En cours au Siège de l'ONU

Troisième Commission: de la Corne de l’Afrique à la Fédération de Russie, inquiétudes quant aux répercussions des conflits sur les droits humains 

Soixante-dix-huitième session,
36e et 37e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4391

Troisième Commission: de la Corne de l’Afrique à la Fédération de Russie, inquiétudes quant aux répercussions des conflits sur les droits humains 

Poursuivant son examen de la situation des droits humains dans des pays spécifiques, la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, s’est intéressée aujourd’hui aux cas de l’Éthiopie, de l’Érythrée, du Burundi, du Bélarus, de la Fédération de Russie et de l’Ukraine.  Les six titulaires de mandat venus présenter leur rapport et dialoguer avec les États Membres ont souligné le lien entre les violations des droits humains et les conflits, tout en déplorant, pour la majorité d’entre eux, le manque de coopération des pays concernés. 

Le Président de la Commission internationale d’experts des droits de l’homme sur l’Éthiopie a ouvert ce bal des présentations en regrettant la récente décision du Conseil des droits de l’homme de mettre fin au mandat de son organe.  Ajoutée à la fin de la commission d’enquête de l’Union africaine, cette décision signifie qu’« il n’y a plus de mécanisme indépendant qui enquête sur les atrocités commises en Éthiopie », a alerté M. Mohamed Chande Othman.  Une situation d’autant plus grave, selon lui, qu’après les crimes commis par toutes les parties au conflit en Éthiopie depuis 2020, y compris des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, le risque existe que de nouvelles atrocités soient perpétrées à grande échelle. 

En effet, a expliqué le Président de la Commission, malgré la signature de l’accord de cessation des hostilités en 2022, les troupes érythréennes et les milices Amhara restent présentes au Tigré et s’y livrent à des violences contre les civils.  Et alors que ces mêmes populations ont déjà subi des violations « à une échelle stupéfiante » de la part des forces de défense éthiopiennes et érythréennes, mais aussi de forces régionales et de milices affiliées, les perspectives de responsabilisation sont minces, le Gouvernement éthiopien s’employant à échapper à tout contrôle via la création de mécanismes défectueux et l’instrumentalisation des institutions, a dénoncé M. Othman, non sans regretter de n’avoir pu retourner en Éthiopie après sa première visite en juillet 2022, et ce, malgré ses demandes répétées. 

Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée a, pour sa part, constaté que l’accord de cessation des hostilités entre le Gouvernement éthiopien et le Front de libération du peuple du Tigré n’a pas non plus amélioré la situation interne de ce pays. Évoquant un recul des droits humains en Érythrée, M. Mohamed Abdelsalam Babiker a rappelé que, depuis plus de 30 ans, le Président Afwerki dirige le pays sans élections ni séparation des pouvoirs, et sans que les citoyens aient voix au chapitre.  Selon lui, cette détérioration est en grande partie due au système de service militaire national à durée indéterminée, qui s’accompagne de punitions collectives imposées aux familles et aux communautés pour les forcer à rejoindre les forces de défense érythréennes. 

Si le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi, a, lui, fait état de potentiels progrès, il a aussi fustigé la faiblesse des institutions nationales, qui fait d’elles « des instruments de violation des droits humains ».  M. Fortuné Gaetan Zongo a également dénoncé les lacunes du système judiciaire burundais, liées à l’insuffisance des ressources humaines et à la vétusté des infrastructures, mais aussi à l’ingérence de l’exécutif, à la corruption et à la méfiance du public.  En outre, il a noté le recours à des infractions aux contours imprécis, comme les soupçons d’atteinte à la sûreté de l’État, souvent utilisées contre des personnes menant des activités politiques et sociales licites.  Il a enfin regretté que ses demandes de visite soient restées sans réponse.

De son côté, reconnaissant travailler à distance pour ne pas risquer l’emprisonnement, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus a mis l’accent sur la prolifération des lois antiterroristes « dans un pays pourtant épargné par le phénomène du terrorisme ».  La propagande terroriste ou sa justification publique y est sanctionnée par une peine de sept ans d’emprisonnement, conduisant des individus qui cherchaient à documenter ou à entraver le transit de troupes russes et d’équipements militaires destinés à la guerre en Ukraine à être reconnus coupables de terrorisme, a expliqué Mme Anaïs Marin.  Alors que près de 3 500 personnes sont répertoriées comme extrémistes au Bélarus et que des sites et des comptes sociaux de défenseurs des droits humains sont soumis à la censure, le champ d’application de la peine de mort a été étendu pour inclure des crimes de terrorisme vaguement définis, a-t-elle ajouté, soulignant l’absence de garanties d’un procès équitable. 

Décrivant elle aussi un climat de peur et d’impunité, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie a dénoncé les tentatives d’obstruction des autorités russes, qui tentent de dissuader d’autres mécanismes des droits humains de l’ONU de collaborer avec son mandat.  L’espace civique indépendant n’existe plus en Russie, a déploré Mme Mariana Katzarova, qui a rappelé que plusieurs organisations russes de défense des droits humains ont été fermées au motif qu’elles seraient des « agents étrangers ».  Après avoir constaté une nette augmentation des détentions arbitraires pour raisons politiques, elle a constaté que la répression actuelle des droits humains en Russie et la guerre externe que mène ce pays contre l’Ukraine « vont de pair ». 

En conclusion de ce tour d’horizon, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a salué la coopération du Gouvernement ukrainien, alors que ses demandes de visite dans les zones occupées par la Fédération de Russie sont restées lettre morte.  Précisant que son rapport ne relève que trois cas dans lesquels les autorités ukrainiennes ont commis des violations des droits humains à l’encontre de personnes qu’elles accusaient de collaborer avec les autorités russes, M. Erik Mose s’est, en revanche, alarmé de l’étendue, de la fréquence et de la gravité de certains types de violations commises du côté russe.  Il a ainsi énuméré des cas de torture, d’homicide volontaire, de viol et de déportation d’enfants, susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité. Face à ces atrocités, il a jugé primordial que les auteurs de ces violations répondent de leurs actes. 

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 26 octobre, à partir de 10 heures.  

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS - (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. MOHAMED CHANDE OTHMAN, Président de la Commission internationale d’experts des droits de l’homme sur l’Éthiopie, a commencé son exposé en exprimant son inquiétude face à l’absence de mise en œuvre complète de l’accord de cessation des hostilités entre le Gouvernement fédéral et le Front populaire de libération du Tigré, qui a mis fin voilà un an à l’un des conflits les plus meurtriers du XXIe siècle.  De ce fait, le pays semble aujourd’hui sombrer dans une spirale d’instabilité, a-t-il dit, avant d’évoquer son rapport, présenté en septembre au Conseil des droits de l’homme, qui décrit les atrocités de grande ampleur commises par toutes les parties au conflit en Éthiopie depuis le 3 novembre 2020, y compris les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. 

Précisant que la Commission internationale d’experts a mené ses investigations en suivant la méthodologie d’autres commissions d’enquête de l’ONU, guidée par les principes d’indépendance, d’impartialité et de confidentialité, M. Othman a regretté qu’elle n’ait pas eu accès à l’Éthiopie après sa première visite à Addis-Abeba en juillet 2022, et ce, malgré les demandes répétées de coopération adressées au Gouvernement. 

En dépit de cet obstacle, a-t-il expliqué, la Commission a trouvé des preuves d’atrocités de grande ampleur.  Au Tigré, les Forces éthiopiennes de défense nationale, les Forces de défense érythréennes, les forces régionales et les milices affiliées ont perpétré des violations et des abus « à une échelle stupéfiante », notamment des massacres, des viols et des violences sexuelles généralisés et systématiques à l’encontre des femmes et des filles, des famines délibérées, des déplacements forcés et des détentions arbitraires, a-t-il souligné. Ces actes constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, a affirmé le Président de la Commission, avant d’insister sur la nécessité d’établir la responsabilité du commandement par le biais d’une enquête. 

Malgré la signature de l’accord de cessation des hostilités, a-t-il relevé, les troupes érythréennes et les milices amhara restent présentes au Tigré et s’y livrent à des atrocités contre les civils, tandis que les minorités Irob et Kunama, près de la frontière érythréenne, sont particulièrement menacées. Il s’est également inquiété de l’expulsion des Tigréens du Tigré occidental, qui occasionne le déplacement interne de dizaines de milliers de personnes.  Dans les régions d’Amhara et d’Afar, les forces du Tigré et les milices ont également commis de graves violations, dont beaucoup sont constitutives de crimes de guerre, a ajouté M. Othman.  Selon lui, la situation dans la région d’Amhara s’est considérablement détériorée ces derniers mois, l’annonce de l’état d’urgence en août 2023 ayant donné lieu à des violations des droits humains, notamment des exécutions extrajudiciaires et des arrestations à grande échelle. 

Dans la région d’Oromia, a-t-il poursuivi, la Commission a découvert des pratiques persistantes d’arrestations arbitraires et de torture de civils accusés d’avoir des liens avec le groupe Armée de libération oromo (OLA).  Elle a aussi établi que, dans l’Ouest d’Oromia, des frappes de drones utilisées dans le cadre de la stratégie anti-insurrectionnelle ont tué ou blessé des dizaines de civils l’an dernier.  Alors que de telles frappes sont encore menées aujourd’hui, les attaques de l’Armée de libération oromo, de ses groupes dissidents et de milices fano se poursuivent contre les civils Amhara et Oromo dans les régions d’Oromia et d’Amhara, a-t-il rapporté, constatant que la prolifération des groupes armés non étatiques ont conduit à une insécurité accrue et à des violences à grande échelle.

Dans ce contexte, M. Othman a averti que la situation en Éthiopie présente la plupart des indicateurs de crimes d’atrocités futures.  En effet, a-t-il expliqué, le Gouvernement éthiopien et les forces qu’il contrôle, de même que les forces érythréennes présentes en Éthiopie, les groupes armés régionaux, étatiques et non étatiques, et les milices, sont en mesure de poursuivre les violations commises.  Par ailleurs, alors que les perspectives nationales de responsabilisation sont minces, il a noté l’absence de facteurs atténuants susceptibles de prévenir ces futurs crimes.  . 

Considérant que les actions du Gouvernement éthiopien, notamment son processus de justice transitionnelle « gravement déficient », présentent toutes les caractéristiques d’une stratégie de « quasi-conformité », M. Othman a dénoncé une volonté d’échapper au contrôle régional et international via la création de mécanismes défectueux et l’instrumentalisation des institutions au détriment des droits des victimes et du système international des droits de l’homme.  Compte tenu de la gravité des crimes commis et du risque de nouvelles atrocités, il a jugé essentiel de poursuivre une surveillance internationale rigoureuse de la situation.  À ses yeux, la décision du Conseil des droits de l’homme de mettre fin au mandat de la Commission et la fin de la Commission d’enquête de l’Union africaine signifient que, dans l’état actuel des choses, « il n’y a plus de mécanisme indépendant qui enquête sur les atrocités commises en Éthiopie ».  Il a donc appelé les organisations et institutions des Nations Unies à renforcer leurs activités de rapport et de défense de la situation des droits humains en Éthiopie.  Enfin, il a invité les États Membres à assumer leur responsabilité, laquelle pourrait, selon lui, comprendre le recours à la juridiction universelle. 

Dialogue interactif 

À la suite de cet exposé, l’Éthiopie a appelé à respecter le fait que les États ont la responsabilité principale en matière de droits humains.  Elle a souligné qu’elle est partie aux principaux traités sur les droits humains et qu’elle présente régulièrement son rapport au titre de l’Examen périodique universel (EPU).  Elle a souligné que, depuis la signature de l’accord de cessation des hostilités en novembre 2022 à Pretoria, elle met tout en œuvre pour prévoir des recours pour les violations des droits humains. La délégation a regretté que les progrès réalisés ne soient pas pris en compte dans le rapport et a rejeté les conclusions de la Commission comme « lacunaires, partisanes et motivées politiquement ». 

Elle a aussi exprimé son opposition aux conclusions du rapport conjoint de sa commission nationale sur les droits humains et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).  Elle a cependant indiqué qu’une équipe spéciale interministérielle a été créée pour mettre en œuvre certaines des recommandations du rapport conjoint; ce qui a permis des poursuites de la part des victimes.  Elle a aussi indiqué qu’un cadre de réhabilitation et de reconstruction a été mis en place et qu’un processus de consultation concernant le cadre de justice transitionnel a été mené à bien.  Enfin, après s’être félicitée du fait que le Conseil des droits de l’homme, lors de sa cinquante-quatrième session, ait mis fin au mandat de la Commission, elle a assuré que l’Éthiopie continuera de travailler avec les institutions internationales et régionales pour renforcer ses capacités en matière de promotion et de protection des droits humains. 

Souscrivant au principe des « solutions africaines aux problèmes africains », le Cameroun s’est opposé à tous les travaux « non-coopératifs et politisés » dans le domaine des droits humains, lesquels entraînent, selon lui, une « division manichéenne artificielle » entre les États.  À cet égard, il a salué le non-renouvellement du mandat de la Commission.  La Zambie, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé que les États ont la responsabilité principale en matière de droits humains.  Elle a jugé que l’EPU est le seul mécanisme inclusif pour examiner la situation des droits humains dans les pays et s’est opposée à tout « deux poids, deux mesures » et toute tentative de politisation de ces questions.  Elle a en outre salué les efforts du Gouvernement éthiopien pour la justice transitionnelle et sa collaboration avec le HCDH.  Le Zimbabwe s’est, lui aussi, opposé aux rapports sur les situations spécifiques des pays, notamment en Éthiopie, au Burundi et en Érythrée.  Le Mali a estimé que les rapports ne mettent pas assez en valeur les efforts faits par les gouvernements.  Il a demandé d’éviter toute politisation des questions de droits humains et plaidé en faveur du développement économique pour progresser dans ce domaine. 

Saluant la position constructive du Gouvernement éthiopien et sa collaboration avec le HCDH et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples établie par l’Union africaine, la Fédération de Russie s’est également félicitée du caractère impartial et professionnel des travaux de la commission éthiopienne des droits de l’homme.  Se réjouissant de la mise en place d’un dialogue politique national, elle a appelé à des négociations constructives entre toutes les parties sur la base du principe des « solutions africaines aux problèmes africains ».  Le Bélarus a regretté que la Commission n’ait pas présenté de rapport écrit à l’Assemblée générale et demandé où trouver ce rapport.  Relevant par ailleurs que la Commission a fait état d’un besoin de financement de 3 millions de dollars, il s’est dit conforté dans sa position d’opposition aux mandats dédiés à des pays. 

Cuba a dénoncé les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme comme des « outils de pression à visée hégémonique » qui n’améliorent pas la situation des droits humains sur le terrain. Dans la même veine, le Nicaragua a rejeté l’utilisation des droits humains comme prétexte pour s’ingérer dans les affaires internes d’États indépendants et exercer des pressions politiques sur les pays en développement.  La Chine s’est déclarée favorable au principe des « solutions africaines aux problèmes africains », avant d’appeler la communauté internationale à la suivre dans son effort d’assistance humanitaire à l’Éthiopie.  Elle a également redit son rejet des mécanismes dédiés à des pays, surtout quand les pays concernés s’y opposent, comme c’est le cas de l’Éthiopie.  Le Venezuela a dénoncé, à son tour, la création de mécanismes de droits humains dédiés à un pays spécifique, insistant sur la primauté de l’EPU. 

L’Union européenne a, pour sa part, salué l’accord de cessation des hostilités tigré-éthiopien de 2022 et les travaux de la commission éthiopienne des droits de l’homme en collaboration avec le HCDH.  Elle a demandé que cessent toutes les violations du droit international des droits humains, du droit international humanitaire et du droit international des réfugiés, réclamant des enquêtes transparentes, indépendantes et impartiales.  Elle s’est inquiétée des informations faisant état de la persistance de violations des droits humains dans les États d’Afar, d’Oromia et d’Amhara, avant de demander comment mettre en œuvre la politique de justice transitionnelle en temps voulu. Les États-Unis se sont préoccupés de la persistance de violations des droits humains après la signature de l’accord de novembre 2022.  Ils ont appelé l’Éthiopie à s’assurer que les auteurs des violations rendent des comptes, y compris au sein du Gouvernement.  Saluant la collaboration avec le HCDH, ils se sont déclarés déçus de l’absence de coopération pour la mise en œuvre du mandat de la Commission. Ils ont souhaité savoir quelles sont les mesures prises pour rétablir la confiance auprès des victimes et garantir un processus inclusif. 

La Suisse a salué les développements positifs qui ont suivi la signature de l’accord de paix et des mesures prises pour lancer un processus de justice transitionnel, tout en s’inquiétant des violations persistantes des droits humains.  Elle a souhaité que des investigations indépendantes se poursuivent malgré le non-renouvellement du mandat de la Commission.  Quelles mesures devraient être prises pour garantir la protection des droits humains après la fin de ce mandat, a-t-elle demandé.  Par la voix de sa déléguée de la jeunesse, le Luxembourg a regretté à son tour le non-renouvellement du mandat de la Commission malgré la persistance des violations des droits humains et le risque de répétition.  Il a exhorté l’Éthiopie à suivre les recommandations du rapport de la Commission et à solliciter l’appui du HCDH pour désamorcer les facteurs de risque structurels, notamment en Amhara, en Oromia et au Tigré, et demandé à l’Érythrée de retirer toutes ses troupes de la région.  Au regard de ces facteurs de risque, à quoi faut-il s’attendre dans les mois à venir, s’est-il enquis. 

Le Royaume-Uni s’est préoccupé du risque de violations futures des droits humains, notamment dans les régions du Tigré et d’Amhara. Saluant les efforts de l’Éthiopie en matière de justice transitionnelle, il s’est interrogé sur les moyens dont dispose la communauté internationale pour soutenir ce processus.  L’Islande a estimé que la fin du mandat de la Commission est prématurée et a invité l’Éthiopie à mettre en œuvre des mécanismes de reddition de comptes efficaces, avant de demander comment la communauté internationale peut épauler la mise en place d’une justice transitionnelle.  Les Pays-Bas ont salué les signataires de l’Accord de Pretoria et appelé à poursuivre les auteurs de violations de droits humains quels qu’ils soient.  Ils ont aussi voulu savoir comment la communauté internationale pourra soutenir la promotion et la protection des droits humains en Éthiopie après la fin du mandat de la Commission. 

Reprenant la parole, l’Éthiopie a salué l’Accord de Pretoria et rappelé l’importance de trouver des « solutions africaines aux problèmes africains ».  Concernant la justice transitionnelle, elle a dit s’appuyer sur le cadre de l’Union africaine et a indiqué qu’elle compte renforcer ses capacités nationales en la matière, notamment grâce à l’appui de la communauté internationale et des bureaux des agences des Nations Unies. 

Répondant aux questions et remarques des délégations en tant que membre de la Commission internationale d’experts des droits de l’homme sur l’Éthiopie, M. STEVEN RATNER a précisé que le rapport de la Commission mentionne les meurtres de grande ampleur commis avant la fin du conflit tigré-éthiopien. Toutefois, a-t-il dit, un certain nombre d’éléments montrent que le conflit n’est pas terminé.  Il a ainsi fait état de la présence persistante de forces d’occupation érythréennes, d’un taux de violence sexuelle et sexiste effarant et d’une situation humanitaire déplorable.  S’agissant des risques de nouvelles atrocités de masse, M. Ratner a jugé essentiel de maintenir des efforts de contrôle et de prévention en Éthiopie, compte tenu de la capacité des différents acteurs à commettre de telles violations. 

Pour ce qui est de la réponse du Gouvernement fédéral éthiopien en matière de justice transitionnelle, M. Ratner a indiqué que la Commission a pris note de certaines mesures positives.  Il a cependant reconnu qu’il s’agit d’un processus complexe et multidimensionnel, et que des divergences de points de vue se sont faites jour avec le Gouvernement, notamment suite à l’atelier organisé à Nairobi, qui a mis en évidence les réserves de plusieurs groupes ethniques quant à la crédibilité et l’inclusivité de ce processus.  En clair, la Commission doute de la sincérité du processus, a-t-il expliqué, ajoutant que le rapport mentionne plusieurs mesures à prendre dans ce sens: cessation des violations, établissement de mécanismes crédibles de reddition de comptes, coopération avec les institutions internationales, ajustement du calendrier de justice transitionnelle et mise en place de justice de réparation.  Ce sont les critères de référence minimaux pour réaliser des progrès à l’avenir, a souligné le responsable. 

De l’avis de M. Ratner, la communauté internationale a un rôle à jouer dans ce processus.  Elle peut en effet examiner les pratiques de l’Éthiopie et fournir au pays une assistance technique et des conseils, conformément aux normes internationales, a-t-il plaidé, saluant à cet égard l’action menée par l’Union africaine, en particulier pour la surveillance de l’accord de cessation des hostilités.  Il a estimé qu’en l’absence de la Commission, dont le mandat n’a pas été renouvelé par le Conseil des droits de l’homme, il revient au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme d’assurer le suivi de la situation.  Avant de conclure, il a une nouvelle fois exprimé sa préoccupation concernant la « conformité partielle » de l’Éthiopie au processus de justice transitionnelle et a souhaité que cette question suscite une réflexion au sein de la Troisième Commission. 

Exposé

M. FORTUNÉ GAETAN ZONGO, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi s’est dit profondément convaincu que la situation des droits humains au Burundi pouvait être améliorée, soulignant que la nomination du pays au Conseil des droits de l’homme (CDH) ne l’exonérait pas de ses obligations en matière de droits fondamentaux de la personne et souhaitant le voir s’engager dans un dialogue constructif avec les organes de traités et le CDH. 

Le Rapporteur spécial s’est félicité de la réouverture des frontières avec le Rwanda, qui favorise la libre circulation des personnes et des biens. Il a aussi rappelé que le Burundi avait pris part au quatrième cycle de l’Examen périodique universel (EPU) le 4 mai 2023, avant de prendre note de l’annulation par la Cour suprême de la condamnation à cinq ans de prison, de l’avocat Tony Germain Nkina et de son client Apollinaire Hitimana, libérés le 27 décembre 2022.

« Les défis restent énormes et les progrès timides », a-t-il toutefois tempéré, affirmant que la faiblesse des institutions restait criante et faisait d’elles des instruments de violation des droits humains.  Il s’est notamment inquiété de l’absence d’un contrôle strict du Service national de renseignement pour garantir les conditions de détention et la légalité au regard des instruments juridiques internationaux et régionaux ratifiés par le Burundi.  Il a dénoncé le recours à des infractions aux contours imprécis, comme les soupçons d’atteinte à la sûreté de l’État ou de rébellion, qui, s’est-il inquiété, laissent une grande marge d’interprétation et sont utilisées contre des personnes menant des activités politiques et sociales licites, comme Christophe Sahabo, ancien Directeur général de l’hôpital Kira, la journaliste Floriane Irangabiye, ou Christopher Nduwayo, Secrétaire national du Congrès national pour la liberté. 

M. Zongo a aussi dénoncé les faibles performances du système judiciaire, notamment en raison de l’insuffisance des ressources humaines, des outils de travail, de la vétusté des infrastructures, de l’ingérence de l’exécutif, de la corruption et de la méfiance à son égard.  Il a regretté que les rapports de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme se limite à reproduire les discours officiels alors que les partis politiques, les médias et la société civile sont menacés. En conséquence, il a recommandé à l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme de réévaluer le statut « A » de la Commission, afin de l’encourager à se conformer aux Principes de Paris. 

Le Rapporteur spécial a regretté que ses demandes de visite soient restées sans réponse, en dépit de l’invitation permanente adressée par le Burundi depuis juin 2013 aux titulaires de mandat au titre des procédures spéciales.  Avant de conclure, il a attiré l’attention de la communauté internationale sur l’échéance des élections de 2025, avertissant qu’il fallait prévenir de potentielles violences.  

Dialogue interactif 

À l’issue de cet exposé, le Burundi a rejeté l’intégralité du rapport du Rapporteur spécial qui, a ajouté la délégation, vient renforcer sa conviction quant au caractère inutile et inadapté de ce mécanisme.  Ce dernier est imposé et voté par tous les pays occidentaux et rejeté par tous les pays africains et prouve la tendance à la politisation des droits humains et à la manipulation de l’opinion.  Ce document « petit et bas » contient des éléments « diffamatoire à l’encontre du peuple burundais », s’est insurgée la délégation. 

Mettant en cause le paragraphe 32, la délégation a appelé le Rapporteur spécial à cesser d’employer des termes injurieux et dégradant quand il parle du Gouvernement burundais.  Elle a rappelé qu’en 2015, l’opposition radicale menait des activités terroristes visant à renverser des institutions démocratiquement élues, évoquant des fusillades et un coup d’État raté.  Partout dans le monde, les gouvernements utilisent les moyens légaux pour les combattre et cela ne s’appelle pas un crime contre l’humanité, a-t-elle tranché.

Elle a également pointé les paragraphes 37 à 46 qui critiquent, selon elle, l’intégrité de la nomination et des personnes à la tête de la Commission nationale des droits l’homme et de la Commission Vérité et réconciliation.  Ces mensonges, ces accusations fallacieuses et ces calomnies ne resteront pas éternellement impunis, a mis en garde la délégation, qui a rappelé que le Burundi a été élu au Conseil des droits de l’homme avec plus de 87% des voix.

La Fédération de Russie a, elle aussi, estimé que les critiques adressées aux autorités burundaises étaient « totalement infondées », saluant leurs efforts pour prévenir la discrimination à l’encontre des minorités nationales et religieuses et faciliter le retour des réfugiés.  Les États occidentaux devraient renoncer à faire pression sur les autorités burundaises sous prétexte de respect des droits humains.  Le Nicaragua, la République populaire démocratique de Corée, la Zambie et le Cameroun ont mis cause l’instrumentalisation et la politisation des droits humains; le Venezuela et l’Érythrée estimant de surcroît que l’Examen périodique universel (EPU) est l’instrument idoine pour aborder la question des droits humains avec l’État intéressé. 

À ce sujet, comment la communauté internationale peut-elle soutenir au mieux la mise en œuvre par le Burundi des recommandations de l’EPU, a souhaité savoir l’Union Européenne, les États-Unis, appelant pour leur part à la reddition de comptes pour les violations les plus graves des droits humains et à promouvoir l’indépendance de la justice au Burundi. 

Cessons la politisation des droits humains, a exhorté Cuba, qui a réitéré son opposition à des exercices dont l’objectif est de faire pression sur le pays de façon hégémonique, sans améliorer la situation des droits humains sur le terrain.  L’Égypte a, elle aussi, déploré une instrumentalisation des droits humains, tout comme le Bélarus qui s’est prononcé en faveur d’un dialogue sur un pied d’égalité avec tous les pays.  La Chine a fustigé la diffusion d’informations erronées dans le but de vilipender injustement le pays, notant que le Gouvernement burundais a travaillé de façon positive et parcouru un très long chemin.  L’objectif doit être de renforcer les capacités des États, dans la coopération sincère, a souligné le Mali.

Reprenant la parole, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi a considéré que les critiques formulées au sujet des procédures spéciales ne le concernaient pas directement mais relevaient d’un débat entre États et le Conseil des droits de l’homme (CDH).  Il a regretté l’absence d’interaction avec le Burundi, qui a systématiquement rejeté les demandes de contacts, et a fait savoir que ce dernier avait reçu le rapport afin qu’il puisse y réagir, conformément à la procédure établie.  En outre, le rapport étant limité à 10 600 mots, cela ne permettait pas d’étayer en profondeur chaque analyse avancée avec des exemples précis, a indiqué le Rapporteur qui a assuré qu’il était ouvert à un débat constructif sur l’ensemble des points contentieux et à corriger le rapport si nécessaire.  Au chapitre de la politisation, il a rappelé que les membres du Conseil des droits de l’homme étaient élus par les États, donc le produit de leur volonté.  Sur la question de savoir comment la communauté internationale pourrait venir en aide au Burundi, le Rapporteur spécial a souligné l’importance pour ce dernier de manifester une volonté politique de solliciter une assistance technique, notamment en vue de renforcer son système judiciaire. 

Exposé

M. MOHAMED ABDELSALAM BABIKER, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, a présenté un bilan alarmant de la situation des droits humains dans ce pays, relevant qu’aucun progrès n’a été réalisé depuis sa dernière présentation en octobre 2022.  Il a noté que la signature de l’accord de cessation des hostilités entre le Gouvernement éthiopien et le Front populaire de libération du Tigré, en novembre 2022, n’a pas amélioré la situation interne en Érythrée, qui s’est au contraire détériorée.

Cette détérioration est notamment due au système du service militaire national à durée indéterminée, a expliqué le Rapporteur spécial, précisant que les troupes érythréennes n’ont pas été démobilisées et que la conscription militaire se poursuit sans relâche.  Il a également documenté des pratiques coercitives, notamment l’imposition de punitions collectives sur des familles et des communautés entières pour les forcer à rejoindre les forces de défense érythréennes.  Il a enfin relevé que des milliers d’Érythréens ont perdu la vie dans le conflit au Tigré, sans que des informations officielles sur les victimes ne soient fournies.

Sur le plan religieux, M. Babiker a signalé une répression accrue de la liberté de religion, avec des vagues renouvelées d’arrestations massives. En septembre, environ 400 chrétiens ont ainsi été arbitrairement emprisonnés, parmi lesquels des prêtres catholiques et orthodoxes, notamment le docteur Futsum Gebrenegus, unique psychiatre en Érythrée au moment de son arrestation, et le Patriarche Abune Antonios, détenu à domicile et persécuté pendant 16 ans.  L’espace civique demeure en outre complètement fermé dans le pays, s’est alarmé le Rapporteur spécial.  Le Président Afwerki dirige le pays depuis plus de 30 ans sans élections ni séparation des pouvoirs, et les Érythréens n’ont aucun moyen de participer à la prise de décisions dans leur propre pays, s’est-il lamenté. Selon lui, des centaines de journalistes, d’opposants politiques et de personnes de foi sont soumis à de graves violations de leurs droits humains.  Il a appelé les autorités érythréennes à les libérer rapidement et à informer les familles des disparus de leur sort.

Enfin, le Rapporteur spécial a mis en avant la situation critique des réfugiés et des demandeurs d’asile érythréens, dont le nombre s’élevait, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), à plus de 577 000 à la fin de 2022.  Il a dit avoir reçu plusieurs rapports sur la disparition de réfugiés érythréens, qui font craindre qu’ils n’aient été enlevés par des trafiquants ou par les autorités.  Il a donc appelé tous les pays concernés à les protéger de leur mieux. 

Dialogue interactif 

Prenant la parole à la suite de l’exposé du Rapporteur spécial, l’Érythrée a assuré promouvoir et protéger les droits humains et a exprimé son rejet de toute politisation de ces questions.  Rappelant que la résolution initiale de l’Assemblée générale sur l’Érythrée avait été appuyée par les États africains pour lui donner un « visage africain », elle a relevé que beaucoup de ces États ont depuis constaté la nature biaisée de cet effort.  Du reste, aucun d’eux n’a par la suite appuyé le renouvellement du mandat, a-t-elle observé, estimant que les pays occidentaux, qui se cachaient derrière cette approche injuste, ont ainsi été « démasqués ».  Elle a ajouté que l’Érythrée n’a pas reconnu et ne reconnaîtra jamais ledit mandat. Selon elle, ce rapport « biaisé » reprend de nombreuses allégations infondées, comme elles le sont toutes depuis 2012, et ce, dans le but de vilipender et de déstabiliser l’Érythrée, victime d’une véritable « chasse aux sorcières ».  En outre, le rapport fait fi des efforts déployés par le pays sur le chemin des droits humains, a déploré la délégation, selon laquelle ces droits sont pourtant le fondement de la justice sociale qui sous-tend le développement du pays. 

Dénonçant l’absence de données fiables et vérifiables dans le rapport, ainsi que les allégations inacceptables qu’il contient, la délégation a rappelé que les principes d’objectivité et de non-sélectivité s’appliquent à tous les rapporteurs spéciaux des Nations Unies.  Or, a-t-elle noté, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée a, par exemple, signalé que des soldats somaliens avaient été déployés par l’Érythrée lors du conflit contre l’Éthiopie, une information mensongère que la Somalie elle-même a niée.  Le Rapporteur spécial n’a pourtant pas retiré cette allégation, s’est indignée l’Érythrée, lui demandant d’assumer ses responsabilités après avoir présenté un rapport fallacieux au Conseil des droits de l’homme.  De même, le programme érythréen de service militaire national a été injustement critiqué par le Rapporteur spécial, alors que ce dispositif introduit après l’indépendance promeut l’unité nationale et la citoyenneté et contribue à la stabilité de la nation.  Au vu de ces pratiques déplorables, elle a demandé l’arrêt de cet « outil inutile de harcèlement », le renvoi du Rapporteur spécial, qui a manqué à ses devoirs, et le retrait de son rapport. 

Le Venezuela, Cuba et le Nicaragua se sont également opposés à de tels « outils de pression » qui, selon eux, répondent à des intérêts hégémoniques et dont les motivations sont politiques.  Ces outils « sélectifs et punitifs », dirigés systématiquement contre des pays du Sud, ne contribuent en rien à améliorer la situation des droits humains sur le terrain et ne génèrent au contraire qu’affrontements et défiance, ont-ils fait valoir.  Il est peu crédible de se préoccuper des droits humains dans tel ou tel pays, tout en exerçant contre ce même pays des mesures coercitives unilatérales, a ajouté Cuba.  La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a elle aussi rejeté tous les rapports spécifiques à un pays, dénonçant une tendance alarmante à ne viser que les pays en développement. 

De son côté, le Nigéria a réitéré son appel à ce que toutes les préoccupations relatives aux droits humains soient abordées dans le cadre du processus d’Examen périodique universel (EPU), se disant convaincu que ce mécanisme est la seule plateforme garantissant l’égalité de traitement des États Membres et leur respect des obligations internationales en matière de droits humains.  S’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, la Zambie s’est quant à elle réjouie des avancées réalisées par l’Érythrée dans ce domaine, un avis appuyé par le Soudan, selon lequel il faut saluer les engagements positifs pris par l’Érythrée et lever les mesures coercitives contre ce pays. Pour le Cameroun, toutes les parties intéressées ne peuvent travailler sans la coopération du pays concerné et cela vaut particulièrement pour les droits humains.  Aux problèmes nationaux doivent correspondre des réponses nationales, a plaidé la délégation.  À son tour, la Chine a fermement appuyé l’Érythrée et l’a félicitée pour ses progrès face à la pauvreté et l’exclusion, réalisés en dépit des mesures coercitives unilatérales.  La République islamique d’Iran a ensuite déploré l’approche sélective du Rapporteur spécial, qui selon elle mine la coopération et le dialogue, avant de rejeter plus largement tout mandat spécifique à un pays.

Félicitant, tout au contraire, le Rapporteur spécial pour son travail, l’Union européenne s’est déclarée préoccupée par la situation des droits humains en Érythrée, notamment les détentions arbitraires et la conscription d’enfants.  Elle a notamment demandé à l’Érythrée de mettre fin au service militaire national à durée indéfinie, tout en se réjouissant de la participation du pays à l’EPU.  Sur la même ligne les États-Unis se sont alarmés des nombreuses violations des droits humains que subit la population érythréenne et ont sommé les autorités nationales à y mettre un terme.  Ils ont par ailleurs voulu savoir comment l’ONU pourrait faciliter la libération des 16 journalistes arbitrairement détenus par l’Érythrée.

La République arabe syrienne a ensuite rejeté le paragraphe 4 du rapport, qui affirme que la non-coopération de l’Érythrée remet en cause l’intégrité du Conseil des droits de l’homme et de l’ensemble du système des droits humains des Nations Unies, alors que ce pays est membre élu du Conseil. Elle a aussi estimé que, malgré les affirmations du paragraphe 7, le code de conduite n’a pas été respecté comme le prouvent « les paragraphes 21, 25, 28, 33 et de nombreux autres ».  Jugeant, dans ces conditions, qu’il n’y a aucune obligation de rendre compte au Rapporteur spécial, elle a rappelé que son mandat n’est pas au-dessus du droit souverain des États Membres, lesquels sont les premiers chargés de faire respecter les droits humains.  La Fédération de Russie a, elle, réitéré son rejet de la pratique des résolutions unilatérales politisées par pays.  Selon elle, la mise en place d’un mécanisme qui ne bénéficient pas du soutien de l’Érythrée n’a aucun sens et n’aura aucun impact positif sur la situation des droits humains.  Elle a en revanche évalué positivement les accords entre l’Érythrée et l’Éthiopie sur le retrait progressif du territoire éthiopien des unités érythréennes impliquées dans l’opération de rétablissement de l’ordre constitutionnel dans la région du Tigré.  La délégation a d’autre part condamné les sanctions américaines contre-productives prises à l’encontre d’un certain nombre de responsables érythréens et éthiopiens, précisant que la Fédération de Russie entend élargir ses liens commerciaux avec l’Érythrée. 

Le Pakistan a rejeté les examens par pays et la prolifération de mandats spécifiques « qui ne s’adressent jamais aux pays du Nord ou aux pays où ces derniers ont des intérêts », comme c’est le cas avec l’Inde concernant le Jammu-et-Cachemire.  Dénonçant elle aussi les mandats ciblant spécifiquement des pays comme des mesures sélectives et arbitraires, l’Algérie a estimé que l’EPU est l’instrument idoine en matière d’examen de la situation des droits humains.  Du même avis, le Bélarus a considéré le rapport comme sélectif et s’est élevé contre toutes les mesures coercitives unilatérales.  Il a aussi dénoncé l’utilisation de critères vagues et ambigus par les titulaires de mandat et s’est prononcé en faveur d’un traitement de ces questions par le biais de l’EPU.  Le Mali aurait souhaité que l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les populations ressortent du rapport.  Il a appelé à respecter la souveraineté des États et à éviter de les blâmer.  Le Burundi a, lui aussi, regretté la tendance croissante à la politisation des droits humains et à l’utilisation de ces derniers pour s’ingérer dans les affaires internes des États.  Enfin, le Soudan du Sud a appuyé l’EPU comme un « système équitable », notant que l’Érythrée collabore avec ce mécanisme du Conseil des droits de l’homme.

Reprenant la parole après ces questions et remarques, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée a d’abord déploré le niveau inacceptable d’hostilité vis-à-vis de son mandat.  Puis, il a exprimé sa déception face au manque de coopération de l’Érythrée, déplorant que ses tentatives répétées d’engager un dialogue constructif, que ce soit à New York ou à Genève, soient restées lettre morte. M. Babiker a ensuite contesté les accusations érythréennes selon lesquelles son rapport serait biaisé et infondé, rappelant que sa méthodologie a été partagée deux semaines avant sa publication, ce qui offrait à l’Érythrée une occasion de réagir.  Il a également relevé des cas spécifiques de détention et de disparitions jamais justifiées, comme celle d’une jeune fille érythréenne-américaine âgée de 12 ans, disparue depuis près de 11 ans.  Ce ne sont pas des informations biaisées, mais bien des faits, a-t-il dit. 

Après avoir adressé un appel direct aux membres du Groupe des États d’Afrique pour qu’ils encouragent la coopération de l’Érythrée, il a rappelé que ce pays a déjà été jugé coupable de violations des droits humains par l’Union africaine.  Or, il s’agit là d’un mécanisme africain, a-t-il souligné, rejetant les allégations de partialité portée à son mandat.  Aux accusations de la Syrie, il a rétorqué qu’il s’acquitte bel et bien de son mandat en tant que Rapporteur spécial et qu’il s’en tient à son code de conduite et à sa méthodologie, validés par les instances internationales. Ce qui hypothèque le système, c’est sa politisation par les États Membres, pas par les Rapporteurs, a-t-il tranché.

Enfin, répondant à la question de l’Union européenne sur ce qu’il est possible de faire, M. Babiker s’est référé aux 11 recommandations formulées depuis 2011 par plusieurs de ses rapports, et a réitéré son appel à la communauté internationale pour qu’elle exerce davantage de pression sur l’Érythrée.

Exerçant son droit de réponse, en tant que pays concerné, l’Érythrée a de nouveau fermement réfuté les allégations contenues dans le rapport, notamment le fait qu’elle utiliserait des mesures coercitives contre les familles qui ne coopéreraient pas.  Réaffirmant son engagement envers les droits humains, la délégation érythréenne a ainsi indiqué que son pays a soumis des rapports à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et s’emploie à mettre en œuvre la Charte africaine sur les droits et du bien-être de l’enfant, dont 80% des recommandations sont appliquées, selon elle.  Pour conclure, la délégation a reproché au Rapporteur spécial d’être « sorti de son mandat » en évoquant le rôle de l’Érythrée dans le conflit en Éthiopie.  Ce qui ressort des relations bilatérales ne le regarde pas, a-t-elle conclu. 

Exposé

Mme ANAÏS MARIN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, a indiqué que dans ce pays qui a été épargné par le terrorisme jusqu’à présent, les lois antiterroristes prolifèrent et les autorités poursuivent comme terroristes ou extrémistes tous ceux qui osent dénoncer le Gouvernement et ses violations des droits humains.  Le champ d’application de la peine de mort a été étendu pour inclure des crimes de terrorisme vaguement définis et la peine capitale peut désormais être appliquée aux responsables de l’État et aux militaires reconnus coupables de haute trahison.  En outre, la propagande terroriste ou sa justification publique est sanctionnée par une peine de sept ans d’emprisonnement.  Des dizaines d’individus, qui cherchaient à documenter ou à entraver le transit à travers le territoire biélarussien de troupes russes et d’équipements militaires destinés à la guerre en Ukraine, ont notamment été reconnus coupables de terrorisme. L’espace public a été fermé à la libre expression de toute opinion dissidente, permettant aux autorités de poursuivre pour extrémisme des militants de la société civile et des membres de l’opposition politique, ainsi que des défenseurs des droits humains, des avocats, des journalistes indépendants, des universitaires et des travailleurs culturels.  Elle a expliqué que l’absence de garanties d’un procès équitable favorise la militarisation de la loi, alertant en outre que la présomption d’innocence des accusés n’est jamais respectée.  De même, les personnes accusées de crimes résidant à l’étranger peuvent désormais être jugées par contumace en ligne, même si elles ont déclaré se voir systématiquement refuser la possibilité d’y participer.  Et s’ils sont reconnus coupables d’activités extrémistes ou d’atteinte aux intérêts du Bélarus, ces exilés peuvent désormais être déchus de leur citoyenneté.

Poursuivant, la Rapporteuse spéciale a signalé que les médias progouvernementaux qualifient systématiquement d’extrémistes toute personne ayant participé aux manifestations organisées faisant suite aux élections contestées de 2020, notamment les journalistes, et les défenseurs des droits humains qui offrent une assistance juridique aux manifestants détenus ou qui ont collecté des fonds pour soutenir leur famille.  À l’heure actuelle, a-t-elle précisé, 3 429 personnes sont répertoriées comme extrémistes.  Et le ministère de l’information tient une liste de documents extrémistes soumis à la censure qui s’est allongée de façon exponentielle pour inclure les sites Web, les comptes de réseaux sociaux et les chaînes YouTube ou Telegram des organisations de défense des droits humains. Rien qu’en 2021, 426 documents de ce type ont été reconnus comme extrémistes, et depuis 2022, plus de 1 000 nouvelles entrées ont été ajoutées, y compris des livres de fiction, de poésie et d’histoire.  En 2021, un nouveau code des infractions administratives est entré en vigueur, augmentant les amendes et les durées de détention administrative en cas de violation de la procédure d’organisation ou de tenue d’événements de masse.  Les personnes reconnues coupables d’extrémisme sont interdites d’activités pédagogiques, de publier et d’occuper des postes gouvernementaux ou élus, et dans certains cas, les tribunaux auraient ordonné un traitement obligatoire dans un hôpital psychiatrique.  Les autorités pénitentiaires, en outre, se montrent très dures envers les personnes figurant sur les listes noires, et plusieurs demandes de preuve de vie d’individus sont restées sans réponse; ce qui laisse présager des disparitions forcées, s’est alarmée la Rapporteuse spéciale qui a demandé la libération immédiate et sans conditions de tous les individus détenus illégalement. 

Dialogue interactif 

L’Ukraine a indiqué qu’elle enquêtait sur la déportation d’enfants ukrainiens au Bélarus et demandé à la Rapporteuse spéciale d’y accorder une attention particulière, s’inquiétant par ailleurs de la récente décision de ne pas renouveler les passeports des citoyens bélarussiens exilés.  La Pologne s’est inquiétée du sort des prisonniers politiques, notamment Maria Kalesnikava qui purge une peine de sept ans, ainsi que des attaques contre la minorité polonaise, notamment dans l’éducation.  Comment obtenir la libération des prisonniers politiques, notamment ceux qui appartiennent à des minorités nationales, a voulu savoir la délégation qui a par ailleurs demandé au Bélarus de cesser d’instrumentaliser les migrants à des fins politiques.

Comment s’assurer que les auteurs de violation soient traduits en justice, a demandé la Lituanie au nom des pays baltes et nordiques, qui s’est également inquiétée de la déportation d’enfants ukrainiens vers le territoire bélarussien. La République tchèque s’est préoccupée de l’abus de la législation anti-terroriste, suivie de l’Union européenne qui a dénoncé l’assaut de grande ampleur lancé contre la société civile, exigeant la libération de tous les prisonniers politiques et un moratoire sur la peine de mort.  De quels outils dispose l’ONU pour pousser le Bélarus à mettre ses lois anti-terroristes et anti-extrémistes en conformité avec la législation internationale? Le Luxembourg a relevé que l’absence de définitions exhaustives du terrorisme et de l’extrémisme violent dans les résolutions contraignantes du Conseil de sécurité avait créé un vide qui permettait à des États autocratiques, tels que le Bélarus, d’adopter des définitions vagues de l’extrémisme et du terrorisme dans leurs légations nationales.  Comment préciser ces définitions pour qu’elles ne puissent être utilisées contre la liberté d’expression des populations?

Que faire pour soutenir les habitants du Bélarus, ont demandé les Pays-Bas qui ont notamment dénoncé le ciblage des citoyens ayant fui à l’étranger, menacés d’être déchus de leur citoyenneté et privés de passeport.  Le Liechtenstein a appelé pour sa part à renforcer les efforts en vue d’une reddition de comptes internationale pour les citoyens du Bélarus détenus ou condamnés arbitrairement. 

Les États-Unis ont demandé aux autorisés bélarussiennes d’ouvrir leurs portes à la Rapporteuse spéciale et à l’équipe d’enquête du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Par ailleurs, comment assurer la reddition de comptes concernant le transfert d’enfants ukrainiens dans des soi-disant colonies de vacances au Bélarus?  Le Royaume-Uni a condamné les détentions arbitraires et illégales de 1 500 prisonniers politiques, déplorant les décès en détention d’Ales Pushkin et exigeant la libération d’Ales Bialiatski et de Maria Kalesnikava.  Comment soutenir ce qui reste des représentants de la société civile sur place sans les mettre en danger, s’est enquise la Suisse.

Réagissant aux remarques des délégations, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus a indiqué qu’un décret limitant les services consulaires à l’étranger est récemment entrée en vigueur et vise les Bélarussiens en exil ainsi que les enfants, déplorant une forme de discrimination à l’égard des personnes qui n’ont pas les moyens de revenir au Bélarus pour refaire leur passeport.  Aussi, elle a exhorté les pays hôtes à faire preuve de flexibilité, notamment en reconnaissant la viabilité de pièces d’identité qui auraient éventuellement expiré, ou en émettant des documents de voyage alternatifs.  Elle a également signalé que des personnes rentrées au Bélarus pour régler leurs questions administratives y auraient subi des violations des droits humains.

La Rapporteuse spéciale a ensuite souligné que la reddition de comptes est primordiale, notamment pour les auteurs de torture et de disparitions forcées. Ces derniers n’étant nullement inquiétés au Bélarus, il revient au pays reconnaissant la juridiction universelle d’assumer cette responsabilité, a-t-elle plaidé, signalant en outre, que la Cour pénale internationale (CPI) a été saisie pour qualifier l’acte d’expulsion de crime de guerre.

Notant que le militantisme est une activité très dangereuse au Bélarus, elle a appelé la communauté internationale à faire confiance aux défenseurs des droits humains sur le terrain et à ne pas violer leur confidentialité pour éviter de les exposer aux représailles.  Elle a également alerté qu’elle encoure elle-même un risque d’emprisonnement si elle se rendait sur place.  Il faut donc se faire à l’idée que certaines activités de protection des droits humains doivent se faire à distance, a-t-elle dit.  La Rapporteuse spéciale a également déploré que cette année, le Bélarus ait privé ses citoyens du droit de faire appel devant le Conseil des droits de l’homme, limitant encore plus leurs possibilités de recours.  Elle a par ailleurs indiqué ne pas être en mesure d’évaluer la situation des enfants déportés, faute de pouvoir se rendre sur place.

Exposé

Mme MARIANA KATZAROVA, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, a d’emblée déploré le manque de coopération des autorités russes et même leurs tentatives actives d’obstruction, qui consistent notamment à essayer de dissuader d’autres mécanismes de droits humains de l’ONU de collaborer avec son mandat.  Constatant une détérioration rapide de la situation depuis l’attaque de la Russie contre l’Ukraine le 24 février 2022, elle a mis en lumière une série de violations systématiques et ciblées, qui ont pour but de museler la dissidence et les voix indépendantes.  La répression actuelle des droits humains en Russie et la guerre externe que mène ce pays contre l’Ukraine vont de pair, a-t-elle observé. 

Mme Katzarova a ensuite constaté que l’espace civique indépendant n’existe plus en Russie.  Décrivant un climat de peur et d’impunité, elle a mentionné plusieurs organisations de droits humains, comme le Groupe Helsinki de Moscou, le Centre Sakharov ou l’ONG Memorial, lauréate en 2022 du prix Nobel de la paix, qui ont été fermées après avoir été étiquetées comme « agents étrangers ».  La Rapporteuse spéciale a également noté une nette augmentation des détentions arbitraires pour motifs politiques, avec plus de 500 personnes détenues juste pour l’année dernière.  Les conditions de détention de figures politiques comme Alexei Navalny et Vladimir Kara-Murza relèvent de la torture délibérée et des mauvais traitements, a-t-elle dénoncé.  Elle a enfin signalé que 82 accusations d’espionnage ont été lancées contre des journalistes d’investigation au cours des sept premiers mois de cette année.  De même, les avocats ne sont pas épargnés, comme le prouve l’arrestation à Moscou, le 13 octobre dernier, de trois avocats d’Alexei Navalny pour « extrémisme »

S’agissant de l’invasion de l’Ukraine, la Rapporteuse spéciale a fait état d’une saturation de l’espace informationnel avec de la propagande en faveur de la guerre et des incitations à la haine contre les Ukrainiens, y compris dans les écoles primaires et secondaires.  Elle a également noté que plus de 20 000 personnes ont été détenues entre février et juin de cette année pour avoir participé à des manifestations pacifiques antiguerre. Elle a, en outre, exprimé sa préoccupation face aux rapports de torture et de mauvais traitements contre les manifestants, y compris des allégations de viol et autres violences sexuelles.  Elle a mentionné le cas d’Anatoly Berezikov, un militant antiguerre décédé en détention, et a relevé l’absence de mesures prises pour garantir la sécurité de la journaliste Yelena Milashina et de l’avocat des droits humains Alexander Nemov, récemment attaqués.

En conclusion, la Rapporteuse spéciale a appelé la Fédération de Russie à reconsidérer son approche et à s’engager dans un dialogue constructif avec son mandat. Mme Katzarova a également exhorté les États Membres à user de leurs bons offices pour rechercher un dialogue constructif avec les autorités russes afin de mettre fin aux violations des droits humains et de sécuriser la libération immédiate de toutes les personnes détenues pour des motifs politiques en Russie.  Elle a enfin appelé de ses vœux des politiques de protection des défenseurs des droits humains à l’intérieur et à l’extérieur du pays. 

Dialogue interactif 

Intervenant après l’exposé de la Rapporteuse spéciale, le Venezuela, le Burundi, Sri Lanka et la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont exprimé leur opposition à la politisation des droits humains qui, selon eux, caractérise les mandats de pays.  Très critique à l’égard du rapport de Mme Katzarova, la RPDC a déclaré soutenir les efforts du peuple russe pour « créer un État puissant », tandis que le Nicaragua affirmait n’appuyer aucun rapport ni résolution ciblant la Fédération de Russie.  De tels documents s’appuient sur des allégations mal intentionnées et à motivations politiques, a fait valoir la délégation. 

Aux antipodes de ces prises de position, l’Irlande, la Suède, s’exprimant au nom des pays nordiques et baltes, et les Pays-Bas se sont dits très préoccupés par la situation des droits humains en Fédération de Russie, la guerre d’agression contre l’Ukraine ayant intensifié la répression intérieure et les mesures restrictives dirigées contre les médias indépendants.  Les Pays-Bas ont appelé les autorités russes à respecter leurs obligations de protéger la liberté d’expression, la liberté de réunion et la liberté des médias, et à protéger l’égalité des droits pour les personnes LGBTQI+.  Dans le climat répressif actuel, comment la communauté internationale peut-elle continuer à soutenir les médias indépendants, les défenseurs des droits humains, les avocats, les personnalités culturelles et les organisations de la société civile russes, a demandé la délégation à la Rapporteuse spéciale. 

Condamnant elle aussi la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie, l’Union européenne a estimé que celle-ci a prouvé son total mépris du droit international et des droits humains.  Considérant que les auteurs de crimes de guerre doivent être poursuivis de manière individuelle, l’Allemagne a demandé des précisions quant au rôle que peut jouer la Cour pénale internationale (CPI) en matière de reddition de comptes dans le cadre de la guerre en Ukraine, le Royaume-Uni s’interrogeant quant à lui sur les leviers à disposition de la communauté internationale pour obliger les autorités russes à rendre des comptes. 

Listant les violations des droits humains commises par la Fédération de Russie sur son territoire, l’Ukraine s’est dite vivement préoccupée par la propagande russe qui appelle à la déshumanisation des Ukrainiens et au rejet de l’existence même de l’Ukraine.  Elle a tout particulièrement dénoncé la déportation de nombreux enfants ukrainiens par la Fédération de Russie, invitant la Rapporteuse spéciale à prêter une attention particulière à cette question.  La Géorgie a ensuite fustigé les violations commises par la Fédération de Russie dans les deux régions géorgiennes qu’elle occupe, condamnant le nettoyage ethnique qui s’y déroule.  La République tchèque s’est, pour sa part, enquise de mesures concrètes pour appuyer les journalistes russes indépendants, tandis que la Pologne demandait comment appuyer le mandat de la Rapporteuse spéciale compte tenu des conditions politiques restrictives en Fédération de Russie.  Les États-Unis ont rappelé que tous les médias russes indépendants ont dû fermer ou s’exiler et que des centaines de prisonniers sont détenus pour avoir exercé leur liberté de conviction.  Comment la communauté internationale peut-elle amplifier la voix opprimée de la société civile russe, ont-ils demandé, cette question étant aussi posée par la Suisse.  Le Luxembourg s’est alarmé d’un espace civique totalement anéanti en Fédération de Russie.  Étant donné le contrôle total des médias, comment pouvons-nous faire passer le message que nous ne faisons nullement l’amalgame entre les autorités et la population russes, s’est-il interrogé.  À sa suite, le Liechtenstein a demandé des détails au sujet des violations commises à l’encontre de ceux qui refusent de rejoindre les forces armées russes. 

La Bulgarie a mis en exergue deux aspects du rapport, auxquels elle apporte son soutien.  D’abord, elle s’est inquiétée du manque de respect des droits de l’enfant, évoquant tout particulièrement la déportation d’enfants ukrainiens en Fédération de Russie et la propagande de haine en direction des écoliers.  Ensuite, elle s’est alarmée des limitations à la liberté d’expression et des assassinats de journalistes.  Le Monténégro, rejoint sur cette position par l’Albanie, a appelé la Fédération de Russie à annuler sa législation répressive contre les médias, à libérer tous les prisonniers politiques et à cesser de faire obstacle aux travaux de la Rapporteuse spéciale.

Centrant son intervention sur l’oppression des personnes LGBTQI+, notamment en Tchétchénie, l’Australie s’est demandé comment la communauté internationale peut leur apporter davantage de soutien, notamment via les organismes de droits humains qui les défendent en Russie.  De son côté, la France a noté que plus de la moitié des personnes arrêtées en Russie lors des manifestations contre la guerre en Ukraine sont des femmes.  Après avoir dénoncé à son tour la détention de journalistes et de militants des droits humains, elle a demandé à la Rapporteuse spéciale son évaluation de la coopération de la Fédération de Russie avec les comités conventionnels et ses attentes quant à l’Examen périodique universel auquel elle se soumettra à Genève.

La Chine, ainsi que la République islamique d’Iran, le Bélarus et l’Érythrée ont réitéré leur position de principe consistant à rejeter les mandats ciblant un pays spécifique sans son consentement, au mépris des principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité et de non-sélectivité.  Les rapports qui en découlent donnent une vision déformée de la situation et de la dynamique des processus relatifs aux droits humains dans ces États, rendant impossible l’évaluation des progrès réels, ont-ils ajouté.  Pour eux, le seul mécanisme interétatique permettant d’examiner les questions relatives aux droits humains dans tous les pays sans exception est l’EPU du Conseil des droits de l’homme.  Tout en adoptant la même position de principe, la République arabe syrienne a ajouté une critique au rapport de Mme Katzarova, l’accusant de biaiser la définition, parfaitement légitime selon elle, « d’agent d’influence étranger ». 

Après ces questions et commentaires, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie a invité la délégation syrienne à la rejoindre pour converser de la complexité de la loi russe sur les agents étrangers, qui s’applique aux individus comme aux organisations.  Elle a ensuite regretté l’absence de la délégation russe dans la salle, tout en louant le rôle des défenseurs des droits humains et des journalistes indépendants qui, eux, « sont venus ici pour écouter et témoigner ».  Elle a souligné les difficultés qu’éprouve la société civile russe, « en exil dans son propre pays ». 

Mme Katzarova est revenue sur les défis spécifiques aux minorités ethniques et aux objecteurs de conscience en Russie.  Selon ses estimations, plus d’un million d’hommes ont ainsi quitté le pays pour éviter la conscription et les persécutions, a-t-elle souligné.  Elle a par ailleurs abordé le sujet sensible des tortures et des mauvais traitements, en particulier ceux survenus pendant et après les deux guerres de Tchétchénie, et a de nouveau dénoncé l’impunité omniprésente. Elle a enfin mis en lumière l’augmentation de la violence domestique en Russie, notamment chez les hommes revenant de la guerre en Ukraine.  « Il ne faut pas isoler le peuple russe », a-t-elle plaidé en conclusion, non sans appeler aussi à « soutenir les voix des braves défenseurs des droits humains ». 

Exposé

M. ERIK MØSE, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, intervenant pour la première fois devant la Troisième Commission, a rappelé que dans ses rapports précédents, la Commission avait constaté que les autorités russes avaient commis un large éventail de violations du droit international, des droits de l’homme et du droit international humanitaire en Ukraine comme en Russie.  Il a précisé que nombre d’entre elles, notamment les actes de torture, les homicides volontaires, les viols et la déportation d’enfants, constituaient des crimes de guerre, et que les vagues d’attaques contre les infrastructures énergétiques et le recours systématique à la torture pourraient constituer des crimes contre l’humanité, sous réserve d’enquêtes plus approfondies. 

Le Président a aussi indiqué que les rapports de la Commission avaient documenté « un petit nombre » de violations commises par les forces armées ukrainiennes, y compris des attaques probablement indiscriminées, et deux incidents pouvant être qualifiés de crimes de guerre.  Dans le dernier rapport, nous avons relevé trois cas dans lesquels les autorités ukrainiennes ont commis des violations des droits humains à l’encontre de personnes qu’elles accusaient de collaborer avec les autorités russes, a-t-il ajouté.  Regrettant que les demandes et prises de contact de la Commission auprès des autorités russes soient restées lettre morte, il s’est plaint du manque d’accès aux zones occupées.  A contrario, il a salué la coopération du gouvernement ukrainien. 

Se disant profondément préoccupé par l’étendue, la fréquence et la gravité de certains types de violations commises par les autorités russes, M. Møse a notamment déploré les attaques à l’arme explosive, comme celle du 28 avril 2023 dans la ville d’Ouman, où un missile russe a frappé un immeuble résidentiel tuant 24 civils.  Rapportant également avoir interrogé de nombreuses personnes torturées par les autorités russes, il a souligné le caractère généralisé et systématique de ces pratiques.  Il a aussi évoqué les cas de viol commis par des soldats russes qui s’introduisaient dans les maisons des villages où ils étaient déployés, les victimes recensées étant âgées de 16 ans à 83 ans.  De même, la Commission a conclu que la déportation vers la Russie de 31 enfants lors d’un incident survenu en mai 2022 constituait un crime de guerre, a-t-il ajouté, appelant au retour rapide en Ukraine de tous les enfants déportés.  Il est primordial que des enquêtes approfondies soient menées et que les auteurs des crimes et violations répondent de leurs actes, a-t-il souligné. 

Dialogue interactif 

L’Ukraine a exprimé sa gratitude envers la Commission d’enquête pour son travail inestimable dans le maintien de la responsabilité et de la justice, avant de condamner l’attaque perpétrée le 5 octobre 2023 contre un café à Hroza, qui a fait 59 morts.  Ces personnes étaient des civils, a-t-elle insisté, contrairement à ce qu’a prétendue la propagande russe qui, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, a faussement assimilé les victimes à des « accompagnateurs néonazis ». 

La délégation ukrainienne a également dénoncé les « crimes odieux », tels que des meurtres délibérés, des actes de torture et des violences sexuelles, perpétrés par les forces militaires russes.  Elle a aussi fait état des conséquences écologiques catastrophiques du sabotage du barrage de Kakhovka par la Russie.  Selon elle, « le plus grand désastre industriel et écologique en Europe » aura un impact à long terme dépassant largement les frontières ukrainiennes.  Enfin, l’Ukraine a réaffirmé son engagement à poursuivre la Russie pour tous les crimes commis. 

Le Canada, jugeant l’impunité inacceptable, a demandé à la Rapporteuse spéciale si les autorités russes ont pris des mesures pour que tous les auteurs de crime soient tenus responsables de leurs actes.  La Pologne a fait le même constat et exigé que la Russie retire immédiatement son armée d’Ukraine.  Les États-Unis ont, pour leur part, dénoncé la déportation d’enfants vers la Russie, avant de se demander, eux aussi, comment la communauté internationale peut forcer la Russie à rendre des comptes pour ses crimes de guerre. 

« Déterminée à ce que la Russie rende des comptes », l’Union européenne a voulu savoir comment la Commission coopérait avec d’autres mécanismes de reddition de comptes internationaux et nationaux.  Et que faire pour aider à faire respecter les droits de victimes, s’est enquise la Finlande, au nom des pays baltes et nordiques. La République tchèque s’est inquiétée des conséquences humanitaire et environnementales de la rupture du barrage deNova Kakhovka, demandant à la Commission de donner des détails sur les impacts économiques et écologiques subis par cette région.  La Roumanie a déploré l’absence de réponse de la Russie aux demandes d’informations. 

Notant que des milliers d’enfants avaient été déportés en Russie et au Bélarus, les Pays-Bas ont voulu savoir comment la communauté internationale pouvait aider l’Ukraine à identifier et retrouver ces enfants et à les réunir avec leur famille.  Cette question a également préoccupé l’Allemagne, la France dénonçant, pour sa part, la « stratégie de la terreur » de la Russie.  Que faire pour que la voix des survivants soit prise en compte? a demandé à son tour l’Irlande

La Géorgie a condamné les attaques aveugles contre certains villages et appelé à ce que justice soit faite, suivie du Monténégro qui a insisté sur l’importance de la reddition de comptes pour le crime d’agression, et de l’Albanie, qui a dénoncé les violences sexuelles et les attaques contre des écoles et des hôpitaux.  De son côté, le Royaume-Uni a voulu savoir comment la Commission surveillait les attaques contre les infrastructures civiles à l’approche de l’hiver. 

La Suisse s’est inquiétée du caractère systématique et généralisé de la torture dans les zones occupées avant de s’intéresser aux démarches de la Commission en vue d’obtenir de la clarté sur l’étendue et les circonstances des transferts illégaux d’enfants.  Le Liechtenstein a demandé si des preuves concernant le crime d’agression avaient été recueillies par la Commission et si elle comptait coopérer avec le centre international chargé des poursuites pour le crime d’agression commis par la Russie contre l’Ukraine.   

Après Israël qui a affirmé qu’il continuerait à soutenir l’Ukraine, l’Australie, appuyée par le Japon, a enjoint le Conseil de sécurité à continuer de faire pression pour que la Russie cesse cette guerre.  La Chine a rappelé, quant à elle, qu’elle s’était opposée à la création de la Commission qui peut « aggraver le conflit et la confrontation ».  Elle a estimé que les préoccupations légitimes de sécurité de tous les pays devaient être prises au sérieux, appelant la communauté internationale à faire plus d’efforts pour atteindre le dialogue et la paix. 

Régissant aux nombreuses remarques des délégations, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a indiqué que nombres d’affaires font déjà l’objet d’enquêtes en Ukraine même, mais que leur nombre –plus de 100 000– nécessite une coordination pour appuyer ce processus.  La communauté internationale peut aider en ce sens, a-t-il dit.  Il a indiqué que la Commission est en contact avec la CPI, ainsi qu’avec d’autres entités sur le terrain.  Les démarches multilatérales se sont déjà avérées utiles car elles permettent de comprendre comment doit se dérouler la coopération, a-t-il assuré. 

Après avoir indiqué ne pas avoir connaissance d’une quelconque application du principe de responsabilité par la Russie, le Président a indiqué que la question des violations des droits des enfants est très délicate, du fait de l’absence d’informations exactes sur le nombre d’enfants déportés ou sur leur sort une fois en Russie.  « Nous avons besoin de plus d’informations, car les chiffres avancés varient selon que la source est ukrainienne ou russe », a-t-il expliqué.  Il a ensuite assuré que l’enquête liée à la destruction du barrage de Kakhovka suit son cours, posant question tant sur les causes que sur son impact environnemental notamment.  Il s’est félicité de l’aide reçue de la part de gouvernements qui reçoivent favorablement les demandes de la Commission d’enquête.  Cependant, il est difficile d’élaborer une stratégie en l’absence de coopération des autorités russes, a-t-il regretté. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les délégations cherchent une solution à 20 ans d’impasse à la Conférence du désarmement

Soixante-dix-huitième session,
22e & 23& séances plénières - matin& après-midi
AG/DSI/3726

Première Commission: les délégations cherchent une solution à 20 ans d’impasse à la Conférence du désarmement

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) s’est penchée aujourd’hui sur le mécanisme du désarmement, dont la paralysie, notamment celle de la Conférence du désarmement, a été déplorée par nombre de délégations.  Si certains l’ont imputée à des méthodes de fonctionnement dépassées ou dévoyées, d’autres ont surtout mis l’accent sur un manque de volonté politique, ou encore à la vision que certains États ont de leur sécurité et des moyens de l’assurer. 

Au sens strict, le mécanisme de désarmement des Nations comprend trois principaux organes: la Conférence du désarmement, la Commission du désarmement et la Première Commission de l’Assemblée générale.  Mais il est parfois aussi entendu comme comprenant le Bureau des affaires de désarmement, l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), de même que les trois Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement.  Les activités de ces cinq derniers organismes ont d’ailleurs été largement saluées par les délégations, certaines regrettant toutefois la faiblesse de leurs ressources. 

Il n’en a pas été de même pour les trois organes centraux, et en particulier pour la Conférence du désarmement.  Plusieurs États Membres ont rappelé les importants résultats obtenus dans ce cadre, parmi lesquels figurent le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires et les Conventions sur l’interdiction des armes chimiques et biologiques. 

Mais, comme l’ont déploré notamment Singapour, le Mexique ou la République de Corée, la Conférence n’a rien produit depuis plus de deux décennies, étant même incapable la plupart du temps, comme l’a rappelé l’Union européenne, d’adopter un programme de travail ou de déterminer son mandat de négociation. Un constat que certains pays ont souhaité nuancer, comme les États-Unis et plus encore la France, qui a estimé que, malgré les blocages, la Conférence du désarmement continue d’héberger des débats essentiels à une compréhension commune des enjeux de désarmement, sans oublier qu’elle reste « la seule instance multilatérale de la communauté internationale pour les négociations dans le domaine du désarmement ». 

À qui la faute?  Pour l’Union européenne et plusieurs délégations occidentales, une partie de ces blocages est imputable à une stratégie d’entrave de la Russie.  La France a rappelé que celle-ci avait empêché la validation de la participation des États observateurs lors de la session de 2023 et a, comme plusieurs autres, dénoncé le dévoiement de la règle du consensus, transformé en veto procédural.  La Russie a rejeté ces critiques, estimant que la situation trouve son origine dans la réticence des pays occidentaux à s’engager en faveur de la mise en œuvre des tâches assignées à la Conférence lors de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le désarmement. Pour la Russie, le blocage de la Conférence illustre clairement la politique de sape des forums multilatéraux de ces pays et leur tentative d’utiliser les Nations Unies pour servir leurs propres ambitions. 

À l’instar du Mouvement des pays non alignés ou encore de la Chine, c’est surtout un manque de volonté politique que plusieurs délégations ont dénoncé.  Pour le Pakistan, le manque de confiance entre États est encore pire actuellement que pendant la guerre froide.  Il n’est donc pas étonnant que les États ne veuillent pas négocier des règles de désarmement perçues comme portant atteinte à leur sécurité et cherchent à maintenir leurs avantages, y compris grâce aux armes nucléaires.  Pour ce pays, ce n’est pas en changeant les méthodes de travail qu’on modifiera la vision qu’ont les États de leur sécurité.  Ce qui est essentiel, c’est de reconnaître le principe de sécurité non diminuée et égale pour tous les États. 

Certaines délégations ont présenté des propositions pour revitaliser la Conférence.  Singapour a appelé à intensifier les consultations; l’Iran a proposé que démarrent des négociations sur une convention globale interdisant les armes nucléaires.  D’autres privilégient les mesures concrètes prises pas à pas, comme le Canada, ou la France qui a suggéré de lancer des négociations sur les sujets les plus mûrs, comme le projet de traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d'armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, ou encore de discuter les questions de transparence des doctrines et arsenaux nucléaires. 

Mais, de manière plus générale, les délégations ont partagé une vision inquiète du mécanisme mondial de désarmement, marqué par les blocages. Largement évoqué lors de précédentes séances, l’échec des deux dernières Conférences d’examen du TNP a de nouveau été mentionné, avec les risques de perte de crédibilité du Traité.  Le Mouvement des pays non alignés et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est ont appelé à préserver celle-ci et exhorté à assurer le succès des prochaines sessions du Comité préparatoire à la onzième Conférence d’examen du TNP. 

La rapidité des évolutions technologiques et scientifiques a également été évoquée par plusieurs délégations qui ont insisté sur la nécessité pour le mécanisme de désarmement de l’ONU de suivre le rythme du progrès, plus particulièrement dans le cyberespace et l’espace extra-atmosphérique, et aussi –l’Autrice a insisté sur ce point- pour tenir compte de nouveaux acteurs.  Certains pays ont toutefois trouvé matière à satisfaction avec les succès de la Commission du désarmement, qui a récemment adopté des recommandations sur la transparence et les mesures de confiance dans l’espace extra-atmosphérique.  Le rôle de réflexion de l’UNIDIR sur les questions émergentes comme l’espace et la cybersécurité a lui aussi été salué. 

En début de session matinale, la Première Commission avait achevé son débat sur le thème « désarmement et sécurité sur le plan régional ». Plusieurs délégations ont souligné la complémentarité des approches régionale et internationale en vue de promouvoir le désarmement et la non-prolifération, dont le Mexique et l’Union européenne.  Le Brésil a insisté sur l’importance de promouvoir la confiance entre pays voisins, mentionnant un accord de surveillance mutuelle qui lie son pays à l’Argentine dans ce but. 

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 26 octobre, à 15 heures.  Elle devrait achever son débat thématique.

  
DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Désarmement et sécurité sur le plan régional

Déclaration

Mme IZZAT HAYATI ZAKARIA (BRUNÉI DARUSSALAM), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), s’est dite préoccupée par le déclin des mécanismes mondiaux de désarmement, de non-prolifération et de contrôle des armements, et a appelé les pays, en particulier les États dotés d’armes nucléaires, à mettre en œuvre leurs obligations dans le cadre de ces mécanismes, y compris le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Le renforcement de l’unité de l’ASEAN par le biais de mécanismes tels que le Sommet de l’Asie orientale, le Forum régional de l’ASEAN et la Réunion des ministres de la défense de l’ASEAN Plus, reste une priorité pour la région, a‑t‑elle déclaré. 

