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Syrie: la composition du comité constitutionnel, objet d’une mésentente au Conseil de sécurité

8383e séance – matin  
CS/13556

Syrie: la composition du comité constitutionnel, objet d’une mésentente au Conseil de sécurité

À la demande de la France, des États-Unis et du Royaume-Uni, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a, ce matin, informé le Conseil de sécurité des résultats de ses derniers efforts pour faciliter la formation d’un comité constitutionnel dans ce pays, source d’un désaccord avec Damas.

S’exprimant par visioconférence depuis Beyrouth, le haut fonctionnaire a expliqué que, le 24 octobre, le Vice-Premier Ministre syrien et Ministre des affaires étrangères, M. Walid Al-Moualem, lui avait réitéré la position de son gouvernement, qui demande le retrait du « dernier tiers » des candidats proposés pour siéger dans ce comité, celui de la société civile, les deux autres étant formés par le Gouvernement et l’opposition. 

M. de Mistura lui a expliqué que cette option ne serait possible « qu’à condition d’un accord préalable sur une liste de substitution », ce à quoi le Ministre a répondu qu’il reviendrait vers lui à ce sujet à l’issue des prochaines consultations avec les garants du processus d’Astana –Fédération de Russie, République islamique d’Iran et Turquie.

L’Envoyé spécial a assuré le Conseil qu’il avait scrupuleusement suivi les critères fixés pour la sélection des candidats de la société civile.  Mais, contrairement aux termes mêmes de la déclaration conjointe de Sotchi, Damas n’accepte pas que l’ONU joue un rôle dans la composition du comité, s’est défendu M. de Mistura.  « Nous voilà placés face à un défi de taille, que j’ai l’intention de tout mettre en œuvre pour relever », a-t-il assuré.

« L’Envoyé spécial n’est pas un ordonnateur, mais un facilitateur: il a pour mandat de faciliter le processus politique en Syrie », a rétorqué le représentant syrien, qui a cependant assuré les membres du Conseil que son pays reste disposé à coopérer avec le haut fonctionnaire.  « Facilitation, et non tutelle », a-t-il insisté, en rejetant les « échéances artificielles » que l’on souhaiterait, selon lui, imposer pour la formation de ce comité.

Les États-Unis ont en effet aujourd’hui rappelé que le « Small Group », dont ils font partie aux côtés de l’Allemagne, la Jordanie, l’Arabie saoudite, le Royaume-Uni et la France, est convaincu que le comité constitutionnel doit être convoqué « avant la fin du mois de novembre », date à laquelle M. de Mistura quittera ses fonctions.  « Vous avez notre plein soutien pour convier sans tarder les participants à une première réunion en novembre.  Nous vous invitons fortement à aller de l’avant », l’a encouragé la France.

Tandis le Royaume-Uni jugeait « incroyable d’avoir à expliquer une fois de plus pourquoi l’ONU doit jouer un rôle en Syrie », le représentant français a dénoncé « l’obstruction » supposée du « régime syrien ».  « Du tableau que vous venez de présenter, il ressort –ce qui était, hélas, prévisible– que le régime ne s’estime pas lié par un engagement, alors même qu’il […] rejette la liste du troisième tiers du comité constitutionnel proposé par l’Envoyé spécial, n’hésitant pas à piétiner ce faisant les règles établies à Sotchi ».

« Notre profonde conviction est qu’il existe aujourd’hui, pour la première fois peut-être depuis sept ans, une étroite fenêtre d’opportunité » pour « emprunter le chemin exigeant d’une dynamique politique pour un règlement du conflit ».  La création du comité constitutionnel peut et doit constituer, selon le délégué français, un « point d’inflexion », et le Sommet d’Istanbul qui réunira samedi la France, l’Allemagne, la Fédération de Russie et la Turquie, doit permettre d’avancer en ce sens.

Les Pays-Bas ont brandi la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité pour justifier la prérogative de l’Envoyé spécial dans la formation de ce comité. Mais la Fédération de Russie a balayé les « leçons de morale » d’un « petit nombre de pays », estimant qu’il n’est pas possible d’imposer un comité constitutionnel qui irait à l’encontre des attentes des parties syriennes.

Le délégué russe a fait état d’un « retour à la normale » pour beaucoup de Syriens, dans de nombreuses régions qui seraient désormais « sécurisées », assurant que les garants du processus d’Astana font de leur mieux pour préserver la situation sur le terrain.  Le 17 septembre dernier à Sotchi, un accord entre la Russie et la Turquie avait été conclu sur l’établissement d’une zone démilitarisée à Edleb, bastion, selon le délégué syrien, de « 30 000 terroristes ».

« Ce n’est pas notre intention de reprendre Edleb en violation de l’accord », a assuré ce dernier, mais nous « le ferons le moment venu » si les efforts diplomatiques en cours ont échoué à faire revenir cette province « sous notre souveraineté », a-t-il cependant précisé.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

S’adressant au Conseil de sécurité par visioconférence depuis Beyrouth, M. STAFFAN DE MISTURA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a déclaré qu’il s’était rendu à Damas le 24 octobre, où il s’est entretenu avec le Ministre des affaires étrangères, M. Walid Al-Moualem, de la question de la formation du comité constitutionnel.  À cette occasion, le Chef de la diplomatie syrienne a réitéré l’importance pour son gouvernement que l’on s’abstienne de toute ingérence dans les affaires internes de son pays, une position qui s’étend à la rédaction de la constitution.  Or, contrairement au mémorandum d’accord signé avec l’ONU et Damas et aux termes mêmes de la déclaration de Sotchi, le Ministre n’accepte pas que l’Organisation joue un rôle dans la composition de ce comité.

L’Envoyé spécial a assuré avoir scrupuleusement suivi les critères fixés pour la sélection des candidats de la société civile, l’un des trois groupes appelé à siéger au sein de ce comité, aux côtés des délégations du Gouvernement et de l’opposition.  Le Ministre Al-Moualem, a précisé M. de Mistura, a proposé que l’on retire le troisième tiers de cette liste, ce à quoi ce dernier a répondu que ce serait possible « uniquement à condition qu’il y ait au préalable un accord sur une liste de substitution ».  Le Ministre lui a dit qu’il reviendrait vers lui à ce sujet, ajoutant qu’il serait souhaitable à ce stade d’attendre les résultats des prochaines consultations avec les garants d’Astana, qui auront lieu demain, 27 octobre. 

Le Gouvernement a très clairement exposé sa position et « nous voilà placés face à un défi de taille, que j’ai l’intention de tout mettre en œuvre pour relever », a assuré l’Envoyé spécial.  « L’ONU n’est pas opposée à des suggestions constructives et modérées sur la formation d’une troisième liste.  Mais ne laissons pas passer la fenêtre de tir qui se présente à nous en novembre. »  Je ferai tout mon possible « pendant le temps qu’il me reste avant de quitter mes fonctions » pour convoquer un comité constitutionnel piloté par les Syriens sous les auspices des Nations Unies, dans le respect de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, a insisté en conclusion l’Envoyé spécial.

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a déclaré que les membres du « Small Group », à savoir les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, l’Égypte, l’Allemagne, la Jordanie, l’Arabie saoudite, ainsi que d’autres partenaires sont tous du même avis: le comité constitutionnel doit être convoqué avant la fin du mois de novembre.  « En dépit de ce qu’a entendu M. de Mistura à Damas, les Nations Unies ont le contrôle sur la composition dudit comité », a insisté le représentant, ajoutant que « faire perdre du temps supplémentaire est irresponsable ».  Du point de vue des États-Unis, « toute autre liste, proposée par qui que ce soit, doit être approuvée par l’Envoyé spécial, comme il est dit dans la résolution 2254 (2015) », a conclu le représentant.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a déclaré qu’« entre la guerre et la paix en Syrie, la clef est pour une large part dans le pays de Tolstoï ».  Moscou doit peser de tout son poids sur Damas pour que ce comité soit mis en place, a-t-il précisé.  Alors que l’ensemble des membres du Conseil de sécurité, « sans exception », ont plaidé pour la mise en place du comité constitutionnel, « il est temps que les choses avancent », a-t-il poursuivi, disant prendre acte de « l’obstruction opposée par le régime syrien au processus politique ».

Cela dit, en tant que membre du « Small Group », la France estime que « l’offre est désormais sur la table et c’est à vous qu’il revient de trancher », a-t-il lancé à M. de Mistura, rappelant qu’il avait reçu mandat des Nations Unies pour mener à bien ces travaux et aboutir à la composition dudit comité.  « Notre détermination est claire », a affirmé le représentant, avant d’indiquer que les membres du « Small Group » se réuniront avant la fin de ce mois dans le but de mobiliser les efforts afin que ce comité réussisse. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a jugé « incroyable que nous ayons à expliquer une fois de plus pourquoi l’ONU doit jouer un rôle en Syrie », compte tenu de la gravité de la crise dans ce pays, dont les conséquences sur la stabilité régionale et internationale sont évidentes.  Est-ce que la Russie a bien donné des garanties à l’ONU, ou s’agissait-il d’un accord élaboré « avec cynisme » pour détourner l’attention du Conseil de sécurité de la poursuite de l’offensive militaire par son allié syrien? s’est demandé Mme Pierce.  La Russie ainsi que la Turquie et l’Iran doivent prêter à l’Envoyé spécial l’appui nécessaire pour lui permettre de s’acquitter de ses fonctions, a exhorté la représentante, qui a émis l’espoir d’avoir de nouvelles informations au lendemain de la réunion du 27 octobre.

M. OLOF SKOOG (Suède) s’est dit profondément déçu par le manque persistant de coopération de la part du Gouvernement syrien concernant le comité constitutionnel, qui contredit la Déclaration finale de Sotchi transmise au Conseil par la Russie.  Il a appelé le Gouvernement syrien à coopérer pleinement avec l’ONU et ceux qui ont des relations étroites avec Damas, en particulier la Russie, pour soutenir de tels efforts.  Il a dit appuyer pleinement l’Envoyé spécial et son mandat de créer un comité constitutionnel, avant de rappeler que, selon la Déclaration de Sotchi, la sélection finale du comité doit se faire via le processus de Genève et l’Envoyé spécial des Nations Unies.  Enfin, le délégué a appelé le Gouvernement à soutenir le processus politique dirigé par l’ONU et à s’assurer qu’il y aura de réels progrès avant la prochaine réunion en novembre.

M. MA ZHAOXU (Chine) a déclaré que le processus de règlement politique se poursuit dans une Syrie « globalement stable », où l’Envoyé spécial a été invité à discuter de ce processus, et notamment de la formation du comité constitutionnel.  Il a estimé que la communauté internationale devrait tout mettre en œuvre pour relancer ce processus piloté par les Syriens eux-mêmes dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de leur pays.  « L’avenir de la Syrie appartient aux Syriens », a-t-il insisté, tout en soulignant l’importance du processus d’Astana.  La délégation chinoise a espéré que les parties concernées garantiront la démilitarisation d’Edleb, en facilitant le retour des réfugiés le plus rapidement possible dans leurs foyers.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a dit être « déçu » car il s’attendait à des « évolutions positives ».  Il est grand temps de former un comité constitutionnel, avant la fin de novembre, a encore plaidé le représentant, ajoutant que « retarder le processus ne fait que compliquer les choses ».  Il a estimé que l’autonomie de l’ONU est essentielle en ce qui concerne la composition, le calendrier et la portée des travaux du comité constitutionnel.  « Nous appuyons fermement l’Envoyé spécial, a-t-il indiqué à cet égard, soutenant en particulier son engagement à assurer que les femmes constituent 30% des membres du comité. »  Même si le comité constitutionnel n’est pas une fin en soi, c’est néanmoins une part importante des efforts et un élément de base de la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) et du Processus de Genève, a dit le représentant. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a estimé que l’accord de Sotchi relatif à la démilitarisation d’Edleb avait offert un contexte plus apaisé pour la relance du processus politique en Syrie.  Soulignant « l’urgente nécessité » de former dans les meilleurs délais le comité constitutionnel, et d’en définir les modalités d’action, le représentant a fait part des préoccupations qui sont les siennes devant les retards pris par cette tâche.  Il a insisté sur l’importance de le faire dans le courant du mois de novembre. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a remercié l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. de Mistura, pour ses efforts inlassables pour qu’il y ait des consultations dans la période à venir en vue d’établir les possibilités de la mise en place d’un comité constitutionnel crédible et équilibré, facilité par les Nations Unies et dirigé par les Syriens.

Le Kazakhstan suit de près la crise syrienne et soutient toute initiative visant à régler le conflit violent qui y fait rage le plus rapidement possible.  Pour sa délégation, la protection du peuple syrien, des civils et des objets représente une priorité de premier ordre.  À ce stade, il faut veiller au maintien de la paix autour d’Edleb, a poursuivi le représentant, remerciant au passage la Fédération de Russie et la Turquie pour leur accord qui a permis d’éviter l’effusion de sang et une crise humanitaire de grande échelle.  Il a également salué la mise en place de corridors humanitaires qui peuvent être usés par plus de 3 000 civils, estimant que c’est le résultat de la création de la zone démilitarisée.

Se félicitant de l’accord du 24 octobre par les garants d’Astana pour accélérer la formation du comité constitutionnel, le représentant a également salué la volonté du groupe d’Astana de poursuivre le dialogue avec le « Small Group » sur la Syrie, sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.

Le Kazakhstan souligne qu’il est important d’aller de l’avant le plus rapidement possible avec la création de ce comité constitutionnel qui représente « un point de départ » pour la relance du processus politique en Syrie.  Le représentant a aussi insisté sur le fait qu’il appartient aux Syriens de définir la forme de leur futur système politique et de leur État à travers les réformes législatives nécessaires, les structures territoriales et administratives ainsi que les élections parlementaires et présidentielle.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït), membre du « Small Group », a déclaré que « la formation de comité constitutionnel est important dans le contexte actuel et permet d’atteindre les objectifs de la résolution 2254 (2015).  La composition de ce comité repose sur les Nations Unies, comme le dit aussi cette même résolution.  S’adressant à M. De Mistura, il a lui a dit « vous avez la légitimité de composer ce comité et nous espérons qu’il pourra se réunir avant la fin de votre mandat ».

En conclusion, le représentant a souligné l’importance de respecter les résolutions des Nations Unies. 

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) a pris acte du fait que les discussions de l’Envoyé spécial avec le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Syrie sur la formation du comité constitutionnel n’avaient pas été faciles et qu’un terrain d’entente pourrait ne pas être trouvé dans l’immédiat.  Il a néanmoins estimé que l’Envoyé spécial devrait poursuivre ses efforts pour convoquer le comité constitutionnel aussi rapidement que possible. 

« Nous sommes tous d’accord quant au fait que l’accord conclu entre la Fédération de Russie et la Turquie sur Edleb présente une fenêtre d’opportunités qui devrait être saisie pour revitaliser un processus politique crédible et inclusif mené par les Syriens eux-mêmes, a ajouté la délégation », en soulignant que la première étape est de former le comité constitutionnel.  Il a placé des espoirs dans les initiatives diplomatiques à l’œuvre cette semaine et ce week-end pour maintenir l’élan pris en ce sens.

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a souhaité que le séjour de M. Staffan de Mistura à Damas, en République arabe syrienne, soit mis à profit pour la levée effective des derniers obstacles à la mise en place du comité constitutionnel.  Il s’est félicité de la tenue le 27 octobre 2018 à Istanbul, du sommet quadripartite (Allemagne, France, Fédération de Russie et Turquie), qui servira de cadre de réflexion sur le processus politique de sortie de crise, ainsi que sur la situation à Edleb. 

La Côte d’Ivoire a souhaité vivement la poursuite du dialogue entre toutes les parties prenantes.  Elle a appelé les belligérants au respect des dispositions de la résolution 2254 (2015) et a exhorté les États membres du Conseil de sécurité à retrouver l’unité qui leur a toujours permis de relever les défis à la paix et à la sécurité internationales. 

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a déclaré que n’ayant pas de solutions militaires au conflit syrien, il faut tendre vers une solution politique, et se saisir de l’occasion de l’accord sur Edleb pour avancer vers ce processus.  À cet égard, la solution politique doit être trouvée dans la résolution 2254 (2015) et le processus de Genève, a-t-il lui aussi rapidement conclu. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a appelé les parties à progresser sur la formation du comité constitutionnel, espérant que la démilitarisation d’Edleb facilitée par les garants d’Astana donnerait un élan au processus.  Il a appelé les parties à ne ménager aucun effort pour la mise en place d'un comité hautement crédible et le plus représentatif possible.  Il faut, a-t-il demandé, que les partis nationaux renoncent à leurs intérêts partisans et soient en position d’égalité.  Le représentant a espéré que le sommet sur la Syrie, qui se tiendra demain entre la Fédération de Russie, la Turquie, la France et l'Allemagne, contribuera à la promotion d’une solution politique de crise donnant la priorité au débat sur le début des travaux du comité.

M. VASSILY NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré qu’il ne se souvenait pas que les envoyés de l’ONU fussent autorisés à faire rapport devant le Conseil de sécurité aussi fréquemment.  Balayant les « leçons de morale » d’un « petit nombre de pays », le représentant a estimé, pour sa part, que le règlement syrien progresse et que les garants d’Astana font de leur mieux pour préserver la situation sur le terrain.  Aujourd’hui en Syrie, dans de nombreuses régions, la sécurité est revenue et les gens ont repris une vie normale, a-t-il assuré.  On ne peut, selon lui, imposer un comité constitutionnel qui irait à l’encontre des attentes des parties syriennes, a affirmé M. Nebenzia, avant de donner l’assurance que sa délégation compte aider l’Envoyé spécial à former ce comité constitutionnel.  Il a cependant mis en garde le « petit groupe de pays » qui cherche à tirer profit de la situation actuelle pour promouvoir son agenda politique. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) s’est dit convaincu que le dialogue reste le meilleur moyen de parvenir à un résultat positif en Syrie, assurant que les garants du processus d’Astana avaient permis de stabiliser la situation sur le terrain.  Il s’est félicité du travail de M. de Mistura, confiant que l’« action patiente et réfléchie » porterait ses fruits.  Le représentant a estimé en outre que la solution passe par l’application de la déclaration conjointe de Sotchi.  Enfin, dans le cadre du droit international et le respect du principe de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale de ce pays, il a lancé un appel à résoudre ce conflit par un processus politique inclusif et un dialogue concerté, menés par et pour le peuple syrien.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a déclaré avoir l’impression que certains pays qui interviennent ici veulent saper la coopération exemplaire que son pays entretient avec les Nations Unies.  La République arabe syrienne est un membre fondateur de l’Organisation des Nations Unies et a été élue à trois reprises au Conseil de sécurité.  Elle n’est donc pas étrangère à son fonctionnement, a-t-il fait valoir.  Il a ajouté que la Syrie avait pleinement participé au processus de Genève et d’Astana.  Elle s’est engagée constructivement avec les différents Envoyés spéciaux, Kofi Annan, Lakhdar Brahimi et Staffan de Mistura.

Avec le Conseil de sécurité, la Syrie a discuté 56 fois de la situation humanitaire avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et a participé à des dizaines de réunions avec l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il en a déduit que « personne ici ne peut douter, ni remettre en cause la coopération du Gouvernement syrien avec les Nations Unies », ajoutant souhaiter que cela ne soit plus jamais remis en cause dans les réunions importantes.

M. Ja’afari a également déclaré que son pays est victime depuis sept ans d’une guerre menée par des groupes terroristes implantés sur son territoire, présentés comme une « opposition modérée ».  Il a vivement déploré que l’Envoyé spécial n’ait jamais mentionné une seule fois ni ce terrorisme, ni les 69 raids aériens menés jusqu’à ce jour par la coalition dirigée par les États-Unis.  « Jamais il n’a condamné ces attaques, qui ciblent tout sauf les groupes terroristes, et qui atteignent des villages de civils, en dépit des demandes répétées de la délégation syrienne », a-t-il déploré.  S’adressant aux autres délégations, il a dit que les pays qui respectent le droit à la vie devraient se retirer et s’écarter de cette coalition.  « Aujourd’hui, pas demain », leur a-t-il lancé.

M. Ja’afari a ensuite déclaré qu’Edleb est une partie chère à la Syrie, et de ce fait, le Gouvernement entend la récupérer, comme le lui permet la Charte des Nations Unies.  « Edleb ne sera pas transformée en cave à terroristes comme à Tora Bora.  Le Gouvernement syrien ne le permettra pas et c’est déjà tranché. »

Abordant la question du processus politique, il a déclaré que son pays croit en la loi de la Charte des Nations Unies, elle-même basée sur le droit et non la force et l’arrogance.  C’est sur cette base que la Syrie s’est engagée dans le processus de Genève et a accepté le principe de la création du comité constitutionnel, a-t-il expliqué.  « L’Envoyé spécial n’est pas un ordonnateur, mais un « facilitateur. Il a pour mandat de faciliter le processus politique en Syrie », a-t-il insisté, ajoutant que son pays reste disposé à coopérer avec lui.  

Cela dit, la coordination avec d’autres États, comme la Fédération de Russie ou la République islamique d’Iran, peut également permettre de progresser sur cette voie, a estimé le délégué.  « Ce sont les Syriens qui, à Sotchi ont accepté la création de ce comité », a-t-il redit, ajoutant que « les calendriers artificiels ne permettront pas de réaliser les aspirations du peuple syrien ».

Reprenant la parole, la représentante du Royaume-Uni a souhaité savoir si l’accord russo-turc tient encore à Edleb?

Lui répondant, son homologue de la République arabe syrienne a déclaré qu’Edleb est une partie importante de son pays, au même titre que « Glasgow, Marseille ou la Floride ».  Lorsqu’un État siégeant au Conseil de sécurité est menacé par le terrorisme, il est normal qu’il mette tout en œuvre pour neutraliser cette menace, comme on a pu le voir ces derniers jours.  Que dire des 30 000 terroristes présents à Edleb?  « Ce sont des terroristes modérés, c’est bien connu », a ironisé le délégué.  Ce n’est pas notre intention de reprendre Edleb en violation de l’accord, mais nous « le ferons le moment venu » si les efforts diplomatiques ont échoué à faire revenir ce territoire sous notre souveraineté. 

La Fédération de Russie a répondu à sa collègue britannique que l’accord tient et continue d’être respecté, avant de confirmer les propos tenus par le représentant de la République arabe syrienne. 

Prenant à son tour la parole, l’Envoyé spécial a souhaité « clarifier un point »: « lorsque j’ai rencontré le Ministre des affaires étrangères, il n’a pas évoqué la question du terrorisme, mais seulement celle du comité constitutionnel.  Il a déclaré qu’il attendait une proposition du processus d’Astana.  Je continuerai d’évaluer la mise en œuvre des mesures de l’Accord de Sotchi et saisirai la moindre occasion en vue d’adresser des invitations aux parties concernées pour parler du comité constitutionnel ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: toujours aussi peu de femmes dans les processus de maintien et de consolidation de la paix, alerte la Directrice d’ONU-Femmes

8382e séance – matin
CS/13554

Conseil de sécurité: toujours aussi peu de femmes dans les processus de maintien et de consolidation de la paix, alerte la Directrice d’ONU-Femmes

« Ce rapport est un cri d’alarme sur l’échec d’intégration des femmes dans le maintien de la paix », a d’emblée prévenu la Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), Mme Phumzile Gloria Mlambo-Ngcuka.  Alors qu’elle présentait, ce matin au Conseil de sécurité, le rapport du Secrétaire général sur « les femmes et la paix et la sécurité », elle a indiqué que, comme l’an dernier, les indicateurs annuellement relevés en matière de processus de paix et de médiation stagnent, quand ils ne chutent pas. 

Ainsi, selon les conclusions du rapport, entre 1990 et 2017, les femmes ont continué de compter pour seulement 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et signataires des principaux accords de paix; et seuls 11% des accords signés en 2017 contiennent des dispositions relatives à la parité entre les genres.  Cette tendance est similaire à celle observée entre 2000 et 2016, où seuls 25 des 1 500 accords signés dans cette période traitaient du rôle des femmes dans les phases de mise en œuvre. 

Elle est même confirmée sur le terrain avec des exemples précis: au Yémen par exemple, aucune femme n’est présente dans les processus actuels visant la reprise du dialogue.  Au Mali, on compte à peine 3% de femmes dans les comités crées pour surveiller la mise en œuvre de l’Accord de paix.  En République centrafricaine et en Afghanistan, les processus de médiation excluent complètement les femmes, a déclaré la Directrice d’ONU-Femmes. 

Le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, qui participait au débat, a regretté cette tendance.  Le nombre total de femmes dans les opérations de paix culmine toujours à 4% des troupes et 10% des effectifs de police.  Pourtant, des exemples existent où la participation des femmes aux processus de paix a eu un impact positif, notamment en Guinée-Bissau, en Colombie et même en Syrie, où des femmes ont négocié des cessez-le-feu sur le plan local, participé à la création de zones de sécurité civile et coordonné des activités humanitaires et de secours, a-t-il assuré.

Mais, alors que la résolution 1325 (2000) a été suivi de huit autres, « comment se fait-il que les femmes demeurent exclues des processus de paix », s’est interrogée la délégation des Pays-Bas, rejointe par celle de la France dont le représentant s’est demandé « comment les opérations de maintien de la paix pourraient-elles protéger efficacement l’ensemble de la population civile sans que les femmes ne soient engagées comme actrices de la paix et de la sécurité? »

En dépit de leurs inquiétudes, ces délégations, à l’instar d’autres, se sont toutefois montrées optimistes, en observant que malgré tout, la situation évoluait positivement.  Ainsi la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) appelle désormais à la participation pleine et effective des femmes aux processus de décision.  Le Conseil de sécurité a récemment décidé d’augmenter le nombre de femmes au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), tout en faisant désormais référence aux droits et à la participation des femmes dans plus de 70% de ses résolutions et 90% de ses déclarations présidentielles. 

La situation commence en effet à changer, s’est également réjoui la Ministre suédoise des affaires étrangères.  Elle a observé que lorsque les pourparlers de paix ont commencé en 2012 en Colombie, il n’y avait qu’une seule femme autour de la table.  Deux ans plus tard, les femmes représentaient 20% de l’effectif de l’équipe de négociation du Gouvernement, et 43% de celle des FARC.  Ce sont elles qui ont été à l’initiative du désenrôlement des enfants-soldats, a-t-elle fait valoir.

On peut également se féliciter que le Prix Nobel de la paix ait été décerné, cette année, à Denis Mukwege et Nadia Murad, deux personnes engagées dans la promotion des droits de la femme.  Par ailleurs, et pour la première fois de son histoire, l’Éthiopie a placé une femme à sa tête et dispose désormais d’un gouvernement parfaitement paritaire, se sont réjouies plusieurs délégations.

Attention cependant, « la participation est un droit et non un traitement de faveur qu’il faut accorder aux femmes », a rétorqué le Royaume-Uni, ne manquant pas de préciser que la participation des femmes permet d’augmenter de 35% les chances de réussite d’un accord et son appropriation par les communautés.  C’est également une question économique qu’il ne faut pas perdre de vue.  Accorder un accès aux droits à la moitié de la population est une manière de susciter la croissance économique, a expliqué la délégation.

Face à ce paradoxe, il apparaît donc clairement qu’il faut faire davantage; le Conseil doit utiliser tous les outils à sa disposition pour assurer une participation effective des femmes, a plaidé la Directrice générale du Centre des femmes pour l’aide juridictionnelle et le conseil juridique, Mme Randa Siniora Atallah.  Il faut en effet surmonter le fossé entre les mots et l’action, a ajouté le Kazakhstan, synthétisant la pensée de nombre de délégations.  Un des moyens est de mettre pleinement en œuvre la résolution 1325 (2000), dans le contexte du vingtième anniversaire de son adoption qui sera célébrée en 2020. 

À cet effet, le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, le réseau de points focaux nationaux, de même que les plateformes de partages des meilleures pratiques comme « FemWise-Africa, ont été cités en tant qu’outils permettant d’obtenir des résultats sur le terrain, notamment par la délégation des États-Unis et celle du Ghana, cette dernière parlant au nom du Réseau des dirigeantes africaines.

Mais pour la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité doit s’en tenir à la question à l’ordre du jour et respecter les buts de la Charte des Nations Unies, l’objectif étant simplement de permettre aux femmes de participer à ces processus à pied d’égalité avec les hommes.  C’est pourquoi le représentant russe a indiqué ne pas soutenir la création de mécanismes additionnels.

Quoi qu’il en soit, les femmes sont « les victimes du système patriarcal, qui, ancré dans le système capitaliste, perpétue les inégalités, l’oppression économique, sociale et culturelle des femmes dans le monde entier », a estimé la Bolivie, tandis que l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) a préconisé de déconstruire les normes sociales qui sont à la base de la dévalorisation du rôle de la femme.

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

Promouvoir la mise en application du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et de la pérennisation de la paix par le biais de l’émancipation politique et économique des femmes (S/2018/900 et S/2018/904)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que jamais, au cours des 30 dernières années, le nombre de pays en proie à une forme de conflit violent n’a été aussi élevé.  « Les déplacements forcés dus aux guerres et aux persécutions sont plus nombreux que jamais.  Les changements climatiques et le sous-développement menacent de plus en plus notre sécurité.  La question des droits de l’homme est reléguée au second plan.  Il y a tout lieu de s’inquiéter, mais nous devons résister au pessimisme ambiant et ne pas perdre de vue que des solutions existent », a déclaré le Chef de l’Organisation.  Il a dit que l’espoir avait toujours guidé nos pas dans l’action que nous menons collectivement pour les femmes, la paix et la sécurité.  C’est une question porteuse de changement, qui comporte bien des éléments dont nous avons besoin pour relever les défis complexes auxquels le monde doit faire face: changements climatiques, désarmement, égalité et inclusion. 

Au cours des dernières années, des exemples concrets de progrès ont été constatés, s’est réjoui M. Guterres, en soulignant l’impact positif des organisations de femmes sur la poursuite du dialogue en Guinée-Bissau ou encore la reconstruction des communautés en Colombie.  En République centrafricaine et au Mali, les femmes ont contribué avec succès à la négociation entre acteurs armés pour mettre fin à l’escalade des tensions intercommunautaires.  En Syrie, les femmes ont négocié des cessez-le-feu au niveau local, participé à la création de zones de sécurité civile et coordonné des initiatives humanitaires et de secours.  « De même au Yémen », a ajouté le Secrétaire général, qui a en outre attesté de l’importance cruciale du travail accompli par les femmes « artisanes de la paix », du Mali au Bangladesh.  « Ici même à l’ONU, le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire fournit des ressources aux organisations de femmes qui en ont besoin.  Le Fonds pour la consolidation de la paix investit plus de 30% de ses ressources dans les programmes d’égalité des sexes.  Et un nombre croissant de donateurs consacre des fonds à l’égalité des sexes. » 

Malgré des progrès, les faits sur le terrain montrent qu’il reste encore beaucoup à faire.  La participation des femmes aux processus de paix officiels reste extrêmement limitée, a reconnu le haut fonctionnaire.  « Entre 1990 et 2017, les femmes ne représentaient que 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et des signataires dans tous les processus de paix importants », a-t-il relevé.  De plus, les conflits continuent d’avoir un effet dévastateur sur les femmes et les filles, l’ONU ayant documenté plus de 800 cas de violences sexuelles liées aux conflits en 2017, « soit une hausse de 56% depuis 2016 ».  De plus, le financement de programmes visant à promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes dans les pays en conflit ne représente que 5% de l’aide bilatérale totale à ces pays, a constaté le Secrétaire général.  « Chaque année, nous prenons des engagements louables, mais ils ne bénéficient pas du soutien financier et politique requis. »

Pour remédier à cet écart, j’entends donner la priorité à plusieurs points d’action au cours de la prochaine année, a annoncé M. Guterres.  Tout d’abord, la parité hommes-femmes a le plus grand impact potentiel sur l’efficacité et la crédibilité de nos opérations sur le terrain, a-t-il affirmé.  C’est pourtant là que les chiffres sont les plus bas et le changement plus lent.  Si les femmes représentent désormais 41% des chefs et chefs adjoints des opérations de paix de l’ONU, soit « plus que jamais auparavant », le nombre total de femmes dans les opérations de paix a stagné.  Aussi le Secrétaire général a-t-il constitué un groupe de travail pour mettre en place des mesures d’urgence.  Notre crédibilité et notre capacité de protection sont également paralysées par le fait que les femmes ne représentent que 4% de nos soldats de la paix et 10% de la police.  L’ONU appuie pleinement les efforts novateurs lancés cette année par les États Membres afin d’encourager une plus grande représentation, a encouragé M. Guterres. 

Il s’est félicité que près de 100 États Membres aient signé avec l’Organisation des accords volontaires pour lutter contre l’exploitation et les abus sexuels, et appelé les autres à les rejoindre.  Le Cercle de leadership des chefs d’État et de gouvernement est attaché à la tolérance zéro, à la prévention et à l’élimination de ce fléau, ainsi qu’à la réduction de son impact, a-t-il noté.  S’agissant de la médiation, « nous savons que la participation significative des femmes est directement liée à une paix plus durable.  Et pourtant, nous continuons d’appuyer et de diriger des processus qui ne sont pas inclusifs ».  À cet égard, a-t-il dit, la création de plusieurs réseaux de femmes au cours des dernières années est une tendance importante, car elles peuvent jouer une influence positive dans ces processus.  « La participation des femmes ne doit pas se limiter à des rôles consultatifs ou à des structures parallèles », a exhorté le Secrétaire général. 

Par ailleurs, une approche sexospécifique de la paix et de la sécurité implique de soutenir la consolidation de la paix au niveau local, même pendant les conflits, a-t-il poursuivi, avant d’ajouter que le financement de ce programme est essentiel et que l’ONU a l’intention de donner l’exemple.  « J’ai créé un groupe de travail de haut niveau chargé d’examiner notre financement en matière d’égalité entre les sexes, notamment dans les domaines de la paix et de la sécurité.  Je tiendrai les entités des Nations Unies responsables de leurs engagements en matière de suivi des dépenses consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité, avec l’objectif d’atteindre ou de dépasser 15% d’ici à 2020 », a annoncé le haut fonctionnaire.  Enfin, « à partir de maintenant », il inclura l’analyse de genre dans ses rapports au Conseil de sécurité à chaque fois que cela sera utile d’éclairer ses décisions.

Dans deux ans, nous marquerons le vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, le cinquième anniversaire du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le vingtième anniversaire de la Déclaration de Beijing.  En prévision, son rapport sur les femmes, la paix et la sécurité, l’an prochain, comprendra une évaluation de la mise en œuvre des recommandations pertinentes dans les trois examens de la paix et de la sécurité entrepris en 2015, en particulier l’Étude mondiale sur l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et de la résolution 2242, adoptée en 2015.

Mme PHUMZILE GLORIA MLAMBO-NGCUKA, Secrétaire générale adjointe, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, ONU-Femmes, présentant le rapport du Secrétaire général, a déclaré que « ce rapport est un cri d’alarme sur l’échec d’intégration des femmes dans le maintien de la paix.  Les femmes ne peuvent pas être exclues des processus de paix uniquement parce qu’elles n’ont pas participé aux combats », a-t-elle estimé.  Prenant l’exemple du Soudan du Sud, elle a expliqué qu’après la signature de l’Accord revitalisé sur la résolution du conflit, et en dépit de l’objectif d’atteindre des quotas minimums de 35% de femmes dans les institutions, il n’y a qu’une seule femme parmi les membres du Comité national prétransitionnel, chargé de suivre la mise en œuvre de cet accord.  « C’est un taux de 10% et non 35% », a-t-elle dit.

Revenant au rapport, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a indiqué que comme elle l’avait déjà exprimé l’an dernier, les indicateurs annuellement relevés en matière de processus de paix et de médiation stagnent, quand ils ne chutent pas.  C’est pour cette raison que le rapport a voulu analyser la contribution des femmes à la paix.  Il souligne aussi que les efforts sont superficiels pour intégrer les femmes dans les processus, celles-ci étant fortement marginalisée dans les institutions chargées de mettre en œuvre les accords de paix. 

Ainsi, entre 1990 et 2017, les femmes ont représenté seulement 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et signataires des principaux accords de paix.  De plus, seuls 11% des accords signés en 2017 contiennent des dispositions relatives à la parité entre les genres.  En outre, sur les 1 500 accords paraphés entre 2000 et 2016, seuls 25 d’entre eux évoquent le rôle des femmes dans les phases de mise en œuvre.  Au Yémen par exemple, aucune femme n’est présente dans les efforts actuels visant à reprendre le dialogue, en dehors des équipes d’observateurs chargés de conseiller l’Envoyé spécial des Nations Unies. 

Au Mali, on compte à peine 3% de femmes dans les multiples comités nationaux crées pour surveiller la mise en œuvre de l’Accord de paix.  En République centrafricaine, les efforts de médiation ne portent que sur les 14 groupes armés et la présidence; ils excluent complètement les femmes.  En Afghanistan, le Gouvernement et ses partenaires internationaux investissent pour que les femmes soient présentes dans les hauts conseils de paix nationaux et provinciaux.  Mais dès qu’il s’agit de discuter avec les Taliban, il n’y a plus de femmes.  Tous ces chiffres confirment la tendance déjà évoquée l’an dernier, a encore déclaré la Directrice d’ONU-Femmes. 

Mme Mlambo-Ngcuka a indiqué que le rapport dresse par ailleurs un tableau de la situation des femmes dans les pays en conflit ou sortant de conflit, en présentant les marges de progrès.  Ainsi, le nombre de femmes parlementaires dans ces pays stagnent à 16% depuis trois ans.  En République démocratique du Congo par exemple, il n’y a que 12% de femmes candidates aux prochaines élections, un chiffre identique à celui d’il y a 7 ans.  En outre, seuls 17 pays ont élu des femmes à leur tête ou à la tête de leurs gouvernements, et aucun parmi les pays sortant de conflit.  Dans les situations de conflit, les filles ont une fois et demi plus de chance d’abandonner l’école primaire.  Au Yémen aujourd’hui le taux de mariage forcé est en hausse: 66% en 2017, contre 52% l’année précédente et 32% avant le conflit.  Dans ce contexte, la seule manière de lutter contre cette tendance est d’investir massivement et fortement dans les programmes destinés aux femmes, a plaidé la Secrétaire générale adjointe.

Mme Mlambo-Ngcuka a déclaré qu’il y avait cependant des motifs de satisfaction, notamment le fait que les décisions du Conseil de sécurité relatives aux situations spécifiques de pays ou de régions contenaient de plus en plus d’expressions relatives aux femmes, soit une hausse de 50% à 75%.  Le nombre de femmes présentant des exposés au Conseil de sécurité est également en augmentation, s’est réjouie la Directrice exécutive d’ONU-Femmes.  Mais de son point de vue, il y a encore des marges de progrès possibles, dans le contexte du 20e anniversaire de la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité, qui sera célébré en 2020.  Vingt ans après son adoption, il est temps pour les Nations Unies de tenir une discussion sur la façon de soutenir et de financer les processus qui excluent les femmes, comme cela a été demandé cette semaine au Conseil par les femmes de la société civile.  Il faut également faire davantage pour protéger les femmes militantes, défenseures des droits de l’homme et faiseuses de paix, a déclaré Mme Mlambo-Ngcuka, avant de se réjouir que le Prix Nobel de la paix ait été décerné conjointement au Docteur Denis Mukwege et à Mme Nadia Muras, deux défenseurs des droits de la femme. 

Mme RANDA SINIORA ATALLAH, Directrice générale du Centre des femmes pour l’aide juridictionnelle et le conseil juridique, qui représentait le Groupe de travail des organisations non gouvernementales sur les femmes et la paix et la sécurité, a indiqué parler « au nom des femmes palestiniennes qui font face quotidiennement à la violence, à la discrimination, à la privation et aux violations systématiques de leurs droits fondamentaux ».  Elle a commencé son discours par le récit de l’expérience de Mervat, une femme qui vit dans la vieille ville d’Hébron: « Un jour, elle sort les poubelles devant sa maison.  Une fois dehors, elle est violemment attaquée par un groupe de colons.  Ses voisins, qui ont entendu ses cris, la voient se faire battre et sonnent l’alarme. »  Mervat, a précisé Mme Siniora Atallah, était enceinte de quatre mois au moment des faits; elle a perdu son enfant, une des conséquences de ses blessures. 

Autre histoire racontée par Mme Siniora Atallah à propos d’une habitante de Jérusalem, Sana, qui s’était fait réveiller par la police en septembre dernier.  Mère de deux enfants, Sana avait été choquée d’apprendre que la police allait démolir sa maison sous prétexte que sa famille n’avait pas de permis de construire.  Elle avait une semaine pour quitter les lieux. 

Au début du mois de mai, durant la marche du retour à la frontière est de Gaza, Nisreen, une mère de trois enfants, a reçu une balle de l’Armée israélienne dans la poitrine, a encore raconté la représentante.  Au moment des faits, Nisreen manifestait pacifiquement avec un groupe de femmes et d’enfants.  Deux jours après, Alla avait reçu une balle dans le ventre alors qu’elle marchait avec ses amis pour aller voir un spectacle de danse près de la même frontière. 

« Ces histoires décrivent la vie sous occupation des femmes et des filles palestiniennes », a expliqué Mme Siniora Atallah en faisant remarquer que ces femmes vaquent à leurs occupations quotidiennes avec les risques d’attaques violentes.  Leurs maisons peuvent leur être enlevées à tout moment et leur participation à la vie publique se fait dans la peur.  L’occupation israélienne et la crise humanitaire qui en résulte ont des conséquences profondément sexospécifiques et exacerbent les inégalités entre les sexes; les femmes subissent disproportionnellement la violence de l’occupation endurée par tous les Palestiniens.

L’occupation, a poursuivi la représentante, renforce les structures patriarcales de la société palestinienne.  Les femmes palestiniennes doivent subvenir à leurs besoins en plus de leurs responsabilités de prendre soin des enfants, des malades et des blessés, ce qui souvent les isole de leurs communautés et de la vie publique.  Dans leurs efforts pour protéger leurs familles de la violence ou des arrestations, elles deviennent des gardiennes des prisons de leurs propres enfants.  La violence politique dans la sphère publique conduit à des pics de violence dans la sphère privée, a constaté la militante: la violence domestique est outrageusement élevée et le féminicide augmente. 

À cela s’ajoute que les femmes sont privées de ressources pour répondre aux abus.  Les conditions difficiles provoquées par l’occupation font que les femmes palestiniennes n’ont pas accès à la justice et aux moyens de subsistance.  En outre, les coupes dans le financement de l’Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Moyen-Orient (UNRWA) ont disproportionnellement touché la vie des femmes en particulier dans les domaines de l’éducation et de la santé. 

Mme Siniora Atallah a également souligné que l’occupation israélienne avait réduit l’espace rendant possible la liberté et l’indépendance de la société civile.  Elle a indiqué que les défenseures des droits de l’homme sont accusées d’incitation par Israël.  De plus, en juillet 2018, des milliers de Palestiniennes ont manifesté de manière pacifique aux frontières orientales de la bande de Gaza, pour protester contre l’occupation.  Des tireurs embusqués israéliens ont tiré contre les protestataires et les ont aspergées de gaz lacrymogène blessant ainsi des milliers et tuant près de 100 civils.

Les volontaires de la société civile, y compris le personnel médical, sont pris pour cible par l’armée en dépit de leurs uniformes, a aussi relaté Mme Siniora Atallah.  Les femmes journalistes qui font des reportages sur le conflit sont agressées et mises en détention.  Le résultat de ces représailles est qu’elles sont dissuadées de faire des reportages sur l’occupation.  Cela aboutit à marginaliser encore plus les femmes de la sphère publique. 

En s’engageant pour les femmes, la paix et la sécurité, le Conseil de sécurité a reconnu l’importance de la participation des femmes et que sans les femmes, il ne peut y avoir de paix.  Elle a donc appelé le Conseil à agir aujourd’hui notamment pour assurer la participation des femmes dans la prévention des conflits, la transition démocratique, les efforts de réconciliation et le travail humanitaire.  Il doit appeler l’Autorité palestinienne à mettre en œuvre son plan d’action dans le cadre de la résolution 1325 (2000), allouer des fonds suffisants et donner un appui politique de haut niveau à la participation des femmes à toutes les étapes du processus de paix.  Le Conseil doit appeler Israël à stopper l’occupation militaire et l’expansion des colonies, s’engager dans une solution politique et cesser immédiatement ses violations du droit international. 

Mme Siniora Atallah a également appelé les États à arrêter d’exporter des armes en Israël.  Les gouvernements, les entreprises d’armement et les vendeurs d’armes doivent être pris pour responsables des transferts d’armes dans les situations où elles alimentent le conflit et violent le droit international.  Le Conseil doit aussi faire cesser la culture de l’impunité et veiller à ce que les forces israéliennes, ou autres acteurs responsables des actes de violence commis contre des femmes et des défenseures des droits des femmes, soient tenus pour responsables de leurs actes. 

Le Conseil, a-t-elle encore demandé, doit assurer que les aides humanitaires soient respectueuses de l’égalité des sexes.  Le Conseil doit enfin utiliser tous les outils pour assurer une participation effective des femmes et intégrer une analyse de genre dans toutes les discussions sur la situation, notamment en ajoutant le Territoire palestinien occupé à l’ordre du jour du Groupe informel d’experts sur les femmes, la paix et la sécurité, et en invitant des femmes représentantes de la société civile à faire des exposés au Conseil pour les débats sur des pays particuliers. 

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a noté que quand les pourparlers de paix entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et le Gouvernement colombien avaient démarré en 2012, il n’y avait qu’une seule femme autour de la table.  Un an plus tard se tenait le premier Sommet national des femmes et de la paix en Colombie et les femmes y réclamaient à être incluses dans les discussions.  Deux ans plus tard, les femmes comptaient pour 20% de l’effectif de l’équipe de négociation du Gouvernement, et pour 43% de celle des FARC.  En s’organisant, les femmes ont élargi l’agenda du processus de paix, s’est réjouie la Ministre.  Elles ont négocié des cessez-le-feu locaux, renforçant la sécurité; leurs exigences ont mis les parties prenantes face à leurs responsabilités.  Coté FARC, le désenrôlement des enfants-soldats a été une initiative des femmes et de la société civile, a-t-elle fait remarquer, en notant qu’elles ont vraiment été à la base des efforts de consolidation de la paix en Colombie.

Au Sahel, a poursuivi la Ministre, les femmes sont aussi agentes du changement.  Dans la région du lac Tchad, où les défis sécuritaires et environnementaux sont nombreux, les femmes vivant de la pêche se sont coalisées pour être autosuffisantes en poisson, faire reconnaître leurs droits face aux agressions sexuelles et viols dont elles sont victimes, et obtenir un accès basique aux soins en matière de santé sexuelle et reproductive.  En conclusion, la Ministre a revendiqué une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions, de consolidation de la paix, de négociation et de maintien de la paix dans le monde.  Elle a regretté que les femmes aient toujours à prouver que leur participation à une action diplomatique soit bénéfique avant de pouvoir y prendre part, alors qu’on ne demandait jamais rien de tel aux hommes.

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a rappelé que l’adoption de la résolution 1325 (2000) était basée sur l’idée qu’une plus grande implication des femmes dans les processus de paix augmente leurs chances de réussite.  « Si nous en sommes convaincus, comment se fait-il que les femmes demeurent exclues des processus de paix », s’est-elle interrogée.  Mme Brandt a appelé à tout faire pour augmenter la participation des femmes aux processus de décision, aussi bien au sein des missions de maintien de la paix qu’au Siège de l’ONU.  Elle a cité plusieurs exemples récents, à commencer par le fait que le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) appelle désormais à la participation pleine et effective des femmes aux processus de décision.  Elle a également mentionné la décision récente du Conseil de sécurité d’augmenter le nombre de femmes au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).

Le 8 mars dernier, a ajouté Mme Brandt, pour la première fois dans l’histoire du Conseil, une réunion a eu lieu avec une majorité des deux tiers de femmes représentant les 15 membres.  En conclusion, la représentante a appelé à lutter fermement contre les violences à l’encontre de femmes exerçant des responsabilités, qui sont souvent prises pour cible par ceux qui ne souhaitent pas la paix, comme en témoigne selon elle les 83 militantes des droits de l’homme tuées depuis le début du processus de paix en Colombie.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a dit se réjouir du choix du Comité Nobel de décerner le Prix Nobel à des personnes engagées dans la promotion des droits de la femme.  Cette décision montre que la promotion des droits de la femme est une priorité de la communauté internationale, a-t-elle dit.  Elle a également déclaré que la question de l’autonomisation des femmes est une question « éminemment politique et économique ».  Car accorder un accès aux droits à la moitié de la population est une manière de susciter la croissance économique, a expliqué la représentante, insistant sur cet aspect économique, qui selon elle « ne doit pas être perdu de vue ».

Mme Pierce a également souligné que « tout le monde sait que la participation des femmes aux processus de paix est une garantie de succès ».  Ainsi, selon elle, les processus incluant les femmes ont 35% plus de chance d’aboutir à une paix pérenne et de servir les communautés.  « La participation est un droit et non un traitement de faveur qu’il faut accorder aux femmes », a-t-elle conclu. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a jugé nécessaire de surmonter le fossé entre les mots et l’action, en mettant en œuvre le programme « Femmes, paix et sécurité » à l’aide de mécanismes onusiens aussi solides que le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes, de la paix et de la sécurité, et le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, de même que le réseau de points focaux nationaux et la Stratégie pour l’égalité des sexes de la Commission de consolidation de la paix, qui sert de plateforme pour le partage des pratiques optimales et des leçons apprises.  Le représentant a ensuite déclaré que la parité entre les sexes devait prévaloir à travers tout le système des Nations Unies et dans le cadre de la réforme de l’architecture de sécurité, notamment au travers d’une coopération étroite entre le Département des opérations de maintien de la paix et ONU-Femmes.  La délégation a par ailleurs salué l’intention de l’Union européenne de lancer un projet-pilote d’une valeur de deux millions d’euros en vue de fournir des programmes éducatifs aux Afghanes dans des institutions prestigieuses basées au Kazakhstan et en Ouzbékistan.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire), s’exprimant au nom de son pays et également au nom de l’Éthiopie et de la Guinée équatoriale, s’est félicité de la désignation d’une femme au poste de présidente de l’Éthiopie et pour la composition d’un gouvernement parfaitement paritaire.  « Cela a valeur d’exemple et c’est un témoignage de ce que le leadership de la femme devient de plus en plus nécessaire et déterminant dans la conduite des affaires du monde. »

Le représentant a également déclaré que sur le plan continental, les États africains, dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), ont donné la priorité à la promotion de la parité dans les appareils exécutif et législatif, de même que pour le renforcement du rôle des femmes dans les stratégies de médiation et de prévention.  Il importe maintenant de mettre en œuvre les mesures nécessaires, en coopération avec les Nations Unies et ses partenaires.  À cet égard, les plateformes « Femwise Africa » et le « Réseau des femmes leaders africaines » veillent à la mise en œuvre effective des engagements pris pour l’inclusion des femmes dans le rétablissement de la paix, la stabilité et le développement, a conclu le

M. MA ZHAOXU (Chine) a rappelé que, d’après le Président Mao, « les femmes pouvaient occuper la moitié du ciel ».  Il s’est félicité de la présence de Chinoises au sein des contingents déployés par Pékin au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS).  Les femmes, a-t-il estimé, jouent un rôle indispensable dans la prévention des conflits, dans la paix, dans la réconciliation et dans la réintégration des anciens combattants.  Le Conseil de sécurité devrait encourager le règlement pacifique des conflits en plaçant les femmes au premier plan, a préconisé le représentant, qui a jugé nécessaire d’œuvrer à la pleine opérationnalisation du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, avec pour objectif un monde meilleur pour tous.

M. BADER ABDULLAH N.  M. ALMUNAYEKH (Koweït) a déclaré que par le biais des résolutions successives sur la question des femmes, à commencer par la 1325 (2000), le Conseil de sécurité a mis en place un cadre règlementaire qu’il faut maintenant mettre en œuvre.  Si l’on veut atteindre l’objectif du Secrétaire général, à travers son concept de « paix positive », il faut accroître et garantir la participation des femmes et lutter contre toutes les causes et phénomènes qui peuvent l’entraver, d’autant que l’expérience a montré que cette participation offre de meilleurs résultats.  Dans ce contexte, la délégation s’est réjouie de la participation des femmes yéménites au processus de négociations, notamment celles parrainées par le Koweït et destinées à rétablir le dialogue et la paix dans ce « pays frère ». 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou), qui préside avec la Suède le Groupe d’experts sur les femmes, la paix et la sécurité au Conseil, a indiqué que, malgré l’adoption de huit résolutions depuis la résolution historique 1325 (2000), des obstacles persistent et obligent à redoubler d’efforts.  Les données montrent en effet qu’une participation plus importante des femmes à tous les niveaux de la vie politique a pour conséquence une moindre propension au conflit et une meilleure propension au maintien et à la consolidation de la paix.  En outre, a souligné la délégation, l’égalité entre les sexes et l’autonomisation économique et politique des femmes sont essentielles pour réduire leur vulnérabilité durant les conflits et, en général, prévenir la violence.  Investir dans cette autonomisation revient donc à investir dans la paix et le développement.

S’agissant du rôle des femmes dans le maintien de la paix et la sécurité internationale, la délégation a souligné la nécessité de contribuer au financement des organisations de femmes appelées à participer aux processus de paix lancés par le Conseil.  De même est-il important d’intégrer des perspectives de genre dans les opérations de paix déployées par décision du Conseil et de former de façon adéquate les Casques bleus à la protection et à la promotion des droits humains des femmes, des filles et des garçons.  Pour sa part, le Pérou a augmenté la participation des femmes dans ses forces armées déployées dans les opérations de maintien de la paix et a déjà atteint les 15% demandés.  Et le ministère de la femme et des populations vulnérables a créé un registre des déplacés, qui permet de traiter des droits des femmes et des filles touchées durant les années pendant lesquelles le Pérou a combattu le terrorisme.

M. GENNADY V.  KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné la nécessité de s’en tenir strictement à la question à l’ordre du jour, en s’abstenant de pratiquer des doubles emplois avec d’autres organes du Conseil de sécurité.  Quant aux processus de négociations classiques, ils restent toujours d’actualité, a tenu à rappeler le représentant: dans ce contexte en effet, sont respectés les buts de la Charte des Nations Unies, l’objectif étant simplement de permettre aux femmes de participer à ces processus à pied d’égalité avec les hommes.  Il a considéré qu’il est important pour le Secrétariat de l’ONU de prendre en compte, dans son prochain rapport, les expériences et les vues des pays touchés par des conflits.  En revanche, le représentant s’est déclaré opposé à la création de mécanismes additionnels.

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) a exprimé son attachement « inébranlable » à la question « femme, paix et sécurité », comme le montre son appui à la participation des femmes dans les processus de paix.  C’est pour cette raison que les États-Unis sont d’avis que le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes, de la paix et de la sécurité est un organe qui peut permettre d’aller plus en avant, le but étant d’obtenir des résultats concrets sur le terrain.  Les États-Unis sont en outre engagés dans l’autonomisation de la femme, a ajouté le représentant.  Il a mentionné que cet engagement se concrétise notamment dans les pays en développement, comme le montrent les subventions de millions de dollars allouées par les États-Unis à cette cause.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) s’est demandé « comment les opérations de maintien de la paix pourraient-elles protéger efficacement l’ensemble de la population civile sans que les femmes ne soient engagées comme actrices de la paix et de la sécurité, à tous les échelons, dans tous les piliers, militaire, civil, politique, économique »?  L’absence d’accès à l’éducation, à la propriété, à l’emploi et à des structures financières, aux services de santé rend les femmes plus vulnérables aux conséquences des conflits.  Autre constat: le nombre d’accord de paix intégrant des dispositions liées au genre a diminué l’an dernier.  Par ailleurs, les femmes sont encore bien trop souvent exclues des discussions quel que soit le stade de la négociation, a noté le délégué en signalant aussi que seuls 2% des médiateurs et 8% des négociateurs étaient des femmes durant les 25 dernières années. 

Notant que le Conseil inclut désormais des dispositions sur les droits et la participation des femmes dans plus de 70% des résolutions et près de 90% des déclarations présidentielles, M. Delattre a recommandé d’atteindre les 100% et d’adopter des déclarations à la presse sous cet agenda.  « Nous devons continuer à inviter systématiquement les personnalités issues de la société civile pour nous dresser un portrait fidèle de la réalité sur le terrain », a-t-il ajouté en plaidant aussi pour que les visites de terrain du Conseil donnent toute leur place aux rencontres avec les femmes.  Il faut aller plus loin, a exhorté le représentant français en invitant à saisir l’occasion de l’anniversaire de la résolution 1325 (2000) et en assurant un suivi plus efficace de la mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité, notamment ses 76 plans d’action et 11 cadres régionaux.  « Nous sommes prêts à travailler avec tous nos partenaires pour définir les contours d’un mécanisme qui permettrait réellement d’évaluer ces processus nationaux et régionaux », a proposé le délégué en citant le rapport du Secrétaire général. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a considéré que la participation véritable des femmes aux processus de paix, et plus largement aux processus politiques, tient à la qualité même de cette participation: « il ne s’agit pas du nombre de participantes, mais du leadership exercé par les femmes », a-t-elle analysé.  Aussi, est-il nécessaire, selon la représentante d’identifier et de soutenir les politiques favorables à leur participation aux processus de prise de décisions.  Abordant la question de l’autonomisation économique des femmes, la déléguée a rappelé qu’il s’agit avant tout de s’assurer que des ressources telles que l’eau et la terre sont réparties également entre ceux et celles qui prennent les décisions.  Mais aucune discussion sur l’autonomisation des femmes ne serait complète sans une référence à la problématique de l’éducation, a-t-elle ajouté, avant de dire que celle-ci est un catalyseur pour réaliser la participation égale des femmes à la société et leur intégration dans le redressement économique à long terme.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a constaté que les femmes sont « les victimes du système patriarcal, qui, ancré dans le système capitaliste, perpétue les inégalités, l’oppression économique, sociale et culturelle des femmes dans le monde entier ».  À son avis, c’est le problème principal et le système qu’il faut combattre.  Mais même s’il existe des similitudes, chaque pays a sa réalité et ses différents défis.  Ainsi en Colombie, l’Accord de paix entre le Gouvernement et les FARC intègre une perspective de genre, tandis que la mission de vérification est parfaitement paritaire.  On assiste de la même manière à des progrès dans la représentation politique des femmes, notamment en Somalie, dans la région du Sahel ou en Afghanistan, a-t-elle observé. 

Mais dans d’autres cas, comme dans les pays du bassin du lac Tchad, les femmes subissent et souffrent des activités des groupes et mouvement terroristes.  En République démocratique du Congo, la participation des femmes doit encore être renforcée, a ajouté la représentant de la Bolivie en concluant par l’exemple de son pays dont la Constitution de 2009 établit un « droit de la femme et de l’homme à la participation libre ».

Mme MICHELLE MÜNTEREFING, Ministre d’État à l’Office fédéral des affaires extérieures de l’Allemagne, a présenté les trois priorités de son Gouvernement s’agissant de la thématique « Femmes, paix et sécurité ».  « La première, ce sera de placer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) au cœur des travaux de l’Allemagne, lorsqu’elle siégera au Conseil de sécurité pendant son mandat pour la période 2019-2020, a-t-elle annoncé. »  « La seconde sera de continuer à prêter notre soutien aux activités de l’ONU visant à prévenir et éliminer les violences sexuelles perpétrées en période de conflit », a ajouté Mme Münterefing.  La troisième, a précisé cette dernière, sera pour notre délégation de réaliser des progrès dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) d’ici à 2020, date du vingtième anniversaire de cette résolution, en s’appuyant sur les leçons apprises par le réseau des points focaux nationaux.

