En cours au Siège de l'ONU

Le Comité spécial de la décolonisation considère indispensable l’établissement de listes électorales crédibles et transparentes en Nouvelle-Calédonie

Session de 2017,
7e séance – matin
AG/COL/3313

Le Comité spécial de la décolonisation considère indispensable l’établissement de listes électorales crédibles et transparentes en Nouvelle-Calédonie

 Le Comité appelle aussi à garantir la souveraineté de la Polynésie française sur ses ressources naturelles 

Le Comité spécial chargé de l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux « Comité spécial de la décolonisation » ou « Comité des Vingt-Quatre » a appelé (1), aujourd’hui, l’Assemblée générale à considérer que l’établissement, en Nouvelle-Calédonie, de listes électorales « justes, régulières, crédibles et transparentes », comme prévu par l’Accord de Nouméa, est indispensable à la réalisation, en 2018, « d’un acte libre, équitable et authentique d’autodétermination ».

« Après 165 ans de colonisation française, la Nouvelle-Calédonie se trouve dans une phase critique », a déclaré le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, faisant référence au « référendum historique » qui doit se tenir, en 2018,  dans ce territoire administré par la France.

À l’instar de son homologue de la Sierra Leone, ce dernier s’est notamment préoccupé du fait que plus de 20 000 Kanaks seraient exclus de la liste électorale, soulignant que leur participation au scrutin est importante pour assurer la crédibilité du processus et pour que les résultats du référendum soient acceptés.  

Considérant le référendum de 2018 fondamental pour la décolonisation de la Nouvelle-Calédonie, le représentant du Venezuela a par ailleurs suggéré l’organisation d’une visite du Comité spécial pour montrer au peuple kanak son plein appui à cette « étape importante ».

Au préalable, le Comité a adopté sans vote un projet de résolution consacré à la Polynésie française (2), par lequel il invite l’Assemblée générale à exhorter la France, en tant que Puissance administrante, à garantir la souveraineté permanente du peuple de la Polynésie française sur ses ressources naturelles, et de favoriser la mise en place rapide d’un processus d’autodétermination équitable et effectif, dans le cadre duquel seront arrêtés le calendrier et les modalités de l’adoption d’un acte d’autodétermination. 

Réagissant au contenu de ce texte, le Délégué des affaires internationales, européennes et du Pacifique du Gouvernement polynésien, M. Manuel Terrai, a toutefois signalé que 70% de la population polynésienne privilégiait le développement économique au sein de la République française plutôt que l’indépendance.  La Polynésie française n’est pas une colonie à être décolonisée et sa situation ne doit pas être décidée « à la roulette russe », mais en tenant compte de la volonté de la population, a-t-il notamment affirmé.

De son côté, l’élu indépendantiste de l’Assemblée de Polynésie, M. Richard Ariihau Tuheiava, a fustigé une législation coloniale qui garantit à la France le contrôle unilatéral des ressources du territoire polynésien, ainsi que sa volonté de s’approprier le plateau continental et une zone économique exclusive (ZEE) de cinq millions de kilomètres carrés. Il a également dénoncé les « revenus considérables » que rapportent, à la Puissance administrante, les taxes sur les billets d’avion et sur toutes les compagnies aériennes qui atterrissent à Tahiti, les activités spatiales de la base de Kourou, en Guyane, et l’exploitation des ressources minérales du sous-sol marin. 

Sur cette question, le représentant du Venezuela s’est étonné que la Puissance administrante ne fasse pas, pour la Polynésie, preuve de la même collaboration qu’au sujet du dossier calédonien. 

Pendant cette matinée de travaux le Comité a aussi adopté sans vote sept autres projets de résolution portant respectivement sur les situations d’Anguilla; des Bermudes; des Îles Vierges britanniques; des Îles Caïmanes; de Guam; de Montserrat; et des Tokélaou. 

Aux termes de chacun des projets de résolution, l’Assemblée générale est notamment invitée à réaffirmer « qu’en fin de compte, c’est au peuple » du territoire concerné lui-même « qu’il appartient de déterminer librement son futur statut politique, conformément aux dispositions applicables de la Charte, de la Déclaration et de ses résolutions pertinentes ».  

Le Comité spécial de la décolonisation poursuivra ses travaux demain, vendredi 23 juin, à partir de 10 heures.

  1. Projet de résolution A/AC.109/2017/L.11;
  2. Projet de résolution A/AC.109/2017/L.24
  3. Projets de résolution A/AC.109/2017/L.14; A/AC.109/2017/L.15; A/AC.109/2017/L.16; A/AC.109/2017/L.17; A/AC.109/2017/L.18; A/AC.109/2017/L.19; A/AC.109/2017/L.7

QUESTION DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE (A/AC.109/2017/7 ET A/AC.109/2017/L.24)

M. MANUEL TERRAI, Délégué des affaires internationales, européennes et du Pacifique du Gouvernement polynésien, a rappelé que la question de la Polynésie a été présentée pour la première fois au Comité le 4 octobre 2013.  Il a déclaré que la majorité des Polynésiens souhaitaient privilégier le développement économique au sein de la République française plutôt que l’indépendance.  Il a indiqué que l’économie ne cessait de s’améliorer après l’instabilité économique qui a marqué la Polynésie entre 2004 et 2013.  Avec un PIB de 5,5 milliards de dollars en 2015 pour une population de 285 000 personnes, l’économie polynésienne est une des plus dynamiques du Pacifique, s’est-il félicité.  Il a signalé que le dialogue avec l’État français ne s’est jamais interrompu, précisant que le Chef du Gouvernement du territoire, M. Édouard Fritch, rencontrait cette semaine, à Paris, le Président de la République française et la Ministre de l’Outre-Mer.

S’agissant de la situation politique, le délégué a indiqué que la population était partagée entre partisans de l’autonomie et de l’indépendance.  Il a précisé que les récentes élections législatives s’étaient achevées avec l’élection de deux députés pro-autonomie et d’un député pro-indépendance.  Il a précisé que les candidats pro-autonomie avaient rassemblé 75 000 voix contre 16 000 pour les candidats indépendantistes.  Il a estimé que 70% de la population considère que la Polynésie française n’est pas une colonie qui doit être décolonisée.  Il a souhaité que la situation de la Polynésie ne soit pas décidée « à la roulette russe », mais en tenant compte de la volonté de la population.

M. RICHARD ARIIHAU TUHEIAVA, élu du parti « Union pour la démocratie » (UPLD) à l’Assemblée de Polynésie, a rappelé que la Polynésie française a été réinscrite en 2013 sur la liste des territoires non autonomes, grâce à la résolution 67/225 de l’Assemblée générale.  Toutefois, a-t-il déploré, malgré cette décision de l’Assemblée générale, qui confirme l’applicabilité à la Polynésie française de l’Article 73 e) de la Charte, la Puissance administrante refuse de fournir au Comité spécial les renseignements requis.  M. Tuheiava a en particulier dénoncé la volonté de la Puissance administrante de s’approprier le plateau continental et une zone économique exclusive (ZEE) de 5 millions de kilomètres carrés.  Il a appelé au respect du deuxième paragraphe de l’article 2 de la Convention sur le droit de la mer.

M. Tuheiava a ensuite dénoncé la création, par l’État français, de deux taxes appliquées en Polynésie.  Il a notamment cité la taxe sur les billets d’avion et sur toutes les compagnies aériennes qui atterrissent à Tahiti et qui permettent à l’État français de récolter, selon lui, des centaines de millions de dollars.  Il a aussi souligné les revenus considérables que rapportent, depuis 1970, les activités spatiales de la base de Kourou, en Guyane, et qui couvrent la zone économique exclusive (ZEE) de la Polynésie.  Il a aussi mentionné les ressources considérables liées à l’exploitation des ressources minérales du sous-sol marin.  Le délégué a ensuite affirmé que la législation coloniale qui régit la Polynésie garantie à la France le contrôle unilatéral des ressources du territoire polynésien.

Pour ce qui est des conséquences des essais nucléaires, M. Tuheiava a regretté que les documents pertinents des Nations Unies aient omis de citer les principales informations fournies.  Illustrant son propos, il a rappelé qu’en date du 27 novembre 2014, l’Assemblée de Polynésie a adopté une résolution exhortant la Puissance administrante à reconnaître le caractère colonial des essais nucléaires effectués sur le territoire polynésien.  Il a aussi noté que lors des auditions de 18 pétitionnaires, entendus en 2016 par la Quatrième Commission, il avait été rappelé que la Commission d’indemnisation française des victimes des essais nucléaires avait reconnu que le décès de l’épouse de M. Yves Conroy était lié aux 46 essais nucléaires menés par la France.  

M. CARLYLE CORBIN, chercheur à The Dependecy Studies Projet, a rappelé qu’au titre de la résolution 67/225, l’Assemblée générale a reconnu que la Polynésie française est un cas de colonisation, et que cinq résolutions ont été adoptées depuis sur ce territoire.  Il a expliqué qu’afin d’étayer la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes, une évaluation de son niveau d’autonomie avait été menée à l’aide d’indicateurs capables de déterminer la nature du statut politique des relations entre le territoire et la Puissance administrante.  Il a regretté le manque de coopération de la Puissance administrante avec le Comité de décolonisation. 

S’agissant des essais nucléaires, M. Corbin a estimé que la teneur des deux rapports du Secrétaire général sur la question démontre l’insuffisance des mesures prises par la Puissance administrante.  Il a souhaité que la publication de l’étude indépendante sur les conséquences humanitaires des essais nucléaires, évoquées depuis plusieurs années par la Quatrième Commission, soit examinée par le Comité de décolonisation. Il a conclu que le baromètre de la réussite de la Polynésie dépendra de la pleine mise en œuvre des résolutions adoptées par le Comité de décolonisation et l’Assemblée générale.  

Le représentant du Venezuela, a regretté l’absence de progrès en Polynésie française, s’étonnant notamment que la Puissance administrante ne fasse pas, pour la Polynésie, preuve de la même collaboration qu’au sujet du dossier calédonien.  Il a exhorté la France à respecter l’Article 73 e) de la Charte des Nations Unies. 

Projet de résolution sur la Question de la Polynésie française A/AC.109/2017/L.24)

Par ce projet de résolution sur la Question de la Polynésie française adopté sans vote, l’Assemblée générale est invitée à réaffirmer le droit inaliénable du peuple de la Polynésie française à l’autodétermination, conformément à la Charte des Nations Unies et à sa résolution 1514 (XV) contenant la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.

Le Comité l’appellerait également à déplorer que la Puissance administrante n’ait pas donné suite à la demande qui lui avait été faite de soumettre au sujet de la Polynésie française les renseignements visés à l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte depuis que le territoire a été réinscrit sur la liste des territoires non autonomes par l’Assemblée générale en 2013.

Par ce texte l’Assemblée générale doit aussi exhorter la Puissance administrante à garantir la souveraineté permanente du peuple de la Polynésie française sur ses ressources naturelles, y compris les ressources marines et les minéraux sous-marins, conformément à ses résolutions sur la question.

L’Assemblée générale est priée de prendre note du rapport du Secrétaire général sur les retombées environnementales, écologiques, sanitaires et autres des essais nucléaires pratiqués pendant 30 ans en Polynésie française, établi en application du paragraphe 7 de sa résolution 71/120 du 6 décembre 2016. 

Elle est aussi priée d’inviter la Puissance administrante d’intensifier son dialogue avec la Polynésie française afin de favoriser la mise en place rapide d’un processus d’autodétermination équitable et effectif, dans le cadre duquel seront arrêtés le calendrier et les modalités de l’adoption d’un acte d’autodétermination.

QUESTION DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE (A/AC.109/2017/11 ET A/AC.109/2017/L.11)

Le représentant du Venezuela, a appelé la France à coopérer de manière constructive sur la Nouvelle-Calédonie.  S’agissant de l’application de l’Accord de Nouméa, il a voulu que le Comité spécial et les Nations Unies suivent la situation de près notamment en ce qui concerne les inscriptions sur les listes électorales.  Il a souligné que le référendum de 2018 sera fondamental pour tracer la voie de la décolonisation de la Nouvelle-Calédonie.  Aussi, le Venezuela appelle à organiser une visite du Comité spécial sur place pour montrer au peuple kanak que le Comité l’appuie pleinement à cette étape importante.

Venu présenter le projet de résolution sur la « Question de la Nouvelle-Calédonie »  Le représentant de la Papouasie-Nouvelle Guinée, qui intervenait également au nom des Fidji, a dit attendre avec impatience les informations que doit transmettre la Puissance administrante au sujet de la Nouvelle-Calédonie, soulignant que la situation est fluide et appelant le Comité ainsi que les Nations Unies à rester vigilants.  Après 165 ans de colonisation française, la Nouvelle-Calédonie se trouve dans une phase critique, a-t-il estimé, et il appartient aux parties prenantes de régler les questions liées au processus électoral, notamment les inscriptions sur la liste électorale, avant la tenue du référendum.  Le représentant s’est notamment préoccupé de l’exclusion de 23 000 Kanaks des listes électorales, soulignant que ces derniers doivent être inscrits pour que les résultats du référendum soient acceptés.  Sa crédibilité ne doit pas être mise en doute et la Puissance administrante doit résoudre ces questions sans délai, a-t-il souligné.  Le représentant a exhorté les parties prenantes à entreprendre des efforts sérieux en matière de sensibilisation et de plaidoyer sur ce « référendum historique ». 

Alors que la représentante de l’Indonésie a apporté son soutien à la résolution, le représentant de la Sierra Leone a souhaité la résolution pacifique des différends en Nouvelle-Calédonie.  Il a ajouté qu’il était préoccupé du fait que plus de 20 000 Kanaks soient exclus de la liste électorale.  Cela peut avoir des conséquences importantes sur le résultat du référendum, s’est-il inquiété.

En adoptant sans vote ce projet de résolution, le Comité de décolonisation invite l’Assemblée générale à noter les préoccupations que suscitent les difficultés rencontrées dans le déroulement des élections provinciales concernant les diverses interprétations qui continuent d’être faites des dispositions relatives au corps électoral restreint et la procédure d’appel en matière d’inscription sur les listes électorales, et à encourager la Puissance administrante et les Néo-Calédoniens à répondre à l’amiable et pacifiquement aux inquiétudes de tous les intervenants conformément à la législation en vigueur dans le territoire et en France, tout en respectant et en faisant respecter l’esprit et la lettre de l’Accord de Nouméa.

L’Assemblée générale est également appelée à considérer que des mesures appropriées pour l’organisation des consultations futures sur l’accession à la pleine souveraineté, « y compris l’établissement de listes électorales justes, régulières, crédibles et transparentes », comme prévu par l’Accord de Nouméa, sont indispensables à la réalisation d’un acte libre, équitable et authentique d’autodétermination conforme à la Charte ainsi qu’aux principes et aux pratiques de l’Organisation.

Elle demanderait en outre à la France, Puissance administrante, d’étudier la possibilité d’élaborer un programme d’éducation visant à informer le peuple néo-calédonien de la nature de l’autodétermination, afin qu’il soit mieux préparé au moment de prendre une décision sur la question, et prierait le Comité spécial de fournir toute l’assistance disponible à cet égard.

Par ce texte, le Comité invite par ailleurs l’Assemblée générale à engager vivement toutes les parties concernées, dans l’intérêt des Néo-Calédoniens, à poursuivre leur dialogue, dans le cadre de l’Accord de Nouméa, « dans un esprit d’harmonie et de respect mutuel » afin de continuer de promouvoir un environnement propice à l’évolution pacifique du territoire vers un acte d’autodétermination « où toutes les options seraient ouvertes », et qui reposerait sur le principe selon lequel c’est au peuple néo-calédonien qu’il appartient de choisir comment déterminer son destin.

L’Assemblée générale prierait en outre instamment la Puissance administrante de prendre des mesures propres à protéger et garantir le droit inaliénable des Néo-Calédoniens sur leurs ressources naturelles et celui de rester maîtres de la valeur future de ces ressources.

Adoption de projets de résolution sur les questions des territoires non autonomes d’Anguilla (A/AC.109/2017/2 et A/AC.109/2017/L.14); des Bermudes (A/AC.109/2017/3 et A/AC.109/2017/L.15); des Îles Vierges britanniques (A/AC.109/2017/4 et A/AC.109/2017/L.16); des Îles Caïmanes (A/AC.109/2017/5 et A/AC.109/2017/L.17); de Guam (A/AC.109/2017/9 et A/AC.109/2017/L.18); de Montserrat (A/AC.109/2017/10 et A/AC.109/2017/L.19); et des Tokélaou (A/AC.109/2017/14 et A/AC.109/2017/L.7)

Le Comité spécial a adopté, sans vote, une série de projets de résolution spécifiques à chacun des territoires non autonomes susmentionnés.  Comme l’année dernière, et contrairement aux années précédentes, il ne s’agit pas d’une « résolution omnibus » en plusieurs parties, mais de résolutions séparées, qui comportent toutefois des éléments communs, répétés dans chaque texte.

Ainsi, aux termes de chacun des projets de résolution, l’Assemblée générale est invitée, par le Comité, à réaffirmer le droit inaliénable du peuple du territoire concerné à l’autodétermination, conformément à la Charte des Nations Unies et à sa résolution 1514 (XV) contenant la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, le « caractère incontournable » du principe de l’autodétermination dans le processus de décolonisation dudit territoire et le fait que ce principe constitue aussi un droit fondamental reconnu par les conventions pertinentes relatives aux droits de l’homme.

En outre, l’Assemblée générale est invitée à réaffirmer « qu’en fin de compte, c’est au peuple » du territoire concerné lui-même « qu’il appartient de déterminer librement son futur statut politique, conformément aux dispositions applicables de la Charte, de la Déclaration et de ses résolutions pertinentes ».  À cet égard, l’Assemblée générale demanderait à la Puissance administrante d’agir en coopération avec le Gouvernement du territoire et les organes compétents du système des Nations Unies pour mettre au point des programmes d’éducation visant à faire prendre conscience à la population de son droit à l’autodétermination, compte tenu des différents statuts politiques légitimes envisageables sur la base des principes clairement définis dans sa résolution 1541 (XV) et ses autres résolutions et décisions pertinentes.

Par ailleurs, à l’exception du texte concernant les Tokélaou, chaque projet de résolution prévoit que l’Assemblée générale, « prenant en considération le Programme de développement durable à l’horizon 2030, y compris les objectifs de développement durable », soulignerait qu’il importe de stimuler le développement économique et social durable du territoire (…) tout en facilitant la conservation, la régénération et la reconstitution des écosystèmes ainsi que la résilience face aux nouveaux défis.  Elle engagerait vivement la Puissance administrante à « s’abstenir de mener des activités illicites, néfastes et non productives, y compris de faire du territoire un paradis fiscal, car elles ne correspondent pas aux intérêts du peuple du territoire ».

En marge de l’adoption de la résolution relative à la situation des Tokélaou, le représentant de la Sierra Leone a demandé au Gouvernement de Nouvelle-Zélande de promouvoir l’esprit d’autodétermination du peuple des Tokélaou.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur l’archipel des Chagos, opposant Maurice et le Royaume-Uni

Soixante et onzième session,
88e séance plénière – matin
AG/11924

L’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur l’archipel des Chagos, opposant Maurice et le Royaume-Uni

L’Assemblée générale a adopté, aujourd’hui, une résolution dans laquelle elle demande à la Cour internationale de Justice (CIJ) de donner un avis consultatif sur deux questions concernant les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos du territoire de Maurice en 1965, une résolution qualifiée par le représentant du Royaume-Uni, qui administre l’archipel, de « précédent terrible ».

Par cette résolution*, adoptée par 94 voix pour, 15 voix contre et 65 absentions, l’Assemblée demande à la CIJ de donner un avis consultatif pour déterminer si le processus de décolonisation a été « validement mené à bien lorsque Maurice a obtenu son indépendance en 1968, à la suite de la séparation de l’archipel des Chagos de son territoire et au regard du droit international ».  Elle lui demande aussi de se prononcer sur les conséquences en droit international « du maintien de l’archipel des Chagos sous l’administration du Royaume-Uni, notamment en ce qui concerne l’impossibilité pour Maurice d’y mener un programme de réinstallation pour ses ressortissants, en particulier ceux d’origine chagossienne ».

Commentant « une distraction », « un obstacle aux discussions bilatérales » et « un précédent terrible pour l’Assemblée générale et la Cour », le représentant du Royaume-Uni s’est d’abord étonné que la résolution lie les anciens habitants de l’archipel à la question de la souveraineté britannique, parce que, durant les trois séries de pourparlers bilatéraux engagées depuis le mois de septembre, Maurice n’y a fait que de « légères allusions », se concentrant plutôt sur le transfert de souveraineté.

Le fait est, a souligné le représentant, que nous avons négocié en 1965 le détachement de l’archipel avec les représentants élus de Maurice, les mêmes avec lesquels nous négocions séparément l’indépendance du pays.  Pour les Chagos, ils ont négocié une compensation que le Royaume-Uni a payée.  Ils ont aussi négocié des droits et obtenu l’engagement de récupérer l’archipel quand il ne sera plus nécessaire à la stratégie de défense britannique. 

Justement, le dernier survivant des participants à la Conférence constitutionnelle de 1965 était là aujourd’hui.  Le Ministre mauricien de la défense, M. Anerood Jugnauth, a tranché: « le consentement de la colonie de Maurice –si consentement il y a eu– ne saurait justifier une violation de la Charte des Nations Unies ».  En tant qu’État indépendant, a-t-il martelé, Maurice n’a jamais conclu d’accord sur le « démembrement » de son territoire. 

Ce « démembrement » obtenu sous la contrainte, sans le consentement des Mauriciens et avec le déplacement des habitants de l’archipel, a été réalisé en violation du droit des peuples à l’autodétermination et des droits de l’homme.  « Aucune compensation financière » ne saurait justifier la violation de ces principes », a ajouté le Ministre.

Il a rappelé que l’ONU avait donné au Royaume-Uni jusqu’à juin 2017 pour finaliser les pourparlers, lesquels ont été vains, car le Royaume-Uni a refusé de fixer une date butoir, « voire a refusé de parler de décolonisation ».  « Nous ne pouvons pas nous engager », a confirmé le représentant britannique.  L’archipel des Chagos fait depuis 1966 l’objet d’un accord de coopération militaire avec les États-Unis.  Nous ne pouvons pas, 19 ans avant la fin de l’accord, prédire ce que sera notre stratégie de défense, s’est-il expliqué. 

La base de Diego Garcia, a-t-il tenu à souligner, contribue « de manière essentielle » à la sécurité et à la stabilité régionales et internationales, en particulier l’océan Indien, dont Maurice.  Elle joue un rôle « critique » dans la lutte contre les défis les plus complexes et les plus urgents du XXIsiècle comme le terrorisme, la criminalité internationale, la piraterie ou toute autre forme d’instabilité, a insisté le représentant, en répétant que quand le territoire ne sera plus nécessaire, sa souveraineté passera à Maurice.  Il a aussi pronostiqué que la CIJ ne se saisira pas de l’affaire parce qu’elle concerne un différend bilatéral entre deux États Membres de l’ONU.

L’Article 94 de la Charte des Nations Unies dispose que « l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur toute question juridique ».  L’avis consultatif est différent des arrêts que la CIJ peut rendre sur des différends territoriaux soumis par les États parties et couverts par le chapitre IV du Statut de la Cour. 

« Demander un avis consultatif à la Cour ne menace ni la paix ni la sécurité », a déclaré le Ministre mauricien de la défense, assurant le Royaume-Uni et les États-Unis qu’un contrôle effectif de Maurice sur l’archipel des Chagos ne représenterait en aucune façon une menace sur la base militaire de Diego Garcia, des assurances que le représentant du Royaume-Uni a jugées « sans crédibilité », voyant dans la démarche de Maurice et de l’Assemblée générale une tentative de contourner le principe « essentiel » selon lequel un État n’est pas obligé, sans son consentement, de voir ses différends bilatéraux soumis à un règlement judiciaire.

Le Secrétariat de l’ONU a indiqué que, sur la base des derniers avis consultatifs, la saisine de la CIJ devrait coûter entre 450 000 et 600 000 dollars.

En début de séance, l’Assemblée a rendu hommage à la mémoire du Président de Vanuatu, Baldwin Lonsdale, décédé le 17 juin 2017 à l’âge de 67 ans dans l’exercice de ses fonctions, qu’il occupait depuis 2014.  Le Président de l’Assemblée a salué la mémoire d’un « homme honoré dans tout le Pacifique pour son dévouement en faveur de son peuple ».  Plusieurs délégations ont vu en lui « un champion de la lutte contre les changements climatiques » qui a « servi son peuple avec dignité ».  Le représentant de Vanuatu a remercié la communauté internationale pour ces témoignages de sympathie envers le défunt, qu’il a qualifié de « chantre de l’état de droit ».  

* A/71/L.73

DEMANDE D’AVIS CONSULTATIF DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE SUR LES EFFETS JURIDIQUES DE LA SÉPARATION DE L’ARCHIPEL DES CHAGOS DE MAURICE EN 1965: PROJET DE RÉSOLUTION (A/71/L.73)

Déclarations

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. RAYMOND SERGE BALÉ (Congo), a présenté le projet de résolution et expliqué que ce texte entend concourir à la décolonisation « totale » de l’Afrique.  Le texte, a-t-il dit, fait suite à une résolution de l’Union africaine qui dénonce comme « illégale » l’autorité britannique sur l’archipel des Chagos.  Constatant depuis plus de cinq décennies, qu’il n’y a pas « de chance de progrès » sur cette question, le Groupe des États d’Afrique a décidé de demander à l’Assemblée générale de saisir la Cour internationale de Justice (CIJ).  Un vote « oui » serait un vote en faveur de la Charte des Nations Unies, a déclaré le représentant.

Rappelant qu’il est le dernier survivant des participants à la Conférence constitutionnelle de Maurice, qui, tenue à Londres en 1965, a ouvert la voie à l’indépendance du pays en 1968, M. ANEROOD JUGNAUTH, Ministre de la défense de Maurice, s’est dit bien placé pour rendre compte des circonstances du démembrement de l’archipel des Chagos avant l’indépendance. 

« Je parle au nom des Mauriciens originaires de l’archipel des Chagos qui en ont été expulsés de force », a-t-il tonné, parlant d’un l’archipel qui faisait partie du territoire de Maurice depuis le XVIIIsiècle, à l’époque où Maurice était une colonie française.  La France a gouverné l’archipel des Chagos comme s’il dépendait de Maurice, avant de céder les deux territoires au Royaume-Uni en 1810.

L’administration de l’archipel des Chagos comme un territoire mauricien s’est poursuivie sans interruption durant la période coloniale britannique jusqu’à son « démembrement illégal », le 8 novembre 1965.  Cela s’est produit, a dénoncé le Ministre, en violation flagrante du droit international et de la résolution 1514 (XV) sur la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, adoptée le 14 décembre 1960 par l’Assemblée générale.

Le Ministre a insisté sur le fait que la nature « illégale » du démembrement avait été reconnue et confirmée par l’Assemblée générale, dans sa résolution 2066 (XX), du 16 décembre 1965.  L’Assemblée y invite le Gouvernement du Royaume-Uni à prendre des mesures effectives en vue de la mise en œuvre immédiate et complète de la résolution 1514 (XV), « à l’exclusion de toute mesure emportant démembrement du territoire de Maurice ou violation de son intégrité territoriale ».  Par la suite, l’Assemblée a réitéré sa position à plusieurs reprises, dans ses résolutions 2232 (XXI), du 20 décembre 1966, et 2357 (XXII), du 19 décembre 1967.

Pourtant, a déploré le Ministre, le processus de décolonisation de Maurice est toujours incomplet.  « Plus de 30 ans après le démembrement de l’archipel des Chagos, des vérités choquantes sur les circonstances de ce démembrement viennent de faire surface », a déclaré le représentant, précisant que des notes internes jusqu’ici inconnues du Ministère britannique des affaires étrangères, rédigées entre 1965 et 1966, ont été retrouvées.  Ces notes démontrent la « volonté délibérée » du Royaume-Uni de mettre l’ONU face à un « fait accompli » et « d’induire en erreur la communauté internationale sur la nature de la population de l’archipel ».

Selon ces notes internes, il apparaît que les habitants de l’archipel ont été « cyniquement » qualifiés de « Tarzan » et de « Vendredi », dans le seul but de se dérober à l’examen minutieux des Nations Unies sur la nature « illégale » du démembrement.  À l’appui de son argumentaire, le Ministre a cité le contenu d’une note interne adressée par le Secrétaire colonial britannique à son Premier Ministre en 1965, dans laquelle il déclare: « Il est donc important que nous soyons en mesure de mettre les Nations Unies devant un fait accompli. »

Ces faits nouveaux, a estimé le Ministre, devraient suffire à une nouvelle interprétation de ce qui s’est produit en 1965.  Le démembrement du territoire de Maurice sous la contrainte, sans le consentement des Mauriciens, et le déplacement des habitants de l’archipel ont été réalisés en violation du droit des peuples à l’autodétermination et des droits de l’homme.  « Aucune compensation financière » ne saurait justifier la violation de ces principes, a-t-il ajouté.

La position du Royaume-Uni semble être en effet que Maurice a donné son accord en acceptant une compensation financière.  Or, « le consentement de la colonie de Maurice –si consentement il y a eu– ne saurait justifier une violation de la Charte », s’est justifié le Ministre, ajoutant qu’« en tant qu’État indépendant », Maurice n’a jamais conclu d’accord sur le démembrement.

Le Ministre a rappelé que l’ONU avait donné au Royaume-Uni jusqu’à juin 2017 pour entamer des négociations sur le processus de décolonisation.  Trois séries de pourparlers ont eu lieu mais ils ont été vains, car le Royaume-Uni a refusé de fixer une date pour parachever le processus, « voire a refusé de parler de décolonisation ».

Le Ministre a par conséquent appuyé le projet de résolution demandant un avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur la question de savoir si « le processus de décolonisation a été validement mené à bien lorsque Maurice a obtenu son indépendance en 1968 ».

« Demander un avis consultatif à la Cour ne menace ni la paix ni la sécurité », a déclaré le Ministre, assurant le Royaume-Uni et les États-Unis qu’un contrôle effectif de Maurice sur l’archipel des Chagos ne représenterait en aucune façon une menace sur la base militaire de Diego Garcia.  Il s’est dit prêt à conclure un accord à long terme avec les parties concernées sur ce point.

« Laissons les Nations Unies accomplir leur mandat concernant la décolonisation! » a déclaré, en conclusion, le Ministre de la défense de Maurice.

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a rappelé qu’en 2016, les chefs d’État et de gouvernement du Mouvement, réunis à leur dix-septième Sommet dans l’île de Margarita, au Venezuela, avaient déjà indiqué que l’archipel des Chagos est un territoire mauricien et promis de voter en faveur de la résolution.  

Au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), M. ISMAEL ABRAÃO GASPAR MARTINS (Angola) a rappelé que l’un des objectifs fondateurs de la Communauté est d’œuvrer à la décolonisation totale.  Il a fait un rappel historique des faits entourant l’archipel des Chagos, relevant notamment que ce territoire a été retiré de Maurice avant son indépendance.  Il a demandé à toutes les délégations de voter en faveur de ce texte pour « faire triompher » le droit international et la Charte des Nations Unies.   