La représentante a réaffirmé que la préservation de la zone exempte d’armes nucléaires (ZEAN) du Sud-Est créée par le Traité de Bangkok, renforce la paix et la sécurité mondiales et régionales, favorise la réalisation de l’objectif d’un monde sans armes nucléaires et contribuent aux objectifs du TNP.  La représentante a ajouté que la Commission du Traité de Bangkok étudie la possibilité d’autoriser les États dotés d’armes nucléaires qui sont disposés à signer et à ratifier le Protocole au Traité de Bangkok sans réserve et à fournir au préalable une assurance formelle de cet engagement à procéder à la signature.  En outre, l’ASEAN continue de soutenir les efforts en cours pour la création de telles zones ailleurs dans le monde, en particulier au Moyen-Orient. Par ailleurs, le Forum régional de l’ASEAN et ses 27 membres ont poursuivi le dialogue sur les questions de non-prolifération et de désarmement. 

Enfin, la représentante a souligné que l’Indonésie, au nom de l’ASEAN, avait présenté la résolution actualisée de l’ASEAN intitulée « Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires de l'Asie du Sud-Est (Traité de Bangkok) » au titre du point de l’ordre du jour relatif au désarmement général et complet. 

M. MATTIAS VAREM (Estonie) a estimé que la plus grande guerre depuis la Seconde Guerre mondiale se déroule en ce moment: celle de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Le recours à la coercition n’a pas sa place en ce XXIe siècle, a ajouté le représentant, qui a condamné la campagne d’attaques de drones russes contre les installations de l’Ukraine qui contraint des milliers de civils à se battre pour survivre.  Ce comportement est contraire au droit international, tout comme celui de la République islamique d’Iran et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), a poursuivi le représentant, qui a ensuite a appelé l’Iran à cesser d’approvisionner la Russie en armes. 

Le représentant a demandé à la Russie d’être transparente en termes de contrôle des armes.  Soulignant que la Russie s’était retirée du Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FACE) et du Traité New START, avait annoncé le déploiement d’armes nucléaires au Bélarus ainsi que le retrait de sa signature du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), il l’a accusée de perturber l’architecture internationale de désarmement et de saper les règles internationales. 

M. BRUCE TURNER (États-Unis) a déploré la multiplication des menaces à la coopération régionale en matière de sécurité, le conflit de Gaza venant notamment rappeler le rôle déstabilisateur de l’Iran au Moyen-Orient. Le représentant a appelé ce pays à coopérer en toute transparence avec l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour qu’il puisse être attesté que son programme nucléaire est de nature pacifique.  Il a également exprimé la préoccupation de son pays face aux accords militaires passés entre la Russie et l’Iran et la RPDC dans le cadre de son agression brutale et illégale contre l’Ukraine.  Ces pratiques sapent le régime de prolifération et constituent des violations d’accords multilatéraux de contrôle des armes classiques, a‑t‑il averti, jugeant également essentiel d’assurer la paix et la sécurité de Taiwan.  Enfin, le représentant a appelé à la conclusion de traités supplémentaires portant création de ZEAN, qui soient agréés par toutes les parties. 

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a défendu les mérites des ZEAN pour la non-prolifération et le désarmement nucléaires.  Les traités sur lesquels elles reposent permettent également aux États dotés d’armes nucléaires de fournir des garanties négatives de sécurité par le biais de protocoles juridiquement contraignants, a rappelé le représentant.  Ces garanties sont vitales, en particulier dans un contexte de tensions croissantes dans l’environnement de sécurité international, a poursuivi le représentant, qui a reconnu que, malgré leurs contributions, les ZEAN ne remplacent pas les obligations juridiques et les engagements sans équivoque des États dotés d’armes nucléaires en vue de l’élimination totale des armes nucléaires. 

Dans sa région, la Malaisie reste déterminée à intensifier les efforts de toutes les parties pour résoudre toutes les questions en suspens conformément aux objectifs et aux principes du Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est, a assuré le représentant.  Pour lui, la réalisation de toutes les promesses du Traité passe par la signature et la ratification du Protocole au Traité par les États dotés d’armes nucléaires. Avant de conclure il s’est dit favorable à la création d’une ZEAN au Moyen-Orient. 

M. FLORES TROCHE (Mexique) a estimé que les efforts régionaux de désarmement et de non-prolifération sont complémentaires des efforts mondiaux et, à ce titre, représentent une contribution importante à la paix et la sécurité internationales.  Le représentant a rappelé que dès 1967, l’Amérique latine et les Caraïbes avaient éradiqué les armes nucléaires de leur région avec le Traité de Tlatelolco, se réjouissant que cet exemple ait donné lieu à la création de quatre autres ZEAN dans le monde.  De même, il a rappelé que 116 pays, soit les deux tiers des États Membres, ont décidé d’interdire les armes nucléaires sur le plan régional.  Il a appelé les États dotés à retirer leurs réserves ou déclarations interprétatives formulées sur les ZEAN, ce qui, a‑t‑il estimé, permettrait à ces zones d’être entièrement protégées contre l’utilisation de ces armes.  Il a également réitéré le soutien de son pays à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. 

Le représentant a salué le travail des centres régionaux des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement, estimant qu’ils soutiennent efficacement la mise en œuvre régionale et nationale d’initiatives visant à renforcer la paix et le désarmement.  Du même coup, ces centres concourent au développement économique et social et à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a‑t‑il estimé.  Il a tout particulièrement insisté sur l’importance de l’assistance technique apportée par le Centre régional pour l’Amérique latine dans le développement des capacités nationales ainsi que pour le respect des obligations en matière de désarmement, de non-prolifération et de contrôle des armements. 

M. SARMAD MUWAFAQ MOHAMMED AL-TAIE (Iraq) a jugé qu’il existe un lien intrinsèque entre désarmement régional et mondial.  Aussi a‑t‑il souligné combien les événements tragiques de Gaza devraient inciter tous les acteurs de la région à œuvrer sans tarder à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Ce processus ne pourra réussir qu’au prix d’une dénucléarisation préalable de l’entité israélienne, a‑t‑il soutenu. 

M. JAN MICHAEL GOMEZ (Philippines) a souligné l’utilité des activités de sensibilisation et de formation aux enjeux du désarmement et de la non-prolifération entreprises dans le cadre du Traité de Bangkok ayant porté création d’une ZEAN en Asie du Sud-Est.  Le représentant a ajouté que son pays, aux côtés d’autres membres de l’ASEAN, est pleinement impliqué dans les discussions en cours sur de possibles accords de garanties négatives de sécurité, renouvelant à cet égard l’invitation de son pays aux États dotés d’armes nucléaires d’y participer. 

Mme CAMILLE PETIT (France) a rappelé que la France a été profondément heurtée par l’ampleur des crimes commis par le Hamas contre Israël et a condamné ces attaques terroristes qui ont frappé majoritairement des civils, dont de nombreuses victimes sont aussi françaises.  La France soutient une réponse légitime, dans le plein respect du droit international, en particulier du droit international humanitaire, a‑t‑elle déclaré.  La France est mobilisée pour venir en aide aux populations de Gaza et a demandé un accès sûr, immédiat et durable de l’aide humanitaire à Gaza. 

Par ailleurs, l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine demeure un acte illicite, contraire aux principes de la Charte des Nations Unies, qui fait peser un danger majeur sur la stabilité de la région, a affirmé la représentante.  Elle a condamné cette agression et a appelé la Russie à agir de manière conforme aux responsabilités internationales qu’elle prétend exercer.  Pour la représentante, le conflit armé en Ukraine fragilise trois grands piliers du processus de maîtrise des armements conventionnels applicables dans cette région, à savoir le Traité FACE, le Document de Vienne et le Traité « Ciel ouvert » dont l’objet vise à renforcer la confiance et la transparence afin de prévenir les risques d’escalade. Elle a notamment déploré la décision de la Russie de se retirer du FACE, estimant que ce pays faisait une nouvelle fois le choix du désengagement des cadres existants de la maîtrise des armements conventionnels et de la remise en cause de l’architecture de sécurité en Europe. 

La lutte contre les trafics illicites et le détournement des armes classiques, dont les armes légères et de petit calibre (ALPC) et leurs munitions, ainsi que la lutte contre les engins explosifs improvisés méritent une attention renouvelée, a par ailleurs souligné la représentante, pour qui le renforcement de l’assistance sur les plans régional et sous-régional est également essentiel.  La France est, avec l’Allemagne, à l’origine d’une initiative soutenue par l’Union européenne visant à réduire les trafics d’armes à feu dans les Balkans occidentaux à l’horizon 2024, a‑t‑elle rappelé.  L’initiative est déjà un succès, a‑t‑elle estimé, avant de présenter la méthode utilisée comme un modèle intéressant pour d’autres régions. 

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne (UE), a préconisé un travail complémentaire entre l’ONU et les organisations régionales, ainsi que des mesures de renforcement de la confiance à l’échelle régionale.  L’architecture européenne de sécurité repose sur les principes de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États, a‑t‑il rappelé, relevant que ces principes sont ceux de la Charte des Nations Unies.  À ce titre, le représentant a condamné la guerre de la Russie en Ukraine, affirmant que l’UE continuerait de soutenir l’Ukraine de manière financière, diplomatique et militaire aussi longtemps que nécessaire.  De même, il a assuré que l’UE ne reconnaîtra pas la tentative russe de légitimiser son contrôle de certaines parties du territoire ukrainien par le biais de « prétendues élections ».  Il a lancé un appel au Bélarus pour qu’il ne laisse pas la Russie employer son territoire en vue de lancer des opérations d’agression, et à l’Iran pour qu’il cesse de fournir des drones à la Russie. 

Condamnant l’attaque du Hamas contre Israël et déplorant toutes les vies emportées, le représentant a demandé que soit facilité le travail de l’ONU et des organisations humanitaires.  Il a évoqué le droit d’Israël à la légitime défense dans le cadre du droit international humanitaire, et appelé à fournir une aide et à protéger les infrastructures civiles –hôpitaux, écoles et bâtiments de l’ONU.  Il a réaffirmé son attachement à une paix pérenne à partir d’une solution à deux États. 

Mentionnant la situation au Sahel, le représentant a estimé que la région est confrontée à des crises sécuritaires et humanitaires graves, notamment en raison des interactions entre groupes armés et groupes terroristes.  Enfin, il a préconisé le renforcement de la coopération régionale pour contrôler le trafic des ALPC, évoquant dans ce cadre les collaborations de l’Union européenne, de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). 

M. ADIB AL ASHKAR (République arabe syrienne) a jugé inacceptables les larmes de crocodiles qui ont été versées vis-à-vis de la souffrance des victimes en Palestine, tout comme la mise sur le même pied d’égalité de l’agresseur et de l’agressé.  Le représentant a ensuite rappelé que son pays a accepté la prorogation du TNP dans le cadre d’un accord prévoyant l’adoption de la résolution établissant une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Il a souligné que la Syrie avait adhéré à la Convention sur les armes chimiques en 2014 et signé en 1972 la Convention sur les armes biologiques, il a regretté que cette zone n’ait toujours pas été établie en raison du refus d’Israël d’abandonner son arsenal d’armes de destruction massive et de son refus d’adhérer aux instruments internationaux pertinents.  Considérant la résolution sur le Moyen-Orient de 1995 comme un pilier fondamental du régime de non-prolifération sur le plan régional, le représentant a regretté que les États-Unis aient fait obstacle à toute mesure pour la mettre en œuvre afin d’assurer la supériorité militaire d’Israël dans la région. 

Il est temps que la communauté internationale prenne des mesures sérieuses pour obliger Israël à adhérer au TNP et à soumettre toutes ses installations et activités nucléaires aux garanties de l’AIEA, a déclaré le représentant, qui a demandé la convocation d’une conférence internationale en sens. 

M. KONSTANTINOS CHRISTOGLOU (Grèce) a réitéré le soutien de son pays pour la coopération régionale dans le domaine du désarmement et de la sécurité, estimant que ces mesures favorisent le désarmement à l’échelle mondiale.  À cette fin, le représentant a encouragé la création de partenariats pour la non-prolifération et le désarmement, ainsi que de mesures de confiance sur les plans régional et sous-régional.  Il a considéré que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU contient quelques notions à même de guider cet effort, notamment ses recommandations concernant la mise en œuvre d’instruments régionaux et la diplomatie préventive.  Relevant par ailleurs le lien établi entre climat, paix et sécurité, il a estimé que les organisations et cadres régionaux pouvaient jouer un rôle important à cet égard. 

Le représentant s’est dit profondément préoccupé par le détournement, le commerce illicite et l’utilisation non autorisée d’armes classiques.  À ce titre, il a souligné l’importance des initiatives régionales, citant comme exemple la stratégie de l’UE contre les armes à feu, le trafic illicite des ALPC et de leurs munitions, ainsi que le Centre d’échange pour le contrôle des armes légères en Europe du Sud-Est et de l’Est.  Il a réitéré le soutien de son pays à la feuille de route pour une solution durable au contrôle des armements dans les Balkans occidentaux d’ici à 2024. 

Le représentant a appelé au développement d’un cadre de sécurité régional au Moyen-Orient, mentionnant la contribution de son pays au rapport du Secrétaire général de cette année sur le « renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région de la Méditerranée ».  La Grèce soutient le projet de résolution L.16 sur le même sujet.  Estimant que son pays joue le rôle d’un pilier de la stabilité dans la région, il a rappelé sa politique visant à établir des mécanismes de coopération trilatéraux et multilatéraux avec ses voisins de la Méditerranée orientale et du Moyen-Orient. 

M. AKAKI DVALI (Géorgie) a axé son intervention sur la situation dans la région de la mer Noire qui, depuis de nombreuses années, est particulièrement exposée à une militarisation en violation flagrante de toutes les règles et normes internationales.  La guerre menée par la Russie en Ukraine a anéanti tous les efforts régionaux et internationaux, considérables, déployés ces dernières années pour renforcer la sécurité dans cette région et l’a exposée à des risques sans précédent, mettant en péril la sécurité européenne et mondiale et la sécurité alimentaire dans le monde, a affirmé le représentant. 

Face aux nouvelles réalités régionales, le représentant a attiré l’attention sur la poursuite des actions illégales de la Russie à l’égard de la Géorgie, expliquant qu’à ce jour, la Russie continue d’exercer un contrôle effectif sur 20% du territoire géorgien par le biais de sa présence militaire illégale dans les régions occupées du pays.  En outre, les récentes déclarations concernant le déploiement d’une base navale militaire russe dans la région occupée d’Abkhazie et l’inclusion des deux régions indivisibles de la Géorgie dans les processus d’intégration de la Russie représentent clairement une nouvelle tentative de provocation visant à remettre en cause la sécurité dans la région de la mer Noire et à déstabiliser la sécurité, les droits de l’homme et la situation humanitaire déjà désastreuse dans les régions occupées, a‑t‑il affirmé. 

Invoquant les jugements de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour pénale internationale qui établissent clairement la responsabilité juridique de la Russie dans cette occupation illégale, le représentant a mis en garde contre les implications plus larges de cette situation sur la sécurité mondiale et a exigé un engagement international renforcé. 

M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) a déploré que le principe de sécurité indivisible soit sans cesse violé, aboutissant à une dégradation de la portée des buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Ce qu’il faut, selon le représentant, ce sont des traités de renoncement à l’utilisation de certaines armes.  Or l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) suit le chemin inverse, en continuant de baser la sécurité européenne sur l’augmentation de ses capacités opérationnelles et en déployant toujours plus de forces sur le flanc Est de l’Europe, a‑t‑il affirmé. 

Le représentant a expliqué que les activités militaires intenses de l’OTAN le long de la frontière de contact avec son pays, ainsi que le soutien des Occidentaux au régime néonazi de Kiev, avaient contraint la Russie à intervenir. Tout avait été fait par les Occidentaux pour que la Russie intervienne, et tout est fait à présent pour que notre opération perdure, a‑t‑il accusé, déclarant que son pays ne pourra rien proposer de constructif tant que l’OTAN poursuivra sa politique d’expansion au nez et à la barbe des intérêts sécuritaires de la Russie. 

Le représentant a également noté que « les caprices » des États Unis expliquent le retrait de la Russie de certains traits bilatéraux d’importance. Nos propositions pour renouer des accords sont ignorées, on y répond même en plaidant pour l’entrée de la Suède et de la Finlande dans l’OTAN, a‑t‑il lancé.  Il a répété que tant que l’OTAN, Washington et Bruxelles seront arcboutés sur des politiques d’hostilité flagrante contre son pays, la Russie ne pourra envisager de dialogue sérieux avec ces interlocuteurs. 

M. KIMGHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a mis en cause les États-Unis et Israël pour leurs dépenses militaires, relevant que le premier est celui qui dépense le plus au monde en matière d’armements, tandis qu’Israël se trouve dans les 10 premiers.  Le représentant a estimé que ces deux pays contribuent à la course mondiale aux armements et aux conflits au Moyen-Orient.  Il a blâmé les États-Unis pour avoir déclenché de nombreux conflits en Iraq, en Afghanistan et en Syrie. 

De même, le représentant a jugé que les programmes d’armes nucléaires des États-Unis et d’Israël représentent une menace importante pour la sécurité régionale. Il s’est notamment alarmé de l’appel récent du Premier Ministre d’Israël à une « menace nucléaire crédible contre l’Iran » devant l’Assemblée générale des Nations Unies, relevant également qu’Israël est le seul de la région à n’avoir pas adhéré à de multiples traités majeurs de désarmement comme le TNP, la Convention sur les armes chimiques (CIAC) et la Convention sur l’interdiction des armes biologiques (CIABT). Il a appelé les États-Unis et Israël à contrôler leurs dépenses militaires, à ne pas s’engager dans des guerres d’agression et à abandonner leur programme nucléaire militaire. 

Le représentant a, de même, déploré l’utilisation fréquente d’armes chimiques au Moyen-Orient, estimant urgente l’instauration d’une zone régionale exempte de tout type d’armes de ce genre.  Enfin, il a nié toute implication de son pays dans la guerre en Ukraine et a rappelé le droit de l’Iran de répondre à ses besoins de sécurité, conformément au droit international. 

M. KIM IN CHOL (République populaire démocratique de Corée) a reconnu l’importance du désarmement régional pour la paix et la stabilité, tout en dénonçant l’accumulation d’armes dans plusieurs régions du monde.  Mettant en cause les États-Unis et leurs activités dans la péninsule coréenne, le représentant les a présentés comme une « partie belliqueuse » dans le cadre d’une alliance militaire qui met en danger l’environnement sécuritaire de la RPDC.  Il a ensuite détaillé les exercices militaires menés cette année dans la région par les États-Unis en collaboration avec la République de Corée, y compris le déploiement d’un sous-marin nucléaire et d’autres actifs nucléaires stratégiques. Il a mis en garde contre les potentielles conséquences catastrophiques de cette posture, en soulignant que l’Asie du Nord-Est, y compris la péninsule coréenne, n’est pas la propriété des États-Unis et en réaffirmant le droit à la légitime défense des pays de la région. 

M. FLAVIO SOARES DAMICO (Brésil) a fait part de sa tristesse et de sa préoccupation face aux conflits qui ont lieu partout sur la planète, appelant les parties à faire preuve de retenue et à épargner les civils.  Il a assuré comprendre les causes sous-jacentes de ces conflits et, plus particulièrement, la nécessité de restaurer la confiance entre pays voisins.  Évoquant les difficultés au Conseil de sécurité pour parvenir à un consensus, il a déploré que cette situation porte atteinte au régime de non-prolifération. Dans ce contexte, il a estimé que l’éclatement simultané de plusieurs conflits de par le monde est un symptôme, plus qu’une cause. 

Dans les années 1960, a rappelé le représentant, deux blocs nucléaires se faisaient face et le monde était divisé entre États dotés et non dotés.  Son pays et d’autres nations de la région ont alors emprunté des voies novatrices, par exemple en créant une ZEAN dans une région à forte densité de population, a‑t‑il poursuivi.  Il s’est félicité que cette initiative ait été suivie de plusieurs autres ZEAN dans le monde.  Ces zones permettent de progresser vers le désarmement nucléaire, a‑t‑il estimé, insistant sur ses trois piliers que sont l’absence d’armes nucléaires, les mécanismes d’inspection et, surtout, la garantie de non-utilisation de l’arme nucléaire par les États dotés. 

Éviter la course à l’armement nucléaire peut favoriser la confiance entre pays de la même région, a conclu le représentant, qui a en particulier préconisé le principe de la surveillance mutuelle entre pays voisins, rappelant qu’une telle initiative est mise en œuvre par le Brésil et l’Argentine. 

M. ALEMAD (Émirats arabes unis) a commencé par un appel à un cessez-le-feu et à une trêve humanitaire à Gaza.  Compte tenu des tensions au Moyen-Orient, le représentant a ensuite insisté sur le bien-fondé de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive dans cette région, en rappelant la résolution de 1995 de l’ONU et les trois sessions récentes de la Conférence tenues à cet effet.  Il a appelé toutes les parties à participer de manière constructive à la quatrième session de la Conférence, qui se tiendra en novembre.  Les Émirats arabes unis attendent en outre des résultats tangibles lors de la prochaine conférence d’examen du TNP et réaffirment leur engagement en faveur de ce traité et du droit de tous les États à l’utilisation pacifique l’énergie atomique.  À cette fin, le représentant a exhorté tous les États Membres à respecter les normes de l’AIEA et ses mesures de confiance, disant espérer que cela aurait un impact positif au Moyen-Orient.

M. LARBI ABDELFATTAH LEBBAZ (Algérie) a condamné fermement les atrocités que subit la population civile de Gaza depuis près de trois semaines sans que la communauté internationale n’agisse.  Le représentant a appelé celle-ci à faire cesser immédiatement cette sauvagerie inhumaine, et à remédier à tout ce qui empêche l’arrivée urgente d’une aide humanitaire et médicale de base à la population de Gaza.  Il a par ailleurs rappelé que le Sahel est touché par le commerce illicite des ALPC, qui a exacerbé une situation sécuritaire déjà fragile, ce qui appelle une réponse globale basée sur un volet de sécurité ainsi qu’un processus politique. 

La création de ZEAN est une étape concrète vers l’élimination totale de ces armes, a déclaré le représentant, qui a réaffirmé l’importance vitale de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient et s’est félicité du succès de la troisième session de la Conférence sur la question. 

Enfin, le représentant a rappelé que, comme les années précédentes, l’Algérie a soumis un projet de résolution portant sur le « Renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région de la Méditerranée ». 

M. ANDRANIK GRIGORYAN (Arménie) a souligné que les Arméniens sont les victimes directes des violations massives des principaux accords de désarmement et non-prolifération en vigueur par l’Azerbaïdjan.  Le renforcement militaire continu depuis deux décennies de ce pays a enhardi Bakou, qui a lancé des agressions militaires assorties, à chaque fois, de bombardements indiscriminés contre des infrastructures civiles, a accusé le représentant, qui a ajouté que ces opérations brutales avaient fini par pousser la totalité de la population arménienne à fuir le Haut-Karabagh.  Il a estimé que, dans ce contexte, la communauté internationale doit condamner sans détour la politique expansionniste de l’Azerbaïdjan dans la région et s’employer à restaurer de manière inconditionnelle les mécanismes de désarmement et de contrôle des armements. 

M. MARCIAL EDU MBASOGO (Guinée équatoriale) a rappelé la contribution de son pays aux efforts de l’Union africaine contre le terrorisme, déplorant la piraterie, le recours au mercenariat et le trafic des ALPC et de leurs munitions.  Ces violations du droit international aggravent la traite ou l’abus des ressources naturelles, a déploré le représentant, qui a préconisé le renforcement des contrôles douaniers, des institutions régionales ainsi que des initiatives visant à préserver la paix sur le continent.  Il s’est félicité du rôle joué en la matière par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). 

Rappelant que la Guinée équatoriale assume actuellement la présidence tournante de la CEEAC, le représentant a apporté son soutien, à ce titre, au projet de résolution sur les Mesures de confiance à l’échelon régional: activités du Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale, dont l’objectif est de promouvoir le contrôle des armements, la non-prolifération et le désarmement dans la région. 

Exposés du Chef du désarmement régional à la Direction de l’information et de la sensibilisation du Bureau des affaires de désarmement, et des directeurs des Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement

Les Directeurs et la Directrice des trois Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement ont évoqué les activités qu’ils mènent sur le terrain, en matière, en particulier, de renforcement des capacités des États pour faciliter la mise en œuvre d’engagements pris pour lutter contre le trafic des armes légères et de petit calibre (ALPC), la prolifération d’armes de destruction massive ou encore sensibiliser les jeunes aux enjeux de désarmement et de sécurité internationale. 

Qu’il s’agisse de l’Amérique latine, de l’Asie ou de l’Afrique, les continents sur lesquels sont déployés les trois Centres, les Directeurs de ces instruments ont souligné les thématiques transversales aux initiatives qu’ils déclinent sur les plans local et régional, comme la prévention de la violence armée contre les femmes, l’éducation des jeunes au désarmement, les liens entre désarmement et développement et la féminisation des activités de désarmement. Ils ont également indiqué que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU forme leur feuille de route commune et le moteur de l’assistance qu’ils apportent par le biais du Bureau des affaires de désarmement dont ils dépendent ainsi que du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), aux États et à leurs partenaires du secteur privé et de la société civile.  Cette assistance porte sur la mise en œuvre d’instruments aussi importants que le Programme d’action de l’ONU contre les ALPC ou la résolution 1540 du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive. 

Les Directeurs de Centres ont également attiré l’attention sur la nécessité que les pays honorent leurs promesses financières à l’égard des Centres régionaux, ceux-ci ne pouvant s’acquitter de leur mandat que grâce aux contributions volontaires des États Membres. 

La Cheffe du Service du désarmement régional, de l'information et de la sensibilisation du Bureau des affaires de désarmement a, quant à elle, rendu hommage aux Centres, dont elle a expliqué qu’ils travaillent avec différentes organisations régionales de communication pour élaborer et mettre en œuvre des stratégies évolutives en matière d’éducation au désarmement.  Elle a indiqué qu’à ce jour, 20 000 inscrits du monde entier participent à une plateforme sur ces questions, laquelle, a‑t‑elle confirmé, a besoin des contributions volontaires des États pour être régulièrement mise à jour et pérennisée. 

Mécanisme pour le désarmement

Déclarations

M. MOCHAMMAD IQBAL SIRIE (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé qu’accroitre le désarmement est un objectif commun, mais il a déploré le manque de volonté politique en la matière, notamment en ce qui concerne le désarmement nucléaire.  Il a affirmé que la session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement joue un rôle essentiel et s’est félicité de l’approbation du rapport du Groupe de travail de la quatrième session extraordinaire.  Le Mouvement des pays non alignés reste ouvert à toute discussion en la matière, a‑t‑il déclaré. 

Le représentant a réaffirmé l’importance de la Conférence du désarmement et l’a appelée à se mettre d’accord par consensus sur un programme de travail équilibré, tout en rejetant toute politisation de son travail.  Il a souligné sa pertinence en tant que seule instance universelle pouvant soumettre des recommandations concrètes à l’Assemblée générale.  Il a dit soutenir son travail, qui doit être renforcé par davantage de volonté politique. 

Le Mouvement des pays non alignés est préoccupé par le fait que ses membres ne sont pas représentés de manière équitable au sein du Bureau des affaires de désarmement et appelle à prendre des mesures correctives.  Le représentant a en outre déclaré qu’il présenterait deux projets de résolution sur les centres régionaux pour la paix et le désarmement et la tenue de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement. 

M MARK SEAH (Singapour), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a estimé que, dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes et de menaces persistantes pour la sécurité internationale, il est impératif de renforcer la pertinence, la crédibilité et l’adaptabilité du mécanisme de désarmement des Nations Unies.  Cela nécessitera un engagement et une vision renouvelés de la part de tous les États Membres, a estimé le représentant, qui a fait part de la préoccupation de l’ASEAN face au déclin de l’engagement et de la coopération dans les mécanismes mondiaux de désarmement, de non-prolifération et de contrôle des armes. 

L’ASEAN appelle les pays, en particulier les États dotés d’armes nucléaires, à maintenir et à mettre pleinement en œuvre leurs obligations et engagements dans le cadre de ces mécanismes, y compris le TNP, a appuyé le représentant, qui a regretté les échecs des neuvième et dixième Conférences d’examen du TNP, qui n’ont pas réussi à adopter un document final substantiel. Cela souligne la nécessité de déployer des efforts supplémentaires pour préserver l’intégrité et la crédibilité du TNP. 

Face à l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement, qui perdure depuis plus de 20 ans, le représentant a appelé cette dernière à intensifier encore davantage les consultations et à progresser en adoptant et en mettant en œuvre un programme de travail équilibré et complet. 

Par ailleurs, l’ASEAN réaffirme son soutien au Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique et insiste sur la nécessité de veiller à ce que le mécanisme de désarmement de l’ONU suive le rythme de l’évolution rapide du paysage sécuritaire et des progrès scientifiques et technologiques, notamment dans le cyberespace et l’espace extra-atmosphérique.  L’ASEAN reconnaît la nécessité d’utiliser une approche multipartite pour faire avancer les discussions et les actions importantes en matière de désarmement. Elle promeut une culture de la paix et du dialogue, notamment en renforçant et en soutenant les programmes « Jeunesse, paix et sécurité » et « Femmes, paix et sécurité », a précisé le représentant, qui s’est aussi félicité du renforcement de l’engagement de la société civile, du secteur privé et du monde universitaire. 

M. CIARAN JAMES DOYLE (Irlande), s’exprimant au nom d’un groupe de pays, a souligné la nécessité d’intégrer une perspective de genre dans tous les rouages du mécanisme de désarmement, y compris la Première Commission, et ce, conformément aux recommandations figurant dans Notre Programme commun et l’agenda du désarmement du Secrétaire général de l’ONU.  Une approche sexospécifique permet de mieux comprendre comment les femmes, les hommes, les garçons et les filles peuvent être touchés de manière différente par l’emploi des différentes catégories d’armes, a notamment fait valoir le représentant.  Il a également mentionné les recherches spécialisées menées par l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), qui appellent à une féminisation des postes de direction dans les instances de désarmement.  Il est avéré que la prise en compte de points de vue différents permet d’obtenir plus de résultats en faveur de la paix, a‑t‑il noté. 

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI (Jordanie), au nom du Groupe des États arabes, a de nouveau demandé un arrêt immédiat de l’agression des civils dans la bande de Gaza et un libre accès aux convois humanitaires.  Le représentant a ensuite souligné que les efforts internationaux en vue d’accéder à l’universalité du TNP font partie de l’engagement du Groupe en vue d’arriver à un monde exempt d’armes nucléaires.  Le cadre de référence en la matière est fondé uniquement sur les sessions extraordinaires et ne peut être amendé que par une autre session extraordinaire, a‑t‑il affirmé. 

Soulignant la menace représentée par les armes nucléaires, le représentant a déploré l’échec des deux dernières conférences d’examen du TNP, avant de souhaiter que la onzième Conférence d’examen soit, elle, un succès, en particulier en vue d’une élimination complète des armes nucléaires au Moyen-Orient et de la création dans cette région d’une zone exempte d’armes nucléaires. 

Le représentant s’est en outre félicité des travaux de la Conférence de désarmement et de ses réunions.  Il a réaffirmé la nécessite pour les États dotés de faire preuve de flexibilité nécessaire pour arriver à des résultats pratiques. 

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne, a rappelé la responsabilité de la communauté internationale pour préserver la pertinence de la Première Commission, de la Conférence du désarmement et de la Commission du désarmement. L’Union européenne continuera de lutter pour préserver ce système fondé sur des règles, a assuré le représentant, qui l’a jugé indispensable à la préservation de la sécurité collective. Il a déploré la détérioration de l’environnement sécuritaire et de l’architecture du désarmement, estimant que la guerre de la Russie en Ukraine exacerbe la situation. 

Le représentant s’est dit inquiet de l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement, laquelle ne peut ni adopter un programme de travail, ni déterminer son mandat de négociation.  Il a considéré que cette situation n’est pas viable et participe au climat actuel de menace.  En outre, la Conférence devrait accorder le statut d’observateur aux États Membres sans obstruction politique, a‑t‑il poursuivi, mentionnant le rejet de toutes les demandes par la Russie et estimant cette initiative contraire à la vocation multilatérale de l’instance.  L’Union européenne, a‑t‑il poursuivi, appuie l’élargissement de la Conférence et appelle à la nomination d’un coordonnateur spécial, lequel mènerait des consultations sur la composition et la configuration de l’enceinte.  Il a également réclamé que la Conférence commence des négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et autres dispositifs explosifs nucléaires (traité FMCT). 

En ce qui concerne la Commission du désarmement des Nations Unies, le représentant a salué les recommandations de son Groupe de travail II à propos des mesures pratiques de transparence et de confiance dans l’espace, se félicitant de leur adoption par consensus.  Il a de même apporté son soutien au Programme pour la paix du Secrétaire général de l’ONU. Se disant préoccupé par la situation financière du mécanisme de désarmement de l’ONU, il a assuré que l’Union européenne continuera de soutenir nombre de traités relatifs et a exhorté les États à verser leurs contributions dans les temps. 

Pour M. SHUAIB MOHAMED (Afrique du Sud), le mécanisme de désarmement des Nations Unies joue un rôle essentiel dans la réalisation du monde envisagé dans la Charte et dans l’environnement mondial actuel.  Il est donc essentiel que les composantes du mécanisme de désarmement soient en mesure de remplir leurs mandats respectifs.  Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) a été négocié et adopté par l’Assemblée générale et le mécanisme du Groupe de travail à composition non limitée est de plus en plus sollicité pour faire avancer les questions clefs, a annoté le représentant.  Il a estimé que ces deux voies de négociation ou de délibération avaient créé un espace permettant de donner effet aux aspirations d’une majorité d’États longtemps frustrés ailleurs dans le mécanisme de désarmement, bloqué sur le plan de la procédure et souvent sur le plan politique. 

Le représentant a ensuite dit partager la frustration et les préoccupations de nombreux États Membres concernant l’inaction de la Conférence du désarmement, suite à l’impasse sur son programme de travail.  Cette situation n’est pas tenable, a‑t‑il affirmé, et elle sape la crédibilité et la pertinence de la Conférence du désarmement.  Le représentant a également estimé que la Commission du désarmement des Nations Unies, en tant qu’organe délibérant du mécanisme de désarmement, était particulièrement bien placée pour trouver un terrain d’entente indispensable.  Le Groupe de travail sur les recommandations visant à réaliser le désarmement nucléaire et la non-prolifération des armes nucléaires constitue, à son avis, une base solide pour la poursuite des discussions au cours du prochain cycle et trouver un terrain d’entente. 

M. MOCHAMMAD IQBAL SIRIE (Indonésie) a estimé qu’il est important de se rassembler autour du multilatéralisme et crucial de respecter les engagements pris en faveur d’un monde pacifique.  La volonté politique et la souplesse sont essentielles pour le succès du renforcement du mécanisme de désarmement, a ajouté le représentant, qui a dénoncé l’absence de volonté politique de la part des États dotés de l’arme nucléaire, laquelle a, selon lui, considérablement freiné l’efficacité du mécanisme.  Il a appelé tous les États, y compris les États dotés, à travailler sincèrement à des progrès véritables en matière de désarmement, afin que les engagements deviennent une réalité sur le terrain et aboutissent à des résultats concrets. 

Réaffirmant que l’efficacité du dispositif de désarmement est une responsabilité commune, le représentant a rappelé qu’il était nécessaire de travailler notamment aux garanties négatives de sécurité, au projet de traité FMCT et à la question de l’espace extra-atmosphérique.  Il a encouragé les États Membres à contribuer au succès des prochaines sessions du Comité préparatoire à la onzième Conférence d’examen du TNP. 

M. MATTHEW MOXEY (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a réitéré l’attachement des États membres de la communauté à un multilatéralisme efficace et au désarmement, même si la CARICOM est déçue par l’impasse des travaux de la Conférence du désarmement.  Il faut surmonter ces difficultés, a ajouté le représentant.  Il a salué le travail du Bureau des affaires de désarmement de l’Organisation des Nations Unies et exprimé la reconnaissance de la CARICOM pour le programme de bourses et de formation des Nations Unies sur le désarmement. 

Saluant le travail des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, le représentant a salué celui de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes, qu’il a décrit comme un soutien sans faille pour la CARICOM, en particulier en termes de formation.  Il a en outre réaffirmé le rôle crucial des ZEAN pour faire avancer la non-prolifération et le désarmement. 

M. JAN MICHAEL GOMEZ (Philippines)a déclaré que le mécanisme de désarmement doit servir de socle sur lequel sont prises en compte les préoccupations de tous les États en matière de désarmement et de non-prolifération. L’adoption des mesures de désarmement dans nos instances doit se faire de manière équitable et équilibrée, pour éviter qu’aucun État puisse avoir l’avantage sur d’autres, a‑t‑il souligné.  Le représentant a également plaidé en faveur de l’ouverture des discussions sur le désarmement aux vues innovantes de la société civile, afin de « mieux travailler dans le sens des attentes des opinions publiques ».  Le désarmement multilatéral doit être transparent et basé sur les principes d’équité et de crédibilité pour qu’il inspire de nouveau confiance et engagement auprès des citoyens, a‑t‑il conclu. 

Mme CAMILLE PETIT (France) a estimé que le mécanisme du désarmement et ses institutions fournissent un cadre solide.  Dans ce cadre, elle a réitéré l’attachement de la France à la Conférence du désarmement, seule instance multilatérale chargée de la négociation de traités à vocation universelle.  Elle a rappelé qu’on y a élaboré des accords majeurs. Malheureusement, a–t-elle poursuivi, l’instance a dû faire face cette année à la stratégie d’entrave de la Russie, l’empêchant de valider la participation d’États à titre d’observateurs. À ce titre, elle a dénoncé un abus de la règle du consensus, transformé selon elle en veto procédural.  La Russie a également empêché la tenue de discussions de fond dans l’enceinte, a‑t‑elle déploré. 

La représentante a rappelé qu’elle avait elle-même présidé la Conférence du désarmement au mois de juin, précisant qu’avec l’Allemagne, la France avait tenté de revitaliser l’enceinte pour lui permettre de retrouver son rôle éminent sur la négociation de traités de désarmement.  Elle a dit avoir tiré trois enseignements de cette période.  D’abord, la Conférence reste active malgré les tentatives de blocage et continue d’héberger des débats essentiels à notre compréhension commune des enjeux de désarmement.  Deuxièmement, cette instance doit continuer de travailler à un ordre du jour positif du désarmement en commençant par les sujets les plus mûrs. La représentante a ainsi préconisé le lancement, au sein de la Conférence, des négociations sur un traité FMCT, ainsi que sur le sujet de la transparence des doctrines et arsenaux nucléaires.  Enfin, elle a préconisé la revitalisation des travaux par le dialogue, mentionnant une retraite à Montreux réunissant les États participants et les États candidats au statut d’observateur.  Cette rencontre, s’est-elle félicitée, a montré qu’une revitalisation par petits pas pourrait s’avérer efficace auprès des États Membres. 

La représentante a également souligné le rôle incontournable de l’UNIDIR, lequel a retracé dans deux rapports les initiatives passées pour revitaliser la Conférence du désarmement, ainsi que celles lancées durant la présidence française.  Enfin, elle a fait part de sa préoccupation quant à la crise financière des enceintes de désarmement, laquelle dure depuis plusieurs années.  Cette instabilité financière ne doit pas menacer le multilinguisme, a‑t‑elle averti, jugeant qu’il s’agit d’un garant de l’efficacité du multilatéralisme. 

M. EDUARDO ALCIBIADES SÁNCHEZ KIESSLICH (Mexique) a rappelé que, depuis plus de 20 ans, la Conférence du désarmement fonctionne a minima sans donner de résultats concrets, ses membres se contentant d’examiner un programme de travail qu’ils n’approuvent pas, ou ne mettent en œuvre que quand ils l’adoptent.  Le représentant a ainsi constaté que, depuis 1996, aucune négociation d’accords juridiquement contraignants sur le désarmement n’a eu lieu au sein de la Conférence.  Chaque année, celle-ci se contente de délibérer au lieu de négocier et perturbe le déroulement des autres instruments du mécanisme de désarmement, en empiétant par exemple, sur les fonctions de la Commission du désarmement des Nations Unies, a‑t‑il critiqué. 

À l’encontre de certaines délégations qui souhaitent le maintien du statu quo et aggravent la paralysie de la Conférence en utilisant des règles procédurales qui favorisent l’imposition de leurs positions, le représentant a appelé les membres de la Conférence du désarmement au dialogue pour sortir enfin de l’impasse et revitaliser pour de bon cet organe essentiel. La crise institutionnelle de l’ensemble du mécanisme de désarmement est incontestable, a poursuivi le représentant, pour qui une véritable réforme de l’ensemble du mécanisme doit passer par la convocation d’une nouvelle session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement ou de tout autre mécanisme où repenser le désarmement onusien, qui se doit de répondre aux aspirations à la paix du monde au XXIe siècle. 

M. AMR ESSAMELDIN SADEK AHMED (Égypte) a estimé qu’en raison des crises en cascade qui secouent les équilibres géostratégiques, il devient urgent de revitaliser un mécanisme du désarmement encore trop soumis aux tentatives de mainmise de certains États soucieux d’imposer leurs vues à tous.  Dans cette optique, le représentant a plaidé pour un échange de propositions et de solutions concrètes pour sortir de l’impasse, qui pourraient être débattues lors du Sommet de l’avenir qui se tiendra l’an prochain à New York.  Par ailleurs, il a demandé que le rôle de la société civile soit contenu dans ses justes limites dans le cadre des processus de délibérations sur le désarmement multilatéral, par nature intergouvernementales. 

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a insisté sur l’impératif de la mise en œuvre complète et efficace des obligations et des engagements pris dans le cadre des traités de désarmement existants car il y va de leur crédibilité et de leur intégrité.  Le TNP en est un exemple, a relevé le représentant pour qui, après deux Conférences d’examen du TNP successives sans résultat substantiel, les États parties devraient redoubler d’efforts pour maintenir le rôle du Traité en tant que pierre angulaire du régime mondial de désarmement et de non-prolifération nucléaires. 

La Première Commission conserve un rôle clef en tant que plateforme de discussion entre États Membres et d’examen de solutions aux défis actuels dans le domaine du désarmement et de la sécurité internationale, a argué le représentant, avant de faire part des préoccupations de la Malaisie face à l’érosion de la confiance observable au sein de la Commission ces dernières années.  Cela se reflète dans la teneur générale des débats et dans l’examen des projets de résolution et de décision, a‑t‑il avancé, notant qu’il était de plus en plus difficile de parvenir à un consensus.  S’adressant à ses homologues, il a déclaré que, dans les circonstances actuelles, on ne saurait trop insister sur le rôle de la diplomatie, du dialogue et de l’instauration d’un climat de confiance. 

Pour ce qui est de la Conférence du désarmement, le représentant a estimé qu’un accord sur un programme de travail équilibré et complet ne peut être reporté indéfiniment si la Conférence veut conserver sa pertinence.  Après avoir réitéré le soutien de la Malaisie aux efforts des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, notamment dans la région Asie-Pacifique, il a fait valoir que le mécanisme de désarmement des Nations Unies doit suivre l’évolution dans toute une série de domaines, en faisant preuve de résistance et de réactivité face aux nouveaux défis. 

M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas) a déploré que les progrès dans la mise en œuvre d’instruments cruciaux tels que le TICE et le projet de traité FMCT continuent d’être entravés, alors que la Conférence du désarmement n’a pas entamé de négociations sur un nouvel instrument de désarmement depuis près de 30 ans.  Notre quête d’un monde pacifique ne peut aboutir que grâce à la coopération internationale, a rappelé le représentant.  Pour défendre, renforcer, élargir les normes, les principes et les accords, un mécanisme de désarmement efficace et véritablement multilatéral est nécessaire, a‑t‑il plaidé.  Il a aussi fait part de sa profonde préoccupation face à l’utilisation croissante du consensus comme moyen de veto au sein de la Conférence du désarmement, dans diverses réunions des États parties ainsi que dans les Groupes de travail. 

Il faut redynamiser la Conférence du désarmement pour qu’elle puisse jouer son rôle unique de forum multilatéral de négociation sur le désarmement, a insisté le représentant, qui a rappelé que l’UNIDIR avait compilé une liste de propositions utiles, parmi lesquelles le document de travail 2019 des Pays-Bas, qui contient des suggestions pratiques pour s’assurer que la Conférence puisse se concentrer sur la substance de son travail. 

Il n’y a pas grand-chose à changer dans le mécanisme de désarmement lui-même, a estimé le représentant.  Ce n’est pas l’état de la machine, mais le comportement des différents opérateurs qui est en cause: certains veulent aller plus vite, d’autres tirent sur les freins, et malheureusement au moins un veut passer la marche arrière.  Il n’est pas étonnant que nous n’allions nulle part. Commençons réellement à négocier, a exhorté le représentant, qui a estimé que les occasions ne manquent pas de le faire, que ce soit dans un Groupe de travail, lors de la nouvelle session de la Conférence ou lors de la deuxième session du Comité préparatoire à la onzième Conférence d’examen du TNP, pour n’en citer que quelques-unes. 

M. BOŠTJAN JERMAN (Slovénie) a rappelé que son pays a toujours soutenu les trois forums du mécanisme de désarmement que sont la Première Commission, la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement des Nations Unies. Il s’est dit préoccupé par le fait que la Conférence du désarmement soit toujours dans l’impasse et s’est déclaré favorable à l’ouverture immédiate de négociations sur un traité FMCT. 

En outre, le représentant a regretté de n’avoir pas été en mesure de participer aux travaux de la Conférence du désarmement cette année en raison de la décision de ne pas autoriser les observateurs à participer à ses travaux. Par ailleurs, il a estimé qu’il est possible d’élargir la Conférence.  De nouveaux membres y apporteraient des idées nouvelles et contribueraient de manière substantielle à son travail, a‑t‑il plaidé. 

Pour M. ALEXANDER KMENTT (Autriche), les traités internationaux dans le domaine du désarmement sont plus nécessaires que jamais, d’autant qu’il faut s’adapter aux nouvelles technologies et tenir compte des nouveaux acteurs.  Toutefois le mécanisme de désarmement des Nations Unies reflète les tensions entre les acteurs et ne fait pas preuve de souplesse, a constaté le représentant, qui a notamment déploré l’impasse au sein de la Conférence du désarmement.  Trop souvent le consensus est utilisé de manière excessive dans ce cadre, voire comme un droit de veto, ce qui sape la coopération, a‑t‑il estimé.  Il a également parlé d’une poignée de pays qui ont une vision très particulière du multilatéralisme, en appelant à élargir le nombre d’acteurs au sein du mécanisme de désarmement.  L’Autriche est favorable à une réforme plus vaste de ce mécanisme, a‑t‑il conclu. 

M. JORGE VIDAL (Chili) a salué tous les textes soumis dans les instances du désarmement multilatéral tenant compte de la perspective de genre. Il a encouragé les États Membres à mieux comprendre l’impact négatif de la violence armée dont souffrent particulièrement les femmes et les filles.  Nos processus doivent être inclusifs en matière de genre pour être efficaces, a‑t‑il ajouté.  C’est pourquoi, le représentant a appelé ses homologues à voter en faveur des projets de résolution de la Première Commission comportant un tel volet sexospécifique. 

Mme VILMA THOMAS RAMIREZ (Cuba) a attiré l’attention sur la nécessité de respecter les accords existants de désarmement, cela en veillant à renforcer la coopération entre parties.  Elle a réitéré l’appui de son pays au mandat de la Conférence du désarmement, estimant qu’il faut lui donner un nouvel élan s’appuyant sur la richesse des discussions et débats tenus en son sein en 2023. 

La représentante a rappelé que la Conférence est « une structure de négociations ».  Si la volonté politique existe, nous pourrons la doter d’un programme intégral et équilibré de travail, a‑t‑elle estimé, et ce, afin qu’elle puisse négocier trois traités juridiquement contraignant importants : un instrument pour empêcher la course aux armements dans l’espace, un traité FMCT et un instrument donnant des garanties négatives de sécurité aux États non dotés d’armes nucléaires. 

M. RAFIQUL ALAM MOLLA (Bangladesh) a estimé qu’il existe actuellement de nombreux défis de sécurité mais aucune alternative au multilatéralisme.  Il a réitéré son engagement en faveur des trois instances du désarmement que sont la Première Commission, la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement.  Ces instances doivent rester pertinentes et aboutir à des résultats, a déclaré le représentant, qui a rappelé que le mécanisme avait abouti à des traités clefs et à des cadres normatifs, grâce aux procédures en place. 

Le représentant s’est toutefois dit gravement préoccupé par l’érosion des règles dans le processus de désarmement, en raison de l’attitude de pays qui ne veulent pas le faire avancer.  Nous ne pouvons pas rester dans l’ornière, a‑t‑il dit.  Cette impasse n’est pas tenable et il faut agir de façon résolue.  Il a plaidé en faveur du renouvellement du travail au sein de la Première Commission, notamment pour éviter les doublons.  Il a félicité l’UNIDIR pour ses travaux de qualité ainsi que pour ses ressources pédagogiques.  Enfin, il a estimé que les femmes devaient pouvoir participer plus largement aux travaux sur le désarmement. 

Mme YOON SUNGMEE (République de Corée) a estimé que, face à la multiplication des défis, il est essentiel que les trois instances majeures du désarmement puissent se remettre à travailler. Elle a relevé que la pertinence de la Conférence du désarmement a été contestée, et que sa situation n’a pas évolué cette année encore, l’enceinte n’ayant pas pu se mettre d’accord sur la question de l’accès aux observateurs, tandis qu’il n’y a plus eu de négociation sur les questions de fond depuis des décennies. 

La représentante a toutefois salué les actions de la présidence de la Conférence du désarmement, se réjouissant de l’organisation de sessions informatives sur le traité FMCT et la prise en compte des genres et des jeunes, avant de souligner le succès de la retraite de Montreux. Elle s’est également réjouie du rôle de l’UNIDIR, mentionnant son rôle sur les questions émergentes comme l’espace et la cybersécurité. Elle s’est en outre félicitée que la Commission du désarmement soit parvenue à un consensus sur les questions de désarmement dans l’espace extra-atmosphérique. 

M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) a préconisé que le renforcement des régimes de maîtrise des armements existants et l’élaboration de nouveaux régimes se fassent soit par le biais de mécanismes conventionnels existants, soit par le biais du mécanisme de désarmement des Nations Unies.  Seul ce principe peut garantir un véritable multilatéralisme en matière de désarmement et prendre en compte les intérêts des parties prenantes en matière de sécurité, a estimé le représentant, qui a appelé à intensifier le travail progressif et constructif de tous les éléments de la « triade » unique du désarmement que constituent la Première Commission de l’Assemblée générale, la Commission du désarmement des Nations Unies et la Conférence du désarmement. 

À cette fin, les États Membres devraient respecter strictement les mandats et les règles de procédure de ces structures et éviter la politisation, qui nuit gravement à la recherche de solutions consensuelles aux problèmes urgents de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération, a affirmé le représentant.  Il a dénoncé à cet égard les tentatives actuelles des États occidentaux de saper les forums multilatéraux sur le désarmement et d’utiliser les Nations Unies pour servir leurs propres ambitions sans tenir compte des intérêts des autres États Membres, principalement des pays en développement, estimant que ce fait requiert une attention particulière de la part de la communauté internationale. Les pays occidentaux appellent ouvertement à la révision de l’architecture actuelle de la maîtrise des armements, du désarmement et de la non-prolifération, leur a‑t‑il reproché.  Alors que cette architecture est basée sur les normes et les principes du droit international, ils veulent la remplacer par des règles non contraignantes conçues pour assurer une plus grande domination de ce groupe d’États, a‑t‑il accusé, jugeant ces actions absolument inacceptables, porteuses de confrontations, de divisions de la communauté internationale, de tensions accrues, d’une perte de confiance.  En outre, elles détournent l’attention de la communauté internationale des véritables problèmes de sécurité internationale, a‑t‑il asséné. 

Pour le représentant, les travaux de la Conférence du désarmement sont une illustration claire de cette situation.  La cause de cette situation ne réside pas, selon lui, dans les principes du travail de la Conférence, mais dans la réticence de ses collègues occidentaux à s’engager dans la mise en œuvre des tâches assignées à ce forum par les décisions de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le désarmement, à savoir la négociation d’instruments internationaux juridiquement contraignants sur le contrôle des armements et le désarmement.  La Russie poursuivra ses efforts pour améliorer l’efficacité et la cohérence du mécanisme de désarmement des Nations Unies, a assuré le représentant, qui a appelé à s’opposer à toute tentative de révision de ce mécanisme. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a jugé essentiel de renforcer le rôle et le mandat de la Conférence du désarmement, le seul organe multilatéral de négociation des traités de désarmement et de non-prolifération.  La Conférence doit reprendre ses travaux de fond et, surtout, entamer des négociations sur une convention globale interdisant les armes nucléaires, a ajouté le représentant.  La vocation de la Conférence du désarmement est de négocier des traités, pas de tenir des délibérations sans débouchés concrets, a‑t‑il poursuivi, jugeant qu’il incombait en premier lieu aux États dotés de faire preuve de la volonté politique nécessaire pour revitaliser cet organe sans en compromettre le mandat. 

Mme SILVIA GREVE (Suisse) s’est alignée sur la position du Secrétaire général qui, dans son Nouvel Agenda pour la paix, souligne la nécessité de renforcer le mécanisme de désarmement établi lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale dévolue au désarmement, y compris la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement.  Les différentes instances qui composent ce mécanisme peinent à fournir une réponse à nombre de défis en matière de sécurité internationale et de désarmement, a constaté la représentante, pour qui les blocages affectant la Conférence du désarmement depuis 25 ans constituent une source de préoccupation particulière alors que rien ne semble indiquer que ces blocages pourront être surmontés. 

Au contraire, pour la première fois cette année, la Conférence du désarmement a été dans l’incapacité de s’accorder sur la participation d’États non membres à ses travaux, a regretté la représentante, pour qui cette situation est d’autant moins acceptable que la Conférence a à son ordre du jour un nombre de sujets qui concernent directement l’ensemble des États Membres de l’ONU. 

Pour la représentante, il y a matière à réfléchir à l’articulation entre les différentes composantes du mécanisme de désarmement afin de définir si celles-ci fonctionnent de manière optimale ou si des retouches ou modifications devraient y être apportées.  Elle y a vu un exercice essentiel afin de dégager progressivement un consensus sur l’évolution des priorités en matière de désarmement, d’examiner les progrès scientifiques et techniques et leur incidence potentielle sur le désarmement et la sécurité internationale, et de formuler des recommandations à ce sujet. 

La représentante a notamment suggéré d’évaluer si les activités et rôles des différentes composantes du mécanisme sont complémentaires et si elles interagissent, comme stipulé dans le document final de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le désarmement.  Ce document indique notamment que la Conférence du désarmement doit prendre en compte les recommandations formulées à son endroit par l’Assemblée générale dans l’élaboration de son ordre du jour, a‑t‑elle rappelé.  La Suisse invite la Conférence à mettre pleinement en œuvre cette disposition et estime qu’il serait opportun de mettre en place à terme un processus permettant de conduire une évaluation en profondeur du fonctionnement du mécanisme de désarmement. 

M. LEONARDO BENCINI (Italie) a déclaré que son pays reste déterminé à contribuer à la préservation et au renforcement du mécanisme multilatéral de désarmement par le biais, en particulier, de l’universalisation de tous les traités et conventions pertinents qui en constituent l’ossature. Dans cette optique, l’Italie soutient la convocation, « au moment opportun et selon des modalités à définir », d’une quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le désarmement. 

Mme THOMAS FETZ (Canada) s’est déclarée profondément troublée par le mépris flagrant des règles les plus fondamentales du droit international et par le manque de respect du droit international humanitaire par la Russie en Ukraine.  De même, le Canada est préoccupé par les tentatives de certains États d’éroder les instruments internationaux de désarmement, de contrôle des armes et de non-prolifération.  La représentante a demandé à la Fédération de Russie de revenir sur sa prétendue suspension du Traité New START et sur les mesures prises pour retirer sa ratification du TICE.  Elle a appelé également la Chine à collaborer avec la Russie et les États-Unis pour réduire les stocks mondiaux d’armes nucléaires. 

Après trois décennies d’impasse, la Conférence du désarmement a besoin d’être revitalisée de toute urgence, a estimé la représentante.  Au fil du temps, a‑t‑elle déploré, certains États ont interprété le principe du consensus comme un droit pour chaque membre d’opposer son veto à toute question de procédure ou de fond.  Le consensus n’est pas destiné à créer un veto de facto, a‑t‑elle affirmé.  En outre, elle a estimé que le rapport de l’UNIDIR intitulé « Revitaliser la Conférence du désarmement » présente une série de petits pas, de grandes étapes ou de réformes majeures à examiner par les États pour revigorer la Conférence.  Par ailleurs, l’ouverture de la Conférence du désarmement aux États intéressés et une participation inclusive devraient être envisagées, en particulier lorsqu’il s’agit d’intégrer les perspectives de genre dans l’ensemble du mécanisme de désarmement. 

M. BRUCE TURNER (États-Unis) a estimé que les outils du désarmement à disposition de la communauté internationale sont adéquats et appropriés. On peut toutefois les rendre plus efficaces et plus efficients, et c’est dans cet esprit que les États-Unis ont distribué plusieurs idées « modestes » pour améliorer les méthodes de travail de la Conférence du désarmement sans en changer le règlement intérieur, a déclaré le représentant.  Le monde d’aujourd’hui est caractérisé par des conflits potentiels entre plusieurs puissances, a‑t‑il noté, et il existe des nouveautés qui pourraient modifier « l’art de la guerre ».  Dans ce monde de turbulence et de transition, les avantages sont difficiles à apprécier.  Il faut donc maintenir les structures existantes en étant prêts à les améliorer. 

Le représentant a accusé « un pays » de tenir l’ensemble du système des Nations Unies, y compris la Conférence du désarmement, en otage par l’obstruction procédurale; ce qu’il ne peut gagner sur le plan diplomatique, à savoir la Fédération de Russie.  Pour les États-Unis, la proposition russe visant à négocier un traité sur le placement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique est fondée sur de fausses bases et sur une fiction.  Il a, en outre, dénoncé la pratique des amendement hostiles.  La censure n’est pas la bonne voie à suivre, a‑t‑il affirmé, avant de plaider pour la pleine participation des femmes aux négociations de désarmement. 

M. ANMOL SHER (Inde) a expliqué qu’en tant qu’État nucléaire responsable, l’Inde a pour politique de maintenir une dissuasion minimale et crédible avec une posture de non-recours en premier et de non-utilisation d’armes nucléaires contre des États non dotés d’armes nucléaires.  Elle reste fermement attachée au désarmement nucléaire universel, non discriminatoire et vérifiable.  Se disant convaincu que cet objectif peut être atteint dans les délais impartis par un processus progressif reposant sur un engagement universel et un cadre multilatéral convenu, global et non discriminatoire, le représentant a expliqué que l’approche de son pays était décrite dans son document de travail soumis à la Première Commission en 2006 et à la Conférence du désarmement en 2000. 

En tant qu’unique forum multilatéral de négociation sur le désarmement, la Conférence du désarmement a le mandat et les membres nécessaires pour entamer des négociations sur une convention globale sur les armes nucléaires, a argué le représentant.  Sans diminuer la priorité qu’elle accorde au désarmement, l’Inde soutient l’ouverture immédiate de négociations, au sein de la Conférence, sur un traité non discriminatoire, multilatéral, internationalement et effectivement vérifiable sur l’arrêt de la production de matières fissiles, sur la base du document CD/1299 et du mandat qu’il contient, qui reste la base la plus appropriée pour les négociations. 

Rappelant enfin que l’Inde présente deux projets de résolution chaque année, respectivement sur une « Convention sur l’interdiction de l’utilisation des armes nucléaires » et sur la « réduction du danger nucléaire », le représentant a sollicité le soutien et le parrainage des États Membres pour leur adoption.  Avant de conclure, il a souligné que le TIAN, négocié en dehors de la Conférence du désarmement, ne crée aucune obligation pour l’Inde. 

M. SHEN JIAN (Chine) a décrit un mécanisme de désarmement sous pression en raison, en particulier, de l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement et du manque de volonté politique, y voyant la cause du peu de progrès enregistrés par les conventions sur les armes de destruction massive.  Le représentant a toutefois salué les résultats obtenus sur l’espace et les technologies de l’information et des communications (TIC), tout en appelant au partage d’une vision sécuritaire commune ne tolérant aucun développement de nouveaux théâtres de conflit et de course aux armements.  Pour sortir de l’ornière à la Conférence du désarmement, il faut réaffirmer, à travers un dialogue apaisé, la nature multilatérale de cet organe de négociation sur des sujets impactant la sécurité internationale, qu’ils soient traditionnels ou émergents, a préconisé le représentant. 

M. GUL QAISER SARWANI (Pakistan) a expliqué que certains États veulent maintenir leurs avantages grâce aux armes nucléaires.  Pour le représentant, il existe un manque de confiance pour négocier des règles en matière de désarmement qui est encore pire que pendant la guerre froide.  Il n’est donc pas étonnant que les États ne puissent pas discuter des questions relatives à leur sécurité. 

Pourtant, le mécanisme de désarmement fonctionne, a affirmé le représentant.  Ce mécanisme a permis d’aboutir à des traités importants, a‑t‑il rappelé.  D’aucuns ont demandé la revitalisation du mécanisme, ce qui part du principe que les méthodes de travail empêchent l’accord.  Or, changer les méthodes de travail ne va pas modifier les visions qu’ont les États de leur sécurité.  Il faut donc trouver une autre solution que la solution procédurale à ces questions de sécurité.  Ce qui est essentiel, c’est de reconnaître le principe de sécurité non diminuée et égale pour tous les États, a affirmé le représentant. 

La Conférence du désarmement permet la participation de tous les États sur un pied d’égalité grâce à la règle du consensus, a poursuivi le représentant, qui a fait observer que certains États s’opposaient à tout un ensemble de choses dont ils estiment qu’elles vont à l’encontre de leurs stratégies de sécurité.  La Première Commission et les Groupes de travail font face à ces mêmes obstacles.  Le Pakistan est favorable à ce qu’on donne un nouvel élan au consensus sur la base de la non-discrimination.  Une nouvelle session extraordinaire de l’Assemblée générale ne suffira pas, a conclu le représentant. 

M. IAN FLOYD (Royaume-Uni) a noté que, lors de la session de la Conférence du désarmement tenue cette année, des discussions utiles avaient impliqué plus avant ses membres sur les questions de fond inscrites à son ordre du jour.  Mais l’impasse dans le lancement de nouvelles négociations persiste, a reconnu le représentant, qui a déploré que la Conférence n’ait pas admis d’observateurs pour sa session de 2023, cela en raison de l’insistance de la Russie pour que les candidatures soient examinées une par une, contrairement à la pratique consistant à adopter l’ensemble de la liste.  La légitimité de la Conférence du désarmement repose sur sa transparence et son inclusivité, a souligné le représentant. 

Le représentant a ensuite avancé que même si le mécanisme de désarmement, comme le reste du système multilatéral, est loin d’être parfait, « il demeure le meilleur dont nous disposons ».  Pour lui, ce n’est pas à cause du règlement intérieur de tel ou tel organe, ou du fait qu’ils se réunissent à New York ou à Genève, que les pays ne parviennent pas à réaliser de progrès significatifs en matière de désarmement et de contrôle des armements; mais c’est à cause du climat ambiant de profonde méfiance entre les États et de la mauvaise foi de certaines délégations. Dans ce contexte, le représentant a assuré que le Royaume-Uni reste ouvert aux initiatives et propositions visant à rationaliser le mécanisme pour mieux l’adapter à ses objectifs, tout en restant fidèle à ses principes fondateurs. 

Mme INDIRA GOHIWAR ARYAL (Népal) a estimé qu’un mécanisme de désarmement opérationnel est essentiel pour guider les États dans les défis résultant de la concurrence géopolitique.  Elle s’est dite gravement préoccupée par les progrès minimes réalisés dans le domaine du désarmement, de la non-prolifération et de la maîtrise des armements.  L’impasse dans laquelle se trouve toujours la Conférence du désarmement a sapé sa crédibilité et sa stabilité, a déclaré la représentante, qui a ajouté que ce manque de confiance s’étendait à la Commission du désarmement des Nations Unies, à la Conférence d’examen du TNP et à la Première Commission elle-même, où l’on observe le dépôt d’un certain nombre de résolutions concurrentes. 

La représentante a reconnu le rôle des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement dans la promotion des priorités nationales, régionales et sous-régionales en matière de désarmement.  Les centres régionaux devraient être renforcés, dotés de ressources suffisantes et développés en tant que dépositaires des meilleures pratiques en matière d’efforts de désarmement sur le plan régional.  Depuis la fin des années 1980, le Népal s’est associé au Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique pour organiser des réunions et des dialogues régionaux dans le cadre du « Processus de Katmandou », a rappelé la représentante. Elle a néanmoins déploré que le Centre ne dispose pas de ressources suffisantes pour mettre en œuvre les activités prescrites par l’Assemblée générale et a appelé les États Membres et les organisations non gouvernementales à verser des contributions volontaires.  En conclusion, elle a rappelé que comme chaque année, le Népal présente un projet de résolution sur le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique

M. LARBI ABDELFATTAH LEBBAZ (Algérie) a mis en avant l’importance de préserver les accords de désarmement existants et les forums multilatéraux sur le désarmement, qui incarnent les réalisations de la coopération internationale et des négociations multilatérales au cours des dernières décennies pour relever les défis auxquels l’humanité est confrontée.  La recherche de solutions et d’accords dans le cadre du multilatéralisme, conformément à la Charte des Nations Unies, est le seul moyen durable de traiter les questions liées au désarmement et à la sécurité internationale, a estimé le représentant. 

Pour le représentant, les forums sur le désarmement offrent aux États la possibilité de se consulter et de coopérer entre eux, et de résoudre les problèmes qui peuvent se poser dans le cadre des Nations Unies.  Cela permet en général de promouvoir la coopération internationale, le règlement pacifique des différends, le dialogue et les mesures de confiance, contribuant ainsi à renforcer les relations multilatérales amicales entre les États et les peuples, a‑t‑il argumenté.  Il a donc souligné l’importance du mécanisme multilatéral de désarmement qui comprend la Conférence du désarmement, seul forum multilatéral de négociation sur le désarmement, la Commission du désarmement des Nations Unies, organe délibérant universel et organe subsidiaire de l’Assemblée générale, et la Première Commission. 

Appelant à maintenir et renforcer le rôle et le mandat de toutes les composantes du mécanisme de désarmement des Nations Unies, le représentant a argué que l’impasse dans laquelle il se trouve est due à l’absence de la volonté politique nécessaire pour progresser sur la voie du désarmement, en particulier du désarmement nucléaire, et non à la performance de ces organes ou à leurs méthodes de travail et règles de procédure. 

Droits de réponse

Le représentant du Canada a répondu aux commentaires formulés par certaines délégations sur le Moyen-Orient.  Il a jugé que rien ne peut justifier les actes de terreur du Hamas et réclamé la libération immédiate des otages.  Il s’est toutefois dit profondément préoccupé par la situation humanitaire à Gaza et l’impact sur les civils, estimant essentiel que l’aide humanitaire y soit acheminée.  Il a appelé à la protection du personnel et des installations humanitaires.  Enfin, il a appuyé les peuples palestinien et israélien à vivre en paix, rappelant le soutien de son pays pour une solution à deux États. 

Le représentant de la Chine a rejeté les accusations des États-Unis concernant la politique nucléaire de son pays.  Il a en outre rappelé que, par sa résolution 27/58, l’Assemblée générale a reconnu à la République populaire de Chine le statut de seule représentante de la Chine auprès des Nations Unies.  À ce titre, le représentant a estimé que les États-Unis instrumentalisent la question de Taiwan, qui relève des affaires intérieures de la Chine.  Il a averti que son pays ne tolérera pas les ingérences sur ce dossier, s’insurgeant du soutien étranger dont bénéficie Taiwan.  Il a accusé les États-Unis de traiter la Chine comme un rival pour justifier leur expansion dans la région et perpétuer leur hégémonie.  Le programme nucléaire de son pays, a‑t‑il poursuivi, n’a pour but que la dissuasion contre ceux qui compteraient utiliser des armes nucléaires contre la Chine.  Sa politique militaire est défensive par nature, a‑t‑il assuré, appelant les États-Unis à faire un travail d’introspection et à cesser de s’immiscer dans les affaires intérieures chinoises. 

Le représentant d’Israël a exhorté les pays arabes à condamner les attaques terroristes du Hamas et à appeler à la libération sans condition des otages israéliens détenus à Gaza.  Il a dénoncé les agissements de l’Iran, accusé de téléguider toutes les organisations terroristes paramilitaires qui déstabilisent le Moyen-Orient:  Le Hamas, le Hezbollah mais aussi les milices houthistes.  Ce même pays soutient depuis 2011 le régime assassin de la Syrie, responsable de la mort de 300 000 Syriens, y compris au moyen d’armes chimiques, a‑t‑il ajouté. 

Le représentant de l’Azerbaïdjan a rejeté la fausse description de l’histoire par l’Arménie, auteur de nombreuses violations des efforts diplomatiques destinés à réguler les relations entre les deux États et des accords de contrôle régionaux des armements.  La quantité d’armes saisie par nos propres forces, notamment des milliers de mines antipersonnel, démontre que notre intervention a permis de couper court à une militarisation de la région destinée à déstabiliser l’Azerbaïdjan, a‑t‑il aussi lancé. 

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a répondu aux États-Unis.  Rejetant leurs allégations, il a dit n’y voir qu’une nouvelle provocation pour présenter son pays comme étant le diable, un moyen de diversion.  Les États-Unis ne comprennent pas la volonté de notre pays de défendre le peuple coréen et s’opposent aux relations de bon voisinage entre la Russie et la RPDC; c’est une vision hégémoniste, a‑t‑il accusé.  Il y a des alliances militaires hostiles à la RPDC et l’OTAN en est le maître d’œuvre.  Les États-Unis font tout pour défaire la Fédération de Russie alors qu’ils disent qu’ils ne veulent pas de confrontation avec elle.  Ils militent en faveur d’un coup d’État chez nous.  Les pratiques immorales seront condamnées par les pays épris de paix, a conclu le représentant. 

Le représentant de la Fédération de Russie a répondu à diverses délégations, affirmant que, depuis la fin de la guerre froide, les États-Unis tentent d’aller à l’encontre des intérêts de la Russie.  Ainsi, a‑t‑il déclaré, en 2008, l’Occident a ouvert la porte de l’OTAN à l’Ukraine; en 2014, le régime ukrainien a lancé une guerre civile dans le Donbass qui a été évitée grâce aux Accords de Minsk.  Pourtant, a poursuivi le représentant, la Russie a encouragé le dialogue entre Kiev et le Donbass; mais nous n’avions d’autre choix que de reconnaître l’indépendance de certaines régions pour permettre la dénazification de l’Ukraine.  Il a rejeté toutes les allégations de l’Occident sur la « mission » que mène la Russie en Ukraine, une mission conforme à la Charte des Nations Unies. Les États-Unis se sont immiscés dans les affaires intérieures de Kiev en lui faisant miroiter un avenir occidental, a‑t‑il encore déclaré. 

La représentante du Koweït a appuyé la position du Groupe des États arabes en rappelant que plus de 6 500 « martyrs » sont morts à Gaza en l’espace de 18 jours en raison des « bombes aveugles israéliennes ».  Elle a accusé Israël de ne pas respecter le droit international au prétexte de vouloir se défendre.  Le Koweït s’oppose aux destructions aveugles et aux déplacements forcés de la population palestinienne, et demande à la communauté internationale et au Conseil de sécurité de mettre un terme à cette guerre sauvage et d’assurer une aide humanitaire sans entraves dans la bande de Gaza.  Au nom de la paix et de la sécurité régionales, la représentante a en outre estimé qu’il fallait mettre en place sans tarder une ZEAN au Moyen-Orient et faire en sorte que tous les pays de la région souscrivent au TNP. 

L’Observateur permanent de l’État de Palestine a exigé qu’Israël mette un terme à sa guerre contre Gaza et aux bombardements insensés de cibles civiles, y compris l’une des églises les plus vieilles au monde.  La Puissance occupante doit mettre fin au siège de Gaza et permettre l’ouverture de couloirs humanitaires, a‑t‑il insisté, assurant qu’il n’y a plus d’eau, plus de médicaments, plus de carburants, plus de nourriture et que les hôpitaux ne sont presque plus en mesure de fonctionner.  Affirmant qu’il s’agit d’un véritable crime d’épuration ethnique, l’Observateur permanent s’est indigné que l’histoire ne saurait accepter une nouvelle Naqba aujourd’hui. 

