En cours au Siège de l'ONU

Le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien débat avec la société civile de mesures permettant de lutter contre l’impunité

Réunion – matin & après-midi
AG/PAL/1482

Le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien débat avec la société civile de mesures permettant de lutter contre l’impunité

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies et des contraintes horaires qui en résultent, l’intégralité du communiqué sera publiée ultérieurement)

Après avoir commémoré hier la Nakba, la « catastrophe » de 1948 -l’exode forcé de leurs terres des populations palestiniennes-, le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien s’est penché aujourd’hui sur les actions en justice intentées récemment par la société civile. Réfléchissant aux moyens de lutter contre l’impunité pour les crimes commis à l’encontre des Palestiniens, les participants ont également abordé la question de la possibilité d'un embargo sur les armes visant Israël et ont appelé à faire respecter la résolution demandant la fin de l’occupation du Territoire palestinien.

Panel II: « Les pratiques optimales pour arriver à la redevabilité et à la fin de la guerre à Gaza: actions juridiques récentes de la société civile et embargo sur les armes »

Ce matin, le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a poursuivi sa discussion avec des représentants de la société civile en mettant l’accent sur les actions juridiques récentes engagées par la société civile en faveur d’un embargo militaire contre Israël, de la redevabilité des entreprises qui entretiennent des relations commerciales avec Israël et du rôle des tribunaux et législations nationales.

Quatre panélistes se sont succédé à la tribune pour témoigner de leurs actions, à commencer par le Coordonnateur des politiques au Comité national palestinien pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BDS), qui dirige le mouvement mondial non violent œuvrant à la fin de la complicité avec le colonialisme, l’occupation militaire et l’apartheid d’Israël.  Basé à Jérusalem, M. Saleh Hijazi a pointé qu’Israël ne peut perpétrer ses crimes à Gaza et en Cisjordanie que grâce à la complicité de certains États, en première ligne les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne qui lui apportent un appui militaire et des renseignements.  Il y a d’autres États, a-t-il ajouté, qui maintiennent leurs relations commerciales avec Israël, et cela en dépit des appels de plus de 35 experts de l’ONU à rompre leurs relations commerciales avec les entités israéliennes qui opèrent au mépris du droit international. 

Le mouvement BDS soutient les mesures et actions engagées partout sur la planète pour demander des sanctions contre Israël, un embargo militaire et un boycott dans les domaines des sports et des universités, a expliqué M. Hijazi. Il a salué les résultats obtenus à ce stade, notamment en Colombie, en Irlande et en Espagne, avant d’inviter plus d’États à suivre cet exemple afin d’exclure toute relation avec les entreprises complices de violations graves de droits humains dans le Territoire palestinien occupé. Parmi les succès obtenus, il a mentionné entre autres la fermeture des supermarchés Carrefour en Jordanie à cause du boycott des produits israéliens.

L’importance de la redevabilité des entreprises, surtout dans le secteur de la défense, a été soutenue également par M. Shir Hever, Conseiller du Comité national de boycott pour la campagne d’embargo sur les armes.  Il a appelé les États à passer à l’action pour interdire toute exportation vers Israël de matériel militaire ou à double usage, d’intelligence artificielle et d’énergie.  S’adressant aux États qui continuent d’expédier du matériel militaire à ce pays, M. Hever les a prévenus:  « l’istoire vous jugera et, à terme, les tribunaux internationaux aussi ».  La retransmission en direct du génocide à Gaza restera une tache sombre dans l’histoire de l’humanité mais il n’est pas trop tard selon lui pour imposer à Israël un embargo militaire complet, tel que demandé par la Commission des droits de l’homme des Nations Unies.

Comme l’ont relevé de nombreux intervenants pendant la discussion, si le droit est limpide, le problème reste l’absence de volonté politique qu’il s’agisse des entreprises ou des gouvernements.  Sur ce point, ils ont reconnu que la pression de la rue est importante pour changer et infléchir les décisions politiques.  Les mérites d’une approche « du bas vers le haut », en faisant pression sur des élus locaux, des maires, des sénateurs et parlementaires ont été mis en avant par des interventions de la salle, qui ont souvent fait le parallèle avec le mouvement antiapartheid en Afrique du Sud. L’idée de revitaliser le Comité spécial contre l’apartheid des Nations Unies a également été avancée.

Leur emboîtant le pas, Mme Diala Shamas, avocate au Center for Constitutional Rights (CCR), a expliqué œuvrer contre les abus commis par le Gouvernement et les forces de l’ordre israéliens sous couvert de sécurité nationale, tant aux États-Unis qu’à l’étranger.  Dès le 18 octobre 2023, le Centre for Constitutional Rights avait envoyé un document à l’Administration Biden pour tirer la sonnette d’alarme face au réel risque de génocide à Gaza, a-t-elle signalé.  En l’absence de réaction, le Centre s’est tourné vers les tribunaux et a lancé un procès contre le Président Biden et le Secrétaire d’État Blinken pour complicité de génocide, mais le juge saisi de l’affaire a estimé ne pas avoir la compétence de statuer sur cette question « politique ».

Depuis, Mme Shamas se concentre sur la protection des défenseurs des droits des Palestiniens aux États-Unis « parce que le mouvement pour l’arrêt du génocide se solde aujourd’hui par des tentatives de déportation et de punition, voire de sanctions contre les universités et la Cour pénale internationale (CPI) ».  En tant qu’avocate, elle a donc décidé de représenter ceux qui sont ciblés par ces mesures, dont Mahmoud Khalil, l’étudiant de Columbia University arrêté il y a deux mois pour avoir soutenu les droits des Palestiniens.  Ces détentions font partie d’une politique générale visant à bâillonner ceux et celles qui condamnent les actions d’Israël et s’opposent à la complicité des États-Unis avec le génocide à Gaza, s’est-elle indignée en appelant à saisir les mécanismes régionaux et internationaux à défaut de pouvoir obtenir des résultats dans les tribunaux locaux.

Il faut que les États comprennent qu’aller à l’encontre du droit finira par aller contre leurs propres intérêts, a martelé Mme Shamas avant d’encourager les États arabes et du Sud à se décider à ne plus soutenir les États-Unis car seules des pressions politiques et commerciales permettront de mettre fin au soutien de ce pays « à la Nakba continuelle ».

Même son de cloche du côté de M. Jake Romm, de la Hind Rajab Foundation aux États-Unis, qui a été créée en 2024 par plusieurs avocats et militants bénévoles déterminés à utiliser les systèmes judiciaires nationaux et internationaux pour que les soldats israéliens répondent de leurs crimes de guerre, de leurs crimes contre l’humanité et de leur génocide en Palestine, en particulier dans la bande de Gaza. 

« Hind a été assassinée au vu et au su de tous - le monde a entendu ses derniers mots et a vu le carnage ».  Le génocide à Gaza est diffusé en direct non seulement par des Palestiniens documentant ce qui est, dans de nombreux cas, leurs derniers jours, mais également par les soldats israéliens, « sans honte, avec jubilation même », a rappelé l’avocat.  Sur ce point, un rabbin présent dans la salle a réagi en condamnant les actions des soldats israéliens, un « affront pour notre peuple » avant d’appeler à mettre fin « à la politisation de l’antisémitisme ».

Pourtant, malgré les preuves accablantes d’actes criminels de la part des Forces de défense israéliennes, aucun soldat ni fonctionnaire n’a encore eu à répondre de ses actes devant un tribunal national ou international, a constaté M. Romm avant de présenter les actions possibles, avec un vaste appareil logistique et opérationnel, afin d’agir contre des fonctionnaires parmi les plus hauts placés jusqu’aux soldats les moins gradés.  C’est ainsi que la Hind Rajab Foundation s’est engagée à rompre le cycle d’impunité en poursuivant devant les tribunaux nationaux et internationaux les soldats israéliens et les personnes ayant la double nationalité qui sont responsables d’avoir commis ou facilité ces crimes, quel que soit le lieu où ils vivent ou voyagent.

M. Romm a regretté qu’à ce stade, de nombreux États se contentent toujours de nommer ce génocide pour ce qu’il est, sans pour autant prendre d’autres mesures.  Les faits sont là et cela devrait suffire à inciter ces États à agir, a-t-il conclu.

À suivre...

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité pour les droits des Palestiniens commémore la Nakba sur fond de guerre à Gaza

423e séance – matin & après-midi
AG/PAL/1481

Le Comité pour les droits des Palestiniens commémore la Nakba sur fond de guerre à Gaza

Le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a commémoré, aujourd’hui, la « catastrophe » de 1948, à savoir l’exode forcé de leurs terres des populations palestiniennes, plus communément connue sous le nom de Nakba.  Au-delà de la fin de la guerre à Gaza, les intervenants ont unanimement plaidé pour la fin de l’occupation israélienne dans l’ensemble du Territoire palestinien, la création d’un État de Palestine indépendant et sa reconnaissance pleine et entière par l’ONU.

Intervenant au nom du Président palestinien Mahmoud Abbas, l’Observateur permanent de l’État de Palestine a affirmé que la guerre que mène actuellement Israël contre Gaza n’est que le prolongement des catastrophes de la Nakba qui se poursuit sans trêves depuis 1948.  « Cette tragédie est une honte pour l’humanité! » s’est-il exclamé. 

L’objectif d’Israël est de déplacer notre peuple et de le forcer à quitter la bande de Gaza en plus du vol continu de terres palestiniennes en Cisjordanie, a-t-il accusé.  Il a également exhorté les États Membres à soutenir et financer l’UNRWA, « témoin vivant de la Nakba » et « bouée de sauvetage » pour des millions de réfugiés palestiniens, mais aussi à lutter contre les « tentatives trompeuses » de mettre à mal son rôle mandaté par l’Assemblée générale.  Les souffrances du peuple palestinien sont aggravées par la prise pour cible de l’Office, a-t-il indiqué. 

La seule solution durable à cette crise réside dans le respect total du droit international, y compris l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice de 2024 déclarant illégale l’occupation israélienne des territoires palestiniens, a souligné à son tour le Vice- Président du Comité. 

La conférence de juin - occasion de soutenir la solution des deux États

Assurant que l’État palestinien est prêt à assumer toutes ses responsabilités politiques, économiques, sociales et sécuritaires à Gaza et en Cisjordanie, l’observateur palestinien a dit attendre des résultats tangibles de la Conférence internationale de haut niveau pour le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution des deux États qui se tiendra le mois prochain, au Siège des Nations Unies.

Pour le Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, cette conférence, demandée par l’Assemblée générale et coprésidée par la France et l’Arabie saoudite, sera l’occasion de soutenir une solution viable à deux États « avant qu’il ne soit trop tard ».

Qualifiant la situation à Gaza de « catastrophe sans fin » , M. Khaled Khiari a indiqué que depuis les terribles attentats terroristes perpétrés par le Hamas le 7 octobre 2023 et la détention continue d’otages, plus de 1,9 million de Palestiniens –soit plus de 85% de la population de Gaza– ont été déplacés de force, parfois à 10 reprises ou plus.  Gaza est désormais un « enfer humanitaire », s’est-il alarmé.  Parallèlement, depuis le début de l’année 2025, plus de 40 000 Palestiniens ont été déplacés en Cisjordanie occupée en raison d’opérations militaires israéliennes.

Les déplacements forcés doivent être rejetés sans équivoque, a exigé M. Khiari qui a appelé en outre à un cessez-le-feu immédiat et durable, à la libération sans délai de tous les otages, à la fin de l’expansion des colonies et à la reprise de négociations politiques crédibles, des demandes largement reprises à leur compte par les États Membres et la Ligue arabe.  À défaut, la promesse d’une solution à deux États risque de s’amenuiser jusqu’à disparaître, a-t-il mis en garde.

Avancées judiciaires importantes en faveur de la libération de la Palestine

Professeure de relations internationales à la Rutgers University, Mme Nour Erekat s’est indignée de l’apathie de la communauté internationale alors « qu’au jour 585 du génocide perpétré par Israël », 92% des bâtiments résidentiels de Gaza ont été détruits, 36 hôpitaux rendus inutilisables et l’entrée de denrées alimentaires et de produits de première nécessité rendue impossible.  Ce faisant, Israël ne se contente pas de tuer des Palestiniens aujourd’hui, mais menace l’avenir même du peuple palestinien, s’est-elle inquiétée.

