Quatrième Commission: face aux transformations géopolitiques, les opérations de paix doivent s’appuyer sur une orientation stratégique intégrée
La Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a fait le point, cet après-midi, sur les orientations stratégiques et opérationnelles prises par les opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour relever les défis géopolitiques émergents, dans le cadre de son débat sur la question des opérations sous tous leurs aspects.
Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix a fait état des défis croissants auxquels sont confrontées les Nations Unies dans leurs efforts visant à maintenir la paix dans le monde, du fait des changements géopolitiques et économiques « spectaculaires » qui s’opèrent sur fond de tensions régionales, des inégalités et des vulnérabilités climatiques. Nous continuons également d’être confrontés à l’action des groupes armés non étatiques, à des attaques asymétriques, à l’exploitation des ressources naturelles et à la criminalité transnationale organisée, s’est inquiété M. Jean-Pierre Lacroix, tandis que les Casques bleus sont victimes d’attaques ciblées, notamment à l’aide d’engins explosifs improvisés.
Pour faire face à ces problèmes, les sept priorités d’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) continuent de fournir une orientation stratégique aux opérations de maintien de la paix. Parmi celles-ci, M. Lacroix a cité la cohérence collective derrière la stratégie politique, par laquelle les missions de maintien de la paix mettent à profit leurs bons offices et leurs partenariats pour soutenir les solutions politiques aux conflits, avec les organisations régionales telles que l’Union africaine.
L’intégration stratégique et opérationnelle ainsi que le renforcement des capacités ont également permis de réaliser des progrès importants, grâce au système de préparation des capacités de maintien de la paix et à la mise en place de forces de réaction rapide, de forces spéciales, d’hôpitaux de campagne et d’hélicoptères dans au moins quatre missions sur le terrain.
Pour M. Atul Khare, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, la formation est essentielle pour renforcer les capacités existantes et générer de nouvelles compétences parmi le personnel en uniforme. Près de 13 000 membres du personnel en uniforme ont été ainsi été formés dans les domaines de l’ingénierie, de la médecine, du commandement, des communications, de l’informatique, des renseignements et de la reconnaissance dans le cadre d’un programme de partenariat du Département.
Toutefois, alors que les décès de Casques bleus dus à des actes de malveillance ont presque doublé l’an dernier, passant de 13 en 2020 à 25 en 2021 puis à 29 cette année, les missions de paix s’efforcent d’affaiblir les groupes armés responsables, d’améliorer leurs connaissances de la situation sur le terrain et de prévoir et d’éviter les menaces.
En tant que pays contributeur de troupes, le Guatemala s’est dit préoccupé que les forces de maintien de la paix soient de plus en plus la cible d’acteurs hostiles et soient confrontées à des menaces asymétriques et complexes dans des environnements politiques et sécuritaires en constante détérioration. Selon son représentant, l’ONU doit mettre à jour les principes du maintien de la paix pour refléter le fait que « le casque bleu et le drapeau n’offrent pas une protection naturelle », mais constituent plutôt une cible. L’Organisation et les pays contributeurs de troupes et de police doivent en outre planifier les opérations en se fondant sur l’évaluation des menaces de l’environnement spécifique, et non sur des politiques davantage adaptées au maintien de la paix traditionnel.
Si la mort d’un seul soldat de la paix est une mort de trop, aucun décès ne devrait jamais survenir en raison de l’absence de soins médicaux adéquats, a fait valoir le Secrétaire général adjoint au Département de l’appui aux missions. À cette fin, celui-ci déploie, dans les missions à haut risque, des solutions de télémédecine entre le théâtre d’opérations militaires et les installations médicales.
L’Uruguay a pour sa part souligné l’importance d’actualiser les recommandations afin que les opérations de maintien de la paix et les Casques bleus puissent remplir leurs mandats tout en renforçant leur sécurité et leur formation. Son représentant a appelé à l’adoption de nouvelles approches afin d’assurer la protection des civils, tout en reconnaissant le rôle unique du Comité spécial des opérations de maintien de la paix en tant que plateforme permettant de réaliser des actions concrètes dans ce domaine.
