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BBNJ: après des débats fructueux, la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine entame sa deuxième semaine de travaux

Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine,
Première session, matin & après-midi
MER/2212

BBNJ: après des débats fructueux, la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine entame sa deuxième semaine de travaux

Lancés le 14 avril dernier, les travaux de la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (Accord BBNJ) et la tenue de la première réunion de la Conférence des Parties à l’Accord ont repris aujourd’hui.

À l’ouverture de la séance, ce matin, les Coprésidents de la Commission préparatoire, Mme Janine Elizabeth Coye-Felson (Belize)et M. Adam McCarthy (Australie), ont donné un aperçu des sujets qui ont semblé être au cœur des interventions des délégations et des tendances générales des débats qui ont déjà eu lieu.  Les rapports oraux présentés par les coprésidents sont « bien entendu sans préjudice des discussions en cours et toutes les options évoquées par les délégations restent valables », a précisé M. McCarthy.

Sur le fond, ont-ils relevé, les délégations ont convenu du fait que le règlement intérieur de la Conférence des Parties (COP), largement considéré comme fondamental, apporterait « clarté, inclusion et justice ».  S’agissant du lieu, on s’oriente vers une organisation des réunions au Siège de l’ONU, tout en laissant une certaine souplesse à la COP afin qu’elle conserve l’option d’organiser des réunions ailleurs, en prenant en compte les obstacles en termes de coûts. 

S’agissant de la fréquence des réunions de la COP, on s’achemine vers « une fois par an au début, puis tous les deux ans ensuite ».  Sauf circonstances exceptionnelles, le présentiel sera privilégié au virtuel, ont résumé les coprésidents.  S’agissant du règlement intérieur des organes, plusieurs ajouts devraient être compilés dans un document unique.  Un soutien a été exprimé pour que le secrétariat de la COP soit relié institutionnellement à l’ONU tout en préservant une certaine autonomie. À ce sujet, le modèle de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a semblé rallier le plus de soutiens.

Groupe de travail III sur les règles de gestion financière régissant le financement de la Conférence des Parties à l’Accord et le financement du secrétariat et de tout organe subsidiaire 

La Commission préparatoire a ensuite poursuivi l’étude des règles de gestion financière régissant le financement de la prochaine COP, celui du secrétariat de l’Accord BBNJ et de ses cinq organes subsidiaires.

L’Union européenne (UE)a soutenu le fait qu’en adoptant le budget, la COP autorise le Chef du secrétariat à engager des dépenses pour lesquelles des crédits ont été ouverts, et ce jusqu’à concurrence des montants approuvés.  Toutefois, sur la capacité de celui-ci à effectuer des virements de crédit à l’intérieur de chacune des principales lignes budgétaires approuvées et d’une ligne à l’autre, « à hauteur de 20% de la principale ligne de crédit sur laquelle le montant est prélevé », l’UE s’est montrée plus circonspecte.  « Ce pourcentage devrait être aussi stable que possible: que la COP le fixe périodiquement paraît incertain. »  Même prudence s’agissant de la réserve de trésorerie, qui a pour objet d’assurer la continuité des opérations en cas de manque temporaire de liquidités.  Un passage dans la note des coprésidents n’a pas échappé à l’UE: dans le cadre du fonds d’affectation spéciale général, il est constitué une réserve de trésorerie dont la COP « fixe périodiquement le montant » par consensus.  Ce dernier point a paru, là aussi, malvenu à l’UE. 

S’agissant du modèle de fonds -modèle A, de type Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ou modèle B, de type Convention sur la diversité biologique- l’UE n’a pas été en mesure de se prononcer à ce stade. Enfin, la perspective que la COP décide, en consultation avec le Secrétaire général de l’ONU, de la répartition de tout solde non engagé, une fois que toutes les dépenses ont été réglées, a satisfait l’UE, qui s’est félicitée « que si la COP peut créer des fonds, elle puisse aussi en supprimer ».

Le groupe Core Latin American countries (CLAM) a exprimé sa préférence pour « le modèle CCNUCC », sauf s’agissant du fonds spécial: là, le modèle de la Convention sur la diversité biologique prévaudrait pour sa souplesse.  Le groupe a également adhéré à l’idée d’un fonds de réserve de trésorerie dans le cadre du fonds d’affectation spéciale général.  Sur la question des arriérés, le CLAM s’est rangé derrière la Chine et a préconisé de la souplesse au sujet de la date butoir du 1er janvier pour le versement des contributions.

« Dans l’intérêt des pays en développement », la Fédération de Russie a appelé à ne pas créer de structures qui nécessiteraient un financement supplémentaire et ajouteraient un fardeau pour le mécanisme de financement. Pour garantir la stabilité financière de l’Accord, la Türkiye a recommandé la création d’un système de riposte graduée pour les arriérés persistants.  Le mécanisme devrait toutefois prendre en compte les « circonstances exceptionnelles » des pays en développement et appuyer des mesures « proportionnées », telles que la suspension temporaire du droit de vote après une longue période de non-versement.  Une telle approche, selon la Türkiye, promouvrait la reddition de comptes tout en préservant l’équité et l’inclusion.

Groupe de travail III sur les mesures à convenir avec le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) pour donner effet aux dispositions relatives au financement de l’Accord

Un représentant du Fonds pour l’environnement mondial (FEM) a pu échanger ce matin avec les délégations au sujet de la Caisse du FEM, mentionnée dans l’article 52 de l’Accord BBNJ comme faisant partie du mécanisme de financement, de même qu’un fonds spécial et un fonds de contributions volontaires.  Le FEM est destiné à lutter contre la perte de biodiversité, les changements climatiques et la dégradation de l’environnement.  Il aide les pays en développement à répondre aux priorités environnementales et à adhérer aux conventions internationales en la matière. 

À une question de l’UE sur les conditions d’octroi, le représentant a utilisé comme référence la Convention de Minamata sur le mercure.  Il a pointé que tous les projets financés par le FEM nécessitaient l’approbation préalable des parties, ceci pour minimiser les incompatibilités potentielles avec la Convention, l’Accord ou les orientations de la COP.  À une seconde question portant sur les délais d’approbation du FEM par rapport au moment de l’entrée en vigueur du mémorandum d’accord, le représentant s’est, là encore, référé à la Convention de Minamata sur le mercure, où, lors de la septième réunion, il avait été décidé que ledit mémorandum serait renvoyé au Conseil du FEM pour examen avant la COP. Les secrétariats du FEM et de la COP de Minamata ont ainsi « travaillé de concert » pour mettre à jour le protocole d’entente, pour qu’il soit prêt à être adopté lors de la première COP.

La Russie a demandé au représentant du FEM ce qu’il pensait du projet de mémorandum d’accord à l’étude, « qui n’est pas un document juridiquement contraignant et ne crée aucun droit ou obligation pour les parties ».  Constitue-t-il en l’état une garantie suffisante du financement des activités qui seront couvertes par l’Accord?  Pour la Russie, cela risque de ne pas suffire.  Sachant que le FEM opère par le truchement des institutions spécialisées des Nations Unies, la déléguée russe a voulu savoir « quelle serait l’option juridiquement contraignante la plus adéquate pour que l’intégrité de l’Accord soit préservée ».  Quant au fonds d’affectation spéciale: « comment va-t-il fonctionner?  Comment les contributions pourront-elles être faites par les pays en développement? »  C’est très important, a insisté la Russie, parce que pour le moment, ce qui est présenté aux parties, c’est le modèle du FEM, partiellement contraignant, « sans que l’on sache si les États Membres peuvent fixer leurs conditions, ou si c’est le FEM qui les impose, ce qui est plus probable ».  Le FEM risque de privilégier ses propres intérêts et de s’ingérer dans les processus internes des États, a-t-elle craint.

« Le mémorandum d’accord est une décision prise par les parties, aux parties de choisir ce qui doit y figurer », a simplement réagi le représentant du FEM. Le Fonds travaille en étroite coopération avec tous les secrétariats existants pour rendre des comptes, a-t-il assuré.

Pour la République de Corée, le mémorandum d’accord préparé par le secrétariat est adéquat.  Cela dit, les modalités précises de financement nécessitent encore des débats. L’UE a pour sa part soutenu le protocole du FEM, ainsi que le Royaume-Uni, qui s’est réjoui du fait qu’il y ait déjà des financements disponibles.  Le neuvième processus de reconstitution des ressources du FEM a débuté en décembre dernier et devrait être achevé d’ici à juin 2026. 

En fin de matinée, les coprésidents ont réorienté les discussions vers la question du règlement intérieur de la Conférence des Parties à l’Accord.

Groupe de travail I sur le règlement intérieur de la Conférence des Parties à l’Accord

Singapour a réclamé, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), que les petits États insulaires en développement (PEID) soient représentés dans tous les bureaux des organes subsidiaires.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), la Jamaïque a recommandé de faire en sorte que les mandats durent six ans et qu’ils soient limités au nombre de deux, « pas forcément de manière consécutive », afin que les experts des pays en situation particulière puissent être représentés de manière adéquate dans les organes subsidiaires.  À ce sujet, un siège devrait être réservé à un représentant des PEID et à un représentant des pays les moins avancés (PMA), a ajouté la CARICOM. Il est à craindre que si l’on choisit les experts par groupe régional uniquement, il n’y ait pas vraiment de représentation équitable, a mis en garde la Micronésie, au nom des PEID.

Ce débat s’est poursuivi durant la session de l’après-midi, les délégations s’exprimant également sur la gouvernance des organes subsidiaires et les modalités pour la prise de décision.

Groupe de travail I sur le mandat, les modalités de fonctionnement et le règlement intérieur des organes subsidiaires créés en application de l’Accord 

Les délégations se sont mises d’accord sur le fait que les organes subsidiaires doivent pouvoir jouir d’une certaine autonomie et d’une certaine indépendance, tout en s’acquittant de leurs fonctions sous l’égide de la COP.  Si l’Accord BBNJ définit déjà le mandat de ces organes, a fait remarquer l’Union européenne, il faut toutefois favoriser les synergies afin d’éviter tout doublon, a-t-elle précisé, appuyée par le Bangladesh. 

S’agissant de la composition du bureau, la Türkiye, Sri Lanka et le Royaume-Uni ont marqué leur nette préférence pour un bureau « de taille limitée ».  Souhaitant que les présidents des organes subsidiaires participent à tous les travaux du bureau, le Japon a estimé, à l’instar de l’UE et de l’Islande, qu’un président et neuf vice-présidents serait le « nombre idéal ».  S’agissant des pouvoirs des présidents des organes subsidiaires, les avis ont été davantage partagés.  L’Australie a estimé que le président devrait pouvoir voter, tandis que l’Arabie saoudite préférerait que les présidents restent neutres. 

Toutefois, l’Argentine, au nom du CLAM, a trouvé difficile d’assurer un équilibre régional dans de telles circonstances et s’est dite favorable à une limite de 15 membres qui pourraient prendre des décisions « en connaissance de cause ».  Au nom de la CARICOM, la Jamaïque a précisé que « tant qu’il y a une représentation régionale pour nous, nous sommes flexibles » sur le nombre de membres. 

Dans le même ordre d’idées, Singapour, au nom de l’AOSIS, a rappelé qu’il était important d’avoir un membre du bureau provenant des PEID pour répondre à leurs besoins spécifiques, tel que précisé dans l’Accord.  Pour favoriser la participation des PEID, le Bangladesh a proposé d’inclure des mécanismes consultatifs.  Réclamant une représentation des pays en développement, la République islamique d’Iran a abondé en ce sens et suggéré de nommer deux représentants pour chaque groupe régional représenté à l’ONU.  Appuyant cet objectif, la Türkiye a également estimé que les cinq régions doivent être représentées de manière équitable. 

Se posant en gardienne des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer comme à son habitude, la Fédération de Russie a rappelé que les décisions de la COP ne devront, en aucun cas, préjuger du statut juridique des mesures prises dans le cadre d’autres instances.  Pour la déléguée russe, les zones protégées doivent être définies avec l’accord des pays signataires mais également, et -c’est là une « question vitale »- des États parties à la Convention, et il est nécessaire de prévoir des contre-dispositions pour préserver les droits des utilisateurs dans ces zones.  Faisant écho à la position russe, la Chine a rappelé que les décisions prises dans le cadre de l’Accord BBNJ doivent effectivement refléter les intérêts de tous les pays. 

