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Conférence sur la biodiversité marine: le chapitre « Ressources génétiques marines » suscite des avis variés

Première session,
matin & après-midi
MER/2083

Conférence sur la biodiversité marine: le chapitre « Ressources génétiques marines » suscite des avis variés

Les délégations chargées d’élaborer un instrument juridique sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine ont poursuivi, aujourd’hui, l’examen du point intitulé « Ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages », en réfléchissant notamment au champ d’application territorial des dispositions du futur instrument.

Ce texte devra régir en principe la biodiversité marine des « zones ne relevant pas de la juridiction nationale », c’est-à-dire les zones les plus éloignées de la côte.  Cela exclut précisément les zones relevant de la juridiction nationale et, aux dires des intervenants, les zones économiques exclusives de chaque pays.

Il faut, en outre, déterminer d’où proviennent les ressources qui seront visées par le texte.  Pour cela, les participants ont fait la distinction entre deux sections différentes des zones ne relevant pas de la juridiction nationale: la zone internationale des fonds marins, appelée « la Zone »; et la haute mer, qui se situe géographiquement au-dessus de « la Zone ».

Concrètement, plusieurs délégations, dont l’Inde, ont préconisé que l’instrument couvre les ressources à la fois de « la Zone » et de la haute mer, tandis que la Fédération de Russie et les États-Unis ont proposé un champ plus restrictif: l’instrument serait cantonné à « la Zone ».  La délégation russe a argué que les ressources génétiques marines en haute mer doivent rester libres d’exploitation et de recherche.

Le représentant du Togo s’est montré inquiet des divergences de vues et a prévenu qu’il faudrait un minimum d’accord pour que le futur instrument soit contraignant.  Le Canada a renchéri: « les grandes déclarations ne suffiront pas; il faut arriver à un texte qui aille au-delà ». 

Le groupe de travail chargé de la question des ressources génétiques avait entamé ses travaux hier après-midi.  Il les a achevés après avoir aussi discuté de la nature des ressources visées: les poissons à usage commercial et ceux destinés à la recherche scientifique?  Les ressources génétiques marines recueillies in situ, ex situ et in silico?  Certains, comme le Mexique et le Japon, ont demandé d’inclure les produits dérivés.

Outre les droits de propriété intellectuelle, ce sont les questions de l’accès et du partage des avantages qui ont suscité le plus d’échanges.  Certains ont souhaité que l’accès aux ressources soit réglementé et, surtout, qu’il soit juste et équitable.  Mais d’autres, comme le Japon et les États-Unis, ont avancé que toute nouvelle règlementation entraverait la recherche scientifique.

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux demain, jeudi 13 septembre, à partir de 10 heures.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages

Les délégations ont, ce matin, poursuivi l’examen du point intitulé « Ressources génétiques marines (RGM), y compris les questions relatives au partage des avantages », en commençant par réfléchir au champ d’application territorial des dispositions du futur instrument.

Avant toute chose, l’Uruguay et le Viet Nam ont appelé à respecter les droits de l’État côtier d’exploitation des ressources naturelles et des activités économiques dans les zones relevant de leur juridiction nationale, y compris la zone économique exclusive et le plateau continental jusqu’à 200 milles marins et au-delà.  Le nouvel instrument ne devra donc pas couvrir les zones relevant de la juridiction nationale et les zones économiques exclusives, en a déduit le Maroc, qui a insisté sur la liberté de navigation: elle doit être garantie par l’instrument. 

L’Uruguay a aussi rappelé que la zone internationale des fonds marins, « la Zone », relève du patrimoine commun de l’humanité, ce dont il faut tenir compte.  C’est également ce qu’a relevé El Salvador en invitant à établir une relation équilibrée entre les deux sphères.  Rappelons que « la Zone » est la tranche inférieure de la région marine dont la tranche supérieure est appelée « haute mer ».

Le Canada a rappelé que, en effet, l’instrument ne doit pas couvrir les zones relevant de la juridiction nationale, avant de souligner la complexité de la question du champ d’application territorial.  Les grandes déclarations ne suffiront pas et il faut arriver à un texte qui aille au-delà, après l’examen des propositions émises, a-t-il préconisé.  Le Canada a insisté sur l’importance de privilégier la cohérence des dispositions en ce qui concerne les RGM recueillies in situ et in silico.

Concrètement, l’Inde, la Norvège, les États fédérés de Micronésie, le Mexique, l’Afrique du Sud, par exemple, ont estimé que le champ d’application territorial de l’instrument devrait couvrir les activités dans « la Zone » comme celles menées en haute mer.  Les Fidji y ont ajouté les zones relevant de la juridiction nationale y compris la zone économique exclusive et le plateau continental jusqu’à 200 milles marins et au-delà, tout en précisant que l’instrument ne doit pas hypothéquer la souveraineté des États. 

Plus restrictive, la Fédération de Russie a proposé de cantonner l’instrument à « la Zone », souhaitant que les RGM en haute mer soient libres d’exploitation et de recherche: il faut « seulement » respecter les accords et les conventions existants. 

La détermination du champ d’application doit prendre en considération les zones de chevauchement des RGM, a fait remarquer l’Islande pour qui l’instrument s’appliquera aux RGM recueillies in situ.

Les délégués ont aussi énuméré les ressources qui, à leur avis, devraient être incluses dans le futur traité.  Pour l’Inde et l’Indonésie, le futur instrument doit couvrir toutes les formes de ressources marines.

Le Bangladesh, l’Équateur, la Norvège et l’Islande, et aussi l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), ont toutefois recommandé de faire la distinction entre les poissons à usage commercial et ceux destinés à la recherche scientifique, la délégation islandaise précisant que les poissons comme RGM devraient être inclus dans le nouvel instrument.  Autrement dit, il faut faire une distinction entre les poissons sur la base de l’utilisation des RGM et non sur leur valeur économique, a résumé l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (IUCN). 

Pour le Viet Nam, les poissons à usage commercial ne devraient pas relever de l’instrument.  À ce propos, le Chili ne veut pas que les RGM soient traitées comme un produit commercial. 

La Suisse, elle, a été d’avis que l’instrument ne devrait pas couvrir les produits dérivés et les RGM recueillies in silico.

De son côté, le Japon a plaidé pour que les produits dérivés soient couverts par le nouvel instrument.  Mais attention, selon lui, la commercialisation des RGM est difficile et couteuse: il faut par exemple entre 9 et 17 ans pour fabriquer des médicaments à partir des RGM.  Il est donc impossible, en a-t-il déduit, de définir les RGM sur la base de leur valeur économique.  « Aucune entreprise japonaise n’envisage de se lancer dans ce domaine contrairement aux rumeurs », a-t-il tenu à préciser.

Les États-Unis ont exprimé le même avis que le Japon sur le bénéfice supposé de l’exploitation commerciale des RGM.  Le champ d’application du nouvel instrument devra se limiter aux RGM se trouvant dans « la Zone », a ajouté le représentant américain.  Pour lui, ce nouvel instrument doit porter sur la protection des ressources durables marines et ne doit pas avoir un effet rétroactif.  Les produits dérivés ne doivent pas par ailleurs figurer dans cet instrument, a-t-il demandé.

À ce stade de la discussion, le Togo a demandé, compte tenu des divergences, si l’instrument qui sera établi à la fin de la Conférence pourra être véritablement contraignant.  Le Togo estime qu’il faut un minimum d’accord pour que l’instrument soit contraignant.  Son champ d’application doit en tout cas couvrir toutes les questions à l’étude.

C’est un « régime juste et équitable pour les toutes RGM » qu’a demandé la Norvège: « Nous devons rédiger un accord tourné vers l’avenir et ne reflétant pas uniquement les préoccupations actuelles. »  Pour ce qui est des produits dérivés et des données numériques, « faudra-t-il créer un nouveau régime juridique compte tenu des divergences »?

Les États fédérés de Micronésie ont plaidé pour que l’instrument s’applique aux RGM collectées in situ, ex situ et in silico.  Ils ont souhaité des dispositions claires garantissant la traçabilité des RGM.  L’instrument devra aussi s’appliquer aux produits dérivés et prévoir, de même, leur traçabilité.  Les Fidji, qui ont aussi souligné l’importance de la traçabilité des RGM, ont proposé que l’instrument s’applique aux RGM collectées in situ, ex situ, in silico ainsi que les données numériques afférentes.  Il est important d’inclure les ressources ex situ, et les produits dérivés, a renchéri le Mexique.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Algérie s’est dite surprise de la proposition d’exclure les RGM des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Pour ce qui est des produits dérivés, il ne faut pas miner les accords existants notamment le Protocole de Nagoya, a-t-il mis en garde.

L’Afrique du Sud a abordé la question du partage des avantages, rappelant que c’est un élément relevant du patrimoine mondial de l’humanité.  Le partage doit avoir pour but de contribuer à sortir les pays en développement de la pauvreté, a-t-il souligné.  Nauru a précisé qu’il ne voulait pas rendre obligatoire le partage des avantages monétaires des RGM. 

Les groupes de pays ont ensuite fait des déclarations sur la question de l’« Accès aux ressources et partage des avantages ».  Au nom du Groupe des 77 et la Chine, l’Égypte a vu dans les principes du Protocole de Nagoya une source d’inspiration s’agissant des connaissances autochtones sur la question.  Il a souligné que la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine contribuent à la sécurité alimentaire et au développement économique.  « L’utilisation des RGM doit se faire de façon pacifique et sans appropriation illégale. »  Le Groupe est ouvert aux discussions sur les avantages monétaires devant être partagés de façon équitable.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Algérie a plaidé pour que l’accès aux ressources soit réglementé, le nouvel instrument devant être transparent sur la question.  La meilleure façon de réglementer l’accès est un système de notification numérique ouvert et préalable qui n’hypothèque pas la recherche sur la biodiversité marine.  « Les deux tiers de cette salle ne veulent pas d’un accès non réglementé », a noté le délégué.  S’agissant du partage des avantages monétaires, il faut se fonder sur l’expérience du système multilatéral de partage des avantages.  Le nouvel instrument doit aussi couvrir le droit de propriété intellectuelle.  Il faut créer un système unique sui generis répondant aux besoins des scientifiques et conforme aux réglementations en vigueur. 

Les RGM relevant du patrimoine de l’humanité, le partage de leurs avantages doit clairement être mentionné dans l’instrument, a plaidé l’Alliance des petits États insulaires, par la voix des Maldives qui préconisent de s’inspirer des principes de Nagoya.  Ces avantages doivent être utilisés pour le renforcement des capacités et la promotion de la recherche marine.  Les RGM ne devraient pas faire l’objet de brevet, a prévenu le représentant.

L’Union européenne estime que l’accès aux ressources doit être gratuit et réglementé.  S’agissant du partage des avantages, il faut une approche générale et commencer à faire émerger un consensus sur le partage d’avantages non monétaires qui serait l’option la plus facile à mettre en place.  Tout partage des avantages doit être conforme à la Convention sur le droit de la mer et contribuer à la recherche marine, au renforcement des capacités et au transfert des techniques marines.

Au nom de la CARICOM, la Barbade estime qu’un système de notification est utile s’agissant de l’accès aux ressources.  Toutefois, ce système ne doit pas être utilisé pour promouvoir la recherche marine.  Pour ce qui est du partage des avantages, il doit être conforme à la Convention sur le droit de la mer.  L’instrument doit avoir une liste non exhaustive des avantages.

Dans l’après-midi, les délégations ont poursuivi l’examen des volets suivants: le champ d’application, l’accès aux ressources et le partage des avantages, et la surveillance de l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction.

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), Nauru a dit que l’accès aux ressources doit être accordé par des licences non exclusives et il doit être réglementé.  Un mécanisme de partage des avantages doit tenir compte des besoins de l’AOSIS, a plaidé la délégation en se basant sur le principe de l’équité et sur celui de la compatibilité avec les droits des États côtiers adjacents.  En outre, à son avis, une liste des avantages devrait figurer dans l’instrument.  Les avantages monétaires doivent être gérés par un fonds qui financera notamment le renforcement de capacités, a-t-il ajouté.

Le Mexique estime que tout le monde doit avoir accès aux ressources, mais qu’il faut réglementer l’accès aux RGM dans le cadre de l’exploitation commerciale.  Un avis préalable à l’accès est important pour les projets industriels et commerciaux. 

Toutes les ressources génétiques doivent être mises à la disposition de tous les États, a également exigé l’Argentine qui veut un accès juste et équitable aux ressources, avec un partage juste et équitable des avantages.

L’accès libre aux ressources n’a cependant pas recueilli l’accord du Japon qui estime que cela pourrait perturber le travail des chercheurs.  La Fédération de Russie rappelle que le régime actuel garantit la liberté d’accès aux ressources génétiques marines et aux autres ressources halieutiques et ressources vivantes.  Ce régime n’a pas de limitation.   

De même, les États-Unis rappellent que l’accès aux ressources et aux avantages doit rester ouvert à tous.  Il faut examiner comment faciliter cet accès pour tous afin de parvenir à un partage équitable des avantages.  Toute nouvelle règlementation de l’accès entraverait la recherche scientifique.  Il faut donc maintenir le régime actuel d’accès aux ressources, ont conclu les États-Unis.

Pour Singapour, l’accès aux ressources doit être libre et ouvert en ce qui concerne la bio-prospection.  La République de Corée a dit que l’accès aux ressources doit respecter la liberté d’accès en haute mer. 

Pour faciliter l’accès aux ressources, le Saint-Siège est favorable à la création d’un registre en ligne, peu onéreux, sécurisé, facile d’utilisation.  Il faut encourager un accès plus large en distribuant des licences non exclusives.  De son côté, la Chine a suggéré la création d’un code de conduite pour l’accès aux ressources génétiques marines. 

À propos du « partage des avantages », le Brésil a dit que cela doit aider les pays en développement à acquérir les outils nécessaires aux recherches.  Une liste exhaustive doit en être dressée.  « Nous sommes en faveur de l’établissement d’un mécanisme monétaire de partage des avantages qui serait géré par un fonds global. »  Ce fonds pourrait être financé par une taxe de 1% des recettes provenant de l’utilisation commerciale des ressources génétiques marines, a proposé le Brésil.  La Papouasie-Nouvelle-Guinée a plaidé, elle, pour un mécanisme robuste de partage des avantages tant monétaires que non monétaires.

Mais, selon la Chine, le partage des avantages monétaires ne devrait pas être mis en place jusqu’à ce qu’un marché à grande échelle pour les RGM existe.  Cette délégation a en outre proposé d’établir une liste indicative des avantages.  Pour sa part, le Japon n’est pas en faveur du partage des avantages monétaires dans la mesure où ce partage n’encouragerait pas le travail des experts.

La délégation de Singapour a simplement posé des questions: « Quels sont ces avantages exactement?  Quels sont les avantages monétaires et non monétaires? »

Le Pérou suggère que le partage des avantages réponde au principe de patrimoine mondial de l’humanité et à celui de la durabilité.  En outre, il faut s’inspirer des mécanismes de partage des avantages déjà existants, a-t-il prôné.

Les États-Unis estiment que les nouvelles règles de partage des avantages devraient aider les pays en développement.  La Norvège a rappelé que l’objectif global de l’instrument est que les pays en développement puissent utiliser à bon escient les ressources de « la Zone » et la haute mer.  C’est pourquoi les États fédérés de Micronésie ont dit que l’accès sans partage aux avantages n’est pas envisageable.  Le partage des avantages doit tenir compte des besoins des pays en développement et du coût élevé du nettoyage en mer, a précisé cette délégation.

Le Saint-Siège a proposé un cadre de partage des avantages en fonction de l’utilité et des valeurs réelles et potentielles des ressources.   

S’agissant du droit de propriété intellectuelle, les États-Unis croient que les rapports des pays sur cette question n’ont pas à être publiés dans l’instrument, surtout ceux relevant de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).  La Fédération de Russie a dit que le droit de propriété intellectuelle est déjà discuté dans des instances spécialisées.  Il ne faut pas faire un doublon au sein du nouvel instrument, a-t-elle demandé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Conférence sur la biodiversité marine en haute mer ouvre le dossier des ressources génétiques marines

Première session,
matin & après-midi
MER/2082

La Conférence sur la biodiversité marine en haute mer ouvre le dossier des ressources génétiques marines

Les négociations sur un traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer se sont poursuivies, aujourd’hui, dans le cadre des Groupes de travail sur « les études d’impact sur l’environnement » et sur les « ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages », un enjeu de taille qui sera examiné jusqu’au 17 septembre.*

Les délégations ont commencé par examiner le champ d’application géographique pour les ressources génétiques marines.  Ce champ doit être le plus large possible, a conseillé le Groupe des États d’Afrique, favorable à un traité qui s’appliquerait aussi aux produits dérivés pour ne pas créer un vide juridique dans lequel s’engouffrer.  L’inclusion de ces produits a été rejetée par l’Union européenne, laquelle s’est également opposée à l’idée que le futur traité se limite à la zone internationale des fonds marins, « La Zone », comme l’a prôné la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Le consensus sera difficile à trouver, a pronostiqué la République de Corée, alors que les Philippines défendaient, avec d’autres comme la Colombie ou Samoa, l’idée d’une distinction entre les poissons comme produits commerciaux et les poissons comme ressources génétiques, ladite distinction devant être établie par « un organe scientifique » prévu par le futur traité. 

Auparavant, les délégations ont conclu leurs discussions sur les études d’impact sur l’environnement (EIE), un processus qui, au début de sa planification, cerne et évalue les risques environnementaux d’un projet spécifique.  Comme la veille, les discussions ont, sans l’ombre d’un consensus, tourné autour de l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, de la relation avec les procédures prévues par les instruments, cadres et organes existants et des activités pour lesquelles une telle étude est prescrite.

L’inscription éventuelle des évaluations stratégiques environnementales (ESE) dans le futur traité a également divisé les délégations.  Quels en sont les paramètres?  Quels liens établir avec les EIE? s’est interrogé le Mexique.  Quels programmes et quelles politiques seraient évalués stratégiquement? s’est aussi demandée la Chine.  Il faut tout simplement écarter ces évaluations du futur traité, ont tranché les États-Unis, arguant que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer n’en exige pas.

Les négociations reprendront demain mercredi 12 septembre à partir de 10 heures.

*A/CONF.232/2018/3

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail sur les études d’impact sur l’environnement

Les délégations ont poursuivi leurs discussions sur les études d’impact sur l’environnement (EIE), un processus qui, au début de sa planification, cerne et évalue les risques environnementaux d’un projet spécifique.  Comme hier, les discussions ont tourné autour de l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, de la relation avec les procédures prévues par les instruments, cadres et organes existants et des activités pour lesquelles une étude d’impact sur l’environnement est prescrite.

Les Maldives, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), ont fait observer que les normes en matière d’EIE varient énormément d’une région à l’autre et qu’il serait judicieux de trouver un terrain d’entente.  Il s’agirait, a poursuivi l’Autorité internationale des fonds marins, d’identifier les critères et de veiller à ce que les EIE soient validées par les bonnes institutions, comme la Commission juridique et technique du Conseil de l’Autorité, qui est chargée de préparer des évaluations stratégiques.  « Il s’agit d’un système complet et malgré tout assez souple. »  La liste des critères ne devrait pas être définitive, a estimé l’Union internationale pour la conservation de la nature.  Les questions à se poser sont « y a-t-il un impact probable à évaluer? » et « quel niveau d’évaluation est nécessaire? » a précisé le Fonds mondial pour la nature.  Le futur traité est donc l’occasion d’établir des normes juridiques minimales.  Le Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement en Antarctique ou « Protocole de Madrid » pourrait servir de « référence » pour la définition des critères, dans la mesure où son Annexe porte précisément sur les EIE, a fait valoir l’Islande.

Les États-Unis ont défendu le concept d’« équivalence fonctionnelle », qui dispenserait de mener une EIE si une l’avait déjà été dans un « contexte sectoriel » analogue.  Ils ont également encouragé les États à adopter des mesures de vérification des EIE.  Nauru, au nom des petits États insulaires en développement (PEID), a donc suggéré de mettre en commun les ressources de ces îles pour pallier le manque de financements et promouvoir une « internationalisation » des processus de prise de décisions ».  C’est le niveau « national » qui a été privilégié par l’Autriche, au nom de l’Union européenne.  Une position vigoureusement défendue par la Norvège, ou encore la Fédération de Russie, laquelle a également contesté l’idée que les processus puissent être supervisés par des commissions techniques extérieures.  Une telle idée suggèrerait que l’on ne peut pas faire confiance aux États, a-t-elle relevé, appuyée par les États-Unis ou la Nouvelle-Zélande.  Pour l’Australie, il revient à l’État du pavillon concerné de mener une EIE dans la plus grande transparence possible, y compris vis-à-vis des États côtiers, même s’ils ne participent pas à l’étude en tant que telle.

Les EIE doivent faire l’objet de consultations à toutes les étapes, avant toute décision sur leur lancement, a voulu l’Égypte, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.  Il faut, ont préconisé à leur tour les Maldives, des consultations publiques avec les communautés autochtones locales détentrices de savoirs traditionnels.  Les informations basiques sur l’activité envisagée, une prévision de l’EIE et une description du « scénario du pire », voilà ce que devrait prévoir le futur traité, a estimé le Togo.  Toute activité qui pourrait affecter les fonds marins devra être « assujettie » aux EIE, a martelé le Togo, sans oublier les effets transfrontières, a ajouté la Colombie.

Les États côtiers adjacents doivent en effet être notifiés des EIE et de leurs résultats, a renchéri le Maroc.  Tous les États doivent être consultés sur les activités pour lesquelles une EIE est prescrite, a estimé l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (IUCN) alors que l’approche régionale était défendue par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Si une EIE est justifiée, le contenu et le processus devraient être harmonisés entre les régions, a acquiescé le Comité international de protection des câbles, ajoutant que les entreprises privées, propriétaires des câbles sous-marins, doivent être consultées à chaque étape de l’EIE.

Quelles modalités l’instrument devrait-il prévoir pour faciliter l’échange d’informations concernant les études d’impact sur l’environnement?  L’Union européenne a défendu la création d’un « centre d’échange » qui devrait être géré, selon Nauru, par le secrétariat du futur traité et dont les informations seraient ouvertes au public, a ajouté le Mexique.  Sans centre d’échange, pas d’informations sur les besoins liés au renforcement des capacités, ont dit les États-Unis.  Le centre pourrait être un véritable centre d’études environnementales, a pronostiqué le Sénégal.

Le futur traité devrait-il comporter des dispositions sur les évaluations stratégiques environnementales?  Il faut des normes, a estimé l’Algérie.  Ici aussi, l’approche régionale a été privilégiée par Antigua-et-Barbuda, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), qui a insisté sur des informations démontrant l’importance des évaluations, sur la participation du public et sur le principe du pollueur-payeur.  Il est difficile, a argué l’Union européenne, d’évaluer l’effet des activités dans les zones au-delà de la juridiction nationale, en particulier leurs effets cumulatifs qui peuvent être soumis à la fois à des EIE et à des évaluations stratégiques.  Ces évaluations, qu’elles soient menées collectivement ou individuellement, nécessitent une coopération régionale ad hoc ou fondée sur des accords existants.  Tenant de l’approche régionale pour les EIE, la Fédération de Russie s’est prononcée pour une approche mondiale s’agissant des évaluations stratégiques puisque les activités concernées sont déjà couvertes par des cadres et arrangements internationaux.

Le Mexique s’est en effet interrogé sur l’opportunité d’inscrire les évaluations stratégiques dans le futur traité.  Quels en sont les paramètres?  Quels liens établir avec les EIE?  Quels programmes et quelles politiques seraient évalués stratégiquement? s’est aussi demandé la Chine.  On peut envisager un mandat et une portée clairs, a estimé la République islamique d’Iran.  Non, il faut tout simplement renoncer aux évaluations stratégiques dans le futur traité, ont tranché les États-Unis.  La Convention sur le droit de la mer n’en exige pas.  On peut tout de même réfléchir aux éléments à mettre en place, a plaidé le Nigéria qui, avec le Sénégal, a souligné l’importance des évaluations stratégiques dont les résultats pourraient enrichir les EIE.  Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a appuyé cette position.    

Groupe de travail sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages

Les délégations ont examiné le champ d’application géographique, l’accès et le partage des avantages des ressources génétiques marines (RGM), y compris les questions relatives au partage des avantages. 

Le but, a prévenu, l’Égypte, au nom du Groupe de 77 et la Chine, est d’éviter de fragiliser les ressources marines, ce qui doit clairement figurer dans le futur traité.  Le champ d’application doit être le plus large possible, a conseillé l’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique.  Le nouvel instrument doit s’appliquer aux produits dérivés pour ne pas créer un vide juridique dans lequel on pourrait s’engouffrer.  Il faut une distinction « pratique » entre les différents poissons et les autres ressources biologiques qui ne sauraient être couverts par le même régime juridique, ont plaidé les Maldives, au nom l’Alliance des petits États insulaires.  La Barbade, au nom de la CARICOM, a plutôt voulu que le champ d’application se limite à la zone, les zones économiques exclusives et le plateau continental étant épargnés.

