En cours au Siège de l'ONU

L’amélioration de la situation humanitaire en Syrie dépend du processus politique en cours, estiment des membres du Conseil de sécurité

8384e séance – matin
CS/13558

L’amélioration de la situation humanitaire en Syrie dépend du processus politique en cours, estiment des membres du Conseil de sécurité

Trois jours après la réunion quadripartite qui a réuni à Istanbul l’Allemagne, la France, la Fédération de Russie et la Turquie, le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014),2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016), 2393 (2017) et 2401 (2018) du Conseil de sécurité, traitant des aspects humanitaires, sécuritaires et politiques de la crise en Syrie.

La situation humanitaire a été source d’inquiétudes parmi les membres du Conseil, même si des développements positifs ont été observés ces dernières semaines, avec l’accord de cessez-le-feu sur Edleb, comme l’a indiqué le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, qui présentait le rapport. 

Au cours des sept premiers mois de cette année, 5,5 millions de personnes en moyenne ont bénéficié d’une aide d’urgence.  Rien qu’en septembre, 2,5 millions ont reçu une aide alimentaire, notamment du côté des zones récemment repassées sous contrôle gouvernemental. 

Mais alors que le Gouvernement syrien s’était engagé à faciliter l’acheminement des convois, il vient de reporter le départ d’un convoi destiné à 50 000 personnes vivant à Roukban, a déploré le Coordonnateur des secours d’urgence, appelant les membres du Conseil à garantir la pérennité de l’accord russo-turc sur Edleb.  Il a aussi recommandé de prolonger d’un an la résolution 2165 (2014), qui prévoit des livraisons transfrontières d’aide par les agences humanitaires des Nations Unies, notamment pour aider les 3 millions de civils d’Edleb et pour faire parvenir les fournitures et services essentiels dans le nord de la Syrie.

Autres recommandations: permettre un accès à Roukban pour les convois humanitaires du Croissant-Rouge arabe syrien et de l’ONU; soutenir les efforts pour améliorer l’accès humanitaire, l’évaluation des besoins et le recueil de preuves sur la levée et l’utilisation des ressources; et enfin obtenir des financements généreux pour les opérations de secours.  « Il est très important que cela reste le cas, pour les millions de personnes se trouvant à Edleb, car les enjeux sont élevés », a insisté M. Lowcock. 

Un des participants à la réunion quadripartite du 27 octobre, en l’occurrence la France, a indiqué qu’ils étaient parvenus à la conclusion selon laquelle la situation humanitaire ne pourra s’améliorer qu’avec un cessez-le-feu à long terme et des élections libres, avec la participation des Syriens de la diaspora.  Cela implique que le régime syrien cesse sa « stratégie d’instrumentalisation politique et punitive » à l’égard de la population en entravant l’acheminement de l’aide vers les zones « réconciliées », a dit le représentant français. 

Plusieurs délégations, notamment celle du Royaume-Uni, de la Pologne et des États-Unis ont partagé ce point de vue.  Notant que le Gouvernement syrien a annoncé qu’il reprendrait Edleb « le moment venu », le délégué des États-Unis a prévenu que l’ampleur de la crise serait « inouïe » si le Président Assad décidait de rompre le cessez-le-feu.  « Nous devons nous préparer au pire en cas d’échec politique », a prévenu la délégation américaine. 

Pour ne pas en arriver là et pour éviter que la situation humanitaire ne s’aggrave davantage, ces mêmes délégations ont réclamé des garanties sur le processus politique.  Elles doivent se matérialiser non seulement par la durabilité de l’accord concernant Edleb, mais aussi par la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) et par la mise en route du comité constitutionnel.  C’est ce qu’ont soutenu également les délégations du Koweït, de l’Éthiopie et de la Côte d’Ivoire. 

Au lieu de « poser des conditions » ou de faire des « critiques », il faut contribuer et soutenir le processus politique, a rétorqué le représentant russe.  « Il est certes essentiel que le comité constitutionnel débute ses travaux, mais encore faut-il qu’il soit accepté de toutes les parties. »  On ne peut pas imposer à Damas des échéances artificielles ou des solutions qui viennent de l’étranger, a-t-il exigé. 

En soutenant le processus de négociation intersyrien, la communauté internationale contribuera à une solution pour résoudre la crise humanitaire, a résumé le Kazakhstan.

Le représentant syrien a demandé de ne pas confondre processus politique et question humanitaire, affirmant que des pays occidentaux cherchent à manipuler le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  La « vérité » est que l’aide transfrontière est utilisée pour acheminer des armes en Syrie, a-t-il affirmé en accusant les terroristes de prendre des civils comme boucliers humains.  Il a rappelé que le Gouvernement syrien avait demandé que les zones libérées soient parmi celles qui bénéficient du plan d’acheminement de l’assistance.  « Cela n’est pas pris en compte dans le rapport », a-t-il déploré.

En début de séance, le Conseil de sécurité avait observé une minute de silence à la mémoire des victimes de la fusillade à la synagogue de Pittsburgh survenue le 27 octobre.  Plusieurs membres du Conseil ont en outre présenté leurs condoléances à l’Indonésie, à la suite de l’accident d’avion abîmé en mer avec 189 personnes à bord le 29 octobre. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2018/947)

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré que des développements positifs ont été observés ces dernières semaines, avec l’accord de cessez-le-feu sur Edleb.  « Il est très important que cela reste le cas, pour les millions de personnes se trouvant à Edleb, car les enjeux sont élevés. »

Il a également indiqué que les Nations Unies et leurs partenaires continuent de fournir une assistance aux populations à travers toute la Syrie.  Ainsi, au cours des sept premiers mois de cette année, en moyenne 5,5 millions de personnes ont bénéficié d’une aide de secours.  Rien qu’en septembre, 2,5 millions de personnes ont reçu une aide alimentaire, notamment du côté des zones récemment repassées sous contrôle gouvernemental, avec l’appui du Croissant-Rouge arabe syrien.  Le Gouvernement syrien a fermement exigé que toute aide destinée aux zones sous son contrôle parte de Damas.  Il a également accepté de faciliter l’acheminement des convois.  Cependant, dans plusieurs autres régions ayant « changé de mains », les Nations Unies n’ont pas « d’accès durable », a-t-il dit.

M. Lowcock a ensuite rappelé que si la résolution 46/182 de l’Assemblée générale adoptée en 1991 exige que les gouvernements soient consultés pour la coordination de l’aide humanitaire d’urgence, il est tout aussi important que les principes d’indépendance, d’impartialité et de neutralité de l’action humanitaire soient soulignés, en particulier afin de garantir que l’aide soit fournie sur la base des besoins et non pour d’autres considérations.  Cette question, qui a été discutée avec le Gouvernement syrien, a conduit à la signature d’un accord sur l’extension des capacités des Nations Unies à évaluer les besoins de la manière la plus large possible, a encore indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence. 

En plus des convois partant de Damas, les Nations Unies continuent aussi leurs opérations transfrontières.  Depuis la Turquie, environ 1 000 camions transportant des bâches en plastique, des vêtements chauds pour l’hiver, des bottes, des radiateurs et des poêles ont pris la route vers la Syrie.  Une aide critique a également été acheminée depuis l’Iraq, en direction du nord-est de la Syrie, en passant par la frontière d’al-Yarubiyah.  Au cours des neuf premiers mois de 2018, plus de 750 000 personnes en moyenne ont reçu une aide alimentaire grâce à ces activités transfrontières. 

Cependant, des zones de préoccupation persistent en Syrie, a poursuivi M. Lowcock.  Ainsi, alors qu’en coopération avec le Croissant-Rouge arabe syrien, une opération partant de Damas devait parvenir à 50 000 personnes et permettre de vacciner 10 000 enfants à Roukban, ville située à la frontière avec la Jordanie, le départ du convoi initialement prévu le 27 octobre a été reporté, en raison d’informations faisant état d’insécurité.  Or la population de Roukban n’a pas reçu d’aide depuis janvier de cette année, s’est alarmé M. Lowcock, ajoutant que, selon des rapports alarmants, des enfants continuent de mourir en raison du manque de soin.  « Cette situation ne doit pas se poursuivre », a-t-il martelé avant d’ajouter que les Nations Unies sont prêtes à faire repartir le convoi. 

Pour cette raison, il appelle toutes les parties à faire en sorte que la sécurité des travailleurs humanitaire soit garantie, dans le contexte où des combats continuent d’avoir lieu et d’affecter les civils le long de l’Euphrate et dans divers lieux de la province de Deïr el-Zor.  On rapporte qu’environ7 000 personnes ont été déplacées de Hajin en raison de combats menés contre les dernières enclaves de Daech en Syrie.  On affirme aussi que 15 000 personnes sont prisonnières dans les zones encore contrôlées par cette organisation, a-t-il dit.

Concluant son intervention, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a déclaré chercher le soutien des membres du Conseil de sécurité sur cinq points: la pérennité de l’accord sur Edleb; la prolongation pour un an supplémentaire de la résolution 2165 (2014); l’accès humanitaire à Roukban; l’amélioration des processus d’évaluation des besoins, de collectes de fonds et de preuves sur l’utilisation de ces fonds; et enfin la générosité des donateurs.  Sur ce dernier point, il a déclaré que bien que 1,7 milliard de dollars aient déjà été levés, le plan de secours d’urgence de cette année n’est, pour l’heure, financé qu’à moitié.

Saluant le cessez-le-feu d’Edleb, M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) s’est cependant dit préoccupé par le sort des civils à Deïr el-Zor, ainsi que par le problème des mines et des engins explosifs laissés dans la zone de Raqqa par les combattants de Daech.  Il a appelé toutes les parties à renforcer la protection des civils durant les opérations militaires contre Daech.  Concernant l’accès humanitaire, le délégué a appelé le Gouvernement syrien à coopérer avec les Nations Unies pour que l’aide parvienne à ceux qui en ont le plus besoin, surtout dans les zones qu’il contrôle de nouveau.  Invoquant le principe d’impartialité, il s’est aligné sur les conclusions du Sommet d’Istanbul réclamant un accès rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire dans les zones difficiles d’accès.  S’inquiétant à cet égard de la situation au camp de Roukban, il a rappelé que les souffrances et la crise humanitaire ne se dissiperont qu’avec des progrès sur le plan politique, sur la base de la résolution 2254 (2015).

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) a déclaré que la tenue de cette réunion était opportune, dans la mesure où le représentant de la Syrie a déclaré vendredi que son gouvernement reprendrait Edleb « le moment venu »: une offensive pourrait aggraver la crise humanitaire qui sévit dans le pays.  L’ampleur de la crise serait « inouïe » si le Président Assad décidait de rompre le cessez-le-feu instauré par l’accord russo-turc, a-t-il prévenu, craignant la plus grande catastrophe humanitaire au monde.  « Nous sommes d’accord pour dire que nous devons nous préparer au pire en cas d’échec politique; la communauté internationale devrait être prête à agir si le régime venait à rompre le cessez-le-feu », a mis en garde la délégation américaine.  Il s’est ensuite ému des difficultés à apporter de l’aide depuis Damas pour les trois millions d’habitants d’Edleb, qui ne tiennent que grâce à l’aide transfrontalière autorisée par des résolutions du Conseil de sécurité.  Encore faut-il que ces résolutions soient appliquées, a fait observer M. Cohen, en rappelant à tous les États Membres concernés la nécessité de s’acquitter de leurs obligations.  Par ailleurs, a-t-il ajouté, le régime syrien doit encore démontrer qu’il est favorable à la réintégration des réfugiés, lesquels doivent pouvoir prendre le chemin du retour dans des conditions sûres.  « Réfugiés et déplacés doivent pouvoir décider lorsqu’ils souhaitent rentrer dans leurs foyers », a-t-il insisté.  Le représentant a, en conclusion, réitéré l’importance de former le comité constitutionnel le plus rapidement possible, en rappelant qu’il ne s’agissait en rien d’une « échéance artificielle » mais d’un « impératif moral ». 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a rappelé les conclusions du Sommet d’Istanbul, à savoir que la situation humanitaire ne sera améliorée qu’avec un cessez-le-feu à long terme, et des élections libres organisées sous supervision onusienne, avec la participation des Syriens de la diaspora.  Dans le cadre d’un cessez-le-feu à long terme à Edleb, la protection des civils et des installations médicales doit être une priorité absolue pour les parties prenantes, a-t-il souligné.  Déplorant que les conditions ne soient pas encore réunies pour un retour des civils, il a dénoncé les actions du régime syrien entravant leur retour, comme sa stratégie d’ingénierie démographique.  « Ne nous laissons pas tromper par la fable du régime: ce n’est pas l’absence de reconstruction qui empêche le retour des réfugiés.  C’est l’absence d’avancées crédibles dans le processus politique », a estimé M. Delattre.

Blâmant le régime syrien, qui « continue inlassablement sa stratégie d’instrumentalisation politique » en imposant des obstacles à l’aide humanitaire, M. Delattre a jugé « inadmissible » que le régime bloque les convois interagences et mette en place une stratégie punitive à l’égard de la population, en entravant l’acheminement de l’aide vers les zones « réconciliées ».  Il a réclamé que l’ensemble des convois puisse circuler de manière sûre dans tout le pays, notamment jusqu’au camp de Roukban, « où 50 000 personnes vivent dans des conditions cauchemardesques », et dans le nord-est récemment libéré du joug de Daech, où M. Delattre a appelé l’ONU à intensifier ses efforts.  Enfin, dans la perspective d’une solution politique durable, il a appelé à la création d’un comité constitutionnel d’ici à la fin de l’année, dans la lignée des appels du Conseil de sécurité de vendredi dernier et des conclusions du Sommet d’Istanbul.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé qu’après huit années d’affrontements, tout le monde est d’accord sur le fait que « les Syriens sont épuisés par la guerre et l’incertitude sur leur avenir ».  Malgré la baisse du nombre des offensives militaires, la présence de groupes terroristes dans la province d’Edleb risque de provoquer selon lui un risque d’escalade.  Aussi a-t-il rappelé que les parties à l’accord russo-turc doivent s’acquitter de leurs obligations de démilitariser la zone tampon.  Par ailleurs, il a attiré l’attention sur la situation dans le camp de Roukban, à la frontière syro-jordanienne, marquée au cours de la période à l’examen par une nouvelle détérioration du sort des quelque 45 000 personnes qui y sont installées.  Pour la délégation, le conflit en Syrie ne pourra être résolu par la voie militaire, mais par un processus politique adossé à la résolution 2254 (2018).

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a dit partager le même point de vue que la France en ce qui concerne le processus politique en Syrie, dans le contexte où les membres du « Small group », dont son pays fait partie, sont actuellement réunis à Londres.  Sa délégation souhaite avoir des garanties sur la durabilité de l’accord concernant Edleb, sur la détermination des Gouvernements syrien et russe à continuer d’autoriser les convois humanitaires, et encore sur la réunion du futur comité constitutionnel bien avant la fin de novembre.

Le Royaume-Uni est également du même avis que les États-Unis lorsque ceux-ci évoquent les préoccupations de l’ONU en ce qui concerne l’évaluation des besoins humanitaires.  Il faut des mécanismes indépendants d’évaluation, a plaidé la représentante, rappelant que les États Membres des Nations Unies ont l’obligation de garantir un accès humanitaire en fonction des besoins.  Si le Royaume-Uni peut comprendre l’argument sécuritaire soulevé par le Gouvernement syrien concernant la zone de Roukban, à la frontière jordanienne, elle estime aussi que le Conseil de sécurité a besoin d’être informé dans le détail des préoccupations syriennes et russes.  La représentante attend d’entendre ces délégations sur ce point.

Le Royaume-Uni est enfin du même avis que M. Lowcock, qui en appelle à la « générosité » des donateurs internationaux.  Le Gouvernement du Royaume-Uni s’est montré généreux et a promis 3,4 milliards de dollars d’aide humanitaire, a rappelé Mme Pierce en indiquant qu’une « bonne partie » de cette somme a déjà été versée.  Pour autant, sa délégation partage, une fois de plus, le point de vue de la France s’agissant de la question de la reconstruction de la Syrie.  Elle ne sera traitée que lorsque la crise sera terminée, a conclu Mme Pierce. 

Mme JOANNA WRENCKA (Pologne) a déclaré que, si l’accord russo-turc en date du 17 septembre qui a établi une zone démilitarisée dans la province d’Edleb a permis d’éviter une catastrophe humanitaire, les civils de la région n’en continuent pas moins de se heurter à des besoins considérables, et à des menaces à leur sécurité.  C’est la raison pour laquelle la représentante a encouragé toutes les parties à pleinement appliquer l’accord, en particulier l’obligation de préserver le cessez-le-feu pour permettre un accès humanitaire sans entraves dans tout le territoire de la Syrie.  La représentante a également souligné la nécessité de protéger les civils et les infrastructures civiles, demandant en outre aux acteurs exerçant une influence sur les parties au conflit, en particulier les garants du processus d’Astana, de prendre toutes les mesures possibles pour faire cesser les hostilités une bonne fois pour toutes sur l’ensemble du territoire syrien. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a salué les progrès réalisés à Edleb et appelé à mettre en œuvre immédiatement les accords de Sotchi.  Il s’est dit inquiet du sort des civils dans la région de Deïr el-Zor, où les combats ont déplacé plus de 30 000 personnes depuis juillet: il a réclamé à l’ONU de leur venir en aide et demandé à toutes les parties prenantes de respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, et de protéger les civils et les infrastructures civiles, y compris le personnel humanitaire.  Vu le large nombre d’engins explosifs laissés par Daech, il a appelé l’ONU à déminer le secteur pour lancer les opérations humanitaires et donner aux réfugiés une opportunité de retourner chez eux, en particulier à Raqqa.  Enfin, il a appelé la communauté internationale à soutenir le processus de négociation intersyrien pour résoudre la crise humanitaire, il a recommandé à toutes les parties prenantes de collaborer avec l’ONU et ses agences, et réclamé une approche holistique qui aille au-delà de la seule aide matérielle.  Il s’est réjoui de la tenue du récent Sommet d’Istanbul entre la France, l’Allemagne, la Russie et la Turquie et approuvé les avancées qu’il a permises, notamment la création prochaine d’un comité constitutionnel.

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a rappelé que l’accord sur Edleb avait permis d’empêcher la confrontation et d’éviter une « catastrophe humanitaire sans précédent ».  Pour cette raison, la Côte d’Ivoire appelle toutes les parties à s’inscrire résolument dans sa mise en œuvre.  Elle les appelle également à la retenue et à prendre les mesures nécessaires pour garantir un accès sûr, durable et sans entraves de l’assistance humanitaire.  La Côte d’Ivoire reste par ailleurs convaincue qu’il n’y aura de solution durable à la crise syrienne que dans le cadre du processus politique fondé sur un dialogue inclusif entre toutes les parties.  Le représentant a salué en conséquence les initiatives prises dans le cadre du processus de Genève et d’Astana, a conclu le représentant. 

M. WU HAITAO (Chine) a rappelé que l’accord conclu entre la Russie et la Turquie pour instaurer un cessez-le-feu et démilitariser la zone d’Edleb tient toujours, même si des années de conflit ont considérablement endommagé les infrastructures civiles, exposant les populations civiles à des difficultés grandissantes à l’approche de l’hiver.  Les efforts humanitaires en Syrie doivent être déployés dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriales de ce pays, a tenu à rappeler le représentant.  Il a ensuite souligné la nécessité de rester mobilisé contre les forces terroristes, qui continuent d’entraver l’acheminement de l’aide humanitaire.  La Chine, a-t-il annoncé, vient d’apporter une aide supplémentaire aux populations syriennes, y compris pour les réfugiés se trouvant dans les pays limitrophes, sous la forme de générateurs et de câbles afin d’améliorer l’alimentation en électricité. 

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est réjouie de la conclusion de l’accord sur Edleb et de ses effets positifs sur la situation humanitaire.  Pour cette raison, a-t-elle ajouté, il est important que cet accord soit pérenne, et que le Gouvernement syrien continue de faciliter la distribution de l’aide humanitaire aux zones nécessiteuses.  Cela dit, l’Éthiopie reste convaincue que la sortie de crise en Syrie ne peut être que politique, dans la ligne de la résolution 2254 (2015).  À cet égard, la délégation salue la réunion quadripartite qui s’est tenue vendredi à Istanbul entre la Turquie, la Fédération de Russie, la France et l’Allemagne. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré que la situation à Edleb est loin d’être rassurante, même si la préservation de l’accord russo-turc jusqu’à présent constitue un pas dans la bonne direction.  Le représentant a évoqué le sort de 45 000 personnes qui vivent dans le camp de Roukban dans des conditions précaires et pâtissent de l’insuffisance des soins de santé.  S’il s’est félicité du retour de personnes déplacées à Raqqa, M. Meza-Cuadra a exhorté la communauté internationale à déminer le sol, où la présence d’engins explosifs improvisés continue de représenter un grave danger.  Sa délégation a également plaidé pour que le retour des réfugiés et personnes déplacées s’effectue dans des conditions sûres et en toute sécurité. 

M. KAREL J. G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) s’est inquiété du manque d’accès humanitaire à l’intérieur de la Syrie après presque huit ans de conflit, même dans les zones contrôlées par le régime syrien.  Ce dernier refuse depuis le 16 août l’accès aux zones en difficulté aux convois interagences, en particulier aux zones récemment reprises à l’opposition.  Le représentant a jugé « intolérable » que des civils soient punis collectivement parce qu’ils vivent dans des zones anciennement aux mains de l’opposition ». 

Déplorant la situation à Edleb « où trois millions de Syriens sont coincés entre l’armée syrienne et la frontière turque », M. Oosterom a appelé le Conseil de sécurité à soutenir le couloir humanitaire transfrontalier formé depuis la Turquie.  Saluant la baisse de la violence dans ce secteur, il a appelé à un cessez-le-feu durable et au respect du droit international humanitaire.  Les Pays-Bas appuient une solution politique négociée entre les parties prenantes syriennes, sur la base de la résolution 2254 (2015) et du Communiqué de Genève (2012), et l’application du principe de responsabilité aux auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Ils désapprouvent les appels « prématurés » à une aide à la reconstruction et au retour des réfugiés, considérant que le pays n’est pas prêt. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a partagé les points de vue exprimés par d’autres délégations sur la situation humanitaire catastrophique, la fourniture de l’aide aux zones dans le besoin, la nécessité de reformuler la résolution 2165 (2014) sur l’aide humanitaire en Syrie et d’avancer sur le processus politique, conformément à la résolution 2254 (2015).  Du point de vue de la Suède, la situation humanitaire ne sera atténuée que si l’on avance sur le processus politique, a résumé le représentant. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a déclaré qu’il faut contribuer à soutenir les processus en cours, au lieu de les « critiquer » ou de « poser des conditions », « ce que franchement nous ne comprenons pas », a-t-il lancé.  Les Syriens sont de plus en plus nombreux à rentrer à chez eux depuis la frontière syro-jordanienne, a-t-il constaté avec satisfaction.  Nos partenaires turcs font tout leur possible pour démilitariser la zone d’Edleb, mais les organisations terroristes, comme « le Front el-Nosra et les Casques blancs », continuent de se déplacer, parfois en possession d’armes chimiques, a assuré le représentant.  Si ces violations se poursuivent, la Russie se réserve le droit de mener des offensives pour éradiquer cette menace, a-t-il mis en garde. 

Évoquant le sommet quadripartite tenu le 27 octobre à Istanbul, il a rappelé que cela avait été l’occasion pour les différentes parties de réitérer leur attachement à un règlement politique dans le respect de la souveraineté de la Syrie.  Il est maintenant essentiel selon lui de faire démarrer les travaux du comité constitutionnel, mais pour qu’il soit opérationnel, encore faut-il qu’il soit accepté de toutes les parties.  Après tant d’années de guerre, le pays devra passer par un processus de réconciliation nationale, et on ne peut pas imposer à Damas des échéances artificielles ou des solutions qui viennent de l’étranger, a-t-il tranché.  Quant à ses « collègues » qui continuent de parler du « régime syrien », il leur a rappelé que c’est contraire à tous les documents officiels, qui mentionnent le Gouvernement syrien. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a déclaré que son pays reste sur sa position, à savoir que le conflit en Syrie n’a pas d’issue militaire.  Il a donc estimé que la violence doit être réduite sur toute l’étendue du territoire syrien, dans le cadre de la résolution 2401 (2018).  Le représentant a salué la réunion quadripartite de vendredi dernier entre la Turquie, la Fédération de Russie, la France et l’Allemagne, espérant que cette réunion renforcera le dialogue et permettra de garantir la pérennité du cessez-le-feu, notamment à Edleb.  En outre, la Bolivie considère que tous les efforts visant à lutter contre les groupes considérés comme « terroristes » par le Conseil de sécurité doivent également tenir compte de la protection des civils.  La délégation appelle donc toutes les parties ayant une influence sur le terrain à rechercher ces deux objectifs. 

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) s’est désolé de voir certains membres du Conseil de sécurité confondre processus politique et question humanitaire, avant de déplorer une supposée attaque aérienne lancée par la coalition à l’aide « de bombes au phosphore blanc ».  Il s’est élevé contre les tentatives de certains pays de manipuler le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), imputant la baisse du financement de l’aide fournie dans son pays aux « mesures coercitives » prises par les pays occidentaux à l’encontre de son gouvernement.

Évoquant le rapport présenté par M. Lowcock, le représentant a souligné la nécessité « impérieuse » de modifier le mécanisme de rapport de la situation sur le terrain, estimant que la périodicité de l’examen de ce document devrait être trimestrielle plutôt que mensuelle.  Il a accusé les groupes terroristes armés de faire des civils des boucliers humains, en se réfugiant dans des écoles et des hôpitaux, avant de s’élever contre l’indifférence supposée du Secrétariat de l’ONU vis-à-vis des éléments d’information présentés par Damas, qui sont systématiquement ignorés par l’OCHA.  La « vérité », a argué le délégué syrien, c’est que son gouvernement a demandé à l’ONU de faire figurer les zones libérées parmi celles qui peuvent bénéficier du plan périodique d’acheminement de l’assistance, mais elles n’ont pas été retenues.  « La réponse est à trouver du côté de M. Lowcock », a ironisé M. Ja’afari.

Il a ensuite regretté que les auteurs du rapport, « à la demande de certains pays occidentaux », ne tiennent pas compte du fait que l’aide transfrontalière est utilisée par les groupes terroristes pour acheminer des armes dans son pays.  S’agissant des réfugiés, il a assuré qu’ils étaient des millions à prendre le chemin du retour, malgré les tentatives des puissances occidentales de les effrayer pour les dissuader.  M. Ja’afari a tenu à rappeler qu’« Edleb est une ville syrienne », et que son gouvernement continuera de combattre les terroristes jusqu’au dernier ou tout transfert d’armes illégal dans son pays. 

Reprenant la parole à la fin de la séance, la représentante du Royaume-Uni a déclaré qu’il n’était « pas acceptable de critiquer, dans cette enceinte, les Nations Unies parce qu’elles font leur travail ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

« La paix n'est pas trouvée, la paix est construite », souligne le Recteur de l’Université de la paix à la Quatrième Commission

Soixante-treizième session,
16 séance – après midi
CPSD/676

« La paix n'est pas trouvée, la paix est construite », souligne le Recteur de l’Université de la paix à la Quatrième Commission

Cet après-midi, la Quatrième Commission s’est penchée sur l’Université pour la paix (UPEACE), un point de son ordre du jour* qui revient tous les trois ans.

Elle a également adopté, par consensus, le projet de résolution sur cette question par lequel l’Assemblée générale demanderait à nouveau au Secrétaire général de créer, sous son patronage, un fonds d’affectation spéciale pour la paix afin de faciliter le versement de contributions volontaires à l’Université.  L’Assemblée, par ce texte, prierait de faire davantage appel à l’Université, dans le cadre de l’action qu’il mène en vue de régler les différends et de consolider la paix, pour la formation du personnel, en particulier, du personnel chargé du maintien et de la consolidation de la paix, de manière à renforcer ses capacités dans ce domaine, ainsi que pour la promotion de la Déclaration et du Programme d’action en faveur d’une culture de paix et du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

C’était l’occasion pour le Recteur de l’Université, M. Francisco Rojas-Aravena, de faire le point sur la mission de cette institution, une mission d’autant plus pertinente dans le contexte mondial actuel.  Il était accompagné de deux membres de son rectorat, la lauréate du prix Nobel de la paix, Mme Ouided Bouchamaoui, de Tunisie, et le Chancelier de l’Université, M. Enrique Baron, de l’Espagne.

Dans un contexte mondial marqué par une profonde transformation du système international avec la reconfiguration des relations géostratégiques et de la géopolitique mondiale, le recteur a souligné que cette restructuration est caractérisée par des incertitudes.  « Un nouvel équilibre dans les relations de pouvoir entre les principaux acteurs reste à trouver » dans la mesure où ces changements ont entraîné une crise du système multilatéral, à la fois aux niveaux mondial et régional, ainsi que l’émergence des visions à fort poids nationaliste ou « populistes » qui s’accompagnent de protectionnisme économique. 

Pour M. Rojas-Aravena, seule la coopération permettra de faire face aux risques issus de la mondialisation et de l’interdépendance et, à défaut, il sera impossible d’arrêter ou de limiter l’érosion de la gouvernance démocratique, de l’état de droit et de la démocratie.  C’est précisément pour cette raison qu’il est impératif de remettre à l’honneur les espaces multilatéraux pour concevoir, reconstruire et consolider les biens communs de toute l’humanité, a-t-il martelé, soulignant à cet égard le rôle privilégié de l’ONU et de l’UPEACE.  

Reprenant une citation du fondateur de l’Université pour la paix, l’ancien Président costaricien Rodrigo Carazo Odio, il a rappelé que « la paix n’est pas trouvée, la paix est construite ».  La mission de son Université est précisément « de fournir à l’humanité, une institution internationale d’enseignement supérieur au service de la paix ».

C’est sur une idée de l’ancien Président Carazo Odio, que cette institution académique internationale avait été mise en place par l’ONU en 1980.  L’Université pour la paix est basée au Costa Rica et a pour objectif de promouvoir une culture internationale de la paix: elle doit favoriser entre tous les êtres humains un esprit de compréhension, de tolérance et de coexistence pacifique; elle doit encourager la coopération entre les peuples et contribuer à réduire les obstacles et les menaces à la paix et au progrès dans le monde.  À ce jour, l’UPEACE a formé plus de 2 200 étudiants, dont 54% sont des femmes, a souligné son recteur, avec fierté.

La délégation du Soudan a d’ailleurs salué ce taux élevé de femmes diplômées de l’Université.  Elle a cependant soulevé la question de la répartition des ressources de l’Université entre le Costa Rica et ses deux centres régionaux africains, le premier à Addis-Abeba et l’autre à Kampala, et a invité son recteur à prévoir plus de visites régionales dans ces deux centres.

Réagissant à cette intervention, le recteur de l’UPEACE a expliqué que le Programme pour l’Afrique est plus important que jamais et que le Bureau d’Addis-Abeba est, en effet, très utile pour examiner les situations de conflit sur le continent.  Il a indiqué que la principale activité de l’Université, outre les séminaires et le suivi d’étudiants thésards, est de délivrer une maîtrise en droits de l’homme pour les membres de la police de l’Ouganda.  Sur l’aspect financier, le recteur a regretté certaines coupes budgétaires mais il s’est engagé à poursuivre ses visites dans les centres régionaux, à condition d’en avoir les moyens.

M. Rojas-Aravena a ensuite rebondi sur cet échange pour encourager les pays africains à allouer deux bourses par pays, de manière à créer « une masse critique d’étudiants africains » à l’UPEACE. 

Dans le même contexte, le représentant du Costa Rica, qui a également présenté la résolution, a salué la création de nouvelles alliances régionales comme le Programme pour l’Afrique, qui vise à développer les capacités des universités africaines en matière de paix, genre, gestion des conflits, gouvernance, sécurité et développement.  

Pour le recteur d’UPEACE, « former et éduquer à la réalisation d’une paix durable consiste à promouvoir le multilatéralisme, le partage des responsabilités, la compréhension mutuelle, l’égalité des sexes et l’inclusion ».  Il a également mis l’accent sur l’importance des actions préventives qui doivent être fondées sur une meilleure connaissance et reconnaissance des causes profondes des conflits afin d’ouvrir des espaces de négociation.  

C’est précisément ce qu’a fait l’Université au cours des trois dernières années, par une série d’activités menées en collaboration avec plusieurs agences des Nations Unies, dans des domaines importants liés au multilatéralisme mondial.  Parmi celles-ci figure le Programme « Femmes et désarmement », mis en œuvre au Moyen-Orient, en Afrique, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine, en collaboration avec le Bureau des affaires de désarmement, a indiqué le recteur.  De même, en ce qui concerne le renforcement de l’état de droit et la protection des droits de l’homme, l’Université a offert un programme de maîtrise en droit international des droits de l’homme au Honduras, qui a été suivi par 100 participants (juges, procureurs et défenseurs des droits de l’homme). Cette activité a été développée conjointement avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Direction du développement et de la coopération (DDC) et l’Union européenne.  Avec l’Institut interrégional pour la recherche des Nations Unies sur la criminalité et la justice (UNICRI), basé à Turin, elle a finalisé la première édition de la maîtrise de droit en criminalité transnationale et justice, la deuxième édition étant en cours.

Par ailleurs, UPEACE a été reconnue par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Gouvernement du Costa Rica, avec le sceau « Intégration vivante ».  Cette distinction lui a été accordée pour le travail humanitaire réalisé dans le cadre de l’exécution du programme « de transfert et de protection », qui fournit un abri temporaire aux citoyens à risque dans le Triangle du Nord (Guatemala-Honduras-El Salvador).

L’éducation pour une culture de la paix et de la non-violence est un investissement essentiel, a poursuivi le recteur, avant de rappeler les six départements de l’Université - droit international, environnement et développement, études de la paix et des conflits, études régionales, enseignement à distance, et programme de doctorat.  Il a ensuite passé en revue la partie des programmes qui traite des objectifs de développement durable comme l’éducation et l’environnement.  Enfin, il a souligné l’importance des accords d’alliance avec des partenaires, y compris universitaires, et avec les donateurs.

L’appui des États Membres permettra à l’Université pour la paix d’obtenir des résultats encore meilleurs en matière de formation de nouvelles générations d’agents de la paix.  « Avec votre soutien, nous aurons une Université pour la paix plus active, dynamique et renforcée, mieux à même de contribuer à la réalisation d’une paix durable.  Si nous voulons la paix, nous devons travailler pour la paix! » a-t-il conclu.

* La Commission était saisie du rapport du Secrétaire général sur la question (A/73/313)

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission examine les vulnérabilités des femmes face à la traite, l’esclavage moderne et au droit à l’alimentation

Soixante-treizième session,
35e & 36e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4244

La Troisième Commission examine les vulnérabilités des femmes face à la traite, l’esclavage moderne et au droit à l’alimentation

La Troisième Commission a poursuivi, aujourd’hui, son examen des différents droits de l’homme au travers d’un dialogue avec les Rapporteurs spéciaux traitant de questions aussi variées que la traite des êtres humains, les formes contemporaines d’esclavage ou le droit à l’alimentation, occasion pour ces derniers de mettre l’accent sur la vulnérabilité particulière des femmes, qu’elles soient victimes de trafics, travailleuses agricoles ou encore migrantes.  Les délégations ont par ailleurs pu prendre connaissance des travaux du Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée.

Dès l’introduction de son exposé, Mme Maria Grazia Giammarinaro, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a fait observer que ce fléau était généralement appréhendé comme une « question de sécurité ».  Soucieuse de combler une « lacune », elle a choisi de traiter dans son rapport de la dimension de genre, en voyant dans les femmes non seulement des victimes ou des victimes potentielles de la traite, mais aussi des agents du changement.

Alors que, depuis 2016, le Conseil de sécurité s’est spécifiquement penché sur la traite des personnes en axant cette question sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, avec un accent particulier sur le terrorisme, la Rapporteuse spéciale a jugé important d’intégrer une approche fondée sur les droits de l’homme et sur le genre dans les quatre piliers du programme « femmes, paix et sécurité » -Prévention, protection, participation et enfin, secours et relèvement- pour garantir des réponses plus efficaces à la traite, ainsi que contribuer aux processus de paix. 

En outre, Mme Giammarinaro a dit tenir fermement au rôle crucial de la femme dans la prévention de la traite, en particulier dans les situations de déplacement et d’après-conflit.  À ses yeux, il est possible, grâce à la participation et à l’autonomisation des femmes, d’adopter une approche globale et intégrée pour protéger les victimes et les victimes potentielles de la traite à des fins d’exploitation sexuelle dans le contexte de conflits.

La vulnérabilité des femmes tenait aussi une place centrale dans le rapport de la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, Mme Urmila Bhoola, qui traite cette année des dimensions liées au genre, en mettant un accent particulier sur la discrimination structurelle à l’égard des femmes et des filles, à la fois cause et conséquence des diverses manifestations de l’esclavage et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage dans le monde.

Globalement, les filles et les femmes qui travaillent constituent la très grande majorité des personnes dont les droits humains sont violés à travers des manifestations spécifiques, notamment les formes contemporaines d’esclavage telles que le travail forcé, le travail en servitude, la servitude, mariages forcés et autres pratiques analogues à l’esclavage, a expliqué Mme Bhoola.  Un constat que confirment les estimations mondiales sur l’esclavagisme moderne publiées en 2017, selon lesquelles les femmes et les filles représentent 71% des personnes exploitées, dont 58% dans le travail forcé, sur un total de 40,3 millions de personnes soumises à ce fléau.

La plupart des formes d’esclavage se produisant dans le secteur privé, les entreprises devraient se conformer aux Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme des Nations Unies, a encore plaidé la Rapporteuse spéciale, mettant l’accent sur l’exploitation des femmes migrantes, provoquée selon elle par « la baisse d’opportunité d’emplois décents partout dans le monde et la course vers le bas notamment au niveau des différentes chaînes d’approvisionnement » mais aussi par les pratiques frauduleuses d’agences de recrutement de travailleuses domestiques.

Mme Hilal Elver, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, a, quant à elle, mis en garde contre l’augmentation du nombre de personnes sous-alimentées dans le monde, au nombre de 821 millions selon les plus récents rapports de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Elle a aussi souligné le rôle essentiel des travailleurs agricoles -un tiers de la population active mondiale- dans la réalisation de l’objectif 1 de développement durable -« Faim zéro »- à l’horizon 2030, alors même que ces travailleurs, et particulièrement les femmes, sont paradoxalement les plus confrontés à l’insécurité alimentaire. 

La Rapporteuse spéciale a rappelé les conditions de travail dangereuses de ces travailleurs, souvent privés de protection face aux températures extrêmes et à l’exposition aux pesticides.  Elle a aussi critiqué le système de production industriel, basé sur la maximisation de l’efficacité à moindre coût.  À cet égard, elle a remercié le continent africain pour son soutien à la syndicalisation des travailleurs agricoles, notamment des femmes qui sont les plus mal représentées et font face à plus d’obstacles que les hommes .

Les délégations ont ensuite entendu M. Joseph Cannataci, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, présenter le rapport de son groupe de travail sur les mégadonnées, lequel fait apparaître que les données sont un atout économique clef, au même titre que le capital et le travail.  De fait, leur dépendance totale aux informations personnelles exige une adaptation aux exigences des lois sur le droit à la vie privée et à la protection des données, a-t-il souligné.  Il a aussi invité les États Membres à travailler à la création de normes internationales pour le partage de données préservant la confidentialité et à poursuivre les activités internationales de normalisation.  En outre, il les a encouragés à ratifier la Convention modernisée pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, dite « Convention 108+ » et à la mettre en œuvre sans tarder dans le droit interne.

Pour finir, la Troisième Commission a repris sa discussion générale sur la protection et la promotion des droits de l’homme, à laquelle ont participé une vingtaine de délégations.

Lundi 29 octobre, à partir de 10 heures, la Troisième Commission achèvera sa discussion générale sur la protection et la promotion des droits de l’homme, avant de commencer l’examen des questions de racisme et d’autodétermination.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclaration liminaire

Mme MARIA GRAZIA GIAMMARINARO, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a attiré l’attention sur les liens significatifs entre les femmes, la paix et la sécurité.  C’est pour combler cette « lacune », qu’elle se propose d’aborder la dimension de genre dans son rapport.  Jusqu’ici, a-t-elle fait observer, cette notion a été absente dans le traitement de cette problématique.  En effet, la traite est principalement appréhendée comme une « question de sécurité ». 

Or, pour la Rapporteuse spéciale, il est important d’intégrer une approche de la traite des personnes fondée sur les droits de l’homme et sur le genre dans les quatre piliers du programme « femmes, paix et sécurité » -prévention, protection, participation et enfin, secours et relèvement- pour garantir des réponses plus efficaces à la traite, ainsi que contribuer aux processus de paix.  Depuis 2016, le Conseil de sécurité s’est spécifiquement penché sur la traite des personnes relevant de son mandat sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, avec un accent particulier sur le terrorisme, comme cela a été reconnu dans ses résolutions 2331 (2016) et 2388 (2017).

Pour Mme Giammarinaro, la dimension genre de la traite des personnes dans les situations de conflit et de postconflit est avant tout une violation des droits de l’homme, qui devrait être traitée dans le cadre international des droits de l’homme.  Et cela est un message clef, a-t-elle insisté: les femmes doivent être considérées non seulement comme des victimes ou des victimes potentielles de la traite, mais également comme des agents du changement.

Mme Giammarinaro a dit tenir fermement au rôle crucial de la femme dans la prévention de la traite, en particulier dans les situations de déplacement et dans les situations d’après-conflit.  À son avis, il est possible, grâce à la participation et à l’autonomisation des femmes, d’adopter une approche globale et intégrée pour protéger les victimes et les victimes potentielles de la traite à des fins d’exploitation sexuelle dans le contexte de conflits. 

Le rapport, a expliqué Mme Giammarinaro, essaie de montrer qu’une telle approche peut efficacement compléter les efforts en cours contre la traite des êtres humains entrepris au niveau mondial, notamment au sein du Conseil de sécurité et d’autres organes intergouvernementaux, et réduire considérablement les vulnérabilités débouchant sur une exploitation sexiste. 

À cet égard, la Rapporteuse spéciale a brièvement traité de chacun des piliers du programme relatif aux femmes, à la paix et à la sécurité, et présenté certaines des principales recommandations figurant dans son rapport.

Il s’agit d’abord de tenir dûment compte des « signes avant-coureurs » en ayant à l’esprit que les mesures prises ne doivent pas être axées uniquement sur les victimes, mais également sur les auteurs.  Il faut ensuite s’assurer que la justice dans les situations de conflit et d’après-conflit soit de nature transformatrice et s’attaque non seulement aux violations subies par chaque femme, mais également aux inégalités sous-jacentes qui rendent les femmes et les filles vulnérables en période de conflit.

Enfin, la participation significative des femmes est cruciale à tous les niveaux de la prise de décisions en matière de paix et de sécurité, comme en témoigne l’étude mondiale sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité des Nations Unies.  Celle-ci conclut que les processus de paix incluant des femmes en tant que témoins, signataires, médiatrices ou négociatrices augmentent de 20% la probabilité qu’un accord de paix ait une durée minimale de deux ans.  L’impact est encore plus grand avec le temps, un accord de paix ayant 35% plus de chances de durer 15 ans si les femmes participent à sa conception.  En outre, l’intégration d’une perspective sexospécifique dans l’approche en matière de droits économiques et sociaux et de l’accès à ceux-ci au lendemain des conflits est essentielle au rétablissement sur le long terme. 

En conclusion, la Rapporteuse spéciale a insisté sur le droit à la réparation, un aspect, selon elle, impératif pour garantir aux victimes de la traite l’accès à des recours juridiques efficaces et appropriés.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec Mme Maria Grazia Giammarinaro, la Suisse a dit apprécier l’approche globale du rapport et le fait qu’il relève la nécessité d’intégrer la lutte contre la traite des êtres humains de façon plus inclusive dans le travail du Conseil de sécurité et de connecter cette problématique à l’agenda de la résolution 1325.  Elle a voulu savoir si des possibilités d’amélioration existent en matière d’échange d’informations entre le Conseil des droits de l’homme et le Conseil de sécurité afin de garantir une approche fondée sur les droits de l’homme.  Elle a aussi demandé s’il existe des exemples concrets concernant l’intégration intégrale de la traite dans l’agenda pour le maintien de la paix.  Le Liechtenstein a voulu savoir comment évaluer les possibilités d’améliorer la lutte contre ces activités qui touchent essentiellement les femmes et les filles. 