C’est également dans cette optique que le libellé « jusqu’à ce que tous les efforts pour parvenir à un consensus aient été épuisés » a retenu l’attention des délégations lors des discussions sur les modalités de vote. Afin de s’assurer que tous les efforts ont été déployés pour parvenir au consensus, il faudrait déterminer des indicateurs et donc établir un seuil élevé pour le quorum, a expliqué la Chine, appuyée par le Japon.  Un avis que la Micronésie, au nom des PEID du Pacifique, n’a pas partagé, préférant une majorité simple à un quorum trop élevé.  Pour l’UE, les étapes pour arriver au consensus sont pourtant bien définies dans l’Accord, un avis que n’a pas partagé pas l’Arabie saoudite.  « De toute façon, ce sera la COP qui décidera si le consensus a été épuisé », a fait valoir le délégué micronésien. 

Débattant sur le seuil à atteindre pour les décisions et les amendements, le Maroc, au nom du Groupe des États d’Afrique, et la Türkiye ont suggéré un seuil des deux tiers pour garantir « la légitimité du processus », une option retenue également par le Japon qui pourrait « même accepter un seuil des trois quarts ».  Pour d’autres délégations, tout dépend du type de décision.  Selon la déléguée chinoise, il ne peut y avoir d’outil de gestion qui ne soit créé par consensus.  D’après la Micronésie, au nom des PEID du Pacifique, toutes les parties prenantes de la Convention sur le droit de la mer devraient être associées à la création d’outils de gestion mais « cela ne veut pas dire qu’on ne doive pas essayer de dégager un consensus ». 

L’Argentine, au nom du CLAM, a, quant à elle, relevé l’absence de dispositions sur le droit au vote par procuration.  Le vote par procuration est « contraire aux principes de la Charte de l’ONU », a objecté la Russie, souhaitant éviter tout précédent allant à l’encontre des pratiques onusiennes.  « Il n’existe pas de règles formelles pour le vote par procuration dans ce contexte », a répliqué le Royaume-Uni.  L’Accord est un « jalon pour le multilatéralisme et l’inclusivité en est un principe clef », a tranché l’Islande, faisant remarquer que le vote par procuration soutiendrait toute disposition allant en ce sens. 

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Conseil de sécurité: « un point de non-retour » pratiquement atteint dans la crise sécuritaire, humanitaire et institutionnelle qui ravage Haïti

9902e séance – matin
CS/16047

Conseil de sécurité: « un point de non-retour » pratiquement atteint dans la crise sécuritaire, humanitaire et institutionnelle qui ravage Haïti

L’insécurité s’est tellement aggravée en Haïti, où les gangs criminels lancent des attaques coordonnées pour prendre le contrôle du territoire, que la situation pourrait atteindre « un point de non-retour », a mis en garde, ce matin au Conseil de sécurité, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour ce pays qui est en train de « mourir à petit feu », selon les mots de son Représentant permanent. 

« Je dois être très franche », a déclaré Mme María Isabel Salvador, qui dirige le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH). « Tout effort du Gouvernement sera insuffisant sans une intensification du soutien international, notamment par le biais d’un financement et d’une capacité opérationnelle accrus pour la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS). Ce n’est pas un choix, mais une nécessité, car il n’existe aucune alternative viable. » 

La Représentante spéciale a indiqué que depuis la fin du mois de janvier, des groupes criminels organisés ont lancé des attaques coordonnées pour étendre leur contrôle territorial et saper l’autorité de l’État.  L’échelle des violences sème la panique parmi les Haïtiens, qui craignent le total effondrement de l’État, a-t-elle relaté, précisant que l’ampleur et la durée de ces violences, qui ont fait 1 086 morts rien qu’en février et mars, ont dépassé les capacités de la Police nationale d’Haïti, malgré l’appui des Forces armées d'Haïti et de la MMAS. 

Sans une aide internationale opportune, décisive et concrète, Haïti pourrait être confrontée au chaos total, et tout retard dans votre soutien pourrait être la cause directe d’une telle détérioration, a encore prévenu la haute fonctionnaire. 

« Aux grands maux les grands remèdes », a renchéri le délégué haïtien, qui a indiqué que son pays est disposé à discuter et appuyer toute initiative de ses partenaires traditionnels visant à le débarrasser des gangs qui terrorisent la population.  Les mettre hors d’état de nuire est une nécessité absolue, a-t-il souligné, après avoir averti que « la République d’Haïti est en train de mourir à petit feu sous l’action combinée des gangs armés, des narcotrafiquants et des trafiquants d’armes ». 

L’ensemble des membres du Conseil ont partagé une même appréhension devant une situation hors de contrôle, malgré le déploiement de la MMAS, une force placée sous commandement kényan et chargée depuis fin 2023 de créer les conditions de sécurité propices à la tenue d’élections présidentielle et législatives en Haïti. Conseillère à la sécurité nationale auprès du Président du Kenya, Mme Monica Juma a reconnu que les avancées réalisées par la Mission sont menacées par la coalition de gangs armés Viv Ansanm, dans la capitale Port-au-Prince comme dans plusieurs départements, assurant toutefois que « l’espoir demeure ».  Ce dont la Mission a besoin, c’est d’être pleinement déployée et dotée des moyens adéquats, a-t-elle plaidé, notant que la Mission ne dispose à l’heure actuelle que d’un millier de soldats sur les 2 500 soldats prévus. 

« Déployée à seulement 40%, la MMAS est incapable de s’acquitter efficacement de son mandat », ont déploré les A3+ (Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana) par la voix du Guyana, suivis par la Fédération de Russie, la France ou encore le Panama.  Les A3+ ont donc appelé le Conseil à examiner les options retenues par le Secrétaire général pour fournir une assistance supplémentaire à Haïti, à commencer par une « transition » vers une opération de maintien de la paix de l’ONU, qui pourrait intervenir dans un second temps, une fois réduit le contrôle territorial des gangs, a précisé la France. 

Tel n’a pas été l’avis de la Chine, qui a invité la « nation souveraine » d’Haïti à former un gouvernement légitime sans délai et à cesser de compter sur l’aide systématique de l’étranger.  La délégation s’est également lancée dans un réquisitoire contre les États-Unis, qu’elle a accusés d’ingérence de longue date dans les affaires haïtiennes. Après avoir orchestré, il y a un an, l’installation d’un nouveau gouvernement, Washington « ferme aujourd’hui les yeux, malgré le chaos », en n’appliquant pas réellement l’embargo sur les armes dont ils ont pourtant accepté l’imposition.  « Le résultat, c’est que les gangs sont mieux outillés que la Police nationale d’Haïti », s’est inquiété le représentant chinois, notant que la plupart des armes arrivant en Haïti proviennent des États-Unis. 

Pour le Panama, une des priorités du Conseil devrait donc être d’incorporer au BINUH une unité spécialisée pour soutenir les autorités haïtiennes dans la mise en œuvre de l’embargo.  « Sans accès à des armes et des munitions illégales, les bandes criminelles armées n’auraient pas pu prendre en otage la quasi-totalité du pays », se sont émus les A3+, pour lequel le régime de sanctions doit être intégralement mis en œuvre. 

Assurant pour sa part que les États-Unis continueront à coopérer avec le BINUH, la MMAS et le Gouvernement haïtien, la délégation américaine a signalé qu’ils ne peuvent assumer seuls le fardeau et a encouragé les bailleurs de fonds à contribuer à ces efforts.  Elle a également estimé que même avec un renforcement sécuritaire, une mission politique spéciale n’est pas en mesure de faire face aux enjeux liés à la violence de gangs. 

De son côté, Mme Pascale Solages, cofondatrice de l’organisation NÈGÈS MAWON, a alerté sur l’ampleur des violences sexuelles perpétrées contre les Haïtiennes, mais aussi sur le « mépris total » dans lequel est tenue selon elle la Constitution haïtienne, qui exige un minimum de 30% de femmes au sein des organes gouvernementaux.  Cette représentante de la société civile a estimé que les « autorités de transition » n’avaient démontré aucune volonté politique de mettre en œuvre un plan, un programme et des ressources centrés sur les besoins de ses concitoyennes.  Elle a tout aussi vigoureusement critiqué la MMAS qui, après un an de présence, n’a apporté aucun changement positif dans la vie des Haïtiennes, « au contraire ». Cette force multinationale, a-t-elle exhorté, doit donc se rappeler de son exigence d’opérer dans le strict respect du droit international, en tenant compte de la problématique de genre. 

Dans son intervention, la France a par ailleurs confirmé son intention de poursuivre le « travail de mémoire » engagé par le Président Emmanuel Macron, qui a annoncé le 17 avril la création d’une commission mixte franco-haïtienne, une décision dont s’est réjoui le délégué haïtien, pour qui elle ouvre la voie à des « espaces de dialogue et de compréhension mutuelle, dans une logique de réparation sans revanche ».  Un sentiment auquel a fait écho la République dominicaine, seule nation limitrophe d’Haïti.  Affirmant que la crise « aux proportions dystopiques » dans ce pays fait peser une menace existentielle sur le sien, le Ministre des relations extérieures dominicain a expliqué que son Gouvernement n’avait pas eu d’autre choix que de déployer 1 500 soldats supplémentaires à la frontière avec son voisin, portant à 11 000 le nombre de ceux qui y sont stationnés. 

Il est impératif de mettre en œuvre des sanctions contre les individus et les institutions qui financent et protègent la criminalité organisée en Haïti et de renforcer l’embargo sur les armes, a réclamé la République dominicaine, jugeant « inconcevable » que seuls cinq criminels aient été punis jusqu’à présent, « sans que les facilitateurs individuels et institutionnels soient identifiés. »  Soutenant la stratégie à deux volets du Secrétaire général, le Ministre dominicain a insisté sur l’établissement d’une mission spécialisée et mandatée pour faire usage de la force contre les gangs criminels, avant d’être contraints de devoir négocier avec ces derniers: « C’est le moment décisif pour une action coordonnée et une responsabilité partagée. » 

En début de séance, le Conseil de sécurité a observé une minute de silence à la mémoire du pape François. 

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La question concernant Haïti

Exposé

Mme MARÍA ISABEL SALVADOR, Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti, a déclaré que la situation sécuritaire en Haïti s’était encore dégradée depuis sa dernière intervention au Conseil, avertissant du risque d’un point de non-retour dans la crise haïtienne.  Depuis fin janvier, des groupes criminels organisés mènent des attaques coordonnées pour étendre leur contrôle territorial et affaiblir l’autorité de l’État haïtien.  Ils ont ciblé Kenscoff, la dernière voie de sortie de Port-au-Prince qui ne soit pas entièrement contrôlée par les gangs, progressant simultanément vers Delmas, le centre-ville de Port-au-Prince et Pétion-Ville – des zones jusque-là épargnées – et aggravant la déstabilisation de la ville. 

Les attaques, a poursuivi la haute fonctionnaire, se sont également propagées dans les départements de l’Ouest, du Centre et de l’Artibonite.  Plus récemment, des gangs se sont emparés de Mirebalais.  Au cours de cette attaque, plus de 500 détenus ont été libérés lors de la cinquième évasion de prison en moins d’un an, dans le cadre d’une action délibérée visant à consolider leur domination, à démanteler les institutions et à instiller la peur. 

Elle a signalé que l’ampleur et la durée de ces violences ont dépassé les capacités de la Police nationale d’Haïti, malgré le soutien des forces armées nationales et de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), entravant davantage la stabilisation.  Rien qu’en février et mars, 1 086 personnes ont été tuées et 383 autres blessées, a indiqué Mme Salvador.  Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 60 000 ont été déplacées de force au cours des deux derniers mois, s’ajoutant au million de personnes déjà déplacées depuis décembre 2024.  L’échelle des violences a semé la panique parmi les Haïtiens, qui craignent le total effondrement de l’État, a-t-elle ajouté. 

Selon la Représentante spéciale, les autorités nationales ont renforcé les forces de sécurité et amélioré la coordination entre la police, les Forces armées d’Haïti et la MMAS, et le 14 avril, un budget révisé a été adopté pour soutenir les capacités de la police et de l’armée.  Cependant, a-t-elle signalé, les forces de sécurité nationales ne peuvent réussir sans une structure de commandement unifiée et stratégique, libre de toute ingérence politique et opérant sous l’autorité civile.  De plus, elles ont besoin d’unités antigangs plus spécialisées, d’un meilleur équipement et de meilleures conditions de travail. 

