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Réunion d’urgence du Conseil de sécurité: large condamnation de la décision russe de reconnaître l’« indépendance » de certaines zones des régions de Donetsk et Louhansk

8970e séance – soir
CS/14798

Réunion d’urgence du Conseil de sécurité: large condamnation de la décision russe de reconnaître l’« indépendance » de certaines zones des régions de Donetsk et Louhansk

Réuni d’urgence, ce soir, quelques heures après que le Président russe, M. Vladimir Putin, eut décidé de reconnaître « l’indépendance » d’entités séparatistes de l’est de l’Ukraine et d’y déployer des troupes de « maintien de la paix », le Conseil de sécurité a entendu la Fédération de Russie renvoyer au « régime ukrainien de Maïdan » la responsabilité de cette escalade, tandis que la majorité des délégations, unies dans leur condamnation, la priaient de revoir sa position et de faire le choix de la diplomatie pour éviter la survenue d’un conflit armé majeur au cœur de l’Europe.   

Dans ce climat de grande tension, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a vivement regretté une décision qui « risque d’avoir des répercussions régionales et mondiales ».  Reprenant les mots du Secrétaire général, Mme Rosemary DiCarlo a souligné que la reconnaissance par Moscou de l’indépendance de certaines zones des régions de Donetsk et de Louhansk constitue une violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine et est « incompatible » avec les principes de la Charte des Nations Unies.   

Préoccupée par la multiplication des tirs d’artillerie de part et d’autre de la ligne de contact, comme l’a confirmé la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a appelé tous les acteurs concernés à concentrer leurs efforts sur une cessation immédiate des hostilités, « avant que les conditions actuelles, déjà dangereuses, ne s’aggravent davantage ».  Elle leur a également rappelé que la négociation est l’unique moyen d’aborder leurs divergences, comme le prévoit la résolution 2202 (2015) du Conseil.    

La Charte des Nations Unies a été écrite pour « empêcher les autocrates de faire la guerre », ont martelé, à sa suite, les États-Unis, pour qui les attaques russes contre l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine n’ont « pas été provoquées ».  Les raisons invoquées pour reconnaître l’indépendance de régions séparatistes du Donbass ne sont que des « prétextes » pour justifier l’invasion de ce pays, ont-ils accusé, rejetant catégoriquement l’argument selon lequel l’Ukraine voudrait obtenir des armes nucléaires de l’Occident.   

« Nous ne sommes plus en 1919 », a ajouté la délégation américaine, pointant le danger que courent notamment la Finlande, la Géorgie, le Kazakhstan, la Lettonie, l’Estonie et certaines régions de la Pologne face à la volonté affichée par Moscou d’en revenir à « l’empire russe d’avant l’Union soviétique ». Après avoir réduit les accords de Minsk à néant, « Vladimir Putin ne s’arrêtera pas là », a-t-elle averti, avant d’indiquer que le Président Joe Biden a d’ores et déjà signé un décret interdisant les activités commerciales dans les « soi-disant Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk ».  Sur la même ligne, le Royaume-Uni a annoncé de nouvelles sanctions contre la Fédération de Russie, qu’il a exhortée à « faire un pas en arrière ».   

Rappelant pour sa part les efforts incessants en faveur de la désescalade menés par le Président Emmanuel Macron, en lien avec le Chancelier allemand Olaf Scholz, la France a, elle aussi, évoqué des sanctions ciblées contre « ceux qui ont pris part à cette décision illégale », tout en exhortant la Fédération de Russie à « revenir sur la décision de reconnaissance des entités séparatistes ».  Moscou doit retirer ses forces et se réengager dans les accords de Minsk, conformément aux discussions menées au format Normandie, a appuyé l’Allemagne, rejointe par l’Albanie, l’Irlande, la Norvège et le Mexique.  La Chine s’est, elle, contentée d’appeler au règlement de ce « différend » par des moyens pacifiques en appelant à la retenue.   

Sans répondre aux « attaques directes » la visant, la Fédération de Russie a justifié sa décision de reconnaître les deux « républiques » autoproclamées par le « refus obstiné » de Kiev de parler directement aux représentants de Donetsk et de Louhansk, alors que le dialogue est « l’élément central » des accords de Minsk.  Elle a également accusé le « régime ukrainien de Maïdan » de n’utiliser que le « langage des armes et des menaces » avec les populations de l’est de l’Ukraine, en particulier les citoyens russophones, qui entendent légitimement utiliser leur langue maternelle et l’enseigner à leurs enfants.    

Fustigeant les « aventures militaires ukrainiennes », la délégation russe a par ailleurs déploré le rôle « extrêmement négatif » joué par les pays occidentaux, États-Unis en tête, qui, tout en attisant la crainte « sans fondement » d’une invasion, ont inondé le pays d’armes et poussé à des affrontements dans le Donbass. « Nous ne pouvons pas permettre cela », a-t-elle cinglé, déplorant que les autres membres du Conseil n’aient pas évoqué les quatre millions d’habitants menacés par les manœuvres ukrainiennes et les milliers de réfugiés qui affluent en Fédération de Russie. Selon elle, la décision russe vise avant tout à « préserver la vie de ces gens ».   

À l’origine de cette réunion d’urgence, l’Ukraine a, elle, dénoncé la décision « illégale et illégitime » du Kremlin, qui fait suite à celles de 2008 en Géorgie et de 2014 en Crimée.  Assurant n’avoir « peur de personne » et vouloir défendre ses frontières internationalement reconnues, elle a réclamé des consultations sur la base du Mémorandum de Budapest relatif aux garanties de sécurité ainsi que des réunions spéciales de l’OSCE et du format Normandie.  « Nous voulons savoir qui sont nos amis, nos alliés, les partisans de la Charte des Nations Unies et ceux susceptibles de dissuader la Fédération de Russie d’aller plus loin », a-t-elle lancé, non sans exhorter Moscou à revenir sur sa décision et à regagner la table des négociations.   

« L’ONU va-t-elle succomber au virus inoculé par le Kremlin?  La réponse dépendra des États Membres », a conclu la délégation ukrainienne, qui, au-delà des accords de Minsk, a dit se battre pour la paix en Ukraine, en Europe et dans le monde. 

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136) 

Déclarations 

« C’est avec beaucoup d’inquiétude et de tristesse que j’informe le Conseil, ce soir, de l’évolution de la situation dangereuse en Ukraine et dans les environs », a déclaré Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix.  Dans sa déclaration d’aujourd’hui, a-t-elle dit, le Secrétaire général a été clair: il considère que la décision de la Fédération de Russie de reconnaître l’indépendance de certaines zones des régions de Donetsk et de Louhansk constitue une violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine et est incompatible avec les principes de la Charte des Nations Unies.  « Nous regrettons vivement cette décision, qui risque d’avoir des répercussions régionales et mondiales, de même que l’ordre donné aujourd’hui de déployer des troupes russes dans l’est de l’Ukraine, manifestement pour une ‘mission de maintien de la paix’ », a ajouté la haute fonctionnaire.   

Ces développements font suite à la décision d’ordonner une évacuation massive des résidents civils de Donetsk et de Louhansk vers la Fédération de Russie, a poursuivi Mme DiCarlo.  Elle s’est dite préoccupée par l’escalade des tirs d’artillerie de part et d’autre de la ligne de contact, qui aurait fait un certain nombre de victimes.  La Mission spéciale d’observation de l’OSCE a enregistré un total de 3 231 violations du cessez-le-feu dans le Donbass du 18 au 20 février: 1 073 violations du cessez-le-feu, dont 926 explosions dans la région de Louhansk, et 2 158 violations du cessez-le-feu, dont 1 100 explosions, dans celle de Donetsk.  La Secrétaire générale adjointe a rappelé à toutes les parties concernées leurs responsabilités en vertu du droit international humanitaire et du droit des droits de l’homme.  Pour l’ONU, la négociation est le seul moyen d’aborder les divergences existantes entre les acteurs clefs du conflit dans l’est de l’Ukraine, conformément à la résolution 2202 (2015) du Conseil de sécurité, a informé Mme DiCarlo. 

« Avant que les conditions actuelles, déjà dangereuses, ne s’aggravent davantage, nous appelons tous les acteurs concernés à concentrer leurs efforts sur une cessation immédiate des hostilités », a insisté Mme DiCarlo, pour qui civils et infrastructures civiles doivent être protégés, et les actions et déclarations susceptibles d’aggraver la situation, évitées.  Au cours des dernières semaines, les principaux acteurs ont déployé d’intenses efforts diplomatiques pour éviter une nouvelle éruption du conflit au cœur de l’Europe, a-t-elle salué. 

Tout au long des huit années de conflit dans l’est de l’Ukraine, l’ONU a continué à fournir une aide humanitaire vitale à tous celles et ceux qui en avaient besoin, et d’œuvrer au respect des droits de la personne, a-t-elle poursuivi.  « Pendant cette période difficile, nous nous engageons à tenir nos promesses et à rester pleinement opérationnels en Ukraine, y compris à Donetsk et Louhansk. »  La sûreté et la sécurité de tout notre personnel sont de la plus haute importance pour l’Organisation et doivent être respectées par toutes les parties, a ajouté Mme DiCarlo pour qui « les prochaines heures et les prochains jours seront cruciaux ».  Elle a reconnu que le risque d’un conflit majeur est réel et doit être évité à tout prix.  Elle a assuré, en conclusion, de l’engagement total du Secrétaire général à œuvrer à une résolution diplomatique de la crise actuelle. 

Rappelant les derniers propos du Président de la Fédération de Russie cet après-midi, Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a souligné que la Charte des Nations Unies a été écrite pour empêcher les autocrates de faire la guerre.  Les attaques russes contre l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine n’ont pas été provoquées.  Ce sont, a dit la représentante, une violation des principes fondamentaux du droit international qui va à l’encontre de la Charte.  Ce sont des prétextes pour justifier l’invasion de l’Ukraine dont les conséquences se feront ressentir bien au-delà des frontières ukrainiennes.  Fustigeant les motivations et les allégations fallacieuses et infondées de la Fédération de Russie et ses tentatives de trouver un prétexte pour lancer une guerre, la représentante a pointé le doigt sur le fait que le Président russe a immédiatement annoncé l’entrée de ses troupes dans le Donbass. 

Elle a rejeté l’idée selon laquelle l’Ukraine voudrait obtenir des armes nucléaires de l’Occident, avant de rappeler que ce pays a renoncé à ces armes et que les États-Unis et leurs alliés n’ont pas l’intention de lui en fournir.  Face à l’argument selon lequel la Fédération de Russie peut prétendre à tous les territoires de l’Empire russe d’avant l’Union soviétique, la représentante a souligné le danger que courent désormais la Finlande, la Géorgie, le Kazakhstan, la Lettonie, l’Estonie et certaines régions de la Pologne.  Nous ne sommes plus en 1919, a-t-elle tonné.  Nous sommes en 2022 où la vaste majorité des États Membres des Nations Unies et du Conseil de sécurité se sont engagés à aller de l’avant et à ne pas faire marche arrière.  Les répercussions des actions de la Fédération de Russie seront « graves et lourdes », en Ukraine, en Europe et dans le monde entier.   

Si la situation continue de se dégrader, a prévenu la représentante, nous verrons des pertes de vies, des souffrances et des millions de déplacés qui créeront une crise des réfugiés en Europe.  La Fédération de Russie, a-t-elle poursuivi, met notre système à l’épreuve et refuse de dire ses intentions, voulant tester nos limites et voir comment faire de l’ONU une farce.  Elle a exhorté la communauté internationale à agir et demandé à la Fédération de Russie et à ses soutiens de faire le choix de la diplomatie.  L’intégrité territoriale et la souveraineté de chaque État Membre de l’ONU, dont l’Ukraine, doivent être respectées et préservées, a insisté la représentante, en regrettant que la séquence des événements décrite par son Secrétaire d’État, la semaine dernière, semble se matérialiser.  « Vladimir Putin ne s’arrêtera pas, après avoir réduit les accords de Minsk à néant. »  

La représentante a estimé que le monde doit agir sur la base des principes fondateurs de l’ONU.  Elle a indiqué que le Président Joe Biden a signé un décret présidentiel interdisant les investissements et les activités commerciales dans les soi-disant Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk.  Nous prendrons, a-t-elle prévenu, d’autres mesures, pour rendre la Fédération de Russie responsable de ses violations « claires » du droit international, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Nous serons fermes car personne ne peut rester passif.  Les attaques contre l’Ukraine doivent causer une riposte sévère et nous sommes convaincus que la solution diplomatique est le seul moyen de résoudre les différends, a conclu la représentante.   

M. FERIT HOXHA (Albanie) a condamné dans les termes les plus fermes la décision de la Fédération de Russie de reconnaître les régions séparatistes de l’est de l’Ukraine, la qualifiant de violation flagrante du droit international.  Cette décision est nulle et non avenue, elle n’a aucune légitimité internationale, a-t-il martelé, avant d’appeler le Conseil de sécurité et tous les États Membres de l’ONU à rejeter cette reconnaissance.  Réitérant l’engagement de son pays en faveur de l’intégrité et de la souveraineté de l’Ukraine, il a jugé que la décision de la Fédération de Russie est une violation des accords de Minsk et un affront pour le Conseil.  Le monde entier a pu constater que la Fédération de Russie n’a eu de cesse de saper la souveraineté de l’Ukraine, a-t-il dénoncé, qualifiant la situation actuelle de « bis repetita » des événements survenus en Géorgie en 2008 et en Crimée en 2014.  Pour le délégué, l’instrumentalisation de minorités pour menacer la paix et la sécurité internationales est un fait alarmant qui illustre à son avis la méthode de déstabilisation adoptée par la Fédération de Russie.  Dans ce contexte, il a exigé le retrait des troupes russes massées à la frontière ukrainienne et celles, « déguisées en soldats de maintien de la paix », qui sont entrées en Ukraine.  Il a appelé la Fédération de Russie à travailler de bonne foi, dans le cadre de négociations, et à donner une chance aux accords de Minsk.  « Il faut régler ce conflit de manière diplomatique, c’est l’unique solution », a-t-il conclu.   

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a condamné la reconnaissance par la Russie des régions séparatistes de l’est de l’Ukraine, qui constitue non seulement une nouvelle atteinte à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de l’Ukraine, mais aussi une violation des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, de la résolution 2202 (2015) et des engagements pris par la Russie.  Il a rappelé que, le 17 février dernier devant le Conseil de sécurité, la Fédération de Russie avait reconnu qu’il n’y avait pas d’autres options que la mise en œuvre des accords de Minsk et que ceux-ci étaient « la seule base juridique internationalement reconnue » pour régler le conflit en Ukraine.  La réalité est tout autre aujourd’hui, a dit le délégué en rappelant pourtant les efforts incessants en faveur de la désescalade menés ces dernières semaines et ces derniers jours, notamment de la part du Président Macron en lien avec le Chancelier allemand.  « Nous poursuivrons ces efforts et appelons la Russie à mettre ses actes en cohérence avec ses paroles, lorsqu’elle prétend être en faveur du dialogue, et à revenir sur la décision de reconnaissance des entités séparatistes. »  M. de Rivière a aussi indiqué que la France prépare, avec ses partenaires européens, des sanctions ciblées contre ceux qui ont pris part à cette décision illégale. 

Se disant préoccupé par cette nouvelle étape dans la déstabilisation de la part de la Russie, il a salué la retenue dont a fait preuve l’Ukraine et appelé la Fédération de Russie à s’abstenir de toutes autres actions de déstabilisation, notamment celles susceptibles de mettre en danger la sécurité des populations civiles.  Le représentant de la France a dit également être préoccupé du fait que le Président Putin a ordonné à son armée de se déployer dans les territoires séparatistes sous le prétexte du maintien de la paix.  Cela constituerait une autre violation flagrante de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, a-t-il tranché.  Il a promis que la France continuera à défendre la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues. 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a appelé toutes les parties à la retenue, arguant que la priorité immédiate est la désescalade des tensions, en tenant compte de tous les intérêts légitimes en matière de sécurité et de la nécessité d’assurer la paix et la stabilité à long terme dans la région et au-delà.  Cette question, a dit le représentant, ne peut être résolue que par la diplomatie.  Il faut faire place aux initiatives des premiers concernés qui ont cherché à apaiser les tensions.  Les accords de Minsk, a-t-il souligné, constituent la base d’un règlement négocié et pacifique.  Il a rappelé, dans ce contexte, que plus de 20 000 étudiants et ressortissants indiens vivent dans différentes parties de l’Ukraine, y compris dans les zones frontalières, et a souligné la nécessité de maintenir la paix et la sécurité internationales, en intensifiant les efforts diplomatiques pour trouver une solution mutuellement acceptable.   

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déclaré suivre les derniers développements en Ukraine avec une extrême inquiétude.  Le système de sécurité collective des Nations Unies, a-t-il dit, repose en définitive sur le pilier du droit international.  Celui-ci, à son tour, repose sur des principes fondamentaux consacrés par la Charte des Nations Unies: l’égalité souveraine et l’intégrité territoriale des États Membres, la retenue dans l’usage ou la menace de l’usage de la force, et le règlement pacifique des différends.  Cependant, notre pilier et nos principes ne donneront aucun résultat si les préoccupations légitimes de toutes les parties ne sont pas prises en considération et si la Charte et les engagements existants, tels que les accords de Minsk, ne sont pas pleinement respectés, a-t-il mis en garde.   