Au-delà de la zone aussi, ont insisté, avec le Pérou, la Thaïlande et la Nouvelle-Zélande, l’Union européenne qui s’est opposée à l’inclusion des produits dérivés.  Il faut couvrir les ressources « ex situ et in silico », a insisté, à son tour, Nauru, au nom des petits États insulaires en développement (PEID).  L’instrument doit être clair, a prévenu l’Argentine, et ne toucher en aucun cas les ressources des zones relevant de la juridiction nationale.  Cette position a été fermement appuyée par la Chine.  Le consensus sera difficile, à reconnu la République de Corée, alors que les Philippines défendaient, avec d’autres comme la Colombie et Samoa, l’idée d’une distinction entre les poissons comme produits commerciaux et les poissons comme ressources génétiques, ladite distinction devant être établie par « un organe scientifique » prévu par le futur traité. 

Il faut se concentrer sur les ressources en tant que telles et non sur leur valeur potentielle, a mis en garde le Saint-Siège, prônant une distinction entre ressources vivantes et non vivantes dont la valeur économique varie d’une espèce à l’autre.  Nous devons avoir un certain degré de « certitude juridique » s’agissant des ressources marines du plateau continental, a estimé Maurice qui a demandé un débat sur la biodiversité marine dans la zone de plateau continental.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Envoyé spécial pour le Yémen prévient le Conseil de sécurité que le processus politique connaîtra « des hauts et des bas »

8348e séance – après-midi
CS/13496

L’Envoyé spécial pour le Yémen prévient le Conseil de sécurité que le processus politique connaîtra « des hauts et des bas »

Cet après-midi, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Martin Griffiths, a indiqué au Conseil de sécurité qu’en convoquant les consultations interyéménites à Genève, la semaine dernière, il ne s’attendait pas à ce que ce soit « une mission aisée ».  Le processus politique connaîtra des hauts et des bas, a prédit l’Envoyé spécial.

Intervenant par visioconférence depuis Amman en Jordanie, M. Griffiths a expliqué qu’en dépit de l’absence de l’une des parties, nous avons quand même pu relancer le processus politique « J’étais tout aussi déçu que vous de ne pas avoir pu amener la délégation de Sanaa à Genève et j’espère que cela ne se reproduira plus », a-t-il ajouté. 

L’Envoyé spécial a expliqué que les parties au conflit ne s’étaient pas rencontrées depuis plus de deux ans.  La guerre a connu une escalade sur tous les fronts.  Le degré de confiance est au plus bas et les coûts humain et humanitaire ne cessent de croître.  « J’ai appris que c’était une course contre la montre pour sauver ce qui reste des institutions publiques », a-t-il dit.  Il faut de la volonté politique, de la détermination et l’engagement de tous les acteurs, y compris des membres du Conseil de sécurité. 

Mon rôle, a précisé l’Envoyé spécial, est d’encourager les parties tout en leur rappelant la nécessité de respecter leurs obligations et leurs responsabilités vis-à-vis du peuple yéménite et de la communauté internationale. Les parties ne doivent pas se laisser entraîner dans de nouveaux affrontements militaires de grande envergure, a mis en garde M. Griffiths. 

Plusieurs pays ont pointé un doigt accusateur sur les houthistes.  Pour le Koweït, leur absence à Genève a été l’occasion de « faire la distinction entre ceux qui souhaitent faire avancer le processus politique et ceux qui manipulent la situation pour prolonger la crise malgré les souffrances du peuple yéménite ».  Le Yémen a invité l’ONU et le Conseil de sécurité à assumer leurs responsabilités directes et à mettre en œuvre les résolutions adoptées pour forcer ce « groupe putschiste » à se soumettre à la volonté du peuple, afin d’arriver à une paix durable.

Les tentatives visant à saper les efforts de paix des Nations Unies ne sauraient plus être tolérées, se sont impatientés les États-Unis, exhortant les États à accorder à l’Envoyé spécial tout leur soutien.  Toutes les délégations ont jugé essentiel de préserver les chances de renouer le dialogue pour mettre fin à un conflit qui a plongé le Yémen dans la pire crise humanitaire au monde.  Aussi la France a-t-elle appelé les parties à rester engagées avec l’Envoyé spécial pour reprendre au plus vite la voie du dialogue et faire avancer le processus de paix.

La solution militaire n’étant pas viable, la Fédération de Russie a aussi encouragé l’Envoyé spécial à maintenir tous les canaux de communication avec toutes les parties, qui doivent faire preuve de retenue et renoncer aux armes. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

Par visioconférence depuis Amman, en Jordanie, M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a indiqué qu’en convoquant les consultations interyéménites à Genève, il ne s’attendait pas à ce que ce soit « une mission aisée ».  Les parties ne s’étaient pas rencontrées depuis plus de deux ans.  La guerre a connu une escalade sur tous les fronts.  Le degré de confiance est au plus bas et les coûts humain et humanitaire ne cessent de croître.  Les parties, a-t-il poursuivi, sont piégées dans le cercle vicieux de la violence. 

À l’inverse, le peuple yéménite aspire à une solution politique pacifique pour mettre fin à la guerre et avoir un gouvernement qui pourrait satisfaire ses besoins élémentaires, a expliqué M. Griffiths.  « J’ai appris que c’était une course contre la montre pour sauver ce qui reste des institutions publiques », a-t-il dit.

En dépit du fait que l’une des parties était absente aux consultations de Genève, nous avons quand même pu relancer le processus politique, a assuré l’Envoyé spécial.  « J’étais tout aussi déçu que vous de ne pas avoir pu amener la délégation de Sanaa à Genève et j’espère que cela ne se reproduira plus », a-t-il ajouté. 

Le processus politique yéménite connaîtra des hauts et des bas, a prédit M. Griffiths.  Cela ne veut pas dire forcément que la situation politique et militaire n’est pas propice à des consultations officielles.  Certes, ce processus n’est pas facile.  Il faut de la volonté politique, de la détermination et l’engagement de tous les acteurs, y compris des membres du Conseil de sécurité, a-t-il recommandé. 

« Je vois mon rôle comme un travail aux côtés des parties pour comprendre leurs préoccupations », a indiqué l’Envoyé spécial.  Mon rôle, a-t-il précisé, est de les encourager tout en leur rappelant la nécessité de respecter leurs obligations et leurs responsabilités vis-à-vis du peuple yéménite et de la communauté internationale.

Les parties ne doivent pas se laisser entraîner dans de nouveaux affrontements militaires de grande envergure, a mis en garde M. Griffiths.  Il s’est notamment dit préoccupé par les attaques des forces Ansar Allah contre l’Arabie saoudite et la mer Rouge.

En outre, le déclin économique entraîne de plus en plus de personnes dans la pauvreté et la menace d’un conflit dans le sud.  Les manifestants dans les provinces du sud ont exprimé leurs frustrations socioéconomiques.  Il faut entendre la voix du sud du pays, a fait valoir l’Envoyé spécial. 

M. Griffiths a indiqué qu’il va continuer ses discussions dans le cadre d’une série de visites ces prochains jours, pour réaliser des progrès tangibles en s’appuyant sur les discussions de Genève et les principales mesures de renforcement de la confiance, dont l’échange de prisonniers et l’ouverture de l’aéroport de Sanaa.  Il a dit souhaiter un engagement fort des parties à poursuivre les consultations.

L’Envoyé spécial a dit prévoir également de rencontrer plusieurs acteurs du sud du pays pour trouver un accord sur leur participation au processus politique, processus au sein duquel les femmes ont un rôle à jouer, l’inclusivité étant cruciale.

Ce chemin vers la paix ne sera pas linéaire, a insisté M. Griffiths.  « Il n’est pas surprenant que certains trouvent difficile d’y participer ».  Avancer vers la paix est urgent à présent, c’est là une leçon que l’on tire de Genève, a-t-il conclu. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a salué les efforts de l’Envoyé spécial et s’est avouée déçue que les discussions interyéménites qui devaient avoir lieu à Genève n’aient pu eu le format escompté.  Elle s’est néanmoins dite enchantée que les consultations aient porté des fruits malgré tout, notamment pour ce qui est de la participation des femmes au processus politique.  Elle a appelé les houthistes à participer aux consultations pour au moins discuter des mesures de confiance nécessaires.  Pour ce qui est de l’économie du Yémen, elle a reconnu une « situation désespérée ».

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a regretté qu’une des parties n’ait pas pu se rendre aux consultations tant attendues de Genève.  Mais le début d’une négociation n’est jamais facile, surtout après deux ans de méfiance, a-t-il reconnu.  Les mesures de confiance proposées et examinées à Genève se concentrent sur les questions les plus cruciales à savoir le bien-être du Yéménite moyen, a dit le représentant qui a fermement soutenu cette approche et qui a appelé les parties à faire preuve de bonne foi et à travailler avec l’Envoyé spécial en prenant les mesures nécessaires.  La « petite contrariété » de ce week-end doit être surmontée.  Elle ne devrait justifier aucune escalade sur le terrain, a estimé le représentant qui a déploré l’intensification des affrontements à Hodeïda et les tensions latentes à Aden. 

Il a appelé les parties à démontrer leur engagement en faveur de la paix, en faisant preuve de retenue et en désamorçant les tensions « sans conditions préalables ».  Le représentant a tenu à féliciter l’Envoyé spécial pour ses efforts visant à renforcer la participation des femmes au processus.  Il a conclu en demandant au Conseil de sécurité d’envoyer un message clair sur l’obligation de respecter le droit international humanitaire et de traiter des violations des droits de l’homme.  L’obligation de rendre des comptes doit figurer en tête de l’agenda, a-t-il insisté, de même que dans le futur accord politique.  Le représentant n’a pas manqué de réclamer l’ouverture des ports de Hodeïda et de Salif et l’acheminement sans heurt de l’aide humanitaire dans tout le pays. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a regretté que les discussions entre parties yéménites prévues à Genève, à l’initiative des Nations Unies, n’aient pu se tenir.  Il a toutefois jugé essentiel de préserver les chances de renouer le dialogue, a estimé le représentant.  Il a appelé les parties à rester engagées avec l’Envoyé spécial pour reprendre au plus vite la voie du dialogue et faire avancer le processus de paix.  « La médiation des Nations Unies est la seule issue possible au conflit au Yémen et la seule voie à même de pouvoir relancer les discussions en vue d’un accord sur la gestion du port de Hodeïda, d’une reprise des pourparlers, d’une cessation durable des hostilités et de la définition des paramètres d’une solution politique. »  Pour la France, l’heure doit être à la mise en œuvre des mesures de confiance qui ont été identifiées par l’Envoyé spécial.

La recherche de cette solution politique est non seulement indispensable mais également urgente, a poursuivi M. Delattre, alors que la situation humanitaire déjà désastreuse, continue de se dégrader.  Pour la France, seule une solution politique permettra de mettre fin durablement aux souffrances des Yéménites.  Dans cet esprit, M. Delattre a réitéré que le droit humanitaire et les droits de l’homme doivent être respectés au Yémen.

M. OLOF SKOOG (Suède) a estimé qu’en dépit des défis évidents et des revers temporaires, « qui sont à attendre après des années de conflit », il est encourageant de voir la reprise des consultations et la dynamique engagée à Genève.  À ce titre, il a cité les discussions avec le Gouvernement yéménite sur des mesures de confiance portant sur l’aéroport de Sanaa, les vols médicaux, l’échange de prisonniers et l’économie du pays.  La Suède félicite le Gouvernement pour son engagement constructif, a dit le représentant qui a jugé regrettable que les houthistes n’aient pas saisis l’occasion qui s’est présentée à Genève.  Il les a exhortés à participer à l’avancement du processus politique et a dit soutenir pleinement l’approche proposée par l’Envoyé spécial. 

Il est plus que jamais crucial de rester sur la voie politique, a estimé le représentant, avant d’exprimer son inquiétude face à l’escalade récente dans le port de Hodeïda et aux frappes aériennes.  Pour la Suède, l’augmentation du nombre de victimes civiles est totalement inacceptable.  Par conséquent elle rappelle aux parties qu’une escalade à Hodeïda aggraverait davantage la situation humanitaire qui prévaut déjà dans le pays.  En conclusion, le représentant a appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à appuyer les efforts de l’Envoyé spécial et à exhorter les parties à la désescalade, au respect du droit international humanitaire et à la participation au processus politique inclusif sous l’égide des Nations Unies sans conditions préalables.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a reconnu que malgré les difficultés, les bases nécessaires sont là pour rapprocher les Yéménites et trouver une solution pacifique, même si les consultations de Genève ne se sont pas déroulées comme prévu.  Le représentant y a vu « un contretemps qui peut être surmonté mais ne doit pas être utilisé pour justifier une escalade du conflit ».  Évoquant la pire crise humanitaire au monde, il a dénoncé la recrudescence de la violence constatée, ces derniers jours.  Il faut protéger la population civile conformément au droit international humanitaire, a-t-il insisté. 

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a pris note des consultations organisées à Genève, le dialogue étant la seule manière de mener le processus de négociations pour résoudre de façon pacifique le conflit au Yémen.  Elle a appelé toutes les parties à participer au dialogue en s’abstenant de recourir à une rhétorique de confrontation et de violence.  Il faut s’appuyer sur les mesures de confiance, comme la réouverture permanente de l’aéroport de Sanaa et une détente dans les zones de conflit, a préconisé la représentante.  Toute attaque militaire qui vise des objectifs civils ou des espaces publics est contraire au droit international, a-t-elle prévenu.  Il n’y a pas d’issue militaire au conflit au Yémen, a-t-elle réitéré.  Les parties doivent renoncer à toute condition préalable au dialogue. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a appuyé les efforts des pays intéressés et des parties en vue d’ouvrir la voie vers une solution juste et négociée au Yémen, y compris les consultations politiques à Genève.  Cette approche est la seule qui permettra de préserver la souveraineté, l’indépendance et l’unité du Yémen, a-t-il dit.  Il a salué les efforts des agences de l’ONU, des ONG et des pays du Golfe qui fournissent une aide humanitaire.  Près de 75% de la population yéménite a besoin d’une protection contre la malnutrition, le choléra et autres maladies, a déploré le délégué. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué le processus de consultations entre les parties au conflit lancé la semaine dernière à Genève, à l’appui du processus politique au Yémen.  Elle s’est réjouie que des mesures essentielles de renforcement de la confiance aient été discutées avec des responsables du Gouvernement yéménite, dont l’échange de prisonniers, la réouverture de l’aéroport de Sanaa et les questions économiques, tout en regrettant que les représentants des houthistes n’aient pas fait le déplacement à Genève.  La représentante a émis l’espoir que les parties redoubleront d’efforts pour parvenir à une solution au conflit.  En dépit des progrès récents sur le plan politique, les combats se sont poursuivis au cours des dernières semaines.  Nous sommes alarmés, a-t-elle avoué, par les informations faisant état d’attaques meurtrières contre les civils.  La déléguée a exhorté les parties à respecter le droit international humanitaire et à rouvrir les ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a réitéré le soutien de son pays aux efforts de l’Envoyé spécial et regretté que les consultations interyéménites de Genève n’aient pu avoir lieu comme prévu en raison du refus des houthistes d’y participer.  Pour le représentant, c’est là l’occasion de faire la distinction entre ceux qui souhaitent faire avancer le processus politique et ceux qui manipulent la situation pour prolonger la crise malgré les souffrances du peuple yéménite.  L’absence des houthistes aux consultations montre bien qu’ils ne sont pas disposés à respecter les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Ce dernier doit en tirer les conséquences, a estimé le représentant.  Il a assuré que la Coalition, qui était présente à Genève par le biais de ses ambassadeurs, appuie les efforts de l’Envoyé spécial.  Il a rappelé que le Conseil de sécurité avait estimé que « la meilleure solution au Yémen est de s’attaquer aux causes profondes » du conflit.  Or, la principale cause c’est le coup d’État des houthistes.  Le Koweït demande donc aux membres du Conseil de sécurité de respecter leurs propres recommandations. 

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a constaté que malgré les appels de la communauté internationale, les combats se poursuivent, notamment dans la ville portuaire de Hodeïda.  L’ONU, a-t-il relevé, estime que le conflit a fait 6 660 victimes civiles entre mars 2015 et août 2018.  Il a invoqué la responsabilité des protagonistes et l’obligation des parties de respecter le droit international et de s’opposer à toute entrave à l’acheminement de l’aide humanitaire.  Préoccupé par l’impasse dans laquelle se trouvent les pourparlers entre les houthistes et le Gouvernement yéménite, « frères ennemis », le représentant a estimé que les Nations Unies doivent user de tous les moyens diplomatiques pour amener les parties à reprendre le dialogue.  Il a exhorté M. Griffiths à poursuivre sa médiation et ses bons offices et appelé à une plus grande implication des acteurs régionaux. 

S’il a félicité M. Griffiths pour son action, M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) s’est dit préoccupé par l’absence de la délégation des houthistes à Genève et par la situation de vulnérabilité de la population yéménite.  Il a appelé toutes les parties à comprendre que seul un processus « franc et inclusif » peut mener à une solution pacifique et durable.  Il a condamné tous les types de violences contre la population civile.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a soutenu l’initiative visant à relancer les pourparlers de paix mais a avoué qu’il ne s’attendait pas à ce que « le retour du conflit yéménite dans le giron politique serait chose facile ».  Mais, a-t-il assuré, la Fédération de Russie fait confiance à M. Griffiths.  La solution militaire n’étant pas viable, il a encouragé l’Envoyé spécial à maintenir tous les canaux de communication avec toutes les parties qui, a-t-il ajouté, doivent faire preuve de retenue et renoncer aux armes.  Tous les Yéménites doivent unir leurs efforts pour lutter contre le terrorisme dans la péninsule arabique », a poursuivi le représentant.  Il a prôné « un format d’accompagnement des efforts », sous l’égide des Nations Unies, pour agir de façon plus coordonnée.  Les menaces et les affrontements doivent céder la place au dialogue, et la Fédération de Russie s’y emploie en appuyant le travail de l’Envoyé spécial, a conclu le représentant.

M. WU HAITAO (Chine) a regretté que la partie houthiste ait décidé de ne pas prendre part aux consultations interyéménites de Genève initiées par l’Envoyé spécial.  Il a salué les efforts de M. Griffiths et lui a assuré le soutien de la Chine.  Les négociations doivent permettre de rapprocher les positions et d’engager un processus politique pour parvenir à la paix au Yémen.  Toutefois, cela doit se faire dans le respect de la souveraineté de l’État du Yémen, a averti le représentant pour lequel un règlement inclusif passe par le dialogue et la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Avant de conclure, il a exhorté les parties à autoriser un accès humanitaire sans entrave à tout le pays.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a salué le Gouvernement yéménite pour avoir participé aux consultations de Genève.  Elle a toutefois regretté que les houthistes aient décidé ne pas y prendre part et les a exhortés à faire preuve de la volonté politique nécessaire dans les prochains jours pour participer au processus consultatif lancé par l’Envoyé spécial, M. Griffiths.

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a dit partager la frustration des autres membres du Conseil face à l’absence des houthistes aux consultations interyéménites à Genève.  Les tentatives visant à saper les efforts de paix des Nations Unies ne sauraient plus être tolérées, s’est-elle impatientée, exhortant les États à accorder à l’Envoyé spécial tout leur soutien.  Soulignant que les enjeux sont importants, la représentante a prévenu que le conflit fait monter la température dans tout le Moyen-Orient.  Elle a rappelé les frappes de missiles balistiques en Arabie saoudite et les menaces sur le transport maritime dans la mer Rouge.  Elle s’est donc félicitée du « remarquable » degré d’unité du Conseil sur le Yémen.  Les parties au conflit doivent immédiatement trouver les moyens de payer les enseignants, de permettre aux enfants de retourner à l’école, d’autoriser les vols d’évacuation médicale et de protéger les civils.  La représentante a appelé les membres du Conseil à réaffirmer leur confiance dans l’Envoyé spécial et a exigé de toutes les parties qu’elles travaillent avec lui.

M. BIN MUBARAK (Yémen) a assuré que le Gouvernement du Yémen s’est dirigé avec bonne foi et espoir aux consultations de Genève.  « Le Président s’est engagé à les couronner de succès. »  Il s’agissait d’une réunion entre le Gouvernement et « le parti du coup d’État » après deux ans d’arrêt, a-t-il précisé.  Le Conseil de sécurité a suivi ce processus avec intérêt, a constaté le représentant, et a appelé les parties à mettre un terme à ce conflit.  Mais les houthistes, « avec leur irresponsabilité et insouciance connues » ne sont pas venus.  « C’est ainsi qu’ils exploitent l’attention internationale ».  Ces milices font une interprétation erronée des rapports biaisés produits par certaines organisations, a accusé le représentant.

Il a voulu que l’on se concentre sur les mesures de confiance agrées en 2015, en accordant notamment l’attention à l’acheminement de l’aide humanitaire et aux capacités de la Banque centrale.  Il a reproché aux houthistes d’imposer des conditions préalables et d’essayer de saper les efforts de l’Envoyé spécial, alors que la Coalition a fait preuve de beaucoup de retenue.  Le représentant a d’ailleurs regretté l’emploi « d’expressions floues » pour justifier leur comportement.  Nous sommes devant, a-t-il précisé, « un coup d’État contre la majorité constitutionnelle élue, mené par un groupe idéologique armé qui traite de haut les Yéménites ».  Le représentant a invité l’ONU et le Conseil de sécurité à assumer leurs responsabilités directes et à mettre en œuvre les résolutions adoptées pour forcer ce « groupe putschiste » à se soumettre à la volonté du peuple yéménite, afin d’arriver à une paix durable. 

Nous célébrons l’anniversaire de la révolution du 26 septembre sur laquelle les Yéménites avaient misé pour mettre fin au confessionnalisme que ce « groupe sectaire » essaie de raviver, a souligné le représentant qui a brandi la photo d’un enfant yéménite de 10 ans « tué il y a deux jours d’une balle dans la tête par un houthiste dont il avait effleuré le pied en jouant au football ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: La Fédération de Russie présente les résultats du sommet de Téhéran sur la Syrie et se heurte à une vague de critiques

8347e séance – matin
CS/13495

Conseil de sécurité: La Fédération de Russie présente les résultats du sommet de Téhéran sur la Syrie et se heurte à une vague de critiques

La Fédération de Russie a demandé, aujourd’hui, la convocation d’une réunion du Conseil de sécurité pour faire part des résultats du sommet qui s’est tenu le 7 septembre à Téhéran entre les garants du processus d’Astana – la Russie, l’Iran et la Turquie.  Le sommet, qui a réfléchi aux moyens de réduire la violence en Syrie, notamment à Edleb, a été « constructif », a affirmé la Fédération de Russie.  Une position aux antipodes de celles des pays occidentaux, les États-Unis estimant que ce processus est un « échec » et promettant des « conséquences sérieuses » pour toute offensive militaire à Edleb. 

La Fédération de Russie a indiqué d’emblée que le sommet de Téhéran a été un « jalon important dans le relèvement de la Syrie ».  Lancé en janvier 2017, le processus d’Astana a donné lieu à l’Accord du même nom, signé le 4 mai 2017, entre les trois garants sur la création de quatre zones de désescalade, à savoir la Ghouta orientale, Deraa, Homs et à Edleb.  Les trois premières zones ont été reprises par l’armée syrienne cette année.

Signalant la présence massive de combattants terroristes à Edleb, la Fédération de Russie a indiqué que les trois garants du processus d’Astana sont prêts à poursuivre des efforts énergiques pour éradiquer le terrorisme en Syrie, mettre fin aux souffrances des civils et initier un processus politique.  La Fédération de Russie a fait la distinction entre les terroristes et les groupes armés disposés à s’engager dans un processus politique.

Le signal envoyé par le sommet de Téhéran doit être entendu, « maintenant que nous voyons des menaces de frappes contre des installations gouvernementales à cause de l’emploi supposé d’armes chimiques », a ajouté la Fédération de Russie qui a argué que la Syrie n’aurait aucune raison de les utiliser, car cela ouvrirait la voie aux frappes de représailles de la « troïka occidentale ».  L’Iran a fustigé « ces inventions » pour justifier le recours à la force contre la Syrie.

La Turquie, un des trois garants, s’est quelque peu démarquée et a mis en garde contre une opération militaire d’envergure à Edleb, craignant une catastrophe humanitaire.  « Une opération militaire ferait le jeu des terroristes », a-t-elle prévenu.  Seul un cessez-le-feu viable permettra la création d’un environnement propice à la lutte contre le terrorisme, a asséné la Turquie.