Mme Erekat a par ailleurs fait observer que cette période de génocide a néanmoins été marquée par des avancées judiciaires importantes en faveur de la libération de la Palestine, évoquant notamment les mesures provisoires de la Cour internationale de Justice (CIJ) ainsi que la délivrance, par la Cour pénale internationale, des mandats d’arrêt contre Benjamin Netanyahu et Yoav Gallant. 

Dénonçant la « déférence sélective » de certains pays, dont les États-Unis, envers la CIJ sur la question du génocide des Palestiniens, Mme Erekat y a vu une tentative de se décharger de toute responsabilité.  En défendant Israël, les États-Unis menacent l’ensemble de la structure juridique établie depuis la Seconde Guerre mondiale, a -t-elle mis en garde.

Les travaux du Comité se sont poursuivis dans l’après-midi dans le cadre d’un échange avec la société civile sur la « Nakba continuelle ».

Discussion avec la société civile sur la « Nakba continuelle »

Avant de céder la parole aux intervenants de la société civile, le modérateur de cet échange et Observateur permanent de l’État de Palestine s’est réjoui de la mobilisation massive des étudiants, notamment aux États-Unis, en faveur de la cessation du conflit à Gaza et la cause du peuple palestinien. 

Cet échange a été marqué par l’intervention de M. Ahmed Masoud, auteur et enseignant anglo-palestinien qui a informé que sa belle-sœur et son neveu ont été tués aujourd’hui même par des frappes israéliennes.  « Aujourd’hui, je pleure leur vie », a-t-il déclaré, avant d’évoquer les souvenirs de son enfance marquée par la faim et le froid dans un camp de réfugiés. 

Intervenant par visioconférence, il a également expliqué avoir décidé de ne pas intervenir devant le Comité en personne par crainte d’être arrêté à la frontière américaine en raison sa prise de position concernant la situation à Gaza. 

Directrice de Zochrot, une organisation non gouvernementale (ONG) israélienne qui défend le droit au retour des Palestiniens, Mme Maya Yavin insiste sur le droit au retour des Palestiniens.  Des solutions pratiques existent et doivent être négociées par les réfugiés Palestiniens eux-mêmes, a estimé l’intervenante qui a par ailleurs proposé de dépasser la solution des deux États et de privilégier la réalisation du droit inaliénable à l’autodétermination. 

Elle a également appelé les États Membres à révoquer le statut d’ONG de la Jewish National Fund en la tenant responsable pour son rôle dans le nettoyage ethnique du peuple palestinien.  Les États doivent aussi soutenir la mise en place d’un mécanisme international robuste pour punir l’apartheid et appliquer le droit au retour, a-t-elle ajouté, avant de réclamer la suspension d’Israël des Nations Unies en raison de ses violations persistantes du droit international. 

« La Nakba doit être vue comme un crime et un génocide », a déclaré à son tour Mme Zaha Hassan, chargée de mission à la Carnegie Endowment for International Peace, en relevant que les crimes commis ces 19 derniers mois sont bien plus graves que ceux qui a été perpétrés en près de huit décennies. 

De son côté, la Directrice exécutive adjointe de l’Arab Center Washington a constaté que les implications juridiques de la Nakba sont limpides mais que la communauté internationale refuse de donner aux Palestiniens les moyens de se défendre.  Il est essentiel de combattre la déshumanisation et le racisme envers les Palestiniens, a souligné Mme Tamara Kharroub.  Il est temps de reformer le système de justice internationale et d’appliquer les avis et les sentences de la CIJ. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: lorsque la question des disparus n’est pas traitée, des sociétés entières sont incapables d’aller de l’avant, selon le Sous-Secrétaire général Khiari

9917e séance – après-midi
CS/16063

Conseil de sécurité: lorsque la question des disparus n’est pas traitée, des sociétés entières sont incapables d’aller de l’avant, selon le Sous-Secrétaire général Khiari

À la demande des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni, le Conseil de sécurité a tenu, cet après-midi, une séance consacrée aux personnes portées disparues dans le cadre d’un conflit armé, à la lumière de la résolution 2474 (2019) qui exige le respect de la dignité et la protection des civils dans ces circonstances.  Un débat qui a suscité de vives émotions après les témoignages de membres des familles de disparus, l’un sud-coréen et l’autre Israélien, présents à la table du Conseil.  Alors que le Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, M. Mohamed Khaled Khiari, a fait le point sur cette question qui touche directement un certain nombre de pays, plusieurs intervenants ont demandé la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour promouvoir et plaider en faveur du retour des otages décédés.

Le Sous-Secrétaire général a lancé un appel pressant à la pleine mise en œuvre de la résolution 2474 en prévenant que « lorsque la question des personnes disparues n’est pas traitée, non seulement les individus, mais également les sociétés entières sont incapables d’aller de l’avant ».  Il a donné l’exemple du coût humain de la guerre du Golfe de 1991, qui se fait encore sentir sachant que 315 ressortissants koweïtiens et de pays tiers sont encore portés disparus.  De même, le travail du Comité des personnes disparues à Chypre illustre l’importance que revêt la question des personnes disparues, non seulement pour les familles directement touchées, mais aussi pour des communautés entières.  M. Khiari a aussi évoqué la question en ce qui concerne l’Ukraine, le Myanmar, la péninsule coréenne et la Syrie, sans oublier l’Iraq. 

Plus en arrière dans le temps, il y a 75 ans, la Directrice générale de la Korean War Abductees’ Family Union (« Union des familles des personnes enlevées pendant la guerre de Corée »), qui a livré son témoignage, a indiqué qu’elle avait 18 mois lors de l’enlèvement de son père par les soldats de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Mme Sung Eui Lee a fait savoir que malgré les multiples preuves, la RPDC n’avait jamais reconnu son crime d’enlèvement.

Inquiétudes pour les otages à Gaza et les Palestiniens disparus

Revenant à 2024, M. Khiari a cité les chiffres du Comité international de la Croix-Rouge (CICR): il y aurait eu l’an dernier 56 000 nouveaux cas de personnes disparues.  Il a rappelé notamment que 58 otages israéliens sont toujours à Gaza, dont 35 présumés morts, tout comme des milliers de Palestiniens sont portés disparus, dont beaucoup seraient enterrés et sous les décombres.  De graves inquiétudes persistent également concernant les milliers de Palestiniens détenus par les autorités israéliennes depuis octobre 2023, de nombreux parmi eux étant toujours portés disparus.

Il a salué la récente libération d’Edan Alexander, un ressortissant américano-israélien qui était retenu en otage à Gaza, y voyant une source d’espoir même si sur les 58 otages israéliens, 35 sont présumés morts, comme Itay Chen.  Le père de celui-ci, M. Ruby Chen, a estimé qu’en refusant de fournir des informations ou d’autoriser l’accès aux otages, même pour les organismes humanitaires comme le CICR, le Hamas viole clairement la résolution 1474 et le droit international.  « Nous voulons le retour d’Itay, et son état physique, quel qu’il soit, ne le rend pas moins otage », a-t-il clamé en brandissant sa photo.

Le représentant d’Israël a remercié ce père de famille pour son témoignage poignant, avant de saluer la présence de la mère et du frère de Hadar Goldin, militaire israélien tué et enlevé en 2014 lors d’un cessez-le-feu négocié par l’ONU et les États-Unis.  Onze ans après, le Hamas n’a toujours pas restitué le corps à la famille, s’est indigné le délégué israélien avant de rendre hommage à Mme Goldin qui, par son plaidoyer pour les otages, est « devenue la conscience que ni l’ONU, ni ce Conseil et tant d’autres au sein de la communauté internationale n’ont réussi à trouver ».  Le délégué a d’ailleurs demandé au Secrétaire général d’inclure, dans son prochain rapport, une section documentant chaque otage toujours détenu par le Hamas, chaque corps volé, chaque Israélien disparu depuis le 7 octobre et chaque soldat tombé au combat avant cette date dont les restes n’ont pas encore été rendus. 

Pour le délégué, l’obligation morale de rendre les morts à leurs familles n’est ni un principe politique ni une norme occidentale, mais « un devoir universel » partagé par toutes les nations et ancré dans toutes les religions.  Or, « non seulement le Hamas a violé cette obligation de la manière la plus odieuse, mais il en a fait une véritable industrie », s’est-il indigné, dénonçant une « économie de la mort ». 

Selon l’Algérie en revanche, « ceux qui appliquent ce genre de politique ne devraient pas jouer à la victime et donner des leçons ».  La délégation a évoqué les cas de Palestiniens disparus du fait de l’occupation, notant même que la justice israélienne a validé ces actes au motif que ces dépouilles peuvent servir de monnaie d’échange.  Indigné lui aussi, le Panama a vu dans ces disparitions un symptôme des inégalités structurelles du système international et d’une géopolitique qui n’applique pas toujours ses principes avec la même cohérence dans les différents contextes. 

Appels à l’action pour retrouver les disparus, morts ou vivants

Les États-Unis ont également exhorté le Hamas à libérer immédiatement les otages et à restituer au plus vite les dépouilles de ceux qui ont été assassinés pour permettre à leur famille de faire leur deuil.  La délégation américaine a ensuite dénoncé l’attitude de la RPDC, « l’un des États les plus répressifs au monde », dans le différend sur les personnes enlevées pendant la guerre de Corée. 

Lui emboîtant le pas, la République de Corée a rappelé qu’environ 100 000 civils avaient été enlevés par la RPDC au cours d’un conflit ayant duré trois ans.  « Compte tenu du vieillissement des personnes enlevées et de leurs familles, le règlement de cette question urgente ne peut plus être différé », a argumenté la délégation, avant d’exhorter une fois de plus la RPDC à résoudre tous les problèmes relatifs aux personnes enlevées, aux détenus et aux prisonniers de guerre non rapatriés.

En plus du strict respect du droit international existant pour traiter des personnes disparues dans le cadre de conflits armés, la République de Corée a demandé d’explorer des approches novatrices.  Elle a cité en exemple une initiative des médias sud-coréens qui avaient lancé, en 1983, l’émission de télévision intitulée « À la recherche de familles dispersées ».  Ce programme, diffusé en direct pendant 140 jours, a permis de réunir 10 000 familles, séparées depuis la guerre de Corée, qui ne savaient même pas que leurs proches vivaient dans la région.  Un tel succès que l’UNESCO a inscrit ce programme au Registre Mémoire du monde.  La Chine a, elle, appelé à utiliser les technologies de pointe pour identifier et retrouver les disparus.

« Personne sur cette terre ne doit être oublié », a renchéri le Koweït qui a évoqué « la plaie profonde » des 308 personnes toujours introuvables depuis l’invasion iraquienne ayant conduit à la guerre d’Iraq de 1991.  La délégation iraquienne a d’ailleurs assuré de son engagement à œuvrer aux côtés du CICR pour élucider le sort des disparitions survenues sur son territoire, sans oublier de demander au Secrétaire général de désigner un haut responsable à l’ONU qui serait chargé de la question. 

Ukraine, Fédération de Russie, Chypre: des disparus, anciens ou récents

Du côté de l’Europe, le Royaume-Uni a rappelé que des milliers d’Ukrainiens sont portés disparus, dont des dizaines de milliers d’enfants expulsés de force vers la Fédération de Russie. La France a rappelé qu’aux termes du Statut de Rome relatif à la Cour pénale internationale (CPI), les disparitions forcées sont constitutives de crimes contre l’humanité lorsqu’elles sont commises dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile. 

La Fédération de Russie a regretté que le Sous-Secrétaire général n’ait pas mentionné les personnes disparues sur son territoire lors de l’incursion ukrainienne à Koursk.  Si 378 personnes ont été retrouvées, les autorités de Kiev retiendraient selon elle beaucoup d’autres en otage, comme des « marchandises vivantes » à échanger.  De même, plusieurs millions de citoyens soviétiques sont toujours portés disparus après la Seconde Guerre mondiale, sans que le Conseil ne se soit penché sur leur sort, a signalé la délégation. 

Un autre cas de disparition a été rappelé par la délégation de Chypre: à la suite des violences intercommunautaires des années 1960 et de l’invasion turque de 1974, plus de 2 000 personnes –Chypriotes grecs et Chypriotes turcs– ont disparu.  Le sort de nombre d’entre elles reste inconnu à ce jour, a souligné la délégation qui a accusé la Türkiye de refuser de rendre compte des disparus, d’enquêter sur leur disparition et de fournir à leurs familles des informations sur les circonstances de leur décès. 

