En cours au Siège de l'ONU

Soixante-douzième session,
22e séance - après-midi
AG/J/3557

La Sixième Commission se penche sur la protection de l’atmosphère et l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a porté son attention, aujourd’hui, sur les chapitres VI et VII du rapport de la Commission du droit international (CDI), consacrés à la protection de l’atmosphère et à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, après avoir complété son examen des projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité et à l’application provisoire des traités. 

Venu présenter le second groupe de chapitres thématiques, le Président de la Commission du droit international, M. Georg Nolte, en a profité pour annoncer que les activités entourant le soixante-dixième anniversaire de la CDI, en 2018, seront financées par des contributions volontaires des États Membres. 

Saisie du quatrième rapport du Rapporteur spécial sur la protection de l’atmosphère, qui étudiait notamment la relation entre les règles du droit international relatives à la protection de l’atmosphère et d’autres règles pertinentes du droit international, comme celles du droit international du commerce et de l’investissement, du droit de la mer et du droit international des droits de l’homme, la CDI a adopté à titre provisoire, lors de sa soixante-neuvième session, un projet de directive portant sur la relation entre règles pertinentes.

Ouvrant le débat au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, les Îles Marshall ont jugé les projets de directives sur la protection de l’atmosphère « extrêmement importants » pour la communauté internationale, et vitaux pour les petits États insulaires en développement.  Alors que la montée du niveau de la mer causée par le réchauffement climatique représente une « menace existentielle » pour ces États, la délégation a appelé à prêter une attention particulière aux personnes vulnérables aux changements climatiques, notamment les peuples autochtones et les communautés locales.

Une proposition jugée « problématique » par l’Union européenne, qui a préconisé l’approche plus équilibrée de l’Accord de Paris de 2015, qui contient le principe de « responsabilités communes mais différenciées ».  L’Autriche a souligné que les groupes spécifiques mentionnés dans le projet de directive, soit les populations autochtones, les populations des pays les moins avancés, et les populations des zones côtières de faible élévation et des petits États insulaires en développement, font bien partie des groupes particulièrement vulnérables.

Si l’Union européenne a salué le lien qui est créé entre la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes, elle a toutefois jugé préférable de ne pas inclure dans les projets de directives des concepts ou des formulations contraires aux accords internationaux existants sur le droit de l’environnement.  Mettant en garde contre les mesures de géo-ingénierie, son délégué a jugé utile de se référer au « principe de précaution » et au fait que 150 États signataires de la Convention sur la diversité biologique de 1992 ont déjà entrepris d’en limiter l’utilisation.  Singapour a mis l’accent sur le bien-être des générations futures.

La commission a également débattu de la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Saisie du cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale sur cette question, la CDI a adopté, par vote plutôt que par consensus, lors de sa dernière session, un projet d’article intitulé « Crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas ».

Bien que la Rapporteuse spéciale ait indiqué dans ce rapport qu’elle n’avait pas été en mesure de déterminer l’existence d’une règle coutumière autorisant l’application de limites ou d’exceptions à l’immunité ratione personae, elle a déterminé que des limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère s’appliquaient effectivement aux représentants de l’État dans le contexte de l’immunité ratione materiae.  Cette question fondamentale du droit international a fait l’objet d’un débat « intense et complet », a rappelé le Président de la CDI.  

La Norvège, au nom des pays nordiques, a réitéré sa position voulant qu’aucune règle d’immunité ne devrait s’appliquer en droit interne pour les crimes internationaux les plus graves, estimant par ailleurs que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) devrait être envisagé comme faisant partie du droit international coutumier.

La question de l’immunité relève de la souveraineté juridique nationale, a par contre insisté le Soudan.  Prenant note des désaccords qui subsistent entre les membres de la Sixième Commission sur cette question, l’Ukraine a fait remarquer que le droit interne relatif à l’immunité diffère grandement d’un pays à l’autre, et qu’il est souvent basé sur le cas par cas, ainsi que sur des motifs d’ordre politique.  À cet égard, l’Autriche a fait valoir que les restrictions à l’immunité devraient être combinées aux protections procédurales, afin d’éviter les poursuites pénales contre les représentants officiels de l’État motivées politiquement.

Pour leur part, l’Ukraine, le Mexique et la Slovénie ont déploré que l’acte d’agression ne figure pas sur la liste des crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, dont le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. 

Afin de servir au mieux les intérêts de la communauté internationale, le Portugal a préconisé un équilibre entre l’égalité et la souveraineté des États, les droits individuels et la nécessité d’éviter l’impunité en cas de crime grave au regard du droit international.

Le Rapporteur spécial de la Commission sur les crimes contre l’humanité, M. Sean Murphy, a déclaré avoir entendu, au cours des débats des derniers jours, un appui fort des États Membres en faveur des travaux de la CDI sur les crimes contre l’humanité, ajoutant que leurs suggestions sur les 15 projets d’articles seront prises en compte dans la rédaction du rapport final.