Dans cet esprit, le représentant a renouvelé son appel à toutes les parties concernées pour qu’elles maintiennent le dialogue dans un esprit d’ouverture, de compréhension et de flexibilité et avec un sentiment d’urgence afin de trouver les moyens d’une paix durable en Ukraine et dans la région au sens large.  Un premier objectif incontournable est un cessez-le-feu immédiat, avec un désengagement complet des troupes et des équipements militaires présents sur le terrain, a demandé le délégué en y voyant une étape importante pour instaurer la confiance entre les parties, renforcer la diplomatie et rechercher une solution durable à la crise.  Le représentant s’est dit, en conclusion, convaincu que ce Conseil doit assumer sa responsabilité fondamentale d’aider les parties à s’engager dans un dialogue significatif et efficace afin de parvenir à une solution qui réponde efficacement aux problèmes de sécurité de la région. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a affirmé que les décisions prises aujourd’hui par le Président Putin auront des conséquences graves.  Elle a évoqué des conséquences humanitaires, des conséquences pour la souveraineté d’un État Membre des Nations Unies, ainsi que des conséquences pour le droit international.  En effet, la représentante a estimé que le Mémorandum de Budapest et les accords de Minsk ont été foulés au pied par la Fédération de Russie qui s’efforce de redessiner les frontières européennes par la force.  Le Royaume-Uni a annoncé de nouvelles sanctions en réaction aux actes de ce jour contre la souveraineté de l’Ukraine.  Plus que jamais, le Conseil de sécurité doit défendre les principes de la Charte des Nations Unies, a insisté Mme Woodward, en l’appelant à faire preuve d’unité et à condamner l’agression russe contre une nation souveraine.  Enfin, elle a appelé Moscou à respecter ses obligations en vertu de la Charte des Nations Unies.  « La Fédération de Russie nous pousse au bord du précipice et nous l’exhortons à faire un pas en arrière », a-t-elle ajouté en conclusion.   

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a dit suivre avec préoccupation l’évolution récente de la situation dans l’est de l’Ukraine appelant à mettre un terme aux actions qui aggravent cette crise.  Elle a rappelé que le Conseil de sécurité a approuvé, par sa résolution 2202 (2015), un ensemble de mesures comme seul cadre pour régler la situation dans l’est de l’Ukraine.  Cette décision doit être respectée, a prié la représentante regrettant que trois principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies soient violés: l’interdiction de la menace ou de l’emploi de la force dans les relations internationales, le respect de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des États et la non-intervention dans les affaires intérieures des États. 

Il est également inacceptable que les attentats à la bombe, les explosions et autres violations du cessez-le-feu se soient multipliés ces derniers jours, selon les rapports de la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a poursuivi la représentante qui a exhorté les parties à mettre immédiatement fin à ces actions.  Rappelant la récente déclaration énergique de la Russie selon laquelle elle n’envahira pas l’Ukraine, la représentante a espéré que cette annonce sera pleinement respectée.  Elle a terminé en réaffirmant son attachement au respect de la souveraineté, de l’indépendance politique et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, conformément à la Charte des Nations Unies, au droit international et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale en particulier les résolutions 2625 (XXV) et 3314 (XXIX). 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a évoqué un « moment de grand danger » pour le peuple ukrainien et pour la paix internationale, un moment qui « aurait dû être évité par la diplomatie et le dialogue ».  L’Irlande défend la souveraineté et l’intégrité de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, a-t-elle souligné, ajoutant que son pays est également fidèle aux principes consacrés par la Charte des Nations Unies.  L’Ukraine a les mêmes droits fondamentaux que tout autre État indépendant, a fait valoir la représentante, ajoutant que les engagements pris par les États Membres sont « contraignants pour tous, sans exception ».  Rappelant à cet égard que, quatre jours plus tôt, le Vice-Ministre russe des affaires étrangères avait assuré qu’il n’y avait « pas d’alternative » aux accords de Minsk, elle a constaté que la décision prise aujourd’hui par Moscou constitue la deuxième violation de l’intégrité et de la souveraineté de l’Ukraine par la Russie en moins de 10 ans.  Cette « décision unilatérale », par laquelle la Russie « tourne le dos » aux accords de Minsk, est une « provocation » qui n’a d’autre but que d’accroître les tensions, a dénoncé la déléguée, avant d’appeler à une désescalade et à une solution diplomatique.  Nous avons besoin de mesures concrètes sur le terrain, a-t-elle insisté, sommant la Russie de revenir aux discussions au format Normandie.  Enfin, après avoir souhaité que la Mission spéciale d’observation de l’OSCE présente en Ukraine bénéficie de la protection prévue dans les accords, elle a estimé que le Conseil a la responsabilité d’œuvrer au règlement de ce conflit plutôt que de lui ouvrir un « nouveau chapitre ».   

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a souhaité faire référence à la déclaration prononcée par sa délégation le 17 février dernier sur le même sujet, en soulignant à nouveau l’importance de la désescalade et de la retenue, ainsi que la nécessité de préserver la sécurité et la stabilité dans la région.  Il est temps, a estimé la représentante, d’œuvrer de façon constructive et de bonne foi à résoudre la situation, en étant conscient de ses répercussions sur les personnes et infrastructures civiles. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a estimé que l’Ukraine est au bord d’une guerre majeure.  Il a regretté que notre cri en faveur de la diplomatie n’ait pas été entendu et, plus grave encore, la demande de la Charte des Nations Unies aux États de « régler leurs différends internationaux par des moyens pacifiques de manière que la paix et la sécurité internationales, ainsi que la justice, ne soient pas menacées », ignorée.  Aujourd’hui, a poursuivi M. Kimani, « la menace ou l’usage de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de l’Ukraine » a été mis en œuvre.  Le représentant a avoué être préoccupé par l’annonce faite par la Fédération de Russie de reconnaître les régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk comme États indépendants, une annonce qui porte atteinte à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Les préoccupations sécuritaires ne peuvent justifier cette reconnaissance alors qu’il y a de multiples voies diplomatiques disponibles pour parvenir à des solutions pacifiques.  « Le multilatéralisme est sur son lit de mort ce soir.  Il a été pris d’assaut aujourd’hui comme il l’a été par d’autres grandes puissances dans un passé récent », s’est lamenté le représentant.  Il a donc appelé les États Membres et le Secrétaire général à aider les parties concernées à résoudre la situation par des moyens pacifiques, réaffirmant le soutien du Kenya à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a « regretté profondément » que la Fédération Russie ait décidé de reconnaître les régions non contrôlées par le Gouvernement de l’Ukraine dans l’est du pays et d’y envoyer des troupes, tournant ainsi le dos aux accords de Minsk.  Il a indiqué à cet égard que, lorsqu’il a rejoint l’ONU en 1957, son pays ne se faisait pas d’illusion sur les relations internationales mais pensait que l’égalité souveraine était la « condition sine qua non d’un monde stable ».  Nouer des liens amicaux, promouvoir la coopération entre les peuples et défendre la perspective de lendemains meilleurs étaient autant de promesses qui avaient présidé à la décision du Ghana, a-t-il confié, avant de rappeler qu’à travers l’ONU et des principes clefs comme l’autodétermination, des pays colonisés ont pu devenir des États indépendants et souverains.  Réaffirmant le soutien du Ghana au respect des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine, le délégué a assuré que son pays ne reconnaît aucune entité en dehors des principes du droit international.  Dans le contexte ukrainien, il a appelé les parties à faire montre de la plus grande retenue et à rester fidèles aux principes de la Charte des Nations Unies et du droit international.  En cas de conflit ouvert, l’Europe risque d’être déstabilisée et tous les pays paieront un lourd tribut à ces actions, a averti le représentant, pour qui la voie du dialogue et de la diplomatie doit prévaloir, sous l’égide de l’ONU et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).   

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a déclaré que la décision prise aujourd’hui par la Fédération de Russie relativement aux régions ukrainiennes met à mal la mise en œuvre des accords de Minsk.  Elle en a pris acte et appelé toutes les parties à la désescalade, les encourageant au dialogue et la diplomatie pour sortir de la crise et éviter le pire.   

Mme MONA JUUL (Norvège) a déclaré que cette séance s’explique par la violation par la Fédération de Russie du principe fondamental sur lequel repose cette Organisation – « l’égalité souveraine de tous ses Membres ».  Elle a condamné fermement la décision du Président russe de reconnaître les « Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk » autoproclamées dans l’est de l’Ukraine comme des États indépendants.  Cette décision constitue selon elle une violation manifeste des accords de Minsk, dont la Fédération de Russie est pourtant signataire.  Et cette reconnaissance va directement à l’encontre du travail en faveur d’une paix négociée du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral, a encore relevé la déléguée.  Aussi a-t-elle instamment demandé à la Fédération de Russie de désamorcer la situation en retirant ses forces militaires de l’Ukraine et de ses frontières.  Qualifiant la décision de la Fédération de Russie de déployer des troupes dans l’est de l’Ukraine d’« injustifiée et irresponsable », car elle accroît encore les tensions, la représentante a estimé que « nous sommes confrontés à la perspective d’une guerre, qui non seulement menacerait l’architecture de sécurité de l’Europe, mais provoquerait également des souffrances inégalées parmi la population civile ». 

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré que sa délégation suit de très près la situation autour de l’Ukraine.  Il a appelé toutes les parties à faire montre de retenue et à éviter d’autres mesures susceptibles d’aggraver les tensions.  Il a salué tous les efforts déployés pour tenter de trouver une solution diplomatique à la crise actuelle, en soulignant l’importance de répondre aux préoccupations légitimes de chaque partie sur la base du respect mutuel.  Pour la Chine, chaque pays doit régler ses différends internationaux par des moyens pacifiques, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit préférer ne pas répondre aux attaques directes contre son pays.  Maintenant, a-t-il estimé, il est important de se concentrer sur la manière d’éviter la guerre et de forcer l’Ukraine à arrêter les bombardements et les provocations dans les régions de Donetsk et de Louhansk.  En écoutant les discours « d’un certain nombre de collègues », a constaté le représentant, on croirait que la reconnaissance par la Fédération de Russie des Républiques populaires de Louhansk et de Donetsk se produit « soudainement, sans aucune raison ».  C’est faux, a-t-il tonné.  Les deux républiques ont déclaré leur indépendance en 2014 et la Fédération de Russie ne l’a reconnue que maintenant, malgré leurs appels mais aussi ceux des institutions russes, et ce, dès le début.  Mais l’espoir que « le régime ukrainien de Maïdan » reprenne ses esprits et cesse de privilégier le langage des armes et des menaces contre les citoyens de l’Est s’est révélé vain.   

Nous avons demandé à plusieurs reprises à Kiev d’écouter les aspirations de ses citoyens russophones, de respecter leur désir « tout à fait légitime » d’utiliser leur langue maternelle et de l’enseigner à leurs enfants, et d’honorer la mémoire de ceux qui ont libéré leurs terres des nazis.  Les accords de Minsk, a rappelé le représentant, ont été signés après que « les aventures militaires ukrainiennes » se sont heurtées à la détermination des habitants de Donetsk et de Louhansk à défendre leur terre.  Le train de mesures pour la mise en œuvre des accords avait suscité l’espoir, surtout à l’élection en 2019 du nouveau Président ukrainien qui promettait de rétablir enfin la paix dans le Donbass.  Ceux qui comptaient sur l’attitude pacifique des autorités ukrainiennes se sont malheureusement trompés, a regretté le représentant.  Kiev a non seulement renoué très rapidement avec la rhétorique militaire et le bombardement des civils, mais a également tout fait pour détruire les accords de Minsk.   

Kiev a « refusé obstinément » de parler directement aux représentants de Donetsk et de Louhansk, alors que le dialogue est l’élément central des accords de Minsk.  Le 17 février dernier, les propos des dirigeants ukrainiens au cours de la réunion du Conseil de sécurité ont confirmé leur refus de discuter.  L’on a vu alors clairement que l’Ukraine n’avait aucune intention de se conformer aux accords de Minsk.  Le représentant s’est, à ce propos, étonné de la promptitude de « ses collègues du Conseil » à exiger des dialogues en Libye et en Syrie mais pas en Ukraine.  Il a déploré le rôle « extrêmement négatif des collègues occidentaux », États-Unis en tête.  Au lieu de contraindre Kiev à honorer ses obligations, ils n’ont fait, a-t-il accusé, qu’inciter ouvertement l’Ukraine à s’entêter, répétant que c’est la Fédération de Russie qui ne remplit pas ses obligations, alors qu’elle n’est pas partie auxdits accords.   

Depuis plusieurs semaines maintenant, a poursuivi le représentant, ils ont attisé sans justification aucune la peur d’une invasion « supposée imminente » de l’Ukraine, inondant « sans vergogne » cette dernière d’armes et d’instructeurs militaires et l’encourageant à se livrer à des provocations dans le Donbass.  La « bulle d’air » soufflée par les efforts conjoints de l’Occident et de l’Ukraine ne pouvait qu’éclater.  Le week-end dernier, a poursuivi le délégué russe, l’intensité des bombardements ukrainiens dans les zones résidentielles des deux Républiques populaires de Louhansk et de Donetsk a fortement augmenté, plusieurs groupes de saboteurs s’attaquant ou tentant de s’attaquer aux infrastructures vitales.  En conséquence, l’on a vu des victimes parmi la population civile dans les deux républiques, une mobilisation générale de leurs habitants et un afflux de 60 000 personnes se réfugiant en Fédération de Russie mais pas vers l’ouest de l’Ukraine. 

Le Donbass, a prévenu le représentant, est au bord d’une nouvelle aventure militaire ukrainienne, comme en 2014 et 2015.  « Nous ne pouvons rester les bras croisés », a-t-il affirmé, et c’est pourquoi le Président Vladimir Putin a écouté l’opinion des parlementaires et des membres du Conseil de sécurité russe.  « Vous connaissez la suite »: une déclaration détaillée du Chef d’État russe sur les motifs de la décision a été diffusée en détail par tous les grands médias du monde.  Nous invitons « nos collègues occidentaux » à reprendre leurs esprits, à se montrer moins émotifs et à éviter d’aggraver la situation.  Personne, sauf vous, ne peut freiner les velléités militaristes de Kiev.  Personne, sauf vous, ne peut obliger Kiev à cesser les bombardements et les provocations contre les deux républiques, lesquels, dans ce nouveau contexte, peuvent avoir des conséquences particulièrement dangereuses, a prévenu le représentant.  Conformément aux accords signés avec les deux républiques, la fonction de maintien de la paix sera exercée par l’Armée russe, a-t-il souligné, notant que dans leurs déclarations, « ses collègues » n’aient pas parlé des quatre millions d’habitants du Donbass menacés par les dernières manœuvres militaires ukrainiennes.  Notre objectif principal est de préserver la vie de ces habitants, a conclu le représentant. 

Le virus qui a contaminé les Nations Unies aujourd’hui a été inoculé par le Kremlin, a dit constater M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine).  Nous avons demandé cette réunion d’urgence pour attirer l’attention sur la décision « illégale et illégitime » du Président russe de reconnaître « l’indépendance » des territoires ukrainiens occupés de Donetsk et de Louhansk mais c’est l’ensemble des États Membres qui est attaqué.  L’attaquant, a souligné le représentant, c’est celui qui avait déjà occupé la Géorgie en 2008 et l’Ukraine en 2014.  Mais, a assuré le représentant, nos frontières internationalement reconnues demeureront malgré les déclarations et actions de la Fédération de la Russie qui doit être comptable de ses actes.   

La reconnaissance de « l’indépendance » de certains territoires occupés de Louhansk et de Donetsk constitue un retrait « de facto et unilatéral » des accords de Minsk et un mépris des décisions du format Normandie.  Le représentant a réclamé au Conseil de sécurité des consultations sur la base du Mémorandum de Budapest relatif aux garanties de sécurité et une réunion spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Il a aussi réclamé une mission de surveillance pour prévenir toute escalade et une réunion d’urgence du format Normandie.  Nous voulons, a-t-il insisté, savoir qui sont nos amis, nos alliés, les partisans de la Charte des Nations Unies et ceux susceptibles de dissuader la Fédération de Russie d’aller plus loin.   

Nous voulons, a poursuivi le représentant, une solution politique et nous refusons de réagir aux provocations, même si nous faisons valoir notre droit à la légitime défense.  Nous sommes chez nous, nous n’avons peur de personne, nous ne devons rien à personne et nous ne renoncerons à rien pour personne.  Cela doit être clair.  Nous ne sommes pas en février 2014, mais en février 2022.  Nous sommes un autre pays, avec une autre armée.  Notre objectif, c’est la paix, la paix en Ukraine, la paix en Europe, la paix dans le monde.  Insistant sur les accords de Minsk, le représentant a qualifié la décision du Président Putin de « menace à l’ordre fondé sur les règles et de menace à la Charte des Nations Unies, plus particulièrement à son Article 2 ».   