Affirmant que tout effort du Gouvernement haïtien ne suffira pas pour réduire significativement la violence des groupes criminels, elle a jugé plus crucial que jamais d’intensifier le soutien international à Haïti, notamment par le biais d’un financement et d’une capacité opérationnelle accrus pour la MMAS. « Ce n’est pas un choix, mais une nécessité, car il n’existe aucune alternative viable ». 

Alors que la crise sécuritaire affecte tous les aspects de la vie en Haïti, la présence de l’ONU est également mise à rude épreuve, a relevé la Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).  Elle a indiqué que l’isolement persistant de la capitale, dû à la suspension des vols commerciaux depuis novembre 2024 et au blocage des accès routiers, demeure le principal défi opérationnel.  En réponse, le BINUH et les agences des Nations Unies ont adopté des modalités hybrides et réduit leur présence à Port-au-Prince afin de maintenir leurs opérations et d’apporter une aide vitale.  Cependant, sans financement suffisant et prévisible, même une présence minimale des Nations Unies pourrait ne plus être viable, compromettant notre capacité à répondre aux priorités de notre mandat, a encore mis en garde Mme Salvador. 

Malgré les énormes défis sécuritaires, les autorités haïtiennes, avec le soutien du BINUH, ont pris des mesures pour faire avancer le processus politique.  Le Conseil présidentiel de transition a réaffirmé l’engagement de tenir des élections pour transférer le pouvoir à des autorités élues d’ici à février 2026, conformément à l’accord conclu il y a un an.  Le Comité de pilotage de la Conférence nationale a mené de larges consultations sur la révision constitutionnelle, tandis que le Conseil électoral provisoire a avancé dans les préparatifs administratifs et logistiques. 

« Malgré ces progrès, nombreux sont ceux qui s’inquiètent de la faisabilité du calendrier, la détérioration sécuritaire compromettant les préparatifs essentiels à l’organisation d’un référendum et d’élections inclusives, participatives et crédibles », a reconnu la Représentante spéciale.  Elle a indiqué que le BINUH reste déterminé à soutenir les autorités et les parties prenantes dans leur dialogue constructif sur les préparatifs électoraux, mais que compte tenu de la détérioration de la situation, il est crucial d’aligner le champ d’action du Bureau sur les réalités du terrain. 

Après avoir appelé le Conseil de sécurité à ajouter des noms à la liste des sanctions et exhorté les États Membres à appliquer pleinement l’embargo sur les armes, la Représentante spéciale a de nouveau souligné que les efforts du Gouvernement haïtien ne suffiront pas pour réduire significativement l’intensité et la violence des groupes criminels. 

Il est crucial d’intensifier le soutien international à Haïti, notamment en augmentant le financement et la capacité opérationnelle de la MMAS, a-t-elle insisté.  Sans une aide internationale opportune, décisive et concrète, Haïti pourrait être confronté au chaos total, et tout retard dans votre soutien pourrait être la cause directe d’une telle détérioration, a-t-elle prévenu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

BBNJ: les règles de gestion financière au menu des débats de la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine

Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine,
Première session, matin & après-midi
MER/2211

BBNJ: les règles de gestion financière au menu des débats de la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine

Le Groupe de travail III de la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (Accord BBNJ) a réfléchi aujourd’hui au financement de la Conférence des Parties dès sa première réunion. 

Les délégations ont été saisies ce matin d’un document établi par les Coprésidents de la Commission, M. Adam McCarthy (Australie)et Mme Janine Coye-Felson (Belize), qui, pour faciliter les négociations, reprend de nombreux éléments figurant par exemple dans les règles et procédures financières de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), de la Convention sur la diversité biologique ou encore, plus récemment, de la Convention de Minamata sur le mercure.

De même, cet après-midi, elles ont étudié un projet de mémorandum d’accord entre la Conférence des Parties (COP) à l’Accord BBNJ et le Conseil du Fonds pour l’environnement mondial (FEM).  La Caisse du FEM est mentionnée comme faisant partie d’un mécanisme de financement devant permettre de fournir des ressources financières « adéquates, accessibles, nouvelles et supplémentaires et prévisibles » dans le cadre de l’Accord, notamment pour aider les États parties en développement à le mettre en œuvre. 

Groupe de travail III sur les règles de gestion financière régissant le financement de la Conférence des Parties à l’Accord et le financement du secrétariat et de tout organe subsidiaire

Aux termes du paragraphe 4 de l’article 47 de l’Accord, la Conférence des Parties devra adopter, à sa première réunion, les règles de gestion financière régissant son financement, ainsi que celui du secrétariat et de ses organes subsidiaires.

Les délégations ont été invitées à échanger sur le bien-fondé de chacun de des modèles présentés et à répondre à ces questions: la structure du document des Coprésidents est-elle adaptée?  Y-a-t-il des éléments manquants, ou au contraire redondants?  Quels éléments de fonds font l’objet d’un accord ou d’un désaccord?  Quels éléments de fond sont les plus importants et pourquoi?

Les délégations ont salué le travail des Coprésidents, la Chine s’étonnant même de l’exhaustivité « stupéfiante » du document, et la structure de celui-ci a globalement été jugée adéquate.

Circonspecte, comme nombre de délégations, sur le choix de tel ou tel modèle à ce stade, l’Union européenne a estimé que tout dépendrait des décisions prises sur les arrangements relatifs au secrétariat - notamment sa structure, a ajouté le Royaume-Uni.  La Nouvelle-Zélande, l’Australie, la Communauté des Caraïbes (CARICOM), l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et le Japon pencheraient plutôt pour un modèle de gestion financière inspiré des structures onusiennes existantes telles que la CCNUCC, vu les avantages en matière de coûts, de charges et de gestion.  Un lien avec l’ONU serait utile aux États et au secrétariat, a ainsi estimé le Japon.

La Chine, pour sa part, a appuyé l’idée d’un modèle indépendant, basé sur l’Autorité internationale des fonds marins, tandis que les Philippines ont été inspirées par la Convention sur la diversité biologique, pour sa souplesse, mais aussi parce qu’elle prévoit un fonds d’affectation spéciale tiré du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).

Par la voix de l’Iraq, le Groupe des 77 et la Chine ont réitéré ce matin l’importance de la participation pleine et effective des pays en situation particulière à la mise en œuvre de l’Accord BBNJ sur la biodiversité marine.

Le Groupe considère le « fonds spécial » comme l’une des principales entités opérationnelles de l’architecture financière de l’Accord BBNJ et a rappelé aux pays développés leurs obligations en matière de financement, au titre de l’article 52 de l’Accord.

Les Maldives, au nom de l’AOSIS, ont souhaité apporter quelques amendements au document des coprésidents, comme l’inclusion de mesures appropriées appliquées aux parties en cas de retard de paiement, afin d’inciter au paiement des contributions dans le délai imparti.  De telles mesures pourraient inclure la suspension du droit de vote et la capacité de peser sur les nominations à tout poste au sein de la COP ou de l’un de ses organes subsidiaires.  Enfin, pour l’AOSIS, les États observateurs pourraient contribuer au financement des COP, par souci d’équité.

Au nom des petits États insulaires en développement (PEID) du Pacifique, la Papouasie-Nouvelle-Guinée a réclamé que le statut particulier des PEID soit inscrit dans tous les chapitres du document.  La CARICOM s’est rangée derrière cet avis, en ajoutant qu’il manquait au document l’inclusion d’un paragraphe qui offrirait une certaine flexibilité aux PEID et aux pays les moins avancés (PMA) dans le paiement de leurs contributions, au cas où ils seraient frappés par une catastrophe naturelle.  « Attention à ne pas accorder trop de circonstances particulières », cela pourrait créer in fine des tensions entre les États parties, a toutefois mis en garde l’Union européenne.

Il est encore prématuré de se prononcer de manière déterminée sur le choix d’un modèle, sachant que nous n’avons pas toutes les informations sur les règles d’opérationnalisation du fonds spécial ou sur le lien entre la COP et le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), a jugé le Core Latin American Group (CLAM).  Ce groupe a aussi insisté sur le rôle crucial du Comité des finances, qui devra se pencher sur la question de la transparence.  Les contributions du secteur privé étant clairement évoquées dans le traité, il serait important selon lui de disposer de règles précises en matière de reddition de comptes, sans quoi le danger de conflits d’intérêts serait bien réel.

La Fédération de Russie a critiqué le caractère volontaire des contributions aux fonds.  De son point de vue, c’est un « problème majeur », qui mine la réalisation de l’Accord BBNJ et laisse planer le risque que personne ne verse de contributions. « Comment parler de règles de gestion financière, alors que nous ne disposons pas d’un mécanisme de financement stable? » s’est impatientée la déléguée russe.  Le mécanisme de financement n’est pas prévu dans l’Accord, a-t-elle souligné, alors que l’Accord vise avant tout à favoriser le transfert de technologies, à renforcer les capacités et à réaliser des projets efficaces pour la biodiversité, notamment pour les pays en développement.  Le fait que les contributions volontaires soient aussi liées au FEM n’a pas non plus rassuré la Russie, qui y a vu un « risque d’ingérence ».

Groupe de travail III sur les mesures à convenir avec le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) pour donner effet aux dispositions relatives au financement de l’Accord

Dans son article 52, l’Accord BBNJ crée un mécanisme de financement devant permettre de fournir des ressources financières adéquates, accessibles, nouvelles et supplémentaires et prévisibles.  Ce mécanisme vise à aider les États parties en développement à mettre en œuvre l’Accord, y compris via le renforcement des capacités et le transfert de technologies marines.  La Caisse du FEM est mentionnée comme faisant partie de ce mécanisme de financement, de même qu’un fonds spécial et un fonds de contributions volontaires créé par la COP.

S’agissant du projet de mémorandum préparé par les coprésidents de la Commission, la majorité des délégations ont estimé qu’il constitue un « bon point de départ ».  L’Union européenne, appuyée par le Royaume-Uni et la Türkiye, a estimé que le document est « conforme » aux exigences de l’Accord.  Rappelant à ce titre que le mémorandum repose sur d’autres protocoles entre le FEM et des accords environnementaux, tout en étant adapté au contexte de l’Accord, la Norvège a précisé que le mécanisme financier sera « clef » pour la mise en œuvre de l’Accord.  « Le FEM a l’avantage d’exister et d’être immédiatement prêt à passer à l’action », a ajouté l’Union européenne. 

Néanmoins, il s’agit d’inclure des dispositions pour faire émerger des synergies avec d’autres fonds, plutôt que des doublons, a poursuivi l’Union européenne, appuyée par le Brésil, au nom du Core Latin American Group (CLAM).  Elle a souhaité établir un processus de coopération basé sur des échanges réguliers et ainsi éviter d’engranger une microgestion du FEM. 

Plusieurs groupes de délégations, dont Antigua-et-Barbuda, au nom de la CARICOM, les Seychelles, au nom du Groupe des État d’Afrique, et le Brésil, au nom du CLAM, ont tenu à rappeler que les entités du mécanisme de financement doivent être guidées par les besoins des États parties, en particulier les pays en développement, et fonctionner selon les critères établis par l’article 52, paragraphe 9 du traité.

L’utilisation des fonds doit être soumise à un examen régulier via des rapports de conformité annuels, ont souligné ces mêmes groupes, souhaitant que la COP fournisse des orientations pour promouvoir cohérence et complémentarité quant au financement et au rôle du FEM.  Antigua-et-Barbuda, au nom de la CARICOM, a noté que le mandat reste très vague, estimant que l’évaluation devrait porter seulement sur les activités que le FEM finance. Il faut trouver « la bonne manière de faire coopérer le FEM avec l’Accord BBNJ », a tranché la Norvège qui a relevé que le FEM travaille avec de nombreux programmes.

Mais avant toute chose, il est nécessaire de définir précisément les modalités et les critères pour le financement, ont avancé Sri Lanka et le Bangladesh.  Ce dernier a néanmoins attiré l’attention sur la nécessité de conserver de la souplesse, de respecter les priorités nationales et de fournir les financements sous la forme d’une aide, et non de prêts, sans que cette aide ne soit liée à des taux de marché ou qu’elle ne crée de la dette pour des « biens publics ». Pour la Thaïlande, qui a annoncé, sous les applaudissements, avoir signé l’Accord BBNJ cet après-midi, il est crucial de favoriser la transparence. 