Dernier intervenant sur cette question, le Conseil de l’Europe a rappelé qu’il a été l’un des premiers acteurs internationaux à s’attaquer à la question de la lutte contre l’impunité, dans le cadre de la Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. 

La Sixième Commission poursuivra son examen du rapport de la Commission du droit international demain, vendredi 27 octobre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Suite des déclarations

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a considéré que les poursuites judiciaires efficaces dans les cas de crimes contre l’humanité doivent être menées par tous, en prenant des mesures aux niveaux international et national et en renforçant la coopération internationale sous toutes ses modalités, y compris par le biais de l’extradition et de l’entraide judiciaire.  Pour sa part, le Mozambique s’est dit déterminé à coopérer et à prêter son appui à la tendance actuelle consistant à prévenir de tels crimes et à lutter contre eux, afin de mettre fin à l’impunité.  À cet égard, le représentant a affirmé que c’est le devoir de chaque État d’exercer sa juridiction criminelle.  Les travaux de la CDI, a-t-il ajouté, sont d’une importance capitale pour mobiliser l’engagement politique des États. 

Chaque État devrait prendre les mesures nécessaires pour que les crimes contre l’humanité constituent des infractions au regard de son droit pénal, a déclaré M. DANAIL CHAKAROV (Bulgarie).  « L’incorporation de cette obligation dans un traité multilatéral est un pas important pour traiter de ces atrocités et mettre fin à l’impunité dans le monde », a-t-il dit.  Il a appuyé la liste non exhaustive d’infractions sur laquelle tous les États devraient tomber d’accord. Reconnaissant que les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité sont bien structurés et qu’ils comblent des lacunes dans le système pénal international existant, il a invité tous les pays à approfondir l’examen de ce sujet, qui est inscrit depuis longtemps dans le programme de travail des Nations Unies.

Par ailleurs, M. Chakarov a salué les projets de directives sur l’application provisoire des traités.  Ils consolident les pratiques diverses des États et se conforment aux dispositions pertinentes de la Convention de Vienne sur le droit des traités et de la Convention de Vienne sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales.  Des clarifications additionnelles sur ce sujet sont toutefois nécessaires en raison de la nature spécifique des dispositions précitées, qui entrent pratiquement en vigueur avant le reste du traité lui-même.  Il y a en effet beaucoup de malentendus entre les praticiens, a souligné le représentant, d’où la pertinence des travaux de la commission. 

Mme LIYANA MUHAMMAD FUAD (Malaisie) a estimé que les différents scénarios évoqués, dans le cadre desquels pourraient s’appliquer à titre provisoire les traités, devraient être approchés avec prudence, en raison des conséquences que cela pourrait avoir sur le plan juridique.  Au nombre de ses réserves, figure l’application provisoire en rapport avec les autres dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, et avec la pratique des organisations internationales.  Elle a noté que la Commission du droit international a adopté à titre provisoire tous les projets de directives 1 à 11, tels que présentés par le Comité de rédaction plus tôt cette année.  Elle a estimé qu’il subsiste des doutes quant à certaines parties des projets de directives, qui doivent « offrir une meilleure compréhension et interprétation » et prendre en compte les législations internes des États.  À cet égard, la législation de la Malaisie ne prévoit aucune disposition explicite qui interdise ou autorise l’application à titre provisoire des traités. 

Mme Fuad a noté que le projet de directive 10 s’aligne sur la formulation de l’article 46 de la Convention de Vienne de 1969 et devrait être considéré conjointement avec cet article.  Pour la Malaisie, la signature des traités ne crée pas nécessairement une obligation juridique lorsque le traité exige d’être ratifié ou approuvé.  « Cependant, il faut mentionner le fait que chaque État doit veiller à ce que l’expression de son consentement à appliquer un traité à titre provisoire soit compatible avec sa législation interne », a préconisé la déléguée.  En l’état, la Malaisie n’envisagera de devenir partie à un traité international une fois son cadre juridique domestique en place, a-t-elle poursuivi.  S’agissant du projet de directive 11, elle a argué que le projet de directive 9 stipule que le droit interne d’un État ou les règles internes d’une organisation internationale peuvent ne pas être invoqués pour justifier l’échec à s’acquitter d’obligations internationales découlant de l’application provisoire des traités.  En dernière instance, elle a précisé qu’il est crucial de distinguer l’application provisoire d’un traité spécifique de la source des obligations prévues par le traité en question. 

Après avoir déclaré que son pays souffre des effets de « l’agression de la Russie », M. VOLODYMYR PAVLICHENKO (Ukraine) a mis l’accent sur le chapitre IV du rapport de la Commission du droit international, portant sur les crimes contre l’humanité.  Il a indiqué que, selon le rapport de l’« International Partnership for Human Rights » (IPHR), des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ont été commis dans le cadre du conflit en cours.  Afin d’établir un cadre juridique universel pour ces crimes, il a exprimé l’espoir que les projets d’articles adoptés par la CDI deviennent une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Il a salué la création d’un groupe de travail sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, estimant que l’impact humanitaire de la dégradation de l’environnement a des conséquences directes sur le bien-être de la population et les droits de l’homme.  Il a invité la CDI à approfondir son examen des questions de complémentarité et de responsabilité pénale, notamment des acteurs non étatiques, dans le contexte de la protection de l’environnement lors de conflits. 

