En cours au Siège de l'ONU

La Sixième Commission reste divisée sur l’inscription de la protection de l’atmosphère au programme de la Commission du droit international

Soixante-douzième session,   
23e et 24e séances – matin et après-midi
AG/J/3558

La Sixième Commission reste divisée sur l’inscription de la protection de l’atmosphère au programme de la Commission du droit international

Elle reçoit la visite du Président de la Cour internationale de Justice

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a poursuivi aujourd’hui son examen des chapitres VI et VII du rapport de la Commission du droit international (CDI), consacrés à la protection de l’atmosphère et à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, deux sujets qui ont continué de diviser les délégations.

La commission a entendu ce matin une allocution de M. Ronny Abraham, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ).  C’est une tradition désormais bien établie pour le Président de la CIJ d’effectuer une visite à la Sixième Commission lorsque l’Assemblée générale examine le rapport annuel de la Cour, a rappelé le Président de la Commission, M. Georg Nolte.

M. Abraham a choisi de parler de la place des tiers dans la pratique judiciaire et la jurisprudence de la CIJ.  Il a expliqué comment la Cour reconnaît que les intérêts d’États tiers, et plus particulièrement leurs intérêts juridiques, peuvent entrer en jeu dans le cadre de procédures contentieuses. 

Abordant le chapitre sur la protection de l’atmosphère, les délégations ont commenté le dernier rapport du Rapporteur spécial qui s’est notamment employé à démontrer que le droit de la protection de l’atmosphère existait et qu’il fonctionnait en interaction avec d’autres branches pertinentes du droit international, en particulier le droit international du commerce et de l’investissement, le droit de la mer et le droit des droits de l’homme.  Partant de cette analyse, il a proposé un projet de directive portant sur la relation entre les règles pertinentes.

Les pays favorables à l’inscription de la question de la protection de l’atmosphère au programme de travail de la CDI, tels la République de Corée, Cuba, les Tonga, le Chili, l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande, la Nouvelle-Zélande ou encore le Sénégal, ont vanté le projet de préambule qui établit une corrélation étroite entre l’atmosphère et les océans, évoque la situation particulière dans laquelle se trouvent les zones côtières de faible élévation et les petits États insulaires en développement du fait de la montée du niveau de la mer, et souligne qu’il est dans l’intérêt des générations futures de préserver durablement la qualité de l’atmosphère.

Préoccupés par la direction prise par la CDI, les États-Unis l’ont au contraire invitée à cesser ses activités sur la protection de l’atmosphère.  La CDI devrait faire preuve de beaucoup de prudence dans le développement de ses travaux sur ce sujet, a averti la France.  Tout aussi sceptique, le Royaume-Uni a noté que les accords internationaux existants couvrent de nombreuses questions liées à ce thème et qu’ils sont suffisamment souples pour régler d’autres défis au fur et à mesure qu’ils apparaissent.  

Dans le même esprit, l’Espagne a exprimé son « mécontentement » devant le texte des projets de directives sur la protection de l’atmosphère, ajoutant ne pas être en mesure de voir la pertinence d’un instrument dédié à cette question.  Selon elle, ce texte ne se prononce pas en faveur de la protection de l’atmosphère, mais se borne à proposer des directives sur les différents domaines du droit international qui s’intéressent à cette question.  Pour la Grèce, les questions du droit de la mer n’ont pas leur place dans une série de directives sur la protection de l’espace atmosphérique.  La CDI n’est pas compétente pour aborder ce thème, ont conclu la République tchèque et la Slovaquie.

La Chine a critiqué le manque de référence à la pratique internationale, et jugé les projets directives « plus utiles sur un plan théorique ».  Enchaînant sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le délégué chinois a jugé problématique le projet d’article relatif aux crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Résumant l’opinion d’une majorité d’intervenants, il a regretté que ce texte ait été adopté à la hâte, à l’issue d’un vote qui a révélé que le tiers des membres y étaient opposés. 

Pour la France, la commission aurait dû prendre le temps de forger un consensus, compte tenu des enjeux concrets de la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, tandis que l’Espagne a estimé que la CDI devrait éviter de donner l’impression de créer du droit.

L’Iran, l’Estonie, la Sri Lanka, entre autres, ont recommandé une position équilibrée et prudente sur ce sujet délicat et « éminemment politique » selon Cuba.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux mardi 31 octobre à 15 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Allocution du Président de la Cour internationale de Justice

M. RONNY ABRAHAM, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a fait un exposé sur « la place des tiers dans la pratique judiciaire et la jurisprudence de la Cour internationale de Justice », en commentant tout d’abord les articles 62 et 63 du Statut de la Cour.  Il a au préalable rappelé qu’un arrêt de la Cour n’est obligatoire que pour les parties en litige et dans l’affaire qui est jugée.  Toutefois, les intérêts d’États tiers peuvent entrer en jeu dans le cadre des procédures contentieuses dans deux cas: lorsqu’un État veut jouer un rôle actif dans une affaire qui oppose deux autres États parce qu’il estime y avoir intérêt d’ordre juridique (article 62) ou lorsqu’il veut voir ses droits protégés dans la résolution de l’affaire parce qu’elle concerne l’interprétation d’une convention à laquelle il a participé (article 63).

Dans la première situation, l’État tiers doit adresser une « requête à fin d’intervention » sur laquelle la Cour doit statuer sans qu’il ne soit précisée la forme de la décision sur ce point.  Dans la deuxième situation, l’État tiers doit faire une « déclaration d’intervention » et la Cour se borne à constater que l’État se trouve bien dans la situation prévue par l’article 63. 

Le Président de la CIJ a indiqué que la Cour avait été saisie, depuis sa création, de seulement quatre déclarations d’intervention basées sur l’article 63.  Il a précisé les conditions de forme dans lesquelles doit être faite cette démarche ainsi que les conditions de fond.  Ainsi, la procédure principale doit mettre en cause l’interprétation d’une convention à laquelle l’État souhaitant intervenir est partie, celui-ci ayant l’intention de présenter à la Cour des observations sur cette interprétation.

Les contours de l’intervention fondée sur l’article 62 sont moins évidents, a poursuivi M. Abraham.  Si l’article prévoit les délais à respecter et les arguments à fournir, c’est la jurisprudence de la Cour qui a précisé les conditions dans lesquelles un État tiers peut intervenir.  Ainsi, il n’est pas nécessaire que les parties à l’affaire en cause consentent à une telle intervention, sauf si l’État tiers entend lui-même devenir une partie au procès.  Cela résulte d’une jurisprudence de 2011 dans un différend territorial et maritime qui opposait le Nicaragua et la Colombie, dans lequel le Costa Rica et le Honduras ont voulu intervenir.

La Cour a également précisé, dans un arrêt datant du 13 septembre 1990, que l’intervention sur le fondement de l’article 62 avait un but « préventif ».  En conséquence, un État tiers ne peut, par le biais de l’intervention, soumettre à la Cour de nouvelles questions à trancher, en tout cas lorsqu’il n’acquière pas la qualité de partie.  Il doit se borner à protéger ses intérêts.  Enfin, lorsqu’elle statue sur une requête à fin d’intervention, la Cour ne se demande pas si la participation de l’État tiers pourrait lui être utile ou même nécessaire.  La Cour n’examine que si cet État a un intérêt juridique dans le différend.  Dans une affaire opposant Malte et la Libye, elle avait ainsi jugé non admissible la demande d’intervention de l’Italie.

Le Président de la CIJ a ensuite expliqué la différence entre les versions française et anglaise de l’article 62, indiquant que la Cour avait choisi de se baser sur la formulation anglaise selon laquelle l’État tiers doit avoir un « intérêt d’ordre juridique susceptible d’être affecté par la décision en l’espèce ».  La Cour a aussi précisé d’autres éléments, par exemple qu’un « intérêt » suffit pour entamer la procédure, sans avoir à invoquer nécessairement « un droit ».  La Cour, a-t-il ajouté, n’a jamais rejeté une demande d’intervention si les conditions de l’article 62 étaient remplies. 

M. Abraham a également signalé qu’un État tiers qui n’est pas intervenu dans une affaire soumise à la Cour pouvait cependant demander la communication des pièces, ce qui lui est généralement accordé si les parties au différend ne s’y opposent pas.

Passant à la deuxième partie de son exposé, le Président de la Cour a parlé de la protection accordée par celle-ci à un État tiers dans le cadre d’une affaire contentieuse dans laquelle il n’est pas intervenu.  Cette protection prend deux formes: la Cour peut déclarer qu’elle ne peut pas statuer sur une question qui pourrait affecter les intérêts d’un État tiers non partie; ou elle peut s’assurer que sa décision n’affecte pas un tel État.

Concernant la première situation, il a cité une jurisprudence (le « principe de l’or monétaire ») datant de 1943 qui concernait les intérêts de l’Albanie, dans une affaire opposant l’Italie et la France sur une question de transfert d’or monétaire pris à l’Italie par l’Allemagne.  Le principe de l’or monétaire ne s’applique toutefois que si l’intérêt juridique de l’État tiers qui risque d’être affecté est au cœur du sujet de la décision.  Il faut un lien logique entre les éléments invoqués par l’État tiers et la décision à prendre.  M. Abraham a cité une jurisprudence de 1992 à ce sujet qui concernait des terres phosphates à Nauru.

Pour ce qui est de la deuxième situation, le Président de la CIJ a pris l’exemple de la délimitation maritime comme cas typiques dans lesquels la Cour veille à protéger les intérêts des États tiers à un différend, citant un arrêt de 2009 concernant la mer Noire.

Les autres tiers autorisés à intervenir dans une procédure contentieuse devant la CIJ sont les organisations internationales publiques, comme prévu par le Statut, mais pas les organisations non gouvernementales.  Le Président a aussi parlé, brièvement, de l’intervention de tiers dans les procédures consultatives.  En fonction de l’article 66 du Statut, le greffier doit aviser tous les États qui pourraient se présenter devant la Cour pour un cas donné.  Ceux qui ne seraient pas notifiés peuvent demander à être entendus, ce à quoi la Cour répond positivement ou négativement.  Si des ONG adressent des écritures à la Cour dans une procédure consultative, ces documents ne sont pas considérés comme des pièces du dossier mais comme des publications consultables par les États et les ONG.

Suite de l’examen des chapitres VI et VII du rapport

M. METOD SPACEK (Slovaquie) a jugé que la façon dont la Commission du droit international (CDI) aborde la question de la protection de l’atmosphère continue de susciter des doutes.  L’examen de ce sujet a démontré que cette question ne se développe pas aisément, a-t-il estimé, ajoutant en outre que la Slovaquie appuie tous les efforts internationaux visant à lutter contre les changements climatiques.  Toutefois, il s’est dit convaincu qu’il ne revient pas à la CDI d’aborder ces questions politiques, qui vont au-delà de son mandat.  Les règles relevant de la protection de l’atmosphère doivent s’appuyer uniquement sur des fondements juridiques, a-t-il poursuivi, ajoutant que les projets d’articles ne doivent pas s’opposer à des régimes de traités ayant cours. 

Pour le représentant, l’objectif de la commission n’est pas clair à cet égard.  Concentrant son propos sur les relations entre États, il a estimé que la pratique des États n’établit pas une branche séparée du droit international sur la protection de l’atmosphère.  Il s’est inquiété de la fragmentation du droit, se prononçant en faveur des règles sur l’interprétation contenues dans la Convention de Vienne.  D’après lui, le paragraphe 2 du projet de directive 9, sur la relation entre règles pertinentes, « ne fait qu’énoncer des évidences ».  Il a par ailleurs fait remarquer que les personnes vulnérables à la dégradation de l’environnement décrites dans le projet d’article ne sont pas forcément les mêmes que celles qui sont le plus exposées aux changements climatiques.

S’agissant de l'immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l'État, M. Spacek a indiqué que la CDI ne devrait passer au vote qu’en cas de questions extrêmes ou de sujets politiques, ce qui n’était pas le cas ici, selon lui.  Il a préconisé une prise de décision consensuelle afin d’éviter de diviser la commission.  En outre, il a appuyé les limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État définies dans le projet d’article, estimant que les crimes visés ne devraient pas aller au-delà des crimes principaux en vertu du droit international.

Abordant le sujet de la protection de l’atmosphère, M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a déclaré que les commentaires sur les projets d’alinéas au préambule témoignent de la complexité scientifique du sujet.  Il semble donc difficile pour les délégués de la Sixième Commission de prendre position.  À cet égard, se pose la question de l’intérêt de ces projets d’alinéas, qui se bornent à faire état du contexte et ne posent pas d’intention, a-t-il ajouté. 

En outre, la France s’interroge sur l’intérêt du projet d’article 9 dans lequel est question d’éviter toute divergence entre les règles de la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international.  Il a noté que ces directives formuleraient des règles dépourvues de tout caractère contraignant.  Le représentant s’est demandé si la protection de l’atmosphère est régie par les règles de droit international en matière d’investissement.  Le commentaire du projet de directive n’apporte que peu d’éclairage sur les liens entre les traités  bilatéraux d’investissement et la protection de l’atmosphère, a-t-il déploré.  Concernant la non-discrimination, il a noté que le commentaire se fonde sur un unique article de doctrine pour affirmer que le principe de non-discrimination demande à un État de traiter la pollution mondiale comme si elle venait de son territoire.  La Commission du droit international (CDI) devrait faire preuve de beaucoup de prudence dans le développement de ses travaux sur ce sujet, a-t-il averti.

Par ailleurs, M. Alabrune a souligné l’importance du sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Les règles en la matière n’exonèrent pas les bénéficiaires de responsabilités et ne doivent pas favoriser l’impunité.  Il a appelé l’attention des délégations sur les difficultés soulevées par le dernier rapport de la CDI sur ce sujet.  « Compte tenu des enjeux concrets de l’immunité de juridiction pénale étrangère et des vifs débats, la France pense que la commission aurait dû prendre le temps de forger un consensus. »

« C’est d’autant plus regrettable que les juridictions nationales sont très attentives aux travaux de la commission », a continué le représentant.  Il a considéré que sur un sujet d’une telle importance, il est fondamental que la commission indique si ses travaux participent à la codification du droit international ou à son développement progressif.  Les exceptions aux immunités ratione materiae ne constituent pas des règles de droit international coutumier, faute d’une pratique des États et d’une opinio juris reconnue.  Il a regretté que la commission n’ait pas mis en place un groupe de travail sur cette question.  Au regard des divisions sur le sujet, il a donc jugé préférable que la CDI se donne tout le temps nécessaire pour avoir une vision pertinente de la pratique et parvenir à une proposition consensuelle. 

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a consacré son intervention à la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, qui revêt une importance critique pour les États Membres, et qui, a-t-il rappelé, a donné lieu à un débat intense au sein de la Commission du droit international (CDI).  S’agissant des limites et des exceptions à l’immunité, il a recommandé d’agir « avec circonspection », compte tenu de la complexité juridique et du caractère politique délicat des problèmes soulevés.  Rappelant qu’il n’a pas été possible de déterminer l’existence d’une règle coutumière concernant l’immunité ratione personae, il a souligné que l’approche adoptée dans le projet d’article 7 avait généré un débat très divisé au sein de la commission et mené, hélas, à une décision après une mise aux voix sur une question qui, par sa nature même devrait faire l’objet d’une analyse critique et d’une décision par consensus.

Le représentant a jugé problématique l’évocation de la pratique des traités en ce cas d’espèce car, pour établir l’existence d’une règle coutumière, il faudrait des preuves beaucoup plus claires et sans équivoque de la pratique des traités.  Ensuite, il a exprimé son inquiétude du fait de l’évocation trop fréquente des traités qui stipulent expressément la responsabilité pénale individuelle pour des crimes de droit international.  En effet, a-t-il argué, ces traités, par définition, ne devraient pas primer sur les tribunaux nationaux d’un État étranger en ce qui concerne l’immunité d’un représentant de l’État. 

M. Perera a estimé que le projet d’article 7 est largement fondé sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) et ne peut donc pas être considéré comme reflétant un principe du droit coutumier établissant des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Dans le cas du Statut de Rome, a-t-il clarifié, les États parties jouissent d’une discrétion souveraine et renoncent, volontairement, au droit de réclamer l’immunité pour les principaux crimes énoncés dans le Statut, y compris en ce qui a trait à la troïka.  En dernier lieu, il a partagé l’avis de la commission sur la nécessité de reconnaître la relation cruciale entre les exceptions éventuelles à l’immunité ratione materiae et les procédures qui garantiraient que de telles exceptions ne feront pas l’objet d’abus à des fins politiques partisanes.

Mme KANOKWAN PENGSUWAN, (Thaïlande) a reconnu la valeur du travail de la commission sur la protection de l’atmosphère en ce qu’il améliore la visibilité de cette problématique et des questions juridiques complexes qu’elle soulève, notamment celle de la fragmentation.  Elle a exprimé son appui de principe au paragraphe 1 du projet de directive 9, en particulier sur le fait que toutes les règles pertinentes du droit international doivent être identifiées, interprétées et appliquées de manière à aboutir à une seule série d’obligations compatibles.

Dans le cadre de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Pengsuwan a pris note du projet d’article 7 tel que provisoirement adopté par la commission, qui dresse une liste de tous les crimes auxquels l’immunité ratione materiae ne saurait s’appliquer, sur la base de la conclusion de la Rapporteuse spécial qu’il n’existe pas de règle coutumière du droit international autorisant l’application de limites ou d’exception à l’immunité ratione personae.  Elle a été d’avis que le travail sur ce sujet « si compliqué et hautement délicat » devrait reposer sur la lex lata et sur la pratique de l’État.  Dès lors, les propositions de lex ferenda devraient être faites uniquement dans le cas où il existe un consensus international.  En conclusion, elle a encouragé la commission à explorer davantage cette question en prenant en considération les opinions exprimées par les États à la Sixième Commission.

Abordant le chapitre sur la protection de l’atmosphère, M. XU HONG (Chine) a estimé que le projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes serait judicieux s’il existait déjà des règles établies en la matière, ce qui ne semble pas être le cas.  De ce fait, les conclusions tirées ici souffrent du manque de référence en matière de pratique internationale, et ce projet de directive est plus utile sur un plan théorique. 

Sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a jugé problématique le projet d’article 7 relatif aux crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Il a été adopté à la hâte, sans les discussions appropriées, et le vote a révélé que le tiers des membres y étaient opposés.  En outre, les six exceptions identifiées par cet article ne s’appuient pas sur la pratique internationale, et « la pratique des États d’Asie n’a pas été amplement prise en compte ».  Il a averti que la levée injuste de l’immunité de représentants de l’État allait sérieusement fouler au pied le principe de l’égalité souveraine de tous les États, conduisant ainsi à des décisions politiquement motivées, et entamer la stabilité des relations internationales.

Au sujet des normes impératives du droit international général (jus cogens), le représentant a estimé que la question devrait s’inspirer de l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités et de la pratique des États, et « éviter de s’appuyer excessivement sur des déductions théoriques ».  Or, d’après lui, les trois éléments de base proposés par le Rapporteur spécial dans son premier rapport, à savoir que les normes de jus cogens s’appliquent universellement, qu’elles sont supérieures aux autres normes du droit international et qu’elles protègent les valeurs fondamentales de la communauté internationale, sont en contradiction avec les éléments établis par l’article 53 de la Convention de Vienne.  Non seulement les éléments proposés vont au-delà du cadre de l’article susmentionné, mais ils ne s’appuient pas assez sur la pratique du droit.  De plus, a-t-il poursuivi, ces éléments sont sujets à controverse, par exemple le concept de « valeurs fondamentales » qui peut être difficile à définir dans une communauté internationale avec des civilisations diverses et de multiples systèmes de valeurs. 

Vu l’absence de consensus sur le fait de savoir quelles normes entrent dans la catégorie des principes généraux de droit, M. Xxxxx a jugé nécessaire de poursuivre les études sur la question, invitant le rapporteur spécial à apporter des éclaircissements à ce sujet.  Que l’expression « la communauté internationale des États dans son ensemble » soit interprétée comme « une large majorité d’États » ou comme « une très large majorité d’États », une telle définition serait très difficile à mettre en pratique, a-t-il averti.

Abordant la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, la Chine estime que, compte tenu de la pratique internationale limitée en la matière, et des contextes politiques et historiques complexes dans lesquels cette pratique a eu lieu, il est probable que la codification des règles internationales de droit dans ce domaine serait très difficile.  Il faudrait aussi s’interroger sur l’urgence de la commission de s’embarquer dans la codification de cette question à ce stade, a demandé le représentant.  Il a été d’avis de limiter la portée de cette question à la responsabilité de l’État et à la succession d’États, en excluant la responsabilité des organisations internationales et de la succession de gouvernements. 

M. PETR VALEK (République tchèque) a reconnu que la protection de l’atmosphère est un des défis les plus sérieux qui se présentent à l’humanité.  Ainsi l’impact de nombreuses activités anthropogènes sur la qualité de l’atmosphère a-t-il été scientifiquement prouvé.  Ceci étant, il a estimé que la commission n’a pas la compétence pour aborder ces questions.

Le problème de la relation entre les règles de droit international relatives à la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes pose la question de savoir s’il existe un droit de l’atmosphère en soit, « ce dont nous ne sommes pas convaincus », a expliqué le représentant.  Le projet de directive 9, adopté à titre provisoire, génère plusieurs préoccupations, a-t-il déclaré, notamment le problème principal de l’harmonisation entre les diverses sources de droit.  Toute avancée future sur ces questions doit être précédée de l’identification de ces problèmes interconnectés.  Ce texte suggère une solution qui n’est pas viable selon lui.  « Le paragraphe 2 est bien plus réaliste et représente le seul élément sur lequel on puisse travailler », a-t-il déclaré.

Passant à la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. Valek a souligné que les exceptions à l’immunité ratione materia sont une question complexe, car la pratique des États peut varier.  Par ailleurs, il a salué le projet d’article 7 relatif aux crimes de droit international, qui reflète la tendance des États.  Il a salué le commentaire de ce projet d’article.  S’agissant du crime de corruption, il ne doit pas être envisagé comme un acte accompli, a-t-il noté.  Il a mis en lumière la conclusion selon laquelle les exceptions ne s’appliquent pas.  Il a ajouté que ce principe s’applique à l’immunité ratione pesonae des personnes type consulaire ou force militaire.  Bien que ce soit déjà abordé ailleurs, il lui a semblé utile de réaffirmer ce fait dans les commentaires du projet d’article 7.

Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a déclaré que tel qu’adopté par la Commission du droit international (CDI), le projet de directive 9 qui traite des liens et synergies entre les règles du droit international sur la protection de l’atmosphère et d’autres règles pertinentes du droit international, fournit une orientation utile.  Il cherche en effet à garantir une complémentarité avec différentes règles, notamment celles d’autres branches du droit international comme le droit du commerce et de l’investissement, le droit de la mer et le droit international des droits de l’homme, de sorte que les États puissent respecter les deux sans crainte de contradiction quant à leurs obligations. 

La représentante a relevé que des considérations liées à l’environnement sont chaque fois plus intégrées dans ces diverses branches du droit.  Elle a en revanche conseillé d’éviter de formuler des directives « sectorielles » qui risqueraient de devenir rapidement obsolètes compte tenu de l’évolution continue de la pratique de l’État et de la jurisprudence.   Elle a également considéré que les questions du droit de la mer n’ont rien à faire dans une série de directives sur la protection de l’espace atmosphérique.  Cela est d’autant plus vrai en ce qui concerne la délimitation des zones maritimes, tout le droit de la mer étant déjà réglementé par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  À ce propos, elle a invité la CDI à consulter la résolution 71/257 de l’Assemblée générale, dernière en date sur les océans et le droit de la mer. 

Abordant ensuite la question « très délicate » des limites et des exceptions à l’immunité ratione materiae, Mme Telalian a noté avec préoccupation que, cette année, il existe une « divergence apparemment irréconciliable», qui a eu pour résultat que la commission n’a pu arriver à une proposition consensuelle pour le projet d’article 7, sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, puisqu’il a été inévitable de passer aux voix, ce qui est plutôt inhabituel.  Elle a noté qu’en dépit d’un débat houleux au sein de la commission, la majorité des membres a approuvé l’approche systémique proposée par la Rapporteuse spéciale dans son cinquième rapport.  Elle a assuré pleinement comprendre les inquiétudes exprimées par certains membres de la commission liées aux abus potentiels des exceptions à l’immunité ratione materiae et la crainte de « procès à des fins politiques ».  Elle a salué le fait que la mention de crimes liés à la corruption ait été biffée de la liste des crimes.

Au sujet des normes impératives du droit international général (jus cogens), elle a estimé que les deux rapports et le projet de conclusions du Rapporteur spécial, M. Dire Tladi, avaient ouvert la voie à une approche pragmatique reposant sur les éléments de jus cogens figurant dans l’article 53 de la Convention de Vienne de 1969, dont la définition est largement acceptée et s’applique bien au-delà du droit des traités.  Elle a également invité la commission à fournir une orientation sur le sens de « droit international général » car celle proposée par le Rapporteur spécial, qui n’a pas été retenue par le Comité de rédaction, si elle venait à être mieux élaborée et affinée, serait susceptible de constituer un bon point de départ.

Abordant la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Telalian a salué le travail du Rapporteur spécial, M. Pavel Sturma, mais elle a estimé que la commission risquait de se trouver confrontée à des difficultés pour l’identification des règles applicables, et devra en conséquence combler les lacunes.

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a jugé utiles les travaux de la CDI sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, tant dans la perspective de la codification du droit international que dans celle de son développement progressif.  Elle a jugé que les concepts pertinents étaient limités, comme l’ont démontré les travaux sur une décision concernant le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Elle a insisté sur la distinction entre l’immunité ratione materiae et l’immunité ratione personae

La représentante s’est dite satisfaite de l’identification par la commission d’actes commis par des représentants de l’État qui ne peuvent faire l’objet d’une immunité ratione materiae, et pour lesquels des poursuites pénales peuvent être intentées.  En conclusion, elle a invité la commission à poursuivre son examen des garanties procédurales. 

M. CLAUDIO TRONCOSO REPETTO (Chili) a déclaré que la protection de l’atmosphère revêt une importance croissante.  Cette enveloppe gazeuse est en relation étroite avec l’environnement, et sa dégradation menace l’existence même de la vie sur terre.  Concernant les nouveaux paragraphes, il a estimé qu’ils ont été très bien rédigés, notamment en ce qui concerne la référence aux petits États insulaires en développement et aux zones côtières de faible élévation.  En effet, l’augmentation du niveau de la mer met à mal l’existence même de populations littorales.

S’agissant du projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes, le représentant s’est félicité de la synthèse qui a été faite.  Les normes relatives à la protection de l’atmosphère font partie des normes internationales générales où le régime de la protection de l’atmosphère est en relation avec d’autres droits, notamment le droit du commerce et de l’investissement et les droits de l’homme.  Le paragraphe 2 de ce texte renvoie aux États et met en exergue le développement progressif du droit sur cette question, a-t-il noté.  Son paragraphe 3 stipule qu’il convient de porter une attention particulière aux personnes et aux groupes particulièrement vulnérables, dont les populations autochtones et les populations des petits États insulaires en développement.

S’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. Repetto a salué le travail rigoureux qui a été fait par le Rapporteur spécial, qui a tenu compte des observations des États et de leur pratique.  La question des limites et des exceptions à l’immunité ratione materiae n’est pas une question simple, a-t-il fait remarquer.  Des principes fondamentaux comme la lutte contre l’impunité en cas de crime grave se trouvent confrontés au principe de la souveraineté de l’État.

En ce qui concerne les normes impératives du droit international général (jus cogens), le représentant a salué le changement de nom du thème, car le texte à ce sujet peut faire l’objet de changements.  Enfin, il a considéré que le sujet de la preuve devant les juridictions de droit internationales doit être abordée avec souplesse.

Abordant le sujet de la protection de l’atmosphère, M. ANDRZJ MISZTAL (Pologne) s’est demandé quelle serait la relation entre le paragraphe 1 du projet de directive 9, intitulé « Relation entre règles pertinentes », et les conclusions du groupe d’étude de la Commission sur la fragmentation, qui sont citées comme source d’inspiration dans le commentaire.  Il n’a pas jugé nécessaire de répéter le principe de l’article 31 paragraphe 3(c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  « Ma délégation a des difficultés avec le point selon lequel le droit international général contient le principe de complémentarité », a-t-il ajouté.  Par ailleurs, fournir des directives séparées qui se réfèrent au droit du commerce et de l’investissement, au droit de la mer et aux droits de l’homme, fait courir le risque d’aller au-delà du champ d’application de ce sujet, qui, comme l’indique le projet d’article 2, traite des règles juridiques liées à la protection de l’atmosphère. 

Passant au sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. Misztal a noté que la commission a adopté par vote enregistré le projet d’article 7, qui traite des crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, « ce qui est assez inhabituel ».  Il a estimé que cette question va au cœur même de la compréhension du droit international.  Prévenir et réprimer les crimes les plus graves est sans aucun doute dans l’intérêt de la communauté internationale dans son ensemble.  Mais, bien que les projets de textes montrent un équilibre entre la codification du droit international et son développement progressif, ils nécessitent une évaluation approfondie.

En ce qui concerne les normes impératives du droit international général (jus cogens), le représentant a rappelé la position de son pays, à savoir que le concept de jus cogens régional est contraire à la notion de jus cogens en soi et ne devrait donc pas être acceptée. 

La succession d’États en matière de responsabilité de l’État, a poursuivi M. Misztal, est une question complexe du fait de la rareté des cas de succession et des contextes politiques et historiques différents dans lesquels ils se produisent, si bien que les traités abordant la question de la succession d’État bénéficient d’un soutien relativement étroit.

M. THEMBILE ELPHUS JOYINI (Afrique du Sud) a déclaré que le Rapporteur spécial a basé son rapport sur l’identification des normes impératives du droit international général sur l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, assurant ainsi que le travail de la CDI demeure ancré dans le droit des traités et le droit international coutumier.  En présentant une définition et en développant un à un chaque concept étudié, la commission a adopté une approche méthodique envers l’établissement du cadre nécessaire à l’identification du jus cogens.  Comme le Rapporteur spécial, il a estimé qu’une norme de droit international général doit être reconnue par la communauté internationale dans son ensemble comme ayant une qualité particulière afin d’acquérir le statut de jus cogens.  Il a souligné qu’une liste du jus cogens deviendrait rapidement obsolète et ne pourrait qu’être partielle, et non exhaustive. 

S’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. Joyini s’est dit en accord avec l’opinion voulant que le projet d’article 7 fasse référence aux crimes de droit international pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Selon lui, ce texte complète les éléments normatifs de l’immunité ratione materiae définis dans les projets d’articles 5 et 6.  Il a ajouté que le fait que cet article se réfère à des crimes signifie que le principe de certitude juridique du droit pénal doit être préservé et que des outils doivent être mis en place afin d’éviter toute subjectivité à cet égard.  Reconnaissant la tendance observée par la CDI vers une limitation de l’immunité ratione materiae pour certains crimes au regard du droit international, il a estimé que les projets d’articles doivent opérer dans un ordre juridique international cohérent et systématique.  Il a réitéré la position de son pays voulant qu’un équilibre doit être trouvé entre le besoin de protéger le concept traditionnel d’immunité des représentants de l’État, sur la base de l’égalité des États, et les impératifs de la lutte contre l’impunité pour les crimes internationaux. 

Concernant la protection de l’atmosphère, le représentant a dit que les efforts de la communauté internationale en ce sens sont d’une importance cruciale pour un développement durable.  Notant que le développement du droit international sur cette question n’a pas toujours été systématique et cohérent, il a déploré le fait qu’il n’a pas toujours été tenu compte des lois internationales environnementales existantes à ce sujet.  Selon lui, les principes de précaution, de prévention et de pollueur-payeur sont partie intégrante de la loi sur la protection de l’atmosphère.

Mme MINNA-LIINA LIND (Estonie) a noté pour sa part que les deux premiers paragraphes du projet de directive 9 établissent un lien entre les règles relatives à la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes.  Elle a appuyé l’approche de la commission au sujet du principe « d’harmonisation et d’intégration systémique » afin d’éviter les conflits entre toute règle relative à la protection de l’atmosphère et les règles d’autres domaines juridiques.

La représentante a aussi jugé indispensable que les directives ne soient pas en concurrence, mais qu’elles complètent plutôt le régime du droit international en vigueur.  Se référant au paragraphe 3 du projet de directive, elle a salué la mention des souffrances des personnes pouvant se retrouver dans des situations de vulnérabilité suite à la pollution et à la dégradation de l’atmosphère.  Elle a proposé que les enfants, les personnes âgées et les segments les plus pauvres de la population nationale soient également cités en tant que groupes de personnes vulnérables.

Quant à la problématique de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il s’agit à l’évidence, d’un sujet délicat et important », a poursuivi Mme LIND.  Il relève de la responsabilité partagée des États de veiller à ce que les auteurs n’échappent pas à la justice.  Les immunités ne devraient pas servir à protéger des individus de la reddition de comptes pour les crimes les plus graves et à réduire à néant l’objectif de compétence universelle, a-t-elle voulu.

La représentante s’est félicitée de l’inclusion de la torture, des disparitions forcées et de l’apartheid en tant que crimes séparés sur la liste du projet d’article 7, regrettant néanmoins que le Comité de rédaction ait décidé de ne pas y ajouter le crime d’agression en raison, principalement, de la prochaine entrée en vigueur de l’amendement de Kampala au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  Elle a aussi appuyé la position selon laquelle les chefs d’État et de gouvernement et les ministres des affaires étrangères jouissent de l’immunité ratione personae uniquement durant leur mandat.  En dépit des divergences de vues s’agissant des ministres des affaires étrangères, elle a appuyé l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) selon lequel l’immunité ratione materiae vise à favoriser la conduite des relations internationales et que le ministre des affaires étrangères y a pleine compétence.

Se concentrant sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. JAMES KINGSTON (Irlande) a regretté le clivage de la commission autour du projet d’article 7 et de ses commentaires qui a exigé une mise aux voix, attribuant cette situation au fait que le terrain n’avait pas été suffisamment déblayé, préalablement à la session de cette année, en vue de l’examen de la question des limites et des exceptions à l’immunité.  Il a donc souhaité que la commission continue à se pencher sur le fond du projet d’article 7 ainsi que sur les dispositions relatives aux procédures et garanties pour sa prochaine session, en mettant l’accent sur la pratique des États.  À l’instar d’autres délégations, il a sollicité des éclaircissements sur ce texte pour savoir, entre autres, s’il cherche à déterminer la portée du droit international existant (lex lata) ou jusqu’où la commission est en train de suivre la tendance émergente vers des normes désirables (lex ferenda).

M. Kingston a rappelé que la commission avait pour mandat de codifier et de développer progressivement le droit international et qu’en cette qualité, elle devait d’abord et avant tout focaliser ses efforts sur un état des lieux du droit avant de procéder à l’évaluation des propositions pour le développement progressif.  Cela est d’autant plus vrai pour un sujet comme celui de l’immunité qui risque de soulever des problèmes d’ordre pratique, qui devront être examinés par les ministères des affaires étrangères et les avocats internationaux, mais aussi par les tribunaux nationaux qui pourraient avoir à se prononcer sur des affaires fort délicates.  

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a partagé l’avis du Rapporteur spécial qu’il y a une tendance à la reconnaissance d’exceptions à l’immunité ratione materiae, tant au niveau international que national, une tendance que son gouvernement confirme.  Il a dès lors salué le concept proposé dans le projet d’article 7, relatif aux crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas. 

Les Pays-Bas estiment en effet que les crimes internationaux se trouvent de façon inhérente exclus de la catégorie des actes commis dans le cadre de fonctions officielles, et donc ne sont pas susceptibles de se prévaloir de l’immunité.  Le représentant a partagé les inquiétudes de certains membres de la commission en ce qui concerne le choix du Comité de rédaction d’inclure une liste limitative de crimes, une liste qui n’inclut pas par exemple l’esclavage.  Une telle liste a en outre l’inconvénient d’entraver le développement de la notion de crimes de droit international auxquels l’immunité ne s’appliquerait pas.  Il a dit préférer une référence générale aux « crimes internationaux » comme crimes auxquels l’immunité ratione materiae ne peut s’appliquer. 

Devant l’existence de règles juridiques relatives à la protection de l’atmosphère et les discussions antérieures tenues par la commission, M. FIRAT SUNEL (Turquie) a déclaré que le travail de la commission sur cette question devait tenir compte des traités existants et éviter d’imposer des obligations additionnelles aux États.  La CDI devrait plutôt chercher à uniformiser le cadre juridique existant, a-t-il ajouté.  Notant que le projet de directive 4 oblige les États à étudier l’impact environnemental de leurs activités susceptibles d’avoir un impact négatif sur l’atmosphère en termes de pollution ou de dégradation atmosphérique, il a invité la commission à poursuivre son examen de cette question. 

M. ANDREI METELITSA (Bélarus), concentrant son intervention sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, a estimé qu’il n’y a pas de norme usuelle concernant les exceptions à l’immunité, car il n’y a pas suffisamment de pratique des États en la matière.  Les conclusions reflétées dans le rapport, ainsi que l’article 98 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), intitulé « Coopération en relation avec la renonciation à l’immunité et le consentement à la remise » confirment notre position, à savoir que l’exclusion de l’immunité ratione materiae n’est pas une norme de droit international, tant que la Cour ne bénéficie pas de la coopération de l’autre État, a-t-il expliqué.  Il s’agit selon lui d’une simple proposition de norme: un État peut l’accepter ou ne pas l’accepter.

Évoquant la liste des crimes visés au projet d’article 7, le représentant a souligné que le Statut de Rome parle de quatre crimes, et que la notion de crime d’agression est tellement spécifique que l’on ne devrait pas l’examiner dans les tribunaux nationaux.  « Nous ne sommes pas d’accord avec les tentatives artificielles d’imposer une pareille liste », a-t-il  insisté.  Les autres crimes, tels que la disparition, l’esclavage ou le harcèlement pour des raisons de race ou autre, relèvent de la notion de crimes uniquement s’ils sont réalisés sur une vaste ampleur ou de façon systématique, a-t-il déclaré, car ce ne sont pas des normes de droit international établies.

M. JOSÉ MARTÍN Y PÉREZ DE NANCLARES (Espagne) a exprimé son « mécontentement » devant le texte du projet de directive sur la protection de l’atmosphère, ajoutant ne pas être en mesure de voir la pertinence d’un instrument dédié à cette question.  Selon lui, ce texte ne se prononce pas en faveur de la protection de l’atmosphère, mais se borne à proposer des directives sur les différents domaines du droit international qui s’intéressent à cette question.  L’interprétation intégrée des normes du droit international relatives à la protection de l’atmosphère ne mène pas à un « ensemble unique d’obligations compatibles », a-t-il ajouté.  De même, il a jugé futile et non fondé en droit international le principe d’harmonisation et d’interprétation systématique mentionné au paragraphe 1 du projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes.  En outre, il a relevé différentes erreurs dans la terminologie employée dans ce projet de directive, notant entre autres que les personnes et groupes ne sont pas vulnérables à la dégradation atmosphérique, mais bien à ses effets. 

S’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé que la commission devrait éviter de donner l’impression de créer du droit.  Il s’est dit convaincu que l’immunité des chefs d’État et de gouvernement relève du droit international coutumier, ce qui n’est pas le cas des limites et exceptions à l’immunité ratione materiae.  Il a noté à cet égard que l’étude de la pratique des États et de l’opinio juris peut se révéler particulièrement complexe, ajoutant à titre d’exemple que la Cour internationale de Justice (CIJ) a refusé à deux reprises de se prononcer sur cette question.  Il a déploré à nouveau l’adoption du projet d’article 7 par vote plutôt que par consensus, ce qui a pour effet d’en affaiblir la portée.  Il a rappelé que la Loi sur l’immunité des États et des organisations internationales, adoptée par l’Espagne en 2015, exclue l’immunité pour les crimes de génocide, de disparition forcée, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité pour les hauts dirigeants.  Enfin, s’agissant de l’immunité ratione materiae, il a jugé nécessaire de mentionner de façon explicite comment elle s’applique aux hauts dirigeants de l’État après leur mandat.

M. MAHE’ULI’ULI SANDHURST TUPOUNIUA (Tonga) a déclaré que l’atmosphère, ressource commune partagée par l’ensemble de l’humanité, souffre des perturbations occasionnées par les activités humaines, ce qui continue d’avoir des répercussions néfastes sur notre planète.  S’il a reconnu les régimes complexes du droit international en vigueur sur les changements climatiques et la diminution de la couche d’ozone, il n’en a pas moins critiqué « leur approche fragmentée » qui pose un défi aux efforts tendant à la protection de l’atmosphère par des efforts concertés aux niveaux national, régional et international.

Le représentant a souligné que les paragraphes 1 et 2 du projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes apportaient des solutions pratiques pour remédier à cette fragmentation.  Il a aussi salué la mention des groupes vulnérables, au paragraphe 3, en particulier la référence aux petits États insulaires en développement qui se trouvent dans une situation difficile à cause de l’élévation du niveau de la mer, et évoqué les implications juridiques potentielles de ce phénomène.

M. STEPHEN H. SMITH (Royaume-Uni) a abordé le chapitre relatif à la protection de l’atmosphère en réitérant ses doutes sur la nécessité des travaux de la commission sur ce sujet.  Il a noté en effet que les obligations internationales existantes couvrent de nombreuses questions liées à ce thème et que ces accords sont suffisamment souples pour régler d’autres défis au fur et à mesure qu’ils apparaissent.  Il a cité en exemple l’amendement de Kigali au Protocole de Montréal qui étend la portée de cet accord pour inclure les émissions de gaz à effet de serre, en plus des substances qui appauvrissent la couche d’ozone.  Le projet de directive 9 reconnaît lui-même qu’il existe d’autres règles pertinentes en la matière, a-t-il relevé.  Il a préféré d’ailleurs que l’on enlève les exemples donnés pour éviter toute ambiguïté quant au caractère exhaustif de la liste de lois et traités concernés.

Le représentant a aussi relevé une ambiguïté concernant le même texte qui fait une référence, inutile à son avis, à certaines dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Ces règles, a-t-il fait remarquer, s’appliquent déjà aux États parties à la Convention et sont largement reconnues comme faisant partie du droit international coutumier.  D’où son scepticisme sur l’utilité de les intégrer dans le projet d’article. Il a salué l’approche plus équilibrée suivie par l’Accord de Paris sur les changements climatiques qui fait référence au principe de « responsabilité commune mais différenciée et des capacités respectives », mais il a craint que le projet d’articles puisse saper l’évolution de ces principes. 

Venant au chapitre sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, M. Smith a été d’avis que les exceptions à l’immunité ratione materiae prévues au projet d’article 7 n’étaient pas suffisamment étayées par la pratique des États pour être vues comme des règles établies du droit international coutumier.  De plus, a-t-il noté, la commission elle-même est divisée sur la question, comme le prouve le vote enregistré sur ce texte, une pratique très inhabituelle. 

Ce sujet est d’une grande importance sur le plan pratique, a poursuivi la délégation britannique en relevant par exemple que les déplacements internationaux de hauts fonctionnaires sont monnaie courante.  Il a rappelé à ce propos que l’immunité n’a pas pour but d’offrir un bénéfice personnel à des individus, mais de garantir l’efficacité des fonctions des hauts fonctionnaires.  Il a donc demandé à la commission d’indiquer clairement quels projets d’articles reflètent le droit international existant (lex lata) et lesquels ne le font pas et représentent alors un « nouveau droit ».  Dans le dernier cas, le Royaume-Uni estime que la forme appropriée pour ces travaux serait un traité.

Mme ELAHEH MOUSAVI-NEJAD (République islamique d’Iran) a rappelé que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est profondément ancrée dans le principe de l’égalité souveraine des États, ainsi que dans le postulat selon lequel l’État et ses dirigeants ne font qu’un, si bien que les représentants de l’État ne peuvent être traduits devant les juridictions nationales d’autres États.  Ce postulat est tenu pour vrai eu égard aux représentants de l’État autres que ceux qui composent la traditionnelle « troïka ».

La représentante a noté que le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas a été adopté de façon assez inhabituelle.  Il y a eu des divergences d’opinions fondamentales, ce qui reflète la difficulté du sujet qui implique des questions hautement sensibles pour les États.  À son avis, ce texte n’a pas bénéficié suffisamment de la pratique des États.  « C’est pour cela que nous pensons que le projet d’articles n’aborde pas la question de manière appropriée », a-t-elle dit.

Mme Mousavi-Nejad a pensé aussi que le rapport ne fournit pas de jurisprudence pertinente sur la non-applicabilité de l’immunité ratione materiae en se fondant principalement sur des cas relevant du droit privé et non pénal.  De plus, elle a considéré que les traités énumérés en annexe du projet d’article précité ne sont pas universellement acceptés, et que, dès lors, les définitions présentées ne peuvent pas non plus être universellement acceptées.  Elle a recommandé que la commission procède sur ce sujet avec plus de prudence.

Mme HANNAH WEIR (Nouvelle-Zélande) a exprimé son appui aux limites et exceptions à l’immunité ratione materiae de la juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, notamment pour les crimes les plus graves en vertu du droit international.  Elle a souhaité que la Rapporteuse spéciale se penche sur l’approche alternative suggérée par certains États de reformuler le projet d’article 7 sur la base de l’obligation d’un État de lever l’immunité de ses représentants ou d’intenter des poursuites à leur encontre pour les crimes internationaux.  La lutte contre l’impunité et pour la reddition de comptes est dans l’intérêt primordial de la communauté internationale dans son ensemble, a-t-elle noté.  Les limitations et exceptions sont étroitement liées à l’aspect procédural de l’immunité, a-t-elle ajouté. 

S’agissant des normes impératives du droit international général, la représentante a exprimé son appui à l’adoption des conclusions provisoires relatives à l’analyse des conséquences du jus cogens, en 2018, dans le but d’élaborer des propositions pour une liste des normes relatives au jus cogens en 2019. 

Se tournant vers la protection de l’atmosphère, Mme Weir s’est prononcée en faveur de l’identification, de l’interprétation et de l’application cohérente des règles de droit international pertinentes.  Le projet de directive 9 constitue un point de départ intéressant à cet égard, a-t-elle relevé.  Elle a aussi salué la reconnaissance, dans le projet de préambule, de la corrélation étroite entre l’atmosphère et l’océan, et de la situation particulière des petits États insulaires en développement devant la montée du niveau de la mer.  

Mme ARET PINO RIVERO (Cuba) a estimé que la question de la protection de l’atmosphère est importante afin de prévenir la dégradation atmosphérique.  Elle a plaidé pour qu’il soit clarifié que les directives relatives au principe de précaution, aux responsabilités communes mais différenciées, à la responsabilité des États et aux transferts de fonds et de technologie aux pays en développement s’appliquent sans préjudice au principe de pollueur-payeur.

En ce qui concerne l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la représentante a reconnu que cette question comporte une dimension éminemment politique.  Elle s’est déclarée en accord avec l’immunité ratione personae pour les hauts dirigeants dans l’exercice de leurs fonctions.  Elle a relevé que le projet d’article 1 sur le champ d’application a suivi le modèle de la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens, ajoutant préférer une liste des délits visés plutôt qu’une formulation générale qui peut donner lieu à des interprétations divergentes.  Concernant les immunités accordées aux fonctionnaires, elle a invité à étudier la pratique des États et des tribunaux internationaux.  Enfin, elle jugé important d’approfondir l’aspect procédural de l’immunité.

M. JEEM S. LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a approuvé totalement le quatrième rapport sur la protection de l’atmosphère.  Pour éviter la fragmentation du droit international, il est essentiel que la Commission du droit international (CDI) établisse, avec autorité, que de nombreux domaines du droit international sont liés les uns aux autres et interagissent avec régularité et intensité, a-t-il déclaré.  Il a notamment appuyé l’adoption provisoire du projet de directive 9 concernant les relations entre les règles de droit international traitant de la protection de l'atmosphère et les autres domaines pertinents du droit international.  Il a cependant regretté que les projets d’articles et les commentaires associés n’aient pas conservé les riches débats sur le droit international du commerce et de l’investissement, le droit international des droits de l’homme et le droit de la mer.

Le représentant a soutenu le paragraphe 3 du projet de directive 9 tel qu’adopté provisoirement, car il souligne la vulnérabilité particulière des peuples des petits États insulaires en développement affectés par l’élévation du niveau de la mer.  En tant que petit État insulaire en développement, avec de nombreux atolls peu élevés et beaucoup de zones côtières, la Micronésie pense que la CDI devrait analyser la dimension juridique de ces défis dans les domaines pertinents du droit international.  Il a redit son intention de soumettre une proposition écrite à la commission pour l’inclusion du sujet des implications de l’élévation du niveau de la mer dans ses travaux à long terme, ce qui permettra de mettre en relief les nombreux instruments et autres sources du droit international pertinents.

En conclusion, M. Lippwe a rappelé sa position selon laquelle la protection de l'atmosphère est une obligation erga omnes, ou à l’égard de tous.  Ainsi, un État a-t-il l’obligation de contrôler ses actes de pollution qui dégradent l’atmosphère au détriment de la communauté internationale, ce qui inclut les citoyens des autres États et leur jouissance des droits de l’homme.

Mme KERSTIN PUERSCHEL (Allemagne) a estimé que la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l'État est un sujet controversé d’une grande importance.  La lutte contre l’impunité est loin d’avoir été gagnée, malgré les progrès réalisés, a-t-elle estimé.  Pour réussir, il faut parvenir à un équilibre entre l’égalité souveraine des États et les impératifs de la lutte contre l’impunité, a-t-elle fait valoir.  Certaines préoccupations soulevées l’an dernier se retrouvent encore dans le rapport de la Commission du droit international (CDI) cette année, a-t-elle relevé, ajoutant qu’il comporte de nombreuses faiblesses méthodologiques, notamment en utilisant des éléments de la pratique des États de façon arbitraire pour établir une tendance à des limites et exceptions à l’immunité.  Pour la représentante, il n’est pas clair quelle partie du projet d’article 7 est censée faire l’objet d’un développement progressif et quelle partie doit être codifiée, ajoutant que ce texte ne reflète pas le droit international coutumier en vigueur.  La CDI ne devrait pas se présenter comme créant du droit international, a martelé la représentant, et devrait proposer des projets de traités et non des projets d’articles à être utilisés aussitôt par les cours nationales.

Il s’agit d’une période importante pour la CDI, a estimé la représentante, qui pourrait avoir un impact important sur la pertinence de ses travaux.  Elle a rappelé qu’il s’agit d’un organe respecté des Nations Unies et que ses travaux sont considérés par les cours nationales.  Cependant, la CDI affaiblit de cette façon les bases même de sa légitimité, a déclaré la représentante, avant de réaffirmer que ce sont les États et non la CDI qui créent le droit international, et ce, par traité.  Par ailleurs, elle a déploré que la liste des crimes présentée dans le projet d’article pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas n’est pas exhaustive et n’offre donc pas de certitude juridique.  Elle est arbitraire, selon elle, ajoutant qu’elle n’inclut pas le crime d’agression.  Pour la représentante, le projet d’article 7 doit être évalué en fonction des règles de procédure qui l’accompagnent.  En conclusion, elle a affirmé que ce texte ne contribue pas à l’équilibre entre l’égalité souveraine des États et la lutte contre l’impunité.

Sur le chapitre de la protection de l’atmosphère, Mme JU YEONG JANG (République de Corée) a appuyé l’insertion des alinéas du préambule pour trois raisons.  Tout d’abord, a-t-elle expliqué, le préambule reflète la corrélation étroite entre l’atmosphère et les océans.  Ensuite, il est axé sur la situation particulière dans laquelle les zones côtières de faible élévation et les petits États insulaires en développement se trouvent du fait de l’élévation du niveau de la mer.  Enfin, dans le contexte du développement durable, le préambule constate qu’il convient de tenir compte du fait qu’il est dans l’intérêt des générations futures de préserver durablement la qualité de l’atmosphère. 

Mme Jang a aussi appuyé le projet de directive 9, notamment la référence à des domaines spécifiques comme le droit international du commerce et de l’investissement, le droit de la mer et le droit international des droits de l’homme, tout en précisant que la liste n’est pas exhaustive.  Selon elle, il faut prendre en compte les principes de l’harmonisation et l’intégration systémique d’autres règles pertinentes lors de l’élaboration de nouvelles règles de droit international concernant la protection de l’atmosphère.  Elle a aussi estimé que le paragraphe 3 de la directive 9 était en harmonie avec l’objectif de développement durable.

Après avoir loué le travail de la Rapporteuse spéciale et du Comité de rédaction sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la représentante a fait remarquer que le projet d’article 7 a été adopté à l’issue d’un vote par appel nominal le 20 juillet dernier, méthode qui constitue une exception car le processus ordinaire est l’adoption par consensus.  Le fait que le projet d’article 7 ait été provisoirement adopté par 21 voix pour, 8 contre et une abstention révèle un désaccord de fond.  Elle a abondé dans le sens de la Rapporteuse spéciale pour reconnaître qu’il n’existe pas de limites ou d’exceptions à l’immunité ratione personae, soulignant toutefois le clivage autour des limites ou exceptions relatives à l’immunité ratione materiae comme la règle de lex lata ou lex ferenda.

Mme Jang a appuyé les efforts tendant à combattre l’impunité tout en invitant à accorder l’attention voulue à la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) à cet égard.  Elle a ainsi cité l’affaire du Mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo v. Belgique).  À cet égard, elle a prié la commission et la Rapporteuse spéciale de recueillir et d’examiner des pratiques pertinentes.

Saluant le travail de la CDI sur la protection de l’atmosphère, M. BATZION BEN DAVID GERTSMAN (Israël) a dit reconnaître l’importance des questions de la pollution marine, des gaz à effet de serre émis par les navires et de la montée du niveau de la mer.  Bien qu’il appuie le principe de l’harmonisation juridique, il s’est opposé à l’approche intégrée proposée par le Rapporteur spécial.  Selon lui, cette position est pertinente notamment en ce qui concerne le lien qui est fait par la commission entre la protection de l’atmosphère et le droit international sur les droits de l’homme, qui comportent des différences significatives.  Par ailleurs, il a déclaré que tout mécanisme de conformité doit être circonscrit à la protection de l'atmosphère et concentrer son activité sur des questions qui ne sont pas couvertes par des instruments existants, mettant en garde contre le risque de politisation. 

Concernant l'immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé qu’il existe une reconnaissance universelle de l’immunité des représentants de l’État devant les juridictions pénales étrangères, ajoutant qu’il s’agit d’une question procédurale.  Selon lui, l’immunité, dans ce contexte, a été développée en droit international afin d’assurer les principes de l’égalité souveraine des États et de prévenir la politisation.  Il s’est dit « vivement préoccupé » par le fait que la CDI n’a pas su refléter le droit international coutumier sur cette question.  Dans le cadre du projet d'article 7, il s’est particulièrement inquiété du traitement de la question de l’immunité ratione personae et des exceptions à l’immunité ratione materiae.  Alors que les projets d'articles stipulent que l’immunité ratione personae ne s’applique qu’à la « troïka » composée du chef de l’État, du chef de gouvernement et du ministre des affaires étrangères, il a fait remarquer qu’en vertu du droit international coutumier et d’une décision de la Cour internationale de Justice, l’immunité n’est pas limitée à ce groupe. 

Afin d’assurer le maintien des relations internationales et de l’ordre mondial, M. Gertsman a estimé que cette immunité devrait s’étendre à d’autres représentants de l’État de haut rang.  Selon lui, il n’existe pas de tendance ni de normes internationales relatives aux limites ou aux exceptions à l’immunité ratione personae.  La « nature problématique » du traitement de cette question par la CDI se reflète dans le fait que le projet d'article 7 a été adopté par vote plutôt que par consensus, a-t-il conclu, ajoutant que les discussions futures de la commission sur cette question devraient se fonder sur le principe de subsidiarité.

Mme INTAN DIYANA AHAMAD (Malaisie) a remarqué que, dans le chapitre consacré à la protection de l’atmosphère, les nouveaux paragraphes du préambule du projet de directives soulignent l’interaction étroite qui découle des relations physiques entre l’atmosphère et les océans.  Elle a rappelé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ne traite que des questions relatives à l’atmosphère de l’espace aérien territorial et qui affectent l’environnement marin.  C’est pour cela que la communauté internationale doit combler les failles du droit international tel qu’il existe actuellement, a-t-elle dit en se disant favorable au projet de préambule, afin de coordonner les lois sur la protection de l’atmosphère et les océans. 

La représentante a ainsi appuyé le nouveau paragraphe qui fait référence à la situation particulière des États côtiers de faible élévation et des petits États insulaires en développement, une préoccupation qui ressort aussi du paragraphe relatif aux intérêts des futures générations.  En ce qui concerne le projet de directive 9, relatif aux liens entre les différentes règles pertinentes de droit international, elle a été d’avis que la liste des règles ne devrait pas être exhaustive.

Passant au chapitre sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Ahamad a rappelé sa position, conforme à celle exprimée par la Rapporteuse spéciale dans son cinquième rapport, sur les différences dans la détermination d’un acte en tant que limite, en particulier dans le cas de crimes internationaux dans chaque État.  Elle a aussi rappelé qu’elle recommandait une formulation prudente du projet d’article 7, souhaitant aussi que le 7 (1) soit étudié plus avant pour examiner les différentes pratiques des États quant à la définition des crimes, en particulier la torture et les disparitions forcées.  La Malaisie maintient donc ses réserves quant à la qualification de ces crimes comme une exception à l’immunité. 

Mme NGUYEN THUY GIANG (Viet Nam) a salué le travail de la CDI sur la question de la protection de l’atmosphère et son lien avec le droit international, y compris le droit commercial, le droit de la mer et le droit international des droits de l’homme, ajoutant qu’il s’agit d’une question pressante pour les États.  Elle a par ailleurs estimé que le terme « atmosphère » devrait être mieux défini, afin de le différencier d’autres entités territoriales, et que les directives devraient être examinées plus à fond afin d’éviter tout conflit avec les lois existantes. 