Mme SIMONA LESKOVAR, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Slovénie, a souligné la nécessité d’un rôle actif des hommes dans la promotion de l’Agenda « Femmes, paix et sécurité », tant en ce qui concerne la prévention que l’élimination de la violence sexuelle et de la violence sexiste en période de conflits, ainsi que dans la participation effective des femmes aux efforts de paix.  Mme Leskovar a poursuivi en disant que le deuxième plan national de la Slovénie sur les femmes, la paix et la sécurité pour la période 2018-2020 sera adopté dans les prochains mois.  Fondé sur l’examen du premier plan, il prend en compte les nouveaux défis et les nouvelles tendances, et prévoit cinq domaines thématiques: l’intégration de la perspective « genre », la participation des femmes, la protection des femmes et des filles et la lutte contre les violences sexuelles en période de conflit armé, l’éducation, la formation et la sensibilisation sur les « Femmes, paix et sécurité », et la responsabilité pour violence sexuelle et sexiste en période de conflit armé.  Le Plan comprend un mécanisme de suivi et d’information, a précisé Mme Leskovar avant de signaler qu’une nouvelle directive est en préparation pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) pour les forces armées. 

Mme IRYNA HERASHCHENKO (Ukraine) s’est dit convaincue que l’ONU était dotée des mécanismes de mise en œuvre nécessaires pour accélérer les efforts dans la participation des femmes.  L’Ukraine a, pour sa part, redoublé d’efforts pour garantir les droits des femmes dans tous les domaines et a mis en œuvre un plan d’action jusqu’en 2020 pour qu’elles participent plus au processus de consolidation de la paix.  Si le pays favorise la participation des femmes à la vie politique, elles ne représentent que 12% des élus au Parlement et le Gouvernement est en train d’introduire des quotas.  Sa stratégie d’égalité entre les sexes s’applique aussi à la défense, qui compte déjà 2 500 femmes dont 3 400 sont des officiers, et une première femme général de division pour les services médicaux. 

La représentante s’est arrêtée sur la catastrophe humanitaire liée à l’agression militaire, citant les cas d’infirmières tuées dans le Donbass.  Les mines sont également un problème colossal, car elles sont en très grand nombre, et de nombreuses femmes et enfants en sont morts.  Elle a aussi dénoncé la violence sexuelle dans le Donbass occupé et a insisté pour un accès humanitaire, notamment de l’ONU.  Aussi l’Ukraine exige-t-elle l’introduction immédiate d’une mission de paix dans le Donbass avec un mandat large pour prévenir une catastrophe humanitaire et protéger les plus vulnérables.  La représentante a rappelé que le prix Sakharov venait d’être attribué au célèbre prisonnier Oleg Sentsov et que l’Ukraine avait proposé un échange de prisonniers, auquel la Russie n’a pas répondu. 

M. KORO BESSHO (Japon) a assuré attacher une grande importance à la participation des femmes et à la protection de leurs droits dans le domaine de la paix et de la sécurité, le Japon souhaitant créer une « société où les femmes brillent ».  Le pays a soutenu le projet d’ONU-Femmes au Kenya pour promouvoir la participation des femmes au niveau communautaire en les formant à la prévention et à la réaction contre la radicalisation violente.  Il a aussi a contribué au renforcement des capacités et de la représentation des policières en Afghanistan, pour les aider à fournir une protection effective aux femmes victimes de violence. 

Le Japon essaie également de renforcer la coopération dans de nombreux domaines.  Il est l’un des principaux donateurs du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, pour un montant total de 9,5 millions de dollars, et des résultats ont pu être constatés en République démocratique du Congo.  Le Japon soutient également le programme « Leadership, autonomisation, accès et protection des femmes dans la riposte aux crises » d’ONU-Femmes, à hauteur de 8,7 millions de dollars en 2018.  Enfin, le Japon a choisi Sri Lanka comme pays partenaire dans le cadre de l’Initiative de partenariats du G7 pour les femmes, la paix et la sécurité et souhaite élargir son assistance aux femmes touchées par le conflit dans ce pays.  Pour conclure, M. Bessho a fait savoir que le Japon accueillera l’Assemblée mondiale pour les femmes à Tokyo en mars 2019.

Mme PAULOMI TRIPATHI (Inde) a estimé que le problème des femmes dans les processus de paix et de sécurité doit être pris dans un contexte économique et social plus large.  Il est largement admis que prendre en compte les sexes des personnes pour bâtir des sociétés résilientes et pacifiques a des effets positifs, a-t-elle assuré en prônant un travail normatif à cet égard.  L’Assemblée générale doit se concentrer sur le développement et l’égalité entre les sexes pour mettre en place des sociétés pacifiques et résilientes, et le Conseil de sécurité doit faire tous les efforts nécessaires pour réaliser l’autonomisation des femmes, a-t-elle poursuivi.  Elle a ajouté que la coopération internationale pour poursuivre les criminels est essentielle.  En Inde, a-t-elle indiqué, le discours sur l’autonomisation des femmes a progressé, et de plus en plus de femmes participent aux processus politiques.  L’Inde a honoré son engagement vis-à-vis de l’ONU, à savoir que les femmes représentent 15% de ses troupes fournies pour le maintien de la paix.  Partenaire d’ONU-Femmes, l’Inde est prête à coopérer avec ses partenaires pour des sociétés pacifiques, résilientes et ouvertes à toutes et tous, a assuré Mme Tripathi.

M. GUILLERMO FERNANDEZ DE SOTO (Colombie) s’est félicité que le processus de paix en Colombie ait été cité comme exemple positif de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), même si beaucoup de problèmes restent encore à surmonter.  Reconnaissant l’indispensable participation et autonomisation politique et économique des femmes, il a mis en avant deux réussites qui ont marqué les deux premiers mois du Gouvernement du Président Ivan Duque: pour la première fois, une femme est vice-présidente de la République, en charge également de la promotion de l’égalité entre les sexes, et le Président a formé le premier Gouvernement paritaire de l’histoire de la Colombie. 

Le délégué a annoncé que le nouveau Plan de développement de la Colombie comprendra un chapitre sur l’égalité hommes-femmes, un plan pour garantir une vie libre de violences, la prévention des grossesses adolescentes, la création d’un observatoire sur le genre et l’attention aux victimes du conflit.  Le Président a également exprimé l’intention d’arriver rapidement à de meilleures normes de participation des femmes dans les postes à responsabilité des forces armées.  Attentif à la préoccupation manifeste de la société civile au sujet des menaces et assassinats de militantes des droits de l’homme, le Gouvernement va redoubler d’efforts pour renforcer le cadre institutionnel et les mesures de protection, et accélérer les enquêtes.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a regretté que le rôle crucial des femmes pour la paix et la sécurité soit souvent négligé.  Il a estimé qu’un nombre suffisant de cadres et de règlements existent mais que leur mise en œuvre reste malheureusement limitée.  Le nombre de femmes Casques bleus n’a pas radicalement changé depuis 10 ans, passant de 2 à 4%, et seulement 28% de femmes sont déployées sur le terrain à l’ONU.  Doter les femmes d’autonomie économique et politique doit être au cœur des efforts, a continué le représentant, assurant que l’on doit faire mieux pour la protection des femmes qui défendent les droits de l’homme.  Pour cela il faut aussi garantir un financement suffisant au programme Femmes, paix et sécurité.  Quant au rôle des femmes dans le secteur de la sécurité, il ne doit pas être sous-estimé.  En tant que coprésidente du Groupe des amis de la réforme du secteur de la sécurité, la Slovaquie travaille en étroite collaboration avec le Groupe des amis de l’égalité entre les sexes pour explorer les opportunités de renforcer le soutien de l’ONU dans ces domaines.  C’est seulement avec une participation accrue des femmes que la confiance du public dans le secteur de la sécurité se raffermira dans les zones d’après-conflit.

Mme RAZIYE BILGE KOÇYIĞIT GRBA (Turquie), qui parlait au nom du groupe MIKTA (Mexique, Indonésie, Corée, Turquie, Australie), a assuré que pour ces pays l’autonomisation des femmes était essentielle, y compris pour qu’elles accèdent à des postes de décisions; c’est une façon d’augmenter les chances de succès dans les pourparlers de paix entre parties prenantes.  Ce groupe de pays a aussi réaffirmé son attachement à l’objectif de l’égalité entre les sexes dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le groupe a salué les différentes résolutions de l’ONU promouvant un cadre normatif pour l’autonomisation des femmes sur la question Femmes, paix et sécurité. 

Malgré ces progrès, des défis demeurent, les violences sexuelles étant devenues une arme de routine dans les conflits.  Le groupe a souligné que les violences sexuelles et les violences sexistes ont un lien direct avec l’inégalité entre les sexes, la pauvreté, l’exclusion et la discrimination.  Le groupe a donc appelé à agir sans délai pour traiter les causes profondes des conflits, mais aussi pour assurer la promotion de l’égalité des sexes.  La représentante a cité une statistique d’ONU-Femmes rappelant que 90% des victimes de conflits étaient des civils, une catégorie où les femmes et les enfants sont davantage représentés que les hommes.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a reconnu que la question des femmes et de la paix et de la sécurité est devenue un facteur puissant pour assurer la féminisation de la paix dans un environnement d’après-conflit.  Mais les femmes sont encore généralement « invisibles » et exclues des processus et des négociations de paix.  Les cultures patriarcales et les structures de pouvoir discriminatoires continuent d’inhiber les efforts pour une paix inclusive, les droits des femmes et la prévention effective des conflits. 

Mme Lodhi a tenu à souligner le fait que le Conseil de sécurité doit joui son rôle de maintien de la paix et de la sécurité en se focalisant sur les causes des conflits, en particulier les conflits prolongés comme le Jammu et Cachemire et la Palestine.  Ensuite, la communauté internationale doit accorder la même attention au sujet du jour qu’aux quatre piliers que sont la prévention, la participation, la protection et le relèvement.  Par ailleurs, les institutions nationales des droits de l’homme sont un lien essentiel dans la chaîne de responsabilité en ce qui concerne les violations des droits des femmes ainsi que leur prévention, et les efforts pour appuyer leur travail devraient être soutenus.  Enfin, pour une plus grande participation des femmes aux mandats de maintien de la paix, les perspectives sexospécifiques doivent être pleinement intégrées dans le paradigme de la consolidation de la paix afin de renforcer « l’environnement de protection », a proposé la déléguée. 

Mme MARI SKÅRE (Norvège), a d’abord rappelé les progrès concernant la question des femmes et de la paix et de la sécurité, avant d’estimer qu’à l’approche du vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000), il fallait davantage.  Les femmes sont sous-représentées partout et à tous les niveaux du maintien de la paix, a-t-elle déploré.  Elle a appelé à établir des liens entre les médiations pour la paix, à veiller à ce que les mécanismes d’inclusion complètent, plutôt que remplacent, les efforts visant à inclure les femmes dans le circuit officiel, à approfondir l’analyse des conflits avec une perspective de genre et à soutenir l’intégration des questions de genre dans les opérations de paix. 

Notre appui à la réforme de l’ONU, d’ONU-Femmes, du Département des affaires politiques et de celui des opérations de maintien de la paix fait partie de notre réponse, a ajouté la représentante.  Comme les réseaux de médiatrices régionales se trouvent actuellement à New York en quête de coopération, nous devons préparer le terrain pour des processus inclusifs dès les débuts des pourparlers de paix, a encore déclaré Mme Skare, qui a estimé qu’un poste de Conseiller en égalité des sexes devrait être établi au siège de chaque opération de maintien de la paix. 

Mme BESIANA KADARÉ (Albanie) s’est réjouie que, depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), des progrès importants aient été accomplis en matière d’égalité des sexes et que les États Membres aient progressivement intégré les principes et obligations découlant du texte dans leurs politiques nationales. 

Cependant, a remarqué Mme Kadaré, un fossé demeure entre les déclarations sur le papier et la réalité sur le terrain.  « Les faits parlent d’eux-mêmes: de 1990 à 2017, seulement 2% des médiateurs dans les processus de paix officiels étaient des femmes », a-t-elle déclaré, dénonçant une « mentalité trop masculine » dans les relations internationales.  L’Albanie souhaite donc que soient renforcés l’engagement de la communauté internationale et la coopération entre l’ONU, la société civile et les États Membres, pour produire un impact sur le terrain. 

Pour sa part, l’Albanie a beaucoup progressé, a affirmé Mme Kadaré.  En septembre dernier, elle a lancé son premier plan d’action national d’application de la résolution 1325 (2000).  Le pays a rassemblé la société civile et les groupes de défense des femmes pour renforcer la durabilité de ce plan d’action, a-t-elle expliqué.  Par ailleurs, le nombre de femmes parlementaires est monté à 41, soit 29,3% des élus nationaux.  Le gouvernement actuel a garanti la parité, et à la tête du Ministère de la défense se trouve désormais une femme.  Le nombre d’ambassadrices a lui aussi augmenté, passant à 26%, et les femmes consuls à 33%: du jamais vu en Albanie, a fait observer la représentante. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a estimé qu’il fallait redoubler d’efforts pour augmenter la représentation et la participation des femmes dans tous les processus de construction de la paix et la prévention des conflits et à tous les niveaux de prise de décisions.  Le représentant a souligné que l’éducation est un facteur essentiel et que la garantie d’un accès à l’éducation durant les conflits est un objectif fondamental qui contribue à protéger les femmes et les filles des risques des conflits. 

Avec la Norvège, l’Argentine a organisé, en 2017, la deuxième Conférence sur des écoles sûres, a indiqué le représentant, avant d’encourager tous les États Membres à endosser la Déclaration sur des écoles sûres.  En ce qui concerne les actions concrètes pour mettre en œuvre la résolution 1325 (2000), le Ministère des relations extérieures de l’Argentine a lancé, avec le Ministère de la justice et des droits de l’homme, la mise en place d’un réseau fédéral de médiatrices avec une perspective de genre, composé de 50 professionnelles.  De la même manière, le Ministère des relations extérieures, en coordination avec l’ambassade du Canada et l’ONG Réseau de sécurité et de défense de l’Amérique latine (RESDAL), a lancé un projet de diagnostic sur l’état des lieux par rapport à l’intégration de la perspective de genre dans les 10 ministères impliqués dans la mise en œuvre du Plan national d’action de la résolution 1325 (2000).

M. JORGE SKINNER-KLEÉ ARENALES (Guatemala) a réitéré l’importance du leadership et de la participation des femmes dans la prévention et la solution des conflits et la consolidation de la paix.  Il a jugé nécessaire d’augmenter leur représentation à tous les niveaux de prise de décisions, rappelant que la discrimination reste toujours un obstacle pour les femmes et, par conséquent, pour le développement humain en général.  Une meilleure participation des femmes a des répercussions positives pour affronter quelques-uns des défis les plus urgents, y compris les migrations, les changements climatiques et bien entendu la prévention des conflits. 

M. Skinner-Kleé Arenales a indiqué que le Guatemala a participé activement aux deux réunions des points focaux de Femmes, paix et sécurité, qui ont permis de mettre en place une plateforme pour l’échange d’expériences et de meilleures pratiques au niveau international.  Selon lui, les alliances stratégiques qui ont émergé de ce réseau sont importantes pour atteindre l’objectif d’un monde de sociétés inclusives, pacifiques et protégeant les droits des femmes.  Les femmes jouent un rôle essentiel dans la promotion de la justice, la réconciliation, le désarmement, la démobilisation, la réinsertion sociale, la reconstruction des institutions nationales et la prévention et la résolution des conflits, a conclu le représentant.

M. ARIEL RODELAS PENARANDA (Philippines) s’est réjoui que les femmes de son pays aient contribué significativement au processus de paix entre le gouvernement philippin et le Front de libération islamique moro, en juillet dernier.  Cinq membres de la commission de transition de Bangsamoro étaient des femmes.  « Durant les négociations, les deux panels étaient composés de femmes, qui ont fait avancer l’Agenda des femmes », s’est félicité M. Penarada.  Le représentant a également cité en exemple les « troupes en hijab »: une force policière et militaire spéciale, « qui combat les aspects psychologiques et culturels de la bataille de Marawi ».  La « loi organique Bansamoro » a réservé des sièges de parlementaire aux femmes, et prévoit des protections contre leur exploitation sexuelle.  Les Philippines sont aussi le premier pays au monde à avoir formulé un plan d’action régional sur les femmes, la paix et la sécurité, un plan qui aboutit sur le terrain à des activités et des projets. 

M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a indiqué que son pays, de par son histoire tragique durant la Seconde Guerre mondiale, se sentait particulièrement concerné par le problème des violences contre les femmes en temps de conflit.  C’est pourquoi elle fera tout son possible pour faire avancer l’agenda Femmes, paix et sécurité.  À cet égard, le Gouvernement coréen a récemment lancé l’initiative « action avec les femmes et la paix », qui soutient la protection des femmes et des filles durant et après des conflits armés, et qui vise à renforcer l’autonomisation des femmes dans le cadre de la consolidation de la paix. 

Constatant les progrès de la résolution 1325, M. Cho a déploré le fossé qui existe entre les textes et la réalité.  Les femmes demeurent parmi les groupes les plus vulnérables en temps de conflit; pour y remédier, la Corée a appelé à redoubler d’efforts pour promouvoir les femmes à des postes de dirigeantes, pour qu’elles participent aux processus de paix et de sécurité, un secteur où elles sont encore sous représentées.  Dans ce contexte, il a encouragé les Nations Unies à continuer à travailler dans cette direction, et à augmenter le ratio des femmes dans les troupes de maintien de la paix.  En République de Corée, la représentation nationale est composée de davantage de femmes (27,8% dans les cabinets ministériels), tandis que 60,9% des nouvelles recrues dans le secteur diplomatique sont des femmes, a signalé M. Cho. 

Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a félicité Mme Nadia Murad, Ambassadrice de bonne volonté pour la dignité des victimes de la traite des êtres humains de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), et M. Denis Mukwege, tous les deux prix Nobel de la paix 2018, pour leur courage et leur persévérance afin de mettre un terme à la violence sexuelle liée aux conflits.  Mme Murad est un exemple de la façon dont les femmes peuvent devenir de puissants agents de la paix.  La représentante a réaffirmé l’importance de la protection et de la promotion des droits de l’homme, de l’égalité entre les sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et a soutenu leur pleine inclusion et leur participation institutionnalisée à tous les échelons des processus de paix et plus généralement de tous les processus de prise de décisions.  Elle a estimé que l’ONU devrait donner l’exemple et elle a dit croire dans les initiatives globales axées sur les survivants des conflits et de la violence. 

Mme Bogyay a dit soutenir les initiatives de paix de femmes locales et a espéré que le rôle important de la société civile et des organisations dirigées par des femmes soit reconnu.  S’agissant de la participation des femmes dans les missions de maintien de la paix, la Hongrie cherche à augmenter le nombre d’expertes militaires et de policières dans les missions de l’ONU.  Elle a aussi fourni une contribution financière au Fonds d’affectation spéciale à l’appui de la lutte contre la violence à l’égard des femmes.  En conclusion, Mme Bogyay a plaidé pour une approche holistique aux niveaux local, régional et mondial, en utilisant tous les instruments du système des Nations Unies et en coopération étroite avec les acteurs pertinents et avec les gouvernements.

Mme SIMA SAMI I. BAHOUS (Jordanie) a insisté sur la participation entière et véritable des femmes dans les processus de paix et de sécurité et sur l’importance du financement des programmes et mécanismes.  La Jordanie a mis en place un plan d’action national, avec la participation des acteurs de la société civile, qui accorde une place particulière à l’émancipation de la femme et à sa participation dans la réalisation de la paix pérenne.  Ce plan a défini 4 objectifs stratégiques: renforcer la participation des femmes dans les secteurs de la sécurité et militaire, y compris dans les unités de terrain; renforcer la participation active des femmes face au terrorisme et à la violence à travers des initiatives volontaires; fournir des services humanitaires, psychiques, sociaux, médicaux, éducatifs aux femmes et aux secteurs vulnérables de manière sûre; disséminer une culture sociétale qui appuie la parité entre les sexes et préparer les femmes pour qu’elles soient ambassadrices de la paix.  La Jordanie veille en particulier à protéger les femmes de l’extrémisme, soulignant que les conflits ayant secoué la région n’ont pas épargné les femmes.  La représentante a signalé en particulier les difficultés auxquelles la femme palestinienne fait face, victime des politiques israéliennes punitives.  La femme joue un rôle de premier plan dans la paix, a-t-elle conclu. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie), au nom des pays baltes, a fait siennes les recommandations du Secrétaire général sur la nécessité de porter une grande attention aux signes avant-coureurs de violations des droits de l’homme, hélas très souvent dirigées contre les femmes et les filles, quand un conflit menace.  Une paix durable ne sera possible qu’avec une participation significative des femmes dans tous les aspects de la paix et de la sécurité, pas seulement en tant que bénéficiaires des progrès, mais en tant que dirigeantes et agents du changement, a souligné M. Jürgenson.  Il a ajouté qu’une telle participation augmentait les chances de 35% d’un accord de paix d’au moins 15 ans entre les parties prenantes d’un conflit. 

M. Jürgenson a aussi relevé qu’il fallait porter une attention particulière aux besoins des femmes et des filles dans les situations post-conflits, y compris pour assurer leur sécurité physique, leur fournir des soins de santé reproductifs et psychologiques et veiller à ce qu’elles disposent de moyens de subsistance et participent aux décisions.  Dans leurs contributions aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, les pays baltes font tout pour assurer la parité dans les troupes de maintien de la paix, en encourageant les femmes à s’engager dans les forces militaires et de police. 

M. Jürgenson a enfin mis l’accent sur le rôle crucial de la société civile, y compris les ONG représentant les femmes; il s’est réjoui qu’elles interviennent désormais régulièrement dans les séances du Conseil de sécurité.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a rappelé que les États Membres devaient faire en sorte que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité soit au cœur des priorités de la communauté internationale.  Elle a toutefois noté les échecs systémiques pour intégrer les femmes aux missions de maintien de la paix, et le fait qu’elles ne jouent pas assez souvent le rôle de médiateur dans les discussions pour la paix.  « Nous devons exiger la participation des femmes en tant qu’actrices dans les processus de paix à hauteur de 50% au moins. »  Les Émirats arabes unis ont lancé une « politique 100% femmes » pour que la parité soit une composante clef de sa politique et de ses programmes.  Un entraînement militaire et de maintien de la paix pour les femmes arabes va être organisé conjointement par le Ministère de la défense, ONU-Femmes et le syndicat général des femmes des Émirats arabes unis – une première dans la région. 

M. JOSE SINGER (République dominicaine) a relevé que les femmes et les filles ne sont pas seulement des victimes de conflit, mais sont aussi des agents de changement, et a plaidé pour leur participation à tous les niveaux des processus de paix.  Il a cité en exemple l’accord de paix en Colombie, le premier au monde à intégrer la thématique du genre comme axe central.  Cette réussite est en partie due au grand nombre de femmes impliquées dans le processus de paix et, selon lui, l’accord doit servir de cadre de référence et inspirer d’autres processus de paix.  Appliquer la résolution 1325 (2000) ne consiste pas seulement à compter plus de femmes autour de la table, a fait observer M. Singer, mais à intégrer leurs perspectives et celles des organisations de femmes dans les processus de médiation, en assurant leur participation pleine et effective, garantissant ainsi la crédibilité et la durabilité des processus de paix.  Il a donc appelé à redoubler d’efforts pour lever les obstacles structurels à cette participation, de même que pour coopérer avec la société civile et les militantes des droits de l’homme, à la condition de les protéger également des menaces et des violences dont elles sont la cible.  Signe de l’engagement de la République dominicaine pour la « Tolérance zéro » envers les abus et l’exploitation sexuels, le Président Danilo Medina a signé le Pacte global volontaire pour la prévention et la réponse à l’exploitation sexuelle dans les opérations des Nations Unies.

M. LUIS HOMERO BERMÚDEZ ÁLVAREZ (Uruguay) a relevé que les graves violations des droits humains de la femme ne sont pas sporadiques mais au contraire le prolongement d’une autre violence bien ancrée dans les sociétés et qui trouve racine dans les inégalités, la discrimination généralisée envers les femmes et le mépris pour leurs droits fondamentaux, la raison pour laquelle les États doivent prendre des mesures pour traiter de ces causes structurelles.  Pour sa part, le Gouvernement uruguayen a adopté une Stratégie nationale pour l’égalité entre les sexes 2030, élaborée avec la société civile, avec une feuille de route pour influencer les politiques publiques et orienter les actions de l’État.  L’éducation joue un rôle fondamental pour l’autonomisation politique et sociale de la femme, a fait valoir M. Bermúdez Álvarez, pour vaincre la discrimination, pour que les femmes connaissent mieux leurs droits, et pour leur donner la confiance nécessaire pour prendre les décisions qui touchent leur vie.  C’est la raison pour laquelle l’Uruguay a adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  S’agissant des opérations de maintien de la paix, l’Uruguay dispose d’un pourcentage au-dessus de la moyenne d’effectifs féminins déployés et continue à augmenter cette participation.  L’école nationale des opérations de paix de l’Uruguay dispense en outre une formation obligatoire sur des sujets tels que la prévention et la réponse à la violence contre les femmes.  En plus, le Gouvernement applique une politique de « tolérance zéro ». 

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique) a déploré la faible participation des femmes dans les opérations de paix et a appelé les États Membres à l’augmenter.  Pour sa part, le Mexique a fait de gros efforts comme contributeur de troupes et de policiers depuis 2015.  Il a déployé huit femmes de ses forces armées dans les missions de paix en Colombie, au Sahara occidental et au Mali, ce qui correspond à la proportion minimale requise par l’ONU de 15%.  Faisant partie du Réseau global de points focaux sur Femmes, paix et sécurité, le Mexique reconnaît l’importance de ce forum interrégional pour partager des expériences et des bonnes pratiques.  Le programme Femmes, paix et sécurité et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 sont les deux faces d’une même médaille, a estimé la représentante.  Par exemple, traiter des causes fondamentales des conflits et soutenir la paix, c’est comprendre que les femmes doivent disposer d’autonomie économique et jouir totalement de leurs droits humains.  Cela implique des ressources économiques suffisantes, des possibilités de travail, l’élimination de la féminisation de la pauvreté et la liberté de prendre des décisions dans la vie de la communauté.  Sans participation politique, les femmes n’atteindront jamais leur considérable potentiel, a assuré la représentante.  Parvenir à l’égalité entre les sexes dans la sphère publique est une priorité pour le Mexique et, au cours de la nouvelle législature, la Chambre des députés sera constituée d’environ 48,8% de femmes et le Sénat de 49,22%, passant ainsi au quatrième rang mondial.

M. PHILIPP CHARWATH (Autriche) a souligné que les organisations locales et la société civile jouaient un rôle clef dans l’avancement du Programme; l’Autriche a d’ailleurs contribué à hauteur d’un million d’euros au financement du Fonds des femmes pour la paix.  Ce fonds crée des ponts entre l’ONU, les États Membres et la société civile pour aider les organisations de femmes à consolider la paix et apporter un soutien humanitaire aux femmes, là où il fait défaut. 

L’Autriche est convaincue que l’absence de violence est un prérequis pour parvenir à des sociétés pacifiques, a poursuivi M. Charwath.  Dans ce contexte, l’Autriche combat activement la violence des hommes contre les femmes, et à ce titre, a augmenté son engagement contre les mutilations génitales; en 2018, elle a donné plus d’un million d’euros à ses victimes.  De même, l’Autriche reconnait le lien entre les droits humains et la prévention de conflits.  Elle a donc appelé à reconnaitre l’importance du travail des défenseurs des droits des femmes pour la mise en œuvre du programme des femmes, de la paix et la sécurité.  Dans ce contexte, elle a soutenu Amnesty International dans son organisation d’une discussion en marge du Conseil des ministres des affaires étrangères européens qui s’est tenu à Vienne le 28 août 2018.

Pour M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse), permettre aux femmes de participer efficacement aux efforts de consolidation de la paix et prévenir les violences sexuelles contre les femmes, mais aussi contre les hommes, est l’un des objectifs centraux de son engagement et une composante essentielle de son quatrième plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité, adopté récemment.  Ces deux objectifs sont étroitement liés à l’autonomisation des femmes dans les domaines politiques et économiques, a-t-il souligné.

Notant que les femmes devraient, comme les hommes, être « impliquées dans le processus politique dès le début et à tous les niveaux », le délégué a rappelé que l’autonomisation économique des femmes était une condition préalable à leur participation aux processus politiques.  Il a aussi insisté sur l’engagement et l’autonomisation des hommes et des garçons dans le cadre de l’égalité des sexes.  « En nous concentrant exclusivement sur des femmes, nous avons tendance à oublier le rôle des hommes dans l’autonomisation politique et économique.  Or la mise en lumière des privilèges et des vulnérabilités des hommes peut changer la donne », a affirmé le représentant suisse, qui s’est réjoui que, grâce à l’action de nombreux champions de l’égalité des sexes et à l’engagement du Secrétaire général, la communauté internationale soit sur la bonne voie. 

Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a estimé que l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes et des filles exigent davantage d’engagement de la part de la communauté internationale dans son ensemble.  Quant à elle, l’Italie a placé l’égalité au cœur de sa politique étrangère et a organisé l’année dernière la première réunion ministérielle du G7 entièrement consacrée au genre.  En 2018, dans le cadre de sa présidence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Italie applique une perspective de genre dans toutes ses initiatives.  Le pays, a ajouté Mme Zappia, fait aussi partie du cercle de dirigeants du Secrétaire général et il est le principal donateur du Fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles. 

Quant à assurer une participation significative des femmes tout au long du cycle de paix, l’Italie a lancé l’année dernière, lorsqu’elle assurait la présidence du Conseil, le Réseau des femmes médiatrices pour la Région de la Méditerranée, qui a deux objectifs: la prévention et la médiation d’une part, le renforcement des capacités d’autre part.  En ce qui concerne les opérations de maintien de la paix, l’Italie fournit une formation de qualité et des cours spécialisés pour les soldats de la paix dans un Centre d’excellence à Vicenza, a fait savoir Mme Zappia.  En venant à l’application du principe de responsabilité, elle s’est félicitée des avancées de ces dernières décennies et a souhaité que le Conseil fasse de la violence sexuelle un critère automatique pour imposer des sanctions. 

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a jugé nécessaire de protéger les femmes en situation de conflit et de promouvoir leur autonomisation qui est essentielle pour la consolidation de la paix et le règlement des conflits.  Les femmes comptent parmi les principales victimes des invasions étrangères et du terrorisme dans la région du Moyen-Orient, a-t-il noté, en évoquant le sort de la Palestine et plus particulièrement de la bande de Gaza, où « les femmes sont victimes du bouclage de la zone » et des « bombardements israéliens ».  Dans une région aussi instable, « il y a peu de place pour l’autonomisation des femmes, hélas », a déploré M. Al Habib: « ce que veulent les femmes, c’est rester en vie; leur autonomisation est un problème secondaire ».  En tant que « victime d’agressions étrangères », l’Iran attache une grande importance aux femmes qui participent à la vie politique iranienne à l’occasion d’élections, non seulement en tant qu’électrices, mais aussi en tant que candidates.

Mme EYNAT SHLEIN (Israël) a fait valoir qu’Israël avait été le premier pays à mettre en œuvre des éléments de la résolution 1325 dans sa législation nationale.  Le pays est membre de la Commission de la condition de la femme et du Groupe des amis de la 1325 et sera l’année prochaine membre du Conseil d’administration d’ONU-Femmes.  Depuis 2003, le Centre de formation Golda Meir Mount Carmel a organisé 36 séminaires sur le rôle des femmes dans la résolution de conflits et la construction de la paix, qui encouragent le dialogue entre les femmes israéliennes et palestiniennes.  Pour Israël, les éléments essentiels de la réussite de tout processus décisionnel, en particulier dans les domaines de la paix et de la sécurité, sont la coopération, les partenariats, le partage d’expériences et la création d’opportunités.  La délégation a cité un article publié en août 2018 par le Dr Jana Krause de l’université d’Amsterdam, qui montre que la participation active des femmes aux négociations de paix débouche sur de meilleurs accords, sur des taux plus élevés de mise en œuvre de ces accords et sur une paix plus durable.  Pour un avenir meilleur, il faut adopter une approche plus inclusive des processus de paix, a-t-elle conclu.

Mme MARA MARINAKI de l’Union européenne a dit que sa délégation se concentre sur quatre priorités sur la question « Femmes, paix et sécurité ».  En premier lieu, elle met l’accent sur la participation politique des femmes et le leadership.  Il est important, a dit la représentante, d’assurer que les femmes et les filles dans les situations fragiles et après-conflits, affectées et touchées par les conflits, puissent participer de manière égale et équitable dans toutes les sphères politiques, économiques et sociales de leurs sociétés.  C’est la condition préalable à la création de sociétés inclusives et pacifiques, au développement durable et à la paix.  En deuxième lieu, l’Union européenne donne la priorité à la lutte contre la violence sexuelle en période de conflit et appuie les actions de l’ONU dans ce domaine.  En troisième lieu, l’Union œuvre à la promotion des politiques proactives pour l’autonomisation économique des femmes, ce qui aboutit à des rendements considérables pour les économies et les sociétés.  La quatrièmement priorité de l’Union, a ajouté Mme Marinaki, est le renforcement des cadres nationaux de mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité de ses États membres. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a plaidé pour impliquer davantage les femmes, afin qu’elles deviennent des actrices de la paix au sein de leur communauté et de leur pays.  Pour ce faire, le représentant a recommandé que le Conseil de sécurité soit informé de la situation sur le terrain, notamment grâce à des réunions régulières d’information par des titulaires de mandats de procédures spéciales, par la prise en compte des recommandations du Groupe informel d’experts et l’engagement avec des organisations de femmes lors des visites de terrain effectuées par le Conseil. 

Pour le représentant, il faudrait examiner la manière d’utiliser les sanctions à titre dissuasif contre la violence sexuelle.  Mais les femmes doivent aussi être plus nombreuses dans les opérations de maintien de la paix et dans la réforme du secteur de sécurité.  Il faut par ailleurs appuyer davantage les conseillers pour l’égalité des sexes dans le cadre des mandats actuels.  Il faut enfin protéger les défenseurs des droits des femmes et autonomiser les femmes en tant qu’actrices locales. 

M. Pecsteen de Buytswerve a préconisé d’éliminer les obstacles à la participation des femmes aux processus et accords de paix et d’identifier tous les domaines où l’on peut agir davantage.  En conclusion, il a fait observer que la Belgique mettait actuellement en œuvre son troisième plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité. 

Mme MARIE CHATARDOVÁ (République tchèque) s’est félicitée que les délégations s’emparent de plus en plus du sujet de la participation des femmes au sein des sphères publiques.  Pour lutter contre les stéréotypes et les normes sociales, et mettre en œuvre dans les entreprises le Programme Femmes, paix et sécurité, la République tchèque a mis en place son premier plan d’action national sur le sujet, afin de parvenir à un équilibre professionnel entre hommes et femmes et mettre fin aux discriminations.  Le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec le monde universitaire et encourage les États Membres à faire de même.  Le droit à participer aux affaires publiques est une liberté fondamentale liée aux droits de la personne, a insisté la déléguée.  La République tchèque a choisi l’objectif 16 de développement durable (Paix, justice et institutions efficaces) dans le cadre de sa présidence de l’ECOSOC, et à ce titre, elle a attaqué de front les inégalités entre hommes et femmes dans diverses régions du monde comme en Zambie, au Pakistan et Sri Lanka; elle a aussi participé au projet de renforcement des capacités pour supporter l’augmentation du nombre de femmes dans les rangs des forces armées jordaniennes.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a dit que l’Église catholique a toujours défendu la dignité et les droits de l’homme des victimes des conflits et des urgences humanitaires.  Elle offre notamment une protection physique ainsi qu’un soutien moral et spirituel; elle travaille avec la police des frontières; elle facilite l’accès à l’aide judiciaire et humanitaire.  Le Saint-Siège, a ajouté le nonce, appuie les efforts pour assurer que chaque femme profite de l’aide lorsque c’est nécessaire.  Mais il a précisé que le Saint-Siège ne peut pas accepter comme une solution appropriée les services qui promeuvent et fournissent l’avortement tels que ceux inclus dans le Dispositif minimum d’urgence en santé reproductive (DMU).  « L’aide humanitaire ne devrait jamais être envisagée ou menée contre le droit à la vie: l’avortement n’est jamais une solution sûre. »  Le nonce a plaidé pour que les plus jeunes membres de la famille humaine ne soient pas discriminés sur la base de situations d’urgence de migration, de conflit ou de catastrophe.  Il a rappelé les propos du pape François qui a dit que « les êtres humains sont les fins en soi »; ils ne sont jamais les moyens pour résoudre d’autres problèmes. 

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana) au nom du Réseau des dirigeantes africaines, a applaudi la création d’un Groupe d’experts informels chargés du Programme Femmes, paix et sécurité dans des régions sensibles du monde.  Des missions conjointes de l’ONU et de l’Union africaine, en RDC et au Nigéria, ont permis d’intensifier la mise en œuvre du Programme et de donner une voix aux femmes et aux filles qui en étaient privées par la guerre.  Le Réseau des dirigeantes africaines a adopté un plan d’action stratégique pour développer des activités de formation et augmenter le nombre de femmes au sein des forces militaires des troupes de maintien de la paix.  « Les femmes appartenant à notre réseau ont montré les preuves de leur efficacité », a assuré Mme Pobee: elles méritent un appui plein et entier en tant qu’actrices de la paix et du développement économique.  Le réseau des dirigeantes africaines veut garantir le développement des réseaux de femmes dirigeantes, avec l’appui de l’Union africaine et d’ONU-Femmes.  Mme Pobee a réclamé la présence de davantage de femmes « aux tables où les décisions sont prises ».

Parlant ensuite en sa capacité nationale, au nom du Ghana, Mme Pobee a énuméré les progrès enregistrés dans le cadre du Programme Femmes, paix et sécurité: la première femme du pays brigadier général, la première commissaire électorale, 21 femmes au Conseil national de la paix, et des femmes à des hauts postes du pouvoir judiciaire.  Le Gouvernement ghanéen a mis en place un processus d’action pour relever les défis et combler les lacunes relevées lors de la mise en œuvre du précédent plan.  Dans le cadre du plan d’action régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Ghana continue d’appuyer les initiatives sous-régionales, comme à l’Institut des femmes pour la paix au centre d’entrainement international Kofi Annan, qui a entrainé des femmes du Libéria à l’observation du bon déroulement des élections dans leur pays. 

M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili) s’est félicité que 76 pays, parmi lesquels le Chili, aient adopté des plans d’action pour mettre en œuvre la résolution 1325.  Dans le même temps, le représentant a regretté que les objectifs de la résolution soient loin d’être atteints.  Pour sa part, le Chili a placé le programme Femmes, paix et sécurité au cœur de sa politique extérieure multilatérale et il a été le premier pays de la région à adopter un plan d’action national en 2009.  Son troisième plan (2019-2022) en cours d’élaboration vise à renforcer davantage le rôle de la femme dans les contextes de négociation, de médiation, de construction et de consolidation de la paix et il intègrera des mécanismes de suivi, d’évaluation et d’établissement des responsabilités.  Le champ d’action s’étendra aux situations de catastrophe naturelle, d’aide humanitaire et de déplacement de personnes, et ce avec la collaboration active de la société civile et d’autres institutions.  Le Chili coparraine aussi le Réseau de points focaux nationaux.  Pour conclure, M. Skoknic Tapia a espéré que l’attribution du prix Nobel de la paix à Nadia Murad et Denis Mukwege pour leurs efforts visant à mettre fin à la violence sexuelle comme arme de guerre inspirera le Conseil de sécurité et la communauté internationale.

M. MARC-ANDRÉ BLANCHARD (Canada), au nom du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, a commencé par se réjouir de la désignation d’une femme à la présidence de l’Éthiopie, qualifiant cet évènement d’« exemple pour tous ».  Il a ensuite partagé les préoccupations des autres délégations quant à la stagnation des données sur la représentation des femmes au sein des processus de maintien et de consolidation de la paix.  Ce manque persistant devrait demeurer une priorité pour les Nations Unies.  Et pour ces raisons, les États membres de ce Groupe se réjouissent des efforts déployés par le Secrétaire général, notamment à travers sa stratégie de la parité à l’échelle du système.  Bien que le Conseil de sécurité n’ait pas encore atteint la parité parmi les représentants des États Membres, le Groupe apprécie qu’il fasse davantage participer les femmes de façon systématique à ses travaux. 

En sa capacité nationale, le représentant du Canada a prévenu qu’il n’y aura pas de miracle.  « Il ne suffira pas de mettre une médiatrice par ici ou une conseillère en égalité des sexes par là.  La discrimination politique, économique et socio-structurelle entre les genres existe dans tous nos pays », a-t-il dit, plaidant pour des investissements durables et pour la mise à disposition de ressources pour obtenir des résultats transformateurs. 

S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. DANG DINH QUY (Vietnam) a fait état de l’adoption, en novembre 2017, d’une déclaration conjointe sur la promotion des femmes, de la paix et de la sécurité au sein de la sous-région, dans laquelle ses États membres encouragent l’intégration d’une perspective « genre » dans l’ensemble des initiatives et stratégies de prévention des conflits et de reconstruction post-conflit.  En outre, à l’échelon régional, l’ASEAN est déterminée à disséminer une perspective sexospécifique dans les trois piliers, à savoir sécuritaire et politique, économique, et socioculturel.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a indiqué que la politique de développement internationale de l’Irlande cherche à amplifier la voix des femmes et des filles dans les processus de développement à tous les niveaux.  Les femmes sont fortes dans la médiation et le maintien de la paix, a-t-elle argué en disant vouloir tirer parti de cette capacité.  L’Irlande est un membre fondateur et donateur important du Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, tandis que les forces de défense irlandaises ont un plan d’action ambitieux sur cet agenda qui commence à donner ses premiers fruits.  Les préparatifs du troisième Plan d’action national sur la résolution 1325 (2000) battent leur plein, a ajouté la représentante en précisant ses priorités: la prévention de l’extrémisme violent, les expériences des migrants et des réfugiés et la question de la masculinité.  Pour l’Irlande, les appels pour la participation égale des femmes en politique doivent être les mêmes que les appels à la participation égale des femmes à la société et à l’économie.  « Nous voulons voir la fin des obstacles structurels qui freinent l’autonomisation politique et économique des femmes.  Nous devons également continuer à remettre en question la perception des jeunes femmes en tant que victimes passives des conflits », a poursuivi la représentante qui a soulevé la nécessité d’engager les hommes autant que les femmes dans la mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a estimé que l’établissement des responsabilités est un élément essentiel de la lutte contre les violences sexuelles commises en période de conflit.  Même s’il s’est félicité de la création d’un certain nombre de mécanismes de suivi, comme celui établi par le Conseil des droits de l’homme pour le Myanmar pour enquêter sur les violences sexuelles et sexistes perpétrées contre les Rohingya et d’autres minorités, il n’en reste pas moins que « la justice, la paix et l’égalité sont une utopie pour de nombreuses femmes et filles à travers le monde », a-t-il observé.  Aussi est-il nécessaire de mettre en œuvre le plus rapidement possible l’objectif 5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, relatif à l’égalité entre les sexes, de même que les objectifs 5, 10 et 16, a préconisé le représentant.

M. JULIO CÉSAR ARRIOLA RAMÍREZ (Paraguay) a déclaré que la Constitution de son pays accorde et garantit l’égalité des droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels aux hommes et aux femmes.  Le Gouvernement travaille à la promotion des droits de la femme, en tant que facteur de changement, car il considère que cette responsabilité incombe en premier lieu aux États.  Pour cette raison, le Ministère de la femme du Paraguay met en œuvre des politiques publiques tenant compte de la perspective de genre.  Parmi elles, il y a la « Ciudad Mujer », un centre destiné uniquement aux femmes, et dans lequel, elles peuvent trouver plus de 80 services liés à l’éducation de qualité, à la santé sexuelle et génésique, entre autres.  Le féminicide a été inscrit dans le Code pénal, a-t-il ajouté.

M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a encouragé tous les États Membres à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) et les résolutions subséquentes, en rappelant que des dizaines de Portugaises prenaient part à des initiatives de paix, notamment sous les auspices de l’Union européenne.  Le Portugal, a-t-il ajouté, promeut le droit à l’éducation dans les situations d’urgence humanitaire, y compris pour l’enseignement supérieur.  À cet égard, il a mentionné la plateforme mondiale pour les étudiants syriens, ONG fondée en novembre.  Le représentant a appelé les États Membres à signer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles à laquelle se sont déjà ralliés 81 pays, dont le Portugal.  Il a, enfin, cité en exemple Nadia Murad et Denis Mukwege, lauréats du Prix Nobel de la paix, comme symboles de la dénonciation de la violence sexuelle contre les femmes et de son utilisation comme arme de guerre.

M. SURENDRA THAPA (Népal) a déclaré que les femmes peuvent jouer un rôle clef dans les processus de paix en tant que facteur de changement.  C’est pour cela qu’après la signature de l’Accord de paix de 2006, son pays a adopté en 2011 un plan d’action national pour la mise en œuvre des résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008) du Conseil de sécurité.  Un des objectifs de ce plan est d’atteindre le taux de 33% de représentation de femmes dans toutes les institutions du pays, y compris les comités de paix locaux et le Parlement.

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a déclaré que, jamais dans son histoire, la prospérité politique et économique des femmes n’avait été plus vitale dans le pays qu’aujourd’hui.  Son Gouvernement accorde donc une attention particulière à trois domaines spécifiques, à savoir le renforcement de l’indépendance financière et économique des femmes, l’élimination de la violence contre les femmes et l’engagement des femmes dans la vie publique et politique.  Sri Lanka est également engagée en faveur de la mise en œuvre de projets de consolidation de la paix plaçant la femme au premier plan, en particulier les veuves ayant perdu leur mari lors du conflit qui a sévi dans le pays jusqu’en 2009.  Enfin, Colombo a lancé un Plan national d’action pour les droits de l’homme pour la période 2017-2021, qui réitère l’importance de parvenir à l’égalité entre les sexes.

M. AMAL MUDALLALI (Liban) a rappelé que ce fut seulement en 2013 que Mme Mary Robinson fut nommée comme première femme Envoyée spéciale du Secrétaire général de l’ONU.  « Où sont les femmes Envoyées spéciales pour la paix aujourd’hui? Nous devrions en voir beaucoup plus dans cette pièce et dans le monde entier. »  Le Liban, a dit son représentant, est fermement attaché à une approche inclusive de l’Agenda Femmes, paix et sécurité.  Le Premier Ministre désigné, M. Saad Hariri, qui est le premier à nommer des femmes ministres dans son cabinet, s’est engagé à nommer des femmes ministres dans le prochain gouvernement.  Il a promis de donner un rôle effectif aux femmes de son Cabinet.  « Si le pays avait été remis aux femmes, nous aurions été dans un endroit beaucoup plus agréable aujourd’hui », a dit le délégué en paraphrasant son Premier Ministre.  La Commission nationale des femmes libanaises a tenu six réunions entre avril et juillet 2018 pour élaborer le premier Plan national d’action sur la résolution 1325 qui devrait être approuvé par le nouveau gouvernement, a annoncé M. Mudallali.  En outre, l’armée libanaise est en train d’élaborer son plan stratégique visant à assurer l’égalité entre les sexes.

M. IRINA VELICHKO (Bélarus) a déclaré qu’il ne faut pas sous-estimer les politiques qui ont pour but de renforcer le rôle des femmes dans une série de problèmes internationaux.  Traditionnellement, le Bélarus soutient les initiatives internationales luttant contre des fléaux internationaux comme la traite des femmes.  Le Bélarus, a-t-il ajouté, participe également aux opérations de maintien de la paix.  Parmi les contingents qu’il a déployés au Liban, on compte un grand nombre de femmes, a déclaré la représentante. 

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie) a fait valoir l’Initiative Village de la paix, initiée par l’Institut Wahid, une institution indonésienne qui a coopéré avec ONU-Femmes et le Japon pour autonomiser les femmes au niveau local et renforcer ainsi la résilience des communautés.  Elle a ensuite lancé un plaidoyer en faveur d’une hausse du nombre de femmes soldats de la paix, ce à quoi s’emploie son pays, avec un total de 72 femmes déployées qui sera bientôt porté à 112.  De manière plus générale, la représentante s’est prononcée en faveur d’une intégration des perspectives de genre dans le maintien de la paix à l’ONU, l’Indonésie œuvrant en ce sens grâce à la formation qu’elle dispense dans son centre de formation de Sentul. 

M. FREDERICO SALOMÃO DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) a indiqué que son pays avait lancé cette année son deuxième plan d’action sur la mise en œuvre de la résolution 1325.  Ce plan reprend les quatre piliers de la résolution, tout en tenant compte de la réalité du Brésil en tant que pays en développement.  Depuis l’adoption de ce plan, un jalon important a été franchi, avec l’intégration en 2017 de la première femme dans la haute hiérarchie de l’armée nationale, a fait valoir le représentant avant de signaler aussi la création de programmes de formation de femmes militaires.

Le Brésil a par ailleurs imposé des quotas de représentation des femmes dans les partis politiques, dans les candidates aux élections et dans les temps d’antenne qui leur sont accordés.  Le taux de femmes élues a ainsi augmenté: il est passé de 10% à 15% pour la chambre basse et on compte même une députée autochtone.  Le Brésil reconnaît que la prochaine étape est d’augmenter le nombre de femmes brésiliennes dans les opérations de maintien de la paix.  Il prendra en ce sens des mesures concrètes dans la ligne des propositions du Secrétaire général, a assuré le représentant. 

M. PULE DIAMONDS (Namibie) a jugé encourageants les progrès enregistrés sur la question des femmes, de la paix et de la sécurité, laquelle a donné lieu à sept résolutions du Conseil de sécurité.  Pourtant, a-t-il fait remarquer, l’Étude mondiale réalisée en 2015 pour marquer le 15e anniversaire de la résolution 1325 (2000) a démontré la lenteur de la mise en œuvre de ce texte.  Le délégué a profité de l’occasion pour encourager les États Membres qui s’y emploient à mettre en place des plans d’action nationaux afin d’assurer une application, un suivi et une évaluation structurés, notamment en matière de recrutement des femmes dans les forces armées, d’entraînement des femmes aux négociations et de formation à l’assistance en faveur des femmes victimes de violence. 

Notant que la résolution 1325 (2000) préconise l’inclusion des femmes aux tables de négociation, le représentant a estimé qu’une éducation de qualité et sensible aux conflits pour les femmes et les filles était essentielle pour assurer la participation des femmes aux processus de consolidation de la paix.  Il s’est également félicité que, conformément à cette résolution, le Département des opérations de maintien de la paix (DPKO) ait demandé aux pays contributeurs de troupes de déployer davantage de femmes afin de parvenir à l’objectif d’un part de 15% de femmes au sein des missions de maintien de la paix d’ici à décembre 2018.  Il a indiqué qu’en juillet de cette année, la Namibie en était pour sa part à 13% de femmes déployées, deux autres devant l’être cette année pour atteindre les 15%. 

Le délégué a enfin souligné que son pays est un membre fondateur du Réseau de points focaux pour les femmes, la paix et la sécurité, qui facilite la coordination des États Membres sur cette question et permet des échanges de bonnes pratiques, avec la participation d’ONU-Femmes et d’organisations de la société civile. 

Mme NARJESS SAIDANE, Organisation internationale de la Francophonie – OIF, a expliqué que la Francophonie se situe dans une logique de partage d’expériences et s’efforce de mieux révéler, au Conseil de sécurité, la dynamique de l’espace francophone.  Pour faire avancer l’agenda, il faut, selon elle, dépasser la perception qui voudrait que les femmes aient encore besoin d’être formées et autonomisées pour jouer un rôle.  Elle a ainsi préconisé de déconstruire les normes sociales qui sont à la base de la dévalorisation du rôle de la femme.  Les chefs d’État et de gouvernement de la Francophonie réunis à Erevan, le 11 et 12 octobre 2018 pour leur 17ème Sommet, ont adopté une nouvelle Stratégie pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, des droits et de l’autonomisation des femmes et des filles.

La lutte contre les violences et les discriminations faites à celles-ci est également au cœur des priorités de la Francophonie, a-t-elle poursuivi, rappelant la Déclaration francophone sur ce sujet, suivie en 2013 d’un plan d’action.  C’est aussi une priorité opérationnelle, qui a abouti à un Accord-cadre de coopération avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU sur la question des violences sexuelles en période de conflits.  Cette coopération privilégiera le dialogue politique entre parties au conflit pour la protection et l’accès effectif des victimes et survivantes à la justice, ainsi que la lutte contre l’impunité des auteurs de violence, a expliqué Mme Saidane.  Elle permettra également de renforcer les cadres juridiques nationaux et l’adoption de mesures concrètes, en s’attaquant aux causes profondes, de ces violences et discriminations.  Toujours sur le plan opérationnel, la Francophonie soutient le renforcement de la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix.

M. MOHAMED OMAR MOHAMED GAD (Égypte) a déclaré que, dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325, son pays souligne la nécessité de créer des cadres institutionnels adéquats pour permettre l’autonomisation des femmes.  L’Égypte déploie des efforts considérables contre l’exploitation sexuelle, notamment dans le cadre d’un programme de formation et de sensibilisation destiné aux militaires, a-t-il fait valoir.  Il a notamment mentionné la publication d’un ouvrage sur la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Le Caire a également pris part au Réseau de dirigeantes africaines, a précisé le représentant, en rappelant que la femme est le principal artisan de la transition vers la paix et le développement. 

M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a jugé fondamental, et ce en dépit de toutes les spécificités, d’adopter une approche globale, qui permettent aux hommes de comprendre le rôle qui leur revient dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Le Gouvernement kenyan a, pour sa part, progressé sur la mise en œuvre de son plan d’action national, en intégrant une approche de genre dans les politiques nationales. 

Des femmes ont été nommées à des postes militaires et envoyées dans les opérations de maintien de la paix.  En 2017, le Kenya comptait 17% de femmes dans ses contingents, bien plus que les 15% exigés, s’est félicité le représentant.

M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a relevé, au nombre des entraves constatées par le Groupe d’experts du Conseil de sécurité sur l’Agenda Femmes, paix et sécurité, la non-garantie des droits socioéconomiques et culturels des femmes, leur faible participation à la politique, la pauvreté et les violences sexuelles qui les affectent.  Selon le délégué, il est prioritaire d’appuyer les droits des femmes et des filles et de promouvoir l’égalité des sexes pour parvenir à une mise en œuvre effective de l’agenda susmentionné.  Il a parlé du « Plan d’action femmes et paix et sécurité » du Luxembourg qui porte sur cinq ans et concerne l’ensemble de son gouvernement.  Ses piliers sont la participation égalitaire à tous les niveaux des processus de paix et de sécurité, la prévention et la protection des violences sexuelles et la promotion de l’Agenda Femmes, paix et sécurité.  Il a précisé que ce plan est complémentaire du Plan national « Égalité » qui promeut l’égalité femmes-hommes dans la prise de décision et dans l’emploi, et qui préconise aussi l’intégration de la dimension du genre dans l’ensemble des politiques du gouvernement. 

Pour M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives), il est temps que le Conseil de sécurité donne la priorité à une perspective de genre dans son diagnostic des risques en matière de sécurité.  Le Conseil doit rendre effective l’application des résolutions concernées et produire une analyse des progrès.  Surtout, le programme pour les femmes, la paix et la sécurité doit faire partie de la boîte à outils habituelle du Conseil de sécurité, en plus de débats comme celui-ci.

Les Maldives, fortes d’une tradition où les décisions sont prises conjointement entre maris et femmes dans les foyers, a toujours connu le suffrage universel, s’est enorgueilli M. Mohamed.  Les congés de maternité et de paternité sont garantis par la loi et le pays ne connaît pas la discrimination à l’emploi ni en milieu scolaire.  Cependant, des progrès restent à faire dans le domaine des femmes aux postes de décision.  Les Maldives prennent des mesures pour inverser la tendance, tant dans le secteur privé que le secteur public, pour que les femmes ne soient pas réduites au choix binaire entre maternité ou carrière. 

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a insisté sur l’urgence d’éliminer toutes formes de discrimination contre les femmes sur les plans physiques, sociaux, économiques et au niveau de la sécurité politique.  Il a assuré que son pays continuait par ailleurs de considérer les femmes victimes des conflits comme une puissante force de diplomatie publique.  À ce titre, a-t-il rappelé, 65% du personnel impliqué dans les processus de paix en Géorgie sont des femmes.  Il a cependant regretté que « l’occupation en cours des régions d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud par la Fédération de Russie mine le processus de paix et impose des conditions de vie difficiles à l’une des parties les plus vulnérables de la société ».  Selon lui, les femmes vivant dans ces zones sont sujettes à des violations systématiques des droits de l’homme, dont le déni de leur droit à la liberté de mouvement, des détentions illégales et des menaces à leur sécurité physique en cas de franchissement illégal de la frontière.  Prenant l’exemple d’une femme, Maia Otinashvili, qui aurait été kidnappée et détenue pendant 10 jours par les forces russes pour avoir « facilité un franchissement illégal de la frontière », le délégué a assuré que 160 femmes sont aujourd’hui illégalement détenues de la sorte. 

Pour promouvoir le rôle de la femme dans la société, Mme MILICA PEJANOVIĆ ĐURIŠIĆ (Monténégro) a déclaré que son pays avait développé une approche globale axée sur leur participation politique accrue, la lutte contre la violence à leur encontre, et leur autonomisation économique.  Elle a ensuite indiqué que son gouvernement s’était doté de mécanismes de suivi de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), en coopération avec ONU-Femmes, et s’apprêtait à adopter un Plan d’action national à cet effet pour la période 2019-2023. 

En outre, le Monténégro travaille étroitement avec le Réseau de points focaux nationaux de l’ordre du jour Femmes, paix et sécurité, ainsi qu’avec le Réseau de femmes médiatrices de la région méditerranée. 

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a informé que son pays a alloué un soutien financier au mécanisme international, impartial et indépendant créé par l’Assemblée générale pour enquêter sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie, dont les crimes sexuels et sexistes. 

Le Qatar est en outre le principal donateur du fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.  Avec d’autres partenaires, le pays parraine aussi la première conférence internationale sur la participation des jeunes à la paix, qui se tiendra en mars prochain à Helsinki. 

M. CRAIG J. HAWKE (Nouvelle-Zélande) a indiqué que, chaque année, son pays organise la conférence annuelle de l’Association des centres de formation au maintien de la paix, qui comprend des modules de sensibilisation à la thématique femmes, paix et sécurité, conférence qu’elle préside actuellement. 

Par ailleurs, les femmes et les filles doivent pouvoir exercer un contrôle sur leur propre santé sexuelle et reproductive, a ajouté le délégué, avant de se féliciter de l’adoption de la résolution 39/10 du Conseil des droits de l’homme sur la mortalité maternelle évitable dans les contextes humanitaires. 

Mme ANN SUDMALIS (Australie) a parlé du projet de recherche « Vers une paix inclusive » financé par le Gouvernement et focalisé sur les femmes, la paix et la sécurité dans la région indopacifique.  La recherche montre que l’un des facteurs pour assurer des accords de paix durables est la présence active des organisations des femmes.  Elles sont sur le terrain avant, durant et après les conflits.  Elles servent de médiateurs, à résoudre les conflits, à recoudre les relations communautaires et à rétablir la confiance dans les institutions.  La recherche montre aussi que la participation effective des femmes est rarement appuyée ou financée.  Trop souvent, les arrangements institutionnels excluent les femmes des processus clefs et les mesures comme les quotas ne suffisent pas à compenser leur sous-représentation. 

Les femmes de notre région veulent des solutions pratiques, a poursuivi la représentante: avoir accès aux soins infantiles, aux transports sûrs et aux toilettes; être consultées sur le calendrier des réunions et voir financer le voyage de leurs compagnons; être protégées contre la violence de ceux qui sont opposés à leur activisme et à leur leadership.  L’Australie étudie également les dimensions sexospécifiques de l’extrémisme violent dans sa région et le rôle différent que les femmes jouent et pourraient jouer pour lutter contre.  Les résultats de la recherche alimenteront le deuxième plan d’action national de l’Australie attendu en 2019, a annoncé la représentante.  Enfin, l’Australie a formé 101 conseillers militaires sur la problématique hommes-femmes et a créé 10 postes à temps plein de conseillers sur ce sujet.

