Désarmement nucléaire: les délégations de la Première Commission expriment leurs profondes divergences
La Première Commission a débattu, cet après-midi, du mécanisme onusien de désarmement, en réitérant, comme hier, son appel à la revitalisation de la Conférence du désarmement, unique instance multilatérale de la communauté internationale pour les négociations sur le désarmement. Les délégations ont également exprimé leurs profondes divergences de vue, en particulier sur deux projets de résolution sur les armes nucléaires, lesquels, faute de temps, n’ont pas pu être adoptés. En tout, ce sont 20 projets de résolution sur ces armes qui doivent être approuvés par la Première Commission avant d’être entérinés en plénière par l’Assemblée générale.
Concernant l’impasse dans laquelle la Conférence du désarmement se trouve depuis deux décennies, le représentant du Mexique a estimé qu’il fallait profiter du dynamisme des discussions en cours à Genève, en particulier celles conduites par le groupe de travail dit de la voie à suivre, « pour faire notre autocritique et avancer dans l’élaboration d’un programme de travail équilibré et complet de la Conférence », a-t-il déclaré. À ses yeux, « le vide actuel à la Conférence du désarmement est dû au manque de volonté politique de ses membres, et à une conception particulière du consensus, considérée à tort comme un impératif ». Notant que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, adopté le 7 juillet dernier, a pu être négocié avec succès en dehors du cadre du mécanisme onusien de désarmement, cela avec la participation de la société civile, la délégation mexicaine a notamment plaidé pour un élargissement de la composition de la Conférence du désarmement et d’une inclusion citoyenne à ses délibérations.
Commentant l’évolution du mécanisme de désarmement de l’ONU, constitué de la Conférence du désarmement, de la Commission du désarmement et de la Première Commission, le représentant de l’Équateur s’est pour sa part inquiété de ce que « la répartition des rôles de négociation et de délibération à Genève et à New York » ne soit pas clairement respectée. Il a en outre déploré que « le discrédit qui plane sur le consensus provient de ce que cette règle est utilisée et conçue comme une forme de veto universel ».
Cette même délégation de l’Équateur a en outre critiqué avec véhémence un projet de résolution intitulé « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires ». Pour le représentant équatorien, la version 2017 de ce texte, adoptée habituellement par consensus, est lacunaire car la priorité devant être accordée au désarmement nucléaire n’y est plus réaffirmée. Ce pays, comme l’Afrique du Sud, a également déploré que l’appel à l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) soit affaibli par le retrait du texte traditionnel de la mention des huit États devant le ratifier pour qu’il devienne opérationnel.
Les délégués équatorien et sud-africain ont ainsi annoncé leur opposition au projet de résolution, estimant de surcroît que ce texte édulcore les accords consensuels issus des conférences d’examen du TNP et exprime la tendance des États dotés d’armes nucléaires à réinterpréter les obligations du titre et à assortir de conditions leur mise en œuvre. « Au fond, c’est comme si ce texte imputait la responsabilité de l’absence de progrès en matière d’élimination des armes nucléaires à ceux qui n’en possèdent pas », a résumé le représentant équatorien.
Le projet de résolution « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire » a également été longuement commenté par les représentants d’États Membres. L’Autriche, rappelant que c’était la version 2016 de ce texte qui, l’an dernier, avait « donné un mandat au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en juillet dernier », a affirmé que le projet de résolution n’interférait en rien dans la mise en œuvre du TNP: « au contraire, en rappelant la nécessité d’appliquer l’Article du Traité, il la complète », a-t-il affirmé, appelant les États Membres à admettre que ce traité fasse partie du mécanisme onusien de désarmement.
Les délégations des États-Unis et de la Fédération de Russie ont estimé, à l’inverse, que l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires sapait bien le régime instauré par le TNP, en cela qu’il ne créé pas de droit coutumier en matière de désarmement et parce qu’il n’a pas été négocié avec la participation des cinq plus importants États dotés d’armes nucléaires. Par conséquent, ces pays ont annoncé qu’ils ne soutiendraient pas ce projet de résolution qui « réaffirme que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est une contribution essentielle au désarmement nucléaire. »
Le représentant de la Fédération de Russie a en outre observé que toutes les résolutions sur les armes nucléaires formaient un tableau assez sombre. Le consensus fait l’objet d’un morcellement, a-t-il dit, et la course aux armements avait été remplacée par une profusion de projets de résolution sur le désarmement nucléaire.
