En cours au Siège de l'ONU

8344e séance – après-midi
CS/13489

Dossier des armes chimiques en Syrie: des questions restent en suspens et le Conseil de sécurité reste divisé

Près de cinq mois après les dernières allégations d’emploi d’armes chimiques à Douma, en République arabe syrienne, la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement de l’ONU, Mme Izumi Nakamitsu, a déploré cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, l’absence d’une nouvelle structure pour remplacer le mécanisme d’établissement des responsabilités sur le dossier chimique syrien, suite au non renouvellement de ce dernier par le Conseil en novembre 2017. 

Cette séance houleuse a en outre été marquée par les appels de nombreuses délégations à agir pour qu’Edleb ne devienne pas « le nouvel Alep ou la nouvelle Ghouta orientale », une inquiétude rejetée par Moscou et Damas comme relevant de la « fable » et du « mensonge ». 

Présentant le rapport mensuel du Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), l’organisme chargé de faire appliquer toutes les dispositions de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, Mme Nakamitsu a entamé la séance sur une note optimiste.  Elle s’est félicitée du fait que l’OIAC ait été en mesure de vérifier la destruction de la totalité des 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la Syrie.  « C’est un pas important en faveur de l’application complète de la résolution 2118 (2013) », a-t-elle salué.

La Haute-Représentante a toutefois noté que de nombreuses questions restaient en suspens, y compris l’enquête de la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en Syrie sur une allégation d’emploi d’armes chimiques à Douma, dans la Ghouta orientale, le 7 avril 2018.  Dans ce cadre, elle a jugé « profondément préoccupante » l’absence d’un mécanisme d’établissement des responsabilités, suite au non renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC-ONU, que le Conseil avait créé en 2015.  La fin du Mécanisme a enhardi ceux qui souhaitent commettre de nouvelles attaques chimiques, a-t-elle déploré, avant d’appeler le Conseil à travailler « main dans la main » pour trouver une « approche commune ».

Faisant écho à ses propos, la France a exhorté les alliés de la Syrie à prendre leurs responsabilités pour éviter une nouvelle utilisation d’armes chimiques, face à la menace d’une offensive majeure à Edleb.  « C’est un impératif pour la Syrie et la communauté internationale », a estimé le pays, émettant des doutes quant au fait que Damas ait déclaré l’intégralité de ses stocks en 2013.  C’est d’autant moins certain, a surenchéri la Pologne, que la déclaration initiale de la Syrie concernant son programme chimique comportait plusieurs zones d’ombre.

Les « lacunes et incohérences » dans cette déclaration initiale sont uniquement dues au fait que le pays a été contraint de faire cette déclaration « à la hâte », a quant à elle estimé la Fédération de Russie, ajoutant que Damas fournissait de façon volontaire des informations à l’OIAC.  « C’est la seule bonne façon de régler les questions en suspens », a estimé le pays, qualifiant les « informations mensongères » selon lesquelles Damas cacherait des substances neurotoxiques de « propagande ». 

Pour Moscou, en effet, ce sont les « combattants illégaux armés » en Syrie qui emploient des armes toxiques pour discréditer Damas et justifier des actions d’agression étrangère.  Quant aux « fables » concernant la soi-disant intention de Bashar Al-Assad d’utiliser des armes chimiques à Edleb, la Fédération de Russie a déclaré: « Cela me rappelle le roman d’Agatha Christie, ‘Un meurtre sera commis le…’ ». 

Agatha Christie était une romancière, a rétorqué le Royaume-Uni.  Or, l’utilisation bien réelle d’arme chimique par Damas n’est plus à démontrer, a poursuivi la délégation, jugeant intolérable que des gouvernements puissent envisager d’employer des armes chimiques contre leur propre peuple, voire même contre des petites villes ou petits villages au Royaume-Uni.  La Russie est peut-être parvenue à mettre fin au Mécanisme d’enquête conjoint, ont en effet déclaré les États-Unis, mais cela n’efface pas les conclusions déjà rendues par le Mécanisme concernant l’utilisation meurtrière avérée d’armes chimiques dans le pays.  Les « mensonges russes et syriens » et la dissémination de « fake news » ne les exonèrent pas, ont mis en garde les États-Unis, rappelant qu’à deux reprises, y compris en avril, le pays n’a pas hésité à intervenir en Syrie face à l’emploi d’armes chimiques.  

