En cours au Siège de l'ONU

Session de fond de 2025
11e & 12e séances plénières – matin & après-midi
AG/COL/3394

Soutenue par les pays de la région, l’Argentine revendique à nouveau sa souveraineté sur les Îles Falkland (Malvinas) dans son différend colonial avec le Royaume-Uni

Le Ministre des affaires étrangères, du commerce international et du culte de l’Argentine, l’une des deux parties au conflit de souveraineté sur les Îles Falkland (Malvinas)*, est venu accompagné d’une large représentation institutionnelle ce matin pour défendre la position de longue date de Buenos Aires sur cette question de colonisation qui « transcende les gouvernements ». 

M. Gerardo Werthein a commencé par rappeler que l’occupation britannique de l’archipel, le 3 janvier 1833, a été menée par la force, expulsant les autorités argentines légitimes et la population déjà installée sur place.  Il s’agissait sans équivoque d’un acte colonial, qui violait le droit international et la souveraineté territoriale de l’Argentine, laquelle a toujours défendu avec fermeté sa revendication visant à recouvrer le plein exercice de sa souveraineté, a-t-il insisté.

Réfutant l’argument du Royaume-Uni qui invoque le principe d’autodétermination pour éviter tout dialogue avec l’Argentine, le Ministre a estimé que si celui-ci était central dans de nombreux processus de décolonisation, il ne s’applique pas à la question des Malvinas.  S’appuyant sur la résolution 1514 (XV) qui établit clairement que tout processus de décolonisation doit respecter l’unité nationale et l’intégrité territoriale des États, M. Werthein a souligné que dans le cas des Malvinas, il n’y a pas de peuple colonisé ayant droit à l’autodétermination.  Il existe, en revanche, une population établie par la Puissance occupante, à la suite de l’expulsion en 1833 des autochtones et des autorités locales.

Pour Buenos Aires, il convient de s’interroger sur la justification qu’il peut y avoir à séparer unilatéralement un territoire insulaire faisant partie intégrante du plateau continental argentin, en y établissant une population et en y maintenant une force militaire étrangère destinée à la soutenir. Une situation manifestement incompatible avec les principes fondamentaux du droit international, a tranché le Ministre.

M. Werthein a reproché au Royaume-Uni de non seulement refuser le dialogue, mais de continuer de prendre des mesures unilatérales dans le territoire contesté, en violation directe de la résolution 31/49 de l’Assemblée générale, qui exhorte les deux parties à s’abstenir de modifier la situation tant que leur différend ne sera pas réglé.  Parmi ces mesures, figure le maintien d’une présence militaire disproportionnée sur les Îles Malvinas, Géorgie du Sud et Sandwich du Sud ainsi que  les zones maritimes environnantes, incompatible avec le statut de zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud, et la délivrance unilatérale et illégale de licences et de concessions, au mépris des droits souverains de l’Argentine, pour l’exploration et l’exploitation de ressources naturelles, en particulier les hydrocarbures et les pêcheries.  M. Ricardo Ancell Patterson, l’un des quatre pétitionnaires à intervenir ce matin sur cette question, s’est indigné de ce qu’il a qualifié de « pillage colonial ».

MM. Marc Pollard et Peter Biggs, membres élus de ce qu'ils ont présenté comme « l'Assemblée législative des Iles Falklands », sont venus plaider la cause du peuple de l’archipel en revendiquant son droit à l’autodétermination: « nous ne sommes pas implantés, nous sommes enracinés », a assuré M. Pollard, en rappelant qu’en 2013, plus de 99.8% de la population a voté pour rester dans le giron britannique en tant que territoire d’outre-mer dans le cadre d’un référendum.  Aucune négociation, aucune décision relative aux Îles Falkland ne peut et ne doit se prendre sans la participation de « notre peuple », a-t-il tranché.

Quoi qu’il en soit, Buenos Aires reste pleinement disposée à reprendre des négociations bilatérales de fond avec Londres pour résoudre pacifiquement ce différend, conformément à la résolution 2065 de 1965 de l’Assemblée, a indiqué son ministre.  Estimant que les conditions sont favorables pour entamer une nouvelle phase de dialogue afin d’aborder de manière constructive toutes les questions d’intérêt mutuel, y compris celle de la souveraineté, M. Werthein a fait savoir que l’Argentine avait demandé cette semaine au Secrétaire général de l’ONU d’exercer ses bons offices afin de faciliter ce processus, une demande reprise à leur compte par les pays de la région.

L’Équateur, qui s’exprimait au nom du Consensus de Brasilia, a assuré que ses États membres étaient alignés sur la position de l’Argentine, ces derniers arguant que la seule façon de mettre fin à cette situation est de parvenir à un accord bilatéral.