La Commission poursuivra ses travaux, vendredi 27 octobre, à 15 heures.
QUESTIONS À L’ORDRE DU JOUR ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DEPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR
Suite du débat thématique sur le mécanisme de désarmement
M. AHMED NOURI SALIMI (Maroc) a jugé que la situation actuelle justifiait d’un besoin pressant de revitalisation du mécanisme de désarmement, citant notamment la Conférence du désarmement, « unique instance pour faire avancer le désarmement au bénéfice de tous ». Selon lui, l’impasse où se trouve cet organe contraste avec les nouveaux défis sécuritaires et va à contre-sens de la récente adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Il a constaté que les défis de prolifération continuent d’exister et a appelé les États à faire preuve de volonté politique. Le Maroc s’est à cet égard félicité de l’adoption, à la Commission du désarmement, de 14 recommandations sur les mesures de rétablissement de la confiance dans le domaine des armes classiques. Il a conclu en saluant l’apport des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, notamment celui du Centre africain qui est, selon lui, un centre d’expertise reconnu pour ses activités continentales. Il a appelé les Nations Unies à le soutenir financièrement et matériellement pour qu’il puisse mener à bien toutes ses missions.
M. IBRAHIM F M A A ALDAI (Koweït) a considéré que le multilatéralisme était la meilleure méthode pour aboutir au désarmement. Il a appelé l’ensemble des États Membres à poursuivre leurs efforts et à renforcer leur volonté politique pour aboutir à un monde sans armes de destruction massive. Il a déploré à cet égard l’absence de progrès à la Conférence du désarmement. « Tous les Membres doivent mettre fin à l’impasse », a-t-il exhorté. Souhaitant voir redémarrer le mécanisme de désarmement au plus tôt, le Koweït s’est en revanche félicité des avancées relatives à l’organisation de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement. Il a espéré que tous les États Membres sauront se mettre d’accord sur ses objectifs
M. HTIN LYNN (Myanmar) a souligné que son pays avait présidé le groupe de travail sur la voie à suivre au cours de la session 2017 de la Conférence du désarmement, estimant que ce groupe représente un pas dans la bonne direction devant mener à la revitalisation de la Conférence. Il a indiqué que les participants avaient eu des discussions de fond sur tous les points à l’ordre du jour de la Conférence du désarmement. Selon lui, le format de discussion, dit de prénégociation, est utile pour contribuer de manière significative au rapprochement des États Membres de la Conférence, « qui doivent surmonter leurs divergences de vues ». La quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le désarmement, a-t-il aussi dit, permettra d’examiner de manière approfondie le fonctionnement et l’efficacité du mécanisme onusien de désarmement, et de se pencher sur les défis émergents, y compris la cybersécurité et les systèmes d’armes létales autonomes, et la manière d’y répondre dans le cadre du désarmement de demain.
M. JULIO HERRÁIZ (Espagne) a affirmé que son pays partageait les sentiments « d’insatisfaction », de « frustration » et de « lassitude » relayés, de façon récurrente, par de nombreuses délégations, face au manque d’ambition et d’efficacité des solutions proposées par la Première Commission en matière de mécanisme de désarmement. Tout en appelant cette commission à ne pas se laisser aller à « l’autosatisfaction », M. Herráiz a estimé que seule une démarche « critique et novatrice », basée sur le dialogue, permettrait d’aboutir à des propositions « constructives » et « réalistes ». En tant que présidente, cette année, de la Conférence du désarmement, l’Espagne a selon lui été en mesure de parvenir à un consensus lors de l’adoption du rapport final de la Conférence, en dépit des divergences entre États. Toutefois, M. Herráiz a tenu à rappeler que l’échange de points de vue divergents est consubstantiel au processus de négociation des traités dans le cadre de la Conférence. Tout en reconnaissant, enfin, le stade avancé des discussions en cours sur l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles pour des armes nucléaires ou d’autres dispositifs explosifs nucléaires, le représentant a appelé la Conférence du désarmement à ne pas perdre de vue les solutions basées sur le renforcement des garanties de sécurité négatives.