Se disant également préoccupée par les intérêts des pays en développement, la Fédération de Russie a battu en brèche le projet de mémorandum, estimant qu’il n’y a « aucune garantie concernant le financement du monde en développement ».  Selon la déléguée, le document comporte des expressions qui sont caractéristiques d’un document juridiquement contraignant, tout en se voulant non contraignant.  En outre, les dispositions actuelles n’offrent pas d’indications claires ou de garanties sur le financement par le FEM des pays en développement, a-t-elle déploré.  « On ne peut pas exclure que la priorité soit donnée aux pays industrialisés ou qu’il y ait ingérence dans les affaires internes des pays en développement. » 

Afin d’éclairer les débats, la Suisse et le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique ont tenu à faire part de leur expérience avec le FEM. Dans le protocole d’accord existant entre le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique et le FEM, des évaluations du financement nécessaire sont réalisées sur la base des orientations de la COP.  La Suisse a, quant à elle, estimé qu’il n’est pas nécessaire d’être trop explicite dans le texte présenté puisque des pratiques normalisées illustrent que « cela fonctionne très bien lorsque tout le monde travaille de bonne foi ». 

S’agissant des critères de sélection des membres qui siégeront au Comité des finances, organe subsidiaire créé en vertu de l’Accord, la Micronésie, au nom des PEID du Pacifique, a jugé nécessaire d’établir une comparaison avec des organes similaires existants.  Cette délégation a été également d’avis, comme l’Union européenne, que l’équilibre entre les genres et la représentation géographique constitueront des critères essentiels et a demandé, à l’instar d’Antigua-et-Barbuda, la sélection d’un membre parmi les PEID. Selon l’Union européenne, le Comité des finances devra également coopérer étroitement avec les autres comités. C’est pourquoi il faudrait préciser leurs mandats respectifs pour éviter tout chevauchement. 

Selon la Fédération de Russie, ces modalités doivent être définies en se référant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il ne faut pas « nourrir l’idée de l’exploitation des fonds marins » alors que ceux-ci « constituent des biens communs de l’humanité », a asséné la déléguée russe.  Il est selon elle indispensable de prévoir des règles précises pour siéger au sein des organes subsidiaires et participer de façon active à l’élaboration des recommandations par consensus.  Les membres devront faire autorité dans les secteurs pertinents et défendre les priorités des États en développement, a-t-elle conclu.

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ECOSOC: le Forum de la jeunesse s’achève sur des appels à renforcer l’accès et les compétences numériques des jeunes

Session de 2025, Forum de la jeunesse,
4e & 5e séances – matin & après-midi
ECOSOC/7199

ECOSOC: le Forum de la jeunesse s’achève sur des appels à renforcer l’accès et les compétences numériques des jeunes

L’édition 2025 du Forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC), qui s’achève aujourd’hui après trois jours de débats, a vu 105 jeunes délégués représenter leurs gouvernements respectifs, a constaté avec joie la Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques au Département des affaires économiques et sociales (DESA), à la clôture de l’événement.  Une session durant laquelle les jeunes ont voulu montrer qu’ils sont les moteurs des progrès du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Mme Bjørg Sandkjær a reconnu que l’engagement des jeunes va au-delà des « problèmes de jeunesse », car ils contribuent à tous les objectifs de développement durable (ODD) -aux niveaux local, national et mondial- de manière essentielle et originale.  Les actions qu’ils mènent dans le monde entier en sont la preuve et ils étaient nombreux à les présenter au cours de la session. 

Une autre certitude martelée pendant ces trois jours: il est essentiel d’inclure les jeunes de manière significative dans tous les processus qui façonnent leur vie, et donc dans l’élaboration des politiques. Ce à quoi le DESA contribue par le biais du Programme des délégués de la jeunesse des Nations Unies, qui veille à ce que leurs idées soient prises en compte dans les décisions de l’ONU, a fait valoir Mme Sandkjær.  Elle a d’ailleurs espéré que les jeunes seront nombreux à participer au deuxième Sommet mondial pour le développement social, en novembre à Doha (Qatar).

Les différentes sessions de la journée ont illustré notamment le besoin de former les jeunes aux technologies -le numérique et l’intelligence artificielle (IA) en particulier- pour leur donner plus de chances d’accéder à un emploi décent, dans le secteur formel.  Les universités, en tant que partenaires, ont ainsi été invitées à créer un espace d’apprentissage et de réflexion éthique sur les outils technologiques.  L’importance des partenariats avec les différentes parties prenantes a aussi été soulignée, dans l’une des discussions.

Garantir un travail décent aux jeunes

La discussion du matin était axée sur les moyens de contribution des jeunes au développement durable par le biais de l’objectif de développement durable (ODD) no 8 relatif au travail décent et la croissance économique.  D’emblée, le modérateur, M. Siam Yabili, a appelé à bâtir des systèmes économiques qui soient en adéquation avec le potentiel créatif des jeunes.  Celui qui est Président de Congo Connexion et Président du Conseil des jeunes de la diaspora congolaise a prôné des partenariats multipartites pour avancer. Et surtout, « personne ne doit prendre la parole au nom des jeunes », a-t-il insisté en rappelant la bravoure et la résilience des jeunes du monde entier.  Il a lui-même grandi dans un camp de réfugiés du fait du conflit qui ravage l’est de la République démocratique du Congo (RDC) depuis des décennies.

Plantant le décor du débat, la Directrice du Bureau de l’Organisation internationale du Travail (OIT) auprès des Nations Unies a constaté qu’un jeune sur cinq évolue dans le secteur formel dans les pays en développement, contre quatre sur cinq dans les économies avancées.  Selon Mme Cynthia Samuel-Olonjuwon, il faut doter les jeunes de compétences pour qu’ils puissent prospérer dans un monde du travail en perpétuelle mutation.  De même, a-t-elle ajouté, « on ne peut parler de travail décent sans veiller à l’équité, la dignité et la justice sur le lieu du travail ». C’est pourquoi l’ONU a lancé en 2016 l’Initiative mondiale en faveur de la création d’emplois décents pour les jeunes au cours du Forum de la jeunesse.  Aujourd’hui, a-t-elle salué, cette initiative est devenue une alliance mondiale avec plus de 100 acteurs multipartites qui entendent changer l’environnement du travail en faveur des jeunes.

Miser sur le numérique et les partenariats

Le numérique est arrivé en tête des secteurs sur lesquels miser afin d’intégrer les jeunes au monde de l’emploi, selon plusieurs jeunes ayant pris la parole.  L’emploi décent pour les jeunes passe par les compétences numériques, a affirmé notamment une jeune entrepreneuse jordanienne.  Pour ne pas creuser davantage la fracture numérique, elle a recommandé d’autonomiser les jeunes femmes et les jeunes les plus vulnérables.

Une jeune du Zimbabwe a aussi expliqué comment la formation dans le numérique permet d’accompagner les jeunes à développer leurs compétences.  Une autre jeune, qui est fondatrice de Frontlines Foundation, une organisation à but non lucratif promouvant une utilisation sûre de l’intelligence artificielle, a plaidé pour la formation des jeunes en la matière afin de promouvoir l’innovation et l’équité dans le monde de l’emploi.

En Afrique du Sud, a indiqué la délégation, les autorités ont déjà investi dans l’innovation et les technologies numériques pour préparer les jeunes aux emplois décents dans le secteur.  L’Inde a quant à elle soutenu des programmes ciblant les jeunes ruraux en leur permettant d’accéder aux outils financiers grâce au numérique.  Ainsi, la plupart des jeunes ont un compte bancaire et le Gouvernement favorise l’essor des start-up.  Une jeune de Samsung Electronics America a évoqué une initiative du groupe Samsung qui a permis à 2,8 millions de jeunes dans 60 pays de renforcer leurs compétences numériques.  Un partenariat est d’ailleurs en cours avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans cette optique.

Ces efforts ne doivent pas oublier les réfugiés, a rappelé un jeune réfugié, cofondateur de l’ONG Unleashed-Potentials in Motion (Ouganda), en expliquant combien il est important d’autonomiser et éduquer les jeunes et les femmes des communautés de réfugiés en libérant leurs capacités de leadership et leurs potentiels cachés.  Un autre, jeune colombien, a proposé d’investir dans les entreprises de jeunes.  Et au Tchad, le Gouvernement a lancé un programme en 2022 visant à créer 50 000 emplois décents en faveur des jeunes.

Un jeune fonctionnaire américain travaillant à la Maison Blanche a milité pour que les jeunes tirent profit d’opportunités d’organisations internationales et des programmes gouvernementaux les ciblant, alors qu’une jeune kurde d’Iraq a invité les jeunes à ne pas rêver d’être fonctionnaires, mais plutôt de créer leurs propres emplois car ils ont l’énergie et l’enthousiasme en leur faveur.

Sur un autre plan, une jeune de Türkiye a déploré le fait que le monde de l’emploi continue de penser qu’il faut que les jeunes aient de l’expérience avant de parvenir à des emplois décents.  Elle a préconisé des stages pour les aguerrir, même si ceux-ci ne bénéficient qu’aux classes privilégiées du fait qu’ils sont généralement non rémunérés.  Elle a donc plaidé pour que les stages soient payés.  Un jeune slovène a aussi décrié le système de stages non rémunérés.  Loin de cette problématique, une jeune étudiante de la George Washington University a amené la discussion sur le terrain des zones de conflit, où le débat sur les emplois décents n’a pas lieu d’être, car on pense d’abord à survivre.  Il faudrait donc penser, a-t-elle dit, au renforcement des compétences des jeunes dans les sociétés postconflit en transition.

Transition vers des emplois décents et verts

Les emplois verts et décents ont également été présentés comme un bon avenir pour les jeunes.  Un jeune canadien a rappelé qu’il faut mettre en œuvre l’Accord de Paris sur les changements climatiques et promouvoir l’économie verte qui est à même de créer de tels emplois.  Une autre jeune activiste climatique a appelé les dirigeants politiques à soutenir le développement des compétences des jeunes dans le cadre de la transition écologique.

Dans un exposé sur la question des emplois verts, M. Marcos Neto, Administrateur assistant et Directeur du Bureau des politiques et de l’appui aux programmes du PNUD, a résumé les avantages de la transition écologique pour les jeunes.  Il a rappelé que cette transition pourrait créer près de 100 millions d’emplois avant l’année 2030, mais a prévenu qu’il fallait aider les jeunes à accéder aux compétences y afférentes.  Conscient des besoins en la matière, le PNUD a créé près de 100 laboratoires dans de nombreux pays.  En partenariat avec l’OIT, l’agence onusienne organise des ateliers sur la transition écologique et les emplois verts.  « Il faut faire de la transition écologique une révolution qui permette de créer des emplois décents pour les jeunes », a-t-il souhaité.

L’autonomisation des jeunes par la science et la technologie

Dans l’après-midi, une session thématique a mis l’accent sur le rôle de la science et de la technologie dans la promotion des ODD, en mettant en évidence les opportunités pour les jeunes à l’ère numérique et les défis qui se posent, tels que la fracture numérique, la cybersécurité et l’utilisation éthique de l’IA.

Le postulat, selon la modératrice, Mme Sinead Bovell, fondatrice de WAYE, c’est que les jeunes doivent pleinement bénéficier des technologies émergentes, en ayant accès à des outils numériques abordables et adaptés, ainsi qu’à une infrastructure Internet fiable.  Parallèlement, l’accès à la technologie doit s’accompagner des compétences nécessaires pour naviguer dans le monde numérique, a-t-elle précisé.  Forte de ce constat, elle a mis en lumière le rôle de premier plan que doit jouer l’éducation dans ce contexte en demandant aux intervenants de réfléchir à la manière avec laquelle les universités et écoles pourraient contribuer à mieux préparer les jeunes à l’avenir technologique. 

En tant que pôles de formation du capital humain, les universités doivent continuer à jouer un rôle central dans la préparation des jeunes à un environnement technologique en rapide évolution: elle doivent dispenser une formation technique et en même temps créer un espace propice à la réflexion éthique et à la recherche interdisciplinaire, a répondu M. Alexander Schrier, étudiant à la University of Pennsylvania.  Lorsque les cours sont étroitement alignés sur les défis mondiaux, les étudiants acquièrent non seulement les compétences nécessaires pour utiliser les outils numériques, mais aussi le jugement nécessaire pour en faire bon usage. 

Par conséquent, pour préparer les jeunes à l’avenir numérique, les universités devraient, selon l’étudiant, promouvoir la culture numérique dans toutes les disciplines, et pas seulement dans les STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques).  Elles devraient proposer davantage de cours qui associent la maîtrise technique à des bases en éthique des données, en cybersécurité et en développement durable.  À titre d’exemple, il a mentionné l’un de ses cours intitulé « Intelligence artificielle et sécurité internationale » qui fait le lien entre la théorie des relations internationales, l’informatique et l’économie afin d’examiner les risques et les opportunités que représente l’IA sur la scène mondiale.

