En cours au Siège de l'ONU

Soixante-douzième session,
18e séance – matin
CPSD/647

Drones, coopération régionale et évolution des mandats: la Quatrième Commission débat de l’avenir des opérations de maintien de la paix

Les nouvelles technologies peuvent-elles apporter une solution à l’« évolution multidimensionnelle des conflits » et aux dangers d’un « environnement asymétrique » auxquels font face les Casques bleus?  C’est la question posée ce matin par plusieurs délégations de la Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation), qui se réunissaient à nouveau pour débattre de l’avenir des opérations de maintien de la paix.

Cette discussion avait pour toile de fond les préoccupations de nombreux États Membres quant à la situation sécuritaire des Casques bleus.  « Les soldats de l’ONU sont devenus la cible de menaces quotidiennes générées par la prolifération d’armes et la violence confessionnelle », s’est notamment inquiété le représentant du Bangladesh tandis que la représentante de Cuba a déploré de très nombreuses pertes en vies humaines parmi les soldats de la paix ces dernières années.

Pour plusieurs délégations, à l’instar du Nigéria, le recours aux technologies modernes en matière de collecte d’informations, de communication, de surveillance aérienne et de détection de mines et d’explosifs, ne fait aucun doute. « Celles-ci doivent être employées de manière réaliste et prudente », a cependant mis en garde le représentant du Bangladesh, qui a précisé qu’elles ne pouvaient « en aucun cas se substituer au déploiement de Casques bleus dûment formés sur le terrain ».

Son homologue du Venezuela a toutefois souligné que certaines technologies modernes, notamment les drones, peuvent, représenter une menace à la souveraineté des pays hôtes.  Dans ce contexte, il a défendu la mise ne place de normes claires pour réglementer leur usage, notamment en protégeant la confidentialité des communications gouvernementales et en empêchant les pratiques en violation du droit international.

Reconnaissant que ces technologies peuvent améliorer la connaissance de l’environnement et contribuer à la sécurité du personnel, la représentante de Cuba a invité à réaliser une analyse au cas par cas, qui tienne compte de la souveraineté des États, mais aussi à définir les aspects juridiques, opérationnels, techniques et financiers relatifs à l’emploi de ces techniques.

Pour répondre aux situations de plus en plus complexes sur le terrain, plusieurs représentants ont également insisté sur la nécessité de faire évoluer les mandats, qui doivent être « sur mesure » et offrir une « souplesse suffisante » pour s’adapter aux situations.  « Le mandat, c’est le guide, la base », a affirmé le représentant de la Chine, précisant qu’il faut se concentrer sur les besoins des pays hôtes, des pays contributeurs de troupes et s’adapter aux priorités et à la réalité de la situation.  Plusieurs délégations ont abondé dans son sens, le représentant du Mexique ajoutant que les missions devaient aussi inclure « toutes les phases au sortir du conflit » et contribuer « de manière cohérente et multisectorielle » à une paix durable. 

Des divergences sont cependant apparues, la déléguée russe s’opposant à une « interprétation souple des mandats en fonction des conditions sur le terrain » car cela créerait plus de risques d’attaque pour le personnel.  Elle a fait savoir que son pays n’appuierait pas « une augmentation d’actions fortes et préventives, ni une participation des soldats de la paix à des actions contre le terrorisme ».  Les délégués de l’Argentine et du Venezuela se sont alignés sur cette position, le premier rappelant que les opérations de maintien la paix « n’ont pas été conçues pour imposer des solutions politiques par la force ni pour mener des opérations de lutte contre le terrorisme » tandis que le second a mis en garde contre « la tentation de confier des mandats plus robustes aux missions », avertissant que cela pourrait impliquer encore plus ces missions dans des conflits.  « Il y a aussi des opérations qui ont duré trop longtemps, sans remplir leur mandat aux objectifs peu clairs », a-t-il ajouté.

Pour de nombreuses délégations, africaines notamment, l’avenir des opérations de maintien de la paix passe également par un renforcement de la coopération régionale.  Le délégué du Nigéria a exhorté l’ONU et les organisations régionales à profiter de leur complémentarité, l’une portant la légitimité et l’autorité qui découle de sa Charte, pendant que les autres apportent « une perspective unique sur les peuples, la culture, l’environnement et les problèmes sous-jacents qui menacent la paix ».  Le délégué d’Afrique du Sud, quant à lui, a mis en évidence le fait que des organisations régionales sont souvent les premières à se déployer pour stabiliser une situation.

« Des réponses africaines doivent être apportées aux problèmes africains », a renchéri le représentant de la Namibie.  Ce dernier a appelé à la pleine mise en œuvre du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, dans le but de renforcer la coopération dans les domaines de la prévention de conflit, la gestion des crises et la reconstruction après les conflits.  Le représentant du Nigéria a en outre appelé à la finalisation de l’examen commun ONU-Union africaine des mécanismes de financement de ces opérations qui envisage que les Nations Unies prennent en charge 75% du budget de l’Union africaine relatif aux missions autorisées par le Conseil de sécurité.

La collaboration bénéfique de l’Union africaine avec l’ONU a aussi été mise en évidence par le représentant du Soudan qui a parlé du succès de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD).

Tout en indiquant que « ces partenariats avec les organismes régionaux permettent aussi de répondre à certaines contraintes auxquelles font face les Nations Unies », les délégations ont cependant appelé à des « fonds suffisants, réguliers et durables destinés aux opérations dirigées par des pays africains ». Seul bémol: l’intervention de la déléguée de l’Érythrée qui a mis en garde sur le déploiement de contingents venant de pays voisins, « en particulier en Afrique », en faisant observer que les intérêts nationaux peuvent aller « au-delà » de la recherche d’une paix nationale ou régionale. 

La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 27 octobre, à partir de 10 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS

Suite du débat général

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a souligné que la paix durable ne passe pas par les solutions militaires mais par les résolutions politiques.  À ce titre, il a salué la résolution 2379 de l’ONU qui met l’emphase sur ce principe.  Évoquant les nouveaux défis qu’affrontent les opérations de maintien de la paix, il a estimé que la volonté de réforme de l’architecture de maintien de la paix est une excellente nouvelle qui permettra aux différentes missions de mieux remplir leurs mandats.  Il a plaidé pour qu’une procédure d’examen régulier de ce mécanisme soit mise en place afin de s’assurer qu’il est bien aligné avec les objectifs et rôles des opérations de maintien de la paix.

Appelant les Nations Unies à mieux considérer l’importance des pays contributeurs de troupes, il a demandé à ce qu’on renforce la communication avec eux et qu’un meilleur soutien leur soit prodigué, aussi bien en termes d’équipements que de formations. Il a également souligné le lien entre la paix et le développement durable.