La Türkiye s’est intéressée au nombre important de Chypriotes turcs portés disparus entre 1963 et 1974.  La plupart étaient des civils, alors que leurs homologues grecs étaient majoritairement militaires, a souligné la délégation qui a accusé « les Chypriotes grecs de présenter des informations déformées en parlant d’occupation de la partie nord de l’île ».  Elle a rappelé que « l’intervention légitime de 1974 a été menée conformément au Traité de garantie, à la suite du coup d’État déclarant l’annexion de l’île par la Grèce ».

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Protection des civils en période de conflit armé

Exposé

M. MOHAMED KHALED KHIARI, Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, a relevé que depuis l’adoption de la résolution 2474 du Conseil de sécurité en 2019, le nombre de personnes touchées par les conflits armés, y compris celles portées disparues, n’a cessé d’augmenter.  Rien qu’en 2024, le Comité international de la Croix Rouge (CICR) a enregistré 56 000 nouveaux cas de personnes disparues.  Il n’existe pas de chiffres exhaustifs concernant les personnes portées disparues dans les conflits, mais nous savons que la situation est désastreuse, a-t-il dit.  Il a rappelé que le droit international humanitaire interdit les disparitions forcées et exige des parties à un conflit qu’elles prennent toutes les mesures possibles pour recenser les personnes portées disparues, tout en consacrant le droit des familles à obtenir des informations sur le sort de leurs proches.

M. Khiari a brossé un tableau de la situation à travers le monde.  Ainsi, les hostilités en cours entre Israël et les groupes armés palestiniens continuent de susciter de graves préoccupations.  Il a salué la récente libération d’Edan Alexander, un ressortissant américano-israélien qui était retenu en otage à Gaza, y voyant une source d’espoir.  Il a toutefois rappelé que 58 otages israéliens, dont 35 présumés morts, seraient toujours portés disparus à Gaza.

Par ailleurs, des milliers de Palestiniens, dont des enfants, sont toujours portés disparus, nombre d’entre eux étant ensevelis sous les décombres, et leurs familles cherchent toujours des informations sur leur sort et leur lieu de détention.  De plus, Israël continue de retenir les dépouilles de Palestiniens décédés, y compris celles de personnes qui seraient enterrées dans des tombes anonymes ou numérotées, ce qui empêche les familles d’obtenir des informations.  De graves inquiétudes persistent également concernant les milliers de Palestiniens détenus par les autorités israéliennes depuis octobre 2023, dont beaucoup sont toujours portés disparus.

En Ukraine, à la suite de l’invasion russe de grande ampleur en 2022, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme signale qu’un grand nombre de civils ukrainiens dans les zones sous occupation russe ont été placés en détention, certains étant apparemment détenus au secret.  Selon l’agence onusienne, certains de ces cas pourraient constituer des disparitions forcées.  Un nombre indéterminé de civils ukrainiens, dont des enfants, auraient également été transférés vers la Fédération de Russie, a—t-il déclaré.

Au Myanmar, a-t-il poursuivi, des cas de personnes présumées disparues ou disparues se sont produits dans tout le pays depuis le coup d’État militaire de 2021.  Au moins 2 000 personnes seraient mortes en détention militaire.  « Dans la péninsule coréenne, nous encourageons toutes les parties à poursuivre les efforts antérieurs et à poursuivre le rapatriement des dépouilles mortelles de la guerre de Corée dans leurs pays respectifs », a-t-il aussi plaidé.  Concernant la Syrie, il a salué l’engagement des autorités intérimaires syriennes et les a exhortées à collaborer avec l’Institution indépendante chargée de la question des personnes disparues en République arabe syrienne.

Le Sous-Secrétaire général a ensuite souligné que le coût humain de la guerre du Golfe de 1991 est encore présent, avec 315 ressortissants koweïtiens et de pays tiers toujours portés disparus.  De même, le travail du Comité des personnes disparues à Chypre illustre l’importance que revêt la question des personnes disparues, non seulement pour les familles directement touchées, mais aussi pour des communautés entières.

Lorsque la question des personnes disparues n’est pas réglée, cela empêche non seulement des individus mais des sociétés entières d’aller de l’avant, a mis en garde M. Khiari avant d’appeler à la pleine mise en œuvre de la résolution 2474. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: en Libye, les enquêtes de la CPI sur les crimes commis en détention connaissent des rebondissements judiciaires

9916e séance – matin
CS/16062

Conseil de sécurité: en Libye, les enquêtes de la CPI sur les crimes commis en détention connaissent des rebondissements judiciaires

C’est une séance événementielle à plus d’un titre que le Conseil a tenue ce matin sur la Libye, malgré l’absence sur place du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), contraint de s’exprimer par visioconférence après qu’un visa pour s’y rendre en personne lui a été refusé par les États-Unis.  M. Karim Khan, qui a présenté l’état d’avancement des investigations qu’il a dirigées au cours des six derniers mois dans ce pays d’Afrique du Nord, a été accusé de partialité par la délégation américaine, suivie par la Fédération de Russie, qui a brandi les allégations de violences et harcèlement sexuels portées contre le Procureur. 

Cette réunion a également eu lieu le jour même où la Libye, qui n’est pas partie au Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI, a officiellement accepté l’exercice de la compétence de la Cour, une décision dont se sont félicités plusieurs membres du Conseil.  « Il s’agit d’une étape importante vers une plateforme renouvelée d’action collective en faveur de la justice », s’est réjoui M. Khan, en mettant en garde les auteurs de crimes dans ce pays.  Secondé par l’Algérie, le délégué libyen a toutefois rappelé que c’est bien « la justice libyenne qui est compétente au premier chef ». 

« Sur les côtes de la Méditerranée, il y a une boîte noire de souffrances, que personne n’a voulu ouvrir.  Une boîte noire qui contient les cris et la douleur persistante de certaines des personnes les plus vulnérables, tant à l’ouest qu’à l’est du pays », s’est ému le Procureur avant d’évoquer les progrès dans la lutte contre l’impunité en Libye, y voyant le résultat du dynamisme de son bureau et des enquêtes que mène son équipe en Libye. 

Il a toutefois modéré son enthousiasme en décrivant le revers subi par son bureau après l’émission, le 18 janvier 2025, du tout premier mandat d’arrêt s’agissant des crimes commis dans des centres de détention libyens.  Aussitôt localisé et arrêté à Turin, l’accusé, M. Osama Elmasry Njeem, a été remis en liberté et expulsé par les autorités italiennes, une décision qui a suscité la consternation des victimes et des organisations de la société civile libyennes.  L’Italie s’est justifiée en invoquant des « préoccupations sécuritaires nationales », mais également le « principe de complémentarité de la juridiction pénale de la Cour ».  Rome, dont le soutien à la CPI serait sans faille, n’a pas échoué à respecter ses obligations en matière de coopération avec elle, a assuré le représentant italien. La Russie a toutefois vivement dénoncé le « deux poids, deux mesures » qui permettrait à des pays européens d’« ignorer » un mandat d’arrêt. 

M. Njeem a été renvoyé en Libye, « là où, selon nous, il a commis des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, notamment des meurtres, des actes de torture et des persécutions », s’est désolé le Procureur. Conscient que l’émission du mandat d’arrêt le visant et son arrestation ont provoqué une « onde de choc » parmi les milices libyennes, le Procureur a tenu à dire que leurs craintes sont fondées.  Il a ainsi annoncé que son bureau demande activement que d’autres mandats d’arrêt soient émis contre les auteurs de crimes commis dans les lieux de détention. 

Par ailleurs, il s’est félicité de la demande d’assistance faite par la National Crime Agency (NCA), l’agence britannique de lutte contre la criminalité organisée, pour que la CPI lui fournisse des informations à l’appui d’une enquête sur les avoirs de M. Njeem détenus au Royaume-Uni.  « Grâce à cette collaboration, la NCA a été en mesure de geler des comptes et des biens d’une valeur totale de plus de 12 millions de livres », a fait savoir M. Khan, ce qu’a confirmé le représentant britannique. S’il s’est également félicité que M. Njeem ait été démis de ses fonctions à la tête du Département des opérations et de la sécurité au sein de la police judiciaire libyenne, le Procureur a cependant encouragé les autorités libyennes à remettre cet individu à la CPI. 

Il a ensuite évoqué le sort de M. Ibrahim Al-Dersi, un député de l’est de la Libye victime de disparition forcée, dont le seul crime est « d’avoir osé élever la voix au nom du peuple libyen ».  Le délégué libyen a vigoureusement dénoncé les sévices que cet élu endure, et qui ont été révélés dans une vidéo.  Pour parvenir à percer cette autre « boîte noire » que sont les enlèvements dans ce pays, le Procureur en a appelé à la coopération des États parties au Statut de Rome pour appréhender les responsables. 

Un sentiment auquel ont fait écho la Sierra Leone et la France, mais pas les États-Unis, pour qui la CPI est une « institution politisée biaisée » contre Washington et son « allié » Israël.  La délégation américaine a d’ailleurs menacé de prendre des sanctions contre ceux qui facilitent les actions de la CPI visant les États-Unis et ses alliés, dont Israël. 

La Fédération de Russie s’est quant à elle lancée dans un réquisitoire contre le « prétendu » Procureur de la « prétendue » CPI, « tribunal fantoche » et « véritable instrument de l’Occident collectif ». La représentante russe a aussi évoqué les allégations de violences sexuelles visant M. Khan dans l’exercice de ses fonctions, et qui devraient selon elle lui interdire de s’exprimer devant le Conseil.  La Sierra Leone a au contraire déploré que le Procureur Khan ne puisse être physiquement présent à cette séance en raison du refus du « pays hôte » de lui accorder un visa.  Un déni qui l’empêche de rencontrer de hauts responsables onusiens et affecte le fonctionnement même du Conseil de sécurité, a-t-elle observé.  Le représentant sierra-léonais a en outre dénoncé les attaques et sanctions visant des responsables de la CPI et leurs assistants, s’émouvant d’un climat d’« hostilité » visant la Cour. 

Alors que les membres du Conseil favorables à la Cour ont réitéré ce matin la nécessité de la soutenir financièrement, le Procureur a considéré qu’il était temps d’accélérer les enquêtes et de démontrer la capacité de son bureau à remplir le mandat que lui a été confié.  M. Khan s’est engagé à ce que celles menées dans le cadre de plusieurs axes prioritaires soient achevées d’ici à la fin de 2025, et les autres d’ici au premier trimestre de 2026. 

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La situation en Libye

Exposé

M. KARIM KHAN, Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a déclaré qu’au cours des six derniers mois, une étape majeure avait été franchie avec l’émission du premier mandat d’arrêt public concernant des crimes commis dans des centres de détention en Libye.  « Sur les côtes de la Méditerranée, une boîte noire de souffrances s’ouvre, que personne n’a voulu ouvrir », a-t-il déclaré.  Une boîte noire qui contient les cris et la douleur persistante, à l’heure où nous parlons, de certaines des personnes les plus vulnérables, tant à l’ouest qu’à l’est du pays.  Nos enquêtes méthodiques à ce sujet se sont appuyées sur de multiples sources de preuves interconnectées, fondées sur nos partenariats avec de nombreux acteurs. 

Cet espoir s’est rapidement transformé en frustration dans les jours qui ont suivi, lorsque M. Osama Elmasry Njeem, qui fut responsable des établissements pénitentiaires de Tripoli, où des milliers de personnes ont été détenues pendant de longues périodes, a été renvoyé en Libye par l’Italie. « Renvoyé là où, selon nous, il a commis des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, notamment des meurtres, des actes de torture et des persécutions. »  Le retour de M. Njeem sur les lieux de ses crimes suscite la consternation parmi les victimes, a relaté le Procureur. 

Nous savons que l’arrestation de M. Njeem et l’émission du mandat d’arrêt le visant avaient provoqué une onde de choc au sein des milices et des auteurs de ces crimes, à travers toute la Libye.  Leurs craintes sont justifiées, a assuré le Procureur: son bureau demande activement que des mandats d’arrêt soient émis contre d’autres individus liés aux crimes commis en détention dans ce pays. 

En outre, la CPI a répondu à une demande d’assistance de la National Crime Agency (NCA) afin de fournir des informations à l’appui d’une enquête civile britannique sur les avoirs de M. Njeem détenus au Royaume-Uni: « grâce à cette collaboration, la NCA a obtenu des ordonnances de gel de comptes et de biens d’une valeur totale de plus de 12 millions de livres.  L’enquête de la NCA est en cours », s’est félicité M. Khan. Il s’est également félicité que M. Njeem ait été démis de ses fonctions à la tête du Département des opérations et de la sécurité judiciaire de la police judiciaire.  Il a cependant encouragé les autorités libyennes à remettre cet individu à la CPI afin qu’il y soit jugé pour les crimes qu’il aurait commis contre le peuple libyen. 