« En septembre dernier, vous avez demandé au Royaume-Uni et à Maurice d’entamer des négociations bilatérales sur l’archipel des Chagos, que nous administrons, comme territoire britannique de l’océan Indien », a rappelé M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni), avant d’ajouter: « nous l’avons fait de bonne foi ».  Cette semaine encore, les ministres des deux pays se sont rencontrés à New York pour poursuivre leur dialogue bilatéral.

« Vous aviez raison, car nous devrions avoir pour règle de discuter de manière bilatérale pour régler des affaires bilatérales », a insisté le représentant, voulant que la question reste bilatérale.  Il a donc regretté que cette question ait abouti à l’Assemblée générale et s’est dit triste qu’un différend entre deux États Membres de l’ONU, deux partenaires du Commonwealth, ait passé le seuil de cette salle.  Une voie constructive est toujours possible et le Royaume-Uni appelle au retrait du projet de résolution pour la garder ouverte, a dit le représentant. 

Il ne s’agit pas d’une « question de décolonisation », a-t-il poursuivi.  Maurice est devenue indépendante en 1968, en vertu d’un accord mutuel entre son Conseil des ministres et le Gouvernement britannique.  Dans des discussions séparées avec le Conseil des ministres, Maurice avait déjà accepté le détachement de l’archipel des Chagos, un accord qu’il a respecté jusque dans les années 80.  Ainsi, pendant des années, l’Assemblée générale n’a jamais entendu parler de la question. 

« Pourtant, nous voilà aujourd’hui », s’est étonné le représentant, se demandant: « Combien d’autres questions bilatérales laissées par l’histoire pourraient atterrir de cette façon à l’Assemblée générale? »  Le projet de résolution, a-t-il prévenu, pourrait créer un précédent que beaucoup viendraient à regretter. 

Nous ne doutons pas, a-t-il dit, du droit de l’Assemblée générale de demander un avis consultatif à la CIJ sur une question juridique.  Mais le fait que l’Assemblée n’ait jamais examiné cette question pendant des années montre que le débat d’aujourd’hui a été convoqué pour de toutes autres raisons.  C’est une tentative de Maurice de contourner un principe « essentiel »: le principe selon lequel un État n’est pas obligé, sans son consentement, de voir ses différends bilatéraux soumis à un règlement judiciaire.  « Nous ne donnons pas et ne donnerons jamais ce consentement, car nous savons ce sur quoi nous nous sommes mis d’accord avec Maurice. »

La CIJ, a prédit le représentant, ne se saisira pas de l’affaire parce qu’elle concerne un différend bilatéral entre deux États Membres de l’ONU.  Le représentant a appelé tous ceux qui ont l’intention de s’abstenir de voter contre le projet de résolution, « précisément parce qu’il s’agit d’une affaire bilatérale ». 

Depuis septembre dernier, a-t-il expliqué, trois séries de pourparlers bilatéraux ont été engagées.  Ces pourparlers ont été infructueux, mais le Royaume-Uni y tient toujours.  Il a fait de nombreuses propositions à Maurice et déjà, dès 1965, il avait pris l’engagement « contraignant » de céder à Maurice la souveraineté sur l’archipel des Chagos quand il ne servira plus aux objectifs de défense.  Plus récemment, le Royaume-Uni a offert, sans préjudice de sa souveraineté, un cadre de gestion commune de toutes les îles à l’exception de Diego Garcia.  Il a aussi offert des formes stratégiques et tactiques de coopération en matière de sécurité.  « Je regrette donc que Maurice n’ait pas accepté ces offres parce qu’elles auraient pu créer un climat de confiance et donner à Maurice le droit de regard concret et direct sur l’archipel qu’il n’a jamais eu. »

Le représentant s’est d’ailleurs dit surpris que le projet lie les anciens habitants de l’archipel à la question de la souveraineté britannique parce que, durant les pourparlers, Maurice n’y a fait que de « légères allusions », se concentrant plutôt sur le transfert de souveraineté.  Tous les gouvernements britanniques qui se sont succédé ont exprimé leurs regrets quant à la manière dont les Chagossiens ont été retirés du « Territoire britannique de l’océan Indien » dans les années 60 et 70.  En 1973, le Gouvernement a donné des fonds au Gouvernement mauricien pour financer leur réinstallation.  En 1982, d’autres fonds ont été alloués et plus récemment, le Gouvernement a commandité une étude indépendante et mené des consultations populaires qui ont conclu à une réelle aspiration au retour mais une aspiration qui s’affaiblit quand les gens comprennent ce que serait leur vie dans des îles très isolées et à basse altitude.  Le Gouvernement a donc renoncé à la réinstallation, après avoir réfléchi à la faisabilité, aux coûts et aux intérêts en matière de défense et de sécurité.

Le Gouvernement, a précisé le représentant, a préféré injecter quelque 50 millions de dollars pour améliorer la vie des Chagossiens dans les communautés où ils vivent aujourd’hui, que ce soit à Maurice, aux Seychelles ou au Royaume-Uni.  La priorité de Maurice n’a jamais été le sort des Chagossiens mais plutôt la souveraineté sur l’archipel, en pressant le Royaume-Uni de fixer une date.  « Nous ne pouvons pas nous engager », a confirmé le représentant, à cause de l’accord de 1965.  Le « Territoire britannique de l’océan Indien », s’est-il expliqué, a été créé pour des raisons de sécurité et, en 1966, un accord a été conclu avec les États-Unis sur une utilisation commune d’un territoire qui fait une contribution « essentielle » à la sécurité et à la stabilité régionales et internationales, en particulier l’océan Indien, dont Maurice.  La base militaire joue un rôle « critique » dans la lutte contre les défis les plus complexes et les plus urgents du XXIe siècle comme le terrorisme, la criminalité internationale, la piraterie ou toute autre forme d’instabilité. 

L’accord avec les États-Unis prend fin en 2036 et nous ne pouvons pas, 19 ans avant, prédire ce que seront nos objectifs de défense, a insisté le représentant, jugeant que les assurances de Maurice manquent de crédibilité, contrairement à celles du Royaume-Uni qui ne cesse de dire que quand le territoire ne sera plus nécessaire aux objectifs de défense, sa souveraineté passera à Maurice.  Le Royaume-Uni n’a pas hésité à le faire avec les Seychelles, a affirmé le représentant. 

Le fait est, a-t-il conclu, que nous avons négocié le détachement de l’archipel avec les représentants élus de Maurice, les mêmes avec lesquels nous négocions séparément l’indépendance de leur pays.  Ces représentants avaient l’autorité de négocier et nous avons conclu un accord avec eux.  Sur l’archipel des Chagos, ils ont négocié une compensation que le Royaume-Uni a payée.  Ils ont négocié les droits et l’engagement de récupérer les îles quand elles ne seront plus nécessaires à la défense.  Notre engagement, a précisé le représentant, ne veut pas dire que nous ne sommes pas sûrs de notre souveraineté.  Nous voulons discuter avec nos partenaires de cette question bilatérale qui nous divise.  Il s’agit en effet d’une question bilatérale qui relève de discussions bilatérales, a-t-il répété.  Elle n’est pas matière à une demande d’avis consultatif à la CIJ par l’Assemblée générale, a-t-il insisté, avant d’annoncer un vote contre le projet de résolution et de prévenir qu’un avis consultatif serait « une distraction », « un obstacle aux discussions bilatérales » et « un précédent terrible pour l’Assemblée générale et la Cour ».

La représentante des États-Unis a rappelé que son pays a reconnu la souveraineté du Royaume-Uni sur l’archipel des Chagos en 1984, les deux ayant une base militaire « importante » sur le territoire.  Maurice, s’est impatientée la représentante, essaye de faire croire à une question de décolonisation alors qu’il s’agit bien d’un « différend bilatéral ».  « On ne peut pas demander l’avis de la CIJ quand les deux parties n’adhérent pas à la démarche », a-t-elle argué, affirmant que cela créerait un précédent grave et que ce processus empièterait sur les efforts bilatéraux en cours.  Le Royaume-Uni a fait des offres généreuses et Maurice veut maintenant se soustraire aux efforts bilatéraux, a-t-elle dénoncé, avant d’annoncer un vote contre.

Le représentant de l’Inde a rappelé que l’Inde a toujours été, depuis son indépendance en 1947, un fervent défenseur de la décolonisation.  L’Inde a toujours soutenu la quête de Maurice de rétablir sa souveraineté sur l’archipel.  L’Inde vote pour.

L’Égypte aussi, a dit son représentant, conformément à la position du Groupe des États d’Afrique et du Mouvement des pays non alignés.  L’archipel des Chagos constitue l’un des derniers chantiers de la décolonisation.

Le vote « oui » est « un impératif historique en solidarité avec une nation africaine sœur », s’est expliqué, à son tour, le représentant du Kenya.  Les violations et les exactions qui ont marqué l’histoire de cet archipel exigent de tous les États qu’ils votent en faveur du texte, a-t-il plaidé, en ajoutant: « Tout ce que nous demandons c’est l’avis de la CIJ, est-ce si difficile? »

Nous appuyons la position de Maurice et demandons à toutes les parties de régler la question par le dialogue, a déclaré le représentant de la République-Unie de Tanzanie.

Reprenant la parole, le représentant du Royaume-Uni a insisté, une nouvelle fois, sur le fait que la question de l’archipel des Chagos relève exclusivement d’un différend bilatéral.  L’Assemblée générale est instrumentalisée et contribuer à contourner le principe selon lequel un avis consultatif à la Cour ne peut être demandé sans le consentement de toutes les parties concernées.  « C’est un précédent très malheureux. »

« C’est un précédent dangereux », a acquiescé son homologue des États-Unis face à une question « purement bilatérale ».

Le représentant du Chili s’est dissocié du Mouvement des pays non alignés, estimant que le différend entre Maurice et le Royaume-Uni doit être réglé de façon bilatérale.  Nous nous abstenons, a-t-il annoncé.

Malgré son engagement « sans faille » en faveur de la décolonisation, la Croatie, a dit son représentant, vote contre pour « laisser sa chance aux négociations bilatérales ».

Il est regrettable que ces négociations n’aient pas abouti, a avoué le représentant de la France, rappelant que tous les recours bilatéraux ne sont pas épuisés.  La France ne peut donc voter en faveur du projet de résolution.

Nous voterons pour, a contré le représentant de Trinité-et-Tobago.

Le représentant de l’Australie a estimé qu’il n’est pas approprié de demander l’avis consultatif de la CIJ pour déterminer les droits et intérêts des États Membres.  La base militaire de Diego Garcia joue un rôle crucial dans la lutte mondiale contre le terrorisme et il est de l’intérêt de tous les États de lever toute équivoque sur le statut de la base, au risque de saper sa contribution à la paix et la sécurité internationales, a plaidé le représentant. 

Son homologue de l’Uruguay a exhorté les deux parties à poursuivre leur dialogue.  Cette question est une question bilatérale, a souligné la représentante de l’Allemagne, notant que l’une des parties ne souhaite pas impliquer la CIJ dans le règlement du différend.  S’étant abstenu lors du vote, le délégué de la Chine a appelé, à son tour, à la poursuite des consultations bilatérales.  La recherche de solutions doit rester au niveau bilatéral, a acquiescé le représentant du Mexique, en rappelant tout de même que la CIJ est bien l’organe approprié pour statuer sur les différends entre États.  Mais pas au stade actuel, a estimé son homologue de la Nouvelle-Zélande.  Les différends bilatéraux ne relèvent de la CIJ que quand les parties sont en négociation, a ajouté le représentant de la Suède.  

La question n’a rien à voir avec un différend territorial, a précisé le délégué d’El Salvador.  Nous sommes devant des questions de décolonisation sur lesquelles la CIJ a déjà statué.  Mais le règlement des différends par la CIJ, a nuancé le représentant du Canada, exige le consentement des deux parties.  Hors dans ce cas, ce principe n’a pas été respecté.  Privilégions les négociations bilatérales, a encouragé son homologue du Portugal, la CIJ ne devant pas s’impliquer dans des affaires bilatérales, a ajouté le représentant d’Israël.  Les deux parties doivent poursuivre le dialogue, a concédé le délégué du Brésil, mais un vote en faveur de la résolution veut dire que l’on demande à un organe de l’ONU, la CIJ, de donner un avis non contraignant propre à guider les deux parties vers le règlement de leur différend.  Qu’elles se concentrent donc sur les négociations bilatérales, a conclu le représentant du Myanmar, avant que son homologue de l’Indonésie ne souligne l’intégrité territoriale est un droit « inaliénable » de tout État indépendant.  Les parties doivent avoir un calendrier, a-t-il estimé, souhaitant l’avènement d’une solution acceptable par tous.   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur l’interdiction des armes nucléaires: des délégations s’opposent à « la subordination » de la future convention au TNP

Conférence sur les armes nucléaires,
19e séance - Matin
CD/3714

Conférence sur l’interdiction des armes nucléaires: des délégations s’opposent à « la subordination » de la future convention au TNP

« Nous ne sommes pas venus ici pour négocier le protocole d’un instrument mais un instrument indépendant », a lancé, ce matin, l’Équateur aux participants à la Conférence pour la négociation d’une convention sur l’interdiction des armes nucléaires, alors que le Brésil martelait: « nous sommes ici pour négocier un traité autonome en vue de l’élimination totale des armes nucléaires ». 

La réaction de ces deux États était suscitée par une interprétation de l’article 19 du projet de convention, qui se lit « la Convention n’affecte pas les droits et obligations des États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) ».  L’Équateur, le Brésil et d’autres ont vu dans cet article « une subordination » de la future convention au TNP, « un manque d’indépendance juridique » ou encore « un obstacle à l’objectif fondamental de la convention ».  Ces États ont réclamé la suppression pure et simple de cette disposition, comme meilleur moyen d’éviter toute ambiguïté.  Invoquant un proverbe africain: « quand un enfant tombe, il regarde vers l’avant alors que quand un adulte tombe il regarde en arrière », le Nigéria a proposé comme alternative à la suppression pure et simple, la mention de tous les traités pertinents sans hiérarchisation aucune.

L’article 11 sur les amendements a également suscité plusieurs commentaires.  Le Mexique et le Pérou ont insisté sur le fait que les éventuels amendements ne pouvaient en aucun cas être contraires aux principes de la convention, alors que d’autres, comme la Malaisie, notait un défaut de précision: qui peut soumettre des amendements et quelles seraient les modalités de leur adoption?  Dans son état actuel, l’article ne dit rien sur les auteurs des amendements mais consacre une adoption à la majorité des deux tiers des États parties.

Quant à l’article 18 qui reconnaît « le droit souverain » de chaque État partie à se retirer de la Convention, certaines délégations ont exigé que cette option soit régie par des conditions « strictes et claires ».  En revanche, les représentants de la société civile se sont carrément opposés à cette option, exigeant une disposition selon laquelle « le retrait de la convention n’est pas permis ».  Ils ont dit se baser sur le précédent de la Charte des Nations Unies qui ne prévoit pas le retrait d’un État Membre.

La première lecture du projet de convention étant terminée, la Présidente de la Conférence a soumis aux délégations une nouvelle version des 14 alinéas du préambule, sur la base des « propositions convergentes » des délégations.  Au titre des principaux changements, elle a mentionné les ajouts suivants: la notion de « risque posé par l’existence des armes nucléaires »; le fait que les « armes nucléaires menacent la survie de l’humanité et ont des effets négatifs sur la santé des générations actuelles »; l’interdiction de la « menace d’utiliser des armes nucléaires »; l’obligation des États parties de respecter le droit international, y compris le droit international humanitaire et les droits de l’homme; l’existence d’un lien entre la convention et les mécanismes de désarmement des Nations Unies; le constat de la lenteur du désarmement nucléaire; et la condamnation de la dépendance des doctrines militaires traditionnelles vis-à-vis de la dissuasion nucléaire.

La prochaine réunion de la Conférence sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

NÉGOCIATIONS, CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 8 DE LA RÉSOLUTION 71/258 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EN DATE DU 23 DÉCEMBRE 2016, EN VUE DE L’ADOPTION D’UN INSTRUMENT JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT VISANT À INTERDIRE LES ARMES NUCLÉAIRES EN VUE DE LEUR ÉLIMINATION COMPLÈTE

Les délégations ont repris l’examen des articles 11 à 21 relatifs aux questions suivantes: amendements, règlement des différends, universalité, signature, ratification, entrée en vigueur, réserves, durée, relations avec d’autres accords, dépôt et textes authentiques.  Réagissant à certaines remarques faites hier sur l’article 19 qui se lit « la Convention n’affecte pas les droits et obligations des États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) », le représentant de l’Équateur s’est dit préoccupé par le fait que la Convention n’aurait pas d’indépendance juridique, compte tenu de sa subordination au TNP.  Il a regretté ce fait, arguant que des États avaient, par le passé, interprété le TNP de manière « non positive ».  L’ancien Premier  Ministre britannique, M. Tony Blair, y voyait ainsi une autorisation pour les puissances nucléaires de maintenir leurs arsenaux nucléaires. 

Si l’article 19 risque d’être interprété de la même manière, il faut tout simplement le supprimer, a estimé le représentant qui « n’est pas venu ici pour négocier le protocole d’un autre instrument mais un instrument indépendant ».  Il a été soutenu par ses homologues de l’Argentine, de l’Indonésie, du Mexique, de la Nouvelle-Zélande ou encore des Fidji, « pour qu’aucune possibilité de réarmement ne soit envisageable ».  La délégation nigériane a adopté la même position et cité un proverbe africain: « quand un enfant tombe, il regarde vers l’avant alors que quand un adulte tombe il regarde en arrière ».  La délégation a proposé de mentionner l’ensemble des traités pertinents sans hiérarchisation aucune.  Il ne serait pas « sage » de ne mentionner que le TNP, a renchéri le représentant de la Thaïlande.

Le représentant du Brésil s’est également opposé à cette « clause de subordination » du TNP qui risquerait de saper « l’objectif fondamental » de la Convention.  « Nous sommes ici pour négocier un traité autonome en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », a insisté le représentant.  Il a également exprimé son désaccord avec la proposition de laisser aux États parties la possibilité de négocier des accords militaires avec des États non parties au traité.  Cette proposition, faite hier par la Suisse, est « inacceptable » en ce qu’elle risque d’avoir une incidence sur l’efficacité globale de la Convention. 

Revenant à l’article 11 sur les amendements, le représentant de l’Indonésie a voulu qu’il précise qui a le droit de présenter des amendements.  Sur l’article 13 relatif à l’universalité, il a proposé qu’on le renforce, en soulignant: « chaque État partie doit promouvoir et encourager ».  Passant ensuite à l’article 18 sur la durée, il a voulu une version simplifiée sur le « droit souverain » de chaque État partie de se retirer du traité.  Il faut des dispositions formelles, a plaidé le représentant.  Son homologue du Venezuela a estimé que la possibilité de se retirer de la Convention serait un moyen de faciliter l’adhésion des puissances nucléaires à cette Convention.  Justement, ces puissances ayant refusé de participer aux négociations, le représentant de Singapour s’est opposé à la disposition qui prévoit que les États parties notifient leur volonté de se retirer de la Convention au Conseil de sécurité.  Il a proposé que la notification soit faite auprès de l’Assemblée générale.  Le représentant des Fidji a commenté l’article 17 sur les réserves, arguant qu’aucun État partie ne devrait pouvoir exprimer des réserves, en particulier lorsqu’il s’agit des armes nucléaires. 

Interventions des représentants de la société civile

« Le traité devrait mentionner qu’aucun retrait n’est possible », a estimé la représentante de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires, ajoutant qu’aucun évènement extraordinaire ne saurait jamais justifier la production ou l’acquisition d’armes nucléaires.  Il existe un précédent connu, a-t-elle déclaré, rappelant que la Charte des Nations Unies mentionne expressément qu’aucun retrait de l’Organisation n’est envisageable.

Dans cette perspective, a estimé le représentant du Centre pour la sécurité internationale et d’études politiques du Kazakhstan, les paragraphes 2 et 3 de l’article 18 devraient être supprimés et remplacés par le libellé suivant: « Le retrait de cette convention n’est pas permis ».  Il a également proposé d’inclure un paragraphe établissant « qu’aucune disposition de cette convention ne saurait être interprétée comme fragilisant le droit des États parties de développer l’énergie nucléaire à des fins civiles ».

Après ces interventions, la Présidente de la Conférence a apporté des explications quant à la nouvelle version du préambule du projet de convention, à partir de laquelle les délégations seront amenées à procéder à une deuxième lecture.  La Présidente a précisé avoir rassemblé les propositions convergentes des délégations pour aboutir à cette nouvelle version.  Au titre des principaux changements, elle a mentionné les ajouts suivants: la notion de « risque posé par l’existence des armes nucléaires »; le fait que les « armes nucléaires menacent la survie de l’humanité et ont des effets négatifs sur la santé des générations actuelles »; l’interdiction de la « menace d’utilisation des armes nucléaires »; l’obligation des États parties de respecter le droit international, y compris le droit international humanitaire et les droits de l’homme; l’existence d’un lien entre la convention et les mécanismes de désarmement des Nations Unies; le constat de la lenteur du désarmement nucléaire; et la condamnation de la dépendance des doctrines militaires traditionnelles vis-à-vis de la dissuasion nucléaire.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Soudan du Sud: « seuls un processus politique ouvert et une réelle volonté des acteurs clefs peuvent mettre fin au conflit », selon M. Jean-Pierre Lacroix

7982e séance – après-midi
CS/12884

Soudan du Sud: « seuls un processus politique ouvert et une réelle volonté des acteurs clefs peuvent mettre fin au conflit », selon M. Jean-Pierre Lacroix

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a affirmé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, que « seuls un processus politique ouvert et une réelle volonté politique des acteurs clefs à mettre fin au conflit, et la mise en œuvre de l’Accord de paix, pourraient apporter la paix au Soudan du Sud ».

M. Lacroix présentait le rapport* du Secrétaire général sur le Soudan du Sud pour la période allant du 2 mars au 1er juin 2017, soulignant pour l’occasion que ni la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), ni la Force de protection régionale « ne sont une panacée à la crise » que vit le pays. 

Il a aussi indiqué qu’en l’absence d’une quelconque amélioration de la situation sur le terrain, il n’est pas possible de proposer une éventuelle modification du mandat de la MINUSS.

M. Lacroix a rappelé qu’en vertu de l’Accord de paix signé en 2015, des élections devraient se tenir dans le pays à la fin de la période de transition, soit à la fin de l’année 2018.  Mais si la situation actuelle persiste -la poursuite du conflit armé, la paralysie politique, les déplacements massifs de population, les besoins humanitaires et de protection accrus-, il ne sera pas possible de tenir des élections au Soudan du Sud, a-t-il prévenu.

Le conflit s’est en effet poursuivi dans diverses régions du pays, en dépit du cessez-le-feu proclamé par le Président du pays, M. Salva Kiir, le 22 mai dernier, le jour du lancement du dialogue national. 

Le représentant du Soudan du Sud, M. Joseph Moum Majak Ngor Malok, qui prenait part à la réunion, a accusé le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition), allié de l’ancien Premier Vice-Président Riek Machar, d’avoir mené des attaques avec l’intention de causer une instabilité et attirer l’attention de la communauté internationale.  Il a condamné en particulier une récente attaque commise par un groupe de l’ancien Vice-Président à l’encontre d’un bus de civils sur la route entre Nimule et Djouba. 

De son côté, M. Nicholas Haysom, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Soudan et le Soudan du Sud, intervenant par visioconférence depuis Genève, n’a aperçu « à l’heure actuelle, aucun signe d’un processus politique ouvert ».  Il a relevé que l’exclusion de M. Riek Machar, un signataire clef de l’Accord de paix de 2015, et son remplacement par M. Taban Deng, rendaient encore plus difficile l’avènement d’un processus politique ouvert. 

De l’avis de l’Envoyé spécial, un dialogue national ouvert et crédible doit être précédé d’un processus politique qui crée l’environnement sécuritaire et politique nécessaire.  Or, la demande faite à l’opposition de déposer les armes avant de prendre part au dialogue est interprétée comme un appel à la capitulation sans assurance que les causes du conflit seront examinées.

« Un dialogue raisonnable n’est pas possible dans le climat de terreur actuel », a estimé également la représentante de l’Uruguay, exhortant la MINUSS, dans ce contexte, à mettre l’accent sur la protection des civils et des droits de l’homme.  Le représentant de la Bolivie a également regretté la poursuite des combats avant d’exhorter le M/APLS dans l’opposition à respecter le cessez-le-feu et renoncer à la violence.     

« Nous devons nous assurer que le dialogue national lancé par le Président Salva Kiir soit sincère », a renchéri le représentant du Kazakhstan avant de regretter la persistance de restrictions imposées aux opérations de la MINUSS.  Il a notamment souligné l’urgence de faire cesser les attaques contre les acteurs humanitaires.

Face à ces accusations, le représentant du Soudan du Sud a assuré que le Gouvernement ne souhaitait pas entraver les activités de la MINUSS ni celles des acteurs humanitaires.  Il a déclaré que le dialogue national ne devait pas être perçu comme une alternative à l’Accord de paix, mais comme un mécanisme viable permettant de résoudre les problèmes politiques et mettre fin à la guerre.  Son gouvernement, a-t-il assuré, respectera les conclusions et décisions du dialogue national.  Le représentant s’est aussi félicité que plusieurs groupes armés aient décidé de déposer les armes pour s’associer à ce dialogue. 

Dans son exposé, M. Jean-Pierre Lacroix a décrit une situation également marquée par les espoirs de la population « qui aspire désespérément à la paix », alors que plus de la moitié a besoin d’assistance alimentaire, et que le tiers est constitué de déplacés dont la moitié sont des réfugiés.

« Cette tragédie est d’origine humaine », a-t-il rappelé en pointant du doigt les décisions délibérées de l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) pour ce qui est du Gouvernement, de l’APLS dans l’opposition, et d’autres entités, d’utiliser les conflits armés à des fins politiques.

Le Secrétaire général adjoint a relevé que malgré la promesse de libérer des prisonniers politiques, un membre du personnel de l’ONU avait été récemment libéré contre deux qui restent détenus depuis deux ans, et un autre qui vient d’être incarcéré à Rumbek.  Il a, dans ce contexte, invité le Conseil de sécurité à « juger le Président Kiir à l’aune de ses actes, et non pas en fonction de ses paroles ». 

M. Lacroix a également jugé crucial que les membres du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité aient un accès illimité à tous les sites, afin de documenter et vérifier les violations du cessez-le-feu.  Pour l’instant, la MINUSS et le Mécanisme de surveillance font face à plusieurs obstacles qui restreignent leurs mouvements, ce qui rend leur travail extrêmement difficile, et parfois même impossible. 

Dans cet environnement hostile, la MINUSS s’évertue à protéger les civils du mieux qu’elle peut, essuyant même parfois des tirs hostiles.  Le Secrétaire général adjoint a donc plaidé pour le déploiement de la Force de protection régionale dont les premiers éléments continuent d’arriver dans le pays.  Il a précisé que les premiers contingents éthiopiens seraient déployés en juillet, tandis que le déploiement du contingent kényan est tributaire du transfert de matériels déjà utilisés par les forces du même pays.  Un second site d’accueil de la Force de protection régionale a été choisi par le Gouvernement et les modalités de déploiement sont en cours d’élaboration.

Le représentant du Soudan du Sud a, de son côté, affirmé que son gouvernement appuyait le déploiement de la Force de protection régionale.  Rappelant que la MINUSS est présente au Soudan du Sud à la demande de son pays, il a exhorté la Mission à informer le Gouvernement le plus rapidement possible des incidents dont elle est le témoin afin que les auteurs puissent être poursuivis. 

M. Lacroix s’est par ailleurs dit encouragé par le communiqué de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) du 13 juin dernier par lequel l’institution propose un certain nombre d’étapes pour ressusciter le processus de paix au Soudan du Sud.

L’Envoyé spécial a été plus circonspect en faisant observer qu’il n’y avait pas de feuille de route claire pour la mise en œuvre des propositions de l’IGAD.  Il a invité la communauté internationale à « envoyer un message clair pour exprimer son soutien à un processus ouvert qui inclut tous les groupes armés et partis politiques ayant une quelconque influence dans les combats actuels » au Soudan du Sud.

La communauté internationale, a-t-il encore demandé, doit rappeler que des élections nationales crédibles ne peuvent avoir lieu qu’au terme d’une période de transition marquée par l’ouverture politique et la stabilité, et non dans des circonstances d’insécurité et de déplacements généralisés de population.

* S/2017/505

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

République démocratique du Congo: le Conseil de sécurité reconduit les sanctions jusqu’au 1er juillet 2018

7981e séance – après-midi 
CS/12883

République démocratique du Congo: le Conseil de sécurité reconduit les sanctions jusqu’au 1er juillet 2018

Les responsables d’attaques contre des soldats de la paix de la MONUSCO ou des membres du personnel des Nations Unies seront soumis aux sanctions

Le Conseil de sécurité a décidé, cet après-midi, de reconduire jusqu’au 1er juillet 2018 les sanctions concernant la République démocratique du Congo (RDC) et de proroger jusqu’au 1er août 2018 le mandat du Groupe d’experts du Comité 1533 chargé de surveiller l’application des sanctions imposées.

Dans sa résolution 2360 (2017), adoptée à l’unanimité, le Conseil décide toutefois de « réexaminer les dispositions de la présente résolution le 31 octobre 2017 au plus tard », une fois que le rapport final du Groupe d’experts aura été présenté.  À cet égard et « eu égard aux circonstances extraordinaires dans lesquelles celui-ci travaille actuellement », le Conseil proroge jusqu’au 15 août 2017 le délai de soumission dudit rapport qui, aux termes de la résolution 2293 (2016) adoptée le 23 juin dernier, aurait dû être remis le 15 juin 2017 au plus tard.

Le texte adopté apporte aussi une réponse à l’assassinat, en mars, de deux membres du Groupe d’experts qui surveillaient l’application du régime de sanctions dans le Kasaï central.  « Condamnant avec la plus grande fermeté » ce double meurtre, le Conseil a décidé que le fait de « planifier, diriger ou commanditer des attaques contre des soldats de la paix de la MONUSCO ou des membres du personnel des Nations Unies, notamment les membres du Groupe d’experts, ou d’y participer » entrerait désormais dans le cadre des mesures soumises à sanctions au titre de la résolution.

Avant le vote, le représentant de la France, pays qui présentait le texte, a rappelé que les deux experts assassinés -Michael Sharp et Zaida Catalan- menaient une activité « très importante pour le travail du Conseil » puisque les experts des comités des sanctions sont au cœur des régimes des sanctions.  C’est pourquoi, a-t-il expliqué, la France a, « au vu des circonstances », proposé quelques changements au texte de ce qui reste un « renouvèlement essentiellement technique ».