Prenant note des désaccords qui subsistent au sujet du chapitre VII du rapport de la commission, qui porte sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a fait remarquer que les législations nationales diffèrent grandement et sont souvent basées sur le cas par cas, ainsi que sur des motifs politiques.  « Les États totalitaires suivent la pratique de l’impunité pour leurs dirigeants et leurs représentants, peu importe la gravité des crimes qu’ils ont commis », a déploré le représentant, ajoutant qu’il en va de même pour les juridictions internationales auxquelles les États en cause ne sont pas parties, en vertu de l’article 34 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En dépit de la décision de la commission de ne pas inclure le crime d’agression dans la liste des crimes visés, il a estimé que l’agression devrait être assujettie à la non-applicabilité de l’immunité ratione materiae en tant que crime grave en vertu du droit international.

M. YAZAN BAZADOUGH (Jordanie) a appuyé dans leur ensemble les textes proposés pour l’adoption d’une convention sur les crimes contre l’humanité.  Selon lui, une telle convention doit être élaborée pour combler les lacunes du droit international.  Sachant que les conflits armés non internationaux sont les plus répandus, il a estimé qu’il est donc essentiel de pouvoir les couvrir aussi.  Il a considéré que le projet de convention n’est pas en contradiction avec le Statut de Rome.  La définition des crimes contre l’humanité figurant dans l’article 3 est importante parce qu’elle adopte des points cruciaux, comme la répression du crime d’apartheid.

Par ailleurs, le représentant a appuyé le principe de l’obligation d’exercer l’action pénale aut dedere aut judiciare, tel que formulé à l’article 10.  « C’est un point de droit international d’une grande importance », a-t-il souligné.  En outre, la protection des victimes et témoins, que l’on retrouve dans l’article 12, est un ajout important qui reflète les dernières évolutions du droit international.  Il a proposé d’imposer aux États la création d’un fonds destiné à l’indemnisation des victimes. 

M. FONSECA DOS SANTOS PEREIRA (Timor-Leste) a déclaré que la lutte contre l’impunité pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre est nécessaire au développement durable, à la paix et à la sécurité internationales, ainsi qu’à la protection des droits de l’homme.  S’agissant du chapitre 4 du rapport, portant sur les crimes contre l’humanité, il a déclaré qu’en tant que signataire du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), le Timor-Leste appuie intégralement tous les instruments juridiques internationaux afin de lutter contre l’impunité. 

Toutefois, le représentant a considéré que l’extradition devrait se faire en vertu des accords réciproques entre États parties.  Il a rappelé que son pays a mis sur pied un service d’enquête spécialisée à cet effet.  Il a considéré que les efforts visant à lutter contre l’impunité constituent un jalon important afin d’assurer l’état de droit aux niveaux national et international.  En conclusion, il s’est prononcé en faveur de l’adoption d’une convention contraignante afin de lutter efficacement contre l’impunité pour les crimes contre l’humanité.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme MARTA REQUENA, déléguée du Conseil de l’Europe, a noté que le Rapporteur spécial de la Commission du droit international (CDI) sur cette question, M. Pavel Šturma, avait transmis à la CDI un premier rapport, dans lequel il présentait notamment un sondage sur les pratiques relatives à des cas de succession d’États en Europe centrale et occidentale au cours des années 1990.  Or, Mme Requena a souhaité porter à l’attention de la Sixième Commission l’existence d’un projet pilote du Conseil de l’Europe, portant précisément sur cette question.  Dans le cadre de ce projet pilote, a-t-elle souligné, 16 États membres du Conseil de l’Europe ont fourni des données nationales sur leurs pratiques en matière de succession d’États et de reconnaissance au Comité des conseillers juridiques sur le droit international public du conseil.  Mme Requena a estimé que les résultats de cette étude pourraient bénéficier aux travaux du Rapporteur spécial.

Concernant les crimes contre l’humanité, la représentante a rappelé que le Conseil de l’Europe avait été l’un des premiers acteurs à s’attaquer à la question de la lutte contre l’impunité des auteurs de ces crimes, dans le cadre de sa Convention européenne sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, adoptée en 1974.  Abordant le troisième rapport du Rapporteur spécial sur cette question, Mme Requena a souhaité apporter une précision sur le chapitre du rapport lié aux victimes, témoins et autres personnes.  Ce chapitre, a-t-elle dit, mentionne dans une note de bas de page les lignes directrices sur la protection des victimes d’actes terroristes adoptées par la Direction générale des droits de l’homme et de l’état de droit du Conseil de l’Europe, le 2 mars 2005.  Or, a-t-elle informé, ces lignes directrices ont été révisées, le 19 mai 2017, pour les adapter aux évolutions du terrorisme.  Elle a appelé à faire en sorte que le projet d’article 14 de la future convention sur les crimes contre l’humanité adopte une approche aussi « holistique » que la nouvelle version de ces lignes directrices.