L’Union européenne a salué l’accent mis dans le rapport sur la dimension de genre dans la traite des êtres humains en situation de conflit.  Elle a rappelé son engagement à concrétiser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et s’est dite préoccupée par la prévalence des violences sexistes contre les filles et les garçons dans les conflits.   Notant que Mme Giammarinaro recommande d’intégrer ces efforts dans l’élaboration de programmes sociaux et psychosociaux, elle a demandé des exemples des meilleures pratiques d’une telle intégration horizontale.

Le Royaume-Uni a rappelé qu’il avait toujours plaidé pour la lutte contre la traite des êtres humains, décrite par sa Première Ministre comme l’un des plus grands crimes de tous les temps contre les droits de l’homme.  Il faut travailler ensemble pour traduire ces engagements en actions, a-t-il estimé, ajoutant que l’égalité des sexes devait être au cœur de ces travaux, qui concernent les trois piliers des Nations Unies.  À cet égard, le Royaume-Uni aimerait savoir comment mieux mobiliser les agences pertinentes des Nations Unies et améliorer l’efficacité interagences sur le terrain. 

Le Qatar a jugé important de préserver la dignité humaine et mettre en œuvre des engagements éthiques pour protéger les droits de l’homme.  Il a rappelé son engagement en faveur du Programme mondial de lutte contre la traite des êtres humains et ses initiatives de politique nationale en la matière, notamment la création d’un comité national contre la traite des êtres humains.  Il aimerait savoir quelles mesures la Rapporteuse spéciale a prises pour garantir que cette lutte soit prise en considération dans les différents piliers des Nations Unies.  Pour le Bahreïn, le défi de la traite des êtres humains exige, de notre part, solidarité et efforts.  Le Bahreïn s’emploie à lutter contre cette problématique sur son territoire et dans le monde, y compris, sur le plan national, en collaboration avec des organisations de la société civile ainsi qu’avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). 

Les États-Unis constatent que les trafiquants d’êtres humains profitent de l’effondrement des structures étatiques et ciblent les personnes vulnérables, notamment les femmes et les enfants, mais aussi les apatrides.  Ils ont rappelé qu’ils avaient demandé que toutes les organisations humanitaires traitent, dès le début d’un conflit, des violences sexistes.  Mais les États-Unis estiment que le rapport de Mme Giammarinaro met trop l’accent sur la situation des réfugiés dans les camps alors que la majorité d’entre eux se trouvent hors des camps.  Ils aimeraient savoir si la Rapporteuse spéciale a noté des politiques mises en œuvre par des États Membres et visant à identifier les femmes et les enfants en situation de conflit.

L’Indonésie a souligné son engagement en faveur de la mise en œuvre des traités de lutte contre la traite des êtres humains et du Processus de Bali, lequel est coprésidé par l’Australie et l’Indonésie et vise à faciliter les discussions et le partage d’informations sur les questions relatives au trafic et à la traite des êtres humains et aux crimes transnationaux connexes.  En outre, des mesures nationales ont été prises pour soutenir les victimes sur les plans social et psychologique.  L’Indonésie aimerait l’opinion de la Rapporteuse spéciale sur le moyen de faire respecter les droits de l’homme en travaillant avec les forces de police dans la lutte contre la traite des êtres humains.

Le Bélarus a salué l’amélioration de lutte contre la traite des êtres humains et dit intensifier ses propres efforts.  Il faut renforcer le travail sur la diffusion d’informations visant les enfants, notamment par Internet.

Pour l’Afrique du Sud, la traite des êtres humains est un crime transnational qui exige une réponse nationale, régionale et internationale.  Le pays a adopté, en 2013, une loi qui criminalise de tels agissements et prévoit la création d’un organe interministériel dédié à la lutte contre la traite des personnes.  Dans le cadre de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Afrique du Sud contribue aux efforts régionaux pour combattre ce fléau.  À cet égard, elle a voulu savoir comment les États peuvent renforcer leur coopération transfrontière contre ce phénomène.

La Fédération de Russie a, une fois encore, rappelé que la mise en œuvre des mandats au titre des procédures spéciales devait respecter la répartition des attributions entre les différents organes des Nations Unies.  Elle s’est ainsi élevée contre la tentative de la Rapporteuse spéciale de s’immiscer dans les résolutions du Conseil de sécurité.  Selon elle, la proposition visant à élargir le travail du Conseil de sécurité au domaine de la lutte contre la traite des personnes est contre-productive.  Elle reproche aussi au rapport une attention exagérée aux violences sexuelles, estimant qu’il existe à l’ONU suffisamment de mécanismes dans les mandats desquels entre la lutte contre la violence sexuelle.  Enfin, la Fédération de Russie a dit ne pouvoir appuyer l’intégration des recommandations de la Rapporteuse spéciale dans l’agenda du Conseil sur les femmes, la paix et la sécurité.

Enfin, la République arabe syrienne s’est opposée, elle aussi, aux empiètements de la Rapporteuse spéciale sur des questions extérieures à son mandat, comme la paix et la sécurité ou l’intégrité territoriale de la Syrie.  S’agissant de la traite des personnes, le Ministère de l’intérieur dispose de ses propres procédures de lutte, tandis que le Ministère des affaires sociales s’occupe du sort des victimes.  La République arabe syrienne invite les États Membres à strictement respecter les résolutions 2331 (2016) et 2388 (2017) du Conseil de sécurité sur la traite des êtres humains.

La Grèce a expliqué que les déplacements forcés dans les conflits armés et l’absence de routes sûres aggravaient la vulnérabilité à la traite.  Elle a ensuite cité le cadre national d’assistance et de service de protection pour les victimes potentielles que le pays a mis en place, tels que des centres pour les violences sexuelles et sexistes ou encore la garantie de l’accès des groupes vulnérables aux services de santé.

Le Myanmar a expliqué avoir adopté une loi pour répondre aux menaces actuelles, avant de demander à la Rapporteuse spéciale comment les mesures préconisées pourraient contribuer à faire en sorte que les acteurs non étatiques respectent leurs engagements.  Expliquant qu’il travaillait avec le Bangladesh et les Nations Unies au retour des réfugiés dans le pays, il a demandé comment l’ONU pouvait faire pour que les trafiquants ne fassent pas échouer le processus. 

Israël a mentionné le phénomène des mères porteuses, expliquant que la pratique était très réglementée dans le pays pour éviter toute forme d’exploitation dans un processus qui doit être volontaire pour la mère de substitution.  Israël aimerait connaître l’avis de la Rapporteuse spéciale sur les formes de coopération pouvant être mises en place dans le domaine de la maternité de substitution.

Réponses

Dans ses réponses, Mme MARIA GRAZIA GIAMMARINARO a expliqué prendre très au sérieux ce que la Fédération de Russie avait déclaré à propos de la création de normes indépendantes de la part des Rapporteurs spéciaux, expliquant que son mandat ne concernait pas les politiques et qu’elle ne faisait « que présenter des rapports ».  À propos de l’intégration des mesures préconisées dans le programme « Femmes, paix et sécurité », la Rapporteuse spéciale a expliqué qu’il n’y avait pas là de démarches réellement nouvelles.  Les dernières résolutions du Conseil de sécurité y font elles-mêmes référence, a-t-elle explicité, même si elles ne sont pas très fréquentes.  Comment alors peut-on continuer à faire avancer la mise en œuvre de ces mesures?, s’est-elle interrogée, en rappelant que le programme « Femme, paix et sécurité », lui-même, reconnaissait la traite comme étant un des domaines préoccupants. 

Comment les missions sur le terrain des Nations Unies peuvent-elles contribuer à ces efforts, s’est ensuite interrogée la Rapporteuse spéciale.  À ce sujet, elle a déploré que, sur le terrain, les équipes chargées des questions de sécurité ne parlent pas toujours le même langage que le personnel chargé du développement et les équipes spécialisées dans l’identification des conditions de traite et d’esclavage sexuelle.  « Tout le monde devrait apprendre à parler la même langue afin de protéger les personnes et prévenir la traite », a-t-elle conclu.

Déclaration liminaire

Mme URMILA BHOOLA, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, a présenté un rapport qui traite, cette année en particulier, des dimensions liées au genre dans les formes contemporaines de l’esclavage en mettant un accent particulier sur la discrimination structurelle à l’égard des femmes et des filles, à la fois cause et conséquence des diverses manifestations de l’esclavage et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage dans le monde.

Globalement, les filles et les femmes qui travaillent constituent la très grande majorité des personnes dont les droits humains sont violés à travers des manifestations spécifiques, notamment les formes contemporaines d’esclavage telles que le travail forcé, le travail en servitude, la servitude, mariages forcés et autres pratiques analogues à l’esclavage, a expliqué Mme Bhoola.

Pour la Rapporteuse spéciale, les recherches et études indiquent que les formes contemporaines d’esclavage sont clairement différenciées selon le sexe et la nature.  Selon les estimations mondiales sur l’esclavagisme moderne publiées en 2017, 40,3 millions de personnes ont été soumises aux formes contemporaines de l’esclavage, dont près de 25 millions ont été exploitées dans le travail forcé.  Ces chiffres montrent en outre que les femmes et les filles représentent 71% des personnes exploitées, dont 58% dans le travail forcé.

Alors que les femmes et les filles sont touchées de manière disproportionnée par l’esclavage moderne, le rapport estime également qu’en 2016, plus de 11 millions d’hommes et de garçons ont été exploités dans des travaux imposés par l’État, notamment dans la construction ou dans l’armée.

Les inégalités et la discrimination fondées sur le sexe sont les principales causes de l’esclavage des femmes et des filles, a fait observer Mme Bhoola.  La pauvreté, les normes culturelles et sociales, l’absence de système de protection social et les discriminations dans l’accès à l’éducation et à l’information, le système judiciaire, sont pour elle quelques-uns des nombreux facteurs qui expliquent cet état de fait.  Ces éléments sont en outre aggravés par les changements climatiques et les conflits ainsi que les migrations mondiales.

Comme la plupart des formes d’esclavage se produisent dans le secteur privé, il est impératif que les entreprises se conforment aux Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme des Nations Unies et garantissent des recours adéquats pour les violations des droits de l’homme, a plaidé la Rapporteuse spéciale, qui a conclu en exhortant les États à élaborer des politiques spécifiques visant les femmes et les filles, étant donné que leur exploitation dans les formes contemporaines d’esclavage sont façonnées par la discrimination fondée sur le sexe, en particulier des facteurs sociaux, juridiques et culturels .

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec Mme Urmila Bhoola, le Qatar s’est dit préoccupé par les statistiques du rapport sur la prolifération des formes contemporaines d’esclavage et a assuré tout faire pour lutter contre ce phénomène et défendre les victimes.  Le Qatar est partie à divers traités relatifs à cette question, notamment la Convention (n°105) de l’Organisation internationale du Travail sur l’abolition du travail forcé et a criminalisé les pratiques qui contribuent au travail forcé.

L’Union européenne a souligné son engagement à éradiquer les formes contemporaines d’esclavage et à poursuivre les responsables de tels crimes en justice.  Elle note que les discriminations contre les femmes constituent un facteur clef des formes contemporaines d’esclavage, dont elles sont victimes de façon disproportionnée et qu’une approche fondée sur le genre est donc nécessaire dans le cadre de la lutte contre ce fléau.  L’Union européenne souhaite que la Rapporteuse spéciale développe ses recommandations adressées aux organisations internationales pour éliminer les différentes formes d’esclavage moderne.  Elle aimerait en outre savoir comment impliquer les femmes et les filles dans l’élaboration de politiques visant à prévenir et éliminer ces formes contemporaines d’esclavage. 

Le Royaume-Uni a dit s’employer activement à combattre les formes contemporaines d’esclavage, notamment dans le cadre de la mise en œuvre du Programme 2030.  Pour le Royaume-Uni, le rôle essentiel que jouent les Nations Unies dans la lutte contre ce phénomène se justifie d’autant plus que l’esclavage concerne les différents piliers de l’Organisation.  Il aimerait savoir quelles mesures concrètes l’ONU devrait prendre pour faire progresser cette lutte mondiale.  Dans le même sens, le Liechtenstein aimerait savoir quelles mesures concrètes devraient être prises pour éliminer les risques d’esclavage pour les femmes migrantes, y compris les travailleuses migrantes.

Les États-Unis ont salué les recommandations du rapport en faveur de la collecte de données ventilées afin d’élaborer des politiques efficaces contre les formes contemporaines d’esclavage, lesquelles constituent, selon eux, des formes de traite d’êtres humains.  Les États-Unis soutiennent divers politiques et programmes visant à prévenir ces crimes, notamment en responsabilisant les communautés.  Ils aimeraient savoir comment associer efficacement la société civile à la lutte contre ce phénomène. 

Réponses

Dans ses réponses, Mme URMILA BHOOLA s’est dire impatiente de se rendre l’année prochaine au Qatar.  À l’Union européenne, elle a dit qu’elle avait un rôle à jouer pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavages qui existent dans la région faisant observer qu’une augmentation notable de différents types d’exploitation avait été remarquée en Italie, en particulier parmi les travailleuses migrantes, alors même que ces dernières pourraient jouer un rôle essentiel dans la lutte contre l’esclavage moderne si elles y étaient impliquées 

Face à la question générale des formes contemporaines d’esclavage pour les femmes migrantes, la Rapporteuse spéciale a cité comme causes « la baisse d’opportunité d’emplois décents partout dans le monde et la course vers le bas notamment au niveau des différentes chaînes d’approvisionnement ».  Insistant sur le fait que son rapport mettait l’accent sur les travailleuses migrantes au niveau du travail domestique, elle a dénoncé les pratiques frauduleuses qui le facilitent et notamment les agences de recrutement qui perpétuent les pratiques.  Enfin, Mme Bhoola a estimé que les États pouvaient jouer un rôle essentiel pour réguler ces pratiques et qu’elles soient équitables, notamment en reconnaissant le rôle des femmes dans le secteur des soins informels et dans le secteur domestique.

Déclaration liminaire

Mme HILAL ELVER, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, a mis en garde, chiffres de son rapport à l’appui, contre l’augmentation du nombre de personnes sous-alimentées dans le monde.  Ils sont 821 millions, soit une personne sur 9, à être touchés par la privation chronique de nourriture, a-t-elle précisé, citant les plus récents rapports de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

Pour atteindre l’objectif 1 de développement durable -« Faim zéro »- à l’horizon 2030, il est de plus en plus important de garantir à la population mondiale une alimentation adéquate, accessible et disponible, afin de concrétiser le droit humain à une alimentation pour tous, a plaidé la Rapporteuse spéciale.  Il est, dès lors, urgent d’atteindre cet objectif en luttant contre ce fléau qui touche en particulier les ouvriers agricoles.

Son rapport se penche notamment sur le rôle essentiel des travailleurs agricoles dans la réalisation de la sécurité alimentaire, qui paradoxalement sont eux-mêmes les plus confrontés à l’insécurité alimentaire, a précisé Mme Elver.  La Rapporteuse spéciale a notamment rappelé les conditions de travail dangereuses de ces derniers, souvent sans aucune protection.  Les ouvriers agricoles représentent environ un tiers de la population active mondiale, soit 1,3 milliard de personnes, a-t-elle rappelé.

Mme Elver a critiqué le système de production industriel, basé notamment sur la maximisation de l’efficacité à moindre coût, qui domine actuellement le monde.  Elle l’a accusé de générer des bas salaires, du travail à temps partiel, souvent dans le secteur informel, sans fournir aucune protection sociale.

La Rapporteuse spéciale a expliqué avoir voulu mettre l’accent sur ces conditions de travail dangereuses car non seulement elles menacent la vie des travailleurs, mais sapent également leur droit à l’alimentation.  Le secteur agricole fait en effet partie des industries les plus dangereuses, du fait de l’exposition régulière des travailleurs aux pesticides et à de longues heures passées dans des températures extrêmes, sans accès adéquat à l’eau.

Pendant les périodes de plantation et de récolte, les travaux dans les champs peuvent durer du matin jusqu’à tard dans la nuit, empêchant encore davantage les travailleurs d’accéder aux services sociaux, a rappelé Mme Elver.  Selon elle, seuls 20% des ouvriers agricoles ont accès aux protections sociales de base, notamment à la sécurité sociale, aux soins de santé et à l’indemnisation.  De plus, ces travailleurs, le plus souvent isolés géographiquement, n’ont pas la possibilité de former des syndicats en raison notamment de problèmes juridiques et des restrictions imposées par les employeurs.

Pour la Rapporteuse spéciale, le droit des travailleurs à l’alimentation passe par la garantie d’un salaire de subsistance leur permettant de satisfaire leurs besoins fondamentaux et ceux de leurs proches.  Cela nécessite également l’élimination de la pauvreté et de ses causes profondes, ainsi que l’amélioration des conditions de travail et de vie, a-t-elle insisté.  Elle a donc appelé les États à mettre en œuvre, en vertu du droit international des droits de l’homme, des protections sociales contre les risques de pauvreté des ouvriers et de leurs familles, causés par la maladie, l’invalidité, le congé de maternité, les accidents du travail, le chômage, l’âge ou le décès.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec Mme Hilal Elver, les Comores, au nom du Groupe des États d’Afrique, se sont félicitées de voir le rapport reconnaître aux travailleurs agricoles un rôle essentiel pour réaliser le droit universel à une alimentation décente.  Elles rappellent toutefois que, très souvent, ces travailleurs doivent eux-mêmes lutter pour assurer leur subsistance.  Le Groupe des États d’Afrique est reconnaissant à la Rapporteuse spéciale pour avoir fait mention des projets menés sur le continent pour intégrer des femmes dans les syndicats agricoles et les protéger contre les violences sexuelles.  Il voudrait savoir comment protéger les droits de ces travailleurs alors qu’il n’y a pas d’instrument international dans ce domaine.

L’Afrique du Sud a rappelé que le secteur agricole joue un rôle très important dans le pays, notamment en termes d’emplois.  Dans ce cadre, le Gouvernement appuie la redistribution des terres pour corriger les péchés du passé, soutenir l’économie et accroître la production pour tous.  L’Afrique du Sud souhaite l’élaboration d’un instrument juridique contraignant pour combattre les violations des droits humains commises par des sociétés transnationales et appelle les États Membres à soutenir le projet de déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales, récemment adopté par le Conseil des droits de l’homme.

Cuba a rappelé le caractère fondamental du droit à l’alimentation, lié au droit le plus précieux: le droit à la vie.  Cuba accuse les États-Unis d’ignorer ce droit, « comme le montre le rapport de Mme Elver ».  Cuba a ainsi dû consentir des efforts importants pour atteindre des résultats reconnus en matière de sécurité alimentaire, malgré la stratégie des États-Unis visant à imposer la faim au peuple cubain.  Cuba appelle les États Membres à ne pas imposer de mesures coercitives unilatérales qui empêchent la réalisation du droit à l’alimentation.

La Turquie a jugé essentiel que chacun soit libéré de la faim pour pouvoir maintenir ses capacités physiques et mentales et plaidé pour que des mesures soient prises à l’échelle mondiale pour améliorer les conditions de vie et de travail de ces personnes.  À cet égard, elle a demandé à Mme Elver de préciser comment l’ONU pourrait agir pour permettre une approche holistique de ce problème.

L’Union européenne a estimé que le rôle des chaînes d’approvisionnement planétaires devrait être accompagné par une exigence de transparence et de responsabilité, et en particulier un traitement décent et digne des travailleurs.  Prenant note des recommandations de la Rapporteuse spéciale pour une meilleure synergie entre les secteurs public et privé, elle a demandé comment mieux sensibiliser la société civile et les milieux académiques à cette question.  Observant par ailleurs que la féminisation croissante de l’agriculture devrait créer des possibilités d’élaboration d’outils spécifiques pour les femmes travaillant dans le domaine agricole, elle a voulu savoir comment améliorer pour elles la mise en œuvre du cadre existant.

Le Viet Nam a jugé le rapport très pertinent, étant un pays dont 70% de la population est constituée de travailleurs agricoles.  Il souhaite que la Rapporteuse spéciale parle des bonnes pratiques sur les réglementations existantes pour réduire les pesticides.  En outre, étant l’un des cinq pays les plus vulnérables aux changements climatiques, il espère un rapport sur le droit à l’alimentation dans ce contexte.

L’Indonésie a rappelé qu’elle avait accueilli la Rapporteuse spéciale du 9 au 14 avril dernier, estimant que cette visite avait permis de faire le point sur les efforts continus du Gouvernement pour identifier les défis et reconnaître les progrès.  Elle a demandé des précisions sur la collaboration la plus efficace avec les parties prenantes pour une meilleure protection des travailleurs agricoles, notamment ceux vivant dans des zones très reculées.

Réponses

Dans réponses, Mme HILAL ELVER a remercié le continent africain et a insisté sur l’importance de soutenir la syndicalisation des travailleurs, surtout pour les femmes, qui sont mal représentées au sein des syndicats et qui font face à plus d’obstacles que les hommes.  Elle a également remercié Cuba, rappelant que ce pays était « à la base de la création de son mandat ».  Elle a estimé que les sanctions unilatérales imposées au pays sont « contre les principes des droits de l’homme », en précisant que ces mesures, qui visent à contraindre le Gouvernement à changer de politique, a « en réalité une incidence sur l’accès de la population à l’eau potable ».  Pour elle, ces mesures devraient être examinées par les Nations Unies.

Enfin, en réponse à l’Afrique du Sud, Mme Elver a dit être d’accord sur le fait que « les résolutions contraignantes sont importantes, parce que nous n’avons plus de contrôle sur les producteurs de notre alimentation ».  Le flou des chaînes d’approvisionnement mérite un examen spécifique, a-t-elle encore ajouté.

Déclaration liminaire

M. JOSEPH A. CANNATACI, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, dont le rapport reste à paraître, a tout d’abord expliqué avoir présenté, en mars, au Conseil des droits de l’homme un bilan complet de son premier mandat de trois ans, dont il avait inauguré la fonction.  Se disant honoré de voir son mandat prolongé jusqu’en 2021, il a rappelé que les révélations sur la sécurité et la surveillance avaient conduit à la création de ce poste.

Le Rapporteur spécial a ainsi expliqué qu’après qu’Edward Snowden eût dévoilé les détails des programmes de surveillance et de partage du renseignement mis en œuvre par les États-Unis et le Royaume-Uni, des requêtes avaient été déposées auprès de la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’interception en bloc de communications.  La Cour a récemment conclu que l’interception en masse n’était pas intrinsèquement incompatible avec un régime des droits de l’homme, à condition que les garanties appropriées soient en place et qu’il n’existe aucun autre moyen d’atteindre les objectifs légitimes, a-t-il expliqué.  La Cour a conclu en outre que le régime de partage de renseignements avec des gouvernements étrangers n’avait pas violé les articles 8 ou 10 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (la « Convention européenne des droits de l’homme »), articles qui reflètent de près les dispositions de l’ONU en matière, respectivement, de droit au respect de la vie privée et familiale et de liberté d’expression.  La Cour a toutefois reconnu que le régime d’interception en masse du Royaume-Uni, tel qu’il était appliqué jusqu’en 2016, contrevenait aux articles 8 et 10 de la Convention, en raison de l’insuffisance des garanties présentées.

Le Rapporteur spécial a également attiré l’attention de la Troisième Commission sur le projet de loi d’assistance et d’accès portant modification de la législation relative aux télécommunications et autres lois du Gouvernement australien qui, selon lui, pourrait avoir de profondes répercussions sur les droits de l’homme et la cybersécurité aux niveaux international et national, s’il devait avoir force de loi.  Il a précisé que le Forum international de contrôle des services de renseignement (IIOF) qu’il organise chaque année, se réunira à Malte à la fin du mois de novembre et discutera sans nul doute de ce projet de loi.

Revenant aux activités de son mandat, M. Cannataci a indiqué que tous les groupes de travail thématiques mis en place progressaient bien.  Ils sont notamment chargés d’examiner l’utilisation des informations personnelles par le secteur privé en réponse à des événements comme la violation de Cambridge Analytica, l’introduction de législations telles que la loi américaine Cloud Act 2018, le projet de loi australien, l’affaire Microsoft contre le Gouvernement américain.  Tous ces sujets ont un lien étroit avec la sécurité et la surveillance, a-t-il souligné.

M. Cannataci a ensuite présenté le rapport du Groupe de travail sur les mégadonnées en prenant soin de préciser qu’en 2018, de nouvelles protections de la vie privée et des données étaient entrées en vigueur ou envisagées dans le monde entier, notamment en Inde, en Amérique du Sud et au sein de l’Union européenne.  Selon lui, ce rapport fait apparaître que les données sont et resteront un atout économique clef, au même titre que le capital et le travail.  Leur dépendance totale aux informations personnelles exige une adaptation aux exigences des lois sur le droit à la vie privée et à la protection des données, a souligné le Rapporteur spécial, jugeant impossible d’isoler les moteurs économiques et politiques des politiques et des pratiques entourant les données ouvertes.

M. Cannataci a indiqué avoir tiré de ces travaux des recommandations sur les données ouvertes.  Il estimé ainsi que, sauf s’il est possible de déterminer sans ambiguïté s’il existe des informations personnelles dans des données agrégées ou si des données désagrégées ne peuvent pas être réagrégées, les données ouvertes ne doivent pas contenir d’enregistrements au niveau de l’unité.  Il a également invité les États Membres à travailler à la création de normes internationales pour le partage de données préservant la confidentialité et à poursuivre les activités internationales de normalisation.  Le Rapporteur spécial les encourage en outre à ratifier la Convention modernisée pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, dite « Convention 108+ » et à la mettre en œuvre sans tarder dans le droit interne, en accordant une attention particulière à la mise en œuvre des dispositions imposant des garanties pour les données à caractère personnel collectées à des fins de surveillance et à d’autres fins de sécurité nationale.

Dans un souci d’alignement des meilleures pratiques, M. Cannataci préconise aussi que, lors de la révision et de la mise à jour de leur législation nationale dans le cadre de la transposition de la Convention du Conseil de l’Europe, les États membres situés en dehors de l’Union européenne intègrent les garanties et les recours prévus dans le Règlement général sur la protection des données (RGDP) de l’Union européenne, adopté en avril 2016, et entré en vigueur cette année.  Enfin, il exhorte les gouvernements et les entreprises à reconnaître la souveraineté des peuples autochtones sur les données qui les concernent ou qui sont collectées auprès d’eux et invite les États Membres à examiner l’adéquation de tous les cadres juridiques et politiques relatifs à l’intelligence artificielle pour la protection de la liberté d’expression et du droit au respect de la vie privée.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec M. Joseph A. Cannataci, l’Australie a affirmé que la loi mise en cause par M. Cannataci n’introduisait pas de faiblesses dans la technologie et que sa base n’était pas nouvelle.

L’Union européenne a insisté sur l’importance de continuer à protéger les défenseurs des droits de l’homme et leur communication.  C’est pourquoi elle a adopté récemment un nouvel ensemble de mesures de protection de données pour s’adapter aux progrès techniques dans le monde d’aujourd’hui.  Elle a demandé au Rapporteur spécial quelle valeur ajoutée à la juridiction déjà existante pourrait apporter le nouveau document juridiquement contraignant qu’il propose d’élaborer.  L’Allemagne a déploré que le droit à la vie privée soit violé dans certains pays alors qu’une telle violation prélude à d’autres violations des droits de l’homme.  Elle a notamment mentionné les données concernant l’identité sexuelle, qui peuvent mener à des discriminations contre certains groupes spécifiques.  Elle a insisté sur le fait que les droits de l’homme s’appliquent aussi bien en ligne qu’hors ligne et qu’il fallait faire plus d’effort pour protéger la vie privée.

Le Brésil a noté que le rapport parlait brièvement de ce que les États et les entreprises pouvaient faire pour éviter les violations arbitraires du droit à la vie privée et a demandé au Rapporteur spécial d’évoquer les liens entre les violations et les stockages des données qui alimentent la propagande politique.

Réponses

Dans ses réponses, M. JOSEPH CANNATACI a indiqué qu’entre amis il y avait des désaccords et que son rôle était d’être cet ami qui peut émettre des critiques, lesquelles peuvent être constructives.  Il a ainsi indiqué, à l’Australie, avoir examiné sa nouvelle loi de manière approfondie et avoir été à l’écoute d’un certain nombre d’acteurs, notamment des entreprises qui ont fait part de leur malaise.  Parfois, la législation ne répond pas aux objectifs qu’elle était censée atteindre, a-t-il fait observer, avant d’encourager l’Australie à amender son texte.  Il a, par ailleurs, félicité l’Union européenne pour ses avancées en la matière, mais a tenu à faire la distinction entre les deux Europes: celle des 28 membres de l’Union européenne et celle des 47 États membres du Conseil de l’Europe.

Le Rapporteur spécial a encouragé les États à resserrer la législation en matière de sauvegarde, soulignant qu’au sein de l’Union européenne elle-même, seuls cinq ou six États avaient travaillé pour augmenter les sauvegardes, alors que les autres sont encore à la traîne.

M. Cannataci a en outre voulu sensibiliser l’assistance en évoquant le scandale de la société Cambridge Analytica, qui a fourni des millions de données d’utilisateurs du réseau social Facebook à des groupes qui les ont utilisées à des fins politiques, lors des élections aux États-Unis et lors du référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Pour le Rapporteur spécial, l’idéal serait que tous les membres des Nations Unies s’asseyent autour d’une table et examinent cette question complexe pour aboutir à un instrument de sauvegarde, notamment s’agissant du cyberespace.  Malheureusement, le climat politique, pour l’heure, n’est pas favorable pour lancer une telle initiative, a-t-il déploré.

Discussion générale

M. FREDERICO SALOMÃO DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) au nom du groupe d’amis des personnes LGBTI, a déclaré que le but du groupe était de travailler avec le système des Nations Unies pour permettre le respect universel des droits de l’homme de tous les individus, incluant les LGBTI, et en particulier de protéger ces derniers de toutes formes de violence.  Protéger la communauté LGBTI de la violence ne requiert pas la création de nouveaux droits, a-t-il expliqué, parce que les droits de l’homme de tous les individus sont inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dispose que « tous les hommes sont nés libres et égaux en droit ».

M. Duque Estrada Meyer, qui s’est félicité de la création, en 2016, par le Conseil des droits de l’homme du mandat de l’Expert indépendant sur la protection contre les violences et discriminations basées sur l’orientation sexuelle et l’identité du genre, a déploré que, dans certaines parties du monde, et notamment son propre pays, les personnes LGBTI continuent d’être des victimes de violations sérieuses des droits de l’homme.

S’opposer à ces violences ne devrait jamais faire l’objet de débats, a affirmé le représentant, qui a salué le rôle des défenseurs des droits des personnes LGBTI et a déclaré qu’aucun individu ne devrait être sujet de violence et d’abus, voire d’assassinats parfois, du fait de son orientation sexuelle ou identité de genre.

M. WU HAITAO (Chine) a indiqué que le chemin vers la réalisation du noble objectif « les droits de l’homme pour tous » est long et ardu.  C’est pourquoi, la Chine propose d’abord la sauvegarde de la paix et de la sécurité, en tant qu’élément primordial des droits de l’homme.  À cette fin, le représentant a invité à soutenir les principes de la Charte des Nations Unies, à renforcer le multilatéralisme et les mécanismes de sécurité collective: en un mot, à « construire un rempart pour la paix ».

M. Wu a ensuite appelé à promouvoir le développement global, exhorté la communauté internationale à s’inscrire contre le protectionnisme et défendu une économie mondialisée équilibrée, reposant sur des bénéfices partagés et le principe « gagnant-gagnant ».  Il a plaidé en faveur de la promotion des échanges et de la coopération, car il n’y a pas, à son sens, un « modèle unique » en matière de droits de l’homme.  Les institutions chargées des droits de l’homme de l’ONU doivent être un lieu d’échange et de dialogue, et non pas une plateforme de pression et de confrontation, a-t-il affirmé.

Enfin, le représentant a indiqué que le Conseil des droits de l’homme, dans le cadre du troisième cycle de l’Examen périodique universel, examinerait en novembre prochain la situation des droits de l’homme dans son pays: la Chine est prête à s’engager dans des dialogues constructifs avec toutes les parties dans un cadre de respect mutuel, a-t-il conclu.

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a énuméré les pays au sein desquels prenaient place des violations des droits de l’homme que les États-Unis condamnent, citant notamment la République islamique d’Iran pour l’emprisonnement de personnes pour des activités pacifiques et des codes vestimentaires, le Myanmar pour des violences sexuelles, la Chine pour la détention de plus d’un million de musulmans, mais également la République arabe syrienne, la Fédération de Russie, le Venezuela, la Turquie, le Burundi et le Yémen.

M. VICTOR MORARU (République de Moldova) a rappelé que la politique et la législation nationales en matière de droits de l’homme étaient guidées en premier lieu par les traités des Nations Unies et des conventions régionales, en particulier celles émanant du Conseil de l’Europe, y compris la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que l’accord d’association Union européenne-Moldova.  Pour le représentant, il y a là un niveau élevé de contrôle, qui régule tous les processus des institutions nationales dans le domaine des droits de l’homme.  En dehors de ces obligations issues des traités des Nations Unies, la République de Moldova entretient des dialogues réguliers avec l’Union européenne concernant les questions relatives à la protection des droits de l’homme.

M. PLAYFORD (Australie) a indiqué qu’en mars dernier son pays avait présenté un engagement pour les membres entrants au Conseil des droits de l’homme, qui a été soutenu par 10 autres États et dont l’objectif est de renforcer l’efficacité et la crédibilité du Conseil.  Le représentant a ensuite passé en revue les différentes actions menées par son pays dans le cadre du Conseil des droits de l’homme, notamment en encourageant la participation de la société civile et en engageant des discussions sur la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes (LGBTI) pour ne laisser personne de côté.  Fière de ses contributions au sein du Conseil des droits de l’homme, l’Australie est disposée à travailler de concert avec les États Membres pour identifier des voies innovantes pour la promotion de la question des droits de l’homme.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a énuméré les mesures mises en place par son pays en matière de droits de l’homme, avec notamment en l’adoption, en décembre 2017, du Plan d’action national pour les droits de l’homme, conforme aux objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  En outre, a-t-il rappelé, durant les deux années précédentes, l’Argentine a reçu notamment la visite de l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, du Rapporteur spécial contre la torture et du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation.  Il a également fait observer que le pays avait été élu pour la quatrième fois au Conseil des droits de l’homme.

Concernant la peine de mort, M. García Moritán a rappelé l’engagement inaliénable de son pays, qui se reflète dans ses actions internationales.  L’Argentine a ainsi ratifié tous les instruments internationaux et régionaux existants relatifs à l’abolition de la peine de mort. 

M. AMIRBEK ZHEMENEY (Kazakhstan) a présenté les mesures mises en œuvre par le pays dans le domaine des droits de l’homme, avant d’insister sur le fait que son pays n’avait pas de rapport en retard à remettre aux organes de traités de droits de l’homme et de préciser qu’il avait notamment remis, en mars dernier, son rapport au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  Il a en outre rappelé que le Kazakhstan avait invité des Rapporteurs spéciaux à se rendre dans le pays dès 2009.

Le représentant a toutefois exprimé des inquiétudes quant à l’indépendance et l’impartialité des membres des organes de traités des droits de l’homme et a déploré que leurs conclusions ne soient pas plus proches de la réalité, et parfois en dehors de leur mandat.

Mme ANNA SUZUKI (Japon) a vu dans la Déclaration conjointe issue du sommet États-Unis-République populaire démocratique de Corée (RPDC), en juin dernier, un bon pas vers une résolution globale des questions en suspens et a salué les efforts diplomatiques en cours pour obtenir le respect des engagements pris.

Le Japon, de concert avec l’Union européenne, présentera un projet de résolution relatif à la « situation des droits de l’homme » en RPDC dans le cadre de la Troisième Commission.  Il a formé le vœu de la voir adoptée et réunir le plus large soutien de la communauté internationale.  Celle-ci devrait prendre des mesures concrètes pour améliorer les droits de l’homme en RPDC, a poursuivi la représentante, qui a évoqué l’enlèvement des citoyens japonais par la RPDC et appelé à leur retour immédiat.

Mme JUANA SANDOVAL (Nicaragua) a expliqué que le Gouvernement de réconciliation et d’unité nationale travaillait pour la sécurité du pays, et que ce dernier était un facteur de stabilité, de paix et de sécurité régionale avec des indicateurs de développement économique positifs.  Elle a rappelé les 5,2% de croissance annuelle moyenne de ces dernières années, qui ont permis au pays de doubler son PIB, mais également de réduire la pauvreté tant générale qu’extrême, toutes deux ayant été réduites de moitié.

Pour M. KIM SONG (République populaire démocratique de Corée), la cruelle réalité est que les énormes abus en matière de droits de l’homme résultent sans exception du piétinement de la souveraineté nationale et des inégalités sociales endémiques.  Le représentant s’est élevé contre l’immixtion des pays occidentaux dans les affaires intérieures de pays indépendants.  Ils usent et abusent des droits de l’homme pour s’ingérer dans les affaires intérieures des États, a-t-il accusé.  Il a demandé que les sanctions « inhumaines et barbares » soient levées immédiatement, étant donné l’état actuel des relations internationales et leur l’évolution.  Au Japon, coauteur avec l’Union européenne d’un projet de résolution sur les droits de l’homme en RPDC, le représentant a rappelé les multiples violations des droits de l’homme commis par ce pays le siècle dernier.

M. MOHAMMAD HASSANI NEJAD PIRKOUHI (République islamique d’Iran) a dénoncé les violations flagrantes des droits de l’homme par les États-Unis au niveau international et régional.  Il a évoqué les images atroces des souffrances des enfants migrants séparés de leur mère aux États-Unis, qui ont fait le tour du monde, ainsi que les disparités raciales face aux forces de l’ordre, les injustices subies par les Afro-américains et les femmes, sans parler des migrants menacés par les interdictions de se rendre aux États-Unis.

Sur le plan international, le représentant a déploré le retour à l’unilatéralisme des États-Unis et leur couverture des actes d’agression d’Israël.  Il a également critiqué les opérations extérieures des États-Unis, affirmant qu’elles avaient partout créé désolation et désordre.

M. Hassani Nejad Pirkouhi a ensuite dressé un panorama de la situation déplorable des droits de l’homme dans le monde, notamment en Europe et au Canada.  Pour lui, le racisme et la xénophobie ont atteint dans ces pays un niveau sans pareil et visent en particulier les migrants et les musulmans.  Ce niveau de brutalité aujourd’hui est affligeant, a-t-il accusé, avant de qualifier les sanctions unilatérales imposées par « le régime de Washington » contre son pays de « crime contre l’humanité ».

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a mis en avant la structure institutionnelle solide du pays pour lutter contre toutes les formes de discriminations.  En tant que membre fondateur du Conseil des droits de l’homme et membre actuel, le Pérou participe à son renforcement institutionnel sans discriminations ni sélectivité, a ajouté le représentant. 

Ainsi, depuis 2002, le Pérou invite chaque année tous les Rapporteurs spéciaux, les Experts indépendants et les groupes de travail pour qu’ils évaluent le pays.  Toutefois, « l’extrême pauvreté empêche la pleine jouissance des droits de l’homme et affaiblit des politiques sociales qui ont permis d’améliorer les indicateurs dans le domaine de la santé », a reconnu le représentant.

Mme HARTERY (Canada) a énuméré les nombreux défis qui guettent le monde et menacent l’efficacité du système multilatéral.  Parmi ces défis, elle a cité notamment la migration, les changements climatiques, le terrorisme et les inégalités économiques.  Relever ces défis est essentiel mais les solutions doivent inclure le respect des droits de l’homme, a-t-elle plaidé: « Nous avons besoin de collaboration et d’inclusion pour assurer que tout le monde soit entendu ».  La représentante a estimé que l’Examen périodique universel constituait un instrument essentiel pour aider tous les États à progresser en matière de droits de l’homme.

M. MOHAMED ABDELRAHMAN MOHAMED MOUSSA (Égypte) a expliqué que la Charte des Nations Unies était, au départ, le reflet d’une expérience humaine traumatisante qui, depuis lors, a servi de constitution universelle.  Toutefois, malgré les progrès réalisés dans la promotion des droits de l’homme, les violations restent nombreuses et graves, surtout en Afrique et au Moyen Orient.  L’Égypte a, pour sa part, dû faire face à des défis majeurs en matière de violation des droits de l’homme, et notamment à la violence croissante du terrorisme qui a affecté le droit à la vie et certains droits politiques et culturels.

Le représentant a appelé à un effort concerté sur le plan international et à l’adoption d’une stratégie commune.  De même, il s’est déclaré préoccupé des atteintes croissantes aux libertés fondamentales dans le monde, en particulier du fait qu’un certain nombre de pays européens exploitent la situation des migrants et font la promotion de la xénophobie.

M. Moussa a conclu en dénonçant la politisation des droits de l’homme qui « ne devraient pas être utilisés pour s’ingérer dans les affaires politiques d’un État et prendre en compte les différences culturelles et religieuses ».

M. CARAZO (Costa Rica) a déclaré que le pays croyait dans les droits de l’homme en tant que fin et en tant que moyen pour atteindre des sociétés plus justes, des sociétés qui ne laissent personne sur le bord du chemin.  « La démocratie, le développement durable et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont les piliers du développement et de la paix sociale », a-t-il déclaré.

Le représentant a dit être préoccupé du recul des droits de l’homme dans le monde et de la persistance des violations massive de ces droits pour des raisons religieuses, ethniques, d’origine ou de genre.  Il a déploré comme une des conséquences les plus dramatiques de ces violations les millions d’hommes, femmes et enfants déplacés, migrants ou réfugiés dans le monde.  Il a dénoncé l’attitude antidémocratique de nombreux gouvernements qui « usent la force pour réprimer les mouvements sociaux ».

M. Carazo a insisté sur l’importance de l’Examen périodique universel et sur la nécessité de le renforcer, notamment en prévision de la révision de 2020 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur le fonctionnement efficace des systèmes des organes de traités.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a fait une déclaration relative aux organes conventionnels de droits de l’homme.  Pour lui, il s’agit de protéger les défenteurs de droits de l’homme et les victimes.  À cette fin, il a appelé à fixer des normes juridiques en matière de droits de l’homme.

Le système des organes conventionnels, chargés d’assurer le suivi des traités de droits de l’homme, continue de gagner en importance, a fait observer le représentant.  Mais M. Pecsteen de Buytswerve a aussi dénoncé les retards dans la soumission des rapports nationaux à ces organes et la non-présentation de rapports, mais aussi les doubles emplois et les méthodes de travail divergentes des organes conventionnels.  Ce sont là quelques défis que doivent relever les États parties et ces organes, a-t-il remarqué.  À cet égard, le représentant a remercié le Secrétaire général pour son rapport bi-annuel qui identifie les obstacles et encourage la cohésion des systèmes en rationnalisant le travail.  C’est un des défis les plus pressants, a-t-il insisté.  Pour finir, il a appelé à examiner d’autres choix pour que le système donne de meilleurs résultats.

M. RUIZ (Philippines) a affirmé que l’engagement de son pays en faveur des droits de l’homme était tout aussi clair aujourd’hui qu’en 1948, quand il a souscrit à la Déclaration universelle des droits de l’homme.  Ainsi, sur le plan national, les Philippines ont mis en place le Programme « Ambition 2040 » qui doit permettre d’assurer « une vie sure, confortable, avec une classe moyenne ou personne n’est pauvre, sans stupéfiant, en respectant les normes et les démarches en matière de droits de l’homme ».

Pour le représentant, il est important d’assurer que les mécanismes du programme avancent de façon harmonieuse.  Toutes les allégations de violations des droits de l’homme sont examinées et les auteurs traduits en justice, a-t-il affirmé.  Enfin, les Philippines accordent « beaucoup d’importance » à la procédure de l’Examen périodique universel (EPU) et insistent sur la nécessité de renforcer ce mécanisme ainsi que la pertinence du Conseil des droits de l’homme.

Mme INASS A. T. ELMARMURI (Libye) a réaffirmé l’attachement de son pays à ses engagements internationaux relatifs à la protection et au renforcement des droits de l’homme.  Elle a en même temps rappelé que la Libye préserve son droit souverain de refuser ou d’exprimer des réserves s’agissant de textes ou de langages en contradiction avec sa législation nationale.

S’agissant des droits économiques, sociaux et culturels, la Libye a multiplié les efforts visant à promouvoir les droits de la femme, l’égalité des sexes et un accès gratuit à l’éducation et aux soins pour tous ses ressortissants.  La représentante a rappelé les différentes conventions internationales auxquelles la Libye est partie, notamment la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Faisant enfin remarquer que le risque terroriste est toujours d’actualité en Libye, Mme Elmarmuri a appelé au renforcement de la coopération régionale et internationale et la coordination mutuelle. 

