En cours au Siège de l'ONU

Conférence biodiversité marine: le Secrétaire général souligne, au nom de « l’urgence océanique », la nécessité d’un texte ambitieux

Reprise de la cinquième session
67e séance plénière – matin
MER/2173

Conférence biodiversité marine: le Secrétaire général souligne, au nom de « l’urgence océanique », la nécessité d’un texte ambitieux

La Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, plus connue sous l’acronyme anglais « BBNJ », a entendu, ce matin, un message du Secrétaire général, dans lequel ce dernier souligne l’importance d’aboutir à un texte « robuste et ambitieux ».

« Nos océans sont sous pression et nous ne pouvons plus oublier l’urgence océanique », a déclaré M. António Guterres, dans ce message lu par le Secrétaire général de la Conférence, M. Miguel de Serpa Soares.  Mentionnant les conséquences négatives des changements climatiques, de la perte en biodiversité et de la pollution, M. Guterres a exhorté les délégations à remédier à ces tendances destructrices en adoptant un traité ambitieux.

Un tel traité permettrait la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine sur plus des deux tiers de l’espace océanique, a expliqué le Chef de l’ONU soucieux de voir les ressources génétiques marines utilisées pour le bien de l’humanité.  Il a souligné qu’un tel traité fournirait un cadre adapté pour l’utilisation des aires marines protégées.  Ce texte concrétiserait la promesse du renforcement des capacités et du transfert des techniques marines, a-t-il insisté.

Enfin, le Secrétaire général a déclaré que cette conférence est l’occasion de montrer que la Convention sur le droit de la mer est à la hauteur des nouveaux défis.  « L’horloge tourne », a, de son côté, déclaré la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee (Singapour), en encourageant les délégations à faire preuve de souplesse pour aboutir à un texte d’ici à la fin de la semaine.  Depuis le samedi 25 février, les délégations sont saisies d’une dernière mouture* du nouvel avant-projet d’accord actualisé, qui est à la base des discussions. 

La déléguée du Belize a ensuite pris la parole pour faire le point sur les avancées des négociations sur les ressources génétiques marines, thème de la partie II du texte en discussion.  Nous avons procédé à un toilettage de l’article 11 qui porte sur le partage juste et équitable des avantages, a-t-elle dit, en faisant état de progrès substantiels dans les discussions.  « La lumière semble être au bout du tunnel. »

Son homologue du Canada a abordé le sujet du chapitre des outils de gestion par zone, qui comprennent les aires marines protégées (Partie III).  Elle a indiqué que les délégations sont désormais « à l’aise » avec le libellé de l’article 20 ante sur les mesures d’urgence.  Elle a ajouté que les discussions se poursuivent au sujet de l’article 19 qui précise les modalités à suivre par la Conférence des Parties pour la prise de décisions. 

Sur les études d’impact sur l’environnement (Partie IV), le délégué des Pays-Bas a évoqué les « progrès substantiels » en ce qui concerne l’article 34 intitulé « Notification et consultation publiques » et qui se rapporte aux activités envisagées par les Parties au futur traité. 

Au sujet du chapitre « Renforcement des capacités et transfert de techniques marines » (Partie V), la déléguée d’El Salvador a indiqué que les discussions autour de l’article 44 ont progressé de manière substantielle.  Cet article prévoit les modalités du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines et, notamment, qu’ils sont fonction des besoins et priorités des États parties en développement, compte étant tenu de la situation particulière des petits États insulaires en développement.

Il y a une convergence de vues, si bien que les crochets autour de certains passages ont pu être supprimés, a poursuivi la déléguée d’El Salvador.  Comme lors des jours précédents, elle a loué l’esprit constructif qui anime les délégations pendant les discussions.  « J’ai bon espoir que cette conférence connaîtra une issue heureuse. »

Pour ce qui est des questions transversales, le délégué de la Jamaïque a discuté de l’article 4 relatif à la relation entre le futur accord et la Convention sur le droit de la mer, les instruments et cadres juridiques pertinents et les organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux et sectoriels pertinents.  Des progrès significatifs ont été accomplis sur le paragraphe 2 de cet article (interprétation et application de l’article) grâce à la souplesse des délégations, a-t-il déclaré, avant de noter les divergences qui subsistent autour du paragraphe 3.

Pour ce qui est de la partie sur la mise en œuvre et le respect des dispositions (Partie VIII) et de celle sur le règlement des différends (Partie IX), la déléguée de la Nouvelle-Zélande a indiqué que l’article 55 sur les procédures de règlement des différends a été au cœur des discussions.  La déléguée a espéré que le consensus sera atteint lors des prochaines discussions.

S’agissant des dispositions finales, la Présidente a indiqué qu’un accord a été trouvé sur le type de contribution qui alimentera le fonds spécial établi en vertu de l’article 52 intitulé « Financement ».  Les délégations ont globalement appuyé l’idée d’inclure une disposition autorisant la Conférence des Parties à examiner et évaluer la commercialisation des produits issus de l’utilisation des ressources génétiques marines.

Enfin, le représentant du Mexique a pris la parole pour saluer les progrès accomplis jusqu’à présent et dire son espoir de voir un accord d’ici à vendredi.  Pour illustrer les longues heures de négociation qui attendent les délégations, le délégué de l’État de Palestine a indiqué qu’il était prêt à se munir d’un sac de couchage.

La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu demain, jeudi 2 mars, à 10 heures.

* A/CONF.232/2023/CRP.1/Add.1 (non disponible en français)

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité spécial de la Charte achève les travaux de sa session 2023 sans parvenir à adopter l’intégralité de son rapport annuel 

Session annuelle de 2023,
306e & 307e séances plénières, Matin & après-midi
L/3296

Le Comité spécial de la Charte achève les travaux de sa session 2023 sans parvenir à adopter l’intégralité de son rapport annuel 

Pour la deuxième année consécutive, le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation a achevé ses travaux sans parvenir à adopter dans son entièreté son rapport annuel, se limitant, une fois de plus, à uniquement entériner son introduction.

L’échec à parvenir, aujourd’hui, au consensus sur le rapport de la session 2023 a été déploré par le Président du Comité spécial, M. Zéphyrin Maniratanga, du Burundi, ainsi que par les délégations qui ont été plusieurs à déplorer l’intransigeance « d’un État Membre » au sujet de libellés se rapportant à la situation en Ukraine.  La Fédération de Russie a regretté pour sa part que le Comité soit pris en otage par un groupe de « délégations issues d’une même région géographique » qui s’efforcerait de transformer cet organe juridique en un véhicule de propagande politique. 

Une situation similaire s’était déjà produite l’an dernier, le Comité spécial ayant dû clore sa session 2022 sans parvenir à adopter son rapport annuel dans son intégralité, en raison de divergences sur certaines dispositions concernant l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie. 

Présenté par la Rapporteuse du Comité spécial, Mme Azela G. Arumpac-Marte, des Philippines, le rapport de la session 2023 comprend cinq chapitres portant sur l’ensemble des points à son ordre du jour.  Il fait suite à la tenue, entre le 21 février et le 1er mars 2023, de deux réunions plénières du Comité spécial et de trois réunions de son groupe de travail plénier. 

Après l’introduction au chapitre I, l’examen du chapitre II, consacré au maintien de la paix et de la sécurité internationales, a mis en lumière de profondes divisions entre les délégations.  La Fédération de Russie, rejointe par le Bélarus, l’Érythrée et le Nicaragua, a ainsi demandé que le paragraphe 4 soit supprimé, estimant que le Comité spécial n’a pas pour mandat de traiter de différends concernant des situations spécifiques et qu’il existe d’autres organes des Nations Unies pour débattre de ces questions. 

Une opinion contraire à celle de l’Ukraine, qui a exprimé son plein appui au libellé du paragraphe 4, tout en jugeant que le paragraphe 5 établit une équivalence « erronée » entre la position d’une « majorité écrasante » d’États Membres et l’auteur de violations de la Charte déjà condamné par six résolutions de l’Assemblée générale.  Ce paragraphe viendrait saper la crédibilité du rapport, a dénoncé son représentant, en mettant en garde contre toute tentative de manipulation du rapport par le responsable de ces violations afin de rendre légitime son agression. 

Comme l’Union européenne, la Géorgie, l’Australie ou encore le Guatemala, les États-Unis ont estimé que le paragraphe 4 se veut une description précise des débats du Comité spécial et devrait être consigné dans le rapport.  « Débattre de violations de la Charte des Nations Unies relève du mandat du Comité spécial », a affirmé la déléguée américaine.  Afin d’éviter toute politisation des travaux du Comité, l’Iran, la Syrie, le Venezuela et la Guinée équatoriale ont en revanche demandé que la deuxième partie du paragraphe 4 ainsi que le paragraphe 5 soient supprimés, au contraire du Mexique qui a vu une « corrélation » entre ces deux textes. 

S’agissant de la section A du chapitre II, intitulée « Adoption et application des sanctions imposées par l’Organisation des Nations Unies », l’Égypte, appuyée par la Türkiye, a souhaité que soit conservée l’appellation « Daech », utilisée lors de la dix-septième stratégie d’examen, et qu’il ne soit pas fait mention de celle d’« État islamique d’Iraq et du Levant ». 

Le chapitre III du rapport, intitulé « Règlement pacifique des différends », a suscité de nouveaux débats entre les délégations.  L’État de Palestine, soutenue par l’Égypte, a souhaité ajouter un libellé au paragraphe 4 précisant que l’Assemblée générale est libre de discuter de toute situation recommandée en vertu de l’Article 12 de la Charte concernant le règlement pacifique des différends.  Israël a toutefois jugé inapproprié que le rapport comprenne des déclarations qui n’ont pas été formulées lors de réunions du Comité, estimant qu’il s’agit là d’une question de procédure. 

Appuyée par la Géorgie, l’Ukraine a suggéré d’ajouter, à la fin du paragraphe 5, le membre de phrase « et expriment leur préoccupation concernant les décisions d’organes judiciaires, y compris la Cour internationale de Justice, qui demeurent en suspens en dépit de leur nature contraignante ». 

La Fédération de Russie a, quant à elle, proposé un ajout au libellé reflétant les inquiétudes exprimées selon elle par les États Membres concernant l’utilisation « abusive » des compétences de la Cour internationale de Justice (CIJ) à des fins politiques et les pressions exercées sur la Cour, y compris du fait d’interventions lors de procédures litigieuses.  L’ensemble des procédures devant la Cour sont, dans une certaine mesure, litigieuses, a rétorqué l’Ukraine, qualifiant la proposition russe de « quelque peu trompeuse ». 

Toujours au chapitre III, à la demande de l’Iran, la note explicative du Mouvement des pays non alignés adoptée au paragraphe 5 (b) de la résolution 77/109 de l’Assemblée générale concernant l’identification « d’autres moyens pacifiques » pour le règlement pacifique des différends à l’Article 33 de la Charte a été annexée au rapport. 

La proposition de la Fédération de Russie de recommander que le Secrétariat crée un site Web sur le règlement pacifique des différends et de mettre à jour le Manuel sur le règlement pacifique des différends entre États, présentée à la section B, est restée en suspens à la demande de l’Ukraine afin de poursuivre les négociations. 

Le chapitre IV du rapport porte sur le répertoire de la pratique des organes des Nations Unies et le répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, et le chapitre V est consacré aux méthodes de travail du Comité spécial et à la définition de nouveaux sujets. 

La prochaine séance plénière du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation sera annoncée dans le Journal des Nations Unies

* Les proposition de libellés formulées par les délégations au cours de cette séance et citées dans ce communiqué ne sont pas des traductions officielles.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence biodiversité marine: les négociations sont marquées par des « progrès considérables »

Reprise de la cinquième session,
66e séance plénière – matin
MER/2172

Conférence biodiversité marine: les négociations sont marquées par des « progrès considérables »

La Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, plus connue sous l’acronyme anglais « BBNJ », a entendu ce matin les facilitateurs des négociations faire état de « progrès considérables » vers le règlement des questions en suspens. 

« L’horloge tourne », a indiqué la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee, de Singapour, en encourageant les délégations à travailler d’arrache-pied pour aboutir à un texte d’ici à la fin de semaine.  Depuis le samedi 25 février, les délégations sont saisies d’une dernière mouture du nouvel avant-projet d’accord actualisé, qui est à la base des discussions. 

La déléguée du Belize a ainsi fait le point sur les avancées des négociations sur les ressources génétiques marines.  Elle a évoqué l’article 12 sur les droits de propriété intellectuelle en indiquant qu’il semble y avoir une convergence de vues sur l’inclusion d’une disposition sur lesdits droits, même si les avis sont encore différents sur la manière de procéder.  Plusieurs propositions ont été faites.  Et nous progressons vers le règlement des autres questions en suspens, a-t-elle ajouté. 

Son homologue du Canada a abordé le sujet du chapitre des outils de gestion par zone, qui comprennent les aires marines protégées, thème de la partie III du texte soumis à la discussion.  Nous n’avons pas organisé de nouvelles consultations officieuses depuis hier, a-t-elle dit, en précisant que les discussions se sont déroulées au sein d’un petit groupe. 

Elle a évoqué l’article 19 sur la prise de décisions et fait état de « progrès tangibles » dans l’écriture de son libellé.  Elle a indiqué que la Chine a fait une proposition sur les zones contestées.  Nous allons nous pencher sur la définition de ces aires contenue dans l’article premier, a-t-elle dit, en précisant qu’un travail d’affinage du texte reste nécessaire. 

Sur les études d’impact sur l’environnement (Partie IV), le délégué des Pays-Bas a fait état de « progrès considérables » accomplis lors de la journée d’hier, des divergences de longue date ayant été finalement surmontées.  Évoquant l’article 41 bis, il a déclaré que les délégations sont convenues que l’Organe scientifique et technique devra élaborer des normes et lignes directrices, les remerciant au passage pour leur approche constructive. 

Sur le renforcement des capacités et le transfert de techniques marines (Partie V), la déléguée d’El Salvador a indiqué que les discussions autour de l’article 44 ont progressé de manière substantielle.  Cet article se rapporte aux modalités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines. 

Pour ce qui est des questions transversales, le délégué de la Jamaïque a discuté de l’article 4 relatif à la relation entre l’Accord et la Convention sur le droit de la mer, les instruments et cadres juridiques pertinents et les organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux et sectoriels pertinents. 

Il a notamment fait état du retrait de propositions afin de parvenir à l’équilibre auquel les délégations aspirent.  Pour ce qui est de la mise en œuvre et respect des dispositions (Partie VIII) et du règlement des différends (Partie IX), la déléguée de la Nouvelle-Zélande a précisé qu’il y a un accord pour appuyer l’option I visée à l’article 55 sur les procédures de règlement des différends. 

Enfin, s’agissant des dispositions finales, la Présidente a indiqué qu’il y a un accord global sur l’article 56 de la partie X sur les tiers à l’Accord.  Suggestion a été faite que cette disposition ne soit pas incluse, a-t-elle précisé.  La Présidente a également noté l’accord des délégations en ce qui concerne l’article 57 sur la bonne foi et abus de droit. 

La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu le mercredi 1er mars, à 10 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le séisme dévastateur du 6 février n’a fait qu’aggraver la situation humanitaire en Syrie, s’alarment deux hauts fonctionnaires de l’ONU

9272e séance - matin
CS/15215

Conseil de sécurité: le séisme dévastateur du 6 février n’a fait qu’aggraver la situation humanitaire en Syrie, s’alarment deux hauts fonctionnaires de l’ONU

Au lendemain du séisme dévastateur du 6 février dernier, la priorité immédiate pour les Syriens est à la réponse humanitaire d’urgence, ont affirmé, ce matin devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Geir O. Pedersen, et le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Martin Griffiths. 

Cette séance sur les aspects politiques et humanitaires du dossier syrien était la première depuis le tremblement de terre qui a touché de plein fouet la Syrie et la Türkiye.  Le bilan provisoire est de plus de 50 000 morts, dont environ 6 000 en Syrie, sans compter les nombreux blessés, les dizaines de milliers de disparus et les centaines de milliers de sans-abri, a précisé M. Griffiths.  Une « immense tragédie » qui vient aggraver les souffrances d’un peuple déjà en proie à 12 années de conflit armé: avant même cette catastrophe, environ 15,3 millions de personnes, soit 70% des Syriens, avaient besoin d’une aide humanitaire, a déploré M. Griffiths, qui est aussi le Coordonnateur de secours d’urgence de l’ONU. 

Dans un tel contexte, les mesures d’urgence seront insuffisantes et doivent être supplées par un effort humanitaire soutenu, une coordination étroite et un soutien généreux, a tranché M. Griffiths.  Alors que l’appel éclair lancé en faveur de la Syrie exige 397,6 millions de dollars pour répondre aux besoins les plus vitaux au cours des trois prochains mois, la prochaine conférence des donateurs à Bruxelles sera un test pour l’engagement des bailleurs de fonds.  D’autant que le plan de réponse humanitaire 2023 pour la Syrie devra être financé à hauteur de 4,8 milliards de dollars pour répondre aux besoins antérieurs au séisme, soit le « plus vaste appel humanitaire » consolidé jamais lancé. 

Si le Secrétaire général adjoint a salué l’accord du Gouvernement syrien pour rouvrir pendant trois mois les points de passage frontaliers de Bab el-Salam et d’Al-Ra’ee pour permettre le passage de l’aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie, l’Envoyé spécial a cependant relayé la frustration des habitants de cette région devant l’incapacité de la communauté internationale à prêter assistance au lendemain de la catastrophe.  La Directrice des interventions de Save the Children, Mme Rasha Muhrez, qui représentait la société civile, a confirmé que l’aide n’est tout simplement pas arrivée au niveau et à la vitesse exigés par les circonstances. 

La réalité tragique, a reconnu M. Pedersen, c’est qu’une réponse efficace a été partiellement entravée par des défis directement liés aux problèmes irrésolus du conflit syrien.  Le haut fonctionnaire s’est cependant réjoui d’une chose, à savoir que les mesures prises à la suite du tremblement de terre et de ses répliques ont adressé un message clair, à savoir qu’il est possible d’agir et de coopérer s’agissant de la Syrie.

Des membres du Conseil ont ainsi rappelé qu’ils sont intervenus, comme le Royaume-Uni, qui a indiqué avoir promis de contribuer à l’effort de secours à hauteur de 30 millions de dollars.  Le Japon a, de son côté, fourni une aide d’urgence de 27 millions, tandis que les Émirats arabes unis ont annoncé avoir mis en place un pont aérien d’une centaine de vols pour acheminer dans la région des articles de première nécessité, ainsi qu’un autre spécifiquement vers la Syrie à partir de Dubaï pour les vols opérés par les Nations Unies et leurs organisations partenaires.  La Suisse qui s’exprimait également au nom du Brésil, a exhorté les parties à faciliter davantage un accès humanitaire rapide, sûr, sans entrave et durable dans toutes les régions du pays, demandant que les conséquences du séisme ne soient pas politisées.  De même le groupe des A3 –formé du Ghana, du Gabon et du Mozambique– a appelé toutes les parties au conflit à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et à instaurer un cessez-le-feu immédiat.

À l’instar de plusieurs membres du Conseil, M. Pedersen s’est toutefois inquiété des échanges de tirs d’artillerie entre les forces gouvernementales syriennes, les forces démocratiques syriennes, l’opposition armée ou l’Organisation de libération du Levant (HTS).  Il a aussi fait état de frappes de drones turcs, d’une frappe aérienne au centre de Damas attribuée à Israël, d’assassinats dans le sud-ouest de la Syrie, et d’attaques attribuées à Daech dans le désert. 

Pour la Chine, les sanctions imposées à la Syrie depuis des années ont aggravé la crise existante, réduisant presque à néant les capacités d’intervention humanitaire syriennes.  Même son de cloche pour la Russie qui a évoqué les nombreux problèmes que les sanctions occidentales ont créés et « continuent de créer » pour les Syriens.  La Syrie a fustigé les effets des sanctions unilatérales que lui ont imposées les États-Unis et l’Union européenne: selon elle, ces mesures perturbent le secteur aérien, en empêchant des compagnies internationales de vendre des médicaments et du matériel médical à la Syrie, en provoquant des pénuries de carburant, en donnant lieu à la saisie illégale de gisements de pétrole et de gaz, et en barrant l’importation d’équipements nécessaires à l’approvisionnement en eau potable et à l’assainissement, mais aussi d’engins de construction lourds.   

Les États-Unis ont rétorqué que les sanctions visent des entités et des individus qui brutalisent les Syriens depuis des années, bombardent des zones peuplées, et ont utilisé des armes chimiques contre des civils innocents.  Le 23 février dernier, les États membres de l’UE ont d’ailleurs adopté une exemption humanitaire temporaire pour une durée de 6 mois, a fait valoir la France, qui a précisé qu’elle ne signifiait aucunement que les sanctions empêchent l’aide humanitaire d’atteindre les populations et de répondre à leurs besoins.

Selon la Türkiye, le séisme, qui a très lourdement touché sa propre population, a mis en lumière la nature interdépendante des problèmes syriens.  La délégation a souligné que le retour des réfugiés fait partie du règlement de la crise tout comme l’élimination des groupes terroristes, tels que le YPG/PKK et Daech.  Selon l’Envoyé spécial, la résolution des questions politiques en suspens exigera réalisme et franchise aussi bien du Gouvernement syrien que de l’opposition syrienne, et de toutes les autres parties concernées. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT - S/2023/127

Déclarations

L’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la Syrie, M. GEIR O. PEDERSEN, a indiqué que les tremblements de terre qui ont récemment frappé la Türkiye et la Syrie ont causé des souffrances indescriptibles pour des millions de personnes.  Les Syriens touchés -dans les deux pays- étaient déjà empêtrés dans l’une des plus graves crises humanitaires de ce siècle, après 12 années impitoyables de conflit.  De plus, les tremblements de terre ont frappé lorsque leurs besoins étaient les plus élevés, lorsque les services étaient les plus rares, lorsque l’économie était au plus bas et les infrastructures déjà fortement endommagées.  Selon l’Envoyé spécial, la priorité immédiate est la réponse humanitaire d’urgence au tremblement de terre en faveur des Syriens, où qu’ils se trouvent.  À l’appui de l’impératif humanitaire, j’ai exhorté à dépolitiser la réponse humanitaire, a-t-il dit.  Cela signifie faciliter l’accès.  Il a expliqué que ce n’est pas le moment de faire de la politique avec la question des passages à travers les frontières ou les lignes de front.  De même, cela signifie aussi des ressources; et c’est le moment pour tout le monde de donner rapidement et généreusement en Syrie et éliminer tous les obstacles pour que l’aide parvienne aux Syriens dans toutes les zones touchées.  Dans la même lignée, cela signifie garantir le calme, car ce n’est pas le moment de se lancer dans une action militaire ou des violences. 

M. Pedersen a indiqué que les Syriens dans le nord-ouest, en particulier dans les régions contrôlées par le Gouvernement, ont exprimé de fortes frustrations devant l’incapacité de la communauté internationale à fournir une assistance urgente dans les jours qui ont suivi les tremblements de terre.  La réalité tragique, a-t-il expliqué, est qu’une réponse efficace a été entravée en partie par des défis qui se rapportent directement aux problèmes non résolus au cœur du conflit.  Il s’est néanmoins réjoui de constater que les tremblements de terre ont également révélé une autre réalité.  En effet, nous voyons qu’il est possible d’œuvrer au bien commun.  Nonobstant les défis et les échecs des premiers jours, les mesures prises en réponse aux tremblements de terre -tous temporaires, humanitaires, mais tous importants- ont adressé un message clair: il est possible de faire des choses positives et de coopérer sur la Syrie.  Il a ainsi salué le fait que des Syriens eux-mêmes se sont organisés pour apporter de l’aide.  Le haut fonctionnaire s’est dit touché par leur volonté de mettre la politique de côté.  Il a souligné le fait que les Syriennes ont été à l’avant-garde de ces efforts, même si, malheureusement, des rapports font état de femmes violées, battues et harcelées. 

L’Envoyé spécial a également salué la récente introduction d’exemptions dans plusieurs régimes de sanctions unilatérales en raison des tremblements de terre, notamment par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne, ainsi que des efforts pour s’assurer que leurs sanctions n’interfèrent pas avec la réponse humanitaire.  Il a ensuite salué la décision du Gouvernement syrien d’ouvrir les deux points de passage avec la Türkiye, à Bab el-Haoua et Al-Ra’ee, dans le nord-ouest de la Syrie.  M. Pedersen s’est également félicité de l’accord général obtenu en faveur d’opérations transversales dans le nord-ouest de la Syrie jusqu’en juillet, ainsi que d’autres mesures pour réduire les formalités administratives pour les acteurs humanitaires et faciliter les transactions par rapport à la réponse au tremblement de terre.  M. Pedersen a noté que le tremblement de terre a laissé entrevoir que le calme actuel peut être maintenu grâce à une volonté politique.  Il a tout de même évoqué des informations concernant des échanges de tirs d’artillerie entre les zones sous contrôle du Gouvernement syrien, les forces démocratiques syriennes, l’opposition armée ou celle sous le contrôle de Hay’at Tahrir el-Cham.  Il a aussi signalé des frappes de drones turcs, une frappe aérienne au centre de Damas attribuée à Israël, des assassinats dans le sud-ouest de la Syrie, et des attaques terribles attribuées à Daech dans le désert. 

Alors que nous passons de l’intervention d’urgence au relèvement après le tremblement de terre, les défis politiques non résolus poseront des obstacles plus importants.  La Syrie est en effet l’un des paysages politiques et opérationnels les plus complexes de la planète: un territoire divisé en plusieurs zones contrôlée par différentes parties; un gouvernement sous sanctions de la part de donateurs clefs; des autorités de facto par ailleurs; plusieurs groupes terroristes répertoriés; cinq armées étrangères; des déplacements de population massifs; des violations et abus systémiques des droits humains; des institutions dégradées, corrompues ou absentes; des infrastructures détruites; une économie en lambeaux; un trafic de stupéfiants en plein essor; et des besoins de plus en plus pressants.  Et cela nécessitera de naviguer dans ces complexités dans un contexte où la communauté internationale est elle-même divisée, a noté le haut fonctionnaire. 

Selon l’Envoyé spécial, la situation aujourd’hui est sans précédent et appelle à un leadership, à des idées audacieuses et à un esprit coopératif.  De ce fait, a-t-il relevé, la voie politique à suivre exigera une conversation sérieuse entre les principales parties prenantes pour avancer sur certaines des questions politiques non résolues du conflit.  Et cela nécessitera moins de posture, moins de rhétorique et plus de pragmatisme.  Cela nécessitera, a-t-il dit, du réalisme et la franchise du Gouvernement syrien et de l’opposition syrienne, et de tous les acteurs extérieurs clefs. 