Il a invité la Fédération de Russie à lire scrupuleusement la déclaration que le Secrétaire général de l’ONU a publiée aujourd’hui et dans laquelle il estime que la décision russe est une violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine.  La Fédération de Russie, a tonné le représentant, doit renoncer à sa stratégie qui se fonde sur la menace de la force et la menace d’y recourir pour empiéter sur l’intégrité territoriale où l’indépendance politique de l’Ukraine.  La Fédération de Russie doit revenir sur sa décision et regagner la table des négociations.  L’ONU, s’est-il demandé, va-t-elle succombé au virus inoculé par le Kremlin?  La réponse dépendra des États Membres.  Aujourd’hui, le Kremlin n’a fait que copier mot pour mot le décret qu’il avait adopté en 2008 sur la Géorgie.  Il compense son manque de créativité par le bon fonctionnement de ses photocopieuses.  « Qui sera le suivant?  La question reste ouverte », a prévenu le représentant.   

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a rappelé qu’il y a quatre jours, le Conseil est parvenu à un consensus sur le fait que les accords de Minsk doivent être mis en œuvre.  Le Vice-Ministre russe des affaires étrangères a lui-même admis à cette réunion qu’il n’y a « pas d’alternative » à ce document historique pour l’Ukraine, a relevé la représentante.  Or, nous sommes aujourd’hui confrontés à une « attitude inverse » de la Fédération de Russie, s’est-elle indignée, qualifiant la décision du Président Putin de reconnaître les « républiques populaires » séparatistes autoproclamées dans l’est de l’Ukraine de « violation flagrante » de la résolution 2202 (2015) mais aussi des principes inscrits dans la Charte des Nations Unies.  Il s’agit d’une autre violation « délibérée » de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, après l’annexion illégale de la Crimée et l’instigation du conflit armé dans l’est de l’Ukraine depuis 2014, a-t-elle insisté, avant d’estimer que la Fédération de Russie « tombe le masque » après avoir longtemps assuré qu’elle n’était pas partie au conflit.   

Condamnant avec la plus grande fermeté la violation par la Fédération de Russie de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine, la déléguée a averti qu’avec ses alliés et partenaires, l’Allemagne répondra à cette violation du droit international par des mesures « fermes et adéquates » qui auront de « graves conséquences économiques, politiques et géostratégiques ».  Après avoir noté que la décision de la Fédération de Russie intervient dans le contexte d’un renforcement sans précédent des forces russes autour de l’Ukraine au cours des dernières semaines, elle a constaté que « ces forces semblent prêtes à attaquer », à la faveur d’un « prétexte ».  Or, la Charte des Nations Unies est « limpide », a-t-il souligné.  « Elle interdit sans équivoque la menace de la force contre l’intégrité territoriale et l’indépendance politique des États », a martelé la représentante avant d’appeler la Fédération de Russie, en tant que membre permanent du Conseil, à revenir immédiatement sur ses décisions d’aujourd’hui et à se réengager dans les accords de Minsk conformément à ce sur quoi les conseillers politiques du N4 (format Normandie) se sont mis d’accord en dernier lieu. 

De plus, a-t-elle ajouté, la Fédération de Russie doit s’assurer que ses forces ne franchiront pas les frontières internationalement reconnues de l’Ukraine et doit immédiatement retirer ses troupes des régions frontalières de l’Ukraine, en Fédération de Russie et au Bélarus.  La déléguée a, enfin, appelé la Fédération de Russie à renouveler son engagement envers l’architecture de sécurité européenne basée sur des règles, qui a été construite au fil des décennies, et à « reprendre le chemin de la diplomatie, au lieu de verser davantage de sang ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité spécial de la décolonisation donne le coup d’envoi de sa session de 2022

Session de 2022,
1re séance plénière – matin
AG/COL/3352

Le Comité spécial de la décolonisation donne le coup d’envoi de sa session de 2022

Le Comité spécial de la décolonisation (Comité spécial des Vingt-Quatre) a donné ce matin le coup d’envoi de sa nouvelle session, en procédant à la réélection de sa Présidente et en écoutant une intervention du Chef de cabinet du Secrétaire général de l’ONU, qui s’est aussi exprimé « en tant que citoyen d’un ancien pays colonial », « parfaitement conscient des effets dévastateurs du colonialisme sur les sociétés ».

M. Courtenay Rattray a donc jugé essentielle dans ce contexte la coopération internationale, avant de souligner que les 17 territoires non autonomes inscrits sur la liste des Nations Unies, dont certains ont des économies fragiles, ont consenti d’énormes efforts pour faire face aux répercussions socioéconomiques de la crise sanitaire.  Il a dit que l’appui fourni par les puissances administrantes, le système des Nations Unies et d’autres organisations continuera d’être d’une grande importance pour faire en sorte que 2022 soit l’année de la reprise « pour tous ». 

Un appel repris à son compte par la Présidente du Comité spécial, Mme Keisha McGuire (Grenade), qui, après sa réélection par acclamation à la tête de cet organe subsidiaire de l’Assemblée générale, a exhorté ses États Membres à redoubler d’efforts pour l’aider dans la conduite de ses travaux.  Le Comité est chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, à entendre les déclarations de représentants des territoires non autonomes, et à y dépêcher des missions de visite et à organiser chaque année des séminaires régionaux

Sur ce dernier point, elle a regretté que la réduction des allocations pour les voyages au cours des derniers exercices budgétaires ait affaibli la capacité du Comité à s’acquitter pleinement de ses deux importants aspects de son mandat.  C’est pourquoi Mme McGuire a demandé des ajustements pour la prise en charge des voyages officiels des membres du Comité, et ce, afin d’éviter des coûts exorbitants encourus en raison de réservations de dernière minute. 

Au nombre des développements récents survenus dans les territoires non autonomes, la Présidente a cité la tenue, le 12 décembre 2021, du troisième référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie.  Tout en notant qu’une majorité des 43% d’électeurs ayant participé au vote avaient dit « non » à l’indépendance, Mme McGuire a assuré de la volonté du Comité de continuer à accompagner le processus de décolonisation dans ce territoire, conformément à son mandat.  Elle a précisé que la Nouvelle-Calédonie est entrée dans une période de transition définie par la Puissance administrante, après avoir organisé trois référendums dans le cadre de l’Accord de Nouméa de 1998.  Elle a précisé que le Comité a entretenu un dialogue avec la France en présence de son ministre des Outre-mer. 

Cette séance d’organisation des travaux du Comité a également permis l’élection ou la réélection de ses Vice-Présidents, MM. Pedro Luis Pedroso Cuesta (Cuba),  Alhaji Fanday Turay (Sierra Leone) et Arrmanatha Christiawan Nasi (Indonésie), et de M. Bassam Sabbagh (République arabe syrienne) au poste de rapporteur. 

Les représentants de Cuba, de l’Indonésie, de la République arabe syrienne, de la Sierra Leone, de l’Iran et de l’Iraq ont salué l’adoption d’un programme de travail qui adresse un message clair sur la détermination du Comité spécial à promouvoir la décolonisation à l’ONU.  Alors que débute la deuxième année de la Quatrième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, tous ont appelé à favoriser une meilleure communication avec les puissances administrantes pour permettre la mise en œuvre l’application de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale en date du 14 décembre 1960, qui vise à éliminer le colonialisme « sous toutes ses formes et manifestations ». 

Le Comité a également adopté son projet de programme de travail pour cette session.

Le Comité spécial tiendra une réunion d’organisation du Séminaire régional pour le Pacifique au mois de mars dès qu’un pays hôte potentiel se sera manifesté, tandis que ses travaux de fond se dérouleront du 13 au 24 juin 2022. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Représentante spéciale en Haïti informe le Conseil de sécurité de certains signes de progrès malgré la violence et les besoins humanitaires

8969e séance – matin
CS/14796

La Représentante spéciale en Haïti informe le Conseil de sécurité de certains signes de progrès malgré la violence et les besoins humanitaires

La Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti a informé ce matin le Conseil de sécurité de la situation en Haïti faisant état, ces derniers mois, d’une polarisation extrême mais aussi de signes de progrès. 

Mme Helen La Lime a décrit tant les éléments qui portent à l’inquiétude -la violence des gangs, la poursuite de l’impunité, les faiblesses du système judiciaire et la détérioration de la situation humanitaire– que ceux qui alimentent l’espoir d’une réelle amélioration, à savoir la poursuite du dialogue politique, l’adoption par la Police nationale d’Haïti (PNH) d’une approche équilibrée, les 600 millions de dollars d’aide promis par la communauté internationale et l’absence de cas de choléra dans le pays depuis trois ans. 

Présentant le dernier rapport du Secrétaire général sur Haïti, celle qui est à la tête du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) a dénoncé la violence des gangs qui ont pris en otage la vie économique et sociale de millions de femmes, d’enfants et d’hommes.  Elle a déploré en particulier les enlèvements, les meurtres et la violence sexuelle et sexiste, autant de crimes qui ont pour but de terroriser la population et d’étendre l’emprise territoriale des gangs. 

Mme La Lime a exhorté à combattre d’urgence l’impunité et les faiblesses structurelles du système judiciaire d’Haïti qui bloquent la nomination des juges, limitent le lancement d’enquêtes et l’ouverture de nouvelles procédures.  Cette situation nourrit les rumeurs et accentue la méfiance et les soupçons, a constaté la haute responsable qui y voit une explication à l’arrêt de l’enquête sur le meurtre du Président Jovenel Moïse.  « Le système judiciaire national n’arrive pas à faire la lumière sur ce drame », s’est désolée la délégation de Haïti en reconnaissant le dysfonctionnement des institutions démocratiques. 

À ce propos, et comme signe de progrès, Mme La Lime a souligné la poursuite du dialogue mené par le Premier Ministre, M. Ariel Henry, avec les différents acteurs politiques afin d’élargir le consensus sur la création d’institutions démocratiquement élues.  Elle s’est également réjouie de la formation, le 24 novembre 2021, du nouveau Gouvernement, notant que cela a contribué à l’apaisement des tensions comme elle l’a constaté depuis le 7 février, date qui aurait marqué la fin du mandat du Président Moïse.  Elle a en outre misé sur la nouvelle approche sécuritaire, qui équilibre les aspects prévention et répression, et le déploiement de la PNH dans les zones sensibles.  Des fruits modestes en ont été recueillis, s’est réjouie la Représentante spéciale. 

Le représentant d’Haïti a toutefois informé que la PNH aurait besoin de formations et d’un encadrement adapté pour faire face efficacement à la situation sécuritaire.  La France n’a pas dit le contraire en recommandant de donner la priorité à l’objectif de fournir davantage de moyens à la PNH, qui en retour doit se montrer irréprochable, a-t-elle précisé.  Mme La Lime a salué le nouvel élan dans ce domaine, symbolisé par la création imminente d’un fonds multi-donateurs qui doit déboucher sur une hausse du financement des forces de police par le Gouvernement et par un soutien international accru sur les plans technique et financier.   

Sur le plan politique, Mme La Lime a informé de la publication prochaine du calendrier électoral ainsi que de la création envisagée d’un conseil électoral provisoire qui soit crédible et efficace et qui rassemble tous les acteurs nationaux.  Le Mexique a plaidé pour que cette création ne soit pas reportée.  Le Royaume-Uni a insisté sur l’importance de la participation des femmes et de la société civile à l’organisation des scrutins. 

La détérioration de la situation humanitaire a vivement préoccupé les membres du Conseil, en particulier après le tremblement de terre survenu dans le sud du pays en août 2021, qui a fait 2 248 morts et poussé 43% de la population dans le besoin d’assistance humanitaire en 2022, comme l’a décrit la Représentante spéciale.  Sans aide, les Haïtiens tenteront un voyage périlleux à l’étranger plutôt que de rester chez eux, a averti l’Irlande. 

« Haïti n’est pas isolé » a semblé rassurante la délégation des États-Unis en évoquant la conférence ministérielle tenue au Canada en janvier, qui a promis 600 millions de dollars pour la reconstruction du sud du pays.  Citant aussi la conférence sur la reconstruction organisée cette semaine par le Gouvernement haïtien, les États-Unis ont vu dans toutes ces conférences et rencontres le signe de l’engagement de la communauté internationale envers Haïti.  Le délégué d’Haïti a placé son espoir dans cette solidarité internationale en prévenant que, sans investissements massifs et sans création d’emplois durables et bien rémunérés, « nos efforts seront vains ». 

Pour renforcer l’efficacité de l’aide internationale, Mme La Lime a encouragé à formuler et adopter une nouvelle approche basée sur une coordination accrue des efforts internationaux.  Le Brésil a notamment plaidé pour le renforcement de la coopération entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix.  Quant au mandat du BINUH, le Brésil a dit attendre une discussion en profondeur lorsque le Secrétaire général aura présenté ses recommandations à ce sujet, en avril prochain. 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI (S/2022/117)

Déclarations

Mme HELEN LA LIME, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a informé de la situation marquée par une polarisation extrême dans le pays, malgré des signes de progrès ces derniers mois.  Le Premier Ministre, M. Ariel Henry, continue de dialoguer avec les différents acteurs politiques dans l’objectif d’élargir le consensus sur la création d’institutions démocratiquement élues et fonctionnelles, a noté la haute responsable.  Le succès dépendra, a-t-elle précisé, de la volonté collective des différents acteurs d’arriver à une solution de compromis, de faire passer les intérêts nationaux avant leurs propres aspirations et d’être souple sur les détails.  Le nouveau Gouvernement dévoilé le 24 novembre 2021 est le résultat le plus probant des efforts qui ont été déployés jusqu’à présent, selon Mme La Lime qui a fait état d’un apaisement des tensions, comme le prouve le calme observé le 7 février, date à laquelle le mandat de feu le Président Jouvenel Moïse serait officiellement arrivé à son terme.  Mme La Lime a indiqué qu’alors que la publication d’un calendrier électoral révisé est en cours, l'objectif est de créer un conseil électoral provisoire qui soit crédible et efficace et qui rassemble tous les acteurs, afin de rétablir la confiance des différents acteurs nationaux.

La Représentante spéciale a par ailleurs dénoncé la poursuite de la violence des gangs qui ont pris en otage la vie économique et sociale de millions de femmes, d’enfants et d’hommes.  Elle a dénoncé l’utilisation indiscriminée par les gangs de l’enlèvement, du meurtre et de la violence sexiste et sexuelle pour terroriser les populations et étendre encore plus leur contrôle du territoire. Cela est « particulièrement répugnant », a-t-elle commenté.  

Pour endiguer cette violence, la Police nationale d’Haïti (PNH) a adopté une approche plus équilibrée entre prévention et répression, déployant en outre une présence policière accrue dans des zones sensibles, a constaté Mme La Lime en appréciant les fruits modestes que cela semble porter.  Elle a toutefois prévenu que la PNH ne compte pas assez de personnel et de ressources, ce qui fait qu’elle ne peut pas, à elle seule, endiguer la montée de l’insécurité causée par les gangs.  Elle a souligné dès lors l’importance du renforcement en cours de la coopération internationale pour combler les lacunes auxquelles cette institution est confrontée.  Ce nouvel élan, symbolisé par la création imminente d’un fonds multi-donateurs, doit déboucher sur une hausse du financement des forces de police par le Gouvernement et par un soutien international accru sur les plans technique et financier.

Mme La Lime a en outre suggéré un contrôle plus vigilant du flux illicite d’armes, accompagné de projets socioéconomiques et d’activités de réintégration afin de créer des emplois et des sources de revenus dans les quartiers qui sont les plus affectés.  Les autorités haïtiennes ont adopté une stratégie réduction de la violence communautaire au niveau national, a-t-elle salué en notant que cela a permis à des milliers de jeunes de reprendre leur éducation.

La Représentante spéciale a par ailleurs demandé de combattre de toute urgence l’impunité, y compris en rendant la justice après l’assassinat du Président Moïse dont l’enquête est à l’arrêt.  « Cette situation alimente les rumeurs et exacerbe la méfiance et les soupçons. »  Le système judiciaire haïtien souffre de faiblesses structurelles, a noté Mme La Lime en citant notamment les difficultés pour renouveler les mandats des juges, limitant ainsi la capacité des tribunaux à lancer des enquêtes et à ouvrir de nouvelles procédures.  Une action plus décisive est nécessaire pour préparer l’entrée en vigueur du Code de procédure pénale, a-t-elle estimé.

Le tremblement de terre qui a détruit la partie sud du pays en août 2021 et qui a coûté la vie à 2 248 personnes a compliqué davantage la situation humanitaire, a poursuivi la Cheffe du BINUH en notant qu’il y a 4,9 millions de personnes, soit 43% de la population, qui auront besoin d’une assistance humanitaire en 2022.  La réunion ministérielle du 21 janvier présidée par le Canada, la conférence internationale des bailleurs de fonds pour la reconstruction de la péninsule Sud et la visite de la Vice-Secrétaire générale cette semaine ont été une occasion de réitérer l’engagement de la communauté internationale en soutien à Haïti et à sa population, a-t-elle apprécié avant de préciser que les États Membres se sont engagés à contribuer à hauteur de 600 millions de dollars.  