La Syrie a quant à elle accusé des médias américains d’avoir préparé le bombardement d’avril dernier en prétextant « avoir senti des puanteurs » une semaine après le déclenchement de l’affaire de l’emploi d’armes chimiques à Douma.  Or, le pays a qualifié de fausses les informations concernant la présence d’armes chimiques en Syrie.  Certains membres du Conseil « attendent Godot qui ne viendra pas », a déploré Damas, faisant allusion à la pièce de théâtre de Samuel Beckett.  Quant au futur emploi d’armes chimiques à Edleb, la Syrie a ironisé sur le fait que les États-Unis, la France et le Royaume-Uni semblaient connaître à l’avance les sites où seraient utilisées les armes chimiques. 

Face à ces échanges, plusieurs délégations, en tête desquelles la Chine, ont rappelé que la solution politique demeurait la seule « approche viable » en Syrie, notamment afin d’éviter, selon l’expression des Pays-Bas, qu’Edleb ne devienne « le prochain Alep ou la prochaine Ghouta orientale ».

LA SITUATION AU MOYEN ORIENT

Lettre datée du 28 août 2018, adressée à la Présidente du Conseil de sécurité par le Secrétaire général (S/2018/804)

Déclarations

Tout comme le Conseil de sécurité en a été informé le mois dernier, a rappelé au début de la réunion Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement de l’ONU, le Secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a été en mesure de vérifier la destruction de la totalité des 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne.  « C’est un pas important en faveur de l’application complète de la résolution 2118 (2013) », s’est-elle félicitée.

Mme Nakamitsu, qui présentait notamment les conclusions du cinquante-neuvième rapport mensuel du Directeur général de l’OIAC, a en outre ajouté que les questions en suspens liées à la déclaration initiale de la République arabe syrienne étaient toujours à l’étude.  Le 10 juillet dernier, a-t-elle rappelé, l’OIAC a reçu une lettre de la République arabe syrienne en réponse aux questions contenues dans la lettre du 10 avril 2018 adressée au Vice-Ministre syrien des affaires étrangères, M. Faisal Mekdad, par le Directeur général de l’OIAC.  Selon la Haute-Représentante, l’équipe continue d’analyser les réponses fournies et rendra compte au Conseil des résultats de cette analyse en temps voulu.

Par ailleurs, a indiqué Mme Nakamitsu, le 6 juillet, le Secrétariat technique de l’OIAC a publié une note intitulée « Rapport intérimaire de la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en Syrie sur l’incident relatif à une allégation d’emploi de produits chimiques toxiques comme arme à Douma, en République arabe syrienne, le 7 avril 2018 ».  Le 7 aout, a-t-elle poursuivi, l’OIAC a reçu une note verbale de la République arabe syrienne, dans laquelle figuraient des commentaires sur ce rapport intérimaire.  L’OIAC continue d’étudier ces réponses, ainsi que les allégations d’utilisation d’armes chimiques à Douma.

En outre, a déclaré la Haute-Représentante, la mission d’établissement des faits menée par l’OIAC en République arabe syrienne a demandé et obtenu des documents relatifs aux quatre incidents sur lesquels enquête actuellement l’Autorité nationale de la République arabe syrienne, à savoir deux incidents survenus à Khirbat Masasna (le 7 juillet 2017 et le 4 août 2017), un incident à Salamiyé (le 9 août 2017) et un autre à Souran (le 8 novembre 2017).  La mission d’établissement des faits, a-t-elle dit, continue d’étudier ces documents.

Par ailleurs, Mme Nakamitsu a rappelé que, lors de sa quatrième session spéciale, en juin dernier, la Conférence des États parties à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, avait décidé que le Secrétariat de l’OIAC mettrait en œuvre des arrangements pour identifier les auteurs dans les cas où l’emploi d’armes chimiques avait été avéré.  Le 27 juillet, a-t-elle précisé, le Directeur général de l’OIAC a fait un rapport sur la mise en œuvre de cette décision au Secrétaire général de l’ONU, qui a pris bonne note de cette avancée.