Estimant que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État relève du droit international coutumier, la représentante a fait valoir que sa codification devait se faire dans le strict respect des principes de l’égalité entre les États, de la non-intervention dans les affaires intérieures des États et de la paix et de la sécurité internationales.  Estimant qu’il s’agit là des conditions nécessaires au maintien d’un équilibre entre l’immunité des représentants de l’État et de la lutte contre l’impunité, elle a invité la commission à poursuivre ses débats sur cette question.  En ce qui concerne la corruption, elle a expliqué que ce crime ne peut être considéré comme une exception à l’immunité, car il concerne les agissements d’un individu et n’est pas clairement établi en droit international.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a rappelé que sa délégation a présenté sa déclaration sur l’immunité le 25 octobre.  S’agissant de la protection de l’atmosphère, il s’est dit préoccupé de la direction que semble prendre la commission sur cette question.  Estimant que de nombreux instruments existant traitent déjà du développement et de la mise en place de traités relatifs à la protection de l'atmosphère, il a jugé qu’il ne revient pas à la commission de traiter de cette question.  Il s’est dit préoccupé que tout exercice visant à établir des règles juridiques sur des accords environnementaux dans des domaines spécifiques pourrait saper des accords ayant fait l’objet de négociations.  En outre, il a estimé qu’une telle entreprise pourrait compliquer plutôt que faciliter les négociations et entraver les progrès des États dans le domaine de l’environnement. 

En conséquence, a rappelé M. Simonoff, les États-Unis se sont opposés à l’inclusion de cette question à l’ordre du jour de la commission.  Il a ajouté que, parmi les préoccupations relatives aux rapports précédents exprimées au cours des dernières années, les plus sérieuses portaient sur les « obligations » et « exigences », contrevenant ainsi à l’entente de 2013 à cet effet.  La commission est allée encore plus loin cette année, a-t-il déploré, en adoptant un projet de directive qui prétend se prononcer non seulement sur l’interprétation des traités relatifs à l’atmosphère, mais aussi sur de nouvelles règles du droit international.  Devant ce constat, il a invité la commission à cesser ses activités sur cette question.

M. ANDITYA  HUTAMA PUTRA (Indonésie) a déclaré accorder la plus haute importance au sujet de la protection de l’atmosphère et a soutenu l’inclusion de la question dans le programme de travail de la Commission du droit international.  Cependant il a reconnu que cette question est épineuse et il a fait part de ses préoccupations, notamment sur le fait que des questions importantes du droit de l’environnement sont exclues des débats de la CDI, comme le principe pollueur-payeur ou encore des traitements différenciés.  La commission, avec son expertise, est le meilleur instrument pour combler les écarts existant entre les différents instruments juridiques existants.  En outre, il a estimé qu’il serait intéressant d’inclure dans le préambule la notion de « patrimoine de l’humanité ».

En ce qui concerne l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le délégué a estimé qu’il ne devrait pas y avoir de place pour l’impunité pour les crimes internationaux les plus graves.  Il a fait observer qu’il n’existe que peu de lois nationales qui reconnaissent les limites et exceptions à l’immunité.  Dans le cas de l’Indonésie, il n’en a aucune.

Sur le chapitre de la protection de l’atmosphère, Mme COUMBA GAYE (Sénégal) a approuvé l’intégration des diverses branches du droit international dans le projet de directive 9 sur la protection de l’atmosphère, notamment les règles du droit international du commerce et de l’investissement, du droit de la mer et du droit international des droits de l’homme.  Elle a déclaré que l’action de la CDI à cet égard aide à surmonter le risque de fragmentation juridique, qui avait conduit les délégations à émettre des réserves.  Elle a considéré que la protection de l’atmosphère fait partie du droit international général et invité la commission à s’y référer.  Afin d’éviter les conflits éventuels, elle a invité la CDI à assurer l’harmonisation de ses projets de directives avec les accords existant sur cette question.  Elle a ajouté que les accords multilatéraux sur l’environnement portent également sur la protection de l’atmosphère.  Elle a soutenu que les pays en développement doivent faire l’objet d’une attention particulière en raison de leur vulnérabilité économique et environnementale.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: 17 ans après l’adoption de la résolution 1325, progrès isolés et « revers alarmants » dans la participation des femmes aux processus de paix

8079e séance – matin
CS/13045

Conseil de sécurité: 17 ans après l’adoption de la résolution 1325, progrès isolés et « revers alarmants » dans la participation des femmes aux processus de paix

La participation des femmes aux processus de paix et politiques a connu des progrès isolés mais au cours de l’année écoulée, des « revers alarmants », s’est desolée la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, lors de la réunion biannuelle du Conseil de sécurité sur la problématique « femmes, paix et sécurité » à laquelle sont intervenues aujourd’hui 91 délégations.

Venue présenter le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la question, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a cité en exemple la conformité de l’Accord de paix en Colombie avec les exigences de la résolution 1325 (2000), qui demande aux États « de faire en sorte que les femmes soient davantage représentées à tous les niveaux de prise de décisions dans les institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et le règlement des différends ».

Cette résolution avait aujourd’hui un visage et une voix, ceux de Charo Mina-Rojas, coordonnatrice nationale de « Proceso de Comunidades Negras », qui a expliqué avoir pris part au processus de paix « historique » entre le Gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

Un accord appelé, selon elle, « à faire école », dans la mesure où deux de ses dispositions sont « particulièrement progressistes » et pourraient amener des « changements significatifs » pour les futurs processus de paix dans le monde.  Elle a cité l’intégration implicite de la perspective « genre » comme principe intersectoriel et celle d’un chapitre ethnique qui offre des garanties importantes pour assurer l’autonomie, la protection et la promotion des droits des peuples d’ascendance africaine dans une perspective « genre, famille et génération ».

Malheureusement, a constaté la Directrice d’ONU-Femmes, la Colombie semble être une exception, comme en témoignent l’absence des femmes à la table des négociations de paix et leur faible taux de 3% parmi les Casques bleus déployés dans le cadre des opérations de maintien de la paix de l’ONU, un chiffre « inacceptable » en 2017, a tranché la Chef de cabinet du Secrétaire général, Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti qui a confirmé la détermination de M. Antonio Guterres à se concentrer sur la prévention.

Engagé dans des discussions avec les pays fournisseurs de contingents, le Secrétariat de l’ONU est déterminé à accroître le nombre des femmes médiatrices, a assuré la haut-fonctionnaire, qui s’est lancée dans un plaidoyer en faveur des partenariats avec les organisations régionales et internationales et la société civile.  L’ONU, a-t-elle dit, entend s’engager plus systématiquement avec les organisations féminines, « partenaires naturelles de la prévention ».  

Mme Viotti a regretté les très nombreux exemples d’initiatives de prévention menées par les femmes qui sont soit insuffisamment appuyées, soit « déconnectées » des mécanismes nationaux et régionaux d’alerte rapide ou des organes décisionnels en général.  La Ministre des affaires étrangères de la Suède, Mme Margot Wallström s’est indignée, à son tour, que les organisations et réseaux de femmes reçoivent un « montant ridiculement bas » du financement du développement.  Cela doit changer, s’est-elle impatientée.

Cela change peut-être.  Plusieurs intervenants se sont félicités du Réseau de femmes médiatrices de la région méditerranéenne, lancé par l’Italie hier à Rome avec le soutien du Parlement.  En mars 2017, l’Union africaine avait déjà créé son « Réseau africain des femmes dans la prévention des conflits et la médiation de la paix », après celui des femmes nordiques médiatrices de la paix.

L’Éthiopie a fait état des politiques en matière d’égalité hommes-femmes de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Le Rwanda a signalé une initiative de la Communauté de l’Afrique de l’Est pour développer un « cadre destiné à renforcer le leadership des femmes » dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix.

Reste que c’est aux États Membres qu’il incombe au premier chef de mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) et les huit autres résolutions pertinentes du Conseil de sécurité adoptées depuis 17 ans.  C’est ce que la France a dit qu’elle s’efforce de faire dans le cadre de son deuxième plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité, couvrant la période 2015-2018.  Plusieurs pays ont en effet présenté leur plan d’action national.

Mais combien de résolutions, d’études, de réunions seront encore nécessaires pour en finir avec le chiffre « inacceptable » de 9% de femmes parmi les participantes aux quelque 30 grandes négociations menées ces 25 dernières années? s’est impatientée la Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Mme Michaëlle Jean.  L’Équateur a dénoncé « les plafonds de verre, les échelles bancales et les sols glissants » qui retardent les progrès. 

« De quoi avons-nous peur?  D’être plus performants? », s’est demandée la Chef de l’OIF.  La Thaïlande n’a pas dit autre chose lorsqu’elle a appelé à la fin des préjugés sur ces femmes « pacificatrices douces, propagatrices d’un sentiment de sécurité ».  Non, les femmes sont « des agents efficaces du changement ».

Nous savons ce qu’il faut, a souligné la Ministre suédoise des affaires étrangères: « un espace politique, une société civile active et un renforcement constant des capacités » et les exemples sont là, a-t-elle dit, en revenant sur la Colombie où les organisations féminines ont ouvert la voie à leur inclusion dans le processus de paix mais aussi sur l’Afghanistan où le Haut Conseil de la paix compte 13 femmes et 39 hommes, et sur la Somalie, où le Forum national du leadership a fixé un quota de femmes au Parlement.  « Pas de femmes, pas de paix », a résumé la Ministre.

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

Réaliser la promesse du programme concernant les femmes et la paix et la sécurité: assurer sa pleine application, y compris la participation des femmes

Rapport du Secrétaire général sur les femmes et la paix et la sécurité (S/2017/861)

Lettre datée du 20 octobre 2017, adressée au Secrétaire général par la Chargée d’affaires par intérim de la Mission permanente de la France auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2017/889)

Déclarations

Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de Cabinet du Secrétaire général de l’ONU, a voulu insister sur la prévention, comme pilier essentiel de l’agenda sur les femmes et la paix et la sécurité et priorité du Secrétaire général.  Les liens entre prévention et égalité des sexes, a-t-elle dit, sont non seulement nombreux mais très clairs.  Elle a regretté les très nombreux exemples d’initiatives de prévention menées par les femmes qui sont soit insuffisamment appuyés soit déconnectés des mécanismes nationaux et régionaux d’alerte rapide ou des organes décisionnels en général.  Le Secrétaire général, a assuré sa Chef de Cabinet, est fermement déterminé à promouvoir l’égalité des sexes dans le travail de paix et de sécurité de l’ONU et à investir dans l’analyse de cette égalité dans les conflits.  Son Cabinet s’est d’ailleurs doté d’un Conseiller principal, avec rang de Secrétaire général adjoint, pour la prévention et le genre qui travaille à consolider les liens entre ces deux problématiques.

La Chef de Cabinet a expliqué que la visite que le Secrétaire général effectue en ce moment en République centrafricaine vise non seulement à appuyer l’opération de l’ONU en ce moment délicat mais aussi à voir par lui-même comment la nouvelle approche de la prévention de l’exploitation et des atteintes sexuelles change les choses sur le terrain.

Le Secrétaire général a aussi mis en place un plan concret pour parvenir à la parité entre les sexes au sein de l’ONU.  Comme cette parité est en échec dans les opérations de maintien de la paix, il travaille avec les pays contributeurs de troupes et de police pour accroître le nombre des femmes en uniforme car il est tout simplement « inacceptable » qu’en 2017, les femmes ne représentent que 3% des soldats de la paix, « la partie la plus visible de l’ONU ».  L’Organisation travaille aussi, a poursuivi la Chef de Cabinet, à accroître sa réserve de médiatrices.  Le nouveau Conseil consultatif sur la médication est d’ailleurs à la fois de haut niveau et paritaire.  Le nouveau Bureau de lutte contre le terrorisme intègre lui aussi la perspective genre dans ses efforts contre l’extrémisme violent.  Les propositions de réforme de l’architecture de paix et de sécurité du Secrétariat mettront aussi un accent fort sur le renforcement du lien entre les stratégies politiques et l’expertise genre.

Énumérant les cinq résolutions pour l’année à venir, la Chef de Cabinet a souligné que l’ONU entend s’engager plus systématiquement avec les organisations féminines comme « partenaires naturelles de la prévention ».  Elle fera aussi en sorte que ses initiatives de prévention et de suivi mettent l’accent sur les violations des droits des femmes.  L’ONU, a poursuivi la Chef de Cabinet, entend également s’attaquer aux causes structurelles et sous-jacents des crises, y compris les inégalités entre les hommes et les femmes.  Elle veut améliorer la collecte et l’analyse des statistiques sur le genre et encourage d’ailleurs les États à suivre les indicateurs d’égalité des sexes comme partie intégrante de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  L’égalité des sexes et la sécurité des femmes sont parmi les indicateurs les plus fiables de la paix, a insisté la Chef de Cabinet.

Dix-sept ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000), la mise en œuvre demeure aléatoire, a-t-elle reconnu.  Si l’on comprend clairement le lien entre égalité des sexes, participation des femmes et stabilité et résilience, on ne fait pas assez pour opérationnaliser cette compréhension.  À partir de l’année prochaine, a annoncé la Chef de Cabinet, le rapport du Secrétaire général se concentrera sur les résultats et moins sur les activités.  Elle a invité tous les États Membres à partager leurs informations et leurs exemples et en dire plus sur l’impact de leurs politiques.  Profitons-en pour identifier les lacunes et tirer parti des succès, a-t-elle conclu, non sans oublier de souligner que la concrétisation de cette vision dépendra de la profondeur du partenariat avec les États, les organisations régionales et la société civile, conscients qu’une participation effective des femmes rend plus forts et plus viables les efforts de paix.

Si le rapport du Secrétaire général célèbre à juste titre des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) et des autres résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, « il met également en lumière nombre de tendances et de revers alarmants », a affirmé Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive d’ONU-Femmes.  Elle a commencé par saluer l’Accord de paix qui est actuellement mis en œuvre en Colombie, lequel prévoit une centaine de dispositions relatives à l’égalité entre les sexes.  Malheureusement, a-t-elle constaté, ce pays semble être une exception dans le monde, comme en témoigne le fait que l’absence des femmes à la table des négociations de paix est plus souvent la norme que l’exception.  À la lumière des indicateurs dont nous disposons, nous avons constaté que nous faisons un peu moins bien qu’il y a un an, a révélé la Directrice exécutive.  Ainsi, à la Conférence de l’union pour la paix au Myanmar en 2016 –« avant la crise actuelle »– il y avait 7 femmes pour 68 hommes.  En République centrafricaine, aux récents pourparlers de paix qui se sont déroulés sous les auspices de la Communauté de Sant’Egidio, aucune femme n’était présente.  En Syrie, six ans après le début du conflit, la participation des femmes aux négociations de paix se limite pour l’essentiel à un rôle consultatif.  Cette « marginalisation politique » va au-delà des pourparlers de paix, a-t-elle indiqué.

À peine 17 pays ont une femme à la tête de l’État ou du gouvernement, dont un seul se relevant d’un conflit, le Liberia, a précisé la haut-fonctionnaire, cependant que la proportion de femmes parlementaires dans les pays en conflit et postconflit a stagné à 16%, ces deux dernières années.  Le recours à des quotas et à des mesures provisoires spéciales pourrait contribuer à remédier à cette situation, a poursuivi Mme Mlambo-Ngcuka, qui a relevé qu’en Somalie, la représentation des femmes au Parlement a atteint 25%, par rapport au taux de 14% lors du précédent cycle électoral.  Au Mali, a-t-elle encore noté, les femmes représentent 30% des candidats élus à Bamako, Gao et Tombouctou, soit quatre fois plus que lors des dernières élections locales. 

La Directrice exécutive a souligné que les atrocités commises contre les femmes et les filles en temps de conflit sont désormais connues de tous.  La communauté internationale a des preuves suffisantes des atrocités en Syrie, au Soudan du Sud ou en République centrafricaine.  En revanche, leurs auteurs continuent d’échapper à leurs responsabilités, tandis que les victimes ne reçoivent pas l’appui nécessaire, a dénoncé Mme Mlambo-Ngcuka. 

La Directrice exécutive a rappelé les programmes, qui n’existaient pas il y a encore 20 ans, et qui ont permis d’apporter un soutien à des centaines de milliers de victimes.  Cependant, de nombreuses autres n’en bénéficient pas en raison d’un manque de ressources, d’accès ou de sécurité, a-t-elle déploré.  Rappelant que les conséquences de la guerre pour les femmes et les filles ne se limitent pas à la violence sexuelle, la Directrice exécutive a souligné que les inégalités entre les sexes entravaient leur accès à la nourriture, à l’eau, à la santé, à l’emploi ou bien encore à l’éducation.  Au Yémen, un nombre significatif de filles de moins de 15 ans sont mariées, tandis que le nombre de femmes analphabètes devrait atteindre les deux tiers, effaçant les gains réalisés au cours des dernières décennies, a-t-elle dit. 

Mme Mlambo-Ngcuka a rappelé que la mortalité maternelle au Nigéria est près de 10 fois plus élevée dans le nord-est du pays, touché par un conflit, que dans le sud-ouest, en raison de la destruction des infrastructures de santé.  Il y a quelques mois, nous fêtions la libération de 82 écolières de Chibok, lesquelles sont devenues des jeunes femmes après trois ans de captivité, a noté Mme Mlambo-Ngcuka, ajoutant que celles-ci reçoivent désormais un soutien médical et éducatif. 

Venant aux défis et aux progrès liés au Conseil de sécurité, Mme Mlambo-Ngcuka a rappelé que le nombre de femmes dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU était encore très bas.  « Nous avons essayé de mettre un terme à l’exploitation et aux atteintes sexuelles commises par les soldats de la paix mais nous avons échoué », a-t-elle reconnu, en soulignant les conséquences négatives de cette situation pour la réputation de l’ONU.  Appelant l’ONU et les États Membres à y remédier, elle a jugé encourageants la réduction des allégations de violences sexuelles en République centrafricaine et les progrès accomplis dans le soutien apporté aux victimes.  Une culture de la responsabilité est en train de se mettre en place, a-t-elle affirmé.  La Directrice exécutive a en revanche déploré la réduction des postes de spécialistes de la problématique hommes-femmes en raison des coupes dans le budget du maintien de la paix.  Les missions et les équipes de pays ont pourtant davantage besoin de ces postes, que moins, a-t-elle dit. 

Mme Mlambo-Ngcuka a redit l’engagement d’ONU-Femmes à faire en sorte que l’analyse de la question du genre en temps de conflit soit dûment prise en compte lors de la création, du déploiement et du retrait des opérations de maintien de la paix.  Le Fonds de consolidation de la paix a alloué, en 2016, 19,2% de ses ressources à l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, dépassant la cible fixée de 15%, s’est-elle réjouie.  Mme Mlambo-Ngcuka a exhorté les États Membres à continuer d’appuyer le Fonds et a souhaité que la cible de 15% soit adoptée par les donateurs dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale et par les fonds mis en place au profit de pays fragiles ou affectés par un conflit.  Le « Women’s Peace and Humanitarian Fund », le seul fonds onusien consacré aux femmes, à la paix et à la sécurité, devrait être doté de davantage de ressources, afin d’appuyer les organisations féminines en RDC, en Iraq ou bien encore en Palestine, a-t-elle déclaré. 

Mme Mlambo-Ngcuka a prévenu que les défenseures des droits des femmes n’ont jamais été autant la cible d’attaques.  Nous ne ferons jamais assez pour les protéger, a-t-elle dit, avant de se féliciter qu’elles soient désormais invitées par le Conseil à prendre la parole.  Si elle a salué l’adoption de résolutions consacrées exclusivement aux moyens de remédier à l’exploitation et aux atteintes sexuelles, elle a estimé que le Conseil pourrait faire plus pour « peser de tout son poids politique » derrière le programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité.  La Directrice exécutive a souligné la nécessité de faire fond sur les gains enregistrés, au nombre desquels elle a mentionné l’établissement de listes régionales de femmes médiatrices ou bien encore l’adoption par 68 pays et territoires de plans d’action nationaux.  Nous menons 25 projets destinés à prévenir l’extrémisme violent dans plusieurs pays et régions, a-t-elle continué.  Elle a ajouté que plus de 60 pays, organisations régionales et internationales et ONG ont adhéré à l’Appel à l’action pour la protection contre la violence sexiste dans les situations d’urgence. 

Mme Mlambo-Ngcuka a salué l’adoption du Traité « historique » sur l’interdiction des armes nucléaires et souligné les signes encourageants pour l’égalité des sexes recensés dans les tribunaux internationaux.  Il y a quelques jours, la Cour de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a créé un précédent en rendant sa toute première décision sur la violation du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique, dit Protocole de Maputo, a-t-elle relevé.  En conclusion, la Directrice exécutive a reconnu que le programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité, devenu un pilier essentiel des affaires internationales, n’en était qu’au début de sa mise en œuvre. 

Au nom du Groupe de travail des ONG sur les femmes et la paix et la sécurité, Mme CHARO MINA-ROJAS, Représentante de la société civile et Coordonnatrice nationale de « Proceso de Comunidades Negras », a rappelé qu’elle était impliquée dans le processus de paix historique à la Havane entre le Gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).  En représentant le Conseil national afro-colombien pour la paix (CONPA), j’ai plaidé pour que l’on veille au respect des droits et que l’on réponde aux attentes des peuples d’ascendance africaine dans l’Accord de paix, a-t-elle dit.

Je suis en mesure de parler comme témoin de l’importance des négociations et des processus de mise en œuvre inclusifs qui soutiennent la participation des femmes de différentes origines ethniques, emblématiques des objectifs et principes de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité.  Deux dispositions de l’Accord de paix étaient particulièrement progressives et pourraient amener des changements significatifs pour les futurs processus de paix dans le monde: l’intégration implicite de la perspective « genre » comme principe intersectoriel et celle d’un chapitre ethnique qui offre des garanties importantes pour assurer l’autonomie, la protection et la promotion des droits des peuples d’ascendance africaine dans une perspective « genre, famille et génération ».

L’Accord de paix a une grande importance pour la société civile et nous nous attendons à ce que, dans sa mise en œuvre, cet engagement et la participation active des femmes, des groupes ethniques et de leurs communautés continuent. 

Néanmoins, la Colombie, a averti Mme Mina-Rojas, risque de gaspiller cette chance si le désarmement échoue et si les communautés les plus affectées par le conflit armé, y compris les militantes et les activistes des droits de l’homme, continuent à être ignorées dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Je suis devant vous aujourd’hui pour rendre audible leur appel urgent et pour souligner que pour mon peuple, « c’est une question de vie ou de mort ».

Il y a trois domaines prioritaires sur lesquels j’aimerais mettre l’accent dans ma déclaration, a confié l’oratrice qui a cité la participation des femmes de différentes origines ethniques, la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, des activistes de la société civile et des communautés autochtones et d’ascendance africaine, et la surveillance et la réalisation inclusives des processus de paix. 

Le premier domaine demande la participation continuelle des femmes, surtout des communautés diverses, dans toutes les matières relatives à la réalisation de l’Accord de paix.  Les femmes en Colombie et surtout celles d’ascendance africaine, se mobilisent depuis des décennies pour rendre visibles les violations de leurs droits et pour assurer des transformations significatives dans l’approche de la paix et de la sécurité.  En Colombie, a déploré la représentante, il n’y a aucune organisation ethnique représentative dans l’organisme de haut niveau sur le genre établi pour surveiller la mise en pratique du chapitre genre de l’Accord de paix.

Alors que les parties à l’Accord travaillent avec la communauté internationale pour démobiliser les combattants des FARC, les paramilitaires et les autres acteurs armés ont rempli le vide laissé par les FARC dans de nombreuses régions de la Colombie, pointant la nécessité urgente de consulter les organisations féminines locales et les leaders communautaires, de même que celle de les inclure dans la conception des stratégies de protection afin de sauvegarder leurs communautés. 

En consultation avec les communautés autochtones et d’ascendance africaine, le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent appuyer le Gouvernement colombien dans la conception et la mise en pratique de systèmes de sécurité et d’autoprotection communautaires qui tiennent compte de la question du genre.  Ignorer nos préoccupations sécuritaires et nos alertes a pour l’instant eu des conséquences dévastatrices, a rappelé Mme Mina-Rojas.

En ce qui concerne la nécessité de garantir la sécurité intégrale et collective qui comprend la sécurité physique des leaders et des communautés ainsi que le respect et la protection des territoires et des droits territoriaux, elle a indiqué que la prolifération des armes alimente la peur et les déplacements forcés dans les communautés autochtones et d’ascendance africaine, ce qui influe négativement sur la participation des femmes et leur mobilité,  en donnant lieu à une aggravation de la violence sexuelle et fondée sur le sexe. 

L’oratrice s’est dite alarmée par le nombre croissant d’assassinats et de menaces à l’égard des défenseurs et activistes des droits de l’homme partout en Colombie.  Les leaders et les membres du Conseil communautaire d’Alto et Frontera, une municipalité proche de la frontière avec l’Équateur continuent, par exemple, à être ciblés par des groupes paramilitaires et des détracteurs des FARC qui cherchent à contrôler le territoire afin d’y cultiver et de vendre la coca.  La semaine dernière, nous avons enterré Jair Cortés, le sixième leader tué dans cette municipalité.  Nous avons aussi été forcés d’évacuer plusieurs femmes leaders et leurs familles menacées de mort.

La violence sexuelle et fondée sur le sexe et la stigmatisation qui l’accompagne, surtout contre les femmes autochtones et d’ascendance africaine et leurs enfants, représentent une question de sécurité intégrale et collective.  Le silence qui entoure ces crimes est plus condamnable encore que les crimes eux-mêmes.  Les femmes activistes risquent leurs vies pour porter leurs cas devant la justice. 

Il faut de toute urgence établir une ligne de communication directe entre les autorités autochtones et d’ascendance africaine, les organisations féminines et la juridiction spéciale pour la paix, dont la Commission vérité, coexistence et non-répétition, pour que ces cas deviennent une priorité, que leurs auteurs soient traduits en justice et que les victimes aient accès aux soins et à un appui psychosocial.

Pour terminer, a indiqué Mme Mina-Rojas, il est crucial que le plan- cadre pour la mise en œuvre de l’Accord de paix inclue des objectifs et des indicateurs spécifiques pour mesurer les progrès et les résultats des politiques, programmes et réformes, à la lumière des besoins, des valeurs et des droits des peuples autochtones et d’ascendance africaine. 

Il est indispensable que le Gouvernement colombien et sa commission de mise en œuvre acceptent et incluent les indicateurs ethniques, y compris les indicateurs fournis par les organisations autochtones et d’ascendance africaine plus tôt ce mois-ci.  Ces indicateurs doivent être soutenus par une véritable volonté politique.  Ils aideront à transformer les conditions de la guerre qui entravent le bien-être des femmes autochtones et d’ascendance africaine et leurs communautés et avancer vers le développement social et la sécurité collective. 

Pour les femmes d’ascendance africaine, assurer leur sécurité collective nécessite aussi que les principes de consentement libre, préalable et informé, de consultation, d’autonomie, d’intégrité culturelle et de participation soient respectés et que les droits de l’homme inscrits soient inconditionnellement encouragés et protégés.  Afin d’atteindre la paix en Colombie et ailleurs, il n’est pas seulement question de mettre fin à la guerre et à la violence, mais aussi de traiter collectivement les causes profondes du conflit, y compris les injustices sociales, qu’elles soient liées au sexe ou à la race, et de promouvoir le bien-être de toutes les personnes de toutes origines et toutes religions.

Cela implique aussi l’appui aux efforts des femmes en faveur de la démilitarisation et du désarmement.  Tous les acteurs, y compris le Conseil de sécurité, le système de l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, et surtout les États Membres, ont la responsabilité d’honorer leurs obligations.  S’il est mis en pratique et bien financé, l’agenda sur les femmes, la paix et la sécurité peut ouvrir le chemin de la paix en Colombie et dans le monde.  L’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et la protection des droits des femmes sont fondamentales pour la prévention des conflits et une paix durable, a insisté Mme Mina-Rojas. 

Mme MICHAËLLE JEAN, Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a demandé combien de résolutions, d’études, de réunions seront encore nécessaires pour en finir avec le chiffre « inacceptable » de 9% de femmes parmi les participants aux quelque 30 grandes négociations menées ces 25 dernières années.  « De quoi avons-nous peur?  D’être plus efficaces? » a-t-elle lancé, avant d’appeler les organisations internationales et les États à s’engager résolument, avec la société civile, à identifier et mobiliser de manière plus systématique et coordonnée des femmes pour s’asseoir à toutes les tables de négociation.  Mme Jean a également déploré le chiffre « dérisoire » de 3% de femmes seulement parmi le personnel militaire des missions de la paix de l’ONU alors qu’il est démontré que leur présence contribue à un meilleur comportement des forces de sécurité et accroît la crédibilité des missions.  « De quoi avons-nous peur?  D’être plus performants? ». 

Impliquée depuis plus de 15 ans dans la contribution francophone aux opérations de maintien de la paix, l’OIF se mobilise sur le terrain pour encourager la participation des femmes et former les forces de sécurité aux droits des femmes.  La Secrétaire générale a ajouté qu’il faut faire plus pour l’intégration économique et sociale des femmes parce que la paix, la stabilité et la sécurité dépendent aussi d’un développement partagé et inclusif.  Il faut faire plus pour le financement en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité, plus pour une pleine reconnaissance de toutes les formes de discrimination et des crimes commis contre les femmes, plus pour que cesse l’impunité.

Mme IVANNA KLYMPUSH-TSINTSADZE, Vice-Premier Ministre de l’intégration européenne et euro-atlantique de l’Ukraine, s’est dite convaincue de la nécessité pour le Conseil de sécurité de renforcer la mise en œuvre de ses résolutions relatives à la problématique femmes, paix et sécurité.  D’une manière générale, a-t-elle préconisé, la communauté internationale doit accorder une attention suffisante à la protection des femmes dans les zones touchées par les conflits, et renforcer en parallèle leur participation significative aux processus politiques et de consolidation de la paix, tout en veillant à la complémentarité de ces deux piliers.  Dans ce contexte, elle a estimé que le déploiement de conseillères de la problématique hommes-femmes et de la protection des femmes au sein des opérations de maintien de la paix est déterminant.

Depuis qu’elle est devenue membre non permanente du Conseil, l’Ukraine, a assuré Mme Klympush-Tsintsadze, a fait de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) une priorité quotidienne.  Ainsi, en 2016, son gouvernement a adopté un plan national d’action pour la mise en œuvre de cette résolution pour la période 2016-2020, qui ambitionne d’élargir la participation des femmes aux processus de prise de décisions dans les domaines de la sécurité et de la défense nationales, et du maintien de la paix.  Ce plan a également pour objectif de garantir la protection des femmes et des filles, et de prévenir les violences dirigées contre elles et d’y répondre.  En outre, l’Ukraine, avec le soutien d’ONU-Femmes, s’est dotée d’une stratégie pluriannuelle de parité entre les sexes pour la sécurité et la défense, qui vise à accroître la représentation des femmes dans les forces armées.  La ministre a indiqué que le Président ukrainien venait tout juste de nommer une femme à la tête du processus de consolidation de la paix dans la région du Donbass, cependant que deux femmes font partie des groupes de travail de Minsk, en charge des questions humanitaires et politiques. 

« L’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie et l’occupation temporaire d’une partie du territoire national ont eu pour conséquence des violations généralisées des droits de l’homme, y compris des violences sexuelles et dirigées contre les femmes », a accusé en conclusion Mme Klympush-Tsintsadze, en faisant état du chiffre de 58% de femmes parmi les personnes déplacées par le conflit qui sévit dans l’est du pays. 

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, qui rentre à peine d’une visite à Hérat et Kaboul, en Afghanistan, où elle a pu rencontrer des filles et des femmes, s’est fait le porte-parole de leurs difficultés à joindre les deux bouts, à préserver la sécurité de leur famille et à éviter les risques de violence sexuelle.  « Que fait l’agenda femmes, paix et sécurité pour ces femmes? »  Eh bien, a répondu la Ministre, il devrait faire en sorte que ceux qui travaillent dans le secteur de la sécurité aient plus de collègues femmes; que les femmes médiatrices, formées entre autres par la Suède, aient un vrai rôle et travaillent sans craindre des menaces de mort; que la fille que j’ai rencontrée, âgée de 18 ans, mariée à 13 ans et mère de cinq enfants, eut été capable d’avoir 10 ans de plus pour grandir, avoir une éducation et réaliser ses rêves. 

« L’oppression des femmes est une maladie mondiale », s’est indignée la Ministre, dénonçant le fait que les femmes sont systématiquement sous-représentées dans les processus décisionnels, qu’elles sont moins bien payées que les hommes et que dans certains domaines, elles n’ont tout simplement pas de droits. 

La violence sexuelle, comme arme, est l’expression ultime de l’oppression des femmes, s’est encore indignée la Ministre.  Je l’ai vu de mes propres yeux, a-t-elle rappelé, lorsque j’étais la première Représentante spéciale du Secrétaire général pour la violence sexuelle dans les conflits entre 2010-2011.  Ce que j’ai réalisé, a-t-elle indiqué, c’est que nous commettons trois erreurs lorsque nous examinons la question d’une violence « inévitable, innommable mais un moindre crime ». 

La Ministre a insisté sur l’importance de la collecte et de l’analyse de données ventilées par sexe, par exemple sur le niveau d’éducation, les personnes déplacées et même le nombre de femmes et d’hommes policiers.  Il nous faut des rapports fondés sur une bonne analyse de données dûment collectées. 

Elle a souligné l’importance d’un autre élément, l’expertise.  Elle a dit craindre que dans la foulée des coupes budgétaires et des mandats intégrés, le nombre des spécialistes de la problématique hommes-femmes ne vienne à diminuer. 

La Ministre a enfin cité les organisations et réseaux de femmes qui reçoivent un montant ridiculement bas du financement du développement.  Cela doit changer, s’est-elle impatientée.  Nous savons ce qu’il faut, « un espace politique, une société civile active et un renforcement constant des capacités » et les exemples sont là, a dit la Ministre, en citant l’Afghanistan où le Haut Conseil de la paix compte 13 femmes et 39 hommes, la Somalie, où le Forum national du leadership a fixé un quota de femmes au Parlement, et la Colombie où les organisations féminines ont ouvert la voie à leur inclusion dans le processus de paix.  « Pas de femmes, paix de paix », s’est résumé la Ministre.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) s’est voulu « franc »: nous nous réunissons ici pour répéter la même chose, demander que plus de femmes participent aux processus de paix et que l’on passe de la parole aux actes.  Séance après séance, rapport du Secrétaire général après rapport du Secrétaire général, on pose le même constat: la mise en œuvre du programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité demeure insuffisante.  Le représentant a donc demandé aux États Membres à se montrer « très précis ».  Dans ce souci de précision, il a parlé de l’aide de son pays aux pays comme le Yémen, la Syrie ou la Somalie pour améliorer la participation des femmes, faire entendre leur voix et accroître leur influence.  Il a aussi rappelé que son pays s’est fait le « chantre » de la lutte contre l’exploitation et les atteintes.  Nous avons, a justement précisé le représentant, lancé 23 projets dans des zones de conflit afin d’aider les rescapées et lutter contre leur stigmatisation.  Deux millions de dollars ont été versés au Fonds d’affectation en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles.  À ce propos, le délégué a jugé très préoccupant que le Secrétariat n’accorde plus la même importance aux spécialistes de la problématique hommes-femmes dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU. 

Pour la première fois de son histoire, le Royaume-Uni compte en même temps une femme Premier Ministre et une femme Présidente de la Cour suprême.  L’égalité des sexes reste au cœur de la politique étrangère, « nous devons pratiquer ce que nous prêchons quotidiennement », a conclu M. Rycroft, sous une salve d’applaudissements. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rappelé que depuis son adoption il y a 17 ans, la résolution 1325 (2000) continue de se heurter à des difficultés de mise en œuvre.  Convaincu que des informations plus précises sont « indispensables », il a tout particulièrement souligné l’importance des données ventilées par sexe, pour surmonter les difficultés.  Il a donc salué l’initiative de certains États Membres de mettre au point un « indice femmes, paix et sécurité ».  La Bolivie, a-t-il dit, a élaboré des textes de loi pour promouvoir une société plus équitable, en insistant sur l’émancipation politique des femmes.  L’objectif de la parité a été atteint au Parlement, la Bolivie étant classée au deuxième rang mondial pour le nombre de femmes parlementaires.  Sur le plan économique, priorité est donnée au droit foncier des femmes, ce qui leur a permis d’acquérir, là aussi, une réelle autonomie.  Il y a 10 ans, a-t-il rappelé, 38% de personnes vivaient dans la pauvreté en Bolivie, contre 16% aujourd’hui, résultat d’une meilleure répartition des richesses, dont les femmes ont particulièrement bénéficié. 

M. FODÉ SECK (Sénégal) a rappelé que la résolution 1325 (2000) était « d’inspiration africaine, namibienne plus précisément ».  Après avoir pris connaissance des recommandations du Secrétaire général, le représentant a estimé que l’espoir est tout de même permis avec la mise en place de structures et d’instruments comme le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, le Réseau des points focaux nationaux, le « Women’s Peace and Humanitarian Fund », qui sont tous venus renforcer les structures régionales et nationales.  L’Afrique participe à cette dynamique par le biais du Protocole de Maputo relatif aux droits des femmes et de la Déclaration solennelle sur l’égalité des sexes en Afrique de 2004.  De même, un poste d’envoyé spécial pour les femmes, la paix et la sécurité a été créé par la Commission de l’Union africaine, alors que le Réseau des femmes leaders africaines voyait le jour.

Au plan sous-régional, les membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont adopté la Déclaration de Dakar sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Une Unité genre a même été créée au Secrétariat exécutif de la CEDEAO, tandis qu’ont été mis en place un plan stratégique sur le genre et une politique en matières sexospécifques.  Pour sa part, le Sénégal a intégré tous les instruments internationaux, régionaux et sous-régionaux dans son arsenal juridique.  Le pays a ainsi institutionnalisé le genre dans les interventions des forces de défense et de sécurité sénégalaises.  Quelque 113 Sénégalaises sont à présent déployées dans des missions de maintien de la paix. 

Le représentant a prôné le renforcement de la coopération avec les États pour une mise en œuvre effective des plans d’action nationaux élaborés en application de la résolution 1325.  Il a saisi cette occasion pour attirer l’attention sur « la particularité de la bande sahélo-saharienne où se développent de façon inquiétante l’extrémisme violent et le terrorisme ».  Pour le Sénégal, le Groupe d’experts informel, créé par la résolution 2242, ainsi que le Groupe de travail spécial sur la prévention et la résolution des conflits en Afrique gagneraient à travailler en meilleure coordination, et recenser ensemble les leçons apprises et les meilleures pratiques afin de les partager.  Il a conclu en citant le Secrétaire général qui a affirmé que « la mise en place de processus de paix inclusifs avec la participation effective des femmes devrait être la norme et non plus l’exception ».

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) a, à son tour, insisté sur la participation des femmes dans les processus de paix.  L’ONU doit montrer la voie, a-t-il dit, en faisant remarquer qu’au rythme actuel, il faudra 170 années pour arriver à la parité au sein de l’Organisation.  Le représentant a mentionné le lancement, hier, à Rome, du Réseau international des médiatrices pour former les femmes aux techniques de la médiation.  Pour la première fois, le Parlement a débloqué des fonds.  L’Italie a d’ailleurs fait une contribution à ONU-Femmes de 10 millions de dollars. 

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a estimé que le rôle des femmes dans la paix et la sécurité est plus que jamais important et rappelé l’importance qu’il y à faire en sorte que les femmes prennent pleinement part aux processus décisionnels.  Ainsi, Washington a adopté, le 6 octobre, la loi 2017 sur les femmes, la paix et la sécurité, qui exige du Gouvernement qu’il établisse une stratégie complète permettant aux femmes de prendre part aux efforts de paix.  L’émancipation économique des femmes, a dit Mme Sison, est également une priorité pour les États-Unis, qui financent une initiative destinée à soutenir les projets des femmes d’affaires. 

La représentante s’est déclarée déçue que la participation des femmes aux processus de paix supervisés par les Nations Unies reste relativement faible, tout en se disant rassurée par les garanties données par le Secrétaire général de remédier à cette situation.  Elle s’est félicitée de l’annonce faite par le Secrétariat de créer un groupe consultatif de haut niveau sur la médiation.  « Un accord a plus de chances d’être conclu si les femmes participent au processus de paix », a argué la déléguée.  S’agissant du terrorisme et de l’extrémisme violent, la représentante a préconisé que l’on sollicite davantage les activistes locales pour détecter les signes avant-coureurs de radicalisation.  Elle a rappelé qu’en Afghanistan lorsque les talibans ont attaqué Kunduz en 2012 et 2016, à chaque fois, ils s’en sont pris à la station de radio dirigée par Sediqa Sherzai.

M. AMR ABDELATTIF ABOULATTA (Égypte) a demandé à l’ONU de dépêcher davantage de missions sur les droits et l’autonomisation des femmes dans les pays en conflit, comme celles qui se sont déroulées en RDC et au Nigéria.  Le représentant a estimé que la portée du programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité devrait se limiter aux pays en proie à un conflit ou émergeant d’un conflit.  Il faut aller au-delà de la simple évaluation de la présence des femmes dans les processus de paix pour pouvoir avancer des mesures concrètes permettant de renforcer cette participation.  Le nombre de femmes Casques bleus doit augmenter et un équilibre, être assuré, entre les deux piliers du programme que sont la protection et la participation.  En tout chose, a voulu le représentant, il faut tenir compte des spécificités culturelles.  L’Égypte ne ménage aucun effort pour lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles, a affirmé M. Aboulatta, précisant que les Casques bleus égyptiens reçoivent un module de formation spécifique avant leur déploiement.  Le représentant a prôné un « engagement éthique renouvelé » en faveur des femmes dans les pays en proie à un conflit ou émergeant d’un conflit. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est dite préoccupée par les défis identifiés dans le rapport du Secrétaire général, et notamment par le nombre sans précédent de femmes prenant part désormais à des actes terroristes.  Elle a plaidé en faveur d’une approche régionale pour renforcer la participation des femmes aux processus de paix, en faisant valoir les progrès accomplis par l’Afrique en ce domaine.  En mars 2017, l’Union africaine a créé le Réseau africain des femmes dans la prévention des conflits et la médiation de la paix (« FemWise »).  Cette année, également, la Commission de l’Union africaine et ONU-Femmes, avec l’appui de l’Allemagne, ont lancé le Réseau des femmes leaders africaines, qui réunit environ 80 participantes de toute l’Afrique dans le but de renforcer le rôle des femmes dans la conduite des affaires.  L’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) s’est de son côté dotée de politiques en matière d’égalité hommes-femmes, autant d’initiatives qui pourraient fournir un « excellent socle » de coopération avec l’ONU, a estimé la représentante, qui a en conclusion défendu les initiatives visant à renforcer la présence des femmes dans les opérations de maintien de la paix.

M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) a déploré le manque de progrès accomplis dans la protection des femmes en temps de conflit, avant de se dire horrifié par les atrocités commises par les groupes terroristes.  Le représentant a tout de même estimé qu’il y a des structures spécifiques autres que le Conseil de sécurité pour discuter des questions de parité entre les sexes et d’autonomisation des femmes.  Ici, a-t-il tranché, les discussions doivent se limiter à la participation des femmes aux processus de paix.  « L’enceinte du Conseil ne saurait être utilisée pour promouvoir des concepts qui ne jouissent pas d’un consensus international. »  Le représentant a assuré que son pays veillait à garantir une proportion suffisante de femmes parmi les Casques bleus russes.  Mais, a-t-il prévenu, la protection des femmes ne relève pas de la responsabilité des missions de maintien de la paix de l’ONU mais de celle des gouvernements.  « Ne l’oublions pas », a-t-il insisté, avant de répondre à l’intervention de l’Ukraine et de dénoncer les graves crimes commis par les forces ukrainiennes contre les femmes.  En revanche, le représentant a rappelé « l’histoire unique » de son pays s’agissant du respect des droits des femmes. 

M. SHEN BO (Chine) a jugé qu’il faut redoubler d’efforts pour faire cesser les conflits armés à travers le monde.  La communauté internationale devrait embrasser l’idée d’un développement pacifique pour tous, notamment des femmes, dont les droits doivent être vigoureusement protégés, a-t-il avancé.  Si la protection des droits et des intérêts des femmes doit être renforcée universellement, il faut veiller à ce que, dans les pays sortant d’un conflit, les dividendes de la paix profitent à tous, y compris aux femmes, a insisté le représentant.  Pour y parvenir, les instances onusiennes doivent œuvrer en synergie avec le Conseil de sécurité, dont les résolutions pertinentes doivent pleinement être mises en œuvre, a-t-il suggéré.  Il a exprimé la disposition de son pays à œuvrer à la poursuite des objectifs consacrés dans ces différents textes. 

Près de 17 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000), le cadre normatif instauré à cette occasion n’a toujours pas été pleinement mis en œuvre, a déploré M. KORO BESSHO (Japon).  Il y a exactement deux ans, a poursuivi le représentant, environ 100 États se sont engagés à promouvoir l’application du programme de l’ONU concernant les femmes et la paix et la sécurité.  Parmi eux, le Japon s’était personnellement engagé à mettre en œuvre progressivement et réaliser un suivi de son plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000); à augmenter progressivement son appui financier à ONU-Femmes et au Bureau de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, et à investir dans le développement des ressources humaines et l’éducation des femmes déplacées. 

« Le Japon a tenu fidèlement ses promesses », s’est félicité le représentant.  Le pays a finalisé un premier rapport d’évaluation de son plan d’action national.  Il est également devenu le second pourvoyeur de fonds d’ONU-Femmes en 2016, des contributions qui concourent largement au développement des ressources humaines et à l’éducation des femmes déplacées au Moyen-Orient et en Afrique.  Le représentant a ajouté que son pays demeure l’un des principaux soutiens financiers du Bureau de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.

Par ailleurs, M. Bessho a salué les initiatives telles que la création par l’Union africaine, en mars 2017, du Réseau africain des femmes dans la prévention des conflits et la médiation de la paix.  Il a également salué le futur Réseau de femmes médiatrices de la région méditerranéenne et du Réseau des femmes nordiques médiatrices de la paix. 

Selon lui, la formation appropriée du personnel des opérations de la paix est également primordiale.  Pour cette raison, le Japon a appuyé les efforts d’ONU-Femmes visant à former 230 femmes au Centre de formation pour le soutien de la paix du Kenya, en 2016.  Le représentant a enfin estimé que la Stratégie sur la parité des sexes applicable à l’ensemble du système des Nations Unies était un excellent outil, dont il convient de garantir la mise en œuvre.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a demandé un appui au Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité et au Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la sécurité.  Il a encouragé la prise de parole des organisations féminines au Conseil de sécurité, avant d’appeler de ses vœux le doublement du nombre de femmes dans les opérations de paix de l’ONU.  Le manque de financement du programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité est une source de préoccupation, a-t-il avoué, avant de détailler les efforts de son pays pour transposer les piliers dudit programme dans la législation kazakhe. 

Mon pays prône une approche de tolérance zéro s’agissant des atteintes sexuelles commises contre les femmes, a-t-il dit.  Il a indiqué que 15% de l’aide publique au développement de son pays est affecté aux programmes sur l’égalité des sexes, notamment en Afghanistan.  À son tour, le représentant a mis l’accent sur l’importance de l’analyse et de la collecte de données fiables afin d’évaluer les progrès.  « Les femmes sont synonymes de beauté, ajoutons de la beauté à ce monde, en renforçant leur influence. »

S’agissant de la mise en œuvre du programme de l’ONU concernant les femmes et la paix et la sécurité, M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a salué non seulement les efforts du Secrétaire général et du groupe informel du Conseil de sécurité chargé de cette question, mais également ceux des autres acteurs, tels que le lancement, l’an dernier, par 63 États Membres, à l’initiative de l’Espagne, du Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la sécurité, qui a tenu sa réunion inaugurale en avril 2017 à Alicante. 

Il revient également à chaque État, a-t-il ajouté, de mettre en œuvre au niveau national la résolution 1325 (2000), à savoir améliorer la participation des femmes aux activités de médiation, de prévention et de résolution des conflits.  « Les capacités de rapprochement, de négociation, de compréhension et d’empathie dont font preuve les femmes dans ces situations ne sont plus à démontrer », a-t-il déclaré.  De son côté, a-t-il dit, l’Uruguay a augmenté la proportion de femmes dans les opérations de maintien de la paix et cela s’est traduit par un enrichissement de la qualité des contingents et des résultats obtenus.  Le représentant a précisé que, dans le cas de la Mission de l’ONU en RDC, l’augmentation du nombre de femmes a contribué à rétablir des liens de confiance entre la Mission et les communautés locales.

Il a appelé à l’éradication totale de la violence sexuelle dans les conflits et de la culture de l’impunité pour rétablir les victimes dans leur dignité.  Ces victimes, a-t-il ajouté, doivent être au centre de la lutte contre ces violences.  M. Rosselli a également estimé que le Conseil se devait de transmettre à la Cour pénale internationale (CPI) les affaires liées à des crimes de violence sexuelle durant les conflits.  Il a salué l’initiative du Secrétaire général concernant l’instauration d’un pacte volontaire permettant à chaque État Membre signataire de renforcer les engagements pris pour lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a débuté son intervention par un témoignage de soutien à la volonté de l’Union africaine et du Ghana de fonder un « réseau des femmes leaders africaines » et à l’initiative de l’Italie visant à constituer un réseau de femmes médiatrices en Méditerranée, qui sera lancée aujourd’hui même.  « Nous ne pouvons pas résoudre les crises en laissant de côté la moitié de l’humanité: les femmes doivent être protégées mais aussi prendre pleinement part à la prévention et à la résolution des conflits », a poursuivi le représentant.  Exhortant à « passer de la rhétorique à l’action », le représentant a rappelé que la mise en œuvre des huit résolutions ambitieuses adoptées par le Conseil de sécurité sur la question demeurait insuffisante.  Des progrès ont certes été accomplis, a toutefois reconnu M. Delattre, citant le fait que trois quarts des résolutions du Conseil prennent désormais en compte la problématique femmes, paix et sécurité et la création d’un groupe d’experts informel sur cette question.  « Mais désormais, il faut que les États élaborent des plans nationaux, voire régionaux, et les mettent en œuvre », a exhorté le représentant, en soulignant que lorsque les femmes participent aux processus de paix, la réussite durable des accords de paix sur une période d’au moins deux ans augmente de 20%, et la chance qu’un accord reste en place pendant au moins 15 ans augmente de 25%. 

M. Delattre a ensuite attiré l’attention sur le plan national de la France pour mettre en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Sur ce point, il s’est enorgueilli de ce que le Gouvernement français actuel soit « paritaire », tout comme l’est également la Mission permanente de la France auprès de l’ONU.  La France, a-t-il poursuivi, met actuellement en œuvre son deuxième plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité, qui couvre la période 2015-2018.  Ce plan, a précisé le représentant, repose sur cinq principaux piliers, à savoir la participation des femmes, leur protection pendant les conflits, la lutte contre l’impunité des auteurs de violences sexuelles et sexistes, la prévention via la sensibilisation du public aux violences dont sont victimes les femmes et, enfin, la promotion du programme de l’ONU relatif aux femmes et la paix et la sécurité.  Pour chacun de ces piliers, M. Delattre a indiqué que la France mettait en œuvre des actions à trois niveaux: national, multilatéral et par des actions concrètes de coopération.  C’est dans cette perspective, a-t-il indiqué, que son pays soutient la politique de tolérance zéro du Secrétaire général contre l’exploitation et les atteintes sexuelles.

Sur le terrain, le représentant français a précisé que la France appuyait des programmes humanitaires pour aider les femmes touchées par les conséquences des crises en Afghanistan, en République centrafricaine, au Liban ou encore au Nigéria.  « Nous menons aussi de nombreux projets pour protéger les femmes de la traite des êtres humains », a-t-il dit. 

Selon lui, il est en outre impératif de mettre en œuvre de manière plus cohérente les résolutions du Conseil et les objectifs de développement durable.  Dans cette perspective, il a indiqué que l’aide publique au développement française intégrait pleinement le genre et que le volume des projets financés ayant un impact direct sur la vie des femmes était en augmentation.

La France a par ailleurs entamé un effort global pour accroître la participation des femmes dans ses forces armées.  Sur ce point, M. Delattre a précisé que les effectifs féminins avaient pratiquement doublé depuis 1998, pour atteindre aujourd’hui 15%. 

Reprenant la parole, le représentant de l’Ukraine a dit que les femmes représentent 58% des personnes déplacées en Ukraine soit près d’un million de personnes.  Cette situation est la conséquence directe de l’agression russe, a indiqué le représentant.  La Fédération de Russie doit arrêter d’envoyer des armes et des soldats dans l’est de l’Ukraine, a-t-il ajouté, avant de révéler que le dernier convoi « soi-disant humanitaire » envoyé par la Fédération de Russie contenait deux tanks modernes et des munitions.  Le représentant a conclu en souhaitant la libération « des centaines d’Ukrainiens » détenus dans les prisons russes. 

Mme MARÍA ÁNGELA HOLGUÍN CUÉLLAR, Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a souligné, à son tour, que les femmes ont activement participé au processus de paix dans son pays, dont elle-même qui a été négociatrice plénipotentiaire de l’Accord final comptant plus de 100 dispositions relatives au genre.  Un an après la signature de cet Accord, la Colombie a créé les instances nécessaires, dont une spécifique au genre et composée de sept femmes responsables d’organisations rurales, de victimes du conflit et de la société civile.  L’objectif est d’améliorer les conditions de vie par l’autonomisation et l’émancipation économique et de rompre les cycles de violence qui affaiblissent les droits des femmes.

La participation des femmes est également tangible dans la composition des institutions de justice transitionnelle, a poursuivi Mme Holguín Cuéllar.  Par exemple, 28 des 51 magistrats de la juridiction spéciale de paix élus en septembre sont des femmes, dont la Présidente, et cette institution envisage de créer une unité d’enquête dotée d’une équipe spéciale pour les cas de violence sexuelle.  L’Accord de paix stipule d’ailleurs que les délits de violence sexuelle commis dans le cadre du conflit ne peuvent pas être amnistiés.  La Ministre a aussi voulu souligner que la première Mission politique spéciale en Colombie approuvée par le Conseil de sécurité est celle qui a compté la plus forte proportion de femmes, avec près de 20% d’observatrices.  Elle a espéré que la seconde maintiendra ou dépassera ce cap.  La Ministre a estimé que le processus colombien, avec ses qualités et ses défauts, peut devenir une des références dans l’application de la résolution 1325 et que les leçons qui en sont tirées pourront servir à d’autres processus de paix.

Mme CHANTAL SAFOU, Ministre du genre, de l’enfant et de la famille de la République démocratique du Congo (RDC), a dit que son pays, affecté par plusieurs années de conflits armés aux conséquences néfastes, notamment sur les femmes et les enfants, s’est engagé résolument dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité.  Elle s’est félicitée de la sortie de la RDC de la liste des pays qui recrutent les enfants dans les forces armées. 

Le Gouvernement a adopté son plan d’action depuis 2013 avec 10 axes prioritaires.  « Nous avons entrepris sa révision participative et inclusive avec une grande collaboration de la société civile tant nationale qu’internationale notamment Cordaid, Diakonia et ONU-Femmes », a expliqué Mme Safou.

Le Gouvernement a aussi procédé à l’évaluation du plan d’action en cours pour déceler les forces et les faiblesses et collecter les données statistiques dans 10 provinces en attendant les autres provinces, en vue d’atteindre un plus grand nombre de femmes au niveau local. 

La Ministre a ajouté que le renforcement des capacités des femmes leaders en négociation et médiation a influencé la prise de décisions en période de crise et postconflit en RDC.  Plus de 500 leaders féminins et notabilités locales ont vu leurs capacités renforcées sur la résolution des conflits et notions de genre.  Ceci leur permet de contribuer à la résolution pacifique des conflits dans les provinces où sévissent les conflits ethniques.

La RDC, a indiqué Mme Safou, a procédé à la révision de la Stratégie nationale de lutte contre les violences sexuelles et basées sur le genre, à l’adoption du Plan d’action des forces armées ainsi qu’à la signature du Communiqué conjoint entre le Gouvernement et l’ONU sur la lutte contre les violences sexuelles en période de conflits.

À travers ce communiqué, le Gouvernement a réaffirmé son engagement à renforcer la politique de « tolérance zéro » contre les crimes des violences sexuelles, et à adopter des mesures pour lutter contre l’impunité en initiant des poursuites contre leurs auteurs.  Entre juillet et décembre 2014, 135 décisions de justice ont sanctionné des militaires et des policiers haut gradés, et 111 décisions été rendues en 2016 par la justice militaire contre les auteurs poursuivis pour violences sexuelles. 

Mme BÄERBEL KOFLER, Commissaire pour la politique des droits de l’homme et pour l’aide humanitaire de l’Allemagne, a proposé quatre idées pour intensifier la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Premièrement, nous devons appuyer les initiatives pratiques pour transformer les discours sur la participation des femmes dans les processus de paix en actes concrets.  L’Allemagne a soutenu l’Union africaine en développant le Réseau des femmes leaders africaines.  Elle a aussi soutenu l’initiative du Ghana et de l’Union africaine pour lancer le Groupe des amis des femmes leaders africaines à New York. 

Deuxièmement, entre les débats publics annuels, il faut intercaler des discussions tout au cours de l’année sur l’agenda « femmes, paix et sécurité ».  Troisièmement, il faut établir des liens entre la mise en œuvre de cet agenda et les autres programmes d’action plus particulièrement le Programme 2030 et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  L’Allemagne a mis l’accent sur ces liens dans la deuxième génération du Plan d’action national 2017-2020 qu’elle a adopté cette année.  Enfin, nous devons prendre des mesures spécifiques pour la mise en œuvre du programme « femmes, paix et sécurité. »  La Commissaire a insisté sur le fait que les missions de maintien de la paix ont besoin de spécialistes de la problématique hommes-femmes.  Cette expertise est au cœur de la pérennisation de la paix et de la sécurité. 