M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a salué l’adoption, par la Commission du désarmement, de recommandations sur les armes classiques ainsi que la qualité et l’intérêt des discussions à la Conférence du désarmement au cours de sa session 2017. Il faut profiter des dynamiques en cours pour, à Genève, faire notre autocritique et avancer dans l’élaboration d’un programme de travail équilibré et complet, a-t-il ajouté. Il a estimé que le vide actuel à la Conférence du désarmement est dû au manque de volonté politique de ses membres, et à une conception particulière du consensus, considéré à tort comme un impératif. Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires a pu être négocié avec succès en dehors du cadre strict du mécanisme onusien de désarmement, a-t-il fait observer. À cette aune, il a plaidé pour un élargissement de la composition de la Conférence du désarmement et d’une inclusion, à ses délibérations, de la société civile.
La représentante de l’Argentine a présenté brièvement le rapport de la Commission du désarmement. Elle a salué les recommandations du groupe de travail, estimant que le groupe avait eu des discussions approfondies sur l’ordre du jour qui lui a été confié. Saluant le consensus qui a présidé pendant ses travaux, elle a espéré que ce rapport sera lui aussi adopté par consensus. « C’est ce que nous offre le multilatéralisme, il nous offre le compromis », a-t-elle lancé.
Poursuivant au nom de son pays, la déléguée a ensuite réitéré son engagement envers le désarmement et salué les réalisations qui ont découlé du mécanisme, notamment la Convention sur les armes chimiques et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Elle y a vu la preuve que la communauté internationale peut avancer quand elle fait preuve de volonté politique. L’Argentine s’est aussi félicitée des efforts pour revitaliser la Conférence du désarmement.
M. VLADIMIR YERMAKOV (Fédération de Russie) a affirmé que le projet de son pays d’élaborer, à la Conférence du désarmement, une convention internationale pour combattre les actes terroristes chimiques et biologiques avait pour unique but de compléter le cadre juridique du contreterrorisme en lien avec les armes de destruction massive. Notre projet de programme de travail de la Conférence du désarmement, qui combine les prénégociations sur ce traité et la poursuite de discussions du désarmement nucléaire sous divers aspects, reste sur la table, a-t-il ajouté. Il a rappelé que la tâche de chaque membre de la Conférence était de trouver une issue à l’impasse qui entrave ses travaux depuis deux décennies et cela en surmontant les divergences de vues. Il a considéré que les progrès enregistrés à la Commission du désarmement en 2017 étaient des signes encourageants que, bientôt, la Commission sera en mesure d’exploiter pleinement son potentiel d’organe délibérant. Le mécanisme onusien de désarmement est loin d’avoir épuisé tout son potentiel a-t-il affirmé, assurant que son pays restait prêt à discuter de tout l’éventail des questions de désarmement à New York comme à Genève.
M. DAVISON (Canada), au nom d’un groupe d’États, a déclaré que si l’on accepte que la paix et la sécurité internationale sont une tâche qui doit être partagée par tous, ce qui est un principe de base du multilatéralisme, il importe de reconnaître que plus doit être fait pour encourager la participation des femmes au mécanisme onusien de désarmement. Les organisations internationales doivent représenter la société dans son ensemble, a-t-il dit, et il faut garder à l’esprit que le traitement des questions de désarmement dépend de la nature de la participation à cet effort partagé. À l’instar de son homologue irlandais, le représentant a estimé que tous les instruments de désarmement devaient inclure des perspectives de genre.
Mme KEANE (Irlande) a salué la reconnaissance d’une participation égale, pleine et entière des femmes et des hommes dans l’élaboration et la mise en œuvre du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Nous saluons aussi que le Traité reconnaisse l’impact sexospécifique des armes nucléaires, a-t-elle ajouté. La représentante a expliqué que son pays avait présenté un document de travail sur le genre, le développement et les armes nucléaires en mai dernier, dans le cadre des discussions tenues par le Comité préparatoire du Traité. Elle a souhaité que le traitement de ce thème soit enrichi par la participation de la société civile lors de la prochaine réunion du Comité préparatoire. Pour la déléguée irlandaise, la participation accrue des femmes dans les différentes enceintes de désarmement fournirait des perspectives nouvelles et injecterait un nouvel élan dans les processus en cours de négociation et d’examen des principaux instruments multilatéraux.
