnes disparues. 

Au nom d’un groupe de 66 pays, M. ALEJANDRO GONZÁLEZ BEHMARAS (Cuba) a appelé au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États, rappelant qu’il s’agit là de principes consacrés par la Charte des Nations Unies.  Il a également souligné l’importance de la non-ingérence dans les affaires intérieures des pays, qui est une norme essentielle régissant les relations internationales.  À cet égard, les situations au Xinjiang, à Hong Kong et au Tibet relèvent des affaires intérieures de la Chine, a fait valoir le représentant, qui a fustigé la politisation des droits humains et d’autres politiques « à géométrie variable ». 

Mme VICTORIA LIETA LIOLOCHA (République démocratique du Congo), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) s’est alarmée de la résurgence du racisme, de l’intolérance et de la montée des discours de haine.  Elle a réaffirmé l’importance de l’application intégrale et effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et a appelé à la ratification universelle de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. 

La représentante s’est ensuite félicitée de l’adoption, par le Conseil des droits de l’homme, de la résolution intitulée « De la rhétorique à la réalité: Appel mondial en faveur d’une action concrète contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée » qui demande notamment que soient renforcées les campagnes de sensibilisation afin d’accroître la visibilité du message de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Elle a dit attendre avec intérêt l’adoption du projet de résolution intitulée: « Appel mondial pour une action concrète en vue de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et de l’application intégrale et du suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban », qui sera proposé à la présente session de la Commission.

M. STAN ODUMA SMITH (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes, a rappelé que le fléau de l’héritage de l’esclavage et du colonialisme continue de saper le droit au développement, les principes de la Charte des Nations Unies et de la Charte internationale des droits de l’homme.  Le racisme et la discrimination raciale empêchent les personnes d’ascendance africaine de tirer le meilleur parti de leur potentiel économique, a-t-il souligné, déplorant la persistance de l’exclusion économique, l’augmentation de la pauvreté et l’inégalité dans les pays où vivent des personnes d’ascendance africaine.

Par ailleurs, il a fait observer que la pandémie de COVID-19 a affaibli les principes des droits humains et a gravement élargi le fossé économique et financier qui a affecté de manière disproportionnée les pays en développement, principalement les personnes d’ascendance africaine.  Il a également pointé du doigt les effets des changements climatiques, de la sécurité alimentaire et de l’instabilité des prix de l’énergie, plus durement ressentis par les personnes d’ascendance africaine.  En outre, les pratiques et politiques financières et économiques établies par les pays développés, les donateurs et les institutions ne sont pas adaptés pour répondre efficacement aux besoins des personnes d’ascendance africaine, a-t-il estimé. 

L’éradication du « racisme économique et financier » est plus qu’une correction morale, c’est un bien mondial et une dette due depuis longtemps aux personnes d’ascendance africaine, a-t-il martelé, exhortant les États Membres et autres acteurs à examiner d’un œil critique l’étendue et l’impact de la discrimination raciale économique et financière.  Enfin, le délégué s’est réjoui de la création récente de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine, attendant avec impatience sa première session, du 5 au 8 décembre 2022, à Genève. 

Au nom du Système d’intégration d’Amérique centrale, Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a rappelé qu’aucun État ne peut faire face seul à la question de la migration.  Ces dernières années, a-t-elle relevé, la migration intrarégionale a considérablement augmenté.  Cette tendance devrait se poursuivre, notamment dans le contexte de la pandémie de COVID-19, a indiqué la représentante, selon laquelle il convient d’aborder la question de la migration, notamment la migration irrégulière, de manière conjointe, par le biais de la coopération et du dialogue.  Elle a également fait valoir que les personnes migrantes contribuent à répondre aux défis de la baisse démographique ainsi que de la pénurie de main d’œuvre. 

La déléguée a ensuite exprimé sa préoccupation face au nombre croissant d’enfants et d’adolescents non accompagnés sur les routes migratoires.  Alertant contre les risques de traite des personnes, elle a plaidé pour une riposte concertée et une coopération renforcée entre les pays d’origine, de transit et de destination.  Elle s’est par ailleurs alarmée de la mobilité accrue des populations en raison des effets des changements climatiques sur les moyens de subsistance, appelant à faire preuve d’une plus grande solidarité, en particulier dans les situations d’urgence.  La représentante a exhorté les États, les organisations et les différents acteurs à se pencher sur les conséquences des urgences humanitaires sur les personnes migrantes, mais aussi à développer des politiques et programmes internationaux incluant la dimension de genre.  Enfin, elle a invité les États à intégrer la migration dans leurs stratégies de développement, en s’acquittant de leurs obligations en matière de protection des personnes migrantes.