Ces propos ont été salués par le Royaume-Uni qui a invité le Conseil à se rallier autour du plan de la Turquie, tandis que les États-Unis ont prévenu: « Nous ne laisserons pas l’Iran, derrière la façade du processus d’Astana, saboter l’avenir du peuple syrien ».  La France a fustigé l’absence d’engagement ferme de la Fédération de Russie et de l’Iran à préserver la désescalade « dont ils se sont portés garants ».  Elle a aussi prévenu qu’elle ne tolèrera aucun nouvel usage d’armes chimiques, et est prête, avec ses proches partenaires, « à réagir en cas d’attaque chimique », a-t-il dit, appuyée par son homologue des États-Unis.  La Chine a émis le vœu que les discussions sur la création d’un comité constitutionnel, lancées par l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, constituera une première étape du processus politique.

Le Conseil de sécurité a commencé la séance en observant une minute de silence à la mémoire des victimes des attaques terroristes perpétrés le 11 septembre 2001 à New York, à Washington et à Philadelphie.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que le Président Vladimir Putin avait été le premier dirigeant à appeler le Président américain, le 11 septembre 2001.  Le troisième sommet des garants du processus d’Astana, à savoir la Fédération de Russie, l’Iran et la Turquie, a poursuivi le représentant, a été constructif.  Tenu le 7 septembre dernier, il a été un jalon important dans le relèvement de la Syrie.  Les trois garants, a-t-il affirmé, sont prêts à poursuivre des efforts énergiques pour éradiquer le terrorisme en Syrie, mettre fin aux souffrances des civils et initier un processus politique.  Les trois garants se sont également engagés à garantir la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a déclaré le délégué russe. 

Nous avons parlé d’Edleb, où des combattants terroristes, appartenant à des organisations hors la loi, visées comme telles par le Conseil de sécurité, sont massés, a-t-il poursuivi, en réaffirmant l’engagement des trois garants à mettre fin aux activités terroristes.  Indiquant que la possibilité d’un dialogue existe et qu’elle doit être exploitée, il a demandé aux groupes armés de cesser leurs tirs contre des villes syriennes, en particulier dans le nord-ouest de la province de Hama.  Le délégué a voulu faire la distinction entre les groupes armés disposés à s’engager dans un processus politique et les groupes terroristes.  Ceux qui ont de l’influence sur les groupes armés doivent l’exercer, a-t-il déclaré, rejetant, en revanche, comme impossible toute coexistence avec les terroristes.  Nous ne tolèrerons pas leurs agissements, ces groupes étant la ramification d’Al-Qaida contre lequel le monde se bat depuis le 11 septembre 2001, a tranché le représentant. 

Il a espéré que le signal envoyé par le sommet de Téhéran sera entendu, « maintenant que nous entendons les menaces de frappes contre des installations gouvernementales à cause de l’emploi supposé d’armes chimiques ».  La Syrie, a souligné le représentant, n’a aucune raison d’utiliser de telles armes.  Elle n’en a pas et elle est tout à fait consciente qu’un recours à ces armes ouvrirait la voie aux frappes de représailles de la « troïka occidentale ».  Les allégations ne sont que des provocations des adversaires de Damas qui espèrent obtenir l’aide de leurs « protecteurs occidentaux ». 

Le délégué a pris note des consultations qui doivent bientôt avoir lieu à Genève sur, entre autres, la création d’un comité constitutionnel représentant tous les Syriens.  Il a attiré l’attention sur l’efficacité du format d’Astana et la capacité de ses trois garants de trouver des compromis.  Le prochain sommet aura lieu en Fédération de Russie, a-t-il conclu. 

M. KAREL J.G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a parlé des risques d’escalade rapide impliquant les acteurs régionaux et internationaux, de la responsabilité des garants d’Astana et de la nécessité d’un cessez-le-feu complet, et de l’urgence de protéger les civils lors de la lutte contre le terrorisme.  Les risques d’escalade rapide impliquant les acteurs régionaux et internationaux n’ont jamais été aussi grands.  Les conséquences potentielles sont terribles.  C’est la raison pour laquelle il est urgent d’accorder une attention effective à la diplomatie avec l’objectif de se rapprocher d’une solution non militaire.  La solution politique est la seule option pour terminer ce conflit de manière durable, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

Le représentant a ajouté que sa délégation était déçue des résultats du sommet de Téhéran.  C’est la responsabilité des garants d’Astana de faire respecter les accords de cessez-le-feu et de désescalade qu’ils ont précédemment agréés et pour protéger les civils.  Ils ont réitéré leur engagement de trouver une solution négociée en Syrie mais en pratique deux des trois garants se préparent plutôt à une offensive militaire à grande échelle à Edleb. 

Si la Fédération de Russie et la République islamique d’Iran sont sérieuses concernant une solution non militaire, elles devraient arrêter les préparatifs militaires autour d’Edleb et arrêter immédiatement les attaques aériennes.  C’est important que la zone de désescalade soit respectée.  « Nous partageons les inquiétudes turques concernant l’escalade de la violence et d’une imminente catastrophe humanitaire à Edleb. » 

Pour ce qui est de la protection des civils, M. van Oosterom a déclaré que toutes les parties devraient faire preuve de retenue, accorder la priorité à la protection des civils et permettre un accès humanitaire sans entrave.  Les civils ne sont pas les seuls à pouvoir quitter la ville.  « Nous sommes sceptiques au concept de couloirs ou de routes d’évacuation protégés.  Les parties doivent respecter le droit international humanitaire en Syrie et en particulier à Edleb. » 

Toute mesure contre le terrorisme doit se conformer aux obligations du droit international en particulier des droits de l’homme, du droit des réfugiés et du droit international humanitaire.  Combattre le terrorisme n’est pas une excuse pour attaquer sans distinction ou proportionnalité.  Les dernières contestations de la population civile à Edleb contre la violence et l’extrémisme montrent que la ville n’est pas un « foyer du terrorisme ». 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a regretté que la réunion de Téhéran n’ait pas permis d’obtenir un engagement ferme de la Russie et de l’Iran à préserver la désescalade dont ils se sont portés garants.  « Notre priorité commune reste la lutte contre le terrorisme, mais cette lutte ne peut justifier des attaques indiscriminées contre des civils », a-t-il souligné.  « Nous savons combien une offensive d’ampleur à Edleb aurait des conséquences désastreuses sur le pays et la région, en termes humanitaires, sécuritaires et politiques », a averti le représentant.  La France, a-t-il prévenu, ne tolèrera aucun nouvel usage d’armes chimiques, et est prête, avec ses proches partenaires, « à réagir en cas d’attaque chimique ».

Préserver le cessez-le-feu et protéger les civils, y compris les personnels humanitaires, doivent être la première priorité des acteurs présents sur le terrain, a poursuivi M. Delattre.  « Il faut pour cela que la Russie s’engage. »  La France, a-t-il assuré, ne ménage pas ses efforts.  Selon lui, les garants doivent obtenir un délai permettant de trouver un accord.  M. Delattre a rappelé que la seule issue crédible au conflit syrien est une solution négociée et acceptable par tous.  Il a proposé la feuille de route suivante: un engagement résolu des parties à un cessez-le-feu pour épargner la population civile d’Edleb; la poursuite du processus politique avec pour première étape un appui collectif au lancement des travaux du Comité constitutionnel syrien; et le rassemblement des membres du Conseil de sécurité autour d’un agenda politique constructif à l’Assemblée générale. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a commencé par adresser ses plus profondes condoléances aux victimes des attentats du 11 septembre 2001, affirmant que la communauté internationale est unie contre le terrorisme.  Il a ensuite salué la tenue du sommet tripartite, le 7 septembre dernier, et a félicité les trois pays du processus d’Astana « qui s’efforcent de trouver une solution politique pour la Syrie ».  Le représentant a aussi mentionné le rôle positif de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura.  Il a appelé toutes les parties à respecter les principes de la Charte des Nations Unies et les autres normes internationales, et à éviter de menacer de recourir à la force ou d’y recourir.  Les parties doivent prendre toutes les mesures pour épargner les civils, a insisté le représentant avant de demander à la communauté internationale d’appuyer le processus d’Astana et les Nations Unies « qui restent le principal médiateur dans ce conflit ».  Il a espéré que la discussion sur la création d’un comité constitutionnel, lancé par l’Envoyé spécial, constituera une première étape du processus politique.

M. OLOF SKOOG (Suède) s’est dit très préoccupé par l’escalade de la violence à Edleb en raison des agissements de la Syrie et de la Fédération de Russie.  Toutes les parties doivent se conformer au droit international et protéger les civils, a—t-il dit, en rappelant que trois millions de civils vivent à Edleb. 

Dans ce contexte, il a souligné l’importance pour les garants d’Astana d’intensifier leurs efforts en vue de mettre en œuvre l’accord de désescalade qu’ils ont conclu, de protéger les civils, de garantir un accès humanitaire et de prévenir une escalade militaire.  « Ils doivent agir dès à présent pour éviter une catastrophe humanitaire colossale en cas d’offensive militaire de grande envergure à Edleb », a déclaré M. Skoog.  « Cela est loin d’être hypothétique puisque nous avons vu que toutes les zones de désescalade se sont transformées en zones d’escalade depuis l’année dernière. »

Enfin, il a invité le Conseil à œuvrer pour une solution pacifique à Edleb, conformément au droit international.

Il a semblé à M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire), que la rencontre de Téhéran n’a pas apporté de réponses rassurantes quant aux inquiétudes sur le sort d’Edleb, notamment la protection des civils et les répercussions humanitaires du conflit, « les garants du Processus d’Astana ayant seulement insisté sur la nécessité de combattre le terrorisme et le droit de Damas de récupérer l’intégralité de son territoire ».  Les nombreux appels lancés par le Conseil de sécurité et la communauté internationale n’ont pu empêcher la récente escalade de la violence, qui a entraîné le déplacement de plus de 30 000 personnes, a regretté le représentant.  Convaincue qu’il est encore temps de donner une chance à la paix, la Côte d’Ivoire exhorte toutes les parties prenantes à un cessez-le-feu immédiat et à privilégier la voie des négociations, a conclu le représentant. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a présenté ses condoléances au peuple américain et aux familles des victimes du 11 Septembre, et s’est engagé à poursuivre les efforts du Koweït pour neutraliser Daech en Syrie.

Revenant sur le sommet du 7 septembre des garants du processus d’Astana, il a appelé les parties concernées à poursuivre le dialogue pour parvenir à un règlement pacifique de la situation à Edleb, et a rappelé que le prix d’une escalade militaire sera payé en premier lieu par les femmes, les enfants et les malades. 

Suivant les rapports sur l’évolution de la situation à Edleb, il s’est dit préoccupé par le déplacement de plus de 30 000 personnes d’Edleb au cours des derniers jours.  Revenant également sur l’avertissement lancé par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Mark Lowcock, qui redoute qu’une intervention militaire à Edleb ne conduise à la pire catastrophe humanitaire, il a exhorté les parties à assurer la protection des civils et des sites civils.  « Les attaques militaires contre des groupes terroristes ne justifient pas que l’on contrevienne au droit international. » 

Le Koweït souscrit au communiqué du Secrétaire général du 29 août dans lequel il a appelé les garants d’Astana à intensifier leurs efforts pour parvenir à un règlement pacifique de la situation à Edleb.  « Il s’agit de la quatrième séance du Conseil sur la Syrie en moins d’une semaine », a noté le représentant, qui a espéré que « cette mobilisation » permette d’éviter l’escalade militaire et ses conséquences humanitaires à Edleb. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a salué le sommet trilatéral des pays garants du processus d’Astana qui a eu lieu à Téhéran et qui a débouché sur l’adoption d’une déclaration conjointe et une plus grande coopération entre les trois pays -Fédération de Russie, Turquie et République islamique d’Iran- pour régler la crise syrienne.  Rappelant que c’est la troisième fois que ces trois pays se réunissent dans le cadre de ce processus, il a souligné qu’ils avaient réitéré leur attachement à l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Ce sommet a également démontré le rôle du processus d’Astana dans la coordination des activités internationales dans le contexte du processus de paix syrien, y compris la défense de l’unité politique et de l’intégrité du pays, a poursuivi le représentant.

Abordant la question de la coopération dans la lutte contre les groupes terroristes comme Daech, al-Qaïda ou le Front el-Nosra, il a souligné que la déclaration conjointe appelle à faire la distinction entre terroristes et groupes d’opposition armés participant au cessez-le-feu.  Cette déclaration met également l’accent sur le processus politique, la création d’un comité constitutionnel, l’aide humanitaire, le rapatriement des demandeurs d’asile et l’organisation d’une conférence internationale sur les réfugiés et les personnes déplacées. 

Le Kazakhstan estime que tout cela contribuera à la formation finale du comité constitutionnel et aura un impact positif sur le processus politique en vue de tenir des élections libres en Syrie.  Le représentant a toutefois aussi appelé la communauté internationale à concentrer ses efforts sur le règlement du conflit intrasyriens par des moyens exclusivement pacifiques, à reconstruire le pays et à faire face à la situation humanitaire.  Il a également appelé à réfléchir aux conditions du retour des nombreux réfugiés syriens dans leur pays.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué l’esprit de coopération entre les garants d’Astana et souligné la nécessité d’éviter une nouvelle escalade de la violence et des souffrances à Edleb.  D’après lui, rien ne justifie le massacre de civils.  Il a estimé que les garants d’Astana, du fait de leur influence sur le terrain, ont une responsabilité particulière dans le scenario actuel.  À cet égard, il a appuyé la proposition de l’Envoyé spécial de « promouvoir une distinction véritable entre la population civile et les terroristes ». 

Le Conseil de sécurité, a conclu le représentant, doit adresser un message clair à la communauté internationale pour indiquer qu’il ne tolèrera pas que le droit international et le droit international humanitaire continuent d’être impunément violés. 

Après avoir salué la réunion qui s’est tenue à Téhéran, M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a appelé les parties à mettre en œuvre la résolution 2401 (2018) du Conseil de sécurité.  Il a espéré que les accords locaux contribueront à la désescalade de la violence et à l’évacuation des personnes dans le besoin, y compris les personnes appartenant à des groupes armés et leurs familles, tout en permettant le passage de l’aide humanitaire.  Les mêmes accords devraient permettre le retour volontaire de la population civile.

Le représentant a mis l’accent sur la nécessité de prendre des mesures pour réduire la violence, promouvoir la confiance entre les parties, améliorer la situation humanitaire et lancer des initiatives pour trouver une solution politique et pacifique au conflit syrien en général.  Il a demandé aux membres permanents du Conseil de sécurité ayant une influence sur le terrain de s’en servir pour que la lutte contre les groupes terroristes et les groupes armés ne fasse davantage de victimes innocentes. 

De plus, le délégué a recommandé de renforcer le processus politique sur la base de la Déclaration finale de Sotchi et de la mise en place du comité constitutionnel. 

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) s’est dit très préoccupé par l’escalade de la violence à Edleb, qui est une zone de désescalade établie par les garants du processus d’Astana, où vivent près de trois millions de civils.  « Nous sommes profondément alarmés par le fait que les engagements relatifs au cessez-le-feu ne sont pas respectés par les garants d’Astana.  Nous sommes déçus par l’absence de conclusions tangibles après la rencontre des garants à Téhéran. »

Le délégué a exhorté les garants d’Astana à intensifier leurs efforts en vue de protéger les civils, avant d’affirmer que toute utilisation de la force, y compris contre des proches de terroristes, ne peut aboutir à des attaques indiscriminées contre les civils.  Le délégué a ensuite invité le Conseil à œuvrer pour éviter une tragédie à Edleb.  « Nous devons agir maintenant », a-t-il dit, ajoutant qu’une opération militaire majeure entraînerait une nouvelle vague de déplacements forcés. 

Enfin, il a rappelé qu’il n’y a pas de solution militaire en Syrie

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a salué la détermination des garants du processus d’Astana face à la menace djihadiste et leur engagement à continuer de coopérer pour éradiquer tous ceux qui sont désignés comme terroristes par le Conseil de sécurité, tout en œuvrant en faveur d’un processus politique négocié.  Il est indispensable de traduire en actes la Déclaration de Téhéran pour éviter de soumettre Edleb à des bombardements intensifs.  La population civile, a-t-il insisté, ne doit pas souffrir de la « politique de la terre brûlée ».  M. Mba a espéré que les réunions de l’Envoyé spécial avec les représentants des garants du processus d’Astana permettront de débloquer le conflit syrien, à travers notamment la mise en place d’un comité constitutionnel inclusif dirigé par les Syriens. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a exprimé sa solidarité avec le peuple et le Gouvernement américain en cette journée du 11 Septembre.

Elle a souligné l’importance de la réunion des garants du processus d’Astana qui a eu lieu ce week-end et a rappelé que toute escalade militaire à Edleb pourrait aggraver la crise humanitaire sur place.  L’Éthiopie exhorte donc les trois pays garants du processus d’Astana « qui se sont attelés à la situation à Edleb », à respecter l’accord de désescalade et à protéger les civils et les sites civils.  Il faut aussi veiller à faciliter l’acheminement humanitaire, a-t-elle ajouté.  L’Éthiopie salue la distinction qui est faite dans leur déclaration commune, entre terroristes et groupes d’opposition armés. 

« Il n’existe pas de solution militaire en Syrie », a affirmé la représentante, avant d’appeler la communauté internationale à soutenir l’initiative de l’Envoyé spécial de l’ONU, M. Staffan de Mistura, pour mettre en place un comité constitutionnel, un premier pas vers un règlement politique en Syrie.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a exhorté la Fédération de Russie et la République islamique d’Iran à intensifier leurs efforts en vue de mettre en œuvre l’accord de désescalade qu’ils ont conclu et de protéger les civils à Edleb.  Une opération militaire à Edleb serait contreproductive et ferait le jeu des terroristes, a-t-elle dit, en citant les mots du Président turc Recep Tayyip Erdoğan. 

Elle a déclaré que la Turquie a bel et bien un projet à Edleb, « pourtant le délégué russe n’en a pas parlé ».  Une solution politique est cruciale en Syrie, mais une telle solution est rendue impossible par le lancement d’une offensive militaire d’envergure, a-t-elle poursuivi.  « Nous voulons entendre de l’Iran et de la Russie qu’ils ne lanceront pas d’offensive, qu’ils contribueront avec la Turquie s’agissant de la situation à Edleb et œuvreront pour mettre fin à la crise syrienne », a déclaré la déléguée. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a salué l’occasion de discuter des perspectives d’une solution pacifique en Syrie.  Toutefois, a-t-elle averti, « ne perdons pas de temps avec la désinformation, les distractions et les mensonges que le régime Assad et leurs partenaires russes et iraniens profèrent constamment pour déformer cette discussion ».  « Parlons des faits sur le terrain », a intimé Mme Haley, décrivant la situation à Edleb.  D’après l’ONU, plus de 30 000 personnes ont déjà été déplacées par les bombardements.  « On a beaucoup parlé aujourd’hui.  Mais on n’a pas vu d’actions indiquant que la Russie, l’Iran et Assad sont intéressés par une solution politique.  On n’a vu que les actions de lâches intéressés par la conquête militaire sanglante d’Edleb. »

D’après Mme Haley, la Russie et l’Iran ont rejeté la demande de la Turquie de décréter un cessez-le-feu à Edleb.  Or les États-Unis s’opposent à toute escalade de la violence, a-t-elle insisté.  Elle a reproché à ces deux pays d’avoir systématiquement violé les zones de désescalade qu’ils ont créées, la dernière étant à Edleb.  Ce n’est pas ainsi que vous convaincrez les États-Unis et d’autres pays de financer les efforts de reconstruction, a martelé la représentante.  « La Russie, l’Iran et Assad démolissent Edleb et nous demandent d’appeler ça la paix », a-t-elle ironisé.  « Astana a échoué », a-t-elle déclaré. « Nous ne laisserons pas à l’Iran, derrière la façade du Processus d’Astana, s’approprier l’avenir du peuple syrien ».  La représentante a réitéré son avertissement s’agissant des armes chimiques en Iraq.  « La Russie a le pouvoir d’arrêter la catastrophe qui s’annonce à Edleb ».  Si Assad, la Russie et l’Iran continuent sur la voie actuelle, a-t-elle prévenu, les conséquences seront terribles.

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a répondu aux questions sur les « projets russes pour Edleb ».  Nous aussi, a-t-il dit, nous voudrions savoir quels sont les « plans de la coalition pour la Syrie », surtout après les menaces concrètes qui ont été proférées contre plusieurs pays, dont la Fédération de Russie, à cause d’une prétendue utilisation d’armes chimiques.  Devant les « avertissements » lancés au cas où son pays s’engageait dans une opération militaire à Edleb », le représentant a précisé qu’il n’a jamais été question « d’opérations militaires » mais bien « d’opérations antiterroristes ».  Dans le contexte actuel, a-t-il ajouté, les zones de désescalade ne sont pas éternelles et tôt ou tard, elles seront remplacées pour pouvoir mener des opérations antiterroristes.

Devant les multiples questions posées vendredi dernier et aujourd’hui aux garants du processus d’Astana, le représentant russe a décelé une certaine envie que le processus capote.  Le processus se poursuit et il obtiendra des résultats en Syrie, a-t-il rétorqué.  « Tout ce qui s’est dit aujourd’hui est une tentative de préserver une enclave terroriste en Syrie pour faire obstacle au rétablissement de l’autorité de l’État syrien sur tout son territoire. »  Les garants du processus d’Astana feront tout leur possible pour éviter les victimes civiles, a rassuré le représentant.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) s’est dit satisfait de la contribution du format d’Astana à la paix, la sécurité et la stabilité en Syrie, rappelant que lors du dernier sommet tripartite, les Présidents russe, turc et iranien ont discuté de la manière de parvenir à une paix durable.  « Ils ont envoyé un message clair dans leur Déclaration conjointe », a noté le représentant, et ont réaffirmé leur ferme attachement à la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie.  « Il s’agit là du droit de chaque État et la Syrie ne fait pas exception », a estimé le représentant.  C’est la raison pour laquelle, les garants du processus d’Astana ont rejeté toute tentative de créer une nouvelle réalité sur le terrain sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme.  « Il faut que ce message clair soit entendu », a insisté le représentant.

Victime lui-même des armes chimiques, l’Iran condamne dans les termes les plus forts tout recours à ces armes par qui que ce soit, partout et à tout moment.  L’Iran prévient toutefois toute action motivée par un prétendu usage des armes chimiques par le Gouvernement syrien.  Le représentant a argué que la Syrie a dûment détruit toutes ses armes chimiques sous supervision internationale et que l’on assiste aujourd’hui « à une invention pour recourir à la force contre la Syrie ».  « Toute tentative ne ferait que compliquer encore la situation », a-t-il mis en garde. 

Les trois Présidents, a poursuivi le représentant, ont également réaffirmé leur détermination à continuer de coopérer « pour éliminer tous les terroristes », à savoir Daech, le Front el-Nosra et tout autre individu ou groupe qui participe à des actions associées à Al-Qaida ou à Daech et « qui sont désignés comme des groupes terroristes par le Conseil de sécurité ».  Le représentant s’est toutefois dit conscient de l’importance qu’il y a à préserver les civils.  C’est pourquoi les trois Présidents ont réaffirmé leur détermination à les protéger.  « Pour le Président Rouhani, la lutte contre le terrorisme à Edleb fait intégralement partie de la mission de restaurer la paix et la stabilité en Syrie, mais cela doit se faire sans victimes civiles. » 

Le sommet de Téhéran a également réitéré que toute solution au conflit syrien passe par un processus politique négocié.  À ce titre, les garants du processus d’Astana encouragent la coopération en vue de créer un comité constitutionnel mais aussi pour préparer un retour sûr des réfugiés et personnes déplacées en Syrie.  « C’est pourquoi l’organisation d’une conférence internationale sur cette question est importante. »  Se tournant vers la délégation américaine, le représentant a rappelé que c’est la Syrie elle-même qui a demandé à son pays de soutenir sa lutte contre le terrorisme.  Les interventions militaires américaines en Syrie sont quant à elles illégales.

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a déclaré que l’établissement d’une zone de désescalade à Edleb a permis de réduire drastiquement la violence.  Lors du sommet de Téhéran, le Président turc a souligné la nécessité de préserver cette zone et appelé à un cessez-le-feu immédiat et complet à Edleb.  Le délégué a précisé qu’un tel cessez-le-feu doit s’appliquer à toutes les attaques aériennes et terrestres, dans la mesure « où il ne saurait y avoir de hiérarchie arbitraire dans la mort ».  « Nos appels pour un cessez-le-feu incluent toutes les opérations militaires et la Turquie continuera d’œuvrer sur cette base. » Il a mis en garde contre une opération militaire d’envergure qui entraînerait une catastrophe humanitaire et une vague massive de déplacements forcés vers l’Europe et la Turquie, pays qui accueille déjà près de 3,5 millions de réfugiés.  Rappelant que le régime syrien cherche à légitimer ses opérations par des motifs de lutte contre le terrorisme, il a indiqué que dans un environnement aussi complexe qu’à Edleb, les méthodes antiterroristes ne produiront pas les résultats désirés.  « Une opération militaire ferait le jeu des terroristes. »

Seul un cessez-le-feu viable permettra la création d’un environnement propice à la lutte contre le terrorisme, a-t-il dit, ajoutant que c’est la voie dans laquelle son pays s’est engagé.  « Pour que nos efforts soient fructueux, des garanties doivent être données aux civils et aux groupes d’opposition modérés, selon lesquelles ils ne seront pas pris pour cible une fois qu’ils se seront dissociés des terroristes. »  Il s’agit là de l’objectif sous-jacent de l’appel au cessez-le-feu lancé par le Président turc.  Le délégué a précisé que, dans le droit fil du mémorandum d’Astana, la Turquie a établi 12 postes d’observation dans la zone de désescalade d’Edleb, qui ont permis de prévenir des violations et de créer les conditions pour dissocier les terroristes des groupes d’opposition modérés.  « Il ne saurait y avoir de victoire militaire en Syrie », a-t-il déclaré, en appelant à une solution politique négociée. 