S’agissant de l’application provisoire des traités, la représentante a appelé à inclure dans le mémorandum établi par le Secrétariat sur cette question des exemples précis concernant la pratique du Conseil de l’Europe en matière d’application de dispositions de traités spécifiques.

Venu présenter le second groupe de chapitres thématiques, le Président de la Commission du droit international (CDI), M. GEORG NOLTE, a indiqué que les activités entourant le soixante-dixième anniversaire de la CDI seront financées par des contributions volontaires.  Saisie du quatrième rapport du Rapporteur spécial sur la Protection de l’atmosphère, qui proposait des directives sur la relation entre les règles du droit international relatives à la protection de l’atmosphère et d’autres règles pertinentes du droit international, telles que le droit commercial international, le droit de la mer et le droit international des droits de l’homme, la CDI a adopté à titre provisoire le projet de directive 9 portant sur la relation entre règles pertinentes a-t-il déclaré.  

Saisie du cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale sur la question des limites et des exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la CDI a adopté le projet d’article 7 intitulé « crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas ».  M. Nolte a indiqué que la notion d’exception à l’immunité est une question fondamentale du droit international et qu’elle a fait l’objet d’un débat « intense et complet », notamment en ce concerne l’immunité ratione materiae.  Il a noté que l’adoption de ce projet d’articles a fait l’objet d’un vote plutôt que d’un consensus entre les États Membres.

Le Président a précisé que, bien que la Rapporteuse spéciale ait indiqué dans ce rapport qu’elle n’avait pas été en mesure de déterminer l’existence d’une règle coutumière autorisant l’application de limites ou d’exceptions à l’immunité ratione personae, elle a déterminé que des limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère s’appliquaient effectivement aux représentants de l’État dans ce contexte.  Au paragraphe 1 du projet d’article 7 se trouve une liste des crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, y compris le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, qui constituent les crimes les plus graves au regard du droit international, a-t-il ajouté.  M. Nolte a précisé que l’immunité ratione materiae ne s’applique pas à l’immunité ratione personae.

S’exprimant au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, Mme AMATLAIN E. KABUA (Îles Marshall) a jugé les projets de directives sur la protection de l’atmosphère « extrêmement importants » pour la communauté internationale, et vitaux pour les petits États insulaires.  Elle a souligné que l’un des impacts les plus graves de la dégradation atmosphérique est la montée du niveau de la mer causée par le réchauffement climatique, qui représente une « menace existentielle » pour les États insulaires. 

Malgré le fait que les petits États insulaires du Pacifique sont parmi les plus faibles contributeurs au réchauffement de la planète, ils courent le risque d’être submergés au cours de ce siècle, a averti la représentante.  Elle a suggéré à la commission d’ajouter la question de la montée du niveau de la mer d’un point de vue juridique à son programme de travail à long terme, en raison de ses effets sur l’intégrité territoriale des États, soulignant l’urgence de tenir ce débat.  Selon elle, une attention spéciale devrait être portée aux personnes vulnérables aux changements climatiques, notamment les peuples autochtones et les communautés locales.

M. LUCIO GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, a jugé préférable de ne pas inclure dans les projets de directives des concepts ou des formulations contraires aux accords internationaux existants sur le droit de l’environnement.  S’agissant du projet de directive 7 sur la modification intentionnelle à grande échelle de l’atmosphère, il a estimé que la formulation actuelle implique à tort que les mesures de géo-ingénierie sont en général admissibles, alors que l’Union européenne considère que le projet de directive cherche à rester neutre à ce sujet.  D’après le délégué, il faut se référer au « principe de précaution » et au fait que 150 États signataires de la Convention sur la diversité biologique de 1992 ont déjà entrepris de limiter l’utilisation de mesures de géo-ingénierie.

Pour M. Gussetti, la référence à la situation et aux besoins particuliers des pays en développement est « problématique ».  Il a préconisé l’approche plus équilibrée de l’Accord de Paris de 2015 qui contient le principe de « responsabilités communes mais différenciées ».  Pour ce qui est de la relation entre le droit de l’atmosphère et le droit international du commerce et de l’investissement, il a noté avec satisfaction que le quatrième rapport du Rapporteur spécial mentionne l’Accord économique et commercial global (CETA) entre le Canada, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part.

M. Gussetti a fait remarquer que la décision de l’Union européenne de limiter temporairement l’application de son système d’échange de droits d’émission aux vols de toutes les compagnies aériennes opérant entre des pays européens n’était pas fondée sur son incompatibilité éventuelle avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce.  En effet, l’Union européenne considère que sa Directive sur l’aviation est pleinement conforme au droit international, y compris le droit international du commerce.