Au nom d’un Groupe de pays, M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie Saoudite) a exhorté les États Membres et groupes régionaux à entreprendre des démarches préventives pour parvenir à un dialogue et à un échange fructueux des idées pour la promotion des droits de la personne.  Il a encouragé à travailler main dans la main afin de renforcer la coopération en appui aux droits humains, appelant à prendre en compte les circonstances nationales et locales auxquelles les différents pays font face.  Il a également appelé à respecter, également, la diversité culturelle, religieuses, civilisationnelle entre les sociétés et les États. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, Mme TEBOHO JULIAH BABEDI (Afrique du Sud) s’est dite inquiète du fait que le Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban fassent état d’une mise à l’écart de ce processus en raison de défis permanents, y compris la pandémie de COVID-19.  Constatant que le travail du Groupe d’éminents experts indépendants a connu des complications au cours des deux dernières années, la représentante a ainsi déploré les boycotts continus d’importantes réunions de haut niveau des Nations Unies sur ces questions et la désinformation généralisée sur le contenu et le contexte historique de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  À l’instar du rapport du Secrétaire général, a-t-elle ajouté, le Groupe des États d’Afrique juge nécessaire de mener des campagnes pour améliorer l’éducation aux droits humains dans le monde entier, en particulier auprès des jeunes, afin de faire largement connaître et comprendre les instruments internationaux des droits de l’homme, y compris les objectifs de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Pour finir, la déléguée a invité la communauté internationale à continuer d’appuyer la mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine avant son expiration en 2024.

M. EDBROOKE (Liechtenstein) a rappelé son attachement au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, avant de souligner l’importance de l’autodétermination en tant qu’élément de prévention des conflits.  Alors que nombre de conflits découlent d’un manque d’autonomie, il a estimé que le droit à l’autodétermination ne saurait être circonscrit au seul contexte de la décolonisation.  Le délégué a ainsi fait état d’études selon lesquelles le fédéralisme est une des réponses aux conflits découlant de problématiques autonomistes.  Mieux comprendre le lien entre l’autodétermination et les conflits permettrait de prévenir des violations des droits humains, a fait valoir le représentant en faisant mention de la guerre en Ukraine. 

Mme AHAMED MOHAMMED (Kenya)a rappelé le lien entre conflits et exclusion, exhortant les organisations multilatérales à tout mettre en œuvre pour le combattre.  À ce titre, la déléguée a estimé que les Nations Unies se doivent de donner l’exemple, en excluant tout d’abord le harcèlement et la discrimination au sein de l’Organisation.  Les États Membres doivent quant à eux prendre des mesures concrètes et mesurables pour lutter contre le racisme, notamment dans le domaine de l’éducation et de l’emploi, a-t-elle plaidé.  Enfin, après avoir fustigé des comportements biaisés à l’encontre des personnes d’ascendance africaine, elle a invité l’ensemble des États Membres à mettre en œuvre le Mécanisme de suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  

M. DAI BING (Chine) a rejeté les accusations des États-Unis et d’autres pays occidentaux, estimant que ces déclarations mensongères ne sauraient effacer les progrès considérables réalisés dans la région du Xinjiang.  Ces pays veulent déstabiliser la Chine et maintenir leurs hégémonies, a accusé le représentant, avant de dénoncer l’hypocrisie des accusateurs.  Le délégué a ainsi évoqué la mort de l’Afro-Américain George Floyd aux États-Unis ainsi que la situation dans la prison de Guantanamo.  Beaucoup d’anciennes puissances coloniales se targuent aujourd’hui d’être pionnières en matière des droits humains, alors qu’elles ne savent même pas améliorer le quotidien de leurs citoyens dans le contexte actuel d’inflation rampante, a-t—il ajouté. 

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela), qui s’est exprimé au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, est revenu sur la valeur que le Groupe donne à la lutte contre les diverses formes de racisme.  La domination de certains groupes par d’autres constitue une dette qui doit être réparée une fois pour toutes, sans plus attendre, a-t-il insisté.  Il a exhorté tous les États à criminaliser toute manifestation de haine, et condamné la résurgence de tendances fascistes et autres qui supposent la supériorité de certains êtres humains sur d’autres.  Il a notamment jugé immoral que certains gouvernements, tout en essayant de donner des leçons de bonne gouvernance au reste du monde, aient été incapables de garantir pleinement le droit à la non-discrimination de leurs propres citoyens, tout en le promouvant activement par l’imposition illégale de mesures coercitives unilatérales, qui touchent aujourd’hui plus d’un tiers de l’humanité.  Les principes de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a ajouté la délégation constituent la feuille de route du Groupe des Amis sur le chemin de la mise au ban du racisme et phénomènes liés.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), a constaté que 20 ans après l’adoption de la Déclaration et Programme d’action de Durban, certaines formes de racisme continuent de prévaloir dans le monde entier.  Nous avons fait fi des mécanismes et des accords que nous avions nous-même élaborés, a-t-il déploré, rappelant que ces structures avaient pour objectif de permettre à la communauté internationale de réfléchir au racisme.  Nous avons au contraire prononcé des jugements de valeur qui contreviennent à ces instruments, a-t-il affirmé, dénonçant une politisation qui permet à certains États de se cacher derrière leur petit doigt. 

Il a ainsi appelé à aborder les causes systémiques du racisme et à éviter la politisation de la question de race.  Certains utilisent cette thématique pour attaquer d’autres États, a-t-il remarqué.  Il a également exhorté à ne plus ignorer que le racisme a imprégné toutes les formes de développement économique et social.  Nous l’avons vu dans la pandémie et dans la façon dont on lutte contre les changements climatiques, a-t-il souligné.  Aujourd’hui, nous vivons dans un monde économique et social vraiment inégal, a-t-il déploré, regrettant que cette tendance n’ait jamais été abordée comme elle l’aurait dû être. 