Afin de permettre aux opérations de maintien de la paix de réaliser leur mandat, M. Lacroix a souligné l’importance d’assurer une meilleure compréhension des mandats du Conseil de sécurité par les principales parties prenantes, de même que la pleine coopération des pays hôtes. Pour le Mouvement des pays non alignés, dont les membres constituent 90% des troupes déployées au sein d’opérations de paix, le Conseil de sécurité doit formuler des mandats clairs, ciblés, réalistes et réalisables, fondés sur l’appropriation nationale et soutenus par un processus de paix global, en consultation avec les États hôtes ainsi qu’avec les pays contributeurs de troupes et de police.
Comme l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), le Mouvement a par ailleurs d’exhorté le Secrétariat à veiller à ce que les pays contributeurs de troupes et de police soient remboursés en temps voulu pour leurs contributions au maintien de la paix.
En tant que questions transversales cruciales, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité de même que le maintien de la paix axé sur la technologie et les données guident nos actions dans les sept domaines prioritaires de l’Action pour le maintien de la paix Plus, a encore dit le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix. Les communications stratégiques, sixième priorité de l’Action pour le maintien de la paix Plus, revêtent en outre une importance particulière à une époque caractérisée par des tensions géopolitiques accrues, où les conflits sont de plus en plus complexes et où les mandats des missions de maintien de la paix sont parfois mal compris.
La Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 2 novembre, à 15 heures.
ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS
Déclarations liminaires
M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a fait état des défis croissants auxquels sont confrontées les Nations Unies dans leurs efforts visant à maintenir la paix dans le monde, notamment du fait des changements géopolitiques et économiques « spectaculaires » qui s’opèrent sur fond de tensions régionales, des inégalités et des vulnérabilités climatiques. Nous continuons également à être confrontés à des groupes armés non étatiques, à des attaques asymétriques, à l’exploitation des ressources naturelles et à la criminalité transnationale organisée, tandis que les technologies émergentes constituent une arme à double tranchant. De plus, les Casques bleus continuent d’être directement visés, a ajouté le Secrétaire général adjoint, en s’inquiétant de la menace des engins explosifs improvisés. Toutefois, l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) continue de fournir notre orientation stratégique.
En ce qui concerne la première des priorités d’A4P+, la cohérence collective derrière une stratégie politique, M. Lacroix a indiqué que les missions de maintien de la paix mettent à profit leurs bons offices et leurs partenariats pour soutenir les solutions politiques aux conflits, entre autres avec les organisations régionales telles que l’Union africaine. Il a cité l’exemple du Mali, où l’Union africaine, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) ont soutenu le Médiateur de la CEDEAO. S’agissant de la deuxième priorité, l’intégration stratégique et opérationnelle, le Secrétaire général adjoint a fait état de progrès substantiels au sein des missions et avec les agences, fonds et programmes des Nations Unies. Toutes les opérations de maintien de la paix disposent désormais des plans de mission ou des cadres de résultats du système global de planification et d’évaluation des performances (CPAS), a-t-il assuré en ajoutant que l’analyse et la planification passent notamment par la mise en place d’unités de planification intégrée.
En ce qui concerne la troisième priorité, les capacités et les mentalités, M. Lacroix a signalé des progrès importants, grâce au Système de préparation des moyens de maintien de la paix (PCRS). Nous avons ainsi fourni des Forces de réaction rapide, des forces spéciales, des hôpitaux de campagne et des hélicoptères à au moins quatre missions sur le terrain, a-t-il noté, tout en renforçant les capacités d’alerte précoce et de réaction rapide sur le terrain. En ce qui concerne la quatrième priorité, soit la responsabilité à l’égard des soldats de la paix, M. Lacroix a déclaré que l’amélioration de la sûreté et de la sécurité du personnel de maintien de la paix reste une priorité absolue pour le Secrétariat. Toutefois, les décès de Casques bleus dus à des actes de malveillance ont presque doublé l’an dernier, passant de 13 en 2020 à 25 en 2021, alors que ce chiffre s’élève à 29 en 2022, notamment du fait d’attaques utilisant des munitions explosives et des engins explosifs improvisés. La MINUSMA, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) s’affairent à affaiblir les groupes armés responsables, à améliorer la connaissance de la situation et à prévoir et éviter les menaces. M. Lacroix a demandé à cet effet un investissement soutenu dans l’équipement, la formation et la maintenance, en particulier à la MINUSMA.