Mme NAWAL AHMED MUKHTAR AHMED (Soudan) a exprimé sa gratitude aux détenteurs de mandats qui se sont exprimés devant la Troisième Commission.  Les relations entre paix, développement et droits de l’homme demeurent organiques, a souligné la représentante, qui a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur des droits de l’homme et des libertés fondamentales.  Elle a indiqué, en outre, que la question des femmes figurait en bonne place dans le plan de développement national.  C’est également le cas pour la promotion de la condition des personnes handicapées.  Pour finir, Mme Ahmed s’est félicitée que le Soudan ne figure plus sur la liste des pays qui recrutent les enfants dans les conflits armés.

Mme AYŞE İNANÇ-ÖRNEKOL (Turquie) s’est déclarée préoccupée de la réapparition du courant et de l’idéologie extrémiste dans le monde et surtout au sein de l’Union européenne, qui se traduit par des courants islamophobes et xénophobes.  De plus, la représentante a déploré que les migrants continuent de subir des violences alimentées par des discours anti-migrants.

Sur le plan national, Mme İnanç-Örnekol a rappelé que l’état d’urgence instauré après la tentative du « coup d’état terroriste » avait été levé, ce qui ouvre des nouvelles possibilités de renforcement des droits fondamentaux dans le pays.  Enfin, elle a regretté que les pays européens qui affirment être des champions des droits de l’homme ne fassent pas preuve de solidarité et n’aient pas permis à la Turquie de se protéger contre la tentative de coup d’État.

Mme CHUCHOTTHAVORN (Thaïlande) a indiqué que, bien qu’ils soient violés, les droits de l’homme restaient pertinents.  Le Gouvernement a créé des partenariats avec la société civile, le secteur privé et différentes autres composantes de la société pour promouvoir les droits de l’homme.  La représentante a ainsi évoqué la préparation d’un plan national 2019-2023 en matière de droits de l’homme qui s’étend à plusieurs groupes, dont les personnes LGBTI.  Elle a également mentionné la mise en œuvre par son pays des Règles Nelson Mandela pour les droits des détenus.  Par ailleurs, la Thaïlande est en train de rédiger une loi pour prévenir et interdire le travail forcé.  En conclusion, la représentante a préconisé d’encourager l’éducation en matière de droits de l’homme.

Droits de réponse

Le représentant de Cuba a répondu aux États-Unis en faisant remarquer que la délégation avait quitté la Troisième Commission après avoir accusé 15 nations, y voyant « la preuve que le pays veut manipuler les droits de l’homme et n’accorde aucune importance à cette Commission ».  Pour Cuba, la Troisième Commission est utilisée par les États-Unis, qui n’ont pourtant « pas de leçons à donner en matière de droits de l’homme » et devraient plutôt répondre de l’utilisation de la torture, notamment à Guantanamo, un territoire illégalement pris à Cuba.

Le représentant de la République arabe syrienne a réagi aux « allégations fallacieuses » des États-Unis, pays qui n’a pas le « droit de prendre la parole pour donner des leçons en matière de droits de l’homme alors que l’Administration américaine viole la Charte des Nations Unies et les différents instruments des droits de l’homme ».  Notre pays et notre région ont souffert des actions de ce membre permanent censé être chargé de la paix et sécurité internationales, a poursuivi le représentant, qui les a accusés de soutenir et financer le terrorisme et d’empêcher une solution politique dans son pays.

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a réagi aux accusations des États-Unis et du Japon.  Les États-Unis n’ont aucune pertinence en matière de droits de l’homme et sont « les vide-ordures des droits de l’homme », commettant des crimes que l’on ne saurait même pas imaginer en RPDC.  Quant au Japon, il n’a pas non plus le droit de parler des droits de l’homme des autres pays car il a été « agressif et criminel », a envahi la péninsule coréenne pendant 40 ans et y a commis des crimes comme l’enlèvement de 1,4 million de Coréennes ou l’imposition de l’esclavage sexuel à 200 000 Coréennes pour les bénéfices de l’armée impériale.

Le représentant de la Chine a rejeté « les accusations fallacieuses » des États-Unis, employées à des fins politiques.  Il a voulu discuter de la situation des droits de l’homme aux États-Unis, notamment l’interdiction à six pays musulmans de l’accès au pays en raison de leur religion.  De même, il a évoqué les violations et tortures à Guantanamo et leurs auteurs qui vivent dans l’impunité.  Le représentant a également accusé les États-Unis de violer les droits des minorités, notamment celles d’origine asiatique.  Il a évoqué, pour finir, sa préoccupation face aux abus sexuels dont sont victimes les enfants aux États-Unis, ainsi que les mariages d’enfants commis au nom de liberté religieuse.

Le représentant de la Fédération de Russie a rappelé que la Crimée et la ville de Sébastopol sont « des territoires de la Fédération de Russie sur la base d’un vote souverain ».  En outre, la Fédération de Russie ne participe nullement au conflit en Ukraine et les accusations en ce sens sont une « tentative de justifier de la terreur de l’Ukraine face à sa population ».

La représentante du Japon a réagi aux allégations de la République populaire démocratique de Corée, notamment aux chiffres avancés sur des « questions du passé » qui sont « basées sur des erreurs factuelles ».  Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Japon a respecté la démocratie et les droits de l’homme et a contribué à la paix et à la sécurité de l’Asie-Pacifique et internationale, a poursuivi le représentant, qui a lancé un appel pour essayer d’aller vers un avenir conjoint.

Exerçant de nouveau son droit de réponse, le représentant de la République populaire démocratique de Corée a expliqué que le Japon violait les droits de l’homme des Coréens et que, en juin dernier, il avait confisqué les souvenirs et les équipements sportifs de lycéens coréens.  « En d’autres termes, les droits de l’homme de nos compatriotes ont été violés et le droit international également », a-t-il ajouté.

Reprenant la parole, la représentante du Japon, se référant aux lois régissant l’importation de produits en provenance de la République populaire démocratique de Corée, a déclaré que les allégations de discrimination ne reflétaient pas la réalité.  Par ailleurs, elle a insisté sur le fait que le problème des enlèvements n’avait pas encore été résolu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission débat du jus cogens, « sujet très sensible », et entend le Président de la Cour internationale de Justice

Soixante-treizième session,
25e & 26e séances, matin & après-midi
AG/J/3583

La Sixième Commission débat du jus cogens, « sujet très sensible », et entend le Président de la Cour internationale de Justice

Les délégations ont affiché aujourd’hui, devant la Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, certaines divergences autour des normes impératives du droit international général (jus cogens), sujet « très sensible », selon l’expression de la délégation égyptienne, qui figure, dans le second groupe de chapitres thématiques du rapport* annuel de la Commission du droit international (CDI).  Outre l’examen de ces points, la Sixième Commission a entendu ce matin une allocution du Président de la Cour internationale de Justice, M. Abdulqawi Ahmed Yusuf, sur la désignation d’experts, notamment scientifiques.

D’emblée, compte tenu de l’importance « unique » du jus cogens, le délégué de la Chine a invité la Commission à faire preuve d’une « grande prudence », alors qu’elle a devant elle le troisième rapport du Rapporteur spécial.  La détermination de ses éléments et critères constitutifs doit en effet se fonder sur la Convention de Vienne sur le droit des traités et s’appuyer sur la pratique des États, a-t-il argué, tandis que son homologue de la France a appelé à la « mesure » sur ce sujet.

Le délégué de la Chine s’est également dit en désaccord avec le projet de conclusion 17, commenté par de nombreuses délégations, qui dispose que les résolutions du Conseil de sécurité ne sont pas contraignantes si elles entrent en conflit avec le jus cogens.  Selon le commentaire relatif à ce projet contenu dans le rapport, un « conflit direct » est « peu probable ».

Notant les critiques soulevées par ce projet de conclusion, le délégué de l’Autriche, pays « partisan convaincu de l’état de droit », a soutenu cette idée que les résolutions du Conseil puissent contrevenir potentiellement au jus cogens.  « Les pouvoirs du Conseil sont soumis à la Charte et au jus cogens », a-t-il déclaré.  Les résolutions violant une norme impérative deviennent caduques, a appuyé le représentant de l’Égypte.

Les délégations ont abordé d’autres aspects controversés du jus cogens, notamment ceux se rapportant à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  La déléguée du Brésil a encouragé le Rapporteur spécial à mettre au point une liste illustrative des normes du jus cogens, tandis que son homologue de Chypre a souhaité qu’elle soit « non exhaustive ».  Le délégué du Japon a précisé que les normes figurant sur une telle liste n’auront pas de statut spécial les distinguant des autres normes de jus cogens qui n’y figurent pas.  Leurs homologues de l’Allemagne et des Pays-Bas ont repoussé l’idée d’une liste.

Plus globalement, le délégué de l’Italie a indiqué que le jus cogens présente une dimension théorique « qui ne peut être aisément occultée », si bien qu’il est difficile d’aboutir à des « projets de conclusion fructueux ».  Le représentant italien a proposé deux approches, soit une approche encore « plus large, encore moins axée sur la pratique », soit une approche resserrée sur les aspects spécifiques d’une possible application du jus cogens au droit des traités.

« Le Rapporteur spécial semble avoir une conception théorique du jus cogens comme manifestation d’un ordre juridique supérieur qui s’imposerait aux États », a critiqué le délégué de la France.  La Slovaquie et la République tchèque ont, elles aussi, noté que le Rapporteur spécial s’est basé principalement sur la doctrine plutôt que sur la pratique internationale.

À l’instar des autres orateurs, le représentant tchèque a, par ailleurs, commenté les projets de directive sur la protection de l’atmosphère, sujet qui fait partie, avec le jus cogens et l’application provisoire des traités, du second groupe de chapitres thématiques du rapport examiné par la Commission.  « Ces projets ne visent pas à remédier au grave défi de la détérioration de l’atmosphère », a-t-il regretté, en pointant le manque d’expertise technique de la CDI.  La CDI a atteint « un sommet de trivialité » en réaffirmant le principe de règlement pacifique des différends entre États relatifs à la protection de l’atmosphère, a asséné son homologue slovaque.

L’autre temps fort de la journée a été l’intervention du Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Abdulqawi A. Yusuf.  Celui-ci a centré son allocution sur la désignation d’experts, prévue à l’article 50 de son Statut, qui est l’un des outils de procédure dont dispose la Cour pour prendre en considération les questions scientifiques complexes soulevées dans un nombre croissant d’affaires qui lui sont soumises.

Le Président s’est dit convaincu que le recours à des experts permet à la Cour d’apprécier pleinement des questions scientifiques, « sans préjudice des droits procéduraux des parties ».  Il a détaillé la valeur ajoutée de ces experts, avant d’examiner les circonstances dans lesquelles la Cour devrait désigner ses propres experts. 

M. Yusuf a indiqué que le droit international n’est pas « une île », imperméable aux autres disciplines.  Au contraire, l’application de ce droit est de plus en plus influencée par les évolutions technologiques et scientifiques, a-t-il noté, en soulignant la pertinence à cette aune de l’article 50 précité, fruit de « l’incroyable prescience » des rédacteurs dudit Statut.

Enfin, M. Yusuf a regretté que son intervention se soit apparentée davantage à un « cours magistral » qu’à un dialogue interactif, comme initialement prévu, les délégations n’ayant pas souhaité poser de questions.  Le Président de la Commission a indiqué qu’il serait pertinent à l’avenir que les délégations soient informées à l’avance du thème de l’intervention du Président pour nourrir le débat.  « Notre silence ne doit pas être interprété comme une indifférence à la présentation du Président », a réagi le délégué du Pérou.

La Sixième Commission reprendra ses travaux mardi 29 octobre, à 10 heures.

*A/73/10

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DIXIÈME SESSION

Suite des déclarations sur les chapitres VI à VIII du rapport

S’agissant de la protection de l’atmosphère, M. HELMUT TICHY (Autriche) a commenté le projet de directive 12 sur le règlement des différends, déclarant que l’implication d’experts techniques et scientifiques dans une affaire peut être nécessaire si cette affaire est d’une certaine complexité.

Se tournant vers l’application provisoire des traités, le délégué a regretté que les projets de directives ressemblent par trop aux projets de directives provisoires adoptés l’année dernière.  Les suggestions faites par les délégations n’ont pas été prises en compte, a-t-il déploré.  Il a évoqué le projet de directive 9 sur l’extinction et la suspension de l’application à titre provisoire lorsqu’un État ou une organisation internationale notifie aux autres États ou organisations internationales son intention de ne pas devenir partie au traité.  S’il a salué la référence faite aux règles contenues dans les Conventions de Vienne, le délégué aurait souhaité des dispositions provisoires sur d’autres formes d’extinction et de suspension, notamment par le biais d’une extinction unilatérale.

À propos des normes impératives du droit international général (jus cogens), le délégué autrichien a noté les critiques soulevées par le projet de conclusion 17 qui dispose que les résolutions contraignantes des organisations internationales, y compris celles du Conseil de sécurité de l’ONU, n’établissent pas d’obligations contraignantes si elles sont en conflit avec une norme impérative du droit international général.  Partisan convaincu de l’état de droit, mon pays appuie l’idée que les résolutions du Conseil peuvent potentiellement contrevenir au jus cogens, a-t-il dit.  Il a tenu à rappeler un passage du rapport final de l’Initiative autrichienne de 2004 à 2008 qui indique que les pouvoirs du Conseil sont soumis à la Charte et au jus cogens.  M. Tichy a enfin évoqué le projet de conclusion 22, plus controversé, qui indique que les États ont l’obligation d’exercer leur compétence pour connaître des infractions interdites par les normes impératives du droit international général (jus cogens) lorsque ces infractions sont commises par leurs nationaux ou sur un territoire relevant de leur juridiction.  « Ce libellé laisse à penser qu’il autorise une compétence internationale pour poursuivre des infractions sanctionnées par le jus cogens sur la seule base du droit national. »  Toute compétence universelle doit s’exercer dans le cadre du droit international, a-t-il conclu. 

M. XU HONG (Chine) s’est opposé aux mentions faites hier, par la Cour permanente d’arbitrage (CPA), d’une sentence arbitrale relative à la mer de Chine méridionale, affirmant que la CPA n’a « aucune compétence » en la matière.  Selon lui, cette sentence arbitrale ultra vires « dénuée de toute légalité » est « manifestement une erreur » d’évaluation des faits et de l’application du droit, et sa mention à la Sixième Commission est « inappropriée ». 

Après avoir reconnu que la protection de l’atmosphère est une question « complexe et sensible », le représentant a rappelé la nécessité de se référer à l’accord en quatre points conclu en 2013 et à la pratique générale du droit, et de respecter pleinement les accords issus des négociations politiques et juridiques.  Il a exprimé son désaccord avec le projet de directive 3, sur l’obligation de protéger l’atmosphère, qui fait état de l’existence de règles du droit international à cet égard.  Quant à la directive 4, sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement, elle reprend le texte de certains traités relatifs à l’environnement et l’applique à la protection de l'atmosphère « sans tenir compte du contexte ».  

Se tournant vers l’application à titre provisoire des traités, M. Xu a estimé que la portée des obligations contraignantes pour les parties devait être considérée avec précaution.  L’importance « unique » du jus cogens devrait inciter la Commission à faire preuve d’une grande prudence.  La détermination de ses éléments et critères constitutifs doit en effet se fonder sur la Convention de Vienne sur le droit des traités et s’appuyer sur la pratique des États, a-t-il argué, sans viser au développement de nouvelles règles. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), il s’est dit en désaccord avec le projet de conclusion 17, qui stipule que les résolutions du Conseil de sécurité ne sont pas contraignantes si elles entrent en conflit avec le jus cogens.  Il a invité la Sixième Commission à respecter la procédure dans l’examen de ce sujet afin de permettre aux États Membres d’exprimer leurs vues.

Pour ce qui est de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, un autre chapitre, M. Xu a réitéré la position de la Chine voulant que le droit international doit tenir compte des différences entre les conflits internationaux et non internationaux.  Sur la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a rappelé que plusieurs États Membres ont fait part de leur objection à la disposition relative à la non-applicabilité de l’immunité ratione materiae formulée au projet d’article 7.

M. ANDREA TIRITICCO (Italie) a indiqué, s’agissant de la protection de l’atmosphère, que tout travail de la Commission sur ce sujet doit prendre en compte les risques environnementaux découlant de la pollution transfrontalière.  Il a noté le soin avec lequel le Rapporteur a évité toute interférence avec les négociations politiques actuelles sur la protection de l’environnement.  Il a salué l’attention portée à l’expertise technique et scientifique dans les contentieux sur la pollution atmosphérique.

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), M. Tiriticco a salué l’équilibre trouvé entre les subtilités de ce sujet, y compris sur le plan théorique, et le souhait d’adopter une approche pratique. « Néanmoins, le sujet en lui-même présente une dimension théorique qui ne peut être aisément occultée, ce qui fait qu’il est difficile, à ce stade, d’aboutir à des projets de conclusions fructueuses. »  Il a proposé, soit une approche plus large, encore moins axée sur la pratique, ou alors, au contraire, une approche plus resserrée sur les aspects spécifiques d’une possible application du jus cogens au droit des traités.  Enfin, M. Tiriticco a salué l’approche équilibrée du rapport sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.

Mme CHRISTINA HIOUREAS (Chypre) a souligné l’importance d’interpréter les traités d’une façon cohérente avec les normes impératives du droit international (jus cogens).  Elle a encouragé la Commission à examiner la question de savoir ce qui détermine l’existence d’un conflit entre le jus cogens et la Convention de Vienne sur le droit des traités, ainsi que les conséquences juridiques d’un tel conflit.  Si les travaux sur ce sujet devraient éviter toute déviation de la Convention de Vienne, la portée du jus cogens va au-delà du droit des traités, a-t-elle relevé.  Elle a en outre estimé que le nombre limité de normes du jus cogens rend possible l’élaboration d’une liste non exhaustive afin de clarifier cet aspect du droit international. 

M. MOHAMED EL SHINAWY (Égypte) a évoqué les normes impératives du droit international général (jus cogens), « sujet très sensible », et le projet de conclusion 11 sur la séparabilité des dispositions conventionnelles en conflit avec une telle norme.  Il a souhaité qu’il n’y ait pas d’exception à la nullité d’un traité en raison de la survenance d’une nouvelle norme impérative du droit international général (jus cogens).  Or ce projet prévoit des exceptions, notamment lorsque les dispositions qui sont en conflit avec la norme impérative du droit international général (jus cogens) n’ont pas constitué une base essentielle du consentement à être lié par le traité et qu’il ne serait pas injuste de continuer à exécuter ce qui subsiste du traité.  « Il n’y pas de critères clairs pour de telles exceptions », a tranché le délégué.

M. El Shinawy a relevé le projet de conclusion 17 qui dispose que les résolutions contraignantes des organisations internationales, y compris celles du Conseil de sécurité de l’ONU, n’établissent pas d’obligations contraignantes si elles sont en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens).  Les résolutions violant une norme impérative deviennent caduques et n’emportent aucune conséquence juridique, a-t-il précisé en conclusion.

Abordant la question des normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme MAITE DE SOUZA SCHMITZ (Brésil) a considéré que le projet de conclusion 17, relatif à leurs conséquences sur les résolutions contraignantes des organisations internationales, devrait faire mention explicite des décisions du Conseil de sécurité qui sont également liées aux normes du jus cogens.  S’agissant des projets de conclusions 22 et 23, relatifs aux infractions interdites par des normes impératives du droit international général (jus cogens), et de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la représentante a encouragé le Rapporteur spécial à mettre au point une liste illustrative des normes du jus cogens

Sur l’application à titre provisoire des traités, Mme Schmitz a noté que « l’intention des États ne peut pas être déduite mais doit être explicite ».  Mme Schmitz s’est félicitée de l’attention accordée à la Convention de Vienne sur le droit des traités dans le projet de directive 3.  Enfin, elle a noté le manque de pratique important concernant l’application provisoire des traités.

Allocution du Président de la Cour internationale de Justice

M. ABDULQAWI AHMED YUSUF, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a centré son allocution sur la désignation d’experts, prévue à l’article 50 de son Statut, qui est l’un des outils de procédure dont dispose la Cour pour prendre en considération les questions scientifiques complexes soulevées dans un nombre croissant d’affaires qui lui sont soumises.

En vertu de l’article 50 du statut, « à tout moment, la Cour peut confier une enquête ou une expertise à toute personne, corps, bureau, commission, ou organe de son choix ».

Le Président s’est dit convaincu que le recours à des experts permet à la Cour d’apprécier pleinement des questions scientifiques, « sans préjudice des droits procéduraux des parties ».  Il a détaillé la valeur ajoutée de ces experts, avant d’examiner les circonstances dans lesquelles la Cour devrait désigner ses propres experts.  L’étude de la jurisprudence de la Cour révèle qu’elle n’a exercé qu’en quatre occasions cette faculté que lui confère l’article 50. 

Il a indiqué qu’il n’est pas surprenant de voir l’impact que la science a sur le droit international et les travaux de la Cour. « Cependant la Cour n’est pas l’arbitre des questions scientifiques. »  Ce n’est que lorsque des éléments de preuve de nature scientifique sont nécessaires pour le processus de prise de décisions et que ces éléments n’ont pas été fournis de manière adéquate par les parties que la Cour exerce son pouvoir de désigner ses propres experts, a-t-il déclaré.

M. Yusuf a indiqué que le droit international n’est pas « une île », imperméable aux autres disciplines.  Au contraire, l’application de ce droit est de plus en plus influencée par les évolutions technologiques et scientifiques, a-t-il conclu, en soulignant la pertinence à cette aune de l’article 50 précité, fruit de « l’incroyable prescience » des rédacteurs dudit Statut.

Pour illustrer son propos, le juge a donné deux séries d’exemples. La première série concerne des situations où les États ont défini le contenu de leurs obligations juridiques en se référant à des paramètres scientifiques donnés.  Ainsi, en l’affaire relative à la Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon, Nouvelle Zélande (intervenant), la Cour devait statuer sur la question de savoir si le Japon menait son programme de chasse à la baleine « en vue de recherches scientifiques », conformément au paragraphe I de l’article VIII de la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, qui autorise à tuer des cétacés à de telles fins.  D’autres conventions internationales définissent une notion juridique à l’aide de termes scientifiques, revêtant souvent ceux-ci d’un sens précis.  Ainsi, l’article 76 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer définit le plateau continental au-delà de 200 milles marins en utilisant des paramètres scientifiques.

La seconde série d’exemples utilisée par M. Yusuf concerne des situations dans lesquelles les faits du différend porté devant la Cour doivent être établis conformément à des principes et méthodes scientifiques.  Ainsi, en l’affaire relative à des Usines de pâte à papier (Argentine C. Uruguay), la Cour devait déterminer si le rejet de certaines substances dans le fleuve Uruguay polluerait ce cours d’eau, en violation des obligations que le statut du fleuve impose à l’Uruguay.  L’affaire relative à des Epandages aériens d’herbicides (Équateur c. Colombie) posait des questions analogues.

Le Président, qui a présenté hier à l’Assemblée générale le rapport annuel de la CIJ, a rappelé au début de son discours deux tendances qui se font jour.  La première est l’augmentation considérable du nombre de décisions rendues par la Cour sur le fond et les procédures incidentes.  En 10 mois cette année, a-t-il rappelé, la Cour a rendu pas moins de quatre arrêts.  La seconde tendance qui se dessine est la diversité croissante des affaires soumises à la Cour.  En sus de litiges traditionnels, la Cour est de plus en plus saisie de différends ayant trait à d’autres sujets très divers, comme les droits de l’homme, les relations diplomatiques ou la protection de l’environnement.  « Seule juridiction internationale à compétence générale, elle peut connaître de toute question de droit international, sous réserve, bien entendu, du consentement des parties au différend. »

Considérant que le droit international permet aux États de choisir librement les moyens de s’acquitter de leurs obligations, M. CEZARY MIK (Pologne) a estimé que le projet de directive 10, relatif à la mise en œuvre en droit interne des obligations en vertu du droit international sur la protection de l'atmosphère, doit être précisé afin de mieux refléter cette notion.  De plus, l’incohérence entre le titre « Contrôle du respect » et le texte de la directive 11 soulève des « préoccupations significatives », notamment sur la notion de conformité. 

Concernant l’application à titre provisoire des traités, le représentant a noté qu’un préavis raisonnable devrait être donné quant à la conclusion de l’application provisoire d’un traité.  De plus, une disposition devrait être ajoutée au projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités sur le modèle de l’article 70 de la Convention de Vienne, qui stipule que l’application provisoire n’affecte pas les droits et obligations des parties créés par l’exécution d’un traité avant son terme. 

M. Mik s’est ensuite interrogé sur la pertinence du projet de conclusion 8 sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) relatif à l’acceptation d’une norme du droit international général en tant que jus cogens.  Estimant que les États sont libres de choisir le mode de règlement des différends, il a jugé superflue la conclusion 14 sur cette question.  Enfin, il a proposé l’élaboration d’une disposition spécifique afin de prendre en compte les résolutions du Conseil de sécurité.

M. LIONEL YEE (Singapour) a déclaré que sa délégation entend présenter ses observations détaillées sur les projets de directive concernant la protection de l’atmosphère avant le 15 décembre. 

L’absence de commentaires relatifs aux projets de conclusion sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) rend difficile l’analyse de ces conclusions, a continué le délégué.  Il a salué les projets de conclusion 10 à 13 visant à affirmer les conséquences des contradictions entre le droit des traités et les normes impératives du droit international.  S’agissant du projet de conclusion 14, sur la procédure recommandée pour le règlement des différends concernant un conflit entre un traité et une norme du jus cogens, il s’est dit préoccupé par le chevauchement avec les procédures établies par la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En outre, cette conclusion est selon lui inappropriée car elle ne présente qu’une recommandation de procédure.

Pour M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique), le projet de directive relatif à la mise en œuvre au niveau national des obligations découlant de la protection de l’atmosphère coïncide avec les mécanismes utilisés par les États pour s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international.  En outre, la directive portant sur le règlement pacifique des différends doit être interprétée conformément à l’Article 33(1) de la Charte des Nations Unies.  Par ailleurs, le représentant a considéré que le projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités reflète une vision pragmatique de ce sujet qui sera utile aux États Membres comme aux organisations internationales. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), M. Arrocha s’est félicité que les projets de conclusion soient fondés sur des textes déjà approuvés par la Sixième Commission, tels que la Convention de Vienne sur le droit des traités et la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.  Il a suggéré l’ajout d’un projet de conclusion portant sur les conséquences des normes du jus cogens sur les principes généraux du droit, afin que soient prises en compte toutes les sources du droit international.  Le représentant a de plus appuyé la recommandation contenue dans le projet de conclusion 14, voulant que tout conflit entre un traité et une norme du jus cogens soit soumis à la Cour internationale de Justice (CIJ).

Abordant un autre thème, la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a invité la CDI à définir, dans ses futurs rapports, les concepts de « juridiction » et de « contrôle » en lien avec la doctrine et la jurisprudence en matière de responsabilité des États, notamment pour les territoires occupés par des acteurs non étatiques bénéficiant de l’appui d’États tiers.  Par ailleurs, il a rejoint la position du Rapporteur spécial voulant que la responsabilité de l’État pour un fait internationalement illicite ne se transfère pas automatiquement à l’État successeur. 

M. PETR VALEK (République tchèque) a indiqué que les projets de directives relatifs à la protection de l’atmosphère manquent de « dispositions substantielles » et qu’ils ne visent pas à remédier au grave défi de la détérioration de l’atmosphère.  « À raison, puisque la Commission ne possède pas l’expertise technique et scientifique requise. »

Le délégué a ensuite salué l’adoption du texte du projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités, avant d’aborder les normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a noté que l’approche du Rapporteur spécial sur ce sujet « à la dynamique évolutive » se base principalement sur des références à la doctrine plutôt que sur la pratique internationale.  « L’accent ne devrait pas être mis sur quelles normes acquièrent un caractère impératif du droit international général, mais plutôt comment, c’est-à-dire par quel procédé, une norme impérative du droit international général peut être identifiée », a conclu M. Valek.

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a regretté l’absence des Rapporteurs spéciaux au présent débat sur la protection de l'atmosphère, se disant d’autant plus « surpris » que ce sujet apparaît comme une priorité.  Il a souhaité la tenue d’un pacte mondial pour l’environnement afin de proposer un cadre universel destiné à éviter la fragmentation du droit international sur l’environnement.  Selon lui, des interrogations persistent sur la valeur juridique des projets de directive, notamment en raison de la référence aux obligations des États.  La directive 10 et l’ensemble des projets de directives ne renvoient pas à de nouvelles obligations des États mais bien à des obligations existantes, a-t-il noté, ajoutant que la faible référence à la pratique internationale rend difficile l’identification d’une tendance en la matière.

M. Alabrune a contesté la méthode utilisée par le Rapporteur spécial pour élaborer les projets de conclusion sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), notant qu’aucun des projets n’a été renvoyé à la plénière, et que la Commission ne les a pas incorporés à ses rapports annuels.  Il a déploré l’absence de commentaires relatifs aux projets de conclusion, ajoutant qu’ils sont pourtant nécessaires à l’examen de ce sujet « important » et que leur absence prive les délégations de la possibilité d’en débattre au sein de la Sixième Commission.  Notant que les interactions entre la CDI et la Sixième Commission sont fondamentales pour la légitimité de la Commission, il a estimé que cela constitue une remise en cause des méthodes de travail de la CDI.  Il ressort de l’examen des travaux de la CDI sur le jus cogens que le Rapporteur appuie ses travaux sur des références doctrinales plutôt que sur la pratique en la matière, bien que limitée.  Puisque les projets de conclusion n’ont pas encore été adoptés en séance plénière, il est temps de remédier à cette situation, a-t-il conclu.

Le représentant a ajouté que le Rapporteur spécial semble avoir une conception théorique du jus cogens comme manifestation d’un « ordre juridique supérieur » qui s’imposerait aux États, tout en appelant à des garanties procédurales sur l’applicabilité de toute obligation internationale.  Pour lui, la détermination d’une norme comme impérative devrait être soumise à un procédé particulièrement exigeant.

M. METOD SPACEK (Slovaquie) a jugé pertinentes les préoccupations exprimées par les délégations lors des séances précédentes de la Sixième Commission sur l’approche générale des débats concernant la protection de l’atmosphère.  Il a noté que les projets de directive ne font que « réaffirmer une évidence » ainsi que des règles « rudimentaires » et générales du droit international qui ne s’appliquent pas directement à la protection de l’atmosphère.  Alors que la mise en œuvre nationale des obligations internationales relève du droit souverain des États, il n’est d’aucune utilité de rappeler les options existantes pour la réalisation de ce droit.  Avec le projet de directive 12, la CDI a atteint « un sommet de trivialité » en réaffirmant le principe de règlement pacifique des différends, a-t-il asséné, ajoutant que cette approche peut s’avérer « dangereuse » en ouvrant la porte à des spéculations sur « des motifs secrets ».

Par ailleurs, M. Spacek a déploré le manque de clarté entourant la question des normes impératives du droit international général (jus cogens), et invité la Commission à la prudence.  Il a toutefois salué la cohérence des projets de conclusion et le fait que le Rapporteur spécial soit allé au-delà du droit des traités, tout en déplorant son manque de concision.  En outre, a-t-il noté, certains projets de conclusion sont fondés sur des opinions doctrinales plutôt que sur la pratique des États, bien que limitée.  Il a aussi considéré « sans fondement » le projet de conclusion 14, qui recommande de soumettre les différends relatifs au jus cogens à la Cour internationale de Justice (CIJ).

M. CHRISTOPHE EICK (Allemagne) a noté que le point de savoir si un traité est en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens) pouvait avoir des implications lourdes, c’est pourquoi l’Allemagne propose d’inclure un projet de conclusion sur la procédure recommandée.  Constatant que le débat sur l’adoption d’une liste énumérative des normes du jus cogens restait ouvert, le représentant a réitéré un point déjà évoqué lors de sa déclaration de 2017, à savoir qu’une telle liste pourrait mener à de mauvaises conclusions et risquerait d'établir un statu quo pouvant entraver l’évolution du jus cogens à l’avenir.  Par conséquent, l’Allemagne juge que la CDI n’a pas besoin d’entreprendre la tâche « énormément difficile » d’adopter une telle liste.

Dans un commentaire plus général sur la procédure suivie par la Sixième Commission dans ses travaux sur ce point, l’Allemagne a constaté que le projet de conclusions était actuellement en cours d’examen par le Comité de rédaction, sans qu’il ne soit examiné ni commenté annuellement par la plénière, tant que la première lecture de l’ensemble du projet n’est pas terminée.

C’est un désavantage pour plusieurs raisons selon l’Allemagne.  D’une part, les États Membres ne peuvent pas donner leur avis avant la première lecture du projet fini; d’autre part, cet écart par rapport aux pratiques habituelles de la CDI leur complique la tâche. 

M. YUSUKE NAKAYAMA (Japon) a commenté un paragraphe du préambule aux projets de directive sur la protection de l’atmosphère, selon lequel « la protection de l’atmosphère contre la pollution atmosphérique et la dégradation atmosphérique est une préoccupation pressante de l’ensemble de la communauté internationale ».  Notant le fait que l’Accord de Paris parle d’une « préoccupation commune de l’humanité », il a souhaité une actualisation de ce paragraphe.

S’agissant des normes impératives du droit international (jus cogens), le délégué a indiqué que la détermination de ses éléments et critères constitutifs doit se fonder sur la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Il a souhaité que la Commission consacre un temps suffisant à ce sujet important, avant d’appeler de ses vœux une liste illustrative des normes du jus cogens, dont il a souligné l’utilité.  « Néanmoins, un soin spécial devra être apporté à la préparation de cette liste afin d’éviter toute conception erronée selon laquelle les normes ainsi listées auraient un statut spécial les distinguant des autres normes qui pourraient être identifiées comme de jus cogens mais qui ne figurent pas dans la liste », a conclu M. Nakayama.

Selon M. ANDREJ SVETLICIC (Slovénie), la source de l’application à titre provisoire des traités n’est toujours pas claire.  Il a ainsi souhaité que puisque l’accord donné à une telle application est une condition préalable, cela doit se refléter dans la directive 6 du projet de Guide sur l’effet juridique de l’application à titre provisoire.

Le délégué a invoqué ensuite la question spécifique de la déclaration unilatérale et souligné la pertinence à ce titre de la Convention de Vienne sur la succession des États.  L’article 28 de cette Convention dispose qu’un traité bilatéral qui, à la date d’une succession d’États, était en vigueur ou était appliqué à titre provisoire à l’égard du territoire auquel se rapporte la succession d’États est considéré comme s’appliquant à titre provisoire entre l’État nouvellement indépendant et l’autre État intéressé.  Nous ne voyons pas pourquoi cette règle ne s’appliquerait qu’à la succession d’États, a-t-il conclu.

M. MARTIN MANDVEER (Estonie) a déclaré, concernant la question de la protection de l’atmosphère, que la coopération internationale est d’une grande importance et que les États devraient soutenir les recommandations allant en ce sens.  L’Estonie considère aussi que les défis auxquels font face les pays en développement et les pays les moins avancés doivent être reconnus dans les lignes directrices.  « Bien que la protection de l’atmosphère soit une responsabilité commune, nous avons des capacités différentes », a-t-il dit.

S’exprimant sur l’application à titre provisoire des traités, le représentant a jugé redondantes les directives 3 (« Règle générale ») et 4 (« Forme de l’accord ») du projet de Guide.  Il a proposé qu’elles soient reformulées ou fondues, de façon à ce que les références aux formes d’application provisoire des traités, contenues dans les traités eux-mêmes, soient retirées.  La délégation apprécie en outre l’inclusion de clauses types reflétant les meilleures pratiques des États.

Enfin, s’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), l’Estonie reconnaît les difficultés actuelles de trouver un consensus sur ces normes.  Son délégué s’est dit favorable à l’élargissement du projet de conclusion 11, sur la séparabilité des dispositions conventionnelles en conflit avec une telle norme, visant à inclure les actes des organisations internationales comme créant des obligations juridiques envers les États.  Il a estimé aussi que le projet 14, sur la procédure recommandée pour le règlement des différends concernant un conflit entre un traité et une norme du jus cogens, doit être clarifié, en raison des contradictions qu’il contient.  Il a trouvé également que le projet 15 sur les conséquences du jus cogens sur le droit international coutumier ne reflète pas assez la complexité de la question, car il n’analyse pas tous les aspects du droit international coutumier. 

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a trouvé appropriée l’élaboration du projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités.  Il a toutefois rappelé que toute conclusion sur ce sujet devrait découler, en premier lieu, de la pratique des États. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), il a noté que plusieurs éléments du jus cogens demeurent contestés.  Il a fait part de ses préoccupations quant au manque de clarté entourant le concept de jus cogens, y compris son identification et son application.  Dans le projet de conclusion 14, la procédure relative au règlement des différends en cas de conflit entre le jus cogens et un traité est similaire à l’article 66 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, à la différence qu’il ne comporte pas de règle procédurale relative, entre autres, à l’invalidité d’un traité.  M. Lefeber a donc suggéré d’ajouter un paragraphe reflétant les règles générales contenues dans les articles 65 et 67 de la Convention.  Enfin, il a réitéré l’opposition de son pays à l’élaboration d’une liste, illustrative ou autre, des normes du jus cogens, considérant qu’elle aurait pour effet de prévenir l’émergence de la pratique des États et de l’opinio juris

M. CARLOS JIMENEZ PIERNAS (Espagne) a abordé la protection de l’atmosphère et commenté les projets de directives 10 et 11, respectivement sur la « mise en œuvre » en droit interne des obligations en vertu du droit international sur la protection de l’atmosphère, et le « contrôle du respect » par les États de leurs obligations.  Ces deux expressions, en langue espagnole, peuvent être potentiellement synonymes, a-t-il dit, en souhaitant donc leur réécriture.  Il a suggéré à la place « mise en œuvre nationale » et « contrôle international du respect ».  Le délégué a, en outre, demandé des clarifications pour savoir si les projets de directives s’appliquent également aux organisations internationales et pas seulement aux États.

S’agissant de l’application à titre provisoire des traités, le délégué espagnol a notamment discuté de la directive 7 sur les réserves du projet de Guide.  Selon ce texte, un État, au moment de convenir de l’application provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité, peut formuler des réserves visant à exclure ou à modifier l’effet juridique produit par l’application à titre provisoire de certaines dispositions de ce traité, a-t-il dit.  « Mais qu’en est-il des réserves formulées lors de la signature d’un traité et qui, selon l’article 23.3 de la Convention de Vienne de 1969, doivent être confirmées par l’État au moment d’exprimer son consentement à être juridiquement lié par un traité? »  Le délégué a, en conséquence et en conclusion, demandé une clarification sur ce point.

M. VISHNU DUTT SHARMA (Inde) a déclaré que le projet de conclusion 14 sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), sur la procédure recommandée pour le règlement des différends concernant un conflit entre un traité et une telle norme, devrait, comme l’article 66 de la Convention de Vienne, tenir compte des préoccupations des États Membres et ne pas restreindre le règlement des différends à la seule Cour internationale de Justice.  Il a estimé qu’une étude approfondie du Chapitre VII et de l’Article 103 de la Charte des Nations Unies permettrait d’éclairer le débat sur le projet de conclusion 17 relatif à l’invalidité des résolutions contraignantes des organisations internationales, y compris les résolutions du Conseil de sécurité. 

Quant aux projets de conclusion sur la protection de l’atmosphère, ils devraient avoir pour effet de rappeler aux États leurs obligations en la matière et la nécessité de s’en acquitter conformément à la procédure envisagée dans les mécanismes internationaux, a poursuivi M. Sharma.  Enfin, il a invité la CDI à examiner le concept de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, sans lier cette question à la Cour pénale internationale (CPI).

M. JAMES KINGSTON (Irlande) s’est félicité de l’adoption en première lecture du texte du projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités et des commentaires y relatifs.  Il a salué la décision d’amender la directive 6 en remplaçant la phrase « les mêmes effets juridiques » par « une obligation juridiquement contraignante d’appliquer le traité ou une partie de celui-ci ». À propos de la directive 7, l’Irlande a noté les divergences de vue parmi les membres de la Commission sur la question de savoir s’il est nécessaire d’inclure une disposition sur les réserves dans le cadre de l’application provisoire des traités.  Selon lui, il n’existe pas de cas où un traité aurait prévu la formulation de réserves en relation avec l’application provisoire.  Aucune trace non plus de cas où un État aurait formulé des réserves à un traité appliqué à titre provisoire.  À ce titre, la délégation irlandaise a considéré qu’il fallait procéder à de plus amples recherches quant aux pratiques des États et des organisations internationales sur ce sujet précis.

Sur l’élaboration de clauses types, il a jugé qu’elle fournit une assistance utile dans les cas où l’application provisoire est jugée appropriée.  Cependant, il y aurait, selon lui, besoin de « flexibilité » dans un domaine où les différents systèmes institutionnels et judiciaires pourraient chercher à utiliser une application provisoire.

M. ANDREI N. METELITSA (Bélarus) a souligné la nécessité de respecter les bases méthodologiques de la CDI, notamment en s’appuyant sur la pratique des États.  Seule la pratique des États peut constituer les normes impératives du droit international, a-t-il insisté, alors que les organisations internationales et les juridictions peuvent contribuer à identifier la pratique des États.  Dans le projet de conclusion 5, les sources du jus cogens ne sont pas identifiées correctement, a-t-il relevé.  Pour déterminer les normes impératives, il faut déterminer des critères qui ne font pas polémique, alors que le projet de conclusion 7, qui parle d’une majorité d’États pour identifier une norme du jus cogens, est insuffisant. 

Se référant au projet de directive 1 sur la protection de l’atmosphère, il a identifié les facteurs naturels et anthropiques, et invité la Commission à fournir des précisions sur cette question.  

Mme PIRANAJ THONGNOPNUA YVARD (Thaïlande) a salué l’adoption d’un projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités.  Elle a rappelé que son pays est doté d’un système dualiste, les dispositions internationales devant être transposées dans le droit interne pour s’appliquer.

La déléguée a ensuite déclaré que le seuil d’identification des normes impératives du droit international général (jus cogens) doit être plus élevé et plus clair que la seule expression « par une large majorité d’États ».  L’établissement d’une liste illustrative de normes du jus cogens pourrait entraver le développement du jus cogens lui-même, qui peut évoluer au cours du temps, a-t-elle dit.  Enfin, elle a indiqué que la reconnaissance d’un jus cogens régional pourrait saper la notion de jus cogens comme normes étant acceptées et reconnues par la communauté internationale dans son ensemble.

Les règles du droit international relatives à la protection de l’atmosphère doivent être identifiées, interprétées et mises en œuvre de façon cohérente, a déclaré Mme VICTORIA HALLUM (Nouvelle-Zélande).  Elle a apprécié l’accent mis sur la nécessité pour les États de se conformer aux règles et aux procédures découlant des accords internationaux sur la protection de l’atmosphère. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme Hallum a dit attendre avec intérêt la décision de la CDI quant à la pertinence d’élaborer une liste illustrative.  Toutefois, devant la faible pratique des États et l’impact potentiel du jus cogens sur le droit international, elle a invité la Commission à adopter une approche « prudente et équilibrée ».  Sur un autre chapitre, la représentante a souligné l’importance de mener des consultations avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a douté de l’utilité du projet de directive 10 sur la mise en œuvre en droit interne des obligations en vertu du droit international sur la protection de l’atmosphère.  Elle a considéré qu’un lien plus direct avec les obligations internationales spécifiques sur la protection de l’atmosphère était nécessaire.  La Roumanie soutient l’usage de mécanismes coercitifs en matière de protection environnementale.  La représentante a ensuite cité le paragraphe 2 de la directive 11 sur le contrôle du respect des obligations: « Pour assurer la conformité, des procédures de facilitation ou d’exécution peuvent être utilisées »; elle a remarqué que les deux procédures pourraient être utilisées subséquemment: d’abord les procédures de facilitation, ensuite les mesures d’exécution.

Concernant l’application à titre provisoire des traités, la Roumanie s’aligne sur l’Union européenne, en réclamant toutefois « davantage de clarté » concernant « l’obligation pour les États Membres ou les organisations internationales de ne pas participer aux négociations des traités ».