M. STEPAN Y. KUZMENKOV (Fédération de Russie) a dénoncé les accusations formulées par le Canada et d’autres pays occidentaux à l’encontre de la Chine sur la question du Xinjiang, les qualifiant d’« absurdes et sans fondement ».  Hélas, a-t-il déploré, le rapport « déplacé et biaisé » du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) sur le Xinjiang a contribué à la propagation de ces fausses accusations.  Le représentant a également pointé la campagne de haine sans précédent menée cette année contre son pays.  Il s’est inquiété du fait que cette « russophobie assumée », avouée même par certains acteurs politiques de l’Union européenne, ne soit plus une pratique marginale mais une tendance de fond, au point de se transformer en un élément de politique gouvernementale.  Les victimes de ces manifestations sont notamment des enfants qui sont exposés à un harcèlement pur et simple, même dans les écoles, tant de la part de leurs camarades de classe que des enseignants et de l’administration des établissements d’enseignement, a-t-il fait observer.  Avant de conclure, le délégué a exhorté le HCDH et le Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur les formes contemporaines de racisme à prêter une attention accrue à cette pratique « honteuse et inacceptable ».

M. HELENA NDAPEWA KUZEE (Namibie) a insisté sur l’importance de l’autodétermination, considérant que l’inscription de dix-sept territoires non autonomes à l’ordre du jour de l’ONU appelle à redoubler d’efforts pour faire avancer la décolonisation.  Il a dénoncé les injustices que continue de subir le peuple palestinien, y voyant la nécessité urgente d’une solution à deux États.  Il a ensuite déploré le manque de progrès dans la mise en œuvre des résolutions sur le Sahara occidental, arguant de l’impératif moral d’être solidaires des Sahraouis jusqu’à ce que leur droit à l’autodétermination soit réalisé.

M. IGOR PILIPENKO (Bélarus) a déploré que le racisme et ses dérivés soient devenus des instruments politiques sciemment utilisés et cultivés par certains États.  Les violations des droits humains sur la base de l’appartenance ethnique ou nationale se sont accrues, a constaté le délégué, précisant que le Bélarus en est également la cible.  Il a notamment rappelé que le pays fut aux prises de l’Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale.  Or, certains pays européens couvrent des criminels coupables de génocide au Bélarus lors de cette guerre, a fustigé le délégué, qui s’est ainsi félicité de voir son pays déclarer l’absolue nécessité d’éliminer la réhabilitation du nazisme.  Le délégué a soutenu à ce titre la Russie, qui a proposé une résolution en ce sens.  La lutte contre le racisme sert aussi de prétexte à certains États pour s’immiscer dans les affaires intérieures des autres, a en outre regretté le délégué, prenant la défense de la Chine.

Reprise des déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

Mme VERENE SHEPHERD, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a présenté le rapport annuel de son organe en précisant qu’il traite en premier lieu de la persistance et de l’augmentation des discours de haine raciste et des crimes de haine, en particulier sur Internet et les réseaux sociaux.  Ce phénomène a été exacerbé par la pandémie de COVID-19, a-t-elle constaté, rappelant que certains groupes spécifiques ont été accusés de propager le virus et que certaines personnalités publiques se sont livrées à des expressions racistes et xénophobes qui ont contribué à alimenter la haine et la violence racistes contre les minorités nationales et ethniques, en particulier les personnes d’ascendance africaine, les peuples autochtones, les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d'asile.  Le Comité a, d’autre part, suivi de près la situation des personnes d’ascendance africaine, des peuples autochtones et des autres minorités, s’intéressant à la marginalisation et la discrimination auxquels font face ces groupes de population, notamment en termes d’accès à l’emploi, à l’éducation, au logement, aux services de santé et sociaux, et aux affaires publiques et politiques.  Enfin, a-t-elle indiqué, le Comité s’est penché sur la situation préoccupante des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile, notant qu’un grand nombre d’entre elles se sont vu refuser ou ont eu un accès limité aux services de base.

Mme Shepherd est amplement revenue sur les activités du Comité, déplorant à cet égard que la présentation tardive et la non-présentation de rapports restent un défi: au moment de l'adoption du présent rapport annuel, 84 rapports d’États parties étaient en retard, a-t-elle relevé, avant d’encourager les États parties dont les rapports sont en retard à opter pour la procédure de rapport simplifiée, qui permet d’économiser temps et ressources pour toutes les parties concernées.  La Présidente a ensuite regretté que, depuis l'année dernière, aucun nouvel État partie n’ait reconnu la compétence du Comité pour examiner des communications individuelles au titre de l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Cette procédure offre pourtant un moyen supplémentaire aux victimes de discrimination raciale d’obtenir justice lorsque les voies de recours internes sont incapables de le faire, a-t-elle fait valoir.

Le Comité, a-t-elle poursuivi, a également initié trois commissions de conciliation interétatiques ad hoc et, dans le cadre de la procédure d’alerte rapide et d’action urgente, a examiné des situations concernant huit.  Les situations examinées concernaient les droits fonciers des peuples autochtones, la discrimination dans l’éducation à l’encontre des minorités ethniques et le recours excessif à la force par les forces de l’ordre contre les personnes d’origine africaine. 