Le Procureur a ensuite évoqué le sort de M. Ibrahim El-Dirsi, un député de l’est de la Libye, dont le crime est « d’avoir osé élever la voix au nom du peuple libyen ».  Sa disparition à Benghazi est emblématique des souffrances causées par les disparitions forcées et la détention arbitraire en Libye.  Il a espéré que, grâce à l’attention continue accordée par son bureau aux crimes commis dans les centres de détention en Libye, à l’émission de nouveaux mandats d’arrêt, sous scellés ou publics, et à une coopération renforcée avec les partenaires libyens, « nous parviendrons à mettre fin à de tels crimes et à percer cette boîte noire ». 

Pour ce faire, la coopération des États pour appréhender les responsables est essentielle en vertu du Statut de Rome, a-t-il précisé. 

S’agissant des crimes commis contre les migrants et ceux liés aux opérations de 2014-2020, l’équipe du Procureur a organisé plus de 145 réunions avec 80 organisations de la société civile, tandis que la Procureure adjointe Nazhat Shameem Khan a participé à une deuxième réunion importante avec 38 autres ONG afin de discuter de la manière dont le Bureau pourrait collaborer plus efficacement avec ses partenaires.  Relayant leurs inquiétudes, il a considéré qu’il était temps d’accélérer les enquêtes et démontrer la capacité du Bureau du Procureur à remplir le mandat que lui a confié ce Conseil.  « Conformément à cet impératif, je peux confirmer que les enquêtes menées dans le cadre de plusieurs axes prioritaires, conformément au mandat que vous lui avez confié, seront achevées d’ici à la fin de 2025, et que les autres axes d’enquête, conformément au mandat du Conseil, seront achevés d’ici au premier trimestre 2026. »

M. Khan a enfin annoncé qu’aujourd’hui même, le Greffier de la Cour pénale internationale avait reçu une déclaration de la Libye conformément à l’article 12(3) du Statut de Rome: « il s’agit d’une étape importante vers une plateforme renouvelée d’action collective entre la CPI et la Libye en faveur de la justice », ce dont il s’est félicité.  L’engagement du Gouvernement libyen témoigne d’une nouvelle volonté de coopérer et de mettre la justice au service d’un avenir meilleur, s’est réjoui le Procureur. La présentation de cette déclaration signifie que les auteurs de crimes en Libye doivent être conscients d’un partenariat renouvelé entre la Libye et la CPI pour rendre justice aux victimes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen: l’Envoyé spécial voit dans la cessation des hostilités entre les États-Unis et les houthistes une opportunité de promouvoir le processus politique

9915e séance – matin
​CS/16061

Yémen: l’Envoyé spécial voit dans la cessation des hostilités entre les États-Unis et les houthistes une opportunité de promouvoir le processus politique

L’Envoyé spécial pour le Yémen a, ce matin devant le Conseil de sécurité, salué l’annonce faite le 6 mai d’une cessation des hostilités entre les États-Unis et les houthistes et y a vu l’opportunité de faire avancer un processus dirigé et contrôlé par les Yéménites eux-mêmes, afin de répondre aux défis « immenses » du pays.  « Le statu quo est intenable », a-t-il affirmé lors d’une séance au cours de laquelle les délégations ont également débattu de la place des femmes dans les efforts de paix et de la situation humanitaire critique dans le pays.

M. Hans Grundberg a qualifié l’annonce du 6 mai de « désescalade importante et nécessaire en mer Rouge et au Yémen » tout en indiquant que le pays demeure traversé par les tensions régionales.  Il a en effet appelé la récente attaque des houthistes contre l’aéroport Ben Gurion en Israël et la riposte israélienne contre l’aéroport de Sanaa notamment.  C’est une escalade dangereuse, a déclaré M. Grundberg, en appelant les parties à protéger les civils et les infrastructures civiles. 

Au vu de la défiance entre les parties et de la gravité de la situation économique, l’Envoyé spécial a convenu que la poursuite d’un processus politique pourrait être un objectif « naïf et peu réaliste ».  Or, « ce n’est pas le cas », a-t-il souligné, notant que les parties ont d’ores et déjà agréé les éléments fondamentaux de ce que pourrait être un processus politique au Yémen: un cessez-le-feu à l’échelle nationale, des mesures pour répondre aux défis humanitaires et économiques pressants et un processus politique inclusif.  « Ces engagements doivent être respectés en vue d’une paix pérenne. » 

De même, M. Grundberg a souligné qu’une paix durable au Yémen ne pourra résulter que d’un engagement international et d’une approche de long terme, exhortant à « redoubler d’efforts pour offrir une alternative crédible à la guerre et une vision pour le Yémen allant au-delà du statu quo et de la stagnation ».

Une position partagée par le Danemark qui a estimé que le récent accord entre les États-Unis et les houthistes offre l’espoir « d’un chemin vers la désescalade et le dialogue ».  Cet accord servira de base à l’objectif ultime de consolidation de la paix et de la stabilité au Yémen, a appuyé la République de Corée, la Slovénie estimant pour sa part que toute désescalade est un pas dans la bonne direction.  La France, la Grèce ou encore le Panama ont par ailleurs condamné les attaques des houthistes contre Israël et souligné la nécessité de protéger la sûreté maritime et la liberté de navigation en mer Rouge.

« Grâce à une approche internationale coordonnée, nous continuerons d’œuvrer à un endiguement efficace des capacités des houthistes », a appuyé le Royaume-Uni, tout en saluant la récente désescalade des tensions.  De leur côté, les États-Unis ont estimé que leurs frappes contre les houthistes ont mis à mal des infrastructures qui soutenaient les objectifs terroristes de ces derniers et permis en outre le rétablissement de la navigation dans la mer Rouge.

La capitulation des houthistes est un succès de notre approche, a déclaré la délégation, qui a ajouté que la poursuite des frappes dépend de ces derniers qui, a-t-elle ajouté, « ne veulent plus combattre parce qu’ils sont épuisés ». 

Une position contestée par la Fédération de Russie qui a mis en doute l’efficacité de telles actions, en rappelant l’« expérience désastreuse » de la précédente Administration américaine face aux houthistes.  Selon elle, les bombardements prolongés ne conduisent qu’à une dégradation encore plus rapide de la situation humanitaire.  « Washington semble avoir pris conscience de la futilité de son approche, comme en témoigne le récent accord conclu avec les houthistes », a-t-elle tranché, tout en regrettant qu’Israël ait pris le relais des bombardements au Yémen. 

Sans cautionner les actions d’Ansar Allah, la délégation russe a rappelé qu’elles « répondent aux souffrances persistantes de la population civile de la bande de Gaza », principalement en raison du blocus humanitaire de l’enclave par Israël et des opérations militaires en cours.  La Chine n’a pas dit autre chose en rappelant que les tensions en mer Rouge sont liées à la situation à Gaza.  « Un cessez-le-feu permanent à Gaza est capital pour une paix durable dans la région », a renchéri la Somalie, au nom des A3+ (Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana).

Saluant les efforts déployés pour protéger la mer Rouge et le détroit de Bab el-Mandab, le délégué du Yémen a estimé que mettre fin à la menace houthiste va de pair avec un soutien au Gouvernement pour lui permettre d’exercer son autorité sur l’ensemble du territoire.  Il a de nouveau demandé à la communauté internationale de classer les houthistes comme organisation terroriste et d’assécher leurs sources de financement. Condamnant en outre, comme la majorité des orateurs, les arrestations arbitraires de membres de l’ONU, d’organisations humanitaires et du corps diplomatiques par les houthistes, le délégué a affirmé que ces derniers ne cesseront pas ce chantage sans une réaction internationale forte.

La détérioration de la situation humanitaire a également été abondamment évoquée au cours de cette séance, à commencer par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Tom Fletcher, qui a indiqué que la moitié des enfants yéménites, soit 2,3 millions, souffrent de malnutrition et 600 000 autres de malnutrition sévère.  L’an dernier, le Yémen a enregistré plus d’un tiers des cas de choléra dans le monde et 18% des décès qui en découlent, tout en étant le théâtre de l’une des pires épidémies de rougeole au monde, a relevé M. Tom Fletcher. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a par ailleurs expliqué que le plan d’intervention humanitaire pour 2025 est financé à hauteur d’à peine 9%, soit moins de la moitié de la somme reçue l’année dernière à la même période.  « Les coupes se font durement ressentir.  Des gens meurent », s’est-il alarmé.

Les A3+ ont soutenu l’appel à renforcer la réponse humanitaire pour 2025, tout en demandant que les opérations d’aide ne soient pas politisées.  Il faut accroître l’assistance humanitaire, a renchéri la Chine, appuyée par le Yémen.  Le Danemark a rappelé avoir financé à hauteur de 200 millions de dollars les opérations humanitaires, tandis que le Royaume-Uni a fait savoir que près de 1,5 million de femmes et enfants au Yémen ont bénéficié de son aide.

La situation des femmes a été le dernier axe de la réunion, le Conseil entendant une intervention de la Directrice de pays pour le Yémen du Center for Civilians in Conflit (CIVIC).  Mme Dina el-Mamoun a indiqué que les conséquences les plus dévastatrices de la crise au Yémen sont souvent subies par les femmes et les filles.  Les violences sexistes sont en hausse, souvent perpétrées en toute impunité, et les services de base vitaux, y compris une réponse adéquate aux violences sexistes, restent inaccessibles à des millions de personnes, a-t-elle dit.  Trois Yéménites déplacés par le conflit sur 4 sont des femmes et des enfants. 

Dans de nombreux cas, des filles de moins de 18 ans sont cheffes de famille et tentent de survivre dans des camps sans abri ni protection adéquats.  Dans le même temps, Mme el-Mamoun a relevé que les femmes sont en première ligne des interventions humanitaires, de la résolution communautaire des conflits et des initiatives de consolidation de la paix. Rien qu’en 2024, les organisations dirigées par des femmes ont apporté un soutien vital à plus de 2 millions de Yéménites, s’est-elle félicitée, tout en faisant état d’une augmentation inquiétante des menaces, du harcèlement et de la détention des défenseuses des droits humains, des travailleuses humanitaires et des artisanes de la paix. 

Elle a demandé que la participation pleine, égale et significative des femmes à toutes les étapes du processus politique soit garantie.  Cela implique une représentation d’au moins 30% dans toutes les négociations de paix et dans la gouvernance postconflit, a insisté Mme el-Mamoun.  Appuyé par la Grèce et la Slovénie notamment, le Danemark a également souhaité une pleine participation des femmes aux efforts de paix et pourparlers intra-yéménites, ainsi que le respect de ce quota de 30% arrêté lors de la conférence de dialogue national.  Enfin, le Panama a condamné les restrictions à la liberté de circulation des femmes et à leur accès aux services de base.

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La situation au Moyen-Orient

Exposé

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a salué l’annonce faite le 6 mai d’une cessation des hostilités entre les États-Unis et les houthistes, voyant une désescalade importante et nécessaire en mer Rouge et au Yémen après la reprise, le 15 mars, des frappes des États-Unis contre les zones contrôlées par les houthistes.  Il a rappelé que le Yémen demeure traversé par les tensions régionales, en mentionnant l’attaque houthiste contre l’aéroport Ben Gourion en Israël et la riposte israélienne contre l’aéroport de Sanaa notamment.  C’est une escalade dangereuse, a-t-il dit, en appelant les parties à protéger les civils et les infrastructures civiles.  M. Grundberg a estimé que l’annonce du 6 mai est une opportunité pour faire avancer un processus dirigé et contrôlé par les Yéménites eux-mêmes.  « Les défis auxquels le pays doit faire face sont immenses, de la profonde défiance entre les parties, dont certaines se prépareraient à la guerre, à un effondrement économique imminent », a-t-il signalé. 

