En cours au Siège de l'ONU

Instrument sur la biodiversité marine: Un groupe de travail planche sur le thème « renforcement des capacités et transfert des technologies marines »

Première session,
10e séance plénière - matin & après-midi
MER/2078

Instrument sur la biodiversité marine: Un groupe de travail planche sur le thème « renforcement des capacités et transfert des technologies marines »

La Conférence qui se réunit depuis mardi sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer, dans le but d’élaborer un traité juridiquement contraignant, a examiné aujourd’hui l’un des quatre thèmes prévus, « le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines ».  Les discussions, menées dans le cadre d’un groupe de travail informel, ont laissé apparaître que la majorité des pays ne souhaite pas faire table rase du passé et préfère se baser sur le droit international de la mer en vigueur.

Les délégations se sont astreintes à réfléchir à toute une série de questions posées par la Présidente de la Conférence, dans un guide établi spécialement pour faciliter les débats (document 2018/3).

En ce qui concerne la mise en place d’une « liste » des principaux types de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines, le principe semble acquis.  Une majorité d’intervenants l’imagine « non exhaustive » et « souple ».  Concernant le contenu, l’Union Européenne l’a résumé en ciblant trois chapitres: « assistance aux biens; ressources humaines et dimension institutionnelle; connaissances et diffusion de la connaissance ». 

Le spectre des propositions concernant le transfert des technologies marines est large, et son caractère, volontaire ou contraignant, a fait débat entre les délégués.  Des propositions concrètes ont été émises pour la transmission du savoir-faire comme « le transfert de ressources humaines par le biais d’ateliers nationaux ou régionaux, des cours, des bourses », a cité l’Argentine.  Pour le transfert de matériel, un site Internet centralisant les transactions a été plébiscité.

Le principe de libre transfert des technologies s’est heurté aux exigences du droit de propriété intellectuelle.  Un équilibre n’a pas été trouvé sur cette question, les opinions variant grandement entre pays.

La Micronésie et la Norvège ont estimé que le mécanisme d’échange d’information devrait être transparent et ouvert à tous, tandis que le Bangladesh a remarqué que les transferts de techniques allaient forcément devoir impliquer le secteur privé.  

La question, centrale, du financement et de l’accès aux ressources, a également été abordée.  Des dispositions spécifiques pour les pays en développement côtiers du Pacifique et d’Afrique ont eu la faveur de plusieurs intervenants.  Les petits États insulaires en développement devraient être prioritaires pour recevoir les financements, selon Nauru. 

Les Maldives ont réclamé la création d’un fonds pour la biodiversité marine dont la finalité, et la contribution volontaire ou obligatoire, font l’objet de débats.  Ce pays a vu d’un bon œil l’ouverture au secteur privé pour alimenter le fonds en plus de l’apport des États.  De même pour Sainte-Lucie qui a proposé de jumeler des sources de financement traditionnelles et novatrices, notamment un partenariat public-privé.  

Pour leur part, les États-Unis et la Fédération de Russie se sont dits ouverts à un mode de financement volontaire.  Selon la délégation américaine, un mode de financement obligatoire et l’imposition de droits d’accès aux zones de haute mer iraient à l’encontre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et décourageraient les États à rejoindre l’instrument. 

La Conférence intergouvernementale reprendra ses travaux demain, vendredi 7 septembre, à partir de 10 heures.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail informel sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines: suite de la discussion

Quatre autres questions devaient être abordées dans le cadre du groupe de travail réuni aujourd’hui, après le début de ses travaux hier après-midi.  Toujours en se basant sur le document de la Présidence établi pour faciliter les débats (document 2018/3), le groupe a discuté de la question « Types et modalités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines » (6.2), du « financement » (6.3), et des points 6.4 « Suivi et examen de l’efficacité » et 6.5 « Questions soulevées par les éléments interdisciplinaires ».

Les discussions ont été guidées par la facilitatrice, Mme NGEDIKES OLAI ULUDONG (Palaos), qui, à plusieurs reprises, a demandé que les débats de ce matin soient « beaucoup plus concrets » par rapport à la veille.

Une des questions posées dans le document de la Présidence est la suivante: « S’appuyant sur les instruments existants, tels que la Convention [des Nations Unies sur le droit de la mer] et les Critères et principes directeurs de la Commission océanographique intergouvernementale concernant le transfert de techniques marines, l’instrument devrait-il contenir une liste indicative et non exhaustive des principaux types de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines? »

« Il ne serait pas utile d’avoir une liste exhaustive », a répondu tout d’abord la délégation des Maldives, envisageant une telle liste seulement à condition qu’elle soit « souple et évolutive ».  Une telle liste devrait se fonder sur les objectifs spécifiques du nouvel instrument, et probablement être inspirée des directives de la Commission océanographique intergouvernementale (COI), a ajouté le délégué.

Mettant elle aussi l’accent sur la souplesse, l’Union européenne a invité à être prudent, craignant que la mise en œuvre de dispositions sur une telle liste se heurte à un manque de flexibilité.  Elle a exprimé sa préférence pour une « liste indicative et non exhaustive », ce qui est selon elle « le reflet du débat ».  « Nous sommes prêts à travailler sur cette base », a dit la délégation.  De même, les Fidji rejointes par le Canada et l’Australie, ont déclaré ne pas vouloir d’une liste exhaustive, estimant qu’il serait difficile d’amender une liste dans le cadre d’un instrument juridiquement contraignant. 

Sur les éléments à intégrer dans cette liste, l’Union européenne a proposé de les regrouper sous trois chapitres essentiels: « assistance aux biens; ressources humaines et dimension institutionnelle; connaissances et diffusion de la connaissance ».

Résumant les débats, le Paraguay a déclaré que la liste devrait être non exhaustive, suffisamment souple et équilibrée, tout en tenant compte de la volonté de coopération des États.  En outre, la liste devrait s’inspirer des éléments de de la Convention sur la diversité biologique, du Protocole de Carthagène, de la Convention sur le droit de la mer et d’autres accords internationaux.

La délégation de l’Algérie, qui s’exprimait au nom du groupe des États d’Afrique, et celle de Nauru, au nom des petits États insulaires en développement (PEID), ont souhaité que l’on commence par renforcer les mécanismes prévus par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Ils ont proposé d’aller plus loin en amendant les textes existants pour les adapter aux zones marines ne relevant pas de la juridiction nationale, celles qui doivent faire l’objet du futur instrument juridiquement contraignant.

« De quelle autre façon pourrait-on aborder les types de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines? ».  Une autre question posée par la Présidence à laquelle les participants ont tenté de répondre.

À ce sujet, la délégation de Maurice souhaiterait que l’on parle plutôt de « développement des capacités » et de « transferts de technologies marines ».  Le Mexique a évoqué le transfert de ressources humaines par le biais d’ateliers nationaux ou régionaux, des cours, des bourses, dans la même veine que celles réalisées par l’Autorité internationale des fonds marins.

L’Autorité internationale des fonds marins a fait valoir que des mécanismes de renforcement des capacités et de transfert des techniques marines dotés de financement adéquats sont essentiels pour assurer la participation des pays en développement.  À cet égard, la formation doit être assurée, en tenant compte des besoins spécifiques des pays en développement.  La Commission océanographique intergouvernementale (COI) a proposé de partager son savoir-faire en la matière, notamment par le biais d’un centre de partage d’information.

Les États Membres sont aussi invités à réfléchir à un « énoncé, dans l’instrument, des modalités du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines ».  Devrait-on avoir recours aux mécanismes existants ou mettre en place de nouveaux mécanismes? a demandé la Présidence dans son document de travail.

Concernant un mécanisme d’échange d’informations pour le renforcement des capacités, le Mexique a approuvé la proposition des Maldives pour un système de « guichet unique » -pour les transferts d’équipement et de connaissances- et la création d’un centre d’échange virtuel.  De nombreuses délégations ont suggéré la création d’un site Internet qui y serait consacré.

Les recherches sont en général menées par le secteur privé, a fait valoir le Bangladesh, en notant que cela laisse aux pays les moins avancés un rôle plus passif.  « Mais peut-être que le secteur privé ne sera pas intéressé à échanger des informations », a-t-il conclu en se demandant s’il ne serait pas utile de réguler cette activité du secteur privé en fonction des exigences du partage de connaissances.

Pour Singapour, il est essentiel de maintenir un équilibre entre la protection de la propriété intellectuelle et le partage des connaissances, faisant valoir que l’instrument ne devrait pas miner les protections existantes.  Toutefois, les États fédérés de Micronésie, comme la Norvège, ont estimé que le mécanisme d’échange d’informations devrait être transparent et ouvert à tous.

À ce sujet, les États-Unis ont prôné la mise en place d’un mécanisme de recueil d’informations sur les meilleures pratiques relatives à l’étude d’impact environnemental, afin de constituer une bibliothèque regroupant les informations ne relevant pas de la sécurité nationale ou de la propriété intellectuelle.

Autre sujet de réflexion, la coopération.  « Comment l’instrument devrait-il énoncer l’obligation faite aux États de coopérer en matière de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines? »

Les Fidji ont recommandé un partenariat public privé pour mettre en œuvre la coopération et l’assistance en ce qui concerne les ressources génétiques marines, notamment les questions relatives au partage des avantages, les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, et les études d’impact sur l’environnement.  La République de Corée a toutefois considéré que le renforcement des capacités et les transferts techniques devraient se faire sur une base volontaire.  Le Bangladesh veut, lui, créer un réseautage, afin d’accroître l’échange d’informations entre instituts de recherche et chercheurs.  Pour l’Australie, les besoins régionaux et les entités régionales doivent être pris en compte.

Certains pays les moins avancés, comme le Togo, ont réclamé une aide pour mener les évaluations nécessaires et identifier leurs besoins en termes de renforcement des capacités, ce que l’Union européenne a approuvé.

Quelques interventions ont porté sur un éventuel organe d’examen pour contrôler la mise en œuvre du futur instrument.  Les Maldives ont souhaité qu’un tel mécanisme soit « suffisamment souple » et produise des « rapports périodiques, transparents et complets ».  Un organe qui formulerait des recommandations pour accroître l’efficacité de l’instrument et un processus qui serait inclusif, a recommandé la délégation.

La discussion s’est déplacée sur le terrain du financement: quels mécanismes existants devraient être pris en considération dans la fourniture de financement et de ressources?

S’agissant du financement de l’instrument, l’Égypte, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a prôné la combinaison d’un système volontaire et non volontaire, notamment par le biais du système d’accès aux ressources biologiques et partage des bénéfices (ABS).  Pour les Maldives et Nauru, il serait utile de disposer d’un fonds commun doté d’un financement prévisible, financé par les États et le secteur privé, destiné au renforcement des capacités et ouvert aux États comme aux organisations non gouvernementales.  Les pays en développement, notamment les petits États insulaires en développement, devraient en être les premiers bénéficiaires.  Ce fonds devrait être constitué d’un fonds opérationnel, d’un fonds de dotation et d’un fonds de redressement et de réhabilitation.

L’Union européenne a réitéré son opposition à la création d’un nouveau mécanisme de financement.  Elle s’est dite ouverte à l’ouverture d’un fonds d’affectation spéciale constitué de sources de financement publiques et privées existantes.  Elle a estimé que la cohérence et l’accessibilité doivent être au centre de tout mécanisme d’échange d’informations, qui pourrait servir de lien entre fournisseurs et bénéficiaires.  Prenant la parole au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Sainte-Lucie a estimé que le mécanisme de financement devrait jumeler des sources de financement traditionnelles et novatrices, notamment un partenariat public-privé.

Pour leur part, les États-Unis et la Fédération de Russie se sont dits ouverts à un mode de financement volontaire, arguant qu’un mode de financement obligatoire et l’imposition de droits d’accès aux zones de haute mer iraient à l’encontre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et décourageraient les États à rejoindre l’instrument. 

Considérant que les ressources marines constituent un héritage de l’humanité, la République islamique d’Iran a proposé d’établir un mécanisme de financement obligatoire, régi par une autorité de mise en œuvre incluant le secteur privé.  Une position partagée par l’Algérie, pour qui le financement doit être prévisible et durable, afin d’éliminer les lacunes existantes dans la Convention sur le droit de la mer.

Les délégations sont ensuite passé au chapitre « Suivi et examen de l’efficacité ».

La Chine, le Japon et les Maldives ont appuyé la création d’un mécanisme de suivi et de normes pour faciliter l’examen des besoins en renforcement des capacités techniques et des transferts de techniques marines.  Un tel mécanisme devrait disposer d’une composante régionale, a fait valoir Nauru.  En fin de séance, le Mexique a invité les délégations à réfléchir à la nature des réunions que devront tenir les États parties sur le suivi et l’examen de l’efficacité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale pour commémorer la Journée internationale contre les essais nucléaires

Soixante-douzième session,
112e séance plénière – matin
AG/12046

Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale pour commémorer la Journée internationale contre les essais nucléaires

Ce matin, pour la première fois, la Journée internationale contre les essais nucléaires a été commémorée dans le contexte d’une réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale, en présence d’une victime de ces essais au Kazakhstan.

À cette occasion, le Président de l’Assemblée, M. Miroslav Lajčák, a vivement regretté que 20 ans après son adoption, le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) n’ait toujours pas pu entrer en vigueur, une position partagée par tous les intervenants de la réunion de ce matin, et en particulier par le Secrétaire exécutif du TICEN, M. Lassina Zerbo.

C’est d’autant plus urgent qu’en dépit des instruments multilatéraux de la non-prolifération et du désarmement nucléaire, certains pays n’ont eu de cesse de moderniser leurs armes et leurs installations nucléaires.  Comme l’a souligné M. Lajčák, ces progrès immenses dans les sciences et technologies nucléaires se sont malheureusement accompagnés d’énormes souffrances humaines et ont eu des impacts négatifs sur l’environnement au fil des décennies, une empreinte laissée par les essais et les accidents nucléaires.

Plus de 2 000 essais nucléaires ont eu lieu dans le monde depuis 1945, a rappelé le Président en soulignant l’ampleur des répercussions en termes de santé, de contamination de ressources naturelles et de détérioration de l’environnement.

Abondant dans son sens, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a d’abord rendu compte de sa visite récente au Japon où il a rencontré des survivants de l’explosion de la bombe atomique à Nagasaki, les Hibakusha.  « Nous nous souvenons également des victimes de l’ère désastreuse des essais nucléaires à grande échelle », a-t-il dit en déplorant leurs conséquences sur les communautés dans de nombreuses régions, allant des habitants de Semipalatinsk et de la steppe du Kazakhstan aux habitants des îles du Pacifique Sud et au peuple Maralinga Tjarutja d’Australie méridionale.

Pour prendre toute la mesure de ce fléau, l’Ambassadeur honoraire du projet ATOM, M. Karipbek Kuyukov, était là pour parler au nom des victimes des essais nucléaires, puisqu’il est lui-même né sans mains, il y a 50 ans, alors qu’il vivait près du site d’essais de Semipalatinsk, au Kazakhstan.  Militant du désarmement nucléaire, il s’est fait le porte-parole de l’initiative ATOM, qui a pour objectif d’impliquer davantage la société civile mondiale en lui soumettant une pétition à signer en faveur de l’adoption de mesures actives contre la menace nucléaire.

Le rôle de chef de file du Kazakhstan dans ce domaine s’inscrit directement dans la prise de position politique courageuse de son Président qui, en 1991, avait décidé de fermer le site nucléaire de Semipalatinsk, un site où 470 essais nucléaires soviétiques avaient eu lieu.

Mais, comme l’a souligné à juste titre le Secrétaire exécutif du TICEN, M. Lassina Zerbo, l’interdiction complète et vérifiable de ces essais ne représente que la première étape sur la voie d’un monde exempt d’armes nucléaires.

Il a rappelé qu’en 20 ans, 183 pays ont signé le TICEN et 166 l’ont ratifié.  Il a également assuré que le régime de vérification du Traité a fait ses preuves, affirmant qu’aujourd’hui « aucun État ne pourrait mener des essais nucléaires sans être repéré ».  La représentante de l’Union européenne a d’ailleurs partagé ce point de vue.  Il n’en demeure pas moins que la véritable victoire ne sera obtenue qu’une fois le TICEN entré en vigueur, ce qui a amené M. Zerbo à pointer du doigt les huit pays dont cela dépend, à savoir la Chine, l’Iran, le Pakistan, Israël, l’Inde, les États-Unis, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et l’Égypte. 

En vue d’y parvenir, la Belgique, en tant que coordinatrice du processus de l’Article XIV avec l’Iraq, a expliqué qu’un programme d’initiatives encourageant l’adhésion de ces États au Traité est en cours.  Dans ce programme, une importance particulière est donnée à l’engagement de la nouvelle génération et de la société civile pour renforcer la sensibilisation à tous les niveaux, même si la décision finale revient aux gouvernements, une approche qui a été soutenue par M. Zerbo.

« Chacune des ratifications nous rapproche de notre objectif commun de non-prolifération et de coopération internationale technique dans le domaine de la sécurité », a estimé M. Zerbo saluant dans la foulée la décision de la Thaïlande de ratifier le Traité dans un proche avenir, une décision que le représentant de ce pays a confirmée.  À cet égard, la représentante de l’Union européenne a rappelé le rendez-vous de la réunion ministérielle des amis du TICEN, qui aura lieu le 27 septembre en marge du segment de haut niveau de l’Assemblée générale, et qui représente une bonne opportunité pour signer et ratifier le Traité.

Si les intervenants de ce matin ont reconnu que depuis son adoption il y a vingt ans, le TICEN a permis de cimenter une norme internationale interdisant les essais nucléaires, une première étape vers l’objectif plus large du Traité sur la non-prolifération (TNP), le Secrétaire général leur a rappelé qu’un État avait néanmoins violé cette norme.  Ainsi, pour M. Guterres, les essais nucléaires menés par la RPDC sont bien la preuve qu’aucune mesure ponctuelle ne peut remplacer une interdiction mondiale et juridiquement contraignante des essais nucléaires.

Les représentants du Groupe des États d’Afrique, du Groupe des États de l’Europe de l’Est, du Groupe des États arabes, de l’Union européenne et d’autres États Membres ont tous soutenus la nécessité de l’universalisation et de l’entrée en vigueur urgente du TICEN.  Ils ont fait valoir que ce Traité s’inscrit dans une vision de sécurité commune coopérative, qui a besoin d’un nouvel élan politique fort.  Pour les intervenants, le TICEN représente l’un des éléments clef du régime de non-prolifération et du désarmement.  Certaines délégations, comme celle de l’Uruguay, ont même souligné la contribution du TICEN au développement durable.

Ainsi, ces Groupes, et les autres délégations qui sont intervenus ce matin, ont tous appelé les pays dotés de l’arme nucléaire à éliminer la menace existentielle qu’elle représente en signant et ratifiant le TICEN dans un premier temps.  Cette demande s’adresse plus précisément aux huit États qui figurent toujours à l’Annexe II du Traité.

Dans la même veine, de nombreux intervenants sont également revenus sur l’adoption historique, l’an dernier, du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, un autre traité qui mérite le plein appui de la communauté internationale en vue de son entrée en vigueur.

Sur une note optimiste, le Groupe des amis du TICEN a rappelé qu’avec 183 signatures et 166 ratifications, ce Traité est l’un des plus soutenus.  En attendant son entrée vigueur, ce Groupe appelle au respect du moratoire sur les essais nucléaires, et encourage la RPDC à signer et ratifier le TICEN de manière prioritaire, ainsi que les sept autres États qui doivent encore le faire.  De nombreux intervenants ont pris note avec optimisme de l’annonce par la RPDC de mettre fin à ses tests nucléaires.

S’impatientant face aux théories selon lesquelles la situation internationale n’est pas propice pour aller de l’avant dans la dénucléarisation, le représentant du Groupe arabe a estimé que ces puissances nucléaires devaient enfin honorer leurs obligations: « C’est la moindre des choses qu’elles doivent à la communauté internationale, compte tenu des dommages énormes infligés par les essais nucléaires qu’elles ont menés. »  En effet, alors que les États dotés de l’arme nucléaire envisagent de moderniser leurs armes et leurs installations nucléaires, il est plus que jamais impératif de mettre un terme aux essais.  Il s’agit là d’une responsabilité commune, comme l’a souligné le représentant de la République islamique d’Iran. 

Le représentant du Groupe des États arabes a ainsi annoncé vouloir revitaliser les efforts multilatéraux en vue de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.

À l’instar du Groupe des amis du TICEN, le représentant de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a salué la décision de la Thaïlande de le signer très prochainement.  Ils ont également pris note du sommet intercoréen du 27 avril 2017, ainsi que celui entre les États-Unis et la RPDC, avant d’encourager les parties à continuer de travailler vers la réalisation d’une paix durable et la dénucléarisation de la péninsule coréenne.

RÉUNION DE HAUT NIVEAU POUR COMMÉMORER LA JOURNÉE INTERNATIONALE CONTRE LES ESSAIS NUCLÉAIRES

Déclarations liminaires

Dans sa déclaration liminaire à l’occasion de la commémoration de la Journée internationale contre les essais nucléaires, le Président de l’Assemblée générale, M. MIROSLAV LAJČÁK, a souligné que cette Journée internationale est célébrée pour la première fois dans le contexte d’une réunion de haut niveau officielle. 

Les immenses progrès dans les sciences et technologies nucléaires ont malheureusement été accompagnés d’énormes souffrances humaines au fil des décennies, a rappelé M. Lajčák.  En effet, depuis 1945, plus de 2 000 essais ont eu lieu dans le monde, a-t-il précisé, ce qui a eu des répercussions en termes de santé, de contamination de ressources naturelles et de détérioration de l’environnement.  Au-delà de ces questions, M. Lajčák voit dans les tests nucléaires un problème politique dans la mesure où ils contribuent à intensifier les tensions internationales et suscitent des incompréhensions politiques.  « C’est pour cette raison que cette réunion est essentielle », a estimé le Président de l’Assemblée.

Après avoir noté que 20 ans après son adoption, le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) n’a toujours pas pu entrer en vigueur, il a demandé que le moratoire sur les essais nucléaires soit respecté à tout prix.  Il a exhorté les huit États qui doivent encore signer et ratifier le TICEN pour son entrée en vigueur à le faire sans plus tarder.

M. Lajčák s’est félicité des développements encourageants dans la péninsule coréenne, saluant les efforts de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), de la République de Corée et des États-Unis qui ont permis ces avancées.  Pour M. Lajčák, il ne fait toutefois pas de doute que la signature et la ratification du TICEN par la RPDC, et par les autres États, auraient des répercussions positives dans la péninsule coréenne.

Le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, a rappelé que, le mois dernier, il a visité le Japon et a rencontré des survivants de l’explosion de la bombe atomique à Nagasaki.  À travers les témoignages des survivants, les Hibakusha, il nous est rappelé qu’il faut veiller à ce que les armes nucléaires ne soient plus jamais utilisées, a-t-il plaidé.  Par la présente commémoration, le Secrétaire général a dit que « nous nous souvenons également des victimes de l’ère désastreuse des essais nucléaires à grande échelle ».  En effet, l’héritage de plus de 2 000 essais nucléaires a touché des gens et des communautés dans de nombreuses régions, allant des habitants de Semipalatinsk et de la steppe du Kazakhstan aux habitants des îles du Pacifique Sud et au peuple Maralinga Tjarutja d’Australie méridionale.

M. Guterres a rappelé que l’impact catastrophique des essais nucléaires avait eu de profondes répercussions sur l’environnement, la santé humaine, la sécurité alimentaire et le développement économique.  « C’est pourquoi nous devrions tous nous féliciter de la norme stricte contre les essais nucléaires qui s’est développée depuis la fin de la guerre froide », a-t-il dit en citant notamment les moratoires volontaires mis en place par la plupart des États possédant des armes nucléaires.  Depuis le début du siècle, un seul État a violé cette norme, a-t-il rappelé en notant que, par le biais du Conseil de sécurité, la communauté internationale a réagi de manière décisive à chaque violation.  Selon le Secrétaire général, les essais nucléaires menés par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont montré qu’aucune mesure ponctuelle ne peut remplacer une interdiction mondiale et juridiquement contraignante des essais nucléaires.

Le Secrétaire général a invité à déployer tous les efforts nécessaires pour permettre l’entrée en vigueur immédiate du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN).  En effet, « en limitant le développement et l’amélioration qualitative des armes nucléaires, le Traité freine la course aux armements nucléaires ».  Il constitue une puissante barrière contre les États qui pourraient chercher à mettre au point, fabriquer et utiliser, ou acquérir, des armes nucléaires en violation de leurs engagements de non-prolifération.  Pourtant, plus de 20 ans après sa négociation, le traité n’a pas encore pris effet, a—t-il regretté, avant de réitérer son appel afin que les huit États restants, dont la ratification est nécessaire pour que le TICEN puisse entrer en vigueur, s’engagent à signer le Traité et achever le processus de ratification.  Il les a tous exhortés à ne pas attendre que les autres agissent avant d’aller de l’avant.  Pour le Secrétaire général, la cessation complète et vérifiable de tous les essais nucléaires est un pilier essentiel d’un monde exempt d’armes nucléaires et d’un monde plus sûr pour tous.

Dans sa déclaration de soutien au TICEN, le Secrétaire exécutif du Traité, M. LASSINA ZERBO, est revenu sur sa récente visite au Kazakhstan, où il a assisté à une conférence de cinq jours qui rassemblait des experts du désarmement nucléaire.  Leurs discussions de fond avaient pour objectif de promouvoir l’entrée en vigueur du TICEN pour que les essais nucléaires soient abandonnés à jamais, a-t-il expliqué.  Il a salué le courage politique du Président du Kazakhstan qui avait décidé de fermer le site nucléaire de Semipalatinsk en 1991, un site où 470 essais nucléaires soviétiques avaient eu lieu.  Par ce geste, le Kazakhstan est devenu chef de file des efforts de non-prolifération et de désarmement nucléaire.

Pour M. Zerbo, il est impératif que la communauté internationale interdise à jamais ces essais compte tenu de leurs conséquences sur les êtres humains et la nature.  Il a précisé cependant que l’interdiction complète et vérifiable des tests nucléaires ne représente que la première étape sur la voie d’un monde exempt d’armes nucléaires. 

Depuis son adoption il y a 20 ans, 183 pays ont signé le TICEN, et 166 l’ont ratifié, a rappelé le Secrétaire exécutif assurant de plus que le régime de vérification du Traité a fait ses preuves et est résolument efficace.  Il n’a pas hésité à dire que, de nos jours, aucun État ne pourrait mener des essais nucléaires sans être repéré.  « Mais la victoire ne sera réelle qu’une fois que le TICEN sera entré en vigueur », a poursuivi M. Zerbo en pointant du doigt les huit pays figurant à son Annexe II dont cela dépend, à savoir la Chine, l’Iran, le Pakistan, Israël, l’Inde, les États-Unis, la République populaire démocratique de Corée et l’Égypte.  Si la décision finale revient aux gouvernements, M. Zerbo a aussi encouragé une mobilisation de la société civile et des jeunes pour soutenir le Traité et sensibiliser le public à son importance.

« Depuis la première Journée internationale contre les essais nucléaires en 2010, nous ne pouvons ignorer l’anxiété croissante liée aux tensions dans le monde, or la coopération internationale dans le domaine de l’interdiction des essais nucléaires n’est toujours pas suffisamment forte », a-t-il regretté.  « L’unité des nations en faveur d’un monde sans armes nucléaires s’est évaporée au cours de ces 20 dernières années, mais ne nous laissons pas abattre, soyons encore plus déterminés et exigeons des actions immédiates à commencer par l’entrée en vigueur du TICEN », a-t-il lancé à la salle.  « Chacune des ratifications nous rapproche de notre objectif commun en faveur de la non-prolifération et de la coopération internationale technique dans le domaine de la sécurité. »  À cette occasion, M. Zerbo a salué la décision de la Thaïlande de ratifier le Traité dans un proche avenir.