Mme VERÓNICA GARCÍA GUTIÉRREZ (Costa Rica) a déclaré que son pays déploie des contingents composés en majorité de femmes et adopte toujours une approche de genre dans les processus de paix et de sécurité.  Le Costa Rica traite, par ailleurs, aussi de la question de la violence armée contre les femmes et a toujours souligné l’importance du désarmement, de la non-prolifération et du contrôle des armes. 

Car la paix et la stabilité ne peuvent être atteintes sans des politiques solides qui répondent aux questions de genre, a affirmé la représentante, ajoutant que son pays avait reconnu la nécessité d’institutionnaliser cette approche.  Le Costa Rica l’a fait à travers l’élaboration et l’adoption d’un instrument multidimensionnel intégral dénommé « Politique d’égalité effective entre les femmes et les hommes » et couvrant la période 2018-2030, a indiqué la délégation. 

M. DEE-MAXWELL SAAH KEMAYAH (Libéria) a souhaité une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions, de consolidation de la paix, de négociation et de maintien de la paix dans le monde.  « Il est de plus en plus clair qu’aucune société n’a opéré une sortie de conflit avec succès sans que les femmes en soient parties prenantes », a-t-il souligné.  Les femmes au Libéria accèdent de plus en plus à des postes décisionnels, notamment dans l’armée et la police, s’est félicité M. Kemayah en nommant la Cheffe d’État-major des forces armées du Libéria et l’Inspectrice générale adjointe de la Police nationale libérienne. 

Le représentant a loué l’équipe de pays des Nations Unies, ONU-Femmes, le Fonds pour la consolidation de la paix, les partenaires internationaux et les parties prenantes pour leur soutien dans les efforts du Libéria pour l’autonomisation des femmes dans tous les secteurs de la société.  Il s’est, enfin, dit impatient de participer et de soutenir le Groupe des Amis du Réseau des femmes d’influence en Afrique, le Réseau de coordonnateurs pour les femmes et la paix et la sécurité et le Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité aux Nations Unies.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a indiqué que son pays participe activement à l’initiative sur la promotion de la médiation en Méditerranée, lancée par son pays et l’Espagne en 2012, ainsi qu’au Réseau des points focaux sur la thématique « Femmes, paix et sécurité », créé par l’Espagne en 2016, et au Réseau des femmes méditerranéennes lancé par l’Italie en 2017.  Le représentant a fait valoir l’emploi de centaines de femmes comme guides spirituels musulmans (Morchidates) dans les mosquées ou institutions religieuses à travers le Maroc: « Ces femmes donnent des lignes directrices sur les véritables principes pacifiques de l’islam, basée sur la tolérance et l’acceptation de l’autre », a-t-il déclaré.  En outre, la délégation a souligné que son pays déploie régulièrement du personnel féminin au sein de missions de maintien de la paix comme celle en République démocratique du Congo, la MONUSCO.  D’ailleurs, a ajouté le représentant, le Maroc entend satisfaire, avant la fin de 2018, l’objectif de 15% de femmes parmi les experts en missions et observateurs militaires dans cette catégorie. 

M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a déclaré soutenir toutes les mesures ayant pour but de mettre en œuvre la résolution 1325 (2000), y compris celles visant à combler les lacunes tant sur le plan national qu’international.  C’est pour cette raison que son gouvernement a adopté une approche globale, incluant l’alignement de sa législation avec ladite résolution et la présentation volontaire de rapports devant le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. 

Par exemple, en 2012, le Gouvernement a créé le fonds de développement des femmes, destiné à financer des projets qui accroissent l’autonomie économique des femmes, a indiqué le délégué.  Sur le plan international, la Thaïlande participe à diverses missions de maintien de la paix.  Là, 20% des contingents thaïlandais sont composés de femmes, a-t-il assuré.

M. VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a fait l’historique des mesures prises par le Gouvernement rwandais pour contribuer à la prévention du conflit au Rwanda après le génocide des Tutsis en 1994, pour dire qu’il est important de reconnaître l’importance des solutions nationales et des mécanismes traditionnels pour résoudre les conflits.  Des efforts doivent être entrepris pour impliquer les « gardiens de la paix » qui sont généralement les personnes âgées et les femmes.  « Pour que nous puissions faire progresser l’égalité des sexes et autonomiser les femmes politiquement et économiquement, et dans le contexte de la paix et de la sécurité et du relèvement après le conflit, nous devons prendre quelques mesures », a prôné le représentant en citant, par exemple, la création de plateformes de partages des meilleures pratiques comme « FemWise-Africa » et le Réseau des dirigeantes africaines.  Pour la mise en œuvre effective et réussie de l’Agenda Femmes, paix et sécurité, il a conseillé de mieux évaluer les progrès accomplis sur le terrain et au Siège des Nations Unies.  Il a ainsi suggéré de faire le suivi des progrès dans le cadre de l’évaluation des performances de tous les chefs des missions de maintien de la paix et des missions politiques de l’ONU. 

Mme SAADA DAHER HASSAN (Djibouti) a attiré l’attention sur les répercussions des changements climatiques sur la sécurité, qui touchent les femmes de manière disproportionnée, en limitant leur accès aux ressources de base telles que l’eau.  Dès lors, il importe d’adopter des stratégies adéquates d’évaluation et de gestion des risques, a préconisé la représentante.  Son pays, a-t-elle avancé, a œuvré en faveur de la participation des femmes aux processus d’autonomisation économique, à la gouvernance et à la justice.  « Beaucoup de politiques publiques sectorielles en ce sens ont été accomplies et font l’objet d’un programme national sur le genre.  L’article 1er de la Constitution djiboutienne a instauré l’égalité entre l’homme et la femme concernant les droits civiques et politiques », a-t-elle ajouté, en faisant valoir que les femmes représentent 25% des personnels de l’administration publique. 

Mme SOFYA SIMONYAN (Arménie) a évoqué un moment fort de l’histoire du pays.  Il s’est déroulé ce printemps, quand les citoyens arméniens, les femmes et la jeunesse en tête de cortège, ont exercé leurs libertés fondamentales d’expression, d’opinion et de culte.  Le Gouvernement a depuis encouragé les femmes à participer aux affaires publiques de la nation et à son processus politique.  Dans cet élan, il a donné une priorité fondamentale aux réformes accélérant l’égalité entre les sexes, une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions et leur représentation politique.  Un plan d’action national, inspiré du programme pour les femmes, la paix et la sécurité, en est au stade final. 

Plus tôt ce mois-ci, l’Arménie a accueilli le Sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie: « l’un des principaux documents adoptés à cette occasion est la Stratégie de la Francophonie pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, des droits et de l’autonomisation des femmes et des filles », a ajouté Mme Simonyan.  Cette Stratégie reconnaît que les femmes, les organisations et les réseaux de femmes jouent un rôle important dans la promotion de la paix et la préservation des communautés, en particulier dans les situations de conflit, lorsque leurs responsabilités économiques et sociales augmentent.  La Stratégie reconnaît également que la participation des femmes dans les processus de paix crée les conditions favorables à une réelle réconciliation nationale, a conclu la représentante. 

Mme AMARSANAA DARISUNEM, Représentante de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a dit que l’OSCE reconnaît que les dimensions politico-militaires, économiques et environnementales sont étroitement liées aux dimensions humaines de la sécurité.  Elle constate, elle aussi, que la participation significative des femmes dans les processus de paix est un défi.  Elles restent sous-représentées, y compris dans les équipes de négociation de l’OSCE.

Pour combler cette lacune, l’équipe d’appui à la médiation et la section de genre de l’OSCE développent actuellement « une boîte à outils » sur l’inclusion des femmes dans les processus de paix, a expliqué la représentante.  Cette boîte à outils permettra d’identifier de quelles façons les femmes peuvent être engagées dans lesdits processus, dans le contexte de l’appui formel accordé par l’OSCE aux négociations et à la facilitation de dialogues. 

M. HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a déclaré que son gouvernement s’efforce d’accorder les mêmes droits aux hommes et aux femmes, que ce soit en facilitant l’accès de ces dernières au marché du travail ou en garantissant leur participation politique.  « Nous avons lancé une croisade contre les violences sexuelles et sexistes à l’échelle du pays », a-t-elle dit en mentionnant notamment l’adoption d’une loi organique.

Mme PENNELOPE ALTHEA BECKLES, (Trinité-et-Tobago) a rappelé que son pays avait présenté en 2010 à l’Assemblée générale de l’ONU la première résolution sur « Femmes, désarmement, non-prolifération et maîtrise des armements », dans le double objectif de promouvoir l’autonomisation de la femme et en même temps la paix et la sécurité internationales.  Cette résolution, actuellement examinée par la Première Commission de l’Assemblée générale, continue de bénéficier d’un large soutien des États Membres, s’est-elle réjouie.  En tant que membre actuel du Conseil d’administration d’ONU-Femmes, Trinité-et-Tobago veut continuer de travailler de concert avec les États Membres pour la réalisation de l’égalité des sexes à l’échelle mondiale.  Mme Beckles voit dans le plan stratégique d’ONU-Femmes 2018-2021, un important instrument à même de contribuer à la réalisation de cet objectif.  Pour finir, elle a remercié la communauté internationale pour sa confiance dans l’élection, pour la première fois, d’un représentant de son pays au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW).

M. ION JINGA (Roumanie) s’est déclaré satisfait que le prix Nobel de la paix ait été accordé, cette année, à deux personnalités qui défendent et promeuvent les droits de la femme.  Toutefois, il s’est dit extrêmement préoccupé par l’intimidation et les représailles contre les femmes militantes pour la paix et les activistes humanitaires.  

S’agissant de la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix, la Roumanie est d’avis que la présence de femmes officiers dans leurs rangs est importante pour l’efficacité opérationnelle et a un impact sur la pérennité de la paix.  Pour sa part, la Roumanie a atteint un taux de 13% de femmes parmi les contingents déployés au sein des missions de maintien de la paix où elle est présente.

M. CARMELO INGUANEZ (Malte) s’est félicité que les questions de l’autonomisation des femmes, de l’égalité de genre et de participation des femmes dans la vie publique et politique prennent une place de plus en plus centrale dans les travaux du Conseil de sécurité.  À cet égard, il a estimé que la résolution 1325 (2000) et les suivantes sont au cœur des activités du Conseil en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Le représentant a considéré que le rôle des femmes dans la recherche de la paix et de la sécurité ne pouvait être ignoré.  De fait, a-t-il dit, elles devraient non seulement participer librement aux débats locaux et internationaux sur leur avenir mais aussi exercer des fonctions publiques et devenir décisionnaires au sein du gouvernement et de la société.  Elles devraient par ailleurs pouvoir participer sans entrave à des discussions et débats en dehors de leur pays d’origine. 

Dans un nombre écrasant de cas, les femmes souffrent de violences directes et délibérées dans les zones de conflit, a poursuivi M. Inguanez, saluant le fait que la résolution 1820 (2008) du Conseil ait reconnu la violence sexuelle comme une arme de guerre.  Il a également pris note de la préoccupation exprimée par le Secrétaire général au sujet du manque de progrès dans les engagements plus fondamentaux en faveur de la paix et de la sécurité, des droits de l’homme et l’égalité de genre.  Soulignant l’importance de l’égalité de genre, laquelle est renforcée par l’objectif 5 du Programme 2030, le représentant a indiqué que son pays avait œuvré à sa promotion au cours des dernières années.  Malte a ainsi promulgué cette année une nouvelle loi contre les violences sexistes et domestiques, qui incorpore les dispositions de la Convention d’Istanbul, a-t-il indiqué. 

Mme DANIELA ALEJANDRA RODRÍGUEZ MARTÍNEZ (Venezuela) s’est dite convaincue que la participation accrue des femmes à tous les processus de paix est une priorité pour garantir la paix durable dans les sociétés postconflit, à condition toutefois que les ressources suffisantes leur soient affectées.  Davantage d’expertes doivent être nommées dans les opérations de maintien de la paix, dans lesquelles toutes les atteintes aux droits de l’homme doivent faire l’objet d’une politique de tolérance zéro, a préconisé la représentante.  Elle a plaidé, en conclusion, en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes à tous les niveaux de la société. 

Mme CLARE HUTCHINSON, Représentante de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), a indiqué que l’OTAN a créé un comité consultatif de la société civile sur les femmes, la paix et la sécurité qui représente les femmes les plus touchées par les inégalités et les conflits.  Ce comité nous demande d’élargir notre compréhension de la sécurité et de promouvoir une approche plus inclusive, a-t-elle expliqué.  Les membres ont parlé de leurs préoccupations face aux menaces à la paix dans le monde et de leurs frustrations quant à la lenteur des progrès sur la question.  « Nous avons écouté.  Nous avons entendu leurs voix.  Et nous avons répondu en assurant que l’intégration du genre et l’inclusion des voix des femmes sont intégrées dans le travail de l’OTAN », a assuré Mme Hutchinson. 

Partout, les femmes mettent l’accent sur la nécessité de renforcer les mesures préventives en intégrant une perspective de genre dans les analyses d’alerte rapide.  « Nous devons reconnaître que les violations des droits des femmes et leur isolement politique et économique sont des indicateurs de conflit potentiel », a continué la représentante de l’OTAN.  Le comité consultatif de la société civile demande à l’Organisation de rendre le genre plus visible dans les réponses en matière de sécurité et de fournir une vision claire pour l’avenir, qui repose sur des efforts coordonnés avec les organisations internationales et la société civile. 

Mme LALA MEHDIYEVA (Azerbaïdjan) a déclaré qu’en tant que pays dont une partie du territoire est sous occupation militaire étrangère, « victime de nettoyage ethnique et d’autres atrocités commises contre sa population civile », l’Azerbaïdjan considère la sécurité des civils comme étant de la première importance.  Aujourd’hui, plus d’un million d’Azerbaïdjanais sont réfugiés et déplacés dans leur propre pays, la moitié étant des femmes.  Elles souffrent de cette situation depuis une trentaine d’années. 

C’est pour cette raison que la délégation estime que la communauté internationale ne devrait pas rester indifférente au sort des femmes et des filles dans les conflits armés.  Elle a le devoir de les protéger, a insisté la représentante, ajoutant que son pays continue de soulever cette question sur le plan international, y compris au sein de l’Assemblée générale et de la Commission de la condition de la femme. 

Mme MARÍA BASSOLS DELGADO (Espagne) a rappelé qu’en dépit de progrès accomplis depuis 2000, la participation des femmes aux processus de paix est encore timide, en raison principalement d’obstacles institutionnels.  C’est la raison pour laquelle elle s’est réjouie des initiatives présentées ce matin par le Secrétaire général, avant de dire que son propre pays s’est engagé à nommer des femmes à des postes de responsabilité au sein d’organismes chargés de promouvoir la paix et la sécurité.  L’Espagne s’est déclarée convaincue que l’accès des femmes à tous les niveaux du cursus scolaire et des études supérieures est absolument nécessaire, conformément aux objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a annoncé qu’en juillet dernier, le Gouvernement a présenté le deuxième rapport du plan national d’action sur la résolution 1325.  Ce plan entend permettre aux femmes de participer activement à la construction du pays par la mise en œuvre de différentes mesures, notamment l’augmentation de la participation des femmes dans les processus de décision et dans l’exécutif, dans les questions de sécurité, de paix et de réintégration, de prévention et de protection des femmes contre la violence et la discrimination.  Il mise sur la sensibilisation et l’augmentation de la sécurité économique des femmes vulnérables.  Après avoir énuméré les progrès réalisés, M. Saikal a reconnu que le plus grand obstacle à la mise en œuvre des plans nationaux est l’insécurité.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des mesures contre « les cerveaux de cette insécurité », en se basant sur les engagements juridiques internationaux et la Charte des Nations Unies. 

M. THABO MICHAEL MOLEFE (Afrique du Sud) a déclaré qu’il est reconnu que la participation des femmes accroît les chances de résolution des conflits.  Elle améliore aussi la protection des filles et des femmes face aux menaces de violences sexuelles.  Forte de cette reconnaissance, certains instruments de l’Union africaine traitent spécifiquement de la question des femmes, notamment le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, également connu sous le nom de Protocole de Maputo.  Ce dernier cherche à réaliser les droits de la femme, tels qu’énumérés dans la Charte africaine.  Il insiste sur le fait que les États ont l’obligation de mettre en œuvre les résolutions des Nations Unies relatives à la paix et à la sécurité.  Le Protocole les exhorte donc à prendre toutes les mesures pour accroître la participation des femmes, les protéger dans les situations de conflit, y compris de la violence sexuelle et des pratiques néfastes comme le mariage précoce et les mutilations génitales féminines.  

M. TAREQ MD. ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a déclaré que son pays, face à la crise humanitaire qui menace les réfugiés rohingya, travaille en coopération étroite avec ses partenaires humanitaires pour créer un espace sûr et inclusif pour les femmes de ces communautés se trouvant dans les camps près de la frontière.  Il a dénoncé les crimes « inhumains » perpétrés par les forces de sécurité du Myanmar, d’après la mission d’établissement des faits dépêchée par le Conseil des droits de l’homme.  Le représentant a indiqué que le Bangladesh avait récemment conclu un cadre de coopération avec le Bureau de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles dans les conflits pour répondre aux besoins des victimes.  M. Islam a exhorté le Conseil de sécurité à rester saisi de la dimension du genre dans ses délibérations relatives à la situation au Myanmar.

Reprenant la parole à la fin du débat, le représentant d’Israël a jugé « regrettable que le Président du Conseil de sécurité ait choisi d’inviter, au cours de ce débat, la représentante d’une organisation palestinienne, « censée aider les femmes, mais qui se sert de son mandat pour promouvoir la haine et la violence ».  La représentante de cette organisation a décrit les juifs comme « buvant le sang des Palestiniens », a affirmé le représentant.  De son point de vue, on ne peut pas s’étonner du choix de la Bolivie d’inviter une telle organisation, a-t-il poursuivi, affirmant que « la Bolivie n’est pas, contrairement à Israël, un modèle de démocratie ».  On peut toujours regarder ailleurs lorsque l’on parle d’Israël, mais la vérité est que « les vrais ennemis des Palestiniens sont la société civile palestinienne et le peuple palestinien lui-même », a conclu le représentant.

Le représentant de la Bolivie, répondant à la délégation d’Israël, a donné lecture de l’article 39 du Règlement intérieur provisoire du Conseil de sécurité, lequel dit que le Conseil de sécurité peut inviter qui il souhaite pour l’éclairer sur une situation spécifique.  « C’est donc le Conseil de sécurité qui a invité cette organisation.  Le Conseil de sécurité », a répété le représentant. 

Sur la question des droits de l’homme, il a souhaité savoir si Israël accepterait la visite d’un organe international, qui se rendrait dans les territoires palestiniens occupés pour y examiner la situation des droits.  La Bolivie, pour sa part, est prête à le faire, comme elle l’a déjà fait par le passé, « puisqu’elle n’a rien à cacher ».  Concluant, il a dit que « le pire ennemi des Palestiniens est l’occupation israélienne.  Cette situation prendra fin lorsque l’occupation prendra elle aussi fin », a-t-il lancé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: appui unanime à la Cour internationale de Justice face à la « crise de confiance » qui frappe le multilatéralisme

Soixante-treizième session,
24e & 25e séances plénières – matin & après-midi
AG/12082

Assemblée générale: appui unanime à la Cour internationale de Justice face à la « crise de confiance » qui frappe le multilatéralisme

Alors que son Président, le juge Abdulqawi A. Yusuf, a présenté, devant l’Assemblée générale, le dernier rapport de la Cour internationale de Justice (CIJ) pour la période du 1er août 2017 au 31 juillet 2018, « une période chargée et productive », tous les États ont salué son rôle, en particulier dans cette ère où les institutions internationales et le multilatéralisme sont confrontés à une crise de confiance.

Depuis le 1er août 2017, 17 affaires contentieuses ont été pendantes devant « l’organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies », alors qu’un certain nombre d’autres affaires ont été réglées.  La CIJ a aussi rendu quatre arrêts et 13 ordonnances, tout en étant saisie de cinq nouvelles affaires contentieuses.

Son Président a fait part de l’inquiétude de la Cour, laquelle croule sous le poids des affaires tout en faisant face à l’éventualité d’un déménagement du Palais de la Paix, son siège de La Haye, bientôt en travaux.  « La Cour n’a pas encore d’information sur les modalités de ce déménagement », a déploré le juge Yusuf, rappelant qu’il est important de disposer d’un plan de transition souple en cette période chargée.  Le manque d’information « crée une atmosphère d’incertitude qui n’est pas propice à l’exercice des fonctions judiciaires », a-t-il déploré.

Après que le juge Yusuf a décrit les activités menées et celles en cours, plusieurs délégations ont salué la diversité géographique des affaires qui illustre le caractère universel de la compétence de la Cour.  C’est aussi un signe que le multilatéralisme, mis à rude épreuve, reste le meilleur garant de la paix et de la sécurité internationales, s’est réjoui le Sénégal.  Face à la « crise de confiance » dans les institutions internationales, le rôle de la CIJ est plus que jamais important, a renchéri Singapour.  En cette période de défis pour le multilatéralisme, la CIJ demeure une institution essentielle pour la paix et l’ordre juridique internationaux, a ajouté la France.  Malgré les vents contraires, la CIJ incarne les principes de paix et de justice », a dit, à son tour, Chypre.

La Cour, a poursuivi le Gabon, « peut se féliciter qu’à ce jour, le sérieux de son travail constitue le socle sur lequel est arc boutée sa crédibilité ».  La représentation en son sein des différents systèmes juridiques, des langues et des cultures, contribue sans aucun doute à l’efficacité et à la qualité des décisions, a commenté la Belgique, tandis que d’autres saluaient le fait que 193 États sont parties au Statut de la Cour et que 73 États ont accepté sa juridiction obligatoire.

La mission de la Cour est de régler, conformément au droit international, les différends d’ordre juridique qui lui sont soumis par les États et de donner des avis consultatifs sur les questions juridiques que peuvent lui poser les organes et les institutions spécialisées de l’Organisation des Nations Unies autorisés à le faire.  Au vu de cette double mission, la Gambie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a salué l’efficacité et le professionnalisme avec lesquels la CIJ a traité de la requête de l’Assemblée générale sur les conséquences juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965. 

Le Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, a regretté que le Conseil de sécurité n’ait sollicité aucun avis consultatif de la Cour depuis 1970.  De toutes façons, ont noté des États dont la Libye, certains pays ne respectent pas les arrêts de la Cour.  Il a rappelé l’avis consultatif de 2004, resté lettre morte, sur l’illégalité du mur de séparation érigé par Israël.  Une affaire, ont professé les Pays-Bas, ne devrait jamais être présentée à la Cour sous le prétexte fallacieux d’un avis consultatif.  La saisine doit contenir une question générale de droit international et non une question sur l’application de ce droit à une situation particulière, ce qui est dans les faits un différend juridique entre des États.  La Cour, ont-t-il insisté, doit toujours s’assurer du consentement des parties et ce consentement ne peut exister que si les parties ont reconnu sa juridiction obligatoire. 

Ce cours de droit n’a pas empêché Cuba d’accuser les membres du Conseil de sécurité d’user de leur droit de veto pour faire obstacle aux arrêts de la Cour, ce qui montre les imperfections des mécanismes d’exécution des arrêts et pointe vers la nécessité d’une réforme pour protéger les pays en développement contre les grandes puissances, a prôné le pays.  L’Iran a justement demandé aux États-Unis de se ranger à l’ordonnance de la CIJ du 3 octobre par laquelle la Cour indique que ces derniers doivent, par les moyens de leur choix, supprimer toute entrave que les mesures annoncées le 8 mai 2018 mettent à la libre exportation vers l’Iran de certains biens et services qui sont énumérés. 

L’Ukraine a également accusé la Fédération de Russie qui « persiste à discriminer l’Assemblée des Tatars de Crimée, alors que dans sa décision du 19 avril 2017 les 15 juges de la CIJ avaient demandé au pays de ne plus imposer des limitations au droit de cette communauté à préserver ses institutions ». 

L’Assemblée générale reprendra ses travaux le vendredi 26 octobre à 10 heures pour examiner la question de l’espace comme moteur de développement durable.

RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE (A/73/4 ET A/73/319)

L’Assemblée générale est saisie du rapport de la Cour internationale de Justice (A/73/4); et du rapport du Secrétaire général sur le Fonds d’affectation spéciale du Secrétaire général destiné à aider les États à porter leurs différends devant la Cour internationale de Justice (A/73/319) portant sur la période allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018, durant laquelle le Fonds n’a reçu aucune demande, et des contributions ont été versées par la Suisse et la Finlande. 

Présentation du rapport

M. ABDULQAWI A. YUSUF, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a présenté son rapport A/73/4 qui couvre la période allant du 1er août 2017 au 31 juillet 2018, « une période chargée et productive », au cours de laquelle 17 affaires contentieuses ont été pendantes devant la CIJ, alors qu’un certain nombre d’autres affaires ont été réglées au cours de l’année. 

Au cours de la période du rapport, a expliqué le Président, la Cour a entendu six affaires, y compris les audiences sur les exceptions préliminaires soulevées par la France dans le cadre de l’affaire des « Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France) ».  Elle a aussi entendu les parties impliquées dans le différend concernant l’obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique (Bolivie c. Chili).  En juin et août derniers, la CIJ a entendu les arguments oraux des parties sur la demande en indication de mesures conservatoires présentée par le Qatar au sujet de l’affaire relative à l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Qatar c. Émirats arabes unis).  Elle a également entendu les parties sur l’affaire des violations alléguées du Traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955 (République islamique d’Iran c. États-Unis d’Amérique).

Depuis le 1er août 2017, la CIJ a rendu quatre arrêts.  Le 2 février 2018, elle a rendu deux arrêts sur le fond, le premier portant sur la fixation du montant de l’indemnisation due par le Nicaragua au Costa Rica, et le second sur la délimitation maritime dans la mer des Caraïbes et l’océan Pacifique (Costa Rica c. Nicaragua).  La CIJ a fixé le total de la somme due par le Nicaragua au Costa Rica au 2 avril 2018 à 378 890,59 dollars. 

Au sujet de l’affaire de la « délimitation maritime dans la mer des Caraïbes et l’océan Pacifique » (Costa Rica c. Nicaragua), a poursuivi M. Yusuf, la Cour a reconnu la souveraineté du Costa Rica sur toute la partie septentrionale d’Isla Portillos, y compris sa côte jusqu’au point où la rive droite du fleuve San Juan rejoint la laisse de basse mer de la côte de la mer des Caraïbes, à l’exception de la lagune de Harbor Head et du cordon littoral qui sépare cette dernière de la mer des Caraïbes, sur lesquels la souveraineté est nicaraguayenne à l’intérieur de la frontière définie au paragraphe 73 de l’arrêt.  Le 14 février, le Nicaragua a informé la Cour qu’il avait démantelé son camp militaire du territoire du Costa Rica. 

Le troisième arrêt de la Cour, rendu le 6 juin 2018, portait sur les exceptions préliminaires soulevées par la France dans le cadre de l’affaire des « Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France) ».  Pour rappel, le 13 juin 2016, la Guinée équatoriale a déposé une requête introductive d’instance contre la France au sujet d’un différend ayant trait à « l’immunité de juridiction pénale du second Vice-Président de la République de Guinée équatoriale chargé de la défense et de la sécurité de l’État, M. Teodoro Nguema Obiang Mangue, ainsi qu’au statut juridique de l’immeuble qui abrite l’ambassade de Guinée équatoriale en France ».  Le 31 mars 2017, la France avait soulevé trois exceptions préliminaires à la compétence de la Cour.  La Cour a rejeté à l’unanimité la demande de la France tendant à ce que l’affaire soit rayée du rôle; et a indiqué, à titre provisoire, que la France doit, dans l’attente d’une décision finale en l’affaire, prendre toutes les mesures dont elle dispose pour que les locaux présentés comme abritant la mission diplomatique de la Guinée équatoriale, au 42 avenue Foch, à Paris, jouissent d’un traitement équivalent à celui requis par l’article 22 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, de manière à assurer leur inviolabilité.

Le quatrième arrêt de la Cour a été rendu le 1er octobre 2018 quand elle a tranché au fond l’affaire relative à l’obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique (Bolivie c. Chili).  Le 24 avril 2013, l’État plurinational de Bolivie a déposé une requête introductive d’instance contre le Chili au sujet d’un différend ayant trait à « l’obligation du Chili de négocier de bonne foi et de manière effective avec la Bolivie en vue de parvenir à un accord assurant à celle-ci un accès pleinement souverain à l’océan Pacifique ».  La Cour a ainsi conclu, le 1er octobre, que le Chili n’avait pas contracté d’obligation juridique de négocier l’accès souverain de la Bolivie à l’océan Pacifique.  Elle a cependant ajouté que sa conclusion ne devait pas être comprise comme empêchant les parties de poursuivre leur dialogue et leurs échanges dans un esprit de bon voisinage, afin de traiter les questions relatives à l’enclavement de la Bolivie, dont la solution était considérée par l’une et l’autre comme relevant de leur intérêt mutuel.

Le juge a ensuite évoqué trois ordonnances qui ne sont pas de nature procédurale et que la Cour a rendues au cours de la période considérée.  Dans son ordonnance en date du 15 novembre 2017, la Cour a dit que la première et la deuxième demandes reconventionnelles présentées par la Colombie étaient irrecevables comme telles et ne faisaient pas partie de l’instance en cours, et que la troisième et la quatrième demandes reconventionnelles présentées par la Colombie étaient recevables comme telles et faisaient partie de l’instance en cours. 

Le 23 juillet 2018, la Cour a rendu son ordonnance sur la demande en indication de mesures conservatoires, demandant ainsi, entre autres, que « les familles qataro-émiriennes séparées par suite des mesures adoptées par les Émirats arabes unis le 5 juin 2017 soient réunies »; et que « les Qatariens affectés par les mesures adoptées par les Émirats arabes unis le 5 juin 2017 puissent avoir accès aux tribunaux et autres organes judiciaires de cet État ».

Le 3 octobre enfin, la Cour a rendu une troisième ordonnance en indication de mesures conservatoires, dans l’affaire « des violations alléguées du Traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955 (République islamique d’Iran c. États-Unis d’Amérique).  Le 16 juillet 2018, l’Iran avait déposé une requête introductive d’instance contre les États-Unis au sujet d’un différend concernant des violations alléguées du Traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires signé par les deux États à Téhéran le 15 août 1955 et entré en vigueur le 16 juin 1957.  L’Iran a indiqué que sa requête portait sur la décision prise le 8 mai 2018 par les États-Unis de rétablir pleinement et de faire appliquer un ensemble de sanctions et de mesures restrictives la visant, directement ou indirectement, ainsi que les ressortissants et sociétés iraniennes.  Des mesures que les autorités américaines avaient auparavant décidé de lever dans le cadre du Plan d’action global commun, l’accord sur le programme nucléaire iranien, conclu le 14 juillet 2015 par l’Iran, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, l’Allemagne et l’Union européenne.  L’Iran avait également introduit, le 16 juillet dernier, une demande en indication de mesures conservatoires.

C’est dans ce contexte, a expliqué le Président, qu’il faut comprendre l’ordonnance de la CIJ du 3 octobre par laquelle la Cour indique que « les États-Unis doivent, par les moyens de leur choix, supprimer toute entrave que les mesures annoncées le 8 mai 2018 mettent à la libre exportation vers le territoire de la République islamique d’Iran de médicaments et de matériel médical; de denrées alimentaires et de produits agricole; et de pièces détachées, des équipements et des services connexes nécessaires à la sécurité de l’aviation civile ».  Les États-Unis doivent également veiller à ce que, s’agissant des biens et services visés, les permis et autorisations nécessaires soient accordés et à ce que les paiements et autres transferts de fonds ne soient soumis à aucune restriction.  De plus, les deux parties doivent s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend dont la Cour est saisie, ou d’en rendre la solution plus difficile. 

Le 28 septembre dernier, a continué M. Yusuf, l’État de Palestine a engagé une procédure contre les États-Unis au sujet de la violation de la Convention de Vienne de 1961.  Pour rappel, cet État avait déposé au Greffe de la Cour, le 4 juillet 2018, une déclaration ainsi libellée: « L’État de Palestine déclare par la présente qu’il accepte avec effet immédiat la juridiction de la Cour internationale de Justice pour tous différends nés ou à naître relevant de l’article premier du Protocole de signature facultative à la Convention de Vienne, sur les relations diplomatiques, concernant le règlement obligatoire des différends (1961), auquel l’État de Palestine a adhéré le 22 mars 2018. »

Le Président de la Cour a par ailleurs noté que la CIJ a décidé que ses membres ne pourront désormais prendre part qu’aux arbitrages impliquant plusieurs États.  Néanmoins, un juge ne peut prendre part à plus d’une procédure d’arbitrage et il ne peut non plus intervenir dans un arbitrage impliquant un État qui aurait une autre affaire pendante devant la Cour.

Par ailleurs, le Président de la CIJ a fait part de l’inquiétude de la Cour devant l’éventualité d’un déménagement du Palais de la Paix qui devra faire l’objet de travaux de rénovation par le pays hôte, notamment à cause d’une contamination à l’amiante.  « La Cour n’a pas encore d’information sur les modalités de ce déménagement », a déploré le juge Yusuf, en rappelant qu’il est important d’avoir un plan de transition souple en cette période chargée.  Le manque d’information « crée une atmosphère d’incertitude qui n’est pas propice à l’exercice de ses fonctions judiciaires », a-t-il conclu.

Déclarations

S’exprimant au nom du Groupe de Visegrad (Slovaquie, République tchèque, Hongrie et Pologne), M. METOD ŠPAČEK, Directeur du Département du droit international au Ministère des affaires étrangères et européennes de la Slovaquie, a souligné le rôle irremplaçable de la Cour internationale de Justice (CIJ), principal organe judiciaire des Nations Unies, dans le règlement pacifique des différends entre États.  Le nombre croissant d’États soumettant leurs différends à la juridiction de la Cour reflète leur confiance en elle, a-t-il dit.  Durant la période examinée, cinq affaires ont été soumises à la Cour et quatre jugements et plusieurs ordonnances ont été délivrés, ce qui témoigne de son intégrité et de son efficacité pour ce qui est de rendre la justice internationale.  Les pays du Groupe de Visegrad apprécient la remarquable contribution à long terme de la CIJ à la prévention des conflits et à la promotion de relations amicales entre États. 

M. Špaček a ensuite abordé deux sujets inséparables à son sens: l’élargissement de l’acceptation de la juridiction de la CIJ; et l’énorme contribution de la CIJ au renforcement de l’état de droit au niveau international.  S’agissant du premier, il a rappelé que le Statut de la Cour offre aux États plusieurs moyens d’accepter sa juridiction et qu’à présent, 73 sur les 193 États parties acceptent la juridiction obligatoire en vertu de l’article 36, paragraphe 2 du Statut.  Des arrangements spéciaux de soumission des différends constituent un autre moyen d’acceptation et ceux-ci ne doivent pas être sous-estimés. 

La volonté des États de soumettre leurs différends doit aller de pair avec leur volonté d’appliquer, en toute bonne foi, les décisions de la Cour, a encore indiqué le représentant, estimant que ce n’est qu’après leur mise en œuvre que les jugements et ordonnances garantissent que le système de justice internationale est pleinement efficace.

S’agissant de la contribution de la CIJ au renforcement de l’état de droit, M. Spacek a fait valoir que les 17 affaires dont elle est saisie couvrent plusieurs sujets du droit international, notamment des questions maritimes, territoriales et environnementales, des questions relatives aux droits de l’homme, aux immunités des États, ou encore à l’interprétation des traités.  Ce large éventail, conjugué avec la variété des régions concernées, est une manifestation du caractère universel de la Cour et du rôle indispensable de la noble mission des Nations Unies de maintien de l’ordre juridique international, a-t-il conclu. 

M. SAMUEL MONCADA (Venezuela), au nom du Mouvement des pays non alignés, a indiqué que ses États membres ont décidé d’optimiser leurs efforts pour poser de nouveaux jalons en vue d’atteindre « le plein respect du droit international ».  Il a mis l’accent sur le rôle de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans le règlement pacifique des différends, conformément aux dispositions pertinentes de la Charte et du Statut de la Cour, en particulier les articles 33 et 94 de la Charte. 

Compte tenu du fait que le Conseil de sécurité n’a sollicité aucun avis consultatif de la Cour depuis 1970, le Mouvement des pays non alignés exhorte le Conseil à se servir davantage de la Cour en tant que source chargée d’interpréter le droit international, notamment sur des sujets polémiques, et à envisager que celle-ci examine ses décisions.  Le Mouvement invite également l’Assemblée générale, d’autres organes et institutions autorisés par la Charte, à solliciter l’avis consultatif de la CIJ sur des questions juridiques qui surgissent dans le cadre de leurs activités respectives. 

Le représentant a, en outre, réaffirmé l’importance de l’avis consultatif de la CIJ, en date du 8 juillet 1996, sur la « légalité de la menace ou l’emploi d’armes nucléaires » par lequel elle avait déterminé qu’il existe une obligation de poursuivre, en toute bonne foi, et de conclure les négociations visant au désarmement nucléaire sous tous ses aspects sous un contrôle international strict et effectif. 

Enfin, M. Moncada a lancé un appel à Israël, la Puissance occupante, à pleinement respecter l’avis consultatif de la CIJ en date du 9 juillet 2004 sur les conséquences juridiques de la construction d’un mur sur le territoire palestinien occupé.  Il a également demandé à tous les États de respecter les dispositions figurant dans cet avis, pour mettre fin à l’occupation israélienne qui a commencé en 1967, et établir un État de Palestine indépendant avec Jérusalem-Est pour capitale. 

Prenant la parole au nom de la Communauté des pays lusophones, M. JOSÉ LUIS FIALHO ROCHA (Cabo Verde) a rappelé à son tour que la CIJ était la seule juridiction internationale de caractère universel à compétence générale.  À ce titre, elle assume d’importantes responsabilités au sein de la communauté internationale et joue un rôle fondamental dans le règlement des différends entre États et le renforcement de l’état de droit international.  Ce faisant, elle évite que des désaccords entre États conduisent à une éruption de violence.  Le taux élevé de respect de ses jugements au fil de son histoire est très encourageant.  Le représentant y a vu une preuve de la confiance des États en son indépendance et impartialité. 

Le représentant a noté le surcroît de travail et le large éventail de sujets traités par la CIJ, ce qui confirme son succès, bien que les affaires devant elle proviennent du monde entier et soient juridiquement complexes.  Cela réaffirme l’universalité de la Cour, l’élargissement de la portée de ses travaux et sa spécialisation grandissante, a-t-il déclaré, ajoutant que la CIJ déploie des « efforts impressionnants » pour faire face au niveau très élevé d’activités.  Partant, il a jugé indispensable que les États Membres admettent la nécessité de lui fournir des ressources adéquates. 

M. Fialho Rocha a souligné la contribution de la CIJ au développement du droit international, en particulier en ce qui concerne l’usage de la force, la délimitation des frontières maritimes, l’autodétermination, et l’immunité des États et de leurs agents.  Ses jugements et avis consultatifs ont en outre inspiré les décisions des organes internationaux, a-t-il encore relevé, louant au passage le fait que la CIJ prend en considération le travail d’autres juridictions internationales.  Cette tendance positive gagnerait à être encouragée, a-t-il commenté, puisqu’elle promeut plus de cohérence au sein du système international.  À cet égard, la Communauté des pays lusophones est convaincue que les juridictions internationales devraient coopérer dans l’amélioration de l’ordre juridique international par le biais du dialogue et de la « fertilisation mutuelle ». 

Reconnaissant « la tension fréquente entre droit et pouvoir », le représentant de Cabo Verde a admis la difficulté qu’il y a de trouver un juste équilibre entre l’obligation qu’ont les États de régler leurs différends de façon pacifique, d’une part, et la nécessité d’un consentement souverain pour recourir à de tels mécanismes, d’une autre.

S’exprimant au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande, Mme MARIE-CHARLOTTE MCKENNA  (Australie) a noté l’augmentation « considérable », depuis 20 ans, du nombre d’affaires présentées devant la CIJ, ce qui reflète la confiance des États Membres sur le rôle de la Cour dans le règlement pacifique des différends.  L’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande ont accepté la juridiction obligatoire de la Cour, a rappelé le représentant, en appelant les États qui ne l’ont pas encore fait à soumettre une déclaration en ce sens.

Prenant acte des efforts déployés par la Cour pour traiter les affaires en cours, Mme McKenna a encouragé la Cour à répondre rapidement et de façon appropriée aux situations urgentes qui requièrent son attention.

M. AMADOU JAITEH (Gambie), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a indiqué que le principe de prévention avait été relevé dans l’avis consultatif de la CIJ relatif à l’utilisation ou la menace d’utilisation d’arme nucléaire.  Le Groupe des États d’Afrique insiste sur le fait qu’un avis unanime de la CIJ en date du 8 juillet 1996 avait conclu qu’il existe une obligation de poursuivre de bonne foi, et de parvenir à, une conclusion sur des négociations visant le désarmement nucléaire sous tous ses aspects.  Ce sujet est important pour l’Afrique qui est une zone exempte d’arme nucléaire, a indiqué le délégué.

Le Groupe note que la Cour a rejeté les trois affaires présentées par les Îles Marshall sur les « obligations concernant les négociations relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires et au désarmement nucléaire ».  M. Jaiteh a tout de même souligné que ces arrêts ont été pris par des décisions serrées.

Les États d’Afrique saluent l’efficacité et le professionnalisme avec lesquels la CIJ a traité de la requête de l’Assemblée générale, en vertu de la résolution 71/292, par laquelle elle demandait un avis consultatif de la Cour sur les conséquences juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965.  Le Groupe se félicite notamment que la CIJ ait permis à l’Union africaine de prendre part aux débats sur cette question.

Après avoir salué la contribution de la CIJ au règlement pacifique des différends internationaux, M. MASAHIRO MIKAMI (Japon) a déclaré que l’état de droit et les relations internationales fondés sur des règles constituent le fondement de la politique étrangère de son pays.  Le Japon, a rappelé le représentant, a récemment accueilli le sommet de l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Asie et d’Afrique (AALCO).  Au cours des discussions, les participants ont souligné l’augmentation significative du nombre de différends soumis à la Cour depuis 1991. 

Plus de 300 traités bilatéraux et multilatéraux reconnaissent la compétence de la CIJ pour le règlement des différends découlant de l’interprétation des traités, a indiqué M. Mikami.  Toutefois, seuls huit États de la région Asie-Pacifique, sur un total de 73, ont fait une déclaration reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour.  La communauté internationale dispose aujourd’hui de plusieurs instances de règlement pacifique des différends, telles le Tribunal international du droit de la mer et le système de l’Organisation mondiale du commerce, a-t-il noté, en encourageant les juridictions internationales à assurer la « cohérence » de la jurisprudence afin d’éviter la fragmentation du droit international. 

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a rappelé que les Nations Unies ont été créées pour préserver les générations futures du fléau de la guerre, et que l’un de leurs buts consiste à faire respecter les principes de la justice et du droit international.  La CIJ, en tant qu’organe judiciaire principal de l’Organisation, joue dès lors un rôle fondamental, en particulier dans la prévention des conflits.  Le représentant a insisté sur le rôle de la CIJ dans le renforcement du droit international et de l’état de droit sans lesquels toutes les activités entreprises sous l’égide de l’ONU « n’auraient aucun sens », que ce soit dans les domaines de la paix et la sécurité, du développement durable ou des droits de l’homme.  Ainsi, ses avis consultatifs et ses jugements sont fondamentaux pour affermir l’engagement de la communauté internationale en faveur de la primauté du droit.

D’après le Soudan, le rapport annuel de la CIJ, et le nombre de différends qui lui ont été soumis, montrent l’importance accordée par les États parties au travail effectué dans le Palais de la Paix.  M. Mohamed a invité les États à appuyer davantage la Cour, en lui apportant notamment des ressources supplémentaires pour qu’elle soit en mesure de bien s’acquitter de sa mission. Il a aussi encouragé la Cour à persévérer dans ses mesures visant à l’amélioration des qualifications de son personnel et à faire face au fardeau croissant de ses responsabilités, notamment en ce qui concerne la durée de l’examen des affaires.

Le Soudan a par ailleurs prié l’Assemblée générale de demander aux États qui n’ont pas encore accepté la juridiction obligatoire de la CIJ d’appréhender positivement cette question.  Il a aussi prié le Conseil de sécurité, qui n’a pas requis d’avis consultatif de la Cour depuis 1970, d’envisager de le faire.

L’ONU, et le Conseil de sécurité en particulier, doivent promouvoir le règlement pacifique des différends, comme le prévoit le Chapitre VI de la Charte, a déclaré M. FRANCISCO TENYA (Pérou).  Fort de son expérience devant la CIJ, le Pérou a témoigné de son efficacité en rappelant la décision relative à sa frontière maritime avec le Chili, et son application par les deux pays dans un esprit de bon voisinage.  Il a également renvoyé au rôle de la Cour en vertu de l’article 96 de la Charte sur les avis consultatifs que l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité, et d’autres organes et institutions spécialisés autorisés, peuvent demander à la Cour.

M. Tenya a noté que l’Assemblée générale avait à nouveau prié les États ne l’ayant pas encore fait d’envisager la possibilité de reconnaître la juridiction obligatoire de la Cour, comme l’ont fait le Pérou et 72 autres États.  Il a loué le travail des juges, du Président et de la Vice-Présidente, de même que le personnel du Secrétariat, avant d’appeler l’Assemblée à continuer à examiner les besoins de cet organe en prenant en considération ses activités actuelles, qui sont particulièrement denses, ce qui explique aussi son prestige et la nature universelle de sa compétence.  Il a signalé la présence de l’Amérique latine parmi les juges de la CIJ qui compte des magistrats de toutes les régions du monde.  Enfin, le représentant a encouragé à poursuivre la réflexion sur les voies et moyens de répondre à la surcharge de travail de la Cour. 

Face à la « crise de confiance » envers le multilatéralisme et les institutions internationales, M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a jugé le rôle de la CIJ plus important que jamais.  Dans ce contexte, le respect de règles agréées par l’ensemble des États revêt une importance particulière pour les petites nations comme Singapour.  Le délégué a encouragé la Cour à poursuivre son action en faveur de la promotion et du renforcement de l’état de droit, y compris le règlement pacifique des différends.

Singapour a informé la Cour de son accord avec les deux requêtes de suspension des procédures présentées en 2017 par la Malaisie, a rappelé M. Gafoor, en saluant le fait que les parties ont accepté de suivre les processus juridiques afin de régler leurs différends de manière amicale.  Enfin, il a salué les efforts déployés par la CIJ pour améliorer le contenu de son site Internet, permettant ainsi la diffusion de ses audiences dans le monde entier. 

La CIJ enregistre un nombre de plaintes toujours plus conséquent et sa masse de travail atteint un point critique, a reconnu Mme ALINA OROSAN, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie.  Néanmoins, a-t-elle noté, il est aussi bon signe pour la Cour qu’un nombre toujours plus grand d’États y fassent appel.  Les affaires portées devant la Cour sont très complexes et sensibles, c’est donc un gage de confiance de la part des États que de faire appel à la CIJ, a estimé Mme Orosan.  Elle a rappelé que c’étaient les États Membres qui, avec leur consentement, donnaient à la Cour son pouvoir, et que ces mêmes États, en veillant à ce que ses décisions soient respectées, agissaient dans la logique de la Charte et dans la même ligne que celle des Nations Unies. 

Pour sa part, la Roumanie a fait « une impressionnante volte-face » vis-à-vis de la CIJ.  À l’époque du communisme, a expliqué la Ministre, le pays était résolument contre, jusqu’en 2015 quand il a déposé une déclaration d’acceptation de la juridiction souveraine de la CIJ, reconnaissant son autorité.  « La Cour n’est pas un élément décoratif », mais un organe central de promotion du droit international, un pilier fondamental de la paix et de bon voisinage à travers le monde, a conclu Mme Orosan.

M. MOHAMED A. M. NFATI (Libye) a déploré le fait que certains États ne respectent pas les arrêts de la Cour, faisant ainsi obstacle au rôle de la Cour.  Il a rappelé ainsi que dans un avis consultatif, la Cour avait estimé en 2004 que le mur de séparation construit par Israël était une violation du droit international.  La CIJ avait ainsi demandé au Conseil de sécurité de prendre des mesures appropriées en vertu de la Charte des Nations Unies.  Il a regretté que le Conseil n’ait jamais pris ces mesures. 

Le représentant a en outre rappelé que la Libye a déjà comparu plusieurs fois devant la CIJ et que le pays a toujours respecté ses arrêts, « même quand ceux-ci allaient contre ses intérêts ».   

2018 marque le soixantième anniversaire de l’acceptation par son pays de la juridiction obligatoire de la Cour, a signalé M. PAUL RIETJENS, Directeur général des affaires juridiques auprès du Ministère des affaires étrangères de la Belgique.  Il a souhaité encourager tous les États qui ne l’auraient pas encore fait à accepter cette juridiction, et lancé un appel à tous les États pour qu’ils continuent de l’accepter dans le cadre de traités spécifiques, bilatéraux et multilatéraux, qui ont désigné la Cour comme l’instrument principal pour régler les différends au sujet desdits traités.

Commentant le rapport annuel de la CIJ, le représentant a constaté que la charge de travail est en augmentation constante avec pas moins de 17 affaires pendantes à l’heure actuelle.  Cette activité intense témoigne de la confiance que les États lui accordent et de leur intérêt pour trouver une solution juridique et pacifique à leurs différends.  Il a aussi souligné que, tant par ses arrêts que par ses avis consultatifs, dont le nombre a significativement augmenté au cours des années, la Cour contribue de manière substantielle à l’application, l’interprétation et la précision du droit international.

Compte tenu de la portée « considérable » de sa jurisprudence et de sa contribution à la détermination et au développement du droit international, la Belgique a encouragé les États et les organismes internationaux à continuer d’inclure dans les futurs traités multilatéraux des dispositions reconnaissant la compétence de la CIJ pour les différends liés à l’application ou à l’interprétation de ces traités.  La représentation, en son sein, des différents systèmes juridiques, des langues et des cultures, contribue sans aucun doute à l’efficacité et à la qualité des décisions, a commenté M. Rietjens, qui a conclu que la Cour ne peut être véritablement efficace que si ses arrêts, avis et ordonnances sont respectés. 

M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) a fait remarquer que le monde est à présent confronté à des défis qui mettent à mal l’état de droit et érodent le multilatéralisme, comme les changements climatiques, les conflits armés, le terrorisme et les violations des droits de l’homme.  Face à une telle réalité, la force des institutions mondiales et du droit international demeure fondamentale.  « Le travail de la Cour internationale de Justice ne saurait être perçu comme un thème de plus à l’ordre du jour de l’Assemblée générale », a-t-il déclaré, insistant que cet organe et la valeur de ses accomplissements doivent être au centre de l’attention.  Le rapport présenté par le Président de la CIJ montre sa solidité et met l’accent sur sa pertinence dans le maintien de la paix et la sécurité internationales. 

Le représentant a rappelé que pour la seule décennie écoulée, la CIJ a été saisie de plus de 20 nouvelles affaires contentieuses émanant d’États de toutes les régions et que l’on a aussi eu recours à ses avis consultatifs.  Il a relevé la diversité des sujets traités, différends territoriaux sur terre et sur mer ou immunités des fonctionnaires étatiques, ainsi que la diversité des sources du droit invoquées et analysées.  Il a regretté que certains États cherchent cependant à recourir à d’autres mécanismes pour éviter de se soumettre à la juridiction de la Cour.  De plus, la non-application du principe de responsabilité est toujours préjudiciable à l’état de droit et risque de générer d’autres différends. 

En somme, a résumé M. Alday, l’efficacité de la Cour est tributaire de la mise en œuvre de ses avis et décisions.  Reconnaissant qu’il s’agit là d’un sujet délicat pour le Mexique, il a rappelé qu’en 2003, pour la première fois, son pays avait eu recours à la CIJ dans l’affaire Avena pour résoudre, de bonne foi, un différend résultant d’une violation de l’Article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires au sujet de 51 cas de Mexicains condamnés à la peine de mort par plusieurs tribunaux des États-Unis.  Avec une sentence favorable émise le 31 mars 2004, cela fait maintenant quinze ans que l’on attend l’application de l’avis de la Cour.  Il a aussi signalé que durant ces années, José Ernesto Medellin Roja, en 2008, Humberto Leal Garcia, en 2011, Edgar Tamayo Arias, Ramiro Hernandez Llanas, en 2014, et Ruben Cardenas Ramirez en 2017, normalement protégés par l’avis de la CIJ, ont été exécutés.  Chacune de ces exécutions constitue une violation supplémentaire du droit international », a-t-il commenté, en exhortant à ce que cela ne devienne pas le cas de Roberto Ramos Moreno dont l’exécution est programmée pour le 14 novembre.   

Mme ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) a regretté le fait que certains arrêts de la CIJ restent lettre morte, en violation flagrante de l’Article 94 de la Charte des Nations Unies qui dispose que « chaque Membre des Nations Unies s’engage à se conformer à la décision de la Cour internationale de Justice dans tout litige auquel il est partie ».  Elle a souligné que l’efficacité et la mise en œuvre de certains arrêts de la Cour sont sujets à critique, non sans raison, alors que certains pays ne reconnaissent pas toujours des arrêts qui ne leur sont pas favorables.  Elle a évoqué le refus de ces pays d’appliquer les arrêts de la Cour, y compris en faisant obstacle aux mécanismes dont disposent les Nations Unies pour appliquer ces arrêts, en faisant valoir leur droit de veto au Conseil de sécurité.  Pour Cuba, cela montre à suffisance les imperfections des mécanismes d’exécution des arrêts de la Cour, et cela invite à reformer le système des Nations Unies et la CIJ, en vue de donner davantage de garanties aux pays en développement face aux nations puissantes.

Cuba attache une importance spéciale aux avis consultatifs de la CIJ, y compris celui du 9 juillet 2004 relatif aux « conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé ».  Pour cette raison, Cuba demande que cet avis consultatif soit pleinement respecté et invite tous les États à respecter et assurer le respect des dispositions de la Cour sur cette question, a conclu la représentante. 

M. XU HONG (Chine) a souligné que la charge de travail de la Cour a cru récemment, attestant de la confiance dont elle jouit.  Il a invité la CIJ à statuer dans le strict respect du droit et à veiller à préserver sa réputation.  Elle doit être dotée de ressources suffisantes, d’autant que sa charge de travail est très importante, a-t-il dit, en prenant note des difficultés financières rencontrées par la Cour.

« Membre permanent du Conseil de sécurité, la Chine va continuer d’appuyer la Cour. »  Pointant « le grave défi actuel de l’unilatéralisme », le délégué chinois a enfin assuré de la détermination de son pays à préserver le droit international et la Charte des Nations Unies.

« La Cour internationale de justice (CIJ) reste une composante essentielle d’un ordre international basé sur le multilatéralisme et demeure un maillon fondamental dans la promotion des relations amicales entre les États », a déclaré M. YOUSSEF HITTI (Liban).  La CIJ est un élément majeur de sauvegarde du droit international et ce, à la fois à travers sa fonction contentieuse mais aussi consultative.  « La Cour donne vie à des règles juridiques, prouvant que celles-ci ne peuvent être réduites à des concepts abstraits », a ajouté le représentant en saluant notamment le bilinguisme de la Cour.

Le français et l’anglais, les deux langues officielles de la Cour, reflètent une tradition, une culture et un système juridiques, a précisé M. Hitti pour qui leur emploi équilibré a un impact sur la jurisprudence de la Cour.  Et de paraphraser le Professeur Alain Pellet pour qui le bilinguisme est « un gage de meilleure justice plus authentiquement internationale et de ce fait, sans doute plus acceptable pour tous les justiciables particuliers que sont les États souverains ».

M. Hitti a aussi évoqué la diversité géographique des États recourant à la Cour, ce qui « illustre sa prééminence et assoit un peu plus son caractère universel », ainsi que la palette variée de domaines couverts.  Un exemple récent est la reconnaissance, inédite, dans l’arrêt Costa Rica c. Nicaragua du 2 février 2018, du droit à la réparation des dommages causés à l’environnement.  Le représentant a aussi relevé que la charge de travail sans cesse grandissante n’empêche pas la Cour de statuer dans un « délai raisonnable » qui n’excède pas six mois entre la clôture de la procédure orale et la lecture d’un arrêt ou d’un avis consultatif.  

M. GEORGE RODRIGO BANDEIRA GALINDO (Brésil) a estimé que la présentation du rapport annuel de la CIJ est l’occasion unique d’évaluer ce que le droit international est capable de faire pour apaiser les tensions et promouvoir un monde plus pacifique.  En améliorant le dialogue dans la langue du droit international, la CIJ devient un instrument efficace de la diplomatie préventive.  Le représentant a rappelé l’importance accordée par le Secrétaire général au volet prévention, lequel est inextricablement lié au règlement pacifique des différends.  La CIJ est au cœur de ces efforts.  Elle est plus qu’un simple moyen énoncé dans le Chapitre VI de la Charte: elle est le principal organe judiciaire des Nations Unies et la seule Cour internationale à caractère universel et à compétence générale.

Le dernier rapport est un autre chapitre de l’histoire de la Cour: quatre jugements, 13 arrêts et cinq nouvelles affaires, tandis que celles en cours englobent des États de quatre continents dont six d’Afrique, sept des Amériques, six d’Asie et cinq d’Europe.  Après avoir évoqué la charge croissante de travail et la variété des sujets abordés, preuves de la vitalité renouvelée de cet organe et de son rôle universel dans la promotion de la justice, le représentant a salué les activités de proximité qui rapproche la CIJ d’une série d’audiences et contribuent à propager le droit international.  Il a, en particulier, souligné le programme de stages ainsi que la participation à des manifestations organisées par des universités. 

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a déclaré, qu’en tant que pays qui a réglé les questions de la délimitation des frontières maritimes par des voix juridiques et pacifiques, son pays suit avec intérêt le travail de la CIJ sur les différends territoriaux et maritimes ainsi que sur la conservation des ressources vivantes et naturelles.  Côtier de l’Océan indien, le Bangladesh voit aussi un intérêt particulier dans l’avis consultatif que la Cour donnera, à la demande de l’Assemblée générale, sur l’Archipel des Chagos.  Tous les ans, a rappelé le représentant, le Bangladesh se porte coauteur de la résolution sur le suivi de l’avis consultatif relatif à la légalité des armes nucléaires.  Il a conclu en encourageant la Cour à examiner les candidatures des stagiaires issus des pays en développement et en remerciant la Suisse pour avoir versé cette année des contributions volontaires au Fonds d’affection du Secrétaire général destiné à aider les États à s’acquitter des dépenses découlant de la saisine de la Cour.

Mme MARIANA DURNEY (Chili) a dit avoir suivi de près les activités de la Cour durant la période examinée, lesquelles révèlent des thèmes chaque fois plus divers et plus complexes du droit international.  Tous ces sujets sont le reflet d’une communauté d’États ouverte aux décisions de la CIJ.  Mme Durney a mentionné la décision définitive de la Cour sur une affaire concernant le Chili, qui est également partie à une affaire en suspens.  Le Chili a participé aux procédures en réaffirmant, à chaque étape, son attachement au droit international et aux relations pacifiques entre États.  La politique étrangère chilienne repose en effet sur le renforcement du droit international, en tant que cadre de coopération et d’édification de la communauté des États.  Le droit international apporte des éléments fondamentaux à la coexistence et au règlement pacifique des différends. Dans ce contexte, Mme Durney a mis en exergue le rôle essentiel des traités internationaux.