L’absence d’un mécanisme d’établissement des responsabilités concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, suite au non-renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC-ONU, est « profondément préoccupante », a par ailleurs estimé Mme Nakamitsu.  La fin du Mécanisme, a-t-elle insisté, a enhardi ceux qui souhaitent commettre de nouvelles attaques chimiques.  « Tous ceux qui utilisent des armes chimiques doivent être identifiés et tenus pour responsables », a martelé la Haute-Représentante.

Elle a ainsi appelé le Conseil à travailler « main dans la main » pour trouver une « approche commune » face à ce problème qui menace la sécurité et la paix dans le monde, avant de rappeler en conclusion ces mots du Secrétaire général: « Tout emploi d’armes chimiques est intolérable, les souffrances provoquées par ces armes sont horribles ».

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a rappelé l’opposition de principe de son pays à l’endroit de toute arme chimique, et son soutien à l’ouverture de poursuites judiciaires contre les auteurs d’attaques à l’arme chimique.  « Toutefois, la responsabilité d’une partie doit être établie par des éléments de preuve irréfutables », a-t-il déclaré, en expliquant que les membres du Conseil de sécurité doivent aller au-delà de leurs intérêts géopolitiques respectifs pour envisager des actions conjointes et intégrées.  Tout en saluant le rapport du Secrétaire général à l’ordre du jour du Conseil, le représentant a estimé que les enquêtes en cours manquaient de clarté, en particulier s’agissant de l’incident de Douma.  Le délégué a également jugé que l’absence de mesures préventives ne permet pas de répondre de manière efficace aux menaces continues des armes chimiques dans le pays.  Enfin, a-t-il ajouté, la crainte que des attaques à l’arme chimique soient perpétrées est instrumentalisée comme outil de terreur et de chaos parmi les populations au profit des différentes parties.  Il a insisté sur le fait de ne pas politiser ou polariser cette question essentielle.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a souligné que l’usage d’armes chimiques est un crime contre l’humanité et a dit être préoccupé par les dénonciations récurrentes d’usage d’armes chimiques en Syrie.  Il a salué les enquêtes en cours et a dit avoir pleine confiance dans le professionnalisme de l’OIAC, tout en saluant le sacrifice de son personnel sur le terrain en Syrie.  Le Pérou salue la destruction des 27 sites identifiés par le Gouvernement syrien, et le pays dit espérer que la documentation présentée récemment par la Syrie va permettre de faire la lumière sur certaines incohérences de son programme d’armes chimiques. 

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a dit qu’avec la menace d’une offensive majeure à Edleb la Syrie est à nouveau au bord du vide.  « La priorité de nos efforts doit aller au respect du cessez-le-feu et nous appelons la Russie et l’Iran à user de leur influence pour y parvenir. »

Le risque d’emploi d’armes chimiques est sérieux, a déclaré M. Delattre, rappelant que le programme chimique syrien n’est pas démantelé.  « Il est impossible à ce jour de confirmer qu’il a déclaré l’intégralité de ses stocks et capacités en 2013. »  Le délégué a exhorté les alliés de la Syrie à prendre leurs responsabilités pour éviter une nouvelle escalade et l’emploi d’armes chimiques. « C’est un impératif pour la Syrie et la communauté internationale. »

Enfin, M. Delattre a de nouveau insisté sur la gravité du moment et l’importance d’une pleine mobilisation de ce Conseil et de la communauté internationale.  « La France appelle les garants d’Astana à préserver la désescalade de la violence. »

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué le professionnalisme de l’OIAC, notamment de sa mission d’établissement de faits en Syrie.  Elle a dit souhaiter que la communication entre la Syrie et l’OIAC va se poursuivre afin de clarifier les zones d’ombre de la déclaration initiale du pays quant à son programme chimique. 

La représentante a noté que ce cinquante-neuvième rapport mensuel signifie que cela fait bientôt 5 ans que le Conseil de sécurité et la communauté internationale n’ont pas été en mesure d’atténuer la menace posée par les armes chimiques en Syrie.  Cela ne veut pas dire que cet organe n’est pas en mesure d’y parvenir.  Elle a ainsi rappelé que le Mécanisme d’enquête conjoint de l’OIAC et des Nations Unies laisse voir que le Conseil est uni autour de l’objectif commun d’empêcher l’usage d’armes de destruction massive. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que les discussions du Conseil de sécurité sur ce dossier ne reflétaient pas la réalité sur le terrain et se faisaient l’écho des « positions anti-Damas » de certains membres du Conseil, alors même que la totalité des installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne a été détruite, tout comme les arsenaux chimiques existants.