M. KARIPBEK KUYUKOV s’est exprimé en tant qu’Ambassadeur honoraire du projet ATOM, une initiative du Kazakhstan ayant pour objectif de consolider la société civile mondiale en lui soumettant une pétition à signer en faveur de l’adoption de mesures actives contre la menace nucléaire.  L’Ambassadeur Kuyukov a dit parler au nom des victimes des essais nucléaires, puisqu’il est lui-même né sans main il y a 50 ans, alors que sa famille habitait près du site d’essais de Semipalatinsk, au Kazakhstan.  Il a parlé des répercussions sanitaires des essais qui y étaient menés, en plus d’expérimentations sur les animaux et les humains du temps de l’Union soviétique.  Depuis l’âge de 25 ans, M. Kuyukov dit « exprimer sa peine et sa protestation par la peinture en tenant le pinceau par la bouche ou grâce à ses orteils ».

Il a ensuite salué le projet ATOM, qui a permis de collecter pas moins de 312 000 signatures des internautes de plus de 100 pays, dans le cadre d’une pétition qui vise un million de signataires afin de contribuer à bâtir un monde exempt d’armes nucléaires.  Au nom des victimes des essais nucléaires, l’Ambassadeur d’ATOM a demandé aux États dont la signature est cruciale pour l’entrée en vigueur du TICEN de ratifier cet important instrument, afin de préserver les générations futures des effets néfastes des essais nucléaires.  Il a terminé en invitant la communauté internationale à tirer les « leçons amères » de l’histoire des conséquences des essais nucléaires, et d’œuvrer à l’élimination complète des armes nucléaires.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Dossier des armes chimiques en Syrie: des questions restent en suspens et le Conseil de sécurité reste divisé

8344e séance – après-midi
CS/13489

Dossier des armes chimiques en Syrie: des questions restent en suspens et le Conseil de sécurité reste divisé

Près de cinq mois après les dernières allégations d’emploi d’armes chimiques à Douma, en République arabe syrienne, la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement de l’ONU, Mme Izumi Nakamitsu, a déploré cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, l’absence d’une nouvelle structure pour remplacer le mécanisme d’établissement des responsabilités sur le dossier chimique syrien, suite au non renouvellement de ce dernier par le Conseil en novembre 2017. 

Cette séance houleuse a en outre été marquée par les appels de nombreuses délégations à agir pour qu’Edleb ne devienne pas « le nouvel Alep ou la nouvelle Ghouta orientale », une inquiétude rejetée par Moscou et Damas comme relevant de la « fable » et du « mensonge ». 

Présentant le rapport mensuel du Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), l’organisme chargé de faire appliquer toutes les dispositions de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, Mme Nakamitsu a entamé la séance sur une note optimiste.  Elle s’est félicitée du fait que l’OIAC ait été en mesure de vérifier la destruction de la totalité des 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la Syrie.  « C’est un pas important en faveur de l’application complète de la résolution 2118 (2013) », a-t-elle salué.

La Haute-Représentante a toutefois noté que de nombreuses questions restaient en suspens, y compris l’enquête de la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en Syrie sur une allégation d’emploi d’armes chimiques à Douma, dans la Ghouta orientale, le 7 avril 2018.  Dans ce cadre, elle a jugé « profondément préoccupante » l’absence d’un mécanisme d’établissement des responsabilités, suite au non renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC-ONU, que le Conseil avait créé en 2015.  La fin du Mécanisme a enhardi ceux qui souhaitent commettre de nouvelles attaques chimiques, a-t-elle déploré, avant d’appeler le Conseil à travailler « main dans la main » pour trouver une « approche commune ».

Faisant écho à ses propos, la France a exhorté les alliés de la Syrie à prendre leurs responsabilités pour éviter une nouvelle utilisation d’armes chimiques, face à la menace d’une offensive majeure à Edleb.  « C’est un impératif pour la Syrie et la communauté internationale », a estimé le pays, émettant des doutes quant au fait que Damas ait déclaré l’intégralité de ses stocks en 2013.  C’est d’autant moins certain, a surenchéri la Pologne, que la déclaration initiale de la Syrie concernant son programme chimique comportait plusieurs zones d’ombre.

Les « lacunes et incohérences » dans cette déclaration initiale sont uniquement dues au fait que le pays a été contraint de faire cette déclaration « à la hâte », a quant à elle estimé la Fédération de Russie, ajoutant que Damas fournissait de façon volontaire des informations à l’OIAC.  « C’est la seule bonne façon de régler les questions en suspens », a estimé le pays, qualifiant les « informations mensongères » selon lesquelles Damas cacherait des substances neurotoxiques de « propagande ». 

Pour Moscou, en effet, ce sont les « combattants illégaux armés » en Syrie qui emploient des armes toxiques pour discréditer Damas et justifier des actions d’agression étrangère.  Quant aux « fables » concernant la soi-disant intention de Bashar Al-Assad d’utiliser des armes chimiques à Edleb, la Fédération de Russie a déclaré: « Cela me rappelle le roman d’Agatha Christie, ‘Un meurtre sera commis le…’ ». 

Agatha Christie était une romancière, a rétorqué le Royaume-Uni.  Or, l’utilisation bien réelle d’arme chimique par Damas n’est plus à démontrer, a poursuivi la délégation, jugeant intolérable que des gouvernements puissent envisager d’employer des armes chimiques contre leur propre peuple, voire même contre des petites villes ou petits villages au Royaume-Uni.  La Russie est peut-être parvenue à mettre fin au Mécanisme d’enquête conjoint, ont en effet déclaré les États-Unis, mais cela n’efface pas les conclusions déjà rendues par le Mécanisme concernant l’utilisation meurtrière avérée d’armes chimiques dans le pays.  Les « mensonges russes et syriens » et la dissémination de « fake news » ne les exonèrent pas, ont mis en garde les États-Unis, rappelant qu’à deux reprises, y compris en avril, le pays n’a pas hésité à intervenir en Syrie face à l’emploi d’armes chimiques.  

La Syrie a quant à elle accusé des médias américains d’avoir préparé le bombardement d’avril dernier en prétextant « avoir senti des puanteurs » une semaine après le déclenchement de l’affaire de l’emploi d’armes chimiques à Douma.  Or, le pays a qualifié de fausses les informations concernant la présence d’armes chimiques en Syrie.  Certains membres du Conseil « attendent Godot qui ne viendra pas », a déploré Damas, faisant allusion à la pièce de théâtre de Samuel Beckett.  Quant au futur emploi d’armes chimiques à Edleb, la Syrie a ironisé sur le fait que les États-Unis, la France et le Royaume-Uni semblaient connaître à l’avance les sites où seraient utilisées les armes chimiques. 

Face à ces échanges, plusieurs délégations, en tête desquelles la Chine, ont rappelé que la solution politique demeurait la seule « approche viable » en Syrie, notamment afin d’éviter, selon l’expression des Pays-Bas, qu’Edleb ne devienne « le prochain Alep ou la prochaine Ghouta orientale ».

LA SITUATION AU MOYEN ORIENT

Lettre datée du 28 août 2018, adressée à la Présidente du Conseil de sécurité par le Secrétaire général (S/2018/804)

Déclarations

Tout comme le Conseil de sécurité en a été informé le mois dernier, a rappelé au début de la réunion Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement de l’ONU, le Secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a été en mesure de vérifier la destruction de la totalité des 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne.  « C’est un pas important en faveur de l’application complète de la résolution 2118 (2013) », s’est-elle félicitée.

Mme Nakamitsu, qui présentait notamment les conclusions du cinquante-neuvième rapport mensuel du Directeur général de l’OIAC, a en outre ajouté que les questions en suspens liées à la déclaration initiale de la République arabe syrienne étaient toujours à l’étude.  Le 10 juillet dernier, a-t-elle rappelé, l’OIAC a reçu une lettre de la République arabe syrienne en réponse aux questions contenues dans la lettre du 10 avril 2018 adressée au Vice-Ministre syrien des affaires étrangères, M. Faisal Mekdad, par le Directeur général de l’OIAC.  Selon la Haute-Représentante, l’équipe continue d’analyser les réponses fournies et rendra compte au Conseil des résultats de cette analyse en temps voulu.

Par ailleurs, a indiqué Mme Nakamitsu, le 6 juillet, le Secrétariat technique de l’OIAC a publié une note intitulée « Rapport intérimaire de la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en Syrie sur l’incident relatif à une allégation d’emploi de produits chimiques toxiques comme arme à Douma, en République arabe syrienne, le 7 avril 2018 ».  Le 7 aout, a-t-elle poursuivi, l’OIAC a reçu une note verbale de la République arabe syrienne, dans laquelle figuraient des commentaires sur ce rapport intérimaire.  L’OIAC continue d’étudier ces réponses, ainsi que les allégations d’utilisation d’armes chimiques à Douma.

En outre, a déclaré la Haute-Représentante, la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en République arabe syrienne a demandé et obtenu des documents relatifs aux quatre incidents sur lesquels enquête actuellement l’Autorité nationale de la République arabe syrienne, à savoir deux incidents survenus à Khirbat Masasna (le 7 juillet 2017 et le 4 août 2017), un incident à Salamiyé (le 9 août 2017) et un autre à Souran (le 8 novembre 2017).  La mission d’établissement des faits, a-t-elle dit, continue d’étudier ces documents.

Par ailleurs, Mme Nakamitsu a rappelé que, lors de sa quatrième session spéciale, en juin dernier, la Conférence des États parties à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, avait décidé que le Secrétariat de l’OIAC mettrait en œuvre des arrangements pour identifier les auteurs dans les cas où l’emploi d’armes chimiques avait été avéré.  Le 27 juillet, a-t-elle précisé, le Directeur général de l’OIAC a fait un rapport sur la mise en œuvre de cette décision au Secrétaire général de l’ONU, qui a pris bonne note de cette avancée.

L’absence d’un mécanisme d’établissement des responsabilités concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, suite au non-renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC-ONU, est « profondément préoccupante », a par ailleurs estimé Mme Nakamitsu.  La fin du Mécanisme, a-t-elle insisté, a enhardi ceux qui souhaitent commettre de nouvelles attaques chimiques.  « Tous ceux qui utilisent des armes chimiques doivent être identifiés et tenus pour responsables », a martelé la Haute-Représentante.

Elle a ainsi appelé le Conseil à travailler « main dans la main » pour trouver une « approche commune » face à ce problème qui menace la sécurité et la paix dans le monde, avant de rappeler en conclusion ces mots du Secrétaire général: « Tout emploi d’armes chimiques est intolérable, les souffrances provoquées par ces armes sont horribles ».

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a rappelé l’opposition de principe de son pays à l’endroit de toute arme chimique, et son soutien à l’ouverture de poursuites judiciaires contre les auteurs d’attaques à l’arme chimique.  « Toutefois, la responsabilité d’une partie doit être établie par des éléments de preuve irréfutables », a-t-il déclaré, en expliquant que les membres du Conseil de sécurité doivent aller au-delà de leurs intérêts géopolitiques respectifs pour envisager des actions conjointes et intégrées.  Tout en saluant le rapport du Secrétaire général à l’ordre du jour du Conseil, le représentant a estimé que les enquêtes en cours manquaient de clarté, en particulier s’agissant de l’incident de Douma.  Le délégué a également jugé que l’absence de mesures préventives ne permet pas de répondre de manière efficace aux menaces continues des armes chimiques dans le pays.  Enfin, a-t-il ajouté, la crainte que des attaques à l’arme chimique soient perpétrées est instrumentalisée comme outil de terreur et de chaos parmi les populations au profit des différentes parties.  Il a insisté sur le fait de ne pas politiser ou polariser cette question essentielle.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a souligné que l’usage d’armes chimiques est un crime contre l’humanité et a dit être préoccupé par les dénonciations récurrentes d’usage d’armes chimiques en Syrie.  Il a salué les enquêtes en cours et a dit avoir pleine confiance dans le professionnalisme de l’OIAC, tout en saluant le sacrifice de son personnel sur le terrain en Syrie.  Le Pérou salue la destruction des 27 sites identifiés par le Gouvernement syrien, et le pays dit espérer que la documentation présentée récemment par la Syrie va permettre de faire la lumière sur certaines incohérences de son programme d’armes chimiques. 

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a dit qu’avec la menace d’une offensive majeure à Edleb la Syrie est à nouveau au bord du vide.  « La priorité de nos efforts doit aller au respect du cessez-le-feu et nous appelons la Russie et l’Iran à user de leur influence pour y parvenir. »

Le risque d’emploi d’armes chimiques est sérieux, a déclaré M. Delattre, rappelant que le programme chimique syrien n’est pas démantelé.  « Il est impossible à ce jour de confirmer qu’il a déclaré l’intégralité de ses stocks et capacités en 2013. »  Le délégué a exhorté les alliés de la Syrie à prendre leurs responsabilités pour éviter une nouvelle escalade et l’emploi d’armes chimiques. « C’est un impératif pour la Syrie et la communauté internationale. »

Enfin, M. Delattre a de nouveau insisté sur la gravité du moment et l’importance d’une pleine mobilisation de ce Conseil et de la communauté internationale.  « La France appelle les garants d’Astana à préserver la désescalade de la violence. »

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué le professionnalisme de l’OIAC, notamment de sa mission d’établissement de faits en Syrie.  Elle a dit souhaiter que la communication entre la Syrie et l’OIAC va se poursuivre afin de clarifier les zones d’ombre de la déclaration initiale du pays quant à son programme chimique. 

La représentante a noté que ce cinquante-neuvième rapport mensuel signifie que cela fait bientôt 5 ans que le Conseil de sécurité et la communauté internationale n’ont pas été en mesure d’atténuer la menace posée par les armes chimiques en Syrie.  Cela ne veut pas dire que cet organe n’est pas en mesure d’y parvenir.  Elle a ainsi rappelé que le Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC et des Nations Unies laisse voir que le Conseil est uni autour de l’objectif commun d’empêcher l’usage d’armes de destruction massive. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que les discussions du Conseil de sécurité sur ce dossier ne reflétaient pas la réalité sur le terrain et se faisaient l’écho des « positions anti-Damas » de certains membres du Conseil, alors même que la totalité des installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne a été détruite, tout comme les arsenaux chimiques existants.

Pour le représentant, « les lacunes et incohérences » dans la déclaration initiale de la République arabe syrienne sont dues au fait que le pays a été contraint de faire cette déclaration « à la hâte », dans le cadre d’un conflit armé.  De plus, a-t-il dit, le Gouvernement syrien fournit de façon volontaire des informations à l’OIAC.  « C’est la seule bonne façon de régler les questions en suspens », a-t-il affirmé, rejetant les « informations mensongères » selon lesquelles Damas cacherait des substances neurotoxiques comme relevant de la pure « propagande ». 

À ses yeux, ce sont les combattants illégaux armés en République arabe syrienne qui emploient des armes toxiques pour discréditer Damas et justifier des actions d’agression étrangère.  Les Casques blancs financés par des puissances occidentales utilisent des subterfuges et n’hésitent pas à employer des enfants pour filmer des vidéos mensongères, a-t-il encore affirmé.  Quant aux rumeurs concernant la soi-disant intention de Damas d’utiliser des armes chimiques à Edleb, le représentant a déclaré: « Cela me rappelle le roman d’Agatha Christie, ‘Un meurtre sera commis le…’ ».  Damas ne possède ni d’armes chimiques ni n’a d’intention d’en utiliser, a-t-il affirmé.  « Pensez-vous que le monde va croire à de telles fables », s’est interrogé le représentant. 

Mme MAHLET HAILU GAUDEY (Éthiopie) a noté que l’OIAC poursuit l’examen de la réponse du Gouvernement syrien sur certaines questions en suspens.  Elle a dit souhaiter, en attendant le rapport, que les questions en suspens soient traitées par le biais de communications productives entre les deux parties.  L’Éthiopie invite toutes les parties à coopérer avec la mission d’établissement des faits sur le dossier de Douma pour lequel un rapport intérimaire a été publié.

Pour l’Éthiopie, il n’y a aucune justification à l’utilisation d’armes chimiques par des acteurs étatiques ou non.  Ceux qui le feraient doivent en répondre, a-t-elle plaidé en précisant que l’unité du Conseil de sécurité est cruciale pour s’en assurer.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a salué la destruction de 27 sites identifiés par le Gouvernement syrien dans le cadre de son programme d’armes chimiques.  Au sujet de la sécurité du personnel de l’OIAC, il a souhaité que leurs accès aux sites soient assujettis à la mise en œuvre de nouvelles mesures de sécurité arrêtés par le Département de la sécurité de l’ONU.  La Guinée équatoriale espère que les parties en Syrie continueront à respecter les instruments internationaux, notamment dans ce contexte de préparation d’une vaste offensive militaire.

Par ailleurs, la Guinée équatoriale réitère son opposition à l’utilisation d’armes chimiques, quel que soit le lieu.  Il a souligné qu’il est urgent de créer un mécanisme pour identifier les utilisateurs d’armes chimiques.  Pour cela, a-t-il insisté, l’unité du Conseil de sécurité est importante.  Il a ensuite invité la communauté internationale à continuer d’appuyer les efforts de paix en Syrie, dans le respect de l’intégrité territoriale de ce pays.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a réitéré son appui à la Mission d’établissement des faits menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  En ce qui concerne les allégations d’emploi d’arme chimiques à Douma, il a estimé que l’enquête devait se baser sur « un protocole standard, indépendant et transparent ».  Le représentant a en outre estimé que le Conseil de sécurité devait trouver un consensus afin de créer un nouveau mécanisme indépendant pour établir les responsabilités concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a espéré que les réponses apportées par la Syrie permettent de lever le voile sur les incohérences issues de sa déclaration initiale concernant son programme d’armes chimiques.  Il a noté qu’il n’existe pas de mécanisme permettant d’identifier les auteurs d’utilisation d’armes chimiques en Syrie afin que ceux-ci répondent de leurs actes.  Le Koweït se félicite du fait que l’OIAC ait récemment décidé de jouer cette fonction.

Le Koweït se dit en outre préoccupé par l’éventualité de l’usage d’armes chimiques à Edleb au cours de l’offensive militaire qui s’y prépare.  Il a invité le Conseil à rester uni sur la question des armes chimiques en Syrie, avant d’inviter les garants du processus d’Astana, qui doivent se réunir demain, à prendre des initiatives pour éviter un bain de sang à Edleb et à faciliter un acheminement de l’aide humanitaire dans la région.

M. DESIRE WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a salué les progrès accomplis dans la destruction de la totalité des 27 unités de production d’armes chimiques en Syrie.  Pour la Côte d’Ivoire, ces progrès constituent une étape importante dans le processus de démantèlement exhaustif de l’arsenal chimique de ce pays.  De même, les réponses apportées par le Gouvernement syrien à la liste non exhaustive de questions du Directeur général de l’OIAC constituent une autre preuve de cette tendance positive. 

La Côte d’Ivoire souhaite que les résultats de l’analyse des documents transmis par la Syrie permettent d’élucider les incidents de 2017 à Kharbit, Masasnah, Al-Salamiyah et Sourian, et d’identifier les auteurs de l’utilisation de ces armes chimiques afin qu’ils répondent de leurs actes devant les juridictions internationales compétentes.  Pour terminer, la Côte d’Ivoire salue la publication du rapport intérimaire de l’OIAC sur les allégations d’emploi de produits chimiques à Douma le 7 avril 2018, et attend avec intérêt les conclusions définitives. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est dite très préoccupée par le potentiel d’utilisation d’armes chimiques par Damas lors de son offensive à Edleb.  Elle a rappelé que la mission d’établissement des faits menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) avait d’ores et déjà établi 13 cas d’emploi avérés ou très probables de telles armes par Damas. 

En réponse à son homologue russe, la représentante a rappelé qu’Agatha Christie était une romancière.  Or, a-t-elle poursuivi, l’utilisation réelle d’arme chimique par Damas à l’encontre de sa population a déjà été établie.  La représentante a ainsi jugé intolérable que des gouvernements puissent envisager d’employer des armes chimiques contre leur propre peuple, voire même, a-t-elle ajouté, contre des petites villes ou petits villages au Royaume-Uni.  Elle a par conséquent exhorté la Fédération de Russie à user de son influence pour faire en sorte que des armes chimiques ne soient pas utilisées en République arabe syrienne, sous peine, a-t-elle mis en garde, de devenir complice de l’emploi de ces armes.

M. MA ZHAOXU (Chine) s’est félicité du fait que les 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne avaient été détruites.  Concernant les récents rapports faisant état d’une possible utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, le représentant a fortement condamné toute utilisation de telles armes.  Il a appelé à ce que des enquêtes impartiales et objectives soient systématiquement ouvertes en cas d’utilisation d’armes chimiques, dans le respect, toutefois, de la souveraineté de la République arabe syrienne et de son intégrité territoriale.  « La solution politique est la seule approche viable », a déclaré le représentant chinois. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté le Conseil à agir pour éviter que le « pire scénario » ne se déroule à Edleb.  « Les garants de la zone de désescalade d’Edleb et les autorités syriennes doivent œuvrer sérieusement à une solution pacifique et négociée à Edleb. » Il a rappelé que toute lutte antiterroriste doit respecter le droit international et jugé inacceptable toute utilisation d’armes chimiques.  S’agissant des armes chimiques, il a fustigé la récente tendance consistant à répandre délibérément des éléments de désinformation et invité le Conseil à se retrouver sur un terrain commun.  « Nous condamnons tous l’emploi d’armes chimiques, partout, par quiconque, en toutes circonstances. » Enfin, il a souhaité le renvoi de la situation en Syrie devant la Cour pénale internationale(CPI). 

M. OLOF SKOOG (Suède) a exhorté les autorités syriennes à coopérer avec l’OIAC afin que leur déclaration de destruction des armes chimiques soit précise et fasse l’objet de vérifications.  Il a dit attendre avec impatience le dernier rapport de l’OIAC sur l’attaque de Douma, avant de se dire préoccupé par les risques d’escalade militaire à Edleb, qui aurait de graves conséquences humanitaires.  Les garants de la zone de désescalade d’Edleb et toutes les parties doivent œuvrer pour une désescalade et un accès humanitaire sans entraves à Edleb.  « Edleb ne doit pas devenir le prochain Alep ou la prochaine Ghouta orientale. » Enfin, M. Skoog s’est dit alarmé par les allégations d’une nouvelle utilisation d’armes chimiques en Syrie. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a estimé que les membres du Conseil de sécurité qui ont cherché à protéger le régime de Damas depuis le début du conflit devraient avoir « honte » et auraient à en répondre devant l’Histoire.  Une nouvelle fois, a-t-elle affirmé, Moscou se prépositionne afin de se faire le « complice » du régime de Damas.  Elle a parlé de signes avant-coureurs selon lesquels Damas se préparerait à utiliser des armes chimiques pour achever le siège d’Edleb.  Comme par le passé, a poursuivi la représentante, ce régime et ses alliés iraniens et russes n’ont de cesse de proférer des mensonges concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, via la dissémination de « fake news ». 

La Russie est peut-être parvenue à mettre fin au Mécanisme d’enquête conjoint, a déclaré la représentante, mais cela n’efface pas les conclusions déjà rendues par ledit Mécanisme concernant l’utilisation meurtrière avérée d’armes chimiques dans le pays.  Selon la représentante, la République arabe syrienne a utilisé ces armes au moins 50 fois contre sa population depuis le début du conflit.

Les « mensonges russes et syriens » ne les exonèrent pas, a-t-elle poursuivi.  Ils ne font, selon elle, que révéler la culpabilité de Bashar Al-Assad.  Les États-Unis ne cesseront pas de dénoncer l’utilisation de ces armes, a ajouté la représentante, rappelant que son gouvernement, à deux reprises, n’avait pas hésité à intervenir dans le pays face à l’emploi d’armes chimiques.  Ne pariez pas contre les États-Unis, a enfin mis en garde la représentante, car nous ne resterons pas les bras ballants.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a qualifié de fausses les informations faisant état de la présence d’armes chimiques en Syrie.  Il a affirmé qu’« il n’y a plus d’armes chimiques en Syrie depuis 2014 ».  Il a déploré que certains membres du Conseil « attendent Godot qui ne viendra pas », en faisant allusion à la pièce de théâtre de Samuel Beckett.

Pour le représentant, le Conseil a déjà commis des erreurs en Iraq et en Libye et il est temps d’apprendre de ces erreurs.  Il a accusé un membre du Conseil, s’étant retiré de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et du Conseil des droits de l’homme, et d’autres instances multilatérales afin de ternir l’image de la Syrie.  Pourtant, a-t-il argué, ce membre détient « le record historique d’utilisation d’armes nucléaires, chimiques et biologiques sur des civils dans le monde ».  Il a accusé des médias américains d’avoir préparé le bombardement d’avril dernier en prétextant « avoir senti des puanteurs », une semaine après le déclenchement de l’affaire de l’utilisation d’armes chimiques à Douma.  Ensuite, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont bombardé des sites en Syrie.

« Nous n’avons pas besoin d’armes bannies pour éradiquer le terrorisme international », a déclaré le délégué syrien, ajoutant que son pays n’allait pas céder aux menaces des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni; des États qui ont soutenu des groupes terroristes en Syrie, notamment le Front el-Nosra et les Casques blancs.  Il a souligné que son pays combat également à Al-Qaida qui a mené des attaques le 11 septembre 2001 à New York, et ensuite à Paris et Londres.  « Et vous, vous soutenez cette guerre contre nous? » s’est-il étonné.  Il a en outre marqué sa surprise sur le fait que ces armes chimiques en Syrie semblent affecter exclusivement les femmes et les filles.  De même, il a ironisé sur le fait que ces trois pays, ainsi que des groupes terroristes, semblent connaître à l’avance les sites où seront utilisés les armes chimiques.  Il a ensuite accusé le Conseil de sécurité et l’OIAC de négliger les correspondances de son pays, pas moins de 156 envoyées à ces deux organes et qui sont restées lettre morte.  La dernière, a-t-il rappelé, a été transmise il y a deux jours, et elle fait mention de l’éventuelle utilisation d’armes chimiques à Edleb par des groupes rebelles.  M. Ja’afari a enfin noté une « confusion » de la part de certaines délégations sur le thème de la présente séance et celle qui aura lieu demain.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sous-Secrétaire générale aux opérations de paix souligne la volatilité de la situation en Haïti et le risque de « troubles majeurs »

8342e séance – matin
CS/13487

La Sous-Secrétaire générale aux opérations de paix souligne la volatilité de la situation en Haïti et le risque de « troubles majeurs »

La Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, Mme Bintou Keita, a insisté, aujourd’hui, devant le Conseil de sécurité, sur la « volatilité » de la situation en Haïti et mis en garde contre le risque « élevé » de « troubles majeurs ».  Elle a par ailleurs noté, à l’instar de nombreuses délégations, les progrès inégaux accomplis en vue de la transition de l’actuelle Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) vers une autre forme de présence onusienne, à partir d’octobre 2019.

Mme Keita, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général sur la MINUJUSTH, a rappelé la flambée de violence, marquée par des pertes en vies humaines et des actes de destruction, qui a touché le pays en juillet dernier à la suite de la suppression des subventions aux produits pétroliers, entraînant notamment une hausse du prix du kérosène de 38%.

« Depuis, les autorités haïtiennes n’ont pas cherché à remédier aux causes profondes de la précarité sociale, alors que le processus de ratification par le Parlement de l’énoncé de la politique générale du Premier Ministre nommé et la prise de fonctions du nouveau Gouvernement sont en attente », a-t-elle regretté.  

La Sous-Secrétaire générale a également pointé le ressentiment populaire alimenté par des révélations sur les avantages présumés des fonctionnaires et le débat sur l’utilisation discutable des fonds PetroCaribe.  Les gangs, en particulier dans la capitale, continuent de mettre la Police nationale haïtienne à l’épreuve, a-t-elle dit.

