L’Assemblée générale appelle à l’élaboration d’« espace 2030 », projet de coopération visant à faire des activités spatiales un moteur du développement durable
L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui sans vote, une résolution sur le « Cinquantenaire de la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (UNISPACE+50) » dans laquelle elle invite le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique à continuer d’élaborer « Espace 2030 », projet de coopération internationale visant à faire des activités et applications spatiales, un des moteurs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Les manifestations organisées, pendant trois ans, autour d’« UNISPACE+50 », ont été l’occasion de débattre des nouvelles orientations de la gouvernance mondiale des activités dans l’espace et du renforcement des capacités de tous les États pour les hisser à la hauteur des nouvelles réalités, des défis et des opportunités offertes par le champ spatial, a estimé la Présidente du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, Mme Rosa María Ramírez de Arellano y Haro, du Mexique, qui présentait la résolution.
Dans ce texte, l’Assemblée générale note avec satisfaction qu’à l’issue des préparatifs d’UNISPACE+50 et du débat de haut niveau organisé à cette occasion sont parus des documents décrivant un projet global, inclusif et stratégique de renforcement de la coopération internationale, dans lesquels l’espace est considéré comme un moteur essentiel de la réalisation des objectifs de développement durable au profit de tous les pays. Sur la base des résultats de ces préparatifs, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique doit, selon l’Assemblée générale, continuer d’élaborer le programme « Espace 2030 » et son plan de mise en œuvre. La réalisation du programme, souligne l’Assemblée, nécessitera un partenariat mondial et une coopération renforcée entre les États Membres, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, l’industrie et les entités du secteur privé.
Les États-Unis se sont dissociés des références au Programme de développement durable à l’horizon 2030, au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015–2030) et à l’Accord de Paris sur les changements climatiques. Le Programme 2030, ont-ils martelé, n’a pas de caractère contraignant et n’implique ni nouvel engagement financier ni nouvelle obligation commerciale. Les États-Unis ont réitéré leurs réserves au Cadre de Sendai et rappelé leur intention de se retirer de l’Accord de Paris, à moins qu’il ne soit amendé.
Les États-Unis ont expliqué qu’alors qu’ils avaient lancé leur programme spatial au pic de la guerre froide et dans la crainte d’une « course dans l’espace » entre superpuissances, ils le voient désormais comme un instrument de développement humain et de coopération internationale. Ils se sont tout particulièrement félicités de ce qu’« UNISPACE+50 » ait reconnu le rôle croissant du secteur privé dans l’exploration et les applications spatiales, et ont dit attendre du processus « Espace 2030 », un document « visionnaire » qui tiendrait compte de la trajectoire des États vers la Lune, Mars et les autres organes célestes et de la manière dont ils y incorporent des arrangements commerciaux nouveaux et novateurs. L’annonce faite par les États-Unis de créer une nouvelle force militaire dans l’espace, a commenté l’Iran, suscite des inquiétudes car cette politique rend encore plus probable une course aux armements voire un conflit dans l’espace.
Dans le préambule de sa résolution, l’Assemblée générale se dit d’ailleurs « vivement préoccupée » par la possibilité d’une course aux armements dans l’espace et considère que tous les États Membres, notamment ceux qui sont particulièrement avancés dans le domaine spatial, doivent s’employer activement à empêcher cette course en vue de promouvoir et de renforcer la coopération internationale. L’Iran a fermement appuyé la négociation d’un instrument juridiquement contraignant pour prévenir les menaces. « UNISPACE+50 », a espéré la Fédération de Russie, va donner l’occasion d’approfondir le dialogue. Elle a rappelé qu’elle a lancé une initiative similaire, en septembre dernier, avec la réunion sur le droit spatial.
L’Assemblée générale reprendra ses travaux le lundi 29 octobre à partir de 10 heures pour examiner le rapport de la Cour pénale internationale (CPI).
L’ESPACE COMME MOTEUR DE DÉVELOPPEMENT DURABLE
Déclaration liminaire
Mme ROSA MARĺA RAMĺREZ DE ARELLANO Y HARO (Mexique), Présidente du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, a présenté le projet de résolution intitulé « Cinquantenaire de la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique: l’espace comme moteur de développement durable » (A/73/L.6). Elle a rappelé qu’en juin dernier, son Comité a célébré le cinquantenaire, entre autres, dans le cadre d’un segment de haut niveau qui a connu la participation de plus de 93 États, plusieurs entités de l’ONU, des organisations intergouvernementales et des ONG gouvernementales. La cérémonie d’anniversaire « UNISPACE+50 » a été l’occasion de débats sur les nouvelles orientations de la gouvernance mondiale des activités dans l’espace et sur le renforcement des capacités de tous les États, de la Première Commission de l’Assemblée générale et du Bureau des affaires spatiales des Nations Unies pour les hisser à la hauteur des nouvelles réalités, des défis et des opportunités offertes par le champ spatial. Les instruments internationaux sur l’espace sont fondamentaux pour atteindre les 17 objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La communauté spatiale doit y travailler collectivement, dans l’intérêt de tous, en particulier des pays en développement.