Enfin, il a rappelé ce que le Président turc a déclaré aujourd’hui dans un article du Wall Street Journal: « Edleb est la dernière sortie avant le péage.  Si la communauté internationale, y compris l’Europe et les États-Unis, n’agissent pas maintenant, c’est le monde entier, et non pas seulement les civils syriens innocents, qui en paiera le prix. »

La représentante du Royaume-Uni a également repris la parole pour souligner que son pays n’entend pas détourner l’attention du processus d’Astana.  Elle a d’ailleurs invité le Conseil à se rallier autour du plan de la Turquie.  Les habitants d’Edleb vont inévitablement souffrir si l’assaut militaire a lieu, a-t-elle prévenu, en appelant au respect des principes de distinction et de proportionnalité.  Le Conseil, a-t-elle estimé, doit discuter cette semaine des moyens de faire obstacle à une offensive militaire d’envergure à Edleb. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur la biodiversité marine en haute mer: trois approches en discussion pour créer et gérer les aires protégées

Première session,
matin & après-midi
MER/2081

Conférence sur la biodiversité marine en haute mer: trois approches en discussion pour créer et gérer les aires protégées

Les travaux sur un futur traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer se sont poursuivis, aujourd’hui, dans le cadre des Groupes de travail sur les « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées » et sur « les études d’impact sur l’environnement ».*

Faut-il une approche mondiale, régionale ou hybride pour créer et gérer les aires marines protégées?  Le Groupe des États d’Afrique a défendu la première option car pour être véritablement contraignantes, ont renchéri les Petits États insulaires du Pacifique, les décisions doivent être prises par un organe à compétence mondiale.  Évitons « un traité sans mordant » assimilable à un « tigre de papier », a prévenu l’Argentine.  L’approche mondiale prévoit donc une conférence des États parties, organe suprême et décisionnel, un secrétariat responsable de la gestion administrative et un comité scientifique ouvert aux scientifiques et experts de toutes les régions du monde qui examinerait les propositions des États, en tenant compte, ont insisté Nauru et les États fédérés de Micronésie, des savoirs traditionnels, « résultats de plusieurs siècles d’observation ».

Non, ont contré les tenants de l’approche sectorielle ou régionale dont la Fédération de Russie.  Des décisions prises au niveau mondial à la majorité des voix ouvriraient la voie à la politisation, a-t-elle argué.  Elles doivent être prises par les États directement concernés, a insisté la Fédération de Russie, vantant l’excellent travail de la Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR).

La Nouvelle-Zélande et le Japon ont tenté de rapprocher les points de vue en prônant une approche hybride.  Toute proposition de créer une aire marine protégée pourrait être envoyée au comité scientifique qui ferait des recommandations à la conférence des États parties.  La décision de la conférence serait ensuite envoyée aux cadres existants qui auraient le dernier mot.

Qu’en est-il des études d’impact sur l’environnement?  Doivent-elles être obligatoires?  La base juridique se trouve dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, ont répondu le Groupe des 77 et la Chine, en écho à l’Union européenne.  Les articles 204, 205 et surtout 206 en attestent puisque « lorsque des États ont de sérieuses raisons de penser que des activités envisagées relevant de leur juridiction ou de leur contrôle risquent d’entraîner une pollution importante ou des modifications considérables et nuisibles du milieu marin, ils évaluent, dans la mesure du possible, les effets potentiels de ces activités sur ce milieu et rendent compte des résultats de ces évaluations ».

Le futur traité doit aller plus loin et établir des nouvelles normes et exigences minimales, a estimé le Groupe des États d’Afrique, appuyé par les Petits États insulaires du Pacifique.  De nouvelles activités aussi?  Pour le Groupe des États d’Afrique, le futur traité doit fixer des critères, suggérant, comme l’a fait aussi le Brésil, de se référer à l’« Annexe I du Protocole au Traité sur l’Antarctique, relatif à la protection de l’environnement ».  « Des critères exclusivement scientifiques », a souligné le Canada.

La Conférence intergouvernementale reprendra ses travaux demain, mardi 11 septembre, à partir de 10 heures.

*A/CONF.232/ 2018/3

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail sur les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées et autres mesures

Les participants ont entamé cette deuxième semaine de débats sur la mise en place d’un futur instrument sur la « la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales » en examinant la question de la « Procédure relative aux outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées », le point 4.3 du guide établi spécialement pour faciliter les débats (document 2018/3).

Appelés à dire concrètement quelles seraient les procédures pour établir les aires marines protégées et les outils de gestion y afférents, et de dessiner le cadre institutionnel approprié, les participants ont donné des avis qui ont permis de retenir trois approches majeures: une approche globale ou mondiale, une approche sectorielle ou régionale et enfin une approche dite hybride qui tient compte des deux précédentes. 

Pour l’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, l’approche globale est la plus adéquate si l’on veut surmonter le statu quo.  Au nom des Petits États insulaires du Pacifique, Nauru a aussi insisté sur le fait que pour être contraignantes, les décisions doivent être prises par un organe à compétence mondiale.  « Si nous voulons un instrument solide et de portée mondiale, alors il faudra lui offrir de nouveaux organes de régulation afin de ne pas dépendre d’organes externes », a argué l’Argentine qui a mis en garde contre « un traité sans mordant » assimilable à un « tigre de papier ».   

Le cadre institutionnel prévoirait, a relevé l’Algérie, une conférence des parties qui en serait l’organe suprême et décisionnel, un secrétariat responsable de la gestion administrative au jour le jour et un comité scientifique ouvert aux scientifiques et experts de toutes les régions du monde.  Cet aménagement institutionnel proposé par le Groupe des États d’Afrique a reçu le soutien de plusieurs participants. 

L’Algérie a précisé que le comité scientifique devrait examiner les propositions qu’on lui fait avec toutes les organisations pertinentes.  En dehors des États parties, les organisations compétentes pourraient également être autorisées à faire des propositions pour la création des aires marines protégées.  Dans ce cadre, Nauru a plaidé pour la prise en compte des savoirs traditionnels, un avis partagé par les États fédérés de Micronésie qui ont préféré parler de « comité d’experts » pour tenir compte de ces savoirs, « résultats de plusieurs siècles d’observation ».

Les Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a estimé qu’il faut faire des écosystèmes particulièrement vulnérables le principal critère pour la création des aires marines protégées.  Si la plupart des délégations ont proposé que cette création et les outils de gestion par zone viennent des États, des délégations comme celles de l’Argentine et des États-Unis ont tout de même souhaité que les États adjacents ou voisins aient la possibilité de donner leur avis sur des propositions qui pourraient les affecter.  Le Brésil a promis qu’il y aura toujours des consultations avec les États adjacents et lorsque les outils de gestion seront adoptés par la conférence des parties, ils seront contraignants pour tous les États parties.  Il faut que ce soit clair: c’est bien la conférence des États parties qui sera habilitée à prendre des décisions sur les propositions faites par les États, a renchéri la Chine.  La Colombie a précisé que le processus de prise de décisions doit favoriser le consensus, même s’il serait utile de prévoir des mécanismes de mise aux voix si le consensus n’est pas atteint.  

Pour les ténors de l’approche sectorielle ou régionale, il faut laisser le soin aux régions de gérer les questions relatives aux outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées et autres mesures.  La Fédération de Russie s’est opposée à l’approche globale: les décisions doivent être prises par les mécanismes et instruments sectoriels et régionaux.  Des décisions prises au niveau mondial à la majorité des voix ouvriraient la voie à la politisation, a-t-elle argué.  Le nombre des États affectés par l’établissement d’une aire marine protégée serait toujours inférieur à la majorité des États parties.  Non, a estimé la Fédération de Russie, les décisions doivent être prises par les États directement concernés.  La démarche régionale est donc la mieux indiquée.  Elle a aussi rappelé que la plupart des États sont déjà parties à des mécanismes et cadres régionaux comme la Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR).    

Une troisième voie, dite hybride, s’est également dégagée des échanges.  La Nouvelle-Zélande en a été l’un des défenseurs, avec le Japon qui a estimé que toute proposition de création d’une aire maritime protégée pourrait être envoyée au comité scientifique qui ferait des recommandations à la conférence des parties.  La décision de la conférence serait ensuite envoyée aux cadres existants pour les modalités de mise en œuvre.  C’est en effet les cadres compétents qui prendraient la décision finale.  La collaboration entre un cadre mondial nouveau et des acteurs régionaux a eu l’assentiment des États-Unis qui ont prévenu que les critères de désignation des aires marines protégées ne doivent pas dépasser les considérations environnementales.  Il n’est question que de « vulnérabilités écologiques » et non de considérations socioéconomiques comme l’ont avancé la Chine ou le Saint-Siège.  La majorité des délégations ont également estimé que les propositions de créer des aires marines protégées doivent être justifiées scientifiquement.  Toutes les parties prenantes doivent être entendues, y compris la société civile.

Au vu des diverses opinions, le Canada a constaté l’absence de « solution magique » dans tous les cas de figure.  Pourquoi ne pas adopter une approche qui permettrait un examen au cas par cas?  Ainsi, les outils de gestion par zone ne seraient établis par le nouvel organe que dans le cas où la zone identifiée n’en a pas déjà une.  L’OSPAR fonctionne bien, a renchéri l’Islande, en arguant que le nouvel instrument pourrait par exemple exiger que les nouveaux organes travaillent avec les organes régionaux sectoriels.  Le maintien des organes existants permettrait d’éviter l’impasse qui avait caractérisé les précédentes négociations multilatérales.

L’Australie a aussi vanté les mérites du modèle hybride afin de tenir compte de toutes les tendances, alors que l’Afrique du Sud persistait dans la défense de l’approche mondiale pour « éviter la fragmentation des outils de gestion par zone et établir ainsi un régime unique ».  La communauté internationale a besoin d’« un traité aux dents acérées et qui ait du mordant », a-t-elle plaidé, à son tour.  En plus de la conférence des parties, du secrétariat et du comité scientifique, le Sénégal a proposé d’ajouter des organes subsidiaires.

Groupe de travail sur les études d’impact sur l’environnement

Le facilitateur du Groupe de travail, M. René Lefeber (Pays-Bas), a invité les délégations à débattre de « l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement »; de la « relation avec les procédures d’étude de l’impact sur l’environnement prévues par les instruments, cadres et organes pertinents »; et « des activités pour lesquelles une étude d’impact sur l’environnement est prescrite ».

En ce qui concerne l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, l’Égypte a, au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77), déclaré que la base juridique des études d’impact se trouve dans la Convention des Nations Unis sur le droit de la mer.  Un avis partagé par la majorité des intervenants, dont l’Union européenne (UE) et le Japon et bien d’autres qui ont avancé que les articles 204, 205, et surtout 206 de la Convention sont clairs sur cette question.  L’article 206 dispose notamment que « lorsque des États ont de sérieuses raisons de penser que des activités envisagées relevant de leur juridiction ou de leur contrôle risquent d’entraîner une pollution importante ou des modifications considérables et nuisibles du milieu marin, ils évaluent, dans la mesure du possible, les effets potentiels de ces activités sur ce milieu et rendent compte des résultats de ces évaluations de la manière prévue à l’article 205 ».

Les Maldives, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), ont en effet insisté sur l’obligation de respecter le droit international coutumier en la matière, et notamment l’article 206.  L’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a plutôt plaidé pour que le nouveau traité établisse des normes et des exigences minimales pour les études d’impact.  Nauru, au nom des PEID du Pacifique, a précisé qu’il s’agit de fixer des seuils et des critères.  Le Saint-Siège a estimé que comme la haute mer ne fait pas l’objet de directives juridiques agréées par tous, s’agissant des études d’impact, il faut peut-être appliquer la loi de l’État du pavillon, un avis partagé par la Norvège.

Quid de la relation avec les procédures d’étude de l’impact sur l’environnement prévues par les instruments, cadres et organes pertinents?  Nauru, toujours au nom des PEID du Pacifique, a voulu une coordination étroite entre les nouvelles et anciennes normes.  La coordination et la coopération sont essentielles, a aussi jugé l’UE, en insistant sur l’importance qu’il y a à éviter les doublons.  Comme il existe déjà de nombreux organes qui régissent les études d’impact, les États-Unis ont jugé bon de rechercher les « points de convergence » entres les nouvelles et anciennes normes.  Pourquoi créer de nouvelles règles dans les zones qui en ont déjà? s’est tout simplement interrogée la Chine.   

Quant aux activités pour lesquelles une étude d’impact sur l’environnement est prescrite, le Groupe des 77 et de la Chine s’est dit disposé à explorer toute liste d’activités pour autant qu’elle soit souple et régulièrement mise à jour.  Les États-Unis ont voulu qu’une activité qui ne figurerait sur la liste puisse tout de même faire l’objet d’une étude d’impact.  

Pour l’Algérie et le Groupe des États d’Afrique, le futur traité doit fixer des seuils en vertu desquels les études d’impact deviendraient obligatoires, suggérant, comme l’a fait aussi le Brésil, de se référer à l’« Annexe I du Protocole au Traité sur l’Antarctique, relatif à la protection de l’environnement ».  Il faut bien s’entendre sur les critères et les seuils, a prévenu l’UE, alors qu’Antigua-et-Barbuda, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), proposait que la liste des activités soit présentée en annexe du futur traité.  Le Japon et d’autres États comme les Seychelles ont soutenu cette proposition.  Le Canada a insisté sur « des critères exclusivement scientifiques », rejetant d’emblée l’idée d’une liste variable recensant une série d’activités.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale demande un soutien accru à la lutte contre le paludisme et au développement durable de l’Afrique

Soixante-douzième session,
113e séance plénière – après-midi
AG/12048

L’Assemblée générale demande un soutien accru à la lutte contre le paludisme et au développement durable de l’Afrique

L’Assemblée générale a, cet après-midi, demandé un soutien accru à la réalisation des objectifs fixés en matière de lutte contre le paludisme dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et dans la Stratégie technique mondiale de lutte contre le paludisme 2016-2030 de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

En adoptant sans vote une résolution de 49 paragraphes de fond, présentée par l’Eswatini, au nom du Groupe des États d’Afrique, et Samoa, l’Assemblée a engagé les pays où le paludisme est endémique à affecter davantage de ressources à la lutte contre cette maladie et à revoir et renforcer leurs stratégies nationales en les alignant sur les recommandations techniques de l’OMS. 

Le texte adopté souligne qu’il faut de toute urgence optimiser le financement de la santé en général et de la lutte antipaludique en particulier, en gardant à l’esprit que le montant des contributions devra augmenter sensiblement afin que puisse être atteint l’objectif d’étape de la Stratégie technique mondiale visant à mobiliser 6,4 milliards de dollars par an d’ici à 2020. 

Tout en ayant souscrit au consensus, les États-Unis se sont dissociés du paragraphe 34, qui « prévoit des assouplissements » des dispositions de l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) « aux fins de la protection de la santé publique » et, en particulier, l’accès universel aux médicaments et la fourniture d’une aide aux pays en développement à cet effet.  Les États-Unis ont regretté que les nombreuses séances de négociation aient été « bloquées » par les questions sur la propriété intellectuelle.

Ils ont également voté contre, aux côtés de la République dominicaine, une résolution qui a recueilli 159 voix pour et qui porte sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre et l’appui international au Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  Le texte de 54 paragraphes de fond a été présenté par l’Égypte, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.

Avant l’adoption de la résolution, un amendement américain a été rejeté par 106 voix contre, 46 voix pour et les abstentions de la République centrafricaine, de la Guinée équatoriale, de la Norvège et de Tuvalu.  Au paragraphe 28, les États-Unis souhaitaient remplacer la formule « gagnant-gagnant » par le mot « internationale »: « L’Assemblée générale réaffirme que nous avons décidé d’avancer ensemble sur la voie du développement durable et de nous consacrer collectivement à la recherche d’un développement véritablement mondial et d’une coopération « gagnant-gagnant » dont tous les pays et toutes les régions du monde pourront retirer des avantages considérables. »

Regrettant le rejet de son amendement, les États-Unis ont dit ne pouvoir appuyer la résolution dans son ensemble, ce qui ne préjuge en rien du soutien que Washington continuera de témoigner à l’Afrique et à son développement.

Tout en ayant voté pour la résolution, l’Autriche a, au nom de l’Union européenne, regretté que le texte ait un caractère plus « déclaratoire » que « transformatif ».  Des concepts « nouveaux et vagues », comme celui pointé de « gagnant-gagnant », ont fait leur apparition, a-t-elle relevé à son tour, estimant que cela ne favoriserait pas forcément le rapprochement entre États.  Cette résolution ne devrait pas être adoptée annuellement comme c’est actuellement le cas, a encore estimé l’Autriche. 

Après avoir rappelé l’étroitesse des liens qui l’unissent à l’Afrique, la Chine n’a pu que regretter l’absence de consensus.  Elle est revenue sur la septième édition du Forum sur la coopération sino-africaine qui s’est tenue la semaine dernière à Beijing. 

Toujours au nom du Groupe des 77 et de la Chine, l’Égypte a présenté une autre résolution, relative à l’« application des recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport sur les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique ».  Le texte de 56 paragraphes de fond a recueilli 158 voix pour et l’opposition des États-Unis qui ont expliqué leur vote par le fait que leur amendement a été rejeté par 107 voix contre, 47 voix pour et les abstentions de la Guinée équatoriale, de la Norvège et des Tuvalu.

Ici aussi, l’amendement portait sur l’expression « mutuellement bénéfique ».  Les États-Unis ont décelé la « volonté pernicieuse » d’« un État Membre » de promouvoir des « objectifs nationaux » dans le cadre des projets multilatéraux.

Également réticente devant le concept de « mutuellement bénéfique », l’Autriche a, au nom de l’Union européenne, proposé un amendement qui a été adopté sans vote.  L’Autriche s’est félicitée de voir que les liens entre conflits et climats, qui ne sont pas une « question abstraite », aient été soulignés.  Elle a toutefois regretté que le véritable mandat de la Commission de consolidation de la paix n’ait pas été reflété dans le libellé du texte.

Aux termes de la résolution, l’Assemblée demande en effet à la communauté internationale d’accroître son soutien et de respecter ses engagements à prendre d’autres mesures dans les domaines essentiels au développement économique et social de l’Afrique, « dans un esprit de coopération mutuellement bénéfique ».  La Hongrie a souscrit aux explications de vote des États-Unis et de l’Union européenne.  Affirmant que les migrations constituent un « véritable enjeu sécuritaire », elle a souligné le droit des êtres humains « à vivre en paix et en sécurité dans leurs pays d’origine ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité tient son tout premier débat sur le lien entre corruption et conflits

8346e séance – matin
CS/13493

Le Conseil de sécurité tient son tout premier débat sur le lien entre corruption et conflits

La corruption peut être un « déclencheur » de conflits, a affirmé aujourd’hui le Secrétaire général de l’ONU, alors que le Conseil de sécurité, organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, examinait pour la première fois de son histoire la question intitulée « corruption et conflits », en présence du fondateur d’« ENOUGH Project ».  Neuf des 10 pays que « Transparency International » considère comme les plus corrompus au monde sont à l’ordre du jour du Conseil, a argué la Présidente du Conseil et Représentante permanente des États-Unis, pour faire taire les accusations d’empiètement sur les prérogatives des autres organes et agences spécialisées des Nations Unies.

À mesure qu’un conflit fait rage, « la corruption prospère », a mis en garde le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres.  Même quand les conflits diminuent, la corruption peut entraver le redressement national.  Les liens entre corruption, terrorisme et extrémisme violent, a rappelé le Secrétaire général, ont été maintes fois reconnus.  Les biens détournés peuvent être utilisés pour financer de nouveaux crimes, notamment des actes extrémistes violents et des actes terroristes.  Les enquêtes menées par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) ont révélé que la corruption des fonctionnaires est particulièrement forte dans les zones touchées par les conflits.  Dans les situations de conflit, les parties prenantes telles que les commissions anticorruptions, la société civile et les médias peuvent être affaiblies ou entravées dans leurs activités essentielles. 

Les propos tenus par M. Guterres n’ont pas empêché certains pays, comme la Fédération de Russie, de douter du bien-fondé de l’inscription de cette question à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  La corruption ne constitue pas en soi une menace à la paix et la sécurité internationales, a argué la Bolivie, relevant que cette question relève d’abord et avant tout des prérogatives de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC).  L’Éthiopie a mis l’accent sur la Convention des Nations Unies contre la corruption qui compte à ce jour 186 États parties, a souligné le Secrétaire général.  L’Éthiopie a insisté sur l’excellent travail de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime pour une bonne mise en œuvre de la Convention. 

Neuf des 10 pays que « Transparency International » considère comme les plus corrompus au monde sont à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, se sont justifiés les États-Unis qui assurent la présidence du Conseil pour le mois de septembre.  Au lieu de s’interroger sur cette situation, l’ONU choisit d’ignorer la corruption, craignant que l’examen de cette question ne décourage les gouvernements et mette un terme à la coopération ou considérant tout simplement que la corruption, c’est « le prix à payer pour faire des affaires » dans certains pays. 

Si le Conseil de sécurité veut respecter son engagement en faveur de la paix et de la sécurité internationales, il doit s’attaquer à la corruption, ont tranché les États-Unis qui ont d’ailleurs annoncé la convocation aujourd’hui même d’une réunion en formule aria pour parler des conséquences sur la sécurité internationale de la corruption au Venezuela, un pays comme l’Iran dont le Gouvernement « n’est pas là pour servir le peuple mais pour servir ses propres intérêts avec la corruption, comme moyen ».  Manipuler la question de la corruption pour s’immiscer dans les affaires intérieures des États est une approche qu’il faut dénoncer, s’est emportée la Bolivie, après que la Fédération de Russie a relevé une certaine ironie dans le fait que ces réunions soient convoquées par la présidence américaine du Conseil alors même que le « lobbysme est une pratique acceptée et présente à tous les échelons du pouvoir aux États-Unis ».  La Fédération de Russie a plutôt souligné toute l’importance qu’elle accorde au mécanisme d’examen de la Convention contre la corruption, un mécanisme « dépolitisé » qui fonctionne très bien, a-t-elle insisté. 

Tant que le Conseil de sécurité et les autres parties intéressées ne changeront pas la dynamique, la guerre restera plus profitable que la paix aux yeux des belligérants et des corrompus, a contré le fondateur d’« Enough Project ».  M. John Prendergast a voulu que les efforts de paix mettent davantage l’accent sur le démantèlement des économies de guerre et la réforme des institutions étatiques, une chose « particulièrement difficile » dans des pays où les ressources naturelles se prêtent au vol et à la corruption. 

Ce qui est « remarquable et regrettable », a-t-il poursuivi, c’est qu’il n’existe pas de nos jours de stratégie organisée pour lutter contre « le siphonage » de l’argent opéré par les leaders des pays comme le Soudan du Sud, le Nigéria, la Somalie, le Soudan, la République centrafricaine ou encore en République démocratique du Congo (RDC) et leurs collaborateurs commerciaux et bancaires à l’étranger.  M. Pendergast n’a pas oublié la Syrie, l’Afghanistan et l’Iraq où des leaders militaires et civils utilisent aussi des réseaux de collaborateurs commerciaux et bancaires pour s’enrichir, profiter de la politique et se maintenir au pouvoir.  Pendant des années l’unique outil dans ce domaine ont été les sanctions ciblées.  Or, a-t-il rappelé, elles se sont révélées inefficaces la plupart du temps parce que trop faibles et ne couvrant pas les corrompus qui alimentent les conflits.  Ce qui manque, selon M. Pendergast, c’est la pression financière contre le blanchiment d’argent, les comptes en banque illicites et les sociétés écrans. 