Le représentant a notamment appelé à aligner le Programme de développement durable à l’horizon 2030 avec l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA) dans le but de répondre aux racines des conflits en Afrique.  Il a souligné que des « réponses africaines doivent être apportées aux problèmes africains ».  Il a appelé à la pleine mise en œuvre du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, expliquant que cela permettra de renforcer la coopération dans les domaines de la prévention de conflit, la gestion des crises et la reconstruction après les conflits.

M. Gertze s’est par ailleurs inquiété des récentes coupures budgétaires dans les opérations de maintien de la paix qui, a-t-il mis en garde, risque de faire perdre les gains obtenus dans certains conflits.  Il a aussi mis l’emphase sur le rôle fondamental que jouent les femmes en matière de paix et de sécurité, signalant par ailleurs que la Namibie est pleinement engagée dans la politique de tolérance zéro en ce qui concerne les abus sexuels perpétrés durant les opérations de maintien de la paix.

S’il a défendu une modernisation des opérations de maintien de la paix, M. MOUNZER MOUNZER (République arabe syrienne) a souligné que ces opérations n’étaient pas une solution permettant de résoudre de manière durable des conflits, insistant sur le besoin de s’attaquer aux causes profondes.  Il a également indiqué que la responsabilité de la protection des civils incombe aux pays hôtes et que les opérations de maintien de la paix ne doivent pas toucher ou ignorer cette responsabilité.  Il a appelé à ne pas utiliser la protection des civils pour s’ingérer dans les affaires des États, réclamant par ailleurs une définition juridique et commune du concept de protection des civils.

Après s’être félicité des bons rapports entre son pays et la Force des Nations Unies chargée d'observer le désengagement (FNUOD) et l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), le représentant a fait observer que le déploiement d’une opération de maintien de la paix au Moyen-Orient « dure depuis des années en raison de la poursuite par Israël de l’occupation des territoires arabes ».  Il a accusé Israël de faire fi du droit international et de mettre à mal la sécurité de la région entière par ses politiques d’occupation.  Le représentant syrien a fait observer que quatre opérations de maintien de la paix opèrent actuellement dans la région, ce qui exerce des pressions sur les ressources financières et humaines des Nations Unies.  Il a demandé à la communauté internationale de faire pression sur Israël pour permettre aux peuples de la région de vivre en paix et au personnel des Nations Unies déployé de rentrer chez lui.

Le délégué a ensuite fait part de sa vive préoccupation au sujet des attaques terroristes qui ciblent les Casques bleus et les opérations de maintien de la paix. Il a déploré que certains postes aient dû être évacués dans le Golan, et a accusé Israël d’« appuyer des groupes terroristes affiliés à Al-Qaida ».  Il a aussi dénoncé des violations « flagrantes de l’Accord de séparation, du droit international et du mandat de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) ».  Il a notamment déploré que les informations transmises aux Nations Unies à ce sujet soient restées lettre morte, accroissant les menaces de ces groupes et les attaques perpétrées contre les postes onusiens « avec l’appui total d’Israël ».  

M. ROLANDO CASTRO CORDOBA (Costa Rica) a rappelé que son pays s’était désarmé de par sa propre volonté depuis 69 ans, convaincu que c’est de cette façon qu’il peut contribuer à la paix et sécurité internationales.  Il a indiqué que dans sa région, trois missions de maintien de la paix s’étaient terminées avec succès, imputant cette réussite à l’appropriation nationale, la clarté des objectifs et des mandats définis par le Conseil de sécurité ainsi qu’à une communication large et transparente.  Le représentant s’est dit inquiet de constater que la rhétorique belliciste augmente dans le monde sans réaction appropriée de la communauté internationale.  Il a également constaté que la nature des conflits a changé, estimant qu’il faut y répondre en lançant des réformes pour permettre aux opérations de maintien de la paix d’accorder la priorité à la prévention et de mettre l’accent sur une plus grande équité économique, le développement durable, une culture de paix, ainsi qu’une participation démocratique effective.

Le représentant a aussi affirmé que les opérations de maintien de la paix doivent se concentrer sur l’être humain et protéger les civils des violations des droits de l’homme.  C’est dans cet esprit que les mandats doivent être formulés, ils doivent être « sur mesure » et offrir une souplesse suffisante pour répondre aux situations sur le terrain, a-t-il estimé.

Le représentant a aussi insisté sur la politique de tolérance zéro concernant les abus sexuels, soulignant que l’ONU représente souvent « la dernière lueur d’espoir pour les peuples ».  « Ces abus nuisent gravement à la crédibilité des opérations de maintien de la paix, et empêchent la mise en œuvre des mandats concernant la protection des civils », a-t-il affirmé, appelant par ailleurs à punir les auteurs de ces actes et non pas les lanceurs d’alerte.  Enfin, il a insisté sur la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix, soulignant qu’elles ont un rôle clef à jouer dans la transition de la guerre vers la paix, la cohésion sociale et le redressement économique.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a déclaré que, face à l’évolution des conflits armés et à la nature changeante des nouveaux défis à la paix et au développement, l’ONU se doit d’articuler une nouvelle approche pour concrétiser sa finalité ultime: le maintien de la paix et la sécurité internationales.  Au cours des décennies passées, « nous avons consacré la majeure partie de nos ressources humaines et financières à nous occuper des conflits plutôt qu’à les prévenir » a-t-il constaté, invitant à examiner plus amplement les questions afférentes aux opérations de maintien de la paix en vue du renforcement de cet « outil principal de l’ONU » et de l’adapter aux besoins de la société contemporaine. 

Il a estimé que l’adoption des résolutions historiques 70/262 de l’Assemblée générale et 2282 (2016) du Conseil de sécurité témoigne de l’engagement de ces deux organes à façonner les réponses de l’ONU liées au maintien de la paix à travers le concept de paix durable, le renforcement du volet prévention, et des approches intégrales pour remédier aux causes structurelles de conflits.  Plus concrètement, il s’agit pour M. Mendiolea de consolider la capacité de l’ONU à trouver des solutions multidimensionnelles, à formuler et exécuter des solutions politiques, de sécurité, de développement des droits de l’homme, mais aussi de prêter attention aux questions humanitaires, le tout en prenant en considération la perspective sexospécifique.

Dans cette optique, le Mexique estime que le Comité des 34 devrait veiller à ce que les mandats de ces opérations soient suffisamment souples, proches de la réalité et des besoins sur le terrain, qu’ils incluent toutes les phases au sortir du conflit et contribuent également, de manière cohérente et multisectorielle, à une paix durable.  Le représentant a aussi jugé indispensable de renforcer l’interaction et la coordination entre le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de contingents, les donateurs, les États bénéficiaires, les organisations régionales, les agences pertinentes du système, les autorités nationales et la société civile.  Il a recommandé à l’Assemblée générale d’amorcer un examen intégral des opérations de maintien de la paix, « notamment la forme controversée de fonctionnement et de financement des missions politiques spéciales », en tant que partie essentielle de la réforme globale de l’architecture de paix et sécurité de l’ONU.     