Enfin, à propos des normes impératives du droit international général (jus cogens), la Roumanie aurait apprécié que tous les textes des projets de conclusions et les commentaires reflétant la vue du CDI sur le sujet soient à disposition, d’autant plus que des travaux importants ont déjà été effectués sur ce point; cela aurait permis un dialogue constructif entre la CDI et la Sixième Commission.

Espérant un engagement de la CDI en ce sens, Mme Orosan a préconisé une approche basée sur la pratique des États plutôt qu’une approche doctrinale; elle a souhaité que le Rapporteur spécial accorde davantage d’attention au droit international existant, et que l’élaboration des normes ne dévie pas de ce canevas; elle a enfin réclamé de la constance avec les autres sujets examinés par la CDI ou en train de l’être, ceci pour empêcher un phénomène de fragmentation, ou des contradictions dans les déclarations, qui pourraient entraver le mandat de la CDI.

Sur le sujet de la Protection de l’atmosphère, M. PAULO ALEXANDRE COLAÇO PINTO MACHADO (Portugal) a estimé que les 12 projets de directives reflètent une approche équilibrée de ce problème auquel le Portugal est très attaché.  Par ailleurs, il a soutenu la formulation utilisée pour le projet de directive 12 établissant que les différends devaient se régler par des moyens pacifiques.

Sur la question de l’application à titre provisoire des traités, le représentant a souligné qu’elle était incompatible avec la Constitution de son pays.  S’il s’est félicité de nombreuses évolutions positives dans le texte révisé du projet de Guide, certains points continuent de poser, selon lui, problème.  Ainsi, il a salué l’affirmation dans la directive 3 de la nature volontaire du mécanisme d’application provisoire.  Il a aussi relevé que la nouvelle directive 6 ne laisse désormais plus de place au doute ni à la confusion.  En revanche, la directive 7 continue d’utiliser l’expression « effet juridique » qui réintroduit une incertitude que la directive 6 avait précédemment supprimé.  « Même si cette expression provient de la définition de la réserve dans la Convention de Vienne sur le droit des traités, nous préfèrerions une formulation moins ambigüe », a insisté le délégué.  Étant donné le manque de pratique des États sur cette question, le Portugal a suggéré que la Commission réfléchisse plus attentivement à la question des réserves.  Il s’est aussi félicité des clauses types présentées par le Rapporteur spécial qui seraient, selon lui, un excellent complément aux directives.

Le délégué s’est, finalement, attardé sur le sujet des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Pour lui, le simple fait de rendre les normes internationales plus compréhensibles contribue à renforcer la stabilité du système juridique international.  Il a félicité la Commission pour l’équilibre qu’elle a trouvé entre théorie et pratique pendant cette session.  Selon lui, elle a bien mis en lumière que les États et les organisations internationales ont des obligations positives au titre des normes préliminaires du droit international général.  Le Portugal a estimé que s’assurer d’une mise en œuvre des traités est essentiel pour la sécurité juridique internationale.  Toutefois, a-t-il ajouté, la mise en œuvre d’un traité dont les normes sont invalides à cause d’un conflit avec une norme impérative devrait être protégée quand ses bases essentielles ne sont pas en jeu.

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a indiqué que le sujet « protection de l’atmosphère » ne peut être débattu sans les apports de la communauté scientifique.  Il a commenté un paragraphe du préambule aux projets de directive sur la protection de l’atmosphère, selon lequel « la protection de l’atmosphère contre la pollution atmosphérique et la dégradation atmosphérique est une préoccupation pressante de l’ensemble de la communauté internationale ».

Notant le fait que l’Accord de Paris parle d’une « préoccupation commune de l’humanité », il a souhaité une actualisation de ce paragraphe et son remplacement donc par « préoccupation commune de l’humanité ».  Il a prôné une « approche agressive » s’agissant des efforts visant à définir et à remédier à la dégradation environnementale du fait de l’homme.  Enfin, le délégué a souhaité au paragraphe 6 du préambule un élément de langage reflétant davantage les avertissements émis par la communauté scientifique.

Mme ZAMAKHINA EVGENIIA (Fédération de Russie) a mentionné que la législation russe des traités est fondée sur les dispositions de la Convention de Vienne, et permet l’application à titre provisoire des traités.  Selon elle, l’application provisoire d’un traité cesse si l’État fait part aux autres États de son intention de ne pas devenir partie aux traités.  Récemment, la Russie a mis fin à l’application provisoire d’un traité multilatéral mais le greffier du traité a considéré que la Russie demeure liée à ses obligations découlant du traité, tout en appelant à approfondir l’examen de cette question.  Selon la représentante, une tendance se dessine afin de rendre l’application provisoire des traités de plus en plus facile pour les parties, ce qui pourrait mettre en péril le droit des traités et le système juridique international dans son ensemble. 

Abordant les normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme Evgeniia a exprimé son soutien à la position de la CDI, qui s’est appuyée sur les textes de la Convention de Vienne.  Selon elle, le recours à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour le règlement des différends n’est pas conforme à la forme non normative des projets de conclusions sur le jus cogens.  En ce qui concerne l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, Mme Evgeniia a rappelé que cette question a déjà fait l’objet d’une étude de la CDI.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les commissions économiques régionales défendent le renforcement de l’intégration et la coopération pour réaliser le Programme 2030

Soixante-treizième session,
Dialogue avec les Commissions régionales - matin
AG/EF/3507

Les commissions économiques régionales défendent le renforcement de l’intégration et la coopération pour réaliser le Programme 2030

L’intégration et la coopération régionale pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 sont plus que jamais nécessaires pour favoriser la résilience dans un contexte mondial de plus en plus complexe.  Tel était le thème principal abordé ce matin à la Deuxième Commission chargée des questions économiques et financières, au cours de son dialogue annuel avec les cinq Commissions économiques régionales des Nations Unies. 

Ces commissions sont en charge de l’orientation et de l’analyse des politiques de développement dans les régions.  Elles peuvent être utiles pour identifier les besoins et les exigences des États, notamment face aux inégalités croissantes, qui sont l’un des problèmes essentiels dans la mise en œuvre du Programme 2030, a souligné Mme Alicia Bárcena, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) et Coordonnatrice des Commissions régionales, qui a modéré le débat.  En bref, chaque Commission cherche comment à gérer les bouleversements globaux de manière régionale.

En présentant les principaux défis de chaque région pour atteindre les objectifs de développement durable, les Secrétaires exécutifs ont parlé de l’élimination de la pauvreté et de la croissance économique.  Évoquant un phénomène « d’hypermondialisation » en cours depuis 2015, la Secrétaire exécutive de la CEPALC a noté une érosion de la confiance des peuples dans les pactes sociaux et une augmentation des inégalités sociales.  Si la région de l’Amérique latine et des Caraïbes a réussi à sortir 70 millions de personnes de la pauvreté ces 20 dernières années, des différences demeurent entre le niveau de vie des hommes et celui des femmes, et les problèmes de qualité des services publics et de violence persistent, sans compter que la dissuasion militaire ne pourra rien contre les migrations.  La Secrétaire exécutive a attiré l’attention sur l’exemple de l’Union européenne où 63% des biens exportés vont vers d’autres pays membres.  Il faut s’en inspirer.

Son homologue de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Mme Vera Songwe, s’est enthousiasmée de l’accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine, déjà signé par de nombreux pays à Kigali, au Rwanda, en mars 2018, lequel permettra aux entreprises de croître plus rapidement.  L’Afrique, a-t-elle expliqué, est caractérisée par une croissance de 3%, bien inférieure au niveau de l’année 2000, et dans 13 pays, la dette a atteint au moins 70% du produit intérieur brut (PIB), ce qui « doit être un signal d’alarme».

Le Secrétaire adjoint exécutif de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), M. Kaveh Zahedi, s’est félicité du recul de la pauvreté et de l’augmentation de l’espérance de vie dans la région Asie et Pacifique qui pourtant ne pourra atteindre qu’un seul objectif de développement durable, celui de l’accès universel à l’éducation.  Les émissions de gaz à effet de serre sont beaucoup trop élevées, les inégalités d’accès à la santé, à l’eau ou à l’assainissement sont frappantes et fait nouveau, la fracture numérique se creuse.  Les catastrophes dues aux changements climatiques tuent cinq fois plus dans la région qu’ailleurs dans le monde, touchant surtout les plus pauvres. 

M. Mounir Tabet, Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) a lui aussi évoqué les changements climatiques, pour souligner que la région contribue pour moins de 5% aux émissions de gaz à effet de serre mais qu’elle devrait enregistrer les plus fortes hausses de température d’ici à la fin du siècle.  Les plus vulnérables sont les pays les moins avancés (PMA).  La région attribue 83% des pertes économiques aux inondations.  C’est aussi dans cette région que la fracture numérique est l’une des plus graves au monde.  M. Tabet n’a pas oublié de mentionner que la région a accueilli plus de 38 millions de migrants en 2017, représentant 14,8% des migrants dans le monde, et que le nombre de réfugiés a atteint près de 8,7 millions.

Pour sa part, Mme Olga Algayerova, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE) a cité quelques Conventions qui ont fait avancer l’intégration de sa région.  La CEE est parmi les premiers à développer des systèmes intelligents de transport, a-t-elle ajouté. 

Au cours du débat interactif, les délégations ont salué le rôle des Commissions dans le renforcement de la coopération régionale et l’aide à la réalisation des objectifs de développement durable.  La Chine a rappelé que la réforme de ces Commissions est un point important de la réforme du système des Nations Unies pour le développement.  La Fédération s’est d’ailleurs demandé comment envisager leur rôle dans ce nouveau paysage réformé.    

La Deuxième Commission reprendra ses travaux, en séance publique, le mardi 6 novembre, à 10 heures, pour examiner des projets de résolution.

DIALOGUE AVEC LES SECRÉTAIRES EXÉCUTIFS DES COMMISSIONS RÉGIONALES SUR LE THÈME « INTÉGRATION ET COOPÉRATION RÉGIONALE POUR LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME 2030 »

Ouvrant le débat en sa qualité de modératrice, Mme ALICIA BÁRCENA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) et Coordonnatrice des Commissions régionales a relevé que le contexte mondial actuel est très complexe et que la coopération régionale peut renforcer la résilience.  Les Commissions régionales sont utiles pour identifier les besoins des États, notamment face aux inégalités croissantes qui sont l’un des problèmes essentiels dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Chaque région a des plateformes intergouvernementales et les Commissions régionales doivent en être les partenaires principaux.

Mme VERA SONGWE, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a donné le contexte et les perspectives économiques du continent africain, en visioconférence.  Elle a d’abord salué l’élection d’une femme à la présidence de l’Éthiopie et la normalisation de la situation dans le pays.  La croissance est revenue en Afrique, a-t-elle affirmé, en entrant dans le vif du sujet.  Mais, a-t-elle prévenu, elle n’est plus aussi forte qu’en 2000.  Elle est de 3% environ à l’échelle du continent et non plus à 6% comme au début du siècle.  Cette croissance, nécessaire pour réaliser les objectifs de développement durable, n’a pas empêché l’aggravation des inégalités.  Elle est beaucoup plus rapide en Afrique de l’Est, grâce à une bonne gouvernance et à l’intégration des marchés.  Le sud du continent -Afrique du Sud, Botswana, Zambie– a, quant à lui, souffert de la chute des prix des produits et d’un taux de chômage élevé.

Concernant précisément la création d’emplois, Mme Songwe a affirmé que les investissements sont là, mais que les petites et moyennes entreprises (PME) stagnent.  De plus, l’Afrique n’épargne pas suffisamment par rapport à des continents comme l’Asie orientale.  Or, l’épargne est essentielle pour générer les investissements, au risque de s’exposer à l’endettement.  Poursuivant, la Secrétaire exécutive a relevé une baisse générale du déficit fiscal par rapport à la période 2015-2016.  Le Cameroun, le Nigéria, l’Afrique du Sud, la République démocratique du Congo ont pu augmenter leurs exportations.

On dit souvent à New York ou à Washington que la dette des pays africains a augmenté, a dit Mme Songwe.  Il est donc nécessaire que l’on s’y attaque.  La dette de 13 pays du continent a atteint 70% ou plus de leur produit intérieur brut (PIB).  « Cela doit être un signal d’alarme pour nous », a-t-elle dit, surtout que 81% de toute la dette extérieure est due à des obligations en euros comme l’illustre le cas du Ghana.  « C’est un problème de taux de change et de gestion de l’inflation, a relevé Mme Songwe devant des questions macroéconomiques qui préoccupent le continent. 

Bien sûr, la solution la plus rapide était d’augmenter les impôts, a-t-elle poursuivi.  Mais la croissance n’a pas suivi.  Les nouvelles politiques fiscales doivent plutôt viser la diversification des revenus.  Par exemple, très peu de pays taxent le secteur de l’immobilier.  « Il faut y réfléchir », a conseillé Mme Songwe.  Le libre-échange est la voie sur laquelle s’est engagée l’Afrique.  L’Accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine (AFCFTA), signé par de nombreux pays à Kigali au Rwanda, en mars 2018, est à saluer, en ce qu’il doit conduire à un marché commun et à une monnaie unique, permettant aux entreprises de se développer plus rapidement.

Elle a enfin constaté que les échanges en dehors de l’Afrique étaient encore très dépendants de l’extraction minière.  Prenant pour exemple l’entreprise de transports Uber, elle a appelé à ce que l’Afrique développe le secteur des nouvelles technologies.

Mme OLGA ALGAYEROVA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), a souligné l’importance des questions transfrontalières pour la région.  Des solutions sur les infrastructures et les transports peuvent ainsi permettre d’avancer dans la réalisation du Programme 2030, par exemple s’agissant de la gestion de l’eau.  Montrant une carte routière, Mme Algayerova a insisté sur les coûts de transport.  La CEE a développé les cadres normatifs pour les systèmes de transport, dont la Convention douanière relative au transport international de marchandises sous le couvert de carnets (Convention TIR) qui a réduit le transport maritime de 80% et les coûts de 39%.  De même, l’intermodalité contribue à des systèmes de transport plus efficaces, tout en réduisant l’empreinte écologique.  La CEE figure parmi les premiers à avoir développer des systèmes intelligents de transport.

La pollution de l’air est l’un des principaux risques, qui a des coûts sanitaires et économiques.  La Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière a permis de réduire les émissions et d’augmenter l’espérance de vie de 12 mois.  Au titre des autres défis, la CEE examine les effets des sécheresses et des inondations, dont les coûts sont loin d’être négligeables.  La Convention sur l’eau est bien prise en compte dans les lois et mesures nationales.

La Secrétaire exécutive a aussi cité la Convention sur la prévention des accidents industriels majeurs et leurs conséquences, rappelant l’accident de l’usine Sandoz en Allemagne qui a pollué des affluents du Rhin.  Elle s’est également attardée sur la Convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière qui permet des solutions alternatives pour réduire les risques environnementaux et sanitaires.  Le Protocole sur l’évaluation stratégique environnementale donne des idées aux gouvernements pour construire des infrastructures plus durables et plus résilientes.

M. KAVEH ZAHEDI, Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a relevé que la pauvreté avait diminué dans la région et que l’espérance de vie y avait augmenté.  Néanmoins, la région ne pourra atteindre qu’un seul objectif de développement durable, celui de l’accès universel à l’éducation.  Dans les autres domaines, elle stagne, voire recule.  Les émissions de gaz à effet de serre sont beaucoup trop élevées, les inégalités sont frappantes entre pays et au sein des pays et les catastrophes dues aux changements climatiques tuent cinq fois plus qu’ailleurs dans le monde, touchant surtout les pauvres. 

Soulignant que la coopération est essentielle pour que la région revienne sur la bonne voie, il a relevé quelques progrès et initiatives: la feuille de route régionale pour la mise en œuvre du Programme 2030 ou encore le Forum Asie-Pacifique pour le développement durable.  Aux inégalités, il faut ajouter la fracture numérique.  Mais l’on peut se féliciter du fait qu’il y a deux semaines, les États membres de la CESAP aient décidé de mettre en commun les richesses de leurs agences spatiales pour faire avancer le Programme 2030.  M. Zahedi a mis en avant les activités de sa Commission comme son assistance technique qui, au Bhoutan, porte sur le développement des outils statistiques précieux.  La CESAP participe à la lutte contre les problèmes transfrontaliers et les catastrophes naturelles. 

M. MOUNIR TABET, Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a choisi neuf questions transfrontalières liées à neuf objectifs de développement durable pour exposer les défis et expliquer ce que la CESAO fait pour les relever.  Premièrement, en ce qui concerne les changements climatiques (objectif 13), la région contribue pour moins de 5% aux émissions de gaz à effet de serre mais devrait enregistrer les plus fortes hausses de température d’ici à la fin du siècle.  Les plus vulnérables sont les pays les moins avancés (PMA), en particulier la Mauritanie, le Soudan, la Somalie et le Yémen.  La CESAO a notamment mis en place une plateforme de développement des capacités pour les négociateurs des accords sur les changements climatiques et gère la préparation du premier rapport sur l’impact de ce phénomène et l’évaluation de la vulnérabilité de la région arabe.  S’agissant de la réduction des risques de catastrophe (objectif 11), M. Tabet a rappelé que la région arabe est l’une des plus vulnérables et que 83% des pertes économiques sont liées aux inondations.  La CESAO a préparé une base de données et aide les États arabes à faire face aux tempêtes de sable.

Quant aux ressources hydriques (objectif 6), les liens entre conflits et eau sont particulièrement aigus en Iraq et en Syrie, en Palestine, en Jordanie et au Liban.  La CESAO évalue les effets des changements climatiques sur les bassins hydriques transfrontaliers et aide les pays à développer le cadre de la Convention sur les ressources naturelles partagées depuis 2010.  Pour ce qui est de l’énergie (objectif 7), les problèmes de coupures de courant frustrent les efforts de développement, a relevé M. Tabet.  La CESAO fournit un appui technique sur la formulation de politiques visant à renforcer le développement de chaînes de valeur d’énergie propre et promeut les investissements dans l’énergie renouvelable.

Passant aux transports (objectif 11), les défis concernent la faiblesse des réseaux routiers et de chemin de fer et leurs coûts, surtout aux frontières et leurs coûts invisibles comme les pots de vin.  La CESAO aide à identifier les priorités régionales et les solutions novatrices pour mettre en œuvre des systèmes de gestion et développer des transports multimodaux.

Concernant l’intégration économique (objectif 8), les volumes d’échanges sont très bas et les restrictions sont très élevées pour les échanges commerciaux, ce qui ne rend pas la région attractive, a indiqué M. Tabet.  La CESAO évalue principalement les obstacles aux échanges et aide les États à surmonter les difficultés d’intégration économique régionale.

S’agissant de l’accès numérique (objectif 9), c’est un défi considérable car les technologies de l'information et des communications (TIC) ne sont pas disponibles pour la majorité de la population des pays arabes.  La fracture numérique dans la région est l’une des plus élevées au monde, a souligné M. Tabet. La CESAO évaluera les progrès issus du Consensus de Beyrouth sur la transformation et l’économie numérique dans la région arabe.

En ce qui concerne les migrations (objectif 10), M. Tabet a rappelé que la région a accueilli plus de 38 millions de migrants en 2017, représentant 14,8% des migrants dans le monde, et que le nombre de réfugiés a atteint 8,7 millions.  La CESAO s’est engagée à aider à opérationnaliser les objectifs du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.  Enfin, M. Tabet a parlé de la prévention des conflits (objectif 16) et a indiqué que la CESAO met au point un cadre d’évaluation des risques et qu’elle soutient le renforcement des cadres juridiques et règlementaires pour améliorer la gouvernance dans la sphère économique et sociale.

Mme ALICIA BÁRCENA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a relevé qu’en Amérique centrale et dans les Caraïbes, la question est de savoir comment gérer les bouleversements mondiaux, notamment les migrations et la transition démographique, les nouvelles technologies et la balance commerciale.  Le monde a longtemps pensé que le libre-échange était la panacée, a-t-elle fait remarquer, mais le protectionnisme croît et l'Amérique centrale et le Mexique pâtissent aussi des tensions entre les États-Unis et la Chine.  Non-émetteurs de gaz à effet de serre, les Caraïbes subissent pourtant le choc des changements climatiques, sans compter le problème des inégalités croissantes.

Les États-Unis demandent au Mexique d’être une zone tampon contre les migrations; l’Europe fait de même avec l’Afrique.  « En même temps, on voit apparaître les premières migrations climatiques, avec le manque d’eau au Guatemala ».  Si la région a réussi à sortir 70 millions de personne de la pauvreté ces 20 dernières années, il n’en demeure pas moins que des différences persistent entre le niveau de vie des hommes et celui des femmes.  Les services publics souffrent toujours de leur faible qualité et la violence est là, même de manière latente.

Passant aux réformes numériques, elle a déploré la concentration des plateformes numériques dans l’escarcelle de « deux ou trois pays ».  La création de valeurs que représentent les données ne profitent qu’à une poignée de gigantesques entreprises, a relevé Mme Bárcena, qui s’est demandé comment évaluer leur impact sur le monde du travail.

Évoquant un phénomène « d’hypermondialisation » en cours depuis 2015, elle a noté une érosion de la confiance des peuples dans les pactes sociaux, une aggravation des inégalités sociales, une classe moyenne mécontente et perdante dans les pays émergents et une classe moyenne gagnante dans les pays développés.  Le problème de l’augmentation de la dette et des flux financiers en dehors de la région vers des marchés plus solides est « grave ». 

Jugeant qu’il était temps d’insister sur la coopération régionale, elle a souhaité que les régions deviennent résilientes, grâce à l’augmentation des échanges régionaux et à la lutte contre les flux illicites.  « Nous sommes fatigués d’entendre parler des réformes fiscales ».  Ce qu’il faut, c’est une lutte véritable contre l’évasion fiscale, qui coûte des milliards de dollars à la région.  Ce qu’il faut aussi, c’est obtenir un vrai transfert des technologies.

La Secrétaire exécutive a recommandé des investissements dans l’économie circulaire et des progrès vers des migrations plus sûres.  Si les accords de libre-échange sont en danger, le Marché commun du Sud (Mercosur) ou l’ASEAN donnent de bons résultats.  L’exemple de l’Union européenne, où 63% des biens sont exportés vers des pays membres devrait, inspirer sa région.  Elle a proposé la création d’une plateforme régionale pour le lithium, l’intégration des transports et des télécommunications, une gestion commune de l’agroalimentaire et des forêts, la connectivité régionale avec un marché numérique unique pour l’Amérique centrale et un autre pour l’Amérique du Sud.  Le secteur privé est très intéressé par ce genre d’initiatives, a-t-elle souligné.

Débat interactif

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, l’Égypte a insisté sur le rôle « essentiel » de l’approche régionale et sous-régionale pour le succès du Programme 2030.  Elle a donc plaidé pour le renforcement des fonctions des Commissions régionales qui doivent mieux collaborer avec les équipes de pays de l’ONU.  En toutes choses, a prévenu l’Égypte, il faut éviter les doublons et les chevauchements.  L’Égypte attend avec intérêt les options du Secrétaire général sur la restructuration des activités opérationnelles pour le développement.  Il faut éviter les solutions à taille unique et garantir une approche flexible.  Les Commissions régionales doivent aller bien au-delà des analyses et des conseils et s’occuper véritablement du développement et du renforcement des capacités nationales, a estimé l’Égypte.

Comment envisager le rôle des Commissions régionales dans le contexte des réformes? s’est demandé la Fédération de Russie, qui a tout de même pronostiqué que leur charge de travail ira croissant et qu’il faudra leur garantir, en conséquence, le niveau suffisant de ressources humaines.  Le pays a dénoncé l’état actuel des relations internationales de plus en plus érodées en raison de la concurrence déloyale et des mesures unilatérales.  La Fédération de Russie a estimé, à son tour, que les Commissions régionales doivent resserrer leurs liens avec le système des coordonnateurs résidents pour garantir une bonne coopération et un développement « dépolitisé ».  Dans ce cadre, a ajouté le Paraguay, les Commissions régionales ne doivent pas oublier de soutenir le Programme d’action de Vienne pour les pays en développement sans littoral.  Il a souligné la disposition de ce Groupe de pays à parler avec les pays de transit et toutes les autres parties prenantes pour que l’examen à mi-parcours du Programme d’action ait un impact réel. 

Le débat doit se concentrer sur la connectivité au-delà du transport et des infrastructures logistiques.  Il faut, a estimé la Roumanie, parler des liens entre les secteurs productifs, les banques et les fonds d’investissements.  La République de Corée a souligné sa détermination à rester engagée dans le développement de la région Asie-Pacifique, estimant qu’il faut encore renforcer la coopération régionale.

Pour cette région, a estimé le Bhoutan, la priorité est que la CESAP contribue à une meilleure intégration des pays en développement sans littoral aux circuits économiques régional et mondial.  Formuler des politiques de développement, renforcer les capacités et promouvoir l’intégration, c’est ce que l’on attend des Commissions régionales, a dit la Chine.  Des recherches ciblées devraient permettre de renforcer les relations de travail entre l’ONU ici à New York et les Commissions.  Quant à elle, la Chine continuera ses efforts de soutien via le Fonds CESAP-Chine dans des domaines comme l'agriculture, les transports ou la parité.  La Thaïlande a dit son intention de partager son expérience avec la CESAP aux consultations Asie-Pacifique sur la coopération Sud-Sud, qui aura lieu en juin, ainsi qu’à la Conférence de Buenos Aires, en mars prochain.  La CESAP devrait d’ailleurs renforcer ses relations avec l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN) et les autres organisations régionales.  Elle pourrait ainsi se mettre au fait des meilleures pratiques.

La CEA doit, a estimé Cabo Verde aider concrètement les pays à revenu intermédiaire en Afrique à réaliser les objectifs de développement durable.  Cabo Verde a un peu tempéré l’enthousiasme sur l’intégration africaine.  Il a préféré vanter les mérites de l’intégration sous-régionale, en particulier dans les domaines de l’énergie et des infrastructures.  Il faut d’abord lever tous les obstacles à cette intégration avant de penser à intégrer tout le continent, a-t-il estimé.  Quelles mesures concrètes la CEA envisage-t-elle pour aider les petits États insulaires en développement, s’agissant entre autres de la question de la dette.  Les Commissions, dont la CEPALC, restent un instrument intéressant pour l’intégration régionale, a souligné le Mexique.  Le multilatéralisme doit en effet commencer au niveau des régions, a ajouté l’Iran.

Comme nos frontières occidentales réunissent deux grands blocs économiques, a fait observer le Bélarus, nous défendons l’intégration comme principe pour la croissance économique et le développement durable.  Les Commissions régionales devraient examiner toutes les formes de coopération pour créer « un nouveau monde, sans ligne de partage » et assurer une plus grande synergie pour réaliser le Programme 2030.  Elles devraient aussi faciliter la participation des États à certains aspects de leurs travaux, en particulier les mécanismes du commerce international.  L’Indonésie s’est tout simplement dit heureuse du niveau de coopération entre la CESAP et l’ASEAN, s’agissant, entre autres, de la prochaine Conférence de Buenos Aires pour la coopération Sud-Sud en mars prochain.  Comment les Commissions régionales envisagent-elles leur rôle, dans un contexte de transformation du système des Nations Unies pour le développement? a-t-elle demandé.

Le Kazakhstan a réitéré sa volonté d’accueillir le secrétariat de la CESAP à Almaty.  Hôte de la CEA, l’Éthiopie a réaffirmé son soutien aux travaux de la Commission.  Que fait cette dernière, s’est demandé le Nigéria, pour aider l’Afrique à surmonter des obstacles comme les retards technologiques, le manque d’investissements et le fardeau de la dette.  Aucun des défis actuels ne peuvent-être correctement relevés, sans la prise en compte de la dimension régionale, a estimé le Chili.

Conclusions

La voix des pays doit être davantage entendue « ici au Siège », a estimé la Secrétaire exécutive de la CEPALC, qui a regretté que depuis le Mexique, elle n’ait pas la même influence à New York.  Les Commissions régionales, a-t-elle rappelé, sont « des secrétariats d’instance multilatérale ».  « Vous parlez, nous écoutons » a-t-elle dit, encourageant les pays à travailler avec les Commissions régionales pour sensibiliser leurs ministères aux objectifs du Programme 2030.  Nos plateformes sont universelles et personne n’en est exclu.  Elle a dit avoir entendu le Paraguay et ses problèmes de coûts de transport alors qu’en Europe, on a beaucoup progressé sur la question des transports et du commerce.  Il faut s’en inspirer.  La Secrétaire exécutive a aussi dit avoir entendu le Chili qui a parlé d’un statut intermédiaire, dans une région où 85% des pays sont considérés comme des pays à revenu intermédiaire et trois ont été reclassés.  Le produit intérieur brut (PIB) n’est pas un indicateur fiable du niveau de développement.  Il faut de nouveaux indicateurs pour ne pas mettre les pays en porte à faux en les sortant d’une catégorie sans avoir réglé des problèmes structurels.  Les Commissions régionales reçoivent leur mandat directement des États membres.  Elles sont le bras droit de l’ONU en matière de développement.  « Venez nous voir, venez travailler avec nous », a-t-elle conclu. 

Son homologue de la CEA a rappelé la tenue prochaine de la Conférence sur l’économie bleue au Kenya.  Elle aussi a estimé que le Conseil économique et social (ECOSOC) devrait créer un groupe au sein de la CEA sur la situation des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a une nouvelle fois salué l’accord sur la Zone de libre-échange.

La Secrétaire exécutive de la CEE s’est félicitée des expressions de soutien des délégations et a tenu à souligner que sa Commission a toujours collaboré avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Nous souhaitons coopérer avec tout le système des Nations Unies, a-t-elle assuré.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission rejette par un vote l’examen d’un projet de résolution russe sur le Traité FNI (forces nucléaires à portée intermédiaire)

Soixante-treizième session,
19e séeance - matin
AG/DSI/3611

La Première Commission rejette par un vote l’examen d’un projet de résolution russe sur le Traité FNI (forces nucléaires à portée intermédiaire)

La Première Commission (Désarmement et sécurité internationale) a rejeté, ce matin, par vote, l’examen d’un projet de résolution déposé hors délai la veille par la Fédération de Russie concernant l’avenir du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI).  La Russie entendait répondre à l’intention des États-Unis de se retirer du Traité FNI en vigueur depuis 1987. 

Les États-Unis avaient déposé hier, 25 octobre, une motion d’ordre pour s’opposer à l’examen de ce texte au motif qu’il avait été soumis après la date limite fixée par la Commission au 18 octobre.  Faute de consensus lors des consultations menées entre temps par le Président de la Commission, la Fédération de Russie a demandé, aujourd’hui, un vote sur la question: la Commission s’est prononcée contre l’examen de la résolution dans son enceinte par 55 voix contre, 31 pour et 54 abstentions.

Les États-Unis ont été soutenus notamment par la France, la Finlande ou le Royaume-Uni pour qui il ne fallait pas créer de « précédent ».  Le Royaume-Uni a également estimé que ce projet concernant « la paix et la sécurité », comme l’avait souligné le représentant russe, relevait du mandat du Conseil de sécurité.

La Russie a regretté ce rejet en prévenant que « si les États-Unis se retirent du Traité et commencent à développer sans contrôle leur potentiel nucléaire, nous serons confrontés à une nouvelle réalité face à laquelle ces questions de procédure paraîtront bien insignifiantes ».

L’Argentine, quant à elle, a expliqué avoir voté « contre » lors du vote car qu’il s’agissait d’une question bilatérale entre la Russie et les États-Unis et qu’il revenait par conséquent à ces deux pays de trouver une solution.

À l’issue de ce vote, la Commission a repris ses travaux selon l’ordre du jour convenu, notamment sur le point 4 de son ordre du jour –les armes classiques– à propos desquelles plusieurs délégations ont souligné l’articulation entre l’usage excessif de ces armes, en particulier en zone urbaine, et le nécessaire respect du droit international humanitaire.

Le Mexique a jugé « insoutenable » que les pays producteurs et exportateurs d’armes privilégient leurs intérêts économiques et ceux de leurs industries alors que les armes conventionnelles sont responsables de la majorité des morts violentes dans le monde.  Il a appelé à la création d’un instrument international qui permette de protéger les civils dans les villes.

Le désarmement est d’abord un programme humanitaire face à l’augmentation du nombre de victimes, a également soutenu la représentante des Pays-Bas.  Elle a par ailleurs appelé au respect du droit international humanitaire dans l’utilisation des systèmes d’armes létales autonomes, et souligné que les avancées technologiques, les drones en particulier, exigent une meilleure compréhension des risques à venir.

Elle a été appuyée sur ce point par le Mexique et par l’Inde, qui a rappelé qu’elle présidait le Groupe d’experts gouvernementaux ad hoc et a souhaité que celui-ci puisse poursuivre ses travaux avec les ressources nécessaires.

Puis la Commission a entamé le débat sur le point 5 de l’ordre du jour, (autres mesures de désarmement et sécurité internationale) lors duquel les délégations se sont inquiétées des usages malveillants du cyberespace.  Pour l’Indonésie, qui parlait au nom du Mouvement des pays non alignés, il faut s’assurer que l’utilisation de ces technologies se fasse « dans le plein respect du droit ».

Singapour a rappelé que la cybersécurité avait été un point clef de son mandat à la tête de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour laquelle il établira d’ailleurs un centre d’excellence en 2019.  Car pour le représentant, tous les États doivent s’équiper de capacités suffisantes pour sécuriser leurs infrastructures.

« Alors que la menace augmente chaque jour », a remarqué la Russie, l’ONU ne dispose pas de mécanisme spécifique pour traiter de cette question.  « Faux », a rétorqué le Canada qui s’exprimait également au nom d’un groupe de pays (Australie, Canada, Chili, Estonie, Japon, Pays-bas, Nouvelle-Zélande, République de Corée, Royaume-Uni): des mesures de confiance ont été élaborées; il convient de « faire front » sur ce qui a été accompli et non de le saper.  « Le droit international s’applique dans le cyberespace comme ailleurs », a insisté la représentante.

La Première Commission reprendra ses travaux lundi 29 octobre à 10 heures.

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Poursuite de la discussion suite au dépôt d’un projet de résolution par la Fédération de Russie

Le représentant du Royaume-Uni a considéré que la Première Commission devait respecter le Règlement intérieur.  Le projet de résolution est un nouveau texte soumis bien après la date butoir, a-t-il expliqué.  S’il a bien noté que c’était un sujet urgent compte tenu de la situation internationale, il a estimé qu’il y avait un endroit pour cela: le Conseil de sécurité.

Le délégué de la République islamique d’Iran a estimé qu’il fallait prendre en compte d’autres faits.  Le 24 octobre, a-t-il rappelé, la Président de la Commission a posé une question similaire concernant un projet de résolution présenté hors délai par le Cameroun.  Il avait alors fourni deux raisons pour expliquer ce retard: l’importance du projet de résolution et le caractère extraordinaire de sa mise en œuvre.  Le délégué iranien a estimé que les mêmes raisons pouvaient être invoquées pour la proposition russe.  Sans vouloir entrer dans des explications de fond, il a considéré que les deux explications données dans le cas du Cameroun s’appliquent cette fois encore.  Il a rappelé que la République islamique d’Iran n’avait pas cherché à politiser la proposition camerounaise et ne l’avait pas bloquée en invoquant le Règlement intérieur: « Nous vous avons écoutés et nous avons accepté la proposition du Cameroun. »  Même si la proposition russe concerne une question bilatérale, a-t-il conclu, elle concerne la sécurité du monde, et donc elle est de notre ressort.

Le représentant de la Chine a estimé que le Règlement intérieur devrait être respecté, mais en même temps qu’il faudrait un espace pour en discuter.

Le représentant des États-Unis a rappelé que, pour la résolution du Cameroun, arrivée après le 18 octobre, une exception avait été faite car elle portait sur un point à l’ordre du jour.  Mais la tentative de la Russie de présenter une résolution très politique est différente, à son avis.  Aussi a-t-il souhaité qu’on s’en tienne au Règlement intérieur, « sinon la Commission ne pourra fonctionner ».  Il n’y a donc pas lieu de comparer avec la résolution camerounaise qui portait sur un point de l’ordre du jour de la Commission, a-t-il répété.

Le représentant de la République arabe syrienne a reconnu l’importance du Règlement intérieur mais a appelé à éviter la pratique « deux poids, deux mesures » dans les travaux.  Inscrire la résolution au programme ne constitue pas selon lui un précédent.  Il a dit « ne pas comprendre » les objections du Royaume-Uni et des États-Unis.  Le document CRP1 a déjà été amendé et personne ne s’y est opposé, a-t-il rappelé.  Le délégué a fait valoir que le désarmement nucléaire est fondamental et que cette question est cruciale.  « Puisque nous avons déjà amendé le document, nous pensons que nous pouvons examiner cette question. » 

Le document CRP1 « n’a pas été amendé, ni révisé », car la date butoir n’a pas été modifiée, a précisé à ce stade le Président de la Première Commission.

Selon le délégué de la France, il faut respecter le Règlement qu’on a tous accepté, or le délai de présentation des projets est depuis longtemps dépassé.  Il a, par ailleurs, estimé que la situation n’est en aucun cas comparable avec l’exemple du Cameroun puisque là le problème était technique; le sujet sur lequel il présentait un projet était inscrit à l’ordre du jour.  Il a conclu en estimant que le respect du droit est la meilleure façon de construire la confiance.

Sur la question du Cameroun, le délégué de la République islamique d’Iran a réitéré qu’une décision avait été prise sur la foi d’arguments que le Président avait présentés, faisant référence à des circonstances exceptionnelles.  Selon lui, nous sommes aussi, aujourd’hui, dans des circonstances exceptionnelles.  À ce titre, il a trouvé que ses collègues français et américains avaient choisi, cette fois, d’adopter « une position très dure ».  Pour lui, c’est un « positionnement politique ».  Il a rappelé que le mandat de la Première Commission est d’étudier les questions de désarmement.  « On nous dit que cette question n’est pas à l’ordre du jour, a-t-il conclu, mais si on avait suivi cette approche, la nouvelle proposition des États-Unis sur la cybersécurité n’aurait pas dû être acceptée ».

Le représentant de la Fédération de Russie a tenu à préciser plusieurs choses à propos du Règlement.  Citant plusieurs articles de ce texte, il a estimé que la question de la date butoir pour la présentation des projets de résolution est certes essentielle, mais pas la plus importante du programme de travail de la Commission.  « La Commission peut décider de la changer au besoin, a-t-il assuré. C’est pour cette raison que nous considérons qu’il n’y a rien dans le Règlement qui nous empêche de présenter ce projet de résolution pour qu’il soit examiné. »

Par ailleurs, a-t-il assuré, la Russie demandera que cette question soit examinée par le Conseil de sécurité lorsque les États-Unis se seront effectivement retirés du Traité.  Estimant qu’il reste encore du temps pour essayer de prévenir cette décision dommageable pour la paix et la sécurité internationales, il considère que le sujet relève aussi de la Première Commission.

Enfin, il a argué qu’il y a au minimum deux points de l’ordre du jour au titre desquels son projet peut être présenté: les points 101b (désarmement nucléaire) et 101t (missiles).  « De ce fait, nous ne voyons pas de raisons formelles de ne pas étudier notre proposition », a-t-il insisté.  « Notre proposition est simple, a répété le délégué: nous demandons au Président et au Secrétariat d’accepter la proposition de la Russie sans discrimination, car nous considérons que les circonstances ne sont pas moins importantes que celles qui ont permis d’accepter le projet de résolution du Cameroun ».

Le Président de la Première Commission a rappelé que la date butoir avait été adoptée lors les travaux préparatoires de la Commission.

Le représentant de l’Australie a expliqué la différence entre la résolution du Cameroun et celle de la Russie: celle du Cameroun était attendue.  Il n’est pas raisonnable d’examiner le texte de la Russie ici, « après quelques jours à peine », pour décider si oui ou non les délégations veulent se prononcer sur ce texte, a-t-il tranché.  Les délégations doivent pouvoir consulter leur capitale; or elles n’ont pas eu le temps de le faire.

Pour la délégation de la Finlande, la question ne relève que de la procédure et il n’y a aucune considération politique: il s’agit de la date butoir que nous avions adoptée pour le dépôt de résolutions; or la Russie a déposé son projet près d’une semaine plus tard.  Pour la Finlande, il est donc clair que ce projet ne doit pas être examiné par cette Commission.

La délégation d’Israël a considéré, pour sa part, qu’il s’agit d’une question bilatérale entre la Russie et les États-Unis; par conséquent la Commission n’est pas le forum adéquat pour l’examiner.

La Fédération de Russie a répondu à Israël: « oui il s’agit d’un traité bilatéral; cependant ce n’est pas la question posée ».  Les États-Unis ont évoqué l’idée de se retirer du Traité FNI, décision qui pourrait avoir des répercussions très négatives sur le système de désarmement et de non-prolifération, a-t-il argué.  Il a donc insisté sur la tenue d’un vote sur son projet de texte.

Procédure de vote

À l’issue de ces discussions, un vote a été organisé pour trancher la question et la Commission a décidé qu’elle n’était pas saisie du projet de résolution russe sur Traité le FNI, par 55 votes contre, 31 pour et 54 abstentions.

Le délégué de la Fédération de Russie a dit sa surprise et sa tristesse face au vote d’aujourd’hui.  Il a estimé que la majorité des pays qui se sont abstenus sont des défenseurs du désarmement nucléaire et qu’une partie significative des pays qui ont voté contre sont des partisans du maintien du traité.  Disant ne pas comprendre leur position, il a expliqué que la Russie avait essayé d’envoyer un message fort au cercle politique des États-Unis concernant les dangers auxquels nous expose la trajectoire américaine.  Il espérait que cette initiative serait soutenue par toutes les forces raisonnables qui se trouvent dans cette enceinte, mais il a constaté qu’il avait tort.

« D’ici à un an, si les États-Unis se retirent du traité et commencent à développer sans contrôle leur potentiel nucléaire, nous serons confrontés à une réalité toute autre », a prévenu le délégué russe.  « Et ces questions de procédures nous paraîtrons alors bien insignifiantes. »  Faisant appel à leur qualité de diplomate, il a rappelé à ses confrères que leur mission est de réagir rapidement à ce qui se produit dans le monde et d’éviter autant que possible une dégradation de la situation.  Il a cependant assuré que la Russie allait continuer de travailler aux côtés des États qui partagent son point de vue pour convaincre les États-Unis d’adopter une approche constructive dans le cadre du traité et de ne pas renforcer son potentiel nucléaire comme cela a été déclaré par le Président Trump.  Il a pointé finalement la responsabilité des États qui ont aujourd’hui « manqué de courage avec leur décision ».

Explications de vote

Le représentant de l’Argentine a expliqué pourquoi son pays avait voté non.  Soulignant que ce traité avait été signé entre les États-Unis et la Fédération de Russie, il a estimé que c’est à ces deux pays de trouver une solution.  Il a également fait valoir que le projet de résolution avait été présenté hors délai.

Le délégué du Bélarus s’est demandé « comment pouvons-nous accepter un projet de résolution dans un cas et prendre une autre décision dans un cas similaire? »  Il s’est dit très déçu pas le résultat du vote, car ce traité a des répercussions sur la sécurité internationale.  « Ceux qui disent que c’est un traité bilatéral et que seuls deux pays sont concernés ont tort », a-t-il conclu.

Le représentant de la Finlande a rappelé que son vote portait sur la procédure et le Règlement intérieur.  Il s’est donc dit satisfait que les règles aient été respectées.  « Notre position sur le Traité FNI a été clairement exprimée dans notre déclaration nationale », a-t-il rappelé.

Le représentant des États-Unis s’est dit « déçu » de voir la Russie utiliser des « mots inappropriés »; « c’est une façon d’intimider les autres nations et c’est désolant ».  « Au cours des cinq dernières années et demi, nous avons essayé de dialoguer avec la Russie sur les violations du Traité FNI », a-t-il assuré, en constatant que celle-ci affirme ne pas avoir réalisé d’essai de missiles de portée intermédiaire et que, récemment, elle a reconnu des essais mais affirmé qu’ils n’étaient pas effectués en violation du Traité FNI.  Cela fait cinq ans et demi que les États-Unis essaient de régler le problème, a insisté le représentant, qui a espéré que la Russie détruira ses missiles.

Le représentant d’El Salvador a expliqué qu’il ne s’agissait pas de courage ou de faiblesse, mais juste de traiter la proposition faite, sans que cela préjuge de sa position sur le désarmement nucléaire.

La République islamique d’Iran a demandé au représentant des États-Unis de prêcher par l’exemple: il y a quelques jours, il avait utilisé le mot « blague » à propos d’un collègue, a-t-il rappelé.