Le fondateur d’« Enough Project » a donc prôné des régimes de sanctions ciblant les réseaux de la grande corruption et pas seulement les individus; des mesures contre les flux financiers illicites dans le système financier international; et des poursuites judiciaires pour les crimes financiers associés aux atrocités de masse.  Il a également encouragé le Conseil de sécurité à travailler plus étroitement avec des entités spécialisées comme le Financial Action Task Force.  « Les outils de pression financière ne sont pas une fin en soi », a reconnu M. Prendergast, arguant que ces outils doivent s’inscrire dans une stratégie globale de diplomatie intense et de soutien aux institutions, axée sur la transparence et l’obligation de rendre des comptes.  Le Forum économique mondial estime que le coût de la corruption dans le monde est d’au moins 2 600 milliards de dollars, soit 5% du produit intérieur brut mondial.  Selon la Banque mondiale, les entreprises et les particuliers paient plus de 1 000 milliards de dollars en pots de vin chaque année.  Ces chiffres ont été rappelés par le Secrétaire général de l’ONU.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Corruption et Conflits

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTTERES, Secrétaire général de l’ONU, a débuté son intervention en soulignant que la corruption est présente dans tous les pays, riches et pauvres, du Nord et du Sud, développés et en développement.  Le Forum économique mondial, a-t-il précisé, estime que le coût de la corruption à travers le monde est d’au moins 2 600 milliards de dollars, soit 5% du produit intérieur brut mondial.  Et selon la Banque mondiale, les entreprises et les particuliers paient plus de 1 000 milliards de dollars en pots de vin chaque année.  « La corruption prive les écoles, les hôpitaux et les autres de fonds indispensables.  Elle pourrit les institutions, les fonctionnaires s’enrichissent ou ferment les yeux sur la criminalité.  Elle prive les gens de leurs droits, chasse les investissements étrangers et détruit l’environnement.  La corruption engendre la désillusion vis-à-vis du gouvernement et de la gouvernance et est souvent à l’origine de dysfonctionnements politiques et de divisions au sein de la société. »

Arguant que la corruption peut être un « déclencheur » de conflits, le Secrétaire général a expliqué qu’à mesure que le conflit fait rage, « la corruption prospère ».  Même quand les conflits diminuent, la corruption peut entraver le redressement national.  Par ailleurs, les liens entre corruption, terrorisme et extrémisme violent ont été maintes fois reconnus par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, a rappelé le Secrétaire général.  Les biens volés par la corruption peuvent être utilisés pour financer de nouveaux crimes, notamment des actes extrémistes violents et des actes terroristes.  Les enquêtes menées par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) ont révélé que la corruption des fonctionnaires est particulièrement forte dans les zones touchées par les conflits.  Dans les situations de conflit, les parties prenantes telles que les commissions anticorruptions, la société civile et les médias peuvent être affaiblies ou entravées dans leurs activités essentielles. 

Les États Membres doivent être en première ligne dans la lutte contre la corruption.  Il est particulièrement important de renforcer les capacités des commissions nationales de lutte contre la corruption, a préconisé M. Guterres.  Selon lui, les gouvernements peuvent également renforcer les efforts de lutte contre la corruption en veillant à l’indépendance du système judiciaire et en favorisant une société civile dynamique, la liberté des médias et la protection efficace des lanceurs d’alerte.  La communauté internationale peut compléter ces efforts en luttant plus efficacement contre le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale et les flux financiers illicites qui ont privé les pays de ressources indispensables et alimentent davantage la corruption.

Le Secrétaire général a appelé à redoubler d’efforts pour prévenir les conflits et faire face rapidement aux risques avant qu’ils ne s’aggravent.  La lutte contre la corruption et la résolution des problèmes de gouvernance, qui sont à la base de nombreux conflits, doivent faire partie des approches préventives.  C’est l’occasion de créer une base solide de confiance et de responsabilité et d’accroître la résilience de la société face aux crises.  Dans les opérations de paix, notre engagement doit être conçu et mis en œuvre de manière plus claire, avec une « focale anticorruption » pour renforcer une culture de responsabilité et de respect de l’état de droit, a-t-il encore recommandé.

L’ONU peut aider les États Membres de plusieurs façons, en diffusant les pratiques optimales et en soutenant les efforts visant à renforcer les institutions nationales de lutte contre la corruption, a estimé le Secrétaire général.  La Commission internationale contre l’impunité au Guatemala en est un bon exemple. 

Avant l’adoption de la Convention des Nations Unies contre la corruption, il n’existait pas d’instrument mondial pour criminaliser la corruption, ou pour récupérer les biens mal acquis.  Aujourd’hui, la Convention compte 186 États parties et le crime de corruption est sanctionné dans tous les pays du monde.  Les solides mécanismes d’évaluation par les pairs de la Convention ont servi de cadre mondial à la coopération internationale pour renforcer la prévention, perturber les programmes de blanchiment de capitaux, restituer les avoirs détournés de banques étrangères et prendre d’autres mesures nécessaires.  M. Guterres a encouragé tous les États Membres à apporter une plus grande détermination à sa mise en œuvre. 

« Profitons également des progrès technologiques, qui nous donnent l’occasion d’élargir massivement la participation du public à la gouvernance et d’accroître la responsabilité. »  Dans le même temps, nous savons que les conventions et les mesures juridiques doivent être supplées par un leadership vigoureux pour faire de la corruption une priorité, a poursuivi le Secrétaire général.  « Nous devons tous faire davantage pour lutter contre la corruption, renforcer la gouvernance et mettre en place des institutions fiables qui garantissent la probité et le progrès pour tous », a-t-il conclu.

M. JOHN PENDERGAST, Fondateur du Projet ENOUGH et cofondeur de The SENTRY, a rappelé d’emblée que tout au long de l’histoire, certaines personnes et groupes ont tiré des profits importants des situations de conflit.  À titre d’exemples, il a cité les conflits actuels en Afrique, notamment au Soudan du Sud, au Nigéria, en Somalie, au Soudan, en République centrafricaine ou encore en République démocratique du Congo (RDC), alimentés par des opportunités « extraordinaires » d’enrichissement illicite où l’on voit un lien indéniable entre corruption à grande échelle et atrocités de masse.  Les armées nationales et les groupes rebelles ont recours à une violence extrême pour mettre la main sur les ressources naturelles, la main d’œuvre et les réseaux de contrebande.  La violence permet de se financer grâce au saccage et au vol des biens de l’État avec des connections bancaires qui vont jusqu’à New York, Londres et Dubaï, a poursuivi M. Pendergast.

Dans ces pays africains « pris en otage », tout comme en Syrie, en Afghanistan ou en Iraq, des leaders militaires et civils utilisent des réseaux de collaborateurs commerciaux et bancaires en interne et à l’étranger pour s’enrichir, profiter de la politique ou encore maintenir leur pouvoir.  Les trafiquants d’armes, d’ivoire, d’or et de diamants ainsi que les compagnies pétrolières et de travaux publics sont en collision avec des hauts responsables gouvernementaux ou des seigneurs de guerre, voire des réseaux terroristes dans certains cas, pour maximiser les profits d’une infime minorité.  « Ces réseaux s’y connaissent en technologie, en fraude fiscale et en blanchiment d’argent et sont capables d’échapper à la règlementation, aux forces de l’ordre ou encore aux sanctions internationales », a averti M. Pendergast.  Ce sont des conflits pour le « contrôle d’États pris en otage et leurs ressources naturelles » car contrôler un État, c’est la voie la plus sûre pour contrôler les ressources.

Tant que le Conseil de sécurité et les autres parties intéressées ne changeront pas cette dynamique, la guerre restera plus profitable que la paix aux yeux des belligérants et des corrompus.  C’est la raison pour laquelle les efforts de paix doivent mettre l’accent surle démantèlement des économies de guerre et la réforme des institutions étatiques pour les rendre aptes à s’acquitter de leurs mandats.  Cela est particulièrement difficile, a reconnu l’orateur, dans des pays où les ressources naturelles offrent des opportunités énormes pour le vol et la corruption.

Ce qui est « remarquable et regrettable », a-t-il poursuivi, c’est qu’il n’existe pas de nos jours de stratégie organisée pour lutter contre « le siphonage » de l’argent opéré par les leaders de ces pays et leurs collaborateurs commerciaux et bancaires à l’étranger.  Chaque année, s’est indigné M. Pendergast, des milliards de dollars arrivent en Afrique sous forme d’aide ou de missions de maintien de la paix.  Pourtant, les dirigeants de ces pays et leurs réseaux continuent de détourner l’argent parce que les diplomates aux manettes de ces efforts de paix et de développement n’ont pas les moyens de changer les systèmes qui entretiennent les conflits.  « Il ne s’agit pas de renverser les régimes mais de changer les systèmes », a martelé l’intervenant.  Pendant des années l’unique outil dans ce domaine ont été les sanctions ciblées.  Or, a-t-il rappelé, elles se sont révélées inefficaces la plupart du temps parce que trop faibles et ne couvrant pas les corrompus qui alimentent les conflits.

Ce qui manque, selon M. Pendergast, c’est la pression financière contre le blanchiment d’argent, les comptes en banque illicites et les sociétés-écrans.  « C’est à cela qu’il faut s’attaquer pour démanteler ces réseaux de kleptocrates. »  Ce n’est que comme cela que les diplomates des Nations Unies et autres acteurs pourront assurer le succès de leurs efforts de paix.  M. Pendergast a donc prôné des régimes de sanctions ciblant les réseaux de la grande corruption et pas seulement les individus; des mesures contre les flux financiers illicites dans le système financier international; et des poursuites judiciaires pour les crimes financiers associés aux atrocités de masse.  Ce sont là, a-t-il plaidé, des outils puissants pour modifier les comportements, en s’attaquant aux individus et aux compagnies qui jouent un rôle actif dans le fonctionnement des réseaux.  L’intervenant a recommandé au Conseil de sécurité de faire de la corruption liée aux conflits un motif de sanction.  Il l’a également encouragé à travailler plus étroitement avec des entités spécialisées comme le Financial Action Task Force.  « Les outils de pression financière ne sont pas une fin en soi », a reconnu l’orateur, arguant que ces outils doivent s’inscrire dans une stratégie globale de diplomatie intense et de soutien aux institutions, axée sur la transparence et l’obligation de rendre des comptes.

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a déclaré qu’à la base, la corruption est le transfert de richesse des plus démunis aux plus puissants.  Les pots-de-vin, les opérations d’initiés, l’écrémage des fonds publics et le détournement de l’aide humanitaire sont autant de formes du prix que les plus pauvres paient involontairement aux puissants dans des régimes corrompus.  « Lorsque le poids de ce fardeau devient trop lourd, les gens réagissent inévitablement », a-t-elle mis en garde.  Le 17 décembre 2010, un humble vendeur de fruits tunisien s’est assis devant le bureau du gouverneur local, s’est aspergé d’essence et s’est immolé par le feu.  L’acte désespéré de Mohamed Bouazizi a déclenché le printemps arabe et a fait de lui le visage de la protestation contre les gouvernements autoritaires.  Ce qui est souvent oublié dans cette histoire, a estimé la représentante, c’est que c’est la corruption qui a poussé Mohamed Bouazizi à se tuer publiquement et douloureusement.  « Mohamed », a-t-elle dit, était systématiquement harcelé par des fonctionnaires exigeant des pots-de-vin.  Son action a déclenché une vague de soulèvements anti-corruption dans le monde arabe.  Les gouvernements qui semblaient stables depuis des décennies se sont effondrés en quelques semaines.  Neuf des 10 pays que Transparency International considère comme les plus corrompus au monde sont à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  « Neuf sur 10 », a-t-elle répété.

Mais au lieu de se demander pourquoi c’est le cas, l’ONU est trop souvent portée à ignorer la corruption, craignant que l’examen de cette question ne décourage les gouvernements et mette un terme à la coopération et considérant tout simplement que la corruption, c’est « le prix à payer pour faire des affaires » dans certains pays.  Les gouvernements de pays comme le Venezuela et l’Iran ne sont pas là pour servir leur peuple.  Ils sont là pour servir leurs propres intérêts avec la corruption, comme moyen, a soutenu Mme Haley. 

Si le Conseil de sécurité veut respecter son engagement en faveur de la paix et de la sécurité, il doit s’attaquer à la corruption », a-t-elle martelé.  Les exemples de corruption menant à un conflit sont partout.  La représentante a affirmé que le Gouvernement corrompu de M. Victor Ianoukovitch a volé au peuple ukrainien quelque 100 milliards de dollars en moins de quatre ans.  Et lorsque « Ianoukovitch » a finalement été évincé, les répercussions ont été mondiales.  La Fédération de Russie a occupé la Crimée et entamé la confrontation la plus grave entre Moscou et l’Occident depuis la fin de la guerre froide. 

La corruption alimente également les mouvements terroristes, a-t-elle poursuivi.  « Boko Haram est monté en puissance au Nigéria, en se positionnant largement contre la corruption et l’oppression exercée par les autorités.  Les premières cibles de ses attaques violentes ont été les postes de police qui abritent un personnel « notoirement corrompu et abusif ».  Depuis lors, le Nigéria a pris de véritables mesures en vue d’une réforme et les États-Unis félicitent le Gouvernement d’avoir reconnu la nécessité d’un changement, a déclaré Mme Haley.

La corruption soutient et prolonge les conflits, a-t-elle ajouté.  Les divisions ethniques au Soudan du Sud sont certes réelles, mais la source principale du conflit est une lutte pour le contrôle des revenus pétroliers.  Ailleurs en Afrique, des groupes exploitent les ressources naturelles, voire le trafic d’espèces sauvages, pour financer leurs guerres. 

La corruption est également un problème international car les fonds pillés sont blanchis dans le système financier international.  Plus que tout autre pays, les États-Unis ont pris des mesures pour y mettre un terme.  Grâce à Initiative contre la cleptocratie et pour le recouvrement d’avoirs, à la loi sur les pratiques de corruption à l’étranger et à la loi mondiale Magnitski sur la responsabilité des droits de l’homme, les États-Unis ont banni les personnes impliquées dans le narcotrafic, le trafic d’armes et le blanchiment d’argent.  Dans des pays comme la République démocratique du Congo, le Nicaragua et le Venezuela, le Trésor américain a imposé des sanctions importantes.  Plus tard aujourd’hui, les États-Unis organiseront une réunion selon la formule Arria, qui portera spécifiquement sur les conséquences de la corruption au Venezuela et sur la manière dont elle menace la sécurité internationale, a annoncé la représentante. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a souhaité que le Conseil assure le suivi des recommandations formulées par le Secrétaire général aujourd’hui.  La corruption exacerbe les conflits, constitue un obstacle majeur au développement économique et entrave les efforts de paix et de réconciliation, a-t-elle dit, estimant à 3 000 milliards de dollars les pertes annuelles imputables à ce phénomène.  « La corruption est un mal insidieux », a-t-elle insisté avant de souligner que les groupes extrémistes en profitent.  Aucun pays n’est à l’abri et le mien n’y échappe pas, a-t-elle reconnu.  La représentante a détaillé les mesures prises au Royaume-Uni, dont une loi de 2017 visant à barrer l’accès des hommes d’affaires corrompus aux services bancaires britanniques.  Nous devons nous montrer unis dans ce combat, a-t-elle poursuivi, en exhortant les pays qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention des Nations Unies contre la corruption.  Soulignant que la restitution des ressources détournées est un aspect essentiel de la lutte contre la corruption, la représentante a rappelé que son pays a contribué à la restitution d’une somme de 300 millions de dollars au Nigéria. 

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a expliqué que, en plus d’affaiblir considérablement les institutions et l’état de droit, la corruption engendre de grandes disparités économiques, favorise la criminalité organisée et le financement du terrorisme.  Elle fragilise ainsi tant la sécurité que le développement politique, économique et social des États affectés.  C’est en ce sens qu’elle peut constituer un obstacle à la paix et à la sécurité internationales, en particulier dans les pays en situation de conflit ou postconflit.  Dans ce contexte, a-t-il dit, il est indispensable que la communauté internationale reste pleinement mobilisée pour lutter contre la corruption à tous les niveaux –national, régional et international– en mettant en œuvre la Convention des Nations Unies contre la corruption.  Évoquant l’expérience de la France, le délégué a assuré qu’elle avait mobilisé les pouvoirs publics, les acteurs économiques et la société civile, plus proches du terrain et promoteurs d’initiatives innovantes.

Soucieuse de transparence de la vie économique, la France a adopté en 2016 une loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.  Cette loi, a précisé le représentant, a également créé l’Agence française anticorruption, chargée d’élaborer des recommandations relatives à la prévention et à l’aide à la détection de la corruption.  Au-delà, les organisations régionales et internationales ont elles aussi un rôle à jouer pour contribuer aux efforts anticorruptions et soutenir les États qui en ont besoin.  C’est par exemple le cas de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) et du Conseil de l’Europe, qui ont élaboré des instruments juridiques régionaux particulièrement pertinents.  La France, a conclu M. Delattre, soutient également le Partenariat pour un gouvernement ouvert, qui vise à accroître l’ouverture des données publiques et la participation citoyenne aux décisions publiques et qui rassemble désormais plus de 70 pays. 

En se basant sur l’expérience de son propre pays, M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a plaidé pour une coopération plus étroite entre pays, notamment sur le plan régional, ainsi qu’avec l’ONU, INTERPOL et d’autres agences spécialisées dans la lutte contre la corruption.  Le monde d’aujourd’hui atteste des liens entre développement et sécurité, et, par conséquent, il faut évaluer l’ampleur des problèmes tels que le terrorisme, la criminalité transnationale organisée, l’exploitation des ressources naturelles, le trafic de stupéfiants et d’armes et identifier la manière dont la corruption s’infiltre dans toutes ces activités. 

Le représentant a préconisé une stratégie à trois niveaux, à commencer par le lien entre sécurité et développement, des approches régionales innovantes et le renforcement de la coordination au sein des Nations Unies pour plus d’efficacité, de transparence et de responsabilité.  Il s’est également dit convaincu que les efforts individuels des pays doivent être complémentés par des actions menées « dans l’unité ».  À ce titre, il a évoqué les régimes de sanctions du Conseil de sécurité et ses résolutions qui pourraient réduire la probabilité des conflits alimentés par la corruption. 

M. DESIRE WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a axé son intervention sur les institutions administratives, judiciaires et sécuritaires, « trois institutions qui sont emblématiques des défis que constitue la corruption pour les États ».  Conscient de l’énorme potentiel de nuisance du phénomène de la corruption et de sa capacité à saper les fondements des États, les dirigeants africains, a rappelé le représentant, ont proclamé 2018, année de la lutte contre la corruption.  Le représentant a aussi attiré l’attention sur le fait que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a souligné la nécessité d’une plus grande intégration de l’architecture africaine de gouvernance dans le cadre de la prévention structurelle des conflits, tout en inscrivant la stratégie africaine de lutte contre la corruption dans l’optique d’une approche mondiale.  Le représentant a ensuite parlé de la Déclaration finale adoptée par les chefs d’État de l’Union africaine le 2 juillet, qui contient des mesures supposant une appropriation véritable de la lutte contre la corruption au niveau local, en vue de mutualiser les expériences pour une plus grande efficience au niveau du continent. 

Afin de briser le cercle vicieux qui mène à des situations encore plus inextricables dans les pays en situation de postconflit, le représentant a jugé utile de faire figurer explicitement la dimension lutte contre la corruption dans les accords de paix, de veiller à ce que les interventions contre la corruption commencent dans l’immédiat après le conflit et de renforcer la collaboration avec la société civile.  Il a conclu en soulignant que son pays a créé dès le 16 avril 2014, la Haute Autorité pour la bonne gouvernance, renforcé la Cellule nationale de traitement de l’information financière et les textes régissant la Direction centrale des marchés publics.  Le Gouvernement a aussi élargi les pouvoir de contrôle de la Cour des comptes. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a rappelé que la lutte contre les menaces à la paix et à la sécurité internationales est la première responsabilité de ce Conseil.  Il est crucial, a-t-il insisté, de respecter la Charte des Nations Unies, dont le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États.  Il faut privilégier les partenariats fondés sur un pied d’égalité et régler les différends par le dialogue.  Les racines des conflits, c’est le sous-développement, a insisté le représentant.  Le représentant a souligné les résultats « substantiels » du Sommet Chine-Afrique qui vient de se tenir à Beijing.  La corruption, a-t-il dit, est l’ennemi commun de l’humanité.  Il a donc appelé au renforcement de la coopération internationale s’agissant aussi de la restitution des biens volés.  Il n’a pas manqué de rappeler que son pays est partie à la Convention des Nations Unies contre la corruption. 

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a commencé par rappeler que l’état de droit forme la pierre angulaire de toute société stable et de la démocratie, et que la corruption est un virus qui l’affaiblit, d’où l’importance d’établir les responsabilités et d’honorer l’obligation de rendre des comptes.  Cela exige, a-t-elle rappelé, la séparation des pouvoirs, les contre-pouvoirs et le suivi judiciaire.  La représentante a insisté sur la transparence, une valeur à laquelle son gouvernement est profondément attaché.  Elle a attiré l’attention du Conseil sur l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives, qui exige des États qui y adhèrent qu’ils publient les informations relatives à la gestion des ressources naturelles.  Elle a prévenu des risques posés par la corruption s’agissant de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, se félicitant, une nouvelle fois, de l’objectif 16 sur la paix, la justice et des institutions fortes.

M. OLOF SKOOG (Suède) a déclaré que la corruption ne connaît pas de frontières et constitue un facteur d’instabilité, qui peut avoir des conséquences encore plus graves pour les femmes et les groupes vulnérables.  Les efforts multilatéraux de la communauté internationale ont abouti à des engagements politiques vigoureux à l’appui des initiatives anticorruption, comme le Programme de développement durable à l’horizon 2030, dont les objectifs 10 et 16 sont particulièrement pertinents à cet égard, a noté le représentant.  Il a également cité le Programme d’action d’Addis-Abeba, la Convention des Nations Unies contre la corruption et certaines résolutions du Conseil de sécurité, comme la résolution 2282.  Pour sa part, la Suède a entrepris des efforts nationaux, et partagé ses pratiques optimales, notamment lors de la Conférence de Stockholm sur la fiscalité, qui s’est tenue en mai dernier, afin de promouvoir le renforcement des capacités dans ce domaine spécifique. 

M. VASSILY A. NEBENZYA (Fédération de Russie) a souligné que les conflits sont souvent le fruit d’une lutte secrète pour le contrôle des ressources naturelles, « l’autre face de la médaille de la corruption ».  Le représentant a vu une certaine ironie dans le fait que cette réunion ait été convoquée par la présidence américaine du Conseil de sécurité alors même que le « lobbysme est une pratique acceptée et présente à tous les échelons du pouvoir aux États-Unis ».  Il a en revanche rappelé que son pays n’a cessé de plaider pour le renforcement du rôle de coordonnateur de l’ONU dans la lutte contre la corruption, sur la base de la Convention contre la corruption, une convention que la Fédération Russie a été l’une des premières à signer.  Mon pays, a ajouté le représentant, accorde une attention particulière au mécanisme d’examen de la Convention, un mécanisme « dépolitisé » et demande à l’ONU et à son Office contre le crime et la corruption (ONUDC) de fournir une aide technique aux États Membres.  Le représentant a ensuite passé en revue les différentes actions menées par la Fédération de Russie avec l’ONUDC.  Le mécanisme « dépolitisé » de lutte contre la corruption fonctionne très bien, a-t-il insisté.  Il a donc dit ne pas voir le bien-fondé de cette question à l’ordre du jour du Conseil de sécurité car cela sape les efforts des agences spécialisées et autres organes internationaux.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a rappelé que la corruption compromet l’état de droit et la justice.  Ce n’est pas un phénomène inconnu dans notre hémisphère, a-t-il déclaré.  La corruption est une menace pour la stabilité et une cause de nombreux conflits.  Au Pérou, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée est une priorité, a affirmé le représentant, arguant que la pérennisation de la paix signifie institutions inclusives, systèmes de contrepoids au pouvoir, participation accrue des femmes et lutte contre la corruption.  Ce sont les citoyens eux-mêmes qui doivent être aux commandes de la lutte contre la corruption et en dénonçant les pratiques.  Le représentant a plaidé pour une réponse coordonnée des États, mentionnant l’Accord de Lima de 2008 et demandé l’inclusion de la lutte contre la corruption dans les mandats des opérations de paix de l’ONU. 