Pour le représentant, « les lacunes et incohérences » dans la déclaration initiale de la République arabe syrienne sont dues au fait que le pays a été contraint de faire cette déclaration « à la hâte », dans le cadre d’un conflit armé.  De plus, a-t-il dit, le Gouvernement syrien fournit de façon volontaire des informations à l’OIAC.  « C’est la seule bonne façon de régler les questions en suspens », a-t-il affirmé, rejetant les « informations mensongères » selon lesquelles Damas cacherait des substances neurotoxiques comme relevant de la pure « propagande ». 

À ses yeux, ce sont les combattants illégaux armés en République arabe syrienne qui emploient des armes toxiques pour discréditer Damas et justifier des actions d’agression étrangère.  Les Casques blancs financés par des puissances occidentales utilisent des subterfuges et n’hésitent pas à employer des enfants pour filmer des vidéos mensongères, a-t-il encore affirmé.  Quant aux rumeurs concernant la soi-disant intention de Damas d’utiliser des armes chimiques à Edleb, le représentant a déclaré: « Cela me rappelle le roman d’Agatha Christie, ‘Un meurtre sera commis le…’ ».  Damas ne possède ni d’armes chimiques ni n’a d’intention d’en utiliser, a-t-il affirmé.  « Pensez-vous que le monde va croire à de telles fables », s’est interrogé le représentant. 

Mme MAHLET HAILU GAUDEY (Éthiopie) a noté que l’OIAC poursuit l’examen de la réponse du Gouvernement syrien sur certaines questions en suspens.  Elle a dit souhaiter, en attendant le rapport, que les questions en suspens soient traitées par le biais de communications productives entre les deux parties.  L’Éthiopie invite toutes les parties à coopérer avec la mission d’établissement des faits sur le dossier de Douma pour lequel un rapport intérimaire a été publié.

Pour l’Éthiopie, il n’y a aucune justification à l’utilisation d’armes chimiques par des acteurs étatiques ou non.  Ceux qui le feraient doivent en répondre, a-t-elle plaidé en précisant que l’unité du Conseil de sécurité est cruciale pour s’en assurer.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a salué la destruction de 27 sites identifiés par le Gouvernement syrien dans le cadre de son programme d’armes chimiques.  Au sujet de la sécurité du personnel de l’OIAC, il a souhaité que leurs accès aux sites soient assujettis à la mise en œuvre de nouvelles mesures de sécurité arrêtés par le Département de la sécurité de l’ONU.  La Guinée équatoriale espère que les parties en Syrie continueront à respecter les instruments internationaux, notamment dans ce contexte de préparation d’une vaste offensive militaire.

Par ailleurs, la Guinée équatoriale réitère son opposition à l’utilisation d’armes chimiques, quel que soit le lieu.  Il a souligné qu’il est urgent de créer un mécanisme pour identifier les utilisateurs d’armes chimiques.  Pour cela, a-t-il insisté, l’unité du Conseil de sécurité est importante.  Il a ensuite invité la communauté internationale à continuer d’appuyer les efforts de paix en Syrie, dans le respect de l’intégrité territoriale de ce pays.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a réitéré son appui à la Mission d’établissement des faits menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  En ce qui concerne les allégations d’emploi d’arme chimiques à Douma, il a estimé que l’enquête devait se baser sur « un protocole standard, indépendant et transparent ».  Le représentant a en outre estimé que le Conseil de sécurité devait trouver un consensus afin de créer un nouveau mécanisme indépendant pour établir les responsabilités concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a espéré que les réponses apportées par la Syrie permettent de lever le voile sur les incohérences issues de sa déclaration initiale concernant son programme d’armes chimiques.  Il a noté qu’il n’existe pas de mécanisme permettant d’identifier les auteurs d’utilisation d’armes chimiques en Syrie afin que ceux-ci répondent de leurs actes.  Le Koweït se félicite du fait que l’OIAC ait récemment décidé de jouer cette fonction.