Outre la condamnation du meurtre des deux experts et le rappel de la nécessité pour les autorités congolaises d’enquêter et de coopérer avec toute enquête qui pourrait être menée par les Nations Unies ou encore par la Suède ou les États-Unis, pays dont étaient ressortissants les deux victimes, ces modifications consistent en l’introduction du nouveau critère d’imposition de sanctions à l’encontre de tout individu qui attaquerait un membre d’un groupe d’experts ou serait impliqué dans un tel acte.

La représentante de la Suède a salué le vote unanime du Conseil et remercié la France pour son travail sur la résolution.  Comme, avant elle, la représentante des États-Unis, elle a estimé qu’en renouvelant le mandat du Groupe d’experts, le Conseil adressait un message clair sur sa volonté de le voir poursuivre ses travaux.  Elle a en outre réclamé la pleine coopération de la RDC avec son pays, l’ONU et les États-Unis dans toute enquête sur ces assassinats et a suggéré une enquête spéciale mandatée par le Secrétaire général.  En attendant, la Suède appuie la création par l’ONU d’un groupe d’enquête et attend son rapport le mois prochain.

Le représentant de l’Égypte, pays qui préside le Comité des sanctions sur la RDC, a réclamé, lui aussi, la pleine coopération du Gouvernement de la RDC, tout comme le représentant du Royaume-Uni.

Alors que, dans la résolution, le Conseil condamne « les actes de violence observés dans la région du Kasaï ces derniers mois » et se dit « vivement préoccupé par les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits » qui y auraient été commises, les mêmes membres du Conseil ont fait état d’informations alarmantes.  Le représentant du Royaume-Uni a parlé de « niveaux de violence et de brutalité qui ne peuvent perdurer ».  Appelant le Gouvernement à protéger sa propre population, il a noté que la situation au Kasaï avait des conséquences au-delà des frontières de la RDC, avec l’arrivée de près de 30 000 réfugiés en Angola.  C’est pourquoi le Royaume-Uni appuie la demande du Haut-Commissaire aux droits de l’homme de mener une enquête internationale sur les exactions commises dans cette région.

La représentante des États-Unis a pour sa part relevé que le Gouvernement de la RDC avait jusqu’alors refusé toute enquête sur ces violences, alors que son homologue de la Suède dénonçait des « violations odieuses » du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme en RDC, « qui ne font que renforcer le cercle vicieux des violences ».  Quant au représentant de l’Italie, il s’est dit préoccupé non seulement par la détérioration de la sécurité au Kasaï, mais aussi par la réduction de l’espace démocratique dans le pays.

Dans la résolution, le Conseil a également décidé de réexaminer, « le moment venu et au plus tard le 1er juillet 2017 », les mesures qu’il a édictées « afin de les adapter en fonction de la situation régnant en RDC sur le plan de la sécurité, en particulier de l’avancement de la réforme de l’appareil de la sécurité, ainsi que du désarmement, de la démobilisation, de la réintégration et de la réinstallation ou du rapatriement des membres des groupes armés congolais et étrangers, en particulier les enfants qui en font partie », ainsi qu’en fonction de la mise en œuvre du texte adopté ce jour.

Ces groupes armés -et les exactions qu’ils commentent- sont fermement condamnés par le Conseil, qui exige qu’ils « mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et autres activités déstabilisatrices, notamment l’exploitation des ressources naturelles ».  Il exige également que leurs membres soient « démobilisés immédiatement et de façon permanente, déposent les armes, et libèrent et démobilisent les enfants qui se trouvent dans leurs rangs ».

D’autre part, le Conseil se félicite des progrès accomplis par le Gouvernement congolais pour mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants dans le cadre du conflit armé, ainsi que son action pour prévenir et combattre les violences sexuelles en période de conflit.

En outre, le Conseil exhorte le Gouvernement et toutes les autres parties concernées à appliquer l’« Accord politique global et inclusif » du 31 décembre 2016 et à « créer les conditions nécessaires pour que le processus électoral soit libre, juste, crédible, ouvert, transparent, pacifique et conforme à la Constitution congolaise ».  Il rappelle à cet égard les paragraphes pertinents de sa résolution 2348 (2017) adoptée le 31 mars dernier, par laquelle le Conseil a prorogé le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Ainsi, il « encourage l’échange rapide d’informations entre la MONUSCO et le Groupe d’experts » et prie la Mission « d’épauler, dans les limites de ses capacités, le Comité et le Groupe d’experts ».

Après l’adoption de la résolution, le représentant de la RDC a dit « prendre note » du renouvèlement du mandat du Groupe d’experts pour un an et a affirmé que son gouvernement était déterminé à faire la lumière sur « l’assassinat ignoble » de deux de ses membres.

Mais le représentant a aussi estimé que la résolution aurait pu se limiter à l’extension de deux mois du mandat du Groupe d’experts pour lui permettre de finaliser son rapport.  On aurait ainsi pu éviter « une pléthore de résolutions », a-t-il affirmé.  Quelques instants plus tôt, le représentant de l’Égypte s’était au contraire félicité d’un calendrier qui devrait permettre d’adopter, à l’automne, une nouvelle résolution sur la base des conclusions dudit rapport.

En outre, le représentant de la RDC a estimé que des questions politiques traitées dans la résolution de ce jour, comme celles qui touchent à l’Accord politique du 31 décembre dernier, « auraient pu ne pas être évoquées dans une résolution relative au Comité des sanctions ».  Il a en revanche regretté qu’aient été laissées de côté des « questions sécuritaires importantes » telles que le dossier des combattants sud-soudanais.

Il a également estimé que la résolution n’édictait « aucune mesure susceptible d’assainir la situation » en ce qui concerne le pillage des ressources naturelles ou encore les trafics d’armes et de munitions.  Pour la RDC, il faut dans ce domaine édicter des sanctions « contre des multinationales qui sont connues et approvisionnent les criminels », ainsi que contre les pays de transit et d’accueil de ces « minerais du sang ».

Revenant sur la situation au Kasaï, le représentant a affirmé que son pays coopérait tant avec la MONUSCO qu’avec le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme.  Il a rappelé qu’après le meurtre des deux experts, une enquête avait été ouverte par la justice de son pays en coopération avec ces deux instances onusiennes, ajoutant que le Bureau d’enquête fédéral des États-Unis (FBI) y avait été associé à la demande de ce pays et qu’il en serait de même pour la Suède si elle le demande.

Depuis le 5 juin, a-t-il ajouté, des procès sont en cours auxquels les ONG et les Nations Unies peuvent assister.  Il a fait état de neuf suspects, dont quatre apparaissent sur la vidéo montant l’assassinat barbare des deux experts.  Il a conclu en assurant le Conseil de la détermination de son pays à mener ces enquêtes « jusqu’au bout, de manière transparente, pour sanctionner les coupables ».

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Texte du projet de résolution (S/2017/529)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses précédentes résolutions et les déclarations de son président concernant la République démocratique du Congo,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo et de tous les États de la région, et soulignant que les principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale doivent être pleinement respectés,

Soulignant que c’est au Gouvernement congolais qu’il incombe au premier chef d’assurer la sécurité sur son territoire et de protéger les populations, dans le respect de l’état de droit, des droits de l’homme et du droit international humanitaire, et notamment de les protéger des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre,

Prenant note du rapport à mi-parcours (S/2016/1102) du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo (le « Groupe d’experts »), créé en application de la résolution 1533 (2004) et reconduit dans ses fonctions par les résolutions 1807 (2008), 1857 (2008), 1896 (2009), 1952 (2010), 2021 (2011), 2078 (2012), 2136 (2014), 2198 (2015) et 2293 (2016),

Condamnant avec la plus grande fermeté le meurtre de deux membres du Groupe d’experts qui surveillaient l’application du régime de sanctions dans la région du Kasaï central, exprimant toute sa sympathie aux familles des victimes, aux Gouvernements des États-Unis, du Chili et de la Suède, ainsi qu’au Groupe d’experts et au Secrétariat de l’ONU, et se déclarant préoccupé par le fait que les quatre nationaux congolais qui les accompagnaient sont portés disparus,

Rappelant que le Gouvernement congolais doit enquêter rapidement et de manière approfondie sur le meurtre des deux membres du Groupe d’experts et traduire les auteurs en justice, demandant au Gouvernement congolais de coopérer aux fins des enquêtes menées par les entités des Nations Unies et de celles qui pourraient être menées par les services de répression de la Suède et des États-Unis, conformément à la législation nationale congolaise, et se félicitant, à cet égard, de la création par le Secrétaire général d’une commission d’enquête des Nations Unies chargée d’enquêter sur la mort des deux experts et de son engagement à faire en sorte que l’ONU fasse le maximum pour garantir que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice,

Rappelant l’importance stratégique que revêt la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, et demandant de nouveau à tous les signataires d’honorer rapidement, intégralement et en toute bonne foi les engagements qu’ils ont pris dans cet accord, en vue de remédier aux causes profondes du conflit et de mettre fin aux cycles récurrents de violence,

Rappelant qu’au titre de l’Accord-cadre, tous les États de la région se sont engagés à s’abstenir de toute ingérence dans les affaires intérieures des pays voisins et à ne pas tolérer de groupes armés ni leur fournir une assistance ou un appui de quelque nature que ce soit, et condamnant de nouveau énergiquement tout appui apporté de l’intérieur ou de l’extérieur aux groupes armés opérant dans la région, qu’il soit financier, logistique ou militaire,

Se déclarant de nouveau profondément préoccupé par l’insécurité et la situation humanitaire qui continuent de toucher durement la population civile, exprimant sa vive inquiétude au sujet de l’augmentation récente du nombre de personnes déplacées en République démocratique du Congo, se déclarant également très préoccupé par les activités militaires de groupes armés congolais et étrangers et la contrebande de ressources naturelles congolaises, en particulier d’or et d’ivoire, soulignant qu’il importe de neutraliser tous les groupes armés, y compris les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), les Forces démocratiques alliées (ADF), l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) et tous les autres groupes armés présents en République démocratique du Congo, conformément à la résolution 2348 (2017),

Condamnant les actes de violence observés dans la région du Kasaï ces derniers mois et se déclarant vivement préoccupé par les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits qui auraient été commises dans la région, se déclarant de nouveau gravement préoccupé par les violations graves du droit international humanitaire commises par les milices locales dans cette région, le recrutement et l’utilisation d’enfants dans les conflits armés en violation du droit international applicable, et les attaques perpétrées contre les forces de sécurité de la République démocratique du Congo et les symboles de l’autorité de l’État, restant également très préoccupé par les informations récentes faisant état de 42 charniers et de meurtres de civils par des membres des forces de sécurité de la République démocratique du Congo, violations et atteintes qui pourraient constituer des crimes de guerre au regard du droit international,

Réaffirmant qu’il est important et urgent de mener rapidement des enquêtes transparentes sur les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises dans la région du Kasaï, renouvelant son intention de suivre de près les progrès réalisés dans les enquêtes sur ces violations, notamment sur l’usage disproportionné de la force, qui seront menées conjointement par le Gouvernement de la République démocratique du Congo, la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo, en collaboration avec l’Union africaine, comme l’a annoncé le Gouvernement congolais, afin de traduire en justice et de faire répondre de leurs actes tous les responsables, et attendant avec intérêt les résultats de leur action,

Condamnant le meurtre brutal de plus de 600 civils dans la région de Beni depuis octobre 2014, exprimant sa profonde préoccupation face à la menace que constituent les groupes armés, en particulier les ADF, et à la persistance de la violence dans cette région, se déclarant préoccupé par les informations faisant état d’une collaboration entre des éléments des FARDC et des groupes armés au niveau local, en particulier celles, reçues récemment, indiquant que certains officiers des FARDC avaient joué un rôle dans l’insécurité qui régnait dans la région de Beni, demandant que des enquêtes soient menées afin de s’assurer que les responsables rendent des comptes, et notant l’engagement pris par la République démocratique du Congo dans sa lettre datée du 15 juin 2016 (S/2016/542),

Se déclarant préoccupé par la multiplication des entraves à l’accès humanitaire dans l’est du pays, en raison de l’insécurité et de la violence, ainsi que par les attaques incessantes visant des agents et des moyens humanitaires, soulignant que ces actes pourraient constituer un motif d’inscription sur la liste au sens du paragraphe 2 de la présente résolution, et demandant à toutes les parties au conflit de respecter l’impartialité, l’indépendance et la neutralité des agents humanitaires,

Réaffirmant qu’il importe de mener à bien la démobilisation permanente des ex-combattants du Mouvement du 23 mars (M23), soulignant qu’il importe d’empêcher que ces ex-combattants se regroupent ou rejoignent d’autres groupes armés, et demandant que la mise en œuvre des Déclarations de Nairobi et du programme de désarmement, démobilisation, réintégration, et réinstallation ou rapatriement des ex-combattants du M23 soit accélérée, moyennant notamment la levée des obstacles au rapatriement, en coordination avec les États de la région concernés,

Condamnant les mouvements illicites d’armes tant à l’intérieur de la République démocratique du Congo qu’à destination de ce pays, y compris les transferts à des groupes armés ou entre groupes armés, en violation des résolutions 1533 (2004), 1807 (2008), 1857 (2008), 1896 (2009), 1952 (2010), 2021 (2011), 2078 (2012), 2136 (2014), 2198 (2015) et 2293 (2016), et se déclarant déterminé à continuer de surveiller attentivement l’application de l’embargo sur les armes et des autres mesures qu’il a édictées dans ses résolutions concernant la République démocratique du Congo,

Sachant, à cet égard, que l’embargo sur les armes qu’il a imposé joue un rôle notable dans la lutte contre le transfert illicite d’armes légères et de petit calibre en République démocratique du Congo et concourt à la consolidation de la paix au sortir du conflit, au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration des ex‑combattants et à la réforme de l’appareil de la sécurité,

Soulignant que l’avènement d’une paix et d’une sécurité durables en République démocratique du Congo passe nécessairement par une gestion transparente et efficace des ressources naturelles du pays et par la fin de la contrebande et du trafic de ces ressources, se déclarant préoccupé par l’exploitation illégale et le trafic de ressources naturelles auxquels se livrent les groupes armés et par les effets néfastes du conflit armé sur les zones naturelles protégées, saluant les efforts déployés par les gardes forestiers et les autres acteurs congolais qui s’efforcent de protéger ces zones, engageant le Gouvernement congolais à continuer de s’efforcer de préserver ces zones, et soulignant son plein respect de la souveraineté du Gouvernement congolais sur ses ressources naturelles et la responsabilité qui incombe à ce gouvernement de gérer efficacement ces ressources à cet égard,

Rappelant que les liens entre l’exploitation illégale des ressources naturelles, y compris le braconnage et le trafic d’espèces sauvages, le commerce illicite de ces ressources et la prolifération et le trafic d’armes, constituent un des principaux facteurs venant alimenter et exacerber les conflits dans la région des Grands Lacs, préconisant la poursuite de l’action que la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et les gouvernements intéressés mènent à l’échelle régionale pour lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, et soulignant à cet égard l’importance que revêtent la coopération régionale et le renforcement de l’intégration économique, particulièrement en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles,

Notant que le Groupe d’experts a conclu que s’il y a eu des efforts encourageants concernant le commerce des minerais et les dispositifs de traçabilité, l’or demeure un grave problème, rappelant que la Déclaration de Lusaka issue du Sommet extraordinaire de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs sur la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles dans la région des Grands Lacs a engagé les acteurs de ce secteur à exercer leur devoir de diligence, saluant l’engagement de la Conférence et les progrès accomplis sur cette question, et soulignant qu’il est crucial que les gouvernements régionaux et les centres de négoce, en particulier ceux qui s’occupent de l’affinage et du commerce de l’or, redoublent d’efforts pour accroître la vigilance contre la contrebande et réduire les pratiques qui pourraient saper les efforts déployés au niveau régional par la République démocratique du Congo et la Conférence,

Notant avec préoccupation les informations selon lesquelles des groupes armés ainsi que certains éléments des FARDC seraient toujours impliqués dans le commerce illégal de minerais, la production illégale et le commerce illégal de charbon de bois et de bois, et le braconnage et le trafic d’espèces sauvages,

Notant avec une vive inquiétude la persistance de graves atteintes aux droits de l’homme et violations du droit international humanitaire commises contre des civils dans l’est de la République démocratique du Congo, notamment les exécutions sommaires, les actes de violence sexuelle et sexiste et le recrutement et l’utilisation d’enfants à grande échelle auxquels se livrent les groupes armés,

Rappelant qu’il est essentiel de mettre en œuvre intégralement et promptement l’accord du 31 décembre 2016 pour appuyer la légitimité des institutions de transition, soulignant qu’il est crucial que le prochain cycle électoral se déroule de façon pacifique et crédible, comme prévu par la Constitution et dans le respect de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, pour assurer durablement la stabilisation et la consolidation de la démocratie constitutionnelle en République démocratique du Congo, et demandant l’application immédiate des mesures de renforcement de la confiance, conformément aux dispositions de l’accord, notamment en mettant un terme aux restrictions de l’espace politique dans le pays, en particulier aux arrestations et aux détentions arbitraires de membres de l’opposition politique et de représentants de la société civile ainsi qu’aux restrictions imposées aux libertés fondamentales telles que la liberté d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse, soulignant l’importance pour le Gouvernement de la République démocratique du Congo et ses partenaires nationaux de prendre sans plus attendre toutes les mesures nécessaires afin d’accélérer les préparatifs des élections, notamment de garantir la participation des femmes à tous les niveaux et de créer les conditions voulues pour que les activités politiques soient libres et inclusives et que les élections aient lieu, conformément à l’accord du 31 décembre,

Demeurant vivement préoccupé par les informations faisant état de la recrudescence des violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises par des membres des FARDC, de l’Agence nationale de renseignements, de la Garde républicaine et de la Police nationale congolaise, enjoignant à toutes les parties de s’abstenir de recourir à la violence et à la provocation et de respecter les droits de l’homme, et soulignant que le Gouvernement congolais doit se conformer au principe de proportionnalité dans l’emploi de la force,

Rappelant qu’il importe de lutter contre l’impunité dans les forces de sécurité, à tous les niveaux, et soulignant qu’il faut que le Gouvernement congolais poursuive ses efforts à cet égard et veille au professionnalisme de ses forces de sécurité,

Demandant que toutes les personnes responsables de violations du droit international humanitaire et de violations des droits de l’homme ou d’atteintes à ces droits, y compris d’actes de violence ou de sévices sur des enfants et d’actes de violence sexuelle et sexiste, soient rapidement appréhendées, traduites en justice et amenées à répondre de leurs actes,

Rappelant toutes ses résolutions ayant trait aux femmes et à la paix et à la sécurité, au sort des enfants en temps de conflit armé et à la protection des civils en période de conflit armé, et rappelant également les conclusions concernant les enfants et les conflits armés en République démocratique du Congo qu’a adoptées le 18 septembre 2014 son Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé (S/AC.51/2014/3),

Se félicitant de la volonté de coopération avec la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en période de conflit armé, la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit et la MONUSCO dont fait preuve le Gouvernement congolais, et notamment la Conseillère du Président sur la violence sexuelle et le recrutement d’enfants, aux fins de l’application du plan d’action visant à prévenir et à faire cesser le recrutement et l’utilisation d’enfants par les FARDC et les violences sexuelles qu’elles commettent à l’encontre de ceux-ci, et de la lutte contre l’impunité des personnes qui commettent des violences sexuelles en période de conflit, notamment des membres des FARDC,

Notant l’importance capitale de l’application effective du régime de sanctions et le rôle clef que les États voisins ainsi que les organisations régionales et sous-régionales peuvent jouer à cet égard, et préconisant que la coopération soit encore renforcée,

Soulignant qu’il est d’une importance cruciale que le Comité reçoive en temps voulu les notifications détaillées sur les armes, les munitions et l’entraînement visées au paragraphe 11 des directives régissant la conduite de ses travaux,

Estimant que la situation en République démocratique du Congo constitue toujours une menace pour la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Régime de sanctions

1.    Décide de reconduire jusqu’au 1er juillet 2018 les mesures énoncées aux paragraphes 1 à 6 de la résolution 2293 (2016), notamment les réaffirmations qu’il y a faites, et décide de réexaminer les dispositions de la présente résolution le 31 octobre 2017 au plus tard, une fois que le rapport final visé au paragraphe 5 de la présente résolution aura été présenté;

2.    Réaffirme que les mesures décrites au paragraphe 5 de la résolution 2293 (2016) s’appliquent aux personnes et entités que le Comité aura désignées au motif qu’elles se livrent ou concourent à des actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité de la République démocratique du Congo, tels que définis au paragraphe 7 de cette même résolution;

3.    Décide que ces actes comprennent le fait de planifier, diriger ou commanditer des attaques contre des soldats de la paix de la MONUSCO ou des membres du personnel des Nations Unies, notamment les membres du Groupe d’experts, ou d’y participer;

Groupe d’experts

4.    Décide de proroger jusqu’au 1er août 2018 le mandat du Groupe d’experts, exprime l’intention de le réexaminer et de se prononcer, le 1er juillet 2018 au plus tard, sur une nouvelle prorogation, et prie le Secrétaire général de prendre dès que possible les mesures administratives requises pour rétablir le Groupe d’experts, en consultation avec le Comité, en faisant au besoin appel aux compétences des membres du Groupe créé conformément aux résolutions antérieures;

5.    Proroge jusqu’au 15 août 2017 le délai de soumission du rapport final du Groupe d’experts demandé au paragraphe 9 de la résolution 2293 (2016), eu égard aux circonstances extraordinaires dans lesquelles celui-ci travaille actuellement et compte tenu de la lettre datée du 15 juin 2017 que le Président du Comité a adressée au Président du Conseil de sécurité;

6.    Prie le Groupe d’experts de s’acquitter des tâches énoncées ci-après et de lui présenter, après concertation avec le Comité, un rapport à mi-parcours, le 30 décembre 2017 au plus tard, et un rapport final, le 15 juin 2018 au plus tard, et d’adresser des mises à jour mensuelles au Comité, sauf les mois où ces rapports doivent lui être remis;

a)    Aider le Comité à s’acquitter de son mandat, notamment en lui fournissant des informations pouvant servir à désigner éventuellement des personnes et entités qui se livreraient aux activités énoncées au paragraphe 2 de la présente résolution;

b)    Réunir, examiner et analyser des informations au sujet de l’application des mesures édictées dans la présente résolution, en mettant l’accent sur les violations;

c)    Étudier et recommander, en tant que de besoin, des moyens d’améliorer les capacités dont disposent les États Membres, en particulier ceux de la région, pour appliquer effectivement les mesures imposées par la présente résolution;

d)    Réunir, examiner et analyser des informations sur les réseaux régionaux et internationaux d’appui aux groupes armés et sur les réseaux criminels opérant en République démocratique du Congo;

e)    Réunir, examiner et analyser des informations concernant la fourniture, la vente ou le transfert d’armes et de matériel connexe et la fourniture d’assistance militaire connexe, notamment par le truchement de réseaux de commerce illicite, et le transfert d’armes et de matériel connexe à des groupes armés par les forces de sécurité de la République démocratique du Congo;

f)    Réunir, examiner et analyser des informations sur les auteurs de violations graves du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, notamment au sein des forces de sécurité, en République démocratique du Congo;

g)    Évaluer l’efficacité des mesures de traçabilité des minerais dont il est fait mention au paragraphe 21 de la présente résolution et poursuivre la collaboration avec d’autres instances;

h)    Aider le Comité à préciser et à actualiser les informations sur les personnes et entités visées par les mesures imposées dans la présente résolution, notamment en fournissant des renseignements concernant leur identité et d’autres renseignements pouvant servir à établir le résumé des motifs présidant à leur inscription sur la liste, qui est mis à la disposition du public;

7.    Exprime son plein appui au Groupe d’experts, préconise une coopération accrue entre tous les États, en particulier ceux de la région, la MONUSCO, les organismes compétents des Nations Unies et le Groupe d’experts, engage toutes les parties et tous les États à faire en sorte que les personnes et entités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle coopèrent avec le Groupe d’experts, et exige de nouveau de toutes les parties et de tous les États qu’ils garantissent la sécurité de ses membres et de son personnel d’appui, et de toutes les parties et de tous les États, notamment de la République démocratique du Congo et des pays de la région, qu’ils permettent au Groupe d’experts d’avoir accès, en toute liberté et sans délai, à tels personnes, documents et lieux qu’il estimerait susceptibles de présenter quelque intérêt aux fins de l’exécution de son mandat;

8.    Demande au Groupe d’experts de coopérer activement, dans le cadre de l’exécution de son mandat, avec les autres groupes d’experts qu’il a créés;

Groupes armés

9.    Condamne fermement tous les groupes armés opérant dans la région et les violations du droit international humanitaire et d’autres normes applicables du droit international, ainsi que les atteintes aux droits de l’homme qu’ils commettent, notamment les attaques contre la population civile, les soldats de la paix de la MONUSCO et le personnel humanitaire, les exécutions sommaires, les violences sexuelles et sexistes et le recrutement et l’emploi d’enfants à grande échelle, et réaffirme que les auteurs de tels actes seront amenés à en répondre;

10.   Exige que les FDLR, les ADF, la LRA et tous les autres groupes armés opérant en République démocratique du Congo mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et autres activités déstabilisatrices, notamment l’exploitation des ressources naturelles, et que leurs membres soient démobilisés immédiatement et de façon permanente, déposent les armes, et libèrent et démobilisent les enfants qui se trouvent dans leurs rangs;

Engagements pris à l’échelle nationale et régionale

11.   Se félicite des progrès accomplis à ce jour par le Gouvernement congolais pour ce qui est de mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants dans le cadre du conflit armé, invite instamment le Gouvernement congolais à poursuivre la mise en œuvre de tous les engagements qu’il a pris dans le plan d’action conclu avec l’ONU et de ceux pris en faveur de la protection des filles et des garçons contre la violence sexuelle, et à faire connaître ces engagements dans toute la chaîne de commandement militaire, y compris dans les zones reculées, et demande au Gouvernement congolais de veiller à ce que les enfants ne soient pas placés en détention pour association avec des groupes armés;

12.   Se félicite de l’action menée par le Gouvernement de la République démocratique du Congo pour prévenir et combattre les violences sexuelles en période de conflit, notamment des progrès enregistrés dans la lutte contre l’impunité, et demande à celui-ci de continuer d’honorer les engagements qu’il a pris dans le plan d’action de mettre fin aux violences sexuelles et violations que commettent ses forces armées, et de redoubler d’efforts dans ce domaine, notant que s’il ne le fait pas, le Secrétaire général pourrait de nouveau désigner nommément les FARDC dans ses prochains rapports sur la violence sexuelle;

13.   Souligne qu’il importe que le Gouvernement congolais s’emploie activement à poursuivre les responsables des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis dans le pays et que la coopération à l’échelon régional s’impose dans ce domaine, notamment celle que le Gouvernement entretient avec la Cour pénale internationale, engage la MONUSCO à user de ses pouvoirs actuels pour aider le Gouvernement à cette fin et demande à tous les signataires de l’Accord-cadre de continuer à tenir leurs engagements et à coopérer pleinement les uns avec les autres et avec le Gouvernement congolais et la MONUSCO pour ce faire;

14.   Rappelle qu’il ne saurait y avoir d’impunité pour les responsables de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits commises en République démocratique du Congo et dans la région et, à ce propos, engage vivement la République démocratique du Congo, tous les pays de la région et les autres États Membres de l’ONU qui sont concernés à traduire en justice les auteurs de ces actes, y compris les membres des services de sécurité, et à exiger d’eux qu’ils rendent des comptes;

15.   Demande au Gouvernement congolais de continuer de renforcer, avec l’aide des partenaires internationaux, la sécurité, le contrôle et la gestion des stocks d’armes et de munitions, de se pencher sur les transferts à des groupes armés qui lui sont signalés, selon qu’il conviendra et si la demande lui en est faite, et de mettre en œuvre d’urgence un programme national de marquage des armes, en particulier des armes à feu appartenant à l’État, dans le respect des normes établies par le Protocole de Nairobi et le Centre régional sur les armes légères;

16.   Souligne que le renforcement de l’autorité de l’État et de la gouvernance dans l’est de la République démocratique du Congo incombe au premier chef au Gouvernement congolais, qui doit notamment mettre en œuvre une véritable réforme de l’appareil de sécurité, notamment de l’armée, de la police et de la justice, et mettre fin à l’impunité des auteurs de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits et de violations du droit international humanitaire, et exhorte le Gouvernement congolais à redoubler d’efforts à cette fin, conformément aux engagements qu’il a pris dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération;

17.   Exhorte le Gouvernement de la République démocratique du Congo et toutes les autres parties concernées à appliquer l’« Accord politique global et inclusif » du 31 décembre 2016 et à créer les conditions nécessaires pour que le processus électoral soit libre, juste, crédible, ouvert, transparent, pacifique et conforme à la Constitution congolaise, et rappelle tous les paragraphes pertinents de sa résolution 2348 (2017);

18.   Demande à tous les États, en particulier ceux de la région, de prendre des mesures concrètes pour qu’aucun appui ne soit apporté sur leur territoire ou à partir de leur territoire aux groupes armés opérant en République démocratique du Congo ou traversant le territoire congolais, soulignant qu’il faut s’attaquer aux réseaux qui soutiennent les groupes armés opérant dans le pays, les financent et recrutent pour leur compte et qui enrôlent des enfants en vue de leur utilisation comme enfants soldats, et lutter contre la collaboration entre des éléments des FARDC et des groupes armés au niveau local, et demande à tous les États de prendre des mesures pour amener, lorsqu’il y a lieu, les dirigeants et membres des FDLR et d’autres groupes armés qui résident dans leurs pays à répondre de leurs actes;

Ressources naturelles

19.   Engage à nouveau le Gouvernement congolais à continuer de lutter contre l’exploitation illégale et la contrebande de ressources naturelles, notamment en amenant les éléments des FARDC qui se livrent au commerce illicite de ressources naturelles, en particulier l’or et les produits provenant d’espèces sauvages, à répondre de leurs actes;

20.   Souligne qu’il faut redoubler d’efforts pour mettre un terme au financement des groupes armés qui prennent part à des activités déstabilisatrices en se livrant au commerce illicite de ressources naturelles comme l’or ou les produits provenant des espèces sauvages;

21.   Se félicite, à cet égard, des mesures qu’a prises le Gouvernement congolais pour appliquer les lignes directrices sur le devoir de diligence concernant la chaîne d’approvisionnement des minerais, définies par le Groupe d’experts et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), prend acte des efforts que déploie le Gouvernement congolais pour mettre en œuvre des dispositifs de traçabilité des minerais, et invite tous les États à aider la République démocratique du Congo, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et les pays de la région à mettre en place un commerce des minerais responsable;

22.   Salue les mesures prises par les gouvernements des pays de la région pour appliquer les lignes directrices sur le devoir de diligence, y compris la transposition dans leur droit interne des dispositions relatives au mécanisme de certification régional établi par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, conformément au Guide de l’OCDE et à la pratique internationale, demande que le Mécanisme de certification soit étendu à d’autres États Membres de la région, et engage tous les États, surtout ceux de la région, à continuer de faire connaître ces lignes directrices, notamment en priant instamment les importateurs, les industries de transformation, en particulier les centres d’affinage de l’or, et les consommateurs de produits minéraux congolais d’exercer la diligence requise, conformément au paragraphe 19 de la résolution 1952 (2010);