Mme La Lime a tenu à informer que cela fait trois années consécutives que les laboratoires n’ont détecté aucun cas de choléra en Haïti, ce qui indique une marche vers l’élimination de cette maladie.  Cependant, l’échec de l’aide au développement depuis plusieurs années oblige à formuler et adopter une nouvelle approche basée sur une coordination accrue des efforts internationaux et la mise en place de véritables partenariats avec des autorités et les acteurs haïtiens, a préconisé la Représentante spéciale.  Elle a terminé en exhortant les dirigeants haïtiens à dialoguer de manière constructive pour mener le pays vers le processus électoral.  Il faut veiller à ce que les réformes structurelles urgentes soient menées à bien, pour faire face à la violence des gangs, lutter contre l’impunité et la corruption, renforcer la justice et transformer l’économie, a-t-elle conclu.

Mme  LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a relevé que la situation en Haïti montre à quel point le soutien continu des Nations Unies demeure vital.  Elle a rappelé qu’en décembre, les États-Unis ont convoqué une réunion de haut niveau avec Haïti et ses partenaires internationaux dans le but de prévoir des mesures concrètes et rapides pour renforcer la PNH.  De même, le Canada a accueilli une réunion ministérielle sur Haïti en janvier, à laquelle ont participé 19 États et plusieurs organisations multilatérales.  Dans une déclaration publiée à l’issue de la rencontre, le Canada a souligné « l’importance de renforcer le soutien international et la coordination de l’aide internationale »  en faveur d’Haïti.  Juste cette semaine, a rappelé la représentante, le Gouvernement haïtien a tenu une conférence sur la reconstruction.  Toutes ces conférences et rencontres témoignent de la préoccupation et de l’engagement de la communauté internationale envers Haïti, a-t-elle argué, ajoutant que « Haïti n’est pas isolé » et que le renouvellement du mandat du BINUH réaffirmera l’engagement commun à soutenir le peuple haïtien dans ses efforts pour faire face aux crises politiques et sécuritaires en cours. 

En revanche, Mme  Thomas-Greenfield a reconnu qu’il y a de quoi s’inquiéter.  En effet, l’activité des gangs a augmenté rapidement, les Haïtiens étant victimes de meurtres, d’enlèvements, de violences sexuelles et de déplacements forcés.  Les responsables de ces actes horribles doivent être tenus responsables, a-t-elle exigé.  De même, elle a souligné que la PNH a besoin d’un soutien financier ainsi que d’équipement, de formation et d’un leadership cohérent, ce qui permettra sa professionnalisation continue et renforcera sa capacité à lutter contre les gangs et à améliorer la sécurité des citoyens.  Mais comme le note le rapport du Secrétaire général, la Police ne peut à elle seule résoudre les problèmes de sécurité d’Haïti, a-t-elle reconnu en appelant à fournir un soutien non seulement aux forces de l’ordre, mais aussi au système judiciaire et aux initiatives de réduction de la violence communautaire.  Car il faut aider Haïti à créer un système de justice pénale fonctionnel, a plaidé la représentante.  Enfin, elle a dit attendre avec impatience la publication de l’évaluation du Secrétaire général sur le mandat du BINUH en avril. 

« La situation en Haïti pourrait difficilement être plus préoccupante », a constaté M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÌREZ (Mexique) en se déclarant particulièrement inquiet de la crise de la sécurité publique, marquée par les violences des gangs qui contrôlent la majeure partie de Port-au-Prince et des cas de violences sexuelles contre les femmes, les filles et les jeunes hommes.  Dans ce contexte, il a jugé alarmant le déplacement de milliers de personnes, tout comme la fragilité voire l’inefficacité du système judiciaire.  Ces multiples défis exigent de traiter les causes profondes de l’insécurité et de la violence, mais aussi de s’attaquer au trafic d’armes et à la corruption, a plaidé le représentant, indiquant que son pays contribue à ces efforts en formant la Police nationale d’Haïti (PNH) à la lutte contre la criminalité organisée et au renforcement de la confiance parmi la population. 

Le délégué a ensuite estimé que la formation d’un conseil électoral provisoire ne peut être reportée en vue de la tenue des élections présidentielle et législatives.  « Il est temps que les différends politiques se règlent dans les urnes », a-t-il dit, avant d’évoquer la crise humanitaire, qui est aggravée, selon lui, par la dégradation de l’environnement, les effets des changements climatiques et leur incidence sur la sécurité alimentaire.  À cet égard, il a annoncé que le Mexique prévoit de lancer en Haïti un programme d’assistance qui viendra en aide à plus de 5 000 personnes.  Ce projet, a-t-il noté, s’ajoute au déploiement d’une brigade médicale l’an dernier, à l’envoi de 2 000 tonnes de vivres et de médicaments, et à la mise en place d’un programme de bourses pour les jeunes Haïtiens.  Enfin, après avoir rappelé que le BINUH a été la première mission politique spéciale créée dans le cadre de la réforme de la paix et de la sécurité promue par le Secrétaire général, il a souhaité que l’évaluation des missions, préconisée par la résolution 2600 (2021), permette d’accroître l’efficacité de la présence onusienne en Haïti. 

M. BING DAI (Chine) a souligné la gravité de la situation en Haïti et appelé les dirigeants du pays à assumer leurs responsabilités.  Une structure politique stable est fondamentale, a dit le délégué, en demandant le lancement d’un dialogue politique inclusif.  Il a aussi souhaité l’adoption d’un calendrier électoral réaliste.  Il a dénoncé la violence des gangs et plaidé pour une police haïtienne plus professionnelle.  Il a rappelé que 40% de la population du pays a besoin d’une aide humanitaire et exhorté la communauté internationale à augmenter celle-ci.  Haïti doit surmonter les obstacles institutionnels qui entravent son développement économique, a dit le délégué de la Chine.  Enfin, il s’est dit favorable à un réajustement du mandat du BINUH et a demandé qu’il renforce sa coopération avec le PNUD et la Commission de consolidation de la paix.  Les pays de la région devraient aussi intensifier leurs efforts en appui à Haïti, a conclu le représentant. 

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) s’est inquiété de la détérioration de la situation sécuritaire en Haïti et de l’augmentation de la violence sexuelle et sexiste et de la persistance de l’impunité pour les violations et les abus des droits humains.  Afin d’améliorer la situation en matière de sécurité, il a recommandé de procéder à une hiérarchisation des priorités et des ressources pour les services de police, insistant notamment sur le renforcement des capacités et de la confiance.  Notant que l’augmentation de la violence a exacerbé la vulnérabilité, il a indiqué que sans aide d’urgence, le peuple haïtien continuera de faire face à des choix désespérés, pour ensuite saluer la conférence internationale qui s’est déroulée cette semaine à Port-au-Prince, où 600 millions de dollars ont été recueillis. 

Sans aide, les Haïtiens tenteront un voyage périlleux à l’étranger plutôt que de rester chez eux, a poursuivi le délégué.  Et lorsqu’ils font ce voyage, il est crucial que tous bénéficient de protections juridiques en vertu du droit international des réfugiés.  Des voies sûres, légales et dignes pour ceux qui fuient la violence sont plus que jamais essentielles, a estimé le représentant.  Ce dont les Haïtiens ont vraiment besoin, c’est d’une voie vers la stabilité politique, capable de créer les conditions propices à la reprise économique et au développement durable, a encore déclaré le représentant pour lequel le consensus est le seul moyen de sortir de l’impasse politique.  Ce consensus doit reposer sur un engagement large, inclusif et participatif, y compris des représentants de la société civile.  Et les solutions durables exigent une garantie de sûreté et de sécurité pour tous ceux qui s’engagent politiquement, et pour les femmes afin d’assurer leur participation significative, pleine et égale. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a indiqué que la gestion des crises qui ébranlent Haïti et le nécessaire développement durable du pays ne peuvent se faire sans rétablir la confiance dans le système politique et judiciaire fondé sur l’état de droit.  Tous les acteurs politiques doivent donc s’engager dans un dialogue inclusif pour résoudre le problème politique actuel dès que possible, et il faut organiser de nouvelles élections légitimes.  Pour cela, elle a appelé à un processus inclusif, y compris la participation pleine, égale et significative des femmes, afin de trouver une solution haïtienne à la situation politique.  Pour la représentante, cette situation pourrait bénéficier d’un engagement international plus fort, y compris un BINUH plus fort.   

La déléguée a plaidé pour que les violations et exactions liées à la violence armée à Port-au-Prince soient traitées de toute urgence.  Le recours signalé à la violence sexuelle et au viol par des gangs criminels comme arme pour terroriser et affirmer leur contrôle est inacceptable, a-t-elle déclaré.  Elle a regretté que cette violence contribue à déplacer les populations affectées, en particulier les femmes et enfants, notant que les personnes handicapées courent également des risques particuliers.  Elle a appelé les autorités à faire davantage pour protéger leurs citoyens, veiller à ce que les travailleurs humanitaires aient un accès sans entrave et mettre rapidement en œuvre la stratégie nationale de réduction de la violence communautaire.  Enfin, la représentante a dit attendre avec intérêt l’évaluation du mandat du BINUH, estimant que ce n’est pas le moment pour la communauté internationale de réduire son engagement en Haïti.  

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a constaté que la situation politique et sécuritaire en Haïti est restée volatile et tendue depuis la dernière réunion du Conseil consacrée à ce pays.  Malgré la polarisation actuelle, il s’est félicité des efforts déployés par les dirigeants haïtiens pour parvenir à un consensus sur l’avenir politique du pays.  Il a également salué le fait que le Premier Ministre ait réitéré, le mois dernier, son engagement à dialoguer avec toutes les parties prenantes et confirmé que le prochain chef de l’État serait choisi par la voie démocratique.  Le représentant s’est toutefois déclaré préoccupé par la persistance des violences liées aux gangs, principalement dans la capitale Port-au-Prince, appelant à un renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti.  Il a d’autre part observé qu’en dépit des divers défis, les projets du Fonds pour la consolidation de la paix en faveur de la réduction de la violence communautaire et du programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) progresse positivement. Enfin, affirmant attendre avec intérêt l’évaluation indépendante du BINUH attendue en avril pour définir la marche à suivre en Haïti, il a rappelé que l’Inde a renforcé son aide à ce pays, notamment à la suite du passage de l’ouragan Mathew en octobre 2016 et durant la pandémie de COVID-19. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré qu’Haïti traverse aujourd’hui une crise très grave, sur plusieurs fronts.  « La classe politique est minée par les divisions, la plupart des institutions connaissent de profondes difficultés, les groupes criminels terrorisent la population et Haïti se relève à peine du tremblement de terre du mois d’aout 2021. »  Il y a urgence, a déclaré la déléguée.  Elle a affirmé que seul le dialogue peut sortir Haïti de la crise politique actuelle.  Elle a salué à cet égard la constitution d’un gouvernement d’ouverture, en novembre dernier, sous l’égide du Premier Ministre Ariel Henry.  Il faut mettre un terme à la violence des gangs, a poursuivi la déléguée.  « La priorité est de consacrer davantage de moyens à la Police nationale d’Haïti, qui en retour doit se montrer irréprochable. »  Elle a ensuite souligné l’importance de renouer avec un fonctionnement normal des institutions.  « Il faut regarder les choses en face: aujourd’hui le système judiciaire haïtien est déliquescent. »  Or, il est crucial pour Haïti de mener à bien l’enquête sur l’assassinat du Président Jovenel Moïse, a tranché la déléguée.  Enfin, jugeant alarmante la situation humanitaire en Haïti, elle a déclaré qu’en 2022 la France contribuera à la réponse humanitaire en Haïti à hauteur de 6,5 millions d’euros. 

M. FERIT HOXHA (Albanie)a déclaré que la lutte contre l’insécurité reste la priorité absolue en Haïti.  Par conséquent, le rétablissement de l’autorité de l’État doit être le point de départ de la marche vers la normalité, a estimé le représentant.  À cet égard, a-t-il dit, tous les efforts doivent être faits pour renforcer la Police nationale d’Haïti et l’assistance internationale est nécessaire pour faciliter les réformes judiciaires, lutter contre la corruption et mettre fin à l’impunité.  Le pays ne sortira pas de ces crises sans une voie claire vers la démocratie, a souligné M. Hoxha, qui a pris note de la volonté du Premier Ministre Ariel Henry de dialoguer, y compris auprès des partisans de « l’accord du Montana ».  À ses yeux, la solution réside dans un dialogue national inclusif, avec la participation de toutes les parties prenantes politiques, économiques et de la société civile.  La communauté internationale peut et doit aider, mais le règlement de la crise est entre les mains des Haïtiens eux-mêmes, a prévenu le délégué. 

M. Hoxha a appelé à accélérer les préparatifs des élections qui doivent êtres inclusives, pacifiques, libres, équitables, transparentes et crédibles et avec la participation pleine, égale et significative des femmes, et de la société civile.  Après avoir salué les 600 millions de dollars promis à la conférence internationale des donateurs pour aider Haïti à se reconstruire, le représentant albanais a appelé les autorités haïtiennes à travailler avec le BINUH pour engager les réformes urgentes dont le pays a besoin et améliorer la stabilité politique et la bonne gouvernance et de créer un Haïti plus sûr, démocratique, juste et plus prospère. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a exhorté les dirigeants politiques d’Haïti, ses professionnels et les membres de la société civile à faire preuve de compromis en forgeant un modèle constitutionnel et en organisant des élections crédibles pour déboucher sur la création d’un gouvernement inclusif et compétent.  L’Union africaine et les États africains doivent partager leurs connaissances et leurs bons offices avec le peuple d’Haïti en ce moment de besoin, a-t-il estimé, rappelant que l’Acte constitutif de l’Union africaine reconnaît la diaspora comme sixième région, et qu’Haïti en fait partie. 

Poursuivant, le représentant a salué les efforts en cours du BINUH et d’autres partenaires pour renforcer la capacité de la Police nationale d’Haïti, notamment en ce qui concerne les opérations antigangs.  Il a souligné la nécessité d’intégrer, dans les programmes d’assistance, des formations à la protection des femmes et des filles contre les violences et abus sexuelles et sexistes.  Il a également encouragé les autorités haïtiennes à procéder à une réforme de fond du secteur judiciaire afin de lutter contre les détentions préventives prolongées, créer des bureaux d’aide juridique, accélérer des affaires judiciaires et établir des greffes fonctionnels.  Ces mesures sont essentielles pour lutter contre l’impunité et veiller à ce que les responsables de crimes emblématiques, dont l’assassinat du Président Jovenel Moïse, soient traduits en justice, a souligné M. Kimani qui a jugé tout aussi essentiel que le lien entre la politique, les gangs et les flux financiers illicites soit brisé. 

Sur le plan économique, le représentant des A3 a jugé urgent de s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et de la précarité afin de permettre une reconstruction durable en Haïti, déplorant que le pays continue de perdre la précieuse main-d’œuvre dont il a besoin pour sa reconstruction.  Il a ensuite remercié les donateurs ayant pris part à la réunion du 16 février sur la reconstruction et le relèvement de la péninsule Sud d’Haïti suite au tremblement de terre dévastateur du 14 août et à la tempête tropicale Grace du 17 août dernier.  Notant que la majorité des 14 milliards de dollars levés à cette occasion sont destinés à financer les réponses d’urgence, il a souligné qu’une aide supplémentaire est nécessaire pour appuyer la sécurité alimentaire, le développement des infrastructures, la réforme du secteur de la justice et de la sécurité, l’éducation, et la gestion des risques de catastrophe.  Il a en outre souhaité que le mandat du BINUH soit revu afin qu’il puisse offrir un meilleur soutien au pays. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a condamné les violences perpétrées par des gangs armés qui sapent les efforts de paix en Haïti, appelant au renforcement de l’état de droit pour rétablir la stabilité et remettre le pays sur la voie de la prospérité.  Dans cet esprit, la représentante a jugé essentiel d’élargir la représentation et l’inclusion de tous les segments de la société haïtienne, en particulier des femmes, qu’il convient aussi de protéger contre la violence.  Elle a d’autre part préconisé de renforcer le secteur de la sécurité pendant le processus de transition et de lutter contre la corruption.  Elle a également estimé que la réduction de la violence communautaire nécessite des solutions durables, notamment par le biais du développement et des efforts humanitaires.  À cet égard, la déléguée a souhaité que les programmes de relèvement, tels que les initiatives de développement communautaires, permettent d’améliorer les moyens de subsistance et d’offrir des opportunités aux Haïtiens.  Elle a dit attendre avec intérêt le prochain rapport d’évaluation stratégique, tout en se disant convaincue qu’une stratégie cohérente dirigée par Haïti lui-même, avec l’appui de l’ONU, est la solution pour restaurer la paix et la stabilité dans le pays. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit qu’Haïti est très proche du cœur des Brésiliens et rappelé que son pays a déployé des milliers de Casques bleus au sein de l’ancienne Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Qualifiant la situation en Haïti de critique, il a estimé que la présence de l’ONU doit être réévaluée, selon une approche intégrée, prenant en compte les dimensions sociale, politique et économique de la crise.  « Haïti doit briser le cercle vicieux de la pauvreté, de la criminalité et de la violence politique. »  Il a aussi souhaité un renforcement sur le dossier de la coopération entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix.  Il a rappelé que cette dernière a été créée pour catalyser les efforts de consolidation de la paix et de promotion du développement.  Le représentant du Brésil a jugé inévitable une discussion en profondeur du mandat du BINUH et dit attendre avec impatience les recommandations du Secrétaire général en avril. Enfin, il a souhaité que le principe fondamental de l’ONU, qui est de « ne laisser personne sur le côté », guide les efforts du Conseil en ce qui concerne la crise haïtienne. 