L’Envoyé spécial a indiqué que les tremblements de terre ont exposé et aggravé bon nombre des questions clefs liées à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité sur les questions de gouvernance; de souveraineté; d’intégrité territoriale; le cessez-le-feu national; la construction d’un environnement sûr; le fichier des détenus, disparus et manquants; le retour sûr, digne et volontaire des réfugiés et des déplacés; et enfin, la reconstruction et la réhabilitation postconflit dont l’ampleur s’est aggravée avec les tremblements de terre.  M. Pedersen a appelé la communauté internationale à travailler ensemble pour soutenir la réponse d’urgence au tremblement de terre et à assurer un engagement coordonné pour tracer une voie politique à suivre. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours durgence, a rappelé que trois semaines se sont écoulées depuis que les tremblements de terre ont frappé la Türkiye et la Syrie, faisant au moins 50 000 morts, dont environ 6 000 en Syrie, sans compter les nombreux blessés, les dizaines de milliers de disparus et les centaines de milliers de sans-abri.  Alors que la zone la plus touchée a de nouveau été secouée par de fortes répliques hier, il a fait observer que cette « immense tragédie » vient aggraver les souffrances d’un pays déjà en proie à 12 années de conflit armé.  Avant même cette catastrophe, quelque 15,3 millions de personnes, soit 70% de la population du pays, avaient besoin d’une aide humanitaire, a-t-il souligné, avant d’estimer à 5 millions le nombre de personnes qui, au milieu de l’hiver, ont aujourd’hui besoin d’un abri de base et d’une assistance non alimentaire en Syrie.  Indiquant que la phase de recherche et de sauvetage touche à sa fin, il a salué les efforts héroïques déployés pour aider les victimes prises sous les décombres.  Malgré les efforts internationaux, « le plus grand héroïsme, ce sont les Syriens qui ont sauvé les Syriens » et, tragiquement, de nombreux premiers intervenants ont eux-mêmes été victimes, a ajouté M. Griffiths. 

Depuis le 9 février, a poursuivi le haut fonctionnaire, l’ONU a envoyé plus de 423 camions dans le nord-ouest de la Syrie, transportant de la nourriture essentielle, des abris, des kits sanitaires, du matériel et des fournitures médicales pour au moins un million de femmes, d’hommes et d’enfants.  Précisant que de nombreuses autres livraisons sont prévues dans les semaines à venir, il a salué l’accord du Gouvernement syrien d’ouvrir les points de passage frontaliers de Bab el-Salam et d’Al-Ra’ee pour que l’ONU puisse fournir une aide humanitaire dans le nord-ouest.  Au cours des deux dernières semaines, ces passages frontaliers ont permis à l’Organisation et à ses partenaires humanitaires d’accéder plus rapidement et plus efficacement aux nécessiteux, a-t-il affirmé, assurant que ces deux points de passage faciliteront également une nouvelle intensification des opérations humanitaires en cours via Bab el-Haoua, point de passage autorisé par le Conseil de sécurité.  M. Griffiths a également salué les approbations accélérées de visas par le Gouvernement syrien, indiquant que ces nouvelles procédures ont permis aux agences des Nations Unies, aux ONG et à d’autres acteurs humanitaires d’envoyer du personnel spécialisé pour soutenir les opérations à Damas et dans les zones touchées.  Faisant état d’une aide aux personnes vivant dans des abris collectifs et aux communautés d’accueil surpeuplées, avec un accent particulièrement mis sur la réponse à la violence sexiste et à d’autres risques, il a dit avoir débloqué 40 millions de dollars du Fonds central d’intervention d’urgence des Nations Unies pour soutenir les opérations de secours.  Il a ajouté que l’OCHA utilise aussi le Fonds humanitaire syrien et le Fonds humanitaire transfrontalier syrien pour aider ses partenaires à étendre leurs opérations. 

Dans ce contexte, la réponse au séisme a eu pour effet de retarder les efforts visant à relancer les missions vitales à travers les lignes de front vers le nord-ouest de la Syrie, a constaté M. Griffiths.  Nous avons besoin que toutes les parties facilitent un accès rapide et sans entrave aux secours et au personnel humanitaires, conformément aux exigences du droit international humanitaire, a-t-il plaidé, avant d’affirmer que l’objectif de l’ONU est que ces convois reprennent dans les semaines à venir.  Reste que la demande croissante, la rareté des articles essentiels et la hausse des prix mettent à rude épreuve nos chaînes d’approvisionnement, a alerté le Secrétaire général adjoint, faisant également état de difficultés d’approvisionnement pour les opérations transfrontalières.  Alors que les infrastructures essentielles sont gravement endommagées, nous devons importer des machines pour nettoyer les décombres et avons besoin d’équipements pour les hôpitaux de fortune et d’outils pour rétablir l’accès à l’eau potable, a-t-il ajouté, avant de relever que l’ONU s’efforce de surmonter les obstacles involontaires générés par les sanctions et les lois antiterroristes.  Tout en se félicitant des récentes clarifications concernant les exceptions humanitaires aux sanctions et des engagements visant à accélérer la délivrance de licences d’exportation, il a jugé qu’une implication soutenue reste essentielle, notamment pour encourager les secteurs privé et bancaire à travailler avec l’ONU et ses partenaires dans le cadre des exceptions disponibles. 

Si ces mesures urgentes sont nécessaires, il faut aussi un effort humanitaire soutenu, une coordination étroite et un soutien généreux, a insisté M. Griffiths, rappelant que l’appel éclair pour la Syrie demande 397,6 millions de dollars pour répondre aux besoins les plus essentiels au cours des trois prochains mois.  Selon lui, la prochaine conférence des donateurs à Bruxelles sera un moment charnière pour cette réponse, à la fois en Syrie et en Türkiye.  Dans le même temps, le plan de réponse humanitaire 2023 pour la Syrie nécessitera 4,8 milliards de dollars pour répondre aux besoins préexistants, a-t-il ajouté, estimant que les membres du Conseil peuvent contribuer à faire de ce « plus grand appel humanitaire au monde » une réalité.

Mme RASHA MUHREZ, Directrice des interventions de Save the Children, a raconté l’histoire de Maya qui a passé la nuit du tremblement de terre chez son amie Tala, toutes les deux en première année à l’Université.  Lorsque le sol a tremblé cette nuit-là, il ne leur a fallu que quelques secondes pour être ensevelies sous les décombres.  Après 10 heures passées sous les gravats, les poumons de Maya l’ont lâchée, elle s’est étouffée.  Quand elle a finalement été retirée, son corps était encore chaud.  Elle venait de mourir.  Les secours étaient arrivés avec quelques minutes de retard.  Maya est décédée avec sa meilleure amie et cousine Tala, son oncle et sa tante.  Samedi dernier, elle aurait dû célébrer son dix-neuvième anniversaire.  Maya et Tala étaient mes cousines, a révélé l’oratrice. 

Les Syriens ont appelé à l’aide la communauté internationale mais celle-ci n’est tout simplement pas arrivée au niveau et à la vitesse requis.  Ils étaient complètement seuls durant les premières heures du séisme et quand une grande partie du monde leur a tourné le dos, ils se sont soutenus et ont sauvé ce qui pouvait l’être.  Aujourd’hui, ce sont les secouristes locaux qui nettoient les décombres.  Des organisations locales fournissent aux enfants et à leurs familles des abris, des couvertures et des matelas, des vêtements chauds et de la nourriture.  Les gens utilisent des camionnettes pour transporter l’aide et les articles essentiels aux familles dans le besoin alors qu’ils ont perdu eux-mêmes leurs propres maisons et leurs proches.  Ils sont également aux prises avec les conséquences émotionnelles du tremblement de terre.  L’intervenante a rendu hommage aux communautés syriennes, aux travailleurs humanitaires et à ses amis qui ne les ont pas abandonnés. 

Cependant, la résilience a ses limites, a averti la Directrice de Save the Children: celle de Maya et des Syriens ne se traduira pas par un avenir plus digne et plus sûr sans changement.  Elle a demandé au Conseil une nouvelle approche pour éviter d’urgence les impacts secondaires du tremblement de terre alors que les enfants dans le nord de la Syrie sont exposés à la violence et à l’exploitation.  Beaucoup de familles disent que leurs enfants font des cauchemars et craignent qu’il y ait un autre séisme.  Les enfants et leurs familles auront besoin d’un soutien psychosocial continu pour les aider à se remettre de leurs cicatrices mentales.  Ils ne doivent pas être laissés seuls face à ces défis.  Ils ont besoin de notre soutien, a plaidé l’oratrice, en réclamant un accès humanitaire à toutes les personnes touchées. 

Saluant l’ouverture de deux points de passage frontaliers supplémentaires et l’assouplissement des mesures administratives pour l’aide humanitaire mises en place par le Gouvernement syrien, la Directrice a demandé des moyens financiers pour que les organisations humanitaires puissent sauver des vies et aider les gens à se relever.  La Syrie ne doit pas devenir dépendante de l’aide, a-t-elle ajouté.  Il faut mettre la politique de côté et repenser à une nouvelle approche.  Le temps du relèvement a sonné.  Il faut soutenir les organisations locales et la société civile pour qu’elles changent la livraison de l’aide aux populations dans le besoin.  Les écoles devront être réhabilitées et les hôpitaux adaptés à leurs besoins. 

Les enfants ont besoin de maisons sûres pour vivre, non de tentes.  Leurs parents ont besoin d’emplois qui leur rapportent un salaire décent et leur permettent de subvenir aux besoins de leurs familles.  Sans un changement d’approche, même pour reconstruire ce qui a été perdu, les Syriens ont besoin d’une nouvelle vie.  Il faut de nouvelles approches créatives pour relever l’ampleur des défis.  Les Syriens sont résilients.  Soutenons cette résilience pour les aider à atteindre un avenir meilleur, a exhorté l’intervenante en conclusion. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a rappelé que les autorités syriennes ont ouvert deux points de passage frontaliers avec la Türkiye à la suite des tremblements de terre.  Il a dénoncé les entraves à l’assistance humanitaire posées par les actions du groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham, relevant que l’aide qui passe par les zones sous contrôle du Gouvernement syrien parvient sans obstacle aux destinataires.  Outre la fourniture d’une assistance urgente à la population de la Syrie, il a appelé la communauté internationale à œuvrer à la restauration des zones détruites.  Cela nécessitera un soutien impartial de toute la communauté internationale, a-t-il indiqué.  Il a constaté que depuis 2017, la communauté des donateurs n’a pas été à la hauteur des besoins en Syrie.  Face à ce constat, le délégué a dénoncé « le cynisme de certains membres du Conseil de sécurité » qui reprochent à la Russie de ne rien faire pour la Syrie, parce que le pays n’agit pas à travers le prisme des mécanismes onusiens.  Pourtant, a-t-il dit, la Russie a fourni des informations sur l’aide qu’elle apporte.  Nous ne voulons pas agir par le biais de l’ONU parce que malgré toutes nos demandes, ses procédures ne sont pas transparentes, a-t-il objecté, en évoquant l’absence de données sur les projets mis en œuvre.  De plus, le peuple syrien sait lui-même qui l’aide et à quel degré, a-t-il expliqué. 

Le représentant a évoqué les nombreux problèmes que les sanctions occidentales ont créés et continuent de créer pour le peuple syrien.  Dans le contexte actuel, il a jugé pertinent de remettre sur la table la question de leur suppression, à la lumière d’un rapport de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), qui laisse entrevoir les conséquences de ces sanctions sur la situation au lendemain des tremblements de terre en Syrie.  Il a dit attendre également le rapport de l’équipe de pays des Nations Unies en Syrie sur l’impact des sanctions, document qui était du reste attendu en janvier dernier, a fait remarquer le délégué, qui s’est plaint que les sanctions américaines empêchent les engrais russes de parvenir à la Syrie, car bloqués dans des ports de l’Union européenne. 

Sur le plan sécuritaire, le délégué russe a dénoncé la présence militaire étrangère illégale en Syrie et la présence de foyers terroristes.  Il a aussi dénoncé les actes d’Israël qui, le 19 février dernier, a bombardé Damas, l’un de ses missiles ayant fait 5 morts et 15 blessés dans un bâtiment résidentiel.  Il a appelé Israël à mette fin à ces actes de provocation qui pourraient avoir des conséquences dangereuses pour toute la région.  Il a souligné que pour assurer la stabilisation et la sécurité en Syrie et au-delà, il sera nécessaire de rétablir son intégrité territoriale et sa souveraineté, ainsi que le contrôle de Damas sur l’ensemble du territoire national.  Il a dit privilégier un règlement politique mené et dirigé par les Syriens eux-mêmes, avec le soutien de l’ONU, sans intervention externe et dans le respect des principes de souveraineté, d’indépendance et d’intégrité territoriale de la Syrie. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a exprimé sa solidarité avec les victimes du tremblement de terre en Syrie, indiquant que son pays a annoncé l’envoi d’une aide d’un montant de 185 millions de dollars pour leur prêter assistance.  Le représentant s’est félicité de l’ouverture de deux points de passage pour permettre l’acheminement de l’aide dans le nord-ouest de la Syrie et a applaudi la participation de groupes de la société civile aux opérations.  Il a cependant rappelé que la crise humanitaire en Syrie ne date pas d’il y a trois semaines.  La nécessité d’un acheminement transfrontalier de l’aide est claire depuis longtemps et le restera, a-t-il souligné, appelant les membres du Conseil de sécurité à veiller à ce que l’aide arrive à ceux qui en ont besoin.  Pour ce faire, il faut que l’aide transfrontalière se poursuive sans entrave, a-t-il insisté, avant de préciser que les États-Unis appuient la distribution d’aide par toutes les voies possibles, y compris à travers les lignes de front.  Le délégué a ainsi déclaré soutenir le plan de l’OCHA en faveur d’opérations à travers les lignes vers le nord-ouest et a appelé les autorités syriennes à permettre aussi l’acheminement d’une aide transfrontalière. 

Déplorant les informations selon lesquelles cette aide est détournée, bloquée ou se retrouve aux mains du Gouvernement syrien, le représentant a exhorté toutes les parties à s’abstenir de tel agissements.  Il s’est également déclaré préoccupé par les rapports faisant état de nouveaux bombardements dans le nord-ouest de la Syrie, enjoignant le « régime syrien » à coopérer plutôt avec l’Envoyé spécial pour trouver une solution politique au conflit, conformément à la résolution 2254 (2015).  Constatant que la crise humanitaire est d’autant plus dévastatrice que le conflit syrien en est à sa douzième année, il a estimé que le Conseil de sécurité peut faire davantage pour appuyer le processus politique, et ce, bien que les travaux de la Commission constitutionnelle restent bloqués en raison des exigences syriennes.  Selon lui, la résolution 2254 est la feuille de route convenue pour régler le conflit et le Gouvernement syrien ferait mieux de s’y conformer, au lieu d’utiliser le tremblement de terre pour détourner l’attention du processus politique. 

Pour finir, le représentant est revenu sur les commentaires de « certains », selon lesquels les sanctions imposées à la Syrie entraveraient la fourniture de l’aide.  N’oublions pas que ces sanctions visent des entités et des individus qui brutalisent les Syriens depuis des années, qui bombardent des zones peuplées, qui ont utilisé des armes chimiques et qui ciblent ceux qui ne devraient pas l’être, a-t-il fait observer.  S’adressant aux organisations travaillant sur le terrain, il a assuré que les États-Unis ne ciblent pas les opérations humanitaires mais, au contraire, fournissent de l’aide et accordent des licences.  Nous sommes prêts à aider les organisations si elles perçoivent des obstacles à l’acheminement de l’aide, a-t-il ajouté, avant de répondre à son homologue russe au sujet du prétendu blocage des engrais russes.  Ce n’est pas à cause des États-Unis que la Russie accuse un retard dans la fourniture de son engrais à la Syrie, a-t-il affirmé, ajoutant qu’elle peut surmonter ce problème en travaillant avec l’ONU et ses partenaires.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a partagé le témoignage d’Ahmad, membre d’une organisation de la société civile active dans la province d’Alep pour illustrer la situation tragique où, « en quelques instants, tout le monde est devenu une victime.  Les civils, les travailleurs humanitaires et mêmes les policiers de la défense civile.  Tout le monde est victime de ce séisme dévastateur.  Quatre-vingts secondes ont suffi pour changer la vie là-bas »Pour ces Syriennes et Syriens, ces 80 secondes se sont ajoutées à 12 années d’un conflit qui a fragilisé le socle politique et social de leur pays.  La Suisse, a indiqué la représentante, souhaite également amplifier l’appel de l’Envoyé spécial à un cessez-le-feu au niveau national. 

D’Alep à Soueïda, de Deïr el-Zor à Homs, les frappes aériennes, attaques indiscriminées et affrontements armés mettent en danger les civils dans l’ensemble du pays et constituent de sérieux freins à l’instauration d’une paix durable, a dénoncé la déléguée.  Elle a appelé les parties au conflit à respecter leurs obligations de droit international humanitaire et de droits humains et à protéger les civils et le personnel humanitaire.  Elle a aussi appelé à faire toute la lumière sur le sort des personnes détenues et disparues, leurs proches comptant parmi les 15,3 millions de Syriennes et de Syriens qui dépendent de l’aide humanitaire.  Leur accorder le droit de savoir, c’est ouvrir la porte à une solution politique, qui demeure la seule issue possible au conflit, a terminé l’oratrice.

La représentante de la Suisse, qui s’exprimait également au nom du Brésil, en tant que co-porte-plume sur les questions humanitaires en Syrie, a déclaré que trois semaines après le tremblement de terre et ses répliques, les besoins humanitaires dans ce pays étaient plus importants que jamais.  L’aide doit parvenir aux personnes touchés, a souligné la représentante, en espérant que le nombre de convois humanitaires augmentera dans un avenir proche.  Les conditions nécessaires à un acheminement rapide et sans entrave doivent être assurées et maintenues et l’aide continuer d’être distribuée en toute sécurité sur le terrain, a-t-elle ajouté.  La déléguée a donc exhorté les parties à autoriser et à faciliter davantage un accès humanitaire rapide, sûr, sans entrave et durable dans toutes les régions de la Syrie, demandant que les conséquences du séisme ne soient pas politisées. 

S’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a rappelé que la population syrienne, épuisée par des années de conflit et les conséquences du récent tremblement de terre, a besoin d’aide.  Aussi a-t-il appelé à une forte mobilisation de la communauté internationale en faveur de l’appel éclair de près de 400 millions de dollars lancé par le Secrétaire général au lendemain du séisme dévastateur qui a frappé la Syrie et la Türkiye le 6 février.  L’accès étant la pierre angulaire de l’aide humanitaire d’urgence, le représentant s’est donc félicité de la décision du Gouvernement syrien d’autoriser l’ouverture des deux nouveaux points de passage de Bab el-Salam et Al-Ra’ee pour une période de trois mois, outre celui de Bab el-Haoua. 

Préoccupé par la poursuite des hostilités dans le nord de la Syrie, les A3 appellent toutes les parties au conflit à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et à instaurer un cessez-le-feu immédiat afin de faciliter l’acheminement de l’aide aux victimes, a poursuivi le représentant.  Sur le plan politique, il a souhaité que la neuvième session de la Commission constitutionnelle, facilitée par les Nations Unies, puisse se tenir à Genève dans les meilleurs délais et qu’elle permette de relever les défis auxquels la Commission est confrontée.  M. Biang a enfin pris note de l’introduction récente d’exemptions permanentes consécutives aux tremblements de terre dans plusieurs régimes de sanctions unilatérales: les A3, a-t-il ajouté, appellent à la levée des sanctions par tous les pays concernés afin de ne pas entraver les opérations de secours au profit de la population syrienne dans le besoin.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a constaté que la situation humanitaire en Syrie reste désastreuse, les tremblements de terre exacerbant les crises déjà existantes dans le pays.  Alors que l’ampleur des besoins est incommensurable, avec des niveaux record de pauvreté et d’insécurité alimentaire, une épidémie de choléra et des conditions hivernales difficiles, il a salué l’accord trouvé entre le Président Assad et l’ONU pour ouvrir deux points de passage frontaliers supplémentaires vers le nord-ouest du pays pour une période initiale de trois mois.  Pour le représentant, toutes les modalités, transfrontalières et au travers des lignes de front, doivent être utilisées pour répondre de manière adéquate aux vastes besoins humanitaires.  Il a indiqué à cet égard que le Japon a décidé de fournir une aide d’urgence de 27 millions de dollars pour les dommages causés par les séismes en Syrie et en Türkiye, en plus des secours d’urgence déjà livrés. 

Le délégué a ensuite prévenu que la crise humanitaire ne pourra être résolue sans un règlement politique du conflit.  Saluant les efforts inlassables de l’Envoyé spécial et de son adjointe pour que reprennent les réunions de la Commission constitutionnelle à Genève, il a jugé impératif que des progrès soient réalisés dans tous ces domaines, y compris sur le dossier des personnes détenues et disparues, pour parvenir à la fin du conflit par des moyens pacifiques et diplomatiques.  Il a donc exhorté toutes les parties, en particulier les autorités syriennes, à s’engager pleinement et à coopérer avec l’Envoyé spécial pour promouvoir un processus politique global et inclusif.  Cela reste la seule voie viable vers la paix et la stabilité pour le peuple syrien, a-t-il dit, avant d’inviter les membres du Conseil de sécurité à mettre leurs divergences de côté et à travailler de manière constructive à l’amélioration de la situation humanitaire et à la mise en œuvre d’un processus politique dirigé et facilité par les Syriens, conformément à la résolution 2254 (2015).

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est félicité de l’ouverture de deux points de passage transfrontaliers supplémentaires vers la Syrie, qu’ont pu emprunter 368 camions avec à leur bord des médicaments, des vivres, de l’eau, des couvertures, des tentes et d’autres articles essentiels.  C’est bien la preuve selon lui de ce qui peut être accompli avec un peu de volonté politique et une préoccupation réelle à l’égard du peuple syrien.  Le représentant a ensuite rejeté l’idée que, dans un contexte marqué par le deuil et l’insécurité, des attaques armées meurtrières continuent d’être perpétrées dans le territoire syrien.  Il a par ailleurs noté avec préoccupation l’information selon laquelle se multiplient les cas de violences sexuelles dans les abris communautaires.  Aussi M. Pérez Loose a-t-il demandé l’activation des mécanismes de surveillance pertinents avec la célérité exigée par de tels actes.  Le délégué s’est en conclusion fait l’écho de l’appel urgent lancé par le Secrétaire général pour un montant de 397 millions de dollars afin de répondre aux besoins humanitaires de la population syrienne pour les trois premiers mois, se disant convaincu que ce chiffre augmentera au fur et à mesure que débutera la phase de réinstallation des personnes déplacées et de reconstruction des infrastructures stratégiques détruites par les tremblements de terre.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a souhaité que la réponse humanitaire internationale se fasse dans l’urgence et qu’elle puisse atteindre toutes les personnes touchées.  Il a salué la décision du Gouvernement syrien d’ouvrir deux postes frontières supplémentaires pendant une période de trois mois, en réponse aux besoins urgents suscités par les tremblements de terre.  Outre des fonds pour les deux pays affectés, les Émirats arabes unis, a indiqué le représentant, ont mis en place un pont aérien d’une centaine de vols pour acheminer dans la région des articles de première nécessité, ainsi qu’un autre spécifiquement vers la Syrie à partir de Dubaï pour les vols opérés par les Nations Unies et les organisations partenaires.  Le délégué a indiqué que les équipements lourds sont un des besoins les plus urgents pour réparer les infrastructures et reconstruire.  Il a dénoncé le fait que des groupes terroristes aient entravé le passage de l’aide humanitaire par les lignes de front, essayant ainsi d’obtenir des gains aux dépens du peuple syrien.  Nous sommes également préoccupés par la multiplication des enlèvements et des assassinats commis par Daech au cours de ces dernières semaines, a ajouté le représentant.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a salué les efforts inlassables de MM. Griffiths et Pedersen pour alléger les souffrances du peuple syrien après plus d’une décennie de conflit et, maintenant, face aux conséquences tragiques des tremblements de terre.  Indiquant que, la semaine dernière, le Gouvernement brésilien a annoncé un don de purificateurs d’eau et de sept tonnes d’aliments nutritifs déshydratés au Gouvernement syrien, il s’est dit inquiet pour les enfants qui, partout en Syrie, continuent de subir de terribles traumatismes alors qu’ils devraient être épargnés.  Il a jugé particulièrement préoccupante la situation des enfants dans les camps, notamment celui de Hol, avant de saluer les efforts de rapatriement en cours.  De l’avis du représentant, les souffrances humaines supplémentaires causées par les séismes soulignent la nécessité d’une solution politique du conflit.  Réaffirmant que seul un processus politique dirigé par les Syriens et facilité par les Nations Unies, dans le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la Syrie, peut offrir une solution durable, il a estimé qu’un cessez-le-feu global est urgent et a appelé toutes les parties à faire preuve d’un maximum de retenue. 

Après avoir condamné toutes les activités terroristes et les attaques récentes des forces étrangères, le représentant a fait valoir que la résolution 2254 (2015) fournit une feuille de route pour restaurer l’unité et la souveraineté de la Syrie.  Or, depuis plusieurs mois maintenant, nous n’avons vu aucun progrès en ce qui concerne les réunions de la Commission constitutionnelle, a-t-il déploré, avant d’inviter les parties prenantes à faire montre d’une volonté politique renouvelée pour faire avancer le processus.  Saluant les efforts de l’Envoyé spécial visant à réengager les principales parties prenantes afin de trouver une issue à l’impasse actuelle, il l’a aussi félicité pour son engagement continu auprès du Conseil consultatif des femmes.  Enfin, tout en espérant que les récents gestes de solidarité internationale pourront influencer positivement le dossier politique, il a souhaité que cette coopération humanitaire ouvre la voie à de nouvelles mesures de confiance.

M. ARIAN SPASE (Albanie) a rappelé que dans moins de deux semaines, cela fera 12 ans qu’une poignée d’adolescents syriens ont été arrêtés par le régime d’Assad pour avoir tagué des graffitis favorables à la démocratie à Deraa.  En conséquence, les adolescents syriens d’aujourd’hui n’ont connu que la guerre et la brutalité et les récents tremblements de terre dévastateurs n’ont fait qu’accroître la misère et les besoins humanitaires.  Le représentant a soutenu la prolongation pour une nouvelle période de six mois du mécanisme transfrontalier pour l’acheminement de l’aide aux 4,1 millions de Syriens du nord-ouest du pays.  Il a réclamé une nouvelle résolution pour assurer la prévisibilité, la préparation, le soutien, la mobilisation efficace des ressources et la mise en œuvre des projets. 