Mme GABRIELA MARTINIC (Argentine) a rappelé que son pays avait activement participé à la MINUSTAH, et s’est félicitée de la fin de cette mission, rendant hommage au personnel qui y a contribué durant 13 ans.  Elle s’est félicitée du projet de réforme et a apporté son soutien à l’approche centrée sur la médiation et la diplomatie préventive.  Elle a aussi souligné le rôle important du Comité spécial des opérations de maintien de la paix en tant qu’instance unique pour examiner les questions relatives aux opérations de maintien de la paix.

« Les opérations de maintien de la paix doivent s’inscrire dans le cadre d’une stratégie à l’appui d’un processus politique plus large » a poursuivi la représentante, qui a insisté sur le nouvel accent mis sur la prévention et l’approche holistique, « afin d’éviter la fragmentation des efforts ».  Elle a recommandé d’utiliser les conseils de la Commission de consolidation de la paix pour assurer la pérennité de la paix.  Elle a aussi appelé à éliminer les obstacles qui empêchent la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix. Concernant le recours à la force, elle a pris acte de la position du Groupe indépendant de haut niveau chargée d’étudier les opérations de maintien de la paix mais a indiqué que cela ne devrait pas constituer un obstacle pour agir de manière robuste pour assurer la protection des civils, la sécurité du personnel, ou la bonne mise en œuvre du mandat des opérations de maintien de la paix.

Par ailleurs, la représentante a affirmé que les opérations de maintien de la paix n’ont pas été conçues pour imposer des solutions politiques par la force ni pour mener des opérations de lutte contre le terrorisme.  Elle a appelé à une meilleure planification, avec des priorités établies dès le début, soulignant que les opérations doivent bénéficier de personnel spécialement formé et de ressources financières adéquates pour pouvoir s’acquitter de leurs mandats.  Enfin, elle a dit qu’elle accordait une importance capitale à la composante « droits de l’homme » présente dans un certain nombre de missions.

M. MOHAMMAD HELMY AHMAD ABOULWAFA (Égypte) a mis en avant la nécessité de s’attaquer aux causes des conflits et souligné que les opérations de maintien de la paix doivent rester des outils déployés dans un cadre politique, prévoyant des stratégies de sortie de crise dès l’étape de planification.  Il a aussi souligné que le respect des principes fondamentaux du maintien de la paix –consentement des parties, impartialité et non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense- assurait la crédibilité des Nations Unies.

Tout en reconnaissant que la protection des civils a évolué, il a estimé qu’elle ne doit pas servir de prétexte à des interventions militaires.  Il a réclamé une définition claire de la protection des civils, qui distingue civils et combattants.  Le représentant a également appelé à renforcer les organisations régionales, via un soutien à l’Union africaine, avec des ressources financières. Il a constaté qu’il y a « un véritable besoin de coopération triangulaire entre le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de troupes et le Secrétariat de l’ONU lors de la planification des missions et de la définition des mandats ».

En tant que pays contributeur de troupes, il a indiqué que l’Égypte était attachée à fournir des contingents disposant du matériel nécessaire, pour un déploiement rapide.  « Cet engagement doit être pris en compte, quand il s’agit d’élargir des contingents », a-t-il ajouté.  Le représentant a ensuite défendu la poursuite des efforts pour lutter contre les abus sexuels, appelant à ce que la politique de tolérance zéro s’applique non seulement aux troupes mais à l’ensemble du personnel de l’ONU.

Enfin, le représentant a constaté que les défis complexes d’aujourd’hui nécessitent une approche plus « robuste, avec des outils les plus propices pour s’attaquer aux causes des conflits et identifier des solutions viables et durables ».  L’objectif doit rester la pérennisation de la paix, a-t-il souligné, avant d’insister sur l’impératif d’adopter des approches globales et inclusives. 

M. AHMED (Bangladesh) a fait remarquer que plusieurs missions des Nations Unies ne disposent pas des capacités nécessaires à la mise en œuvre de leurs mandats, qui sont de plus en plus multidimensionnels.  En dépit des efforts consentis par tous les partenaires des Nations Unies, il demeure difficile de constituer des forces et de recevoir l’appui technique et logistique requis, a-t-il regretté.  Il a ensuite indiqué que si son pays soutient l’utilisation des nouvelles technologies dans les opérations de maintien de la paix, celles-ci doivent être employées de manière réaliste et prudente.  En aucun cas, ces technologies, notamment d’information et de télécommunication, ne doivent se substituer au déploiement de Casques bleus dûment formés sur le terrain, a-t-il notamment souligné.  Pour le délégué, les Casques bleus, avant d’être des combattants, sont des contributeurs de paix professionnels et impartiaux, et « c’est pour cela qu’il faut trouver les moyens de renforcer leur sécurité et leur protection ».  Notant que les soldats de l’ONU sont devenus la cible de menaces quotidiennes générées par la prolifération d’armes et la violence confessionnelle, il a mis l’accent sur la nécessité, pour les pays fournisseurs de troupes et les forces de l’ordre des pays hôtes, de consacrer davantage de temps à la sécurisation de l’environnement d’intervention des Casques bleus.  Enfin, il a souligné l’importance de renforcer le partenariat et la coordination entre le Conseil de sécurité, les pays fournisseurs de contingents ou de personnels de police et le Secrétariat de l’Organisation.

M. MICHAEL ONYEDIKA OKWUDILI (Nigéria) a considéré que l’évolution des conflits actuels exige des processus de paix qui soient valables dans le présent et dans le futur.  Répondre correctement aux enjeux d’aujourd’hui et de demain exige des Nations Unies de créer des mécanismes qui priorisent les outils politiques, sociaux et de développement, a-t-il indiqué.  À ses yeux, cette stratégie converge parfaitement avec la doctrine de prévention et de paix durable qui gagne du terrain et permet de s’attaquer aux causes des conflits avant qu’ils ne dégénèrent.

Plaidant ensuite pour une meilleure protection des contingents des missions des Nations Unies, il a estimé que des rencontres régulières entre ces missions et les autorités du pays d’accueil permettraient de bâtir une relation de confiance qui pourrait devenir la clef de leur succès.  Face à l’augmentation des risques asymétriques auxquels font face les Casques bleus, le délégué a jugé nécessaire d’avoir recours aux technologies modernes en matière de collecte d’information, de communication, de surveillance aérienne et de détection de mines et d’explosifs.

Le représentant a dit également sa colère face aux abus sexuels perpétrés par des Casques bleus et d’autres employés déployés sur les zones de conflit: « c’est une honte que des atrocités de ce genre aient encore cours.  Le temps est venu pour les États Membres de prendre les devants », a-t-il lancé, précisant que le Nigéria fait partie du « cercle de dirigeants » qui regroupe les pays ayant une présence opérationnelle sur le terrain et qui se sont engagés à faire face aux abus et atteintes sexuels.