La Fédération de Russie a réagi aux rires qui ont accueilli sa déclaration: il n’y a rien de drôle et je n’ai pas utilisé de gros mots ».  Les États-Unis évoquent des violations depuis cinq ans, a-t-il relevé. « Oui, la Russie se prépare à la guerre, elle est prête à faire la guerre, mais les États-Unis sont eux prêts à « une guerre » en renforçant leur arsenal », a-t-il argué.

Déclarations sur les armes conventionnelles

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a jugé insoutenable que les pays producteurs et exportateurs d’armes privilégient leurs intérêts économiques et protègent ceux de leurs industries quand on sait que les armes conventionnelles sont responsables de la majorité des morts dans le monde et entretiennent les conflits.  « Le commerce irresponsable génère la prolifération des armes et il est plus qu’urgent d’empêcher qu’elles ne tombent dans les mains de la criminalité transnationale organisée et des terroristes. »  Le représentant a donc appelé à la coopération et à l’engagement de tous les pays pour combattre ce problème et demandé que l’attention soit focalisée sur la protection des victimes, la recherche des responsabilités et la reddition de comptes dans cette prolifération.

Certaines armes ne doivent pas être utilisées, a-t-il ajouté, en citant les armes à sous-munitions, en vertu du principe de discrimination des victimes.  Le délégué a appelé à créer un instrument international qui permette de protéger les civils dans les villes, en invitant à discuter des limites du recours à la force.  Enfin, il a appelé à se montrer attentifs aux progrès technologiques qui peuvent créer des asymétries en renforçant les capacités de certains États.  Il faut également, a-t-il ajouté, discuter d’un instrument juridiquement contraignant pour interdire les systèmes autonomes qui régissent les drones armés.

M. TONG HAI LIM (Singapour) a appuyé les efforts menés pour lutter contre le commerce illicite des armes.  Il a rappelé que son pays avait participé activement à la troisième Conférence d’examen du Programme d’action sur les armes légères et contribuait aux efforts internationaux en la matière.  Singapour a d’ailleurs signé le Traité sur le commerce des armes en septembre 2014.  En outre, le pays soutient les initiatives sur l’usage sans discernement des mines antipersonnel qui ont des conséquences humanitaires néfastes.  Singapour s’est dit également convaincu de l’importance de la transparence en termes de transfert d’armes.  Le délégué a insisté pour que les États respectent leurs obligations quant au commerce illicite des armes et leur usage sans discernement, tout en leur reconnaissant le droit d’acquérir des armes au nom de leur légitime défense. 

Mme NIDHI TIWARI (Inde) a partagé les inquiétudes relatives aux transferts d’armes classiques, y compris les armes légères et de petit calibre (ALPC), vers des terroristes ou d’autres acteurs non-étatiques, « un problème qui de nos jours représente une menace réelle pour la paix et la sécurité internationales ainsi qu’un obstacle à la réalisation des objectifs de développement durable ».  Fermement attachée à la Convention sur certaines armes classiques (CCAC), l’Inde estime qu’il faut la rendre universelle; elle compte à ce jour 125 États parties.  Dans cet esprit, l’Inde soutient le plan d’action pour son universalisation ainsi que son programme de sponsoring auxquels elle a régulièrement contribué financièrement ces dernières années.  À cet égard, la représentante s’est dite préoccupée par la situation financière actuelle de la CCAC.  Elle a lancé un appel à tous les États pour qu’ils s’acquittent de leurs contributions dans les temps, saluant au passage les efforts de son Président pour améliorer la prévisibilité et la viabilité des finances de la Convention.

En décembre 2017, l’Inde a accueilli une conférence internationale sur la CCAC, en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui s’est tenue à Delhi, « la première de ce genre en Asie en 10 ans ».  Son objectif était de mieux comprendre la portée et le contenu de cette convention pour faciliter une adhésion plus forte, a expliqué la représentante.

Elle a également rappelé que sous la présidence de l’Inde, le Groupe d’experts gouvernementaux (GEG) sur le système d’armes létales autonomes a pu adopter son rapport par consensus en 2018.  Pour l’Inde, l’examen de cette question dans le contexte de la CCAC renforce celle-ci et souligne sa capacité à répondre de manière significative aux technologies nouvelles en mutation applicables aux conflits armés du XXème siècle.  Sa délégation encourage la poursuite du travail du Groupe d’experts sur ce système « avec des moyens financiers adéquats et la participation de toutes les parties prenantes ».  Elle soutient également le registre des armes classiques des Nations Unies et son rapport sur les dépenses militaires, a indiqué la représentante, rappelant qu’elle y soumettait régulièrement ses rapports nationaux.  En conclusion, elle a indiqué que l’Inde avait des contrôles nationaux stricts sur les transferts d’armes classiques qui répondent aux plus hautes normes internationales.

Pour M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique), le contrôle des armes classiques est un pilier fondamental de la réalisation du programme de désarmement ainsi que pour la paix et la sécurité internationales.  Ce principe est ancré dans la Constitution du Mozambique, a précisé le représentant.  Preuve de son engagement en faveur du désarmement complet et universel, le Mozambique applique, depuis 2001, le Programme d’action des Nations Unies sur la prévention, la lutte et l’élimination du commerce illicite des ALPC.  Dans ce contexte, le Gouvernement a adopté certains instruments juridiques et pris des mesures de maintien de l’ordre pour contrecarrer les effets de la prolifération des armes à feu, notamment celles aux mains de civils, a expliqué le représentant, citant la tenue de registres, le marquage et le traçage des armes ainsi que le contrôle de leurs exportations et importations, voire même des embargos et des pénalités.  Des campagnes de sensibilisation accompagnent ces mesures gouvernementales en vue de promouvoir le débat public avec toutes les parties prenantes, a précisé le représentant.

Sa délégation est consciente qu’en agissant seule, et uniquement sur le plan national, « nos efforts seront dilués et voués à l’échec », car dans le monde interconnecté actuel, la responsabilité de la lutte contre le commerce illicite des ALPC exige des actions et des partenariats entre États, organisations régionales et internationales ainsi qu’avec d’autres parties prenantes pertinentes.  C’est dans cet esprit que le Mozambique fait désormais partie de l’Organisation de coopération régionale des chefs de police de l’Afrique australe (OCCPA) ainsi que d’INTERPOL.  Le représentant a également rappelé que depuis 2015, le Mozambique est débarrassé des mines antipersonnel et qu’il poursuit activement l’application de la Convention sur les armes à sous-munitions.  Il a également signé le Traité sur le commerce des armes.

Mme LILIANE SÁNCHEZ RODRÍGUEZ (Cuba) s’est scandalisée de l’ampleur des dépenses en armement.  Elle a chiffré à 1,7 milliard de dollars les investissements de cette année, alors que, dans le même temps, a-t-elle souligné, plus de trois milliards de personnes vivent dans la pauvreté et 844 millions n’ont même pas accès à des services de base comme l’eau potable.  Elle a estimé que les États surarmés approfondissent le déséquilibre en produisant et en stockant ces armes. 

Par ailleurs, a-t-elle accusé, certains continuent à vendre ces armes à des acteurs non étatiques, alors que dans le même temps ils en refusent à des pays qui en ont besoin pour leur autodéfense.  « C’est un deux poids, deux mesures », a-t-elle insisté.  À ce titre, elle a expliqué que son pays ne peut pas appuyer des accords visant à interdire des armes dont les technologies peuvent être à double emploi et qui imposeraient des sélections discriminatoires pour des États qui en ont besoin à des fins pacifiques.  Pour elle, le Traité sur le commerce des armes établit des paramètres subjectifs pour accepter ou nier le transfert d’armes aux États Membres.

Pour éliminer le trafic illicite, a-t-elle poursuivi, il faut s’attaquer aux causes profondes qui sont socioéconomiques.  Considérant que le Programme d’action sur les armes légères est le principal texte de référence, Cuba continuera de l’appuyer, de même que les documents finaux de la Conférence d’examen.  Sur la Convention sur l’interdiction des armes classiques, la déléguée a souhaité un protocole qui interdise tout système d’armes létales autonomes avant que celles-ci soient produites à grande échelle.  À ses yeux, ces armes sont incompatibles avec le droit international humanitaire.

M. VICTOR MORARU (République de Moldova) a estimé que les États Membres ont l’obligation de faire plus pour réduire la disponibilité non réglementée des armes conventionnelles et des ALPC, en zone de conflits ou de conflits potentiels, en assurant un strict contrôle et la destruction des armes en surplus.  Selon le résultat de la troisième Conférence d’examen du Programme d’action des Nations Unies sur les ALPC, la production illicite, et le transfert illégal des armes conventionnelles dans les « zones grises », où les gouvernements n’exercent pas de contrôle complet sur une partie du territoire, est une source de préoccupation pour de nombreux gouvernements, « y compris le mien », a-t-il indiqué.

« Ce phénomène se retrouve dans la partie est de la République de Moldova, qui est partiellement contrôlée par une entité militarisée non constitutionnelle », a-t-il déclaré.  II a affirmé que de grandes quantités d’armes conventionnelles, appartenant à un Groupe opérationnel des forces russes, stationnent là, contrairement au droit.  Bien que situées sur le territoire de la Moldova, les armes conventionnelles russes ne sont pas sous « sa juridiction ou son contrôle ».  En raison d’un manque complet de transparence de la part de la Russie, ni le Gouvernement moldave, ni la Mission de l’OSCE, qui a une mission en Moldova et un mandat adéquat, ne peuvent vérifier les stocks d’armes, s’est plaint le délégué.  Cette situation, a-t-il expliqué, représente le principal obstacle qui empêche le Gouvernement moldave d’appliquer sur son territoire les dispositions des instruments multilatéraux, auxquels la Moldova est partie.  Il a donc dit espérer le retrait des forces militaires russes et de leur armement du territoire de Moldova, en accord avec le Document d’Istanbul de 1999.

Mme SANDRA DE JONGH (Pays-Bas) a salué les efforts du Secrétaire général des Nations Unies pour lier les questions de désarmement et développement durable.  Elle a relevé que le désarmement est d’abord un programme humanitaire face à l’augmentation du nombre de victimes et les menaces que font peser les armes explosives, notamment quand elles tombent entre les mains des terroristes.  Elle a également cité le problème de l’usage de mines antipersonnel en zone urbaine et de l’utilisation des armes à sous munitions.  L’utilisation des armes classiques est réglementée par le droit humanitaire, a rappelé la déléguée, en appelant à respecter ce droit essentiel.  De même pour les systèmes d’armes létales autonomes qui sont porteurs de risques, des risques qu’il faut mieux comprendre et mieux évaluer, selon elle.  Les avancées technologiques rapides et les drones exigent une meilleure compréhension des risques à venir, a-t-elle insisté.

Déclarations sur les autres mesures de désarmement et de sécurité internationale

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie), parlant au nom du Mouvement des pays non alignés, a noté les opportunités qu’offrent les technologies de l’information et des communications (TIC) pour les États, notamment les moins développés, tout en soulignant leur potentiel de mettre en danger la paix et la sécurité.  À ce titre, a-t-elle dit, il faut absolument s’assurer que l’utilisation de ces technologies se fait dans le plein respect du droit.  Elle a rappelé le rôle central des Nations Unies dans les avancées des TIC et le besoin de poursuivre la discussion pour s’assurer de la transparence et de la participation inclusive de tous les États, incluant la possibilité de créer un groupe de travail à l’Assemblée générale.

La représentante a ensuite insisté sur l’importance du respect des normes environnementales dans la mise en œuvre des accords sur la limitation des armes.  Tous les États, par le biais de leur action, devraient contribuer au respect de ces normes, a-t-elle insisté.  Elle a assuré que le Mouvement des pays non alignés allait proposer des projets de résolution en ce sens.

M. ANDREI KRUTSKIKH (Fédération de Russie) a estimé que la situation empirait chaque jour, car un certain nombre de pays renforcent leur « cyberpotentiel », ce qui devrait leur permettre de réaliser la première attaque cybernétique.  Or, les membres de la communauté internationale, se rendant compte qu’ils sont vulnérables, dépensent beaucoup dans leur défense au lieu d’investir dans le développement, a-t-il remarqué.  Face à ces menaces, on a vu, après la réunion du groupe sur la sécurité de l’information, en 2017, que l’ONU ne dispose pas de mécanisme pour traiter de cette question, alors que l’Organisation devrait jouer un rôle de chef de file dans le domaine.

À l’heure actuelle, l’équilibre dans le traitement de cette question est décidé par les plus forts, a relevé le représentant.  Il a estimé qu’il faudrait une implication directe de tous les États intéressés, quel que soit leur niveau de développement technologique.  À cette fin, la Russie a déposé un projet de résolution qui plaide pour un monde plus juste dans la sphère numérique et appelle à la création d’un groupe de travail de l’ONU à composition non limitée pour examiner trois sujets: le comportement des États; l’applicabilité du droit international; la coopération et le renforcement des capacités des pays en développement.  Ce groupe garantirait la participation de tous les États intéressés, a précisé le délégué.  Il a rappelé que sans règle, il est impossible d’assurer l’ordre dans la sphère cybernétique.  Aussi faut-il faire tout ce qui est possible pour réduire les menaces, tout en respectant le principe de non-ingérence, et pour prévenir l’élargissement du fossé numérique.  Enfin, le représentant russe a jugé essentiel de dénoncer les États qui se livrent à ces activités. 

M. BURHAN GAFOOR (Singapour), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a assuré que les pays de l’ASEAN partageaient une vision commune d’un cyberespace pacifique, surtout au vu des avancées rapides dans le domaine des sciences et des technologies.  Les menaces évoluent dans le cadre d’une économie mondialisée, a-t-il affirmé, mais aucun État n’a à lui seul les solutions pour y faire face.  Selon lui, il faut donc passer par des coopérations régionales et internationales pour répondre à ces menaces.  Il a assuré que les responsables de l’ASEAN ont réaffirmé leur volonté de coopérer pour relever ces défis.  Dans le cadre du trente-deuxième Sommet de l’ASEAN, ils ont ainsi convenu du développement d’un mécanisme de cybersécurité.  Il a expliqué que les discussions avaient été guidées par le rapport d’experts gouvernementaux sur les TIC remis aux Nations Unies en 2015.

À cet égard, le délégué a rappelé le rôle clef joué par l’ONU sur ces questions.  Appuyant l’agenda présenté par le Secrétaire Général, il s’est dit ravi de voir que le plan d’action pour le partenariat entre l’ASEAN et l’ONU mettait également en lumière cette nécessaire coopération en matière de cybersécurité.  Baser le cyberespace sur des règles économiques est une condition du développement économique, a-t-il insisté.

D’un point de vue national, il a rappelé que la cybersécurité a été un point clef de la présidence singapourienne de l’ASEAN.  Selon lui, il est important pour tous les États d’être équipés des capacités suffisantes pour sécuriser leurs infrastructures.  Pour renforcer le développement des capacités stratégiques et de recherches de l’ASEAN, Singapour établira, en 2019, le centre d’excellence de cybersécurité de l’ASEAN.  Singapour, a-t-il ajouté, a aussi travaillé en étroite collaboration avec la Conférence du désarmement.  « Nous avons participé à des consultations officielles et prenons note des résolution présentées. »  En revanche il s’est dit déçu qu’il n’y ait pas eu de convergence sur cette question unique et essentielle de la cybersécurité.  « S’il n’y a pas de consensus sur cette question, comment allons-nous faire sur des questions encore plus complexes? »

M. WALTON ALFONSO WEBSON (Antigua-et-Barbuda) au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a souligné que la résolution du Conseil de sécurité 1325 (2000) et les résolutions de suivi ont réaffirmé importance du rôle des femmes dans la prévention et le règlement des conflits, négociations et maintien de la paix de la paix et dans l’assistance humanitaire et la reconstruction; ces résolutions soulignent l’importance d’une participation équitable des femmes aux efforts de maintien de la paix de la paix et de sécurité.  La CARICOM va donc présenter un projet de résolution sur cette perspective du genre dans le désarmement. 

La CARICOM, a poursuivi le représentant, soutient par ailleurs le Programme d’action sur les armes légères des Nations Unies, premier instrument international sur le contrôle de ces armes et sur le rôle des femmes dans ce cadre.  Si la CARICOM n’est pas touchée par les conflits armés, elle l’est par la violence liée aux ALPC qui causent environ 70% des homicides dans la région.  Cela détourne des ressources importantes des objectifs de développement dans une région déjà frappée par les catastrophes naturelles, a fait remarquer le délégué.  Selon l’OMS, les communautés qui subissent la violence sont également exposées à la malnutrition et aux maladies transmissibles. 

M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte), s’exprimant au nom du Groupe des États arabes, a appelé tous les États à renouveler leur engagement dans la coopération multilatérale dans le domaine du désarmement.  Le Groupe est préoccupé par l’augmentation des ressources militaires; il estime que cet argent pourrait être utilisé pour résoudre la paix dans le monde.  L’augmentation des dépenses militaires a des répercussions sur les objectifs de développement durable, a-t-il ajouté.  Comme les armes de destruction massive et la modernisation des armes nucléaires sont une menace à la sécurité mondiale, il a recommandé que les plateformes mondiales de désarmement tiennent compte des normes environnementales.

La délégation s’est, par ailleurs, dite très préoccupée par l’usage des TIC à des fins de destruction. Selon le délégué, les Nations Unies doivent continuer à établir et renforcer les règles et les normes en la matière.  Enfin, le Groupe a appelé à des progrès concrets pour faire face à l’usage accru d’armes létales autonomes.  Il a considéré que ces armes entraînent un problème de responsabilité humaine quant à l’usage légitime de ces armes.

M JOHN DAVISON (Canada), qui parlait également au nom de l’Australie, Chili, Estonie, Japon, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, République de Corée et Royaume-Uni, a dénoncé des actes malveillants dans le cyberespace dus à des États qui, directement ou par le biais d’acteurs non étatiques, s’adonnent à des activités ciblant des infrastructures, des systèmes essentiels et des processus démocratiques et sapent ce faisant l’ordre international.  Ces actes mettent en péril les bénéfices du cyberespace; les États qui les commettent le font au mépris des normes car le cyberespace n’est pas sans régime juridique ni gouvernance.  Le droit international s’y applique comme ailleurs et les États ont des devoirs en ligne comme hors ligne.  C’est un processus qui a été validé par l’ONU en 2015, dans le contexte de la sécurité internationale, a ajouté le représentant.

Des mesures de renforcement de la confiance ont été élaborées par des organisations régionales et il convient de faire front sur ce qui a été accompli, a poursuivi le délégué, qui a appelé à poursuivre ces efforts au sein des Nations Unies et ailleurs, notamment au sein des Groupes d’experts gouvernementaux, pour favoriser le consensus.  « Il est essentiel que le processus GEG parvienne à la transparence et la confiance pour aboutir à un document dans un délai raisonnable, en mettant l’accent sur les questions les plus épineuses. »  Chacun, a ajouté le délégué, doit jouer son rôle pour lutter contre les menaces à la paix et la sécurité dans le cyberespace.  Il a estimé que la création par consensus d’un Groupes d’experts gouvernementaux sur la cybersécurité en Première Commission donnerait du temps aux États et aux partenaires et serait une première contribution importante pour contrer ces menaces.

Mme NARCISA-DACIANA VlĂDULESCU, déléguée de l'Union européenne, a dénoncé les menaces malveillantes sur Internet, à commencer par la tentative de la Fédération de Russie de saper l’intégrité de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) par une cyberopération agressive.  Réaffirmant son attachement au système du droit international, il a appelé au renforcement de la cybersécurité pour défendre l’intégrité des institutions, y compris par le biais des Nations Unies.

L’UE a fait la promotion d’un cadre stratégique pour la promotion de la sécurité dans le cyberespace basé sur le droit international existant.  Reconnaissant l’importance des Nations Unies dans l’établissement des normes de comportement sur Internet, le délégué a rappelé que les différents groupes d’experts gouvernementaux mandatés sur cette question avaient permis d’obtenir des consensus sur des mesures contribuant à la stabilité et à la sécurité du cyberespace: des règles de comportement responsable des États, le renforcement de la confiance, le respect du droit international…

L’Union européenne a également rappelé que les rapports du Groupe d’experts gouvernementaux de 2013 et 2015 contenaient des recommandations essentielles à mettre en œuvre. Il a cité 11 principes volontaires et non juridiquement contraignants dans lesquels le Groupe souligne que les États doivent respecter des comportements responsables et les droits fondamentaux.  À cet égard, le délégué européen a rappelé que les principes internationaux s’appliquent à l’usage des TIC par les États.  Pour bâtir la confiance et renforcer la coopération, la délégation a encore reconnu le besoin de renforcer les capacités des services d’enquêtes en cas de cybercrimes. Reconnaissant la nature complexe et interconnectée du réseau, le délégué a appelé tous les membres des gouvernements, de la société civile et du secteur privé à appuyer un cyberespace libre, ouvert et pacifique.

Saluant toutes les réussites des anciens Groupes d’experts gouvernementaux, il a souhaité qu’un nouveau groupe soit convoqué en 2019. Pour garantir son efficacité et son dynamisme, il a d’ailleurs jugé que son mandat devait être ciblé et orienté. Rappelant que tous les États membres de l’Union européenne se porteront coauteurs du projet de résolution L.37 qui rencontre d’ordinaire le consensus, il a regretté que la Russie, sponsor traditionnel de cette résolution, ait choisi, cette année, de suivre une trajectoire différente. Le délégué estime que son attitude mine les recommandations consensuelles des précédents Groupe d’experts gouvernementaux.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale appelle à l’élaboration d’« espace 2030 », projet de coopération visant à faire des activités spatiales un moteur du développement durable

Soixante-treizième session,
26e séance plénière – matin
AG/12083

L’Assemblée générale appelle à l’élaboration d’« espace 2030 », projet de coopération visant à faire des activités spatiales un moteur du développement durable

L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui sans vote, une résolution sur le « Cinquantenaire de la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) » dans laquelle elle invite le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique à continuer d’élaborer « Espace 2030 », projet de coopération internationale visant à faire des activités et applications spatiales, un des moteurs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Les manifestations organisées, pendant trois ans, autour d’« UNISPACE+50 », ont été l’occasion de débattre des nouvelles orientations de la gouvernance mondiale des activités dans l’espace et du renforcement des capacités de tous les États pour les hisser à la hauteur des nouvelles réalités, des défis et des opportunités offertes par le champ spatial, a estimé la Présidente du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, Mme Rosa María Ramírez de Arellano y Haro, du Mexique, qui présentait la résolution. 

Dans ce texte, l’Assemblée générale note avec satisfaction qu’à l’issue des préparatifs d’UNISPACE+50 et du débat de haut niveau organisé à cette occasion sont parus des documents décrivant un projet global, inclusif et stratégique de renforcement de la coopération internationale, dans lesquels l’espace est considéré comme un moteur essentiel de la réalisation des objectifs de développement durable au profit de tous les pays.  Sur la base des résultats de ces préparatifs, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique doit, selon l’Assemblée générale, continuer d’élaborer le programme « Espace 2030 » et son plan de mise en œuvre.  La réalisation du programme, souligne l’Assemblée, nécessitera un partenariat mondial et une coopération renforcée entre les États Membres, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, l’industrie et les entités du secteur privé.

Les États-Unis se sont dissociés des références au Programme de développement durable à l’horizon 2030, au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015–2030) et à l’Accord de Paris sur les changements climatiques.  Le Programme 2030, ont-ils martelé, n’a pas de caractère contraignant et n’implique ni nouvel engagement financier ni nouvelle obligation commerciale.  Les États-Unis ont réitéré leurs réserves au Cadre de Sendai et rappelé leur intention de se retirer de l’Accord de Paris, à moins qu’il ne soit amendé.

Les États-Unis ont expliqué qu’alors qu’ils avaient lancé leur programme spatial au pic de la guerre froide et dans la crainte d’une « course dans l’espace » entre superpuissances, ils le voient désormais comme un instrument de développement humain et de coopération internationale.  Ils se sont tout particulièrement félicités de ce qu’« UNISPACE+50 » ait reconnu le rôle croissant du secteur privé dans l’exploration et les applications spatiales, et ont dit attendre du processus « Espace 2030 », un document « visionnaire » qui tiendrait compte de la trajectoire des États vers la Lune, Mars et les autres organes célestes et de la manière dont ils y incorporent des arrangements commerciaux nouveaux et novateurs.  L’annonce faite par les États-Unis de créer une nouvelle force militaire dans l’espace, a commenté l’Iran, suscite des inquiétudes car cette politique rend encore plus probable une course aux armements voire un conflit dans l’espace. 

Dans le préambule de sa résolution, l’Assemblée générale se dit d’ailleurs « vivement préoccupée » par la possibilité d’une course aux armements dans l’espace et considère que tous les États Membres, notamment ceux qui sont particulièrement avancés dans le domaine spatial, doivent s’employer activement à empêcher cette course en vue de promouvoir et de renforcer la coopération internationale.  L’Iran a fermement appuyé la négociation d’un instrument juridiquement contraignant pour prévenir les menaces.  « UNISPACE+50 », a espéré la Fédération de Russie, va donner l’occasion d’approfondir le dialogue.  Elle a rappelé qu’elle a lancé une initiative similaire, en septembre dernier, avec la réunion sur le droit spatial.

L’Assemblée générale reprendra ses travaux le lundi 29 octobre à partir de 10 heures pour examiner le rapport de la Cour pénale internationale (CPI).

L’ESPACE COMME MOTEUR DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Déclaration liminaire

Mme ROSA MARĺA RAMĺREZ DE ARELLANO Y HARO (Mexique), Présidente du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, a présenté le projet de résolution intitulé « Cinquantenaire de la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique: l’espace comme moteur de développement durable » (A/73/L.6).  Elle a rappelé qu’en juin dernier, son Comité a célébré le cinquantenaire, entre autres, dans le cadre d’un segment de haut niveau qui a connu la participation de plus de 93 États, plusieurs entités de l’ONU, des organisations intergouvernementales et des ONG gouvernementales.  La cérémonie d’anniversaire « UNISPACE+50 » a été l’occasion de débats sur les nouvelles orientations de la gouvernance mondiale des activités dans l’espace et sur le renforcement des capacités de tous les États, de la Première Commission de l’Assemblée générale et du Bureau des affaires spatiales des Nations Unies pour les hisser à la hauteur des nouvelles réalités, des défis et des opportunités offertes par le champ spatial.  Les instruments internationaux sur l’espace sont fondamentaux pour atteindre les 17 objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  La communauté spatiale doit y travailler collectivement, dans l’intérêt de tous, en particulier des pays en développement. 

Le projet de résolution présenté aujourd’hui, a expliqué la Présidente, a été approuvé à l’issue d’« UNISPACE+50 ».  Elle a encouragé l’adoption de l’agenda « Espace 2030 » qui sera crucial pour la réalisation du Programme de développement durable.  À travers les piliers économie, société et accessibilité spatiales, sans oublier la diplomatie spatiale, nous nous embarquons, s’est réjouie la Présidente, dans le processus du Comité, une plateforme unique de discussions sur les questions liées à toutes les activités spatiales, pour adopter un agenda global de sensibilisation à l’importance de l’espace, relever les défis de l’humanité et faire avancer les sociétés. 

Déclarations

M. ENRIQUE JOSÉ MARĺA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a dit que son pays milite contre une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Il a demandé à la communauté internationale de poursuivre les efforts en faveur d’un régime juridique international régissant les activités spatiales.  Il a rappelé que son pays vient de présenter sa candidature au Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et plaide pour une gestion de l’espace qui contribue réellement à la réalisation des objectifs de développement durable.  Le Paraguay souhaite en outre, a poursuivi le représentant, que tous les pays puissent participer aux activités spatiales, quel que soit leur niveau de développement technologique.  Il faut donc soutenir les initiatives des pays en développement, par une coopération internationale revigorée.  Le Paraguay, s’est enorgueilli le représentant, a créé son Agence spatiale, l’année dernière, dans laquelle travaillent des acteurs du secteur public et du secteur privé qui collaborent avec les agences de pays comme l’Argentine et le Mexique.  Le représentant a conclu en plaidant pour qu’un niveau de ressources adéquat soit garanti au Bureau des affaires spatiales des Nations Unies. 

Profondément convaincus de l’importance de l’espace pour la réalisation des objectifs de développement durable, Mme AHOOD ABDULLA AL ZAABI (Émirats arabes unis) a souligné que son pays a dûment participé à « UNISPACE+50 », comme en témoignent les trois réunions préparatoires régionales qu’il a organisées en 2016 et 2017 sur le thème « L’espace comme catalyseur d’un développement socioéconomique durable ».  Ces réunions ont abouti à la Déclaration de Doubaï qui comprend une série de recommandations.  Comme les Émirats arabes unies s’efforcent de jeter les bases de leur secteur spatial, la représentante a décrit les activités de « KALIFA SAT », un projet d’exploration de l’espace extra-atmosphérique.  Elle n’a pas oublié de mentionner que la jeune émirienne, Alyia Mansouri, a travaillé sur le Projet « Falcon 9 » à la NASA.  Les Émirats seront aussi les premiers du monde arabo-musulman à travailler au Projet spatial « Amal » - espoir -. 

Mme OLGA MOZOLINA (Fédération de Russie) a parlé des divergences sur l’amélioration de la gouvernance mondiale des activités spatiales.  Pour éviter les contradictions, les réglementations nationales doivent s’adapter aux règles et normes internationales.  La Fédération de Russie a toujours soutenu les prérogatives du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique s’agissant de la gouvernance et de la sécurité spatiales.  « UNISPACE+50 » va donner l’occasion d’approfondir le dialogue, s’est-elle félicitée, tout en rappelant que son pays a lancé une initiative similaire, en septembre dernier, avec la réunion sur le droit spatial.  Pour lier les activités spatiales au Programme 2030, la Fédération de Russie a même mis en place une politique spécifique.  Le pays qui est un grand lanceur d’engins spatiaux, pour lui et pour des pays tiers, estime crucial que la communauté internationale améliore le système d’immatriculation de ces engins.

M. KENNETH HODGKINS (États-Unis) a souligné que son pays, qui avait lancé son programme spatial au pic de la Guerre froide et dans la crainte d’une « course dans l’espace » entre superpuissances, voit désormais ses activités spatiales comme un instrument de développement humain et de coopération internationale.  Le représentant s’est réjoui de ce que ces six dernières décennies, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, dont le nombre des membres ne cesse d’augmenter, se soit affirmé comme le premier forum des Nations Unies pour l’exploration et l’utilisation pacifiques de l’espace.  Aujourd’hui « UNISPACE+50 » a reconnu le rôle croissant du secteur privé dans l’exploration et les applications spatiales, a souligné le représentant qui s’est réjoui, en particulier qu’« UNISPACE+50 » ait lancé le processus visant à développer « Espace 2030 », un agenda de deux ans qui orienterait les travaux du Comité 2030.  Le représentant s’est félicité des progrès enregistrés à la première réunion du Groupe de travail sur « Espace 2030 », il y a une dizaine de jours à Vienne.  Il a avoué que son pays espère un document « visionnaire » lequel jetterait les bases du travail futur du Comité et de ses Sous-Comités, en tenant compte de la direction que les États prennent vers la Lune, Mars et les autres organes célestes et de la manière dont ils y incorporent des arrangements commerciaux nouveaux et novateurs.

M. MOHAMMAD HOSSEIN GHANIEI (République islamique d’Iran) a relevé que la science et la technologie spatiales sont si indispensables à notre vie quotidienne que nous sommes autant dépendants d’elles que nous le sommes de l’air, des mers et des océans.  C’est pour cette raison que l’espace extra-atmosphérique est considéré comme l’héritage commun de l’humanité et une province commune.  Il doit donc être exploré et utilisé pour le bien des générations présentes et futures.  Cette exploration, a-t-il précisé, doit être équitable et ouverte à tous les pays.  « C’est un droit inaliénable de tous les États », a-t-il martelé, ajoutant que cela n’a rien à voir avec le niveau de développement économique et scientifique.  En tant que membre fondateur du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, l’Iran, a dit le représentant, souligne que le respect des principes régissant l’espace extra-atmosphérique est la seule approche pour y assurer une utilisation durable et équitable. 

Il s’est ainsi opposé aux revendications de souveraineté, aux discriminations dans la coopération et aux ingérences dans les activités des autres États.  Il a au contraire plaidé un transfert non discriminatoire de la science, du savoir-faire et de la technologie et rejetant d’emblée toute restriction aux activités spatiales des pays en développement.  Le représentant a estimé que l’exploitation de l’orbite géostationnaire doit être rationalisée et accessible équitablement et sans aucune discrimination.  Il a donc dénoncé le régime du « premier arrivé, premier servi » qui fait que les espaces orbitaux disponibles sont occupés par les pays développés, laissant peu de chance aux pays en développement de positionner leurs satellites et les privant de services utiles.  « C’est une injustice qui doit prendre fin », a-t-il assené.

Le représentant a aussi souligné que l’un des principes cardinaux du droit international est que l’espace extra-atmosphérique doit être utilisé à des fins « exclusivement pacifiques », et toute tentative de le militariser ou de l’armer mettrait sérieusement à mal ce principe.  L’annonce faite par les États-Unis de créer une nouvelle force militaire dans l’espace suscite donc des inquiétudes et pour l’Iran, la politique américaine rend encore plus probable la course aux armements voire un conflit dans l’espace.  Le représentant a fermement appuyé la négociation d’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention de la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.

Mme KIMBERLY CHAN (Canada) a souligné que le processus « UNISPACE+50 » n’est pas encore terminé puisque l’on attend encore « Espace 2030 ».  Mon pays, a-t-elle promis, continuera de promouvoir l’utilisation pacifique de l’espace pour que tout le monde puisse tirer de la science et des technologies spatiales les bénéfices socioéconomiques.  Le Canada compte sur des résultats concrets et quantifiables s’agissant des objectifs de développement durable.  Il sait qu’il faudra des donnés et des informations collectées à partir des équipements spatiaux car les données satellitaires peuvent par exemple donner lieu à des statistiques plus fiables.  Pour de nombreux objectifs de développement durable, a prévenu la représentante, la portée et la fréquence requises pour les données ne seraient tout simplement pas possibles, techniquement ou financièrement, sans les observations par satellite.  Mais intégrer les informations géospatiales dans la masse des autres données reste un des plus grands problèmes à résoudre, même pour le Canada qui travaille avec ses partenaires nationaux et internationaux, a reconnu le représentant.

Ces prochains mois, le pays compte lancer la troisième génération du programme RADARSAT qui jouera un rôle important dans le suivi des progrès enregistrés dans les objectifs de développement durable: surveiller les changements dans les terres du nord et les zones côtières, et voir comment ces régions répondent aux changements climatiques et utilisent leurs ressources accrues pour le développement.  Cet été, le Canada a aussi adopté la feuille de route de Charlevoix sur la santé des océans, prenant l’engagement de travailler avec les partenaires du G7 pour déployer des technologies d’observation et assurer une meilleure gestion intégrée des zones côtières.  Il est important de continuer à partager les expertises, a souligné le représentant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: sixième demande consécutive de subvention budgétaire des tribunaux cambodgiens ou quand l’exception devient la règle

Soixante-treizième session,
9e séance – matin
AG/AB/4297

Cinquième Commission: sixième demande consécutive de subvention budgétaire des tribunaux cambodgiens ou quand l’exception devient la règle

Une pratique qui « n’a plus rien d’exceptionnel », s’impatiente le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) dans son rapport*.  Pour la sixième année consécutive, la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires était saisie, ce matin, d’une demande « exceptionnelle » de 9,7 millions de dollars pour financer, en 2019, la composante internationale des Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens. 

Chargées du procès des Khmers rouges, les Chambres extraordinaires comprennent deux composantes, nationale et internationale, financées séparément.  Selon les termes de l’accord conclu entre l’ONU et le Cambodge en 2005, l’ONU se charge de mobiliser des contributions volontaires pour les dépenses de fonctionnement de la composante internationale, tandis que le Gouvernement cambodgien assume le financement de la composante nationale, y compris les traitements du personnel recruté sur le plan national et les dépenses opérationnelles.  Dans les faits, au cours des premières années de fonctionnement, la composante nationale était principalement financée par des contributions volontaires, à hauteur de 80%.  L’apport du Cambodge a toutefois considérablement augmenté au fil des ans, jusqu’à couvrir, depuis 2015, plus de 60% des dépenses. 

Parallèlement, les contributions volontaires des États à la composante internationale n’ont cessé de diminuer, au point de contraindre le Secrétaire général, chaque année depuis 2013, à demander l’autorisation « exceptionnelle » de ponctionner le budget ordinaire de l’ONU.  L’an dernier, l’Assemblée générale avait permis à M. António Guterres de débloquer une nouvelle fois 8 millions de dollars pour les tribunaux cambodgiens.  Cette année, le Secrétaire général demande 9,7 millions de dollars.  Soulignant que « la pratique n’a plus rien d’exceptionnel », le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) recommande de réduire de 2,2 millions le montant demandé et prie M. Guterres de « s’employer activement » à obtenir des contributions volontaires supplémentaires.

Eu égard aux « travaux importants et progrès significatifs » des Chambres extraordinaires, le Cambodge a appuyé, ce matin, la demande de subvention du Secrétaire général.  S’agissant de la composante nationale, Phnom Penh a affirmé son intention de maintenir le niveau actuel des contributions directes, à savoir le financement intégral des coûts opérationnels et le versement des six premiers mois de salaire du personnel recruté sur le plan local.  Le pays a dit compter sur les Nations Unies et les principaux bailleurs de fonds, dont l’Union européenne, pour obtenir le financement restant de la composante nationale en 2019. 

Le financement « adéquat et durable » des Chambres extraordinaires doit demeurer une priorité, ont affirmé le Groupe des 77 et la Chine, saluant les efforts du Cambodge pour couvrir la majorité des dépenses de la composante nationale ces quatre dernières années.  Préoccupé par les « défis financiers persistants » auxquels font face les Chambres extraordinaires, le Groupe a appuyé la demande de subvention du Secrétaire général, avant d’encourager ce dernier à obtenir des contributions volontaires supplémentaires pour combler le déficit des composantes nationales et internationales.  C’est précisément pour inciter les États Membres à augmenter leurs contributions, a indiqué l’Iraq, que Bagdad a annoncé, le 22 octobre dernier, le versement d’une contribution volontaire aux deux composantes des Chambres extraordinaires. 

La Cinquième Commission tiendra sa prochaine réunion jeudi 1er novembre, à partir de 10 heures, pour examiner le projet de rénovation de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, à Santiago.

* A/73/448

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: la composition du comité constitutionnel, objet d’une mésentente au Conseil de sécurité

8383e séance – matin  
CS/13556

Syrie: la composition du comité constitutionnel, objet d’une mésentente au Conseil de sécurité

À la demande de la France, des États-Unis et du Royaume-Uni, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a, ce matin, informé le Conseil de sécurité des résultats de ses derniers efforts pour faciliter la formation d’un comité constitutionnel dans ce pays, source d’un désaccord avec Damas.

S’exprimant par visioconférence depuis Beyrouth, le haut fonctionnaire a expliqué que, le 24 octobre, le Vice-Premier Ministre syrien et Ministre des affaires étrangères, M. Walid Al-Moualem, lui avait réitéré la position de son gouvernement, qui demande le retrait du « dernier tiers » des candidats proposés pour siéger dans ce comité, celui de la société civile, les deux autres étant formés par le Gouvernement et l’opposition. 

M. de Mistura lui a expliqué que cette option ne serait possible « qu’à condition d’un accord préalable sur une liste de substitution », ce à quoi le Ministre a répondu qu’il reviendrait vers lui à ce sujet à l’issue des prochaines consultations avec les garants du processus d’Astana –Fédération de Russie, République islamique d’Iran et Turquie.

L’Envoyé spécial a assuré le Conseil qu’il avait scrupuleusement suivi les critères fixés pour la sélection des candidats de la société civile.  Mais, contrairement aux termes mêmes de la déclaration conjointe de Sotchi, Damas n’accepte pas que l’ONU joue un rôle dans la composition du comité, s’est défendu M. de Mistura.  « Nous voilà placés face à un défi de taille, que j’ai l’intention de tout mettre en œuvre pour relever », a-t-il assuré.

« L’Envoyé spécial n’est pas un ordonnateur, mais un facilitateur: il a pour mandat de faciliter le processus politique en Syrie », a rétorqué le représentant syrien, qui a cependant assuré les membres du Conseil que son pays reste disposé à coopérer avec le haut fonctionnaire.  « Facilitation, et non tutelle », a-t-il insisté, en rejetant les « échéances artificielles » que l’on souhaiterait, selon lui, imposer pour la formation de ce comité.

Les États-Unis ont en effet aujourd’hui rappelé que le « Small Group », dont ils font partie aux côtés de l’Allemagne, la Jordanie, l’Arabie saoudite, le Royaume-Uni et la France, est convaincu que le comité constitutionnel doit être convoqué « avant la fin du mois de novembre », date à laquelle M. de Mistura quittera ses fonctions.  « Vous avez notre plein soutien pour convier sans tarder les participants à une première réunion en novembre.  Nous vous invitons fortement à aller de l’avant », l’a encouragé la France.

Tandis le Royaume-Uni jugeait « incroyable d’avoir à expliquer une fois de plus pourquoi l’ONU doit jouer un rôle en Syrie », le représentant français a dénoncé « l’obstruction » supposée du « régime syrien ».  « Du tableau que vous venez de présenter, il ressort –ce qui était, hélas, prévisible– que le régime ne s’estime pas lié par un engagement, alors même qu’il […] rejette la liste du troisième tiers du comité constitutionnel proposé par l’Envoyé spécial, n’hésitant pas à piétiner ce faisant les règles établies à Sotchi ».

« Notre profonde conviction est qu’il existe aujourd’hui, pour la première fois peut-être depuis sept ans, une étroite fenêtre d’opportunité » pour « emprunter le chemin exigeant d’une dynamique politique pour un règlement du conflit ».  La création du comité constitutionnel peut et doit constituer, selon le délégué français, un « point d’inflexion », et le Sommet d’Istanbul qui réunira samedi la France, l’Allemagne, la Fédération de Russie et la Turquie, doit permettre d’avancer en ce sens.

Les Pays-Bas ont brandi la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité pour justifier la prérogative de l’Envoyé spécial dans la formation de ce comité. Mais la Fédération de Russie a balayé les « leçons de morale » d’un « petit nombre de pays », estimant qu’il n’est pas possible d’imposer un comité constitutionnel qui irait à l’encontre des attentes des parties syriennes.

Le délégué russe a fait état d’un « retour à la normale » pour beaucoup de Syriens, dans de nombreuses régions qui seraient désormais « sécurisées », assurant que les garants du processus d’Astana font de leur mieux pour préserver la situation sur le terrain.  Le 17 septembre dernier à Sotchi, un accord entre la Russie et la Turquie avait été conclu sur l’établissement d’une zone démilitarisée à Edleb, bastion, selon le délégué syrien, de « 30 000 terroristes ».

« Ce n’est pas notre intention de reprendre Edleb en violation de l’accord », a assuré ce dernier, mais nous « le ferons le moment venu » si les efforts diplomatiques en cours ont échoué à faire revenir cette province « sous notre souveraineté », a-t-il cependant précisé.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

S’adressant au Conseil de sécurité par visioconférence depuis Beyrouth, M. STAFFAN DE MISTURA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a déclaré qu’il s’était rendu à Damas le 24 octobre, où il s’est entretenu avec le Ministre des affaires étrangères, M. Walid Al-Moualem, de la question de la formation du comité constitutionnel.  À cette occasion, le Chef de la diplomatie syrienne a réitéré l’importance pour son gouvernement que l’on s’abstienne de toute ingérence dans les affaires internes de son pays, une position qui s’étend à la rédaction de la constitution.  Or, contrairement au mémorandum d’accord signé avec l’ONU et Damas et aux termes mêmes de la déclaration de Sotchi, le Ministre n’accepte pas que l’Organisation joue un rôle dans la composition de ce comité.

L’Envoyé spécial a assuré avoir scrupuleusement suivi les critères fixés pour la sélection des candidats de la société civile, l’un des trois groupes appelé à siéger au sein de ce comité, aux côtés des délégations du Gouvernement et de l’opposition.  Le Ministre Al-Moualem, a précisé M. de Mistura, a proposé que l’on retire le troisième tiers de cette liste, ce à quoi ce dernier a répondu que ce serait possible « uniquement à condition qu’il y ait au préalable un accord sur une liste de substitution ».  Le Ministre lui a dit qu’il reviendrait vers lui à ce sujet, ajoutant qu’il serait souhaitable à ce stade d’attendre les résultats des prochaines consultations avec les garants d’Astana, qui auront lieu demain, 27 octobre. 