Mme Keita a ensuite mentionné les défis qui demeurent pour le passage sans heurt vers une présence des Nations Unies en Haïti autre qu’une opération de maintien de la paix d’ici au 15 octobre 2019.  Le rapport précité du Secrétaire général comprend en annexe les 46 indicateurs retenus pour surveiller les progrès accomplis dans la mise en œuvre d’une stratégie de sortie de la MINUJUSTH, comme souhaité par le Conseil.

Elle a, en particulier, déploré la lenteur des progrès dans l’adoption de lois visant à améliorer l’accès à la justice et le fonctionnement de l’administration pénitentiaire.  Quant aux indicateurs relatifs à la nomination des membres du Conseil électoral permanent et à une représentation suffisante des femmes au sein de la Cour de Cassation, ils n’ont pas été atteints, a-t-elle déclaré.

La Sous-Secrétaire générale a enfin souligné la nécessité de mettre pleinement en œuvre le plan de développement de la Police nationale haïtienne, pour améliorer le professionnalisme des officiers de police, ainsi que leur nombre.  « Or le taux d’officiers sur 1 000 habitants a chuté à 1,32 en raison notamment de démissions. »

Les délégations ont exprimé un certain scepticisme sur cette transition vers une autre forme de présence de l’ONU d’ici à l’année prochaine, le Royaume-Uni jugeant « alarmante » cette baisse du nombre de policiers, « compte tenu de la centralité de cet indicateur ». 

Appelant les autorités haïtiennes à « se saisir pleinement de la gestion des troubles à l’ordre public » et à « éviter toute politisation » de la police, la déléguée de la France a plaidé pour un retrait « responsable » de la MINUJUSTH, fondé sur une évaluation claire de la situation sur le terrain.

Son homologue de la Pologne a, elle, mis en garde contre « une limitation excessive ou trop précoce » de la présence de l’ONU dans le pays, tandis que la délégation de la Côte d’Ivoire a estimé que « le succès de la stratégie de retrait de la MINUJUSTH passe inévitablement par une étroite collaboration entre les différentes parties prenantes ».

Le représentant d’Haïti s’est voulu rassurant dans son intervention, estimant que la crise de juillet a été surmontée.  « Les institutions publiques ont démontré leur maturité », a-t-il déclaré.  Il a précisé que le nouveau Gouvernement aura pour priorités l’organisation d’élections prévues en octobre 2019 et l’intensification de la lutte contre la corruption.

« Haïti continue par ailleurs de mener des efforts soutenus en faveur du renforcement de l’état de droit, du système de justice et de la promotion des droits de l’homme », a-t-il assuré, en soulignant la baisse de la criminalité. Enfin, le délégué a réitéré l’engagement des autorités haïtiennes à assurer une transition sans heurt de la MINUJUSTH vers une présence des Nations Unies qui ne soit plus axée sur le maintien de la paix.

*S/2018/795

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI (S/2018/795)

Déclarations

Mme BINTOU KEITA, Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, a indiqué que la MINUJUSTH a créé un mécanisme permettant de surveiller les progrès accomplis dans la mise en œuvre d’une stratégie de sortie sur deux ans assortie d’objectifs pour le passage à une présence des Nations Unies en Haïti autre qu’une opération de maintien de la paix.  « En collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies et les parties prenantes nationales, nous avons poursuivi la collecte et l’analyse des données relatives aux 46 indicateurs énoncés dans le précédent rapport du Secrétaire général. »

Mme Keita a passé en revue les progrès accomplis pour atteindre ces indicateurs, indiquant tout d’abord que le passage à une présence des Nations Unies en Haïti autre qu’une opération de maintien de la paix ne devrait intervenir pas avant le 15 octobre 2019.  Des défis demeurent et une intervention sera nécessaire pour remplir tous les indicateurs d’ici cette date, a-t-elle déclaré.  Elle a notamment souligné la nécessité de mettre pleinement en œuvre le plan de développement de la Police nationale haïtienne, pour améliorer le professionnalisme des officiers de police et leur nombre.  « Le taux d’officiers sur 1000 habitants a chuté à 1,32 en raison notamment de démissions. »

La Sous-Secrétaire générale a rappelé que les progrès dépendent de l’adoption de législations clefs, notamment en vue d’améliorer le travail de la police et le fonctionnement de l’administration pénitentiaire.  « Or, cela n’a pas encore commencé. » Pareillement, les indicateurs relatifs à la nomination de neuf membres du Conseil électoral permanent et à une représentation suffisante des femmes au sein notamment de la Cour de Cassation n’ont pas été atteints.  Des retards sont également observés s’agissant des mécanismes de surveillance et d’établissement de responsabilités dans le domaine judiciaire. 

« En matière de sécurité, tandis que le nombre d’homicides volontaires a chuté, des menaces demeurent, y compris une augmentation des crimes liés aux gangs. » Mme Keita a indiqué que ces gangs, en particulier dans la capitale, mettent la police à l’épreuve alors que les prochaines élections législatives sont prévues en 2019.  La mise en œuvre réussie du plan de développement de la Police nationale d’Haïti 2017-2021, avec l’aide de la MINUSJUSTH, permettra au Gouvernement de continuer à assumer progressivement ses responsabilités en matière de sécurité.  Les lacunes constatées devront être comblées, a-t-elle déclaré, en particulier le manque de ressources financières. 

Mme Keita a indiqué que le plan intégré de transition en matière de sécurité, comme demandé par le Conseil, orientera la première phase d’un retrait responsable et effectif de la présence policière de l’ONU en Haïti.  Cette première phase ramènera de sept à cinq les unités de police constituées (FPU) entre le 15 octobre 2018 et le 15 avril 2019.  « Les régions d’où les FPU seront retirées ont été sélectionnées en fonction de leur niveau de stabilité, de l’amélioration de leur situation sécuritaire, des progrès achevés dans la réalisation des indicateurs des objectifs fixés et de la nécessité de garantir la bonne marche des opérations de la MINUJUSTH jusqu’à octobre 2019. »

Mme Keita a rappelé la vague de violence qui a touché le pays il y a deux mois à la suite de la suppression des subventions aux produits pétroliers, entraînant une hausse du prix du kérosène de 38%, vague qui illustre la volatilité de la situation sécuritaire.  « Depuis, les autorités n’ont pas cherché à remédier aux causes profondes de la précarité sociale, alors que le processus de ratification par le Parlement de l’énoncé de la politique générale du Premier Ministre nommé et la prise de fonctions du nouveau Gouvernement sont en attente. » La Sous-Secrétaire générale a pointé le ressentiment populaire alimenté par des révélations sur les avantages présumés des fonctionnaires et le débat sur l’utilisation discutable des fonds PetroCaribe.  « Le risque de troubles majeurs demeure élevé. »

Enfin, Mme Keita a, s’agissant de la mise en œuvre du mandat de la Mission, indiqué que cette dernière, l’équipe pays et le Gouvernement devront redoubler d’efforts pour rattraper le temps perdu à la suite des évènements de juillet.  Seul un gouvernement pleinement fonctionnel pourra relever les défis, a-t-elle conclu.

Mme LEONA ROMEO-MARLIN (Pays-Bas) a souligné l’importance de renforcer l’état de droit en Haïti, pour garantir le succès de la transition vers le retrait de la MINUJUSTH.  Dans ce contexte, le Gouvernement haïtien doit poursuivre ses réformes constitutionnelles, consolider ses institutions politiques et améliorer le respect des droits de l’homme dans le pays.  Cela suppose, selon la représentante, un engagement constant de Port-au-Prince auprès de la Mission des Nations Unies, ainsi que de fournir le soutien nécessaire dans les domaines politique, législatif et budgétaire. 

Une dimension importante à cet égard est la réforme judiciaire, a estimé la représentante, en soulignant l’importance pour le Parlement d’adopter à la fois le code pénal et le code de procédure pénale.  En outre, a affirmé Mme Romeo-Marlin, la Police nationale haïtienne doit améliorer sa capacité à répondre aux menaces qui pèsent sur le pays, comme les flambées de violences qui ont été constatées en juillet dernier.  Elle a en conclusion plaidé pour un retrait responsable de la MINUJUSTH, fondé sur une évaluation claire de la situation sur le terrain. 

Mme ANNE GUEGUEN (France)a considéré que la MINUJUSTH continue de mener « un travail remarquable de soutien aux autorités haïtiennes, dans un pays où la situation reste fragile et où les enjeux sont considérables ».  Saluant le soutien apporté par la Mission à la police nationale, elle a appelé les autorités haïtiennes à « se saisir pleinement de la gestion des troubles à l’ordre public » et à « éviter toute politisation » de la police. 

Mme Gueguen a ensuite engagé Haïti à poursuivre toutes les pistes d’amélioration du système judiciaire lancées par la MINUJUSTH, notamment les questions liées à l’efficacité de la chaîne pénale et aux conditions de détention en milieu carcéral.  « Il est à ce titre crucial de renforcer la confiance des Haïtiens dans la capacité et la volonté du système judiciaire à lutter contre la criminalité. »

Enfin, a poursuivi la représentante, il est essentiel de poursuivre les efforts en matière de droits de l’homme, notamment le renforcement du bureau du médiateur et la désignation d’un point de contact de haut niveau au sein du Gouvernement.  Des mécanismes de justice transitionnelle doivent également être mis en place pour faire la lumière sur les violations massives des droits de l’homme commises par le passé.  Sur ce sujet comme sur les autres, la France attend des autorités haïtiennes qu’elles redoublent d’efforts dans la perspective de la période de transition et de la fin de la MINUJUSTH. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est dit préoccupé par les manifestations violentes survenues en Haïti au mois de juillet dernier, suite à l’augmentation du prix des combustibles.  Les manifestations, a-t-il insisté, doivent avant tout respecter l’ordre politique du pays.  Dans ce contexte difficile, le représentant a félicité le Président Jovenel Moïse pour le courage dont il a fait preuve en décidant d’éliminer les subventions aux combustibles.  Il a également salué l’adoption par le Parlement haïtien d’un ensemble de projets de loi importants visant à améliorer le sort des personnes handicapées dans le pays et à les intégrer davantage à la société haïtienne, signe selon lui, de la volonté politique de faire profiter du développement à toutes les couches sociales. 

Par ailleurs, le représentant a salué les efforts continus des Nations Unies en vue d’éradiquer le choléra en Haïti.  Il s’est ainsi félicité de la tendance à la baisse de l’épidémie, qui semble se poursuivre cette année.  En conclusion, le représentant a invité toutes les institutions politiques haïtiennes, ainsi que la société civile, à aider le Président Moïse à entreprendre les réformes nécessaires pour promouvoir l’état de droit, les droits de l’homme, la bonne gouvernance, l’autorité de l’État et le renforcement de la justice du pays.

À la suite de la prorogation d’un an par le Conseil de sécurité du mandat de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), en avril dernier, M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a félicité la Mission pour avoir entrepris un grand nombre de projets et d’initiatives visant à soutenir l’état de droit, renforcer la Police nationale haïtienne et protéger les droits de l’homme dans le pays.  Le représentant a également félicité le Président Jovenel Moïse et son Gouvernement pour leurs actions en faveur de la stabilité, de la sécurité, du développement économique et du changement social haïtien.  Dans ce cadre, il a jugé légitime les appels des autorités du pays à aligner davantage l’aide internationale au développement avec les priorités nationales.

Tout en reconnaissant l’ampleur des progrès réalisés pour stabiliser le contexte politique et sécuritaire en Haïti, le représentant a toutefois souligné qu’un grand nombre de défis attendaient le Gouvernement du pays, à commencer par la lutte contre le choléra, la surpopulation carcérale et la corruption.  Il a également mis l’accent sur la nécessité de stabiliser la situation économique et financière du pays, lutter contre l’insécurité alimentaire et sécuriser la situation humanitaire.  À ses yeux, les évènements violents de juillet démontrent en outre la nécessiter de disposer d’institutions politiques fortes.  Il a appelé l’ONU et les organisations régionales à travailler de concert en faveur d’une approche intégrée et unie pour parvenir à une transition réussie dans le pays.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué la nomination de la nouvelle Représentante spéciale, Mme Helen La Lime, avant de noter la précarité de la situation en Haïti, comme l’a montré la vague de violence de juillet dernier.  Il s’est félicité de la nomination du nouveau Premier Ministre et a appelé à la ratification des projets de code de procédure pénale et de code pénal.  Il a dénoncé les activités de gangs criminels et souligné l’importance de l’appui de la Mission à la Police nationale.  Il s’est dit préoccupé néanmoins par les allégations de violations perpétrées par ladite Police et a insisté sur les défis rencontrés par l’administration pénitentiaire.  Enfin, le délégué péruvien a appuyé les efforts du Gouvernement en vue de l’instauration d’une paix pérenne.

M. IPO (Côte d’Ivoire) s’est déclaré préoccupé de la situation politique en Haïti, estimant que la priorité devrait être donnée au renforcement de la collaboration entre l’exécutif et le parlement; à la lutte contre la corruption; à la réforme des textes régissant les partis politiques; à la nécessité pour le Gouvernement, les différentes formations politiques et la société civile de surmonter leurs divergences; et à l’adoption d’un pacte de gouvernance ou de stabilité qui devrait découler du dialogue sectoriel national. 

Sur le plan économique, la délégation ivoirienne a exhorté les autorités haïtiennes à prendre les mesures visant à créer un climat de confiance entre les populations et les institutions nécessaires à la réalisation des objectifs de développement durable.  Enfin, au titre de la stratégie de sortie de crise, sa délégation a salué les actions menées par le Gouvernement avec l’appui de la MINUJUSTH, y compris les mesures d’atténuation prises pour accompagner le retrait de la Mission, prévenir le vide sécuritaire et assurer une transition harmonieuse dans les départements concernés.  « Le succès de la stratégie de retrait de la MINUJUSTH passe inévitablement par une étroite collaboration et une harmonisation des priorités entre les différentes parties prenantes pour édifier et consolider les institutions publiques haïtiennes », a déclaré M. Adom.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a déploré les évènements violents du mois de juillet, qui illustrent selon elle le lien entre développement économique et stabilité.  Aux vues de ces manifestations violentes, la représentante a jugé primordial qu’Haïti œuvre en faveur du consensus politique afin de relancer son développement économique et de faire en sorte que les couches les plus défavorisées de sa population ne souffrent pas des réformes et profitent également du développement.

Tout en rappelant que l’aide internationale au Gouvernement haïtien devait intervenir dans le respect de la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays, la représentante a félicité les Nations Unies pour leur approche coordonnée afin de renforcer la capacité de l’État haïtien à faire face aux catastrophes naturelles.  Elle a appelé l’ONU et la communauté internationale à continuer de soutenir financièrement le pays en la matière.  La représentante a aussi salué les progrès réalisés dans la lutte contre le choléra, grâce à la nouvelle approche définie par le Secrétaire général.  Elle a toutefois appelé la communauté internationale à honorer ses engagements pour créer des systèmes robustes d’assainissement des eaux dans le pays.

Enfin, Mme Cordova Soria a appelé la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) à respecter son mandat de consolidation de l’état de droit, de réduction des violences communautaires, de renforcement de la justice et de stabilisation de la sécurité, tout en luttant contre les violences sexuelles, selon la politique de tolérance zéro définie par le Secrétaire général.  Sur ce dernier point, elle s’est dite préoccupée par les enfants sans pères suite aux cas d’abus sexuels commis par des membres de la Mission. 

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a salué les progrès accomplis de la Mission dans le cadre de sa stratégie de retrait d’ici deux ans.  « Il est clair que la situation en Haïti demeure très fragile comme l’a montré la violence de juillet. » Il a encouragé le Secrétariat à suivre de très près l’évolution de la situation sécuritaire dans les 12 prochains mois. 

S’agissant des indicateurs de la transition, il a déploré la lenteur des progrès accomplis pour les atteindre, le nombre d’officiers de police ayant notamment baissé depuis un an.  « Cela est alarmant, compte tenu de la centralité de cet indicateur. » Enfin, le délégué a encouragé le Secrétariat à se montrer réaliste s’agissant du partage des responsabilités et à combler les lacunes capacitaires de l’équipe de pays, laquelle joue un rôle crucial pour mener à bien la transition précitée. 

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a estimé que les évènements violents du mois de juillet démontraient que les sources de l’instabilité dans pays étaient toujours présentes, signe que la communauté internationale devait continuer d’accompagner Haïti dans sa transition.  Il a espéré que la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) sera en mesure d’œuvrer en faveur de l’état de droit et du renforcement de la police nationale du pays.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a déclaré que la vague de violence qui a touché le pays il y a deux mois illustre la volatilité de la situation actuelle en Haïti.  Elle a exhorté les parties à ne pas recourir à la force pour atteindre leurs objectifs politiques, à promouvoir l’état de droit et à trouver des solutions consensuelles aux défis du pays.  Elle a jugé remarquable l’amélioration des capacités de la Police nationale haïtienne.  « Beaucoup reste encore à faire pour assurer le passage sans heurts et efficace à une présence des Nations Unies en Haïti autre qu’une opération de maintien de la paix d’ici l’année prochaine. » Enfin, la déléguée a mis en garde contre une limitation excessive ou trop précoce de la présence de l’ONU dans le pays, compte tenu de la fragilité de la situation actuelle. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) s’est félicité du bon alignement des priorités définies par le Président Jovenel Moïse et du mandat de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), notamment dans les domaines de la défense de l’état de droit, du respect des droits de l’homme, ainsi que de l’amélioration de l’économie, des infrastructures, de la résilience et de la sécurité du pays.  « Nous espérons constater des résultats très prochainement », a-t-il déclaré, mentionnant notamment l’adoption d’un nouveau code pénal et d’un code de procédure pénale.

Selon lui, le cadre de référence défini par le Secrétaire général dans son rapport facilitera ces efforts en faisant le lien entre les progrès réalisés dans des domaines clefs du mandat de la MINUJUSTH et d’autres préconditions essentielles à la stabilité du pays, dont le développement socioéconomique et la lutte contre la corruption.  Cette Mission, a poursuivi le représentant, est l’une des premières à réaliser la transition entre le maintien traditionnel de la paix et la consolidation de la paix.  Une transition réussie serait non seulement importante pour Haïti, mais aussi pour le système des Nations Unies dans son ensemble, afin de démontrer sa capacité à stabiliser un pays à la suite d’un conflit interne.

Enfin, le représentant d’est déclaré inquiet face aux conclusions du rapport du Secrétaire général, selon lesquelles la capacité de la Mission et de l’équipe de pays des Nations Unies en Haïti à travailler sur les questions de genre était limitée. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé la vague de violence qui a touché le pays il y a deux mois à la suite de la suppression des subventions aux produits pétroliers.  Il a salué la nomination du nouveau Premier Ministre, avant de noter la diminution du taux de criminalité.  Mais les autorités devraient pleinement utiliser les capacités de la MINUJUSTH, a-t-il déclaré.  Le délégué a ensuite noté la fragilité de la situation actuelle et plaidé pour une coopération renforcée entre acteurs haïtiens, l’ONU et bailleurs de fonds, afin que le pays referme ce chapitre critique de son histoire.  Enfin, il a indiqué que la nouvelle stratégie onusienne de lutte contre l’épidémie de choléra a permis de diminuer le nombre de nouveaux cas. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a mis en garde contre la situation sécuritaire fragile du pays, comme en témoignent selon lui les manifestations violentes qui ont eu lieu en juillet dernier, les dissensions entre le pouvoir législatif et exécutif, la démission récente du Premier Ministre Lafontant et le gel des travaux du Parlement.  Ces difficultés interviennent alors même que la situation humanitaire du pays demeure critique, notamment parce que le plan humanitaire haïtien n’est financé qu’à hauteur de 10%, a-t-il poursuivi, une situation qui n’aidera pas, selon lui, à préparer la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) à une transition réussie.  À tout cela s’ajoute le regain d’activités des bandes criminelles à travers le pays, a déploré le représentant, pour qui seule une action concertée des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire permettra de relever ces différents défis. 

Dans ce cadre, le délégué a estimé que l’ONU avait encore beaucoup à faire pour consolider la stabilité en Haïti.  Il a par conséquent assuré le pays du soutien de la Fédération de Russie pour parvenir, à terme, à l’autosuffisance haïtienne.  Enfin, le représentant a regretté que le dernier rapport du Secrétaire général ne comporte aucune information concernant les atteintes et abus sexuels commis en Haïti par des représentants d’organisations non gouvernementales accréditées par l’ONU. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a indiqué que la vague de violence qui a touché le pays il y a deux mois atteste de la précarité de la situation.  Elle a encouragé le Gouvernement à œuvrer pour renforcer la confiance des Haïtiens dans leurs institutions.  La prospérité et la stabilité futures du pays dépendent du renforcement de l’état de droit et de l’amélioration des conditions socioéconomiques, a-t-elle dit.

La déléguée a salué la nomination du nouveau Premier Ministre, avant de noter que beaucoup reste encore à faire pour assurer le passage à une présence des Nations Unies en Haïti autre qu’une opération de maintien de la paix.  Les efforts à cette fin doivent être renforcés, a-t-elle conclu, en se félicitant de la nomination de Mme Helen La Lime en tant que nouvelle Chef de la MINUJUSTH. 

Rappelant les manifestations violentes de juillet dernier en Haïti, M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a salué la réaction des autorités du pays, qui a permis selon lui de faire en sorte que la situation ne dégénère pas, notamment dans la capitale.  « Il faut préserver les acquis », a ensuite martelé le représentant, selon lui en œuvrant davantage à la lutte contre la corruption, au renforcement de la justice, à la lutte contre l’impunité, au respect de l’état de droit, au développement économique et à la professionnalisation de la police, qui doit demeurer « apolitique ». 

Enfin, a ajouté le représentant, il convient de continuer à promouvoir les droits de l’homme, notamment en luttant contre les violences sexuelles.  Dans ce sens, il s’est félicité de l’annonce par le Procureur du pays de son intention d’ouvrir une enquête sur les exactions commises par les forces de police à l’encontre de la population civile.

M. DENIS RÉGIS (Haïti) a reconnu que les « craintes de déstabilisation » suscitées par les troubles survenus du 6 au 8 juillet sont le résultat d’une « frustration publique » face aux difficultés socioéconomiques rencontrées par le pays.  Il a cependant estimé que la crise a été surmontée et que les institutions publiques ont démontré leur maturité.  Il s’est félicité à cet égard du soutien de la communauté internationale et du Conseil de sécurité.  Après les événements de juillet, le Président Jovenel Moise a désigné, au terme de consultations nationales, un nouveau Premier ministre chargé de former un gouvernement d’union nationale bénéficiant de la légitimité requise pour s’attaquer aux problèmes les plus urgents et poursuivre les réformes, a expliqué le représentant.  Il a précisé que le nouveau gouvernement aura pour priorités l’organisation d’élections prévues en octobre 2019 et l’intensification de la lutte contre la corruption.  Il a accueilli avec « intérêt » l’invitation lancée par le Secrétaire générale aux acteurs politiques à œuvrer ensemble pour le bien commun et à favoriser l’adoption de mesures susceptibles de répondre aux besoins immédiats du peuple haïtien, conditions essentielles au maintien de la stabilité politique. 

Malgré les retards dans l’atteinte de certains objectifs et la faiblesse des ressources disponibles, M. Régis a déclaré qu’Haïti continue de mener des efforts « soutenus » en faveur du renforcement de l’état de droit, du système de justice et de la promotion des droits de l’homme.  Parmi les indicateurs de ces progrès, il a cité la nomination d’un protecteur du citoyen, le renforcement du Bureau de droits de l’homme, la baisse de la criminalité, l’adoption d’un nouveau code pénal et d’un code de procédure criminelle, ainsi que l’augmentation du nombre de femmes au sein de la police.  Malgré les difficultés, il a réitéré l’engagement des autorités haïtiennes à assurer une transition sans heurt de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) vers une présence des Nations Unies qui ne soit plus axée sur le maintien de la paix.  Pour lui, « l’onde de choc » de la crise de juillet ne remet pas en cause les réformes structurelles entreprises et les « conquêtes démocratiques » du peuple haïtien.  Il a souhaité en terminant pouvoir compter sur l’appui des Nations Unies pour la mise en place d’un « nouveau pacte de coopération » mieux adapté aux besoins d’Haïti, dans le cadre d’une « authentique stratégie de pérennisation de la paix ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Biodiversité marine en haute mer: au deuxième jour de la session, les délégations appellent à élaborer un projet de traité « universel »

Première session,
8e & 9e séances plénières - matin & après-midi
MER/2077

Biodiversité marine en haute mer: au deuxième jour de la session, les délégations appellent à élaborer un projet de traité « universel »

« Un océan, une planète, un traité », c’est ainsi que la représentante de l’Alliance de la haute mer a résumé l’enjeu de la Conférence qui a ouvert ses portes hier pour entamer les travaux sur un futur traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer.  Les 193 États Membres sont chargés de définir les contours d’un texte qui doit être utile à tous les pays et s’intégrer à l’ordre juridique existant, qui comprend notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et la Convention sur la diversité biologique.

Sur les quatre grands thèmes qui seront abordés au cours des deux semaines de session, c’est la question « renforcement des capacités et transfert de technologies marines » qui a été traitée en premier, cet après-midi, par un groupe de travail ad hoc.  Celui-ci a, comme les trois autres groupes, « un jour et quart » pour discuter et produire des résultats.

Auparavant, les États Membres et les autres participants –organisations internationales et organisations non gouvernementales– ont achevé le débat général commencé hier, l’occasion pour les délégations de confirmer leurs attentes tout en exprimant, pour certaines, des doutes sur l’ambition de la Conférence qui a prévu d’accoucher d’un avant-projet de texte début 2020.

« Ce sera un long voyage », a prédit le représentant du Nigéria, cependant convaincu que les quatre sessions prévues pour la Conférence permettront d’arriver « à bon port ».

Véritable « patrimoine commun de l’humanité », selon les termes de certains intervenants, la biodiversité marine des « zones ne relevant pas de la juridiction nationale », c’est-à-dire les zones de haute mer, sera aussi examinée par trois autres groupes de travail devant plancher sur les thèmes suivants: « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées »; « évaluation de l’impact sur l’environnement »; et « accès et partage des ressources génétiques marines ».

L’idée d’une convention dans le domaine de la biodiversité marine en haute mer est venue de la nécessité de coopérer, sur le plan international, pour garantir la « conservation » et « l’utilisation durable » des ressources dont regorgent ces zones.

Tout d’abord, la conservation.  Pour l’Érythrée, il n’est pas envisageable de laisser les choses en l’état actuel: « tout retard dans l’accord alourdit la menace d’une catastrophe écologique ».  Cet État Membre a expliqué que, du fait de leur interdépendance, les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales sont tout aussi importantes à protéger pour les économies nationales que leurs propres zones marines.

Puis, l’utilisation durable.  Le Royaume des Tonga, petit État insulaire en développement, a relevé l’importance d’utiliser ces ressources marines de manière durable, pour le bien de toute l’humanité, et pour les générations présentes et futures.  Il a insisté sur « l’intérêt commun » à gérer au mieux cet « héritage », tandis que le Honduras a parlé de « responsabilité collective en ce qui concerne la gestion des ressources marines ».

« Un océan propre, sûr et productif », c’est ce qu’ont plaidé les États-Unis en recommandant d’élaborer un instrument qui soit « au service de tous » et « en conformité avec le régime actuel, sans saper ni chevaucher d’autres instances et d’autres mandats », en particulier le régime du droit à la propriété intellectuelle. 

Cet appel à respecter rigoureusement le droit international pertinent, en premier lieu la Convention sur le droit de la mer, dite de Montego Bay, a été lancé à maintes reprises, notamment par l’Inde, la Tanzanie ou encore l’Autorité internationale des fonds marins. 