La Présidente a ensuite salué la décision des présidents des organes de traité d’établir un calendrier prévisible d’examen sur huit ans, se disant convaincue qu’il apportera un certain nombre d’avantages à toutes les parties prenantes, et notamment l’égalité de traitement entre tous les États parties.  Pour le mettre en œuvre, une augmentation des ressources allouées aux organes de traité sera toutefois inévitable, a-t-elle averti, invitant l’ONU à ne pas faire échouer ce « changement de paradigme » en raison de contraintes financières.  Selon Mme Shepherd, l’augmentation du nombre de traités, de ratifications et de la charge de travail qui en découle au fil des ans a créé des arriérés auxquels, malgré des injections occasionnelles de ressources, les organes de traité et leurs « petits secrétariats » ne peuvent tout simplement pas faire face avec le niveau de ressources actuel.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, les États-Unis ont salué les recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale présentées en août dernier à Genève, qui invitent les États Membres à s’attaquer aux problèmes d’injustice « chez eux ».  Comment la communauté internationale et les États parties peuvent-ils contribuer à l’universalité de la Convention, s’est enquise l’Union européenne, qui a également souhaité connaître certaines bonnes pratiques s’agissant de l’implication de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme dans la rédaction des rapports des États parties.  La Convention demeure le socle universel pour prévenir, combattre et éliminer le racisme, a fait valoir la France, avant d’indiquer qu’elle rendra compte devant le Comité à Genève dans deux semaines.  De quelle façon les injustices raciales peuvent-elles être prises en compte, s’est interrogée la Jamaïque, tandis que le Royaume-Uni souhaitait savoir quelles étaient les pratiques optimales pour lutter contre le racisme. 

De son côté, la Fédération de Russie a voulu attirer l’attention du Comité sur la situation en Lettonie, où les pressions et les politiques discriminatoires contre la population russophone se poursuivent.  Que peut faire le Comité pour remédier à de tels actes, a demandé la délégation russe.  Dans quelle mesure peut-on lutter contre le profilage racial pratiqué par les forces de l’ordre dans certains pays, s’est, pour sa part, enquis le Cameroun.  L’Arménie s’est quant à elle inquiétée du sort des minorités arméniennes, avant de demander comment la société civile pourrait être intégrée aux mécanismes d’alerte précoce en matière de discrimination raciale.  S’agissant des minorités religieuses, des demandeurs d’asile et des réfugiés, l’Azerbaïdjan a, conseillé à l’Arménie de suivre les recommandations que la Convention formule à l’adresse à tous les États Membres. 

Le Cambodge a ensuite salué les efforts de la Chine en matière de promotion et de protection des droits humains, grâce à une approche centrée sur les personnes.  À sa suite, la République démocratique populaire lao a salué la manière ouverte avec laquelle la Chine a accueilli l’ancienne Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, soulignant que le Xinjiang, Hong Kong et le Tibet relèvent des affaires internes de ce pays.  La Chine a, elle, jugé essentiel que le Comité s’acquitte de son mandat de façon impartiale et indépendante, et l’a invité à s’abstenir de toute politisation. 

En réponse aux délégations, la Présidente du Comité pour l’élimination de discrimination raciale a appelé les États à redoubler d’efforts pour parvenir à faire de la Convention un instrument universel.  Elle a ensuite rappelé que la société civile joue un rôle prépondérant dans l’action du Comité, non pas pour minimiser ce que les États ont à dire, mais parce qu’il est essentiel d’avoir « plusieurs sons de cloche ».  Mme Shepherd a également relevé que la pandémie de COVID-19, qui a perturbé les travaux de son organe, a mis en lumière des discriminations raciales structurelles dans de nombreux pays, les groupes les plus touchés étant les populations autochtones et d’ascendance africaine ou asiatique.  Évidemment, a-t-elle poursuivi, le colonialisme a laissé des traces.  C’est aux États qui laissent se perpétuer ces stigmates et le colonialisme jeter une ombre au tableau de prendre des mesures pour inverser cette tendance, a exhorté la Présidente. 

Mme Shepherd a par ailleurs précisé que le fonctionnement des procédures d’alerte prévoit la présence d’une équipe d’experts juridique, chargée d’examiner les plaintes individuelles et de déterminer leur recevabilité.  Elle a également tenu à rappeler que les États parties à la Convention doivent présenter un rapport dans un délai d’un an après la comparution devant le Comité, ajoutant que des rapports de suivi seront présentés en conséquence.  Enfin, après avoir souligné les dangers que représentent les discours de haine en ligne et hors ligne, elle a estimé que la Déclaration et le Programme d’action de Durban constituent des jalons permettant de corriger les erreurs du passé et d’aborder les problématiques avec la plus grande urgence. 

Exposé

Mme E. TENDAYI ACHIUME, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, qui présentait ses deux derniers rapports, a tout d’abord relevé que dans de nombreux cercles, y compris les plus puissants sur le plan géopolitique et les plus influents sur le plan institutionnel (tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des Nations Unies), l’injustice et l’inégalité raciales sont jugées dignes de déclarations et de rhétoriques de condamnation sans fin, mais « indignes » d’une réorganisation fondamentale du droit, de la politique et de l’économie aux niveaux mondial et national. 

Face aux soulèvements et demandes pour la justice raciale en 2020, certains États Membres ont, deux ans plus tard, apporté des réponses qui semblent, au mieux, s’apparenter au statu quo, a regretté la Rapporteuse.  Elle a pointé du doigt, à cet égard, le Royaume-Uni qui, lors de la cinquante et unième session du Conseil des droits de l’homme, a fait une déclaration « alarmante » pour expliquer son vote contre une résolution qui cherchait à mobiliser des actions concrètes contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance. 