La représentante a aussi noté les efforts de la Cour pour accélérer le traitement des dossiers, ce qui a des avantages pratiques en termes de coûts tant pour la Cour que pour les États.  Le rapport met aussi en lumière les efforts de proximité de la Cour, en particulier avec le public, les étudiants, les universitaires, les magistrats, les avocats et autres communautés intéressées, s’est réjouie la représentante.

M. SIDHARTHA FRANCISCO MARIN ARÁUZ (Nicaragua) a remarqué que trois des quatre cas énumérés par le Président de la CIJ concernaient le Nicaragua, ce qui témoigne de l’engagement de son Gouvernement à respecter le droit international et à promouvoir l’état de droit dans toutes les affaires auxquelles il est partie.  Le Nicaragua participe également aux sessions orales de la Cour, a dit le représentant, qui a attiré l’attention sur un point du rapport du Président qui mentionne une augmentation des travaux, avec notamment des demandes de mesures provisoires qui viennent s’ajouter aux procédures en cours.  Il faut tenir compte de cette surcharge de travail au moment d’élaborer le budget de la CIJ, a estimé le représentant.

M. VISHNU DUTT SHARMA (Inde) a noté la nature variée et le nombre élevé d’affaires pendantes devant la CIJ, estimant que le fait que les questions touchent quatre continents traduit le caractère universel de la Cour.  Il a salué la Cour pour avoir adapté ses méthodes de travail.  Il a également salué le fait que la Cour veille à une large diffusion des décisions qu’elle prend, ce qui constitue une source d’informations pour les États qui veulent par exemple évoquer sa jurisprudence. 

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO ZELEDÓN (Costa Rica) a, à son tour, mis en avant l’intense activité de la Cour et la diversité des affaires sur plusieurs continents.  Il a en particulier évoqué l’avis consultatif que l’Assemblée sollicitera sur les conséquences juridiques de la séparation de l’archipel de Maurice en 1965.  La solution pacifique des différends internationaux est un objectif essentiel des Nations Unies, a-t-il encore noté, en insistant sur le rôle de la CIJ dans le maintien de la paix et la sécurité internationales et la promotion de l’état de droit au niveau international.  Pour cette raison, il est de la responsabilité de l’ONU et des États d’appuyer la Cour et cela exige que l’ONU veille à ce qu’elle puisse continuer à traiter de façon efficace et objective, avec une indépendance absolue du point de vue juridique et des procédures, les affaires dont elle est saisie, tout en lui garantissant les ressources budgétaires nécessaires.

Le représentant costaricien a également insisté pour que l’ONU envisage des moyens pour le suivi des décisions judiciaires.  Il a reconnu par ailleurs le rôle que la CIJ pourrait jouer dans la réalisation des objectifs de développement durable car c’est un organe qui a réussi à prévenir l’usage de la force, à défendre les droits des peuples à l’autodétermination, à plaider pour la préservation de l’environnement et à reconnaître et éviter de futures violations des droits de l’homme.  Le Costa Rica, qui accepte la juridiction obligatoire de la Cour depuis 1973, a invité tous les États à faire de même. 

Selon M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), il est indéniable que la Cour remplit pleinement son rôle d’instrument privilégié au service de la paix et de la sécurité internationales que lui confère le chapitre II de son Statut.  Ainsi, « la Cour peut se féliciter qu’à ce jour, le sérieux de son travail constitue le socle sur lequel est arc-boutée sa crédibilité ».  Pour le Gabon, cela honore l’institution et renforce la confiance des États Membres dans la primauté du droit comme instrument à leur service dans la recherche de solutions pacifiques aux différends qui les opposent. 

M. JORGE SKINNER-KLEE ARENALES (Guatemala) a apprécié l’importance de la CIJ car sa contribution est essentielle pour la coexistence pacifique et la coopération entre les États.  Il a aussi saisi cette occasion pour mentionner le référendum qui s’est déroulé le 15 avril dernier dans son pays et qui a permis aux Guatémaltèques de saisir la Cour du différend territorial, insulaire et maritime de plus d’un siècle et demi avec Belize.  La population guatémaltèque a accepté cette saisine, réaffirmant ainsi la vocation pacifique de leur pays et sa foi dans le droit international.

M. DOROS VENEZIS (Chypre) a estimé que la grande charge de travail de la Cour illustre la confiance qu’ont les États en elle.  Il a souhaité que la Cour soit dotée des ressources nécessaires à la bonne exécution de son mandat.  Il a rappelé que Chypre avait pris part à la rédaction de la résolution 71/146 de l’Assemblée générale qui demandait un avis consultatif de la CIJ sur l’archipel de Chagos, séparé de Maurice en 1965.  Maintenant que les juges ont entamé leurs délibérations, Chypre espère que leur avis sera accepté et mis en œuvre par tous les États.

Mme OKSANA ZOLOTAROVA (Ukraine) a salué le fait que de plus en plus d’États recourent à la Cour, ce qui confirme sa crédibilité et la confiance en sa capacité de trancher les litiges avec équité.  La Cour, a-t-elle poursuivi, se positionne comme une source du droit international à laquelle différents organes judiciaires internationaux se réfèrent.  Cependant, a-t-elle regretté, tous les pays n’ont pas le même respect pour ses décisions.  La représentante en a voulu pour preuve la Fédération de Russie, qui persiste à interdire l’Assemblée des Tatars de Crimée, alors que, dans sa décision du 19 avril 2017, la CIJ lui avait intimé l’ordre de ne plus limiter le droit de cette communauté de préserver ses institutions.  La Fédération de Russie, a constaté la représentante, ne fait que démontrer le peu de respect qu’elle a pour la Cour, la Charte et le droit international.  Elle a aussi rappelé qu’en juin 2018, l’Ukraine a soumis à la CIJ la liste des violations des Conventions internationales pour la répression du financement du terrorisme et sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale commises par la Fédération de Russie.  Puisque le pays est partie aux deux Conventions, a insisté la déléguée, il viole en effet ses obligations internationales par son comportement dans le Donbass et en Crimée.

M. CHRISTOPHE EICK (Allemagne) s’est inquiété de voir des acquis fondamentaux du droit international remis en cause et a considéré que dans ce contexte, plus que jamais, la Cour est une institution indispensable.  La CIJ représente un pilier majeur de l’ordre international et apporte une contribution majeure au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Mais le fait que son travail soit fondé sur le libre consentement des États, en vertu d’un principe bien connu du droit international, lui interdit de se saisir d’une situation sans l’aval des parties concernées.  En 2008, a rappelé le représentant, l’Allemagne avait présenté une Déclaration par laquelle elle acceptait la juridiction obligatoire de la CIJ.  Elle encourage les autres États à faire de même, a dit le représentant, qui a remarqué une augmentation du nombre des affaires portées devant la Cour.  De plus en plus de pays portent leurs conflits devant elle, ce qui accroît sa charge de travail et exerce une pression sur ses capacités.

Mme HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a également rapidement évoqué les activités de la CIJ au cours de la période du rapport, notant qu’en 20 ans, le volume de travail avait considérablement augmenté, ce qui montre la confiance des États.  Elle a salué le rôle fondamental de la CIJ qui maintient un degré élevé d’efficacité et de qualité pour répondre rapidement aux situations urgentes.  La Cour doit donc être dotée des ressources et des fonds nécessaires à l’accomplissement de sa mission, a-t-elle plaidé.    

Pour Mme PIRANAJ THONGNOPNUA YVARD (Thaïlande), le nombre accru de affaires dont est saisie la CIJ signe la confiance que les États placent en elle pour sauvegarder les principes et les objectifs de la Charte des Nations Unies.  Elle a salué les efforts de la Cour pour clarifier le rôle du droit international par rapport au droit coutumier et l’a appuyée quand elle considère que « l’obligation de négocier est une obligation de moyen et non de résultat ».  Les travaux de la Cour contribuent au règlement pacifique des différends sans procédures contradictoires et prolongées.  La représentante a donc encouragé les autres États à utiliser davantage la CIJ et à soutenir son rôle dans la délivrance des avis consultatifs.

M. LUIS HOMERO BERMÚDEZ ÁLVAREZ (Uruguay) a remarqué que les décisions et avis de la CIJ sont toujours fondés sur une profonde analyse juridique propre à un corps judiciaire prestigieux et responsable travaillant en toute indépendance et en totale objectivité.  Il a encouragé tous les États à lui apporter leur soutien et à réaffirmer la primauté du droit et de la justice dans le règlement des différends soumis à sa juridiction.  Invoquant la contribution de son pays à la génération des normes du droit international, le représentant a dit que l’Uruguay a toujours pu compter, au cours de son histoire, sur des juristes de renom.  Il a cité l’un des juges de la CIJ, M. Eduardo Jiménez de Aréchaga, qui a aussi présidé cet organe.  L’Uruguay a en outre été l’un des premiers pays à avoir saisi la Cour et à s’être plié à ses décisions.  Il est l’obligation de tous les États de défendre son intégrité territoriale et en conséquence, il est fondamental que la CIJ et ses avis ou décisions soient pleinement respectés.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a souhaité beaucoup de fermeté de la part de la communauté internationale en cas de non-application des arrêts et décisions de la CIJ.  Le Qatar, a-t-elle affirmé, a toujours respecté les arrêts de la Cour.  Elle a rappelé que le 11 juin 2018, son pays a saisi la Cour des violations de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, commises par les Émirats arabes unis.  Le 23 juillet 2018, s’est réjouie la représentante, la Cour a donné raison au Qatar et demandé aux Émirats arabes unis de réparer les torts causés aux ressortissants qataris.  

M. CARLOS JIMÉNEZ PIERNAS, (Espagne), a indiqué que sans préjuger du bon travail de la CIJ, il convient de commenter certains aspects qui nécessiteraient plus d’exactitude et dont la correction servirait à promouvoir le principe de l’économie des procédures et renforcerait leur efficacité et leur transparence.  Nos commentaires ne sont nullement un exercice théorique mais bien le fruit de notre expérience devant la Cour, a prévenu le représentant.  Sans recourir à une réforme du Statut de la Cour, il a proposé l’adoption de mesures pour réduire et rationnaliser la durée aussi bien de la phase écrite que de la phase orale.  Dans la première phase, il faudrait un seul tour de rédaction sans affecter le droit des États de solliciter, exceptionnellement, un deuxième tour.  Pour la phase orale, il a évoqué l’article 61 des règles de procédures et suggéré que les membres de la Cour dirigent ou identifient les aspects factuels et juridiques sur lesquels les parties devraient centrer leurs plaidoyers.  Cela contribuerait à se concentrer sur les aspects les plus fondamentaux du différend.  Il a en outre recommandé d’assouplir la procédure devant la Cour, ce qui aidera à économiser les ressources sans porter préjudice aux parties impliquées.   

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLIZ (État plurinational de Bolivie) a fait observer que les pays d’Amérique latine sont les « principaux clients » de la Cour, avec pratiquement 50% des affaires.  La Cour a pu ainsi trouver des solutions aux divers problèmes frontaliers et autres problèmes hérités de la longue période coloniale.  Les frontières terrestres et maritimes ont en effet généré des confrontations belliqueuses, aboutissant parfois à la « loi du plus fort » sans possibilité de recourir au droit international.  Le représentant a rappelé qu’un de ces conflits avait eu lieu en 1879, avec l’invasion de la Bolivie par le Chili.  Les frontières territoriales ont été altérées sans que les traités de paix n’y puissent rien.  Il a également rappelé qu’il y a quelques années, la CIJ avait réglé le différend maritime entre le Pérou et le Chili, octroyant au Pérou une nouvelle frontière maritime et 20 000 km de mer.

À son tour, la Bolivie a fait appel à l’arbitrage de la Cour pour résoudre la pire conséquence de sa confrontation belliqueuse: son enclavement maritime.  Or, a estimé le représentant, la décision communiquée il y a quelques jours à peine montre que la Cour n’a pas pris en compte l’obligation faite au Chili par l’Organisation des États Américains (OEA) « de négocier avec la Bolivie un accès à l’océan Pacifique ».  La Bolivie respecte la décision de la Cour mais elle déplore ce qui ne s’apparente pas vraiment à « un sens de la justice », lequel aurait servi les intérêts mutuels des deux pays mais également ceux du continent, qui veut soigner ses dernières plaies et surtout, fortifier l’esprit de bon voisinage et d’intégration entre « peuples frères ».

C’est la raison pour laquelle, après la décision de la Cour, la Bolivie a immédiatement invité le Chili à renouer le dialogue bilatéral, conformément d’ailleurs à la décision de la CIJ.  Le dialogue est la voie à suivre, a insisté le représentant, en invoquant le Pacte de Bogota duquel la CIJ devrait s’inspirer pour rester à la hauteur des défis et s’assurer du soutien des États.  

M. FRANCOIS ALABRUNE (France) a rappelé l’importance de la représentation à la Cour des différentes cultures juridiques et des langues, dont l’équilibre contribue à la qualité de ses travaux et à l’autorité de sa jurisprudence.  Le rapport d’activité témoigne de l’importance de la Cour dans le règlement pacifique des différends entre États, a-t-il souligné, en renvoyant à la liste des affaires inscrites au rôle et à l’accroissement de l’activité contentieuse au cours des dernières décennies.  Il a aussi noté que depuis la présentation du rapport de l’année passée, cinq requêtes introductives d’instance ont été déposées auprès du Greffe de la Cour.  Celle-ci a aussi rendu trois arrêts, deux au fond, le troisième sur des exceptions préliminaires, et deux ordonnances à propos de demandes en indication de mesures conservatoires.  Pour M. Alabrune, les décisions de la Cour contribuent à l’apaisement des relations entre États et les aident à parvenir à une solution lorsque les autres moyens de règlement pacifiques ne le permettent pas.  Il a estimé qu’en cette période de défis pour le multilatéralisme, la CIJ demeure une institution essentielle pour la paix et l’ordre juridique internationaux.   

M. GIORGI MIKELADZE (Géorgie) a relevé qu’alors que la communauté internationale est de plus en plus unie dans différentes sphères d’interactions, le respect du droit international est de la plus grande importance pour parvenir à une paix et une stabilité durables sur les plans international et national.  Il a promis que la Géorgie allait continuer de respecter ses obligations en vertu du droit international et des droits de l’homme.  En dépit de l’occupation illégale de 20% de son territoire et de l’agression dont elle est toujours victime, la Géorgie demeure respectueuse du principe de résolution pacifique des différends et soutient les principes contenus dans la Charte des Nations Unies et le Statut de la CIJ. 

Après avoir salué le rôle « irremplaçable » de la Cour, M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) est revenu sur l’ordonnance du 3 octobre 2018 que le Président du CIJ a évoqué dans sa présentation.  Cette ordonnance, a-t-il rappelé, a constaté que les sanctions imposées à l’Iran par les États-Unis après le retrait du Plan d’action global commun, contreviennent pour partie aux termes du Traité d’amitié signé entre les deux pays en 1955.  En conséquence, a poursuivi le délégué, la Cour a constaté le caractère « illégal des sanctions américaines » et demandé des mesures provisionnelles afin que les États-Unis retirent tout frein à l’exportation vers l’Iran des produits visés par ledit Traité.  Cette décision crée des obligations juridiques internationales auxquelles les États-Unis sont obligés de se plier.  Il a précisé que la CIJ a noté que les mesures américaines peuvent potentiellement mettre l’aviation civile en danger et avoir un impact sur la santé du peuple iranien.  Il a enfin rappelé que la Cour a ajouté une mesure additionnelle intimant aux deux parties de prévenir toute aggravation du différend.  Or, a-t-il pointé, les sanctions additionnelles que les États-Unis comptent prendre le 4 novembre prochain entrent dans ce cadre.  Afin de respecter le rôle de la Cour, en tant qu’organe judiciaire principal des Nations Unies, le représentant a demandé à tous les États de se garder de tout soutien aux sanctions des États-Unis.

Après s’être félicité que la Cour soit de plus en plus sollicitée pour régler des litiges, M. MOHAMMED ATLASSI (Maroc) y a vu la preuve d’une confiance des États et de son caractère universel.  Selon lui, le rôle de cet organe est complémentaire avec celui du Conseil de sécurité pour faire régner la paix et la sécurité internationales.  Mais, a-t-il insisté, l’impact de la CIJ va bien au-delà de ses seuls arrêts et avis. Tant de différends ont pu trouver un début de règlement par le simple fait que l’une des parties a su suggérer de saisir la Cour.  De plus, a poursuivi le représentant, plusieurs litiges soumis à la CIJ ont connu un dénouement non par une quelconque décision mais simplement parce que des mesures provisoires ont contribué à leur règlement.

M. ENRIQUE JOSE MARIA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a estimé nécessaire de soutenir le travail de la Cour pour renforcer le système multilatéral.  La jurisprudence qui émane de ses arrêts et avis consultatifs contribuent à une plus grande prévisibilité du droit international et la diffusion de ses travaux aide à sensibiliser le public au règlement pacifique des conflits et à la stabilité.  Il a défendu l’idée de faire de l’espagnol l’une des langues officielles de la Cour.  Il a estimé qu’il convient de réfléchir à la possibilité de lier les travaux de la CIJ à l’Assemblée générale pour assurer une bonne application des décisions par tous les États Membres et au Conseil de sécurité.  Tous les États Membres se doivent de respecter et d’honorer les décisions de la Cour, en totalité et de bonne foi, a insisté le représentant. Il a souligné la nécessité de conforter la Cour, en lui octroyant des ressources suffisantes pour son fonctionnement.  Par ailleurs, les contributions au Fonds d’affectation spéciale créé par le Secrétaire général aideront les pays, qui n’ont pas de grands moyens, à saisir plus facilement la Cour, a fait observer le représentant.

M. EL SHINAWY (Égypte), a résolument appuyé la CIJ et mis l’accent sur le fait que de plus en plus d’États lui soumettent leurs différends dans une large gamme de sujets.  Il a insisté sur la nécessité de respecter les décisions et les avis consultatifs de la Cour, tout en relevant qu’en dépit de l’intensification de ses activités, la Cour n’a pas été priée, cette année, de donner un avis consultatif, à l’exception de celui sur l’archipel des Chagos.  Le représentant a souligné l’importance des avis consultatifs et a encouragé par ailleurs les États à accepter la juridiction obligatoire de la Cour.  Il a demandé à l’Assemblée générale de garantir à la Cour les ressources qu’il lui faut, compte de sa surcharge de travail.  Les États qui le peuvent, a ajouté le représentant, ne doivent pas hésiter à faire des contributions au Fonds d’affectation spéciale du Secrétaire général destiné à aider les pays à saisir la Cour.   

M. NARCISO SIPACO RIBALA (Guinée équatoriale) a déclaré que son pays s’efforce d’encourager le règlement pacifique des conflits par la diplomatie préventive, le dialogue sincère et des négociations inclusives.  Pour cette raison, la CIJ a un rôle déterminant dans le règlement pacifique des conflits et le renforcement de l’état de droit.  Elle promeut, applique, interprète et développe le droit international, a énuméré le représentant, voyant un rôle qui permet d’éviter le recours à la force ou l’imposition de sanctions unilatérales susceptibles de déchaîner de nouvelles vagues de violations du droit international, avec des conséquences tragiques pour les couches les plus vulnérables de la société, notamment les femmes et les enfants.  Le représentant s’est en effet montré inquiet devant la tendance grandissante de certains États à violer les principes d’égalité souveraine des États et celui de non-ingérence dans les affaires intérieures.  Il a fermement condamné toutes les violations de la Charte et des immunités et privilèges conférés aux chefs d’États, aux dignitaires et aux diplomates par le droit international.  Le représentant a pris note des procédures et salué les démarches expliquées par le Président de la CIJ dans l’affaire Guinée équatoriale contre France.   

M JAGDISH DHARAMCHAND KOONJUL (Maurice) a estimé que le volume des affaires dont la Cour est saisie témoigne de la confiance que lui accordent les États Membres pour régler les différends et donner des orientations à tous les organes de l’ONU sur les questions d’ordre juridique.  Dans ce contexte, il a estimé que les États doivent renforcer leur appui en allouant à la CIJ des ressources proportionnelles aux tâches qui l’attendent.  Il s’est félicité de voir un plus grand nombre de pays comparaître devant la Cour ou participer à ses débats.  La Cour et son Greffe continuent de mener les procédures de façon professionnelle et « parfaitement équitable » entre État, grands ou petits, a-t-il conclu.

Après avoir remercié le Président de la Cour pour son exposé, M. MAMADOU RACINE LY (Sénégal) a estimé que la multiplication des affaires dont est saisie la CIJ est un gage de sécurité supplémentaire, démontrant la préférence donnée par les Nations Unies au règlement pacifique des différends sur « la loi du plus fort ».  C’est aussi un signe que le multilatéralisme, mis à rude épreuve, reste le meilleur garant de la paix et de la sécurité internationales.  Voici le cadre idéal, a estimé le représentant, pour se pencher sur les possibilités de renforcer notre engagement commun en faveur de l’état de droit et d’échanger sur la complémentarité entre l’Assemblée générale et la Cour.  Le représentant a espéré que l’ONU et la Cour continueront d’œuvrer pour gagner la bataille de la paix et de la sécurité.  Il a aussi émis le souhait d’une collaboration efficace, assurant le respect et l’exécution des décisions de la Cour qui par sa jurisprudence ne cesse de contribuer au développement du droit international, base légale de notre commun vouloir de vivre ensemble.

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Savador) a déclaré que les activités de la Cour montrent son rôle fondamental dans le règlement pacifique des différends.  En tant que Cour internationale à double juridiction, la CIJ joue un rôle fondamental dans la promotion de l’état de droit et le renforcement du droit international.  L’accès à un règlement pacifique des différents doit se faire sur un pied d’égalité, a poursuivi le représentant, qui a fait observer qu’il y a des pays qui ne peuvent pas saisir la Cour en raison des coûts, « chaque fois plus élevés ».  Parallèlement, la charge de travail de la CIJ augmente et il serait bienvenu de lui assurer le budget nécessaire.  Le représentant a conclu en plaidant pour une répartition géographique parmi le personnel de la Cour et pour l’égalité des sexes.  Il a enfin demandé que les documents de la Cour soient publiés dans les six langues officielles.

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) s’est déclaré fier que son pays continue d’être l’hôte de la CIJ, avant d’encourager les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter sa juridiction obligatoire et de le faire avec le moins de réserves possible.  Il s’est alarmé dans ce contexte de la tendance à l’augmentation du nombre des réserves.  Les Pays-Bas ont fait tout leur possible pour éliminer les leurs, a-t-il fait savoir, soulignant que l’unique réserve est une ratione temporis selon laquelle le Royaume ne reconnaîtra que les différends émanant de situations ou de faits remontant à moins de 100 ans.  La CIJ doit être en mesure de décider de tous les différends entre États car ce n’est, en effet, qu’en jouissant d’un large mandat qu’elle pourra s’acquitter de ses fonctions en tant que principal organe judiciaire de la communauté internationale, a-t-il argué.  En attendant l’acceptation universelle sans aucune réserve du Statut de la Cour, les Pays-Bas ont loué l’incorporation dans tous les traités d’une clause compromissoire relative à la juridiction de la Cour.  Lorsque la clause sera optionnelle, a-t-il dit, les Pays-Bas feront une déclaration de reconnaissance de la juridiction de la Cour.  Mais, a-t-il prévenu, le libellé d’une telle clause pourrait limiter la juridiction à tel point que la Cour se verrait forcée de se déclarer incompétente ou de ne considérer qu’une partie du différend.

Le représentant s’est dit inquiet de la tendance de certains États à se retirer des traités qui contiennent de telles clauses quand ils sont cités dans une affaire dont est saisie la Cour, et ce, même avant que la Cour ne se prononce sur sa compétence.  La Cour, a-t-il estimé, ne devrait pas se déclarer compétente en l’absence du consentement des parties au différend car le consentement est une condition préalable de sa compétence.  Une affaire, a poursuivi le représentant, ne devrait jamais être présentée à la Cour sous le prétexte fallacieux d’un avis consultatif.  La saisine doit contenir une question générale de droit international et non une question sur l’application de ce droit à une situation particulière, ce qui est dans les faits un différend juridique entre des États.  La Cour, a-t-il insisté, doit toujours s’assurer du consentement des parties et ce consentement ne peut exister que si les parties ont reconnu sa juridiction obligatoire. 

Après avoir rappelé le rôle clef joué par la Cour dans l’architecture des Nations Unies, Mme MARIA ANGELA PONCE (Philippines) s’est félicitée de l’augmentation de sa charge de travail, de la variété des sujets dont elle est désormais saisie et de la diversité géographique des États parties.  C’est là le signe de la confiance placée en elle et dans sa mission de régler pacifiquement les différends sur la base du droit.  La rapidité avec laquelle la Cour prend désormais ses décisions et sa détermination à rester hermétique aux pressions politiques ne sont pas étrangères à la multiplication des saisines, s’est félicitée la représentante.  Qualifiant de « fondamentale pour la paix et la sécurité » la relation qu’entretiennent la Cour et le Conseil de sécurité, elle a conseillé à ce dernier de faire davantage appel à la CIJ pour des avis et des conseils sur les normes juridiques internationales.  Elle a noté que la dernière requête de ce type remonte à 1970.

Droit de réponse

Réagissant à l’intervention de l’Ukraine « qui a saisi l’occasion du débat non pas pour évaluer le travail de la CIJ mais pour faire sa propre propagande », la Fédération de Russie a rejeté une interprétation fallacieuse.  La Cour, a-t-elle affirmé, n’a pas encore finalisé son arrêt du 19 avril 2017, portant entre autres sur les institutions des Tatars de Crimée.  Ce n’est qu’en mai dernier que la Fédération de Russie a transmis ses propres commentaires. 

Le Chili a déploré, à son tour, que la Bolivie ait choisi d’offrir une interprétation unilatérale de la décision de la Cour.  Il est, a-t-il jugé, tout à fait inopportun d’ouvrir ici un débat sur une décision qui, par ailleurs, montre la bonne foi dont a fait preuve le Chili tout au long des échanges bilatéraux.  Mais la décision de la Cour, a rassuré le Chili, n’empêche en rien la diplomatie de suivre son cours, au nom de la justice.

Les Émirats arabes unis ont tenu à répondre au Qatar, qui a jugé bon de commenter une décision de la CIJ alors que cette dernière a pris soin de demander aux deux pays de s’abstenir de tout acte qui pourrait rendre le différend encore plus difficile à régler.  Nous nous sommes engagés, ont dit les Émirats arabes unis, à respecter la décision de la CIJ et à appliquer des mesures humanitaires.  Les 2 194 Qataris, qui sont pour le moment aux Émirats, peuvent rester ou partir à leur gré.  À ce jour, le nombre d’entrées et de sorties des Qataris a atteint les 8 000.  En outre, 694 autres ressortissants qataris continuent de travailler dans les institutions émiriennes.  Évitons donc les revendications sans fondement, se sont impatientés les Émirats arabes unis.

Les Émirats arabes n’ont jamais respecté la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a rétorqué le Qatar.  Ils ont expulsé collectivement tous les Qataris et refusé aux autres d’entrer sur leur territoire.  Le Qatar a rappelé qu’il a demandé à la CIJ d’ordonner toutes les mesures nécessaires pour que les Emirats arabes unis respectent enfin leurs obligations et suspendent toutes les mesures discriminatoires et hostiles.

Nous ne pouvons que dénoncer ces fausses allégations, ont répliqué les Émirats arabes unis qui ont affirmé avoir imposé des mesures qui ne ciblent en aucun cas le peuple qatari mais bien son « régime ».  La CIJ n’a pas encore rendu sa décision finale et il serait bon que les deux parties agissent de bonne foi pour espérer un règlement, ont-t-il tranché.

Pourquoi politiser les décisions de la CIJ et les tordre? s’est demandé le Qatar.  Il a rejeté les accusations des Émirats arabes unis selon lesquelles il s’ingère dans leurs affaires intérieures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission se penche sur la protection de l’atmosphère, « question essentielle » pour la communauté internationale

Soixante-treizième session,
24e séance – après-midi
AG/J/3582

La Sixième Commission se penche sur la protection de l’atmosphère, « question essentielle » pour la communauté internationale

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a abordé cet après-midi l’examen du second groupe de chapitres thématiques du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI), consacrés à la protection de l’atmosphère, à l’application à titre provisoire des traités, et aux normes impératives du droit international général (jus cogens).

La CDI a adopté provisoirement, au cours de sa soixante-dixième session, un projet de préambule, 12 projets de directive ainsi que des commentaires sur la protection de l’atmosphère, un sujet qu’elle examine depuis 2013.  Dans son cinquième rapport sur cette question, le Rapporteur spécial, M. Shinya Murase, a proposé trois nouveaux projets de directive portant sur: la mise en œuvre en droit interne des obligations en vertu du droit international sur la protection de l’atmosphère contre la pollution atmosphérique; le contrôle du respect par les États de leurs obligations à ce titre; le règlement pacifique des différends.  Le Rapporteur a souligné à cet égard le besoin de prendre en compte la « dimension scientifique et la complexité factuelle des différends relatifs à l’environnement ». 

« Avec ce sujet, la Commission se propose d’aider la communauté internationale à aborder les questions essentielles à la protection transfrontière et mondiale de l’atmosphère », a fait remarquer, avant l’ouverture des débats, le Président de la CDI, M. Eduardo Valencia-Ospina, venu présenter le second groupe de chapitres thématiques.

La prudence manifestée par la CDI pour les activités touchant la modification intentionnelle à grande échelle de l’atmosphère, dans le projet de directive 7, a reçu l’aval de la Finlande, qui a souligné, au nom des pays nordiques, l’importance du principe de précaution, qui prévoit l’obligation de s’abstenir de toute activité si les conséquences sur l’environnement ne peuvent être mesurées avec précision. 

Si l’Union européenne s’est félicitée de l’adoption de ces projets de directive, elle a toutefois regretté l’absence de référence à des accords existants, comme le Protocole de Montréal.  Son représentant a en outre appelé la Commission à considérer une rédaction de la directive 3, sur l’obligation de protéger l’atmosphère, qui encouragerait les États Membres à adhérer ou à mettre en œuvre les accords multilatéraux sur l’environnement.

« Le droit international de l’environnement est en constante évolution », ont encore relevé les pays nordiques, en encourageant la Commission à puiser dans l’expérience acquise depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris sur le climat pour la finalisation de ses travaux. 

Par ailleurs, l’adoption par la Commission, en première lecture, d’un projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités regroupant l’ensemble des projets de directive sur cette question a été saluée par les pays nordiques et l’Union européenne, qui a toutefois insisté sur la nécessité de prendre en compte la pratique des organisations internationales en la matière.

Saisies, en outre, du troisième rapport du Rapporteur spécial consacré aux 13 projets de conclusion relatifs aux normes impératives du droit international général (jus cogens), les délégations de la CDI ont continué d’émettre des réserves sur les effets du jus cogens sur les traités et le droit international général. 

Les pays nordiques ont réitéré leur position voulant que le jus cogens soit traité par une approche « conceptuelle et analytique », plutôt qu’avec l’objectif d’élaborer un cadre normatif à l’intention des États.  Devant la pratique « modeste » dans ce domaine controversé du droit international, leur représentante a appelé la Commission à la prudence, et réitéré ses réserves quant à l’élaboration d’une liste des normes du jus cogens.

Par ailleurs, les derniers orateurs à s’exprimer, en début de séance, sur le premier groupe de chapitres thématiques du rapport de la CDI ont à nouveau souligné l’apport « crucial » au développement du droit international que constituent les projets de convention sur la détermination du droit international coutumier.  La Malaisie a cependant rappelé l’importance de préserver le caractère « flexible » de la formation du droit international coutumier.  En écho à cette déclaration, El Salvador n’a pas jugé pertinente l’élaboration d’une liste restrictive des formes de la pratique coutumière.

L’inscription de l’élévation du niveau de la mer au programme à long terme de la Commission a continué d’interpeler les délégations, qui ont considéré que ce sujet devrait être traité dans les plus brefs délais.  « Plus de 70 États seront probablement touchés directement par l’élévation du niveau de la mer », s’est alarmé le Saint-Siège, alors qu’aux Seychelles, 90% de la population vit le long des bandes côtières.  Devant cette menace, aggravée par l’effet des changements climatiques, Monaco et l’Indonésie ont exhorté la CDI à examiner ce sujet de toute urgence. 

Allant plus loin, la Cour permanente d’arbitrage (CPA) a invité la CDI à s’interroger sur les responsabilités juridiques qui pourraient découler de l’érosion des côtes s’il est avéré que les changements climatiques sont le fait de l’homme.

La Sixième Commission reprendra son examen du rapport de la Commission du droit international demain, vendredi 26 octobre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DIXIÈME SESSION

Suite des déclarations sur les chapitres I à V, XII et XIII du rapport

M. NAM DUONG NGUYEN (Viet Nam) s’est dit heureux de l’adoption par consensus des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a exprimé des préoccupations sur le traitement réservé au silence des États tel que considéré par les organes conventionnels d’experts, soulignant que le silence ne peut être considéré comme une pratique ultérieure. 

Abordant les projets de convention relatifs à la détermination du droit international coutumier, « point théorique et difficile », le représentant a favorisé une approche systémique.  À cet égard, il a considéré que le projet de conclusion 4 sur l’exigence d’une pratique des États doit contribuer à la formation des règles du droit coutumier international, ce qui devrait être reflété dans le rapport de la CDI. 

Mme AFZAN ABD KAHAR (Malaisie) a souligné l’importance d’assurer la diffusion des projets de commentaires adoptés par la CDI, notamment auprès des spécialistes de l’interprétation des traités.  Les conclusions portant sur la détermination du droit international coutumier sont cruciales au développement du droit international, a-t-elle remarqué. 

Mme Kahar a toutefois appelé à considérer les différences politiques et structurelles des États dans l’évaluation du comportement de l’État en tant que pratique de l’État, présentée dans le projet de conclusion 5.  Il faut conserver le caractère « flexible » de la formation du droit coutumier, a-t-elle argué, et considérer les projets de conclusion comme des guides pratiques permettant de déterminer les règles du droit international coutumier.  Enfin, elle a salué la publication du Mémorandum du Secrétariat, qui fournit des indications additionnelles sur le droit international coutumier.

Mme LORRAINE FAURE (Seychelles) s’est félicitée que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait été inscrite au programme de travail à long terme de la CDI.  Mon pays est exposé à cette menace, 90% de sa population vivant dans des bandes côtières, a-t-elle dit.  En conclusion, elle a souhaité que la Commission examine ce sujet de toute urgence.

M. SATAR AHMADI (République islamique d’Iran) a salué la décision de la Commission d’inclure dans son programme de travail les principes généraux du droit.  Des travaux sur les principes généraux du droit permettraient de contribuer efficacement à la codification du droit international, à plus forte raison que ce sujet est fortement lié à deux autres thèmes actuellement à l’étude de la Commission, à savoir les normes impératives du droit international général et la détermination du droit international coutumier.  Eu égard aux discussions de la Sixième Commission durant l’année écoulée, le représentant a, en outre, jugé qu’il serait prématuré pour la Commission d’inclure la question de la compétence pénale universelle dans son programme de travail à long terme.

S’agissant des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, M. Ahmadi a estimé que les projets de conclusion ne prenaient pas en compte l’intégralité des circonstances dans lesquelles ces accords et pratique ultérieurs pourraient jouer un rôle dans l’interprétation des traités.  Par exemple, les conclusions n’abordent pas, selon lui, la question de la pertinence des accords et de la pratique ultérieurs dans l’interprétation des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales.  Pour cette raison, les projets de résolution ne seraient pas applicables, d’après le représentant, en cas de conflit entre un traité et la pratique ultérieure d’un État souverain concernant ce traité ainsi que des traités bilatéraux entre États. 

Le représentant a déduit des projets de conclusion qu’un accord ultérieur comme moyen d’interprétation authentique au sens de l’article 31, paragraphe 3(a), est un accord entre toutes les parties à un traité, signé après la conclusion dudit traité, concernant son interprétation ou l’application de ses provisions.  Dans ce cadre, le représentant a réitéré la position de son pays selon laquelle les accords ultérieurs et la pratique ultérieure dans le contexte de l’interprétation des traités devaient être confinés aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne.  Par conséquent, le recours à « des moyens complémentaires » d’interprétation après avoir employé la règle générale d’interprétation, tel que le prescrit l’article 31, vise selon lui à apporter des preuves supplémentaires ou à éclairer davantage les intentions des parties et leur compréhension commune concernant les termes d’un traité.  En tant que tel, ce recours à « des moyens complémentaires » doit uniquement servir, pour le représentant, à accompagner le processus d’interprétation, sur une base discrétionnaire et non obligatoire.

S’agissant du projet de conclusion 6 sur l’identification des accords ultérieurs et de la pratique ultérieure, le représentant a rappelé que le paragraphe 1 vise à déterminer si les parties à un traité ont pris position au sujet de son interprétation.  Or, selon lui, la distinction entre les deux formes d’accord n’est pas complètement claire dans la pratique.  Il a estimé que l’interprétation d’un traité au sens de l’article 31, paragraphe 3, nécessitait un accord explicite et une position expressément prise par les parties à un accord.  Toutefois, si les parties se sont simplement accordées sur la non-application temporaire du traité ou sur un arrangement pratique (modus vivendi), les obligations générales découlant du traité devraient selon lui rester inchangées.

Mme MARÍA ALEJANDRINA SANDE (Uruguay) a jugé essentielle la contribution de la CDI à la diffusion du droit international.  Pour elle, la détermination du droit international coutumier et son lien avec les normes impératives du droit international en font un thème particulièrement important.  La dimension régionale et le droit particulier, de même que les conditions psychologiques et matérielles doivent être pris en compte dans la détermination de ce que constitue le droit international coutumier. 

Prenant pour exemple le droit d’asile en relation avec la dimension régionale, la représentante a relevé que la CDI considère qu’il n’y a pas d’application commune du droit d’asile, qui est fonction avant tout de considérations politiques.  Elle a salué la mention de la position des États dans les enceintes internationales pour la reconnaissance de l’opinio juris.  Par ailleurs, l’Uruguay se félicite de l’inscription à son programme de travail à long terme de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international et de la compétence pénale universelle, qui devrait être examinée dans les meilleurs délais.

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador) a salué la contribution à la codification du droit international des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Se référant au projet de conclusion 8, il a déclaré que l’interprétation des termes d’un traité susceptible d’évoluer dans le temps doit tenir compte du principe de contemporanéité, selon lequel l’interprétation d’un traité doit se fonder sur les circonstances existantes au moment de son adoption.  Quant à la conclusion 10, qui porte sur l’accord des parties au sujet de l’interprétation d’un traité, il a déploré que le texte ne reflète pas le fait qu’un tel accord, bien que non contraignant, pourra être considéré a posteriori. 

Le représentant n’a pas jugé pertinente l’élaboration d’une liste restrictive des formes de la pratique coutumière, telle qu’énoncée au projet de conclusion 6 du chapitre du rapport de la CDI consacré à la détermination du droit international coutumier.  Après avoir salué le soixante-dixième anniversaire de la Commission, il a appelé la Sixième Commission et la CDI à assurer la coordination de leurs activités de développement progressif du droit international et de codification afin de pouvoir répondre aux défis de la « société internationale contemporaine ».

S’agissant des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, M. DANAIL CHAKAROV (Bulgarie) a estimé que le projet de conclusion 13, basé sur les article 31 et 32 de la Convention de Vienne et sur une analyse rigoureuse de cas juridiques et de pratiques étatiques, permettrait d’assister efficacement les États, les organisations internationales et les juridictions nationales et internationales dans leur interprétation des traités.  Il a salué l’accent mis sur des cas précis d’accords et de pratique ultérieurs, s’agissant notamment du rôle des décisions adoptées dans le cadre d’une conférence des États parties à un traité international, de la pratique des organisations internationales dans l’application de leurs actes constitutifs et de la prononciation d’organes conventionnels d’experts.

Le représentant a également salué le projet de conclusion 2, qui reconnait le rôle des articles 31 et 32 de la Convention de Vienne s’agissant du droit international coutumier.  Selon lui, cette conclusion permettra de lever toute ambiguïté concernant ces deux articles.  Concernant la détermination du droit international coutumier, il s’est félicité de l’adoption en seconde lecture par la Commission de la conclusion 16 et de ses commentaires.  Il a également salué l’approche mesurée de la Commission, qui a su selon lui combiner les principes et méthodes universellement reconnus, telles que l’approche des « deux éléments », avec la pratique générale et l’acceptation comme étant le droit (opinio juris).  Il s’est notamment félicité du projet de conclusion 11, qui présente selon lui une analyse fine de l’interdépendance entre les traités et le droit international coutumier.

M. CHARLES MHANGO (Malawi) a salué l’adoption de deux ensembles de projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.  Ces projets faciliteront le travail des États, des organisations internationales et des tribunaux, a-t-il déclaré.

M. Mhango s’est dit en faveur de l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI.  En conclusion, le délégué a noté les effets dévastateurs des changements climatiques et assuré de la coopération de son pays sur ce sujet.

S’agissant des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, Mme SIHAM SEBBAR (Maroc) a pris note de ce que le texte des projets de conclusion adopté en seconde lecture continuait, dans sa conclusion 3, à renforcer l’esprit de la Convention de Vienne sur le droit des traités, en reflétant les accords et la pratique ultérieurs en tant que moyens d’interprétation authentiques.  Elle a rappelé que la pratique ultérieure, au sens de l’article 31, paragraphe 3-b de la Convention de Vienne, était un moyen d’interprétation authentique, au même titre que les accords ultérieurs.  Elle a également pris note du fait que la pratique ultérieure visée par l’article 32 de la Convention désignait une autre pratique ultérieure n’exigeant pas l’accord de toutes les parties sur le sens du traité.  Toutefois, la représentante a estimé que la qualification de pratique ultérieure en tant que moyen d’interprétation authentique à la conclusion 3, confirmée à la conclusion 4, et en tant que moyen complémentaire au sens de l’article 32 de la Convention de Vienne à la conclusion 9, paragraphe 3, donnait l’impression de l’existence dans le projet de conclusions de deux catégories différentes, voire autonomes, de pratiques ultérieures.  Selon la représentante, une indication supplémentaire dans cette conclusion, résumant les explications qui figurent dans le commentaire, aurait été utile pour éviter ce genre de confusion, notamment pour les personnes qui seront amenées à faire usage du texte de conclusions sans recourir aux commentaires.

S’agissant de la conclusion 10 relative à l’accord des parties au sujet de l’interprétation des traités, Mme Sebbar a dit appréhender avec nuance l’effet juridique du silence des parties, qui, selon le texte, équivaut à l’acceptation d’une pratique ultérieure lorsque les circonstances appellent une réaction.  Elle a précisé que cet effet supposait la présomption selon laquelle les moyens de prendre connaissance d’une pratique ultérieure devraient a priori être à la portée des parties.  Par conséquent, sa compréhension de cette partie de la conclusion 10 est que les actes constituant la pratique ultérieure en vertu de l’article 31, paragraphe 3-b de la Convention de Vienne, devraient bénéficier d’une notoriété suffisante pour que la connaissance de cette pratique soit possible et qu’une réaction puisse lui être faite.

Enfin, la représentante a souscrit à la formulation du paragraphe 1 de la conclusion 12, qui fait de la pratique d’une organisation internationale un moyen auquel il est plausible de recourir pour l’interprétation de son acte constitutif, tant que cette pratique découle exclusivement des États qui sont supposés en avoir dument connaissance et l’avoir acceptée.  Les actes constituant cette pratique, a-t-elle précisé, ne doivent pas soulever d’incompatibilité avec l’acte constitutif de l’organisation internationale.

M. FLORIAN BOTTO (Monaco) s’est félicité que la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait été inscrite au programme de travail à long terme de la CDI.  Au vu des menaces qui résultent de ce phénomène et des questions juridiques engendrées par l’élévation du niveau de la mer pour tout État, et en particulier les États côtiers et les petits États insulaires en développement, Monaco soutient la demande visant à ce que la CDI place cette question à son programme actuel et l’examine avec urgence, a conclu M. Botto.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur du Saint-Siège, a rappelé que plus de 70 États seront probablement touchés directement par l’élévation du niveau de la mer.  Face à ce défi, il a prôné une approche éthique prenant en compte les besoins des futures générations.  Il s’est félicité que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait été inscrite au programme de travail à long terme de la CDI.  Puisque les répercussions humanitaires de ce phénomène sont des plus pressantes, le représentant a souhaité l’inscription au programme de travail actuel de la question de la protection juridique des migrants et des personnes déplacées.  La CDI viendrait ainsi combler une lacune dans le droit international actuel, a conclu Mgr Auza.

Mme MARTA REQUENA, représentante du Conseil de l’Europe, a déclaré que la succession d’États en matière de responsabilité de l’État revêt une importance particulière pour le Conseil, après les nombreux cas de succession survenus dans les années 90 et leurs conséquences juridiques.  Le Comité des conseillers juridiques sur le droit international public (CAHDI) a préparé un rapport exhaustif sur cette question, qui peut être utile aux travaux de la CDI, a-t-elle précisé. 

La représentante a noté la référence à la Convention européenne des droits de l’homme contenue dans les commentaires de 8 des 13 projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Abordant la détermination du droit international coutumier, elle a noté que les projets de conclusion sur cette question reflètent l’approche adoptée par les États, les juridictions et les organisations internationales.  Elle a exprimé son accord avec la conclusion 12, qui note que la pratique des organisations internationales peut contribuer à l’identification du droit international coutumier.

M. AHMAD SHALEH BAWAZIR (Indonésie) a salué l’adoption des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a affiché la prudence concernant une interprétation évolutive des traités visée au projet de conclusion 8.  Une telle interprétation pourrait saper la règle générale, sachant qu’il n’y a pas de pratique établie.

En ce qui concerne les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, le délégué a appuyé l’inclusion de la règle de l’objecteur persistant dans le projet de conclusion 15 et salué les éclaircissements apportés par le commentaire y afférant.  Par ailleurs, il s’est félicité que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait été inscrite au programme de travail à long terme de la CDI.  Il a appelé à la prudence dans l’examen de ce sujet, compte tenu de son côté sensible, en particulier s’agissant de la délimitation des frontières maritimes.  En revanche, il a jugé prématuré toute discussion de la CDI au sujet de la compétence pénale universelle.

Mme EVGENIYA GORIATCHEVA, représentante de la Cour permanente d’arbitrage (CPA), a rappelé que la CPA est une organisation internationale fondée en 1899 visant à faciliter le recours à l’arbitrage et à d’autres modes de règlement pacifique des différends entre États, entités étatiques, organisations internationales et acteurs privés.

La Cour, a expliqué Mme Goriatcheva, a recommandé que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international soit inscrite au programme de travail à long terme de la CDI.  Elle a indiqué que dans l’affaire Bay of Bengal Maritime Boundary Arbitration entre le Bangladesh et l’Inde, l’un des tribunaux visés à l’annexe VII de la Convention sur le droit de la mer a pris en compte ce phénomène en notant que des changements côtiers majeurs surviendront dans la région en 2100.  Elle a invité la CDI à se pencher sur la question juridique de savoir si l’érosion graduelle des côtes en raison des changements climatiques doit être vue comme un changement naturel ou du fait de l’homme et quel régime de responsabilité pourrait en découler.

M. CHRISTOPHER BRADLEY HARLAND, délégué du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a salué l’adoption des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a indiqué que le CICR travaille actuellement à une actualisation des commentaires afférant aux Conventions de Genève de 1949 et à leurs Protocoles additionnels de 1977 et noté des parallèles avec l’approche de la CDI.

En ce qui concerne les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, le délégué a noté là encore des parallèles entre le travail de la CDI et l’Étude du CICR sur le droit international humanitaire coutumier publiée en 2005.  Enfin, il a insisté sur l’intérêt du sujet relatif à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

Déclarations sur les chapitres VI à VIII du rapport

M. LUCIO GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, a salué l’adoption de l’ensemble des projets de directive sur la protection de l’atmosphère, tout en regrettant que la suggestion de l’Union d’inclure des références à des accords spécifiques, comme le Protocole de Montréal, n’ait pas été retenue.  Il a invité la CDI à envisager une rédaction de la directive 3 sur l’obligation de protéger l’atmosphère qui encourage les États à adhérer, à ratifier ou à mettre en œuvre les accords multilatéraux sur l’environnement.  Il s’est félicité que le paragraphe 9 du commentaire relatif au projet de directive 7, intitulé « Modification intentionnelle de l’atmosphère à grande échelle », indique explicitement que ce dernier « ne vise ni à autoriser ou à interdire » la géo-ingénierie, tout en se disant préoccupé par les conséquences environnementales de la géo-ingénierie.  M. Gussetti s’est, par ailleurs, félicité de l’introduction de la directive 12 relative au règlement des différends. 

Le délégué a ensuite salué l’adoption du texte du projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités.  Il a souligné la nécessité que la pratique des organisations internationales dans ce domaine soit prise en compte.  À ce titre, M. Gussetti s’est félicité que la portée ratione personae des projets de directives inclut ces organisations.  L’Union est un acteur qui contribue à façonner activement la pratique en la matière.  Il a évoqué le projet de directive 3 qui dispose qu’un traité peut être appliqué à titre provisoire, en attendant son entrée en vigueur entre les États ou organisations internationales, « lorsque le traité lui-même en dispose ainsi, ou lorsqu’il en a été ainsi convenu d’une autre manière ».  La CDI devrait clarifier si elle entend marquer son accord à une application provisoire au moment de la signature du traité et quelle est la base juridique pertinente d’une telle règle.  Selon la CDI, un État ou une organisation internationale peut faire une déclaration aux fins de l’application à titre provisoire d’un traité dans les cas où le traité est muet sur l’application à titre provisoire ou celle-ci n’est pas convenue par un autre moyen, a indiqué le délégué.  Cette déclaration doit être acceptée par les autres.  Il a invité la CDI à argumenter davantage sur la question de savoir pourquoi le régime des actes unilatéraux ne peut pas s’appliquer à l’application à titre provisoire des traités.  M. Gussetti a salué le libellé du paragraphe 3 du projet de directive 9 sur l’extinction et la suspension de l’application à titre provisoire.  Selon ce paragraphe, le présent projet de directive est sans préjudice de l’application, mutatis mutandis, des règles pertinentes exposées dans la partie V, section 3, de la Convention de Vienne sur le droit des traités, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission alerte l’Assemblée générale des risques d’une course aux armements dans l’espace

Soixante-treizième session,
15e séance – après midi
CPSD/675

La Quatrième Commission alerte l’Assemblée générale des risques d’une course aux armements dans l’espace

La Quatrième Commission chargée des politiques spéciales et de la décolonisation a achevé, aujourd’hui son débat sur l’usage pacifique de l’espace extra-atmosphérique, en alertant l’Assemblée générale de la possibilité d’une course aux armements dans l’espace.

Dans un projet de résolution doté d’un dispositif de 41 paragraphes sur « la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace », adopté sans vote, la Commission a recommandé à l’Assemblée générale de se montrer « gravement préoccupée » et d’engager surtout les États qui sont particulièrement avancés dans le domaine spatial, à s’employer activement à empêcher une course aux armements dans l’espace, condition essentielle pour promouvoir la coopération internationale en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace à des fins pacifiques.  L’Assemblée devrait aussi accepter l’idée d’un débat conjoint d’une demi-journée entre la Quatrième Commission et la Première Commission chargée des questions de désarmement et de la sécurité internationale sur les risques éventuels pour la sécurité et la viabilité des activités spatiales. 

Tout en adhérant au consensus, l’Iran s’est dit préoccupé par le libellé du projet de résolution: les questions liées à la sécurité de l’espace ou aux aspects militaires ne relèvent pas de la compétence du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, a-t-il estimé.  Avant cela, pendant le débat, Cuba a dénoncé les « déclarations guerrières » des États-Unis, soulignant que la militarisation de l’espace extra-atmosphérique serait un des plus grands dangers pour l’humanité.  Avec le Pakistan, il a appelé à un traité interdisant la militarisation de l’espace.  Le projet de traité, présenté par la Fédération de Russie et la Chine lors de la Conférence du désarmement, pourrait constituer une bonne base de négociation, a estimé Cuba.

Singapour a rappelé que le nombre d’objets mis en orbite ne cesse d’augmenter et que, de nos jours, il y avait plus de 6 000 satellites dans l’exosphère immédiate qui apportent des services essentiels dans les domaines des télécommunications, de l’observation météorologique, du positionnement mondial et autres.  Pour le Saint-Siège, les États devraient examiner d’urgence la nécessité d’élaborer un « code de la route » pour éviter les collisions.  Un tel code exigerait que l’État lanceur ait conçu l’orbite de l’engin spatial de sorte que l’engin puisse être éliminé de manière sûre et responsable.  Dans son projet de résolution, la Commission recommande aussi à l’Assemblée générale de juger « indispensable » que les États prêtent davantage attention au problème de la probabilité de plus en plus grande de collisions d’objets spatiaux avec des débris spatiaux et demander que les recherches sur cette question se poursuivent.

Dans un autre texte, la Commission a recommandé comme à l’Assemblée de nommer Chypre, l’Éthiopie, la Finlande, Maurice et le Paraguay membres du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique.  La Turquie s’est réjouie de l’intérêt croissant pour le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique.  Elle a toutefois rappelé que le sud de Chypre est habité par des Chypriotes grecs et le nord par des Chypriotes turcs.  Elle s’est donc dissociée du consensus, ajoutant que sa décision de ne pas demander une mise aux voix ne présage en rien d’un changement de position.  Le statut de mon Gouvernement est non négociable, a rétorqué Chypre qui a invoqué les résolutions du Conseil de sécurité.  Chypre a insisté sur le fait qu’il est le seul Gouvernement légitime représentant l’ensemble de l’île.  Il s’est félicité de son entrée au Comité par une décision prise de manière « apolitique ». 

 La Quatrième Commission entamera son débat sur « l’Université pour la paix », demain vendredi 25 octobre, à partir de 15 heures.

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE (FIN)

Déclarations

M. RAJEEL MOSHIN (Pakistan) a rappelé que son pays est partie aux cinq traités multilatéraux fondamentaux qui régissent l’utilisation pacifique de l’espace. Nous considérons que l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, bien public mondial, doivent se faire dans l’intérêt de tous les pays.  L’espace extra-atmosphérique doit rester l’héritage commun de l’humanité.  Le Pakistan, a-t-il dit, est favorable à la négociation d’un instrument juridiquement contraignant contre la militarisation de l’espace.  Mais l’universalisation des instruments juridiques est une condition préalable à la coopération.  Le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique doit aider les pays en développement, s’agissant des domaines de la santé, de l’agriculture, de la gestion des ressources hydriques, de l’atténuation des effets des changements climatiques, de la navigation par satellite ou encore des communications.  Cette année, a indiqué le représentant, le Pakistan a lancé un satellite de télédétection et un autre d’évaluation technologique qui lui permettront d’améliorer la gestion de l’agriculture et la planification urbaine.  Le représentant n’a pas oublié la question importante des débris spatiaux, soutenant tous les instruments pertinents.  Il a souligné le devoir et la responsabilité de tous, d’aider les pays en développement à appliquer les dispositions relatives à l’environnement spatial.

M. TONG HAI LIM (Singapour) a réaffirmé, à son tour, que l’espace extra-atmosphérique doit rester un patrimoine commun pacifique et viable de l’humanité.  Notant que les applications spatiales font intégralement partie de notre quotidien et sont devenues indispensables, il a rappelé que, de nos jours, il y avait plus de 6 000 satellites dans l’exosphère immédiate qui apportent des services essentiels dans les domaines des télécommunications, de l’observation météorologique, du positionnement mondial et autres.  Le nombre d’objets mis en orbite ne cesse d’augmenter en même temps que croît l’industrie spatiale, sans compter la miniaturisation des satellites.  Il semble important, a-t-il estimé, de prendre des mesures pour répondre aux défis croissants de la congestion des orbites et des débris spatiaux pour que l’espace extra-atmosphérique reste notre patrimoine pacifique.

C’est la raison pour laquelle la coopération internationale est primordiale, a souligné le représentant, pour lequel il est urgent de mettre à jour, de manière consensuelle, les normes spatiales.  Les instruments doivent être transparents et inclusifs, a insisté le représentant, qui a soutenu l’approche inclusive du Comité.  Il faut, a-t-il ajouté, continuer à travailler pour mettre en place un cadre international ouvert et inclusif et assurer ainsi la viabilité de l’espace extra-atmosphérique.  Il s’est dit impatient de commencer les discussions sur le programme « Espace 2030 ».

Le représentant s’est arrêté sur le cas de Singapour et son initiative « Nation intelligente » dont l’objectif est de garantir la connectivité dans tout le pays.  Il a également fait état des efforts de l’agence spatiale nationale pour attirer des investissements étrangers dans le développement des petits satellites.

M. HUMBERTO RIVERO ROSARIO (Cuba) a rappelé la position de principe de son pays, à savoir que la militarisation de l’espace extra-atmosphérique serait, un des plus grands dangers de l’humanité.  L’espace doit rester un patrimoine commun de l’humanité et c’est pourquoi, les États doivent s’abstenir de se lancer dans la course aux armements, « ce qui mènerait à un désastre ».  Il faut, a insisté le représentant, un traité interdisant la militarisation de l’espace.  Un dialogue constructif entre le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et les Sous-Comités juridiques de la Conférence du désarmement permettrait de mettre à jour un instrument juridique international efficace, a estimé le représentant.  Il a considéré que le projet de traité présenté par la Fédération de Russie et la Chine lors de la Conférence du désarmement pourrait constituer une bonne base de négociation.

Le représentant a condamné les « déclarations guerrières » des États-Unis, qui parlent de développer une force militaire dans l’espace extra-atmosphérique.  Il a, en revanche, reconnu les bienfaits de l’exploration pacifique de l’espace, « un droit de tous les États » qui exige que l’on aide les pays en développement à l’exercer.  Malgré le blocus injuste imposé par les États-Unis, Cuba maintient son intérêt pour les activités dans l’espace extra-atmosphérique, a conclu le représentant.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a exprimé l’intention de son pays de présenter sa candidature au Comité sur les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique.  Il a, à son tour, exhorté la communauté internationale à se doter d’un régime international robuste pour régir les activités spatiales.  Il a aussi plaidé pour que l’on alloue davantage de ressources au Bureau des affaires spatiales des Nations Unies.  Le représentant a, en effet, insisté sur l’impératif de réduire le « fossé spatial » entre pays développés et pays en développement pour que tous puissent bénéficier des applications spatiales.

Le Bangladesh tire d’ailleurs déjà parti des technologies spatiales pour évaluer l’impact des changements climatiques, gérer les catastrophes ou développer le secteur des télécommunications.  Le pays a lancé son premier satellite au mois de mai dernier et reste profondément opposé à la course aux armements dans l’espace.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a souligné que la coopération internationale était fondamentale pour que l’espace extra-atmosphérique reste universellement bénéfique.  Il s’est félicité du fait que la Station spatiale internationale ait continué de fonctionner avec un équipage international.  La communauté internationale devrait tirer des enseignements de cette expérience de coopération pacifique, et envisager de l’élargir aux systèmes de lancement d’autres États, voire même d’impliquer davantage d’États à la création de stations spatiales internationales.  Est-il logique, aujourd’hui, de gérer plusieurs programmes à caractère national, en parallèle, plutôt que de les associer à un seul effort bien coordonné visant à développer notre utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique? a demandé le représentant.

Pour le Saint-Siège, il est de plus en plus évident que les satellites en orbite autour de la Terre ont besoin d’être lancés et opérés de façon à réduire la possibilité de collision avec d’autres satellites et objets spatiaux.  La destruction d’engins spatiaux provoque des problèmes et met en danger les autres satellites, a-t-il ajouté.  Dans la poursuite de l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique, les États devraient examiner d’urgence la nécessité d’élaborer un « code de la route » pour le lancement de véhicules spatiaux pour s’assurer que leurs orbites n’empièteront pas sur ceux des vaisseaux spatiaux existants.  De telles règles exigeraient également que l’État lanceur ait conçu l’orbite de l’engin spatial de manière à ce, que l’engin puisse être éliminé de manière sûre et responsable, a-t-il ajouté.