Utiliser l’IA pour atteindre nos objectifs plus rapidement

Une spécialiste de la cybersécurité, Mme Zino Haro, cofondatrice de Youth for Privacy (Mexique), a estimé que quand on parle d’alphabétisation numérique, le véritable enjeu est de savoir comment intégrer nos capacités et préoccupations en tant que personne aux capacités de la technologie.  Aujourd’hui, la distinction entre ce qui est strictement humain et ce qui est strictement machine est de moins en moins nette et à l’avenir, il faudra veiller à utiliser de la manière la plus appropriée les technologies émergentes et à en faire des amplificateurs plutôt que des substituts de l’action humaine, a-t-elle fait valoir.  En d’autres termes, comment utiliser des technologies telles que l’IA pour atteindre nos objectifs plus rapidement ou avec des bases plus solides au lieu de centrer nos objectifs sur l’IA? 

Elle a toutefois relevé que, de nos jours, de nombreux systèmes scolaires accusent un retard administratif important ou ne disposent pas des ressources nécessaires pour exposer leurs élèves aux nouvelles technologies autant qu’ils le devraient.  « Si votre école ou votre lieu de travail n’a pas encore trouvé le moyen d’intégrer correctement ces nouvelles technologies, il est possible que les gens les utilisent à mauvais escient et n’apprennent pas ce qu’ils devraient apprendre », a-t-elle mis en garde.  Sur ce point, la modératrice a apporté une précision car, contrairement à l’idée que « tous les jeunes sont en ligne aujourd’hui », dans le monde en développement, seuls 43% d’entre eux le sont. 

Les technologies, un bien public devant être mondialisé

Mettant sa casquette du « Sud mondial » Mme Joyati Das, chercheuse au Melbourne Centre for Cities, a confirmé que les infrastructures numériques de ces pays ne sont pas robustes et que l’accès à Internet reste une aspiration pour la plupart des citoyens et en particulier les groupes vulnérables.  À ses yeux, les technologies doivent être considérées comme un bien public et leur démocratisation est impérative, notamment à travers des partenariats public-privé. 

Pour Mme Das, il ne fait pas de doute que la technologie est un facteur de développement, y compris de développement social, et un outil de plaidoyer puissant.  Les jeunes d’aujourd’hui sont sensibilisés aux questions locales et mondiales grâce aux outils numériques, a-t-elle relevé, mais en même temps, ces technologies ont rendu les jeunes plus visibles et mis en exergue leur pouvoir d’influence. Sur ce point, elle a rappelé qu’ONU-Habitat est en train de concevoir une initiative de plaidoyer -« Villes de jeunes 2030 »- qui cherche à positionner les jeunes comme source de données sur la gouvernance et les ODD en vue de promouvoir une responsabilité commune entre les gouvernements et les communautés en termes de développement urbain.

L’innovation et la technologie doivent se fonder sur des objectifs afin d’être visionnaires et non pas réactionnaires, a soutenu l’un des intervenants au débat interactif.  Abondant en ce sens, un jeune colombien a précisé qu’il faut un objectif économique pour construire des économies durables, et il faut que l’innovation puisse donner lieu à des initiatives positives.  Son organisation utilise par exemple l’IA dans la lutte contre la déforestation.  Enfin, son homologue du Danemark a observé qu’une éducation numérique inclusive permet aux jeunes de jouer un rôle de « défenseurs de la paix et du bien-être numériques ».

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Conseil de sécurité: pas de retour possible de la stabilité en Libye sans une relance du processus politique, prévient la nouvelle Représentante spéciale

9900e séance – matin
CS/16045

Conseil de sécurité: pas de retour possible de la stabilité en Libye sans une relance du processus politique, prévient la nouvelle Représentante spéciale

Deux mois après sa prise de fonction, la nouvelle Représentante spéciale du Secrétaire général pour la Libye et Cheffe de la Mission d’appui des Nations Unies dans ce pays (MANUL) a brossé, ce matin, un tableau de la situation sans concession devant le Conseil de sécurité.  Alors que la Libye reste engluée dans une crise politique, économique, sécuritaire et humanitaire, elle a averti qu’un rétablissement de la stabilité ne pourra être envisagé sans une relance du processus politique et la formation d’un gouvernement unifié. 

Faisant état de ses consultations avec les acteurs libyens, qu’il s’agisse de dirigeants politiques et militaires, de responsables d’institutions de contrôle et de partis politiques ou encore de représentants de la société civile, Mme Hanna Serwaa Tetteh a indiqué que, si certains de ses interlocuteurs conviennent qu’il est urgent d’unifier les institutions, d’autres considèrent qu’une telle évolution prolongerait la période de transition qui dure depuis près de 15 ans. 

De même, alors que toutes les parties s’accordent sur la tenue d’élections nationales, les avis divergent quant à la nécessité d’un cadre constitutionnel préalable au scrutin, a-t-elle constaté, précisant que la MANUL s’emploie à dépasser ces divisions en appuyant les travaux du Comité consultatif chargé d’élaborer des options pour résoudre les questions électorales controversées. Le rapport que le Comité consultatif doit soumettre à la fin du mois servira de base pour « forger un consensus sur les prochaines étapes du processus politique mené et pris en charge par les Libyens », a-t-elle assuré. 

Mme Tetteh a ajouté que, parallèlement à ces travaux, la MANUL a mobilisé des experts économiques pour identifier des réformes visant à améliorer la gestion financière et la viabilité du pays.  En l’absence d’un budget national concerté, l’utilisation excessive des vastes ressources de la Libye pourrait entraîner un effondrement économique si rien n’est fait, a prévenu la Représentante spéciale, qui s’est déclarée favorable à un audit des principales institutions de l’État libyen par l’un des plus grands cabinets internationaux spécialisés.  Cela apporterait, selon elle, de la clarté sur la gestion des finances publiques et contribuerait à remédier aux défaillances et aux lacunes de ces institutions. 

Qualifiant par ailleurs d’« instable » la situation sécuritaire intérieure, bien que l’accord de cessez-le-feu de 2020 tienne largement, la Cheffe de la MANUL a dit craindre une nouvelle flambée de violence à Tripoli, la capitale et ses environs étant le théâtre de mobilisations armées.  Même inquiétude dans la région sud, où la consolidation du contrôle des forces de l’Armée nationale libyenne (ANL) continue d’alimenter les tensions avec les parties prenantes locales et ont entraîné de violents combats.  De fait, a souligné Mme Tetteh, « la situation restera fragile tant qu’il n’y aura pas une volonté politique d’unifier les forces de sécurité et militaires autour d’une vision commune ». 

Divisions profondes et concurrence féroce autour de la rente pétrolière

L’absence d’unification des institutions politiques et des forces militaires a été pointée par les membres du Conseil, la plupart imputant l’impasse persistante aux luttes entre parties libyennes pour le contrôle des ressources de l’État, notamment pétrolières.  Ces divisions soumettent les institutions du pays à des graves pressions et nourrissent les risques d’un conflit renouvelé, s’est ému le Royaume-Uni, appelant les dirigeants du pays à mettre de côté leurs intérêts personnels et à agréer un cadre économique unifié.  Les parties doivent impérativement s’entendre sur un budget unifié pour préserver la stabilité économique, défendre le dinar libyen et mettre fin au conflit sur le partage des recettes, ont renchéri les États-Unis. 

Cette préoccupation a été partagée par les A3+ (Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana), qui, par la voix de l’Algérie, ont constaté que l’absence d’un budget unifié, conjuguée à un manque de transparence et de responsabilité, n’a fait qu’exacerber la crise économique en Libye.  Ils ont, par conséquent, invité la MANUL à fournir au pays une assistance technique pour l’aider à relever ce grave défi.  Sur la même ligne, la Chine et la Fédération de Russie ont en outre insisté sur le déblocage des avoirs libyens gelés et leur utilisation au redressement national. 

Au-delà du marasme économique, les délégations ont surtout souligné l’urgence de dépasser les blocages et de parvenir à la formation d’un nouveau gouvernement unifié à même d’organiser des élections nationales.  Saluant l’achèvement de la deuxième phase des élections municipales, les A3+ ont exhorté les différentes parties libyennes à collaborer avec la MANUL pour résoudre les questions litigieuses liées aux lois électorales, en vue de trouver des solutions pratiques pour sortir le pays de l’impasse politique.  La Grèce et la Slovénie ont, pour leur part, applaudi la création du Comité consultatif, y voyant l’opportunité de relancer un processus politique inclusif, dirigé et pris en charge par les Libyens. 

À l’unisson, la France a appelé tous les acteurs libyens et internationaux à coopérer avec la Représentante spéciale pour surmonter les luttes politiques concernant le contrôle des institutions.  Elle a notamment jugé nécessaire de mettre un terme à la crise à la tête du Haut Conseil d’État, qui reste non résolue.  Le pays a besoin d’un processus politique revitalisé, a résumé la Chine en se félicitant des récentes discussions intralibyennes au Caire.  Le Pakistan a quant à lui plaidé en faveur d’une réconciliation politique menée et contrôlée par les Libyens, qui se concentre sur une répartition équitable des ressources nationales. 

Sur le plan sécuritaire, les membres du Conseil ont constaté la recrudescence des tensions ces dernières semaines et appelé à la réunification des institutions militaires et de sécurité pour y faire face.  Ces efforts d’intégration militaire sont essentiels pour éviter que le pays ne devienne un « centre de conflit régional », ont souligné les États-Unis, pour qui le renforcement de la sécurité est également nécessaire pour acheminer l’aide humanitaire et contrôler les migrations illégales, exacerbées par les conflits au Soudan et au Soudan du Sud.  Il importe aussi d’appuyer la MANUL dans la mise en œuvre du plan de retrait de toutes les forces étrangères du territoire libyen, a ajouté la France, rejointe par le Royaume-Uni qui s’est alarmé des activités de déstabilisation de milices et d’autres acteurs sécuritaires.

Violations du régime de sanctions

La question des sanctions a également été abordée par plusieurs membres, à commencer par les États-Unis, qui se sont dits favorables au renouvellement du mandat du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye, notamment en raison des violations de l’embargo sur les armes et des exportations illicites de pétrole libyen. La délégation américaine a demandé au Groupe d’experts de travailler sur ces violations et d’identifier les individus et entités qui « déstabilisent la Libye ».  De son côté, la Fédération de Russie a estimé que les sanctions doivent tenir compte des « réalités du pays ». 

Le respect de l’embargo sur les armes est impératif pour aider la Libye à retrouver sa souveraineté et la maîtrise de ses frontières, a insisté la France, non sans rappeler que les autorisations mises en place par le Conseil depuis 2016 pour permettre à des États Membres et organisations régionales d’inspecter des navires suspectés de violations contribuent à cet objectif, en particulier via l’opération IRINI de l’Union européenne.  Face aux refus répétés et persistants opposés à l’inspection de navires soupçonnés de violer l’embargo sur les armes, la Grèce a indiqué qu’elle appuierait le renouvellement du mandat de l’opération, qui expire en mai. Il est crucial pour préserver la paix et la stabilité en Libye et en Méditerranée, a-t-elle souligné. 

Prenant acte des efforts du Comité consultatif et de ses propositions pour sortir de l’impasse, le représentant de la Libye a demandé à la nouvelle Représentante spéciale de soutenir le processus politique afin de permettre la tenue d’élections.  Il a cependant dit attendre « des actes, pas de simples paroles », affirmant que si son pays a besoin d’un véritable partenariat international, il ne doit pas pour autant se faire dicter des conditions.  Compte tenu de la gravité de la crise économique, il a appelé à « des arrangements budgétaires et financiers au service du peuple libyen ». Le délégué a également averti qu’il ne pourra pas y avoir de stabilité tant que l’État n’aura pas le contrôle des armes qui circulent dans le pays.  Quant au fait que la Libye est un pays de transit pour les migrants, il a jugé qu’elle ne peut endosser seule la responsabilité de ce phénomène, dénonçant les « leçons de tolérance » données par les pays européens. 