Le Royaume-Uni a déclaré clairement qu’il n’était pas d’accord avec l’appel à des réparations pour la traite des esclaves et le colonialisme, au motif que de telles revendications « détournent l’attention des défis urgents que sont la lutte contre le racisme contemporain et les inégalités mondiales », jugeant en outre que « la manière la plus efficace aujourd’hui de répondre à la cruauté du passé est de s’assurer que les générations actuelles et futures n’oublient pas ce qui s’est passé », a regretté Mme Achiume.  Ceci est d’autant plus choquant qu’il s’agit d’une nation qui, a-t-elle rapporté, a payé l’équivalent de 16 milliards de livres en valeur actuelle pour indemniser environ 3 000 familles propriétaires d’esclaves pour la perte de leurs « biens » lorsque l’esclavage a été aboli.  Pour elle, cet état de fait ne « peut être dissocié » de l’héritage persistant du commerce transatlantique des personnes asservies et du colonialisme, notant que de nombreuses nations qui ont largement profité de ces régimes insistent pour que le passé reste pleinement dans le passé.

Venant ensuite à son rapport consacré à la crise écologique, la justice climatique et la justice raciale, la Rapporteuse a déclaré qu’il ne peut y avoir d’atténuation ou de résolution significative de la crise écologique mondiale sans action spécifique pour lutter contre le racisme systémique, et en particulier contre les héritages raciaux historiques et contemporains du colonialisme et de l’esclavage. 

En plus de documenter les zones de sacrifice racial, son rapport met en lumière les déplacements forcés et l’immobilité dans le contexte de la crise écologique et la manière dont les groupes marginalisés sur le plan racial, ethnique et national sont soumis de manière disparate à cette coercition et à cette immobilité.  Elle a également appelé les États Membres d’adopter une approche tenant compte du fait que la justice climatique repose sur la justice raciale et vice versa.

Quant à son deuxième rapport consacré à la lutte contre la glorification du nazisme, du néonazisme et des idéologies connexes, il met en lumière des tendances « inquiétantes », dont l’élargissement des groupes néonazis aux nationalistes blancs et aux mouvements populistes d’extrême droite, ainsi que l’utilisation des nouvelles technologies pour faire progresser le néonazisme et le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui y sont associés.  De même, elle a relevé une recrudescence de l’antisémitisme en Europe et en Amérique du Nord, ainsi que du racisme anti-asiatique et anti-noir, de l’islamophobie et des attaques contre les non-nationaux, en relation avec la COVID-19.  S’agissant de l’instrumentalisation de l’antisémitisme en particulier, la Rapporteuse spéciale a exhorté le système des Nations Unies et les États Membres à lancer un processus ouvert et inclusif pour identifier une réponse améliorée à l’antisémitisme. 

Dialogue interactif

À l’issue de cette présentation, plusieurs délégations telles que le Canada, l’Uruguay, ainsi que des États européens, ont, à l’instar du Guatemala et Israël, refusé catégoriquement le libellé de son rapport qui appelle les États Membres à suspendre l’adoption et la promotion de la définition de l’antisémitisme tel que proposé par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste.  Les Nations Unies ne peuvent pas prendre note de ce rapport qui, en essence, contredit le mandat de son auteur, ont-elles ajouté.  À l’heure où l’antisémitisme est en hausse, la définition de l’Alliance est essentielle pour aider à éduquer sur ce qu’est l’antisémitisme, et comment et où il se manifeste, a insisté la Hongrie, appuyée par l’Albanie.  Les États-Unis ont accusé la Rapporteuse spéciale de « tentative de politisation » de son mandat, suivis de la Roumanie qui a appelé à trouver une définition « commune », une position également soutenue par l’Italie qui s’est targuée d’avoir mis sur pied une stratégie contre ce phénomène.

De nombreuses délégations à l’instar, de l’Australie, l’Union européenne, et du Royaume-Uni, ont par ailleurs dénoncé l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, notant en outre que Moscou a justifié cette agression en invoquant la lutte contre le néonazisme.  Il s’agit là d’une instrumentalisation et d’une violation des droits humains, a dénoncé la Tchéquie, décriant un abus de langage.  

De son côté, Cuba s’est alarmée des violations policières aux États-Unis contre les minorités.  À l’instar de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), la République démocratique populaire lao a réfuté toute tentative de politiser les droits humains pour s’ingérer dans les affaires de la Chine dont la délégation a regretté que, dans beaucoup de pays, les minorités ne disposent pas de système judiciaire vers lequel se tourner en cas d’abus.

Après l’Indonésie, qui s’est opposée au concept de peuple autochtone, le Pakistan a décrié l’occupation du Jammu-et-Cachemire par l’Inde, pour ensuite dénoncer l’islamophobie et exhorter à une intensification des efforts internationaux pour promouvoir une culture de la tolérance.  Une position appuyée par le Qatar, ainsi que l’Azerbaïdjan au nom du Mouvement des pays non alignés.

Pour finir, la Fédération de Russie a interpellé la Rapporteuse spéciale au sujet des récents propos du Haut Représentant de l’Union européenne, M. Joseph Borell, selon lesquels l’UE est un jardin entouré par la « jungle » du reste du monde.  N’est-ce pas là une déclaration raciste?