Approuvant le projet de directive 9, le délégué a salué le lien qui est créé entre la protection de l’atmosphère et les autres règles de droit international pertinentes.  En matière de droit de la mer, il a rappelé la décision prise par l’Organisation maritime internationale (OMI) en 2016 de baisser de 0,50% d’ici à 2020 la teneur maximum en soufre des carburants marins, ce qui réduira la pollution atmosphérique.  Il a souhaité que tous les États, à commencer par les États du pavillon, prennent des mesures en ce sens.  Concernant les droits de l’homme, il a cité l’étude du Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui a conclu que la pollution atmosphérique était cancérigène pour les humains.  À ce sujet, il a souligné que les segments les plus pauvres de la population étaient particulièrement vulnérables.

Pour ce qui est du projet de préambule, M. Gussetti a proposé d’inclure des références au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, à l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris et à la nécessité de ratifier le Protocole de 1999 à la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, relatif à la réduction de l’acidification, de l’eutrophisation et de l’ozone troposphérique (Protocole de Göteborg), et de refléter la déclaration politique sur la pollution qui sera adoptée par l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement en décembre prochain.

M. HELGE SELAND (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a tenu à faire des remarques concernant le chapitre VII du rapport sur les limites et exceptions à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Il a réitéré que pour les crimes internationaux les plus graves, aucune règle d’immunité ne devrait s’appliquer dans les juridictions nationales.  Il a encouragé la Commission du droit international (CDI) à trouver un équilibre entre le combat contre l’impunité pour les crimes les plus graves et la nécessité de préserver un cadre juridique important pour la stabilité des relations interétatiques.

Ensuite, le représentant s’est déclaré en accord avec l’analyse de la pratique des États présentée dans le cinquième rapport de la Rapporteuse spéciale, et a noté la difficulté d’aller vers des conclusions claires eu égard au nombre de questions et aux différents points de vue exprimés.  Il a souligné l’importance des règles relatives à l’immunité.  Il a rappelé son attachement au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), en particulier l’article 27 sur le défaut de pertinence de la qualité officielle, qui devrait être envisagé aujourd’hui comme faisant partie du droit international coutumier.

M. Seland a en outre appuyé le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas et a souligné l’importance d’inclure le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Les pays nordiques approuvent le paragraphe 2 de cet article qui demande de comprendre les crimes conformément à la définition qu’en donnent les traités.  Il a encouragé la commission à chercher un consensus sur les questions les plus délicates, afin de créer les meilleures conditions pour ses travaux.

Concernant le sujet de la protection de l’atmosphère, M. HELMUT TICHY (Autriche) a noté que les trois nouveaux paragraphes du préambule provisoirement adoptés par la commission, et qui ont trait à l’interaction entre l’atmosphère et les océans, à l’élévation du niveau de la mer, aux petits États insulaires en développement et aux intérêts des générations futures, reflètent bien des situations généralement reconnues et qui ont déjà été discutées au sein des Nations Unies et de l’Organisation maritime internationale (OMI).

Le nouveau projet de directive 9, intitulé « Relation entre règles pertinentes » aborde une question fondamentale et montre que la protection de l’atmosphère est un sujet transversal, a continué le représentant.  La protection de l’atmosphère chevauche d’autres sujets, ce qui pose la question de leur compatibilité, a-t-il déclaré.  En tout état de cause, appliquer les principes de l’harmonisation devrait conduire à la réduction des objectifs de protection de l’atmosphère.

Ainsi, le projet de directives 9, paragraphe 2 pourrait être compris comme demandant que les nouvelles règles de protection de l’atmosphère soient compatibles avec les règles de droit international existantes.  Or cela empêcherait tout nouveau développement qui diffèrerait de manière substantielle des règles déjà existantes.  « Nous ne pensons pas qu’une telle restriction doive être envisagée », a indiqué M. Tichy. 

Le projet de directive 9, paragraphe 3 demande aux États, à juste titre, de prêter une considération particulière aux personnes et aux groupes de personnes particulièrement vulnérables à la pollution et à la dégradation atmosphériques.  Cependant, le représentant a pensé que les groupes spécifiques mentionnés, c’est-à-dire les populations autochtones, les populations des pays les moins avancés, et les populations des zones inondables et des petits États insulaires en développement font partie des groupes particulièrement vulnérables.

Passant à la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a rappelé que la délégation autrichienne est comme par le passé en faveur des limites et des exceptions proposées à l’immunité « ratione materiae ».  Cependant, il a estimé comprendre la nécessité de clarification pour savoir si elles reflètent le droit international coutumier ou relèvent plus du droit progressif.  Il a déclaré voir un lien clair entre les exceptions et les limites à l’immunité, d’un côté, et les protections procédurales, de l’autre.  Il a réitéré à cet égard que les restrictions à l’immunité devraient être combinées aux protections procédurales pour éviter les poursuites pénales contre les représentants officiels de l’État motivées politiquement.

M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a pris note de la suggestion d’adopter le projet d’article 7 sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Cette question a acquis une importance majeure alors qu’elle découle de la souveraineté juridique nationale.  Il a rappelé la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens qui prévoit que l’immunité est acceptée en tant que droit international coutumier, ce qui renforce l’état de droit et la certitude juridique. 