Mme SANDRA ERICA JOVEL POLANCO (Guatemala) a estimé que la résolution 1325 (2000) et les sept résolutions suivantes du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité constituaient des « instruments puissants » pour que les femmes soient à même de jouir pleinement de leurs droits, mais aussi d’accéder à la justice et de bénéficier d’une participation égale aux processus décisionnels, tant en situation de conflit, postconflit ou de paix.  Selon elle, les plans d’action nationaux de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) sont également des « outils puissants » pour renforcer la mise en œuvre et le suivi des engagements pris par les États. 

Dans cet état d’esprit, le Guatemala a lui-même élaboré, en juin dernier, son propre plan d’action national, que la représentante a qualifié de « succès supplémentaire obtenu par le pays en matière de protection des droits des femmes en situation de conflit ou postconflit ».  Le rôle joué par les femmes au sein des opérations de maintien de la paix est un autre volet important de la mise en œuvre de la résolution, a déclaré la représentante, appelant les États Membres et l’ONU à poursuivre leurs efforts en vue de promouvoir la participation des femmes à tous les niveaux des processus de paix.

Mme LAURA ELENA FLORES HERRERA (Panama) a salué la création par le Conseil de sécurité du Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité.  La représentante a salué d’autres initiatives dont l’adoption par le Secrétaire général d’une stratégie de parité hommes-femmes, « Spotlight » de l’Union européenne et le soutien apporté aux femmes par le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la sécurité humaine.  La représentante a également salué la mise en place de réseaux nationaux et régionaux des femmes médiatrices.  Elle a appelé les donateurs à appuyer financièrement ces réseaux.

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a déclaré que la pleine participation des femmes à la médiation est essentielle pour réaliser une paix.  Les racines des conflits ne peuvent être déracinées et les traumatismes sociaux, guéris, tant que la moitié de la population sera exclue des processus politiques.  Les femmes partagent le fardeau du conflit et du relèvement ce qui rend encore leur participation plus importante.  L’inclusion des femmes dans les processus de paix contribue aussi à leur autonomisation et à l’égalité des sexes conformément à l’objectif 5 de développement durable.  En outre, l’accès à la justice est un élément crucial des sociétés pacifiques, justes et inclusives dont parle cet objectif.

La violence sexuelle peut constituer un crime contre l’humanité et un crime de guerre et dans des circonstances exceptionnelles, des éléments de génocide, a prévenu la représentante qui a estimé que la protection la plus efficace contre cette violence est tout simplement de la prévenir.  Elle a donc salué l’accent mis par le Secrétaire général sur la prévention et a rappelé que 114 États ont signé le Code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  La représentante a appelé les autres États à adhérer au Code pour que le Conseil de sécurité puisse remplir ses mandats de protéger les civils des atrocités de masse.

M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a déploré l’insuffisance des progrès accomplis depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), dans la mesure où les femmes demeurent selon lui « largement absentes » des institutions et des processus internationaux de maintien de la paix.  Il s’est toutefois félicité des efforts déployés par le Secrétaire général pour inverser cette tendance, comme en témoigne l’adoption d’une stratégie pour promouvoir la parité au sein du système des Nations Unies.

S’agissant de son pays, le représentant a indiqué que le Code du statut personnel tunisien, adopté dès 1956, avait été le premier élément fondateur de la Tunisie moderne.  « C’est dire l’importance accordée par mon pays à l’autonomisation des femmes », a-t-il déclaré, ajoutant que, dans cette lignée, la Constitution tunisienne de 2014 consacre et préserve les droits des femmes.  Parallèlement, le représentant a indiqué que le Parlement tunisien venait d’adopter une loi historique visant à l’élimination de toutes les violences faites aux femmes, loi qui s’appuie sur les normes internationales en vigueur et qui reconnaît la violence de genre.  Cette initiative porte la marque, selon lui, de la détermination de la Tunisie à éradiquer cette forme de violence.

Enfin, le représentant a indiqué que la Tunisie participait actuellement à un projet en collaboration avec ONU-femmes, qui devrait aboutir à terme à l’élaboration d’un plan d’action national de mise en œuvre du programme de l’ONU relatif aux femmes et à la paix et à la sécurité.

Au nom de l’Australie, de l’Indonésie, du Mexique et de la République de Corée, M. FERIDUN H. SINIRLIOĞLU (Turquie) a déclaré qu’en dépit des progrès accomplis depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), des difficultés décourageantes subsistaient, les femmes et les filles étant toujours touchées de manière disproportionnée par les conflits.  Des politiques humanitaires sensibles au genre doivent être développées pour assurer l’accès des femmes et des filles à la santé, à l’éducation et aux autres services de base.  Des efforts redoublés doivent également être faits pour empêcher qu’elles deviennent des victimes de la traite dans les situations de conflit et postconflit.  Le représentant a souligné que des progrès significatifs sur ce front ne pourraient être réalisés que par des mesures coordonnées et consolidées, soulignant l’importance de la coopération régionale et internationale à une époque où les causes et les effets des conflits se propageaient facilement d’une frontière à l’autre. 

M. SHANKER DAS BAIRAGI, Ministre des affaires étrangères du Népal, a dit que les femmes peuvent jouer un rôle essentiel d’« agent du changement » en offrant des perspectives novatrices pour maintenir la paix.  Leur rôle dans la prévention des conflits, les négociations de paix, la protection des civils en tant que soldats de la paix ne sera jamais assez souligné.  Depuis l’adoption de la résolution 1325, le Népal n’a cessé de soutenir la cause « femmes et paix et sécurité ».  En 2011, il a été le premier pays d’Asie du Sud et le deuxième d’Asie, à adopter un plan d’action national sur les résolutions 1325 et 1820. Ce plan repose sur les cinq piliers qui sont: la participation, la prévention et la protection, la promotion, les secours et le relèvement, la surveillance et l’évaluation.  Il prévoit 59 actions spécifiques.  Avec une représentation minimum de 33% de femmes dans les comités locaux de paix, le plan est l’exemple même d’un processus transparent, inclusif et participatif, impliquant les victimes du conflit et les organisations de la société civile.  Le Népal a partagé son succès avec d’autres pays et se prépare à adopter un second plan axé cette fois-ci sur la violence sexuelle.

Le Népal estime qu’en respectant la parité entre les sexes, les missions de maintien de la paix feraient preuve de plus de compassion à l’égard des populations qu’elles servent, garantissant ainsi une meilleure protection des civils contre l’exploitation et les atteintes sexuelles.  Pour sa part, le Népal s’est engagé à atteindre l’objectif fixé par l’ONU de 15% de femmes dans ses contingents et à intégrer les mesures de l’ONU sur les abus sexuels et la protection des droits de l’homme dans la formation de ses Casques bleus.

En tant que pays émergeant d’un conflit armé et grand contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix, le Népal est résolument attaché à une meilleure représentation des femmes.  Sa constitution garantit d’ailleurs un seuil de 33% de femmes dans les Parlements fédéral et provinciaux et de 40% aux élections locales.  Elle exige en outre que le président et le vice-président soient de sexe ou de communauté différente.  L’expérience nationale montre qu’il n’y a pas de paix sans une pleine participation des femmes, a conclu le Ministre.

Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) s’est enorgueillie de la réalisation par son pays d’un premier suivi du plan d’action national slovène pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, examen qui a, selon elle, démontré la contribution de son pays à la mise en œuvre du programme de l’ONU relatif aux femmes, à la paix et à la sécurité dans les instances régionales et internationales.  La représentante a notamment mis l’accent sur la participation de la Slovénie à plus de 20 projets visant à autonomiser les femmes en Afrique, au Moyen-Orient et en Afghanistan.  De plus, a-t-elle dit, la Slovénie continue de financer à hauteur de plusieurs millions d’euros la politique et le plan d’action de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).

S’agissant de la parité dans l’armée slovène, la représentante a indiqué qu’en 2015, un poste permanent de conseiller pour les relations hommes-femmes avait été créé au sein de l’état-major slovène, ainsi qu’un réseau de conseillers militaires pour l’égalité des sexes.  En outre, la Slovénie a répondu à l’appel du Secrétaire général visant à accroître le nombre de femmes haut gradées dans les opérations de maintien de la paix, en nommant la première femme commandant de contingent au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  La Slovénie intègre également la dimension genre dans sa gestion des mouvements migratoires et participe au Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la sécurité, ainsi qu’au Réseau de femmes médiatrices de la région méditerranéenne, qui vient tout juste d’être créé. 

Sur le plan politique, la représentante a indiqué que la participation des femmes slovènes était excellente, dans la mesure où la moitié des ministres du Gouvernement actuel sont des femmes, y compris les Ministres de la défense et de l’intérieur.  Enfin, la représentante a voulu que l’on fasse davantage participer les hommes à la promotion de l’égalité des sexes. 

Au nom du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, M. MICHAEL DOUGLAS GRANT (Canada) a estimé que les vrais progrès résident dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), et à ce propos, il y a encore fort à faire.  Les pays ayant établi des plans d’action nationaux doivent aussi y mettre des ressources nécessaires pour arriver à des résultats.  Le Groupe salue l’Espagne qui a établi le Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la sécurité et se félicite que l’Allemagne et la Namibie entendent présider ce réseau en 2018 et 2019 respectivement.  En plus de l’implication des femmes dans tous les processus avant, pendant et après les conflits, il faudrait aussi leur donner un plus grand rôle dans les efforts de consolidation de la paix et de relèvement économique. 

Pour le Groupe, il est important de renforcer la prise en compte des questions de femmes, paix et sécurité dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, à la fois en termes de participation des femmes et d’utilisation de l’expertise genre, tout en rendant cette approche transversale dans la doctrine et tous les documents de planification.  Le Groupe se dit inquiet du fait que la diminution du rôle des conseillers en genre et des conseillers en protection des femmes pourrait paralyser la capacité des missions de maintien de la paix de remplir ces fonctions critiques. 

En outre, il faut s’assurer que les soldats de la paix des Nations Unies ne soient pas eux-mêmes le problème.  C’est pourquoi le Groupe appelle à la condamnation des cas d’exploitation et d’atteintes sexuelles au sein des opérations de maintien de la paix.  Le Groupe salue les récentes initiatives du Secrétaire général pour lutter contre ce fléau, et affirme qu’il faut faire davantage pour assurer la reddition des comptes et « reconfigurer fondamentalement notre approche collective afin de placer les victimes au centre ».  Le Groupe plaide pour que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice, et que les victimes et survivants reçoivent l’assistance nécessaire afin de pouvoir réintégrer leur société.  Le Groupe salue la récente résolution du Conseil de sécurité, la 2379 (2017), portant sur la redevabilité en ce qui concerne les crimes commis par Daech en Iraq.  Le Groupe souligne d’ailleurs la place des jeunes et des femmes dans la lutte contre l’extrémisme violent. 

S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, le représentant a dit que dans la cadre du sa politique étrangère féministe, le Canada prend des actions concrètes pour la mise en œuvre de la résolution 1335 (2000).  Le Canada consacre 150 millions de dollars sur cinq ans en soutien aux organisations locales qui promeuvent les droits des femmes dans les pays en développement et dans des États dits fragiles.  L’an dernier, le Canada a octroyé 1,5 million de dollars à « Women’s Peace and Humanitarian Fund ».

Le Canada entend augmenter le nombre de femmes officiers de police déployées dans les opérations de maintien de la paix, et participe activement aux efforts des Nations Unies pour augmenter le nombre de policières dans les opérations de maintien de la paix.  Le pays est par ailleurs l’un des plus grands défenseurs de la politique de tolérance zéro en matière d’exploitation et d’atteintes sexuelles.  Le Premier Ministre canadien vient d’ailleurs de rejoindre le Cercle du leadership du Secrétaire général et de signer le Pacte volontaire pour prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles.  Le pays fournit un financement au Bureau du Coordonnateur sur les questions d’exploitation et d’atteintes sexuelles et au Fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles.  « La question de la reddition des comptes a une forte résonance au Canada », a précisé le représentant.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (Iran) a souligné qu’au Moyen-Orient, les femmes sont les principales victimes d’une violence à grande échelle, en particulier du terrorisme.  Il est faux de croire que la disparition physique de Daech fera disparaître ses méthodes inhumaines, a averti le représentant, parce qu’elles ont été adoptées par d’autres groupes terroristes.  Il a dénoncé les politiques interventionnistes qui ont préparé le terrain à ces groupes terroristes, arguant d’une expérience régionale qui a montré que c’est le vide du pouvoir laissé par ces interventions étrangères qui a donné lieu à la violence contre les femmes et les enfants.  Malheureusement, a encore dénoncé le représentant, le Conseil de sécurité ne parle jamais des États qui ont créé ces terreaux fertiles du terrorisme. 

Il s’est enorgueilli de ce que dans son pays, les femmes participent activement à la vie politique et sociale, mentionnant par exemple que dans les universités le nombre des étudiantes en médecine est le double de celui des étudiants.  Mais, a dit craindre le représentant, ces avancées risquent d’être annihilées par les sanctions imposées par les États-Unis, lesquelles sapent les efforts des femmes et de la société civile iranienne tout entière. 

M. KAREL KOMÁREK (République tchèque) a déploré le fait que 68 pays seulement se soient dotés à ce jour d’un plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  De plus, a-t-il dit, la grande majorité des projets figurant dans ces plans sont « des petits projets à court terme au budget limité ».  Une fois encore, a constaté le représentant, le principal problème est le manque de financement.

Au niveau national, le représentant a indiqué que la République tchèque a adopté un plan d’action national en début d’année, qui comprend des mesures « durables et substantielles ».  Au titre des réalisations du pays sur la question, le représentant a souligné que la République tchèque était devenue le chef de file du programme de formation des femmes de l’armée jordanienne.  Le pays développe également un programme pour encourager la participation des femmes aux processus décisionnels.  La République tchèque a alloué cette année 6 millions de dollars à des projets d’autonomisation des femmes en Serbie, au Kosovo, en République centrafricaine et en Afghanistan.

Toutefois, le représentant a indiqué que les femmes tchèques étaient toujours sous-représentées dans les postes à responsabilité politique, y compris dans la diplomatie.  Il a indiqué que le plan d’action national comportait des dispositions visant à remédier à cette situation.

« L’expérience a montré qu’il n’y a pas de paix durable sans la participation des femmes », a déclaré M. TORE HATTREM (Norvège), qui s’exprimait au nom du Danemark, de la Finlande, de l’Islande et de la Suède.  Par conséquent, toute approche doit tenir compte de l’égalité des sexes.  À la lumière du rapport du Secrétaire général, il a exprimé certaines préoccupations notamment face à la baisse de la participation des femmes dans la médiation, au déclin du nombre des spécialistes de la problématique hommes-femmes et à celui de la dimension genre dans les accords de paix.  « Les acquis difficilement obtenus doivent être sauvegardés », a estimé le représentant, qui a salué le lancement, hier, de l’index mondial sur les femmes et la paix et la sécurité, un outil qui devrait, selon lui, permettre d’affiner les interventions.

Une application plus stratégique est en effet nécessaire, a-t-il argué, soulignant que les femmes sont devenues plus influentes dans les processus de paix, à la table de négociation et dans les initiatives parallèles, comme on le voit pour la Colombie et la Syrie.  L’approche actuelle de la thématique « femmes, paix et sécurité » reste trop générale et manque d’analyses contextuelles et de points d’action.  Le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité est un pas important dans la bonne direction, a estimé le représentant qui a également encouragé les États Membres à nommer plus de femmes à des postes de direction, rappelant que le taux actuel est d’une femme pour sept hommes.

Mme SIMA SAMI BAHOUS (Jordanie) a dit qu’au niveau national, le Gouvernement a obtenu beaucoup de résultats en matière d’autonomisation des femmes et de promotion de leurs droits.  En adoptant son Plan d’action national, il a pu travailler plus étroitement avec les ONG sur le renforcement des capacités et le financement des entreprises dirigés par les femmes.  Le Gouvernement a mis aussi l’accent sur une plus grande participation des femmes à la vie politique: elle est de 15% au Sénat, de 35% dans les partis politiques, de 21% dans les syndicats et de 19% dans le corps diplomatique.  Pour aller de l’avant, le Gouvernement a entamé la réforme de nombreuses lois, notamment celle sur la protection contre les violences et le Code du travail qui prévoit des horaires aménagés pour les femmes.  Pour la Jordanie, le Programme 2030 est une occasion de garantir aux femmes une participation effective dans les processus décisionnels. 

Rappelant que son pays est avec d’autres à l’origine du Groupe des Amis contre l’extrémisme violent, la représentante est revenue à la situation des réfugiés syriens dans son pays pour insister sur les efforts consentis en termes d’accès à la santé, à l’éducation, à la protection, à l’emploi.  La Jordanie aide également les femmes palestiniennes détenues dans les prisons israéliennes. 

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a plaidé pour une plus grande implication des femmes dans la formulation et la mise en œuvre des mandats des opérations de la paix et des missions politiques spéciales, dans les négociations de paix et dans les interventions humanitaires.  Les crises humanitaires complexes provoquées par les conflits mettent justement en lumière la violence, y compris sexuelle, subie par les femmes et les filles, en particulier les réfugiées et les déplacées, qu’il convient de protéger en priorité. 

Il serait aujourd’hui impensable, a poursuivi le représentant, de créer une opération de maintien de la paix sans déployer des conseillers en matière d’égalité des genres, sans incorporer un mandat pour la protection des femmes ou sans former les Casques bleus à la prévention et à la lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles.  Le représentant a également salué le Secrétaire général pour son action visant à atteindre la cible de 15% de femmes officiers parmi le personnel des opérations de maintien de la paix.

Au plan national, le représentant a indiqué que le Brésil s’était doté, en mars 2017, d’un plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), dans le cadre duquel, les écoles militaires ont pour la première fois admis des femmes.  « Nous nous efforçons également d’augmenter le nombre de candidates aux postes civils et militaires dans les opérations de maintien de la paix et dans les missions politiques spéciales », a-t-il ajouté.

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique) a déclaré que lorsqu’il s’agissait de parvenir à une paix durable, les femmes étaient essentielles pour créer des sociétés inclusives dotées d’un tissu social sain.  Elle a appuyé les conclusions du Secrétaire général et a salué son engagement à intégrer l’égalité des sexes dans la prévention des conflits, ainsi que son initiative de réforme des Nations Unies.  Elle a aussi pleinement appuyé la participation des femmes dans tous les domaines de la vie publique étant donné que l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes sont nécessaires à la réalisation des sociétés pacifiques et équitables, dont parle l’objectif 5 du Programme 2030. 

Le Gouvernement mexicain encourage la représentation équitable des femmes dans tous les secteurs et à tous les niveaux.  La résolution 1325 (2000) du Conseil sur les femmes, la paix et la sécurité a renforcé les normes nationales même si la mise en œuvre effective de la résolution reste un défi.  Le Secrétaire général doit poursuivre ses efforts pour faire en sorte que cet agenda soit réellement transversal.  « La femme est le visage de la paix durable », a conclu la représentante.

Mme MARA MARINAKI, de l’Union européenne, a confirmé son soutien aux efforts du Secrétaire général visant à mettre la parité au cœur de la plateforme de prévention des Nations Unies.  Elle a ensuite énuméré une série d’efforts réalisés par l’Union européenne pour prévenir et éliminer la violence contre les femmes et les filles dans le monde, dont l’initiative Spotlight menée en partenariat avec les Nations Unies, auquel l’Union a contribué à hauteur de 500 millions d’euros.  Au mois de juin dernier, l’Union européenne a également pris la tête de l’Appel à l’action pour la protection contre la violence sexiste dans les situations d’urgence, et a signé la Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe, pour renforcer le cadre juridique existant et la capacité à éliminer toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des femmes et des filles.  Concernant la politique de tolérance zéro, Mme Marinaki a indiqué que l’Union européenne avait revu ses normes de comportement pour les opérations civiles et militaires.  Tous ces efforts, a poursuivi la représentante, s’alignent avec « la conviction ferme que la prévention de la violence sexuelle et fondée sur le sexe est essentielle pour empêcher les conflits ».  Elle a mentionné que 18 États membres avaient adopté un plan d’action national, complété par un cadre au niveau européen, et qu’un budget de 6,5 milliards d’euros par an avait été débloqué pour des projets dans le cadre du plan d’action européen sur le genre 2016-2020.

Mme Marinaki est ensuite revenue sur différents outils et avancées de l’Union européenne sur le plan de la parité, ainsi que sur son soutien à des initiatives en Afghanistan, en Syrie et en Ouganda permettant une participation pleine et active des femmes dans la prévention et la résolution des conflits, ainsi que la consolidation de la paix.  L’union européenne a également soutenu la formation de femmes activistes de la paix en Lybie aux techniques de négociation et médiation, a ajouté la représentante.  Saluant notamment l’important travail du Réseau africain des femmes dans la prévention des conflits et la médiation, elle a dit attendre avec intérêt l’interaction entre ce Réseau et celui des femmes médiatrices de la Méditerranée, lancé récemment.  La participation des femmes et la pleine mise en œuvre du programme femmes, paix et sécurité doivent guider la réforme du pilier paix et sécurité de l’ONU, a-t-elle conclu, annonçant que l’Union européenne a pris des mesures pour accélérer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a rappelé que son pays avait initié la résolution 1325 du Conseil de sécurité et restait profondément attaché à sa mise en œuvre.  En Namibie cela se fait par le truchement de la politique nationale pour l’égalité des sexes qui comprend un module « Genre, consolidation de la paix, règlement de conflit et gestion des catastrophes naturelles », a expliqué le représentant ajoutant que l’objectif général est d’augmenter la participation des femmes dans ces domaines.  Ce cadre s’accompagne d’autres politiques nationales visant à placer les femmes sur un même pied d’égalité avec les hommes notamment pour ce qui est de l’action affirmative, de l’héritage ou de la loi sur les terres.

Ces politiques ont permis à la Namibie de déployer des femmes dans toutes les missions de maintien de la paix, et, à ce jour, le pays a l’un des contingents de police exclusivement composé de femmes les plus importants à l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour.  Le représentant a rappelé que selon des études de l’ONU, les femmes soldats font l’objet de restrictions culturelles différentes que leurs homologues hommes, et ont plus de facilité à soutirer des informations aux femmes et aux enfants.

Parmi les défis majeurs à la pleine mise en œuvre de la résolution 1325, le représentant a cité le manque de conscience de cet agenda ainsi que le manque de volonté politique liée à des préjugés et à des normes culturelles et traditionnelles qui ne favorisent pas l’accès des femmes a des positions de pouvoir.  Il a plaidé pour l’inclusion des femmes dans les mécanismes d’alerte précoce, de médiation et de règlement de conflits et a demandé des dispositions claires sur le genre dans les accords de paix, ce qui n’était le cas que pour la moitié des accords passés en 2016.

La Namibie encourage les États Membres à nommer des femmes aux positions de tête dans les organisations régionales et internationales œuvrant pour la paix.  De plus les pays contributeurs de troupes et de contingents devraient détacher davantage de femmes en tant qu’expertes militaires.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a expliqué le troisième plan national 2017-2021 de la Belgique qui englobe de nombreuses lignes d’action devant contribuer à améliorer la situation des femmes dans les zones de pré/postconflit.  Pour assurer le suivi de ce plan, un rapport annuel sur les progrès réalisés pour chaque ligne d’action et chaque instrument de suivi sera soumis au Parlement, a-t-il précisé. 

Intégrer la dimension genre dans les actions belges en matière de conflit, de paix et de sécurité est l’un des six piliers de ce plan d’action.  Dans cet objectif, la Belgique œuvre à la promotion au sein de la Commission de consolidation de la paix, dont elle est membre, de l’intégration de la dimension genre dans la préparation des « nouvelles stratégies intégrées de consolidation de la paix » et dans les évaluations biennales des cadres stratégiques, a expliqué le représentant.  Il a salué le fait que la Commission dispose désormais d’un mécanisme qui puisse mieux intégrer l’agenda femmes, paix et sécurité grâce à des points focaux sur le genre.

La Belgique salue aussi le degré d’ambition de la Stratégie du Secrétaire général pour la parité entre les sexes et l’assure de son plein soutien.  Elle partage le point de vue que les femmes sont une force de paix et qu’il est essentiel qu’elles puissent jouer pleinement leur rôle de protagonistes au service de la paix et de la prévention des conflits.  Dans cet esprit, la Belgique consacrera, en avril 2018 à New York, un séminaire au rôle des femmes dans la médiation en Afrique, afin d’identifier des pistes pour renforcer leur action.

Mme INA H. KRISHNAMURTHI (Indonésie) a dit que les femmes étaient largement l’objet d’exploitation dans les situations de conflit.  Ces défis sapent l’esprit de la résolution 1325 (2000) et signifient aussi qu’il nous reste un long chemin à parcourir avant de réaliser un monde pacifique, juste et prospère.  La représentante a estimé qu’il faut, d’abord, créer un environnement favorable à la paix et à la stabilité, les solutions devant se focaliser sur des institutions qui encouragent la tradition du dialogue, du consensus, de l’inclusivité, du respect, de l’intégrité, du règlement pacifique des différends et du non-recours à la force.  Il est également important de reconnaître et de favoriser le rôle de la femme et de la famille dans la prévention des conflits qui portent toujours les germes du radicalisme et de l’extrémisme.

Deuxièmement, il faut développer un écosystème qui stimule la prospérité. Les États Membres ont adopté le Programme 2030 qui est un plan complet et intégré capable de faire la synergie entre le développement et la paix.  Permettre aux femmes de participer à l’économie contribue à la consolidation de la paix.  Troisièmement, il est important d’avoir une ONU forte dont les mécanismes de consolidation et de maintien de la paix sont constamment renforcés.  Avant 2019, l’Indonésie, a annoncé la représentante, devrait avoir 4 000 Casques bleus sur le terrain dont un nombre croissant de femmes. 

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a indiqué que la mise en œuvre du programme relatif aux femmes et à la paix et à la sécurité était une priorité absolue pour son pays.  Pour accélérer cette mise en œuvre, a-t-il dit, nous avons besoin de trois choses: le leadership de la part du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale; le renforcement de l’architecture institutionnelle de l’ONU; et des actes concrets, en adoptant des plans d’action nationaux.  L’Espagne, a-t-il précisé, vient justement d’adopter son second plan d’action national.

Le représentant a par ailleurs présenté un certain nombre de changements qu’il souhaiterait voir adoptés dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  En premier lieu, il a salué la création par le Conseil, en 2016, du Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité.  Mais, a-t-il estimé, il faudrait que les discussions de ce Groupe d’experts, qui se réunit chaque mois, aboutissent à des mesures concrètes.  Le représentant a aussi plaidé pour une plus grande participation de la société civile aux débats publics du Conseil, notamment pour présenter une perspective locale de la thématique « femmes et paix et sécurité ».  Le représentant a aussi proposé que les auteurs de violences sexuelles dans les pays à l’ordre du jour du Conseil fassent l’objet de sanctions.

Il a rappelé que, à l’initiative de son pays, le Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la sécurité a été lancé l’an dernier par 63 États Membres.  Le Réseau, a-t-il ajouté, a tenu sa réunion inaugurale à Alicante en avril 2017.  Le représentant a salué l’Allemagne et la Namibie pour avoir proposé d’accueillir les prochaines réunions du réseau, respectivement en 2018 et 2019.  Le représentant a voulu qu’un pays d’Amérique latine, ou à défaut, un pays d’Asie se porte candidat pour la réunion de 2020.  Il a plaidé pour une adhésion massive au Réseau.

« Parfois le processus de réforme des Nations Unies est si complexe que j’ai un peu de mal à le suivre », a subitement déclaré le représentant.  Il a dit craindre que le programme relatif aux femmes et à la paix et à la sécurité n’ait pas la place qu’il mérite.  Cette réforme doit accorder la priorité à la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a dit que les quatre piliers de l’agenda femmes, paix et sécurité ont besoin d’une attention et d’une action accélérées de la part de l’ONU et des États Membres.  Le représentant a souligné d’autres domaines essentiels comme le désarmement, la création d’un plus grand espace pour les organisations féminines et le besoin d’informations et d’analyses plus solides sur les femmes et la paix et la sécurité. 

La crise des réfugiés ayant créé des défis spécifiques pour les femmes, d’autres actions sont nécessaires.  Il est aussi très important d’avancer collectivement dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et sur l’avènement de sociétés pacifiques et inclusives.

La Slovaquie élabore actuellement son premier plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité.  Le Gouvernement continue de promouvoir tous les efforts nationaux afin de renforcer le rôle des femmes dans la société grâce à la stratégie nationale de l’égalité des genres 2014-2019 et au plan d’action sur l’égalité des sexes.  Le Ministère de la défense a élaboré son propre plan sur l’égalité des sexes.

M. Mlynár a souligné qu’une réforme du secteur de la sécurité sensible au genre est essentielle pour développer des institutions non discriminatoires, représentatives de la population et capables de répondre efficacement aux besoins spécifiques des différents segments.  L’approche de la réforme du secteur de la sécurité à l’ONU doit être plus sensible au genre et ce, tout au long de ses phases de planification, de conception, de mise en œuvre, de suivi et d’évaluation.

Cette réforme doit aussi inclure la réforme des processus de recrutement et d’amélioration des services de sécurité pour faire face et prévenir la violence sexuelle et sexiste.  Il est nécessaire de se concentrer davantage sur le développement de stratégies de réforme du secteur de la sécurité sensibles au genre et d’obtenir des résultats tangibles sur le terrain.  C’est la raison pour laquelle, la Slovaquie, coprésidente du Groupe des Amis de la réforme du secteur de la sécurité, prévoit d’organiser un atelier en 2018.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a pointé les nombreux obstacles entravant la bonne mise en œuvre du programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité. Il a néanmoins salué l’inclusion croissante de la problématique hommes-femmes dans les mandats des opérations de maintien de la paix de l’ONU et a indiqué que son pays avait accru le nombre de femmes dans les contingents péruviens de ces opérations.  Le programme relatif aux femmes et la paix et la sécurité doit occuper un rôle central dans le processus de réforme en cours des opérations de maintien de la paix, a-t-il dit.  Ce sera l’un des axes du mandat du Pérou, qui siègera au Conseil à partir de janvier 2018. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) s’est enorgueilli du fait que son pays a atteint l’objectif de 15% ciblé par les Nations Unies en matière de participation des femmes à des postes d’observateurs militaires et d’officier au sein des opérations de maintien de la paix.  L’Argentine, a-t-il ajouté, continuera de consolider ce gain dans le cadre de son plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Le représentant a par ailleurs appelé à poursuivre les efforts visant à intégrer des spécialistes des questions liées au genre, à la violence fondée et à la violence sexuelle dans les différentes opérations de maintien de la paix, ainsi que des équipes de médiatrices.  A ce sujet, il a appuyé la proposition du Secrétaire général de créer et de renforcer des réseaux nationaux et régionaux de médiatrices. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a rappelé que la présence des femmes dans les négociations de paix favorise la durabilité des accords de paix et que 35% des accords négociés par les femmes durent plus de 15 ans. Le Maroc a organisé, le 7 septembre 2016, une conférence internationale sur le thème « Femmes, paix et sécurité », a-t-il dit.  « Lors de cette Conférence, le Maroc a annoncé la création d’un Centre régional indépendant consacré à l’étude du rôle de la femme dans les opérations de maintien de la paix et sa contribution dans la réalisation du développement durable. »  Le délégué a jugé nécessaire l’intégration de l’approche genre et développement dans un contexte postconflit, en vue d’assurer, dès le début du processus de reconstruction, un développement durable et équitable où femmes et hommes se partagent les ressources, la prise de décisions et le pouvoir.  Les objectifs de développement durable prouvent que le genre, la paix, la sécurité et le développement sont liés, interconnectés et indissociables les uns des autres, a conclu le délégué du Maroc.

Mme ALEXANDRA BAUMANN (Suisse) a indiqué que la sécurité humaine, l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes et des filles sont des éléments clefs de la politique étrangère de la Suisse.  Ainsi, le Département fédéral des affaires étrangères a lancé sa première grande stratégie sur l’égalité des genres et les droits des femmes qui met en avant l’action en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité comme l’un de ses principaux volets.  Parmi les raisons, la représentante a cité le fait que l’égalité entre les sexes est une clef pour la prévention des conflits et la violence, y compris de l’extrémisme violent.  En outre il faut que les femmes soient incluses dans les processus de paix et cela ne doit pas se résumer à un siège à la table de négociation mais englober leur capacité de faire valoir leurs idées et préoccupations.

À cet égard, la Suisse salue la stratégie du Secrétaire général sur l’égalité et son appel à nommer davantage de femmes en tant qu’envoyées spéciales, médiatrices et expertes en médiation.  Tirant la leçon des expériences passées, la représentante a encouragé la mobilisation aux côtés de la société civile, la mise en place de capacités et l’autonomisation des femmes.  Il faut mettre en place un effectif de femmes prêtes à agir, le moment venu, en tant que médiatrices et négociatrices, a-t-elle estimé.  Pour cela, il est impératif que les femmes participent à toutes les activités et tous les entraînements liés à la médiation.

Pour la Suisse, il existe en outre deux aspects cruciaux pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité à savoir l’action des hommes et des garçons et l’autonomisation économique des femmes.  Il faut que le programme sur les femmes, la paix et la sécurité ne se limite pas aux femmes et qu’il place la transformation des rapports de force dans les sociétés en son centre.  L’autonomisation économique des femmes doit obtenir plus d’attention dans les activités de relèvement post-conflit et de renforcement de l’État, a encore plaidé la délégation suisse.

Mme ANNA FATA, observatrice du Saint-Siège, a observé que malgré les pas positifs accomplis dans la mise en œuvre des huit résolutions du Conseil de sécurité, les femmes restaient minoritaires dans les négociations de paix et dans les opérations de maintien de la paix.  « Les femmes, qui sont des agents du changement, devraient pouvoir faire plus », a affirmé Mme Fata.  S’appuyant sur la présence de l’église catholique au niveau local durant les cinq décennies de conflit en Colombie et sur la mise en œuvre de l’accord de paix sur le terrain, elle a affirmé que cette expérience avait amplement démontré le rôle clef des femmes comme « faiseuses de paix »: elles désarment la violence avec leur capacité de comprendre et d’avoir de l’empathie, de dissuader et de convaincre, de pardonner et de reconstruire des vies, des familles et des communautés entières.

Malheureusement, a-t-elle poursuivi, les femmes sont plus souvent des cibles et des victimes que des agents de la paix dans les conflits d’aujourd’hui.  Elle a dénoncé l’extrémisme violent et le terrorisme qui utilisent les violences sexuelles comme tactique de terreur, et la restriction des droits des femmes par un détournement de la religion, « un développement dangereux et de plus en plus répandu ».  Mme Fata a cependant insisté sur le fait que les violences contre les femmes n’étaient pas seulement perpétrées lors des conflits, soulignant que les femmes constituent aussi la majorité des victimes de la traite.  Rappelant la responsabilité des États, qui doivent poursuivre les auteurs de ces crimes, elle a appelé les parties au conflit à respecter leurs obligations en vertu du droit humanitaire et des droits de l’homme.  Elle a mis en évidence le rôle essentiel de l’éducation, rappelant le rôle de l’église catholique à cet égard, grâce à un « réseau ancré localement et connecté internationalement ».

Mme AMARSANAA DARISUREN, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a rappelé que son organisation était active dans toutes les phases d’un conflit et appuyait le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  La mission spéciale de l’OSCE en Ukraine fait en sorte que la voix des hommes et des femmes vivant dans les zones de conflit soient entendues, a-t-elle dit.  « Nous devons améliorer encore l’équilibre entre les sexes parmi nos observateurs afin de parvenir à des patrouilles mixtes permettant un meilleur accès aux populations civiles. »  Elle a indiqué que 31 pays de la zone de l’OSCE avaient adopté des plans d’action nationaux, avant d’affirmer que son organisation était aux avant-postes de la lutte contre l’extrémisme violent.  Le nouveau projet intitulé « leaders contre l’extrémisme violent et la radicalisation » met l’accent sur le rôle des femmes, a-t-elle affirmé.  Nous reconnaissons que nous devons en faire plus pour assurer de manière plus systématique la participation des femmes aux processus de paix, a conclu Mme Darisuren.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a qualifié de « tournant » l’adoption de la résolution 1325 (2000), un texte qui a consacré le rôle des femmes dans les processus de paix et de médiation.  Il est regrettable de constater qu’elle reste insuffisamment mise en œuvre 17 ans plus tard, a constaté la représentante, qui s’est dite favorable à une stratégie à long terme pour l’autonomisation des femmes, tout en leur facilitant l’accès aux mécanismes de justice transitionnelle dans les sociétés postconflit.  La représentante a aussi jugé qu’il faut reconnaître l’importance du rôle que la femme peut jouer dans la prévention de la radicalisation.  C’est pourquoi l’État du Qatar mène diverses initiatives à l’échelle nationale et internationale, a-t-elle indiqué.  Le Gouvernement a également contribué à une étude internationale sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), contribution qui fait partie prenante de la volonté de Doha de faire de la parité homme-femme un élément transversal dans toutes ses politiques.

Également au nom de l’Estonie et de la Lettonie, Mme AUDRA PLEPYTE (Lituanie) a déclaré que les femmes étaient souvent négligées dans les négociations, le maintien et la consolidation de la paix.  La représentante a souligné la nécessité d’intégrer les femmes à toutes les étapes de la prévention et de la résolution des conflits.  La perspective du genre doit être intégrée dans les opérations de paix, a-t-elle exhorté ajoutant que le rôle accru des femmes dans les activités des Nations Unies s’est révélé efficace et devrait être élargi.  À cette fin, les pays baltes ont encouragé les femmes militaires et policières à postuler à des postes de maintien de la paix. 

La représentante a insisté sur une formation de bonne qualité en matière de droits de l’homme et des questions liées au genre.  Elle a aussi attiré l’attention sur le rôle central que la société civile joue dans la mise en œuvre du programme « femmes, paix et sécurité ».  Avertissant qu’un financement insuffisant est un obstacle majeur à la mise en œuvre du programme, elle a appelé tous les États à aider financièrement les organisations de la société civile.  L’accès à la justice demeure une priorité pour que les auteurs de crimes contre les femmes et les filles puissent être traduits en justice et que les victimes soient indemnisées pour le préjudice qu’elles ont subi, a ajouté la représentante.

Mme NELLY SHILO (Israël) a rappelé que la présence des femmes dans les négociations de paix favorise la durabilité des accords de paix et que 35% des accords négociés par les femmes durent plus de 15 ans. Les femmes font la différence, a-t-elle dit, en prenant l’exemple du processus de paix en Colombie et au Libéria.  En dépit des efforts faits, les femmes ne représentent que 4% du personnel militaire des opérations de paix de l’ONU, a-t-elle déploré.  Pour attirer plus de femmes, elle a prôné une politique de tolérance zéro contre le harcèlement sexuel au sein de ces missions.  Elle a ensuite détaillé les efforts faits par son pays pour une meilleure inclusion des femmes dans la société israélienne.  Près de 50 lois allant en ce sens ont été votées ces 10 dernières années, a-t-elle dit, avant d’admettre que « beaucoup reste encore à faire ».

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a indiqué que les femmes de son pays étaient à l’avant-garde d’un mouvement de réforme et de promotion de politiques et de législations en vue de renforcer leur rôle au sein de la société sud-africaine.  Aujourd’hui, les femmes représentent 42% des parlementaires et 41% des membres du Gouvernement, s’est-il félicité, en faisant observer que deux femmes occupent la présidence de l’Assemblée nationale et du Conseil national des provinces.  L’Afrique du Sud prête aussi une assistance aux femmes médiatrices du continent africain, grâce à son centre de formation.  Soucieuses de consolider la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) et de celles qui ont été adoptées par la suite, l’Afrique du Sud maintient un dialogue permanent avec la société civile et les universitaires pour faire avancer la cause de l’autonomisation des femmes et éliminer les obstacles qui entravent leur participation aux processus de paix et aux efforts de médiation.

Mme GILLIAN BIRD (Australie) a dit que son pays a porté à 25% le nombre de femmes officiers d’état-major et observateurs militaires dans les missions des Nations Unies.  La représentante a félicité le Département des affaires politiques d’avoir supervisé l’augmentation substantielle de l’expertise en matière d’égalité des sexes avec le déploiement de 25 conseillers pour l’égalité des sexes dans 11 missions sur le terrain.  De tels efforts ont démontré qu’avec un financement et des objectifs spécifiques, il est possible d’améliorer la participation des femmes, s’est félicitée la représentante.  Tous les acteurs clefs doivent jouer un rôle dans la mise en œuvre du programme sur les femmes, la paix et la sécurité y compris les groupes de la société civile qui sont la plus grande source d’expertise sur le terrain.  La représentante a rappelé que son pays a créé le Fonds pour la paix et l’aide humanitaire aux femmes, qui apporte un appui aux organisations féminines pour contribuer à la prévention des conflits, la réponse aux crises et la consolidation de la paix.

M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a estimé qu’il fallait poursuivre les efforts de manière plus coordonnée pour empêcher les femmes d’être victimes de la violence, en pointant particulièrement la prévention des violences sexuelles lors des conflits et la nécessité de traduire leurs auteurs en justice.  Estimant qu’on ne peut tolérer aucun abus sexuel de la part des soldats de la paix, il a salué la détermination du Secrétaire général et ses initiatives en la matière.  M. Cho a ensuite demandé que l’on traduise en actions concrètes l’objectif d’augmenter la participation des femmes aux efforts de paix.  La République de Corée a adopté un plan national d’action en 2014 et a réalisé l’objectif de 15% de femmes dans les contingents de maintien de la paix.  Le délégué a ensuite plaidé pour que l’on aligne les réformes de l’architecture de paix et de sécurité des Nations Unies avec le programme femmes, paix et sécurité, en citant plus spécifiquement la participation significative des femmes à toutes les étapes des processus de paix et le renforcement de la parité au niveau du recrutement pour des positions de direction.  Le représentant dont le pays assume la présidence de la Commission de consolidation de la paix a attiré l’attention sur la création de points de contact pour les questions d’égalité des sexes au Canada et au Bangladesh.  La Commission a également augmenté la participation des femmes au maintien de la paix au niveau national et a dialogué, lors d’une réunion aux Îles Salomon, avec un groupe de jeunes parlementaires, a conclu le délégué.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) s’est dite convaincue du rôle crucial des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix, arguant du processus de paix en Irlande « qui en a fourni la preuve ».  La déléguée a déclaré que cette problématique sera au cœur de la prochaine session de la Commission de la condition de la femme, que présidera l’Irlande qui finance d’ailleurs des ONG, notamment au Nigéria, pour faire avancer la cause de la participation accrue des femmes aux processus de paix.  La représentante a détaillé le plan d’action national de son pays, qui vise notamment à accroître le nombre de femmes dans les Forces armées irlandaises.  L’Irlande est l’un des 14 pays à avoir signé l’Appel à l’action pour la protection contre la violence sexiste dans les situations d’urgence, a conclu la représentante irlandaise.

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a déclaré que le conflit prolongé dans son pays avait fait de nombreuses victimes, des orphelins, des veuves de guerre, des mères célibataires et des familles monoparentales.  Répondre aux préoccupations immédiates de ces femmes et en faire des participantes dans tous les domaines de la consolidation de la paix reste une priorité des efforts postconflits.  Pour que la consolidation de la paix soit couronnée de succès, il faut que l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, y compris l’autonomisation économique, la sécurité humaine, les droits de l’homme et le développement, aillent ensemble.

Il est également essentiel de faire participer les acteurs nationaux à tous les échelons et aux plus hauts niveaux du Gouvernement afin de garantir l’appropriation des processus de consolidation de la paix et de garantir leur viabilité à long terme.  Alors que Sri Lanka s’engage sur la voie de la réconciliation et de la justice transformatrice, le Gouvernement a créé un groupe de travail composé de 11 personnalités éminentes pour mener des consultations à l’échelle nationale sur les mesures de réconciliation.  Les membres de ce groupe de travail proviennent entièrement de la société civile dont six femmes.

M. MACHARIA KAMAU (Kenya) a indiqué que le 8 mars 2016, Journée internationale de la femme, le Gouvernement a lancé un plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325, qui concerne la sécurité, la consolidation de la paix, la résolution des conflits, la fin de l’impunité relative à la violence contre les femmes, l’intégration de la dimension de genre et la protection des droits humains.  Comme contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix, le Kenya déploie une proportion de femmes de 19%, soit plus des 15% recommandés par l’ONU.  Le Kenya est donc le premier en ce qui concerne le déploiement de femmes officiers, s’est réjoui le représentant.

Le Gouvernement a d’ailleurs mis en place un centre de formation au maintien de la paix pour renforcer les capacités des femmes comme des hommes dans le rétablissement de la paix, les négociations et la diplomatie préventive aux niveaux communautaire et national.  Il a aussi lancé une campagne nationale visant à rompre le silence sur la violence sexiste et à communiquer sur la dimension genre, de la paix et de la sécurité.  Les centres médicaux et psychosociaux pour les victimes de violences sexuelles et sexistes ont été renforcés, de même qu’a été élargi l’accès à la justice.

Mme TAREQ MD ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a indiqué qu’il comptait s’écarter du sujet à l’ordre du jour pour évoquer la « catastrophe » qui touche les 600 000 personnes, principalement rohingya, qui se sont réfugiées dans son pays au cours de ces derniers mois fuyant le « nettoyage ethnique » au Myanmar.  Les viols et les violences sexuelles sont la « principale technique » des forces de sécurité du Myanmar qui en usent de « manière systématique et coordonnée » pour chasser les Rohingya et les empêcher de revenir chez eux, a accusé la représentante.  Pour avoir joué un rôle décisif dans l’adoption de la résolution 1325 (2000), le Bangladesh ne peut rester silencieux ou même « objectif » face à de telles atrocités, a déclaré la représentante.  Elle a fait valoir l’aide apportée par son pays à près de 2 000 femmes enceintes.  Elle a rappelé que la Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence sexuelle dans les conflits armés, qui se rendra ce weekend dans les camps de réfugiés du Bangladesh, a exhorté les autorités du Myanmar à interdire à leurs forces armées de se livrer à de tels crimes et à ouvrir des enquêtes approfondies sur ceux qui ont été commis.

Quoique nous n’ayons pas adopté de plan d’action national, s’est expliquée Mme BESIANA KADARE (Albanie), la dimension genre est couverte par notre stratégie nationale sur l’égalité des sexes et la lutte contre la violence domestique.  L’Albanie, a-t-elle affirmé, a également intégré les objectifs de la résolution 1325 (2000) dans la stratégie de gestion des ressources humaines adoptée par ses forces armées et dans la stratégie de maintien de l’ordre public adoptée par ses forces de police.  En conséquence, la participation des femmes dans les forces armées albanaises a augmenté, pour atteindre 17%, sans oublier le fait que l’actuelle Ministre de la défense est une femme, tout comme l’était son prédécesseur.  À cela, s’ajoute le fait que la police albanaise applique désormais un strict critère de parité dans sa politique de recrutement, de sorte que, au total, les femmes représentent à l’heure actuelle 14% des forces de police du pays.  Au plan politique, 28% des Parlementaires et la moitié des ministres du gouvernement sont des femmes.

Par ailleurs, la représentante a déclaré que son pays travaillait actuellement à l’élaboration d’un plan d’action national, avec l’appui de ses partenaires hollandais, d’ONU-Femmes, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’Union européenne (UE).  Au niveau régional, l’Albanie soutient le Réseau des femmes médiatrices de la région méditerranéenne, créé à l’initiative de l’Italie.  « Notre monde a besoin de plus de leaders femmes et de plus d’hommes acquis à la cause de l’égalité des sexes », a-t-elle déclaré en conclusion.

S’associant à la déclaration de l’Union européenne (UE), M. XXX (Hongrie) a rappelé que dans les zones touchées par les conflits, les femmes jouent un rôle clef pour assurer des moyens de subsistance à leurs familles.  Elles sont très bien implantées dans la vie communautaire et sont donc essentielles pour lutter contre l’extrémisme violent.  Le représentant a estimé qu’une bonne mise en œuvre du programme « femmes et paix et sécurité » exige une coopération entre les gouvernements et les organisations de la société civile.  À ce propos, il s’est dit profondément préoccupé par la violence contre les défenseurs des droits des femmes.  À ses yeux, la participation accrue des femmes aux opérations de maintien de la paix est essentielle pour la protection des civils.  Par conséquent, la Hongrie a augmenté le nombre de ses expertes et policières dans les missions de maintien de la paix des Nations Unies auxquelles elle participe.

M. NABEEL MUNIR (Pakistan) a souligné le « fardeau disproportionné de traumatisme et de violence » porté par les femmes en temps de conflit.  Le viol des femmes est une tactique de guerre, a-t-il dit, avant d’inviter le Conseil à se concentrer sur les causes profondes des conflits afin de les prévenir.  Les gouvernements doivent veiller à la protection des femmes, a-t-il poursuivi, jugeant essentiel de renforcer les capacités en la matière.  Le délégué a demandé une participation accrue des femmes aux processus de paix et a rappelé, en conclusion, que son pays a contribué au Fonds d’affectation spécial en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles.

M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) a fait observer que les principes d’égalité et de non-discrimination sont au cœur de la Constitution des Maldives. La législation nationale a été renforcée pour lutter contre le harcèlement sexuel, la violence domestique et les abus sexuels.  Aux Maldives, les femmes représentent plus de 60% des fonctionnaires, 40% du personnel judiciaire et au moins 30% des sièges leur sont réservés dans les conseils d’administration des entreprises publiques.  Pour mettre en place la résolution 1325, la législation et les politiques sont nécessaires mais ce sont aussi et surtout les mentalités qui doivent évoluer, a estimé le représentant.  Les études montrent que lorsque davantage de femmes occupent des postes de pouvoir, l’acceptation et la perception que la société en a s’améliorent, a-t-il poursuivi.  C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de faire en sorte que les femmes prennent une part égale dans les décisions essentielles de l’exécutif.

Mme LISE H.J. GREGOIRE-VAN-HAAREN (Pays-Bas) a cité les noms de plusieurs femmes, tirées du dernier rapport de « Human Rights Watch » sur la République centrafricaine, où elles ont été victimes de viols et d’esclavage sexuel, utilisés comme tactique de guerre dans tout le pays.  Elle a ensuite souligné la détermination de son pays à intégrer la problématique hommes-femmes dans toutes ses politiques, laquelle ne consiste pas seulement à respecter des obligations paritaires, mais aussi à être porteuse de changements.  « La résolution 1325 ne doit pas simplement être traduite dans les langues officielles, mais aussi dans les faits », a tranché la déléguée.

M. HECTOR ENRIQUE JAIME CALDERON (El Salvador) a mentionné les efforts constants de son pays en faveur de la protection des droits des femmes.  En juillet dernier, El Salvador a lancé son plan d’action national an application de la résolution 1325 (2000).  Le plan prévoit des actions innovantes relatives à la protection sociale des femmes, a poursuivi le délégué qui a reconnu le rôle crucial des femmes dans la promotion et le maintien de la paix et a apporté son soutien à l’approche de tolérance zéro du Secrétaire général, s’agissant des atteintes sexuelles commises par les soldats de la paix.  En conclusion, il a affirmé qu’El Salvador s’efforçait d’augmenter le nombre de femmes au sein des contingents salvadoriens des missions de paix de l’ONU.

M. CRISTIÁN BARROS MELET (Chili) a rappelé le rôle pionnier joué en Amérique latine par son pays dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), sous le mandat de la Présidente Michelle Bachelet.  Celle-ci est bien consciente du rôle crucial des femmes en tant qu’agents du changement et du maintien de la paix, a-t-il poursuivi.  Le second plan national du Chili met l’accent sur l’éducation et la formation du personnel, a affirmé M. Barros Melet qui a affirmé que l’autonomisation des femmes est l’un des piliers du projet porté par Mme Bachelet.  Au nombre des progrès accomplis, le délégué a mentionné le quota de 40% réservé aux femmes dans le Congrès.  Mais à l’heure actuelle, l’urgence est d’accroître la participation des femmes dans les opérations de paix, a-t-il estimé.

M. EARLE COURTENAY RATTRAY (Jamaïque), s’est dit préoccupé par les insuffisances dans la mise en œuvre du programme « femmes et paix et sécurité ».  Il a exigé des mesures préventives pour s’attaquer aux causes structurelles et profondes des inégalités entre les sexes.  La Jamaïque, a-t-il indiqué, a élaboré une politique nationale du genre, alignée avec sa politique nationale de développement.  À cette fin, le Gouvernement a lancé la campagne « HeforShe » créée par ONU-Femmes et un plan d’action stratégique national 2017-2026 visant à éliminer la violence sexiste.  Le représentant a appuyé l’idée du Secrétaire général de créer des mécanismes efficaces pour mesurer les résultats concernant la mise en œuvre du programme.

Ces mécanismes, a-t-il estimé, doivent tenir compte de la coopération et du soutien nécessaires pour atteindre les résultats requis, notamment grâce à un financement prévisible et durable.  Notant le rôle des jeunes femmes dans la consolidation de la paix, il a exprimé son soutien au travail accompli conformément à la résolution 2250 (2015) sur la jeunesse, la paix et la sécurité. Il a également approuvé les efforts visant à assurer l’autonomisation économique des femmes, leur promotion dans les structures de gouvernance et leur accès à la justice et à la sécurité.  De même, il a exprimé son intérêt pour l’intégration d’une dimension genre dans les efforts de désarmement, de démobilisation et de réintégration.

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a dit que son pays souhaitait accroître la participation des femmes dans toutes les sphères de la société iraquienne, ainsi que leur nombre dans les postes à responsabilité.  La nouvelle Constitution iraquienne prévoit d’ailleurs que 25% des sièges du Conseil des représentants iraquien soient réservés aux femmes, a-t-il dit.  Le représentant a précisé qu’il y avait trois ambassadrices iraquiennes et qu’une femme est à la tête de la mairie de Bagdad.  Il a sollicité l’aide de la communauté internationale pour faciliter la réinsertion des femmes, notamment yézidies, qui ont enduré les pires sévices de la part de Daech.  Enfin, il a salué l’adoption de la résolution 2371 (2017) sur la collecte des éléments de preuve des crimes commis par Daech afin que ce groupe terroriste rende enfin des comptes à la justice.

M. PHILIPP CHARWATH (Autriche) a partagé trois points.  Premièrement, il ne peut y avoir de solution durable à un conflit sans la participation des femmes.  En avril, l’Autriche a organisé une retraite de haut niveau sur des processus de paix efficaces et l’inclusion des femmes, ce qui a permis de collecter des recommandations concrètes sur la manière d’aboutir à une participation significative des femmes dans ces processus.  Deuxièmement, l’autre élément clef est un journalisme sensible au genre et à la protection des femmes journalistes.  Lorsque les femmes sont présentées comme des victimes, un journalisme sensible au genre peut transformer les préjugés, promouvoir l’autonomisation des femmes et sensibiliser l’opinion publique au rôle des femmes dans la prévention, la gestion et la résolution des conflits.  Le 3 novembre prochain, l’Autriche organisera une manifestation sur le rôle des médias dans la mise en œuvre de l’agenda femmes, paix et sécurité.  Troisièmement, les organisations régionales sont bien placées pour faire le lien entre le cadre international et les mises en œuvre locales et nationales.  L’Autriche appelle l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à adopter son propre plan d’action sur les femmes, la paix et la sécurité. 

Mme ELENE AGLADZE (Géorgie) a déclaré que son pays était en train d’élaborer son troisième plan d’action national en application de la résolution 1325 (2000).  La Géorgie vient de signer la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul, a-t-elle poursuivi.  La déléguée s’est dite vivement préoccupée par le sort des femmes vivant dans les régions occupées de la Géorgie, lesquelles continuent de subir de graves violations de leurs droits et libertés, en particulier la liberté de mouvement.  La situation dans ces territoires occupés est d’autant plus alarmante qu’aucune mission de surveillance n’y est déployée, a conclu Mme Agladze.

M. RIYAD MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a dit apprécier les efforts consentis par l’ONU pour mettre cette question au centre de la plateforme de prévention et de l’élan diplomatique.  Il a ensuite mis en avant les propres efforts de la Palestine, soulignant que le mouvement des femmes palestiniennes est l’un des plus vieux et des plus forts de la région et au delà, avec des structures représentatives datant du XIXe siècle.  L’Union générale des femmes palestiniennes, au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), a été l’un des premiers syndicats de la région.  Il a également cité le Comité national de haut niveau pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), créé en 2012, et le plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité lancé en 2016.  La Palestine a été l’un des 68 pays à se doter d’un tel plan, s’est enorgueilli M. Mansour qui a ensuite détaillé les objectifs du plan d’action 2017-2019, adopté tant par le Gouvernement que par les organisations de la société civile.  Malgré ces efforts, une femme n’a été élue à un poste élevé de l’exécutif de l’OLP qu’en 2009.  La Palestine doit aussi revoir le cadre législatif pour garantir la cohérence avec les engagements internationaux concernant la protection et les droits des femmes, a reconnu M. Mansour.

M. CHARLES T. NTWAAGAE (Botswana) a dit que la communauté internationale devait continuer de s’attaquer aux normes sociales qui perpétuent la violence et les abus sexuels contre les femmes et promouvoir le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  À cet égard, le représentant a souligné la responsabilité des États d’honorer leur obligation de mettre fin à l’impunité et d’utiliser tous les moyens disponibles pour établir les responsabilités et poursuivre tous les auteurs des violations.  M. Ntwaagae a appelé les États à prendre des mesures pratiques pour lever les obstacles de l’accès des femmes à la justice y compris en créant un environnement dans lequel les femmes peuvent effectivement dénoncer les violences sans crainte et sans intimidation.  Il a exhorté tous les États à renforcer la capacité de leurs systèmes judiciaires pour élargir l’accès des victimes à la justice. 