Pour ce qui est de la cinquième priorité, la responsabilisation des soldats de la paix, nous continuons à nous concentrer sur le renforcement des performances conformément au Cadre intégré de performance et de responsabilisation en matière de maintien de la paix, a assuré le Secrétaire général adjoint. Les communications stratégiques, la sixième priorité, revêtent une importance particulière à une époque caractérisée par des tensions géopolitiques accrues, où les conflits sont de plus en plus complexes et où les mandats des missions de maintien de la paix sont parfois mal compris.
S’agissant de la septième priorité, soit la coopération avec les pays hôtes, M. Lacroix a souligné l’importance d’assurer une meilleure compréhension des mandats du Conseil de sécurité par les principales parties prenantes. La coopération pleine et entière des pays hôtes reste en effet nécessaire pour permettre aux opérations de maintien de la paix de mettre en œuvre leur mandat. En tant que questions transversales cruciales, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité de même que le maintien de la paix axé sur la technologie et les données guident nos actions dans les sept domaines prioritaires d’A4P+, a-t-il ajouté. L’augmentation du nombre de femmes en uniforme déployées, à tous les niveaux et dans toutes les fonctions et la création d’environnements de travail inclusifs restent des priorités essentielles pour le maintien de la paix des Nations Unies, a encore dit le Secrétaire général adjoint. Le maintien de la paix des Nations Unies est un symbole puissant de la manière dont le multilatéralisme peut continuer à œuvrer pour la paix et la sécurité à une époque marquée par de nouveaux défis et des divisions géopolitiques, a conclu M. Lacroix.
M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, est intervenu pour donner des exemples de progrès réalisés dans les trois priorités du Programme A4P+ les plus pertinentes pour son Département: capacités et état d’esprit, responsabilités à l’égard des soldats de la paix, et responsabilités des soldats de la paix. Concernant les capacités et l’état d’esprit, le Département de l’appui aux missions reste déterminé à faire en sorte que les capacités des unités déployées correspondent aux tâches qui leur sont confiées. En s’appuyant sur les éléments fournis chaque trimestre par chacune des missions sur le terrain, le Département contrôle divers paramètres de performance. Ces rapports trimestriels constituent la base de la communication périodique avec les pays contributeurs de troupes et de police pour leur demander de remédier aux lacunes identifiées dans le matériel déployé appartenant aux contingents. La formation est essentielle pour renforcer les capacités existantes et générer de nouvelles compétences parmi le personnel en uniforme, ce qui permet d’améliorer les performances. Grâce à un programme phare de partenariat triangulaire, le Département dispense des formations dans les domaines de l’ingénierie, de la médecine, le commandement, les communications, l’informatique, les renseignements, la surveillance et la reconnaissance, entre autres. Près de 13 000 membres du personnel en uniforme d’Afrique, d’Asie du Sud-Est ont été formés dans le cadre de ce programme. M. Khare a saisi l’occasion pour encourager les délégations à contribuer à son financement.
Concernant la responsabilité envers les soldats de la paix, M. Khare a souligné que si la mort d’un seul soldat de la paix était une mort de trop, aucun décès ne devrait jamais survenir en raison d’une absence de soins médicaux adéquats. À cette fin, en plus d’améliorer continuellement le service des hôpitaux de terrain et ses pratiques d’évacuation des blessés, le Département déploie des solutions de télémédecine, notamment des capacités de télésanté entre les lieux des blessures et les installations médicales dans quatre missions à haut risque: la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). M. Khare a aussi abordé la question de la santé mentale du personnel de maintien de la paix. Les environnements de plus en plus difficiles dans lesquels il opère ont augmenté le stress psychologique des Casques bleus. Avec le soutien de plusieurs États Membres et d’un Comité consultatif d’experts en santé mentale, le Département de l’appui aux missions prépare une stratégie de soutien à la santé mentale du personnel en uniforme: « un projet est attendu d’ici la fin du mois de mars 2023 », a-t-il déclaré. Concernant la numérisation, la plateforme « UNITE Aware » continue de s’appuyer sur les capacités déployées dans le cadre de la MINUSCA. Le « Partenariat pour la technologie dans le maintien de la paix » continue de fournir une plateforme pour l’engagement technologique entre l’ONU et ses États Membres. En juin 2022, le dernier symposium du Partenariat s’est tenu sur le continent africain; il s’est concentré sur le maintien de la paix, la sûreté et la sécurité, la formation, la responsabilité écologique et la télémédecine. Le prochain symposium dudit Partenariat, prévu en 2023, sera accueilli par le Népal. Tirant parti des technologies numériques pour renforcer la sûreté et la sécurité, le Département s’efforce d’améliorer la protection des bases de l’ONU en s’appuyant sur un large éventail de technologies: radars, systèmes de détection de tirs indirects et drones, entre autres. Le déploiement de ce type de technologies n’est possible que grâce à l’engagement des États Membres, a bien précisé M. Khare.