D’après le représentant, la définition des représentants de l’État recouvre également des personnes qui exercent des éléments d’autorité de l’État ou qui agissent sur instruction de l’État.  Il a ajouté que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État devrait se faire prima facie, sur une base raisonnable.  L’exercice par l’État de sa juridiction est une manifestation de souveraineté, condition nécessaire pour faire respecter la loi, a-t-il.  Comme prévu au projet d’article 6, il a constaté que la question de l’immunité du chef de l’État est controversée.  Il s’est interrogé sur les sources du droit international sur cette question.

Mme SUSANA VAZ PATTO (Portugal) a estimé que la question de la protection de l’atmosphère devait être traitée de manière équilibrée et positive.  Pour le Portugal, il s’agit d’une responsabilité qui incombe aux États et seule une action conjointe permettra d’y faire face.  Le travail actuel de la Commission du droit international (CDI) présente une opportunité importante, selon sa délégation, pour développer des directives et promouvoir des mécanismes qui pourraient amener les États à adopter des normes communes et à recourir à des pratiques recommandées pour la protection de l’environnement, en connexion avec le droit international du commerce et de l’investissement, le droit de la mer et les droits de l’homme.

Pour ce qui est de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l'État, la représentante a estimé qu’il faut une approche claire et axée sur les valeurs.  « La loi n’est pas neutre et doit refléter les valeurs fondamentales de toute société », a-t-elle affirmé.  Pour servir au mieux les intérêts de la communauté internationale, il faut donc parvenir à un équilibre judicieux entre l’égalité et la souveraineté des États, les droits individuels et la nécessité d’éviter l’impunité en cas de crime grave au regard du droit international.  Pour parvenir à cet équilibre, la commission doit identifier les règles existantes du droit international mais également s’engager dans un exercice de développement progressif.  Ce développement progressif devrait tenir compte, selon elle, du fait que l’immunité est un instrument important dans la conduite des relations extérieures, mais qu’elle doit être interprétée et appliquée dans le contexte de l’évolution actuelle en ce qui concerne les valeurs humaines fondamentales qui ont un statut de jus cogens.

Mme Vaz Patto a félicité la commission d’avoir adopté le projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Toutefois, elle a estimé que l’immunité ne devrait pas non plus s’appliquer au crime d’agression, un crime qui est reconnu par le Statut de Rome.  Elle a donc exhorté la commission à revoir sa position sur ce point lors de la deuxième lecture.

Mme DAMARIS CARNAL (Suisse) a tenu à clarifier quelques questions méthodologiques sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Le caractère procédural de l’immunité oblige les tribunaux à traiter la question de l’immunité à titre préliminaire, a-t-elle déclaré.  Or la Cour internationale de Justice (CIJ) a indiqué en 2012, dans son arrêt Allemagne c. Italie, que « l’idée de subordonner le droit à l’immunité à la gravité de l’acte illicite en cause pose un problème de logique ».  Selon la CIJ, deux interprétations sont possibles, mais aucune des deux ne nous semble satisfaisante pour ce qui est des procédures pénales contre les représentants d’un État étranger, a-t-elle dit, et il serait utile que la Commission du droit international (CDI) prenne position sur cette question.

Ensuite, la représentante a constaté que la CDI ne fait aucune distinction entre les diverses raisons pour lesquelles un tribunal national est arrivé à la conclusion qu’un représentant de l’État ne jouit pas de l’immunité liée à la fonction devant une juridiction pénale étrangère lorsqu’une procédure a été ouverte en relation avec les crimes internationaux.  Il ne serait approprié de parler d’exceptions à la règle générale de l’immunité que dans le cas de la gravité des actes en question, a-t-elle déclaré.  Alors que la question se pose de savoir si les exceptions proposées reflètent le droit international coutumier, il est admis que la portée de l’immunité ratione materiae se limite aux actes accomplis dans l’exercice de fonctions officielles.

Mme Carnal a estimé que le mandat de la CDI consiste à la fois à codifier et à développer progressivement le droit international.  Nous estimons qu’il est important de faire une distinction claire entre ces deux aspects des travaux de la commission, a-t-elle indiqué.  En outre, après un examen des sources citées à l’appui de l’article 7, elle a été d’avis que ces critères exigeants pour l’établissement d’une règle de droit international coutumier ne sont pas satisfaits en l’espèce.  Elle a encouragé la commission à fournir des éléments plus probants pour soutenir le projet d’article 7 ou à indiquer clairement que celui-ci s’inscrit dans le développement progressif du droit.

M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) a reconnu que les projets d’articles sur la protection de l’atmosphère s’appuient sur les relations entre les règles pertinentes du droit de l’environnement, du droit de la mer et des droits de l’homme.  Les principes du droit international, comme celui de la responsabilité partagée ou du pollueur payeur, ne doivent pas subir de préjudice dans le contexte de nos travaux, a-t-il insisté.  Concernant le projet d’article 9, il a estimé qu’il cherche à concilier les différentes règles existantes.  Il s’est félicité de la mention des groupes vulnérables au paragraphe 3, afin d’en tenir compte dans l’interprétation systémique du droit international.  Il a par ailleurs invité le Rapporteur spécial à poursuivre ses consultations auprès des scientifiques compétents sur cette question afin d’en connaitre les limites.