Le Sri Lanka a, en même temps, rappelé que l’élaboration de ladite Convention avait donné lieu à de nombreux blocages qui risquent de se répéter.  La Turquie, d’ailleurs, n’est pas partie à la Convention et estime qu’il ne s’agit pas d’un instrument universel, ni unificateur, ce qui a fait dire à sa représentante qu’il fallait, cette fois, un instrument véritablement universel.  Un souhait exprimé aussi par la Colombie.

Pour que le traité réponde aux préoccupations de tous les pays, il faut se demander « comment l’instrument devrait-il reconnaître les besoins particuliers des pays en développement, notamment les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral, les pays géographiquement désavantagés et les petits États insulaires en développement, ainsi que des États côtiers d’Afrique? »  C’est une des questions examinées dans l’après-midi par le groupe de travail informel sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines.

Nauru, qui s’exprimait au nom du groupe des petits États insulaires en développement du Pacifique, a plaidé vigoureusement pour la reconnaissance du cas particulier de ces pays.  La représentante a suggéré que les besoins spécifiques des pays en développement soient mentionnés dans le futur texte.

Autre proposition concrète formulée le matin: l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) recommande la création d’un organe scientifique et technique à l’échelle mondiale afin d’évaluer, de manière indépendante, les océans et apporter des conseils sur leur protection.

Soucieux, quant à lui, de la protection contre la pollution acoustique, le représentant de l’organisation non gouvernementale « Ocean Care » a averti que le son se propage quatre fois plus rapidement dans l’eau que dans les airs, et que ces ondes ont un impact sur de nombreuses espèces marines.

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux demain, jeudi 6 septembre, à partir de 10 heures.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Déclarations

Le représentant de l’Indonésie a réclamé « une approche constructive » pour les zones de haute mer ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il s'est félicité des « bases solides » mises en place par la Présidente de la Conférence pour élaborer un avant-projet de texte.  Il a rappelé que toutes les zones marines, nationales ou non, étaient interdépendantes.  Il a dit espérer que la communauté internationale trouve « un juste milieu » entre les différentes approches.

M. ANTONIO GUMENDE (Mozambique) a dit attacher la plus haute importance à la mise en place d’un instrument juridique international contraignant.  Il a qualifié le moment de « jalon », et réclamé « un consensus » pour établir un cadre « robuste ».  Il s’est dit particulièrement préoccupé par le sort du canal du Mozambique, qui est à la fois une zone de biodiversité abondante et une route importante de navigation.

Pour le représentant du Mexique, le succès dépend de la manière dont les États Membres travailleront ensemble.  Son représentant espère que l’esprit actuel perdurera lors des « étapes critiques » à venir.  Au Mexique, pays qui dispose de 11 000 km de côtes, la conservation et la diversité jouent un rôle important, a indiqué le représentant qui espère arriver rapidement à des négociations.  Il a souhaité que le nouvel instrument ne sape pas les normes déjà mises en place par le passé.  Il s’est dit particulièrement préoccupé de la présence invasive des micro plastiques dans les océans.  Le droit de la mer relève de la responsabilité collective, a plaidé le représentant en soulignant l’importance de la réglementation des zones hors juridiction nationale qui représentent 63% des surfaces d’eau marine.  « Nous nous devons d’être à la hauteur », a-t-il dit.

La représentante de la Colombie a fait remarquer qu’il est temps d’élaborer cet instrument après toutes ces années de préparation.  « Il faut que ce texte soit à la fois ouvert aux parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et aux États qui ne le sont pas », a-t-elle plaidé.  Elle a expliqué que ce nouvel instrument se doit d’être universel et d’apporter une réponse aux défis multiples des océans, tout en gardant un lien avec les accords multilatéraux existants.  Elle a rappelé que ce texte doit prévoir une répartition équitable de l’exploitation des richesses de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

Le représentant du Honduras a souhaité que le consensus soit de mise, car il faut parvenir à « un instrument contraignant qui rappelle notre responsabilité collective en ce qui concerne la gestion des ressources marines ».  Ce document doit aussi tenir compte de l’expérience d’autres entités internationales et des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-il recommandé.  Le Honduras a aussi réaffirmé l’importance d’examiner les quatre thématiques de fond fixées en 2011 et a plaidé pour un travail constructif pour arriver à un instrument qui bénéficie aux générations présentes et futures.

M. V. VA’INGA TONE (Tonga) a présenté son pays comme étant un petit État insulaire en développement (PEID) qui est en même temps un « large État océanique en développement ».  Il a rappelé que « nous sommes tous des gardiens de cette planète à part entière » que sont les océans, d’où découle la responsabilité collective de la protéger, la préserver et d’utiliser ses ressources de manière durable, pour le bien de toute l’humanité, et pour les générations présentes et futures.  Il a souligné l’intérêt commun et la préoccupation commune dans la gestion de cet héritage.  M. Tone a ensuite dit espérer que le « projet zéro » du futur instrument capturera les aspirations et intérêts collectifs de manière équilibrée.  Cela permettra, a-t-il assuré, de parvenir à un instrument qui soit universel, inclusif, avant-gardiste et pratique.

Le représentant des États-Unis a dit œuvrer en faveur d’un océan « propre », « sûr » et « productif », ce qui est « essentiel si nous voulons soutenir l’économie bleue ».  Il a souhaité que le nouvel instrument se mette au service de tous, en conformité avec le régime actuel, sans saper ni chevaucher d’autres instances et d’autres mandats.  La grande question est de « comment faire » cela de façon authentique sans saper les cadres existants, a-t-il avancé, se disant circonspect quant à la possibilité de régler la question du partage des bénéfices.  « Le régime du droit à la propriété intellectuelle ne doit pas être sapé », a-t-il prévenu.

Le représentant de l’Inde a dit vouloir un régime juridique immédiat, pour aider non seulement « la conservation mais aussi le développement scientifique » en ce qui concerne la biodiversité marine en haute mer.  Il a en outre souhaité que les travaux soient menés « en conformité avec le droit de la mer existant ».

La représentante de la Turquie a salué la qualité du document de base devant guider les discussions et que la Présidente a bien voulu transmettre aux délégations.  Même si la Turquie est engagée dans des pourparlers, le pays précise que cela ne change en rien sa position en ce qui concerne la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  La Turquie n’est pas partie à la Convention et estime qu’il ne s’agit pas d’un instrument universel.  Il n’a pas un caractère unificateur et ne représente pas un cadre légal régissant les activités sur les mers et océans, a-t-elle ajouté.  La déléguée a terminé en souhaitant que le nouvel instrument en préparation soit véritablement universel.

La représentante de la République unie de Tanzanie a souligné qu’il faut s’assurer que le nouvel instrument tienne dûment compte des transferts de technologies et des besoins spécifiques des États africains.  Ce nouveau document doit également tenir compte des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Elle a conclu en notant que la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale fait partie du patrimoine commun de l’humanité.

M.SAMSON S. ITEGBOJE (Nigéria), espérant « arriver à bon port » en matière de droit de la mer, s’est référé à la résolution 72/749 (2017), première pierre, selon lui, pour construire la route menant à un nouveau traité.  « C’est un long voyage », a-t-il constaté, cependant convaincu que les quatre prochaines sessions permettront d’arriver à bon port.  « Notre région est confrontée à de nombreux défis.  La situation s’aggrave à cause d’un manque de capacités humaines et matérielles. »  Le Nigéria espère que des mesures seront prises pour diminuer les pratiques non durables ayant des conséquences négatives sur les habitants du Nigéria les plus vulnérables.

Pour le représentant de l’Érythrée, « le statu quo n’est pas une option; tout retard dans l’accord alourdit la menace d’une catastrophe écologique ».  Du fait de leur interdépendance, les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales, la haute mer, sont des zones tout aussi importantes à protéger pour les économies nationales que leurs propres zones, a-t-il argué.  Il est aussi essentiel, selon lui, que les habitants de pays en voie de développement disposant de côtes soient impliqués dans le processus.  S’agissant du partage des bénéfices et des ressources génétiques marines, le représentant souhaite savoir « quelles sont au juste ces ressources, puisque les pays en voie de développement n’étudient pas ce genre de choses ».  Il faut permettre à ces pays de participer aux recherches, a-t-il insisté, et répartir équitablement des bénéfices glanés dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales.

Mme ELIZABETH VILLALTA (El Salvador) a déclaré qu’il est essentiel de garder à l’esprit que nous parlons du « patrimoine commun de l’humanité » quand on fait référence à la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Elle a remercié les donateurs ayant contribué au fonds d’affectation spéciale qui a permis de faciliter la participation de certaines délégations de pays en développement à cette session de fond.

Le représentant du Japon a salué le potentiel génétique de la biodiversité marine, vantant notamment ses bienfaits pour la pharmacopée.  Pour le Japon, il ne fait pas l’ombre d’un doute que ces bénéfices doivent être partagés entre tous.  Néanmoins, il a rappelé que la collecte de données et les recherches marines exigent d’énormes sacrifices en temps et en argent, et parfois sans succès à la clef.  Le délégué a donc averti que le principe du partage des bénéfices pourrait « décourager les investissements dans la recherche marine ».  

Le Japon a créé plusieurs aires marines protégées et plaide pour de meilleures techniques scientifiques pour leur préservation.  Le pays insiste sur le fait que de nouvelles techniques qui pourraient résulter des discussions actuelles ne doivent pas forcément se substituer à celles déjà existantes.  Il faut donc tenir compte de l’expérience accumulée par les organismes déjà à pied d’œuvre.  De même, sur la question des études d’impact environnemental, le Japon souhaite que des zones ayant déjà fait l’objet de ces études ne soient pas obligées d’en subir de nouvelles après l’adoption éventuelle de nouveaux cadres. 

Le représentant du Soudan a déclaré, au sujet des zones marines ne relevant pas des juridictions nationales, que l’élaboration d’un instrument international contraignant revêtait la plus haute importance, mais qu’il fallait étendre sans changer les cadres juridiques élaborés par les précédentes conventions relatives au droit de la mer.  « Nous devons travailler en conformité avec le droit international », et « être guidés par le principe de liberté en haute mer », a-t-il dit tout en évoquant sans hésiter la question du partage des ressources.  « Comment prendre en compte les pays en développement et les pays les moins avancés des côtes africaines », est une des nombreuses questions auxquelles la Conférence devra répondre, mais le représentant est convaincu que « les meilleures solutions seront trouvées pour l’humanité ».

Le représentant du Cameroun s’est félicité des progrès réalisés au cours des 10 dernières années dans le processus qui vise à mettre en place un instrument contraignant.  Il est important de capitaliser sur les acquis, selon lui, et de permettre aux milieux marins de subsister pour les générations futures.  La protection des zones marines protégées, les ressources marines génétiques, la biodiversité marine, tout cela revêt un caractère historique selon le représentant, mais il reste encore à définir des modalités et obtenir un consensus.

Le représentant du Sri Lanka a rappelé que son pays dépend des ressources marines du fait de son statut d’« État marin ».  Le Sri Lanka souligne que les ressources génétiques marines sont un sujet très souvent oublié.  Il faut donc renforcer les capacités des pays en développement pour faciliter leur accès et leur gestion de ces ressources.  Il a recommandé pour cela d’établir un mécanisme pratique de transfert de technologies permettant aux pays en développement d’en tirer des bénéfices tangibles.  Dans ce contexte de préparation du nouvel instrument, le Sri Lanka rappelle que l’élaboration de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer avait donné lieu à de nombreux blocages.  Il faut donc garder cette réalité à l’esprit afin d’éviter les mêmes écueils.

Le délégué de la Guinée a souligné que l’histoire s’écrit au présent et se raconte au passé.  « Il faut donc que l’histoire de cet instrument en cours de rédaction procure fierté à nos enfants et nos petits-enfants demain », a-t-il souhaité.  Il a rappelé que nous avons en commun cette biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il a plaidé pour qu’il n’y ait plus de « maillons faibles » en s’assurant que les pays en développement bénéficient des transferts de technologies pour renforcer leurs capacités de gestion des ressources marines.

La représentante de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a indiqué que son organisation avait rassemblé un ensemble d’informations et d’idées qui peut servir d’outil ou de « matrice d’options » pour le nouvel instrument en cours d’élaboration.  L’UICN note qu’en facilitant l’accès des pays en développement à la recherche génétique marine, la science dans ces pays et dans les nations développées sera gagnante et connaîtra des avancées.  La création d’un réseau intégré d’aires marines protégées peut favoriser la connectivité entre elles, tout en renforçant leur résilience face aux changements climatiques, a aussi argué la déléguée.  Elle a en outre souligné que les impacts cumulés de divers types d’activités constituent une menace pour la biodiversité marine.  Et cette menace ne peut être résolue de manière sectorielle.  C’est pourquoi l’UICN propose la mise sur pied d’un organe scientifique et technique à l’échelle mondiale qui serait chargé d’évaluer les océans de manière indépendante et d’apporter des conseils sur leur protection.

Le représentant de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a rappelé qu’une grande partie de la population mondiale dépend des fonds marins pour sa subsistance, et que 30% des stocks de poissons sont péchés de manière non durable.  Pour éviter la surpêche, la FAO a pris de nombreuses initiatives en collaboration avec ses partenaires: elle agit pour protéger l’agriculture et la pêcherie.  La bonne gestion des pêcheries en haute mer est souvent faite par les organisations compétentes, a-t-il rappelé.  Il a rappelé que les droits et obligations des nations participantes à la pêche en haute mer sont en vigueur depuis une trentaine d’années, et que le cadre est solide, mais qu’il était important de renforcer les synergies.  Il faut, selon lui, s’attaquer à la pêche non réglementée et illégale.

Le représentant de l’Organisation maritime internationale (OMI), dont la raison d’être est de réguler la pollution de tous les navires du monde, a rappelé que tous les États Membres sont assujettis aux mêmes principes, et que par conséquent, l’OMI permet d’assurer une situation sur pied d’égalité pour tous les navires.  Il s’est brièvement félicité « que l’accord se construise ».

M. ALFONSO ASCENCIO-HERRERA, représentant l’Autorité internationale des fonds marins, a insisté sur « une approche holistique » de la protection des fonds marins.  Il s’agit de les considérer comme un tout, a-t-il expliqué: « il est important de ne pas fragmenter encore davantage le droit de la mer ni d’agir de manière non conforme avec une approche holistique ».  D’autre part, la Convention sur le droit de la mer établit un système permettant de réglementer l’accès aux ressources minérales des grands fonds pour prendre en considération les intérêts de pays moins bien lotis, comme les pays les moins avancés et les États côtiers africains, a-t-il souligné.  Elle prévoit aussi la protection de la faune et de la flore des grands fonds.  En conséquence, prévient le représentant, le droit de la mer existant ne doit pas être sapé.

Le Président de la Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a émis le vœu de voir adopter, à la fin des quatre sessions de fond, un instrument juridiquement contraignant qui sera appuyé par tous les États.  Il a insisté sur le renforcement des données scientifiques concernant les océans, une mission à laquelle s’attelle son organisme.  Il a expliqué que ce sont des données sûres qui peuvent conduire à des prises de décisions éclairées sur les océans.

La COI plaide également pour le transfert des connaissances et capacités vers des régions peu développées.  La COI a parmi ses projets immédiats la poursuite de la cartographie en trois dimensions des fonds marins.  Son Président a expliqué que le renforcement des données scientifiques concernant les océans facilitera la réalisation des cibles relatives aux océans du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Le représentant du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a insisté sur l’importance des données et des études scientifiques.  Il a parlé de projets en ce sens, notamment en ce qui concerne la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il s’est ensuite félicité de deux projets menés par le PNUE sur le renforcement de capacités en Afrique dans le cadre de la préservation des ressources marines, projets qui bénéficient de l’appui d’autres partenaires.

Le représentant de la Commission des pêches de l’Atlantique Nord-Est (CPANE) a expliqué que cette organisation régionale avait mis en œuvre des programmes de pêche responsable, préservant par exemple certaines espèces de requins par la désignation de zones comme « non ouvertes aux activités de pêche ».  Il a souhaité que le nouvel instrument en cours d’élaboration ne sape pas les intérêts des organisations de pêche et viennent davantage renforcer leur mandat.

La représentante du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique a annoncé les résultats de ses travaux.  Depuis l’avènement de la Convention, a-t-elle indiqué, une approche systémique a été privilégiée.  Douze principes ont été établis, allant de la pollution marine à la pollution sonore.  Les processus entamés en 2011 et les informations constamment mises à jour sont précieuses pour les différents acteurs, a-t-elle souligné.

Lors de la prochaine réunion de la Conférence des Parties à la Convention, qui se tiendra en Égypte en novembre 2018, il sera question de mettre à jour les descriptions existantes, en se basant sur les meilleures données scientifiques.  Les zones côtières et les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales ont été examinées sans préjugés, et la coopération transrégionale encouragée.  L’expérience du protocole de Nagoya pourrait éclairer les délibérations dans le cadre du partage des ressources génétiques marines dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales, a-t-elle indiqué.

La représentante du Secrétariat de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage a dit que beaucoup de ces espèces (tortues, requins...) sont représentées dans la Convention et lient des pays, des cultures différentes, et évoluent même parfois dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales.  Toutes les parties reconnaissent qu’aucun pays ne peut à lui seul gérer de manière unilatérale ces problèmes.  « Il faut un réseau cohérent », et un habitat bien géré ou restauré, a-t-elle indiqué.  La représentante a rappelé que la connectivité est essentielle pour la mise en place de zones aquatiques protégées conformément au droit international.  Le besoin d’outils de gestion par zones dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales est patent, a-t-elle soutenu.  Le traité futur, a-t-elle assuré, devra compléter le cadre déjà mis en place concernant les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales.

La représentante de l’International Coastal and Ocean Organization (ICO) a annoncé qu’elle organisait un événement parallèle demain, le 6 septembre, avec les délégations de la France, la Barbade, l’UNESCO et la Fondation pour la paix Sasakawa.  Concernant les outils de gestion par zones, elle a averti qu’il fallait développer plus avant les capacités de chaque société et les cadres juridiques et politiques pour appuyer ce nouvel instrument.  Le défi n’est pas d’adopter de nouvelles lois pour les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales mais de renforcer les capacités et les techniques marines, a-t-elle relevé.

Mme HIROKO MURAKI GOTTLIEB, du Conseil international du droit de l’environnement (CIDE), a estimé que l’état de droit est un facilitateur pour réaliser des objectifs ambitieux, y compris dans le domaine de la préservation de l’environnement où le droit de l’environnement aide les hommes à respecter les lois de la nature.  C’est donc par le biais de l’état de droit que nous pouvons coexister sur notre planète interconnectée, a-t-elle relevé avant d’inviter les délégations à ne plus penser en silos et à travailler de manière collaborative pour trouver des solutions aux problèmes liés à la dégradation des océans.

La représentante de l’Alliance de la haute mer a dit que « nous avons dû traverser des eaux turbulentes avant d’arriver à cette étape d’élaboration de cet instrument » sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Elle a rappelé que la plus grave menace qui pèse sur les océans est l’échec même de faire face aux défis auxquels sont confrontés les océans.  Elle a plaidé pour que les négociations sur l’instrument soient véritablement ouvertes à tous.  « Un océan, une planète, un traité », a-t-elle souhaité en concluant.

La représentante de l’organisation non gouvernementale « Ocean Care » a insisté pour que la question de la pollution acoustique dans les grands fonds marins soit intégrée dans le futur instrument.  Elle a dénoncé les sons émis dans les océans par les hommes, lesquels ont un impact néfaste sur le long terme.  Il faut donc que les activités humaines tiennent compte du fait que le son se propage quatre fois plus rapidement dans l’eau que dans les airs, et que ces sons ont un impact sur de nombreuses espèces marines.  Elle a conclu en disant que face aux incertitudes entourant la pollution acoustique, du fait du manque de recherches sur le sujet, le principe de précaution doit être de mise dans le nouvel instrument.

Déclaration de la Présidente

En début d’après-midi, la Présidente de la Conférence, Mme RENA LEE (Singapour), a tenu à apporter des précisions sur la structure et la longueur de son document établi pour faciliter les débats (document 2018/3).  Elle a rappelé que chaque délégation pouvait attirer l’attention sur un point qui aurait été omis dans ce document.  « Nous voulons éviter de répéter ce qui a été dit », a tout simplement indiqué la Présidente.  Elle a invité les intervenants à déborder du cadre du document, à ne pas hésiter à le critiquer, assurant qu’elle en prenait l’entière responsabilité.

Groupe de travail informel sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines

À peine la séance plénière levée, le groupe de travail informel sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines se réunissait.  La facilitatrice, Mme NGEDIKES OLAI ULUDONG (Palaos), a loué la qualité du travail de préparation sur ces questions.  Les problèmes abordés durant cette première après-midi ont été circonscrits, comme l’a demandé la facilitatrice, au paragraphe 6 du chapitre 3 du document 2018/3 intitulé « Objectifs du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines ». 

Les questions à examiner sont énoncées, dans ledit document, de la manière suivante:

« a) Énoncé, dans l’instrument, des objectifs du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines.

b) Comment l’instrument devrait-il reconnaître les besoins particuliers des pays en développement, notamment les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral, les pays géographiquement désavantagés et les petits États insulaires en développement, ainsi que des États côtiers d’Afrique?

c) Comment l’instrument devrait-il aborder et reconnaître la nécessité de développer et de renforcer la capacité des États, en particulier les États en développement, qui en ont besoin et en font la demande, conformément au paragraphe 2 de l’article 266 de la Convention? »

Respectant l’état d’esprit que la Présidente souhaitait insuffler aux débats, l’Union européenne a voulu « aller au plus pratique ».  Concernant les objectifs, l’UE propose d’avoir des dispositions générales sur les moyens d’accroître ce transfert de techniques et d’aider les États qui en ont besoin.  Elle a, en ce sens, été rejointe par la Nouvelle-Zélande, les États fédérés de Micronésie et la Norvège.  Les États-Unis, de leur côté, se sont déclarés en défaveur de l’inclusion de termes préférentiels pour les pays en développement comme il en était question dans le point b), une position qui n’a pas fait d’autres partisans.

Pour la représentante de Nauru, qui s’exprimait au nom du groupe des petits États insulaires en développement du Pacifique, la reconnaissance du cas particulier de ces pays est absolument essentielle.  « Il faudrait même aller plus loin. »  Par exemple, au point c), les besoins spécifiques des pays en développement devraient être mentionnés, a-t-elle suggéré.  Pour l’instant, aucun mécanisme n’a identifié ces besoins, a-t-elle remarqué, avant de demander qu’une évaluation scientifique et technique soit réalisée pour les identifier.

C’est « une obligation pure et simple du transfert des techniques marines » qu’il faudrait, et non plus une incitation, a plaidé de façon énergique l’Argentine.  La Convention sur le droit de la mer contient des dispositions concrètes en ce sens, a concédé le représentant, mais elle parle seulement de « faire son possible ».  « Il faut aller au-delà, et clairement définir une obligation »: sans obligation, les objectifs n’auraient aucun sens, selon lui.  Ce point de vue a été soutenu par plusieurs pays, dont l’Équateur.

La facilitatrice a exigé, à de nombreuses reprises durant le débat, que les discussions s’en tiennent aux trois points a, b et c de l’ordre du jour, en demandant aux délégations de ne pas aborder encore les questions de financement.

Le Mexique a mis en exergue l’objectif de créer les conditions pour que les pays en développement aient accès à l’information scientifique et accèdent ainsi aux ressources génétiques marines.  Il a aussi mis sur la table la délicate question de la propriété intellectuelle: « les transferts des techniques marines vont de pair avec les questions de propriété intellectuelle ».  Or, « cette dernière empêche que nous discutions de beaucoup de sujets liés à la protection de l’environnement », a-t-il regretté.  

Au contraire, le Canada a fait savoir qu’il était attaché à ce droit de la propriété intellectuelle, tandis que la République islamique d’Iran a jugé que ce droit ne devrait pas être un obstacle, tout en reconnaissant qu’il devait, lui aussi, être respecté.

Pour ce qui est du transfert des techniques marines, le Mexique estime qu’il doit être sans limite ou, en tout cas, souple.  Ce sujet est règlementé par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, a-t-il noté en en déduisant que toute nouvelle réglementation devait aussi le prendre en compte, ce qui nécessite de « faire un effort ».

Clairement, les frictions entre transferts de technologies et propriété intellectuelle sont un problème sui surgira de nouveau.  Quoi qu’il en soit, « le transfert des techniques marines n’est pas une fin en soi », a conclu le Mexique, qui a remarqué que pour les pays les moins avancés, avoir accès à l’information n’est pas forcément bénéfique en soi car il faut disposer également de la capacité nécessaire pour traiter, digérer cette information.

Demain, quatre autres questions seront abordées dans le cadre de ce groupe de travail.  Après l’élection des trois derniers membres du Bureau restant à élire, le groupe discutera de la question « Types et modalités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines » (6.2), du « financement » (6.3), et des points 6.4 « Suivi et examen de l’efficacité » et 6.5 « Questions soulevées par les éléments interdisciplinaires ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: Au lendemain du cessez-le-feu à Tripoli, « le statu quo est intenable », estime le Représentant spécial devant le Conseil de sécurité

8341e séance – après-midi
CS/13485

Libye: Au lendemain du cessez-le-feu à Tripoli, « le statu quo est intenable », estime le Représentant spécial devant le Conseil de sécurité

Le 4 septembre, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) est parvenue à faire accepter des principales parties au conflit dans ce pays un cessez-le-feu, permettant de rétablir un début de calme à Tripoli, où des violences avaient éclaté le 26 août dernier, a annoncé, cet après-midi, le Représentant spécial du Secrétaire général, pour qui « le statu quo est intenable ».

« La violence qui s’est emparée de la capitale a fait exploser la façade de calme qui prévalait depuis mai 2017.  Les tanks et l’artillerie lourde ont été déployés dans des quartiers résidentiels.  Soixante et un Libyens ont été tués et 159 autres blessés, la plupart des victimes étant des civils, parmi lesquelles des enfants.  Des familles ont été contraintes au déplacement.  Les pillages et la criminalité sont devenus monnaie courante à mesure que les gangs ont pris le contrôle des rues.  Des centaines de criminels se sont échappés de prison.  Les migrants sont, soit pris au piège dans des centres de détention, soit finissent à la rue ».

La ville se trouvait au bord d’une « guerre totale », a résumé M. Ghassan Salamé par visioconférence depuis Tripoli, en estimant que cette dernière escalade en date ne fait que perpétuer un cycle de violences qui a déjà menacé de « couper en deux » le pays en juin et juillet.  Et le 23 août, Daech, dont l’influence ne cesse de s’étendre selon lui, a revendiqué l’attaque commise près de Zliten, qui a coûté la vie à quatre policiers: « Je mets en garde ce Conseil contre la possibilité que la Libye ne devienne un repaire de terroristes de tous bords. »

Un autre risque pointé du doigt aujourd’hui par le Représentant spécial, c’est celui de voir le sud de la Libye devenir un « champ de bataille » « alternatif » et une base-arrière de groupes armés étrangers, y compris d’organisations terroristes.  Les récents affrontements que se sont livrées sur place les forces gouvernementales tchadiennes et celles d’opposition alimentent ces craintes, alors que, dans l’est du pays, Derna est le théâtre d’affrontements sporadiques et de frappes aériennes, a argué M. Salamé.

Le représentant de la Libye a dénoncé l’irresponsabilité de parties qui se servent d’armes pour s’opposer à la mise en place d’institutions sécuritaires unifiées, conformément aux principes élaborés par la MANUL en concertation avec les parties libyennes.  Une unification de l’armée et de la police « réclamée quasi unanimement » par la population libyenne, précise le rapport du Secrétaire général que le Représentant spécial était venu présenter.