Le poste frontière pourrait ainsi assurer un accès aussi longtemps qu’il sera nécessaire et certainement pas quand le régime en décidera.  La cause profonde de cette tragédie humaine inimaginable qu’est la Syrie aujourd’hui est politique.  Il faut répondre aux revendications et à l’aspiration du peuple syrien à la liberté et à la sécurité.  Il n’y a pas d’autre voie vers la paix.  Seule la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) permettra d’aller de l’avant, a martelé le représentant qui a déploré l’obstruction du régime syrien et de ses partisans.  Il les appelés à renoncer à leurs prétextes absurdes et à faciliter une nouvelle convocation de la neuvième session de la Commission constitutionnelle à Genève.  Le représentant a conclu en réitérant son appui à la création d’un nouveau mécanisme pour clarifier le sort des personnes détenues et portées disparues en Syrie.

Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a indiqué qu’après le séisme, la France a débloqué une aide de 12 millions d’euros et livré 40 tonnes de matériels d’urgence.  Elle a salué la mobilisation de M. Martin Griffiths pour obtenir l’ouverture d’autres postes frontières.  Elle a relevé que la complexité des opérations humanitaires en Syrie demeure entière en raison de la nature du régime qui détourne une part substantielle de l’aide transitant par Damas et ponctionne les fonds alloués au financement des projets humanitaires.  S’agissant des sanctions, elle a rappelé qu’elles ont été adoptées en réponse aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité commis par le régime et ses affidés.  Les sanctions européennes n’ont jamais empêché l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie, a-t-elle argué, estimant que les montants des financements alloués par l’Union européenne et ses États membres au plan de réponse humanitaire pour la Syrie en sont la preuve.  Ainsi, en 2022, la Commission européenne a versé 770,8 millions de dollars d’aide en faveur de la Syrie.  Le 23 février dernier, les États membres de l’UE ont adopté une exemption humanitaire temporaire pour une durée de 6 mois.  Cette exemption, a expliqué la représentante, ne signifie aucunement que les sanctions empêchent l’aide humanitaire d’atteindre les populations et de répondre à leurs besoins.  Il s’agit d’adapter cet outil à l’urgence liée aux séismes et à permettre aux ONG d’agir avec plus de rapidité. 

Avant le séisme, le nombre des victimes de la guerre en Syrie était déjà sans précédent, a poursuivi la déléguée, en ajoutant que la brutalité du conflit et la répression du régime ont provoqué un des plus grands mouvements de population de ce siècle.  Par ailleurs, plus de 100 000 personnes sont portées disparues dont la plupart croupissent dans les prisons du régime.  Les Syriens demandent justice car sans justice aucune paix durable n’est possible, a-t-elle lancé, en précisant que la France poursuivra sans relâche son combat contre l’impunité: les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité devront rendre compte de leurs actes.  La représentante a enfin rappelé qu’en l’absence d’un processus politique crédible et inclusif, la France n’a aucune raison de renoncer aux fondamentaux de sa position vis-à-vis du régime syrien.  De ce fait, la France n’entend pas se laisser prendre au piège des tentatives de Bashar Al-Assad de tirer profit d’une catastrophe qui affecte une population que son régime a martyrisée et abandonnée.

M. DAI BING (Chine) a exprimé à son tour son émoi face à la situation humanitaire en Syrie, aggravée par les récents tremblements de terre.  Il a indiqué qu’après le premier séisme, le Gouvernement chinois a mis en branle son mécanisme d’assistance et a fourni une aide importante à la Türkiye et à la Syrie.  Il a ajouté que, tandis que des équipes de secours étaient dépêchées sur les lieux de la catastrophe, la société civile chinoise s’est mobilisée pour faire des dons en nature.  La Chine va continuer à apporter son assistance pour aider Syriens et Turcs à reconstruire leur pays, a-t-il assuré, estimant également que les aides bilatérales et l’appel humanitaire des Nations Unies doivent être encouragés.  Le représentant a ensuite salué les efforts de MM. Pedersen et Griffiths, qui se sont rendus sur place pour mobiliser le soutien international.  Il s’est également félicité de la décision du Gouvernement syrien d’ouvrir deux postes frontières supplémentaires, ce qui permet à davantage de convois de se rendre dans le nord-ouest du pays.  C’est une mesure positive pour secourir les personnes touchées, a insisté le délégué, selon lequel cela montre que la Syrie fait preuve de « bonne volonté » pour coopérer avec les Nations Unies et faire en sorte que l’aide transfrontière atteigne ceux qui en ont besoin.  Hélas, la fourniture de l’aide à travers les lignes de front reste encore entravée, a-t-il déploré, appelant les parties à donner la priorité aux intérêts du peuple syrien et à lever les obstacles. 

Pour le représentant, les sanctions imposées à la Syrie depuis des années ont aggravé cette crise, réduisant presque à néant les capacités d’intervention humanitaire syriennes.  Si des assouplissements temporaires des sanctions ont été décidés cette année, cela ne fait que confirmer la gravité de la situation, a-t-il souligné, avant d’appeler à tout faire pour que les organisations humanitaires sur le terrain aient les coudées franches.  Ces mesures temporaires ne contribueront pas davantage à réparer les socles économiques de la Syrie, a constaté le délégué, pour qui il importe de lever toutes les sanctions unilatérales et « illégales » contre le pays pour « éviter une catastrophe plus grave encore ».  Dans ce contexte, le processus politique conduit et pris en mains par les Syriens est la solution idoine, a-t-il soutenu, invitant les parties au conflit à dépasser leurs divergences et à se réunir à nouveau au sein de la Commission constitutionnelle.  Se prononçant à cet égard pour la définition de critères uniformes et conformes au droit international et aux résolutions du Conseil de sécurité, il a aussi souligné l’importance de réprimer les forces terroristes présentes en Syrie et d’empêcher les parties de s’en faire complices.  Il a enfin condamné les frappes aériennes menées par « certains pays » contre des zones résidentielles de Damas, souhaitant que cessent les atteintes à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi que le pillage de ses ressources. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a annoncé que son gouvernement a agi immédiatement après le séisme, et fourni un financement supplémentaire aux premiers intervenants dans le nord-ouest de la Syrie et annonçant une aide d’urgence supplémentaire d’un montant de 30 millions de dollars à l’ONU et aux partenaires humanitaires en Syrie et en Türkyie.  Cette tragédie a mis en évidence l’importance d’un accès sans entrave et sans conditions dans le nord-ouest du pays.  Le Conseil doit continuer à surveiller de près cet accès à la lumière des préoccupations persistantes que le régime continue de détourner et de compliquer la livraison de l’aide.  Après plus d’une décennie de conflit au cours duquel le « régime d’Assad » a agi avec un mépris total pour le bien-être de son peuple, ce serait une insulte au peuple syrien de permettre à Damas d’utiliser cette dernière tragédie pour éviter d’assumer la responsabilité de ses actes, a alerté la représentante. 

Elle a rappelé que le Conseil a récemment pris connaissance de nouvelles preuves de l’utilisation criminelle par le « régime syrien » d’armes chimiques contre sa population civile à Douma en 2018.  Aujourd’hui même, des milliers de familles se retrouvent sans réponse concernant des êtres chers qui ont disparu dans les prisons d’Assad.  Pendant ce temps, le régime continue de projeter l’instabilité dans la région, notamment par la production et la contrebande de fénétylline.  Cette industrie illicite de stupéfiants, qui rapporte des dizaines de milliards de dollars, finance un régime qui vit dans le luxe sur le dos de sa population, a accusé la représentante.  Le peuple syrien a besoin d’une aide humanitaire immédiate et mérite une paix durable, inclusive et juste.  Le processus politique de l’ONU défini dans la résolution 2254 (2015) reste la seule voie viable pour y parvenir, selon la déléguée. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a souligné que les enfants non accompagnés ont un besoin urgent de protection et de soins appropriés pendant le processus de regroupement familial.  De même, les familles ont besoin d’un soutien psychosocial d’urgence pour les aider à se remettre de l’horreur qu’elles ont vécu.  Les femmes et les filles, a-t-elle ajouté, méritent une protection et une réponse humanitaire sensible au genre.  La déléguée a salué l’ouverture des postes frontières de Bab el-Salam et d’Al-Ra’ee.  Elle a émis le vœu que les opérations à travers les lignes de front pourront également être élargies.  Elle a tout de même insisté sur l’importance d’ouvrir des postes frontières supplémentaires, compte tenu de l’ampleur des besoins.  Elle a estimé que 12 ans de conflit et d’innombrables crimes commis par le Gouvernement syrien et les parties à ce conflit ont infligé une douleur indicible à des millions de gens.  Selon elle, même face aux dernières tragédies, nous devons rester ferme dans notre appel à des progrès sur le plan politique, en droite ligne de la résolution 2254 (2015).  Pour elle, le tremblement de terre du 6 février en Türkiye et en Syrie est une occasion de recentrer et de redoubler d’efforts pour assurer une paix juste et durable en Syrie.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a tout d’abord indiqué que, alors que son pays fait face aux conséquences catastrophiques du tremblement de terre dévastateur, l’organisation terroriste Daech a mené une attaque brutale au cours de laquelle 53 citoyens ont été tués dans la ville d’al-Soukhna, dans l’est de la province de Homs.  Simultanément, Israël a mené une attaque aérienne, le 19 février, depuis le Golan occupé, tirant des missiles sur des quartiers résidentiels de Damas, a-t-il ajouté, précisant que cette attaque « préméditée » a fait 5 morts, 15 blessés, et provoqué la destruction d’habitations civiles, ainsi que des dommages matériels à des centres éducatifs et des sites historiques.  Dénonçant une violation flagrante du droit international et des principes de la Charte des Nations Unies, il a appelé le Conseil de sécurité à condamner les attaques israéliennes en prenant les mesures nécessaires pour dissuader leur auteur.  Il a également renouvelé son appel aux pays qui soutiennent Israël au sein du Conseil pour qu’ils cessent d’entraver cet organe dans l’exercice de ses responsabilités de mettre fin aux crimes commis par l’occupant israélien et les organisations terroristes, et les tiennent pour responsables. 

Le représentant a par ailleurs assuré que, plus de trois semaines après le tremblement de terre, son gouvernement continue, dans la limite de ses capacités, de déployer tous les efforts possibles pour faciliter la réponse d’urgence dans les quatre provinces touchées.  Il a ainsi indiqué que les exemptions nécessaires ont été accordées pour aider l’arrivée de l’assistance humanitaire via les trois aéroports syriens, le port maritime de Lattaquié et les points de passage frontaliers terrestres avec le Liban et la Jordanie.  Le Gouvernement syrien a accordé des facilités aux Nations Unies, aux organisations internationales opérant en Syrie et au Comité international de la Croix-Rouge, notamment en accélérant les procédures douanières et en accordant des visas, a-t-il précisé, faisant également état de la « décision souveraine » d’ouvrir deux points de passage supplémentaires pour une période de trois mois afin d’apporter une aide humanitaire dans le nord-ouest du pays.  Cette décision a contribué au passage de 368 camions transportant de l’aide humanitaire, ce qui témoigne de l’importance de l’accord conclu avec les Nations Unies, a relevé le délégué.  Il a ajouté que le Gouvernement syrien a aussi continué d’accorder les approbations nécessaires aux agences onusiennes pour fournir une aide humanitaire à travers les lignes de front, y compris dans le nord-ouest de la Syrie, pour une période de six mois et pour mener des évaluations des besoins humanitaires dans le nord-est du pays en réponse aux répercussions du tremblement de terre et des répliques.  À cet égard, le représentant a rejeté toutes les tentatives de politisation de la situation humanitaire en Syrie, que ce soit par le biais des terroristes du Front el-Nosra et de Hay’at Tahrir el-Cham en leur donnant l’ordre d’empêcher l’entrée de l’aide à travers les lignes, ou par le scepticisme diffusé par certains pays occidentaux quant à la décision du Gouvernement syrien d’acheminer l’aide par deux nouveaux points de passage. 

Remerciant tous les pays qui ont fait preuve de solidarité avec la Syrie et son peuple, le représentant a aussi exprimé sa gratitude au Secrétaire général de l’ONU pour avoir lancé un appel humanitaire urgent.  Il s’est toutefois déclaré inquiet face au faible niveau de financement du plan de réponse humanitaire en Syrie, qui n’a reçu que moins de 50% des fonds demandés, et a appelé les pays donateurs à redoubler d’efforts afin d’assurer l’acheminement de l’aide humanitaire à tous ceux qui en ont besoin.  Il a ensuite dénoncé les effets des sanctions unilatérales qu’imposent les États-Unis et l’Union européenne à son pays, soulignant qu’elles affectent gravement les opérations humanitaires, notamment en perturbant le secteur aérien syrien, en empêchant des entreprises internationales de vendre des médicaments et du matériel médical à la Syrie, en provoquant des pénuries de carburant, en saisissant illégalement des gisements de pétrole et de gaz, et en barrant l’importation d’équipements nécessaires à l’approvisionnement en eau potable et à l’assainissement, mais aussi d’engins de construction lourds.  De plus, les sanctions et les restrictions sur l’importation d’engrais ont causé des dommages irréparables à la capacité de production agricole de la Syrie, contribuant à une forte augmentation du coût des aliments produits localement, a-t-il dénoncé, ajoutant que les mesures unilatérales imposées aux banques syriennes ont conduit au gel ou à la rupture des relations financières avec les banques étrangères.  Répondre aux répercussions catastrophiques du tremblement de terre nécessite de donner la priorité aux questions humanitaires et non aux questions politiques, a souligné le délégué, appelant à la mise en place d’un environnement sûr et stable pour le peuple syrien, ce qui passe selon lui par le soutien aux efforts de lutte contre le terrorisme et les attaques israéliennes répétées, la fin de la présence étrangère illégale sur le territoire syrien et la levée inconditionnelle des mesures coercitives unilatérales.

M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique dIran) a déclaré que l’aide humanitaire en Syrie doit être renforcée et fournie de manière impartiale et non discriminatoire, sans politisation ni condition.  Le représentant a demandé à la communauté internationale de lever les sanctions unilatérales inhumaines contre ce pays.  Il faut aussi mettre un terme au pillage continu des ressources naturelles par les forces étrangères qui prive la Syrie d’une somme de 100 milliards de dollars.  Il a demandé la mise en œuvre de la résolution 2672 (2023), en mettant l’accent sur les projets de relèvement et de reconstruction des infrastructures essentielles.  Le délégué a salué la récente décision de la Syrie d’ouvrir deux nouveaux postes frontières pour faciliter l’accès humanitaire. 

Il a souligné que la solution politique à la crise syrienne doit rester un processus mené et dirigé par la Syrie et facilité par l’ONU.  Il a dit soutenir les travaux de la Commission constitutionnelle dont l’impasse actuelle peut être résolue par un engagement constructif et la bonne foi de toutes les parties concernées.  Il a dissuadé les initiatives qui ne feraient que détourner le processus politique de son objectif et qui n’apporteraient aucune valeur ajoutée.  Préoccupé par les attaques terroristes dans les zones sous occupation, le représentant a dénoncé la présence illégale des forces militaires étrangères en Syrie.  Il a condamné la dernière attaque terroriste du régime israélien contre un immeuble résidentiel dans une zone densément peuplée du centre de Damas, le 19 février dernier.  Il a exigé de la communauté internationale qu’elle oblige le régime israélien à cesser ses violations répétées de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie.  Le Conseil de sécurité doit prendre ses responsabilités et condamner les violations continues du régime israélien de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de certains États Membres, a insisté le représentant.

M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a évoqué les conséquences des tremblements de terre qui ont affecté la vie de millions de gens.  Il a indiqué que les routes menant aux postes frontières de Bab el-Haoua, d’Al-Ra’ee et de Bab el-Salam ont été déblayées et sont désormais totalement praticables.  Il a jugé crucial de maintenir ouverts ces postes frontières et a assuré que l’espace aérien turc est également ouvert au trafic humanitaire vers la Syrie.  Nous sommes prêts, a-t-il affirmé, à ouvrir un autre poste frontière.  Selon le délégué, le séisme a mis en lumière le caractère imbriqué des problèmes syriens.  Il a appelé à une solution politique durable, en application de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Il a souligné que le retour des réfugiés fait partie du règlement de la crise tout comme l’élimination des groupes terroristes, tels que le YPG/PKK et Daech.  Le terrorisme, a-t-il insisté, est la principale menace à la paix et à la sécurité régionales et la Türkiye va poursuivre son action contre toutes les formes de ce fléau.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence biodiversité marine: vive inquiétude des délégations dans la « dernière ligne droite » des négociations

Reprise de la cinquième session,
65e séance plénière – matin
MER/2171

Conférence biodiversité marine: vive inquiétude des délégations dans la « dernière ligne droite » des négociations

La Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, plus connue sous l’acronyme anglais « BBNJ », a entendu ce matin des délégations exprimer leur vive inquiétude quant à l’issue des négociations, celles-ci entrant dans la dernière « ligne droite », selon l’expression du délégué de Cuba.

Alors que la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee, de Singapour, a transmis aux délégations, samedi 25 février, une dernière mouture* du nouvel avant-projet d’accord actualisé, qui est à la base des discussions, Cuba, au nom du Groupe des 77 et la Chine, s’est étonné que les propositions faites par plus de 140 délégations aient été mises sur un même pied d’égalité que les propositions avancées par une poignée d’entre elles.  « Certaines propositions sont en outre sur la table depuis des années. »

Même son de cloche du côté de la Fédération de Russie qui a regretté que toutes les propositions faites par les délégations n’aient pas été reflétées dans la dernière mouture du texte.  « Cela n’aide pas à forger un consensus », s’est-elle désolée.  Le délégué de la Sierra Leone, au nom du Groupe des pays d’Afrique, s’est également alarmé des propositions faites par un petit nombre de délégations, notamment sur les questions transversales, et qui seraient, selon lui, de nature à saper le futur traité.

Une inquiétude partagée par la Chine et l’Équateur, le délégué de ce pays remarquant que 300 passages du texte sont entre crochets, c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’accord entre les délégations.  Le représentant équatorien a également insisté sur le peu de temps qu’il reste pour examiner la question fondamentale du financement, tandis que son homologue du Brésil a rappelé l’importance de prendre en compte les besoins spécifiques des pays en développement. 

Mais la charge la plus virulente est venue du représentant de la Jamaïque qui a fustigé ces délégations qui préfèrent camper sur leurs positions et prennent ainsi « en otage » le processus de négociation.  « La folie c’est de refaire toujours la même chose en espérant des effets différents », a-t-il ironisé, sous les applaudissements nourris des délégations.  « Nous avons fait des progrès considérables, mais un long chemin reste à accomplir », a reconnu la Présidente, en faisant appel à « la bonne volonté » dans les négociations.

La déléguée du Belize a ensuite fait le point sur les avancées des négociations sur les ressources génétiques marines.  Elle a insisté sur la satisfaction des délégations en ce qui concerne les paragraphes 1, 2, 3 et 6 de l’article 9 intitulé « Activités relatives aux ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».  Le premier paragraphe, par exemple, prévoit que toutes les Parties peuvent mener de telles activités, dans la conformité avec le futur accord.  Des divergences persistent en revanche sur les paragraphes 4 et 5, a admis la déléguée. 

À son tour, la déléguée du Canada a abordé le sujet du chapitre des outils de gestion par zone, qui comprennent les aires marines protégées, thème de la partie III du texte soumis à la discussion.  Évoquant les paragraphes 1, 4 et 5 de l’article 19 relatif à la prise de décisions, la représentante canadienne a précisé que les « discussions approfondies » qui se sont déroulées au sein des petits groupes ont abouti à des éléments de langage révisés qui ont reçu l’appui de la quasi-totalité des délégations.  « Des progrès significatifs ont été accomplis, même si les discussions doivent se poursuivre », a-t-elle déclaré.

Le délégué des Pays-Bas a ensuite fait un résumé des dernières consultations informelles qui se sont tenues sur les études d’impact sur l’environnement (Partie IV).  Évoquant l’article 41 bis, il a déclaré que les délégations sont convenues que l’Organe scientifique et technique sera chargé d’élaborer des normes et lignes directrices. 

Sur le renforcement des capacités et du transfert de techniques marines (Partie V), la déléguée d’El Salvador a insisté sur le consensus autour de l’article 43 relatif à la coopération dans le domaine du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines.  Nous sommes dans l’attente d’une proposition en ce qui concerne la référence aux détenteurs de connaissances traditionnelles, a-t-elle déclaré.  Ces détenteurs sont en effet mentionnés au titre des parties prenantes avec lesquelles les Parties devraient coopérer pour le renforcement des capacités et le transfert de techniques marines.

Pour ce qui est des questions transversales, le délégué de la Jamaïque a insisté sur les progrès accomplis sur le libellé de l’article 4 relatif à la relation entre l’Accord et la Convention sur le droit de la mer, les instruments et cadres juridiques pertinents et les organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux et sectoriels pertinents.  « De fortes divergences subsistent sur le paragraphe 3 relatif au statut juridique des entités non parties à la Convention », a-t-il informé.

Enfin, pour ce qui est de la mise en œuvre et du respect des dispositions (Partie VIII) et du règlement des différends (Partie IX), la déléguée de la Nouvelle-Zélande a souligné « l’accord général » obtenu autour de l’article 53 ter sur le Comité de mise en œuvre et de contrôle du respect des dispositions.  Elle a en outre précisé qu’un accord serait proche au sujet de l’article 55 sur les procédures de règlement des différends.

La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu le mardi 28 février, à 10 heures.

* A/CONF.232/2023/CRP.1/Add.1

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Somalie dénonce une « déconnexion croissante » entre le régime de sanctions la visant et l’évolution de sa lutte contre les Chabab

9271e séance - après-midi
CS/15213

Conseil de sécurité: la Somalie dénonce une « déconnexion croissante » entre le régime de sanctions la visant et l’évolution de sa lutte contre les Chabab

Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, le Président du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 751 (1992) concernant la Somalie lui présenter les activités de cet organe depuis le 20 octobre 2022.  Réagissant à cet exposé, le représentant de la Somalie a réitéré la position de son gouvernement en faveur d’une levée totale de l’embargo sur les armes, avant de dénoncer une « déconnexion croissante » entre le régime de sanctions appliqué à son pays et la situation sur le terrain, notamment s’agissant de la lutte contre les Chabab. 

À l’entame de sa présentation, le Président du Comité 751 a rappelé que, par sa résolution 2662 (2022) adoptée le 17 novembre dernier, le Conseil de sécurité a encore assoupli l’embargo sur les armes déjà partiellement levé afin de soutenir le développement des institutions somaliennes de sécurité et de police.  M. Kimihiro Ishikane, du Japon, a également rappelé que cette résolution a modifié le nom du Comité, désormais dénommé « Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution (1992) concernant les Chabab », ce qui illustre, selon lui, l’accent mis par le régime de sanctions. 

M. Ishikane a d’autre part indiqué que, le 17 février de cette année, le Comité s’est réuni pour entendre un exposé du Groupe d’experts reconstitué sur la Somalie relatif à son programme de travail pour 2023.  À cette occasion, a-t-il indiqué, le Coordonnateur du Groupe a informé le Comité de la poursuite de ses enquêtes sur les sources de financement des Chabab, notamment les opérations portuaires en Somalie susceptibles de générer des revenus pour ce groupe terroriste, ainsi que sur les violations potentielles de l’embargo sur les armes et l’interdiction du charbon de bois. 

Le Coordonnateur du Groupe d’experts a en outre évoqué les efforts du Gouvernement fédéral somalien à l’appui des critères définis dans le rapport du Secrétaire général visant à guider le Conseil dans son examen plus approfondi de l’embargo sur les armes, a ajouté le Président du Comité.  

Ces critères de référence « ne semblent ni mesurables ni réalistes », lui a répondu le représentant de la Somalie, pour qui l’embargo sur les armes, initialement destiné à freiner l’afflux d’armes et à consolider la sécurité, est devenu un « obstacle » entravant les efforts déployés par le Gouvernement fédéral pour contrer la menace évolutive d’« Al-Khawarij » -nom donné aux Chabab par les autorités somaliennes- et pour mettre en œuvre le Plan de transition. 

Pour le représentant, les sanctions devraient cibler ceux qui constituent une menace pour la paix et la sécurité en Somalie tout en soutenant les politiques de sécurité du Gouvernement fédéral.  Il est donc essentiel, selon lui, d’adapter les sanctions à la stratégie du Président somalien, M. Hassan Sheikh Mohamud, qui prévoit de combattre le groupe terroriste par le biais d’un partenariat régional et international, en vue de le vaincre militairement, de le priver de ressources et de contrer son idéologie d’extrémisme violent. 

Pour ce qui est de l’embargo sur le charbon de bois somalien, M. Ishikane a fait savoir que le Comité a récemment reçu deux lettres de la Somalie à ce sujet, l’une concernant le charbon de bois qui se trouvait à bord du navire MV Fox, la seconde portant sur les stocks de charbon de bois existants.  Sur ce dernier point, le représentant de la Somalie a assuré que son gouvernement se conforme aux dispositions de la résolution 2662 (2022), tout en étant conscient qu’une stratégie de réduction des stocks exige de prendre en compte la lutte contre la pauvreté. 

À propos de « l’affaire MV Fox », le représentant a salué la saisie par les autorités d’Oman du charbon de bois somalien présent à bord du navire dans le port de Salalah, mais s’est dit préoccupé par la vente signalée de la cargaison confisquée par les autorités omanaises.  À ses yeux, la distribution du produit de cette revente au Gouvernement somalien « garantirait le retour dudit produit à son propriétaire initial, le peuple somalien », conformément aux objectifs des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

Enfin, après avoir réaffirmé que les sanctions imposées de longue date à la Somalie « ne sont pas propices à l’accès des forces de sécurité somaliennes à l’équipement militaire nécessaire pour mener à bien le mandat de protection de la population et de l’intégrité territoriale du pays », il a assuré que le Gouvernement fédéral somalien assumera l’entière responsabilité de la sécurité de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) d’ici à 2024 et collaborera étroitement avec les membres du Conseil sur la levée totale de l’embargo sur les armes, afin de faciliter la paix pour le pays et pour la région. 