Le projet de résolution présenté aujourd’hui, a expliqué la Présidente, a été approuvé à l’issue d’« UNISPACE+50 ». Elle a encouragé l’adoption de l’agenda « Espace 2030 » qui sera crucial pour la réalisation du Programme de développement durable. À travers les piliers économie, société et accessibilité spatiales, sans oublier la diplomatie spatiale, nous nous embarquons, s’est réjouie la Présidente, dans le processus du Comité, une plateforme unique de discussions sur les questions liées à toutes les activités spatiales, pour adopter un agenda global de sensibilisation à l’importance de l’espace, relever les défis de l’humanité et faire avancer les sociétés.
Déclarations
M. ENRIQUE JOSÉ MARĺA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a dit que son pays milite contre une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. Il a demandé à la communauté internationale de poursuivre les efforts en faveur d’un régime juridique international régissant les activités spatiales. Il a rappelé que son pays vient de présenter sa candidature au Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et plaide pour une gestion de l’espace qui contribue réellement à la réalisation des objectifs de développement durable. Le Paraguay souhaite en outre, a poursuivi le représentant, que tous les pays puissent participer aux activités spatiales, quel que soit leur niveau de développement technologique. Il faut donc soutenir les initiatives des pays en développement, par une coopération internationale revigorée. Le Paraguay, s’est enorgueilli le représentant, a créé son Agence spatiale, l’année dernière, dans laquelle travaillent des acteurs du secteur public et du secteur privé qui collaborent avec les agences de pays comme l’Argentine et le Mexique. Le représentant a conclu en plaidant pour qu’un niveau de ressources adéquat soit garanti au Bureau des affaires spatiales des Nations Unies.
Profondément convaincus de l’importance de l’espace pour la réalisation des objectifs de développement durable, Mme AHOOD ABDULLA AL ZAABI (Émirats arabes unis) a souligné que son pays a dûment participé à « UNISPACE+50 », comme en témoignent les trois réunions préparatoires régionales qu’il a organisées en 2016 et 2017 sur le thème « L’espace comme catalyseur d’un développement socioéconomique durable ». Ces réunions ont abouti à la Déclaration de Doubaï qui comprend une série de recommandations. Comme les Émirats arabes unies s’efforcent de jeter les bases de leur secteur spatial, la représentante a décrit les activités de « KALIFA SAT », un projet d’exploration de l’espace extra-atmosphérique. Elle n’a pas oublié de mentionner que la jeune émirienne, Alyia Mansouri, a travaillé sur le Projet « Falcon 9 » à la NASA. Les Émirats seront aussi les premiers du monde arabo-musulman à travailler au Projet spatial « Amal » - espoir -.
Mme OLGA MOZOLINA (Fédération de Russie) a parlé des divergences sur l’amélioration de la gouvernance mondiale des activités spatiales. Pour éviter les contradictions, les réglementations nationales doivent s’adapter aux règles et normes internationales. La Fédération de Russie a toujours soutenu les prérogatives du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique s’agissant de la gouvernance et de la sécurité spatiales. « UNISPACE+50 » va donner l’occasion d’approfondir le dialogue, s’est-elle félicitée, tout en rappelant que son pays a lancé une initiative similaire, en septembre dernier, avec la réunion sur le droit spatial. Pour lier les activités spatiales au Programme 2030, la Fédération de Russie a même mis en place une politique spécifique. Le pays qui est un grand lanceur d’engins spatiaux, pour lui et pour des pays tiers, estime crucial que la communauté internationale améliore le système d’immatriculation de ces engins.