Le représentant de l’Égypte a répondu à Israël que bombarder des hôpitaux et des lieux de culte, c’est cela qui est un mal.  Ce qui se passe maintenant à Gaza n’est pas moins monstrueux que tous les meurtres de masse de l’histoire. 

Le représentant de la Jordanie a accusé Israël de violer le droit international sur la terre de Palestine.  Telle est la vérité, qu’il faut condamner, a‑t‑il ajouté.  Il a mis en garde contre toute tentative d’expulsion des Palestiniens et a jugé que cibler des civils, « ce n’est pas exercer un droit à la légitime défense ».  Les actions d’Israël à Gaza sont une guerre brutale et inhumaine, pas l’exercice d’un tel droit, a‑t‑il affirmé. 

Le représentant de l’Arabie saoudite a condamné l’occupation israélienne qui cible les civils.  Il a demandé à la communauté internationale de cesser son hypocrisie et sa pratique du deux poids, deux mesures, et exigé un cessez-le-feu pour acheminer l’aide humanitaire. 

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu à la délégation israélienne.  Il a estimé que plus de 6 000 personnes avaient été tuées, ce qui pousse la région dans un état d’instabilité.  Il a condamné les crimes commis et condamné ce « régime perfide » qui doit cesser de violer le droit international.  Il a par ailleurs affirmé que les propos tenus concernant l’utilisation d’armes chimiques en Syrie relèvent d’une campagne de propagande hostile. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Moyen-Orient: deux nouveaux projets de résolution rejetés par un Conseil de sécurité divisé sur la marche à suivre à Gaza

9453e séance – après-midi 
CS/15464

Moyen-Orient: deux nouveaux projets de résolution rejetés par un Conseil de sécurité divisé sur la marche à suivre à Gaza

Après le rejet, la semaine dernière, de deux projets de résolution visant à répondre à la crise à Gaza, le Conseil de sécurité a, cet après-midi encore, échoué à adopter deux textes concurrents, l’un présenté par les États-Unis, l’autre par la Fédération de Russie, à l’issue de votes qui ont donné lieu à des clivages manifestes, l’Équateur regrettant que l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales se transforme en « arène où s’expriment les rivalités de ses membres ».

Le texte américain, qui a recueilli 10 voix pour, a été rejeté en raison d’un veto de la Chine et de la Fédération de Russie, les Émirats arabes unis ayant également voté contre.  Le Brésil et le Mozambique se sont abstenus.  Celui de la Fédération de Russie s’est soldé par un nombre insuffisant de voix en faveur -Chine, Gabon, Émirats arabes unis et Fédération de Russie–, le texte ayant également suscité les votes contre des États-Unis et du Royaume-Uni, et recueilli 9 abstentions. 

Les porte-plume des deux textes ont pris la parole avant leur mise aux voix, dans l’espoir de rallier le soutien des autres membres du Conseil.  Estimant qu’il s’agissait d’un « moment de vérité », la délégation américaine a assuré avoir tout mis en œuvre pour parvenir à un « consensus autour d’une résolution forte et équilibrée », en multipliant les concertations non seulement avec les « Quinze », y compris la Russie, mais aussi avec de nombreuses organisations humanitaires sur le terrain, pour renforcer « la diplomatie directe et urgente soutenue par la grande majorité des membres du Conseil ».

Une approche, ont affirmé les États-Unis, qui contraste singulièrement avec la « mauvaise foi » de Moscou, dont le texte a circulé « à la toute dernière minute », après « zéro consultation ».  La Russie a adressé le même reproche aux États-Unis, en dénonçant l’absence d’un « processus de consultations normal » et des « délais irréalistes » pour leur projet de résolution.  Washington, après son recours au veto la semaine dernière, tente à l’évidence de faire adopter un nouveau texte « rempli de dispositions politisées, inadéquates et extrêmement douteuses », en a conclu la délégation russe.

« Le projet américain ne contient toujours pas d’appel au cessez-le-feu.  Il ne condamne pas les attaques aveugles contre des civils et des biens civils à Gaza.  Il ne dénonce pas les actes visant à réinstaller de force des civils », a-t-elle poursuivi, en jugeant que les États-Unis ne veulent « tout simplement pas » que les décisions du Conseil « influencent d’une manière ou d’une autre » l’« intervention violente » d’Israël à Gaza, laquelle, accompagnée de violations flagrantes du droit international humanitaire, risque de régionaliser le conflit, voire de l’internationaliser.

La Chine a justifié son votre contre le projet de résolution américain « pour des raisons de droit et de conscience », au nom du « principe de justice » et à la suite des appels lancés par les pays arabes.  Ce texte « déséquilibré » et « ambigu », aux modifications « cosmétiques », « mélange tout » et, en cas d’adoption, aurait donné le « feu vert » à une action militaire d’envergure d’Israël et à l’escalade du conflit.  Or, a pointé le représentant chinois, il ne fait aucune référence aux causes profondes de la crise humanitaire dans la bande de Gaza et n’exhorte pas Israël à lever son blocus ni à renoncer à son ordre d’évacuation, qui ne fera que précipiter la « descente aux enfers » de ce territoire.  Sans nier l’importance des préoccupations sécuritaires de Tel-Aviv, la Chine a considéré que le texte américain élude délibérément la question de l’occupation israélienne et de la création d’un État palestinien.

« Comment Moscou réagirait-elle si des terroristes et des escadrons de la mort liquidaient tous les habitants d’un de ses quartiers?  Comment Beijing réagirait si des jihadistes meurtriers décapitaient des bébés chinois? », a demandé le représentant d’Israël à ses homologues russe et chinois.  Dénonçant le « deux poids, deux mesures » qui pèse selon lui en matière de lutte antiterroriste dans le monde, il a accusé la Russie d’avoir tenté, avec son projet de résolution, de « lier les mains d’Israël pour l’empêcher d’éliminer une menace existentielle ». 

Le délégué israélien s’est indigné de l’absence, dans le libellé du texte russe, de mention au droit à la légitime défense d’Israël contre les attaques perpétrées par les « sauvages » du Hamas, qui s’est livré au « pire massacre de Juifs depuis l’Holocauste ».  Une omission jugée également problématique par le Royaume-Uni et le Japon, pour qui la reconnaissance de ce droit dans le projet américain n’aurait pas offert de blanc-seing à Israël pour commettre des actes illicites.

Tel n’a pas été l’avis de la Fédération de Russie, qui a rappelé que la référence au droit de légitime défense, comme l’a confirmé la Cour internationale de Justice (CIJ) dans son avis consultatif de 2004, « ne s’applique pas dans le cas d’une puissance occupante ».  Dans le texte américain rejeté, il est réaffirmé « le droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, de tous les États ».

Pour la France, le Conseil doit réitérer le droit d’Israël à se défendre, a indiqué son représentant, en plaidant pour la mise en place d’une « trêve humanitaire devant mener à un cessez-le-feu ».  D’où son vote en faveur du texte américain, son abstention sur le projet russe s’expliquant par le refus de qualifier de « terroristes » les attaques du Hamas, outre l’absence d’ouverture à la négociation.  Cette dernière raison a également été invoquée par la Suisse pour justifier sa propre abstention.

Comme l’Équateur, l’Albanie a dit avoir soutenu le projet de résolution présenté par les États-Unis, regrettant le double veto sino-russe, qui n’aidera selon elle ni la population gazaouie, ni les otages israéliens, ni les travailleurs humanitaires. Mais alors que le Conseil de sécurité s’est montré « incapable de prendre la bonne décision », le Hamas et d’autres groupes ont maintenant toutes les raisons de s’« enhardir », s’est-elle inquiétée.  Malte, qui a pris la parole au nom du E10, soit des 10 membres élus du Conseil de sécurité, a annoncé leur intention d’œuvrer collectivement à une nouvelle proposition de texte.

Quant aux Émirats arabes unis, qui ont voté contre le projet américain et pour le projet russe, ils ont rappelé les éléments de langage auxquels leur délégation est attachée: « cessez-le-feu immédiat », « libération des otages », « accès humanitaire sûr et sans entrave », « approvisionnement en eau et en carburant ».  En outre, il n’existe pas de hiérarchie dans la valeur des vies des civils israéliens et palestiniens, ont-ils rappelé, et nous ne pouvions rester silencieux au sujet des déplacements forcés et des ordres d’évacuation vers le sud de Gaza, a indiqué leur représentante.

Le Ghana a indiqué que le projet américain, « sur lequel nous avons travaillé tout le week-end », aurait pu contribuer à l’émergence d’un consensus, avant d’exprimer son souhait que l’on renonce à l’ordre d’évacuation, « pour sauver des vies ».  S’agissant du texte russe, la délégation aurait apprécié de disposer de davantage de temps pour examiner ses propositions.  Enfin, le Gabon a réaffirmé que la solution des deux États est la seule viable pour un règlement durable du conflit israélo-palestinien.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: la Présidente de la CIJ en faveur de retouches mineures du Statut de la Cour tant il a résisté à « l’épreuve du temps »

Soixante-dix-huitième session,
25e & 26e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3700

Sixième Commission: la Présidente de la CIJ en faveur de retouches mineures du Statut de la Cour tant il a résisté à « l’épreuve du temps »

La Présidente de la Cour internationale de justice (CIJ), Mme Joan Donoghue, pour sa troisième et dernière intervention en cette qualité, s’est prononcée, cet après-midi, devant la Sixième Commission, en faveur de retouches mineures du Statut de la CIJ.  « Lors de mon arrivée à la Cour en 2010, ma conviction était que le Statut avait sérieusement besoin d’être actualisé, je suis arrivée à la conclusion inverse aujourd’hui », a-t-elle déclaré, au cours d’une longue intervention.  Le Statut de la Cour est resté au cœur du débat qui s’est poursuivi le matin sur les chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI), consacrés aux principes généraux du droit et à l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.

À l’entame de son propos, la Présidente a tenu à souligner la charge de travail toujours plus conséquente de la Cour.  En 2022, elle a rendu 4 arrêts et 28 ordonnances, contre 2 arrêts et 11 ordonnances en 2001.  Cette charge de travail pose nécessairement la question des ressources à disposition de la Cour, a dit la Présidente, en pointant leur augmentation marginale.  Le budget biennal de la Cour était de 46,5 millions de dollars pour les années 2010-2011.  Désormais annuel, le budget de la Cour est en 2023, de 29 millions de dollars, a-t-elle mentionné.

Mais c’est la question de la révision du Statut de la Cour qui a dominé son intervention, en rappelant qu’elle est assujettie aux mêmes conditions restrictives que celles prévues pour la Charte des Nations Unies.  « Quels changements pourraient être faits?  Ma réponse est la suivante: très peu de changements et seulement après mûre réflexion », a tranché la Présidente, en notant que le Statut a résisté à l’épreuve du temps. 

Si elle a souhaité le maintien de la désignation d’un juge ad hoc visé à l’Article 31 du Statut, son élimination pouvant dissuader certains États d’accepter la compétence de la Cour, Mme Donoghue a souhaité que la proposition d’éliminer la possibilité de réélection des juges soit étudiée de près, afin d’apporter une nouvelle preuve de l’impartialité de la Cour.  « Cela pourrait s’accompagner d’un allongement du mandat des juges », a-t-elle dit, en proposant un seul mandat de 12 ans. 

Enfin, la Présidente a jugé essentielle une révision du Statut afin d’éliminer l’expression de « nations civilisées », visée à l’Article 38 de la CIJ et de rendre le Statut, mais aussi la Charte des Nations Unies, plus inclusifs en ce qui concerne la question du genre.  Nous avons fini d’actualiser les règles de la Cour afin d’user de formulations plus inclusives en français comme en anglais, a conclu la Présidente. 

Dans son projet de conclusions sur les principes généraux du droit, la Commission du droit international (CDI) avait déjà écarté cette notion de « nations civilisées », dont l’anachronisme avait été souligné par la plupart des délégations.  Plusieurs délégations se sont en outre référées à l’Article 38 du Statut sur les sources du droit applicables par la Cour lors des discussions sur ledit projet de conclusions.  « La base de tout travail sur la question doit être l’Article 38 du Statut de la CIJ », a tranché la déléguée de l’Inde, en appelant à une réflexion accrue sur l’identification de ces principes.

Le délégué du Cameroun, quant à lui, a invité la CDI à faire un « choix terminologique » entre les principes généraux du droit évoqués dans ce projet de conclusions et les principes généraux de droit de l’Article 38.  Il a battu en brèche l’idée du projet d’articles selon laquelle l’énumération de l’Article 38 confère à ces principes une valeur égale aux autres sources du droit international à l’instar de la source conventionnelle et de la source coutumière. 

S’agissant du débat sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, des intervenants, comme l’Inde ou la Roumanie, ont souligné l’importance de l’avis consultatif demandé à la CIJ sur les obligations des États en matière de changements climatiques.  « La Cour va consacrer une partie significative de son énergie et de son temps aux deux demandes d’avis qui lui ont été faites », a déclaré la Présidente. L’autre avis a trait aux conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux vendredi 27 octobre, à partir de 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SES SOIXANTE-TREIZIÈME ET SOIXANTE-QUATORZIÈME SESSIONS - A/78/10

Suite du débat général sur le module 1: chapitres introductifs I à III, chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission), chapitre IV (Principes généraux du droit) et chapitre VIII (L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international)

M. MIGUEL ÁNGEL REYES MONCAYO (Mexique) s’est félicité, au sujet des principes généraux du droit, que l’expression « l’ensemble des nations » remplace celle de « nations civilisées ».  Le délégué a par ailleurs relevé que la détermination du caractère général d’un principe provenant d’un système juridique national n’est pas automatique et doit suivre une analyse attentive et large afin d’inclure les différentes régions du monde.

À propos de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a salué le travail du Groupe d’étude sur cette question, qui préoccupe également, dans le contexte régional, la Commission des affaires juridiques et politiques de l’Organisation des États américains (OEA) et le Comité juridique interaméricain.

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a réitéré ses doutes au sujet de l’existence d’une seconde catégorie de principes généraux du droit, qui proviendrait du système juridique international.  Selon elle, les principes généraux du droit, en tant que source de droit international, ne peuvent qu’être liés aux principes généraux formés au sein des systèmes juridiques nationaux.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a rappelé que des procédures consultatives ont été engagées devant le Tribunal international du droit de la mer -sur les obligations de préserver et de protéger le milieu marin et de prévenir sa pollution en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer- et devant la Cour internationale de Justice (CIJ)- sur les obligations des États en matière de changements climatiques.  Selon elle, ces initiatives montrent la nécessité de faire preuve de plus de clarté au sujet de la dimension juridique de l’élévation du niveau de la mer et de ses répercussions, souvent sans précédent.  La Roumanie est d’avis que les États ont besoin d’orientations faisant autorité sur la manière de gérer les effets de ce phénomène, conformément aux dispositions de ladite Convention et aux autres normes pertinentes du droit international.  Se félicitant des travaux du Groupe d’étude, la déléguée a salué la prééminence accordée à la stabilité juridique.  Elle a exprimé son accord avec d’autres États qui appellent à une coopération internationale plus approfondie et à un soutien aux États qui risquent de perdre tout ou une partie de leur territoire.

M. PETER KLANDUCH (Slovaquie) a déclaré que la position de sa délégation a légèrement changé concernant l’intérêt d’étudier les principes généraux du droit sous l’angle international.  Les principes généraux du droit ne peuvent être dérivés que des systèmes juridiques nationaux, a-t-il justifié, étant donné qu’ils représentent le plus haut degré de généralisation des normes communes aux systèmes juridiques du monde.  Une catégorie distincte de source du droit formée au sein du cadre juridique international n’est pas souhaitable, a-t-il estimé.  Par ailleurs, le représentant a exprimé des réserves sur l’utilisation du terme « transposition » dans les projets de conclusions 4 et 6, le terme « transposabilité » reflétant mieux la nuance entre l’existence et l’applicabilité d’une principe général de droit dans l’ordre international, et a noté des incohérences entre les projets 8 et 4.  Sa délégation n’est pas non plus convaincue par les liens établis entre les trois sources du droit international.  Si une hiérarchie formelle n’est pas établie, cela ne signifie pas pour autant qu’elles sont toutes sur le même pied d’égalité. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a rappelé que l’intégrité de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer doit être garantie.  Néanmoins, l’option des lignes de base fixes et la préservation des zones maritimes est intéressante pour les États concernés par ce phénomène, a-t-il ajouté, saluant l’approche pragmatique et les solutions proposées.  Il a toutefois appelé à la prudence sur la distinction entre les dimensions politique et juridique du sujet.  Par ailleurs, concernant la détermination de la portée des accords juridiquement non contraignants, le délégué a préféré le terme « instruments ».  Enfin, il a encouragé la CDI à prêter attention à la parité des genres, y compris pour la nomination des rapporteurs spéciaux. 

M. MARTIN SMOLEK (République tchèque) a noté que si les principes généraux de droit provenant des systèmes juridiques nationaux visés dans le projet de conclusion 4 de la CDI étaient une source de droit international « égale aux traités et au droit coutumier international », ils avaient dans la pratique un rôle complémentaire à celui des traités et de la coutume.  Ensuite, le projet de conclusion 5 fixe un seuil « trop élevé » qui pourrait « ne pas refléter la pratique existante » pour la détermination de l’existence d’un principe commun aux différents systèmes juridiques du monde. S’agissant du projet de conclusion 7, le délégué a réitéré la position selon laquelle la Commission devrait examiner les principes généraux du droit formés dans le cadre du système juridique international comme des « règles de conduite générales » susceptibles de refléter des caractéristiques « essentielles » du système juridique international, à l’instar des principes de l’égalité souveraine et de non-intervention dans les affaires intérieures des États, ou encore de l’interdiction des crimes de droit international. 

D’après le délégué, le sujet de l’élévation du niveau de la mer est « difficile et complexe ».  Il a estimé que les travaux du Groupe d’étude à ce titre pouvaient offrir un « inventaire » pour identifier des solutions juridiques possibles aux problèmes posés par ce phénomène.  Il a notamment jugé important de préserver l’intégrité de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer qui « reflète le droit international coutumier de la mer ». 

Le délégué s’est par ailleurs félicité que la Commission ait décidé d’inclure le sujet « Les accords internationaux juridiquement non contraignants » à son programme de travail afin de clarifier les principes régissant ce sujet.  Il a rappelé que la République tchèque soutenait comme d’autres États le renvoi de la compétence universelle au programme de la CDI.  Enfin, il a indiqué que son pays avait décidé de verser une contribution volontaire au nouveau fonds d’affectation spéciale pour l’assistance aux rapporteurs spéciaux. 

Mme SHEKHAR (Inde) a appelé la CDI à la prudence avant toute conclusion de son travail sur les principes généraux du droit.  La base de sa réflexion sur la question doit être l’Article 38 du Statut de la CIJ, a dit la déléguée, en appelant à une réflexion accrue sur l’identification de ces principes.  S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, elle a indiqué que son pays est conscient de l’immense complexité des aspects techniques et juridiques de ce sujet.  Sur la condition d’État en particulier, la déléguée a souhaité qu’une plus grande prudence soit de mise en ce qui concerne la présomption de continuité de ladite condition.  Enfin, elle a souligné l’importance pour les débats des avis consultatifs de la CIJ et du Tribunal international du droit de la mer une fois que ceux-ci auront été rendus.

M. DECLAN SMYTH (Irlande) a estimé que la portée des principes généraux du droit devrait être clairement délimitée par le projet de conclusions de la CDI.  Il a remis en question l’inclusion parmi eux des principes pouvant se former dans le cadre du système juridique international.  Il a rappelé que les principes généraux du droit visés à l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) sont uniquement ceux provenant des systèmes juridiques nationaux.  Ces principes sont censés être appliqués par les tribunaux internationaux pour remédier aux lacunes dans le droit coutumier et conventionnel, a argumenté le délégué, en rappelant qu’ils sont une source complémentaire du droit par rapport aux sources primaires que sont le traité et la coutume.  Il a estimé qu’une confusion existe sur les principes pouvant se former dans le cadre du système juridique international et invité la Commission à la prudence.

S’agissant de la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a estimé que le point de départ de toute discussion est la volonté raisonnable des États de préserver les limites maritimes existantes, conformes au droit.  Il a aussi souligné la nécessité de préserver l’intégrité du cadre juridique existant, en particulier la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. « L’Irlande est, avec d’autres, d’avis que nous devons trouver maintenant les arrangements, afin que les lignes de base établies conformément à la Convention soient considérées comme permanentes. »

Mme ALESSANDRA FALCONI (Pérou) a rappelé que les principes généraux du droit constituent une source du droit international, laquelle peut compléter le droit national et international et servir de fondement à des droits et obligations primaires, ainsi qu’à des règles secondaires et procédurales.  Elle a salué l’inclusion d’une seconde catégorie de règles pouvant être formées au sein du système international.  En outre, la méthodologie adoptée pour déterminer les principes généraux du droit dérivant des systèmes juridiques nationaux semble appropriée, a-t-elle souligné, estimant néanmoins qu’un projet de conclusions doit porter sur l’identification des principes généraux découlant du droit international.  La représentante a estimé que les décisions découlant de tribunaux nationaux peuvent être pertinentes en tant que source du droit international, appelant toutefois à une analyse plus approfondie de la question. 

L’élévation du niveau de la mer peut avoir des conséquences catastrophiques sur les territoires des petits États insulaires, et de graves répercussions sur les droits humains des populations, a dit la représentante.  Toutefois, le principe du changement fondamental de circonstances ne s’applique pas aux frontières maritimes, a-t-elle rappelé, soulignant l’importance de la stabilité juridique.  Elle a néanmoins reconnu l’intérêt des principes d’équité et de souveraineté.  Soulignant l’importance du lien entre la CDI et la Sixième Commission, elle a appuyé la suggestion de la Sixième Commission de tenir la première partie de la prochaine session de la CDI à New York pour renforcer les liens entre les deux commissions. 

M. ANTON KORYNEVYCH (Ukraine) s’est principalement exprimé sur le projet d’articles de la CDI sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, en notant que la Commission avait décidé d’exclure le crime d’agression de la liste des crimes dudit projet.  Or le crime d’agression est l’un des crimes « qui préoccupent le plus la communauté internationale dans son ensemble ».  Jugeant « peu convaincants » les arguments de la CDI pour distinguer entre le crime d’agression et les autres crimes de droit international s’agissant de l’application de l’immunité fonctionnelle, il a repris point par point, pour les réfuter, les arguments avancés par la Commission pour justifier cette approche.  Il a tout d’abord rappelé que la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) sur le crime d’agression avait été activée depuis cinq ans.  S’il a admis la dimension politique du crime d’agression, le délégué a toutefois souligné qu’il en était de même pour tout crime relevant du droit international, notant que ces crimes étaient souvent commis par des représentants de l’État.  Il a en outre noté que si la poursuite du crime d’agression par une juridiction pénale étrangère pouvait se révéler impossible en raison de l’application de l’immunité personnelle, ces actes pouvaient faire l’objet de poursuites devant des juridictions étrangères quand ces représentants n’exercent plus leurs fonctions.  S’agissant enfin de l’argument selon lequel il existerait un risque pour les tribunaux nationaux de devoir évaluer, dans le cas du crime d’agression, la légalité du recours à la force par un autre État, il a rappelé que cette possibilité n’était en aucun cas une caractéristique particulière du crime d’agression, puisqu’elle concernait aussi les procédures pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre.

La Commission n’a donc pas présenté des raisons convaincantes pour l’exclusion du crime d’agression du champ d’application du projet d’article 7 de la CDI, a conclu le délégué.  Des arguments solides existent en faveur de la reconnaissance de la non applicabilité de l’immunité fonctionnelle aux crimes relevant du droit international, y compris le crime d’agression, a-t-il analysé, en citant notamment le précédent de la Charte de Nuremberg et des conclusions du Tribunal de Nuremberg, suivi en 1948 par le Tribunal de Tokyo, en 1962 par la Cour suprême d’Israël dans l’affaire Eichmann, dans plusieurs décisions du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, ou encore par la CPI.  Cette jurisprudence soutient « sans équivoque » le point de vue selon lequel, en vertu du droit international coutumier, les représentants de l’État ne jouissent pas d’une immunité fonctionnelle pour les crimes relevant du droit international, et aucune distinction ne doit donc être faite à cet égard en ce qui concerne le crime d’agression, a expliqué le délégué. Notant que de nombreux États soutenaient la création d’un tribunal spécial pour le crime d’agression contre l’Ukraine, il a jugé que l’inclusion du crime d’agression dans la liste des crimes du projet d’article 7 serait « conforme aux travaux antérieurs de la CDI ».  Si la CDI choisit de maintenir sa décision d’omettre le crime d’agression dans son projet d’articles sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, elle s’écartera selon lui, de sa position historique concernant l’inapplicabilité des immunités aux crimes de droit international.  Ce point mérite d’être réexaminé, notamment à la lumière des observations écrites des États, pour éviter une « grave incohérence » dans le traitement de tels crimes. 

Mme SUPHANVASA TANG (Thaïlande) a demandé que les travaux de la CDI soient axés sur des sujets pratiques revêtant un intérêt certain pour les États. Elle a qualifié de réussite le projet de conclusions de la CDI sur les principes généraux du droit.  Les critères d’identification de ces principes doivent être distingués des critères d’identification de la coutume, a dit la déléguée, en notant la confusion introduite par les principes pouvant se former dans le cadre du système juridique international visé par le projet de conclusion 3. Elle s’est dite préoccupée par le libellé du projet de conclusion 6 sur la détermination de la transposition dans le système juridique international.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a souligné l’acuité de ce phénomène, ainsi que celui des « migrations climatiques ».  La stabilité juridique en la matière doit être préservée, a-t-elle indiqué.  Les droits souverains des États déterminés dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer doivent être sauvegardés.  Enfin, elle a salué l’inscription du sujet « Les accords internationaux juridiquement non contraignants » au programme de travail de la CDI.

Mme KEKE MANTSHO ANNASTACIA MOTSEPE (Afrique du Sud) a salué l’utilisation de l’expression « communautés des nations » car il ne devrait pas y avoir de discrimination dans la formation des principes généraux du droit.  Néanmoins, elle a souligné des incohérences et des imprécisions dans le projet de conclusion 7, appelant la CDI à examiner ce point de plus près.  En outre, le projet de conclusion 11 suggère qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les sources du droit international, a-t-elle remarqué, alors que dans la pratique les traités l’emportent sur le droit coutumier qui l’emportent eux-mêmes sur les principes généraux. 

« Nous savons que les pays qui souffrent le plus de l’élévation du niveau de la mer sont ceux qui y ont le moins contribué », a déploré la représentante, non sans rappeler les graves dégâts causés récemment par les marées de printemps en Afrique du Sud.  L’équité est un principe fondamental qui figure dans différentes conventions internationales et devrait constituer un principe directeur, a-t-elle estimé. Elle a appelé la CDI à adopter une interprétation de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer qui assure une approche équilibrée au regard des lignes de base et des zones maritimes, sans l’amender pour autant. 

Mme HANH DUC LE (Viet Nam), s’agissant des principes généraux du droit, s’est félicitée du projet de conclusion 2 où a été remplacée l’expression « nations civilisées ».  Elle a indiqué que les principes généraux du droit pouvaient selon son pays être formés dans le cadre du système juridique international, en citant à titre d’exemple l’expression « principes de droit universellement reconnus », fréquemment utilisée dans les instruments de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN).  La déléguée a procédé à un examen de l’ensemble du projet de conclusions en rappelant qu’il importe, lorsque l’on interprète un accord, de savoir quelles étaient les intentions des parties lors de la conclusion de cet accord.  Si cette approche a été respectée aux différentes étapes du projet de conclusions, ce n’était cependant pas celle des rédacteurs de l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 qui favorise le texte comme « moyen authentique d’interprétation ».  À cet égard, la déléguée a estimé que l’application du projet de conclusions conduit à un résultat « insatisfaisant », qui crée plus d’incertitudes et de conflits qu’elle n’en résout. 

Concernant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a réaffirmé l’importance primordiale de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et plus généralement de la stabilité juridique sur cette question.  Le Viet Nam accorde aussi une grande importance aux principes de souveraineté sur les ressources naturelles, à leur contribution au développement durable des États, ainsi qu’à l’équité dans l’examen et la résolution des conséquences juridiques de l’élévation du niveau de la mer, a-t-elle expliqué. 

Notant enfin que pour l’orientation future de leurs travaux, les coprésidents envisageaient diverses options, telles un projet de conclusions, une déclaration interprétative ou encore un projet de convention-cadre, la déléguée a invité le Groupe d’étude sur les méthodes de travail à faire preuve de « prudence », eu égard aux questions traitées en parallèle par d’autres organes, comme les récentes demandes d’avis consultatif adressées au Tribunal international du droit de la mer et à la Cour internationale de Justice (CIJ). 

M. MORA FONSECA (Cuba) s’est dit satisfait du projet de conclusions de la CDI relatif aux principes généraux du droit, jugeant positif que les membres de la Commission soient d’accord pour considérer la nature juridique des principes comme source du droit international, tout en prenant en compte les principes communs aux systèmes juridiques nationaux. 

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a reconnu que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer n’offre pas de réponse à toutes les questions posées.  Il faut néanmoins respecter strictement les dispositions de la Convention relatives aux limites et aux frontières maritimes, même si elles sont physiquement modifiées par l’élévation du niveau de la mer, a-t-il dit. Outre l’insécurité juridique que cela entraînerait, les modifier serait en effet très difficile à assumer pour les petits États insulaires en raison de la perte de ressources naturelles nécessaires à leur économie, a plaidé le délégué.  Quant à l’extinction possible de la condition d’État en raison de la perte totale de territoire due à l’élévation du niveau de la mer, il a recommandé la plus grande prudence et le maintien du principe selon lequel, face à une situation d’une telle ampleur, lesdits États ne perdraient pas leur condition de sujet international.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a appelé à traiter l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international « sous le prisme de l’équité ».  « Faut-il le rappeler, ceux qui risquent de souffrir le plus de l’élévation du niveau de la mer, en tant que phénomène anthropique, sont ceux qui y ont le moins contribué. »   Selon lui, la préservation des lignes de base et des droits maritimes expriment non seulement les principes fondamentaux de l’équité et de la stabilité juridique, mais également des notions relevant de la justice climatique profondément ancrées dans les droits humains et les principes généraux du droit international.  Le représentant a indiqué qu’il existe un lien entre le principe d’équité et le principe des responsabilités communes mais différenciées, et que ce dernier principe, établi en droit international, s’applique aux obligations de lutter contre les changements climatiques et leurs effets, dont l’élévation du niveau de la mer.  Il a ajouté que la stabilité juridique et l’équité doivent être les principes directeurs des travaux du Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer.  « Ainsi, les besoins et intérêts particuliers des États en développement, notamment ceux vulnérables aux changements climatiques, devront être pleinement pris en considération. »

Abordant le sujet « Principes généraux du droit », le représentant a invité la Commission à faire un choix terminologique entre les principes généraux du droit évoqués au projet de conclusion 1 et les principes généraux de droit évoqués au paragraphe 1 de son commentaire, qui reprend l’alinéa c) du paragraphe 1 de l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Cette précision est d’autant plus souhaitable que ces deux acceptions ont une nature juridique différente, a-t-il souligné.  Il s’est aussi interrogé sur la méthodologie de la détermination des principes généraux du droit décrite par la Commission et a dit sa perplexité quant à « l’opérationnalisation de ce procédé », du fait de la difficulté qu’il y a à examiner de façon exhaustive tous les éléments disponibles. Enfin, le représentant a estimé que le commentaire 2 du projet de conclusion 10, laisse entendre que l’énumération de l’Article 38 du Statut de la CIJ confère à ces principes, une valeur égale aux autres sources du droit international à l’instar de la source conventionnelle et de la source coutumière.  « Une fois de plus, ma délégation note que la doctrine est loin d’être unanime sur cette question, puisqu’une partie estime, et ma délégation est de cet avis, que l’ordre d’énumération des sources du droit international fait par l’Article 38 du Statut de la CIJ n’est pas anodin et est plutôt l’expression d’une gradation délibérée qui établit de fait une hiérarchie entre lesdites sources. »

M. ALAN KESSEL (Canada) a souligné que l’élévation du niveau de la mer revêt une importance particulière pour son pays en raison du relèvement isostatique qui soulève certaines portions du littoral.  Réitérant l’importance de maintenir la stabilité du territoire des États côtiers, il a appelé à préserver la légitimité des lignes de base et des zones maritimes, ainsi que les droits et privilèges qui y sont associés en droit international. Par ailleurs, il a déploré l’arrestation, la condamnation et la détention arbitraire de ressortissants étrangers qui servent de monnaie d’échange dans les relations internationales. Non seulement ces pratiques violent les droits humains, mais elles compromettent aussi la coopération, la sécurité et le commerce à l’échelle internationale, a-t-il mis en garde, appelant la communauté internationale à s’opposer à ces pratiques.  À ce titre, le dialogue de haut niveau organisé par le Costa Rica, le Malawi, les États-Unis et le Canada a rallié plus de 74 États Membres et l’Union européenne.  Le groupe interrégional d’experts internationaux indépendants, composé de juristes éminents, établi au cours de ce dialogue, examinera la pratique de la détention arbitraire dans le droit international et les potentielles lacunes afin de définir une marche à suivre pour des instruments juridiques efficaces contre la détention arbitraire, a-t-il annoncé en conclusion. 

Mme NAUSHYN JANAH (Nouvelle-Zélande) a souligné les effets de l’élévation du niveau de la mer sur les îles et les zones côtières, rappelant que de nombreuses communautés dépendent des zones maritimes pour leur subsistance, leur économie et leur mode de vie.  À cet égard, la stabilité et l’équité juridique, dont l’importance est centrale dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, devraient guider le débat sur les conséquences juridiques de ce phénomène, a-t-elle estimé. Selon sa délégation, il est donc nécessaire de préserver les lignes de base et les droits maritimes, et de garantir les droits souverains des États sur lesdites zones, en dépit de l’élévation du niveau de la mer.  Cette approche pratique a reçu un large appui, a insisté la déléguée.  Elle a salué le fait que le Groupe d’étude examinera en 2024 le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard de la condition étatique et de la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, soulignant qu’un éventail de principes appuient la continuité de la Convention dans ce contexte. 

M. MAXIM V. MUSIKHIN (Fédération de Russie) a expliqué que pour déterminer si des actes non contraignants pouvaient modifier ou compléter des traités internationaux, la Russie se fondait sur sa constitution pour laquelle seuls les traités internationaux, normes et principes de droit international « reconnus », font partie du système juridique russe.  Un accord qui n’a pas de force juridique ne devrait donc pas contredire les dispositions d’un traité international existant, a-t-il noté, en appelant à exclure des propositions de la CDI, les accords qui combinent plusieurs actes unilatéraux, les accords conclus avec des acteurs non étatiques et les accords couverts par le droit interne, et à rationaliser une pratique « très hétérogène » dans ce domaine. 

S’agissant des principes généraux du droit, le délégué a noté qu’il n’y avait pas de définition de ces principes et que la question de savoir s’ils étaient des sources directes de droits et d’obligations pour les États n’était pas résolue.  Il a donné l’exemple du principe fondamental pacta sunt servanda, qui ne saurait être placé sur un pied d’égalité avec le principe lex posterior.  Il a donc appelé à plus de clarté dans les définitions, en soulignant que « si les principes généraux sont des règles, ils doivent comme les règles conventionnelles et coutumières être le fruit de la volonté des États ».  De plus, pour le délégué, le mécanisme de transposition d’un principe général de droit des systèmes juridiques nationaux vers le système juridique international est une « fiction juridique ». Il a proposé de modifier le projet de conclusion 2 en indiquant qu’un principe général de droit ne devait pas simplement être « reconnu » par la communauté des nations, mais reconnu précisément en tant que principe opérant dans le système juridique international.  Il a par ailleurs souligné que pour sa délégation, il existait bien une « hiérarchie informelle » entre les principes généraux de droit et les règles conventionnelles et coutumières. 

Le délégué a expliqué ensuite que, pour son pays, l’élévation du niveau de la mer était « un phénomène naturel global », alors que le rapport de la CDI indiquait qu’il s’agissait d’un phénomène naturel « causé par l’activité humaine », une approche qu’il a jugée préoccupante puisque la détermination des causes du phénomène « dépasse le mandat de la CDI ».  Le concept « d’État particulièrement touché », doit être abordé en tenant compte des différences dans la manière dont les États sont affectés par ce phénomène, a-t-il poursuivi.  Le délégué a appelé à éviter la fragmentation du droit de la mer en garantissant l’adhésion aux dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il a appelé à débattre de l’émergence de nouveaux concepts concernant les droits des personnes affectées par l’élévation du niveau de la mer, tels que les réfugiés climatiques ou « l’apatridie climatique ».  

En conclusion, le délégué est revenu sur la déclaration de son homologue de l’Ukraine, qui a évoqué lors du débat, la question des dérogations à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, un thème qui ne concernait pas le sujet de la réunion du jour.  Il s’agit là d’un manque de respect à l’égard des membres de la Sixième Commission, a-t-il critiqué.  Ce délégué ayant évoqué des « suspects russes », il a demandé si l’Ukraine avait l’intention d’étendre ces dérogations aux crimes commis par son propre pays et par des commanditaires gouvernementaux.  « Je pense que la réponse est oui. »

Intervention de la Présidente de la Cour internationale de Justice

Mme JOAN DONOGHUE, Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ), a axé son discours sur l’avenir de la Cour, pour sa troisième et dernière intervention en sa qualité de Présidente devant la Commission.  Elle a d’abord analysé les tendances les plus récentes en ce qui concerne l’activité contentieuse de la Cour, en notant que 20 affaires sont pendantes, provenant de toutes les régions du monde. Elle a noté que, pour deux tiers de ces affaires, la compétence de la Cour découle d’une convention.  Elle a ensuite souligné le grand intérêt entourant les deux demandes d’avis consultatifs faites à la Cour, l’un sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, l’autre sur les obligations des États en matière de changements climatiques.  Elle a précisé que 53 États Membres de l’ONU et l’État observateur de Palestine ont formulé des commentaires écrits s’agissant du premier avis.  Au moins autant d’États devaient en faire de même en ce qui concerne l’avis sur les obligations des États en matière de changements climatiques, a dit la Présidente. « La Cour va consacrer une partie significative de son énergie et de son temps à ces deux demandes. »

Mme Donoghue a ensuite évoqué la charge de travail toujours plus conséquente de la Cour.  À titre de comparaison, la Cour, en 2022, a rendu 4 arrêts et 28 ordonnances, contre 2 arrêts et 11 ordonnances en 2001.  Cette charge de travail pose nécessairement la question des ressources à disposition de la Cour, a dit la Présidente, en pointant leur augmentation marginale.  Elle a rappelé que le budget biennal de la Cour était de 46,5 millions de dollars pour les années 2010-2011.  Désormais annuel, le budget de la Cour est en 2023 de 29 millions de dollars. « Il ne faut pas être diplômé en économie pour voir, qu’avec l’inflation, les ressources de la Cour ont stagné, tandis que sa charge de travail a spectaculairement augmenté. »  Je me dois de porter cette question des ressources à votre attention, a dit la Présidente.  « Mais n’est-ce pas un sujet concernant la Cinquième Commission? Bien sûr, mais le budget de la CIJ représente moins de 1% du budget total de l’Organisation, cela n’est pas peut-être pas la priorité des délégués travaillant au sein de cette Commission. » Elle a ainsi exhorté les délégués de la Sixième Commission à être des « alliés de la Cour » dans leurs discussions avec leurs collègues de la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires.

Abordant le sujet d’une révision du Statut de la Cour, la Présidente a rappelé qu’elle est assujettie aux mêmes conditions restrictives que celles prévues pour la Charte des Nations Unies elle-même.  « Quels changements pourraient être faits?  Ma réponse est la suivante: très peu de changements et seulement après réflexion. »  Mme Donoghue a rappelé que, lors de son arrivée à la Cour en 2010, sa conviction était que le Statut de la CIJ avait « sérieusement » besoin d’être actualisé.  « J’ai abouti à la conclusion opposée. »  Mentionnant les aspects du Statut qui ont résisté à l’épreuve du temps, elle s’est notamment félicitée que la compétence de la Cour ne soit pas obligatoire pour tous les États Membres de l’ONU, comme cela avait pu être avancé dans les années 40.  « Je suis bien trop réaliste pour prévoir le soutien d’un nombre suffisant d’États pour une éventuelle révision prévoyant une telle compétence obligatoire », a dit la Présidente, en ne se disant pas pour autant « troublée » par cette situation.

Mme Donoghue a souligné les hautes attentes placées en la Cour, avant de plaider pour des retouches mineures du Statut.  Elle s’est prononcée en faveur du maintien de la désignation d’un juge ad hoc visé à l’Article 31 du Statut, son élimination pouvant dissuader certains États d’accepter la compétence de la Cour. Elle a évoqué l’idée que des organisations internationales puissent être parties à des procédures contentieuses, seuls les États pouvant l’être aux termes de l’Article 34.  « Je ne suis pas convaincue par cette suggestion. »  Elle a cependant appuyé une révision plus modeste consistant à permettre à des organisations régionales de devenir parties à une procédure contentieuse dans les domaines pour lesquels les États leur ont donné compétence. 

Sur le mode de désignation des juges, la Présidente a estimé que les avantages du système actuel ne sont pas pleinement réalisés.  Il faudrait prendre dûment en considération la proposition d’éliminer la possibilité de réélection des juges, afin d’apporter une nouvelle preuve de l’impartialité de la Cour, a dit la Présidente, en ajoutant que cela s’accompagnerait d’un allongement du mandat des juges.  « Un seul mandat de 12 ans pourrait être une possibilité. »

Mme Donoghue a toutefois jugé essentielle une révision du Statut afin d’éliminer l’expression de « nations civilisées » et une autre révision afin de rendre le Statut, mais aussi la Charte des Nations Unies, plus inclusif en ce qui concerne la question du genre.  Nous avons fini d’actualiser les règles de la Cour afin d’user de formulations inclusives en français comme en anglais, a conclu la Présidente.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: la dépendance « critique » de l’humanité aux systèmes spatiaux requiert une gouvernance mondiale de l’espace renforcée

Soixante-dix-huitième session,
15e séance - matin
CPSD/788

Quatrième Commission: la dépendance « critique » de l’humanité aux systèmes spatiaux requiert une gouvernance mondiale de l’espace renforcée

Afin de préserver le caractère pacifique de l’exploration spatiale et de prévenir l’encombrement de l’espace extra-atmosphérique, de nombreuses délégations ont appelé, ce matin, devant la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation), au renforcement de la gouvernance mondiale des activités spatiales. 

Venu présenter le rapport du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), son Président a ouvert le débat général de la Commission sur cette question en indiquant que la poursuite de l’exploration spatiale, que ce soit par le biais de missions humaines ou robotiques, s’est intensifiée au cours des dernières années, avec le lancement de missions vers le Soleil, la Lune, des planètes et même des astéroïdes, ouvrant ainsi de « nouvelles frontières » à la recherche scientifique.  M. Omran Sharaf, des Émirats arabes unis, s’est félicité des engagements audacieux de la part d’acteurs publics et privés pour retourner dans l’espace lointain et permettre la présence à long terme de l’humanité parmi les corps célestes. 

Sur Terre, les technologies, les données et les applications spatiales sont déterminantes pour formuler des politiques concernant la protection de l’environnement, le développement, les soins de santé, l’action climatique, la réduction des risques de catastrophe ou encore les interventions d’urgence, a renchéri la Présidente de la Commission, Mme Mathu Joyini.  Pour assurer la viabilité des biens spatiaux dans la durée, elle a jugé impératif de promouvoir la sécurité des opérations spatiales et de considérer l’espace comme un moteur du développement durable. 

Un avis partagé par M. Sharaf, qui a noté que les utilisations pacifiques de l’espace ont révolutionné la vie sur Terre.  Les communications par satellite, les satellites météorologiques et les systèmes de navigation sont devenus des éléments essentiels qui soutiennent nos activités quotidiennes.  Or, a-t-il prévenu, la dépendance, avérée, de notre monde aux systèmes spatiaux est devenue « critique ».  Selon lui, les défis auxquels nous sommes confrontés ne peuvent être relevés qu’au moyen d’une coopération internationale plus forte et de l’avancement de la gouvernance mondiale de l’espace extra-atmosphérique. 

Pour l’Union européenne, le droit international, y compris la Charte des Nations Unies, est applicable à l’espace, le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 et les principes directeurs constituant la pierre angulaire de la gouvernance mondiale spatiale.  Tandis qu’elle explore les moyens par lesquels elle pourrait accepter les droits et obligations contenus dans les traités pertinents de l’ONU sur le sujet, elle a appuyé le Code de conduite de La Haye, signé par 144 États, afin d’assurer un environnement spatial sûr et durable.   

À l’instar de nombreuses délégations, le Viet Nam, qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a souligné que l’accès à l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques est un droit inaliénable de tous les États, conformément au droit international et au principe de non-appropriation de l’espace.  Il a encouragé le COPUOS à assurer la pleine mise en œuvre de ces instruments et d’autres activités, telles que le Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER). 

Le Bangladesh s’est inquiété de la croissance exponentielle du nombre de mises en orbite de satellites, dont le nombre est passé de 210 en 2013 à 2 470 en 2022.  Il a donc appelé à mener des activités spatiales conformément au droit et aux normes internationales, en particulier les lignes directrices sur l’atténuation des débris spatiaux et la durabilité à long terme du COPUOS.  Dans cette optique, il a jugé urgent d’entamer des négociations sur un instrument juridiquement contraignant susceptible d’empêcher une course aux armements dans l’espace. 

De son côté, Cuba a réitéré son opposition à la militarisation de l’espace et sa préoccupation face à son exploitation au détriment de la sécurité des États.  Selon la délégation, les débris occasionnés par le réseau de satellites espions qui saturent l’orbite géostationnaire devraient faire partie du cadre juridique établi dans les traités pertinents de l’ONU.  Considérant que la militarisation de l’espace constitue un risque pour toutes les nations, indépendamment de leurs capacités spatiales, Sri Lanka a préconisé une action collective. 

À cet égard, le Pakistan a estimé que la réduction des débris spatiaux constitue une responsabilité commune mais différenciée, la plupart des débris orbitaux étant la conséquence d’opérations passées ou en cours menées par les principales nations spatiales.  Dans ce contexte, il incombe à celles-ci non seulement de répondre à cette situation, mais aussi d’aider les pays en développement à respecter les lignes directrices en la matière.  Qui plus est, a appuyé la Thaïlande, les progrès de la numérisation, de l’intelligence artificielle et des technologies spatiales doivent se traduire en un renforcement des capacités et des transferts technologiques vers les pays en développement. 

Devant l’utilisation « provocatrice » de satellites civils à des fins non déclarées, la Fédération de Russie a annoncé qu’elle présentera devant la Commission un projet de résolution intitulé « Les technologies spatiales au service de la paix ».  L’Union européenne a considéré que ce texte portait sur des questions de sécurité spatiale, lesquelles ne relèvent pas de la Quatrième Commission.   

Après avoir condamné l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, L’UE a réitéré son opposition à l’affiliation à l’ONU d’un nouveau centre régional d’enseignement des sciences et des technologies spatiales situé en Russie.  Laquelle a dénoncé en retour les attaques « impardonnables » de l’Union européenne, qui abuse selon elle de son statut d’observateur au sein du Comité. 

La Commission poursuivra son débat sur la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace le jeudi 26 octobre 2023, à partir de 10 heures. 

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L'ESPACE

Déclarations

M. STEEN MALTHE HANSEN, de l’Union européenne-UE, s’est félicité du travail effectué au cours des dernières années par le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) afin de faire progresser la coopération sur les questions spatiales, notamment la mise en œuvre des lignes directrices pour la viabilité à long terme des activités spatiales et les aspects juridiques des activités liées aux ressources spatiales.  Après avoir condamné fermement la guerre d’agression illégale menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, le représentant a réitéré l’opposition de l’UE à l’affiliation à l’ONU d’un nouveau centre régional d’enseignement des sciences et des technologies spatiales en Russie.   

Selon le délégué, le droit international, y compris la Charte des Nations Unies, est applicable à l’espace extra-atmosphérique.  Le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 et les principes directeurs constituent à ses yeux la pierre angulaire de la gouvernance mondiale dans l’espace.  Dans ce contexte, l’UE continue d’explorer les moyens par lesquels elle pourrait accepter les droits et obligations contenus dans les traités appropriés de l’ONU sur l’espace.  Afin de promouvoir la préservation d’un environnement spatial sûr, sécurisé et durable, il a exprimé son appui au Code de conduite de La Haye, signé par 144 États.   

Poursuivant, le délégué a estimé que le Groupe de travail sur la durabilité à long terme des activités spatiales devrait concentrer ses activités sur la mise en œuvre des lignes directrices existantes tout en répondant également aux besoins en matière de renforcement des capacités et en identifiant progressivement de nouveaux défis.  Comme l’a reconnu le Conseil de l’Union européenne, la gestion du trafic spatial et la réduction des débris spatiaux figurent parmi les questions clefs.  S’appuyant sur les capacités renforcées du système de surveillance de l’espace et de suivi des objets en orbite (SST), il a prôné une coopération accrue avec les partenaires internationaux en vue du partage d’informations.  Il s’est par ailleurs félicité des discussions engagées au sein du Groupe de travail sur les aspects juridiques des activités liées aux ressources spatiales lors de la récente soixante-deuxième session du sous-comité juridique.   

S’agissant du projet de résolution L.5 présenté par la Fédération de Russie, le représentant a considéré que ce texte traite « clairement » de questions de sécurité spatiale, lesquelles ne relèvent pas de la Quatrième Commission.   

M. HOANG NGUYEN NGUYEN (Viet Nam), qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a réitéré que l’accès à l’espace extra-atmosphérique est un droit inaliénable de tous les États et que son utilisation doit se faire exclusivement à des fins pacifiques et pour le bénéfice collectif de l’humanité, conformément au droit international et au principe de non-appropriation de l’espace.  Il a partagé ses préoccupations relatives à la possibilité d’une course aux armements dans l’espace, la fragilité de l’environnement spatial et les défis posés par la viabilité à long terme des activités spatiales, ainsi que la nécessité d’accorder une plus grande attention à la probabilité croissante de collisions d’objets spatiaux en raison de l’augmentation du nombre de débris, qui pourrait avoir une incidence sur les futures missions spatiales. 

Par conséquent, l’ASEAN salue les activités et les dialogues qui permettent d’approfondir la compréhension des questions relatives à la sécurité de l’espace, ainsi que les efforts visant à développer davantage les cadres juridiques et à renforcer la gouvernance des activités spatiales de manière inclusive, un engagement qui s’est traduit notamment par l’organisation d’une série d’ateliers sur la sécurité spatiale par ce forum régional.  Favorable à un renforcement du rôle de l’ONU et de ses organes compétents pour veiller à ce que l’utilisation et l’exploration de l’espace extra-atmosphérique restent pacifiques et bénéfiques pour tous, le délégué a estimé que l’Assemblée générale devrait jouer un rôle plus important dans la promotion d’un dialogue continu sur les questions et défis actuels dans ce domaine.  Il a invité le COPOUS, ses sous-comités et le Bureau des affaires spatiales, à continuer de renforcer leur rôle essentiel en tant que principale plateforme intergouvernementale pour traiter les questions liées aux activités spatiales, notamment par la mise en œuvre intégrale et effective de leurs instruments tels que les lignes directrices sur la réduction des débris spatiaux et la plateforme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER).   

M. VATHAYUDH VICHANKAIYAKIJ (Thaïlande) a déclaré qu’en raison de l’ajout de nouveaux acteurs et partenaires dans l’exploration spatiale, il est de notre responsabilité collective de faire en sorte que l’espace reste un domaine de paix, de coopération et de prospérité partagée.  À cette fin, il a noté que l’accès à l’espace extra-atmosphérique est un droit inaliénable de tous les États.  Nous devons en outre veiller à ce que les progrès de la numérisation, de l’intelligence artificielle et des technologies spatiales mènent à une infrastructure appropriée pour l’économie numérique, grâce au renforcement des capacités et au transfert de technologies vers les pays en développement.  En tant que Présidente du Sous-Comité de l’ASEAN sur les technologies et les applications spatiales, la Thaïlande entend poursuivre sa collaboration spatiale sur les plans régional et interrégional.  De plus, les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique jouent un rôle majeur dans le développement durable.  L’Agence thaïlandaise de développement de la géoinformatique et des technologies spatiales a ainsi développé des applications liées à l’espace dans des domaines tels que la gestion de l’eau, la gestion des catastrophes, la planification urbaine ou encore l’exploration et la cartographie des ressources naturelles.  De plus, Bangkok a lancé le satellite THEOS-2 le 9 octobre dernier afin de promouvoir l’industrie spatiale locale. 

M. MOHAMMAD AAMIR KAHN (Pakistan) a rappelé que son pays est membre du COPUOS depuis 1973, et qu’il a ratifié les cinq principaux traités spatiaux des Nations Unies régissant les utilisations pacifiques et la viabilité à long terme de l’espace extra-atmosphérique.  En tant que nation spatiale émergente, le programme spatial national du Pakistan est axé sur la poursuite d’un progrès socioéconomique durable, a-t-il expliqué, en soulignant qu’Islamabad s’est également engagée dans une coopération solide au niveau international sur les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, afin de franchir les étapes clés de la mise en œuvre de son programme spatial national-2047.  Les capacités spatiales croissantes du Pakistan sont utilisées dans divers domaines tels que l’agriculture, la gestion des catastrophes, la santé publique, la planification urbaine et la gestion des ressources en eau. 

Nous nous engageons à mener toutes nos activités spatiales de manière pacifique, transparente et sûre, conformément aux normes internationales en vigueur, et la politique spatiale pakistanaise met l’accent sur la coopération internationale, a assuré le représentant, en donnant des exemples concrets.  Il a demandé au COPUOS et à ses sous-comités de tout mettre en œuvre pour développer une coopération internationale solide en matière de renforcement des capacités, d’assistance technique et de transfert de technologie, afin que les pays en développement puissent jouir pleinement de leurs droits en matière d’exploration, d’accès et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique pour un développement durable.   

Réitérant que la réduction des débris spatiaux est une responsabilité commune mais différenciée, il a relevé que la plupart des débris orbitaux sont la conséquence d’opérations passées et en cours des principales nations spatiales et, par conséquent, il a estimé qu’il leur incombe non seulement de répondre à cette situation, mais aussi d’aider les pays en développement et les pays émergents, tant sur les plans technique que financier, à respecter les lignes directrices en matière de réduction des débris spatiaux.  Le cadre normatif et juridique régissant l’exploration, l’exploitation et l’utilisation des ressources spatiales devrait, selon lui, être cohérent avec le droit international de l’espace existant, c’est-à-dire les cinq traités de l’ONU sur l’espace, et respecter pleinement les principes de non-appropriation et d’accès équitable.  Le COPUOS et ses sous-comités devraient donc jouer le rôle qui leur revient en tentant de résoudre cette question complexe qui entrave l’accès des pays en développement à l’orbite géostationnaire sur une base équitable. 

M. TOUFIQ ISLAM SHATIL (Bangladesh) a réaffirmé que l’accès à l’espace extra-atmosphérique est un droit inaliénable de tous les États et un bien commun de l’humanité.  Le Bangladesh concentre son attention sur l’observation de la Terre et la surveillance météorologique, la cartographie de l’utilisation des terres, la surveillance fluviale et côtière, y compris les changements à long terme dans la plus grande forêt de mangrove du monde.  Lancé en 2018, le premier satellite de communication du pays fournit des services de télécommunication, de radiodiffusion, d’enseignement à distance et de télémédecine.  Le représentant a insisté sur l’importance du renforcement des capacités, du transfert de technologies et d’une coopération internationale efficace pour permettre à tous les pays de bénéficier des avantages de la science et de la technologie spatiales.  Il a salué l’apport du Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence (UN-SPIDER).  Il a également souligné la contribution des technologies spatiales à l’augmentation des rendements agricoles grâce à une agriculture de précision et durable permettant d’optimiser la productivité des cultures grâce à la surveillance et la gestion efficaces des terres.   

Le délégué s’est toutefois inquiété de la croissance exponentielle de la mise en orbite de satellites, dont le nombre est passé de 210 en 2013 à 2 470 en 2022.  Il a donc appelé à mener des activités spatiales conformément au droit et aux normes internationales, y compris les lignes directrices sur l’atténuation des débris spatiaux du Comité et les lignes directrices pour la durabilité à long terme.  De plus, il a jugé urgent d’entamer des négociations sur un instrument juridiquement contraignant afin de prévenir une course aux armements dans l’espace.   

Mme YUMIRKA FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a réaffirmé sa ferme conviction que l’utilisation et l’exploration de l’espace extra-atmosphérique doivent se faire à des fins exclusivement pacifiques, au bénéfice et dans l’intérêt de tous les pays, quel que soit leur degré de développement économique ou scientifique.  Elle a réitéré l’opposition de son pays à la militarisation de l’espace et sa préoccupation face à une exploitation spatiale menée au détriment de la sécurité des nations, comme en témoigne le vaste réseau de satellites espions existants, qui saturent l’orbite géostationnaire d’une grande quantité de débris spatiaux.  L’utilisation de l’orbite géostationnaire doit s’inscrire dans le cadre juridique établi dans les traités pertinents des Nations Unies, en tenant compte des contributions des activités spatiales au développement durable.  Or, l’exercice du droit à utiliser l’espace constitue aujourd’hui un rêve inaccessible pour la plupart des pays en développement.  Malgré le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par le Gouvernement des États-Unis, Cuba accorde une importance croissante aux sciences spatiales et à leurs applications, notamment pour la prévision des catastrophes naturelles telles que les cyclones et les inondations.   

M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée) a relevé que l’écart entre le monde spatial inexploité et l’humanité se rétrécit chaque jour davantage depuis le lancement du premier satellite il y a 60 ans.  Alors que les pays en développement se lancent activement dans la conquête de l’espace, l’époque où l’exploration spatiale était réservée à quelques pays développés est révolue.  La RPDC, a-t-il rappelé, a lancé son premier satellite artificiel en 1998, et s’efforce depuis de développer son industrie spatiale nationale.  La croissance de l’industrie spatiale est selon lui la clef pour faire la démonstration de la puissance nationale, promouvoir la croissance économique et élever le niveau de vie de la population.  

Cependant, les États-Unis entravent par tous les moyens les échanges et la coopération internationaux de la RPDC dans le domaine spatial, a-t-il considéré, tout en contestant le droit de Pyongyang de lancer des satellites à des fins pacifiques, en invoquant des violations des résolutions du Conseil de sécurité.  Pire encore, ce pays empêche les spécialistes spatiaux de la RPDC de participer aux séminaires internationaux sur l’espace.  À ses yeux, les prétendues « résolutions » du Conseil de sécurité n’ont aucun fondement au regard du droit international et ne visent qu’à priver son pays de sa souveraineté et de ses droits au développement en niant son idéologie et son système.  Il a ainsi dénoncé la tentative « agressive » de militarisation de l’espace par les États-Unis, qui ont déployé de nombreux moyens militaires dans l’espace et renforcent progressivement leur force spatiale.   

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a défendu le principe que l’espace extra-atmosphérique est un bien commun de l’humanité et que toutes les nations devraient pouvoir bénéficier des apports de l’exploration spatiale.  Il faut toutefois collectivement lutter contre la militarisation de l’espace, a-t-il martelé, parce que cela constitue un risque pour toutes les nations indépendamment de leurs capacités spatiales.  Il est important de renforcer les partenariats entre les nations spatiales et celles qui voudraient se développer dans ce domaine, ce qui suppose un cadre juridique inclusif ancré sur l’accès équitable, a argué le représentant, avant de brosser un tableau des technologies spatiales utilisées au Sri Lanka au service de l’agriculture et de la météorologie essentiellement.  Il a également insisté sur le fait qu’il faut permettre aux jeunes générations du monde entier de faire partie de « l’odyssée cosmique » en leur instillant un sens des responsabilités et en leur permettre son appropriation.  Le représentant a ensuite passé en revue les contributions régionales et internationales du Sri Lanka dans le domaine spatial, y compris son attachement à la formation aux technologies spatiales et leur potentiel pour le développement durable.  Il s’est dit préoccupé par la prolifération des débris dans l’espace en demandant la stricte application des lignes directrices existantes.  En outre, il a soulevé la question de la délimitation claire de l’espace extra-atmosphérique pour qu’il y ait plus de certitudes juridiques entre le droit spatial et le droit aérien.   

M. MOHAMMAD REZA SAHRAEI (République islamique d’Iran) a commencé par réaffirmer que l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique doivent être menées conformément à l’ensemble du droit international applicable afin de bénéficier aux générations présentes et futures de l’humanité.  Tous les pays ont également le droit d’explorer et d’utiliser l’espace extra-atmosphérique et d’y accéder de manière rationnelle, juste et équitable, et dans le plein respect du principe de non-appropriation de toute partie de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune ou tout autre corps céleste.  Si les mesures de transparence et de confiance sont essentielles pour garantir l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique, le délégué a aussi rappelé que la promotion de la non-intervention et de la non-ingérence dans les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques doit être pleinement respectée.  Il a plaidé pour une approche multilatérale des affaires internationales spatiales, plutôt que l’approche « qui a échoué jusqu’à présent » qui consistait à prendre des mesures coercitives unilatérales à l’encontre des pays en développement.   

Afin de parvenir à un développement durable dans l’espace, tous les États devraient pouvoir accéder à l’espace extra-atmosphérique en utilisant les sciences et technologies spatiales et leurs applications, a argué le représentant.  Il a remarqué que bien que certains États aient injustement restreint et limité les moyens des pays en développement, ces derniers ont démontré leur capacité à apporter une contribution significative aux activités concernées, a-t-il fait valoir, en citant le cas de son propre pays en train d’établir l’un des plus grands centres spatiaux d’Asie occidentale près du port de Chabahar.  D’ici à la fin du mois de mars 2031, ce centre devrait être pleinement opérationnel et capable d’effectuer des lancements spatiaux internationaux, a-t-il annoncé, et le mois dernier, l’Iran a également réussi à mettre en orbite son propre satellite d’imagerie, Nour-3.  Le délégué a conclu en appelant les nations spatiales à ne pas s’engager dans une course aux armements dans l’espace, précisant que le Gouvernement iranien soutient pleinement la négociation d’un instrument juridiquement contraignant visant à empêcher cela. 

M. ALSAMMAK (Iraq) a salué le rôle joué par l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique en matière de développement durable, notamment concernant les communications et le transfert de données afin d’améliorer les services publics aux citoyens des zones reculées.  Elle permet également de renforcer le développement économique en utilisant les satellites pour surveiller les ressources naturelles et agricoles, tout en prévenant les catastrophes naturelles au moyen d’alertes précoces.  Les satellites permettent en outre de surveiller les forêts et la couverture végétale, de même que la désertification.  Néanmoins, l’augmentation des coûts de ces technologies constitue un véritable obstacle pour les pays en développement.  Il est donc nécessaire de renforcer la coopération internationale en la matière, de même que l’utilisation responsable et éthique de l’espace extra-atmosphérique.  Le représentant a également indiqué que l’Iraq a récemment lancé un satellite et un programme spatial.   

M. MAXIMILIANO JAVIER ALVAREZ (Argentine) a réaffirmé le rôle fondamental du Traité sur l’espace dans le maintien de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et dans la promotion des buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Ce traité est la pierre angulaire du régime juridique international relatif à l’espace extra-atmosphérique, a-t-il concédé, tout en reconnaissant que la nature changeante de la technologie et des activités spatiales exige que la communauté internationale trouve des solutions convenues sur le plan multilatéral aux nouveaux défis qu’elles posent.  Cela permettrait de contribuer à une meilleure gouvernance mondiale de l’espace à une époque où les acteurs spatiaux et les possibilités d’ingérence se multiplient, a fait valoir le représentant.  Compte tenu de l’importance des données satellitaires pour la préservation de la qualité de vie des personnes et de leur environnement, le représentant a notamment fait état des applications des données recueillies par la constellation SAOCOM1 de satellites pour tous les pays et de la constellation italienne COSMO/SkyMed, dans le cadre de la coopération avec l’Agence spatiale italienne (ASI) au sein du système satellitaire italo-argentin pour la gestion des urgences (SIASGE).  Afin d’élargir l’accès à l’information satellitaire, le Géoportail fédéral pour la gestion locale, une plateforme web spécialement conçue pour les gouvernements locaux, a été lancé en novembre 2022 dans le but de démocratiser l’accès des équipes municipales aux outils d’analyse territoriale.  Il offre des outils d’analyse géographique qui facilitent les processus de planification territoriale stratégique et de prise de décision en matière de gestion des infrastructures, d’environnement, de transport, d’agriculture et de sécurité sociale dans toutes les municipalités, en mettant à disposition des informations centralisées, des tutoriels et des images satellite de haute qualité, a expliqué le représentant.  Il s’agit d’une coentreprise entre le Ministère des sciences, de la technologie et de l’innovation, le Ministère de l’intérieur et le Ministère de la défense, par l’intermédiaire de l’Institut géographique national. 

Mme HANA BINTI NORDIN (Malaisie) a pris note des changements rapides dans les activités spatiales et des nouveaux défis qui les accompagnent en appelant tous les gouvernements, et en particulier les nations spatiales, à garantir la bonne gouvernance de l’espace et la viabilité des activités spatiales.  Elle a appelé à renforcer la transparence et l’échange d’informations entre tous les acteurs dans le cadre de ces activités et à respecter les traités spatiaux et les résolutions pertinentes de l’ONU.  La Malaisie s’est dotée d’un cadre juridique spatial à cet effet, a précisé la représentante en expliquant que son pays continue d’utiliser ses activités spatiales pour le développement socio-économique et à la gestion des catastrophes.  Saluant les progrès accomplis par le COPUOS et le Bureau des affaires spatiales pour promouvoir la coopération internationale dans l’utilisation pacifique de l’espace, la déléguée leur a assuré le concours de son pays afin d’atteindre ces objectifs. 

M. SERGEY BELOUSKO (Fédération de Russie) a affirmé qu’en tant que l’une des principales nations spatiales, la Russie a toujours plaidé en faveur de la préservation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques, en tant que bien de l’humanité tout entière.  Son exploration devrait être menée sur une base égale et non discriminatoire, conformément aux normes du droit international de l’espace.  Insistant sur la nécessité de renforcer le rôle du Comité des Nations Unies sur l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), qu’il a décrit comme une plateforme unique pour réglementer l’ensemble des questions pertinentes, il a argué que cet organe doit conserver son statut fondé sur la participation égale de tous ses États membres aux discussions et à la prise de décision sur la base du consensus.  Il a espéré l’adoption par consensus par la Quatrième Commission du projet de résolution intitulé « Coopération internationale dans l’exploration pacifique de l’espace extra-atmosphérique ». 

Attirant l’attention de la communauté internationale sur la tendance dangereusement croissante à l’utilisation des systèmes spatiaux civils, y compris les systèmes commerciaux, au-delà de leurs objectifs déclarés, le représentant a estimé que ces actions exposent la viabilité à long terme des activités spatiales à des risques injustifiés, ainsi que de nombreux processus socioéconomiques sur Terre, dont dépend le bien-être des populations, principalement dans les pays en développement.  L’utilisation provocatrice de satellites civils soulève des questions dans le contexte du Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967, a relevé le délégué, en soulignant l’urgence d’initiatives visant à préserver l’espace à des fins purement pacifiques.  Fort de ce constat, il a annoncé que la Russie soumettra cette année un projet de résolution intitulé « Les sciences et technologies spatiales au service de la paix » à l’examen de la Quatrième Commission dans lequel on appelle au rejet de l’utilisation des infrastructures spatiales civiles à des fins non déclarées, y compris l’ingérence dans les affaires intérieures d’États souverains et la participation à des conflits armés.  Il a espéré que ce projet de texte « non conflictuel et fédérateur » recevra un large soutien international et sera respecté par tous les États Membres des Nations Unies. 

Droit de réponse 

La Fédération de Russie a rejeté catégoriquement toute politisation des travaux de la Quatrième Commission consacrés à l’espace.  La Russie n’acceptera pas les attaques « hypocrites et impardonnables » de l’Union européenne, qui abuse constamment de son statut d’observateur au sein du Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique.  Il a demandé aux représentants de l’Assemblée générale de respecter une approche équilibrée, afin d’empêcher les pays occidentaux de politiser ses travaux en évoquant « l’opération militaire spéciale » en Ukraine.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: tour d’horizon des violations des droits humains au Moyen-Orient et en Somalie

Soixante-dix-huitième session,
34e et 35e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4390

Troisième Commission: tour d’horizon des violations des droits humains au Moyen-Orient et en Somalie

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, s’est penchée aujourd’hui sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés, en République arabe syrienne ainsi qu’en République islamique d’Iran et en Somalie.  Un constat partagé en est ressorti: le recul continu des droits humains sous l’effet combiné de politiques violant les libertés, et de conflits compilés à des crises multiples. 

Ouvrant son intervention par une minute de silence en hommage aux milliers de civils tués dans les violences qui embrasent le Proche-Orient depuis le 7 octobre, Mme Navi Pillay a condamné, sans équivoque, tant les crimes commis par le Hamas –tels l’assassinat d’un millier de citoyens israéliens– que les attaques israéliennes ayant ôté la vie de milliers de civils palestiniens.  « Il y a des indications claires que des crimes internationaux ont été et sont commis » a prévenu la Présidente de la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël. 

Qualifiant de crimes de guerre les tirs indiscriminés de groupes palestiniens sur des villes israéliennes, la Présidente a aussi affirmé que les autorités israéliennes avaient systématiquement omis de prendre des mesures de précaution efficaces pour éviter les pertes civiles lors des incursions et des bombardements contre Gaza entraînant la mort de milliers de personnes. 

Mais, avant même que ne débute l’actuelle flambée de violence, les opérations de maintien de l’ordre d’Israël en Cisjordanie occupée et les attaques répétées contre Gaza violaient systématiquement le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, a rapporté la Présidente.  Pour elle, ces actions témoignent des objectifs israéliens: « nier le droit à l’autodétermination des Palestiniens en empêchant la création d’un État indépendant ». 

Les événements actuels prouvent l’échec de la communauté internationale à remédier à des décennies d’illégalité et d’impunité de la part d’Israël et à mettre fin à son « occupation éternelle », a ensuite analysé la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 qui a analysé les conditions de vie « insoutenables » endurées par des générations d’enfants palestiniens sous la présence militaire et coloniale croissante d’Israël.  L’objectif de paix et de justice ne peut être atteint qu’en garantissant l’égalité des droits et la dignité des enfants palestiniens, a souligné Mme Francesca Albanese.

Ces deux exposés ont fait apparaître une fracture entre délégations, à commencer par l’État de Palestine et d’Israël.  « Lorsque vous justifiez le terrorisme, vous l’excusez », s’est indignée la délégation israélienne après l’exposé de Mme Pillay.  Mais « abandonner le peuple palestinien maintenant c’est une trahison de l’humanité et du droit international » s’est exclamée la délégation palestinienne. 

Sur la liste des acteurs régionaux incriminés par Israël figure l’Iran, dont la situation des droits humains a été analysée par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran qui s’est alarmé des violences commises par les forces de sécurité iraniennes dans le cadre des manifestations qui ont eu lieu depuis la mort en garde à vue de Jina Mahsa Amini, voilà 13 mois.  Non moins de 537 personnes ont trouvé la mort aux mains des forces de sécurité, a rapporté M. Javaid Rehman, qui s’est ému du harcèlement et la discrimination systématiques que subissent les femmes et les filles en Iran, dans un espace civique toujours plus cadenassé.  La loi sur la promotion de la culture de chasteté et du hijab qui prévoit des peines de prison et de flagellation pour les femmes qui violent le code vestimentaire l’a notamment inquiété. 

De son côté, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne a alerté que le pays est en proie à « la plus grande escalade des hostilités depuis quatre ans », déplorant un mépris total pour la vie des civils alors que les parties se livrent à une « spirale de représailles ».  Il a également signalé que rien ne prouve que les mesures coercitives unilatérales sectorielles appliquée au cours de la dernière décennie ont entraîné des changements positifs de la part du Gouvernement syrien ou d’autres acteurs, regrettant que les civils en paient le prix ainsi que celui de la sur-conformité qui en découle. 