Pour sa part, le Président du Comité a indiqué que, lors de sa prochaine communication au Conseil, il lui fera rapport des statistiques concernant l’embargo sur les armes et les notifications de dérogation sur les engins explosifs improvisés.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: le Représentant spécial annonce créer un groupe de haut niveau rassemblant tous les acteurs libyens pour mettre le pays sur la voie des élections

9270e séance - matin
CS/15212

Libye: le Représentant spécial annonce créer un groupe de haut niveau rassemblant tous les acteurs libyens pour mettre le pays sur la voie des élections

Les Libyens exigent la paix, la stabilité et la prospérité, a rappelé ce matin le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye au Conseil de sécurité, qui examinait la situation dans ce pays au moment du douzième anniversaire de la Révolution de 2011.  M. Abdoulaye Bathily, qui est Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a fait part de ses efforts pour préparer la tenue d’élections en 2023, notamment la mise sur pied d’un groupe de haut niveau rassemblant toutes les parties prenantes libyennes pour élaborer un cadre juridique et une feuille de route limitée dans le temps.  Les membres du Conseil ont presque unanimement salué cette initiative à l’exception de la Fédération de Russie pour qui les tentatives de créer des mécanismes distincts visant à régler le dossier libyen ne seront pas productives. 

En Libye, le processus politique est enlisé, a regretté le Chef de la MANUL dénonçant un processus qui ne répond pas aux aspirations du peuple.  Il a souligné que les Libyens, impatients d’élire leurs dirigeants, remettent en question la volonté et le souhait des acteurs politiques intérimaires actuels de tenir des élections inclusives et transparentes en 2023.  En vue de la sortie de l’impasse actuelle, il a indiqué avoir reçu un grand nombre de propositions orales ou écrites, depuis le 17 décembre 2022, et ce, grâce à des consultations tous azimuts avec les Libyens comme avec les partenaires internationaux et régionaux.

Mais pour l’instant la classe politique libyenne souffre d’une grande crise de la légitimité, a fait remarquer le Représentant spécial en conseillant à celle-ci de convenir d’un socle constitutionnel consensuel pour la tenue des élections présidentielle et législatives, en prévoyant la participation d’un large éventail de parties prenantes.  C’est dans cet esprit qu’il a annoncé sa volonté de mettre sur pied un groupe de haut niveau qui rassemblera des représentants des institutions politiques, de grands acteurs politiques, les chefs tribaux, la société civile, les représentants des femmes et des jeunes, notamment.  Ce groupe abordera par exemple la question de la sécurité des élections et préparera le code de conduite des candidats. 

Ce mécanisme a été soutenu notamment par le Royaume-Uni, qui a suggéré de parvenir à un compromis entre les parties prenantes libyennes en y associant même les fauteurs de troubles potentiels.  Le but est de garantir le respect des résultats des élections, a-t-il expliqué.  La Suisse a également salué ce mécanisme alternatif pour conduire le pays à des élections libres et équitables tout en encourageant les candidatures en grand nombre de femmes. 

Les Émirats arabes unis ont vivement souhaité le succès des efforts du Représentant spécial en espérant des élections parlementaires et présidentielle cette année.  « Aussi rapidement que possible », a renchéri la Chine en appelant à promouvoir des solutions menées par les Libyens.  Il faut éviter toute solution imposée de l’extérieur qui pourrait avoir des conséquences néfastes pour le pays, a insisté la délégation chinoise.  Pour le Mozambique, qui s’exprimait également au nom du Gabon et du Ghana (les A3), les élections ne sont pas une fin en soi, mais elles peuvent être un catalyseur vers une paix et une sécurité durables en Libye. 

Moins pressée, la Fédération de Russie a mis en garde contre toute précipitation dans l’organisation d’élections.  Un scrutin national mal organisé ne serait probablement pas une panacée pour régler tous les problèmes de la Libye, a argué le représentant en craignant même que cela soit contre-productif si l’on fait fi des progrès réalisés précédemment par la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État.  De plus, il n’a pas jugé productif de créer des mécanismes distincts en vue de régler le dossier libyen.  « Nous ne devrions pas nous nourrir d’illusions quant à la valeur ajoutée de ces formats. » 

Si les conditions permettant la tenue sans heurts d’élections parlementaires et présidentielle sont réunies, il sera possible de mettre fin à la période de transition et de ne pas répéter les erreurs du passé, a reconnu le représentant de la Libye estimant que tout nouveau mécanisme doit se concentrer en priorité et exclusivement sur le délai à respecter pour parvenir à une constitution et permettre l’organisation des scrutins d’ici à la fin de l’année.

La situation économique du pays a aussi été abordée, plusieurs membres du Conseil appelant à une gestion transparente et responsable des ressources naturelles du pays.  En effet, a informé le Représentant spécial, les Libyens demandent une distribution équitable des ressources nationales pour laquelle il faut d’urgence créer un mécanisme mené par les Libyens qui rassemble les parties libyennes.  Celles-ci doivent pouvoir ainsi convenir des priorités en termes d’allocation des ressources et veiller à la gestion transparente et équitable des recettes du pétrole et du gaz. 

La discussion sur la réforme du secteur de la sécurité, autre sujet majeur dans le dossier libyen, a mis en avant l’importance du travail de la Commission militaire conjointe 5+5, y compris de la sous-commission technique conjointe pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) entérinée en janvier dernier.  La France a promis d’allouer 100 000 dollars au financement des efforts du Représentant spécial à cet égard.  La France a aussi plaidé pour le retrait de l’ensemble des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires du territoire libyen, en coopération avec les pays voisins de la Libye.  Ce retrait a été demandé par les autres membres du Conseil, comme la Fédération de Russie qui l’a voulu « synchronisé et progressif ».  Le représentant de la Libye a appelé à mettre en place un plan pour reconstruire les institutions militaires et de sécurité de son pays, de façon professionnelle et sans les politiser. 

Les membres du Conseil se sont également montrés favorables à la conférence de réconciliation nationale convoquée par l’Union africaine (UA) et le Conseil présidentiel libyen à Tripoli.  Il s’agit d’un processus inclusif centré sur les victimes et qui fait fond sur les principes de justice transitionnelle.  Les délégués ont encouragé les Libyens à mettre en œuvre, avec le concours de l’UA, les mesures nécessaires pour la tenue d’une telle conférence. 

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

M. ABDOULAIE BATHILY, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a rappelé que la Libye vient de célébrer le douzième anniversaire de la Révolution de 2011 en exprimant sa détermination à façonner un avenir meilleur: les Libyens ont réitéré leurs exigences en faveur de la paix, la stabilité à long terme et la prospérité.  Le processus politique demeure néanmoins enlisé, a noté le Représentant spécial en faisant remarquer que ce processus ne répond pas pleinement aux aspirations du peuple libyen qui entend élire ses propres dirigeants et revitaliser ses institutions politiques.  Il a fait part de l’impatience des Libyens qui remettent en question la volonté et le souhait des acteurs politiques intérimaires actuels de tenir des élections inclusives et transparentes en 2023.  Il a indiqué de son côté avoir poursuivi, depuis le 17 décembre 2022, ses consultations tous azimuts avec les Libyens ainsi qu’avec les partenaires internationaux et régionaux pour identifier les voies et moyens de sortir de l’impasse politique actuelle.  Il a dit avoir reçu un grand nombre de propositions orales ou par écrit quant aux manières d’en sortir. 

À tous ses interlocuteurs, le Chef de la MANUL a demandé avec insistance de ne plus répéter les modalités de transition qui ne font que servir les intérêts des défenseurs du statu quo.  Il leur a demandé de parler d’une même voix, leur rappelant que leurs intérêts respectifs ne pouvaient être assurés que par le biais d’une issue pacifique stable et prospère.  Tous les partenaires régionaux et internationaux conviennent pleinement de la nécessité de tenir des élections inclusives et transparentes en 2023, a rapporté le Représentant spécial.  S’agissant de l’adoption par la Chambre des députés du treizième amendement à la Constitution, il a dit que son adoption devait encore être entériné par le Haut Conseil d’État.  Cet amendement divise la classe politique libyenne et la population au sens large, alors qu’il ne porte pas sur des questions litigieuses fondamentales, a-t-il expliqué. 

Par ailleurs, le Représentant spécial a noté que la classe politique libyenne souffre d’une grande crise de la légitimité, et ce depuis des années.  Pour surmonter cette crise, il a estimé que la classe politique doit convenir d’un socle constitutionnel consensuel pour la tenue des élections présidentielle et législatives, en prévoyant la participation et l’implication d’un large éventail de parties prenantes.  Il a annoncé à cet égard vouloir mettre sur pied un groupe de haut niveau pour la Libye qui rassemblera toutes les parties prenantes libyennes pertinentes y compris des représentants des institutions politiques, de grands acteurs politiques, les chefs tribaux, les organisations de la société civile, des femmes et des jeunes, en vue d’adopter un cadre juridique et une feuille de route limitée dans le temps pour la tenue des élections en 2023.  Ce groupe fournira également une plateforme pour trouver un consensus au sujet de questions connexes telles que la sécurité des élections et l’adoption d’un code de conduite pour tous les candidats. 

S’agissant de la conférence de réconciliation nationale convoquée par l’Union africaine et le Conseil présidentiel libyen à Tripoli, le Chef de la MANUL a insisté sur le fait qu’il s’agit d’un processus inclusif centré sur les victimes et qui fait fond sur les principes de justice transitionnelle.  Il a encouragé les Libyens à mettre en œuvre, avec le concours de l’UA, les mesures nécessaires pour la tenue d’une telle conférence. 

Pour ce qui est du travail de la Commission militaire conjointe 5+5, le cessez-le-feu continue d’être respecté, a informé le Représentant spécial en précisant qu’aucune violation n’a été enregistrée depuis décembre.  Toutefois la situation sécuritaire demeure fragile, a-t-il mis en garde avant de signaler que la Commission militaire conjointe 5+5 a entériné en janvier le mandat du sous-comité technique conjoint pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR).  La Commission a également décidé d’entamer un dialogue avec les représentants des groupes armés afin de discuter des manières de garantir un environnement propice à la tenue des élections.  M. Bathily a aussi indiqué que les comités de liaison avec la Libye, le Soudan et le Niger, avec l’appui des conseillers de la MANUL, ont élaboré et approuvé un mécanisme intégré pour la coordination et l’échange d’informations entre les trois pays de sorte à faciliter le processus de retrait des mercenaires et des combattants étrangers.  Il a ensuite annoncé son prochain déplacement au Tchad afin d’encourager les autorités de ce pays à appuyer plus avant la mise en œuvre du plan d’action pour le retrait des combattants étrangers et des mercenaires. 

Sur le volet économique, le Représentant spécial a déclaré que la gestion des ressources économiques du pays demeure une vive de source préoccupation pour tous les Libyens, dénonçant le fait que les dépenses allouées aux services de base continuent de manquer.  « Ils demandent la reddition de comptes et la satisfaction de leurs aspirations en faveur d’une distribution équitable des ressources. »  Il faut, a conseillé M. Bathily, aborder cette question de manière urgente et créer un mécanisme mené par les Libyens qui rassemble les parties libyennes pour qu’elles puissent convenir des priorités en termes d’allocation des ressources et veiller à ce que les recettes du pétrole et du gaz soient gérées de manière transparente et équitable.  Il a également appelé à la réunification de la Banque centrale afin d’assurer la reddition de comptes et promouvoir la prospérité économique du pays.  Il a annoncé que le groupe de travail économique du Comité international de suivi de Berlin continue de travailler avec les institutions libyennes de sortent à poursuivre la discussion au sujet d’un accord pour un mécanisme temporaire de contrôle des dépenses. 

Le Représentant spécial a enfin dénoncé le rétrécissement de l’espace civique en Libye appelant les autorités libyennes à cesser toute répression à l’encontre de la société civile, à protéger et promouvoir l’espace civique, et à ne pas interférer dans les travaux des organisations de la société civile.  En outre, les femmes libyennes doivent être représentées de manière effective dans tous les processus politiques et processus de réconciliation., a-t-il conseillé.  Il a salué le projet de loi sur la lutte contre la violence à l’encontre des femmes, qui a officiellement été soumis à la Chambre des députés.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a déclaré qu’en vue d’organiser des élections parlementaires et présidentielle, les parties prenantes libyennes doivent faire des compromis et se mettre d’accord sur les conditions des élections.  Les fauteurs de troubles potentiels doivent également être associés à un accord, afin de garantir le respect des résultats des élections, a plaidé la représentante, qui a remercié l’Égypte pour ses efforts visant à soutenir les discussions entre la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État.  Elle a appelé à élargir la négociation politique afin de réaliser des progrès durables vers les élections, et à jeter les bases d’une stabilité à long terme, y compris pour finaliser une constitution, facilitée par le gouvernement élu, et un cycle continu d’élections futures respectant la durée des mandats. 

Pour la déléguée, il est par ailleurs nécessaire de mettre en place des processus économiques et des institutions publiques transparents et responsables, au service de l’ensemble de la population libyenne, par le biais d’une distribution équitable des ressources, de la fourniture de services publics et d’investissements dans ces derniers.  Elle a également indiqué qu’en tant que coprésident du groupe de travail sur la sécurité en Libye, le Royaume-Uni continuera à soutenir les efforts visant à faire travailler ensemble et à unifier à terme les armées libyennes en une seule armée d’État, responsable devant un gouvernement élu et capable de relever tous les défis de la Libye en matière sécuritaire. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que la Suisse avait, en décembre dernier, soutenu le Représentant spécial lors d’un dialogue numérique sur les droits de l’homme avec plus de 300 participants venus de toute la Libye.  Par le passé, nous avons également accueilli plusieurs rencontres organisées par l’ONU sur la Libye et restons à disposition comme pays hôte, a-t-elle assuré.  Plus d’un an après le report des élections, elle a jugé primordial de renouveler la légitimité des institutions libyennes.  À cet égard, elle a salué la présentation du mécanisme alternatif du Représentant spécial pour conduire le pays à des élections libres et équitables.  La représentante a demandé que tout soit fait pour assurer un environnement propice, dans lequel la société libyenne puisse exercer pleinement, et dans toute sa diversité, ses droits politiques et civils, lors des futures élections.  Les candidatures d’un plus grand nombre de femmes à des postes politiques constituent un facteur important, a-t-elle dit.  Elle a d’ailleurs fait part de sa préoccupation devant les actes des violence commis contre les femmes qui participent à la vie publique et aux processus politiques.  Elle s’est aussi dite inquiète face aux restrictions imposées à la société civile, notamment des restrictions bureaucratiques.  Elle a cité en particulier les informations concernant de récentes arrestations en application de la nouvelle loi sur la cybercriminalité.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a insisté sur l’unité du Conseil de sécurité pour sortir de l’impasse politique en Libye.  Le Conseil ne devrait pas permettre aux acteurs politiques de perdre du temps à leur profit, a-t-il indiqué, avant d’encourager les dirigeants politiques libyens à s’accorder rapidement sur des arrangements définitifs et limités dans le temps pour la tenue d’élections dans le pays en 2023.  Il a salué les évolutions positives récentes sur la voie de la sécurité, y compris la reprise des activités de la Commission militaire conjointe 5+5.  Le délégué a également encouragé les Libyens et la communauté internationale à continuer de travailler ensemble pour poursuivre la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu, afin d’apporter la stabilité au pays.  Il a appelé à accorder une attention soutenue au retrait des mercenaires, des forces étrangères et des combattants étrangers, ainsi qu’au désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) et à la réforme du secteur de la sécurité.  Des efforts continus pour unifier les principales institutions de gouvernance en Libye, y compris la Banque centrale, sont également critiques.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé que le Conseil de sécurité reste l’instance appropriée pour discuter des modifications du mandat de la MANUL et fournir des orientations au Représentant spécial sur sa mise en œuvre.  Ce mandat, tel qu’énoncé dans la résolution 2542 (2020), prévoit une médiation entre les parties libyennes et la fourniture à ces dernières des bons offices de la Mission en vue de garantir une transition politique dirigée et prise en charge par les Libyens, a fait valoir le représentant.  Selon lui, la feuille de route proposée par le Représentant spécial devrait contribuer à un environnement où les acteurs libyens, sans ingérence étrangère, peuvent mettre de côté leurs divergences et se diriger vers des élections.  À cet égard, le délégué a salué l’idée du Représentant spécial visant à favoriser un nouveau dialogue entre toutes les parties prenantes libyennes, dans le but de sortir de l’impasse politique entre le Haut Conseil d’État et la Chambre des députés. 

Évoquant ensuite le régime de sanctions appliqué à la Libye, le représentant a exhorté les États Membres à respecter leur obligation d’empêcher la fourniture, la vente ou le transfert direct ou indirect d’armes et de matériel connexe à ce pays.  Les violations répétées de l’embargo sur les armes enhardissent les adversaires politiques en Libye, a-t-il averti, avant de demander aux autorités libyennes de se conformer aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de fournir au Comité des sanctions des informations actualisées et détaillées sur l’organisation de leurs institutions de sécurité.  Il a également appelé à tenir pour responsables les acteurs privés ou publics qui se rendent coupables de violations des droits humains et du droit international humanitaire.  Enfin, après avoir réitéré la nécessité du retrait immédiat de toutes les forces étrangères et mercenaires de Libye, ainsi que des stratégies de désarmement, de démobilisation et de réintégration des milices armées locales, il a jugé que la Commission de consolidation de la paix peut aider à promouvoir en Libye une approche intégrée, stratégique et cohérente de la réforme du secteur de la sécurité et, plus largement, du renforcement des institutions, tout en canalisant le soutien d’autres pays. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a dénoncé les divergences de la classe politique libyenne en demandant à celles-ci de tirer les enseignements du passé, d’ouvrir un nouveau chapitre dans l’histoire du pays et de faire passer les intérêts nationaux avant toute autre considération.  Regrettant le report des élections, il a affirmé que le processus politique actuel ne sert en rien les intérêts nationaux du peuple libyen.  Les parties libyennes devraient se rassembler derrière les efforts du Représentant spécial et permettre un accord qui déboucherait sur l’organisation d’élections parlementaires et présidentielle cette année et sur la création d’un Gouvernement unifié, a-t-il lancé.  Il a plaidé pour une participation réelle et égale des femmes libyennes dans tous les aspects du processus politique, notamment le processus électoral, demandant la protection des femmes et des filles face aux risques de violence.  Il a également jugé fondamental d’impliquer la jeunesse dans le processus politique, arguant qu’elle jouera un rôle capital dans la pérennisation de la paix. 

Le représentant a vivement souhaité le succès des efforts du Chef de la MANUL pour mettre en place un processus permettant de sortir de la période de transition et de garantir une paix pérenne en Libye.  Il a dit que sa délégation appuie l’organisation du forum préparatoire pour la conférence nationale de réconciliation et la mise en œuvre de la stratégie de réconciliation nationale avec la participation de toutes les parties libyennes.  Le délégué a aussi insisté sur l’importance de respecter l’accord de cessez-le-feu afin préserver la stabilité sur tout le territoire libyen, avant de demander des mesures pour unifier les institutions militaires et créer une force militaire conjointe.  Il a réitéré l’importance d’un retrait graduel et équilibré des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires en Libye, appelant en outre à poursuivre la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  S’agissant des mesures adoptées par le Conseil, il a souhaité qu’elles n’entravent pas les efforts déployés par les forces libyennes pour réagir aux menaces qui pèsent sur la sécurité dans le pays, notamment dans le sud.  Il a aussi dit de miser sur la stabilité dans toute la région y compris dans le domaine de l’immigration.  Le représentant a, enfin, demandé aux autorités libyennes d’améliorer la transparence et la gouvernance en matière de dépenses publiques, de garantir une redistribution équitable des ressources, de préserver les institutions vitales et de protéger la richesse du pays et sa population. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a jugé grand temps pour la Libye de tourner la page des jeux politiques à somme nulle, affirmant que l’impasse n’est plus une solution.  Le peuple libyen veut un changement, qui doit commencer par des élections pour rendre leur légitimité aux institutions libyennes, mais il souhaite également le respect des droits humains, la prospérité et la démocratie, a affirmé le représentant.  C’est la raison pour laquelle il est fondamental que le Conseil et la communauté internationale s’expriment à l’unisson avec les 11 interlocuteurs libyens et toutes les parties prenantes en Libye sur le plan sécuritaire, a-t-il estimé.  Le délégué s’est ensuite félicité de la reprise des réunions de la Commission militaire conjointe 5+5, avec la participation des pays de la région, avant de réitérer son appui à l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020.  Il a indiqué qu’il demeure toutefois profondément préoccupé par les atteintes aux droits humains et le rétrécissement qui se poursuit de l’espace civique.  Il a aussi déploré que la Mission indépendante d’établissement des faits chargée d’enquêter sur les violations des droits de l’homme en Libye n’ait pas accès à tous les acteurs et à tous les éléments qu’elles souhaitent consulter dans le pays.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a exhorté les différents segments de la société libyenne à s’engager dans des pourparlers de bonne foi, et d’œuvrer à l’établissement de la constitution du pays et d’un cadre électoral nécessaire à la tenue rapide d’élections.  Il a salué les efforts du Représentant spécial, tout en précisant qu’il ne peut réussir sa mission si les acteurs politiques libyens ne placent pas les intérêts des Libyens au-dessus de toute autre considération.  Les élections ne sont pas une fin en soi, mais elles peuvent être un catalyseur vers une paix et une sécurité durables en Libye, a-t-il estimé. 

Le représentant a invité les intérêts étrangers en Libye à considérer d’abord les intérêts des Libyens en arrêtant leur soutien aux diverses factions dans ce conflit.  La Libye est un pays africain, et les populations du continent sont les plus affectées par son instabilité, a-t-il rappelé, jugeant légitime pour l’Union africaine de s’engager pleinement à toutes les étapes de la résolution de la crise libyenne, y compris en ce qui concerne la réconciliation, l’organisation du scrutin électoral et le processus politique.  Il a salué la tenue récente de réunions de la Commission militaire conjointe 5+5, avant de condamner la présence de forces étrangères sur le sol libyen.  Leur départ, a-t-il souligné, est essentiel pour un environnement favorable et propice à l’avancement du processus politique en cours, conduisant à la tenue d’élections en 2023. 

Notant que le processus de paix en Libye est inextricablement lié à la stabilité de la région, le représentant des A3 a estimé que des consultations avec les États voisins et la région sont indispensables.  De même, le soutien international devrait être étendu à la coopération transfrontalière dans la lutte contre le trafic d’armes, le terrorisme, la contrebande et la traite des personnes, entre autres.  Après avoir dénoncé les violations continues de l’embargo sur les armes, le représentant a noté que la situation humanitaire en Libye est un sujet de préoccupation profonde.  Il a exhorté à ce que tous les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile soient traités avec dignité partout dans le pays, en particulier au large des côtes libyennes.  Il a également demandé des enquêtes approfondies sur les mauvais traitements de ces migrants et réfugiés, et que les responsables de ces traitements inhumains soient identifiés, jugés et condamnés.  Au sujet des mesures concernant les avoirs gelés de la Libye, le délégué a appelé à prendre des mesures en consultations avec les autorités libyennes afin de veiller à leur préservation, en vue de leur restitution au peuple libyen.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a regretté que plus d’un an se soit écoulé depuis le report de la tenue des élections présidentielle et législatives en Libye.  Il a cependant salué la reprise, le 5 janvier, des pourparlers entre les Présidents de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État, imputant ce rapprochement au travail accompli par le Représentant spécial depuis sa nomination.  Il est prioritaire que les parties s’accordent, dans les meilleurs délais, sur les bases constitutionnelles de la tenue d’élections nationales, transparentes et inclusives, a-t-il plaidé, avant s’étendre sur les conditions de sécurité.  Réaffirmant le soutien de son pays aux travaux de la Commission militaire conjointe 5+5, notamment en ce qui concerne le maintien de l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020, le représentant a estimé que l’élimination de la présence militaire étrangère en Libye doit être une priorité.  Il a salué à ce propos la mise en place d’un mécanisme intégré de coordination et de partage de données par la Commission militaire conjointe 5+5 et les comités de liaison de la Libye, du Soudan et du Niger, en vue de faciliter le retrait complet des mercenaires et des combattants étrangers du pays. 

Après s’être alarmé de la détérioration de l’espace civique en Libye, le délégué s’est également déclaré préoccupé par la situation humanitaire et des droits humains des migrants et des réfugiés dans ce pays.  Exhortant les autorités libyennes à démanteler les réseaux criminels et de traite des êtres humains, il a jugé impératif de veiller à ce que les auteurs de violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme soient traduits en justice.  Il a par ailleurs regretté que l’accord entre l’ONU et le Ministère libyen de la femme, qui prévoyait la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), ait été dissous et a appelé au renforcement de la participation des femmes dans le domaine politique et le processus de paix.  En matière judiciaire, il a salué l’élaboration d’une loi sur la justice transitionnelle et la réconciliation nationale, avant d’appeler le Gouvernement libyen à se conformer à son obligation de coopérer avec la Cour pénale internationale et le Bureau du Procureur.  Cette coopération, a-t-il insisté, est essentielle pour permettre que soient jugés les responsables de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis sur le territoire libyen depuis février 2011. 

M. DAI BING (Chine) a exhorté les parties libyennes à appuyer l’élan imprimé en vue de créer un environnement politique propice à la reconstruction et au développement.  La priorité absolue est selon lui de trouver rapidement un accord sur les questions qui créent des divergences et faire en sorte que les élections puissent avoir lieu aussi rapidement que possible.  Le représentant a souligné l’importance de promouvoir des solutions menées et dirigées par les Libyens, qui devraient être appuyées par le Conseil de sécurité.  Promouvoir un règlement politique en Libye, c’est préserver sa souveraineté et son intégrité territoriale, a plaidé le délégué invitant à prendre en compte les préoccupations de toutes les parties.  Qui plus est, il faut éviter toute solution imposée de l’extérieur qui pourrait avoir des conséquences néfastes pour le pays, a prévenu le représentant. 

Le délégué a en outre appelé à soutenir le processus de réconciliation nationale en Libye et la décision de l’Union africaine d’appuyer ce processus.  Cela permettra d’imprimer un nouvel élan pour la transition, la stabilité, la reconstruction et le développement du pays, a-t-il ajouté.  L’Union africaine doit jouer un rôle plus appuyé sur ce dossier, a encore insisté le représentant de la Chine qui a demandé que les armes se taisent en Libye.  Toutes les parties devraient continuer de travailler au sein de la Commission militaire conjointe 5+5 afin de régler tout différend et éviter tout acte qui pourrait nourrir l’escalade.