Adopté par consensus ce matin, le projet de résolution relatif à la question des Îles Falkland (Malvinas), réaffirme d’ailleurs qu’un tel règlement pacifique est le moyen de mettre fin à la situation coloniale particulière propre aux Îles Falkland (Malvinas).  Le Comité spécial y déplore que, malgré le large appui international en faveur de négociations entre les Gouvernements argentin et britannique, l’application des résolutions de l’Assemblée générale sur cette question n’ait toujours pas commencé.  Par conséquent, il leur demande de consolider le processus de dialogue et de coopération en cours en reprenant leurs négociations afin de trouver, dans les meilleurs délais, une solution pacifique à ce conflit, conformément aux dispositions des résolutions pertinentes de l’Assemblée.  Dans ce cadre, le Comité spécial réaffirme son appui résolu au Secrétaire général pour la mission de bons offices qu’il effectue afin d’aider les parties.

Au cours du débat général, de nombreux pays ont pris fait et cause pour l’Argentine dans ce différend de souveraineté.  Au nom des États membres du Marché commun du Sud (MERCOSUR), l’Uruguay a fait valoir que, depuis l’adoption de la résolution 2065 (XX), l’Assemblée générale n’a cessé de plaider pour une solution pacifique et négociée entre les deux parties.  Dans le même temps, il a rappelé que l’État plurinational de Bolivie, le Chili et le MERCOSUR ont récemment signé avec l’Argentine une déclaration qui reconnaît la souveraineté de Buenos Aires sur les Îles Falkland (Malvinas), tout en exigeant l’arrêt de l’exploitation des ressources dans ce territoire.  Faisant remarquer que le Gouvernement argentin « souhaite renouer les négociations », la délégation a appelé le Gouvernement britannique à faire de même pour trouver une solution durable. Plusieurs délégations, notamment le Chili, la Bolivie, le Nicaragua et le Pérou, ont souscrit à cette ligne à la fois solidaire de l’Argentine et favorable à des discussions de bonne foi.

Plus offensif, la République bolivarienne du Venezuela a jugé urgent que Londres revienne sur la voie du dialogue et de la négociation directe, afin d’« obtenir, une fois pour toutes, le plein exercice de la souveraineté de la République argentine sur les territoires qui lui ont été confisqués en 1833 ».  Cuba a, de son côté, appelé à une solution négociée, juste et définitive à la question des Îles Malvinas « dans le respect de l’intégrité territoriale de l’Argentine », promettant de continuer à faire entendre sa voix « pour que l’Amérique latine et les Caraïbes soient libérées du colonialisme ».

De son côté, la Chine a réaffirmé son « appui sans faille à la revendication légitime de l’Argentine », voyant dans la question des Îles Malvinas « un vestige du colonialisme ».  Favorable au règlement pacifique des différends, conformément à la Charte des Nations Unies, elle a défendu « l’équité internationale et la justice », face à ceux qui continuent de vouloir imposer leur pouvoir et de mettre en avant les intérêts en exploitant d’autres pays. « Tout cela sape la souveraineté et le développement de ces pays, mais aussi les normes régissant les relations internationales », s’est indignée la délégation chinoise.

D’autres pays ont défendu une position de neutralité dans ce conflit, à l’instar des Fidji, qui, tout en réitérant leur soutien indéfectible au droit des peuples à l’autodétermination, ont exprimé la croyance que « l’Atlantique Sud, comme le Pacifique, doit être un océan de paix ».  Ces délégations, parmi lesquelles Antigua-et-Barbuda, Saint-Vincent-et-les Grenadines et la Sierra Leone, ont rappelé leur engagement en faveur d’un règlement pacifique et équitable de cette question, exhortant le Secrétaire général à user activement de ses bons offices pour soutenir les progrès à cet égard.  Comme pour les autres territoires non autonomes, l’Indonésie a encouragé des consultations régulières entre le Comité spécial, la Puissance administrante et les États Membres concernés pour créer la confiance et trouver une solution juste et durable.

Reconnaissant les revendications historiques et les aspirations nationales de l’Argentine concernant les Îles Falkland (Malvinas), mais aussi le rôle administratif actuel du Royaume-Uni sur le territoire, le Timor-Leste a appelé à prioriser les voies diplomatiques et juridiques afin de favoriser un processus inclusif qui implique significativement les habitants de ces îles. Au nom de la stabilité et de la coopération régionales dans la région de l’Atlantique Sud, Saint-Kitts-et-Nevis a exhorté l’Argentine et le Royaume-Uni à poursuivre leur collaboration afin d’instaurer la confiance et de parvenir à une résolution pacifique du différend. 

 

* La souveraineté sur les Îles Falkland (Malvinas) fait l'objet d'un différend entre le Gouvernement de l'Argentine et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord (voir ST/CS/SER.A/42).

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