23.   Engage la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et ses États membres à collaborer étroitement avec les mécanismes en vigueur en République démocratique du Congo afin d’assurer la viabilité et la transparence des opérations et le respect du principe de responsabilité dans ce domaine, constate que le Gouvernement congolais continue d’appuyer la mise en place de dispositifs de traçabilité et de diligence destinés à permettre l’exportation d’or artisanal, et engage celui-ci à poursuivre dans cette voie;

24.   Continue d’engager la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs à mettre en place les moyens techniques nécessaires pour aider les États Membres à lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, note que certains États Membres ont fait d’importants progrès dans ce domaine, et recommande à tous les États Membres de mettre pleinement en œuvre le système de certification régional et de publier des statistiques complètes sur le commerce de ressources naturelles, conformément au paragraphe 19 de la résolution 1952 (2010);

25.   Engage tous les États à continuer de s’employer à mettre fin au commerce illicite des ressources naturelles, notamment dans le secteur de l’or, et à amener ceux qui se rendent complices de ce commerce illicite à rendre des comptes, dans le cadre de l’action menée pour veiller à ce que le commerce illicite des ressources naturelles ne profite pas aux entités visées par des sanctions, aux groupes armés ou aux réseaux criminels, y compris ceux auxquels appartiennent des membres des FARDC;

26.   Réaffirme les dispositions des paragraphes 7 à 9 de sa résolution 2021 (2011) et demande à la République démocratique du Congo et aux États de la région des Grands Lacs de coopérer au niveau régional, notamment aux fins des enquêtes, en vue de lutter contre les réseaux criminels régionaux et les groupes armés impliqués dans l’exploitation illégale de ressources naturelles, notamment le braconnage et le trafic d’espèces sauvages, et de donner pour instruction à leurs autorités douanières de renforcer le contrôle des exportations et des importations de minerai en provenance de la République démocratique du Congo;

Rôle de la MONUSCO

27.   Rappelle le mandat de la MONUSCO, énoncé dans sa résolution 2348 (2017), en particulier au paragraphe 30, lequel souligne l’importance d’une analyse plus approfondie de la situation politique et du conflit, notamment grâce à la collecte et à l’analyse des informations sur les réseaux criminels qui appuient les groupes armés, au paragraphe 35 iii), lequel concerne la surveillance de la mise en œuvre de l’embargo sur les armes, et au paragraphe 35 iv), lequel porte sur les activités minières;

28.   Encourage l’échange rapide d’informations entre la MONUSCO et le Groupe d’experts, conformément au paragraphe 43 de la résolution 2348 (2017), et prie la MONUSCO d’épauler, dans les limites de ses capacités, le Comité et le Groupe d’experts;

Comité des sanctions, présentation de rapports et réexamen

29.   Demande à tous les États, en particulier ceux de la région et ceux dans lesquels se trouvent des personnes et entités désignées en application du paragraphe 2 de la présente résolution, de rendre régulièrement compte au Comité des mesures prises en application des mesures imposées aux paragraphes 1, 4 et 5 et recommandées au paragraphe 8 de la résolution 1952 (2010);

30.   Souligne qu’il importe que le Comité tienne des consultations régulières avec les États Membres, selon les besoins, afin d’assurer l’application intégrale de toutes les mesures énoncées dans la présente résolution;

31    .Prie le Comité de lui présenter oralement au moins une fois par an, par la voix de son président, un bilan de ses travaux, et de lui rendre compte, selon que de besoin, de la situation dans le pays avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo, et invite le Président du Comité à tenir régulièrement des réunions d’information à l’intention de tous les États Membres intéressés;

32.   Demande au Comité de recenser tout cas de non-respect des mesures visées aux paragraphes 1, 4 et 5 de la résolution 2293 (2016) et de décider pour chaque cas de la conduite à suivre, et prie le Président du Comité de lui rendre compte des activités menées par le Comité sur cette question dans les bilans qu’il lui présentera régulièrement en application du paragraphe 31 de la présente résolution;

33.   Demande à la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé et à la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit de continuer de communiquer au Comité des informations sur ces questions, conformément au paragraphe 7 de la résolution 1960 (2010) et au paragraphe 9 de la résolution 1998 (2011);

34.   Décide de réexaminer, le moment venu et au plus tard le 1er juillet 2017, les mesures édictées dans la présente résolution, afin de les adapter, selon qu’il conviendra, en fonction de la situation régnant en République démocratique du Congo sur le plan de la sécurité, en particulier de l’avancement de la réforme de l’appareil de la sécurité, ainsi que du désarmement, de la démobilisation, de la réintégration, et de la réinstallation ou du rapatriement, selon qu’il conviendra, des membres des groupes armés congolais et étrangers, en particulier les enfants qui en font partie, et de la mise en œuvre des dispositions de la présente résolution;

35.   Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) fait état d’une dégradation inquiétante de la sécurité dans le pays

7980e séance – matin 
CS/12882

Le Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) fait état d’une dégradation inquiétante de la sécurité dans le pays

La première réunion du « Processus de Kaboul » est saluée comme une importante initiative pour la stabilité de l’Afghanistan

Face à une nouvelle dégradation de la sécurité en Afghanistan, le Gouvernement doit éviter toute mesure qui risquerait de diviser le pays, notamment sur des bases ethniques, et veiller à maintenir la cohésion nationale, y compris en luttant contre la corruption généralisée et les violations des droits de l’homme, a expliqué ce matin devant le Conseil de sécurité M. Tadamichi Yamamoto, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).  Point plus positif: la première réunion du Processus de Kaboul sur la paix et la réconciliation a été considérée comme une importante initiative pour la stabilité dans le pays et toute la région.

M. Yamamoto présentait au Conseil le dernier rapport trimestriel* sur l’Afghanistan du Secrétaire général, lequel s’est rendu la semaine dernière à Kaboul.  Le Chef de la MANUA, puis l’ensemble des intervenants lors du débat, se sont montrés très préoccupés de l’aggravation de l’état de la sécurité, illustrée par le terrible attentat au camion piégé commis le 31 mai à Kaboul.  Cet attentat avait été suivi de manifestations de mécontentement elles-mêmes à l’origine de nouveaux morts, et de nouveaux attentats lors des funérailles des victimes.  Dans son rapport, le Secrétaire général rappelle que cet attentat « et l’escalade de violence qui a suivi ont encore démontré combien les civils étaient vulnérables face au conflit ».

Dans ce contexte, il est important que les dirigeants et le peuple afghans manifestent une unité nationale, a fait valoir le Chef de la MANUA, appuyé là aussi par les représentants des 27 délégations qui ont pris part au débat.  M. Yamamoto a jugé particulièrement inquiétant que, depuis plusieurs mois, apparaissent des divisions politiques fondées sur des divisions ethniques.  « S’il n’y a pas de changements dans les méthodes de gouvernance, nous nous heurterons sans doute à des difficultés plus graves, qu’il sera plus difficile de gérer », a-t-il averti.

Le Représentant spécial a en revanche salué la tenue, le 6 juin, de la première réunion du « Processus de Kaboul sur la paix et la réconciliation, piloté par les autorités afghanes ».  Plusieurs des intervenants ont insisté sur l’importance d’une telle appropriation nationale.  Le représentant de l’Afghanistan, M. Mahmoud Saikal, a estimé que cette réunion avait marqué la reprise d’une importante initiative pour la stabilité dans le pays.

Mais si de nombreux orateurs ont mis l’accent sur la nécessité de la coopération régionale tant pour la sécurité que pour le développement économique de l’Afghanistan et de toute la région, la réunion a également été marquée par la mise en cause du Pakistan par le représentant afghan.  Ce dernier a affirmé qu’il avait été « clairement établi » que l’attaque commise le 10 janvier à Kandahar avait été planifiée à Quetta, au Pakistan, ajoutant que les enquêtes sur l’attaque du 31 mai mettaient en évidence des liens avec le réseau Haqqani, basé lui aussi au Pakistan.  M. Saikal a accusé ce pays de s’être montré « déterminé depuis toujours » à utiliser tous les moyens à sa disposition pour déstabiliser l’Afghanistan.

La représentante du Pakistan a rejeté ces accusations, affirmant que la résurgence de l’insurrection en Afghanistan ne pouvait être expliquée par une « référence commode » à des « centres de soutien » situés à l’étranger.  De larges parties du territoire afghan sont aujourd’hui sous le contrôle des Taliban et leurs « refuges » se trouvent en Afghanistan, a-t-elle ajouté.

Mais la représentante du Pakistan a aussi fait une distinction entre l’insurrection des « Taliban afghans » et les « groupes terroristes » -notamment l’État islamique- implantés dans le pays, estimant que ces derniers représentent une « menace commune » pour les Taliban et le Gouvernement.  Elle a souhaité que ces deux parties reprennent les pourparlers de paix, ce qui correspond à la position dominante de la communauté internationale et à celle du Secrétaire général.

De fait, le Représentant spécial a encouragé le peuple afghan à engager « un véritable dialogue interne » avec les Taliban, afin de définir ce que doit signifier le « vivre ensemble ».  À cet égard, plusieurs délégations ont considéré comme un bon exemple les discussions entre le Gouvernement et le mouvement Hezb-i Islami Gulbuddin, le représentant de l’Égypte se félicitant d’ailleurs qu’elles aient permis au chef du mouvement, M. Gulbuddin Hekmatyar, de rentrer en Afghanistan.

Parmi les nombreux représentants qui ont appelé de leurs vœux une réconciliation nationale en précisant qu’il ne saurait y avoir de solution militaire, celui de la Fédération de Russie a suggéré un assouplissement du régime des sanctions imposées par le Conseil de sécurité.  Mais le représentant de l’Afghanistan a, au contraire, demandé que les Taliban soient reconnus comme groupe terroriste par les Nations Unies, estimant que ces derniers sont incapables de se lancer dans de véritables négociations.

Ce à quoi le représentant de l’Inde a ajouté qu’il ne fallait pas distinguer entre « bons terroristes » et « mauvais terroristes ».  Pour lui, les Taliban, comme Daech, Al-Qaida ou d’autres, sont toutes des organisations terroristes, beaucoup d’entre elles étant interdites à ce titre par les Nations Unies.  Il a donc invité à les traiter comme telles.

Par ailleurs, les différents intervenants sont salué le rôle de la MANUA, en attendant avec intérêt les conclusions de l’examen stratégique de la Mission, dont le rapport est attendu le mois prochain.  Certains pays, comme la Suède, ont demandé notamment un mandat politique plus fort pour le Représentant spécial, y compris sur les questions régionales relatives aux efforts de paix, et ont mis en avant la nécessité d’une meilleure coordination des donateurs et la participation des femmes à la vie politique, économique et sociale afghane.  La France a souhaité une « rationalisation » de la MANUA, estimant qu’elle devait se concentrer sur l’essentiel. 

* S/2017/189

LA SITUATION EN AFGHANISTAN

Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/2017/508)

Déclarations

M. TADAMICHI YAMAMOTO, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), qui a présenté le dernier rapport de la Mission (S/2017/508) en date du 15 juin 2017, a fait état d’une aggravation des tensions dans le pays depuis le mois de mars.  S’il a ajouté que le Gouvernement avait démontré sa volonté de prendre des mesures en faveur de la paix, il a souhaité que celles-ci aillent plus loin.  Il s’est aussi inquiété de la réaction des forces de l’ordre après les manifestations de mécontentement qui ont suivi l’attentat terroriste du 31 mai.

M. Yamamoto a jugé particulièrement inquiétant que les divisions politiques qui ont émergé dans la direction du pays se fondent sur des divisions ethniques, alors même que les Taliban tentent de semer la dissension dans le pays.  Il a rappelé le rôle modérateur joué par la MANUA à la suite de l’attentat du 31 mai et des événements qui ont suivi.  « S’il n’y a pas de changements dans les méthodes de gouvernance, nous nous heurterons sans doute à des difficultés plus graves, qu’il sera plus difficile de gérer », a averti le Chef de la MANUA.

M. Yamamoto s’est appesanti sur les divisions qui apparaissent dans le pays depuis plusieurs mois.  Il a noté que des forces nouvelles se plaignent que le Gouvernement ne soit pas assez inclusif alors que ce dernier leur reproche de diviser le pays.  « Si l’opposition est naturelle sur toute scène politique, la méfiance ne cesse de croître et les déclarations de plus en plus inflexibles qui se multiplient rendent la situation plus difficile », a encore averti le Chef de la MANUA.

M. Yamamoto a rappelé que l’attentat de Kaboul n’avait pas fait de victimes internationales mais avait endommagé plusieurs ambassades, qui ont dû évacuer du personnel et n’ont pas toutes repris pleinement leurs activités.  « La communauté internationale ne doit pas se laisser intimider », a-t-il affirmé.

Parmi les autres défis auxquels l’Afghanistan est confronté, M. Yamamoto a cité non seulement les difficultés économiques et la difficulté à intégrer les nombreux réfugiés qui rentrent chaque jour, mais aussi une corruption endémique et un manque de confiance des investisseurs dans le secteur privé.  « La croissance économique est plus lente que celle de la population et la corruption met en péril la légitimité de l’État », a ajouté le Chef de la MANUA.

Insistant sur cette dernière, M. Yamamoto a rappelé que la corruption « est au cœur du problème de l’impunité, qui est elle-même au cœur de la question des droits de l’homme ».  Il a rappelé que la MANUA avait publié en avril son premier rapport sur la corruption dans le pays et a dit se réjouir des « réactions fortes » de la population.  Le Gouvernement d’union nationale s’est attelé à la tâche et a commencé à entreprendre des réformes dans divers ministères, a observé M. Yamamoto, qui a en outre estimé que le nouveau centre national de lutte contre la corruption se révèle efficace.   Pour le Représentant spécial, les efforts de lutte contre les violations des droits de l’homme et notamment la torture et les mauvais traitements des détenus doivent eux aussi être renforcés.

Pour M. Yamamoto, la récente crise a montré qu’il était dangereux de promouvoir des intérêts particuliers, que ce soit au plan national ou international.  « Le contexte afghan est très fragile », a-t-il rappelé, avant de lancer un appel pour mieux préparer les futures élections parlementaires.  « L’absence de clarté sur ces questions est un facteur de méfiance politique croissante », a-t-il ajouté, estimant que l’annonce prévue demain de la date du scrutin pourrait avoir un effet positif.

M. Yamamoto a par ailleurs encouragé le peuple afghan à engager « un véritable dialogue interne »  avec les Taliban, afin de définir ce que doit signifier le « vivre ensemble ».  La MANUA fait tout son possible pour réduire les tensions politiques, a réaffirmé le Chef de la Mission, qui a dit attendre « avec intérêt et confiance » les résultats de l’examen stratégique demandé par le Conseil.  Il a conclu son discours en lançant une nouvelle fois un appel à la retenue, afin que la population afghane puisse fêter dans la paix la fin du ramadan.

M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a rappelé que son pays restait constamment attaqué et qu’il connaissait actuellement une période décisive face à l’adversité.  Grâce à des mesures efficaces des forces armées nationales, l’offensive de printemps des Taliban a pu être retardée et ces derniers ont subi de lourdes défaites dans le pays.  Mais les « orchestrateurs de l’insécurité » ont alors eu recours à des attaques terroristes dans les villes, visant des cibles faciles, d’où des attaques sans précédent dans les rues et contre des hôpitaux, des cimetières, des mosquées, des missions diplomatiques ou encore les institutions politiques.

Le représentant a rappelé que, depuis le début de l’année, ces attaques terroristes urbaines avaient fait plus de 500 morts et 1 100 blessés.  M. Saikal a notamment insisté sur l’ampleur inégalée de l’attaque au camion piégé du 31 mars, « crime contre l’humanité et les valeurs islamiques » commis durant le mois saint du ramadan, et qui a fait à elle seule 150 morts.  Cette attaque, a-t-il rappelé, a provoqué des manifestations de colère de la population, qui ont elles-mêmes fait de nouvelles victimes, y compris lors d’une triple attaque terroriste lors des funérailles.

M. Saikal a ensuite énuméré les pays récemment victimes d’attaques terroristes, y voyant la preuve que le terrorisme n’a pas de frontières et continue de menacer les populations partout dans le monde.  Le représentant a donc insisté sur la nécessité d’éliminer des centres de soutien qui, au-delà des frontières, permettent aux terroristes d’opérer en Afghanistan.  Il a affirmé qu’il avait été « clairement établi » par des enquêtes conjointes que l’attaque commise le 10 janvier à Kandahar avait été planifiée à Quetta, au Pakistan, ajoutant que les enquêtes sur l’attaque du 31 mai mettaient en évidence des liens avec le réseau Haqqani, basé lui aussi au Pakistan. 

M. Saikal a également dénoncé les violations de la frontière, qui ont selon lui quadruplé depuis mars, et qui aggravent la situation.  Il a dénoncé le « pays voisin bien connu » qui avait accusé devant le Conseil de sécurité le Gouvernement afghan de chercher à « externaliser ses problèmes internes et blâmer les autres pour ses propres échecs ».  Il s’agit, a ajouté le représentant, du « même État qui se montre déterminé depuis toujours à utiliser tous les moyens à sa disposition pour déstabiliser notre pays tout en l’accusant de faiblesse ».

Pour faire face à la situation actuelle, l’Afghanistan a adopté une stratégie à trois volets, a expliqué M. Saikal.  Il faut renforcer le consensus sur la lutte contre le terrorisme en incitant le Pakistan à réellement coopérer, à cesser ses violations de la frontière afghane et à faciliter le processus de paix.  Il faut aussi renforcer les capacités de défense de l’Afghanistan, a-t-il ajouté avant de parler aussi du renforcement nécessaire de l’unité nationale, de la gouvernance et des services apportés à la population.

M. Saikal a estimé que la conférence internationale tenue le 6 juin à Kaboul avait marqué la reprise d’une importante initiative pour la stabilité dans le pays.  Pour le représentant, le Pakistan a naturellement un rôle important à jouer pour mettre fin à l’extrémisme violent et promouvoir la paix.  Il a donc souhaité qu’il saisisse l’occasion, dans l’intérêt de ses propres concitoyens et de toute la région.

Le représentant a en outre mis en avant le professionnalisme et le dévouement des forces de sécurité afghanes, notamment la police, malgré leur manque de moyens.  Le Gouvernement ne laissera pas ses ennemis infiltrer ses forces de sécurité, a encore affirmé M. Saikal avant d’assurer que son pays continuerait de lutter contre la corruption et en faveur du développement économique et de l’assistance à la population. 

Pour sa part, l’ONU doit jouer son rôle, a poursuivi M. Saikal.  Le représentant a exprimé sa reconnaissance au Secrétaire général pour sa récente visite à Kaboul et s’est félicité de la création du nouveau Bureau des Nations Unies pour la lutte contre le terrorisme.  Il a toutefois demandé que soient prises des mesures pour mieux lutter contre les violations de la frontière et contre le terrorisme dans la région.  Il a aussi demandé que les Taliban soient reconnus comme groupe terroriste, estimant que ces derniers sont incapables de se lancer dans de véritables négociations.  M. Saikal s’est enfin félicité de l’examen stratégique de la MANUA.

Insistant en conclusion sur les énormes sacrifices consentis par le peuple afghan, M. Saikal a rappelé le rôle essentiel que les Nations Unies doivent jouer, y compris le Conseil de sécurité.  L’Afghanistan se tourne vers lui pour être aidé à surmonter ses difficultés et enfin vivre en paix à l’abri du terrorisme et de la destruction.

M. KORO BESSHO (Japon) a regretté qu’en dépit du soutien de la communauté internationale, il y ait encore peu de changement en matière de sécurité en Afghanistan.  Il s’est inquiété encore plus de voir l’unité s’effriter au sein du Gouvernement d’union nationale, soulignant la nécessité de prendre des mesures visant à inclure les communautés ethniques, qui sont sous-représentées dans le Gouvernement.  Celui-ci, a-t-il ajouté, doit revenir à ses engagements de 2014 qui visaient notamment une représentation équitable de la population afghane.

Parmi les engagements non tenus, il a également cité les élections parlementaires, qui auraient dû avoir lieu en 2015, demandant au Gouvernement d’annoncer un calendrier électoral pour ces élections ainsi que pour celles des conseils de districts.  Il l’a encouragé à utiliser la vaste expérience de l’ONU dans ce domaine pour s’assurer que les voix des Afghans soient entendues lors de ces élections et lors de l’élection présidentielle prévue en 2019.

Le représentant japonais s’est félicité de la réunion tenue dans le cadre du Processus de Kaboul le 6 juin, l’occasion pour l’Afghanistan de montrer son ferme engagement à faire avancer le processus de paix, avec le soutien de ses partenaires internationaux et régionaux.  Le Gouvernement, a-t-il souhaité, doit non seulement faire preuve de volonté mais aussi arriver à des résultats concrets au bénéfice du peuple afghan.  Concernant les déplacements de population, il a salué les efforts du Gouvernement pour mieux protéger les civils.  Enfin, il a dit attendre avec intérêt les résultats de l’examen stratégique, le mois prochain, tel que prévu par la résolution 2344 (2016).

M. OMIRTAI BITIMOV (Kazakhstan) a salué l’amélioration des relations bilatérales entre l’Afghanistan et le Kazakhstan.  Il a estimé que malgré le refus des Taliban de négocier avec les autorités afghanes, il fallait continuer à œuvrer pour la paix.  Il a déploré la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays, et il s’est dit inquiet de la création de nouveaux groupes terroristes dans le nord de l’Afghanistan.  Il s’est aussi inquiété de l’intensification de la culture du pavot et a plaidé pour une lutte acharnée contre le trafic de drogues qui finance le terrorisme. 

Selon le représentant, la récession économique que vit l’Afghanistan s’explique par la dégradation de la situation sécuritaire.  À cet égard, il a fait valoir l’appui financier et multiforme que le Kazakhstan apporte à son voisin.  Il a invité la communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité, à revoir la manière dont est traitée la question afghane.  Il a ainsi invité le Conseil à renforcer les liens avec les voisins de l’Afghanistan et à tenir compte de leurs intérêts divers. 

En ce qui concerne la MANUA, le représentant a plaidé en faveur du renforcement de son rôle politique.  Il a aussi émis le vœu de voir l’Afghanistan intégrer les structures économiques d’Asie centrale.  S’agissant enfin de la lutte contre le terrorisme, il a insisté sur la nécessité de s’attaquer sérieusement au le trafic de stupéfiants.

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a rappelé le très lourd tribut que les Afghans innocents continuent de payer à cause du terrorisme.  « L’attentat du 31 mai avait pour but de diviser le Gouvernement afghan, la population et les diplomates », a-t-elle affirmé avant d’assurer que « le soutien des États-Unis à l’Afghanistan demeure inchangé ».  Les États-Unis, a-t-elle précisé, soutiennent en particulier le développement des organes de sécurité, notamment par le biais de la mission pilotée par l’OTAN.  Ils soutiennent aussi les efforts régionaux.

La représentante s’est félicitée que la première réunion du Processus de Kaboul, tenue le 6 juin, ait permis de renforcer le soutien régional et international en faveur d’un processus piloté par les Afghans.  Elle a rappelé que son pays s’était joint à l’appel lancé aux groupes extrémistes pour qu’ils participent au processus.  Elle a estimé que les progrès dans les discussions avec le Hezb-i Islami étaient synonymes d’espoir pour le pays, où il n’y a pas de solution militaire.  « L’avenir de l’Afghanistan dépend aussi beaucoup du rôle de ses voisins, qui doivent cesser tout soutien aux groupes terroristes et extrémistes », a poursuivi la représentante.

Mme Sison a pris note des nombreux défis, y compris économiques, auxquels se heurte l’Afghanistan.  Le soutien international à ce pays doit être le plus efficace possible, a-t-elle recommandé, avant de rendre hommage au rôle essentiel de coordination de la MANUA dans de nombreux domaines.  Elle a aussi dit attendre avec intérêt les conclusions de l’examen stratégique de la Mission.

M. CARL SKAU (Suède) a condamné les dernières attaques terroristes perpétrées à Kaboul.  Il a appelé à mettre fin à la violence et a souhaité que les responsables soient tenus responsables.  « La paix doit être obtenue par des négociations et non sur le champ de bataille », a dit le représentant en paraphrasant le Secrétaire général.  « Nous tous, mais particulièrement les pays de la région, avons intérêt à voir un Afghanistan en paix et stable », a-t-il ajouté en soulignant que l’engagement constructif et durable de la région serait essentiel pour atteindre cet objectif.  Il s’est aussi inquiété que les tensions régionales continuent de saper la stabilité à long terme et la croissance économique de ce pays.

Le représentant a estimé que la MANUA continuait de jouer un rôle important de par le soutien qu’elle apporte au Gouvernement et au peuple afghans, au moment où ces derniers construisent une société démocratique, prospère et pacifique.  Face aux défis qui demeurent, la présence efficiente, efficace et convenablement configurée de l’ONU demeure vitale pour soutenir les efforts en vue d’une paix durable.  Il a recommandé cinq priorités pour le soutien de l’ONU à l’Afghanistan: suivre une approche globale qui inclue le développement, les droits de l’homme, l’état de droit et l’aide humanitaire; être présent à tous les niveaux; prévoir un mandat politique plus fort pour le Représentant spécial du Secrétaire général, y compris sur les questions régionales relatives aux efforts de paix; mieux coordonner les donateurs; et favoriser la participation et l’intégration des femmes afghanes à la vie politique, économique et sociale.

M. GORGUI CISS (Sénégal) a fermement condamné les attentats commis ces derniers temps, qui ont coûté tant de vies au sein de la population afghane.  Il s’est félicité que le Président Ashraf Ghani et le Chef de l’exécutif Abdullah Abdullah aient engagé un dialogue afin d’harmoniser leurs relations et faire baisser les tensions sociales.  Il a en revanche déploré l’absence de perspectives de paix avec les Taliban.  Le délégué s’est félicité de la mobilisation des voisins de l’Afghanistan pour œuvrer en faveur de la paix, et il a salué le travail que mène la MANUA.

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a dit partager les vues du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et a estimé que le représentant du Kazakhstan avait fait une « brillante analyse » de la situation.  La récente vague terroriste qui a déferlé sur le pays a beaucoup attristé la Fédération de Russie, « amie de longue date » de l’Afghanistan, a-t-il ajouté.

Mais ce qui préoccupe le plus la Fédération de Russie aujourd’hui, c’est l’aggravation des tensions politiques.  Elle insiste donc sur l’importance du processus de réconciliation nationale, qui doit être dirigé par les Afghans eux-mêmes.  La Fédération de Russie est prête à apporter son aide, a ajouté le représentant, qui a suggéré un éventuel assouplissement du régime des sanctions imposées par le Conseil de sécurité.  Le représentant a également rappelé le Processus de Moscou pour faciliter le dialogue, qu’il a jugé « prometteur », tout en se disant « perplexe » face au refus de certains États d’y participer.

Pour la Fédération de Russie, la force internationale en Afghanistan n’a pas réussi à rétablir la paix et à lutter efficacement contre le terrorisme.  « Il faut aujourd’hui mettre l’accent sur l’unité nationale et la coopération régionale », a poursuivi le représentant, qui a regretté la « rhétorique antirusse » de certains pays.  Pourtant, a-t-il ajouté, la Fédération de Russie a apporté une importante contribution à la lutte contre le terrorisme en Afghanistan, y compris en coopération avec les États-Unis.  Mais elle est aujourd’hui inquiète de la présence croissance de l’État islamique en Afghanistan et s’interroge sur le survol du pays par des avions non identifiés et sans immatriculation.  La MANUA devrait se pencher sur la question, a estimé M. Safronkov.  Enfin, le représentant a expliqué que la Fédération de Russie était également inquiète de la reprise du narcotrafic, qui fournit des ressources au terrorisme, sachant que la culture du pavot s’étend de nouveau dans le pays.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) s’est dit choqué du fait que les femmes et les enfants soient les premiers à payer le prix des attentats terroristes en Afghanistan.  « Que ce soit dans les rues de Manchester, de Londres ou encore de Kaboul, le message à l’endroit des terroristes doit être le même: trop c’est trop », a-t-il déclaré.  Il a estimé que la lutte contre le terrorisme et en faveur du développement et de la paix en Afghanistan passait par un travail concerté des Afghans.

« Le pays a plus que jamais besoin de s’unir et de regarder vers l’avenir avec espoir », a-t-il indiqué, arguant que la tenue d’élections législatives ouvertes pourrait œuvrer à cette fin.  Mais pour cela, il faudrait déjà arrêter une date définitive pour cette échéance.  Le délégué a plaidé pour le renforcement du dialogue national dans ce pays composé de nombreux groupes ethniques.  Ce dialogue national doit intégrer les jeunes et les femmes, a-t-il plaidé.  Par ailleurs, il a appelé à reconfigurer la MANUA dans le cadre de la recherche d’une paix durable dans le pays et pour le respect des droits de tous les Afghans.

M. LIU JIEYI (Chine) a déclaré que le rétablissement de la paix et de la stabilité en Afghanistan était dans l’intérêt tant du peuple afghan que de toute la région.  La Chine se félicite donc des efforts du Gouvernement afghan et de l’aide qu’apportent les pays de la région en ce sens.  Mais la Chine constate aussi la dégradation des conditions de sécurité en Afghanistan.  De l’avis du représentant, la communauté internationale doit s’unir pour renforcer la coordination dans la lutte contre le terrorisme en Afghanistan et faire en sorte que l’idéologie terroriste cesse de se propager.

La communauté internationale doit aussi promouvoir le processus de réconciliation nationale, a plaidé le représentant en soutenant que les parties afghanes devaient y participer activement dans l’intérêt de l’avenir du pays.  « L’accord de paix conclu entre le Gouvernement afghan et différents groupes armés devrait être mis en œuvre et la communauté internationale devrait l’appuyer », a-t-il insisté. 

Il est aussi très important, à son avis, de renforcer les capacités du Gouvernement car c’est avant tout ce dernier qui devrait résoudre les problèmes du pays.  S’il a appelé la communauté internationale à respecter la volonté du peuple afghan qui doit pouvoir choisir son mode de gouvernance et son système de développement, il lui a demandé d’apporter au Gouvernement une assistance ciblée pour renforcer ses capacités de gouvernance.

« La Chine salue le travail effectué par la MANUA et espère que l’examen stratégique en cours lui permettra de cibler davantage ses efforts sur la promotion de la réconciliation, de la paix et du développement. »  Le représentant a assuré que son pays, qui a toujours respecté la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Afghanistan, soutient aussi son intégration régionale dans le cadre de l’initiative dite des « Nouvelles routes de la soie ».

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a affirmé que la sécurité et le développement de l’Afghanistan sur le long terme dépendent de la pleine implication des Afghans eux-mêmes.  Il a souhaité que les conditions de dialogue avec les Taliban soient favorisées au niveau régional, se félicitant à cet égard de la dernière rencontre entre le Président Afghan et le Premier Ministre pakistanais.