Le fait que la corruption affecte les États ne signifie pas en soi qu’elle représente une menace à la paix et à la sécurité internationales, a argué M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) qui n’a pas manqué de souligner que cette question relève d’abord et avant tout des prérogatives de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC).  Il a appelé le Conseil de sécurité à respecter la Charte et à se limiter aux menaces à la paix et à la sécurité internationales.  L’ingérence du Conseil dans les affaires des autres organes des Nations Unies affecte l’autorité de ces dernièrs et affaiblit leur mandat, a averti le représentant pour lequel cette réunion du Conseil risque de « politiser » la lutte contre la corruption.  Se servir de cette question pour s’immiscer dans les affaires intérieures des États est une approche qu’il faut dénoncer, a affirmé le représentant dont le pays a d’ailleurs renoncé au secret bancaire pour renforcer la transparence, « un exemple à suivre à l’échelle mondiale ».  La lutte contre la corruption, a-t-il estimé, doit commencer par la réforme du système financier international et l’élimination des paradis fiscaux. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a souligné les causes sociales sous-jacentes du fléau de la corruption, dont la pauvreté et l’absence de l’état de droit.  Il y a par ailleurs un lien fort entre corruption et intensité des conflits, a-t-il déclaré, rappelant que la corruption peut détruire les économies des pays.  Il a souligné la robustesse du cadre juridique prévu par la Convention des Nations Unies contre la corruption et appelé à sa pleine mise en œuvre.  Nous devons resserrer notre coordination avec les organisations régionales, en mettant en place des réseaux régionaux de lutte contre la corruption, a préconisé le délégué.  Il a mentionné la création en 2016, au Koweït, d’une entité chargée notamment de promouvoir la transparence dans les transactions financières.  Lutter contre la corruption est une responsabilité commune, qui échoit d’abord aux États Membres, a conclu le délégué. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a salué l’inclusion de la question de la lutte contre la corruption à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Pour lui, la corruption constitue une dépravation morale qui touche toutes les couches de l’État mais également le système privé.  Il s’agit d’une appropriation illégale d’un bien, ce qui renvoie à l’Article 36 de la Charte, a-t-il souligné.  Le trafic d’influence, les dessous de table et autres sont des pratiques courantes de la corruption, « un problème commun à toutes les nations du monde ».  Il a donc encouragé le renforcement de la coopération internationale, saluant au passage le travail de l’ONUDC.  Le représentant a affirmé que la Guinée équatoriale s’est dotée d’une loi contre les fonctionnaires véreux.  Elle devrait se doter sous peu d’une loi sur la lutte contre la corruption.  Avant de conclure, le représentant a dénoncé les multinationales qui cherchent à maximiser leurs profits en faisant fi des lois en vigueur dans les pays où elles opèrent.  « La corruption c’est comme le tango, il faut être deux pour danser ».

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a reconnu, à son tour, que la corruption généralisée est l’une des causes profondes des conflits.  La corruption se joue des frontières et le Conseil ne peut détourner les yeux de ce fléau, a-t-elle estimé.  Elle a exhorté les bailleurs de fonds à refuser toute aide aux gouvernements qui ne s’engagent pas fermement contre la corruption.  La déléguée a d’ailleurs appelé au renforcement des capacités, en insistant tout de même sur la volonté politique comme « élément clef ».  Elle a exhorté les États qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à la Convention des Nations Unies contre la corruption, un phénomène contre lequel aucun pays n’est à l’abri. 

Tout en reconnaissant les effets négatifs de la corruption, Mme MAHLET HAILU GAUDEY(Éthiopie) a estimé que cette question n’a pas sa place à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Il y a suffisamment de questions pressantes pour la paix et la sécurité internationales, a-t-elle insisté, mettant en garde le Conseil contre la tentation d’empiéter sur les mandats des autres organes des Nations Unies.  Rien n’empêche le Conseil d’examiner la corruption dans le cadre de situations particulières de conflits, a-t-elle concédé, en pointant le doigt sur certains régimes de sanctions.  Mais pour la représentante, la Convention des Nations Unies contre la corruption est le seul instrument juridiquement contraignant pertinent.  Elle a d’ailleurs salué le travail de l’ONUDC en faveur d’une bonne mise en œuvre de la Convention.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur la biodiversité marine: quels principes retenir pour réglementer les outils de gestion des zones de haute mer?

Première session,
matin & après-midi
MER/2079

Conférence sur la biodiversité marine: quels principes retenir pour réglementer les outils de gestion des zones de haute mer?

Deux groupes de travail se sont réunis aujourd’hui dans le cadre des discussions sur un futur traité relatif au droit de la mer, qui aura pour but « la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales », des zones de haute mer qui représentent 64% des océans.

Au lancement de la Conférence, mardi, le Conseiller juridique de l’ONU, M. Miguel de Serpa Soares, avait souligné l’importance d’un tel instrument juridiquement contraignant: des océans et des mers durables peuvent contribuer à l’éradication de la pauvreté, à une croissance économique soutenue, à la sécurité alimentaire, à la création de moyens de subsistance durables et à la résilience face aux changements climatiques.

Sur les quatre grands thèmes qui seront abordés au cours des deux semaines de session, la question « renforcement des capacités et transfert des technologies marines » a été traitée par un premier groupe de travail informel, qui a achevé ses travaux ce matin après plus d’une journée de débats.  « Je commence à voir la conversation prendre forme », s’est réjouie la facilitatrice, Mme Ngedikes Olai Uludong, des Palaos.

De manière générale, il a été demandé que le principe de renforcement des capacités soit appliqué à tous les aspects de mise en œuvre de l’instrument et, en plus, en tenant compte des besoins spécifiques de chaque pays.  C’est ce qu’a suggéré notamment l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) qui a exprimé une autre exigence: le processus de renforcement des capacités doit être mené par les pays eux-mêmes. 

Sur le plan financier, le Togo a proposé la création d’un fonds pour le financement du renforcement des capacités, une idée partagée par la représentante de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Le deuxième groupe de travail à se réunir cette semaine fut celui chargé de la question « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées et autres mesures ».  Sous la houlette de la facilitatrice Mme Alice Revell, de la Nouvelle-Zélande, il a commencé par réfléchir aux « objectifs » de ces outils. 

Les délégations ont semblé s’accorder sur le principe que ces outils doivent correspondre aux objectifs généraux du nouvel instrument, à savoir la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer et la santé et la résilience des océans.  Cela exige une définition générale claire de ces outils, a-t-on demandé.

L’Union européenne a estimé que ces outils de gestion par zone sont essentiels pour que les États parties du futur instrument s’acquittent des obligations qui leur incomberont. 

Les deux groupes de travail ont donné l’occasion aux participants à la Conférence de répéter, comme les jours précédents, que la conception d’un nouvel instrument doit s’appuyer sur les acquis et leçons tirées des instruments existants.  Ils ont appelé à garantir la compatibilité et la cohérence des instruments juridiques, rejetant par la même occasion toute « superposition », tout « chevauchement » ou toute « hiérarchie » entre les différents textes internationaux.

Pour les outils de gestion par exemple, la priorité doit être d’identifier les lacunes de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer avant de définir des outils de gestion plus larges visant à réduire les risques pour la biodiversité en haute mer, a estimé l’observateur du Saint Siège.

« Les effets de notre nouvel instrument sur les instruments existants devront être finement analysés », a conclu le délégué uruguayen.

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux lundi 10 septembre, à partir de 10 heures.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail informel sur le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines: suite et fin de la discussion

Les délégations ont abordé ce matin le point 6.5 du guide de la présidence établi pour faciliter les débats (document 2018/3) intitulé « Questions soulevées par les éléments interdisciplinaires ».

Le représentant du Groupe des 77 et la Chine, celui de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) ainsi que d’autres délégations ont demandé qu’il y ait une définition claire de ce qu’on entend par « techniques marines » dans le contexte du renforcement des capacités et le transfert de ces techniques, un point de vue que l’Union européenne ne partage pas.  Cette délégation veut, d’une part, éviter des définitions trop précises sans qu’il y ait une raison et, d’autre part, souligne que les techniques marines risquent d’évoluer dans le temps.  Pour le Groupe des États d’Afrique et la Norvège, la question des définitions devrait être abordée beaucoup plus tard en fonction des besoins.

Les délégations ont ensuite abordé le cas des petits États insulaires en développement (PEID).  Il a été demandé à plusieurs reprises que leurs circonstances particulières soient reconnues dans le nouvel instrument.  Le représentant du Canada, ainsi que d’autres intervenants, sont en faveur de la définition d’approches et de principes pour l’aide aux États qui doivent se doter des capacités de mise en œuvre des dispositions de l’instrument.  Beaucoup préfèrent l’utilisation des meilleurs instruments existants avant de chercher à créer de nouveaux mécanismes.

Évoquant de manière plus large la question du renforcement des capacités, l’AOSIS a souhaité que ce principe soit appliqué à tous les aspects de mise en œuvre de l’instrument et, en plus, en tenant compte des besoins spécifiques de chaque pays.  Le groupe a également précisé que le processus de renforcement des capacités doit être mené par les pays eux-mêmes. 

Concernant l’aide dont les pays ont besoin pour augmenter leurs capacités, l’AOSIS a plaidé en faveur d’un mécanisme clair pour faire appliquer « l’obligation de coopérer » et ne pas avoir à dépendre uniquement de « promesses non contraignantes ».  Allant dans le même sens, le Togo a souligné la nécessité de créer un fonds pour le financement du renforcement des capacités, une idée partagée par la représentante de l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (UICN) qui a défendu le bien-fondé de la création d’un fonds spécifiquement consacré à la biodiversité en haute mer et qui financerait notamment les transferts de techniques marines.

Comme l’a dit le représentant de la Guinée, « si nous sommes là pour négocier un instrument juridiquement contraignant, il faut arrêter d’éviter les obligations contraignantes » qui doivent être mises à la charge des pays, notamment en ce qui concerne le transfert des techniques marines.  En même temps, il a évoqué la possibilité d’envisager une base volontaire, en fonction du niveau de chaque pays dans les secteurs donnés.  La liste des obligations contraignantes pourrait être révisée de manière périodique, a—t-il suggéré.  En conclusion, il a déclaré que « continuer à parler de volontarisme nous fait perdre du temps ». 

En ce qui concerne les institutions, le besoin d’un secrétariat pour le nouvel instrument a fait l’unanimité; certains ont proposé que ce rôle soit attribué à la Conférence océanographique internationale de l’UNESCO.  Le représentant du Bangladesh a proposé que l’Autorité internationale des fonds marins assure la coordination et la coopération du renforcement des capacités de techniques marines.

De manière plus générale sur ce point, le Groupe des États d’Afrique a appelé à capitaliser sur les acquis et leçons tirées des instruments existants -la Convention sur la diversité biologique, le Protocole de Nagoya, la Convention de Stockholm et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer- qu’il s’agisse de l’obligation faite aux États de coopérer en matière de renforcement des capacités et transfert des techniques marines, ou des arrangements institutionnels dans ce domaine.

Les intervenants se sont également dits en faveur de la création d’un centre d’échange des bonnes pratiques et de l’information, cependant la délégation de la Suisse a estimé que le rôle d’un tel centre ne devrait pas se limiter aux techniques marines mais avoir une portée plus large.

Groupe de travail sur les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées et autres mesures

La facilitatrice de ce Groupe de travail, Mme ALICE REVELL (Nouvelle-Zélande), a limité les interventions de ce matin au point 4.1 du guide établi spécialement pour faciliter les débats (document 2018/3), qui porte sur les « objectifs » des outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, et la question de savoir si ces objectifs devraient s’appliquer à l’ensemble des outils de gestion par zone.

Pour le Groupe des 77 et la Chine, l’AOSIS, l’Union européenne (UE), le groupe des petits États insulaires en développement (PEID) et les membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), ces outils de gestion par zone doivent correspondre aux objectifs généraux du nouvel instrument, à savoir la conservation et d’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer et la santé et la résilience des océans.  À terme, ces outils pourraient éventuellement être définis en fonction de domaines spécifiques.  Mais il faut tout d’abord une définition générale claire de ces outils, ont exigé d’autres délégations.  Le représentant du Mexique a même suggéré, pour plus de clarté, de définir les activités qui pourraient être autorisées au cas par cas, par zone, et sur la base des meilleures données scientifiques. 

De son côté le représentant de l’Union européenne a estimé que ces outils de gestion par zone sont essentiels pour que les États parties du futur instrument s’acquittent des obligations qui leur incomberont.  L’UE considère que la valeur ajoutée de ce nouvel instrument est précisément de mettre en place un réseau d’aires marines protégées à l’échelle mondiale avec des mesures et des niveaux de protection clairs pour chacune d’entre-elles, ce qui suppose notamment que ces aires soient clairement identifiées par rapport aux zones adjacentes. 

Sur une note discordante, le représentant de la Fédération de Russie a demandé que le nouvel instrument se limite au choix de certains principes, sur la base desquels les organismes existants prendraient des décisions concernant les zones protégées.  De telles zones doivent être définies sur une base scientifique connue, a-t-il souhaité en voulant que l’on choisisse clairement les objectifs à réaliser et que ces objectifs aient un lien direct avec la conservation et l’utilisation de la biodiversité.  Sa délégation, a-t-il précisé, n’est pas en faveur de la création ad vitam eternam de telles aires marines protégées.  Son idée est de supprimer ces zones une fois les objectifs atteints.

Rebondissant sur les exigences de son homologue russe, la représentante de la Nouvelle-Zélande a passé en revue une série d’outils de référence scientifiques existants déjà qui pourraient être utilisés pour définir les aires marines protégées et leurs objectifs spécifiques. 

Le délégué de la Fédération de Russie a aussi fait remarquer que la pêche dans ces zones ne relevant pas de la juridiction nationale ne représente qu’une part infime de la pêche mondiale, de quoi il a déduit que cette activité ne devrait pas être règlementée par le nouvel instrument.  Lui répondant sur ce point, le représentant du Sénégal a fait valoir que, de nos jours, toutes les pêcheries sont en train de dégringoler parce qu’il n’y a plus de ressources au niveau côtier.  Par conséquent, a-t-il argué, de plus en plus de pays vont se tourner vers la haute mer pour y trouver des ressources, d’autant plus que la technologie le permet.

Pour l’observateur du Saint Siège, la priorité devrait être d’identifier les lacunes de la Convention sur le droit de la mer avant de définir des outils de gestion plus larges visant à réduire les risques pour la biodiversité en haute mer dans leur ensemble.  Il ne faut pas se limiter aux poissons et à la pollution, a-t-il ajouté.  En outre, « le réseau mondial des zones protégées doit avoir des bases solides à court et à long terme ».  Dans cet esprit, le Sénégal a proposé d’opter pour une approche écosystémique dans la définition des outils de gestion des aires marines protégées, ce qui englobe la conservation et la gestion durable.

La discussion s’est déplacée sur le point 4.2 du document de référence: « Relation avec les mesures associées aux instruments, cadres et organes pertinents. »

Le délégué du Groupe des 77 et de la Chine a demandé la transparence, la gestion intégrée et une utilisation durable des instruments juridiques existants, tandis que son homologue de l’Union européenne a demandé le respect des mandats des organes existants.  Le nouvel instrument ne doit pas saper les textes existants et devrait inclure des mesures de coopération avec ces derniers, a-t-il dit, appuyé en cela par l’Uruguay, qui a rappelé que tous les États Membres ne sont pas parties à la Convention sur le droit de la mer, même si celle-ci est « le point de départ de nos discussions ».  « Les effets de notre nouvel instrument sur les instruments existants devront être finement analysés », a déclaré le délégué uruguayen.

« Le nouvel accord ne doit pas se superposer aux autres », a renchéri la délégation du Japon, à l’instar de l’Islande.  Le délégué de la Fédération de Russie a déclaré que les organes créés par le nouvel instrument ne seront pas plus compétents que ceux existants, tandis que l’Australie a demandé que le nouvel instrument renforce la cohérence des mesures existantes sans les « hiérarchiser ».  Il est impérieux de renforcer la coopération entre les organes existants, a déclaré le Togo.

Le délégué du Chili, pays qui compte un secteur de pêche très important, a plus spécifiquement demandé le respect de l’Accord sur les stocks de poissons et une compatibilité des instruments.  « Le Chili ne cherche pas créer de nouveaux droits autres que ceux prévus par l’Accord sur les stocks de poissons et la Convention de 1982, mais nous voulons l’application de ces droits. »

La due protection des droits des États côtiers adjacents a par ailleurs été réclamée par de nombreux délégués, notamment ceux de Maurice, du Japon et des Maldives.  Les États côtiers adjacents doivent être consultés dans la création d’une aire marine protégée, afin d’éviter des conflits d’interprétation par rapport à la Convention de 1982, a dit le délégué de l’UE.  Le représentant de Nauru, au nom des PEID, a, lui, réclamé qu’une consultation obligatoire des États côtiers adjacents soit prévue par le nouvel instrument.  Nous comprenons les préoccupations des États côtiers adjacents, a déclaré le délégué de la Chine, qui a, lui aussi, mis en garde contre un « chevauchement » des outils existants.  

Les États côtiers adjacents doivent être associés à l’élaboration des instruments de protection régionaux, a déclaré le représentant des États-Unis.  S’agissant de la création d’un mécanisme de consultation des États côtiers, le délégué russe a dit que cela n’est pas suffisant pour prendre en compte les intérêts de ces États.  « Il doit y avoir une reconnaissance de l’intérêt particulier de ces États et une préservation de leurs droits sur toutes les zones relevant de leur juridiction nationale », a tranché le représentant du Canada, reconnaissant que ce dernier point devrait faire l’objet de convergence parmi les délégations.

Le dernier point examiné aujourd’hui fut le point 4.3 du document de référence intitulé « Procédure relative aux outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées ».

La meilleure procédure à adopter relativement aux outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, doit prendre en compte les intérêts de tous les États Membres et être cohérente, a déclaré le délégué de Singapour.  Cette procédure pourrait être d’application mondiale, régionale, sectorielle ou hybride, a envisagé la représentante de la Nouvelle-Zélande, en soulignant l’importance des organisations régionales.

Cette procédure doit se fonder sur les éléments scientifiques les plus rigoureux possible, a exigé l’Égypte, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.  Son homologue des Maldives, au nom des PEID, a lui aussi demandé que la procédure à adopter relativement aux outils de gestion par zone soit basée sur des critères scientifiquement rigoureux et adoptée suivant la règle du consensus.  Il a également insisté sur l’expertise des PEID en la matière.

La décision d’une création d’une aire marine protégée sera prise par les États parties au prochain accord, a rappelé le délégué de l’Union européenne, tout en souhaitant que les consultations à ce sujet incluent tous les États, ainsi que la société civile.  Il a demandé que ces consultations soient limitées dans le temps, inclusives et transparentes et souhaité, lui aussi, que la procédure se fonde sur des éléments scientifiques les plus rigoureux possibles.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial pour la Syrie présente une proposition pour éviter une catastrophe humanitaire « dévastatrice » à Edleb

8345e séance – matin
CS/13491

Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial pour la Syrie présente une proposition pour éviter une catastrophe humanitaire « dévastatrice » à Edleb

Alors que l’offensive sur Edleb se prépare, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a averti ce matin, devant le Conseil de sécurité, que tous les ingrédients sont réunis pour qu’une « tempête parfaite » se déferle sur cette zone de désescalade avec des « conséquences humanitaires dévastatrices ». 

Pour éviter une telle tragédie et permettre à la population civile d’échapper à la quadrature du cercle, M. de Mistura a appelé à mettre en œuvre une proposition de la société civile d’Edleb qui recommande de dissocier la population des terroristes et des groupes armés et de présenter un ultimatum aux combattants afin qu’ils quittent la région, en particulier ceux du Front el-Nosra.  Selon l’Envoyé spécial, la Russie et la Turquie pourraient être les garants d’un tel plan d’évacuation.

Au préalable, le Directeur des opérations et du plaidoyer du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), M. John Ging, a indiqué que sur les 3 millions de personnes qui vivent dans la zone de désescalade d’Edleb, près de 2,1 millions ont besoin d’assistance humanitaire, dont 1,4 million sont déplacées. Il a aussi précisé que des plans ont été mis au point pour soutenir jusqu’à 900 000 femmes, enfants et hommes qui pourraient être piégés par le conflit, et jusqu’à 700 000 personnes susceptibles d’être déplacées au nord d’Edleb et au-delà par les affrontements, ainsi que 100 000 autres qui pourraient fuir dans les zones placées sous le contrôle des forces gouvernementales. 

Agitant le spectre des morts et de la destruction à Alep et dans la Ghouta orientale, le Ministre adjoint des affaires étrangères du Koweït, M. Khaled Al-Jarallah, a appelé à renforcer les efforts diplomatiques pour éviter un nouveau bain de sang.  « Ce Conseil, a-t-il affirmé, a une responsabilité humanitaire, morale et juridique envers la population d’Edleb et doit rechercher une solution préventive satisfaisante. »

« Ceux qui parlent de zone de désescalade à Edleb ne sont pas au courant de la situation du terrain, puisque les groupes armés n’ont pas respecté les dispositions du processus d’Astana », a toutefois estimé le représentant syrien qui a assuré que l’État syrien avait donné assez de temps aux groupes terroristes pour se joindre au processus de réconciliation.  Si ces groupes refusent d’obtempérer, a-t-il averti, « le Gouvernement syrien se tient prêt à agir ».  

Son homologue de la Fédération de Russie a, pour sa part, tancé les pays occidentaux qui sont à l’origine de cette « hystérie collective » autour d’Edleb, afin, a-t-il affirmé, que le dernier bastion terroriste de Syrie ne tombe pas.  Selon ses dires, il existe entre 40 à 45 groupes armés comptant près de 50 000 combattants à Edleb, dont le plus important est le Front el-Nosra qui regroupe 15 000 personnes, tandis que la majorité des localités seraient gérées par des milices d’autodéfense qui souhaitent une trêve avec le Gouvernement syrien.

« Le sort des citoyens ordinaires syriens n’intéresse pas les occidentaux, puisque, les terroristes malmènent allègrement la population dans cette zone de désescalade sans que cela n’émeuve personne », a affirmé le représentant russe qui a déploré que les « partenaires occidentaux » aient ignoré les appels lancés par Moscou.

« Lorsqu’Assad et son allié russe disent qu’ils veulent lutter contre le terrorisme, ce qu’ils veulent dire, en réalité, c’est qu’ils vont bombarder des hôpitaux et des écoles », a rétorqué la représentante des États-Unis.

À ses yeux, une offensive contre Edleb affaiblirait la Syrie et « créerait des générations de Syriens incapables d’oublier la brutalité odieuse du régime d’Assad et de ses alliés ».  Aussi, a-t-elle exhorté la Russie à bien examiner ses options et à se montrer à la hauteur de ses responsabilités.  

« Une offensive meurtrière à Edleb ne marquerait pas la fin de la crise, mais plutôt le début d’une nouvelle phase », s’est aussi inquiétée la France, tandis que le Royaume-Uni a prévenu qu’en cas d’offensive d’envergure à Edleb, la communauté internationale demandera des comptes aux commandants des forces armées déployées dans la région.  De nombreuses délégations ont en outre mis en garde contre toute éventualité d’utilisation d’armes chimiques.

La délégation des États-Unis n’en a pas moins jugé qu’il est encore temps de trouver une alternative et a appelé à trouver une solution politique fondée sur la feuille de route de la résolution 2254 (2018), et qui appelle à la tenue d’un réel dialogue entre les Syriens et à la création d’une nouvelle constitution devant déboucher sur la tenue d’élections libres et équitables. 

La quasi-totalité des intervenants ont aussi réitéré leur préférence pour une solution politique négociée et pacifique, sans manquer de lancer des appels en direction des acteurs clefs en Syrie, notamment les garants du processus d’Astana que sont la Fédération de Russie, la Turquie et l’Iran, qui s’étaient réunis aujourd’hui même à Téhéran.  Ces derniers ont décidé de régler la question d’Edleb « dans l’esprit de coopération qui caractérise le processus d’Astana », a d’ailleurs rendu compte l’Envoyé spécial qui s’est toutefois préoccupé du risque que ce nouvel élan diplomatique soit affecté par un regain d’activités militaires.

La Suède a, pour sa part, souligné l’importance pour les garants d’Astana de mettre en œuvre sans délai l’accord de désescalade qu’ils ont conclu, et de donner la priorité à la protection des civils.  « Ils doivent agir dès à présent pour éviter une catastrophe humanitaire colossale en cas d’offensive militaire de grande envergure à Edleb », a déclaré le représentant suédois. 

Le Kazakhstan a, quant à lui, appelé à appliquer les mesures de renforcement de la confiance prévues par le processus d’Astana; notamment la libération des prisonniers et des personnes enlevées, la remise aux familles des dépouilles de leurs proches et l’identification des disparus.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. STAFFAN DE MISTURA, intervenant par visioconférence depuis Genève, a averti que tous les ingrédients sont réunis pour une « tempête » à Edleb qui aura des conséquences humanitaires dévastatrices.  L’ONU estime en effet à 3 millions environ les habitants de la région, parmi lesquels 1 million d’enfants et près de 99% de civils.  Le reste étant constitué de groupes terroristes reconnus comme tels par le Conseil de sécurité, des combattants étrangers et d’autres groupes armés d’opposition qui s’y étaient réfugiés suite aux accords avec le Gouvernement syrien. 

L’Envoyé spécial a relevé que tous les yeux sont aujourd’hui rivés vers Téhéran où vient de se tenir la rencontre entre les trois garants du processus d’Astana, à savoir la Fédération de Russie, la Turquie et l’Iran.  Il a également indiqué que des informations font état de déploiement de troupes gouvernementales autour d’Edleb qui est pourtant, a-t-il rappelé, une zone de désescalade.  Dans le même temps, le Chef du Front el-Nosra a dit sa détermination à se battre, alors que les groupes d’opposition seraient en train de renforcer leurs positions en creusant des tranchés et en faisant exploser des ponts.  Depuis la fin du mois dernier, tous ces groupes d’opposition ont rejoint la bannière du « Front de libération ».  Il a aussi dit avoir entendu des avertissements concernant d’éventuelles attaques chimiques.  En tout état de cause, M. de Mistura a affirmé que tous les ingrédients sont réunis pour une « tempête parfaite » à Edleb. 