Tandis que le délégué libyen imputait la gravité de la crise économique à la détérioration de la situation sécuritaire, M. Salamé a estimé quant à lui que les défis économiques sont à la source de la violence.  Le haut fonctionnaire a indiqué avoir exhorté la Banque centrale de Libye et le Gouvernement d’entente nationale à faire des progrès sur les questions du taux de change de la devise nationale et des réformes des subventions.

« Nous sommes également favorables à une redistribution plus équitable de la richesse en Libye, axée non pas sur l’apaisement des groupes en fonction de leur puissance militaire, mais sur la fourniture d’une assistance aux Libyens en fonction de leurs besoins », a expliqué le Représentant spécial, qui a dénoncé le « comportement prédateur » de groupes armés formés de « porte-flingues devenus millionnaires ».

Mais M. Salamé a également dirigé sa diatribe vers les membres de la Chambre des représentants, laquelle a échoué jusqu’à présent à organiser des élections législatives et présidentielle en Libye, initialement prévues le 10 décembre 2018. Certains d’entre eux, a-t-il accusé, manœuvrent pour « détourner le processus politique » à leur profit et « cimenter leur autorité » au lieu de plancher sur une législation pertinente ouvrant la voie à la tenue des scrutins, à l’issue desquels ils pourraient perdre leur siège.

Considérant que les agissements des groupes armés sont directement responsables d’un climat inadéquat à la tenue d’un processus électoral, le délégué libyen a encouragé le Conseil à envisager des sanctions contre ces individus.  Une proposition sur laquelle la Fédération de Russie et la Chine, entre autres, ont émis des réserves.  D’une manière générale, les membres du Conseil de sécurité ont reconnu l’importance de réunir des conditions propices à la tenue d’élections.

Le représentant de la Côte d’Ivoire a rappelé que l’unité du Conseil de sécurité avait permis la mise sous sanctions, le 7 juin 2018, de six individus libyens impliqués dans la traite de personnes, dénoncée par plusieurs membres comme un fléau en Libye.  Le 23 août, le Groupe d’experts du Comité établi par la résolution 1970 (2011) du Conseil de sécurité, qui s’occupe de surveiller l’état de mise en œuvre de ces sanctions, a indiqué que les violations de l’embargo sur les armes et l’exportation illicite de pétrole brut et raffiné constituent un obstacle à cet égard, a expliqué le Président du Comité, M. Olof Skoog, de la Suède.

LA SITUATION EN LIBYE (S/2018/780)

Déclarations

« Le statu quo en Libye est intenable », a déclaré M. GHASAN SALAMÉ, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye.  « La violence qui s’est emparée de Tripoli à partir du 26 août a fait exploser la façade de calme qui prévalait depuis mai 2017.  Les tanks et l’artillerie lourde ont été déployés dans des quartiers résidentiels.  Soixante et un Libyens ont été tués et 159 blessés, la plupart des victimes étant des civils, dont des enfants.  Des familles ont été contraintes au déplacement.  Les pillages et la criminalité sont devenus monnaie courante à mesure que les gangs prennent le contrôle des rues.  Des centaines de criminels se sont échappés de prison.  Les migrants sont, soit pris au piège dans des centres de détention, soient finissent à la rue. »

« La ville se trouve au bord d’une guerre totale », a prévenu le haut fonctionnaire.  Le 4 septembre, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), qu’il dirige, a réussi à conclure un cessez-le-feu entre les principales parties au conflit, permettant de rétablir un début de calme.  Nous devons maintenant fournir une assistance technique et des bons offices à l’appui du cessez-le-feu, a estimé le Représentant spécial.  Selon lui, la récente flambée de violence n’est que la dernière d’une série qui a secoué la Libye.  « Les évènements de juin et juillet dernier ont en effet menacé de couper le pays en deux.  Le 10 août, des groupes armés ont expulsé par la force des familles Tawerghan du camp de personnes déplacées de Tariq al-Matar.  Et après l’horrible attaque perpétrée le 2 mai contre la Haute Commission électorale nationale, Daech a, le 23 août, revendiqué l’attaque commise près de Zliten, qui a coûté la vie à quatre policiers.  La présence de l’organisation terroriste en Libye ne cesse de s’étendre: « Je mets en garde ce Conseil contre la possibilité que la Libye ne devienne un sanctuaire de terroristes de tous bords et lui demande de réagir à cette menace croissante ». 

En outre, au cours des dernières semaines, a relevé le chef de la MANUL, les forces du Gouvernement tchadien et de l’opposition tchadienne se sont livrées à des affrontements dans le sud de la Libye, plus d’un millier de combattants ayant été impliqués.  Cette région risque de devenir un « champ de bataille » régional et une base-arrière de groupes armés étrangers, y compris d’organisations terroristes, a alerté M. Salamé.  L’Accord récemment conclu par le Tchad, le Soudan, le Niger et la Libye doit donc être mis en œuvre de manière que la Libye ne devienne pas un théâtre de conflit alternatif.  Par ailleurs, à Derna, dans l’est du pays, les affrontements sporadiques et les frappes aériennes se poursuivent, l’ONU s’efforçant de faciliter l’assistance humanitaire aux familles sur place. 

« Nous ne pouvons pas revenir au statu quo ante. » Pour rétablir la stabilité en Libye, M. Salamé a jugé urgent d’établir des institutions civiles et militaires unifiées et vigoureuses, au service de tous les citoyens.  De son côté, la MANUL fait porter son action dans deux domaines spécifiques, mais interdépendants.  Tout d’abord, elle œuvre à la révision des arrangements sécuritaires à Tripoli en vue de réduire l’influence des groupes qui se servent de la lutte armée pour atteindre leurs objectifs.  La seconde priorité de la Mission est de répondre aux problèmes économiques sous-jacents qui érodent au quotidien la vie des citoyens à travers tout le pays.  Aussi, a-t-il exhorté la Banque centrale de Libye et le Gouvernement d’entente nationale à faire des progrès sur les questions du taux de change de la devise nationale et des réformes des subventions.  « Nous sommes également favorables à une redistribution plus équitable de la richesse en Libye, axée non pas sur l’apaisement des groupes en fonction de leur puissance militaire, mais sur la fourniture d’une assistance aux Libyens en fonction de leurs besoins », a résumé le Représentant spécial. 

En ce qui concerne les élections, un certain nombre de conditions doivent être réunies, a-t-il averti.  Regrettant que la Chambre des représentants ait échoué à organiser une élection, et à adopter une législation sur le référendum, M. Salamé a estimé que nombres des membres siégeant à la Chambre échouent à faire leur travail.  « Ils cherchent à détourner le processus politique à leur profit, en se cachant derrière la procédure ou de fausses promesses.  C’est très clair: ils n’ont pas l’intention de renoncer à leurs positions.  Ils ont mis en place des dispositions juridiques pour cimenter leur autorité. »  S’il a salué les récentes réunions entre les deux chambres, le Représentant spécial a toutefois dit que toute tentative de rapprochement devait servir le processus politique.  « J’ai épuisé tous les recours traditionnels pour promouvoir le processus législatif.  Jusqu’à présent, ils ont été, soit bloqués, soit conçus pour n’aller nulle part », a-t-il constaté.  Si une législation n’est pas finalisée rapidement, nous refermerons le chapitre sur cette approche, a conclu M. Salamé. 

M. OLOF SKOOG, intervenant en qualité de Président du Comité établi par la résolution 1970 (2011) du Conseil de sécurité, a fait le point sur les travaux de ce Comité sur la période allant du 17 juillet au 5 septembre 2018 pendant laquelle il s’est réuni une fois de manière informelle et a poursuivi ses travaux par écrit selon la procédure d’approbation tacite.  Le 23 août, le Comité a entendu un exposé du Comité d’experts sur son rapport final, dans le cadre de la résolution 2367 (2013), et a discuté des recommandations qui y figurent.  L’un des problèmes majeurs évoqués à cette occasion était celui des violations de l’embargo sur les armes, et des droits de l’homme, y compris dans le contexte de la traite de personnes migrantes.  Il a également été question d’exportation illicite de pétrole brut et raffiné par la Libye et de l’application du gel des avoirs.

Sur les 14 recommandations du rapports, 7 sont étudiées par le Conseil de sécurité, a-t-il poursuivi, et le reste par le Comité.  Ce dernier a accepté de prendre des mesures de suivi par rapport à 2 de ces recommandations, et a demandé des justifications par écrit pour 3 autres d’entre-elles alors que les 2 dernières ne demandent pas d’action du Comité à ce stade.  Le Président du Comité a ensuite passé en revue les demandes d’exemption et autres reçues par rapports aux problèmes susmentionnés.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) s’est dite alarmée des informations faisant état de violations des droits de l’homme perpétrées contre des migrants et des réfugiés dans des camps de détention, où les personnes subissent des mauvais traitements et se voient refusées des soins de santé.  Elle a engagé les parties libyennes à ouvrir des enquêtes sur ces actes atroces.  Sa délégation a ensuite réitéré la nécessité de mettre en œuvre intégralement l’Accord politique libyen pour fermer, de manière définitive, le chapitre de la période de transition.  La représentante a enfin insisté sur l’importance d’adopter la législation adéquate en vue de l’organisation d’élections présidentielle et législatives.

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a estimé qu’un dialogue inclusif devait se tenir, un dialogue qui soit ouvert à toutes les parties prenantes libyennes, sans exception.  Il a dit soutenir le Représentant spécial dans ses efforts de mise en œuvre du Plan d’action des Nations Unies, avant de souhaiter que l’Union africaine y apporte également son soutien.  La Chine a estimé que les sanctions ne sont pas une fin en soi, mais un moyen de parvenir à un objectif politique. 

M. LEON H. KACOU ADOM (Côte d’Ivoire) a regretté la reprise des combats à Tripoli entre groupes armés qui s’étaient pourtant engagés à s’inscrire dans le processus de sortie de crise initié par le Gouvernement d’entente nationale, y voyant un signe de la précarité sécuritaire qui prévaut en Libye.  Ces actions risquent de saper les efforts de la communauté internationale en faveur de la réconciliation nationale libyenne, a-t-il redouté.  Aussi, la Côte d’Ivoire appelle-t-elle toutes les parties concernées au strict respect du cessez-le-feu et du couvre-feu décrétés à Tripoli, afin de préserver les acquis du processus global de sortie de crise.  Elle invite les factions armées rivales à Derna à mettre fin aux affrontements et à laisser un accès sans entrave et sûr à l’assistance humanitaire.

Le représentant a également fait part de ses préoccupations par rapport à la persistance du trafic illicite de migrants et les violations flagrantes des droits de l’homme dans les centres de détention, avant de demander la fermeture de ces centres et le respect des droits des détenus.  Il a salué l’unité d’action du Conseil de sécurité qui a permis la mise sous sanctions, le 7 juin 2018, de six individus impliqués dans la traite de personnes.  En revanche, il a regretté le manque de progrès enregistrés dans la mise en œuvre des engagements pris par les parties libyennes lors de la Conférence de Paris du 29 mai 2018 en vue de l’organisation d’élections législatives et présidentielle prévues le 10 décembre 2018.

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a condamné l’escalade de la violence constatée depuis la semaine dernière à Tripoli, tout en se félicitant de l’accord de cessez-le-feu conclu sous les auspices du Représentant spécial.  Il est essentiel de mettre en œuvre l’Accord politique libyen et de tourner définitivement la page de la période de transition, ce qui sera difficile tant que le pays sera divisé entre factions rivales.  La stabilité de la Libye passe par la réconciliation, à laquelle s’emploie non seulement la MANUL, mais aussi l’Union africaine, a souligné le représentant, qui a indiqué que le Gouvernement d’entente nationale doit bénéficier d’un soutien renforcé.  En conclusion, le délégué s’est élevé contre les violations quotidiennes des droits de l’homme qui se multiplient dans la rue, ou dans les centres de détention, dans ce pays.  La Guinée équatoriale appuiera toute proposition bien fondée susceptible de favoriser la réunification de la Libye.

Mme MAHLET HAILU GAUDEY (Éthiopie) a exhorté les parties libyennes à mettre en œuvre l’accord de cessez-le-feu, en rappelant que tout objectif politique doit être poursuivi par le dialogue, non pas par la violence.  Il est crucial d’assurer un accès humanitaire sûr et sans entrave dans le pays, a-t-elle poursuivi.  Seul un processus politique robuste, dirigé par les Libyens eux-mêmes, pourra ramener le pays sur la voie de la stabilité, a-t-elle dit, en soulignant la nécessité de mettre en place les conditions nécessaires à la tenue d’élections.  La déléguée a enfin exhorté le Conseil à continuer de parler d’une seule voix sur ce dossier et à renforcer son soutien à la MANUL qui devrait, selon elle, intensifier son engagement. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a exprimé son inquiétude devant les récents développements à Tripoli qui connait depuis 10 jours une grave dégradation de la situation sécuritaire avec de lourdes conséquences humanitaires, susceptibles de mettre en danger le processus politique.  Suite à ces « affrontements inacceptables », la France et ses partenaires ont appelé les acteurs à y mettre fin.  Elle salue le cessez-le-feu obtenu hier grâce à l’engagement du Représentant spécial.  Pour la France, la lutte contre tous ceux qui mettent en danger les fragiles équilibres politiques et profitent de la situation dans le pays pour détourner les ressources économiques est une priorité.  Le représentant a dénoncé la « prédation économique » et regretté que les derniers affrontements de Tripoli semblent avoir été motivés pour partie par des motifs financiers.  Il est également préoccupé par la situation humanitaire, en particulier celle des migrants et des réfugiés qui font l’objet de violations des droits de l’homme.  La France appelle donc les autorités libyennes à tout mettre en œuvre pour qu’ils soient traités dignement.

M. Delattre a ensuite appelé la communauté internationale à rappeler à tous ceux qui menacent la paix, la sécurité et la stabilité de la Libye, qu’ils s’exposent à des sanctions internationales, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité.  « Il est plus que jamais essentiel d’avancer dans la transition démocratique en Libye », a poursuivi le représentant demandant dans la foulée aux membres du Conseil de réaffirmer unanimement leur soutien à la feuille de route de M. Salamé.  Pour la France, il est également impératif d’organiser des élections dans le calendrier agréé à Paris le 29 mai dernier, par les quatre acteurs clefs de la scène politique libyenne.  La France apportera son soutien au renouvellement pour un an du mandat de la MANUL, a conclu le représentant.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a déclaré que les violences récentes perpétrées en Libye ne menacent pas seulement les vies de centaines de civils, mais remettent également en cause les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan d’action des Nations Unies.  La dernière escalade en date souligne à nouveau la nécessité de se pencher sans délais sur les causes profondes politiques, et sur le problème de la multiplication des acteurs armés sur le terrain ayant des objectifs divergents.  Dans ce contexte, les structures d’État, les forces armées et le secteur de la sécurité doivent être renforcés, de même qu’il faut améliorer les conditions socioéconomiques, des efforts qui auront des répercussions positives sur le processus politique et la stabilité du pays.  En conclusion, il a abondé dans le sens du Secrétaire général, qui indique dans son rapport que, si les élections doivent se tenir pour renouveler les mandats des institutions libyennes et établir une nouvelle autorité exécutive, les conditions propices à cette fin doivent être réunies.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a souligné les conséquences de l’escalade de la violence à Tripoli sur les efforts de stabilisation.  Il a exhorté les parties libyennes à respecter l’accord de cessez-le-feu, afin d’ouvrir la voie à un accord politique global.  Il a plaidé pour la mise en place d’institutions unifiées, rappelant que les groupes terroristes tirent profit du vide sécuritaire.  La période de transition doit s’achever, a-t-il dit, en souhaitant la finalisation des amendements à l’Accord politique libyen.  Le délégué a demandé des réformes économiques équitables dans le pays, au service de tous les Libyens.  Les institutions financières doivent gérer de manière efficace et équitable les ressources publiques, a-t-il conclu. 

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a appelé toutes les parties à coopérer avec les Nations Unies et à pleinement respecter le cessez-le-feu obtenu hier par l’ONU.  Il est impératif que la situation sécuritaire dans le pays s’améliore pour pouvoir aller de l’avant sur les autres dossiers, a-t-elle estimé, espérant notamment parvenir à la fin de la crise politique, à plus de transparence dans le milieu économique, à la coordination des efforts internationaux ainsi qu’à une amélioration de la situation des droits de l’homme.  Elle a souligné le besoin urgent d’un processus politique inclusif piloté par les Libyens, apportant son plein soutien aux efforts du Représentant spécial en ce sens, avant de plaider pour qu’il y ait de nouvelles élections, à conditions qu’elles se passent dans de bonnes conditions. La déléguée a encouragé les institutions libyennes à travailler sur un nouveau cadre constitutionnel et un gouvernement inclusif.

Les Pays-Bas encouragent en outre une amélioration de la situation économique en Libye, ce qui passe par plus de transparence dans les institutions économiques et financières libyennes et l’unification de la banque centrale.  Il faut aussi rétablir l’état de droit en Libye, a martelé la représentante, qui a appelé toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et les droits de l’homme, en particulier dans le contexte des migrants et des réfugiés.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a condamné les actes de violence commis à Tripoli et exhorté les parties à respecter l’accord de cessez-le-feu.  « L’Accord politique libyen est la seule voie viable pour résoudre la crise dans ce pays. » Il s’est dit préoccupé par la lenteur de la mise en œuvre des amendements audit Accord en raison de blocages politiques.  Il a plaidé pour un engagement des femmes et des jeunes aux efforts de stabilisation politique et pour un soutien robuste de la communauté internationale.  Le délégué a estimé que la MANUL peut jouer un rôle constructif s’agissant d’une répartition équitable des ressources financières liées à la vente d’hydrocarbures.  Enfin, il a souligné la nécessité de remédier à la grande vulnérabilité des migrants qui sont à la merci de groupes criminels. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a condamné la récente escalade de la violence à Tripoli et dans ses alentours, avant de dénoncer aussi la détention arbitraire de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants.  Dans ce contexte, elle a demandé la fermeture de tous les centres de détention.  « Une politique de tolérance zéro pour les actes de torture et les exécutions sommaires est un préalable pour édifier un pays fondé sur l’état de droit. »  La déléguée polonaise a ensuite exhorté toutes les parties libyennes à cesser les hostilités et à respecter l’Accord de cessez-le-feu.  S’agissant du processus politique, elle a salué l’engagement fort des femmes libyennes en faveur des efforts de relèvement social et politique du pays. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a dit que l’hostilité récente n’a pu cesser que grâce aux efforts déployés par le Représentant spécial, qu’il a salués.  Il a ensuite regretté que l’entreprise d’unification des forces de sécurité, et notamment le projet de création de garde présidentielle, n’ait toujours pas été couronné de succès.  Le représentant a estimé que la tenue d’élections dans le contexte actuel pourrait être contreproductive, et devenir source d’instabilité plutôt que d’unité.  Par ailleurs, dans son rapport, le Secrétaire général affirme que l’aide aux personnes déplacées est une priorité, a relevé le représentant.  « Nous sommes d’accord avec cette position, et c’est la même approche qui devrait prévaloir dans le cas de la Syrie », a argué le délégué, pour qui cette question ne saurait être politisée. 

Quant aux mesures de sanctions, elles ne peuvent être une fin en soi, a fait observer la Fédération de Russie.  La délégation a dénoncé les tentatives de ne pas régler les causes profondes des déplacements, certaines d’entre elles étant d’origine socioéconomique, et causées par des acteurs étrangers.  Préoccupé par le problème de la propagation illicite des armes en Libye, il s’est demandé ce qu’il arriverait si celles-ci tombaient entre les mains d’acteurs non étatiques.  Mais la tâche première qui attend la Libye, c’est celle de l’unification, a insisté le représentant en conclusion.

M. OLOF SKOOG (Suède) s’est dit profondément préoccupé par l’escalade de la violence à Tripoli au cours de la semaine écoulée, des actes qui constituent des violations flagrantes du droit humanitaire international et des abus des droits de l’homme.  Il a appelé toutes les parties à respecter le cessez-le-feu négocié par le Représentant spécial, et donc à mettre un terme aux hostilités, à protéger les civils et à rouvrir l’aéroport de Mitiga.  De plus, la Suède demande un accès humanitaire sans entrave en Libye et réclame que les civils qui souhaitent quitter le pays puissent le faire.  Le représentant a également exhorté tout pays ayant une influence sur les parties à les pousser à respecter leurs engagements.  Aux groupes qui n’ont pas participé aux efforts de médiation de l’ONU d’hier, il a demandé de se joindre à l’accord de cessez-le-feu.  Il n’a pas hésité à rappeler à ceux qui cherchent à saper la paix et la stabilité en Libye qu’ils s’exposent à des poursuites.

En tant que Président du Comité de sanction pour la Libye, le représentant a noté la poursuite des flux illégaux d’armes dans le pays, ce qui alimente l’escalade de la violence.  Il a saisi cette occasion pour demander à tous les États Membres de respecter leurs obligations découlant des résolutions pertinentes ainsi que les sanctions, dont l’embargo sur les armes.  En conclusion, il a demandé à la communauté internationale de se rallier au Plan d’action pour la Libye du représentant spécial et de respecter le rôle de chef de file de l’ONU sur le terrain dans les efforts de médiation.  Il a aussi demandé aux membres du Conseil de sécurité de faire preuve d’unité sur ce dossier.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a condamné l’escalade de la violence à Tripoli et souligné la nécessité d’arriver à une cessation des hostilités.  La tenue des élections prévues sera un élément clef de la transition dans le pays, a-t-elle dit.  Elle a insisté sur la gravité de la situation humanitaire et appelé les parties à s’abstenir de tout acte fragilisant l’accord de cessez-le-feu.  Les dirigeants libyens doivent travailler main dans la main en vue de la réunification du pays et un partage équitable des ressources, a déclaré la déléguée britannique.  Enfin, elle s’est dite prête à faire distribuer un projet de déclaration à la presse sur la situation en Libye. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a demandé aux parties libyennes de s’abstenir de toute action susceptible d’affaiblir le processus de paix, le peuple libyen souhaitant la fin des combats, le retour des services essentiels et la prospérité du pays.  « La triste vérité est qu’un petit nombre de fauteurs de troubles politiques sapent cette vision », a-t-il déclaré.  Il a invité les acteurs internationaux, en particulier les voisins de la Libye, à dire que « c’est assez! », en obligeant les parties à parvenir à un accord politique crédible et à organiser des élections libres et impartiales.  Le délégué a rappelé qu’au début de l’année, le Conseil a utilisé des sanctions pour la première fois s’agissant des défis liés à la traite des êtres humains en Libye.  « Il est de notre responsabilité d’aider le peuple libyen à bâtir un avenir meilleur », a-t-il conclu.

M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a dit que les événements sanglants qui se sont déroulés à Tripoli attestent de l’ampleur du défi sécuritaire en Libye.  Il a dénoncé l’utilisation irresponsable des armes par des parties qui s’opposent à la mise en place d’institutions de protection.  Les groupes armés doivent être notre priorité, a-t-il dit, en demandant au Conseil qu’il œuvre à leur désarmement.  Le Conseil doit en outre demander aux parties d’accroître leurs efforts pour régler la crise.  Le délégué a salué la signature, hier, d’un accord de cessez-le-feu, avant d’imputer la gravité de la situation économique à la détérioration sécuritaire.

Certains acteurs n’ont pas honoré leurs engagements, ce qui a dégradé davantage encore la situation économique, a-t-il poursuivi.  Il a jugé scandaleuses les violations des droits de l’homme dont sont victimes des Libyens et des étrangers.  « Les groupes armés présents dans d’autres pays ne doivent pas diffuser leur venin en Libye », a-t-il déclaré.  Le délégué a demandé la mise en œuvre du Plan d’action de l’ONU afin d’ouvrir la voie à la tenue d’élections démocratiques.  Le Conseil doit faire preuve de clarté et envisager des sanctions contre ceux qui s’opposent à la paix, a-t-il conclu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Un Conseil de sécurité divisé se penche sur la situation au Nicaragua, « pays sans espérance »

8340e séance – matin
CS/13483

Un Conseil de sécurité divisé se penche sur la situation au Nicaragua, « pays sans espérance »

C’est dans une salle polarisée que le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, la situation au Nicaragua, un « pays sans espérance ».  En effet, la présidence américaine avait inscrit hier ce nouveau point à l’ordre du jour du Conseil au titre de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, une décision contestée par plusieurs membres du Conseil de sécurité pour qui la situation au Nicaragua ne constitue pas une menace à la paix et à la sécurité internationales. 

Pourtant, la crise politique, économique et sociale au Nicaragua inquiète, et les membres du Conseil ont vivement condamné la violence qui a fait des centaines de victimes, ainsi que les actes d’exécution extrajudiciaire et de torture, souvent aux mains de groupes paramilitaires. 

Le Nicaragua est devenu un pays sans espérance, une bombe à retardement, a notamment averti l’ancien secrétaire général du Ministère de la défense du Nicaragua, M. Felix Maradiaga, venu témoigner de la répression violente subie par les manifestants qui appellent « uniquement » au respect des droits civiques.

« Les voix de centaines de Nicaraguayens ont été réduites au silence par la mort, l’emprisonnement et un climat de terreur », a-t-il déploré.  Le Nicaragua est devenu une prison à ciel ouvert, où les actes de torture et sévices sexuels sont monnaie courante, où les défenseurs des droits de l’homme et les dirigeants religieux sont particulièrement à risque et où un simple tweet peut mener à une détention arbitraire, a-t-il ajouté.

Si ces abus et débordements restent perçus par les uns comme les facteurs d’une crise interne, pour l’Organisation des États américains (OEA) et d’autres membres du Conseil, ce sont au contraire des signes avant-coureurs d’une crise plus large qui risque de déborder sur les pays voisins, à l’image des 23 000 Nicaraguayens qui se sont réfugiés au Costa Rica au cours des quatre derniers mois. 

Invoquant la crise migratoire massive engendrée par la « tragédie vénézuélienne », ainsi que l’exode syrien, la délégation des États-Unis a d’ailleurs appelé à éviter que « l’histoire ne se répète ». 

« Le Conseil de sécurité ne doit pas –il ne peut pas– être un observateur passif alors que le Nicaragua continue de se transformer en un État raté, corrompu et dictatorial, parce que nous savons où cette voie mène.  Un exode nicaraguayen submergerait ses voisins et créerait un afflux de migrants et de demandeurs d’asile en Amérique centrale », a notamment averti la délégation.

Même son de cloche du côté de l’Organisation des États américains (OEA) qui a signalé que les problèmes que connait le Nicaragua inquiètent toute la région et que la situation dans le pays ne semble pas s’améliorer en dépit des nombreuses démarches initiés par l’Organisation, notamment la création d’un mécanisme de suivi de la situation des droits de l’homme et d’un groupe interdisciplinaire d’experts pour faciliter le dialogue au Nicaragua.

Convaincu qu’il ne sera pas possible de trouver une solution sans prendre en considération la volonté du peuple nicaraguayen par le biais d’élections crédibles, le Chef de Cabinet du Secrétaire général de l’OEA, M. Gonzalo Koncke, a espéré que les réformes électorales pourront être menées à bien d’ici à janvier 2019.

« Le Gouvernement du Nicaragua peut choisir la voie démocratique pour une sortie de crise mais, à défaut, il y a un véritable risque de crise migratoire et l’Amérique centrale n’est pas à même de faire face à une telle hypothèse », a averti M. Koncke. 

Ce dernier a également insisté sur l’impératif de la reprise rapide du processus de dialogue national avec la participation de la Conférence épiscopale, un point de vue largement partagé dans la salle.  Pour la France, c’est même de ce dialogue national que dépendent à la fois une sortie pacifique et négociée de la crise actuelle et les progrès dans les discussions sur la démocratisation et la justice au Nicaragua.