Le Gouvernement a très clairement exposé sa position et « nous voilà placés face à un défi de taille, que j’ai l’intention de tout mettre en œuvre pour relever », a assuré l’Envoyé spécial.  « L’ONU n’est pas opposée à des suggestions constructives et modérées sur la formation d’une troisième liste.  Mais ne laissons pas passer la fenêtre de tir qui se présente à nous en novembre. »  Je ferai tout mon possible « pendant le temps qu’il me reste avant de quitter mes fonctions » pour convoquer un comité constitutionnel piloté par les Syriens sous les auspices des Nations Unies, dans le respect de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, a insisté en conclusion l’Envoyé spécial.

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a déclaré que les membres du « Small Group », à savoir les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, l’Égypte, l’Allemagne, la Jordanie, l’Arabie saoudite, ainsi que d’autres partenaires sont tous du même avis: le comité constitutionnel doit être convoqué avant la fin du mois de novembre.  « En dépit de ce qu’a entendu M. de Mistura à Damas, les Nations Unies ont le contrôle sur la composition dudit comité », a insisté le représentant, ajoutant que « faire perdre du temps supplémentaire est irresponsable ».  Du point de vue des États-Unis, « toute autre liste, proposée par qui que ce soit, doit être approuvée par l’Envoyé spécial, comme il est dit dans la résolution 2254 (2015) », a conclu le représentant.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a déclaré qu’« entre la guerre et la paix en Syrie, la clef est pour une large part dans le pays de Tolstoï ».  Moscou doit peser de tout son poids sur Damas pour que ce comité soit mis en place, a-t-il précisé.  Alors que l’ensemble des membres du Conseil de sécurité, « sans exception », ont plaidé pour la mise en place du comité constitutionnel, « il est temps que les choses avancent », a-t-il poursuivi, disant prendre acte de « l’obstruction opposée par le régime syrien au processus politique ».

Cela dit, en tant que membre du « Small Group », la France estime que « l’offre est désormais sur la table et c’est à vous qu’il revient de trancher », a-t-il lancé à M. de Mistura, rappelant qu’il avait reçu mandat des Nations Unies pour mener à bien ces travaux et aboutir à la composition dudit comité.  « Notre détermination est claire », a affirmé le représentant, avant d’indiquer que les membres du « Small Group » se réuniront avant la fin de ce mois dans le but de mobiliser les efforts afin que ce comité réussisse. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a jugé « incroyable que nous ayons à expliquer une fois de plus pourquoi l’ONU doit jouer un rôle en Syrie », compte tenu de la gravité de la crise dans ce pays, dont les conséquences sur la stabilité régionale et internationale sont évidentes.  Est-ce que la Russie a bien donné des garanties à l’ONU, ou s’agissait-il d’un accord élaboré « avec cynisme » pour détourner l’attention du Conseil de sécurité de la poursuite de l’offensive militaire par son allié syrien? s’est demandé Mme Pierce.  La Russie ainsi que la Turquie et l’Iran doivent prêter à l’Envoyé spécial l’appui nécessaire pour lui permettre de s’acquitter de ses fonctions, a exhorté la représentante, qui a émis l’espoir d’avoir de nouvelles informations au lendemain de la réunion du 27 octobre.

M. OLOF SKOOG (Suède) s’est dit profondément déçu par le manque persistant de coopération de la part du Gouvernement syrien concernant le comité constitutionnel, qui contredit la Déclaration finale de Sotchi transmise au Conseil par la Russie.  Il a appelé le Gouvernement syrien à coopérer pleinement avec l’ONU et ceux qui ont des relations étroites avec Damas, en particulier la Russie, pour soutenir de tels efforts.  Il a dit appuyer pleinement l’Envoyé spécial et son mandat de créer un comité constitutionnel, avant de rappeler que, selon la Déclaration de Sotchi, la sélection finale du comité doit se faire via le processus de Genève et l’Envoyé spécial des Nations Unies.  Enfin, le délégué a appelé le Gouvernement à soutenir le processus politique dirigé par l’ONU et à s’assurer qu’il y aura de réels progrès avant la prochaine réunion en novembre.

M. MA ZHAOXU (Chine) a déclaré que le processus de règlement politique se poursuit dans une Syrie « globalement stable », où l’Envoyé spécial a été invité à discuter de ce processus, et notamment de la formation du comité constitutionnel.  Il a estimé que la communauté internationale devrait tout mettre en œuvre pour relancer ce processus piloté par les Syriens eux-mêmes dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de leur pays.  « L’avenir de la Syrie appartient aux Syriens », a-t-il insisté, tout en soulignant l’importance du processus d’Astana.  La délégation chinoise a espéré que les parties concernées garantiront la démilitarisation d’Edleb, en facilitant le retour des réfugiés le plus rapidement possible dans leurs foyers.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a dit être « déçu » car il s’attendait à des « évolutions positives ».  Il est grand temps de former un comité constitutionnel, avant la fin de novembre, a encore plaidé le représentant, ajoutant que « retarder le processus ne fait que compliquer les choses ».  Il a estimé que l’autonomie de l’ONU est essentielle en ce qui concerne la composition, le calendrier et la portée des travaux du comité constitutionnel.  « Nous appuyons fermement l’Envoyé spécial, a-t-il indiqué à cet égard, soutenant en particulier son engagement à assurer que les femmes constituent 30% des membres du comité. »  Même si le comité constitutionnel n’est pas une fin en soi, c’est néanmoins une part importante des efforts et un élément de base de la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) et du Processus de Genève, a dit le représentant. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a estimé que l’accord de Sotchi relatif à la démilitarisation d’Edleb avait offert un contexte plus apaisé pour la relance du processus politique en Syrie.  Soulignant « l’urgente nécessité » de former dans les meilleurs délais le comité constitutionnel, et d’en définir les modalités d’action, le représentant a fait part des préoccupations qui sont les siennes devant les retards pris par cette tâche.  Il a insisté sur l’importance de le faire dans le courant du mois de novembre. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a remercié l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. de Mistura, pour ses efforts inlassables pour qu’il y ait des consultations dans la période à venir en vue d’établir les possibilités de la mise en place d’un comité constitutionnel crédible et équilibré, facilité par les Nations Unies et dirigé par les Syriens.

Le Kazakhstan suit de près la crise syrienne et soutient toute initiative visant à régler le conflit violent qui y fait rage le plus rapidement possible.  Pour sa délégation, la protection du peuple syrien, des civils et des objets représente une priorité de premier ordre.  À ce stade, il faut veiller au maintien de la paix autour d’Edleb, a poursuivi le représentant, remerciant au passage la Fédération de Russie et la Turquie pour leur accord qui a permis d’éviter l’effusion de sang et une crise humanitaire de grande échelle.  Il a également salué la mise en place de corridors humanitaires qui peuvent être usés par plus de 3 000 civils, estimant que c’est le résultat de la création de la zone démilitarisée.

Se félicitant de l’accord du 24 octobre par les garants d’Astana pour accélérer la formation du comité constitutionnel, le représentant a également salué la volonté du groupe d’Astana de poursuivre le dialogue avec le « Small Group » sur la Syrie, sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.

Le Kazakhstan souligne qu’il est important d’aller de l’avant le plus rapidement possible avec la création de ce comité constitutionnel qui représente « un point de départ » pour la relance du processus politique en Syrie.  Le représentant a aussi insisté sur le fait qu’il appartient aux Syriens de définir la forme de leur futur système politique et de leur État à travers les réformes législatives nécessaires, les structures territoriales et administratives ainsi que les élections parlementaires et présidentielle.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït), membre du « Small Group », a déclaré que « la formation de comité constitutionnel est important dans le contexte actuel et permet d’atteindre les objectifs de la résolution 2254 (2015).  La composition de ce comité repose sur les Nations Unies, comme le dit aussi cette même résolution.  S’adressant à M. De Mistura, il a lui a dit « vous avez la légitimité de composer ce comité et nous espérons qu’il pourra se réunir avant la fin de votre mandat ».

En conclusion, le représentant a souligné l’importance de respecter les résolutions des Nations Unies. 

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) a pris acte du fait que les discussions de l’Envoyé spécial avec le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Syrie sur la formation du comité constitutionnel n’avaient pas été faciles et qu’un terrain d’entente pourrait ne pas être trouvé dans l’immédiat.  Il a néanmoins estimé que l’Envoyé spécial devrait poursuivre ses efforts pour convoquer le comité constitutionnel aussi rapidement que possible. 

« Nous sommes tous d’accord quant au fait que l’accord conclu entre la Fédération de Russie et la Turquie sur Edleb présente une fenêtre d’opportunités qui devrait être saisie pour revitaliser un processus politique crédible et inclusif mené par les Syriens eux-mêmes, a ajouté la délégation », en soulignant que la première étape est de former le comité constitutionnel.  Il a placé des espoirs dans les initiatives diplomatiques à l’œuvre cette semaine et ce week-end pour maintenir l’élan pris en ce sens.

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a souhaité que le séjour de M. Staffan de Mistura à Damas, en République arabe syrienne, soit mis à profit pour la levée effective des derniers obstacles à la mise en place du comité constitutionnel.  Il s’est félicité de la tenue le 27 octobre 2018 à Istanbul, du sommet quadripartite (Allemagne, France, Fédération de Russie et Turquie), qui servira de cadre de réflexion sur le processus politique de sortie de crise, ainsi que sur la situation à Edleb. 

La Côte d’Ivoire a souhaité vivement la poursuite du dialogue entre toutes les parties prenantes.  Elle a appelé les belligérants au respect des dispositions de la résolution 2254 (2015) et a exhorté les États membres du Conseil de sécurité à retrouver l’unité qui leur a toujours permis de relever les défis à la paix et à la sécurité internationales. 

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a déclaré que n’ayant pas de solutions militaires au conflit syrien, il faut tendre vers une solution politique, et se saisir de l’occasion de l’accord sur Edleb pour avancer vers ce processus.  À cet égard, la solution politique doit être trouvée dans la résolution 2254 (2015) et le processus de Genève, a-t-il lui aussi rapidement conclu. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a appelé les parties à progresser sur la formation du comité constitutionnel, espérant que la démilitarisation d’Edleb facilitée par les garants d’Astana donnerait un élan au processus.  Il a appelé les parties à ne ménager aucun effort pour la mise en place d'un comité hautement crédible et le plus représentatif possible.  Il faut, a-t-il demandé, que les partis nationaux renoncent à leurs intérêts partisans et soient en position d’égalité.  Le représentant a espéré que le sommet sur la Syrie, qui se tiendra demain entre la Fédération de Russie, la Turquie, la France et l'Allemagne, contribuera à la promotion d’une solution politique de crise donnant la priorité au débat sur le début des travaux du comité.

M. VASSILY NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré qu’il ne se souvenait pas que les envoyés de l’ONU fussent autorisés à faire rapport devant le Conseil de sécurité aussi fréquemment.  Balayant les « leçons de morale » d’un « petit nombre de pays », le représentant a estimé, pour sa part, que le règlement syrien progresse et que les garants d’Astana font de leur mieux pour préserver la situation sur le terrain.  Aujourd’hui en Syrie, dans de nombreuses régions, la sécurité est revenue et les gens ont repris une vie normale, a-t-il assuré.  On ne peut, selon lui, imposer un comité constitutionnel qui irait à l’encontre des attentes des parties syriennes, a affirmé M. Nebenzia, avant de donner l’assurance que sa délégation compte aider l’Envoyé spécial à former ce comité constitutionnel.  Il a cependant mis en garde le « petit groupe de pays » qui cherche à tirer profit de la situation actuelle pour promouvoir son agenda politique. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) s’est dit convaincu que le dialogue reste le meilleur moyen de parvenir à un résultat positif en Syrie, assurant que les garants du processus d’Astana avaient permis de stabiliser la situation sur le terrain.  Il s’est félicité du travail de M. de Mistura, confiant que l’« action patiente et réfléchie » porterait ses fruits.  Le représentant a estimé en outre que la solution passe par l’application de la déclaration conjointe de Sotchi.  Enfin, dans le cadre du droit international et le respect du principe de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale de ce pays, il a lancé un appel à résoudre ce conflit par un processus politique inclusif et un dialogue concerté, menés par et pour le peuple syrien.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a déclaré avoir l’impression que certains pays qui interviennent ici veulent saper la coopération exemplaire que son pays entretient avec les Nations Unies.  La République arabe syrienne est un membre fondateur de l’Organisation des Nations Unies et a été élue à trois reprises au Conseil de sécurité.  Elle n’est donc pas étrangère à son fonctionnement, a-t-il fait valoir.  Il a ajouté que la Syrie avait pleinement participé au processus de Genève et d’Astana.  Elle s’est engagée constructivement avec les différents Envoyés spéciaux, Kofi Annan, Lakhdar Brahimi et Staffan de Mistura.

Avec le Conseil de sécurité, la Syrie a discuté 56 fois de la situation humanitaire avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et a participé à des dizaines de réunions avec l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il en a déduit que « personne ici ne peut douter, ni remettre en cause la coopération du Gouvernement syrien avec les Nations Unies », ajoutant souhaiter que cela ne soit plus jamais remis en cause dans les réunions importantes.

M. Ja’afari a également déclaré que son pays est victime depuis sept ans d’une guerre menée par des groupes terroristes implantés sur son territoire, présentés comme une « opposition modérée ».  Il a vivement déploré que l’Envoyé spécial n’ait jamais mentionné une seule fois ni ce terrorisme, ni les 69 raids aériens menés jusqu’à ce jour par la coalition dirigée par les États-Unis.  « Jamais il n’a condamné ces attaques, qui ciblent tout sauf les groupes terroristes, et qui atteignent des villages de civils, en dépit des demandes répétées de la délégation syrienne », a-t-il déploré.  S’adressant aux autres délégations, il a dit que les pays qui respectent le droit à la vie devraient se retirer et s’écarter de cette coalition.  « Aujourd’hui, pas demain », leur a-t-il lancé.

M. Ja’afari a ensuite déclaré qu’Edleb est une partie chère à la Syrie, et de ce fait, le Gouvernement entend la récupérer, comme le lui permet la Charte des Nations Unies.  « Edleb ne sera pas transformée en cave à terroristes comme à Tora Bora.  Le Gouvernement syrien ne le permettra pas et c’est déjà tranché. »

Abordant la question du processus politique, il a déclaré que son pays croit en la loi de la Charte des Nations Unies, elle-même basée sur le droit et non la force et l’arrogance.  C’est sur cette base que la Syrie s’est engagée dans le processus de Genève et a accepté le principe de la création du comité constitutionnel, a-t-il expliqué.  « L’Envoyé spécial n’est pas un ordonnateur, mais un « facilitateur. Il a pour mandat de faciliter le processus politique en Syrie », a-t-il insisté, ajoutant que son pays reste disposé à coopérer avec lui.  

Cela dit, la coordination avec d’autres États, comme la Fédération de Russie ou la République islamique d’Iran, peut également permettre de progresser sur cette voie, a estimé le délégué.  « Ce sont les Syriens qui, à Sotchi ont accepté la création de ce comité », a-t-il redit, ajoutant que « les calendriers artificiels ne permettront pas de réaliser les aspirations du peuple syrien ».

Reprenant la parole, la représentante du Royaume-Uni a souhaité savoir si l’accord russo-turc tient encore à Edleb?

Lui répondant, son homologue de la République arabe syrienne a déclaré qu’Edleb est une partie importante de son pays, au même titre que « Glasgow, Marseille ou la Floride ».  Lorsqu’un État siégeant au Conseil de sécurité est menacé par le terrorisme, il est normal qu’il mette tout en œuvre pour neutraliser cette menace, comme on a pu le voir ces derniers jours.  Que dire des 30 000 terroristes présents à Edleb?  « Ce sont des terroristes modérés, c’est bien connu », a ironisé le délégué.  Ce n’est pas notre intention de reprendre Edleb en violation de l’accord, mais nous « le ferons le moment venu » si les efforts diplomatiques ont échoué à faire revenir ce territoire sous notre souveraineté. 

La Fédération de Russie a répondu à sa collègue britannique que l’accord tient et continue d’être respecté, avant de confirmer les propos tenus par le représentant de la République arabe syrienne. 

Prenant à son tour la parole, l’Envoyé spécial a souhaité « clarifier un point »: « lorsque j’ai rencontré le Ministre des affaires étrangères, il n’a pas évoqué la question du terrorisme, mais seulement celle du comité constitutionnel.  Il a déclaré qu’il attendait une proposition du processus d’Astana.  Je continuerai d’évaluer la mise en œuvre des mesures de l’Accord de Sotchi et saisirai la moindre occasion en vue d’adresser des invitations aux parties concernées pour parler du comité constitutionnel ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: toujours aussi peu de femmes dans les processus de maintien et de consolidation de la paix, alerte la Directrice d’ONU-Femmes

8382e séance – matin
CS/13554

Conseil de sécurité: toujours aussi peu de femmes dans les processus de maintien et de consolidation de la paix, alerte la Directrice d’ONU-Femmes

« Ce rapport est un cri d’alarme sur l’échec d’intégration des femmes dans le maintien de la paix », a d’emblée prévenu la Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), Mme Phumzile Gloria Mlambo-Ngcuka.  Alors qu’elle présentait, ce matin au Conseil de sécurité, le rapport du Secrétaire général sur « les femmes et la paix et la sécurité », elle a indiqué que, comme l’an dernier, les indicateurs annuellement relevés en matière de processus de paix et de médiation stagnent, quand ils ne chutent pas. 

Ainsi, selon les conclusions du rapport, entre 1990 et 2017, les femmes ont continué de compter pour seulement 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et signataires des principaux accords de paix; et seuls 11% des accords signés en 2017 contiennent des dispositions relatives à la parité entre les genres.  Cette tendance est similaire à celle observée entre 2000 et 2016, où seuls 25 des 1 500 accords signés dans cette période traitaient du rôle des femmes dans les phases de mise en œuvre. 

Elle est même confirmée sur le terrain avec des exemples précis: au Yémen par exemple, aucune femme n’est présente dans les processus actuels visant la reprise du dialogue.  Au Mali, on compte à peine 3% de femmes dans les comités crées pour surveiller la mise en œuvre de l’Accord de paix.  En République centrafricaine et en Afghanistan, les processus de médiation excluent complètement les femmes, a déclaré la Directrice d’ONU-Femmes. 

Le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, qui participait au débat, a regretté cette tendance.  Le nombre total de femmes dans les opérations de paix culmine toujours à 4% des troupes et 10% des effectifs de police.  Pourtant, des exemples existent où la participation des femmes aux processus de paix a eu un impact positif, notamment en Guinée-Bissau, en Colombie et même en Syrie, où des femmes ont négocié des cessez-le-feu sur le plan local, participé à la création de zones de sécurité civile et coordonné des activités humanitaires et de secours, a-t-il assuré.

Mais, alors que la résolution 1325 (2000) a été suivi de huit autres, « comment se fait-il que les femmes demeurent exclues des processus de paix », s’est interrogée la délégation des Pays-Bas, rejointe par celle de la France dont le représentant s’est demandé « comment les opérations de maintien de la paix pourraient-elles protéger efficacement l’ensemble de la population civile sans que les femmes ne soient engagées comme actrices de la paix et de la sécurité? »

En dépit de leurs inquiétudes, ces délégations, à l’instar d’autres, se sont toutefois montrées optimistes, en observant que malgré tout, la situation évoluait positivement.  Ainsi la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) appelle désormais à la participation pleine et effective des femmes aux processus de décision.  Le Conseil de sécurité a récemment décidé d’augmenter le nombre de femmes au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), tout en faisant désormais référence aux droits et à la participation des femmes dans plus de 70% de ses résolutions et 90% de ses déclarations présidentielles. 

La situation commence en effet à changer, s’est également réjoui la Ministre suédoise des affaires étrangères.  Elle a observé que lorsque les pourparlers de paix ont commencé en 2012 en Colombie, il n’y avait qu’une seule femme autour de la table.  Deux ans plus tard, les femmes représentaient 20% de l’effectif de l’équipe de négociation du Gouvernement, et 43% de celle des FARC.  Ce sont elles qui ont été à l’initiative du désenrôlement des enfants-soldats, a-t-elle fait valoir.

On peut également se féliciter que le Prix Nobel de la paix ait été décerné, cette année, à Denis Mukwege et Nadia Murad, deux personnes engagées dans la promotion des droits de la femme.  Par ailleurs, et pour la première fois de son histoire, l’Éthiopie a placé une femme à sa tête et dispose désormais d’un gouvernement parfaitement paritaire, se sont réjouies plusieurs délégations.

Attention cependant, « la participation est un droit et non un traitement de faveur qu’il faut accorder aux femmes », a rétorqué le Royaume-Uni, ne manquant pas de préciser que la participation des femmes permet d’augmenter de 35% les chances de réussite d’un accord et son appropriation par les communautés.  C’est également une question économique qu’il ne faut pas perdre de vue.  Accorder un accès aux droits à la moitié de la population est une manière de susciter la croissance économique, a expliqué la délégation.

Face à ce paradoxe, il apparaît donc clairement qu’il faut faire davantage; le Conseil doit utiliser tous les outils à sa disposition pour assurer une participation effective des femmes, a plaidé la Directrice générale du Centre des femmes pour l’aide juridictionnelle et le conseil juridique, Mme Randa Siniora Atallah.  Il faut en effet surmonter le fossé entre les mots et l’action, a ajouté le Kazakhstan, synthétisant la pensée de nombre de délégations.  Un des moyens est de mettre pleinement en œuvre la résolution 1325 (2000), dans le contexte du vingtième anniversaire de son adoption qui sera célébrée en 2020. 

À cet effet, le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, le réseau de points focaux nationaux, de même que les plateformes de partages des meilleures pratiques comme « FemWise-Africa, ont été cités en tant qu’outils permettant d’obtenir des résultats sur le terrain, notamment par la délégation des États-Unis et celle du Ghana, cette dernière parlant au nom du Réseau des dirigeantes africaines.

Mais pour la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité doit s’en tenir à la question à l’ordre du jour et respecter les buts de la Charte des Nations Unies, l’objectif étant simplement de permettre aux femmes de participer à ces processus à pied d’égalité avec les hommes.  C’est pourquoi le représentant russe a indiqué ne pas soutenir la création de mécanismes additionnels.

Quoi qu’il en soit, les femmes sont « les victimes du système patriarcal, qui, ancré dans le système capitaliste, perpétue les inégalités, l’oppression économique, sociale et culturelle des femmes dans le monde entier », a estimé la Bolivie, tandis que l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) a préconisé de déconstruire les normes sociales qui sont à la base de la dévalorisation du rôle de la femme.

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

Promouvoir la mise en application du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et de la pérennisation de la paix par le biais de l’émancipation politique et économique des femmes (S/2018/900 et S/2018/904)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que jamais, au cours des 30 dernières années, le nombre de pays en proie à une forme de conflit violent n’a été aussi élevé.  « Les déplacements forcés dus aux guerres et aux persécutions sont plus nombreux que jamais.  Les changements climatiques et le sous-développement menacent de plus en plus notre sécurité.  La question des droits de l’homme est reléguée au second plan.  Il y a tout lieu de s’inquiéter, mais nous devons résister au pessimisme ambiant et ne pas perdre de vue que des solutions existent », a déclaré le Chef de l’Organisation.  Il a dit que l’espoir avait toujours guidé nos pas dans l’action que nous menons collectivement pour les femmes, la paix et la sécurité.  C’est une question porteuse de changement, qui comporte bien des éléments dont nous avons besoin pour relever les défis complexes auxquels le monde doit faire face: changements climatiques, désarmement, égalité et inclusion. 

Au cours des dernières années, des exemples concrets de progrès ont été constatés, s’est réjoui M. Guterres, en soulignant l’impact positif des organisations de femmes sur la poursuite du dialogue en Guinée-Bissau ou encore la reconstruction des communautés en Colombie.  En République centrafricaine et au Mali, les femmes ont contribué avec succès à la négociation entre acteurs armés pour mettre fin à l’escalade des tensions intercommunautaires.  En Syrie, les femmes ont négocié des cessez-le-feu au niveau local, participé à la création de zones de sécurité civile et coordonné des initiatives humanitaires et de secours.  « De même au Yémen », a ajouté le Secrétaire général, qui a en outre attesté de l’importance cruciale du travail accompli par les femmes « artisanes de la paix », du Mali au Bangladesh.  « Ici même à l’ONU, le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire fournit des ressources aux organisations de femmes qui en ont besoin.  Le Fonds pour la consolidation de la paix investit plus de 30% de ses ressources dans les programmes d’égalité des sexes.  Et un nombre croissant de donateurs consacre des fonds à l’égalité des sexes. » 

Malgré des progrès, les faits sur le terrain montrent qu’il reste encore beaucoup à faire.  La participation des femmes aux processus de paix officiels reste extrêmement limitée, a reconnu le haut fonctionnaire.  « Entre 1990 et 2017, les femmes ne représentaient que 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et des signataires dans tous les processus de paix importants », a-t-il relevé.  De plus, les conflits continuent d’avoir un effet dévastateur sur les femmes et les filles, l’ONU ayant documenté plus de 800 cas de violences sexuelles liées aux conflits en 2017, « soit une hausse de 56% depuis 2016 ».  De plus, le financement de programmes visant à promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes dans les pays en conflit ne représente que 5% de l’aide bilatérale totale à ces pays, a constaté le Secrétaire général.  « Chaque année, nous prenons des engagements louables, mais ils ne bénéficient pas du soutien financier et politique requis. »

Pour remédier à cet écart, j’entends donner la priorité à plusieurs points d’action au cours de la prochaine année, a annoncé M. Guterres.  Tout d’abord, la parité hommes-femmes a le plus grand impact potentiel sur l’efficacité et la crédibilité de nos opérations sur le terrain, a-t-il affirmé.  C’est pourtant là que les chiffres sont les plus bas et le changement plus lent.  Si les femmes représentent désormais 41% des chefs et chefs adjoints des opérations de paix de l’ONU, soit « plus que jamais auparavant », le nombre total de femmes dans les opérations de paix a stagné.  Aussi le Secrétaire général a-t-il constitué un groupe de travail pour mettre en place des mesures d’urgence.  Notre crédibilité et notre capacité de protection sont également paralysées par le fait que les femmes ne représentent que 4% de nos soldats de la paix et 10% de la police.  L’ONU appuie pleinement les efforts novateurs lancés cette année par les États Membres afin d’encourager une plus grande représentation, a encouragé M. Guterres. 

Il s’est félicité que près de 100 États Membres aient signé avec l’Organisation des accords volontaires pour lutter contre l’exploitation et les abus sexuels, et appelé les autres à les rejoindre.  Le Cercle de leadership des chefs d’État et de gouvernement est attaché à la tolérance zéro, à la prévention et à l’élimination de ce fléau, ainsi qu’à la réduction de son impact, a-t-il noté.  S’agissant de la médiation, « nous savons que la participation significative des femmes est directement liée à une paix plus durable.  Et pourtant, nous continuons d’appuyer et de diriger des processus qui ne sont pas inclusifs ».  À cet égard, a-t-il dit, la création de plusieurs réseaux de femmes au cours des dernières années est une tendance importante, car elles peuvent jouer une influence positive dans ces processus.  « La participation des femmes ne doit pas se limiter à des rôles consultatifs ou à des structures parallèles », a exhorté le Secrétaire général. 

Par ailleurs, une approche sexospécifique de la paix et de la sécurité implique de soutenir la consolidation de la paix au niveau local, même pendant les conflits, a-t-il poursuivi, avant d’ajouter que le financement de ce programme est essentiel et que l’ONU a l’intention de donner l’exemple.  « J’ai créé un groupe de travail de haut niveau chargé d’examiner notre financement en matière d’égalité entre les sexes, notamment dans les domaines de la paix et de la sécurité.  Je tiendrai les entités des Nations Unies responsables de leurs engagements en matière de suivi des dépenses consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité, avec l’objectif d’atteindre ou de dépasser 15% d’ici à 2020 », a annoncé le haut fonctionnaire.  Enfin, « à partir de maintenant », il inclura l’analyse de genre dans ses rapports au Conseil de sécurité à chaque fois que cela sera utile d’éclairer ses décisions.

Dans deux ans, nous marquerons le vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, le cinquième anniversaire du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le vingtième anniversaire de la Déclaration de Beijing.  En prévision, son rapport sur les femmes, la paix et la sécurité, l’an prochain, comprendra une évaluation de la mise en œuvre des recommandations pertinentes dans les trois examens de la paix et de la sécurité entrepris en 2015, en particulier l’Étude mondiale sur l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et de la résolution 2242, adoptée en 2015.

Mme PHUMZILE GLORIA MLAMBO-NGCUKA, Secrétaire générale adjointe, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, ONU-Femmes, présentant le rapport du Secrétaire général, a déclaré que « ce rapport est un cri d’alarme sur l’échec d’intégration des femmes dans le maintien de la paix.  Les femmes ne peuvent pas être exclues des processus de paix uniquement parce qu’elles n’ont pas participé aux combats », a-t-elle estimé.  Prenant l’exemple du Soudan du Sud, elle a expliqué qu’après la signature de l’Accord revitalisé sur la résolution du conflit, et en dépit de l’objectif d’atteindre des quotas minimums de 35% de femmes dans les institutions, il n’y a qu’une seule femme parmi les membres du Comité national prétransitionnel, chargé de suivre la mise en œuvre de cet accord.  « C’est un taux de 10% et non 35% », a-t-elle dit.

Revenant au rapport, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a indiqué que comme elle l’avait déjà exprimé l’an dernier, les indicateurs annuellement relevés en matière de processus de paix et de médiation stagnent, quand ils ne chutent pas.  C’est pour cette raison que le rapport a voulu analyser la contribution des femmes à la paix.  Il souligne aussi que les efforts sont superficiels pour intégrer les femmes dans les processus, celles-ci étant fortement marginalisée dans les institutions chargées de mettre en œuvre les accords de paix. 

Ainsi, entre 1990 et 2017, les femmes ont représenté seulement 2% des médiateurs, 8% des négociateurs et 5% des témoins et signataires des principaux accords de paix.  De plus, seuls 11% des accords signés en 2017 contiennent des dispositions relatives à la parité entre les genres.  En outre, sur les 1 500 accords paraphés entre 2000 et 2016, seuls 25 d’entre eux évoquent le rôle des femmes dans les phases de mise en œuvre.  Au Yémen par exemple, aucune femme n’est présente dans les efforts actuels visant à reprendre le dialogue, en dehors des équipes d’observateurs chargés de conseiller l’Envoyé spécial des Nations Unies. 

Au Mali, on compte à peine 3% de femmes dans les multiples comités nationaux crées pour surveiller la mise en œuvre de l’Accord de paix.  En République centrafricaine, les efforts de médiation ne portent que sur les 14 groupes armés et la présidence; ils excluent complètement les femmes.  En Afghanistan, le Gouvernement et ses partenaires internationaux investissent pour que les femmes soient présentes dans les hauts conseils de paix nationaux et provinciaux.  Mais dès qu’il s’agit de discuter avec les Taliban, il n’y a plus de femmes.  Tous ces chiffres confirment la tendance déjà évoquée l’an dernier, a encore déclaré la Directrice d’ONU-Femmes. 

Mme Mlambo-Ngcuka a indiqué que le rapport dresse par ailleurs un tableau de la situation des femmes dans les pays en conflit ou sortant de conflit, en présentant les marges de progrès.  Ainsi, le nombre de femmes parlementaires dans ces pays stagnent à 16% depuis trois ans.  En République démocratique du Congo par exemple, il n’y a que 12% de femmes candidates aux prochaines élections, un chiffre identique à celui d’il y a 7 ans.  En outre, seuls 17 pays ont élu des femmes à leur tête ou à la tête de leurs gouvernements, et aucun parmi les pays sortant de conflit.  Dans les situations de conflit, les filles ont une fois et demi plus de chance d’abandonner l’école primaire.  Au Yémen aujourd’hui le taux de mariage forcé est en hausse: 66% en 2017, contre 52% l’année précédente et 32% avant le conflit.  Dans ce contexte, la seule manière de lutter contre cette tendance est d’investir massivement et fortement dans les programmes destinés aux femmes, a plaidé la Secrétaire générale adjointe.

Mme Mlambo-Ngcuka a déclaré qu’il y avait cependant des motifs de satisfaction, notamment le fait que les décisions du Conseil de sécurité relatives aux situations spécifiques de pays ou de régions contenaient de plus en plus d’expressions relatives aux femmes, soit une hausse de 50% à 75%.  Le nombre de femmes présentant des exposés au Conseil de sécurité est également en augmentation, s’est réjouie la Directrice exécutive d’ONU-Femmes.  Mais de son point de vue, il y a encore des marges de progrès possibles, dans le contexte du 20e anniversaire de la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité, qui sera célébré en 2020.  Vingt ans après son adoption, il est temps pour les Nations Unies de tenir une discussion sur la façon de soutenir et de financer les processus qui excluent les femmes, comme cela a été demandé cette semaine au Conseil par les femmes de la société civile.  Il faut également faire davantage pour protéger les femmes militantes, défenseures des droits de l’homme et faiseuses de paix, a déclaré Mme Mlambo-Ngcuka, avant de se réjouir que le Prix Nobel de la paix ait été décerné conjointement au Docteur Denis Mukwege et à Mme Nadia Muras, deux défenseurs des droits de la femme. 

Mme RANDA SINIORA ATALLAH, Directrice générale du Centre des femmes pour l’aide juridictionnelle et le conseil juridique, qui représentait le Groupe de travail des organisations non gouvernementales sur les femmes et la paix et la sécurité, a indiqué parler « au nom des femmes palestiniennes qui font face quotidiennement à la violence, à la discrimination, à la privation et aux violations systématiques de leurs droits fondamentaux ».  Elle a commencé son discours par le récit de l’expérience de Mervat, une femme qui vit dans la vieille ville d’Hébron: « Un jour, elle sort les poubelles devant sa maison.  Une fois dehors, elle est violemment attaquée par un groupe de colons.  Ses voisins, qui ont entendu ses cris, la voient se faire battre et sonnent l’alarme. »  Mervat, a précisé Mme Siniora Atallah, était enceinte de quatre mois au moment des faits; elle a perdu son enfant, une des conséquences de ses blessures. 

Autre histoire racontée par Mme Siniora Atallah à propos d’une habitante de Jérusalem, Sana, qui s’était fait réveiller par la police en septembre dernier.  Mère de deux enfants, Sana avait été choquée d’apprendre que la police allait démolir sa maison sous prétexte que sa famille n’avait pas de permis de construire.  Elle avait une semaine pour quitter les lieux. 

Au début du mois de mai, durant la marche du retour à la frontière est de Gaza, Nisreen, une mère de trois enfants, a reçu une balle de l’Armée israélienne dans la poitrine, a encore raconté la représentante.  Au moment des faits, Nisreen manifestait pacifiquement avec un groupe de femmes et d’enfants.  Deux jours après, Alla avait reçu une balle dans le ventre alors qu’elle marchait avec ses amis pour aller voir un spectacle de danse près de la même frontière. 

« Ces histoires décrivent la vie sous occupation des femmes et des filles palestiniennes », a expliqué Mme Siniora Atallah en faisant remarquer que ces femmes vaquent à leurs occupations quotidiennes avec les risques d’attaques violentes.  Leurs maisons peuvent leur être enlevées à tout moment et leur participation à la vie publique se fait dans la peur.  L’occupation israélienne et la crise humanitaire qui en résulte ont des conséquences profondément sexospécifiques et exacerbent les inégalités entre les sexes; les femmes subissent disproportionnellement la violence de l’occupation endurée par tous les Palestiniens.

L’occupation, a poursuivi la représentante, renforce les structures patriarcales de la société palestinienne.  Les femmes palestiniennes doivent subvenir à leurs besoins en plus de leurs responsabilités de prendre soin des enfants, des malades et des blessés, ce qui souvent les isole de leurs communautés et de la vie publique.  Dans leurs efforts pour protéger leurs familles de la violence ou des arrestations, elles deviennent des gardiennes des prisons de leurs propres enfants.  La violence politique dans la sphère publique conduit à des pics de violence dans la sphère privée, a constaté la militante: la violence domestique est outrageusement élevée et le féminicide augmente. 

À cela s’ajoute que les femmes sont privées de ressources pour répondre aux abus.  Les conditions difficiles provoquées par l’occupation font que les femmes palestiniennes n’ont pas accès à la justice et aux moyens de subsistance.  En outre, les coupes dans le financement de l’Office de Secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Moyen-Orient (UNRWA) ont disproportionnellement touché la vie des femmes en particulier dans les domaines de l’éducation et de la santé. 

Mme Siniora Atallah a également souligné que l’occupation israélienne avait réduit l’espace rendant possible la liberté et l’indépendance de la société civile.  Elle a indiqué que les défenseures des droits de l’homme sont accusées d’incitation par Israël.  De plus, en juillet 2018, des milliers de Palestiniennes ont manifesté de manière pacifique aux frontières orientales de la bande de Gaza, pour protester contre l’occupation.  Des tireurs embusqués israéliens ont tiré contre les protestataires et les ont aspergées de gaz lacrymogène blessant ainsi des milliers et tuant près de 100 civils.

Les volontaires de la société civile, y compris le personnel médical, sont pris pour cible par l’armée en dépit de leurs uniformes, a aussi relaté Mme Siniora Atallah.  Les femmes journalistes qui font des reportages sur le conflit sont agressées et mises en détention.  Le résultat de ces représailles est qu’elles sont dissuadées de faire des reportages sur l’occupation.  Cela aboutit à marginaliser encore plus les femmes de la sphère publique. 

En s’engageant pour les femmes, la paix et la sécurité, le Conseil de sécurité a reconnu l’importance de la participation des femmes et que sans les femmes, il ne peut y avoir de paix.  Elle a donc appelé le Conseil à agir aujourd’hui notamment pour assurer la participation des femmes dans la prévention des conflits, la transition démocratique, les efforts de réconciliation et le travail humanitaire.  Il doit appeler l’Autorité palestinienne à mettre en œuvre son plan d’action dans le cadre de la résolution 1325 (2000), allouer des fonds suffisants et donner un appui politique de haut niveau à la participation des femmes à toutes les étapes du processus de paix.  Le Conseil doit appeler Israël à stopper l’occupation militaire et l’expansion des colonies, s’engager dans une solution politique et cesser immédiatement ses violations du droit international. 

Mme Siniora Atallah a également appelé les États à arrêter d’exporter des armes en Israël.  Les gouvernements, les entreprises d’armement et les vendeurs d’armes doivent être pris pour responsables des transferts d’armes dans les situations où elles alimentent le conflit et violent le droit international.  Le Conseil doit aussi faire cesser la culture de l’impunité et veiller à ce que les forces israéliennes, ou autres acteurs responsables des actes de violence commis contre des femmes et des défenseures des droits des femmes, soient tenus pour responsables de leurs actes. 

Le Conseil, a-t-elle encore demandé, doit assurer que les aides humanitaires soient respectueuses de l’égalité des sexes.  Le Conseil doit enfin utiliser tous les outils pour assurer une participation effective des femmes et intégrer une analyse de genre dans toutes les discussions sur la situation, notamment en ajoutant le Territoire palestinien occupé à l’ordre du jour du Groupe informel d’experts sur les femmes, la paix et la sécurité, et en invitant des femmes représentantes de la société civile à faire des exposés au Conseil pour les débats sur des pays particuliers. 

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a noté que quand les pourparlers de paix entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et le Gouvernement colombien avaient démarré en 2012, il n’y avait qu’une seule femme autour de la table.  Un an plus tard se tenait le premier Sommet national des femmes et de la paix en Colombie et les femmes y réclamaient à être incluses dans les discussions.  Deux ans plus tard, les femmes comptaient pour 20% de l’effectif de l’équipe de négociation du Gouvernement, et pour 43% de celle des FARC.  En s’organisant, les femmes ont élargi l’agenda du processus de paix, s’est réjouie la Ministre.  Elles ont négocié des cessez-le-feu locaux, renforçant la sécurité; leurs exigences ont mis les parties prenantes face à leurs responsabilités.  Coté FARC, le désenrôlement des enfants-soldats a été une initiative des femmes et de la société civile, a-t-elle fait remarquer, en notant qu’elles ont vraiment été à la base des efforts de consolidation de la paix en Colombie.

Au Sahel, a poursuivi la Ministre, les femmes sont aussi agentes du changement.  Dans la région du lac Tchad, où les défis sécuritaires et environnementaux sont nombreux, les femmes vivant de la pêche se sont coalisées pour être autosuffisantes en poisson, faire reconnaître leurs droits face aux agressions sexuelles et viols dont elles sont victimes, et obtenir un accès basique aux soins en matière de santé sexuelle et reproductive.  En conclusion, la Ministre a revendiqué une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions, de consolidation de la paix, de négociation et de maintien de la paix dans le monde.  Elle a regretté que les femmes aient toujours à prouver que leur participation à une action diplomatique soit bénéfique avant de pouvoir y prendre part, alors qu’on ne demandait jamais rien de tel aux hommes.

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a rappelé que l’adoption de la résolution 1325 (2000) était basée sur l’idée qu’une plus grande implication des femmes dans les processus de paix augmente leurs chances de réussite.  « Si nous en sommes convaincus, comment se fait-il que les femmes demeurent exclues des processus de paix », s’est-elle interrogée.  Mme Brandt a appelé à tout faire pour augmenter la participation des femmes aux processus de décision, aussi bien au sein des missions de maintien de la paix qu’au Siège de l’ONU.  Elle a cité plusieurs exemples récents, à commencer par le fait que le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) appelle désormais à la participation pleine et effective des femmes aux processus de décision.  Elle a également mentionné la décision récente du Conseil de sécurité d’augmenter le nombre de femmes au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).

Le 8 mars dernier, a ajouté Mme Brandt, pour la première fois dans l’histoire du Conseil, une réunion a eu lieu avec une majorité des deux tiers de femmes représentant les 15 membres.  En conclusion, la représentante a appelé à lutter fermement contre les violences à l’encontre de femmes exerçant des responsabilités, qui sont souvent prises pour cible par ceux qui ne souhaitent pas la paix, comme en témoigne selon elle les 83 militantes des droits de l’homme tuées depuis le début du processus de paix en Colombie.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a dit se réjouir du choix du Comité Nobel de décerner le Prix Nobel à des personnes engagées dans la promotion des droits de la femme.  Cette décision montre que la promotion des droits de la femme est une priorité de la communauté internationale, a-t-elle dit.  Elle a également déclaré que la question de l’autonomisation des femmes est une question « éminemment politique et économique ».  Car accorder un accès aux droits à la moitié de la population est une manière de susciter la croissance économique, a expliqué la représentante, insistant sur cet aspect économique, qui selon elle « ne doit pas être perdu de vue ».

Mme Pierce a également souligné que « tout le monde sait que la participation des femmes aux processus de paix est une garantie de succès ».  Ainsi, selon elle, les processus incluant les femmes ont 35% plus de chance d’aboutir à une paix pérenne et de servir les communautés.  « La participation est un droit et non un traitement de faveur qu’il faut accorder aux femmes », a-t-elle conclu. 