Mme ALICE JACOBS (Royaume-Uni) a déclaré que les défis sécuritaires, sanitaires et économiques auxquels Haïti est confronté ne peuvent être résolus que par un soutien unifié aux solutions dirigées par Haïti.  À cet égard, l’appui au BINUH demeure essentiel, a-t-elle estimé, s’inquiétant en outre de la persistance de l’impasse politique et de ses répercussions sur le peuple haïtien.  Elle a soutenu les efforts en cours pour parvenir à un consensus politique pour assurer la tenue d’élections libres, équitables et crédibles.  Elle incombe en outre aux partenaires internationaux d’Haïti de soutenir une solution dirigée par Haïti. 

Rappelant que l’assassinat du Président Moïse a été un acte odieux, elle a réitéré son appel pour que les auteurs de ce crime soient traduits en justice.  Le Royaume-Uni est aussi préoccupé par la détérioration de la situation en matière de sécurité et de droits humains, en particulier par l’augmentation des enlèvements, de la violence criminelle et les cas de traite des êtres humains, a-t-elle ajouté.  Profondément préoccupé par la situation humanitaire dans le pays, la représentante a encouragé tous les acteurs à travailler de manière constructive avec les autorités haïtiennes pour trouver des solutions aux causes profondes de ces crises et pour soutenir le développement et le progrès du peuple haïtien. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que la situation en Haïti est marquée par une crise profonde, s’inquiétant du vide du pouvoir à tous les niveaux, ainsi que la paralysie des systèmes judiciaire et de sécurité.  Il a pris note des mesures adoptées par le Gouvernement pour avancer dans le bon sens, avec des résultats modestes.  Le représentant a déploré que des armes à feu rentrent dans le pays par des ports que le Gouvernement ne contrôle visiblement pas.  Il s’est également inquiété du manque de progrès dans l’enquête sur l’assassinat du Président Moise.  Des informations laissent voir une implication étrangère dans cet acte, a-t-il affirmé, souhaitant que les coupables en rendent compte.  Pour permettre au pays de sortir de la crise, il a appelé à lancer des réformes qui conduiraient à la tenue des élections afin d’éviter que le pays ne sombre dans un gouffre.  De même, la BINUH doit favoriser le dialogue entre les parties prenantes haïtiennes, a—t-il préconisé. 

M. ANTONIO RODRIGUE (Haïti) a commencé par exprimer sa gratitude pour l’élan de solidarité international qui a permis de mobiliser, mercredi dernier, 600 millions de dollars en promesses de don pour la reconstruction de la péninsule du Sud d’Haïti, frappée l’an dernier par un séisme dévastateur.  Il a ensuite estimé qu’il importe aujourd’hui de remettre les institutions démocratiques de son pays sur les rails, compte tenu de leur dysfonctionnement actuel.  Évoquant à ce sujet l’assassinat en juillet dernier du Président Jovenel Moïse, il a constaté que le système judiciaire national n’arrive pas à faire la lumière sur ce drame. De plus, a poursuivi le représentant, nous n’avons plus de Parlement capable de jouer le rôle dévolu au pouvoir législatif.  Rétablir le plus rapidement possible le fonctionnement normal des institutions est donc impératif pour ramener durablement la paix et la stabilité dans le pays, a-t-il dit, assurant que le Gouvernement œuvre à la construction de consensus à cette fin.  Dès son entrée en fonction, le Premier Ministre, M. Ariel Henry, a ainsi tenu à rencontrer tous les acteurs de la vie nationale afin de trouver un accord pour une « gouvernance apaisée et efficace » durant la période intérimaire, a précisé le délégué, non sans se réjouir que cette initiative ait permis de rallier des adversaires politiques. 

Il convient à présent de mettre en place les structures indispensables à la tenue d’une consultation populaire pour l’adoption d’une nouvelle Constitution et d’organiser des élections générales libres, honnêtes et démocratiques, a poursuivi le représentant, selon lequel, « si tout se passe bien », le pouvoir devrait être rendu à des élus choisis par le peuple haïtien « au début de l’année prochaine ».  Il a toutefois averti que l’insécurité actuelle fait peser un risque important sur tout le processus.  En effet, a-t-il déploré, les gangs armés font régner la terreur dans plusieurs régions du pays et dans divers quartiers de la capitale, ce qui implique de rétablir l’ordre et de restaurer l’autorité de l’État préalablement à l’organisation d’élections.  Faisant état de succès de la PNH, notamment de la réouverture d’écoles dans des quartier contrôlés par des gangs et de terminaux pétroliers bloqués plusieurs semaines par des « bandits », il a reconnu que beaucoup reste à faire pour revenir à une situation normale et que « la répression seule ne suffit pas ». 

Nous avons besoin d’un soutien renforcé pour les corps spécialisés de la Police nationale, a expliqué M. Rodrigue, précisant que ces derniers manquent cruellement d’armes, de munitions et d’équipements appropriés.  Nos policiers ont aussi besoin de formation et d’encadrement adaptés pour leur permettre de faire face efficacement à la situation, a-t-il ajouté, avant de relever que l’instabilité chronique que connaît son pays non seulement perturbe la vie économique, mais empêche aussi les investissements et fait fuir les touristes, tout en maintenant le peuple dans la misère en en poussant les jeunes vers l’émigration illégale.  Sans des investissements massifs, sans la création d’emplois durables et bien rémunérés, nos efforts seront vains, a estimé le délégué, formant l’espoir que la solidarité internationale avec Haïti, constatée mercredi dernier, se manifestera aussi pour le rétablissement de la sécurité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: vives préoccupations face au regain de violations du cessez-le-feu dans l’est de l’Ukraine

8968e séance – matin
CS/14795

Conseil de sécurité: vives préoccupations face au regain de violations du cessez-le-feu dans l’est de l’Ukraine

Deux semaines après sa dernière séance sur le sujet, le Conseil de sécurité s’est, ce matin, réuni à nouveau pour discuter de la situation « extrêmement dangereuse » en Ukraine et à ses frontières.  « Les spéculations et accusations vont bon train autour d’un conflit militaire potentiel », a indiqué la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques des Nations Unies, selon laquelle le seul recours possible à la crise doit être d’ordre diplomatique: « Nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer », a-t-elle exhorté.  

S’exprimant par visioconférence, Mme Rosemary DiCarlo a constaté que les tensions « en Ukraine et autour de l’Ukraine » sont plus élevées aujourd’hui qu’à n’importe quel moment depuis 2014.  Les problèmes sous-jacents sont « complexes et anciens », a analysé Mme DiCarlo, soulignant que le conflit qui dure depuis huit ans dans l’est du pays s’inscrit dans le contexte plus large de l’architecture de sécurité européenne. 

L’impasse semble totale, a-t-elle reconnu, suivi sur ce point par M.  Mikko Kinnunen, le Représentant spécial du Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine et au sein du Groupe de contact trilatéral: peu, « voire aucun », progrès significatif n’a été accompli –y compris récemment dans le cadre du format Normandie– dans la mise en œuvre des accords de Minsk, censés mettre fin aux hostilités dans les oblasts de Donetsk et de Louhansk, qui font toutes deux parties de la région orientale du Donbass, en Ukraine.  Et ce, alors que de nouvelles violations du cessez-le-feu de part et d’autre de la ligne de contact ont été constatées au cours des dernières heures. 

Depuis le début de l’année, la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine a ainsi observé deux fois plus de violations du cessez-le-feu par rapport à la même période en 2021 et de plus en plus de victimes civiles, « essentiellement à la suite de tirs d’artillerie » entre les deux parties, selon son Observateur en chef, M. Yasar Halit Çevik.  Une situation d’autant plus inquiétante que 2,9 millions de personnes ont toujours besoin d’une aide humanitaire, a précisé Mme DiCarlo, la majorité dans les zones du Donbass non contrôlées par le Gouvernement. 

Si l’appel à l’apaisement lancé par la Secrétaire générale adjointe a été largement repris par les membres du Conseil, les États-Unis, par la voix de leur Secrétaire d’État, M. Anthony Blinken, ont directement accusé Moscou de vouloir se servir de n’importe quel « prétexte » pour justifier une offensive militaire contre l’Ukraine.  En réponse à cette provocation « fabriquée de toutes pièces », les autorités russes pourraient alors déclarer que la Russie doit défendre les citoyens russes ou les Russes ethniques en Ukraine, a poursuivi le Secrétaire d’État.  « Des missiles et des bombes seront largués à travers l’Ukraine.  Les communications seront brouillées.  Des cyberattaques mettront hors service les principales institutions du pays.  Ensuite, chars et soldats russes avanceront vers des cibles déjà identifiées », a anticipé M. Blinken. 

Le Secrétaire d’État a ensuite fait savoir qu’il avait proposé au Ministre russe des affaires étrangères, M. Sergueï Lavrov, de le rencontrer la semaine prochaine pour trouver une issue à la crise, préconisant en outre la tenue de réunions du Conseil OTAN-Russie et du Conseil permanent de l’OSCE afin d’ouvrir la voie à un sommet des principaux dirigeants pour parvenir à un accord sur les préoccupations mutuelles en matière de sécurité.  « Si la Russie est attachée à la diplomatie, nous lui offrons toutes les occasions de démontrer cet engagement », a-t-il souligné.

La Russie n’a aucune intention d’envahir l’Ukraine, a affirmé le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération Russie selon lequel la crise au Donbass découlerait du mensonge colporté par Kiev, qui accuse Moscou de ne pas s’acquitter de ses obligations en vertu des accords de Minsk.  Un argument « nul et non avenu », a tonné M. Sergey Vershinin.  Selon lui, ces allégations accréditent surtout une manœuvre destinée à convaincre les chancelleries occidentales que l’application des accords de Minsk serait contraire aux intérêts de l’Ukraine, voire « signifierait [sa] destruction ». 

À ses yeux, le nœud du problème est le refus systématique de Kiev d’engager un dialogue direct avec les représentants de Donetsk et Louhansk au sein du Groupe de contact trilatéral, alors que cela est explicitement prévu dans le texte des accords.  Il ne s’agit pas d’une « exigence » russe mais d’une obligation faite à l’Ukraine, a insisté le Vice-Ministre, regrettant que cela « mette en péril » l’ensemble du processus. 

Les accords de Minsk ont été signés en 2014 à la fois par mon pays et la Russie, a rétorqué le représentant de l’Ukraine qui a dénoncé l’appel lancé il y a deux jours par la Douma d’État russe au Président Putin pour reconnaître l’indépendance des « républiques populaires de Donetsk et de Louhansk ».  Une telle reconnaissance équivaudrait au retrait délibéré de la Russie des accords de Minsk et à l’abandon de la voie politico-diplomatique pour le règlement de ce différend, a-t-il mis en garde.  Un sentiment partagé par l’Irlande et la France, entre autres.  Le Vice-Ministre Vershinin a, quant à lui, mis en cause la répression de la communauté russophone en Ukraine et l’accumulation d’armes par Kiev au mépris des mesures de confiance mutuellement agréées. 

De son côté, le Ministre d’État de l’Europe et de l’Amérique du Nord du Royaume-Uni, M. James Cleverly, a prévenu que toute incursion russe en Ukraine serait une « erreur stratégique » et un désastre humanitaire qui appellerait à une réaction ferme de « notre part ».  Par sa « posture menaçante », sa rhétorique et ses « exigences irréalistes », Moscou remet en question la sécurité européenne, selon la Norvège, qui a rappelé que chaque pays a le droit de choisir librement ses allégeances sur le plan sécuritaire, en faisant allusion au souhait de Kiev d’intégrer l’Organisation du Traité de l’Atlantique-Nord (OTAN).  Tout en se livrant à un vigoureux plaidoyer prodiplomatie, la Chine a estimé pour sa part que la sécurité régionale ne peut être garantie par l’élargissement d’un bloc militaire. 

Cette séance a également été marquée par l’intervention d’une militante de la société civile ukrainienne qui a vivement dénoncé le fait que les autorités de Kiev s’opposent à toute dissidence, notamment aux « personnes qui sont contre Maïdan, contre le renversement du Gouvernement, et contre la guerre dans l’est ». 

LA SITUATION EN UKRAINE

Déclarations

S’exprimant par visioconférence, Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué qu’un an après son dernier exposé au Conseil de sécurité sur la situation en Ukraine dans le contexte de la mise en œuvre des accords de Minsk, le 11 février 2021, les tensions en Ukraine et autour de l’Ukraine sont plus élevées qu’à n’importe quel moment depuis 2014.  « Les spéculations et accusations autour d’un conflit militaire potentiel vont bon train.  Quoi que l’on pense de la perspective d’une telle confrontation, la réalité, c’est que la situation actuelle est extrêmement dangereuse », a constaté la haute fonctionnaire. 

Les problèmes qui sous-tendent la crise actuelle sont « complexes et anciens », a-t-elle souligné.  Ils relient le conflit qui dure depuis huit ans dans l’est de l’Ukraine à des questions plus vastes relatives à l’architecture de sécurité européenne.  Bien que paraissant « insolubles », ces questions peuvent et doivent être réglées par des moyens diplomatiques et les nombreux mécanismes et cadres régionaux et internationaux disponibles.  Nous soutenons tous ces efforts, y compris par le biais des bons offices du Secrétaire général de l’ONU, a ajouté Mme DiCarlo. 

Malheureusement, il y a eu peu, « voire aucun », progrès significatif dans la mise en œuvre des diverses dispositions des accords de Minsk.  Malgré des efforts répétés, les pourparlers, tant dans le format Normandie que dans le cadre des discussions menées par le Groupe de contact trilatéral, demeurent dans l’impasse. Elle a salué les efforts déployés par la France et l’Allemagne pour accueillir les récentes discussions du Format Normandie afin de sortir de l’impasse actuelle et espéré qu’elles se poursuivront.  Quant aux accords de Minsk, ils restent le seul cadre approuvé par ce Conseil pour un règlement négocié et pacifique du conflit dans l’est de l’Ukraine, a rappelé la Secrétaire générale adjointe, qui s’est dite préoccupée par les informations faisant état de nouvelles violations du cessez-le-feu de part et d’autre de la ligne de contact au cours des dernières heures.  « Si elles sont avérées, elles ne doivent pas s’intensifier davantage », a plaidé Mme DiCarlo qui a exhorté toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue en cette période sensible.  

Elle a également appelé l’ensemble des parties concernées à s’abstenir de toute mesure unilatérale susceptible d’aller à l’encontre de la lettre et de l’esprit des accords de Minsk, ou de compromettre leur mise en œuvre et d’entraîner de nouvelles tensions.  Quant à la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), « qui s’acquitte de ses fonctions cruciales en dépit de défis considérables », elle doit bénéficier de conditions sûres et sécurisées. 

Évoquant les graves préoccupations du Secrétaire général à la perspective d’un conflit militaire en Europe, Mme DiCarlo a déclaré qu’il n’y a pas d’alternative à la diplomatie  pour régler les tensions autour de l’Ukraine, dont la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale doivent être respectées.  Les récents contacts diplomatiques, notamment entre chefs d’État, sont les bienvenus, a-t-elle reconnu.  « Mais il faut en faire plus, de toute urgence, notamment prendre des mesures tangibles et vérifiables sur le terrain et mettre fin à la rhétorique incendiaire pour désamorcer les tensions. » 

Dans le contexte actuel, a-t-elle poursuivi, les besoins humanitaires importants qui touchent 2,9 millions de personnes, dont la majorité vit dans les zones non contrôlées par le gouvernement dans l’est de l’Ukraine, ne peuvent être négligés.  Elle a appelé les donateurs à assurer le financement rapide du Plan de réponse humanitaire 2022, d’un montant de 190 millions de dollars, qui est nécessaire pour continuer à répondre aux besoins vitaux de 1,8 million d’habitants en situation vulnérable, dont plus d’un million vivent dans les zones contrôlées par le Gouvernement et 750 000 en dehors. 

Pour la population des oblasts de Donetsk et de Louhansk, qui redoute la guerre, l’impact de la pandémie de COVID-19 a accentué les perturbations et souffrances existantes.  Des millions de personnes qui, avant la pandémie, pouvaient encore maintenir des liens familiaux et communautaires, n’ont pu traverser librement la ligne de contact en raison des restrictions liées à la pandémie.  En raison de leur isolement accru et de la perte brutale de l’accès aux services de base et aux moyens de subsistance, les besoins de cette population déjà vulnérable ont été exacerbés.  Dans le même temps, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) continue de documenter les pertes civiles et l’impact des hostilités, de surveiller la liberté de mouvement, et de recevoir et signaler les allégations de violations. 

Malgré les tensions persistantes, 2021 a vu le plus faible nombre de victimes civiles documentées par le HCDH depuis le début du conflit, a relevé la Secrétaire générale adjointe.  « L’adhésion générale au cessez-le-feu a été un facteur important de cette tendance.  Il doit se poursuivre. »  Notant que plus de 14 000 personnes ont déjà perdu la vie dans le conflit dans l’est de l’Ukraine, elle a souligné que l’on ne peut tout simplement pas accepter « ne serait-ce que la possibilité d’un nouveau conflit en Ukraine ».   Le monde attend des mécanismes de sécurité collective en Europe, mais aussi de ce Conseil, qu’ils contribuent à garantir que les seules escarmouches resteront d’ordre diplomatique.  « Nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer », a-t-elle exhorté. 