Le Koweït se dit en outre préoccupé par l’éventualité de l’usage d’armes chimiques à Edleb au cours de l’offensive militaire qui s’y prépare.  Il a invité le Conseil à rester uni sur la question des armes chimiques en Syrie, avant d’inviter les garants du processus d’Astana, qui doivent se réunir demain, à prendre des initiatives pour éviter un bain de sang à Edleb et à faciliter un acheminement de l’aide humanitaire dans la région.

M. DESIRE WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a salué les progrès accomplis dans la destruction de la totalité des 27 unités de production d’armes chimiques en Syrie.  Pour la Côte d’Ivoire, ces progrès constituent une étape importante dans le processus de démantèlement exhaustif de l’arsenal chimique de ce pays.  De même, les réponses apportées par le Gouvernement syrien à la liste non exhaustive de questions du Directeur général de l’OIAC constituent une autre preuve de cette tendance positive. 

La Côte d’Ivoire souhaite que les résultats de l’analyse des documents transmis par la Syrie permettent d’élucider les incidents de 2017 à Kharbit, Masasnah, Al-Salamiyah et Sourian, et d’identifier les auteurs de l’utilisation de ces armes chimiques afin qu’ils répondent de leurs actes devant les juridictions internationales compétentes.  Pour terminer, la Côte d’Ivoire salue la publication du rapport intérimaire de l’OIAC sur les allégations d’emploi de produits chimiques à Douma le 7 avril 2018, et attend avec intérêt les conclusions définitives. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est dite très préoccupée par le potentiel d’utilisation d’armes chimiques par Damas lors de son offensive à Edleb.  Elle a rappelé que la mission d’établissement des faits menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) avait d’ores et déjà établi 13 cas d’emploi avérés ou très probables de telles armes par Damas. 

En réponse à son homologue russe, la représentante a rappelé qu’Agatha Christie était une romancière.  Or, a-t-elle poursuivi, l’utilisation réelle d’arme chimique par Damas à l’encontre de sa population a déjà été établie.  La représentante a ainsi jugé intolérable que des gouvernements puissent envisager d’employer des armes chimiques contre leur propre peuple, voire même, a-t-elle ajouté, contre des petites villes ou petits villages au Royaume-Uni.  Elle a par conséquent exhorté la Fédération de Russie à user de son influence pour faire en sorte que des armes chimiques ne soient pas utilisées en République arabe syrienne, sous peine, a-t-elle mis en garde, de devenir complice de l’emploi de ces armes.

M. MA ZHAOXU (Chine) s’est félicité du fait que les 27 installations de fabrication d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne avaient été détruites.  Concernant les récents rapports faisant état d’une possible utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, le représentant a fortement condamné toute utilisation de telles armes.  Il a appelé à ce que des enquêtes impartiales et objectives soient systématiquement ouvertes en cas d’utilisation d’armes chimiques, dans le respect, toutefois, de la souveraineté de la République arabe syrienne et de son intégrité territoriale.  « La solution politique est la seule approche viable », a déclaré le représentant chinois. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté le Conseil à agir pour éviter que le « pire scénario » ne se déroule à Edleb.  « Les garants de la zone de désescalade d’Edleb et les autorités syriennes doivent œuvrer sérieusement à une solution pacifique et négociée à Edleb. » Il a rappelé que toute lutte antiterroriste doit respecter le droit international et jugé inacceptable toute utilisation d’armes chimiques.  S’agissant des armes chimiques, il a fustigé la récente tendance consistant à répandre délibérément des éléments de désinformation et invité le Conseil à se retrouver sur un terrain commun.  « Nous condamnons tous l’emploi d’armes chimiques, partout, par quiconque, en toutes circonstances. » Enfin, il a souhaité le renvoi de la situation en Syrie devant la Cour pénale internationale(CPI). 