La troisième priorité soulignée par le Secrétaire général adjoint concerne les responsabilités environnementales des missions. En fournissant un soutien technique pour l’eau, les eaux usées, les déchets solides, l’énergie, les systèmes de gestion environnementale, l’ONU a continuellement amélioré les systèmes de suivi des performances et des risques. Il y a toutefois un domaine où il faut faire davantage, celui de la transition vers les énergies renouvelables sur le terrain. Actuellement, seuls 6% de l’électricité utilisée par les missions proviennent de sources d’énergie renouvelables. « Nous étudions les moyens d’accélérer cette transition, notamment en faisant appel à des fournisseurs privés ou publics », a déclaré M. Khare.
M. MIGUEL MOURATO GORDO, Directeur de la Division des stratégies et des politiques mondiales, Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité (DMSPC), a déclaré que la question de la responsabilité des Casques bleus est une priorité constante pour le Secrétariat qui tire sans cesse des leçons de notre expérience collective en matière de prévention et de traitement des risques de violations des normes de conduite. Le Département, a-t-il dit, collabore activement avec les États Membres, y compris les pays contributeurs de troupes et de police, pour partager les bonnes pratiques innovantes en matière de prévention, de répression et une approche centrée sur les victimes pour soutenir les victimes d’exploitation et d’abus sexuels. Récemment, les États Membres avaient encouragé à partager les bonnes pratiques en matière de conduite et de discipline. Le DMSPC a documenté les bonnes pratiques et les a publiées sur le site Web « Conduite dans les missions de terrain des Nations Unies ».
Le Département continue de progresser dans les réparations faisant suite à des demandes de paternité et de pension alimentaire en souffrance découlant d’allégations d’exploitation et d’abus sexuels. Il a mis en place un groupe de travail interdépartemental qui examinera les bonnes pratiques et les leçons apprises pour élaborer un cadre d’action. Le DMSPC gère le Fonds d’affectation spéciale pour le soutien aux victimes d’exploitation et d’abus sexuels pour aider les victimes. En 2021-2022, le Fonds d’affectation spéciale a soutenu la mise en œuvre de huit projets, dont un premier projet au Soudan du Sud. Dans le cadre des activités visant à garantir la responsabilité des Casque bleus, le Département s’efforce d’améliorer le système de suivi de la gestion des cas, y compris le développement d’un portail des États Membres pour améliorer l’accès aux informations sur la conduite et la discipline.
S’agissant de l’évaluation des performances, le DMSPC coopère avec les missions de maintien de la paix pour établir des contrats entre les Chefs de missions et le Secrétaire général en 2022-2023 qui faciliteront les évaluations de performances et la collecte de données, a indiqué M. Gordo. Dans le cadre de la politique de tolérance zéro à l’égard de la fraude et de la corruption au sein de l’Organisation, le Secrétariat publiera à l’occasion de la Journée internationale de la lutte contre la corruption, le 9 décembre, un manuel complet de sensibilisation à la fraude et à la corruption, a-t-il encore annoncé.
En ce qui concerne la gestion financière, la DMSPC continue d’aider les missions à élaborer des propositions budgétaires responsables en améliorant les méthodologies existantes, la discipline budgétaire, la transparence. De plus, le Département développe une architecture de données qui améliorera les capacités de données et d’analyse dans l’ensemble du Secrétariat, y compris sur le terrain, a relevé le Directeur. En ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité, le DMSPC s’efforce d’atteindre la parité à tous les niveaux d’ici 2028 et de fidéliser les talents. À cette fin, il donne des plans d’action et des données essentielles pour aider les entités onusiennes à réaliser la parité entre les sexes et continuera de prendre des mesures pour mettre en œuvre les Directives et recommandations énoncées dans la Stratégie sur la parité entre les sexes et les Directives d’ONU-Femmes.