M. MIKKO KINNUNEN, Représentant spécial du Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine et au sein du Groupe de contact trilatéral, s’est inquiété des conditions sécuritaires actuelles très tendues en Ukraine et autour de l’Ukraine.  Il a estimé que les participants au Groupe de contact trilatéral ont encore des positions trop éloignées, rendant impossible en l’état la résolution du conflit.  « Il faut poursuivre notre action. »  Tous les éléments des accords de Minsk ont leur importance et doivent être pris dûment en compte, a-t-il affirmé, en ajoutant que lesdits accords sont « le socle de notre action. »  Le Représentant spécial a jugé qu’il est facile d’accuser l’une des parties à ces accords de ne pas les mettre en œuvre, en appelant à la prudence.  Il a également indiqué qu’aucun élément de ces accords n’a été appliqué intégralement, appelant toutes les parties à assumer leurs responsabilités.  Il faut éviter les provocations, car aucune partie ne bénéficiera d’un regain d’activités militaires, a-t-il insisté, déplorant les allégations faites ce matin même d’un pilonnage de Louhansk à proximité de la ligne de contact.  « Il est crucial d’établir les faits et d’éviter toutes escalade, » a-t-il martelé avant de rappeler que le conflit armé en Ukraine, qui a débuté il y a huit ans, a fait 14 000 victimes. 

Poursuivant, M. Kinnunen a indiqué que les participants au Groupe se sont engagés, il y a deux mois, à respecter l’accord de cessez-le-feu de juillet 2020. Même si cela n’est pas suffisant, les violations du cessez-le-feu ont baissé de 70%, a déclaré le Représentant spécial.  « S’ il y a une volonté politique, alors il est possible de ne pas recourir aux armes », a-t-il argué, tout en jugeant les progrès encore insuffisants.  Il a aussi mentionné la récente résolution de la Douma d’État russe, par laquelle cette dernière demande au Gouvernement russe de reconnaître l’indépendance des régions de Donetsk et de Louhansk.  Cette résolution ne reflète pas la ligne du Gouvernement mais il faut souligner que toutes les parties doivent s’engager à œuvrer au rétablissement de la souveraineté de l’Ukraine sur l’intégralité de son territoire, a-t-il précisé.  Il a appelé à ne ménager aucun effort pour avoir des discussions de fond et sortir le Groupe de contact de l’impasse.  Le Représentant spécial a enfin précisé que ledit Groupe s’est réuni en distanciel, un format qui n’est pas propice à la confidentialité et à des interactions dignes de ce nom.  Nous voulons revenir à des réunions en présentiel du Groupe, avec l’OSCE, la Fédération de Russie, l’Ukraine et des représentants des régions de Donetsk et de Louhansk, a conclu M. Kinnunen. 

M. YASAR HALIT ÇEVIK, Observateur en chef de la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, a fait état de conditions de travail toujours plus complexes, ajoutant que la situation du cessez-le-feu pose de nouveaux problèmes au détriment des populations civiles des deux côtés de la ligne de contact.  Il a indiqué que les obstacles à la libre circulation de son équipe ont continué en 2021 et jusqu’à ce jour, limitant ainsi les capacités de la Mission. Cela est tout simplement inacceptable, tout comme les blocages temporaires des opérations de la Mission à Donetsk et Louhansk, s’est-il indigné, précisant que la ligne de contact reste très difficile à franchir tant pour la Mission que pour les civils.  Étant donné ces difficultés, l’Observateur en chef a insisté sur l’impératif pour les parties de faire preuve de la volonté nécessaire pour respecter à la lettre les engagements pris dans le cadre des différents accords. 

Il s’est inquiété de l’augmentation progressive de la violence armée et des violations du cessez-le-feu en 2021, marquées notamment par l’utilisation d’armes lourdes que les parties s’étaient pourtant engagées à retirer. Il a indiqué que lors de la réunion du Groupe de contact trilatéral du 22 décembre 2021, les parties avaient dit vouloir respecter le cessez-le-feu, mais que les tensions restent élevées.  « Les avantages de la désescalade sont pourtant clairs », s’est-il impatienté, évoquant notamment la reconstruction de ponts et autres infrastructures civiles dans ces zones.  Il a ensuite dénoncé les exercices employant des munitions létales « pas plus tard qu’en 2022 », en violation du cessez-le-feu.  Depuis le début de l’année, la Mission a observé deux fois plus de violations du cessez-le-feu par rapport à la même période en 2021 et il y a de plus en plus de victimes civiles, essentiellement à la suite de tirs d’artillerie. L’Observateur en chef a également fait état d’autres violations des accords de Minsk, notamment l’utilisation de drones et de matériel lourd dans des zones résidentielles, en précisant que ces violations sont le fait des deux parties. 

M. Çevik a indiqué que les communautés le long de la ligne de contact vivent dans des zones dangereuses où il y a eu 41 morts civiles en 2021.  De plus, la pandémie a entraîné son lot de difficultés pour les civils des deux côtés puisqu’il ne reste plus qu’un point de passage accessible au quotidien sur cinq, alors que des familles sont séparées.  Les besoins et les droits des civils devraient primer, a tranché l’Observateur en chef qui a réclamé l’ouverture des points de passage et appelé à protéger les infrastructures civiles.  Pour cela il a souligné l’importance des échanges de garanties de sécurité, notamment pour assurer la réparation de ces infrastructures car, à défaut, les tensions risquent de monter sur le terrain. 

Selon l’Observateur en chef, le rôle de la Mission d’observation est aujourd’hui plus essentiel que jamais, même si les entraves de circulations l’empêchent de pleinement s’acquitter de son mandat d’observation impartiale.  Il a indiqué que ces obstacles ont empêché la Mission d’utiliser tout le matériel dont elle dispose et qu’il a donc été difficile de surveiller toute la ligne de contact. Alors que les tensions montent sur le terrain, il est impératif que toutes les dispositions des accords de Minsk soient respectées, en premier lieu le cessez-le-feu, a tranché M. Çevik qui a insisté sur l’impératif de permettre au personnel de la Mission d’observation de franchir inconditionnellement la ligne de contact.  Le rôle de la Mission reste crucial pour désamorcer les tensions et œuvrer à la paix, mais pour cela elle doit pouvoir compter sur le soutien indéfectible de la communauté internationale, a-t-il insisté en rappelant le coût humain de ce conflit. 

Mme TETIANA MONTYAN, militante de la société civile de l’Ukraine, a déclaré qu’elle est absolument convaincue que les autorités de Kiev n’ont pas l’intention d’appliquer les accords de Minsk, déplorant que l’Occident fournisse des armes pour renforcer les forces armées de l’Ukraine.  Elle a accusé Kiev de ne pas vouloir dialoguer avec Donetsk et la société civile.  L’Europe et l’OTAN ne veulent pas non plus dialoguer car ils sont contre ceux qui veulent vivre en paix avec la Russie, a-t-elle ajouté, avant de dénoncer les poursuites pénales engagées « contre les personnes qui veulent la paix », celles qui étaient contre « Maïdan », contre le renversement du Gouvernement, contre l’OTAN, contre l’Europe ». 

Mme Montyan a indiqué que cela fait 5 ans que l’on attend un statut spécial pour les régions de l’est de l’Ukraine, « mais que les autorités de Kiev ne vont pas l’octroyer ».  Elles refusent toute dissidence en Ukraine, s’est-elle alarmée.  Les personnes qui sont contre Maïdan, contre le renversement du Gouvernement, contre la guerre dans l’est n’ont pas le droit de s’exprimer ni dans les partis politiques, ni dans les organisations de la société civile, a-t-elle dénoncé. 

Poursuivant, la militante a affirmé que les puissances occidentales permettent à Kiev de ne pas appliquer les accords de Minsk, « car si ce n’était pas le cas, ces accords seraient déjà mis en œuvre ».  Selon elle, l’objectif véritable de l’Occident est de pousser la Russie à la guerre.  « Il n’y a pas d’autres explications à l’hystérie occidentale ».  Le peuple ukrainien et la population des régions qui veulent l’autonomie ne sont que des pions dans ce jeu géopolitique, a-t-elle déploré, signalant que ce matin, des explosions et des tirs ont été signalés le long de la ligne de contact. 

Elle a accusé Kiev d’avoir tiré sur des civils durant les 8 années de guerre, s’indignant du manque de réaction de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE à ce sujet.  L’Occident regarde dans l’indifférence les souffrances de toutes ces personnes tout en clamant qu’il n’y a d’autres options que les accords de Minsk, a-t-elle déploré, soulignant une fois de plus que les autorités de Kiev doivent les appliquer. 

M. SERGEY VERSHININ, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a commencé par rappeler qu’il y a exactement sept ans, le Conseil de sécurité adoptait à l’unanimité sa résolution 2202 (2015), reconnaissant le paquet de mesures en vue de l’application des accords de Minsk comme seul cadre juridique international pour le règlement du conflit civil dans l’est de l’Ukraine.  Hélas, a-t-il déploré, sept ans plus tard, nous avons de plus en plus de raisons de croire que la mise en œuvre du paquet de mesures de Minsk n’entre toujours pas dans les plans de nos voisins ukrainiens.  Il en a pris pour preuve des déclarations récentes de responsables ukrainiens, à commencer par celles de la Vice-Première Ministre ukrainienne, Mme Irina Vereshchuk, qui a affirmé hier qu’il n’y aurait « aucune nouvelle loi sur le statut spécial du Donbass », et ceci après un entretien entre le Président Zelensky et le Chancelier allemand Scholz. 

M. Vershinin a également rappelé que, le 4 février, dans une interview télévisée, le Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, M Dmytro Kuleba, a estimé que les accords de Minsk ne pouvaient pas être mis en œuvre « aux conditions russes », cette même idée ayant été avancée par le Chef de cabinet de la présidence ukrainienne lors d’une récente réunion des conseillers politiques au format Normandie à Paris.  Le 2 février, ce même responsable a affirmé que « pas une seule région d’Ukraine n’aurait le droit de veto sur les décisions nationales », a ajouté le Vice-Ministre russe, notant que la veille, le Président Zelensky avait évoqué une solution « alternative » pour le conflit dans le Donbass, expliquant que Kiev a une vision différente quant à la mise en œuvre de certaines clauses des accords de Minsk.  Le 31 janvier, a poursuivi M. Vershinin, le secrétaire du Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine a déclaré à l’agence Associated Press que « l’application de l’accord de Minsk II signifie la destruction du pays ».  En effet, selon ce responsable, a ajouté le Vice-Ministre russe, « quand ce document a été signé sous la menace des canons russes et sous les yeux des Allemands et des Français, il était clair pour toutes les personnes raisonnables qu’il ne pouvait pas être mis en œuvre ». 

De l’avis de M. Vershinin, les responsables politiques ukrainiens essaient de convaincre l’opinion occidentale que les accords de Minsk sont contraires aux intérêts de l’Ukraine.  Pour cela, ils prétendent que la Russie ne remplirait pas ses obligations au titre de ces accords, a-t-il relevé, n’excluant pas d’entendre un tel argument aujourd'hui.  Cette affirmation est pourtant nulle et non avenue, puisqu'il n'y a aucune mention de la Russie dans le texte des accords de Minsk, a fait valoir le numéro 2 de la diplomatie russe, avant de rappeler que le document auquel cette réunion du Conseil est consacrée porte sur le cessez-le-feu; le retrait des armes; l’observation de l’OSCE; le début de dialogue entre Kiev et le Donbass; l’amnistie; l’échange de détenus; l’accès humanitaire; la levée du blocus économique; le transfert à Kiev du contrôle de la frontière, si le point 11 est rempli; le retrait des forces étrangères et des mercenaires; la nouvelle Constitution fixant le statut particulier du Donbass; la coordination de la procédure de tenue des élections; et l’intensification des travaux du Groupe de contact trilatéral. 

Sept ans après l’adoption de la résolution 2202, force est de constater qu’aucune des dispositions du paquet de mesures de Minsk II n’est entièrement mise en œuvre, en particulier s’agissant du cessez-le-feu, a noté M. Vershinin.  À ses yeux, le nœud du problème est le refus systématique de Kiev d’engager un dialogue direct avec les représentants de Donetsk et Louhansk au sein du Groupe de contact, alors que cela est prévu explicitement aux paragraphes 4, 9, 11 et 12 du document. Il ne s’agit pas d’une « exigence » russe mais d’une obligation faite à l’Ukraine, a-t-il insisté, regrettant que cela mette en péril l’ensemble du processus de Minsk.  Le Vice-Ministre a aussi constaté que l’Ukraine refuse obstinément de mettre en œuvre les dispositions sur le dialogue avec le Donbass, la procédure d’autonomie temporaire et la mise en œuvre d’une réforme constitutionnelle pour consolider le statut de la région.  Il a précisé à cet égard que le Parlement ukrainien vient de présenter un projet de loi sur la décentralisation qui ne prévoit pas de statut particulier pour la région.  De même, a-t-il observé, la partie ukrainienne exclut toute interaction directe avec le Donbass dans le cadre du mécanisme de coordination, ce qui ne permet pas de répondre efficacement aux violations du cessez-le-feu.  Dans le même temps, les tentatives visant à rejeter la responsabilité sur la Russie et d’en faire une partie au conflit ont, selon lui, pour seul objectif de « détourner l’attention du non-respect par l’Ukraine du paquet de mesures de Minsk ». 

Dénonçant la « politique de l’autruche » adoptée par ses collègues occidentaux, M. Vershinin a regretté que ces derniers relèguent au second plan le paquet de mesures de Minsk pour se concentrer sur les travaux du format Normandie. Or, comme le prévoit l’annexe 2 de la résolution 2202, ce format n’est rien de plus qu’un « mécanisme de contrôle pour la mise en œuvre des accords de Minsk » et en aucun cas une structure servant à s’accorder sur de nouvelles décisions, a-t-il soutenu, avant d’accuser les « têtes brûlées » ukrainiennes de profiter de cette permissivité pour se lancer dans des aventures militaires contre l’intérêt de leur peuple, avec à la clef un conflit interne et des milliers de victimes civiles. Avant de conclure, le Vice-Ministre russe a rappelé les bombardements de l’armée ukrainienne sur le Donbass et fustigé l’utilisation de méthodes de guerre interdites.  Il a également condamné l’enlèvement, en octobre dernier à Louhansk, d’un observateur du Centre conjoint de coordination et de contrôle, avant d’enjoindre les pays occidentaux à ne pas transformer cette réunion en tribune de la propagande de Kiev, selon laquelle la Fédération de Russie va attaquer l’Ukraine.  « Nous avons déjà montré que cela n’était pas vrai », a-t-il souligné, ajoutant que « la date de l’invasion imaginaire annoncée est déjà passée ». 

M. ANTONY J. BLINKEN, Secrétaire d’État des États-Unis, a déclaré que la menace la plus immédiate pour la paix et à la sécurité est l’agression imminente de la Russie contre l’Ukraine.  Il a indiqué qu’au cours des derniers mois, « sans provocation, ni justification », la Russie a amassé plus de 150 000 troupes autour des frontières de l’Ukraine.  Alors qu’elle affirme les réduire, nos informations indiquent clairement que ces forces –comprenant des troupes au sol, des avions, des navires– se préparent à lancer une attaque contre l’Ukraine dans les prochains jours.  Selon M. Blinken, la Russie envisage de fabriquer un prétexte pour justifier son attaque, sous forme d’un événement violent que la Russie imputera à l’Ukraine, ou d’une accusation scandaleuse que la Russie portera contre le Gouvernement ukrainien.  Ces derniers jours, a-t-il ajouté, les médias russes ont déjà commencé à diffuser certaines de ces fausses alertes et affirmations, pour maximiser l’indignation publique et jeter les bases d’une justification inventée de la guerre. 

En réponse à cette provocation fabriquée, a-t-il poursuivi, les plus hauts niveaux du Gouvernement russe pourraient convoquer des réunions d’urgence pour faire face à la soi-disant crise et publier des proclamations déclarant que la Russie doit réagir pour défendre les citoyens russes ou les Russes ethniques en Ukraine.  Ensuite, l’attaque est prévue pour commencer.  « Des missiles et des bombes russes tomberont sur l'Ukraine.  Les communications seront bloquées.  Les cyberattaques fermeront les principales institutions ukrainiennes », a-t-il prédit, ajoutant que les chars et les soldats russes avanceront ensuite vers des cibles clefs, notamment la capitale ukrainienne, Kiev, une ville de 2,8 millions d’habitants. 

Exhortant la Russie à abandonner la voie de la guerre pendant qu’il est encore temps, le Secrétaire d’État américain a indiqué que les informations qu’il vient de présenter ont été validées par ce qui se passe « sous nos yeux et ceux de nos alliés et partenaires ».  Si la Russie fait le choix de la guerre, a-t-il mis en garde, notre réponse sera nette et décisive.  Soulignant que la diplomatie est le seul moyen « responsable » de résoudre cette crise, M. Blinken a appelé à la mise en œuvre des accords de Minsk.  Si la Russie est prête à s’asseoir avec le Gouvernement ukrainien et mettre en œuvre ces engagements, la France et l’Allemagne seront prêtes à convoquer des discussions de haut niveau au format Normandie pour régler ces questions, a-t-il indiqué, ajoutant que l’Ukraine y est également préparée.  Il a aussi indiqué que tout progrès vers la résolution de la crise au Donbass grâce aux accords de Minsk permettrait de renforcer les discussions sur les questions de sécurité que les États-Unis sont prêts à engager avec la Russie. 