M. OLOF SKOOG (Suède) a exhorté les autorités syriennes à coopérer avec l’OIAC afin que leur déclaration de destruction des armes chimiques soit précise et fasse l’objet de vérifications.  Il a dit attendre avec impatience le dernier rapport de l’OIAC sur l’attaque de Douma, avant de se dire préoccupé par les risques d’escalade militaire à Edleb, qui aurait de graves conséquences humanitaires.  Les garants de la zone de désescalade d’Edleb et toutes les parties doivent œuvrer pour une désescalade et un accès humanitaire sans entraves à Edleb.  « Edleb ne doit pas devenir le prochain Alep ou la prochaine Ghouta orientale. » Enfin, M. Skoog s’est dit alarmé par les allégations d’une nouvelle utilisation d’armes chimiques en Syrie. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a estimé que les membres du Conseil de sécurité qui ont cherché à protéger le régime de Damas depuis le début du conflit devraient avoir « honte » et auraient à en répondre devant l’Histoire.  Une nouvelle fois, a-t-elle affirmé, Moscou se prépositionne afin de se faire le « complice » du régime de Damas.  Elle a parlé de signes avant-coureurs selon lesquels Damas se préparerait à utiliser des armes chimiques pour achever le siège d’Edleb.  Comme par le passé, a poursuivi la représentante, ce régime et ses alliés iraniens et russes n’ont de cesse de proférer des mensonges concernant l’utilisation d’armes chimiques en République arabe syrienne, via la dissémination de « fake news ». 

La Russie est peut-être parvenue à mettre fin au Mécanisme d’enquête conjoint, a déclaré la représentante, mais cela n’efface pas les conclusions déjà rendues par ledit Mécanisme concernant l’utilisation meurtrière avérée d’armes chimiques dans le pays.  Selon la représentante, la République arabe syrienne a utilisé ces armes au moins 50 fois contre sa population depuis le début du conflit.

Les « mensonges russes et syriens » ne les exonèrent pas, a-t-elle poursuivi.  Ils ne font, selon elle, que révéler la culpabilité de Bashar Al-Assad.  Les États-Unis ne cesseront pas de dénoncer l’utilisation de ces armes, a ajouté la représentante, rappelant que son gouvernement, à deux reprises, n’avait pas hésité à intervenir dans le pays face à l’emploi d’armes chimiques.  Ne pariez pas contre les États-Unis, a enfin mis en garde la représentante, car nous ne resterons pas les bras ballants.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a qualifié de fausses les informations faisant état de la présence d’armes chimiques en Syrie.  Il a affirmé qu’« il n’y a plus d’armes chimiques en Syrie depuis 2014 ».  Il a déploré que certains membres du Conseil « attendent Godot qui ne viendra pas », en faisant allusion à la pièce de théâtre de Samuel Beckett.

Pour le représentant, le Conseil a déjà commis des erreurs en Iraq et en Libye et il est temps d’apprendre de ces erreurs.  Il a accusé un membre du Conseil, s’étant retiré de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et du Conseil des droits de l’homme, et d’autres instances multilatérales afin de ternir l’image de la Syrie.  Pourtant, a-t-il argué, ce membre détient « le record historique d’utilisation d’armes nucléaires, chimiques et biologiques sur des civils dans le monde ».  Il a accusé des médias américains d’avoir préparé le bombardement d’avril dernier en prétextant « avoir senti des puanteurs », une semaine après le déclenchement de l’affaire de l’utilisation d’armes chimiques à Douma.  Ensuite, les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont bombardé des sites en Syrie.

« Nous n’avons pas besoin d’armes bannies pour éradiquer le terrorisme international », a déclaré le délégué syrien, ajoutant que son pays n’allait pas céder aux menaces des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni; des États qui ont soutenu des groupes terroristes en Syrie, notamment le Front el-Nosra et les Casques blancs.  Il a souligné que son pays combat également à Al-Qaida qui a mené des attaques le 11 septembre 2001 à New York, et ensuite à Paris et Londres.  « Et vous, vous soutenez cette guerre contre nous? » s’est-il étonné.  Il a en outre marqué sa surprise sur le fait que ces armes chimiques en Syrie semblent affecter exclusivement les femmes et les filles.  De même, il a ironisé sur le fait que ces trois pays, ainsi que des groupes terroristes, semblent connaître à l’avance les sites où seront utilisés les armes chimiques.  Il a ensuite accusé le Conseil de sécurité et l’OIAC de négliger les correspondances de son pays, pas moins de 156 envoyées à ces deux organes et qui sont restées lettre morte.  La dernière, a-t-il rappelé, a été transmise il y a deux jours, et elle fait mention de l’éventuelle utilisation d’armes chimiques à Edleb par des groupes rebelles.  M. Ja’afari a enfin noté une « confusion » de la part de certaines délégations sur le thème de la présente séance et celle qui aura lieu demain.

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