M. Alemu a salué les efforts déployés par le Gouvernement d’union nationale dans la lutte contre la corruption, affirmant qu’il est important d’assurer la cohérence et l’unité au sein du pays.  Il a invité la communauté internationale à appuyer les efforts du Gouvernement afghan afin qu’il réalise ses objectifs de développement, insistant à cet effet sur le respect des engagements pris à la Conférence de Bruxelles sur l’Afghanistan d’octobre dernier. 

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) a condamné les derniers attentats terroristes et rappelé le soutien de son pays au peuple afghan.  L’Italie considère comme un signe important envoyé à la communauté internationale la visite, la semaine dernière, du Secrétaire général à Kaboul.  Elle se félicite aussi de la première réunion du Processus de Kaboul, qui doit être la propriété des Afghans et qui montre l’importance de la dimension régionale de la question afghane.  Ainsi, le terrorisme et l’extrémisme violent ne pourront être combattus que dans le cadre d’une coopération régionale renforcée, que l’Italie appuie.

« Il n’y a pas de solution militaire au conflit afghan », a rappelé le représentant, qui a insisté sur la nécessité d’un large consensus pour que le processus de réconciliation soit couronné de succès.  Il est important de garantir la participation des femmes à ce processus, a ajouté M. Lambertini.  Le représentant a également insisté sur la nécessité de renforcer les institutions afghanes, et notamment les capacités des forces de défense.  Mais il faut aussi lutter contre toutes les formes de corruption,  a-t-il ajouté.

« Les défis auxquels est confronté l’Afghanistan sont multiples et complexes et ne pourront être surmontés que dans l’union nationale », a poursuivi le représentant.  Il en est de même pour assurer le succès des nécessaires réformes.  À cet égard, l’Italie espère que le programme de réforme électorale sera bientôt mené à terme et qu’un calendrier électoral sera publié  en vue d’un processus honnête et transparent.  Enfin, l’Italie soutient la MANUA et attend avec intérêt le rapport sur son examen stratégique.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a salué la récente visite du Secrétaire général de l’ONU en Afghanistan, soulignant que cela témoigne de l’intérêt de la communauté internationale pour l’avenir du pays.  Il a déploré la recrudescence d’attentats terroristes dans le pays, avant de saluer le retour en Afghanistan de M. Gulbuddin Hekmatyar, chef de la faction Hezb-i Islami Gulbuddin, invitant d’autres groupes radicaux à dialoguer avec le Gouvernement afghan.

Le représentant a ensuite dénoncé toute approche en douceur face au trafic de stupéfiants, et notamment d’opium.  Rappelant que ce trafic constitue une source de financement du terrorisme dans le pays, il a appelé au renforcement de la collaboration internationale dans la lutte pour s’y opposer.  Il a déclaré que l’Égypte allait continuer de jouer un rôle actif dans le soutien du Processus d’Istanbul sur la sécurité et la coopération régionales pour la paix et la stabilité en Afghanistan.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a dit que la détérioration de la situation sécuritaire en Afghanistan est, pour la France, une source de préoccupation majeure.  Elle a estimé que la prolifération des groupes armés et terroristes devait être prise particulièrement au sérieux, avant de souligner combien la dégradation de la sécurité aggrave une situation humanitaire déjà fragile marquée dernièrement par un retour massif de réfugiés en provenance du Pakistan et de l’Iran.  Pour Mme Gueguen, ce contexte sécuritaire extrêmement volatile rend l’unité du Gouvernement afghan plus que jamais essentielle pour la démocratie afghane.

Sur le plan des droits de l’homme, la représentante s’est inquiétée de la précarité de la situation des femmes et des enfants.  Au-delà des réformes à mener à court et à moyen terme, elle a estimé que la stabilisation durable de l’Afghanistan ne pourrait passer que par la réconciliation nationale.  Dans ce contexte, elle a salué la décision du Président Ghani de rassembler, le 6 juin dernier, le « Processus de Kaboul pour la paix et la sécurité ».  À son avis, l’accompagnement et le soutien de la communauté internationale en général, des Nations Unies en particulier, n’a jamais été aussi important.

« Nous attendons avec beaucoup d’intérêt la remise des conclusions de la revue stratégique de la MANUA le mois prochain », a-t-elle dit avant de souhaiter que cet exercice permette de rationaliser les missions de la MANUA et de se concentrer sur l’essentiel.  En outre, elle a estimé qu’une simplification des mécanismes de coordination sur place pourrait sans doute permettre d’améliorer l’efficacité et la visibilité de l’assistance apportée par les Nations Unies.  

M. OLEH HERASYMENKO (Ukraine) a regretté que les acquis en matière de politique, de réforme de la justice, de protection des droits de l’homme, de lutte contre le trafic de drogues aient été assombris par l’accroissement des tensions entre les partis politiques à l’approche de la prochaine saison électorale.  Le représentant a souligné qu’il était absolument impératif de préserver ces réalisations et qu’il appartenait aux parties prenantes afghanes de faire preuve de maturité, en laissant de côté leurs différences et en recherchant plutôt la réalisation d’une paix durable et totale et de l’entente nationale.  Il a ajouté que le terrorisme restait une menace grave pour ce pays, qui affecte directement la paix et la stabilité de la région, sachant que les Taliban ont annoncé leurs offensives annuelles.

« Nous sommes aussi préoccupés par la souffrance des civils, en particulier les pertes élevées de femmes et d’enfants comme conséquences des affrontements entre les Forces nationales de sécurité afghanes et les Taliban ou des mines et restes explosifs de guerre.  Le nombre croissant de personnes déplacées et de réfugiés rapatriés en Afghanistan constitue un autre point de préoccupation.  Avant de terminer, le représentant a souligné l’importance de la coopération régionale pour la stabilisation de la situation en Afghanistan.  Afin de parvenir à la paix et la prospérité en Afghanistan, les acteurs clefs ne doivent épargner aucun effort pour faire face aux principales menaces régionales posées par le terrorisme.  « Nous sommes du même avis que le Secrétaire général selon lequel cet objectif peut être atteint avec l’amélioration des relations bilatérales entre l’Afghanistan et le Pakistan, par le biais d’un dialogue constructif », a réitéré le délégué ukrainien.

Mme CRISTINA CARRIÓN (Uruguay) a jugé fondamentale la consolidation des institutions démocratiques de l’Afghanistan pour arriver à la stabilité du pays, saluant les progrès accomplis en ce sens grâce aux programmes de réformes prioritaires sur la corruption, les élections et la reddition de comptes des hauts fonctionnaires.  Le manque de dialogue et de progrès vers un accord de paix entre le Gouvernement et les Taliban cause toujours des grandes souffrances à la population, a-t-elle noté en s’inquiétant aussi des incidents en matière de sécurité qui font de nombreuses victimes.

Autres sujets de préoccupation pour la représentante: la situation des droits de l’homme et les conséquences humanitaires des déplacements de plus en plus nombreux.  Elle a lancé un appel à appuyer l’Afghanistan aux pays de la région, la communauté internationale, les Nations Unies et en particulier le Conseil de sécurité. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a déclaré qu’il fallait déployer un effort concerté pour lutter contre le terrorisme en Afghanistan.  Il a invité la communauté internationale à continuer de faciliter le retour volontaire des déplacés dans le pays.  Mais il faut d’abord procéder au déminage afin que les populations qui retournent chez elles le fassent en toute sécurité, a—t-il préconisé.

Le représentant a salué les efforts menés par le Gouvernement qui a établi une feuille de route pour la paix en avril dernier.  Il a également salué les diverses initiatives multilatérales, bilatérales et régionales qui entrent dans la droite ligne du Processus de Kaboul.  Il a enfin appelé à des négociations directes entre le Gouvernement afghan et les groupes armés.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a estimé que le rapport du Secrétaire général ne faisait que confirmer l’inquiétude croissante face à la dégradation de la sécurité et de la situation économique en Afghanistan.  La représentante a condamné les différents attentats commis en Afghanistan, rappelant que son pays était lui aussi victime du terrorisme et était donc désireux de travailler avec l’Afghanistan pour y faire face.  Elle a souhaité que les divergences politiques entre les deux pays, « qui se sont récemment accentuées », puissent être résolues.

La paix ne pourra être rétablie que par le biais d’un dialogue entre Kaboul et les Taliban afghans, a poursuivi la représentante, qui a rappelé que c’était aussi la position dominante au sein de la communauté internationale et celle du Secrétaire général.  Elle a regretté que les pourparlers aient été « sabotés » en 2015 « dans des conditions bien connues », avant de rappeler les multiples enceintes et processus destinés à faciliter la réconciliation, y compris le récent Processus de Kaboul.

« Un processus politique est nécessaire pour cette réconciliation car il n’existe pas de solution militaire », a insisté Mme Lodhi.  Pour le Pakistan, la résurgence de l’insurrection ne peut pas être expliquée par une référence commode à des « centres de soutien » et autres « refuges » situés à l’étranger.  De larges parties du territoire afghan sont aujourd’hui sous le contrôle des Taliban dont les « refuges » se trouvent en Afghanistan, a-t-elle fait valoir.  « Le Pakistan, qui accueille plus de deux millions de réfugiés, attend de la reconnaissance pour son assistance plutôt que ce qu’on a pu entendre aujourd’hui de la part du représentant afghan », a ajouté la représentante.

Rappelant ensuite que le Président afghan et le Premier Ministre pakistanais étaient convenus à Astana de revitaliser les discussions pour promouvoir la réconciliation, Mme Lodhi s’est dite convaincue que ces deux pays pouvaient coopérer ensemble et que les liens culturels, religieux et géographiques qui les unissent finiraient par s’imposer.  « Il faudra toutefois pour réussir que les parties afghanes le souhaitent et renoncent à toute solution militaire », a-t-elle ajouté.  Mme Lodhi a estimé que cela était possible car, selon elle, le Gouvernement afghan et les Taliban font face à une « menace commune », qui est celle des groupes terroristes tels que ceux liés à l’État islamique.  Victime du terrorisme depuis plus de 35 ans, le Pakistan est le pays de la région qui a le plus à gagner de la paix en Afghanistan, a-t-elle conclu.

M. FERIDUN H. SINIRLIOĞLU (Turquie) a salué la détermination des Forces nationales de sécurité afghanes dans leur lutte contre le terrorisme.  Il a estimé que la présence de Daech dans le pays constituait une raison supplémentaire de continuer à soutenir l’Afghanistan.  Il a jugé indispensable que les réalisations de ces 15 dernières années soient consolidées.  Dans ce contexte, a-t-il indiqué, la Turquie a décidé de consacrer 150 millions de dollars d’aide au développement à l’Afghanistan sur la période 2018-2020.  Il a aussi cité une aide de 60 millions de dollars pour appuyer l’armée nationale afghane durant cette même période en accord avec les décisions prises par l’OTAN lors de son sommet de Varsovie.  Il a indiqué que la Turquie continuerait d’accueillir la mission de l’OTAN pour la formation des femmes policières afghanes. 

Le représentant a par ailleurs salué les efforts du Gouvernement afghan en matière de lutte contre la corruption.  Il a estimé que la tenue, le 6 juin dernier, de la première réunion du « Processus de Kaboul pour la paix et la sécurité » représentait un développement positif des efforts de paix et de réconciliation menés sous l’égide des Afghans.  Il a espéré que l’accord intervenu entre le Gouvernement afghan et le groupe Hezb-i Islami servirait de modèle pour les autres groupes.  La Turquie, a-t-il assuré, continuera d’appuyer l’Afghanistan par le biais des plateformes multilatérales, notamment par le biais de « Cœur d’Asie/Processus d’Istanbul ».

M. HARALD BRAUN (Allemagne) a salué la détermination du Gouvernement d’union nationale à laisser les portes ouvertes à la négociation de paix avec les Taliban.  À son avis, un processus de paix et de réconciliation complet reste la seule solution pour parvenir à une stabilité à long terme en Afghanistan et dans la région.  Il a estimé que seul un processus conduit par les Afghans eux-mêmes permettrait de parvenir à des solutions durables.

M. Braun s’est par ailleurs inquiété que le nombre de victimes parmi les femmes et les enfants ait augmenté respectivement de 24% et 17%.  Dans ce contexte, il a particulièrement salué l’adoption par le Gouvernement d’une stratégie nationale de prévention et d’atténuation des victimes civiles.

En outre, il a estimé que la ratification imminente du Protocole V de la Convention de 1980 sur les armes classique serait de nature à réduire le nombre de victimes civiles.  L’Allemagne, en tant que vice-présidente du Groupe de contact sur l’Afghanistan, salue les efforts de la MANUA pour renforcer la cohésion entre les acteurs internationaux et régionaux présents en Afghanistan.  Enfin, le représentant a dit attendre avec impatience la remise des conclusions de l’examen stratégique de la MANUA le mois prochain. 

Mme HEDDA SAMSON (Pays-Bas) a mis l’accent sur trois questions importantes pour l’Afghanistan que sont la situation sécuritaire et la stabilité politique; la réconciliation et la participation des femmes à la société; et l’examen des missions de la MANUA.  S’agissant de la situation sécuritaire, elle a jugé indispensable de garantir l’unité du Gouvernement.  Elle a rappelé que les institutions européennes s’étaient engagées à hauteur de 230 millions de dollars lors de la Conférence de Bruxelles d’octobre 2016 pour appuyer les efforts du Gouvernement afghan.  Les Pays-Bas, a-t-elle précisé, ont consacré une somme de 4,5 millions pour aider les groupes les plus vulnérables. 

Pour ce qui est de la réconciliation nationale et la participation des femmes, la représentante a exhorté les parties à collaborer avec le processus de paix et de réconciliation conduit par l’Afghanistan.  Elle a salué la décision du Président Ghani de tenir une réunion, le 6 juin dernier, dans le cadre du « Processus de Kaboul pour la paix et la sécurité », soulignant ses efforts pour faciliter la participation des femmes.  La représentante a d’ailleurs prévenu qu’il n’y aurait pas de paix en Afghanistan sans participation active des femmes.  Dans ce contexte, elle a particulièrement applaudi la tenue du quatrième Symposium des femmes afghanes, qui s’est tenu le 15 mai 2017.

Par ailleurs, elle a dit l’importance de l’examen stratégique en cours de la MANUA, avant de souligner l’importance du rôle de la Mission dans le domaine de la coopération politique régionale.

M. JUAN MANUEL GONZÁLEZ DE LINARES PALOU (Espagne) a rappelé les différents défis auxquels l’Afghanistan devait faire face et a estimé que, malgré les progrès accomplis, la situation était loin d’être positive.  Mais il a aussi noté, comme l’a fait le Secrétaire général durant sa récente visite, la volonté du peuple afghan d’aller de l’avant.  Il a donc appelé les dirigeants du pays à donner la priorité au bien-être de leur population.  Enfin, il a réitéré l’appui ferme de l’Espagne à la MANUA et à toutes les agences des Nations Unies qui travaillent au bien-être des Afghans.

M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a indiqué que la communauté internationale était confrontée, en Afghanistan, à « un adversaire qui n’a pas peur de violer le droit international humanitaire et le droit international ».  « Cet adversaire est également inondé de ressources, d’armes et de soutien opérationnel, et il a accès à des sanctuaires hors du pays. »  Le représentant a affirmé que la communauté internationale ne pouvait pas changer la situation du pays si elle se refusait de voir ces réalités en face.

Il a aussi reproché au Conseil de sécurité de se réunir sur la question de l’Afghanistan tous les trois mois, alors que la situation sur le terrain inviterait à des réunions plus régulières.  Il a déploré cette « tendance à traiter de la violence en Afghanistan comme de la routine ».  « Où est-ce que ces éléments antigouvernementaux en Afghanistan prennent-ils leurs armes, leurs explosifs, où se forment-ils et d’où viennent leurs fonds? » a-t-il lancé.  « Comment se fait-il que l’augmentation spectaculaire de la production d’opium, accompagnée de la hausse des prix des stupéfiants, n’a jamais attiré l’attention du Comité des sanctions 1988 portant sur l’Afghanistan? » a-t-il ajouté.

Le délégué a rappelé que l’Inde venait d’établir un corridor aérien avec l’Afghanistan.  Il y a quelques jours, les premiers cargos de marchandises sont arrivés dans les deux pays, mettant ainsi fin aux obstacles commerciaux auxquels les deux pays faisaient face.  Il a salué le futur examen des activités de la MANUA, mais souligné l’importance pour l’ONU d’avoir également des discussions informelles avec toutes les parties prenantes importantes pour l’Afghanistan.  Il a terminé son propos en déclarant qu’il ne fallait pas faire de distinction entre bons et mauvais terroristes, et il a cité les groupes en activité en Afghanistan, expliquant qu’aucune justification ne saurait être donnée à leurs actes.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a vivement condamné les actes terroristes commis en Afghanistan et a rappelé que la paix était une condition essentielle au développement durable du pays.  C’est pourquoi la dégradation de la sécurité est inquiétante pour le pays et pour le monde.  On ne peut y remédier uniquement par des moyens militaires, a affirmé le représentant, pour qui la prolifération des groupes terroristes sur le territoire afghan nécessite une réaction internationale concertée.  La communauté internationale, a-t-il plaidé, doit plus que jamais apporter son soutien au Gouvernement d’union nationale afghan.

« Le soutien que lui apporte la République islamique d’Iran est quant à lui indéfectible », a assuré le représentant, pour qui les progrès accomplis dans l’accord de paix conclu avec le Hezb-i Islami attestent de la volonté de paix du Gouvernement afghan.  Pays voisin de l’Afghanistan, la République islamique d’Iran est directement intéressée à la paix dans ce pays, a encore déclaré le représentant.  En outre, « la République islamique d’Iran soutient la MANUA et les institutions des Nations Unies qui appuient le Gouvernement afghan dans la mise en œuvre de ses priorités nationales ».

Mme JOANNE ADAMSOM, de l’Union Européenne, a jugé indispensable que le processus de paix conduit par les Afghans inclue tous les hommes et femmes, en tenant compte de leurs intérêts légitimes à préserver l’unité et la souveraineté, l’intégrité territoriale, ainsi que l’égalité des droits de tous les Afghans conformément à la Constitution afghane.  Elle a salué le lancement de la nouvelle initiative de paix régionale, appelé Processus de Kaboul pour la paix et la coopération en matière de sécurité.  Elle s’est félicitée de la volonté du Gouvernement d’engager un processus politique avec les Taliban et d’autres groupes de l’opposition afin de parvenir à un règlement politique durable.  Elle a aussi souligné les efforts déployés par le Gouvernement dans la mise en œuvre de ses engagements en matière de lutte contre la corruption, dans la préparation des élections, ainsi que dans les domaines fiscal et budgétaire.  Elle a espéré que l’Afghanistan pourrait ratifier rapidement l’accord de coopération en matière de partenariat et développement signé avec l’Union européenne le 18 février.   

S’agissant des droits de l’homme, la représentante de l’Union européenne a particulièrement applaudi la tenue du quatrième Symposium des femmes afghanes qui s’est tenu le 15 mai 2017.  Elle a félicité le Gouvernement pour son engagement à régler le problème du report des élections parlementaires et provinciales.  Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, elle a noté que l’événement de haut niveau organisé à Kaboul, le 8 mai, par les institutions européennes avait permis de mettre en évidence le haut niveau de convergence avec les autorités afghanes sur la nécessité de mener de réels efforts pour lutter contre ce fléau.  

Par ailleurs, la représentante de l’Union européenne a estimé que la coopération régionale restait une des clefs pour parvenir à une paix et une stabilité durables en Afghanistan et dans la région, ainsi que pour le développement durable.  C’est pourquoi, a-t-elle dit, l’Union européenne soutient des cadres régionaux comme le « Cœur d’Asie/Processus d’Istanbul » ou la Conférence sur la coopération économique régionale concernant l’Afghanistan.  Enfin, elle a exhorté la MANUA à intensifier ses travaux avec le Gouvernement afghan pour permettre la meilleure intégration des personnes déplacées et des réfugiés de retour dans le pays. 

M. MATHIAS BOGAERT (Belgique) a souligné l’importance d’une action durable contre les mines en Afghanistan qui reste l’un des pays les plus touchés au monde par ce fléau.  Plus de 80% des victimes de munitions non explosées sont des enfants, a rappelé le représentant qui a souligné le défi considérable auquel l’Afghanistan fait face pour atteindre ses obligations de déminage en vertu de la Convention d’Ottawa en 2023.  La Belgique a décidé de soutenir un nouveau projet du Service de la lutte antimines de l’ONU pour renforcer la capacité de l’autorité nationale afghane chargée de cette lutte en vue de coordonner et de gérer la qualité de toutes les activités menées dans ce cadre dans le pays. 

Puis il s’est profondément préoccupé de l’impact accru du conflit sur les enfants.  Il a appelé le Secrétaire général à maintenir une capacité spéciale de protection de l’enfance au sein de la MANUA et a réitéré son appel à toutes les parties au conflit afin qu’elles respectent pleinement leurs obligations internationales en vertu du droit international humanitaire.

Le représentant a enfin réaffirmé l’importance d’un plan d’action national global contre l’extrémisme violent en vue de lutter efficacement contre le terrorisme.  Pour cela, il a jugé crucial d’avoir une bonne compréhension sur le terrain des facteurs de radicalisation et de recrutement, ainsi qu’une bonne connaissance des réseaux de financement du terrorisme.  La Belgique félicite le Gouvernement afghan pour les efforts importants entrepris jusqu’ici concernant, par exemple, la mise en œuvre du plan d’action de lutte contre le terrorisme.  Il a encouragé celui-ci à continuer à travailler à un plan d’action national dans ce domaine en tirant parti du soutien et de l’expertise des Nations Unies.

Mme GILLIAN BIRD (Australie) a condamné l’attaque terroriste du 31 mai à Kaboul tout en réaffirmant l’engagement de son gouvernement à soutenir l’Afghanistan dans sa lutte contre le terrorisme et ses efforts pour le développement et la sécurité.  La représentante a exhorté le peuple afghan à maintenir sa solidarité en dépit de la frustration et de la souffrance.  Elle a salué le travail de la MANUA qui encourage le dialogue politique grâce à ses bons offices à Kaboul.  Les événements de ce dernier trimestre soulignent la nécessité pour la communauté internationale d’être avec l’Afghanistan au moment où il s’emploie à mettre un terme au cycle de la violence.  À cet égard, l’Australie a annoncé l’augmentation de son engagement militaire de près de 300 hommes pour soutenir le développement des capacités à long terme des Forces nationales de sécurité afghanes. 

Saluant le démarrage de l’initiative de Kaboul, la représentante a indiqué que l’appropriation par l’Afghanistan de la discussion régionale sur la paix durable démontrait son engagement à trouver des idées nouvelles, intelligentes et pratiques sur la manière de parvenir à la stabilité.  Mme Bird a encouragé les voisins et les partenaires du pays à se joindre aux efforts du Gouvernement d’union nationale et a salué l’engagement constructif entre le Premier Ministre Nawaz Sharif et le Président Ghani.

La communauté internationale se tient aux côtés de l’Afghanistan et est prête à soutenir Kaboul au moment où elle cherche des solutions aux défis afghans, a assuré la déléguée australienne, en soulignant que, de son côté, l’Afghanistan reste à la pointe des efforts mondiaux contre le terrorisme.  Les récents événements à Londres, Manchester, Téhéran, en Égypte et en Afghanistan même soulignent les conséquences potentielles de l’échec. 

Après avoir réitéré l’engagement de son pays auprès de l’Afghanistan sur son parcours vers le développement, Mme CATHERINE BOUCHER (Canada) a exprimé sa profonde préoccupation à l’égard de la détérioration constante de la sécurité dans ce pays, particulièrement en ce qui a trait au nombre de victimes signalées jusqu’à maintenant en 2017 chez les civils et les travailleurs humanitaires.  « Nous sommes consternés par le nombre de victimes chez les civils.  Leur déplacement, leur vulnérabilité accrue et leurs pertes sont inacceptables.  Nous sommes consternés de voir les répercussions qu’ont l’instabilité et l’insécurité sur les femmes et les enfants. »

La représentante a appelé toutes les parties au conflit à prendre des mesures urgentes pour mettre fin au meurtre et à la mutilation des civils.  « Nous demandons aux voisins et aux partenaires de l’Afghanistan de continuer à travailler avec le Gouvernement de l’Afghanistan afin d’accroître la stabilité de la région et réduire la violence dans le pays », a déclaré la représentante canadienne. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité se félicite du déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel et appelle les partenaires à la soutenir sur les plans logistique et financier

7979e séance – matin
CS/12881

Le Conseil de sécurité se félicite du déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel et appelle les partenaires à la soutenir sur les plans logistique et financier

Par la résolution 2359 (2017), adoptée à l’unanimité ce matin, le Conseil de sécurité « se félicite du déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S) sur l’ensemble du territoire des pays qui y participent, avec des effectifs en personnel militaire et personnel de police pouvant aller jusqu’à 5 000 personnes, en vue de rétablir la paix et la sécurité dans la région du Sahel ».

« Ce n’est pas une force de plus, ni une force de trop », a justifié le représentant du Mali, M. Issa Konfourou, qui s’exprimait au nom des membres du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et du Tchad).  

Le représentant malien a indiqué que cette résolution envoyait « un message de solidarité envers les peuples du Sahel », cette Force conjointe devant créer un environnement propice à la pleine réalisation du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).

Cette Force, a-t-il poursuivi, qui va également travailler en coordination avec la force française Barkhane et avec les armées des pays du G5 Sahel, résulte de la volonté commune des chefs d’État de la région de coordonner leurs efforts et moyens pour lutter efficacement contre le terrorisme, le crime organisé et les trafics d’êtres humains. 

C’est dans ce contexte que, dans la résolution adoptée ce matin, le Conseil « prie instamment la FC-G5S et les forces françaises de veiller, au moyen des dispositifs pertinents, à l’échange d’informations et à la bonne coordination de leurs opérations, dans les limites de leurs mandats respectifs ».  Il « prie de nouveau à cet égard le Secrétaire général de renforcer la coopération entre la MINUSMA et les États membres du G5 Sahel, y compris grâce à la fourniture à la MINUSMA de données de renseignement utiles et d’officiers de liaison issus des États membres du G5 Sahel ».

Le texte rappelle, en outre, « que c’est aux États du G5 Sahel qu’il incombe de donner à la FC-G5S les ressources dont elle a besoin », et « salue l’engagement pris par l’Union européenne d’apporter un soutien financier de 50 millions d’euros à la FC-G5S ».

En outre, la résolution « engage les partenaires bilatéraux et multilatéraux à apporter davantage leur appui, notamment par la fourniture d’une assistance suffisante à la FC-G5S sur les plans logistique, opérationnel et financier, et les engage également à convoquer rapidement une conférence de planification visant à assurer la coordination des efforts d’assistance des donateurs à la FC-G5S ».

Le soutien international est important pour la France, dont le représentant, M. François Delattre, a souligné que la sécurité dans le Sahel avait un impact direct sur celle de son pays.  C’est à ce titre que 4 000 soldats français sont déployés dans le Sahel dans le cadre de l’Opération Barkhane.

Mais « au Sahel, c’est notre sécurité à tous qui est en jeu », a ajouté M. Delattre, avant de rendre hommage au sacrifice des États africains qui sont engagés dans cette région au service de la sécurité internationale.  C’est dans ce contexte que le représentant de la France a souligné la responsabilité des Nations Unies et de la communauté internationale de soutenir ces États sur les plans tant politique que financier. 

Le délégué du Mali a renchéri en appelant à un soutien conséquent de la part des partenaires bilatéraux et multilatéraux, afin de mobiliser les moyens nécessaires à l’opérationnalisation effective et au fonctionnement efficace de la Force conjointe.

« Nous voulons aller vite, car les groupes criminels n’attendent pas », a-t-il argué avant d’annoncer la tenue, le 2 juillet prochain, à Bamako, d’un sommet extraordinaire des chefs d’État du G5 Sahel avec le Président de la République française. 

Parallèlement au volet sécuritaire, le représentant du Mali a promis que la Force conjointe accorderait la priorité aux questions de développement, de bonne gouvernance et de résilience des populations.

Le texte adopté insiste d’ailleurs, dès son troisième alinéa, sur « le rôle important des femmes en matière de prévention et de règlement des conflits comme de consolidation de la paix » et « souligne que la FC-G5S doit tenir compte de la situation des femmes dans tous les aspects de l’exécution de son concept stratégique d’opérations ».

Le G5 Sahel, créé en 2014, avait adopté une résolution le 6 février 2017 dans laquelle elle avait décidé de créer une force conjointe.  C’est par un communiqué du 13 avril 2017 que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a entériné le concept stratégique des opérations et autorisé le déploiement de la FC‑G5S.

Le Conseil de sécurité, dans la résolution adoptée ce matin, « prie le Secrétaire général de lui faire rapport, sur les activités de la FC-G5S », notamment « un rapport oral actualisé dans les deux mois et un rapport écrit dans les quatre mois suivant l’adoption de la présente résolution ».  Par la suite, il est demandé au Secrétaire général « d’inclure ces éléments dans les rapports présentés périodiquement par le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel ».

Le Conseil de sécurité entend réexaminer le déploiement de la FC-G5S dans un délai de quatre mois à compter de ce jour.