Déclarations
M. OMAR HILALE (Maroc), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé que l’amélioration de l’efficacité du maintien de la paix est une entreprise qui nécessite l’engagement conjoint de toutes les parties prenantes. Il a réitéré son appel au Secrétariat pour qu’il veille à ce que les politiques soient soumises à l’examen des États Membres avant leur mise en œuvre, au moyen d’un processus de consultation intergouvernemental. Il a rappelé la contribution de la « feuille de route du Caire pour l’amélioration des performances des opérations de maintien de la paix » à la mise en œuvre d’Action pour le maintien de la paix. M. Hilale a exprimé son mécontentement quant au fait que la dernière session du Comité spécial des opérations de maintien de la paix n’a pas été en mesure d’adopter un rapport substantiel. Après avoir rappelé l’engagement du Mouvement à soutenir les efforts visant à assurer l’efficacité des opérations de maintien de la paix, le représentant a réitéré ses positions de principe, notamment son appel à se conformer strictement aux buts et principes de la Charte des Nations Unies et du maintien de la paix, à savoir le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force sauf en cas de légitime défense et de défense du mandat, en plus des principes d’égalité souveraine, d’indépendance politique, d’intégrité territoriale des États. Le Conseil de sécurité doit formuler des mandats clairs, ciblés, réalistes et réalisables, en consultation avec les États hôtes ainsi qu’avec les pays contributeurs de troupes et de police. Ces mandats devraient en outre être fondés sur l’appropriation nationale et soutenus par un processus de paix global. Le délégué a souligné à cet égard le rôle important de la Commission de consolidation de la paix et du Fonds pour la consolidation de la paix dans le renforcement de l’intégration entre le maintien et la consolidation de la paix. Le soutien financier, humain et logistique adéquats sont tout aussi essentiels aux missions de maintien de la paix que les capacités militaires, a-t-il noté.
Le Mouvement des pays non alignés continue par ailleurs d’exhorter le Secrétariat à veiller à ce que les pays contributeurs de troupes et de police soient remboursés en temps voulu pour leurs contributions au maintien de la paix. Le représentant a condamné dans les termes les plus forts les menaces et attaques perpétrées contre les soldats de la paix de l’ONU, en demandant au Secrétariat et aux pays hôtes de travailler en étroite collaboration pour assurer la lutte contre l’impunité. En tant que plus grand contributeur de troupes, à hauteur de 90%, la sûreté et la sécurité du personnel des missions de l’ONU sont une préoccupation majeure du Mouvement. Alors que le renseignement en matière de maintien de la paix contribue à renforcer la connaissance de la situation et le partage de l’information, M. Hilale a pris note de la Stratégie pour la transformation numérique des opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Les États détiennent la responsabilité première de la protection des civils, a encore dit le représentant, en soulignant la nécessité de poursuivre les consultations avec les États Membres sur la protection du personnel et des installations des missions de maintien de la paix. Il a de plus réitéré son soutien « total » à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général en matière d’exploitation et d’abus sexuels et condamné fermement toute forme d’exploitation et d’abus commis par le personnel de l’ONU. Dans ce contexte, le représentant a exprimé son appui au renforcement de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine, y compris dans le domaine du maintien de la paix, sur la base des avantages comparatifs de chaque organisation. Les opérations de maintien de la paix doivent en outre faire en sorte de ne laisser aucun impact environnemental négatif de leur présence, comme le veut la Stratégie environnementale applicable aux missions sur le terrain.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a souhaité évoquer certains points, le premier étant de rappeler la nécessité d’adopter de bonnes méthodes de travail et des recommandations claires et spécifiques: l’Association a déploré à cet égard que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, également connu sous le nom de Comité des 34, ne soit pas parvenu à un consensus dernièrement. L’orateur a ensuite insisté sur l’importance pour le Conseil de sécurité de donner des « mandats clairs » aux missions et de procéder en amont à des consultations précoces et rapides avec les parties prenantes ainsi qu’avec les pays fournisseurs de contingents. En troisième lieu, l’ASEAN a exhorté l’ONU à rembourser de manière immédiate les pays fournisseurs de troupes et à leur fournir un matériel adéquat. Il a salué l’interaction entre l’ASEAN et l’ONU, et rappelé l’importance du rôle des organisations régionales. Le représentant a aussi insisté sur le renforcement de la sécurité des Casques bleus, et remercié l’ONU d’avoir appuyé un projet trilatéral en Indonésie et pour ses efforts visant à faciliter les capacités d’évacuation des opérations de maintien de la paix. Il a enfin loué la contribution et l’efficacité des femmes Casques bleus.