M. TANMAYA LAL (Inde) a plaidé en faveur d’une « implication institutionnalisée » des femmes dans le maintien de la paix, la prévention des conflits et les processus politiques.  Selon lui, la problématique femmes, paix et sécurité ne peut pas être envisagée isolément du contexte social plus large de l’autonomisation des femmes et des questions de développement durable.  Le représentant a rappelé que son pays, « le plus important contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix de l’ONU ces 70 dernières années », avait mis sur pied, il y a 10 ans, la toute première unité de police féminine au sein de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL).  Le Premier Ministre Modi, a annoncé M. Lal, s’est engagé en faveur d’une participation plus élevée des femmes parmi les Casques bleus, avec un objectif de 15% d’observateurs militaires d’ici à la fin de cette année.  L’Inde a également l’intention de déployer une autre unité de police formée exclusivement de femmes.  Par ailleurs, a ajouté le délégué, New Dehli a pris la tête d’un effort visant à animer des ateliers de sensibilisation à la violence sexuelle dans les situations de conflit armé.

M. JUAN CARLOS MENDOZA-GARCÍA (Costa Rica) a appelé les États membres du Conseil de sécurité à soutenir sans restriction l’engagement du Secrétaire général à parvenir à l’égalité des sexes à tous les niveaux des opérations de maintien de la paix.  Il est en outre essentiel d’intégrer la perspective genre et droits de l’homme dans tous les domaines d’action des processus de paix et de sécurité, comme par exemple dans les commissions d’enquête ou les mécanismes de justice transitionnelle.  Le recours généralisé à la violence sexuelle comme tactique de terreur et arme de guerre est inacceptable, a ajouté le représentant, et ces actes, qui constituent un crime contre l’humanité, doivent être pénalisés avec la plus grande fermeté, une lutte totale contre l’impunité et le renvoi des criminels devant la Cour pénale internationale.

Le Costa Rica salue la volonté du Secrétaire général de lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles.  Il a d’ailleurs adhéré au Pacte volontaire lancé en septembre. M. Mendoza-García a insisté sur la nécessité d’apporter le soutien nécessaire aux victimes et aux survivants de violences sexuelles en situation de conflit afin de les aider à se réinsérer correctement et avec dignité dans leur communauté.  Il faut également en finir avec les normes discriminatoires et garantir l’accès des femmes aux ressources économiques et financières.  Il est nécessaire de prendre en compte les répercussions de la violence armée sur les femmes, et par conséquent les impliquer dans les efforts de désarmement, de non-prolifération et de contrôle des armes.

M. ION JINGA (Roumanie) a constaté la nécessité de plus en plus urgente d’avoir plus de femmes dans les postes de commandement des opérations de maintien de la paix.  La Roumanie, a-t-il dit, est un grand promoteur de l’intégration des femmes dans les contingents des missions de l’ONU.  Nous sommes fiers qu’une femme officier de la police roumaine ait reçu le titre d’« International Female Police Peacekeeper » en 2015.  Actuellement, une autre femme policier roumaine occupe le poste de chef des opérations au sein de la Mission de l’ONU au Libéria, a indiqué le représentant.

En même temps, en application de la résolution 1325 (2000), le Ministère de la défense a adopté un plan d’action visant à mettre en œuvre le programme femmes, paix et sécurité, ce qui fait qu’à présent, 40 femmes militaires roumaines sont déployées dans des missions de l’ONU ou d’autres organisations internationales, en République démocratique du Congo, en Afghanistan, dans les Balkans et en Géorgie.  En outre, la Roumanie a rejoint le Réseau de points focaux nationaux « femmes, paix et sécurité », officiellement lancé à New York, le 23 septembre 2016.

Les 13 et 14 juin 2017, le Ministère de la défense a organisé à Bucarest, une conférence régionale sur « l’intégration du genre dans la sécurité et la défense ».  La Roumanie a aussi rejoint le Royaume-Uni et le Pérou dans une manifestation organisée à l’ouverture de la session actuelle de l’Assemblée générale sur la présence des femmes dans les opérations de maintien de la paix.

Mme LOUISE SHARENE BAILEY, de l’Union africaine, a déclaré qu’à sa réunion du 13 mars 2017, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a approuvé les modalités de création du Réseau des femmes africaines de prévention de conflit et de médiation (FEMWISE-AFRICA) dont l’objectif est de renforcer le rôle des femmes dans la prévention et la médiation dans le contexte de l’Architecture africaine de paix et de sécurité (APSA).  En août de cette année, le Conseil de sécurité a approuvé cette initiative. 

Les priorités de FEMWISE-AFRICA sont, entre autres choses, d’« assurer un canal pour la participation significative et efficace des femmes aux processus de paix, y compris en tant que chefs des missions officielles de médiation de haut niveau et, initier l’action des femmes qui catalysera et intégrera l’engagement des femmes dans la médiation, conformément à « l’Agenda 2063 » de l’Union africaine et des objectifs de développement durable.

Comme partie de ses efforts pour accélérer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), l’Union africaine lancera officiellement en février 2018 l’initiative « Réseau des femmes leaders africaines ».  Avant cela, le 31 octobre prochain, le Conseil de paix et de sécurité tiendra un débat public sur le « rôle des femmes dans la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent en Afrique ».

M.   , de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), a déclaré que le Plan d’action de l’OTAN sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) et les résolutions connexes ont été approuvées par les 29 membres de l’Organisation et 55 pays, ce qui en fait la plus large coalition politique pour mettre en œuvre l’agenda femmes, paix et sécurité.  L’OTAN vise à maintenir cet élan et à intensifier le soutien en 2018 avec des versions révisées à la fois de la résolution 1325 et de son plan d’action.  Cette révision permettra à la politique et au plan d’action de l’OTAN de souligner l’importance d’intégrer la perspective genre dans tout le travail et à tous les niveaux.

Mme DIOSITA T. ANDOT (Philippines) a indiqué que la ville de Marawi, au sud des Philippines, avait finalement été libérée après cinq mois de terreur imposée par l’État islamique, entrainant le déplacement de 700 000 personnes.  Elle a expliqué que son gouvernement avait lancé un plan d’évaluation postconflit et un plan de réhabilitation et de reconstruction de la paix, en coopération avec des partenaires internationaux comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Elle a souligné que ces programmes prenaient en compte la problématique de genre sous tous ses aspects.

La représentante a ensuite rappelé que son pays mettait en œuvre depuis le début la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et qu’il lançait, pour la période 2017-2022, son troisième plan d’action national (NAPWPS).  Elle a spécifié que ce plan intègre plus largement la situation des femmes dans les conflits armés et reconnait leur contribution au règlement des conflits.  Le plan, a-t-il insisté, a pour objectif premier d’intégrer le vocabulaire et les préceptes de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, a-t-elle expliqué. 

Dans la recherche de la paix avec différents groupes rebelles aux Philippines, des actions significatives sont menées pour assurer une meilleure participation des femmes, en particulier les femmes autochtones ou Moro, et pour garantir une meilleure protection de leurs droits.  La représentante a souligné que les femmes avaient joué un rôle crucial dans la réponse apportée à la crise de Marawi, avec le déploiement, pour la première fois, lors des combats, d’une unité féminine (CRC) chargée de mettre en œuvre les programmes de reconstruction et d’assistance aux personnes déplacées.  La représentante a également mis en avant la création, avec l’aide d’ONU-Femmes, d’un kit pour renforcer l’implication des femmes dans le développement. 

M. NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam) a demandé le renforcement de la réponse collective aux défis de la sous-représentation, des inégalités et de la discrimination à l’encontre des femmes.  La représentation et la participation des femmes aux processus décisionnels dans les situations postconflit et les efforts de paix doivent être élargis pour veiller à ce que leurs besoins et intérêts soient reflétés et satisfaits. 

La perspective genre devrait être intégrée de manière cohérente et complète dans tous les domaines du maintien de la paix et de la prévention des conflits.  L’impunité doit cesser, a ajouté le représentant, avant de souligner l’importance de l’éducation pour renforcer les capacités des femmes.  L’éducation est essentielle pour équiper les femmes et les filles des connaissances qui leur permettront de se protéger des risques et d’assurer leur résilience contre les chocs économiques, les changements climatiques et les catastrophes naturelles.  Il faut les sensibiliser au programme femmes, paix et sécurité en utilisant les différents moyens de communication.  M. Nga a indiqué que la première femme officier vietnamienne sera bientôt déployée à la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud ainsi que neuf autres femmes qui vont travailler dans un hôpital de niveau II.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de l’égalité des sexes et de la promotion des droits des femmes, qui sont des éléments cruciaux de la prévention et du règlement des différends.  Il a salué les recommandations faites par le Secrétaire général dans son rapport, notamment celles qui attirent l’attention sur les liens entre la problématique à l’ordre du jour et la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier les objectifs 5 sur l’autonomisation des femmes et 16 sur les sociétés pacifiques et inclusives.  Le représentant a précisé que son gouvernement avait élaboré plusieurs projets, dont un mécanisme national destiné à protéger la femme de toute forme de violence.

M. SAOD RASHID AL MAZROUI (Émirats arabes unis) a affirmé que l’un des principes fondateurs de son pays était la pleine participation des femmes dans toutes les sphères de la société.  Il a souligné l’importance du partenariat de son pays avec ONU-Femmes, le premier ayant annoncé une contribution de 15 millions de dollars au profit de l’organisation au cours des trois prochaines années.  Mon pays et ONU-Femmes ont lancé en 2016 un bureau de liaison à Abu Dhabi afin de promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, a-t-il dit.  Le délégué a souligné l’importance de renforcer les capacités judiciaires des États pour qu’ils puissent poursuivre les auteurs de violences sexuelles.  C’est pourquoi mon pays soutient l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action contre la violence sexuelle en Somalie, a-t-il conclu.

M. ZOHRAB MNATSAKANYAN (Arménie) a annoncé l’adoption prochaine par son gouvernement d’un projet de loi sur la prévention des violences conjugales et la protection des victimes.  Il s’est félicité de pouvoir annoncer que le quota des femmes parlementaires est récemment passé de 20 à 25%, avec comme objectif de parvenir à 30% d’ici à 2020.  Outre un plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), le représentant a fait valoir le lancement d’ateliers dans son pays, en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), pour sensibiliser à la mise en œuvre de la résolution.  Il a appuyé les recommandations du Secrétaire général qui envisage de faire de cette mise en œuvre un véritable programme « transformatif » pour pérenniser la paix.  Il a enfin salué le rôle que jouent les femmes dans le règlement des différends, en particulier des organisations issues de la société civile, notamment dans le Haut-Karabakh.  Le représentant a cependant regretté que les efforts déployés en ce sens soient entravés et que des Arméniens soient pris pour cible dans « l’État voisin ».

Pour Mme PENNELOPE ALTHEA BECKLES, (Trinité-et-Tobago), le caractère précurseur de la résolution 1325 ne saurait être assez mis en évidence, son pays ayant été un des premiers à reconnaître la nécessité d’impliquer les femmes dans les efforts de paix et de sécurité.  Le soutien de son pays aux résolutions successives, dont il reconnaît la nature particulière, est fondé sur les obligations de la Charte et les propres lois nationales de Trinité-et-Tobago, qui ont intégré les droits inaliénables des femmes.  Poursuivant, la représentante a rappelé l’importance d’honorer les obligations en vertu des instruments internationaux tels que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ou la Convention relative aux droits de l’enfant.

Elle a mis en évidence le rôle que peut jouer le Traité sur le commerce des armes pour contribuer à la réduction, si non à l’élimination, des souffrances incalculables, en particulier des femmes et des enfants.  Mme Beckles a aussi voulu rappeler la complémentarité de la résolution 1325 (2000) avec la première résolution présentée à l’Assemblée générale par son propre pays en 2010, sur les « femmes, le désarmement, la non-prolifération et le contrôle des armes ».  Elle a salué le plan stratégique des Nations Unies pour l’égalité des sexes, « un instrument important qui peut contribuer à l’objectif commun ».

M. URUJENI BAKURMUTSA (Rwanda) a déclaré que faire participer les femmes aux processus de paix et de sécurité n’était pas seulement « une bonne chose à faire, mais aussi une décision intelligente ».  La contribution unique des femmes apporte une valeur ajoutée aux questions importantes telles que la protection des droits de l’enfant, la lutte contre les violences sexistes et la promotion des droits de l’homme.  Il est clair, a dit le représentant, que lorsque les droits des femmes et leur autonomie sont entravés, les répercussions sur la société dans son ensemble sont terribles.  Ainsi, pendant le génocide des Tutsi, le viol et d’autres formes de violence sexuelle étaient principalement dirigés contre les femmes, non seulement pour avilir la femme en tant qu’individu, mais pour dépouiller la communauté au sens large de l’humanité qui est la sienne, a argué M. Bakurmutsa.  Il a ensuite signalé une initiative régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est, en coopération avec l’Union africaine, pour développer un « cadre destiné à renforcer le leadership des femmes » dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix.  Au niveau national, le Rwanda a adopté un plan d’action national pour donner effet à la résolution 1325 (2000).  Ses deux piliers, a précisé le délégué, sont la promotion de la participation égale des femmes et des hommes à toutes les initiatives de paix à tous les niveaux, et l’intégration d’une perspective « genre » dans les efforts de paix et de sécurité.

Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) a affirmé que le Portugal a toujours soutenu le programme femmes, paix et sécurité, qu’il juge essentiel pour parvenir à une participation active des femmes et des filles dans tous les aspects et à toutes les étapes de la prévention des conflits, de leur résolution et des processus de sortie de conflit.  En 2009, le Portugal a adopté un premier plan d’action national sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) puis un deuxième plan pour la période 2014-2018.

Mme Pucarinho a réitéré l’engagement de son pays à continuer de former le personnel des forces armées et de sécurité affecté à des missions de maintien de la paix sur l’égalité des sexes et la violence contre les femmes et les filles, notamment la violence sexuelle, la violence sexiste et la traite.  Le Portugal soutient totalement la politique de tolérance zéro du Secrétaire général, a dit la représentante qui a salué l’organisation de la réunion de haut niveau sur la prévention qui s’est tenue le 18 septembre.  Le Portugal, qui y a participé, a également signé le Pacte volontaire contre l’impunité.  Il a renforcé les mesures de prévention, rejoint le cercle de dirigeants sur la prévention et contribué au Fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles, a encore précisé la représentante.

M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) a estimé que la communauté internationale doit trouver les moyens de promouvoir davantage l’égalité des sexes et les droits des femmes, tout en augmentant leur nombre dans les postes de direction des efforts de paix et de sécurité.  Pour sa part, la Thaïlande a adopté en 2016 des mesures et directives sur la question « femmes, paix et sécurité », qui comprennent les aspects de la prévention, de la protection, du renforcement des capacités et de l’autonomisation.  Ce document souligne le rôle important des femmes dans la résolution des conflits politiques et sociaux tant aux niveaux national qu’international, a expliqué le représentant qui a aussi indiqué que 24% du personnel militaire et de police thaïlandais servant dans les opérations de maintien de la paix au Soudan du Sud, en Inde et au Pakistan ainsi qu’au Darfour sont des femmes.

Les États doivent faire plus pour accroître le niveau de participation des femmes au maintien de la paix, qui reste en-dessous des 4% des effectifs en uniforme.  Nous devons, s’est impatienté le représentant, nous rappeler que les femmes ne sont pas seulement des victimes mais aussi et surtout des agents efficaces du changement.  La rhétorique doit aller au-delà de la promotion du simple rôle des femmes comme propagatrices d’un sentiment de sécurité auprès des autres femmes et des enfants.  Arrêtons une fois pour toutes de perpétuer le stéréotype « femmes douces pacificatrices ».

Mme MANAL HASSAN RADWAN (Arabie saoudite) a dit qu’en dépit d’un consensus international sur le rôle des femmes dans la paix et la sécurité, il reste encore beaucoup à faire pour traduire en actes la résolution 1325 (2000).  Trois difficultés essentielles, selon elle, se posent. La première est l’occupation, qui représente le principal obstacle à la réalisation des droits des femmes, comme en Palestine, où celles-ci sont victimes de détentions arbitraires et de torture physique et psychologique par les forces israéliennes.  La déléguée a ensuite incriminé le terrorisme, comme l’illustrent les agissements du Hezbollah, de Daech et de Boko Haram dans différentes régions du monde.  Elle a aussi mis en cause le « discours de l’extrémisme violent » contre les musulmanes, y compris dans des démocraties, où la liberté religieuse et idéologique des femmes est bafouée « en raison de leur aspect ».  Afin de remédier à ces difficultés, l’Arabie saoudite appelle à mettre fin à l’occupation et à la colonisation et à cesser de soutenir des régimes oppresseurs.  La représentante s’est enorgueillie de ce que les Saoudiennes puissent par exemple participer aux élections municipales et occuper des postes à responsabilité dans la diplomatie.

M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a souligné la détermination de son pays à améliorer la vie des femmes afghanes. L’autosatisfaction n’est pas de mise, a-t-il dit. Le délégué a pointé le fardeau disproportionné porté par les femmes au cours des décennies de conflit qui ont dévasté son pays. Depuis 2001, d’immenses progrès sociaux ont été enregistrés en Afghanistan, a-t-il déclaré. Il a indiqué que son Gouvernement n’épargnait aucun effort pour appliquer la résolution 1325 (2000) en vue d’assurer la pleine participation des femmes au processus de consolidation de la paix en cours et dans toutes les sphères de la société. Le délégué a redit l’engagement de son pays à augmenter le nombre de femmes dans les Forces afghanes, lesquelles comptent aujourd’hui plus de 3 000 femmes soldats et policières. Il a mentionné la création du Ministère de la condition de la femme au nombre des structures créées pour promouvoir les droits des femmes.  Il a affirmé, en conclusion, que son pays est entré dans une « nouvelle phase » et a jugé crucial l’appui de la communauté internationale.

Mme HELENA YÁNEZ LOZA (Équateur) s’est félicitée que le rôle des femmes fasse l’objet d’un examen périodique au Conseil de sécurité, donnant ainsi à la communauté internationale l’occasion de se pencher sur leur place dans la paix et la sécurité.  Elle a estimé que les recommandations du Secrétaire général répondent à la nécessité de travailler sur l’égalité des sexes, pour ce qui est de l’autonomisation des femmes, de la protection de leurs droits et des risques auxquels elles font face, notamment les violences sexuelles et de genre.  Elle a rappelé que la prévention et la résolution des conflits, la reconstruction postconflit et la pérennisation de la paix ne pouvaient être achevés qu’en prenant en compte cet objectif intrinsèque.  Elle a salué le mécanisme mis en œuvre pour assurer l’inclusion de l’égalité des sexes dans les processus de maintien ou de consolidation de la paix.

« Les violences sexuelles dans les conflits sont une réalité inacceptable », a-t-elle déclaré, insistant sur la nécessité « de prévenir l’impunité des auteurs », de mettre en place « un mécanisme d’aide aux victimes » et « d’éduquer la société ».  Elle a rappelé que ces efforts devaient permettre « d’éliminer tous les cas d’abus ou d’exploitation sexuelles dans les opérations de maintien ou de consolidation de la paix », rappelant que ces abus sapent la crédibilité de l’ensemble de l’ONU.

Autant que pour les problèmes de participation ou de leadership, ces problèmes de violences sexuelles ne sont pas dus à une absence de lois, de politiques publiques ou de structures administratives mais d’un manque de mise en œuvre imputable « à des mentalités qui n’ont pas évolué ».  « C’est un exercice quotidien », a-t-elle indiqué, ajoutant que « pour que ce changement s’installe, le processus d’inclusion doit être important et continu ».  Le chemin est long et pavé « d’un plafond de verre, d’échelles bancales et de passages glissants ».

M. EMMANUEL ADEMOLA OGUNNAIKE (Nigéria) a affirmé que la protection des droits des femmes était la marque du progrès de l’humanité.  La responsabilité de cette protection incombe en premier lieu aux gouvernements, la communauté internationale devant leur apporter une aide constructive, a-t-il déclaré.  Il a précisé qu’une telle aide devait respecter les priorités nationales.  Le délégué a noté le rôle de l’Union africaine dans l’avancement du programme « femmes, paix et sécurité ».  Au plan national, il a indiqué que le second plan d’action national adopté par son pays en application de la résolution 1325 (2000) avait élargi le concept de sécurité pour inclure les questions de l’extrémisme violent, du désarmement et de la démobilisation.  Ce plan reflète l’engagement de mon gouvernement à assurer la sécurité des femmes et des filles par temps de conflit armé et à garantir leur pleine participation aux stratégies de prévention des conflits et de consolidation de la paix, a-t-il poursuivi.

Le délégué a déclaré que les efforts de son pays et de ses partenaires internationaux avaient permis la libération de tous les territoires occupés par Boko Haram.  Notant que 80% des deux millions de personnes déplacées dans le nord-est du Nigéria sont des femmes, il a mentionné les mesures concrètes prises pour faciliter leur retour volontaire et digne.  Mon gouvernement œuvre sans relâche pour assurer la libération de toutes les filles de Chibok et des autres personnes qui sont encore aux mains de Boko Haram, a conclu le délégué nigérian.

M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) a salué le lancement du Réseau des femmes leaders africaines en mai dernier à New York et souligné « le haut degré d’intégration » de la question de la femme dans l’architecture de paix et de sécurité de l’Union africaine. Parmi les efforts consentis par l’Union africaine, il a cité l’accès des femmes à des postes de médiatrices de paix, d’observatrices électorales ou de conseillères pour l’égalité des sexes.  Le délégué a déclaré que le Parlement de Djibouti compte 12% de femmes, ces dernières représentant par ailleurs 25% des effectifs de l’administration publique.  Il a ajouté que son pays préparait un projet visant à la création d’un observatoire du genre et a souligné la nécessité d’éradiquer les causes profondes des conflits et de renforcer leur prévention.

Mme LALA MEHDIYEVA (Azerbaïdjan) a constaté la volonté politique certaine de la communauté internationale de mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) mais que les injustices se poursuivent vis-à-vis des femmes.  Elle a contesté les propos du représentant de l’Arménie, pays qui aurait commis des crimes très graves dans son pays et porté des accusations sans fondement aujourd’hui.  Elle a fait état d’atrocités telles des « décapitations » et des « mutilations de femmes enceintes », et de la séparation d’enfants de leur famille.  En avril dernier, les forces armées de l’Arménie ont, a-t-elle affirmé, effectué des tirs d’artillerie lourde contre des villages azéris.  L’Azerbaïdjan poursuivra néanmoins ses efforts pour résoudre le conflit par des moyens pacifiques, a assuré la représentante. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: l’examen de la situation des droits de l’homme par pays donne lieu à de vives attaques contre les procédures spéciales

Soixante-douzième session,
32e & 33e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4212

Troisième Commission: l’examen de la situation des droits de l’homme par pays donne lieu à de vives attaques contre les procédures spéciales

Alors que la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, poursuivait aujourd’hui son examen de la situation des droits de l’homme dans différents pays, un large groupe de délégations ont rappelé leur opposition au principe même des mandats de pays, jugés politisés, sélectifs, intrusifs et irrespectueux de la souveraineté des États dès lors qu’ils étaient créés sans leur accord.  Plusieurs ont estimé que la Troisième Commission n’était pas le lieu pour les examiner et que ces questions devraient être traitées au Conseil des droits de l’homme, dans le cadre de l’Examen périodique universel. 

Ont été visés aujourd’hui par ces attaques -déjà exprimées hier à propos de la République islamique d’Iran et du Myanmar– les trois Rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), en Érythrée et au Bélarus –respectivement M. Tomas Ojea Quintana, Mme Sheila B. Keetharuth et M. Miklós Haraszti- ainsi que le Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, M. Fatsah Ouguergouz.

Les présentations de ces quatre titulaires de mandats de procédures spéciales ont néanmoins permis de constater l’étendue du chemin restant à parcourir pour arriver à une normalisation.

À propos de la RPDC, M. Quintana a regretté d’avoir à continuer d’identifier des « schémas de graves violations des droits de l’homme ».  Il s’est aussi déclaré préoccupé par les conséquences des sanctions du Conseil de sécurité sur des secteurs vitaux de l’économie et par la rhétorique guerrière qu’entretiennent le Gouvernement nord-coréen et ceux d’autres pays.  M. Haraszti a, pour sa part, constaté qu’en dépit d’une période de « détente » et de changements « cosmétiques » après les arrestations massives de manifestants en 2010, le Bélarus avait repris sa politique de répression vis-à-vis des voix critiques.

S’agissant de la situation en Érythrée, Mme Sheila B. Keetharuth a noté qu’en l’absence de constitution, d’assemblée législative et de système judiciaire indépendant, des questions continuaient de se poser dans ce pays sur les conditions de détention, les morts en prison, les exécutions extrajudiciaires, la détention arbitraire ou les brèches dans la liberté d’expression, de religion et de croyance.  Elle a ajouté que l’Érythrée jouissait en outre d’une impunité totale pour les violations commises dans le passé, dont certaines relèvent du crime contre l’humanité, notamment des cas d’esclavage, de disparitions forcées et de torture.

Quant au Burundi, M. Ouguergouz a estimé que les violations des droits de l’homme constatées depuis avril dans ce pays pourraient être constitutives de crimes contre l’humanité, tels que définis par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  Rappelant que le retrait du Burundi de la CPI prenait effet ce jeudi à minuit, il a assuré que la Cour restait compétente pour reconnaître tout crime de droit international commis pendant la période considérée et lui a recommandé d’ouvrir une enquête à ce sujet.

À l’exception de la RPDC, dont le représentant n’a pas pris la parole lors de la présentation du rapport de M. Quintana, chacun des États concernés a vigoureusement dénoncé le rapport qui le visait, l’accusant d’être partial, déséquilibré, politiquement motivé ou encore mal renseigné, d’autant qu’aucune des procédures spéciales en cause n’avait été autorisée à se rendre dans le pays relevant de son mandat.  L’Érythrée a estimé que le mandat de Mme Keetharuth provenait de « pays hostiles », le représentant du Burundi a dénoncé « un véritable ragoût de mensonges et de manipulations » visant à déstabiliser son pays et son homologue du Bélarus y a vu un exemple des « pratiques délétères du Conseil des droits de l’homme ».

Les pays concernés n’ont pas été les seuls, loin s’en faut, à critiquer les différentes procédures spéciales lors des dialogues interactifs successifs.  Comme la veille, le Venezuela a insisté au nom du Mouvement des pays non alignés sur le fait que les questions relatives aux droits de l’homme devraient être abordées dans un contexte global, « sans politisation ni sélectivité ou esprit de confrontation et dans le respect de la souveraineté des États ».

Pour un grand nombre de délégations, notamment la Fédération de Russie, la République arabe syrienne, la Chine, Cuba, l’Égypte, l’Algérie ou encore la République démocratique populaire lao, seul le Conseil des droits de l’homme, par le biais du mécanisme de l’Examen périodique universel (EPU), dispose de la légitimité nécessaire pour examiner la situation des droits de l’homme, et ce, dans tous les États.  Ces pays ont dénoncé les rapports de pays comme allant à l’encontre de la Charte des Nations Unies, qualifiant ces outils de « contreproductifs et inefficaces ».

Les deux autres Rapporteuses spéciales qui sont intervenues aujourd’hui –Mme Agnès Callamard, sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, et Mme Urmila Bhoola, sur les formes contemporaines d’esclavage- n’ont pas été soumises aux mêmes critiques avec leurs mandats thématiques.  Elles n’en ont pas moins décrit des situations sombres.

Mme Bhoola a ainsi rappelé que, d’après l’Organisation internationale du Travail (OIT), plus de 40 millions de personnes, dont 25% d’enfants, étaient victimes de formes contemporaines d’esclavage en 2016, alors que 150 milliards de dollars de profits étaient réalisés par le secteur privé grâce au travail forcé.  Ces chiffres mettent, selon elle, en lumière l’urgence d’une action globale visant à faire respecter et à protéger les droits des victimes.

Pour sa part Mme Callamard a présenté un rapport consacré à la « mort illégale de réfugiés et de migrants, en expliquant que ce phénomène était encore peu documenté.  Combien sont exécutés, tués, noyés ou ont perdu la vie des suites de déshydratation ou de faim?  Combien ont été torturés, sont morts de désespoir ou se sont vus refuser des traitements pouvant les sauver?, s’est-elle interrogée, recommandant que le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières et le pacte mondial sur les réfugiés incorporent des mécanismes de prévention et de réponse à la privation arbitraire de la vie des migrants.

Demain, vendredi 27 octobre, la Troisième Commission poursuivra à partir de 10 heures son dialogue avec plusieurs titulaires de mandat de procédures spéciales.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME (A/72/40 ET A/C.3/72/9)

Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux

Déclarations liminaires, suivies de dialogues interactifs

M. TOMAS OJEA QUINTANA, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), a déclaré que, depuis sa dernière intervention devant l’Assemblée générale en 2016, la communauté internationale avait été le témoin d’une exacerbation sans précédent des tensions au sein de la péninsule coréenne.

Déplorant que la RPDC continue de rejeter son mandat et ses demandes de visite sur le terrain, le Rapporteur spécial a expliqué avoir cependant effectué des missions en République de Corée, au Japon, au Cambodge et au Saint-Siège, afin de pouvoir poursuivre ses investigations.

Présentant les conclusions de son rapport, M. Quintana a mentionné qu’entre janvier et septembre 2017, le pays avait tiré 19 missiles balistiques, ce qui a entraîné l’adoption de trois résolutions par le Conseil de sécurité ainsi que la prise de mesures unilatérales de la part de certains États Membres.

Le Rapporteur spécial s’est déclaré inquiet des conséquences des sanctions du Conseil de sécurité sur des secteurs vitaux de l’économie du pays et des conséquences directes que cela aurait sur la jouissance des droits de l’homme dans le pays.  L’Histoire montre que les sanctions peuvent avoir un impact dévastateur sur les populations civiles, a-t-il insisté.

M. Quintana s’est également dit préoccupé par la rhétorique guerrière qu’entretiennent le Gouvernement de la RPDC et ceux d’autres pays.  Il a rappelé que la communauté internationale devait veiller à ce que cette situation ne se transforme pas en conflit armé, ajoutant que la poursuite de la dénucléarisation ne pouvait pas se faire au risque d’une guerre nucléaire.

Le Rapporteur spécial a réaffirmé que toute politique d’isolement de la RPDC par la communauté internationale entraînerait une détérioration de la situation des droits de l’homme dans le pays, tout en insistant sur le fait que le Gouvernement de la RPDC avait la responsabilité première de protéger et de promouvoir les droits de l’homme dans le pays.  M. Quintana a, à ce propos, regretté d’avoir à continuer d’identifier des schémas de graves violations des droits de l’homme dans le pays.

Revenant sur la séparation de familles coréennes qui continue de prendre de nouvelles formes et d’affecter de nouvelles catégories de victimes, le Rapporteur spécial a mentionné le refoulement de Coréens par la Chine, qui entraîne une augmentation du nombre d’enfants de père chinois et de mère coréenne non reconnus.  De même, il a fait allusion aux enlèvements par la RPDC de citoyens de la République de Corée, dont les familles sont toujours sans nouvelles.

Le Rapporteur spécial a également mentionné la corruption et le rôle que cette dernière jouait dans la société, ainsi que la surveillance et le contrôle de l’information et de la communication par le Ministère de la sécurité d’État.

Reconnaissant cependant une amélioration de la situation, le Rapporteur spécial a fait état de l’amélioration de la coopération du pays avec les mécanismes des droits de l’homme des Nations Unies.  Il a ainsi relevé qu’en 2016 la RPDC avait ratifié son cinquième traité des droits de l’homme, la Convention relative aux droits des personnes handicapées, et avait autorisé, en mai 2017, le Rapporteur spécial sur ces droits à se rendre dans le pays.

Au début du dialogue avec M. Tomas Ojea Quintana, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, le Venezuela, s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a insisté sur le fait que les questions relatives aux droits de l’homme devraient être abordées dans un contexte global, sans politisation ni sélectivité ou esprit de confrontation et dans le respect de la souveraineté des États.

Un peu plus tard, Cuba, à son tour, a fait valoir qu’il n’appuyait pas les mandats de pays établis sans le consentement des pays concernés et s’est élevé contre un rapport motivé politiquement.  Pour Cuba, le régime de sanctions ne favorise pas les droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) et constitue une violation des droits de la population nord-coréenne.  Cuba n’entend pas suivre le « chemin du châtiment » choisi par le Conseil de sécurité et appelle au dialogue et à la coopération avec la RPDC.

Dans le même sens, la République islamique d’Iran a réaffirmé sa position de principe contre les mandats de pays, estimant que ce système viole la Charte des Nations Unies et les principes d’objectivité et de neutralité.  Elle a, elle aussi, exprimé sa préoccupation quant à l’impact des sanctions sur la population civile de la RPDC.  La République arabe syrienne a, elle aussi, dénoncé une ingérence dans les affaires de la RPDC, jugeant en outre regrettable que le Rapporteur spécial ait outrepassé son mandat, en s’intéressant à des questions de politique intérieure.  Elle a elle aussi plaidé en faveur de la poursuite d’un dialogue « équilibré et sans politisation » avec la RPDC.  L’Algérie s’est, quant à elle, déclarée préoccupée par le nombre croissant de rapports soumis à la Troisième Commission, estimant à son tour que l’Examen périodique universel était un outil plus utile pour l’amélioration des droits fondamentaux.

La République de Corée a déploré les continuelles violations des droits de l’homme en RPDC et a exprimé le souhait que la coopération avec les mécanismes des Nations Unies des droits de l’homme s’améliore.

Le Japon a fait état de sa véritable préoccupation face à l’attitude de la RPDC, qui préfère allouer ses ressources au développement de son arsenal nucléaire plutôt qu’à la protection de sa population.  Il a déclaré attendre du Rapporteur spécial qu’il évalue les mesures prises pour rendre certaines personnes responsables de la situation en matière de droits de l’homme.  Il a aussi voulu connaître l’avis du Rapporteur spécial quant à une utilisation optimale du Bureau de Séoul du Haut-Commissariat des droits de l’homme. 

Les États-Unis ont regretté que la RPDC refuse de s’engager avec le Rapporteur spécial et observé que des violations graves des droits de l’homme continuent d’être signalées dans ce pays.  Ils ont notamment cité le traitement infligé aux individus rapatriés de force de la Chine et les détentions extrajudiciaires pratiquées par le régime nord-coréen.  Cette situation nécessite, selon eux, des actions urgentes de la part de l’Assemblée générale.  À ce sujet, ils aimeraient savoir quelles mesures sont prises par les Nations Unies pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables en RPDC. 

Le Royaume-Uni a parlé de la « situation effrayante » en matière de droits de l’homme et a appelé le régime nord-coréen à redonner une dignité à sa population plutôt que de continuer à développer son système d’armes nucléaires.  Il l’a également exhorté à offrir au Rapporteur spécial un accès pour évaluer la situation sur le terrain.  L’Allemagne juge, elle aussi, déplorable la situation des droits de l’homme en RPDC et a appelé le pays à s’engager dans un dialogue constructif.  Elle a demandé ce que les Nations Unies pouvaient faire pour améliorer la condition des travailleurs coréens migrants à l’étranger.

L’Australie reste préoccupée par les violations des droits de l’homme en RPDC et regrette que ce pays semble préférer les armes balistiques à la protection de son peuple.  Jugeant important de continuer de prendre en considération les informations permettant d’étayer le rapport de la Commission d’enquête, elle a demandé à savoir comment le Rapporteur spécial évaluait la situation.

La Suisse reste préoccupée par la récurrence des violations des droits en RPDC et a souligné l’importance d’encourager le dialogue tout en assurant la traduction en justice des auteurs de ces violations.  Tout en notant avec satisfaction que la RPDC avait pris des mesures pour s’engager dans certains mécanismes des droits de l’homme, la Suisse a déploré son refus de coopérer avec le Rapporteur spécial.  Elle aimerait savoir comment obtenir la collaboration de la RPDC et quelle est l’approche de M. Quintana quant à une mise en œuvre des recommandations faites à l’occasion de l’Examen périodique universel.   

L’Union européenne a noté que de nombreuses visites de porteurs de mandats spéciaux en RPDC avaient été bloquées et a demandé de quelle manière la collecte d’informations indépendante pouvait être améliorée. 

L’Irlande estime que le Conseil de sécurité devrait référer la situation en RPDC et les violations des droits de l’homme qui y ont cours à la Cour pénale internationale.  Étant donné la détérioration de la situation des droits de l’homme dans le pays et la poursuite des sanctions internationales liées aux activités balistiques du régime, elle aimerait savoir comment la communauté internationale peut fournir un soutien adéquat pour s’assurer que les sanctions n’ont pas d’effet sur la population de la RPDC.  

La Norvège a noté avec satisfaction que la RPDC avait ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées et l’a appelée à adhérer à tous les traités relatifs aux droits de l’homme.  Si elle partage les préoccupations du Conseil de sécurité, elle juge qu’isoler le pays peut avoir des effets délétères sur la population.  Elle a souhaité savoir comment mieux évaluer la situation.  Bien que préoccupées par les violations systématiques des droits de l’homme en RPDC, les Maldives saluent, elles aussi, la ratification par ce pays de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.  Elles appellent le Gouvernement de la RPDC à coopérer avec les mécanismes des Nations Unies et le Rapporteur spécial, au lieu d’amasser des armes de destruction massive. 

La République tchèque a demandé quelles initiatives pourraient être explorées pour améliorer la collaboration entre la RPDC et l’ONU. 

L’Argentine a demandé quelles mesures pouvaient prendre la communauté internationale pour permettre un suivi effectif aux recommandations et conclusions du Conseil des droits de l’homme et du Groupe d’experts indépendants.

La Fédération de Russie a déclaré que la seule approche constructive possible avec la RPDC était celle de la coopération et du dialogue et que, n’en déplaise à certains acteurs, c’était la seule à même de permettre d’atteindre des résultats.  La République démocratique populaire lao a appelé elle aussi à un dialogue constructif avec la RPDC et a encouragé celle-ci à collaborer avec d’autres pays.

Dans ses réponses aux délégations, M. Tomas Ojea Quintana, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, a déploré que le dialogue ne soit pas total, du fait de l’absence du représentant de la RPDC.  Il a expliqué que le grand défi, pour lui, consistait à accéder aux informations sur la situation actuelle en RPDC.  Quant aux mesures à adopter, le Rapporteur spécial a rappelé que ses prédécesseurs avaient demandé que le Conseil de sécurité saisisse la Cour pénale internationale pour constater que c’était là « une option que le Conseil de sécurité n’a pas retenue », bien que les sanctions soient à ses yeux arrivées à leur point extrême.  À propos des effets négatifs du régime de sanctions, il a expliqué avoir rencontré à New York les personnes chargées du dossier et avoir recommandé au Groupe d’experts chargé de la mise en œuvre des sanctions d’élargir et d’étendre ses connaissances techniques sur leur impact négatif.

M. Quintana a par ailleurs estimé que le travail de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée « avance », insistant sur le fait que les informations recueillies devaient être impartiales et complètes, car elles allaient être contestées.

Mme SHEILA B. KEETHARUTH, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, a rappelé que, par sa résolution 35/35, adoptée sans vote, le Conseil des droits de l’homme avait renouvelé, en juin dernier, son mandat pour une année supplémentaire, avec pour mission d’assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations de la Commission d’enquête sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, publiées dans le rapport de juin 2016, et celles qu’elle avait, elle-même, formulées dans son rapport présenté en juin dernier.  Pour l’instant, elle entend se concentrer sur les éléments clefs et faire une mise à jour, en août prochain, sur les évolutions majeures survenues sur le terrain des droits de l’homme en Érythrée.

Mme Keetharuth a estimé que, depuis juin dernier, la situation des droits de l’homme dans le pays avait connu quelques progrès.  L’Érythrée est ainsi devenue l’un des deux pays africains à avoir atteint la phase critique de financement, de préparation et d’intervention en matière de sécurité sanitaire en cas de pandémie, comme le montre le rapport du Groupe de travail sur le financement de la préparation.  Asmara, sa capitale, a également été inscrite à la liste du Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Cependant, des points de préoccupation persistent, a fait observer la Rapporteuse spéciale, qui a notamment cité la durée du service national, qui reste indéfinie à ce jour, au-delà des 18 mois prévus par la législation.  En outre, le pays n’a toujours pas de constitution, pas plus que d’assemblée législative et ne connaît pas d’indépendance du secteur judiciaire, ni de protection face au mauvais usage de la force publique.  Les questions portant par ailleurs sur les conditions de détention, la mort dans ces prisons, les exécutions extrajudiciaires, la détention arbitraire ou les brèches dans la liberté d’expression, de religion et de croyance sont également des points qui restent encore à résoudre.  L’un des problèmes identifiés par la Rapporteuse spéciale est le manque de volonté politique, notamment pour ce qui est de mettre fin aux arrestations arbitraires.

L’Érythrée continue en outre de connaître une impunité totale pour les violations des droits de l’homme commises dans le passé, dont certaines relèvent du crime contre l’humanité, notamment des cas d’esclavage, de disparitions forcées, de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a poursuivi la Rapporteuse spéciale.  La Commission d’enquête avait recommandé l’établissement de mécanismes indépendants pour faire la lumière sur ces actes et fournir des réparations aux victimes.  La Rapporteuse spéciale a dit n’être pas informée qu’une telle démarche ait été entreprise par les autorités, tout en ajoutant que la lutte contre l’impunité devait demeurer la priorité absolue.  À cet égard, elle a estimé que la compétence universelle pourrait représenter un des moyens de répondre à ce défi, puisqu’en 2016, pas moins de 13 pays s’étaient saisis de 47 cas sur le fondement du principe de compétence universelle.

Par ailleurs, le nombre de jeunes fuyant le pays ne cesse de croître.  Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), environ 100 personnes fuiraient le pays chaque jour.  Officiellement, il y avait 21 215 réfugiés érythréens en Éthiopie en 2016.  Rien que depuis le début de l’année, 20 000 sont déjà arrivés, dont 46% sont âgés de 18 à 24 ans selon l’OIM.  L’Érythrée connaît également des problèmes en matière de droit à la propriété.  La communauté grecque d’Asmara ayant vu des biens en sa possession depuis des décennies être confisqués par le Gouvernement, dont le bâtiment du consulat honoraire de Grèce.

Face à cette situation, la Rapporteuse spéciale a invité les États Membres et la communauté internationale dans son ensemble à évaluer la situation des droits de l’homme dans ce pays, ajoutant que le Gouvernement devrait montrer des signes d’engagement et prendre des mesures spécifiques, notamment en mettant en place des cadres judiciaires indépendants et transparents, en cessant les pratiques d’arrestations, de détention ou de torture, en mettant un terme aux discriminations ethniques et religieuses ou encore en interdisant la servitude domestique des filles et femmes.

Intervenant au titre de pays concerné, le représentant de l’Érythrée a dénoncé le contenu du rapport de Mme Sheila B. Keetharuth, estimant que le mandat de la Rapporteuse spéciale provenait de « pays hostiles » à l’Érythrée, qui agissent ainsi pour l’isoler « sous prétexte de préoccupations sur les droits de l’homme ».  Il a indiqué à cet égard que l’Érythrée rejetait « toute activité à motif politique ».  Le délégué a également observé que, de l’aveu même de la Rapporteuse spéciale, ce rapport n’avait pas été avalisé par le Conseil des droits de l’homme.

Face aux difficultés, l’Érythrée a fait preuve de résilience et est devenue un pays sûr et stable, a fait valoir le représentant, rappelant qu’il lui avait fallu répondre aux exigences de l’édification d’un pays.  Or, a-t-il déploré, « notre recherche de paix et de dignité a été attaquée ».  La situation des droits de l’homme dans le pays est, selon lui, rendue « opaque » par les conclusions de la Rapporteuse spéciale, qui donnent une « image irréaliste » de l’Érythrée.  En effet, a-t-il poursuivi, les données ont été produites de façon sélective et les défis du pays ont été passés sous silence.  En outre, le rapport préconise des mesures « sévères et indues », a-t-il encore regretté, jugeant que ce document manque des « normes minimales de professionnalisme ».

Rappelant avoir, à de nombreuses occasions, dénoncé l’impartialité de la Rapporteuse spéciale, le représentant a assuré que son pays était néanmoins disposé à partager des informations avec elle afin de promouvoir le dialogue multilatéral.  À cet égard, a-t-il fait valoir, certains pays travaillent avec l’Érythrée pour faire avancer des démarches positives en matière de droits de l’homme.  Il a encore rappelé que son pays avait adhéré à nombre de traités internationaux et régionaux dans le domaine des droits de l’homme et avait présenté des rapports au Comité des droits de l’enfant et des communications à l’Organisation internationale du Travail (OIT).  L’Érythrée entend aussi respecter les deux Pactes internationaux sur les droits de l’homme, auxquels elle a accédé après son indépendance.

Affirmant que le droit était renforcé par l’égalité devant la loi, le représentant a assuré que le système judiciaire de son pays incluait toutes les parties prenantes.  Il a aussi mis l’accent sur l’éducation, assurant qu’elle avait été élargie pour que personne ne soit laissé-pour-compte.  Il a enfin rappelé l’engagement de l’Érythrée en faveur de la réalisation des objectifs de développement.

En conclusion, le représentant a affirmé que l’Éthiopie voisine était connue pour ses violations flagrantes des droits de l’homme.  Il s’est ainsi posé la question de savoir si les violations recensées par la Rapporteuse spéciale n’étaient pas en fait causées par l’Éthiopie.  Il s’est aussi interrogé sur l’utilité de ces examens de pays.  Il est, selon lui, important de ne pas saper le mécanisme de l’Examen périodique universel avec des mandats prétendument chargés de promouvoir les droits de l’homme. 

Lors du dialogue interactif avec Mme Sheila B. Keetharuth, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, toute une série de délégations -Cuba, le Nicaragua, le Bélarus, la Chine, le Burundi, l’Inde, le Venezuela, le Pakistan, l’Égypte, le Zimbabwe, la République islamique d’Iran et la Fédération de Russie- ont critiqué le mandat de Mme Keetharuth, affirmant que seuls le Conseil des droits de l’homme et le mécanisme de l’Examen périodique universel (EPU) étaient légitimes comme outil d’examen de la situation des droits de l’homme dans les États.  Tous ont dénoncé les procédures spéciales des rapports de pays comme allant à l’encontre de la Charte des Nations Unies et comme un outil « contreproductif et inefficace », ainsi que toute sélectivité et politisation de l’examen des droits de l’homme.

Djibouti a pour sa part exigé la libération immédiate des 13 prisonniers djiboutiens détenus en Érythrée depuis 2008.  La Somalie a appuyé cette demande.

Les États-Unis ont fait état des réfugiés érythréens cherchant refuge sur leur territoire et ont appelé le Gouvernement de l’Érythrée à respecter sa Constitution et à développer un système judiciaire transparent et impartial.  Le Royaume–Uni a affirmé que l’Érythrée devait mettre en pratique la loi qui limite à 18 mois le service national et s’est dit préoccupé par les souffrances des réfugiés érythréens.

L’Union européenne a déploré le refus permanent du pays au Rapporteur spécial et lui a demandé quels étaient ses objectifs pour son mandat.

La Norvège et l’Irlande ont toutes deux demandé comment les partenaires internationaux du pays pouvaient mieux travailler pour aider l’Érythrée.  La Suisse a fait de même et a appelé l’Érythrée à collaborer avec les mécanismes de protection des droits de l’homme et à envisager à ce titre l’établissement d’un bureau du Conseil des droits de l’homme dans le pays.

La République tchèque a regretté que le Gouvernement érythréen n’ait pas organisé d’élections depuis 20 ans et que le pays ne compte qu’un seul parti politique.  Elle a demandé comment la communauté internationale pourrait aider le pays à effectuer sa transition démocratique.

En réponse aux délégations, Mme Sheila B. Keetharuth, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, s’est félicitée de la coopération et des relations bilatérales entretenues par certains États avec l’Érythrée, y voyant de bonnes pratiques à pérenniser.  Elle a toutefois estimé que ces relations devraient inclure un examen des droits de l’homme.  Ce ne sont pas des questions à balayer d’un revers de la main, a-t-elle commenté, en demandant aux pays concernés de veiller à ce que les droits fondamentaux soient au cœur de leurs préoccupations.

Mme Keetharuth a en outre déclaré vouloir faire des droits religieux une priorité de son mandat.  Se disant néanmoins consciente des efforts à réaliser, elle a estimé qu’un élément positif consisterait à libérer le père Antonios, assigné à domicile depuis plus de 10 ans.  La Rapporteuse spéciale a ajouté que l’une des réussites de son mandat avait été de mettre la question des droits de l’homme en Érythrée à l’ordre du jour de la communauté internationale et d’avoir mis un coup de projecteur sur les violations.

La Rapporteuse spéciale a précisé qu’elle consacrerait la dernière année de son mandat à la question de la responsabilisation et s’attacherait à ce qu’un dialogue plus constructif se noue avec le pays.  « J’ai passé les premières années à essayer de jeter des ponts, j’espère pouvoir enfin réussir à en construire un et qu’une main amicale soit tendue au mandat », a-t-elle dit.

Mme Keetharuth a estimé que l’Examen périodique universel, présenté par plusieurs délégations comme le mécanisme idoine s’agissant des droits de l’homme, n’était pas incompatible avec l’exercice de son mandat.  Il faut voir celui qui est le plus utile et ne pas opposer ces deux possibilités, a-t-elle fait valoir. 

La Rapporteuse spéciale a confirmé qu’on ignore le nombre de personnes privées de liberté en Érythrée, y compris dans le cadre de détentions arbitraires.  Elle a encouragé l’Érythrée à se pencher sur le sujet et à essayer de mettre en œuvre des mécanismes pour que tout le monde ait accès à la justice.  Il faut aussi que le droit à la participation à la vie politique soit mis en avant car c’est un droit fondamental, a-t-elle plaidé.

La Rapporteuse spéciale a enfin souhaité « rétablir la vérité » quant à ses travaux. Elle s’est ainsi dite attristée d’entendre que son rapport n’avait pas été soumis au Conseil des droits de l’homme. « Si cela n’avait pas été le cas, je ne disposerais pas de mandat pour effectuer ce travail », a-t-elle conclu.

Reprenant la parole, le représentant de l’Érythrée a indiqué que le Conseil des droits de l’homme avait, effectivement, « pris note » du rapport de Mme Keetharuth.  Il a, d’autre part, dit constater avec regret que Djibouti ne s’occupait pas de ses propres affaires et s’ingérait dans celles de l’Érythrée.  Tout en reconnaissant que des difficultés perdurent en Érythrée, il a accusé Djibouti d’être un pays régi par une famille, où des violations des droits de l’homme sont commises dans l’impunité.  De plus, a-t-il dit, Djibouti ne cesse de mener des actes hostiles à l’égard de l’Érythrée.  Relevant que « la charité commence chez soi », il a estimé que les normes régissant les droits de l’homme devaient être améliorées partout, y compris à Djibouti.  En conclusion, il a assuré que la porte de l’Érythrée était ouverte et le resterait pour tous ceux qui veulent mener un dialogue honnête, dans le respect des droits de l’homme. 

Djibouti a répliqué que le pays n’avait jamais fait l’objet d’aucune commission d’enquête concernant les droits de l’homme.  Djibouti ne veut pas être comparé à des pays comme l’Érythrée, où des violations graves sont commises depuis 1991 et où la population est torturée et terrorisée, où ceux qui ont le courage de fuir sont froidement éliminés et où les proches des opposants subissent des représailles.

M. MIKLÓS HARASZTI, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, a déclaré que les violentes et massives arrestations de manifestants pacifiques, en mars 2011, expliquaient les raisons de la création de son mandat par le Conseil des droits de l’homme en mars de cette année-là.  Alors que les partenaires du Bélarus avaient ensuite observé une période de « détente », le pays a repris sa politique de répression vis-à-vis des voix critiques, a-t-il ensuite expliqué.  En réalité, il n’y a pas eu de changement fondamental dans le système de gouvernance du Bélarus, mais de simples changements « cosmétiques » dans les méthodes appliquées par les autorités, a estimé le Rapporteur spécial.

M. Haraszti a ensuite indiqué que son rapport expliquait comment le Président actuel, M. Alexandre Loukachenko, avait construit une structure étatique qui consolide et protège son pouvoir.  Même les progrès en matière de droits de l’homme servent cet objectif, a-t-il affirmé.  Il y a un an, le Bélarus avait adopté un « soi-disant » plan d’action, composé d’une liste de 100 promesses visant à renforcer ou étendre des services déjà en vigueur, certaines dans la vie civique.  Mais aucune action concrète n’a été prise à ce jour, d’autant que les autorités ont soigneusement mis de côté la longue liste de recommandations issues de l’Examen périodique universel et des organes de traités, portant sur l’amélioration de la situation des droits de l’homme et des droits civiques en particulier, a notamment affirmé le Rapporteur spécial.

Alors que l’an dernier, il avait pu se réjouir de deux bonnes nouvelles -la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et l’élection de deux membres de l’opposition au Parlement– le Rapporteur spécial a dit n’en avoir aucune à présenter cette année, à l’exception de l’enregistrement du mouvement « Dites la Vérité » ou encore de la soumission du rapport du Bélarus devant le Comité des droits de l’homme, mais avec 16 ans de retard. 

Le rapport de M. Haraszti se concentre sur la concentration des pouvoirs et montre que le Gouvernement n’a pas hésité ces deux dernières décennies à adopter des mesures pour effectivement supprimer le libre exercice des droits civils et politiques.

Cette année, le Parlement a clairement montré sa logique: protéger le pouvoir absolu du Président, quitte à renier les derniers vestiges des libertés constitutionnelles, a encore affirmé le Rapporteur spécial.  Or, cette concentration des pouvoirs a eu des conséquences dévastatrices tout au long des 23 ans de règne du Président, avec une opposition politique réduite au silence, une répression accrue sur les voix dissidentes ou le harcèlement et l’intimidation des médias.  En raison des troubles en Ukraine, l’activisme civique est de plus en plus considéré comme une menace à la nation et des preuves de conspiration sont fabriquées, comme le montre le cas de la « Légion blanche » cette année, où des opposants politiques ont été arrêtés.  De telles pratiques sont cycliques au Bélarus, a encore affirmé M. Haraszti.

Le Rapporteur spécial a également observé que le Président Loukachenko s’était engagé à revoir le très controversé décret no 19 à la suite des manifestations de mars dernier et de la vague d’arrestations qui s’en est suivie.  Cela montre bien qu’il est capable de changer le cadre légal et les pratiques enracinées par un simple trait de plume, a estimé M. Haraszti.  De ce fait et paradoxalement, la situation des droits de l’homme pourrait aussi changer pour le mieux dans ce pays grâce à la concentration des pouvoirs, a poursuivi le Rapporteur spécial, avant de lancer un appel aux autorités bélarussiennes pour qu’elles s’engagent avec son mandat, d’autant qu’il est dit prêt à les aider à mettre en œuvre leurs obligations et engagements avec les Nations Unies.

Le délégué du Bélarus a estimé que les travaux du Rapporteur spécial représentaient le pire exemple des « pratiques délétères du Conseil des droits de l’homme » et que l’absence de résultats concrets et les dépenses énormes encourues étaient la preuve directe que les mandats de pays du Conseil étaient négatifs.  Il a déploré que le Rapporteur spécial n’ait pas noté les changements positifs survenus dans le pays, alors même que l’ONU y constate de façon « régulière » une amélioration des droits de l’homme dans le pays.  Il a également dénoncé un conflit d’intérêt fondé sur des motivations « pernicieuses » du Rapporteur spécial pour garder son mandat.

Le Bélarus souhaite honorer ses obligations en matière de droits de l’homme pour parfaire ses politiques nationales, a assuré le représentant.  Il a rappelé que le Bélarus avait adopté un plan d’action pour les droits de l’homme comme peu de pays dans le monde, et non un « soi-disant programme » comme l’a dit le Rapporteur spécial.  Il a aussi mentionné que le Bélarus faisait partie d’un groupe de 33 pays qui, selon le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, n’avait pas d’arriéré en matière de remise de rapports.

Le représentant a néanmoins reconnu des « points problématiques » dans le pays, comme il en existe « partout dans le monde ».  Il a insisté sur le « dialogue ouvert » que mène le Bélarus avec, notamment, l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, y voyant une « condition sine qua non » du succès des Nations Unies.  Il a enfin demandé au Rapporteur spécial de mettre fin de « façon prématurée » au suivi de son mandat.

Lors du dialogue avec M. Miklós Haraszti, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, de très nombreux pays ont de nouveau exprimé leur opposition au principe des rapports de pays sans autorisation préalable de ces derniers, à l’image du Venezuela, qui a regretté la partialité et la sélectivité de ces titulaires de mandat et jugé que la coopération et le dialogue restaient la meilleure façon de promouvoir les droits de l’homme.  L’Érythrée a ainsi estimé que les droits de l’homme doivent être traités de façon juste dans tous les pays, ajoutant que le Conseil des droits de l’homme demeurait le meilleur endroit pour en assurer la promotion au niveau international.  Inquiétude aussi du Burundi devant les rapports spécifiques par pays et leur utilisation à des fins politiques.  Pour ce pays, seul l’Examen périodique universel (EPU) peut assurer la protection et la promotion des droits de l’homme au Bélarus et dans d’autres pays.  C’est aussi la position de l’Azerbaïdjan, pour qui l’Examen périodique universel est un mécanisme efficace d’évaluation.

Cuba a, elle aussi, réaffirmé que l’Examen périodique universel constituait la meilleure façon d’établir les droits de l’homme dans les pays. Pour Cuba, l’exercice d’aujourd’hui a clairement une motivation politique et n’est pas compatible avec les travaux de la Troisième Commission. C’est aussi la position de la République démocratique populaire lao, convaincue que l’Examen périodique universel est l’instrument le plus approprié pour traiter de ce type de problématique, au Bélarus comme ailleurs. 

De même, le Soudan a dit son désaccord face à la présentation de résolutions sur le Bélarus à la Troisième Commission et la République populaire démocratique de Corée s’est élevée contre une tentative de politisation de la situation au Bélarus et contre l’atteinte à la souveraineté d’un pays sous le prétexte des droits de l’homme. 

Tout autant que son mandat, le Rapporteur spécial a été directement mis en cause.  La Fédération de Russie a estimé que le Rapporteur spécial était motivé politiquement.  Elle juge le rapport présenté risible, ajoutant qu’il manque de respect à l’égard d’un État souverain; il apporte une nouvelle preuve que les titulaires de mandats doivent répondre de leur mandat auprès du Conseil des droits de l’homme.