En conclusion, il a appelé à soutenir le processus de réconciliation libyen en vue de la tenue d’élections et souhaité l’arrêt des ingérences.  « Nous en avons assez des solutions imposées de l’extérieur qui ne font que nourrir l’instabilité. » 

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La situation en Libye S/2025/223

Exposé

Mme HANNA SERWAA TETTEH, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la Libye et Cheffe de la Mission d'appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a indiqué avoir mené, depuis sa prise de fonction en février, de vastes consultations avec les acteurs politiques, militaires, sécuritaires et judiciaires libyens, les institutions de contrôle, les partis politiques, la société civile, les leaders féministes et la communauté diplomatique.  Elle a noté que la plupart des dirigeants libyens appellent à un processus politique inclusif et soulignent l’urgence d’unifier les institutions et de rétablir la stabilité.  Certains estiment qu’un nouveau gouvernement unifié est la seule solution, tandis que d’autres affirment qu’il prolongera la période de transition qui dure depuis près de 15 ans, a-t-elle rapporté, précisant toutefois que toutes les parties s’accordent sur la tenue d’élections, même si les avis divergent quant à la nécessité d’un cadre constitutionnel préalable au scrutin.  Pour sa part, la MANUL soutient les travaux du Comité consultatif visant à élaborer des options pour résoudre les questions électorales controversées, a expliqué la Représentante spéciale, selon laquelle cet organe a tenu des sessions à Benghazi et à Tripoli, notamment avec le Comité « 6+6 » et la Haute Commission électorale nationale, pour discuter de ces défis.  Il poursuit actuellement ses délibérations et devrait soumettre son rapport sur la voie à suivre d’ici à la fin du mois, ce document devant servir de base pour forger un consensus sur les prochaines étapes du processus politique mené et pris en charge par les Libyens. 

Constatant que la crise politique libyenne persiste en raison de la concurrence pour les ressources économiques, Mme Tetteh a ajouté que, parallèlement aux travaux du Comité consultatif, la MANUL a mobilisé des experts économiques pour identifier des réformes visant à améliorer la gestion financière et la viabilité du pays.  Dans ce contexte, elle a prévenu qu’en l’absence d’un budget national concerté, l’utilisation excessive des vastes ressources de la Libye pourrait entraîner un effondrement économique si rien n’est fait.  Elle a néanmoins qualifié d’évolution positive l’interruption des transactions « pétrole brut contre carburant » de la National Oil Corporation à compter du 1er mars, estimant qu’elle favorise une plus grande transparence des ventes de pétrole.  Elle a par ailleurs jugé qu’un audit des principales institutions de l’État libyen par l’un des cinq plus grands cabinets internationaux spécialisés apporterait de la clarté sur la gestion des finances publiques et contribuerait à remédier aux défaillances et aux lacunes de ces institutions. 

Sur le plan sécuritaire, elle a noté que, si l’accord de cessez-le-feu de 2020 tient largement, la situation reste instable.  Dans un contexte de renforcement militaire continu, les récentes mobilisations armées à Tripoli et dans ses environs ont ravivé les inquiétudes quant à une éventuelle flambée de violence dans la capitale, a-t-elle averti, ajoutant que, dans la région Sud, la consolidation du contrôle des forces de l’Armée nationale libyenne continue d’alimenter les tensions avec les parties prenantes locales et ont entraîné de violents combats et des pertes en vies humaines à Qatroun.  Selon elle, « la situation restera fragile tant qu’il n’y aura pas une volonté politique d’unifier les forces de sécurité et militaires autour d’une vision commune ».

Pour la Représentante spéciale, l’une des conséquences tragiques de la division des institutions en Libye est « le vide dans lequel les acteurs armés commettent des violations des droits humains en toute impunité ».  Alors que des discours de haine, xénophobes et racistes, incitent à la violence contre les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les organisations humanitaires, elle a pris acte des récentes discussions entre le Gouvernement et l’ONU pour remédier à la situation et a encouragé tous les acteurs politiques à adopter une approche plus globale pour lutter contre le trafic de migrants et sécuriser l’espace humanitaire. Dénonçant d’autre part les détentions arbitraires de professionnels du droit et d’opposants politiques, elle a exhorté les autorités à garantir que les arrestations soient menées conformément à la loi et que les personnes privées de liberté bénéficient de leur droit à un procès équitable.  Elle a également invité la Chambre des députés à accélérer l’adoption de la loi sur la protection des femmes contre la violence, avant de réitérer l’engagement de la MANUL à collaborer avec toutes les parties prenantes libyennes et l’Union africaine pour soutenir un processus de réconciliation fondé sur les droits, centré sur les victimes et inclusif. 

S’agissant de la deuxième phase des élections locales dans 62 municipalités, dont Tripoli, Benghazi et Sabha, Mme Tetteh a confirmé que l’inscription des électeurs s’est achevée le 15 avril.  Réaffirmant l’importance de ces élections pour l’établissement d’une « gouvernance démocratique à la base », elle s’est félicitée que, dans l’ensemble, la première phase des élections municipales ait été un succès.  Au niveau national, elle a observé que le litige concernant les élections à la présidence du Haut Conseil d’État reste non résolu, ce qui fragilise l’institution.  Elle a exhorté ses membres à trouver une solution de compromis. 

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BBNJ: le règlement intérieur de la Conférence des parties à l’Accord sur la biodiversité marine au cœur des travaux de la Commission préparatoire

Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord sur la biodiversité marine,
Première session, matin & après-midi
MER/2210

BBNJ: le règlement intérieur de la Conférence des parties à l’Accord sur la biodiversité marine au cœur des travaux de la Commission préparatoire

La Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (Accord BBNJ) et la tenue de la première réunion de la Conférence des Parties à l’Accord a poursuivi aujourd’hui ses travaux de fond sur un éventail de questions. 

Le Groupe de travail I a ainsi continué, ce matin et en début d’après-midi, son débat sur le projet de règlement intérieur de la Conférence des Parties (COP) à l’Accord, entamé lundi. 

Les délégués ont repris ensuite l’examen du mandat, des modalités de fonctionnement et du règlement intérieur des organes subsidiaires créés en application de l’Accord, ainsi que de la procédure à suivre pour la sélection de leurs membres et des membres de l’Organe scientifique et technique.

Groupe de travail I sur le règlement intérieur de la Conférence des Parties à l’Accord

S’agissant de la fréquence des réunions ordinaires, la majorité des délégations se sont entendues sur un format annuel qui serait ensuite réduit au fil de la mise en œuvre de l’Accord BBNJ, probablement à un format biennal.  La pierre d’achoppement s’est située davantage au niveau du degré de précision ou de flexibilité à accorder au libellé du règlement intérieur.  Pour certaines délégations, comme l’Australie et Singapour, l’Accord offre une certaine souplesse d’interprétation « qu’il serait bon de conserver » afin que la COP puisse s’adapter à l’évolution des processus.  Pour d’autres, comme la Suisse, il est nécessaire de fixer les modalités précises des réunions dès à présent. 

À ce titre, la Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique, appuyée par le Canada, a suggéré une échéance de trois à cinq ans pour la tenue de réunions annuelles, tandis que le Bangladesh a estimé que ce délai pourrait s’avérer trop court pour opérationnaliser pleinement l’Accord.  En vue de conserver une certaine flexibilité, l’Islande a recommandé d’inclure dans le projet un processus de révision des modalités après cinq ans, tandis que l’Argentine, au nom du Core Latin American Group (CLAM), a souhaité l’ajout d’un libellé permettant de réduire la fréquence des réunions, comme proposé par l’Union européenne. 

Pour des raisons de « stabilité et de prévisibilité », le Japon a préconisé de fixer directement une base biennale et d’inclure une clause pour l’organisation de réunions extraordinaires.  La Suisse a, elle aussi, estimé que des réunions biennales donneraient davantage de temps pour réaliser de réels progrès dans la mise en œuvre de l’Accord.  Reconnaissant que les deux options comportent des avantages, la Chine a toutefois soulevé la question du nombre de parties « contractantes », qui sera amené à évoluer.  « Si seuls 60 États participent à la première réunion, allons-nous accepter que des décisions importantes soient prises? » a-t-il lancé.  L’Accord entrera en vigueur 120 jours après la date de dépôt du soixantième instrument de ratification, d’approbation, d’acceptation ou d’adhésion.

S’agissant du lieu et du format des réunions, la principale préoccupation reste la participation inclusive de tous les États parties.  Si bon nombre de délégations, dont la Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique, et la Jamaïque, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), favorisent la tenue de réunions au Siège de l’ONU à New York pour des raisons pratiques et financières, d’autres ont estimé qu’un format hybride pourrait tout à fait résoudre la question de la participation. 

Singapour, au nom des petits États insulaires en développement (PEID), a rappelé que la participation des pays en développement serait probablement nécessaire pour atteindre le quorum en cas de prise de décisions.  La CARICOM, a, sur ce point, estimé que le fonds d’affectation spéciale pourrait financer la participation des pays en développement, sans qu’il n’y ait toutefois aucune garantie.  Il ne faut pas perdre de vue que « l’inclusion et la pleine participation doivent être promues tout au long du processus », ont rappelé les Philippines. 

C’est pour cette même raison que le format virtuel a divisé les délégations. Dans l’ensemble, les délégations ont appuyé des réunions en présentiel, avec la possibilité d’un format hybride, voire virtuel, pour les organes subsidiaires et en cas de circonstances exceptionnelles, comme ce fut le cas pendant la pandémie de COVID-19, sans que des décisions de fonds ne soient alors prises et sur seule initiative de la COP. 

Si l’Union européenne a souhaité réfléchir plus avant au format virtuel, la Suisse a rappelé la « contradiction environnementale » que représente l’organisation de réunions en présentiel, même si celles-ci comportent certains avantages non négligeables.  Le Royaume-Uni a rappelé que les réunions hybrides peuvent réduire les coûts, tandis que la Norvège a estimé que les réunions virtuelles peuvent encourager une plus grande participation.  Les États fédérés de Micronésie ont abondé dans ce sens, expliquant que des réunions virtuelles permettraient d’accroître la participation des petites délégations qui ne peuvent envoyer de représentants à chaque session à l’étranger. « Si des décisions par consensus peuvent alors êtes prises à distance, il ne peut néanmoins être question de vote », a précisé le délégué. 

À l’inverse, la République islamique d’Iran et Cuba ont rappelé que certains pays font face à des difficultés techniques, notamment en raison de mesures coercitives unilatérales qui ne permettent pas l’accès à certains logiciels. Pour la Fédération de Russie, la question ne se pose simplement pas.  « Il y a des pratiques établies à l’ONU et le Règlement intérieur de l’Assemblée générale devrait prévaloir », a tranché la déléguée, estimant que New York est donc le lieu approprié et que toutes les réunions devraient se tenir en présentiel. 

Concernant la possibilité de l’alternance du lieu, le délégué chinois a noté que ce type de disposition a tendance à exercer une pression sur les groupes régionaux concernés.  Appuyé notamment par l’Australie, il s’est dit favorable au libellé « à moins qu’elle n’en décide autrement » afin de conserver une flexibilité si la tenue de réunions au Siège de l’ONU s’avérait impossible.  Si alternance il y avait, l’Iran a soulevé le problème des privilèges et immunités qui s’appliquent dans l’État hôte, rappelant de veiller à aborder cette question dans le règlement intérieur. 

Les délégations se sont ensuite penchées sur le seuil de prise de décisions et le statut d’observateur, sans que de réels consensus n’aient émergé.  Plusieurs d’entre elles se sont dites favorables à la participation des observateurs, « sans réinventer la roue ».  Il s’agit de se baser sur la pratique existante, a résumé la Sierra Leone.  L’Argentine, au nom du CLAM, la Chine et El Salvador ont toutefois estimé que le rôle et les catégories des observateurs doivent être clarifiés en se basant sur d’autres instruments existants. 

À l’inverse de l’Union européenne qui a vu d’un œil bienveillant la participation des observateurs à toutes les séances, la Fédération de Russie a réitéré que le règlement intérieur doit s’inscrire dans la droite ligne du Règlement intérieur de l’Assemblée générale.  Selon la déléguée, le nombre d’observateurs doit donc être limité et toutes les informations sur leur financement, l’aide fournie par les États et leurs contributions aux objectifs onusiens doivent être communiquées de manière transparente. 

Groupe de travail I sur le mandat, les modalités de fonctionnement et le règlement intérieur des organes subsidiaires créés en application de l’Accord; et sur les procédures à suivre pour la sélection de leurs membres et des membres de l’Organe scientifique et technique

La séance de l’après-midi a été largement consacrée aux procédures à suivre pour la sélection des experts de l’Organe scientifique et technique.  Les autres organes subsidiaires sont: le Comité sur l’accès et le partage des avantages, le Comité de renforcement des capacités et de transfert de technologies marines, le Comité des finances, et le Comité de mise en œuvre et de contrôle du respect des dispositions.  Les délégations ont débattu à partir d’une note élaborée par le Secrétariat de l’ONU.