M. ROBERT A.  WOOD (États-Unis) a déclaré que la seule voie pérenne pour la Libye est de permettre à son peuple de choisir ses propres dirigeants lors d’élections nationales.  Il a remercié le Gouvernement égyptien de ses efforts en faveur de la tenue d’élections présidentielle et législatives dans ce pays.  Pour le représentant, il faut faire fond sur ces réalisations et poursuivre les efforts facilités par l’ONU visant à galvaniser un vaste consensus et garantir la tenue d’élections couronnées de succès en Libye.  De leur côté, les dirigeants libyens doivent faire montre de la volonté nécessaire pour la tenue de ces scrutins, a-t-il lancé.  Les États-Unis, quant à eux, continueront d’appuyer le travail impartial de la Haute Commission électorale, a dit le représentant, qui s’est félicité de l’assistance technique apportée par la MANUL à cet organe. 

Le délégué a aussi souhaité que les progrès dans le domaine politique s’accompagnent d’avancées dans les domaines sécuritaire et économique.  L’élaboration d’un mécanisme de gestion des recettes serait susceptible de soutenir ces progrès, de même que la réunification de la Banque centrale libyenne, a-t-il fait valoir, arguant que cela permettrait au peuple libyen de voir comment les richesses du pays sont redistribuées.  Enfin, après avoir demandé aux combattants étrangers et aux mercenaires de quitter le territoire libyen, le représentant a déploré le sort réservé aux migrants en Libye et le traitement inhumain qui leur est réservé dans des centres illégaux de détention. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a estimé que la Libye et son peuple méritent mieux que l’insoutenable impasse à laquelle leur classe politique les condamne.  Les Libyens méritent mieux qu’un pays où forces étrangères, mercenaires et milices enracinent leur présence et resserrent leur emprise au mépris de la souveraineté, de l’intégrité, de la stabilité et de l’unité libyennes, a—t-elle ajouté.  Douze ans après la révolution de février 2011, ils méritent mieux qu’une société où l’espace démocratique et les libertés fondamentales sont menacés, s’est impatientée la déléguée qui a rappelé le besoin de redistribution équitable et transparente des revenus du pétrole au profit de toutes les régions libyennes.  Elle a de ce fait appelé à la relance du processus électoral, expliquant qu’un gouvernement libyen unifié est nécessaire pour organiser ces élections sur l’ensemble du territoire, contrôler ses frontières et y gouverner partout et pour tous.  Elle a insisté sur l’importance de garantir l’égalité des chances entre les candidats. 

La représentante a appelé à soutenir la Commission militaire conjointe 5+5, rassemblant acteurs sécuritaires de l’est et de l’ouest, notamment en faveur d’une armée libyenne unifiée et du processus de démantèlement et de réintégration des milices.  C’est pourquoi la France a décidé d’allouer 100 000 dollars au financement des efforts que mène le Représentant spécial en appui des travaux de la Commission.  Enfin, a-t-elle déclaré, la France continuera également à exiger le respect de l’embargo sur les armes et le retrait de l’ensemble des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires du territoire libyen, en coopération avec les pays voisins de la Libye.

M. DMITRY A.  POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté l’échec des initiatives visant à rétablir pleinement l’État libyen, le report des élections et l’expiration de la feuille de route du Forum de dialogue politique interlibyen.  Exprimant son soutien de principe aux efforts du Représentant spécial, le délégué a mis en garde contre toute précipitation dans l’organisation des élections.  Un scrutin national mal organisé ne serait probablement pas une panacée pour tous les problèmes de la Libye, selon lui, ce serait même contre-productif de faire fi des progrès réalisés précédemment par la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État.  Il a dit soutenir les efforts en cours de réconciliation nationale de l’Union africaine.  Pour avancer sur la voie de la paix, a poursuivi le représentant, il faudra des efforts coordonnés de la part de tous les acteurs régionaux et internationaux impliqués compte tenu notamment du fait que le schisme au sein de la Libye maintient l’impasse actuelle.  Manipuler les parties libyennes et influencer de manière unilatérale la situation sur le terrain ne contribueront pas à la recherche d’une solution politique et ne feront qu’exacerber le schisme dans le pays, a prévenu le représentant russe. 

Pour lui, les tentatives de créer des mécanismes distincts visant à régler le dossier libyen ne seront pas productives.  « Nous ne devrions pas nous nourrir d’illusions quant à la valeur ajoutée de ces formats. »  Le représentant a mis en garde que le règlement politique n’est que le prélude d’un travail difficile qui attend les Libyens.  Il a dénoncé l’hypocrisie de certains pays occidentaux qui ne défendent que leurs propres intérêts géopolitiques et commerciaux.  Washington demeure profondément impliqué dans le dossier libyen, a constaté le représentant, se disant étonné des nombreuses déclarations publiques et des visites dans le pays de hauts dignitaires américains.  Leur objectif réel est selon lui de maintenir le statu quo en faisant de la Libye un exportateur stable de pétrole sur les marchés internationaux.  Le délégué a fait appel à la sagesse du peuple libyen pour qu’il ne tombe dans ce piège.  La Russie, a-t-il dit en concluant son intervention, est favorable à un retrait synchronisé et progressif de tous les groupes armés et des contingents militaires non libyens, sans exception.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est déclarée inquiète de « l’impasse politique stagnante » en Libye ainsi que de la polarisation du pays.  Elle a toutefois salué les consultations menées par le Représentant spécial avec un large éventail d’acteurs libyens et a noté avec satisfaction qu’il existe parmi ces derniers une convergence croissante d’opinions favorables à la tenue d’élections cette année.  Réaffirmant que le peuple libyen a le droit de choisir ses propres dirigeants par le biais d’élections libres, équitables et inclusives, elle a appelé toutes les parties à dialoguer avec le Représentant spécial de manière constructive et de bonne foi afin de surmonter leurs divisions politiques et institutionnelles.  Par ailleurs, tout en relevant le rôle crucial que joue la Commission militaire conjointe 5+5 pour maintenir le cessez-le-feu, la représentante a exhorté les acteurs libyens à s’abstenir de toute escalade et à donner la priorité à la protection des civils.  Elle a également jugé que le retrait des combattants étrangers et des mercenaires du territoire libyen devrait être une priorité dans tout processus politique, se félicitant à cet égard de la mise en place d’un mécanisme de coordination conjoint entre la Libye, le Soudan et le Niger.  Il s’agit, selon elle, d’une étape supplémentaire importante vers la stabilité et la promotion d’un climat favorable au processus politique.  Pour l’appuyer, a-t-elle indiqué, il convient d’appliquer pleinement l’embargo sur les armes, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

M. TAHER M. T.  ELSONNI (Libye) a commencé par blâmer les interventions négatives pratiquées par certains pays dans le sien, les accusant d’avoir exploité les rêves de changement de son peuple.  Il a plaidé pour une approche plus positive, se félicitant des tentatives, engagées aux niveaux régional et international, pour trouver des solutions, de la part de parties qui étaient autrefois des adversaires.  Le représentant a également salué les initiatives qui visent à permettre à la Libye de s’engager sur la voie de la démocratie et de tenir des élections le plus rapidement possible.  Si les conditions permettant la tenue sans heurts d’élections parlementaires et présidentielle sont réunies, il sera possible selon lui de mettre fin à la période de transition et de ne pas répéter les erreurs du passé.  L’heure étant venue de changer de cap, tout nouveau mécanisme doit donc se concentrer en priorité et exclusivement sur le délai à respecter pour parvenir à une constitution et permettre l’organisation des scrutins d’ici à la fin de l’année, a insisté le représentant. 

Il a ensuite appelé tout un chacun à prêter un appui à la Commission militaire conjointe 5+5, qui est à pied d’œuvre pour réunifier l’armée, avant de rejeter la présence de forces étrangères sur le territoire libyen.  Il faut donc mettre en place un plan pour reconstruire les institutions militaires et de sécurité, de façon professionnelle et sans les politiser, a-t-il dit.  Le délégué a ensuite demandé que soit révisé le régime de sanctions, vieux de 12 ans, demandant en particulier que soient dégelés les avoirs dont la Libye a besoin.  Il a constaté que certains acteurs souhaitent faire main basse sur les richesses libyennes.  Enfin, le délégué a demandé de radier de la liste des sanctions certains individus qui y figurent pour des raisons injustifiées ou pour des raisons qui ont perdu leur pertinence au fil des années.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence biodiversité marine: la Présidente promet un nouveau texte consolidé reflétant le « dur labeur » de la semaine écoulée

Reprise de la cinquième session,
64e séance plénière – matin
MER/2170

Conférence biodiversité marine: la Présidente promet un nouveau texte consolidé reflétant le « dur labeur » de la semaine écoulée

La Présidente de la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, plus connue sous l’acronyme anglais « BBNJ », a promis, ce matin, qu’une version consolidée du nouvel avant-projet d’accord actualisé, sur la base duquel travaillent les délégations, sera présentée ce samedi.

Cette version sera le reflet du « dur labeur » accompli cette semaine et on y verra les changements apportés au cours des négociations, a indiqué Mme Rena Lee, de Singapour, en exhortant les délégations à faire montre d’un esprit de compromis.  La Conférence a ensuite fait le point sur les travaux qui se sont tenus hier lors de consultations informelles. 

La déléguée du Belize a fait un rapport oral du travail du petit groupe sur les ressources génétiques marines (Partie II du futur accord), en signalant que les discussions ont abordé des questions telles que les principes juridiques, les informations de séquençage numérique et l’utilisation des termes.

Son homologue du Canada a, elle, abordé le sujet du chapitre des outils de gestion par zone, qui comprennent les aires marines protégées, thème de la partie III du texte soumis à la discussion.  La représentante a fait mention des « préoccupations conceptuelles » de certaines délégations au sujet des paragraphes 2 et 3 de l’article 19 relatif à la prise de décisions.  Le paragraphe 2 prévoit que la Conférence des Parties peut reconnaître des outils de gestion par zone mis en place par des organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux ou sectoriels pertinents. 

Des délégations ont questionné la pertinence de leur inclusion dans le futur accord, tandis que d’autres étaient en faveur, a poursuivi la représentante canadienne.  Elle a aussi souligné les divergences de vues qui entourent la définition des aires marines protégées contenue dans l’article premier et la référence faite à l’expression « à long terme de la biodiversité ».  Il s’agit, selon le texte à l’examen, d’aires marines géographiquement définies, désignées et gérées en vue d’atteindre des objectifs spécifiques de conservation [à long terme de la biodiversité] et dans lesquelles, selon qu’il convient, l’utilisation durable peut être autorisée pourvu qu’elle soit compatible avec de tels objectifs.

Le délégué des Pays-Bas a ensuite fait un résumé des dernières consultations informelles qui se sont tenues sur les études d’impact sur l’environnement (Partie IV).  Nous n’avons pas encore réglé la question de savoir si l’Organe scientifique et technique élaborera des normes et lignes directrices ou seulement des lignes directrices, a-t-il dit, en évoquant l’article 41.  « Plusieurs autres questions doivent encore être réglées. »  L’Organe scientifique et technique qu’il est prévu de créer à l’article 49 devrait fournir des avis scientifiques et techniques à la Conférence des Parties et s’acquitter d’autres fonctions, comme le recueil d’informations sur les meilleures pratiques.

La représentante d’El Salvador s’est montrée plus optimiste s’agissant du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines (Partie V), en soulignant « les résultats positifs » obtenus, notamment pour l’article 44 relatif aux modalités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines.  Cet article prévoit que ce renforcement se fasse de manière transparente, efficace et itérative également participative, transversale et tenant compte du genre.  La déléguée a une nouvelle fois loué « l’esprit constructif » des discussions.

Pour ce qui est des questions transversales, le délégué de la Jamaïque a insisté sur les fortes oppositions que suscite l’inclusion du principe de « patrimoine commun de l’humanité » dans l’article 5 relatif aux approches et principes généraux.  Il a en revanche fait état d’un soutien global des délégations au libellé du paragraphe 3 de l’article 6, aux termes duquel les parties devraient favoriser la coopération internationale en matière de recherche scientifique marine et le développement et le transfert de techniques marines dans le respect de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et à l’appui du futur accord.

Enfin, le délégué de Cuba a, au nom du Groupe des 77 et la Chine, pris la parole pour dire son impatience de découvrir la nouvelle mouture du texte promise par la Présidente.  À l’instar de la Fédération de Russie il y a quelques jours, il s’est dit préoccupé par les modifications apportées au sein des petits groupes, toutes les délégations n’étant pas informées.  Les délégations ne doivent pas perdre confiance dans le processus de négociation, a-t-il averti.

La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu lundi 27 février, à 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte trois résolutions sur la santé mondiale et la pérennisation de la paix, et achève son examen du rapport de l’OIAC

Soixante-dix-septième session
60e séance plénière – après-midi
AG/12493

L’Assemblée générale adopte trois résolutions sur la santé mondiale et la pérennisation de la paix, et achève son examen du rapport de l’OIAC

L’Assemblée générale a adopté, cet après-midi, trois résolutions, dont deux portant sur l’organisation de réunions de haut niveau: celle sur la prévention et la riposte face aux pandémies et celle sur la lutte contre la tuberculose, prévues respectivement les 20 et 22 septembre.  Un autre texte portait sur le rôle du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale.  En début de séance, les délégations ont poursuivi leurs explications de vote suite à l’adoption de la résolution sur la coopération entre l’ONU et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), lundi.

L’Assemblée général a ainsi adopté le texte intitulé « Portée, modalités, format et organisation de la réunion de haut niveau sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies », tel qu’amendé par consensus, après avoir rejeté, par 40 voix pour, 85 contre et 9 abstentions (Angola, Australie, Canada, Ghana, Liechtenstein, Madagascar, Nouvelle–Zélande, République de Corée et Suisse), un projet d’amendement présenté par les États-Unis et visant à supprimer le onzième alinéa du préambule. 

Cet alinéa, qui rappelle la décision SSA2(5) du 1er décembre 2021 de l’Assemblée mondiale de la Santé sur la création d’un organe intergouvernemental de négociation en vue de rédiger un instrument de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies, a été adopté par 86 voix pour, 41 contre et 8 abstentions (Angola, Australie, Canada, Liechtenstein, Madagascar, Nouvelle–Zélande, République de Corée et Suisse), au terme d’une mise aux voix demandée par la Suède.  Au nom de l’Union européenne, sa représentante a expliqué que cet alinéa constitue un précédent « négatif » dans un texte consacré à des modalités d’organisation d’une réunion. 

Si Cuba a exprimé son attachement aux efforts des Nations Unies en vue de satisfaire les besoins sanitaires des États Membres, son délégué a estimé, comme l’Inde ou encore la Malaisie, que la pandémie de COVID-19 a démontré une nouvelle fois l’injustice du système international actuel, alors que les pays en développement continuent de souffrir de manière disproportionnée des retombées socioéconomiques de la pandémie. 

Il s’agit pourtant, a renchéri le Mexique, d’une mention factuelle de l’OMS visant à combler les lacunes qui subsistent en matière de prévention, de préparation et de riposte lors d’urgences sanitaires.  Pour le Brésil, supprimer cet alinéa reviendrait à enlever la raison même de la convocation de la réunion. 

Par ce texte, l’Assemblée générale décide par ailleurs que la réunion de haut niveau d’une journée sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies, convoquée en collaboration avec l’OMS, se tiendra le 20 septembre 2023 au Siège de l’Organisation, à New York.  Cette rencontre aura pour objectif d’insuffler un nouvel élan politique, notamment au moyen de l’intégration d’une approche multisectorielle de la prévention, de la préparation et de la riposte aux pandémies. 

La résolution intitulée « Portée, modalités, forme et organisation de la réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose », présentée par le Président de l’Assemblée générale, a été adoptée à l’unanimité par les États Membres.  Par ce texte, l’Assemblée décide que la réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose se tiendra le 22 septembre 2023 à New York sur le thème « Faire progresser la science, les finances et l’innovation, et tirer parti de leurs bienfaits pour mettre fin d’urgence à l’épidémie mondiale de tuberculose, en particulier en assurant un accès équitable à la prévention, au dépistage, aux traitements et aux soins ». 

En adoptant la résolution consacrée au rôle du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale, dont le quinzième anniversaire a été célébré en décembre dernier, l’Assemblée générale encourage celui-ci à continuer d’entretenir le dialogue sur les questions relevant de la diplomatie préventive avec les gouvernements de la région ainsi que des liens avec les organisations régionales concernées, afin de faciliter la coordination et l’échange d’informations en tenant dûment compte des mandats de chacune.  Elle se félicite également du concours que le Centre apporte à la mise en œuvre des initiatives des pays d’Asie centrale en faveur d’une région stable, pacifique et prospère.

En début de séance, les délégations ont poursuivi leurs explications de vote suite à l’adoption, le 20 février dernier, de la résolution portant sur la coopération entre l’ONU et l’OIAC, par laquelle l’Assemblée générale prend note « avec une vive préoccupation » du dernier rapport de l’Équipe d’enquête et d’identification de l’ Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) sur l’emploi d’armes chimiques en Syrie, publié en 2020. 

Comme l’Indonésie, le Brésil a déploré la présentation de deux projets de résolution sur le même sujet ainsi que la tendance à proposer des versions alternatives aux textes négociés, avec pour effet de saper la possibilité de parvenir à un consensus.  Sri Lanka a condamné pour sa part le recours à des armes chimiques, quels qu’en soient les circonstances ou les utilisateurs, jugeant intolérable que l’OIAC soit utilisée à des fins politiques.

La prochaine séance plénière de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

DÉCISION SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET LES PROJETS D’AMENDEMENT

Consolidation et pérennisation de la paix

Adoption du projet de résolution (A/77/L.53)

La résolution intitulée « Rôle du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale » a été adoptée par consensus, après sa présentation par la déléguée du Turkménistan.

Le Président a indiqué qu’un débat sur cette question sera organisé ultérieurement.

Coopération entre l’organisation des nations unies et l’organisation pour l’interdiction des armes chimiques

Projets de résolution (A/77/L.48A/77/L.49/Rev.1)

Suite des explications de vote après le vote

Après l’adoption lundi 20 février de la résolution A/77/L.49/Rev.1, l'Assemblée générale a entendu les dernières explications de vote après le vote.

Le représentant de Sri Lanka a insisté sur l’importance de la coopération entre l’ONU et l’OIAC, qui est, selon lui, à un tournant.  Nous ne pouvons plus nous permettre une escalade des hostilités, qu’elle qu’en soit la cause, a-t-il mis en garde.  « La nature tire la sonnette d’alarme mais nous faisons fi de ces alertes », s’est désolé le représentant.  Il a condamné sans équivoque l’utilisation d’armes chimiques quels qu’en soient les circonstances ou les utilisateurs.  Nous ne pouvons tolérer l’utilisation de l’OIAC en tant qu’outil politique ou vecteur pour atteindre des objectifs politiques, a-t-il encore décrié.  Il a rappelé que l’OIAC accompagne en outre les États Membres en vue d’évaluer les mesures de sûreté et de sécurité, l’atténuation des risques et la gestion des produits chimiques. 

Le représentant du Brésil a déploré la situation engendrée par la présentation de deux projets de résolution sur le même sujet et la tendance à proposer des versions alternatives aux textes négociés, ce qui sape la possibilité de parvenir à un consensus.  Il a recommandé de rechercher avant tout le consensus, notamment lors dans les relations avec l’OIAC.  Le délégué a invité les États Membres à s’engager en faveur du principe central de la retenue, qui seul permet une pleine coopération en vertu du principe de l’égalité souveraine des États.  

Le délégué de Cuba a dit qu’il n’a pas appuyé ce texte qui, à son avis, divise les Membres.  Les divergences doivent être traitées au sein de l’OIAC et ne doivent pas faire l’objet d’une résolution, a tranché le délégué.

La déléguée de l’Indonésie a dit avoir voté en faveur du texte, qui insiste sur une coopération étroite entre l’ONU et l’OIAC.  Elle a appelé au consensus, en évitant d’aborder des sujets qui divisent.  Mon pays s’est abstenu lors du vote de certains paragraphes, a-t-elle dit.  Elle a fustigé « l’égoïsme » de certains pays en dénonçant la présentation de deux projets qui nous éloignent du consensus.  Les efforts pour rapprocher les deux textes se sont réduits au minimum, a constaté la déléguée.

La représentante de la Colombie s’est dite attachée à la Convention sur les armes chimiques, en ajoutant que le désarmement et la non-prolifération d’armes de destruction massive sont des principes fondamentaux pour son pays.  Elle a appelé à la destruction totale de telles armes et de leurs vecteurs.  La déléguée a demandé de redoubler d’efforts afin de renforcer le dialogue entre les États Membres et le règlement négocié de tous les différends, selon les valeurs et principes de l’ONU.

Santé mondiale et politique étrangère

Présentation et adoption de la résolution A/77/L.51

L’Assemblée générale a adopté par consensus la résolution intitulée « Portée, modalités, forme et organisation de la réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose ». Ce texte fixe les modalités de la réunion qui se tiendra à New York le 22 septembre 2023 pendant le débat général de sa soixante-dix-huitième session.

Présentation et adoption de la résolution A/77/L.54

Présentation des projets d’amendements A/77/L.55 et A/77/L.56

La représentante des États-Unis a dit être déçue de devoir se porter coauteur d’amendements pour renforcer un paragraphe et souligner le rôle central de l’Organisation mondiale de la Santé.  La promotion des droits humains est essentielle pour renforcer la préparation aux pandémies, a-t-elle fait remarquer en appelant les délégations à appuyer l’amendement L.55.

La représentante de la Suède, parlant au nom de l’Union européenne, a expliqué proposer, par l’amendement L.56, de supprimer le onzième alinéa du préambule du projet de résolution.  Cet alinéa rappelle un paragraphe d’une décision de l’Organisation mondiale de la Santé, qui reprend une formule précise, « l’accès sans entrave » à des contre-mesures en cas de situations d’urgence sanitaire.  L’accès humanitaire sans entrave est un concept que l’on connaît, mais dans le cas présent, un accès sans entrave n’a pas été défini, a relevé la déléguée en mettant en garde contre les abus.  Elle a ainsi expliqué ne pas pouvoir appuyer le maintien de ce paragraphe.  Cet alinéa constitue à son avis un précédent négatif dans un texte consacré à des modalités d’organisation d’une réunion.  L’Union européenne a toujours été transparente sur ce sujet, a-t-elle dit, en demandant une nouvelle fois cette suppression.

Adoption de l’amendement L.55

L’amendement L.55 a été adopté par consensus. Il prévoit d’insérer au quatorzième alinéa du préambule « et des obligations mises à la charge des États par le droit international des droits de l’homme » après « dans le respect de la Charte des Nations Unies ».

Déclarations avant l’examen de l’amendement L.56

Le représentant de Cuba a déclaré que l’accès à des services de santé de qualité est une priorité de son pays.  Il a exprimé son attachement aux efforts des Nations Unies en vue de satisfaire les besoins sanitaires des États Membres, estimant que la réunion de haut niveau contribuera à la réalisation de cet objectif.  Toutefois, a-t-il noté, la COVID-19 a démontré une nouvelle fois l’injustice du système international actuel alors que les pays en développement continuent de pâtir de manière disproportionnée des retombées socioéconomiques de la pandémie.

Le délégué de l’Inde a souligné la riposte discriminatoire qui a été faite à la pandémie, notamment en ce qui concerne l’accès aux vaccins.  Il est crucial de dépasser les divergences et d’instaurer l’égalité en matière sanitaire, a dit le délégué, en rejetant la suppression de l’alinéa 11 du préambule.

Le délégué du Venezuela a souligné la pertinence de l’alinéa 11 du préambule et rejeté tout amendement visant à sa suppression.

Le représentant du Brésil a déploré la proposition visant à supprimer l’alinéa 11 de la résolution L.54, qui a fait l’objet d’un consensus lors des négociations.  Cet alinéa fait état des difficultés rencontrées par les États Membres lors de la pandémie de COVID-19, a-t-il souligné.  Il a estimé que sa suppression reviendrait à supprimer la raison même de la convocation de la réunion de haut niveau sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies. 

Le représentant du Mexique a déploré qu’un groupe de pays juge inacceptable une mention factuelle de l’Organisation mondiale de la Santé.  La décision mentionnée à l’alinéa 11 reconnaît la nécessité de faire face aux lacunes qui subsistent en matière de prévention, de préparation et de riposte lors d’urgences sanitaires, notamment la mise au point et la distribution de vaccins, a-t-il expliqué. 

Le délégué de la Malaisie a appelé à renforcer les capacités de riposte et de prévention face aux pandémies.  Le projet de résolution est équilibré, a-t-il estimé, avant de dire sa perplexité devant les amendements présentés.  Il a rejeté la proposition de supprimer l’alinéa 11 du préambule, une idée qui bafoue les priorités du monde en développement selon lui.

Le délégué de la Chine a souligné que le projet de texte est le fruit du consensus, en dénonçant la présentation d’amendement qui vise à imposer des vues à autrui.  Il a donc appelé tous les pays à appuyer le texte dans son ensemble.

Le représentant de l’Afrique du Sud a appelé à faire montre de volonté politique au niveau international et à plus de financement afin d’assurer la préparation et la riposte aux pandémies.  Selon lui, la pandémie a vu les pays recourir au protectionnisme plutôt qu’à la solidarité.  Nous n’avons pas tiré les enseignements sur cette question, a-t-il regretté, notant que l’on débat de l’opportunité de reprendre le libellé de l’Organisation mondiale de la Santé, un texte pourtant consensuel. 

Rejet de l’amendement L.56 par vote

L’Assemblée a voté sur l’amendement L.56 qui proposait de supprimer le onzième alinéa du préambule de la résolution. Elle l’a rejeté par 40 voix pour, 85 contre et 9 abstentions (Angola, Australie, Canada, Ghana, Liechtenstein, Madagascar, Nouvelle–Zélande, République de Corée et Suisse).

Vote sur le maintien de l’alinéa 11 du préambule du projet de résolution A/77/L.54

La représentante de la Suède, parlant au nom de l’Union européenne, a expliqué qu’étant donné que le projet d’amendement proposé par l’Union européenne a été rejeté, elle demande que le maintien de l’alinéa 11 du préambule existant soit mis aux voix.

L’alinéa a été adopté par 86 voix pour, 41 contre et 8 abstentions (Angola, Australie, Canada, Liechtenstein, Madagascar, Nouvelle–Zélande, République de Corée et Suisse).

Après ce vote, la résolution intitulée « Portée, modalités, format et organisation de la réunion de haut niveau sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies » (A/77/L.54) a été adoptée par consensus.