Le Secrétaire d’État a ensuite fait savoir qu’il avait proposé au Ministre russe des affaires étrangères, M. Sergueï Lavrov, de le rencontrer la semaine prochaine pour trouver une issue à la crise, préconisant en outre la tenue de réunions du Conseil OTAN-Russie et du Conseil permanent de l'OSCE afin d’ouvrir la voie à un sommet des principaux dirigeants pour parvenir à un accord sur les préoccupations mutuelles en matière de sécurité. Si la Russie est attachée à la diplomatie, nous lui offrons toutes les occasions de démontrer cet engagement, a-t-il souligné, avant d’exhorter le gouvernement russe à annoncer clairement, dès aujourd'hui, que la Russie n'envahira pas l'Ukraine. 

M. JAMES CLEVERLY, Ministre d’État de l’Europe et de l’Amérique du Nord, du Royaume-Uni, a dit soutenir la mise en œuvre des accords de Minsk tels qu’entérinés par le Conseil de sécurité.  Il incombe aujourd’hui à toutes les parties de respecter les engagements pris, a-t-il plaidé.  Il a condamné la mesure prise par la Douma russe qui a demandé au Président Putin de reconnaître l’indépendance de certaines régions ukrainiennes.  M. Cleverly a fait un rappel historique des faits en Ukraine, notamment l’implication de la Fédération de Russie dans le conflit au Donbass.  Il a estimé que la situation reste tendue aujourd’hui parce que la Fédération de Russie a déployé à la frontière les forces nécessaires à l’invasion de l’Ukraine.  Il a contredit l’annonce russe du retour de certaines troupes dans leurs bases, estimant même que les forces militaires se renforcent.  Si la Russie veut sérieusement un règlement diplomatique, alors il doit s’engager dans les réunions de l’OSCE, a recommandé le Ministre en notant que la Russie ne s’est pas présentée à la réunion de mercredi et ne semble pas vouloir y prendre part samedi. 

Pour M. Cleverly, régler le problème dans les régions de l’est de l’Ukraine n’est possible que par des voies pacifiques.  Il a dénoncé la désinformation entourant des évènements dans le Donbass, « une stratégie familière » de la Russie , a—t-il argué.  Il a demandé que la Fédération de Russie participe aux processus diplomatiques dont dépend la sécurité mondiale.  Selon le Ministre, si l’invasion avait lieu, ce serait un choix du Président Putin et une abdication des engagements envers la Charte des Nations Unies qui prône le règlement pacifique des différends.  Toute incursion russe en Ukraine serait une erreur stratégique et un désastre humanitaire qui appellerait à une réaction ferme de « notre part », a-t-il averti.  Il a appelé la Fédération de Russie à changer de cap et à passer de la parole aux actes en retirant ses troupes, à s’engager fermement pour la diplomatie et à œuvrer pour la paix et la sécurité. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a jugé alarmante la situation sécuritaire en Ukraine et à proximité, se disant profondément préoccupée par le renforcement militaire à grande échelle entrepris par la Fédération de Russie dans le nord de la Crimée occupée, à l’est et au sud de l’Ukraine, ainsi qu’au Bélarus et dans la mer Noire.  Les informations faisant état d’une intensification des bombardements sont très inquiétantes et ne doivent pas être instrumentalisées par la Russie comme prétexte à une quelconque offensive militaire, a-t-elle mis en garde.  La délégation a appelé la Russie à revenir au dialogue, de manière constructive et de bonne foi, par le biais des mécanismes internationaux établis.  Mais le fait que la Russie cherche « faussement » à présenter le conflit en Ukraine orientale comme un conflit interne à ce pays reste un obstacle majeur, selon la déléguée pour qui la réalité est que la Russie l’a alimenté, en fournissant un soutien financier et militaire aux formations séparatistes qu’elle soutient. 

La représentante a exprimé sa vive préoccupation concernant la résolution de la Douma russe appelant à la reconnaissance des « républiques populaires » autoproclamées de Donetsk et de Louhansk.  Elle a tenu à mettre en garde contre une telle mesure, qui constituerait une nouvelle violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et contredirait directement l’esprit et la lettre des accords de Minsk.  Elle a également exhorté la Russie à respecter ses engagements au titre du Document de Vienne et à contribuer à un dialogue et à des échanges constructifs au titre de son Chapitre III. 

Par sa « posture menaçante », sa rhétorique et ses « exigences irréalistes », la Russie remet en question la sécurité européenne, a dénoncé la représentante en rappelant que chaque pays a le droit de choisir librement ses allégeances sur le plan sécuritaire. Nous ne pouvons pas permettre que l’architecture de sécurité en vigueur soit remplacée par des sphères d’influence, a tranché la représentante.  Après avoir appelé les parties au conflit dans le Donbass à rechercher un cessez-le-feu durable et à faire tout leur possible pour éviter les pertes civiles, la représentante a prévenu que l’escalade du conflit entraînerait des conséquences humanitaires « dévastatrices ». 

M. JOÃO GENESIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé que, dans les conditions actuelles, une volonté politique forte et renouvelée est cruciale pour résoudre le conflit en Ukraine.  « Nous croyons qu’une solution diplomatique doit être trouvée et nous appuierons toute initiative crédible visant à un règlement pacifique. »  Le délégué a exhorté toutes les parties à appliquer les accords de Minsk dans leur esprit et dans leur lettre, avant de se féliciter de la reprise des discussions en format Normandie.  Il a aussi réclamé un désengagement accru des forces militaires sur le terrain.  Les négociations sur les paramètres d’octroi d’un statut spécial à certaines zones de Donetsk et de Louhansk doivent être conduites de toute urgence, dans un esprit de compromis et de flexibilité, a déclaré le délégué.  Il a plaidé pour que l’application des accords de Minsk respecte pleinement la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous exhortons toutes les parties à prendre les mesures nécessaires pour une désescalade et à jouer un rôle constructif dans la recherche d’une solution politique, a conclu le représentant du Brésil. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a déclaré qu’elle est un fervent partisan de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.  L’Ukraine a le droit de choisir sa propre politique étrangère et d’assurer la sécurité et la défense de son territoire, a-t-elle dit avant d’appeler au calme, à la désescalade et à la poursuite de la diplomatie, au moment où la Russie renforce son déploiement militaire à la frontière ukrainienne.  Mme Byrne Nason a précisé que la désescalade implique un retrait important des troupes et des équipements russes. 

La mise en œuvre intégrale des accords de paix de Minsk et les efforts connexes de règlement des conflits au sein du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral sont des priorités importantes pour l’Irlande, a poursuivi Mme Byrne Nason.  À cet égard, la représentante a profondément regretté la décision de la Douma russe de présenter une proposition de loi visant à reconnaître les zones non contrôlées par le Gouvernement, de Donetsk et de Louhansk en Ukraine, en tant qu’entités indépendantes.  « Ce serait une violation claire des accords de Minsk. »  Mme Byrne Nason s’est aussi élevée conte les restrictions imposées à la liberté de circulation de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE et regretté que ses équipements aient été endommagés ou saisis.  Elle a déploré le refus de la Fédération de Russie de proroger le mandat de la Mission d’observation pour surveiller les passages frontaliers.  « L’Irlande appelle toutes les parties à œuvrer pacifiquement en faveur d’un règlement politique efficace et durable du conflit. » 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) s’est félicité des initiatives visant à permettre la pleine mise en œuvre des accords de Minsk, notamment celles menées par le Groupe de contact trilatéral et celles en format Normandie.  Face aux tensions actuelles autour de l’Ukraine, il a exhorté l’ensemble des parties à dialoguer par le biais de tous les canaux diplomatiques et à œuvrer à l’application intégrale des accords de Minsk.  Estimant à cet égard que le format Normandie peut favoriser l’application effective des dispositions politiques et de sécurité de ces accords, il a salué la réunion, à Paris et Berlin, de conseillers politiques des quatre pays membres de cette configuration diplomatique.  Il a également appelé au respect du cessez-le-feu de juillet 2020, avant d’encourager les parties à adopter des mesures de désescalade.  Avant de conclure, le représentant a rappelé que son pays compte des ressortissants en Ukraine, notamment des étudiants.  Il a donc souhaité qu’un règlement pacifique se fasse jour et que tous les intérêts de sécurité des pays de la région soient pris en compte.  

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a dit que son pays soutient que le respect de l’intégrité territoriale et la souveraineté de tous les pays, par tous les États, soulignant que c’est là « la pierre angulaire de la paix mondiale ».  Si le multilatéralisme doit renaître dans un système qui offre la paix pour tous, les États les plus puissants doivent systématiquement adhérer au droit international et respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les pays, dans toutes les régions, a-t-il recommandé.  Cette impasse peut être résolue de manière imminente, selon le représentant qui a demandé aux grandes puissances militaires, notamment celles qui sont représentées au Conseil de sécurité, de fournir des efforts spécifiques et soutenus pour parvenir à des accords minimums de déconfliction et de respect mutuel.  M. Kimani a réitéré la nécessité pour toutes les parties de pleinement mettre en œuvre leurs engagements découlant des accords de Minsk.  Le représentant du Kenya s’est félicité de la réunion des conseillers du format Normandie qui s’est tenue plus tôt ce mois-ci, saluant aussi la réunion de suivi qui est prévue dans l’optique de la mise en œuvre des accords de Minsk. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a rappelé que, depuis la dernière réunion du Conseil sur l’Ukraine, le 31 janvier, des efforts diplomatiques intensifs ont été déployés pour réduire les tensions actuelles en Europe de l’Est, notamment dans le cadre du format Normandie: « Ces formats structurés, en particulier ceux qui réunissent la Russie et l’Ukraine ainsi que d’autres parties prenantes, sont importants pour faire progresser le dialogue et réduire les tensions. »  La déléguée a donc instamment demandé à toutes les parties prenantes d’éviter les mesures qui rendraient plus difficile la mise en œuvre des accords de Minsk. 

Mme Nusseibeh a également souligné la nécessité d’accorder l’attention qu’elle mérite à la situation critique des civils se trouvant dans l’est de l’Ukraine, 3,4 millions d’entre eux ayant besoin d’aide humanitaire, dont 55% de femmes et 16% d’enfants.  Elle a regretté les obstacles qui entravent l’acheminement de l’aide à certaines des populations dans le besoin, en particulier dans les zones proches de la ligne de contact dans l’est de l’Ukraine. Elle a insisté sur l’importance de ne pas aggraver les tensions existantes, sous peine de porter gravement préjudice aux civils.  La déléguée a appelé toutes les parties à ne pas entraver l’accès à l’aide humanitaire ou la circulation des civils dans les zones de conflit, conformément à leurs obligations en droit international. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a déploré que les accords de Minsk demeurent très largement inappliqués, avant de se dire vivement préoccupé par la recrudescence des tensions le long des frontières ukrainiennes.  Il a réaffirmé le soutien de son pays à la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, qui est un membre à part entière de l’ONU.  Notant les préoccupations sécuritaires d’autres États Membres européens, notamment à l’est, il a appelé à la retenue afin de maintenir l’ordre pacifique en Europe.  Il a salué les engagements diplomatiques de haut niveau sur la situation en Ukraine, y compris les récentes discussions en format Normandie.  Le délégué a appelé à un dialogue renouvelé au sein de ce format afin d’aplanir les divergences s’agissant de l’interprétation de la série de mesures prévues par lesdits accords.  Enfin, le représentant du Ghana a exhorté les parties à garantir un accès humanitaire sans entraves dans les zones gouvernementales et non-gouvernementales, conformément au droit international humanitaire. 

Pour M. JUAN RAMOÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a jugé urgent, avant tout, d’envoyer un signal clair et sans équivoque de la volonté des parties, qui permettra d’inverser l’escalade des tensions et laissera la place à la négociation politique.  Il a donné les mots d’ordre de « Détente, Diplomatie et Dialogue ».  La seule véritable solution étant une solution diplomatique, il a salué la volonté affichée par les différents acteurs de poursuivre sur la voie du dialogue.  Il a apprécié les efforts des dirigeants mondiaux qui, en tant que facteurs d’influence, se sont personnellement impliqués dans la recherche d’une solution pacifique à cette crise, capable de répondre aux divers problèmes de sécurité dans la région.  Alors que toute solution à long terme implique la fin des tensions dans l’est de l’Ukraine, le représentant a fait valoir que huit ans après le début du conflit, les accords de Minsk restent le cadre à utiliser pour parvenir à une solution négociée.  Il a misé sur le Groupe de contact trilatéral et le format Normandie qui favorisent la confiance et le dialogue. 

Soulignant le coût humain le long de la ligne de contact et l’aggravation de la situation humanitaire, le représentant a demandé que la liberté de mouvement des civils soit garantie, sans conditions, des deux côtés.  Il a appelé les parties à faciliter un accès humanitaire sûr et sans restriction dans la région et à garantir la libre circulation de la mission d’observation de l’OSCE, ce qui est essentiel à la pleine exécution de son mandat.  Il est également nécessaire de souligner que les mines, les munitions non explosées et autres engins explosifs constituent une menace réelle et affectent de manière disproportionnée la population civile, a ajouté le représentant en appelant les parties à éliminer les mines existantes et à ne pas s’engager dans le placement de nouveaux explosifs. 

M. JUN ZHANG (Chine) a regretté les nouvelles violations de cessez-le-feu le long de la ligne de contact et plaidé pour que les accords de Minsk soient mis en œuvre par toutes les parties, en misant pour cela sur les efforts déployés pour régler la question ukrainienne.  Il a invité toutes les parties concernées à adopter une position constructive et à régler les éventuelles divergences de vues par le dialogue et la consultation.  Il leur a aussi demandé d’établir une feuille de route et un calendrier pour appliquer au pied de la lettre ces accords sans retard afin d’ouvrir la voie vers un règlement politique de la crise ukrainienne. 

Concernant les tensions à la frontière orientale de l’Ukraine, le représentant a dit que dans le contexte actuel, toutes les parties devraient laisser la raison l’emporter et tendre vers un règlement politique tout en s’abstenant de tout acte de nature à exacerber les tensions ou à alimenter la crise.  Elles devraient tenir compte des préoccupations légitimes des uns et des autres en matière de sécurité, a encouragé le représentant en disant que la Chine soutient tous les efforts qui mèneront à un apaisement.  Prenant note de l’implication récente de la Russie avec la France, l’Allemagne et d’autres pays de l’Europe au plus haut niveau diplomatique, le délégué a exhorté les pays européens à prendre des décisions stratégiques indépendantes dans le droit fil de leurs propres intérêts.  « Il n’y a pas d’autres alternatives à la diplomatie. »  Toutes les questions, y compris les plus insolubles, peuvent et doivent être traitées par les voies diplomatiques, a insisté le représentant en appuyant les bons offices du Secrétaire général qui visent à apaiser les tensions. 

Le représentant de la Chine a estimé que « rien n’arrive sans raison ».  L’élargissement de l’OTAN est une question qui ne peut pas être contournée en Ukraine, a-t-il commenté en déclarant que la sécurité régionale ne peut pas être garantie par l’élargissement d’un bloc militaire.  Il a accusé « un pays » qui refuse de renoncer à sa mentalité héritée de la guerre froide, qui dit une chose, et en fait une autre.  Le représentant a exhorté les pays concernés à tirer les enseignements de l’Histoire, à respecter la notion de sécurité commune globale, à respecter la confiance mutuelle, à régler les différends par le dialogue et la consultation et à faire davantage pour contribuer à la paix et la stabilité dans le monde. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a réitéré son soutien à la mise en œuvre des accords de Minsk, tout en rejetant les pressions exercées sur l’Ukraine en vue d’une application sur la base d’une interprétation unilatérale.  Il a également exprimé son plein soutien aux droits des minorités en Ukraine et ailleurs, avant de mettre en garde contre l’instrumentalisation de ces minorités pour « créer des États dysfonctionnels ».  Selon lui, demander des « pouvoirs exécutifs » pour les minorités russes en Ukraine signifie vouloir contrôler le Gouvernement et le Parlement à Kiev pour leur imposer une politique de sécurité et de défense étrangère et ainsi saper les processus démocratiques.  Dans ce contexte, il s’est dit profondément préoccupé par l’appel du Parlement russe à la reconnaissance de l’indépendance et de la souveraineté de certaines parties du territoire de l’Ukraine, à l’image de ce qui a eu lieu en 2008 en Géorgie.  Une telle décision n’aurait aucune validité juridique et serait contraire à l’essence même des accords de Minsk, a souligné le représentant. 