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a jugé nécessaire de surmonter le fossé entre les mots et l’action, en mettant en œuvre le programme « Femmes, paix et sécurité » à l’aide de mécanismes onusiens aussi solides que le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes, de la paix et de la sécurité, et le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, de même que le réseau de points focaux nationaux et la Stratégie pour l’égalité des sexes de la Commission de consolidation de la paix, qui sert de plateforme pour le partage des pratiques optimales et des leçons apprises.  Le représentant a ensuite déclaré que la parité entre les sexes devait prévaloir à travers tout le système des Nations Unies et dans le cadre de la réforme de l’architecture de sécurité, notamment au travers d’une coopération étroite entre le Département des opérations de maintien de la paix et ONU-Femmes.  La délégation a par ailleurs salué l’intention de l’Union européenne de lancer un projet-pilote d’une valeur de deux millions d’euros en vue de fournir des programmes éducatifs aux Afghanes dans des institutions prestigieuses basées au Kazakhstan et en Ouzbékistan.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire), s’exprimant au nom de son pays et également au nom de l’Éthiopie et de la Guinée équatoriale, s’est félicité de la désignation d’une femme au poste de présidente de l’Éthiopie et pour la composition d’un gouvernement parfaitement paritaire.  « Cela a valeur d’exemple et c’est un témoignage de ce que le leadership de la femme devient de plus en plus nécessaire et déterminant dans la conduite des affaires du monde. »

Le représentant a également déclaré que sur le plan continental, les États africains, dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), ont donné la priorité à la promotion de la parité dans les appareils exécutif et législatif, de même que pour le renforcement du rôle des femmes dans les stratégies de médiation et de prévention.  Il importe maintenant de mettre en œuvre les mesures nécessaires, en coopération avec les Nations Unies et ses partenaires.  À cet égard, les plateformes « Femwise Africa » et le « Réseau des femmes leaders africaines » veillent à la mise en œuvre effective des engagements pris pour l’inclusion des femmes dans le rétablissement de la paix, la stabilité et le développement, a conclu le

M. MA ZHAOXU (Chine) a rappelé que, d’après le Président Mao, « les femmes pouvaient occuper la moitié du ciel ».  Il s’est félicité de la présence de Chinoises au sein des contingents déployés par Pékin au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS).  Les femmes, a-t-il estimé, jouent un rôle indispensable dans la prévention des conflits, dans la paix, dans la réconciliation et dans la réintégration des anciens combattants.  Le Conseil de sécurité devrait encourager le règlement pacifique des conflits en plaçant les femmes au premier plan, a préconisé le représentant, qui a jugé nécessaire d’œuvrer à la pleine opérationnalisation du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, avec pour objectif un monde meilleur pour tous.

M. BADER ABDULLAH N.  M. ALMUNAYEKH (Koweït) a déclaré que par le biais des résolutions successives sur la question des femmes, à commencer par la 1325 (2000), le Conseil de sécurité a mis en place un cadre règlementaire qu’il faut maintenant mettre en œuvre.  Si l’on veut atteindre l’objectif du Secrétaire général, à travers son concept de « paix positive », il faut accroître et garantir la participation des femmes et lutter contre toutes les causes et phénomènes qui peuvent l’entraver, d’autant que l’expérience a montré que cette participation offre de meilleurs résultats.  Dans ce contexte, la délégation s’est réjouie de la participation des femmes yéménites au processus de négociations, notamment celles parrainées par le Koweït et destinées à rétablir le dialogue et la paix dans ce « pays frère ». 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou), qui préside avec la Suède le Groupe d’experts sur les femmes, la paix et la sécurité au Conseil, a indiqué que, malgré l’adoption de huit résolutions depuis la résolution historique 1325 (2000), des obstacles persistent et obligent à redoubler d’efforts.  Les données montrent en effet qu’une participation plus importante des femmes à tous les niveaux de la vie politique a pour conséquence une moindre propension au conflit et une meilleure propension au maintien et à la consolidation de la paix.  En outre, a souligné la délégation, l’égalité entre les sexes et l’autonomisation économique et politique des femmes sont essentielles pour réduire leur vulnérabilité durant les conflits et, en général, prévenir la violence.  Investir dans cette autonomisation revient donc à investir dans la paix et le développement.

S’agissant du rôle des femmes dans le maintien de la paix et la sécurité internationale, la délégation a souligné la nécessité de contribuer au financement des organisations de femmes appelées à participer aux processus de paix lancés par le Conseil.  De même est-il important d’intégrer des perspectives de genre dans les opérations de paix déployées par décision du Conseil et de former de façon adéquate les Casques bleus à la protection et à la promotion des droits humains des femmes, des filles et des garçons.  Pour sa part, le Pérou a augmenté la participation des femmes dans ses forces armées déployées dans les opérations de maintien de la paix et a déjà atteint les 15% demandés.  Et le ministère de la femme et des populations vulnérables a créé un registre des déplacés, qui permet de traiter des droits des femmes et des filles touchées durant les années pendant lesquelles le Pérou a combattu le terrorisme.

M. GENNADY V.  KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné la nécessité de s’en tenir strictement à la question à l’ordre du jour, en s’abstenant de pratiquer des doubles emplois avec d’autres organes du Conseil de sécurité.  Quant aux processus de négociations classiques, ils restent toujours d’actualité, a tenu à rappeler le représentant: dans ce contexte en effet, sont respectés les buts de la Charte des Nations Unies, l’objectif étant simplement de permettre aux femmes de participer à ces processus à pied d’égalité avec les hommes.  Il a considéré qu’il est important pour le Secrétariat de l’ONU de prendre en compte, dans son prochain rapport, les expériences et les vues des pays touchés par des conflits.  En revanche, le représentant s’est déclaré opposé à la création de mécanismes additionnels.

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) a exprimé son attachement « inébranlable » à la question « femme, paix et sécurité », comme le montre son appui à la participation des femmes dans les processus de paix.  C’est pour cette raison que les États-Unis sont d’avis que le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes, de la paix et de la sécurité est un organe qui peut permettre d’aller plus en avant, le but étant d’obtenir des résultats concrets sur le terrain.  Les États-Unis sont en outre engagés dans l’autonomisation de la femme, a ajouté le représentant.  Il a mentionné que cet engagement se concrétise notamment dans les pays en développement, comme le montrent les subventions de millions de dollars allouées par les États-Unis à cette cause.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) s’est demandé « comment les opérations de maintien de la paix pourraient-elles protéger efficacement l’ensemble de la population civile sans que les femmes ne soient engagées comme actrices de la paix et de la sécurité, à tous les échelons, dans tous les piliers, militaire, civil, politique, économique »?  L’absence d’accès à l’éducation, à la propriété, à l’emploi et à des structures financières, aux services de santé rend les femmes plus vulnérables aux conséquences des conflits.  Autre constat: le nombre d’accord de paix intégrant des dispositions liées au genre a diminué l’an dernier.  Par ailleurs, les femmes sont encore bien trop souvent exclues des discussions quel que soit le stade de la négociation, a noté le délégué en signalant aussi que seuls 2% des médiateurs et 8% des négociateurs étaient des femmes durant les 25 dernières années. 

Notant que le Conseil inclut désormais des dispositions sur les droits et la participation des femmes dans plus de 70% des résolutions et près de 90% des déclarations présidentielles, M. Delattre a recommandé d’atteindre les 100% et d’adopter des déclarations à la presse sous cet agenda.  « Nous devons continuer à inviter systématiquement les personnalités issues de la société civile pour nous dresser un portrait fidèle de la réalité sur le terrain », a-t-il ajouté en plaidant aussi pour que les visites de terrain du Conseil donnent toute leur place aux rencontres avec les femmes.  Il faut aller plus loin, a exhorté le représentant français en invitant à saisir l’occasion de l’anniversaire de la résolution 1325 (2000) et en assurant un suivi plus efficace de la mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité, notamment ses 76 plans d’action et 11 cadres régionaux.  « Nous sommes prêts à travailler avec tous nos partenaires pour définir les contours d’un mécanisme qui permettrait réellement d’évaluer ces processus nationaux et régionaux », a proposé le délégué en citant le rapport du Secrétaire général. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a considéré que la participation véritable des femmes aux processus de paix, et plus largement aux processus politiques, tient à la qualité même de cette participation: « il ne s’agit pas du nombre de participantes, mais du leadership exercé par les femmes », a-t-elle analysé.  Aussi, est-il nécessaire, selon la représentante d’identifier et de soutenir les politiques favorables à leur participation aux processus de prise de décisions.  Abordant la question de l’autonomisation économique des femmes, la déléguée a rappelé qu’il s’agit avant tout de s’assurer que des ressources telles que l’eau et la terre sont réparties également entre ceux et celles qui prennent les décisions.  Mais aucune discussion sur l’autonomisation des femmes ne serait complète sans une référence à la problématique de l’éducation, a-t-elle ajouté, avant de dire que celle-ci est un catalyseur pour réaliser la participation égale des femmes à la société et leur intégration dans le redressement économique à long terme.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a constaté que les femmes sont « les victimes du système patriarcal, qui, ancré dans le système capitaliste, perpétue les inégalités, l’oppression économique, sociale et culturelle des femmes dans le monde entier ».  À son avis, c’est le problème principal et le système qu’il faut combattre.  Mais même s’il existe des similitudes, chaque pays a sa réalité et ses différents défis.  Ainsi en Colombie, l’Accord de paix entre le Gouvernement et les FARC intègre une perspective de genre, tandis que la mission de vérification est parfaitement paritaire.  On assiste de la même manière à des progrès dans la représentation politique des femmes, notamment en Somalie, dans la région du Sahel ou en Afghanistan, a-t-elle observé. 

Mais dans d’autres cas, comme dans les pays du bassin du lac Tchad, les femmes subissent et souffrent des activités des groupes et mouvement terroristes.  En République démocratique du Congo, la participation des femmes doit encore être renforcée, a ajouté la représentant de la Bolivie en concluant par l’exemple de son pays dont la Constitution de 2009 établit un « droit de la femme et de l’homme à la participation libre ».

Mme MICHELLE MÜNTEREFING, Ministre d’État à l’Office fédéral des affaires extérieures de l’Allemagne, a présenté les trois priorités de son Gouvernement s’agissant de la thématique « Femmes, paix et sécurité ».  « La première, ce sera de placer la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) au cœur des travaux de l’Allemagne, lorsqu’elle siégera au Conseil de sécurité pendant son mandat pour la période 2019-2020, a-t-elle annoncé. »  « La seconde sera de continuer à prêter notre soutien aux activités de l’ONU visant à prévenir et éliminer les violences sexuelles perpétrées en période de conflit », a ajouté Mme Münterefing.  La troisième, a précisé cette dernière, sera pour notre délégation de réaliser des progrès dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) d’ici à 2020, date du vingtième anniversaire de cette résolution, en s’appuyant sur les leçons apprises par le réseau des points focaux nationaux.

Mme SIMONA LESKOVAR, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Slovénie, a souligné la nécessité d’un rôle actif des hommes dans la promotion de l’Agenda « Femmes, paix et sécurité », tant en ce qui concerne la prévention que l’élimination de la violence sexuelle et de la violence sexiste en période de conflits, ainsi que dans la participation effective des femmes aux efforts de paix.  Mme Leskovar a poursuivi en disant que le deuxième plan national de la Slovénie sur les femmes, la paix et la sécurité pour la période 2018-2020 sera adopté dans les prochains mois.  Fondé sur l’examen du premier plan, il prend en compte les nouveaux défis et les nouvelles tendances, et prévoit cinq domaines thématiques: l’intégration de la perspective « genre », la participation des femmes, la protection des femmes et des filles et la lutte contre les violences sexuelles en période de conflit armé, l’éducation, la formation et la sensibilisation sur les « Femmes, paix et sécurité », et la responsabilité pour violence sexuelle et sexiste en période de conflit armé.  Le Plan comprend un mécanisme de suivi et d’information, a précisé Mme Leskovar avant de signaler qu’une nouvelle directive est en préparation pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) pour les forces armées. 

Mme IRYNA HERASHCHENKO (Ukraine) s’est dit convaincue que l’ONU était dotée des mécanismes de mise en œuvre nécessaires pour accélérer les efforts dans la participation des femmes.  L’Ukraine a, pour sa part, redoublé d’efforts pour garantir les droits des femmes dans tous les domaines et a mis en œuvre un plan d’action jusqu’en 2020 pour qu’elles participent plus au processus de consolidation de la paix.  Si le pays favorise la participation des femmes à la vie politique, elles ne représentent que 12% des élus au Parlement et le Gouvernement est en train d’introduire des quotas.  Sa stratégie d’égalité entre les sexes s’applique aussi à la défense, qui compte déjà 2 500 femmes dont 3 400 sont des officiers, et une première femme général de division pour les services médicaux. 

La représentante s’est arrêtée sur la catastrophe humanitaire liée à l’agression militaire, citant les cas d’infirmières tuées dans le Donbass.  Les mines sont également un problème colossal, car elles sont en très grand nombre, et de nombreuses femmes et enfants en sont morts.  Elle a aussi dénoncé la violence sexuelle dans le Donbass occupé et a insisté pour un accès humanitaire, notamment de l’ONU.  Aussi l’Ukraine exige-t-elle l’introduction immédiate d’une mission de paix dans le Donbass avec un mandat large pour prévenir une catastrophe humanitaire et protéger les plus vulnérables.  La représentante a rappelé que le prix Sakharov venait d’être attribué au célèbre prisonnier Oleg Sentsov et que l’Ukraine avait proposé un échange de prisonniers, auquel la Russie n’a pas répondu. 

M. KORO BESSHO (Japon) a assuré attacher une grande importance à la participation des femmes et à la protection de leurs droits dans le domaine de la paix et de la sécurité, le Japon souhaitant créer une « société où les femmes brillent ».  Le pays a soutenu le projet d’ONU-Femmes au Kenya pour promouvoir la participation des femmes au niveau communautaire en les formant à la prévention et à la réaction contre la radicalisation violente.  Il a aussi a contribué au renforcement des capacités et de la représentation des policières en Afghanistan, pour les aider à fournir une protection effective aux femmes victimes de violence. 

Le Japon essaie également de renforcer la coopération dans de nombreux domaines.  Il est l’un des principaux donateurs du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, pour un montant total de 9,5 millions de dollars, et des résultats ont pu être constatés en République démocratique du Congo.  Le Japon soutient également le programme « Leadership, autonomisation, accès et protection des femmes dans la riposte aux crises » d’ONU-Femmes, à hauteur de 8,7 millions de dollars en 2018.  Enfin, le Japon a choisi Sri Lanka comme pays partenaire dans le cadre de l’Initiative de partenariats du G7 pour les femmes, la paix et la sécurité et souhaite élargir son assistance aux femmes touchées par le conflit dans ce pays.  Pour conclure, M. Bessho a fait savoir que le Japon accueillera l’Assemblée mondiale pour les femmes à Tokyo en mars 2019.

Mme PAULOMI TRIPATHI (Inde) a estimé que le problème des femmes dans les processus de paix et de sécurité doit être pris dans un contexte économique et social plus large.  Il est largement admis que prendre en compte les sexes des personnes pour bâtir des sociétés résilientes et pacifiques a des effets positifs, a-t-elle assuré en prônant un travail normatif à cet égard.  L’Assemblée générale doit se concentrer sur le développement et l’égalité entre les sexes pour mettre en place des sociétés pacifiques et résilientes, et le Conseil de sécurité doit faire tous les efforts nécessaires pour réaliser l’autonomisation des femmes, a-t-elle poursuivi.  Elle a ajouté que la coopération internationale pour poursuivre les criminels est essentielle.  En Inde, a-t-elle indiqué, le discours sur l’autonomisation des femmes a progressé, et de plus en plus de femmes participent aux processus politiques.  L’Inde a honoré son engagement vis-à-vis de l’ONU, à savoir que les femmes représentent 15% de ses troupes fournies pour le maintien de la paix.  Partenaire d’ONU-Femmes, l’Inde est prête à coopérer avec ses partenaires pour des sociétés pacifiques, résilientes et ouvertes à toutes et tous, a assuré Mme Tripathi.

M. GUILLERMO FERNANDEZ DE SOTO (Colombie) s’est félicité que le processus de paix en Colombie ait été cité comme exemple positif de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), même si beaucoup de problèmes restent encore à surmonter.  Reconnaissant l’indispensable participation et autonomisation politique et économique des femmes, il a mis en avant deux réussites qui ont marqué les deux premiers mois du Gouvernement du Président Ivan Duque: pour la première fois, une femme est vice-présidente de la République, en charge également de la promotion de l’égalité entre les sexes, et le Président a formé le premier Gouvernement paritaire de l’histoire de la Colombie. 

Le délégué a annoncé que le nouveau Plan de développement de la Colombie comprendra un chapitre sur l’égalité hommes-femmes, un plan pour garantir une vie libre de violences, la prévention des grossesses adolescentes, la création d’un observatoire sur le genre et l’attention aux victimes du conflit.  Le Président a également exprimé l’intention d’arriver rapidement à de meilleures normes de participation des femmes dans les postes à responsabilité des forces armées.  Attentif à la préoccupation manifeste de la société civile au sujet des menaces et assassinats de militantes des droits de l’homme, le Gouvernement va redoubler d’efforts pour renforcer le cadre institutionnel et les mesures de protection, et accélérer les enquêtes.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a regretté que le rôle crucial des femmes pour la paix et la sécurité soit souvent négligé.  Il a estimé qu’un nombre suffisant de cadres et de règlements existent mais que leur mise en œuvre reste malheureusement limitée.  Le nombre de femmes Casques bleus n’a pas radicalement changé depuis 10 ans, passant de 2 à 4%, et seulement 28% de femmes sont déployées sur le terrain à l’ONU.  Doter les femmes d’autonomie économique et politique doit être au cœur des efforts, a continué le représentant, assurant que l’on doit faire mieux pour la protection des femmes qui défendent les droits de l’homme.  Pour cela il faut aussi garantir un financement suffisant au programme Femmes, paix et sécurité.  Quant au rôle des femmes dans le secteur de la sécurité, il ne doit pas être sous-estimé.  En tant que coprésidente du Groupe des amis de la réforme du secteur de la sécurité, la Slovaquie travaille en étroite collaboration avec le Groupe des amis de l’égalité entre les sexes pour explorer les opportunités de renforcer le soutien de l’ONU dans ces domaines.  C’est seulement avec une participation accrue des femmes que la confiance du public dans le secteur de la sécurité se raffermira dans les zones d’après-conflit.

Mme RAZIYE BILGE KOÇYIĞIT GRBA (Turquie), qui parlait au nom du groupe MIKTA (Mexique, Indonésie, Corée, Turquie, Australie), a assuré que pour ces pays l’autonomisation des femmes était essentielle, y compris pour qu’elles accèdent à des postes de décisions; c’est une façon d’augmenter les chances de succès dans les pourparlers de paix entre parties prenantes.  Ce groupe de pays a aussi réaffirmé son attachement à l’objectif de l’égalité entre les sexes dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le groupe a salué les différentes résolutions de l’ONU promouvant un cadre normatif pour l’autonomisation des femmes sur la question Femmes, paix et sécurité. 

Malgré ces progrès, des défis demeurent, les violences sexuelles étant devenues une arme de routine dans les conflits.  Le groupe a souligné que les violences sexuelles et les violences sexistes ont un lien direct avec l’inégalité entre les sexes, la pauvreté, l’exclusion et la discrimination.  Le groupe a donc appelé à agir sans délai pour traiter les causes profondes des conflits, mais aussi pour assurer la promotion de l’égalité des sexes.  La représentante a cité une statistique d’ONU-Femmes rappelant que 90% des victimes de conflits étaient des civils, une catégorie où les femmes et les enfants sont davantage représentés que les hommes.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a reconnu que la question des femmes et de la paix et de la sécurité est devenue un facteur puissant pour assurer la féminisation de la paix dans un environnement d’après-conflit.  Mais les femmes sont encore généralement « invisibles » et exclues des processus et des négociations de paix.  Les cultures patriarcales et les structures de pouvoir discriminatoires continuent d’inhiber les efforts pour une paix inclusive, les droits des femmes et la prévention effective des conflits. 

Mme Lodhi a tenu à souligner le fait que le Conseil de sécurité doit joui son rôle de maintien de la paix et de la sécurité en se focalisant sur les causes des conflits, en particulier les conflits prolongés comme le Jammu et Cachemire et la Palestine.  Ensuite, la communauté internationale doit accorder la même attention au sujet du jour qu’aux quatre piliers que sont la prévention, la participation, la protection et le relèvement.  Par ailleurs, les institutions nationales des droits de l’homme sont un lien essentiel dans la chaîne de responsabilité en ce qui concerne les violations des droits des femmes ainsi que leur prévention, et les efforts pour appuyer leur travail devraient être soutenus.  Enfin, pour une plus grande participation des femmes aux mandats de maintien de la paix, les perspectives sexospécifiques doivent être pleinement intégrées dans le paradigme de la consolidation de la paix afin de renforcer « l’environnement de protection », a proposé la déléguée. 

Mme MARI SKÅRE (Norvège), a d’abord rappelé les progrès concernant la question des femmes et de la paix et de la sécurité, avant d’estimer qu’à l’approche du vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000), il fallait davantage.  Les femmes sont sous-représentées partout et à tous les niveaux du maintien de la paix, a-t-elle déploré.  Elle a appelé à établir des liens entre les médiations pour la paix, à veiller à ce que les mécanismes d’inclusion complètent, plutôt que remplacent, les efforts visant à inclure les femmes dans le circuit officiel, à approfondir l’analyse des conflits avec une perspective de genre et à soutenir l’intégration des questions de genre dans les opérations de paix. 

Notre appui à la réforme de l’ONU, d’ONU-Femmes, du Département des affaires politiques et de celui des opérations de maintien de la paix fait partie de notre réponse, a ajouté la représentante.  Comme les réseaux de médiatrices régionales se trouvent actuellement à New York en quête de coopération, nous devons préparer le terrain pour des processus inclusifs dès les débuts des pourparlers de paix, a encore déclaré Mme Skare, qui a estimé qu’un poste de Conseiller en égalité des sexes devrait être établi au siège de chaque opération de maintien de la paix. 

Mme BESIANA KADARÉ (Albanie) s’est réjouie que, depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), des progrès importants aient été accomplis en matière d’égalité des sexes et que les États Membres aient progressivement intégré les principes et obligations découlant du texte dans leurs politiques nationales. 

Cependant, a remarqué Mme Kadaré, un fossé demeure entre les déclarations sur le papier et la réalité sur le terrain.  « Les faits parlent d’eux-mêmes: de 1990 à 2017, seulement 2% des médiateurs dans les processus de paix officiels étaient des femmes », a-t-elle déclaré, dénonçant une « mentalité trop masculine » dans les relations internationales.  L’Albanie souhaite donc que soient renforcés l’engagement de la communauté internationale et la coopération entre l’ONU, la société civile et les États Membres, pour produire un impact sur le terrain. 

Pour sa part, l’Albanie a beaucoup progressé, a affirmé Mme Kadaré.  En septembre dernier, elle a lancé son premier plan d’action national d’application de la résolution 1325 (2000).  Le pays a rassemblé la société civile et les groupes de défense des femmes pour renforcer la durabilité de ce plan d’action, a-t-elle expliqué.  Par ailleurs, le nombre de femmes parlementaires est monté à 41, soit 29,3% des élus nationaux.  Le gouvernement actuel a garanti la parité, et à la tête du Ministère de la défense se trouve désormais une femme.  Le nombre d’ambassadrices a lui aussi augmenté, passant à 26%, et les femmes consuls à 33%: du jamais vu en Albanie, a fait observer la représentante. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a estimé qu’il fallait redoubler d’efforts pour augmenter la représentation et la participation des femmes dans tous les processus de construction de la paix et la prévention des conflits et à tous les niveaux de prise de décisions.  Le représentant a souligné que l’éducation est un facteur essentiel et que la garantie d’un accès à l’éducation durant les conflits est un objectif fondamental qui contribue à protéger les femmes et les filles des risques des conflits. 

Avec la Norvège, l’Argentine a organisé, en 2017, la deuxième Conférence sur des écoles sûres, a indiqué le représentant, avant d’encourager tous les États Membres à endosser la Déclaration sur des écoles sûres.  En ce qui concerne les actions concrètes pour mettre en œuvre la résolution 1325 (2000), le Ministère des relations extérieures de l’Argentine a lancé, avec le Ministère de la justice et des droits de l’homme, la mise en place d’un réseau fédéral de médiatrices avec une perspective de genre, composé de 50 professionnelles.  De la même manière, le Ministère des relations extérieures, en coordination avec l’ambassade du Canada et l’ONG Réseau de sécurité et de défense de l’Amérique latine (RESDAL), a lancé un projet de diagnostic sur l’état des lieux par rapport à l’intégration de la perspective de genre dans les 10 ministères impliqués dans la mise en œuvre du Plan national d’action de la résolution 1325 (2000).

M. JORGE SKINNER-KLEÉ ARENALES (Guatemala) a réitéré l’importance du leadership et de la participation des femmes dans la prévention et la solution des conflits et la consolidation de la paix.  Il a jugé nécessaire d’augmenter leur représentation à tous les niveaux de prise de décisions, rappelant que la discrimination reste toujours un obstacle pour les femmes et, par conséquent, pour le développement humain en général.  Une meilleure participation des femmes a des répercussions positives pour affronter quelques-uns des défis les plus urgents, y compris les migrations, les changements climatiques et bien entendu la prévention des conflits. 

M. Skinner-Kleé Arenales a indiqué que le Guatemala a participé activement aux deux réunions des points focaux de Femmes, paix et sécurité, qui ont permis de mettre en place une plateforme pour l’échange d’expériences et de meilleures pratiques au niveau international.  Selon lui, les alliances stratégiques qui ont émergé de ce réseau sont importantes pour atteindre l’objectif d’un monde de sociétés inclusives, pacifiques et protégeant les droits des femmes.  Les femmes jouent un rôle essentiel dans la promotion de la justice, la réconciliation, le désarmement, la démobilisation, la réinsertion sociale, la reconstruction des institutions nationales et la prévention et la résolution des conflits, a conclu le représentant.

M. ARIEL RODELAS PENARANDA (Philippines) s’est réjoui que les femmes de son pays aient contribué significativement au processus de paix entre le gouvernement philippin et le Front de libération islamique moro, en juillet dernier.  Cinq membres de la commission de transition de Bangsamoro étaient des femmes.  « Durant les négociations, les deux panels étaient composés de femmes, qui ont fait avancer l’Agenda des femmes », s’est félicité M. Penarada.  Le représentant a également cité en exemple les « troupes en hijab »: une force policière et militaire spéciale, « qui combat les aspects psychologiques et culturels de la bataille de Marawi ».  La « loi organique Bansamoro » a réservé des sièges de parlementaire aux femmes, et prévoit des protections contre leur exploitation sexuelle.  Les Philippines sont aussi le premier pays au monde à avoir formulé un plan d’action régional sur les femmes, la paix et la sécurité, un plan qui aboutit sur le terrain à des activités et des projets. 

M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a indiqué que son pays, de par son histoire tragique durant la Seconde Guerre mondiale, se sentait particulièrement concerné par le problème des violences contre les femmes en temps de conflit.  C’est pourquoi elle fera tout son possible pour faire avancer l’agenda Femmes, paix et sécurité.  À cet égard, le Gouvernement coréen a récemment lancé l’initiative « action avec les femmes et la paix », qui soutient la protection des femmes et des filles durant et après des conflits armés, et qui vise à renforcer l’autonomisation des femmes dans le cadre de la consolidation de la paix. 

Constatant les progrès de la résolution 1325, M. Cho a déploré le fossé qui existe entre les textes et la réalité.  Les femmes demeurent parmi les groupes les plus vulnérables en temps de conflit; pour y remédier, la Corée a appelé à redoubler d’efforts pour promouvoir les femmes à des postes de dirigeantes, pour qu’elles participent aux processus de paix et de sécurité, un secteur où elles sont encore sous représentées.  Dans ce contexte, il a encouragé les Nations Unies à continuer à travailler dans cette direction, et à augmenter le ratio des femmes dans les troupes de maintien de la paix.  En République de Corée, la représentation nationale est composée de davantage de femmes (27,8% dans les cabinets ministériels), tandis que 60,9% des nouvelles recrues dans le secteur diplomatique sont des femmes, a signalé M. Cho. 

Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a félicité Mme Nadia Murad, Ambassadrice de bonne volonté pour la dignité des victimes de la traite des êtres humains de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), et M. Denis Mukwege, tous les deux prix Nobel de la paix 2018, pour leur courage et leur persévérance afin de mettre un terme à la violence sexuelle liée aux conflits.  Mme Murad est un exemple de la façon dont les femmes peuvent devenir de puissants agents de la paix.  La représentante a réaffirmé l’importance de la protection et de la promotion des droits de l’homme, de l’égalité entre les sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et a soutenu leur pleine inclusion et leur participation institutionnalisée à tous les échelons des processus de paix et plus généralement de tous les processus de prise de décisions.  Elle a estimé que l’ONU devrait donner l’exemple et elle a dit croire dans les initiatives globales axées sur les survivants des conflits et de la violence. 

Mme Bogyay a dit soutenir les initiatives de paix de femmes locales et a espéré que le rôle important de la société civile et des organisations dirigées par des femmes soit reconnu.  S’agissant de la participation des femmes dans les missions de maintien de la paix, la Hongrie cherche à augmenter le nombre d’expertes militaires et de policières dans les missions de l’ONU.  Elle a aussi fourni une contribution financière au Fonds d’affectation spéciale à l’appui de la lutte contre la violence à l’égard des femmes.  En conclusion, Mme Bogyay a plaidé pour une approche holistique aux niveaux local, régional et mondial, en utilisant tous les instruments du système des Nations Unies et en coopération étroite avec les acteurs pertinents et avec les gouvernements.

Mme SIMA SAMI I. BAHOUS (Jordanie) a insisté sur la participation entière et véritable des femmes dans les processus de paix et de sécurité et sur l’importance du financement des programmes et mécanismes.  La Jordanie a mis en place un plan d’action national, avec la participation des acteurs de la société civile, qui accorde une place particulière à l’émancipation de la femme et à sa participation dans la réalisation de la paix pérenne.  Ce plan a défini 4 objectifs stratégiques: renforcer la participation des femmes dans les secteurs de la sécurité et militaire, y compris dans les unités de terrain; renforcer la participation active des femmes face au terrorisme et à la violence à travers des initiatives volontaires; fournir des services humanitaires, psychiques, sociaux, médicaux, éducatifs aux femmes et aux secteurs vulnérables de manière sûre; disséminer une culture sociétale qui appuie la parité entre les sexes et préparer les femmes pour qu’elles soient ambassadrices de la paix.  La Jordanie veille en particulier à protéger les femmes de l’extrémisme, soulignant que les conflits ayant secoué la région n’ont pas épargné les femmes.  La représentante a signalé en particulier les difficultés auxquelles la femme palestinienne fait face, victime des politiques israéliennes punitives.  La femme joue un rôle de premier plan dans la paix, a-t-elle conclu. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie), au nom des pays baltes, a fait siennes les recommandations du Secrétaire général sur la nécessité de porter une grande attention aux signes avant-coureurs de violations des droits de l’homme, hélas très souvent dirigées contre les femmes et les filles, quand un conflit menace.  Une paix durable ne sera possible qu’avec une participation significative des femmes dans tous les aspects de la paix et de la sécurité, pas seulement en tant que bénéficiaires des progrès, mais en tant que dirigeantes et agents du changement, a souligné M. Jürgenson.  Il a ajouté qu’une telle participation augmentait les chances de 35% d’un accord de paix d’au moins 15 ans entre les parties prenantes d’un conflit. 

M. Jürgenson a aussi relevé qu’il fallait porter une attention particulière aux besoins des femmes et des filles dans les situations post-conflits, y compris pour assurer leur sécurité physique, leur fournir des soins de santé reproductifs et psychologiques et veiller à ce qu’elles disposent de moyens de subsistance et participent aux décisions.  Dans leurs contributions aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, les pays baltes font tout pour assurer la parité dans les troupes de maintien de la paix, en encourageant les femmes à s’engager dans les forces militaires et de police. 

M. Jürgenson a enfin mis l’accent sur le rôle crucial de la société civile, y compris les ONG représentant les femmes; il s’est réjoui qu’elles interviennent désormais régulièrement dans les séances du Conseil de sécurité.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a rappelé que les États Membres devaient faire en sorte que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité soit au cœur des priorités de la communauté internationale.  Elle a toutefois noté les échecs systémiques pour intégrer les femmes aux missions de maintien de la paix, et le fait qu’elles ne jouent pas assez souvent le rôle de médiateur dans les discussions pour la paix.  « Nous devons exiger la participation des femmes en tant qu’actrices dans les processus de paix à hauteur de 50% au moins. »  Les Émirats arabes unis ont lancé une « politique 100% femmes » pour que la parité soit une composante clef de sa politique et de ses programmes.  Un entraînement militaire et de maintien de la paix pour les femmes arabes va être organisé conjointement par le Ministère de la défense, ONU-Femmes et le syndicat général des femmes des Émirats arabes unis – une première dans la région. 

M. JOSE SINGER (République dominicaine) a relevé que les femmes et les filles ne sont pas seulement des victimes de conflit, mais sont aussi des agents de changement, et a plaidé pour leur participation à tous les niveaux des processus de paix.  Il a cité en exemple l’accord de paix en Colombie, le premier au monde à intégrer la thématique du genre comme axe central.  Cette réussite est en partie due au grand nombre de femmes impliquées dans le processus de paix et, selon lui, l’accord doit servir de cadre de référence et inspirer d’autres processus de paix.  Appliquer la résolution 1325 (2000) ne consiste pas seulement à compter plus de femmes autour de la table, a fait observer M. Singer, mais à intégrer leurs perspectives et celles des organisations de femmes dans les processus de médiation, en assurant leur participation pleine et effective, garantissant ainsi la crédibilité et la durabilité des processus de paix.  Il a donc appelé à redoubler d’efforts pour lever les obstacles structurels à cette participation, de même que pour coopérer avec la société civile et les militantes des droits de l’homme, à la condition de les protéger également des menaces et des violences dont elles sont la cible.  Signe de l’engagement de la République dominicaine pour la « Tolérance zéro » envers les abus et l’exploitation sexuels, le Président Danilo Medina a signé le Pacte global volontaire pour la prévention et la réponse à l’exploitation sexuelle dans les opérations des Nations Unies.

M. LUIS HOMERO BERMÚDEZ ÁLVAREZ (Uruguay) a relevé que les graves violations des droits humains de la femme ne sont pas sporadiques mais au contraire le prolongement d’une autre violence bien ancrée dans les sociétés et qui trouve racine dans les inégalités, la discrimination généralisée envers les femmes et le mépris pour leurs droits fondamentaux, la raison pour laquelle les États doivent prendre des mesures pour traiter de ces causes structurelles.  Pour sa part, le Gouvernement uruguayen a adopté une Stratégie nationale pour l’égalité entre les sexes 2030, élaborée avec la société civile, avec une feuille de route pour influencer les politiques publiques et orienter les actions de l’État.  L’éducation joue un rôle fondamental pour l’autonomisation politique et sociale de la femme, a fait valoir M. Bermúdez Álvarez, pour vaincre la discrimination, pour que les femmes connaissent mieux leurs droits, et pour leur donner la confiance nécessaire pour prendre les décisions qui touchent leur vie.  C’est la raison pour laquelle l’Uruguay a adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  S’agissant des opérations de maintien de la paix, l’Uruguay dispose d’un pourcentage au-dessus de la moyenne d’effectifs féminins déployés et continue à augmenter cette participation.  L’école nationale des opérations de paix de l’Uruguay dispense en outre une formation obligatoire sur des sujets tels que la prévention et la réponse à la violence contre les femmes.  En plus, le Gouvernement applique une politique de « tolérance zéro ». 

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique) a déploré la faible participation des femmes dans les opérations de paix et a appelé les États Membres à l’augmenter.  Pour sa part, le Mexique a fait de gros efforts comme contributeur de troupes et de policiers depuis 2015.  Il a déployé huit femmes de ses forces armées dans les missions de paix en Colombie, au Sahara occidental et au Mali, ce qui correspond à la proportion minimale requise par l’ONU de 15%.  Faisant partie du Réseau global de points focaux sur Femmes, paix et sécurité, le Mexique reconnaît l’importance de ce forum interrégional pour partager des expériences et des bonnes pratiques.  Le programme Femmes, paix et sécurité et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 sont les deux faces d’une même médaille, a estimé la représentante.  Par exemple, traiter des causes fondamentales des conflits et soutenir la paix, c’est comprendre que les femmes doivent disposer d’autonomie économique et jouir totalement de leurs droits humains.  Cela implique des ressources économiques suffisantes, des possibilités de travail, l’élimination de la féminisation de la pauvreté et la liberté de prendre des décisions dans la vie de la communauté.  Sans participation politique, les femmes n’atteindront jamais leur considérable potentiel, a assuré la représentante.  Parvenir à l’égalité entre les sexes dans la sphère publique est une priorité pour le Mexique et, au cours de la nouvelle législature, la Chambre des députés sera constituée d’environ 48,8% de femmes et le Sénat de 49,22%, passant ainsi au quatrième rang mondial.

M. PHILIPP CHARWATH (Autriche) a souligné que les organisations locales et la société civile jouaient un rôle clef dans l’avancement du Programme; l’Autriche a d’ailleurs contribué à hauteur d’un million d’euros au financement du Fonds des femmes pour la paix.  Ce fonds crée des ponts entre l’ONU, les États Membres et la société civile pour aider les organisations de femmes à consolider la paix et apporter un soutien humanitaire aux femmes, là où il fait défaut. 

L’Autriche est convaincue que l’absence de violence est un prérequis pour parvenir à des sociétés pacifiques, a poursuivi M. Charwath.  Dans ce contexte, l’Autriche combat activement la violence des hommes contre les femmes, et à ce titre, a augmenté son engagement contre les mutilations génitales; en 2018, elle a donné plus d’un million d’euros à ses victimes.  De même, l’Autriche reconnait le lien entre les droits humains et la prévention de conflits.  Elle a donc appelé à reconnaitre l’importance du travail des défenseurs des droits des femmes pour la mise en œuvre du programme des femmes, de la paix et la sécurité.  Dans ce contexte, elle a soutenu Amnesty International dans son organisation d’une discussion en marge du Conseil des ministres des affaires étrangères européens qui s’est tenu à Vienne le 28 août 2018.

Pour M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse), permettre aux femmes de participer efficacement aux efforts de consolidation de la paix et prévenir les violences sexuelles contre les femmes, mais aussi contre les hommes, est l’un des objectifs centraux de son engagement et une composante essentielle de son quatrième plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité, adopté récemment.  Ces deux objectifs sont étroitement liés à l’autonomisation des femmes dans les domaines politiques et économiques, a-t-il souligné.

Notant que les femmes devraient, comme les hommes, être « impliquées dans le processus politique dès le début et à tous les niveaux », le délégué a rappelé que l’autonomisation économique des femmes était une condition préalable à leur participation aux processus politiques.  Il a aussi insisté sur l’engagement et l’autonomisation des hommes et des garçons dans le cadre de l’égalité des sexes.  « En nous concentrant exclusivement sur des femmes, nous avons tendance à oublier le rôle des hommes dans l’autonomisation politique et économique.  Or la mise en lumière des privilèges et des vulnérabilités des hommes peut changer la donne », a affirmé le représentant suisse, qui s’est réjoui que, grâce à l’action de nombreux champions de l’égalité des sexes et à l’engagement du Secrétaire général, la communauté internationale soit sur la bonne voie. 

Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a estimé que l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes et des filles exigent davantage d’engagement de la part de la communauté internationale dans son ensemble.  Quant à elle, l’Italie a placé l’égalité au cœur de sa politique étrangère et a organisé l’année dernière la première réunion ministérielle du G7 entièrement consacrée au genre.  En 2018, dans le cadre de sa présidence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’Italie applique une perspective de genre dans toutes ses initiatives.  Le pays, a ajouté Mme Zappia, fait aussi partie du cercle de dirigeants du Secrétaire général et il est le principal donateur du Fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles. 

Quant à assurer une participation significative des femmes tout au long du cycle de paix, l’Italie a lancé l’année dernière, lorsqu’elle assurait la présidence du Conseil, le Réseau des femmes médiatrices pour la Région de la Méditerranée, qui a deux objectifs: la prévention et la médiation d’une part, le renforcement des capacités d’autre part.  En ce qui concerne les opérations de maintien de la paix, l’Italie fournit une formation de qualité et des cours spécialisés pour les soldats de la paix dans un Centre d’excellence à Vicenza, a fait savoir Mme Zappia.  En venant à l’application du principe de responsabilité, elle s’est félicitée des avancées de ces dernières décennies et a souhaité que le Conseil fasse de la violence sexuelle un critère automatique pour imposer des sanctions. 

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a jugé nécessaire de protéger les femmes en situation de conflit et de promouvoir leur autonomisation qui est essentielle pour la consolidation de la paix et le règlement des conflits.  Les femmes comptent parmi les principales victimes des invasions étrangères et du terrorisme dans la région du Moyen-Orient, a-t-il noté, en évoquant le sort de la Palestine et plus particulièrement de la bande de Gaza, où « les femmes sont victimes du bouclage de la zone » et des « bombardements israéliens ».  Dans une région aussi instable, « il y a peu de place pour l’autonomisation des femmes, hélas », a déploré M. Al Habib: « ce que veulent les femmes, c’est rester en vie; leur autonomisation est un problème secondaire ».  En tant que « victime d’agressions étrangères », l’Iran attache une grande importance aux femmes qui participent à la vie politique iranienne à l’occasion d’élections, non seulement en tant qu’électrices, mais aussi en tant que candidates.

Mme EYNAT SHLEIN (Israël) a fait valoir qu’Israël avait été le premier pays à mettre en œuvre des éléments de la résolution 1325 dans sa législation nationale.  Le pays est membre de la Commission de la condition de la femme et du Groupe des amis de la 1325 et sera l’année prochaine membre du Conseil d’administration d’ONU-Femmes.  Depuis 2003, le Centre de formation Golda Meir Mount Carmel a organisé 36 séminaires sur le rôle des femmes dans la résolution de conflits et la construction de la paix, qui encouragent le dialogue entre les femmes israéliennes et palestiniennes.  Pour Israël, les éléments essentiels de la réussite de tout processus décisionnel, en particulier dans les domaines de la paix et de la sécurité, sont la coopération, les partenariats, le partage d’expériences et la création d’opportunités.  La délégation a cité un article publié en août 2018 par le Dr Jana Krause de l’université d’Amsterdam, qui montre que la participation active des femmes aux négociations de paix débouche sur de meilleurs accords, sur des taux plus élevés de mise en œuvre de ces accords et sur une paix plus durable.  Pour un avenir meilleur, il faut adopter une approche plus inclusive des processus de paix, a-t-elle conclu.

Mme MARA MARINAKI de l’Union européenne a dit que sa délégation se concentre sur quatre priorités sur la question « Femmes, paix et sécurité ».  En premier lieu, elle met l’accent sur la participation politique des femmes et le leadership.  Il est important, a dit la représentante, d’assurer que les femmes et les filles dans les situations fragiles et après-conflits, affectées et touchées par les conflits, puissent participer de manière égale et équitable dans toutes les sphères politiques, économiques et sociales de leurs sociétés.  C’est la condition préalable à la création de sociétés inclusives et pacifiques, au développement durable et à la paix.  En deuxième lieu, l’Union européenne donne la priorité à la lutte contre la violence sexuelle en période de conflit et appuie les actions de l’ONU dans ce domaine.  En troisième lieu, l’Union œuvre à la promotion des politiques proactives pour l’autonomisation économique des femmes, ce qui aboutit à des rendements considérables pour les économies et les sociétés.  La quatrièmement priorité de l’Union, a ajouté Mme Marinaki, est le renforcement des cadres nationaux de mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité de ses États membres. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a plaidé pour impliquer davantage les femmes, afin qu’elles deviennent des actrices de la paix au sein de leur communauté et de leur pays.  Pour ce faire, le représentant a recommandé que le Conseil de sécurité soit informé de la situation sur le terrain, notamment grâce à des réunions régulières d’information par des titulaires de mandats de procédures spéciales, par la prise en compte des recommandations du Groupe informel d’experts et l’engagement avec des organisations de femmes lors des visites de terrain effectuées par le Conseil. 

Pour le représentant, il faudrait examiner la manière d’utiliser les sanctions à titre dissuasif contre la violence sexuelle.  Mais les femmes doivent aussi être plus nombreuses dans les opérations de maintien de la paix et dans la réforme du secteur de sécurité.  Il faut par ailleurs appuyer davantage les conseillers pour l’égalité des sexes dans le cadre des mandats actuels.  Il faut enfin protéger les défenseurs des droits des femmes et autonomiser les femmes en tant qu’actrices locales. 

M. Pecsteen de Buytswerve a préconisé d’éliminer les obstacles à la participation des femmes aux processus et accords de paix et d’identifier tous les domaines où l’on peut agir davantage.  En conclusion, il a fait observer que la Belgique mettait actuellement en œuvre son troisième plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité. 