Déclarations après l’adoption de la résolution

Le Japon a insisté sur l’importance de traiter des questions relatives aux pandémies dans le cadre de la couverture sanitaire universelle.  En effet, a-t-il dit, la pandémie de COVID-19 nous a rappelé l’importance de traiter des questions de santé de manière globale et non pas de manière fragmentée.  Il ne fait aucun doute qu’en cas d’une pandémie causée par de nouveaux virus, nous devons pouvoir compter sur des produits de qualité, a ajouté le Japon.

Le Mexique, qui a souscrit au texte, a regretté la mise aux voix de l’alinéa 11.  Même si nous déplorons certains éléments de la résolution, nous continuera à œuvrer pour changer la donne, a-t-il promis.

Également au nom de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, le Canada s’est dit préoccupé par des expressions telles que « accès sans entraves », dans l’alinéa 11 de la résolution.  Il aurait fallu, a-t-il estimé, se limiter aux questions d’organisation et éviter les questions de fond.  Nous devons garantir l’intégration de nos efforts face aux pandémies, a-t-il conclu, en appelant à la transparence.

La Suisse a souligné l’importance de la coopération multilatérale et d’un engagement continu afin de prévenir de futures urgences sanitaires mondiales, telles que la pandémie de COVID-19.  Elle a plaidé pour une OMS « forte et cohérente », tout en considérant que l’alinéa 11 de la résolution n’est pas nécessaire dans le cadre d’une résolution qui porte sur l’organisation d’une réunion de haut niveau. 

La Fédération de Russie a dit avoir voté en faveur de la résolution.  Toutefois, a-t-elle prévenu, cela ne signifie toutefois pas que nous appuyons l’ajout de libellés sur le fond.  Regrettant l’amendement sur les droits humains présenté par un groupe de pays, elle a estimé que ces questions doivent être discutées pendant les négociations sur la future déclaration politique de la réunion de haut niveau.  La Fédération de Russie s’est par ailleurs déclarée troublée par le paragraphe 10 du dispositif sur l’approbation par l’Assemblée générale d’une liste d’ONG.  Il aurait été préférable, s’est-elle expliquée, de se concentrer sur les compétences et de sélectionner de manière consensuelle ces organisations.  Malgré les propositions dans ce sens, les coordonnateurs du projet ont renoncé à cette solution équilibrée, a-t-elle déploré.  Elle a aussi attiré l’attention sur l’alinéa 8 du préambule, qui mentionne un rapport résultant de l’« avis personnel » des experts du Groupe indépendant de haut niveau du G20 sur le financement des biens publics mondiaux, un concept qui ne fait l’objet d’aucun consensus au sein de l’ONU. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Devant le Conseil de sécurité, le Secrétaire général demande qu’on « donne une bonne fois pour toutes une chance à la paix » en Ukraine

9269e séance – matin & après-midi
CS/15211

Devant le Conseil de sécurité, le Secrétaire général demande qu’on « donne une bonne fois pour toutes une chance à la paix » en Ukraine

Le Conseil de sécurité a marqué, ce matin, l’anniversaire de l’invasion russe de l’Ukraine, intervenue le 24 février 2022, en organisant un débat lors duquel le Secrétaire général de l’ONU a insisté sur le « besoin de paix, une paix conforme à la Charte des Nations Unies et au droit international » et a appelé à « encourager chaque effort significatif qui vise à mettre fin à l’effusion de sang et donner une bonne fois pour toutes une chance à la paix ». 

Pour M. António Guterres, l’invasion russe de l’Ukraine, « violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international », a fait de la vie du peuple ukrainien « un véritable enfer ».  Il a rappelé que quelque 17,6 millions de personnes avaient besoin d’aide, que plus de 8 millions d’Ukrainiens sont enregistrés comme des réfugiés à travers l’Europe et que 5,4 millions ont été déplacés à l’intérieur du pays, que la moitié des enfants ont été contraints de quitter leur foyer, et décrit les destructions et exactions commises.  « Et ne nous méprenons pas, la Fédération de Russie subit également les conséquences mortifères » du conflit, a ajouté le Secrétaire général. 

Mettant en exergue sa priorité absolue qui est la protection des civils et des infrastructures civiles, le Secrétaire général a demandé que cessent les attaques qui les visent et l’utilisation des armes explosives dans les zones peuplées.  Il a aussi réclamé un accès sûr et sans entrave pour l’aide humanitaire.  Recensant les mesures prises au sein du système de Nations Unies pour atténuer les effets du conflit, il a appelé à la prolongation de l’Initiative céréalière de la mer Noire au-delà de l’échéance actuelle de mars et dit « œuvrer à l’élimination des derniers obstacles aux exportations des produits alimentaires et d’engrais russes ». 

« C’est la voix des armes que l’on entend en ce moment, mais, au bout du compte, nous savons tous que la voie de la diplomatie et de la responsabilité est le chemin vers une paix juste et durable », a souligné M. Guterres, qui a appelé à une paix dans le respect de la Charte, du droit international et de la résolution adoptée hier par l’Assemblée générale. 

Ce texte, portant sur les principes de la Charte des Nations Unies « sous-tendant une paix globale, juste et durable en Ukraine »  et adopté par 141 voix pour, 7 contre –dont la Fédération de Russie– et 32 abstentions, dont celles de trois membres du Conseil de sécurité -la Chine, le Gabon et le Mozambique- « exige de nouveau que la Fédération de Russie retire immédiatement, complètement et sans condition toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues du pays, et appelle à une cessation des hostilités ». 

Pour le Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, M. Dmytro Kuleba, cette résolution suit la logique du plan de paix en 10 points du Président Volodymyr Zelenskyy, dont l’objectif est de rétablir le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Toute nouvelle proposition de paix devrait être alignée sur les exigences de la résolution de l’Assemblée générale, a prévenu M. Kuleba. 

Tour à tour, plusieurs délégations ont proposé des plans divers pour que la guerre s’arrête.  Le Haut-Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a réaffirmé l’appui de l’UE au plan du Président ukrainien, tout comme les membre occidentaux du Conseil et les 14 chefs de la diplomatie de pays européens non membres du Conseil –membres de l’UE, voisins de l’Ukraine ou Président en exercice de l’OSCE– qui sont également intervenus. 

Cette longue liste a été l’une des causes d’une protestation du représentant de la Fédération de Russie, qui a estimé que cette présence massive ne représentait « pas de valeur ajoutée » et au contraire « dévaluait l’intérêt de ces interventions ».  Le représentant a plus encore reproché au Président de séance d’avoir placé le chef de la diplomatie de l’Ukraine juste après le Secrétaire général dans la liste des intervenants, soit avant les membres du Conseil, en violation du règlement de celui-ci. 

Tel qu’il est « sournoisement utilisé » par l’Ukraine et les pays occidentaux, le mot « paix » signifie « la capitulation de la Russie et sa défaite stratégique », qui sont les véritables objectifs de l’ingérence occidentale dans les affaires ukrainiennes a ensuite dénoncé le représentant russe.  « Pour nous, il est absolument évident que l’Ukraine n’est nullement une victime », a-t-il affirmé, ajoutant que si l’Ukraine arrêtait les hostilités, elle aurait une chance de se reconstruire en tant qu’État indépendant normal et pacifique et de sauver des milliers de vies humaines.  Il a aussi dénoncé « l’extermination des habitants russophones » du Donbass par « le régime de Kiev ».  Un peu plus tôt, alors que le Ministre ukrainien demandait aux membres du Conseil de se lever pour observer une minute de silence « à la mémoire des victimes de l’agression russe », il avait répliqué que ceux-ci devaient se lever pour rendre hommage à « toutes les victimes » du conflit « depuis 2014 ». 

Les autres membres du Conseil ont tenté d’apporter leur contribution.  Le représentant de la Chine a cité le plan de paix de son pays, présenté comme impartial, et appelé Russie et Ukraine à reprendre directement les pourparlers sans condition préalable, tout en demandant à la communauté internationale de rétablir les infrastructures civiles ukrainiennes et d’assurer le retour des réfugiés et personnes déplacées.  Rejeter sans ambiguïté les tentatives d’annexion de territoires basées sur la force et la violence comme outil de domination entre États n’est pas seulement une vision de « l’Occident », mais un principe sacré pour les pays en développement, dont le seul arsenal est le droit international et dont les munitions sont les dispositifs de la Charte, a commenté l’Équateur. 

Les Émirats arabes unis ont appelé à renforcer le rôle de médiateur du Secrétaire général.  Préconisant la construction d’une paix qui ne soit ni vindicative ni hostile, ils ont suggéré de petites avancées, comme la préservation du régime de non-prolifération, le renforcement de l’aide humanitaire, la poursuite des échanges de prisonniers et la reconduction de l’Initiative céréalière de la mer Noire, une mesure sur laquelle plusieurs autres membres du Conseil, en particulier les pays africains, ont également insisté.  Le représentant du Brésil s’est dit convaincu qu’un pays comme le sien, qui n’est pas directement impliqué dans le conflit, a un rôle constructif à jouer dans la promotion du dialogue.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE

Question de procédure

Avant que le débat ne commence, le représentant de la Fédération de Russie a exprimé son désaccord face à la longue liste de pays non membres du Conseil invités à participer à la présente réunion et avec l’ordre des interventions.

M. Vassily A. Nebenzia a demandé au Président de séance, le Ministre des affaires étrangères de Malte, pour quelle raison il avait décidé de donner la parole au Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine avant que ne s’expriment les membres du Conseil, contrairement aux règles établies au sein de cet organe, qui doivent être respectées.  Le Président de séance ayant répondu qu’en ce jour anniversaire du déclenchement de la guerre en Ukraine, il était utile de donner la parole au Ministre des affaires étrangères de ce pays, le représentant russe a rétorqué qu’en donnant la parole au Ministre ukrainien avant les membres du Conseil, il créerait un précédent en faveur de ce pays.  Citant plusieurs exemples de pays à l’ordre du jour du Conseil dont les chefs de la diplomatie n’ont pas bénéficié de ce privilège, le représentant s’est interrogé sur l’image que le Conseil donnerait alors au monde.  Le représentant russe a souligné qu’il était prêt à entendre le Ministre ukrainien, mais dans le respect de la pratique établie.  Il a aussi dénoncé le nombre sans précédent de délégations invitées au titre de l’article 37 et les représentants de pays européens qui présentent la position commune de l’Union européenne.  Cela ne représente pas de valeur ajoutée, au contraire, cela dévalue l’intérêt de ces interventions, a-t-il estimé, avant de regretter que la présidence maltaise du Conseil méprise le règlement de cet organe en plaçant la position de l’Union européenne au-dessus de son fonctionnement.  Il a rappelé le Règlement du Conseil indiquant que la position de la présidence doit être impartiale, jugeant que Malte ne parvient pas à tenir cette position et a dénoncé dans la décision de la présidence une tentative de défendre les intérêts mesquins de l’Europe. 

Après avoir fait à son tour observer qu’à l’occasion d’autres débats du Conseil, le Ministre des affaires étrangères de la Serbie s’était lui aussi exprimé devant le Conseil avant les membres de ce dernier, et que les autres intervenants du jour étaient venus à New York en personne pour démontrer qu’ils étaient eux aussi touchés par la guerre en Ukraine, le Président de séance a dit prendre note des remarques et maintenu la liste d’intervenants et l’ordre des interventions. 

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que les principes et les valeurs de la Charte des Nations Unies « ne sont pas une question de commodité » ni de vains mots sur du papier, mais « sont au cœur de ce que nous sommes; ils reflètent la mission essentielle de nos Nations Unies », qui existent « précisément pour répondre à tout grief - quel qu’il soit ». 

Le Secrétaire général a rappelé que, voici un an, il avait, « au nom de l’humanité », demandé de ne pas permettre que « commence en Europe ce qui pourrait être la pire guerre depuis le début du siècle », avec des conséquences « dévastatrices pour l’Ukraine, tragiques pour la Fédération de Russie » et des conséquences pas même prévisibles alors pour l’économie mondiale.  Rappelant qu’il avait alors dit qu’il fallait donner une chance à la paix, il a déploré qu’elle n’ait « eu aucune chance » et que la guerre ait « pris le dessus ».

L’invasion russe de l’Ukraine est une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international, a assené le Secrétaire général, qui en a dressé le bilan: la mort, la destruction, les déplacements de population à grande échelle, des attaques aveugles contre les civils et les infrastructures civiles et d’indicibles souffrances, des dizaines de cas de violences sexuelles liées au conflit, de graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme à l’encontre de prisonniers de guerre, des disparitions forcées et des détentions arbitraires de civils.

« La vie est un véritable enfer pour le peuple ukrainien », a poursuivi le Secrétaire général, qui a rappelé qu’on estimait à 17,6 millions -près de 40% de la population ukrainienne- le nombre des personnes qui ont besoin d’aide humanitaire ou protection.  Plus de 8 millions d’Ukrainiens ont été enregistrés comme réfugiés à travers l’Europe et 5,4 millions ont été déplacés à l’intérieur du pays, tandis que la moitié des enfants du pays ont été contraints de quitter leur foyer, a-t-il notamment détaillé.  Il a aussi mentionné les destructions d’infrastructures vitales, les attaques contre des établissements de santé, les écoles et collèges endommagés ou détruits.  Il a aussi fait état l’impact moins mesurable mais dévastateur des mois de déplacements et de bombardements sur la santé mentale de la population.  « Et ne nous méprenons pas, la Fédération de Russie subit également les conséquences mortifères » du conflit, a-t-il ajouté.

« Nous avons besoin de paix - une paix conforme à la Charte des Nations Unies et au droit international », a martelé le Secrétaire général.  En attendant celle-ci, il a cité comme la « priorité absolue » la protection des civils et a donc demandé l’arrêt des attaques qui les visent, ainsi que les infrastructures civiles.  Il a également demandé que cesse l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées et qu’un accès humanitaire sûr et sans entrave à l’aide vitale soit garanti. 

Le Secrétaire général a cité plusieurs actions en cours du système de Nations Unies.  Pour aider à investir dans la reconstruction de l’Ukraine, il a expliqué que le Programme des Nations unies pour le développement a codirigé, avec la Banque mondiale, une évaluation des dommages causés aux infrastructures énergétiques.  Il a rappelé les efforts de l’Agence internationale de l’énergie atomique pour assurer la sûreté et la sécurité de ses 15 réacteurs en fonctionnement dans le pays, et en particulier ceux de la centrale nucléaire de Zaporijia, demandant de nouveau à toutes les parties à s’accorder pour établir une zone de sûreté et de sécurité nucléaires autour de cette dernière. 

M. Guterres a en outre jugé inacceptables les « menaces à peine voilées » d’utiliser des armes nucléaires dans le cadre du conflit, lesquelles ont « fait grimper le risque nucléaire à un niveau jamais atteint depuis les jours les plus sombres de la guerre froide ».

Le Secrétaire général a affirmé que des progrès continuaient d’être réalisés dans le cadre de l’Initiative céréalière de la mer Noire, rappelant que l’accord avait été négocié avec les parties par les Nations Unies et la Türkiye et permis de faire baisser les prix dans le monde entier.  Il a réitéré son appel à la prolongation de l’accord au-delà de l’échéance actuelle de mars et affirmé que l’ONU était « fermement résolue à œuvrer à l’élimination des derniers obstacles aux exportations de produits alimentaires et d’engrais russes ».  Ces efforts démontrent que la coopération internationale est « essentielle, précieuse et possible, même en plein conflit », a-t-il ajouté. 

Enfin, le Secrétaire général a rappelé que le Conseil de sécurité avait, lors de l’année écoulée, consacré plus de 40 débats à l’Ukraine.  « C’est la voix des armes que l’on entend en ce moment, mais, au bout du compte, nous savons tous que la voie de la diplomatie et de la responsabilité est le chemin vers une paix juste et durable », a-t-il affirmé.  Appelant à empêcher toute nouvelle escalade, M. Guterres a conclu en appelant à « encourager chaque effort significatif qui vise à mettre fin à l’effusion de sang et donner une bonne fois pour toutes une chance à la paix ».

M. DMYTRO KULEBA, Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a rappelé que 141 États Membres de l’Assemblée générale ont adopté, hier, une résolution sur les principes d’une paix globale, juste et durable en Ukraine en prenant fait et cause pour la Charte des Nations Unies.  Sept autres membres ont pris le parti de la Russie.  Aucune explication supplémentaire n’est requise, a estimé le Ministre, pour qui la résolution suit la logique de la formule de paix du Président Volodymyr Zelenskyy.  L’objectif de ce plan en 10 points est de rétablir le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Le but du plan est de sortir la Russie de l’Ukraine et de faire du monde un endroit plus sûr, a martelé le Ministre.  Pour lui, toute nouvelle proposition de paix devrait être alignée sur les exigences énoncées dans la résolution. 

M. Kuleba a souligné la nécessité d’agir rapidement pour assurer la sûreté et la sécurité nucléaires en forçant la Russie à se retirer de la centrale nucléaire de Zaporijia; pour éviter la menace de la faim, en faisant avancer l’Initiative céréalière de la mer Noire et en contrant les efforts russes pour la saper; ainsi qu’en développant l’initiative Grain From Ukraine.  Il faut prévenir une crise énergétique, ce qui nécessitera l’arrêt de la terreur des missiles russes contre les infrastructures critiques de l’Ukraine.  Il faut protéger l’environnement, car les bombardements russes ont brûlé des millions d’hectares de forêts ukrainiennes.  Mais avant tout, a prié le Ministre, il faut sauver les gens, leur vie et leur droit et lutter pour la paix.

Soulignant l’ampleur de la crise humanitaire provoquée par l’agression de la Russie contre l’Ukraine, le Ministre a promis que l’Ukraine résistera, comme elle l’a fait jusqu’à présent.  L’Ukraine gagnera et Putin va perdre beaucoup plus tôt qu’il ne le pense, a-t-il lancé.  Il a aussi mis en garde les responsables et militaires russes, qui finiront en procès.  Plus vous continuerez à attaquer l’Ukraine et plus longtemps, plus nous serons déterminés et plus votre défaite sera humiliante, a encore promis le Ministre, dénonçant dans la foulée la propagande russe selon laquelle l’approvisionnement en armes de l’Ukraine alimente la guerre.  L’Ukraine a en effet besoin d’armes, tout comme un pompier a besoin d’eau pour éteindre un incendie.  Plus tôt les armes arriveront, plus tôt le feu sera éteint. 

Selon le Ministre, armer un pays qui se défend contre l’agression est absolument légitime et c’est un acte de défense de la Charte des Nations Unies.  Au contraire, a-t-il averti, aider un agresseur est illégitime et défie la Charte.  Toute fourniture d’armes ou d’équipements militaires à la Russie signifie une complicité dans l’attaque contre la Charte des Nations Unies.  « Si vous donnez des armes à la Russie, vous commettez un crime ».

À court terme, l’Ukraine doit restaurer sa souveraineté et son intégrité territoriale.  À long terme, la justice doit être rendue et la Russie doit changer.  Le Ministre a appelé à la création d’un tribunal spécial ayant une compétence spécifique sur le crime d’agression contre l’Ukraine et la capacité de traiter des immunités personnelles des principaux auteurs, « à commencer par Putin ».  La Russie incite aux conflits et entrave systématiquement les décisions du Conseil de sécurité de l’ONU nécessaires pour résoudre les crises dans les autres endroits du monde, a encore affirmé M. Kuleba.

Le Ministre a estimé que l’avenir de la Russie aux Nations Unies devrait être déterminé dans le contexte du transfert selon lui illégitime du siège occupé par l’URSS à la Russie en 1991 et de la responsabilité des crimes commis sur le territoire de l’Ukraine. 

La paix signifie justice; toutes les nations éprises de paix gagneront la paix sur le champ de bataille et à la table diplomatique, a conclu le Ministre, qui a demandé que soit observée une minute de silence à la mémoire des victimes de l’agression russe, ce à quoi le représentant de la Fédération de Russie a répondu qu’il se levait à la mémoire aussi des victimes du conflit depuis 2014. 

M. IAN BORG, Ministre des affaires étrangères et européennes et du commerce de Malte, a dénoncé une guerre brutale qui a entraîné d’immenses souffrances, destructions et misères pour l’Ukraine et sa population, saluant le courage et la résilience dont ont fait preuve les Ukrainiens au cours des 12 derniers mois.  D’ailleurs, a-t-il fait observer, divers mécanismes onusiens et internationaux ont fourni des preuves de meurtres de civils, d’attaques contre des infrastructures civiles, de torture et d’autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants, de violences sexuelles et sexistes, d’enlèvements et de déportations forcées d’enfants. 

Nous devons redoubler d’efforts pour que les auteurs de violations de la Charte des Nations Unies et du droit international, y compris le droit humanitaire international et le droit relatif aux droits de l’homme, rendent des comptes, a lancé le Ministre, se félicitant, à cet égard, de l’important travail réalisé par la Commission internationale indépendante d’enquête sur l’Ukraine.  Le Ministre s’est dit, en outre, aux côtés du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) dans ses enquêtes et réitéré son appel à la Fédération de Russie à respecter la décision de la Cour internationale de Justice (CIJ) ordonnant la suspension immédiate des opérations militaires.

Enfin, l’orateur a exprimé sa profonde préoccupation au sujet de la sûreté nucléaire en Ukraine, s’inquiétant des tirs à l’intérieur et autour des centrales, y compris celle de Zaporijia.  Dans le contexte de la détérioration de l’architecture mondiale de non-prolifération, toute déclaration de la Russie suggérant que l’utilisation éventuelle d’armes nucléaires est justifiée d’une quelconque manière est inacceptable, s’est indigné le Ministre.  Pour lui, une telle rhétorique ne fait qu’engendrer de l’incertitude, saper davantage la confiance entre les parties et à exacerber les tensions.

M. ANTONY BLINKEN, Secrétaire d’État des États-Unis, a rappelé que le 17 février 2022, il avait averti le Conseil que la Fédération de Russie prévoyait d’envahir l’Ukraine après avoir inventé un prétexte pour renverser son gouvernement démocratiquement élu, accusations niées à l’époque par le représentant russe.  La Russie a par la suite « ressorti son manuel de la Crimée de 2014 », en occupant des territoires, en déportant des populations et en manipulant des résultats électoraux pour prétendre que ces territoires voulaient rejoindre la Fédération de Russie.  Or, a poursuivi M. Blinken, « le Président Putin n’a pas su l’emporter sur l’Ukraine », et a donc voulu briser la résistance ukrainienne d’un point de vue psychologique en s’attaquant aux civils, aux infrastructures essentielles, et en enlevant des jeunes enfants.  « Et pourtant, les Ukrainiens semblent plus forts que jamais. »  Lors de la contre-offensive menée par l’Ukraine, il a décrété la conscription de 300 000 jeunes hommes qu’il a envoyés « au hachoir ».  Toutefois, les Ukrainiens se sont battus vaillamment pour défendre leur nation et leur droit à déterminer leur propre avenir, a déclaré le Secrétaire d’État.  Pendant ce temps, « la communauté internationale s’est rassemblée », la vaste majorité des États Membres des Nations Unies ayant voté encore et encore pour condamner les violations de la Charte et l’agression de la Fédération de Russie.  Hier encore, 141 d’entre eux ont voté en faveur d’une résolution qui réaffirme les principes de souveraineté et d’intégrité territoriale des États, condamne la tentative de s’emparer du territoire ukrainien et appuie une paix juste durable. 

Lorsque le Président Putin a tenté d’exploiter militairement la pire crise alimentaire mondiale de longue date, l’ONU a rapidement répondu avec l’Initiative céréalière de la mer Noire, a poursuivi M. Blinken.  La Fédération de Russie a également tenté de transformer l’énergie en arme, mais les pays ont plutôt pris des mesures extraordinaires pour mettre fin à leur dépendance envers l’énergie russe.  « Et pourtant, les pays du monde entier continuent de se tenir aux côtés de l’Ukraine, car nous reconnaissons tous que si nous abandonnons l’Ukraine, nous abandonnerons la Charte des Nations Unies elle-même et les règles et principes qui font que les pays peuvent vivre en paix et en sécurité », a-t-il ajouté.  « Si nous ne défendons pas ces principes, nous vivrons dans un monde où les plus forts domineront les plus faibles. » 

Pour éviter un tel scénario, M. Blinken a appelé à lutter pour une paix juste et pérenne par des moyens diplomatiques.  Il a mis en garde contre tout cessez-le-feu qui permettrait à la Russie de consolider son contrôle des territoires saisis et de lancer de nouvelles attaques comme ce fut le cas en 2015.  « Dans cette guerre, il y a un agresseur, il y a une victime; la Russie mène une guerre de conquête, l’Ukraine se bat pour sa liberté », a martelé le Secrétaire d’État.  « Un homme, Vladimir Putin, a lancé cette guerre; un homme peut l’arrêter. »  À ceux qui croient que cette guerre accapare trop de ressources et d’attention, le Secrétaire d’État a rappelé les contributions de son pays à la lutte contre la faim dans le monde, au maintien de la paix ou encore aux réfugiés. 

Afin que des comptes soient rendus à la suite des atrocités commises par la Fédération de Russie à Marioupol, à Irpin et ailleurs, il a invité la communauté internationale à collaborer aux enquêtes nationales et internationales.  « Nous ne devons pas laisser l’indifférence de M. Putin face à la vie humaine devenir notre indifférence », a-t-il insisté, en demandant aux membres du Conseil de tenir leur promesse de préserver les générations futures du fléau de la guerre, comme le souhaite le peuple de l’Ukraine. 

Mme OLTA XHAÇKA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, a estimé qu’en cet « anniversaire tragique » de l’invasion russe de l’Ukraine, « il n’y a rien à célébrer mais plutôt des regrets à avoir ».  Au-delà de ses conséquences délétères, cette guerre a néanmoins permis de voir le monde s’unir pour la défense de la Charte des Nations Unies, a-t-elle nuancé, saluant l’adoption à une écrasante majorité, hier à l’Assemblée générale, d’une résolution appelant au retrait immédiat et sans conditions des forces russes du territoire ukrainien.  Il y a un an, a rappelé la Ministre, ces mêmes troupes ont traversé la frontière et les missiles russes ont envahi le ciel de l’Ukraine et continuent de le faire.  Ce cataclysme pour l’Ukraine a secoué l’Europe et fait également souffrir des millions de personnes dans le monde, a-t-elle ajouté, dénonçant une guerre d’agression injuste et non provoquée, menée par un membre permanent du Conseil de sécurité qui se comporte comme un « État voyou ».  Face à cette agression, l’Ukraine résiste pour défendre sa population, sa terre et son avenir, a salué la Ministre, pour qui ce combat est celui de toutes les personnes qui aspirent à la paix et à la justice.  Selon elle, si la Russie a raison d’être « fière de son histoire », elle n’a aucune raison de l’être pour ses agissements actuels.  De fait, la Russie s’est isolée et « ne le doit qu’à elle-même », a-t-elle constaté, avant de se dire convaincue que cette guerre prendra fin avec la fin de la présence russe en Ukraine, ouvrant la voie à la reconstruction du pays. 