Adoption de projets de texte

Par un projet de décision sur l’augmentation du nombre des membres du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (A/C.4/73/L.6), la Commission recommande à l’Assemblée générale de nommer Chypre, l’Éthiopie, la Finlande, Maurice et le Paraguay au Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique.

Dans le projet de texte sur la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace (A/C.4/73/L.4), la Commission recommande à l’Assemblée générale de se montrer « gravement préoccupée » par la possibilité d’une course aux armements dans l’espace et engagerait surtout les États qui sont particulièrement avancés dans le domaine spatial, à s’employer activement à empêcher une telle course, condition essentielle pour promouvoir la coopération internationale en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace à des fins pacifiques.  Selon la Commission, l’Assemblée devrait d’ailleurs prier le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique de poursuivre, à titre prioritaire, l’examen des moyens permettant de veiller à ce que l’espace continue d’être utilisé à des fins pacifiques et convenir que le Comité devrait continuer d’examiner la perspective plus large de la sécurité dans l’espace et notamment les moyens de promouvoir la coopération internationale, régionale et interrégionale.

L’Assemblée devrait aussi accepter l’idée d’un débat conjoint d’une demi-journée entre la Quatrième Commission et la Première Commission chargée des questions de désarmement et de la sécurité internationale sur les risques éventuels pour la sécurité et la viabilité des activités spatiales.  À ce propos, elle devrait juger indispensable que les États prêtent davantage attention au problème de la probabilité de plus en plus grande de collisions d’objets spatiaux avec des débris spatiaux et demander que les recherches sur cette question se poursuivent.

Par ailleurs, l’Assemblée générale devrait prier instamment la Réunion interorganisations sur les activités spatiales (ONU-Espace) de continuer à examiner la façon dont les sciences et techniques spatiales et leurs applications pourraient concourir à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et encourager les entités du système des Nations Unies à participer aux efforts de coordination déployés par ONU-Espace.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: Paysans, personnes LGBTI, travailleurs exposés à des substances toxiques et reconnaissance d’un droit à un environnement sain

Soixante-treizième session,
33e & 34e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4243

Troisième Commission: Paysans, personnes LGBTI, travailleurs exposés à des substances toxiques et reconnaissance d’un droit à un environnement sain

Les discussions entre la Troisième Commission, chargée des affaires sociales, humanitaires et des droits de l’homme, et les titulaires de mandats de procédures spéciales ont aujourd’hui reflété la variété des droits de l’homme, puisqu’il a été question aussi bien du droit à un environnement sain ou de l’incidence de la gestion des produits dangereux que des droits des paysans, des exécutions sommaires et arbitraires, de la protection de la communauté LGBTI et de la promotion de la justice et de la vérité.

Il est temps que les Nations Unies reconnaissent le droit fondamental à un environnement sain, a plaidé M. David Boyd, Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, qui a déploré que les sociétés humaines soient la cause de dégradations environnementales sans précédent partout sur la planète.  Pour lui, ce droit réunit tous les critères établis par l’Assemblée générale régissant la proclamation de droits additionnels.  Sa reconnaissance au niveau mondial aurait un impact positif direct sur les performances environnementales ainsi que sur la qualité de vie des populations les plus vulnérables.

Ces propos, le Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux, M. Baskut Tuncak, a dit les reprendre à son compte.  Dans la droite ligne du discours de son collègue, il a présenté une série de statistiques alarmantes, notamment le fait que, chaque année, plus de deux millions de travailleurs meurent de maladies professionnelles, dont plus de la moitié uniquement du fait d’une exposition à des substances toxiques.  Il a déploré que la pollution soit la plus grande source de décès prématurés dans les pays en développement, devant le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme réunis.  Il s’est également alarmé que les pédiatres décrivent aujourd’hui des enfants nés « pré-pollués » en raison de leur exposition précoce à un cocktail de substances toxiques et s’est élevé contre le comportement scandaleux de certains États et entreprises qui déploient des « efforts inimaginables pour nier » les effets sur la santé des expositions.

C’est à propos d’autres travailleurs –les paysans- qu’est intervenu M. Ruddy José Flores Monterrey, Rapporteur-Président du Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée sur une déclaration des Nations Unies relative aux droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.  Il a plaidé en faveur de ladite Déclaration, adoptée en septembre par le Conseil des droits de l’homme.  Protéger les droits des personnes qui vivent et travaillent dans les zones rurales, c’est protéger la principale source de nourriture dans le monde, mais également la biodiversité dont dépendent les systèmes alimentaires ainsi que les emplois et les moyens de subsistance de millions de familles, et enfin promouvoir la durabilité environnementale, la résilience et l’adaptation aux changements climatiques, a-t-il insisté.  Rappelant en outre que les paysans et les travailleurs en zones rurales constituent les groupes les plus vulnérables, notamment les femmes et les filles, il a estimé qu’ils méritaient « le soutien de la communauté internationale », ajoutant que cette Déclaration le leur apporte.  Il reste que, si Cuba a annoncé qu’il présenterait un projet de résolution visant à faire adopter la déclaration par l’Assemblée générale, l’Union européenne a fait savoir que certaines dispositions lui causaient toujours problème.

« Sauver des vies n’est pas un crime ».  C’est ce qu’a fait valoir la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Mme Agnès Callamard, qui s’est penchée sur les pratiques d’aide humanitaire et de sauvetage de par le monde.  « Le droit de ne pas être arbitrairement privé de la vie est un droit fondamental et universellement reconnu, applicable à tout moment et en toutes circonstances », a-t-elle rappelé.  Ceci s’applique aussi en période de conflit armé et dans d’autres situations d’urgence, quand le droit international humanitaire impose clairement de protéger les acteurs humanitaires non seulement contre les attaques, mais aussi contre l’entrave à l’accès aux populations dans le besoin.  Mme Callamard a rappelé à ce propos que les États devaient prendre des mesures pour prévenir les menaces prévisibles à la vie, et ce, « sans aucune forme de discrimination ».

De discriminations, et aussi de violences, il a été beaucoup question avec l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, M. Victor Madrigal-Borloz.  « Les personnes transsexuelles et de genre divers sont victimes de violence et de discrimination dès leur plus jeune âge », a-t-il déploré en dénonçant en particulier les dommages causés par la « transphobie » de par le monde.  On ne peut d’ailleurs prendre pleinement conscience de l’ampleur du phénomène, faute de données appropriées, a-t-il expliqué.  Il a insisté sur l’urgence de protéger la vie des personnes transsexuelles et de genre divers par des mesures « qui ne peuvent être différées ».  À l’exception de l’Afrique du Sud, seuls des pays occidentaux et latino-américains ont échangé avec le Rapporteur spécial.

Enfin, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, M. Fabian Salvioli, est revenu sur des questions de justice transitionnelle, de prévention et de maintien de la paix.  Il a déploré que les jeunes soient exclus des discussions et des processus de justice transitionnelle alors même que les marginaliser ne pouvait que nuire à la consolidation de la paix et rendre inefficace la lutte contre l’extrémisme violent.  Il a également insisté sur la nécessité de faciliter une approche plus systématique de la question des femmes, de la paix et de la sécurité, alors que, de son côté, le Conseil de sécurité tenait son débat annuel sur le sujet.

Demain, vendredi 26 octobre à partir de 10 heures, la Troisième Commission entendra encore trois titulaires de mandats de procédures spéciales dans le cadre de l’examen de la protection et la promotion des droits de l’homme, avant de poursuivre sa discussion générale sur le même thème.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclaration liminaire

M. FABIAN SALVIOLI, Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, a expliqué que son premier rapport en tant que titulaire de ce mandat -M. Salvioli a pris ses fonctions en mai dernier- identifiait quatre axes de coopération prioritaires pour la collaboration qu’il entend établir avec l’Assemblée générale, en considérant certaines des tâches accomplies à la fois par l’Assemblée générale et par le Conseil de sécurité.

Le premier de ces axes concerne la justice transitionnelle, la prévention et le maintien de la paix, en tenant compte des résolutions jumelles de l’Assemblée générale 70/262 et du Conseil de sécurité –2282 (2016)- concernant l’architecture de consolidation de la paix, a précisé M. Salvioli, affirmant vouloir travailler sur la conceptualisation et la portée, du point de vue des droits de l’homme et de l’identification des bonnes pratiques, du rétablissement de la confiance et de la réconciliation.  Il a également proposé d’étudier l’inclusion des mesures de justice transitionnelle dans le contexte de la prévention, en suivant avec intérêt la notion de « mesures de justice transitionnelle complètes », préconisée par le Conseil de sécurité.

Le deuxième axe consiste à insister sur l’importance qu’il y a à tirer parti de la capacité créatrice des jeunes pour la justice transitionnelle, en tenant compte du fait que la génération actuelle de jeunes est la plus nombreuse de l’histoire, a poursuivi le Rapporteur spécial.  Déplorant que ces jeunes soient souvent exclus des discussions et des processus de justice transitionnelle, il a averti que les marginaliser ne pouvait que nuire à la consolidation de la paix et rendre inefficace la lutte contre l’extrémisme violent.  Il s’est aussi dit inquiet du manque d’informations de base que les jeunes ont des événements passés dans leur propre pays, au cours desquels de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire ont été perpétrées.  Or, a-t-il souligné, la transmission de la mémoire joue un rôle fondamental dans la rupture des cycles de violence.

Le troisième axe de travail concerne l’accentuation de la perspective de genre dans les initiatives de justice transitionnelle.  À cette fin, M. Salvioli a dit vouloir utiliser l’Enquête mondiale sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et travailler avec le Groupe informel d’experts sur les femmes, la paix et la sécurité.  Il entend ainsi faciliter une approche plus systématique de la question des femmes, de la paix et de la sécurité dans le travail même du Conseil de sécurité.  À ses yeux, un rôle actif, complet et directeur des femmes dans les processus de justice transitionnelle est non seulement important mais aussi nécessaire et essentiel pour que ces processus se déroulent avec succès.

Enfin, le quatrième axe de travail porte sur la relation entre les droits de l’homme et les objectifs du développement durable dans le contexte de la justice transitionnelle.  Le Conseil des droits de l’homme, a-t-il rappelé, a déjà souligné la nécessité de travailler dans cette perspective dans sa résolution 12/11 de 2009 et dans la note d’orientation du Secrétaire général de 2010 sur l’approche des Nations Unies en matière de justice transitionnelle de 2010.  Pour M. Salvioli, l’absence de résolution des problèmes entraînant des violations des droits économiques, sociaux et culturels peut empêcher de parvenir à des solutions durables et menacer les processus de justice transitionnelle.  De fait, a-t-il dit, une stratégie efficace pour parvenir à une paix durable consiste à traiter de manière exhaustive les causes sous-jacentes des conflits par le biais d’un ensemble de mesures de politique publique.  « L’universalité, l’interdépendance et l’indivisibilité des droits de l’homme doivent être présents dans la conception et l’exécution des programmes de justice transitionnelle », a-t-il souligné. 

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. Fabian Salvioli, l’Argentine a présenté les mesures qu’elle a mises en œuvre afin d’approfondir et de consolider les politiques publiques en matière de droits de la personne, et notamment le Plan pour les droits de la personne lancé en 2017.  Elle a demandé au Rapporteur spécial d’indiquer les relations entre corruption et violation manifeste des droits de la personne dans les contextes de transition, et plus précisément quelles étaient les principales difficultés que représente la corruption dans ces contextes.

Les États-Unis ont dit appuyer les mécanismes de redevabilité judiciaire et non judiciaire, qui sont essentiels pour éviter la répétition des atrocités.  C’est pourquoi ils demandent qu’une solution politique du conflit syrien respectueuse des droits de l’homme soit trouvée pour que les responsables des violations soient traduits en justice.  Ils exhortent par ailleurs le Gouvernement du Myanmar à mettre en œuvre les recommandations de la Commission Annan et à créer les conditions du retour des réfugiés au Bangladesh.  Ils appuient la Cour pénale spéciale de la République centrafricaine pour mettre fin au cycle de violence, ainsi que les progrès réalisés par la Colombie en matière de droits de l’homme.  Les États-Unis demandent aussi au Gouvernement de Sri Lanka de continuer ses avancées dans le sens de la résolution 30/1 du Conseil des droits de l’homme.  Ils s’interrogent en fin sur les stratégies appliquées par les pays dont le Rapporteur spécial pourrait parler.

La Fédération de Russie a dénoncé les thèmes choisis par le Rapporteur spécial, estimant qu’ils étaient « intéressants mais sortent de son mandat et font double emploi avec d’autres institutions du système des Nations Unies ».  Ainsi a-t-elle mentionné, les questions de justice transitionnelle et de maintien de la paix sont, entre autres, de la responsabilité du Conseil de sécurité.

L’Union européenne est revenue sur la recommandation du Rapporteur spécial d’utiliser l’énergie créatrice des jeunes pour les processus de justice de transition.  Elle a demandé quelle démarche de cohésion pouvait être mise en place pour que les jeunes aient un rôle plus inclusif et par quelles méthodes des progrès pourraient être réalisés.  De plus, elle a noté que les voix des femmes étaient marginalisées, notamment dans la justice traditionnelle, et a donc demande comment le Rapporteur spécial envisageait d’appliquer la perspective de genre dans ses travaux.  L’Irlande a noté l’intention du Rapporteur spécial d’étudier la promotion de la réconciliation en comparant les pratiques et a demandé ce que les États peuvent faire pour l’aider. 

La Suisse a souligné la déconnexion en matière de justice transitionnelle entre ce qui est décidé à New York et sur le terrain.  Elle a voulu savoir, elle aussi, comment le Rapporteur comptait anticiper pour faire participer les jeunes, un groupe rarement inclus dans les processus de changement.  La Suisse a également évoqué le lien entre la justice transitionnelle et les atteintes aux droits économiques, sociaux et culturels souvent causes de profonds conflits et est le domaine de la justice transitionnelle le plus sous-développé, et invité le Rapporteur à explorer cette question dans le cadre du Programme 2030. 

La République arabe syrienne a rejeté en bloc les affirmations des États-Unis à son propos et appelé ce pays à mettre fin à ses « opérations criminelles », contre les civils en Syrie, dans le cadre de l’Alliance internationale. 

Réponses

Dans ses réponses, M. FABIAN SALVIOLI a insisté sur le devoir de mémoire dans les plans nationaux établis dans le cadre de la justice transitionnelle.  Le Rapporteur spécial a ensuite estimé que la corruption, en tant que violation des droits de la personne et ce qu’elle représente pour les institutions de l’État, nuisait de façon transversale aux droits dans leur ensemble.  « Il est important de voir que le Conseil des droits de l’homme a commencé à se pencher sur son impact sur l’administration de la justice », a-t-il fait observer.  Il a cité, à cet égard, les procédures mises en place par le Guatemala, les qualifiant d’exemples de bonnes pratiques.  Il a dit avoir l’intention d’approfondir cet aspect, l’année prochaine, dans le cadre des questions thématiques. 

M. Salvioli a dit partager l’avis de certaines délégations s’agissant de la responsabilisation et tout ce qui relève des commissions de vérité.  Celles-ci sont fondamentales, a-t-il insisté.  S’agissant des stratégies de justice transitionnelle, les procédures suivies à cet égard ne sont pas « forcément linéaires » et connaissent parfois des « rebondissements ».  Là aussi, il faut s’inspirer des bonnes pratiques, mais le Rapporteur spécial a dit ne pas vouloir sélectionner un processus en particulier, estimant que chaque État avait ses particularités.  Il a toutefois proposé d’offrir son assistance technique aux États qui le souhaitent. 

M. Salvioli a tenu, en outre, à rassurer la Troisième Commission sur son mandat, soulignant n’avoir nullement l’intention de se pencher sur des questions qui relèvent d’autres organes.  Cependant, a-t-il poursuivi, fonctionner de manière illogique n’est pas non plus productif et, dans certains cas, il est raisonnable de coopérer car certaines questions ne peuvent être dissociées. 

Enfin, revenant sur la participation des jeunes dans les processus de justice transitionnelle, le Rapporteur spécial a jugé cette approche fondamentale et a invité à adopter des approches holistiques.

Déclaration liminaire

M. VICTOR MADRIGAL-BORLOZ, Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, a présenté son rapport en rappelant que, chaque jour, des personnes transsexuelles et de genre divers étaient victimes de violences à des niveaux offensants pour la conscience humaine.  Chaque jour, ces personnes sont massivement et de manière disproportionnée victimes de meurtres, de passages à tabac, de tortures et de mauvais traitements, de viols et d’autres abus sexuels, le tout résultant de la « transphobie », a souligné l’Expert indépendant.  Il a précisé que ces personnes étaient aussi fréquemment victimes de menaces, de coercition et de privation arbitraire de liberté, y compris d’incarcération forcée en établissement psychiatrique.

Observant qu’un projet non gouvernemental avait recensé 325 assassinats de personnes transsexuelles et de genre divers, l’an dernier, et que des sources similaires faisaient état de 2 609 meurtres depuis 2008, M. Madrigal-Borloz s’est dit certain que « ce n’est que la partie visible de l’iceberg, en raison du manque d’informations et de recueil de données appropriées ».  À ses yeux, ce manque de données appropriées est, en soi, le résultat de la transphobie et de la dévaluation de la vie des femmes et des hommes transsexuels.  Il s’ensuit que, dans la plupart des cas, il existe un lien entre ces violations et la responsabilité de l’État, a-t-il expliqué.

En règle générale, a poursuivi l’Expert indépendant, et à quelques exceptions près, les personnes transsexuelles et de genre divers sont victimes de violence et de discrimination dès leur plus jeune âge et sont prises dans une spirale d’exclusion et de marginalisation.  Elles sont souvent brimées à l’école, rejetées par leur famille, poussées dans la rue et se voient refuser l’accès à un emploi légal.  En conséquence, et pour survivre, elles doivent s’appuyer sur des économies informelles, y compris le travail du sexe, et faire face à une situation économique extrêmement difficile.  À cet égard, a-t-il noté, les personnes de couleur diverse et transsexuelles, les minorités ethniques, les migrants et les travailleurs du sexe sont particulièrement vulnérables.

Pour briser ces cycles de violence, il est impératif que la communauté des nations soit sensibilisée et résolue à s’acquitter de son devoir de protéger la vie des personnes transsexuelles et de genre divers, a fait valoir M. Madrigal-Borloz.  « Ces mesures ne peuvent être différées », a-t-il insisté, constatant toutefois que la grande majorité des personnes transsexuelles et de genre divers dans le monde n’ont pas accès à la reconnaissance du genre par l’État.  Elles vivent donc dans un vide juridique où la stigmatisation et les préjugés créent un climat qui encourage et récompense tacitement les actes de violence et de discrimination perpétrés à leur encontre.  La persécution est également facilitée par le recours à des lois ou règlements qui criminalisent les personnes en fonction de leur identité ou de leur expression, a-t-il déploré. 

Même lorsque les États reconnaissent l’identité de genre des personnes transsexuelles, ils imposent souvent des conditions abusives, telles que des diagnostics de santé mentale, des traitements et procédures forcés ou involontaires qui peuvent entraîner une douleur et une souffrance physique et mentale graves et permanentes, et à des souffrances qui violent le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a précisé l’Expert indépendant.  De même, a-t-il insisté, les exigences en matière de stérilisation violent l’intégrité physique, l’autodétermination et la dignité humaine des personnes transgenres.  Ils détruisent également les projets de vie, comme c’est le cas lorsque le divorce est demandé.  De plus, les enfants sont souvent exclus de la reconnaissance du genre, ce qui entraîne un risque accru de persécution, d’abus, de violence et de discrimination. 

Pourtant, les États ont le pouvoir de mettre fin aux épreuves auxquelles sont confrontées des personnes transsexuelles et de genre divers, a soutenu l’Expert indépendant.  Son rapport, a-t-il relevé, met en lumière les principales décisions d’organes internationaux et régionaux et les mesures efficaces prises par toutes les branches de l’État pour lutter contre la violence et la discrimination sur la base de l’identité de genre, y compris des mesures visant à garantir le respect de cette identité.  Ces mesures vont de la « dépathologisation » des identités transsexuelles à la reconnaissance juridique de l’identité de genre.  Elles incluent l’impératif immédiat d’éliminer les exigences abusives pour une telle reconnaissance, a-t-il conclu, encourageant les États à s’inspirer des développements positifs, aux niveaux mondial, régional et national, mis en évidence dans son rapport. 

Note sur la Dépathologisation

En juin 2018, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a publié sa nouvelle classification internationale des maladies (ICD-11), qui sera présentée à l’Assemblée mondiale de la santé pour adoption en juin 2019 et devrait entrer en application en 2022.  Dans ce cadre, ce que l’OMS appelle la « non-cohérence de genre » a été transférée de la liste des troubles mentaux à celle de la santé sexuelle.  « Bien qu’il soit désormais prouvé qu’il ne s’agit pas d’un trouble mental, et que la classifier ainsi peut entraîner une stigmatisation énorme pour les personnes trans, la transidentité implique des besoins en santé sexuelle qui peuvent être mieux pris en charge si elles restent dans cette seconde liste », expliquait l’OMS lors de la publication.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. Victor Madrigal-Borloz, le Costa Rica a insisté sur le fait que le genre était une composante de l’identité et que les personnes transgenres souffraient du déni de leurs droits et de discriminations.  Il a indiqué avoir éliminé les indications du sexe de naissance dans les documents d’identité pour éviter la stigmatisation.  L’Argentine a rappelé que le soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme était un moment fondamental pour se rappeler que nous sommes tous égaux en droit.  Elle a demandé quels étaient les obstacles les plus difficiles à surmonter pour la population transsexuelle.

Le Mexique, qui reconnaît le caractère constructif et équilibré du rapport de l’Expert indépendant, a appelé à se pencher sur les causes sous-jacentes à la discrimination et la violence et s’est élevé contre les discours de haine.  II a voulu savoir quelles étaient les expériences en matière de dépathologisation.  À cet égard, le Brésil a salué la dépathologisation du genre, qui représente une amélioration du traitement des personnes transsexuelles.  Il estime que les traitements imposés de chirurgie ou autres peuvent constituer des violations des droits de l’homme.

El Salvador a souligné l’existence dans le pays d’un département consacré à cette problématique.  Les défis sont nombreux mais « nous restons attachés aux droits fondamentaux et à l’identité » des personnes LGBTI, a ajouté El Salvador, pays qui appuie la diversité et insiste pour défendre la communauté LGTBI.  Pour l’Uruguay, il faut continuer à mener des campagnes de sensibilisation aux violences à l’encontre de la communauté LGTBI.  Il souhaite avoir plus d’indications de la part de l’Expert indépendant sur ses visites récentes.  Tout en renouvelant son engagement, la Colombie s’est dite favorable à la création d’un espace pour un dialogue constructif visant à surmonter les divergences sur ces questions.  Pour elle, la pleine jouissance des droits fondamentaux est une question transversale qui commence à la maison.

L’Union européenne a expliqué que les notions d’identité sexuelle variaient d’un pays à l’autre et s’est déclarée très préoccupée par les violences menées sur cette base.  Elle a reconnu l’importance de la dépathologisation des comportements transgenre par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Elle a enfin demandé quelles influences avaient les sociétés lorsqu’elles reconnaissaient la diversité dans les cultures.

Au nom d’un groupe de pays d’Europe du Nord, la Suède a expliqué que le droit à être reconnu en tant qu’être humain exceptionnel faisait partie des droits fondamentaux et que le genre faisait partie de l’identité.  Pour ce groupe, la violence transphobe existait partout.  Pour y faire face, l’égalité devant la loi est certes essentielle, mais il faut aussi que les lois soient appliquées.  La Suède a demandé quelles étaient les meilleures pratiques pour que les mesures légales et autres soient efficaces pour réduire la violence transphobe.  L’Islande s’est, pour sa part, félicitée d’être à la tête de l’indice d’acceptation sociale des LGTBI selon une étude menée, en 2017, par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et a expliqué qu’une loi sur la reconnaissance des LGTBI était en cours de rédaction dans le pays.  Elle a demandé à l’Expert indépendant de préciser ce qu’il considère comme étant les barrières structurelles les plus communes auxquelles fait face la communauté LGTBI.

La France a déploré que la vie des personnes LGTBI soit parfois menacée.  Après avoir salué la décision de l’Inde de dépénaliser les relations homosexuelles consenties, elle a demandé quelles stratégies étaient les plus efficaces pour élargir le mouvement de dépénalisation des relations homosexuelles consenties sans créer de réactions violentes dans les pays concernés.  L’Allemagne encourage les États à reconnaître l’identité de genre dans le contexte de l’identité et rappelle que les gouvernements ont l’obligation de respecter les droits de l’homme de toutes les personnes, y compris LGTBI.  Elle salue, elle aussi, la dépénalisation de l’homosexualité en Inde, comme à la Trinité-et-Tobago, mais déplore qu’un tiers de la population dans le monde continue à vivre dans des pays qui pénalisaient les personnes LGTBI.  Elle a enfin demandé comment les militants LGTBI pouvaient être mieux protégés et leur travail favorisé.

L’Espagne a salué les avancées en matière de « dépathologisation de ces communautés » et souligné les progrès accomplis par son pays en matière de droit d’accès de cette communauté à la reproduction assistée.  L’Irlande a mentionné la nouvelle loi adoptée dans le pays sur l’identité de genre, qui prévoit notamment un nouveau certificat de naissance reflétant ce changement.

Les Pays-Bas ont noté que la tendance n’était pas positive partout et qu’il était nécessaire de poursuivre les efforts.  Ils ont demandé comment la question de la reconnaissance de l’identité de genre était liée aux droits égaux sur la base de l’identité sexuelle.  La Belgique est convaincue qu’une attention particulière contribuerait à la lutte contre les violences à l’égard de la communauté LGBTI.  En Belgique, les violences fondées sur le genre sont interdites par la loi et une loi a été amendée pour permettre aux personnes transgenres de modifier leur identité de genre sans passer par un traitement médical.  La Belgique s’interroge en outre sur le rôle de la société civile.

Pour la Slovénie, les personnes transgenres font face à des violences car la diversité sexuelle reste stigmatisée du fait que les normes sont différentes selon les pays.  La question de l’identité de genre est souvent associée à la race ou la religion et ces associations contribuent encore plus à la marginalisation.  Elle a voulu savoir comment faire face à l’exclusion de ces personnes?

Le Royaume-Uni a rappelé que les droits fondamentaux étaient universels et devaient s’appliquer à tous.  Il s’est préoccupé du discours anti-droits de certains dirigeants et a demandé quelles étaient les méthodes recommandées pour examiner cela en vertu des discours de haine.

La Géorgie a condamné la discrimination de facto contre les populations LGBTI.  Elle suggère d’adopter des lois et décisions appropriées et d’assurer la participation de la société civile et des communautés concernées et appuie les recommandations sur l’élimination de la stigmatisation sociale associée à la diversité.  La Géorgie, qui attend le rapport et les recommandations de l’Expert indépendant à la suite de sa visite, a regretté qu’il n’ait pas eu l’occasion de se rendre dans les zones occupées pour évaluer la situation.  Elle aimerait savoir quel serait l’âge optimal pour un enfant pour changer son identité de genre?

L’Albanie a regretté qu’encore 70 pays criminalisent l’orientation sexuelle, estimant que de telles pratiques ne renforcent pas l’état de droit et ne font que légitimer la haine face à la différence.  L’Albanie est en train de mettre en place un plan d’action national pour les personnes LGBTI.

La Nouvelle-Zélande a dénoncé les violences physiques et psychologiques que subit la communauté LGTBI, dont elle juge le niveau très préoccupant.  Elle exhorte les États Membres à condamner tous les actes de violence.  L’Australie a souligné son attachement à cette question, qui est au « cœur de notre croyance profonde » pour les droits de toutes les personnes.  Elle reconnaît toutefois que, dans le pays, la population LGBTI est sujette à davantage de violences et compte réagir face à cette tendance.  Le Canada a dit pouvoir comprendre que le sujet puisse être sensible pour certains États, mais ces derniers n’en devraient pas moins combler les lacunes législatives ou autres dans le cadre de la reconnaissance du genre.  Le Canada a souhaité que l’Expert indépendant présente des exemples de campagnes d’éducation et de sensibilisation visant à changer les attitudes face à la diversité de genre qui ont été couronnées de succès.

Les États-Unis ont demandé quelles mesures pouvaient être adoptées pour débattre avec la Fédération de Russie des questions de violence et de disparitions forcées de personnes LGTBI.

Enfin, l’Afrique du Sud a souligné que la Constitution de son pays repose sur le respect de la dignité humaine et du respect de la diversité des personnes.  C’est aussi un pilier de sa politique nationale et internationale.  Elle a appelé à lutter contre la stigmatisation et a demandé davantage de précisions sur la position de l’Expert indépendant, s’agissant de la collecte des données ventilées par sexe.

Réponses

Dans ses réponses, M. VICTOR MADRIGAL-BORLOZ s’est dit « touché » par le débat qui l’encouragera à pousser la réflexion et la façon d’aborder la question dans le futur.  Il a relevé quatre préoccupations exprimées par les délégations relatives à son mandat, aux bonnes pratiques, à l’identité et au rôle de la société civile.  Il a observé une certaine souplesse s’agissant de la notion d’identité de genre et a salué l’Uruguay pour avoir adopté une législation dans ce domaine.

Quant aux nombreux défis, M. Madrigal-Borloz a rappelé qu’il les avait présentés devant le Conseil des droits de l’homme.  Il a notamment mentionné la pénalisation de la transidentité, parfois passible de la peine de mort.  Il existe « une relation inextricable entre la pénalisation et l’incapacité des États » à agir sur cette question, a estimé l’Expert indépendant, qui a noté un contexte délicat pour la mise en œuvre de stratégies particulières, relevant des considérations d’ordre politiques.  M. Madrigal-Borloz a salué, à cet égard, l’approche de son prédécesseur qui semble « procéder d’un certain mérite ».  À ses yeux, il faut identifier si les violences ou discriminations découlent du système judiciaire ou de politiques publiques.

S’agissant de la collecte des données soulevées par l’Afrique du Sud, M. Madrigal-Borloz a estimé pour l’heure qu’il est impossible d’envisager des collectes exhaustives dans ce domaine. 

Quant à la question du déni de l’existence des personnes LGBTI, l’Expert indépendant a rappelé avec vigueur que ces personnes existent bien dans le monde entier.  Tout déni revient à tourner le dos à des obligations internationales.  Quant à la question du dialogue, il a fait part de sa détermination -figurant d’ailleurs dans son mandat- à dialoguer avec toute personne prête à le faire.  Il a reconnu ne pas « avoir de mécanismes diplomatiques » mais a ajouté qu’il travaillait en fonction de ses moyens et s’est dit attaché à une écoute attentive.

S’agissant des pratiques optimales, l’Expert indépendant a invité les délégations à se référer à son rapport.  Il s’est inscrit en faveur d’une campagne d’éducation et exhorté à la protection des personnes transgenres, ce qui aura un impact direct sur leur espérance de vie.  L’espérance de vie d’une femme transgenre est de 35 ans, a-t-il fait observer.

M. Madrigal-Borloz a aussi insisté sur le rôle de la société civile qui figure parmi ses pratiques optimales, et la participation de la communauté LGBTI, car ce n’est qu’avec elle que l’on pourra « mieux comprendre la situation » de ses membres, ainsi que sur le devoir fondamental des États d’éviter toute régression à cet égard.

Pour finir, l’Expert indépendant a salué la Géorgie pour son « excellente collaboration » lors de sa visite dans ce pays, ainsi que les pays comme l’Uruguay, le Mozambique, l’Ukraine et Sri Lanka, dans lesquels il se rendra prochainement.

Déclaration liminaire

Mme AGNÈS CALLAMARD, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a tout d’abord fait valoir que, comme l’est intitulé son rapport, « sauver des vies n’est pas un crime ».  En effet, a-t-elle noté, on trouve trace d’actions humanitaire prises par des particuliers ou des organisations depuis des centaines d’années.  Diverses convictions, croyances et cadres moraux ont façonné ce qui apparaît aujourd’hui sous le régime humanitaire moderne, a-t-elle relevé, ajoutant que de telles interventions étaient aussi nécessaires aujourd’hui qu’elles l’avaient été au cours de l’histoire de l’humanité, qu’il s’agisse d’assister les victimes de conflits, de venir en aide aux millions de personnes en mouvement ou d’offrir des services aux communautés laissées-pour-compte, isolées ou stigmatisées. 

De l’avis de la Rapporteuse spéciale, ces acteurs et les mesures de sauvetage qu’ils prennent aident également les États à s’acquitter de leurs obligations en matière de droits de l’homme.  À cet égard, a-t-elle souligné, le droit de ne pas être arbitrairement privé de la vie est un droit fondamental et universellement reconnu, applicable à tout moment et en toutes circonstances, y compris en période de conflit armé et dans d’autres situations d’urgence.  Les États doivent par conséquent s’abstenir de tout acte constitutif de privation arbitraire de la vie et prendre des mesures pour prévenir les menaces prévisibles à la vie émanant d’autorités de l’État ou d’acteurs privés.  « Ce droit suprême doit être maintenu sans aucune forme de discrimination », a insisté Mme Callamard.

De même, dans les situations de conflit armé, le droit international humanitaire impose clairement à toutes les parties de protéger les acteurs humanitaires non seulement contre les attaques, mais aussi contre le harcèlement, l’intimidation et l’entrave à l’accès aux populations dans le besoin, a poursuivi la Rapporteuse spéciale, ajoutant qu’aucune partie au conflit ne pouvait refuser arbitrairement son consentement à des offres de services humanitaires légitimes.  De plus, a-t-elle rappelé, en vertu du droit international des droits de l’homme, les États ont « l’obligation positive de rechercher et de faciliter l’action humanitaire et l’obligation négative de ne pas l’empêcher ».

Pour Mme Callamard, ces interventions vitales sont aujourd’hui menacées.  La « portée excessive » des mesures demandées par le Conseil de sécurité aux États Membres pour lutter contre le terrorisme ainsi que l’absence d’une définition du terrorisme à l’échelle mondiale ont eu pour conséquence qu’un large éventail d’actes humanitaires sont qualifiés de mesures de soutien au terrorisme.  D’autre part, pour protéger leurs pays de la migration irrégulière, les États dissuadent les services humanitaires pour les migrants aux frontières de mener des missions de sauvetage et d’assistance, violant ainsi leur obligation de prévenir, combattre et éliminer la privation arbitraire de la vie.  Enfin, a-t-elle observé, la fourniture de services humanitaires aux femmes et aux filles, ainsi qu’aux populations LGBTI, a également été criminalisée, découragée ou stigmatisée.

Parmi les recommandations contenues dans son rapport, Mme Callamard a cité la nécessité pour le Conseil de sécurité d’adopter des résolutions excluant expressément les actions humanitaires du champ de la lutte contre le terrorisme, y compris des sanctions.  De plus, les États devraient clairement et sans ambiguïté exempter les actions humanitaires de leurs lois et mesures antiterroristes, comme certains ont commencé à le faire.  Ils devraient également supprimer tous les obstacles à la fourniture de soins de santé complets en matière de sexualité et de procréation, y compris des services d’avortement médicalisé, et prendre toutes les mesures raisonnables pour permettre aux prestataires de soins de faire leur travail sans ingérence ni restriction indues, a-t-elle plaidé, exhortant chacun à mettre fin aux « inacceptables limitations imposées aux actes de solidarité, petits ou grands, organisés ou spontanés », car ils contribuent à rendre notre monde plus sûr.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec Mme Agnès Callamard, la Fédération de Russie a regretté que, pour « une énième fois » la Rapporteuse spéciale ait préféré se concentrer sur des thèmes « ne faisant pas partie de son mandat ».  Elle a également estimé que « beaucoup de parties du rapport étaient inventées et sans aucune justification juridique ».  En ce qui concerne la sécurité du personnel humanitaire, elle a expliqué que, sans douter du rôle essentiel des États dans leur protection, il ne fallait pas oublier que les travailleurs humanitaires devaient aussi respecter la souveraineté et les lois des pays dans lesquels ils opèrent.  Demandant, elle aussi, à la Rapporteuse spéciale de respecter les limites de son mandat, l’Arabie saoudite en a rejeté les recommandations.

La France a rappelé que les gouvernements avaient l’obligation de protéger le droit à la vie.  La France considère en ce sens que le respect du droit à la santé, y compris sexuelle et reproductive, doit être assuré en toutes circonstances.  Elle déplore donc toute entrave à la fourniture de services de santé sexuelle et reproductive tels que la contraception, le traitement du VIH/sida ou encore l’avortement, car ces entraves contribuent à augmenter le taux de décès évitables.  La France a demandé à la Rapporteuse spéciale quelles mesures elle préconisait pour que le droit des prestataires de santé sexuelle à exercer leurs fonctions sans intimidation puisse être mieux protégé.

La Nouvelle–Zélande a expliqué que 130 millions de personnes avaient besoin d’aide et de protection et s’est déclarée préoccupée du déni d’aide humanitaire.  Pour la Nouvelle-Zélande, les fournisseurs d’aide humanitaire ne devraient pas avoir à se retrouver face à un dilemme consistant à, soit diminuer leur offre de services soit voir leurs financements diminuer.  Elle s’est félicitée de l’adoption de la résolution du Conseil des droits de l’homme qui exhorte les États à faire en sorte que les lois sur la santé sexuelle et reproductive soient conformes aux droits de l’homme.  Elle a enfin demandé quels étaient les plus grands défis pour que les organisations humanitaires ne soient pas empêchées de fournir ces services qui sauvent des vies.

L’Australie a fait état de ces lois qui contiennent des sauvegardes pour protéger les acteurs humanitaires.  El Salvador a également fait état des mises en œuvre dans le pays pour protéger les groupes les plus vulnérables de la population et a expliqué son attachement à la jouissance des droits et libertés fondamentales.

Pour le Brésil, la migration ne devrait pas être considérée comme une menace ou un état d’urgence qui empêcherait les États d’appliquer le droit international, surtout lorsque les normes comme le droit à la vie est menacé.  Le Brésil rejette en outre la criminalisation des migrants réguliers et demande à la Rapporteuse spéciale de préciser quelles mesures pratiques les États peuvent prendre pour protéger les groupes fournissant ces services aux migrants. 

Le Mexique s’est attaché à l’importance de la pénalisation des féminicides et autres crimes liés au genre.  Il a demandé quelles étaient les mesures à prendre pour faire face au problème des violences faites aux femmes en situation vulnérable.

L’Islande est revenue sur l’assassinat du journaliste saoudien Khashoggi et a dit appuyer la demande d’une enquête indépendante.  Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale ce qu’une telle enquête devrait faire.  L’Islande aimerait aussi savoir si la Rapporteuse spéciale a envisagé d’enquêter sur la situation au Yémen.  Les États-Unis ont, eux aussi, évoqué l’assassinat de Jamal Khashoggi et ont demandé une enquête impartiale.  Les États-Unis sont en outre préoccupés par le fait que les crimes extrajudiciaires sont des pratiques courantes dans de nombreux pays.  Ils ont demandé à la Rapporteuse spéciale comment les États pouvaient mettre mieux en œuvre les mécanismes pour éviter les récurrences de ces pratiques.

L’Iraq a défendu l’existence de la peine de mort dans le pays en expliquant qu’elle n’était appliquée que pour les crimes les plus graves, en vertu du droit souverain garanti par l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  En outre, il existe de nombreuses garanties pour protéger les droits avant d’appliquer la sentence en cas de condamnation à mort.

Pour la Suisse, assurer la sécurité de l’État est légitime mais lesdits États ne sauraient utiliser la lutte contre le terrorisme pour ne pas respecter leurs obligations vis à vis des droits de l’homme.  La Suisse exhorte les États à s’assurer que les activités des organisations humanitaires ne soient pas criminalisées et s’inquiète de ce que de nombreux acteurs humanitaires connaissent des difficultés du financement.

L’Union européenne a demandé à la Rapporteuse spéciale si elle pouvait indiquer ses priorités pour les mois à venir et les éventuelles visites prévues dans les pays.

Réponses

Dans ses réponses, Mme AGNÈS CALLAMARD a souligné que le point de départ dans le contexte de ses travaux est la victime.  La Rapporteuse spéciale met au cœur de son action la question relative à la protection des victimes, tout comme les programmes des Nations Unies.  Insistant sur le lien humanitaire, elle a invité les délégations à lire son rapport au côté des rapports précédents de ses prédécesseurs.  Si certains pensent qu’elle s’écarte de son mandat, celui-ci repose fermement sur les analyses et travaux de ses cinq prédécesseurs, a-t-elle insisté.  Si son rapport a accordé une grande importance à la dimension juridique, c’est que cet aspect se rattache au potentiel des exécutions arbitraires.

S’agissant des obstacles et défis, Mme Callamard a longuement évoqué les problèmes auxquels se heurtent les agents humanitaires.  D’abord, ces personnes sont ciblées sur le terrain par les parties au conflit.  Ensuite, sur le plan des normes, elle voit le monde avancer dans une direction « nocive », sous divers prétextes, tels que la lutte contre le terrorisme ou d’autres.  Il y a une « normalisation de la criminalisation » des personnes qui tentent de sauver les vies, a-t-elle dénoncé.

C’est pourquoi la Rapporteuse spéciale a exhorté la communauté internationale, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité à agir à cet égard.  Elle a expliqué qu’elle ne faisait ici que souligner la mise en œuvre du respect des obligations faites aux États et conformes au travail humanitaire.  Car, a-t-elle poursuivi, lorsque l’on empêche les travailleurs humanitaires d’accomplir leur tâche, les populations deviennent doublement victimes.  Cette dynamique complexe doit être prise en compte, a-t-elle insisté.  C’est pourquoi aussi Mme Callamard demande l’adoption de mesures claires.  Elle juge en effet qu’il faut impérativement progresser sur ces questions.

En réponses aux références faites au journaliste saoudien Jamal Khashoggi, la Rapporteuse spéciale a fait observer que dire que cet assassinat relève de la portée de son mandat n’est pas une « observation personnelle ».  Il s’agit là d’une « exécution arbitraire où des représentants d’un État sont impliqués », a-t-elle insisté.  « Je ne sais pas de qui il s’agit », a-t-elle ajouté, mais, au vu de la nature internationale du crime commis, de l’identité de la victime, du fait que plusieurs pays sont impliqués et que les assassinats de journalistes constituent une priorité majeure pour les États Membres, Mme Callamard a estimé qu’une « enquête internationale » permettrait d’avancer pour « refuser et rejeter » ce type d’exécution.  La Rapporteuse spéciale a suggéré, pour finir, la mise en place d’« un mandat pour passer en revue les éléments de preuve » collectés par la Turquie et l’Arabie saoudite.  À cette fin, elle a préconisé la constitution d’une équipe d’experts mandatée par la communauté internationale.

Déclaration liminaire

M. DAVID BOYD, Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, a présenté un rapport dans lequel il explique pourquoi, à ses yeux, il est temps que les Nations Unies reconnaissent le droit fondamental à un environnement sûr, propre, sain et durable.

Déplorant que les sociétés humaines soient la cause de dégradations environnementales sans précèdent et que l’humanité ait excédé un nombre de limites essentielles à la vie humaine et à la planète Terre, le Rapporteur spécial a notamment rappelé que les taux de dioxyde de carbone dans l’air s’élevaient à des niveaux sans précédent, entraînant les changements climatiques, et que le taux d’extinction des espèces était 100 fois supérieur à la normale.

L’Organisation mondiale de la Santé attribue près d’un quart de la charge mondiale de la morbidité à « l’exposition à des risques environnementaux dans l’air que nous respirons, dans l’eau que nous buvons, dans la nourriture que nous mangeons et dans les bâtiments dans lesquels nous vivons », a ajouté M. Boyd, alors que ceci pourrait être évité grâce à des lois, des politiques et des programmes plus sévères.

En 2012, a expliqué M. Boyd, le Conseil des droits de l’homme a créé ce nouveau mandat, qui était alors d’Expert indépendant, et placé à sa tête M. John Knox, son prédécesseur.  En 2015, le mandat a été promu au niveau de Rapporteur spécial et encore étendu en 2018.  Il a, à ce propos, noté qu’à l’époque de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, les mots « changements climatiques », « diversité biologique » et « fardeau environnemental » n’existaient pas.  Et pourtant, aujourd’hui les systèmes écologiques, la diversité biologique et les conditions de la planète, « qui sont les fondations vitales de l’existence humaine » connaissent un stress sans précédent.  « Notre dépendance à un environnement sain ne fait plus débat » a-t-il constaté.

M. Boyd a expliqué que son prédécesseur et lui-même étaient d’accord pour dire qu’il y avait un manque dans le système international des droits de l’homme et qu’il était temps que les Nations Unies reconnaissent le droit fondamental des individus à vivre dans un environnement sûr, propre, sain et durable; ce droit réunissant tous les critères établis par l’Assemblée générale régissant la proclamation de droits additionnels.  Il a fait observer que si l’ONU n’avait pas encore reconnu ce droit, certains États Membres l’avaient déjà fait et qu’il était désormais inscrit dans la Constitution de plus de 100 pays.

Pour le Rapporteur spécial, le test ultime dans l’évaluation du droit à un environnement sain consiste à savoir si ce dernier contribue à des individus et des écosystèmes sains.  Il estime à cet égard que les preuves sont sans appel, comme le montrent de nombreuses études qui concluent que la reconnaissance de ce droit aurait un impact positif direct sur les performances environnementales ainsi que sur la qualité de vie des populations les plus vulnérables.

M. Boyd a ensuite énuméré quatre approches que l’Assemblée générale pourrait utiliser pour reconnaître le droit à un environnement sain.  La première consiste en un nouveau traité international, tel que le Pacte mondial introduit par la France, l’année dernière, et qui est en cours de discussion.  La seconde serait le développement d’un protocole additionnel à un traité déjà existant tel que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.  La troisième approche serait d’adopter un nouveau pacte international pour compléter le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  Enfin, l’Assemblée générale pourrait adopter une résolution se concentrant sur le droit à un environnement sain, comme elle l’a fait pour les droits à l’eau et à l’assainissement en 2010.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. David Boyd, le Costa Rica, qui s’est présenté comme un pays confronté à de grands défis en matière environnementale, a rappelé qu’il avait déjà reconnu au niveau constitutionnel le droit à un environnement sain et équilibré et avait en outre lancé, en septembre, une initiative qui vise à promouvoir l’égalité des sexes et des droits en accord avec l’environnement.  Dans ce cadre, il aimerait savoir quels sont les avantages de reconnaître le droit à un environnement sain.  La Suisse encourage le Rapporteur spécial à présenter une analyse de la mise en œuvre des législations nationales sur la question et aimerait des précisions sur l’analogie faite dans le rapport avec le droit à l’eau potable et à l’assainissement.

L’Union européenne prête une grande importance à la promotion de tous les droits de l’homme, notamment dans ses politiques environnementales.  Ses États membres participent activement à la protection de l’environnement et ont accédé à une convention qui exige des parties qu’elles fournissent des informations à l’examen de ce droit.  L’Union européenne est disposée à participer au débat en vue d’une reconnaissance universelle du droit à un environnement sain, mais estime qu’à court terme, s’engager sur la voie d’une déclaration juridiquement contraignante ne serait pas l’idéal.  Parmi les options proposées dans le rapport, quelle serait la plus réaliste?  La France a rappelé sa proposition de texte universel et général sur la protection de l’environnement et estime qu’il pourrait ouvrir la voie à un possible pacte mondial sur l’environnement.  Elle participera aux travaux en mettant un environnement sain au cœur de ses priorités.  Elle voudrait aussi savoir quelles sont les différences entre les pays ayant intégré le droit à un environnement sain dans leur droit interne et si un instrument juridiquement contraignant pourrait contribuer à une protection effective de ce droit.

La Slovénie a relevé que beaucoup de travail a été effectué par le mandat et s’est félicitée que le dernier rapport présente des principes cadres reflétant l’importance des droits de l’homme dans le contexte de l’environnement.  Elle aimerait que le Rapporteur spécial explique comment il compte s’appuyer sur le travail effectué à Genève et à New York et quelles sont les priorités de son mandat.

La Fédération de Russie a souligné qu’un environnement sain est important pour l’exercice d’une large gamme de droits de l’homme et qu’y porter atteinte constitue une entrave aux droits à la vie, à la santé, à l’eau, à la culture et au développement.  Mais, ajoute-t-elle, il faut aussi renforcer les obligations en matière de préservation de la nature, sur la base du développement durable.  La Fédération de Russie estime en outre que le mandat de M. Boyd doublonne avec de nombreux mécanismes et organismes des Nations Unies.  Elle pense qu’il faut faire montre de prudence au sujet du projet de déclaration mondiale et comprendre la différence entre le document proposé et ce qui existe déjà.

Réponses

Dans ses réponses, M. DAVID BOYD a souligné les avantages de la reconnaissance du droit à un environnement sain au sein de l’Assemblée générale.  Nous avons une expérience de plus de 40 ans et cela a permis la mise en place de législations robustes et de démontrer leur efficacité, notamment à travers une réduction des gaz à effet de serre, a-t-il plaidé.  Certes, il ne s’agit pas d’un droit de l’homme nouveau puisque le Portugal a été le premier pays à l’introduire dans sa Constitution, suivi de l’Espagne et par la suite de plusieurs autres pays.  Mais pour le Rapporteur spécial, reconnaître ce droit aura des incidences positives sur la vie quotidienne des populations.  Quant aux actuels accords multilatéraux, ils permettent de consolider et d’harmoniser les législations nationales et d’intégrer le concept des droits de l’homme à l’ensemble des accords liés à cette problématique.

S’agissant de l’avenir de son mandat, M. Boyd a indiqué qu’il entendait poursuivre sur la voie de son prédécesseur, notamment son action sur les procédures.  Il a précisé qu’il présenterait, en 2019, au Conseil des droits de l’homme un premier rapport consacré à la pollution de l’air.  Il compte aussi se pencher sur l’approche genre, identifier les bonnes pratiques et aborder la défense des défenseurs des droits de l’homme en matière de protection de l’environnement.

M. Boyd a enfin dit avoir noté, dans le cadre d’analyses et d’étude, que les États qui ont intégré le droit à un environnement sain dans leur Constitution avaient connu des avancées remarquables en matière d’environnement.  Il a rappelé qu’il avait consacré un livre à cette question, avant de conclure en qualifiant de de lacune l’absence d’un droit mondial à un environnement sain.

Déclaration liminaire

M. BASKUT TUNCAK, Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux, a présenté un chiffre alarmant: plus de deux millions de travailleurs meurent chaque année de maladies professionnelles, dont près d’un million dû uniquement à l’exposition toxique.

L’exploitation des travailleurs peut revêtir des formes multiples, a expliqué le Rapporteur spécial, qui évoque cependant dans son rapport cette forme « particulièrement cruelle » qu’est l’exposition à des substances toxiques.  D’ici la fin de mon intervention liminaire -une dizaine de minutes- « environ 20 travailleurs seront morts prématurément à cause de ces expositions », a lancé M. Tuncak.

Les travailleurs ne sont toutefois pas les seuls à être exposés à des substances toxiques.  Aujourd’hui, une grande partie du monde se trouve « du mauvais côté, dans un fossé toxique », a expliqué le Rapporteur spécial.  L’exposition à la pollution est la plus grande source de décès prématurés dans les pays en développement, a-t-il ajouté, citant des estimations.  Elle tue plus de personnes que le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme réunis.  De fait, a encore fait observer le Rapporteur spécial, cette problématique demeure une crise de santé publique qui touche tous les pays, des plus riches aux moins industrialisés.

Les pédiatres décrivent aujourd’hui les enfants comme nés « pré-pollués » en raison de leur exposition très tôt à un cocktail de substances incontestablement toxiques, dont beaucoup ne seront démontrées que des années plus tard, a poursuivi M. Tuncak.  Or, cette « pandémie silencieuse » de maladies qui cause incapacités et décès prématurés est maintenant généralisée, en grande partie à cause de l’exposition des enfants pendant les périodes sensibles de leur développement.

Les maladies et les incapacités résultant de l’exposition à des substances toxiques sont cruelles, a poursuivi le Rapporteur spécial, citant les cancers ou encore la suffocation et les maladies respiratoires, sans parler des supplices psychologiques subis par la famille.  Il s’est élevé, à cet égard, contre le comportement scandaleux de certains États et entreprises, qui déploient des « efforts inimaginables pour nier » les effets sur la santé des expositions.  Parfois, dit-il, ils iront jusqu’à accuser les victimes elles-mêmes, d’avoir mal compris la notice qui parfois est libellée en langue étrangère.

Pour M. Tuncak, le plus odieux est qu’il existe presque toujours des alternatives pour prévenir ou minimiser les expositions.  Des solutions à ces abus et violations des droits de l’homme sont disponibles si les États décident de contraindre les entreprises à les adopter.

Malheureusement, au sein de la grande majorité des pays, les efforts déployés à cet égard sont manifestement insuffisants.  Le Rapporteur spécial a cité quelques cas illustrant ces faits portés à son attention ces dernières années.  Il a ainsi cité la vente de produits de consommation non testés en Corée, qui ont coûté la vie à des dizaines de nouveau-nés, de femmes enceintes et de personnes âgées.  En 2015, le nombre de décès reconnus était de 95, pour plus de 200 autres intoxiqués, mais les évaluations du nombre réel de victimes sont toujours en cours et, à ce jour, quelque 1 300 plaintes ont été enregistrées.

Le rapport mentionne également 40 000 décès prématurés, par an, dus à la pollution de l’air uniquement dans la ville de Londres et le combat d’une femme pour faire reconnaître que la pollution de l’air, qui dépasse de loin les exigences de l’Union européenne et les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a été derrière la cause du décès de sa fille de 9 ans.

Le Rapporteur spécial a également mentionné le sort tragique des familles Roms, Ashkali et égyptiennes au Kosovo, hébergées dans des camps des Nations Unies construits sur des terres toxiques entre 2009 et 2013.  Ces familles ont encore du mal à exercer leur droit à un recours effectif, a-t-il fait remarquer.  Aucun État Membre n’a contribué au fonds fiduciaire des Nations Unies créé il y a un an.

Pour M. Tuncak, ce ne sont là que quelques exemples parmi des dizaines, qui concernent des secteurs variés allant des industries extractives à la production de produits chimiques.

M. Tuncak a qualifié en conclusion de « formidable opportunité » les négociations mondiales en cours visant à élaborer le cadre mondial « post 2020 » pour les produits chimiques et les déchets toxiques.  Pour lui, c’est l’occasion de conclure un accord mondial fort pour améliorer la santé humaine en prévenant et en minimisant les expositions toxiques au niveau mondial.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. Baskut Tuncak, l’Union européenne s’est dite d’accord pour reconnaître la situation des travailleurs exposés aux produits et déchets dangereux.  Dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’objectif 8 vise à garantir un travail décent pour tous, a-t-elle rappelé, tout en se disant consciente des risques que les produits et déchets dangereux font courir à l’environnement et à la santé.  Se disant favorable à l’objectif du Rapporteur spécial de lancer un dialogue sur les obligations de toutes les parties, l’Union européenne lui a demandé ce qui pourrait être fait pour protéger les travailleurs de ces conditions de travail dangereuses.  Elle a aussi voulu avoir des exemples de bonnes pratiques s’agissant des recours en cas d’entraves aux droits de l’homme.

Le Japon a souhaité rectifier certains éléments du rapport de M. Tuncak concernant l’accident nucléaire de Fukushima-Dairi.  Le Rapporteur spécial n’a pas pris en compte les réponses du Japon s’agissant du risque radioactif persistant à Fukushima, a fait valoir la délégation, assurant que le pays continuait de fournir une aide au logement aux évacués, ces derniers étant libres de rentrer chez eux si telle est leur volonté.  Le Gouvernement ne force personne, a insisté la délégation.  Quant aux doses radioactives admissibles, il semble y avoir une incompréhension.  Le Gouvernement du Japon poursuit ses efforts pour atteindre l’objectif d’un millisievert.  Le Japon reproche au Rapporteur spécial d’avoir diffusé des informations incorrectes et porté atteinte à la réputation de Fukushima.

Réponses

Dans ses réponses, M. BASKUT TUNCAK a insisté sur l’importance d’informer les travailleurs sur les substances qu’ils manipulent: « ils doivent savoir à quelle substance ils sont exposés ».  Concernant les substances chimiques toxiques utilisées dans l’industrie, certaines ont été considérées comme sûres pour l’être humain, mais d’autres n’ont pas été testées à ce jour, alors que des travailleurs, y compris des femmes, continuent d’y être exposés.  S’agissant d’actions concrètes dans l’évaluation de ces substances, le Rapporteur spécial a salué l’action de certains pays de l’Union européenne qui ont entamé une telle évaluation.

Pour ce qui est de donner son consentement avant l’utilisation de certaines substances, M. Tuncak a répondu qu’il était difficile à un travailleur de condition modeste, dont l’unique besoin est de nourrir sa famille, de le refuser si on le lui demandait.  Quant au recours, la meilleure pratique consiste à établir un lien de cause à effet, a estimé le Rapporteur spécial.  À cet égard, le cas de l’amiante est riche en enseignements.

M. Tuncak a par ailleurs invité le Japon à appliquer scrupuleusement la recommandation de la Commission internationale de protection contre les radiations (CIPR), notamment pour protéger les femmes et enfants exposés aux radiations lors de la catastrophe de Fukushima.  Il a, pour finir, repris à son compte les appels à une reconnaissance universelle d’un environnement propre, sain et durable car lors de ses visites sur le terrain, « cela lui a semblé ne pas être un droit mais plutôt un privilège ».

Déclaration liminaire

M. RUDDY JOSÉ FLORES MONTERREY, Rapporteur-Président du Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée sur une déclaration des Nations Unies relative aux droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales, a présenté le rapport de la cinquième session de son organe au Conseil des droits de l’homme.  Ce Groupe de travail, a-t-il précisé, a été constitué pour négocier, conclure et soumettre au Conseil un projet de « Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales ».

Au cours de la cinquième session, qui s’est tenue du 9 au 13 avril, la version révisée du projet de déclaration a été négociée dans un environnement constructif, inclusif et transparent, a-t-il indiqué, ajoutant que, dans une déclaration liminaire, la Haute-Commissaire adjointe aux droits de l’homme avait souligné qu’il était urgent que le Groupe de travail achève ses travaux afin de répondre au manque de protection qui touche plus d’un milliard de personnes.  Soulignant que les petits agriculteurs fournissent une grande partie de la nourriture consommée localement (80% en Asie et en Afrique subsaharienne, alors que 80% de la population mondiale souffrant de la faim vit dans des zones rurales), elle a jugé que la seule façon de les inclure était de ne jamais les laisser pour compte, a rapporté M. Flores Monterrey en la remerciant.

Outre le résumé des discussions, le rapport contient en annexes les propositions spécifiques reçues dans les délais convenus, a indiqué M. Flores Monterrey.  Dans ses conclusions, le Groupe de travail a exprimé ses préoccupations concernant la situation des droits de l’homme des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.  Il a reconnu leurs contributions à la lutte contre la faim, à la préservation et à l’amélioration de la biodiversité, soulignant la nécessité de respecter, promouvoir, protéger et réaliser leurs droits fondamentaux.  Les recommandations comprennent la présentation pour approbation du projet de déclaration à la trente-neuvième session du Conseil des droits de l’homme, tenue en septembre dernier, conformément au mandat du Groupe de travail, a précisé le Président-Rapporteur.

En vertu du mandat donné et sur la base des propositions de texte reçues et des dizaines de consultations informelles tenues avec toutes les parties intéressées, la présidence a distribué une version révisée du projet de déclaration aux missions permanentes en août.  Cette version révisée cherchait à intégrer les différents points de vue présentés, tout en maintenant l’objectif de la Déclaration de répondre au mandat confié.