M. BAKHSHI (République islamique d’Iran) a rappelé que la Commission du désarmement et la Conférence du désarmement ont donné naissance à des instruments universels qui ont fait date. Selon lui, le mécanisme de désarmement n’est pas directement responsable des impasses qu’il rencontre. « Il y a des tentatives continues de masquer la nature politique des blocages -notamment à la Conférence du désarmement- derrière des questions techniques », a-t-il assuré, avant de lancer que même le meilleur mécanisme de désarmement n’arriverait à rien en l’absence de volonté politique. Pointant « certains États dotés et leurs défenseurs », il a estimé que s’ils mettaient de côté leur inflexibilité, le mécanisme ferait de nouveau la preuve de son efficacité. À ses yeux, le contraste entre l’adoption, à la Commission du désarmement, de recommandations sur des mesures concrètes de renforcement de la confiance en matière d’armes classiques grâce à la souplesse des pays non alignés, et l’absence de progrès sur le désarmement nucléaire causée par la « position inflexible » de certains pays dotés, souligne bien l’importance de la volonté politique dans ce mécanisme. Constatant que la revitalisation du mécanisme est un objectif partagé par tous, il a appelé les États dotés à faire preuve de souplesse pour permettre à ce mécanisme de respecter son mandat.
Saluant par ailleurs l’adoption récente du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, il a plaidé pour l’organisation rapide, au sein de la Conférence du désarmement, d’une convention sur les armes nucléaires. Il a enfin soutenu la position des pays non-alignés sur le principe d’une répartition géographique équitable au sein du Bureau des affaires de désarmement de l’ONU et a exhorté le Secrétaire général de prendre des décisions concrètes à ce sujet.
M. DELFINA JANE ALOYSIUS DRIS (Malaisie) a présenté le projet de résolution L.57 sur la suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, en soulignant la nécessité impérieuse que les pays mettent en œuvre l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) relatif notamment à l’élimination de leurs arsenaux. Cette demande, a-t-elle indiqué, est réitérée dans l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice qui souligne également qu’il existe une obligation de poursuivre de bonne foi et de mener à terme des négociations conduisant au désarmement nucléaire sous tous ses aspects, assorti d’un contrôle international strict et efficace. Ce point est rappelé dans le texte du projet L.57, a précisé la déléguée.
M. FERNANDO LUQUE MÁRQUEZ (Équateur) s’est félicité des progrès réalisés cette année par la Commission du désarmement sur les armes classiques, ainsi qu’à la Conférence du désarmement, qui a abordé des questions de fond dans le cadre du groupe de travail sur la voie à suivre. Pour lui, la session actuelle de la Première Commission est riche de discussions sur des questions émergentes. Il a toutefois noté que la répartition des rôles de négociation et de délibération à Genève et à New York n’est pas claire. Il a également constaté que le discrédit qui plane sur le consensus provient de ce que cette règle est utilisée et conçue comme une forme de veto universel.
DÉCISIONS SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR
Armes nucléaires
Déclarations avant les votes
Le représentant du Kazakhstan, au sujet du projet de résolution L.36, a rappelé que la résolution 6435 avait été adoptée à l’unanimité et que par là, tous les pays ont exprimé qu’il n’existait pas d’avenir pour les essais nucléaires sur cette planète. Selon lui, mettre fin aux essais nucléaires est une préoccupation commune pour tous les États Membres. Il a appelé à « prendre soin les uns des autres et de cette précieuse planète ».
La représentante de la Belgique a appelé à trouver une voie réaliste vers un monde sans armes nucléaires. Assurant qu’elle partage la frustration quant à l’absence d’efforts des États dotés de l’arme nucléaire, elle a toutefois estimé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ne pourra pas être efficace puisqu’il n’a pas reçu l’appui des pays dotés et ne propose pas de plan clair sur la non-prolifération.