M. JUAN CARLOS HOLGUÍN, Ministre des affaires étrangères de l’Équateur, a indiqué que parmi les centaines de milliers de personnes qui avaient fui le conflit se trouvaient près d’un millier d’Équatoriens, dont beaucoup ont dû être évacués.  Il a évoqué les conséquences humaines et matérielles de la guerre, arguant qu’à tout cela s’ajoutent la destruction du tissu social et la détérioration de la santé mentale des victimes.  La terre fertile de l’Ukraine qui, pendant des siècles, a servi de base pour nourrir des millions de personnes dans le monde, est soumise à la pollution par les bombardements et les mines, a-t-il déploré.

Pour le Ministre, la guerre a également affecté la dynamique de travail de ce Conseil et la confiance dans le système des Nations Unies.  Il a rappelé qu’au cours de ces 12 mois, le système des Nations Unies s’était mobilisé, le Conseil de sécurité s’était réuni au moins 50 fois pour examiner la situation en Ukraine, y compris parfois avec la participation du Président ukrainien par visioconférence. 

Le Ministre a appelé le Conseil à rejeter sans ambiguïté les tentatives d’annexion de territoires basées sur la force, ainsi que la violence comme outil de domination entre États.  Ce n’est pas seulement une vision de « l’Occident », a-t-il relevé, mais un principe sacré pour les pays en développement, dont le seul arsenal est le droit international et dont les munitions sont les dispositifs de la Charte.  Il a appelé les membres du Conseil de sécurité, collectivement ou individuellement, à redoubler d’appui aux efforts et aux bons offices du Secrétaire général. 

Enfin, M. Holguín a estimé que la meilleure façon d’honorer la vie des victimes de ce conflit est d’assurer des mécanismes d’enquête indépendants, la responsabilité et la réparation, qui seront utilisés comme outils d’indemnisation, mais aussi de dissuasion.

« L’agression russe contre l’Ukraine est un énorme choc pour mon pays, dépositaire et partie aux Conventions de Genève », a déclaré M. IGNAZIO CASSIS, Ministre des affaires étrangères de la Suisse, qui s’est dit prêt à réunir toutes les parties autour d’une table pour œuvrer à un meilleur respect du droit international humanitaire et, finalement, à l’avènement de la paix.  Après avoir salué la résolution adoptée hier par l’Assemblée générale, le chef de la diplomatie suisse a appelé la Russie à cesser ses hostilités et à retirer sans délai la totalité de ses troupes du territoire ukrainien.  Il a ensuite plaidé pour un multilatéralisme fort et efficace.  « En tant qu’État neutre permanent, la Suisse respecte pleinement ses obligations découlant du droit de la neutralité.  Elle ne privilégie aucun des belligérants sur le plan militaire.  Mais neutralité ne signifie pas indifférence!  On ne peut pas être indifférents face aux violations de nos droits fondamentaux! » a argué M. Cassis, qui a rappelé que la Suisse, aux côtés de 40 autres États, a déféré la situation en Ukraine à la Cour pénale internationale.  Il a d’ailleurs appelé tous les États à coopérer avec la Cour.  Face à des informations faisant état de crimes de guerre, de violences sexuelles et d’autres violations graves du droit international humanitaire et des droits humains, nous ne pouvons pas rester les bras croisés, a-t-il insisté en conclusion.

M. YOSHIMASA HAYASHI, Ministre des affaires étrangères du Japon, a qualifié d’insulte au Conseil de sécurité et à l’ensemble des Nations Unies, l’agression lancée, il y a un an aujourd’hui, par la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Cela a démontré le peu de cas que la Russie fait de l’ONU, a-t-il déploré, rappelant l’appel du Secrétaire général de l’ONU au Président Putin pour lui demander d’arrêter l’opération militaire et de ramener les troupes en Russie. 

Cet appel qui « résonne encore dans ses oreilles », représente, à ses yeux, la volonté collective des États Membres, peut-être à l’exception d’une minorité, et il est reflété dans les résolutions de l’Assemblée générale ainsi que dans l’ordonnance de la Cour internationale de Justice sur les mesures conservatoires du 16 mars 2022.  « Il est regrettable qu’un an plus tard, nous devions encore répéter le même appel », a déploré le Ministre, condamnant, dans les termes les plus forts possibles, l’agression de la Russie contre l’Ukraine.  Il s’agit d’une violation manifeste du droit international, notamment de la Charte des Nations Unies, par un membre permanent du Conseil de sécurité, qui est censé assumer la plus lourde responsabilité en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il affirmé, ajoutant qu’aucun pays n’était autorisé à réécrire des frontières par la force ou la coercition.

Le Ministre a condamné les attaques aveugles contre des civils innocents, qui constituent un crime de guerre.  De même, il a dénoncé la rhétorique nucléaire « irresponsable » de la Russie ainsi que la saisie et la militarisation de la centrale nucléaire de Zaporijia.  À cet égard, il a salué le travail de l’AIEA pour assurer la sûreté et la sécurité nucléaires de la centrale et a apporté son plein soutien à l’agence. 

Enfin, le Japon, qui se tient fermement aux côtés de l’Ukraine, salue les efforts sincères du Président ukrainien Volodymyr Zelenskyy pour démontrer les principes fondamentaux de sa formule de paix et pour promouvoir une paix globale, juste et durable, conformément aux principes inscrits dans la Charte des Nations Unies. 

Répétant que toute tentative de modifier le statut d’un territoire par la force ou la coercition devait être rejetée partout dans le monde, le Ministre a appelé le Conseil de sécurité à ne pas perdre de vue les autres nombreux défis auxquels nous faisons face et a appelé l’ensemble des pays à s’unir pour l’état de droit et pour la paix.

Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a rappelé que le 24 février 2022, la Fédération de Russie a déclenché une « guerre d’agression » contre l’Ukraine, dont elle occupait déjà depuis huit ans une partie du territoire, « sans autre justification que son désir obsessionnel de faire revivre un passé pourtant condamné par l’histoire ».  Cela fait donc aujourd’hui un an « qu’elle sème la mort, la destruction, un an qu’elle viole de façon flagrante les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies », bien qu’elle soit un membre permanent du Conseil de sécurité.  La Cour pénale internationale (CPI) enquête sur les crimes commis et établira le moment venu les responsabilités, « celles des exécutants comme celle des commanditaires ».  Elle a réitéré sa demande d’ouverture d’une enquête sur les transferts de drones de l’Iran à la Russie ainsi que de missiles et de munitions par la République populaire démocratique de Corée. 

Mme Colonna a dénoncé la « rhétorique nucléaire irresponsable » de la part d’un État doté, qui met en péril la sûreté des centrales ukrainiennes qu’elle occupe, saluant au passage les efforts de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour assurer la sécurité de la centrale de Zaporijia.

  « Les faits sont là: il y a un agresseur, la Russie, qui nie ses responsabilités, et un agressé, l’Ukraine, qui se défend mais parle aussi de paix », a encore dit la Ministre, en se félicitant de la condamnation de l’agression russe contre l’Ukraine, hier, à l’Assemblée générale.  « Voilà pourquoi, avec nos partenaires, nous continuerons à lui apporter le soutien dont elle a besoin, aussi longtemps qu’il le faudra », a martelé la Ministre.  Elle a demandé en terminant à la Fédération de Russie de se montrer « digne » des responsabilités qui lui incombent en tant que membre permanent du Conseil et de mettre un terme immédiat à sa guerre d’agression. 

M. JAMES CLEVERLY, Secrétaire d’État en charge des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement du Royaume-Uni, a expliqué s’être rendu à Kiev voilà trois mois et y avoir rencontré le Ministre ukrainien des affaires étrangères peu après qu’un tir de missile russe eut coupé l’eau et l’électricité dans la ville.  « Dmytro (Kuleba) n’a pas laissé la bombe de Putin l’empêcher de faire son travail », a-t-il relaté, précisant avoir déjeuné avec lui dans un restaurant qui, lui aussi, continuait de travailler après avoir installé un générateur.  Pour M. Cleverly, ce genre d’« hospitalité diplomatique » est une démonstration claire que même si les Ukrainiens ont été durement frappés, « leur esprit ne sera pas brisé ».  Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, nous devons tenir la promesse que nous avons faite à l’Ukraine, « la promesse de protéger la Charte des Nations Unies ».  Observant que le Président Putin a montré au cours de l’année écoulée qu’il était prêt à mener une « guerre d’usure », le Secrétaire d’État a averti que cela pourrait renvoyer aux horreurs des deux guerres mondiales du XXème siècle.  Mais « Putin ne peut pas gagner en Ukraine », a-t-il martelé, ajoutant que ce qui est en jeu sur le champ de bataille, « c’est l’ordre international lui-même, au cœur duquel se trouve l’ONU ». 

Saluant le fait que les trois quarts des États Membres de l’ONU ont voté à plusieurs reprises pour condamner cette invasion à l’Assemblée générale, le Secrétaire d’État a constaté que le Président Putin ne se soucie pas de la Charte des Nations Unies.  Ses accaparements de terres dans l’est et le sud de l’Ukraine nous montrent que son cœur est tourné vers l’expansion impériale, a-t-il souligné, avant d’affirmer que ces ambitions coûtent la vie à 800 soldats russes chaque jour.  Mais alors qu’il se voit perdre cette guerre, le Président Putin pourrait recourir à des coupes dans les expéditions de céréales et d’énergie, à des menaces d’escalade, à des campagnes de désinformation toxique et à des cyberattaques, a estimé M. Cleverly.  « Nous devrions y être prêts et y voir des signes de faiblesse », a-t-il dit, avant de prévenir que les aides militaire et humanitaire à l’Ukraine ne suffisent pas.  Il convient de mobiliser des financements à la fois publics et privés pour garantir que l’Ukraine obtiendra les investissements de reconstruction dont elle a besoin, a-t-il préconisé, en rappelant que le Royaume-Uni accueillera en juin à Londres la conférence internationale sur la relance de l’Ukraine.  Un an après le début de cette guerre, « envoyons le message clair que notre soutien à l’Ukraine n’est pas et ne sera jamais limité dans le temps », a conclu le Secrétaire d’État. 

M. KWAKU AMPRATWUM-SARPONG, Vice-Ministre des affaires étrangères et de lintégration régionale du Ghana, a expliqué que l’agression en cours contre l’Ukraine est, à tous égards, illégale, injustifiée et inacceptable.  Selon lui, il n’est pas justifiable qu’un membre permanent du Conseil de sécurité, investi de la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales, choisisse la voie de la guerre en excluant la diplomatie.  Il a rappelé que le veto de la Fédération de Russie, le 25 février 2022 au Conseil de sécurité, l’a malheureusement empêché de prendre des mesures décisives.  Et cette situation renforce les arguments de longue date en faveur d’une réforme urgente du Conseil de sécurité, et de l’interdiction de recourir au veto, et plus encore là où un membre permanent du Conseil enfreint la Charte des Nations Unies et le droit international. 

M. Ampratwum-Sarpong a ensuite déclaré que c’est le moment d’un dévouement renouvelé à la coopération mutuellement bénéfique et au multilatéralisme, et non à la concurrence pour un avantage hégémonique.  Il en a appelé à notre système de justice internationale, y compris l’universalisation du Statut de Rome et de la Cour pénale internationale (CPI), afin de garantir que les auteurs d’atrocités en Ukraine, comme ailleurs, ne restent pas impunis.  Le Ministre a souligné que le reste du monde n’a pas été épargné par les contrecoups de la guerre, avec des impacts paralysants et systémiques sur l’alimentation mondiale, les systèmes énergétiques et financiers.  Les pays en développement, déjà durement touchés par l’impact de la pandémie de COVID-19, de la dette et de l’inflation, ont peu de capacités pour faire face à la détérioration des conditions économiques, a-t-il dit.  Compte tenu du rôle central de la Fédération de Russie et de l’Ukraine dans les marchés des céréales et des engrais, nous soutenons la poursuite du renouvellement de l’Initiative céréalière de la mer Noire, a-t-il souhaité.  Nous sommes fermement convaincus que les canaux de la diplomatie et du dialogue offrent de meilleures chances pour une paix juste, globale et durable, a-t-il dit, avant d’exhorter les membres du Conseil à intensifier leurs efforts en faveur de négociations entre les parties.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH, Vice-Ministre des affaires étrangères des Émirats arabes unis, a présenté ses condoléances pour les vies brisées et emportées par la guerre en Ukraine.  Elle a regretté qu’en ce jour anniversaire, la guerre se poursuive, tout en notant les appels incessants à la paix lancés à la tribune de l’Assemblée générale.  La majorité des membres ont envoyé un message clair que ça suffit, a-t-elle ajouté.  Cette majorité n’est unie ni par l’allégeance à une partie ni par l’affinité à l’autre.  Son objectif n’est pas géopolitique.  Elle n’est ni motivée par de grandes ambitions ni par des intérêts à avancer vers un conflit.  Il faut entendre la voix de cette majorité pour défendre la Charte des Nations Unies, dont les principes sont remis en cause.  La Vice-Ministre a déploré que l’appel à la diplomatie et à la paix lancé il y a un an n’ait pas reçu de réponse alors que la guerre éclatait.  Hier, a-telle poursuivi, les États Membres ont renouvelé leur appel urgent et sincère à mettre fin à cette guerre.  Les dirigeants du monde appellent à des efforts de médiation, des plans de paix, à investir dans une diplomatie inclusive et créative. 

En s’appuyant sur cette majorité favorable à la paix, il faut renforcer le rôle de médiateur du Secrétaire général, a déclaré Mme Nusseibeh, pour qui notre vision pour l’après-guerre doit encourager le retour de la Russie et de l’Ukraine à la table des négociations et non sur le champ de bataille.  Cette guerre ne prendra pas fin si une partie ou l’autre se sent menacée.  En s’appuyant sur la Charte des Nations Unies et sur l’histoire, nous devons nous attacher à la construction d’une paix qui ne soit ni vindicative ni hostile. 

Cet effort ne sera guère simple, a reconnu la Vice-Ministre, qui a préconisé une série de petites avancées, notamment la reconduction de l’Initiative céréalière de la mer Noire, la préservation du régime de non-prolifération, le renforcement de l’aide humanitaire, la poursuite des échanges de prisonniers et le fait de ne pas transformer les institutions multilatérales en un champ de bataille.  Pour y parvenir, il faut coordonner tous les efforts en s’appuyant sur un désir sincère de résoudre cette guerre pacifiquement et en soutenant les canaux de communication, a préconisé Mme Nusseibeh, pour qui il ne faut pas non plus critiquer la voie que nous choisissons pour préserver la Charte des Nations Unies pour une paix globale juste et pérenne en Ukraine.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a redit l’opposition de son pays à la guerre en Ukraine et à toute guerre dans le monde, notamment à celles si nombreuses, chroniques et cycliques, qui se déroulent en Afrique.  Rejeter le logiciel de la guerre n’est, pour lui, ni une forme de neutralité, ni de lâcheté, encore moins une posture opportuniste.  Ce n’est surtout pas une rhétorique d’impuissance ou d’indifférence, a-t-il insisté.  C’est plutôt retenir les leçons indélébiles de l’histoire des guerres injustes qui nous enseigne que ceux qui causent, entretiennent ou déclenchent ces guerres en sont rarement les vainqueurs, a-t-il fait remarquer.  S’extraire donc du logiciel de la guerre, c’est demeurer selon lui en phase avec les idéaux qui sédimentent et font la noblesse des Nations Unies.  Parce que la guerre est contraire aux valeurs qui fondent cette Organisation des Nations Unies et ce Conseil de sécurité, chaque jour de guerre met en cause notre vocation, notre mandat et notre crédibilité, a-t-il averti.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que cette semaine « difficile » pour l’ONU restera dans les mémoires pour le « battage médiatique » fait par l’Ukraine et ses « parrains occidentaux » à l’occasion de l’anniversaire du lancement par son pays d’une « opération militaire spéciale » en Ukraine.  À ses yeux, les expressions comportant le mot « paix », qui sont aujourd’hui utilisées « sournoisement » par des représentants de l’Ukraine et des pays occidentaux impliquent tout autre chose, à savoir « la capitulation de la Russie, sa défaite stratégique ».  Ce sont là les véritables objectifs de « l’ingérence occidentale dans les affaires ukrainiennes », qui se sont manifestés le plus clairement selon lui lors du « coup d’État anticonstitutionnel de Maidan du 21 février 2014 ».  Le représentant a dénoncé « l’extermination des habitants russophones » du Donbass par « le régime de Kiev », dressant un parallèle avec l’intervention de l’OTAN en Yougoslavie en 1999. 

S’agissant des accords de Minsk, M. Nebenzia a déclaré que la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni les ont utilisés pour donner à l’Ukraine le temps de se préparer à la guerre avec la Russie.  « Pour nous il est absolument évident que l’Ukraine n’est nullement une victime », a-t-il ajouté.  Il a dénoncé comme « absolument faux » le « cliché » voulant que « si la Russie arrête les hostilités, il n’y aura pas de guerre, et que si l’Ukraine fait de même, il n’y aura pas d’Ukraine ».  Cela n’a jamais été l’objectif de l’opération militaire spéciale, a-t-il affirmé.  « Si l’Ukraine arrête les hostilités, elle aura une chance de se reconstruire en tant qu’État indépendant normal et pacifique et de sauver des milliers de vies humaines », a-t-il argué. 

Pendant que Russes et Ukrainiens s’entretuent, les entreprises de défense occidentales réalisent des bénéfices faramineux et testent de nouvelles armes, tout en affaiblissant les rivaux européens des États-Unis, a déclaré M. Nebenzia.  Le représentant a incité les pays en développement à ne pas se faire d’illusions sur la véritable nature de ce conflit.  Les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN continuent en effet de s’immiscer dans toutes les questions internationales et dans les affaires intérieures d’autres États, en violation des accords qui ont mis un terme à la guerre froide, a-t-il affirmé. 

« L’Occident collectif doit accepter le fait qu’il existe d’autres acteurs sur notre planète qui ont leurs propres intérêts, et avec lesquels il est nécessaire de coexister », a affirmé M. Nebenzia.  « Le monde unipolaire est une chose du passé », a-t-il poursuivi, estimant que la crise ukrainienne constitue la « phase chaude » de la transition vers un monde multipolaire. 

Pour le représentant, les événements de la dernière année font que « nos relations ne seront plus les mêmes ».  En continuant à alimenter le Gouvernement ukrainien en armes et à l’aider sur le champ de bataille, l’Occident ne laisse pas d’autre choix que « d’éliminer militairement les menaces qui pèsent sur la Russie depuis le territoire de l’Ukraine », a-t-il conclu.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a constaté que, un an après le début des combats en Ukraine, les conséquences tragiques de cette guerre et ses ramifications continuent de se faire sentir aux niveaux local, national et international.  Alors qu’il n’y a pas d’issue en vue, ce conflit fait payer aux civils le prix le plus fort et affecte négativement le commerce mondial, a souligné le représentant, insistant sur les effets graves enregistrés en Afrique.  Selon le FMI, a-t-il indiqué, le conflit menace le relèvement du continent qui commençait tout juste à se remettre de la pandémie.  Nombre de pays africains font aujourd’hui face à une flambée des prix des denrées alimentaires, à une chute du tourisme et à des difficultés d’accès au marché des capitaux, a-t-il fait observer, avant de rappeler que l’Afrique ne connaît que trop bien les effets dévastateurs des conflits.  Faisant valoir que la communauté internationale a la responsabilité commune d’œuvrer au règlement des différends via des solutions pacifiques et négociées, il a invité les États Membres à respecter le principe fondamental de sécurité collective consacré par la Charte des Nations Unies.  Par le passé, a-t-il dit, la communauté internationale a démontré qu’il était possible de surmonter la haine et les soupçons mutuels et de trouver un chemin vers la table des négociations.  Il est donc impératif, à ses yeux, qu’elle appuie tous les efforts diplomatiques pour mettre un terme à la guerre en Ukraine.  Cela passe par une action de tous les pays, à commencer par ceux qui siègent au Conseil de sécurité, a souligné le représentant, pour qui il importe en particulier de tirer parti de l’Initiative céréalière de la mer Noire, des échanges de prisonniers de part et d’autre et des bons offices du Secrétaire général.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a indiqué que le Président Lula avait précisé la position du Brésil, qui est de condamner l’invasion russe et la violation territoriale d’un État souverain, l’Ukraine.  Un an après cette invasion, le représentant a jugé que le moment était venu de donner aussi la parole à ceux qui veulent parler de manière à construire la paix.  Il s’est dit convaincu que des pays comme le Brésil, qui ne sont pas directement impliqués dans le conflit, ont un rôle constructif à jouer dans la promotion du dialogue.  Il a demandé de ne pas perdre de vue le drame humain dû à cette guerre, ou d’ignorer l’impact économique de la guerre dans le monde, notamment en ce qui concerne l’augmentation les coûts de la production agricole et alimentaire. 

M. DAI BING (Chine) a demandé de réfléchir à tête reposée aux manières de faire cesser le conflit et de réaliser la paix et la stabilité à long terme en Ukraine et en Europe, avant de présenter un document sur le règlement politique de la crise ukrainienne, document dont les objectifs, a-t-il fait valoir, sont impartiaux.  La Chine, a dit le représentant, veut jouer un rôle constructif pour résoudre et contribuer à la résolution de la crise. 

Pour le représentant, le règlement du différend repose sur le respect de la Charte des Nations Unies, dont les principes doivent être appliqués de manière harmonieuse.  Pour faciliter une solution politique à la question ukrainienne, il faut assurer une sécurité commune, qui ne doit pas être recherchée aux dépens d’autres acteurs.  Pour garantir la paix et la stabilité en Europe, la logique de confrontation de blocs et de guerre froide doit être abandonnée et les préoccupations légitimes en matière de sécurité de tous les pays doivent être prises en compte pour qu’on ait une architecture de sécurité régionale équilibrée et juste. 

Seule la négociation pourra permettre de sortir de la crise économique internationale, a affirmé le représentant.  À cette fin, il faut promouvoir les pourparlers de paix urgemment et travailler en vue de créer les conditions d’une reprise des négociations.  Ramener les parties à la table des négociations ne sera pas facile, a averti le représentant, mais il s’agira d’une première étape vers une solution politique. 

La Chine appelle la Fédération de Russie et l’Ukraine à reprendre les pourparlers sans condition préalable.  Le représentant a rappelé qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée.  La communauté internationale doit conjointement lutter contre les attaques armées contre les installations nucléaires ou les centrales nucléaires.  Par ailleurs, le droit international humanitaire doit être appliqué.  Les parties doivent s’abstenir d’attaquer les civils et les infrastructures civiles, les femmes et les enfants doivent être protégés et un accès humanitaire, garanti, tout en respectant les droits fondamentaux des prisonniers de guerre.  La communauté internationale doit accroître son assistance et rétablir les infrastructures civiles et assurer le retour des réfugiés, des personnes déplacées pour éviter que la crise humanitaire ne prenne de l’ampleur.  Les opérations humanitaires doivent être conformes aux principes de neutralité et d’impartialité et éviter la politisation. 

Pour la Chine, les pays en développement, qui ne sont pas parties à ce conflit, ne devraient pas payer un prix excessif à cause de lui.  Les parties doivent cesser d’abuser de sanctions unilatérales. 

Le chemin vers la paix ne sera pas facile, a reconnu le représentant, mais quelle que soit la complexité de la situation, il ne faut jamais abandonner nos espoirs de paix et déployer nos efforts pour y arriver.  La Chine sera toujours dans le camp de la paix et du dialogue, appelant les parties à trouver une solution politique à la crise en Ukraine le plus tôt possible, a-t-il conclu.

M. JOSEP BORRELL FONTELLES, Haut-Représentant de lUnion européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, s’est penché sur le point de savoir pourquoi le choix de faire la guerre de la Russie « nous concerne tous », avant d’examiner les moyens de parvenir à la paix. 

De fait, a rappelé le Haut-Représentant, le Président Putin a choisi la guerre et pendant un an, les horreurs ont défilé sous nos yeux avec 13 millions de personnes sans abri, 21 millions ayant besoin d’une aide humanitaire et des dizaines de milliers d’Ukrainiens contraints de quitter leur pays pour se réfugier ailleurs en Europe.  Cette guerre a déchiré des familles et été marquée par l’enlèvement et la déportation forcée de dizaines de milliers d’enfants ukrainiens innocents, le changement de leur statut personnel, y compris de leur nationalité, pour qu’ils soient adoptés par des familles russes.  Ces enfants doivent être renvoyés en Ukraine immédiatement, a-t-il ordonné.  M. Borrell a aussi détaillé les crimes contre l’humanité commis, disant les avoir lui-même constatés lorsqu’il s’est rendu à Boutcha.  Et qui peut oublier Marioupol? s’est-il remémoré, avant de rendre hommage aux Nations Unies pour les efforts qu’elles ont déployés afin d’assurer le passage en toute sécurité des civils piégés dans l’aciérie d’Azovstal. 

Un an après, le bilan de la guerre est catastrophique pour le peuple ukrainien, a déclaré le Haut-Représentant mais, a-t-il ajouté, ses effets sont aussi planétaires.  Il a rappelé l’insécurité alimentaire et énergétique ainsi que la hausse des prix provoquées par le conflit, dont les effets sont dramatiques pour les populations les plus vulnérables.  L’Union européenne et ses États membres ont contribué, depuis un an, à alléger ce fardeau et ces conséquences, a déclaré M. Borrell, qui a cité l’exemple des mesures prises en faveur de la sécurité alimentaire de pays parmi les plus touchés en Afrique. 

Au vu des enjeux et ondes de choc qu’elle a créés, cette guerre doit s’arrêter maintenant, a plaidé le Haut-Représentant, qui a encouragé à explorer les voies menant vers la paix, mais pas n’importe quelle paix.  Il a insisté sur la nécessité d’une paix juste, fondée sur le droit international et la Charte des Nations Unies.  Dès lors, a-t-il estimé, il est urgent que le Kremlin entende ce message - et agisse en conséquence. 