Le Président-Rapporteur s’est félicité que, le 28 septembre, le Conseil des droits de l’homme ait adopté la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales, par sa résolution 39/12.  Cette adoption historique est, selon lui, la reconnaissance de six années de négociations constructives, inclusives et transparentes au sein du Groupe de travail intergouvernemental.  « C’est avant tout l’expression de la volonté internationale de promouvoir l’égalité des droits et la dignité des personnes et des communautés en situation de vulnérabilité, en particulier de celles qui nous fournissent de la nourriture dans le monde », a-t-il soutenu, ajoutant que, dans sa résolution, le Conseil des droits de l’homme recommandait à l’Assemblée générale d’adopter la Déclaration et invitait tous les gouvernements, organisations internationales et autres parties concernées à la diffuser et à en promouvoir le respect universel.

« Protéger les droits des personnes qui vivent et travaillent dans les zones rurales, c’est protéger la principale source de nourriture dans le monde, c’est protéger la biodiversité dont dépendent les systèmes alimentaires, c’est protéger les emplois et les moyens de subsistance de millions de familles, c’est promouvoir la durabilité environnementale, la résilience et l’adaptation aux changements climatiques, et surtout promouvoir l’égalité des droits », a-t-il conclu.

Dialogue interactif

Dans le cadre du dialogue avec M. Ruddy José Flores Monterrey, la Bolivie a souligné que les paysans étaient essentiels pour assurer la sécurité alimentaire, lutter contre les changements climatiques et protéger la biodiversité.  La Déclaration sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales est le produit de plusieurs années de travail et d’un consensus entre les États, les organisations intergouvernementales, les organisations non gouvernementales, la société civile et les institutions nationales des droits de l’homme, a-t-il souligné.  Pour la Bolivie, la Déclaration est peut-être une étape significative dans la reconnaissance de l’apport des paysans à l’humanité.  C’est aussi une excellente occasion de défendre l’égalité des droits.  La Bolivie présentera un projet de résolution portant sur cette Déclaration au cours de la session. 

Observant que 90% des personnes qui connaissent la pauvreté extrême vivent en zones rurales et que la majorité d’entre elles sont des paysans, Cuba a encouragé les différentes parties à contribuer au processus en faveur de la reconnaissance des droits des paysans.  Cuba salue l’adoption par le Conseil des droits de l’homme de la résolution 39/12, dont il est coauteur, et encourage les États Membres à apporter leur soutien à la Déclaration sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

L’Indonésie a indiqué qu’assurer les moyens de subsistance des paysans et des personnes vivant dans les zones rurales constituait une priorité nationale.  C’est pourquoi le pays s’est porté coauteur de la résolution sur ce thème adoptée l’an dernier au Conseil des droits de l’homme.  Le Gouvernement a aussi contribué au projet de déclaration à Genève, lequel est en phase avec ses législations et stratégies nationales.  L’Indonésie souligne, d’autre part, que sa Constitution dispose que les terres, les eaux et les ressources naturelles doivent relever de l’État et bénéficier aux populations.  En dépit de son appui à la Déclaration, l’Indonésie a dit vouloir examiner encore la définition des droits énoncés et la nature évolutive de certains éléments. 

L’Afrique du Sud a indiqué avoir mis en place de nombreux programmes et stratégies pour soutenir sa population paysanne et assurer la sécurité de l’emploi des personnes vivant en zones rurales.  Elle a par ailleurs reconnu que la question de la propriété foncière est essentielle pour le développement socioéconomique de tous les pays.  C’est pourquoi l’Afrique du Sud a pris en compte dans sa Constitution la question de l’appropriation des terres afin de rendre justice aux paysans qui ont contribué au développement économique du pays.  Elle appuie la Déclaration.

L’Union européenne s’est déclarée vivement préoccupée par les inégalités persistantes entre les zones rurales et urbaines.  Elle a aussi réaffirmé son attachement à respecter les droits de l’homme, quel que soit le lieu de résidence et de travail.  Le plein exercice des droits de l’homme pour les personnes en zones rurales constitue une priorité de son action, a-t-elle assuré.  Toutefois, elle estime que des problèmes persistent dans le texte de la Déclaration, notamment la création de nouveaux droits humains ou collectifs.  Dans ce contexte, l’Union européenne a demandé à M. Flores Monterrey quels seraient les meilleurs moyens de dialoguer avec les paysans et personnes vivant dans les zones rurales afin d’améliorer la productivité agricole et contribuer à la sécurité alimentaire.

Réponses

Dans ses réponses, M. RUDDY JOSÉ FLORES MONTERREY a expliqué que, dans la résolution 39/12 du Conseil des droits de l’homme, des « dispositions ont été prévues pour adapter la Déclaration au développement social et à l’ordre juridique national ».  Grâce à ce processus, on est parvenu à un document équilibré, a-t-il estimé, en voyant la preuve lors de l’adoption du texte par le Conseil des droits de l’homme.

Pour M. Flores Monterrey, les paysans et les travailleurs en zones rurales constituent les groupes les plus vulnérables, notamment les femmes et les filles.  Ils méritent le soutien de la communauté internationale et cette Déclaration le leur apporte, a-t-il insisté.  Il s’est félicité que le processus ait été ouvert, car cela a permis d’intégrer diverses propositions de pays et groupes régionaux à même de garantir que les différentes visions seraient compatibles.  Cette approche a été reconnue à Genève au moment de l’adoption du texte, a-t-il insisté.  La Déclaration marque une étape, a-t-il ajouté, avant d’appeler à sa mise en œuvre au niveau national.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission examine la question des armes classiques, ses chiffres alarmants et ses quelques progrès

Soixante-treizième session,
18e séance – matin
AG/DSI/3610

La Première Commission examine la question des armes classiques, ses chiffres alarmants et ses quelques progrès

Avant de reprendre leurs débats sur les armes classiques, d’en reconnaître les chiffres alarmants mais aussi les quelques progrès, la Première Commission chargée du désarmement et de la sécurité internationale a d’abord rejeté, par 77 voix contre, 34 voix pour et 12 abstentions, une motion d’ordre des États-Unis visant à ne pas examiner un projet de résolution russe sur le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) duquel ils envisagent de se retirer.

Cette question tranchée, les délégations ont pu s’exprimer sur les armes classiques.  La Lettonie a souligné qu’aujourd’hui 90% des pertes en vies humaines dans les conflits sont désormais enregistrées parmi les populations civiles alors qu’au début du XXe siècle c’était parmi les soldats.  Chaque année, les armes conventionnelles tuent 500 000 personnes, dont 70 000, en zones de conflit, a chiffré la Lettonie.

Au premier rang des accusés, les armes légères et de petit calibre (ALPC). Leur imputant plus de 70% des décès chez elle, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a souligné qu’elle n’en produit pas ni n’en exporte.  La Jamaïque a imputé cette situation préoccupante à la porosité des frontières des pays comme le sien et à leur emplacement géographique.  Les pays en développement n’ont pas les ressources suffisantes pour lutter contre des réseaux criminels aux moyens sophistiqués et lourds, a prévenu le Honduras, qui estime qu’une grande partie du désarmement passe par la lutte contre ce fléau.  La balle est dans le camp des grands exportateurs d’armes, ont ajouté la CARICOM et le Honduras, en appelant au renforcement de la coopération internationale.

Quelques pays ont souligné les progrès réalisés ces dernières années: au nom des pays nordiques, la Finlande s’est félicitée de ce que la Conférence d’examen du Programme d’action des Nations Unies sur les ALPC ait mis en exergue la question de la participation des femmes à la réalisation des objectifs convenus.  Comme l’a noté le Canada, il est essentiel de donner aux femmes les moyens de s’engager comme partenaires à part entière dans l’élaboration de politiques et de programmes en matière de non-prolifération, de contrôle des armes et de désarmement.

Le Honduras a également apprécié que le problème spécifique des munitions y ait été reconnu, même si la Suisse a noté que cette question ne faisait visiblement pas l’unanimité.  Les États-Unis souhaitant que la communauté internationale reste concentrée sur les efforts à faire sans pour autant créer des exigences inatteignables.  Ils ont, par ailleurs, salué les résultats du Groupe intergouvernemental d’experts sur les systèmes d’armes létales autonomes, une discussion couronnée de succès et productive « malgré l’action de certains États qui ont essayé de politiser les débats ». 

Également ravie par la teneur des discussions, l’Union européenne a jugé que « les êtres humains doivent être aux commandes lorsque sont prises des décisions qui touchent à la vie et à la mort ».  La Finlande a paru en revanche peu convaincue de l’opportunité de mener à ce stade des négociations sur des normes juridiquement contraignantes.  Il nous manque, a-t-elle argué, une définition claire de ces armes pour avancer.  Cependant, elle a estimé que les mines sont un des domaines sur lesquels on peut progresser.

La mise en œuvre de la Convention sur les mines antipersonnel a en effet reçu quelques éloges même si l’Irlande a relativisé ce constat avec des chiffres alarmants. Élargissant le débat aux armes explosives en zones peuplées, elle a rappelé, qu’en 2017, 42 000 personnes ont été tuées ou blessées par ces dispositifs meurtriers et aveugles.  Non seulement 3 victimes sur 4 étaient des civils, soit une augmentation de 38% en un an, mais ce taux passe à 92% lorsque ces armes explosent dans des zones densément peuplées.  Quand la communauté internationale ne peut prévenir un conflit, qu’elle travaille au moins à la protection des civils, s’est-elle impatientée.

Face à ces chiffres terribles, la Suisse a souligné que les engins explosifs improvisés (EEI) activés par les victimes relèvent de la définition des mines antipersonnel.  À ce titre, la Convention citée plus haut fournit, selon elle, un cadre important pour faire face aux défis que posent ces engins et aux conséquences de leur utilisation.

Tous ces défis ont poussé certains représentants à s’inquiéter du financement des instruments multilatéraux.  La Lettonie s’est dite préoccupée par la chute des contributions obligatoires au Traité sur le commerce des armes.  Les États-Unis ont rappelé qu’ils sont toujours le premier pays en termes d’aide à la destruction des armes classiques, avec 3,2 milliards de dollars depuis 1993. L’Union européenne a précisé qu’elle entend contribuer à la lutte antimines dans le monde, en finançant les activités de déminage, de sensibilisation et d’aide aux victimes à hauteur de 600 millions d’euros.

DÉBAT THÉMATIQUE SUR L’ESPACE EXTRA-ATMOSPHERIQUE ET LES ARMES CONVENTIONNELLES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Motions d’ordre

Les États-Unis ont présenté une motion d’ordre visant à ce que la Commission n’examine pas le projet de résolution relatif au Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) qu’a soumis la Fédération de Russie.  Les États-Unis ont expliqué leur motion par le fait que cette dernière n’a soumis son texte qu’hier soir, soit plus d’une semaine après la date butoir du 18 octobre, sans compter qu’elle n’a pas hésité à le fuiter à la presse russe avant même que les membres de la Commission n’en soient informés, un « précédent regrettable ».

C’est l’évolution de la situation en ce qui concerne le Traité FNI qui nous a contraints à réagir, s’est expliquée la Fédération de Russie, face « à cet événement critique ».  Elle a rappelé que, le 20 octobre, le Président Donald Trump a jugé « possible » que son pays se retire du Traité FNI et annoncé son intention de renforcer l’arsenal nucléaire américain.  La communauté internationale, a dit craindre la Fédération de Russie, est donc confrontée à une nouvelle réalité, celle « moins sûre et moins stable » d’une nouvelle course aux armements nucléaires.  Le retrait des États-Unis du Traité aurait un impact sur la sécurité d’au moins 40 États européens, voire sur la sécurité internationale.  C’est devant ce « « cas de force majeure » que la Fédération de Russie s’est dite obligée de réagir pour prévenir des « conséquences apocalyptiques ». 

Le projet de résolution, a-t-elle précisé, se fonde sur une série de résolutions adoptées à l’Assemblée générale pour assurer la viabilité du Traité FNI.  Le texte vise la poursuite des consultations entre la Fédération de Russie et les États-Unis afin d’aplanir les préoccupations mutuelles dans le cadre du Traité.  Nous serions alors en mesure, a plaidé la Fédération de Russie, de préserver le Traité et de renforcer la responsabilité des deux parties dans sa mise en œuvre.  La préservation du Traité, a-t-elle insisté, est une condition sine qua non des progrès vers la réduction des arsenaux nucléaires.  La Fédération de Russie a donc appelé les États à appuyer son projet de résolution, se disant prête à poursuivre les consultations pour préciser sa position ainsi que les orientations et objectifs du texte.

Le Président de la Commission peut-il se prononcer sur notre motion d’ordre? se sont impatientés les États-Unis, qui ont invoqué l’article 113 du Règlement intérieur de l’Assemblée générale: « Au cours de la discussion d’une question, un représentant peut présenter une motion d’ordre et le Président statue immédiatement sur cette motion conformément au Règlement.  Tout représentant peut en appeler de la décision du président.  L’appel est immédiatement mis aux voix et, si elle n’est pas annulée par la majorité des membres présents et votants, la décision du président est maintenue. Un représentant qui présente une motion d’ordre ne peut, dans son intervention, traiter du fond de la question en discussion. »

Si j’ai bien compris, a demandé le Président, les États-Unis demandent que la Commission se prononce contre l’examen du projet de résolution russe?  Arguant de l’unanimité de tous les membres du Bureau, du Règlement intérieur et de l’importance du consensus, le Président a proposé d’accorder un peu plus de temps pour discuter de cette question et d’y revenir plus tard dans la journée ou demain matin.  Nous demandons une mise aux voix immédiatement, ont rétorqué les États-Unis.  Nous demandons, ont-ils précisé, que la Commission reconnaissance le dépassement de la date butoir pour la présentation des projets de résolution.  À moins qu’une délégation ne demande un vote, a avoué le Président, je préférerais poursuivre les discussions.  Nous demandons un vote, ont répété les États-Unis.

Après avoir consulté le Conseiller juridique, le Président a donné lecture de l’article 113 du Règlement intérieur.  Quelles seraient les conséquences de l’adoption de la motion d’ordre américaine? s’est inquiétée la Fédération de Russie.  Nous parlons, a-t-elle insisté, de sécurité internationale, une question qui relève de la compétence de l’ONU.  Nous allons, a-t-elle prévenu, « voter sur l’avenir du monde ».  « Les États-Unis veulent sortir du Traité et augmenter leur arsenal nucléaire et, nous, nous jouons au jeu du Règlement intérieur? » s’est indignée la Fédération de Russie « très émue et très frappée » par la situation.  Nous sommes, s’est-elle alarmée, « au bord d’une poudrière » qui pourrait enflammer l’Europe et le monde.  On ne peut pas opposer à une telle menace le Règlement intérieur.  Nous sommes absolument opposés à cette approche et demandons à tous les États « responsables » d’appuyer notre proposition, a plaidé la Fédération de Russie.

Le Président a tout de même appelé « au calme » et rappelé que « rester civilisé fait partie de la profession de diplomate ».  Les questions urgentes de sécurité relèvent du Conseil de sécurité, ont martelé les États-Unis, répétant que nous sommes ici devant une date butoir largement dépassée.  Votons sur la recevabilité ou l’irrecevabilité du projet de résolution russe, se sont-ils, une nouvelle fois, impatientés.

Ma proposition, a répété, à son tour, le Président, est de donner plus de temps aux discussions.  Pour examiner la motion d’ordre? s’est demandé l’Allemagne.  De combien de temps parlez-vous?  La précision est venue du Secrétariat de la Commission: ceux qui votent « oui », votent pour la recevabilité du projet de résolution russe, et ceux qui vote « non », votent pour donner plus de temps aux discussions sur ladite recevabilité.  Le Président veut donc un peu plus de temps pour prendre une décision sur la motion d’ordre américaine? ont dit comprendre les Pays-Bas.

Mise aux voix, la motion des États-Unis sur l’irrecevabilité du projet de résolution russe a été rejetée par 77 voix contre, 33 voix pour et 12 abstentions.  La Commission a donc suivi la proposition de son Président de laisser du temps aux discussions en vertu de l’article 116 du Règlement intérieur qui dispose : « Au cours de la discussion d’une question, un représentant peut demander l’ajournement du débat sur la question en discussion.  Outre l’auteur de la motion, deux orateurs peuvent prendre la parole en faveur de l’ajournement, et deux contre, après quoi la motion est immédiatement mise aux voix. »

Déclarations

Au nom du Groupe des États d’Afrique, Mme AAHDE LAHMIRI (Maroc) s’est dite profondément préoccupée par le commerce, le transfert et le flux illicites des armes légères et de petit calibre et de leur présence « excessive et incontrôlée » dans de nombreuses régions du monde, compte tenu, en particulier, de leurs conséquences socioéconomiques innombrables.  Elle a salué le succès en juin dernier, de la troisième Conférence d’examen du Programme d’action contre les armes légères et de petit calibre et appelé les États à honorer leurs obligations.  Malgré l’éventail des initiatives régionales, la représentante a souligné que l’aide et la coopération internationales demeurent des ingrédients essentiels à une bonne mise en œuvre du Programme d’action.  Appelant les pays développés à octroyer une meilleure aide technique et financière, elle a exhorté tous les États à mettre en œuvre le Traité sur le commerce des armes, et ce, d’une manière équilibrée qui réaffirme leur droit souverain d’acquérir, de fabriquer d’exporter, d’importer et de posséder des armes classiques pour leur défense et leurs besoins de sécurité, conformément à la Charte des Nations Unies.

Au nom des pays nordiques, M. JARMO VIINANEN (Finlande) a appelé à mieux inclure les femmes dans les prises de décisions concernant les armes légères et de petit calibre (ALPC).  Il n’y a que des avantages à réaliser l’égalité entre les sexes, a-t-il estimé.  Il s’est dit ravi que la Conférence d’examen du Programme d’action des Nations Unies sur les ALPC ait mis en exergue la question de la participation des femmes à la réalisation des objectifs convenus.  Le contrôle des flux d’armes est une question de désarmement mais aussi de développement, a souligné le représentant.  S’il a reconnu que la réglementation du commerce des armes n’est pas tâche facile, il a assuré que les groupes de travail se concentrent sur des questions pratiques qui auront des répercussions concrètes.  Le Traité sur le commerce des armes doit être mis en œuvre d’un point de vue pratique, a pressé le représentant, et le fonds de contributions volontaires pourrait être utile, à cet égard.  Rappelant que le Traité propose de créer une plateforme transparente, il a encouragé les États qui ne l’ont pas encore fait à le ratifier.

Le représentant a ensuite jugé fructueuses les discussions sur les armes autonomes létales.  Beaucoup reste à faire sur ce sujet émergent, a-t-il tout de même reconnu.  Nous ne sommes pas convaincus que les négociations sur des normes juridiquement contraignantes soient une bonne idée à ce stade, a-t-il cependant jugé.  Pour le moment, il nous manque une définition claire de ces armes pour avancer sur cette question.  Il s’est, enfin, dit préoccupé par les rapports sur l’usage des armes à sous-munitions et les dégâts qu’elles provoquent sur les populations civiles.  Un important travail doit être fait pour débarrasser le monde de ces mines, a-t-il ajouté.  Quand les processus de désarmement et de commerce semblent polarisés, celui sur les mines est l’un des domaines sur lesquels nous pouvons avancer, a-t-il conclu.  « Un monde exempt de ces mines est à notre portée. »

Au nom de la Communauté des Caraïbes, M. RUDOLPH MICHAEL TEN-POW (Guyane) a rappelé que sa région est confrontée à une prolifération illicite des petites armes et insisté sur le taux élevé de crimes qui sape la confiance dans les États.  Plus de 70% des décès sont liés aux armes à feu alors qu’il s’agit d’une région qui ne produit ni n’exporte des armes légères et de petit calibre (ALPC).  La CARICOM est un fervent défenseur du Traité sur le commerce des armes, qui permet de réguler le commerce des armes classiques et de s’attaquer aux détournements de ces armes vers des marchés illégaux.  L’objectif de ce Traité doit donc rester présent à l’esprit des États jusqu’à ce qu’il soit atteint.  S’agissant du transfert d’armes, ce sont les civils, a rappelé le représentant, qui payent le plus lourd tribut des conflits dans le monde.  Aussi, a-t-il appelé tous les États parties à la bonne foi et les États non parties à la lutte contre les transferts d’armes qui sont contraires au Traité.  Il a également insisté sur l’importance de l’universalisation du Traité et appelé les États qui ne l’ont pas fait à le ratifier au plus vite.

Toutes les discussions sur les ALPC seraient incomplètes sans la mention des munitions, a-t-il poursuivi, se félicitant de ce que la Conférence d’examen en tienne compte ainsi que des situations de violence.  Le représentant a exhorté les États à se concentrer sur les enjeux en constante évolution, notamment les répercussions des nouvelles technologies sur la fabrication de ces armes.  Il a également souligné le rôle particulier des femmes dans le désarmement, surtout dans la désescalade des tensions et auprès des communautés.  Les femmes, a-t-il rappelé, sont frappées de façon disproportionnée par la violence dans les conflits.  Le représentant a conclu en demandant que l’on se penche sur les processus de désarmement et que l’on évite de politiser les débats.

M. VIKTOR DVOŘÀK, délégué de l’Union européenne, a jugé que les flux illicites mal régulés d’armes contribuent aux conflits, favorisent les terroristes et ont des répercussions humanitaires et socioéconomiques.  Ils hypothèquent nos efforts conjoints en faveur des objectifs de développement durable. Le représentant s’est donc félicité des engagements internationaux sur la lutte contre les armes légères et de petit calibre.  Pour lui, les contrôles des transferts constituent un « défi majeur », mais il est possible de le faire au niveau des exportations.  « Notre échange d’informations joue un rôle majeur en ce sens », a-t-il jugé, en attirant l’attention sur l’exemple de l’Union européenne.  Il a donc appelé les États Membres de l’ONU à souscrire au Traité sur le commerce des armes qui, avec l’Instrument international de traçage et le Protocole facultatif sur les armes à feu, est un cadre qui évite les détournements illicites et renforce la paix et la sécurité.

Évoquant la Convention sur les mines antipersonnel, le représentant a vu là un bon exemple de contrôle multilatéral des armes.  Si les mines antipersonnel sont interdites dans 164 États, on voit, s’est-il alarmé, des mines improvisées dans beaucoup de pays, notamment pour empêcher le retour des réfugiés et des déplacés.  Le représentant a confirmé que l’Union européenne entend contribuer à la lutte antimines dans le monde, en finançant les activités de déminage, de sensibilisation et d’aide aux victimes à hauteur de 600 millions d’euros.  Le représentant s’est dit particulièrement préoccupé par les répercussions énormes des engins improvisés et a appelé à des mesures plus strictes, au niveau national, pour en barrer l’accès aux terroristes.  Il a conclu en saluant les efforts de sensibilisation de la communauté internationale aux discussions sur les armes classiques.  Il s’est notamment félicité des progrès enregistrés après la discussion des experts sur les armes autonomes létales.  « Les êtres humains doivent être responsables des décisions qui touchent à la vie et à la mort », a-t-il estimé.

Au nom d’une quarantaine de pays, Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a fait une déclaration sur les armes explosives en zones peuplées.  Elle a insisté sur la responsabilité de tous, dont les belligérants, de protéger les civils dans les conflits armés.  Les armes détruisent les infrastructures de base, altèrent les conditions de vie des populations à long terme et provoquent des déplacements de population, les rendant encore plus vulnérables.  Les répercussions à long terme de ces armes ont été détaillées dans les travaux de l’ONU, a souligné la représentante, qui a cité le dernier rapport sur la protection des civils dans les conflits dans lequel le Secrétaire général de l’ONU regrette une protection « faible » et appelle à agir d’urgence pour garantir le respect du droit international humanitaire.  Quand elle ne peut pas prévenir un conflit, la communauté internationale, a pressé la représentante, doit au moins travailler pour améliorer la protection des civiles.  En 2017, a-t-elle rappelé, 42 000 personnes ont été tuées ou blessées par des armes explosives et 3 victimes sur 4 étaient des civils, soit une augmentation de 38% en un an.  Quand des armes explosent dans des zones peuplées, 92% des victimes sont des civils, a martelé la représentante, devant des chiffres alarmants qui appellent à une réaction rapide.

Dans les situations de conflit, la question est toujours de savoir comment les règles du droit international humanitaire sont mises en pratique.  Il faut faire beaucoup plus et tous les États doivent appuyer des mesures pour renforcer la protection des civils, définir des normes et partager les politiques et les bonnes pratiques.  Toute initiative doit avoir pour objectif de renforcer la protection des personnes et des infrastructures civiles, a insisté la représentante.

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a regretté qu’aujourd’hui, 90% des pertes en vies humaines dans les conflits soient enregistrées parmi les populations civiles alors qu’au début du XXsiècle c’était parmi les soldats.  Les armes conventionnelles tuent 500 000 personnes chaque année, dont 70 000 en zones de conflit, a-t-il rappelé.  À cet égard, le représentant a souligné l’importance du désarmement dans le domaine des armes conventionnelles.  Son pays a d’ailleurs ratifié le Traité sur le commerce des armes le 2 avril 2014, soit un an après son adoption.  Réussir la mise en œuvre de ce Traité a été la priorité du Gouvernement letton, a déclaré le représentant, qui a souhaité partager son expérience nationale pour aider les autres pays à développer des systèmes de contrôle des exportations d’armes, efficaces et conformes aux normes internationales.  La Lettonie, a-t-il rappelé, a accédé à la présidence du Traité le 24 août dernier, avec un programme « ambitieux ».  Nous nous concentrerons en outre sur les questions de sexospécificité, a-t-il annoncé, avant de souligner que l’universalisation du Traité est la clef d’un monde sans la violence causée par la circulation illégale des armes.  Le représentant s’est dit préoccupé par la chute des contributions obligatoires car « l’efficacité du Traité dépend de la disponibilité des ressources ».  Il a appelé toutes les délégations à honorer leurs obligations financières et a déploré que le même problème touche la Convention sur l’interdiction de certaines armes classiques.

Mme IRMA ALEJANDRINA ROSA SUAZO (Honduras) a estimé qu’une grande partie du désarmement passe par la lutte contre les armes légères et de petit calibre dont son pays souffre au quotidien.  Le Congrès national s’apprête d’ailleurs à adopter une loi sur le port d’armes qui implique des règles beaucoup plus rigoureuses.  Il a, en outre, déjà identifié les grandes routes de trafic afin d’en renforcer le contrôle.  Dans le même temps, la justice pénale a été améliorée, notamment son aspect « prévention ».  De même une règlementation est en cours d’élaboration pour encadrer les activités du secteur privé.  En 2017, le Honduras a ratifié le Traité sur le commerce des armes et la Convention interaméricaine sur les armes à feu, a indiqué la représentante, qui a souligné le caractère « essentiel » de la coopération internationale, s’agissant du renforcement des capacités, du transfert des technologies et du partage des meilleures pratiques.  Les pays en développement, a-t-elle rappelé, n’ont pas les ressources suffisantes pour lutter contre des réseaux criminels aux moyens sophistiqués et lourds.

M. ROBERT WOOD (États-Unis) a estimé que la Convention sur certaines armes classiques est un instrument important.  Il a, à cet égard, salué les résultats du Groupe d’experts gouvernementaux sur les systèmes d’armes létales autonomes, une discussion couronnée de succès et productive « malgré l’action de certains États qui ont essayé de politiser les débats ».  Demandant la mise en œuvre du Programme d’action sur les armes légères et de l’Instrument international de traçage, il a considéré qu’on doit rester concentré sur les efforts à faire sans créer des exigences inatteignables.  Le représentant a reconnu qu’il reste beaucoup à faire pour réaliser les engagements pris, il y a 17 ans.  Il a assuré que les États-Unis continueraient à fournir une assistance financière et technique dans la destruction des armes classiques.  « Même s’il y a longtemps qu’on n’a pas vu de missiles portatifs à courte portée (MANPAD), la menace demeure, a-t-il prévenu. Il est important de contribuer à réduire cette menace qui pèse sur les aéroports internationaux. 

Le représentant a d’ailleurs rappelé que les États-Unis avaient contribué à détruire plusieurs dizaines de ces missiles et un nombre considérable de vecteurs.  Considérant que le Registre des armes classiques est un instrument important, il a demandé à tous les États d’y inclure leurs données sur le transfert d’armes légères et de petit calibre et sur les armes lourdes.  Il a finalement rappelé à la communauté internationale que les États-Unis sont toujours le premier pays en termes d’aide à la destruction des armes classiques, contribuant notamment au déminage des pays post conflit. Depuis 1993, nous avons versé la somme de 3,2 milliards de dollars pour la destruction des armes classiques, a-t-il chiffré.

Mme SABRINA DALLAFIOR (Suisse) a voulu que l’on ne remette pas en cause les concepts fondamentaux du droit international humanitaire dans les enceintes de l’ONU, en utilisant des formules ou un vocabulaire erroné.  Ce droit et les droits de l’homme doivent être respectés en toute circonstance.  Nous devons élaborer des mesures pratiques pour une meilleure mise en œuvre du droit international humanitaire, a-t-elle estimé.  L’urbanisation croissante des conflits et les effets directs qu’elle a sur la population et leurs infrastructures civiles soulignent la nécessité de l’approche sur deux axes: le respect par toutes les parties belligérantes des obligations internationales et la condamnation de toute violation; et l’adoption de mesures concrètes pour garantir le respect du droit international humanitaire dans les zones urbaines.  La représentante a aussi estimé que comme des engins explosifs improvisés (EEI) activés par les victimes relèvent de la définition des mines antipersonnel, la Convention sur l’interdiction de ces mines fournit aux États un cadre important pour faire face aux défis que posent ces engins et aux conséquences de leur utilisation.  Quant aux munitions, elle a souligné que la question mérite d’être traitée comme une problématique à part entière.  La mise sur pied d’un groupe d’experts gouvernementaux constituera une étape propice à une discussion spécifique. L’expérience a montré, a-t-elle ajouté, que la mise en œuvre de lignes directrices internationales existantes, telles que les directives techniques internationales sur les minutions, est essentielle.  Concluant sur les systèmes d’armes létales autonomes, la représentante s’est dite favorable à la proposition d’élaborer une déclaration politique qui renfermerait des principes clefs, donnerait une orientation aux futurs débats et ouvrirait la voie à de possibles mesures pratiques.

« Certains défendent l’idée que le Traité sur le commerce des armes est la solution pour mettre un terme à tous les flux illégaux d’armes classiques », a remarqué le représentant de l’(Égypte), M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN, qui a cité quelques lacunes.  Il a dénoncé un manque de définitions claires, ce qui sape son efficacité et l’expose aux abus.  Le Traité peut ainsi être utilisé pour des manipulations politiques et la sécurisation des monopoles sur le commerce des armes classiques, tout en ignorant la nécessité d’en barrer l’accès aux destinataires « non autorisés » comme les terroristes et les groupes armés illégaux.  Par conséquent, l’Égypte réitère son appel aux États parties au Traité pour qu’ils veillent à une mise en œuvre conforme à la Charte des Nations Unies et respectueuse du droit des États à assurer leur sécurité et leur légitime défense.

Rappelant que l’Égypte fait partie des pays qui ont le plus souffert des mines antipersonnel, puisque 20% des mines plantées pendant la Seconde guerre mondiale l’ont été sur le sol égyptien, le représentant a demandé une coopération internationale plus soutenue pour faire face à ce problème majeur.  Il a, en outre, souligné que ce n’est pas tant le manque de contrôle des exportations d’armes classiques ou le manque de sécurité des stocks qui pose problème, mais plutôt le fait que certains pays continuent d’approvisionner délibérément et de manière illicite les groupes terroristes et les groupes armés illégaux.  Ce phénomène exige une attention immédiate, a estimé le représentant, avant de demander aux Nations Unies de prendre des mesures concrètes.

La promotion de la paix et de la sécurité internationales dépend de notre capacité collective à reconnaître et à tenir compte des spécificités de genre en ce qui trait à la non-prolifération, au contrôle des armes et au désarmement, a souligné Mme KAYA DUNAWA-PICKARD (Canada).  Elle a rappelé que son pays est profondément engagé dans le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, comme en attestent le deuxième plan d’action national mais aussi l’organisation de discussions sur le désarmement au sein du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, à New York et à Genève, au printemps dernier, ainsi que la poursuite des discussions sur le renforcement des capacités, à Genève, cette année.  L’emploi d’une « optique féministe » sur le désarmement fournit des points de vue essentiels sur la manière dont les gouvernements peuvent prévenir et répondre à la violence et aux conflits et mieux soutenir les victimes.  Il est essentiel de comprendre, par exemple, la façon dont les armes légères sont utilisées pour perpétrer la violence faite aux femmes et aux filles. 

Le Canada est sensible à la manière dont les transferts illicites d’armes légères et de petit calibre peuvent aggraver les répercussions séxospécifiques de la violence armée.  Nous nous efforçons de tenir compte du risque de violence fondée sur le sexe dans nos évaluations du contrôle des exportations et d’étudier systématiquement ce risque dans nos politiques plus générales, a affirmé le représentant.  Afin de surmonter la discrimination enracinée et de réaliser des progrès, il est essentiel de donner aux femmes les moyens de s’engager comme partenaires à part entière dans l’élaboration de politiques et de programmes et dans les travaux concrets en matière de non-prolifération, de contrôle des armes et de désarmement.  Cette année, le Canada a inclus des dispositions dans sa résolution sur le traité d’interdiction de la production des matières fissiles, qui soulignent l’importance d’assurer l’inclusion véritable des femmes dans la négociation du traité futur, a conclu le représentant.

M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a estimé que l’universalisation des traités et instruments sur les armes classiques est la seule solution pour supprimer la menace à la paix et à la sécurité qu’elles posent.  Il s’est dit en faveur de l’adoption d’un cadre complémentaire au Traité sur le commerce des armes qui traiterait de la diminution des armes classiques existantes.  Il a souhaité que l’interprétation du droit à la légitime défense ne serve pas à justifier un réarmement ou une prolifération des armes classiques.  Demandant aux pays de favoriser la participation des femmes à cette lutte et de mettre sur un pied d’égalité les explosifs et les munitions dans leur cadre réglementaire, il a surtout insisté sur le besoin de prendre des mesures de renforcement de la confiance.  À ce titre, il a salué le rôle joué par la communauté internationale et la société civile.  Les engagements reposent sur la coopération internationale, a-t-il insisté, rappelant la nécessité de renforcer les ressources humaines, de disposer des ressources financières suffisantes et de bénéficier des technologies adéquates.  Il a jugé que cette Commission est un lieu d’échange des meilleures pratiques propres à renforcer la confiance entre les États.  Il a souhaité que les ressources allouées à la modernisation des arsenaux soient plutôt réaffectées vers la réalisation des objectifs de développement durable.

Frappée par l’impact dévastateur des armes classiques pas uniquement dans les situations de conflits armés, mais aussi dans des sociétés « comme la nôtre » où la violence armée a significativement augmenté, Mme DIEDRE NICHOLE MILLS (Jamaïque) a réitéré l’importance qu’il y a à ce que les discours reflètent cette dynamique.  Elle a rappelé que la Jamaïque, à l’instar des autres pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), n’est ni producteur ni importateur net d’armes classiques, ce qui ne l’empêche pas d’être de plus en plus vulnérable aux crimes violents et aux activités criminelles associées au commerce illicite de armes légères et de petit calibre, compte tenu de la porosité de ses frontières et de son emplacement géographique.  La Jamaïque s’est donc attelée à mettre en place des mesures législatives, politiques et opérationnelles pour contrecarrer la prolifération de ce type d’armes.  Une loi est en cours de préparation pour inclure de nouvelles dispositions, notamment rendre le traçage de ces armes obligatoire, y compris leur enregistrement et la capture de leur signature balistique.  La révision de la loi sur les armes à feu de 1967 offrira une base juridique à un registre national, alors qu’il est aussi prévu de mettre en place un comité national inter-agences et de créer une liste nationale de contrôle.  Un manuel relatif aux normes de marquage a également été établi. 

Un plan d’action national a été adopté, ainsi que d’autres mesures que la représentante a passé en revue, avant de rappeler que la Jamaïque continue de compter sur l’assistance de ses partenaires.  Elle a donc salué le soutien apporté aux pays de la région par le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, et a espéré qu’il sera doté des ressources nécessaires pour maintenir son assistance « à la lumière des dynamiques spécifiques au niveau de la sous-région ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La détermination du droit international coutumier entre « clarté » et « incertitude » devant la Sixième Commission

Soixante-treizième session,
22e & 23e séances – matin & après-midi
AG/J/3581

La détermination du droit international coutumier entre « clarté » et « incertitude » devant la Sixième Commission

La détermination du droit international coutumier a été l’un des principaux axes de discussion de la Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, au troisième jour d’examen des premiers chapitres thématiques du rapport* annuel de la Commission du droit international (CDI), les délégations estimant que ce rapport ne dissipe pas les « incertitudes » sur ce sujet.  Lors de cette séance très technique, de nombreux pays ont aussi salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI.

Le rapport de la CDI contient 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, sujet crucial, puisque la coutume est, avec les traités, l’une des deux sources essentielles du droit international.  Ces deux sources entretiennent d’ailleurs « une relation complexe et interactive », selon l’expression du délégué de Sri Lanka.  Son homologue de l’Afrique du Sud a en outre noté que le droit international coutumier est de plus en plus souvent invoqué devant les tribunaux, y voyant là la preuve que le droit international n’est pas le « domaine réservé » de quelques-uns.

Entrant dans les détails, le délégué de Sri Lanka a estimé que le projet de conclusion 11 qui établit dans quelle mesure une règle conventionnelle peut refléter une règle de droit international coutumier est une disposition « vitale » qui jette une certaine « clarté » sur cette relation.  Ce projet de conclusion sera d’une aide précieuse pour les praticiens afin de dissiper les ambiguïtés, a-t-il déclaré.

Même son de cloche du côté de la Fédération de Russie, dont la représentante a estimé que ces projets de conclusion tombent « à point nommé » afin de contrer la tendance à conclure à l’existence d’une norme de droit coutumier suivant la pratique de tel État ou organe international.  « Seule la pratique des États peut contribuer à la formation du droit coutumier, et non celle des organisations », a-t-elle rappelé.

Sur ce point de la pratique des organisations internationales, lesquelles « servent souvent d’arènes ou de catalyseurs de la pratique des États » selon une expression du rapport précité, la représentante de la Nouvelle-Zélande a exprimé ses doutes devant le libellé du projet de conclusion 4 qui prévoit que cette pratique contribue à la formation du droit international coutumier « dans certains cas ».

La déléguée a ainsi souhaité des précisions sur cette dernière expression, ainsi que sur les organisations internationales dont la pratique peut effectivement contribuer à la formation de ce droit.  Le commentaire relatif à ce projet de conclusion n’est pas d’un grand recours puisqu’il mentionne la pratique de « certaines organisations, mais pas de toutes », a-t-elle remarqué.  Le délégué d’Israël a également regretté la « confusion » sur ce sujet.

Notant les divergences des États, la déléguée de la Roumanie a déclaré que la pratique de ces organisations peut déterminer le droit international coutumier, « notamment si ces organisations ont été l’objet de transferts de compétences de la part des États ».  De son côté, son homologue du Royaume-Uni a estimé que ce projet de conclusion apporte une clarification utile.

Le projet de conclusion 15 sur « l’objecteur persistant », qui est une exception à l’application du droit international coutumier, a été abondamment discuté, notamment par le représentant de Sri Lanka.  « Certains États ont indiqué que lorsqu’un État a objecté à une règle de droit international coutumier lorsqu’elle était en voie de formation, cette règle n’est pas opposable audit État, lequel n’aurait pas à maintenir son objection », a-t-il dit.  Le projet de conclusion 15 prévoit que l’objection doit « être maintenue de manière persistante ». 

Mais la charge la plus virulente est venue du représentant de Chypre qui a vu dans ce principe, un « véritable virus » inoculé au droit international coutumier.  Un État ne peut déroger à ses obligations découlant d’une règle coutumière internationale, une fois que celle-ci a été identifiée, a déclaré le délégué, en se disant lui-même « objecteur persistant » à ce principe.  Il a précisé qu’il s’agit d’un concept « polémique » qui n’a pas le soutien des États.

Le représentant de Sierra Leone s’est lui penché sur le projet de conclusion 6 concernant la détermination du droit international coutumier, lequel note que l’inaction peut, « dans certaines circonstances », être considérée comme la pratique d’un État.  « Le libellé aurait dû être plus précis et il aurait dû tenir compte de deux aspects majeurs: la conscience de l’État de la pratique et l’inaction volontaire d’agir qui est différente de « l’abstention délibérée d’agir », a-t-il déclaré.

Enfin, de nombreuses délégations, en particulier des petits États insulaires en développement, mais aussi le Canada, qui possède le plus long littoral du monde, ont salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la Commission.  « Un pas de géant dans la bonne direction », selon la Papouasie-Nouvelle-Guinée, sur un sujet « intergénérationnel », comme l’a dit la République de Corée.  Le délégué des Tonga a déclaré qu’il n’existe pas de menace plus grave, tandis que son homologue des États fédérés de Micronésie a demandé que les études sur le sujet puissent commencer au plus vite.

« Qu’adviendra-t-il de l’État dont les populations auront fui l’élévation de la mer?  Celui-ci aura-t-il disparu au regard du droit international ou faudra-t-il attendre qu’il soit submergé totalement par les eaux? » a demandé le délégué des Fidji.  Un bémol est venu de la délégation de Chypre, qui a rappelé que le sujet a déjà été traité par l’Association de droit international et a donc douté de l’utilité d’y consacrer des ressources déjà « maigres ».

La Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 25 octobre, à 15 heures.

*A/73/10

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DIXIÈME SESSION

Suite des déclarations sur les chapitres I à V, XII et XIII du rapport

Mme VICTORIA HALLUM (Nouvelle-Zélande) a loué la « considérable contribution » de la CDI au droit international, la Commission ayant par exemple jeté les fondations pour la création de la Cour pénale internationale (CPI).  Elle s’est félicitée de l’adoption des 16 projets de conclusion, assortis de commentaires, sur la détermination du droit international coutumier, en notant le souci de concision de la Commission.  Cependant, en certaines occurrences, cela a conduit à des déclarations générales sans valeur pratique claire.  Elle a exprimé ses doutes s’agissant du projet de conclusion 4 disposant que dans certains cas, la pratique des organisations internationales contribue également à la formation, ou à l’expression, de règles de droit international coutumier.  La déléguée a demandé des précisions sur cette expression « dans certains cas », le commentaire afférent n’étant pas d’un grand recours puisqu’il indique que la pratique de « certaines organisations, mais pas toutes » peut être pertinente. 

La déléguée a salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI.  C’est une question d’importance pour mon pays, a-t-elle dit.  « Notre objectif est de trouver le moyen, le plus rapidement possible, de garantir aux États côtiers qu’ils ne perdront pas leurs droits sur leurs ressources maritimes et leurs zones de juridiction en raison de l’élévation du niveau de la mer. »  Mme Hallum a indiqué que tous les États ont intérêt à préserver l’équilibre délicat entre leurs droits et obligations défini par la Convention sur le droit de la mer et à éviter les contentieux éventuels.  En conclusion, elle a souhaité que ce point fasse partie du programme actuel de travail de la CDI.

Pour Mme ALINA OROSAN (Roumanie), la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international est assez importante pour que la CDI s’en saisisse et en fasse un élément de son programme de travail.  La Roumanie précise que les études engagées sur ce thème ne doivent pas chercher à modifier le droit international, mais plutôt analyser la façon dont le droit international traite des problèmes soulevés par ce phénomène et dont il peut s’adapter, et, par conséquent, identifier des lacunes potentielles.  La délégation encourage donc le groupe d’étude et attend ses conclusions.

Concernant la question des accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, la Roumanie salue le travail du Rapporteur spécial, M. Georg Nolte, et se félicite également de l’adoption des projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier.  Mme Orosan a noté que les commentaires des États ont été fort divergents sur le point relatif à la pertinence de la pratique des organisations internationales dans la détermination du droit international coutumier.  La Roumanie est d’avis que la pratique de ces organisations peut effectivement déterminer le droit international coutumier, notamment si ces organisations ont été l’objet de transferts de compétences de la part des États. 

Mme CHAVANART THANGSUMPHANT (Thaïlande) s’est félicitée de l’adoption des projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Le rôle de ces accords et pratique ultérieurs, tel que visé par l’article 31 de la Convention de Vienne, ne peut se comprendre que dans le contexte de l’interprétation des traités, a-t-elle dit.  Elle a ajouté que toute modification des dispositions d’un traité doit respecter l’article 39 de ladite Convention pour garantir la stabilité des relations internationales.  À cette même fin, elle a prôné la prudence s’agissant de l’utilisation des accords et pratique ultérieurs en vue de l’« interprétation évolutive » des textes, laquelle devrait être circonscrite « à certaines circonstances ou à certaines catégories de traités ayant un objet spécifique ».  « Nous recommandons par conséquent de recourir à l’interprétation évolutive seulement dans le contexte où des accords et pratique ultérieurs sont utilisés pour déterminer l’intention des parties de conférer ou non un sens évolutif à une disposition d’un traité. »

Commentant l’inscription de la compétence pénale universelle dans le programme de travail de long terme de la CDI, la déléguée a rappelé que ce concept doit être distingué de l’obligation de poursuivre ou d’extrader et des autres formes de compétence, y compris territoriale et de nationalité.  Elle a invité la Commission à apporter des clarifications s’agissant de la définition, de la nature et de la portée du principe de compétence pénale universelle.  Enfin, la représentante a déclaré que la Thaïlande suivra avec un grand intérêt les discussions sur l’autre sujet inscrit au programme de travail de long terme, l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, avant d’appeler à un dialogue renforcé entre la CDI et la Sixième Commission. 

M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) s’est félicité de l’adoption par la CDI des 13 projets de conclusion relatifs aux accords et à la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a estimé que les projets de conclusions 2, 4, 5, 6, 7 et 10 favorisent l’équilibre entre les mécanismes formels d’interprétation des traités.  Ces textes, a-t-il noté, constituent « une grande avancée » dans le développement progressif du droit international et du renforcement des moyens complémentaires d’interprétation des traités. 

Le représentant a également salué l’adoption des 16 projets de conclusion portant sur la détermination du droit international coutumier, qui fourniront un outil utile permettant de clarifier la pratique des États et l’opinio juris, ainsi que leur manifestation.  Il a encouragé les membres de la Sixième Commission à mettre en œuvre le fruit des travaux de la CDI, considérés « impartiaux et apolitiques ».  S’agissant de l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail de la CDI, il a rappelé que la Sixième Commission s’est déjà prononcée à maintes reprises sur cette question, et qu’elle bénéficierait de l’analyse technique de la CDI. 

M. FIRAT SUNEL (Turquie) a déploré le fait que la Commission ne compte que 4 femmes parmi ses membres, et seulement 7 au cours de ses 70 années d’existence.  Par ailleurs, il a estimé que l’inscription de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme de la CDI permettra de combler les lacunes qui subsistent dans la lutte contre l’impunité.  De même, il a estimé que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international aura des incidences sur les États, les droits de l’homme, les frontières maritimes et l’environnement. 

Le représentant s’est félicité de l’adoption des projets de conclusion relatifs aux accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et à la détermination du droit international coutumier.  Il a noté que le concept d’objecteur persistant constitue un principe du droit international général, qui fait partie intégrante du droit coutumier. 

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a rappelé, à propos des projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, la relation complexe et interactive qui existe entre coutume et traités, les deux sources primaires du droit international.  Le projet de conclusion 11 sur la portée de certains moyens de détermination du droit international coutumier est une disposition vitale qui jette « une certaine clarté » sur cette relation, a-t-il relevé.  « Le droit coutumier international est souvent évoqué pour combler les lacunes du droit conventionnel et pour clarifier les droits et obligations découlant des traités. » Ce texte, selon lequel une règle énoncée dans un traité peut refléter une règle de droit international coutumier s’il est établi que la règle conventionnelle a codifié une règle de droit international coutumier existante à la date de la conclusion du traité ou a servi de point de départ à une opinio juris, sera d’une aide précieuse pour les praticiens afin de dissiper les ambiguïtés, a-t-il relevé. 

Le délégué a ensuite évoqué le projet de conclusion 15 sur « l’objecteur persistant », exception à l’application de ce droit, qui a fait l’objet de divergences entre États, certains d’entre eux mettant en garde contre des abus de ce principe.  Certaines délégations ont ainsi indiqué que lorsqu’un État a objecté à une règle de droit international coutumier lorsqu’elle était en voie de formation, cette règle n’est pas opposable audit État, lequel n’aurait pas à maintenir son objection, contrairement à ce que prévoit le projet précité.  Par ailleurs, M. Perera a estimé que les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités apportent également « une certaine clarté ».  Enfin, il a recommandé que ces conclusions figurent en annexe des résolutions de l’Assemblée générale. 

La CDI, y compris ses membres russes, ont contribué au développement du droit international, s’est félicitée Mme ZAMAKHINA EVGENIIA (Fédération de Russie).  Elle a salué « l’absence de politisation » et l’accent mis sur le consensus qui ont cours à la Commission.  Elle a toutefois estimé que la CDI devrait ralentir la cadence de ses travaux afin de permettre la mise en œuvre de projets répondant aux besoins de tous les États.  La Commission doit donc entendre les avis des États et en tenir compte.  Abordant les interactions entre la CDI et la Sixième Commission, la représentante a noté qu’en général, l’Assemblée générale prend note des projets de résolution et attire l’attention des États Membres, tandis que ceux-ci utilisent les textes pour le développement du droit malgré l’absence de consensus.  Or, la plupart de ces projets ne relèvent pas du droit coutumier, a-t-elle déploré, avant de suggérer de recueillir l’avis des États dans un document distinct. 

Mme Evgeniia a pris note des projets de conclusion relatifs aux accords et à la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, fondés sur les dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Quant aux projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier, ils tombent à point nommé « afin de contrer la tendance à conclure à l’existence d’une norme de droit coutumier suivant la pratique de tel État ou organe international ».  En effet, la pratique ou l’opinio juris ne peuvent être considérées comme des éléments constitutifs du droit coutumier si elles ne correspondent pas à une norme de jus cogens, comme stipulé dans les Conventions de Vienne, a fait valoir la représentante.  Seule la pratique des États peut contribuer à la formation du droit coutumier, et non celle des organisations, a précisé la représentante, pour qui toute norme de droit international doit être instituée dans un traité ou le droit coutumier. 

Selon la représentante, les rapports de la CDI devraient être « avant tout analytiques ».  Enfin, elle n’a pas jugé opportun d’inscrire la question de la compétence pénale universelle au programme déjà chargé de la CDI.

Si Mme JANE J. CHIGIYAL (États fédérés de Micronésie) a salué la décision d’inscrire la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, elle a toutefois appelé la Commission à l’inclure dans son programme actuel pour que les études sur le sujet puissent commencer « au plus vite ». 

À partir du moment où l’examen de la question s’avère utile pour la communauté internationale, alors les États devraient pouvoir participer activement aux travaux du groupe d’étude, a fait valoir Mme Chigiyal.  De plus, leur contribution ne devrait pas se limiter aux interventions au cours des réunions de la Sixième Commission; elle pourrait prendre la forme de commentaires, de comptes rendus, de séminaires interactifs ou d’autres modes informels de participation, tout en accordant du poids à l’implication des petits États insulaires en développement (PEID) et d’autres pays en développement ayant des zones côtières de faible élévation. 

L’élévation du niveau de la mer soulève de graves questions de droit international pour des PEID comme la Micronésie, a reconnu la représentante, mais « c’est aussi un sujet qui intéresse la communauté internationale dans son ensemble ».  De fait, ce phénomène pourrait par exemple modifier les frontières maritimes des États ou provoquer des migrations humaines.  En conclusion, elle a cité les mises en garde contenues dans le cinquième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et son rapport spécial récent sur le réchauffement planétaire de 1,5° C.

Considérant que le développement progressif du droit international doit porter sur les défis mondiaux actuels, M. VILIAMI VA’INGA TONE (Tonga) a déclaré qu’il n’existe pas de menace « plus urgente » que l’élévation du niveau de la mer découlant des changements climatiques.  Saluant l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, il a mis l’accent sur la protection des personnes affectées par ce phénomène.  Il a souligné l’importance de mener des études approfondies sur ces questions, tout en respectant les dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer concernant la délimitation des frontières maritimes.

M. ALAN KESSEL (Canada) a rappelé que le Canada possède le plus long littoral au monde et que le pays est donc directement affecté par l’élévation du niveau de la mer et les effets des changements climatiques.  Les questions juridiques liées à ce phénomène sont nombreuses et complexes, a-t-il ajouté, notamment en ce qui concerne le droit de la mer, la notion d’État, les délimitations maritimes et la protection des personnes affectées.  Bien que ces questions soient traitées au sein d’autres entités des Nations Unies, y compris l’Assemblée générale, le Canada appuie « vigoureusement » l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, et considère que ce sujet pourrait également être inscrit à son programme actuel. 

Pour le représentant, la certitude et la stabilité juridique des zones maritimes participent à l’établissement de relations ordonnées entre les États et à la paix et la sécurité internationales, ainsi qu’à l’utilisation durable des ressources maritimes.  Il a mis la Commission en garde contre le risque de s’égarer dans les débats sur les questions les plus larges découlant de l’élévation du niveau de la mer, qui viendraient compliquer l’examen du sujet. 

M. MICHAEL IRMAN KANU (Sierra Leone) est revenu sur le projet de conclusion 13 qui indique que la pertinence des prononcés d’un organe conventionnel d’experts aux fins de l’interprétation d’un traité dépend des règles applicables du traité.  Pour la délégation, ces prononcés peuvent, dans certaines circonstances, donner naissance ou faire référence à un accord ultérieur ou une pratique ultérieure des parties au sens du paragraphe de l’article 31 de la Convention de Vienne.

Par ailleurs, le représentant s’est référé au premier paragraphe du projet de conclusion 6 concernant la détermination du droit international coutumier, lequel note que l’inaction peut, « dans certaines circonstances », être considérée comme la pratique d’un État.  Pour la délégation, le libellé aurait dû être plus précis et il aurait dû tenir compte de deux aspects majeurs: la conscience de l’État de la pratique et l’inaction volontaire d’agir qui est différente de « l’abstention délibérée d’agir ». 

Au sujet de la compétence pénale universelle, la Sierra Leone rappelle qu’elle avait par le passé demandé quelles seraient les conclusions éventuelles de la Commission sur ce thème.  M. Kanu a souhaité que l’examen de cette question au sein d’autres instances onusiennes ne vienne pas compromettre son étude par la Sixième Commission.  Il y a vu une occasion pour la Sixième Commission et la CDI de rapprocher leurs méthodes de travail dans le cadre de l’examen parallèle de ce même thème.  Enfin, la Sierra Leone appuie l’inscription de la question de l’élévation du niveau de la mer au programme de travail de la CDI.  Le pays souhaite même que des corapporteurs soient désignés pour cette question importante. 

M. ANDREW MURDOCH (Royaume-Uni) a salué la décision d’inscrire le sujet « Principes généraux du droit » au programme de travail de la CDI et celle d’inscrire l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international à son programme de travail à long terme.  Il a pris note de l’inscription de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme, tout en jugeant que ce sujet n’est pas assez « mûr » pour être discuté par la Commission.  Il a ensuite invité la Commission à faire preuve de clarté dans la codification du droit international.  Lorsque la Commission propose de nouveaux apports au droit international, les États doivent pouvoir en discuter, a-t-il dit, en déplorant que certains sujets fassent l’objet d’un traitement rapide.

M. Murdoch a salué l’adoption des projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  « Il s’agit là d’une boussole utile pour les praticiens dans l’art de l’interprétation des traités. »  Abordant les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, le délégué du Royaume-Uni s’est félicité de la clarification apportée par le projet de conclusion 4 sur la pratique des organisations internationales.  Enfin, le délégué a noté l’importance de ces projets de conclusion, le droit international coutumier étant de plus en plus souvent invoqué devant les tribunaux.

Selon Mme MARIANA DURNEY (Chili), les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités ont permis de systématiser les normes et procédés existants, au bénéfice des praticiens du droit international.  La conclusion 7, qui porte sur les effets possibles des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation, indique que l’interprétation ne peut aller au-delà de la détermination du sens du traité, et qu’un accord sur cette interprétation ne constitue pas une modification dudit traité à moins d’indications claires des parties. 

Mme Durney a accueilli favorablement les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier.  Se référant au projet de conclusion 4, elle a partagé l’avis de la CDI selon lequel la pratique des États joue un rôle primordial dans la formation du droit international coutumier, sans préjudice de la conduite des organisations internationales.  Elle a souligné, comme le commentaire relatif au projet de conclusion 5, que la pratique des États doit être connue des autres États pour contribuer à la formation et à l’identification des normes du droit international coutumier.  Quant à la conclusion 6, elle indique que seule l’abstention délibérée d’un État peut être considérée comme une pratique du droit coutumier.  La représentante s’est également dite en accord avec la conclusion 12, qui stipule que l’effet des résolutions adoptées par les organisations internationales ou les conférences intergouvernementales « contribue au développement » d’une norme du droit international coutumier.  

Alors que la Commission célèbre son soixante-dixième anniversaire, Mme Durney a considéré la faible représentation des femmes au sein de la CDI comme un problème urgent, contraire à l’article 8 des statuts de la Commission sur la représentation adéquate de l’ensemble de la communauté internationale.  Elle invité les États Membres à proposer à l’avenir la candidature de femmes afin que soient réellement représentés les grandes civilisations et systèmes juridiques du monde. 

M. DEKALEGA FINTAKPA LAMEGA (Togo), abordant les 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, a partagé les inquiétudes « au sein même de la Commission » relatives à la portée de la pratique des organisations internationales soulevée au projet de conclusion 4.  S’il est admis dans certains cas que cette pratique peut constituer un important aspect pour la formation de ce droit, il convient de préciser de quelle pratique il s’agit, à quel moment elle serait pertinente et quelles considérations devront être prises en compte pour évaluer le poids de cette pratique par rapport à celle des États eux-mêmes, a-t-il argumenté.  Évoquant le projet de conclusion 8, il a déclaré que son pays aurait préféré qu’une référence claire à la notion « d’États spécialement affectés et concernés » soit faite dans ce projet et non pas seulement dans son commentaire.

Par ailleurs, M. Fintakpa Lamega a espéré que l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI permettra une analyse juridique approfondie de cette « importante problématique ».  Enfin, il a indiqué que le point de la compétence pénale universelle doit demeurer à l’étude dans la mesure « où toute analyse juridique de ce concept ne saurait occulter son abus et sa politisation ».

Mme SANDEA DE WET (Afrique de Sud) a regretté le nombre insuffisant de femmes au sein de la CDI.  Elle s’est félicitée de la clarté apportée par les projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  S’agissant des 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, elle a souligné que ce droit est souvent évoqué devant les tribunaux.

Ces projets de conclusion ne doivent pas être circonscrits au monde académique parce qu’ils trouveront à s’appliquer dans des situations de la vie réelle, a dit Mme De Wet, en dissipant le « mythe » qui veut que le droit international soit le domaine réservé de quelques-uns.  Elle s’est félicitée du caractère non-prescriptif de ces projets et a rappelé que les États sont les acteurs majeurs dans l’identification de ce droit.  Les projets de conclusion ne reconnaissent pas la conduite d’acteurs non étatiques dans la formation du droit international coutumier.  Enfin, la déléguée a salué l’inclusion du principe d’« objecteur persistant », tout en rappelant la nécessité que ce principe soit de nature temporaire et soumis à des critères d’application très rigoureux.

M. LUIS XAVIER OÑA GARCÉS (Équateur) a cité l’Article 13 de la Charte des Nations Unies qui demande à l’Assemblée générale d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification.  Ce mandat permet d’assurer que le droit international suit l’évolution de la « science juridique » et des sociétés.  Il s’est félicité des précisions contenues dans les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  De même, les projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier permettent d’identifier les normes du droit coutumier. 