L’Ouzbékistan a constaté que le mandat de M. Haraszti n’était pas bien utilisé et qu’il n’était pas soutenu par tous les membres du Conseil des droits de l’homme.  Assurant qu’on ne peut remplacer l’Examen périodique universel pour ce type de questions, il a ajouté que la résolution qui a créé ce mandat avait été contreproductive.  Pour l’Ouzbékistan, la situation au Bélarus ne nécessite pas un suivi du Rapporteur spécial.  La République islamique d’Iran s’est dite préoccupée par cette plateforme biaisée que représente le Rapporteur spécial et a estimé que le Bélarus ne méritait pas d’être ainsi examiné par un mandat spécial.  C’est aussi l’avis du Turkménistan, convaincu que la situation du Bélarus ne nécessite pas d’action urgente de la part du Conseil des droits de l’homme.  À preuve, le Bélarus collabore avec la plupart des mécanismes de droits de l’homme et avec des organisations internationales comme le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.  De même, la Chine a salué les progrès réalisés par le Bélarus dans la réalisation de son programme de protection des droits fondamentaux, jugeant que sa collaboration avec les mécanismes internationaux est un signe de sa volonté de coopération dans ce domaine.

C’est aussi l’avis du Kazakhstan, pour lequel la problématique des droits de l’homme ne peut être abordée de façon efficace que dans un esprit de respect.  Pour ce pays, la coopération renforcée du Bélarus avec les mécanismes des droits de l’homme témoigne de sa volonté d’aller dans le bon sens.  Le Pakistan s’est lui aussi dit convaincu que la protection des droits de l’homme s’appuyait sur une approche constructive et non politique.  Il faut donc tenir compte de la collaboration du Bélarus avec les mécanismes internationaux et de son respect des normes pertinentes en matière de droits de l’homme.  L’amélioration de la situation de droits de l’homme ne peut se faire qu’au travers du dialogue, a ajouté le Tadjikistan, qui soutient les efforts du Bélarus en matière de protection et de promotion des droits de l’homme.  Quant à la République arabe syrienne, elle a fait savoir qu’à la place du Secrétaire général, elle aurait licencié le Rapporteur spécial pour son rapport qui est un cas flagrant d’ingérence dans les affaires du Bélarus.  Le Rapporteur spécial a outrepassé son mandat et a insulté le Président souverain de ce pays, élu par la population en 2016, a-t-elle dénoncé.

En revanche, et même si elle s’est félicitée que le Bélarus soit partie à la plupart des instruments internationaux en matière de droits de l’homme et qu’il soumette des rapports périodiques, l’Inde a estimé que l’ambiance actuelle ne permettait pas le dialogue avec ce pays.  De même, la Pologne, tout en saluant la ratification par le Bélarus de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, a demandé à son gouvernement de cesser ses représailles et ses attaques contre les manifestants.  Elle a en outre demandé au Rapporteur spécial s’il avait perçu des signes de coopération future à la suite de sa visite en juillet. 

La République tchèque a regretté que le Bélarus utilise la voie de la répression contre ceux qui défendent les droits fondamentaux.  Elle a demandé au Rapporteur spécial s’il avait pu parler aux autorités bélarussiennes lors de sa visite.  L’Union européenne s’est dite préoccupée par les conclusions du rapport sur le déni systématique des droits de l’homme au Bélarus.  Jugeant que ce pays se doit de tenir ses engagements et d’instaurer la démocratie, elle a souhaité savoir comment encourager concrètement le Bélarus sur cette voie. 

La Lituanie a jugé inadmissible que des journalistes soient détenus arbitrairement au Bélarus.  Condamnant les violations systématiques des activités licites des défenseurs des droits de l’homme, elle aimerait savoir comment la communauté internationale peut aider ce pays à promouvoir les droits fondamentaux.  L’Irlande partage les préoccupations exprimées sur les détentions arbitraires et a attiré l’attention sur le rôle des défenseurs des droits de l’homme au Bélarus.  Le Royaume-Uni s’est lui aussi déclaré préoccupé par le traitement imposé aux manifestants et aux journalistes au Bélarus.  Il a souhaité connaître les impressions du Rapporteur spécial à ce sujet, après sa visite dans le pays.

Les États-Unis ont jugé malheureux que le Bélarus refuse de coopérer avec le mandat de M. Haraszti et ne lui donne pas accès au pays. Ils se sont par ailleurs déclarés déçus par la nouvelle loi électorale et ont dit craindre que les prochaines élections ne soient pas équitables.  La Suisse a elle aussi déploré le manque de coopération du Bélarus avec le mandat du Rapporteur spécial et a demandé à celui-ci où devrait commencer un vrai changement dans ce pays en matière de politique de droits de l’homme.  L’Allemagne a souhaité savoir comment le Rapporteur spécial évaluait le potentiel du programme d’action sur les droits de l’homme adopté en 2016 par le Bélarus.  La Norvège a plaidé pour un moratoire sur la peine de mort au Bélarus et a demandé comment faire pour faciliter l’accès du Rapporteur spécial à ce pays afin qu’il puisse s’acquitter de son mandat. 

Le Bélarus a répondu aux délégations en déclarant qu’aujourd’hui étaient examinées des questions qui touchaient aux activités du Rapporteur spécial en sa qualité officielle et non à celles réalisées durant ses voyages privés, qui n’ont rien à voir avec le mandat du Rapporteur spécial.

M. Haraszti a répondu au Bélarus d’abord, puis aux questions des délégations.  Concernant la visite privée au Bélarus à laquelle le représentant de ce pays venait de faire allusion et qui figure dans son rapport, le Rapporteur spécial a expliqué s’être rendu au Bélarus à l’invitation de l’Assemblée parlementaire de l’OLCU et non sur invitation du Bélarus puisque son mandat n’est toujours pas reconnu par le pays.  Il a dit s’être entretenu sur place avec des activistes, des membres de la société civile et avoir également assisté à un procès « horrible » dans lequel étaient jugés des participants à des manifestations.

Le Rapporteur spécial s’est inscrit en faux après les propos de nombreuses délégations concernant le plan d’action adopté par le Bélarus. Il a expliqué que les recommandations faites à l’issue de l’Examen périodique universel n’avaient pas été prises en considération en ce qui concerne les droits civils et politiques, que ce soit en matière de dépénalisation ou de mesures répressives à l’encontre des médias.  Revenant sur la question sur la peine de mort, il a expliqué qu’il allait examiner la question avec plus de détails.

En réponse aux questions portant sur les mesures à prendre pour aider la société civile dans ces circonstances « peu propices à leur développement », M. Haraszti a estimé que le plus important était de résister à la tendance internationale en cours, qui est de « dénoncer, de pointer du doigt, de bloquer tous les soutiens à la société civile ».  À la République arabe syrienne, il a répondu que, s’il avait critiqué le Président du Bélarus dans son pays, il serait en prison à l’heure qu’il est.  « Je ne le critique pas en tant qu’individu mais au titre de ma fonction » a-t-il insisté.  Et d’expliquer qu’en tant que chef du pilier exécutif, le Chef de l’État possède énormément de compétences, qui lui confèrent un « pouvoir absolu », notamment par le biais de décrets.  Cette situation ne permet pas une bonne gestion des droits de l’homme, a-t-il conclu.

Mme AGNÈS CALLAMARD, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a dit être consciente de l’importance de son mandat dans le contexte international actuel et compte tenu que beaucoup de personnes comptent sur elle.  Elle a ensuite dit avoir, dans ce cadre, adressé environ 130 communications aux États, en son nom propre mais aussi au nom d’autres mandats.  Malheureusement, moins de 50% de ces recommandations ont reçu des réponses, a-t-elle déploré, appelant ces États à coopérer en répondant aux communications.

Mme Callamard a ensuite présenté son rapport, qui porte sur la mort illicite de migrants et réfugiés, en expliquant que ce phénomène était peu documenté.  Combien sont exécutés, tués, noyés ou ont perdu la vie des suites de déshydratation ou de faim?  Combien ont été torturés, sont morts de désespoir ou se sont vus refuser des traitements pouvant les sauver?, a-t-elle demandé, avant de répondre que nous n’en savons rien, en dépit des multiples efforts pour avoir des données, y compris de la part de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et de son projet Migrants disparus.

Le nombre de migrants à travers le monde est à son plus haut niveau historique, du fait notamment de ceux qui rejoignent leurs rangs sous la contrainte, forcés de quitter leurs foyers pour fuir la guerre, la pauvreté, la dégradation de l’environnement ou simplement pour trouver de meilleures opportunités, a ensuite rappelé la Rapporteuse spéciale.  Ces migrants sont confrontés sur leur chemin à des violations de leurs droits humains, y compris fondamentaux, comme celui ne de pas être arbitrairement détenu ou tué.  Or, dans son étude, Mme Callamard a dit avoir observé que nombre de pays appliquaient des politiques de contrôle de frontières qui, de manière implicite ou explicite, tolèrent le risque de mort pour les migrants.  Ces politiques partagent au moins trois caractéristiques, à savoir la dissuasion, l’extraterritorialité et la militarisation.  Le rapport montre le lien entre ces trois critères et le fait que les migrants peuvent mourir des conséquences de ces politiques.

La mort illicite de migrants impliquant des acteurs étatiques ou non étatiques déclenche rarement une enquête approfondie, a en outre affirmé Mme Callamard.  Pourtant, certaines normes internationales sont particulièrement importantes lorsqu’elles sont appliquées aux morts illégales dans le contexte de mouvements massifs de population, y compris dans le cadre du trafic de migrants ou de traite des personnes.  C’est aussi pour cela que le rapport met en évidence ces normes internationales et quelques bonnes pratiques en termes d’identification, de localisation de familles et de sépulture.  Il contient également des recommandations aux États et aux acteurs internationaux, notamment que le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières et le pacte mondial sur les réfugiés incorporent des mécanismes de prévention et de réponse à la privation arbitraire de la vie des migrants.  La Rapporteuse spéciale recommande également que les organes régionaux et internationaux comme INTERPOL et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) assistent les États pour les enquêtes concernant les cas graves de trafic de migrants.  Elle recommande enfin aux États de coopérer pour établir des données régionales et internationales et pour mettre en place des mécanismes pour lier ces données aux efforts des familles de migrants disparus. 

Lors du dialogue avec Mme Agnes Callamard, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, le Royaume-Uni a demandé comment dissuader les migrants d’entreprendre des voyages difficiles qui font le lit des trafiquants.  L’Union européenne s’est déclarée préoccupée par le rôle des acteurs étatiques et non étatiques et a demandé comment la Rapporteuse spéciale comptait influer sur cette question dans le cadre de ses travaux.  Elle a également demandé quelles mesures pouvaient être prises pour que les collectes de données soient exactes et comment elle comptait prendre en compte la perspective de genre.  La France a demandé, elle aussi, quelles mesures pourraient prendre les États pour améliorer les pratiques en matière de collecte et de partage de données.

L’Algérie a insisté sur l’importance de s’attaquer aux causes profondes des migrations.  Les Philippines se sont déclarées préoccupées par le sort de quelque 10 millions de Philippins travaillant à l’étranger, notamment dans des zones dangereuses.  Rappelant que certains titulaires de mandat ne respectaient pas leur Code de conduite, elles ont appelé à davantage de rigueur et d’impartialité, avant de demander comment elles pouvaient appuyer les travaux de la Rapporteuse spéciale de façon à ce que son travail ne soit pas biaisé.

L’Australie a dit vouloir adresser un message clair aux passeurs: ils ne pourront pas envisager d’organiser de tels passages vers l’Australie.  En même temps, l’Australie a assuré qu’elle éviterait les refoulements de migrants illégaux vers des endroits où ils seraient en danger.

S’exprimant au nom des pays nordiques, la Finlande a défendu l’obligation pour les États d’ouvrir des enquêtes en cas de décès illicite.  Les pays nordiques comptent étudier les recommandations de la Rapporteuse spéciale.  Ils souhaitent aussi savoir quelles mesures peuvent être prises pour protéger les enfants réfugiés et par quelles routes les migrants et réfugiés courent le plus de risque de mourir.

Dans ses réponses, Mme Agnes Callamard, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a expliqué que, si elle ne s’était pas penchée sur les causes profondes des migrations, c’est que cette question ne relève pas de son mandat et qu’elle s’efforce de le respecter.  Elle a ajouté que d’excellents rapports sur la question avaient déjà été publiés.

La Rapporteuse spéciale a aussi observé que les États investissaient beaucoup dans la lutte contre le trafic de migrants, mais très peu dans les cas de trafic accompagnés de la mort des migrants.  Il faut donc que les États et les organisations internationales qui travaillent sur ce sujet comprennent que les enquêtes sur le trafic accompagné d’homicide doivent devenir une priorité, même s’il n’existe pas de réponses faciles.  Pour l’instant, les solutions apportées ne sont pas suffisantes et restent locales, en raison du manque de volonté politique et de coopération entre États, a-t-elle estimé.

Mme Callamard a par ailleurs jugé difficile de faire état d’une voie de migration plus risquée qu’une autre car les migrants ou les trafiquants changent constamment de routes et s’adaptent aux changements.  Mais ce sujet doit rester au cœur des préoccupations de la communauté internationale, car les migrants ont des droits.  Malheureusement, les pays en mesure de les protéger ne le font pas toujours, prenant prétexte de leur souveraineté ou de questions de sécurité, a-t-elle conclu. 

Mme URMILA BHOOLA, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, a déclaré avoir été encouragée par l’attention croissante accordée à la question dont relève son mandat.  Pourtant, le seul critère permettant d’évaluer les luttes anti-esclavagistes est leur impact sur la vie et la dignité des personnes, a-t-elle expliqué.

Pour la Rapporteuse spéciale, les questions importantes à se poser sont donc: les lois offrent-elles une protection suffisante contre les formes extrêmes d’exploitation professionnelle et sexuelle?  Les victimes ont-elles accès à des recours adéquats et efficaces?  Existe-t-il suffisamment de mesures pour s’attaquer aux tendances socioéconomiques systémiques qui permettent l’exploitation à très grande échelle ?

Mme Bhoola a rappelé que, d’après l’Organisation internationale du Travail (OIT), plus de 40 millions de personnes, dont 25% d’enfants, étaient victimes de formes contemporaines d’esclavages en 2016.  Ces chiffres mettent en lumière l’urgence d’une action globale visant à faire respecter et à protéger les droits des victimes, a-t-elle insisté.

Présentant les conclusions de son rapport, Mme Bhoola a expliqué que la prévalence de l’esclavage était le symptôme d’un effort global insuffisant pour réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement.  Malgré les progrès réalisés, les tendances socioéconomiques systémiques ont affaibli le développement durable centré sur les droits fondamentaux, a estimé la Rapporteuse spéciale.  Celle-ci a insisté sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, estimant qu’avec les objectifs de développement durable, il fournissait un cadre pour permettre « l’accélération des efforts afin d’éradiquer les formes contemporaines d’esclavage ».  Et d’insister sur les objectifs 8.7 -qui porte sur le travail forcé- et 16 sur –paix, justice et institutions efficaces.

Déplorant que les opportunités que présente le Programme 2030 pour les droits humains puissent être perdues si les ressources pour le mettre en œuvre n’étaient pas mobilisées par la communauté internationale, Mme Bhoola a insisté sur les 3 à 5 milliards de dollars manquant pour financer sa mise en œuvre.

Enfin, la Rapporteuse spéciale a expliqué que mettre un terme aux différentes formes contemporaines d’esclavage faisait partie intégrante de la lutte plus globale contre la pauvreté, le sous-développement et les inégalités de genre.  Parmi les recommandations de son rapport, elle conseille de renforcer la collaboration et le partage de connaissances pour permettre la mise en œuvre de l’objectif 8.7, mais invite aussi les États Membres à améliorer encore leur législation nationale pour se conformer, entre autres, à la Convention relative à l’esclavage de 1926 ainsi qu’à la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage de 1957.

En conclusion, la Rapporteuse spéciale a rappelé que 150 milliards de dollars de profits étaient réalisés par le secteur privé grâce au travail forcé et a appelé les entreprises à respecter les droits fondamentaux en accord avec l’objectif 8.7. 

Lors des échanges qui ont suivi la présentation de Mme Urmila Bhoola, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, le Qatar a dit ne ménager aucun effort pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavage et de traite d’êtres humains.  Il cherche toutefois à savoir de quels moyens disposent les États pour mettre ces politiques en place et en assurer le suivi.  Le Maroc a demandé quelles étaient les bonnes pratiques en matière de coopération internationale pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavage et de traite d’êtres humains.

Pour l’Afrique du Sud, lutter contre ces phénomènes implique de se pencher sur leurs causes profondes, dont la pauvreté.  Pour l’Afrique du Sud, le développement peut être une manière de lutter contre les formes contemporaines d’esclavage et de traite d’êtres humains et souhaite avoir davantage d’informations sur ce point.  L’Union européenne estime que les sources sont diverses.  C’est pourquoi, elle plaide pour une mise en œuvre holistique du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  L’Union européenne a demandé à la Rapporteuse spéciale quel type de coopération elle suggère, et quels moyens de recours pour les victimes.

Le Royaume-Uni a mentionné les mesures qu’il a prises pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavage et de traite.  Il estime que les Nations Unies peuvent jouer un rôle, mais aimerait savoir de quelle manière.  Pour le Liechtenstein, les Nations Unies devraient pouvoir aider les pays à perturber les activités d’esclavage et de traite d’êtres humains.  Il a souhaité savoir comment le futur pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières devrait être formulé pour éviter que des personnes ne soient victimes de l’esclavage ou de la traite.

Visité en juillet dernier par la Rapporteuse spéciale, le Paraguay a assuré qu’il mettrait en œuvre ses recommandations et restait disposé à coopérer avec elle.

Après ces interventions, Mme Urmila Bhoola, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, a relevé que plusieurs initiatives nationales, régionales et internationales étaient prises pour lutter contre le phénomène, comme l’Alliance 8.7, et a appelé les États à coopérer avec cette dernière.  Elle a aussi déclaré que nombre d’organes des Nations Unies disposaient d’éléments portant sur ces phénomènes et qui visent à aider les États à mettre en place les outils pertinents.  Il faut simplement que les États s’en saisissent, a-t-elle assuré.

Quant aux causes profondes, un des moyens de lutter contre elles consisterait pour les États à faciliter la création de conditions propices au développement et à l’emploi, a affirmé la Rapporteuse spéciale.  Les entreprises doivent de leur côté respecter leurs responsabilités vis-à-vis des droits de l’homme, de façon à éliminer l’esclavage des chaînes de production mondiale.  Mme Bhoola a également invité les acteurs à coordonner leurs efforts et à mettre en commun leurs ressources.

M. FATSAH OUGUERGOUZ, Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, a commencé par rappeler que sa Commission avait été créée par le Conseil des droits de l’homme, il y a un an, afin de mener une enquête approfondie sur les violations des droits de l’homme et les atteintes à ceux-ci commises dans ce pays depuis avril 2015.  Au terme de sept mois d’enquête, a-t-il dit, la Commission est parvenue à la conclusion que certaines des violations constatées pourraient constituer des crimes de droit international.  Le Conseil des droits de l’homme s’est déclaré préoccupé par les conclusions de la Commission et a décidé de prolonger son mandat d’un an, a-t-il ajouté, précisant que le Gouvernement burundais avait toujours refusé de coopérer à ces travaux malgré les invitations répétées de la Commission.

M. Ouguergouz a rappelé que la crise relative aux droits de l’homme au Burundi durait maintenant depuis deux ans et demi.  La situation, déjà inquiétante lors des premières manifestations contre la candidature du Président Pierre Nkurunziza à l’élection présidentielle en avril 2016, s’est rapidement détériorée après la tentative de coup d’État de mai 2015.  Selon les derniers chiffres du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la population des réfugiés burundais suite à cette crise est estimée à 410 413 personnes, soit environ 4% de la population totale du pays.

Contrairement à ce qu’affirme le Gouvernement burundais, la situation des droits de l’homme ne s’est guère améliorée depuis cette crise, a poursuivi M. Ouguergouz, précisant que des violations et atteintes graves s’étaient poursuivies jusqu’en 2017 de manière tout aussi brutale, entretenues par des discours de haine de la part de hauts responsables.

Bien que n’ayant pu se rendre au Burundi en raison du refus du Gouvernement de lui donner accès au territoire, la Commission a pu recueillir plus de 500 témoignages, qui ont été analysés et corroborés.  Sans s’ériger ni en juge ni en procureur, elle s’est acquittée de sa mission de manière rigoureuse et impartiale, a souligné son Président.  Ce travail d’enquête a notamment fait l’objet d’un rapport de 20 pages qui a été présenté au Conseil des droits de l’homme, a-t-il précisé.

Les graves violations et atteintes aux droits de l’homme commises ont consisté essentiellement en des arrestations et détentions arbitraires, des exécutions extrajudiciaires, des actes de torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants, des viols et d’autres violences sexuelles et des disparitions forcées, a détaillé M. Ouguergouz.  Il a ajouté que l’espace démocratique s’était par ailleurs rétréci, les dirigeants des principaux partis d’opposition et de nombreux journalistes étant aujourd’hui en exil ou sous le coup de mandats d’arrêt internationaux émis par le Burundi.

M. Ouguergouz a indiqué que les principaux auteurs de ces violations étaient des membres du service national de renseignement, de la police, de l’armée et de la ligue des jeunes du parti au pouvoir.  Toutefois, a-t-il relevé, des atteintes ont également été commises par des groupes armés d’opposition, même si elles sont plus difficiles à documenter.

Pour le Président de la Commission, il existe des motifs raisonnables de croire que certaines des violations et atteintes graves documentées sont constitutives de crimes contre l’humanité, tels que définis par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  L’ampleur des violations, leur localisation, le profil et la pluralité des victimes et des auteurs présumés tendent à prouver qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’une attaque généralisée, a-t-il poursuivi, soulignant que, conformément à son mandat, la Commission avait établi une liste non exhaustive d’auteurs présumés de ces crimes contre l’humanité.

À cet égard, M. Ouguergouz a rappelé que le retrait du Burundi du Statut de Rome prenait effet ce jour à minuit.  La CPI est donc compétente pour reconnaître tout crime de droit international qui aurait été commis entre avril 2015 et ce jour, a-t-il fait remarquer.  Sur cette base, la Commission a recommandé que la CPI ouvre une enquête sur de possibles crimes de droit international commis pendant cette période au Burundi, a-t-il conclu, appelant le Gouvernement burundais à lutter contre l’impunité dont jouissent les agents étatiques et à réformer en profondeur son système judiciaire.

Au titre de pays concerné, le représentant du Burundi a déclaré que, deux ans après la tentative de changement de régime par insurrection et coup d’État, son pays continue de « subir un harcèlement politico-diplomatique sans précédent » qui vise les mêmes objectifs par des moyens déguisés pour habiller diplomatiquement une « guerre humanitaire » contre le peuple du Burundi.  Sans surprise et sans avoir été au Burundi, cette Commission d’enquête a produit un rapport biaisé, partial, déséquilibré et politiquement motivé, « un véritable ragoût de mensonges et de manipulations » visant à déstabiliser le Burundi.  « Mon pays se réserve le droit de traduire devant la justice les auteurs de ce rapport pour diffamation et tentative de déstabilisation » du pays, a menacé le représentant.

Le représentant du Burundi a également reproché au rapport d’incriminer systématiquement le Gouvernement du Burundi tout en couvrant les crimes odieux commis par l’opposition radicale, alors que ces crimes sont pourtant revendiqués publiquement sur les chaînes de télévision internationales.  Depuis son préambule jusqu’à son point final, le rapport ne contient aucun paragraphe sur ces crimes et leurs auteurs qui opèrent sous le parapluie protecteur de certains États extérieurs qui les hébergent et les protègent contre les poursuites judiciaires, a-t-il dit.  En appui à sa déclaration, le représentant a présenté trois photos de personnes –l’une violée, l’autre tuée, la troisième brûlée vive- attribuant ces actes aux éléments de l’opposition qui, a-t-il assuré, les ont eux-mêmes revendiqués.  Le rapport n’évoque aucun de ces cas, a-t-il fait observer.  Il a demandé au Président de la Commission de se départir de son parti pris et de faire son travail avec honnêteté.

Le Burundi a expliqué à de nombreuses reprises pourquoi il n’a pas souhaité coopérer avec cette Commission, a ajouté le représentant, affirmant que celle-ci avait, dès le départ, publiquement affiché ses intentions en refusant de prendre en considération les arguments du Gouvernement et de les publier.  Le Burundi croit qu’il ne peut y avoir meilleure illustration du manque de neutralité et d’indépendance de la Commission que sa tolérance délibérée des actes criminels commis par « les forces négatives » contre les civils, femmes et enfants compris.  Par ailleurs, les paragraphes 106 et 107 du rapport appellent les pays de l’Union européenne qui appliquent des « sanctions injustes » contre le Burundi à les maintenir.  Le Président de la Commission sort ainsi de façon flagrante de son mandat, a estimé le représentant, pour qui une telle recommandation montre bien que la Commission est un outil politique entre les mains de ces pays

Le représentant a encore déploré qu’à la dernière session du Conseil des droits de l’homme, en septembre dernier, et alors que le Groupe des États d’Afrique avait présenté un projet de résolution équilibré au titre de l’assistance technique et du renforcement des capacités dans le domaine des droits de l’homme, prenant en compte les préoccupations de l’Union européenne, cette dernière a décidé, « contre toute attente », de présenter sa propre résolution, conduisant le Conseil à adopter en moins de 24 heures et de façon inédite deux résolutions sur le Burundi, créant deux mécanismes aux mandats diamétralement opposés et financés par les États Membres.  Quoi qu’il en soit, le Gouvernement du Burundi rejette ce rapport et ses conclusions.  Il reste, pour sa part, engagé à promouvoir et protéger les droits de l’homme et redit que l’Examen périodique universel est le seul mécanisme pertinent en matière de droits de l’homme, a conclu le représentant. 

Lors du débat avec M. Fatsah Ouguergouz, Président de la Commission d’enquête sur le Burundi, le Venezuela a répété une nouvelle fois, au nom du Mouvement des pays non alignés, que les questions relatives aux droits de l’homme devraient être abordées dans un contexte global et dans le cadre d’un dialogue constructif sans confrontation ni sélectivité.  Il a reproché à la Troisième Commission d’exploiter les droits de l’homme à des fins politiques en violation des principes d’impartialité.  Le Zimbabwe a dit partager la même position.  Le Bélarus a déclaré que les procédures spéciales avaient été mises en place pour le bénéfice de leurs créateurs et ne prenaient pas en compte le bien des pays concernés.  Ces mesures sont motivées politiquement, le rapport des mandats de pays est partial et déforme la véritable situation des droits de l’homme sur place, a-t-il ajouté.  L’Inde aussi estime que les mandats de pays doivent être en accord avec les principes des Nations Unies. 

La Chine s’est dite opposée à la création arbitraire d’une procédure spéciale sans l’accord du pays concerné et a souligné les efforts positifs déployés par le pays pour promouvoir la paix.  L’Érythrée s’est prononcée contre les mandats de pays, jugés « contre-productifs », dans lesquels elle ne voit que perte de ressource et de temps.  Pour la Fédération de Russie, les mandats de pays ne sont pas les plus utiles pour changer la situation sur le terrain.  La Fédération de Russie est favorable à la coopération, aux initiatives régionales et à l’Examen périodique universel.

La République populaire démocratique de Corée et la République islamique d’Iran estiment, elles aussi, que le Conseil des droits de l’homme et l’Examen périodique universel sont les outils pertinents pour traiter des situations des droits de l’homme.  L’Iran salue en outre la volonté de coopération du Burundi avec le mécanisme créé par la résolution du Groupe des États d’Afrique adoptée, en septembre dernier, à Genève. 

L’Algérie a déploré pour sa part l’adoption par le Conseil des droits de l’homme, en septembre dernier, de deux résolutions différentes sur le Burundi et a demandé à ce que soient évitées les approches menant à la confrontation.  Elle a rappelé que les mandats de pays ciblaient toujours les pays en développement et que c’était cette pratique de « deux poids, deux mesures » qui avait mené à la disparition de la Commission des droits de l’homme.  L’Égypte a déploré, elle aussi, l’adoption de ces deux résolutions qui créent deux mandats antinomiques, ce qui est « inefficace ».  Elle a également déploré le fait que le rapport se base sur les témoignages de réfugiés et ne prenne pas en compte le point de vue des autorités du pays.

Le Maroc est revenu sur la résolution du Groupe des États d’Afrique, regrettant qu’elle n’ait pas reçu le soutien de l’ensemble du Conseil des droits de l’homme alors qu’elle avait été l’objet de longues négociations.  Citant les avantages de cette résolution, il a notamment mentionné qu’elle avait été acceptée par le Gouvernement du Burundi, qui avait ainsi indiqué sa volonté de coopérer avec le Conseil des droits de l’homme.

Cuba, qui a voté en faveur de la résolution du Groupe des États d’Afrique sur le Burundi le 30 septembre dernier à Genève, est d’avis qu’il faut appuyer les initiatives régionales et permettre de trouver une solution africaine à la crise burundaise.  Le pays a également redit son opposition de principe aux mandats spécifiques de pays et considère que l’Examen périodique universel est le seul mécanisme pertinent en matière de droits de l’homme.

La Guinée équatoriale a fait observer que l’on ne pouvait demander au Burundi de coopérer avec la Commission d’enquête, tant qu’elle manque de crédibilité et de professionnalisme, en plus d’avoir été rejetée par le Burundi lors de sa création.  Au lieu d’envisager de tel mécanisme, il aurait fallu obtenir la coopération du pays concerné.  À cet égard, le mécanisme créé par la résolution présentée à Genève par le Groupe des États d’Afrique offre un cadre de résolution de la crise.

La République arabe syrienne a rejeté catégoriquement le rapport et a déclaré que la Commission était biaisée et qu’elle se basait sur des ressources non crédibles.  L’objectif de cette Commission était de politiser les droits de l’homme au Burundi et de s’ingérer dans les affaires des pays et de mettre en œuvre des objectifs « sataniques » pour faire des droits de l’homme des armes pour combattre la législation des pays, a affirmé le représentant. 

Le Pakistan a appelé à éviter les doublons entre le Conseil des droits de l’homme et la Troisième Commission.  Il estime, lui aussi, que l’Examen périodique universel est le mécanisme pertinent pour examiner la situation des droits de l’homme dans les pays.

Djibouti s’est déclaré préoccupé face à la tendance à la politisation, et à la subjectivité qui prévaut face aux droits de l’homme et soutient l’idée que, pour poursuivre la protection des droits de l’homme, la coopération est nécessaire.  Maurice a également estimé que montrer du doigt un pays n’est pas constructif.  Ce rapport, en plus de manquer d’objectivité, n’est pas inclusif et n’a pas tenu compte des avis du Gouvernement.

La République-Unie de Tanzanie a déploré le fait que, sans visite sur le terrain, la Commission ne pouvait être sûre que les informations obtenues étaient crédibles.  Elle s’est déclarée sceptique quant au rapport.  Autre pays voisin du Burundi, le Rwanda s’est surtout dit préoccupé par les allégations de crimes contre l’humanité commis dans ce pays tels que rapportés par la Commission d’enquête.  Il a demandé au Burundi de coopérer, et à la communauté internationale de régler cette crise par les moyens requis.

Le Botswana, qui s’est déclaré préoccupé par le tableau sombre tracé par le rapport, a déploré le manque de collaboration des autorités burundaises et a apporté son soutien à la Commission.

L’Union européenne s’est, elle aussi, déclarée préoccupée par la situation au Burundi et a appelé le Gouvernement à désarmer tous les groupes armés.  Elle a demandé au Président de la Commission quelles étaient ses priorités pour la deuxième année de son mandat.  Les Pays-Bas ont demandé au Président de la Commission comment il voyait la coopération entre son organe et le groupe des trois experts créés par le Conseil des droits de l’homme en septembre dernier, suite au projet de résolution présenté par l’Union européenne.

Dans ses réponses, M. Ouguergouz a déclaré ne pas être surpris par les propos enflammés et les accusations « graves » du représentant du Burundi.  Prenant acte des « menaces » portées à l’encontre des membres de la Commission, et du fait qu’ils pouvaient être traduits en justice pour diffamation par le Burundi, il a répondu qu’il ne cèderait à aucune tentative d’intimidation.

M. Ouguergouz a ensuite expliqué avoir effectué son enquête sur la base de témoignages recueillis à l’étranger mais aussi sur le territoire burundais par différents canaux.  Cette situation résulte de l’interdiction d’accès au territoire burundais qui lui a été signifiée par les autorités burundaises, aucun membre du Gouvernement de ce pays n’ayant par ailleurs répondu à ses demandes d’information.

À l’Union européenne, le Président de la Commission d’enquête a expliqué que la priorité de sa Commission, l’an prochain, serait d’approfondir ses enquêtes sur certaines allégations sur lesquelles il n’avait pas eu le temps de travailler.  Il entend aussi se concentrer sur les allégations nouvelles qui lui sont parvenues après l’élaboration du rapport, et examiner la question des violations des droits économiques, sociaux et culturels.

Concluant à son tour, le représentant du Burundi a déclaré que son pays n’avait pas de leçons à recevoir du Rwanda, un pays qui emprisonne et torture, en plus de se dire « victime d’un génocide présumé », alors qu’il se rend lui-même coupable d’un « génocide présumé » qui a emporté six millions de personnes en République démocratique du Congo.  S’adressant au Président de la Commission, il a dit qu’il avait mal compris ses propos.  Le Burundi se réserve le droit souverain de le poursuivre en justice pour diffamation et pour tentative de déstabilisation, a-t-il redit, insistant sur « tentative de déstabilisation ».  C’est le droit souverain du Burundi et il le fera, a-t-il assuré.  Il lui a également dit qu’il se trouvait face à un public averti et intelligent, qui sait lire les rapports.  Sur les quelque 28 délégations qui se sont exprimées, 23 ont critiqué son rapport, contre seulement 5 pays, qui sont certainement ceux pour lesquels il travaille, a-t-il conclu.

En réaction à cette intervention, le représentant du Rwanda a dit devoir prendre la parole suite à « la provocation du distingué représentant du Burundi ».  Le Rwanda n’a fait que réagir à la présentation d’un rapport qui n’est pas le sien.  « Arrêtez d’externaliser vos problèmes », a en outre lancé le représentant, ajoutant aussi qu’il « prenait note » que le Burundi nie le génocide du Rwanda devant cette « auguste assemblée ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission se penche sur la protection de l’atmosphère et l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État

Soixante-douzième session,
22e séance - après-midi
AG/J/3557

La Sixième Commission se penche sur la protection de l’atmosphère et l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a porté son attention, aujourd’hui, sur les chapitres VI et VII du rapport de la Commission du droit international (CDI), consacrés à la protection de l’atmosphère et à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, après avoir complété son examen des projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité et à l’application provisoire des traités. 

Venu présenter le second groupe de chapitres thématiques, le Président de la Commission du droit international, M. Georg Nolte, en a profité pour annoncer que les activités entourant le soixante-dixième anniversaire de la CDI, en 2018, seront financées par des contributions volontaires des États Membres. 

Saisie du quatrième rapport du Rapporteur spécial sur la protection de l’atmosphère, qui étudiait notamment la relation entre les règles du droit international relatives à la protection de l’atmosphère et d’autres règles pertinentes du droit international, comme celles du droit international du commerce et de l’investissement, du droit de la mer et du droit international des droits de l’homme, la CDI a adopté à titre provisoire, lors de sa soixante-neuvième session, un projet de directive portant sur la relation entre règles pertinentes.

Ouvrant le débat au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, les Îles Marshall ont jugé les projets de directives sur la protection de l’atmosphère « extrêmement importants » pour la communauté internationale, et vitaux pour les petits États insulaires en développement.  Alors que la montée du niveau de la mer causée par le réchauffement climatique représente une « menace existentielle » pour ces États, la délégation a appelé à prêter une attention particulière aux personnes vulnérables aux changements climatiques, notamment les peuples autochtones et les communautés locales.

Une proposition jugée « problématique » par l’Union européenne, qui a préconisé l’approche plus équilibrée de l’Accord de Paris de 2015, qui contient le principe de « responsabilités communes mais différenciées ».  L’Autriche a souligné que les groupes spécifiques mentionnés dans le projet de directive, soit les populations autochtones, les populations des pays les moins avancés, et les populations des zones côtières de faible élévation et des petits États insulaires en développement, font bien partie des groupes particulièrement vulnérables.

Si l’Union européenne a salué le lien qui est créé entre la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes, elle a toutefois jugé préférable de ne pas inclure dans les projets de directives des concepts ou des formulations contraires aux accords internationaux existants sur le droit de l’environnement.  Mettant en garde contre les mesures de géo-ingénierie, son délégué a jugé utile de se référer au « principe de précaution » et au fait que 150 États signataires de la Convention sur la diversité biologique de 1992 ont déjà entrepris d’en limiter l’utilisation.  Singapour a mis l’accent sur le bien-être des générations futures.

La commission a également débattu de la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Saisie du cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale sur cette question, la CDI a adopté, par vote plutôt que par consensus, lors de sa dernière session, un projet d’article intitulé « Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas ».

Bien que la Rapporteuse spéciale ait indiqué dans ce rapport qu’elle n’avait pas été en mesure de déterminer l’existence d’une règle coutumière autorisant l’application de limites ou d’exceptions à l’immunité ratione personae, elle a déterminé que des limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère s’appliquaient effectivement aux représentants de l’État dans le contexte de l’immunité ratione materiae.  Cette question fondamentale du droit international a fait l’objet d’un débat « intense et complet », a rappelé le Président de la CDI.  

La Norvège, au nom des pays nordiques, a réitéré sa position voulant qu’aucune règle d’immunité ne devrait s’appliquer en droit interne pour les crimes internationaux les plus graves, estimant par ailleurs que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) devrait être envisagé comme faisant partie du droit international coutumier.

La question de l’immunité relève de la souveraineté juridique nationale, a par contre insisté le Soudan.  Prenant note des désaccords qui subsistent entre les membres de la Sixième Commission sur cette question, l’Ukraine a fait remarquer que le droit interne relatif à l’immunité diffère grandement d’un pays à l’autre, et qu’il est souvent basé sur le cas par cas, ainsi que sur des motifs d’ordre politique.  À cet égard, l’Autriche a fait valoir que les restrictions à l’immunité devraient être combinées aux protections procédurales, afin d’éviter les poursuites pénales contre les représentants officiels de l’État motivées politiquement.

Pour leur part, l’Ukraine, le Mexique et la Slovénie ont déploré que l’acte d’agression ne figure pas sur la liste des crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, dont le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. 

Afin de servir au mieux les intérêts de la communauté internationale, le Portugal a préconisé un équilibre entre l’égalité et la souveraineté des États, les droits individuels et la nécessité d’éviter l’impunité en cas de crime grave au regard du droit international.

Le Rapporteur spécial de la Commission sur les crimes contre l’humanité, M. Sean Murphy, a déclaré avoir entendu, au cours des débats des derniers jours, un appui fort des États Membres en faveur des travaux de la CDI sur les crimes contre l’humanité, ajoutant que leurs suggestions sur les 15 projets d’articles seront prises en compte dans la rédaction du rapport final.

Dernier intervenant sur cette question, le Conseil de l’Europe a rappelé qu’il a été l’un des premiers acteurs internationaux à s’attaquer à la question de la lutte contre l’impunité, dans le cadre de la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. 

La Sixième Commission poursuivra son examen du rapport de la Commission du droit international demain, vendredi 27 octobre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Suite des déclarations

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a considéré que les poursuites judiciaires efficaces dans les cas de crimes contre l’humanité doivent être menées par tous, en prenant des mesures aux niveaux international et national et en renforçant la coopération internationale sous toutes ses modalités, y compris par le biais de l’extradition et de l’entraide judiciaire.  Pour sa part, le Mozambique s’est dit déterminé à coopérer et à prêter son appui à la tendance actuelle consistant à prévenir de tels crimes et à lutter contre eux, afin de mettre fin à l’impunité.  À cet égard, le représentant a affirmé que c’est le devoir de chaque État d’exercer sa juridiction criminelle.  Les travaux de la CDI, a-t-il ajouté, sont d’une importance capitale pour mobiliser l’engagement politique des États. 

Chaque État devrait prendre les mesures nécessaires pour que les crimes contre l’humanité constituent des infractions au regard de son droit pénal, a déclaré M. DANAIL CHAKAROV (Bulgarie).  « L’incorporation de cette obligation dans un traité multilatéral est un pas important pour traiter de ces atrocités et mettre fin à l’impunité dans le monde », a-t-il dit.  Il a appuyé la liste non exhaustive d’infractions sur laquelle tous les États devraient tomber d’accord. Reconnaissant que les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité sont bien structurés et qu’ils comblent des lacunes dans le système pénal international existant, il a invité tous les pays à approfondir l’examen de ce sujet, qui est inscrit depuis longtemps dans le programme de travail des Nations Unies.

Par ailleurs, M. Chakarov a salué les projets de directives sur l’application provisoire des traités.  Ils consolident les pratiques diverses des États et se conforment aux dispositions pertinentes de la Convention de Vienne sur le droit des traités et de la Convention de Vienne sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales.  Des clarifications additionnelles sur ce sujet sont toutefois nécessaires en raison de la nature spécifique des dispositions précitées, qui entrent pratiquement en vigueur avant le reste du traité lui-même.  Il y a en effet beaucoup de malentendus entre les praticiens, a souligné le représentant, d’où la pertinence des travaux de la commission. 

Mme LIYANA MUHAMMAD FUAD (Malaisie) a estimé que les différents scénarios évoqués, dans le cadre desquels pourraient s’appliquer à titre provisoire les traités, devraient être approchés avec prudence, en raison des conséquences que cela pourrait avoir sur le plan juridique.  Au nombre de ses réserves, figure l’application provisoire en rapport avec les autres dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, et avec la pratique des organisations internationales.  Elle a noté que la Commission du droit international a adopté à titre provisoire tous les projets de directives 1 à 11, tels que présentés par le Comité de rédaction plus tôt cette année.  Elle a estimé qu’il subsiste des doutes quant à certaines parties des projets de directives, qui doivent « offrir une meilleure compréhension et interprétation » et prendre en compte les législations internes des États.  À cet égard, la législation de la Malaisie ne prévoit aucune disposition explicite qui interdise ou autorise l’application à titre provisoire des traités. 

Mme Fuad a noté que le projet de directive 10 s’aligne sur la formulation de l’article 46 de la Convention de Vienne de 1969 et devrait être considéré conjointement avec cet article.  Pour la Malaisie, la signature des traités ne crée pas nécessairement une obligation juridique lorsque le traité exige d’être ratifié ou approuvé.  « Cependant, il faut mentionner le fait que chaque État doit veiller à ce que l’expression de son consentement à appliquer un traité à titre provisoire soit compatible avec sa législation interne », a préconisé la déléguée.  En l’état, la Malaisie n’envisagera de devenir partie à un traité international une fois son cadre juridique domestique en place, a-t-elle poursuivi.  S’agissant du projet de directive 11, elle a argué que le projet de directive 9 stipule que le droit interne d’un État ou les règles internes d’une organisation internationale peuvent ne pas être invoqués pour justifier l’échec à s’acquitter d’obligations internationales découlant de l’application provisoire des traités.  En dernière instance, elle a précisé qu’il est crucial de distinguer l’application provisoire d’un traité spécifique de la source des obligations prévues par le traité en question. 

Après avoir déclaré que son pays souffre des effets de « l’agression de la Russie », M. VOLODYMYR PAVLICHENKO (Ukraine) a mis l’accent sur le chapitre IV du rapport de la Commission du droit international, portant sur les crimes contre l’humanité.  Il a indiqué que, selon le rapport de l’« International Partnership for Human Rights » (IPHR), des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ont été commis dans le cadre du conflit en cours.  Afin d’établir un cadre juridique universel pour ces crimes, il a exprimé l’espoir que les projets d’articles adoptés par la CDI deviennent une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Il a salué la création d’un groupe de travail sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, estimant que l’impact humanitaire de la dégradation de l’environnement a des conséquences directes sur le bien-être de la population et les droits de l’homme.  Il a invité la CDI à approfondir son examen des questions de complémentarité et de responsabilité pénale, notamment des acteurs non étatiques, dans le contexte de la protection de l’environnement lors de conflits. 

Prenant note des désaccords qui subsistent au sujet du chapitre VII du rapport de la commission, qui porte sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a fait remarquer que les législations nationales diffèrent grandement et sont souvent basées sur le cas par cas, ainsi que sur des motifs politiques.  « Les États totalitaires suivent la pratique de l’impunité pour leurs dirigeants et leurs représentants, peu importe la gravité des crimes qu’ils ont commis », a déploré le représentant, ajoutant qu’il en va de même pour les juridictions internationales auxquelles les États en cause ne sont pas parties, en vertu de l’article 34 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En dépit de la décision de la commission de ne pas inclure le crime d’agression dans la liste des crimes visés, il a estimé que l’agression devrait être assujettie à la non-applicabilité de l’immunité ratione materiae en tant que crime grave en vertu du droit international.

M. YAZAN BAZADOUGH (Jordanie) a appuyé dans leur ensemble les textes proposés pour l’adoption d’une convention sur les crimes contre l’humanité.  Selon lui, une telle convention doit être élaborée pour combler les lacunes du droit international.  Sachant que les conflits armés non internationaux sont les plus répandus, il a estimé qu’il est donc essentiel de pouvoir les couvrir aussi.  Il a considéré que le projet de convention n’est pas en contradiction avec le Statut de Rome.  La définition des crimes contre l’humanité figurant dans l’article 3 est importante parce qu’elle adopte des points cruciaux, comme la répression du crime d’apartheid.

Par ailleurs, le représentant a appuyé le principe de l’obligation d’exercer l’action pénale aut dedere aut judiciare, tel que formulé à l’article 10.  « C’est un point de droit international d’une grande importance », a-t-il souligné.  En outre, la protection des victimes et témoins, que l’on retrouve dans l’article 12, est un ajout important qui reflète les dernières évolutions du droit international.  Il a proposé d’imposer aux États la création d’un fonds destiné à l’indemnisation des victimes. 

M. FONSECA DOS SANTOS PEREIRA (Timor-Leste) a déclaré que la lutte contre l’impunité pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre est nécessaire au développement durable, à la paix et à la sécurité internationales, ainsi qu’à la protection des droits de l’homme.  S’agissant du chapitre 4 du rapport, portant sur les crimes contre l’humanité, il a déclaré qu’en tant que signataire du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), le Timor-Leste appuie intégralement tous les instruments juridiques internationaux afin de lutter contre l’impunité. 

Toutefois, le représentant a considéré que l’extradition devrait se faire en vertu des accords réciproques entre États parties.  Il a rappelé que son pays a mis sur pied un service d’enquête spécialisée à cet effet.  Il a considéré que les efforts visant à lutter contre l’impunité constituent un jalon important afin d’assurer l’état de droit aux niveaux national et international.  En conclusion, il s’est prononcé en faveur de l’adoption d’une convention contraignante afin de lutter efficacement contre l’impunité pour les crimes contre l’humanité.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme MARTA REQUENA, déléguée du Conseil de l’Europe, a noté que le Rapporteur spécial de la Commission du droit international (CDI) sur cette question, M. Pavel Šturma, avait transmis à la CDI un premier rapport, dans lequel il présentait notamment un sondage sur les pratiques relatives à des cas de succession d’États en Europe centrale et occidentale au cours des années 1990.  Or, Mme Requena a souhaité porter à l’attention de la Sixième Commission l’existence d’un projet pilote du Conseil de l’Europe, portant précisément sur cette question.  Dans le cadre de ce projet pilote, a-t-elle souligné, 16 États membres du Conseil de l’Europe ont fourni des données nationales sur leurs pratiques en matière de succession d’États et de reconnaissance au Comité des conseillers juridiques sur le droit international public du conseil.  Mme Requena a estimé que les résultats de cette étude pourraient bénéficier aux travaux du Rapporteur spécial.

Concernant les crimes contre l’humanité, la représentante a rappelé que le Conseil de l’Europe avait été l’un des premiers acteurs à s’attaquer à la question de la lutte contre l’impunité des auteurs de ces crimes, dans le cadre de sa Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, adoptée en 1974.  Abordant le troisième rapport du Rapporteur spécial sur cette question, Mme Requena a souhaité apporter une précision sur le chapitre du rapport lié aux victimes, témoins et autres personnes.  Ce chapitre, a-t-elle dit, mentionne dans une note de bas de page les lignes directrices sur la protection des victimes d’actes terroristes adoptées par la Direction générale des droits de l’homme et de l’état de droit du Conseil de l’Europe, le 2 mars 2005.  Or, a-t-elle informé, ces lignes directrices ont été révisées, le 19 mai 2017, pour les adapter aux évolutions du terrorisme.  Elle a appelé à faire en sorte que le projet d’article 14 de la future convention sur les crimes contre l’humanité adopte une approche aussi « holistique » que la nouvelle version de ces lignes directrices.

S’agissant de l’application provisoire des traités, la représentante a appelé à inclure dans le mémorandum établi par le Secrétariat sur cette question des exemples précis concernant la pratique du Conseil de l’Europe en matière d’application de dispositions de traités spécifiques.

Venu présenter le second groupe de chapitres thématiques, le Président de la Commission du droit international (CDI), M. GEORG NOLTE, a indiqué que les activités entourant le soixante-dixième anniversaire de la CDI seront financées par des contributions volontaires.  Saisie du quatrième rapport du Rapporteur spécial sur la Protection de l’atmosphère, qui proposait des directives sur la relation entre les règles du droit international relatives à la protection de l’atmosphère et d’autres règles pertinentes du droit international, telles que le droit commercial international, le droit de la mer et le droit international des droits de l’homme, la CDI a adopté à titre provisoire le projet de directive 9 portant sur la relation entre règles pertinentes a-t-il déclaré.  

Saisie du cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale sur la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la CDI a adopté le projet d’article 7 intitulé « crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas ».  M. Nolte a indiqué que la notion d’exception à l’immunité est une question fondamentale du droit international et qu’elle a fait l’objet d’un débat « intense et complet », notamment en ce concerne l’immunité ratione materiae.  Il a noté que l’adoption de ce projet d’articles a fait l’objet d’un vote plutôt que d’un consensus entre les États Membres.

Le Président a précisé que, bien que la Rapporteuse spéciale ait indiqué dans ce rapport qu’elle n’avait pas été en mesure de déterminer l’existence d’une règle coutumière autorisant l’application de limites ou d’exceptions à l’immunité ratione personae, elle a déterminé que des limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère s’appliquaient effectivement aux représentants de l’État dans ce contexte.  Au paragraphe 1 du projet d’article 7 se trouve une liste des crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, y compris le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, qui constituent les crimes les plus graves au regard du droit international, a-t-il ajouté.  M. Nolte a précisé que l’immunité ratione materiae ne s’applique pas à l’immunité ratione personae.

S’exprimant au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, Mme AMATLAIN E. KABUA (Îles Marshall) a jugé les projets de directives sur la protection de l’atmosphère « extrêmement importants » pour la communauté internationale, et vitaux pour les petits États insulaires.  Elle a souligné que l’un des impacts les plus graves de la dégradation atmosphérique est la montée du niveau de la mer causée par le réchauffement climatique, qui représente une « menace existentielle » pour les États insulaires. 

Malgré le fait que les petits États insulaires du Pacifique sont parmi les plus faibles contributeurs au réchauffement de la planète, ils courent le risque d’être submergés au cours de ce siècle, a averti la représentante.  Elle a suggéré à la commission d’ajouter la question de la montée du niveau de la mer d’un point de vue juridique à son programme de travail à long terme, en raison de ses effets sur l’intégrité territoriale des États, soulignant l’urgence de tenir ce débat.  Selon elle, une attention spéciale devrait être portée aux personnes vulnérables aux changements climatiques, notamment les peuples autochtones et les communautés locales.

M. LUCIO GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, a jugé préférable de ne pas inclure dans les projets de directives des concepts ou des formulations contraires aux accords internationaux existants sur le droit de l’environnement.  S’agissant du projet de directive 7 sur la modification intentionnelle à grande échelle de l’atmosphère, il a estimé que la formulation actuelle implique à tort que les mesures de géo-ingénierie sont en général admissibles, alors que l’Union européenne considère que le projet de directive cherche à rester neutre à ce sujet.  D’après le délégué, il faut se référer au « principe de précaution » et au fait que 150 États signataires de la Convention sur la diversité biologique de 1992 ont déjà entrepris de limiter l’utilisation de mesures de géo-ingénierie.

Pour M. Gussetti, la référence à la situation et aux besoins particuliers des pays en développement est « problématique ».  Il a préconisé l’approche plus équilibrée de l’Accord de Paris de 2015 qui contient le principe de « responsabilités communes mais différenciées ».  Pour ce qui est de la relation entre le droit de l’atmosphère et le droit international du commerce et de l’investissement, il a noté avec satisfaction que le quatrième rapport du Rapporteur spécial mentionne l’Accord économique et commercial global (CETA) entre le Canada, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part.

M. Gussetti a fait remarquer que la décision de l’Union européenne de limiter temporairement l’application de son système d’échange de droits d’émission aux vols de toutes les compagnies aériennes opérant entre des pays européens n’était pas fondée sur son incompatibilité éventuelle avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce.  En effet, l’Union européenne considère que sa Directive sur l’aviation est pleinement conforme au droit international, y compris le droit international du commerce.

Approuvant le projet de directive 9, le délégué a salué le lien qui est créé entre la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes.  En matière de droit de la mer, il a rappelé la décision prise par l’Organisation maritime internationale (OMI) en 2016 de baisser de 0,50% d’ici à 2020 la teneur maximum en soufre des carburants marins, ce qui réduira la pollution atmosphérique.  Il a souhaité que tous les États, à commencer par les États du pavillon, prennent des mesures en ce sens.  Concernant les droits de l’homme, il a cité l’étude du Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui a conclu que la pollution atmosphérique était cancérigène pour les humains.  À ce sujet, il a souligné que les segments les plus pauvres de la population étaient particulièrement vulnérables.

Pour ce qui est du projet de préambule, M. Gussetti a proposé d’inclure des références au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, à l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris et à la nécessité de ratifier le Protocole de 1999 à la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, relatif à la réduction de l’acidification, de l’eutrophisation et de l’ozone troposphérique (Protocole de Göteborg), et de refléter la déclaration politique sur la pollution qui sera adoptée par l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement en décembre prochain.

M. HELGE SELAND (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a tenu à faire des remarques concernant le chapitre VII du rapport sur les limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Il a réitéré que pour les crimes internationaux les plus graves, aucune règle d’immunité ne devrait s’appliquer dans les juridictions nationales.  Il a encouragé la Commission du droit international (CDI) à trouver un équilibre entre le combat contre l’impunité pour les crimes les plus graves et la nécessité de préserver un cadre juridique important pour la stabilité des relations interétatiques.

Ensuite, le représentant s’est déclaré en accord avec l’analyse de la pratique des États présentée dans le cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale, et a noté la difficulté d’aller vers des conclusions claires eu égard au nombre de questions et aux différents points de vue exprimés.  Il a souligné l’importance des règles relatives à l’immunité.  Il a rappelé son attachement au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), en particulier l’article 27 sur le défaut de pertinence de la qualité officielle, qui devrait être envisagé aujourd’hui comme faisant partie du droit international coutumier.

M. Seland a en outre appuyé le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas et a souligné l’importance d’inclure le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Les pays nordiques approuvent le paragraphe 2 de cet article qui demande de comprendre les crimes conformément à la définition qu’en donnent les traités.  Il a encouragé la commission à chercher un consensus sur les questions les plus délicates, afin de créer les meilleures conditions pour ses travaux.

Concernant le sujet de la protection de l’atmosphère, M. HELMUT TICHY (Autriche) a noté que les trois nouveaux paragraphes du préambule provisoirement adoptés par la commission, et qui ont trait à l’interaction entre l’atmosphère et les océans, à l’élévation du niveau de la mer, aux petits États insulaires en développement et aux intérêts des générations futures, reflètent bien des situations généralement reconnues et qui ont déjà été discutées au sein des Nations Unies et de l’Organisation maritime internationale (OMI).

Le nouveau projet de directive 9, intitulé « Relation entre règles pertinentes » aborde une question fondamentale et montre que la protection de l’atmosphère est un sujet transversal, a continué le représentant.  La protection de l’atmosphère chevauche d’autres sujets, ce qui pose la question de leur compatibilité, a-t-il déclaré.  En tout état de cause, appliquer les principes de l’harmonisation devrait conduire à la réduction des objectifs de protection de l’atmosphère.

Ainsi, le projet de directives 9, paragraphe 2 pourrait être compris comme demandant que les nouvelles règles de protection de l’atmosphère soient compatibles avec les règles de droit international existantes.  Or cela empêcherait tout nouveau développement qui diffèrerait de manière substantielle des règles déjà existantes.  « Nous ne pensons pas qu’une telle restriction doive être envisagée », a indiqué M. Tichy. 

Le projet de directive 9, paragraphe 3 demande aux États, à juste titre, de prêter une considération particulière aux personnes et aux groupes de personnes particulièrement vulnérables à la pollution et à la dégradation atmosphériques.  Cependant, le représentant a pensé que les groupes spécifiques mentionnés, c’est-à-dire les populations autochtones, les populations des pays les moins avancés, et les populations des zones inondables et des petits États insulaires en développement font partie des groupes particulièrement vulnérables.

Passant à la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a rappelé que la délégation autrichienne est comme par le passé en faveur des limites et des exceptions proposées à l’immunité « ratione materiae ».  Cependant, il a estimé comprendre la nécessité de clarification pour savoir si elles reflètent le droit international coutumier ou relèvent plus du droit progressif.  Il a déclaré voir un lien clair entre les exceptions et les limites à l’immunité, d’un côté, et les protections procédurales, de l’autre.  Il a réitéré à cet égard que les restrictions à l’immunité devraient être combinées aux protections procédurales pour éviter les poursuites pénales contre les représentants officiels de l’État motivées politiquement.