S’agissant de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé que la torture et l’apartheid auraient dû être inclus dans les exceptions prévues au projet d’article 7.  Il a regretté que l’acte d’agression n’ait pas été retenu, de même que la corruption, un crime qui ne peut être commis que par un représentant de l’État, a-t-il relevé.  Il a estimé qu’il fallait continuer à étudier la pratique des États en tenant compte de la codification et du développement progressif du droit international, rôle fondamental de la Commission du droit international (CDI).  En ce qui concerne les règles de procédure pour les poursuites et les enquêtes pour les crimes commis par les représentants de l’État, il s’agit d’une question importante afin d’éviter la politisation du droit par les représentants de l’État.

Mme SUE ROBERTSON (Australie) a relevé que l’immunité de l’État était un principe de base du droit international, découlant du principe de l’égalité souveraine de tous les États.  L’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est donc le corollaire de l’immunité des États.  L’Australie regrette que la commission n’ait pu arriver à un consensus sur la question des limites et des exceptions à cette immunité, et que le projet d’article 7, sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, ait dû être adopté par voie de vote, a-t-elle déclaré.  L’Australie s’associe à ces États qui ont voté contre l’adoption de cet article qui, sous sa forme actuelle, ne reflète aucune pratique établie par les États, ni ne s’apparente à aucune tradition juridique existante. 

Pour l’Australie, a poursuivi Mme Robertson, l’immunité ne doit pas s’apparenter à l’impunité, mais elle intervient pour empêcher que le représentant d’un État ne soit poursuivi pour des crimes internationaux dans certaines circonstances, et pas dans toutes les situations.  Selon elle, les représentants des États peuvent être poursuivis en cas de crime international dans leur propre pays, devant une cour internationale compétente, ou devant des tribunaux d’un État tiers après la levée de leur immunité.  En conclusion, elle a estimé que cet article 7 ne présente pas de solution idéale, et souhaité plutôt que l’idée d’une obligation conventionnelle de renoncer ou de poursuivre soit discutée par la commission.

Mme DAPHNE HONG (Singapour) a exprimé son soutien au Rapporteur spécial chargé des travaux sur le sujet de la protection de l’atmosphère, se félicitant que la coopération internationale soit placée au cœur du projet de directives.  Elle a souligné l’importance de l’équité intergénérationnelle, voulant voir préserver les intérêts des générations futures en ce qui concerne la qualité de l’atmosphère, tout en suggérant de se concentrer aussi sur la pollution dont souffre la génération actuelle.  Elle a donc suggéré d’intégrer une référence à la « génération actuelle » dans le préambule.  Elle s’est par ailleurs interrogée sur la fragmentation possible entre les règles de droit et sur la valeur pratique du projet de directives.  En ce qui concerne les dispositions du préambule relatives à la situation spéciale des zones côtières de faible élévation et des petits États insulaires en développement, liée à la hausse du niveau de la mer, elle a appuyé la reconnaissance du fait que ces États sont plus vulnérables à la dégradation et à la pollution atmosphériques.  « Cette situation particulière ayant déjà été reconnue dans l’Accord de Paris sur les changements climatiques, elle ne devrait pas être controversée », a-t-elle insisté.

Passant au chapitre sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Hong s’est dite étonnée de la façon inhabituelle dont le projet d’article 7 a été adopté de manière provisoire par la commission, c’est-à-dire par un vote, déduisant de cette dissension que ce texte méritait un examen plus poussé.  Sur le fond, elle s’est demandé s’il y avait suffisamment de jurisprudence et de règlementations des États et de traités pour justifier une codification d’une liste spécifique de crimes tombant sous le coup du projet d’article 7 pour lesquels l’immunité rationae materiae ne s’appliquerait pas. 

En outre, vu la rédaction actuelle de ce texte, la représentante a suggéré à nouveau à la commission de revoir, dans le cadre du développement progressif du droit, l’extension de l’immunité rationae personae à des hauts fonctionnaires au-delà de la troïka, après l’achèvement de ses travaux sur l’immunité rationae materiae.  Enfin, elle a partagé les inquiétudes de plusieurs membres de la commission sur « la nécessité d’éviter des procédures politiquement motivées ou un exercice illégitime de la compétence ».  Il faut se concentrer sur les garanties, a-t-elle souhaité, pour s’assurer que les exceptions à l’immunité rationae materiae ne soient pas appliquées d’une façon complètement subjective.

S’agissant du chapitre VI du rapport de la Commission du droit international (CDI), portant sur la protection de l’atmosphère, M. ANGEL HORNA (Pérou) a souligné le rapport étroit existant avec la mer et les océans.  Il a estimé que le Rapporteur spécial devrait se référer au rapport issu du Processus consultatif officieux des Nations Unies ouvert à tous sur les océans et le droit de la mer.