L’Envoyé spécial a convenu que la poursuite d’un processus politique au vu de tels troubles pourrait être un objectif « naïf et peu réaliste ».  « Je suis ici pour expliquer ce que n’est pas le cas. »  Le fait est que les parties ont d’ores et déjà agréé les éléments fondamentaux de ce que pourrait être un processus politique au Yémen: un cessez-le-feu à l’échelle nationale, des mesures pour répondre aux défis humanitaires et économiques pressants et un processus politique inclusif, a déclaré M. Grundberg, soulignant que ces engagements doivent être respectés en vue d’une paix pérenne ».  Il a également reconnu que les défis gagnent en complexité, certains venant à douter de la pertinence de la feuille de route.  « Ma réponse demeure inchangée: le Yémen a encore besoin des éléments de cette feuille de route tels qu’un cessez-le-feu, une reprise économique et un processus politique inclusif pour aller de l’avant. »  Il a souligné la nécessité de nouvelles garanties afin d’encourager les parties, tant l’environnement a changé depuis la fin 2023.  « Les Yéménites veulent aller de l’avant parce que le statu quo est intenable. »  

L’Envoyé spécial a indiqué que le Yémen ne connaît pas encore la paix, même si les lignes de front peuvent apparaître figées.  Le soutien continu de la communauté internationale est nécessaire pour aider les Yéménites à bâtir un pays stable, prospère et sûr.  Il a ensuite de nouveau condamné la détention arbitraire par les houthistes de membres de l’ONU, de la société civile et de missions diplomatiques, avant de saluer la récente libération de membres de l’ambassade des Pays-Bas.  Les houthistes doivent libérer tous les détenus sans conditions.  Une paix durable au Yémen ne pourra résulter que d’un engagement international et d’une approche de long terme, a insisté l’Envoyé spécial.  « Nous devons redoubler d’efforts pour offrir une alternative crédible à la guerre et une vision pour le Yémen allant au-delà du statu quo et de la stagnation. » 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: face aux « conditions inhumaines » imposées par Israël aux civils de Gaza, un plan alternatif de distribution de l’aide fait débat

9914e séance – après-midi
CS/16060

Conseil de sécurité: face aux « conditions inhumaines » imposées par Israël aux civils de Gaza, un plan alternatif de distribution de l’aide fait débat

Réuni cet après-midi à la demande de ses membres européens (Danemark, France, Grèce, Slovénie et Royaume-Uni), soutenus par l’Algérie, pour examiner la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza, le Conseil de sécurité a été informé par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Thomas Fletcher, des « conditions inhumaines » qu’Israël impose aux civils du Territoire palestinien occupé, singulièrement à Gaza, où, selon la Directrice du Bureau de liaison de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à New York, Mme Angélica Jácome, « le risque de famine est imminent ». 

Depuis plus de 10 semaines, rien n’est entré à Gaza: ni nourriture, ni médicaments, ni eau, ni tentes, a constaté M. Fletcher, précisant en outre que des centaines de milliers de Palestiniens ont, une fois de plus, été déplacés de force et confinés dans des espaces de plus en plus restreints, 70% du territoire de l’enclave se trouvant soit dans des zones militarisées par Israël, soit sous le coup d’ordres de déplacement.  Dans ce contexte, il a estimé que le « mode de distribution conçu par Israël » -et appuyé par les États-Unis-, qui consisterait à contourner l’architecture existante gérée par l’ONU et ses partenaires humanitaires, créerait « un précédent inacceptable pour l’acheminement de l’aide ». 

Un mécanisme d’aide alternatif articulé autour d’une entité privée

Rappelant qu’en vertu du droit international humanitaire, Israël, en tant que Puissance occupante, doit traiter les civils avec humanité et s’abstenir de transférer, déporter ou déplacer de force la population civile d’un territoire occupé, le Secrétaire général adjoint a mis en garde contre des modalités de distribution qui excluraient les personnes handicapées, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les blessés, tout en provoquant de nouveaux déplacements.  Ce faisant, Israël « conditionne l’aide à des objectifs politiques ou militaires » et « fait de la famine un argument de négociation », a accusé M. Fletcher, avant d’exposer les efforts déployés par l’ONU pour expliquer aux autorités israéliennes les conditions minimales de leur engagement sur la base des principes humanitaires fondamentaux. 

Articulé autour d’une entité privée, la Gaza Humanitarian Foundation, ce nouveau mécanisme constituerait le moyen le plus sûr d’assurer l’acheminement de l’aide sans que le Hamas ne la détourne, ont fait valoir les États-Unis en exhortant l’ONU à poursuivre les discussions sur cette possible solution.  Assurant que ladite fondation, dotée de sa propre force de sécurité, s’est engagée à fournir l’aide dans le respect des principes humanitaires, dont la neutralité et l’humanité, la délégation a indiqué que Washington a envoyé des hauts représentants en Israël pour travailler sur ces nouvelles modalités qui visent à permettre la fourniture de l’aide aux « non combattants » à Gaza. 

« Nous ne permettrons plus que le mécanisme humanitaire qui alimente des organisations terroristes perdure », a pour sa part prévenu le représentant d’Israël, qui s’est dit « heureux » des efforts entourant la mise en place de ce nouveau mécanisme.  Il a toutefois regretté que le Secrétaire général de l’ONU l’ait déjà « balayé d’un revers de la main » au motif que l’Organisation ne peut participer à un dispositif qui ne respecterait pas les principes d’impartialité, d’humanité, d’indépendance et de neutralité.  « La situation est d’autant plus ironique que le précédent mécanisme foulait au pied ces principes », a-t-il relevé, jugeant « consternant que l’ONU refuse de travailler avec des États qui offrent des solutions réelles » et préfère « préserver le cadre humanitaire qui sert le Hamas », aux dépens des otages et de la population de Gaza. 

Pour ceux qui doutent encore de l’intention d’Israël de détruire le peuple palestinien à Gaza, « cette famine provoquée en apporte la preuve ultime », a fulminé l’Observateur permanent de l’État de Palestine, selon lequel le plan de « soi-disant distribution de l’aide humanitaire » poursuit les mêmes objectifs illégaux par d’autres moyens.  Il a noté à cet égard que ce projet israélien a été rejeté par toutes les agences des Nations Unies et toutes les organisations humanitaires, « car il ne fait que perpétuer l’utilisation de l’aide à des fins militaires, en poussant des civils et des humanitaires désespérés dans des zones militarisées pour recevoir ou distribuer l’aide au péril de leur vie, en comptant les calories, en excluant de nombreuses personnes, souvent les plus vulnérables, et en soumettant davantage la population ». 

Rejet quasi unanime de l’initiative israélo-américaine

La plupart des membres du Conseil ont partagé un même rejet du plan israélo-américain.  Le Royaume-Uni a indiqué qu’il ne soutiendra « aucun mécanisme d’aide visant à atteindre des objectifs politiques ou militaires, ou mettant en danger des civils vulnérables ».  Les modalités envisagées par Israël vont à l’encontre du droit international et ne permettraient pas de répondre aux besoins des populations, a abondé la France, avant de réaffirmer son soutien aux acteurs humanitaires opérant à Gaza, en particulier l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  « Il incombe à Israël de leur permettre d’opérer. »     

« En promouvant cette initiative, les dirigeants israéliens appellent de fait les structures de l’ONU à devenir complices de leur propre opération militaire », a dénoncé la Fédération de Russie, considérant qu’il serait préférable d’ouvrir les points de passage frontaliers pour fournir une aide efficace aux Gazaouites « otages de ces décisions politiques et militaires ». L’aide humanitaire ne doit pas être militarisée, a renchéri la Chine, pour qui il importe que cette assistance respecte les principes d’impartialité, d’indépendance et de neutralité. 

Sur la même ligne, la Somalie s’est élevée contre la « proposition avancée par Israël », qui contrevient aux principes de neutralité et d’impartialité humanitaires, porte atteinte au rôle des Nations Unies et de ses agences, et viole les mesures provisoires contraignantes émises par la Cour internationale de Justice.  Ce « soi-disant mécanisme humanitaire » risque de transformer l’aide en un instrument de coercition et de déplacements forcés, a ajouté le Pakistan, tandis que le Guyana jugeait inacceptable que les normes et règles existantes soient « bouleversées par des propositions qui ne satisfont pas aux principes humanitaires et porteront atteinte à la dignité des civils ».

À son tour, la Slovénie a rejeté « tout modèle qui ne répond pas aux critères minimaux d’un soutien humanitaire fondé sur des principes », avant de réitérer son soutien sans équivoque au système de distribution de l’aide mis en œuvre par l’ONU et ses partenaires humanitaires, conformément au droit international humanitaire.  Plus partagée, la Grèce a appelé à veiller à ce que tout plan proposé respecte les principes fondamentaux du droit international humanitaire, tout en rappelant que l’ONU a affirmé à plusieurs reprises sa volonté d’intensifier la livraison de fournitures et de services essentiels une fois le blocus levé. 

Plus de 2 millions de personnes confrontées à un risque de famine

Exigée par la quasi-totalité des membres du Conseil, la levée de ce blocus est d’autant plus urgente que, selon le dernier aperçu du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire, rendu public hier, près de 2,1 millions de personnes à Gaza font face à un « risque critique de famine » après des mois de conflit, des déplacements de masse et de graves restrictions à l’accès humanitaire.  Selon la Directrice du Bureau de liaison de la FAO à New York, 500 000 personnes, soit une personne sur cinq dans l’enclave, sont entrées en phase 5 du Cadre précité, le stade le plus sévère. 

« Si le blocus humanitaire et commercial devait se poursuivre, le pire scénario pourrait advenir, conduisant au non-accès à des denrées, à l’eau, aux médicaments et à d’autres éléments nécessaires à la survie », a expliqué Mme Angélica Jácome, non sans rappeler qu’avant le 7 octobre 2023, Gaza connaissait un taux de malnutrition faible, comparable à celui des pays européens.  Alors que la résolution 2417 (2018) du Conseil a réaffirmé la responsabilité commune de la protection des civils et de leurs biens, qui est cruciale pour prévenir la famine, la Directrice a averti du risque de voir près de 71 000 enfants de moins de 5 ans gravement dénutris à Gaza dans les 11 prochains mois. 

Ces chiffres, en a déduit l’Algérie, montrent qu’un « crime systémique d’affamement de la population palestinienne » est perpétré et que « l’auteur est connu de tous ».  Fustigeant l’indifférence face à cette situation insupportable, la délégation a constaté que « la seule chose qui peut rentrer dans Gaza aujourd’hui est la mort ».  La Sierra Leone a, elle, rappelé les mots du Secrétaire général selon lesquels la bande de Gaza est devenue « un cimetière d’enfants ».  En tant que Conseil, nous devons empêcher la normalisation de ces immenses souffrances, a-t-elle plaidé, condamnant toute mesure qui s’apparente à un « châtiment collectif ». 

De son côté, Israël a dénoncé la « désinformation » contenue dans les rapports du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire, qui, a-t-il pointé, répètent à tort depuis le début du conflit que Gaza est confronté à la famine.  Or, « les analyses confirment qu’il n’y a pas de famine à Gaza », a affirmé son délégué, reprochant au Cadre d’utiliser des sources onusiennes qui ne reflètent qu’un tiers de l’aide livrée à Gaza et ignorent les mises en garde émises par le Gouvernement israélien. 

Ces propos n’ont pas empêché une majorité de membres de se féliciter de la libération de l’otage américain Edan Alexander, qui, comme l’a relevé l’Observateur permanent de l’État de Palestine, a été obtenue grâce aux efforts des États-Unis, du Qatar et de l’Égypte.  À l’instar du Royaume-Uni, ils ont estimé qu’un accord de cessez-le-feu offrirait le meilleur espoir de mettre fin au calvaire des otages et de leurs familles, d’alléger les souffrances des civils, de mettre fin au contrôle du Hamas sur Gaza et d’ouvrir la voie à une solution à deux États.  Appelant aussi à soutenir le plan arabe de reconstruction de Gaza, la France a formé le vœu que le voyage en cours du Président Trump dans la région permette des progrès en ce sens. 

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La situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne

Exposé

M. THOMAS FLETCHER, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a commencé par demander aux membres du Conseil de sécurité de « réfléchir un instant aux mesures que nous dirons aux générations futures avoir prises pour mettre fin aux atrocités du XXIe siècle dont nous étions quotidiennement témoins à Gaza ». Il a dit craindre que la réponse ne se résume en ces mots vides: « nous avons fait tout ce que nous pouvions ».  Le haut fonctionnaire a ensuite constaté qu’aujourd’hui, Israël impose « délibérément et sans vergogne » des conditions inhumaines aux civils dans le Territoire palestinien occupé.  Ainsi, a-t-il rappelé, depuis plus de 10 semaines, rien n’est entré à Gaza: ni nourriture, ni médicaments, ni eau, ni tentes.  De plus, des centaines de milliers de Palestiniens ont, une fois de plus, été déplacés de force et confinés dans des espaces de plus en plus restreints, 70% du territoire de Gaza se trouvant soit dans des zones militarisées par Israël, soit sous le coup d’ordres de déplacement. 