Multidimensionnelle elle aussi est la crise décrite par le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan.  Pour M. Richard Bennett, la population y vit une « tempête parfaite de défis », entre les conséquences du séisme à Hérat, les décennies de guerre, la crise économique, le sous-financement de l’aide humanitaire et la détérioration de la situation des droits humains depuis la prise de pouvoir des Taliban en août 2021.  Premières visées, les femmes et les filles, toujours plus exclues de la vie publique, sont l’objet de discriminations grandissantes, notamment dans le domaine de l’éducation, ce qui appauvrit un espace civique déjà effondré. 

Bouclant ce tour d’horizon, l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie a indiqué qu’en dépit de progrès politiques, la situation sécuritaire demeure volatile en Somalie, secouée par des attaques suicides des Chabab qui ont fait 692 victimes en quelques mois cette année. Mais Mme Isha Dyfan, à son tour, a déploré les violations commises par les autorités dirigeantes elles-mêmes, notamment la restriction continue de l’espace civique somalien.  Elle a également dénoncé l’imposition de la peine de mort à des enfants dans le Puntland ainsi que les arrestations et détentions arbitraires de journalistes. 

La Troisième Commission poursuivra ces travaux demain, mercredi 25 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. JAVAID REHMAN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, a indiqué que son rapport dépeint la sombre réalité de la situation des droits humains en Iran.  Il a d’abord déploré l’absence d’enquête indépendante sur la mort en garde à vue de Jina Mahsa Amini, 13 mois après les faits, ainsi que sur les diverses violences commises par les forces de sécurité dans le cadre des manifestations qui ont eu lieu depuis septembre 2022.  Non moins de 537 personnes ont pourtant trouvé la mort aux mains des forces de sécurité.  Il s’est également alarmé de l’extrême niveau de violence ciblant les minorités ethniques et religieuses, en particulier les Kurdes et les Baloutches, notant qu’entre septembre 2022 et mai 2023, au moins 140 manifestants kurdes ont été tués par les forces de sécurité.  En septembre 2022, les forces de sécurité ont abattu au moins 95 personnes à Zahedan, dans la province du Sistan-Baloutchistan.  La gravité des violations commises par les autorités laisse présager la commission de crimes internationaux, notamment les crimes contre l’humanité, a indiqué le Rapporteur spécial.

M. Rehman s’est également inquiété des restrictions imposées à un espace civique déjà cadenassé, regrettant la poursuite de l’emprisonnement de Narges Mohammadi, lauréate du prix Nobel de la paix 2023.  Il a condamné les restrictions inacceptables imposées à la liberté d’expression, y compris l’emprisonnement de défenseurs des droits humains et de journalistes, ainsi que les perturbations de l’accès à l’Internet.  Il a aussi fustigé les détentions arbitraires de ressortissants étrangers ou de personnes ayant la double nationalité, déplorant l’exécution en 2023 d’Alireza Akbari, ressortissant iranien d’origine britannique, et de Habib Chaab, ressortissant iranien d’origine suédoise.

Il s’est inquiété de l’augmentation exponentielle du nombre d’exécutions dans le pays, évoquant des chiffres « alarmants » en ce qui concerne le trafic de drogues.  Au moins 582 personnes ont été exécutées en 2022 dont 256 pour des délits liés aux stupéfiants, comparativement à au moins 572 exécutions signalées en 2023 dont 305 pour des accusations liées aux drogues.  En outre, sept personnes ont été exécutées en raison de leur participation aux manifestations nationales, a-t-il signalé, s’inquiétant de voir la peine de mort imposée pour des actes qui ne devraient pas être considérés comme criminels. Les minorités sont également la cible d’exécution, de disparitions forcées et de condamnations arbitraires.

Le Rapporteur spécial a ensuite dit être choqué par la prise pour cible, le harcèlement et la discrimination systématiques que subissent les femmes et les filles en Iran.  Il s’est notamment inquiété de la loi sur la promotion de la culture de chasteté et du hijab qui prévoit des peines de prison et de flagellation pour les femmes qui violent le code vestimentaire.  Le redéploiement de la police des mœurs est également très préoccupant.  En outre, le 31 juillet, plus de 13 000 élèves, dont une majorité de filles, auraient été victimes d’un empoisonnement présumé dans plus de 100 établissements scolaires, a-t-il signalé, avant de fustiger l’inefficacité de la réponse des autorités et leur incapacité à protéger les étudiantes.

Pour le Rapporteur spécial, les « critères islamiques » invoqués accroissent les limitations constitutionnelles et législatives existantes, entraînant une négation des principes de l’état de droit.  En outre, l’échec à s’engager dans un dialogue démocratique et l’incapacité à introduire des réformes progressives ont conduit à une méfiance considérable du public.  Il a également dit être sérieusement préoccupé par les lois et politiques qui violent le droit à la liberté de réunion et d’association pacifique, ainsi que par celles qui écartent les femmes des cercles décisionnels, jusqu’à leur dénier le droit de voter, d’être élues, ou d’accéder aux services publics. 

Dialogue interactif

Ouvrant les échanges, la République islamique d’Iran s’est élevée contre le rapport la concernant, estimant qu’il n’était ni objectif, ni impartial.  La délégation a rejeté les critiques de sa Constitution et de ses lois, y voyant une atteinte à sa souveraineté, qualifiant par ailleurs de fausses les allégations concernant la mort de Jina Mahsa Amini, ou la situation des minorités ethniques et religieuses, affirmant en outre que la peine de mort ne concernait que les crimes les plus graves. Elle a reconnu que le rapport fait état des conséquences négatives des mesures coercitives illégales sur la population, mais a regretté qu’il n’appelle pas à y mettre fin.  Le Rapporteur spécial nuit à la crédibilisé du Conseil des droits de l’homme (CDH), a affirmé la délégation iranienne, l’accusant en outre de nier les faits et de ne pas tenir compte de ses observations. Elle a également dénoncé sa proximité avec le Royaume-Uni et les pays occidentaux, qui sont du « mauvais côté de l’histoire », les accusant de violer eux-mêmes les droits humains tout en notant qu’aucun pays n’est parfait.  Elle a condamné le meurtre d’un garçon musulman de 6 ans aux États-Unis en raison de la « campagne de haine » qui y est menée. 

De nombreuses délégations sont également intervenues pour rejeter les mandats sur des pays spécifiques, et se prononcer en faveur de l’Examen périodique universel (EPU), y voyant un meilleur cadre pour évaluer le respect des droits humains dans un pays.  Ce fut notamment le cas du Venezuela, de Cuba -qui a dénoncé la politisation des droits humains– du Nicaragua, de la République populaire et démocratique de Corée (RPDC), de la Chine et du Bélarus.  Ces États ont également exhorté à la levée des mesures coercitives unilatérales, de même que la Fédération de Russie qui s’est inquiétée de l’impact négatif de ces mesures, fustigeant la politique agressive des États-Unis et de leurs alliés. 

La République arabe syrienne a, de plus, rejeté l’affirmation contenue dans le rapport selon laquelle il n’y avait pas eu d’enquête concernant la mort de Jina Mahsa Amini, indiquant que le Conseil syrien des droits de l’homme lui avait consacré deux longs rapports.  De son côté, le Pakistan a regretté que la communauté internationale n’ait jamais établi un mandat spécifique contre un pays développé ou un pays abritant les intérêts économiques des États puissants, estimant que la situation au Jammu-et-Cachemire était un bon exemple de ce prisme, alors que des violations des droits humains y sont commises en toute impunité par l’Inde.  Rejetant lui aussi les résolutions spécifiques, Sri Lanka a argué du fait que la promotion et la protection des droits humains ne pouvaient progresser sans la participation du pays concerné. 

Adoptant des positions diamétralement opposées, les États-Unis ont rappelé que plus de 500 Iraniens avaient été exécutés en 2023 dénonçant en outre la torture, les violences sexuelles et les arrestations arbitraire.  Le Canada a dénoncé une situation des droits humains déplorable, suivi de l’Irlande qui s’est préoccupée de la répression violente des manifestations. La délégation a également voulu savoir si les lois inscrites au paragraphe 48 du rapport étaient appliquées.  L’Australie a dénoncé les discriminations à l’égard des femmes et des filles, suivie de l’Islande qui s’est inquiétée de l’utilisation des technologies numériques pour les surveiller et les punir, demandant à l’Iran de renoncer à toutes les mesures discriminatoires dont elles font l’objet. 

Le Royaume-Uni s’est inquiété du nombre croissant d’exécutions et a demandé à l’Iran de prononcer un moratoire sur la peine de mort et de cesser les exécutions pour des peines liées aux stupéfiants.  Il faut aussi prononcer un moratoire sur l’exécution des mineurs, a renchérit la Suisse qui a demandé des précisions sur l’application de la loi sur la culture de chasteté et le hijab qui, s’est-elle inquiétée, peut imposer des peines pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison. Comment améliorer les droits des minorités sexuelles, ethniques et religieuses en Iran, s’est enquise l’Allemagne qui, de même que la Norvège, a appelé l’Iran à ouvrir ses portes aux Rapporteur spécial. 

Les Pays-Bas ont réclamé une enquête sur la situation d’Armita Geravand. Par ailleurs, comment garantir un accès à un Internet libre en Iran alors que l’accès se restreint?  L’Union européenne s’est inquiétée de l’arrestation de 20 000 personnes en Iran et du décès de 500 personnes du fait de l’utilisation disproportionnée de la force.  Que peut-on faire pour amener le Gouvernement de l’Iran à cesser les exécutions, en particulier concernant les enfants, les usagers de stupéfiants et les manifestants?  La délégation s’est aussi inquiétée de nouvelles législations visant les femmes et les filles et a demandé plus de détails sur ces dernières au Rapporteur spécial. 

Israël a accusé, pour sa part, l’Iran de soutenir des organisations terroristes comme le Hezbollah et le Hamas et d’instrumentaliser les institutions des droits humains.  Reprenant la parole, l’Iran a dénoncé les violations des droits humains commises par le « régime israélien », notamment la colonisation. La délégation a aussi dénoncé les États-Unis, les accusant de tuer les ressortissants d’autres pays en leur déclarant des guerres économiques. 

Réagissant à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran a indiqué qu’il n’avait pas pu se rendre dans le pays depuis son entrée en fonction en 2018.  Regrettant les allégations selon lesquelles son rapport serait motivé politiquement, il a demandé aux autorités de s’engager avec lui sur le fond de son étude.

Concernant l’impact des sanctions, le rapport mentionne les répercussions sur le secteur de la santé et sur la situation économique, a fait remarquer le Rapporteur spécial, faisant part de son appui en faveur des dérogations humanitaires.  Cela dit, les sanctions ne peuvent pas être utilisées pour justifier la promulgation de lois et pratiques qui brutalisent les femmes et les obligent à porter leur hijab contre leur volonté, a-t-il estimé, appelant à tenir pour responsables les auteurs de la mort de Jina Mahsa Amini.  Il s’est également inquiété du sort d’Armita Geravand en « état de mort cérébrale », appelant le gouvernement à revoir la loi rendant le port du hijab obligatoire. 

Après avoir rappelé le nombre d’exécutions commises en 2023, le Rapporteur spécial a appelé l’Iran à abolir la peine de mort, y compris pour les enfants et adolescents.  De même, il a appelé à la libération sans condition de toutes les personnes détenues arbitrairement, évoquant de nouveau le cas de Narges Mohammadi.  Les journalistes ayant couvert la mort de Jina Mahsa Amini ont aussi été condamnés à de lourdes peines, s’est-il inquiété.  Après s’être félicité de la libération d’au moins six étrangers ou binationaux, il a alerté sur ce phénomène visant à obtenir d’autres gains en échange de ces libérations. 

Exposé

M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne, a alerté les États Membres sur « la plus grande escalade des hostilités en Syrie depuis quatre ans ».  Il a déploré un mépris total pour la vie des civils alors que les parties se livrent à une « spirale de représailles ».  Il a indiqué que, ce mois-ci, à la suite d’une attaque contre une cérémonie de remise de diplômes à l’académie militaire de Homs, les bombardements sur la province d’Edleb ont frappé des centres médicaux, des écoles et des marchés, tuant ou blessant 200 civils en quatre jours et forçant des dizaines de milliers d’autres à fuir.  Par ailleurs, en représailles à une attaque qui a blessé deux membres des forces de sécurité turques à Ankara, le 1er octobre, la Türkiye aurait répondu par de lourds bombardements sur Hassaké, notamment sur des centrales électriques et des stations d’eau, ce qui a affecté des centaines de milliers de civils.  M. Pinheiro a également rappelé les frappes aériennes israéliennes sur les aéroports internationaux de Damas et d’Alep, le 22 octobre, les deuxièmes ce mois-ci, qui ont mis ces installations temporairement hors service et perturbé l’acheminement de l’aide humanitaire.

Dans ce contexte, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante a estimé que le manque de respect de longue date pour les règles fondamentales du droit international humanitaire en Syrie a « érodé l’essence même du système de protection internationale », avec des conséquences dans d’autres conflits en cours.  Renvoyant à son dernier rapport, présenté le mois dernier au Conseil des droits de l’homme, il a rappelé « la situation humanitaire désespérée et la fragmentation croissante » de la Syrie, auxquelles contribuent les attaques des armées syrienne et russe dans le nord-ouest du pays touché par le séisme de février dernier, les assassinats, les enlèvements et les détentions arbitraires qui se multiplient dans le sud et le centre, et les violences que subissent les 49 000 personnes entassées dans les camps de Hol et Roj, dans le nord-est. 

« La Syrie reste la plus grande crise de réfugiés au monde, avec plus de sept millions de Syriens ayant fui le pays et plus de six millions de personnes déplacées », a résumé M. Pinheiro, signalant que beaucoup de réfugiés ne peuvent pas rentrer car ils ne seraient pas en sécurité et ne pourraient accéder à leurs maisons.  Il a ajouté que la livre syrienne a perdu 80% de sa valeur en trois mois et que plus de 90% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.  Estimant que rien ne prouve que les mesures coercitives unilatérales sectorielles appliquée au cours de la dernière décennie ont entraîné des changements positifs de la part du Gouvernement syrien ou d’autres acteurs, il a regretté que les civils en paient le prix ainsi que celui de la sur-conformité qui en découle.  Il a appelé les États Membres à travailler pour limiter les conséquences sur la population, et demandé l’extension des exemptions humanitaires destinées à faciliter l’acheminement de l’aide. 

Malgré ce sombre tableau, M. Pinheiro s’est félicité de signes d’espoir comme les manifestations pacifiques à Soueïda, avant d’appeler toutes les parties à reconnaître les aspirations légitimes du peuple syrien et à respecter ses droits humains.  Il a également applaudi la création de l’institution dédiée aux dizaines de milliers de personnes disparues afin d’aborder de manière globale ce « traumatisme national permanent ».  Se disant encouragé de voir les témoignages des survivants amplifiés par les procédures devant la Cour internationale de Justice (CIJ), il y a vu une étape importante en vue d’ordonner à l’État syrien de mettre fin à la pratique systématique de la torture.

Après avoir rappelé que plus de 15 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante s’est inquiété de l’incertitude qui planera à nouveau le mois prochain sur la possibilité de poursuivre son acheminement transfrontalier, le consentement du Gouvernement pour deux points de passage risquant d’expirer le 13 novembre.  « Cette situation doit cesser », a-t-il affirmé, exhortant la communauté internationale à veiller à ce que l’aide transfrontalière soit fournie de manière durable, prévisible et en quantités suffisantes.  Notant en conclusion que les contacts avec le Gouvernement syrien s’intensifient, il a appelé les États Membres à placer les droits humains et les demandes légitimes du peuple syrien au cœur de leurs efforts diplomatiques.  « Lui tourner le dos, et même maintenir le statu quo, perpétuerait la misère du peuple syrien au lieu de le soulager », a-t-il dit. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, les Pays-Bas ont demandé au Président de la Commission d’enquête internationale indépendante de fournir des recommandations pour appuyer la société syrienne dans ses efforts de lutte contre les violations des droits humains.  L’Irlande a souhaité savoir comment la communauté internationale peut protéger les réfugiés syriens qui souhaitent rentrer chez eux en dépit des violations commises par le Gouvernement.  Que peut faire de plus la communauté internationale pour soutenir les droits des femmes et l’égalité des sexes en Syrie et comment garantir que les femmes défenseurs des droits humains puissent continuer à faire leur travail essentiel? s’est enquise Malte, tandis que le Luxembourg voulait connaître les recommandations de M. Pinheiro sur l’inclusion de la dimension de genre dans tous les volets de la crise syrienne.

La Suisse a ensuite demandé à M. Pinheiro de préciser ce que recommande la Commission d’enquête internationale indépendante pour empêcher une escalade supplémentaire des hostilités.  Le Royaume-Uni a souhaité connaître l’avis du Président de la Commission d’enquête s’agissant de l’incertitude qui entoure l’accès de l’aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie.  Après les États-Unis, qui ont jugé urgent de mettre un terme à l’impunité en Syrie, l’Australie a voulu savoir comment la communauté internationale peut obliger les responsables syriens à rendre des comptes relativement aux attaques contre les civils et infrastructures civiles.

Après avoir dénoncé l’appui apporté par le régime syrien à « l’organisation génocidaire Hamas », Israël a appelé le Président de la Commission d’enquête à détailler les répercussions de l’exportation du captagon par la Syrie, particulièrement sous l’angle des droits humains.  À sa suite, l’Allemagne s’est déclarée préoccupée par les processus de normalisation avec le régime syrien, avant de réitérer son ferme appui à la promotion d’une solution politique appuyée par l’ONU, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Le Brésil a, pour sa part, souligné la nécessité d’appuyer une solution à la crise qui soit respectueuse de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie.

De leur côté, le Venezuela, le Bélarus, Cuba, l’Érythrée, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et la Chine ont tous exprimé une position de principe consistant à rejeter la création de mécanismes spécifiques à des pays au sein du Conseil des droits de l’homme, estimant qu’ils créent des espaces de confrontation et ne contribuent pas à un dialogue constructif avec les États.  Ils ont également appelé à la levée de toutes les mesures coercitives unilatérales imposées à la Syrie.  Une position également défendue par la Fédération de Russie, selon laquelle le développement socioéconomique de la Syrie est entravé par les sanctions unilatérales illégales imposées par des pays occidentaux soucieux de « régler leurs comptes avec leurs opposants politiques ».  Accusant d’autre part les États-Unis d’occuper une partie du territoire syrien, au mépris des principes de la Charte des Nations Unies, elle a estimé que ce pays porte directement atteinte à l’intégrité territoriale de la Syrie en soutenant des groupes séparatistes.  Elle a également dénoncé les frappes aériennes et les tirs de missiles auxquels se livrent des « États tiers » contre la Syrie. La Chine a, elle aussi, mis en cause les États-Unis, l’accusant d’avoir pillé « plus de 80% des ressources pétrolières syriennes », en violation des droits du peuple syrien.

En conclusion de cette série d’interventions, la République arabe syrienne a indiqué que sa participation au dialogue interactif ne constitue « ni une reconnaissance ni une volonté de dialoguer avec la Commission d’enquête ou ses rapports ».  Ces derniers relèvent d’une campagne systématique de désinformation, a jugé la délégation, qui a souhaité exposer les raisons de sa ferme opposition à la Commission d’enquête et de sa non-coopération.  Mettant successivement en cause les paragraphes 5, 15 et 29 du rapport, elle a reproché à la Commission d’enquête de s’appuyer sur des sources inexistantes ou alimentées à travers des déclarations à la presse.  En venant au paragraphe 47, consacré aux attaques perpétrées par le groupe Hay’at Tahrir el-Cham (HTS) qui n’auraient fait « aucune victime civile », la délégation s’est demandé si la Commission d’enquête entendait promouvoir cette organisation, pourtant désignée comme terroriste et inscrite comme telle sur la liste du Conseil de sécurité depuis 2014.  Accusant la Commission d’enquête de vouloir s’en prendre au Gouvernement syrien pour des motifs politiques, elle a pris à témoin les États Membres de la « prédominance » de cette tendance dans le rapport de M. Pinheiro. 

En réponse aux remarques et questions des délégations, le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne a rappelé, en premier lieu, que les civils sont ciblés par toutes les parties en Syrie.  Selon lui, la situation syrienne s’est détériorée ces quatre dernières années et atteint aujourd’hui son niveau le plus grave.  Les souffrances de la population augmentent non seulement à cause du conflit, mais aussi parce que l’économie est détruite, laissant 90% de la population en dessous du seuil de pauvreté, a-t-il souligné. M. Pinheiro s’est ensuite déclaré préoccupé par les mesures coercitives unilatérales qui visent la Syrie, estimant qu’elles « dépassent les bornes » et frappent essentiellement les populations.  Appelant les États qui les appliquent à réfléchir à leurs incidences, il a également reconnu que certains effets négatifs sont causés par l’État syrien, eu égard à la façon dont il distribue l’aide dans le pays. 

Le Président de la Commission d’enquête est, par ailleurs, revenu sur les problèmes rencontrés par les Syriens qui, de retour dans leur pays, sont arrêtés ou torturés.  De nombreux Syriens de l’étranger veulent rentrer chez eux, mais ils sont « gagnés par la peur », a expliqué M. Pinheiro, ajoutant que ces personnes craignent aussi de ne plus rien retrouver de leurs biens et de n’avoir aucun moyen de subsistance dans un pays aujourd’hui exsangue.  La Syrie pourrait coopérer avec la communauté internationale à ce titre, a-t-il avancé, avant d’appeler le Gouvernement à collaborer également avec l’Institution indépendante chargée de la question des personnes disparues en République arabe syrienne, créée cette année par l’Assemblée générale.  « Coopérez, car l’objectif de ce mécanisme est d’aider et non de surveiller des droits humains », a-t-il lancé à l’adresse des autorités syriennes, ajoutant que les disparitions concernent toutes les communautés syriennes, qu’elles soient antigouvernementales ou loyalistes. 

Exposé

M. RICHARD BENNETT, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan, a décrit une « tempête parfaite de défis » à laquelle est confrontée la population afghane, notant que les conséquences du séisme qui a frappé Hérat ont été exacerbées par des décennies de guerre, une crise économique, le sous-financement de l’aide humanitaire et la détérioration de la situation des droits humains depuis la prise de pouvoir des Taliban en août 2021.  Il a alerté que la situation des femmes et des jeunes filles s’est considérablement détériorée, expliquant qu’elles font face à un rétrécissement continu des activités économiques autorisées en dehors du foyer.  Les femmes ne sont pas non plus autorisées à se réunir dans les parcs, a-t-il ajouté, notant toutefois que les mariages forcés ont été interdits par les Taliban. 

En outre, de plus en plus de femmes et de jeunes filles n’ont pas accès à l’enseignement secondaire ni à l’université.  En plus de réduire les possibilités d’épanouissement personnel et éducatif des femmes et des filles, la suspension de l’école a annulé des décennies de progrès, affectant leurs chances d’accéder à l’indépendance financière, perpétuant les cycles de pauvreté et renforçant les rôles traditionnels des hommes et des femmes.  Notant que le droit à l’éducation est une condition préalable à la revendication de nombreux autres droits humains, il a appelé à examiner de manière approfondie le phénomène évolutif de « l’apartheid sexiste ».  En outre, les mesures visant à limiter l’éducation aux madrassas ou à l’axer principalement sur les études religieuses risquent de priver les enfants de connaissances essentielles ou de créer un terrain fertile pour les idéologies radicales, a-t-il mis en garde.

Le Rapporteur spécial s’est aussi préoccupé de la situation des femmes défenseuses des droits humains, évoquant notamment l’arrestation de Zholia Parsi, Neda Parwani, Rasoul Abdi, et Matiullah Wesa.  Ces arrestations réduisent encore plus l’espace civique déjà effondré, a-t-il déploré, notant qu’il n’existe plus dans le pays d’institutions indépendantes capables de documenter librement les violations des droits humains.  Qui plus est, une culture de l’impunité prévaut pour les cas de torture et de traitement inhumains perpétrés en prison ainsi que pour les violations des droits humains des anciens fonctionnaires du Gouvernement et du personnel militaire, et ce malgré l’amnistie générale décrétée par les Taliban. 

Préoccupé par projet du Pakistan pouvant conduire à l’expulsion massive de 1,4 million d’Afghans, il a par ailleurs exhorté au respect du principe de non-refoulement, appelant en outre à soutenir les Afghans fuyant les persécutions et achever les programmes lancés en 2021 relatifs à la réinstallation. L’Afghanistan doit demeurer une priorité de l’agenda international, a insisté le Rapporteur spécial qui a appelé à écouter et soutenir les Afghans et organisations afghanes, en particulier les femmes.  Ces dernières doivent être entendues dans les forums nationaux et internationaux, a-t-il estimé, insistant ensuite sur l’importance d’examiner l’aide internationale sous l’angle des droits humains, et de soutenir les mécanismes internationaux d’enquête et de reddition de comptes.

Dialogue interactif

Dans un premier temps, l’Afghanistan a félicité le Rapporteur spécial pour son exposé complet mais alarmant.  La délégation a indiqué que la situation des droits humains en Afghanistan est profondément préoccupante et multiforme, englobant un large éventail de défis, parmi lesquels la suppression délibérée des droits et libertés fondamentaux des femmes et des filles, y compris le droit à l’éducation et le droit à l’emploi. De plus, la crise humanitaire, due à l’absence d’une gouvernance responsable, exacerbe la vulnérabilité, l’exploitation, et les abus des femmes et des filles.  En outre, la répression exercée par les Taliban à l’encontre des journalistes et des professionnels des médias a gravement porté atteinte à la liberté de la presse, a poursuivi la délégation, faisant état de journalistes arrêtés, menacés, ou tués.  L’espace civique en Afghanistan a presque disparu, et les Taliban ont réintroduit des politiques draconiennes datant des années 90, en appliquant des châtiments corporels, notamment la lapidation, les flagellations publiques et les exécutions extrajudiciaires. 

La délégation a également fait état d’une augmentation du travail des enfants et les violences sexuelles à leur encontre, s’inquiétant en outre des persécutions endurées par les minorités, ainsi que des discriminations éprouvées par les personnes handicapées, les réfugiés, et les migrants, en particulier dans les pays voisins.  La délégation a toutefois salué la déclaration commune des Rapporteurs spéciaux du 17 octobre, concernant la prévention de l’expulsion collective et le retour forcé de 1,4 million de réfugiés afghans du Pakistan.  La délégation a jugé impératif que la communauté internationale prenne des mesures concertées pour remédier à ces violations, et pour garantir un règlement global qui conduise à la formation d’une structure politique légitime à large assise, fondée sur les aspirations des peuples et le respect des droits humains. 

À l’instar de l’Autriche, l’Irlande, l’Islande, et du Canada qui se sont émus des cas de suicides chez les femmes et les filles, la France a déclaré que les violations systématiques des droits des femmes et des filles en Afghanistan sont constitutives d’une politique de ségrégation, voire de persécution des personnes en fonction de leur sexe. Quelles sont les actions menées dans le domaine de l’éducation et quels sont leurs impacts sur les droits des filles en particulier? L’Union européenne, elle, s’est intéressé aux principales voies de responsabilisation pour les violations des droits humains documentés, tandis que le Luxembourg a évoqué le problème de la radicalisation des nouvelles générations. 

Si les Taliban veulent être reconnus comme des interlocuteurs internationaux, ils doivent obéir préalablement aux principes de la Charte des Nations Unies, ont souligné les Pays-Bas.  Après la Norvège et la Suisse, le Royaume-Uni a relevé les liens entre la dégradation des moyens de subsistance, le manque d’opportunités et la détérioration de la santé mentale des femmes et des filles, ainsi que l’augmentation des mariages d’enfants et des mariages forcés.  La question de reddition de comptes a préoccupé les États-Unis et l’Allemagne ainsi que l’Espagne, qui a indiqué avoir élaboré, avec des femmes afghanes et des juristes espagnols, une feuille de route pour obliger les Taliban à rendre des comptes pour crimes contre l’humanité et persécution fondée sur le genre devant la Cour pénale internationale (CPI). 

Comment persuader les Taliban du rôle central que jouent les femmes et les minorités pour la prospérité du pays? a demandé l’Australie, tandis que l’Albanie a insisté sur l’importance d’appuyer les organisations de la société civile œuvrant dans le pays.  Le Liechtenstein a requis, pour sa part, des informations sur la réaction des Taliban à la visite la plus récente du Rapporteur spécial, de même que le Japon qui a voulu savoir si la question de l’éducation avait été abordée.

Après la Croatie qui a déploré que les femmes soient écartées par les autorités, la République de Corée a relevé que les pratiques discriminatoires des Taliban aggravent la crise humanitaire dans son ensemble.  Des solutions politiques durables constitueraient un pas en avant pour tous les Afghans, a estimé l’Indonésie, suivie de la Malaisie et de la République dominicaine qui a demandé comment mieux coopérer avec d’autres procédures spéciales pour que l’Afghanistan devienne une priorité internationale.  En outre, comment maintenir l’engagement de l’ONU à employer des femmes afghanes, a ajouté Malte

La Fédération de Russie a déploré, pour sa part, que les crimes commis par les forces armées américaines et britanniques à l’encontre des Afghans ne feront probablement jamais l’objet d’une enquête.  Accusant les États-Unis d’avoir pillé des avoirs afghans, la Chine a demandé la levée des mesures coercitives unilatérales.  Le Pakistan, lui, a exhorté les États Membres à se concentrer sur l’aide aux Afghans, et ce, au-delà des réalités géopolitiques. 

Reprenant la parole, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan a relayé le message des femmes afghanes qui demandent à ce que les États Membres leurs parlent, appelant en outre aux États Membres d’appuyer les organisations de défense des droits humains.  Rappelant que les mesures de restriction de l’accès à l’éducation sont censément provisoires, il a appelé à continuer d’exercer des pressions pour que les Taliban rouvrent immédiatement les institutions d’éducation pour les femmes et les filles.  Au-delà de l’ouverture d’institutions d’éducation, il convient aussi de s’assurer que les programmes scolaires et universitaires permettent d’assurer l’avenir et le développement du pays, a-t-il ajouté.  Abordant la question de la redevabilité, il a évoqué les enquêtes de la Cour pénale internationale (CPI), encourageant les États à explorer leurs compétences universelles ou la saisine de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il s’est inquiété du rétrécissement de l’espace de la société civile, et a appelé à ne pas oublier les personnes handicapées et déplacées qui méritent aussi l’attention de la communauté internationale.  Il faut également écouter la jeunesse, a-t-il ajouté, rappelant que moitié de la population afghane a moins de 22 ans. 

Exposé

Ouvrant son intervention par une minute de silence en mémoire des civils tués dans le dernier conflit au Moyen-Orient, Mme NAVI PILLAY, Présidente de la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël, s’est inquiétée de l’éruption de violence, qui, depuis le 7 octobre, a coûté la vie à des milliers de civils.  Elle a condamné sans équivoque l’assassinat de plus d’un millier de citoyens israéliens, les milliers de blessés et la capture de plus de 200 otages, dont des enfants, par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens. Elle a également condamné sans équivoque les attaques israéliennes qui ont entraîné la mort de milliers de civils palestiniens, dont des centaines d’enfants.  « Il y a des indications claires que des crimes internationaux ont été et sont commis », a-t-elle prévenu, appelant à la cessation immédiate des hostilités, au respect du droit international humanitaire et à la libération immédiate de tous les otages.  Mme Pillay a indiqué que la Commission avait immédiatement commencé à recueillir des preuves, demandant au Gouvernement israélien, à l’Autorité palestinienne et à l’autorité de facto du Hamas à Gaza de soutenir cette enquête, notamment en autorisant les enquêteurs à entrer en Israël et à Gaza dès que possible. 

Évoquant le contenu de son rapport, achevé avant la dernière flambée de violence, la Présidente a constaté que les opérations de maintien de l’ordre de plus en plus militarisées d’Israël en Cisjordanie occupée et les attaques répétées contre Gaza, violent systématiquement le droit international relatif aux droits humains et le droit international humanitaire.  « Ces actions sont intrinsèquement liées aux objectifs d’Israël, qui consistent à maintenir l’occupation illégale et, en fin de compte, à nier le droit à l’autodétermination des Palestiniens en empêchant la création d’un État indépendant », a-t-elle affirmé. 

Tout en estimant que les tirs aveugles de projectiles par des groupes armés à Gaza en direction de villes israéliennes constituent un « crime de guerre », Mme Pillay a constaté que les forces de sécurité israéliennes utilisent une force « systématiquement excessive » et des moyens aveugles contre les manifestants palestiniens, tirant couramment à balles réelles contre des personnes non armées et causant des décès et des blessures permanentes. Elle a aussi constaté que les opérations de maintien de l’ordre sont traitées par Israël comme des opérations militaires pendant des hostilités, avec des règles d’engagement beaucoup plus permissives, en violation du droit international.  Rappelant à cet égard que la journaliste palestinienne Shireen Abu Akleh a été tuée par balle alors qu’elle s’apprêtait à faire un reportage sur une de ces opérations à Jénine en mai 2022, elle a vu dans cet homicide le résultat direct de la militarisation d’Israël et dénoncé une violation, intentionnelle ou par imprudence, du droit à la vie.  Affirmant avoir conclu que des hommes de l’unité Duvdevan de l’armée israélienne se trouvaient dans le véhicule d’où le coup de feu est parti, elle a précisé que le nom de son chef est connu de la Commission. 

La Présidente a ensuite déploré que les autorités israéliennes aient systématiquement omis de prendre des mesures de précaution efficaces pour éviter les pertes civiles lors des incursions et des bombardements contre Gaza, entraînant la mort de milliers de personnes.  Dans le même temps, elle a constaté que les groupes armés palestiniens ont tiré sans discernement des milliers de projectiles en direction des villes israéliennes, tuant là encore des civils, ce qui, selon la Commission, constitue un crime de guerre visant à terroriser la population. 

Dans ce contexte, Mme Pillay s’est déclarée encouragée par la résolution de l’Assemblée générale demandant un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) concernant l’occupation israélienne du Territoire palestinien, comme l’avait recommandé la Troisième Commission.  Elle a appelé toutes les parties à coopérer pleinement aux enquêtes, notamment celle relative à la mort de Shireen Abu Akleh.  « Par-dessus tout, le Gouvernement israélien doit mettre fin sans délai à ses 56 années d’occupation et reconnaître le droit du peuple palestinien à l’autodétermination », a-t-elle martelé en conclusion. 

Dialogue interactif

Dans la foulée de cet exposé, Israël a attiré l’attention des États Membres sur les 30 enfants retenus en otages par « une organisation qui a perpétré les pires atrocités imaginables » en brûlant des femmes, des enfants et des personne âgées, en se livrant à des viols et en filmant ses actes. Il a ensuite regretté que, depuis sa création, la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien et en Israël, se soit employée à négliger la terreur palestinienne et à délégitimer Israël et le droit qu’il a de se défendre. Ce faisant,  « vous avez envoyé un message au Hamas et à l’Iran sur le fait qu’ils ont peu à craindre sur le plan international », a poursuivi la délégation, selon laquelle « le Hamas vous a entendue ».  Ainsi, « lorsque vous justifiez le terrorisme, vous l’excusez », a-t-elle insisté, rappelant que cette attaque, « la pire de l’histoire d’Israël », a causé la mort de 1 400 personnes, dont des femmes et des enfants.  Selon elle, le Hamas et d’autres groupes terroristes planifient ce type d’actions depuis des décennies. 

À l’appui de ses dires, la délégation a rappelé que, pendant la soi-disant « grande marche du retour » du Hamas en 2018, le chef du Hamas avait promis de « détruire la frontière avec Israël » et d’ « arracher le cœur » des Israéliens.  Alors que le Hamas était très clair concernant ses objectifs, beaucoup n’ont pas écouté, a regretté la délégation, pour qui le rapport présenté par Mme Pillay et ses accusations infondées contre Israël « démontrent la corruption morale de cette commission ».  « Comment osez-vous comparer une organisation terroriste inhumaine avec les forces de défense israéliennes », s’est-elle indignée, avant d’estimer que les « péchés d’omission » relevés dans le rapport, prendraient des heures à être énumérés.  Rappelant que l’ONU a été créée après l’Holocauste nazi et repose sur la base du « plus jamais ça », elle a jugé que ce nouveau massacre de juifs impose à chacun de faire son choix.  « Vous, commissaires, avez fait le vôtre et nous avons fait le nôtre en Israël », a conclu Israël, promettant de ne pas se reposer « tant que nous n’aurons pas vaincu le Hamas ». 

L’État de Palestine s’est, pour sa part, demandé pourquoi la situation des droits humains en Palestine, zone de conflit et territoire occupé, ne pourrait pas être examinée par la Troisième Commission.  L’État d’Israël, Puissance occupante, a-t-il un statut particulier et les Palestiniens ne valent-t-il rien?  Il a indiqué que sa responsabilité, comme celle de tous les États, est de protéger ses citoyens, ce qu’il s’efforce de faire par des moyens juridiques et politiques.  Il a accusé Israël d’avoir toujours eu recours aux châtiments collectifs, en ciblant des civils, notamment des enfants, des journalistes et des humanitaires, en détruisant les maisons, en déplaçant les populations et en coupant l’eau, l’électricité et l’accès à l’aide humanitaire. 

La délégation a dénoncé la campagne criminelle de déshumanisation à laquelle se livre Israël, jugeant que ce traitement rend les actions palestiniennes légitimes.  « Nous ne sommes pas, comme ils disent, des animaux humains, nous sommes des êtres humains », a-t-elle martelé, rappelant que la population des territoires palestiniens occupés, souffre d’une injustice et d’une oppression prolongées.  Face à cette situation, elle a exhorté les États Membres à être justes, à faire respecter le droit international humanitaire et la protection des civils, à reconnaître la valeur égale des vies palestiniennes et à mettre un terme à la guerre d’Israël contre Gaza.  « Abandonner le peuple palestinien maintenant, serait une trahison de l’humanité et du droit international », a-t-elle insisté, appelant à soutenir  « la paix, pas la guerre; la justice, pas la vengeance ». 

À sa suite, le Chili a insisté sur la nécessité de mettre fin à l’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, tandis que l’Afrique du Sud dénonçait un « régime de répression systématique » des Palestiniens, estimant que les événements de Gaza « nous ramènent 75 ans en arrière ».  L’Égypte a, elle, exprimé sa crainte que des crimes contre l’humanité soient commis à Gaza.  Appelant à un cessez-le-feu immédiat, Cuba a dénoncé la complicité des États-Unis, responsables selon elle de l’impunité avec laquelle Israël agit.  À ce sujet, l’Algérie a souhaité savoir s’il est envisageable qu’un tribunal spécial soit créé par une résolution du Conseil de sécurité pour juger les crimes d’Israël.  Que peuvent faire les États Membres pour qu’Israël soit ajouté dans les annexes du rapport du Secrétaire général sur les enfants touchées par les conflits, a renchéri la République islamique d’Iran.  L’Iraq a, lui, voulu connaître l’avis de la Présidente de la Commission sur les mécanismes à utiliser pour demander des comptes à la Puissance occupante pour ses crimes de guerre et ses crimes contre l’humanité, y compris la violation systématique des Conventions de Genève. 

De son côté, l’Autriche a voulu savoir comment la Commission prévoit d’enquêter sur les crimes commis par le Hamas contre les civils en Israël.  Le Royaume-Uni, l’Albanie et l’Australie ont ensuite mis en cause la probité de la Commission, à laquelle ils ont reproché de faire preuve d’impartialité.  Se présentant comme un « pays à vocation pacifique », le Guatemala a appelé les parties au conflit à dialoguer.  Il a également invité la Commission à rendre compte de la situation de façon impartiale et à respecter le droit qu’a Israël de défendre sa population face aux organisations terroristes.  La Türkiye a appelé Israël à respecter ses obligations en vertu du droit international et à protéger les libertés et les droits fondamentaux du peuple palestinien.  Le Brésil a, quant à lui, exhorté toutes parties à respecter le droit international, avant de réaffirmer son ferme appui à la solution des deux États. Il a aussi demandé la libération des otages retenus à Gaza et la création de couloirs humanitaires pour la population de ce territoire.  À sa suite, l’Irlande a souhaité savoir comment assurer la redevabilité dans ce conflit, rappelant que « même les guerres ont des règles ». Elle a par ailleurs appuyé l’appel au cessez-le-feu humanitaire lancé par le Secrétaire général de l’ONU. 

L’Union européenne a rappelé que ses États membres n’ont pas appuyé la création de la Commission à cause de son mandat trop vaste et de sa nature permanente.  L’Allemagne a condamné les actes de terreur du Hamas et exprimé sa solidarité avec Israël, tout en appelant ce dernier à respecter le droit international et le droit international humanitaire.  Elle s’est par ailleurs déclarée préoccupée par l’attention disproportionnée accordée à Israël dans les instances de l’ONU.  La Hongrie s’est, elle aussi, inquiétée du caractère partial de la Commission, ainsi que de la nature trop vaste et permanente de son mandat. La Bulgarie a exprimé la même préoccupation, demandant que le prochain rapport de la Commission intègre un paragraphe de condamnation ferme du Hamas et de son agression.  À son tour, l’Italie s’est alarmée de la nature illimitée du mandat de la Commission, l’appelant à être impartiale.  Rien ne peut justifier le terrorisme, a-t-elle fait valoir.  La République tchèque a dénoncé un mécanisme partial avec un mandat illimité et a appuyé le droit d’Israël à se défendre.  Sur cette même ligne, les États-Unis ont appuyé le droit d’Israël à la légitime défense, avant de réaffirmer leur soutien inébranlable à Israël et de rappeler les efforts déployés par le Président Biden pour garantir l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza.  La Micronésie a également dénoncé l’accent disproportionné mis sur l’État d’Israël, allant jusqu’à dénoncer l’antisémitisme et la partialité des membres de la Commission.  Plus mesuré, Nauru a dénoncé un « deux poids, deux mesures » concernant Israël, tout en condamnant les actes du Hamasd’« organisation terroriste djihadiste génocidaire ». 

La Fédération de Russie a, elle, dénoncé le « deux poids, deux mesures » de Washington qui, selon elle, coopère avec certains mécanismes et pas avec d’autres.  Elle a rejeté la responsabilité des centaines de morts à Gaza, aux pays qui se sont opposés à son récent projet de résolution au Conseil de sécurité.  La Chine a préféré appeler à la libération des otages et à l’ouverture de couloirs humanitaires à Gaza.  Elle a d’autre part réitéré son attachement à la solution des deux États.  La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a appelé à la fin du siège contre Gaza et exprimé sa solidarité envers le peuple palestinien, tandis que la Malaisie condamnait les efforts visant à discréditer la Commission et ses travaux sur « les violations du régime d’apartheid israélien ».  Le Bangladesh a condamné les actions illégales d’Israël, avant de dénoncer la culture d’impunité dont jouit cet État sous le prétexte de droit à la légitime défense.  Il a estimé que la Cour pénale internationale (CPI)  pourrait se pencher sur les violations évoquées dans le rapport, en particulier le meurtre de la journaliste Shireen Abu Akhleh.  L’Indonésie a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à la justice pour le peuple palestinien sur la base de la solution des deux États. 

Rappelant lui aussi le meurtre de Shireen Abu Alkleh, le Liban a dénoncé le bombardement israélien qui a causé la mort d’Issam Abdallah, de l’agence Reuters, et blessé cinq autres journalistes, qui étaient pourtant clairement identifiés.  Il a demandé que les auteurs soient traduits en justice.  La Jordanie a ensuite appelé à la fin immédiate des opérations militaires contre Gaza, exigeant en outre un accès humanitaire sans entrave et le non-déplacement des Palestiniens.  La Libye a demandé à ce que les principes de la Charte des Nations Unies s’appliquent aussi aux Palestiniens et a soutenu leurs droits légitimes.  La Tunisie a rappelé les 5 000 victimes des bombardements sur Gaza, dont 70% étaient des femmes et des enfants, et le million de personnes déplacées.  « Ne s’agit-il pas là de crimes de guerre, ne s’agit-il pas là de génocide? » s’est-elle interrogée, appelant à un cessez-le-feu immédiat.  Le Soudan a réclamé la levée du blocus contre Gaza, l’arrêt des hostilités et un acheminement sans condition de l’aide humanitaire.  Il a aussi réaffirmé son soutien aux droits inaliénables du peuple palestinien, dans le cadre du droit international, tout comme le Yémen, qui a condamné l’occupation brutale à laquelle se livre Israël en Cisjordanie et rejeté toute tentative de déplacer par la force les Palestiniens de Gaza.  L’Arabie saoudite a demandé à la communauté internationale de pousser Israël à cesser les hostilités et de tuer des civils. La République arabe syrienne a dénoncé l’impunité dont jouit Israël et estimé que son occupation cessera « tôt ou tard ».  Enfin, au nom du Conseil de coopération du Golfe, Oman a appelé à cesser le siège de Gaza et à garantir l’accès d’une aide humanitaire sans limitation.

La Présidente de la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël a repris la parole pour rappeler que son rapport avait été rédigé bien avant le 7 octobre, date de l’attaque du Hamas contre Israël.  Dès cette attaque, nous avons publié une déclaration à la presse faisant état de notre présomption de crimes de guerre. Notre mandat nous permet d’enquêter sur ce type de situation, a-t-elle indiqué, soulignant la nécessité que les auteurs de violations du droit international humanitaire et des droits humains, « quels qu’ils soient », rendent des comptes. Après avoir entendu les réactions des délégations à son exposé, elle a estimé qu’ « une soif de justice s’est exprimée aujourd’hui ». 

Répondant à Israël, elle a déclaré avoir compris les propos indignés de son représentant, notamment sur les décapitations de bébés et les assassinats de femmes enceintes par le Hamas, avant de souligner l’impartialité de la Commission qu’elle préside et sa volonté d’une reddition des comptes. « Laissez-nous entrer en Israël, à Gaza et en Cisjordanie », a-t-elle lancé au délégué israélien, ajoutant que la Commission a « besoin de preuves fiables. »  Notre mandat est de communiquer les informations à notre disposition à des juridictions internationales, a-t-elle précisé, souhaitant que la Cour pénale internationale (CPI) soit saisie afin que des poursuites puissent être lancées.  Mme Pillay a par ailleurs confirmé que l’unité militaire israélienne responsable de la mort de la journaliste palestinienne, Shireen Abu Akleh, a été identifiée par la Commission.  Enfin, affirmant ne pas être antisémite, elle a dit vouloir être jugée à l’aune de son indépendance. 

Exposé

Mme FRANCESCA P. ALBANESE, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 a indiqué que son rapport examine la situation des enfants vivant sous l’occupation israélienne, en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et dans la bande de Gaza.  Avant de le présenter, elle a déclaré que les événements du 7 octobre marquent un tournant tragique dans l’histoire du Territoire palestinien occupé et d’Israël. Elle a rappelé que 1 400 Israéliens et ressortissants étrangers ont été tués à la suite d’attaques brutales menées par des forces paramilitaires palestiniennes provenant de la bande de Gaza. En réponse, les forces d’occupation israélienne ont « de nouveau » procédé à un bombardement sans discrimination de la bande de Gaza tuant 5 000 personnes.  Ces événements constituent le dernier symptôme en date de l’échec cuisant de la communauté internationale à remédier à des décennies d’illégalité et d’impunité de la part d’Israël et à mettre fin à son « occupation éternelle », a-t-elle déploré.

La Rapporteuse spéciale a ensuite expliqué que, son rapport met en lumière le système complexe de violence et les conditions de vie insoutenables endurées par des générations d’enfants palestiniens sous la présence militaire et coloniale sans cesse croissante d’Israël.  Les enfants palestiniens constituent la moitié de la population sous occupation et sont les premières victimes de ce système, vivant dans la crainte, la peur et le désespoir permanents.  Israël, a-t-elle affirmé, prive délibérément les enfants palestiniens de leurs droits humains fondamentaux, dans le cadre de ses efforts visant à entraver le développement et l’autodétermination palestiniennes.


Poursuivant, elle a indiqué qu’entre 2008 et le 6 octobre 2023, 1 434 enfants palestiniens ont été tués et 32 175 autres blessés, principalement par les forces d’occupation israéliennes, précisant que dans la seule bande de Gaza, 1 025 enfants ont été tués depuis le début du blocus illégal en 2007.  Au cours de la même période, 25 enfants israéliens ont été tués, principalement par des assaillants palestiniens, et 524 ont été blessés.  Elle a également fustigé le système de justice militaire pour mineurs d’Israël, qu’elle a qualifié d’« oxymore juridique », précisant qu’entre 500 à 700 enfants palestiniens, dont certains âgés de seulement 12 ans, sont détenus arbitrairement chaque année par les « forces d’occupation israéliennes ».  En outre, la rhétorique d’Israël qui présente les enfants palestiniens comme des « boucliers humains » ou des « terroristes » pour justifier la violence à leur encontre, est profondément déshumanisante.  Et l’environnement oppressif auquel Israël soumet les enfants palestiniens entrave leur droit à une éducation sûre et digne ainsi que leur développement physique, mental et culturel. 

La Rapporteuse spéciale a ensuite exhorté la communauté internationale, y compris la Cour pénale internationale, à mettre fin au cycle de l’impunité et à utiliser tous les outils disponibles, y compris dans le cadre de la Charte des Nations Unies, pour veiller à ce qu’Israël respecte le droit international. L’objectif de paix et de justice ne peut être atteint qu’en garantissant l’égalité des droits et la dignité des enfants palestiniens, a-t-elle souligné. 

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, la délégation de l’État de Palestine a indiqué qu’un enfant est sorti des décombres à Gaza toutes les 15 minutes en raison des bombardements israéliens incessants, avant de demander un cessez-le-feu immédiat.  Les cœurs des enfants palestiniens sont emplis d’effroi. « Savez-vous combien il est difficile à faire oublier à un enfant le souvenir de l’oppression? »  Tous les enfants doivent être protégés, a-t-elle dit. 

Israël a ensuite condamné le pire massacre depuis l’Holocauste subi par son pays, avant d’accuser la Rapporteuse spéciale d’être antisémite et animée d’une haine ardente d’Israël.  Elle n’a pas présenté le tableau d’ensemble, a fustigé le délégué, en lui reprochant l’emploi de l’expression antisémite « lobby juif », ainsi que sa proximité avec Roger Waters, « un nazi ».  Il a également affirmé que la Rapporteuse spéciale s’est réjouie de la suppression du Hamas de la liste des organisations terroristes par l’Union européenne il y a quelques années.  « Est-ce qu’enlever des enfants, éventrer une femme enceinte et poignarder son bébé c’est résister? », s’est indignée la délégation en ajoutant qu’Israël ne va pas dialoguer avec une personne antisémite et haineuse. 

Le Venezuela a confirmé sa solidarité avec le peuple palestinien avant de demander à la Rapporteuse si elle pense que les conditions d’un cessez-le-feu sont réunies.  Le Japon a condamné les attaques du Hamas et précisé qu’une aide de dix millions de dollars pour Gaza a été débloquée.  L’Azerbaïdjan a rappelé la position du Mouvement des non-alignés tandis que l’Afrique du Sud a appelé à la protection de tous les enfants. 

Comment la Rapporteuse spéciale peut-elle exiger qu’Israël figure sur la liste des pays violant les droits de l’enfance? a demandé le Yémen.  Même son de cloche du côté du Bangladesh qui a dénoncé « les politiques génocidaires » d’Israël contre les Palestiniens. 

L’Iran a voulu savoir comment documenter les activités criminelles d’Israël perpétrées à l’encontre des enfants.  De son côté, l’Algérie s’est intéressée aux contours du mécanisme évoqué dans le rapport pour démanteler les colonies de peuplement. 

Quelles mesures peuvent être prises pour que les États soient tenus responsables de soutenir l’occupation de la Palestine par Israël, a demandé la Malaisie.  Et que doit faire le Conseil de sécurité pour sauvegarder la paix et la sécurité, a souhaité savoir l’Iraq.  De manière connexe, Cuba a voulu savoir ce que peut faire la communauté internationale pour mettre fin au mépris de la « Puissance occupante ». 

L’Union européenne a voulu connaître les priorités de la Rapporteuse spéciale compte tenu de l’évolution de la situation au Moyen-Orient.  Le refus d’accès dans les territoires palestiniens occupés est-il toujours d’actualité, a demandé la Jordanie, insistant sur le fait qu’Israël s’enorgueillit d’être la seule démocratie de la région. 

Le Pakistan a dénoncé les violations des droits des enfants à Gaza, avant d’appeler au respect du droit international humanitaire, une position partagée par la Mauritanie, le Koweït, la Syrie, et l’Arabie saoudite. Plus de 2 000 enfants palestiniens ont été tués.  Qu’attend la communauté internationale pour faire cesser ce bain de sang? a lancé le Liban.  De son côté, la Chine a appelé à la reprise des pourparlers de paix afin de parvenir à la solution des deux États, suivie de l’Égypte qui a rappelé que 6 000 Palestiniens ont été tués à Gaza, en exhortant Israël à respecter les droits des enfants.  La Fédération de Russie a dénoncé pour sa part les États-Unis qui bloquent le dossier de l’aide humanitaire à Gaza au Conseil de sécurité. 

Reprenant la parole, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 a affirmé que les critiques d’Israël ne se basaient pas sur les faits, déplorant les attaques diffamatoires lancées à son encontre.  Elle a souhaité pouvoir accéder aux territoires palestiniens occupés afin de rectifier d’éventuelles erreurs.  Elle a vu dans cette « heure tragique » une occasion pour la communauté internationale d’agir de manière sage et équilibrée, ajoutant que pour l’instant ce n’était clairement pas le cas. 

Poursuivant, la Rapporteuse spéciale a signalé que plus de Palestiniens ont été tués ces deux dernières semaines qu’en 2008, 2012, 2014, 2021 et 2022.  Elle a rejeté le concept de légitime défense dans ce cas car ce droit à des limites: il s’agit de repousser l’attaque et une fois l’attaque repoussée il s’arrête, pour laisser place à la justice.  Elle a dénoncé la confusion entre l’éradication de l’aile militaire du Hamas et le bombardement indiscriminé des civils, fustigeant en outre le resserrement d’un blocus déjà illégal.  Ce sont des crimes de guerre, a-t-elle dénoncé.  Elle a appelé à un cessez-le-feu immédiat, à la libération des otages et à l’entrée sans conditions de l’aide humanitaire, supervisée par l’ONU.  Elle a également demandé la création d’une force de protection des civils à Gaza et en Cisjordanie. 

Exposé

Mme ISHA DYFAN, Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie, a présenté son rapport couvrant la période du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023, qui se concentre sur les développements politiques, sécuritaires et humanitaires dans le pays et souligne l’impact des changements climatiques sur les droits humains ainsi que les violations des droits de l’homme les plus répandues contre les civils. À cette aune, elle a indiqué qu’en dépit de progrès sur le plan politique, notamment l’avancement du processus de révision constitutionnelle et l’adoption d’un modèle électoral fondé sur le principe « une personne, une voix », la situation sécuritaire demeure volatile en Somalie.  Pendant la période à l’examen, a-t-elle indiqué, le Gouvernement fédéral a lancé une offensive militaire contre les Chabab, avec le soutien de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) et du Commandement des forces des États-Unis en Afrique (AFRICOM).  Malgré les gains enregistrés par les forces de sécurité somaliennes pendant l’offensive, les Chabab ont continué de mener des attaques-suicides dans tout le pays, a ajouté Mme Dyfan, précisant qu’entre le 8 février et le 7 juin, 255 attaques à l’explosif ont fait 692 victimes.

L’Experte indépendante a ensuite dénoncé l’imposition de la peine de mort à des enfants dans le Puntland et exhorté les autorités fédérales et fédérées à traiter les enfants comme des victimes, à n’user de la détention qu’en tant que mesure de dernier recours et à se référer aux services de protection de la jeunesse en vue de leur réintégration.  Elle a salué l’annonce faite en août dernier par le Gouvernement fédéral d’une amnistie pour des membres des Chabab et encouragé ces derniers à accepter cette offre, à déposer les armes et à œuvrer à la réintégration des anciens combattants.  Elle a, par ailleurs, pris note de la demande du Gouvernement fédéral d’une pause de trois mois dans la seconde phase de retrait des troupes de l’ATMIS.  Selon elle, le manque de financement de l’ATMIS risque de fragiliser la situation sécuritaire et de saper les gains enregistrés. Elle a également déploré la poursuite des affrontements entre les forces de sécurité du Somaliland et des membres armés du clan Dhulbahante à Laascaanood, malgré les appels à la fin des hostilités lancés par le Gouvernement fédéral.  Elle a précisé que 87 personnes ont été tuées et 465 blessées entre le 27 décembre 2022 et le 15 juin dernier.  La situation humanitaire dans le pays demeure critique en raison de l’insécurité, de la violence armée et des catastrophes, telles que les sécheresses et les inondations, a-t-elle ajouté, signalant que 8,25 millions de personnes ont besoin d’une aide d’urgence en Somalie.

Enfin, Mme Dyfan s’est dite consternée par les restrictions continues de l’espace civique en Somalie, avec notamment des arrestations et des détentions arbitraires de journalistes, et la censure de médias. Huit journalistes seraient emprisonnés de façon arbitraire dans le pays, dont cinq à Mogadiscio, deux dans le Somaliland et un dans le Jubaland, a-t-elle indiqué. « J’exhorte les autorités somaliennes à réviser le Code pénal et à décriminaliser le journalisme », a-t-elle déclaré, avant de remercier, en conclusion, le Gouvernement fédéral de l’avoir invitée à visiter le pays en novembre prochain. 

Dialogue interactif

Après cette présentation, le Royaume-Uni s’est dit préoccupé par le risque accru de violence sexuelle liée au conflit et au niveau élevé de déplacement interne.  S’inquiétant de la situation des enfants et des femmes, il a aussi exhorté le Gouvernement fédéral somalien à œuvrer pour que les journalistes puissent travailler sans crainte de représailles.  Il a par ailleurs demandé à l’Experte indépendante ce qu’elle souhaite faire de sa visite sur place le mois prochain.  Se préoccupant elle aussi de la situation des femmes, des enfants et des journalistes, l’Union européenne a appelé le Gouvernement fédéral à faciliter la prochaine visite de l’Experte indépendante.  Elle a estimé que l’offensive en cours ne devait pas être menée au détriment de la liberté d’expression.  Alarmée par les impacts négatifs des changements climatiques sur le pays, elle a demandé comment la communauté internationale peut aider au mieux la Somalie pour mettre en œuvre les indicateurs liés aux droits humains.  La Suisse a, pour sa part, voulu en savoir plus sur la révision du droit pénal en Somalie.  Elle s’est d’autre part inquiétée du fait que les enfants continuent à subir les pires conséquences du conflit en cours, avec des attaques contre les écoles et des mariages forcés. 

Les États-Unis se sont alarmés du fait que huit millions de Somaliens, soit la moitié de la population, aient besoin d’aide humanitaire et que 2,6 millions soient déplacés dans le pays.  Ils se sont ensuite interrogés sur les efforts engagés par la Somalie pour lutter contre des taux croissants de violences fondées sur le genre.  De son côté, la Chine a indiqué qu’elle a débloqué une importante aide humanitaire ainsi qu’un appui pour lutter contre le terrorisme en Somalie. Elle a appelé la communauté internationale à reconnaître les progrès réalisés par les autorités du pays pour promouvoir les droits humains.  La Fédération de Russie a appuyé à son tour les efforts des dirigeants somaliens visant à stabiliser la situation intérieure.  Elle a notamment salué la lutte du Gouvernement fédéral contre les terroristes qui font barrage à l’aide humanitaire dans de nombreuses régions du pays. La délégation s’est toutefois inquiétée de certaines violations des droits humains, appelant le Gouvernement fédéral à y remédier. 

Répondant aux délégations, l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie a évoqué sa prochaine visite en Somalie, affirmant vouloir dialoguer avec le Gouvernement fédéral pour établir des priorités, notamment concernant les critères de référence et l’élaboration d’indicateurs sur les droits humains.  Elle a émis l’espoir que cette visite sera l’occasion d’intégrer la violence fondée sur le genre parmi lesdits indicateurs.  Elle a également souhaité que les discussions portent sur le renforcement de l’état de droit et la loi en préparation sur les médias.  Alors que le plan national de développement se met en place, c’est le bon moment pour placer les critères de référence dans les réflexions du Gouvernement, a-t-elle estimé.  Mme Dyfan a ajouté qu’elle a l’intention d’aborder également avec le Gouvernement la question des exécutions dans le pays.  Citant les données du rapport d’Amnesty International sur ce sujet, elle a noté une réduction du nombre d’exécutions, mais une augmentation du nombre de jugements conduisant à des exécutions.  Elle s’est cependant déclarée confiante que le Gouvernement aura la volonté de discuter de cette question.

Répondant aux États-Unis, l’Experte indépendante a souligné l’importance du cadre juridique proposé dans le projet de loi relatif aux infractions sexuelles. Précisant que ce texte sera bientôt présenté au Gouvernement fédéral, elle a dit avoir l’intention d’insister sur la nécessité d’un cadre juridique pour mieux protéger les femmes et filles à l’avenir. Pour Mme Dyfan, la Somalie est aujourd’hui à la croisée des chemins.  Ce pays, dont la population reste confrontée à la violence, aux discriminations, aux inégalités et au chômage, a besoin du soutien continu de la communauté internationale, a-t-elle insisté, estimant que la paix et la stabilité ne pourront être atteintes qu’avec l’engagement du Gouvernement somalien à placer la protection des civils, notamment des groupes marginalisés et des minorités, au cœur de son action. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Rapport de la CDI à la Sixième Commission: plusieurs visions s’affrontent sur l’interprétation et l’usage des principes généraux du droit

Soixante-dix-huitième session,
24e séance plénière - matin
AG/J/3699

Rapport de la CDI à la Sixième Commission: plusieurs visions s’affrontent sur l’interprétation et l’usage des principes généraux du droit

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a poursuivi ce matin, son examen du rapport de la CDI, notamment des chapitres portant sur les principes généraux du droit et sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.

Les principes généraux du droit ont largement été décryptés et commentés par les délégations, révélant un large spectre d’approches parmi les États Membres sur l’interprétation et l’usage qui doit être fait de ces principes. 

Si l’Équateur et la République islamique d’Iran ont par exemple souligné que ces principes étaient source de droit au même titre que les traités ou la coutume, sans hiérarchie, le Bélarus a suggéré de ne pas accorder à ces principes « un rôle plus important qu’ils n’en ont actuellement », en exigeant des critères clairs de compatibilité avec le système juridique international. 

Quand la Hongrie notait le rôle complémentaire de ces principes avec d’autres normes reconnues du droit international, et la Suisse celui du droit national « tant public que privé », comme source possible de ces principes, d’autres délégations étaient beaucoup plus sceptiques quant à leur transposition dans l’ordre juridique international.  Ainsi les États-Unis, face au risque que des parties à des litiges internationaux « se servent des travaux de la CDI pour faire valoir des obligations sans l’approbation des États », ont-ils souligné que, le consentement des États demeurait nécessaire pour fonder un principe général de droit. 

Un rare point de consensus a été la satisfaction partagée par plusieurs délégations, dont celles du Chili et de l’Estonie, autour de la suppression de la référence aux « nations civilisées » , remplacée par le terme « communauté des nations » dans le projet de conclusions adopté par la CDI.

Toutes les délégations ou presque, y compris celles des pays sans littoral, ont par ailleurs contribué à la poursuite d’un débat particulièrement riche et pertinent sur la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international. 

Conscients de l’enjeu existentiel majeur pour les États insulaires, mais aussi des défis que ce phénomène représente au niveau juridique et pour la paix et la sécurité internationales, une majorité d’intervenants ont, comme l’Allemagne ou la Pologne, invoqué la stabilité juridique comme intrinsèquement liée à la préservation des zones maritimes. 

Parmi les États qui disposent d’un littoral et sont donc concernés au premier chef, tous ont d’ailleurs insisté, à l’instar du Bangladesh, sur le fait que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer n’exigeait pas expressément des États parties qu’ils actualisent leurs lignes de base et les limites extérieures de leurs zones maritimes en raison des modifications de leur littoral résultant de l’élévation du niveau de la mer. 

« Nos lignes de base légales restent mouvantes et n’ont pas été fixées », a pour sa part expliqué le représentant des Pays-Bas, en rappelant la spécificité du littoral néerlandais, en partie constitué de remblais de sable qui empêchent l’avancée trop rapide de la mer vers l’intérieur des terres.  De façon plus ou moins nuancée, notamment sur la référence possible à d’autres normes telles que le principe selon lequel « la terre domine la mer », les délégations ont été unanimes dans leur soutien à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer en tant que cadre juridique applicable à ce sujet et comme « pilier fondamental de la gouvernance des océans », selon les termes de l’Estonie.

Les divergences de vue qui se sont exprimées sur la question des principes généraux du droit ont par ailleurs inspiré un commentaire critique sur les méthodes de travail de la Sixième Commission de la part du représentant du Portugal, qui a noté que face à l'opposition d’une « poignée d’États » aux recommandations de la CDI pour l’adoption de projets d’articles en vue de l’élaboration d’une convention, la Sixième Commission avait choisi de ne pas agir en privilégiant le consensus.  Or « le consensus n’est ni une règle de procédure ni un dogme », a-t-il tranché, en suggérant aux délégations d’améliorer leurs méthodes de travail pour ne pas saper la contribution de la CDI au développement du droit international.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 25 octobre, à partir de 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SES SOIXANTE-TREIZIÈME ET SOIXANTE-QUATORZIÈME SESSIONS - A/78/10

Suite du débat général sur le module 1: chapitres introductifs I à III, chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission), chapitre IV (Principes généraux du droit) et chapitre VIII (L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international)

M. ANDREI POPKOV (Bélarus) a relevé que les conclusions de la Commission clarifient la nature juridique des principes généraux de droit en tant que sources secondaires et autonomes du droit international au sens de l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a jugé pertinent que la CDI poursuive son étude des fondements conceptuels de deux types de principes généraux de droit ayant une portée juridique internationale: les principes généraux issus des systèmes juridiques nationaux et les principes généraux formés au sein du système juridique international.  Le délégué a salué la volonté de la CDI de promouvoir une notion plus universelle et plus neutre des principes généraux de droit, acceptés par l’« ensemble des nations » en lieu et place des « nations civilisées ».  Le droit international moderne devrait être étranger à toute discrimination et à toute gradation des États sur la base du critère « civilisé » ou « non civilisé ».  S’agissant de la transposition de principes généraux du droit provenant de systèmes juridiques nationaux, le délégué a craint que, dans le processus d’incorporation, la signification originale ne soit considérablement déformée ou que son interprétation par un petit groupe d’États influents ne devienne dominante dans le droit international.  Afin d’éviter un tel scénario, il lui a semblé important d’énoncer dans le projet de conclusions les critères clairs permettant de déterminer qu’un principe général de droit est logique et compatible avec le système juridique international.  Le délégué a estimé qu’il n’est pas justifié de donner aux principes généraux de droit un rôle plus important dans le droit international que celui qu’ils ont actuellement.  Par ailleurs, si un principe général de droit provenant des systèmes juridiques nationaux est identifié, il convient d’établir qu’il n’est pas en contradiction avec les normes impératives du droit international avant de l’incorporer dans le droit international. 

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a réitéré que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer jouerait un rôle central pour résoudre des problèmes liés à la délimitation des zones maritimes en cas d’élévation du niveau de la mer.  Dans le même temps, il a estimé que d’autre normes applicables du droit international général pouvaient être utilisées, notamment le principe selon lequel « la terre domine la mer, » la liberté de navigation, ou encore les engagements en matière de règlement pacifique des différends et de protection des droits des États côtiers insulaires. 

M. KONRAD BÜHLER (Autriche) s’est montré sceptique au sujet de la distinction faite entre deux catégories de principes généraux du droit: ceux qui proviennent des systèmes juridiques nationaux et ceux qui peuvent se former dans le cadre du système juridique international, estimant qu’il est très difficile de les distinguer dans la pratique.  Il a également jugé peu convaincante la détermination des principaux généraux du droit formés dans le cadre du système juridique international qui figure dans le projet de conclusion 7.  Par exemple, la nature du principe de l’uti possidetis est controversée, de l’avis de la délégation, puisque la Commission considère qu’il est intrinsèque au système juridique international alors qu’il plonge également ses racines dans les systèmes juridiques nationaux ainsi que dans le droit international coutumier.  Par ailleurs, le représentant a préféré le terme « communauté internationale » au terme « communauté des nations » parce que le terme « nation » a plusieurs sens et qu’il est politiquement sensible.  En outre, la « communauté des nations » exclurait les organisations internationales et d’autres sujets de droit international.  S’agissant de la conclusion 8 consacrée aux « décisions de juridictions », la délégation a proposé d’utiliser plutôt le terme « jurisprudence » à la place de « décisions », puisque celles-ci font généralement référence à des actes contraignants.

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le représentant a fait savoir que l’Autriche y attachait une grande importance, même si elle est un pays sans littoral.  « Les effets des changements climatiques ne concernent d’ailleurs pas que les pays côtiers ou insulaires, puisque l’Autriche est confrontée à la fonte massive des glaciers. »  La délégation est favorable à la stabilité juridique et opposée à toute modification de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. SLAWOMIR MAJSZYK (Pologne) a estimé que le paragraphe 2 du projet de conclusion 7 sur les principes généraux du droit doit être supprimé. Ce paragraphe semble conclure que les principes généraux peuvent être formés dans le système juridique international alors que la CDI ne fournit pas de critères pour les déterminer, créant ainsi des incertitudes sur les sources du droit.  Plusieurs termes et principes doivent être davantage élaborés, a-t-il relevé, notamment le terme « intrinsèque » et les principes du « consentement à la juridiction » et uti possidetis, appelant à la prudence sur la détermination de ces principes en tant que principes généraux.  En outre, sa délégation soutient l’utilisation limitée des principes généraux quand d’autres règles du droit ne permettent pas de répondre à un problème, appelant à préciser, dans le commentaire relatif du projet de conclusion 10, que les principes généraux ne remplacent pas les normes coutumières ou les traités. 

Concernant le chapitre sur l’élévation du niveau de la mer, son objectif est d’interpréter la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer au regard de ce problème, a rappelé le délégué.  La Convention étant acceptée universellement, des discussions sont nécessaires sur les règles coutumières applicables aux enjeux émergents.  Le caractère intangible des frontières est fondamental pour le maintien de la paix et de la sécurité, a-t-il déclaré, estimant que ladite Convention et le droit coutumier correspondant permettent de conserver la stabilité de ces frontières.  Concernant les accords internationaux juridiquement non contraignants, le délégué a salué l’intégration de cette question dans le programme de travail de la CDI mais a souhaité l’utilisation du terme « instruments ».  Enfin, il a demandé une analyse méticuleuse sur l’état d’avancement du processus législatif sur les normes impératives du droit international général au sein de la CDI. 

Mme KERLI VESKI (Estonie) s’est félicitée que le projet de conclusions de la CDI sur les principes généraux du droit ne fasse plus référence aux « nations civilisées », terme remplacé par « communauté des nations ».  Elle a convenu que le projet ne devrait pas utiliser l’expression « communauté internationale des États dans son ensemble » dans le contexte des normes de jus cogens, parce qu’elle fixe un seuil « inutilement élevé ». Cependant, bien qu’il soit nécessaire d’évaluer les positions des États pour déterminer si un principe général de droit a été identifié et reconnu, il n’est pas possible d’exclure que les organisations internationales puissent également apporter des contributions utiles, a fait valoir la déléguée.  Elle a en outre invité la CDI à examiner plus avant les relations entre les principes généraux du droit et les normes impératives du droit international général.

Au sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, la déléguée a reconnu que les questions de stabilité juridique liées aux accords de délimitation des zone maritimes, en particulier dans le contexte de l’analyse du principe du changement fondamental de circonstances (rebus sic stantibus) et du principe selon lequel « la terre domine la mer », sont difficiles à résoudre.  Selon elle, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer doit rester le cadre applicable à ce sujet, en tant que pilier fondamental de la gouvernance des océans, et il faut éviter tout conflit dans les relations internationales.  Si le principe du changement fondamental de circonstances s’appliquait dans le cas de l’élévation du niveau de la mer, cela amènerait les États à devoir renégocier les frontières maritimes, ce qui modifierait les droits et obligations au regard des relations internationales et entraînerait une instabilité, a prévenu la déléguée.  Lorsque le territoire d’États sera complètement submergé ou deviendra inhabitable, le véritable défi sera de lire la Convention avec un regard nouveau et d’interpréter le droit international coutumier en gardant l’esprit ouvert. 