En réponse aux questions et observations des États Membres, la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée s’est tout d’abord élevée contre les déclarations du Guatemala et d’Israël, affirmant avoir travaillé d’arrache-pied pour lutter contre les discours antisémites et de façon plus générale tous les discours de xénophobie et d’intolérance.  Elle a expliqué que, dans son rapport, elle appelle de ses vœux un processus ouvert, transparent et inclusif pour lutter correctement contre l’antisémitisme.

Elle a regretté les propos de la délégation des États-Unis, indiquant qu’elle s’attendait à un échange transparent « pour renforcer nos approches » destinées à mieux lutter contre l’antisémitisme.  Dans son rapport, elle invite justement les Nations Unies à être un espace sûr et ce n’est malheureusement pas le cas, a-t-elle déploré.  Pour combattre l’antisémitisme, la Rapporteuse spéciale a recommandé de tenir compte de l’histoire d’un pays pour comprendre ce qui sous-tend la xénophobie et le racisme en son sein.  Elle a également conseillé de lutter contre l’intolérance et le racisme institutionnels.  L’approche multidimensionnelle est une autre approche défendue par la Rapporteuse qui a encouragé d’aborder cette question « depuis la base jusqu’au sommet » pour comprendre ce que vivent les communautés les plus touchées par ce fléau.

Exposé

Mme KADRA AHMED HASSAN, Présidente-Rapporteuse du Comité spécial chargé d’élaborer des normes complémentaires, a présenté son travail réalisé au cours des deux dernières années sur la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Nous sommes tous conscients que, par le passé, l’élaboration des normes complémentaires à la Convention n’a pas progressé, a-t-elle reconnu.  En effet, pendant de trop nombreuses années, il a semblé qu’il n’y avait pas de volonté politique d’aller de l’avant et de travailler à l’accomplissement du mandat du Comité, a-t-elle poursuivi, se disant cependant heureuse de constater qu’au cours des dernières années, et malgré certains retards, les travaux du Comité ont progressé. 

Rappelant la tenue de la première partie de sa onzième session en décembre 2021, elle a indiqué qu’elle avait été consacrée à l’examen du rapport de la consultation intersession d’experts juridiques, y compris sur la diffusion des discours de haine.  Cette année, lors de la douzième session, le Comité a entendu des présentations et tenu des discussions avec des experts sur l’impact historique du colonialisme sur le droit ainsi que sur toutes les formes contemporaines de discrimination fondée sur la religion ou la croyance, a-t-elle également détaillé, ajoutant avoir poursuivi l’élaboration d’un protocole additionnel.  La troisième session est prévue en avril 2023, a-t-elle par ailleurs indiqué, se félicitant par ailleurs du consensus dégagé au sein du Comité en dépit de divergences de vue. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Afrique du Sud a souligné que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale n’a jamais été actualisée, contrairement à d’autres instruments historiques, relevant en outre que beaucoup d’États n’ont pas pu participer à son élaboration, n’étant pas libres à l’époque.

L’Union européenne a estimé qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un protocole additionnel étant donné que la Convention est un document flexible et vivant.  Le seul problème est sa mise en œuvre, a souligné la délégation, appelant à des efforts en ce sens. 

La Fédération de Russie a indiqué de son côté soutenir l’activité du Comité, l’élaboration de nouvelles normes étant importante.  Par ailleurs, la délégation a déploré une campagne de grande ampleur dirigée depuis février contre les Russes et russophones. 

Reconnaissant qu’il reste beaucoup de travail, la Présidente-Rapporteuse a espéré que la Troisième Commission saura faire preuve de la volonté politique nécessaire pour aller de l’avant.  Le racisme dans ses nombreuses manifestations reste une question urgente partout, a-t-elle appuyé, affirmant que des événements récurrents et tragiques rappellent sans cesse l’urgence de l’éliminer, de même que l’importance cruciale du travail du Comité spécial.  Il s’agit également d’un test de la crédibilité du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale, à savoir si la volonté politique peut être convoquée pour combattre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, a-t-elle estimé.

Débat général

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a expliqué que son gouvernement conçoit et met en œuvre différentes politiques impliquant les voix des personnes oubliées, les peuples autochtones avant tout.  Le Gouvernement colombien travaille à l’intégration de différentes visions du monde dans l’élaboration de politiques conformes à la nature multiculturelle de la nation colombienne, a-t-elle souligné, avant de faire état de mesures de réparation et de discrimination positive.  La Commission nationale intersectorielle pour les réparations historiques a d’ailleurs été créée pour surmonter les effets du racisme, de la discrimination raciale et du colonialisme sur les peuples autochtones de Colombie, a précisé la représentante.  Le Gouvernement a d’autre part mis en place un observatoire contre la discrimination raciale et le racisme, et progresse dans la mise en œuvre du volet ethnique des accords de paix, a-t-elle ajouté, estimant que cette stratégie à vocation pédagogique permettra de réduire le risque que les victimes et les personnes désengagées du conflit se retrouvent discriminées dans leur processus de réintégration dans leur communauté d’origine.

M. ASHISH SHARMA (Inde) a déclaré qu’en tant que pays soumis à la domination coloniale pendant près de deux siècles, l’Inde est consciente des effets néfastes du racisme et de la discrimination raciale.  Le fléau de ce que le Mahatma Gandhi qualifiait de « vestige de l’esclavage » a touché des millions d’Indiens, chassés de leur mère patrie par les puissances coloniales vers des rivages lointains en qualité de travailleurs sous contrat, a-t-il rappelé.  Depuis l’indépendance, la lutte contre le racisme et la décolonisation ont été les pierres angulaires de la politique étrangère de l’Inde, a ajouté le représentant, rappelant qu’en 1946, son pays a été le premier à élever sa voix contre l’apartheid aux Nations Unies. 