Pour améliorer l’efficacité des opérations, le délégué du Nigéria a aussi exhorté l’ONU et les organisations régionales à mieux coopérer et profiter de leur complémentarité.  « L’une porte la légitimité et l’autorité qui découle de sa Charte, pendant que les autres apportent une perspective unique sur les peuples, la culture, l’environnement et les problèmes sous-jacents qui menacent la paix », a-t-il notamment fait observer.  Il a appelé à une forte coopération entre les Nations Unies et l’Union africaine étant donné le nombre de missions de maintien de la paix déployées sur le continent.  « Des fonds suffisants, réguliers et durables destinés aux opérations dirigées par des pays africains demeurent un besoin qui doit être comblé sans délai », a-t-il souligné.  Le Nigéria appelle d’ailleurs à la finalisation de l’examen commun ONU-UA des mécanismes de financement de ces opérations qui envisage que les Nations Unies prennent en charge 75% du budget de l’Union africaine relatif aux missions autorisées par le Conseil de sécurité.

Mme SONIA ISHAQ AHMAD SUGHAYAR (Jordanie) a appuyé les efforts déployés par le Secrétaire général pour réformer les opérations de maintien de la paix, insistant sur la nécessité, pour les Nations Unies, de renforcer leur capacité d’action et d’organisation, pour être mieux adaptées, assurer une meilleure pérennisation de la paix et atteindre les objectifs de développement durable.

Elle a estimé que les opérations de maintien de la paix avaient montré leur efficacité dans de nombreux pays, soulignant toutefois qu’elles pouvaient être améliorées.  « Nous devons comprendre les différences entre les missions et leur contexte, afin de pouvoir assurer une réaction rapide à l’apparition d’un conflit », a-t-elle expliqué, réclamant plus d’autonomie pour que les missions puissent réagir aux menaces qu’elles identifient.  Elle a également indiqué que si les opérations de maintien de la paix comblent souvent un vide et assurent la protection des civils, elles ne doivent pas remplacer la réhabilitation des forces armées nationales.  Aussi a-t-elle insisté sur la mise en œuvre de « périodes de transition et d’évaluation des situations politiques ».  Elle a également demandé à développer la dimension droits de l’homme des missions, à améliorer la formation des personnels, et à renforcer la place de la société civile.  Elle a aussi encouragé les femmes à s’impliquer davantage, « car leur rôle est complémentaire, notamment dans les affaires humanitaires »

« Nous avons besoin d’un mécanisme triangulaire entre Conseil de sécurité Secrétariat et pays contributeurs de troupes pour plus de transparence, d’efficacité et de réactivité sur les opérations de maintien de la paix, notamment sur les conflits transnationaux », a encore ajouté la représentante, insistant sur la coopération entre local, régional et international.  Elle a aussi soutenu la politique de tolérance zéro et réclamé des mesures efficaces contre les abus sexuels, impliquant des poursuites en justice.  La représentante a par ailleurs indiqué que son pays avait fourni quelques 1 200 personnes pour des opérations de maintien de la paix et qu’il était engagé à faire plus.

M. PERREN (Suisse) a souligné que les défis de sécurité ne peuvent pas être gérés efficacement sans prise en compte des droits de l’homme et du développement.  Une approche globale et inclusive est la plus prometteuse pour rendre les sociétés plus résilientes et réduire les violences, a-t-il déclaré, insistant sur le « rôle crucial » de la prévention des conflits.  Il a mis en avant une initiative lancée par la Suisse et 70 autres pays baptisée « Appel du 13 juin » et visant à placer les droits de l’homme au cœur de la prévention des conflits.  « Nous voulons avec cet appel renforcer la coopération entre deux piliers clefs des Nations Unies -Paix et sécurité/droits de l’homme- afin d’améliorer les outils des Nations Unies pour la prévention des conflits et la pérennisation de la paix », a-t-il expliqué.

Le délégué a ensuite réitéré son plein soutien aux efforts du Secrétaire général des Nations Unies et du Conseil de sécurité quant aux abus sexuels.  « Que des victimes de guerres et de conflits soient aussi victimes de violences sexuelles aux mains de représentants de l’ONU qui sont censés les protéger dépasse l’entendement et doit cesser urgemment », a-t-il martelé.  « On le doit aux populations civiles, aux pays hôtes, mais aussi à la majorité écrasante de Casques bleus honnêtes qui risquent chaque jour leur vie pour la paix », a-t-il ajouté, réitérant son soutien à la politique de tolérance zéro et aux mesures annoncées par le Secrétaire général dans ce domaine.

Le représentant a également touché mot de la coopération avec les organisations régionales, estimant que les efforts déployés sur le terrain par les Nations Unies doivent privilégier l’appropriation nationale, et se dérouler en coopération avec les parties prenantes au niveau régional, national et international.  Il a appelé les Nations Unies à travailler « main dans la main » avec les organisations régionales, citant notamment l’exemple de la collaboration entre l’OSCE et l’Union africaine.  Il a indiqué que les domaines de la formation et de l’entrainement des troupes, ainsi que de la mobilisation des civils, de la police et des forces armées s’y prêtaient particulièrement.

Mme CASTRO LOREDO (Cuba) a constaté que les mandats des missions s’étaient transformés ces dernières années, pour devenir plus multidimensionnels, vastes et complexes, et a estimé que cela entrainait des contradictions avec les principes fondamentaux régissant les opérations de maintien de la paix.  Elle a souligné que les opérations de maintien de la paix ne peuvent se substituer à un travail sur les causes profondes des conflits et a jugé inquiétant que certains cherchent à utiliser ces missions pour lutter contre l’extrémisme ou le crime organisé.  « Cela ne peut qu’augmenter le risque d’attaques », a-t-elle notamment averti.

Elle a aussi souligné que les opérations de maintien de la paix devaient être une mesure provisoire pour créer un cadre de sécurité permettant la mise en œuvre d’une stratégie à long terme pour appuyer le développement durable du pays hôte. Concernant la protection de civils, elle a affirmé que la principale responsabilité revenait aux États et qu’il était inacceptable qu’on utilise cet argument pour atteindre des objectifs politiques et s’ingérer dans les affaires internes des pays.  Elle a aussi appelé à augmenter la coopération triangulaire entre le Secrétariat, le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes.  Elle a notamment regretté que ces derniers ne puissent, dans la plupart des cas, participer activement à toutes les étapes du processus de décision.