M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a pris note de la suggestion d’adopter le projet d’article 7 sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Cette question a acquis une importance majeure alors qu’elle découle de la souveraineté juridique nationale.  Il a rappelé la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens qui prévoit que l’immunité est acceptée en tant que droit international coutumier, ce qui renforce l’état de droit et la certitude juridique. 

D’après le représentant, la définition des représentants de l’État recouvre également des personnes qui exercent des éléments d’autorité de l’État ou qui agissent sur instruction de l’État.  Il a ajouté que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État devrait se faire prima facie, sur une base raisonnable.  L’exercice par l’État de sa juridiction est une manifestation de souveraineté, condition nécessaire pour faire respecter la loi, a-t-il.  Comme prévu au projet d’article 6, il a constaté que la question de l’immunité du chef de l’État est controversée.  Il s’est interrogé sur les sources du droit international sur cette question.

Mme SUSANA VAZ PATTO (Portugal) a estimé que la question de la protection de l’atmosphère devait être traitée de manière équilibrée et positive.  Pour le Portugal, il s’agit d’une responsabilité qui incombe aux États et seule une action conjointe permettra d’y faire face.  Le travail actuel de la Commission du droit international (CDI) présente une opportunité importante, selon sa délégation, pour développer des directives et promouvoir des mécanismes qui pourraient amener les États à adopter des normes communes et à recourir à des pratiques recommandées pour la protection de l’environnement, en connexion avec le droit international du commerce et de l’investissement, le droit de la mer et les droits de l’homme.

Pour ce qui est de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l'État, la représentante a estimé qu’il faut une approche claire et axée sur les valeurs.  « La loi n’est pas neutre et doit refléter les valeurs fondamentales de toute société », a-t-elle affirmé.  Pour servir au mieux les intérêts de la communauté internationale, il faut donc parvenir à un équilibre judicieux entre l’égalité et la souveraineté des États, les droits individuels et la nécessité d’éviter l’impunité en cas de crime grave au regard du droit international.  Pour parvenir à cet équilibre, la commission doit identifier les règles existantes du droit international mais également s’engager dans un exercice de développement progressif.  Ce développement progressif devrait tenir compte, selon elle, du fait que l’immunité est un instrument important dans la conduite des relations extérieures, mais qu’elle doit être interprétée et appliquée dans le contexte de l’évolution actuelle en ce qui concerne les valeurs humaines fondamentales qui ont un statut de jus cogens.

Mme Vaz Patto a félicité la commission d’avoir adopté le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Toutefois, elle a estimé que l’immunité ne devrait pas non plus s’appliquer au crime d’agression, un crime qui est reconnu par le Statut de Rome.  Elle a donc exhorté la commission à revoir sa position sur ce point lors de la deuxième lecture.

Mme DAMARIS CARNAL (Suisse) a tenu à clarifier quelques questions méthodologiques sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Le caractère procédural de l’immunité oblige les tribunaux à traiter la question de l’immunité à titre préliminaire, a-t-elle déclaré.  Or la Cour internationale de Justice (CIJ) a indiqué en 2012, dans son arrêt Allemagne c. Italie, que « l’idée de subordonner le droit à l’immunité à la gravité de l’acte illicite en cause pose un problème de logique ».  Selon la CIJ, deux interprétations sont possibles, mais aucune des deux ne nous semble satisfaisante pour ce qui est des procédures pénales contre les représentants d’un État étranger, a-t-elle dit, et il serait utile que la Commission du droit international (CDI) prenne position sur cette question.

Ensuite, la représentante a constaté que la CDI ne fait aucune distinction entre les diverses raisons pour lesquelles un tribunal national est arrivé à la conclusion qu’un représentant de l’État ne jouit pas de l’immunité liée à la fonction devant une juridiction pénale étrangère lorsqu’une procédure a été ouverte en relation avec les crimes internationaux.  Il ne serait approprié de parler d’exceptions à la règle générale de l’immunité que dans le cas de la gravité des actes en question, a-t-elle déclaré.  Alors que la question se pose de savoir si les exceptions proposées reflètent le droit international coutumier, il est admis que la portée de l’immunité ratione materiae se limite aux actes accomplis dans l’exercice de fonctions officielles.

Mme Carnal a estimé que le mandat de la CDI consiste à la fois à codifier et à développer progressivement le droit international.  Nous estimons qu’il est important de faire une distinction claire entre ces deux aspects des travaux de la commission, a-t-elle indiqué.  En outre, après un examen des sources citées à l’appui de l’article 7, elle a été d’avis que ces critères exigeants pour l’établissement d’une règle de droit international coutumier ne sont pas satisfaits en l’espèce.  Elle a encouragé la commission à fournir des éléments plus probants pour soutenir le projet d’article 7 ou à indiquer clairement que celui-ci s’inscrit dans le développement progressif du droit.

M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) a reconnu que les projets d’articles sur la protection de l’atmosphère s’appuient sur les relations entre les règles pertinentes du droit de l’environnement, du droit de la mer et des droits de l’homme.  Les principes du droit international, comme celui de la responsabilité partagée ou du pollueur payeur, ne doivent pas subir de préjudice dans le contexte de nos travaux, a-t-il insisté.  Concernant le projet d’article 9, il a estimé qu’il cherche à concilier les différentes règles existantes.  Il s’est félicité de la mention des groupes vulnérables au paragraphe 3, afin d’en tenir compte dans l’interprétation systémique du droit international.  Il a par ailleurs invité le Rapporteur spécial à poursuivre ses consultations auprès des scientifiques compétents sur cette question afin d’en connaitre les limites.

S’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé que la torture et l’apartheid auraient dû être inclus dans les exceptions prévues au projet d’article 7.  Il a regretté que l’acte d’agression n’ait pas été retenu, de même que la corruption, un crime qui ne peut être commis que par un représentant de l’État, a-t-il relevé.  Il a estimé qu’il fallait continuer à étudier la pratique des États en tenant compte de la codification et du développement progressif du droit international, rôle fondamental de la Commission du droit international (CDI).  En ce qui concerne les règles de procédure pour les poursuites et les enquêtes pour les crimes commis par les représentants de l’État, il s’agit d’une question importante afin d’éviter la politisation du droit par les représentants de l’État.

Mme SUE ROBERTSON (Australie) a relevé que l’immunité de l’État était un principe de base du droit international, découlant du principe de l’égalité souveraine de tous les États.  L’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est donc le corollaire de l’immunité des États.  L’Australie regrette que la commission n’ait pu arriver à un consensus sur la question des limites et des exceptions à cette immunité, et que le projet d’article 7, sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, ait dû être adopté par voie de vote, a-t-elle déclaré.  L’Australie s’associe à ces États qui ont voté contre l’adoption de cet article qui, sous sa forme actuelle, ne reflète aucune pratique établie par les États, ni ne s’apparente à aucune tradition juridique existante. 

Pour l’Australie, a poursuivi Mme Robertson, l’immunité ne doit pas s’apparenter à l’impunité, mais elle intervient pour empêcher que le représentant d’un État ne soit poursuivi pour des crimes internationaux dans certaines circonstances, et pas dans toutes les situations.  Selon elle, les représentants des États peuvent être poursuivis en cas de crime international dans leur propre pays, devant une cour internationale compétente, ou devant des tribunaux d’un État tiers après la levée de leur immunité.  En conclusion, elle a estimé que cet article 7 ne présente pas de solution idéale, et souhaité plutôt que l’idée d’une obligation conventionnelle de renoncer ou de poursuivre soit discutée par la commission.

Mme DAPHNE HONG (Singapour) a exprimé son soutien au Rapporteur spécial chargé des travaux sur le sujet de la protection de l’atmosphère, se félicitant que la coopération internationale soit placée au cœur du projet de directives.  Elle a souligné l’importance de l’équité intergénérationnelle, voulant voir préserver les intérêts des générations futures en ce qui concerne la qualité de l’atmosphère, tout en suggérant de se concentrer aussi sur la pollution dont souffre la génération actuelle.  Elle a donc suggéré d’intégrer une référence à la « génération actuelle » dans le préambule.  Elle s’est par ailleurs interrogée sur la fragmentation possible entre les règles de droit et sur la valeur pratique du projet de directives.  En ce qui concerne les dispositions du préambule relatives à la situation spéciale des zones côtières de faible élévation et des petits États insulaires en développement, liée à la hausse du niveau de la mer, elle a appuyé la reconnaissance du fait que ces États sont plus vulnérables à la dégradation et à la pollution atmosphériques.  « Cette situation particulière ayant déjà été reconnue dans l’Accord de Paris sur les changements climatiques, elle ne devrait pas être controversée », a-t-elle insisté.

Passant au chapitre sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Hong s’est dite étonnée de la façon inhabituelle dont le projet d’article 7 a été adopté de manière provisoire par la commission, c’est-à-dire par un vote, déduisant de cette dissension que ce texte méritait un examen plus poussé.  Sur le fond, elle s’est demandé s’il y avait suffisamment de jurisprudence et de règlementations des États et de traités pour justifier une codification d’une liste spécifique de crimes tombant sous le coup du projet d’article 7 pour lesquels l’immunité rationae materiae ne s’appliquerait pas. 

En outre, vu la rédaction actuelle de ce texte, la représentante a suggéré à nouveau à la commission de revoir, dans le cadre du développement progressif du droit, l’extension de l’immunité rationae personae à des hauts fonctionnaires au-delà de la troïka, après l’achèvement de ses travaux sur l’immunité rationae materiae.  Enfin, elle a partagé les inquiétudes de plusieurs membres de la commission sur « la nécessité d’éviter des procédures politiquement motivées ou un exercice illégitime de la compétence ».  Il faut se concentrer sur les garanties, a-t-elle souhaité, pour s’assurer que les exceptions à l’immunité rationae materiae ne soient pas appliquées d’une façon complètement subjective.

S’agissant du chapitre VI du rapport de la Commission du droit international (CDI), portant sur la protection de l’atmosphère, M. ANGEL HORNA (Pérou) a souligné le rapport étroit existant avec la mer et les océans.  Il a estimé que le Rapporteur spécial devrait se référer au rapport issu du Processus consultatif officieux des Nations Unies ouvert à tous sur les océans et le droit de la mer.

En ce qui concerne l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé qu’il était important de faire la distinction entre les limites et exceptions ratione materiae et ratione personae, alors que les représentants de l’État se trouvent dans l’exercice de leurs fonctions.  Selon lui, il est possible de discerner une tendance ratione materiae pour les crimes qui répugnent à l’humanité.  Il est donc nécessaire d’établir un équilibre entre ces deux principes en tenant en compte, d’une part, la souveraineté des États, et d’autre part, la lutte contre les crimes les plus graves.  Il a estimé qu’il fallait étudier la pertinence de certains aspects du caractère procédural, comme entend le faire le Rapporteur spécial dans son prochain rapport. 

À propos de la protection de l'atmosphère M. ANIL SHIROLE (Inde) a estimé que le projet d’article 9 suggère que les règles juridiques touchant à la protection de l'atmosphère dans d’autres domaines que le droit de la mer, à savoir, les droits de l’homme et le droit international du commerce et de l’investissement, devraient être identifiées, interprétées et appliquées dans le but de préparer un ensemble d’obligations.  Il a estimé que chaque domaine du droit international possède son propre champ d’application et régime juridique.  En conséquence, une étude approfondie est nécessaire pour trouver les facteurs pertinents entre la protection de l’atmosphère et d’autres champs du droit international.

Passant au sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé que les questions soulevées dans le projet d’article 7, sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, sont complexes et politiquement sensibles.  Selon lui, la plus grande prudence est requise avant de décider si la commission devrait se concentrer sur les aspects concernant sa codification ou sur le développement du droit progressif international (lex lata ou lex ferenda).  Cela ne sera possible que si la commission est capable de démontrer une pratique constante dans les traités et de la part des États pour soutenir les exceptions de l’article 7.  Faute d’accord, tout nouveau système pourrait mettre en danger les relations interétatiques et miner l’objectif d’en finir avec l’impunité, a-t-il conclu.

M. YUKI HIROTANI (Japon) a estimé qu’étant donné que l’atmosphère n’est pas statique, il serait important de considérer plutôt les normes générales du droit international, à défaut de traités spécifiques qui contiennent des « normes fragmentées ».  Pour le Japon, le projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes est un moyen d’éviter justement cette fragmentation.  Il a salué le paragraphe 1 qui prescrit l’harmonisation et l’intégration systémique des dispositifs du droit international, afin d’éviter les conflits; de même que le paragraphe 2 qui couvre les situations où des États voudraient établir de nouvelles règles, afin d’éviter une fois encore la fragmentation du droit international sur la question.  En outre, il a approuvé le paragraphe 3 qui met en exergue la situation de gens particulièrement vulnérables à la pollution et à la dégradation atmosphériques.  

Abordant la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a noté que le débat sur les limites et les exceptions a révélé des divisions sur la classification de ces concepts dans le droit coutumier ou dans le contexte des développements nouveaux du droit.  Selon lui, la confusion qui a émergé de ce débat pourrait être due au fait que le cinquième rapport n’a pas apporté d’éléments probants pour soutenir sa conclusion.  Il a demandé des explications sur le choix fait pour établir la liste des crimes à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Enfin, il a prévenu la commission de ne pas confondre l’immunité des États et celle des individus, et conclu que le sixième rapport devrait apporter des clarifications sur les définitions des aspects procéduraux et les garanties.

Mme DANIJELA HORVAT (Slovénie), s’exprimant sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, s’est déclarée en accord avec le fait que les limites et exceptions à l’immunité requièrent un examen prudent, qui prenne en compte la pratique des États, l’opinio juris et les tendances du droit international.  L’adoption par la commission du projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materia ne s’applique pas reflète la complexité de la question.

La représentante a réitéré que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est basée sur les principes d’égalité souveraine des États, la non-ingérence et a pour but de maintenir des relations amicales entre les États.  Elle a par ailleurs soutenu l’approche définie dans le projet d’article 4 sur la portée de l’immunité ratione personae et son paragraphe 2, qui porte sur la traditionnelle troïka, à savoir les chefs d’État, les chefs de gouvernement et les ministres des affaires étrangères, comme étant les seuls récipiendaires de l’immunité.  Elle a aussi apprécié le délicat équilibre trouvé entre la souveraineté des États et la stabilité des relations internationales, ainsi que la nécessité de prévenir et de punir les crimes les plus graves relevant du droit international.  Elle a ensuite salué la liste des crimes et l’inclusion du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, et des crimes de guerre.  Elle a souligné la décision de ne pas inclure le crime d’agression.  Pourtant, le crime d’agression est le plus sérieux crime du droit international.  En conséquence, la Slovénie considère que l’inclusion des crimes d’agression mériterait un nouvel examen. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: la diversité des affaires renvoyées à la CIJ illustre la confiance et l’estime des États

Soixante-douzième session,
34e & 35e séances - matin & après-midi
AG/11965

Assemblée générale: la diversité des affaires renvoyées à la CIJ illustre la confiance et l’estime des États

Le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Ronny Abraham, a présenté aujourd’hui à l’Assemblée générale le rapport annuel du principal organe judiciaire des Nations Unies, « contributeur à la paix et à la sécurité internationales et pilier de l’état de droit, plus pertinent que jamais », a résumé le Président de l’Assemblée, M. Miroslav Lajčák

M. Ronny Abraham a indiqué qu’entre le 1er août 2016 et aujourd’hui, la CIJ a rendu quatre arrêts et trois ordonnances tandis que 19 affaires contentieuses et une procédure consultative sont pendantes.  De nombreuses délégations ont estimé que le nombre et la diversité des affaires qui concernent quatre continents reflètent la confiance et l’estime que les États témoignent à la Cour.

Dans l’affaire du financement du terrorisme et de la discrimination raciale opposant l’Ukraine à la Fédération de Russie, la Cour a rendu une ordonnance le 19 avril 2017, demandant à cette dernière de s’abstenir de maintenir ou d’imposer des limitations à la capacité de la communauté des Tatars de Crimée de conserver ses instances représentatives, y compris le majlis, et de faire en sorte de rendre disponible un enseignement en langue ukrainienne.  Déplorant que, six mois plus tard, la Fédération de Russie néglige toujours son devoir de mettre en œuvre tous les éléments de l’ordonnance, l’Ukraine a appelé l’ONU à examiner soigneusement les cas où les décisions de la Cour ne sont pas respectées afin de trouver le moyen d’en assurer la pleine mise en œuvre.  La Fédération de Russie s’en est vivement défendue dans son droit de réponse, accusant l’Ukraine de se lancer dans une « propagande » et de présenter un « tableau très éloigné de la réalité ».

La question de la non-exécution de décisions de la Cour a inquiété plusieurs délégations, alors que la Cour a un caractère universel puisque tous les États Membres de l’ONU sont ipso facto parties à son Statut.  Cuba a jugé nécessaire d’envisager une réforme de l’ONU, rappelant que la non-exécution des décisions et avis consultatifs de la Cour constitue une violation flagrante de l’Article 94 de la Charte, qui stipule que chaque membre des Nations Unies doit s’engager au respect de la décision de la CIJ dans tout différend dont il est partie.

L’observateur de Palestine a condamné le fait qu’Israël refuse toujours de mettre en œuvre l’avis consultatif de 2004 relatif à la construction d’un mur sur le territoire palestinien occupé.  Les Philippines ont fait remarquer que, sur les 193 États parties au Statut de la Cour, seulement 72 États ont fait des déclarations reconnaissant la juridiction obligatoire.  La limite ratione temporis a été invoquée dans ce cadre, les Pays-Bas expliquant qu’« ils accepteront tous les différends résultant de situations ou de faits qui ne remontent pas plus loin que 100 ans avant la saisine de la Cour ».

Plusieurs délégations ont rappelé l’importance de l’avis consultatif unanime rendu par la Cour le 8 juillet 1996 sur la « légalité de la menace ou l’emploi des armes nucléaires ».  La Thaïlande a regretté que la Cour se soit déclarée incompétente dans l’affaire opposant les Îles Marshall à l’Inde, au motif qu’il n’y a pas de différend entre les parties.  Pour la Thaïlande, la Cour a raté l’occasion d’offrir « certitude et prévisibilité » à l’interprétation de l’article 6 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). 

Le Président de la CIJ a détaillé d’autres décisions dont celle sur l’affaire relative aux immunités et aux procédures pénales présentée par la Guinée équatoriale contre la France.  La Cour a prescrit à la France de prendre, dans l’attente d’une décision finale, toutes les mesures à sa disposition pour que l’immeuble de la « mission diplomatique » de la Guinée équatoriale à Paris soit couvert par l’immunité.  Elle s’est en revanche déclarée incompétente pour la demande relative à l’immunité alléguée de M. Teodoro Nguema Obiang Mangue.

Le Président a aussi parlé des nouvelles procédures dont celle introduite le 16 janvier 2017 contre le Nicaragua par le Costa Rica qui a remercié l’Assemblée générale d’avoir accordé les crédits nécessaires pour que la Cour puisse mener deux inspections sur le terrain.  M. Abraham a d’ailleurs évoqué les demandes pour 2018-2020 qui s’élèvent à 46,9 millions de dollars, soit une augmentation nette de 2,5% par rapport à l’exercice précédent mais « moins de 1% du budget ordinaire de l’Organisation ».

L’Assemblée a également pris note du Rapport du Secrétaire général* sur le Fonds d’affectation spéciale destiné à aider les États à porter leurs différends devant la Cour internationale de Justice.  El Salvador a demandé de réfléchir à des mesures en faveur des pays à faible revenu ou très endettés qui, malgré le Fonds, n’ont pas la même capacité de s’acquitter des coûts de plus en plus élevés qui rendent prohibitifs l’accès à la justice.

À la demande de son Bureau**, l’Assemblée générale a décidé d’examiner en plénière les questions intitulées « Coopération entre l’ONU et l’Organisation de la coopération islamique » et « Incidence de l’évolution exponentielle de la technique sur le développement durable et la paix ». 

Elle a confié à sa Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires la question de la « Confirmation de la nomination de membres du Comité des placements » et à sa Sixième Commission chargée des questions juridiques la question de l’« Octroi du statut d’observateur au Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes ».  En revanche, l’Assemblée a décidé de reporter l’examen du « Retrait complet des forces militaires étrangères du territoire de la République de Moldova ».

L’Assemblée générale tiendra sa prochaine séance publique lundi 30 octobre, à partir de 10 heures, pour examiner le rapport de la Cour pénale internationale.

*A/72/345

**A/72/250/Add.1

RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE (CIJ) (A/72/4) (A/72/345)

Déclarations

M. MIROSLAV LAJČÁK, Président de l’Assemblée générale, a rappelé que l’examen annuel du rapport de la Cour internationale de Justice (CIJ) est une tradition depuis 1968.  Cet examen s’inscrit dans les efforts tendant au renforcement des relations entre les deux organes des Nations Unies: l’Assemblée générale et la Cour.

Il a ensuite mis en exergue trois points sur le rôle de la Cour, le premier étant la contribution de celle-ci à la cause de la paix.  En effet, la CIJ a été créée pour sauver les générations futures du fléau de la guerre.  La Charte stipule, entre autres, que l’objectif de l’Organisation consiste à créer les conditions du respect de la justice et du droit international.

Pour M. Lajčák, en tant que principal organe judiciaire des Nations Unies, la CIJ joue un rôle fondamental.  Si ses jugements ne sont contraignants que pour les parties concernées, la jurisprudence de la Cour a néanmoins un impact plus large.  La Cour envoie un message fort au monde entier car, par ses fonctions visant le règlement pacifique des différends, elle joue également un rôle important dans la prévention des conflits.  Ce faisant, elle contribue aux efforts de la paix.

Le deuxième point que le Président de l’Assemblée a mis en avant est que les travaux de la Cour contribuent au renforcement de l’état de droit, non seulement dans la sphère des relations entre les États mais également au sein du système des Nations Unies.  La vision énoncée dans la Charte, a-t-il dit, ne saurait être matérialisée sans l’état de droit, ce qui définit tout le travail que nous faisons, qu’il soit sur la paix et la sécurité, le développement durable ou les droits de l’homme.  Les jugements de la Cour et ses avis consultatifs sont donc la clef du renforcement de l’engagement de la communauté internationale en faveur de l’état de droit, a-t-il souligné.

Relevant que bien des choses ont changé depuis l’établissement de la CIJ, M. Lajčák a déclaré, en troisième lieu, que cet organe reste plus pertinent que jamais.  Il a illustré son propos par le fait que le rapport annuel présente, dans le menu détail, un « haut degré d’activités et d’intérêt pour le travail de la Cour ».  Ainsi, la période 2016-2017 a vu un certain nombre d’États soumettre leurs différends à l’adjudication de la Cour.  Il est encourageant de noter la tendance positive à l’acceptation de la compétence de la Cour et au caractère contraignant de ses décisions, a estimé le Président. 

M. RONNY ABRAHAM, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a indiqué qu’entre le 1er août 2016 et aujourd’hui, 19 affaires contentieuses et une procédure consultative ont été pendantes devant la Cour, des audiences ayant été tenues dans six d’entre elles.  Dans le même temps, la Cour a rendu quatre arrêts et trois ordonnances en indication de mesures conservatoires.

Ayant déjà présenté les trois arrêts rendus par la Cour le 5 octobre 2016, dans les affaires des Obligations relatives à des négociations concernant la cessation de la course aux armes nucléaires et le désarmement nucléaire (Îles Marshall c. Inde; Îles Marshall c. Pakistan et Îles Marshall c. Royaume-Uni), le Président s’est d’abord attardé sur l’arrêt du 2 février 2017 sur les exceptions préliminaires soulevées par le Kenya en l’affaire relative à la Délimitation maritime dans l’océan Indien.  La Cour, a-t-il indiqué, a conclu que l’exception préliminaire à sa compétence soulevée par le Kenya devait être rejetée de même que la seconde exception qui portait sur la recevabilité de la requête.  La Cour a fixé au 18 décembre, la date d’expiration du délai pour le dépôt du contre-mémoire du Kenya en l’affaire. 

S’agissant des trois ordonnances en indication de mesures conservatoires, le Président a indiqué que la première a été rendue le 7 décembre 2016 en l’affaire relative aux Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France).  La Cour a considéré qu’elle n’avait pas compétence prima facie en vertu de la Convention contre la criminalité transnationale organisée pour connaître de la demande de la Guinée équatoriale relative à l’immunité alléguée de M. Teodoro Nguema Obiang Mangue.  Elle a en revanche conclu qu’elle avait compétence prima facie en vertu de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques pour connaître du différend relatif à l’immeuble sis au 42 avenue Foch.

La Cour ne s’est donc intéressée qu’au droit prétendu de la Guinée équatoriale à « l’inviolabilité des locaux de sa mission diplomatique » et a en conséquence prescrit à la France de prendre, dans l’attente d’une décision finale en l’affaire, toutes les mesures à sa disposition pour que ces locaux jouissent d’un traitement équivalent à celui requis par l’article 22 de la Convention de Vienne, de manière à assurer leur inviolabilité.

Quant à la deuxième ordonnance, rendue le 19 avril 2017, en l’affaire Application de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c. Fédération de Russie), la Cour, a indiqué son Président, a commencé par rappeler qu’elle n’avait pas à établir l’existence de violations des obligations incombant aux parties en vertu de l’une ou l’autre de ces Conventions, mais devait déterminer si les circonstances exigeaient l’indication de mesures conservatoires à l’effet de protéger des droits.  Elle a conclu que, afin de protéger les droits revendiqués par l’Ukraine, concernant la situation en Crimée, la Fédération de Russie devait s’abstenir de maintenir ou d’imposer des limitations à la capacité de la communauté des Tatars de Crimée de conserver ses instances représentatives, y compris le majlis, et faire en sorte de rendre disponible un enseignement en langue ukrainienne.  La Cour a ajouté que les deux parties devaient s’abstenir de tout acte susceptible d’aggraver ou d’étendre le différend dont elle était saisie ou d’en rendre la solution plus difficile. 

Concernant la troisième ordonnance rendue le 18 mai 2017, en l’affaire Jadhav (Inde c. Pakistan), la Cour, après avoir conclu, d’une part, qu’elle avait, prima facie, compétence en vertu de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, et d’autre part, que les conditions auxquelles son Statut subordonnait l’indication de mesures conservatoires étaient réunies, a prescrit au Pakistan de prendre toutes les mesures à sa disposition pour que M. Jadhav, ressortissant indien et condamné à mort au Pakistan, ne soit pas exécuté tant qu’elle n’aurait pas rendu sa décision définitive en l’instance.  La Cour a également décidé que, jusqu’au prononcé de sa décision définitive, elle demeurerait saisie des questions faisant l’objet de cette ordonnance.

Le Président est ensuite venu aux quatre nouvelles procédures engagées, trois en matière contentieuse et une en matière consultative.

Une première instance a été introduite le 16 janvier 2017 par la République du Costa Rica contre la République du Nicaragua au sujet d’un différend relatif à la définition précise de la frontière dans la zone de la lagune de Los Portillos/Harbor Head et à l’établissement par le Nicaragua d’un nouveau camp militaire sur la plage d’Isla Portillos.  M. Abraham a précisé que, compte tenu de la nature des demandes formulées par le Costa Rica dans cette nouvelle affaire et du lien étroit que celles-ci entretiennent avec certains aspects du différend en l’affaire de la Délimitation maritime dans la mer des Caraïbes et l’océan Pacifique (Costa Rica c. Nicaragua), la Cour a décidé de joindre les instances dans les deux affaires le 2 février 2017.  Des audiences ayant été tenues début juillet 2017, cette nouvelle affaire est actuellement en cours de délibéré.

Une deuxième affaire a été portée devant la Cour le 2 février 2017.  La Malaisie a déposé une demande en révision de l’arrêt rendu par la Cour le 23 mai 2008 en l’affaire relative à la Souveraineté sur Pedra Branca/Pulau Batu Puteh, Middle Rocks et South Ledge (Malaisie/Singapour), soutenant qu’il existe un fait nouveau, celui lié aux trois documents découverts dans les archives nationales du Royaume-Uni entre le 4 août 2016 et le 30 janvier 2017, qui montreraient que « certains des plus hauts représentants de l’administration coloniale britannique et de l’Administration singapourienne étaient conscients de ce que Pedra Branca/Pulau Batu Puteh ne faisait pas partie du territoire souverain de Singapour ».  Quelques mois plus tard, le 30 juin 2017, la Malaisie a saisi la Cour d’une nouvelle affaire en déposant une demande en interprétation de l’arrêt rendu par la Cour le 23 mai 2008 en la même affaire.

Pour ce qui est de la demande d’avis consultatif, le Président a précisé qu’il s’agit de celle que l’Assemblée générale a présentée en juin 2017, sur les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965.  La Cour, a-t-il indiqué, a fixé au 30 janvier 2018, la date d’expiration du délai dans lequel les exposés écrits pourraient être présentés et au 16 avril 2018, la date d’expiration du délai dans lequel les États ou organisations qui auraient présenté un exposé écrit pourraient présenter des observations écrites sur les autres exposés.

Après avoir terminé ce tour d’horizon, M. Abraham a évoqué les demandes de crédits budgétaires pour l’exercice biennal 2018-2020 que la Cour a transmis à l’Assemblée.  Les crédits, en légère augmentation, répondent à « des besoins indispensables pour garantir une bonne administration de la justice internationale et réaliser ainsi le mandat que lui confère la Charte des Nations Unies ».  Le budget de la Cour représente moins de 1% du budget régulier de l’Organisation, a ajouté M. Abraham, soulignant que le soutien de l’Assemblée sera en particulier nécessaire pour fournir à la Cour les moyens de mettre en œuvre le progiciel de gestion intégré, Umoja, au cours du prochain exercice biennal. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. SABRI BOUDAKOUM (Algérie), a déclaré d’emblée que son Groupe continue de considérer la CIJ comme un « mécanisme prééminent de règlement des différends au niveau international ».  Principal organe judiciaire des Nations Unies, la CIJ occupe une « position spéciale » car tout ce qu’elle fait vise la promotion de l’état de droit.  « La Cour internationale prononce des jugements et fournit des avis consultatifs conformément à son Statut, qui est une partie intégrante de la Charte des Nations Unies, et contribue, par là même, à la promotion et à la clarification du droit international », a souligné M. Boudakoum.

Il s’est réjoui de la confiance réaffirmée des États en la Cour qui a montré sa capacité de résoudre leurs différends et s’est particulièrement félicité du fait que les États continuent de saisir la CIJ.  Il a aussi salué les États qui ne se contentent plus seulement de saisir la Cour de questions très peu politiques mais aussi de « vraies ayant un véritable poids politique ».  Le nombre d’affaires actuellement en suspens reflète l’estime que les États ont à l’égard de la CIJ, a-t-il encore affirmé.     

Indépendamment de la multiplication des mécanismes judiciaires internationaux de règlement des différends tant sur une base spécialisée que régionale, la CIJ continue d’attirer une large gamme d’affaires, a fait remarquer le représentant algérien, avant de souligner la détermination de la CIJ à mettre l’accent sur l’obligation de coopérer qui repose principalement sur l’obligation en vertu des traités.  Par ailleurs, a tenu à préciser M. Boudakoum, la CIJ s’inspire aussi clairement de principes généraux, notamment en établissant un lien entre l’obligation procédurale et substantive. 

Il a poursuivi en évoquant le principe de prévention, énoncé dans la décision de la CIJ sur le Détroit de Corfou; et l’avis consultatif sur l’Emploi ou la menace d’emploi d’armes nucléaires.  Dans ce contexte, le Groupe des États d’Afrique réaffirme l’importance de l’avis consultatif unanime de la Cour datant du 8 juillet 1996 sur la « Légalité de la menace ou de l’emploi des armes nucléaires ».  Dans cette décision, la CIJ avait conclu qu’il existe une obligation de poursuivre, en toute bonne foi, et de conclure les négociations menant au désarmement nucléaire sous tous les aspects et ce, dans un strict contrôle international.

Notant qu’après deux décennies, la Cour a encore eu l’occasion de prendre des décisions sur des questions afférentes aux armes nucléaires, il a remarqué que celle-ci avait rejeté trois affaires soumises par les Îles Marshall sur les « Obligations concernant les négociations relatives à la cessation de la course aux armes nucléaires et au désarmement nucléaire ».  M. Boudakoum a néanmoins attiré l’attention sur le résultat très serré des votes sur ces affaires.

Passant au fonctionnement de la CIJ, l’Algérie a loué l’efficacité et le professionnalisme avec lequel la Cour a abordé la demande d’avis consultatif de l’Assemblée générale sur la séparation, en 1965, de l’archipel des Chagos de Maurice.

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a souligné la position de principe de son mouvement sur le règlement pacifique des différends et le non-recours à la menace ou à l’emploi de la force.  À cet égard, a affirmé le représentant, la CIJ joue un rôle majeur, en vertu de la Charte.  Le représentant a vivement exhorté le Conseil de sécurité, qui n’a pas sollicité la Cour depuis 1970, à inverser cette tendance, surtout pour s’assurer de la conformité de ses décisions avec la Charte et le droit international.  Le représentant a également invité l’Assemblée générale, les  autres organes de l’ONU et ses fonds et programmes à faire de même.  Il est revenu sur l’importance de l’avis consultatif unanime du 8 juillet 1996 concernant la légalité de la menace ou de l’utilisation de l’arme nucléaire.  Cet avis avait conclu, a rappelé le représentant, qu’il existe une obligation à poursuivre en toute bonne foi les négociations sur le désarmement nucléaire sous tous les aspects, et sous un contrôle international strict et effectif.

Le représentant a lancé un appel pressant à Israël, Puissance occupante, pour qu’il respecte l’avis consultatif de la CIJ, du 9 juillet 2004, sur la « Légalité de la construction d’un mur dans le territoire palestinien occupé », afin de mettre un terme à l’occupation des territoires palestiniens et ouvrir la voie à la création d’un État palestinien indépendant. 

Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), M. ALAN H.KESSEL (Canada) a estimé que la grande variété des États qui saisissent la CIJ et le large éventail des affaires importantes et complexes témoignent de l’importance que les États attachent à la Cour qui est reconnue comme un moyen clef pour assurer la résolution pacifique des différends.  L’acceptation par les pays de sa juridiction obligatoire témoigne de la confiance qu’ils accordent à la Cour, a poursuivi le représentant.  Plus les États seront nombreux à accepter cette juridiction, mieux la CIJ pourra remplir son rôle.  Le représentant a donc appelé les États Membres qui ne l’ont pas encore fait, à déposer auprès du Secrétaire général une déclaration par laquelle ils acceptent la juridiction obligatoire de la Cour.

Au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), M. MAURO VIEIRA (Brésil) a souligné la fonction « cruciale » que la Cour assume dans le système juridique international.  La Cour bénéficie d’une reconnaissance de plus en plus grande puisque tous les États Membres des Nations Unies sont parties à son Statut et que 73 d’entre eux ont reconnu sa juridiction obligatoire.  Après avoir souligné que compte tenu de son volume de travail, la CIJ a besoin de ressources adéquates, le représentant a aussi attiré l’attention sur l’importance des autres cours et tribunaux internationaux qui devraient tous coopérer à l’avancement du droit international.  Rappelant que le Secrétaire général Guterres et le Président de l’Assemblée générale Lajčák insistent sur la prévention, laquelle est intrinsèquement liée au règlement pacifique des différends, M. Vieira a estimé que la CIJ est « au cœur » de ces efforts en tant que principal organe judiciaire de l’ONU et seule cour internationale à caractère universel avec juridiction générale. 

À titre national, le représentant a salué le dernier rapport de la CIJ qui témoigne de sa nouvelle vitalité et de son rôle universel dans la promotion de la justice.  Il a fait part de la fierté du Brésil d’avoir donné d’éminents juristes à la Cour dont le juge Antônio Augusto Cançado Trindade qui va se représenter à un nouveau mandat.

Au nom du Groupe de Visegrad -Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie-, Mme RÉKA VARGA (Hongrie) a estimé qu’exploiter pleinement les moyens disponibles pour établir la base de la compétence de la Cour doit être « l’objectif principal », parce que davantage d’États saisiraient la Cour de leur différend.  Le représentant a donc encouragé les États et les organisations internationales à continuer d’inclure dans les futurs traités multilatéraux, des dispositions qui pourraient servir de base à la compétence de la Cour pour statuer sur l’application ou l’interprétation desdits traités.  Nous encourageons aussi les États à se garder d’émettre des réserves sur les clauses des traités multilatéraux relatives à la compétence obligatoire de la Cour.  Le représentant a insisté sur le fait que le respect des décisions, jugements et instructions de la Cour sont des conditions « fondamentales » à l’efficacité du système de justice internationale.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué le fait que l’Assemblée générale recommence à inviter les États qui ne l’ont pas encore fait à envisager la possibilité de reconnaître la compétence obligatoire de la CIJ, conformément à l’Article 36 paragraphe 2 de son Statut comme l’ont fait le Pérou et 72 autres États.  Il a salué le travail des juges et du Greffe de la Cour, et exhorté l’Assemblée générale à continuer à répondre aux besoins de la Cour.  Le Pérou a noté le niveau soutenu des activités de la CIJ, expression selon lui du prestige dont jouit le principal organe judiciaire de l’ONU.  Ce prestige est notamment reflété dans la diversité géographique des affaires qu’elle examine, ce qui confirme le caractère universel de sa compétence, a-t-il estimé, rappelant qu’il y a à peine quelques années, elle avait traité d’une affaire impliquant le Pérou et le Chili.  Dans la perspective de la prochaine élection des magistrats et en vertu de l’Article 9 du Statut de la Cour, il a émis le vœu que l’accent soit mis sur la présence de juges d’Amérique latine.

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) s’est félicité du travail du principal organe judiciaire des Nations Unies et a pris note des deux affaires concernant son pays qu’a présentées la Malaisie.  Le représentant a insisté sur l’attachement de son pays à l’état de droit et réaffirmé son engagement en faveur du règlement pacifique des différends.  Il a noté avec intérêt le fait que la Cour ait nommé deux experts.

M. MASAHIRO MIKAMI (Japon) a félicité la CIJ pour le rôle qu’elle a joué au cours des 60 dernières années dans le règlement pacifique des différends.  La Cour est maintenant confrontée à une demande croissante d’avis consultatifs sur des questions juridiques complexes, a-t-il noté.  Le représentant s’est félicité de ce que la visite effectuée dans son pays par le Président et le Greffier de la Cour ait permis aux universitaires et juristes japonais de mieux comprendre la CIJ et son importance.  Le représentant s’est approprié les mots du Président de la CIJ selon lequel « deux des impératifs essentiels d’un système judiciaire fondé sur l’état de droit sont la cohérence et la prévisibilité, tant dans la loi elle-même, qu’il s’agisse du fond ou de la procédure, que dans les décisions rendues ».  Aujourd’hui, a fait observer le représentant, les États ont à leur disposition une myriade de moyens pour régler pacifiquement leurs différends. 

Outre la Cour, il a cité le Tribunal international sur le droit de la mer, les tribunaux d’arbitrage, les tribunaux d’investissement internationaux et le système de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Le représentant a encouragé ce large éventail à assurer la cohérence dans leur jurisprudence et à éviter la fragmentation du droit international.  Comme l’a dit le Président de la CIJ lors de sa visite au Japon, a-t-il rappelé: « la cohérence du droit international est garantie par le fait que la CIJ se tient au fait des décisions rendues par les autres organes judiciaires et qu’elle n’hésite à y faire référence dans ses propres jugements, quand cela s’avère nécessaire ». 

M. ROLANDO CASTRO CORDOBA (Costa Rica) a relevé que les affaires dont est saisie la Cour concernent quatre continents et sont de natures différentes, ce qui montre son caractère universel, l’importance que les États Membres accordent à ses décisions et son rôle fondamental dans le maintien de la paix.  Il est essentiel que la Cour puisse continuer à travailler dans une totale indépendance juridique et procédurale, a souligné M. Mendoza, ajoutant que la Cour doit pouvoir examiner les affaires dont elle est saisie, sans craindre pour son budget.  À cet égard, le représentant a remercié l’Assemblée d’avoir accordé les crédits nécessaires aux deux inspections que la Cour a pu effectuer sur le terrain dans l’affaire concernant le Costa Rica.  M. Mendoza a insisté sur le respect des décisions de la Cour et appelé l’Assemblée à réfléchir aux moyens d’assurer ce respect, essentiel à l’état de droit.

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a salué, encore une fois, une année d’intenses activités à la CIJ, alors que l’ordre juridique international semble en butte à de nombreuses épreuves, avec des défis fusant de tous côtés, certains causés par la conduite des États, d’autres, par des développements et des processus qui exigent une réflexion sur leur conformité avec les normes du droit international ou sur la nécessité ou pas d’adapter le droit pour s’y attaquer.  Dans un tel contexte, nous nous tournons vers la CIJ qui est l’un des piliers de la suprématie de l’état de droit dans les relations internationales.  La Cour doit rester un outil attractif pour le règlement des différends et, pour ce faire, elle doit conserver la haute qualité de son travail judiciaire et être pleinement appuyée par les États, a souligné la représentante.  Ayant elle-même saisi la Cour de la question de ses frontières maritimes et accepté sa juridiction obligatoire, la Roumanie, a conclu la représentante, est bien placée pour apprécier l’efficacité et l’équité de la Cour.  

Mme CHRISTINA HIOUREAS (Chypre) a constaté la charge de travail de la CIJ qui est la preuve de la confiance que les États placent en elle, une confiance réitérée dans la résolution 71/146 de l’Assemblée générale.  La représentante a rappelé que c’est pour marquer son respect que son pays a offert à la Cour, le 18 novembre 2016, la réplique d’une tête en calcaire retrouvée dans le sanctuaire d’Aphrodite à Arsos.

M. FRANCOIS ALABRUNE (France) a réaffirmé l’attachement de son pays au rôle de la CIJ en tant qu’organe judiciaire principal de l’ONU et noté la confiance des États dans l’office de la Cour et leur conviction que la contribution de cette dernière favorise l’apaisement dans leurs relations.  Le respect et la bonne exécution des décisions sont renforcés par leur très grande qualité, a souligné le représentant, invoquant, pour illustrer ses propres, la référence à la juridiction de la Cour par d’autres juridictions internationales.  Il a aussi salué la composition de la CIJ ainsi que l’usage de deux langues de travail.  Il a renouvelé aux juges, au Greffe et à l’ensemble du personnel, « la haute estime » de la France pour leur travail remarquable.  

M. KOCH (Allemagne) a évoqué la composition de la Cour, qui sera en partie renouvelée cette année, se disant convaincu que la représentation de la diversité des systèmes et des cultures contribue à la qualité de son travail.  Le représentant a rappelé que le consentement de l’État est la base de la compétence de la Cour et son efficacité, le respect de ses décisions.  La CIJ a la double compétence sur les contentieux et les avis consultatifs et il faut se garder d’en gommer les frontières.

M. TEODORO LOPEZ LOCSIN, JR (Philippines) a noté que sur les 193 États parties au Statut de la Cour, un peu plus d’un tiers, ou 72 États seulement y compris les Philippines, ont fait des déclarations reconnaissant la juridiction obligatoire.  Il a donc réitéré son appel au Conseil de sécurité pour qu’il examine plus sérieusement l’Article 96 de la Charte des Nations Unies et saisisse plus souvent la Cour sur l’interprétation des normes pertinentes du droit international.  Le Conseil de sécurité peut faire comme l’Assemblée générale qui, à travers la résolution 71/292, a demandé l’avis consultatif de la Cour sur les conséquences juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965.  M. Locsin, Jr a en outre réaffirmé l’importance de l’avis consultatif unanime de la CIJ du 8 juillet 1996 sur la « Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires ».  La CIJ a conclu, a rappelé le représentant, à une obligation de poursuivre de bonne foi et de mener à terme les négociations menant au désarmement nucléaire dans tous ses aspects sous un contrôle international strict et efficace.

M. CLAUDIO TRONCOSO REPETTO (Chili) a salué la mise à jour du site Internet de la Cour, qui permet une consultation large et détaillée de ses activités.  La Cour effectue un travail fondamental pour le respect du droit international, générant une jurisprudence utile, qui contribue à une meilleure connaissance du droit international applicable.  La confiance des États en l’intégrité, l’impartialité et l’indépendance de la Cour est essentielle pour l’acceptation du caractère obligatoire de sa juridiction.

Le Chili, a rappelé le représentant, est partie à deux affaires dont la Cour est saisie.  Il a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur du droit international, des relations de bon voisinage et du règlement pacifique des différends.  Un autre principe, a-il ajouté, est celui du respect des traités internationaux, « avec bonne foi et constance », lequel principe est une « condition essentielle » aux relations de bon voisinage.  Le droit international consacre ces relations et oblige les États à s’abstenir de toute conduite qui les affecterait, a dit le représentant qui a imputé à une telle conduite une des affaires pendantes à la CIJ.  Il a aussi tenu à souligner qu’une fois que la Cour est saisie, sa compétence devient exclusive.  Il a donc jugé « inacceptable » le recours simultané à d’autres instances ou à des forums politiques.

Mme VILAWAN MANGKLATANAKUL (Thaïlande) a regretté que la Cour se soit déclarée incompétente pour connaître des Obligations relatives à des négociations concernant la cessation de la course aux armes nucléaires et le désarmement nucléaire (Îles Marshall c. Inde), en l’absence de différend entre les parties.  Pour la Thaïlande, a-t-elle avoué, il s’agissait d’une occasion pour la Cour de se prononcer et d’offrir « certitude et prévisibilité » à l’interprétation de l’article 6 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  La Thaïlande, a poursuivi la représentante, juge très intéressante la question qu’a soulevée la Cour dans cette affaire, celle de savoir si oui ou non les votes des États Membres sur des résolutions présentées dans des organes politiques, comme l’Assemblée générale, peuvent indiquer l’existence d’un différend juridique entre les parties.  Une telle question mérite, a insisté la représentante, d’être examinée plus avant.  

La Thaïlande, a-t-elle dit, encourage l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et les autres organes et entités des Nations Unies à solliciter plus souvent les avis consultatifs de la Cour.  Elle a conclu sans oublier de plaider pour que le personnel de la CIJ bénéficie enfin d’un régime de pension et de remercier le Greffier pour être venu s’entretenir avec les jeunes juristes thaïlandais à Bangkok, l’année dernière. 

Soulignant le rôle « fondamental » de la Cour pour le règlement pacifique des différends, M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a jugé « indispensable » de rappeler que son travail vise à promouvoir et renforcer l’état de droit.  Il s’est, par conséquent, félicité de la diffusion de ses décisions et en a profité pour lancer un appel à l’utilisation de toutes les langues officielles des Nations Unies dans les publications de la Cour, afin d’en élargir la portée.  Revenant au dernier rapport de la CIJ, M. Skinner-Klée a relevé la diversité géographique des affaires, laquelle reflète le caractère universel de la juridiction du principal organe judiciaire des Nations Unies.  Quant à la diversité thématique, elle traduit le caractère général de la compétence de la Cour et, partant, la nécessité pour les États de renforcer la capacité, le budget, l’indépendance et le respect des décisions de la Cour.

M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) a souligné que les affaires traitées témoignent du dynamisme de la Cour et reflètent sa pertinence puisque les États continuent à la saisir pour régler leurs différends.  Le rapport, a-t-il poursuivi, reflète en outre le caractère universel de cet organe, au vu de la diversité régionale des affaires et de la gamme des affaires.  Le représentant a noté que le volume des activités de la Cour est « particulier et différent » des autres cours et tribunaux internationaux qui ont pour mandat d’être « dissuasifs », de prévenir les crimes ou autres types de violations, l’objectif ultime étant leur disparition.

En revanche, l’objectif ultime de la CIJ est que les États ne cessent jamais de la saisir; l’augmentation du nombre des affaires étant un symptôme rassurant du choix porté sur le règlement pacifique des différends au lieu de la confrontation, ce qui est toujours la meilleure solution.  Toutefois, a reconnu le représentant, il reste encore la question de l’exécution des arrêts, si l’on veut réellement rétablir ordre et légalité.  Le représentant a donc invoqué l’Article 94 (2) de la Charte en vertu duquel « si une partie à un litige ne satisfait pas aux obligations qui lui incombent en vertu d’un arrêt rendu par la Cour, l’autre partie peut recourir au Conseil de sécurité et celui-ci, s’il le juge nécessaire, peut faire des recommandations ou décider des mesures à prendre pour faire exécuter l’arrêt ».  Mais, a reconnu le représentant, les intérêts politiques rendent parfois le Conseil « inefficace et donc inopérant », ce qui peut générer une grande frustration chez les États qui ont décidé de soumettre, en toute bonne foi, leurs différends à la Cour.  Il a insisté sur le caractère « définitif et sans recours » des arrêts de la Cour, conformément à l’Article 60 de son Statut.

Le représentant a demandé aux États de reconnaître la juridiction obligatoire de la Cour et à aider cette dernière, en n’oubliant pas d’inclure dans les traités multilatéraux des clauses sur sa compétence, en reconnaissant son « forum prorogatum », en sollicitant ses avis consultatifs et en lui garantissant toutes les ressources nécessaires pour qu’elle puisse s’acquitter de son mandat.      

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a rappelé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales constitue un des objectifs les plus importants de l’ONU et a loué le principe de règlement pacifique des différends.  Pour que la Cour soit à même de régler un différend, les pays concernés doivent accepter sa juridiction, a-t-il souligné.  La juridiction unique de cette Cour et son caractère universel sont des éléments qui en font l’un des mécanismes préférés des États pour trancher les différends, a affirmé le représentant.

Il a jugé particulièrement important de soutenir les efforts déployés par l’ONU pour l’acceptation de la compétence universelle de la Cour.  À la différence des autres mécanismes de règlement des conflits, son champ ne se limite pas à un seul domaine du droit international, a poursuivi le représentant.  Elle prononce des arrêts qui font autorité et joue un grand rôle dans la promotion de l’état de droit.  Le représentant a plaidé à son tour pour que l’on renforce le rôle de la Cour.  Il a appelé l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité à solliciter plus souvent ses avis consultatifs à la CIJ et a exhorté les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter sa juridiction obligatoire.

Mme ANA EDELMIRA ROLÓN CANDIA (Paraguay) a rappelé que son pays célébrait le vingt et unième anniversaire du dépôt de la déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour, précisant que la seule limite à cette acceptation est la limite ratione temporis, renvoyant, à cet égard, à l’Article 36 (2) du Statut de la Cour.  Partageant l’expérience de son pays, qui remonte au Pacte de Bogota de 1948 énonçant l’interdiction de la menace ou de la force par toutes les parties contractantes, elle a salué tous les États qui, cette année, ont reconnu la juridiction obligatoire de la Cour et exhorté tous ceux qui ne l’ont pas encore fait à leur emboîter le pas.

Elle a plaidé pour que la Cour ait les ressources nécessaires à une bonne exécution de son mandat et a, en conclusion, cité les propos de Don Manuel Gondra qui, en 1924 à la cinquième Conférence panaméricaine, avait déclaré: « dans un conflit entre États, le faible et le fort peuvent tous deux avoir raison.  L’un a pour limite sa faiblesse et l’autre a pour moteur sa force.  Mais comme le plus fort n’a pas toujours raison, nous avons fait en sorte qu’il agisse toujours au moins avec justice ».

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a jugé préférable de ne saisir la Cour que des affaires importantes pour ne pas alourdir inutilement sa charge de travail avec des cas qui peuvent être résolus par d’autres moyens judiciaires et pacifiques.  Cette année encore, a confirmé le représentant, le Bangladesh se portera coauteur du projet de résolution sur le suivi de l’avis consultatif de la CIJ relatif à la légalité de la menace ou du recours aux armes nucléaires.  Il a plaidé pour que les Etats donnent à la Cour tous les moyens nécessaires à une bonne exécution de son mandat et s’est félicité du développement du site Internet de la Cour et de son recours accru aux nouvelles technologies de l’information et des communications face au volume et à la complexité de son travail.  Il a remercié la Cour de s’être ouverte aux jeunes et aux étudiants et lui a demandé de faire tout pour que les étudiants des pays en développement et des pays les moins avancés puissent y travailler. 

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a indiqué que son gouvernement vient de renouveler sa déclaration sur la juridiction obligatoire de la Cour, pour éliminer, dans toute la mesure du possible, les limites de la compétence de la Cour dans les contentieux impliquant son pays.  Notre seule réserve à la compétence de la Cour est la limite ratione temporis.  Les Pays-Bas accepteront ainsi tous les différends résultant de situations ou de faits qui ne remontent pas plus loin que 100 ans avant la saisine de la Cour.  Le délégué a encouragé les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter la juridiction obligatoire de la Cour, en faisant le moins de réserves possible.  Il s’est en effet dit préoccupé par la tendance à la multiplication des réserves et a invité les États concernés à reconsidérer leur position et à retirer autant de réserves que possible.

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a dit que l’indépendance et l’impartialité de la CIJ expliquent les multiplies saisines et posent une base solide pour assurer le respect de ses décisions.  Cette tendance est très encourageante, d’autant plus que le Conseil de sécurité est parfois incapable de prendre les décisions qui contribueraient à résoudre les conflits, en raison d’un exercice abusif du droit de veto.  L’Ukraine, a rappelé le délégué, a engagé une procédure devant la CIJ contre la Fédération de Russie concernant l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Le 19 avril de cette année, la Cour a rendu une ordonnance qui demande à la Fédération de Russie de « s’abstenir de maintenir ou d’imposer des limitations à la capacité de la communauté des Tatars de Crimée de conserver ses instances représentatives, y compris le majlis, et de faire en sorte de rendre disponible un enseignement en langue ukrainienne » et de « s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend dont la Cour est saisie ou d’en rendre la solution plus difficile ».

Il ne fait aucun doute que cette ordonnance joue un rôle important dans la prévention d’un préjudice « irréparable » de la part de la Fédération de Russie, a estimé le représentant qui a voulu que les Nations Unies examinent soigneusement les cas où les décisions de la CIJ ne sont pas respectées et trouvent les moyens d’obliger les États à les mettre en œuvre de bonne foi.

Le représentant a rappelé que la Conférence de San Francisco avait, à un moment, envisagé de qualifier d’acte d’« agression » le refus d’un État de se conformer à une décision de la Cour.  Il est revenu sur le rapport que le Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme a publié le 25 septembre dernier, qui parle de la grave détérioration de la situation des droits de l’homme en Crimée depuis le début de l’occupation russe et qui demande à la Fédération de Russie de mettre en œuvre la décision de la CIJ.  Or, six mois plus tard, rien n’a été fait, a dénoncé le représentant qui, à la lumière de cette situation, a présenté à la Troisième Commission un projet de résolution révisé sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol, occupées temporairement, en se fondant sur la résolution de l’année dernière et sur les recommandations pertinentes du Bureau du haut-Commissaire aux droits de l’homme.  Le représentant a demandé l’appui de tous les États Membres à ce nouveau projet de résolution.

M. HECTOR ENRIQUE CELARIÉ LANDAVERDE (El Salvador) a jugé impératif de rappeler que l’un des principes les plus importants du droit international réside dans l’obligation qu’ont tous les États de régler leurs différends par les moyens les plus pacifiques possible, notamment en s’en remettant à la CIJ.  Il a cependant constaté que malgré le Fonds d’affectation spéciale destiné à aider les États à porter leurs différends devant la Cour, tous les pays n’ont pas la même capacité de s’acquitter des coûts de plus en plus élevés qui rendent prohibitifs l’accès à la justice.  Il a voulu que l’on tienne compte de la situation des pays à faible revenu ou très endettés et de réfléchir à des mesures en leur faveur.

La CIJ, qui est confrontée à un surcroît de travail, mérite de travailler sans craindre pour son budget, a poursuivi le représentant.  Il a insisté pour une bonne représentation dans son personnel de tous les systèmes juridiques du monde, en veillant à l’égalité des sexes.  Il a aussi remarqué que sur le site Internet de la Cour, tout est affiché en en anglais et en français.  Il a préconisé l’utilisation des autres langues officielles de l’ONU pour mieux diffuser le travail de la Cour et le droit international auprès des fonctionnaires, des juristes, des avocats, des universitaires et des enseignants.  L’ONU a été conçue comme une organisation pour le maintien de la paix et de l’ordre dans le monde dont un des piliers fondamentaux est le règlement pacifique des différends par le biais de la CIJ, a souligné le représentant.  Il a rendu hommage à la Cour qui a célébré son soixante-dixième anniversaire et à son premier Président, le juriste et diplomate salvadorien, José Gustavo Guerrero.   

Mme MAYA DAGHER (Liban) a souligné le rôle majeur et prééminent de la CIJ dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales.  En tant qu’organe judiciaire principal de l’ONU, la Cour s’est évertuée, selon elle, à maintenir la primauté du droit et à consolider l’idéal de l’état de droit.  Le Liban reconnaît en outre l’apport essentiel de la Cour en ce qu’elle précise le contenu des principes fondamentaux du droit international et œuvre pour son développement.  Constatant l’accroissement du nombre de litiges dont est saisie la Cour, la représentante a estimé que cela était une marque de sa vitalité et de la confiance placée en elle par les États.

Elle a souligné l’importance pour le Liban de l’usage des deux langues -anglais et français- dans le travail de la Cour.  Ce qui la distingue, selon la représentante, est son caractère universel puisque tous les États Membres de l’ONU sont ipso facto parties à son Statut, d’où la nécessité d’avoir des juges « qui représentent toutes les grandes formes de civilisation et les principaux systèmes juridiques du monde », comme le prévoit l’Article 9 de son Statut.  La représentante a estimé qu’une Cour à la composition plus équilibrée serait une Cour qui gagnerait à la fois en légitimité et en efficacité.  C’est dans cette optique que le Liban, a-t-elle dit, présente la candidature de son Représentant permanent actuel, M. Nawaf Salam, à un siège de juge pour la période 2018-2027.