La Colombie, au nom du Core Latin American Group (CLAM), a rappelé le rôle central de l’Organe scientifique et technique dans le fonctionnement de l’Accord, puisqu’il devra s’acquitter de pas moins de 49 fonctions.  « D’où l’importance de la séance de cet après-midi », a souligné le Coprésident, M. Adam McCarthy. 

Les délégations ont échangé sur le futur aspect de l’Organe scientifique et technique, c’est-à-dire sur sa taille, sa composition, ses mandats, des données qui n’ont pas été définies avec précision.  Qui pourrait prétendre à devenir membre de l’Organe, et en vertu de quelle expertise?  L’Accord BBNJ, a rappelé la Communauté des Caraïbes (CARICOM), stipule qu’il sera composé de membres siégeant en qualité d’experts, désignés par les parties, et élus par la Conférence des Parties.  Ces experts posséderaient les « qualifications appropriées », et notamment une expertise multidisciplinaire. Il a été question de réunir à la fois des experts scientifiques et techniques, et des experts en « connaissances traditionnelles pertinentes des peuples autochtones et des communautés locales ».

Les délégations ont pointé que posséder les « qualifications appropriées » conformément au libellé de l’Accord BBNJ, manquait de précision. À ce titre, elles ont souvent repris à leur compte la note de cadrage mentionnant que lesdites qualifications pouvaient comprendre une expérience professionnelle dans les domaines de la biologie marine, de l’océanographie et des sciences de l’environnement; des connaissances traditionnelles des peuples autochtones et des communautés locales et autres domaines pertinents; et une expérience professionnelle en rapport avec les outils de gestion par zone, y compris les zones marines protégées.

L’équilibre entre les genres doit être pris en compte dans la composition de l’Organe scientifique et technique, ont aussi reconnu les participants.  En outre, l’Accord ne fixe pas non plus la taille exacte du futur organe.  Si l’Union européenne a argué que celui-ci devrait rester « souple, agile », elle n’est pas allée jusqu’à donner un chiffre.  Alors qu’une fourchette comprise entre 15 et 25 membres était évoquée depuis le début de la réunion de la Commission préparatoire, la CARICOM, elle, a livré aux délégations un chiffre précis et circonstancié de « 27 membres »: cinq sièges qui reviendraient à chaque groupe régional, plus un siège revenant à un spécialiste en matière de connaissances traditionnelles pertinentes des peuples autochtones et des communautés locales, et un siège pour les petits États insulaires en développement (PEID).

En parallèle, l’Union européenne a proposé de mettre sur pied un « registre d’experts », sous la forme d’un annuaire de chercheurs et de scientifiques qui pourrait être consulté au cas par cas, en fonction des besoins, ainsi que des ateliers de formation en ligne pour « renforcer la coopération ». Dans cette même veine, la Nouvelle-Zélande a proposé une liste, non pas d’experts, mais de différents sujets scientifiques, à actualiser régulièrement, et sur lesquels un « vivier d’experts » pourrait être interrogé.

« On ne va pas réinventer la roue », a de nouveau lancé le délégué de la Micronésie, au nom des PEID.  Selon lui, la composition de l’Organe devrait être « pluridisciplinaire par essence », sa palette ample.  « Je ne vais pas me lancer dans une énumération trop longue, mais il nous faudrait des chercheurs, des techniciens, des titulaires de connaissances traditionnelles », qui devraient être désignés par les parties, mais qui siègeraient à titre personnel, en tant qu’experts.

S’agissant de la durée et du renouvellement des mandats des membres de l’Organe scientifique et technique, l’Union européenne a fait remarquer que la fréquence des sessions de la Conférence des Parties exercerait une influence évidente. Elle a préconisé, quoi qu’il en soit, de se limiter à deux mandats consécutifs par expert.

À contre-courant du flux de la réunion, la Fédération de Russie a critiqué la nature même de l’Accord BBNJ.  « On ne peut pas perdre de vue son déséquilibre », a lancé la déléguée, selon qui l’Accord tue dans l’œuf le mandat des organes subsidiaires qu’il a créés. Elle aussi affirmé que chaque État avait le droit de désigner ses propres experts pour travailler au sein de l’Organe scientifique et technique, et insisté sur son refus de déroger au consensus, « qui ne saurait souffrir d’aucune exception ».

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Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial du Secrétaire général s’alarme des ambitions politiques et sécuritaires concurrentes dans la région des Grands Lacs

9899e séance – après-midi
CS/16044

Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial du Secrétaire général s’alarme des ambitions politiques et sécuritaires concurrentes dans la région des Grands Lacs

Cet après-midi, au Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs a mis en garde contre les ambitions politiques et sécuritaires concurrentes qui secouent la région, où les conséquences du conflit en République démocratique du Congo (RDC) se font partout ressentir, alors que se multiplient les initiatives diplomatiques pour y mettre fin.

« Ce que nous avons observé à ce jour, c’est une compétition d’ambitions politiques et de sécurité ouvertement proclamées le long des zones d’intérêt stratégiques, entretenues par l’existence de multiples groupes armés, l’exploitation illégale des ressources naturelles, mais aussi l’absence de l’autorité de l’État dans ces zones », a expliqué M. Xia Huang, venu présenter le rapport semestriel du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région.

Le haut fonctionnaire a regretté que, malgré les injonctions du Conseil de sécurité, des organisations régionales et sous-régionales africaines, de l’Union européenne, et les restrictions et mesures de sanction prises jusqu’à présent, les combats se poursuivent dans l’est de la RDC, où l’Alliance Fleuve Congo/M23 n’a cessé de poursuivre son expansion territoriale, avec un appui extérieur.  Les violations du droit international et des droits humains sont légion, et la crise humanitaire ne cesse de s’aggraver, tant en RDC que dans certains pays voisins, notamment au Burundi, en Ouganda et au Rwanda.

La Directrice générale du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme Catherine Russell, a confirmé que, depuis janvier, plus d’un million de personnes, dont 400 000 enfants, avaient été déracinées, venant s’ajouter aux 5 millions déjà présentes dans des camps de déplacés.  Les mineurs représentent plus de 40% des près de 10 000 cas de viols et de violences sexuelles signalés pour les seuls mois de janvier et février.  « L’UNICEF estime que pendant la phase la plus intense du conflit de cette année dans l’est de la RDC, un enfant a été violé toutes les demi-heures », a révélé Mme Russell, suscitant des condamnations vigoureuses, dont celle de la France.

Surenchère d’initiatives diplomatiques

L’Envoyé spécial a invité à redoubler d’efforts pour que les récentes avancées politiques et diplomatiques, notamment les processus de paix de Nairobi et de Luanda, la feuille de route des chefs d’État de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) le 24 mars dernier, débouchent sur « un mouvement irréversible vers la paix ».  Outre ces initiatives, il a cité la rencontre initiée le 18 mars à Doha par l’Émir du Qatar entre les Présidents de la RDC et du Rwanda, ainsi que la reprise des échanges entre les services de sécurité du Burundi et du Rwanda.  Comme les États-Unis, M. Xia a également salué la nouvelle disposition affichée par le Gouvernement congolais à engager un dialogue direct avec le M23, tout en soulignant la nécessité de bien coordonner ces multiples efforts régionaux et internationaux.  Chef de file du processus de Nairobi, le Kenya a souligné la primauté du processus unifié de Nairobi-Luanda, rappelant que les efforts des partenaires internationaux, notamment du Qatar, devaient compléter, et non supplanter, le cadre africain.  Pour le Ministre des relations extérieures de l’Angola, M. Téte António, la révision en cours de l’architecture de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), que son pays préside actuellement, devra contribuer efficacement à l’objectif de mettre fin aux conflits sur le continent d’ici à 2030.

Pour la Ministre des affaires étrangères de la RDC, rien n’a changé depuis l’adoption de la résolution 2773 (2025), qui demande au M23 de cesser immédiatement les hostilités, de se retirer de Goma, de Bukavu et de toutes les zones sous son contrôle, et à la Force de défense rwandaise de cesser de soutenir ce groupe armé et de se retirer immédiatement de la RDC.  Mme Thérèse Kayikwamba Wagner a donc préconisé l’imposition de sanctions à la chaîne de commandement des forces armées et aux décideurs politiques rwandais.  La cheffe de la diplomatie congolaise a également demandé la révocation du statut de pays contributeur de troupes du Rwanda et un embargo sur les minerais issus de l’exploitation illégale des ressources en RDC, ainsi qu’un régime de notification obligatoire sur les transferts d’armes à destination de Kigali.  Mme Wagner a appelé le Conseil de sécurité à mettre sur pied sans délai les organes chargés de sa vérification, à prendre des sanctions ciblées le cas échéant et à mettre en place un mécanisme de suivi garantissant l’établissement des responsabilités et la cohérence de la réponse internationale.

Réaffirmant son « engagement sincère » en faveur de la paix et de la coopération régionales, le Rwanda a désigné les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) comme la plus grande menace pour la sécurité régionale. « Malgré les 20 résolutions du Conseil de sécurité appelant à leur désarmement et à leur démantèlement depuis 2003, les FDLR continuent aujourd’hui de recruter et de se livrer à des atrocités. »  Un groupe armé « génocidaire » qui a été intégré aux forces armées congolaises, compromettant non seulement la stabilité régionale, mais aussi le respect de l’Accord-cadre lui-même, a accusé la délégation.  Pour inverser cette dynamique, il a demandé au Conseil de veiller à ce que les FDLR et les groupes dissidents soient neutralisés et désarmés, et les discours de haine qui alimentent la persécution des communautés tutsies congolaises condamnés.  Le Rwanda a en outre exigé que la RDC cesse de faire de lui « le bouc émissaire de ses propres problèmes », un appel repris à son compte par la Fédération de Russie, pour qui « Kinshasa doit cesser de soutenir les FDLR ».

Au nom des A3+ –Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana–, la Somalie a souhaité la reprise d’un dialogue inclusif afin de désamorcer les tensions entre les parties.  Elle a également appelé à la revitalisation de l’Accord-cadre, exhortant tous les signataires à cesser immédiatement tout soutien aux groupes armés qui opèrent dans la région et à mettre fin à l’exploitation illicite des ressources naturelles.  La Grèce et la République de Corée ont souligné l’importance du processus régional, saluant la désignation de M. Faure Gnassingbé, le Président du Togo, comme nouveau médiateur de l’Union africaine.  Les États-Unis ont plaidé pour que les auteurs de violations des droits humains soient traduits en justice.  Pour la Chine, partisane des « solutions africaines aux problèmes africains », le cessez-le-feu doit être décrété dans les meilleurs délais, « sans quoi une paix durable restera une illusion ». 

Alors que la Directrice générale de l’UNICEF demandait 57 millions de dollars pour financer une aide d’urgence aux enfants de l’est de la RDC au cours des trois prochains mois, le Royaume-Uni a préconisé une meilleure coordination entre l’ONU et les donateurs pour qu’elle parvienne aux populations qui en ont le plus besoin.

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Le Forum de la jeunesse de l’ECOSOC se poursuit avec des appels à se rendre à l’évidence: les jeunes doivent participer aux prises de décisions politiques

Session de 2025, Forum de la jeunesse
3e séance – après-midi
ECOSOC/7198

Le Forum de la jeunesse de l’ECOSOC se poursuit avec des appels à se rendre à l’évidence: les jeunes doivent participer aux prises de décisions politiques

« Lorsque nous parlons de la participation des jeunes à l’élaboration des politiques, il est important de comprendre qu’être présent n’est pas la même chose qu’être entendu. »  C’est en ces termes que M. Abdullah Dipto, cofondateur de Pathchola Foundation, a résumé les enjeux de la discussion de cet après-midi au deuxième jour du Forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC).  Et à sa suite, les participants ont martelé cette évidence que les jeunes doivent être au cœur de toutes les stratégies, pas comme de simples bénéficiaires mais comme des partenaires.

« Nous sommes à la pointe de l’innovation et du changement, mais la représentation des jeunes dans l’élaboration des politiques n’est pas suffisante. »  Fort de ce constat, M. Dipto a mis en avant trois principes fondamentaux pour une participation véritable des jeunes à l’élaboration des politiques, à commencer par une culture de « co-élaboration », parce que les programmes et les politiques sont plus efficaces lorsqu’ils sont façonnés par les personnes qu’ils visent à servir, a-t-il expliqué.  Au lieu d’arriver avec des programmes préétablis, posez-nous des questions pour connaître nos besoins, et laissez nos réponses vous guider, a-t-il suggéré. 