Sur le recours aux nouvelles technologies, elle a invité à s’appuyer sur une analyse au cas par cas, et à rester dans le cadre des principes consacrés, notamment la souveraineté des États et l’intégrité territoriale ainsi que le consentement du pays hôte.  Elle a reconnu que ces technologies peuvent améliorer la connaissance de l’environnement et contribuer à la sécurité du personnel, mais a partagé son inquiétude quant au recours aux drones.  Il faut définir les aspects juridiques, opérationnels, techniques et financiers relatifs à l’emploi de ces techniques, a-t-elle estimé, ajoutant que ces nouvelles technologies peuvent compléter les travaux des opérations de maintien de la paix mais ne peuvent s’y substituer.  Enfin, elle a dit son inquiétude quant aux très nombreuses pertes en vies humaines parmi les Casques bleus ces dernières années.  « Il est nécessaire de développer des accords de sécurité et de protection pour ceux qui participent à ces opérations ».

Notant que les missions de maintien la paix se déploient dans un environnement de plus en plus en dangereux et qu’elles font face à de multiples défis, Mme SONALI SAMARASINGHE (Sri Lanka) a appelé à leur fournir davantage de ressources pour réaliser leur mandat.  À cet égard, elle s’est félicitée que le Département de l’appui aux missions ait renforcé la compétition pour l’approvisionnement des vivres aux troupes et à la police, ce qui, selon elle, améliorera la qualité et réduira les coûts.  Elle a aussi salué l’amélioration du soutien médical aux soldats de la paix.  Ensuite, elle a qualifié d’essentiel le déploiement rapide de contingents en uniforme, ainsi que l’équipement et la formation adaptés au besoin du pays destinataire, appelant à combler les manques en matière de capacités et d’équipements par des partenariats.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité de fournir des mandats clairs et un financement prévisible.  « Il est aussi vital de combler les manques en matière d’appréciation de la situation, par un renforcement des formations et de l’intelligence », a souligné la déléguée.

Poursuivant, Mme Samarasinghe a insisté sur le principe d’appropriation nationale, soulignant qu’il devait y avoir une attention claire, de la part des pays hôtes, de bâtir des institutions nationales, renforcer les structures de sécurité nationale et d’instaurer une justice « restauratrice et de réconciliation ».  Elle a aussi appelé à créer des réseaux d’information locaux et de renseignement, afin de mieux protéger les civils et les non combattants.  Les opérations de maintien de la paix, a-t-elle ajouté, doivent être un « soutien aux efforts diplomatiques, et non un palliatif à ces efforts ».  Elle a aussi insisté sur la participation des femmes, citant des recherches qui montrent qu’elles ont plus de succès lorsqu’il s’agit de construire des relations avec les communautés locales et qu’elles sont des modèles pour inspirer d’autres femmes à rejoindre les services de sécurité.  « Si elles sont présentes en plus grand nombre, elles peuvent aussi être un catalyseur pour résoudre le problème des abus sexuels, a analysé la représentante.

À ce sujet, Sri Lanka appuie la politique de tolérance zéro, et procède à un contrôle strict lors de la sélection de troupes qui suivent une formation préalable au déploiement, et reçoivent des manuels de sensibilisation sur l’exploitation sexuelle et l’abus des enfants.  Sri Lanka a aussi signé le pacte volontaire du Secrétaire général pour l’élimination de l’exploitation et des abus sexuels.

En tant que pays en situation postconflit, Sri Lanka est aussi très conscient des liens entre le renforcement du maintien de la paix et ses propres efforts de consolidation de la paix, a fait savoir la déléguée, qui a particulièrement mis en évidence l’importance de la réintégration des anciens combattants comme condition d’une paix pérenne.

M. DOUGLAS NICOMEDES ARCIA VIVAS (Venezuela) a rappelé que les opérations de maintien de la paix sont un instrument important qui doit être utilisé pour étayer le soutien à des solutions politiques, conformément à la Charte des Nations Unies. Il a défendu une analyse en profondeur, pour déterminer si une situation nécessite ou pas le déploiement d’une mission, soulignant que parfois « il n’y a pas de paix à préserver ».  Insistant sur le fait que les Casques bleus n’ont pas vocation à combattre le terrorisme ou le crime organisé, il a mis en garde contre la tentation de confier des mandats plus robustes aux missions, avertissant que cela pourrait impliquer encore plus ces missions dans des conflits, alors même qu’elles sont censées jouer un rôle de facilitateur de paix.  Il y a aussi eu des opérations qui ont duré trop longtemps, sans remplir leur mandat aux objectifs peu clairs, maintenues simplement en position d’attente, et sans bénéficier d’un appui politique approprié, a-t-il poursuivi.

Poursuivant, le représentant a indiqué que si certaines technologies modernes pouvaient contribuer positivement à l’efficacité des missions, elles pouvaient également représenter une menace à la souveraineté des pays hôtes.  Dans ce contexte, il a défendu la mise ne place de normes claires pour réglementer leur usage, notamment en protégeant la confidentialité des communications gouvernementales et en empêchant les pratiques en violation du droit international. « L'utilisation de drones dans les opérations de maintien de la paix, par exemple, doit être soumise à l’approbation des autorités hôtes », a-t-il insisté, soulignant que les pays hôtes et les mandats doivent être scrupuleusement respectés.  Le représentant s’est aussi dit préoccuper que la vision ou les préoccupations des pays contributeurs de troupes ne soient pas davantage prises en compte dans la prise de décisions dès lors qu’il s’agit du déploiement d’opérations les impliquant.  Il a souhaité que ces pays participent activement aux décisions du Conseil de sécurité.  Tout en saluant les efforts déployés par les opérations de maintien de la paix pour protéger les civils et renforcer les capacités des États, il a rappelé que ces activités ne pouvaient se substituer au rôle central de l’État hôte.

Le délégué a par ailleurs vivement condamné les cas d’abus sexuels commis par les Casques bleus et a appuyé la politique de tolérance zéro, soulignant que ce sont les auteurs de ces actes, et non pas les personnes qui les dénoncent, qui doivent être l’objet de poursuites.

Mme DINA GILMUTDINOVA (Russie) a espéré que les projets de réformes structurelles du maintien de la paix seront acceptés par les États Membres.  Elle a rappelé que l’objectif principal des opérations de maintien de la paix est d’aider les parties à conclure des accords politiques de règlement des conflits et les aider à les mettre en œuvre.  Elle a ensuite indiqué que les discussions sur une interprétation souple des mandats en fonction des conditions sur le terrain ne sont, pour la Russie, pas acceptables.  « Cela mènera à un déclin de ce type de mission et créera plus de risques d’attaques pour le personnel », a-t-elle indiqué.  Elle a notamment cité en exemple ce qui s’est fait au Mali et en République démocratique du Congo, estimant que cela n’avait pas montré de meilleurs résultats sur le terrain.  « Nous n’appuyons pas une augmentation d’actions fortes et préventives, ni une participation des soldats de la paix à des actions contre le terrorisme » a-t-elle clairement fait savoir, appelant à définir des mandats clairs et réalistes, qui s’appuient sur les particularités de chaque conflit et ne cherchent pas de résoudre des problèmes génériques.