L’Envoyé spécial a par ailleurs déclaré que les efforts visant à combattre le terrorisme ne doivent pas faire fi des engagements internationaux et des considérations éthiques.  Il a donc invité toutes les parties à éviter cette tragédie, tout en veillant à régler la question des groupes terroristes.  Il a invité les garants du processus d’Astana, « les grands acteurs du Golfe » et d’autres pays qui exercent une influence sur les groupes armés à tout faire pour assurer la protection des civils.  M. de Mistura a souligné que les populations doivent être libres de quitter la région d’Edleb et qu’il faut donc assurer un large accès pour l’ONU qui est prête à travailler avec les parties sur le terrain pour assurer des routes d’évacuation pour les civils, dans le respect des principes humanitaires et des droits de l’homme.  Il a aussi rappelé la position claire du Secrétaire général qui estime que « tout emploi d’armes chimiques est inacceptable ».  Cela ne peut se reproduire en Syrie, a-t-il insisté. 

L’Envoyé spécial a ensuite rappelé que l’offensive sur Edleb se prépare alors que des discussions sont en cours sur la création d’un comité constitutionnel, de même que des réflexions sur le retour des réfugiés en Syrie.  Pour lui, ces deux scénarios ne concordent tout simplement pas.  Il a annoncé qu’il aura des rencontres, lundi et mardi, à Genève, avec les garants du processus d’Astana, avant la tenue d’autres réunions avec d’autres pays qui ont de l’influence en Syrie.  Il s’est préoccupé du risque que ce nouvel élan diplomatique soit affecté par un regain d’activités militaires.  Il a ensuite évoqué les groupes de la société civile d’Edleb qui organisent des manifestations pacifiques et qui ont demandé à l’ONU de tout faire pour assurer la protection des civils.  Pour terminer, l’Envoyé spécial pour la Syrie a exhorté à faire en sorte que « toute proposition et toute alternative pour éviter cette catastrophe ait une chance de prospérer ». 

M. JOHN GING, Directeur des opérations et du plaidoyer du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a rappelé qu’environ 3 millions de personnes vivent dans la zone de désescalade d’Edleb, qui comprend des parties des provinces d’Edleb, d’Alep, de Lattaquié et de Hama.  Parmi elles, près de 2,1 millions ont besoin d’assistance humanitaire, dont 1,4 million sont déplacées.  « Si notre réponse humanitaire se concentre sur les 2,1 millions de personnes dans le besoin, nous sommes préoccupés par la protection et la sûreté de tous les civils dans la zone où une intensification des hostilités a été constatée », a souligné M. Ging. 

Il a indiqué que le 4 septembre, des frappes aériennes et des tirs d’artillerie dans l’ouest et le sud d’Edleb, ainsi que dans le nord d’Hama, ont provoqué des pertes civiles et des déplacements de population.  Et le 6, un hôpital près de Keifr Zeita, dans le nord d’Hama, aurait été frappé par un bombardement aérien, en dépit du fait que cette zone est supposée être sanctuarisée, a déploré le haut fonctionnaire.  « Nous recevons des informations selon lesquelles des engins explosifs improvisés et d’autres attaques meurtrières ciblent des civils de part et d’autre dans la province d’Edleb, y compris des travailleurs humanitaires.  Au moins trois médecins ont été tués rien qu’en août. »  L’ONU et les organisations non gouvernementales, a-t-il assuré, ont continué de mettre en œuvre une opération humanitaire majeure dans cette région, avec en moyenne deux millions de personnes qui bénéficient d’une aide transfrontalière chaque mois, à partir de la Turquie. 

Au-delà de la fourniture d’une assistance, des efforts ont été entrepris pour veiller à ce que les populations en détresse puissent être soutenues dans l’éventualité d’une intensification des hostilités.  Des plans ont été mis au point pour soutenir jusqu’à 900 000 femmes, enfants et hommes qui pourraient être piégés par le conflit, et jusqu’à 700 000 personnes susceptibles d’être déplacées au nord d’Edleb et au-delà par les affrontements, ainsi que 100 000 autres qui pourraient fuir dans les zones placées sous contrôle des forces gouvernementales.  Une aide humanitaire a déjà été prédisposée à Edleb, ainsi que dans des différents emplacements d’Alep, Lattaquié et Hama.  L’ONU a en outre débloqué 20 millions de dollars à partir du Turkey Humanitarian Fund (Fonds humanitaire de la Turquie).  Mais malgré la générosité de certains donateurs, a-t-il déploré, il manque 311 millions pour financer une aide indispensable en case d’une hausse des violences. 

M. Ging a ensuite attiré l’attention du Conseil sur cinq demandes spécifiques, qui s’adressent également à ceux qui exercent une influence sur les parties au conflit.  Tout d’abord, cesser les hostilités dans la zone ou, à tout le moins, veiller à ce qu’il n’y ait pas d’escalade.  Ensuite, garantir la protection des civils et des infrastructures civiles, conformément au droit international humanitaire.  Par ailleurs, le Directeur a plaidé en faveur de la liberté de circulation des populations qui souhaitent partir, dans quelque direction que ce soit.  Puis M. Ging a lancé un appel en faveur d’un accès sûr et sans entrave de l’aide humanitaire aux nécessiteux.  Enfin, a-t-il ajouté, une hausse du financement pour renforcer la réponse humanitaire en préparation est nécessaire.

M. KHALED AL-JARALLAH, Ministre adjoint des affaires étrangères du Koweït, intervenant également au nom de la Suède, pays porte-plume de la résolution 2401 (2018) sur la situation humanitaire en Syrie, a mis en garde contre les conséquences humanitaires d’une escalade à Edleb et exhorté les parties à respecter le cessez-le-feu.  Les garants d’Astana, a-t-il estimé, doivent renforcer leurs efforts pour trouver une solution pacifique à la situation à Edleb.  Agitant le spectre des morts et de la destruction à Alep et dans la Ghouta orientale, il a appelé à renforcer les efforts diplomatiques pour éviter un nouveau bain de sang.  La lutte antiterroriste doit respecter le droit international, y compris les principes de précaution, de proportionnalité et de protection des civils, a-t-il souligné.  « Ce Conseil a une responsabilité humanitaire, morale et juridique envers la population d’Edleb et doit rechercher une solution préventive satisfaisante. » Enfin, le Ministre adjoint a assuré que son pays et la Suède feront tout pour inciter le Conseil à envisager toutes les options possibles. 

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a dit que la Syrie est à nouveau au bord de l’abîme avec le risque d’escalade à Edleb.  La Russie et l’Iran doivent faire respecter le cessez-le-feu, garantir un accès humanitaire complet et ouvrir un processus en vue d’une solution politique crédible, a-t-il dit.  « La France s’est mobilisée pleinement ces dernières semaines notamment auprès des Présidents Erdogan et Putin pour éviter toute offensive. » Après avoir indiqué que la France maintiendra et adaptera son assistance au Nord-Ouest syrien, le représentant a mis en garde contre l’instrumentalisation de la question des corridors humanitaires.  Il est urgent et possible d’éviter un massacre, a-t-il affirmé, en appelant à une solution politique.  Le délégué a également invité à créer, dans l’immédiat, un comité constitutionnel.  Enfin il a lancé un appel à la tenue d’élections libres et régulières, ouvertes à tous les Syriens, y compris les personnes déplacées et réfugiées.  « Une offensive meurtrière à Edleb ne marquerait pas la fin de la crise, mais plutôt le début d’une nouvelle phase », a-t-il prévenu.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a fait part de la préoccupation de sa délégation face à l’éventualité d’une offensive militaire à Edleb.  Il a rappelé que cette région est la dernière enclave terroriste du pays, principalement contrôlée par le Front el-Nosra et des groupes armés d’opposition.  Il a lancé un appel à toutes les parties ayant de l’influence sur le terrain afin qu’elles fassent preuve de modération et préservent la vie des civils, par exemple en facilitant les déplacements de civils, conformément au droit international humanitaire. 

Réitérant son soutien aux pourparlers de paix, le représentant a émis le vœu que le sommet de ce jour à Téhéran entre les garants d’Astana, ainsi que les futures réunions de Genève de l’Envoyé spécial, permettent une sortie de crise.  Les alliés des parties impliquées doivent chercher d’autres théâtres d’opérations pour faire voir leur force militaire, a-t-il lancé en leur demandant aussi de ne plus sacrifier l’avenir des Syriens sur l’autel des intérêts économiques et géostratégiques. 

M. JOANNA WRONECKA (Pologne) a exhorté les garants d’Astana et les autres acteurs exerçant une influence sur les parties au conflit à respecter leurs engagements et à agir pour protéger la population civile d’Edleb.  Par ailleurs, nous demandons un accès sûr et sans entrave de l’aide humanitaire en Syrie, y compris à Edleb, et appelons à prendre toutes les mesures en vue de protéger les travailleurs humanitaires.  Le représentant a également plaidé en faveur d’un retour sûr des déplacés dans leurs foyers, en faisant part de sa préoccupation quant à l’éventualité qu’un assaut sur Edleb puisse créer une nouvelle vague de réfugiés, alors que cette province est déjà celle qui concentre le plus grand nombre de déplacés en Syrie.  Sa délégation a enfin exprimé son inquiétude vis-à-vis du sort des infrastructures civiles, notamment les hôpitaux et les écoles.  Elle s’est aussi préoccupée du sort des enfants qui sont déjà très nombreux à être déplacés à Edleb.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) rappelant ce qui s’est passé à Alep et dans la Ghouta orientale, a averti que, d’ici quelques jours, il se pourrait qu’on parle de dizaines de milliers de nouvelles victimes et de 700 000 personnes déplacées supplémentaires, selon les estimations de l’ONU.  Il a aussi craint une déstabilisation du Moyen Orient ainsi que de nouvelles tensions entre membres permanents du Conseil de sécurité, alors que celui-ci a justement une responsabilité particulière dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Le représentant a plaidé en faveur d’une solution pacifique et appelé les pays pouvant avoir une influence sur le terrain à agir pour que les parties au conflit abandonnent la logique militaire.  Il a souligné l’esprit d’unité manifesté mercredi par 10 membres du Conseil, qui ont mis en évidence l’urgence à donner la priorité à la protection des civils à Edleb.  Il a émis l’espoir que les garants d’Astana puissent tomber d’accord sur une formule qui évite la tragédie que risque de vivre la population civile d’Edleb. 

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a dit sa préoccupation devant l’imminence des combats à Edleb, province dont deux des trois millions d’habitants ont besoin d’une aide humanitaire.  Il s’est alarmé du risque d’un possible recours à l’arme chimique, qui s’ajouterait à la catastrophe humanitaire certaine.  Il n’y a pas d’alternative à la recherche de la paix par un dialogue franc et inclusif en Syrie, a-t-il souligné, en demandant la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Enfin, le délégué ivoirien a appelé les parties au conflit à la retenue et à protéger les civils. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a noté que des initiatives de reconstruction sont menées dans certaines régions de la Syrie.  Il a donc invité la communauté internationale à renforcer les efforts pour soutenir toutes les régions du pays.  La Chine appelle toutes les parties en Syrie à redoubler leurs efforts diplomatiques, tout en plaidant pour que la communauté internationale unisse ses efforts pour poursuivre la lutte contre le terrorisme et renforcer les gains actuels dans ce domaine.  La Chine invite toutes les parties à ne pas porter atteinte aux civils et à respecter l’intégrité territoriale de la Syrie.  Pour la Chine, une solution politique est la meilleure option de sortie de crise, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Le délégué a, en conclusion, invité les parties à se joindre aux efforts de l’Envoyé spécial pour poursuivre les pourparlers de paix. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé que l’objectif de cette réunion est de lancer un appel pour décourager un assaut contre Edleb et de veiller à la protection des populations civiles résidant dans cette province, ou qui y sont déplacées.  Elle s’est donc félicitée des efforts diplomatiques en cours, qui vont dans le sens de cet appel.  « Le sort d’environ trois millions de personnes est en jeu », a prévenu la représentante.  Elle a exhorté la Fédération de Russie et l’Iran à exercer l’influence qui est la leur sur la Syrie pour désamorcer la situation actuelle.  Sur le plan militaire, Mme Pierce s’est préoccupée des nombreuses frappes aériennes qui se sont déroulées ce mois-ci, et qui auraient causé la mort de 38 civils au cours de la seule journée du 4 septembre.  Rappelant l’importance de la doctrine de la proportionnalité et de la distinction, elle a souligné que l’utilisation d’armes interdites pourrait être considérée comme un crime grave.  « Il y a plus de nourrissons à Edleb que de terroristes », a mis en garde la déléguée britannique.  En cas d’offensive d’envergure à Edleb, la communauté internationale demandera des comptes aux commandants des forces armées déployées dans la région, a prévenu Mme Pierce, qui a donné les noms de plusieurs d’entre eux.  Pour sa part, le Royaume-Uni a annoncé une nouvelle aide médicale vitale, d’un montant de 15 millions de dollars, dans l’espoir d’atténuer les souffrances dans les zones censément bombardées.  Mais les bailleurs de fonds ne peuvent se substituer aux États ayant de l’influence sur les parties au conflit, a rappelé la délégation.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté à agir pour éviter une escalade supplémentaire à Edleb, zone dans laquelle près de 3 millions de personnes sont prises au piège.  « Les garants de la zone de désescalade d’Edleb et les autorités syriennes doivent œuvrer sérieusement à une solution pacifique et négociée à Edleb. » Il a rappelé que toute lutte antiterroriste doit respecter le droit international.  Le délégué a ensuite réclamé la pleine application de la résolution 2401 (2018), avant de fustiger les attaques indiscriminées contre les écoles et hôpitaux en Syrie.  « Nous savons que les forces militaires syriennes et russes connaissent les emplacements des hôpitaux qui restent à Edleb. » Il a enfin demandé un accès humanitaire sans entrave dans le pays et souligné l’importance d’une transition politique en Syrie. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a estimé nécessaire de mettre pleinement en œuvre la résolution 2401 (2018) du Conseil de sécurité.  Il a souhaité que les parties renoncent à la violence et permettent l’accès humanitaire pour porter secours aux civils.  Pour la Bolivie, toute mesure de lutte contre les terroristes doit tenir compte de la protection des civils.  Il a également plaidé pour le nettoyage des explosifs de guerre dans la zone de Raqqa, afin de garantir le retour sûr de réfugiés et de déplacés. 

La Bolivie invite les États ayant une influence sur le terrain à tout faire pour éviter l’escalade militaire à Edleb, non seulement les pays qui ont des troupes sur le terrain, mais également ceux qui financent les groupes armés, a précisé le représentant.  Il a aussi plaidé pour la protection des infrastructures civiles.  C’est au peuple syrien de décider de son avenir, a-t-il enfin rappelé, précisant que seule la solution politique peut prospérer, par le biais de négociations, avec l’aide des Nations Unies, et par le biais du processus de Genève. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est dit préoccupée par la situation à Edleb et la possibilité d’une catastrophe humanitaire consécutive à une intensification des hostilités.  « Nous reconnaissons qu’il y a sur place des terroristes désignés par l’ONU qui doivent être vaincus grâce à des efforts coordonnés de la communauté internationale », a-t-elle dit.  « Néanmoins, nous estimons que tout doit être fait pour protéger les vies de millions de civils. »  L’Éthiopie a donc salué les consultations en cours, particulièrement entre les garants d’Astana, dans la mesure où Edleb est une zone de désescalade, avant d’émettre l’espoir que le sommet qui se déroule aujourd’hui même débouchera sur un résultat constructif.  La représentante a donc appelé ceux qui ont de l’influence sur les parties à jouer un rôle constructif.  Après avoir lancé un appel à soutenir le personnel humanitaire déployé sur le terrain, elle a souligné qu’il n’y pas de solution militaire au conflit, celui-ci ne pouvant être résolu qu’au travers du dialogue politique. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a rappelé que les forces militaires russes qui se trouvent en Syrie y avaient été conviées par le Gouvernement syrien avec pour objectif majeur de lutter contre le terrorisme dans le pays.  Il a estimé que la libération finale « de tout le territoire » permettra de créer des conditions favorables à un accord politique, sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Rappelant qu’Edleb est une zone de désescalade, il a invité les garants d’Astana à assurer une libération pacifique d’Edleb d’éléments terroristes.  Il a conseillé de le faire en séparant les groupes terroristes des forces d’opposition modérée qui sont disposées à négocier avec les forces gouvernementales. 

Le Kazakhstan soutien les rencontres du 10 et 11 septembres entre l’Envoyé spécial et les garants du processus d’Astana.  Le représentant a également dit espérer que la réunion des Présidents de ce processus, aujourd’hui même à Téhéran, donne lieu à une décision permettant de renforcer la confiance entre les parties au conflit, faciliter le sort des civils et relancer le processus politique.  Le représentant a également appuyé les efforts des garants visant à aider les Syriens à rétablir l’unité de leur pays et à conclure un accord politique.  En attendant, il a souhaité que les mesures de renforcement de la confiance prévues par le processus d’Astana soient appliquées, notamment la libération des prisonniers et des personnes enlevées, la remise aux familles des dépouilles de leur proche et l’identification des disparus.

M. OLOF SKOOG (Suède) a estimé que le débat d’aujourd’hui était fort différent de ceux qui s’étaient tenus sur les sorts d’Alep, de la Ghouta orientale et Daraa, « parce qu’il n’y a nulle part où fuir pour les 3 millions de civils piégés à Edleb, dont 1 million d’enfants ».  Dans ce contexte, il a souligné l’importance pour les garants d’Astana, qui se rencontrent au plus haut niveau aujourd’hui, de mettre en œuvre sans délai l’accord de désescalade qu’ils ont conclu, et de donner la priorité à la protection des civils.  « Ils doivent agir dès à présent pour éviter une catastrophe humanitaire colossale en cas d’offensive militaire de grande envergure à Edleb », a déclaré M. Skoog.  Celui-ci a proposé au Conseil de poursuivre cette discussion en consultations, pour y être informé des développements et de tout progrès pour dénouer la situation sur le terrain. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé d’emblée que le thème de cette réunion, tel qu’arrêté par la présidence des États-Unis, fait référence au Moyen-Orient et à Edleb, comme s’il ne s’agissait pas d’un territoire de la République arabe syrienne.  Il a dit être d’accord avec l’Envoyé spécial pour la Syrie quand ce dernier reconnaît que les autorités syriennes ont bien le droit de se battre pour reprendre leur territoire.  Il a noté que personne ne conteste le fait que dans la zone de désescalade d’Edleb, le Front el-Nosra est présent en nombre et essaye de contrôler tout le territoire.  « Voilà pourquoi un statu quo est impensable », a-t-il souligné.  De même, les zones de désescalade ont un statut provisoire, a-t-il rappelé, en précisant que les résolutions du Conseil de sécurité n’ont jamais évoqué une trêve dans la lutte contre les terroristes. 

Pour la Fédération de Russie, « le sort des citoyens ordinaires syriens n’intéresse pas les Occidentaux », puisque, a affirmé le représentant, les terroristes malmènent allègrement la population dans cette zone de désescalade sans que cela n’émeuve personne.  Le délégué a rappelé que le 4 septembre dernier, l’aviation russe a frappé des entrepôts d’explosifs et de drones tenus par les terroristes à Edleb.  « D’où vient cette production militaire dont disposent ces terroristes? » s’est-il demandé en pointant leur soutien étranger.  Il a aussi indiqué que les chefs des terroristes s’opposent à toute velléité de quitter leurs groupes, allant même jusqu’à l’élimination physique. 

Le représentant a ensuite signalé qu’il existe entre 40 à 45 groupes armées comptant près de 50 000 combattants à Edleb, dont le plus important est le Front el-Nosra qui regroupe 15 000 personnes.  Et la majorité des localités sont gérées par des milices d’autodéfense qui souhaitent une trêve avec le Gouvernement syrien.  Les habitants d’Edleb sont las de la tyrannie des terroristes, a-t-il affirmé, avant d’appeler à dissocier les groupes d’opposition armée voulant se joindre au processus politique des terroristes. 

Nous avons entendu aujourd’hui de nombreux appels en direction des garants d’Astana, a poursuivi M. Nebenzia, tout en rappelant que la Fédération de Russie avait fait de même en direction des « partenaires occidentaux » qui, a-t-il déploré, les ont ignorés.  Il a accusé Washington d’avoir essayé de renverser le régime syrien.  Et aujourd’hui, les Occidentaux sont à l’origine de cette « hystérie collective » autour d’Edleb, afin, a-t-il affirmé, que le dernier bastion terroriste de Syrie ne tombe pas.  Le représentant russe a néanmoins assuré que des perspectives de pourparlers existent toujours, rappelant que l’Envoyé spécial reste en contact avec l’opposition syrienne armée.  Il a promis que les scénarii apocalyptiques sur Edleb, propagés par certains États, après ceux de la Ghouta orientale et d’Alep, ne vont pas se réaliser, « a contrario du désastre de Raqqa qui a été détruit sous les bombes de la coalition ».

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a assuré que le régime d’Assad et ses facilitateurs la Russie et l’Iran ont déjà un scénario bien rodé.  D’abord ils encerclent une zone civile, puis ils font des déclarations absurdes selon lesquelles toutes les personnes qui s’y trouvent sont des terroristes.  Vient ensuite la campagne de famine et de capitulation.  C’est le scénario de la mort, a-t-elle dénoncé, déjà utilisé et « peaufiné » à Daraa ou dans la Ghouta orientale, dans l’est d’Alep ou à Hama. 

Maintenant, en dépit des avertissements répétés de plusieurs dirigeants, « dont le Président des États-Unis », une offensive se prépare contre Edleb et des zones civiles subissent d’ores et déjà des frappes aériennes.  Nous avons pourtant été très clairs, a mis en garde la représentante: toute attaque contre Edleb constituerait une grave escalade du conflit en Syrie.  Et si Assad, la Russie et l’Iran persistent, les conséquences seront dramatiques.

Nous avons été informés que trois millions de personnes, dont 80% de civils, sont coincés à Edleb, « soit presque 11 fois plus que le nombre de celles qui l’étaient à Alep ».  Elle a appelé le régime d’Assad à mettre un terme à l’offensive, notant par ailleurs que dans ce contexte, qui pourrait se traduire par des conséquences encore plus graves, l’Iran et la Russie ont le pouvoir de faire quelque chose.  Mais lorsqu’Assad et son allié russe disent qu’ils veulent lutter contre le terrorisme, ce qu’ils veulent dire, en réalité, c’est qu’ils vont bombarder des hôpitaux et des écoles, s’est élevée Mme Haley. 

La représentante a également indiqué que la Russie souhaite que les États-Unis et la communauté internationale fournisse l’argent nécessaire à la reconstruction de la Syrie.  Les États-Unis, a-t-elle martelé, n’envisageront pas une telle demande tant que nous n’aurons pas pu constater les résultats concrets d’un processus politique authentique pour mettre un terme à la guerre.  Le contribuable américain ne va très certainement pas subventionner la campagne de destruction d’Assad, s’est-elle emportée.

Mme Haley a jugé qu’il est encore temps de trouver une alternative et a appelé à trouver une solution politique fondée sur la feuille de route de la résolution 2254 (2018) et qui appelle à la tenue d’un réel dialogue entre les Syriens et à la création d’une nouvelle constitution devant déboucher sur la tenue d’élections libres et équitables.

À ses yeux, une offensive contre Edleb, affaiblirait la Syrie et créerait des générations de Syriens incapables d’oublier la brutalité odieuse et brutale du régime d’Assad et de ses alliés.  Elle a exhorté la Russie à bien examiner ses options et à travailler « avec nous, l’ONU et les partenaires internationaux », pour enfin faire venir la paix en Syrie.  La Russie doit être à la hauteur de ses responsabilités et mettre un terme aux combats, a-t-elle affirmé. 

Réagissant aux déclarations des membres du Conseil, M. Staffan de Mistura, Envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, a déclaré que cette réunion est peut-être « cruciale ».  Il a ensuite montré une photo de civils d’Edleb en train de brandir des bougies, affirmant avoir également reçu une lettre signée par 1000 femmes de la province, « qui nous ont exhortés à garder à l’esprit qu’elles sont enseignantes, infirmières, femmes déplacées, ou femmes au foyer ».  Il est vrai, a reconnu le haut fonctionnaire, que certains combattants expulsés des autres régions syriennes se sont rendus à Edleb, mais selon lui, ils seraient minoritaires.  « Je vous invite à vous rendre à Edleb pour voir ces civils qui souffrent depuis des années.  Ces personnes sont opposées aux terroristes », a-t-il témoigné.