Aujourd’hui, trop souvent encore, les jeunes sont intégrés à la fin des processus, après que les décisions ont été prises, a-t-il pointé en estimant que la collaboration entre les générations devrait être la norme, et non l’exception.  Allant plus loin, il a revendiqué plus de transparence et de redevabilité en arguant que lorsque les jeunes investissent leur temps et leurs idées, ils méritent de savoir ce qu’il advient par la suite.  Leurs contributions ont-elles été prises en compte dans les résultats et si ce n’est pas le cas, pourquoi?  Cette redevabilité renforce la confiance, alors que sans confiance, les jeunes se sentent déçus et mis à l’écart, ce qui malheureusement est une expérience courante.

Lui emboîtant le pas, M. Nicholas Nie, de KidsforSDGs et fondateur de EcoAI Insights, a insisté sur l’importance d’élaborer les politiques « avec les jeunes ».  Il ne suffit pas seulement d’élaborer des politiques les concernant, a-t-il précisé. Le jeune homme a dit avoir beaucoup appris à ce sujet dans le cadre de travaux sur la désinformation environnementale. « Je suis peut-être encore adolescent, mais grâce à EcoAI Insights, j’ai pu voir comment l’accès à des outils tels que l’IA [intelligence artificielle] permet aux jeunes de créer de véritables solutions aux problèmes locaux », a-t-il expliqué.  De concert, Nicholas et Abdullah ont estimé que lorsque ces principes sont réellement mis en pratique, la participation des jeunes cesse d’être une simple case à cocher et devient un moteur du changement à travers des politiques et stratégies inclusives plus créatives.

Tout en reconnaissant que les jeunes ont besoin d’aide pour comprendre le fonctionnement des politiques, ils ont souligné que les institutions ont également besoin d’aide pour comprendre comment les jeunes fonctionnent, utilisent la technologie et pensent de manière créative. Certaines des meilleures collaborations en matière de politique de la jeunesse, comme ActNow de l’ONU ou U-Report de l’UNICEF, fonctionnent précisément parce qu’elles s’appuient sur des outils tels que les médias sociaux et les plateformes mobiles, ont-ils argué.  Il a semblé important à ces jeunes d’inviter à aller à la rencontre des jeunes là où ils sont, afin qu’ils puissent participer beaucoup plus facilement et efficacement. 

Le modérateur de la session a d’ailleurs traduit cette idée en acte en donnant rendez-vous aux jeunes présents au Forum à New York sur les réseaux sociaux et en les invitant à utiliser le hashtag #YouthLead pour susciter le débat autour de la question suivante: que signifie pour vous « donner du sens à la participation significative des jeunes »? Comme l’a relevé Mme Casey Harden, Directrice et Secrétaire générale de « World YWCA », la salle de l’ECOSOC est remplie « d’influenceurs ».  Elle les a donc appelés à trouver la motivation « de changer le pouvoir » afin de voir des résultats concrets et à se « départir de leur ego » pour mieux se concentrer sur le bien de chacun et adhérer au leadership intergénérationnel.

L’importance des actions locales a été mise en valeur lors de la discussion qui a suivi ces interventions.  Le Honduras a parlé de « transversaliser » la participation des jeunes aux politiques publiques, et des exemples concrets de l’action des jeunes dans différents secteurs et pays ont été présentés avec pour revendication commune de laisser la place aux jeunes pour façonner l’avenir. Certains responsables de haut niveau, comme la Vice-Ministre de la famille et de la jeunesse de l’Autriche sont également intervenus pour parler de ce qui a été fait dans le cadre de leurs stratégies nationales pour la jeunesse.  En Autriche, l’autonomisation des jeunes s’est notamment traduite par la baisse de l’âge de vote à 16 ans en 2007 et, aujourd’hui, six jeunes de moins de 35 ans sont membres du Parlement autrichien. 

D’autres exemples et bonnes pratiques ont été présentés lors de la deuxième partie de la discussion axée sur les réussites aux niveaux local, national, régional et mondial.

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L’ECOSOC décide des thèmes de son débat consacré à l’humanitaire et de la réunion sur le passage de la phase des secours aux activités de développement

Session de 2025,
15e séance plénière – après-midi
ECOSOC/7197

L’ECOSOC décide des thèmes de son débat consacré à l’humanitaire et de la réunion sur le passage de la phase des secours aux activités de développement

Cet après-midi, le Conseil économique et social (ECOSOC), qui tient cette semaine son Forum de la jeunesse, a adopté deux décisions, par acclamation.

La première prévoit le thème du débat consacré aux affaires humanitaires de la session de 2025, qui est le suivant: « Raviver la solidarité mondiale au service de l’humanité: sauver des vies, atténuer les souffrances et mobiliser des solutions à l’appui de l’action humanitaire ».

Dans la deuxième, c’est le thème de sa réunion sur le passage de la phase des secours aux activités de développement qui est précisé: « Passage de la phase des secours aux activités de développement: trouver des solutions et relever les défis à l’appui des personnes en situation de vulnérabilité dans les situations de crise ».

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Conseil de sécurité: le Représentant spécial s’inquiète de la détérioration rapide de la situation politique et sécuritaire au Soudan du Sud

9898e séance – matin
CS/16043

Conseil de sécurité: le Représentant spécial s’inquiète de la détérioration rapide de la situation politique et sécuritaire au Soudan du Sud

Le Représentant spécial pour le Soudan du Sud, M. Nicholas Haysom, s’est alarmé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, de la détérioration « rapide » de la situation politique et sécuritaire dans ce pays, en y voyant une « sombre réminiscence » des conflits de 2013 et de 2016.  Les délégations ont largement partagé son inquiétude et appelé les parties à respecter l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud de 2018. 

Le Représentant spécial a tout d’abord évoqué les tensions croissantes entre les deux principales parties dudit Accord.  Ces tensions ont dégénéré en une confrontation militaire directe, l’élément déclencheur ayant été les récents évènements dans l’État du Haut-Nil, a-t-il expliqué.  L’Armée blanche, constituée de jeunes locaux armés, a en effet pris le contrôle de la caserne des Forces sud-soudanaises de défense du peuple à Nasser. 

Le 7 mars, a poursuivi M. Haysom, un hélicoptère de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), qu’il dirige, a été la cible d’attaques provoquant la mort d’un membre d’équipage appartenant à la MINUSS et de plusieurs membres des Forces sud-soudanaises de défense du peuple.  « Depuis, nous assistons à une inquiétante spirale négative avec une mobilisation accrue de l’Armée blanche et des Forces sud-soudanaises de défense du peuple dans le Haut-Nil. »  

Le Représentant spécial a indiqué que le déploiement des forces ougandaises à la demande du Gouvernement sud-soudanais alimente les peurs.  M. Haysom a également évoqué la révocation de responsables du Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition) par le Président Salva Kiir Mayardit, ainsi que l’arrestation du Premier Vice-Président Riek Machar.  « Il s’agit d’un nouveau point critique dans les relations entre les deux parties. »  

Fort de ce constat, M. Haysom a appelé à des efforts nationaux et internationaux pour assurer une cessation des hostilités, préserver l’intégrité de l’Accord revitalisé et prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme aux cycles constants de transitions incomplètes au Soudan du Sud.  « Il suffit de regarder de l’autre côté de la frontière au Soudan pour voir comment un pays peut rapidement sombrer dans un conflit catastrophique. » 

De son côté, Mme Jackline Nasiwa, fondatrice et Directrice exécutive du Center for Inclusive Governance, Peace and Justice, a souligné l’urgence de trouver une solution politique au conflit persistant qui déchire son pays. Cette crise compromet tout ce que nous espérions de la période de transition, à savoir la justice, l’élaboration d’une constitution, la réforme du secteur de la sécurité et les préparatifs des élections démocratiques de 2026, a-t-elle constaté.  Mme Nasiwa a exhorté le Conseil à faire pression sur les parties afin qu’elles se réengagent à respecter l’Accord revitalisé. 

La situation humanitaire très critique au Soudan a été largement évoquée, notamment par Mme Edem Wosornu, Directrice des opérations et de la communication du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). Celle-ci a précisé que 9,3 millions de Sud-Soudanais, soit les trois quarts de la population, ont besoin d’une aide humanitaire.  Les violences qui ont ravagé l’État du Haut-Nil ont causé le déplacement de 130 000 personnes, dont plusieurs milliers auraient traversé la frontière vers l’Éthiopie, a-t-elle précisé. 

Mme Wosornu a relevé que cette montée de la violence et des déplacements a accru l’exposition des femmes et des filles à la violence sexiste et à l’exploitation.  « Dans ces conditions, l’accès humanitaire reste trop limité pour atteindre les personnes dans le besoin et les fournitures médicales essentielles s’épuisent rapidement, sur fond d’épidémie de choléra en cours. »  Selon nos estimations, 650 000 enfants de moins de 5 ans risquent de souffrir de malnutrition aiguë sévère cette année, a-t-elle averti. 

Les interventions des délégations ont été d’une même tonalité, la France jugeant la situation au Soudan du Sud inquiétante.  « Il faut éviter que la situation ne dégénère et la France se joint aux appels à la désescalade et au dialogue des pays de la région, des organisations régionales, des Nations Unies et de la communauté internationale. »  La France, appuyée par la Chine notamment, a exhorté les parties à revenir à l’Accord revitalisé et à se conformer à sa lettre comme à son esprit.  « Nous soutenons l’appel de l’Union africaine à la libération de M. Machar. » 

Le processus de paix s’effondre au Soudan du Sud, ont tranché les États-Unis, en déplorant, à l’instar du Royaume-Uni, l’arrestation de M. Machar. Cette délégation a mis en garde contre les risques d’un conflit à grande échelle et exhorté les parties à respecter l’Accord revitalisé.  Le Conseil doit faire pression sur les autorités sud-soudanaises à cette fin, ont déclaré les États-Unis.  La République de Corée a exhorté les parties, en particulier le Président Kiir, à cesser immédiatement les hostilités et à engager un dialogue constructif et direct. 

Même son de cloche du côté de la Sierra Leone qui, au nom des A3+ (Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana), a exhorté les dirigeants du pays à s’engager dans un dialogue politique inclusif et direct pour résoudre leurs différends, conformément à l’Accord revitalisé.  Les dirigeants sud-soudanais doivent par ailleurs veiller à ce que des élections générales puissent se tenir en décembre 2026, a déclaré la Sierra Leone, en appelant la communauté internationale à mobiliser les ressources nécessaires à cette fin. 

Une note quelque peu divergente est venue de la Fédération de Russie qui a estimé que la situation est « sous le contrôle du Gouvernement actuel ». Elle s’est référée aux paroles du Président Kiir qui a en effet assuré qu’il ne laisserait pas le pays sombrer dans une nouvelle guerre civile.  Dans ce contexte, le rôle du Conseil est de soutenir les efforts de stabilisation des autorités, plutôt que d’exercer des pressions inutiles, a argumenté la Russie.  La délégation russe s’est par ailleurs alarmée des informations selon lesquelles le territoire du Soudan du Sud servirait de « tremplin » pour soutenir l’une des parties au conflit du Soudan voisin.  La Chine s’est également inquiétée des risques de contagion. 

« Mon pays fera tout pour mettre pleinement en œuvre l’Accord revitalisé et rester sur la voie de la transition démocratique », a réagi la déléguée du Soudan du Sud.  Face aux effets catastrophiques de la violence intercommunautaire et des activités de groupes armés, le Gouvernement a renforcé ses patrouilles et déployé des tribunaux mobiles pour garantir la justice et l’application du principe de responsabilité, a-t-elle précisé, faisant également état de nouveaux cadres légaux pour « avancer ensemble ». 

Elle a toutefois reconnu que les « fantômes du passé » restent présents, comme l’atteste l’arrestation du Vice-Président Machar et d’autres personnalités.  « Mais le Président Kiir a assuré que nous ne pouvons pas nous permettre de retomber dans le conflit », s’est-elle empressée d’ajouter, affirmant que le Gouvernement ne laissera pas ces problèmes saper les aspirations à long terme de son peuple.  Enfin, elle a assuré que le Soudan du Sud, résolu à mettre en œuvre l’Accord revitalisé, continue d’avancer. 

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