Le représentant de la France a par ailleurs assuré que la question du Sahel serait l’une des priorités de la présidence française du Conseil de sécurité au mois de mars 2018.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Texte du projet de résolution (S/2017/522)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2295 (2016), 2253 (2015) et 2227 (2015),

Rappelant qu’il a la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Affirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad,

Se déclarant toujours préoccupé par la dimension transnationale de la menace terroriste dans la région du Sahel, ainsi que par les graves défis que représentent la criminalité transnationale organisée dans la région du Sahel, notamment le trafic d’armes et de stupéfiants, le trafic de migrants, la traite d’êtres humains, et les liens qui se développent, dans certains cas, entre cette criminalité et le terrorisme, et soulignant que la responsabilité de lutter contre ces menaces et de relever ces défis incombe aux pays de la région,

Rappelant que le Mouvement pour l’unification et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), Al-Qaida au Maghreb islamique (AQIM), Ansar Eddine et son dirigeant, Iyad Ag Ghali, et Al-Mourabitoun sont inscrits sur la Liste relative aux sanctions contre Al-Qaida établie par son Comité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés, se déclarant à nouveau disposé à sanctionner, au titre du régime susmentionné, d’autres personnes, groupes, entreprises et entités qui sont associés à Al-Qaida ou à d’autres entités ou personnes inscrites sur la Liste, et prenant note de la fusion des groupes terroristes AQIM, Al-Mourabitoun et Ansar Eddine dans Jamaat Nosrat el-Islam wal-Muslimin (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), annoncée par Iyad Ag Ghali le 2 mars 2017,

Rappelant que les personnes, groupes, entreprises et entités associés à l’EIIL ou Al-Qaida sont susceptibles d’être inscrits sur la Liste relative aux sanctions contre l’EIIL (Daech) et Al-Qaida conformément aux critères de désignation énoncés dans la résolution 2253 (2015) et que les moyens de financement ou de soutien peuvent consister, sans s’y limiter, à utiliser le produit de la criminalité, dont la culture, la production et le commerce illicites de stupéfiants et de leurs précurseurs,

Saluant la détermination des gouvernements du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel), créé le 19 décembre 2014 à Nouakchott et composé du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad, et leur souci de prendre les choses en main en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, notamment en menant des opérations militaires conjointes transfrontalières de lutte contre le terrorisme, saluant également les efforts réalisés par les forces françaises pour appuyer ces opérations et se félicitant de la décision des États du Sahel et du Sahara de créer un centre de lutte contre le terrorisme dont le siège serait au Caire,

Prenant note de la résolution du 6 février 2017 du G5 Sahel, qui a décidé de créer une force conjointe (Force conjointe du G5 Sahel – FC-G5S), du communiqué du 13 avril 2017 du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, qui a entériné le concept stratégique des opérations et autorisé le déploiement de la FC‑G5S, et de la lettre du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, en date du 15 mai 2017, qui a transmis ce communiqué à ses membres,

Soulignant qu’il incombe au premier chef aux États du G5 Sahel d’assurer la protection des civils dans leurs territoires respectifs conformément aux obligations qu’ils tiennent du droit international, et soulignant également que les opérations de la FC-G5S doivent être conduites en pleine conformité avec le droit international, notamment le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, selon qu’il convient, et que la FC‑G5S doit prendre activement des mesures pour réduire au minimum les risques encourus par les civils dans toutes les zones d’opérations,

Rappelant la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et saluant l’action menée par le Secrétaire général à cet égard,

Prenant note des conséquences de la situation au Mali sur la paix et la sécurité régionales dans la région du Sahel, de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique du Nord, et soulignant que tout doit être fait pour lutter contre le terrorisme au Mali et dans la région du Sahel afin d’appuyer l’application intégrale et effective de l’Accord sur la paix et la sécurité au Mali (l’« Accord »),

Saluant les progrès enregistrés récemment dans l’application de l’Accord, tout en se déclarant profondément préoccupé par la persistance de retards dans sa mise en œuvre intégrale deux années après sa conclusion, et engageant le Gouvernement malien et les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination à prendre de toute urgence des mesures concrètes pour s’acquitter pleinement et sincèrement des obligations qu’ils tiennent de l’Accord sans plus tarder,

Se déclarant à nouveau profondément préoccupé par le manque persistant de capacités essentielles pour la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), et engageant les États Membres à fournir les capacités nécessaires, notamment des troupes et des éléments habilitants, pour que la MINUSMA s’acquitte de son mandat, conformément à la résolution 2295 (2016),

Soulignant que les efforts déployés par la FC-G5S pour lutter contre les activités des groupes terroristes et d’autres groupes criminels organisés contribueront à créer un environnement plus sûr dans la région du Sahel, et ainsi à faciliter la réalisation du mandat de la MINUSMA visant à stabiliser Mali,

Demandant qu’il soit donné effet rapidement, en consultation avec les États Membres de la région du Sahel, les partenaires bilatéraux et les organisations multilatérales, aux stratégies régionales touchant à la sécurité, à la gouvernance, au développement, aux droits de l’homme et aux questions humanitaires telles que la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel,

Exprimant son soutien au Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Mohammed Ibn Chambas, et au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), dans les efforts qu’ils déploient pour appliquer la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel,

Accueillant avec satisfaction le Processus de Nouakchott de l’Union africaine, relatif au renforcement de la coopération en matière de sécurité et à l’opérationnalisation de l’Architecture africaine de paix et de sécurité dans la région sahélo-saharienne, ainsi que les mesures prises par l’Union africaine pour rendre la Force africaine en attente pleinement opérationnelle,

Saluant le rôle joué par les missions de l’Union européenne (UE) pour former les forces nationales de sécurité dans la région du Sahel et leur dispenser des conseils stratégiques, notamment la Mission de formation de l’UE au Mali (EUTM Mali), la Mission PSDC de l’UE au Mali (EUCAP Sahel Mali) et la Mission PSDC de l’UE au Niger (EUCAP Sahel Niger), et se félicitant de la contribution des partenaires bilatéraux et multilatéraux au renforcement des capacités en matière de sécurité dans la région du Sahel,

Prenant note du rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali daté du 6 juin 2017 (S/2017/478), et notamment de la recommandation qu’il lui a adressée de donner suite à la demande des États du G5 Sahel, que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a faite sienne le 13 avril 2017, concernant l’adoption d’une résolution approuvant le déploiement de la FC-G5S,

Rappelant que la situation au Mali constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales et que les activités des organisations terroristes au Mali et dans la région du Sahel menacent la paix et la sécurité internationales,

1.    Se félicite du déploiement de la FC-G5S sur l’ensemble du territoire des pays qui y participent, avec des effectifs en personnel militaire et personnel de police pouvant aller jusqu’à 5 000 personnes, en vue de rétablir la paix et la sécurité dans la région du Sahel;

2.    Accueille avec satisfaction le concept stratégique des opérations de la FC-G5S, communiqué au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général dans sa lettre datée du 15 mai 2017, y compris ses dispositions ayant trait à la coordination de l’assistance humanitaire, à la protection des civils, à la problématique hommes-femmes et aux questions de conduite et discipline;

3.    Insiste sur le rôle important des femmes en matière de prévention et de règlement des conflits comme de consolidation de la paix, ainsi qu’il l’a reconnu dans sa résolution 1325 (2000), et souligne que la FC-G5S doit tenir compte de la situation des femmes dans tous les aspects de l’exécution de son concept stratégique d’opérations;

4.    Souligne que les États du G5 Sahel doivent tenir compte du fait que des enfants sont associés aux groupes terroristes et groupes criminels transnationaux organisés pour les protéger, en considérant comme des victimes ceux qui ont été relâchés ou séparés de quelque autre manière de ces groupes, et prêter particulièrement attention aux questions ayant trait à la protection, la libération et la réintégration de tous les enfants associés à ces groupes;

5.    Prie instamment la FC-G5S et les forces françaises de veiller, au moyen des dispositifs pertinents, à l’échange d’informations et à la bonne coordination de leurs opérations, dans les limites de leurs mandats respectifs, et prie de nouveau à cet égard le Secrétaire général de renforcer la coopération entre la MINUSMA et les États membres du G5 Sahel, y compris grâce à la fourniture à la MINUSMA de données de renseignement utiles et d’officiers de liaison issus des États membres du G5 Sahel;

6.    Rappelle que c’est aux États du G5 Sahel qu’il incombe de donner à la FC-G5S les ressources dont elle a besoin, exhorte les États du G5 Sahel à poursuivre leurs efforts pour que la FC-G5S devienne opérationnelle dans une perspective durable, viable et efficace, et salue l’engagement pris par l’Union européenne d’apporter un soutien financier de 50 millions d’euros à la FC-G5S, engage les partenaires bilatéraux et multilatéraux à apporter davantage leur appui, notamment par la fourniture d’une assistance suffisante à la FC-G5S sur les plans logistique, opérationnel et financier et les engage également à convoquer rapidement une conférence de planification visant à assurer la coordination des efforts d’assistance des donateurs à la FC-G5S;

7.    Prie le Secrétaire général de lui faire rapport, en étroite coordination avec les États du G5 Sahel et l’Union africaine, sur les activités de la FC-G5S, notamment sur son opérationnalisation, les problèmes rencontrés et d’autres mesures qui pourraient éventuellement être envisagées, ainsi que les moyens d’atténuer les retombées négatives que pourraient avoir ses opérations militaires sur la population civile, notamment les femmes et les enfants, un rapport oral actualisé étant présenté dans les deux mois et un rapport écrit dans les quatre mois suivant l’adoption de la présente résolution, et par la suite d’inclure ces éléments dans les rapports présentés périodiquement par le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel;

8.    Entend réexaminer le déploiement de la FC-G5S quatre mois après l’adoption de la présente résolution;

9.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Burundi: l’ONU s’inquiète d’une situation instable alors que le représentant du pays estime qu’il « n’y a plus de crise politique »

7978e séance – après-midi
CS/12879

Burundi: l’ONU s’inquiète d’une situation instable alors que le représentant du pays estime qu’il « n’y a plus de crise politique »

Le Burundi souhaite un « embellissement » de ses relations avec les Nations Unies et des « relations apaisées » avec ses partenaires au développement

La sécurité au Burundi reste instable, la situation socioéconomique se dégrade, et la récente décision des autorités de mettre en place une commission de révision de la Constitution dans un contexte de fortes restrictions aux libertés civiles risque de provoquer une escalade dans la crise, a averti aujourd’hui le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Tayé-Brook Zerihoun.

Devant le Conseil de sécurité, M. Zerihoun a toutefois estimé que la nomination récente par le Secrétaire général de M. Michel Kafando comme Envoyé spécial au Burundi permettrait d’avoir une meilleure compréhension du processus politique en cours.

En revanche, pour le représentant du Burundi, M. Albert Shingiro, « il n’y a plus de crise politique au vrai sens du terme au Burundi ».  Selon lui, les autorités doivent plutôt gérer aujourd’hui les conséquences politiques et économiques de la crise de 2015, dont il a rendu responsable un « plan de déstabilisation des institutions burundaises minutieusement conçu par des éléments exogènes aisément identifiables ».  Le représentant a toutefois insisté sur la recherche d’un « embellissement » des relations du Burundi avec les Nations Unies et sur la reprise de « relations apaisées » avec ses partenaires au développement dans le respect de sa souveraineté nationale.

Dans son exposé, le Sous-Secrétaire général a dépeint une situation fragile et instable.  Il a fait état d’attaques à la grenade dans la capitale ces dernières semaines, ainsi que de répression et d’intimidation de la part des forces de sécurité et des groupes qui leur sont liés.  Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) continue ainsi de faire état d’arrestations, de détentions arbitraires, de torture et de mauvais traitements à l’égard de membres de l’opposition ou perçus comme tels.

En outre, les cas d’incitation à la violence et à la haine ont augmenté depuis avril, notamment à l’occasion de rassemblement des Imbonerakure, les milices de jeunes du parti CNDD-FDD au pouvoir.  La commission d’enquête mise en place par le Conseil des droits de l’homme a présenté à Genève un rapport oral dans lequel elle dit avoir recueilli plus de 470 témoignages faisant état de violations des droits de l’homme depuis 2015.  Son rapport final est attendu en septembre.

À cet égard, le Président de la formation Burundi de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. Jürg Lauber, de la Suisse, qui s’exprimait depuis Genève par visioconférence, a estimé qu’une plus grande présence d’observateurs internationaux au Burundi pourrait contribuer considérablement à améliorer la situation dans les domaines des droits de l’homme et de la sécurité.  Il a donc souhaité que puissent être enfin déployés 200 observateurs militaires et des droits de l’homme de l’Union africaine (UA), qui viendraient appuyer la trentaine qui s’y trouvent déjà et qui, selon le représentant du Burundi, « travaillent librement sans aucune entrave ».

M. Zerihoun a également rappelé que la Commission nationale de dialogue interburundais (CNDI) avait, le 12 mai, conclu qu’une majorité de Burundais soutient le projet de révision de la Constitution qui permettrait notamment de supprimer les restrictions au nombre de mandats que peut effectuer le chef de l’État.  Ce rapport et la création d’une commission de révision de la Constitution qui a immédiatement suivi ont été dénoncés par l’opposition.

Le Sous-Secrétaire général juge très préoccupant que de tels développements aient lieu dans un contexte de fortes restrictions aux libertés civiles et y voit un risque d’aggravation des tensions.

Autre point noir, la situation économique et humanitaire, qui se dégrade.  Le Sous-Secrétaire général a fait état de 3 millions de personnes qui ont besoin d’aide humanitaire et de 2,6 millions exposées à une insécurité alimentaire aiguë, alors que 700 000 dépendent d’une aide alimentaire d’urgence.  Il a également fait état de plus de 400 000 réfugiés et 209 000 déplacés internes.  Il a toutefois noté que le Gouvernement burundais avait levé certaines restrictions à l’accès humanitaire.

C’est un tout autre tableau qu’a présenté M. Shingiro.  Pour le représentant, « qui dit crise politique dit absence ou paralysie des institutions ou encore une insécurité généralisée dans le pays ».  Or, a-t-il ajouté, « le Burundi n’a rien de tout cela ».  La sécurité a connu une « amélioration remarquable » et quelque 156 000 réfugiés sont rentrés, ainsi que certains dirigeants politiques, ce qui ne peut que contribuer à la stabilité régionale.  Pour M. Shingiro, ce que le Gouvernement doit aujourd’hui gérer, ce sont « les conséquences politiques et économiques de la crise de 2015 ».

Le représentant a ainsi longuement dénoncé la tentative de mise en œuvre depuis 2015 d’un « plan de déstabilisation, sous l’impulsion duquel des résolutions biaisées et politiquement motivées sur la situation des droits de l’homme sont régulièrement adoptées à Genève » à l’initiative de commissions d’enquête qui « produisent des rapports à distance sans jamais mettre les pieds au Burundi ».  

Défendant les efforts de son gouvernement dans le cadre d’un « combat permanent » pour les droits de l’homme, M. Shingiro a appelé à « rompre définitivement avec la sélectivité, la politisation, la partialité et la subjectivité ».  « Il est grand temps que le harcèlement politico-diplomatique dont le pays est victime depuis 2015 cesse et cède la place à la coopération », a-t-il ajouté, insistant sur le respect de la souveraineté nationale, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique du pays.

C’est dans le respect de ces « trois piliers de l’existence de tout État » que le représentant a appelé à une coopération internationale et un partenariat mutuellement bénéfique qui permettront de réellement contribuer à la promotion et à la protection des droits de l’homme.

Les intervenants ont tous insisté sur l’importance de cette coopération au niveau régional.  M. Zerihoun et M. Lauber ont ainsi rappelé la tenue, le 20 mai, à Dar es-Salaam, du Sommet de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), laquelle a porté à sa tête le Président Museweni de l’Ouganda et a approuvé les recommandations présentées par son facilitateur dans la crise burundaise, l’ancien Président Mkapa de Tanzanie.

À cette occasion, ce dernier a présenté neuf points pour « nettoyer l’environnement politique pollué » afin de préparer efficacement les élections de 2020.  Il s’agit notamment de prendre des mesures pour renforcer la confiance, élargir l’espace d’expression politique, faciliter le retour des réfugiés et des dirigeants politiques exilés, ainsi que préserver la Constitution et l’Accord d’Arusha.  M. Mkapa s’est dit préoccupé par la lenteur des progrès dans le dialogue et par la demande du Gouvernement de « rapatrier » au Burundi le dialogue avec la CAE. 

M. Lauber a estimé que le plan du facilitateur de la CEA offrait « une voie sûre vers des progrès ». 

Le représentant du Burundi a pour sa part estimé que les consultations avec la CAE étaient sur la bonne voie « malgré quelques défis qui restent à relever ».  Il a surtout énuméré les éléments de consensus qui se sont dégagés à l’occasion d’une réunion tenue le 31 mai à l’initiative du Président de la formation Burundi de la CCP.  Ces éléments prévoient notamment que le peuple concerné et la région doivent conserver le rôle dirigeant dans la gestion de la situation au Burundi, que le rôle de la communauté internationale se limiterait à l’accompagnement et que le volet social et économique devrait toujours bénéficier de l’attention des partenaires au développement du pays.

M. Shingiro a également rappelé que les pays de la région avaient demandé la levée des sanctions qui frappent actuellement le pays, souhaitant que ces différents appels soient entendus par la communauté internationale.

C’est dans ce cadre que le représentant du Burundi a mis en avant les nouvelles relations que son pays entend nouer avec la nouvelle administration de l’ONU.  Il a notamment fait valoir la rapidité avec laquelle son gouvernement avait accrédité tant le nouveau Coordonnateur résident du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), que le nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général nommé début mai, qui devrait se rendre au Burundi avant la fin du mois.  M. Lauber a d’ailleurs jugé de bon augure cette rapide accréditation.

Pour le représentant du Burundi, le plus grand défi auquel le pays est confronté est d’ordre économique.  C’est pourquoi les discussions politiques « ne devraient pas supplanter le volet économique et social » et tout doit se faire parallèlement, « conformément aux trois piliers de l’ONU qui sont notre repère ».  À cet égard, il a salué la nouvelle approche de la formation Burundi de la CCP depuis novembre 2016.

Le représentant de l’Uruguay, M. Elbio Rosselli, s’est félicité que le Sommet de la CAE du 20 mai dernier ait été l’occasion pour les dirigeants de la région de réitérer leur engagement en faveur de la paix au Burundi et il a invité les parties à mettre en œuvre la feuille de route du facilitateur, M. Mkapa.  Il a aussi souhaité le rétablissement de la confiance mutuelle entre le Gouvernement du Burundi et les Nations Unies, notamment par la conclusion de l’accord pour la reprise des activités du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme dans le pays.

La coopération entre le Burundi et ce dernier est suspendue depuis octobre 2016 mais M. Shingiro a affirmé devant le Conseil que le maintien du Bureau du HCDH « était acquis ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: un demi-siècle après l’occupation des territoires palestiniens et syrien, la solution des deux États reste privilégiée

7977e séance – matin
CS/12878

Conseil de sécurité: un demi-siècle après l’occupation des territoires palestiniens et syrien, la solution des deux États reste privilégiée

La solution des deux États vivant côte-à-côte en paix et en sécurité est le seul moyen de mettre fin au conflit israélo-palestinien et de parvenir à une paix durable, ont rappelé ce matin plusieurs membres du Conseil de sécurité, à la suite du Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Nickolay Mladenov.

Si le Coordonnateur spécial était là, par visioconférence depuis Jérusalem, pour faire le point sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) adoptée le 23 décembre dernier par le Conseil de sécurité, qui exige, entre autres, « qu’Israël arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est », cette réunion a tourné autour des obstacles et des possibilités de règlement d’un conflit qui marque une étape ce mois-ci avec le cinquantième anniversaire de la « guerre des Six jours ».

Cette guerre avait conduit à l’occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est, de Gaza et du Golan syrien.  Or, aujourd’hui, les activités de peuplement et les annonces en ce sens ne font qu’augmenter, comme l’a indiqué M. Mladenov en comparant les chiffres des trois derniers mois avec ceux de la période précédente.  Ainsi, 4 000 maisons sont en cours de construction et 2 000 propositions du genre ont été répertoriées pour les colonies d’Israël.

Pour le Secrétaire général de la Ligue des États arabe, M. Ahmed Aboul-Gheit, la stratégie actuelle du Gouvernement israélien, qui crée de nouvelles colonies de peuplement, rend la solution des deux États tout simplement impossible.  Face à l’Initiative de paix arabe de 2002, que beaucoup d’intervenants ont appuyée, Israël « ne propose qu’une solution: la poursuite de l’occupation », a-t-il argué.

Le délégué de la Bolivie y a vu la conséquence de « 50 ans de résolutions non respectées, y compris la dernière, la 2334, qui « n’intéresse personne » à son avis.  En face, son collègue de l’Italie a recommandé de « ne pas laisser place au fatalisme et au renoncement ».

Mais la durée de l’occupation des territoires palestiniens par Israël fait douter nombre de gens sur la capacité de l’ONU à œuvrer à l’épanouissement des peuples du monde, a fait observer le délégué de l’Égypte, tandis que M. Lakhdar Brahimi, membre du groupe des Sages, a dénoncé « la paralysie du Conseil de sécurité ».

L’ancien diplomate et haut fonctionnaire de l’ONU a ainsi souligné la nécessité urgente pour cet organe de jouer un rôle actif, lui conseillant par exemple d’organiser une visite sur le terrain.  Cela permettrait aux membres du Conseil de rencontrer des représentants de la société civile d’Israël et de Palestine, « afin de constater de leurs propres yeux les dégâts psychologiques des deux côtés », a-t-il fait valoir.

La déléguée des États-Unis a également interpelé le Conseil de sécurité en lui demandant de condamner les actes du Hamas.  « Le Conseil est prompt à passer à la loupe les actes d’Israël tout en négligeant ceux du Hamas », a-t-elle affirmé, plaidant pour une résolution spécifique qui indiquerait clairement la nature terroriste du Hamas et qui condamnerait ses actes.

M. Michael Doran, chercheur principal au Hudson Institute invité à faire un exposé, n’a pas dit le contraire en dénonçant une importance disproportionnée qui serait accordée aux actions israéliennes et une mauvaise interprétation du comportement des acteurs arabes ou musulmans.  Il a estimé que le Conseil de sécurité, « inconsciemment peut-être », récompensait les efforts de l’Autorité palestinienne d’internationaliser le conflit.

Parmi les mesures proposées pour faciliter le règlement du conflit, le représentant de la Fédération de Russie a rappelé que l’initiative d’une réunion directe, à Moscou, entre les dirigeants des deux parties en conflit, restait d’actualité. 

Dans son exposé, le Coordonnateur spécial avait aussi salué le calme relatif au cours de ces trois derniers mois, même si l’ONU a répertorié 17 Palestiniens tués par les forces de sécurité israéliennes et la mort de deux membres des forces de l’ordre d’Israël du fait de Palestiniens.  Dénonçant les actes de provocation de part et d’autre, il a souligné la responsabilité des dirigeants des deux bords de prendre des mesures qui démontrent leur engagement à combattre la violence, la provocation et la rhétorique incendiaire.

En outre, comme l’a expliqué le représentant de la France, « les 50 années qui viennent de s’écouler nous enseignent que les destins des Israéliens et des Palestiniens sont liés et qu’aucune des parties ne peut durablement satisfaire ses aspirations nationales en niant celle de l’autre ».

Face à l’impatience exprimée par les délégations en considérant les 50 années d’occupation israélienne et de prolongation du conflit, le Coordonnateur spécial a détaillé les mesures positives prises par Israël récemment pour améliorer l’économie palestinienne, même si le conflit d’autorité entre le Hamas et le Fatah a conduit à la fermeture de la seule centrale électrique de Gaza, réduisant ainsi la disponibilité de l’énergie électrique à quatre heures par jour.

M. Mladenov a craint que cette « poudrière », lorsque qu’elle explosera, entraîne des conséquences dévastatrices sur la population et sape tous les efforts de paix.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. NICKOLAY MLADENOV, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, intervenant par visioconférence depuis Jérusalem, a fait le point sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité au cours de la période allant du 25 mars au 19 juin de cette année.  Ce compte rendu intervient en même temps que le cinquantième anniversaire de la guerre israélo-arabe qui a conduit à l’occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est, de Gaza et du Golan syrien.  « La solution des deux États négociée est la seule garantie pour établir les fondations d’une paix durable qui tienne compte des besoins sécuritaires d’Israël et du droit des Palestiniens à un État souverain », a déclaré le Coordonnateur spécial.

Ce n’est pas le moment de renoncer à cet objectif, a-t-il plaidé en expliquant qu’il était temps de créer les conditions favorables à un retour aux négociations pour résoudre toutes questions relatives au statut final, en tenant compte des résolutions pertinentes des Nations Unies, des accords mutuels et du droit international. 

M. Mladenov a rappelé que la résolution 2334 (2016) invitait Israël à cesser toutes les activités dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est.  Malheureusement, aucune action en ce sens n’a été prise au cours de la période couverte par le rapport.  Au contraire, depuis le 24 mars, on a noté une augmentation des activités de peuplement et des annonces en ce sens, en comparaison à la période prise en compte par le précédent rapport.  Il a souligné qu’il y a 4 000 maisons dont la construction est en cours et 2 000 propositions du genre répertoriées pour les colonies israéliennes.

Il a rappelé que la communauté internationale n’allait reconnaître aucun changement au statu quo du 4 juin 1967, y compris en ce qui concerne Jérusalem.  Les changements qui seront acceptés concerneront exclusivement ceux agréés par les deux parties par la voie des négociations, a-t-il précisé. 

En plus, il a fait part des plans visant à construire 3 200 habitations dans 22 colonies de peuplement de la zone C de la Cisjordanie occupée.  La construction de 100 maisons a commencé dans le cadre de la nouvelle colonie de peuplement d’Amihai qui a été établie dans l’est de la vallée de Shiloh.  Ces habitations seront dédiées aux anciens habitants de l’avant-poste de la colonie d’Amona où les autorités israéliennes ont octroyé le statut de terres domaniales à une zone de 241 hectares.  Ces actes, a-t-il expliqué, vont saper davantage la continuité territoriale d’un futur État palestinien, tout en solidifiant une ligne de colonies qui divise le nord et la partie centrale de la Cisjordanie.

En plus du démarrage de ces nouvelles constructions de colonies, le Premier Ministre d’Israël a déclaré qu’« il n’y aura jamais un gouvernement aussi engagé en faveur des colonies que le sien ».  M. Mladenov a ajouté que, dans Jérusalem-Est occupé, 770 habitations devant se situer sur les pentes du sud de Gilo ont reçu l’autorisation finale, tandis que des permis de bâtir pour plus de 200 unités d’habitation ont été accordés à Ramat Shlomo, Pisgat Ze’ev et Ramot.

Dans la période considérée par le rapport, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a signalé une forte baisse du nombre d’habitations palestiniennes détruites dans la zone C, faisant passer le nombre de maisons détruites ou saisies de 149 dans le précédent rapport à 29 pour le présent rapport.  Même si cette tendance à la baisse a été également relevée à Jérusalem-Est, la moyenne mensuelle de démolition de maisons dans la localité de Jérusalem-Est est restée la même depuis le début de l’année 2017, en comparaison à la moyenne sur la même période de l’année précédente qui avait été considérée comme un record pour les 15 dernières années. 

Le Coordonnateur spécial a affirmé que la violence est demeurée la marque de fabrique de ce conflit, même si les trois derniers mois ont été marqués par un calme relatif sur le terrain: pas de tirs de roquette depuis Gaza vers Israël, et pas de frappes aériennes israéliennes, a—t-il noté.  Selon l’OCHA, 17 Palestiniens ont été tués par les forces de sécurité israéliennes et un soldat israélien a perdu la vie au cours d’une attaque à la voiture-bélier le 6 avril dernier à l’extérieur de la colonie de peuplement d’Ofra.  Et le 16 juin, une policière israélienne a été tuée au cours d’une attaque avec des armes à feu et des armes blanches par des assaillants palestiniens aux alentours de la vieille ville de Jérusalem.

Le 14 avril, un étudiant britannique en programme d’échange a été tué par un assaillant palestinien dans une attaque au couteau à Jérusalem.  Par ailleurs, le 24 mars, un commandant militaire du Hamas a été assassiné par des inconnus à Gaza.  En avril, le Hamas a exécuté six Palestiniens soupçonnés de collaborer avec Israël.  Au cours de la période couverte par ce rapport, l’OCHA a documenté 31 incidents liés aux colonies de peuplement, dont l’un a conduit à la mort d’un Palestinien, à 10 blessés et à la destruction de biens palestiniens.  La plupart de ces incidents ont eu lieu autour de la colonie de peuplement de Yitzhar en Cisjordanie.

Au cours de la même période, on a également noté des actes de provocation de part et d’autre, a poursuivi M. Mladenov.  Des officiels palestiniens et des médias affiliés au Fatah ont continué de commémorer la mémoire des auteurs d’attaques contre des civils israéliens.  Les dirigeants du Hamas ont également continué de célébrer les attaques contre les civils israéliens, les qualifiant d’actes « héroïques ».  De l’autre côté, les officiels israéliens ont utilisé un langage de provocation, certains politiciens n’ayant cessé de répéter qu’il n’y aura jamais d’État palestinien.  Il a cité le cas d’un ministre israélien qui a salué un livre faisant l’apologie du meurtre d’Arabes israéliens. 

M. Mladenov a tout de même salué les mesures positives prises par Israël pour améliorer l’économie palestinienne.  Il a ainsi cité l’ouverture temporaire du pont d’Allenby pour une période de trois mois.  Les Ministres palestinien et israélien des finances ont également tenu un certain nombre de réunions pour discuter des liens fiscaux, une question cruciale pour les Palestiniens au vu de leur déficit budgétaire de 800 millions de dollars.

Par ailleurs, en établissant un comité administratif pour gérer les affaires civiles, le Hamas a renforcé son contrôle de Gaza et a ainsi rejeté les autorités légitimes palestiniennes, réduisant les espoirs de réconciliation.  Un conflit entre le Hamas et le Fatah a aussi conduit à la fermeture de la seule centrale électrique de Gaza, réduisant ainsi la disponibilité de l’énergie électrique à quatre heures par jour.  Pour le Coordonnateur spécial, Gaza est « une poudrière »: quand l’explosion aura lieu, cela aura des conséquences dévastatrices sur la population et cela sapera tous les efforts de paix. 

Les deux millions de Palestiniens de Gaza ne peuvent plus être otages des divisions, a—t-il souligné en rappelant qu’ils vivent sous le contrôle du Hamas depuis 10 ans, expérimentant à la fois le blocus israélien, les divisions internes palestiniennes et trois conflits.  Il a affirmé que la communauté internationale avait le devoir d’éviter une catastrophe humanitaire à Gaza.

M. Mladenov a rappelé que le 29 mars dernier, en Jordanie, le Sommet de la Ligue des États arabes s’était engagé à rétablir des négociations de paix sérieuses sur la base de la solution des deux États.  Dans la même lancée, au cours d’une visite le mois dernier, le Président des États-Unis a rencontré les dirigeants palestiniens et israéliens et a été clair sur le fait que la résolution du conflit est cruciale pour lutter contre la menace de l’extrémisme violent et le terrorisme.

Le Coordonnateur spécial a par ailleurs souligné l’importance de trouver une issue aux contraintes budgétaires qui pèsent sur l’Autorité palestinienne.  Il a invité les parties palestiniennes à faire les compromis nécessaires pour permettre à Gaza de revenir sous le contrôle des autorités légitimes.  Les dirigeants des deux bords ont également la responsabilité de mettre en œuvre des mesures qui démontrent leur engagement pour combattre la violence, les actes de provocation et toute rhétorique incendiaire.

M. AHMED ABOUL-GHEIT, Secrétaire général de la Ligue des États arabes, a dit éprouver une « grande tristesse » face au cinquantième anniversaire de l’occupation des territoires palestiniens, qui se poursuit sans que la Puissance occupante montre la volonté de faire quelque-chose de concret pour y mettre fin.  Comment ce conflit nous a-t-il privés de notre énergie et a-t-il exacerbé tous nos problèmes, nous empêchant d’aller de l’avant et suscitant la haine de la jeunesse? s’est interrogé M. Aboul-Gheit.

Israël souhaite maintenir son contrôle sur les territoires palestiniens et c’est là le nœud du conflit, a insisté M. Aboul-Gheit.  Il a rappelé l’adoption de la résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité, ajoutant qu’elle avait « jeté la base de toute solution acceptable au conflit ».  L’Initiative de paix arabe de 2002, marquée par l’échange de la paix contre la terre, est fondée sur cette résolution et a été appuyée par l’ensemble de la communauté internationale, à l’exception d’Israël qui « ne propose qu’une solution: la poursuite de l’occupation ».  En vertu de cette vision israélienne, le gouvernement palestinien n’est qu’une forme de gouvernement municipal soumis à l’autorité du Gouvernement israélien, a analysé M. Aboul-Gheit, pour qui l’affirmation de l’autorité israélienne sur Gaza et la Cisjordanie est « une réalité douloureuse ».