M. CSONGOR CSERGŐ (Hongrie) a salué le travail effectué par la CDI sur les accords internationaux juridiquement non contraignants et appuyé la décision de la Commission d’organiser un événement commémoratif pour son soixante-quinzième anniversaire à Genève en 2024, qui sera « une occasion unique » d’identifier des questions d’actualité et de trouver un juste équilibre entre les sujets. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le représentant a indiqué que tout en étant un pays enclavé, la Hongrie reconnaissait les défis posés par ce phénomène et était favorable à une analyse « claire et transparente » des réglementations juridiques internationales relatives aux changements climatiques, y compris le sujet connexe de l’élévation du niveau de la mer.  Tout en prenant note des conclusions sur la question des zones maritimes et sur le fait qu’il n’existe pas d’obligation de mise à jour régulière des lignes de base, et tout en s’accordant sur le caractère essentiel du maintien de la « stabilité juridique », il a proposé une réflexion plus poussée sur la forme la plus appropriée pour refléter ces conclusions.  Il s’est en outre dit favorable aux discussions futures sur la reconnaissance du statut d’État et sur les questions liées à la protection des personnes en cas d’élévation du niveau de la mer.

Mme TANIA VON USLAR-GLEICHEN (Allemagne) a abordé le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, en plaidant pour une interprétation « contemporaine » de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer afin de relever « ce défi existentiel ».  Cette Convention n’exige pas des États côtiers qu’ils se livrent à un examen et une mise à jour de leurs lignes de base et de leurs zones maritimes, même s’ils peuvent le faire, a dit la déléguée, en se félicitant de la convergence de vues des États dans ce domaine.  Elle a demandé que le principe de « stabilité juridique » s’applique aussi aux zones maritimes partant d’îles et de rochers.  Elle s’est dite confiante que les difficultés juridiques dans ce domaine seront réglées dans le cadre de ladite Convention et grâce à la tenue de discussions constructives. Enfin, elle a évoqué la situation des petits États insulaires face à l’élévation du niveau de la mer et plaidé pour l’élaboration de solutions fiables sur la base du droit.

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a noté les divergences d’opinion des membres de la CDI sur l’existence de principes généraux de droit dans le système juridique international et suggéré de « supprimer ce désaccord » du projet de commentaires.  Il a par ailleurs indiqué que son pays avait demandé un rapport sur ce sujet au Comité consultatif néerlandais sur les questions de droit international public et partagerait ses conclusions avec la CDI, avec la réponse du Gouvernement.

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer, et notamment la question de l’obligation ou non d’examiner et d’actualiser régulièrement les lignes de base et les limites extérieures des zones maritimes, le représentant a noté que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ne contenait pas d’obligation à cet égard et précisé que les Pays-Bas n’avaient « pas encore de position à ce sujet ».  Selon lui, l’expression « littoral de base », tel qu’utilisée dans les contributions des Pays-Bas aux travaux, fait référence au littoral néerlandais préservé par des remblais de sable et ne doit pas être confondue avec les lignes de base.  Il a expliqué que ces remblais constituaient une mesure préventive de protection du littoral contre une avancée trop rapide de la mer vers l’intérieur des terres.  « Nos lignes de base légales restent ambulatoires et n’ont pas été fixées », a indiqué le représentant.  Il s’est par ailleurs félicité de l’étude complémentaire réalisée sur la sécurité de la navigation concernant les cartes marines, en notant toutefois que ces cartes ne reflétaient pas les lignes de base de son pays.

S’agissant des accords internationaux juridiquement non contraignants, le représentant a rappelé que les travaux réalisés dans différentes enceintes devaient contribuer à une meilleure compréhension du sujet sans perdre la souplesse nécessaire pour que les États puissent recourir à ce type d’accords quand cela est approprié.  Il a conclu son intervention en rappelant que son pays avait accueilli un colloque sur les conseils indépendants, organisé par le Comité consultatif néerlandais sur le droit international public, auquel Mme Patricia Galvão Teles, membre de la CDI, avait participé, participation qu’il a jugé « très utile » pour « améliorer les contribution des Pays-Bas » au travail de la CDI.

M. RICHARD VISEK (États-Unis) a tout d’abord rappelé que son pays avait coparrainé la résolution 77/249 de l’Assemblée générale pour permettre la poursuite de l’examen sur le projet d’articles de la CDI relatif à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité, car une telle convention comblerait une lacune importante dans le cadre juridique international.  S’agissant des principes généraux du droit, le représentant a noté le risque que des parties à des litiges internationaux s’appuient sur les travaux de la CDI pour faire valoir des obligations sans l’approbation des États.  Il a donc recommandé que la Commission ne s’engage pas dans un exercice de développement progressif « sur un sujet qui concerne une source du droit international ».  Sur le critère qui permet de déterminer si les principes généraux du droit provenant des systèmes juridiques nationaux ont été transposés sur le plan international, il a souligné que l’automaticité ne semblait « ni évidente, ni justifiée ».  Pour les États-Unis, le consentement des États est nécessaire pour trouver un principe général de droit. 

Concernant l’élévation du niveau de la mer, le représentant a noté que de « nouvelles tendances » se dessinaient dans les pratiques des États sur la nécessité d’avoir des zones maritimes stables.  À cet égard, il a souligné le caractère « universel et unifié » de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Dans un objectif de stabilité, de sécurité, de certitude et de prévisibilité des droits maritimes, les États-Unis se sont engagés à ne pas contester les lignes de base et limites des zones maritimes établies légalement et non mises à jour suite à l’élévation du niveau de la mer, et encouragent d’autres États à faire de même.  Reconnaissant que l’élévation du niveau de la mer ne menace pas seulement les droits maritimes, mais aussi les communautés côtières et États insulaires du monde entier, le représentant a informé que son pays avait annoncé en septembre qu’il considérait que l’élévation du niveau de la mer provoquée par les changements climatiques d’origine humaine ne devait pas faire perdre à un pays son statut d’État, ou sa qualité de membre de l’ONU. 

S’agissant des méthodes de travail de la CDI, le représentant a fait part de l’intérêt de son pays pour des propositions telles que l’élaboration d’orientations sur la nomenclature des textes et instruments adoptés, afin de clarifier ce qui, dans le travail de la CDI, relève de la codification ou au contraire du développement progressif du droit international.  Pour finir, il a pris note du programme de travail provisoire « très ambitieux » de la CDI pour ces cinq prochaines années et demandé à la Commission de prévoir dans ses délibérations suffisamment de temps pour « prendre en compte les contributions des États Membres ».

M. MATEUS KOWALSKI (Portugal) s’est félicité de la tenue de la première partie de la soixante-dix-septième session de la CDI prévue à New York en 2026. Cela permettra de renforcer l’interaction entre celle-ci et les autres organes onusiens.  Il a estimé que l’ONU et les États Membres pourraient en faire davantage en ce qui concerne la codification du droit international.  Dans certains cas où la CDI a expressément recommandé l’adoption de projets d’articles en vue de l’élaboration d’une convention, cette Commission a choisi de ne pas agir et de privilégier le consensus, alors que seule une « poignée d’États » s’oppose à aller de l’avant, a déploré le délégué.  Il a rappelé que « le consensus n’est ni une règle de procédure ni un dogme » et qu’il n’a pas valeur de veto.  Si nous ne cherchons pas à régler cette question et à améliorer nos méthodes de travail, nous risquons de gravement saper la contribution de la CDI et de cette Commission, a-t-il averti.

Le délégué a invité la CDI à se pencher davantage sur la question des principes généraux du droit, et notamment sur la différence « très ténue » entre les principes provenant des systèmes juridiques nationaux et les principes se formant dans le cadre du système juridique international.  La distinction entre ces derniers et le droit coutumier n’est pas aussi claire qu’elle le devrait.  S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a rappelé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer n’exige pas des États qu’ils se livrent à un examen constant des lignes de base et de la délimitation de leurs zones maritimes.  Enfin, il a estimé fondamental de déterminer dans quelle mesure le principe d’équité est juridiquement pertinent dans un contexte d’élévation du niveau de la mer.

Mme FANNY RATHE (Suisse) a salué « l’approche concluante, logique et exhaustive » adoptée par la CDI sur les principes généraux du droit. Elle a jugé « pertinente » la constatation selon laquelle tous les principes découlant des systèmes juridiques nationaux ne se prêtaient pas forcément à une application dans le système juridique international.  S’agissant de la détermination d’un principe commun aux différents systèmes juridiques du monde, elle a estimé que ce terme devait être interprété « dans sa forme la plus large possible » et souligné que toutes les branches du droit national, tant public que privé, étaient pertinentes pour déterminer l’existence d’un principe général du droit.

La déléguée a par ailleurs salué le travail en cours mené, d’une part, sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, qu’elle a qualifiée de question « urgente » à traiter, et, d’autre part, sur les moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international, un ajout « utile » aux travaux de la CDI sur les sources du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ). 

M. NASIR UDDIN (Bangladesh) a rappelé que le paragraphe 2 de l’Article 7 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer stipule qu’il n’est pas nécessaire de modifier les lignes de base en cas d’érosion des côtes, car une telle modification poserait des difficultés pour les zones maritimes.  Selon sa délégation, les lignes de base doivent donc demeurer inchangées, même en cas d’élévation du niveau de la mer.  Soulignant que les petits États insulaires sont menacés par ce phénomène, il a souligné le caractère immuable et intangible des frontières selon le principe « la terre domine la mer ».  Tous les travaux de la CDI doivent donc être conformes à ladite Convention qui, en tant que « Constitution des océans », régit toutes les activités en mer, a-t-il conclu. 

M. CLAUDIO TRONCOSO REPETTO (Chili) a rappelé que les principes généraux du droit sont une source autonome du droit, comme le dispose l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il s’est félicité que la CDI ait abandonné l’expression « nations civilisées » visé par ledit Article.  Il a évoqué les principes se formant dans le cadre du système juridique international, en rappelant qu’ils doivent être « spécifiques » à ce système.  Il a noté que certains États ont des « hésitations » quant à l’existence de cette seconde catégorie de principes et souhaité une révision du projet de conclusion 7 paragraphe 2. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a rappelé la gravité des conséquences des changements climatiques. Le travail de la CDI est capital, a-t-il reconnu, en rappelant l’importance de la stabilité juridique des lignes de base et des zones maritimes.  Cette question est vue par les États comme devant se régler dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a noté le délégué, en ajoutant que c’est la position du Chili.  Les interprétations de la Convention permettant le statu quo en ce qui concerne les lignes de base et les zones maritimes doivent être accueillies favorablement.  Enfin, il a salué l’inclusion dans le programme de travail de la CDI de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État et la désignation d’un Chilien comme Rapporteur spécial.

M. NOAM CAPPON (Israël) a commencé par rappeler les évènements en cours dans son pays qui subit toujours « les attaques de l’organisation génocidaire Hamas ».  Depuis le 7 octobre, a-t-il témoigné, « le temps s’est arrêté. »  L’État d’Israël continuera de protéger ses citoyens dans le respect du droit international, a-t-il assuré, rappelant que son pays demande la libération des otages gardés en violation flagrante du droit international.  Alors que nous débattons du droit international, la Sixième Commission doit être informée des actes qui foulent le droit au pied, a-t-il estimé, appelant les conseillers juridiques présents dans la salle à condamner les actes « barbares » du Hamas et à appuyer Israël. 

Le délégué a souligné ensuite que, les commentaires des gouvernements sur les projets de textes doivent être pris en compte, appelant la CDI à redoubler d’efforts pour les intégrer, particulièrement avant la deuxième lecture. La CDI doit aussi enquêter sur la pratique des États, a-t-il estimé, insistant sur le fait que la CDI doit être consciente de la distinction entre codification et développement progressif du droit international.  Les travaux sur les principes généraux du droit constituent une valeur ajoutée pour la détermination des sources du droit international à long terme, a reconnu le délégué, mais une analyse comparative des systèmes juridiques permettrait de déterminer l’existence de principes généraux.  S’il a salué l’appel à la cohérence dans le projet de conclusion 10 sur les fonctions des principes généraux du droit, il a toutefois émis des réserves sur la seconde catégorie de principes généraux formés au niveau international.  Selon lui, cette catégorie n’est pas étayée par la pratique des États, puisque les principes généraux sont avant tout de nature nationale, et risque d’entraîner une confusion avec d’autres catégories.  Par ailleurs, la méthode pour les déterminer reste vague et ne permet pas une application systématique, a-t-il conclu.

M. SEYED ALI MOUSAVI (République islamique d’Iran) a rappelé que, s’il n’existe pas de hiérarchie entre les sources de droit international, les principes généraux sont moins invoqués que les conventions internationales ou le droit coutumier en raison de leur opacité.  Ils ne sont pas pour autant subsidiaires, a-t-il estimé, puisqu’ils constituent des principes généraux pour de nombreuses juridictions, ayant contribué à combler certaines lacunes dans le droit international.  Le délégué s’est ensuite demandé si la formation de principes généraux au sein du système juridique international ne serait pas compromise par la formation des principes généraux au sein des systèmes juridiques nationaux, appelant à établir une distinction claire entre les principes généraux émanant du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) et les principes de droit international énumérés dans divers instruments.  De même, les décisions judicaires devraient avoir plus de poids que les enseignements pour déterminer les principes généraux. 

Concernant l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, le délégué a estimé que le sujet doit être considéré à la lumière des apports de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et de la Convention de Montevideo sur les droits et les devoirs des États.  Le principe « la terre domine la mer » pose néanmoins question quant aux lignes de démarcation lors de la perte de territoire, a-t-il remarqué, émettant des doutes sur les principes uti possidetis juris et rebus sic stantibus, leur préférant le principe d’intégrité territoriale et souhaitant la poursuite de l’étude du principe d’équité.  Le délégué a également appelé la CIJ à considérer les changements climatiques de manière holistique, rappelant les conséquences des mesures coercitives unilatérales sur les engagements environnementaux.  Enfin, il a requis la création d’un groupe de travail pour « contrebalancer » l’expérience du Rapporteur spécial sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État. 

M. PABLO AGUSTÍN ESCOBAR ULLAURI (Équateur) a indiqué que sa délégation était en accord avec l’approche en deux étapes, adoptée par la CDI pour identifier les principes généraux du droit, qui comprend la vérification de l’existence d’un principe commun d’un part, et sa transposition dans l’ordre juridique international d’autre part.  Il a cependant noté qu’il fallait faire preuve de souplesse pour déterminer la transposition et que, dans certains cas, un principe dérivé des systèmes juridiques nationaux pouvait être considéré comme non applicable dans un domaine du droit international, tout en l’étant dans un autre.  Le délégué a estimé que s’agissant de la conclusion 7 sur l’existence d’autres principes généraux formés dans le système juridique international, d’autres exemples pouvaient être analysés, même s’ils ne sont pas considérés comme intrinsèques.  Il a notamment cité les principes de Nuremberg, qui concernent la responsabilité individuelle pour les crimes de droit international.  S’agissant de la relation des principes généraux du droit avec les autres sources du droit international, il a souligné qu’il n’y avait pas pour sa délégation de hiérarchie entre les trois sources du droit international que sont les traités, la coutume et les principes généraux de droit. Ces sources peuvent coexister, et les questions d’interprétation, être résolues par les règles et principes d’interprétation et de résolution des conflits acceptés en droit international. 

Le délégué a ensuite salué les progrès réalisés au sein du Groupe d’étude sur l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, un sujet « complexe » qui porte notamment sur des aspects relatifs aux frontières maritimes et aux droits humains, et qu’il faut analyser sur la base des traités applicables, comme la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, sachant qu’il n’y a pas de normes coutumières directement applicables.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Moyen-Orient: le Conseil de sécurité résonne d’appels au cessez-le-feu et à une trêve humanitaire à Gaza, dans la crainte d’un embrasement régional

9451e séance – matin & après-midi
CS/15462

Moyen-Orient: le Conseil de sécurité résonne d’appels au cessez-le-feu et à une trêve humanitaire à Gaza, dans la crainte d’un embrasement régional

À l’occasion de son débat public trimestriel sur la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, le Conseil de sécurité est largement revenu, ce mardi, sur les hostilités en cours dans la bande de Gaza et en Israël.  Ouvrant les débats, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a une nouvelle fois condamné les actes de terreur du Hamas le 7 octobre en Israël et exigé que tous les otages —dont certains parents étaient présents dans la salle— soient libérés immédiatement, sans conditions.  Puis il a dépeint un tableau qui « s’assombrit d’heure en heure », avant de laisser le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Tor Wennesland, et son adjointe, Mme Lynn Hastings, en donner les détails.

Avec trois fois plus d’Israéliens tués la seule journée du 7 octobre (environ 1 400) qu’au total depuis 2005, et davantage de Gazaouis morts lors de la première semaine de frappes (plus de 5 000, selon le Ministère de la santé de Gaza) que pendant la guerre de 50 jours de 2014, ce conflit a déjà établi de funestes records.  Selon le Ministère du logement de Gaza, au moins 42% des logements y ont été détruits ou endommagés depuis le début des hostilités, ce qui compliquera le retour des habitants dans leurs quartiers.  Il n’y a en outre plus d’électricité ni d’eau, et les hôpitaux sont au bord de l’effondrement, a fait savoir la Coordonnatrice spéciale adjointe.  Quant au nombre de déplacés à Gaza, il s’élève désormais à 1,4 million, dont quelque 600 000 ont trouvé refuge dans les installations de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), a précisé Mme Hastings. 

En cette Journée des Nations Unies, elle a d’ailleurs tenu à rendre hommage à ses collègues de l’ONU travaillant pour l’Office dans des conditions extrêmement difficiles, et dont au moins 35 ont perdu la vie au cours des deux dernières semaines.  Elle a lancé un appel à tous les États Membres pour qu’ils soutiennent l’appel éclair de 104 millions de dollars de l’UNRWA pour Gaza.

Heureusement, une partie de l’aide humanitaire parvient enfin à Gaza, s’est réjouie la Coordonnatrice spéciale adjointe, mais il s’agit d’« une goutte d’eau dans un océan de besoins »: à peine 4% du volume quotidien moyen de marchandises préconflit.  Elle s’est particulièrement inquiétée du manque de carburant, sans lequel l’aide ne peut être acheminée, les hôpitaux avoir de l’électricité, l’eau potable être purifiée ou même pompée.  Si rien n’est fait, les réserves de l’ONU sur place seront vides dans quelques jours, a alerté M. Guterres, exhortant Israël et ses partenaires à faciliter l’acheminement de l’aide.  M. Wennesland a salué à cet égard la contribution de l’Égypte à la réouverture du point de passage de Rafah.

Revenant sur les causes du conflit, le Secrétaire général a estimé que si rien ne peut justifier le meurtre ou l’enlèvement de civils, les attaques du Hamas ne se sont pas « produites dans le vide ».  Il a ainsi rappelé que le peuple palestinien est sujet à une « occupation suffocante » depuis 56 ans, voyant ses espoirs d’une solution politique peu à peu s’évanouir, et subissant aujourd’hui une « punition collective ».  Ces propos ont suscité l’ire du Ministre des affaires étrangères d’Israël, M. Eli Cohen, qui, s’adressant directement au Secrétaire général, lui a demandé dans quel monde il vivait pour avoir une telle lecture des événements.  Brandissant des photos d’enfants retenus en otage par le Hamas, égrainant leur nom et leur âge, qualifiant leurs ravisseurs de « monstres » et de « nouveaux nazis », M. Cohen a affirmé que son pays n’a pas choisi cette guerre.  Ainsi, a-t-il clamé, il a non seulement le droit mais le devoir de se défendre.

C’est précisément sur cette notion de « droit et nécessité impérieuse de se défendre contre le terrorisme » qu’a insisté le Secrétaire d’État des États-Unis, M. Anthony Blinken, en annonçant qu’il avait un nouveau projet de résolution, une semaine après avoir opposé son veto à celle du Brésil qui n’intégrait pas cet élément de langage.  Rappelant l’étendue des atrocités « illégales et injustifiables » commises par le Hamas, M. Blinken a convié tous les États Membres —dont 30 ont pleuré des ressortissants le 7 octobre, a-t-il souligné— à agir ensemble pour qu’elles ne puissent plus jamais se reproduire.  Il a en outre promis de tout mettre en œuvre pour empêcher la propagation du conflit, contrairement à l’Iran et à ses affidés (notamment le Hamas, le Hezbollah et les houthistes) qui jettent de l’huile sur le feu - accusations rejetées par la République islamique d’Iran.  Bien que les États-Unis ne veuillent pas la guerre avec cette dernière, ils n’hésiteront pas à se défendre s’ils sont attaqués, a averti M. Blinken.

Parmi les autres membres permanents du Conseil de sécurité, la France a soutenu le droit d’Israël de se défendre et de protéger sa population, comme l’a rappelé aujourd’hui même, sur le sol israélien, le Président Emmanuel Macron.  Cependant, a ajouté Mme Catherine Colonna, la Ministre française des affaires étrangères, Israël doit agir dans le respect du droit international humanitaire, en préservant la vie des civils palestiniens.  Beaucoup ont lancé ce même appel, et d’autres délégations, comme la Ligue des États arabes, ont dénoncé avec force les violations déjà en cours de ce droit.  La Chine et de nombreux autres États Membres ont appelé à un cessez-le-feu humanitaire en insistant sur l’obligation de la Puissance occupante, Israël, de protéger la population et les installations civiles.  La Fédération de Russie, quant à elle, a proposé que l’on revienne sur sa première résolution rejetée en la combinant à celle du Brésil, plutôt que de voter celle, « très douteuse », des États-Unis, qui autoriserait Israël à lancer son attaque terrestre.

« Combien de victimes et d’enfants palestiniens doivent mourir avant que le Conseil n’appelle à la fin de cette folie, qui n’est que le prolongement de l’agression et la tentative d’annexion de la bande de Gaza? » s’est interrogé le Ministre des affaires étrangères et des expatriés de l’État de Palestine, M. Riyad Al-Maliki.  Au nom du Groupe des États arabes, le Vice-Premier Ministre de la Jordanie, M. Ayman Safadi, lui a emboîté le pas, en demandant la cessation immédiate des bombardements, mais aussi, et surtout, l’établissement d’un État palestinien indépendant, avec Jérusalem-Est comme capitale, dans les frontières de 1967.  « L’espoir s’éloigne et il est temps que le Conseil se fasse le chantre de la justice, du droit et de l’humanité.  À défaut, il portera la responsabilité de cette guerre », a-t-il lancé.
 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a décrit une situation au Moyen-Orient qui s’assombrit d’heure en heure, la guerre à Gaza risquant de s’étendre à toute la région.  Il a condamné sans équivoque les actes de terreur du Hamas le 7 octobre en Israël, et exigé que tous les otages soient traités avec humanité et libérés immédiatement et sans conditions, notant la présence de membres de leurs familles dans la salle.

Il a toutefois estimé que ces attaques ne se sont pas produites « dans le vide ». Il a rappelé que le peuple palestinien a été sujet à 56 ans « d’occupation suffocante », voyant ses espoirs d’une solution politique à leur situation peu à peu s’évanouir.  Et si ces griefs ne peuvent justifier les « attaques épouvantables » du Hamas, celles-ci ne peuvent pas davantage justifier la « punition collective » du peuple palestinien.  « Même la guerre à ses règles », a-t-il tranché.

Le Secrétaire général a exigé de toutes les parties qu’elles respectent leurs obligations en droit international humanitaire, qu’elles veillent constamment à épargner les civils dans la conduite des opérations militaires, qu’elles respectent et protègent les hôpitaux et qu’elles respectent l’inviolabilité des installations de l’ONU qui abritent aujourd’hui plus de 600 000 Palestiniens. À ce propos, il a rendu hommage aux collègues de l’ONU travaillant pour l’UNRWA dans des conditions extrêmement difficiles, et dont au moins 35 ont déjà été tués dans le bombardement de Gaza au cours des deux dernières semaines.  Il a également condamné l’ordre donné par Israël à plus d’un million de Gazaouis d’évacuer vers le sud, où il n’y a aucune ressource et où les bombardements font tout autant rage qu’au nord.

Heureusement, s’est-il réjoui, une partie de l’aide humanitaire parvient enfin à Gaza, mais il s’agit d’« une goutte d’eau dans un océan de besoins ». Il s’est particulièrement inquiété du manque de carburant, sans lequel l’aide ne peut être acheminée, les hôpitaux avoir de l’électricité, et l’eau potable être purifiée ou même pompée.  Si rien n’est fait, les réserves de l’ONU sur place seront vides dans quelques jours, a-t-il alerté, exhortant à faciliter l’acheminement de l’aide.  Le Secrétaire général a réitéré son appel à un cessez-le-feu humanitaire immédiat et à la facilitation de la libération des otages.  Il a également réaffirmé son soutien à une solution à deux États, conformément aux résolutions des Nations Unies, au droit international et aux accords antérieurs.

M. TOR WENNESLAND, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, a présenté ses sincères condoléances aux milliers de familles en deuil, entre autres celles des 35 membres du personnel de l’ONU tués à Gaza. L’attaque odieuse lancée par le Hamas le 7 octobre et l’opération militaire dévastatrice menée actuellement par Israël ont fait un nombre impressionnant de victimes civiles et profondément ébranlé les Israéliens et les Palestiniens.  M. Wennesland a ajouté que ces événements sans précédent risquent de s’étendre à l’ensemble de la région.

Faisant un compte rendu de la situation depuis le 7 octobre, le Coordonnateur spécial a indiqué qu’au moins 220 civils, dont des femmes et des enfants, sont retenus en otage dans la bande de Gaza.  Le Hamas a affirmé que 22 otages ont été tués lors des frappes israéliennes. Cette information, a dit M. Wennesland, n’a pas été confirmée.  Il s’est félicité de la récente libération de quatre otages, reconnaissant le rôle important joué par le Qatar, et a appelé à la libération immédiate et sans conditions de tous les autres.

Le jour de l’attaque du Hamas, le Conseil de sécurité israélien a déclaré l’état de guerre pour la première fois depuis plus de 50 ans, avec pour objectifs la destruction des capacités militaires et institutionnelles du Hamas et du Jihad islamique.  Le 8 octobre, le Ministre israélien de la défense a proclamé le siège total de Gaza, bloquant toute entrée de nourriture, d’eau, de carburant et autres fournitures.  Les frappes aériennes ont été dévastatrices: le Ministère de la santé de Gaza a enregistré plus de 5 000 morts, dont plus de 1 100 femmes, 2 000 enfants, ainsi que des journalistes, des professionnels de la santé, et plus de 15 000 blessés.  Plus d’un million de Palestiniens sont désormais des personnes déplacées.

Des infrastructures essentielles ont été détruites et les conséquences humanitaires sont immenses, a poursuivi M. Wennesland.  Il a salué la contribution de l’Égypte à la réouverture du point de passage de Rafah le 21 octobre et s’est fait l’écho de l’appel du Secrétaire général pour un cessez-le-feu humanitaire.

Le risque d’une nouvelle détérioration de la situation en Cisjordanie occupée ou d’un débordement du conflit dans la région reste important, a averti le Coordonnateur spécial.  La violence en Cisjordanie occupée, dont Jérusalem-Est, s’est en effet aggravée depuis le début de la guerre.  Des échanges de tirs ont été enregistrés le long de la Ligne bleue, et le Hezbollah, le Hamas et le Jihad islamique palestinien ont lancé des roquettes et des missiles antichars en direction d’Israël, les forces israéliennes répondant par des tirs d’artillerie et des frappes aériennes.  Plus de 80 000 Israéliens ont été évacués et 20 000 Libanais sont partis de chez eux.

Il est essentiel que la communauté internationale déploie tous les efforts pour mettre fin à l’effusion de sang et empêcher toute nouvelle extension des hostilités, notamment dans la région, a conclu M. Wennesland.  Face à des enjeux incroyablement lourds, il a appelé tous les acteurs concernés à agir de manière responsable.  À cet égard, il a salué l’organisation par l’Égypte du Sommet de la paix du Caire le 21 octobre et les efforts déployés par les États de la région et au-delà pour faire face à la catastrophe humanitaire en cours et ouvrir la voie à un processus de paix réel et sérieux.

Intervenant par visioconférence, la Coordonnatrice spéciale adjointe pour le processus de paix au Moyen-Orient, Mme LYNN HASTINGS, qui est aussi Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice des Nations Unies pour les activités humanitaires dans le Territoire palestinien occupé, a d’abord salué la libération de deux otages samedi et de deux autres hier, en rendant hommage à l’Égypte et au Qatar pour leur médiation, ainsi qu’au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour avoir facilité le processus.  Elle a ensuite appelé à la libération, sans condition, des plus de 200 otages toujours détenus, tout en exigeant que, dans l’intervalle, ils soient traités avec humanité et qu’ils soient autorisés à recevoir la visite du CICR.

Elle a noté qu’alors que d’intenses frappes aériennes continuent de pleuvoir sur Gaza et que des roquettes aveugles s’abattent sur Israël, les morts, les blessés, les destructions et les déplacements s’amoncellent.  Ainsi, du côté israélien, le nombre de morts est plus de trois fois supérieur au nombre cumulé d’Israéliens tués depuis que le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) a commencé à recenser les victimes en 2005.  À Gaza, après la première semaine de frappes, le nombre de morts a dépassé celui des Gazaouis tués lors de la guerre de 50 jours de 2014.  Parmi eux, les femmes et les enfants représentent environ 62% de ces victimes.  Selon le Ministère de la santé de Gaza, plus de 1 500 personnes ont également été portées disparues et sont présumées se trouver sous les décombres, a indiqué la Coordonnatrice humanitaire. 

Quant au nombre de déplacés à Gaza, il est passé à 1,4 million et quelque 600 000 personnes ont trouvé refuge dans les installations de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) dans des conditions de plus en plus difficiles.  Le nombre moyen de déplacés par abri a atteint plus de 2,5 fois sa capacité.  « Il n’y a nulle part où trouver refuge à Gaza.  Lorsqu’il s’agit de décider s’ils doivent fuir ou non, les civils sont damnés s’ils le font et damnés s’ils ne le font pas », a constaté Mme Hastings.  Elle a signalé que des familles déplacées retourneraient dans le nord de Gaza en raison des bombardements en cours, car ne pouvant pas subvenir à leurs besoins fondamentaux dans le sud.  Elle a réitéré, en conséquence, que les civils doivent être protégés et doivent pouvoir couvrir leurs besoins essentiels pour survivre, qu’ils se déplacent ou qu’ils restent. 

Passant à l’ampleur des destructions, elle a déclaré que d’après le Ministère du logement de Gaza, au moins 42% de tous les logements de la bande de Gaza ont été détruits ou endommagés depuis le début de ces hostilités (7 octobre), ce qui remet en question la capacité des gens à retourner dans leurs quartiers. Parallèlement, Gaza reste sous une panne totale d’électricité.  Les hôpitaux sont au bord de l’effondrement en raison des pénuries d’électricité, de médicaments, d’équipements et de personnel spécialisé, des dommages et des destructions.  Par ailleurs, les médecins sont contraints d’opérer sans anesthésie et, depuis le 7 octobre, 16 agents de santé de Gaza auraient été tués et 30 blessés dans l’exercice de leurs fonctions.  « Au milieu de ce tumulte », a encore dit Mme Hastings, l’accord visant à utiliser le point de passage de Rafah depuis l’Égypte pour acheminer des fournitures humanitaires essentielles à Gaza a donné une lueur d’espoir à des personnes vivant dans des conditions épouvantables. 

Au niveau de l’assistance, elle a déclaré qu’en fin de semaine dernière, 34 camions sont entrés dans Gaza avec des articles vitaux, et 20 autres camions ont traversé Rafah pour se rendre à Gaza hier.  Vingt autres doivent traverser aujourd’hui, bien qu’ils soient actuellement retardés.  Tout en se félicitant de cette évolution importante, elle a estimé que ces livraisons ne sont « qu’une goutte d’eau dans l’océan » par rapport à l’ampleur des besoins, soit pas plus de 4% du volume quotidien moyen de marchandises entrant à Gaza avant ces hostilités, et n’incluent pas le carburant, essentiel pour alimenter les services nécessaires à la survie des populations.  Sans carburant, notre opération humanitaire s’arrêtera, a-t-elle averti, ajoutant: « pas de carburant signifie pas d’hôpitaux fonctionnels, pas de dessalement de l’eau et pas de boulangeries ».  De nombreuses personnes boivent de l’eau souterraine salée, ce qui augmente les risques de diarrhée, de choléra et d’autres problèmes de santé, a précisé la Coordonnatrice spéciale adjointe, en demandant à Israël de ramener l’approvisionnement en eau et en électricité aux niveaux d’avant le conflit et de travailler avec les organisations humanitaires pour trouver un moyen sûr d’acheminer du carburant à Gaza.

Elle a en outre demandé que les points de passage israéliens pour la circulation des biens et des personnes soient ouverts.  Elle a vivement rendu hommage à la bravoure de ceux qui fournissent des services humanitaires et de sauvetage, y compris « l’incroyable personnel » de l’UNWRA, dont beaucoup sont eux-mêmes déplacés et continuent de soutenir les plus vulnérables, ainsi qu’aux 35 collègues de l’UNRWA, tragiquement tués.  Elle a prié le Conseil de doubler, sans délai, le financement de l’UNRWA et des autres organismes humanitaires sur le terrain, afin qu’ils puissent poursuivre ces efforts indispensables.

Mme Hastings a également lancé un appel à tous les États Membres pour qu’ils soutiennent à la fois l’appel éclair de 104 millions de dollars de l’UNRWA pour Gaza, qu’il faudra en plus revoir à la hausse, de même que son budget de base, qui accuse un déficit de 100 à 120 millions de dollars en raison d’un sous-financement chronique.  Sans combler ce déficit, l’UNRWA ne sera pas en mesure de payer les salaires de novembre et décembre, y compris ses 13 000 employés à Gaza.  Elle a aussi réitéré l’appel du Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu humanitaire immédiat afin d’alléger les souffrances humaines, et en faveur du dialogue diplomatique. 

M. RIYAD AL-MALIKI, Ministre des affaires étrangères et des expatriés de l’État de Palestine, a souligné le devoir du Conseil de sécurité de mettre un terme aux massacres perpétrés par Israël contre la population civile palestinienne. L’échec persistant du Conseil est inexcusable, a tranché le Ministre pour lequel le peuple palestinien et les peuples libres du monde entier ne pardonneront pas le Conseil s’il échoue, une nouvelle fois, à assumer ses responsabilités.  Chaque minute d’inaction est une âme innocente perdue à Gaza. M. Al-Maliki a regretté qu’Israël ait choisi la guerre et la vengeance contre le peuple palestinien, tuant plus de 5 700 Palestiniens en 16 jours, selon le Ministre et détruisant jusqu’à 50% des habitations.  Il a appelé le Conseil à prendre conscience de l’énormité de cette catastrophe. 

L’inaction du Conseil foule au pied 75 ans de progrès du droit international et du droit international humanitaire.  Combien de victimes et d’enfants palestiniens doivent mourir avant que le Conseil n’appelle à la fin de cette folie, qui n’est que le prolongement de l’agression et la tentative d’annexion de la bande de Gaza?  La paix et la sécurité ne seront pas réalisées par l’anéantissement de Gaza ou la réduction de sa superficie.  Continuer d’ignorer les droits du peuple palestinien, ses souffrances et le droit international n’est pas viable.  La privation de nourriture, d’eau et de médicaments est une punition collective et un crime et la Cour internationale de Justice (CIJ) a dûment rejeté les excuses d’Israël sur cette question. 

Poursuivant, M. Al-Maliki a dit que mettre fin à l’occupation et réaliser les droits du peuple palestinien sont le seul moyen d’assurer la stabilité, la sécurité et la paix régionales et internationales.  Le Conseil doit appeler à la cessation immédiate de l’agression israélienne, garantir l’entrée sans entrave et sans condition de l’aide humanitaire, empêcher les déplacements forcés et fournir d’urgence une protection internationale au peuple palestinien.  Le Conseil doit mettre fin à l’occupation israélienne de la terre palestinienne, dont Jérusalem.  Il doit aider le peuple palestinien à exercer son droit à l’autodétermination, à l’indépendance et au retour des réfugiés.  Cessons de vouloir mettre sur un pied d’égalité la victime et le bourreau, l’occupé et l’occupant, s’est impatienté le Ministre.  La guerre est l’option de ceux qui manquent de courage et de prévoyance, et le choix que fera ce Conseil aura un impact sur le monde entier et non seulement sur la Palestine.  Pour le peuple palestinien, la légitime défense et la résistance sont un droit et un devoir.  Il faut mettre fin au génocide et aux massacres, a conclu le Ministre. 

M. ELI COHEN, Ministre des affaires étrangères d’Israël, a déclaré qu’au moment où le Conseil de sécurité se réunit, des enfants et des bébés sont retenus en otage à Gaza.  Illustrant ses propos, il a brandi devant les membres du Conseil un panneau comportant les photos d’une dizaine d’enfants otages, dont il a égrené les prénoms et âges. S’adressant directement au Secrétaire général, il lui a demandé dans quel monde il vivait.  Ce n’est pas le monde que lui, partage avec d’autres, a-t-il ajouté.  Il a aussi déclaré que la date du 7 octobre rentrera dans l’histoire comme un jour de réveil contre l’extrémisme, comme un jour d’enfer.  Ce jour-là, a-t-il relaté, des centaines de terroristes du Hamas venant de Gaza sont entrés en Israël « avec la haine de Daech », pour massacrer des populations civiles, tuant des bébés, violant et enterrant des femmes vivantes, égorgeant des familles qui allaient à la synagogue, chantant et dansant autour de cadavres.  « Vous n’avez pas vu ces horreurs-là », a-t-il lancé avec véhémence aux membres du Conseil avant de signaler qu’à ce jour, nombre de ces morts n’ont pas encore été enterrés.  « Ce massacre entrera dans l’histoire. »

M. Cohen a aussi parlé des otages, dont il a demandé la libération, en reprenant le slogan « Ramenez-les à la maison ».  Puis, il a signalé aux membres du Conseil que des membres des familles d’otages étaient présents dans la salle, en énumérant leurs noms.  Des familles qui exigent la libération des leurs, a-t-il relayé.  Il a ensuite fait écouter aux membres du Conseil, depuis son téléphone portable, un message audio d’un homme parlant en langue arabe.  Il a affirmé que cette voix était celle d’un terroriste du Hamas disant à sa mère sa fierté d’avoir tué 10 juifs.  « Ces gens sont des monstres et ont donné naissance à un monstre.  Ces gens sont des monstres remplis de haine », a-t-il martelé.  Alors qu’Israël n’a pas choisi cette guerre imposée, Israël a non seulement le droit de se défendre, mais également le devoir de le faire, et il le fera, a-t-il fermement prévenu. 

Poursuivant, le Ministre a affirmé que la prochaine victime de cette « barbarie » sera le monde occidental.  « Cette terreur va s’insinuer chez vous, car ces terroristes veulent étendre leur influence, tout comme Daech », a-t-il affirmé, appelant « le monde libre » à se lever et à soutenir Israël dans cette guerre.  Il a aussi dit entendre les voix de ceux qui parlent de proportionnalité.  S’adressant directement à Mme Hastings, il lui a demandé: « quelle réponse proportionnelle apporter face à la décapitation de bébés? » ajoutant: « ils sont exactement comme les nazis ».  Cette guerre, nous ne l’avons pas choisie, elle nous a été imposée, a-t-il rappelé tout en assurant de la victoire à venir contre cette guerre.  Israël, a-t-il ainsi déclaré, agira de manière inouïe pour que les objectifs du Hamas, de ses maître-chanteurs et collaborateurs, ne se réalisent jamais. 

Le Ministre a, enfin, rappelé que son pays est, « de temps en temps », confronté à ses voisins.  Il a cité un missile lancé depuis le Yémen en assurant que tout le monde sait « qui est derrière tout ça ».  S’adressant directement aux représentants de pays arabes, il leur a dit que « l’Iran est l’ennemi commun » et que le choix pour eux est clair: « soit vous vous ralliez au monde civilisé, soit vous êtes du côté des sauvages du Hamas ». 

M. MAURO VIEIRA, Ministre des affaires étrangères du Brésil, s’est dit témoin d’une violence sans précédent dans la région depuis le 7 octobre dernier. Le Hamas doit libérer les otages israéliens et Israël doit cesser ses frappes aériennes, a-t-il martelé, en plaidant pour un « minimum d’humanité dans la folie de la guerre ». Il est question, à la fois, d’une prise d’otages et d’une crise humanitaire, a constaté le Ministre. Nous pleurons, a-t-il annoncé, trois de nos ressortissants victimes des attaques du Hamas.  Il a appelé à la libération immédiate et sans condition de tous les otages civils, jugeant odieux et criminel tout acte terroriste, conformément au droit international humanitaire. 

Mais le Ministre a mis en garde contre le recours à une force qui renforcerait la théorie des terroristes.  La violence à Gaza est inacceptable, a-t-il estimé, attirant l’attention sur la démolition des infrastructures civiles.  Il a rappelé à Israël, Puissance occupante, l’obligation juridique et morale de protéger la population civile et a insisté sur les principes fondamentaux de proportionnalité, de précaution et d’humanité.  Le Ministre a fustigé le soi-disant ordre d’évacuation qui a apporté des niveaux de souffrances sans précédent.  Il est revenu sur les causes profondes de ce conflit de 75 ans et pressé la communauté internationale de concrétiser la solution des deux États. 

M. ANTHONY BLINKEN, Secrétaire d’État des États-Unis, a annoncé la présentation d’une quatrième résolution qui reprend beaucoup d’éléments de langage de celle proposée par le Brésil, la semaine dernière, tout en intégrant les points de vue des différents interlocuteurs.  Il en a détaillé les quatre points clefs et d’abord le fait que les États-Unis reconnaissent le droit et la nécessité impérieuse de se défendre contre le terrorisme.  Rappelant l’étendue des atrocités commises par le Hamas le 7 octobre et s’étonnant que les condamnations ne soient pas toujours explicites, M. Blinken a affirmé qu’il est impératif d’en empêcher toute répétition de tels actes « illégaux et injustifiables », où qu’ils soient commis et quels qu’en soient leurs auteurs.  Il a ainsi dénoncé les pays qui financent le Hamas et d’autres organisations terroristes, appelant tous les États Membres à faire de même, d’autant plus que 30 d’entre eux ont déploré des morts le 7 octobre dernier.

Le Secrétaire d’État a ensuite réaffirmé le besoin vital de protéger les civils.  Tout en fustigeant la décision cynique du Hamas d’en faire des boucliers humains, il a aussi appelé Israël à prendre toutes les mesures pour protéger les civils.  Plaidant pour une trêve humanitaire, pour laisser le temps aux Gazaouis de se réfugier dans le sud, le Secrétaire d’État a indiqué que son pays a débloqué une somme supplémentaire de 100 millions de dollars pour l’aide humanitaire, portant le total à 1,6 milliard en 2023.  Nous travaillons, a-t-il dit, main dans la main avec l’ONU et l’Égypte sur ce dossier.  Toutes les vies se valent, et un civil est un civil, a insisté M. Blinken, avant d’exhorter le Hamas à libérer tous les otages immédiatement et sans condition.

Troisièmement, il a promis de tout mettre en œuvre pour empêcher que le conflit ne se propage, arguant que ce serait catastrophique pour tous les peuples de la région, et même du monde.  Aussi a-t-il encouragé tous les membres du Conseil de sécurité, et en particulier les membres permanents, à assumer leurs responsabilités pour éviter un tel scénario. Il a blâmé l’Iran et ses affidés pour leur rôle dans ce conflit, et a ajouté que, si son pays ne cherche pas de conflits, il n’hésitera pas à se défendre s’il est attaqué.  Enfin, M. Blinken a appelé toute la communauté internationale à redoubler d’efforts pour obtenir un règlement politique pérenne, qui doit passer par une solution à deux États.  Deux voies diamétralement opposées se dessinent devant nous, a-t-il conclu: la voie du Hamas, synonyme de mort, de souffrances, de ténèbres, et la voie de la paix, de la normalisation et de l’autodétermination qui, seule, permettra à tous les peuples de la région de vivre et de prier ensemble.

Selon Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, la situation est très préoccupante sur le plan humanitaire et dangereuse car la région risque un embrasement.  Nous avons le devoir de condamner sans aucune ambiguïté l’attaque terroriste du Hamas et d’autres groupes terroristes contre Israël, a poursuivi la Ministre, précisant que cette attaque « inhumaine et abominable » a fait près de 40 victimes françaises, dont 30 morts et 9 disparus.  Elle a réitéré l’appel de la France pour que les otages soient libérés, immédiatement et sans conditions.

Mme Colonna a voulu rappeler la solidarité sans faille de la France avec Israël et son soutien indéfectible à sa sécurité, soulignant qu’Israël a le droit de se défendre et de protéger sa population, comme l’a rappelé, aujourd’hui même sur le sol israélien, le Président Emmanuel Macron.  Mais, a ajouté la Ministre, Israël doit le faire dans le respect du droit international, en particulier du droit international humanitaire, et en préservant la vie des civils palestiniens.  Nous savons tous que le Hamas ne représente en rien les Palestiniens. Dans la bande de Gaza, où le Hamas domine par la terreur, il n’apporte que les souffrances de la violence des combats et une crise humanitaire terrible. 

Face à cette crise, a dit la Ministre, le devoir de la communauté internationale, y compris celui d’Israël, est de garantir la fourniture continue aux civils des biens de première nécessité et, pour cela, il faut un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave à la bande de Gaza.  Demandant la mise en place d’une trêve humanitaire, la Ministre a indiqué que la France a triplé son aide humanitaire qui atteindra un total de plus de 110 millions d’euros en 2023.

« Nous avons le devoir impérieux de retracer un chemin de paix » et la France continuera de défendre la solution des deux États.  Le Conseil, a estimé la Ministre, doit se mobiliser et exercer pleinement sa responsabilité.  Il est plus que temps qu’il condamne sans ambiguïté l’attaque terroriste du Hamas contre Israël, qu’il appelle au respect du droit international et qu’il demande la délivrance durable de l’aide à la population de Gaza.  C’est pourquoi la France a voté en faveur du projet de résolution présenté par le Brésil.

M. MICHEL REGIS ONANGA M. NDIAYE, Ministre des affaires étrangères chargé de l’intégration sous-régionale et des Gabonais à l’étranger, a noté que les « effroyables attaques » du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023, marquent un nouveau point de basculement dans le conflit israélo-palestinien.  Le bilan des combats entre Israël et le Hamas s’alourdit chaque jour et de façon vertigineuse, avec des milliers de morts et de blessés, des personnes enlevées, des atrocités commises à l’encontre de femmes, d’enfants et de personnes âgées, a-t-il fait remarquer, en réitérant la ferme condamnation de son pays « de ces actes de barbarie » et exhortant les ravisseurs à remettre en liberté tous les otages.  La libération de deux otages de nationalité américaine le 20 octobre, puis de deux autres de nationalité israélienne le 23, est un motif d’encouragement, a commenté le Ministre gabonais, reconnaissant dans la foulée le droit d’Israël à la légitime défense mais dans le respect du principe de proportionnalité, de précaution et de distinction.  « Avec le siège de Gaza, la détresse humaine a atteint une échelle insoutenable », a-t-il estimé, avant de condamner la violence contre les infrastructures de nature civile en rappelant qu’il faut respecter et protéger les unités sanitaires et leurs personnels en toutes circonstances, conformément au droit international humanitaire.

Sur le plan humanitaire, il a qualifié de « lueur d’espoir » l’acheminement de l’aide vers la bande de Gaza, au point de passage de Rafah, pour des millions de populations de Gaza prises dans l’étau des belligérants, piégées sans eau potable, denrées alimentaires, gaz, carburant et électricité.  À cet égard, il a lancé un appel pour une ouverture en continu de ce point de passage, au vu de la situation critique sur le terrain. Le Ministre a ensuite mis face à ses responsabilités le Conseil de sécurité, qui n’a pas pu surmonter ses clivages, et rappelé que son pays a voté en faveur des deux derniers projets de résolution, animé par le profond désir de mettre fin aux exactions et de protéger les populations civiles.  L’arrêt immédiat des hostilités et un accès sans entrave de l’aide humanitaire aux populations dans le besoin sont des urgences vitales, a-t-il affirmé, en incitant à « œuvrer davantage pour faire taire les armes » et trouver une solution durable à cette crise.  Nous nous devons de prévenir un enlisement de la situation et l’ouverture d’autres fronts dans la région, notamment en Cisjordanie et au sud du Liban, qui rendraient l’environnement régional encore plus volatile, a encore exhorté le Ministre.

M. IGLI HASSANI, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, a déclaré que les terribles événements du 7 octobre représentent l’attaque la plus meurtrière de l’histoire d’Israël.  L’Albanie, a martelé le Ministre, se tient aux côtés d’Israël dans l’exercice de son droit à la légitime défense.  Israël a besoin du soutien de la communauté des nations libres contre les terroristes.  Toutes les mesures doivent être prises pour ne pas nuire à ceux dont la vie est menacée par le Hamas et dont les dirigeants vivent une vie des plus confortables en dehors de Gaza.  Le Ministre a condamné toute glorification du terrorisme et conseillé aux Palestiniens de reconnaître que leur droit à l’autodétermination, leur rêve d’un État et leurs aspirations à une vie meilleure dans la sécurité et la dignité ne seront jamais réalisés avec le Hamas.  Ils doivent se retourner contre les actes de terreur du Hamas.

Le Ministre s’est dit préoccupé par la montée de l’antisémitisme, ce qui est tout simplement inacceptable.  Ne restons pas indifférents face à la promotion des manuels nazis, et luttons contre tous ceux qui attisent les flammes de la division et de la discrimination, a-t-il encouragé.  S’agissant de la situation humanitaire, il a condamné l’attaque perpétrée, mardi dernier, contre l’hôpital Al Ahli et a demandé une enquête approfondie sur cet acte. Il a salué les convois humanitaires vers Gaza, tout en reconnaissant qu’il faut faire beaucoup plus.  Il s’est aussi félicité de la libération de quelques otages avec l’aide du Qatar.  Tout doit être fait pour éviter un débordement du conflit, a appelé le Ministre qui a condamné les attaques du Hezbollah contre Israël.  Israël a besoin de sécurité et les Palestiniens ont besoin de leur État, a résumé le haut responsable, en réitérant son appui à la solution des deux États et à la proposition des États-Unis qui aborde toutes les questions fondamentales.

M. IAN BORG, Ministre des affaires étrangères et européennes et du commerce de Malte, a rappelé que son pays avait condamné sans réserve, les « attaques terroristes ignobles et déplorables » commises le 7 octobre par le Hamas contre Israël.  Il a ajouté que son pays reconnaît le droit d’Israël à l’autodéfense, ainsi que son devoir et sa responsabilité de protéger son peuple.  Toutefois, a-t-il souligné, de telles actions doivent être conformes aux obligations découlant du droit international humanitaire et conformes aux principes de distinction et de proportionnalité.  Le Ministre s’est ensuite félicité de la libération de quatre otages et appelé le Hamas à libérer tous les autres, en toute sécurité, sans condition et sans plus attendre.  Il s’est également dit gravement préoccupés par la situation humanitaire actuelle à Gaza où des milliers de Palestiniens ont été tués, dont beaucoup de civils, notamment des femmes et des enfants.  Des dizaines d’autres personnes sont probablement encore ensevelies sous les décombres des quartiers rasés, a-t-il déploré.

M. Borg a en outre condamné les attaques contre les civils, contre l’ONU et contre le personnel médical et humanitaire, ainsi que contre les lieux religieux et les infrastructures civiles.  Il a demandé une enquête indépendante sur l’explosion survenue à l’hôpital baptiste Al Ahli Arab le 18 octobre, dont les auteurs doivent être tenus responsables.  Il a aussi appelé les parties à respecter leurs obligations internationales, notamment en créant des couloirs humanitaires et des zones de sécurité afin de permettre l’acheminement sûr, rapide, sans entrave et durable de l’aide humanitaire via le point de passage de Rafah.  Il a réitéré « avec force » son appel à l’instauration d’une pause humanitaire immédiate.

Le Ministre a également déclaré que les aspirations légitimes du peuple palestinien ne doivent pas être confondues avec l’idéologie extrémiste du Hamas.  Il a jugé crucial que cette distinction soit claire pour tous afin d’éviter une polarisation incendiaire et une potentielle escalade régionale.  Il ne faut pas non plus perdre de vue la situation en Cisjordanie, où depuis le 7 octobre, les meurtres, les violences et les déplacements forcés de Palestiniens ont connu une forte augmentation, notamment à travers la violence des colons et des centaines d’arrestations, a-t-il rappelé.  Il a alors appelé les parties à la désescalade et à faire preuve de la plus grande retenue, jugeant essentiel pour la paix régionale d’éviter de nouveaux fronts de conflit, en particulier à la frontière israélo-libanaise et en Cisjordanie.  Les parties influentes doivent prendre des mesures pour parvenir à un dialogue qui favorise la paix.  Veiller à ce que les groupes terroristes n’aient pas accès au financement est une condition fondamentale pour promouvoir la paix, a-t-il conclu.

Mme MAYA TISSAFI, Secrétaire d’État au Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, a fait observer que la Suisse, dépositaire des Conventions de Genève, a fait de la protection des civils et du respect du droit international humanitaire une priorité de son mandat au Conseil de sécurité.  Dès le 7 octobre, a-t-elle fait valoir, la Suisse a fermement condamné les actes de terreur, les tirs indiscriminés de roquettes contre la population israélienne et les prises d’otages menées par le Hamas.  La Secrétaire d’État a exigé que tous les otages retenus à Gaza soient traités humainement et libérés, de manière immédiate et inconditionnelle.

Elle a aussi demandé impérativement de protéger les civils et les personnes qui ne participent pas aux hostilités: « il faut les protéger des actes de terreur en Israël, il faut les protéger à Gaza et en Cisjordanie où l’augmentation des violences, notamment par les colons, est inquiétante ».  Inquiète pour les Gazaouis qui se trouvent, aujourd’hui, complètement assiégés, privés d’eau, d’électricité et de services essentiels, la Secrétaire d’État a annoncé que la Suisse avait décidé de mobiliser rapidement des fonds supplémentaires pour le CICR et l’OCHA.  Si l’action humanitaire et la gestion de la crise sont essentielles, Mme Tissafi a appelé à ne pas perdre de vue que le seul socle sur lequel la paix et la stabilité peuvent reposer est la solution des deux États démocratiques, Israël et la Palestine, qui vivent côte à côte, en paix, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues.

M. TOM TUGENDHAT, Secrétaire d’État chargé de la sécurité du Royaume-Uni, a d’abord rappelé que les actes violents du Hamas n’ont pas cessé le 7 octobre, puisque des roquettes continuent de pleuvoir sur des villes israéliennes, et qu’environ 200 personnes, dont un certain nombre de Britanniques, sont toujours retenus en otage à Gaza.  Israël est une nation en deuil, mais aussi une nation attaquée, a-t-il déclaré. Reconnaissant également les souffrances des Palestiniens, le Secrétaire d’État a accusé le Hamas de s’en servir comme de boucliers humains.  Les dirigeants de cette organisation terroriste se préoccupent davantage de l’opinion de leurs maîtres à Téhéran que de celle de leurs concitoyens. M. Tugendhat a réaffirmé le soutien ferme du Royaume-Uni au droit d’Israël de se défendre contre le terrorisme, tout en insistant sur le respect du droit international humanitaire.  Il a fait savoir que son pays a alloué 37 millions de dollars supplémentaires pour aider les civils de Gaza et a salué l’ouverture récente du point de passage de Rafah.

S’inquiétant d’un possible débordement dans la région, compte tenu des attaques du Hezbollah à la frontière entre Israël et le Liban, et de la montée des tensions en Cisjordanie, le Secrétaire d’État a souligné que c’est la raison pour laquelle son Premier Ministre et son Secrétaire d’État aux affaires étrangères se trouvent en ce moment-même dans la région.  Il a prôné une « diplomatie opiniâtre » qui reconnaisse les dures réalités et apporte une aide immédiate.  Il a aussi réitéré la position traditionnelle du Royaume-Uni en faveur de la solution des deux États.  Les événements de la semaine passée montrent, avec une clarté totale, la nécessité de réaliser ces objectifs, a-t-il conclu.

Mme REEM EBRAHIM AL HASHIMY, Ministre d’État pour la coopération internationale des Émirats arabes unis, s’est alarmée de cette crise, l’une des plus importantes de l’histoire moderne de la région.  Elle a appelé à un cessez-le-feu immédiat et pérenne, craignant une propagation du conflit dans la région, comme en attestent les tensions croissantes observées au Sud-Liban, dans le Golan syrien occupé et dans la mer Rouge.  Les efforts régionaux et internationaux doivent donc se concentrer sur la désescalade et le retour au calme.  La Ministre s’est félicitée du Sommet du Caire et a appelé à un flux constant d’aide humanitaire vers Gaza.  Après avoir exhorté Israël à épargner les civils, la Ministre a réitéré sa condamnation de l’attaque barbare, cruelle et sauvage lancée par le Hamas et exigé la libération immédiate et sans condition de tous les otages.  Mais ces crimes ne sauraient justifier le châtiment collectif de la population de Gaza. Dénonçant, en outre, l’ordre d’évacuation donné par Israël à plus d’un million de personnes du nord vers le sud de Gaza, elle a mis en garde contre toute « nouvelle Nakba ».  Il est urgent d’adopter une résolution sur un cessez-le-feu humanitaire immédiat et durable, a conclu la Ministre.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré qu’en cette période très difficile, le Secrétaire général devrait se rendre dans la région pour contribuer personnellement aux efforts visant la reprise des négociation et à la réponse humanitaire.  Depuis le débat de la confrontation armée, 18 000 personnes ont été blessées, dont 19 ressortissants russes, a-t-il fait savoir, en soulignant que « la catastrophe à Gaza a dépassé toutes les limites du raisonnable.  Cette situation, a-t-il estimé, est le résultat des agissements des États-Unis qui sabotent les aspects fondamentaux du conflit, en préférant un traitement palliatif qui ne répond en rien aux objectifs de paix et de stabilité au Moyen-Orient.  M. Nebenzia a dénoncé l’occupation israélienne, les activités de colonisation et la violation des Lieux saints de Jérusalem.  Sans la solution des deux États sur la base des résolutions du Conseil de sécurité, rien ne sera résolu, a-t-il prévenu.

En attendant, a poursuivi le représentant, il faut faire cesser la violence, garantir l’acheminement de l’assistance humanitaire à Gaza et empêcher un embrasement de toute la région.  Il a vivement déploré l’incapacité du Conseil à adopter le projet de résolution qu’il avait proposé, alors même qu’il contenait des principes de base comme l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat. Dans l’opinion internationale, le Conseil a donné carte blanche à Israël pour pilonner Gaza.  Tout en comprenant la rage des Israéliens, il a rappelé que la violence engendre la violence et qu’après avoir bloqué le projet de résolution du Brésil, les États—Unis ont essayé d’introduire un nouveau texte avec des éléments « très douteux », qui aurait laissé Israël agir à sa guise et lancer son attaque terrestre.  Nous proposons de combiner, le cas échéant, les deux premiers projets de résolution et nous rappelons que le nôtre était parrainé par 30 États Membres, dont 17 pays arabes, a conclu le représentant.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a réitéré son appel à tous les acteurs à faire preuve de retenue, à éviter d’exacerber les tensions et à empêcher l’effet domino de la violence dans la région.  Il a condamné les actes terroristes du Hamas et reconnu le droit d’Israël à défendre sa population.  Mais, a-t-il prévenu, le droit à la légitime défense doit s’exercer dans le plein respect des principes du droit international humanitaire.  Il a salué les efforts du Secrétaire général qui ont permis l’acheminement de l’aide humanitaire, ce week-end, et s’est félicité de la libération de certains otages.  Tous les otages du Hamas doivent être libérés immédiatement et sans condition, a-t-il dit, avant de s’attarder sur la situation particulièrement préoccupante en Cisjordanie et à la frontière israélo-libanaise.  Dans ce contexte, il a appelé le Conseil à ne pas se transformer en une arène de rivalités.  L’histoire du conflit israélo-palestinien doit cesser d’être l’histoire des occasions manquées.  La seule façon de mettre fin à ce conflit est de réaliser la solution des deux États.

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré qu’au moment où la situation est marquée par la violence à Gaza, le monde entier a les yeux rivés vers ce Conseil.  Celui-ci doit donc en conséquence prendre des mesures et envoyer un message clair et sans équivoque pour répondre aux appels, a-t-il recommandé en visant en priorité une demande de cessez-le-feu humanitaire.  C’est l’appel lancé par le Secrétaire général, par les pays arabes, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), le CICR et de nombreux programmes des Nations Unies.  C’est aussi ce que réclament et attendent les millions de personnes à Gaza, a-t-il ajouté. Le représentant a donc souhaité que le Conseil de sécurité utilise un langage clair, au risque de voir la situation s’embraser, de réduire à néant la solution des deux États et de plonger les populations dans un cercle vicieux de haine mutuelle.  « Ce scénario n’est pas celui que l’on souhaite et qu’envisagent les voix qui se sont exprimées ici. »

M. Zhang a ensuite estimé que compte tenu des importants besoins humanitaires à Gaza, qui est privé d’eau, de carburant, d’électricité, de nourriture et de médicaments, le seul point de passage de Rafah ne suffit pas, d’autant que l’aide humanitaire qui y passe est comme une « goutte d’eau dans la mer ».  Pour cette raison, il a appelé le Conseil à utiliser un libellé sans équivoque qui exige de la Puissance occupante, Israël, qu’elle lève le blocus de Gaza, ouvre d’autres points de passage et cesse les châtiments collectifs.  Il a aussi appelé au respect du droit international et notamment à viser les objectifs de paix, d’équité et de justice.  Autrement, la communauté internationale aura manqué à ses obligations, au profit d’intérêts des politiciens, a-t-il prévenu.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a réitéré, dans les termes les plus fermes, sa condamnation des attaques terroristes commises par le Hamas, appelant à la libération immédiate des otages.  La communauté internationale ne devrait jamais tolérer des actes aussi odieux, s’est-il écrié.  Israël a le droit de se défendre et de défendre son peuple conformément au droit international, a-t-il fait valoir, tout en exhortant toutes les parties à agir sur la base du droit international.  Il est tout aussi crucial, à ses yeux, de s’attaquer à la situation humanitaire à Gaza et d’assurer la sécurité des civils.  C’est pourquoi, il a jugé urgent de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre un accès humanitaire total, rapide, sûr et sans entrave vers la bande de Gaza, afin d’atténuer la situation humanitaire dévastatrice où les besoins fondamentaux tels que l’électricité, l’eau, la nourriture et l’assainissement s’épuisent.

Le délégué a également réaffirmé l’importance d’assurer la protection du personnel médical et humanitaire exclusivement engagé dans des tâches médicales, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2286 (2016).  Pour finir, le représentant a averti que la situation actuelle pourrait facilement dégénérer en une guerre régionale dont « personne ne bénéficierait », dans une allusion aux échauffourées entre Israël et le Hezbollah, aux missiles et drones abattus par la marine américaine dans la mer Rouge, ainsi qu’aux bombardements sur les aéroports d’Alep et de Damas.  C’est pourquoi, a-t-il conclu, le Japon soutient toute activité diplomatique susceptible de conduire à une désescalade et à une amélioration de la situation humanitaire.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a d’abord regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas réussi à dégager un consensus sur une réponse humanitaire globale depuis le 7 octobre.  Elle a rappelé qu’au lendemain des attaques du Hamas, son gouvernement les avait condamnées et avait appelé à la libération immédiate des otages, sans condition.  Inquiète d’une extension du conflit, elle s’est dite également préoccupée par la destruction des infrastructures publiques et des propriétés privées non seulement en Israël et à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, en Syrie et au Liban. Tout en saluant les efforts déployés pour l’ouverture du poste -frontière de Rafah, la représentante a appelé Israël à faire passer davantage d’aide humanitaire, notamment du carburant nécessaire pour les établissements de santé et les stations de traitement de l’eau à Gaza.  Elle a par ailleurs remercié les dirigeants du Qatar, de l’Égypte, des États-Unis et des pays concernés pour la libération de quatre otages.  Nous appelons tous les acteurs du conflit à reconnaître leurs obligations légales non négociables en vertu du droit international humanitaire, a-t-elle insisté.  En conclusion, elle a réaffirmé l’attachement de son pays à la solution des deux États, sur la base des frontières de 1967.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a réitéré son appel à faire baisser les tensions, à mettre un terme au bain de sang, à stopper les attaques et à permettre un accès humanitaire sans conditions.  Il s’est inquiété de la catastrophe humanitaire à Gaza et a réitéré l’importance de protéger les civils et les infrastructures civiles, quelles que soient les circonstances.

Les membres du Conseil de sécurité ont la responsabilité et le devoir de travailler ensemble et avec d’autres acteurs d’une seule voix pour endiguer le conflit, mettre fin au cycle de la violence et empêcher une escalade régionale, a argué le représentant.  Il a ajouté qu’ils doivent renforcer leur rôle d’influence pour trouver une solution au conflit israélo-palestinien, et soutenir le renforcement de l’Autorité palestinienne, qui représente les aspirations légitimes du peuple palestinien.

Au nom du Groupe des États arabes, M. AYMAN SAFADI, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et des expatriés de la Jordanie, a déclaré que notre humanité, nos valeurs morales et les principes qui sont le fondement de l’ONU sont mis l’épreuve.  Nous sommes aujourd’hui confrontés à une guerre due à des décennies de spoliation. Il faut faire prévaloir les principes de l’ONU, car aucun État ne peut bafouer impunément le droit international. Sans conséquence aucune, Israël construit des colonies, confisque des terres palestiniennes, expulse les gens de Jérusalem et tue 14 civils palestiniens par heure.  Que peut répondre aujourd’hui une Palestinienne à son enfant quand il dit qu’il a soif?  « Ça suffit. »  Ceux qui appuient les frappes incessantes à Gaza ne servent ni Israël ni les Palestiniens.

Il faut assumer la responsabilité d’établir un État palestinien indépendant, avec Jérusalem comme capitale, dans les frontières de 1967.  La violence vient souvent de « la mort de l’espoir » et à ce stade, les pays arabes se battront contre toute tentative de déplacement forcé ou d’exportation de cette crise créée par l’occupation.  Prendre pour cible des civils qui ont trouvé refuge dans ses écoles et des hôpitaux ne peut qu’intensifier la colère.  Les Israéliens n’auront jamais la paix tant que les Palestiniens ne l’auront pas.  Le Conseil de sécurité, s’est impatienté le Vice-Premier Ministre, doit adopter une résolution condamnant l’assassinat de civils des deux côtés et rassurant les millions de Palestiniens et les deux milliards d’Arabes et de musulmans qui attendent que le processus de paix soit remis sur les rails.  Paix pour les Palestiniens, paix pour les Israéliens et paix pour la région, a plaidé le Vice-Premier Ministre.  L’espoir s’éloigne et il est temps que le Conseil se fasse le chantre de la justice, du droit et de l’humanité.  À défaut, il portera la responsabilité de cette guerre.

M. SAMEH SHOUKRY, Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, a dénoncé la « machine de guerre israélienne » qui continue de faucher des vies sans distinction au nom de la légitime défense et de la lutte contre le terrorisme.  Les enfants palestiniens ne méritent pas ce qui est en train de leur arriver aujourd’hui, a-t-il déclaré.  Le Ministre a déploré le silence face au déni du droit international et du droit international humanitaire.  L’Égypte, a martelé M. Shoukry, n’accepte pas que l’on prenne pour cible des civils non armés.  Il a demandé la libération des personnes capturées.  La situation d’aujourd’hui est, selon lui, le fruit de l’accumulation de politiques qui ont consacré l’occupation.  Il a déploré que la communauté internationale n’ait pas utilisé les outils à sa disposition pour imposer un consensus international sur le règlement de la crise palestinienne sur la base des deux États.  Rappelant le Sommet du Caire, du 21 octobre, M. Shoukry a dit que la solution au problème palestinien n’est pas de déplacer les Palestiniens. 

La seule solution est de leur permettre d’exercer leur droit à l’autodétermination, de vivre dans la dignité dans un État indépendant, a-t-il tranché.  « Nous n’accepterons pas toute liquidation de la question palestinienne au détriment de l’Égypte », a précisé le Ministre qui a regretté la pratique du « deux poids, deux mesures » dans le traitement de la question humanitaire.  Il a demandé la mise en place d’un cessez-le-feu à Gaza sans conditions et la cessation des déplacements forcés du peuple palestinien sur leur territoire ou en dehors de leur territoire.  Il faut fournir une protection internationale au peuple palestinien et garantir l’acheminement d’une assistance humanitaire à Gaza, a-t-il encore demandé.  S’agissant d’Israël, il a exigé qu’il assume sa responsabilité en tant que de Puissance occupante.  Quant au Conseil de sécurité, il lui a demandé d’élaborer une formule de paix juridiquement contraignante permettant de régler le conflit israélo-palestinien, qui prévoie la fin de l’occupation et la mise en place de l’État palestinien.  Le Ministre a aussi demandé au Conseil de diligenter une enquête concernant les violations graves du droit international humanitaire à Gaza. 

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a déclaré que les deux conflits qui ont le plus d’incidence sur la sécurité internationale se déroulent en Europe et dans une région qui lui est proche. Il faut être clair: il ne peut et ne doit y avoir aucune excuse pour l’assassinat de centaines de civils.  Toute tentative de replacer cette attaque dans un contexte quelconque est inacceptable.  Il faut appeler un chat un chat: c’est une attaque terroriste perpétrée par une organisation terroriste.  Et il est de l’intérêt de tous de lutter de manière constructive, contre cette terreur et contre cette organisation terroriste.  Parallèlement, la communauté internationale doit tout faire pour éviter l’escalade, c’est-à-dire faire en sorte que cette guerre contre le terrorisme ne devienne pas une guerre entre pays.

Le Ministre a rappelé que c’est dans les jardins de la Maison-Blanche qu’ont été signés les Accords d’Abraham.  Il a rendu hommage au Président Donald Trump, de même qu’à Bahreïn et aux Émirats arabe unis, pour avoir signé ces accords.  Or, a-t-il poursuivi, l’attaque terroriste du 7 octobre risque de nous ramener en arrière et faire voler en éclats les acquis de ces accords.  Le Ministre a salué l’attitude responsable des pays arabes qui font tout pour préserver les acquis de ces accords.  Il a également déclaré que, depuis la Hongrie, les images de manifestants saluant des organisations terroristes, font peur, tout comme la montée de l’antisémitisme. C’est la conséquence de sociétés parallèles nées de l’immigration en Europe, a diagnostiqué le Ministre, ajoutant que son gouvernement juge tout simplement inadmissible d’autoriser des manifestations qui rendent hommage à des organisations terroristes. 

Mme NALEDI PANDOR, Ministre des relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud, s’est alarmée du sort terrible enduré par les Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, tout en insistant sur la nécessité de garantir sans attendre la libération des otages israéliens.  La solution à ce conflit est celle des deux États, Israël et la Palestine, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, a-t-elle tranché.  L’Afrique du Sud souscrit également à l’appel pour un cessez-le-feu urgent et complet et demande l’ouverture de couloirs humanitaires.  La Ministre a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue et à s’abstenir d’entretenir cette guerre injuste et la souffrance des innocents.  Elle s’est dite choquée par les attaques délibérées à l’encontre de civils, renvoyant dos à dos le Hamas et l’État d’Israël, qui se sont rendus coupables de violations du droit international.  Si elle s’est élevée contre les attaques perpétrées par le Hamas, elle a également rappelé que la Puissance occupante a des obligations vis-à-vis des habitants des territoires occupés, conformément à la Convention de Genève qui interdit tout châtiment collectif.  Pour finir, la Ministre a dénoncé l’occupation qui continue de semer la haine et le désespoir, car de même qu’Israël mérite la paix et la sécurité, les Palestiniens méritent la souveraineté, la paix et la sécurité.

M. FAISAL BIN FARHAN A.F. AL FURHAN AL-SAUD, Ministre des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, a déploré que les civils continuent d’être pris pour cible par Israël en dépit des principes du droit international.  L’incapacité de la communauté internationale à mettre un terme au châtiment imposé à la population de Gaza tout comme les tentatives de les contraindre à un déplacement forcé sont le résultat du silence du Conseil de sécurité durant des décennies.  Le Conseil, a-t-il poursuivi, est incapable de s’acquitter de son rôle et d’obliger Israël à respecter le droit international et le droit international humanitaire.  Cette impunité ne fera que nourrir le cycle de violence et l’extrémisme qui sévissent déjà et qui résultent du non-respect des résolutions du Conseil.  Concluant sur la nécessité de revitaliser le processus de paix, il a exhorté la communauté internationale à œuvrer pour la solution des deux États. 

M. JEAN ASSELBORN, Ministre des affaires étrangères et européennes du Luxembourg, a déclaré que « rien ne peut justifier » les atrocités commises par les terroristes du Hamas et du Jihad islamique contre les civils israéliens le 7 octobre.  Il a réaffirmé sans équivoque le droit d’Israël de se défendre dans le cadre du droit international.  Toutefois, a-t-il insisté, « la population de Gaza n’est pas le Hamas » et elle ne peut ni être tenue pour responsable, ni être punie collectivement pour les crimes commis par les terroristes. 