La représentante a ensuite souligné que l’établissement des mandats des opérations de maintien de la paix doit prendre en compte la perspective des pays hôtes et des pays contributeurs de troupes.  Elle a par ailleurs mis en évidence le rôle du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, principale enceinte pour débattre et prendre des décisions sur les opérations de maintien de la paix. Elle a jugé inacceptable que le Secrétariat prenne des décisions sur la base d’une interprétation des travaux de cet organe, comme cela s’est produit pour les questions de l’intelligence et de la collecte d’information. 

M. WU HAITAO (Chine) a souligné que l’évolution de l’environnement « de plus en plus complexe » dans lequel opèrent les missions signifie qu’elles doivent « s’adapter au terrain ».  Pour le représentant, qu’il y a des changements de situation justifiant une évolution des mandats des missions qui doivent être clairs et précis.  « Le mandat, c’est le guide, la base, a-t-il indiqué, et il faut se concentrer sur les besoins des pays hôtes, des pays contributeurs de troupes et s’adapter aux priorités et à la réalité de la situation ».  Il a aussi rappelé qu’il faut « fournir une assistance en respectant le principe d’appropriation par les parties », demandant par ailleurs que les pays contributeurs de troupes soient « écoutés, entendus et remerciés ».

Le représentant a insisté sur la nécessité de répondre aux demandes des pays contributeurs de troupes et d’encourager la coopération avec eux pour renforcer leur capacité.  Il a appelé à mieux soutenir les organisations régionales et sous régionales, « car elles ont des avantages réels sur le terrain et peuvent renforcer les capacités en termes de maintien de la paix ».  Il a aussi engagé le Secrétariat à renforcer l’efficacité des opérations de maintien de la paix et leurs capacités à se déployer rapidement dans des situations complexes, en renforçant notamment la chaîne logistique.  En la matière, il a souhaité qu’une plus grande attention soit consacrée à la phase de pré-déploiement, ainsi qu’au renforcement de la formation, de l’assistance médicale et de la sécurité du personnel. Il a appelé à élaborer des règles pour mieux organiser les échanges d’information entre pays hôtes et pays contributeurs de troupes concernant la sécurité des personnels déployés. 

Après avoir fait part de l’appui de la Chine à la réforme de l’architecture du maintien de la paix, le représentant a rappelé que son pays est le premier contributeur parmi les membres du Conseil de sécurité, avec quelques 2 000 personnels sur le terrain.  Il a enfin mis en avant les efforts lancés par son pays pour renforcer la formation de personnels déployés, en particulier en coopération avec l’Union africaine.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a rappelé qu’il y a un an, 70 pays se sont réunis à Londres pour examiner la façon d’améliorer le maintien de la paix et que différents engagements en étaient sortis, notamment celui de doubler le nombre de femmes d’ici à 2020, pour atteindre 15% des postes.  « En dépit des progrès, nous sommes loin d’avoir atteint cet objectif » a toutefois constaté le représentant, indiquant que son pays compte lancer un réseau de « championne militaire » lors de la prochaine Réunion des Ministres de la défense sur le maintien de la paix des Nations Unies, à Vancouver.  Le Royaume-Uni s’engage aussi à combler les lacunes en matière de capacités et assurer le déploiement rapide des troupes.  Le représentant a ensuite précisé qu’à Vancouver, le Ministre de la défense mettra l’accent sur la façon dont les modèles intelligents peuvent aider à atteindre ces objectifs.  Il a par ailleurs appelé à renforcer les opérations de maintien de la paix en améliorant la planification et en assurant une plus grande performance et responsabilité.

Poursuivant, le représentant a estimé que les réformes entreprises par le Secrétaire général sont un pas dans la bonne direction, en particulier le renforcement des missions et la proposition de planifier toute la réponse des Nations Unies dans un pays ou une région.  Il a appelé à mettre en œuvre les engagements pris afin d’adapter la composition des missions aux défis particuliers de chaque mandat, augmenter la performance, et remplacer les contingents qui n’ont pas bien fonctionné.  Avec cela, le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) pourra faire des choix plus intelligents au sujet des troupes qu’il déploie, mieux répondre aux capacités nécessaires sur le terrain et coordonner le renforcement des capacités pour améliorer la performance, a-t-il estimé.

M. RY TUY (Cambodge) a souligné l’évolution de la nature des conflits, s’inquiétant notamment de l’augmentation des risques qu’un conflit ne débouche sur des crimes de masse.  Il a estimé que les Nations Unies devaient prendre en considération les implications financières liées à ce contexte.  Il a souligné que « des mandats clairs et des dépenses claires » sont essentiels pour déployer des personnels militaires ou civils supplémentaires, surveiller les violations des droits de l’homme, créer un environnement propice à l’assistance humanitaire, élaborer des mécanismes d’alerte, et enfin soutenir les communautés et informer le public.

Soulignant que les dépenses étaient en augmentation, il a appelé à mieux planifier et gérer les opérations de maintien de la paix, apportant son soutien aux efforts de réformes du Secrétaire général.  Il a rappelé le succès des opérations de maintien de la paix en Côte d’ivoire, au Libéria ou en Haïti.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance de la formation des contingents des pays contributeurs de troupes, incluant aussi des femmes « qui ont prouvé leur performance dans les opérations de maintien de la paix ».  Il a rappelé que son pays avait fourni quelques 3 000 Casques bleus aux opérations de maintien de la paix au Soudan, Soudan du Sud, Tchad, Liban, Mali, République centrafricaine, Syrie et Chypre.

Le représentant a par ailleurs fait part de sa vive préoccupation quant aux abus sexuels.  « Des actes aussi diaboliques sont inacceptables et il est absolument critique d’assurer une pleine redevabilité » pour leurs auteurs, a-t-il souligné, apportant son soutien à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général des Nations Unies, ainsi qu’à ses efforts pour renforcer les mécanismes de prévention, d’information, de poursuites afin de promouvoir une plus grande responsabilité.    

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a dit apprécié les efforts du Secrétaire général pour introduire des changements structurels au maintien de la paix.  Malgré la succession des résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité concernant le rôle du pays hôte, il n’y a toujours pas eu de traduction dans les faits, a-t-il toutefois regretté en demandant à ce que « cela soit corrigé ».  Pour lui, il est important que les Nations Unies, par le biais du Conseil de sécurité, veille à adopter un échéancier lors de la définition des mandats des opérations de maintien de la paix, et qu’il y ait une évaluation et un examen périodique des missions liées aux progrès dans la mise en œuvre des mandats.  Le Conseil de sécurité doit prendre en compte les causes profondes des conflits, a-t-il poursuivi, et veiller à ce qu’elles ne perpétuent pas au risque d’une reprise du conflit.  Le représentant a ensuite mis en évidence la corrélation entre les sanctions et l’absence de développement, qui est une cause des conflits.