Le représentant de l’Union européenne (UE) a réaffirmé son ferme engagement quant à l’édification d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient et a regretté que la réunion de 2012 n’ait pas pu être organisée. Souhaitant une réunion sur le sujet à laquelle tous les États parties auraient leur place, l’UE a ensuite rappelé sa contribution à l’établissement de cette zone via des réunions, des séminaires et l’envoi d’un envoyé spécial qui s’est réuni avec le Groupes des sages de la Ligue arabe.
Le représentant du Pakistan a voulu présenter un amendement oral au paragraphe 1 du projet de résolution L.10 rev.1 sur les garanties négatives de sécurité.
Le représentant de Singapour a déclaré que seule l’élimination complète des armes nucléaires permettra d’avancer sur la voie du désarmement nucléaire, précisant que sa délégation appuierait les projets de résolution qui se réfèrent au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Il a jouté que la mise en œuvre de cet instrument ne doit altérer en rien la mise en œuvre pleine et entière des autres instruments en vigueur ainsi que des négociations à la Conférence du désarmement sur de nouveaux instruments multilatéraux.
Le représentant de l’Autriche a appuyé le projet de résolution L.5 sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires, en rappelant que ce texte était basé sur la Déclaration conjointe de 120 pays à l’issue de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) de 2005. Il a également appuyé le projet de résolution L.6 intitulé « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », coparrainé par 57 pays « et qui a donné l’an dernier un mandat au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en juillet dernier ». Ce traité est notamment une contribution à la mise en œuvre de l’Article VI du TNP, il n’interfère donc en rien dans la mise en œuvre de ce dernier, a ajouté le représentant pour qui il convient d’admettre que ce traité fait partie du mécanisme onusien de désarmement.
La représentante de la France a récusé tout lien entre les instruments de désarmement en vigueur et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires figurant dans les projets de résolution L.1, L.22 et L.47.
Le représentant des Pays-Bas a réaffirmé l’engagement de son pays à faire progresser la réalisation de l’objectif commun d’un monde sans armes nucléaires. Des mesures efficaces et tenant compte de l’environnement sécuritaire actuel sont nécessaires, a-t-il dit.
Le représentant de l’Allemagne a rappelé à son tour l’attachement de son pays à la réalisation de cet objectif, sachant qu’une détonation nucléaire aurait des conséquences irréversibles sur l’environnement terrestre. Toutefois, même si le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est soucieux de ce risque, nous n’avons pas soutenu ce projet, « car il n’y a pas de raccourci possible pour mener à un monde sans armes nucléaires ». Il a appelé à réaliser des progrès tangibles sur la base d’une approche progressive et concrète. Cela passe par l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et des résultats vers l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles et d’un instrument sur les garanties négatives de sécurité au sein d’une conférence du désarmement revitalisée, a-t-il dit.
Le représentant du Royaume-Uni a soutenu la résolution de 1995 sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Il a rappelé que le Royaume-Uni a invité des États de la région ainsi que d’autres États concernés notamment des pays arabes. Hélas, a-t-il déploré, ça n’a pas été suffisant pour arriver à la création de cette zone. Il a appelé la communauté internationale à faire preuve d’imagination pour surmonter les différents entourant la création de cette zone. Il a enfin mentionné que son pays n’acceptait pas que le préambule de la résolution L.1 soit ajouté au début du récent Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.
Le représentant de la République islamique d’Iran a rappelé que l’élimination totale des armes nucléaires était la priorité numéro un et a appelé les États non dotés à montrer la voie et d’utiliser tous les moyens pour y arriver. À propos du projet de résolution L.4, qui porte suivi des obligations en matière de désarmement nucléaire, le représentant a précisé que cette année le texte a été mis à jour de façon technique et ne comprend pas de changements substantiels.
Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) s’est exprimé contre les projets de résolution L.7, L.19 et L.35 qui vont selon lui à l’encontre des intérêts de son pays. Il a estimé qu’il y avait un paragraphe inacceptable dans le projet de résolution L.35 concernant le droit au nucléaire. Il a soutenu que ce paragraphe ne prend pas en compte les menaces existentielles que les États-Unis font peser sur la République populaire démocratique de Corée. Il a rappelé que cette menace était la raison d’être du programme nucléaire de son pays. Il a aussi reproché au Japon de chercher, avec cette résolution, une excuse pour renforcer sa puissance militaire.