La Constitution indienne prévoit des garanties contre le racisme et la discrimination raciale, garanties encore renforcées par un cadre juridique complet, « avec un système judiciaire indépendant et impartial, un système politique pluraliste, une société civile dynamique et des médias libres », a affirmé le délégué.  Pour l’avenir, l’Inde parie sur l’éducation et le numérique pour promouvoir les valeurs de la citoyenneté mondiale tout en luttant contre la face sombre des médias sociaux, « devenus une chambre d’écho de la haine raciale et des idées discriminatoires ».  Pour l’Inde, a-t-il poursuivi, la Déclaration et le Programme d’action de Durban continuent de fournir un cadre global pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  La pleine mise en œuvre des textes de Durban est cruciale pour atteindre les ODD, a conclu le représentant d’Israël.

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a estimé que toute doctrine s’appuyant sur la différenciation raciale est scientifiquement fausse, moralement condamnable et socialement injuste, en plus d’être dangereuse.  À ses yeux, il n’existe aucune justification à la discrimination raciale, en théorie comme en pratique, où que ce soit.  La représentante s’est par ailleurs interrogée sur la manière d’appréhender le passé pour aller de l’avant.  Aussi douloureux qu’il soit pour les uns ou déshonorant pour les autres, ce passé, qui se trouve à l’origine du racisme contre les Noirs, se doit d’être confronté, a-t-elle estimé. 

M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a souligné les efforts entrepris par son pays dans la lutte contre la désinformation et sa coopération internationale en la matière, notamment dans le cadre du Groupe des Amis pour la lutte contre la désinformation.  Parmi les dernières manifestations de désinformation dans le monde, il a fustigé la campagne étatique menée par le Gouvernement indien « pour servir ses objectifs stratégiques ».  Citant les données du journal en ligne IFLA, qui a fait état de 9 000 cas de désinformation dans le monde entre janvier et mars 2021, il a accusé l’Inde d’être « la championne des ‘fake news’ sur les réseaux sociaux ».  Le Pakistan en est la cible numéro un, a-t-il dit, ajoutant que New Delhi présente les activistes de paix au Jammu-et-Cachemire comme des terroristes.  Selon le délégué, le Gouvernement indien, mu par un « hindouisme extrémiste », oppresse en outre 200 millions d’Indiens musulmans, ciblés par des appels au génocide.

Mme HEBA MOSTAFA MOSTAFA RIZK (Égypte) s’est dite très préoccupée par la résurgence et l’augmentation de la xénophobie, l’islamophobie et la prolifération des discours de haine, pointant du doigt le rôle des plateformes numériques dans ce domaine.  Les États ont une responsabilité à contrôler ces technologies numériques, a-t-elle insisté.  Par ailleurs, elle a rappelé le soutien de son pays à la création de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine.  La Déclaration et le Programme d’action de Durban sont une base pour des réformes dans ce domaine, a-t-elle ajouté, appelant à des progrès supplémentaires pour l’élaboration de normes complémentaires à ce sujet. 

Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) a déploré l’usage disproportionnée de la force qui mène à la mort de milliers de Palestiniens.  Cela a lieu tous les jours et cela se poursuit sans reddition de comptes, a-t-elle décrié, dénonçant le régime israélien qui commet ces atrocités en sachant très bien qu’il ne subira aucune conséquence.  Par ailleurs, elle a dénoncé la politique de deux poids, deux mesures par les États-Unis et des pays occidentaux à l’égard des personnes d’ascendance africaine, s’inquiétant en outre de la hausse de l’islamophobie.  Enfin, elle a critiqué les mesures coercitives unilatérales qui mènent à des discriminations contre les populations visées, avant de dénoncer les violations des droits humains dans plusieurs pays, y compris au Canada et au Royaume-Uni.

M. NIZHAN FARAZ BIN RIZAL (Malaisie) a défendu le multiculturalisme et la coexistence pacifique entre différentes communautés, et a indiqué que son gouvernement a mis sur pied un plan d’action pour promouvoir une société malaisienne prospère.  Le multilatéralisme consacré dans la Charte est chéri par de nombreuses nations mais de nombreuses autres refusent de le mettre en œuvre, a-t-il ensuite déploré.  Il a pris pour exemple la politique d’Israël dans les territoires palestiniens occupés.  Il a dénoncé le fait qu’Israël ait carte blanche pour perpétuer son régime d’apartheid, faisant fi de la solution des deux États.  Il a aussi plaidé pour que la Palestine devienne un État Membre de l’ONU à part entière.

M. VANDERMUNTERT (Luxembourg) s’est alarmé de la résurgence des tendances racistes, antisémites et xénophobes à travers le monde.  Il a estimé que la lutte contre le racisme mérite toute l’attention de la communauté internationale, notamment pour combattre les campagnes de désinformation et les discours incitant à la haine, qui affectent en particulier les populations migrantes.  Cette lutte nécessite des cadres internationaux efficaces, a-t-il ajouté, plaidant pour une coordination des efforts pour la tolérance et la justice raciale assuré par un système multilatéral fort et solidaire centré sur les Nations Unies.  Pour le représentant, cette lutte doit aussi être inclusive, car le racisme et l’intolérance ne peuvent être combattus avec succès que si la société civile est pleinement engagée.  Il a ensuite assuré que son pays se soumet pleinement aux mécanismes et instruments des droits humains.  À la suite de l’Examen périodique universel de 2018, le Luxembourg a ainsi accepté 12 recommandations relatives à la lutte contre le racisme qui lui ont été adressées et s’est engagé à renforcer ses efforts pour combattre toutes les formes de discrimination raciale et de xénophobie, a-t-il indiqué, faisant également état de la préparation d’une stratégie interministérielle de lutte contre le racisme.  