La représentante de l’Union européenne (UE) a rappelé que l’UE déploie près de 5 000 hommes dans des opérations de paix. Elle est le deuxième contributeur au budget du maintien de la paix avec un engagement financier de près de 1,5 milliard d’euros chaque année. L’UE mobilise deux missions de paix dont l’IRINI qui met en œuvre l’embargo sur les armes de l’ONU et empêche l’exportation illicite de pétrole depuis la Libye, et EUFOR ALTHEA en Bosnie-Herzégovine qui aide les autorités à maintenir un environnement sûr dans un contexte politiquement difficile. L’UE contribue en outre à plus de 60% du budget du Fonds pour la consolidation de la paix. Elle a alloué 1,5 milliard d’euros pour soutenir les efforts de prévention des conflits et de sécurité en Afrique subsaharienne pour la période de 2021 à 2027. La déléguée a dit être préoccupée par les menaces croissantes contre les soldats de la paix par des acteurs malintentionnés, y compris des mercenaires et par les actions peu coopératives des États hôtes. Face à ces défis, elle soutient l’initiative « Agir pour le maintien de la paix », a déclaré la représentante.
L’UE soutient « Action pour le maintien de la paix Plus », a souligné la représentante, qui a ensuite fait six recommandations. En premier lieu, la nécessité de répondre à la menace croissante des engins explosifs improvisé afin de garantir que les soldats de la paix soient correctement formés et équipés. Deuxièmement, il faut limiter la diffusion de la désinformation. Des officiers de communication plus stratégiques devraient être déployés à la fois dans les composantes civiles et militaires des opérations de maintien de la paix. L’UE soutient la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie numérique triennale pour le maintien de la paix, qui devrait conduire à la fois à une sécurité renforcée pour les soldats de la paix et à une meilleure exécution de leur mandat. Troisièmement, a ajouté la représentante, le rôle des femmes doit être renforcé à tous les niveaux des opérations de maintien de la paix. Quatrièmement, les changements climatiques devenant un facteur de conflits, il faut inverser cette tendance et respecter les engagements financiers pour l’atténuation et l’adaptation aux effets des changements climatiques. Cinquièmement, s’agissant des transitions, il faut assurer un transfert plus fluide des tâches des opérations de maintien de la paix aux équipes de pays des Nations Unies, en mobilisant l’ensemble du système des Nations Unies et les institutions financières internationales. Enfin, a terminé la représentante, il faut renforcer les composantes des droits humains des missions de maintien de la paix, car elles jouent un rôle vital dans la documentation des violations et la protection de leurs victimes, contribuant ainsi à la lutte contre l’impunité.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a salué les efforts déployés par le Département des opérations de paix pour concevoir une stratégie tenant compte de la santé mentale et du bien-être psychosocial de son personnel, notamment les troubles de stress post-traumatique, dans l’exercice de ses fonctions. Le Mexique a proposé à cet égard d’accroître la visibilité des questions de santé mentale dans les opérations de maintien de la paix, de fournir une meilleure formation concernant la reconnaissance précoce des conditions qui peuvent affecter la santé mentale, de favoriser une culture de soutien psychosocial pendant les déploiements et de faire en sorte que le personnel reçoive le soutien psychosocial requis. Le Mexique, a poursuivi le représentant, compte passer à une nouvelle étape en matière d’opérations de maintien de la paix en fournissant de l’équipement pour l’exploitation de drones et en participant au niveau ministériel au Sommet des chefs de police des Nations Unies. En ce qui concerne le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, le délégué a indiqué que son pays continuera à défendre la participation pleine, égale et significative des femmes aux négociations et aux processus de paix. Conformément à ses engagements, 25% du personnel mexicain déployé est actuellement composé de femmes, et le Mexique continuera de plaider en faveur de la parité des sexes dans les missions de paix, a précisé le représentant.
Selon M. JOSÉ ALFONSO BLANCO CONDE (République dominicaine), dans un contexte de crises multidimensionnelles, des mesures supplémentaires sont nécessaires pour renforcer la formation des soldats de la paix préalablement à leur déploiement, afin de garantir un accomplissement optimal de leurs tâches et une mise en œuvre efficace des mandats confiés par le Conseil. Dans les pays où la fragilité institutionnelle se prolonge, « nous devons nous demander avec honnêteté quand les conditions sont mûres pour le transfert des responsabilités aux autorités nationales », a analysé le délégué. Trop souvent, ces décisions sont prises sur la base de considérations essentiellement financières, finissant par entraîner des rechutes et des pertes de gains en termes de maintien de la paix.