Évoquant la situation humanitaire dans l’enclave, M. Fletcher a averti que chacun des 2,1 millions de Palestiniens de la bande de Gaza est menacé de famine et qu’un sur cinq risque de mourir de faim.  Malgré le financement de la nourriture qui aurait pu les sauver, les rares hôpitaux ayant survécu aux bombardements sont débordés, a-t-il expliqué, ajoutant que le personnel médical ayant survécu aux attaques de drones et de snipers ne parvient pas à faire face aux traumatismes et à la propagation des maladies. 

Alors que l’hôpital européen de Gaza à Khan Younès a été bombardé aujourd’hui, il a assuré que l’ONU et ses partenaires ont « un plan » pour mener une action humanitaire à grande échelle à Gaza, conformément aux principes fondamentaux d’humanité, d’impartialité, d’indépendance et de neutralité. « Mais Israël nous refuse l’accès, faisant passer son objectif de dépeuplement de Gaza avant la vie des civils », a-t-il déploré, avant de dénoncer le maintien du blocus, la poursuite des attaques contre les travailleurs humanitaires, les violations des privilèges et immunités des Nations Unies et les restrictions imposées aux organisations internationales et non gouvernementales. 

Rappelant qu’en vertu du droit international humanitaire, Israël, en tant que puissance occupante, doit traiter les civils avec humanité et ne doit pas transférer, déporter ou déplacer de force la population civile d’un territoire occupé, le Secrétaire général adjoint a observé que le mode de distribution de l’aide conçu par Israël exclut les personnes handicapées, les femmes, les enfants, les personnes âgées et les blessés.  En outre, il provoque de nouveaux déplacements, expose des milliers de personnes à des dangers et crée un précédent inacceptable pour l’acheminement de l’aide.  Ce faisant, Israël « conditionne l’aide à des objectifs politiques ou militaires » et « fait de la famine un argument de négociation », a accusé M. Fletcher. 

Face à ce « spectacle cynique », il a rappelé que l’ONU a rencontré 12 fois –et encore aujourd’hui– les autorités israéliennes pour discuter des modalités proposées et expliquer les conditions minimales de son engagement sur la base des principes humanitaires fondamentaux.  Il a également rappelé que le Secrétaire général a exposé le droit international pertinent dans ses conclusions à la Cour internationale de Justice (CIJ) et que les résolutions du Conseil ont fermement condamné la famine des civils comme méthode de guerre et le refus illégal de l’accès humanitaire. 

Dans ce contexte, M. Fletcher a constaté qu’au-delà de Gaza, « une violence effroyable s’intensifie également en Cisjordanie, où la situation est la pire depuis des décennies ».  Il a fait état de méthodes de guerre militaires, d’un recours excessif à la force, de déplacements forcés, de démolitions et de restrictions de mouvements, tout en rappelant que « les colonies s’étendent et la violence des colons se poursuit à des niveaux alarmants, parfois avec le soutien des forces israéliennes ».  Alors que des journalistes palestiniens, des représentants de la société civile et des particuliers montrent ces destructions en direct, nombre d’entre eux sont pris pour cible et tués en raison de leur témoignage, a-t-il ajouté.

Relevant que les travailleurs humanitaires internationaux ont été « la seule présence civile internationale à Gaza » et ont informé le Conseil de manière très détaillée des dommages considérables causés aux civils dont ils sont témoins, M. Fletcher a indiqué que la CIJ « examine maintenant si un génocide est en cours dans l’enclave ».  Or ses conclusions risquent d’arriver « trop tard », a-t-il dit, non sans constater que les précédents examens de la conduite de l’ONU dans les cas de violations massives du droit international humanitaire et des droits humains « ont souligné notre incapacité collective à dénoncer l’ampleur des violations commises ». 

Cette dégradation du droit international est selon lui « corrosive et contagieuse ».  C’est pourquoi il a appelé le Conseil à exiger des autorités israéliennes d’arrêter de tuer et de blesser des civils, de lever leur blocus et de laisser les humanitaires sauver des vies; et du Hamas et des autres groupes armés palestiniens, de libérer tous les otages immédiatement et sans condition. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: le Forum des Nations Unies sur les forêts achève une vingtième session qui fut « un espace de confiance et d’amitié vers des objectifs communs »

Vingtième session
10e séance plénière* – matin
ENV/DEV/2069

ECOSOC: le Forum des Nations Unies sur les forêts achève une vingtième session qui fut « un espace de confiance et d’amitié vers des objectifs communs »

Les travaux de la vingtième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF) a pris fin ce matin, après cinq jours de travaux.  Les participants au conclave annuel de cet organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC) ont échangé sur diverses questions relatives à la gestion durable des forêts, en se focalisant sur les moyens de renforcer la mise en œuvre du Plan stratégique des Nations Unies sur les forêts (2017-2030). 

Le Président de la session, M. Ismail Belen (Türkiye), a salué ce qui fut « un espace de confiance, d’amitié et de travail en vue d’atteindre les objectifs communs ».  Il a rappelé que les forêts se présentent aujourd’hui comme une fondation pour la paix, la vie et l’espoir. 

Il est vrai que cette session a lieu alors que le monde connaît des temps incertains, a souligné la Directrice du secrétariat du FNUF, Mme Juliette Biao.  C’est d’ailleurs pourquoi elle a appelé les délégations à redoubler d’efforts pour que le Plan stratégique 2017-2030 soit mis en œuvre.  Pour y parvenir, elle a exhorté les États à mettre la main à la poche pour soutenir davantage le secrétariat du FNUF et le fonds d’affectation spéciale qui lui est consacré. 

Avant de mettre fin à ses travaux, le Forum a décidé de tenir du 11 au 15 mai 2026 au Siège de l’ONU sa vingt et unième session, dont il a approuvé l’ordre du jour provisoire (E/CN.18/2025/L.1).  La Nouvelle-Zélande a exprimé le souhait que le Partenariat de collaboration sur les forêts puisse prendre part aux réunions plénières du Forum pour les prochaines sessions. 

Le projet de rapport (E/CN.18/2025/L.3) de la session a également été présenté par la Rapporteuse, Mme Maria Sokolenko (Fédération de Russie), qui entend le finaliser ultérieurement avec le soutien du secrétariat. De même, le résumé du Président qui servira de contribution du FNUF au forum politique de haut niveau pour le développement durable de 2025, sous les auspices de l’ECOSOC, sera finalisé en tenant compte des observations des délégations. 

Quelques délégations ont saisi cette occasion pour commenter le résumé de la présidenceLa délégation des États-Unis a souhaité que ledit résumé tienne compte, au sujet du possible ajout de cinq postes relevant du budget ordinaire, d’un rééquilibrage éventuel des postes du Département des affaires économiques et sociales (DESA). S’agissant du bureau du Réseau mondial de facilitation du financement forestier qu’il est proposé de créer à Beijing, la délégation américaine a souhaité qu’il soit rappelé au secrétariat la demande de mise à jour des avancées du projet formulée lors de la dix-neuvième session. Enfin, elle a rappelé son opposition aux références faites aux objectifs de développement durable (ODD) et à l’Accord de Paris. 

L’Argentine a proposé un amendement d’une partie du résumé de la présidence, alors que le Royaume-Uni a prévenu qu’il enverrait des observations écrites sur les paragraphes 12, 17 et 25 du document.

Au chapitre 4 du résumé, la Pologne, au nom de l’Union européenne (UE), a souhaité qu’il soit rappelé l’importance d’une utilisation durable des forêts dans le cadre des économies sylvicoles.  Concernant le chapitre 7, elle a jugé que le texte pourrait être plus équilibré pour refléter les discussions, avant d’insister pour qu’apparaisse sa contribution sur l’importance de l’implication des grands groupes et autres parties prenantes pertinentes pour faire progresser les efforts en matière de gestion durable des forêts.  Enfin, elle regretté que le résumé ne mentionne pas le soutien de l’UE à la recommandation qui concerne la prochaine session du Forum. 

Plusieurs délégations, notamment la Nouvelle-Zélande au nom des délégations du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), le Brésil et le Zimbabwe, au nom de la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe), ont informé vouloir soumettre des observations écrites pour qu’elles figurent dans le résumé.  Le Libéria s’est également réservé le droit de faire des commentaires, avant que le Président ne rappelle que les délégations ont encore une semaine pour faire des observations au résumé. 

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* En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse n’a pas pu couvrir les séances 4 à 9.

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Cinquième Commission: le Contrôleur de l’ONU détaille la situation financière difficile de l’Organisation

Soixante-dix-neuvième session,
33e séance plénière – matin
AG/AB/4498

Cinquième Commission: le Contrôleur de l’ONU détaille la situation financière difficile de l’Organisation

Ce matin, la Cinquième Commission de l’Assemblée générale, chargée des questions administratives et budgétaires a entendu un long exposé du Contrôleur de l’ONU, M. Chandru Ramanathan, sur la situation financière de l’Organisation.  Il n’a pas fait mystère des difficultés actuelles en rappelant ce chiffre: les 2,4 milliards de dollars restant impayés au 30 avril 2025 sur un budget annuel de 3,5 milliards.

Au titre du budget ordinaire, le Contrôleur a pointé les fluctuations considérables dans la collecte des recettes mensuelles, rendant difficile l’engagement des fonds à temps pour une mise en œuvre efficace du budget.  Ainsi, en avril 2025, le taux de recouvrement était à son niveau le plus bas des sept dernières années, a-t-il dit, avant d’évoquer les mesures de trésorerie rigoureuses mises en place par l’Organisation. « Pour 2025, nous visons une réduction des dépenses de 600 millions de dollars tant que nous n’avons pas la certitude d’avoir la trésorerie pour respecter nos obligations jusqu’à la fin décembre. »

Le Contrôleur des Nations Unies a rappelé qu’au 30 avril 2025, 101 États Membres avaient payé l’intégralité de leurs contributions au budget ordinaire de l’ONU, soit 4 de moins qu’à la même période l’an dernier.  Il a remercié en particulier les 49 qui l’ont fait dans les délais prévus par les règles financières de l’ONU, soit dans les 30 premiers jours de l’année, et les 152 États Membres ayant versé l’intégralité de leurs contributions pour 2024.  Par ailleurs, 12 États Membres ont versé leurs contributions de 2025 en avance (Arménie, Estonie, Gambie, Hongrie, Israël, Kazakhstan, Lituanie, Maroc, Pologne, Portugal, Slovaquie, Ukraine). 

S’agissant du budget des opérations de maintien de la paix, débattu par les délégations plus tôt dans la semaine, le Contrôleur de l’ONU a précisé que 4,6 milliards de dollars ont été payés fin avril 2025 pour un budget de 5,2 milliards.  Les actions que les États Membres prendront au cours de deux prochains mois seront déterminantes, a-t-il dit, en mettant en garde contre le risque d’une incapacité des missions à s’acquitter de leurs mandats.  S’agissant des tribunaux internationaux, M. Ramanathan a précisé qu’au 30 avril 2025, 79 millions de dollars n’avaient pas été payés, 79 États Membres s’étant acquittés de l’intégralité de leurs contributions, contre 83 au 30 avril 2024. 

En conclusion, le Contrôleur a rappelé que la bonne santé financière de l’Organisation dépend de la capacité des États Membres à s’acquitter de leurs obligations en temps et en heure.  « Le Secrétariat reste pleinement engagé auprès des membres pour atteindre cet objectif. »  L’Organisation ne pourra résoudre la crise de liquidités actuelle qu’avec le soutien des États Membres, a tranché M. Ramanathan, en appelant à en faire davantage pour prévenir les manques cycliques de liquidités.

Les délégations débattront de la situation financière de l’ONU lors de la séance publique prévue le lundi 19 mai à 10 heures.

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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité de l’information: le consensus prévaut, une victoire du multilatéralisme face à la montée de la désinformation

Quarante-septième session
4e séance – matin
PI/2328

Comité de l’information: le consensus prévaut, une victoire du multilatéralisme face à la montée de la désinformation

Ce matin, le Comité de l’information a achevé les travaux de sa quarante-septième session annuelle en adoptant par consensus son rapport final qui contient deux résolutions et qui sera transmis à l’Assemblée générale.  Ce document sera publié ultérieurement.

Saluant ce résultat, le Directeur de la Division de l’information et des médias du Département de la communication globale (DCG), M. Ian Phillips, a exprimé la reconnaissance de la Secrétaire générale adjointe, Mme Melissa Fleming, aux délégués qui ont travaillé sans relâche pour parvenir à ce consensus à un moment où les défis mondiaux se multiplient. 