M. Aboul-Gheit a invité à constater l’échec de la position du système international, mais vu dans les traités de paix signés par l’Égypte et la Jordanie des « lueurs d’espoir » qui ont « passé l’épreuve du temps ».  Il a aussi remarqué qu’on ne s’attaque pas, en fait, au nœud de la question: l’occupation des territoires arabes en 1967.  Toute négociation qui ne reposerait pas sur le principe de « la terre contre la paix » est vouée à l’échec, a insisté M. Aboul-Gheit.  « Israël ne peut récolter les fruits de la paix avant d’être parvenue à la paix », a-t-il affirmé.

Pour le Secrétaire général de la Ligue des États arabes, les deux parties ne pourront pas parvenir à un règlement sans le soutien de la communauté internationale, du fait du déséquilibre de puissance entre les deux parties.  M. Aboul-Gheit a donc rendu hommage aux pays qui se sont engagés en faveur d’un tel règlement, y compris les États-Unis, dont il a souhaité qu’ils poursuivent leur engagement.  Il a en revanche estimé que la stratégie actuelle du Gouvernement israélien, avec ses plans systématiques de création de nouvelles colonies de peuplement, rendait cette solution impossible.  C’est une stratégie de colonisation et non de paix, a affirmé M. Aboul-Gheit, qui a estimé que la résolution 2334 (2016) du Conseil avait constitué un pas dans la bonne direction.

M. Aboul-Gheit a encore constaté qu’Israël s’efforce de normaliser sa position au sein des Nations Unies, y compris en essayant de devenir membre du Conseil de sécurité en 2019-2020, alors que ce pays ne se conforme pas aux résolutions du Conseil de sécurité.  L’accepter au sein du Conseil de sécurité porterait un coup à la crédibilité du Conseil, a affirmé M. Aboul-Gheit, qui s’est dit « perplexe » face à « l’audace » d’Israël, pays qui s’est par ailleurs prononcé récemment pour le démantèlement de l’UNRWA.  Affirmant que le terrorisme était né de la persistance de l’occupation israélienne, il a appelé le Conseil à montrer aux Palestiniens qu’ils ne seront pas oubliés.

M. MICHAEL DORAN, chercheur principal au Hudson Institute, s’est attaché à démontrer que le Conseil de sécurité devrait travailler à faire progresser les relations israélo-palestiniennes tout en évitant de favoriser l’Iran et ses alliés et en évitant également toute mesure qui permette aux Palestiniens d’éluder des négociations directes.  Il a estimé que des « politiques erronées dominantes » avaient ces dernières années empêché les Nations Unies d’adopter des politiques en ce sens.

Parmi ces erreurs figurent, selon le chercheur, l’idée que le conflit israélo-palestinien est au cœur du conflit israélo-arabe.  Si les relations entre Israël et les Palestiniens étaient réellement le centre de gravité des questions politiques régionales, on pourrait s’attendre à ce que les relations entre Israël et les États arabes fluctuent en fonction de ces dernières, ce qui n’a jamais été le cas.  Alors que l’Égypte et la Jordanie ont signé la paix avec Israël, la Syrie a toujours refusé de le faire, et ce n’est pas à cause de la question palestinienne, a poursuivi le chercheur, pour qui, même si le Président Mahmoud Abbas signait la paix avec Israël, ni la Syrie ni l’Iran ne l’accepteraient.

Or, malgré cette évidence, les Nations Unies accordent systématiquement une importance particulière au conflit israélo-palestinien.  Selon M. Doran, le régime d’Assad et le Hezbollah ne font qu’exploiter « l’obsession de la communauté internationale » pour Israël, afin de détourner l’attention de leurs ambitions régionales.  Il a affirmé que si les Nations Unies avaient fait davantage pour dissuader l’Iran et ses alliés ces cinq dernières années, de nombreuses familles syriennes seraient restées en sécurité chez elles.

M. Doran a ensuite cité, comme deuxième erreur, l’idée que la colonisation israélienne en Cisjordanie est le principal obstacle à la paix entre Israël et les Palestiniens.  Pour lui, la politique suivie par le Gouvernement du Président George W. Bush, à laquelle il a participé, montre au contraire qu’un président américain qui voit avec sympathie les préoccupations de sécurité d’Israël peut convaincre ce pays de limiter son expansion territoriale.

Selon le chercheur, il semble que l’administration du Président Trump suive ou s’apprête à suivre la même voie.  Mais, a-t-il ajouté, il est historiquement démontré qu’il est beaucoup plus difficile de convaincre l’Autorité palestinienne de cesser d’inciter sa propre population à la violence.  Selon lui, les ressources que les Nations Unies et leurs États Membres apportent à l’Autorité ne font qu’aider celle-ci à insister sur son droit à une solution des deux États vivant côte à côte.

Troisième erreur, selon M. Doran: croire que l’intransigeance israélienne serait la cause principale du blocage des relations israélo-arabes, alors que les retraits israéliens du Liban en 2000 et de Gaza en 2005 auraient dû tordre le cou pour toujours à cette idée.  Or, ces retraits n’ont fait que renforcer la soif de sang du Hamas et du Hezbollah, a affirmé M. Doran.  Il a expliqué que les Israéliens en avaient déduit que tout retrait ne pourrait se faire qu’avec des garanties de sécurité drastiques, surtout au regard de la situation régionale générale.

Le chercheur a encore dénoncé une importance disproportionnée qui serait accordée aux actions israéliennes et une mauvaise interprétation du comportement des acteurs arabes ou musulmans, pris comme une réaction à Israël alors qu’il est le fruit de leurs propres perceptions et stratégies.  Il a estimé que le Conseil de sécurité, « inconsciemment peut-être », récompensait les efforts de l’Autorité palestinienne d’internationaliser le conflit.

Au contraire, pour M. Doran, cette internationalisation par le biais du recours à l’intercession des Nations Unies est porteuse de dangers.  Pour lui, quand les Nations Unies remplacent l’Autorité palestinienne comme l’interlocuteur d’Israël sur la Cisjordanie, elles réduisent les chances d’une solution car elles ne font rien pour apaiser les préoccupations de sécurité d’Israël.  En revanche, il s’est félicité de la volonté nouvelle affichée lors du Sommet des États arabes sunnites de soutenir les solutions constructives.  En conclusion, M. Doran a estimé que la leçon essentielle à retirer de la guerre de 1967 est que « la paix a plus de chance d’être obtenue, non par l’intercession des Nations Unies, mais par les négociations directes entre les parties ».

M. LAKHDAR BRAHIMI, membre du groupe des Sages, a précisé que, même si son intervention reflète au mieux le consensus de ce groupe sur la question de la Palestine, il était seul responsable de ce qu’il déclarait aujourd’hui devant le Conseil de sécurité.  Il a rappelé que le fondateur de ce groupe, Nelson Mandela, était passionné par cette question et que les Sages s’étaient rendus quatre fois en Palestine et en Israël au cours des huit dernières années.  Ni le Premier Ministre Netanyahu, ni aucun membre du Gouvernement israélien n’a accepté de les rencontrer, a-t-il cependant regretté. 

Après avoir rappelé la vision de Nelson Mandela pour les Palestiniens, qui voyait un État vivant côte-à-côte avec Israël en paix et en sécurité, il a cité un article du New York Times, daté du 2 juin, dont Nathan Thrall est l’auteur.  Les trois piliers de l’occupation israélienne, selon cet auteur, sont le soutien des Américains, la faiblesse des Palestiniens et l’indifférence des Israéliens.  M. Brahimi y a lu aussi, entre les lignes, un quatrième pilier: la paralysie du Conseil de sécurité.

L’ancien diplomate onusien a donné des chiffres qui illustrent la situation: depuis 1967, Israël a construit environ 125 colonies et plus de 100 « avant-postes » sur les terres palestiniennes occupées, placé illégalement 650 000 colons en Palestine (350 000 en Cisjordanie et 300 000 à Jérusalem-Est), emprisonné 800 000 Palestiniens, détruit 48 000 maisons et structures, ayant aussi révoqué les permis de résidence de 250 000 Palestiniens vivant en Cisjordanie et à Gaza et de plus de 14 000 à Jérusalem-Est. 

M. Brahimi a souligné l’extrême vulnérabilité de la population palestinienne qui a hautement besoin de la protection de la communauté internationale, sachant que la Quatrième Convention de Genève est plutôt violée que respectée en ce qui concerne les territoires palestiniens occupés.

Il a aussi attiré l’attention sur la situation désastreuse dans la bande de Gaza, qui en est à sa dixième année de blocus.  « La misère dans cette malheureuse bande de terre surpeuplée est difficile à décrire », a dit M. Brahimi en relatant la dernière visite des Sages à Gaza en 2010.  Il a cité le commentaire d’une habitante qui considère qu’« Israël nous a mis dans un camp de concentration ».  À cela s’ajoute « l’échec irresponsable des dirigeants palestiniens », a poursuivi le diplomate en citant en particulier le Fatah et le Hamas.

M. Brahimi a estimé par ailleurs que le Quatuor, malgré les efforts de M. Jim Wolfensohn, était arrivé à très peu de résultats.  « Beaucoup pensent aujourd’hui que le Quatuor a pleinement démontré son inutilité », a-t-il ajouté.

Venant à ce que peut faire le Conseil de sécurité sur ce dossier, M. Brahimi a souligné la nécessité urgente pour cet organe de jouer un rôle actif, lui conseillant par exemple d’organiser une visite sur le terrain.  Il a mis en parallèle l’ancienneté du dossier et la fréquence des visites des membres du Conseil dans d’autres régions en conflit pour justifier amplement cette visite, qui leur permettrait de rencontrer des représentants de la société civile d’Israël et de Palestine, afin de constater de leurs propres yeux les dégâts psychologiques des deux côtés.

Il a également voulu, de manière officielle, exprimer l’appréciation et l’admiration des Sages pour le travail des mouvements en faveur de la paix en Israël et des « braves défenseurs des droits de l’homme », citant B’Tselem et Breaking the Silence, ainsi que des « auteurs remarquables comme Gideon Levy et Uri Avnery ».  En faisant ce voyage, les membres du Conseil se rendraient compte de l’urgence à faire appliquer les résolutions juridiquement contraignantes adoptées par le Conseil depuis 1967, et notamment la plus récente, à savoir la résolution 2334 (2016) axée sur les colonies illégales.  Ce texte a déjà été bafoué, a-t-il constaté en regrettant la récente décision du Gouvernement israélien de légaliser des « avant-postes » en Cisjordanie.

M. Brahimi a ensuite évoqué les contacts « si peu discrets » entre ledit gouvernement et certains pays arabes, estimant que cela ne pouvait constituer un substitut à la paix avec les Palestiniens.  Il a au contraire jugé l’Initiative de paix arabe, lancée en 2002, comme une bonne base pour cela, mais regretté qu’elle soit ignorée par le Gouvernement d’Israël depuis 15 ans.  Il a rappelé que les pays arabes avaient unanimement appelé Israël et les Israéliens à accepter cette initiative pour préserver des perspectives de paix et éviter que plus de sang ne soit versé.

Enfin, M. Brahimi a averti du risque d’apartheid comme le craignent aussi certains politiciens, les médias et la société civile d’Israël.  Les Palestiniens ont des droits comme tous les êtres humains et des droits collectifs comme tout autre peuple de la planète, a-t-il rappelé en soulignant leur droit à lutter pour le respect de ces droits.  « La Charte des Nations Unies, le droit international et le droit international humanitaire, ainsi que les normes de solidarité internationale, obligent à soutenir les Palestiniens face à l’occupation et l’oppression », a-t-il dit en concluant, soulignant que ce soutien libérerait à la fois la Palestine et Israël.

Pour Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis), le Hamas est « une force de la terreur ».  La représentante a indiqué que cette organisation utilisait des tunnels situés sous des écoles pour déplacer des charges explosives sous les pieds d’enfants qui jouent.  Parlant de la crise humanitaire qui frappe Gaza, elle a estimé que ce qui se déroule dans cette région pourrait être évité.  « Israël n’est pas la cause des problèmes de Gaza », a-t-elle ajouté avant de rappeler que le Hamas, qui dirige Gaza depuis 2007, fait le choix de la provocation et de la guerre.  Mme Haley a indiqué s’être rendue elle-même dans les tunnels placés sous Gaza et soutenu que le ciment destiné à la construction à Gaza était utilisé par le Hamas pour solidifier ces tunnels.

Mme Haley a invité le Conseil de sécurité à condamner les actes du Hamas, reprochant à cet organe de l’ONU d’être prompt à passer à la loupe les actes d’Israël tout en négligeant les activités du Hamas.  Elle a invité le Conseil à adopter une résolution spécifique qui indiquerait clairement la nature terroriste du Hamas et qui condamnerait ses actes.

En ce qui concerne la communauté internationale dans son ensemble, elle l’a invitée à mettre un terme à l’appui politique, militaire et financier dont bénéficie le Hamas.  Elle a souligné que les discours devant le Conseil de sécurité qui mettent en opposition les deux parties ne faisaient pas avancer la situation sur le terrain, invitant plutôt ses collègues à se pencher sur les réelles menaces à la paix et à l’épanouissement des populations en s’intéressant aux activités du Hamas.

M. PETER WILSON (Royaume-Uni) a déclaré que la guerre de 1967 avait été une tragédie tant pour les Palestiniens qui aspirent à l’indépendance que pour les Israéliens qui aspirent à la paix et la sécurité.  Tant de décennies de violences et de haine montrent que le conflit ne pourra se poursuivre de manière indéfinie, a estimé le représentant.  Pour le Royaume-Uni, un appui à une solution à deux États est le seul moyen de parvenir à une paix durable.  À cet égard, le Royaume-Uni appelle les deux parties à ne prendre aucune mesure qui nuise à la perspective de cette solution, ce qui suppose l’arrêt des attaques contre les Israéliens et l’arrêt des constructions de nouvelles implantations en Cisjordanie.

Le Royaume-Uni a toujours eu une position claire: il appuie une solution durable des deux États sur la base des frontières de 1967 avec un État palestinien ayant Jérusalem-Est pour capitale, a poursuivi M. Wilson.  Le Royaume-Uni constate que cette solution est impossible à atteindre depuis plusieurs années mais souhaite voir le processus relancé.  Le Royaume-Uni appelle donc Israéliens et Palestiniens à agir en ce sens.  M. Mladenov a été clair en appelant à traiter d’urgence la situation humanitaire dans la bande de Gaza, a poursuivi le représentant, ajoutant que le Royaume-Uni est particulièrement préoccupé par la crise de l’énergie dans ce territoire.

Par ailleurs, le représentant s’est félicité de la nouvelle loi électorale adoptée le 16 juin par le Gouvernement du Liban, estimant qu’elle allait permettre de jeter de nouvelles bases pour les élections.  Il s’est en revanche inquiété des activités du Hezbollah dans le sud du pays. 

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay), rappelant les 50 années de conflit et de souffrance pour des millions de personnes, a estimé que les espoirs de paix ont été ensevelis par des accusations mutuelles.  « Peut-être qu’un jour, las de faire couler le sang en vain, ils auront le courage de s’asseoir à la table des négociations et feront la paix », a-t-il espéré.  Cette tirade, a-t-il expliqué, concerne la Colombie, où le récent accord de paix a envoyé un message d’espoir au monde entier, y compris au conflit israélo-palestinien. 

M. Rosselli a dénoncé les politiques israéliennes qui sapent les perspectives de paix, rappelant que son pays appuie la solution des deux États, et invitant les parties à créer les conditions propices à une issue négociée.  Enfin, il a réitéré le droit indéfectible des deux peuples à vivre dans la paix, sans qu’il y ait de menace à leur sécurité, les exhortant notamment à reprendre les négociations directes sans préalable afin de donner une chance à la paix.

M. LIU JIEYI (Chine) a rappelé la « communauté de destins communs » qui lie Israéliens et Palestiniens, ce qui fait que la question palestinienne ne pourra être réglée que par la négociation.  Pour la Chine, la communauté internationale doit intervenir d’urgence et assurer la défense des droits et intérêts légitimes du peuple palestinien, notamment la création d’un État pleinement indépendant de Palestine dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale.  Le représentant a encouragé les parties à faire preuve de bonne volonté, reprendre dans les plus brefs délais les négociations directes et mettre en œuvre la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité.  Israël, a-t-il ajouté, doit cesser sa politique de colonisation et mettre fin au blocage de Gaza.

Quant à la communauté internationale, il a souhaité qu’elle parvienne à un consensus et crée des synergies.  À cet égard, la Chine salue le rôle de la Ligue des États arabes et de l’Organisation de la coopération islamique.  Il a aussi souligné le rôle de médiateur actif que joue son pays, la Chine, en rappelant les initiatives prises en ce sens, en particulier depuis 2014.

En ce 20 juin, Journée internationale des réfugiés, la communauté internationale ne doit pas oublier le sort des réfugiés palestiniens et doit continuer de leur apporter un soutien humanitaire, a ajouté M. Liu.  Pour sa part, la Chine soutient le travail de l’UNRWA et continuera de favoriser le développement du peuple palestinien.

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a déploré le fait que le conflit israélo-palestinien soit relégué au second plan à cause de la montée du terrorisme international.  Pour la Fédération de Russie, une solution juste de ce conflit permettrait d’assainir toute la région.  Il a, de ce fait, prôné des négociations directes entre les parties, sans condition préalable.  « La solution des deux États est la seule possible et nous appelons les deux parties à faire montre de retenue afin de ne pas faire dérailler le processus de paix », a-t-il plaidé.  Il a aussi appelé à l’adoption de mesures pratiques pour rétablir le dialogue politique direct.  L’initiative d’une réunion directe, à Moscou, entre les dirigeants des deux parties en conflit, reste selon lui d’actualité.  En outre, a-t-il ajouté, la fin des divisions entre les Palestiniens permettrait d’améliorer la situation à Gaza et de créer les conditions propices au processus de paix.

Le représentant a aussi attiré l’attention du Conseil sur le fait que la déstabilisation de l’Afrique du Nord avait un impact sur les chrétiens et les minorités au Moyen-Orient.  Il a souhaité des efforts collectifs pour arriver à des solutions, prônant le choix du dialogue et de l’inclusion et non celui de l’isolement et de la confrontation.  Il a appelé à unir les efforts du Conseil de sécurité et de la Ligue des États arabes pour aller vers la paix, rappelant que l’amélioration de la situation au Moyen-Orient dépend de la lutte contre le terrorisme qui prospère dans la région.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a déclaré que son pays avait une position limpide sur la situation au Moyen-Orient: il souhaite la reprise des négociations directes et une solution durable fondée sur la solution des deux États.  Le Kazakhstan insiste donc sur la nécessité de l’unité interpalestiniennne et sur la fin de la colonisation israélienne.  Le Kazakhstan est particulièrement préoccupé par la situation humanitaire à Gaza et dans l’ensemble des territoires palestiniens occupés.  Il salue l’annonce par Israël de mesures de compromis pour faciliter la vie économique des Palestiniens.

M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) s’est inquiété de l’annonce, au cours des trois derniers mois, de la construction de nouvelles colonies de peuplement et a appelé Israël à geler ce type d’activités.  Il a également dénoncé les irruptions de violence et les attaques à l’arme blanche qui se sont déroulées, la semaine dernière, à proximité de la vielle ville de Jérusalem, soulignant que de telles attaques ne font que renforcer le cycle de la violence.  Il a rejeté toute incitation à la violence ainsi que sa glorification.

Le représentant japonais s’est aussi soucié de la détérioration de la situation à Gaza, les « pénuries extrêmes de courant » se ressentant sur tous les aspects de la vie, à commencer par la santé, l’eau, l’assainissement et les services municipaux.  Il a averti que le désespoir et la frustration ressentis sur le terrain risquent de provoquer une situation sécuritaire encore plus instable.  Pour le délégué, la crise actuelle démontre la nécessité de promouvoir la réconciliation parmi les Palestiniens et d’œuvrer en faveur d’un assouplissement, et éventuellement, d’une levée du blocus de Gaza, tout en tenant compte des préoccupations sécuritaires.

Poursuivant, M. Kawamura s’est dit particulièrement encouragé par la tenue d’un dialogue entre les États-Unis et les parties prenantes, le jugeant essentiel à la promotion du processus de paix.  Il a indiqué que le Japon participe aux efforts de rétablissement de la confiance entre Israël et la Palestine, évoquant notamment le dixième anniversaire du parc agro-industriel de Jéricho.  Grâce à la coopération, a-t-il fait observer, la confiance mutuelle est renforcée et un savoir-faire en matière de développement économique peut être obtenu.

Pour le délégué japonais, 50 ans d’occupation et 70 ans d’un conflit irrésolu doivent être l’occasion pour chacun de prendre la mesure du lourd tribut payé par la région et de souligner toutes les occasions perdues.  La paix, a-t-il souligné, permettrait de débloquer de nouvelles perspectives politiques, économiques, sécuritaires et culturelles.

M. CARL SKAU (Suède) a affirmé que la communauté internationale doit maintenir sa position vis-à-vis de l’occupation et de la nécessité de parvenir à la solution des deux États.  Il l’a appelée à agir « avant qu’il ne soit trop tard ».  Le représentant suédois a jugé essentiel le leadership des États-Unis pour relancer le processus de paix, saluant les efforts déployés par l’Administration américaine à cette fin.  Il a également estimé que tout effort régional doit se fonder sur l’Initiative de paix arabe.

En outre, un engagement actif avec les personnes directement affectées, notamment les jeunes, est particulièrement pressant.  Constatant notamment que les contacts « de personne à personne » ont atteint un niveau historiquement bas, le délégué a appelé à un nouvel engagement auprès des jeunes et au renouvellement d’un débat sur les perspectives de paix et la solution des deux États.  « Nous devons démontrer à la génération post-Oslo, qu’il existe une alternative à la violence et à l’occupation », a-t-il souligné.

Abordant ensuite la détérioration de la situation humanitaire à Gaza, le représentant a averti que la décision prise par le Gouvernement israélien de réduire encore davantage l’approvisionnement en électricité risquait de provoquer une « escalade dangereuse ».  Il a appelé à prévenir l’émergence d’un nouveau conflit à Gaza, engageant notamment les factions palestiniennes à participer de bonne foi à un processus de réconciliation.

Le représentant de la Suède a, par ailleurs, jugé essentiel de répondre à la question des colonies de peuplement sans plus tarder, soulignant qu’elles représentent le principal obstacle à la solution des deux États.  Il a qualifié de profondément préoccupante l’annonce, par Israël, de la construction de 3 000 nouvelles unités de peuplement, certaines étant prévues à l’intérieur de la Cisjordanie.  Dans le respect de la résolution 2334 (2016), a-t-il indiqué, nous appelons les États à distinguer le territoire de l’État d’Israël des territoires occupés depuis 1967.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a indiqué que la durée de l’occupation des territoires palestiniens par Israël avait fait douter nombre de gens sur la capacité de l’ONU à œuvrer à l’épanouissement des peuples du monde.  Il a insisté sur l’importance des négociations visant une paix durable, soulignant qu’en attendant une telle issue, les Nations Unies se devaient de rester le garant du respect des droits des Palestiniens.  Il a salué les humanitaires qui apportent un soutien crucial aux populations palestiniennes, notamment l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). 

Selon le délégué, le Moyen-Orient ne peut connaître la paix si la souffrance du peuple palestinien continue.  Il a fait valoir l’Initiative de paix arabe comme une proposition qui cherche à conduire à la paix, rappelant que le dernier Sommet de la Ligue des États arabes, tenu en Jordanie, avait souligné l’importance de cette initiative.  « Il est grand temps que ceux concernés par ce conflit comprennent que ces deux peuples ont un avenir commun, puisque vivant côte-à-côte. »  D’où l’importance d’aboutir à la solution des deux États qui verra un État palestinien établi aux côtés de l’État israélien, avec les frontières qui étaient déjà en vigueur avant la guerre de Six jours et avec Jérusalem-Est comme capitale.

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a estimé qu’il ne fallait pas laisser place au fatalisme et au renoncement.  Peu importe la durée de la controverse ou la complexité de la situation géopolitique: quand la volonté existe, on parvient à une solution, a affirmé le représentant.  Il a dit appuyer les nouveaux efforts des États-Unis dans la région, tant que seront respectés le cadre d’Oslo et le principe d’une solution des deux États, la seule qui soit porteuse d’un espoir de paix durable.  Si elle est convaincue que la paix ne pourra être obtenue que par un accord entre les deux parties, l’Italie estime toutefois que des acteurs autres peuvent jouer un rôle en vue d’un tel accord, notamment le Quatuor ou encore les principaux pays arabes.

L’intensification des efforts diplomatiques fait partie intégrante de la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, a poursuivi le représentant, qui a rappelé que cette résolution rejetait aussi toute forme de violence.  L’Italie condamne toute forme d’attaque de part et d’autre et dénonce les discours haineux.  Elle appuie le Président Mahmoud Abbas, représentant légitime de la cause palestinienne.  L’heure est venue pour l’Autorité palestinienne de reprendre le contrôle de la bande de Gaza, où il est indispensable de prendre en compte le contexte humanitaire, a ajouté M. Cardi avant de saluer à cet égard le rôle joué par l’UNRWA ainsi que toutes les autres agences des Nations Unies présentes dans la région.

M. FODÉ SECK (Sénégal) a jugé fort édifiantes les informations présentées par les différents intervenants extérieurs de ce jour, avant de constater la situation des deux entités qui existent aujourd’hui au Moyen-Orient: « un État israélien démocratique et prospère tel qu’envisagé par la résolution 181, et le peuple palestinien, qui poursuit encore ses aspirations légitimes à un État indépendant et viable ».  Pour le représentant, malgré les frustrations, la communauté internationale « n’a d’autre alternative que de redoubler de persévérance et d’efforts » pour parvenir à une solution des deux États.  Il a donc appelé le Conseil de sécurité, le Quatuor et les pays de la région à en revenir à « l’esprit du plan de partage » de 1948.

Outre la recherche de la paix et la sécurité internationales, le but de ces efforts doit être de « faire triompher les forces de la modération » dans un contexte de montée du terrorisme et des extrémismes.  Le Sénégal appelle donc les parties à œuvrer sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et du rapport du Quatuor et à inverser les tendances négatives qui menacent la solution des deux États.  Il appelle notamment à mettre fin à la colonisation et à l’incitation à la haine et à la violence.

Le représentant a en outre rendu hommage aux activités des sociétés civiles palestinienne et israélienne qui tendent à forger à la base davantage de compréhension mutuelle en vue de contribuer à des idées novatrices pouvant contribuer à la « seule solution qui vaille », celle des deux États.  Il a appelé les acteurs politiques palestiniens à trouver, avec le soutien des parties impliquées, une solution définitive à la situation désastreuse qui prévaut à Gaza.  Il a renouvelé le soutien du Sénégal à l’UNRWA, dont il a jugé l’action « vitale » pour cinq millions de réfugiés palestiniens, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation. 

Le Sénégal appuie les initiatives diplomatiques de la France, de la Fédération de Russie, de l’Égypte et de la Jordanie, et souhaite le succès des efforts menés par les États-Unis pour relancer le processus de paix bloqué depuis mars 2014.  Il appuie également la récente réaffirmation de l’Initiative de paix arabe, qui préconise une paix globale entre Israël et les pays arabes du Moyen-Orient.

Enfin, M. Seck a annoncé que le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestiniens, que préside le Sénégal, envisage d’organiser les 29 et 30 juin prochains un forum pour marquer les 50 ans d’occupation.  Ce forum entre dans le cadre des efforts en faveur d’une solution politique négociée, donc pacifique, a-t-il affirmé.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a dit que les 50 années qui se sont écoulées depuis la guerre de juin 1967 nous enseignent que les destins des Israéliens et des Palestiniens sont liés et qu’aucune des parties ne peut durablement satisfaire ses aspirations nationales en niant celles de l’autre.  Il a exprimé les préoccupations de la France à l’égard de la situation qui prévaut dans la bande de Gaza.  La crise humanitaire permanente dans laquelle est installé ce territoire s’est aggravée avec le blocage, depuis deux mois, de la fourniture en électricité.  Il a noté que les habitants de Gaza vivent aujourd’hui avec deux à quatre heures d’électricité par jour, ce qui a des conséquences graves pour les infrastructures médicales et sanitaires, dont le traitement de l’eau.  Il a jugé urgent d’agir afin d’éviter des tensions qui pourraient aboutir à un nouveau conflit meurtrier, comme la bande de Gaza a connu, à trois reprises, au cours des neuf dernières années. 

M. Delattre a aussi jugé fondamental que les Palestiniens parviennent à un accord de réconciliation, avant de rappeler qu’il n’y aura pas d’État palestinien viable sans une unité palestinienne sur les éléments fondamentaux de la solution des deux États.  Le représentant a déclaré que la France était l’amie des Palestiniens comme des Israéliens et qu’elle souhaitait que les deux parties reviennent à la table des négociations.  « Nous souhaitons continuer à agir dans ce sens avec nos principaux partenaires », a-t-il dit en précisant que l’Initiative de paix arabe reste un cadre incontournable pour faire de la paix avec les Palestiniens le premier pas vers une intégration régionale d’Israël.  Le représentant de la France a aussi espéré que l’engagement de l’Administration américaine dans un nouvel effort diplomatique aiderait à relancer une dynamique de négociation entre Israéliens et Palestiniens.  Il a expliqué que la France, et les partenaires européens restaient à la pleine disposition des parties pour aider à la reprise des négociations. 

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a constaté que si la composition du Conseil de sécurité changeait au fil des ans, ses membres entendaient toujours parler du blocage apparemment éternel du processus de paix au Moyen-Orient.  Les causes de ce blocage sont parfaitement connues et il est donc inutile de dénoncer et blâmer une nouvelle fois, a-t-il estimé.  Chacune des parties sait parfaitement ce qui est attendu d’elle.  La communauté internationale entend régulièrement des déclarations de bonnes intentions et de bonne volonté, mais ce qui manque, c’est un suivi de ces déclarations sous la forme d’actions concrètes.

L’Ukraine continue de penser que le processus de paix au Moyen-Orient peut être couronné de succès.  Le principe de la solution des deux États conserve sa validité malgré les difficultés bien connues à sortir de l’impasse actuelle.  Pour le représentant, nous en sommes certes encore très loin, mais les visites de haut niveau qui se sont succédé dans la région durant les deux derniers mois peuvent fournir le terrain nécessaire à un nouvel élan.  L’essentiel est que les parties interprètent correctement cet élan et saisissent les opportunités.  Mais les mouvements de relance du processus politique doivent être réciproques, a précisé M. Yelchenko.