Le représentant a par ailleurs fait observer que depuis 2007, le Soudan est le pays hôte d’une des plus importantes missions de paix qui est aussi « unique »: l’Opération hybride Union africaine-ONU au Darfour (MINUAD) avec des troupes africaines sous surveillance des Nations Unies.  Le représentant a estimé que cette mission s’est acquittée de son mandat et a contribué à la stabilité au Darfour et qu’il importe à présent de définir une stratégie de sortie de la mission, citant notamment la résolution 2063 du Conseil de sécurité, qui prévoit de diminuer de moitié les effectifs de la MINUAD.  Il a indiqué que son pays avait établi, au cours des deux derniers mois, un plan de collecte des armes en plusieurs phases, avec d’abord, une collecte volontaire suivie d’une éducation civique sur l’importance de remettre les armes.  « La situation au Darfour nous incite à revoir et examiner l’imposition de sanctions faites il y a 12 ans en prenant compte de la situation à l’heure actuelle » a-t-il insisté.

M. MICHAEL MAVROS (Chypre) a insisté sur la nécessité que les opérations de maintien de la paix se concentrent sur les racines des fragilités, des violences et des conflits pour appuyer de manière efficace une paix pérenne.  Il a appuyé la volonté de réforme de l’architecture de maintien de la paix du Secrétaire général des Nations unies.  Le représentant a en outre estimé que les 15 missions déployées à travers le monde ne devaient devenir « otages de motivations d’économies », soulignant qu’elles ne représentaient que 0,5% des dépenses militaires mondiales. Il a appelé à une évaluation de chaque mission, « en fonction de son mérite, de ses besoins actuels, de l’état de la menace sur le terrain, du contexte politique et du point de vue du pays hôte ».

Il a ensuite fait part de la gratitude de son pays pour le travail de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), déplorant toutefois que la situation sur le terrain n’ait « malheureusement pas évolué depuis 1974, car 37% du territoire de l’île est toujours sous occupation ». Affirmant que cette mission reste indispensable », il a rappelé que c’était « la mission la moins couteuse des opérations de maintien de la paix -0,5% du total des opérations de maintien de la paix, dont 50% supporté par la Grèce et Chypre ». Il a souhaité que l’évaluation en cours de l’UNFICYP se concentre sur des recommandations qui permettent de rendre optimale son efficacité et la mise en œuvre de son mandat.  Il a encore insisté sur le fait que la recherche d’une meilleure gestion de ressources financières « ne constitue pas une fin en soi », rappelant que les missions ne devaient pas simplement arrêter les conflits mais s’assurer de la consolidation d’une paix durable.

Le représentant a également indiqué que les causes profondes du conflit devaient être étudiées « indépendamment de facteurs exogènes », soulignant que « la partie dominante dans un conflit ne doit pas imposer ses positions au détriment de la plus faible ».  « En dépit de la persistance du problème de Chypre, nous sommes convaincus que la situation sur le terrain et les perspectives de paix seraient aujourd’hui bien pires si les Nations Unies ne s’y étaient pas impliquées ces dernières années », a encore ajouté le représentent.

M. HASSAN ABBAS (Liban) a déploré l’intensification de la violence des conflits dans de nombreuses régions du monde, qualifiant de « cruciales » les opérations de maintien de la paix et les Mission politiques spéciales.  Il a aussi insisté sur l’importance de la prévention, de la diplomatie et des efforts de consolidation de la paix.  Il a également appelé à soutenir les pays hôtes pendant la reconstruction après conflit, citant notamment l’appui aux gouvernements et aux institutions nationales, les efforts de réconciliation, et le renforcement des capacités de l’économie.  Le représentant a aussi apporté son soutien à la politique de tolérance zéro prônée par le Secrétaire général pour combattre les abus sexuels.  Concernant la protection des civils, il a souhaité que la mise en œuvre de l’ensemble des directives existantes dans ce domaine.  Il a mis en valeur une plus grande participation des femmes aux opérations de maintien de la paix.

Rappelant ensuite que son pays accueille la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) depuis 1978 et l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST) depuis 1948 –il a réaffirmé son engagement à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité, en particulier la résolution 1701 de 2006 sur le mandat de la FINUL.  Il a appelé la communauté internationale à « contraindre Israël à se soumettre à ses obligations contenues dans cette résolution, à se retirer des territoires libanais occupés, et à cesser ses violations quotidiennes de la souveraineté du Liban ».  Il a également engagé Israël à aller de la cessation de ses hostilités vers un cessez-le-feu permanent, et à cesser de « miner la crédibilité de la FINUL ».

Concernant la coopération de son pays avec la FINUL ou l’ONUST, il a mis en avant l’efficacité des canaux de communication entre leurs commandements et l’armée libanaise.  Il a notamment salué l’assistance à l’armée libanaise qui lui permet de maintenir la sécurité et la stabilité à travers le pays, notamment dans le sud, et de combattre le terrorisme.  Il a réitéré l’engagement de son pays à préserver la sécurité du personnel onusien déployé au Liban, déplorant que la sécurité de la FINUL soit « minée continuellement par Israël depuis 1978 ».  Il a cité en exemple la mort d’un Casque bleu espagnol « suite à des bombardements israéliens en janvier 2015, de nombreux autres Casques bleus après les frappes aériennes et l’agression du Liban en 2006, et les blessures de centaines de civils et de quatre Casques bleus fidjiens après le bombardement du quartier général de la FINUL à Qana en 1996 ».

Mme ELSA HAILE (Érythrée) a mis en avant l’évolution multidimensionnelle des conflits, appelant les opérations de maintien de la paix à d’y adapter, avec de nouveaux mécanismes permettant plus d’efficacité.  Si elle a soutenu le principe d’un examen global, elle a insisté sur la nécessité que tous les aspects des opérations de maintien de la paix restent de la compétence du seul organe intergouvernemental qu’est le Comité spécial des opérations de maintien de la paix.

La représentante a ensuite demandé que plus d’efforts soient déployés dans la prévention des conflits et dans les capacités de médiation, rappelant les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix.  Elle a notamment insisté sur l’importance des stratégies de sorties de crise dès l’étape de la planification des opérations, ainsi que lors de l’examen des mandats afin de les adapter à l’évolution de la situation.  Elle a ensuite insisté sur le respect des principes énoncés dans la Charte et ceux du maintien de la paix, tout particulièrement pour ce qui est du respect de la souveraineté des pays hôtes.  « Ces principes sont essentiels pour garantir et renforcer les opérations de maintien de la paix », a-t-elle souligné.