Mme MARIE CHATARDOVÁ (République tchèque) s’est félicitée que les délégations s’emparent de plus en plus du sujet de la participation des femmes au sein des sphères publiques.  Pour lutter contre les stéréotypes et les normes sociales, et mettre en œuvre dans les entreprises le Programme Femmes, paix et sécurité, la République tchèque a mis en place son premier plan d’action national sur le sujet, afin de parvenir à un équilibre professionnel entre hommes et femmes et mettre fin aux discriminations.  Le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec le monde universitaire et encourage les États Membres à faire de même.  Le droit à participer aux affaires publiques est une liberté fondamentale liée aux droits de la personne, a insisté la déléguée.  La République tchèque a choisi l’objectif 16 de développement durable (Paix, justice et institutions efficaces) dans le cadre de sa présidence de l’ECOSOC, et à ce titre, elle a attaqué de front les inégalités entre hommes et femmes dans diverses régions du monde comme en Zambie, au Pakistan et Sri Lanka; elle a aussi participé au projet de renforcement des capacités pour supporter l’augmentation du nombre de femmes dans les rangs des forces armées jordaniennes.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a dit que l’Église catholique a toujours défendu la dignité et les droits de l’homme des victimes des conflits et des urgences humanitaires.  Elle offre notamment une protection physique ainsi qu’un soutien moral et spirituel; elle travaille avec la police des frontières; elle facilite l’accès à l’aide judiciaire et humanitaire.  Le Saint-Siège, a ajouté le nonce, appuie les efforts pour assurer que chaque femme profite de l’aide lorsque c’est nécessaire.  Mais il a précisé que le Saint-Siège ne peut pas accepter comme une solution appropriée les services qui promeuvent et fournissent l’avortement tels que ceux inclus dans le Dispositif minimum d’urgence en santé reproductive (DMU).  « L’aide humanitaire ne devrait jamais être envisagée ou menée contre le droit à la vie: l’avortement n’est jamais une solution sûre. »  Le nonce a plaidé pour que les plus jeunes membres de la famille humaine ne soient pas discriminés sur la base de situations d’urgence de migration, de conflit ou de catastrophe.  Il a rappelé les propos du pape François qui a dit que « les êtres humains sont les fins en soi »; ils ne sont jamais les moyens pour résoudre d’autres problèmes. 

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana) au nom du Réseau des dirigeantes africaines, a applaudi la création d’un Groupe d’experts informels chargés du Programme Femmes, paix et sécurité dans des régions sensibles du monde.  Des missions conjointes de l’ONU et de l’Union africaine, en RDC et au Nigéria, ont permis d’intensifier la mise en œuvre du Programme et de donner une voix aux femmes et aux filles qui en étaient privées par la guerre.  Le Réseau des dirigeantes africaines a adopté un plan d’action stratégique pour développer des activités de formation et augmenter le nombre de femmes au sein des forces militaires des troupes de maintien de la paix.  « Les femmes appartenant à notre réseau ont montré les preuves de leur efficacité », a assuré Mme Pobee: elles méritent un appui plein et entier en tant qu’actrices de la paix et du développement économique.  Le réseau des dirigeantes africaines veut garantir le développement des réseaux de femmes dirigeantes, avec l’appui de l’Union africaine et d’ONU-Femmes.  Mme Pobee a réclamé la présence de davantage de femmes « aux tables où les décisions sont prises ».

Parlant ensuite en sa capacité nationale, au nom du Ghana, Mme Pobee a énuméré les progrès enregistrés dans le cadre du Programme Femmes, paix et sécurité: la première femme du pays brigadier général, la première commissaire électorale, 21 femmes au Conseil national de la paix, et des femmes à des hauts postes du pouvoir judiciaire.  Le Gouvernement ghanéen a mis en place un processus d’action pour relever les défis et combler les lacunes relevées lors de la mise en œuvre du précédent plan.  Dans le cadre du plan d’action régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Ghana continue d’appuyer les initiatives sous-régionales, comme à l’Institut des femmes pour la paix au centre d’entrainement international Kofi Annan, qui a entrainé des femmes du Libéria à l’observation du bon déroulement des élections dans leur pays. 

M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili) s’est félicité que 76 pays, parmi lesquels le Chili, aient adopté des plans d’action pour mettre en œuvre la résolution 1325.  Dans le même temps, le représentant a regretté que les objectifs de la résolution soient loin d’être atteints.  Pour sa part, le Chili a placé le programme Femmes, paix et sécurité au cœur de sa politique extérieure multilatérale et il a été le premier pays de la région à adopter un plan d’action national en 2009.  Son troisième plan (2019-2022) en cours d’élaboration vise à renforcer davantage le rôle de la femme dans les contextes de négociation, de médiation, de construction et de consolidation de la paix et il intègrera des mécanismes de suivi, d’évaluation et d’établissement des responsabilités.  Le champ d’action s’étendra aux situations de catastrophe naturelle, d’aide humanitaire et de déplacement de personnes, et ce avec la collaboration active de la société civile et d’autres institutions.  Le Chili coparraine aussi le Réseau de points focaux nationaux.  Pour conclure, M. Skoknic Tapia a espéré que l’attribution du prix Nobel de la paix à Nadia Murad et Denis Mukwege pour leurs efforts visant à mettre fin à la violence sexuelle comme arme de guerre inspirera le Conseil de sécurité et la communauté internationale.

M. MARC-ANDRÉ BLANCHARD (Canada), au nom du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, a commencé par se réjouir de la désignation d’une femme à la présidence de l’Éthiopie, qualifiant cet évènement d’« exemple pour tous ».  Il a ensuite partagé les préoccupations des autres délégations quant à la stagnation des données sur la représentation des femmes au sein des processus de maintien et de consolidation de la paix.  Ce manque persistant devrait demeurer une priorité pour les Nations Unies.  Et pour ces raisons, les États membres de ce Groupe se réjouissent des efforts déployés par le Secrétaire général, notamment à travers sa stratégie de la parité à l’échelle du système.  Bien que le Conseil de sécurité n’ait pas encore atteint la parité parmi les représentants des États Membres, le Groupe apprécie qu’il fasse davantage participer les femmes de façon systématique à ses travaux. 

En sa capacité nationale, le représentant du Canada a prévenu qu’il n’y aura pas de miracle.  « Il ne suffira pas de mettre une médiatrice par ici ou une conseillère en égalité des sexes par là.  La discrimination politique, économique et socio-structurelle entre les genres existe dans tous nos pays », a-t-il dit, plaidant pour des investissements durables et pour la mise à disposition de ressources pour obtenir des résultats transformateurs. 

S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. DANG DINH QUY (Vietnam) a fait état de l’adoption, en novembre 2017, d’une déclaration conjointe sur la promotion des femmes, de la paix et de la sécurité au sein de la sous-région, dans laquelle ses États membres encouragent l’intégration d’une perspective « genre » dans l’ensemble des initiatives et stratégies de prévention des conflits et de reconstruction post-conflit.  En outre, à l’échelon régional, l’ASEAN est déterminée à disséminer une perspective sexospécifique dans les trois piliers, à savoir sécuritaire et politique, économique, et socioculturel.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a indiqué que la politique de développement internationale de l’Irlande cherche à amplifier la voix des femmes et des filles dans les processus de développement à tous les niveaux.  Les femmes sont fortes dans la médiation et le maintien de la paix, a-t-elle argué en disant vouloir tirer parti de cette capacité.  L’Irlande est un membre fondateur et donateur important du Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, tandis que les forces de défense irlandaises ont un plan d’action ambitieux sur cet agenda qui commence à donner ses premiers fruits.  Les préparatifs du troisième Plan d’action national sur la résolution 1325 (2000) battent leur plein, a ajouté la représentante en précisant ses priorités: la prévention de l’extrémisme violent, les expériences des migrants et des réfugiés et la question de la masculinité.  Pour l’Irlande, les appels pour la participation égale des femmes en politique doivent être les mêmes que les appels à la participation égale des femmes à la société et à l’économie.  « Nous voulons voir la fin des obstacles structurels qui freinent l’autonomisation politique et économique des femmes.  Nous devons également continuer à remettre en question la perception des jeunes femmes en tant que victimes passives des conflits », a poursuivi la représentante qui a soulevé la nécessité d’engager les hommes autant que les femmes dans la mise en œuvre de l’Agenda Femmes, paix et sécurité. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a estimé que l’établissement des responsabilités est un élément essentiel de la lutte contre les violences sexuelles commises en période de conflit.  Même s’il s’est félicité de la création d’un certain nombre de mécanismes de suivi, comme celui établi par le Conseil des droits de l’homme pour le Myanmar pour enquêter sur les violences sexuelles et sexistes perpétrées contre les Rohingya et d’autres minorités, il n’en reste pas moins que « la justice, la paix et l’égalité sont une utopie pour de nombreuses femmes et filles à travers le monde », a-t-il observé.  Aussi est-il nécessaire de mettre en œuvre le plus rapidement possible l’objectif 5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, relatif à l’égalité entre les sexes, de même que les objectifs 5, 10 et 16, a préconisé le représentant.

M. JULIO CÉSAR ARRIOLA RAMÍREZ (Paraguay) a déclaré que la Constitution de son pays accorde et garantit l’égalité des droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels aux hommes et aux femmes.  Le Gouvernement travaille à la promotion des droits de la femme, en tant que facteur de changement, car il considère que cette responsabilité incombe en premier lieu aux États.  Pour cette raison, le Ministère de la femme du Paraguay met en œuvre des politiques publiques tenant compte de la perspective de genre.  Parmi elles, il y a la « Ciudad Mujer », un centre destiné uniquement aux femmes, et dans lequel, elles peuvent trouver plus de 80 services liés à l’éducation de qualité, à la santé sexuelle et génésique, entre autres.  Le féminicide a été inscrit dans le Code pénal, a-t-il ajouté.

M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a encouragé tous les États Membres à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) et les résolutions subséquentes, en rappelant que des dizaines de Portugaises prenaient part à des initiatives de paix, notamment sous les auspices de l’Union européenne.  Le Portugal, a-t-il ajouté, promeut le droit à l’éducation dans les situations d’urgence humanitaire, y compris pour l’enseignement supérieur.  À cet égard, il a mentionné la plateforme mondiale pour les étudiants syriens, ONG fondée en novembre.  Le représentant a appelé les États Membres à signer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles à laquelle se sont déjà ralliés 81 pays, dont le Portugal.  Il a, enfin, cité en exemple Nadia Murad et Denis Mukwege, lauréats du Prix Nobel de la paix, comme symboles de la dénonciation de la violence sexuelle contre les femmes et de son utilisation comme arme de guerre.

M. SURENDRA THAPA (Népal) a déclaré que les femmes peuvent jouer un rôle clef dans les processus de paix en tant que facteur de changement.  C’est pour cela qu’après la signature de l’Accord de paix de 2006, son pays a adopté en 2011 un plan d’action national pour la mise en œuvre des résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008) du Conseil de sécurité.  Un des objectifs de ce plan est d’atteindre le taux de 33% de représentation de femmes dans toutes les institutions du pays, y compris les comités de paix locaux et le Parlement.

M. AMRITH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a déclaré que, jamais dans son histoire, la prospérité politique et économique des femmes n’avait été plus vitale dans le pays qu’aujourd’hui.  Son Gouvernement accorde donc une attention particulière à trois domaines spécifiques, à savoir le renforcement de l’indépendance financière et économique des femmes, l’élimination de la violence contre les femmes et l’engagement des femmes dans la vie publique et politique.  Sri Lanka est également engagée en faveur de la mise en œuvre de projets de consolidation de la paix plaçant la femme au premier plan, en particulier les veuves ayant perdu leur mari lors du conflit qui a sévi dans le pays jusqu’en 2009.  Enfin, Colombo a lancé un Plan national d’action pour les droits de l’homme pour la période 2017-2021, qui réitère l’importance de parvenir à l’égalité entre les sexes.

M. AMAL MUDALLALI (Liban) a rappelé que ce fut seulement en 2013 que Mme Mary Robinson fut nommée comme première femme Envoyée spéciale du Secrétaire général de l’ONU.  « Où sont les femmes Envoyées spéciales pour la paix aujourd’hui? Nous devrions en voir beaucoup plus dans cette pièce et dans le monde entier. »  Le Liban, a dit son représentant, est fermement attaché à une approche inclusive de l’Agenda Femmes, paix et sécurité.  Le Premier Ministre désigné, M. Saad Hariri, qui est le premier à nommer des femmes ministres dans son cabinet, s’est engagé à nommer des femmes ministres dans le prochain gouvernement.  Il a promis de donner un rôle effectif aux femmes de son Cabinet.  « Si le pays avait été remis aux femmes, nous aurions été dans un endroit beaucoup plus agréable aujourd’hui », a dit le délégué en paraphrasant son Premier Ministre.  La Commission nationale des femmes libanaises a tenu six réunions entre avril et juillet 2018 pour élaborer le premier Plan national d’action sur la résolution 1325 qui devrait être approuvé par le nouveau gouvernement, a annoncé M. Mudallali.  En outre, l’armée libanaise est en train d’élaborer son plan stratégique visant à assurer l’égalité entre les sexes.

M. IRINA VELICHKO (Bélarus) a déclaré qu’il ne faut pas sous-estimer les politiques qui ont pour but de renforcer le rôle des femmes dans une série de problèmes internationaux.  Traditionnellement, le Bélarus soutient les initiatives internationales luttant contre des fléaux internationaux comme la traite des femmes.  Le Bélarus, a-t-il ajouté, participe également aux opérations de maintien de la paix.  Parmi les contingents qu’il a déployés au Liban, on compte un grand nombre de femmes, a déclaré la représentante. 

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie) a fait valoir l’Initiative Village de la paix, initiée par l’Institut Wahid, une institution indonésienne qui a coopéré avec ONU-Femmes et le Japon pour autonomiser les femmes au niveau local et renforcer ainsi la résilience des communautés.  Elle a ensuite lancé un plaidoyer en faveur d’une hausse du nombre de femmes soldats de la paix, ce à quoi s’emploie son pays, avec un total de 72 femmes déployées qui sera bientôt porté à 112.  De manière plus générale, la représentante s’est prononcée en faveur d’une intégration des perspectives de genre dans le maintien de la paix à l’ONU, l’Indonésie œuvrant en ce sens grâce à la formation qu’elle dispense dans son centre de formation de Sentul. 

M. FREDERICO SALOMÃO DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) a indiqué que son pays avait lancé cette année son deuxième plan d’action sur la mise en œuvre de la résolution 1325.  Ce plan reprend les quatre piliers de la résolution, tout en tenant compte de la réalité du Brésil en tant que pays en développement.  Depuis l’adoption de ce plan, un jalon important a été franchi, avec l’intégration en 2017 de la première femme dans la haute hiérarchie de l’armée nationale, a fait valoir le représentant avant de signaler aussi la création de programmes de formation de femmes militaires.

Le Brésil a par ailleurs imposé des quotas de représentation des femmes dans les partis politiques, dans les candidates aux élections et dans les temps d’antenne qui leur sont accordés.  Le taux de femmes élues a ainsi augmenté: il est passé de 10% à 15% pour la chambre basse et on compte même une députée autochtone.  Le Brésil reconnaît que la prochaine étape est d’augmenter le nombre de femmes brésiliennes dans les opérations de maintien de la paix.  Il prendra en ce sens des mesures concrètes dans la ligne des propositions du Secrétaire général, a assuré le représentant. 

M. PULE DIAMONDS (Namibie) a jugé encourageants les progrès enregistrés sur la question des femmes, de la paix et de la sécurité, laquelle a donné lieu à sept résolutions du Conseil de sécurité.  Pourtant, a-t-il fait remarquer, l’Étude mondiale réalisée en 2015 pour marquer le 15e anniversaire de la résolution 1325 (2000) a démontré la lenteur de la mise en œuvre de ce texte.  Le délégué a profité de l’occasion pour encourager les États Membres qui s’y emploient à mettre en place des plans d’action nationaux afin d’assurer une application, un suivi et une évaluation structurés, notamment en matière de recrutement des femmes dans les forces armées, d’entraînement des femmes aux négociations et de formation à l’assistance en faveur des femmes victimes de violence. 

Notant que la résolution 1325 (2000) préconise l’inclusion des femmes aux tables de négociation, le représentant a estimé qu’une éducation de qualité et sensible aux conflits pour les femmes et les filles était essentielle pour assurer la participation des femmes aux processus de consolidation de la paix.  Il s’est également félicité que, conformément à cette résolution, le Département des opérations de maintien de la paix (DPKO) ait demandé aux pays contributeurs de troupes de déployer davantage de femmes afin de parvenir à l’objectif d’un part de 15% de femmes au sein des missions de maintien de la paix d’ici à décembre 2018.  Il a indiqué qu’en juillet de cette année, la Namibie en était pour sa part à 13% de femmes déployées, deux autres devant l’être cette année pour atteindre les 15%. 

Le délégué a enfin souligné que son pays est un membre fondateur du Réseau de points focaux pour les femmes, la paix et la sécurité, qui facilite la coordination des États Membres sur cette question et permet des échanges de bonnes pratiques, avec la participation d’ONU-Femmes et d’organisations de la société civile. 

Mme NARJESS SAIDANE, Organisation internationale de la Francophonie – OIF, a expliqué que la Francophonie se situe dans une logique de partage d’expériences et s’efforce de mieux révéler, au Conseil de sécurité, la dynamique de l’espace francophone.  Pour faire avancer l’agenda, il faut, selon elle, dépasser la perception qui voudrait que les femmes aient encore besoin d’être formées et autonomisées pour jouer un rôle.  Elle a ainsi préconisé de déconstruire les normes sociales qui sont à la base de la dévalorisation du rôle de la femme.  Les chefs d’État et de gouvernement de la Francophonie réunis à Erevan, le 11 et 12 octobre 2018 pour leur 17ème Sommet, ont adopté une nouvelle Stratégie pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, des droits et de l’autonomisation des femmes et des filles.

La lutte contre les violences et les discriminations faites à celles-ci est également au cœur des priorités de la Francophonie, a-t-elle poursuivi, rappelant la Déclaration francophone sur ce sujet, suivie en 2013 d’un plan d’action.  C’est aussi une priorité opérationnelle, qui a abouti à un Accord-cadre de coopération avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU sur la question des violences sexuelles en période de conflits.  Cette coopération privilégiera le dialogue politique entre parties au conflit pour la protection et l’accès effectif des victimes et survivantes à la justice, ainsi que la lutte contre l’impunité des auteurs de violence, a expliqué Mme Saidane.  Elle permettra également de renforcer les cadres juridiques nationaux et l’adoption de mesures concrètes, en s’attaquant aux causes profondes, de ces violences et discriminations.  Toujours sur le plan opérationnel, la Francophonie soutient le renforcement de la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix.

M. MOHAMED OMAR MOHAMED GAD (Égypte) a déclaré que, dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1325, son pays souligne la nécessité de créer des cadres institutionnels adéquats pour permettre l’autonomisation des femmes.  L’Égypte déploie des efforts considérables contre l’exploitation sexuelle, notamment dans le cadre d’un programme de formation et de sensibilisation destiné aux militaires, a-t-il fait valoir.  Il a notamment mentionné la publication d’un ouvrage sur la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Le Caire a également pris part au Réseau de dirigeantes africaines, a précisé le représentant, en rappelant que la femme est le principal artisan de la transition vers la paix et le développement. 

M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a jugé fondamental, et ce en dépit de toutes les spécificités, d’adopter une approche globale, qui permettent aux hommes de comprendre le rôle qui leur revient dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Le Gouvernement kenyan a, pour sa part, progressé sur la mise en œuvre de son plan d’action national, en intégrant une approche de genre dans les politiques nationales. 

Des femmes ont été nommées à des postes militaires et envoyées dans les opérations de maintien de la paix.  En 2017, le Kenya comptait 17% de femmes dans ses contingents, bien plus que les 15% exigés, s’est félicité le représentant.

M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a relevé, au nombre des entraves constatées par le Groupe d’experts du Conseil de sécurité sur l’Agenda Femmes, paix et sécurité, la non-garantie des droits socioéconomiques et culturels des femmes, leur faible participation à la politique, la pauvreté et les violences sexuelles qui les affectent.  Selon le délégué, il est prioritaire d’appuyer les droits des femmes et des filles et de promouvoir l’égalité des sexes pour parvenir à une mise en œuvre effective de l’agenda susmentionné.  Il a parlé du « Plan d’action femmes et paix et sécurité » du Luxembourg qui porte sur cinq ans et concerne l’ensemble de son gouvernement.  Ses piliers sont la participation égalitaire à tous les niveaux des processus de paix et de sécurité, la prévention et la protection des violences sexuelles et la promotion de l’Agenda Femmes, paix et sécurité.  Il a précisé que ce plan est complémentaire du Plan national « Égalité » qui promeut l’égalité femmes-hommes dans la prise de décision et dans l’emploi, et qui préconise aussi l’intégration de la dimension du genre dans l’ensemble des politiques du gouvernement. 

Pour M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives), il est temps que le Conseil de sécurité donne la priorité à une perspective de genre dans son diagnostic des risques en matière de sécurité.  Le Conseil doit rendre effective l’application des résolutions concernées et produire une analyse des progrès.  Surtout, le programme pour les femmes, la paix et la sécurité doit faire partie de la boîte à outils habituelle du Conseil de sécurité, en plus de débats comme celui-ci.

Les Maldives, fortes d’une tradition où les décisions sont prises conjointement entre maris et femmes dans les foyers, a toujours connu le suffrage universel, s’est enorgueilli M. Mohamed.  Les congés de maternité et de paternité sont garantis par la loi et le pays ne connaît pas la discrimination à l’emploi ni en milieu scolaire.  Cependant, des progrès restent à faire dans le domaine des femmes aux postes de décision.  Les Maldives prennent des mesures pour inverser la tendance, tant dans le secteur privé que le secteur public, pour que les femmes ne soient pas réduites au choix binaire entre maternité ou carrière. 

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a insisté sur l’urgence d’éliminer toutes formes de discrimination contre les femmes sur les plans physiques, sociaux, économiques et au niveau de la sécurité politique.  Il a assuré que son pays continuait par ailleurs de considérer les femmes victimes des conflits comme une puissante force de diplomatie publique.  À ce titre, a-t-il rappelé, 65% du personnel impliqué dans les processus de paix en Géorgie sont des femmes.  Il a cependant regretté que « l’occupation en cours des régions d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud par la Fédération de Russie mine le processus de paix et impose des conditions de vie difficiles à l’une des parties les plus vulnérables de la société ».  Selon lui, les femmes vivant dans ces zones sont sujettes à des violations systématiques des droits de l’homme, dont le déni de leur droit à la liberté de mouvement, des détentions illégales et des menaces à leur sécurité physique en cas de franchissement illégal de la frontière.  Prenant l’exemple d’une femme, Maia Otinashvili, qui aurait été kidnappée et détenue pendant 10 jours par les forces russes pour avoir « facilité un franchissement illégal de la frontière », le délégué a assuré que 160 femmes sont aujourd’hui illégalement détenues de la sorte. 

Pour promouvoir le rôle de la femme dans la société, Mme MILICA PEJANOVIĆ ĐURIŠIĆ (Monténégro) a déclaré que son pays avait développé une approche globale axée sur leur participation politique accrue, la lutte contre la violence à leur encontre, et leur autonomisation économique.  Elle a ensuite indiqué que son gouvernement s’était doté de mécanismes de suivi de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), en coopération avec ONU-Femmes, et s’apprêtait à adopter un Plan d’action national à cet effet pour la période 2019-2023. 

En outre, le Monténégro travaille étroitement avec le Réseau de points focaux nationaux de l’ordre du jour Femmes, paix et sécurité, ainsi qu’avec le Réseau de femmes médiatrices de la région méditerranée. 

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a informé que son pays a alloué un soutien financier au mécanisme international, impartial et indépendant créé par l’Assemblée générale pour enquêter sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie, dont les crimes sexuels et sexistes. 

Le Qatar est en outre le principal donateur du fonds de contributions volontaires des Nations Unies en faveur des victimes de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.  Avec d’autres partenaires, le pays parraine aussi la première conférence internationale sur la participation des jeunes à la paix, qui se tiendra en mars prochain à Helsinki. 

M. CRAIG J. HAWKE (Nouvelle-Zélande) a indiqué que, chaque année, son pays organise la conférence annuelle de l’Association des centres de formation au maintien de la paix, qui comprend des modules de sensibilisation à la thématique femmes, paix et sécurité, conférence qu’elle préside actuellement. 

Par ailleurs, les femmes et les filles doivent pouvoir exercer un contrôle sur leur propre santé sexuelle et reproductive, a ajouté le délégué, avant de se féliciter de l’adoption de la résolution 39/10 du Conseil des droits de l’homme sur la mortalité maternelle évitable dans les contextes humanitaires. 

Mme ANN SUDMALIS (Australie) a parlé du projet de recherche « Vers une paix inclusive » financé par le Gouvernement et focalisé sur les femmes, la paix et la sécurité dans la région indopacifique.  La recherche montre que l’un des facteurs pour assurer des accords de paix durables est la présence active des organisations des femmes.  Elles sont sur le terrain avant, durant et après les conflits.  Elles servent de médiateurs, à résoudre les conflits, à recoudre les relations communautaires et à rétablir la confiance dans les institutions.  La recherche montre aussi que la participation effective des femmes est rarement appuyée ou financée.  Trop souvent, les arrangements institutionnels excluent les femmes des processus clefs et les mesures comme les quotas ne suffisent pas à compenser leur sous-représentation. 

Les femmes de notre région veulent des solutions pratiques, a poursuivi la représentante: avoir accès aux soins infantiles, aux transports sûrs et aux toilettes; être consultées sur le calendrier des réunions et voir financer le voyage de leurs compagnons; être protégées contre la violence de ceux qui sont opposés à leur activisme et à leur leadership.  L’Australie étudie également les dimensions sexospécifiques de l’extrémisme violent dans sa région et le rôle différent que les femmes jouent et pourraient jouer pour lutter contre.  Les résultats de la recherche alimenteront le deuxième plan d’action national de l’Australie attendu en 2019, a annoncé la représentante.  Enfin, l’Australie a formé 101 conseillers militaires sur la problématique hommes-femmes et a créé 10 postes à temps plein de conseillers sur ce sujet.

Mme VERÓNICA GARCÍA GUTIÉRREZ (Costa Rica) a déclaré que son pays déploie des contingents composés en majorité de femmes et adopte toujours une approche de genre dans les processus de paix et de sécurité.  Le Costa Rica traite, par ailleurs, aussi de la question de la violence armée contre les femmes et a toujours souligné l’importance du désarmement, de la non-prolifération et du contrôle des armes. 

Car la paix et la stabilité ne peuvent être atteintes sans des politiques solides qui répondent aux questions de genre, a affirmé la représentante, ajoutant que son pays avait reconnu la nécessité d’institutionnaliser cette approche.  Le Costa Rica l’a fait à travers l’élaboration et l’adoption d’un instrument multidimensionnel intégral dénommé « Politique d’égalité effective entre les femmes et les hommes » et couvrant la période 2018-2030, a indiqué la délégation. 

M. DEE-MAXWELL SAAH KEMAYAH (Libéria) a souhaité une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions, de consolidation de la paix, de négociation et de maintien de la paix dans le monde.  « Il est de plus en plus clair qu’aucune société n’a opéré une sortie de conflit avec succès sans que les femmes en soient parties prenantes », a-t-il souligné.  Les femmes au Libéria accèdent de plus en plus à des postes décisionnels, notamment dans l’armée et la police, s’est félicité M. Kemayah en nommant la Cheffe d’État-major des forces armées du Libéria et l’Inspectrice générale adjointe de la Police nationale libérienne. 

Le représentant a loué l’équipe de pays des Nations Unies, ONU-Femmes, le Fonds pour la consolidation de la paix, les partenaires internationaux et les parties prenantes pour leur soutien dans les efforts du Libéria pour l’autonomisation des femmes dans tous les secteurs de la société.  Il s’est, enfin, dit impatient de participer et de soutenir le Groupe des Amis du Réseau des femmes d’influence en Afrique, le Réseau de coordonnateurs pour les femmes et la paix et la sécurité et le Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité aux Nations Unies.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a indiqué que son pays participe activement à l’initiative sur la promotion de la médiation en Méditerranée, lancée par son pays et l’Espagne en 2012, ainsi qu’au Réseau des points focaux sur la thématique « Femmes, paix et sécurité », créé par l’Espagne en 2016, et au Réseau des femmes méditerranéennes lancé par l’Italie en 2017.  Le représentant a fait valoir l’emploi de centaines de femmes comme guides spirituels musulmans (Morchidates) dans les mosquées ou institutions religieuses à travers le Maroc: « Ces femmes donnent des lignes directrices sur les véritables principes pacifiques de l’islam, basée sur la tolérance et l’acceptation de l’autre », a-t-il déclaré.  En outre, la délégation a souligné que son pays déploie régulièrement du personnel féminin au sein de missions de maintien de la paix comme celle en République démocratique du Congo, la MONUSCO.  D’ailleurs, a ajouté le représentant, le Maroc entend satisfaire, avant la fin de 2018, l’objectif de 15% de femmes parmi les experts en missions et observateurs militaires dans cette catégorie. 

M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a déclaré soutenir toutes les mesures ayant pour but de mettre en œuvre la résolution 1325 (2000), y compris celles visant à combler les lacunes tant sur le plan national qu’international.  C’est pour cette raison que son gouvernement a adopté une approche globale, incluant l’alignement de sa législation avec ladite résolution et la présentation volontaire de rapports devant le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. 

Par exemple, en 2012, le Gouvernement a créé le fonds de développement des femmes, destiné à financer des projets qui accroissent l’autonomie économique des femmes, a indiqué le délégué.  Sur le plan international, la Thaïlande participe à diverses missions de maintien de la paix.  Là, 20% des contingents thaïlandais sont composés de femmes, a-t-il assuré.

M. VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a fait l’historique des mesures prises par le Gouvernement rwandais pour contribuer à la prévention du conflit au Rwanda après le génocide des Tutsis en 1994, pour dire qu’il est important de reconnaître l’importance des solutions nationales et des mécanismes traditionnels pour résoudre les conflits.  Des efforts doivent être entrepris pour impliquer les « gardiens de la paix » qui sont généralement les personnes âgées et les femmes.  « Pour que nous puissions faire progresser l’égalité des sexes et autonomiser les femmes politiquement et économiquement, et dans le contexte de la paix et de la sécurité et du relèvement après le conflit, nous devons prendre quelques mesures », a prôné le représentant en citant, par exemple, la création de plateformes de partages des meilleures pratiques comme « FemWise-Africa » et le Réseau des dirigeantes africaines.  Pour la mise en œuvre effective et réussie de l’Agenda Femmes, paix et sécurité, il a conseillé de mieux évaluer les progrès accomplis sur le terrain et au Siège des Nations Unies.  Il a ainsi suggéré de faire le suivi des progrès dans le cadre de l’évaluation des performances de tous les chefs des missions de maintien de la paix et des missions politiques de l’ONU. 

Mme SAADA DAHER HASSAN (Djibouti) a attiré l’attention sur les répercussions des changements climatiques sur la sécurité, qui touchent les femmes de manière disproportionnée, en limitant leur accès aux ressources de base telles que l’eau.  Dès lors, il importe d’adopter des stratégies adéquates d’évaluation et de gestion des risques, a préconisé la représentante.  Son pays, a-t-elle avancé, a œuvré en faveur de la participation des femmes aux processus d’autonomisation économique, à la gouvernance et à la justice.  « Beaucoup de politiques publiques sectorielles en ce sens ont été accomplies et font l’objet d’un programme national sur le genre.  L’article 1er de la Constitution djiboutienne a instauré l’égalité entre l’homme et la femme concernant les droits civiques et politiques », a-t-elle ajouté, en faisant valoir que les femmes représentent 25% des personnels de l’administration publique. 

Mme SOFYA SIMONYAN (Arménie) a évoqué un moment fort de l’histoire du pays.  Il s’est déroulé ce printemps, quand les citoyens arméniens, les femmes et la jeunesse en tête de cortège, ont exercé leurs libertés fondamentales d’expression, d’opinion et de culte.  Le Gouvernement a depuis encouragé les femmes à participer aux affaires publiques de la nation et à son processus politique.  Dans cet élan, il a donné une priorité fondamentale aux réformes accélérant l’égalité entre les sexes, une plus grande inclusion des femmes dans les processus de prise de décisions et leur représentation politique.  Un plan d’action national, inspiré du programme pour les femmes, la paix et la sécurité, en est au stade final. 

Plus tôt ce mois-ci, l’Arménie a accueilli le Sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie: « l’un des principaux documents adoptés à cette occasion est la Stratégie de la Francophonie pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, des droits et de l’autonomisation des femmes et des filles », a ajouté Mme Simonyan.  Cette Stratégie reconnaît que les femmes, les organisations et les réseaux de femmes jouent un rôle important dans la promotion de la paix et la préservation des communautés, en particulier dans les situations de conflit, lorsque leurs responsabilités économiques et sociales augmentent.  La Stratégie reconnaît également que la participation des femmes dans les processus de paix crée les conditions favorables à une réelle réconciliation nationale, a conclu la représentante. 

Mme AMARSANAA DARISUNEM, Représentante de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a dit que l’OSCE reconnaît que les dimensions politico-militaires, économiques et environnementales sont étroitement liées aux dimensions humaines de la sécurité.  Elle constate, elle aussi, que la participation significative des femmes dans les processus de paix est un défi.  Elles restent sous-représentées, y compris dans les équipes de négociation de l’OSCE.

Pour combler cette lacune, l’équipe d’appui à la médiation et la section de genre de l’OSCE développent actuellement « une boîte à outils » sur l’inclusion des femmes dans les processus de paix, a expliqué la représentante.  Cette boîte à outils permettra d’identifier de quelles façons les femmes peuvent être engagées dans lesdits processus, dans le contexte de l’appui formel accordé par l’OSCE aux négociations et à la facilitation de dialogues. 

M. HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a déclaré que son gouvernement s’efforce d’accorder les mêmes droits aux hommes et aux femmes, que ce soit en facilitant l’accès de ces dernières au marché du travail ou en garantissant leur participation politique.  « Nous avons lancé une croisade contre les violences sexuelles et sexistes à l’échelle du pays », a-t-elle dit en mentionnant notamment l’adoption d’une loi organique.

Mme PENNELOPE ALTHEA BECKLES, (Trinité-et-Tobago) a rappelé que son pays avait présenté en 2010 à l’Assemblée générale de l’ONU la première résolution sur « Femmes, désarmement, non-prolifération et maîtrise des armements », dans le double objectif de promouvoir l’autonomisation de la femme et en même temps la paix et la sécurité internationales.  Cette résolution, actuellement examinée par la Première Commission de l’Assemblée générale, continue de bénéficier d’un large soutien des États Membres, s’est-elle réjouie.  En tant que membre actuel du Conseil d’administration d’ONU-Femmes, Trinité-et-Tobago veut continuer de travailler de concert avec les États Membres pour la réalisation de l’égalité des sexes à l’échelle mondiale.  Mme Beckles voit dans le plan stratégique d’ONU-Femmes 2018-2021, un important instrument à même de contribuer à la réalisation de cet objectif.  Pour finir, elle a remercié la communauté internationale pour sa confiance dans l’élection, pour la première fois, d’un représentant de son pays au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW).

M. ION JINGA (Roumanie) s’est déclaré satisfait que le prix Nobel de la paix ait été accordé, cette année, à deux personnalités qui défendent et promeuvent les droits de la femme.  Toutefois, il s’est dit extrêmement préoccupé par l’intimidation et les représailles contre les femmes militantes pour la paix et les activistes humanitaires.  

S’agissant de la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix, la Roumanie est d’avis que la présence de femmes officiers dans leurs rangs est importante pour l’efficacité opérationnelle et a un impact sur la pérennité de la paix.  Pour sa part, la Roumanie a atteint un taux de 13% de femmes parmi les contingents déployés au sein des missions de maintien de la paix où elle est présente.

M. CARMELO INGUANEZ (Malte) s’est félicité que les questions de l’autonomisation des femmes, de l’égalité de genre et de participation des femmes dans la vie publique et politique prennent une place de plus en plus centrale dans les travaux du Conseil de sécurité.  À cet égard, il a estimé que la résolution 1325 (2000) et les suivantes sont au cœur des activités du Conseil en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Le représentant a considéré que le rôle des femmes dans la recherche de la paix et de la sécurité ne pouvait être ignoré.  De fait, a-t-il dit, elles devraient non seulement participer librement aux débats locaux et internationaux sur leur avenir mais aussi exercer des fonctions publiques et devenir décisionnaires au sein du gouvernement et de la société.  Elles devraient par ailleurs pouvoir participer sans entrave à des discussions et débats en dehors de leur pays d’origine. 

Dans un nombre écrasant de cas, les femmes souffrent de violences directes et délibérées dans les zones de conflit, a poursuivi M. Inguanez, saluant le fait que la résolution 1820 (2008) du Conseil ait reconnu la violence sexuelle comme une arme de guerre.  Il a également pris note de la préoccupation exprimée par le Secrétaire général au sujet du manque de progrès dans les engagements plus fondamentaux en faveur de la paix et de la sécurité, des droits de l’homme et l’égalité de genre.  Soulignant l’importance de l’égalité de genre, laquelle est renforcée par l’objectif 5 du Programme 2030, le représentant a indiqué que son pays avait œuvré à sa promotion au cours des dernières années.  Malte a ainsi promulgué cette année une nouvelle loi contre les violences sexistes et domestiques, qui incorpore les dispositions de la Convention d’Istanbul, a-t-il indiqué. 

Mme DANIELA ALEJANDRA RODRÍGUEZ MARTÍNEZ (Venezuela) s’est dite convaincue que la participation accrue des femmes à tous les processus de paix est une priorité pour garantir la paix durable dans les sociétés postconflit, à condition toutefois que les ressources suffisantes leur soient affectées.  Davantage d’expertes doivent être nommées dans les opérations de maintien de la paix, dans lesquelles toutes les atteintes aux droits de l’homme doivent faire l’objet d’une politique de tolérance zéro, a préconisé la représentante.  Elle a plaidé, en conclusion, en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes à tous les niveaux de la société. 

Mme CLARE HUTCHINSON, Représentante de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), a indiqué que l’OTAN a créé un comité consultatif de la société civile sur les femmes, la paix et la sécurité qui représente les femmes les plus touchées par les inégalités et les conflits.  Ce comité nous demande d’élargir notre compréhension de la sécurité et de promouvoir une approche plus inclusive, a-t-elle expliqué.  Les membres ont parlé de leurs préoccupations face aux menaces à la paix dans le monde et de leurs frustrations quant à la lenteur des progrès sur la question.  « Nous avons écouté.  Nous avons entendu leurs voix.  Et nous avons répondu en assurant que l’intégration du genre et l’inclusion des voix des femmes sont intégrées dans le travail de l’OTAN », a assuré Mme Hutchinson. 

Partout, les femmes mettent l’accent sur la nécessité de renforcer les mesures préventives en intégrant une perspective de genre dans les analyses d’alerte rapide.  « Nous devons reconnaître que les violations des droits des femmes et leur isolement politique et économique sont des indicateurs de conflit potentiel », a continué la représentante de l’OTAN.  Le comité consultatif de la société civile demande à l’Organisation de rendre le genre plus visible dans les réponses en matière de sécurité et de fournir une vision claire pour l’avenir, qui repose sur des efforts coordonnés avec les organisations internationales et la société civile. 

Mme LALA MEHDIYEVA (Azerbaïdjan) a déclaré qu’en tant que pays dont une partie du territoire est sous occupation militaire étrangère, « victime de nettoyage ethnique et d’autres atrocités commises contre sa population civile », l’Azerbaïdjan considère la sécurité des civils comme étant de la première importance.  Aujourd’hui, plus d’un million d’Azerbaïdjanais sont réfugiés et déplacés dans leur propre pays, la moitié étant des femmes.  Elles souffrent de cette situation depuis une trentaine d’années. 

C’est pour cette raison que la délégation estime que la communauté internationale ne devrait pas rester indifférente au sort des femmes et des filles dans les conflits armés.  Elle a le devoir de les protéger, a insisté la représentante, ajoutant que son pays continue de soulever cette question sur le plan international, y compris au sein de l’Assemblée générale et de la Commission de la condition de la femme. 

Mme MARÍA BASSOLS DELGADO (Espagne) a rappelé qu’en dépit de progrès accomplis depuis 2000, la participation des femmes aux processus de paix est encore timide, en raison principalement d’obstacles institutionnels.  C’est la raison pour laquelle elle s’est réjouie des initiatives présentées ce matin par le Secrétaire général, avant de dire que son propre pays s’est engagé à nommer des femmes à des postes de responsabilité au sein d’organismes chargés de promouvoir la paix et la sécurité.  L’Espagne s’est déclarée convaincue que l’accès des femmes à tous les niveaux du cursus scolaire et des études supérieures est absolument nécessaire, conformément aux objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a annoncé qu’en juillet dernier, le Gouvernement a présenté le deuxième rapport du plan national d’action sur la résolution 1325.  Ce plan entend permettre aux femmes de participer activement à la construction du pays par la mise en œuvre de différentes mesures, notamment l’augmentation de la participation des femmes dans les processus de décision et dans l’exécutif, dans les questions de sécurité, de paix et de réintégration, de prévention et de protection des femmes contre la violence et la discrimination.  Il mise sur la sensibilisation et l’augmentation de la sécurité économique des femmes vulnérables.  Après avoir énuméré les progrès réalisés, M. Saikal a reconnu que le plus grand obstacle à la mise en œuvre des plans nationaux est l’insécurité.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des mesures contre « les cerveaux de cette insécurité », en se basant sur les engagements juridiques internationaux et la Charte des Nations Unies. 

M. THABO MICHAEL MOLEFE (Afrique du Sud) a déclaré qu’il est reconnu que la participation des femmes accroît les chances de résolution des conflits.  Elle améliore aussi la protection des filles et des femmes face aux menaces de violences sexuelles.  Forte de cette reconnaissance, certains instruments de l’Union africaine traitent spécifiquement de la question des femmes, notamment le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, également connu sous le nom de Protocole de Maputo.  Ce dernier cherche à réaliser les droits de la femme, tels qu’énumérés dans la Charte africaine.  Il insiste sur le fait que les États ont l’obligation de mettre en œuvre les résolutions des Nations Unies relatives à la paix et à la sécurité.  Le Protocole les exhorte donc à prendre toutes les mesures pour accroître la participation des femmes, les protéger dans les situations de conflit, y compris de la violence sexuelle et des pratiques néfastes comme le mariage précoce et les mutilations génitales féminines.  

M. TAREQ MD. ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a déclaré que son pays, face à la crise humanitaire qui menace les réfugiés rohingya, travaille en coopération étroite avec ses partenaires humanitaires pour créer un espace sûr et inclusif pour les femmes de ces communautés se trouvant dans les camps près de la frontière.  Il a dénoncé les crimes « inhumains » perpétrés par les forces de sécurité du Myanmar, d’après la mission d’établissement des faits dépêchée par le Conseil des droits de l’homme.  Le représentant a indiqué que le Bangladesh avait récemment conclu un cadre de coopération avec le Bureau de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles dans les conflits pour répondre aux besoins des victimes.  M. Islam a exhorté le Conseil de sécurité à rester saisi de la dimension du genre dans ses délibérations relatives à la situation au Myanmar.

Reprenant la parole à la fin du débat, le représentant d’Israël a jugé « regrettable que le Président du Conseil de sécurité ait choisi d’inviter, au cours de ce débat, la représentante d’une organisation palestinienne, « censée aider les femmes, mais qui se sert de son mandat pour promouvoir la haine et la violence ».  La représentante de cette organisation a décrit les juifs comme « buvant le sang des Palestiniens », a affirmé le représentant.  De son point de vue, on ne peut pas s’étonner du choix de la Bolivie d’inviter une telle organisation, a-t-il poursuivi, affirmant que « la Bolivie n’est pas, contrairement à Israël, un modèle de démocratie ».  On peut toujours regarder ailleurs lorsque l’on parle d’Israël, mais la vérité est que « les vrais ennemis des Palestiniens sont la société civile palestinienne et le peuple palestinien lui-même », a conclu le représentant.

Le représentant de la Bolivie, répondant à la délégation d’Israël, a donné lecture de l’article 39 du Règlement intérieur provisoire du Conseil de sécurité, lequel dit que le Conseil de sécurité peut inviter qui il souhaite pour l’éclairer sur une situation spécifique.  « C’est donc le Conseil de sécurité qui a invité cette organisation.  Le Conseil de sécurité », a répété le représentant. 

Sur la question des droits de l’homme, il a souhaité savoir si Israël accepterait la visite d’un organe international, qui se rendrait dans les territoires palestiniens occupés pour y examiner la situation des droits.  La Bolivie, pour sa part, est prête à le faire, comme elle l’a déjà fait par le passé, « puisqu’elle n’a rien à cacher ».  Concluant, il a dit que « le pire ennemi des Palestiniens est l’occupation israélienne.  Cette situation prendra fin lorsque l’occupation prendra elle aussi fin », a-t-il lancé.

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