Le Ministre a plaidé pour un accès humanitaire rapide et sans entrave.  Pour sa part, le Luxembourg a décidé de verser 2,5 millions d’euros supplémentaires aux efforts humanitaires à Gaza et dans la région, en appui notamment à l’UNRWA, au Programme alimentaire mondial (PAM) et au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), ce qui porte son aide d’urgence pour 2023 à près de 12 millions d’euros.  M. Asselborn a par ailleurs appelé la communauté internationale et les principaux acteurs de la région à éviter toute escalade et à relancer d’urgence le processus de paix au Moyen-Orient.  Pour le Luxembourg, la solution des deux États dans les frontières de 1967 est la seule voie viable pour mettre un terme au cycle de violences.

Mme RETNO MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a demandé au Conseil de sécurité de mettre un terme à la guerre à Gaza, d’imposer un cessez-le-feu et d’assurer l’accès de l’aide humanitaire.  La Ministre a appelé à la libération immédiate des civils et à la cessation de l’occupation illégale d’Israël.  Chaque seconde perdue du fait des différences politiques représente une crise humanitaire pour Gaza et davantage d’instabilité pour le monde, a-t-elle constaté.  L’Indonésie, a martelé la Ministre, ne perdra pas une seule seconde pour galvaniser un appui mondial et agir, par le biais de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et le Conseil de coopération du Golfe (CCG), pour demander la fin de la violence et s’attaquer à cette catastrophe humanitaire. 

En ce qui concerne le Conseil de sécurité, la Ministre a souhaité qu’il lance un appel au cessez-le-feu, misant sur « notre obligation collective » de faire cesser ce cycle de la violence avant qu’il n’entraîne une calamité régionale et mondiale.  Elle a également insisté sur l’importance de l’accès humanitaire pour venir en aide aux deux millions d’habitants de Gaza.  Les Palestiniens méritent de jouir de l’égalité de droits et de traitement, de posséder une maison et un foyer, a plaidé la Ministre qui a déploré le déplacement des Palestiniens.  Nous ne devons pas permettre que la tragédie de 1948 se reproduise, a prévenu Mme Marsudi en assurant que l’Indonésie veille à l’application de la solution des deux États. 

M. FRANCISCO ANDRÉ, Vice-Ministre des affaires étrangères du Portugal, a, une nouvelle fois, condamné sans équivoque les attaques terroristes du Hamas et réitéré sa solidarité avec Israël.  Il est du droit et du devoir d’Israël d’éliminer la menace posée par les capacités meurtrières du Hamas.  De même, le Vice-Ministre a condamné le terrorisme sous toutes ses formes, demandant la libération immédiate et sans condition des otages.  Cependant, a-t-il nuancé, les actes d’Israël doivent se conformer au droit international humanitaire.  Des deux côtés, le nombre de morts est stupéfiant et les pénuries d’électricité, de nourriture, d’eau et de carburant ne sauraient être vues comme compatibles avec le droit international.  Le Vice-Ministre s’est inquiété de la catastrophe humanitaire qui s’aggrave d’heure en heure sous les yeux du monde entier.  Il faut agir rapidement, a-t-il pressé, avant de souligner que son pays soutient et appuie l’appel du Secrétaire général de l’ONU à un cessez-le-feu humanitaire.  Le Portugal appuie fermement le travail de l’ONU sur le terrain.

M. AHMED ATTAF, Ministre des affaires étrangères et de la communauté nationale à l’étranger de l’Algérie, a déclaré que les événements qui se déroulent, aujourd’hui, à Gaza se produisent à cause de deux phénomènes qui s’entretiennent et qui ont mené à l’exacerbation de la situation.  Il a cité, d’une part, la marginalisation quasi-totale de la cause palestinienne et sa dévaluation sur le plan international et, d’autre part, la tolérance sans justification de l’occupation israélienne, ainsi que l’immunité sans conditions ni restrictions qui est lui est accordée. 

Détaillant son propos, M. Attaf a expliqué que la marginalisation de la question palestinienne s’entend par sa disparition des priorités de la communauté internationale. Rien de sérieux n’a été fait pour réaliser la paix depuis les années 1990, où l’on a vu une paralysie de la diplomatie internationale, a-t-il rappelé.  Il a ajouté que récemment aussi, la cause palestinienne a été victime d’une « très dangereuse illusion », qui privilégie la paix et la stabilité au Moyen-Orient au détriment et sur les décombres de la question palestinienne et de son État national.

S’agissant de l’immunité dont jouit Israël, elle a donné lieu à davantage d’occupation et d’annexion par la force et au contrôle de plus de 78% de la Cisjordanie.  Le Ministre a aussi noté que cette immunité a donné lieu à plus de politiques racistes, qui visent à changer le statu quo juridique des Lieux saints et notamment de Jérusalem.  Cette immunité a en outre permis la création d’administrations israéliennes inédites qui rivalisent entre elles pour faire preuve de plus de barbarie, plus d’extrémisme et d’expansion colonialiste, et pour violer les droits du peuple palestinien et anéantir l’idée d’un État palestinien, a-t-il ajouté. 

Or, a estimé l’orateur, il faut faire prévaloir la logique du droit et non celle de la force et de l’impunité.  Le Conseil, a-t-il dit, doit donc être conscient d’une réalité claire et limpide: la paix durable ne peut être bâtie sur la criminalité et l’injustice, pas plus que sur la marginalisation et la distinction.  Elle doit l’être sur la base des 87 résolutions qui ont été adoptées ici-même sur le sujet, et qui sont violées uniquement parce qu’un État se veut au-dessus des lois, a conclu le représentant. 

M. AHMET YILDIZ, Vice-Ministre des affaires étrangères en charge du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord de la Türkiye, a d’emblée fait remarquer qu’Israël a tué plus d’enfants palestiniens depuis le 7 octobre que dans tous les raids menés depuis 2006.  Il ne saurait y avoir de justification à la punition collective infligée aux Palestiniens, a lancé le Vice-Ministre.  Il a exhorté le Conseil à s’engager pour que le conflit ne s’étende pas à toute la région et au-delà.  Il a plaidé pour un cessez-le-feu sans conditions, pour un accès sans entrave de l’aide humanitaire à Gaza, pour une réunion des deux parties au conflit afin de convenir d’une solution à deux États dans les frontières de 1967.  Un mécanisme de surveillance des actions des parties est nécessaire, faute de quoi tous les textes adoptés resteront lettre morte, a-t-il conseillé.  Il a exhorté le Conseil à mettre un terme à son indifférence face à ce carnage qui ne saurait avoir sa place au XXIe siècle.

Un cri d’agonie retentit dans tout le Moyen-Orient, a constaté Mme ANNALENA BAERBOCK, Ministre fédérale des affaires étrangères de l’Allemagne, en décrivant les souffrances des familles israéliennes qui pleurent leurs proches, et des Gazaouis qui craignent pour la vie de leurs enfants.  Ici, dans cette salle, nous entendons ce cri, a insisté la Ministre qui a voulu que l’on tienne compte de tous ces cris et que l’on cherche à comprendre la douleur de l’autre mais aussi à s’écouter les uns les autres. S’adressant au Conseil en tant que Ministre des affaires étrangères d’un pays qui porte la responsabilité historique du pire crime imaginable, le crime commis par l’Allemagne nazie: la Shoah - le meurtre systématique de six millions de Juifs, dans le but d’éradiquer la vie juive d’Europe, elle a affirmé que cela veut dire que les Allemands n’auront pas de répit tant que les petits-enfants des survivants de l’Holocauste seront retenus en otage par des terroristes à Gaza.  Pour l’Allemagne, la sécurité d’Israël n’est pas négociable.  Comme tout autre État dans le monde, Israël a le droit de se défendre contre le terrorisme dans le cadre du droit international.

La Ministre a dit avoir rencontré jeudi dernier des familles et des réfugiés palestiniens en Jordanie qui lui ont dit qu’ils avaient perdu 53 membres de leur famille et amis à Gaza au cours des derniers jours.  Pour toutes ces raisons, elle a indiqué que son pays a augmenté de 50 millions d’euros l’aide humanitaire à Gaza et plaide pour la création de « fenêtres humanitaires ».  Fustigeant le projet du Hamas d’attiser les flammes de la haine et la violence, elle a prôné un processus de paix réel à même de permettre tant aux Israéliens qu’aux Palestiniens de vivre côte à côte dans la paix et la sécurité dans deux États indépendants.

Mme HANKE BRUINS SLOT, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, est revenue sur les horreurs dont le monde a été témoin lors de l’attaque terroriste du Hamas contre Israël.  Tout en soutenant ce dernier et son droit à la légitime défense, la Ministre a, toutefois, appelé Israël à faire preuve de retenue dans le recours à la force, « même après les horreurs du 7 octobre ».  Elle a dit partager les préoccupations exprimées par tant de personnes aujourd’hui, concernant la situation des civils à Gaza, qui est catastrophique, avant de plaider en faveur de pauses humanitaires et de l’établissement d’un couloir humanitaire permanent, seuls moyens, à ses yeux, pour éviter que la situation ne s’aggrave davantage.  Pour leur part, les Pays-Bas vont intensifier leur réponse humanitaire en engageant 10 millions d’euros supplémentaires pour l’aide immédiate, dont 8 millions d’euros pour l’UNWRA.  Ce financement vise à améliorer les conditions de vie des citoyens palestiniens, notamment en matière de santé mentale et de soutien psychosocial, a-t-elle précisé. 

Lorsque l’ONU a été créée, le conflit israélo-palestinien était l’une des premières crises majeures nécessitant une attention urgente, a rappelé la Ministre. Elle a estimé qu’aujourd’hui, plus de 75 ans plus tard, la nécessité de trouver une solution à ce conflit est plus urgente et cruciale que jamais.  C’est pourquoi, la Ministre a pressé le Conseil de faire preuve du leadership nécessaire pour gérer cette crise, la contenir et offrir une perspective de paix et de sécurité durables aux Israéliens et aux Palestiniens. 

M. ELTAHER SALEM ELBAOUR, Ministre par intérim des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Libye, a vivement condamné l’agression incessante et le « génocide perpétré dans la bande de Gaza » par Israël.  « Les livres d’histoire sont remplis de pages relatant les souffrances des différentes ethnies ayant subi l’occupation et la répression », a-t-il rappelé.  Estimant que la crise n’a pas débuté le 7 octobre, il a attiré l’attention sur la « politique d’apartheid imposée par les forces d’occupation israéliennes depuis plus de 70 ans ».  Accepter le déplacement forcé des Palestiniens et cautionner cette agression revient à souhaiter voir le monde soutenir un crime de guerre, a-t-il averti, relevant la volonté évidente d’Israël de se livrer à un génocide dans la bande de Gaza.  En conclusion, il a exhorté la communauté internationale à œuvrer pour la création d’un État palestinien indépendant, ayant Jérusalem-Est pour capitale et les frontières définies avant 1967, « et certainement pas les frontières, de 2023 ».  

Mme SANJA ŠTIGLIC, Secrétaire d’État de la Slovénie, a insisté sur le principe de « toute vie compte », surtout en tant de guerre et de crise.  Elle a cité l’anecdote d’une petite Palestinienne de 6 ans, le plus jeune visiteur au consulat slovène à Ramallah, qui a mémorisé l’hymne de la Slovénie pour ses paroles de paix.  Elle a condamné dans les termes les plus forts l’attaque du Hamas contre Israël, ajoutant que la brutalité et le meurtre de civils innocents ne sauraient être justifiés, et a appelé le Hamas à libérer tous les otages sans conditions.  Elle a aussi demandé à Israël de respecter les principes humanitaires, notamment par l’acheminement sans entrave de l’assistance à Gaza, et de cesser les attaques contre les abris, les hôpitaux et l’infrastructure civile, appelant également à diligenter une enquête indépendante sur l’attaque contre l’hôpital épiscopal anglican Al Ahli Arab. 

La Slovénie a revu à la hausse sa contribution à l’UNRWA dans cette crise colossale, a ajouté la Secrétaire d’État qui a exhorté les pays de la région et tous les autres à œuvrer pour garantir une désescalade et relancer un processus de paix en vue de la solution des deux États.  À cet égard, elle s’est félicitée de la tenue du Sommet du Caire.  Les aspirations des Palestiniens et des Israéliens ne sauraient être réalisées qu’à travers un processus politique, a-t-elle rappelé.  En cette Journée des Nations Unies, elle a fait remarquer que les petits-enfants des pères fondateurs, tout comme le Conseil de sécurité, doivent s’atteler à la paix. 

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL, Premier Ministre adjoint des affaires étrangères de Cuba, a dit être préoccupé face à l’escalade de la violence entre Israël et la Palestine, condamnant les meurtres de femmes, d’enfants et de travailleurs humanitaires du système des Nations Unies, et dénonçant les bombardements aveugles de la population et la destruction de maisons, d’hôpitaux et d’infrastructures civiles à Gaza.  La privation d’eau, de nourriture, d’électricité et de carburant aggrave la crise humanitaire, a-t-il relevé, en voyant dans ces actes des punitions collectives, des violations du droit international humanitaire, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.  Il a exigé un cessez-le-feu immédiat et l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza. 

Le Ministre a accusé le Gouvernement américain d’être complice d’Israël pour ses crimes sur la question palestinienne, exigeant qu’il cesse de paralyser le Conseil de sécurité en « utilisant le droit de veto pour protéger les excès du Gouvernement israélien ».  Il a prôné une solution rapide pour mettre fin à l’escalade de la violence et activer d’urgence la solution des deux États, demandant l’adhésion de l’État de Palestine à l’ONU et le retrait complet et inconditionnel d’Israël du Golan syrien et de tous les territoires arabes occupés.  Enfin, il a demandé la fin des « mesures coercitives unilatérales arbitraires et illégales » imposées par les États-Unis contre des nations souveraines du Moyen-Orient. 

M. WOJCIECH GERWEL, Sous-Secrétaire d’État aux affaires étrangères de la Pologne, a insisté sur le droit d’Israël de se défendre dans le respect du droit international et du droit international humanitaire.  Il s’est joint à tous ceux qui réclament la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages du Hamas et soutenu tous les efforts internationaux visant à rétablir la paix.  La communauté internationale, a-t-il préconisé, doit collaborer avec les acteurs régionaux pour convaincre toutes les parties de faire preuve de retenue car il est crucial d’éviter une escalade régionale. 

Le Sous-Secrétaire d’État a estimé qu’il est du devoir commun d’assurer une aide humanitaire aux civils innocents à Gaza.  Il a lancé un appel en faveur de l’accès humanitaire et estimé que compte tenu de la situation tragique actuelle, il ne faut surtout pas laisser les Palestiniens de Gaza sans soutien.  Depuis des décennies, a-t-il affirmé, la Pologne est impliquée dans des projets humanitaires et d’aide au développement au Moyen-Orient, avec un accent particulier sur la Palestine et le Liban.  Concluant, le Sous-Secrétaire d’État a rappelé que le processus de paix au Moyen-Orient a toujours été fragile et a souligné qu’aucun acte de violence ne rapproche d’une solution positive.  Il faut tout mettre en œuvre pour parvenir à la cessation des hostilités et revenir à la voie diplomatique pour résoudre ce différend, a-t-il insisté. 

Mme ELIZABETH TAYLOR JAY, Vice-Ministre des affaires multilatérales de la Colombie, a demandé, avec ferveur, le respect du droit à la vie.  L’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire afin de subvenir aux besoins de la population est une obligation du droit international humanitaire, a-t-elle rappelé, appelant à l’approvisionnement immédiat de la Bande de Gaza en matériel médical, ressources énergétiques et denrées alimentaires.  « Aujourd’hui, nous sommes témoins du mépris total du droit humanitaire », a-t-elle observé, réitérant l’appel de sa délégation à faire cesser le conflit immédiatement et reprendre les négociations, le conflit ne pouvant être réglé que par le dialogue.  Le règlement de ce conflit doit se baser sur les nombreuses résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et sur la solution des deux États, a-t-elle poursuivi.  Afin d’éviter la prolongation et la propagation du conflit, la Vice-Ministre a demandé la tenue d’une conférence internationale.  « Nous devons sortir de la barbarie et de ce conflit vieux de plusieurs décennies », a-t-elle exhorté en conclusion.

M. AHMED ABOULGHEIT, Secrétaire général de la Ligue des États arabes, a estimé que la crédibilité du Conseil de sécurité est en jeu face aux actes de vengeance qui ne visent qu’à infliger un châtiment collectif à une population dont le seul tort est de vivre dans la bande de Gaza.  Il a dénoncé ces violations du droit international et du droit international humanitaire.  Le 11 octobre, la Ligue a condamné dans les termes les plus forts les attaques contre les civils de part et d’autre, forte de la conviction que toutes les parties doivent respecter le droit international, a rappelé M. Aboulgheit, mettant en avant le principe selon lequel une claire distinction doit être faite entre civils et combattants.  La guerre que mène Israël contre les civils à Gaza doit cesser immédiatement, a-t-il martelé arguant que c’est la seule façon d’éviter une catastrophe humanitaire d’envergure.  Mettre un terme à cette guerre relève de la responsabilité du Conseil, en tant que garant de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il insisté, se disant surpris que certains acceptent que cette guerre soit menée au nom de la légitime défense, en dehors du cadre du droit international humanitaire, du droit de la guerre, sans que la moindre limite ne soit imposée. 

Par ailleurs, M. Aboulgheit s’est dit très préoccupé par les déplacements de force de la population du nord vers le sud de Gaza, comme si l’objectif était de créer une catastrophe humanitaire, soulignant que la population de Gaza est déjà une population de réfugiés.  Il a dénoncé une stratégie délibérée menée par Israël pour neutraliser la cause palestinienne, ajoutant qu’Israël et la Palestine ne sauraient connaître une seconde Nakba.  La situation sur tous les territoires palestiniens occupés n’est pas durable et la violence ne fera qu’engendrer la violence, a—t-il prévenu en demandant de s’attaquer aux causes profondes de ce cycle de violence et de mettre un terme à l’occupation, en vue de bâtir un État palestinien conformément aux frontières de 1967.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a réitéré sa ferme condamnation des attaques terroristes du 7 octobre du Hamas et d’autres organisations extrémistes contre Israël ayant fait 1 400 morts, exigeant la remise en liberté immédiate et sans conditions des otages retenus par le Hamas, dont deux ressortissants mexicains.  Parallèlement, la riposte israélienne a fait près de 5 000 morts, plus de 14 200 blessés et des dégâts incalculables aux infrastructures civiles.  Le Mexique reconnaît à Israël le droit de protéger ses citoyens et son territoire, ainsi que de garantir leur sécurité, a-t-elle déclaré, mais cela doit se faire dans le plein respect du droit international, des principes de nécessité et de proportionnalité qui régissent tout recours à la force.

Elle a appelé à une cessation immédiate et durable des hostilités dans l’ensemble du territoire palestinien occupé et à la levée de l’état de siège de la population palestinienne à Gaza.  L’intervenante a jugé inacceptable l’exercice du droit de veto par les États-Unis le 18 octobre dernier, estimant que le projet de résolution proposé par le Brésil était équilibré et de nature essentiellement humanitaire.  Aussi a-t-elle réitéré son appel à celles et ceux qui ne l’ont pas fait à se joindre à l’initiative franco-mexicaine sur la restriction de l’usage du droit de veto, qui compte aujourd’hui 106 signataires.

M. KIM SANGJIN (République de Corée) a condamné les attentats terroristes perpétrés par le Hamas le 7 octobre et rappelé toutes les parties concernées à leur obligation de respecter le droit international et le droit international humanitaire.  Le représentant a demandé la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages et la protection de tous les civils.  L’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire est essentiel. Le représentant a regretté que toute la région, déjà vulnérable, soit confrontée aujourd’hui à un risque élevé d’embrasement.  Il a constaté l’aggravation des tensions en Cisjordanie avec les échanges de tirs de part et d’autre de la Ligne bleue.  Il a appelé la communauté internationale à utiliser tous les moyens à sa disposition pour éviter que la situation ne s’aggrave.  La protection des civils et la prévention d’une propagation du conflit doivent être la priorité et pour briser le cycle de la violence, il faut des négociations sur la solution des deux États.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) s’est dit déçu que le Conseil n’ait pas été en mesure d’assumer ses responsabilités, à cause du droit de veto.  Les organes politiques des Nations Unies ne sauraient rester silencieux face à la situation, a-t-il dit.  Il a condamné, dans les termes les plus fermes, les attaques terroristes du Hamas et les violations massives du droit international humanitaire, consistant à prendre des civils pour cible, les massacrer, les enlever et les retenir en otage.  Tirer délibérément des roquettes contre des cibles civiles constitue une grave violation du droit international humanitaire et un crime de guerre, voire un crime contre l’humanité.  Le représentant a confirmé le droit d’Israël de se défendre conformément au droit international, y compris le droit international humanitaire, et ce, dans le plein respect des principes de proportionnalité.  Il a estimé que le siège de Gaza est un châtiment collectif incompatible avec le droit international humanitaire.  Le grand nombre de victimes civiles, dont beaucoup d’enfants, est tout simplement inacceptable, a-t-il jugé, avant de marteler que la protection des civils doit être la priorité absolue.  L’ONU, en particulier le Conseil, a une responsabilité cruciale et la prévention d’une nouvelle escalade est tout aussi cruciale.  Il faut garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave à la population de Gaza, a conclu le représentant.

M. OMAR HILALE (Maroc) s’est inquiété d’une situation sans précédent et du risque d’embrasement de la région.  Il a rappelé que son pays a présidé une réunion de la Ligue des États arabes, le 11 octobre dernier, qui a débouché sur la résolution 8987 appelant toutes les parties à faire preuve de retenue, soulignant la nécessité de protéger tous les civils et apportant un soutien au peuple palestinien.  Le représentant a insisté sur la nécessité de mettre un terme aux hostilités, d’arrêter ce bain de sang et de faciliter une assistance humanitaire constante et suffisante.  Il a rejeté tout déplacement forcé de la population, qui constitue une menace pour tous les pays de la région.  Nous sommes, a-t-il dit, du côté des Palestiniens et de leurs droits légitimes.  Nous défendons la solution des deux États dans les frontières de 1967 et nous userons de nos relations avec tous les acteurs pour relancer le dialogue et le processus de paix, a promis le représentant.

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a condamné les attaques terroristes du Hamas, appelant à la libération immédiate et sans condition des otages.  Israël a le droit de se défendre dans le respect du droit international, y compris en ce qui concerne les actions menées depuis Gaza, a-t-elle affirmé, convaincue toutefois que la paix durable ne passera pas par une solution militaire.  Elle a appelé à la protection des civils, ainsi qu’à l’acheminement urgent et sans entrave de l’aide humanitaire.  De même, la sécurité des personnes déplacées doit être assurée, a-t-elle exhorté, appelant à la création de zones de sécurité et à la création de couloirs humanitaires. 

Les obligations juridiques ne peuvent être niées en période de conflit, a-t-elle ensuite fait remarquer, exhortant Israël et le Hamas à agir en conformité avec le droit international humanitaire et appelant toutes les parties, y compris Israël et l’Égypte, à fournir de l’aide humanitaire aux civils de Gaza.  La Nouvelle-Zélande se tient prête à accroître le soutien aux populations de Gaza, de Cisjordanie et d’Israël dans les semaines à venir, a-t-elle assuré, regrettant que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure d’adopter une résolution et de s’acquitter de ses fonctions en vertu de la Charte.  « L’heure est à la désescalade et non aux prises de positions politiques pour faire avancer une cause autre que celle de la paix », a-t-elle estimé, saluant toutes les initiatives visant à désamorcer les hostilités et rappelant que sa délégation est favorable à une solution à deux États. 

M. RENÉ ALFONSO RUIDÍAZ PÉREZ (Chili) a réitéré sa condamnation sans équivoque des actions du Hamas, des actes de violence et d’hostilité contre la population civile, et a appelé à la libération sans conditions de tous les otages.  Il s’est dit également très préoccupé par l’opération militaire à Gaza et le représentant a rappelé que le recours à la force dans le cadre de la légitime défense d’un État doit répondre aux principes de proportionnalité, de discernement et de précaution, ce qui ne semble pas être le cas jusqu’à présent. Évoquant le bombardement d’infrastructures civiles, le blocage de l’aide humanitaire et le déplacement forcé de population dans le nord de la bande de Gaza, le délégué a condamné une série d’actes en violation du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.  Le Chili a toujours soutenu le droit du peuple palestinien à constituer un État souverain, a précisé le délégué, en faisant observer qu’il a installé un Bureau de représentation auprès de l’Autorité palestinienne à Ramallah en 1998 et reconnu l’État de Palestine en 2011.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a commencé par exprimer le plein soutien et la solidarité de son pays aux Palestiniens en ces temps difficiles.  Il a condamné les bombardement indiscriminés et aveugles d’Israël contre les civils et les infrastructures civiles dans la bande de Gaza, les jugeant « massives et destructrices ».  Le représentant a, en outre, dénoncé le blocus imposé à l’approvisionnement en eau, en denrées et en carburant, ainsi que le déplacement forcé des populations, qui sont constitutifs, à ses yeux, de « crimes de guerre ».  À cet égard, il a appelé à un cessez-le-feu immédiat et sans condition.  Inquiet des risques qui pèsent sur la sécurité régionale et internationale, le représentant a regretté l’incapacité du Conseil de sécurité à envoyer un appel en ce sens et fustigé ceux qui contribuent à la poursuite de ce conflit.  Selon lui, « toute tentative de créer un équivalent entre Israël, Puissance occupante, et les Palestiniens, les victimes, n’est pas tenable d’un point de vue juridique, moral et politique. »  Le Pakistan qui condamne le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, estime qu’en vertu du droit international, la lutte pour la libération et l’autodétermination de ceux et celles qui vivent sous occupation est légitime et ne saurait être qualifiée de terrorisme.  C’est au contraire la répression de cette lutte qui est illégale, a-t-il tranché.  

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a espéré que le Conseil de sécurité poursuivra ses efforts et agira pour remédier à la situation actuelle et à ses graves conséquences humanitaires. Il a dit attendre de reparler de cette question lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale prévue jeudi prochain.  L’escalade de la violence et le recours à la force à Gaza ont rudement éprouvé les civils palestiniens, a-t-il déploré, en disant son soutien aux familles en deuil.  Le représentant a informé que des citoyens de son pays ont aussi été pris en otage.  Il a appelé toutes les parties à protéger les civils et à leur permettre d’accéder sans entraves à l’assistance humanitaire, avant d’exhorter la communauté internationale à faciliter un tel accès, en particulier à l’eau potable.  Il a enfin prié le Conseil de tout faire en vue de la cessation des hostilités dans la région, et a réaffirmé son soutien au dialogue et à la solution des deux États.

La représentante du Qatar a appelé à un cessez-le feu, à la libération des otages et à la fourniture de l’aide humanitaire à Gaza.  Elle a condamné le blocus imposé à Gaza par Israël, privant 2,3 millions de personnes d’eau, d’électricité, de nourriture et de médicaments.  Il est inacceptable, a-t-elle tonné, d’instrumentaliser ce conflit et de s’en servir comme prétexte pour appliquer une politique de châtiment collectif et forcé la population à partir.  Nous sommes devant, a dénoncé la représentante, une violation du droit international et du droit international humanitaire.  Elle a également mis en garde Israël contre les conséquences de ses opérations punitives à Gaza.  C’est une escalade dangereuse qui risque de s’étendre dans toute la région, en plus d’être une violation des résolutions du Conseil de sécurité.  La représentante a jugé important de coopérer afin d’éviter l’extension du conflit.  L’Émirat du Qatar, a-t-elle conclu, garde ouverts ses canaux de médiation et c’est d’ailleurs grâce à son implication que des otages retenus par le Hamas ont pu être libérés.

M. CHEIKH NIANG, Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a déclaré qu’au fil des années, le Comité avait averti à plusieurs reprises que la situation dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, était intenable.  Sans horizon politique et dans un contexte de violations incessantes des droits humains, la détérioration de la situation et l’escalade deviennent inévitables.  Pourtant, a-t-il déploré, le Conseil reste incapable de mettre un terme aux effusions de sang et de protéger les vies civiles, comme en témoigne malheureusement le veto de la semaine dernière.  Il a aussi déclaré que tout le monde a mis en garde à plusieurs reprises contre les risques d’explosion, car le blocus illégal de Gaza imposé par Israël depuis 16 ans a transformé le territoire en une prison à ciel ouvert et appauvri la population. 

Dans ce contexte, il a déclaré que la Comité condamne fermement les frappes aériennes de représailles et les bombardements israéliens contre la bande de Gaza densément peuplée. Il a condamné en outre les ordres militaires donnés par Israël aux Palestiniens du nord de Gaza d’« évacuer » vers le sud: il n’y a nulle part où être en sécurité à Gaza, a-t-il tranché, ajoutant que le transfert forcé de personnes constitue une grave violation du droit international. 

Le Président du Comité a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à la fin du siège, ainsi qu’à la fourniture de vivres, d’eau, d’électricité, de médicaments et autres articles de première nécessité.  Il a aussi félicité l’Égypte pour avoir facilité l’entrée de l’aide humanitaire cruciale dans la bande de Gaza via le point de passage de Rafah et exhorté Israël à permettre un flux sans entrave de l’aide.  Concluant, il a appelé le Conseil à surmonter les divisions et à agir pour mettre fin à l’effusion de sang et protéger le peuple palestinien. 

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a rappelé que la crise a été déclenchée par les attentats terroristes odieux perpétrés le 7 octobre par le Hamas. C’est une grave erreur morale et stratégique pour la cause palestinienne et les efforts de paix.  La déléguée a rappelé les mots de Golda Meir qui disait: si les groupes pro-palestiniens déposaient les armes aujourd’hui, il n’y aurait plus de violence.  Mais si les Israéliens faisaient de même, il n’y aurait pas d’État d’Israël.  Le fait, a poursuivi, que le Conseil ne reconnaisse pas le droit d’Israël à sa propre préservation et à la défense de son peuple ne contribue pas ni au dialogue, ni à la paix et à la sécurité régionales et internationales.

Le Conseil doit décourager les discours et les actes de haine.  Il doit faire front commun contre le terrorisme, et condamner clairement et sans équivoque les actions du Hamas et des autres organisations terroristes.  Il faut obtenir d’elles qu’elles cessent leurs pratiques consistant à placer des arsenaux et des infrastructures terroristes dans les sous-sols des hôpitaux, des écoles et des centres religieux et à se servir des civils comme boucliers humains.  L’aide humanitaire, qui commence à arriver, ne doit pas être utilisée à mauvais escient par des groupes terroristes pour commettre de nouveaux actes terroristes. Le Conseil doit adopter des résolutions équilibrées qui tiennent du droit d’Israël à la légitime défense, a insisté la représentante.

M. ROBERT RAE (Canada) a estimé qu’il faut rester unis dans la reconnaissance de l’horreur et dans le soutien à la paix pour les Israéliens et les Palestiniens, qui méritent de vivre en sécurité et avec dignité.  Le Canada soutient sans équivoque le droit d’Israël à se défendre, dans le respect du droit international.  « Même les guerres ont des règles » et le devoir de protéger les civils s’applique à tous.  Le représentant a appelé le Hamas à relâcher les otages, car prendre des otages constitue un « crime de guerre ».  Concernant la situation humanitaire, il s’est félicité de l’ouverture de l’accès vers Gaza, mais a jugé que cela n’était pas suffisant.  Pour sa part, le Canada s’est engagé à fournir 60 millions de dollars en assistance humanitaire.  Le représentant a par ailleurs jugé essentiel que ce conflit ne s’aggrave pas et ne s’étende pas aux régions voisines.  Il s’est inquiété, à cet égard, de la rhétorique de l’Iran en faveur du Hamas, des déclarations du groupe terroriste Hezbollah et du lancement de roquettes par des acteurs au Liban.

M. AMIR SAIED IRAVANI (République islamique d’Iran) a rejeté catégoriquement les « allégations infondées » proférées, ce matin, par le Secrétaire d’État américain tentant de rejeter à tort la faute sur l’Iran. « Notre engagement en faveur de la paix et de la stabilité régionales reste inébranlable », a martelé le représentant, en s’associant à la communauté internationale pour soutenir l’appel à un cessez-le-feu immédiat et à l’arrêt de l’intervention militaire « implacable » d’Israël.  Le soutien « inébranlable » des États-Unis à l’occupation et à l’agression en a fait un acteur actif du problème, a accusé le représentant.  « Les États-Unis ont encore exacerbé le conflit en s’alignant ouvertement sur l’agresseur aux dépens de la population palestinienne innocente. »  En fournissant rapidement un soutien militaire et logistique au régime d’occupation, les États-Unis se sont rendus complices du massacre brutal de Palestiniens innocents dans la bande de Gaza, a-t-il insisté.

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a soutenu le droit d’Israël à se défendre et estimé que rien ne pouvait justifier le terrorisme, condamnant l’attaque du Hamas dans les termes les plus fermes et la prise d’otages dont l’Ukraine elle-même a eu à souffrir.  Condamnant catégoriquement la « pratique honteuse » consistant à prendre des civils comme boucliers humains, il a exprimé ses condoléances aux familles des victimes de l’hôpital Al Ahli Arab.  Il a appelé au plein respect des règles de la guerre et du droit international humanitaire, ainsi qu’à garantir un accès humanitaire.  Le délégué a défendu la solution des deux États dans le cadre du droit international et d’une application des résolutions du Conseil de sécurité.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a condamné les attaques abjectes contre les civils, affirmant que l’état de siège et l’attaque militaire dans le but déclaré d’anéantir des vies dans la bande de Gaza constituent un génocide, en violation des Conventions de Genève et de leurs Protocoles.  « Nous ne pouvons pas nous permettre de rester indifférents face à cette catastrophe humaine qui se dessine », s’est-il impatienté.  Le représentant a réaffirmé le soutien résolu de la Namibie à la lutte légitime du peuple palestinien contre l’occupation israélienne, à l’exercice du droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’indépendance avec Jérusalem-Est pour capitale, par des moyens politiques, diplomatiques, pacifiques et non violents.  Pour finir, le représentant a plaidé donc à la mise en œuvre urgente et inconditionnelle des résolutions et décisions de longue date en faveur d’une solution à deux États, seul plan viable par lequel les peuples de Palestine et d’Israël peuvent vivre côte à côte dans la paix et la sécurité.

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a demandé la libération des otages et l’acheminement immédiats de l’aide humanitaire dans la région.  Des conflits qui n’ont pas été réglés pendant des décennies ne le seront pas via des actes terroristes, a-t-il averti, exhortant Israël à s’abstenir d’un « recours disproportionné » à la force.  Face aux conséquences dramatiques du conflit au Moyen-Orient et dans le monde entier, Israël doit revoir les délais d’évacuation des civils qui ne devraient, en aucun cas, devenir victimes d’un « châtiment collectif », a-t-il plaidé.  Selon sa délégation, la solution des deux États est la seule solution pour une paix pérenne. « Nous demandons la reprise du dialogue entre toutes les parties au conflit. » 

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a exprimé ses plus sincères condoléances aux familles des personnes décédées dans les hostilités en cours, y compris le personnel de l’ONU.  Il s’est dit choqué par l’ampleur de l’attaque israélienne à Gaza.  La situation risque de s’aggraver si le Conseil continue d’être paralysé, a-t-il prévenu.  Combien d’enfants encore devront devenir orphelins, être tués ou mutilés, avant que ce Conseil ne décide que trop c’est trop?  Les meurtres de civils innocents doivent cesser et les infrastructures civiles doivent être protégées.  Le délégué a exigé un cessez-le-feu immédiat pour éviter de nouvelles pertes en vies humaines et pour que le travail humanitaire puisse être mené à bien à Gaza.  Il a demandé du carburant pour que les hôpitaux et les ambulances fonctionnent.  La Malaisie, a-t-il ajouté, s’oppose au déplacement forcé de la population de Gaza. Le délégué a appelé le Conseil à cesser l’hypocrisie, le « deux poids, deux mesures » et l’inégalité des traitements.  La paix ne peut être atteinte que par la création d’un État de Palestine libre et indépendant et la solution des deux États, a-t-il conclu.

M. AMARA SHEIKH MOHAMMED SOWA (Sierra Leone) s’est dit très préoccupé par la situation actuelle au Moyen-Orient qui suppose une approche constructive, délibérée et sincère du Conseil de sécurité.  Condamnant dans les termes les plus vifs l’attaque haineuse contre des civils israéliens et la prise d’otages par le Hamas, le représentant a également noté avec une grande inquiétude l’escalade de la violence, en particulier avec la riposte d’Israël.  Si son pays reconnaît le droit à la légitime défense, il a estimé que celle-ci doit être conforme au droit international.  Poursuivant, il a condamné toutes les attaques perpétrées contre des civils et des infrastructures civiles, dont l’attaque contre l’hôpital Al Ahli Arab à Gaza, demandant une enquête à cet égard.  Enfin, il a préconisé que des mécanismes de responsabilité soient établis afin de préserver toutes les preuves de violations du droit international.

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a exprimé sa vive préoccupation quant à la récente escalade des hostilités au Moyen-Orient, appelant à la libération de tous les otages.  Les Philippines soutiennent les efforts de l’ONU pour fournir une aide humanitaire d’urgence aux civils palestiniens pris au milieu du conflit sur la bande de Gaza. À cet égard, le représentant a salué l’ouverture d’un couloir humanitaire avec l’Égypte et a espéré qu’une solution sera trouvée le plus rapidement possible pour évacuer par Rafah les étrangers bloqués à Gaza, dont des Philippins.  Sachant que près de 30 000 Philippins se trouvent en Israël et 130 à Gaza, le représentant a prié le Conseil de sécurité de soutenir les efforts coordonnés pour une évacuation sûre et la protection des migrants dans les zones de conflit.

M. TAREQ M. A. M. ALBANAI (Koweït) a estimé que les événements actuels avaient de graves conséquences pour la paix et la sécurité dans la région.  Il a dénoncé l’intensification des frappes indiscriminées d’Israël sur des zones résidentielles à Gaza et les punitions collectives contre ses habitants, leur déplacement forcé et les coupures d’électricité, d’eau et d’approvisionnement au carburant qu’il subissent.  Il a estimé que le Conseil, dernier recours des petits États, comme pour le Koweït en 1990, avait échoué à adopter une résolution claire contre les violations dont sont victimes les civils palestiniens.  Il a affirmé qu’il était clair que certains États se trouvent au-dessus de la loi commune.  Il a appelé à la solidarité envers le peuple palestinien pour qu’il puisse établir un État en respect des résolutions pertinentes du Conseil, lui demandant de résister à toute tentative de déplacement forcé.  Le délégué a promis aux Palestiniens un pont aérien d’aide humanitaire, comme annoncé par les autorités de son pays.

M. HADI HACHEM (Liban), au nom du Ministre des affaires étrangères et des expatriés/diaspora du Liban, a dénoncé une guerre qui fait fi du droit international et des principes fondamentaux de la Charte.  Il a condamné le blocus de la bande de Gaza qui empêche l’acheminement de tous les biens essentiels, les bombardements d’infrastructures cruciales, d’hôpitaux et de lieux de culture ou encore les attaques contre les journalistes et les employés de l’ONU.  Le représentant a regretté que les forces israéliennes ne tiennent aucunement compte des résolutions de l’ONU ni des appels répétés du Secrétaire général.  Il a appuyé le droit des Palestiniens à disposer de leur propre État.  Si tous les dirigeants s’efforcent de trouver une solution pour que cesse ce conflit sanglant, les Israéliens menacent de ramener le Liban « à l’âge de pierre » avec des attaques par air, terre et mer qui inquiètent les Libanais, a-t-il déploré avant de saluer le rôle de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL). 

La région ne connaîtra de paix qu’avec l’établissement d’un État palestinien et la fin de l’occupation des territoires arabes occupés, a affirmé le représentant, en dénonçant par ailleurs l’utilisation par Israël d’armes incendiaires comme le phosphore blanc qui ont des effets dévastateurs sur l’environnement et sur les personnes.  Il a aussi condamné le meurtre de 13 journalistes à Gaza ainsi que les attaques perpétrées contre des journalistes au Liban.  « Le Liban n’a jamais été l’agresseur mais plutôt la victime de l’agression israélienne. »  Même si le Liban a réussi à libérer un pan de son territoire, Israël occupe d’autres parties du pays comme la région des fermes de Chebaa et de Ghajar, a-t-il poursuivi.  D’autre part, si les réfugiés syriens constituent une priorité pour le Liban, celui-ci ne saurait accepter l’impasse et reste disposé à trouver une solution digne pour leur retour.  En conclusion, le représentant a demandé aux membres du Conseil d’investir dans la paix et la sécurité du Liban, ce qui est dans l’intérêt de la région, de l’Europe et du monde pour éviter un effondrement économique, militaire et sécuritaire. 

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est dit préoccupé par la poursuite des tensions et des conflits au Moyen-Orient, et par la situation des civils.  À cet égard, il a regretté l’absence de mesures concrètes de la part du Conseil de sécurité.  Condamnant sans équivoque toutes les attaques aveugles contre les civils et les infrastructures civiles, il a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à la libération immédiate, inconditionnelle et sûre des otages.  Le représentant a souligné l’importance du dialogue et des négociations, notamment pour permettre l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire, tout en garantissant la sécurité des travailleurs humanitaires.  Après avoir salué les efforts déployés par l’ONU, ses États Membres, ainsi que les organisations régionales et internationales, il a jugé essentielle la participation de toutes les parties pour parvenir à un règlement pacifique et viable du conflit.  À cet égard, le Viet Nam appelle à la relance du processus de paix du Quartet pour le Moyen-Orient, et demande l’arrêt immédiat de toute provocation susceptible d’alimenter la violence et l’animosité entre les deux parties, à savoir l’expansion de colonies en Cisjordanie, la démolition de maisons et l’expulsion du peuple palestinien.  De surcroît, le statu quo des Lieux saints à Jérusalem doit être respecté, a estimé le représentant, considérant que le maintien d’un cessez feu sur le long terme sera conditionné au fait de s’attaquer aux causes profondes de conflit.  Il a appuyé la solution des deux États.

M. ABBAS KADHOM OBAID AL-FATLAWI (Iraq) a affirmé que le peuple palestinien est l’objet d’un « génocide déclaré » de la part d’Israël, la Puissance occupante. La population palestinienne de Gaza est victime d’un blocus, elle est affamée, privée d’eau, de nourriture, bombardée et déplacée de force.  « Autant de preuves de la brutalité israélienne que la communauté internationale oublie et ignore », a déploré le délégué, en dépit des nombreuses résolutions adoptées sur le sujet, jamais mises en œuvre, car il n’existe aucun mécanisme contraignant à cet effet.  Cela a permis à Israël de commettre ces crimes sans jamais devoir en rendre compte, a-t-il encore affirmé.  Alors que tous condamnent les violations du droit international et du droit international humanitaire, le Conseil doit assumer ses responsabilités morale et juridique et mettre un terme à sa politique de sélectivité.  Selon le délégué, le Conseil doit prendre des mesures pour obtenir un cessez-le-feu, empêcher le déplacement de la population, la destruction de biens et de maisons palestiniens, et pour faire cesser les attaques et la désacralisation des Lieux saints.  Il faudra également créer un fonds pour la reconstruction de tout ce qui a été détruit à Gaza par les forces israéliennes.

M. BJÖRN OLOF SKOOG, Chef de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies, a exhorté le Hamas à libérer les otages et la communauté internationale de protéger toute infrastructure civile.  La population civile à désespérément besoin de denrées alimentaires, de matériel médical, de combustibles et d’abris, a-t-il développé, appelant à l’accès sans entrave et à la protection du personnel humanitaire.  Saluant l’ouverture du passage de Rafah, il a fait état de l’aide apportée aux civils par l’UE, qui a triplé sa contribution financière pour atteindre un montant total de 75 millions d’euros, parallèlement au déclenchement de sa riposte intégrée et de l’aide apportée par les États membres à titre national.  Exhortant les parties prenantes à s’abstenir de prendre toute mesure pouvant mener à l’escalade du conflit, il a salué les efforts des acteurs régionaux, appelant la communauté internationale à relancer le processus de paix au Moyen-Orient via la solution des deux États. 

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a considéré prioritaire d’empêcher l’escalade des combats et de tout mettre en œuvre pour que la crise humanitaire dans la bande de Gaza ne continue pas à s’aggraver et que l’aide parvienne à ceux qui en ont besoin. Elle a appelé à protéger la population civile quelle que soit sa nationalité et à un cessez-le-feu durable. Réitérant la ferme condamnation par l’Argentine des actes terroristes perpétrés par le Hamas à l’encontre d’Israël, elle a exigé la libération immédiate et sans condition des otages, y compris des citoyens argentins.  Son pays, a dit la déléguée, reconnaît le droit d’Israël à se défendre, tout en précisant que la population civile, les écoles, les hôpitaux et les installations de l’ONU devaient être protégés en toute circonstance, conformément au droit international humanitaire.  Elle a condamné l’attaque contre l’hôpital Al Ahli Arab à Gaza.  Jugeant impératif d’ouvrir des couloirs humanitaires sûrs, elle a salué la réouverture du point de passage de Rafah, espérant qu’il s’agissait d’un premier pas vers un acheminement durable et sans entrave de l’aide humanitaire.  Préoccupée par la tension croissante aux frontières d’Israël avec la Syrie et le Liban, la déléguée a appelé toutes les parties à « éviter une escalade aux conséquences imprévisibles ».  Elle a également demandé à la communauté internationale de s’investir dans des négociations en vue de parvenir à la solution des deux États, en raison des risques évidents que fait courir l’inaction. Elle a appelé le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale à assumer leurs responsabilités en vertu de la Charte, estimant qu’il en allait de la crédibilité du système onusien.  Elle a également appelé la communauté internationale à ne pas perdre de vue les besoins d’une reconstruction d’envergure de la bande de Gaza.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est dit profondément préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire, les pertes massives de vies civiles et la crise humanitaire croissante.  Il a, une nouvelle fois, condamné sans équivoque les attentats terroristes perpétrés en Israël, le 7 octobre, et exprimé sa profonde consternation face à la perte tragique de vies humaines à l’hôpital Al Ahli de Gaza, estimant que les responsables doivent être traduits en justice.  Il a appelé toutes les parties à protéger les civils, en particulier les femmes et les enfants, et salué les efforts en faveur d’une désescalade et de l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a précisé que l’Inde a envoyé 38 tonnes de médicaments et de fournitures médicales dans la région, avant de réaffirmer son soutien à la solution des deux États, laquelle exige une reprise rapide des négociations de paix.  Il a aussi rappelé le soutien de son pays au peuple palestinien, grâce à une coopération bilatérale au développement, couvrant les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’émancipation des femmes, de l’entrepreneuriat et des technologies de l’information. 

Le temps est extrêmement difficile pour les Palestiniens, les Israéliens et le Moyen-Orient, a reconnu Mme MERETE FJELD BRATTESTED (Norvège).  Elle a condamné les attaques terroristes odieuses du Hamas qui doit libérer tous les otages à Gaza et souligné le droit d’Israël de se défendre.  Toutefois, a-t-elle souligné, les opérations militaires doivent rester conformes au droit international humanitaire et éviter les pertes civiles.  Ravie de l’arrivée des premiers convois à Gaza, la déléguée a demandé un accès humanitaire élargi, avant de rappeler que depuis le début de cette crise, la Norvège a versé 130 millions de couronnes supplémentaires, notamment à l’UNRWA.  Craignant les conséquences dévastatrices d’une escalade de la violence en Cisjordanie et dans le Moyen-Orient tout entier, elle a appelé à l’ouverture d’un horizon politique.  Un État palestinien souverain et indépendant reste la meilleure voie pour une paix durable. La solution des deux États offrirait de nouvelles opportunités de coopération, de sécurité, de stabilité et d’intégration, a conclu la représentante, en rendant hommage à l’UNRWA, dont plusieurs membres ont perdu la vie à Gaza.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a déclaré que le Conseil de sécurité, « en raison du cadre d’impunité qui s’est perpétué au fil du temps par le veto récurrent des États-Unis en faveur de son partenaire génocidaire », a fini par se transformer en un organe facilitant la violence et la mort.  La communauté internationale est témoin d’une escalade sans précédent du conflit qui risque de compromettre la stabilité régionale et internationale, a-t-il averti.  Selon lui, la Puissance occupante et son complice, les États-Unis, démontrent une volonté claire de mener une « opération d’épuration ethnique » du peuple palestinien qui survit dans la plus grande prison à ciel ouvert au monde.  Par ailleurs, il a attiré l’attention sur la violation, en toute impunité, par Israël des résolutions pertinentes et des normes du droit international, exhortant la communauté internationale à prendre note des pays qui cherchent à « justifier l’injustifiable », notamment via des « résolutions s’apparentant à des farces ». 

Les futures générations ne pourront se défaire des images de massacres, a-t-il poursuivi, et pourtant, Washington martèle qu’Israël recourt à la force de manière proportionnée. Le délégué a fait remarquer que cette minimisation n’a toutefois pas les mêmes effets que par le passé grâce aux réseaux sociaux relatant les actes irréfutables d’Israël.  « Le moment est venu de miser sur la paix, la justice et la liberté en mettant tout calcul politique et toute tentative de domination néocoloniale de côté », a-t-il conclu. 

M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie) a déclaré que tant le Gouvernement que le Parlement australiens ont condamné, sans équivoque, les atrocités commises par le Hamas, appelé à la remise en liberté immédiate et sans condition des otages, et soutenu le droit d’Israël à se défendre.  Le représentant a soutenu les efforts tendant à contenir le conflit et indiqué que son pays cherche à travailler avec ceux qui partagent l’objectif de « faire baisser la température » dans la région et d’éviter que ce conflit ne déborde. Les actions du Hamas ont précipité un scénario dévastateur en Israël et à Gaza, et la position de l’Australie est que la protection de la vie des civils doit être la priorité absolue et qu’il faut respecter les règles de la guerre et le droit international humanitaire, a précisé le représentant.

Après avoir relevé que la situation humanitaire à Gaza est catastrophique, il a appelé à un accès humanitaire immédiat, sûr, sans entrave et continu afin d’assurer une aide humanitaire essentielle aux civils dans le besoin.  L’Australie a apporté une première contribution à l’aide humanitaire par l’intermédiaire de partenaires de confiance comme l’UNICEF, a-t-il annoncé. Il a affirmé que le Hamas ne représente pas le peuple palestinien, ni ses besoins et aspirations légitimes.  Une paix durable ne peut être obtenue par des opérations militaires, a-t-il encore souligné, en réitérant son soutien à une solution à deux États.

M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) a exprimé sa solidarité avec le peuple palestinien, victime, selon lui, d’un « génocide » perpétré par la Puissance occupante.  Il a condamné le bombardement d’hôpitaux à Gaza et s’est ému de la mort de membres du personnel de l’ONU sur place.  Israël a décidé de faire fi du droit international et du droit international humanitaire qui sous-tendent la paix et la sécurité internationales, a-t-il dénoncé, accusant cet État de vouloir imposer un « châtiment collectif » aux Palestiniens de la bande de Gaza sous le prétexte de la légitime défense.  Dans ce contexte, il est inconcevable que le Conseil de sécurité soit une fois de plus bloqué, a affirmé le représentant.  Il a appelé le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale à agir de toute urgence, insistant sur l’importance d’instaurer un cessez-le-feu à Gaza et de répondre sans tarder à l’urgence humanitaire.  Pour ce faire, la communauté internationale, par le truchement d’agences comme l’UNRWA, doit continuer d’apporter un soutien à ceux qui en ont le plus besoin, a-t-il plaidé.  À terme, la seule façon de préserver la dignité et la liberté du peuple palestinien est de reconnaître la Palestine comme État Membre à part entière, dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, a conclu le représentant.

M. TOUFIQ ISLAM SHATIL (Bangladesh) s’est indigné de la punition collective infligée à la population civile de Gaza, appelant les membres du Conseil de sécurité à s’entendre sur un cessez-le-feu immédiat pour faire cesser les bombardements continus et aveugles.  Il a, d’autre part, estimé que le premier devoir de la communauté internationale est d’assurer une aide humanitaire aux personnes qui ont survécu à l’attaque militaire brutale d’Israël, d’autant plus que 30% des habitations de la bande de Gaza ont été détruites ou rendus inhabitables, et que l’eau et la nourriture manquent aux habitants.  Le représentant a également plaidé pour que le personnel de l’UNRWA, « bouée de sauvetage pour la Palestine », soit préservé de toute attaque, alors que 35 de ses employés ont déjà été tués par Israël, dont 6 au cours des dernières 24 heures. 

Le délégué s’est élevé contre l’intention affichée par Israël de déplacer de force les Palestiniens hors de leur propre patrie.  Cela risquerait de détériorer davantage la situation humanitaire dans l’ensemble de la région, a-t-il averti, avant d’appeler le Conseil de sécurité à prendre les mesures nécessaires pour tenir Israël responsable de ses crimes de guerre et de son manque de respect flagrant du droit international humanitaire.  À ses yeux, la seule solution à cette crise reste la création d’un État palestinien indépendant, avec Jérusalem-Est pour capitale, dans le cadre d’une solution à deux États basée sur les frontières d’avant 1967. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a appelé à un cessez-le-feu immédiat, la protection des civils israéliens et palestiniens, la libération de tous les otages et l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a également rejeté toute tentative de déplacer par la force les Palestiniens de leur terre natale.  Le dialogue et les approches pacifiques doivent avoir la priorité pour mettre un terme à la guerre et régler pacifiquement tous les différends, régionalement et internationalement, a souligné le représentant.  À cet égard, il a remercié le Secrétaire général pour tous ses efforts visant à obtenir un cessez-le-feu et à acheminer l’aide humanitaire.  Il a ensuite souligné la position ferme de Bahreïn quant au droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’établissement d’un État souverain et indépendant, dans les frontières de 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.  Par conséquent, il a demandé au Conseil de sécurité d’assumer ses responsabilités historiques et d’assurer l’application des résolutions pertinentes. 

M. KEITH MC BEAN (Irlande) s’est inquiété du risque d’une escalade de la violence dans la région et condamné sans réserve l’attaque terroriste du Hamas. Une action barbare visant des civils innocents qui ne pourra jamais être justifiée, a dénoncé le représentant, appelant à la libération immédiate et sans condition préalable de tous les otages. Face à une telle brutalité, Israël a le droit de se défendre et de défendre son peuple conformément au droit international, a fait valoir le délégué, objectant, toutefois, que même les guerres ont des règles.  Il est donc nécessaire de faire la distinction entre le peuple palestinien et le Hamas, a-t-il souligné, décriant l’utilisation des populations civiles en tant que « boucliers humains ».  Le représentant a par ailleurs annoncé une enveloppe supplémentaire de 13 millions d’euros pour faire face à la crise, dont 10 millions d’euros de financement de base.  Les États Membres devraient veiller à ce que l’UNRWA dispose de fonds suffisants pour mener à bien son travail vital, a-t-il fait valoir.  Pour finir, le représentant a exhorté à ne pas oublier la situation « très préoccupante » en Cisjordanie, alors que l’attention de la communauté internationale est concentrée sur la crise à Gaza. 

M. LAURI VOIONMAA (Finlande) a appelé à la libération immédiate des otages et a déploré la situation catastrophique dans la bande de Gaza, appelant à une pause humanitaire.  Dans la crainte d’une escalade, il a exhorté la communauté internationale et les parties prenantes à avancer sur la solution des deux États, avec un État palestinien viable comprenant Gaza et la Cisjordanie.  La communauté internationale doit assumer sa responsabilité et travailler à la reprise des négociations dans les plus brefs délais, a-t-il insisté en conclusion. 

M. PHILIPPE KRIDELKA (Belgique) a condamné les actes terroristes atroces perpétrés en Israël par le Hamas et le Jihad islamique.  Il a appelé à la libération sans condition et sans délai des otages et soutenu le droit d’Israël à se défendre.  Face à la complexité et à l’émotion suscitée par la situation sur le terrain, notre action, a-t-il dit, doit se baser sur le respect du droit international et le droit international humanitaire.  La protection des civils doit être notre préoccupation principale, tout en gardant à l’esprit la responsabilité première des parties au conflit. La Belgique, a prévenu le délégué, ne cautionne ni l’idée d’un blocus total, ni le déplacement forcé des populations et encore moins l’utilisation des civils comme boucliers humains.  Nous appuyons la mise en place, dans les meilleurs délais, d’une trêve humanitaire devant mener à un cessez-le-feu.  Le représentant a rappelé que son pays a augmenté le financement des opérations humanitaires de l’ONU, à hauteur de 2 millions d’euros.

Les efforts diplomatiques doivent maintenant se concentrer sur une désescalade rapide car la situation actuelle montre l’absolue nécessité de définir un horizon politique vers une solution durable et pérenne du conflit.  Le représentant a dit appuyer la solution des deux États.  Il faut, a-t-il pressé, faciliter les échanges, préparer le terrain pour une reprise des pourparlers et nous inscrire en faux contre tous les discours de haine ou autres amalgames non constructifs. Il est impératif de travailler ensemble, de façon constructive, avec les Israéliens et les Palestiniens à la sortie de crise et à une paix durable.

M. SIDI MOHAMED LAGHDAF (Mauritanie), au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), a appelé à l’arrêt immédiat de l’agression illégale d’Israël contre le peuple palestinien.  Il doit y avoir un cessez-le-feu et une protection de la population civile dans la bande de Gaza comme dans le reste du territoire palestinien occupé, a-t-il dit, exigeant d’Israël qu’il mette fin à tous ses crimes et à toutes ses brutalités contre le peuple palestinien, au premier rang desquels le siège inhumain de Gaza.  L’OCI souligne, à cet égard, la nécessité de fournir d’urgence une aide humanitaire, médicale et de secours, y compris en distribuant nourriture, eau, carburant, électricité et médicaments aux habitants de Gaza, cela par l’intermédiaire notamment de l’UNRWA.  « Cette aide est nécessaire dès à présent pour plus d’un million de personnes qui ont déjà été forcées de quitter leur foyer et qui ont tout perdu à cause de cette agression ».  Le représentant a appelé le Conseil de sécurité à agir sans tarder pour mettre fin à l’agression brutale d’Israël et, au-delà, pour « mettre fin à l’impunité dont a joui Israël, la Puissance occupante, pour perpétrer ses crimes de guerre et ses crimes contre l’humanité depuis des décennies ».

M. ALHAKAM DANDY (République arabe syrienne) a déclaré que la campagne criminelle et sanglante d’Israël dépasse l’entendement et l’imagination.  Israël, a-t-il accusé, a coupé tout ce qui est indispensable à la vie des Palestiniens et ne cesse de bombarder la bande de Gaza depuis deux semaines.  Cette campagne illégale n’aurait pas été possible si certains États occidentaux n’avaient donné carte blanche à ce qu’ils qualifient de droit à la légitime défense.  L’escalade et la boucherie actuelles viennent de décennies d’occupation et d’injustice.  En commettant des massacres et un génocide contre le peuple palestinien, Israël mène une politique de la terre brûlée, grâce aux États-Unis qui ont non seulement entravé les décisions du Conseil de sécurité, mais apporté aussi une aide militaire à Israël et des millions de dollars pour éliminer les Palestiniens.  Il faut se garder de mettre sur un pied d’égalité les victimes et la Puissance occupante et reconnaître le droit de légitime des Palestiniens et, à un État indépendant.  Dénonçant le déplacement forcé des populations, le représentant a souligné que les crimes commis à Gaza sont les mêmes que ceux perpétrés dans le Golan syrien occupé.

Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives) a déclaré que l’agression militaire israélienne contre des civils innocents, en particulier des enfants, a provoqué un niveau de dévastation que les mots ne peuvent décrire.  Les pertes en vies humaines, la destruction de maisons et les bombardements continus de Gaza défient tous les principes du droit international et de l’humanité fondamentale, a-t-elle ajouté.  La représentante a souligné qu’en tant que Membres des Nations Unies, les États ont la responsabilité de protéger des vies innocentes par la diplomatie.  Selon elle, l’urgence de la situation est telle qu’elle exige non seulement l’attention de tous mais aussi et surtout « notre action rapide et résolue ». « Le moment est venu pour le Conseil d’accomplir son devoir », a-t-elle dit.  La déléguée a ainsi imploré les membres du Conseil d’agir rapidement, non pas par calcul politique mais par ce devoir moral qui transcende les frontières et les divisions et ne vise qu’un monde plus pacifique. 

M. JAKUB KULHÁNEK (Tchéquie) a condamné, une nouvelle fois, les attaques du Hamas contre Israël et l’enlèvement de plus de 200 personnes, dont des enfants et des personnes âgées.  Il a appelé à leur libération sans condition et insisté sur le droit d’Israël à défendre sa population, conformément au droit international.  Israël, a-t-il dit, n’a pas choisi la guerre.  C’est le Hamas qui l’a choisie, en lançant des attaques sans se soucier des conséquences pour sa propre population, allant même jusqu’à l’utiliser comme bouclier humain.  Les civils, a martelé le représentant, doivent être protégés à tout moment, conformément au droit international humanitaire.  Il a soutenu les appels à l’élargissement de l’accès humanitaire, voulant que l’on veille à ce qu’il ne soit pas détourné par les terroristes.  Il a aussi salué les efforts visant à empêcher que le conflit ne se transforme en une guerre régionale.  Le représentant a préconisé une paix durable basée sur la solution des deux États, estimant qu’il s’agit là de la seule voie réaliste pour garantir la sécurité d’Israël et répondre aux aspirations des Palestiniens.  Il a soutenu le projet de résolution des États-Unis et exprimé l’espoir que le Conseil de sécurité agira dans l’unité. 

Mme ANA JIMENEZ DE LA HOZ (Espagne) a réitéré sa condamnation de tout acte de terrorisme et de violence.  Israël a le droit de se défendre dans le respect du droit international et du droit international humanitaire, a-t-elle rappelé, soutenant néanmoins la demande de pause humanitaire du Secrétaire général.  La communauté internationale, y compris Israël, a le devoir de protéger la population civile de Palestine et de permettre l’accès à l’aide humanitaire.  À ce titre, le Gouvernement espagnol a décidé de doubler l’aide qu’il apporte déjà.  La représentante a également demandé la libération immédiate et sans condition des otages, la prise d’otage constituant un crime de guerre.  Elle a exhorté la communauté internationale à éviter toute politisation du conflit et à soutenir le travail de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), afin de prévenir l’escalade et la propagation du conflit à la région.

Il est tout autant important de trouver une solution crédible de paix au lendemain de la cessation des hostilités actuelles, a poursuivi la déléguée.  Une telle solution est nécessairement la solution des deux États, conformément aux paramètres que ce Conseil de sécurité a validés à plusieurs reprises, a-t-elle estimé, appelant à l’organisation d’une conférence internationale après la cessation des hostilités.  « Nous devons retrouver l’esprit qui a guidé la Conférence de paix de Madrid de 1991 et les Accords d’Oslo », a-t-elle conclu. 

Face à la gravité de la situation, M. TAREK LADEB (Tunisie) a déploré que le Conseil de sécurité ne parvienne pas à trouver un consensus sur la proclamation d’un cessez-le-feu, le maintien de la paix et de la sécurité et l’acheminement de l’aide humanitaire, en cette Journée des Nations Unies.  Les meurtres, les destructions et le blocus sont le résultat attendu du silence de la communauté internationale face aux politiques agressives et aux violations de la Puissance occupante.  Le Conseil de sécurité et les organes de l’ONU se font l’otage de la polarisation et des calculs politiques, aux dépens de la vie de millions de Palestiniens.  C’est précisément ce dont se sert la Puissance occupante pour faire valoir son prétendu droit à la légitime défense.  Le droit international humanitaire et les droits de l’homme perdent apparemment de leur validité dès que l’on franchit la frontière palestinienne, s’est lamenté le délégué. 

Préoccupé par l’escalade de la violence et les opérations militaires à Gaza, M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a appelé à la libre circulation de l’aide humanitaire.  La communauté internationale, a-t-il dit, doit aider l’UNRWA qui joue un rôle essentiel. Elle doit obtenir l’ouverture d’un couloir humanitaire et un cessez-le-feu.  Le représentant a condamné les attaques terroristes et appelé à la libération immédiate de tous les otages.  Il a reconnu les préoccupations légitimes des peuples israélien et palestinien et pressé la communauté internationale de trouver une solution durable à ce conflit. Les deux parties doivent dialoguer et avancer vers la solution des deux États.  Elles doivent prendre du recul et réfléchir à la gravité de leurs actes.  Cette guerre ne résoudra aucun des problèmes d’Israël, de l’Occident ou de Gaza.  Elle doit cesser immédiatement. 

M. VÍCTOR GARCÍA TOMA (Pérou) a condamné le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, avant de souligner que le droit à la légitime défense doit s’inscrire dans le cadre du droit international, y compris du droit international humanitaire, et tenir compte des principes de distinction et de proportionnalité.  Le Pérou appelle donc de toute urgence les parties concernées à parvenir à un cessez-le-feu total et immédiat.  Le représentant a condamné à la fois les tirs de roquettes sur Israël depuis la bande de Gaza, et les bombardements aériens et terrestres aveugles d’Israël sur Gaza. Il a fait sien l’appel du Secrétaire général pour demander au Hamas de libérer immédiatement et sans condition les otages sous son contrôle et à Israël de faciliter l’accès rapide et sans entrave de l’aide humanitaire, en établissant un couloir humanitaire qui offre toutes les garanties à la population civile touchée.  Le Pérou regrette vivement que les efforts déployés par la présidence brésilienne pour adopter une résolution appelant à la cessation des hostilités n’aient pas eu le résultat escompté, en raison du veto opposé par l’un des membres permanents du Conseil. 

Pour l’Observateur permanent du Saint Siège, Mgr GABRIELE CACCIA, la guerre est toujours une défaite pour l’humanité car elle entrave « la vocation innée de la famille humaine à la fraternité ».  Il a condamné de la manière la plus absolue et sans équivoque l’attaque terroriste perpétrée par le Hamas et d’autres groupes armés le 7 octobre contre la population d’Israël, en rappelant les mots du pape François qui a dit que le terrorisme et l’extrémisme alimentent la haine, la violence et la vengeance, et ne font que causer des souffrances mutuelles.  Il a donc réitéré l’appel du pape François à la libération immédiate de tous les otages détenus à Gaza.  Le Saint-Siège rappelle que la responsabilité pénale des actes terroristes est toujours personnelle et ne peut jamais être attribuée à une nation ou à un peuple tout entier, a poursuivi son Observateur, et le droit à l’autodéfense dans tout conflit être conforme au droit international humanitaire, y compris au principe de proportionnalité. 

Exprimant sa vive inquiétude face à la catastrophe humanitaire en cours à Gaza, l’Observateur a souligné que le « siège total » imposé à Gaza a causé des souffrances aveugles parmi la population, notamment en raison des pénuries de vivres, de carburant et de fournitures médicales.  Il a lancé un appel pour faciliter d’urgence des couloirs humanitaires et les maintenir ouverts afin que l’aide puisse atteindre l’ensemble de la population.  Face à l’escalade de la violence, il est impératif, selon l’archevêque, que les autorités de l’État d’Israël et de l’État de Palestine fassent preuve d’audace pour renouveler leur engagement en faveur d’une paix fondée sur la justice et le respect des aspirations légitimes des deux parties.  Si la voie du dialogue semble, aujourd’hui, étroite, elle est la seule option viable pour mettre un terme durable au cycle de violences qui a englouti « cette terre si chère aux chrétiens, aux juifs et aux musulmans », a-t-il conclu. Le Saint-Siège reste convaincu que la solution des deux États offre encore l’espoir d’une telle paix.

M. THORDUR AEGIR OSKARSSON (Islande) a déploré les immenses souffrances des civils innocents et des milliers de personnes, dont des enfants, qui ont été tuées ces derniers jours à Gaza.  Il a profondément regretté que ces atrocités attisent les flammes de la haine, de l’antisémitisme, de l’islamophobie et du racisme à travers le monde.  Il a condamné dans les termes les plus fermes les actes barbares commis par le Hamas, soulignant que le terrorisme ne peut jamais être justifié.  Après avoir appelé à la libération immédiate et sans conditions des otages israéliens, il a indiqué que même si Israël a le droit de se défendre, il doit le faire dans les limites du droit international qui confère aux États des droits et des obligations.  « Les deux sont sacrés », a souligné le représentant.  Il a en outre indiqué que son pays a répondu aux appels d’urgence de l’ONU en allouant une contribution supplémentaire de 70 millions de couronnes islandaises à l’UNRWA. 

M. PAUL BERESFORD-HILL, de l’Ordre de Malte, a déclaré s’exprimer en tant qu’observateur neutre des souffrances qui tourmentent le pays dans lequel son ordre a été fondé, il y a 900 ans.  Il a rappelé qu’à travers toute la Cisjordanie existent encore des hôpitaux portant la croix de Malte à huit pointes, ouverts aux musulmans, aux chrétiens et aux juifs.  Cette Terre est également sainte pour son ordre, a-t-il insisté, déplorant la violence qui s’y est déchaînée contre des innocents.  Le système de santé à Gaza est soumis à une immense pression, s’est-il alarmé, précisant qu’un cinquième des établissements de santé ont cessé de fonctionner et que 143 attaques ont eu lieu contre des centres de soin, dont 81 en Cisjordanie.  À Gaza, 62 offensives contre des installations médicales ont fait plus de 500 morts et blessé 500 autres agents de santé.  Détaillant ces statistiques, il a demandé quand les violences prendront fin.  Quelle que soit la faction dont les missiles ont frappé l’hôpital Al Ahli Arab, ce sont les innocents qui paient le tribut, s’est-il désolé. 

La situation présente le potentiel de se dégrader, comme la crise des Balkans a dégénéré en la Première Guerre mondiale, a estimé le représentant.  Il a émis l’espoir que ce moment d’introspection mondiale résulte en quelque chose de plus que des couloirs humanitaires pour que seuls 20 camions quotidiens apportent une aide vitale à deux millions de personnes. Il a également appelé à la libération des otages innocents.  En conclusion, il a exhorté l’assistance à trouver un chemin vers la paix, enraciné dans la justice et le droit international humanitaire, pour transformer enfin les glaives en socs de charrue. 

Mme NEISHANTA ANNASTACIA BENN (Guyana) a déclaré que silence ne peut plus être une option pour le Conseil de sécurité, qui détient la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  L’appel de ma délégation au Conseil est de s’unir, d’envoyer le message clair aux peuples d’Israël et de Palestine que vous êtes à leurs côtés, a lancé la déléguée, que vous reconnaissez les souffrances qu’ils ont endurées et qu’ils endurent et que vous avez décidé collectivement de répondre par la force du droit international.  La vie des hommes, des femmes et des enfants –des enfants !- en dépend, a-t-elle conclu, insistant pour que cette responsabilité ne soit pas « prise à la légère ».

Mme SOPHEA EAT (Cambodge) a condamné tous les actes de violence et de terrorisme, insistant sur la nécessité de faire de la paix une priorité afin de permettre aux deux nations d’exercer leurs droits au développement plutôt que de subir une guerre sans fin.  Elle a déploré le nombre croissant de victimes civiles, exhortant toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et à engager un dialogue constructif pour parvenir à un cessez-le-feu ou à une pause humanitaire. Elle a également demandé que les parties au conflit ne ciblent pas les infrastructures civiles et autorisent l’acheminement d’aide humanitaire, conformément au droit international humanitaire.  Enfin, elle a appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à « s’unir dans un esprit de solidarité pour mettre en place un dialogue et des négociations conduisant à une paix juste et durable ».

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a rappelé le caractère injustifiable des exactions du Hamas, dénonçant un « carnage insensé ».  Il a condamné les tirs de roquettes et exigé la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages.  Il a rappelé que le Hamas ne représente pas le peuple palestinien et a, à ce titre, considéré qu’il faut répondre urgemment à la situation humanitaire. 

Le Moyen-Orient, s’est-il alarmé, se transforme en poudrière et le risque de voir le conflit déborder dans la région est bien réel.  L’Italie, a dit son représentant, s’est engagée à éviter ce scénario, comme en atteste la présence de sa Première Ministre au Sommet convoqué par le Président égyptien, samedi dernier, ainsi que ses récentes rencontres avec le Premier Ministre Benyamin Netanyahu, le Président Mahmoud Abbas et le Roi Abdallah de Jordanie.  Exhortant les parties à prendre des mesures immédiates pour désamorcer la situation, le représentant a rappelé la nécessité d’une solution politique fondée sur les paramètres convenus au niveau international, dont la solution des deux États.  Même en ces heures sombres, il faut se tourner vers l’avenir et préparer le jour d’après , a-t-il conclu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: préoccupations partagées autour des menaces dans le cyberespace, mais divisions sur les moyens d’y remédier

Soixante-dix-huitième session,
20e & 21e séances plénières - matin & après-midi
AG/DSI/3725

Première Commission: préoccupations partagées autour des menaces dans le cyberespace, mais divisions sur les moyens d’y remédier

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a consacré la plus grande partie de ses deux séances d’aujourd’hui à son débat thématique sur les « Autres mesures de désarmement et sécurité internationale », lesquelles comprennent notamment les questions liées aux technologies de l’information et des communications (TIC), à la cybersécurité, ainsi que la coopération internationale.   