La représentante d’Israël a annoncé que son pays voterait contre le projet de résolution L.6, « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », son pays n’ayant pas participé aux négociations sur le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Cette initiative nous inspire de grandes réserves sur le fond et la forme, en ceci notamment que ce traité ne tient pas réellement compte des enjeux sécuritaires régionaux, a-t-elle indiqué, constatant par ailleurs que cet instrument n’est pas créateur de droit.
La représentante de Cuba a indiqué que son pays appuyait les projets de L.46, L.18, L.74, L.10, L.22 et L.57, dont il s’est porté coauteur. Elle a notamment souligné la nécessité de mettre pleinement en œuvre le projet de résolution L.10, demandant la conclusion d’arrangements internationaux efficaces visant à garantir les États non dotés d’armes nucléaires contre l’emploi ou la menace d’emploi de ces armes « tant que nous n’aurons pas réalisé le désarmement nucléaire ». Elle a également soutenu la création de zones exemptes d’armes nucléaires partout dans le monde, et plaidé en faveur de l’élaboration d’une convention sur l’interdiction de l’utilisation des armes nucléaires au sein de la Conférence du désarmement. La réduction du danger nucléaire est également une nécessité tant que les armes concernées existeront, a aussi signalé la représentante.
Le représentant de la Fédération de Russie a observé que toutes les résolutions sur les armes nucléaires formaient un tableau assez sombre. Le consensus fait l’objet d’un morcellement, a-t-il dit, notant que la course aux armements avait été remplacée par une profusion de projets de résolution sur le désarmement nucléaire. Ces textes, dans la pratique, sont inacceptables, a-t-il estimé, estimant que les efforts vers le désarmement nucléaire n’était pas simple « dans les faits » à mettre en œuvre. La Russie, depuis sa victoire à l’issue de la Second Guerre mondiale, œuvre au désarmement nucléaire, a indiqué le délégué. Notre but était déjà de dissuader l’emploi des armes nucléaires, a-t-il dit, soulignant l’importance de ne jamais oublier les leçons de l’histoire et le temps pris pour parvenir à des résultats en matière de désarmement. L’irréalisme n’est pas une perspective crédible pour progresser sur la voie du désarmement nucléaire.
Le représentant du Japon a présenté une proposition de révision du projet de résolution L.35 « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires » en ajoutant quelques phrases au paragraphe 21 du dispositif.
Reprenant la parole, la représentante d’Israël a appuyé le projet de résolution L.1 sur la « Création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient ». Selon elle, cela reflète la position positive d’Israël visant à instaurer le dialogue pour créer un Moyen-Orient plus sûr. Elle a regretté que, malgré cette attitude sérieuse d’Israël, la partie arabe ait jusqu’ici refusé de participer de façon constructive. Estimant que la résolution L.1 est une résolution de consensus, elle s’est demandée comment une architecture de paix et de sécurité dans la région pourrait être édifiée alors même que les résolutions consensuelles ne peuvent pas être appliquées. Pour que ce processus réussisse, elle a considéré essentiel de prendre en compte les défis de tous les États de la région et d’établir des mesures de confiance et de coopération mutuelles. Selon elle, ce n’est qu’une fois ces mesures en place que l’on pourra passer à des objectifs plus ambitieux. Souhaitant une communication directe et ouverte, elle a appelé tous les États parties à reconnaître le droit de tous les États à exister.
Le représentant du Pakistan a annoncé que sa délégation voterait contre les paragraphes des projets de résolution mentionnant son pays. N’étant pas partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), nous ne nous sentons pas lié à cet instrument, ni aux demandes répétées quant à la nécessité que soit atteinte son universalisation, a-t-il indiqué. Le discours sur les armes nucléaires ne peut pas être réduit aux considérations humanitaires, le principe en la matière devant prévaloir étant celui de la sécurité non diminuée pour tous, a ajouté le délégué. Il a également estimé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires est lacunaire sur la forme et sur le fonds, et ne contribue en rien à l’enrichissement du droit coutumier en matière de désarmement nucléaire. Parce que nous croyons fermement à la nécessité de renforcer la norme contre la conduite des essais nucléaires, nous voterons en faveur du projet de résolution L.42 tout en nous abstenons sur le paragraphe 4 du préambule, a toutefois fait savoir le délégué.