Si la pleine participation des femmes aux processus de paix est essentielle pour obtenir des résultats durables et viables, il est aussi crucial de reconnaître et gérer les vulnérabilités particulières des femmes et des filles dans les conflits pour les protéger efficacement, a relevé l’oratrice. C’est pourquoi il est de la plus haute importance pour la République dominicaine de déployer davantage de conseillères en question de genre et de protection des femmes dans les missions de maintien de la paix. Un signe des progrès réalisés dans ce domaine est selon lui la coordination accrue entre les pays fournisseurs de troupes et de policiers et les pays fournisseurs de personnels judiciaire et pénitentiaire.
Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a condamné dans les termes les plus forts les actes de violence commis contre les Casques bleus, en soulignant que la responsabilité première de la sécurité du personnel et des biens de l’ONU incombe à l’État hôte. En tant que pays contributeur de troupes, le Guatemala est préoccupé par le fait que les forces de maintien de la paix sont de plus en plus la cible d’acteurs hostiles et sont confrontées à des menaces asymétriques et complexes dans des environnements politiques et sécuritaires qui se détériorent. Selon la déléguée, l’ONU doit mettre à jour les principes du maintien de la paix pour refléter le fait que « le casque bleu et le drapeau n’offrent pas une protection naturelle », mais constituent plutôt une cible. L’ONU et les pays contributeurs de troupes et de police doivent en outre planifier les opérations en se fondant sur l’évaluation des menaces de l’environnement spécifique, et non sur des normes et des politiques plus adaptées au maintien de la paix traditionnel.
Le Secrétariat doit selon elle demander aux missions de maintien de la paix de documenter systématiquement les violations des accords sur le statut des forces (SOFA), ainsi que toute limitation de la liberté de mouvement, y compris l’entrée d’équipements, d’armes, de munitions et de personnel dans le pays hôte. La Commission de consolidation de la paix (CCP) doit poursuivre son rôle d’organe consultatif stratégique auprès du Conseil de sécurité des Nations Unies, de l’Assemblée générale des Nations Unies et du Conseil économique et social (ECOSOC), a considéré la déléguée, afin de promouvoir une approche cohérente, coordonnée, intégrée et stratégique de la consolidation et du maintien de la paix, tout en mettant l’accent sur les situations de transition. Elle s’est félicitée de la mise en œuvre du système global de planification et d’évaluation des performances dans toutes les opérations de maintien de la paix, en tenant compte des contextes politiques, sociaux et culturels afférents à chaque mission.
M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a souligné l’urgence d’accélérer les réformes des missions de la paix pour assurer la paix et la sécurité internationales. Son pays, qui déploie quelque 14 000 Casques bleus, a décidé de mettre en œuvre l’initiative « Action pour le maintien de la paix Plus », a indiqué le représentant, qui a également dit que les Philippines appuient la politique de tolérance zéro contre les abus sexuels et s’engage à former les troupes sur cette question préalablement à leur déploiement. Des conseillers sur ce sujet seront également intégrés, a poursuivi le délégué, en encourageant la collaboration ONU/ASEAN pour mettre en œuvre la Déclaration conjointe sur le maintien de la paix. Il a exhorté à augmenter les contributions pour la consolidation de la paix et s’est dit favorable au financement pluriannuel prévisible proposé par le Secrétaire général. Les Philippines ont quant à elles versé 50 000 dollars américains au Fonds pour la consolidation de la paix en 2022. Selon le représentant, le succès des opérations doit être mesuré à l’aune de leur capacité à protéger les civils, en particulier des enfants. Il a suggéré d’investir dans les solutions politiques locales aux conflits et de protéger les civils contre les menaces. Il faut en outre selon lui donner la priorité à la sûreté des Casques Bleus par le partage de l’information et le renforcement de capacités, combattre la désinformation et la mésinformation et renforcer la participation des femmes aux opérations de paix.