Le représentant de la Bolivie a toutefois vu dans la tenue de cette réunion une « mise en accusation du Nicaragua » faisant fi des efforts en cours de son gouvernement et au risque d’exacerber les tensions et de fragiliser le processus de dialogue en cours.  D’autres, comme la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas y ont cependant vu une réponse proactive du Conseil aux abus des droits de l’homme graves observés sur place par l’Organisation des États américains (OEA), et à l’expulsion des membres du Haut-Commissariat aux droits de l’homme qui étaient sur place.  C’est là une raison suffisante pour que le Conseil se penche sur la situation au Nicaragua dans la mesure où il est de son mandat de défendre les entités des Nations Unies, a d’ailleurs estimé le Royaume-Uni. 

Ces arguments n’ont pas empêché la Fédération de Russie de dénoncer « une manœuvre politique » pour donner libre cours à « l’interventionnisme historique » des États-Unis au Nicaragua, un propos appuyé par la Bolivie et le Venezuela qui se sont dits persuadés que l’objectif ultime des États-Unis est de provoquer un renversement du régime actuel au Nicaragua. 

La Chine a appelé à la non-ingérence dans les affaires internes d’un pays, alors que l’Éthiopie a plaidé en faveur d’une diplomatie préventive « plus discrète » par le biais des bons offices du Secrétaire général.  Abondant dans ce sens, le Ministre des affaires étrangères du Nicaragua, M. Denis Moncada Colindres, a été jusqu’à dire que « son inscription à l’ordre du jour du Conseil est une violation de la souveraineté du Nicaragua ».  Il a assuré que le Nicaragua promeut le dialogue national, « le dialogue du peuple avec le peuple, de la famille avec la famille », pour garantir la paix et la stabilité.  Il a aussi rappelé que les États-Unis ont été condamnés en 1986 par la Cour internationale de Justice, à La Haye, pour actes terroristes commis au Nicaragua et a exhorté ce pays « à cesser son agression contre le Nicaragua et à respecter les droits de son peuple ». 

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUSRÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

La situation au Nicaragua

Déclarations

M. GONZALO KONCKE, Chef de Cabinet du Secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), a fait le point sur les efforts déployés par l’Organisation pour rétablir le calme et l’état de droit au Nicaragua depuis avril 2018.  Les pays membres de l’OEA sont extrêmement inquiets par l’escalade des tensions et la détérioration de la situation économique et des droits de l’homme dans le pays où plus de 300 personnes ont perdu la vie, y compris 21 agents de police, a-t-il indiqué. 

Le Secrétaire général de l’OEA suit de près cette situation, notamment les répercussions économiques de la crise, et l’OEA a mobilisé toutes les ressources dont il dispose pour œuvrer en faveur de la justice et du rétablissement de l’État de droit dans le pays.  M. Koncke a aussi indiqué que lors d’une réunion qui s’est tenue du 16 au 21 mai, un mécanisme de suivi de la situation des droits de l’homme au Nicaragua a été mis sur pied, ainsi qu’un groupe interdisciplinaire d’experts pour faciliter le dialogue au Nicaragua.  Le Conseil permanent de l’OEA a également réitéré sa vive préoccupation par rapport à la situation des droits de l’homme et les abus des forces de l’ordre observés au Nicaragua.  L’OEA travaille également avec les autorités nicaraguayennes pour prendre les mesures nécessaires pour mener des réformes électorales et identifier les auteurs de violations des droits de l’homme 

« Les problèmes que connait le Nicaragua inquiètent toute la région », a fait savoir M. Koncke qui a regretté que malgré toutes les démarches susmentionnées, la situation ne semble pas s’améliorer.  De plus, la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a conclu que le Nicaragua a violé entre autres le droit à la santé et à l’accès à la justice de son peuple.  Les conclusions de la CIDH sur les violations répétées de droits de l’homme retirent toute légitimité au gouvernement actuel, a affirmé M. Koncke qui a jugé impératif de sortir de cette impasse en coopérant avec le groupe d’experts de l’OEA.

L’OEA est convaincue qu’il ne sera pas possible de trouver une solution à la situation au Nicaragua sans prendre en considération la volonté du peuple par le biais d’élections crédibles.  Ainsi, l’OEA espère que les reformes électorales pourront être menées à bien d’ici à janvier 2019.  Elle plaide également en faveur de la participation de la Conférence épiscopale du Nicaragua à ce processus.  « Le Gouvernement du Nicaragua peut choisir la voie démocratique pour une sortie de crise mais, à défaut, il y a un véritable risque de crise migratoire », a encore averti M. Koncke, insistant sur le fait que l’Amérique centrale n’est pas à même de faire face à une telle hypothèse. 

M. FELIX MARADIAGA, dirigeant de la société civile et ancien secrétaire général du Ministère de la défense du Nicaragua, a retracé l’histoire tourmentée de son pays, marquée notamment par des conflits armés durant les années et qui, a-t-il affirmé, a été abandonné à de nombreuses reprises par la communauté internationale.  Il a indiqué, qu’à l’âge de 12 ans, il a fui le conflit qui déchirait son pays et pénétré illégalement aux États-Unis.  À présent rentré dans son pays, il a souligné l’urgence de la situation actuelle, marquée par la répression violente de manifestations qui, a-t-il souligné, appellent uniquement au respect des droits civiques.  Il a noté qu’au cours des quatre derniers mois, 23 000 personnes avaient fui le Nicaragua pour se réfugier au Costa Rica.

M. Maradiaga a également rapporté que pendant la crise du mois d’avril, des centaines d’étudiants universitaires avaient cherché refuge dans la Cathédrale de Managua après avoir subi des tirs indiscriminés de la police.  Il a déploré la mort d’un adolescent de 15 ans, Alvaro Conrado, et indiqué avoir vu « la tête d’un adolescent exploser sous l’impact d’une balle ».  Un des aspects les plus alarmants de la crise est la criminalisation des manifestations, a-t-il signalé, avant d’indiquer avoir lui-même reçu des centaines des menaces de mort. 

J’ai été accusé de terrorisme, a-t-il lancé avant de rapporter que le 11 juillet, une vingtaine de paramilitaire munis d’AK47 avait entouré son véhicule avant de le relâcher, « car ils n’avaient pas encore obtenu l’autorisation de me tuer ».  Puis le 13 juillet, a-t-il enchainé, un groupe de paramilitaires a fait irruption dans une réunion d’étudiants à laquelle je participais et m’a roué de coups. 

« Les voix de centaines de Nicaraguayens ont été réduite au silence par la mort, l’emprisonnement et un climat de terreur », a-t-il déploré.  Le Nicaragua est devenu une prison à ciel ouvert, où les actes de torture et sévices sexuels sont monnaie courante et les défenseurs des droits de l’homme et les dirigeant religieux sont particulièrement à risque.  La trace d’un simple tweet peut mener à une détention arbitraire ou à des actes de torture comme l’ablation des parties génitales, a-t-il ajouté.

Le Nicaragua est devenu un pays sans espérance, et le régime de Daniel Ortega a profité du fait que le pays a disparu des écrans radars de la communauté internationale, malgré les violations systématiques des droits humains, a-t-il accusé.  Le Nicaragua, a-t-il encore averti, est une bombe à retardement.  M. Maradiaga a estimé que l’ONU a le devoir de rétablir l’État de droit dans son pays et a demandé l’adoption d’une résolution du Conseil sur la situation actuelle au Nicaragua ainsi que la création de mécanismes de surveillance.

M. VASSILY A.  NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que sa délégation s’oppose à la discussion, au Conseil de sécurité, de la situation au Nicaragua.  Cette question n’a pas lieu d’être inscrite à l’ordre du jour du Conseil, a-t-il affirmé, et il n’est pas sûr que les membres du Conseil de sécurité qui ont appuyé cette réunion se rendent bien compte des conséquences possibles d’une telle pratique.  « Le mandat du Conseil comprend-il vraiment la possibilité d’exercer des pressions sur un certain État qui font face à une crise interne? », s’est interrogé le représentant qui a averti que le débat d’aujourd’hui ne fera qu’aggraver la polarisation au Nicaragua. 

Certains s’inquiètent du fait qu’il existe toujours des États qui mènent leurs propres politiques sans donner suite aux pressions extérieures, a-t-il ironisé, avant d’appeler les membres du Conseil à respecter cette position et à chercher à établir le dialogue avec les États concernés plutôt que d’exercer des pressions en vue de renverser les gouvernements en place.  La Russie déplore en outre que des organismes internationaux soient associés à de telles manœuvres.  Pour elle, il est évident que la question du Nicaragua n’a pas sa place à l’ordre du jour du Conseil de sécurité car, a de nouveau souligné le représentant, la situation politique interne du Nicaragua ne représente pas une menace à la paix et la sécurité internationales.

Les propos des initiateurs de cette réunion pourraient donner l’impression que les États-Unis se soucient réellement du sort du peuple nicaraguayen, a poursuivi le délégué, « or tout le monde sait que la politique d’ingérence de Washington à l’égard de Managua ne date pas d’hier ».  Dans la foulée, il a dénoncé l’ingérence de Washington dans les affaires d’autres États latino-américains, notamment à Cuba, au Venezuela ou encore son rôle dans le renversement du Président chilien Salvador Allende.  « Les peuples africains, de l’Asie et du Moyen-Orient auraient également des choses à dire à cet égard », a poursuivi le représentant avant de faire remarquer que les États-Unis se plaignent pourtant des ingérences étrangères dans leur vie politique interne.

« Une fois de plus, la diplomatie préventive se voit hélas remplacée par une ingérence flagrante dans les affaires internes des États », a dénoncé le représentant russe pour qui la violation des droits de l’homme n’est pas un indicateur systématique de conflits.  « Ne nous ingérons pas dans les processus internes d’États souverains.  C’est vous-même qui le demandez », a-t-il dit, s’adressant directement à la Présidente du Conseil, Mme Nikki Haley.

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a reconnu que l’examen de la situation à l’ordre du jour du Conseil ne fait pas l’objet d’un consensus parmi les membres.  Il a rappelé le rôle d’investigation du Conseil, prévu par la Charte, de situations présentant des signes avant-coureurs d’un possible conflit.  Le Conseil a un rôle à jouer dans la prévention des conflits, a-t-il dit, avant de souligner le rôle des organisations régionales pour désamorcer les crises.  Régler les crises à un stade précoce est crucial pour éviter de nombreuses pertes en vies humaines, a-t-il poursuivi.  Le délégué a déploré la violence au Nicaragua et demandé que les responsables soient punis.  Il a aussi exhorté le Gouvernement du Nicaragua à prendre les mesures nécessaires pour un règlement pacifique de la crise, tout en soulignant l’importance de respecter la souveraineté des États. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a estimé que le cadre juridique de la Charte justifie la tenue du débat d’aujourd’hui sur la situation au Nicaragua.  Il est juste que le Conseil puisse entendre les préoccupations d’organismes régionaux par rapport à des situations qui relèvent de leurs régions, a estimé la représentante.  Il faut également se rappeler que le gouvernement du Nicaragua a expulsé le représentant du Haut-Commissariat des droits de l’homme, a indiqué la déléguée qui a souligné que le Conseil de sécurité doit défendre les entités des Nations Unies.  À ses yeux, cette raison justifie à elle seule la réunion d’aujourd’hui. 

Dans le même ordre d’idées, la représentante a évoqué les risques de crise migratoire qui pèsent sur la région, en raison de la situation qui prévaut au Nicaragua, et qui pourrait la déstabiliser.  Elle a regretté les pertes en vies humaines et a appelé à mettre fin à la violence et à autoriser les manifestations, la liberté d’expression et la liberté de la presse.  Le Royaume-Uni appelle aussi le Gouvernement nicaraguayen à démobiliser les organisations paramilitaires et à enquêter sur les abus qui ont été perpétrés.  Après avoir dénoncé les détentions arbitraires, la déléguée a souligné les problèmes que connait le Nicaragua ne pourront être réglés que par le dialogue.  Elle a regretté que le Gouvernement nicaraguayen ait décidé d’abandonner ce processus.  Pour ce qui est de l’OEA, le Royaume-Uni appuie ses activités ainsi que celles de la CIDH.  Un retour de la paix et de la sécurité au Nicaragua profitera à toute la région, a conclu la déléguée.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a jugé utile la tenue de cette réunion au regard du Chapitre VIII de la Charte et condamné énergiquement la violence commise au Nicaragua qui a fait des centaines de victimes, ainsi que les actes d’exécution et de torture extrajudiciaires.  Ces actes ont été notamment documentés par l’OEA, a-t-il dit.  Le délégué a demandé le démantèlement des groupes paramilitaires et la poursuite en justice des auteurs de violations des droits de l’homme.  L’OEA a créé un groupe de travail sur le Nicaragua, a rappelé le délégué, en déplorant le manque de coopération du Nicaragua avec ledit groupe.  Enfin, il a déclaré que le maintien du statu quo ne fait qu’encourager la violence et souhaité que le Conseil appuie les efforts de l’OEA pour régler la situation au Nicaragua. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a jugé urgent de mettre fin à la répression au Nicaragua, appelant notamment le Gouvernement nicaraguayen à mettre un terme aux arrestations arbitraires, à l’usage excessif de la force et à tout type de pression à l’encontre des manifestants, des défenseurs des droits et des personnalités critiques à l’égard du pouvoir, « y compris via des groupes violents ».  La France condamne à ce titre fermement les violences perpétrées par des unités paramilitaires, notamment l’enlèvement le 20 aout dernier de l’avocat Carlos Cardenas Zepeda, et les mesures d’intimidations et les arrestations qui ont visé les représentants d’organisations syndicales et de défense des droits de l’homme.  La France, a ajouté M. Delattre, estime plus que jamais que le respect des droits fondamentaux est la clef de voute de la légitimité et la stabilité politique.

Le représentant a ensuite appelé le Gouvernement nicaraguayen à préserver la voie du dialogue national, mise en œuvre sous les auspices de la Conférence épiscopale du Nicaragua.  De ce dialogue national dépendent à la fois une sortie pacifique et négociée de la crise actuelle et des progrès dans les discussions sur la démocratisation et la justice, a-t-il souligné.  Il a également fait observer qu’une amélioration durable de la situation au Nicaragua repose aussi sur une coopération étroite avec les organisations multilatérales, « au premier rang desquelles l’Organisation des États américains et les Nations Unies ».  Il a déploré la décision des autorités nicaraguayennes de demander le départ de la mission du Haut-Commissariat aux droits de l’homme à la suite de la publication de son rapport sur la situation dans le pays.  Il a appelé les autorités à coopérer avec le Haut-Commissariat.  Cette coopération, a-t-il souligné, est indispensable pour identifier les responsables et les traduire en justice.

M. KAREL J.G.  VAN OOSTEROM (Pays-Bas) s’est déclaré préoccupé par les évènements au Nicaragua, survenus le 18 avril 2018.  Plus de 350 personnes ont été tuées depuis et plus de 2000 ont été blessées, s’est-il alarmé, en faisant état de violations graves des droits de l’homme, d’usage disproportionné de la violence, d’assassinats extrajudiciaires et de disparitions.  Des crimes qui seraient imputables à des responsables gouvernementaux, des groupes paramilitaires et des individus armés, a souligné le représentant.  Il a estimé que le Conseil de sécurité doit soutenir des efforts de prévention et de médiation au Nicaragua, dans le cadre desquels, a-t-il ajouté, l’engagement des acteurs régionaux et locaux est indispensable.  Le représentant a applaudi le travail fourni par l’Église catholique, ainsi que par l’Organisation des États américains (OEA) à l’appui du dialogue au Nicaragua.  « La décision du Gouvernement nicaraguayen de mettre fin à la présence du Haut-Commissariat des droits de l’homme va à l’encontre de l’établissement des responsabilités pour les violations des droits de l’homme », a encore indiqué le délégué.  Il a exhorté les autorités du pays à pleinement coopérer avec les organisations internationales, avant de soutenir les activités de la Commission interaméricaine sur les droits de l’homme, ainsi que le Groupe interdisciplinaire des experts interdépendants de l’OEA. 

M. LEON H.  KACOU ADOM (Côte d’Ivoire) a noté que le “cycle vicieux” des contestations sociales réprimées aurait fait plus de 300 morts et provoqué l’exode de plus de 23 000 Nicaraguayens vers le Costa Rica.  Il a déploré que la dialogue pour la paix entre le Gouvernement et la société civile, mené sous les auspices de la Conférence épiscopales du Nicaragua, n’ait pas abouti aux résultats escomptés.  Il a également noté que la méfiance réciproque entre le pouvoir et les organisations de la société civile s’était étendu à l’Épiscopat, « accusé par le Gouvernement de partialité en faveur des contestataires », ajoutant ainsi à la complexité de la situation.  De plus, la récente expulsion du Nicaragua des membres de la Mission du Haut-Commissariat aux droits de l’homme n’est pas de bon augure, a ajouté le représentant qui a aussi fait part de ses vives préoccupations quant aux risques d’un conflit majeur, « dont les conséquences humanitaires seraient sans précédent pour le Nicaragua et les pays voisins ».

Le délégué ivoirien a ensuite exhorté le Gouvernement et les organisations de la société civile à renoncer à la violence et à reprendre les négociations sans délais pour une sortie de crise pacifique.  Il a également exhorté les Nations Unies et l’Organisation des États américains à use de la palette d’outils dont elles disposent afin d’instaurer un dialogue constructif avec et entre les acteurs de la crise au Nicaragua.

M. JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est déclaré vivement préoccupé par les développements récents au Nicaragua, en particulier les répressions et violences qui ont causé la mort de centaines de personnes et blessé des milliers d’autres.  Il a ensuite salué les efforts entrepris par l’Organisation des États américains pour résoudre la crise, tout en se disant inquiète par le manque de volonté des parties de prendre part au dialogue inclusif.  Aussi le représentant les a-t-il appelées à commencer de coopérer avec l’OEA et tirer parti du forum qu’elle leur offre.  La Pologne a également estimé que les discussions d’aujourd’hui ne doivent pas être perçues par le Nicaragua comme une tentative de stigmatisation. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a condamné la violence au Nicaragua, tout en notant que celle-ci a diminué et que la situation est en train de se normaliser.  Il s’est dit convaincu que le Gouvernement et le peuple de ce pays résoudront la situation.  « La situation dans ce pays ne constitue pas une menace à la paix et à la sécurité internationales et par conséquent ne relève pas du mandat de ce Conseil », a-t-il dit, tout en insistant sur l’engagement de son pays en faveur du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays.  Enfin, le délégué a déclaré que l’action de l’ONU dans le pays doit se limiter aux bons offices du Secrétaire général. 

M. OLOF SKOOG (Suède) a exhorté le Gouvernement à relancer le dialogue national avec toutes les parties, y compris l’opposition, la société civile et les défenseurs des droits de l’homme.  La participation des femmes à ce dialogue est cruciale, a observé le représentant, en soulignant que cela est indispensable à la recherche d’une solution pacifique.  Sa délégation a aussi souligné que les organisations régionales et sous-régionales sont d’une importance capitale pour empêcher que les crises émergentes ne s’aggravent.  Dans ce contexte, l’ONU a également un rôle de premier plan à jouer, à l’appui des efforts à déployer dans la région dans le domaine de la diplomatie préventive.  C’est la raison pour laquelle la Suède a regretté l’expulsion du Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies du Nicaragua. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie), a défendu la prise en compte, par le Conseil de sécurité, des points de vue des pays et de leur région lorsqu’il y a une crise.  Les expériences passées ont prouvé que la coopération internationale est couronnée de succès que lorsqu’elle est bien calibrée et coordonnées avec les efforts de la région, a-t-elle rappelé.

S’agissant du Nicaragua, la représentante a estimé que la situation ne représente pas une menace à la paix et la sécurité internationales qui justifierait une intervention du Conseil de sécurité.  À ses yeux il s’agit d’une crise interne qui doit être réglée par le dialogue et la négociation entre les parties politiques pour parvenir à une solution pacifique.  Il faut faire montre de prudence face à la situation au Nicaragua, a estimé la représentante pour qui les efforts à déployer pour que la situation n’échappe pas à tout contrôle, doivent se faire discrètement par le biais des missions de bons offices du Secrétaire général.  Autrement, on pourrait envoyer un mauvais signal aux parties concernées au Nicaragua et saper le processus de dialogue en cours, a averti la représentante.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé l’importance de la diplomatie préventive et le rôle des organisations régionales à cette fin.  Il a insisté sur la gravité de la situation actuelle au Nicaragua et défendu le droit de manifester pacifiquement.  Tout différend doit être réglé dans le respect du droit, a-t-il souligné, en exhortant les parties à dialoguer.  Enfin, il a demandé la poursuite des efforts de médiation et de dialogue et exhorté le Gouvernement à coopérer davantage avec la communauté internationale, afin que la situation dans ce pays n’ait plus à figurer à l’ordre du jour du Conseil. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a dénoncé la tenue de cette réunion du Conseil de sécurité sur la situation au Nicaragua sous couvert de briefing par un organisme régional.  « Le Conseil est une institution chargée de traiter des questions représentant une menace à la paix et sécurité internationales or le Nicaragua ne représente pas une telle menace », s’est indigné le représentant qui a regretté que le Conseil soit utilisé à des fins politiques. 

Il a rappelé que l’État nicaraguayen a appelé à un dialogue national par le biais de l’église catholique et s’est dit convaincu que grâce aux efforts déployés par l’État, les auteurs des infractions et des abus pourront être traduits en justice.  La Bolivie s’oppose à l’idée de manipuler des points à l’ordre du jour pour les utiliser comme des parapluies dans le but d’y insérer « tous les points possibles à des fins politiques ».  La Bolivie dénonce en outre cette manœuvre qui vise à placer « sur le banc des accusés » un pays membres des Nations Unies au nom de la diplomatie préventive, une manière d’agir qui, a averti le représentant, nuit à la crédibilité même de la diplomatie préventive.

Le délégué a ensuite dénoncé « l’obsession américaine de s’ingérer dans les affaires internes du Nicaragua depuis le début du XXe siècle », et a passé en revue les différentes étapes de cette histoire.  « Il n’y a pas eu dans l’histoire récente du Nicaragua de moments où ce pays n’ait pas fait l’objet d’ingérences américaines, ce qui a même été reconnu en 1986 par la Cour internationale de Justice », a–t-il notamment fait observer.  À ses yeux, « le pot au rose » de cette réunion est bien l’interventionnisme, l’ingérence et le financement de groupes de l’opposition au nom de la défense de la démocratie et des droits de l’homme par un État qui a pourtant « quitté le Conseil des droits de l’homme, qui promeut la torture ou l’enfermement de demandeurs d’asile et qui sépare les parents migrants de leurs enfants ».

Pour le représentant, l’objectif visé est de promouvoir des situations d’instabilité pour provoquer un changement de régime dans le but de mettre la main sur les ressources des pays visés.  « D’où sortent ces millions de dollars qui financent l’opposition au Nicaragua? », s’est-il demandé.  Si la communauté internationale veut véritablement aider le Nicaragua à régler ses problèmes cela doit se faire dans le cadre de la Charte des Nations Unies et en condamnant tout type d’interventionnisme visant à changer le régime, a conclu le représentant pour lequel la réponse à la crise nicaraguayenne doit être trouvée par les Nicaraguayens.

M. WU HAITAO (Chine) a demandé le respect de la souveraineté des pays et du principe de non-ingérence dans leurs affaires intérieures.  La situation au Nicaragua ne constitue pas une menace à la paix et la sécurité internationales et le Conseil de devrait pas s’en saisir, a-t-il conclu.

Mme NIKKI R.  HALEY (États-Unis) a déclaré qu’il y a un mois, elle se tenait sur le pont Simon Bolivar qui relie le Venezuela à la Colombie et qu’elle y avait observé une file d’attente interminable de personnes désespérées essayant d’« échapper à la tyrannie ».  L’ironie et la tragédie de ce pont ne devraient pas nous échapper, a-t-elle dit.  Nommé en l’honneur d’un grand libérateur, il est désormais une voie d’évasion pour un peuple affamé et emprisonné par un dictateur.  « Les droits de l’homme fondamentaux sont bafoués lorsque la capacité d’un homme à nourrir sa famille est détruite.  Les droits de l’homme sont bafoués lorsqu’une femme perd sa voix pour décider de son propre avenir.  Et lorsque les droits de l’homme sont bafoués, la violence et l’instabilité qui s’ensuivent débordent les frontières.  La crise d’un pays devient la crise d’une région.  Et même une crise mondiale », a affirmé la représentante.

Mme Haley a ensuite accusé le Président du Nicaragua, Daniel Ortega, d’avoir adopté la tactique des dictateurs qu’il a jadis dénoncés.  « Nous ne devrions pas être surpris.  Daniel Ortega et Nicolas Maduro sont taillés dans la même étoffe de corruption.  Ils sont tous deux étudiants de la même idéologie en faillite.  Et ils sont tous deux des dictateurs qui vivent dans la peur de leur propre peuple », a martelé la représentante.  Selon l’Association nicaraguayenne des droits de l’homme, a-t-elle rapporté, plus de 448 personnes ont été tuées et plus de 2 000 autres blessées.  Des centaines d’adversaires du régime ont été enlevés, dont six dirigeants étudiants du dialogue national qui l’ont été hier.  Des centaines d’autres ont disparu.  Et la semaine dernière, Ortega a expulsé une délégation des droits de l’homme des Nations Unies, a poursuivi Mme Haley.

Le résultat, a constaté la représentante des États-Unis, c’est le début de l’exode pour des Nicaraguayens désespérés.  Plus de 25 000 ont émigré au Costa Rica depuis le début de la crise.  Le Honduras, le Panama et le Mexique ont également accueilli des migrants et des demandeurs d’asile nicaraguayens.  « Chaque jour qui passe, le Nicaragua emprunte un parcours familier.  C’est un chemin que la Syrie a pris.  C’est un chemin que le Venezuela a emprunté.  Le Conseil de sécurité ne doit pas –il ne peut pas– être un observateur passif alors que le Nicaragua continue de se transformer en un État raté, corrompu et dictatorial, parce que nous savons où cette voie mène.  L’exode syrien a engendré des millions de réfugiés, semant l’instabilité dans tout le Moyen-Orient et en Europe.  L’exode vénézuélien est à l’origine du plus vaste déplacement de personnes dans l’histoire de l’Amérique latine.  Un exode nicaraguayen submergerait ses voisins et créerait un afflux de migrants et de demandeurs d’asile en Amérique centrale. 

« Nous avons encore la possibilité d’empêcher que l’histoire ne se répète », a estimé la représentante.  Le peuple nicaraguayen exige une voix dans son avenir.  Il appelle à la libération de manifestants emprisonnés arbitrairement.  Il appelle à la fin d’une dictature.  Il réclame sa propre liberté.

Le 18 juillet, a poursuivi la représentante, l’Organisation des États américains a adopté à une écrasante majorité une résolution qui tient le Gouvernement nicaraguayen pour responsable de violations des droits de l’homme et a créé depuis un groupe de travail chargé d’examiner la situation au Nicaragua.  « Pour le bien du peuple nicaraguayen, pour la sécurité de la région et pour le respect des droits de l’homme que nous sommes tenus de respecter, je félicite le Conseil de sécurité d’avoir ajouté sa voix puissante à ceux qui demandent la fin de la tyrannie au Nicaragua », a lancé Mme Haley.

Mon pays est épris de paix, a déclaré M. DENIS MONCADA COLINDRES, Ministre des affaires étrangères du Nicaragua.  Il a demandé la fin de toute ingérence violant le droit international, estimant que la situation dans son pays ne représente pas une menace à la paix internationale.  « Son inscription à l’ordre du jour du Conseil est une violation de la souveraineté du Nicaragua. » Mon pays est un rempart contre le terrorisme et les gangs organisés, a-t-il poursuivi.  Le Ministre a rappelé que le taux de croissance économique annuel est de 5% en moyenne et que la pauvreté a été réduite de moitié ces dernières années.  Le Nicaragua respecte ses engagements et le Conseil n’est de surcroît pas l’enceinte idoine pour discuter des droits de l’homme, a-t-il dit, en dénonçant toute politisation de ce dossier.  Le Ministre a déclaré que son pays promeut le dialogue national, « le dialogue du peuple avec le peuple, de la famille avec la famille », pour garantir la paix et la stabilité.  Enfin, il a rappelé que les États-Unis ont été condamnés en 1986 par la Cour internationale de Justice, à La Haye, pour actes terroristes commis au Nicaragua.  Il a exhorté ce pays à cesser son agression contre le Nicaragua et à respecter les droits de son peuple. 