Le représentant du Guatemala a annoncé que son pays voterait pour le projet de résolution L.35, dans le but de contribuer à l’universalisation du TNP et d’avancer vers une sortie rapide de l’impasse à Genève.
Le représentant de l’Autriche, reprenant à son tour la parole, a indiqué que son pays s’abstiendrait sur le projet de résolution L.35 « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », estimant que ce texte « reformule de manière confuse la notion de consensus » et est de surcroit incompatible sur le fond avec les textes et déclarations issus des conférences d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et les appels qu’ils contiennent. En outre, le texte n’exhorte plus les États concernés à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) afin qu’il puisse entrer en vigueur, a encore regretté le représentant.
Le représentant de l’Équateur a déploré que la version 2017 du projet de résolution L.35 soit peu ambitieuse quant à la réalisation de l’objectif rappelé dans son titre. La priorité devant être accordée au désarmement nucléaire n’est plus réaffirmée dans le texte, a-t-il noté, constatant qu’il n’était plus question de « non-prolifération », la mention du désarmement nucléaire ayant tout simplement « disparue ». La référence à l’Article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) a également disparu, ce qui n’est pas acceptable, incompréhensible même, a déclaré le délégué. Plusieurs mesures en vigueur ne sont plus exigées, alors même que les engagements pris par les États dotés de l’arme nucléaire pour les mettre en œuvre ne sont plus honorés, a encore martelé le représentant. « C’est comme si ce texte imputait la responsabilité de l’absence de progrès en matière d’élimination des armes nucléaires à ceux qui n’en possèdent pas ». « À ce titre, il n’aide en rien, au contraire, à améliorer la confiance entre États », a-t-il estimé. L’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) dépend de la volonté politique de huit États, lesquels ne sont plus mentionnés dans le texte, ce qui affaiblit l’appel que lance traditionnellement ce projet de résolution, a-t-il dit. Pour toutes ces raisons, nous ne pourrons pas appuyer ce texte au moment du vote.
Le représentant des Pays-Bas a expliqué que son pays avait voté contre le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, alors qu’il souscrit à ses objectifs profonds, car il doute que ses dispositions soient de nature à pouvoir éliminer vraiment les armes nucléaires. Condamnant toute formulation qui se féliciterait de ce traité, les Pays-Bas ont toutefois dit souhaiter progresser en prenant en compte toutes les préoccupations pour continuer d’œuvrer au renforcement du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
Le représentant du Brésil a annoncé qu’il s’abstiendrait sur le projet de résolution L.35 « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », considérant que la version de cette année était un pas en arrière comparée aux versions précédentes. Il a jugé inconcevable que le texte de cette année ne mentionne pas l’adoption récente du récent Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, s’étonnant aussi que tant de formulations soient édulcorées. Dans le paragraphe 2, il a notamment noté qu’on ne mentionne plus l’article 6 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), comme cela figurait pourtant dans les formulations précédentes. Le paragraphe 12 ne refléterait plus, non plus, la notion selon laquelle la disparition des armes nucléaires renforcerait le régime de non-prolifération. Il a aussi jugé que le retrait, au paragraphe 3, du dispositif cité dans les documents de 1995 et 2010 était une perte. De même, le retrait des notions explicites présentées dans les rapports finaux de la conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) lui apparaisse comme un « silence incompréhensible ». Il a aussi regretté le pas en arrière au niveau du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et insisté pour que les États cités à l’annexe 2 du traité soient clairement exhortés à le ratifier. Il a encore jugé qu’il y avait une formulation inacceptable au paragraphe 28, estimant qu’il devrait refléter les positions de la conférence d’examen de 2010. À ses yeux, le texte aurait dû être plus ambitieux et inclure une mention plus précise sur l’importance du traité d’interdiction et de production des matières fissiles.