« Même si vous êtes venus aux réunions du Comité avec des positions différentes et qu’il vous a parfois semblé que le fossé était trop large pour être comblé, le multilatéralisme a fonctionné », s’est-il réjoui.  Et c’est d’ailleurs le multilatéralisme en tant que moyen pour relever les défis mondiaux que le DCG cherchera à mettre en valeur pendant la quatre-vingtième session de l’Assemblée générale, a-t-il annoncé.

L’Union européenne a toutefois souligné la nécessité de ne jamais perdre de vue le lien étroit entre la recherche d’un consensus et la non-politisation des travaux du Comité.  Elle a appelé à approfondir la compréhension de son mandat principal et des procédures qui guident ses travaux, notamment ceux de son groupe de travail à composition non limitée: « à mesure que la résolution devient plus longue et complexe, nous risquons d’en diluer l’objectif principal.  Nous devons éviter les redondances et maintenir un mandat clair et précis », a mis en garde son représentant.

Revenant sur une préoccupation majeure exprimée par les délégations tout au long de cette session du Comité -la lutte contre la désinformation et la mésinformation, la manipulation de l’information et l’utilisation sûre, sécurisée et fiable de l’intelligence artificielle (IA)- M. Phillips a appelé à s’appuyer sur les Principes mondiaux pour l’intégrité de l’information pour continuer d’inspirer les efforts visant à créer des environnements informationnels sûrs et sains.  Le langage relatif à l’intelligence artificielle a d’ailleurs été renforcé cette année dans les résolutions du Comité pour souligner l’urgence de garantir qu’elle soit sûre, sécurisée et digne de confiance, a relevé l’Union européenne.

Cette dernière a en revanche pointé les lacunes du Comité en matière de multilinguisme, déplorant l’absence d’interprétation dans les six langues officielles lors de la réunion informelle avec la Secrétaire générale adjointe, et l’adoption, aujourd’hui, d’un texte qui n’a pas été traduit dans toutes les langues officielles de l’ONU. 

« C’est inacceptable », un sentiment auquel a fait écho l’Iraq, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, d’autant plus, a relevé le représentant iraquien, que le Comité a terminé ses travaux dans les délais impartis.  Le multilinguisme est une grande valeur pour l’ONU, a-t-il souligné.

Sur ce point, le Directeur de la Division de l’information et des médias a assuré que le DCG partage cette valeur et continuera de communiquer sur le travail essentiel de l’ONU dans les six langues officielles de l’ONU et dans de nombreuses autres langues. 

Dans notre paysage médiatique complexe, atteindre les publics dans les langues que les gens parlent et sur les plateformes qu’ils utilisent est un défi, mais nous continuerons d’innover pour informer, mobiliser et inspirer, a-t-il assuré.

À noter par ailleurs que lors de l’adoption des textes, l’Argentine s’est dissociée des paragraphes du rapport dans lesquels il est fait référence aux objectifs de développement durable, au Pacte pour l’avenir et à ses annexes sur les changements climatiques.  Même son de cloche du côté de la Hongrie, qui s’est dissociée de certains paragraphes dont les dispositions vont à l’encontre de ses priorités nationales.

L’Afrique du Sud a regretté pour sa part que le Comité n’ait pas pu progresser davantage dans la mise en œuvre des engagements pris en matière de numérisation.

 

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ECOSOC: le dixième forum sur la science, la technologie et l’innovation s’achève sur des idées pour augmenter les financements et renforcer les capacités

Session de 2025,
Forum sur la science, la technologie et l’innovation, matin & après-midi 
ECOSOC/7203

ECOSOC: le dixième forum sur la science, la technologie et l’innovation s’achève sur des idées pour augmenter les financements et renforcer les capacités

Après deux jours de mise en commun des intelligences, y compris celles dites artificielles, le Conseil économique et social (ECOSOC) a mis fin à son dixième forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation (STI) au service de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). 

Tout au long des cinq sessions, dont la première au niveau ministériel, les représentants d’États, experts, entrepreneurs et innovateurs ont discuté de la meilleure façon de tirer parti de ces outils que sont les STI, notamment l’intelligence artificielle, pour accompagner la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Aujourd’hui, les délégations ont examiné les moyens de tirer parti des sciences et technologies pour parvenir au développement durable, y compris en s’appuyant sur l’intelligence artificielle (IA) afin de réduire les inégalités entre sexes et d’assurer la gestion durable des écosystèmes marins.  Elles ont aussi exploré les questions de financement et plaidé pour le renforcement des capacités en matière de STI.

Le Président de l’ECOSOC et les deux Coprésidents du forum sur les STI (les représentants permanents du Maroc et de la Finlande) ont conclu la session, avec à leurs côtés la Coprésidente du Groupe des dix représentants de haut niveau de la société civile, du secteur privé et de la communauté scientifique des Nations Unies pour promouvoir la science, la technologie et l’innovation pour les ODD. 

Session 2 - faire progresser la science, la technologie et l’innovation (STI) pour l’égalité des sexes

Cette session était consacrée à l’examen des moyens de combler la fracture numérique entre les sexes et promouvoir le leadership des femmes et des filles dans les domaines des STI.  Les intervenants ont plaidé pour l’élimination des obstacles à l’accès, à la participation et au leadership de manière égale dans l’éducation, l’emploi et la recherche, notamment les grands domaines symbolisés par l’acronyme STIM (Sciences, technologies, ingénierie et mathématiques). 

L’animateur, M. Tony Maciulis, responsable des contenus à GZERO Media Lightning Talks, s’est dit heureux de constater qu’il était le seul homme de la première partie de la session, les autres protagonistes étant des femmes.

Même si elles sont bien représentées à cette discussion, a reconnu Mme Aree Moon, les femmes ne représentent que 30% dans les STIM. Celle qui est Présidente de la Fondation coréenne pour les femmes dans la science, l’ingénierie et la technologie, a prévenu que si nous voulons agir, il faut commencer par promouvoir des données fiables.  Sans les données, aucune action ne saurait se faire, a-t-elle dit.  Elle a aussi fait remarquer que c’est après l’âge de 30 ans généralement que le fossé se creuse entre les sexes.  L’intervenante a donc plaidé pour que les garçons et les hommes soient les alliés des femmes en quête d’une place dans les domaines scientifiques. 

Mme Mariana Costa, de Laboratoria (Pérou), a expliqué comment sa plateforme mise en ligne permet de renforcer les capacités des femmes d’Amérique latine dans les domaines des STIM.  « Une révolution », quand l’on se souvient que dans les années 1990, certaines poupées Barbie destinées aux jeunes filles pouvaient s’exprimer et disaient des choses comme « les mathématiques, c’est vraiment dur », a rappelé Mme Paola Cecchi Dimeglio, Présidente de Executive Leadership Research Initiative for Women and Minority Attorneys.  Elle a d’ailleurs relevé que, 30 ans plus tard, la situation n’a pas beaucoup évolué.  Celle qui est enseignante à Harvard a fait observer que « les algorithmes sont créés par les hommes et reproduisent l’approche sexiste de la société ».

C’est aussi après avoir constaté les discriminations dans l’éducation des jeunes filles que Mme Catherine Ngila, Directrice exécutive de l’ONG African Foundation for Women and Youth in Education, Sciences, Technology and Innovation (Kenya), s’est engagée à faire bouger les lignes.  Prenant exemple sur son propre parcours, elle a indiqué qu’une femme qui passe par une maternité pendant ses études ne doit pas avoir à choisir entre sa formation et sa vie familiale.  Elle a personnellement pu bénéficier d’une année supplémentaire de bourse pour prendre soin de son enfant.

Les jeunes femmes et filles ont grandement besoin d’outils, a enchaîné Mme Mariéme Jamme,fondatrice de IamtheCODE (Royaume-Uni), dont l’organisation sillonne l’Afrique (Kenya, Sénégal, Burkina Faso...) afin d’apprendre aux jeunes femmes à faire du codage informatique, et ce depuis 2020.  Des milliers de jeunes femmes font désormais du codage informatique grâce à cette organisation.  L’argent est le socle de telles initiatives, a souligné Mme Jamme en expliquant qu’il faut, par exemple, s’assurer que les filles mangent à leur fin et qu’elles aient des serviettes hygiéniques.  Elle a aussi tancé les bailleurs de fonds qui offrent 5 000 dollars et exigent d’innombrables rapports alors qu’ils ont les moyens de donner des millions.

Il s’agit d’abord de mettre sur pied des politiques appropriées, a estimé Mme Sunungurai Dominica Chingarande, Recteure de Women’s University in Africa (Zimbabwe).  Selon elle, les questions de genre sont les questions de développement et sont donc le problème de tous.  Pour le continent africain, elle a jugé que la base de l’action serait d’améliorer la connectivité.

Des délégations ont également pris la parole pour faire l’état des lieux des obstacles que les femmes rencontrent dans les STI, avant de plaider pour des solutions systémiques.  « Qui fixe les règles du jeu? » a demandé par exemple le Mexique en faisant observer que si les femmes ne sont pas impliquées dans la mise en place des règles, y compris dans le secteur de l’intelligence artificielle, il est peu probable de les voir prises en compte après coup.

Session 3: tirer parti de la science pour conserver, restaurer et utiliser de manière durable les écosystèmes marins, océaniques et côtiers

Cette session était axée sur l’exploitation de la science, de la technologie et de l’innovation pour accélérer la conservation, la restauration et l’utilisation durable des océans et des écosystèmes marins, conformément à l’ODD 14. 

Le modérateur, M. Latif Nasser, de WNYC/Radiolab, a planté le décor en rappelant que « notre océan » recouvre la majorité de la surface terrestre, et que c’est là où la vie a commencé et continue.  Alors que les océans absorbent plus de 90% de la chaleur excédentaire générée par les changements climatiques, ils sont aux prises avec des menaces existentielles comme l’augmentation de leur température, ce qui entraîne la montée des eaux et leur acidification, la perte de la biodiversité marine, sans oublier la surpêche et la pollution plastic marine (11 millions de tonnes par an), comme l’a rappelé le représentant du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), qui a jugé plus urgent que jamais de trouver des solutions efficaces pour préserver et restaurer de façon durable les océans. 

Cela passe par une gouvernance renforcée des océans qui doit pouvoir s’appuyer sur des données et solutions scientifiques et technologiques.  Si l’ONU assume un rôle de premier plan en tant que plateforme pour réduire le fossé entre les connaissances et les politiques visant à transformer la relation entre l’humanité et son environnement, l’économie durable bleue dépend des innovations technologiques et scientifiques et de l’intégration de ces technologies de pointe et de l’IA dans la réalité quotidienne des pays directement concernés, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID) et les nations océaniques.

Ces États représentent 1% de la population mondiale, 1% du PIB mondial mais 40% de la biodiversité mondiale et 18% des récifs coraliens, a rappelé M. Xavier Estico, fondateur du Centre des Seychelles pour l’innovation et le développement durable, et membre du Groupe des dix experts de haut niveau de la communauté scientifique, de la société civile et du secteur privé auprès du Secrétaire général.  Les PEID sont devenus le « baromètre du changements climatiques », mais alors que leur patrimoine appartient au monde entier, ces pays n’ont pas les moyens de le préserver sans la collaboration et le soutien internationaux. 

Partant du constat que l’océan est vivant et que ce n’est que par le biais de l’innovation qu’on pourra le protéger, cette discussion a permis de donner des exemples concrets de ce qui se fait déjà dans des contextes nationaux et locaux.

Aux Seychelles, par exemple, des « obligations marines » financent un Fonds spécial de conservation de l’environnement marin, dont un projet porté par une ONG qui, grâce à la science de pointe, fait pousser le corail plus rapidement.  Cette expérience innovante est aujourd’hui répliquée ailleurs dans le monde.

Le professeur Nianzhi Jiao, qui occupe la chaire Cheung Kong Scholar à l’Université de Xiamen en Chine, a développé une pompe microbienne à carbone, une innovation qui lutte contre les émissions de carbone dans l’atmosphère et donc contre le réchauffement de la planète.  Il a mis l’accent sur l’acidification des océans qui est directement liée aux quantités de CO2 dans l’atmosphère et aux eaux usées rejetées dans l’océan.

Pour Mme Awa Bousso Drame, fondatrice de l’Institut de recherche CoastGIS (Sénégal), et Jeune talent 2022 du programme L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science en Afrique subsaharienne, classée dans la liste Forbes Africa 30 Under 30 2023, il faut sortir des cadres théoriques pour bâtir l’économie de la connaissance et renforcer le capital humain, à commencer par les jeunes et les femmes.