M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a souligné l’importance d’actualiser les recommandations afin que les opérations de maintien de la paix et les Casques bleus puissent remplir leurs mandats tout en renforçant leur sécurité et leur formation. Le représentant a appelé à l’adoption de nouvelles approches afin d’assurer la protection des civils, tout en estimant que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix a un rôle unique à jouer en tant que plateforme permettant de réaliser des actions concrètes. Il est également essentiel selon lui de renforcer le rôle des communautés afin qu’elles génèrent leurs propres systèmes de protection et qu’elles soient conscientes de leurs droits. S’agissant du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, l’Uruguay demeure engagé à assurer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, à renforcer les droits des femmes et des filles, à éliminer les obstacles structurels qui empêchent leur participation égale à la société et à autonomiser les femmes en tant qu’agents de transformation, éléments essentiels à ses yeux pour parvenir à un développement et une paix durables. Au niveau national, l’Uruguay a mis en place des politiques visant à favoriser l’accès des femmes aux Forces armées et à la police et adopté, en juillet de cette année, son premier plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité, a-t-il ajouté.
L’Uruguay est le premier pays à disposer de rapports sur la méthodologie d’évaluation des opportunités pour les femmes dans les opérations de paix, au Ministère de la défense nationale comme au Ministère de l’intérieur, dans le cadre de l’Initiative Elsie, s’est enorgueillie le délégué. En outre, a-t-il rappelé, l’Uruguay a coorganisé la Conférence ministérielle sur le maintien de la paix qui s’est tenue les 7 et 8 décembre dernier. L’Armée nationale s’affaire maintenant à planifier une force de réaction rapide et a confirmé ses engagements au titre du Système de préparation des moyens de maintien de la paix, qui garantit la participation des troupes jusqu’au 30 juin 2023.
M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) s’est dit préoccupé par l’augmentation du nombre des attaques contre les Casques bleus cette année, son pays ayant perdu sept ressortissants au Mali. Il a appelé le Secrétariat à fournir les capacités financières et pratiques aux missions, à évaluer les données face aux menaces sécuritaires, et à veiller à ce que de tels incidents ne se répètent pas. Le délégué a aussi plaidé en faveur de mesures de renforcement des capacités des pays hôtes pour que les Casques bleus puissent assumer leurs responsabilités sans obstacle. Des ponts doivent aussi être bâtis avec les pays hôtes pour expliquer aux populations la nature du maintien de la paix, en sachant gérer les attentes des communautés locales et en se mettant à l’écoute de leurs préoccupations. Le délégué a souligné la nécessité pour le Conseil de sécurité d’adopter une approche équilibrée à l’égard du maintien de la paix, comprenant des mandats clairs et réalistes, ainsi que la responsabilité de l’Assemblée générale d’allouer des ressources suffisantes. Il a aussi demandé d’allouer des ressources suffisantes à la composante consolidation de la paix, de maximiser les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales -l’Union africaine et l’ONU-nouent un partenariat crucial à cet égard dans la lutte contre le terrorisme. Enfin, concernant la participation des femmes, l’orateur a appelé à éviter la mise en place de quotas qui ne seraient pas réalistes.
M. HOANG GIANG DANG (Viet Nam) a souligné son appui à la mise en œuvre de l’initiative « Action pour le maintien de la paix » et des réformes visant à renforcer l’efficacité du maintien de la paix. Il a insisté sur l’importance pour les opérations d’avoir des mandats clairs, adaptés aux objectifs et réalistes, en phase avec les réalités du terrain, et leur élaboration impliquer les pays hôtes. Selon lui, assurer la sûreté et la sécurité des soldats de la paix est une autre exigence vitale. À cet égard, les Casques bleus doivent recevoir les formations nécessaires et être dotés des capacités suffisantes. Les missions doivent être équipées d’outils appropriés pour permettre aux Casques bleus de s’acquitter efficacement de leurs mandats et de se protéger des menaces. Le représentant a aussi insisté sur l’importance des femmes dans les opérations de maintien de la paix. Il a terminé en rappelant que des Casques bleus vietnamiens sont actuellement déployés au sein de la MINUSS et de la MINUSCA, outre une unité du génie nouvellement déployée à Abyei. Le Viet Nam continue d’abriter un Centre international de formation en Asie du Sud-Est pour améliorer la préparation et l’efficacité des soldats de la paix dans la région et dans le monde, a précisé le délégué, qui a également indiqué que les femmes représentent 20% des Casques bleus vietnamiens de la MINUSCA et de la MINUSS.