Sur la base du dernier rapport de la CIJ, M. SAMSON SUNDAY ITEGBOJE (Nigéria) a estimé que les gains d’efficacité ont permis à la Cour de faire face à un volume de travail croissant.  La diversité des affaires sur lesquelles elle a statué, entre août 2016 et juillet 2017, illustre le caractère universel et général de sa juridiction et sa pertinence en tant que principal organe judicaire des Nations Unies et mécanisme pour le règlement pacifique de différends.  Prenant note du fait que l’Assemblée générale avait demandé à la CIJ de donner un avis consultatif sur les conséquences légales de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965, le représentant a espéré que cet avis permettra de régler ce différend entre le Royaume-Uni et Maurice.  Il a salué le nouveau site Internet de la Cour qui répond mieux aux exigences du monde juridique, universitaire et diplomatique.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a déclaré que la juridiction universelle de la CIJ et le travail qu’elle a abattu, au cours de ces 71 années, équivalent à la « convocation permanente d’un dialogue entre États voisins » et un appel à privilégier, à tout moment, la paix au lieu de la force, de l’agression, de l’invasion et autres mesures unilatérales.  Le travail de la Cour est une composante majeure du maintien de la paix internationale.  Le représentant s’est félicité qu’après une longue période, la Cour ait repris ses fonctions consultatives.  Soulignant qu’elle va renouveler dans quelques jours le tiers de son corps de magistrats, le représentant a jugé fondamental que toutes les « grandes civilisations et principaux systèmes juridiques » y soient représentés, ce qui pour la Bolivie signifie une « répartition géographique équitable des juges ».  Ceci, a souligné le représentant, permettra à la CIJ de se mettre au service d’un droit international plus universel et plus dynamique, éloigné des deux systèmes eurocentristes.  Il a plaidé pour que la Cour ait des juges d’Amérique latine et pour qu’elle envisage d’introduire l’espagnol comme langue de travail.  Le représentant a aussi plaidé pour que la Cour ait le budget nécessaire à une bonne exécution de son mandat.  

M. V.D.SHARMA (Inde) a rappelé que, depuis sa création en 1946 à juillet 2017, la CIJ a été saisie de 168 affaires, qu’elle a prononcé 120 jugements et donné 27 avis consultatifs.  Le dernier rapport de la Cour illustre l’importance que les États lui attachent et la confiance qu’ils placent en elle.  Rappelant que la Cour est actuellement saisie d’une affaire concernant l’Inde, le représentant a salué les efforts de cette dernière pour sensibiliser au mieux l’opinion publique à ses décisions, que ce soit par ses publications, ses campagnes multimédias ou par son site Internet, lequel affiche désormais toute sa jurisprudence mais aussi celle de la Cour qui l’a précédée.  Tout ceci donne des informations utiles aux États qui veulent saisir la Cour, s’est réjoui le représentant.

M. CARLOS TRUJILLO (États-Unis) a constaté que les États se tournent de plus en plus vers la Cour ou vers d’autres tribunaux internationaux pour régler leurs différends.  La Cour s’est donc efforcée de devenir plus réactive, de renforcer son efficacité et d’affiner ses procédures et méthodes de travail afin de tenir le rythme des affaires présentées.  M. Trujillo a également remercié la Cour pour son travail de diffusion et de publication afin de sensibiliser des acteurs clefs de la société sur son rôle et de faire mieux comprendre le droit public international.

M. MAMADOU RACINE LY (Sénégal) a estimé que le moment est venu d’échanger sur la complémentarité et la belle harmonie dans l’exercice simultané par l’Assemblée générale et la Cour de leurs fonctions respectives au profit de la stabilité internationale.  Par sa jurisprudence, la Cour ne cesse de contribuer au développement du droit international, a ajouté la délégation, en même temps qu’elle éclaire et alimente la doctrine, participe à la vulgarisation de la science juridique en veillant à une large publicité de ses décisions.  Le représentant a rappelé que la crédibilité et l’efficacité du travail de la Cour seront fortement tributaires de sa capacité à prendre en compte, dans son fonctionnement, l’ensemble des systèmes juridiques.

Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a rappelé que son pays a soumis, dès 1994, sa déclaration de reconnaissance de la juridiction obligatoire de la Cour.  Après avoir révisé cette déclaration, compte tenu des nouveaux développements, la Grèce a décidé de renouveler sa confiance à la CIJ en soumettant une nouvelle déclaration en 2015.  La représentante a souligné la contribution de la Cour à la défense et à la promotion de l’état de droit, avant de s’attarder sur le rôle qu’elle peut jouer dans la prévention des conflits en facilitant la diplomatie préventive grâce aux avis consultatifs sollicités par les organes et les entités des Nations Unies.  Les avis consultatifs rendus par la Cour, bien que non contraignants et limités en nombre par rapport aux jugements sur les affaires contentieuses, ont été généralement reconnus pour leur poids juridique et leur autorité morale.  Toutefois, le recours à la fonction consultative de la Cour ne doit en aucun cas contourner le principe fondamental selon lequel aucune affaire ne peut être portée devant la Cour sans le consentement de l’État concerné. 

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a déclaré qu’étant l’un des organes principaux de l’ONU, la CIJ est l’organe chargé de dire le droit à tous les États Membres de l’ONU.  Pour cette raison, le rôle « fondamental » de la Cour dans le règlement pacifique des différends est précieux et ses arrêts font figure de référence dans le droit international.  Le représentant a souligné l’importance de la jurisprudence de la Cour, en matière de droit international, de droit international humanitaire et de droits de l’homme, laquelle jurisprudence prend également en considération les arrêts d’autres tribunaux comme la Cour interaméricaine des droits de l’homme.  À l’instar du Président de la CIJ, le représentant a estimé que cette démarche a favorisé l’évolution et le renforcement du droit international au cours des 20 dernières années.

Au niveau national, l’Uruguay, a dit le représentant, a incorporé la juridiction de la Cour dans les traités qu’il a ratifiés et respecté l’arrêt du 20 avril 2010 sur les « Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c. Uruguay) ».  Dans le même esprit, l’Uruguay reste fidèle à sa politique de défense des droits de la personne, comme l’a illustré l’affaire qui l’a opposé à la société Philips Morris qui a été tranchée par le Centre international de règlement des différends relatifs aux investissements.  

Mme ANET PINO RIVERO (Cuba) a reconnu le travail de la CIJ depuis sa création, et mis l’accent sur la « transcendance particulière » de ses arrêts et avis consultatifs pour les affaires qui lui sont soumises mais aussi pour le développement du droit international public.  Le volume des affaires dont elle est saisie, dont beaucoup émanent de la région d’Amérique latine et des Caraïbes, montrent bien l’importance qu’accorde la communauté internationale au règlement pacifique des différends, a-t-elle déclaré, en renvoyant à l’Article 33.1 de la Charte.  Elle a déploré, en revanche, les arrêts non exécutés, en violation flagrante de l’Article 94 de la Charte qui stipule que chaque membre des Nations Unies doit s’engager au respect de la décision de la CIJ dans tout différend dont il est partie.  Mme Pino Rivero a plaidé pour la nécessité de réformer l’ONU pour donner plus de garanties aux pays en développement face aux grandes puissances.  Elle a aussi jugé utile que la CIJ fasse un bilan critique de son travail et examine ses relations avec les organes des Nations Unies, notamment le Conseil de sécurité.

La représentante a souligné l’importance de l’avis consultatif unanime du 8 juillet 1996 sur la légalité de la menace ou l’emploi des armes nucléaires ainsi que celui du 9 juillet 2004 sur les conséquences juridiques de la construction d’un mur dans le territoire palestinien occupé.  Elle a lancé un appel à tous les États pour qu’ils respectent l’avis de la Cour sur cette dernière question, « très importante ».  Elle a en outre plaidé pour que l’on fournisse rapidement à la CIJ des ressources budgétaires suffisantes.  Les événements survenus ces dernières années montrent l’importance de la CIJ en tant qu’organe juridique international qui aide à régler, par des moyens pacifiques et en toute bonne foi, les différends qui ont un grand impact sur la communauté internationale, a conclu la représentante.      

M. MAJED BAMYA, observateur de l’État de la Palestine, a appuyé l’autonomisation de la CIJ, une autonomisation qui doit être une partie intégrante des efforts visant au respect des buts et principes de la Charte.  L’observateur a appelé tous les États à reconnaître la juridiction obligatoire de la Cour en tant que contribution importante au respect du droit international.  Tous les États et tous les organes des Nations Unies doivent respecter les décisions et avis de la CIJ, a-t-il insisté, avant de condamner le fait qu’Israël méprise et continue de violer le droit international, même après l’avis consultatif de 2004 dans lequel la Cour a déclaré « illégale » la construction du mur dans le territoire palestinien occupé, en ajoutant qu’elle pourrait constituer une annexion de facto, contraire au principe cardinal de l’inadmissibilité de l’acquisition de la terre par la force.

L’observateur a exhorté tous les pays à respecter leurs obligations au regard du droit international et à ne pas reconnaître la situation créée par ces mesures illégales, à faire la distinction entre le territoire occupé et le territoire de la Puissance occupante, à ne pas contribuer à des actes illégaux, et à tenir pour responsables les auteurs de ces violations et crimes.  L’État de Palestine, qui a décidé d’adhérer à tous les mécanismes judiciaires qui lui sont ouverts, salue le recours des États à la Cour internationale de Justice pour régler leurs différends, a conclu l’observateur en français.

Droits de réponse

Réagissant à l’intervention de l’Ukraine, le représentant de la Fédération de Russie a souligné qu’une réunion sur le rapport de la CIJ ne saurait être un bon format pour parler des affaires dont est saisie la Cour.  L’Ukraine s’est lancée dans une « propagande » pour présenter un « tableau très éloigné de la réalité », a dénoncé le représentant, ajoutant que, pour le comprendre, il suffit de lire les mesures conservatoires de l’ordonnance.  La Cour, a-t-il dit comprendre, n’a pas appuyé la demande de l’Ukraine ni sur l’occupation ni sur la situation des Tatars de Crimée.  La CIJ a demandé aux parties de travailler à la mise en œuvre de l’Accord de Minsk et, en ce qui concerne la discrimination raciale, elle n’a appuyé aucune des demandes conservatoires formulées par l’Ukraine.  Le représentant a fait observer que son pays a accueilli « avec respect » l’ordonnance de la Cour qu’elle a acceptée « dans son intégralité ».

Il a plutôt accusé l’Ukraine d’avoir adopté une loi qui a toutes les allures d’une discrimination linguistique, foulant aux pieds les droits des minorités, ce qui est « encore pire qu’au temps de l’URSS ».  Ce n’est pas seulement la faute de Kiev mais aussi celle des pays qui continuent à appuyer sa politique néfaste, a tranché le représentant, en appelant les délégations à y réfléchir.

Se disant étonné de cette intervention qui n’a rien d’un droit de réponse mais tout d’une déclaration générale, preuve du mépris porté à la Cour, le représentant de l’Ukraine a nié avoir fait mention de l’affaire citée par la Fédération de Russie et à la Convention sur le financement du terrorisme pour le Donbass.  Nous n’avons parlé que de la Crimée, a-t-il dit, arguant que le Président de la CIJ a lui-même consacré près de 15 minutes à la description de l’affaire présentée par l’Ukraine contre la Fédération de Russie.  Il est clair que l’occupation temporaire et la tentative d’annexer la Crimée ainsi que les mesures prises dans le Donbass ressemblent fort à un acte d’agression, selon les résolutions de l’Assemblée générale.  La responsabilité pénale des dirigeants russes est engagée, a dit le représentant, en demandant à la Fédération de Russie de cesser ses actes illégaux et de réparer les dégâts qu’elle a causés.

Il l’a aussi exhortée à mettre en œuvre, sans condition, l’ordonnance de la Cour ainsi que les recommandations du Conseil des droits de l’homme.  Il a insisté sur la demande de la Cour visant à ce que la Fédération de Russie s’abstienne de prendre des mesures susceptibles d’aggraver le différend.

Le représentant de la Fédération de Russie a critiqué les sous-entendus « accusatoires » de l’Ukraine.  Le représentant n’a pas voulu rappeler la « position bien connue » de son pays et a préféré dire à l’Ukraine que les décisions de la Cour lui sont également applicables.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: deux hauts responsables de l’ONU exhortent le Soudan et le Soudan du Sud à progresser vers un accord definitif sur la question d’Abyei

8078e séance – après-midi
CS/13043

Conseil de sécurité: deux hauts responsables de l’ONU exhortent le Soudan et le Soudan du Sud à progresser vers un accord definitif sur la question d’Abyei

Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité du Département des opérations de maintien de la paix, M. Alexandre Zouev, et l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Soudan et le Soudan du Sud,  M. Nicholas Haysom, ont exhorté, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, ces deux pays à progresser dans la mise en œuvre des accords qu’ils ont signés sur la région frontalière contestée d’Abyei, afin d’ouvrir la voie à un accord définitif et à une normalisation de leurs relations. 

Présentant le dernier rapport* du Secrétaire général sur la situation à Abyei, le Sous-Secrétaire général à l’état de droit a détaillé les tendances qui continuent de marquer ce conflit.  « Le différend entre les Misseriya et les Ngok Dinka sur la question de l’accès aux pâturages et à l’eau lors de la migration annuelle des Misseriya reste une source récurrente de conflit », a-t-il dit. 

Il a néanmoins souligné l’efficacité de la stratégie de prévention et d’atténuation du conflit de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), qui a notamment permis le retour de 15 000 réfugiés ngok dinka.  Par son engagement proactif, la mission a également permis une diminution de la violence autour du marché commun d’Amiet. 

Le Sous-Secrétaire général a également pointé la situation économique difficile de la zone d’Abyei, ainsi que la présence de groupes armés qui risque à tout moment d’attiser les tensions entre les deux populations.  « Alors que la mission a permis de préserver la paix et la stabilité dans la zone, les tensions intercommunautaires persistent en l’absence de progrès dans la mise en œuvre de l’Accord du 20 juin 2011 », a-t-il déclaré.  Les divergences de vues entravent la mise en place des institutions mixtes prévues par cet accord.  Comme l’explique le Secrétaire général dans son rapport, le Soudan et le Soudan du Sud ont en effet des « positions diamétralement opposées » sur la manière de régler la question d’Abyei. 

Le Gouvernement soudanais et les Misseriya insistent sur une représentation égale à leurs homologues ngok dinka dans la zone d’Abyei, tandis que le Gouvernement sud-soudanais et les responsables de la communauté ngok dinka y sont opposés, écrit le Secrétaire général. 

Par ailleurs, le Soudan continue d’affirmer que l’établissement des institutions mixtes prévu par l’Accord du 20 juin 2011 est la seule voie à suivre alors que le Soudan du Sud conteste leur utilité, invoquant que les délais fixés pour leur mise en place sont dépassés. 

Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit a ainsi expliqué que, six ans après sa création, la capacité opérationnelle du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière n’avait pas évolué.  L’Accord du 30 juillet 2011 portait en effet création d’une mission de vérification et de surveillance de la frontière qui, après la signature de l’Accord sur les dispositions de sécurité le 27 septembre 2012, est devenue opérationnelle sous le nom de Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière. 

Malgré l’absence d’évolution, les deux pays comme l’Union africaine estiment néanmoins que le Mécanisme est un élément indispensable pour assurer la sécurité des frontières et faciliter leur abornement, a poursuivi le Sous-Secrétaire général.  Il en a voulu pour preuve la lettre conjointe du 23 septembre 2017 adressée par le Soudan et le Soudan du Sud au Conseil de sécurité pour demander que l’ONU continue d’apporter son concours au Mécanisme. 

La présence sur le terrain du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière permettrait, selon le Secrétaire général, d’abord de renforcer la confiance dans le processus de marquage des points de passage et, dans un deuxième temps, de mettre en place des postes d’immigration à des endroits convenus en vue de normaliser les relations entre les deux pays.

Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit a rappelé les conditions fixées par le Conseil en vue d’une pleine capacité opérationnelle dudit mécanisme, à savoir le règlement du différend concernant la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, la reprise des discussions au sujet de la démarcation de la frontière, la tenue régulière de réunions du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, et l’assurance d’une complète liberté de circulation pour les opérations du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière.

Les discussions sur la démarcation de la frontière n’ont toujours pas repris et l’Union africaine n’a pas reçu les documents nécessaires pour achever d’élaborer son avis contraignant sur les zones contestées et revendiquées de la frontière, a regretté le Sous-Secrétaire général.  « Fait positif, les deux parties ont accepté de participer à une opération de marquage de quatre sites temporaires d’observation dans la zone frontalière démilitarisée et sécurisé », a-t-il relevé. 

Il a en revanche souligné les « progrès extraordinaires » en vue d’assurer une complète liberté de circulation dans le cadre des opérations du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière.  « L’héliport de Gok Machar est maintenant pleinement opérationnel et des procédures accélérées ont été mises en place pour les autorisations de vol des patrouilles aériennes menées par le Mécanisme », a-t-il dit. 

Enfin, le Sous-Secrétaire général a rappelé que l’opérationnalisation du Mécanisme conjoint de surveillance et de la frontière dépendait de la bonne volonté des deux parties et de la satisfaction des critères précités.  Ce mécanisme est crucial pour restaurer la confiance, a-t-il conclu.  Même son de cloche du côté de l’Envoyé spécial, pour qui « ce mécanisme, s’il est correctement mis en œuvre, peut aider à prévenir les violations et les incursions de part et d’autre de la frontière ». 

Les conflits internes au Soudan et au Soudan du Sud, associés au manque de confiance entre les deux pays, ont continué d’entraver cette mise en œuvre et la normalisation de leurs relations bilatérales, a-t-il analysé.  Selon le haut fonctionnaire, la surveillance de la frontière demeure cruciale pour les efforts de paix dans la mesure où cette frontière a le potentiel de cristalliser les tensions militaires entre Khartoum et Djouba.  Il a déploré que la réunion entre les Présidents soudanais et sud-soudanais sur la mise en œuvre des Accords de coopération de 2012 n’ait pas eu lieu. 

En dépit de progrès limités sur le plan sécuritaire, les deux gouvernements ont manifesté de plus en plus d’intérêt pour une coopération bilatérale dans le secteur pétrolier, comme en témoigne l’accord conclu en septembre pour reprendre la production dans l’État sud-soudanais d’Unité, interrompue par les hostilités depuis 2013. 

S’exprimant à son tour, le délégué du Soudan, M. Omer Dahab Fadl Mohamed, a confirmé l’engagement de son pays en faveur de la mise en œuvre des accords signés avec le Soudan du Sud.  Les Accords de 2012 ont jeté des bases solides pour les relations de nos deux pays, a-t-il dit.  « Cependant, l’absence d’enthousiasme du Soudan du Sud dans la mise en œuvre de tous les aspects de cette coopération, à l’exception du pétrole, n’a pas permis de progrès. »

Le représentant a estimé que la résolution des questions sécuritaires devait précéder celle des questions économiques, avant de souligner l’importance de la pleine opérationnalisation du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière en vue de normaliser les relations avec le Soudan du Sud, « pays frère ».  La poursuite du plein appui de la FISNUA à cette fin est cruciale, a-t-il conclu. 

« Soyons réalistes », a dit le représentant du Soudan du Sud, M. Akuei Bona Malwal.  Il nous faut reconnaître qu’il existe de sérieuses divergences de vues entre les deux pays.  Il a néanmoins réitéré la volonté de son pays à s’engager avec le Soudan dans des efforts renouvelés pour trouver une solution agréée à la question d’Abyei.  Le délégué a également appelé la communauté internationale à continuer de fournir certains services sociaux et humanitaires, afin de consolider les acquis obtenus grâces aux Casques bleus éthiopiens de la FISNUA. 

L’avenir de la mission a été abondamment évoqué lors de ce débat: le Sous-Secrétaire général s’est dit favorable à une prorogation de son mandat pour une période de six mois, tandis que l’Envoyé spécial du Secrétaire général, qui a jugé « peu élevé » le risque de voir les deux pays retomber dans un conflit, a plaidé pour son renforcement. 

Le délégué de l’Uruguay, M. Luis Bermúdez, a affirmé que l’avenir de cette mission était entre les seules mains des gouvernements des deux pays et dépendait de la mise en œuvre des accords signés.  Son homologue bolivien, M. Sacha Sergio Llorentty Solíz, a souhaité que le sommet entre les présidents de ces deux pays se tienne dans les meilleurs délais. 

* S/2017/870

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Désarmement nucléaire: les délégations de la Première Commission expriment leurs profondes divergences

Soixante-douzième session,
23e séance – après-midi
AG/DSI/3589

Désarmement nucléaire: les délégations de la Première Commission expriment leurs profondes divergences

La Première Commission a débattu, cet après-midi, du mécanisme onusien de désarmement, en réitérant, comme hier, son appel à la revitalisation de la Conférence du désarmement, unique instance multilatérale de la communauté internationale pour les négociations sur le désarmement.  Les délégations ont également exprimé leurs profondes divergences de vue, en particulier sur deux projets de résolution sur les armes nucléaires, lesquels, faute de temps, n’ont pas pu être adoptés.  En tout, ce sont 20 projets de résolution sur ces armes qui doivent être approuvés par la Première Commission avant d’être entérinés en plénière par l’Assemblée générale. 

Concernant l’impasse dans laquelle la Conférence du désarmement se trouve depuis deux décennies, le représentant du Mexique a estimé qu’il fallait profiter du dynamisme des discussions en cours à Genève, en particulier celles conduites par le groupe de travail dit de la voie à suivre, « pour faire notre autocritique et avancer dans l’élaboration d’un programme de travail équilibré et complet de la Conférence », a-t-il déclaré.  À ses yeux, « le vide actuel à la Conférence du désarmement est dû au manque de volonté politique de ses membres, et à une conception particulière du consensus, considérée à tort comme un impératif ».  Notant que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, adopté le 7 juillet dernier, a pu être négocié avec succès en dehors du cadre du mécanisme onusien de désarmement, cela avec la participation de la société civile, la délégation mexicaine a notamment plaidé pour un élargissement de la composition de la Conférence du désarmement et d’une inclusion citoyenne à ses délibérations.  

Commentant l’évolution du mécanisme de désarmement de l’ONU, constitué de la Conférence du désarmement, de la Commission du désarmement et de la Première Commission, le représentant de l’Équateur s’est pour sa part inquiété de ce que « la répartition des rôles de négociation et de délibération à Genève et à New York » ne soit pas clairement respectée.  Il a en outre déploré que « le discrédit qui plane sur le consensus provient de ce que cette règle est utilisée et conçue comme une forme de veto universel ». 

Cette même délégation de l’Équateur a en outre critiqué avec véhémence un projet de résolution intitulé « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires ».  Pour le représentant équatorien, la version 2017 de ce texte, adoptée habituellement par consensus, est lacunaire car la priorité devant être accordée au désarmement nucléaire n’y est plus réaffirmée.  Ce pays, comme l’Afrique du Sud, a également déploré que l’appel à l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) soit affaibli par le retrait du texte traditionnel de la mention des huit États devant le ratifier pour qu’il devienne opérationnel.  

Les délégués équatorien et sud-africain ont ainsi annoncé leur opposition au projet de résolution, estimant de surcroît que ce texte édulcore les accords consensuels issus des conférences d’examen du TNP et exprime la tendance des États dotés d’armes nucléaires à réinterpréter les obligations du titre et à assortir de conditions leur mise en œuvre.  « Au fond, c’est comme si ce texte imputait la responsabilité de l’absence de progrès en matière d’élimination des armes nucléaires à ceux qui n’en possèdent pas », a résumé le représentant équatorien.  

Le projet de résolution « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire » a également été longuement commenté par les représentants d’États Membres.  L’Autriche, rappelant que c’était la version 2016 de ce texte qui, l’an dernier, avait « donné un mandat au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en juillet dernier », a affirmé que le projet de résolution n’interférait en rien dans la mise en œuvre du TNP: « au contraire, en rappelant la nécessité d’appliquer l’Article du Traité, il la complète », a-t-il affirmé, appelant les États Membres à admettre que ce traité fasse partie du mécanisme onusien de désarmement. 

Les délégations des États-Unis et de la Fédération de Russie ont estimé, à l’inverse, que l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires sapait bien le régime instauré par le TNP, en cela qu’il ne créé pas de droit coutumier en matière de désarmement et parce qu’il n’a pas été négocié avec la participation des cinq plus importants États dotés d’armes nucléaires.  Par conséquent, ces pays ont annoncé qu’ils ne soutiendraient pas ce projet de résolution qui « réaffirme que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est une contribution essentielle au désarmement nucléaire. » 

Le représentant de la Fédération de Russie a en outre observé que toutes les résolutions sur les armes nucléaires formaient un tableau assez sombre.  Le consensus fait l’objet d’un morcellement, a-t-il dit, et la course aux armements avait été remplacée par une profusion de projets de résolution sur le désarmement nucléaire. 

La Commission poursuivra ses travaux, vendredi 27 octobre, à 15 heures.

QUESTIONS À L’ORDRE DU JOUR ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DEPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Suite du débat thématique sur le mécanisme de désarmement

M. AHMED NOURI SALIMI (Maroc) a jugé que la situation actuelle justifiait d’un besoin pressant de revitalisation du mécanisme de désarmement, citant notamment la Conférence du désarmement, « unique instance pour faire avancer le désarmement au bénéfice de tous ».  Selon lui, l’impasse où se trouve cet organe contraste avec les nouveaux défis sécuritaires et va à contre-sens de la récente adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Il a constaté que les défis de prolifération continuent d’exister et a appelé les États à faire preuve de volonté politique.  Le Maroc s’est à cet égard félicité de l’adoption, à la Commission du désarmement, de 14 recommandations sur les mesures de rétablissement de la confiance dans le domaine des armes classiques.  Il a conclu en saluant l’apport des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, notamment celui du Centre africain qui est, selon lui, un centre d’expertise reconnu pour ses activités continentales.  Il a appelé les Nations Unies à le soutenir financièrement et matériellement pour qu’il puisse mener à bien toutes ses missions.

M. IBRAHIM F M A A ALDAI (Koweït) a considéré que le multilatéralisme était la meilleure méthode pour aboutir au désarmement.  Il a appelé l’ensemble des États Membres à poursuivre leurs efforts et à renforcer leur volonté politique pour aboutir à un monde sans armes de destruction massive.  Il a déploré à cet égard l’absence de progrès à la Conférence du désarmement.  « Tous les Membres doivent mettre fin à l’impasse », a-t-il exhorté.  Souhaitant voir redémarrer le mécanisme de désarmement au plus tôt, le Koweït s’est en revanche félicité des avancées relatives à l’organisation de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement.  Il a espéré que tous les États Membres sauront se mettre d’accord sur ses objectifs 

M. HTIN LYNN (Myanmar) a souligné que son pays avait présidé le groupe de travail sur la voie à suivre au cours de la session 2017 de la Conférence du désarmement, estimant que ce groupe représente un pas dans la bonne direction devant mener à la revitalisation de la Conférence.  Il a indiqué que les participants avaient eu des discussions de fond sur tous les points à l’ordre du jour de la Conférence du désarmement.  Selon lui, le format de discussion, dit de prénégociation, est utile pour contribuer de manière significative au rapprochement des États Membres de la Conférence, « qui doivent surmonter leurs divergences de vues ».  La quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le désarmement, a-t-il aussi dit, permettra d’examiner de manière approfondie le fonctionnement et l’efficacité du mécanisme onusien de désarmement, et de se pencher sur les défis émergents, y compris la cybersécurité et les systèmes d’armes létales autonomes, et la manière d’y répondre dans le cadre du désarmement de demain.

M. JULIO HERRÁIZ (Espagne) a affirmé que son pays partageait les sentiments « d’insatisfaction », de « frustration » et de « lassitude » relayés, de façon récurrente, par de nombreuses délégations, face au manque d’ambition et d’efficacité des solutions proposées par la Première Commission en matière de mécanisme de désarmement.  Tout en appelant cette commission à ne pas se laisser aller à « l’autosatisfaction », M. Herráiz a estimé que seule une démarche « critique et novatrice », basée sur le dialogue, permettrait d’aboutir à des propositions « constructives » et « réalistes ».  En tant que présidente, cette année, de la Conférence du désarmement, l’Espagne a selon lui été en mesure de parvenir à un consensus lors de l’adoption du rapport final de la Conférence, en dépit des divergences entre États.  Toutefois, M. Herráiz a tenu à rappeler que l’échange de points de vue divergents est consubstantiel au processus de négociation des traités dans le cadre de la Conférence.  Tout en reconnaissant, enfin, le stade avancé des discussions en cours sur l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles pour des armes nucléaires ou d’autres dispositifs explosifs nucléaires, le représentant a appelé la Conférence du désarmement à ne pas perdre de vue les solutions basées sur le renforcement des garanties de sécurité négatives.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a salué l’adoption, par la Commission du désarmement, de recommandations sur les armes classiques ainsi que la qualité et l’intérêt des discussions à la Conférence du désarmement au cours de sa session 2017.  Il faut profiter des dynamiques en cours pour, à Genève, faire notre autocritique et avancer dans l’élaboration d’un programme de travail équilibré et complet, a-t-il ajouté.  Il a estimé que le vide actuel à la Conférence du désarmement est dû au manque de volonté politique de ses membres, et à une conception particulière du consensus, considéré à tort comme un impératif.  Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires a pu être négocié avec succès en dehors du cadre strict du mécanisme onusien de désarmement, a-t-il fait observer.  À cette aune, il a plaidé pour un élargissement de la composition de la Conférence du désarmement et d’une inclusion, à ses délibérations, de la société civile.

La représentante de l’Argentine a présenté brièvement le rapport de la Commission du désarmement.  Elle a salué les recommandations du groupe de travail, estimant que le groupe avait eu des discussions approfondies sur l’ordre du jour qui lui a été confié.  Saluant le consensus qui a présidé pendant ses travaux, elle a espéré que ce rapport sera lui aussi adopté par consensus.  « C’est ce que nous offre le multilatéralisme, il nous offre le compromis », a-t-elle lancé.  

Poursuivant au nom de son pays, la déléguée a ensuite réitéré son engagement envers le désarmement et salué les réalisations qui ont découlé du mécanisme, notamment la Convention sur les armes chimiques et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Elle y a vu la preuve que la communauté internationale peut avancer quand elle fait preuve de volonté politique.  L’Argentine s’est aussi félicitée des efforts pour revitaliser la Conférence du désarmement.

M. VLADIMIR YERMAKOV (Fédération de Russie) a affirmé que le projet de son pays d’élaborer, à la Conférence du désarmement, une convention internationale pour combattre les actes terroristes chimiques et biologiques avait pour unique but de compléter le cadre juridique du contreterrorisme en lien avec les armes de destruction massive.  Notre projet de programme de travail de la Conférence du désarmement, qui combine les prénégociations sur ce traité et la poursuite de discussions du désarmement nucléaire sous divers aspects, reste sur la table, a-t-il ajouté.  Il a rappelé que la tâche de chaque membre de la Conférence était de trouver une issue à l’impasse qui entrave ses travaux depuis deux décennies et cela en surmontant les divergences de vues.  Il a considéré que les progrès enregistrés à la Commission du désarmement en 2017 étaient des signes encourageants que, bientôt, la Commission sera en mesure d’exploiter pleinement son potentiel d’organe délibérant.  Le mécanisme onusien de désarmement est loin d’avoir épuisé tout son potentiel a-t-il affirmé, assurant que son pays restait prêt à discuter de tout l’éventail des questions de désarmement à New York comme à Genève.

M. DAVISON (Canada), au nom d’un groupe d’États, a déclaré que si l’on accepte que la paix et la sécurité internationale sont une tâche qui doit être partagée par tous, ce qui est un principe de base du multilatéralisme, il importe de reconnaître que plus doit être fait pour encourager la participation des femmes au mécanisme onusien de désarmement.  Les organisations internationales doivent représenter la société dans son ensemble, a-t-il dit, et il faut garder à l’esprit que le traitement des questions de désarmement dépend de la nature de la participation à cet effort partagé.  À l’instar de son homologue irlandais, le représentant a estimé que tous les instruments de désarmement devaient inclure des perspectives de genre.

Mme KEANE (Irlande) a salué la reconnaissance d’une participation égale, pleine et entière des femmes et des hommes dans l’élaboration et la mise en œuvre du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Nous saluons aussi que le Traité reconnaisse l’impact sexospécifique des armes nucléaires, a-t-elle ajouté.  La représentante a expliqué que son pays avait présenté un document de travail sur le genre, le développement et les armes nucléaires en mai dernier, dans le cadre des discussions tenues par le Comité préparatoire du Traité.  Elle a souhaité que le traitement de ce thème soit enrichi par la participation de la société civile lors de la prochaine réunion du Comité préparatoire.  Pour la déléguée irlandaise, la participation accrue des femmes dans les différentes enceintes de désarmement fournirait des perspectives nouvelles et injecterait un nouvel élan dans les processus en cours de négociation et d’examen des principaux instruments multilatéraux.

M. BAKHSHI (République islamique d’Iran) a rappelé que la Commission du désarmement et la Conférence du désarmement ont donné naissance à des instruments universels qui ont fait date.  Selon lui, le mécanisme de désarmement n’est pas directement responsable des impasses qu’il rencontre.  « Il y a des tentatives continues de masquer la nature politique des blocages -notamment à la Conférence du désarmement- derrière des questions techniques », a-t-il assuré, avant de lancer que même le meilleur mécanisme de désarmement n’arriverait à rien en l’absence de volonté politique.  Pointant « certains États dotés et leurs défenseurs », il a estimé que s’ils mettaient de côté leur inflexibilité, le mécanisme ferait de nouveau la preuve de son efficacité.  À ses yeux, le contraste entre l’adoption, à la Commission du désarmement, de recommandations sur des mesures concrètes de renforcement de la confiance en matière d’armes classiques grâce à la souplesse des pays non alignés, et l’absence de progrès sur le désarmement nucléaire causée par la « position inflexible » de certains pays dotés, souligne bien l’importance de la volonté politique dans ce mécanisme.  Constatant que la revitalisation du mécanisme est un objectif partagé par tous, il a appelé les États dotés à faire preuve de souplesse pour permettre à ce mécanisme de respecter son mandat.

Saluant par ailleurs l’adoption récente du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, il a plaidé pour l’organisation rapide, au sein de la Conférence du désarmement, d’une convention sur les armes nucléaires.  Il a enfin soutenu la position des pays non-alignés sur le principe d’une répartition géographique équitable au sein du Bureau des affaires de désarmement de l’ONU et a exhorté le Secrétaire général de prendre des décisions concrètes à ce sujet. 

M. DELFINA JANE ALOYSIUS DRIS (Malaisie) a présenté le projet de résolution L.57 sur la suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, en soulignant la nécessité impérieuse que les pays mettent en œuvre l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) relatif notamment à l’élimination de leurs arsenaux.  Cette demande, a-t-elle indiqué, est réitérée dans l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice qui souligne également qu’il existe une obligation de poursuivre de bonne foi et de mener à terme des négociations conduisant au désarmement nucléaire sous tous ses aspects, assorti d’un contrôle international strict et efficace.  Ce point est rappelé dans le texte du projet L.57, a précisé la déléguée. 

M. FERNANDO LUQUE MÁRQUEZ (Équateur) s’est félicité des progrès réalisés cette année par la Commission du désarmement sur les armes classiques, ainsi qu’à la Conférence du désarmement, qui a abordé des questions de fond dans le cadre du groupe de travail sur la voie à suivre.  Pour lui, la session actuelle de la Première Commission est riche de discussions sur des questions émergentes.  Il a toutefois noté que la répartition des rôles de négociation et de délibération à Genève et à New York n’est pas claire.  Il a également constaté que le discrédit qui plane sur le consensus provient de ce que cette règle est utilisée et conçue comme une forme de veto universel.  

DÉCISIONS SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Armes nucléaires

Déclarations avant les votes

Le représentant du Kazakhstan, au sujet du projet de résolution L.36, a rappelé que la résolution 6435 avait été adoptée à l’unanimité et que par là, tous les pays ont exprimé qu’il n’existait pas d’avenir pour les essais nucléaires sur cette planète.  Selon lui, mettre fin aux essais nucléaires est une préoccupation commune pour tous les États Membres.  Il a appelé à « prendre soin les uns des autres et de cette précieuse planète ».

La représentante de la Belgique a appelé à trouver une voie réaliste vers un monde sans armes nucléaires.  Assurant qu’elle partage la frustration quant à l’absence d’efforts des États dotés de l’arme nucléaire, elle a toutefois estimé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ne pourra pas être efficace puisqu’il n’a pas reçu l’appui des pays dotés et ne propose pas de plan clair sur la non-prolifération.

Le représentant de l’Union européenne (UE) a réaffirmé son ferme engagement quant à l’édification d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient et a regretté que la réunion de 2012 n’ait pas pu être organisée.  Souhaitant une réunion sur le sujet à laquelle tous les États parties auraient leur place, l’UE a ensuite rappelé sa contribution à l’établissement de cette zone via des réunions, des séminaires et l’envoi d’un envoyé spécial qui s’est réuni avec le Groupes des sages de la Ligue arabe.

Le représentant du Pakistan a voulu présenter un amendement oral au paragraphe 1 du projet de résolution L.10 rev.1 sur les garanties négatives de sécurité.

Le représentant de Singapour a déclaré que seule l’élimination complète des armes nucléaires permettra d’avancer sur la voie du désarmement nucléaire, précisant que sa délégation appuierait les projets de résolution qui se réfèrent au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Il a jouté que la mise en œuvre de cet instrument ne doit altérer en rien la mise en œuvre pleine et entière des autres instruments en vigueur ainsi que des négociations à la Conférence du désarmement sur de nouveaux instruments multilatéraux.

Le représentant de l’Autriche a appuyé le projet de résolution L.5 sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires, en rappelant que ce texte était basé sur la Déclaration conjointe de 120 pays à l’issue de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) de 2005.  Il a également appuyé le projet de résolution L.6 intitulé « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », coparrainé par 57 pays « et qui a donné l’an dernier un mandat au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en juillet dernier ».  Ce traité est notamment une contribution à la mise en œuvre de l’Article VI du TNP, il n’interfère donc en rien dans la mise en œuvre de ce dernier, a ajouté le représentant pour qui il convient d’admettre que ce traité fait partie du mécanisme onusien de désarmement.

La représentante de la France a récusé tout lien entre les instruments de désarmement en vigueur et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires figurant dans les projets de résolution L.1, L.22 et L.47.  

Le représentant des Pays-Bas a réaffirmé l’engagement de son pays à faire progresser la réalisation de l’objectif commun d’un monde sans armes nucléaires.  Des mesures efficaces et tenant compte de l’environnement sécuritaire actuel sont nécessaires, a-t-il dit. 

Le représentant de l’Allemagne a rappelé à son tour l’attachement de son pays à la réalisation de cet objectif, sachant qu’une détonation nucléaire aurait des conséquences irréversibles sur l’environnement terrestre.  Toutefois, même si le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est soucieux de ce risque, nous n’avons pas soutenu ce projet, « car il n’y a pas de raccourci possible pour mener à un monde sans armes nucléaires ».  Il a appelé à réaliser des progrès tangibles sur la base d’une approche progressive et concrète.  Cela passe par l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et des résultats vers l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles et d’un instrument sur les garanties négatives de sécurité au sein d’une conférence du désarmement revitalisée, a-t-il dit. 

Le représentant du Royaume-Uni a soutenu la résolution de 1995 sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Il a rappelé que le Royaume-Uni a invité des États de la région ainsi que d’autres États concernés notamment des pays arabes.  Hélas, a-t-il déploré, ça n’a pas été suffisant pour arriver à la création de cette zone.  Il a appelé la communauté internationale à faire preuve d’imagination pour surmonter les différents entourant la création de cette zone.  Il a enfin mentionné que son pays n’acceptait pas que le préambule de la résolution L.1 soit ajouté au début du récent Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a rappelé que l’élimination totale des armes nucléaires était la priorité numéro un et a appelé les États non dotés à montrer la voie et d’utiliser tous les moyens pour y arriver.  À propos du projet de résolution L.4, qui porte suivi des obligations en matière de désarmement nucléaire, le représentant a précisé que cette année le texte a été mis à jour de façon technique et ne comprend pas de changements substantiels.  

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) s’est exprimé contre les projets de résolution L.7, L.19  et L.35 qui vont selon lui à l’encontre des intérêts de son pays.  Il a estimé qu’il y avait un paragraphe inacceptable dans le projet de résolution L.35 concernant le droit au nucléaire.  Il a soutenu que ce paragraphe ne prend pas en compte les menaces existentielles que les États-Unis font peser sur la République populaire démocratique de Corée.  Il a rappelé que cette menace était la raison d’être du programme nucléaire de son pays.  Il a aussi reproché au Japon de chercher, avec cette résolution, une excuse pour renforcer sa puissance militaire.  

La représentante d’Israël a annoncé que son pays voterait contre le projet de résolution L.6, « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », son pays n’ayant pas participé aux négociations sur le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Cette initiative nous inspire de grandes réserves sur le fond et la forme, en ceci notamment que ce traité ne tient pas réellement compte des enjeux sécuritaires régionaux, a-t-elle indiqué, constatant par ailleurs que cet instrument n’est pas créateur de droit.  

La représentante de Cuba a indiqué que son pays appuyait les projets de L.46, L.18, L.74, L.10, L.22 et L.57, dont il s’est porté coauteur.  Elle a notamment souligné la nécessité de mettre pleinement en œuvre le projet de résolution L.10, demandant la conclusion d’arrangements internationaux efficaces visant à garantir les États non dotés d’armes nucléaires contre l’emploi ou la menace d’emploi de ces armes « tant que nous n’aurons pas réalisé le désarmement nucléaire ».  Elle a également soutenu la création de zones exemptes d’armes nucléaires partout dans le monde, et plaidé en faveur de l’élaboration d’une convention sur l’interdiction de l’utilisation des armes nucléaires au sein de la Conférence du désarmement.  La réduction du danger nucléaire est également une nécessité tant que les armes concernées existeront, a aussi signalé la représentante.

Le représentant de la Fédération de Russie a observé que toutes les résolutions sur les armes nucléaires formaient un tableau assez sombre.  Le consensus fait l’objet d’un morcellement, a-t-il dit, notant que la course aux armements avait été remplacée par une profusion de projets de résolution sur le désarmement nucléaire.  Ces textes, dans la pratique, sont inacceptables, a-t-il estimé, estimant que les efforts vers le désarmement nucléaire n’était pas simple « dans les faits » à mettre en œuvre.  La Russie, depuis sa victoire à l’issue de la Second Guerre mondiale, œuvre au désarmement nucléaire, a indiqué le délégué.  Notre but était déjà de dissuader l’emploi des armes nucléaires, a-t-il dit, soulignant l’importance de ne jamais oublier les leçons de l’histoire et le temps pris pour parvenir à des résultats en matière de désarmement.  L’irréalisme n’est pas une perspective crédible pour progresser sur la voie du désarmement nucléaire. 

Le représentant du Japon a présenté une proposition de révision du projet de résolution L.35 « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires » en ajoutant quelques phrases au paragraphe 21 du dispositif. 

Reprenant la parole, la représentante d’Israël a appuyé le projet de résolution L.1 sur la « Création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient ».  Selon elle, cela reflète la position positive d’Israël visant à instaurer le dialogue pour créer un Moyen-Orient plus sûr.  Elle a regretté que, malgré cette attitude sérieuse d’Israël, la partie arabe ait jusqu’ici refusé de participer de façon constructive.  Estimant que la résolution L.1 est une résolution de consensus, elle s’est demandée comment une architecture de paix et de sécurité dans la région pourrait être édifiée alors même que les résolutions consensuelles ne peuvent pas être appliquées.  Pour que ce processus réussisse, elle a considéré essentiel de prendre en compte les défis de tous les États de la région et d’établir des mesures de confiance et de coopération mutuelles.  Selon elle, ce n’est qu’une fois ces mesures en place que l’on pourra passer à des objectifs plus ambitieux.  Souhaitant une communication directe et ouverte, elle a appelé tous les États parties à reconnaître le droit de tous les États à exister. 

Le représentant du Pakistan a annoncé que sa délégation voterait contre les paragraphes des projets de résolution mentionnant son pays.  N’étant pas partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), nous ne nous sentons pas lié à cet instrument, ni aux demandes répétées quant à la nécessité que soit atteinte son universalisation, a-t-il indiqué.  Le discours sur les armes nucléaires ne peut pas être réduit aux considérations humanitaires, le principe en la matière devant prévaloir étant celui de la sécurité non diminuée pour tous, a ajouté le délégué.  Il a également estimé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est lacunaire sur la forme et sur le fonds, et ne contribue en rien à l’enrichissement du droit coutumier en matière de désarmement nucléaire.  Parce que nous croyons fermement à la nécessité de renforcer la norme contre la conduite des essais nucléaires, nous voterons en faveur du projet de résolution L.42 tout en nous abstenons sur le paragraphe 4 du préambule, a toutefois fait savoir le délégué. 

Le représentant du Guatemala a annoncé que son pays voterait pour le projet de résolution L.35, dans le but de contribuer à l’universalisation du TNP et d’avancer vers une sortie rapide de l’impasse à Genève.

Le représentant de l’Autriche, reprenant à son tour la parole, a indiqué que son pays s’abstiendrait sur le projet de résolution L.35 « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », estimant que ce texte « reformule de manière confuse la notion de consensus » et est de surcroit incompatible sur le fond avec les textes et déclarations issus des conférences d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et les appels qu’ils contiennent.  En outre, le texte n’exhorte plus les États concernés à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) afin qu’il puisse entrer en vigueur, a encore regretté le représentant. 

Le représentant de l’Équateur a déploré que la version 2017 du projet de résolution L.35 soit peu ambitieuse quant à la réalisation de l’objectif rappelé dans son titre.  La priorité devant être accordée au désarmement nucléaire n’est plus réaffirmée dans le texte, a-t-il noté, constatant qu’il n’était plus question de « non-prolifération », la mention du désarmement nucléaire ayant tout simplement « disparue ».  La référence à l’Article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) a également disparu, ce qui n’est pas acceptable, incompréhensible même, a déclaré le délégué.  Plusieurs mesures en vigueur ne sont plus exigées, alors même que les engagements pris par les États dotés de l’arme nucléaire pour les mettre en œuvre ne sont plus honorés, a encore martelé le représentant.  « C’est comme si ce texte imputait la responsabilité de l’absence de progrès en matière d’élimination des armes nucléaires à ceux qui n’en possèdent pas ».  « À ce titre, il n’aide en rien, au contraire, à améliorer la confiance entre États », a-t-il estimé.  L’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) dépend de la volonté politique de huit États, lesquels ne sont plus mentionnés dans le texte, ce qui affaiblit l’appel que lance traditionnellement ce projet de résolution, a-t-il dit.  Pour toutes ces raisons, nous ne pourrons pas appuyer ce texte au moment du vote.

Le représentant des Pays-Bas a expliqué que son pays avait voté contre le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, alors qu’il souscrit à ses objectifs profonds, car il doute que ses dispositions soient de nature à pouvoir éliminer vraiment les armes nucléaires.  Condamnant toute formulation qui se féliciterait de ce traité, les Pays-Bas ont toutefois dit souhaiter progresser en prenant en compte toutes les préoccupations pour continuer d’œuvrer au renforcement du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).

Le représentant du Brésil a annoncé qu’il s’abstiendrait sur le projet de résolution L.35  « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », considérant que la version de cette année était un pas en arrière comparée aux versions précédentes.  Il a jugé inconcevable que le texte de cette année ne mentionne pas l’adoption récente du récent Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, s’étonnant aussi que tant de formulations soient édulcorées.  Dans le paragraphe 2, il a notamment noté qu’on ne mentionne plus l’article 6 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), comme cela figurait pourtant dans les formulations précédentes.  Le paragraphe 12 ne refléterait plus, non plus, la notion selon laquelle la disparition des armes nucléaires renforcerait le régime de non-prolifération.  Il a aussi jugé que le retrait, au paragraphe 3, du dispositif cité dans les documents de 1995 et 2010 était une perte.  De même, le retrait des notions explicites présentées dans les rapports finaux de la conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) lui apparaisse comme un « silence incompréhensible ».  Il a aussi regretté le pas en arrière au niveau du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et insisté pour que les États cités à l’annexe 2 du traité soient clairement exhortés à le ratifier.  Il a encore jugé qu’il y avait une formulation inacceptable au paragraphe 28, estimant qu’il devrait refléter les positions de la conférence d’examen de 2010.  À ses yeux, le texte aurait dû être plus ambitieux et inclure une mention plus précise sur l’importance du traité d’interdiction et de production des matières fissiles.

Le représentant des États-Unis a expliqué pourquoi son pays ne voterait pas en faveur des projets de résolution L.2, L.5, L.17 et L.6.  Concernant le projet de résolution L.2 « Le risque de prolifération nucléaire au Moyen-Orient », il a affirmé que son objectif n’était pas vraiment d’éliminer les armes nucléaires et leurs vecteurs au Moyen-Orient.  Déplorant qu’un État ait été singularisé dans cette enceinte, il a considéré que ce n’était pas une bonne façon d’avancer vers un objectif commun et que cela risquait de nuire au dialogue.  

S’agissant des projets de résolution L.5 « Conséquences humanitaires des armes nucléaires » et L.17 « Impératifs éthiques pour un monde exempt d’armes nucléaires », il s’est interrogé sur les conclusions et les objectifs derrière ces textes.  Si le but est de promouvoir la non-détention d’armes nucléaires, ce n’est pas une position favorable au consensus a-t-il avancé, estimant que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires risque de créer un monde moins sûr que sous le Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Ce Traité, a-t-il averti, ne va pas supprimer une seule arme, mais va au contraire approfondir les divisions entre les États.  Selon lui, il existe une approche pour attaquer le problème des armes nucléaires de façon sécuritaire, mais elle passe par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  

Sur le projet de résolution L.6 « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », il a expliqué que le Gouvernement des États-Unis n’a pas participé aux discussions parce que ce texte est fondé sur l’hypothèse que le désarmement est possible sans prendre en compte la situation sécuritaire internationale.  Répétant que la meilleure façon d’avancer consiste à renforcer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), il a appelé à prendre en compte les facteurs sécuritaires et pas seulement les facteurs humanitaires.  Il a affirmé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires risquait de nuire au TNP, citant notamment son article 18 qui n’impose pas d’adhérer au TNP pour adhérer à celui-ci.  Il a aussi rappelé que ce nouveau traité ne demande pas de déclarer de nouveaux programmes nucléaires éventuels, « ce qui revient donc à affaiblir les structures de désarmement ».  Il a enfin déploré qu’il n’inclue aucune mesure de vérifications sérieuses.  Autant de raisons pour lesquelles les États-Unis rejettent ce traité qui a d’ailleurs, rappelle son représentant, été négocié sans la participation des États dotés.  Le délégué a affirmé qu’il valait mieux faire avancer le désarmement via les processus qui existent déjà.  « Nous n’accepterons aucune mention explicite à ce traité dans un quelconque document », a-t-il conclu.

Le représentant de la République de Corée a indiqué que son pays soutenait une approche graduelle et inclusive, telle que privilégiée par le cadre établi par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  

Reprenant la parole, le représentant de la République islamique d’Iran a déclaré que son pays appuierait le projet de résolution L.1 sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient et L.2 sur le risque de prolifération au Moyen-Orient.  Il a dénoncé la « politique têtue d’Israël, soutenue par les États-Unis », y voyant le seul obstacle à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Les États-Unis, simplement pour faire plaisir au seul État de la région à ne pas avoir adhéré au Traité, font fi d’une norme internationale approuvée par la communauté internationale, a-t-il également dit.  Il a ajouté que la politique d’Israël était une menace exigeant de nouvelles mesures de paix et de sécurité au Moyen-Orient. 

Le représentant de la Chine a annoncé que son pays voterait contre le projet de résolution L.35, « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », les lacunes de la version 2017 donnant lieu à « un texte incompatible avec la position de ma délégation ». 

Le représentant de l’Afrique du Sud a constaté que le projet de résolution L.35 n’avait plus grand chose à voir avec les versions précédentes de ce texte.  Les accords consensuels issus des conférences d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), et les engagements correspondants, ont été édulcorés, ce qui pourrait nuire de manière irréversible à la mise en œuvre du Traité.  La tendance de certains à réinterpréter les obligations du titre et à assortir de conditions leur mise en œuvre sapent gravement la portée du Traité, a-t-il également considéré, annonçant que cette année, son pays ne pourrait soutenir ce texte.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sahel: la mission du Conseil confirme la volonté des États de la région de rendre opérationnelle leur force conjointe de sécurisation des frontières

8077e séance – après-midi
CS/13042

Sahel: la mission du Conseil confirme la volonté des États de la région de rendre opérationnelle leur force conjointe de sécurisation des frontières

La mission du Conseil de sécurité dans le Sahel, qui s’est déroulée du 19 au 22 octobre derniers, a permis de confirmer la détermination politique des États sahéliens à finaliser rapidement, avec l’appui de la communauté internationale, le déploiement de la force régionale chargée de sécuriser leurs frontières, ont unanimement salué, cet après-midi, les trois membres de la délégation du Conseil à s’être rendus sur place.

Menée par la France, l’Italie et l’Éthiopie, cette visite de quatre jours au Mali, en Mauritanie et au Burkina Faso avait pour objectif de fournir aux membres du Conseil une évaluation de première main concernant l’opérationnalisation de la Force conjointe créée en février 2017 par les cinq pays membres du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad).  La mission avait également pour but d’évaluer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, conclu en février 2015. 

« Le premier enseignement, c’est que les autorités des trois pays dans lesquels nous nous sommes rendus ont unanimement réaffirmé leur engagement politique en faveur de l’opérationnalisation dans les meilleurs délais de la Force conjointe », s’est d’emblée félicité le Président du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre et Représentant permanent de la France, M. François Delattre, le même constat étant fait par ses homologues de l’Italie, M. Sebastiano Cardi, et de l’Éthiopie, M. Tekeda Alemu. 

Revenant sur la chronologie de leur mission, les membres du Conseil ont précisé qu’à leur arrivée, le 19 octobre, à Bamako, la capitale malienne, ils s’étaient entretenus avec le Président du pays, M. Ibrahim Boubacar Keïta, et les membres de son cabinet.  À la suite de ces réunions, la délégation s’est rendue à Nouakchott, la capitale de la Mauritanie, afin de s’entretenir avec le Président mauritanien, M. Mohamed Ould Abdel Aziz, et le Secrétaire permanent du G5 Sahel, M. Najim Elhadj Mohamed.

Le 22 octobre, la délégation s’est rendue à Sévaré, dans le centre du Mali, pour une visite du poste de commandement de la Force conjointe du G5 Sahel, récemment inauguré le 9 septembre dernier.  Les trois membres du Conseil se sont entretenus à cette occasion avec le Commandant de la Force, le général Didier Dacko.  De Sévaré, la délégation s’est ensuite rendue à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, où un hommage a été rendu aux victimes de l’attentat terroriste meurtrier perpétré le 13 août 2017 contre le café Aziz Istanbul.  Ils se sont ensuite entretenus avec le Président du Burkina Faso, M. Roch Marc Christian Kaboré.

De ces différentes rencontres, il ressort que « beaucoup a été fait en peu de temps s’agissant de l’opérationnalisation de la Force conjointe », a déclaré M. Delattre, avant d’ajouter que la montée en puissance progressive de la Force avait vocation à faciliter la mise en œuvre des mandats de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et de l’opération française Barkhane.

Pour combattre « l’insécurité croissante qui caractérise la région, secouée par le terrorisme, la criminalité transfrontalière, le trafic d’armes et de drogues et le déficit de développement », le représentant italien, M. Cardi, a en effet estimé que les pays du Sahel avaient pris pleinement conscience de la nécessité de bâtir une architecture régionale de sécurité aux frontières.  Dans ce cadre, il a émis le souhait que le déploiement de la Force conjointe puisse répondre aux attentes de la région. 

Outre le volet sécuritaire, le représentant italien a également pris note, lors de sa rencontre avec le Secrétaire permanent du G5 Sahel, de l’insistance de ce dernier sur le développement et la lutte contre les inégalités comme facteurs clefs du maintien de la stabilité dans le Sahel.

Certes, une approche « holistique » est importante, a, quant à lui, déclaré son homologue de l’Éthiopie, mais lutter contre le fléau de l’insécurité et du terrorisme doit, selon lui, demeurer la priorité.  M. Alemu a en effet dit à quel point il avait été choqué par l’ampleur des difficultés rencontrées par les populations au quotidien.  Lors de ses rencontres avec des représentants de la société civile à Ouagadougou, il a été frappé par la façon dont l’insécurité entravait la vie des habitants, qui ont même peur de se rendre sur les marchés pour faire leurs achats. 

« Ne pas les aider serait catastrophique et aurait des incidences négatives sur la communauté internationale », a-t-il affirmé, appelant le Conseil à tout faire pour appuyer le déploiement de la Force conjointe.  C’est d’ailleurs, a estimé le représentant de la France, le second enseignement que la visite du Conseil a permis de mettre en évidence, à savoir le soutien unanime et appuyé de tous les membres du Conseil envers la Force.  Réfléchir à la meilleure façon de renforcer le soutien de la communauté internationale à la Force sera d’ailleurs l’objet, a-t-il dit, de la réunion du Conseil que présidera, le 30 octobre prochain, le Ministre français de l’Europe et des affaires étrangères, M. Jean-Yves Le Drian.

Déplorant, par ailleurs, la mort aujourd’hui même de trois soldats de la paix tchadiens de la MINUSMA, M. Delattre a réaffirmé la conviction du Conseil « qu’il ne saurait y avoir de stabilité durable au Sahel sans une mise en œuvre effective, intégrale et inclusive » des dispositions de l’Accord de paix au Mali.  Sur ce point, il a déclaré que la mission du Conseil avait été l’occasion pour les autorités maliennes de faire part des avancées récentes dans la mise en œuvre de l’Accord. 

Toutefois, a-t-il remarqué, les groupes signataires ont déploré, dans un document conjoint, un manque de concertation de la part du Gouvernement à cet égard.  M. Delattre est alors revenu sur le communiqué de presse publié par le Conseil, le 6 octobre dernier, dans lequel il exprime sa profonde préoccupation face aux retards persistants dans la mise en œuvre intégrale des dispositions clefs de l’Accord pour la paix et la réconciliation de 2015. 