Aujourd’hui, a-t-il repris, s’est déroulée à Téhéran une réunion au plus haut niveau entre la Russie, l’Iran et la Syrie.  Ce que j’en ai retenu, c’est que le facteur essentiel est le temps, a dit M. de Mistura qui a noté que l’intention déclarée des participants est de continuer à discuter et à mettre en œuvre les idées déjà agréées.  « Moi aussi, j’ai une idée », a lancé M. de Mistura, qui a souligné qu’il s’agissait en réalité d’une proposition de la société civile pour échapper à la quadrature du cercle.  Il a reconnu que des terroristes identifiés par l’ONU se trouvent à Edleb, mais a souligné que ces derniers sont peu nombreux et que la plupart des personnes sur place sont coincées entre deux chaises et ne veulent pas de cette situation. 

L’immense majorité des gens à Edleb sont des civils, qui demandent que l’on opère une distinction claire entre eux et les combattants sur place.  « Nous parlons de trois millions de personnes », a insisté l’Envoyé spécial.  Revenant à la proposition de la société civile, il a recommandé de dissocier la population des terroristes armés et des groupes armés.  Tous les combattants devraient donc se voir proposer un ultimatum pour quitter Edleb, en particulier el-Nosra, « qui a essayé de placer son propre drapeau, mais dont la population n’a pas voulu ».  La Russie et la Turquie devraient être les garants d’un tel plan d’évacuation, a-t-il proposé.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a rappelé que le processus d’Astana visait à créer des zones de désescalade de nature provisoire, afin de conclure des accords de paix avec les groupes armés qui tourneraient le dos aux groupes terroristes.  Malheureusement, a-t-il déploré, ce ne fut pas le cas à Edleb.  « Ceux qui parlent de zone de désescalade à Edleb ne sont pas au courant de la situation sur le terrain, puisque les groupes armés n’ont pas respecté les dispositions du processus d’Astana », a-t-il expliqué.  Il a signalé à la délégation du Royaume-Uni qu’Edleb compte pas moins de 50 000 terroristes, et non pas les 15 000 avancés.

Le représentant a ensuite accusé la présidence du Conseil de sécurité d’être à la fois « un adversaire et un arbitre » qui impose des débats sur le Nicaragua, sur la Syrie, et bientôt sur le Venezuela et l’Iran.  Il a aussi rappelé que trois membres permanents du Conseil de sécurité utilisent souvent leur présidence de l’organe pour organiser « à souhait » des réunions sur la Syrie, alors que c’est bien leurs gouvernements qui sont la cause des souffrances en Syrie et au-delà.  « Edleb se situe bel et bien en Syrie », a-t-il rappelé en justifiant les mesures de son gouvernement visant à expulser les groupes terroristes de cette région du pays.  Selon M. Ja’afari, « défendre les groupes terroristes est une tentative désespérée de les recycler avant de les renvoyer demain au Yémen, au Nigéria ou en Afghanistan ».

Ce dernier a en outre estimé que l’État syrien a donné assez de temps aux groupes terroristes pour se joindre au processus de réconciliation.  À présent, « ceux qui favorisent l’entrée des terroristes en Syrie, notamment le Gouvernement turc, ont encore une chance de les faire quitter le pays ».  Si ces groupes refusent d’obtempérer, a-t-il averti, « le Gouvernement syrien se tient prêt à agir ».  Nous sommes conscients des implications humanitaires et nous prenons toutes les précautions en fournissant des routes sûres pour l’évacuation des civils, a tempéré le représentant qui a promis vivres et protection aux civils.

M. Ja’afari a par ailleurs déploré que les États-Unis, le Royaume-Uni et la France refusent depuis un an d’inscrire le Front el-Nosra sur la liste des groupes terroristes, pour ensuite rappeler que sa délégation a fourni au Conseil des informations indiquant que des groupes terroristes et les Casques blancs ont l’intention d’utiliser des armes chimiques et en faire porter le chapeau au Gouvernement.  J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer Mme la Présidente: « investir dans le terrorisme dans mon pays n’a pas marché », a déclaré le délégué syrien.  Il s’est également insurgé contre l’hypocrisie du Koweït qui parle de la Syrie comme d’un peuple frère, alors que des élus Koweïtiens appellent ouvertement au recrutement de combattants jihadistes pour les envoyer en Syrie.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: Accusée par le Royaume-Uni d’avoir orchestré la tentative de meurtre à Salisbury, la Fédération de Russie dément toute responsabilité

8343e séance – matin
CS/13488

Conseil de sécurité: Accusée par le Royaume-Uni d’avoir orchestré la tentative de meurtre à Salisbury, la Fédération de Russie dément toute responsabilité

À l’initiative du Royaume-Uni, le Conseil de sécurité s’est, ce matin, saisi des conclusions de l’enquête sur l’incident dit de Salisbury, au cours duquel Sergei Skripal et sa fille Yulia avaient été empoisonnés à l’aide d’un agent innervant dans cette petite ville d’Angleterre, le 4 mars 2018.  La représentante britannique, Mme Karen Pierce, a révélé aujourd’hui que deux ressortissants russes, qui seraient affiliés à la GRU –la direction générale des renseignements russe–, avaient été identifiés comme les auteurs de cette tentative de meurtre, des accusations rejetées par le représentant de Moscou.

La police du Royaume-Uni a mené une enquête approfondie, qui a permis de déterminer que le produit utilisé à Salisbury était un neurotoxique issu d’une classe d’agents de guerre chimiques appelée Novitchok, a rappelé la déléguée.  Quant aux deux suspects, qui ont quitté le sol britannique, la présence du Novitchok a été attestée dans leur chambre d’hôtel et ils ont été aperçus sur les lieux du crime le jour même.

Puisque la Fédération de Russie n’autorise pas l’extradition de ses ressortissants, Londres a donc fait la demande et obtenu auprès d’INTERPOL la délivrance d’un mandat d’arrêt international à l’encontre des deux individus, a-t-elle annoncé.

Son homologue russe, M. Vassily Nebenzia, a mis en cause les éléments de preuve brandis par Mme Pierce, en estimant que la publication, hier, de photos des « supposés » responsables ne visaient qu’à donner un « tournant sensationnel » à l’affaire, en attisant le « sentiment antirusse ».  « On nous dit que les suspects auraient des noms russes, mais on estime en même temps que ces noms seraient des noms d’emprunt », a-t-il relevé.

En réponse aux appels de plusieurs membres du Conseil à coopérer pleinement avec le Royaume-Uni, M. Nebenzia a assuré que c’est bien Moscou qui a demandé à Londres de faire preuve de coopération jusqu’à présent.  Ces propos ont fait réagir la représentante britannique qui a rétorqué qu’« on ne recrute pas un pyromane pour enquêter sur un incendie » et que jamais la police du Royaume-Uni, qui est « indépendante du Gouvernement », n’est partie du principe que la Russie était responsable; simplement, que les éléments de preuve pointaient dans cette direction.

Écartant les « élucubrations d’autorités britanniques russophobes », le représentant russe s’est demandé pour quelle raison la Russie voudrait-elle bien empoisonner les Skripal, « et de manière si alambiquée encore »?  On nous a dit que la poignée de la porte du domicile des Skripal aurait été enduite d’un gel, ensuite on nous parle d’un flacon de parfum Nina Ricci contenant l’agent innervant, s’est exclamé M. Nebenzia.

Pour la représentante des États-Unis, la tentative de meurtre contre les Skripal était une attaque « hautement planifiée et délibérée ».  Au lieu d’assumer la responsabilité de ses propres actes, le Gouvernement russe n’a offert jusqu’à présent que « dénégations » et « contre-accusations », suivant un « scénario bien connu »: « De la Crimée au vol MH17, en passant par le Donbass et l’assassinat de Litvinenko, la liste est encore longue.  Et c’est toujours la même rengaine.  La Russie n’est comme par hasard jamais derrière ces incidents », a ironisé Mme Nikki Haley.

Incriminant elle aussi un « mode systématique de malveillance russe à l’étranger », sa collègue du Royaume-Uni a dénoncé la tentative de coup d’état au Monténégro en octobre 2016 et le piratage des emails du Parti démocrate des États-Unis, qui témoigneraient que le GRU s’est rendu « coupable d’ingérence dans les affaires internes » d’autres pays.

Si la France et la Suède ont abondé dans le sens d’une responsabilité de la Russie, d’autres membres, comme l’Éthiopie ou encore le Kazakhstan, ont estimé ne pas disposer d’éléments de preuves irréfutables suffisants pour parvenir à la même conclusion.  La Chine et la Bolivie ont de leur côté mis en garde contre les risques de politisation de cet incident entre la Russie et le Royaume-Uni.

LETTRE DATÉE DU 13 MARS 2018, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE CHARGÉ D’AFFAIRES PAR INTÉRIM DE LA MISSION PERMANENTE DU ROYAUME-UNI DE GRANDE-BRETAGNE ET D’IRLANDE DU NORD AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2018/218)

Déclarations

Avant d’informer le Conseil de sécurité des résultats de l’enquête britannique, Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a tenu à rappeler les faits.  Le 4 mars 2018, à Salisbury, Sergueï Skripal et sa fille Yulia ont été empoisonnés, en Angleterre, à l’aide de l’agent neurotoxique Novitchok, selon des sources officielles britanniques et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Les Skripal ont survécu, et sont aujourd’hui convalescents.  Un officier de police a également été placé dans une unité de soins intensifs après avoir été contaminé lors d’une visite chez Sergei Skripal.  Mais le 30 juin 2018, à Amesbury, deux ressortissants britanniques, Charlie Rowley et Dawn Sturgess, ont été admis à l’hôpital du district de Salisbury.  La police a déterminé qu’ils avaient également été empoisonnés par le Novitchok.  Sturgess est morte le 8 juillet, Rowley a repris conscience deux jours plus tard.

La police britannique a mené une enquête médicolégale très fouillée et a conclu « de façon indépendante » qu’il y avait des éléments de preuve en nombre suffisant pour accuser deux ressortissants russes identifiés comme membres du GRU, la présence de Novicok ayant été attestée dans leur chambre d’hôtel, a annoncé Mme Peirce.  Ces deux individus ne se trouvent plus sur le territoire britannique et la Fédération de Russie n’autorise pas l’extradition de ses ressortissants.  Par conséquent, a expliqué la représentante, le Royaume-Uni a obtenu la délivrance d’un mandat d’arrêt international émis par INTERPOL.  « Nous avons des preuves suffisantes de ce qui s’est passé à Salisbury.  Il y a un mode systématique de malveillance russe à l’étranger », a argué la déléguée, en citant la tentative de coup d’état au Monténégro en octobre 2016 et le piratage des emails du Parti démocrate des États-Unis.  Pour elle, aucun doute: le GRU s’est rendu coupable d’ingérence dans les affaires internes d’autres pays.  Le Royaume-Uni, « qui n’en veut pas au peuple russe », continue d’espérer avoir un partenariat à Moscou, a assuré Mme Peirce, en défendant l’intégrité du régime de non-prolifération. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a exprimé sa « profonde préoccupation » face à l’utilisation d’un agent innervant dans un espace public du Royaume-Uni, qui a fait une victime et mis en danger la vie d’au moins quatre personnes.  Il a fermement condamné l’utilisation d’armes chimiques, considérant qu’elles représentent une menace à la paix et à la sécurité internationales et une « violation flagrante » du régime de non-prolifération.  Il a incité les parties concernées à coopérer pleinement avec les enquêtes en cours, notamment celle de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC). 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a réitéré la solidarité de son pays avec les autorités britanniques à la suite de « l’acte hostile » perpétré le 4 mars à Salisbury.  Il a salué l’enquête du Royaume-Uni, en lien avec l’OIAC, qui confirme l’analyse initiale sur « l’absence d’autre explication plausible que la responsabilité de la Russie ».  Les attaques chimiques perpétrées à Salisbury et Amesbury n’ont pu être lancées et approuvées qu’à un niveau « suffisamment élevé » de l’État russe, a-t-il estimé.  Il a pris note de l’émission de deux mandats d’arrêt contre des officiers de renseignement militaire russes et s’est dit disposé à coopérer avec la police britannique.  Il a exprimé sa profonde préoccupation face à de tels agissements, réaffirmée unanimement par l’OTAN et l’Union européenne.  Le recours à des armes chimiques n’est plus envisageable en ce début de siècle, a-t-il argué, ajoutant qu’il incombe au Conseil de sécurité de protéger le régime de non-prolifération et « notre système de sécurité collective ».  M. Delattre a en outre appelé la communauté internationale, y compris la Russie, à s’engager à protéger la Convention pour l’interdiction des armes chimiques et à renforcer l’OIAC, comme l’a décidé la conférence des États parties.

M. JOANNA WRONECKA (Pologne) a rappelé que, depuis le début, sa délégation avait condamné l’attaque sans précédent qu’avait constitué la tentative de meurtre de Sergei et Yulia Skripal à l’aide d’un agent neurotoxique, « la première de la sorte en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale ».  Elle a appelé la Russie à faite preuve de la plus grande coopération avec le Gouvernement britannique et l’OIAC, estimant que les preuves étaient suffisantes pour accuser des ressortissants russes. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que la tentative de meurtre de Sergei et Yulia Skripal était un crime grave, jugeant nécessaire de veiller au respect des normes internationales en vigueur du régime de non-prolifération. 

Mme LISE GREGOIRE-VAN HAAREN (Pays-Bas) a condamné l’utilisation d’armes chimiques « en tout temps, en tout lieu et dans n’importe quelles circonstances ».  Elle a noté que l’utilisation d’un agent neurotoxique au Royaume-Uni avait fait une victime supplémentaire, Mme Dawn Sturgess, qui n’a pas survécu.  La représentante a vu dans le lancement de procédures pénales un pas important pour établir la vérité et s’est dit entièrement confiante dans l’enquête menée par les  autorités britanniques.  Elle a appelé les États à coopérer pour veiller à ce que les deux suspects comparaissent devant un tribunal au Royaume-Uni et établir toute la vérité sur la manière dont a été menée l’attaque.  La déléguée a aussi exhorté les autorités russes à fournir des informations sur les questions qui demeurent sans réponse et à coopérer avec les efforts pour traduire les responsables en justice.

M. DESIRE WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a condamnéé la tentative d’empoisonnement à l’aide d’un agent neurotoxique.  Il a estimé que l’affaire Skripal nous interpelle tous sur la nécessité de veiller à une mise en œuvre diligente des dispositions pertinentes de l’architecture internationale en matière de non-prolifération.  La Côte d’Ivoire exhorte toutes les parties prenantes à faire preuve de retenue et à collaborer avec l’OIAC, dans le cadre des attributions qui lui ont été conférées lors de la session spéciale tenue les 26 et 27 juin derniers à La Haye, afin d’identifier et traduire devant les juridictions internationales compétentes les auteurs d’usage d’armes chimiques. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a pris note de l’ampleur des nouvelles informations mises en lumière par l’enquête britannique et a exprimé sa confiance dans leur véracité.  « Nous appelons la Russie à changer de cap et à coopérer pleinement avec l’enquête et l’accusation en cours », a-t-il déclaré.  Selon lui, les derniers éléments de preuve démontrent la « forte probabilité » de la responsabilité de la Russie dans l’attaque perpétrée à Salisbury le 4 mars.

Depuis la dernière réunion du Conseil sur la question, a déploré le représentant, un nouveau citoyen britannique est décédé à Amesbury, après être entré en contact avec une substance dont l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a confirmé qu’il s’agissait du même agent neurotoxique que celui qui avait été utilisé pour empoisonner Sergei et Yulia Skripal.

Le représentant a réitéré sa forte condamnation de l’utilisation d’un agent neurotoxique sur le territoire britannique et a fait part de la solidarité de son pays envers le Royaume-Uni, « notre ami proche et notre partenaire européen ».

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a condamné fermement le recours aux armes chimiques par tout État, individu ou entité.  Il a appelé à une enquête juste et impartiale pour toute utilisation de telles substances.  Les attaques chimiques doivent faire l’objet d’enquêtes par l’OIAC, a déclaré le représentant, dans un esprit de dialogue et de consultation pour régler les problèmes.  Enfin, il a mis en garde contre toute politisation risquant d’aviver les tensions. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a estimé que l’examen d’une question aussi grave nécessite plus de temps.  Il est difficile de tirer une conclusion objective, a-t-il déclaré, tout en souhaitant obtenir davantage d’informations des autorités britanniques sur cet incident afin d’en arriver à une conclusion juste et impartiale.  Il a dit compter sur la poursuite d’enquêtes exhaustives et globales avant d’accuser une partie spécifique. 

M. MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a condamné toute utilisation d’armes chimiques que ce soit par un État ou un acteur non étatique.  Elle a toutefois estimé ne pas disposer de tous les éléments nécessaires pour tirer les conclusions nécessaires, ce qui, a-t-elle affirmé, rend d’autant plus nécessaire une coopération totale entre le Royaume-Uni et la Fédération de Russie à cet égard.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a jugé injustifiable d’utiliser comme armes des éléments chimiques, dans quelque circonstance que ce soit.  S’agissant des évènements de mars dernier, elle a réitéré la nécessité de mener une enquête indépendante, transparente, objective, impartiale et dépolitisée.  La représentante a aussi appelé les pays intéressés à utiliser les canaux diplomatiques pour résoudre la situation par le dialogue. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a souhaité que les conclusions de l’enquête sur l’attaque chimique survenue le 4 mars à Salisbury soient exhaustives, justes et indépendantes.  Il a rappelé l’opposition de son pays à l’utilisation des armes chimiques en contravention de la Convention sur les armes chimiques et la Charte des Nations Unies.  Après avoir condamné vigoureusement les attentats à l’arme chimique perpétrés contre les Skripal, il a exprimé sa solidarité avec le peuple britannique.  Enfin, il a invité le Royaume-Uni et la Fédération de Russie à faire preuve de retenue et d’établir des contacts directs. 

M. VASSILI A. NEBENZIA (Fédération Russie) avait espéré qu’aujourd’hui, il entendrait des éléments d’information convaincants permettant de faire la lumière sur ce qui s’est passé à Salisbury.  « Hélas, nous avons entendu les mêmes arguments, selon lesquels des supposés agents russes auraient commis des meurtres à l’aide d’un agent neurotoxique », a -t-il déploré.  Hier, la police britannique a publié des photos des supposés responsables, pour donner un « tournant sensationnel » à l’enquête.  Les suspects auraient des noms russes, mais on estime en même temps que ces noms seraient des noms d’emprunt. Aujourd’hui, de nombreuses délégations ont appelé la Russie à coopérer avec le Royaume-Uni.  Mais c’est nous qui demandons à Londres de coopérer avec nous, ce qui nous est refusé, dans le but d’alimenter « un sentiment antirusse », a rétorqué M. Nebenzia.   Le représentant a émis des doutes sur les photos des suspects, qui se seraient trouvés devant la maison des Skripal le 4 mars, alors que tout semblait démontrer que ceux-ci auraient quitté le domicile tôt dans la journée.  En outre, d’après l’OIAC, le novocik est tellement dangereux qu’il faut le transporter dans un container hermétique.  Rappelant que les noms véritables des suspects ne sont pas connus, le représentant a estimé qu’on ne peut donc pas savoir s’ils sont des agents du GRU. De plus, les autorités britanniques ont manqué à fournir à la délégation russe des informations essentielles, à commencer par les empreintes digitales des deux suspects, obtenus lors de leur entrée au Royaume-Uni « Essayons de faire tomber les masques pour savoir ce qui s’est passé », a lancé le délégué.

Deux ressortissants russes se seraient trouvés à Salisbury en possession d’un agent neurotoxique interdit par l’OIAC.  « Tout le reste n’est qu’élucubrations d’autorités britanniques russophobes », a-t-il tranché.   Pourquoi la Russie voudrait-elle empoisonner les Skripal, et de manière si alambiquée encore ? On nous a dit que la poignée de la porte du domicile des Skripal aurait été enduite d’un gel, ensuite on nous parle d’un flacon de parfum Nina Ricci contenant l’agent innervant, et dans lequel il est d’ailleurs impossible d’en transporter, s’est-il énervé.  Pour le représentant, il paraît évident que les Britanniques n’ont pas de preuve formelle de la responsabilité russe dans cette affaire.  Rejetant toute « accusation infondée », la Fédération de Russie a appelé les Britanniques « à la retenue ».  Il a également indiqué que l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) n’avait pas réussi à identifier la source de l’agent Novitchok qui a été trouvé au mois de mars. M. Nebenzia a réitéré la volonté de son Gouvernement de mener des consultations et exigé un accès consulaire aux citoyens russes qui sont détenus par des autorités britanniques.  La Fédération n’a « jamais produit, élaboré ou stocké » de Novitchok, a-t-il martelé.  Qui plus est, a-t-il soutenu, l’élaboration d’une telle substance s’est faite dans d’autres pays, le Royaume-Uni ou les États-Unis, par exemple.  Le représentant a donc appelé tous les États à assumer leurs responsabilités et à demander au Royaume-Uni de relancer les consultations.  Il est évident que l’on poursuit ici d’autres objectifs que judiciaires, s’est défendu le délégué, en parlant d’« hystérie antirusse ».

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a « condamné catégoriquement » l’emploi d’armes chimiques à Salisbury, se disant déterminée à empêcher l’emploi de ces « armes odieuses ».  Elle s’est dite déterminée à mettre un terme à l’utilisation d’armes chimiques où que ce soit, conformément à l’état de droit.  Les autorités britanniques ont mené une enquête juste et équitable sur les attentats à Salisbury et Amesbury, a estimé la représentante, ajoutant qu’il ne peut y avoir de doute aujourd’hui sur la responsabilité de la Russie dans ces meurtres et l’exposition de centaines de civils au Novitchok.  Elle a parlé d’une attaque minutieusement préparée et expliqué que la police britannique a inculpé deux agents de renseignement russes après avoir suivi leurs déplacements depuis leur arrivée au Royaume-Uni.  « Les conclusions de l’enquête devraient faire froid dans le dos à chacun dans cette salle », a-t-elle affirmé.

Au lieu d’assumer la responsabilité pour ses actes, a poursuivi Mme Haley, le Gouvernement russe n’offre que des dénis et des contre-accusations.  De la Crimée, au vol MH17, au Donbass et au meurtre de Litvinienko, la rengaine est toujours la même: La Russie n’est comme par hasard jamais à l’origine de ces incidents.  Mais personne n’y croit.  Cette récente action de la part des autorités britanniques permettra d’assurer que la Russie ne tirera pas son épingle du jeu après cette attaque éhontée.

La représentante a ensuite rappelé que 153 diplomates russes ont été expulsés à la suite de ces attentats, qui, a-t-elle averti, pourraient se reproduire n’importe où.  Elle a appelé à mener une bataille contre l’impunité face à l’utilisation des armes chimiques.

Reprenant la parole, la déléguée britannique a remercié les membres du Conseil de sécurité qui ont témoigné à son pays leur soutien et leur solidarité.  Elle a rappelé qu’au Royaume-Uni, la police est indépendante du Gouvernement avant de se pencher sur la question de la cohérence des preuves posée aujourd’hui.  En la matière, la représentante a assuré que les enregistrements de vidéosurveillance des deux individus russes étaient à la disposition du Conseil de sécurité.  En réponse au commentaire du Représentant russe concernant l’horodatage des corridors, elle a aussi fait observer que de nombreux couloirs de l’aéroport de Gatwick sont identiques.  Nous avons entièrement confiance dans nos éléments de preuve, a-t-elle affirmé.

La représentante a ensuite fait savoir que la Fédération de Russie avait demandé aux autorités britanniques si elle pouvait participer à l’enquête: « je le répète, on ne recrute pas un pyromane pour enquêter sur un incendie », a insisté Mme Peirce.  Les noms des suspects sont peut-être des noms d’emprunts, mais les individus sont bel et bien réels.  Nous ne sommes pas partis du principe que la Russie était responsable de l’attaque, mais l’enquête a pointé dans cette direction.  Elle a ensuite déclaré que les autorités russes vivent « dans un univers parallèle » où les faits et les normes internationales sont inversés.  Les preuves que nous avons présentées sont sans équivoques.  Le régime de non-prolifération a été « hypothéqué », a affirmé Mme Peirce.

Droit de réponse

À son tour, le représentant de la Fédération de Russie a déclaré n’avoir rien entendu de nouveau dans les exposés présentés ce matin, mis à part des énoncés infondés.  Il a affirmé que les autorités britanniques avaient refusé à deux reprises de délivrer un visa à la sœur de Yulia Skripal qui vit en Russie et qui souhait lui rendre visite.  Les requêtes des autorités britanniques à l’ambassadeur russe n’étaient pas des demandes de coopération mais plutôt des demandes de reconnaissance de culpabilité, a-t-il ajouté.  Il a indiqué que la Russie a proposé au Royaume-Uni de mener une enquête conjointe, dans le cadre de l’OIAC, mais que cette requête est demeurée sans réponse, ajoutant que les autorités britanniques n’ont jamais demandé à la Russie sa version des faits. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.