C’est avant tout de la voie à suivre pour renforcer la cybersécurité sur le plan mondial qu’il a été question.  De nombreuses délégations sont venues rappeler les aspects positifs des TIC et du cyberespace, « catalyseur du développement », mais aussi la nécessité de le préserver des conflits, à l’image du Mouvement des pays non alignés, qui a demandé que le cyberespace soit une ressource exploitée au seul bénéfice des progrès humains.  Le Mexique n’en a pas moins estimé que la réglementation du cyberespace était une condition préalable au développement durable.  Au nom d’un groupe de pays, la Chine, qui a elle aussi appelé à mettre l’accent sur les usages pacifiques du cyberespace dans l’optique du développement socioéconomique des pays en développement, a annoncé, le dépôt d’un projet de résolution.   

De nombreuses délégations se sont aussi dites inquiètes du nombre et de la gravité croissants des cyberattaques.  La Colombie a ainsi signalé une récente cyberattaque contre diverses infrastructures du pays, dont des hôpitaux.  L’Estonie et le Royaume-Uni ont accusé la Fédération de Russie d’avoir mené des opérations cybernétiques dans le cadre d’une campagne de déstabilisation de l’Ukraine.  La France a estimé que la cybersécurité était devenue un enjeu majeur.  Pour l’Algérie, la multiplication des cyberattaques contre les infrastructures critiques des États exige une réponse unie.   

Mais s’il existe un accord sur la nécessité d’une coopération internationale, la méthode à suivre divise.  À cet égard, le rôle du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation a été salué.  Le Président du Groupe a détaillé les différents domaines de travail et les résultats obtenus, notamment un accord pour l’opérationnalisation d’un répertoire mondial des points de contacts.  Il a surtout insisté sur la méthode de travail utilisée, fondée sur l’ouverture et la transparence, la souplesse et le compromis, qui a permis d’adopter deux Rapports d’étapes annuels par consensus, estimant que, de ce fait, le Groupe était devenu en lui-même une mesure de confiance.   

Ce Groupe doit exister jusqu’en 2025.  Pour en prolonger l’existence, la France a présenté sous forme de projet de résolution un « Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale », lequel prévoit, après la conclusion des travaux de l’actuel Groupe de travail et d’ici à la fin de l’année 2026, l’établissement d’un mécanisme permanent, inclusif et orienté vers l’action, qui serait doté des fonctions déjà définies par l’Assemblée générale  dans sa résolution 77/37: renforcer les capacités des États qui le demandent et lutter contre la fracture numérique, mettre en œuvre le cadre normatif agréé et poursuivre les discussions sur son développement, y compris via l’élaboration de normes juridiquement contraignantes, tout en favorisant la participation d’acteurs non gouvernementaux, en particulier du secteur privé.   

Le texte a reçu un large soutien d’États Membres venus de diverses régions du monde.  La Côte d’Ivoire a ainsi estimé qu’il correspondrait à l’exigence d’adaptation continue des actions de la communauté internationale.   

La France a bien insisté sur le fait que le calendrier envisagé évite toute duplication avec les travaux du Groupe de travail, tout en assurant une transition sans accroc.  En effet, plusieurs groupes de pays ont, à l’image de l’Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), demandé d’éviter toute création de mécanismes parallèles qui se chevauchent, plaidant pour un processus « à voie unique » qui pourra s’appuyer sur des recommandations consensuelles.  La Fédération de Russie, qui présente son propre projet de résolution basé sur les recommandations consensuelles d’un premier Groupe de travail, a dénoncé un risque d’« éparpillement ».  Son projet a en revanche été fortement critiqué par les pays occidentaux, la Suisse l’accusant de ne pas s’appuyer sur un libellé consensuel et d’adopter une approche « à la carte ».   

En fin de séance, la Première Commission a commencé d’aborder le thème de « désarmement et sécurité sur le plan régional », occasion pour la dizaine de délégations qui ont pris la parole sur ce point de mettre en avant les zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN).  Plusieurs ont une fois encore plaidé pour en créer une au Moyen-Orient et mis en avant la Conférence pour l’établissement au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive, dont la quatrième session aura lieu en novembre.  Le Mouvement des pays non alignés a en outre demandé un financement adéquat des activités des Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement.   

En tout début de séance, la Première Commission avait achevé l’examen du débat thématique sur les « armes classiques » en entendant l’Observateur permanent du Saint-Siège, qui a notamment rappelé que « la paix demande plus de courage que la guerre ». 

Le Première Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 25  octobre, à partir de 10  heures.   

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR  

Armes classiques (fin) 

Déclarations 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a déclaré que la guerre en Ukraine avait montré que les armes à sous-munitions ou les mines antipersonnel restent utilisées sans distinction.  Il a appelé à cesser d’utiliser ces armes qui touchent principalement des civils et des enfants.  Pour l’Observateur permanent, il faut poser la question de la dimension éthique de l’usage des armes classiques, qui ne peut être justifié que dans un rôle purement défensif.  Il a appelé à faire en sorte que leur usage respecte le droit international humanitaire, ainsi qu’à la transparence sur les stocks.  À ce titre, il a réaffirmé le soutien du Saint-Siège pour le Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères.   

L’Observateur permanent a également émis l’espoir que soit produit un instrument juridiquement contraignant sur les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA) et a exhorté les États Membres à ne pas développer de telles armes.  Estimant inacceptables les morts entraînées dans les populations non combattantes par les armes explosives, il a réitéré son engagement en faveur de la Déclaration politique de Dublin sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées.  Il faut, a‑t‑il insisté, passer du paradigme du dommage collatéral à celui de la protection.   

Enfin, l’Observateur permanent a rappelé les mots du pape François, selon qui la guerre encourage les profits, lesquels reviennent toujours à de rares personnes au détriment de populations entières.  Renoncer aux profits faciles de la guerre n’est pas chose facile, a‑t‑il poursuivi, concluant que la paix demande plus de courage que la guerre.   

Autres mesures de désarmement et sécurité internationale 

Propos liminaires 

M. XXX, Président du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et son utilisation, a rappelé que le Groupe de travail avait convoqué deux sessions de fond et plusieurs réunions informelles.  Nous avons réussi à recenser des mesures très concrètes de nature à renforcer la coopération internationale, s’est-il félicité.  Ainsi, a‑t‑il rappelé, dans la résolution 75/240, le Groupe de travail s’était vu demander « pour adoption par consensus » un Rapport de situation annuelle.  Or, nous avons même réussi à faire un deuxième Rapport de situation annuelle qui a été adopté en juillet 2023 par consensus, a fait observer le Président du Groupe de travail, ajoutant que ce dernier couvrait tous les aspects du mandat du Groupe.   

Concernant les menaces existantes et potentielles, les États Membres ont pu recenser pour la première fois sur la base d’un consensus un certain nombre de menaces émergentes, a expliqué le Président du Groupe de travail, qui a détaillé les différents domaines de travail et les résultats obtenus.  Concernant les règles et comportement responsables des États, ils se sont vu proposer de prendre des mesures concrètes.  Quant au droit international, il faut encore savoir comment il s’applique dans le domaine du numérique.  S’agissant des mesures de confiance, les États ont adopté une liste initiale de quatre mesures de confiance mondiale.  Concernant les États, ils se sont mis d’accord sur des mesures complètes pour une Table ronde le 10 mai 2024 au Siège de l’ONU.  S’agissant du dialogue continu, un mécanisme pourrait être mené par les États permanents sous l’égide l’ONU.  Enfin, les États se sont mis d’accord sur l’opérationnalisation du répertoire mondial des points de contacts, que le Président a dit espérer voir disponible dès l’an prochain.   

M. XXXXX a rappelé qu’il reste deux ans avant la fin du mandat du Groupe de travail.  Sa nature ouverte et transparente a été essentielle pour bâtir la confiance, a‑t‑il estimé, estimant que le Groupe était devenu en lui-même une mesure de confiance, ce qui ne peut être considéré comme un acquis.  Faire en sorte que les décisions soient prises sur la base du consensus est utile, a poursuivi le Président du Groupe de travail, car cela requiert de la souplesse et du compromis.  Il a dit avoir la conviction qu’un consensus peut se trouver, même sur les questions les plus épineuses.  Chacun devra poursuivre le travail dans un esprit de confiance mutuelle, a‑t‑il conclu.   

Déclarations 

M. MOCHMAMMAD IQBAL SHULE (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a souligné l’importance vitale que le cyberespace ne devienne pas un nouveau théâtre de conflit.  Pour le Mouvement, il doit être une ressource exploitée au seul bénéfice des progrès humains.  Le Mouvement fait siennes les propositions adoptées dans son second rapport d’étape par le Groupe de travail à composition non limitée sur les technologies de l’information et des communications (TIC), dont les travaux reposent sur une base consensuelle, y compris la proposition de se pencher au cours des deux prochaines années sur la question des TIC et du droit international applicable.   

Le représentant a également appuyé la proposition de création d’un mécanisme juridique unique sur ces questions de cybersécurité, lequel serait susceptible d’évoluer en fonction des besoins particuliers des pays en développement.  Enfin, il a condamné toute utilisation à mauvais escient des TIC, y compris à des fins terroristes, avant d’apporter le soutien du Mouvement aux projets de résolution de la Commission sur la réduction des dépenses militaires qui seront présentés dans les prochains jours.  Les ressources ainsi dégagées devraient être consacrées à des objectifs tels que l’éradication de la pauvreté et de la faim, a conclu le représentant.   

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a estimé que monde est devenu de plus en plus vulnérable aux activités malveillantes dans le cyberespace, qui sont susceptibles de porter atteinte à la paix et à la sécurité.  Le représentant a réaffirmé son soutien aux travaux du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité de l’utilisation des TIC 2021-2025 en tant que mesure de confiance et s’est félicité de l’adoption par consensus du deuxième Rapport d’activité annuel du Groupe lors de sa cinquième session de fond en juillet 2023.   

Le représentant s’est dit fier que le répertoire des points de contact du Forum régional de l’ASEAN sur la sécurité et l’utilisation des TIC aient contribué aux discussions internationales sur la cybernétique à l’ONU.  Il a préconisé que le Groupe de travail reste la plateforme centrale pour les discussions sur la cybersécurité jusqu’à la fin de son mandat.  Par ailleurs, le représentant a demandé d’éviter de créer des mécanismes parallèles qui se chevauchent.  L’ASEAN est fermement convaincue qu’il est important d’avoir un processus à voie unique qui s’appuiera sur les recommandations consensuelles du Groupe de travail sur le dialogue institutionnel régulier, a‑t‑il déclaré.   

Le représentant a souligné l’importance de la coopération internationale et du renforcement des capacités dans le domaine des TIC pour permettre aux États, en particulier aux pays en développement, de faire face efficacement aux cybermenaces et de mettre en œuvre les 11 normes volontaires et non contraignantes de comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC.  À cette fin, l’ASEAN a lancé la mise en œuvre du projet de cyberbouclier de l’ASEAN de 2023 à 2026, en soutenant l’objectif commun de renforcement des capacités de la région.  À cet égard, le représentant s’est réjoui de la collaboration en tandem menée dans le cadre du partenariat global ASEAN-ONU.   

M. SHEN JIAN (Chine), au nom d’un groupe de pays, a appelé à mettre l’accent sur les usages pacifiques du cyberespace dans l’optique du développement socioéconomique des pays en développement. Nous présenterons en ce sens un projet de résolution lors de la présente session, a annoncé le représentant.   

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne (UE), a estimé que l’ordre international fondé sur des règles doit s’appliquer au cyberespace, rappelant que ce principe fait l’objet d’un large consensus international.  Dans ce cadre, le représentant a dénoncé la guerre de la Russie en Ukraine, estimant qu’elle constitue une grave menace à la sécurité mondiale, y compris dans le cyberespace.  En Europe, les risques ont évolué suite à cette guerre, mais aussi face à d’autres menaces mouvantes provenant d’États et d’acteurs non étatiques, a‑t‑il poursuivi avant d’expliquer que, pour y faire face, l’Union européenne avait développé une politique de cyberdéfense et mis en place des instruments de cyberdiplomatie.   

Prônant la primauté de la responsabilité des États en matière de cybersécurité, le représentant a toutefois rappelé le rôle majeur joué par d’autres acteurs.  Dans ce cadre, il a salué le Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, qui permet des échanges internationaux.  Il a de même salué le consensus auquel est récemment parvenu le Groupe.   

La vaste majorité des États ont des attentes en matière de cybersécurité, a observé le représentant, qui a salué à ce propos les déclarations du Secrétaire général de l’ONU.  Évoquant la résolution 77/37 de l’Assemblée générale, portant sur le « Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale », il a estimé qu’il s’agissait de permettre aux États Membres de bénéficier de flexibilité face à la menace et de faciliter la consultation de la société civile, du secteur privé ou des universités.   

Enfin, le représentant a mis l’accent sur la priorité à accorder à la création d’une plateforme permanente, laquelle permettrait notamment de renforcer la confiance entre États.  À ce titre, il a apporté son soutien au projet de résolution L.60, construit sur la base de la résolution 77/37, qui propose un mécanisme unique à l’ONU, afin de développer une vision commune sur la manière dont le droit international s’applique au cyberespace.   

M. YASEEN LAGARDIEN (Afrique du Sud) a déclaré que son pays avait mis en place un recueil des menaces liées à la cybersécurité.  Il a émis l’espoir que les prochaines sessions du Groupe de travail à composition non limitée permettront de donner suite à ces idées.  Il a estimé que le Groupe d’experts gouvernementaux pourrait faire appel à des experts extérieurs et a ajouté que le Groupe de travail avait été à même d’entendre autant de vues que possible dans le cadre de ses travaux.  Le représentant a estimé qu’il est essentiel de conserver le processus existant qui a fait ses preuves.   

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI (Jordanie), au nom du Groupe des États arabes, a estimé que les solutions de désarmement convenues à l’échelle multilatérale, sous les auspices de l’ONU, constituent la seule manière viable d’assurer la sécurité internationale.  Dans ce cadre, il a exhorté les États Membres à s’acquitter de leurs obligations.  Se disant préoccupé par l’accroissement des tensions et l’augmentation des dépenses militaires, le représentant a estimé que ces sommes devraient être allouées à la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement et les pays arabes.   

Estimant que la possession et la modernisation des arsenaux nucléaires constitue la plus grande menace à la sécurité internationale et au développement durable, le représentant a notamment appelé les pays à contribuer au plein respect des normes environnementales sur cette question.  Enfin, il a déploré l’utilisation des TIC à des fins malveillantes, souhaitant que l’ONU continue d’élaborer des règles contraignantes pour régir le comportement des États.  Il a également appelé à la poursuite de la collaboration internationale dans ce domaine pour permettre à tous les pays de faire face aux cyberattaques.   

M. MOCHAMMAD IQBAL SIRIE (Indonésie) a indiqué que son pays lancera officiellement en début d’année prochaine sa propre agence nationale de cybersécurité, dont le fonctionnement s’appuiera sur les travaux du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité des TIC, notamment ceux relatifs au comportement responsable et à la gouvernance.  Le représentant a estimé que le futur mécanisme qui pourrait découler du processus de délibération en vue d’assurer la sécurité des TIC devrait être adaptable et évolutif, afin de pouvoir prendre en compte les besoins des pays en développement.  Il a appelé les pays à éviter tout dédoublement de processus délibératifs sur la question de la sécurité et des TIC.   

M. ABDELRHMAN MOHAMED FARID HEGAZY (Égypte) a plaidé en faveur de l’élaboration d’un mécanisme assurant la sécurité des TIC et basé sur les travaux du Groupe de travail à composition non limitée.  Pour l’Égypte, les délégations doivent se garder de présenter des projets de résolution concurrents sur un même thème déjà examiné dans un cadre inclusif à l’ONU.  Tenter d’imposer des processus parallèles ne fera que creuser les divisions entre délégations autour de questions consensuelles et d’intérêts commun, y compris pour les pays en développement, a déclaré le représentant.   

Mme YILIAM GOMEZ SARDINAS (Cuba) a rappelé son engagement vers un désarmement complet pour un monde marqué par la paix.  Il faut éviter de consacrer autant de fonds aux budgets militaires pour le perfectionnement d’armes toujours plus sophistiquées et mortifères; cet argent pourrait être utilisé pour l’aide au développement, a insisté la représentante.  Elle a émis l’espoir que le cyberespace, les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA) et l’espace extra-atmosphérique fassent l’objet de réglementations.   

S’agissant des TIC, celles-ci ne peuvent être une arme de guerre et ne doivent être utilisées qu’à des fins pacifiques, a souligné la représentante, qui a jugé légitime l’usage de la force en cas de cyberattaque.  Elle a aussi condamné l’utilisation des TIC par les États-Unis contre Cuba pour diffuser de fausses informations et inviter au renversement du régime cubain.   

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a soutenu les délibérations multilatérales tenues au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, estimant que celui-ci était et devrait rester le seul processus inclusif poursuivi au sein de l’ONU.  L’utilisation des TIC doit être conforme aux objectifs et principes de la Charte des Nations Unies et du droit international, en particulier les principes de souveraineté, d’égalité souveraine, de non-ingérence dans les affaires intérieures, de respect des droits humains, et de la coexistence pacifique entre les États, a‑t‑il ajouté.   

Mme DIANE SHAYNE DELA FUENTE LIPANA (Philippines) a souligné l’importance d’aligner le désarmement sur les objectifs mondiaux de développement, se faisant ainsi l’écho du Mouvement des pays non alignés et soutenant le projet de résolution L.4, qui appelle à une réduction des dépenses militaires pour réorienter les ressources vers le développement économique et social et combler le fossé entre pays développés et pays en développement.   

La représentante a salué la décision du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité dans l’utilisation des TIC, telle qu’établie dans la résolution 75/240 de l’Assemblée générale.  Tout en relevant les répercussions positives des TIC sur le développement, elle en a déploré les utilisations malveillantes et a appelé à des efforts multilatéraux pour protéger le cyberespace et promouvoir son utilisation pacifique.  Dans ce cadre, elle a apporté son soutien à la création d’un mécanisme permanent, dirigé par les États sous l’égide de l’ONU et faisant rapport à la Première Commission.   

La représentante s’est félicitée du dépôt du nouveau projet de résolution sur les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA), estimant que ces armes soulèvent des problèmes humanitaires, juridiques, sécuritaires, technologiques et éthiques.  Face à leur développement rapide, elle a préconisé le respect du droit international.  Elle a appelé de ses vœux un mandat confié au Secrétaire général de l’ONU afin de présenter un rapport qui prenne en compte les progrès technologiques et implique diverses parties prenantes.   

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a estimé que la dépendance sans précédent aux TIC nécessitait une attention soutenue aux considérations de sécurité qui transcendent les frontières nationales.  Les risques et les défis posés par l’utilisation malveillante des TIC doivent être traités de manière efficace, a déclaré le représentant, qui a salué à cet égard les efforts continus du Groupe de travail à composition non limitée 2021-2025 sur la sécurité des TIC et de leur utilisation.  Il s’est félicité de l’adoption en juillet 2023 du deuxième Rapport d’activité annuel du Groupe de travail, y voyant une base solide pour les travaux du Groupe au cours de l’année à venir.   

Le représentant a fait part de son intention de participer activement aux travaux du Groupe de travail, qui s’est avéré être un forum précieux pour discuter des questions de sécurité des TIC entre tous les États Membres.  En outre, il a réaffirmé qu’il fallait éviter les voies parallèles dans les domaines clefs du désarmement.  Il s’agit d’une question qui préoccupe les délégations des pays en développement, compte tenu des contraintes en termes de ressources financières et humaines, a rappelé le représentant.  Il a donc émis l’espoir que le Groupe de travail resterait jusqu’à la fin de son mandat une plateforme à voie unique, ouverte et inclusive, capable de répondre avec souplesse aux exigences des États Membres dans le domaine en évolution rapide de la sécurité des TIC.   

M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas) a relevé que, si les TIC sont des locomotives du développement durable, elles peuvent être détournées par les États et des acteurs non étatiques.  Le risque est d’autant plus élevé que nous dépendons de ces technologies, a‑t‑il poursuivi.  À ce titre, le représentant a appelé au renforcement des règles sur l’usage des TIC par les États, de sorte que l’on sauvegarde le potentiel économique des TIC tout en assurant la sécurité internationale.  Il a salué l’instauration d’un cadre mouvant applicable au comportement responsable des États, le qualifiant de véritable accomplissement pour renforcer la confiance entre les pays, et précisant qu’il a été validé par tous les États Membres.  En réaffirmant le caractère applicable du droit international au cyberespace, ce rapport du Groupe de travail à composition non limitée contient des recommandations concrètes sur les modalités d’application, a‑t‑il poursuivi, avant d’apporter son soutien aux actions visant à comprendre comment le droit international s’applique au cyberespace.   

Le représentant a apporté le soutien de son pays au Programme d’action pour établir un mécanisme permanent et inclusif au terme du travail du Groupe en 2025.  Dans ce cadre, il a appuyé le projet de résolution présenté par la France, estimant qu’il donne un élan au mécanisme et permet une approche équilibrée.   

M. BRAULIO FAUSTO (Mexique) a réaffirmé qu’il est urgent de garantir un cyberespace ouvert, libre, stable, sûr, accessible et résilient pour tous.  Il a jugé indéniable l’applicabilité du droit international, y compris du droit international humanitaire, dans le cyberespace et s’est dit fermement attaché à la mise en œuvre rigoureuse des normes et des principes qui définissent le comportement responsable des États dans ce domaine.  Pour les pays en développement, la réglementation du cyberespace n’est pas simplement une question de sécurité, mais une condition préalable au développement durable dans son sens le plus large, a fait valoir le représentant.   

Par ailleurs, le représentant a fait part de sa crainte d’une course au développement de capacités offensives dans le cyberespace.  Il a jugé alarmant de penser que des nations, ou même des entités privées, pourraient s’orienter vers le développement de capacités offensives avancées qui se traduiraient par des actions potentiellement déstabilisantes.  C’est pourquoi le Mexique préconise un engagement collectif pour éviter que le cyberespace ne devienne un nouvel espace de rivalité.   

Le représentant a réaffirmé que le Groupe de travail à composition non limitée 2021-2025, constitue l’enceinte idéale pour continuer à traiter de manière globale les défis que le cyberespace et les TIC posent dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a appelé à des discussions constructives qui mèneront vers un mécanisme de dialogue permanent sur la cybersécurité.  Ce mécanisme devrait être inclusif et permettre la participation de tous les acteurs concernés, ainsi que la coopération internationale et le renforcement des capacités en fonction des divers besoins régionaux et sous-régionaux.   

Mme EMMA JANE MUTESI LUKABYO (Australie) a rappelé que sa délégation est favorable depuis longtemps à la création d’un mécanisme permanent des Nations Unies pour promouvoir un comportement responsable des États dans le cyberespace, mécanisme qui devra être inclusif, transparent, démocratique et fondé sur le consensus.  À cet égard, la représentante a salué le projet de résolution présenté par la France sur l’établissement d’un Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale.  Elle a ajouté que ce Programme découlerait du processus de délibérations sur ces questions à l’ONU depuis 2004, un processus qui doit demeurer unique et qui prolongerait les discussions menées au sein des groupes de travaux successifs de l’ONU, qu’ils aient été gouvernementaux, d’experts ou à composition non limitée.   

M. JORGE VIDAL (Chili) a salué les réalisations du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale, en particulier s’agissant du nécessaire renforcement et du développement des capacités.  Le représentant a apporté le soutien de sa délégation au projet de résolution sur un Programme d’action visant à promouvoir le comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC dans le contexte de la sécurité internationale.  Il a insisté sur l’importance d’améliorer les capacités de coopération des États en matière d’échange d’informations, le secteur privé, la société civile et le monde universitaire devant être inclus aux discussions onusiennes sur ces questions.   

Mme THARARUT HANLUMYUANG (Thaïlande) a plaidé en faveur d’un cyberespace sûr, accessible, pacifique et résilient, alors même que l’utilisation malveillante des TIC constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales.  À ce titre, la représentante a souhaité rappeler quatre points.  Elle a d’abord appelé de ses vœux un cyberespace gouverné par des règles afin de prévenir les conflits.  Elle a ainsi réaffirmé la position de son pays, pour lequel le droit international et la Charte des Nations Unies sont applicables dans le contexte des TIC.  Cette approche devrait être complétée par les 11 normes non contraignantes pour un comportement responsable dans le cyberespace, a‑t‑elle estimé.  La représentante a ensuite préconisé la tenue de dialogues institutionnels inclusifs et transparents.  Insistant sur la nécessité d’un lieu de partage des meilleures pratiques, elle a estimé que le Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC y pourvoyait.  À ce titre, elle a soutenu la proposition relative à la création d’un futur mécanisme pérenne visant à promouvoir un dialogue institutionnel régulier sur cette question.   

En troisième lieu, la représentante a souligné le rôle essentiel des mesures de confiance, se félicitant que le Groupe de travail ait élaboré un répertoire mondial intergouvernemental de points de contact.  Elle a jugé cette mesure à même de faciliter les communications entre États et d’apaiser les tensions.  Enfin, la représentante a soutenu la mise en place de programmes de renforcement des capacités, afin d’aider les États à renforcer leur cyberrésilience, mais aussi à mettre en œuvre des normes conformes au droit international.   

M. ABU ALHAKAM ADNAN SADEK SAADI (Iraq) a salué les résultats enregistrés par le Groupe de travail à composition non limitée sur l’utilisation des TIC dans le contexte de la sécurité, estimant qu’ils contribueront sans nul doute à la création d’un cyberspace sûr, ouvert et bénéfique à la prospérité des pays en développement.   

M. HUSHAM AHMED (Pakistan) a estimé que le monde se trouve à un moment charnière de l’évolution technologique, marqué par l’émergence de l’intelligence artificielle.  Dans le même temps, on assiste à une nouvelle course aux armements.  Dans ce contexte, le représentant s’est demandé comment les humains conserveront le contrôle des armements, craignant notamment un abaissement du seuil de recours à la force et l’augmentation de la menace nucléaire.  La marge de manœuvre pour réguler ces technologies s’amenuise, s’est-il inquiété, se félicitant toutefois de l’appel lancé par le Secrétaire général de l’ONU à ce propos.   

Relevant qu’un nouveau projet de résolution a été présenté qui porte sur les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA), le représentant a estimé que les discussions devaient se poursuivre au sein des groupes d’experts gouvernementaux pour élaborer des règles internationales.  Par ailleurs, il a considéré que d’autres instances en matière de désarmement pourraient jouer un rôle complémentaire, rappelant que le Pakistan avait déposé un document de travail à la Conférence du désarmement, lequel inclut des propositions pour faire face aux répercussions de l’utilisation militaire de l’intelligence artificielle.   

Enfin, le représentant s’est inquiété du recours aux cyberattaques, relevant que les TIC permettent de mener des attaques anonymes sans l’entrave des limites géographiques habituelles et déplorant que les États soient nombreux à utiliser les TIC comme des instruments de guerre.   

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a relevé que les utilisations hostiles du cyberespace par des acteurs étatiques et non étatiques se multiplient, avec parfois de graves répercussions sur les aspects de la vie humaine.  Transcendant les frontières, une réaction à ce défi devrait être axée sur la protection des infrastructures critiques et des infrastructures d’information critiques, a déclaré le représentant.  Il a souhaité que soit prêtée une attention particulière aux efforts régionaux visant à faciliter les échanges d’expériences, à l’image du Cyber Africa Forum dont l’édition 2023, tenue en avril en Côte d’Ivoire, a été consacrée à la protection des infrastructures critiques contre les cybermenaces.   

Les avancées enregistrées dans les délibérations au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation suscite l’optimisme, a déclaré le représentant, qui a salué l’établissement d’un répertoire mondial d’interlocuteurs pour intensifier la coopération entre les États.  Il s’est également félicité de la poursuite des discussions sur les modalités de mise en place d’un Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale.  La Côte d’Ivoire appuie fortement ce Programme d’action qui, dans le prolongement du Groupe de travail, aurait une vocation de mécanisme permanent, inclusif et orienté vers l’action, afin de correspondre à l’exigence d’adaptation continue des actions de la communauté internationale.  Le représentant a en particulier soutenu, dans ce Programme d’action, une approche renouvelée du renforcement capacitaire des États, notamment les plus vulnérables.   

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a plaidé en faveur du Programme d’action sur les comportements responsables dans le cyberespace tel qu’envisagé dans le projet de résolution porté par la France.  El Salvador est favorable à un cadre en la matière, souple, permanent, inclusif et placé sous l’égide des Nations Unies, a déclaré la représentante.  Celle-ci a en outre attiré l’attention sur le développement de l’intelligence artificielle, appelant les délégations à la Première Commission à appréhender cette évolution par une approche holistique, tant elle a des répercussions dans tous les aspects de la vie quotidienne des citoyens, « générant une véritable dépendance technologique ».   

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a estimé que les progrès technologiques démontraient la nécessité de dépasser les cadres traditionnels des mesures de désarmement, citant notamment l’intelligence artificielle, les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA), les capacités cybernétiques et les biotechnologies.  Selon le représentant, ces avancées imposent le développement de nouvelles solutions en matière de désarmement.  Il a exprimé ses inquiétudes sur le développement de l’intelligence artificielle et des technologies quantiques liées aux systèmes d’armements, alors que le cadre normatif n’a pas le temps de suivre, et a insisté sur la nécessité urgente d’élaborer des cadres complets pour assurer l’utilisation éthique et légale de ces technologies.   

Le cyberespace doit pouvoir être exploité par tous sans discrimination, a affirmé le représentant, qui a préconisé l’approche multilatérale pour y imposer des normes.  Il a salué le travail du Groupe de travail à composition non limitée chargé de cette problématique et son adoption par consensus de deux rapports d’étape consécutifs.  Il a plaidé l’élaboration d’un processus pérenne et souple, à même de s’adapter aux besoins des pays en développement en matière de technologies.  Enfin, détaillant des initiatives déployées sur le plan national, il a notamment cité la mise en place d’une loi sur la cybersécurité en 2023, appelant au soutien de la communauté internationale pour renforcer les capacités de son pays.   

M. MATÍAS ANDRÉS EUSTATHIOU DE LOS SANTOS (Uruguay) a condamné les cyberattaques menées contre les infrastructures publiques, son pays souhaitant augmenter sa capacité de réponse nationale aux cyberincidents.  À ce sujet, le représentant a privilégié une approche propice au renforcement mutuel des capacités des États, afin de permettre à tous les pays de bénéficier des TIC pour leur développement socioéconomique.  Selon lui, les évolutions technologiques doivent aller main dans la main avec celles des procédures administratives et juridiques internationales et nationales, comme le préconise le Groupe de travail sur les TIC dans son rapport 2023.   

Mme STEPHANIE NGONYO MUIGAI (Kenya) a estimé que l’évolution rapide des technologies redéfinit la perception de la sécurité, y compris dans le domaine diplomatique.  La représentante a préconisé la recherche de l’équilibre entre les risques et les bénéfices des TIC, estimant qu’il est urgent de bâtir un environnement de responsabilisation.  Appelant de ses vœux le partage des bonnes pratiques entre États, elle a exhorté l’ONU à appuyer le renforcement des capacités étatiques face aux utilisations abusives de l’intelligence artificielle, des big data ou des médias sociaux.  Il s’agit, a‑t‑elle poursuivi, de mieux comprendre le paysage cybernétique en constante évolution pour établir des mesures de prévention.  Détaillant des initiatives déployées par son pays à l’échelle nationale, la représentante a notamment cité la création d’une équipe d’intervention en cas d’attaque informatique et la mise en œuvre d’une stratégie pour protéger les infrastructures stratégiques.   

M. IVENS MANUEL FRANCISCO GUSMĂO DE SOUSA (Timor Leste), qui a présenté son pays comme un nouvel État s’engageant dans le processus de numérisation, a fait part de sa préoccupation concernant la menace croissante des cyberattaques sur les infrastructures critiques.  Le représentant a estimé qu’un partage des meilleures pratiques par le biais de plateformes bilatérales, régionales et multilatérales renforcerait les structures nationales.  Pour lui, les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux et du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC constituent des plateformes dynamiques pour s’engager sur la question de la cybersécurité.   

Le représentant a souligné la nécessité de renforcer la coopération multilatérale pour suivre l’évolution de la sécurité, y compris les développements dans le cyberespace.  Les mesures de confiance sont des outils essentiels pour promouvoir la confiance et prévenir les conflits, a‑t‑il estimé.  Il a réaffirmé à cet égard son attachement au mécanisme de désarmement et a insisté sur la participation des femmes, sur un pied d’égalité, à ce mécanisme.   

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a relevé la dimension de double usage du cyberespace, notant son exploitation par des criminels et s’inquiétant de ce que plusieurs États développent des capacités numériques à des fins militaires.  Dans un tel contexte, les TIC risquent d’être de plus en plus exploitées à des fins militaires, a‑t‑elle averti.  La représentante a donc préconisé la mise place de cadres pour assurer la cybersécurité sur les plans national et international.  Elle a également insisté sur l’importance du renforcement des capacités, estimant qu’il s’agit d’une mesure essentielle à l’établissement de la confiance et relevant la fracture croissante entre pays sur les questions de cybersécurité.  Elle a aussi appelé à une pleine transparence en ce qui concerne les échanges d’information.   

La représentante a salué le second Rapport d’étape du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, avant d’exhorter les États Membres à soutenir le projet de résolution visant à établir un Programme d’action.  Par ailleurs, elle a appelé de ses vœux la mise en œuvre des recommandations du Secrétaire général de l’ONU, plus particulièrement l’élaboration d’un mécanisme de dialogue unique.   

M. MATTIAS VAREM (Estonie) a condamné les cyberopérations illégales et déstabilisantes menées par la Russie dans le cadre de son agression brutale de l’Ukraine.  Toute utilisation irresponsable des TIC de ce type représente une menace à la paix et à la sécurité internationales, a souligné le représentant, qui a apporté le soutien de sa délégation au projet de programme d’action tourné vers l’action de la France et de l’Égypte sur les comportements responsables dans le cyberespace.  Ce programme de nature institutionnelle devra découler d’un processus délibératif, inclusif et unique au sein de l’ONU, a‑t‑il insisté.   

Mme CHRISTINE NAM (Nouvelle-Zélande) a rappelé que les avancées technologiques dans le cyberespace peuvent rendre le monde plus sûr et contribuer au développement durable et à la croissance économique.  Toutefois, le cyberespace est également devenu un vecteur de menaces nouvelles avec les logiciels rançonneurs, le ciblage d’infrastructures critiques et de l’utilisation malveillante de la cyberactivité qui se développe dans le contexte de conflits armés.  La représentante s’est félicitée du consensus qui s’est dégagé sur le deuxième Rapport d’activité annuel du Groupe de travail à composition non limitée des Nations Unies sur les questions cybernétiques lors de sa cinquième session de fond en juillet.  Elle a souligné que, pour la Nouvelle-Zélande, la Charte des Nations Unies est applicable dans son intégralité dans le cyberespace, si bien que les États doivent s’attendre à être tenus pour responsables des cyberactivités malveillantes qui sont contraires à la Charte et au droit international.   

La représentante a salué la proposition d’un programme d’action des Nations Unies visant à promouvoir un comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC dans le contexte de la sécurité internationale.  La Nouvelle-Zélande estime qu’un mécanisme permanent de dialogue institutionnel est nécessaire pour mettre en œuvre le cadre pour faciliter les travaux sur le renforcement des capacités, en s’appuyant sur les résultats du Groupe de travail, a‑t‑elle expliqué.  Elle a donc soutenu le projet de résolution présenté par la France, estimant qu’il offre à tous les États Membres une voie claire et transparente pour examiner l’élaboration du champ d’application, de la structure, du contenu et des modalités du futur Programme d’action, d’une manière qui complète le Groupe de travail sur l’environnement.   

M. OGASAWARA ICHIRO (Japon) a appelé à promouvoir l’état de droit dans le cyberespace, affirmant que le droit international, notamment la Charte des Nations Unies et le droit international humanitaire sont applicables à celui-ci.  Compte tenu de l’évolution rapide de l’environnement des TIC, la priorité devrait être le lancement de discussions plus concrètes sur la manière dont le droit international existant s’applique à ce niveau, a ajouté le représentant.  Il a dit attendre avec intérêt la tenue de discussions de fond sur le sujet, y compris lors des réunions intersessions du Groupe de travail à composition non limitée pertinent.   

Le renforcement des capacités reste un autre domaine prioritaire pour le Japon, qui collabore étroitement avec l’ASEAN, la Banque mondiale et d’autres partenaires internationaux pour améliorer les moyens d’action régionaux et mondiaux dans le domaine des TIC, a poursuivi le représentant.  La Table ronde globale prévue en mai 2024 offrira à tous les États Membres une excellente opportunité d’échanger sur les mesures pratiques de renforcement des capacités, avec une large participation des parties prenantes concernées, a‑t‑il ajouté.   

M. LAURIN VAN DER HAEGEN (Suisse) a noté que les cyberopérations malveillantes menées par des acteurs étatiques et non étatiques n’ont cessé d’augmenter ces dernières années, que ce soit en temps de paix ou lors de conflits armés.  La guerre contre l’Ukraine illustre cette évolution et n’est pas la seule, a ajouté le représentant, qui a estimé qu’un tel défi ne pourrait être relevé que par le respect du cadre convenu en faveur d’un comportement responsable des États dans le cyberespace, tel qu’il a été confirmé et réaffirmé par les rapports consensuels des groupes de travail de l’ONU, et approuvé par l’Assemblée générale.   

Le représentant s’est félicité de l’adoption du deuxième Rapport d’activité annuel du Groupe de travail à composition non limitée pertinent, qui offre l’opportunité de poursuivre la discussion sur l’application du droit international, y compris le droit international humanitaire, dans le cyberespace.  Il a préconisé qu’au cours des deux prochaines années, la discussion se concentre aussi sur une meilleure compréhension ainsi que sur la promotion et la mise en œuvre des normes volontaires existantes avant d’en élaborer de nouvelles.  La Suisse appuiera le projet de décision relatif à l’approbation de ce rapport et qui propose de convoquer des réunions intersessions en 2024 et 2025.   

Le représentant a ensuite souligné les fortes réserves de son pays concernant le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie sur la même question, qui soulève des questions de fond, notamment parce qu’il ne s’appuie pas sur un libellé consensuel, qu’il adopte une approche à la carte, qu’il ne fait pas référence au cadre consensuel en faveur d’un comportement responsable des États dans le cyberespace et qu’il tente d’adapter le mandat du Groupe de travail.   

Mme ELIZABETH LOUISE PAGE (Royaume-Uni) a déclaré que la Fédération de Russie avait eu recours à des opérations cybernétiques dans le cadre d’une campagne de déstabilisation à l’encontre de l’Ukraine.  Ces attaques ont des répercussions dans le monde réel, a‑t‑elle insisté, se disant profondément préoccupée par le fait que le projet de résolution déposé par la Russie tente de réinterpréter des accords consensuels dans son propre intérêt étroit et, ce faisant, de saper le cadre que nous avons collectivement construit.   

La représentante a souligné que la cyberactivité malveillante ne cesse d’évoluer, affirmant que le Royaume-Uni avait vu ses institutions et valeurs démocratiques de plus en plus ciblées.  Le Royaume-Uni entend réagir avec fermeté aux actes hostiles et cette année, en coordination avec ses partenaires internationaux, il a sanctionné 18 cyberacteurs spécialisés dans les logiciels de rançon.  En outre, la représentante s’est déclarée particulièrement préoccupée par l’utilisation irresponsable de cybercapacités avancées disponibles dans le commerce.  Leur utilisation abusive peut porter atteinte aux droits humains, menacer notre sécurité collective et la stabilité du cyberespace, a‑t‑elle dénoncé.   

La représentante a apporté son soutien au projet de résolution présenté par la France visant à établir un mécanisme permanent, orienté vers l’action et inclusif après la conclusion du Groupe de travail à composition non limitée actuel en 2025, qui s’appuierait sur les résultats consensuels, y compris ceux obtenus au sein du Groupe.  Un tel mécanisme assurerait la continuité des discussions des États sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale et permettrait la mise en œuvre et l’élaboration du Cadre des Nations unies pour un comportement responsable dans le cyberespace, a‑t‑elle estimé.   

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a relevé une augmentation de 50% des cyberattaques entre 2022 et 2023.  Il a assuré que son pays plaide une utilisation exclusivement pacifique du cyberespace, mentionnant sa participation aux négociations intergouvernementales menées sous les auspices de l’ONU.  Conformément à la résolution 75/240, les principes fondamentaux du Groupe de travail à composition non limitée nécessitent le respect des points de vue de tous les États Membres, a rappelé le représentant.  À ce titre, il s’est félicité que le Groupe ait fait émerger un consensus avec son deuxième Rapport annuel, lequel rend compte des prises de positions de tous les États Membres, dont l’Iran.  Il a préconisé un examen des contributions de tous les États, également dans le Rapport précédent du même Groupe.  Ces documents, a‑t‑il estimé, doivent servir de base aux discussions pour faire converger des points de vue opposés.  Enfin, il a accusé certains pays, dont les États-Unis, d’avoir militarisé le cyberespace et mené de nombreuses cyberattaques, notamment contre son pays.  Il a exhorté la communauté internationale à pousser les auteurs de ces attaques à rendre des comptes.   

M. KEDIR GETAHUN (Éthiopie) a appuyé la mise en œuvre du Pacte numérique mondial pour renforcer la coopération numérique par le biais de processus ouverts et inclusifs.  Le représentant a ajouté que les pays en développement font face à des difficultés financières importantes pour réduire la fracture numérique et profiter des TIC à des fins pacifiques et de développement.  Il a appelé la communauté internationale à fournir un soutien axé sur la demande « pour nous permettre de surmonter les obstacles en matière d’utilisation des TIC, y compris dans le contexte de la sécurité ».   

M. XAVIER BÉRARD-CADIEUX (Canada) s’est félicité du cadre évolutif pour un comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC élaboré dans les rapports de consensus du Groupe d’experts gouvernementaux des Nations Unies et du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, ainsi que dans ses récents rapports d’activité annuels pour 2022 et 2023.  Toutefois, le représentant s’est dit préoccupé qu’un petit nombre d’États remettent aujourd’hui en question la solidité de ce cadre, alors même que certains ont joué un rôle clef dans son élaboration.  En outre, il a rappelé que, dans les rapports du Groupe d’experts gouvernementaux de 2015 et de 2021, la communauté internationale s’est accordée par consensus sur un ensemble de normes volontaires globales relatives au comportement responsable des États dans le cyberespace, et que les États ont également convenu que le droit international s’appliquait dans le cyberespace.  Ces normes sont des moyens appropriés pour guider ce que les États peuvent et ne peuvent pas faire dans le cyberespace, a estimé le représentant, qui a rappelé que, depuis 2015, le Canada avait consacré plus de 30 millions de dollars à des projets de renforcement des capacités cybernétiques dans le monde entier.   

Pour le représentant, il faut instaurer un forum permanent en vue de favoriser les discussions pragmatiques à l’issue du mandat actuel du Groupe de travail.  C’est pourquoi le Canada coparraine la proposition de programme d’action de cette année, dans laquelle il voit le meilleur forum pour faire progresser concrètement la mise en œuvre du cadre normatif convenu, notamment en soutenant des activités ciblées de renforcement des capacités.  Le Programme d’action offrira à tous les États Membres un forum inclusif leur permettant de se pencher sur ces questions et sur toutes les questions liées à la cybersécurité, tout en bénéficiant de l’expertise du secteur privé, de la société civile et du milieu universitaire, a encore estimé le représentant.   

Par ailleurs, le Canada soutient le programme de bourses « Femmes dans le domaine de la cybersécurité » en cours.  Les perspectives de genre sont essentielles dans le cyberespace comme partout dans les activités du mécanisme de désarmement, a estimé le représentant.  À ses yeux, l’intégration du genre facilite la création d’initiatives efficaces qui contribueront à intervenir face aux menaces de sécurité dans le monde.  L’un des moyens d’y parvenir est de recueillir et de partager des données ventilées par âge et par genre sur l’impact des armes, a‑t‑il estimé.   

M. SHEN JIAN (Chine) a rejeté l’idée même d’une cyberguerre, ajoutant que le Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale est et doit demeurer le seul cadre de délibérations sous l’égide de l’ONU autour de ces questions.  La Chine a fait des propositions de thèmes d’analyse à développer dans le cadre des travaux futurs du Groupe, notamment sur la protection internationale des données et la gouvernance de l’intelligence artificielle basée sur la responsabilité des États, a ajouté le représentant.   

M. KONSTANTINOS CHRISTOGLOU (Grèce) s’est inquiété de la recrudescence des comportements malveillants dans le cyberspace.  Déplorant les cyberattaques contre les entreprises, les organisations et les citoyens, le représentant a estimé qu’ils constituaient une menace pour la paix et la sécurité internationales.  À ce titre, il a soutenu le travail de l’ONU à travers l’élaboration de normes de comportement responsable et de mesures de confiance.  Il s’est notamment félicité de l’adoption du deuxième Rapport d’étape du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, et plus particulièrement de l’émission de recommandations à l’intention des États pour renforcer leur comportement responsable dans le cyberespace.  La Grèce, a‑t‑il rappelé, participe aux travaux du Groupe depuis sa création.   

M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a déclaré qu’en ce qui concerne les TIC, les menaces contre la paix et la sécurité internationale dans le cyberespace ne peuvent être sous-estimées.  Aucun d’entre nous n’est à l’abri de ces cybermenaces et a donc besoin d’une collaboration transfrontalière pour assurer la paix et la sécurité dans le cyberespace, a‑t‑il assuré.   

Dans ce contexte, le représentant a indiqué que les pays de la CARICOM se retrouvent dans le Plan stratégique de lutte contre la cybercriminalité.  Ils poursuivront leurs efforts au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC dans le contexte de la sécurité jusqu’en 2025.  Nous nous félicitons du Rapport d’étape récemment adopté et qui constitue une feuille de route de choix pour poursuivre la discussion sur ce sujet, laquelle gagnera à se concentrer sur le renforcement des capacités, a encore déclaré le représentant.   

M. LEE HYUN GOO (République de Corée) a salué le projet de résolution sur le Programme d’action visant à promouvoir des comportements responsables des États dans le cyberespace.  Nous pensons qu’il constituera un mécanisme important pour prendre des mesures de confiance et améliorer la mise en œuvre du Cadre de comportement responsable dans le cyberespace, a‑t‑il ajouté.   

Par ailleurs, le représentant a attiré l’attention sur le projet de résolution que la République de Corée présente, une fois de plus cette année, sur les jeunes, le désarmement et la non-prolifération.  Dans l’optique de ce texte, la République de Corée s’efforce, à travers diverses initiatives, à responsabiliser, éduquer et impliquer les jeunes dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération, a expliqué le représentant, qui a invité tous les pays à rejoindre le sien dans cette entreprise.   

M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) a déclaré que l’initiative russe en matière de TIC dans le contexte de la sécurité internationale est de nature non conflictuelle et dépolitisée.  Le texte du projet de résolution que nous présentons est basé sur les dispositions des résolutions de l’Assemblée générale précédemment adoptées par les États Membres et sur les recommandations consensuelles du premier Groupe de travail à composition non limitée comme du dernier Groupe en date, a‑t‑il affirmé.   

Le représentant a expliqué que la version de cette année complète le projet de décision déposé par Singapour l’an dernier, son adoption revêtant une importance particulière alors qu’un groupe d’États a présenté un document proposant de créer, dès à présent, un format alternatif.  Il a indiqué que la Russie considère cette manœuvre comme une nouvelle tentative de saper les activités du Groupe et d’imposer à la communauté internationale un certain format qui ne répond en réalité qu’aux intérêts d’un cercle restreint d’États.  Il a ainsi accusé la France et les États-Unis de chercher à diviser les délégations en proposant la création de leur programme d’action.  Comment peut-on décider d’abord de créer un format pour ensuite, seulement, commencer à réfléchir à ses objectifs, son contenu et ses méthodes de travail? s’est-il interrogé.  Le simple fait que les pays susmentionnés aient déposé ce projet de résolution contredit leurs déclarations selon lesquelles une telle initiative devra encore être examinée sous tous ses aspects au sein du Groupe de travail à composition non limitée, a dénoncé le représentant.   

M. LEONARDO BENCINI (Italie) a soutenu la proposition d’établir un programme d’action pour promouvoir un comportement responsable dans le cyberespace, lequel permettrait à la communauté internationale de se concentrer sur le contenu et le renforcement de la coopération et de la confiance entre les États plutôt que sur des discussions quant à la forme à donner aux processus futurs.  Pour le représentant, la portée, la structure et le contenu du Programme d’action devront être établis dans le cadre de la poursuite des discussions au sein du Groupe de travail à composition non limitée en 2024 et 2025.  Il a souligné que le volet « renforcement des capacités » était crucial si la communauté internationale souhaite un cyberespace sûr et sécurisé.   

M. BRUCE TURNER (États-Unis) a estimé que le désarmement peut contribuer à atténuer les divisions et à améliorer la sécurité internationale et la coopération.  Il a considéré que la non-prolifération renforce la confiance et facilite la coopération pacifique, jouant donc un rôle déterminant en faveur du commerce mondial.  Les régimes visant à élargir l’accès à ces technologies de manière sûre et responsable fournissent des garde-fous indispensables, a estimé le représentant en soulignant qu’ils préviennent le détournement de technologies pacifiques à des fins militaires.  En 25 années de collaboration sur le cyberespace, les États Membres ont réalisé des progrès significatifs, s’est-il félicité, relevant notamment les efforts visant à assurer la participation effective des femmes à tous les niveaux de prise de décisions –une mesure jugée essentielle en vue d’une paix et une sécurité durables.   

Le représentant a salué le travail du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC, apportant le soutien de son pays à son rapport annuel 2023.  S’appuyant sur le travail de ce Groupe, une alliance interrégionale d’États a présenté un Programme d’action afin de mettre en œuvre un cadre consensuel visant à promouvoir le comportement responsable des États, a‑t‑il rappelé.  Il a relevé que cette proposition comprend notamment l’instauration d’un mécanisme permanent et inclusif pour encourager une utilisation responsable des TIC par les États.  À ce titre, il a apporté le soutien de son pays au projet de résolution présenté par la France, estimant qu’il permet une avancée en établissant un mécanisme permanent pour suivre les conclusions du Groupe de travail actuel.  Ce projet, a‑t‑il ajouté, conserve les éléments essentiels de la résolution de l’année dernière, qui avait obtenu 156 voix en sa faveur, notamment en mettant l’accent sur le renforcement des capacités.  Par contre, le représentant a rejeté le projet de résolution présenté par la Russie, estimant qu’il s’agit d’une tentative d’exploiter les travaux du Groupe de travail à composition non limitée pour un ordre du jour étroit et autoritaire.   

M. SHER BEDI (Inde), dont la délégation va présenter un projet de résolution sur le rôle de la science et de la technique dans le contexte de la sécurité internationale et du désarmement, a expliqué que ce texte souligne l’impératif de réglementer les transferts de technologies à des fins pacifiques pour éliminer les risques de prolifération de la part des États et des acteurs non étatiques, ainsi que l’importance pour les États Membres de collaborer avec des experts de l’industrie et de la société civile pour relever les défis connexes.  Pour l’Inde, il est impératif que les biens et technologies émergentes à double usage soient réglementés comme il se doit tout en gardant à l’esprit les exigences de défense des États pour lutter contre les effets néfastes.  Le représentant a assuré que l’Inde est attachée à la promotion d’un environnement TIC sûr, ouvert, stable, pacifique et accessible.   

Mme CAMILLE PETIT (France) a rappelé que, depuis 25 ans, les États reconnaissent le numérique comme un catalyseur du développement qui peut aussi être utilisé à des fins incompatibles avec le maintien de la paix et la sécurité internationales.  La cybersécurité est devenue un enjeu majeur, dans un contexte où la fréquence, la sophistication et la sévérité des cyberattaques perpétrées par des acteurs étatiques et non étatiques continuent de s’accroître, a ajouté la représentante.   

Pour répondre à ces défis, la France s’investit dans les travaux de l’actuel Groupe de travail à composition non limitée 2021-2025, a assuré la représentante, qui a salué l’adoption par consensus en juillet du Rapport annuel d’étape ainsi que les avancées obtenues dans la mise en place d’un répertoire mondial intergouvernemental des points de contact.   

Les États Membres ont souligné à plusieurs reprises l’utilité de travailler à la mise en place d’un mécanisme permanent sur les questions cyber pour garantir une stabilité institutionnelle de plus en plus nécessaire, a ensuite rappelé Mme Petit, qui a présenté le projet de résolution intitulé « Programme d’action destiné à promouvoir le comportement responsable des États en matière d’utilisation du numérique dans le contexte de la sécurité internationale».   

Ce projet de résolution est complémentaire au projet de décision porté par le Président du Groupe de travail à composition non limitée, a assuré la représentante, qui a rappelé qu’il avait obtenu le coparrainage d’un grand nombre d’États issus de divers groupes régionaux.  Il se fonde essentiellement sur du langage consensuel pour réduire les clivages de manière pragmatique, a poursuivi la représentante, qui a ajouté que le texte initial avait considérablement évolué pour tenir compte, de manière inclusive et constructive, de nombreuses remarques formulées par les délégations lors des consultations.  La représentante a rappelé que le projet de résolution prévoit la mise en place, après la conclusion des travaux de l’actuel Groupe de travail et d’ici à la fin de l’année 2026, d’un mécanisme permanent, inclusif et orienté vers l’action, qui sera doté des fonctions définies par la résolution 77/37: renforcer les capacités des États qui le demandent et lutter contre la fracture numérique, mettre en œuvre le cadre normatif agréé et poursuivre les discussions sur son développement, y compris via l’élaboration de normes juridiquement contraignantes, tout en favorisant la participation d’acteurs non gouvernementaux, en particulier du secteur privé.  Le calendrier envisagé évite toute duplication avec les travaux du Groupe de travail, auquel est confié un rôle de premier plan pour sa conception, tout en assurant une transition sans accroc et une continuité après la fin de ses travaux, a encore fait observer la représentante.   

M. FLAVIO SOARES DAMICO (Brésil) a exprimé sa frustration face aux différentes résolutions concurrentes qui ont été présentées cette année sur le cyberespace et la sécurité des TIC dans le contexte de la sécurité internationale.  Notre délégation s’est engagée et continuera de s’engager de manière constructive avec les principaux auteurs des projets de résolution, afin de trouver un libellé unique qui soutienne le rôle du Groupe de travail à composition non limitée en tant que processus doté du mandat légitime pour délibérer sur les TIC et la sécurité internationale, a assuré le représentant.  Pour le Brésil, il convient de laisser le Groupe de travail actuel terminer son œuvre, et les États devraient se garder de faire des propositions sur la question des TIC avant ce terme.   

Pour M. LARBI ABDELFATTAH LEBBAZ (Algérie), l’escalade des menaces liées à l’utilisation malveillante des TIC, conjuguée à la multiplication des cyberattaques contre les infrastructures critiques des États, exige une réponse unie.  Le représentant a souligné l’importance cruciale de veiller à ce que les TIC adhèrent aux principes du droit international et de la Charte des Nations Unies, en particulier l’égalité souveraine, la non-ingérence dans les affaires intérieures, l’abstention de la menace ou de l’utilisation de la force dans les relations internationales, le règlement pacifique des différends et le respect des droits humains, ainsi que la coexistence pacifique entre les États.   

Bien que des défis subsistent, le nouveau Groupe de travail à composition non limitée, sous la présidence de Singapour, offre un forum unique pour mieux comprendre l’évolution des menaces liées à l’utilisation malveillante des TIC et pour travailler collectivement à la recherche de solutions, a argué le représentant, qui a réitéré le soutien de l’Algérie à ce processus ainsi que son engagement à collaborer de manière constructive avec tous les États Membres pour qu’il soit couronné de succès d’ici à 2025.   

Mme BALQEES JANAHI (Bahreïn) a salué les efforts visant à garantir le renforcement des capacités de tous les États afin qu’ils puissent répondre aux cybermenaces et bénéficier des utilisations pacifiques des TIC aux fins de développement.  La représentante a indiqué qu’un réseau de centres de cybersécurité vise à protéger les infrastructures civiles de son pays, ce réseau s’appuyant sur des partenariats régionaux de formation, notamment pour les cadres du secteur privé et les fonctionnaires.  Elle a assuré la Commission de la pleine participation de son équipe aux travaux du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale.   

M. ABD-EL KADER YASMIN TCHALARE (Togo) a réitéré le soutien de son pays au Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation, saluant la publication de son second Rapport d’étape.  S’appuyant sur ce document, le représentant a exprimé sa préoccupation face à l’augmentation des activités malveillantes et leurs répercussions sur les infrastructures critiques.  Il a souligné l’importance de poursuivre les échanges sur ces menaces afin de déterminer les réponses appropriées.   

Le représentant a relevé la portée de la question de l’application du droit international à l’utilisation du numérique.  Dans ce cadre, il a plaidé pour le respect des principes de droit international comme la souveraineté des États, le règlement pacifique des différents et le non-recours à la force.  Enfin, il a insisté sur la nécessité de renforcer les capacités pour faire face aux risques liés aux TIC.  À ce titre, il a salué la recommandation du Groupe de travail visant à faire examiner par le Secrétariat des Nations Unies les programmes de renforcement des capacités, qu’ils émanent ou non de l’ONU.  Enfin, il a plaidé la création d’un mécanisme permanent à voie unique, dirigé par les États sous l’égide de l’ONU, afin d’avancer sur cette question.   

Mme ANA MARICELA ÁVILA BECERRIL (Costa Rica) a apporté le soutien de sa délégation aux travaux en cours du Groupe de travail à composition non limitée sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale, se disant encouragée par l’adoption de son deuxième Rapport annuel, lequel a réussi à dégager un consensus et un équilibre délicat entre diverses perspectives, y compris celle relative au genre.  Le Groupe de travail offre un cadre idéal pour débattre de manière régulière de la manière dont le droit international est lié à l’utilisation des TIC, a‑t‑elle estimé.   

Mme NOHRA MARIA QUINTERO CORREA (Colombie) a salué le Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation.  Le 12 septembre dernier, diverses institutions colombiennes ont été victimes d’une cyberattaque, a signalé la représentante, qui a précisé que, depuis lors, des mesures cybernétiques avaient été prises par le Gouvernement colombien pour mesurer les dommages causés et veiller à être mieux préparé.  Il faut impérativement renforcer les capacités des États, a argué la représentante, pour qui il s’agit d’un aspect fondamental du travail du Groupe de travail à composition non limitée, qui doit œuvrer au renforcement du cadre normatif.  Elle a plaidé en faveur d’un consensus sur un mécanisme permanent de dialogue institutionnel périodique, ce qui exige, selon elle, des efforts collectifs pour faire fond sur le travail déjà abattu par le Groupe de travail actuel.   

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a relevé que les cyberattaques contre les hôpitaux, les centres médicaux et éducatifs, les réseaux de distribution alimentaire et autres réseaux humanitaires se sont multipliées ces dernières années.  Il s’est félicité de la proposition d’élaborer une liste de contrôle pour la mise en œuvre des normes afin d’aider les États, en particulier les pays en développement et les petits États, dans leurs efforts pour mettre en œuvre les normes de comportement responsable de l’État dans l’utilisation des TIC.  Cette liste de contrôle peut contribuer à réduire la fracture numérique et à faire en sorte que tous les États, quel que soit leur niveau de développement, puissent participer à la gouvernance mondiale des TIC en tant qu’égaux souverains, a‑t‑il déclaré.   

Pour l’Observateur permanent, il ne fait aucun doute que le droit international s’applique au cyberespace.  Face aux progrès rapides de la technologie, aux cyberattaques généralisées et à l’omniprésence croissante des TIC dans la société, la communauté internationale ne doit jamais se lasser de travailler ensemble pour faire progresser la coopération internationale, les normes et les instruments juridiques afin de promouvoir le bien commun et protéger les personnes en situation de vulnérabilité contre l’utilisation malveillante des TIC, a‑t‑il conclu.   

Désarmement et sécurité sur le plan régional 

Déclarations 

M. MOCHAMMAD IQBAL SIRIE (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a rappelé l’attachement des pays du Mouvement à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Il a insisté sur le fait qu’Israël doit participer au processus de négociations en cours sur la création d’une telle zone, afin qu’il y soit négocié de bonne foi un traité juridiquement contraignant portant création de celle-ci.  Le représentant a également appelé les délégations à voter en faveur des projets de résolution demandant le financement adéquat des activités des centres régionaux de paix et de désarmement de l’ONU.   

S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, le représentant a répété que les zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN) sont en l’état l’instrument le plus sûr pour progresser vers un monde libéré de ces armes.  Il a demandé aux délégations d’appuyer le projet de résolution de son pays sur le Traité de Bangkok ayant porté création d’une telle zone en Asie.   

M. AMRESEAM AHMED (Égypte) a rappelé qu’il y a plus de 15 ans, le TNP a mis en avant l’importance des ZEAN.  Or, à ce jour, au Moyen-Orient, l’une des régions les plus instables au monde, une telle ZEAN n’a toujours pas vu le jour alors même que cela aurait pu promouvoir la sécurité collaborative dans la région et renforcer l’architecture mondiale de non-prolifération et de désarmement.  La résolution sur le Moyen-Orient adoptée par les parties au TNP a noté avec préoccupation la présence d’infrastructures nucléaires non surveillées, a ajouté le représentant.  Dès lors, il a appelé les États de la région qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au TNP et à soumettre leurs installations au contrôle de l’AIEA, avant d’appeler tous les États Membres à participer aux efforts en cours lors de la quatrième session de la Conférence sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, qui aura lieu en décembre sous la présidence de la Libye.   

M. AZAT NURKEN (Kazakhstan) a estimé que sur les plans régional et mondial, les mesures de désarmement et de maîtrise des armements devraient constituer un objectif commun.  Or, a-t-il déploré, les tensions se multiplient et les mesures de sécurité sont foulées au pied partout dans le monde.   

Le représentant a rappelé qu’en 2006, les États d’Asie centrale ont signé le Traité de Semipalatinsk, qui promeut l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.  Il a souligné l’importance du protocole sur les garanties négatives de sécurité, estimant qu’il constitue un jalon de renforcement de la sécurité aux niveaux régional et international.  Il s’est félicité que les cinq États dotés aient accepté des obligations juridiquement contraignantes pour ne pas utiliser d’armes nucléaires contre les États adhérents au Traité.  Sur le même sujet, il a également plaidé pour le renforcement de la coopération entre ZEAN.   

Le représentant a appelé à déployer une action unifiée sur le désarmement, conformément au Programme 2030 sur les objectifs de développement durable (ODD).  Le Kazakhstan souhaite renforcer la coopération régionale et promouvoir la création d’un pôle des Nations Unies pour la réalisation des ODD, a ajouté le représentant.  Enfin, il a lancé un appel à plus de financement pour le Bureau des affaires de désarmement régional, et mentionné l’organisation par son pays d’ateliers régionaux concernant le Traité sur le commerce des armes (TCA) et la Convention sur l’interdiction des armes biologiques (CIABT).   

M. HUSHAM AHMED (Pakistan) a déclaré qu’au fil des années, les mesures de confiance ont prouvé leur utilité et leur efficacité dans plusieurs régions et sous-régions.  Comme l’ont affirmé les résolutions de l’Assemblée générale, ces mesures, pour être pleinement efficaces, doivent être adaptées aux spécificités de la région et devraient être basées sur des arrangements préalables interétatiques sur la transparence et la réduction des risques, a ajouté le représentant.  Sans être une fin en soi, les mesures de confiance sur le plan régional les plus substantielles devraient concerner le contrôle des armes classiques et l’équilibre stratégique transfrontalier, leur but ultime devant être de renforcer la paix et la sécurité à cette échelle, a‑t‑il estimé.  Enfin, le représentant a appelé les délégations à appuyer les projets de résolution de sa délégation sur le désarmement régional.   

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI (Jordanie), au nom du Groupe des États arabes, a noté la contribution des ZEAN au désarmement, même si elles ne remplacent pas un désarmement nucléaire complet et vérifiable.  Le Moyen-Orient a besoin comme jamais d’efforts de maîtrise des armements, a argué le représentant, avant d’insister sur les accords visant la création d’une ZEAN au Moyen-Orient et en appelant à prendre des mesures immédiates pour parvenir à cet objectif « promu dans tant des résolutions de l’Assemblée générale ».  Il a appelé la communauté internationale à soutenir ce projet.   

Pour sa part, le Groupe des États arabes est déterminé à aller de l’avant et il n’épargnera aucun effort en vue de multiplier les chances de paix dans l’une des zones les plus instables au monde, a affirmé le représentant.  Il a rappelé les acquis des trois sessions de la Conférence sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, en appelant toutes les parties à participer à la quatrième session, qui se tiendra le mois prochain, pour négocier une convention juridiquement contraignante qui contribuerait à la paix et à la sécurité au niveau régional.  Les États arabes honorent leurs engagements en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), a assuré le représentant, qui a reproché à Israël d’être le seul État de la région qui continue de refuser d’y adhérer et de soumettre ses installations au contrôle de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).   

Mme GOMEZ SARDIÑAS (Cuba) a souligné l’importance des initiatives régionales et infrarégionales en vue d’un monde plus sûr.  Elle a rappelé que l’Amérique latine et les Caraïbes avaient joué un rôle de premier plan en la matière, en devenant, il y a 56 ans, la première ZEAN.  Les pays de la région sont tous parties au TNP et au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) nombre d’entre eux ayant également adhéré au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), a-t-elle ajouté.   

La représentante a réaffirmé que l’emploi des armes nucléaires est immoral.  Réitérant en outre sa conviction que les zones exemptes de telles armes contribuent à la paix et au désarmement, elle a appuyé la création d’une ZEAN au Moyen-Orient.  Enfin, elle a exhorté les États dotés à respecter leurs responsabilités et à retirer leurs réserves et déclarations interprétatives à propos des ZEAN.   

M. MATÍAS ANDRÉS EUSTATHIOU DE LOS SANTOS (Uruguay) a énoncé les initiatives régionales auxquelles son pays a souscrit à date en tant que membre notamment du Marché commun du Sud (MERCOSUR).  Il a cité les efforts régionaux menés par ce Groupe régional en matière de transparence et de contrôle de la circulation des armes légères et de petit calibre (ALPC) et des matières radioactives.  Il a également rendu hommage aux activités conduites par le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, et appelé à adopter les projets de résolution sur les centres régionaux, qu’il a qualifiés d’instruments essentiels à la sensibilisation des enjeux du désarmement onusien.   

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a plaidé pour une maîtrise internationale des armements, du désarmement et de la non-prolifération.  Condamnant la guerre non provoquée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, il a considéré qu’elle constitue une violation flagrante du droit international et sape les efforts mondiaux de non-prolifération.  Il l’a accusée de désinformation persistante, évoquant ses allégations concernant la fabrication d’armes chimiques et biologiques en Ukraine.   

Condamnant les actes de terrorisme du Hamas en Israël, le représentant a apporté son soutien à Israël dans ses efforts pour se défendre de manière proportionnée, exhortant les parties à prendre toutes les précautions possibles pour minimiser les dommages causés aux civils.  Il a également accusé l’Iran de transférer des technologies militaires au Hamas, au Hezbollah et au groupe du Jihad islamique palestinien.  Il a en outre mentionné le rapport de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) sur l’attaque chimique de Douma et sur le programme d’armes chimiques de la Syrie, jugeant crucial que la communauté internationale ne laisse pas ce pays échapper à l’obligation de rendre des comptes.   

Apportant le soutien de son pays à la création d’une ZEAN au Moyen-Orient, le représentant a toutefois estimé qu’un tel projet devait reposer sur la base d’arrangements librement conclus par consensus.  Concernant l’Asie, il a dénoncé les programmes nucléaires et balistiques de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et s’est alarmé du risque de malentendus et d’escalade entre l’Inde et le Pakistan, les exhortant à engager un dialogue constructif.  Enfin, il a insisté sur la nécessité de prévenir le détournement et l’utilisation abusive d’armes classiques, y compris les armes légères et de petit calibre, préconisant notamment leur contrôle par le biais de régimes multilatéraux de contrôle des exportations.   

M. WAJDI HASSAN M. MOHARRAM (Arabie saoudite) a rappelé que la non-prolifération est l’un des piliers du TNP, avant d’évoquer les mesures audacieuses prises en ce sens au niveau de la région du Moyen-Orient et la contribution et le rôle de l’AIEA pour vérifier la nature pacifique de toute installation nucléaire.  Soulignant les mérites des ZEAN en termes de désarmement et de non-prolifération, le représentant a dit attendre avec impatience les résultats de la quatrième session de la Conférence sur la création d’une telle zone au Moyen-Orient.   

M. RAFIQUL ALAM MOLLA (Bangladesh) a délivré un plaidoyer pour les ZEAN, qualifiées de rouages essentiels de la paix et de la sécurité internationales, les acteurs des mécanismes régionaux étant des acteurs majeurs dans la mise en œuvre des accords conclus sous l’égide des Nations Unies.  Le représentant a appelé les centres régionaux des Nations Unies à travailler de manière plus étroite avec les initiatives régionales de désarmement, par exemple pour assurer une mise en œuvre la plus complète et adaptée possible à l’évolution des risques dans le cadre de la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive.   

Droits de réponse 

Le représentant de l’Arabie saoudite a qualifié de crime odieux l’opération d’Israël à Gaza, l’accusant d’avoir bombardé l’hôpital Al-Ahli Arab et dénonçant une violation flagrante du droit international humanitaire.  Il a appelé la communauté internationale à renoncer à sa politique de deux poids, deux mesures, face aux actions d’Israël et a exigé un cessez-le-feu immédiat ainsi que l’accès de Gaza à l’aide humanitaire.   

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a répondu à l’intervention de la République de Corée, affirmant que les efforts de son pays en matière balistique reposent sur la nécessité de l’autonomie.  Les résolutions du Conseil de sécurité contre la RPDC vont à l’encontre des principes de la Charte des Nations Unies, a-t-il dénoncé, déplorant que le Conseil ignore dans ses décisions le déploiement d’armes nucléaires par les États-Unis dans la péninsule coréenne.  Il a estimé que l’on ne pouvait masquer la nature agressive de ces initiatives.   

Le représentant de la République islamique d’Iran a regretté que les États-Unis persistent à accuser son pays au sujet du Plan d’action global commun (PAGC), alors qu’eux-mêmes ne respectent pas le régime de non-prolifération, ni les instruments internationaux, y compris la Convention sur les armes chimiques (CIAC).  Ce sont aussi les États-Unis qui ont utilisé la bombe atomique au Japon, a rappelé le représentant, en dénonçant les mesures unilatérales coercitives qu’ils imposent à d’autres États.  Il a rejeté toutes les accusations qui ont été adressées à son pays par les États-Unis.   

Le représentant de la Fédération de Russie, disant réagir à une série de déclarations antirusses, a catégoriquement réfuté toutes les insinuations sur des prétendues cyberattaques russes visant l’Ukraine, arguant même que c’est la Russie qui est victime de cyberagressions ukrainiennes et d’autres pays occidentaux dont « les armées TIC » sont formées par les États-Unis.  L’escalade des tensions dans le domaine du numérique ne répond pas aux intérêts de la communauté internationale, a-t-il mis en garde en pointant du doigt la doctrine promue par certains pays pour faire du cyberespace un nouveau théâtre d’actions militaires, évoquant notamment des cyberlaboratoires de l’OTAN.   

Le représentant d’Israël a réagi aux déclarations fallacieuses des pays du Groupe des États arabes et de l’Iran, les premiers devant selon lui condamner les agissements des groupes terroristes génocidaires comme le Hamas et autres entités financées par l’Iran.  Ce dernier pays multiplie les cyberattaques, y compris contre les hôpitaux, si bien que les déclarations de l’Iran sur ce sujet sont absurdes, ni plus ni moins, a ajouté le représentant.  Il a accusé l’Iran d’utiliser les TIC pour déstabiliser le monde, jugeant qu’il était temps que la communauté internationale s’oppose aux actes malveillants de ce pays.   