Pour M. CARAZO ZELEDON (Costa Rica), cette réunion est opportune et nécessaire, compte tenu des violations de droits de l’homme constatées par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme au Nicaragua.  Le représentant a expliqué que la situation au Nicaragua est une question prioritaire pour son pays qui, directement ou indirectement, en est affecté.  « Notre pays ne restera pas indifférent à la souffrance de nos frères qui font face à une détérioration de l’État de droit et de la situation des droits de l’homme, y compris à une répression qui a coûté la vie à plus de 400 personnes. » 

Le délégué a également dénoncé les exécutions extrajudiciaires, les détentions forcées et les violences sexuelles commises dans les centres de détention ainsi que la politique d’intimidation qui vise les manifestants et leurs familles.  Conformément au droit international, il a rappelé au Gouvernement sa responsabilité de garantir la sécurité de sa population et, à défaut, a appelé la communauté internationale à prendre le relais.  Il s’est inquiété du fait que l’aggravement de la crise politique, économique et sociale au Nicaragua se fait déjà ressentir sur les pays voisins et représente un risque d’escalade pour toute la région de l’Amérique centrale, évoquant notamment l’augmentation significative de migrants et de demandeurs d’asile nicaraguayens au Costa Rica.  Pour la délégation costaricaine seule la voie du dialogue peut apporter une solution au conflit politique auquel est confrontée la population nicaraguayenne.  Aussi exhorte-t-elle, le Gouvernement du Nicaragua à mettre en place les conditions propices à ce dialogue.

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) a déclaré que ce Conseil a été forcé de se saisir de la situation au Nicaragua, ce qui, a-t-il dénoncé, constitue un précédent grave et montre l’arbitraire de la Présidence américaine.  À ses yeux, la situation au Nicaragua ne relève pas du mandat du Conseil.  Il a dénoncé la vague de terrorisme qu’a subi ce pays frère et qui, a-t-il accusé, vise à mettre à bas son gouvernement, tandis que l’OEA est à la solde des États-Unis.  Il a demandé la préservation du multilatéralisme et la fin de toute ingérence dans les affaires du Nicaragua, « qui est traité de la même façon que le Venezuela ».  Il a posé une série de questions incriminant les États-Unis pour leurs efforts en vue d’un soulèvement populaire et d’un changement de régime au Venezuela.  « Qui est l’agresseur? », a-t-il fait mine de s’interroger.  Enfin, il a rejeté l’instrumentalisation du Conseil par un pays sous un prétexte humanitaire en vue de changement de régime, comme cela a été le cas en Libye et en Iraq.  « Ne vous laissez pas entraîner dans ce bourbier », a-t-il lancé aux membres du Conseil. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité des droits du peuple palestinien: vives inquiétudes après la décision des États-Unis de suspendre leur participation financière à l’UNRWA

391e séance - matin
AG/PAL/1415

Comité des droits du peuple palestinien: vives inquiétudes après la décision des États-Unis de suspendre leur participation financière à l’UNRWA

Un responsable de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a souligné, ce matin, devant le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, les « conséquences très graves » de la récente décision des États-Unis de suspendre leur participation financière à l’Agence.  L’UNRWA est désormais plongée dans une véritable « crise financière », a noté le Vice-Président du Comité, M. Dian Triansyah Djani, en appelant les États Membres à soutenir l’Agence qui vient en aide à quelque 5,4 millions de réfugiés palestiniens.

Le Directeur du Bureau de l’UNRWA à New York, M. Peter Mulrean, s’est dit très « déçu » par cette décision des États-Unis, qui pourrait annoncer, s’est-il inquiété, un véritable « changement de paradigme » de l’action humanitaire.  Tout en reconnaissant le droit souverain de chaque État Membre de disposer de ses ressources comme il l’entend, M. Mulrean a indiqué que cette décision ne va pas dans le sens de l’accord signé plus tôt entre les États-Unis et l’UNRWA, dans lequel la bonne gestion de l’Agence avait été saluée.

Le Directeur a rejeté les critiques formulées contre le travail accompli par les écoles et hôpitaux de l’UNRWA.  Il a vu, au contraire, les activités de l’Agence comme « un bien public mondial ».  Depuis l’annonce en janvier dernier du gel par les États-Unis d’une contribution de 300 millions de dollars, l’UNRWA est parvenue à prendre des mesures de gestion « exceptionnelles » afin de mieux contrôler ses coûts, a-t-il poursuivi, en saluant aussi l’aide de 238 millions de dollars fournie par 30 donateurs.

M. Mulrean a indiqué que le déficit budgétaire de l’UNRWA en 2018 s’élève à 200 millions de dollars.  « Nous n’arriverons pas à financer nos activités au-delà de la fin du mois de septembre si l’UNRWA ne reçoit pas des ressources supplémentaires », a-t-il averti, ajoutant que des millions d’enfants palestiniens allaient en pâtir.  « Le travail de l’Agence est vital pour la dignité des Palestiniens. »

Le Directeur a déploré que la décision américaine soit motivée par des considérations politiques, alors que l’UNRWA est une agence humanitaire.  « L’Agence ne doit pas devenir la victime de calculs politiques, qui pourraient saper toute l’action humanitaire. »  Depuis 1950, l’UNRWA a présenté des rapports transparents et l’Assemblée générale a toujours renouvelé son mandat, a conclu M. Mulrean, en rappelant que seule l’Assemblée peut modifier son mandat.  

« L’heure est grave », a affirmé Mme Feda Abdelhady Nasser, Observatrice adjointe de l’État de Palestine, en soulignant « les temps dangereux et extraordinaires que nous vivons ».  Elle a déclaré qu’Israël, soutenu par les États-Unis, n’assume aucune de ses responsabilités de Puissance occupante.  Elle a fustigé également la décision des États-Unis de suspendre leur contribution à l’UNRWA, ainsi que la tentative de ce pays de modifier le statut même de réfugié palestinien, afin d’ôter la question des réfugiés de la table des négociations.

Mme Nasser a ensuite rappelé la définition, selon le droit international, de la catégorie de « réfugié », avant d’indiquer qu’aucun pays ne peut nier cette définition.  Elle a par ailleurs dénoncé la loi sur l’État nation récemment adoptée en Israël, « une loi raciste et discriminatoire ».  Les délégués de Cuba et de la Turquie ont également critiqué la décision américaine et les efforts accomplis pour jeter le discrédit sur les activités de l’UNRWA.

Auparavant, le Comité avait passé en revue ses activités les plus récentes, notamment sa retraite annuelle organisée par la mission du Sénégal le 2 août.  Le Bureau du Comité a convenu de la nécessité, « compte-tenu du climat politique actuel », d’accroître ses activités de sensibilisation aux États-Unis, a déclaré M. Djani.  Le Vice-Président a par ailleurs déclaré qu’une délégation du Comité devrait se rendre à Bruxelles et à Berlin, du 15 au 20 octobre, dans le but « de renforcer le soutien diplomatique de l’Union européenne, de la Belgique et de l’Allemagne pour la solution des deux États, la reconnaissance de l’État de Palestine et une protection des civils palestiniens ».

Enfin, le Comité a approuvé le projet de rapport annuel* qui devrait être soumis à l’attention de l’Assemblée générale lors de sa soixante-treizième session.  Présenté par le Représentant permanent de Malte, M. Carmelo Inguanez, le rapport couvre les travaux du Comité et les développements sur le terrain depuis le 6 septembre 2017, son dernier chapitre contenant les conclusions et recommandations du Comité à l’Assemblée générale.

Rappelant que 2018 marque le soixante-dixième anniversaire de « l’expulsion des réfugiés palestiniens de leur patrie en 1948 », un évènement connu sous le terme d’« Al-Nakba » (la catastrophe), le cinquante-et-unième anniversaire de l’occupation israélienne, le Comité exhorte la communauté internationale à redoubler efforts pour la réalisation de la solution des deux États sur la base des frontières de 1967.

Pour le Comité, il est nécessaire de « reformuler » le conflit israélo-palestinien, car il ne s’agit pas d’un différend territorial entre deux parties, mais d’un conflit déclenché par « un État occupant, colonisant et annexant le territoire d’un autre État ».  Ses membres, a indiqué le rapporteur, soutiennent la révision du modèle existant de négociations bilatérales dans un cadre multilatéral élargi et se félicite du plan en huit points présenté au Conseil de sécurité par le Président de l’État de Palestine, M. Mahmoud Abbas, le 20 février 2018.

Enfin, dans le rapport, le Comité demande qu’il soit mis fin au blocus aérien, terrestre et maritime de Gaza, mis en place il y a 11 ans.  En outre, il exhorte les États Membres qui reconnaissent Jérusalem comme capitale d’Israël à annuler ces décisions, souligne la nécessité de mettre en place un mécanisme de protection et appelle à soutenir la commission d’enquête mandatée par le Conseil des droits de l’homme sur les violations commises le long de la barrière entre Israël et la bande de Gaza pendant les grandes manifestations de la Marche du retour.

*A/AC.183/2018/CRP.2

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Démarrage de la première session de négociations sur un traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer

Première session,
6e & 7e séances - matin & après-midi
MER/2076

Démarrage de la première session de négociations sur un traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer

C’est devant une salle comble que Mme Rena Lee, la Présidente de la Conférence intergouvernementale sur un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, a souhaité, ce matin, la bienvenue aux nombreuses délégations et organisations qui ont répondu présent, pour la première session de fond de la Conférence qui en prévoit quatre d’ici à 2020.

Elle leur a rappelé que le but de cette Conférence intergouvernementale est d’examiner les recommandations du Comité préparatoire établi par la résolution 69/292 de l’Assemblée générale, du 19 juin 2015, sur les éléments de texte d’un futur instrument juridiquement contraignant.  L’objectif est de négocier un avant-projet de texte dans les plus brefs délais.

Cet instrument est d’autant plus important pour l’avenir du monde, a souligné le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, M. Miguel De Serpa Soares, que les océans et les mers durables peuvent contribuer à l’éradication de la pauvreté, à une croissance économique soutenable, à la sécurité alimentaire et à la création de moyens de subsistance durables et des emplois décents.  Dans le même temps, protéger l’environnement marin, y compris la biodiversité, contribue à renforcer la résilience face aux impacts des changements climatiques.

Les discussions, a précisé la Présidente, s’articuleront autour des quatre grands axes thématiques: renforcement des capacités et transfert de technologies marines; outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées; évaluation de l’impact sur l’environnement; accès et partage des ressources génétiques marines.  Il a été décidé, ce matin, que ces quatre thèmes feront l’objet de discussions en groupes de travail informels, chacun ayant « un jour et quart » pour travailler, avant de revenir en séance plénière pour discuter du fruit de ces travaux.

Les nombreuses délégations qui ont pris la parole aujourd’hui –39 interventions au total- ont remercié la présidence de la Conférence de leur avoir soumis en amont un document de synthèse pour faciliter leurs débats**, dans lequel il est notamment rappelé que ni ce processus ni son résultat ne doivent porter préjudice aux instruments et cadres juridiques en vigueur ou aux organes mondiaux, régionaux et sectoriels pertinents.  Ce point a été repris par plusieurs représentants, dont ceux du Canada et de l’Australie, pour lesquels le futur accord doit être compatible avec la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et la Convention sur la biodiversité.

De son côté, le représentant de Monaco a souligné que « la conservation et l’utilisation durable » doivent aller de concert.  Ainsi, les travaux en cours doivent s’inscrire sur le long terme, à l’échelle des générations, en s’inspirant de l’esprit des négociateurs de la Convention de Montego Bay.  Il a fait remarquer que cette « Convention fixe déjà un certain nombre d’obligations et de normes en matière de protection du milieu marin, de coordination internationale et de règlements des différends, qui demeurent plus pertinentes que jamais ».

Aux yeux de la Fédération de Russie, le fait que certaines délégations appellent à se servir plutôt des instruments existants est le signe du scepticisme entourant la négociation d’un nouvel instrument sur ces questions.  De l’avis de la délégation russe, « nous sommes très loin du consensus ».

Pour son homologue islandaise, un point de départ solide pour les négociations à venir serait de savoir si l’instrument est basé sur une approche globale, régionale ou hybride.  « En répondant à cette question fondamentale, nous réduirions considérablement le champ des négociations, et ainsi, raccourcirions notre temps de travail », a-t-elle estimé.  De son côté, le représentant de l’Union européenne a conseillé de s’élever « au-dessus des débats conceptuels qui ont caractérisé le Comité préparatoire et d’aller vers des négociations basées sur des textes ».  Sa priorité pour cette session de fond est « d’identifier les fonctions-clefs » du futur instrument, ainsi que les différentes options ou solutions en matière de régulation.

Lors de la conférence organisationnelle d’avril, les délégations étaient parvenues à un consensus sur la composition du Bureau de la Conférence, qui sera composé de la présidente et de 15 vice-présidents, dont trois représentants par groupe régional siégeant en leur capacité nationale.  La Présidente a tenu à repréciser que cette décision ne saurait « en aucun cas » créer de précédent pour la répartition géographique des bureaux d’autres processus de négociation.  Elle a également demandé que les vice-présidents ne changent pas d’une session de fond à une autre, pour « garantir la continuité ».  Ainsi 12 États ont été élus par acclamation ce matin aux postes de vice-présidents: Algérie, Belgique, Bulgarie, Canada, Chine, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Fédération de Russie, Japon, Maroc, Maurice et Pologne.

Pour ce qui est des trois vice-présidents devant appartenir au Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes, qui a présenté six candidatures, ils seront élus le 6 septembre.

En début de séance, l’ordre du jour* de la Conférence a été adopté ainsi que son programme de travail révisé ** qui sera publié ultérieurement.

* A/CONF.232/2018/L.3

** A/CONF.232/2018/3

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Déclarations d’ouverture

Mme RENA LEE, Présidente de la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine, a souhaité la bienvenue ce matin aux nombreuses délégations et organisations présentes pour cette première session de fond de la Conférence qui en prévoit quatre d’ici à 2020.  Elle leur a rappelé que le but de cette Conférence intergouvernementale est d’examiner les recommandations du Comité préparatoire établi par la résolution 69/292 du 19 juin 2015 sur les éléments de texte et de négocier et aboutir à un projet de texte préalable de cet instrument international juridiquement contraignant dans les plus brefs délais.

Les discussions, a précisé la Présidente, s’articuleront autour de quatre grands axes thématiques à débattre en plénière ou en groupes de travail informels: renforcement des capacités et transfert de technologies marines; outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées; évaluation de l’impact sur l’environnement; accès et partage des ressources génétiques marines.  Il a été décidé, aujourd’hui, que ces quatre thèmes feront l’objet de discussions en groupes de travail informels d’« un jour et quart », dans l’ordre des questions énoncées et qu’il y aura ensuite à nouveau des réunions plénières pour présenter les travaux de ces quatre groupes de travail.

La Présidente de la Conférence s’est dite consciente des divergences de vue sur les moyens d’atteindre l’objectif fixé et de refléter les préoccupations et les intérêts des uns et des autres.  Elle reste néanmoins confiante que grâce à l’esprit de coopération qui a prévalu lors de la Conférence d’organisation en avril, il sera possible d’aller de l’avant.  Pour elle, cette Conférence représente une opportunité pour faire la différence sur la manière de gérer les ressources de nos océans.  « Alors, saisissons-la! »

M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, a souligné combien la voie qui a conduit à cette session a été fructueuse.  Il y a 25 ans, a-t-il rappelé, démarrait une autre conférence des Nations Unies sur les négociations relatives à des questions liées aux océans, pour se conclure avec succès avec l’adoption de l’« Accord sur les stocks de poissons de 1995 », dont l’intitulé exact est l’« Accord aux fins de l’application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s’effectuent tant à l’intérieur qu’au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs ».

M. Soares s’est fit confiant que la présente Conférence sera tout aussi fructueuse et conduira, au plus vite, à un instrument auquel toutes les délégations adhéreront.  Un instrument qui apporte une solide contribution à la préservation et l’usage durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

Le Conseiller juridique a ensuite rappelé que les océans, et les écosystèmes dont ils regorgent, sont essentiels à la vie sur terre.  Malheureusement, ces écosystèmes subissent des pressions de plus en plus fortes.  Si ces pressions et leurs conséquences ne sont pas maîtrisées, alors leur effet cumulatif conduira à un cycle destructif dans lequel les océans ne seront plus en mesure d’offrir certaines des ressources dont dépendent les humains et d’autres êtres vivants.  Il a aussi fait remarquer que des océans et des mers durables peuvent contribuer à l’éradication de la pauvreté, à une croissance économique soutenue, à la sécurité alimentaire et à la création des moyens de subsistance durables et d’emplois décents.  Dans le même temps, protéger l’environnement marin, dont la biodiversité, aidera à renforcer la résilience face aux impacts des changements climatiques, a-t-il ajouté.

M. Soares a salué l’ambiance collégiale qui avait prévalu au cours des discussions d’avril dernier, avant de souhaiter un plein succès aux participants à la présente session de fond, afin qu’ils élaborent l’« instrument ambitieux » que les peuples et la planète attendent.

Déclarations

M. MOHAMED GAD (Égypte), qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a salué le démarrage de la première session des négociations intergouvernementales sur un traité juridiquement contraignant pour protéger la biodiversité marine en haute mer.  Rappelant que le G77 et la Chine ont été l’un des moteurs de ce processus jusque-là, il a regretté qu’à ce jour encore on ne soit pas à jour dans l’intérêt porté à cette question.  Il a souligné l’importance d’œuvrer en faveur de la durabilité de « nos océans » et a appelé à travailler ensemble et de bonne foi pour rédiger le plus rapidement possible un avant-projet de cet instrument juridiquement contraignant.  M. Gad a remercié la Présidente de la Conférence pour le document qu’elle a remis aux délégations pour guider les discussions.  Le G77 l’a étudié avec attention et se dit disposé à travailler de façon productive pour que cette session soit couronnée de succès, a assuré le représentant.  

M. MEHDI REMAOUN (Algérie), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a souhaité que cette session de fond et les trois autres à venir offrent l’occasion de « naviguer en douceur » vers le texte final du traité.  Il a souligné que le « projet zéro » attendu au cours de cette session devrait servir de base de travail pour la prochaine session.  Il a tenu à préciser que les éléments qui constitueront ce document de départ seront la base des négociations intergouvernementales et ne sauraient être considérés comme étant le fruit d’un consensus entre délégations. 

En ce qui concerne la troisième session de fond, le Groupe des États d’Afrique espère que la date pressentie sera modifiée, afin de permettre à la Division des affaires maritimes et du droit de la mer de faire des réservations de salle suffisamment en avance, tout en tenant compte du fait qu’il faut à tout prix éviter de tenir une session au mois de septembre.  Le Groupe a en outre remercié les donateurs qui ont contribué au fonds d’affectation spéciale établi en soutien à la participation d’experts des pays en développement.  Le représentant a conclu en recommandant d’harmoniser les positions grâce à un dialogue franc, direct et ouvert entre délégations.

Le représentant des Maldives, qui s’exprimait au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a remercié la Présidente de la Conférence intergouvernementale pour le document fort utile qu’elle a remis aux délégations en amont de cette session pour guider le dialogue.  Il s’est dit prêt à participer activement au processus en cours dans le but de parvenir le plus rapidement possible à un traité juridiquement contraignant pour protéger la biodiversité marine en haute mer dont la conservation et l’utilisation durable ne relève pas de juridictions nationales.

Constatant qu’à ce jour « nous ne savons que peu de choses des zones de haute mer dont seule une partie infime a été explorée », il a martelé qu’il était néanmoins de « notre responsabilité collective de les préserver », en particulier leur biodiversité, par le biais d’un instrument juridiquement contraignant.  Le but est de conserver leurs ressources pour les générations suivantes.  « Il s’agit d’une responsabilité collective qui ne peut être assumée qu’avec un appui mondial », a-t-il exigé. 

Le représentant du Bangladesh, s’exprimant au nom des pays les moins avancés (PMA), a salué la décision de la Présidente de former des groupes de travail informels pour les quatre thèmes agréés en 2011.  Au sujet du « projet zéro », le représentant a assuré que son groupe entendait prendre part aux discussions de manière constructive.  Il est important, a-t-il estimé, de ne pas repousser indéfiniment l’examen de ce projet, même s’il persiste des points de divergence entre délégations sur certains présupposés. 

Le délégué de l’Union européenne a répété qu’il souhaitait une approche graduelle et évolutive, en se basant sur les résultats du Comité préparatoire.  Il a ajouté qu’il fallait s’élever « au-delà des débats conceptuels qui ont caractérisé le Comité préparatoire, et aller vers des négociations basées sur des textes ».  Sa priorité pour cette session de la Conférence intergouvernementale est « d’identifier les fonctions-clefs » du futur instrument, ainsi que les différentes options ou solutions en matière de régulation.

« Nous devons discuter des problèmes concrets pour qu’à la fin de cette session, des points de convergence émergent », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité que la communauté internationale puisse répondre précisément aux questions « que contient l’accord » et sur « comment » le mettre en œuvre.  Jugeant nécessaires la souplesse et la rapidité des débats pour aboutir à un texte négocié dans les meilleurs délais, le représentant a proposé à la Présidente de mettre en place une « feuille de route » d’ici à la fin de cette session.

M. JULIO CÉSAR ARRIOLA (Paraguay), s’exprimant au nom des 32 pays en développement sans littoral, a dit que ceux-ci ont besoin que leur soit assuré le droit de transit afin qu’ils puissent accéder à la haute mer.  Il a plaidé pour la préservation de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, un patrimoine commun de l’humanité, a-t-il expliqué.

Il a aussi appelé à une utilisation équitable et juste des ressources marines, tout en insistant sur le renforcement des capacités des pays en développement, notamment ceux sans littoral, afin qu’ils puissent également bénéficier des avantages de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  M. Arriola a rappelé que les défis spécifiques qui se posent aux pays en développement sans littoral avaient été reconnus par de nombreux accords multilatéraux, y compris le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le Programme d’action de Vienne en faveur des pays en développement sans littoral pour la décennie 2014-2024.  Le Groupe souhaiterait donc que le futur instrument tienne compte de leurs droits, qui ont du reste été mentionnés dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. 

La représentante des Palaos, qui s’exprimait au nom des 12 petits États insulaires du Pacifique, a expliqué que l’identité de ces pays dépend directement des océans.  Compte tenu de cette relation très étroite avec les océans, ces États ont participé dès le départ avec beaucoup d’intérêt au processus mené par le Comité préparatoire sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Ils espèrent que ce processus se poursuivra dans une atmosphère de respect mutuel permettant à chaque pays de se faire entendre.  « Nous sommes ici pour travailler », a rappelé la représentante avant de souligner qu’il s’agit d’un engagement très couteux pour de nombreuses délégations pour lesquelles il est impératif de réussir.

Elle a remercié la présidence de la Conférence pour le document établi pour guider les négociations de cette première session de fond, estimant qu’il parvient à « un équilibre entre les différentes approches et priorités ».  Pour les petits États insulaires du Pacifique, le futur traité doit répondre aux aspirations de tous.  Ces États attendent des discussions sur des éléments-clefs, notamment les connaissances traditionnelles des pays insulaires en développement.  Insistant pour « aller de l’avant », la représentante a salué le format de travail proposé par la présidence de la Conférence et s’est réjouie de présider l’un des quatre groupes de travail informels.

Mme JULIETTE RILEY (Barbade), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a rappelé qu’en avril dernier, la présidence de la Conférence et son secrétariat avaient déjà émis le vœu que la présente session soit marquée par « une pluie d’idées et une tempête d’inspiration ».  Elle a rappelé que les 14 membres de la CARICOM, des États insulaires, dépendent des ressources marines pour leur développement économique.  Ils ont aussi des liens sociaux, culturels et environnementaux solides avec l’environnement marin. 

La représentante a évoqué les défis auxquels les océans font face, parmi lesquels les changements climatiques et d’autres facteurs qui conduisent à l’acidification des océans et, partant, le blanchiment des récifs coralliens.  Elle a dit être consciente que malgré tous les efforts qui seront consentis, tous les États ne vont pas forcément ratifier l’instrument universel qui sera établi.  Elle a cependant souhaité que ce nouvel instrument tienne compte des préoccupations de toutes les délégations.  Elle a aussi rappelé que les négociations à venir allaient s’appuyer sur les travaux menés au cours des deux années du processus mené par le Comité préparatoire.

Le représentant du Canada s’est dit fermement résolu à participer de façon constructive à cette première session de fond en soulignant qu’il s’agit de relever « tous ensemble » certains des principaux défis touchant les océans du monde parce que ces problèmes « nous concernent tous ».  Il a prôné une perspective mondiale, qui optimise les synergies, la coordination et la coopération, seul moyen selon lui d’obtenir des résultats positifs.  Fier de s’associer au Kenya pour accueillir la Conférence sur l’économie bleue en novembre, le Canada prévoit d’y engager une conversation mondiale sur les océans productifs et durables.  Le Canada est tout aussi fier d’assumer la présidence du G77 en 2018 et a l’intention d’en tirer profit pour mobiliser les efforts visant à des océans sains et durables, notamment en matière de résilience côtière.  Ainsi, a annoncé le délégué, les ministres de l’environnement et des océans du G77 se réuniront à Halifax, en Nouvelle-Écosse, du 19 au 21 septembre 2018, afin d’approfondir les discussions tenues par leurs dirigeants en juin.

Revenant à la présente session, le représentant a invité les délégations à s’éloigner de la dynamique du Comité préparatoire, où des positions générales ont été échangées, et à passer à un mode intégral de négociation en vue de la production d’un avant-projet de texte à partir duquel il sera possible de progresser davantage.  Par rapport aux thèmes principaux, le Canada a soumis dès à présent certaines réflexions, notamment pour ce qui est des ressources génétiques marines où il est important de trouver une approche pratique et viable pour le partage approprié des avantages, tout en respectant les droits et obligations existants en vertu du droit international.  Le représentant a également estimé qu’en ce qui concerne la gestion par zone, il est important de trouver une bonne formule pour une intervention efficace au niveau mondial, tout en tirant parti de l’expertise des autres entités pertinentes et en respectant leurs mandats.

Pour le Canada il s’agit d’élaborer un instrument qui soit pleinement conforme aux dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il faut veiller à ce que les efforts entrepris dans le cadre du processus en cours ne nuisent pas aux instruments et aux cadres juridiques pertinents, ainsi qu’aux travaux des organismes mondiaux, régionaux et sectoriels concernés.

M. LIONEL YEE WOON CHIN (Singapour) a fait remarquer que la Convention sur le droit de la mer, négociée il y a 40 ans, qui est parvenue à un équilibre entre exploitation et protection des océans et des mers, est « un produit de son temps ».  Il a cependant rappelé que la biodiversité dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale n’avait pas été pleinement abordée en 1982, même si le champ d’action des États Membres n’est pas totalement vierge de tout droit.  Il y a en effet plusieurs instruments qui traitent de la question de la biodiversité et des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, a souligné M. Chin.  La Convention sur la biodiversité est entrée en vigueur en 1993 et compte 193 États parties, a-t-il ainsi rappelé à titre d’exemple.  En conclusion, le délégué a souhaité que la recherche de l’équilibre guide les négociations qui s’ouvrent comme elle avait animé celles ayant abouti à la Convention sur le droit de la mer.  « Ma délégation est optimiste que nos divergences pourront être comblées si un esprit de coopération l’emporte. »

Pour Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, la règlementation pour protéger notre environnement est non seulement un impératif moral mais aussi une solution vitale pour répondre à la gravité de la situation actuelle qui, a-t-il précisé, exige une réponse immédiate.  Il a prôné, avec l’accord à venir, une stratégie à long terme dans le contexte de la Convention sur le droit de la mer.  Étant donné l’endroit où se trouvent ces zones, en dehors des juridictions nationales, les activités scientifiques et commerciales sont au cœur de cet accord, a-t-il souligné.  Par conséquent cet accord doit avoir une large application à la fois pour combler les lacunes existantes dans les cadres règlementaires actuels et pour ne pas saper les structures zonales, régionales et sectorielles actuelles, a prévenu l’Observateur permanent, dans le but de ne pas rouvrir des négociations mondiales à chaque fois qu’une nouvelle ressource est découverte ou lorsqu’une nouvelle activité commerciale est engagée dans ce cadre. 