M. KENNETH HODGKINS (États-Unis) a souligné que son pays, qui avait lancé son programme spatial au pic de la Guerre froide et dans la crainte d’une « course dans l’espace » entre superpuissances, voit désormais ses activités spatiales comme un instrument de développement humain et de coopération internationale. Le représentant s’est réjoui de ce que ces six dernières décennies, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, dont le nombre des membres ne cesse d’augmenter, se soit affirmé comme le premier forum des Nations Unies pour l’exploration et l’utilisation pacifiques de l’espace. Aujourd’hui « UNISPACE+50 » a reconnu le rôle croissant du secteur privé dans l’exploration et les applications spatiales, a souligné le représentant qui s’est réjoui, en particulier qu’« UNISPACE+50 » ait lancé le processus visant à développer « Espace 2030 », un agenda de deux ans qui orienterait les travaux du Comité 2030. Le représentant s’est félicité des progrès enregistrés à la première réunion du Groupe de travail sur « Espace 2030 », il y a une dizaine de jours à Vienne. Il a avoué que son pays espère un document « visionnaire » lequel jetterait les bases du travail futur du Comité et de ses Sous-Comités, en tenant compte de la direction que les États prennent vers la Lune, Mars et les autres organes célestes et de la manière dont ils y incorporent des arrangements commerciaux nouveaux et novateurs.
M. MOHAMMAD HOSSEIN GHANIEI (République islamique d’Iran) a relevé que la science et la technologie spatiales sont si indispensables à notre vie quotidienne que nous sommes autant dépendants d’elles que nous le sommes de l’air, des mers et des océans. C’est pour cette raison que l’espace extra-atmosphérique est considéré comme l’héritage commun de l’humanité et une province commune. Il doit donc être exploré et utilisé pour le bien des générations présentes et futures. Cette exploration, a-t-il précisé, doit être équitable et ouverte à tous les pays. « C’est un droit inaliénable de tous les États », a-t-il martelé, ajoutant que cela n’a rien à voir avec le niveau de développement économique et scientifique. En tant que membre fondateur du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, l’Iran, a dit le représentant, souligne que le respect des principes régissant l’espace extra-atmosphérique est la seule approche pour y assurer une utilisation durable et équitable.
Il s’est ainsi opposé aux revendications de souveraineté, aux discriminations dans la coopération et aux ingérences dans les activités des autres États. Il a au contraire plaidé un transfert non discriminatoire de la science, du savoir-faire et de la technologie et rejetant d’emblée toute restriction aux activités spatiales des pays en développement. Le représentant a estimé que l’exploitation de l’orbite géostationnaire doit être rationalisée et accessible équitablement et sans aucune discrimination. Il a donc dénoncé le régime du « premier arrivé, premier servi » qui fait que les espaces orbitaux disponibles sont occupés par les pays développés, laissant peu de chance aux pays en développement de positionner leurs satellites et les privant de services utiles. « C’est une injustice qui doit prendre fin », a-t-il assené.
Le représentant a aussi souligné que l’un des principes cardinaux du droit international est que l’espace extra-atmosphérique doit être utilisé à des fins « exclusivement pacifiques », et toute tentative de le militariser ou de l’armer mettrait sérieusement à mal ce principe. L’annonce faite par les États-Unis de créer une nouvelle force militaire dans l’espace suscite donc des inquiétudes et pour l’Iran, la politique américaine rend encore plus probable la course aux armements voire un conflit dans l’espace. Le représentant a fermement appuyé la négociation d’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention de la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.
Mme KIMBERLY CHAN (Canada) a souligné que le processus « UNISPACE+50 » n’est pas encore terminé puisque l’on attend encore « Espace 2030 ». Mon pays, a-t-elle promis, continuera de promouvoir l’utilisation pacifique de l’espace pour que tout le monde puisse tirer de la science et des technologies spatiales les bénéfices socioéconomiques. Le Canada compte sur des résultats concrets et quantifiables s’agissant des objectifs de développement durable. Il sait qu’il faudra des donnés et des informations collectées à partir des équipements spatiaux car les données satellitaires peuvent par exemple donner lieu à des statistiques plus fiables. Pour de nombreux objectifs de développement durable, a prévenu la représentante, la portée et la fréquence requises pour les données ne seraient tout simplement pas possibles, techniquement ou financièrement, sans les observations par satellite. Mais intégrer les informations géospatiales dans la masse des autres données reste un des plus grands problèmes à résoudre, même pour le Canada qui travaille avec ses partenaires nationaux et internationaux, a reconnu le représentant.
Ces prochains mois, le pays compte lancer la troisième génération du programme RADARSAT qui jouera un rôle important dans le suivi des progrès enregistrés dans les objectifs de développement durable: surveiller les changements dans les terres du nord et les zones côtières, et voir comment ces régions répondent aux changements climatiques et utilisent leurs ressources accrues pour le développement. Cet été, le Canada a aussi adopté la feuille de route de Charlevoix sur la santé des océans, prenant l’engagement de travailler avec les partenaires du G7 pour déployer des technologies d’observation et assurer une meilleure gestion intégrée des zones côtières. Il est important de continuer à partager les expertises, a souligné le représentant.