En ce qui concerne l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé qu’il était important de faire la distinction entre les limites et exceptions ratione materiae et ratione personae, alors que les représentants de l’État se trouvent dans l’exercice de leurs fonctions.  Selon lui, il est possible de discerner une tendance ratione materiae pour les crimes qui répugnent à l’humanité.  Il est donc nécessaire d’établir un équilibre entre ces deux principes en tenant en compte, d’une part, la souveraineté des États, et d’autre part, la lutte contre les crimes les plus graves.  Il a estimé qu’il fallait étudier la pertinence de certains aspects du caractère procédural, comme entend le faire le Rapporteur spécial dans son prochain rapport. 

À propos de la protection de l'atmosphère M. ANIL SHIROLE (Inde) a estimé que le projet d’article 9 suggère que les règles juridiques touchant à la protection de l'atmosphère dans d’autres domaines que le droit de la mer, à savoir, les droits de l’homme et le droit international du commerce et de l’investissement, devraient être identifiées, interprétées et appliquées dans le but de préparer un ensemble d’obligations.  Il a estimé que chaque domaine du droit international possède son propre champ d’application et régime juridique.  En conséquence, une étude approfondie est nécessaire pour trouver les facteurs pertinents entre la protection de l’atmosphère et d’autres champs du droit international.

Passant au sujet de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a estimé que les questions soulevées dans le projet d’article 7, sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas, sont complexes et politiquement sensibles.  Selon lui, la plus grande prudence est requise avant de décider si la commission devrait se concentrer sur les aspects concernant sa codification ou sur le développement du droit progressif international (lex lata ou lex ferenda).  Cela ne sera possible que si la commission est capable de démontrer une pratique constante dans les traités et de la part des États pour soutenir les exceptions de l’article 7.  Faute d’accord, tout nouveau système pourrait mettre en danger les relations interétatiques et miner l’objectif d’en finir avec l’impunité, a-t-il conclu.

M. YUKI HIROTANI (Japon) a estimé qu’étant donné que l’atmosphère n’est pas statique, il serait important de considérer plutôt les normes générales du droit international, à défaut de traités spécifiques qui contiennent des « normes fragmentées ».  Pour le Japon, le projet de directive 9 sur la relation entre règles pertinentes est un moyen d’éviter justement cette fragmentation.  Il a salué le paragraphe 1 qui prescrit l’harmonisation et l’intégration systémique des dispositifs du droit international, afin d’éviter les conflits; de même que le paragraphe 2 qui couvre les situations où des États voudraient établir de nouvelles règles, afin d’éviter une fois encore la fragmentation du droit international sur la question.  En outre, il a approuvé le paragraphe 3 qui met en exergue la situation de gens particulièrement vulnérables à la pollution et à la dégradation atmosphériques.  

Abordant la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant a noté que le débat sur les limites et les exceptions a révélé des divisions sur la classification de ces concepts dans le droit coutumier ou dans le contexte des développements nouveaux du droit.  Selon lui, la confusion qui a émergé de ce débat pourrait être due au fait que le cinquième rapport n’a pas apporté d’éléments probants pour soutenir sa conclusion.  Il a demandé des explications sur le choix fait pour établir la liste des crimes à l’égard desquels l’immunité ratione materiae ne s’applique pas.  Enfin, il a prévenu la commission de ne pas confondre l’immunité des États et celle des individus, et conclu que le sixième rapport devrait apporter des clarifications sur les définitions des aspects procéduraux et les garanties.

Mme DANIJELA HORVAT (Slovénie), s’exprimant sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, s’est déclarée en accord avec le fait que les limites et exceptions à l’immunité requièrent un examen prudent, qui prenne en compte la pratique des États, l’opinio juris et les tendances du droit international.  L’adoption par la commission du projet d’article 7 sur les crimes de droit international à l’égard desquels l’immunité ratione materia ne s’applique pas reflète la complexité de la question.

La représentante a réitéré que l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État est basée sur les principes d’égalité souveraine des États, la non-ingérence et a pour but de maintenir des relations amicales entre les États.  Elle a par ailleurs soutenu l’approche définie dans le projet d’article 4 sur la portée de l’immunité ratione personae et son paragraphe 2, qui porte sur la traditionnelle troïka, à savoir les chefs d’État, les chefs de gouvernement et les ministres des affaires étrangères, comme étant les seuls récipiendaires de l’immunité.  Elle a aussi apprécié le délicat équilibre trouvé entre la souveraineté des États et la stabilité des relations internationales, ainsi que la nécessité de prévenir et de punir les crimes les plus graves relevant du droit international.  Elle a ensuite salué la liste des crimes et l’inclusion du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, et des crimes de guerre.  Elle a souligné la décision de ne pas inclure le crime d’agression.  Pourtant, le crime d’agression est le plus sérieux crime du droit international.  En conséquence, la Slovénie considère que l’inclusion des crimes d’agression mériterait un nouvel examen. 

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