Le représentant a souligné la mise en place d’un groupe de travail chargé de rédiger les commentaires accompagnant les conclusions, qui serviront de guide sur la détermination de l’existence des normes du droit international coutumier.  Ces instruments seront particulièrement utiles aux juges nationaux, qui sont souvent appelés à déterminer les normes du droit international coutumier dans les affaires qu’ils traitent.  Il a salué, en terminant, l’inscription des principes généraux du droit, de la compétence pénale universelle et de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail de la CDI.

M. REUVEN EIDELMAN (Israël) a salué l’adoption des projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier et s’est dit partisan de la rigueur sur ce sujet.  Il a rappelé que les États sont les acteurs majeurs dans l’identification de ce droit et souligné les deux éléments constitutifs du droit coutumier: l’existence d’une pratique générale et son acceptation comme étant le droit.  Il a exprimé certaines réserves, en pointant notamment une confusion dans les projets de conclusion relatifs au rôle des organisations internationales.  « Les commentaires ne reflètent pas la pratique actuelle. »

Le délégué a demandé des éclaircissements sur l’inaction d’un État, celle-ci devant être une inaction délibérée, avant d’ajouter qu’une opinio juris ne peut être déduite du silence d’un État.  Il a par ailleurs déploré que les projets de conclusion laissent une trop grande place aux traités qui ne sont pas encore entrés en vigueur, alors que le nombre de signatures nécessaires a tendance à être de plus en plus bas.  Évoquant l’idée que ces projets figurent en annexe des résolutions de l’Assemblée générale, le délégué a rappelé le caractère juridiquement non contraignant de ces dernières, avant de déplorer « la politisation » du concept de compétence pénale universelle.

M. FRED SARUFA (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a rappelé la préoccupation des États insulaires devant l’élévation du niveau de la mer, qui représente pour eux une menace existentielle.  Il s’est félicité de la décision de la CDI d’inclure ce sujet dans son programme de travail à long terme.  Bien que la portée des travaux se limite strictement aux implications juridiques de ce phénomène climatique sur le droit de la mer, le statut d’État, et la protection des personnes touchées, pour notre pays, a affirmé le représentant, « c’est un pas de géant dans la bonne direction ».

M. Sarufa a attiré l’attention sur les questions relatives aux zones maritimes pour les États archipels tels que le sien, avant d’annoncer que la Papouasie-Nouvelle-Guinée est en train de finaliser les cartes et des coordonnées géographiques fixant ses nouvelles zones maritimes avant soumission au Secrétaire général.  « Il existe des règles spéciales pour les États archipels dans la partie IV de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, en particulier l’article 47 sur les bases maritimes des archipels », a souligné M. Sarufa.  Parmi ces règles, figurent un ratio eau/terre spécifique et une limitation sur la longueur des bases: or, la perte des petites îles périphériques ou des récifs découvrants en raison de la montée du niveau des eaux est de nature à modifier le statut même de ces bases et, par conséquent, les zones maritimes des États archipels, a observé le représentant.

C’est la raison pour laquelle ces questions d’importance doivent être examinées dans le cadre d’une analyse qui déterminerait le degré auquel le droit international dans sa forme actuelle est en mesure ou non de répondre à ces préoccupations, et comment les États peuvent développer des solutions pratiques.  S’agissant des migrations humaines, le représentant a recommandé à la CDI de prendre en compte la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967.

Mme OKSANA ZOLOTAROVA (Ukraine) s’est félicitée de l’adoption de projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Les projets de principe sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés revêtent une importance particulière pour son pays, a-t-elle dit ensuite, notant la faiblesse du cadre juridique existant.  « Il est grand temps que la CDI se penche sur cette question. » 

L’Ukraine a fait l’expérience des ravages causés par une Puissance occupante qui ne prête aucune attention aux dommages environnementaux causés en Crimée et dans le Donbass du fait de l’occupation, a témoigné la représentante.  La mauvaise gestion des zones naturelles et agricoles en Crimée a des conséquences sur les droits de la personne et la protection environnementale, a-t-elle poursuivi.  Elle a donné pour exemple la construction non autorisée du pont de Kertch, qui risque d’occasionner des dommages côtiers et environnementaux dans la mer d’Azov et contrevient au droit international humanitaire et à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. DOROS VENEZIS (Chypre) a mis en garde contre une acceptation généralisée du concept d’« objecteur persistant », visé au projet de conclusion 15 relatif à la détermination du droit international coutumier.  Cette question relève de l’application de ce droit et pas de sa formation, a-t-il dit.  Une fois qu’une norme coutumière a été établie, il n’est pas possible d’y faire objection, a-t-il tranché.  Il a indiqué que peu d’États invoquent ce principe, qui est un « véritable virus inoculé au droit international coutumier ».  Un État ne peut déroger à ses obligations découlant d’une règle coutumière internationale, une fois que celle-ci a été identifiée, a insisté le délégué, en exprimant son désaccord avec les commentaires sur ce sujet.  Les objecteurs persistants sapent la pratique étatique de nombre d’États en développement.

Le délégué s’est dit lui-même « objecteur persistant » à ce projet de conclusion 15 sur un concept qui est « polémique » et n’a pas le soutien des États, même s’il est reconnu par la doctrine et la CDI.  Enfin, s’il a salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme à long terme de la Commission, il a déploré le manque de coopération entre la CDI et la Sixième Commission sur un sujet qui, en outre, a été traité par l’Association de droit international.  Au vu de ces doublons, le délégué de Chypre a douté de l’utilité de consacrer à ce nouveau sujet des ressources déjà « maigres ».

M. MANUEL DE JESÚS PIREZ PÉREZ (Cuba) s’est inquiété du nombre excessif de points inscrits à l’ordre du jour de la CDI.  En particulier, il a considéré que la compétence pénale universelle en tant que sujet ne remplit pas les conditions posées à la cinquantième session, et devrait faire l’objet de débats additionnels à la Sixième Commission.  Selon lui, les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités doivent respecter le régime établi par le Convention de Vienne sur le droit des traités, reflet de la pratique coutumière. 

Quant aux projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier, le représentant les a trouvés opportuns en tant qu’outils de référence à l’intention des États et des praticiens du droit.  La conduite de l’État doit se limiter à la pratique de l’État, sans considérer la pratique des organisations internationales, a-t-il argué.  De plus, il a jugé le projet de conclusion 8 contradictoire, alors qu’il fait état de la pratique constante sans fixer de calendrier précis. 

M. GENE WAQANIVALU BAI (Fidji) a salué la décision d’introduire la question de l’élévation du niveau de la mer dans le programme de travail à long terme de la CDI.  Il a souligné les conséquences dévastatrices de cette élévation pour les populations qui pourraient être déplacées.  « Qu’adviendra-t-il de l’État dont les populations auront fui l’élévation de la mer?  Celui-ci aura-t-il disparu au regard du droit international ou faudra-t-il attendre qu’il soit submergé totalement par les eaux? »

En guise de réponse, le délégué a rappelé l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le Sahara occidental, selon lequel c’est à la population de déterminer l’avenir d’un territoire et non pas au territoire de déterminer l’avenir d’une population.

Mme PIERINA ALAFAMUA KATOANGA (Samoa) a salué la décision d’introduire la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international dans le programme de travail à long terme de la CDI.  Ce phénomène, a-t-elle témoigné, affecte les côtes industrielles de Samoa, la vie des communautés locales, les infrastructures et les écosystèmes, entre autres.  Dans ce pays très vulnérable aux changements climatiques, 70% de la population vit sur les côtes et se trouve exposée aux érosions, aux inondations et aux glissements de terrain. 

Pour les dirigeants des petits États insulaires en développement du Pacifique, la question de l’élévation du niveau de la mer mérite l’attention de la communauté internationale, en raison de l’urgence de la question mais aussi à cause du caractère progressif de l’élévation du niveau de la mer, a conclu la représentante.

M. JONGIN BAE (République de Corée) a commenté les projets de conclusion portant sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Commentant le projet de conclusion 7 sur les effets possibles des accords ultérieurs et de la pratique ultérieure dans le contexte de l’interprétation, il a dit que toute modification substantielle faite par ce biais n’est pas régie par les articles 31 et 32, mais plutôt par l’article 39 de la Convention de Vienne de 1969.  Au sujet des projets de conclusions 12 et 13, la République de Corée souligne que l’intention des États parties est l’élément le plus important de l’interprétation d’un traité.  Il a indiqué que la pratique d’une organisation internationale ou le prononcé d’un organe conventionnel d’experts ne peuvent être considérés comme une pratique ultérieure au sens du paragraphe 3 b) de l’article 31 de la Convention de Vienne de 1969. 

S’arrêtant ensuite aux paragraphes 2 des projets de conclusions 6 et 10 sur la détermination du droit international coutumier, M. Bae a préconisé la cohérence dans l’utilisation des termes et dans l’ordre dans lequel ils y sont utilisés.  Ainsi, une explication serait nécessaire pour apporter des clarifications en cas de contradictions.  Il serait bien aussi d’éclaircir les commentaires relatifs au projet de conclusion 16 et à « d’autres formes de droit coutumier ».

Par ailleurs, la République de Corée note que le thème de l’élévation du niveau de la mer reflète l’inquiétude croissante des petits États insulaires en développement.  Les critères convenus à sa cinquantième session par la CDI sur les nouveaux sujets sont ici respectés.  Il s’agit selon le délégué d’un sujet « intergénérationnel », puisque la génération actuelle a le devoir d’établir un cadre juridique sur cette question.  Il a estimé également qu’elle s’inscrit dans la perspective de « ce que la loi doit être » en opposition à ce qu’elle est en ce moment. 

Quant à la compétence pénale universelle, M. Bae a rappelé que son pays a créé une législation sur la mise en œuvre du Statut de Rome, mais qu’il est d’avis que le sujet n’est pas encore assez « mûr » pour faire l’objet de conclusions significatives.

Mme MARIE-CHAROLETTE MCKENNA (Australie) a salué l’adoption des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, qui constitueront une orientation utile pour les États et les organisations internationales.  En outre, l’inscription de la question de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme de la CDI est tout à fait positive afin d’assurer l’application du principe de responsabilité, de lutter contre l’impunité et de compléter les tribunaux internationaux. 

La question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international représente une source de préoccupation importante pour les États du Pacifique, a rappelé la représentante.  Les États de la région se sont efforcés de clarifier plusieurs questions à ce sujet, notamment les délimitations maritimes, tout en respectant les dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  En conclusion, elle a encouragé la CDI à se pencher sur cette question dans les plus brefs délais.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: les délégations reconnaissent le COPUOS comme un moteur et une plateforme unique de la coopération internationale dans les activités spatiales

Soixante-treizième session,
14e séance – après midi
CPSD/674

Quatrième Commission: les délégations reconnaissent le COPUOS comme un moteur et une plateforme unique de la coopération internationale dans les activités spatiales

Au deuxième jour du débat de la Quatrième Commission (questions de politiques spéciales et décolonisation), sur la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace, les délégations ont été nombreuses à reconnaître le rôle de premier plan que joue le Comité des Nations Unies pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), et ses organes subsidiaires pour la promotion de la coopération internationale dans ce domaine.

Le Canada a ainsi encouragé le Comité et le Bureau des affaires spatiales de l’ONU à capitaliser sur l’élan impulsé par la célébration, cette année à Vienne, du Cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) et la finalisation des travaux du Groupe de travail sur la viabilité à long terme des activités spatiales, pour développer un ordre du jour résolument orienté vers l’avenir.  La Présidente du COPUOS avait d’ailleurs reconnu hier qu’UNISPACE+50 avait fait avancer les discussions sur la formulation de nouvelles orientations concernant la gouvernance mondiale des activités spatiales. 

En effet, compte tenu de la complexité croissante du programme spatial et de l’intérêt renouvelé pour l’exploration de l’espace par l’homme ainsi que pour la viabilité de la terre et de l’espace, les délégations ont été nombreuses à juger que « le moment est opportun » pour que le Comité se penche sur la direction à prendre pour garantir que l’espace soit mis au profit de toute l’humanité et de la planète, en privilégiant la coopération internationale. 

De nombreux intervenants ont revendiqué un accès « universel » à l’espace et aux avantages à tirer des technologies et sciences spatiales afin de les mettre au service du développement durable et de la lutte contre les changements climatiques notamment.  Certaines délégations, comme celles de l’Équateur et de l’Algérie, ont averti du risque de saturation des orbites satellitaires, réfutant le principe du « premier venu, premier servi », tandis que l’Iran a plaidé pour une exploitation rationnelle de l’orbite géostationnaire.

Allant dans le même sens, la Malaisie a estimé que les sept priorités thématiques approuvées en 2015 par le COPUOS, ainsi que son travail sur quatre piliers qui sont l’économie spatiale, la société spatiale, l’accessibilité de l’espace et la diplomatie spatiale, devraient orienter les préparatifs et le développement du programme « Espace 2030 » et son plan de mise en œuvre. 

De son côté, l’Iraq a plaidé en faveur d’une amélioration de l’accès aux données satellitaires pour les pays en développement, soulignant leur importance pour la gestion des catastrophes naturelles, l’impact des changements climatiques et la nutrition, entre autres.

Ce débat a également donné l’occasion à certaines délégations de brosser un tableau de leurs programmes spatiaux, mais aussi des différentes formes que peut prendre la coopération internationale dans ce domaine. 

Ainsi le Japon a évoqué l’initiative KiboCUBE, le programme de coopération ONU/Japon en vue du déploiement de satellites CubeSat depuis le module d’expérimentation japonais (Kibo) de la Station spatiale internationale.  Lancée en 2015, cette initiative a permis à ce jour à des institutions du Kenya, du Guatemala, de Maurice et de l’Indonésie d’utiliser Kibo, et le Kenya a réussi à lancer avec succès son premier satellite cette année, en mai. 

De son côté, le représentant algérien a évoqué un programme satellitaire africain qui permettrait l’accès aux données satellitaires à moindre coût aux pays du continent.

La Quatrième Commission se réunira à nouveau demain, jeudi 25 octobre, à partir de 15 heures.

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE (SUITE)

Déclarations

Mme KIMBERLY K. LOUIS (Canada) a estimé que l’année 2018 a été une année phare pour le Comité des Nations unies pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) avec la célébration du Cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) et la finalisation des travaux de son Groupe de travail sur la viabilité à long terme des activités spatiales.  En tant que Président sortant du Comité, le Canada est honoré d’avoir joué un rôle de leadership sur ces deux dossiers, a indiqué la représentante.  Il encourage le Comité, et ses sous-comités, ainsi que le Bureau des affaires spatiales à capitaliser sur le nouvel élan, notamment à travers le Groupe de travail récemment mis en place sur le programme « Espace 2030 ».

Compte tenu de la complexité croissante du programme spatial, de l’intérêt renouvelé pour l’exploration de l’espace par l’homme, ainsi que celui pour la viabilité de la terre et de l’espace, le moment est opportun pour que le Comité se penche sur la direction à prendre en matière de coopération mondiale pour mettre l’espace au profit de toute l’humanité et la planète.  Pour que cette coopération soit couronnée de succès, a-t-elle enchaîné, il faut pouvoir compter sur l’engagement et les contributions de tous les pays pertinents, en particulier les puissances spatiales établies et celles qui émergent, a poursuivi la représentante.

La représentante a ensuite passé en revue le rôle joué par le Canada dans l’exploration spatiale depuis 1962, date du lancement de son premier satellite – Alouette 1.  Il fait aujourd’hui partie de la station spatiale internationale (ISS) et contribue à l’exploration de Mars, en collaboration avec la NASA et ESA.  Les prochains mois seront importants pour le programme spatial canadien, a précisé la déléguée, avec la mission de l’astronaute canadien, David Saint-Jacques, auprès de l’ISS et le lancement de la mission Constellation Radarsat.  Elle a reconnu toutefois que l’avenir de l’exploration spatiale exigera une coopération internationale soutenue et une gouvernance spatiale mondiale.

Pour le Canada, l’espace extra-atmosphérique représente un instrument de la paix, de la diplomatie et de la coopération entre nations, et c’est la coopération internationale qui rend son exploration possible.

M. HÉCTOR ENRIQUE JAIME CALDERÓN (El Salvador) a réaffirmé son attachement aux principes et accords qui doivent régir les activités des États dans l’exploration et l’utilisation de l’espace, qui doivent se baser sur quatre aspects fondamentaux qui sont l’utilisation commune et à des fins pacifiques, l’utilisation égalitaire, la coopération et la solidarité internationales.

Sa délégation soutient, en outre, le processus visant l’élaboration du programme « Espace 2030 » qui vise à promouvoir les bénéfices et la coopération dans l’utilisation pacifique de l’espace au service du développement humain, et ce, dans un contexte marqué par la complexité croissante du programme spatial.

Le représentant s’est par ailleurs dit d’avis que l’un des principaux objectifs du COPUOS devrait être la promotion de la viabilité des activités dans l’espace extra-atmosphérique pour que les générations futures puissent également profiter de l’accès à l’espace.  Le Gouvernement d’El Salvador estime par ailleurs que la science et les technologies spatiales peuvent être très utiles, notamment pour ce qui est de la gestion des catastrophes naturelles, la protection de l’environnement, la télésanté et la télééducation.  Dans cette optique, El Salvador a mis en place une équipe inter institutions qui sera l’homologue du COPUOS.

M. KHALID MANZALAWI (Arabie saoudite) a souligné que son pays continue de s’impliquer dans les activités spatiales, citant notamment l’ouverture d’un centre pour la science et la technologie.  Le Royaume saoudien a aussi mis au point un programme de développement pour les satellites et les technologies spatiales de pointe.  Le représentant a aussi indiqué que ces dernières années, 17 satellites ont été lancés et que plusieurs autres sont sur le point d’être mis en orbite dans le but de développer la télédétection.  Ces technologies ont été mises au point avec une société privée, ce qui a aussi permis de former des ingénieurs saoudiens, a-t-il ajouté.

Le représentant a également indiqué que le Royaume s’intéresse aux technologies permettant d’étudier la face cachée de la Lune.  Il a aussi parlé de la création d’un centre de pointe pour renforcer la participation de l’Arabie saoudite aux activités d’exploration de l’espace, et ce, en coopération avec un institut californien, et un centre de la NASA.  Nous mettons au point des satellites pour étudier les dunes de sable et les sources d’eau, afin, notamment d’éviter les catastrophes naturelles.

Mme SHIORI AMIYA (OKU), (Japon) est revenue sur la célébration, cette année, à Vienne, d’UNISPACE+50.  S’agissant des sept priorités thématiques approuvées par le COPUOS en 2016, « qui cristallisent l’essence même d’UNISPACE », la représentante a indiqué que le japon avait étroitement coopéré avec la communauté internationale pour les arrêter.  À titre d’exemple, il a cité sa contribution à la priorité thématique 1 qui porte sur « les partenariats mondiaux dans l’exploration spatiale et l’innovation », puisque le deuxième International Space Exploration Forum s’est tenu à Tokyo cette année.  Il a précisé que les documents finaux du Forum peuvent servir de base aux gouvernements pour engager le dialogue en vue de promouvoir la coopération internationale et l’exploration spatiale à long terme au service de l’humanité.

Le délégué a ensuite fait le point sur l’initiative KiboCUBE, le programme de coopération ONU/Japon en vue du déploiement de satellites CubeSat depuis le module d’expérimentation japonais (Kibo) de la Station spatiale internationale.  Lancée en 2015, cette initiative a permis à ce jour à des institutions du Kenya, du Guatemala, de Maurice et de l’Indonésie d’utiliser Kibo, et le Kenya a réussi à lancer avec succès son premier satellite cette année en mai. 

Le Japon est également activement impliqué dans la coopération régionale pour renforcer l’utilisation pacifique de l’espace et pour développer des capacités spatiales d’acteurs émergeants.  Il coaccueille, chaque année, le Forum régional Asie-Pacifique des agences spatiales.

M. MOHD AINI ATAN (Malaisie) a salué les progrès réalisés en matière de coopération internationale dans les activités spatiales à des fins pacifiques grâce aux efforts du COPUOS et du Bureau des affaires spatiales de l’ONU.  Il a notamment cité le développement d’un « curriculum juridique pour l’espace », les programmes de renforcement des capacités en particulier pour les pays en développement, les systèmes de navigation et de chronométrage satellitaires ainsi que les programmes éducatifs sur l’espace offerts par les centres régionaux affiliés aux Nations Unies.  Le représentant a encouragé l’échange d’informations en termes de découverte, d’observation et de caractérisation physique des objets potentiellement dangereux aux alentours de la terre.  Il a ensuite mis l’accent sur les problématiques des débris spatiaux, de la course aux armements dans l’espace, ainsi que sur la consolidation de la résilience aux catastrophes, sans oublier la promotion des sciences, technologies et applications spatiales et leurs pertinences pour le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

S’agissant du Cinquantenaire d’UNISPACE, il a espéré que sa commémoration aura contribué à ouvrir la voie au renforcement du rôle du COPUOS et de ses organes subsidiaires, ainsi que du Bureau des affaires spatiales, dans la promotion de la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace.  Dans la foulée, il a confirmé le soutien de sa délégation au projet de résolution adopté à Vienne en juin 2018, « UNISPACE+50 »: l’espace comme moteur du développement durable.  Le représentant a salué les sept priorités thématiques d’UNISPACE et le travail sur ses quatre piliers qui sont l’économie spatiale, la société spatiale, l’accessibilité de l’espace et la diplomatie spatiale qui devraient, à son avis, orienter les préparatifs et le développement du programme « Espace 2030 » et son plan de mise en œuvre. 

Sur le plan national, la Malaisie a commencé à préparer sa législation spatiale nationale.

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) a déclaré que l’espace extra-atmosphérique est un bien commun de l’humanité, en vertu de quoi il faut en garantir le libre accès à toutes les nations, sur la base de la coopération internationale dans les domaines notamment de la coopération scientifique et le transfert de technologies.  L’exploration et l’usage de l’espace extra-atmosphérique doivent toutefois se faire à des fins exclusivement pacifiques et conformément au droit international, a-t-il indiqué.  Il a salué le rôle du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) et de ses deux sous-comités.

En outre, le représentant a estimé que le déclenchement éventuel d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique représenterait indubitablement une menace à la paix et la sécurité internationales.  Des mesures de transparence et de promotion de la confiance pourraient jouer un rôle important pour la paix, a-t-il estimé.  Il a salué le projet de traité proposé par la Chine et la Fédération de Russie, relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique, estimant que c’est une bonne base pour lancer des négociations sur la possible adoption d’un instrument juridiquement contraignant.  Il a exprimé sa préoccupation concernant la mise au point de satellites conçus pour capter certaines communications, ce qui est contraire à la souveraineté des États, s’est-il indigné.  Enfin, le représentant vénézuélien a demandé aux pays développés de fournir une assistance et une coopération aux pays en développement pour la mise en œuvre de programmes spatiaux.

M. PAUL BATIBONAK (Cameroun) a dit que les sciences et techniques spatiales et leurs applications fournissent des outils indispensables pour trouver des solutions viables propres à assurer le développement durable.  Nous devons donc chercher à tirer profit des avantages qu’offrent les techniques spatiales, en particulier disposer d’informations géospatiales fondamentales pour relever les défis dans le domaine des changements climatiques et des catastrophes naturelles, ainsi qu’en matière de réalisation des objectifs de développement durable. 

Toutefois, a nuancé le délégué, ce panorama prometteur s’assombrit toujours plus à cause de la tendance croissante à la militarisation de l’espace, de la part des puissances qui y transplantent la course aux armements ainsi que la prolifération des débris spatiaux.  Ce caractère militaire et paramilitaire des activités spatiales constitue une menace non seulement à l’utilisation pacifique de l’espace mais également à la survie de l’être humain.  En réponse à cette menace croissante, la communauté internationale doit réfléchir sur la meilleure façon de relever ces défis de l’exploitation et de l’utilisation pacifiques de l’espace extra-atmosphérique. 

M. YONG JIN BAEK (République de Corée) a constaté que, sans coordination adéquate, l’évolution des technologies spatiales et le nombre croissant des acteurs et objets spatiaux représentent à la fois une bénédiction et une menace pour l’humanité.  Dans la situation actuelle, ce rôle de coordination joué par le Comité des Nations Unies pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique est plus important que jamais, a-t-il souligné.

À ce titre, il a salué l’ensemble des directives développées par le Comité pour garantir la viabilité à long terme des activités spatiales.  Même si le Comité n’a pas pu parvenir à un consensus sur cet ensemble de lignes directrices au cours de sa soixante et unième session, son Président et son Groupe de travail ont travaillé d’arrache-pied, a reconnu le représentant.

Il a ensuite salué la célébration du Cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) cette année à Vienne, ainsi que l’adoption, à cette occasion, du projet de résolution sur l’espace comme moteur du développement durable.

Pour la République de Corée, l’espace doit rester sûr et viable.  Dans le même temps, le potentiel énorme des sciences et technologies spatiales pour le développement durable ne devrait pas être entravé, a poursuivi le représentant, expliquant que son gouvernement avait développé, en février dernier, son troisième plan-cadre pour le développement de l’espace afin de mettre les technologies spatiales au service de la lutte contre les changements climatiques, les catastrophes naturelles ou encore les objets spatiaux.  Dans ce contexte, le représentant a mis l’accent sur l’importance de la transparence et de mesures de confiance dans l’environnement spatial actuel « qui est de plus en plus complexe ». 

M. ALI HILAL ALHADI (Iraq) a appelé à adopter des mesures collectives qui permettront à tous les pays de tirer parti de l’espace extra-atmosphérique.  Il a estimé que les conclusions du Cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) devraient profiter à tous les États Membres, indépendamment de leur niveau de développement.  Des lors, l’Iraq appelle la communauté internationale à utiliser l’espace extra-atmosphérique conformément au droit international, et à développer une stratégie commune pour l’exploration et l’utilisation de l’espace au profit du développement durable.

L’Iraq plaide en faveur d’une amélioration de l’accès aux données satellitaires pour les pays en développement, soulignant leur importance pour la gestion des catastrophes naturelles, l’impact des changements climatiques et la nutrition, entre autres.

Le représentant a ensuite présenté certaines avancées positives dans l’utilisation des données et technologies spatiales en Iraq, notamment pour surveiller la pollution des cours d’eau dans certaines parties du pays grâce à des images à haute définition et des données satellitaires.  Des données spatiales ont également été utilisées pour mesurer les dégâts infligés par le groupe EILL, a indiqué le représentant qui a, par ailleurs, plaidé contre une militarisation de l’espace.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a souligné que les technologies de l’espace extra-atmosphérique sont indispensables pour le développement durable des nations.  Ainsi, la coopération internationale est indispensable pour que progressent les programmes spatiaux, notamment ceux des pays en développement.  Insistant sur le rôle des partenariats, il a rappelé qu’au cours des années 1980, le Brésil et la Chine ont collaboré au programme satellite d’exploitation des ressources terrestres, qui a permis de construire et lancer avec succès tout un ensemble de satellites permettant de gérer les ressources de la planète.  Les prochains lancements auront lieu en 2019, a-t-il précisé.  Plus récemment, le Brésil a été l’un des premiers partisans de l’initiative italienne « Univers ouvert », qui doit permettre le partage d’informations sur la question via des universités.

Il a insisté sur l’importance des systèmes multilatéraux pour trouver des solutions aux défis associés aux activités dans l’espace extra-atmosphérique, saluant au passage le rôle du COPUOS, ainsi que le programme « Espace 2030 » et UNISPACE+50.

Cependant, le représentant a noté que des préoccupations substituent concernant des risques de conflit dans l’espace extra-atmosphérique.  « Tous les efforts doivent être faits pour préserver la sécurité dans les activités dans l’espace extra-atmosphérique », a-t-il déclaré.  Certes, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique n’est pas une instance de désarmement, mais il fournit une contribution importante dans la gouvernance mondiale des activités dans l’espace, a par ailleurs commenté le représentant, qui a fait part de la fierté du Brésil, qui le présidera en 2019.

M. KENNETH HODGKINS (États-Unis) a présenté certains développements notables dans la politique spatiale des États-Unis, à commencer par la stratégie nationale du Président Trump pour l’espace.  Il a expliqué que cette stratégie concerne l’ensemble du Gouvernement, pour ce qui est du leadership américain dans l’espace.  Elle sera mise en œuvre en partenariat avec le secteur privé et « nos alliés ».

S’agissant des efforts américains pour améliorer la viabilité des activités spatiales, le représentant a indiqué que la directive 3 de cette stratégie était consacrée à la gestion du trafic spatial.  Elle stipule que les États-Unis doivent encourager l’adoption de nouvelles normes de comportement et de meilleures pratiques par la communauté internationale au moyen de discussions bilatérales et multilatérales avec d’autres puissances spatiales et à travers la participation américaine à différents organismes, y compris le COPUOS « qui doit demeurer une instance multilatérale importante pour faciliter un environnement propice au renforcement de la sûreté, stabilité et viabilité des activités spatiales », a souligné le représentant.

À cet égard, il a reconnu les progrès faits par le Sous-Comité scientifique et technique du Comité et par son Groupe de travail sur la viabilité à long terme des activités spatiales.  Il a notamment salué l’adoption, par le Groupe de travail, de 21 directives volontaires qui « représentent un jalon historique » pour l’utilisation sure et responsable de l’espace pour que toutes les nations puissent continuer à en tirer parti à long-terme.

Le représentant a également souligné que le sous-comité juridique a joué un rôle clef pour élaborer les traités sur l’espace, et a salué son nouveau programme pluriannuel sur le régime juridique et la gouvernance mondiale de l’espace. 

Il a aussi salué le fait que l’année 2018 a été l’année du bilan d’UNISPACE, et s’est félicité du succès de la Conférence marquant cette année le Cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50), ainsi que du programme « Espace 2030 » qui en a émergé.

Mme HUDA AL ABDALI (Émirats arabes unis) a jugé nécessaire de promouvoir les partages des pratiques optimales relatives à l’exploration spatiale.  Elle a indiqué que les Émirats arabes unis ont lancé une série de projets notables, notamment la planification d’une mission d’exploration de Mars, ainsi que la construction d’une ville pour simuler les conditions sur cette planète.  Par ailleurs, elle a jugé essentiel d’enrayer la course aux armements dans l’espace.

En outre, les Émirats arabes unis ont accueilli, en 2017, en collaboration avec les Nations Unies, un Forum de haut niveau sur l’espace en tant que moteur du développement durable qui a abouti à la formulation de recommandations précieuses.  Les Émirats arabes unis font de nombreux efforts pour mettre en place des partenariats avec des entités de premier plan.  Ainsi, nous avons signé un accord pour le lancement du premier astronaute des Émirats arabes unis dans l’espace.

Pour M. DIEGO ALONSO TITUAÑA MATANGO (Équateur), le moment est propice pour évaluer les objectifs du contexte normatif international de l’espace.  Il est conscient des liens entre l’accès et l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques et pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  L’Équateur plaide en faveur d’un meilleur accès à l’espace pour les pays en développement, à travers des accords de coopération pour la mise en œuvre de programmes responsables qui profitent à toute l’humanité, a expliqué son représentant.

Il a mis l’accent sur les politiques de prévention des catastrophes naturelles au moyen de technologies de l’espace, précisant que l’Équateur défend la protection de l’environnement en tirant partie des sciences spatiales.

Le représentant a également souligné l’importance de promouvoir la coopération internationale dans l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et scientifiques et pas seulement commerciales.  Il a également soulevé les risques de saturation de l’orbite géostationnaire.

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a d’abord souligné l’importance de l’accès sans discrimination à la science et aux technologies spatiales pour les États, citant leur rôle indispensable pour le développement durable.  Il a aussi insisté sur le strict respect du principe d’égalité du droit de l’espace, appelant à une exploitation rationnelle de l’orbite géostationnaire.  Le représentant a ensuite appelé à répondre au problème des débris spatiaux. 

Poursuivant, le délégué a aussi souligné que l’un des principes cardinaux du droit de l’espace est l’exploitation exclusivement à des fins pacifiques de l’espace.  Toutefois, l’annonce par les États-Unis de créer une nouvelle force militaire pour l’espace extra-atmosphérique constitue une évolution alarmante.  Les Américains, a-t-il affirmé, cherchent à dominer l’espace, le considèrent comme une zone de guerre et travaillent à développer des systèmes d’armement pour l’espace.  De telles politiques et de telles mesures augmentent la possibilité d’une course aux armements ou même des conflits dans l’espace extra-atmosphérique, s’est-il alarmé.  Nous devons déployer tous les efforts possibles pour assurer que l’espace extra-atmosphérique soit exploré et utilisé uniquement à des fins pacifiques.  L’Iran appuie les négociations pour un instrument juridiquement contraignant de prévention de la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.

M. IBRAHIM MODIBBO UMAR (Nigéria) a estimé que l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique et des corps célestes doivent être faites à des fins pacifiques et pour le bénéfice de tous.  À cet égard, les États dotés de capacités spatiales importantes doivent contribuer activement à l’objectif d’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique, a-t-il déclaré, ainsi qu’à la prévention de la course aux armements dans l’espace.  Ils devraient aussi se retenir d’agir de manières contraires à cet objectif.

Le représentant a ensuite expliqué que le Nigéria entend utiliser ses capacités spatiales à des fins de développement, notamment pour procéder à des analyses environnementales et suivre l’évolution de questions essentielles comme la désertification.  Nous estimons que les stratégies spatiales peuvent et doivent bénéficier à toute l’humanité de manière équitable, que ce soit pour les pays développés ou ceux en développement, a-t-il insisté.

M. Umar s’est ensuite attardé sur l’impact des changements climatiques et des importants mouvements migratoires qu’ils entraînent, notamment dans la région du lac Tchad.  Le Nigéria essaie de reconstituer l’écosystème du bassin en menant des opérations de télédétection et rappelle, à cet égard, l’importance du partage d’informations.

M. MUSTAPHA ABBANI (Algérie) a expliqué que le programme spatial algérien vise à satisfaire les besoins nationaux dans divers domaines.  Il veille notamment à ce que les technologies spatiales puissent contribuer au développement socioéconomique tout en gardant à l’esprit l’importance de la coopération dans ce domaine, a expliqué le représentant.  Il a également expliqué que le système satellitaire algérien, qui est composé de 10 satellites mis en orbite par l’Algérie, vise à favoriser la protection de l’environnement et le suivi de la désertification, entre-autres.

Pour ce qui est des applications spatiales, le représentant a indiqué qu’elles ont notamment été utiles au projet de développement urbain grâce à des images satellitaires.  L’Algérie a participé à divers programmes régionaux organisés par le Bureau des affaires spatiales des Nations Unies.  Sur le plan régional, elle soutient toutes les initiatives dans les domaines des sciences et technologies spatiales pour favoriser le développement durable de l’Afrique.  À ce titre, il a cité un plan commun africain de satellites qui fournissent des données à moindre coût.

L’Algérie suit de près toutes les questions portées à l’attention du COPUOS et contribue à ses efforts en faveurs d’activités spatiales pacifiques au service du développement durable et du bien-être de l’humanité.  Elle appelle à définir les limites de l’espace extra-atmosphérique et à sa protection, ainsi qu’à une répartition équitable des positions orbitales réfutant le principe du « premier arrivé, premier servi ».  Le représentant a également mis l’accent sur la menace que représentent les débris spatiaux.  Il a demandé au COPUOS de tenir compte des inquiétudes exprimées par certains pays et de les aider à développer leurs capacités spatiales nationales.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission : les délégations s’opposent sur les meilleurs moyens de répondre aux nouveaux défis dans l’espace extra-atmosphérique

Soixante-treizième session,
16 & 17e séances – matin & après-midi
AG/DSI/3609

Première Commission : les délégations s’opposent sur les meilleurs moyens de répondre aux nouveaux défis dans l’espace extra-atmosphérique

Faut-il adopter un nouvel instrument juridiquement contraignant pour garantir la sécurité de l’espace extra-atmosphérique, ou se hâter de renforcer l’arsenal des mesures existantes?  Devant la Première Commission (désarmement et sécurité internationale), les délégations ont exprimé aujourd’hui leurs inquiétudes et leurs nombreuses attentes, face au développement rapide des technologies spatiales qui imposent de réfléchir à leur encadrement, alors que planent les menaces d’une course à l’armement dans l’espace.

Le débat a notamment fait apparaître le clivage entre les pays qui se rangent derrière la proposition de la Fédération de Russie et de la Chine en faveur de l’élaboration d’un traité juridiquement contraignant sur le non-déploiement des armes dans l’espace: un tel instrument permettait de renforcer le droit international dans un domaine où il est encore imprécis, ont estimé l’Égypte, au nom du Groupe arabe, le Nigéria ou encore le Venezuela. 

Sans pour autant « écarter » la possibilité d’un nouveau traité, pour la France, le Royaume-Uni ou l’Italie, l’urgence est toutefois d’adopter au plus vite de nouvelles mesures qui répondent aux préoccupations les plus aigües.

Une nouvelle fois, les débats ont frontalement opposé deux approches radicalement différentes des États-Unis et de la Fédération de Russie.  Hier déjà, la délégation américaine avait plaidé pour des mesures contraignantes mais qualifié « d’hypocrite et vide de sens » la proposition russe.  Ce n’est pas, selon elle, la réponse adéquate au renforcement de la confiance. 

« Les États-Unis préfèreraient que l’espace reste exempt de conflit mais ils seront prêts à relever toute forme de défi si nos adversaires transforment l’espace en théâtre de guerre », avait-elle prévenu.

En retour, la Fédération de Russie a jugé aujourd’hui « dangereuse » l’approche américaine selon laquelle l’espace serait devenu un « lieu de confrontation ».  Cette politique de « domination de l’espace » ne contribue pas à un dialogue efficace, ni à la stabilité, a constaté le représentant, qui a averti que « les négociations sur l’espace extra-atmosphérique risquent de ne pas aboutir du tout ».

Avec le développement de l’exploitation spatiale, les défis se complexifient et l’espace peut aussi constituer un lieu de confrontation, a mis en garde la France.  Parce qu’elle juge urgent d’agir, elle privilégie des propositions « rapidement applicables et immédiatement vérifiables ».

De même, si le Royaume-Uni « n’exclut pas » la possibilité de parvenir à un traité juridiquement contraignant à l’avenir, il considère que de graves défis politiques, technologiques et pratiques doivent être résolus rapidement.  Il a également appelé à identifier précisément les « menaces », qu’elles soient accidentelles, comme les risques de collision, ou volontairement agressives.

Mais pour une majorité de pays sans accès aux technologies spatiales, la préoccupation est surtout de ne pas se laisser déborder par les progrès vertigineux et d’accéder aux technologies et à leurs bénéfices.  « Tous les pays doivent pouvoir participer à l’exploration et à l’utilisation pacifique de l’espace et bénéficier de ses résultats », a estimé le Paraguay, appuyé par de nombreuses délégations.

Auparavant la Commission a achevé son débat sur les « Autres armes de destruction massive » qui a placé de nouveau les armes chimiques au centre des échanges, avec les interventions en particulier de la Syrie, de la Fédération de Russie et du Royaume-Uni.

À cette occasion, de nombreuses délégations, comme le Brésil et la Turquie, se sont félicitées de la décision, en juin dernier, à la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, d’élargir le mandat du Secrétariat technique de l’OIAC pour lui permettre d’attribuer la responsabilité en cas d’attaques à l’arme chimique.

Le non-renouvellement du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU, bloqué par le veto de la Fédération de Russie au Conseil de sécurité, a conduit à explorer d’autres options, a rappelé l’Australie, qui a aussi évoqué le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation des armes chimiques, dirigé par la France.

Pour de nombreux États, la création d’un tel mécanisme au sein de l’OIAC enverrait donc « un message clair » sur la fin de l’impunité, d’autant plus, a appuyé l’Australie, que les États parties à la Convention sur les armes chimiques doivent pourvoir attribuer des responsabilités pour toute violation de la Convention.  Mais si l’OIAC doit être mobilisée, il faudra envisager une augmentation de son budget, a toutefois estimé le Royaume-Uni.

Pour la Chine, qui souhaite « une enquête impartiale pour chaque allégation d’attaque », il convient cependant d’utiliser d’abord les mécanismes existants car les États Membres sont divisés sur la question.

La Fédération de Russie et la Syrie, toutes deux mises au banc des accusés, par le Royaume-Uni notamment, ont dénoncé la politisation du débat lors de ces travaux: donner mandat à l’OIAC pour enquêter outrepasse les attributions de l’OIAC et empiète sur celles du Conseil de sécurité, jugent-elles.

« C’est une violation claire du mandat de l’Organisation qui crée des complications supplémentaires pour l’OIAC et risque de la paralyser en accentuant les divisions entre ses membres », a notamment mis en garde la Syrie.

La Lettonie et les Pays-Bas sont par ailleurs intervenus pour rappeler les cyberattaques « hostiles » dont a été la cible l’OIAC au mois d’avril, et dont « le but semble être de saper l’autorité de la Convention », ont-ils regretté.

La Première Commission reprendra ses travaux demain, jeudi 24 octobre, à partir de 10 heures.

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Présentation de rapport

M. YANN HWANG (France) s’exprimant au nom de M. JEAN-CLAUDE BRUNET, Président de la troisième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis dans l’exécution du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, qui a eu lieu du 18 au 29 juin, a rappelé que plus de 900 millions d’armes légères et de petit calibre (ALPC) sont en circulation dans le monde et font 500 000 victimes par an.  Le trafic illicite de ces armes viole les embargos internationaux et contribue à la déstabilisation des sociétés.  Il contribue aussi à perpétuer les conflits, entraver le développement et aliment le crime organisé et le terrorisme.

Le Programme d’action sur les armes légères (PoA) est le seul instrument universel et consensuel susceptible de définir des pistes communes pour combattre le trafic des ALPC, a-t-il rappelé.  Dans ce cadre, une dizaine de séances de consultations ont été mises en place et toutes les séances plénières ont été ouvertes à la société civile, ONG et industries.  Plus de 98 États sont intervenus lors du débat général, une forte progression par rapport à la précédente Conférence, s’est-il félicité.

Les discussions se sont toutefois heurtées à deux difficultés qui ont conduit à un vote: la question des munitions, et la référence à le Programme 2030 du développement durable.  Le Document final de 21 pages a cependant été adopté à l’unanimité avec une déclaration politique et un plan de mise en œuvre, ainsi qu’une section consacrée à la promotion de la coopération et un calendrier de suivi 2018-2024.  Cet élan, a-t-il souligné, doit être maintenu.

Au cours de ses travaux, a-t-il poursuivi, la Conférence a considéré des avancées notables, comme le détournement et la neutralisation effective des ALPC, et la reconnaissance de la violence basée sur le genre, notamment les violences domestiques.  Le Programme 2030 a, par ailleurs, été affirmé comme cadre de référence pour la mise en œuvre du Programme d’action.  De plus, le Document final insiste sur la coopération régionale et internationale pour lutter contre les réseaux, ainsi que sur l’importance de renforcer les capacités.  Le représentant a aussi indiqué qu’au cours de ses prochains travaux, il est prévu de se pencher sur la lutte contre le détournement ainsi que sur les difficultés que peuvent introduire les nouvelles techniques de fabrication d’armes, comme l’utilisation d’imprimantes 3D ou de polymères.

Déclarations sur les autres armes de destruction massive (suite)

Mme ELIF ÇALIŞKAN (Turquie) a rappelé que son pays est proche de régions à haut risque et attache donc beaucoup d’importance au contrôle des armes. Après avoir qualifié l’utilisation des armes chimiques de crime contre l’humanité, la déléguée a déploré que ces armes aient été utilisées en Iraq, en Syrie, ou encore au Royaume-Uni. À ce titre, elle a regretté que le mandat du Mécanisme d’enquête conjoint n’ait pas été renouvelé malgré sa grande utilité.Elle s’est, par ailleurs, félicitée du renforcement des pouvoirs de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour mieux identifier les auteurs d’attaques à l’arme chimique. Après avoir demandé à la Syrie de coopérer avec l’OIAC, elle a dit espérer que la prochaine Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques permettra d’avancer.

Elle a enfin réitéré son appui à la Convention sur les armes biologiques et s’est réjouie que la réunion des États parties, en décembre dernier, ait permis de se mettre d’accord sur un programme de travail.

M. ALEJANDRO VERDIER (Argentine) a lancé un appel aux États parties pour qu’ils respectent les engagements pris aux termes de la Convention sur les armes chimiques.  L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) ayant démontré que des substances chimiques ont été utilisées comme armes, l’Argentine enjoint les États parties à déployer les efforts nécessaires pour maintenir le consensus au sein de l’Organisation.  Toute initiative doit être adoptée par consensus, a-t-il insisté.  La quatrième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques doit permettre de se projeter vers un monde exempt d’armes chimiques et de passer à l’étape suivante.  Il s’agit, a-t-il expliqué, de savoir ne pas s’en tenir à la non-utilisation des armes chimiques, mais aussi de déterminer comment en finir, comment envisager leur destruction et leur élimination. 

Il a aussi appelé à se pencher sur les risques inhérents aux groupes non étatiques.  En juin dernier, une conférence avec les industriels a notamment été l’occasion de discuter de cette menace et de comment prévenir l’emploi de ces produits par des terroristes.  Il est nécessaire d’agir de façon unie, et l’OIAC doit protéger les avancées réalisées et renforcer son action, d’où la nécessité d’éviter de l’affaiblir, a-t-il insisté.

Mme SALLY MANSFIELD (Australie) a appelé tous les États Membres à appuyer les efforts du Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) à établir un mécanisme d’attribution sur la Syrie.  « Cela enverrait un message clair selon lequel les auteurs d’armes chimiques seront toujours tenus pour responsables. »  Lorsque le renouvellement du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU a été bloqué, la communauté internationale a exploré d’autres options, y compris le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation des armes chimiques, dirigé par la France.  « Nous devons continuer à travailler de concert pour ajuster les politiques et les régulations, afin de refléter les nouvelles menaces et technologies dans le domaine des armes de destruction massive, ce qui inclue de robustes contrôles des exportations », a-t-elle souligné.

La représentante a en outre estimé que, si le Conseil de sécurité conserve « bien sûr » l’autorité pour répondre aux préoccupations sécuritaires internationales liées à l’utilisation d’armes chimiques, et de décider quelles mesures appropriées doivent être prises, les États parties à la Convention sur les armes chimiques doivent aussi être capables d’attribuer des responsabilités pour toute violation de la Convention.

Elle a, par ailleurs, indiqué que le groupe australien fédère 43 participants impliqués dans l’harmonisation de contrôle des exportations, afin d’éviter que les États terroristes obtiennent ce dont ils ont besoin pour construire des armes chimiques et biologiques, a-t-elle indiqué.

Mme KATE VASHARAKORN (Thaïlande) a déclaré que les normes internationales contre l’utilisation des armes chimiques et biologiques ont été fermement établies après une prise de conscience majeure.  La communauté internationale a été témoin des conséquences de l’utilisation de ces armes durant la Première Guerre mondiale, a-t-elle rappelé.

Elle a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour combattre l’utilisation d’armes chimiques et a condamné leur utilisation par qui que ce soit, qu’elles que soient les circonstances.  Les auteurs doivent être tenus pour responsables, a-t-elle rappelé.  En même temps, a-t-elle déclaré, le processus de contrôle doit être transparent, équilibré et consensuel.  La vingt-troisième session de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, ainsi que la quatrième Conférence d’examen des États parties à cette même Convention seront l’occasion de délibérer sur ces sujets, a-t-elle estimé.

La représentante a en outre salué les conclusions fructueuses de la Réunion des États parties à la Convention sur les armes biologiques, qui a débouché sur un consensus.  Elle a estimé qu’un protocole de vérification juridiquement contraignant est nécessaire pour réaliser les objectifs de la Convention.

M. ABDULLAH HALLAK (République arabe syrienne) a affirmé « que son pays respecte ses engagements au terme de la Convention sur les armes chimiques, soulignant notamment qu’il a remis ses substances chimiques à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et détruit ses stocks.  Les armes ont été détruites sur un navire américain au large de la Méditerranée, et l’armée syrienne ne possède actuellement aucune arme chimique, ne les a jamais utilisées, ni ne compte le faire », a-t-il assuré.  Il a ensuite appelé les États Membres à trouver l’auteur des crimes commis en Syrie « ailleurs ».

Le Gouvernement syrien condamne le crime d’utilisation des armes chimiques et appuie les efforts pour parvenir à un Moyen-Orient exempt d’armes de destruction massive, a poursuivi le représentant.  En 2003, la Syrie a déposé un projet de résolution en ce sens et a par ailleurs adhéré à la Convention sur les armes chimiques pour rappeler au monde entier qu’elle s’oppose à l’utilisation de ce type d’armes, en dépit des circonstances difficiles qu’elle traverse.

La Syrie, a-t-il ajouté, a en outre mis la communauté internationale en garde contre l’éventuelle utilisation d’armes chimiques par des groupes terroristes, surtout après la main mise d’un groupe sur une usine de chlore à l’est d’Alep.  Et c’est exactement ce qui s’est produit peu après, a-t-il dénoncé, déplorant une attaque qui a fait 25 morts et 110 blessés civils et militaires.  Malgré tout, aucune enquête n’a été diligentée, a-t-il regretté.

La Syrie rejette enfin les méthodes employées par le Royaume-Uni, les États-Unis et la France pour faire adopter une résolution lors de la Conférence de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques dans le but, a-t-il affirmé, de politiser l’OIAC.  Aux yeux du représentant, cette résolution contrevient à la Convention et constitue un précédent international, en attribuant à une organisation des prérogatives qui ne sont pas les siennes.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a estimé que la communauté internationale ne devrait pas admettre que soit défiées les normes contre l’utilisation d’armes chimiques.  Selon lui, la Convention sur les armes chimiques joue un rôle unique: c’est la seule convention sur les armes de destruction massive disposant d’un mécanisme de vérification.  Il faut donc redoubler d’efforts pour la préserver, a-t-il insisté.  Il a aussi souligné le rôle du Conseil de sécurité, notamment ses compétences en cas de violation de la Convention.  S’il a regretté que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) n’ait pas pu attribuer des responsabilités après de récentes utilisations d’armes chimiques, en raison de blocages d’ordre politique, le Brésil participera malgré tout de façon constructive aux préparatifs de la prochaine Conférence d’examen.

Le représentant a ensuite réaffirmé que la coopération internationale est un des piliers de la Convention sur l’interdiction des armes biologiques.  Il a insisté en outre sur la reconnaissons du droit d’entreprendre des recherches biologiques à des fins pacifiques et a souhaité, à ce titre, que le mécanisme de coopération soit renforcé.  Il a finalement regretté que les États parties à cette Convention n’aient pas pu reprendre les négociations sur un protocole qui aurait créé un mécanisme de vérification sur le même modèle que celui de l’OIAC.

Pour Mme MARÍA PALACIOS (Espagne) la passivité face à la détérioration de la norme internationale sur l’utilisation d’armes chimiques n’est pas une alternative.  L’Espagne a donc rallié, dès le départ, le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, ainsi que la création d’un mécanisme au sein de l’OIAC.  Le moment est venu de mettre en pratique le mandat de ce mécanisme adopté en juin, a-t-elle souligné.  Elle a appelé les États Membres à faire preuve de générosité et de hauteur de vue, soulignant les services importants rendus pas la Convention et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).

Elle a aussi attiré l’attention sur l’importance de la Convention sur les armes biologiques, estimant dans la foulée que les différences d’interprétation ne peuvent empêcher d’avancer de façon pratique.  Le programme intersession fournit des opportunités importantes de trouver des dénominateurs communs et d’avancer sur des mesures de confiance et le contrôle des exportations, a-t-elle estimé.

M. PYE SOE AUNG (Myanmar) a rappelé que la Convention sur les armes chimiques est le seul traité multilatéral permettant d’interdire les armes chimiques, leurs vecteurs et d’encadrer l’utilisation pacifique de ces substances.  Hélas, a-t-il poursuivi, elles font toujours parties des arsenaux.  Rassuré par l’annonce de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) que 96% des armes chimiques avaient été détruites sous son mécanisme de vérification, il a souligné que l’Organisation avait réussi à mener à bien un processus de démilitarisation chimique en Russie et en Libye.  « Nous attendons avec impatience les résultats fructueux de la quatrième Conférence d’examen, du mois prochain », a-t-il ajouté.

Pour ce qui est du danger représenté par les armes de destruction massive, il a estimé que la mise en œuvre de la résolution 1540 peut clairement contribuer à un monde plus sûr.  « Il faut que les États Membres refusent à tous les acteurs non étatiques d’accéder à des armes de destruction massive, spécialement lorsque ce sont des terroristes », a-t-il insisté.  Il a finalement exhorté tous les États Membres de respecter leurs obligations internationales.

M. GIANFRANCO INCARNATO (Italie) a rappelé le soutien plein et actif de l’Italie à la Convention sur les armes chimiques et au travail de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il a dit son inquiétude quant à l’utilisation des armes chimiques, ces derniers mois.  Mais condamner n’est pas suffisant, a-t-il insisté, la communauté internationale doit s’assurer que les responsabilités soient établies.  À cet égard, il s’est félicité de l’extension des capacités de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour identifier les utilisateurs de ces armes.  Il en a aussi profité pour soutenir le travail de la mission d’établissement des faits menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en Syrie.

L’Italie a ensuite apporté son plein soutien à la Convention sur les armes biologiques.  Il a regretté, à ce titre, que l’état des contributions financières la place dans une situation compliquée.  Appelant tous les États parties à respecter leurs obligations financières, il a noté le risque croissant de voir des armes de destruction massive tomber dans les mains des terroristes.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a demandé des efforts supplémentaires pour assurer la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques, et s’est dit préoccupé par les rapports faisant état de leur utilisation, y compris dans les situations de conflit prolongé, comme en Syrie.  Les responsabilités doivent être établies, a-t-il insisté, estimant que le Conseil de sécurité devait jouer un rôle pour faciliter ces enquêtes. 

Le représentant a de plus estimé que des mécanismes parallèles peuvent être créés en l’absence d’approches consensuelles.  Il a souhaité que le secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) dispose des moyens pour s’acquitter de son mandat de façon impartiale et efficace.  Face à la « menace alarmante » d’utilisation des armes chimiques par des groupes terroristes, il a appelé les États Membres à travailler étroitement avec l’OIAC.

Concernant la Convention sur les armes biologique, le représentant s’est préoccupé des avancées scientifiques et de la possibilité de conflit biologique. Il a demandé que la coopération et l’assistance internationales puissent être partagées avec les pays en développement afin de les aider à tenir leurs engagements.

Concernant les armes biologiques, M. JI HAOJUN (Chine) a affirmé que son pays a appuyé le modèle de conduite pour les scientifiques dans le cadre de la Convention sur les armes biologiques.  Par ailleurs, il a estimé que le contrôle des exportations et le régime de coopération doivent servir de cadre international sur la question de ces substances.

En novembre, a-t-il rappelé, se tiendra à La Haye la quatrième Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques.  « Nous espérons que toutes les parties l’utiliseront au mieux pour renforcer les objectifs de la Convention », a-t-il affirmé.  Rappelant qu’elle avait reçu plus de 500 inspections sur le terrain, la Chine a estimé promouvoir de façon active la coopération internationale.

Le représentant a ensuite apporté son appui à une enquête complète et impartiale quant à l’établissement des faits pour chaque utilisation alléguée d’armes chimiques. Selon lui, il faut continuer d’utiliser le mécanisme existant pour y arriver. Le fait qu’il ait fallu un vote lors de la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques qui dote l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour adopter le renforcement des pouvoirs de l’OIAC, est selon lui un signe que les États parties sont divisés quant à l’utilisation des armes chimiques. Il s’est tout de même félicité des progrès réalisés dans la destruction des armes chimiques en Syrie et en Iraq.

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a condamné toute utilisation d’armes chimiques partout et par qui que ce soit, accusant notamment la Syrie et la Russie d’avoir violé la Convention sur les armes chimiques et causé un affront au système et à la communauté internationale.  À ses yeux, l’attaque de Salisbury a démontré que la communauté internationale peut s’unir pour identifier les auteurs et assurer les responsabilités.  Mais la Russie a empêché que des enquêtes soient conduites et les auteurs envoyés devant la justice, a-t-il regretté.  La réunion en juin, des États parties à la Convention est pourtant le signe que la communauté internationale veut renforcer ses moyens face à ces attaques.  Mais, pour ce faire, une hausse du budget de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) est nécessaire.  Il a ensuite annoncé que le Royaume-Uni débloquait un million de livres sterling supplémentaires à cet effet, appelant également les États parties à contribuer.

De même, a-t-il poursuivi, il faut s’assurer que la Convention sur les armes biologiques reste efficace et de portée mondiale.  Les efforts pour son universalisation sont donc essentiels.  Il a aussi appelé le Secrétaire général des Nations Unies et les autres organes pertinents à créer des mécanismes de financement durables de la Convention et engagé les États à payer d’urgence leurs arriérés.

Il a, par ailleurs, appelé l’Iran à ne pas développer de missiles balistiques, ni leurs techniques de lancement.  Il a aussi appelé à la mise en œuvre de la résolution 1540 qui vise à empêcher que des armes biologiques et chimiques ne tombent entre les mains des groupes terroristes.

M. HÉCTOR ENRIQUE JAIME CALDERÓN (El Salvador) a demandé à poursuivre la mise en œuvre de toutes les dispositions des Conventions sur les armes biologiques et chimiques.  S’il s’est félicité des avancées, il a jugé qu’un travail considérable restait à faire.  Il s’est dit notamment préoccupé de l’utilisation de ces armes contre des civils.  À ses yeux, il est impératif d’établir des responsabilités après les faits atroces de ces dernières années.  Pour lui, il en va de la préservation de la crédibilité des enquêtes.

Le représentant a ensuite réaffirmé son engagement au renforcement de la Convention sur les armes biologiques.  Il a, à ce propos, déploré que la huitième Conférence d’examen ne soit pas parvenue à un consensus pour un document final.  Il a appelé à la volonté politique de tous les États parties à la Convention pour répondre aux défis actuels et à venir.  Enfin, il a rappelé qu’il y a des bénéfices et des opportunités pour les États dans la recherche biologique.  Il a donc demandé à renforcer les échanges.

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a invité tous les États parties à détruire leurs stocks d’armes chimiques déclarés avec l’appui et le suivi de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et dans le respect de la Convention sur les armes chimiques.  Il a jugé nécessaire de protéger l’OIAC contre toute influence extérieure lorsqu’elle s’acquitte de ses fonctions, car elle a énormément contribué à la mise en œuvre de la Convention depuis sa création, a-t-il insisté.  La Malaisie soutient, par ailleurs, les appels en faveur de l’universalisation de la Convention sur les armes biologiques et met en place actuellement une législation nationale en ce sens.  Mon pays, a indiqué le représentant, entend consentir tous les efforts possibles pour assurer que l’Asie du Sud-Est reste une zone exempte d’armes de destruction massive.

M. LEE JANG-GEUN (République de Corée) a rappelé que la menace de l’utilisation des armes chimiques et biologiques n’est pas moins sérieuse aujourd’hui que celle des armes nucléaires.  « Nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que la question des armes chimiques syriennes reste sans réponse, cinq ans après que la Syrie a rejoint la Convention sur les armes chimiques en 2013 ».  Il a déploré que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) soit toujours incapable de trouver des solutions face aux « inconsistances » des déclarations syriennes.  Il a appelé urgemment la Syrie à coopérer avec les mécanismes de l’OIAC.  Les responsables de crimes haineux commis à l’aide d’armes chimiques doivent rendre des comptes, a-t-il déclaré.  À cet égard, il a appuyé la décision relative aux menaces d’utilisation d’armes chimiques qui a été adoptée lors de la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques en juin dernier.  Les mécanismes d’attribution conférés à l’OIAC permettront de dissuader les auteurs potentiels d’utiliser les armes chimiques dans le futur et contribueront à l’application effective de la Convention sur les armes chimiques.