Le représentant de l’Union européenne a réaffirmé l’importance du rôle de l’AIEA et de l’OIAC dans le cadre de la mise en œuvre, par ses États membres, de la résolution 1540 du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive.   

La représentante du Koweït a condamné les opérations d’Israël dans la bande de Gaza, affirmant que ses forces d’occupation avaient tué plus de 5 000 civils, dont 2 000 enfants.  Elle a dit refuser de considérer les civils palestiniens comme des victimes collatérales.  À ce titre, elle s’est dite convaincue de l’importance du respect des conventions internationales, ainsi que des buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Elle a rappelé que son pays a signé l’ensemble des traités relatifs au désarmement, insistant sur l’importance d’une approche inclusive, notamment pour les États parties au TNP.  Le Koweït, a-t–elle précisé, a exprimé dès les années 70 sa préoccupation quant à la présence d’armes et de programmes nucléaires qui ne font pas l’objet du programme de garanties de l’AIEA.  Elle a dénoncé Israël pour être la cause principale de l’impasse du projet de zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.   

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu au Royaume-Uni, réfutant ses allégations et estimant qu’il avait omis de mentionner les défis régionaux du Moyen-Orient en matière de désarmement.  Il n’a pas parlé, a-t-il précisé, de la poursuite dans la région d’un programme nucléaire qui produirait des centaines d’ogives sans respecter les accords de garanties de l’AIEA, ni de l’arsenal biologique de ce même pays, qui n’a de toutes manières pas adhéré à la Convention sur le sujet.  Ceux qui protègent l’arsenal nucléaire d’Israël et lui fournissent les dernières technologies l’encouragent à faire fi du droit international, au détriment de la sécurité régionale, a-t-il affirmé.  Enfin, il a accusé le Royaume-Uni d’avoir transformé l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques en instrument politique, incapable de fournir un rapport crédible.   

Le représentant de la Chine a réagi à ce qui a été dit par l’Union européenne en s’opposant à son « interprétation erronée » du projet de résolution soutenu par la Chine sur l’utilisation pacifique du cyberespace.  La non-prolifération et le contrôle des exportations ne doivent en aucun cas saper le droit des pays à l’utilisation pacifique, a-t-il dit, rappelant que l’Assemblée générale adopte depuis deux ans le projet de résolution proposé par la Chine qui reconnaît ce droit et appelle à la coopération internationale pour promouvoir le partage des retombées positives de la technologie.  Depuis deux ans, le nombre de pays soutenant cette résolution augmente de manière significative, a ajouté le représentant.  Quant à l’affirmation de l’UE, pour laquelle il n’y a pas de restrictions excessives à ce partage, le représentant lui a opposé la position du G77 et la Chine, qui ne partage pas ce point de vue.  Le représentant a estimé que le nouveau mécanisme de contrôle des exportations doit être marqué par une volonté de coopération.   

Le représentant de la Jordanie a réagi à l’intervention d’Israël sur la position du Groupe des États arabes, et l’a appelé à mettre fin immédiatement aux hostilités qu’il impose aux civils à Gaza au lieu de chercher à les justifier.  Aucun État n’est au-dessus du droit, a ajouté le représentant, en exigeant un acheminement sans entraves de l’aide humanitaire à Gaza car refuser l’eau, les aliments et le carburant aux habitants de la bande équivaut à un crime de guerre.   

Le représentant de l’Iran a rejeté de nouveau les propos d’Israël visant son pays, ajoutant que le « régime » avait utilisé plus de bombes en 10 jours à Gaza que la coalition en Afghanistan pendant une année.  Il a ajouté que les mots manquent pour qualifier la brutalité du régime israélien, qui, quoi qu’il tente, n’effacera jamais les Palestiniens de l’histoire. 

Le représentant de la Fédération de Russie a répété que le projet de programme d’action sur le comportement responsable dans le cyberespace est dépourvu de sens, puisque le Groupe de travail à composition non limitée, où ce mécanisme doit être élaboré, n’aura pas achevé son mandat avant au moins deux ans. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission examine la question de la dette extérieure ainsi que les situations au Myanmar, en République centrafricaine et en RPDC

Soixante-dix-huitième session,
32e et 33e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4389

La Troisième Commission examine la question de la dette extérieure ainsi que les situations au Myanmar, en République centrafricaine et en RPDC

Poursuivant son examen de la promotion et la protection des droits humains, la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a dialogué aujourd’hui avec six titulaires de mandat et deux hauts fonctionnaires de l’ONU.  Dans la matinée, les débats ont porté sur les questions de la solidarité internationale, de la dette et des déplacés, tandis que l’après-midi était consacré à l’examen de la situation des droits humains en République centrafricaine, en République populaire démocratique de Corée (RPDC) et au Myanmar. 

Ouvrant les débats, l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale a appelé les États Membres à adopter un projet de déclaration sur le droit à la solidarité internationale; une démarche qui permettrait, selon lui, de définir un cadre pour la solidarité internationale dans le domaine des droits humains. 

L’Experte indépendante sur les effets de la dette extérieure sur la pleine jouissance de tous les droits de l’homme a ensuite déploré que l’état actuel de l’économie mondiale et le manque de coopération fiscale entraînent la baisse des recettes publiques, l’augmentation du coût de la vie et de l’inflation, ainsi que des politiques d’austérité responsables d’une régression dans la réalisation des droits humains.  « Tous ces facteurs provoquent une spirale descendante d’un niveau de vie déjà en baisse, aggravant la pauvreté et augmentant les inégalités ».

Alors que 80% des actifs financiers mondiaux sont aujourd’hui détenus dans les pays développés, un transfert de seulement 1,1% de cette somme –soit 4 200 milliards de dollars- suffirait à atteindre les objectifs de développement durable (ODD) dans les pays en développement, a-t-elle indiqué, plaidant en faveur d’une « économie fondée sur les droits humains ». Lors du débat interactif, la Chine, la Fédération de Russie, le Cameroun, le Lesotho, Cuba et les Bahamas ont appelé à une réforme de l’architecture financière internationale.  Leur répondant, l’Experte indépendante a proposé la création urgente d’un organe fiscal international neutre, qui pourrait être hébergé par l’ONU. 

Intervenant pour la première fois devant la Troisième Commission, la Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays a rappelé que 71 millions de personnes étaient concernées par cette situation, un chiffre record, qui pourrait augmenter en raison de la multiplication des conflits et des catastrophes. 

La situation au Myanmar a ensuite mobilisé l’attention des délégations pendant une grande partie de l’après-midi.  Accusant la junte militaire d’être un « agent du chaos et de la violence », le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a exhorté les États Membres à ne pas perdre de vue « le feu ardent de la brutalité » qui dévore le pays.  Détaillant les atrocités commises depuis le coup d’État en 2021, il a dénoncé le meurtre d’au moins 4 000 civils, l’incarcération de plus de 25 000 prisonniers politiques, dont presque 20 000 demeurent en détention, et la destruction d’environ 75 000 habitations et structures civiles.  Il a également rappelé que plus de 2 millions de personnes ont été déplacées, 15 millions souffraient d’insécurité alimentaire, et qu’un million de Rohingya étaient réfugiés au Bangladesh. 

« La résolution de la crise des Rohingya doit être au cœur de toute solution politique au Myanmar », a souligné le Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, selon qui la désignation comme « terroristes » des principales organisations armées ethniques et du Gouvernement d’unité nationale fait planner de sérieux doutes quant à l’intérêt de l’armée en faveur d’une véritable solution politique. 

De son côté, le Myanmar a affirmé que la junte ne sera jamais en mesure de vaincre la résistance combinée croissante des mouvements pacifiques armés et des organisations de résistance ethnique, ajoutant qu’elle recourrait de plus en plus à des crimes atroces pour survivre.  La communauté internationale ne doit pas continuer à permettre aux militaires de tuer brutalement la population, a-t-il martelé, appelant à saisir la Cour pénale internationale (CPI).  Le Chef du Mécanisme indépendant d’enquête pour le Myanmar a présenté, pour sa part, le premier rapport de cet organe créé en 2018.

Au préalable, l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine a salué le lancement, le 10 octobre à Genève, de la Politique nationale des droits de l’homme de la RCA de même que son caractère inédit, tout en s’inquiétant de la persistance des violations des droits humains dans le pays.  Si les groupes armés en demeurent les principaux auteurs, ni les forces de défense et de sécurité, ni leurs alliés russes, et ni même les Casques bleus n’en sont exempts, a-t-il affirmé, s’interrogant sur l’efficacité de la politique de tolérance zéro.  

Réagissant à cet exposé, la République centrafricaine a dénoncé la décision du Conseil de sécurité de prolonger l’embargo sur les armes, affirmant que celui-ci a permis à des groupes terroristes de prospérer au vu et au su d’une force de maintien de la paix inopérante et inefficace.  De son côté la Fédération de Russie a rejeté catégoriquement les « allégations » contenues dans le rapport, accusant les militaires russes d’avoir commis de graves violations des droits humains. 

La Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en RPDC a alerté, pour sa part, que la politique du « tout-militaire » génère un sous-investissement dans la protection sociale, fragilisant de larges segments de la population qui manquent de nourriture, d’eau et de soins, et affectant de manière disproportionnée les femmes et les jeunes filles.

En préalable aux débats consacrés aux situations spécifiques, le Mouvement des pays non alignés, par la voix de l’Azerbaïdjan, a exprimé sa profonde préoccupation face à la prolifération de résolutions spécifiques à un pays.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 24 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. OBIORA C. OKAFOR, Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, a présenté un dernier rapport faisant le bilan de ses six années de mandat.  Il a rappelé que son premier rapport avait été consacré aux migrations (A/73/206) et le deuxième aux réfugiés (A/74/185), affirmant que la soi-disant « crise des réfugiés » était plus liée à la réticence de nombreux États à accepter autant de réfugiés qu’ils auraient pu et dû, qu’au nombre de personnes ayant besoin d’une protection.  Il y a vu une crise du « partage équitable des responsabilités » et donc une crise de la solidarité internationale par excellence.  Abordant son troisième rapport (A/75/180), consacré au populisme, il a noté la grave menace qu’il faisait peser sur les droits humains des personnes et des groupes vulnérables.  Il a également rappelé que ses quatrième et cinquième rapports étaient consacrés à la sécurité économiques (A/76/176) et aux vaccins (A/77/173). 

L’Expert indépendant a aussi évoqué ses rapports au Conseil des droits de l’homme, parmi lesquels le deuxième était consacré à la criminalisation des militants des droits humains ayant défendu les droits fondamentaux des migrants et des réfugiés (A/HRC/41/44), le troisième aux changements climatiques (A/HRC/44/44), le quatrième à la pandémie de COVID-19 (A/HRC/47/31) et le cinquième à l’extraterritorialité (A/HRC/50/37).  Il a expliqué que son sixième rapport, présenté en juin dernier au Conseil, était consacré à la révision du projet de déclaration sur le droit à la solidarité internationale (A/HRC/53/32), demandant le soutien des États Membres en vue de son adoption par le biais d’un processus intergouvernemental.  Estimant que cette démarche permettrait de définir un cadre pour la solidarité internationale dans le domaine des droits humains, il a ajouté qu’elle offrirait « un atout supplémentaire et extrêmement important pour œuvrer en faveur d’un monde plus juste et plus équitable ». 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Azerbaïdjan, qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, a rappelé que la solidarité internationale et les droits humains sont des valeurs sur lesquelles repose le Mouvement.  Dans ce cadre, il a réaffirmé la détermination du Mouvement à apporter une assistance politique, morale et matérielle à tout membre qui subirait un préjudice économique, politique ou militaire.  Il a insisté sur l’opposition du Mouvement à toutes les mesures coercitives unilatérales, notamment celles utilisées à des fins de pressions politiques, économiques et financières, en particulier contre les pays en développement, y voyant des violations de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Il a ensuite interrogé l’Expert indépendant sur l’impact que peuvent avoir ces mesures sur le développement, mettant en question l’intégrité de toute déclaration sur la solidarité internationale qui négligerait cet aspect. 

Parmi les autres délégations ayant exprimé leur désapprobation quant aux sanctions unilatérales, Cuba a rappelé qu’en dépit du blocus que lui imposent les États-Unis, il a soutenu la lutte contre la pandémie dans 48 nations, grâce à ses brigades médicales envoyées partout où l’on avait besoin d’elles. La Fédération de Russie a, quant à elle, insisté sur la nécessité d’une solidarité dépolitisée pour résoudre les nombreuses crises mondiales, avant de critiquer la « lecture égoïste » de la Charte des Nations Unies faite par les nations occidentales. La crise migratoire en mer Méditerranée, transformée en véritable « cimetière », et l’absence de solidarité européenne vis-à-vis des nations africaines en est le meilleur exemple, a-t-elle affirmé. 

Le Lesotho a ensuite appuyé le projet de révision de la déclaration sur le droit à la solidarité internationale, estimant qu’il était rendu absolument nécessaire par la pandémie, tandis que le Cameroun rappelait le lien indissociable entre solidarité internationale et droit au développement.  Appelant à ce que davantage de flux financiers soient dirigés vers les pays qui en ont le plus besoin, la délégation camerounaise s’est inquiétée de la résistance que rencontre cette notion et a interrogé l’Expert indépendant sur les répercussions de sa non-inclusion dans les normes internationales. La Chine a fait part de son soutien constant à la solidarité internationale, la considérant non seulement comme un droit mais également comme un devoir, et y voyant la meilleure façon d’atteindre la paix et le développement. 

L’État de Palestine a, de son côté, déploré l’agression de Gaza par Israël, fustigeant tout particulièrement les mesures prises par certains gouvernements pour interdire les manifestations en solidarité avec le peuple palestinien, telles qu’on a pu en voir depuis deux semaines à travers le monde.  Enfin, l’Ordre souverain de Malte, rappelant que la solidarité était sa raison d’être, a exposé ses collaborations avec des communautés locales et des ONG, particulièrement en Afrique et en Asie, sur des sujets tels que la santé, l’eau et l’hygiène. 

Réagissant aux remarques et questions des délégations, l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale a remercié les États Membres qui ont appuyé son mandat ces six dernières années, affirmant que les avancées sur le projet de déclaration sur le droit à la solidarité internationale doivent beaucoup à leur bonne volonté.  Répondant ensuite au Venezuela, il a souligné l’importance des normes internationales pour faire face aux mesures coercitives unilatérales quand celles-ci sont excessives, « ce qui est souvent le cas ». La solidarité internationale peut contribuer à atténuer certains effets indésirables de ces mesures, a-t-il dit. 

Abordant la question des impacts des changements climatiques, il a invité les délégations à consulter son rapport, avant de déplorer une très grande insuffisance de la solidarité internationale en la matière, comme en atteste le blocage des négociations sur le Fonds vert pour le climat.  Selon lui, les pays les plus pauvres ne devraient pas avoir à payer pour les dégâts causés par les plus riches.  En réponse aux interrogations exprimées par le Cameroun, M. Okafor a rappelé que, parmi les instruments existants, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels prévoit déjà un devoir de solidarité pour ce qui est du suivi de l’application du traité par la communauté internationale.  Il a ensuite fait remarquer que les nouveaux droits en création, comme le droit à l’environnement, ne se présentent pas exactement comme les droits précédents. Toutefois, a-t-il ajouté, aucune raison ne peut justifier que de nouveaux droits ne soient pas admis au niveau international. 

Exposé

Mme ATTIYA WARIS, Experte indépendante sur les effets de la dette extérieure et des autres obligations financières internationales connexes des États sur la pleine jouissance de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a rappelé que la pandémie de COVID-19 est venue aggraver le retard pris dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Alors que nous sortons de cette crise, les niveaux de vie continuent de baisser, les intérêts de la dette ne sont pas payés et les monnaies sont dévaluées, a constaté l’Experte indépendante, dont le rapport traite des impacts de diverses crises sur les droits humains à travers le monde. 

Parmi les polycrises actuelles, Mme Waris a tout d’abord mentionné la pauvreté mondiale, qui a progressé pour la première fois depuis 20 ans et a plongé 77 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté en 2021.  Elle a ensuite cité l’impact fiscal de la pandémie de COVID-19, qui a affecté de manière disproportionnée les personnes les plus vulnérables sur le marché du travail, et les crises alimentaires, causées essentiellement par les conflits ou l’insécurité, qui touchent 30,2 millions de personnes.  Les crises liées aux changement climatiques, à la pollution et à la perte de biodiversité ont, elles aussi, des effets néfastes sur les droits humains, a ajouté l’Experte indépendante, précisant que 700 millions de personnes pourraient être déplacées en raison d’une grave pénurie d’eau d’ici à 2030, tandis que 2 milliards de personnes n’ont pas accès à l’eau potable et 3,6 milliards ne disposent pas d’installations sanitaires sûres. 

Notant que les personnes déracinées comptent parmi les plus vulnérables aux problèmes de sécurité alimentaire et de malnutrition, Mme Waris a rappelé qu’en 2021, sur les 51 millions de personnes déplacées dans le monde, près de 45 millions se trouvaient dans des territoires en crise alimentaire.  À ce sujet, elle a relevé que plusieurs conflits armés et crises humanitaires en cours ont des répercussions mondiales, les perturbations des chaînes alimentaires dues à des guerres entraînant une hausse des prix des denrées et, par voie de conséquence, une insécurité alimentaire.  Elle a également observé que de nombreux pays sont confrontés à une crise énergétique.  Dans ce contexte, l’Experte indépendante a déploré que l’état actuel de l’économie mondiale et le manque de coopération fiscale entraînent la baisse des recettes publiques, l’augmentation du coût de la vie et de l’inflation, ainsi que des politiques d’austérité responsables d’une régression dans la réalisation des droits humains.  « Tous ces facteurs provoquent une spirale descendante d’un niveau de vie déjà en baisse, aggravant la pauvreté et augmentant les inégalités », a-t-elle alerté.

Les perturbations liées à la pandémie ont entraîné un déclin du commerce mondial qui, en 2020, était proche de celui de la crise financière mondiale de 2008-2009, a poursuivi Mme Waris, pour qui ces retombées, ajoutées à l’accroissement de la dette publique, ont particulièrement affecté les pays les moins avancés et les pays à faible revenu.  Parallèlement, les envois de fonds des migrants ont connu une forte croissance dans les pays en développement et les pays les moins avancés, devenant ainsi une source majeure de financement du développement, a-t-elle noté, estimant que ces envois contribuent à réduire la pauvreté et les inégalités.  Alors que 80% des actifs financiers mondiaux sont aujourd’hui détenus dans les pays développés, un transfert de seulement 1,1% de ces actifs suffirait à atteindre les ODD dans les pays en développement, comblant ainsi leur déficit de financement, estimé à 4 200 milliards de dollars, a fait valoir l’Experte indépendante. 

Pour Mme Waris, une économie fondée sur les droits humains, un système fiscal plus progressif qui augmenterait les recettes et donc la disponibilité des ressources pour l’État, un financement de l’égalité d’accès aux services publics et la création d’une autorité fiscale mondiale, dotée d’un cadre de coopération internationale, sont autant de solutions pour contrer les crises multiples et réduire les distorsions dans la réalisation des droits humains. 

Dialogue interactif

Plaidant pour un ordre international plus juste et équitable, Cuba a déploré l’existence de mesures coercitives unilatérales qui violent les droits humains et réduisent la capacité des pays à affronter le poids de leur dette, demandant plus de détails sur leurs effets à l’Experte indépendante. En tant que petit État insulaire en développement (PEID) confronté aux changements climatiques, les Bahamas ont plaidé en faveur d’un indice de vulnérabilité allant au-delà du simple revenu national pour déterminer l’accès aux filets de protection financiers internationaux auxquels les États pouvaient avoir droit.  Le pays s’est enquis des recommandations de l’Experte indépendante en matière de supervision et de détection des flux financiers illicites le concernant. 

Le Cameroun a appelé à réformer l’architecture financière internationale, regrettant que les institutions qui la composent n’axent pas leurs actions sur les droits humains.  Elle a également souhaité savoir qui s’opposait à une convention fiscale internationale et demandé des éclaircissements sur le concept d’économie basée sur les droits humains.  Le Lesotho a expliqué, pour sa part, que les changements climatiques frappaient de manière disproportionnée les pays les moins avancés et contraignaient les pays à plus d’emprunts, les enfermant dans le piège de l’endettement. 

La Fédération de Russie a estimé que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ne tenaient pas suffisamment compte des droits humains, notamment du droit au développement.  Elle a plaidé en faveur d’une réforme pour modifier les conditions économiques actuelles, rappelant que de tels projets avaient émergé lors de la crise financière de 2008.  Dénonçant à son tour l’unilatéralisme, le protectionnisme et les mesures coercitives internationales, la Chine a, elle aussi, appelé à une réforme du système financier international en donnant plus de place aux pays en développement dans son pilotage et en leur consacrant plus de ressources.  La République arabe syrienne a indiqué qu’elle n’avait pas pu obtenir d’aide auprès de la Banque mondiale après le tremblement de terre de février 2023, car elle n’était pas à jour quant à ses contributions. Elle a expliqué que l’institution l’avait invitée à envoyer des délégués à Washington D.C. pour trouver une solution, mais que ces derniers n’avaient pas obtenu la permission des autorités états-uniennes.  Que pensez-vous de cette situation? 

Reprenant la parole après ces questions, l’Experte indépendante sur les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a rappelé qu’elle avait abordé la question de l’impact des mesures coercitives unilatérales lors d’une précédente discussion sur les incidences des systèmes fiscaux numériques, en mars dernier, au Conseil des droits de l’homme.  Elle a ensuite critiqué les marchés non réglementés et clandestins qui, selon elle, favorisent la criminalité et exacerbent les vulnérabilités sociales. 

Elle a reproché aux institutions financières internationales de ne pas assez fonder leurs raisonnements et leurs actions sur les droits humains, et a réitéré l’idée de créer un indice de vulnérabilité basé sur des situations concrètes, et non sur des théories.  Revenant sur la difficile réforme de ces institutions, elle a évoqué les tentatives infructueuses de mettre en œuvre une stratégie fondée sur le genre au sein du FMI, et a appelé à y introduire des priorités en matière de santé, d’alimentation et d’éducation. 

Concernant la fiscalité, l’Experte indépendante s’est lamentée du travail cloisonné des institutions financières existantes, faisant obstacle à une approche globale efficace.  « Nous vivons dans un monde où les décisions financières d’un pays ont des retombées et des répercussions dans le monde entier », a-t-elle souligné, appelant à créer d’urgence un organe fiscal international, neutre, où tout le monde serait sur un pied d’égalité.  Cet organe pourrait être hébergé soit par l’ONU, soit par une nouvelle entité, a-t-elle suggéré. 

Exposé

Mme PAULA GAVIRIA BETANCUR, Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays, intervenant pour la première fois devant la Troisième Commission, a indiqué que 71 millions de personnes dans le monde vivent en situation de déplacement interne.  Un nombre record, qu’elle a dit craindre de voir augmenter sous l’impulsion de catastrophes et conflits démultipliés.

Elle a présenté les quatre priorités thématiques interconnectées autour desquelles elle compte axer son mandat, à savoir la violence généralisée, les processus de paix, les changements climatiques, et l’intégration et la réintégration des personnes déplacées.  Ces priorités ont été définies en raison de leur impact sur toutes les phases des cycles de déplacement, a-t-elle indiqué, précisant qu’elle compte privilégier une approche intersectorielle pour étudier la situation des différents segments de la population de déplacés, notamment les femmes, les filles, les enfants, les jeunes, les personnes LGBTQI+, les personnes d’ascendance africaine, les minorités, les personnes âgées et les peuples autochtones. 

Elle a alerté que les situations de violence généralisée, que ce soit aux mains d’acteurs criminels organisés et de groupes extrémistes violents ou suite à des affrontements intercommunautaires, sont disproportionnellement meurtrières, et peuvent entraîner encore plus de morts que les conflits armés.  Mais l’application du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme dans ce domaine constitue un défi particulier, car les acteurs armés non étatiques peuvent rejeter ces cadres, tandis que les États peuvent déroger à leurs obligations en matière de droits humains, notamment dans le contexte des mesures extraordinaires de lutte contre le terrorisme ou contre les gangs. 

Son intention, en particulier, est de fournir des clefs pour prévenir, répondre et résoudre efficacement les déplacements internes dans différents contextes de violence généralisée, garantir la responsabilité des acteurs coupables, et offrir des voies de recours aux populations déplacées dans leurs propres pays.  Je compte également promouvoir l’inclusion de la question des déplacements dans les processus de paix et de médiation ainsi que dans la justice transitionnelle, entre autres, a-t-elle ajouté. 

La Rapporteuse spéciale a ensuite plaidé pour une participation pleine et significative des communautés déplacées par les changements climatiques, ainsi que de celles qui sont exposées à un tel déplacement, dans la conceptualisation des projets et stratégies d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques. Elle a notamment indiqué qu’elle compte examiner comment conceptualiser et mettre en œuvre les relocalisations planifiées d’une manière qui préserve les droits humains des personnes concernées. 

Pour ce qui est du volet de l’intégration et de la réintégration, elle ambitionne d’identifier les facteurs qui permettent aux anciennes personnes déplacées d’avoir le sentiment que leur déplacement a réellement pris fin.  Les politiques de rapatriement et de relocalisation ne peuvent pas être une solution durable si elles ne permettent pas aux personnes concernées d’avoir un sentiment d’appartenance, a-t-elle souligné. Si on ne redouble pas d’efforts pour lutter contre les facteurs de déplacement, notamment les changements climatiques et la violence généralisée, s’attaquer aux causes profondes des conflits et des déplacements grâce à des processus de paix inclusifs et durables, et garantir l’intégration des personnes anciennement déplacées, la crise mondiale des déplacements continuera de s’aggraver, a mis en garde la Rapporteuse spéciale.

Dialogue interactif

Comment utiliser les instruments internationaux existants pour assurer des progrès et des résultats tangibles auprès des personnes déplacées, a demandé la Géorgie en donnant le coup d’envoi aux échanges avec la Rapporteuse spéciale.  Et quels points d’ancrage peut-on identifier au niveau du système global afin de renforcer la protection et les droits humains des personnes déplacées? s’est enquise la Suisse.  Le Cameroun a souhaité obtenir des exemples de bonnes pratiques en matière d’intégration des personnes déplacées, suivi de l’Indonésie qui s’est intéressée aux mesures à adopter en situation d’urgence et d’après-urgence. 

Que peut faire l’ONU pour garantir un meilleur respect des droits humains des déplacés dans les contextes de conflit armé, a demandé à son tour l’Ukraine. Après avoir dénoncé les attaques de milices houthistes contre des camps de déplacés, le Yémen a demandé des détails sur les mécanismes d’obligation redditionnels et de suivi. Préoccupé par la situation au Myanmar, le Bangladesh s’est intéressé aux possibilités de démantèlement des camps de déplacés tout en assurant aux individus un retour sûr. 

Le Liban a indiqué, pour sa part, que la poursuite de l’agression israélienne avait entraîné le déplacement 19 646 personnes dans l’ensemble du pays et a appelé la communauté internationale à « faire pression sur Israël » pour cesser les « violations quotidiennes de l’intégrité territoriale et de la souveraineté ».  À son tour, le Maroc a encouragé les groupes armés et les groupes non étatiques à permettre à la Rapporteuse spéciale de se déplacer librement dans les zones de conflit.  La Chine a critiqué, pour sa part, les pays qui « lancent des guerres au nom de la démocratie », provoquant des déplacements de masse de civils, les rappelant à leurs obligations au regard du droit international. 

Comment pensez-vous prendre en compte le nexus humanitaire et développement dans le cadre de la reconstruction, s’est ensuite enquis le Cameroun.  De manière connexe, les États-Unis ont demandé comment intégrer les voix des personnes déplacées dans les processus de paix.  Comment comptez-vous travailler avec les États pour établir des normes juridiques relatives à la participation des déplacés? a demandé la Colombie. Et comment identifier les personnes déplacées encourant un risque accru de discrimination et de marginalisation? 

S’agissant des changements climatiques, l’Union européenne a souhaité savoir comment appuyer les communautés pour prévenir les déplacements et mettre en œuvre des mesures de prévention des catastrophes.  Le Bangladesh a demandé des exemples de bonnes pratiques, tandis que l’Iraq a souligné que certaines problématiques des changements climatiques, les pénuries en eau notamment, dépassent les ressources dont disposent les États pour y faire face.  La Fédération de Russie a jugé inapproprié d’aborder la question des changements climatiques dans le cadre du mandat de la Rapporteuse spéciale, plaidant en faveur d’un « examen équilibré et objectif » de la relation entre les changements climatiques et la migration y compris interne.

Le Myanmar a fait état de la situation dramatique de son pays depuis le coup d’état militaire de 2021: 1,7 million de personnes ont été déplacées, portant leur total dans le pays à plus de 2 millions; 18 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire; les conditions dans les camps se sont aggravées, particulièrement pour les femmes, et la junte empêche les observateurs de s’y déplacer librement.  La junte militaire a récemment lancé des attaques contre un camp dans l’État kachin, y tuant 30 personnes, a-t-il fait savoir. Que faire pour limiter de tels actes? 

Reprenant la parole, la Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays a indiqué qu’elle allait mettre les bonnes pratiques pour l’intégration des déplacés dans les villes à disposition des États Membres.  Abordant la question des coûts de reconstruction, elle a rappelé l’importance d’élaborer des plans intégrés aux niveaux local et national ainsi que du soutien de la communauté internationale.  Elle a appelé à intégrer la question des déplacés dans les accords de paix et la justice transitionnelle, insistant sur l’importance de la prévention et la mise en place de systèmes d’alerte robustes.  Il faut également investir dans la prévention et la préparation des catastrophes, notamment la mise en place de plans de réinstallation planifiés, a-t-elle ajouté.  Elle a plaidé pour une participation précoce des personnes déplacées, s’inquiétant ensuite des répercussions qu’entraîneraient les fermetures de camps sans planification appropriée. 

Déclaration liminaire

S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, la représentante de l’Azerbaïdjan a pris la parole pour plaider en faveur d’un traitement des questions relatives aux droits humains par le biais d’une approche fondée sur le dialogue, non politisée et non sélective, et de manière juste et équitable, avec comme principes directeurs l’objectivité, le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale, la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, l’impartialité, la non-sélectivité et la transparence, en tenant compte des particularités politiques, historiques, sociales, religieuses et culturelles de chaque pays.  À cette aune, la représentante a exprimé la profonde préoccupation du Mouvement face à la persistance et à la prolifération des adoptions sélectives de résolutions spécifiques à un pays au sein de la Troisième Commission, ainsi qu’au Conseil des droits de l’homme (CDH), pratique qui, selon elle, exploite les droits humains à des fins politiques et viole les principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité et de non-sélectivité dans le traitement des questions liées aux droits humains. 

Appelant à promouvoir une plus grande complémentarité entre les travaux de la Troisième Commission et du Conseil des droits de l’homme et à éviter les doublons et les chevauchements inutiles dans leurs activités, la représentante a fait valoir que l’Examen périodique universel (EPU) du CDH est le « principal mécanisme de coopération intergouvernemental pour examiner les questions relatives aux droits humains au niveau national dans tous les pays sans distinction, avec la pleine participation du pays concerné et en tenant compte du renforcement de ses capacités ».  Elle a également rejeté la pratique actuelle du Conseil de sécurité consistant à traiter les questions de droits humains dans la poursuite des objectifs politiques de certains États.  Mécanisme de coopération orienté vers l’action, l’EPU se fonde sur des informations objectives et fiables et sur un dialogue avec le pays sous examen mené de manière impartiale, transparente, non sélective, constructive, non conflictuelle et non politisée, a-t-elle conclu. 

Exposé

M. YAO AGBETSE, Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine (RCA), a indiqué que la Politique nationale des droits de l’homme de la RCA pour la période 2023-2027 a été lancé le 10 octobre à Genève.  C’est la toute première fois qu’une telle politique est élaborée, a-t-il précisé avant de féliciter les autorités centrafricaines pour cette réalisation et d’appeler à la mobilisation de ressources pour sa mise en œuvre efficace. 

En ce qui concerne le processus de paix, l’Expert indépendant a rappelé les trois instruments dont dispose désormais le pays: l’APR RCA du 6 février 2019 « qui est dans une période d’essoufflement », la Feuille de route de Luanda de 2021 « qui attend des mesures concrètes de la part du gouvernement pour exister pleinement », et les recommandations du Dialogue républicain de 2022 qui nécessitent, elles aussi, d’être activées. Notant que 4 227 ex-combattants avaient été désarmés et démobilisés au 23 mars 2023, il a prôné la poursuite du dialogue politique pour une solution durable. Notant que des tensions persistent malgré le référendum constitutionnel du 30 juillet, il a appelé à un dialogue inclusif pour la réussite des prochaines élections locales. 

En ce qui concerne les violations des droits de l’homme, si les groupes armés en demeurent les principaux auteurs, ni les forces de défense et de sécurité de la RCA, ni leurs alliés russes, et ni même les Casques bleus n’en sont exempts.  Avec 24 cas d’abus enregistrés dans le rapport, M. Agbetse s’est interrogé sur l’efficacité de la politique de tolérance zéro; la majorité des filles et des femmes victimes de violences sexuelles attendant toujours que justice soit faite, a-t-il regretté.  Soulignant le manque de ressources de l’Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants (UMIRR), il a appelé à un soutien financier accru ainsi qu’à une révision du mémorandum liant les États fournisseurs de troupes à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). 

Abordant la situation humanitaire, l’Expert indépendant a indiqué que 3,4 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population totale, auront besoin d’aide en 2023; ce qui représente une hausse de 10% par rapport à 2022.  En outre, 750 500 Centrafricains sont réfugiés dans les pays voisins et 489 000 déplacés à l’intérieur du pays, à la date du 30 août 2023. 

L’Expert indépendant a ensuite évoqué les conséquences de l’insécurité en République centrafricaine pour les pays limitrophes, notamment le Tchad et le Soudan, où les tensions s’accumulent.  Pour éviter qu’elles ne s’aggravent, il a appelé le Conseil de sécurité, de concert avec la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et l’Union africaine (UA), à envisager l’organisation d’une conférence sur la paix et la sécurité en Afrique centrale.  Il a, par ailleurs, exhorté les autorités centrafricaines à renforcer leurs canaux diplomatiques avec les États voisins.  Enfin, il a estimé qu’à plus long terme, il demeure essentiel d’investir dans le développement durable de la RCA, à travers la reconstruction et la réhabilitation des infrastructures routières, scolaires, sportives et médicales. 

Dialogue interactif

Première à réagir à cet exposé, la République centrafricaine a indiqué que le 30 août 2023, son Président a promulgué une nouvelle Constitution qui consacre la jouissance de toutes les formes de liberté et intègre les nouveaux cadres du pays en matière de protection de l’enfance et de lutte contre les violences sexuelles, entre autres.  En outre, la politique nationale des droits de l’homme, un « document unique », a été approuvée le 26 août 2023 par décret.  Il s’agit d’une première qui contribuera à l’effectivité des droits de l’homme garantit par les instruments nationaux et internationaux, s’est félicitée la délégation précisant que cette politique vise notamment à la promotion du droit au développement et du droit des minorités telles que « les femmes, les jeunes ou les réfugiés ».  La délégation a également évoqué la tenue, en novembre 2023, d’une table ronde sur la lutte contre l’impunité et les violences sexuelles. 

Cependant, les sanctions ont conduit à la suspension des appuis budgétaires de l’Union européenne, de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), privant la République centrafricaine de ressources, a déploré la délégation, qui a également dénoncé l’instrumentalisation et la politisation du Processus de Kimberley à des fins de pressions et de chantage.  De même, elle a fustigé le maintien de l’embargo sur les armes, affirmant que celui-ci a permis à des groupes terroristes de prospérer au vu et au su d’une forcée de maintien de la paix inopérante et inefficace. Elle a déploré l’absence de traitement de cette question tant dans l’exposé que dans le rapport de l’Expert indépendant. 

La Fédération de Russie a regretté l’adoption de résolutions sélectives, politisées et unilatérales sur la situation des droits humains dans les différents pays, la jugeant incompatible avec le principe du maintien de relations amicales entre les États.  Elle a ensuite rejeté les « allégations » contenues dans les paragraphes 39 et 40 du rapport, lesquelles accusent les formateurs et experts militaires russes d’avoir commis de graves violations des droits humains.  Dénonçant des informations non fiables et non étayées, la délégation a insisté sur le plein droit du Gouvernement centrafricain de se défendre et de protéger la population civile ainsi que l’état de droit conformément à la législation nationale et internationale. 

Le Royaume-Uni a souhaité savoir de quels appuis l’Expert indépendant a besoin pour mener des enquêtes sur les « crimes commis » par les forces russes.  De son côté, l’Union européenne a demandé comment la communauté internationale pouvait contribuer à lutter au mieux contre l’impunité.  Le Maroc a salué pour sa part les évolutions positives enregistrées par la République centrafricaine en matière de promotion et protection des droits humains, citant notamment la lutte contre les violences basées sur le genre, l’action contre le recrutement d’enfant dans les conflits ou encore l’abolition de la peine de mort. 

À la suite de ces commentaires, l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine a appelé la communauté internationale à continuer à soutenir les efforts de l’État dans la justice transitionnelle, a insisté l’Expert indépendant, estimant en outre que la Commission de consolidation de la paix, se doit d’appuyer la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation.  Mais la lutte contre l’impunité exige aussi un investissement en termes de ressources. Or, des partenaires comme le FMI ou la Banque mondiale ont suspendu depuis deux ans leur aide, a regretté l’Expert indépendant qui a appelé ces institutions à revenir sur leur décision. 

Il a insisté sur l’importance du soutien aux populations dans les zones rurales dans le cadre des futures élections locales, appelant là encore à un renforcement de l’aide dans la perspective du scrutin prévu en octobre 2024. De même, il a espéré que le plan de sécurité des élections permettra aux femmes et filles d’exercer leurs droits démocratiques.  Il a appelé les autorités centrafricaines à une forte sensibilisation des jeunes, des femmes et des filles afin que ces groupes participent de manière actives à ce rendez-vous démocratique qui constitue à ses yeux un instrument pour restaurer la paix dans le pays.

Abordant la question des enquêtes, l’Expert indépendant a estimé que les organisations de la société civile doivent pouvoir continuer à documenter les violations des droits humains commises par tous les acteurs, Casques bleus inclus, afin que justice soit faite. 

Exposé

Mme ELIZABETH SALMÓN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) a indiqué que son rapport met l’accent sur la relation entre les droits humains, la militarisation et l’égalité de genre en RPDC.  Tout en saluant la réouverture partielle des frontières, première étape vers une révision des restrictions imposées par le Gouvernement de la RPDC à la liberté de mouvement, la Rapporteuse spéciale a dit craindre un rapatriement forcé des personnes qui se sont enfuies, dont la majorité sont des femmes, et dont le retour les expose à la torture, aux violences sexuelles ou aux exécutions extrajudiciaires.  Chaque État a l’obligation, en vertu du principe de non-refoulement, de mettre un terme à ces rapatriements et de protéger les ressortissants de la RPDC sur son territoire, a-t-elle souligné, rappelant que, sous couvert de la pandémie de COVID-19, le Gouvernement de la RPDC a isolé le pays à une échelle sans précédent.  Ce faisant, il a exacerbé la crise humanitaire en restreignant l’accès des populations à la nourriture, aux médicaments et aux soins de santé, et a aggravé de multiples violations des droits humains, notamment des disparitions forcées, des arrestations arbitraires et des restrictions des libertés essentielles. 

En cette année marquant le soixante-dixième anniversaire de l’accord d’armistice qui a mis fin aux hostilités de la guerre de Corée, la RPDC se maintient dans un état de conflit prolongé, a déploré Mme Salmón, constatant que la priorité est systématiquement donnée à l’armée, tant dans la gouvernance que dans l’allocation des ressources, ce qui détériore encore davantage la situation des droits humains.  Cette militarisation entraîne une surveillance extrême des citoyens, mais aussi une répression qui donne lieu à des violations des droits humains. Ceux qui regardent ou écoutent les médias étrangers, critiquent l’État ou tentent de partir sont considérés comme des criminels ou des traîtres et s’exposent à de sévères sanctions, a-t-elle dénoncé, ajoutant qu’au-delà de ses frontières, la RPDC procède à des enlèvements systématiques, des refus de rapatriement et des disparitions forcées de personnes en provenance d’autres pays.  De plus, les évadés et ceux qui ont été séparés par la guerre de Corée n’ont pas pu renouer avec leurs familles en RPDC, craignant des représailles.

Selon la Rapporteuse spéciale, le financement des projets militaires induit l’exploitation d’une main d’œuvre non payée.  Une fois leurs études ou leur service militaire terminés, les citoyens de la RPDC sont envoyés sur des lieux de travail sans salaire ni rations adéquates, et les femmes, qui constituent la majorité d’entre eux, sont vulnérables à la corruption, aux abus et à l’exploitation sexuelle de la part des autorités.  De surcroît, la RPDC exporte de la main-d’œuvre à l’étranger dans des conditions de travail forcé, générant ainsi des devises étrangères, a expliqué Mme Salmón, pour qui cette politique du « tout-militaire » génère aussi un sous-investissement dans la protection sociale, fragilisant de larges segments de la population qui manquent de produits tels que la nourriture, les soins de santé ou l’eau.  Une situation encore aggravée par les sanctions imposées à la RPDC, qui ont limité l’importation des produits nécessaires à la production agricole. 

Cette militarisation affecte de manière disproportionnée les femmes et les jeunes filles, celles-ci demeurant confinées dans des rôles traditionnels et des marchés informels, où elles sont vulnérables à l’exploitation, a poursuivi la Rapporteuse spéciale, sans oublier les femmes qui traversent les frontières et se retrouvent victimes des réseaux de traite.  Plaidant pour une approche multipartite, multidimensionnelle et sexospécifique de la militarisation et des droits humains en RPDC, Mme Salmón a estimé que cet État Membre, qui est partie à divers traités relatifs aux droits humains, doit mettre pleinement en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et ses suites.  Ceci inclut l’intégration de politiques sensibles au genre dans le programme de paix et de sécurité et la garantie d’une participation active des femmes aux processus diplomatiques et de paix, a-t-elle précisé, jugeant qu’une paix durable en RPDC et dans la région ne sera jamais atteinte si les droits des femmes continuent d’être sapés. 

Dialogue interactif

Après l’exposé de la Rapporteuse spéciale, plusieurs pays ont vigoureusement rejeté ses conclusions.  Prenant la parole en premier, au nom du Mouvement des pays non alignés, le Venezuela a exprimé son rejet catégorique des mandats ciblant des pays spécifiques, y voyant des instruments politiquement motivés, contraires au droit international. À l’instar de Cuba, du Nicaragua, de la République démocratique populaire lao, du Zimbabwe, de la République islamique d’Iran, du Cameroun ou encore du Bélarus, le Venezuela a également appelé à la levée immédiate des mesures coercitives unilatérales.  En plus d’être illégales, celles-ci sont contre-productives, car elles créent une crise alimentaire dans le pays et empêchent les citoyens de la RPDC d’atteindre les ODD, ont argué ces pays. 

Appelant elle aussi à la levée des sanctions, la Chine s’est focalisée sur les progrès de la RPDC, mettant en avant l’amélioration de la vie de sa population.  La délégation a, par ailleurs, soulevé la question des entrées illégales sur le territoire nord-coréen qui, selon elle, mérite une réponse spécifique.  « Il faut trouver des solutions nationales aux problèmes nationaux », a pour sa part estimé le Cameroun, appelant au dialogue, à la concertation et au multilatéralisme.  Plutôt que les sanctions, plusieurs pays comme le Bélarus, la République démocratique populaire lao ou encore le Nicaragua ont prôné l’utilisation de l’Examen périodique universel (EPU), mécanisme plus inclusif et plus respectueux de la souveraineté des États à leurs yeux. 

Le Burundi a jugé regrettable la tendance croissance à la politisation des droits humains sous prétexte de promouvoir ces derniers, estimant que cela porte préjudice à la coopération internationale.  Sur la même ligne, la Fédération de Russie a affiché son « rejet de principe » du rapport de Mme Salmon, y voyant un instrument de pression ayant pour but de nuire au développement de la RPDC.  À son tour, l’Érythrée a fustigé la politisation des droits humains qui, selon lui, ne sert qu’à « diaboliser et humilier » certains pays.  Cette approche est en contradiction avec la Charte des Nations Unies, a renchéri la République arabe syrienne, qui a mis en doute la véracité des informations ayant servi de base au rapport.

D’autres pays, en revanche, ont apporté leur plein soutien à la Rapporteuse spéciale.  C’est le cas du Pérou, de l’Australie, de la Suisse, ou de l’Irlande, tous très préoccupés par les violations des droits humains en RPDC — en particulier les droits des femmes et des filles.  En sus, les Îles Marshall se sont inquiétées des tentatives de légitimation du régime de Pyongyang par certains pays, et ont fait part de leur grande préoccupation vis-à-vis du programme balistique et nucléaire de la RPDC. Une angoisse partagée par le Japon et l’Australie, qui ont fait le lien entre les droits humains d’un côté, la paix et la sécurité de l’autre: comment pourvoir aux besoins vitaux de sa population lorsqu’on dépense autant de ressources dans des missiles et des essais nucléaires? se sont-ils interrogés.  C’est là le vrai responsable de la crise économique et alimentaire en RPDC, en plus d’être un facteur de déstabilisation régionale, a estimé le Japon, avant d’évoquer la question des personnes enlevées et détenues par la RPDC.  L’Australie s’est, elle, demandée quand la RPDC allait rouvrir ses frontières, maintenant que la pandémie de COVID-19 est loin derrière.

Le Royaume-Uni a également déploré le rapatriement forcé des réfugiés dans le cadre de la réouverture des frontières de la RPDC, avant de s’enquérir des moyens d’empêcher ce phénomène.  L’Union européenne a ensuite appelé la RPDC à discuter avec les Nations Unies, se disant prête à soutenir une telle coopération.  Comment pouvons-nous appuyer votre travail dans ce sens, a-t-elle demandé à la Rapporteuse spéciale.  Dénonçant la situation « désastreuse » des droits humains en RPDC, les États-Unis ont voulu savoir comment la communauté internationale pourrait accroître sa pression sur les autorités afin qu’elles fassent « le choix de leur population ».  La République de Corée a, elle aussi, regretté que la RPDC gaspille des ressources rares pour les consacrer à ses programmes d’armes balistiques et nucléaires au détriment de sa population.  Déplorant en outre l’enlèvement d’un missionnaire sud-coréen, la délégation a exhorté les États Membres à promouvoir le non-refoulement des réfugiés de la RPDC; un appel repris par la République tchèque

Répondant aux sollicitations des États Membres, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) a souhaité insister sur trois idées qui recoupent à la fois les interventions des délégations et son rapport.  Elle a tout d’abord souligné le lien indéfectible qui unit les droits humains, la paix et la sécurité.  Selon elle, la militarisation extrême de la RPDC ne saurait être expliquée sans aborder la question des violations des droits humains. En effet, a-t-elle relevé, cette militarisation détourne des ressources considérables qui pourraient servir à la protection des droits humains, notamment les droits économiques, sociaux et culturels.  D’autre part, cette militarisation est le résultat d’un système de travail forcé, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et un prétexte pour exercer une surveillance extrêmement élevée sur les citoyens, a poursuivi Mme Salmón.

Deuxième idée développée par la Rapporteuse spéciale: les conséquences dévastatrices que génère la militarisation extrême de la RPDC affectent tout particulièrement les femmes et les jeunes filles, augmentant la discrimination dont celles-ci font l’objet, limitant leur participation à la vie publique et les exposant à la violence fondée sur le genre, y compris la violence sexuelle et la traite des personnes.  De plus, le climat d’impunité qui règne en RPDC est un obstacle à la possibilité des citoyens d’accéder à la réparation, a constaté Mme Salmón. 

Enfin, la Rapporteuse spéciale a rappelé que son mandat repose sur deux axes, la reddition de comptes et l’engagement des États.  S’agissant du premier axe, elle a insisté sur le fait que les violations des droits humains ne doivent pas faire l’objet d’impunité, ce qui impose d’assurer un accès à la justice et d’écouter les victimes au niveau national comme international.  Les États doivent en outre garantir les droits humains des citoyens de la RPDC, a-t-elle ajouté, réaffirmant que l’obligation de non-refoulement est une priorité absolue.  Après avoir invité tous les États Membres à honorer cette obligation, elle a conclu son propos en estimant que « l’indifférence n’est pas une option ».

Exposés conjoints sur le Myanmar

M. KHALED KHIARI, Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, a indiqué que la situation politique, humanitaire et des droits humains au Myanmar continue de se détériorer.  Près de 2 millions de personnes sont actuellement déplacées, et le nombre de personnes vivant dans la pauvreté a doublé pour atteindre près de la moitié des 55 millions d’habitants, a-t-il rapporté, déplorant une crise des plus graves dans l’État rakhine.  Il a indiqué que l’ONU a intensifié sa réponse face à ce défi, atteignant 4,4 millions de personnes en 2022 et 1,8 million de personnes supplémentaires au cours du premier semestre de 2023. Cependant, les contraintes d’accès continuent de limiter la fourniture d’une aide aux populations touchées par le passage du cyclone Mocha, en mai 2023.

Après avoir assuré que le processus de nomination d’un Envoyé spécial du Secrétaire général suit son cours, le haut fonctionnaire a signalé que la situation dans l’État rakhine demeure désastreuse pour la communauté rohingya, qui continue de faire l’objet d’une discrimination systémique.  Malgré une certaine amélioration des relations intercommunautaires, les documents d’état civil et de citoyenneté restent inaccessibles pour la grande majorité des Rohingya qui continuent d’être privés de leurs droits les plus élémentaires.  Et aucune solution n’a été trouvé pour les Rohingya déplacés, a-t-il déploré. 

Or, la résolution de la crise des Rohingya doit être au cœur de toute solution politique au Myanmar, a souligné le Sous-Secrétaire général, appelant la communauté internationale à faire preuve d’une plus grande solidarité à l’égard de ce peuple et des pays qui accueillent des réfugiés rohingya, comme le Bangladesh où la situation dans les camps devient de plus en plus difficile. En outre, l’insuffisance des fonds a entraîné des réductions importantes des rations alimentaires à deux reprises cette année, ce qui a aggravé les vulnérabilités, a regretté M. Khiari qui a, par ailleurs, alerté que les Rohingya sont également la proie des réseaux criminels. 

Le Sous-Secrétaire général a ensuite dit être profondément préoccupé par les informations selon lesquelles un tribunal du Myanmar aurait rejeté les appels contre la condamnation de la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi.  En outre, la désignation comme « terroristes » des principales organisations armées ethniques et du Gouvernement d’unité nationale fait planner de sérieux doutes quant à l’intérêt de l’armée en faveur d’une véritable solution politique. 

M. Khiari a ensuite indiqué que le Secrétaire général continue de réitérer ses appels à l’armée pour qu’elle s’abstienne de toute répression et agisse dans l’intérêt supérieur de la paix et de la stabilité au Myanmar et dans la région.  Cela implique également que les groupes de résistance renoncent à la violence à l’encontre des personnes qu’ils considèrent comme favorables à l’armée. Il a également souligné que le rôle de l’Association des nations de l'Asie du Sud-Est dans la résolution de la crise au Myanmar est essentiel, évoquant notamment son consensus en cinq points. 

M. NICHOLAS KOUMJIAN, Sous-secrétaire général et Chef du Mécanisme indépendant d’enquête pour le Myanmar, s’est réjoui de présenter pour la première fois à la Troisième Commission les travaux de ce mécanisme créé en 2018 et chargé de recueillir, de regrouper, de préserver et d’analyser les éléments de preuve attestant la commission de crimes internationaux les plus graves et de violations du droit international au Myanmar depuis 2011.  Indiquant que l’accent a été mis sur les éléments de preuve concernant les violations des droits humains perpétrées contre les Rohingya, contraints de fuir le Myanmar par centaines de milliers à la suite de violences, notamment sexuelles, il a précisé que, depuis le coup d’État de février 2021, le Mécanisme a collecté des preuves de crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, dont la fréquence et l’intensité ont augmenté l’an dernier.  Le Mécanisme dispose, selon lui, d’éléments de preuves d’exécution de masse, d’attaque de civils, de bombardement indiscriminés, d’incarcération sans procès, d’actes de torture et de déportation.

Après avoir remercié la Troisième Commission d’avoir appelé le Myanmar à coopérer avec le Mécanisme, M. Koumjian a déploré que les autorités militaires au pouvoir au Myanmar aient ignoré les demandes d’information et d’accès que lui a faites le Mécanisme.  De surcroît, a-t-il dit, il est très difficile d’accéder à des témoins dans cette région.  C’est pourquoi le Mécanisme a adopté des techniques innovantes lui permettant d’analyser des données, notamment des vidéos, des photos et des images géospatiales postées sur les réseaux sociaux, qui sont vérifiées sur la base d’informations reçues de 723 sources.  Faisant état d’une masse « sans précédent » de preuves et d’informations collectées à ce jour, le Chef du Mécanisme a souhaité que ces éléments ne soient pas « rangés dans des tiroirs » mais servent à lutter contre l’impunité dans le cadre de procès.

Nous partageons ces éléments avec trois procédures en cours devant la Cour pénale internationale (CPI), la Cour internationale de Justice (CIJ) et un tribunal argentin, qui traitent spécifiquement des crimes commis contre les Rohingya, a indiqué M. Koumjian.  Dans ce cadre, a-t-il expliqué, des rapports analytiques ont été préparés, en particulier sur les chaînes de commandement militaire ou encore sur les discours de haine relevés sur Facebook.  Saluant le courage des rescapés qui ont témoigné, le Sous-Secrétaire général a assuré que les interactions avec ces personnes sont protégées par un niveau de confidentialité.  Il a cependant plaidé en faveur d’une augmentation des ressources du Mécanisme pour protéger les témoins et garantir la sécurité du personnel afin qu’il puisse s’acquitter de sa mission.  Celle-ci consiste à « briser le cycle de l’impunité au Myanmar » pour que les auteurs de crimes soient tenus de rendre des comptes, a-t-il conclu. 

THOMAS H. ANDREWS, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, a exhorté à ne pas perdre de vue « le feu ardent de la brutalité et des violations des droits humains qui brûle intensément » à l’intérieur du Myanmar, rappelant la responsabilité des États Membres à l’égard de cette situation critique.  Accusant la junte militaire d’être un « agent du chaos et de la violence », il a détaillé les atrocités que celle-ci a commises depuis le coup d’État illégal lancé par le général Min Aung Hlaing il y a plus de deux ans et demi. 

Le Rapporteur spécial a indiqué que les forces militaires ont tué au moins 4 000 civils et incarcéré plus de 25 000 prisonniers politiques, dont presque 20 000 demeurent en détention, y compris des enfants et des dirigeants démocratiquement élus.  De plus, environ 75 000 habitations et structures civiles ont été détruites.  Le pays est plongé dans la pauvreté, affectant 17,6 millions de personnes qui nécessitent une assistance humanitaire. Plus de 2 millions de personnes ont été déplacées et 15 millions sont confrontées à une insécurité alimentaire modérée ou grave. 

M. Andrews a également fait état de tortures indicibles commises dans les prisons de la junte, où les actes de violences sexuelles, les coups et les électrocutions sont monnaie courante, précisant qu’au moins 181 prisonniers politiques y ont perdu la vie.  En ce qui concerne les impacts régionaux, le Rapporteur spécial a évoqué le sort d’environ 1 million de réfugiés rohingya au Bangladesh, où les conditions s’aggravent.  Il a également dénoncé l’environnement de non-droit créé par la junte, favorisant l’émergence de réseaux criminels et le trafic d’êtres humains le long des frontières du Myanmar.  Cependant quelques progrès sont à noter, le régime subissant une pression accrue de la part de la communauté internationale, a-t-il relevé.  Les sanctions ciblant les biens, les armes et les revenus financiers de la junte sont de plus en plus efficaces.  Certains pays, comme Singapour, acceptent de coopérer dans des enquêtes sur le transfert d’armes et l’application des sanctions, tandis que d’autres boycottent les événements organisés par la junte.  Il s’agit là de « petits pas », mais qui doivent se poursuivre, a-t-il insisté.  « Le motif d’espoir le plus important au Myanmar est le courage, la ténacité et l’engagement de son peuple », a ajouté M. Andrews, soulignant l’urgence pour les États Membres de travailler ensemble à une réponse plus coordonnée et stratégique à la crise au Myanmar. 

Dialogue interactif

À la suite de cette succession de présentations, le Myanmar a regretté que la « junte militaire illégitime » veuille faire croire au monde qu’elle seule peut rétablir la paix et la stabilité dans le pays, alors qu’elle est elle-même « le plus grand obstacle à toute stabilité politique durable au Myanmar ».  La junte retient toujours en otage des dirigeants civils élus, dont le Président U Win Myint et la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi, malgré les appels répétés du Conseil de sécurité en faveur de leur libération immédiate, a rappelé la délégation. Revenant sur l’impact humanitaire de la crise, elle a rapporté que 1,7 million de personnes ont été chassées de chez elles par les attaques militaires aveugles contre la population civile et que le nombre total de personnes déplacées à l’intérieur du pays s’élève désormais à près de 2 millions.  Or, les diverses restrictions imposées aux organisations humanitaires locales et la manipulation de l’accès humanitaire par la junte empêchent les Nations Unies et leurs partenaires d’atteindre les personnes qui ont des besoins urgents, en particulier dans les zones touchées par le conflit, a déploré la délégation. 

Pour affirmer son contrôle, la junte instille la peur parmi la population civile et recourt à la punition collective pour affaiblir le soutien populaire à la résistance, a-t-elle poursuivi.  Malheureusement, l’afflux d’armes étrangères et de kérosène permet à la junte de continuer de perpétrer des atrocités, comme les titulaires de mandat des Nations Unies l’ont documenté dans leurs rapports respectifs.  Pourtant, jusqu’à présent, aucun soldat n’a eu à répondre de ces crimes, car ils sont commis sous la direction et au su de la junte illégale, a poursuivi la délégation.  Par conséquent, une culture d’impunité totale s’est installée au Myanmar et « il importe d’y mettre fin », a-t-elle martelé, avant d’aborder la question du rapatriement des Rohingya.  Le retour de ceux qui se sont réfugiés au Bangladesh ne pourra se faire durablement sous la junte militaire, a tranché la délégation, trouvant « tout à fait logique » que les Rohingya soient réticents à retourner au Myanmar, alors que les militaires qui ont commis des atrocités à leur encontre « se livrent aujourd’hui aux mêmes brutalités contre l’ensemble de la population dans tout le pays ».

Les militaires ne seront jamais en mesure de vaincre la résistance combinée et croissante des mouvements pacifiques et armés et des organisations de résistance ethnique, a affirmé la délégation, estimant que la junte « ne gouverne pas mais survit ».  Dans leur « fuite en avant », les militaires se tournent, selon elle, de plus en plus vers des crimes atroces, jusqu’à présent en toute impunité.  La communauté internationale ne doit pas continuer à permettre aux militaires de tuer brutalement la population, a-t-elle répété, appelant à saisir la Cour pénale internationale (CPI) de la situation au Myanmar.  Il est temps aussi de mettre un terme à l’acheminement d’armes, y compris de kérosène, vers l’armée, car loin d’être utilisées pour défendre le pays, ces fournitures sont utilisées pour « tuer la population », a ajouté la délégation. 

Avertissant que l’élimination de la junte illégale ne fera pas nécessairement du Myanmar un pays stable, la délégation a exhorté les Nations Unies, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), leurs envoyés spéciaux et tous les États Membres à aligner leurs engagements et leurs actions concernant le Myanmar sur les aspirations démocratiques du peuple du Myanmar. « Chaque instant qui passe sans que rien ne soit fait aggrave les souffrances de la population et fait de plus en plus de victimes », a-t-elle conclu, demandant aux intervenants de lui exposer leurs prochaines démarches en vue de mettre fin aux atrocités de la dictature militaire et de rétablir la démocratie au Myanmar.

En tant que pays voisin, la Thaïlande s’est ensuite engagée à agir plus activement face à la crise qui ébranle le Myanmar, pour que la paix y prévale mais aussi pour surmonter les défis transfrontaliers.  La délégation a, en outre, félicité le Bangladesh pour ses efforts en faveur des réfugiés rohingya.  Pour les Îles Marshall, la communauté internationale n’a pas fait le nécessaire pour garantir la responsabilité des coupables de la crise que traverse le Myanmar.  L’année 2023 a, en effet, été une « année horrible » au Myanmar, s’est émue l’Union européenne (UE), condamnant la brutalité de la junte militaire et ses attaques aveugles contre la population civile.  S’adressant à M. Khiari, la délégation a souhaité savoir quel impact aurait un embargo mondial sur les armes à destination de l’armée du Myanmar sur le conflit et sur la jouissance des droits humains par les habitants du pays.  Notant par ailleurs que le rapport de M. Koumjian documente la structure de commandement de l’armée du Myanmar et la manière dont elle a pu délibérément préparer et exécuter des crimes internationaux, l’UE s’est interrogée sur la contribution de la société civile à ces travaux.  S’adressant enfin à M. Andrews, elle a voulu savoir si l’engagement humanitaire de l’ONU s’est traduit par un meilleur accès et une modération des violences commises par les militaires. 

Souscrivant à cette déclaration, l’Allemagne a, elle aussi, condamné la responsabilité des militaires dans les violations des droits humains au Myanmar, avant de demander comment appuyer l’ASEAN pour mettre en place le consensus en cinq points et accroître la pression sur la junte.  Une interrogation partagée par la République de Corée et l’Australie, celle-ci appelant à un embargo mondial sur l’envoi d’armes au Myanmar. De son côté, la République islamique d’Iran s’est alarmée des violations des droits humains contre les musulmans rohingya, qui ont en outre été les premières victimes du cyclone dans l’État rakhine.  La délégation a félicité à son tour le Bangladesh pour son accueil des réfugiés rohingya, se demandant si l’appui de la communauté internationale à ce pays est suffisant.  Sur la même ligne, l’Arabie saoudite s’est indignée de voir la situation des Rohingya s’aggraver jour après jour, avant de rappeler l’aide qu’elle a fournie à cette population.  Comment les différents acteurs internationaux appuient-il ces efforts? a-t-elle demandé aux intervenants. 

Alarmé lui aussi par la situation, le Liechtenstein a voulu savoir comment faire cesser les frappes aériennes contre les civils, une préoccupation également exprimée par les Pays-Bas qui ont rappelé les bombardements meurtriers du 9 octobre dernier.  Le Canada a souhaité que d’autres pays lui emboîtent le pas pour sanctionner la junte, avant de réclamer la libération de toutes les personnes détenues de manière arbitraire, la mise sur pied d’un accès humanitaire pour secourir les populations dans le besoin et la création d’un « plan commun pour priver ce régime de carburant, d’armes et de la légitimité qu’il ne mérite pas ». Très critique à l’égard des rapports, la Fédération de Russie a rejeté la pratique consistant à adopter des résolutions « sélectives, politisées et unilatérales » sur la situation des droits humains dans différents pays.  L’adoption de tels documents n’est pas conforme au principe d’un dialogue mutuellement respectueux, égal et non politisé dans le domaine de la coopération internationale sur la promotion et la protection des droits humains; elle contredit le principe de relations amicales entre les États, a invoqué la délégation.  Les nombreuses accusations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité portées contre les autorités du Myanmar ne peuvent être prises au pied de la lettre en l’absence de preuves et de faits avérés, a-t-elle ajouté, se disant « déçue » que les rapports n’évaluent pas de manière adéquate la volonté des autorités du Myanmar de coopérer avec les organisations et agences des Nations Unies.

Appelant la junte à mettre fin à ses attaques contre les civils, la République tchèque a demandé à M. Khiari de préciser quels sont les principaux défis dans les zones contrôlées par la junte, d’une part, dans les territoires contrôlés par l’opposition, d’autre part.  Après avoir salué l’immense courage et la résilience du peuple du Myanmar, le Luxembourg s’est demandé comment faire pour que les auteurs de violations de droits humains soient un jour traduits en justice, compte tenu de l’absence de perspectives démocratiques dans le pays. En première ligne de cette crise, le Bangladesh a demandé à M. Khiari dans quelle mesure il est possible de renforcer son action et comment les Nations Unies peuvent plus efficacement coordonner leur réponse avec les différents acteurs de consolidation de la paix.  La délégation s’est aussi enquise auprès de M. Koumjian des façons de mieux protéger les témoins qui collaborent avec le Mécanisme d’enquête indépendant. Enfin, elle a rejeté les conclusions de M. Andrews sur le retour forcé des réfugiés rohingya par le Bangladesh, assurant que son pays continue de les accueillir du mieux qu’il le peut.

Comment peut-on établir des synergies entre l’ASEAN et l’ONU pour le règlement de cette crise? a voulu savoir le Japon, qui a assuré qu’il continuera à fournir une assistance humanitaire aux populations au Myanmar. L’Irlande a appelé à continuer à faire pression sur la junte pour mettre en œuvre le consensus en cinq points de l’ASEAN, appuyée en ce sens par l’Indonésie, qui a demandé à la communauté internationale de soutenir la troïka mise en place pour appuyer cet accord.  Elle a également insisté pour que la question des Rohingya fasse l’objet d’une meilleure coopération internationale.  La Malaisie s’est elle aussi émue du sort des Rohingya, affirmant favoriser leur accueil tout en jugeant la situation migratoire de plus en plus « intenable ».  Elle a, par conséquent, souhaité savoir comment il serait possible d’aider au retour sûr et volontaire des réfugiés dans leur pays.

L’Islande a appelé à un règlement pacifique de la crise et à un retour de la démocratie au Myanmar, tandis que la France souhaitait connaître les leviers dont dispose la communauté internationale pour améliorer l’accès des organisations humanitaires aux populations vulnérables.  Que peut faire la communauté internationale pour garantir l’accès aux populations déplacées du Myanmar et assurer leur protection? a pour sa part demandé le Royaume-Uni.  Appelant à un retour volontaire et sûr des réfugiés rohingya et des personnes déplacées, les États-Unis ont voulu savoir dans quelles mesures les États Membres peuvent promouvoir les principes de responsabilité à l’égard des auteurs de la violence.  Comment la communauté internationale peut-elle davantage appuyer la mise en œuvre de la résolution 26/69 adoptée par l’Assemblée générale en 2022, qui appelle le régime à mettre fin à ses violences, à libérer les prisonniers arbitrairement détenus, à permettre un accès humanitaire sans entrave, à protéger les membres des groupes minoritaires et à respecter la volonté et les aspirations démocratiques du peuple du Myanmar, a demandé la Suisse.

Le Bélarus a, pour sa part, plaidé en faveur de la recherche d’un mode de règlement des problèmes qui soient acceptables pour toutes les parties, espérant qu’un format constructif de coopération soit trouvé.  La Chine a, elle, souligné la contribution cruciale de l’ASEAN à la recherche d’un règlement au Myanmar, avant de demander à l’ONU de respecter le rôle de chef de file de cette organisation régionale.  La délégation chinoise a d’ailleurs exprimé son opposition au Mécanisme indépendant d’enquête, créé « sans consultation ni appui du gouvernement concerné », ainsi qu’à l’utilisation des droits humains comme prétexte pour faire pression sur d’autres pays.

Enfin, l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale a mis l’accent sur la situation des Rohingya, qui font l’objet de crimes contre l’humanité.  S’agissant de la tenue d’élections au Myanmar, échéance reportée à plusieurs reprises par la junte au pouvoir, elles devront inclure les Rohingya, a estimé l’Institut, mettant en garde contre un scrutin qui ne bénéficierait pas de l’appui de la communauté internationale.  La situation des Rohingya montre clairement les liens intrinsèques qui existent entre la démocratie, les droits humains, la non-discrimination, la paix et le développement, a-t-il conclu. 

Premier à réagir à ces questions et commentaires le Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique a appelé à la mise en œuvre de la résolution 2669 (2022), rappelant le consensus du Conseil de sécurité en faveur d’une aide humanitaire et d’un dialogue inclusif pour une solution politique négociée.  Il s’est félicité de la décision de l’ASEAN de reconfirmer sa feuille de route pour parvenir à une solution durable, rappelant que l’ONU fournit une expertise comparative pour la médiation et l’aide humanitaire.  Il s’est inquiété des déficits de financements en matière de réponse humanitaire, ainsi que des contraintes d’accès à certaines zones, appelant les États Membres à appuyer le plan de réponse pour le Myanmar.

Il a également engagé les pays voisins, notamment ceux exerçant une influence sur la junte, à faciliter un accès sans entrave aux personnes dans le besoin.  Il a assuré que tout est mis en œuvre pour échanger avec les parties prenantes, signalant cependant que ces efforts sont confrontés à des limitations découlant du risque de détentions arbitraires et des craintes de représailles.  Nous sommes également conscients de l’absence de protection des civils dans les zones où les attaques s’intensifient, a-t-il ajouté.  Il a enfin fait savoir que le plan d’intervention pour les Rohingya n’est financé qu’à hauteur de 42%. 

Le Chef du Mécanisme indépendant d’enquête pour le Myanmar, après avoir rappelé que le premier point du consensus en cinq points consiste à « mettre fin à la violence », n’a pu que constater que celle-ci s’intensifie.  Et elle s’intensifie en premier lieu parce que l’impunité demeure, les criminels n’ayant pas eu à répondre de leurs exactions jusqu’ici.  C’est pour cette raison que le Mécanisme est si important et doit venir compléter le consensus en cinq points, a-t-il plaidé. 

Remerciant les États qui ont aidé le Mécanisme dans la collecte de témoignages —particulièrement le Bangladesh qui a laissé ses équipes s’entretenir avec des réfugiés rohingya— le Chef du Mécanisme a requis davantage de soutien de la part des États impliqués dans la crise.  Il a également remercié les organisations de la société civile, dont il dépend pour être informé et présenté aux témoins ou aux victimes de crimes. 

Répondant à son tour aux délégations, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a tout d’abord constaté que l’aide humanitaire envoyée au Myanmar n’est pas suffisante.  Quelque 17,6 millions de personnes qui en ont besoin ne la reçoivent toujours pas, a-t-il déploré, appelant la communauté internationale à soutenir les organisations de la société civile sur place. Abordant ensuite la question des réfugiés rohingya accueillis à « bras et cœur ouverts » au Bangladesh, M. Andrews a regretté que le Plan d’intervention conjoint face à la crise humanitaire des Rohingya ne soit encore financé qu’à 42%.  Nous pouvons obtenir de meilleurs résultats pour appuyer ces réfugiés au Bangladesh, a-t-il lancé aux États Membres. 

Le Rapporteur spécial a ensuite appelé à continuer de « braquer les projecteurs sur cette crise ».  La junte militaire pense que le monde ne l’observe pas, que cela ne nous importe pas: « c’est faux », a-t-il tranché, avant de s’alarmer de l’augmentation ces deux dernières années des frappes aériennes menées par le pouvoir militaire.  L’armée continue de bombarder des villes et des villages, a-t-il dénoncé, exhortant les États Membres à prendre des mesures pour « clouer au sol ces avions à réaction ou autres hélicoptères de combat en faisant cesser l’acheminement de kérosène ».  Selon lui, l’équivalent d’un milliard de dollars d’armes et de technologies réutilisables ont été livrées à la junte depuis le coup d’État de 2021. 

M. Andrews s’est cependant réjoui de quelques progrès, un pays ayant cessé ses envois de technologies militaires, tandis que Singapour et l’Allemagne ont lancé des enquêtes contre des entités se livrant à des transferts d’armes vers la junte.  De plus, les États-Unis ont sanctionné deux banques au Myanmar, d’autres pays s’en sont pris à 187 entités ou individus, et l’Union européenne a imposé des rétorsions aux compagnies nationales de pétrole et de gaz, principales ressources de la junte. Des dizaines de milliers de dollars ont ainsi échappé aux militaires, s’est félicité le Rapporteur spécial. 

La junte n’est pas un gouvernement légitime, a-t-il répété en abordant un autre volet de questions.  Toute légitimation externe sera récupérée par la junte, qui l’utilisera à l’intérieur des frontières du Myanmar, a averti M. Andrews.  Évoquant ensuite le recensement que la junte entend mettre en œuvre en vue d’éventuelles opérations électorales, il a jugé impossible de tenir des élections tant que le régime exécute ses opposants.  Il a donc appelé tous les États Membres à condamner ce projet électoral comme une « farce ».  Avant de conclure, le Rapporteur spécial a exhorté le Conseil de sécurité à adopter une résolution suivie de mesures concrètes et fortes.  Il s’est toutefois déclaré conscient que cela « ne se produira pas dans le contexte actuel », d’où l’importance pour lui d’une coordination entre toutes les nations solidaires du peuple du Myanmar, pour faire des mesures contre la junte « un tout cohérent et puissant ».

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