Abordant le problème des mauvaises conduites du personnel des opérations de maintien de la paix et des abus sexuels, elle a soutenu la politique de tolérance zéro, encourageant aussi le renforcement de la place des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Elle a en outre insisté sur l’importance de la coopération et de la collaboration avec les organisations régionales.   Elle a cependant mis en garde sur le déploiement de contingents venant de pays voisins, « en particulier en Afrique », faisant observer que les intérêts nationaux peuvent aller « au-delà » de la recherche d’une paix nationale ou régionale. 

M. VOLODYMYR MIALKOUSKYI (Ukraine) a souligné que « toute opération de maintien de la paix dépend d’une constitution de la force appropriée pour être capable de remplir le mandat que lui a assigné le Conseil de sécurité ».  Il a estimé qu’en la matière, un grand pas en avant a été réalisé grâce à la mise en œuvre de la Cellule stratégique de constitution des forces et de planification des moyens qui faisait partie des recommandations du rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies.  S’appuyant toujours sur les recommandations de ce rapport, il a par ailleurs rappelé qu’on ne pouvait pas se dire déçu par les résultats d’une opération de maintien de la paix quand celle-ci n’a pas été correctement financée et équipée.  Il a notamment parlé de moyens aériens, de renseignements et de technologies modernes.  Il a aussi estimé que chaque mission doit faire l’objet d’une analyse approfondie de ses accomplissements réels au regard du mandat qui lui a été confié, l’objectif étant « d’identifier celles qui ont besoin d’une réforme structurelle et considérer le mandat de chaque mission en se focalisant sur la solution politique qu’elle doit porter ». 

Le représentant a ensuite appelé à renforcer le dialogue triangulaire entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents, notamment en améliorant les consultations formelles et informelles au cours du renouvellement et de l’établissement des mandats.  Le groupe de travail du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix pourrait servir de base à ce format de consultations triangulaires, a-t-il ajouté.  Il a ensuite réaffirmé le soutien de l’Ukraine à la politique de tolérance zéro prodiguée par l’ONU en matière d’abus sexuels commis par les Casques bleus.  Le délégué a aussi conseillé au Secrétariat et au Secrétaire général de fournir au Conseil de sécurité des rapports substantifs et francs, présentant notamment des options pour de « nouvelles présences » en matière de maintien de la paix.

Le délégué ukrainien a ensuite mis l’emphase sur le besoin des opérations de maintien de la paix de disposer d’un mandat clair, cohérent et réalisable permettant d’assurer la sécurité des civils et stopper le trafic d’armes.  Il a insisté sur le fait que la décision de déployer ces opérations ne doit pas être considérée comme une fin en soi, mais qu’elle doit, au contraire, être motivée par une solution politique ou un accord de paix.  Il a ensuite rappelé que le mois dernier, l’Ukraine a réitéré la demande qu’elle avait faite en 2015 au Conseil de sécurité d’initier les procédures pour déployer une opération de maintien de la paix sur son territoire.

En tant que pays fournisseur de troupes, M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) a indiqué que son pays soutenait la réforme du maintien de la paix annoncée par le Secrétaire général et qu’il s’alignait avec les observations du rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix.  Il a insisté sur l’importance de la prévention et de la médiation dans les conflits, qui « permet d’éviter de dépenser beaucoup de ressources, notamment humanitaires ».  Les solutions politiques doivent aller de pair avec les solutions militaires pour assurer la paix et la sécurité durables de la région concernée, a-t-il poursuivi, ajoutant que les opérations de maintien de la paix doivent protéger les civils pendant les conflits armés.  Il s’est réjoui de la résolution du Conseil de sécurité sur la primauté de la médiation, du cessez-le-feu et de la mise en œuvre des accords de paix, qui « doivent être la marque de fabrique de l’ONU ».

Le représentant a aussi appelé à des mandats plus réalistes et solides, avec des priorités claires concernant les tâches.  Il a demandé de nouvelles consultations entre le Conseil de sécurité et les pays fournisseurs de troupes « qui doivent être entendus ».  Le représentant a aussi mis en évidence le rôle accru des organisations régionales, comme l’Union africaine, qui « sont, si nécessaire, les premiers à se déployer pour stabiliser une situation ».  Il a ajouté que ces partenariats avec les organismes régionaux permettent aussi de répondre à certaines contraintes auxquelles font face les Nations Unies.  Il a demandé des mécanismes de financement prévisibles, avertissant que les coupes budgétaires pourraient renverser les acquis de certaines missions.  Le représentant a par ailleurs demandé au Secrétaire général d’entamer un processus de mise en œuvre des recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix pour relever les défis que ce dernier a pointé. Finalement, le délégué a affirmé l’attachement de son pays à la politique de tolérance zéro face aux abus sexuels, qui est « conforme à la position de son gouvernement concernant parité entre les sexes ».

Droits de réponse

Usant de son droit de réponse, Israël a dénoncé les propos tenus par le représentant de la République arabe syrienne, estimant que ces accusations venaient « d’un pays qui a toujours violé le droit international et qui se soucie peu de la vérité, d’un pays qui commet des crimes de guerre contre son propre peuple, utilise des armes chimiques et propage un discours de mensonge ».

À son tour, la République arabe syrienne a souligné qu’il n’avait pas fait des accusations mais s’était contentée de donner des faits qui sont reconnus dans les rapports des Nations Unies ».  « La présence de deux missions des Nations Unies au Golan est la conséquence de l’occupation israélienne, elle n’est pas liée aux conséquences de la situation interne, contrairement à ce que prétend la Puissance administrante occupante », a-t-il déclaré.  « Les groupes terroristes come Daech et Jabhat el-Nosra coopèrent avec Israël pour lancer des attaques sur le Golan, et qui sont un prétexte pour Israël de s’attaquer ensuite à l’armée syrienne », a-t-il encore ajouté, estimant que « cela expose la région et les personnels de la mission des Nations Unies, ainsi que son mandat et ses objectifs ».

Usant de son second droit de réponse, le représentant israélien a jugé qu’il était « ironique que le représentant syrien parle des inquiétudes pour les civils de son pays ».  « Nous avons tous vu les atrocités perpétrées par son régime contre son peuple », a-t-il lancé.

Reprenant lui aussi la parole, le représentant de la République arabe syrienne a qualifié son homologue israélien de « représentant de la pire occupation connue dans l’histoire ».  Il a estimé que s’il était « préoccupé par le sort du peuple syrien, pourquoi ne convainc-t-il pas le gouvernement qu’il représente de se retirer sur la ligne de 1967 pour que les habitants du Golan rentrent chez eux ». « S’il est soucieux du peuple syrien, pourquoi son régime a détruit plus de 270 villes, fermes et villages après l’occupation de cette région? » s’est-il encore interrogé.  « S’il est soucieux du peuple syrien, a-t-il encore lancé, son régime devrait s’abstenir d’appuyer des groupes armés dans le Golan et s’abstenir de commettre des exactions contre nos habitants du Golan ».

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