M. Borrell a préconisé de tirer parti de la résolution adoptée hier par l’Assemblée générale à une très large majorité et a rappelé l’appui de l’UE au plan de paix en 10 points du Président Zelenskyy.  L’Union européenne reste toutefois engagée à travailler avec tous les partenaires sincères, à prendre en compte toutes les idées qui appuient les efforts déployés par l’Ukraine pour réaliser une paix globale, juste et pérenne sur la base des décisions des Nations Unies, de sa Charte et du droit international.  En attendant, elle continuera à soutenir l’Ukraine dans sa capacité à se défendre et à protéger son peuple, a affirmé le Haut-Représentant, qui a répété que cet appui ne se faisait pas aux dépens des autres engagements de l’Union européenne ailleurs, bien au contraire. 

M. RASTISLAV KÁČER, Ministre des affaires étrangères de la Slovaquie, a rappelé qu’il y a un an, le Président russe a déclaré la guerre malgré les nombreuses assurances données au Conseil par la Fédération de Russie qu’elle n’avait pas l’intention d’envahir son voisin.  Cette guerre, déclenchée par un membre permanent du Conseil, a, selon lui, ébranlé la foi dans le multilatéralisme.  « Je ne comprends pas dans quel univers parallèle priver des millions d’innocents d’électricité, de chaleur et d’eau, et plonger le pays dans l’obscurité peut être justifié sous le prétexte d’une soi-disant ‘opération militaire spéciale’ », a ajouté le représentant.  Il a réitéré son appel à la cessation immédiate des activités militaires de la Fédération de Russie en Ukraine et au retrait inconditionnel de ses troupes du territoire ukrainien, y compris la Crimée occupée.  Le représentant s’est inquiété du nombre de victimes civiles dénombrées depuis le début de l’invasion, soit plus de 7 199 morts et 11 756 blessés selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), en notant que les chiffres réels sont beaucoup plus élevés.  Il a réitéré en terminant l’engagement de son pays à soutenir l’Ukraine jusqu’à la fin de cette « guerre éhontée » et à faire en sorte que les responsables des crimes commis soient traduits en justice.

M. BODAN AURESCU, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie, a observé que cette guerre aux multiples impacts représente une attaque directe non seulement contre l’intégrité des règles du système international, mais aussi contre notre sécurité, notre prospérité et nos valeurs fondamentales.  Malgré ces menaces, « nous resterons unis et forts aussi longtemps que nécessaire, pour que l’Ukraine gagne et que la Fédération de Russie porte la responsabilité de ce qu’elle a fait », a-t-il affirmé, avant d’appeler cette dernière à cesser inconditionnellement son usage de la force et à se retirer complètement et immédiatement du territoire de l’Ukraine.  À cet égard, le Ministre a salué la résolution adoptée à une écrasante majorité, hier à l’Assemblée générale, qui place les principes de la Charte des Nations Unies « au-dessus de tout, y compris des intérêts nationaux ou régionaux ».  Après avoir énuméré les aides fournies par son pays à l’Ukraine, il s’est dit favorable aux efforts visant à demander des comptes à la Fédération de Russie pour tous les crimes graves commis durant ce conflit, y compris le crime d’agression.  Il a indiqué que la Roumanie a rejoint le groupe restreint d’États qui travailleront aux côtés de l’Ukraine pour identifier la base juridique la plus appropriée pour établir un tribunal à cette fin.  Avant de conclure, le Ministre a exprimé sa grande préoccupation face aux projets russes visant à déstabiliser la République de Moldova voisine, « pays le plus touché par la guerre, à l’exception de l’Ukraine elle-même ».  Invitant le Conseil de sécurité à prendre conscience de cette menace qui pèse sur un autre pays souverain de la région, il a assuré que la Roumanie se tiendra aux côtés des citoyens de la République de Moldova, tout comme elle soutiendra l’Ukraine sans relâche.

M. ZBIGNIEW RAU, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a déclaré qu’avec cette guerre, la Russie « met à l’épreuve notre engagement envers les principes qui nous protègent tous ».  Il a rappelé que les coûts humanitaires de cette guerre sont horribles, précisant que cette agression a provoqué la plus grande crise humanitaire en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.  Les actions du Kremlin sont motivées par la volonté de détruire la nation ukrainienne, son héritage et son avenir, a-t-il assuré.  La Pologne plaide pour l’établissement des responsabilités pour toutes les violations et pour des réparations pour les torts et dommages infligés, a ajouté le Ministre.  Il a appelé les institutions internationales à se tenir du côté des victimes et à faire respecter le principe de responsabilité et de compensation par les agresseurs, quelles que soient leur force et leur puissance. 

Le chef de la diplomatie polonaise a ensuite assuré que le soutien de la Pologne envers l’Ukraine est et restera inébranlable.  Des millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge dans notre pays, a-t-il souligné, relevant qu’en 2022, la Pologne a dépensé plus de neuf milliards de dollars, soit 1,5% de son PIB (produit intérieur brut) en assistance humanitaire pour les réfugiés en provenance d’Ukraine, selon une récente estimation de l’Organisation de coopération et développement économiques (OCDE).  Nous offrons un soutien et hébergeons plus d’une douzaine d’agences des Nations Unies et d’organisations internationales aidant l’Ukraine, a-t-il précisé.  Le Ministre a conclu en appelant la communauté internationale à soutenir l’Ukraine et défendre la Charte des Nations Unies, de sorte que la force de l’argument soit de mise, et non l’argument de la force. 

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de Hongrie, a dit que son pays accueille plus d’un million de réfugiés en provenance d’Ukraine.  La Hongrie, a promis le Ministre, continuera à apporter son aide humanitaire à ce peuple aussi longtemps que nécessaire.  Il a ajouté que le premier devoir de la communauté internationale est de sauver des vies et d’empêcher qu’il y ait davantage de victimes.  Comment y parvenir? s’est-il demandé.  La réponse, selon le Ministre, c’est que l’on ne peut sauver des vies grâce à des livraisons d’armes et aux jeux de sanctions.  Cette position place la Hongrie sous le feu des critiques, a reconnu le Ministre, en dénonçant les accusations insensées portées contre son pays.  Il a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à l’ouverture de pourparlers de paix, ainsi qu’à maintenir les canaux de communication. 

Il faut se concentrer sur la meilleure manière de mettre fin à cette guerre, pour éviter de nouvelles victimes et permettre de faire la paix, a encore prié le Ministre.  Dans cette perspective, il faut s’abstenir de déclarations susceptibles d’alimenter l’escalade.  Le chef de la diplomatie hongroise a prié pour qu’il n’y ait pas de confrontation directe entre l’OTAN et la Fédération de Russie.  « Nous en sommes à notre vingt-cinquième heure.  Nous sommes à court de temps.  Concentrons-nous sur la fin de cette guerre.  Demandons-nous comment l’arrêter.  Comment mettre en place un cessez-le-feu immédiat.  Comment lancer des négociations de paix qui permettront d’aboutir à une paix pérenne et juste », a plaidé en conclusion le Ministre.

Mme ANNALENA BAERBOCK, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a rappelé qu’hier, la voix de l’Assemblée générale a été unie, claire et inébranlable, avec 141 États Membres qui ont fait front commun pour la paix en Ukraine.  Une paix fondée sur les principes de la Charte.  Aujourd’hui, a-t-elle fait remarquer, les yeux du monde entier sont tournés vers le Conseil de sécurité auquel incombe le maintien de la paix et de la sécurité, avant de rappeler aux États Membres que loin d’être « un simple privilège, ceci est votre responsabilité », conformément à l’Article 24 de la Charte.

Or, la réalité,« amère », c’est que depuis le début de la guerre, il y un an, ce Conseil n’a pas été en mesure d’être à la « hauteur de cette responsabilité ».  C’est pourquoi la Ministre a pressé chaque État Membre de trouver le courage de faire ce que la majorité écrasante de l’Assemblée générale a fait: se dresser contre l’agresseur.  Le Président Putin spécule qu’à un moment donné, notre position claire contre sa guerre s’affaiblira.  Il pense qu’en maintenant le cap, il sera récompensé pour son agression impitoyable, a-t-elle poursuivi, énumérant les grandes souffrances que cette guerre cause également à son propre peuple: quelque 200 000 Russes déjà tués ou blessés; des centaines de milliers de Russes qui ont quitté leur pays parce qu’ils ne veulent pas faire partie de cette guerre; plus de 1 000 entreprises internationales qui se sont retirées de Russie, emportant avec elles une partie cruciale de la prospérité du pays.  Pour atteindre ses objectifs cyniques, le Président Putin risque l’avenir de son propre pays, s’est-elle emportée, estimant qu’une paix juste devrait également être dans l’intérêt de la population russe.

La Ministre s’est dite convaincue que ce n’est que lorsque le Président russe comprendra qu’il ne peut pas gagner cette guerre que la paix en Ukraine sera possible.  C’est pourquoi, a-t-elle assuré, « nous continuerons à soutenir l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra.  Politiquement.  Économiquement.  Avec des armes. »  À ceux qui ont des doutes sur le bien-fondé d’armer l’Ukraine, elle a répondu: où serait l’Ukraine aujourd’hui si nous n’avions pas soutenu son droit à se défendre, avec tant de partenaires internationaux?  Cela aurait signifié, plus de Boutcha, de Kharkiv, de Marioupol, de Bakhmout?  Quel message aurait été envoyé au monde? s’est-elle encore interrogée, refusant d’envisager une telle éventualité. 

Disant n’avoir aucune illusion quant à la possibilité de convaincre le représentant de la Fédération de Russie, ici présent, la Ministre s’est en revanche dite convaincue que ce Conseil pourra le forcer à transmettre à ses supérieurs que l’on « ne fermera pas les yeux sur Boutcha, Kharkiv, Marioupol et Bakhmout ».

M. EDGARS RINKĒVIČS, Ministre des affaires étrangères de la Lettonie, qui s’exprimait aussi au nom du Danemark, de lEstonie, de la Finlande, de l’Islande, de la Lituanie, de la Norvège et de la Suède, a déclaré que l’annexion illégale de la Crimée par la Fédération de Russie et l’invasion de l’Ukraine ont « piétiné les normes internationales et l’ordre fondé sur des règles ».  La Russie, membre permanent du Conseil de sécurité, a ainsi cherché à modifier les frontières d’un pays souverain par la force, ce qui constitue à ses yeux une menace « sérieuse » pour la paix et la sécurité internationales.  Il a appelé la Fédération de Russie à se conformer à l’ordonnance de la CIJ du 16 mars 2022, qui lui intime de suspendre immédiatement ses opérations militaires en Ukraine.  Afin de veiller à ce que la Russie retire ses troupes du territoire internationalement reconnu de l’Ukraine, nous devons fournir les moyens nécessaires à l’Ukraine, qui possède un droit inhérent à l’autodéfense en vertu de la Charte, a-t-il argué. 

Incapable de vaincre l’Ukraine sur le champ de bataille, la Fédération de Russie terrorise la population civile ukrainienne au moyen de massacres, de viols et de la déportation d’enfants, a dénoncé le Ministre.  Il a condamné dans les termes les plus forts les attaques délibérées contre les civils, les infrastructures critiques et les biens civils en Ukraine.  Selon lui, la Russie « doit être et sera tenue pour responsable de ses crimes », y compris le crime d’agression, afin de traduire en justice les dirigeants politiques et militaires qui ont déclenché cette guerre d’agression.  À cet égard, il a invité l’ONU à jouer un rôle significatif en faveur de la création d’un tribunal international chargé d’examiner cette question. 

Le Ministre a exprimé son appui à l’Initiative céréalière de la mer Noire et demandé à la Fédération de Russie de cesser de retarder le travail des équipes d’inspection.  Il a exhorté le Conseil à faire respecter la Charte des Nations Unies, fondement d’une paix juste et durable en Ukraine. 

M. RUSLAN BOLBOCEAN, Secrétaire d’État de la République de Moldova, a condamné l’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine et sa tentative d’annexion de territoires ukrainiens.  Exprimant sa tristesse face aux énormes pertes humaines, aux destructions d’infrastructures civiles et au déplacement d’innombrables Ukrainiens, il a indiqué que son pays a accueilli des centaines de milliers d’entre eux et poursuivra son soutien à l’Ukraine aussi longtemps que nécessaire.  En défendant sa terre et sa liberté, l’Ukraine défend aussi notre liberté et notre démocratie, a-t-il fait valoir, saluant « l’incroyable résistance » de ce pays voisin.  Le Secrétaire d’État a signalé à cet égard que, tandis que l’Ukraine résiste à cette invasion militaire, la République de Moldova est en première ligne d’une guerre hybride qui comprend, entre autres, le chantage au gaz, les cyberattaques, la propagande et la désinformation.  À plusieurs reprises, notre espace aérien a été violé par des missiles et des débris de missiles russes qui sont tombés sur notre territoire, s’est-il indigné, avant d’indiquer que son pays continuera d’exhorter la Fédération de Russie à retirer ses forces militaires et ses dépôts de munitions illégalement présents dans la région sécessionniste de Transnistrie.  Malgré tous ces risques, la République de Moldova reste attachée à son intégration à l’Union européenne, qui représente le meilleur moyen d’assurer la paix, la stabilité et la prospérité du pays, a ajouté la Secrétaire d’État.  En conclusion, il a salué le large soutien apporté hier par l’Assemblée générale à la résolution énonçant les principes d’une paix globale, juste et durable en Ukraine et a réaffirmé le soutien indéfectible de son pays à l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de son voisin ukrainien, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.

M. WOPKE HOEKSTRA, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, s’est exprimé au nom du Groupe des Amis de la responsabilité découlant de l’agression contre l’Ukraine, un ensemble de 49 États Membres qui, a-t-il dit, partagent la conviction que le pouvoir de la justice doit toujours prévaloir sur le pouvoir de la force.  La responsabilité et la justice pour l’Ukraine, pour les Ukrainiens et pour la communauté internationale dans son ensemble sont de la plus haute importance pour assurer une paix durable, a-t-il affirmé, saluant l’adoption, hier, par l’Assemblée générale d’une résolution qui souligne la nécessité d’assurer la responsabilité des crimes les plus graves au regard du droit international commis sur le territoire ukrainien.  L’Assemblée générale a une fois de plus démontré sa capacité d’agir, le Conseil de sécurité en ayant été empêché par l’un de ses membres permanents, a-t-il souligné. 

Le Ministre s’est ensuite félicité des initiatives déjà prises pour assurer la responsabilisation, parmi lesquelles le déploiement de missions médico-légales en Ukraine, l’ouverture d’une enquête par le Procureur de la CPI et la création d’un centre international pour la poursuite du crime d’agression, qui sera situé à La Haye.  Il a également applaudi la création de la Commission d’enquête indépendante des Nations Unies sur l’Ukraine et la mise en place du mécanisme de Moscou de l’OSCE, avant de saluer le travail en cours de la mission de surveillance des droits de l’homme, qui documente les violations depuis 2014, notamment les informations faisant état de violences liées au conflit.  Dans l’immédiat, le Ministre a appelé la Fédération de Russie à se conformer à l’ordonnance de la CIJ du 16 mars 2022, qui lui enjoint de mettre immédiatement fin aux opérations militaires qu’elle a commencées le 24 février 2022 sur le territoire de l’Ukraine.  « C’est la première étape pour mettre fin à la trop longue liste de crimes qui exigent justice », a déclaré le chef de la diplomatie néerlandaise, pour qui, au-delà de ce qui s’est déjà produit, il s’agit d’empêcher que de telles violations de la Charte des Nations Unies soient à nouveau commises, en Ukraine ou ailleurs. 

M. ANTONIO TAJANI, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de lItalie, a dénoncé le comportement inacceptable de la Russie qui a profondément ébranlé et questionné les racines de l’ordre international.  Il a dénoncé les propos de la délégation russe qui parle de l’Europe comme étant « l’esclave des États-Unis ».  « Nous sommes esclaves de la liberté, de la démocratie et des droits de de l’homme », a-t-il objecté, jugeant « inacceptable » ce qu’il a entendu ce matin. 

Nous avons besoin de plus de diplomatie, a plaidé le Ministre, ajoutant que l’Initiative céréalière de la mer Noire est un signe d’espoir pour répondre aux préoccupations mondiales et pour démontrer que le dialogue est possible.  Il a appelé au renouvellement de l’Initiative et à l’établissement rapide d’une zone de sécurité nucléaire autour de la centrale nucléaire de Zaporijia. 

En ces temps d’incertitude et de défis mondiaux, M. Tajani a dit parier sur un renforcement du rôle des Nations Unies.  Il a appelé à une Organisation plus représentative, démocratique, efficace, transparente et responsable.  Il a salué les nouveaux efforts et propositions visant à la paix, y compris le récent effort chinois.  Notre succès ou notre échec dépendra de notre engagement collectif envers les principes de la Charte des Nations Unies, a-t-il argué.  Avec ses partenaires et alliés, l’Italie est prête à soutenir la reconstruction de l’Ukraine et la restauration de son vaste patrimoine culturel intentionnellement ciblé par la Russie, a-t-il promis.

M. BUJAR OSMANI, Ministre des affaires étrangères de Macédoine du Nord et Président en exercice de lOrganisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE), a insisté sur l’importance de renforcer la justice et la lutte contre l’impunité.  Racontant les horreurs des attaques des forces militaires de la Fédération de Russie en Ukraine, il a dit que les découvertes et les enquêtes menées jusqu’à présent dans les différentes villes attaquées en Ukraine conduisent à la conclusion que des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ont été commis.  L’ampleur des abus sexuels commis et de la violence contre les femmes et les filles est également très préoccupante.  Les auteurs de ces crimes et violations des droits humains internationaux et du droit international humanitaire doivent être tenus pour responsables et traduits en justice, a insisté le Ministre.  Il a dans la foulée mis en exergue le Mécanisme de Moscou de l’OSCE pour établir les faits et les circonstances d’éventuels cas de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité afin de les présenter aux mécanismes de reddition de comptes ainsi qu’aux tribunaux internationaux. 

Par ailleurs, le Ministre a dit soutenir l’enquête lancée par le Procureur de la Cour pénale internationale à propos des crimes de guerre et de crimes contre l’humanité allégués sur le territoire de l’Ukraine.  Pour M. Osmani, il faut également utiliser et financer les mécanismes des droits de l’homme existants pour soutenir les processus de reddition de comptes.  Il a préconisé un meilleur usage du travail et des informations recueillis par les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, afin d’enquêter sur les violations des droits humains et les crimes connexes dans le contexte de la guerre d’agression contre l’Ukraine. 

Le Ministre a appelé à bloquer toute tentative politique susceptible de saper l’obligation de rendre des comptes pour les violations flagrantes commises.  Il a demandé que soit garanti l’accès à la justice aux victimes de violations des droits de l’homme dans cette « agression insensée » de la Fédération de Russie et que les responsables d’atrocités soient punis.  La Russie doit arrêter cette guerre et retirer ses forces et son équipement militaire du territoire ukrainien, a conclu le Ministre. 

M. JOSÉ MANUEL ALBARES BUENO, Ministre des affaires étrangères et de lUnion européenne et de la Coopération de l’Espagne, a estimé l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie d’autant plus inacceptable qu’elle émane d’un membre permanent de ce Conseil de sécurité, un organe auquel la Charte des Nations Unies confère la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Dès lors, chaque jour où les troupes russes restent sur le territoire ukrainien souverain et indépendant porte atteinte à cette responsabilité, a déploré le Ministre.  L’Espagne se joint donc aux nombreuses voix qui exigent le retrait immédiat, complet et sans condition de toutes les forces militaires russes de tout le territoire ukrainien et le retour aux frontières internationalement reconnues de l’Ukraine, a déclaré le Ministre arguant qu’aucune raison ne peut justifier cette agression. 

Poursuivant, il a exprimé, sa plus vive condamnation du bombardement aveugle par la Russie de cibles et infrastructures civiles essentielles, qui constitue, à ses yeux, une violation inacceptable du droit humanitaire international.  Plus de 8 000 civils ukrainiens ont été identifiés comme ayant été tués pendant la guerre et plus de 14 millions ont été déplacés, s’est-il indigné, évoquant des preuves alarmantes de violations massives des droits humains de la population ukrainienne.  Les responsables de ces actions très graves doivent rendre des comptes, ce que l’Espagne soutiendra sans réserve, a-t-il dit.  Le Ministre a, par ailleurs, décrié l’utilisation du droit de veto par la Fédération de Russie qui empêche le Conseil de sécurité d’exercer son rôle.  Il a dénié le droit à quiconque d’en abuser à ses propres fins, comme s’il s’agissait d’un chèque en blanc pour violer en toute impunité le droit international.  Cependant, a mis en garde le Ministre, ce veto n’empêchera pas la communauté internationale de réagir. 

M. JAN LIPAVSKÝ, Ministre des affaires étrangères de la République tchèque, a déclaré que son pays était celui qui accueille le plus grand nombre de réfugiés de guerre ukrainiens par habitant -près d’un demi-million- et l’un de ceux qui sont les touchés par les conséquences directes de la guerre d’agression non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine. 

Le Ministre a rappelé que, si l’agression à grande échelle de la Russie avait commencé il y a un an, son annexion illégale de la Crimée date d’il y a neuf ans.  « La Russie considère que les autres pays, leur liberté, leur démocratie ou même leur statut d’État ne sont rien d’autre que du butin à saisir dans le cadre de son ambition colonialiste et impérialiste », a-t-il dénoncé, alors que l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues ne sont pas négociables. 

Le Ministre a mis l’accent sur les conséquences mondiales de l’agression, parlant des ondes de choc provoquées sur les marchés mondiaux des matières premières, qui menacent de « conduire 50 millions de personnes au bord de la famine en Afrique et sur d’autres continents ».  Il a rappelé les frappes aériennes massives et délibérées sur des zones densément peuplées, des destructions d’infrastructures civiles essentielles, de villes et villages entiers anéantis, des atrocités commises contre la population civile. 

Rappelant la décision récente du Président Putin de suspendre la participation de la Fédération de Russie au traité New Start, il y a vu le signe que, pour le Président russe, « l’escalade est à l’ordre du jour », et a appelé à « collectivement empêcher la Russie de nous entraîner dans des horreurs similaires à celles des guerres mondiales », à défendre la Charte des Nations Unies et à garantir la responsabilité de tous les crimes relevant du droit international. 

Après avoir fait référence à la très large adoption, hier, de la résolution de l’Assemblée générale sur les « principes qui sous-tendent une paix globale, juste et durable en Ukraine », M. Lipavský a affirmé que le plan de paix présenté par le Président Zelenskyy est celui sur lequel il faut s’appuyer. 

M. GORDAN GRLIĆ-RADMAN, Ministre des affaires étrangères de la Croatie, a estimé que le lancement, il y a un an, de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Fédération de Russie était en fait une escalade dramatique de l’agression qui a commencé en 2014, avec l’occupation de la Crimée et de certaines parties du Donbass.  Les responsables des pertes en vies humaines, des destructions d’infrastructures civiles, des atrocités et des déplacements massifs de populations devront, selon lui, rendre des comptes pour leurs crimes.  La « misère » engendrée par l’agression russe ne s’est pas arrêtée aux frontières de l’Ukraine, a-t-il noté, elle s’est plutôt propagée dans le monde entier, exacerbant l’insécurité alimentaire et énergétique.  Cette guerre ne vise pas seulement à conquérir l’Ukraine, elle a également pour but « d’invalider » la Charte des Nations Unies et les principes mêmes du droit international pour laisser place à une « ère où la force brute et l’accaparement des terres sont la norme acceptée », a affirmé le Ministre. 

« L’armée russe a envahi l’Ukraine, et non l’inverse.  Rien ne peut cacher cette évidence », a encore relevé le Ministre.  Il y a peu, la Croatie a été victime d’une guerre similaire, « avec presque le même prétexte et la même justification cynique », a-t-il rappelé.  Dans cette situation difficile, chaque aide comptait.  « Nous n’acceptons pas la normalisation de cette guerre cruelle qui vise délibérément les civils.  La Russie a commencé cette guerre et elle est la seule à pouvoir l’arrêter en retirant ses troupes d’Ukraine », a-t-il conclu.

M. URMAS REINSALU, Ministre des affaires étrangères de lEstonie, a estimé que l’objectif du Kremlin –« rayer de la carte une Ukraine souveraine et démocratique »- n’avait pas changé.  Si, après une année de lutte courageuse, l’Ukraine mérite plus que jamais la paix, « il ne peut s’agir d’une paix à tout prix », a-t-il averti.  Ce qu’il faut, c’est une paix juste et durable, en pleine conformité avec la Charte des Nations Unies, qui maintient et renforce l’ordre international fondé sur des règles, avec l’ONU en son centre.  Une paix qui empêche le recours à la force pour redessiner les frontières internationales.  Ce sont exactement les mêmes paramètres que ceux pour lesquels l’écrasante majorité des États Membres des Nations Unies a voté hier en adoptant la résolution de l’Assemblée générale, a poursuivi le Ministre.  Et pour lui, « le plan de paix ukrainien est fondé sur les mêmes valeurs et principes universels ».  Il a donc appelé les membres des Nations Unies à soutenir le plan de paix en 10 points du Président Zelenskyy. 

Face aux critiques de certains à l’encontre de pays qui, comme l’Estonie, apportent un soutien militaire à l’Ukraine, le Ministre a rappelé que l’Article 51 de la Charte accorde à chaque pays le droit à l’autodéfense et ajouté que « nous devons collectivement veiller à ce que l’Ukraine puisse se défendre contre l’agresseur ».  Pour faire cesser les atrocités odieuses commises par la Russie, l’aide militaire de l’Estonie à l’Ukraine a atteint 1% de son PIB, a-t-il déclaré. 

Pour parvenir à une paix durable, il faut assurer une responsabilité totale, a déclaré M. Reinsalu, pour qui il faut « discréditer complètement l’agression en tant qu’instrument des relations internationales ».  Le Ministre a donc souhaité la création d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression en Ukraine au sein du système des Nations Unies.  « Nous ne pouvons pas laisser M. Putin se cacher dans une faille judiciaire », a-t-il lancé, ajoutant qu’il fallait tirer les leçons du passé et que les horreurs de la guerre dont nous sommes témoins aujourd’hui sont la conséquence tragique de l’impunité dont ont bénéficié les crimes commis par l’Union soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale.  L’Ukraine ne défend pas seulement son pays, son peuple et son droit à l’existence, elle défend aussi nos valeurs communes, l’ordre juridique international et la Charte des Nations Unies, a conclu le Ministre.

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