Passant à la question de la Convention sur les armes biologiques, le représentant s’est félicité des résultats de la Réunion des États parties de 2017 et de l’établissement d’un programme intersession pour 2018-2020.  Pour assurer la stabilité financière de la Convention, il faut toutefois identifier par quels moyens générer le plus vite possible des capacités financières dans les processus opérationnels.

M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) a apporté son soutien à la Convention sur les armes biologiques et a espéré que la neuvième Conférence d’examen, en 2021, permettra d’arriver au consensus.  La Russie a soumis une proposition d’aide et de coopération internationales en cas d’attaque à l’arme biologique et présenté un document de travail en ce sens.  Pour la Russie, les amis de la Convention doivent soutenir les travaux intersessions qui permettraient de rapprocher les délégations dans le but d’adopter des mesures appropriées pour faire diminuer la menace.  Il n’y a pas d’alternatives, a-t-il estimé, en rappelant que 182 États apportent leur pierre à l’édifice.  Mais le régime de la Convention subit des pressions avec la montée des activités biologiques, d’où l’importance d’améliorer la confiance et la transparence dans sa mise en œuvre.

Par ailleurs, la Russie soutient pleinement le régime de la Convention sur les armes chimiques, l’un des outils les plus fructueux du désarmement, selon elle.  Elle agit d’ailleurs en joignant l’action à la parole: l’élimination de tous les stocks russes d’armes chimiques a été menée à bien avant même les dates prévues en septembre 2017, ce qui a été certifié par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), s’est félicité le représentant.  Il a appelé les autres États « et surtout les États-Unis) à suive cet exemple pour parvenir à la démilitarisation chimique. Il a regretté cependant la politisation du débat, lors de quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques qui dote l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), estimant que certaines conclusions ne sont pas légitimes. Celles-ci, s’est-il inquiété, outrepassent les mandats de l’Organisation et empiètent sur celui du Conseil de sécurité. Il a enfin affirmé que les accusations du Royaume-Uni concernant Salisbury « ne sont pas fondées et ne visent qu’à tromper la communauté internationale ».

M. ARIEL RODELAS PENARANDA (Philippines) a condamné dans les termes les plus forts l’utilisation des armes chimiques où que ce soit, par qui que ce soit, et quelles que soient les circonstances.  « C’est inacceptable et c’est une violation du droit international », a-t-il déclaré.  Les Philippines sont engagées dans la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques et dans le travail de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  « Nous sommes à jour de nos obligations », a-t-il déclaré.  Les Philippines continuent de travailler activement pour intégrer dans le droit national les obligations qui leur incombent aux termes de la Convention.

Par ailleurs, le représentant a fait part de ses préoccupations en ce qui concerne la prolifération des armes de destruction massive, en particulier des armes biologiques et chimiques. Il a appelé les États Membres qui ne l’ont pas fait à signer et ratifier le Convention sur les armes biologiques et la Convention sur les armes chimiques sans délai.

M. SEYED ALI ROBATJAZI (République islamique d’Iran) a dénoncé les attaques aveugles à l’arme chimique qui peuvent avoir des conséquences terribles sur les civils.  Il a rappelé que son pays a été victime de ces armes, lorsque le régime de Saddam Hussein, « avec l’appui des États-Unis », les a utilisées contre lui.  Nombre de survivants souffrent encore des conséquences de ces attaques, a-t-il ajouté, et la mémoire de ces victimes a inspiré la création de la Convention sur les armes chimiques. Pour lui, il est vital de maintenir cette histoire en prenant à bras le corps les défis.

Il a ensuite accusé les États-Unis d’être « le seul État possesseur d’armes chimiques à ne pas avoir éliminé tous ses stocks » et lui a rappelé qu’il avait des obligations internationales à respecter.  Revenant sur la situation en Syrie, il a estimé que des groupes armés terroristes n’auraient pas pu utiliser des armes chimiques sans aide.  Selon lui, cette situation ressemble beaucoup à ce qui s’est passé pendant la guerre entre l’Iran et l’Iraq.  D’après le délégué, de nombreuses entreprises européennes et américaines ont apporté une aide logistique au régime de Saddam Hussein, et ce commerce n’aurait pas pu être possible sans la « bénédiction » des gouvernements des pays où siégeaient ces entreprises.  Appelant à préserver l’intégrité de la Convention mais aussi sa crédibilité, l’Iran s’est dit prêt à collaborer à son renforcement ainsi qu’à celui de l’OIAC.  Il a appelé tous les États à rejoindre la Convention, et particulièrement Israël « qui possède toujours de grands stocks d’armes chimiques ».

Sur la question des armes biologiques, le représentant a estimé que le premier défi à relever est d’assurer la reprise des négociations pour un protocole juridiquement contraignant dans le cadre de la Convention sur les armes biologiques.  Il a demandé aux États-Unis de retirer leur objection quant à ce protocole, pointant par ailleurs le refus du régime israélien de participer à cette Convention.

Mme AUDRA PLEPYTĖ (Lituanie) s’est dite outrée que, 25 ans après la signature de la Convention sur les armes chimiques, on assiste aujourd’hui à de nombreux cas confirmés d’utilisation de ce type d’armes, notamment en Syrie et en Iraq mais aussi au Royaume-Uni et en Malaisie.  La Lituanie condamne dans les termes les plus fermes ces attaques à l’arme chimique par des acteurs étatiques et non étatiques et appelle la communauté internationale à « prendre ses responsabilités » et à consolider les efforts visant à renforcer les moyens institutionnels pour garantir la pleine mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.  « Ces attaques présumées doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies et leurs responsables doivent être traduits en justice », a exigé la représentante, s’associant au passage à l’évaluation faite par les autorités britanniques de l’attaque de Salisbury à l’agent neurotoxique.

Elle a également regretté que le renouvellement du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU pour la Syrie ait été bloqué par une série de vetos russes au Conseil de sécurité, rappelant que les experts du Mécanisme avaient conclu à la responsabilité à la fois du Gouvernement syrien et de l’EILL dans l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.  La Lituanie appelle tous les États Membres à coopérer de bonne foi avec l’OIAC et ses experts et estime que toute tentative de discréditer son travail et son autorité, y compris par des cyberattaques, est inacceptable.  À cet égard, la représentante a rappelé le nouveau régime de mesures restrictives adopté, le 15 octobre, par les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne pour faire face à l’utilisation et la prolifération des armes chimiques.

Indignée par la recrudescence récente de l’utilisation d’armes chimiques, Mme ELISABETH TICHY-FISSLBERGER (Autriche) a condamné ces attaques dans les termes les plus forts, rappelant que le monde s’était engagé à éliminer ces armes.  Pour sa délégation, la Convention sur les armes chimiques est un élément clef du régime international du désarmement et de la non-prolifération.  Les violations récentes de cette Convention sont, par conséquent, très préoccupantes, a estimé la représentante, pour laquelle il ne peut y avoir d’impunité dans ce cas.  Sa délégation soutient par conséquent la décision de l’OIAC, de juin, de mettre en place un mécanisme « d’attribution » pour déterminer qui est responsable de l’utilisation d’armes chimiques.  C’est dans cet esprit que l’Autriche participe au Partenariat international contre l’impunité en cas d’utilisation d’armes chimiques, et soutient le régime de sanctions de l’Union européenne sur cette question. 

La représentante a également fait part des préoccupations de sa délégation face à la modernisation des systèmes de lanceurs d’armes de destruction massive, en particulier de missiles balistiques.  L’Autriche souhaite que les programmes spécifiques de certains pays soient examinés tant sur le plan bilatéral que multilatéral.  Le Code de conduite de La Haye est un instrument multilatéral important pour la transparence et le renforcement de la confiance à cet égard, a rappelé le représentant, qui a encouragé tous les États Membres à y souscrire.

Mme SACHI CLARINGBOULD (Pays-Bas) a rappelé qu’en avril, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), à La Haye, a fait l’objet d’une cyberattaque hostile.  Le 4 octobre, les Présidents de la Commission et du Conseil européen ainsi que le Haut-Représentant des affaires européennes de l’UE ont fait part de leur préoccupation concernant cette attaque dont le but semble être de saper l’autorité de la Convention.  Cet acte agressif illustre le mépris de certains envers des objectifs solennels de l’OIAC, qui œuvre pour éradiquer les armes chimiques, sous mandat onusien.  Le représentant a déploré que, l’année dernière, le Conseil de sécurité n’ait pas réussi à trouver un accord sur la prorogation du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint, ce qui, a-t-elle déploré, a créé un état d’impunité pour l’utilisation des armes chimiques en Syrie.  Elle a salué l’appui dont bénéficie la décision prise lors de la quatrième séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, en juin dernier, qui a étendu le mandat du secrétariat technique de l’OIAC afin de déterminer qui est responsable de l’utilisation de ces armes.

« Comme nous l’avons répété de nombreuses fois, par le passé, il y a un travail important à faire concernant la déclaration initiale de la Syrie », a-t-il déclaré.  Ces dernières années, il y a eu un grand nombre d’incidents liés à l’utilisation d’armes chimiques, dont quatre ont été attribués au régime syrien.  « Ce comportement est un outrage auquel il faut répondre sans délai », a-t-il déclaré.  À cet égard, les Pays-Bas travaillent avec l’Union européenne pour renforcer les sanctions contre la Syrie.

Concernant l’attaque de Salisbury, au Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Canada sont coauteurs d’un projet de résolution des États-Unis pour inclure sur la liste 1 de la Convention sur les armes chimiques, l’agent chimique qui a été utilisé à Salisbury - et ceux qui s’en rapprochent.

M YANN HWANG (France), au nom du Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, qui regroupe 39 États et organisations depuis le 23 janvier 2018, a rappelé que ses membres avaient soutenu en mai l’appel à organiser une séance extraordinaire de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques pour considérer les moyens de renforcer sa mise en œuvre, notamment en ce qui concerne les attributions des responsabilités. Il a aussi salué les dispositions de la décision de la quatrième Conférence qui permettent d’envisager d’accorder d’avantage d’assistance aux États parties dans la mise en œuvre de leurs obligations et de renforcer la coopération internationale dans les limites de la Convention quand il s’agit d’améliorer la sécurité chimique.

La Convention sur les armes chimiques est un pilier essentiel du désarmement international et le renforcement de ses capacités est essentiel a-t-il insisté.  Il a noté avec inquiétude les conclusions de la mission d’établissement des faits de l’OIAC sur l’utilisation des armes chimiques à Latameh, en mars 2017, à Saraqib, en février 2018, et du rapport préliminaire sur l’attaque de Douma en avril 2018.  Jugeant « hautement probable » la responsabilité de la Syrie en la matière, il a appelé ses responsables à honorer leurs obligations en tant qu’État partie à la Convention.

Il a également condamné l’attaque de Salisbury et partagé les conclusions du Royaume-Uni qui indiquent que la responsabilité de la Russie est « hautement probable ».

Déclarations sur les armes conventionnelles

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie) au nom Mouvement des pays non alignés, s’est dite inquiète des conséquences humanitaires de la circulation illicite des armes légères et de petit calibre, tout en réaffirmant le droit souverain des États à en posséder pour leur autodéfense.  Elle a donc lancé un appel aux États exportateurs d’ALPC de bien s’assurer que leurs envois sont destinés uniquement à d’autres États.  Elle a, à cet égard, insisté sur le besoin urgent de redoubler d’efforts pour promouvoir la sécurité et l’assistance.

Sur le danger spécifique représenté par les armes à sous-munitions, elle a demandé que l’assistance humanitaire nécessaire soit fournie aux pays concernés pour les aider à retirer ces armes de la circulation et assister les victimes.  Déplorant l’utilisation de mines antipersonnel, elle a exhorté les États qui le peuvent à fournir assistance financière et toute aide additionnelle pour combattre ce fléau.

La représentante a ensuite appelé au respect du Traité sur le commerce des armes, tout en soulignant que sa mise en œuvre ne doit pas empiéter sur le droit souverain des États à importer, exporter, ou acquérir des armes ou composants nécessaires à leur autodéfense et à leur sécurité.

Elle s’est par ailleurs dit d’avis que les systèmes d’armes létales autonomes posent des questions juridiques et morales au niveau du droit international et des droits de l’homme.  C’est pourquoi, elle a expliqué appuyer la mise en place, dans le cadre de la Convention concernant certaines armes classiques, de dispositions particulières pour ces systèmes d’armes.  Il a enfin appelé les États à réduire de manière significative leurs stocks et production d’ALPC « Ces ressources devraient être affectées à la paix, à la sécurité et au développement de l’économie mondiale », a-t-il conclu.

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté toutes les accusations selon lesquelles des ressortissants russes seraient responsables de l’incident à Salisbury, affirmant que son pays n’a jamais stocké les substances chimiques utilisées pour commettre cette attaque.  Selon lui, plus de 20 États, dont certains membres de l’OTAN, desquels le Royaume-Uni, auraient les moyens de produire les substances neurotoxiques Novitchok qui, de plus, ne font pas partie de la liste de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).

Il a donc appelé l’OIAC à étudier l’inscription de nouvelles substances, rappelant qu’en mai dernier la Russie a transmis un document de 390 pages portant sur les nouvelles substances toxiques qu’il serait bon d’examiner dans le but de les ajouter à la liste de contrôle de l’Organisation.  Les accusations britanniques se font sur la base d’élucubrations sans la moindre preuve sérieuse, la formule « hautement probables » n’ayant que des visées politiques, a-t-il accusé.  Affirmant que ce comportement a déjà été vue par le passé notamment concernant la Syrie, il a dénoncé une « instrumentalisation de charlatan » qui permet aux coupables de s’en sortir « en se frottant les mains ».  La Russie condamne toutes les attaques chimiques et biologiques et veut que les coupables soient jugés.

Le représentant de la Syrie a réfuté toutes les accusations fallacieuses concernant l’utilisation d’armes chimiques par la Syrie.  L’armée syrienne n’en dispose pas, ne les a jamais utilisées et ne les utilisera jamais puisqu’elle n’en a pas, a-t-il martelé.  Il a ensuite accusé le Royaume-Uni, les États-Unis et la France de jouer un rôle subversif en Syrie en soutenant des groupes terroristes et en les aidant à transporter, stocker et utiliser ces armes chimiques.

Ces trois États, a-t-il poursuivi, ont aussi tenté de politiser l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et de l’utiliser comme vecteur en vue de commettre des agressions contre d’autres États.  Ils ont créé un précédent grave en donnant à l’OIAC le pouvoir de mener des enquêtes pénales qui ne sont pas de son ressort.  C’est une violation claire du mandat de l’Organisation qui crée des complications supplémentaires pour l’OIAC et risque de la paralyser en accentuant les divisions entre ses membres.

Poursuivant, il a dénoncé le projet de résolution « hypocrite et mensonger » de la Turquie qui, a-t-il accusé, fournit des armes, y compris chimiques à Daech au front el-Nosra, entre autres.  Selon lui, ces groupes mènent des essais en Turquie, qui supervise le transport et le trafic de substances toxiques vers la Syrie destinées aux terroristes.

Les Pays-Bas aussi transportent des substances toxiques vers l’entité israélienne et d’autres États, a poursuivi le représentant.  Pourquoi n’ont-ils pas signalé ces produits à l’OIAC?

Le représentant des États-Unis a qualifié de risibles les propos de la délégation iranienne.  Il lui a également rappelé que les États-Unis ont indiqué à de nombreuses occasions que la destruction de leurs stocks d’armes chimiques serait effective d’ici à 2023.  Le représentant a également accusé l’Iran d’entraver les progrès dans l’application de la Convention sur les armes biologiques.  Le régime iranien, a-t-il dénoncé, soutient des terroristes et des pays qui ont utilisé des armes chimiques, rappelant par ailleurs la prise en otage des diplomates américains.

Aux accusations de la Syrie, il a répondu que son délégué n’avait fait que reprendre les éléments de langage de « la machine à propagande de Damas ».  Mais selon lui, les faits sont là: la Syrie est coupable d’attaques chimiques contre son peuple.

Le représentant d’Israël s’est contenté de rappeler que son pays est signataire de la Convention sur les armes chimiques et qu’il dispose d’un robuste mécanisme de contrôle des exportations.

Le représentant de la République islamique d’Iran a affirmé que certains des composants chimiques des missiles que Saddam Hussein a fait pleuvoir sur les villes iraniennes ont été fournis par des entreprises étrangères, dont américaines.  En plus de cette agression soutenue par les États-Unis, l’Iran a été assujetti à des interventions et des menaces américaines ces dernières décennies.  Pendant de nombreuses années, des pays de la région ont appelé à une agression contre la République islamique d’Iran, a-t-il insisté, et la dernière menace en date venue d’Israël était même une attaque nucléaire.

Pour ne pas laisser son peuple sans défense, l’Iran a développé son propre système de défense par missiles, a indiqué le délégué, qui a ajouté que ses budgets de défense sont malgré tout infiniment inférieurs à ceux des partenaires des américains.  « Le programme balistique de l’Iran est un système de défense, a-t-il répété.  Considérer les missiles iraniens comme une menace régionale est le signe d’une politique hostile des États-Unis et de leurs alliés ».  Il a en outre assuré que les missiles lancés par l’Iran n’étaient pas des vecteurs pour des armes nucléaires.

Le représentant du Royaume-Uni a souligné que ses accusations se fondaient sur une enquête minutieuse de la police britannique.  Il a accusé la Syrie et la Russie de chercher à détourner l’attention de leur utilisation de l’arme chimique et de saper les institutions qui permettent les enquêtes.  Elles agissent ainsi parce qu’elles sont désespérées, et elles sont désespérées parce qu’elles se sont fait prendre. 

Déclarations sur l’espace extra-atmosphérique (aspects du désarmement)

M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte) au nom du Groupe des États arabes a plaidé pour que l’espace ne devienne pas un nouveau champ de bataille et réclamé un nouvel instrument juridiquement contraignant, qui préviendrait l’escalade ainsi que les lacunes juridiques en ce domaine, surtout face à la progression des capacités militaires.  Il a appelé à interdire le déploiement d’armes dans l’espace, les attaques contre les satellites et autres objets, ainsi que les interférences internationales qui entravent le fonctionnement des objets célestes.  Chaque interdiction devait être assortie de mesures de vérification fiables et d’un mécanisme de règlement des différends qui permettrait d’éviter toute mauvaise utilisation des progrès dans l’espace, a-t-il ajouté.

L’Égypte s’est par ailleurs félicitée de la création du Groupe d’experts gouvernementaux et des progrès enregistrés lors de leur première sessions en août. 

Mme YAILIAN CASTRO LOREDO (Cuba) a rappelé le droit légitime des États à accéder à l’espace extra-atmosphérique et a réclamé un accès sur un pied d’égalité à toutes les technologies, estimant que cela pourrait contribuer à la réalisation des objectifs du Programme 2030.  Selon elle, l’exploration et l’utilisation de l’espace doivent être effectuées au bénéfice de tous les États Membres.  Préoccupée par la menace d’une course aux armements dans l’espace et la présence de matériels belliqueux dans l’espace, elle a regretté que les technologies spatiales soient parfois utilisées au détriment des populations.  Elle a cité, à cet effet, la saturation de l’orbite géostationnaire par des satellites espions.

Demandant un renforcement juridique des instruments pour prévenir ou interdire la présence d’armes dans l’espace, elle a estimé qu’un nouvel instrument devrait intégrer une interdiction de l’usage de la force contre des objets spatiaux.  Selon elle, la proposition de la Chine et de la Fédération de Russie est une bonne base de discussion.  Elle s’est par ailleurs félicitée de plusieurs avancées notables, comme le renforcement de la transparence et de la confiance, la création d’un organe subsidiaire à la Conférence du désarmement ou encore l’examen d’un instrument international juridiquement contraignant dans le cadre d’un Groupe d’experts gouvernementaux.  « L’espace extra-atmosphérique ne doit pas devenir un nouveau théâtre d’opérations », a-t-elle conclu.

M. SHUAIB MAHOMED (Afrique du Sud) a estimé que, vu l’exploration de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et son rôle de plus en plus important dans le développement de l’humanité, la communauté internationale a la responsabilité d’empêcher que l’espace ne devienne un nouveau lieu de positionnement des armes.  L’Afrique du Sud estime que le meilleur moyen de promouvoir la sûreté, la sécurité et la durabilité des activités dans l’espace extra-atmosphérique passe par la coopération et le dialogue international, sur une base équitable.  Il est nécessaire de prendre des mesures pour faire en sorte que l’espace ne devienne pas le prochain lieu de conflit et, par conséquent, qu’une course aux armements dans l’espace ne devienne pas une réalité, a ajouté le représentant.

L’Afrique du Sud soutient les négociations de la Conférence sur le désarmement sur un instrument juridiquement contraignant qui préviendrait une telle course aux armements.  M. Mahomed a, à cet égard, salué la proposition de la Chine et de la Russie pour un projet de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace, même si son adoption semble improbable dans un futur proche.  Il a estimé qu’un traité sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace complèterait et réaffirmerait l’importance du traité de 1967.

M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a dit avoir renoncé à l’utilisation ou la menace de l’utilisation de la force dans les relations internationales et, à ce titre, a souhaité que soit interdit le déploiement d’armes dans l’espace: des mesures concrètes de transparence et de renforcement de la confiance devraient être proposées pour éviter la course de la part de la Conférence du désarmement.  Par le biais de son agence spatiale créée en 2017, le Paraguay déploie des satellites qui devront aider à atteindre les objectifs de développement durable d’ici à 2030 et œuvre en coopération avec des organisations nationales et internationales.  À ce titre, il a demandé son admission au Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, estimant que tous les pays doivent pouvoir participer à l’exploration et à l’utilisation pacifique de l’espace et bénéficier des résultats.  Selon lui, il convient de prendre en compte les besoins des pays en développement, sans discrimination, sur un pied d’égalité, dans le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies.  Il a conclu en invitant les délégations à travailler pour renforcer les opportunités de coopération internationale dans l’espace et en souhaitant la conclusion de négociations et de mesures appropriées pour éviter une course aux armements dans l’espace.

M. ASSYLBEK TAUASSAROV (Kazakhstan) a appelé à prendre des mesures de confiance pour prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Dans cette perspective, le représentant a jugé très utile la résolution de l’Assemblée interdisant le placement d’armes dans l’espace, ainsi que la résolution sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales.  Le représentant a appuyé le projet de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace et de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux, proposé par la Russie et la Chine dans le cadre de la Conférence du désarmement, en 2008 et 2014.  Il a toutefois déploré les obstacles et impasses de la Conférence, qui empêchent selon lui de faire aboutir toute tentative d’adoption d’un instrument juridiquement contraignant.  Dans ce cadre, le délégué a appuyé la constitution d’une nouveau Comité spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, qui s’est réuni pour la première fois en aout dernier à Genève, avec la participation du Kazakhstan.  Il a espéré que les travaux du Comité spécial puisse aplanir les oppositions actuelles dans la perspective d’une codification plus formelle du statut de l’espace extra-atmosphérique.

Tout en réaffirmant, par ailleurs, l’importance du Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques, le représentant a estimé que ce dernier ne devait pas faire entrave à l’utilisation pacifique des technologie spatiales.  Il a toutefois appelé à faire en sorte que la dizaine de pays à disposer d’un programme spatial sophistiqué ne remette pas en cause le cadre actuel des accords sur la limitation des armements dans l’espace extra-atmosphérique, notamment concernant les missiles nucléaires.

M. OMAR HILALE (Maroc), au nom du Groupe des États d’Afrique, a constaté que les informations et leur diffusion dépendent plus que jamais de technologies spatiales.  « C’est un héritage commun de toute l’humanité qui doit donc bénéficier à toutes les populations du monde », a-t-il insisté.  C’est pourquoi, a-t-il continué, l’espace doit demeurer exempt de tous types d’armes qui représenteraient une menace existentielle pour la paix.  C’est à cet égard que le Groupe des États d’Afrique souligne l’importance d’établir un cadre juridique, et notamment des traités juridiquement contraignants, sur le déploiement d’armes et la prévention du déploiement d’armes dans l’espace.

Le représentant a souligné que le potentiel des technologies spatiales doit profiter à tous les États quel que soit leur niveau de développement.  Il a voulu qu’un accès équitable et non discriminatoire soit garanti à tous les états.  Il a aussi noté que la prolifération des débris spatiaux représente une vraie préoccupation et a appelé les Nations Unies à faire de leur atténuation une priorité.  Il a, enfin, jugé que le renforcement de la confiance et de la transparence dans les activités spatiales est essentiel pour maintenir un bon usage de l’espace.

M. LOK BAHADUR POUDEL CHHETRI (Népal) a déclaré que tous les pays devraient avoir les mêmes possibilités d’accéder aux technologies spatiales, y compris les pays les moins avancés et les pays en développement sans littoral, qui, a-t-il souligné, attendent toujours de pouvoir bénéficier de ces réalisations remarquables.  En ce qui concerne la prévention d’une course aux armements dans l’espace, il s’est félicité du début des travaux du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner et de formuler des recommandations sur les éléments d’un instrument juridiquement contraignant.  Des mesures de transparence et de renforcement de la confiance peuvent aider à prévenir une course aux armements dans l’espace et à assurer la durabilité de ses activités, a-t-il ajouté. Toutefois, de telles mesures ne devraient pas entraver l’utilisation légale de l’espace, en particulier par les « retardataires ».

Pour M. YANN HWANG (France) les usages civils de l’espace se multiplient et représentent d’importants vecteurs de développement mais aussi des défis de plus en plus complexes comme la gestion du trafic, ou celui des débris spatiaux, dont un grand nombre gravite à grande vitesse.  L’espace est indispensable aux progrès de la science, dans les domaines de la santé et du climat, mais aussi un lieu de confrontation où certains États peuvent être tentés d’user de la force, a-t-il indiqué.  L’espace, a-t-il poursuivi, est devenu un enjeu de sécurité et de stabilité stratégiques et les États doivent y prendre leur place par la coopération et en promouvant des règles fondées sur le droit international et la Charte des Nations unies.  Face à ce défi la France juge important d’assurer la durabilité et la stabilité des activités, de prévenir une dégradation des conditions d’exploitation de l’espace et de préserver son accès pour les générations futures.

La réponse de la communauté internationale doit être transversale et promouvoir des principes d’utilisation responsable, a-t-il enchaîné.  Mais ceci appelle des réponses efficaces, pragmatiques, suivies et immédiatement mesurables.  La communauté internationale doit rechercher une entente pratique entre les acteurs et limiter les possibilités de malentendus ou d’escalade, d’où l’importance de se doter de mesures de confiance et de promouvoir la transparence.

La France, a fait savoir le représentant, privilégie des propositions rapidement applicables compte tenu de la rapide dégradation du contexte actuel et de la réponse urgente à apporter.  L’UE avait proposé un code de conduite sur les activités spatiales qui a été rejeté, mais aucune proposition alternative meilleure n’a été avancée depuis.  Comment dépasser les clivages qui ont empêché son adoption? a-t-il demandé en conclusion.

M. MUSTAPHA ABBANI (Algérie) a considéré nécessaire d’assurer la transparence, la sécurité et la confiance dans l’espace.  Après avoir souligné que l’Algérie n’aspire à utiliser l’espace que pour des besoins de développement, il a ajouté que l’exploration et l’utilisation de l’espace doivent être réservées à des objectifs pacifiques.  La militarisation de l’espace est à ses yeux source d’inquiétudes en ce qu’elle induit une nouvelle dynamique de course aux armements, donc des conséquences néfastes pour la paix et la stabilité socioéconomique.

Selon lui, l’arsenal juridique actuel connaît certaines lacunes: il n’est pas suffisant pour prévenir une course aux armements dans l’espace.  Résolue à surmonter ces lacunes, l’Algérie a salué certaines décisions de l’Assemblée générale qui vont, selon elle, dans le bon sens.  Elle s’est aussi félicitée des recommandations du Groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance pour les activités spatiales.  Considérant que les mesures volontaires de transparence sont un soutien additionnel, elles ne peuvent, selon le représentant, remplacer une convention juridiquement contraignante pour prévenir une course à l’armement dans l’espace.  Le délégué a conclu en estimant que la Conférence du désarmement est le bon forum pour tenir ces discussions. 

M. USMAN JADOON (Pakistan) a prévenu les États qui « occupent toute la place dans l’espace » que leur avancée technologique ne durera pas toujours et que certains pays les rattrapent déjà.  Il a appelé à l’élaboration d’un nouveau traité dans le cadre de la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Cela fait 30 ans qu’on en parle et il serait temps d’entamer les discussions, a-t-il estimé. La proposition russo-chinoise lui a semblé à cet égard une bonne base de discussion.  À ses yeux, il faut également en finir avec les blocages à la Conférence du désarmement pour avancer sur cette question.

Le représentant s’est par ailleurs félicité de l’engagement de la Russie de ne pas être le premier pays à déployer des armes dans l’espace.  Il a aussi salué les délibérations de l’organe subsidiaire 3 de la Conférence du désarmement chargé de ces questions. Celles-ci ont permis selon lui de mieux comprendre les points de vue des uns et des autres.  Il a enfin exprimé sa satisfaction sur le fait que le Groupe d’experts sur la confiance et la transparence s’est accordé sur le besoin de renforcer la sûreté et la stabilité dans l’espace.  « Tout en reconnaissant la valeur de ces mesures volontaires, nous ne voyons pas comment elles sauraient se substituer à un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace », a-t-il toutefois conclu.

M. ROLLIANSYAH SOEMIRAT (Indonésie) a rappelé que l’espace extra-atmosphérique et les autres corps célestes faisaient partie du « patrimoine commun de l’humanité » et devaient, par conséquent, être utilisés au bénéfice de l’ensemble des États Membres.  Le représentant a toutefois constaté que la paix et à la sécurité dans l’espace extra-atmosphérique étaient sous le coup de menaces grandissantes, pour lesquelles les instruments actuels de lutte contre la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique étaient, selon lui, inadaptés.  Sans pour autant nier l’importance des accords bilatéraux sur la limitation des armements, des codes de bonne conduite et des mécanismes volontaires, le représentant a estimé que rien ne remplaçait un instrument universel juridiquement contraignant.  Étant donné la volatilité de l’environnement sécuritaire international actuel et l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations sur le désarmement, le délégué indonésien a jugé que la question de la non-prolifération des armes dans l’espace extra-atmosphérique était une priorité urgente.

Pour y répondre, le représentant a rappelé que l’Assemblée générale demandait, depuis plusieurs décennies, l’ouverture de négociation sur l’adoption d’un instrument universel juridiquement contraignant.  En tant que membre de la Conférence du désarmement, l’Indonésie salue et appuie les travaux du Comité spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, a poursuivi le représentant, avant d’appeler la Conférence du désarmement à entamer immédiatement des négociations sur la question.

Mme VANESSA WOOD (Australie) a rappelé que l’Australie est depuis longtemps présente dans l’espace et qu’elle a créé, le 1er juillet, l’agence spatiale australienne, responsable de la coordination des questions spatiales civiles.  La représentante a relevé que l’espace se démocratise: la technologie pour construire, lancer et entretenir est moins coûteuse, ce qui implique une hausse de l’activité et de nouveaux défis.  Parmi ceux-ci, Mme WOOD a mentionné la quantité de débris spatiaux, qui vont augmenter les coûts des activités commerciales et civiles dans l’espace, principalement en raison des manœuvres pour éviter les collisions et pour la gestion du trafic en orbite.

Si l’Australie est favorable à la prévention de la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, elle ne soutient pas les initiatives de la Chine et de la Fédération de Russie sur cette question, estimant qu’elles pourraient avoir des conséquences contre-productives.  En outre, a expliqué Mme WOOD, la définition d’arme spatiale proposée est irréaliste car elle ne répond pas au problème des menaces terrestres à double usage, ni à celui du stockage d’armes déployables.  De plus, ces propositions n’intègrent pas de mécanisme de vérification permettant de déterminer si des armes ont été mises au point pour être placées dans l’espace.  Tout objet spatial manœuvrable est une arme potentielle, a fait observer la représentante.  C’est la raison pour laquelle l’Australie se concentre plutôt sur les moyens de limiter les mauvais comportements dans l’espace, par le biais de mesures de transparence et de confiance ainsi que grâce à des principes normatifs, qui permettent des actions pragmatiques et volontaires.  L’Australie reste engagée pour un ordre mondial fondé sur le droit, qui s’applique à l’espace.

M. FAISAL IBRAHIM (Nigeria) a noté que les technologies spatiales ont engendré des progrès environnementaux mais aussi dans le développement de nouveaux médicaments.  L’accélération de l’exploration spatiale devrait se faire pour le bien-être de tous les pays, a-t-il insisté.  Jugeant urgent de prévenir la course aux armements dans l’espace, il a considéré que les instruments juridiques actuels ne sont pas adaptés pour y arriver.  Selon lui, il faut renforcer les régimes de contrainte avec un traité juridiquement contraignant sur la course aux armements dans l’espace.

« Nous appelons tous les états à faire montre de responsabilités, a-t-il souhaité, surtout ceux qui ont des programmes spatiaux ».  Il a jugé par ailleurs que la Conférence du désarmement est la seule plateforme de négociation valable pour traiter de ces questions.  « Nous pensons qu’il est temps de débuter des négociations de bonne foi pour ce qui est du déploiement d’armes dans l’espace », a-t-il conclu.

Mme LEI LEI SEIN (Myanmar) a alerté sur le risque accru de militarisation de l’espace avec la promotion de nouvelles technologies de pointe.  L’exploration et l’exploitation de l’espace ne devraient se faire qu’à des fins pacifiques et au bénéfice de tous, quel que soit le niveau de développement des États et de peuples, a-t-elle précisé. 

Elle a prôné des mesures de renforcement de la confiance et de transparence, indispensables pour maintenir la durabilité des activités, citant les recommandations du Groupe GEG qui sont une base positive pour le renforcement et la prévention de la course aux armements.  Cependant les mesures volontaires ne sauraient remplacer les mesures juridiquement contraignantes, a-t-elle insisté: à ce titre, la mise à jour du traité proposée par la Chine et la Fédération de Russie apparaît comme une contribution positive aux travaux de la Conférence du désarmement, seule enceinte de négociations multilatérale, qui a donc un rôle crucial à jouer sur ce point.  La déléguée a donc espéré que cette instance débuterait sans attendre ses travaux sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.

M. GIANFRANCO INCARNATO (Italie) a rappelé que les satellites étaient indispensables à la sécurité sur terre, en mer et dans les airs, et qu’ils permettaient de prévenir des événements critiques comme les catastrophes naturelles.  Il a estimé qu’un cadre réglementaire global devait être mis en place pour traiter efficacement du problème des nombreux débris spatiaux, car ceux-ci menacent les infrastructures et activités spatiales devenues indispensables.  Il a vu d’un œil favorable un instrument, sur une base volontaire, qui couvrirait toutes les activités dans l’espace: il contribuerait à un partage des responsabilités et à un comportement responsable, a-t-il avancé, ce qui suppose la non interférence dans les explorations pacifiques de l’espace, une réduction de la production des débris et donc la préservation de l’environnement extra-atmosphérique.  Sans exclure un traité à terme, il a jugé qu’il fallait d’abord adopter et appliquer des mesures de transparence et de renforcement de la confiance, étape essentielle vers une meilleure sécurité et vers la durabilité des activités dans l’espace extra-atmosphérique.

Pour M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela), le développement de l’exploitation spatiale doit se faire au profit de la paix et du développement aussi s’est-il dit préoccupé par les déclarations d’une puissance qui considère l’espace extra-atmosphérique comme un lieu d’affrontement.  De telles déclaration réduisent les possibilités de coopération, a—t-il averti.  Le déploiement de nouveaux armements dans l’espace ne ferait qu’augmenter la vulnérabilité et le sentiment d’insécurité des États sans contribuer à la paix. 

Pour le représentant, ces défis rappellent l’importance que revêt le multilatéralisme pour réduire les dangers et surmonter les fossés technologiques.  L’espace représente un patrimoine commun de l’humanité et il faut par conséquent en garantir un accès équilibré, a-t-il insisté.  De plus, la responsabilité doit être partagée mais différentiée quand on évoque la course à l’armement dans l’espace car certains pays n’ont pas du tout les moyens de développer de telles technologies.  Il importe donc aussi de renforcer le transfert des technologues pour une exploitation pacifique de l’espace.

Face aux dangers de militarisation, il convient d’avancer au plus vite dans le renforcement du droit international par la rédaction de nouveaux instruments juridiquement contraignants, a-t-il enchainé.  Le Venezuela appuie donc le projet de traité soumis par la Russie et la Chine en 2008 à la Conférence de désarmement, une initiative importante, selon lui, qui permettrait d’éviter la course aux armements dans l’espace.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a défendu l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et pour le bien de l’ensemble des États Membres.  Il a appelé à entamer des négociations pour parvenir à l’adoption d’un instrument universel juridiquement contraignant pour la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Sur ce point, le représentant a appelé à garantir une représentation géographique équitable au sein du Comité spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.

Le représentant s’est ensuite inquiété de la compétition grandissante entre États dans l’espace extra-atmosphérique, au détriment de la sécurité internationale.  À ce titre, il s’est dit très préoccupé par les développements récents concernant le lancement de missiles balistiques dans l’espace.  Conformément aux accords existants, le Bangladesh s’abstiendra de placer en premier des armes dans l’espace, a-t-il réaffirmé. 

Outre les efforts en matière de désarmement de l’espace extra-atmosphérique, le représentant a appelé à prendre des mesures de réduction des débris spatiaux.  Il a dit soutenir toute initiative visant à répondre à ce défi, en incluant l’ensemble des parties prenantes.

M. LI SUI (Chine) a rappelé que les Nations Unies ont beaucoup œuvré pour empêcher une course aux armements dans l’espace.  Il s’est félicité que, cette année, la Commission du désarmement ait inscrit l’espace à son ordre du jour en se concentrant sur le renforcement de la transparence et de la confiance.

La focalisation actuelle sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace illustre, selon lui, les préoccupations de la communauté internationale.  En août dernier, la Chine et la Russie ont participé à la première réunion du Groupe d’experts gouvernementaux où les deux pays ont présenté un projet de traité sur la prévention du déploiement d’armes dans l’espace.  La situation est sombre dans le domaine de l’espace mais on peut agir, a-t-il soutenu.  Il a dit espérer que le Groupe d’experts pourra se mettre d’accord par consensus sur un traité juridiquement contraignant.

Selon lui, la Conférence du désarmement est le lieu idoine pour discuter de la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Le Groupe d’experts gouvernementaux lui transmettra d’ailleurs le résultat de ses travaux dès qu’il aura terminé.  Le délégué a enfin insisté sur le fait que si les mesures de confiance et de transparence améliorent la sécurité spatiale, elles ne suffisent pas: il faut un traité juridiquement contraignant. 

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a estimé que le cadre en cours notamment le Traité sur l’espace, avait bien servi la communauté internationale mais qu’il devait être étendu pour faire face aux nouveaux défis liés à l’utilisation de l’extra-atmosphérique.  Car le développement rapide du secteur commercial offre de nouvelles possibilités et pose de nouveaux défis, a-t-il indiqué, citant notamment les débris.  Les 21 orientations négociées dans le cadre du COPUOS ont montré un consensus qu’il importe maintenant de traduire dans les faits, a-t-il ajouté.  Tout en n’excluant pas la possibilité de parvenir à un traité juridiquement contraignant à l’avenir il estime que de graves défis politiques, technologiques et pratiques doivent être résolus avant que ne débutent les négociations. 

Il faut comprendre de quoi on parle, a insisté le délégué en réclamant une définition de la notion d’arme, faisant observer que les armes spatiales sont en fait tout objet qui peut être dirigé depuis la terre. À cet égard, il s’est dit préoccupé par les activités de certains États, nommant la Russie dont un responsable militaire a indiqué en 2017 qu’elle développe des missiles capables de détruire les satellites.  Le représentant a appelé à vérifier ces propos et à établir des mesures de confiance et de vérification.  Il est important, a-t-il insisté, de définir les comportements acceptables et non acceptables dans l’espace.  Or, ces éléments ne figurent pas dans la proposition de traité sino-russe.

M. LEE JANG-KEUN (République de Corée) s’est inquiété de l’augmentation des dangers et menaces dans l’espace, comme les débris spatiaux et a demandé à tous les États d’utiliser l’espace de façon responsable et transparente. Le délégué a jugé que, même si certains estiment que le développement des normes dans l’espace avance trop lentement, le cadre actuel offre déjà une base efficace. Il a pris note des efforts pour faire progresser ces normes, notamment par le biais du Groupe d’experts gouvernementaux sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace et de la Conférence du désarmement. En dépit des difficultés, il a dit espéré que le travail de ce Groupe d’experts continuera d’explorer des mesures pratiques tout en évitant les impacts négatifs sur l’utilisation pacifique de l’espace.  Dans le cadre des efforts conjoints de la communauté internationale, il a estimé qu’il fallait octroyer la priorité aux mesures de transparence et de confiance.  Ces mesures encouragent les actions responsables, a-t-il insisté.  À ses yeux, elles sont utiles et indispensables pour prendre en compte la sécurité et la durabilité dans l’espace.

M. ANDREY BELOUSOV (Russie) a estimé que les travaux en cours ne portaient pas à l’optimisme alors, que depuis plus de 20 ans, la Conférence du désarmement « fait du surplace »: ainsi la proposition de la Russie et de la Chine concernant un Traité sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace (PAROS) n’avance pas.  Il y a plusieurs signaux positifs cependant, comme la création d’un Groupe d’experts gouvernementaux des Nations Unies dont la première session s’est tenue à Genève.  Peut-être permettra-t-il d’approcher d’un traité juridiquement contraignant grâce à ses propositions de mesures de confiance, a—t-il espéré.  En théorie, tout le monde est pour mais, dans les faits, il n’est pas facile de se mettre d’accord, a-t-il reconnu. 

Le représentant a de plus relevé que les documents de l’ONU qui régissent les opérations spatiales des États peuvent être perçus comme pas assez solides quand il s’agit de défense.  C’est ainsi que les États-Unis ont exposé leurs vues selon lesquelles l’espace est devenu un « lieu de confrontation », a-t-il remarqué en jugeant cette approche « dangereuse ».

Comment la Russie et la Chine devront-elles mener leurs activités spatiales si les États-Unis n’envisagent les leurs que sous l’angle de la défense, de l’auto défense, ou encore de la défense de leurs intérêts commerciaux.  Cette politique américaine de « domination de l’espace » ne contribue pas à un dialogue efficace ni à la stabilité, s’est-il inquiété.

Si cette tendance doit se confirmer, a-t-il prévenu, les négociations sur l’espace extra atmosphérique risquent de ne pas aboutir du tout et il deviendra dès lors impossible d’en garantir la sécurité et la stabilité.  La Russie et les États qui partagent ses vues entendent œuvrer à contrer un tel scénario.  Elle a d’ailleurs déposé un projet de résolution contre le placement d’armes dans l’espace conformément à l’initiative russe de 2004 et elle soumet une nouvelle résolution sur la promotion de la transparence et des mesures de confiance, en coopération avec la Chine.

M. KAZUHIRO NAKAI (Japon) a jugé que face à l’augmentation des activités spatiales, il est plus important que jamais que la communauté internationale assure la sécurité de l’espace, en renforçant notamment l’état de droit dans l’espace.  Selon lui, il est nécessaire de mettre en œuvre des principes de comportement responsable dans l’espace et il encourage tous les États Membres à faire preuve de bonne volonté.  Rappelant que son pays à participé, cette année, à des discussions sur une prévention de la course aux armements dans l’espace au cours de la réunion du Groupe d’experts gouvernementaux, il a estimé que ces discussions devaient en même temps faire référence au potentiel immense de l’espace.  Les mesures de renforcement de la confiance et de la transparence sont très utiles, a-t-il assuré.  Il a lancé un appel à tous les États Membres pour mettre en œuvre les propositions de mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales qui ont été recommandées par le Groupe dans son rapport de 2013.

Le représentant s’est dit inquiet des comportements négatifs tels que des attaques de satellites qui peuvent créer des débris spatiaux.  Pour contrer ce problème des débris, le délégué a assuré que le Japon va redoubler d’efforts dans le domaine de la connaissance de l’environnement spatial.

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a insisté sur l’importance de préserver la nature pacifique de l’espace extra-atmosphérique, ce qui suppose, selon lui, pour les États de s’abstenir d’utiliser leurs technologies spatiales, y compris les satellites, à des fins militaires.  L’espace doit être protégé en tant que patrimoine commun de l’humanité, a-t-il insisté, avant d’appeler la communauté internationale à se mobiliser pour prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, sur la base des accords existants.  Le représentant a rappelé le rôle central de la Conférence du désarmement pour la prévention de cette course aux armements.  Il a indiqué que son pays s’était associé avec l’Égypte pour présenter à la Première Commission un projet de résolution visant à prévenir la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. 

M. PULE DIAMONDS (Namibie) a rappelé que l’espace pouvait aider l’Afrique à se développer.  Qualifiant de spectaculaires les avancées technologiques dans le domaine des armes spatiales, il y a vu le danger de dissensions entre pays en développement et pays développés.  Alors que l’Afrique essaie de faire taire ses armes pour 2020, nous voyons le potentiel de technologies négatives en développement, a-t-il ajouté.

Il a souligné que les mesures de confiance et de transparence permettraient de mettre l’accent sur les techniques spatiales en vue du développement durable.  Il a finalement demandé que le Groupe d’experts gouvernementaux fasse de nouvelles propositions pour un traité juridiquement contraignant, notamment sur le non-placement, en premier, d’armes dans l’espace.

M. SEYED ALI ROBATJAZI (République islamique d’Iran) a estimé que l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique par un pays ne devait pas se traduire par une dégradation de cet espace pour les autres pays.  Or, la militarisation de cet espace, telle qu’on l’observe actuellement, sape selon lui les accords internationaux existants visant à préserver sa nature pacifique.  Pour éviter une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, le représentant a appelé à combler les lacunes existantes du droit international.  À ses yeux, les États-Unis n’ont eu de cesse de tirer profit de ces lacunes pour dominer l’espace extra-atmosphérique, une tendance qui menace, selon lui, la sécurité internationale.  Les États-Unis, a-t-il poursuivi, dépensent chaque année des dizaines de millions de dollars pour utiliser l’espace extra-atmosphérique à des fins militaires, notamment afin d’y déployer des systèmes d’interception de missiles. 

Le représentant a également accusé les États-Unis d’avoir levé, en 2002, les verrous existants dans le droit international concernant le lancement de missiles balistiques dans l’espace. Récemment, a-t-il ajouté, ce pays a même annoncé son intention de créer une force spatiale militaire. Depuis les années 1980, a résumé le représentant iranien, les États-Unis sont devenus le principal obstacle à l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant pour prévenir une course à l’armement dans l’espace extra-atmosphérique.  « Ils sont seuls face au reste du monde », a-t-il insisté, dénonçant un comportement « irresponsable ».  Dans ce contexte, le représentant a déclaré que l’Iran appuyait toute initiative pour la prévention de la militarisation de l’espace dans le cadre de la Conférence du désarmement.  Aucune mesure, a-t-il conclu, ne pourra remplacer l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant pour réguler cet espace.

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a salué les travaux essentiels du Groupe d’experts gouvernementaux.  Soutenant la collaboration multilatérale, il a jugé que les initiatives menées par les Nations Unies sont appréciables.  Il a cependant souligné que les États ne peuvent pas agir seuls et qu’il importe d’initier des consultations plus larges avec des entités privées et des chercheurs.  La durabilité des activités spatiales nécessite selon lui une action et une attention collective.

M. LOT THAUZENI PANSIPADANA DZONZI (Malawi) a rappelé que les technologies spatiales ont un extraordinaire potentiel pour les pays en développement et que le Malawi, à l’instar d’autres pays moins avancés, en avait besoin.  Parmi les différents usages vitaux qu’il associe à ces technologies, il a cité la gestion des catastrophes, la gestion des ressources hydriques et la gestion des changements climatiques.  « Les imageries fournies permettent par exemple de disposer de cartographies rapides qui sont cruciales en cas de catastrophes naturelles », a-t-il illustré.  Grâce à ces informations, le Malawi a pu mettre en place des routes d’évacuations pour donner suite aux inondations qu’il a subies.  Des initiatives comme l’assistance technique et le partage de données géospatiales sont également cruciales.  De plus, étant donné que le Malawi dépend du secteur agricole, il a grandement profité de la formation technique fournie par les pays développés dans le champ de la technologie spatiale.

Il a ensuite averti du danger que représente l’accumulation des débris et des objets spatiaux, notamment pour la Station spatiale internationale.  Il s’est également dit préoccupé par les perspectives d’une course aux armements dans l’espace.  Cela explique pourquoi le Malawi attache autant d’importance aux protocoles internationaux permettant de protéger notre planète, a-t-il insisté.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a défendu l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et pour le bien de l’ensemble des États Membres.  Il a appelé à entamer des négociations pour parvenir à l’adoption d’un instrument universel juridiquement contraignant pour la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Sur ce point, le représentant a appelé à garantir une représentation géographique équitable au sein du Comité spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.

Le représentant s’est ensuite inquiété de la compétition grandissante entre États dans l’espace extra-atmosphérique, au détriment de la sécurité internationale.  À ce titre, il s’est dit très préoccupé par les développements récents concernant le lancement de missiles balistiques dans l’espace.  Conformément aux accords existants, le Bangladesh s’abstiendra de placer en premier des armes dans l’espace, a-t-il réaffirmé. 

Outre les efforts en matière de désarmement de l’espace extra-atmosphérique, le représentant a appelé à prendre des mesures de réduction des débris spatiaux.  Il a dit soutenir toute initiative visant à répondre à ce défi, en incluant l’ensemble des parties prenantes.

M. DIEGO ALONSO TITUAŇA MATANGO (Équateur) s’est dit convaincu qu’il fallait un instrument juridiquement contraignant qui institue le caractère pacifique de l’espace en renforçant la confiance et la transparence.  Il a jugé qu’une course aux armements dans l’espace est un danger grave pour la paix et la sécurité.  L’espace est un patrimoine commun qui ne doit pas être envisagé comme un nouveau lieu de conflits, a-t-il conclu.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé que le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 était l’accord socle régissant le droit de l’espace, qui assure que l’exploration et l’usage de l’espace, y compris la Lune et les autres corps célestes, doivent être opérées au bénéfice et dans l’intérêt de toutes les nations, peu importe leur degré de développement économique ou scientifique, et doivent appartenir à toute l’humanité.  S’appliquant aussi aux armes nucléaires ou aux ADM, il « a résisté à l’épreuve du temps », s’est réjoui Mgr Auza.  Mais l’intérêt renouvelé pour les systèmes de contre-attaques balistiques dans l’espace extra-atmosphérique, y compris pour détruire des satellites, « souligne l’importance d’initier un processus global en vue d’éliminer les armes nucléaires », a-t-il poursuivi.

L’usage de l’espace extra-atmosphérique pour surveiller les activités sur Terre a pris une importance immense, selon lui, pour surveiller par exemple la réduction des arsenaux nucléaires, ou la bonne exécution d’un traité comme le Traité interdisant les essais d’armes nucléaires dans l’atmosphère, dans l’espace extra-atmosphérique et sous l’eau (TIEN).  C’est pourquoi le Saint-Siège s’est félicité du travail de la Commission du désarmement de l’ONU pour établir des mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales.  Ces mesures ne remplaceront pas des traités juridiquement contraignants pour encadrer les activités spatiales et accroître la stabilité et la paix, mais ils peuvent apporter une aide considérable dans la réalisation de cet objectif, a-t-il fait valoir.  La transparence a aussi l’avantage de faire diminuer la compétition militaire entre États et éviter une course à l’armement.  Le nonce a remis sur la table un projet en discussion à l’ONU dans les années 70, la création d’une « agence internationale de surveillance des satellites », qui permettrait de diffuser ouvertement des informations sur les activités de lancement de satellites et d’autres objets dans l’espace extra-atmosphérique.  Enfin, il a évoqué la nécessité d’un code de bonne conduite entre États lançant des objets dans l’espace, notamment pour éviter des frictions entre satellites.

Déclarations sur les armes conventionnelles (suite)

Au nom de la Ligue des États arabes, M. MARWAN ALI NOMAN AL-DOBHANY (Yémen) a dénoncé la prolifération des armes légères et de petit calibre au Moyen-Orient, en raison notamment de l’action de certains gouvernements qui n’hésitent pas, selon lui, à augmenter la vente de ces armes dans la région.  Pour lutter contre ce phénomène, le représentant a appuyé les mesures prises dans le cadre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.  Toutefois, il a estimé que ces mesures ne devaient pas aller à l’encontre du « droit légitime des pays à l’autodéfense », ni de leur « droit d’importer des armes classiques ».  Le Programme d’action ne doit pas non plus conduire à l’adoption de mesures semant la discorde entre États, a-t-il ajouté.

Le représentant a appelé à poursuivre la lutte contre le trafic illicite des armes légères et de petit calibre, tout en évitant toute ingérence dans les affaires intérieures des États.  Cette lutte, a-t-il estimé, ne doit pas se traduire par une baisse de l’aide publique au développement pour les pays qui en bénéficient.  Enfin, avant d’entamer des négociations sur un instrument concernant les munitions, le représentant a estimé qu’il fallait d’abord conduire des études sur les retombées techniques, économiques, juridiques et sécuritaires de l’adoption d’un tel instrument.

M. DANG DINH QUAY (Viet Nam), qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a souligné les conséquences graves de l’utilisation des armes classiques et les impacts divers de ces armes sur les femmes et les enfants.  Il s’est félicité du programme de désarmement qui permet, selon lui, d’atténuer l’impact humanitaire des armes classiques.  Il s’est félicité de l’adoption par la Commission de mesures consensuelles de renforcement de la confiance dans les armes classiques. En mettant en œuvre leurs obligations, les États doivent se rappeler du droit souverain des États d’acquérir et d’importer des armes classiques pour les besoins de sécurité et d’autodéfense.  Disant son attachement au multilatéralisme sur le contrôle des armes classiques au niveau régional, il a redit son engagement à traiter la question du commerce illicite d’armes.  Engagée au niveau du droit humanitaire, l’ASEAN continue de faire face aux conséquences des armes explosives qui frappent aveuglément.  Il a finalement lancé un appel au pays développés pour qu’ils fournissent une aide sur cette question.

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a jugé « risible » l’intervention des Etats-Unis sur la question de l’espace extra-atmosphérique.  Cela serait très drôle, a-t-il ajouté, si la situation créée par ce pays n’était pas dangereuse pour la sécurité mondiale. 

Les États-Unis affirment que les propositions russes concernant le non-déploiement en premier d’armes dans l’espace ne sont pas louables, a poursuivi le représentant.  Or, selon lui, le simple fait que les États-Unis tentent de saper l’initiative russe prouve justement qu’elle est louable.  C’est également vrai, a-t-il ajouté, de la position américaine à l’encontre du projet sino-russe de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace et de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux.  En réalité, toute mesure pratique visant à prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique sera soit « balayée du revers de la main soit bafouée » par les États-Unis, a affirmé le représentant. 

Aux accusations américaines selon lesquelles les satellites russes dans l’espace se livreraient à des « manœuvres incompréhensibles », le délégué a répondu que ces manœuvres étaient « tout à fait neutres » et visaient essentiellement à corriger leur orbite ou à empêcher des rapprochements dangereux entre plusieurs corps célestes.

À l’inverse, le représentant russe a condamné les pratiques américaines concernant l’enregistrement à outrance de corps célestes, notamment grâce à des satellites météorologiques, qui sont selon lui des satellites puissants et potentiellement dangereux.  Le représentant a averti que ces corps célestes soi-disant pacifiques pourraient avoir pour objectif d’exercer une pression militaire contre les objets spatiaux d’autres pays.  En outre, le représentant a dénoncé l’attitude contradictoire des États-Unis consistant à, d’une part, participer activement au Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques et, d’autre part, à travailler à l’élaboration de leur système antimissile et au renforcement de leur potentiel satellitaire.

Le représentant a enfin accusé les États-Unis de tout faire pour que la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique se poursuive.  Certains États protégés par les États-Unis continuent également de développer leur programme spatial, a-t-il affirmé.

Le délégué de la République arabe syrienne a estimé que le représentant du Royaume-Uni ne méritait aucune réponse.  Il lui a conseillé de « s’occuper du droit à l’autodétermination des peuples et d’indemniser l’Iraq plutôt que de mettre son nez dans ses affaires intérieures ».  Selon lui, ce qui s’est passé à Salisbury confirme que le Royaume-Uni et les États-Unis ont l’intention de développer des armes chimiques.  « Comment expliquer sinon leur refus de donner des infos à l’OIAC? »  Le Royaume-Uni tente de dissimuler ses capacités chimiques et devrait fournir les informations nécessaires à l’OIAC, a-t-il répété.

Il a ensuite accusé les Administrations américaines successives d’avoir entraîné des terroristes du Front el-Nosra.  « C’est une réalité que personne ne peut nier, a-t-il asséné, le représentant américain ne peut nier l’implication de son gouvernement dans ces faits ».  À la France, il a dit que ses tentatives de convaincre les autres délégations de son innocence n’aboutiront pas.  La France a consacré ses fonds, ses médias et son expertise pour fournir des armes et des substances chimiques à des groupes armés, a-t-il affirmé.  Il a aussi avancé que le régime turc facilite le transfert de substances toxiques vers la Russie.  « Même si cette délégation le nie, tous les États Membres savent que la Turquie soutient des organisations terroristes et met en scène des attaques chimiques », a-t-il encore affirmé.

En réponse à son homologue russe, le représentant des États-Unis a affirmé que le traité proposé par la Fédération de Russie était « truffé d’erreurs » et « n’était pas vérifiable ».  Il a noté que la délégation russe était « clairement agressive » ces derniers temps sur la question de l’espace extra-atmosphérique.  Selon lui, la Russie fait preuve de contradiction en voulant, d’un côté, « se préparer à une guerre dans l’espace » et en proposant, de l’autre, un traité « truffé d’erreurs ».  Ce qui n’apparaît pas dans la proposition de traité russe, c’est que le pays a l’intention d’envoyer des armes et des missiles en orbite, a affirmé le représentant américain.  « Cela ne va pas ensemble », a-t-il noté.  Quant à eux, les États-Unis vont se préparer à faire face à tout défi potentiel, a-t-il déclaré.  « Votre traité est en perte de vitesse », a affirmé le représentant, avant d’ajouter une nouvelle fois: « Il est truffé d’erreurs et il faudrait peut-être revenir à un brouillon. »

Répondant ensuite au représentant de la Syrie, le délégué américain a déclaré que le régime syrien continuait de faire des « allégations ridicules » concernant les États-Unis et d’autres pays.  « Ce régime ne convaincra jamais la communauté internationale de son innocence quant à son utilisation d’armes chimiques à l’encontre de sa population », a-t-il affirmé, en le prévenant, ainsi que ses collaborateurs, qu’ils auront à répondre de leurs crimes.

Répondant à la Syrie, le représentant du Royaume-Uni a rétorqué qu’il avait parfaitement illustré son propos et a répété que la Syrie est en violation au titre de ses obligations internationales.

Le délégué de la France s’est contenté de qualifier les propos de « grotesques et ridicules » du délégué syrien.

Pourquoi la Syrie utiliserait une arme qu’elle ne possède pas pour permettre aux trois gouvernements agresseurs de lancer des attaques sur son pays? a ensuite lancé le représentant de la Syrie.  Affirmant que les renseignements britanniques ont créé l’organisation terroriste des Casques blancs, il a assuré que la Syrie possède des enregistrements prouvant l’implication britannique dans la fabrication des mises en scène relatives à l’utilisation des armes chimiques.

Il a ensuite accusé l’Administration américaine d’être responsable du financement et du parrainage de groupes terroristes comme Al-Qaida.  Enfin, il a rétorqué au délégué français que son pays est bel et bien impliqué dans les attentats chimiques en Syrie. 

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