Le représentant des États-Unis a expliqué pourquoi son pays ne voterait pas en faveur des projets de résolution L.2, L.5, L.17 et L.6. Concernant le projet de résolution L.2 « Le risque de prolifération nucléaire au Moyen-Orient », il a affirmé que son objectif n’était pas vraiment d’éliminer les armes nucléaires et leurs vecteurs au Moyen-Orient. Déplorant qu’un État ait été singularisé dans cette enceinte, il a considéré que ce n’était pas une bonne façon d’avancer vers un objectif commun et que cela risquait de nuire au dialogue.
S’agissant des projets de résolution L.5 « Conséquences humanitaires des armes nucléaires » et L.17 « Impératifs éthiques pour un monde exempt d’armes nucléaires », il s’est interrogé sur les conclusions et les objectifs derrière ces textes. Si le but est de promouvoir la non-détention d’armes nucléaires, ce n’est pas une position favorable au consensus a-t-il avancé, estimant que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires risque de créer un monde moins sûr que sous le Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Ce Traité, a-t-il averti, ne va pas supprimer une seule arme, mais va au contraire approfondir les divisions entre les États. Selon lui, il existe une approche pour attaquer le problème des armes nucléaires de façon sécuritaire, mais elle passe par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
Sur le projet de résolution L.6 « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire », il a expliqué que le Gouvernement des États-Unis n’a pas participé aux discussions parce que ce texte est fondé sur l’hypothèse que le désarmement est possible sans prendre en compte la situation sécuritaire internationale. Répétant que la meilleure façon d’avancer consiste à renforcer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), il a appelé à prendre en compte les facteurs sécuritaires et pas seulement les facteurs humanitaires. Il a affirmé que le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires risquait de nuire au TNP, citant notamment son article 18 qui n’impose pas d’adhérer au TNP pour adhérer à celui-ci. Il a aussi rappelé que ce nouveau traité ne demande pas de déclarer de nouveaux programmes nucléaires éventuels, « ce qui revient donc à affaiblir les structures de désarmement ». Il a enfin déploré qu’il n’inclue aucune mesure de vérifications sérieuses. Autant de raisons pour lesquelles les États-Unis rejettent ce traité qui a d’ailleurs, rappelle son représentant, été négocié sans la participation des États dotés. Le délégué a affirmé qu’il valait mieux faire avancer le désarmement via les processus qui existent déjà. « Nous n’accepterons aucune mention explicite à ce traité dans un quelconque document », a-t-il conclu.
Le représentant de la République de Corée a indiqué que son pays soutenait une approche graduelle et inclusive, telle que privilégiée par le cadre établi par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
Reprenant la parole, le représentant de la République islamique d’Iran a déclaré que son pays appuierait le projet de résolution L.1 sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient et L.2 sur le risque de prolifération au Moyen-Orient. Il a dénoncé la « politique têtue d’Israël, soutenue par les États-Unis », y voyant le seul obstacle à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. Les États-Unis, simplement pour faire plaisir au seul État de la région à ne pas avoir adhéré au Traité, font fi d’une norme internationale approuvée par la communauté internationale, a-t-il également dit. Il a ajouté que la politique d’Israël était une menace exigeant de nouvelles mesures de paix et de sécurité au Moyen-Orient.
Le représentant de la Chine a annoncé que son pays voterait contre le projet de résolution L.35, « Agir dans l’unité, avec une détermination renouvelée, en vue de l’élimination totale des armes nucléaires », les lacunes de la version 2017 donnant lieu à « un texte incompatible avec la position de ma délégation ».
Le représentant de l’Afrique du Sud a constaté que le projet de résolution L.35 n’avait plus grand chose à voir avec les versions précédentes de ce texte. Les accords consensuels issus des conférences d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), et les engagements correspondants, ont été édulcorés, ce qui pourrait nuire de manière irréversible à la mise en œuvre du Traité. La tendance de certains à réinterpréter les obligations du titre et à assortir de conditions leur mise en œuvre sapent gravement la portée du Traité, a-t-il également considéré, annonçant que cette année, son pays ne pourrait soutenir ce texte.