Prouvant son argument, deux jeunes Kenyans sont venus présenter leurs initiatives phares.  M. Joseph Nguthiru de HyaPak, a développé des solutions biodégradables pour les plastiques à usage unique et travaille notamment avec les communautés côtières.  De son côté, M. Lennox Omondi, d’ECOBANA, a développé des serviettes hygiéniques biodégradables à base de fibres de bananes.

Il y a aussi l’exemple de ce projet de l’Union africaine et l’Union européenne, piloté par M. Kwame Adu Agyekum, chercheur en télédétection à l’Université du Ghana et Coprésident du Comité directeur de GEO Blue Planet (Ghana).  Ce projet a pour vocation de fournir des données satellitaires sur 18 pays africains -allant du Nigéria à l’Égypte- aux gouvernements, au monde universitaire et aux scientifiques, afin d’alimenter les recherches sur la sauvegarde des océans. 

Toujours sur les données marines, le Chef du Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER) au Bureau des affaires spatiales des Nations Unies, a annoncé le lancement d’une alliance entre UN-SPIDER et plusieurs agences spatiales nationales lors de la troisième Conférence sur l’océan qui aura lieu au mois de juin à Nice.  L’objectif de cette alliance est de connecter le secteur spatial et les océans en vue de leur préservation, a expliqué M. Lorant Czaran. Il souhaite soutenir les pays en première ligne, notamment les PMA et les PEID, en leur facilitant l’accès aux données et technologies spatiales pertinentes pour relever les défis locaux et mondiaux liés aux océans.

L’une des applications concrètes des données satellites pour la surveillance des océans a été présentée par M. Agyekum. En vue d’améliorer la sécurité des pêcheurs en mer, un système de drapeaux, avec un code couleur, a été mis en place pour contourner le problème de l’analphabétisme.  Les informations satellites sont relayées aux responsables des ports via leurs téléphones portables et les drapeaux couleur sont hissés dans les ports en fonction.

Mme Bousso Drame a également cité le cas d’un système d’alerte précoce pour informer les pêcheurs des risques météorologiques, notamment sur la force et la direction des vagues.  Pour elle, l’IA est un outil efficace pour traiter l’imagerie satellite en grand volume afin d’obtenir des instruments sur mesure pour avoir une surveillance en temps réel des océans et milieux côtiers. 

Session 4: renforcer le financement et les capacités en matière de technologie, ainsi que les infrastructures de recherche aux fins de développement durable

Élever le niveau d’investissement et renforcer les capacités en faveur du développement des sciences, des technologies et de l’innovation 

« Qui va financer les besoins en matière de sciences, de technologies et d’innovation (STI)?  Qui va payer l’addition? » a lancé en ouverture de cette table ronde le modérateur, M. Latif Nasser, de WYNBC Studios, résumant ainsi ses enjeux.

Justement, M. Chola Milambo, Représentant permanent de la Zambie, a présenté les propositions faites relatives aux STI dans le document final préparé pour la Conférence de Séville.  Le document met notamment l’accent sur les investissements à consentir dans des infrastructures numériques afin de combler le fossé qui existe.  Il s’est dit confiant en un consensus sur un document final à la mi-juin, même si le calendrier négociations est serré.

Un exemple de financement privé a été donné par M. Gong Ke, de l’université de Nankai (Chine), qui appartient au plus grand réseau d’ingénieurs dans le monde.  Il a mentionné un programme de formations d’ingénieurs au Kenya qui a été financé grâce notamment à des entreprises privées.  L’ingénierie est un élément essentiel et davantage de financements doivent être consacrés pour renforcer les capacités en la matière, a estimé l’expert.

M. Marco Gilli, de la Fondazione Compagnia di San Paolo (Italie), a axé son intervention sur l’importance des organisations philanthropiques pour répondre aux besoins de financement.  « Nos outils sont différents, comme les bourses d’études par exemple, et nous pouvons nous montrer patients quant au retour sur investissement, à la différence des entreprises privées. »  Il a détaillé le plan de partenariat en cours entre l’Italie et l’Afrique afin de créer un réseau de projets notamment universitaires.  « Il existe vraiment une possibilité de renforcer le partenariat entre l’Europe et l’Afrique. »

Des partenariats et autres initiatives ont également été mis en avant pour illustrer ce qu’il est possible de faire en matière de financement.  Mme Thandi Mgwebi, de la Fondation nationale pour la recherche (Afrique du Sud), a dit que son travail consiste à développer des partenariats en matière de STI, « élément central » du Programme 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA).  « Les partenariats, ça marche, parce cela permet d’insuffler de la confiance et cela a des effets multiplicateurs. »  Le financement des STI n’est pas adéquat en Afrique, a-t-elle indiqué, en estimant que la cible de consacrer 1% du budget aux STI n’est pas atteint dans la plupart des pays africains. »  Le financement des STI n’est pas adéquat en Afrique, a-t-elle indiqué, en estimant que la cible de consacrer 1% du budget public ((national ???)) aux STI n’est pas atteint dans la plupart des pays africains.

Une initiative pour l’excellence africaine a par ailleurs été présentée par Mme Peggy Oti-Boateng, de l’Académie africaine des sciences, académie créée il y a 40 ans qui bénéficie du soutien diplomatique de l’UA.  Cette initiative prend en considération les objectifs de développement durable (ODD) et est basée sur le principe de partenariat équitable.  Il n’y a pas de partenariat équitable entre le Nord et le Sud, a-t-elle d’ailleurs fait remarquer.  Elle a jugé qu’il est temps que l’Afrique développe son propre financement en matière de technologie et d’innovation.  « On doit travailler ensemble. »  Elle a saisi cette occasion pour demander une réforme de l’architecture financière internationale.

Mme Angela Sarcina, de la Commission européenne, a précisé qu’un partenariat a été noué avec cinq pays africains (Namibie, Rwanda, Seychelles, Maurice et Kenya) en vue d’élaborer des feuilles de route pour réaliser les ODD dans le domaine des STI.  Des stratégies STI adaptées aux réalités locales sont des moteurs de changement, a-t-elle fait valoir, mais les financements font défaut, a-t-elle reconnu, en espérant que la conférence de Séville permette de mobiliser les financements nécessaires.

M. António Gomes Souza Filho, de la Fondation CAPES (Brésil), a, lui, indiqué que sa fondation vise notamment à la préservation des écosystèmes de la forêt amazonienne.  Près de 750 agents ont été ainsi formés, s’est-il félicité.

Lors du débat qui a suivi, l’Indonésie et l’Algérie ont espéré que la conférence de Séville permettra d’aboutir à des financements innovants.  Une position partagée par l’Éthiopie qui, au nom du Groupe des États d’Afrique, a appelé à répondre aux besoins technologiques du Sud global par le biais notamment de transferts.  « Les connaissances scientifiques sont un bien public mondial. » 

Pointant pour sa part les disparités d’accès dans les diagnostics et les traitements, alors que l’accès à la santé est un droit fondamental, la Fédération mondiale de neurologie a martelé que les financements publics sont indispensables.  Enfin, le Cambodge a rappelé l’importance du capital humain, « sans lequel il est difficile d’aller loin », avant de plaider vigoureusement en faveur de transferts technologiques. 

Améliorer les infrastructures de recherche orientées vers le développement durable

La deuxième table ronde de l’après-midi, dans la continuité des discussions précédentes, s’est ouverte par l’intervention de M. Addisu Fedaku, professeur d’université en Éthiopie.  Il a lancé un appel à l’assistance pour soutenir son entreprise Enset Starter Culture, spécialisée dans la culture de bananes et la production de farines alimentaires, qui emploie majoritairement des femmes.

M. Navid Hanif, Sous-Secrétaire général chargé du développement économique au Département des affaires économiques et sociales (DESA), a introduit cette discussion en disant que sans architecture de recherche solide, il sera difficile de réussir la transition technologique.  Cela implique d’investir dans la collaboration et le partenariat en matière de recherche.  Les collaborations existantes ont abouti à des feuilles de route qui permettent des investissements ainsi que le renforcement des capacités et des politiques pour réaliser les ODD.  En juin, a annoncé le Sous-Secrétaire général, le DESA inaugurera une nouvelle initiative sur la science, la technologie et l’innovation pour une action climatique intégrée dans les petits États insulaires en développement (PEID) d’Afrique. Et face à l’augmentation de la demande, le Département publiera un deuxième guide de mise en œuvre de la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des ODD.  M. Hanif a misé sur la conférence de Séville sur le financement du développement pour trouver des voies afin de financer ces secteurs. 

Dans cette même perspective, Mme Jelena Begovic, chercheuse principale à l’Institut de génétique moléculaire et d’ingénierie génétique (Serbie) et Présidente du Conseil des gouverneurs de l’ICGEB, a insisté sur la nécessité de relier les besoins en développement aux travaux scientifiques, et de créer un pont entre les ODD, les chercheurs et le public.  Elle a rappelé que ce projet bénéficie d’un financement gouvernemental.  Les services publics bénéficient de la numérisation, a justement fait valoir M. Ibrahima Guimba Saïdou, PDG du Partenariat pour l’accès numérique en Afrique (Niger), qui a plaidé pour une numérisation progressive de l’administration.  Il a proposé de créer un pôle d’innovation réunissant bailleurs de fonds, secteur public et secteur privé.  Il a également évoqué la mise en place d’une académie de codage, d’un programme de villages intelligents et connectés, d’une compétition technologique annuelle, ainsi que de mécanismes de financement mixtes confiés au secteur privé.

C’est un appel aux financements volontaires de la science, de la technologie et de l’innovation qu’a lancé pour sa part Mme Motoko Kotani, Vice-Présidente exécutive pour la recherche à l’Université de Tohoku (Japon), chercheuse principale à l’Institut avancé pour la recherche sur les matériaux et à l’Institut de mathématiques, ainsi que membre du Groupe des dix représentants de haut niveau.  Ces financements sont indispensables quand on connaît la contribution importante des travaux des scientifiques à la réalisation des 17 ODD, comme l’a fait valoir M. Carlos Henrique Brito Cruz, Vice-Président du réseau de recherche Elsevier et Coprésident du Groupe des dix représentants de haut niveau.  Ces travaux constituent en effet une base essentielle de connaissances pour atteindre chaque objectif, a-t-il observé.

D’ailleurs, les infrastructures de recherche devraient être considérées comme des biens publics mondiaux, selon l’avis de M. Peter Hanke, Ministre fédéral de l’innovation, de la mobilité et de l’infrastructure de l’Autriche.  C’est pourquoi le Ministre a insisté sur la nécessité de mobiliser à la fois les investissements publics et les fonds privés pour garantir leur pérennité.  L’importance d’un financement durable et équitable pour la science a également été soulignée par Mme Lidia Arthur Brito, Sous-Directrice générale pour les sciences naturelles à l’UNESCO, qui a plaidé pour une science ouverte, inclusive et accessible aux chercheurs comme aux communautés marginalisées.  Elle a évoqué à cet égard l’ouvrage Recommandation de l’UNESCO sur la science ouverte, avant d’insister sur le rôle des gouvernements et de la philanthropie dans le financement.  Mme Arthur Brito a également promu l’accès à distance aux laboratoires, ainsi que le réseau de connaissances scientifiques de l’UNESCO, conçu pour promouvoir un développement fondé sur les données.

Ces efforts de financement nécessitent de coordonner les partenaires, selon M. Seizo Onoe, Directeur du Bureau de la normalisation des télécommunications à l’Union internationale des télécommunications (UIT), qui a présenté une initiative lancée par son organisme pour rassembler des partenaires en vue de financer l’accessibilité universelle à la connectivité.  La question de l’accessibilité a aussi été abordée par M. Chris Sharrock, Vice-Président de Microsoft pour les Nations Unies et les organisations internationales.  Il a insisté sur l’importance de la diffusion technologique et sur le principe selon lequel « celui qui a besoin de la technologie doit pouvoir y accéder ». Microsoft investit à cet effet 80 milliards de dollars, cette année, dans les technologies, dont 8 milliards pour le Sud et 1,6 milliard pour le Kenya et les Émirats arabes unis. 

Le développement durable ne saurait se réaliser sans les ingénieurs, a conclu M. Mustafa Shehu, Président de la Fédération mondiale des organisations d’ingénieurs (WFEO), en proposant d’ajouter un second I à l’acronyme STI pour y inclure l’ingénierie.  Il a appelé à des incitations fiscales en faveur de cette discipline, notamment pour renforcer la connectivité.

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