L’Ukraine se félicite dans ce contexte de la récente rencontre entre responsables palestiniens et israéliens, qui a permis de trouver un accord sur des mesures à prendre pour améliorer la situation économique dans les territoires palestiniens.  Le représentant a toutefois rappelé qu’il ne fallait pas oublier de se concentrer sur les mesures politiques.  À cet égard, il a noté que chaque partie campe sur ses positions.  « Si cela continue, nous pourrons assister à la même réunion dans 50 ans », a-t-il averti.  Pour l’éviter, il a préconisé de travailler à un accord de paix israélo-palestinien reposant sur les résolutions du Conseil de sécurité, les Principes de Madrid, y compris l’échange de la paix contre la terre, la Feuille de route, les accords antérieurs et l’Initiative de paix arabe de 2002.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a estimé qu’après 50 ans, l’occupation israélienne avait influé sur la situation au Moyen-Orient et que la communauté internationale avait échoué à y établir une paix durable.  Ce sont les deux parties qui peuvent faire bouger les choses et aboutir à la reprise des négociations qui conduiraient à une paix durable, a-t-il souligné en notant que le Conseil de sécurité avait le devoir de travailler à l’aboutissement de la solution des deux États.    

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a réaffirmé l’appui de son pays au droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à disposer d’un État indépendant sur la base de la solution des deux États.  La seule possibilité pour une paix juste et durable tient à des négociations directes dans le cadre fourni par les Nations Unies et ses résolutions, y compris les résolutions 242 et 337.  Le représentant a rappelé les multiples tentatives de paix, des Accords de Camp David à la Feuille de route élaborée par le Quatuor.

La question israélo-palestinienne n’est pas purement bilatérale, elle concerne toute la communauté internationale, a poursuivi le représentant, qui a longuement cité à cet égard les positions prises par le Mouvement des pays non alignés.  Il a notamment dénoncé le recours à la force disproportionnée par Israël et sa politique de colonisation, la construction du mur de séparation, ainsi que les provocations et incitations à la haine de colons extrémistes.

Le représentant a constaté qu’il existe depuis un demi-siècle une occupation illégale au regard du droit international.  Pour le représentant, cette réunion du Conseil doit être considérée comme un effort en faveur de la paix.  Mais elle doit aussi rappeler « 50 ans d’échecs et d’incapacité de la communauté internationale », notamment à résoudre le problème des réfugiés palestiniens, qui ont vu naître leurs enfants et désormais leurs petits-enfants dans des camps de réfugiés.  Le représentant a longuement dénoncé ces 50 années d’un échec collectif, illustré par le silence face à la catastrophe humanitaire qui menace à Gaza, et 50 ans de résolutions non respectées, y compris la dernière –la 2334– qui « n’intéresse personne », a-t-il conclu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur l’interdiction des armes nucléaires: l’assistance aux victimes comme moyen de compenser les effets du « racisme nucléaire »

Conférence sur les armes nucléaires,
17e et 18e séances, Matin et après-midi
CD/3713

Conférence sur l’interdiction des armes nucléaires: l’assistance aux victimes comme moyen de compenser les effets du « racisme nucléaire »

Les participants à la Conférence pour la négociation d’une convention sur l’interdiction des armes nucléaires ont abordé, aujourd’hui, la question épineuse de l’assistance aux victimes des armes et essais nucléaires, y compris dans la région du Pacifique qui a souffert d’un « racisme nucléaire » dénoncé par un représentant de la Polynésie française.  Qui va payer? Les États qui ont causé les dégâts ou ceux dont sont issues les victimes?  L’assistance sera-t-elle volontaire ou obligatoire?

De nombreuses délégations ont en effet salué les dispositions du projet de convention relatives à l’assistance aux victimes et à la restauration des territoires endommagés.  Mais les représentants du Saint-Siège, du Mozambique et du Ghana ont dénoncé l’absence d’un caractère « obligatoire »: le projet de convention se contente d’inviter les États « en mesure de le faire » à fournir une assistance et à restaurer les territoires. 

Non seulement cette assistance n’est pas obligatoire mais on semble diluer les responsabilités entre les États, a estimé le délégué de l’Égypte.  Le libellé de la convention ne mentionne que l’assistance des États à leur propre population alors que bien souvent ils ne sont ni ceux qui utilisent l’arme nucléaire ni ceux qui procèdent aux essais, a souligné la représentante de la Nouvelle-Zélande. « Les États ne sauraient payer pour ce qu’ils n’ont pas fait », a tranché le représentant du Nigéria. 

Les délégations de Cuba, de l’Iran et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ont donc proposé que la responsabilité première de fournir une assistance aux victimes repose sur les épaules des auteurs des dégâts, sans  exclure les autres.  L’obligation de fournir une assistance doit non seulement reposer sur l’État dont les victimes sont ressortissantes mais aussi sur l’auteur des dégâts, a résumé le représentant de l’Équateur invoquant le principe de responsabilité internationale.  « Ce ne sont pas les nations du Pacifique, ni l’Algérie qui ont procédé aux essais nucléaires », a-t-il taclé. 

À ce propos, un représentant de la Polynésie française a comptabilisé le nombre et les effets des essais nucléaires menés sur son territoire par la France qu’il a accusée, avec les États-Unis et le Royaume-Uni, de « racisme nucléaire ».  Ces puissances ont utilisé le Pacifique comme un terrain d’expérimentation, tout en cachant les conséquences aux populations locales.  Pourquoi, s’est-il indigné, le projet de convention évite-t-il la « notion de crime » alors que les États nucléaires ont transformé le Pacifique « en poubelle » et en zone exposée à des catastrophes naturelles induites par la radioactivité. 

Le représentant polynésien a exigé indemnisations et réparations, un appel relayé par la délégation des Fidji qui a également rappelé les effets néfastes des essais nucléaires américains sur ses atolls.  Le projet de convention, a dit la délégation, doit prévoir une assistance adéquate à toutes les victimes indépendamment de leur juridiction.  Quiconque a la capacité d’aider doit le faire, a dit la délégation, car il ne s’agit pas de pointer du doigt les responsables mais de venir en aide aux victimes. 

La déléguée fidjienne a aussi proposé que les réunions des États parties à la convention prévoient systématiquement la participation des victimes des armes nucléaires, ainsi que la création d’un point focal pour l’assistance aux victimes.  Dans cette perspective, l’Observateur du Saint-Siège a défendu l’idée de créer un fonds de contributions volontaires pour soutenir les victimes et l’assainissement de l’environnement, lequel serait alimenté par les États responsables des conséquences nucléaires.

Attention, a averti le représentant du Chili.  Il ne faut pas décourager les États à adhérer à la future convention.  Il faut un juste équilibre mais un équilibre conforme aux principes humanitaires, a tranché le représentant de l’Équateur.  « La convention ne saurait être moins progressive que les autres instruments existants. » 

La Conférence, qui a terminé la première lecture des 14 alinéas du préambule et des 21 articles du projet de convention, reprendra ses travaux demain, mardi 21 juin, à partir de 10 heures. 

* A/CONF.229/2017/CRP.1

NÉGOCIATIONS, CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 8 DE LA RÉSOLUTION 71/258 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EN DATE DU 23 DÉCEMBRE 2016, EN VUE DE L’ADOPTION D’UN INSTRUMENT JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT VISANT À INTERDIRE LES ARMES NUCLÉAIRES EN VUE DE LEUR ÉLIMINATION COMPLÈTE

Les délégations ont entamé leurs travaux par l’examen de l’article 6 portant sur les obligations positives des États parties relatives à l’assistance qui se lit: « 1. Chaque État partie en mesure de le faire fournira aux personnes affectées par l’utilisation d’armes nucléaires ou des essais nucléaires dans des zones relevant de sa juridiction ou sous son contrôle, conformément au droit international humanitaire et aux droits de l’homme applicables, une assistance adaptée à leur âge et à leur genre, y compris des soins médicaux, un soutien de réhabilitation et psychologique, et contribuera à leur inclusion sociale et économique. 

2. Chaque État partie, s’agissant des zones relevant de sa juridiction ou sous son contrôle contaminées à la suite d’activités liées à des essais nucléaires ou à l’utilisation d’armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires, aura le droit de demander et de recevoir une assistance pour l’assainissement environnemental des zones contaminées. 

3. Cette assistance peut être fournie, entre autres, par l’intermédiaire du système des Nations Unies, d’organisations ou d’institutions internationales, régionales ou nationales, d’organisations ou d’institutions non gouvernementales ou sur une base bilatérale ».

L’inclusion dans la convention de dispositions relatives à l’assistance aux victimes et à la restauration environnementale est très importante car elle consacre le rôle des victimes dans le désarmement nucléaire, a estimé le représentant du Saint-Siège.  Il a ainsi proposé de modifier le titre actuel de l’article 6, en remplaçant « Assistance » par « Assistance aux victimes et restauration de l’environnement ».  Cela permettrait, a-t-il dit, de mettre l’accent sur la personne humaine et l’environnement plutôt que sur les États parties, une proposition soutenue par les représentants de l’Autriche et du Mozambique.

Il faut aussi mettre davantage l’accent sur les États parties victimes des essais nucléaires et de l’utilisation d’armes nucléaires, a déclaré le représentant du Viet Nam.  Il a pour cela appelé à rajouter un paragraphe, avant l’alinéa 1, établissant l’obligation des États parties qui ont réalisé des essais nucléaires ou utilisé l’arme nucléaire de porter assistance.  Il ne faut cependant pas décourager les futurs États parties à se joindre à la convention, a nuancé le délégué du Chili, plaidant pour un juste équilibre pour ne pas créer d’obstacles majeurs à l’adhésion.

L’équilibre à trouver doit toutefois être favorable aux principes humanitaires, a estimé le représentant de l’Équateur.  La convention ne peut se permettre d’être moins progressive en la matière que d’autres instruments existants, y compris la Convention sur les armes à sous-munitions.  C’est pour cela que la responsabilité humanitaire première doit reposer sur les États auteurs des dégâts, a estimé la représentante du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), et non sur les États qui sont victimes de ces dégâts.

C’est d’autant plus important que les États dont sont ressortissantes les victimes ne sont le plus souvent pas responsables de l’utilisation de l’arme nucléaire ou des essais nucléaires, a précisé la représentante de la Nouvelle-Zélande.  Il faut que les obligations positives des États victimes de dégâts ne soient pas trop lourdes, car alors elles ne seront pas appliquées, a-t-elle ajouté, estimant que la version actuelle du texte était de ce point de vue équilibrée.

S’agissant spécifiquement de l’alinéa 1, le représentant du Saint-Siège a appelé à remplacer l’expression « Chaque État partie en mesure de le faire fournira », par « Chaque État partie fera tous les efforts possibles pour fournir » une assistance.  Cette proposition a été soutenue par les représentants de l’Irlande et des Philippines.  Il faut en effet une expression « plus ferme » afin que l’obligation de fournir une assistance soit clairement établie pour les États parties, a ajouté le représentant du Mozambique.

Or, dans sa forme actuelle, l’alinéa 1 n’établit pas l’obligation de fournir assistance a regretté le représentant du Ghana, proposant le libellé suivant: « Chaque État partie doit, conformément au droit humanitaire applicable, fournir une assistance suffisante ».  Afin de couvrir tous les cas dans lesquels cette obligation doit s’exercer, le représentant du Mozambique a appelé à rajouter, en plus des essais nucléaires et de l’utilisation d’armes nucléaires, l’utilisation « d’autres dispositifs explosifs nucléaires ».  Son homologue du Viet Nam a également proposé d’ajouter, en plus de l’obligation de fournir une assistance aux victimes, la nécessité de « protéger contre la menace nucléaire ».

Il faudrait également, dans l’alinéa 1, faire endosser davantage de responsabilité aux États qui ont réalisé des essais nucléaires, a estimé le délégué de l’Égypte.  Il a donc proposé d’amender le texte afin d’exprimer l’idée que, si chaque États doit fournir une assistance, les États parties ayant déjà procédé par le passé à des essais nucléaires ont une responsabilité supplémentaire de venir en aide aux victimes. 

« Les États parties ne doivent pas payer pour ce qu’ils n’ont jamais demandé », a tranché le représentant du Nigéria, soutenant la proposition de l’Égypte.  Les délégations de Cuba et de l’Iran ont également proposé que la responsabilité première de fournir une assistance repose sur les auteurs des dégâts, tout en précisant que cela n’exclue pas les responsabilités d’autres États.  La responsabilité de fournir une assistance doit donc non seulement reposer sur l’État dont les victimes sont ressortissantes, mais aussi sur les auteurs des dommages, a résumé le représentant de l’Équateur invoquant le principe de responsabilité internationale.  « Ce ne sont pas les nations du Pacifique, ni l’Algérie qui ont procédé aux essais nucléaires », a-t-il. 

Or, la formulation de l’alinéa 1 limite la responsabilité des États parties, qui ne semblent actuellement responsables que pour leurs ressortissants, alors que l’alinéa 3 prévoit de demander une assistance à des pays tiers, a noté le délégué du Brésil.  Plutôt que de parler d’obligation de fournir une assistance, le représentant a proposé de se référer au « droit de demander une assistance », et pas seulement aux États parties « en mesure de le faire », mais aussi aux « États parties ayant réalisé des essais nucléaires ».  Ces derniers doivent fournir une assistance sur demande, a insisté le représentant de la Malaisie

Au contraire, la représentante de la Suisse a estimé  que l’article 6 devrait se centrer sur l’obligation nationale qu’a chaque État partie de fournir une assistance à toutes les victimes sur son territoire, une proposition soutenue par la représentante de la Suède.

Il faut faire référence de manière plus spécifique aux droits des victimes, a par ailleurs estimé le représentant du Liechtenstein, proposant de commencer l’alinéa 1 comme suit: « Chaque État partie respectera le droit des victimes ».  Il a aussi appelé à fusionner les alinéas 1 et 2 de l’article 6, soutenu en cela par la représentante de la Nouvelle-Zélande.

Les victimes doivent toutes être traitées de la même façon, quel que soit leur sexe ou leur âge, a en outre estimé la représentante de l’Ouganda, qui a proposé de supprimer la mention à l’âge et au genre des victimes pour simplement dire « une assistance adaptée à toutes les victimes ».  Il est même inapproprié de parler d’une « assistance adaptée », a ajouté le représentant du Brésil, car, selon lui, aucune assistance ne pourra jamais suffire en matière de dégâts nucléaires.  Effectivement, le fait qu’un État partie soit en mesure de fournir une assistance ne signifie pas forcément que cette assistance est adaptée, a souligné la représentante du Mexique, proposant de supprimer le terme « adaptée ».

S’agissant de l’alinéa 2, le représentant du Saint-Siège a demandé de remplacer l’expression, « aura le droit de demander et de recevoir une assistance », par « fera tous les efforts pour recevoir une assistance ».  Cet alinéa semble donner des droits aux États qui se livrent à des essais nucléaires en les autorisant à demander une assistance alors même que cette convention vise à supprimer ces activités nucléaires, a par ailleurs noté la représentante de l’Ouganda.  Le représentant de l’Iran a également estimé qu’il convenait de lever cette ambiguïté.

Il faut aussi rajouter des dispositions plus détaillées et plus robustes dans cet alinéa 2, a estimé la représentante de l’Irlande, appelant à mentionner dans le texte les effets sur l’environnement devant donner lieu à une restauration, y compris la pollution.   Pour renforcer le texte et le rendre moins ambiguë, le représentant du Ghana a proposé le libellé suivant: « Chaque États partie doit prendre les mesures nécessaires afin de restaurer l’environnement dans les zones sous sa juridiction ou son contrôle ».  Il a également proposé l’ajout d’un alinéa 2 bis: « Chaque État partie dont les actions en matière nucléaire ont affecté d’autres États doit prendre les mesures nécessaires pour fournir une assistance ».

La responsabilité principale de restaurer l’environnement incombe en effet à l’État qui a provoqué les dommages, a déclaré le représentant de Cuba, ajoutant que l’alinéa 2 ne mentionne pas le cas où un État partie aurait causé des dommages sur son propre territoire.  Il a appelé à modifier le texte pour spécifier que cet État aura la responsabilité principale de réparer les dommages environnementaux causés par lui.

S’agissant de l’alinéa 3, le représentant du Saint-Siège a appelé à l’intégrer dans l’article 8, afin de mettre uniquement l’accent dans l’article 6 sur l’assistance aux victimes et la restauration environnementale.  Les représentants de la Suisse, de la Suède et du CICR ont soutenu cette proposition.  Cela permettrait aussi de renforcer l’article 8, a ajouté le délégué des Philippines

Pour clarifier l’alinéa 3 sans avoir à l’intégrer au sein de l’article 8, un changement de titre comme celui proposé par le Saint-Siège serait suffisant, a quant à lui estimé le représentant de la Malaisie.  Le nouveau titre permettrait selon lui de faire la distinction entre le type d’assistance mentionné dans l’article 2 et celui ciblé dans l’article 8.

Il faudrait en outre inclure dans l’alinéa 3 une mention au « Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge », a déclaré le représentant de l’Autriche.  Pour préciser encore davantage l’alinéa 3, le représentant du Nigéria a également demandé d’y ajouter, après la mention aux organisations ou institutions internationales, régionales ou nationales: « y compris les zones exemptes d’armes nucléaires et les bureaux qui administrent ces zones ».  Le représentant de la Malaisie a toutefois jugé que cet ajout n’était pas nécessaire.

Interventions de représentants de la société civile

La représentante de ICAN a demandé que cette convention réponde véritablement aux droits des victimes, en commençant par stipuler clairement la responsabilité des États qui ont eu recours aux armes nucléaires.  Le principe de non-discrimination doit être consacré ainsi que les mesures pour la protection de l’environnement.  La coopération internationale dans l’assistance sera cruciale dans la mesure où les États frappés par ce type d’armes ne pourront pas agir seuls, a-t-elle précisé.  La représentante de Mines Action Canada-Positive Obligations, a abondé dans ce sens.  L’aide aux victimes doit devenir une responsabilité de tous les États ainsi que les mesures nécessaires pour remédier aux dommages environnementaux.  Cet article devrait également exiger des États qui ont eu recours aux armes ou aux essais nucléaires d’apporter leur assistance aux pays victimes de contamination

Comptabilisant le nombre et les effets des essais nucléaires menés sur son territoire par l’État français, un représentant de la Polynésie française a accusé la France, les États-Unis et le Royaume–Uni de « racisme nucléaire » parce qu’ils ont utilisé le Pacifique pour terrain d’expérimentation tout en cachant les conséquences aux populations locales.  Pourquoi, s’est-il indigné, la convention évite la « notion de crime » alors que les États nucléaires ont transformé le Pacifique « en poubelle » et en zone exposée à des catastrophes naturelles induites par la radioactivité.  Il a exigé une indemnisation pour les peuples de la région et des réparations pour les dommages causés à l’environnement.  À cet égard, l’article 6 doit être « beaucoup plus précis » en matière d’assistance aux victimes et parler clairement d’indemnisation, a insisté le représentant.

Celle de « Amplify, generation for Change », un réseau de jeunes leaders du monde entier pour l’interdiction du nucléaire, représentant 13 pays, a mis l’accent sur l’importance de la jeunesse dans la dénucléarisation et sa participation aux futures discussions dans la mesure où « nous sommes ceux qui construiront le monde de demain ».  Elle a souligné l’importance de l’éducation sur le désarmement et le besoin de l’inclure, tel que proposé par la délégation de l’Irlande, dans la convention.  « L’éducation engendre l’action pour parvenir au désarmement total, mais il faut aussi éduquer les gens sur les risques liés au nucléaire et les moyens de se protéger en cas d’utilisation d’armes nucléaires », a affirmé cette jeune représentante. Son organisation souhaiterait que les termes de la Convention soient plus fermes pour ce qui est de l’assistance et de l’accès à l’assistance des victimes.

La représentante de l’Organisation « Soka Gakkai International (SGI) » a également plaidé en faveur de l’inclusion de l’éducation sur le désarmement dans la Convention, si possible dans le préambule et dans son dispositif, dans la mesure où cela contribuerait directement à la réalisation des objectifs de ce texte.  L’éducation sur le désarmement peut élargir la portée des messages.  À ce titre, la représentante a soumis une proposition sur une clause additionnelle à la Convention.

Venant aux articles 7, 8, 9 et 10 relatifs à la mise en œuvre nationale, à la coopération internationale, aux réunions des États parties et aux coûts de ces réunions, le représentant du Viet Nam, qui s’exprimait au nom de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN) a insisté sur la responsabilité des États parties dans la mise en œuvre de la Convention et sur le rôle « crucial » de la coopération régionale et internationale, s’agissant en particulier des solutions aux effets environnementaux des armes nucléaires et de l’assistance aux victimes.

Le représentant de l’Égypte a questionné l’« obligation » faite aux États de présenter un rapport de mise en œuvre, contrairement à ses homologues du Guatemala et de l’Autriche.  L’article 9 parlant de ces rapports et le 7, de la mise en œuvre nationale, la représentante de la Nouvelle-Zélande a proposé de les fusionner, une idée que son homologue brésilien n’a pas soutenue parce que ces articles abordent deux aspects « bien distincts » de la mise en œuvre.  Quelles seraient les fonctions exactes du secrétariat de la Convention? s’est demandée la représentante néo-zélandaise.  On pourrait, a répondu la délégation du Guatemala, scinder l’article 9 en 2 articles distincts pour définir les fonctions du Secrétariat et son mode opératoire et ceux des États parties.

Revenant à l’article 7, la représentante de l’Irlande a insisté sur un libellé « extrêmement clair » qui ne permette pas d’échappatoire aux obligations.  Son homologue de Cuba a proposé un amendement qui insisterait sur la nécessité pour les États parties d’assurer la sécurité tant des personnes que de l’environnement.  Le représentant des Pays-Bas a anticipé des complications dans la mise en œuvre du paragraphe 2 de l’article 7 qui prévoit des sanctions pénales contre ceux qui ne respectent leurs obligations.  C’est peut-être la raison pour laquelle le représentant de l’Iran a demandé que l’on remplace « chaque État partie prendra les mesures nécessaires pour honorer ses obligations » par « toute mesure appropriée », ce qui resterait à la discrétion de chaque État partie.  Le « traité » n’est pas un instrument de désarment et doit, par conséquent, être souple et permettre l’adhésion du plus grand nombre.  

S’agissant de l’article 10 sur le coût des réunions des États parties, la représentante de la Suède a insisté sur l’obligation qui sera faite aux parties de s’acquitter de leurs quotes-parts.  Elle a proposé de définir clairement les conséquences des non-paiements. Son homologue du Brésil s’est opposé à des clauses aussi « draconiennes ». 

Il faut aussi prévoir dans le texte la provenance des ressources nécessaires pour s’assurer de la mise en œuvre universelle de la Convention, a suggéré la représentante de l’Irlande, estimant que ces ressources devraient émaner des Nations Unies.  Elle a aussi prôné l’obligation des États parties à inviter les ONG aux réunions en tant qu’observateurs.  « Société civile » et « ONG », a précisé son homologue de la Thaïlande.

L’Observateur du Saint-Siège est revenu sur l’article 8 qui se lit : « chaque État partie coopère avec les autres pour faciliter la mise en œuvre des obligations de la Convention.  En honorant ses obligations, chaque État partie a le droit de chercher et de recevoir assistance ».  Pour l’Observateur, cet article nécessite une attention particulière en raison de sa connexion directe avec l’assistance aux victimes.  L’Observateur a proposé la création d’un fonds de contributions volontaires pour soutenir l’assistance aux victimes et l’assainissement de l’environnement, lequel serait alimenté par les États responsables des effets nucléaires sur la santé et l’environnement; les principaux bénéficiaires étant les citoyens des pays affectés.  L’Observateur a aussi proposé que le titre de l’article soit « coopération internationale et assistance », une position partagée par la délégation nigériane par souci de cohérence, a voulu que l’on intègre à cet article le paragraphe 3 de l’article 6 qui se lit « une telle assistance doit être offerte par le système des Nations Unies, les institutions ou organisations internationales, régionales ou nationales, les ONG ou sur une base bilatérale ». 

Le représentant algérien a dit tenir à « des termes forts » pour ce qui est de la responsabilité des États nucléaires et des indemnisations à fournir aux pays touchés par les essais.  La Convention doit prévoir une assistance adéquate à toutes les victimes indépendamment de leur juridiction, a insisté la délégation des Fidji, après avoir rappelé les effets néfastes des essais nucléaires américains.  Quiconque a la capacité d’assister devrait le faire, soulignant qu’il ne s’agit pas de pointer du doigt les responsables mais de venir en aide aux victimes.  Il a d’ailleurs mentionné l’inclusion d’une disposition sur la création d’un « point focal pour l’assistance aux victimes. ».

 « Un bon mécanisme d’examen et de suivi est le seul moyen d’optimiser la mise en œuvre de la Convention », a insisté la délégation chilienne, en parlant de l’article 9 sur les réunions des États parties.  Les réunions seront la seule occasion de défendre les principes du « traité », a renchéri le représentant du Liechtenstein, proposant des dispositions sur le non-respect de la Convention par les États parties. 

Interventions des représentants de la société civile

Plusieurs représentants de la société civile ont jugé essentielles les propositions des délégations appelant à ce qu’ils soient systématiquement invités en tant qu’observateurs aux réunions des États parties à la convention.

Rappelant l’importance des obligations positives mentionnées dans le projet de convention pour répondre aux souffrances des victimes des armes et essais nucléaires, la représentante de la Faculté de droit de Harvard a insisté pour que la convention mette davantage en avant la notion de « coopération et d’assistance internationale ».  Selon elle, cela inciterait les États à adhérer à la convention, car ces derniers pourraient ainsi tous bénéficier d’une assistance internationale.

« C’est une erreur courante de penser que seules les puissances nucléaires disposent de la technologie nécessaire pour vérifier la dénucléarisation », a par ailleurs estimé le représentant de l’Université de Princeton, ajoutant que l’article 8 du projet de convention devrait être plus explicite et encourager les États à mettre en commun leurs ressources pour vérifier les avancées vers un monde dénucléarisé.  Il a également appelé à ajouter un paragraphe à l’article 7, incitant les États parties à adopter des lois encourageant leurs citoyens à signaler des activités nucléaires interdites.

Au nom des Parlementaires pour la non-prolifération nucléaire et le désarmement (PNND), une parlementaire des Pays-Bas s’est dite préoccupée par la menace nucléaire croissante.  Elle a soutenu l’article 7 du projet de convention sur la mise en œuvre nationale des obligations tant négatives que positives et a appelé les participants à coopérer avec les parlementaires et la société civile pour adopter ces mesures. 

Le représentant de l’Université autonome de Basse-Californie a, quant à lui, appelé à mettre en place des mécanismes protégeant les régions ayant des frontières communes avec les neuf pays dotés de l’arme nucléaire.  Les États parties, a-t-il insisté, devraient pouvoir accélérer le processus et aller plus loin que ce qui est écrit dans la convention. 

Les délégations ont ensuite ouvert les articles 11 à 21 relatifs aux questions suivantes: amendements, règlement des différends, universalité, signature, ratification, entrée en vigueur, réserves, durée, relations avec d’autres accords, dépôt et textes authentiques.  Le représentant de Cuba a proposé de modifier l’entame de l’article 11 comme suit: « Tout État partie peut proposer des amendements à cette convention.  Le texte de tout amendement proposé doit être soumis au dépositaire en vue de sa notification à tous les Etats parties ».  Le délégué cubain a, par ailleurs, déclaré ne pas comprendre l’utilisation du terme « peut » dans le premier paragraphe de cet article, qu’il a proposé de remplacer par le terme « devra »: « Lors des réunions des États parties ou des conférences d’examen, toute proposition d’amendement à cette convention devra être envisagée ».

La représentante de la Malaisie a, quant à elle, appelé à modifier la formulation de l’article 11, car les conditions d’adoption d’un amendement pourraient selon elle nuire aux objectifs mêmes de la convention.  Elle a ainsi appelé à ce que la procédure d’amendement de la convention reprenne la formulation de la procédure d’amendement du Traité sur le commerce des armes.  Son homologue de Cuba a ensuite proposé d’entamer l’article 12 comme suit: « Les différends qui peuvent se présenter concernant l’application des dispositions de la présente convention seront réglés conformément aux dispositions pertinentes de la présente convention et aux dispositions de la Charte des Nations Unies. »  Au premier paragraphe de ce même article 12, le représentant cubain a proposé de supprimer l’expression « par tous les moyens jugés opportuns ».  Son homologue de la Malaisie a proposé de fusionner les articles 14 et 15 sur l’universalité et la ratification.

S’agissant de l’article 16 sur l’entrée en vigueur, le représentant du Kazakhstan a estimé que le seuil de 40 instruments de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’accession était trop bas.  Ce seuil doit être de 50, comme c’est le cas pour le Traité sur le commerce des armes. Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), la représentante de la Malaisie a proposé de rajouter une disposition pour que le Secrétaire général de l’ONU soit officiellement le dépositaire de l’instrument.  Cette proposition a été soutenue par le représentant de l’Égypte, qui a appelé à ajouter un troisième paragraphe à l’article 16, comme suit: « Le Secrétaire général des Nations Unies doit informer tous les signataires de la date d’entrée en vigueur de la convention ».

S’agissant de l’article 17 sur les réserves, la représentante de la Malaisie a fait part de son incertitude concernant la mention d’une annexe.  Cette annexe ne saurait faire l’objet de réserves contraire à la convention.  Son homologue du Kazakhstan a noté que l’article 18 sur la durée demande à chaque État partie souhaitant se retirer de la convention de notifier trois mois à l’avance le Conseil de sécurité de l’ONU.  Constatant que les membres permanents du Conseil n’ont pas souhaité participer à la présente Conférence, le délégué a proposé de remplacer « Conseil de sécurité » par « Assemblée générale ».  Pour la même raison, le représentant de l’Égypte a proposé d’effacer purement et simplement la mention du Conseil.

Le délégué égyptien a également appelé le Secrétariat à « édulcorer » la formulation du paragraphe de l’article 18 concernant la durée.  Il a proposé d’intituler cet article « durée et retrait », plutôt que « durée », comme c’est actuellement le cas.  Pour ce qui est de l’article 19 sur les relations avec les autres accords, le représentant de Cuba a demandé de le remplacer par le libellé suivant: « Aucun élément de la présente convention ne doit être interprété comme limitant de quelque façon que ce soit les obligations assumées par les États parties au titre du droit international, y compris le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et d’autres instruments relatifs aux armes nucléaires. »  Le représentant de l’Égypte a, quant à lui, proposé de supprimer purement et simplement l’article 19, estimant qu’il n’était pas nécessaire d’établir un lien entre la convention et le TNP, dans la mesure où ce dernier est déjà mentionné dans le préambule.

Les dispositions de ce bloc thématique pourraient être simplifiées, a estimé le représentant des Pays-Bas qui a proposé de supprimer l’article 13 sur l’universalité et s’agissant de l’article 19 sur les relations avec les autres accords, de souligner davantage la hiérarchie entre la Convention et le TNP.  Pourquoi ne citer qu’un seul traité, s’est étonné la délégation sud-africaine, avant de proposer la suppression pure et simple de l’article 19. 

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