Le Saint-Siège invite donc les délégations à adopter une approche qui englobe six éléments lors de cette première phase de négociations, à commencer par une approche basée sur les responsabilités plutôt que sur les droits.  Même si les bénéfices économiques et l’équité sont au cœur des débats sur les ressources marines, c’est leur préservation qui doit être centrale dans l’approche collective.  L’Observateur permanent a également appelé à faire la différence entre les deux mandats distincts qui sont d’une part la conservation, et, d’autre part l’utilisation durable.  Il a noté que les structures réglementaires actuelles se basent sur un modèle « d’utilisation » et que par conséquent il faut reconnaître cette différence pour ne pas saper ces structures.  Il a également encouragé les délégations à se pencher sur la recherche et les études dans un cadre de coopération et à se concentrer sur les ressources plutôt que sur les activités humaines.  Une autre distinction à faire, selon le Saint-Siège, est celle entre « l’accès à » et « l’utilisation de » ces ressources marines, en expliquant notamment que l’accès dans un but de recherche scientifique et de navigation doit être contrôlé pour assurer la coopération et éviter de nuire à l’environnement marin.  L’usage, par contre, doit être règlementé à la fois pour protéger les écosystèmes et pour veiller à la durabilité de l’exploitation de certaines ressources.

S’agissant du financement de ce processus, l’Observateur permanent a remarqué que, historiquement, les lois sont promulguées avec en amont des financements publics qui, à terme, sont remplacés par des investissements privés une fois le travail initial achevé, et les méthodes d’exploitation définies.  Les besoins en ressources de l’humanité indiquent que l’économie bleue est appelée à grandir de manière significative.  « C’est notre mandat d’anticiper les changements qui vont en découler, et de donner la priorité à la vie sous toute ses formes », a conclu l’Observateur permanent.

M. TEODORO L. LOCSIN, JR (Philippines) a estimé que l’instrument attendu allait contribuer à combler les lacunes de la gestion et de l’usage de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il a souligné qu’en tant qu’héritage de l’humanité, cette biodiversité doit être gérée de manière durable, tandis que ses bénéfices doivent être partagés équitablement entre les parties prenantes.  Le futur instrument, a-t-il espéré, doit être guidé par les principes de respect des droits, obligations et intérêts des États parties, comme cela est préconisé par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, y compris le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriales de tous les États.

M. Locsin a souhaité en outre que tous les éléments agréés en 2011 reçoivent la même attention de la part des délégations.  Il a aussi jugé crucial l’accès équitable aux bénéfices de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, ainsi que le renforcement effectif des capacités et le transfert de technologies marines.

Le représentant de Monaco s’est dit convaincu que les travaux de cette Conférence allaient profondément marquer le droit international de la mer.  Désirant « esquisser dès à présent les contours de l’instrument », il a souhaité pour cela bâtir sur les échanges de vues eus lors des précédentes réunions et sur les documents à disposition.  « Les compilations de positions écrites et l’ensemble des vues exposées par toutes les délégations lors du Comité préparatoire fournissent un lot d’informations conséquent », a-t-il souligné. 

Convaincu que « la conservation et l’utilisation durable » doivent aller de concert, le représentant a souhaité que les travaux en train d’être menés s’inscrivent sur le long terme, à l’échelle des générations, en s’inspirant de l’esprit des négociateurs de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  « La Convention fixe déjà un certain nombre d’obligations et de normes en matière de protection du milieu marin, de coordination internationale et de règlements des différends, qui demeurent plus pertinentes que jamais », a-t-il estimé.

M. ALEJANDRO VERDIER (Argentine) a salué la volonté de la communauté internationale d’atténuer les effets négatifs des activités mettant en péril la vie marine.  Pour lui, l’instrument envisagé est un moyen de développer les ressources de manière plus équitable dans les zones de haute mer.  Qualifiant la Convention sur le droit de la mer d’un « équilibre délicat des droits et devoirs » de chaque pays, M. Verdier a déploré qu’il n’existe pas encore de mécanisme global et mondial du droit international de la mer pour les eaux ne relevant pas de juridictions nationales.  Concernant les objectifs de conservation, « nous ne pouvons pas nous contenter de mesures partielles », a-t-il estimé, plaidant pour un mécanisme institutionnel mondial robuste et disposant d’un pouvoir réel.

Concernant la contribution à la biodiversité, M. Verdier a regretté que « seule une poignée de particuliers ont accès de manière non restreinte aux ressources génétiques marines ».  « Ce n’est pas acceptable », a-t-il jugé, rappelant que ces ressources sont un patrimoine de l’humanité, ainsi que l’ont décrété les textes internationaux.  L’instrument doit donc prévoir un mécanisme de distribution équitable des bénéfices, a dit M. Verdier, qui s’est dit opposé au statu quo et à l’unilatéralisme.  « Le renforcement des capacités de transfert des techniques marines doit être pris en compte », a conclu le représentant, qui a appelé à une négociation rapide après l’élaboration d’un projet de texte.

M. FINTAKPA LAMEGA DÉKALÈGA (Togo) a affirmé qu’en tant qu’État côtier, partie à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, son pays reste convaincu que pour une conservation et une utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction marine, il est impérieux d’élaborer, le plus tôt possible, un instrument international juridiquement contraignant.  C’est la raison pour laquelle son pays a activement participé aux travaux des quatre réunions du Comité préparatoire, aux négociations ayant abouti à l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution 72/249 ainsi qu’aux travaux de la réunion d’organisation d’avril 2018.

En décidant de convoquer la présente Conférence intergouvernementale, l’Assemblée générale lui a confié un mandat précis, celui d’examiner les recommandations du Comité préparatoire sur les éléments de texte d’un instrument international juridiquement contraignant, a-t-il rappelé.  Il a insisté sur le fait que les négociations doivent porter sur l’ensemble des questions retenues par l’Assemblée générale en 2011, à savoir la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale dont les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages; la gestion des ressources par zone, y compris les aires marines protégées; les études sur l’impact sur l’environnement; ainsi que le transfert des techniques marines.

Compte tenu de l’importance de toutes ces questions, la délégation togolaise souhaite vivement qu’à l’issue des débats de fond de cette première session, le projet zéro du futur instrument soit préparé et soumis aux délégations pour examen avant la seconde session prévue en 2019.

M. SUPARK PRONGTHURA (Thaïlande) a salué le document que la présidence de la Conférence a remis aux délégations pour orienter les débats de l’étape préliminaire de l’élaboration d’un avant-projet de texte sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Sur les questions de fond, il a estimé que la question de l’accès et du partage de bénéfices de ressources marines génétiques, il a estimé qu’elle devait être régie par le principe du patrimoine de l’humanité.  Il a également proposé, qu’indépendamment de l’usage qui sera fait du poisson (génétique ou pas), il faudrait régir tous les poissons en haute mer selon ce principe indépendamment de leurs ressources génétiques.  En adhérant à ce principe, le nouvel instrument sera en mesure d’harmoniser les mesures de conservation et de gestion et de fixer une norme globale pour ces mesures.

Le représentant de l’Australie a appelé à un traité « robuste » et « équitable », un instrument qui fournisse des instruments supplémentaires pour réguler des zones « dont nous dépendons tous », a-t-il rappelé.  Les zones ne relevant pas de juridictions nationales disposent déjà d’un cadre juridique, qu’il faudra veiller à ne pas bouleverser, a-t-il noté.  Avec cette Conférence, qui ouvre la voie à un avant-projet de texte, beaucoup de détails seront abordés, a prévu le représentant en espérant que l’accent soit mis « sur l’objectif final, sur ce que nous voulons accomplir ensemble ».

Le représentant des Seychelles a estimé qu’aujourd’hui ouvre un nouveau chapitre sur la route vers un instrument juridiquement contraignant qui servira les intérêts de toute la planète.  Notant que de nos jours, les océans subissent des activités intenses, dangereuses et parfois destructrices, il a estimé que cet instrument devra permettre d’y répondre pour assurer un avenir pérenne pour les moyens de subsistance qui découlent des océans.  Sa délégation est reconnaissante à la présidence pour le document qu’elle a fait circuler pour guider ces deux semaines de négociations sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer.  Le représentant a rappelé qu’en tant que pays qui dépend des ressources marines, les Seychelles sont fermement attachées au principe de patrimoine de l’humanité pour les océans.   « Le monde doit faire en sorte d’assurer la pérennité des zones de haute mer dans le cadre de l’économie bleue », et, pour cela il faut des institutions adéquates, un partage de l’expertise ainsi que des garanties pour un accès équitable à ces zones pour les pays en développement.  Il faut également mettre l’accent sur les études d’impact sur les effets sur la biodiversité marine et ajuster les techniques marines en fonction, a-t-il conclu.

Le représentant de l’Équateur, désireux d’avancer et « d’arriver à bon port le plus rapidement possible », s’est félicité du document distribué par la Présidente, le qualifiant « d’excellente base ».  Il s’est dit impatient de démarrer les travaux en petits groupes de travail.

M. JEEM LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a déclaré qu’en tant que « peuple des océans », la Micronésie allait faire « tout ce qui est en son pouvoir pour protéger et préserver les océans pour le bien des générations futures ».  S’attendant à discuter des aspects pratiques et à choisir les éléments qui devraient soit être reflétés dans le texte du traité, soit examinés dans un contexte plus scientifique ou encore politique, le représentant a espéré avancer.  Il a souhaité que l’élaboration de l’avant-projet approche, « plutôt que de recycler les positions précédentes ».  « Le calendrier est important.  Nous devons trouver le bon équilibre entre ceux qui veulent avancer rapidement et ceux qui réclament plus de temps. »

Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a rappelé d’emblée les grandes ambitions de l’ODD 14 pour veiller à obtenir des océans et mers propres, productifs et résilients, avant de souligner la vulnérabilité de la biodiversité marine dans les zones de haute mer en appelant à en finir avec le pillage des ressources de ces zones qui échappent à la juridiction nationale.  La région pacifique et le Forum des leaders des îles du Pacifique ont reconnu, dès 2014, la priorité d’appuyer la création d’un instrument juridiquement contraignant, sous la Convention des Nations Unies du droit de la mer, pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer, et, pour cela il faut pouvoir compter sur la coopération et les partenariats car il s’agit d’un défi transfrontalier, a-t-il conclu.

Le représentant de la Norvège a recommandé une approche plus intégrée pour gérer les zones situées hors des juridictions nationales.  Là, a-t-il rappelé, les activités s’étendent du fret au minage des fonds marins en passant par la pêche.  Rappelant que de nombreuses organisations internationales, comme l’Organisation maritime internationale (OMI), sont déjà chargées de gouverner ces zones, il a soutenu que des mécanismes avec des pouvoirs juridiques étendus existaient déjà.  « Ce dont nous avons besoin est d’une approche plus intégrée pour les zones hors des juridictions nationales où la conservation et les usages sont mesurés ensemble, avec comme horizon l’amélioration des résultats en matière de conservation et la promotion d’un usage plus raisonné des ressources », a-t-il résumé.

Considérant que tous les États doivent pouvoir exercer leurs droits et leurs devoirs en adéquation avec la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, le renforcement des capacités est une priorité pour la Norvège, qui a rappelé coopérer depuis des décennies avec les pays en développement pour bâtir leurs capacités en matière de gestion des océans.  Dans ce domaine, le délégué a mis l’accent sur « un mécanisme de partage des bénéfices lié aux ressources génétiques marines », et appelé à faciliter le partage d’informations sur le matériel collecté dans ce cadre.  Il a plaidé en faveur d’une aide au développement sur le plan technologique, pour améliorer la conservation et la gestion des zones maritimes nationales des pays en développement.

Le représentant des Tuvalu a expliqué que son pays, en tant que petit archipel du Pacifique, dépendaient entièrement des océans, et se devaient d’appuyer la conservation et l’utilisation durable des océans.  Les Tuvalu vont d’ailleurs déposer leurs instruments d’accession au Protocole de Nagoya sur l’accès et le partage des avantages.  Convaincus que l’océan est crucial pour toute société insulaire, « nous ne voudrions pas que certains éléments n’apparaissent pas dans les instruments », a-t-il craint en citant par exemple les connaissances traditionnelles des communautés locales.  « La liberté en haute mer n’est pas illimitée: il y a une obligation de protection des environnements marins. »  La route sera « longue et sinueuse », mais c’est un signe positif pour l’avenir des océans, a conclu, optimiste, le représentant.

Mme ALICE REVELL (Nouvelle-Zélande) a expliqué que l’objectif de son pays est d’adopter un traité qui puisse aider à améliorer la gestion mondiale et la conservation en haute mer et, partant, de lutter contre la perte de la biodiversité mondiale.  Ce traité devrait faciliter la participation des pays en développement, et en particulier des petits États insulaires en développement, pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine dans les zones qui ne relèvent pas de la juridiction nationale, a-t-elle poursuivi.  Pour cela, sa délégation encourage la mise en place d’un cadre international amélioré en capitalisant sur et en révisant les mandats et le travail des organisations qui existent déjà dans ce domaine, en y ajoutant des règlementations claires et des mécanismes de coordination.

Elle a plaidé pour un cadre juridique clair sur la gestion des ressources marines, qui doit faciliter la recherche sur ces ressources et faciliter leur partage équitable tout en gérant les potentiels impacts environnementaux qui y seraient associés.   La Nouvelle-Zélande souhaite aussi la mise en place d’outils de gestion multisectoriels et basés sur ces zones qui échappent à la juridiction nationale, de manière à y garantir la protection et la restauration de la biodiversité.  De plus, le processus actuel doit être inclusif et les pays en développement doivent pouvoir y participer en tenant compte des besoins spécifiques des petits États insulaires en développement, a encore préconisé la représentante.

Le représentant des Fidji s’est félicité de ce nouvel élan, « essentiel », et espère le garder « dans un esprit de coopération et de respect mutuel ».  Il a dit avoir hâte de discuter de la portée de ce régime, et d’établir un cadre.  « L’instrument doit respecter les principes de la Convention et combler ses lacunes, tout en sachant évoluer pour faire face aux questions émergentes », a-t-il estimé.  Qualifiant le transfert des technologies marines d’essentiel, opposé à la surpêche, le représentant a noté que « le nouveau régime devait aussi tenir compte du partage des bénéfices et du patrimoine commun de l’humanité », pour un système juste et équitable, qui respecte les intérêts des petits États et des pays en voie de développement.

La représentante du Venezuela a remercié la présidence de la Conférence intergouvernementale pour le document qu’elle a préparé en vue de faciliter les débats lors de cette première séance de fond des négociations sur un régime international indépendant avec ses propres principes et procédures pour garantir la conservation et l’utilisation durable des océans et des mers dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  En tant qu’État non partie à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, le Venezuela a réaffirmé l’importance qu’il accorde à la protection de la biodiversité, tout en déclarant que sa participation à ce processus et ses résultats ne peuvent en aucun cas avoir d’incidence sur la situation des États qui ne sont pas parties à cette Convention et n’indique pas de changement de position du Venezuela vis-à-vis de ce texte. 

« Nous devons cesser de tourner en rond », a déclaré la représentante de l’Islande, pour qui la Conférence est une belle opportunité pour « repenser notre méthode de travail ».  Un des principaux problèmes pour la représentante est lié à la prise de décisions et à la structure institutionnelle.  « Il y aura une myriade de problèmes à résoudre, quelle que soit l’approche choisie, mais nous ne serons pas en mesure de vraiment nous concentrer si nous persistons à considérer toutes les approches possibles », a-t-elle insisté.

Critiquant le mantra de départ établi par le Comité préparatoire, « d’abord la forme, ensuite la fonction », comme pensé à l’envers, elle a préconisé l’inverse: « d’abord la fonction, ensuite la forme ».  « Nous devons savoir où nous allons pour savoir comment nous y rendre », a-t-elle enchaîné.  Pour elle, un point de départ solide serait de savoir si l’instrument est basé sur une approche globale, régionale ou hybride.  « En répondant à cette question fondamentale, nous réduirions considérablement le champ des négociations, et ainsi, raccourcirions notre temps de travail. »

Le représentant du Maroc a assuré de sa pleine coopération pour un succès des travaux.  Invoquant un « moment historique » quant à la prise de conscience de la nécessité pour la communauté internationale de protéger les océans, il a déploré que « rares étaient les délégations à avoir cru en ce processus ».  « Ceci-dit, ce n’est que le premier pas », a-t-il pronostiqué.  Le représentant a appelé ses collègues à travailler ensemble pour examiner les principaux sujets et progresser.  Il a souhaité « faire plus vite » pour mettre à la disposition des délégations un projet ou un avant-projet d’instrument juridiquement contraignant, l’objectif étant d’entamer des négociations approfondies pour parvenir, lors de la quatrième session, à un projet de consensus.

Le représentant du Chili a redit l’engagement de son pays en faveur d’un développement durable des océans et de la négociation d’un instrument international.  « Nous devons maintenant avancer », a-t-il dit.  Nous devons parvenir à un instrument équilibré, qui ne sape pas le système actuel de gouvernance des océans et des mers, a déclaré le délégué.  Enfin, il a promis que son pays jouera un rôle constructif.

Le représentant de l’Uruguay a rappelé que la Convention sur le droit de la mer a été adoptée au bout de 10 ans de négociations.  Il s’est félicité que l’importance d’un lien entre cette Convention et un nouvel instrument ait été reconnue, avant de saluer l’adoption du plan de travail, signe de la bonne volonté des États.  Nous devrons nous pencher sur la question du financement et du transfert des technologies relatives aux mers et aux océans, a-t-il conclu, en espérant « arriver à bon port ».

Le représentant du Costa Rica, qui a mis en avant l’habitat marin « de grande valeur » de son pays, a déploré le manque de cadres spécifiques, dans certaines activités marines comme la pêche, ou encore dans certaines zones de certaines juridictions nationales.  Souhaitant un cadre plus restrictif, il a qualifié la résolution 69/292 (2015) de « fait historique », et a invité la Présidente de la Conférence à préparer au plus vite un avant-projet qu’il a souhaité « robuste ».

Le représentant de la Chine a jugé essentielles les négociations de ce processus, prédisant que celui-ci aurait des « répercussions profondes ».  Le Gouvernement chinois veut continuer à parler à toutes les parties de manière ouverte, a dit le représentant en souhaitant mettre l’accent sur les valeurs de « consensus », en évitant de bâtir des décisions sur des votes.  Le droit à la navigation et à la pêche ne doit pas être sapé, a-t-il ajouté.  Comme troisième point, il a dit que « nous partageons des intérêts communs, comme la conservation et la préservation des ressources durables ».  Il a appelé à « préserver les intérêts des pays en voie de développement » pour parvenir à des résultats bénéfiques à tous.  Le nouvel instrument doit, selon lui, être « équilibré », et « raisonnable », et ses thèmes examinés de manière équitable.

Le représentant du Brésil a souhaité qu’un instrument sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale soit adopté à l’issue des négociations.  « Il y a urgence », a-t-il dit, en soulignant la nécessité de combler les lacunes juridiques actuelles.  Enfin, le délégué du Brésil s’est dit confiant quant à l’issue desdites négociations.

Le représentant du Pérou a dit que son pays, bien conscient de la valeur des ressources marines, est attaché à la réalisation de l’objectif 14 de développement durable.  Un instrument sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale permettra de mieux prendre en compte les besoins des pays en développement, a-t-il dit.  Il a souhaité que l’on aboutisse à un texte inclusif qui n’ait pas d’incidence sur les pays non signataires de la Convention sur le droit de la mer.  Le Pérou va jouer un rôle constructif s’agissant des quatre « paquets » de questions à négocier, a conclu le délégué.

M. Ki-JUN YOU (République de Corée) a souhaité que le futur instrument international juridiquement contraignant garantisse le libre accès aux ressources génétiques marines des zones situées au-delà de la juridiction nationale, conformément à la liberté en haute mer inscrite dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  En ce qui concerne les évaluations d’impact sur l’environnement, elles devraient à son avis être un outil utile pour minimiser les effets négatifs des activités susceptibles d’entraîner une pollution substantielle ou des modifications importantes et néfastes du milieu marin dans les zones concernées.  Il a ajouté que les obligations des États en matière de renforcement des capacités et de transfert de technologies marines devraient être volontaires et fondées sur leurs capacités, telles qu’énoncées dans la Convention de 1982 et d’autres instruments internationaux.

Le représentant de la République islamique d’Iran a estimé très importante la biodiversité des océans, économiquement et socialement.  « L’exploitation non pérenne des ressources, l’acidification des océans, les changements climatiques causent de grandes préoccupations », a dit le représentant, qui a aussi avoué craindre le phénomène de « fragmentation juridique » quant aux responsabilités en haute mer.  Il a aussi estimé utile de se pencher sur l’équité inter et intragénérationnelle, l’utilisation d’outils de gestion par zones, et les études d’impact sur l’environnement.  « Le nouveau protocole ne devrait pas avoir de répercussions sur la pêche en haute mer à des fins de consommation alimentaire », a-t-il cependant prévenu. 

Le représentant de Maurice a apprécié la feuille de route de la Conférence et la création du groupe de travail ad hoc.  Il a estimé qu’une nouvelle ère s’ouvrait aujourd’hui.  Notant que les hautes mers contiennent certaines des ressources les plus importantes et les moins protégées, il a prévenu que « le temps presse » pour mettre en place un cadre juridique international pour les préserver.  L’enchevêtrement de différentes compétences juridictionnelles entravent les efforts de régulation, a-t-il regretté, et les mesures pour protéger la biodiversité marine sont insuffisantes.  Il a dit espérer que le nouvel instrument complète les cadres juridiques précédents, sans les remplacer.  Cet instrument devra aussi inciter les États Membres à travailler pour le bien commun, et non pour leurs intérêts particuliers.

Le représentant de la Fédération de Russie a constaté le scepticisme entourant la négociation d’un nouvel instrument sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, certaines délégations appelant à se servir plutôt des instruments existants.  « Nous sommes très loin du consensus. »  Le délégué a appelé à un changement dans les méthodes de travail afin d’encourager les États à prendre la voie du consensus.  Il ne serait pas réaliste d’attendre de la Conférence qu’elle soumette d’ici à 2020 trois projets de texte, a-t-il dit, en soulignant une nouvelle fois l’importance du consensus.  Il a affirmé que les chances de parvenir au consensus et à un texte universel sont néanmoins « très faibles ».  Nous devons nous montrer concrets et prendre en compte tous les arguments et propositions présentés, sous peine de ne pas pouvoir aller de l’avant, a-t-il conclu, en soulignant la bonne volonté de son pays de régler toutes les questions de fond.

La représentante du Viet Nam a souligné que sa délégation est un grand défenseur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  C’est pour cela que le pays estime que le nouvel instrument doit respecter pleinement les dispositions de la Convention.  Pour le Viet Nam, la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale fait partie du patrimoine commun de l’humanité, et leur accès doit être géré de manière appropriée à travers un mécanisme international, tandis que les bénéfices qui en découlent devraient être partagés équitablement entre États.  Ces principes doivent être la base du futur instrument.  Le Viet Nam souhaite en outre que les travaux menés en 2011 guident les présentes négociations, tout en souhaitant que l’avant-projet soit distribué en temps opportun, afin de donner assez de temps aux délégations pour l’examiner avant la prochaine session de fond.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité examine en séance publique son programme de travail de septembre, ses membres étant divisés sur l’inclusion de la situation au Nicaragua

8339e séance – matin
CS/13482

Le Conseil de sécurité examine en séance publique son programme de travail de septembre, ses membres étant divisés sur l’inclusion de la situation au Nicaragua

Le Conseil de sécurité s’est réuni en séance publique, cet après-midi, à l’initiative des États-Unis, qui en préside les travaux pour le mois de septembre, pour discuter de son programme de travail mensuel, précisément de l’inscription à l’ordre du jour de la question de « la situation au Nicaragua », plusieurs de ses membres y étant opposés.

Après avoir entendu chaque membre, la Présidente, Mme Nikki Haley, a finalement annoncé que la première réunion du mois, prévue demain matin, portera sur la situation au Nicaragua.

La Bolivie avait pourtant estimé que la réunion prévue le 5 septembre au titre de « la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales: la situation au Nicaragua », ne méritait pas d’être incluse au programme de travail du Conseil, dans la mesure où, selon la délégation, cette situation ne représente pas de menace à la paix et à la sécurité internationales.

S’il s’est déclaré d’accord avec le principe de diplomatie préventive, le délégué bolivien a affirmé que le Conseil devrait s’en tenir à l’examen des questions qui posent une menace directe à la paix et la sécurité internationales.  Il a rappelé qu’un Conseil spécialement mandaté, et qui siège à Genève, peut se saisir des violations des droits de l’homme commises partout à travers le monde.

Le représentant de la Fédération de Russie a appuyé ces propos, estimant en outre que l’inscription de cette question à l’ordre du jour ne serait que de nature à « fragiliser » les efforts en cours au Nicaragua.  La Chine a renchéri, de même que l’Éthiopie et la Guinée équatoriale.  Le Kazakhstan et le Koweït ont exprimé des réserves, le second regrettant le manque de consensus autour de cette question, même s’il a apprécié le fait qu’elle s’inscrive dans le cadre plus général de la coopération avec les organisations régionales.

La délégation des États-Unis a justifié l’examen de la situation au Nicaragua en rappelant aux membres du Conseil qui ont exprimé leur opposition que leurs arguments étaient les mêmes que ceux invoqués par le passé pour le Venezuela.  « Regardez où ce pays en est », a-t-elle lancé à leur adresse.  « Si vous ne pensez pas que le Nicaragua représente un danger, tournez-vous vers ses habitants ou l’Église catholique.  La question que j’ai pour vous est la suivante: combien de gens doivent mourir avant que cette question ne figure au programme de travail du Conseil de sécurité? »

Le Royaume-Uni a appuyé la proposition de la délégation américaine, encourageant le Gouvernement du Nicaragua à présenter sa « vision » d’une « solution constructive » pour faire face à la situation dans le pays.  La France, la Suède, les Pays-Bas, la Côte d’Ivoire et la Pologne n’ont pas eu d’objection à ce que cette question soit examinée au titre du point relatif à la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales.  Le Pérou a en outre jugé que des violations graves du droit international et des droits de l’homme peuvent être des « indicateurs de conflits potentiels ». 

En début de séance, la Présidente du Conseil et représentante des États-Unis, s’exprimant à titre national, avait expliqué avoir convoqué la séance d’aujourd’hui pour renforcer la transparence des travaux de l’organe, soulignant que les membres pouvaient y exprimer publiquement leurs vues sur les points de l’ordre du jour proposés par sa délégation.

« J’espère que ce sera le début de la transparence », a-t-elle déclaré en émettant le vœu de voir cette pratique institutionalisée par les futures présidences du Conseil.

En sa qualité de Président du Groupe de travail informel sur la documentation et les autres questions de procédure, son homologue du Koweït s’est félicité d’apprendre que toutes les séances du Conseil seront publiques ce mois-ci, en particulier sous la présidence d’un des cinq membres permanents, ceux-ci étant « généralement favorables » aux consultations à huis clos. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.