Par ailleurs, le représentant français a mentionné deux rencontres avec la société civile, à Bamako et à Mopti, dans le centre du Mali, au cours desquelles il a noté la volonté des femmes d’être davantage associées à la mise en œuvre de l’Accord et d’être mieux représentées au sein des institutions chargées du suivi de cette mise en œuvre.  Il a également noté la « lassitude de la population du centre » du pays face à la menace des groupes terroristes qu’elle doit affronter.

Évoquant, en outre, la cérémonie pleine « d’émotion », à laquelle la délégation du Conseil a assisté à Bamako, en hommage aux 146 Casques bleus de la MINUSMA décédés dans l’exercice de leur fonction, M. Delattre a appelé le Conseil à observer cette bonne pratique lors de chaque visite dans un pays où est déployée une opération de maintien de la paix de l’ONU.

Le Président du Conseil a enfin noté que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), officiellement invité à s’associer à cette visite, n’avait pas été en mesure d’envoyer un représentant, du fait de son programme de travail chargé, mais avait toutefois indiqué « sa pleine disposition » à participer à de prochaines missions.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie annonce un huitième cycle de pourparlers, à Genève, le 28 novembre

8076e séance – matin
CS/13041

Conseil de sécurité: l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie annonce un huitième cycle de pourparlers, à Genève, le 28 novembre

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a annoncé, ce matin, au Conseil de sécurité, son intention de convoquer un huitième cycle de pourparlers intrasyriens, à Genève, le 28 novembre prochain. 

« Le plan de travail de ce cycle sera établi sur la base de la résolution 2254 (2015), en vue de réaliser un processus politique de transition.  De réelles négociations doivent être engagées sur les points sur lesquels les divergences de vues entre les parties au conflit pourraient être surmontées », a expliqué le haut fonctionnaire, en attirant l’attention sur deux éléments qui doivent selon lui figurer au cœur de ces négociations.

Il s’agit du « calendrier de la nouvelle constitution » et des « conditions préalables à l’organisation d’élections supervisées par les Nations Unies », a précisé M. de Mistura, en demandant l’appui du Conseil pour réaliser des avancées concrètes en ce sens.  Il a également souligné la nécessité de faire des progrès sur les questions des détenus et du déminage.

S’exprimant par visioconférence depuis Genève, l’Envoyé spécial a indiqué qu’il était engagé dans une série de consultations qui iraient en s’intensifiant à l’approche des négociations, et qu’il participerait à ce titre à la septième réunion internationale de haut niveau sur la Syrie, prévue les 30 et 31 octobre à Astana, au Kazakhstan.  Il a également souhaité que la réunion de l’opposition syrienne à Riyad, en Arabie saoudite, se tienne « dans les meilleurs délais ». 

« Ceux qui peuvent exercer une influence sur le Gouvernement syrien doivent le faire, en s’assurant que ses responsables se rendent à Genève pour négocier », a insisté M. de Mistura, en se disant ouvert à toutes les recommandations de la communauté internationale.  En début de semaine, M. de Mistura a rencontré le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, qui lui a donné des « orientations très claires ».

Un processus politique inclusif est plus que jamais nécessaire à la lumière des récents développements sur le terrain, a analysé l’Envoyé spécial, en faisant état d’une « nouvelle escalade » du conflit en lieu et place de la « désescalade » attendue.

Si Raqqa a été libérée de Daech, il n’en reste pas moins que cette organisation terroriste est toujours susceptible de revenir exploiter les griefs de la population civile, d’autant que c’est sur d’autres lignes de front, à Edleb et à Hama notamment, que les affrontements font rage.

Après avoir dénoncé « les images choquantes en provenance de la Ghouta orientale », M. de Mistura a constaté que « l’amélioration de l’accès humanitaire reste pour l’instant illusoire » en raison de « la poursuite des combats, des obstacles bureaucratiques et de l’ingérence de parties au conflit ».

« Les terroristes sont sur la défensive, mais nous ne pourrons pas les vaincre sans un processus politique inclusif, dont la condition préalable est un cessez-le-feu respecté à l’échelle nationale », a-t-il souligné.

Prenant acte du recul de Daech et de la montée en puissance du Gouvernement syrien sur le terrain, le délégué de l’Uruguay a considéré que cette réalité contraint la communauté internationale à prendre les mesures qui s’imposent, notamment la promotion d’un processus négocié pour régler la situation en Syrie.  « Il ne saurait y avoir de solution militaire » dans ce pays, a-t-il conclu.

Cadre de référence des pourparlers, la résolution 2254 du Conseil de sécurité, adoptée le 18 décembre 2015, « avalise » les Déclarations de Vienne du Groupe international de soutien pour la Syrie, dont l’objet est l’application intégrale du Communiqué de Genève du 30 juin 2012, « fondement d’une transition politique conduite et prise en main par les Syriens et visant à mettre fin au conflit syrien ».

Selon cette même résolution, un processus politique dirigé par les Syriens et facilité par l’ONU devait mettre en place, « dans les six mois », « une gouvernance crédible, inclusive et non sectaire », et arrêter un calendrier et les modalités d’une nouvelle constitution.  En vertu de cette constitution, des élections « libres et régulières » auraient dû se tenir, « dans les 18 mois », sous la supervision de l’ONU.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Drones, coopération régionale et évolution des mandats: la Quatrième Commission débat de l’avenir des opérations de maintien de la paix

Soixante-douzième session,
18e séance – matin
CPSD/647

Drones, coopération régionale et évolution des mandats: la Quatrième Commission débat de l’avenir des opérations de maintien de la paix

Les nouvelles technologies peuvent-elles apporter une solution à l’« évolution multidimensionnelle des conflits » et aux dangers d’un « environnement asymétrique » auxquels font face les Casques bleus?  C’est la question posée ce matin par plusieurs délégations de la Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation), qui se réunissaient à nouveau pour débattre de l’avenir des opérations de maintien de la paix.

Cette discussion avait pour toile de fond les préoccupations de nombreux États Membres quant à la situation sécuritaire des Casques bleus.  « Les soldats de l’ONU sont devenus la cible de menaces quotidiennes générées par la prolifération d’armes et la violence confessionnelle », s’est notamment inquiété le représentant du Bangladesh tandis que la représentante de Cuba a déploré de très nombreuses pertes en vies humaines parmi les soldats de la paix ces dernières années.

Pour plusieurs délégations, à l’instar du Nigéria, le recours aux technologies modernes en matière de collecte d’informations, de communication, de surveillance aérienne et de détection de mines et d’explosifs, ne fait aucun doute. « Celles-ci doivent être employées de manière réaliste et prudente », a cependant mis en garde le représentant du Bangladesh, qui a précisé qu’elles ne pouvaient « en aucun cas se substituer au déploiement de Casques bleus dûment formés sur le terrain ».

Son homologue du Venezuela a toutefois souligné que certaines technologies modernes, notamment les drones, peuvent, représenter une menace à la souveraineté des pays hôtes.  Dans ce contexte, il a défendu la mise ne place de normes claires pour réglementer leur usage, notamment en protégeant la confidentialité des communications gouvernementales et en empêchant les pratiques en violation du droit international.

Reconnaissant que ces technologies peuvent améliorer la connaissance de l’environnement et contribuer à la sécurité du personnel, la représentante de Cuba a invité à réaliser une analyse au cas par cas, qui tienne compte de la souveraineté des États, mais aussi à définir les aspects juridiques, opérationnels, techniques et financiers relatifs à l’emploi de ces techniques.

Pour répondre aux situations de plus en plus complexes sur le terrain, plusieurs représentants ont également insisté sur la nécessité de faire évoluer les mandats, qui doivent être « sur mesure » et offrir une « souplesse suffisante » pour s’adapter aux situations.  « Le mandat, c’est le guide, la base », a affirmé le représentant de la Chine, précisant qu’il faut se concentrer sur les besoins des pays hôtes, des pays contributeurs de troupes et s’adapter aux priorités et à la réalité de la situation.  Plusieurs délégations ont abondé dans son sens, le représentant du Mexique ajoutant que les missions devaient aussi inclure « toutes les phases au sortir du conflit » et contribuer « de manière cohérente et multisectorielle » à une paix durable. 

Des divergences sont cependant apparues, la déléguée russe s’opposant à une « interprétation souple des mandats en fonction des conditions sur le terrain » car cela créerait plus de risques d’attaque pour le personnel.  Elle a fait savoir que son pays n’appuierait pas « une augmentation d’actions fortes et préventives, ni une participation des soldats de la paix à des actions contre le terrorisme ».  Les délégués de l’Argentine et du Venezuela se sont alignés sur cette position, le premier rappelant que les opérations de maintien la paix « n’ont pas été conçues pour imposer des solutions politiques par la force ni pour mener des opérations de lutte contre le terrorisme » tandis que le second a mis en garde contre « la tentation de confier des mandats plus robustes aux missions », avertissant que cela pourrait impliquer encore plus ces missions dans des conflits.  « Il y a aussi des opérations qui ont duré trop longtemps, sans remplir leur mandat aux objectifs peu clairs », a-t-il ajouté.

Pour de nombreuses délégations, africaines notamment, l’avenir des opérations de maintien de la paix passe également par un renforcement de la coopération régionale.  Le délégué du Nigéria a exhorté l’ONU et les organisations régionales à profiter de leur complémentarité, l’une portant la légitimité et l’autorité qui découle de sa Charte, pendant que les autres apportent « une perspective unique sur les peuples, la culture, l’environnement et les problèmes sous-jacents qui menacent la paix ».  Le délégué d’Afrique du Sud, quant à lui, a mis en évidence le fait que des organisations régionales sont souvent les premières à se déployer pour stabiliser une situation.

« Des réponses africaines doivent être apportées aux problèmes africains », a renchéri le représentant de la Namibie.  Ce dernier a appelé à la pleine mise en œuvre du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, dans le but de renforcer la coopération dans les domaines de la prévention de conflit, la gestion des crises et la reconstruction après les conflits.  Le représentant du Nigéria a en outre appelé à la finalisation de l’examen commun ONU-Union africaine des mécanismes de financement de ces opérations qui envisage que les Nations Unies prennent en charge 75% du budget de l’Union africaine relatif aux missions autorisées par le Conseil de sécurité.

La collaboration bénéfique de l’Union africaine avec l’ONU a aussi été mise en évidence par le représentant du Soudan qui a parlé du succès de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD).

Tout en indiquant que « ces partenariats avec les organismes régionaux permettent aussi de répondre à certaines contraintes auxquelles font face les Nations Unies », les délégations ont cependant appelé à des « fonds suffisants, réguliers et durables destinés aux opérations dirigées par des pays africains ». Seul bémol: l’intervention de la déléguée de l’Érythrée qui a mis en garde sur le déploiement de contingents venant de pays voisins, « en particulier en Afrique », en faisant observer que les intérêts nationaux peuvent aller « au-delà » de la recherche d’une paix nationale ou régionale. 

La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 27 octobre, à partir de 10 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS

Suite du débat général

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a souligné que la paix durable ne passe pas par les solutions militaires mais par les résolutions politiques.  À ce titre, il a salué la résolution 2379 de l’ONU qui met l’emphase sur ce principe.  Évoquant les nouveaux défis qu’affrontent les opérations de maintien de la paix, il a estimé que la volonté de réforme de l’architecture de maintien de la paix est une excellente nouvelle qui permettra aux différentes missions de mieux remplir leurs mandats.  Il a plaidé pour qu’une procédure d’examen régulier de ce mécanisme soit mise en place afin de s’assurer qu’il est bien aligné avec les objectifs et rôles des opérations de maintien de la paix.

Appelant les Nations Unies à mieux considérer l’importance des pays contributeurs de troupes, il a demandé à ce qu’on renforce la communication avec eux et qu’un meilleur soutien leur soit prodigué, aussi bien en termes d’équipements que de formations. Il a également souligné le lien entre la paix et le développement durable.

Le représentant a notamment appelé à aligner le Programme de développement durable à l’horizon 2030 avec l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA) dans le but de répondre aux racines des conflits en Afrique.  Il a souligné que des « réponses africaines doivent être apportées aux problèmes africains ».  Il a appelé à la pleine mise en œuvre du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, expliquant que cela permettra de renforcer la coopération dans les domaines de la prévention de conflit, la gestion des crises et la reconstruction après les conflits.

M. Gertze s’est par ailleurs inquiété des récentes coupures budgétaires dans les opérations de maintien de la paix qui, a-t-il mis en garde, risque de faire perdre les gains obtenus dans certains conflits.  Il a aussi mis l’emphase sur le rôle fondamental que jouent les femmes en matière de paix et de sécurité, signalant par ailleurs que la Namibie est pleinement engagée dans la politique de tolérance zéro en ce qui concerne les abus sexuels perpétrés durant les opérations de maintien de la paix.

S’il a défendu une modernisation des opérations de maintien de la paix, M. MOUNZER MOUNZER (République arabe syrienne) a souligné que ces opérations n’étaient pas une solution permettant de résoudre de manière durable des conflits, insistant sur le besoin de s’attaquer aux causes profondes.  Il a également indiqué que la responsabilité de la protection des civils incombe aux pays hôtes et que les opérations de maintien de la paix ne doivent pas toucher ou ignorer cette responsabilité.  Il a appelé à ne pas utiliser la protection des civils pour s’ingérer dans les affaires des États, réclamant par ailleurs une définition juridique et commune du concept de protection des civils.

Après s’être félicité des bons rapports entre son pays et la Force des Nations Unies chargée d'observer le désengagement (FNUOD) et l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), le représentant a fait observer que le déploiement d’une opération de maintien de la paix au Moyen-Orient « dure depuis des années en raison de la poursuite par Israël de l’occupation des territoires arabes ».  Il a accusé Israël de faire fi du droit international et de mettre à mal la sécurité de la région entière par ses politiques d’occupation.  Le représentant syrien a fait observer que quatre opérations de maintien de la paix opèrent actuellement dans la région, ce qui exerce des pressions sur les ressources financières et humaines des Nations Unies.  Il a demandé à la communauté internationale de faire pression sur Israël pour permettre aux peuples de la région de vivre en paix et au personnel des Nations Unies déployé de rentrer chez lui.

Le délégué a ensuite fait part de sa vive préoccupation au sujet des attaques terroristes qui ciblent les Casques bleus et les opérations de maintien de la paix. Il a déploré que certains postes aient dû être évacués dans le Golan, et a accusé Israël d’« appuyer des groupes terroristes affiliés à Al-Qaida ».  Il a aussi dénoncé des violations « flagrantes de l’Accord de séparation, du droit international et du mandat de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) ».  Il a notamment déploré que les informations transmises aux Nations Unies à ce sujet soient restées lettre morte, accroissant les menaces de ces groupes et les attaques perpétrées contre les postes onusiens « avec l’appui total d’Israël ».  

M. ROLANDO CASTRO CORDOBA (Costa Rica) a rappelé que son pays s’était désarmé de par sa propre volonté depuis 69 ans, convaincu que c’est de cette façon qu’il peut contribuer à la paix et sécurité internationales.  Il a indiqué que dans sa région, trois missions de maintien de la paix s’étaient terminées avec succès, imputant cette réussite à l’appropriation nationale, la clarté des objectifs et des mandats définis par le Conseil de sécurité ainsi qu’à une communication large et transparente.  Le représentant s’est dit inquiet de constater que la rhétorique belliciste augmente dans le monde sans réaction appropriée de la communauté internationale.  Il a également constaté que la nature des conflits a changé, estimant qu’il faut y répondre en lançant des réformes pour permettre aux opérations de maintien de la paix d’accorder la priorité à la prévention et de mettre l’accent sur une plus grande équité économique, le développement durable, une culture de paix, ainsi qu’une participation démocratique effective.

Le représentant a aussi affirmé que les opérations de maintien de la paix doivent se concentrer sur l’être humain et protéger les civils des violations des droits de l’homme.  C’est dans cet esprit que les mandats doivent être formulés, ils doivent être « sur mesure » et offrir une souplesse suffisante pour répondre aux situations sur le terrain, a-t-il estimé.

Le représentant a aussi insisté sur la politique de tolérance zéro concernant les abus sexuels, soulignant que l’ONU représente souvent « la dernière lueur d’espoir pour les peuples ».  « Ces abus nuisent gravement à la crédibilité des opérations de maintien de la paix, et empêchent la mise en œuvre des mandats concernant la protection des civils », a-t-il affirmé, appelant par ailleurs à punir les auteurs de ces actes et non pas les lanceurs d’alerte.  Enfin, il a insisté sur la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix, soulignant qu’elles ont un rôle clef à jouer dans la transition de la guerre vers la paix, la cohésion sociale et le redressement économique.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a déclaré que, face à l’évolution des conflits armés et à la nature changeante des nouveaux défis à la paix et au développement, l’ONU se doit d’articuler une nouvelle approche pour concrétiser sa finalité ultime: le maintien de la paix et la sécurité internationales.  Au cours des décennies passées, « nous avons consacré la majeure partie de nos ressources humaines et financières à nous occuper des conflits plutôt qu’à les prévenir » a-t-il constaté, invitant à examiner plus amplement les questions afférentes aux opérations de maintien de la paix en vue du renforcement de cet « outil principal de l’ONU » et de l’adapter aux besoins de la société contemporaine. 

Il a estimé que l’adoption des résolutions historiques 70/262 de l’Assemblée générale et 2282 (2016) du Conseil de sécurité témoigne de l’engagement de ces deux organes à façonner les réponses de l’ONU liées au maintien de la paix à travers le concept de paix durable, le renforcement du volet prévention, et des approches intégrales pour remédier aux causes structurelles de conflits.  Plus concrètement, il s’agit pour M. Mendiolea de consolider la capacité de l’ONU à trouver des solutions multidimensionnelles, à formuler et exécuter des solutions politiques, de sécurité, de développement des droits de l’homme, mais aussi de prêter attention aux questions humanitaires, le tout en prenant en considération la perspective sexospécifique.

Dans cette optique, le Mexique estime que le Comité des 34 devrait veiller à ce que les mandats de ces opérations soient suffisamment souples, proches de la réalité et des besoins sur le terrain, qu’ils incluent toutes les phases au sortir du conflit et contribuent également, de manière cohérente et multisectorielle, à une paix durable.  Le représentant a aussi jugé indispensable de renforcer l’interaction et la coordination entre le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de contingents, les donateurs, les États bénéficiaires, les organisations régionales, les agences pertinentes du système, les autorités nationales et la société civile.  Il a recommandé à l’Assemblée générale d’amorcer un examen intégral des opérations de maintien de la paix, « notamment la forme controversée de fonctionnement et de financement des missions politiques spéciales », en tant que partie essentielle de la réforme globale de l’architecture de paix et sécurité de l’ONU.     

Mme GABRIELA MARTINIC (Argentine) a rappelé que son pays avait activement participé à la MINUSTAH, et s’est félicitée de la fin de cette mission, rendant hommage au personnel qui y a contribué durant 13 ans.  Elle s’est félicitée du projet de réforme et a apporté son soutien à l’approche centrée sur la médiation et la diplomatie préventive.  Elle a aussi souligné le rôle important du Comité spécial des opérations de maintien de la paix en tant qu’instance unique pour examiner les questions relatives aux opérations de maintien de la paix.

« Les opérations de maintien de la paix doivent s’inscrire dans le cadre d’une stratégie à l’appui d’un processus politique plus large » a poursuivi la représentante, qui a insisté sur le nouvel accent mis sur la prévention et l’approche holistique, « afin d’éviter la fragmentation des efforts ».  Elle a recommandé d’utiliser les conseils de la Commission de consolidation de la paix pour assurer la pérennité de la paix.  Elle a aussi appelé à éliminer les obstacles qui empêchent la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix. Concernant le recours à la force, elle a pris acte de la position du Groupe indépendant de haut niveau chargée d’étudier les opérations de maintien de la paix mais a indiqué que cela ne devrait pas constituer un obstacle pour agir de manière robuste pour assurer la protection des civils, la sécurité du personnel, ou la bonne mise en œuvre du mandat des opérations de maintien de la paix.

Par ailleurs, la représentante a affirmé que les opérations de maintien de la paix n’ont pas été conçues pour imposer des solutions politiques par la force ni pour mener des opérations de lutte contre le terrorisme.  Elle a appelé à une meilleure planification, avec des priorités établies dès le début, soulignant que les opérations doivent bénéficier de personnel spécialement formé et de ressources financières adéquates pour pouvoir s’acquitter de leurs mandats.  Enfin, elle a dit qu’elle accordait une importance capitale à la composante « droits de l’homme » présente dans un certain nombre de missions.

M. MOHAMMAD HELMY AHMAD ABOULWAFA (Égypte) a mis en avant la nécessité de s’attaquer aux causes des conflits et souligné que les opérations de maintien de la paix doivent rester des outils déployés dans un cadre politique, prévoyant des stratégies de sortie de crise dès l’étape de planification.  Il a aussi souligné que le respect des principes fondamentaux du maintien de la paix –consentement des parties, impartialité et non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense- assurait la crédibilité des Nations Unies.

Tout en reconnaissant que la protection des civils a évolué, il a estimé qu’elle ne doit pas servir de prétexte à des interventions militaires.  Il a réclamé une définition claire de la protection des civils, qui distingue civils et combattants.  Le représentant a également appelé à renforcer les organisations régionales, via un soutien à l’Union africaine, avec des ressources financières. Il a constaté qu’il y a « un véritable besoin de coopération triangulaire entre le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de troupes et le Secrétariat de l’ONU lors de la planification des missions et de la définition des mandats ».

En tant que pays contributeur de troupes, il a indiqué que l’Égypte était attachée à fournir des contingents disposant du matériel nécessaire, pour un déploiement rapide.  « Cet engagement doit être pris en compte, quand il s’agit d’élargir des contingents », a-t-il ajouté.  Le représentant a ensuite défendu la poursuite des efforts pour lutter contre les abus sexuels, appelant à ce que la politique de tolérance zéro s’applique non seulement aux troupes mais à l’ensemble du personnel de l’ONU.

Enfin, le représentant a constaté que les défis complexes d’aujourd’hui nécessitent une approche plus « robuste, avec des outils les plus propices pour s’attaquer aux causes des conflits et identifier des solutions viables et durables ».  L’objectif doit rester la pérennisation de la paix, a-t-il souligné, avant d’insister sur l’impératif d’adopter des approches globales et inclusives. 

M. AHMED (Bangladesh) a fait remarquer que plusieurs missions des Nations Unies ne disposent pas des capacités nécessaires à la mise en œuvre de leurs mandats, qui sont de plus en plus multidimensionnels.  En dépit des efforts consentis par tous les partenaires des Nations Unies, il demeure difficile de constituer des forces et de recevoir l’appui technique et logistique requis, a-t-il regretté.  Il a ensuite indiqué que si son pays soutient l’utilisation des nouvelles technologies dans les opérations de maintien de la paix, celles-ci doivent être employées de manière réaliste et prudente.  En aucun cas, ces technologies, notamment d’information et de télécommunication, ne doivent se substituer au déploiement de Casques bleus dûment formés sur le terrain, a-t-il notamment souligné.  Pour le délégué, les Casques bleus, avant d’être des combattants, sont des contributeurs de paix professionnels et impartiaux, et « c’est pour cela qu’il faut trouver les moyens de renforcer leur sécurité et leur protection ».  Notant que les soldats de l’ONU sont devenus la cible de menaces quotidiennes générées par la prolifération d’armes et la violence confessionnelle, il a mis l’accent sur la nécessité, pour les pays fournisseurs de troupes et les forces de l’ordre des pays hôtes, de consacrer davantage de temps à la sécurisation de l’environnement d’intervention des Casques bleus.  Enfin, il a souligné l’importance de renforcer le partenariat et la coordination entre le Conseil de sécurité, les pays fournisseurs de contingents ou de personnels de police et le Secrétariat de l’Organisation.

M. MICHAEL ONYEDIKA OKWUDILI (Nigéria) a considéré que l’évolution des conflits actuels exige des processus de paix qui soient valables dans le présent et dans le futur.  Répondre correctement aux enjeux d’aujourd’hui et de demain exige des Nations Unies de créer des mécanismes qui priorisent les outils politiques, sociaux et de développement, a-t-il indiqué.  À ses yeux, cette stratégie converge parfaitement avec la doctrine de prévention et de paix durable qui gagne du terrain et permet de s’attaquer aux causes des conflits avant qu’ils ne dégénèrent.

Plaidant ensuite pour une meilleure protection des contingents des missions des Nations Unies, il a estimé que des rencontres régulières entre ces missions et les autorités du pays d’accueil permettraient de bâtir une relation de confiance qui pourrait devenir la clef de leur succès.  Face à l’augmentation des risques asymétriques auxquels font face les Casques bleus, le délégué a jugé nécessaire d’avoir recours aux technologies modernes en matière de collecte d’information, de communication, de surveillance aérienne et de détection de mines et d’explosifs.

Le représentant a dit également sa colère face aux abus sexuels perpétrés par des Casques bleus et d’autres employés déployés sur les zones de conflit: « c’est une honte que des atrocités de ce genre aient encore cours.  Le temps est venu pour les États Membres de prendre les devants », a-t-il lancé, précisant que le Nigéria fait partie du « cercle de dirigeants » qui regroupe les pays ayant une présence opérationnelle sur le terrain et qui se sont engagés à faire face aux abus et atteintes sexuels.

Pour améliorer l’efficacité des opérations, le délégué du Nigéria a aussi exhorté l’ONU et les organisations régionales à mieux coopérer et profiter de leur complémentarité.  « L’une porte la légitimité et l’autorité qui découle de sa Charte, pendant que les autres apportent une perspective unique sur les peuples, la culture, l’environnement et les problèmes sous-jacents qui menacent la paix », a-t-il notamment fait observer.  Il a appelé à une forte coopération entre les Nations Unies et l’Union africaine étant donné le nombre de missions de maintien de la paix déployées sur le continent.  « Des fonds suffisants, réguliers et durables destinés aux opérations dirigées par des pays africains demeurent un besoin qui doit être comblé sans délai », a-t-il souligné.  Le Nigéria appelle d’ailleurs à la finalisation de l’examen commun ONU-UA des mécanismes de financement de ces opérations qui envisage que les Nations Unies prennent en charge 75% du budget de l’Union africaine relatif aux missions autorisées par le Conseil de sécurité.

Mme SONIA ISHAQ AHMAD SUGHAYAR (Jordanie) a appuyé les efforts déployés par le Secrétaire général pour réformer les opérations de maintien de la paix, insistant sur la nécessité, pour les Nations Unies, de renforcer leur capacité d’action et d’organisation, pour être mieux adaptées, assurer une meilleure pérennisation de la paix et atteindre les objectifs de développement durable.

Elle a estimé que les opérations de maintien de la paix avaient montré leur efficacité dans de nombreux pays, soulignant toutefois qu’elles pouvaient être améliorées.  « Nous devons comprendre les différences entre les missions et leur contexte, afin de pouvoir assurer une réaction rapide à l’apparition d’un conflit », a-t-elle expliqué, réclamant plus d’autonomie pour que les missions puissent réagir aux menaces qu’elles identifient.  Elle a également indiqué que si les opérations de maintien de la paix comblent souvent un vide et assurent la protection des civils, elles ne doivent pas remplacer la réhabilitation des forces armées nationales.  Aussi a-t-elle insisté sur la mise en œuvre de « périodes de transition et d’évaluation des situations politiques ».  Elle a également demandé à développer la dimension droits de l’homme des missions, à améliorer la formation des personnels, et à renforcer la place de la société civile.  Elle a aussi encouragé les femmes à s’impliquer davantage, « car leur rôle est complémentaire, notamment dans les affaires humanitaires »

« Nous avons besoin d’un mécanisme triangulaire entre Conseil de sécurité Secrétariat et pays contributeurs de troupes pour plus de transparence, d’efficacité et de réactivité sur les opérations de maintien de la paix, notamment sur les conflits transnationaux », a encore ajouté la représentante, insistant sur la coopération entre local, régional et international.  Elle a aussi soutenu la politique de tolérance zéro et réclamé des mesures efficaces contre les abus sexuels, impliquant des poursuites en justice.  La représentante a par ailleurs indiqué que son pays avait fourni quelques 1 200 personnes pour des opérations de maintien de la paix et qu’il était engagé à faire plus.

M. PERREN (Suisse) a souligné que les défis de sécurité ne peuvent pas être gérés efficacement sans prise en compte des droits de l’homme et du développement.  Une approche globale et inclusive est la plus prometteuse pour rendre les sociétés plus résilientes et réduire les violences, a-t-il déclaré, insistant sur le « rôle crucial » de la prévention des conflits.  Il a mis en avant une initiative lancée par la Suisse et 70 autres pays baptisée « Appel du 13 juin » et visant à placer les droits de l’homme au cœur de la prévention des conflits.  « Nous voulons avec cet appel renforcer la coopération entre deux piliers clefs des Nations Unies -Paix et sécurité/droits de l’homme- afin d’améliorer les outils des Nations Unies pour la prévention des conflits et la pérennisation de la paix », a-t-il expliqué.

Le délégué a ensuite réitéré son plein soutien aux efforts du Secrétaire général des Nations Unies et du Conseil de sécurité quant aux abus sexuels.  « Que des victimes de guerres et de conflits soient aussi victimes de violences sexuelles aux mains de représentants de l’ONU qui sont censés les protéger dépasse l’entendement et doit cesser urgemment », a-t-il martelé.  « On le doit aux populations civiles, aux pays hôtes, mais aussi à la majorité écrasante de Casques bleus honnêtes qui risquent chaque jour leur vie pour la paix », a-t-il ajouté, réitérant son soutien à la politique de tolérance zéro et aux mesures annoncées par le Secrétaire général dans ce domaine.

Le représentant a également touché mot de la coopération avec les organisations régionales, estimant que les efforts déployés sur le terrain par les Nations Unies doivent privilégier l’appropriation nationale, et se dérouler en coopération avec les parties prenantes au niveau régional, national et international.  Il a appelé les Nations Unies à travailler « main dans la main » avec les organisations régionales, citant notamment l’exemple de la collaboration entre l’OSCE et l’Union africaine.  Il a indiqué que les domaines de la formation et de l’entrainement des troupes, ainsi que de la mobilisation des civils, de la police et des forces armées s’y prêtaient particulièrement.

Mme CASTRO LOREDO (Cuba) a constaté que les mandats des missions s’étaient transformés ces dernières années, pour devenir plus multidimensionnels, vastes et complexes, et a estimé que cela entrainait des contradictions avec les principes fondamentaux régissant les opérations de maintien de la paix.  Elle a souligné que les opérations de maintien de la paix ne peuvent se substituer à un travail sur les causes profondes des conflits et a jugé inquiétant que certains cherchent à utiliser ces missions pour lutter contre l’extrémisme ou le crime organisé.  « Cela ne peut qu’augmenter le risque d’attaques », a-t-elle notamment averti.

Elle a aussi souligné que les opérations de maintien de la paix devaient être une mesure provisoire pour créer un cadre de sécurité permettant la mise en œuvre d’une stratégie à long terme pour appuyer le développement durable du pays hôte. Concernant la protection de civils, elle a affirmé que la principale responsabilité revenait aux États et qu’il était inacceptable qu’on utilise cet argument pour atteindre des objectifs politiques et s’ingérer dans les affaires internes des pays.  Elle a aussi appelé à augmenter la coopération triangulaire entre le Secrétariat, le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes.  Elle a notamment regretté que ces derniers ne puissent, dans la plupart des cas, participer activement à toutes les étapes du processus de décision.

Sur le recours aux nouvelles technologies, elle a invité à s’appuyer sur une analyse au cas par cas, et à rester dans le cadre des principes consacrés, notamment la souveraineté des États et l’intégrité territoriale ainsi que le consentement du pays hôte.  Elle a reconnu que ces technologies peuvent améliorer la connaissance de l’environnement et contribuer à la sécurité du personnel, mais a partagé son inquiétude quant au recours aux drones.  Il faut définir les aspects juridiques, opérationnels, techniques et financiers relatifs à l’emploi de ces techniques, a-t-elle estimé, ajoutant que ces nouvelles technologies peuvent compléter les travaux des opérations de maintien de la paix mais ne peuvent s’y substituer.  Enfin, elle a dit son inquiétude quant aux très nombreuses pertes en vies humaines parmi les Casques bleus ces dernières années.  « Il est nécessaire de développer des accords de sécurité et de protection pour ceux qui participent à ces opérations ».

Notant que les missions de maintien la paix se déploient dans un environnement de plus en plus en dangereux et qu’elles font face à de multiples défis, Mme SONALI SAMARASINGHE (Sri Lanka) a appelé à leur fournir davantage de ressources pour réaliser leur mandat.  À cet égard, elle s’est félicitée que le Département de l’appui aux missions ait renforcé la compétition pour l’approvisionnement des vivres aux troupes et à la police, ce qui, selon elle, améliorera la qualité et réduira les coûts.  Elle a aussi salué l’amélioration du soutien médical aux soldats de la paix.  Ensuite, elle a qualifié d’essentiel le déploiement rapide de contingents en uniforme, ainsi que l’équipement et la formation adaptés au besoin du pays destinataire, appelant à combler les manques en matière de capacités et d’équipements par des partenariats.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité de fournir des mandats clairs et un financement prévisible.  « Il est aussi vital de combler les manques en matière d’appréciation de la situation, par un renforcement des formations et de l’intelligence », a souligné la déléguée.

Poursuivant, Mme Samarasinghe a insisté sur le principe d’appropriation nationale, soulignant qu’il devait y avoir une attention claire, de la part des pays hôtes, de bâtir des institutions nationales, renforcer les structures de sécurité nationale et d’instaurer une justice « restauratrice et de réconciliation ».  Elle a aussi appelé à créer des réseaux d’information locaux et de renseignement, afin de mieux protéger les civils et les non combattants.  Les opérations de maintien de la paix, a-t-elle ajouté, doivent être un « soutien aux efforts diplomatiques, et non un palliatif à ces efforts ».  Elle a aussi insisté sur la participation des femmes, citant des recherches qui montrent qu’elles ont plus de succès lorsqu’il s’agit de construire des relations avec les communautés locales et qu’elles sont des modèles pour inspirer d’autres femmes à rejoindre les services de sécurité.  « Si elles sont présentes en plus grand nombre, elles peuvent aussi être un catalyseur pour résoudre le problème des abus sexuels, a analysé la représentante.

À ce sujet, Sri Lanka appuie la politique de tolérance zéro, et procède à un contrôle strict lors de la sélection de troupes qui suivent une formation préalable au déploiement, et reçoivent des manuels de sensibilisation sur l’exploitation sexuelle et l’abus des enfants.  Sri Lanka a aussi signé le pacte volontaire du Secrétaire général pour l’élimination de l’exploitation et des abus sexuels.

En tant que pays en situation postconflit, Sri Lanka est aussi très conscient des liens entre le renforcement du maintien de la paix et ses propres efforts de consolidation de la paix, a fait savoir la déléguée, qui a particulièrement mis en évidence l’importance de la réintégration des anciens combattants comme condition d’une paix pérenne.

M. DOUGLAS NICOMEDES ARCIA VIVAS (Venezuela) a rappelé que les opérations de maintien de la paix sont un instrument important qui doit être utilisé pour étayer le soutien à des solutions politiques, conformément à la Charte des Nations Unies. Il a défendu une analyse en profondeur, pour déterminer si une situation nécessite ou pas le déploiement d’une mission, soulignant que parfois « il n’y a pas de paix à préserver ».  Insistant sur le fait que les Casques bleus n’ont pas vocation à combattre le terrorisme ou le crime organisé, il a mis en garde contre la tentation de confier des mandats plus robustes aux missions, avertissant que cela pourrait impliquer encore plus ces missions dans des conflits, alors même qu’elles sont censées jouer un rôle de facilitateur de paix.  Il y a aussi eu des opérations qui ont duré trop longtemps, sans remplir leur mandat aux objectifs peu clairs, maintenues simplement en position d’attente, et sans bénéficier d’un appui politique approprié, a-t-il poursuivi.

Poursuivant, le représentant a indiqué que si certaines technologies modernes pouvaient contribuer positivement à l’efficacité des missions, elles pouvaient également représenter une menace à la souveraineté des pays hôtes.  Dans ce contexte, il a défendu la mise ne place de normes claires pour réglementer leur usage, notamment en protégeant la confidentialité des communications gouvernementales et en empêchant les pratiques en violation du droit international. « L'utilisation de drones dans les opérations de maintien de la paix, par exemple, doit être soumise à l’approbation des autorités hôtes », a-t-il insisté, soulignant que les pays hôtes et les mandats doivent être scrupuleusement respectés.  Le représentant s’est aussi dit préoccuper que la vision ou les préoccupations des pays contributeurs de troupes ne soient pas davantage prises en compte dans la prise de décisions dès lors qu’il s’agit du déploiement d’opérations les impliquant.  Il a souhaité que ces pays participent activement aux décisions du Conseil de sécurité.  Tout en saluant les efforts déployés par les opérations de maintien de la paix pour protéger les civils et renforcer les capacités des États, il a rappelé que ces activités ne pouvaient se substituer au rôle central de l’État hôte.

Le délégué a par ailleurs vivement condamné les cas d’abus sexuels commis par les Casques bleus et a appuyé la politique de tolérance zéro, soulignant que ce sont les auteurs de ces actes, et non pas les personnes qui les dénoncent, qui doivent être l’objet de poursuites.

Mme DINA GILMUTDINOVA (Russie) a espéré que les projets de réformes structurelles du maintien de la paix seront acceptés par les États Membres.  Elle a rappelé que l’objectif principal des opérations de maintien de la paix est d’aider les parties à conclure des accords politiques de règlement des conflits et les aider à les mettre en œuvre.  Elle a ensuite indiqué que les discussions sur une interprétation souple des mandats en fonction des conditions sur le terrain ne sont, pour la Russie, pas acceptables.  « Cela mènera à un déclin de ce type de mission et créera plus de risques d’attaques pour le personnel », a-t-elle indiqué.  Elle a notamment cité en exemple ce qui s’est fait au Mali et en République démocratique du Congo, estimant que cela n’avait pas montré de meilleurs résultats sur le terrain.  « Nous n’appuyons pas une augmentation d’actions fortes et préventives, ni une participation des soldats de la paix à des actions contre le terrorisme » a-t-elle clairement fait savoir, appelant à définir des mandats clairs et réalistes, qui s’appuient sur les particularités de chaque conflit et ne cherchent pas de résoudre des problèmes génériques.

La représentante a ensuite souligné que l’établissement des mandats des opérations de maintien de la paix doit prendre en compte la perspective des pays hôtes et des pays contributeurs de troupes.  Elle a par ailleurs mis en évidence le rôle du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, principale enceinte pour débattre et prendre des décisions sur les opérations de maintien de la paix. Elle a jugé inacceptable que le Secrétariat prenne des décisions sur la base d’une interprétation des travaux de cet organe, comme cela s’est produit pour les questions de l’intelligence et de la collecte d’information. 

M. WU HAITAO (Chine) a souligné que l’évolution de l’environnement « de plus en plus complexe » dans lequel opèrent les missions signifie qu’elles doivent « s’adapter au terrain ».  Pour le représentant, qu’il y a des changements de situation justifiant une évolution des mandats des missions qui doivent être clairs et précis.  « Le mandat, c’est le guide, la base, a-t-il indiqué, et il faut se concentrer sur les besoins des pays hôtes, des pays contributeurs de troupes et s’adapter aux priorités et à la réalité de la situation ».  Il a aussi rappelé qu’il faut « fournir une assistance en respectant le principe d’appropriation par les parties », demandant par ailleurs que les pays contributeurs de troupes soient « écoutés, entendus et remerciés ».

Le représentant a insisté sur la nécessité de répondre aux demandes des pays contributeurs de troupes et d’encourager la coopération avec eux pour renforcer leur capacité.  Il a appelé à mieux soutenir les organisations régionales et sous régionales, « car elles ont des avantages réels sur le terrain et peuvent renforcer les capacités en termes de maintien de la paix ».  Il a aussi engagé le Secrétariat à renforcer l’efficacité des opérations de maintien de la paix et leurs capacités à se déployer rapidement dans des situations complexes, en renforçant notamment la chaîne logistique.  En la matière, il a souhaité qu’une plus grande attention soit consacrée à la phase de pré-déploiement, ainsi qu’au renforcement de la formation, de l’assistance médicale et de la sécurité du personnel. Il a appelé à élaborer des règles pour mieux organiser les échanges d’information entre pays hôtes et pays contributeurs de troupes concernant la sécurité des personnels déployés. 

Après avoir fait part de l’appui de la Chine à la réforme de l’architecture du maintien de la paix, le représentant a rappelé que son pays est le premier contributeur parmi les membres du Conseil de sécurité, avec quelques 2 000 personnels sur le terrain.  Il a enfin mis en avant les efforts lancés par son pays pour renforcer la formation de personnels déployés, en particulier en coopération avec l’Union africaine.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a rappelé qu’il y a un an, 70 pays se sont réunis à Londres pour examiner la façon d’améliorer le maintien de la paix et que différents engagements en étaient sortis, notamment celui de doubler le nombre de femmes d’ici à 2020, pour atteindre 15% des postes.  « En dépit des progrès, nous sommes loin d’avoir atteint cet objectif » a toutefois constaté le représentant, indiquant que son pays compte lancer un réseau de « championne militaire » lors de la prochaine Réunion des Ministres de la défense sur le maintien de la paix des Nations Unies, à Vancouver.  Le Royaume-Uni s’engage aussi à combler les lacunes en matière de capacités et assurer le déploiement rapide des troupes.  Le représentant a ensuite précisé qu’à Vancouver, le Ministre de la défense mettra l’accent sur la façon dont les modèles intelligents peuvent aider à atteindre ces objectifs.  Il a par ailleurs appelé à renforcer les opérations de maintien de la paix en améliorant la planification et en assurant une plus grande performance et responsabilité.

Poursuivant, le représentant a estimé que les réformes entreprises par le Secrétaire général sont un pas dans la bonne direction, en particulier le renforcement des missions et la proposition de planifier toute la réponse des Nations Unies dans un pays ou une région.  Il a appelé à mettre en œuvre les engagements pris afin d’adapter la composition des missions aux défis particuliers de chaque mandat, augmenter la performance, et remplacer les contingents qui n’ont pas bien fonctionné.  Avec cela, le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) pourra faire des choix plus intelligents au sujet des troupes qu’il déploie, mieux répondre aux capacités nécessaires sur le terrain et coordonner le renforcement des capacités pour améliorer la performance, a-t-il estimé.

M. RY TUY (Cambodge) a souligné l’évolution de la nature des conflits, s’inquiétant notamment de l’augmentation des risques qu’un conflit ne débouche sur des crimes de masse.  Il a estimé que les Nations Unies devaient prendre en considération les implications financières liées à ce contexte.  Il a souligné que « des mandats clairs et des dépenses claires » sont essentiels pour déployer des personnels militaires ou civils supplémentaires, surveiller les violations des droits de l’homme, créer un environnement propice à l’assistance humanitaire, élaborer des mécanismes d’alerte, et enfin soutenir les communautés et informer le public.

Soulignant que les dépenses étaient en augmentation, il a appelé à mieux planifier et gérer les opérations de maintien de la paix, apportant son soutien aux efforts de réformes du Secrétaire général.  Il a rappelé le succès des opérations de maintien de la paix en Côte d’ivoire, au Libéria ou en Haïti.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance de la formation des contingents des pays contributeurs de troupes, incluant aussi des femmes « qui ont prouvé leur performance dans les opérations de maintien de la paix ».  Il a rappelé que son pays avait fourni quelques 3 000 Casques bleus aux opérations de maintien de la paix au Soudan, Soudan du Sud, Tchad, Liban, Mali, République centrafricaine, Syrie et Chypre.

Le représentant a par ailleurs fait part de sa vive préoccupation quant aux abus sexuels.  « Des actes aussi diaboliques sont inacceptables et il est absolument critique d’assurer une pleine redevabilité » pour leurs auteurs, a-t-il souligné, apportant son soutien à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général des Nations Unies, ainsi qu’à ses efforts pour renforcer les mécanismes de prévention, d’information, de poursuites afin de promouvoir une plus grande responsabilité.    

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a dit apprécié les efforts du Secrétaire général pour introduire des changements structurels au maintien de la paix.  Malgré la succession des résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité concernant le rôle du pays hôte, il n’y a toujours pas eu de traduction dans les faits, a-t-il toutefois regretté en demandant à ce que « cela soit corrigé ».  Pour lui, il est important que les Nations Unies, par le biais du Conseil de sécurité, veille à adopter un échéancier lors de la définition des mandats des opérations de maintien de la paix, et qu’il y ait une évaluation et un examen périodique des missions liées aux progrès dans la mise en œuvre des mandats.  Le Conseil de sécurité doit prendre en compte les causes profondes des conflits, a-t-il poursuivi, et veiller à ce qu’elles ne perpétuent pas au risque d’une reprise du conflit.  Le représentant a ensuite mis en évidence la corrélation entre les sanctions et l’absence de développement, qui est une cause des conflits.

Le représentant a par ailleurs fait observer que depuis 2007, le Soudan est le pays hôte d’une des plus importantes missions de paix qui est aussi « unique »: l’Opération hybride Union africaine-ONU au Darfour (MINUAD) avec des troupes africaines sous surveillance des Nations Unies.  Le représentant a estimé que cette mission s’est acquittée de son mandat et a contribué à la stabilité au Darfour et qu’il importe à présent de définir une stratégie de sortie de la mission, citant notamment la résolution 2063 du Conseil de sécurité, qui prévoit de diminuer de moitié les effectifs de la MINUAD.  Il a indiqué que son pays avait établi, au cours des deux derniers mois, un plan de collecte des armes en plusieurs phases, avec d’abord, une collecte volontaire suivie d’une éducation civique sur l’importance de remettre les armes.  « La situation au Darfour nous incite à revoir et examiner l’imposition de sanctions faites il y a 12 ans en prenant compte de la situation à l’heure actuelle » a-t-il insisté.

M. MICHAEL MAVROS (Chypre) a insisté sur la nécessité que les opérations de maintien de la paix se concentrent sur les racines des fragilités, des violences et des conflits pour appuyer de manière efficace une paix pérenne.  Il a appuyé la volonté de réforme de l’architecture de maintien de la paix du Secrétaire général des Nations unies.  Le représentant a en outre estimé que les 15 missions déployées à travers le monde ne devaient devenir « otages de motivations d’économies », soulignant qu’elles ne représentaient que 0,5% des dépenses militaires mondiales. Il a appelé à une évaluation de chaque mission, « en fonction de son mérite, de ses besoins actuels, de l’état de la menace sur le terrain, du contexte politique et du point de vue du pays hôte ».

Il a ensuite fait part de la gratitude de son pays pour le travail de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), déplorant toutefois que la situation sur le terrain n’ait « malheureusement pas évolué depuis 1974, car 37% du territoire de l’île est toujours sous occupation ». Affirmant que cette mission reste indispensable », il a rappelé que c’était « la mission la moins couteuse des opérations de maintien de la paix -0,5% du total des opérations de maintien de la paix, dont 50% supporté par la Grèce et Chypre ». Il a souhaité que l’évaluation en cours de l’UNFICYP se concentre sur des recommandations qui permettent de rendre optimale son efficacité et la mise en œuvre de son mandat.  Il a encore insisté sur le fait que la recherche d’une meilleure gestion de ressources financières « ne constitue pas une fin en soi », rappelant que les missions ne devaient pas simplement arrêter les conflits mais s’assurer de la consolidation d’une paix durable.

Le représentant a également indiqué que les causes profondes du conflit devaient être étudiées « indépendamment de facteurs exogènes », soulignant que « la partie dominante dans un conflit ne doit pas imposer ses positions au détriment de la plus faible ».  « En dépit de la persistance du problème de Chypre, nous sommes convaincus que la situation sur le terrain et les perspectives de paix seraient aujourd’hui bien pires si les Nations Unies ne s’y étaient pas impliquées ces dernières années », a encore ajouté le représentent.

M. HASSAN ABBAS (Liban) a déploré l’intensification de la violence des conflits dans de nombreuses régions du monde, qualifiant de « cruciales » les opérations de maintien de la paix et les Mission politiques spéciales.  Il a aussi insisté sur l’importance de la prévention, de la diplomatie et des efforts de consolidation de la paix.  Il a également appelé à soutenir les pays hôtes pendant la reconstruction après conflit, citant notamment l’appui aux gouvernements et aux institutions nationales, les efforts de réconciliation, et le renforcement des capacités de l’économie.  Le représentant a aussi apporté son soutien à la politique de tolérance zéro prônée par le Secrétaire général pour combattre les abus sexuels.  Concernant la protection des civils, il a souhaité que la mise en œuvre de l’ensemble des directives existantes dans ce domaine.  Il a mis en valeur une plus grande participation des femmes aux opérations de maintien de la paix.

Rappelant ensuite que son pays accueille la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) depuis 1978 et l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST) depuis 1948 –il a réaffirmé son engagement à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité, en particulier la résolution 1701 de 2006 sur le mandat de la FINUL.  Il a appelé la communauté internationale à « contraindre Israël à se soumettre à ses obligations contenues dans cette résolution, à se retirer des territoires libanais occupés, et à cesser ses violations quotidiennes de la souveraineté du Liban ».  Il a également engagé Israël à aller de la cessation de ses hostilités vers un cessez-le-feu permanent, et à cesser de « miner la crédibilité de la FINUL ».

Concernant la coopération de son pays avec la FINUL ou l’ONUST, il a mis en avant l’efficacité des canaux de communication entre leurs commandements et l’armée libanaise.  Il a notamment salué l’assistance à l’armée libanaise qui lui permet de maintenir la sécurité et la stabilité à travers le pays, notamment dans le sud, et de combattre le terrorisme.  Il a réitéré l’engagement de son pays à préserver la sécurité du personnel onusien déployé au Liban, déplorant que la sécurité de la FINUL soit « minée continuellement par Israël depuis 1978 ».  Il a cité en exemple la mort d’un Casque bleu espagnol « suite à des bombardements israéliens en janvier 2015, de nombreux autres Casques bleus après les frappes aériennes et l’agression du Liban en 2006, et les blessures de centaines de civils et de quatre Casques bleus fidjiens après le bombardement du quartier général de la FINUL à Qana en 1996 ».

Mme ELSA HAILE (Érythrée) a mis en avant l’évolution multidimensionnelle des conflits, appelant les opérations de maintien de la paix à d’y adapter, avec de nouveaux mécanismes permettant plus d’efficacité.  Si elle a soutenu le principe d’un examen global, elle a insisté sur la nécessité que tous les aspects des opérations de maintien de la paix restent de la compétence du seul organe intergouvernemental qu’est le Comité spécial des opérations de maintien de la paix.

La représentante a ensuite demandé que plus d’efforts soient déployés dans la prévention des conflits et dans les capacités de médiation, rappelant les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix.  Elle a notamment insisté sur l’importance des stratégies de sorties de crise dès l’étape de la planification des opérations, ainsi que lors de l’examen des mandats afin de les adapter à l’évolution de la situation.  Elle a ensuite insisté sur le respect des principes énoncés dans la Charte et ceux du maintien de la paix, tout particulièrement pour ce qui est du respect de la souveraineté des pays hôtes.  « Ces principes sont essentiels pour garantir et renforcer les opérations de maintien de la paix », a-t-elle souligné.

Abordant le problème des mauvaises conduites du personnel des opérations de maintien de la paix et des abus sexuels, elle a soutenu la politique de tolérance zéro, encourageant aussi le renforcement de la place des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Elle a en outre insisté sur l’importance de la coopération et de la collaboration avec les organisations régionales.   Elle a cependant mis en garde sur le déploiement de contingents venant de pays voisins, « en particulier en Afrique », faisant observer que les intérêts nationaux peuvent aller « au-delà » de la recherche d’une paix nationale ou régionale. 

M. VOLODYMYR MIALKOUSKYI (Ukraine) a souligné que « toute opération de maintien de la paix dépend d’une constitution de la force appropriée pour être capable de remplir le mandat que lui a assigné le Conseil de sécurité ».  Il a estimé qu’en la matière, un grand pas en avant a été réalisé grâce à la mise en œuvre de la Cellule stratégique de constitution des forces et de planification des moyens qui faisait partie des recommandations du rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies.  S’appuyant toujours sur les recommandations de ce rapport, il a par ailleurs rappelé qu’on ne pouvait pas se dire déçu par les résultats d’une opération de maintien de la paix quand celle-ci n’a pas été correctement financée et équipée.  Il a notamment parlé de moyens aériens, de renseignements et de technologies modernes.  Il a aussi estimé que chaque mission doit faire l’objet d’une analyse approfondie de ses accomplissements réels au regard du mandat qui lui a été confié, l’objectif étant « d’identifier celles qui ont besoin d’une réforme structurelle et considérer le mandat de chaque mission en se focalisant sur la solution politique qu’elle doit porter ». 

Le représentant a ensuite appelé à renforcer le dialogue triangulaire entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents, notamment en améliorant les consultations formelles et informelles au cours du renouvellement et de l’établissement des mandats.  Le groupe de travail du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix pourrait servir de base à ce format de consultations triangulaires, a-t-il ajouté.  Il a ensuite réaffirmé le soutien de l’Ukraine à la politique de tolérance zéro prodiguée par l’ONU en matière d’abus sexuels commis par les Casques bleus.  Le délégué a aussi conseillé au Secrétariat et au Secrétaire général de fournir au Conseil de sécurité des rapports substantifs et francs, présentant notamment des options pour de « nouvelles présences » en matière de maintien de la paix.

Le délégué ukrainien a ensuite mis l’emphase sur le besoin des opérations de maintien de la paix de disposer d’un mandat clair, cohérent et réalisable permettant d’assurer la sécurité des civils et stopper le trafic d’armes.  Il a insisté sur le fait que la décision de déployer ces opérations ne doit pas être considérée comme une fin en soi, mais qu’elle doit, au contraire, être motivée par une solution politique ou un accord de paix.  Il a ensuite rappelé que le mois dernier, l’Ukraine a réitéré la demande qu’elle avait faite en 2015 au Conseil de sécurité d’initier les procédures pour déployer une opération de maintien de la paix sur son territoire.

En tant que pays fournisseur de troupes, M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) a indiqué que son pays soutenait la réforme du maintien de la paix annoncée par le Secrétaire général et qu’il s’alignait avec les observations du rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix.  Il a insisté sur l’importance de la prévention et de la médiation dans les conflits, qui « permet d’éviter de dépenser beaucoup de ressources, notamment humanitaires ».  Les solutions politiques doivent aller de pair avec les solutions militaires pour assurer la paix et la sécurité durables de la région concernée, a-t-il poursuivi, ajoutant que les opérations de maintien de la paix doivent protéger les civils pendant les conflits armés.  Il s’est réjoui de la résolution du Conseil de sécurité sur la primauté de la médiation, du cessez-le-feu et de la mise en œuvre des accords de paix, qui « doivent être la marque de fabrique de l’ONU ».

Le représentant a aussi appelé à des mandats plus réalistes et solides, avec des priorités claires concernant les tâches.  Il a demandé de nouvelles consultations entre le Conseil de sécurité et les pays fournisseurs de troupes « qui doivent être entendus ».  Le représentant a aussi mis en évidence le rôle accru des organisations régionales, comme l’Union africaine, qui « sont, si nécessaire, les premiers à se déployer pour stabiliser une situation ».  Il a ajouté que ces partenariats avec les organismes régionaux permettent aussi de répondre à certaines contraintes auxquelles font face les Nations Unies.  Il a demandé des mécanismes de financement prévisibles, avertissant que les coupes budgétaires pourraient renverser les acquis de certaines missions.  Le représentant a par ailleurs demandé au Secrétaire général d’entamer un processus de mise en œuvre des recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix pour relever les défis que ce dernier a pointé. Finalement, le délégué a affirmé l’attachement de son pays à la politique de tolérance zéro face aux abus sexuels, qui est « conforme à la position de son gouvernement concernant parité entre les sexes ».

Droits de réponse

Usant de son droit de réponse, Israël a dénoncé les propos tenus par le représentant de la République arabe syrienne, estimant que ces accusations venaient « d’un pays qui a toujours violé le droit international et qui se soucie peu de la vérité, d’un pays qui commet des crimes de guerre contre son propre peuple, utilise des armes chimiques et propage un discours de mensonge ».

À son tour, la République arabe syrienne a souligné qu’il n’avait pas fait des accusations mais s’était contentée de donner des faits qui sont reconnus dans les rapports des Nations Unies ».  « La présence de deux missions des Nations Unies au Golan est la conséquence de l’occupation israélienne, elle n’est pas liée aux conséquences de la situation interne, contrairement à ce que prétend la Puissance administrante occupante », a-t-il déclaré.  « Les groupes terroristes come Daech et Jabhat el-Nosra coopèrent avec Israël pour lancer des attaques sur le Golan, et qui sont un prétexte pour Israël de s’attaquer ensuite à l’armée syrienne », a-t-il encore ajouté, estimant que « cela expose la région et les personnels de la mission des Nations Unies, ainsi que son mandat et ses objectifs ».

Usant de son second droit de réponse, le représentant israélien a jugé qu’il était « ironique que le représentant syrien parle des inquiétudes pour les civils de son pays ».  « Nous avons tous vu les atrocités perpétrées par son régime contre son peuple », a-t-il lancé.

Reprenant lui aussi la parole, le représentant de la République arabe syrienne a qualifié son homologue israélien de « représentant de la pire occupation connue dans l’histoire ».  Il a estimé que s’il était « préoccupé par le sort du peuple syrien, pourquoi ne convainc-t-il pas le gouvernement qu’il représente de se retirer sur la ligne de 1967 pour que les habitants du Golan rentrent chez eux ». « S’il est soucieux du peuple syrien, pourquoi son régime a détruit plus de 270 villes, fermes et villages après l’occupation de cette région? » s’est-il encore interrogé.  « S’il est soucieux du peuple syrien, a-t-il encore lancé, son régime devrait s’abstenir d’appuyer des groupes armés dans le Golan et s’abstenir de commettre des exactions contre nos habitants du Golan ».

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