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a dénoncé les actes d’agression, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et violations des droits humains perpétrés par les forces israéliennes dans le Golan syrien et autres territoires arabes.  Le représentant a exhorté Israël à mettre un terme à l’occupation de ces territoires.  Par ailleurs, il a rappelé sa position concernant la souveraineté des États, à savoir ne pas s’ingérer dans les affaires internes d’autres pays.  Ainsi la situation au Xinjiang, au Tibet ou à Hong Kong concerne la Chine, a-t-il appuyé, soulignant que la Chine a beaucoup fait dans le domaine du droit humanitaire.  Enfin, il a appelé à faire de l’État de la Palestine un membre à part entière des Nations Unies. 

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a rappelé le plan d’action mis en œuvre dans le pays, couvrant la période 2021 à 2025.  Nous allons bientôt créer un outil complémentaire à notre commission de lutte contre le racisme et la xénophobie, a-t-elle indiqué.  Elle a par ailleurs détaillé les formations en matière de droits humains pour les forces de sécurité, notamment pour qu’elles rendent des comptes en cas de manquement.  Elles disposent également désormais de caméras embarquées, a indiqué la représentante.

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE) a réaffirmé que le racisme et la discrimination raciale vont à l’encontre des principes de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, d’état de droit et de respect des droits humains qui sous-tendent l’UE et qui sont des valeurs communes à tous ses États membres.  L’action de l’UE dans ce domaine, a-t-il précisé, s’appuie sur un cadre juridique solide qui a été développé au fil des ans sur la base de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de la directive de 2000 sur l’égalité raciale de l’UE, qui interdit toute discrimination directe ou indirecte fondée sur l’origine raciale ou ethnique.  Parmi les mesures importantes prises par l’UE dans ce domaine, le représentant a cité l’adoption en 2020 par la Commission européenne du premier plan d’action européen contre le racisme et la nomination en 2021 d’un nouveau coordinateur antiracisme.  Par ailleurs, en ce qui concerne les discours de haine véhiculés par les plateformes numériques, un accord historique a été atteint au sein de l’UE sur la nouvelle loi sur les services numériques, qui consacre le principe selon lequel ce qui est illégal hors ligne doit l'être également en ligne, a indiqué le délégué.  L’UE a, en outre, mis en place un plan d’action contre le racisme 2020-2025, dont la mise en œuvre a été débattue lors du Sommet européen contre le racisme de 2022.  Plaidant enfin pour le débat sur la Déclaration et le Programme d’action de Durban soit inclusif et fondé sur le consensus, le représentant a appelé à éviter la prolifération de mécanismes et d’instruments dédiés à l’élimination du racisme.  Pour l’UE, a-t-il conclu, les normes, telles qu’elles sont prévues par la Convention, et la structure institutionnelle du système des droits de l’homme des Nations Unies, offrent un « cadre adéquat ».   

M. KARL LAGATIE (Belgique) a constaté qu’en matière de lutte contre le racisme, la communauté internationale a déjà adopté un grand nombre d’initiatives, qu’il s’agisse de mécanismes, de groupes d’experts, de programmes, de conventions et de résolutions.  Cela signifie que des outils sont disponibles et à notre disposition pour améliorer la situation, a-t-il dit, jugeant que l’heure est à présent à la mise en œuvre complète et effective des résultats et des recommandations.  Dans ce domaine, la Belgique est et restera active, tant au niveau national qu’international, a affirmé le représentant.  Conformément à l’engagement qu’il a pris lors de la Conférence de Durban en 2001, le Gouvernement fédéral belge a adopté cet été un nouvel ensemble de mesures, dont l’un des principaux objectifs est d’optimiser le suivi et l’étude du racisme en améliorant la collecte différenciée de données qualitatives et quantitatives, a précisé le délégué.  Il a par ailleurs appelé à la ratification universelle et à la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, demandant également aux États qui ont des rapports en retard de les soumettre dès que possible

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, le représentant de l’Inde a interpellé le Pakistan, l’accusant d’avoir détourné la question de la décolonisation pour parler de la question du Jammu-et-Cachemire et dissimuler les violations du Pakistan envers sa propre population.  Le Jammu-et-Cachemire fait partie de l’Inde, a maintenu le délégué indien. 

Le représentant du Pakistan a répondu à l’Inde en déclarant que le Jammu-et-Cachemire n’a jamais fait partie de l’Inde, prenant appui sur de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité selon lesquelles ce territoire est disputé.  Dénonçant les mensonges et les affabulations de l’Inde à ce sujet, il l’a également accusée de violer le droit international en refusant d’accorder au peuple du Jammu-et-Cachemire le droit à l’autodétermination.  Le délégué a conclu son intervention en affirmant que les minorités en Inde sont victimes de discriminations évidentes.

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