Alarmé par les déploiements militaires russes à grande échelle à l’intérieur et autour de l’Ukraine ainsi qu’au Bélarus, le délégué a constaté que le retrait annoncé de ces troupes n’est pas vérifié et que des rapports crédibles font, au contraire, état de nouveaux renforts.  Alors qu’il y avait quelque 100 000 militaires autour de l’Ukraine, au moment de la réunion d’il y a trois semaines, ces forces seraient aujourd’hui au nombre de 150 000, a-t-il précisé, qualifiant cet encerclement d’ « épée de Damoclès » sur le Gouvernement et le peuple ukrainiens.  Notant que le blocage partiel de la mer Noire, de la mer d’Azov et du détroit de Kertch sous prétexte d’exercices navals réguliers ne fait que « resserrer l’étau », il a ajouté que les bombardements intensifs signalés depuis le territoire occupé du Donbass pourraient être le signe de l’exécution d’un « scénario conçu de longue date ».  Il a donc appelé au retrait des troupes d’occupation, condamnant au passage l’annexion illégale de la Crimée et le soutien militaire de Moscou aux forces séparatistes dans le pays. 

Pour le représentant, la Fédération de Russie devrait accepter de s'engager dans un dialogue européen renouvelé sur la sécurité, comme lui a proposé la Pologne en tant que Présidente actuelle de l’OSCE.  Saluant l’appel du Secrétaire d’État américain à des pourparlers avec son homologue russe dès que possible et à la relance des réunions du Conseil OTAN-Russie , il a invité à exploiter chaque mécanisme en faveur de la diplomatie et de la désescalade.  Enfin, il a souhaité que le Secrétaire général intensifie ses efforts d’apaisement des tensions et rende ses bons offices disponibles dans la recherche d’une solution pacifique. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que la mise en œuvre des accords de Minsk ne saurait être considérée de manière indépendante de la situation aux frontières de l’Ukraine.  À ces frontières, a-t-il dit, les tensions ont atteint ces derniers jours un niveau sans précédent en raison du renforcement préoccupant de l’activité militaire russe.  La France a mené des efforts continus avec ses partenaires au cours des dernières semaines pour la désescalade et le dialogue, a témoigné le représentant en expliquant que la position française est fondée sur deux piliers.  Premièrement, l’accumulation de capacités militaires considérables à la frontière d’un État voisin constitue un comportement menaçant et inacceptable, et ce d’autant plus que la Fédération de Russie a déjà porté atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans le passé.  Toute nouvelle agression aurait des conséquences massives et un coût sévère pour la Fédération de Russie, a-t-il averti en ajoutant que les Européens sont unis et prêts à agir en coordination avec tous leurs partenaires à ce sujet.  Deuxièmement, la France est convaincue que la désescalade est possible, par le dialogue et la diplomatie.  C’est le sens des efforts menés par le Président Macron, en coordination avec le Chancelier allemand, a souligné le délégué.  « Nous sommes prêts à engager ce dialogue s’agissant du conflit dans le Donbass, dans le cadre du format Normandie, mais également sur les questions de sécurité et de stabilité en Europe, dans le respect des principes fondamentaux établis dans la Charte des Nations Unies et dans les documents fondateurs de l’OSCE. » 

M. de Rivière a dit que la France soutient pleinement le processus initié par la présidence polonaise de l’OSCE en vue d’un dialogue renouvelé sur la sécurité européenne.  Au sujet des accords de Minsk qui mobilise la France et l’Allemagne depuis 2015, il a indiqué que les efforts se sont poursuivis au cours des dernières semaines au sein du format Normandie.  La réunion de Paris du 26 janvier a permis d’exprimer à nouveau le soutien de toutes les parties au respect inconditionnel du cessez-le-feu, tandis que la réunion du 10 février n’a malheureusement pas permis d’aller plus loin et d’enregistrer des progrès concrets dans la mise en œuvre du « Paquet de mesures de Minsk » dans toutes ses dimensions, c’est-à-dire sécuritaire, humanitaire et politique.  Le représentant a exprimé sa conviction que les accords de Minsk constituent le cadre adapté à la poursuite du dialogue et qu’ils laissent l’espace nécessaire à la définition de solutions concrètes mutuellement acceptables, notamment au sein du Groupe de contact trilatéral.  Il a appelé les parties à s’abstenir de toute déclaration ou mesure allant à l’encontre de la mise en œuvre de ces accords.  « Nous exprimons à ce titre notre préoccupation au sujet de l’adoption par la Douma d’État de la Fédération de Russie d’une résolution appelant à reconnaître les territoires séparatistes d’Ukraine. »  M. de Rivière a estimé que si elle était promulguée, cette résolution constituerait une violation assumée de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Fédération de Russie et une remise en cause fondamentale par ce pays des accords de Minsk.  Selon lui, la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine joue un rôle essentiel dans les efforts de désescalade et elle est les yeux et les oreilles de la communauté internationale.  La France, tout comme l’Allemagne, maintiendra ses ressortissants déployés sur le terrain afin que la mission reste opérationnelle en cette période critique, a-t-il indiqué en assurant que la France continuera à se mobiliser pour la construction d’une paix juste et durable et pour le rétablissement de la pleine souveraineté ukrainienne sur certaines régions de Donetsk et de Louhansk. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit comprendre les craintes de ceux qui redoutent une attaque imminente en Ukraine et a pris note des appels à éviter l’escalade.  Les 10 derniers jours ont été marqués par une intense activité diplomatique visant à « ensemencer les sillons du dialogue », a déclaré le délégué, avant de noter la volonté de dialogue du Président des États-Unis.  Il a souligné la nécessité d’aborder la situation en Ukraine avec le plus grand sens des responsabilités.  Il a appelé les parties à faire montre de retenue et à choisir la voie du dialogue. Le délégué a aussi insisté sur l’importance d’user des canaux diplomatiques existants, en ajoutant que les accords de Minsk plantent « le décor d’une issue pacifique globale ».  Leur mise en œuvre est cruciale, a-t-il poursuivi.  Le représentant du Gabon a enfin exprimé l’attachement de son pays au respect de l’intégralité territoriale et de la souveraineté de chaque État, qui est le ciment de la communauté internationale.  Le Conseil doit plus que jamais se mobiliser pour rejeter toute logique de confrontation, a conclu le délégué. 

Reprenant la parole, M. SERGEY VERSHININ, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, est revenu sur un certain nombre des propos tenus par les membres du Conseil de sécurité, notamment ceux qui sont émus de la décision de la Douma d’État de reconnaître l’indépendance des régions de Donetsk et de Louhansk.  Il a expliqué qu’il s’agissait là d’une initiative de la Chambre basse du Parlement russe et qu’il ne faut donc pas « spéculer », sans quoi le Conseil de sécurité pourrait alors se saisir de n’importe quelle question examinée dans n’importe quel parlement du monde.  Il a souligné que le seul moyen de résoudre le conflit est de mettre en œuvre les accords de Minsk, avant de déplorer la répression dont a fait l’objet la communauté russophone à travers l’Ukraine.  Il a également indiqué que la Crimée est désormais rattachée à la Fédération de Russie à la suite d’un référendum d’autodétermination de la population locale. 

Pour ce qui est d’une « soi-disant agression » de la Russie contre l’Ukraine, le Vice-Ministre a regretté que les déclarations en provenance de Moscou n’aient pas été prises en compte « par tous ».  Notre pays, a-t-il tranché, conduit des manœuvres militaires sur son territoire « comme bon lui semble ».  Quant à l’Ukraine, elle bafoue les documents relatifs à l’établissement des mesures de confiance agréées, notamment au Donbass, où elle a acheminé des armes – drones, missiles sol-air, armes légères et de petit calibre, et munitions militaires, pourtant proscrites par les accords de Minsk, a-t-il observé.  La plupart de ces armements ont été fournis par les États-Unis, « pour un montant de 200 millions de dollars », d’autres par les pays baltes ou le Royaume-Uni, a accusé M. Vershinin.  Selon lui, cette aide démontre que l’Europe ne souhaite pas donner à la Russie des garanties véritables pour sa sécurité nationale.  Il a toutefois espéré que la lettre transmise aujourd’hui même par les États-Unis en réponse aux demandes russes serait « sincère et honnête ». 

À son tour, Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a indiqué qu’elle espérait que la délégation russe aurait réagi au discours du Secrétaire d’État américain en faisant clairement la promesse de ne point envahir l’Ukraine.  Au lieu de cela, on entend toujours la même rhétorique russe faite de désinformation, a-t-elle regretté.  Elle a appelé la Fédération de Russie à cesser la confrontation et d’accepter l’invitation américaine à dialoguer.  « Le Secrétaire Blinken n’est pas venu au Conseil de sécurité ce matin pour faire la guerre, mais plutôt pour trouver un règlement pacifique à la crise », a-t-elle assurée. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) est revenu sur différentes violations des accords de Minsk, rappelant que ces accords ont été signés à la fois par son pays et par la Russie en 2014.  « Le non-respect des engagements pris demeure la marque de la stratégie russe », a-t-il déclaré, avant de dénoncer le bombardement, ce matin, du village de Stanitsya Louhanska à partir du territoire occupé du Donbass. Il a également indiqué qu’il y a deux jours la Douma d’État russe a appelé le Président Putin à reconnaître les parties occupées des régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk comme étant les « républiques populaires de Donetsk et de Louhansk ».  Une telle décision est contraire aux accords de Minsk, a tonné le représentant de l’Ukraine avant de demander au Conseil de sécurité de se saisir de cette situation aujourd’hui même.  Une telle reconnaissance équivaudrait au retrait délibéré de la Russie des accords de Minsk et à l’abandon de la voie politico-diplomatique pour le règlement de ce différend, a mis en garde le représentant tout en précisant que la reconnaissance des soi-disant républiques n’aurait pas d’implications juridiques.  Selon lui, la Russie a le choix de s’orienter vers la voie de la désescalade et du dialogue diplomatique ou de subir la riposte déterminée et consolidée de la communauté internationale. 

Après avoir salué la réponse forte apportée par les membres du Conseil de sécurité aux intentions russes, le représentant a exhorté la Russie à s’engager de manière constructive dans le cadre de négociation existant, « parce qu’à défaut, elle devra assumer à elle seule l’échec des accords de Minsk et des perspectives d’un règlement pacifique ».  Rappelant qu’au titre du paragraphe 4 de ces accords, l’Ukraine et la Russie sont convenues d’établir des zones de sécurité dans leurs zones frontalières sous surveillance et vérification de l’OSCE, il a indiqué que l’Ukraine attend toujours de la Russie qu’elle respecte cet engagement.  C’est d’autant plus urgent aujourd’hui, qu’environ 150 000 soldats russes sont déployés à proximité des frontières de l’Ukraine, a-t-il fait valoir, affirmant attendre des preuves crédibles de leur retrait.  Il a également dénoncé le blocus, par la Russie, d’une grande partie de la mer Noire sous prétexte d’exercices navals, et qui s’inscrit, selon lui, dans le cadre d’une guerre hybride menée contre l’Ukraine, y compris à travers la désinformation et des cyberattaques russes. 

Tout en assurant que l’Ukraine reste attachée à un règlement pacifique du conflit russo-ukrainien par des moyens politiques et diplomatiques, le délégué a averti  que « si la Russie opte pour l’escalade, l’Ukraine se défendra ».  Il a salué les efforts diplomatiques et autres déployés à différents niveaux pour éviter le pire et a réaffirmé la nécessité d’explorer tous les moyens politiques pour assurer la désescalade et redynamiser le format Normandie ainsi que le Groupe de contact trilatéral, y voyant un cadre approprié pour le dialogue direct entre l’Ukraine et la Russie.  Il a cependant estimé qu’il sera difficile de progresser dans la mise en œuvre des accords de Minsk en raison des conditions imposées par la Russie à la tenue de ce dialogue.  Il a assuré que son gouvernement est prêt à reprendre les pourparlers dans le format Normandie, y compris au niveau des dirigeants  en regrettant que la Russie ne soit toujours pas disposée à organiser un sommet du format Normandie. 

Le délégué a ensuite demandé à la Russie d’accorder la liberté de circulation à la Mission d’observation de l’OSCE sur l’intégralité du territoire qu’elle contrôle, notamment dans les zones frontalières.  Sur le volet politique, le représentant a fait remarquer que les discussions sur des questions ayant trait à la mise en œuvre de la soi-disant «Formule Steinmeier», l’ordre spécial sur l’autonomie locale dans certaines zones de Donetsk et Louhansk, la « loi d’amnistie » et les modalités des élections locales demeurent toujours bloquées par la partie russe qui refusent tout simplement de poursuivre les discussions sur les propositions de travail soumises par la délégation ukrainienne en juin 2020. Le représentant ukrainien a ensuite appelé la Russie à assurer la pleine mise en œuvre des engagements qu’elle a pris dans le cadre des accords de Minsk en vue de mettre un terme à l’occupation des parties illégalement occupées de l’Ukraine. 

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a déclaré qu’aux côtés de la France, l’Allemagne reste déterminée à progresser dans le cadre du format Normandie, qui joue un rôle central dans la mise en œuvre des accords de Minsk même si de nombreux obstacles subsistent.  Le cessez-le-feu de juillet 2020 a prouvé que des progrès peuvent être réalisés si la volonté politique est là, a-t-elle souligné.  Elle a demandé aux participants aux réunions du 26 janvier à Paris et du 10 février à Berlin de mettre en œuvre des accords de Minsk et à poursuivre les pourparlers dans le format Normandie et au sein du Groupe de contact trilatéral.  Elle a salué la décision de l’Ukraine de retirer le projet de la loi sur la transition et d’adopter la législation requise par les accords de Minsk. 

Mme Leendertse s’est préoccupée de la proposition de loi russe appelant à reconnaître les « Républiques populaires de Louhansk et de Donetsk » comme des États indépendants.  Cela irait à l’encontre des accords de Minsk et constituerait une violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Elle a également dénoncé les restrictions à la liberté de mouvement des observateurs de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE, ainsi que la destruction de leurs équipements, et a exhorté la Russie à user de son influence afin de garantir que la Mission ait un accès libre et sûr. 

Ces derniers mois, un renforcement militaire sans précédent des forces russes a eu lieu du côté russe et bélarussien de la frontière ukrainienne, a constaté Mme Leendertse, y voyant une menace ou la préparation d’une attaque.  Elle a déploré que la Russie n’ait fourni aucune explication satisfaisante de cette situation.  La Russie doit comprendre que toute agression militaire contre l’Ukraine entraînerait de graves conséquences politiques, économiques et géostratégiques, a affirmé la représentante avant d’exhorter la Russie à faire preuve de transparence sur ses activités militaires.  Elle a ensuite assuré que l’Allemagne et ses partenaires sont prêts à discuter avec la Russie sur les questions de sécurité d’intérêt mutuel et que son gouvernement demeure fermement engagé à trouver une solution diplomatique à la crise. 

Intervenant à nouveaux, le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie a déploré les déclarations belliqueuses prononcées aujourd’hui.  Il a aussi regretté que les récentes déclarations du Président Putin n’aient pas été entendues, notamment celles qu’il a eues après ses entretiens avec le Président français et le Chancelier allemand.  Il s’est aussi étonné de voir que les accords de Minsk sont présentés comme le seul fondement de tout règlement alors que le Président ukrainien a qualifié lesdits accords de « futiles ». Réagissant aux propos du délégué ukrainien qui questionnait dans son intervention la légitimité de la Fédération de Russie en tant que membre de ce Conseil, il a souligné que la Fédération de Russie a succédé à l’URSS comme l’Ukraine a succédé à la République socialiste ukrainienne.  Enfin, il a fait part de sa conception de la beauté, qui réside, selon lui, dans la sagesse.  Alors prenons des décisions sages, a conclu le Vice-Ministre. 

Reprenant à la parole à l’invitation du Président du Conseil, la militante de la société civile ukrainienne a accusé les pays occidentaux de s’employer à « ridiculiser » l’Ukraine depuis huit ans.  Selon Mme Montyan, l’Occident est derrière le renversement du Gouvernement de Maïdan et souhaite que cela « se finisse par l’arrivée de troupes ».  Les autorités de Kiev pourraient ainsi imposer de nouvelles sanctions, a-t-elle ajouté, se demandant « qui en sort gagnant aujourd’hui ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la réponse de l’OTSC à la récente crise au Kazakhstan, enjeu d’un débat sur la coopération entre cette organisation régionale et l’ONU

8967e séance – matin
CS/14794

Conseil de sécurité: la réponse de l’OTSC à la récente crise au Kazakhstan, enjeu d’un débat sur la coopération entre cette organisation régionale et l’ONU

Les délégations ont affiché ce matin, devant le Conseil de sécurité, des divergences de vues quant à la réponse apportée par l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) à la crise qu’a connue en janvier dernier l’un de ses États membres, le Kazakhstan.  La situation en Afghanistan a aussi été évoquée lors de ce débat, présidé par le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, sur la coopération entre l’OTSC et l’ONU, au cours duquel les secrétaires généraux des deux organisations se sont exprimés.

Premier orateur à prendre la parole, le Secrétaire général de l’ONU a rappelé qu’une ONU plus efficace dépend d’une coopération étroite avec les organisations régionales, dont l’OTSC.  M. António Guterres a loué le resserrement des liens entre les deux entités dans de nombreux domaines tels que l’antiterrorisme, la criminalité et les migrations, tandis que son homologue de l’OTSC, M. Stanislav Zas, s’est dit « extrêmement satisfait » de la coopération démontrée en matière de lutte contre le terrorisme.

M. Guterres a également évoqué l’Afghanistan, où la crise humanitaire s’aggrave de jour en jour.  Sans un appui vigoureux, ce pays risque de sombrer dans le désespoir et le terrorisme, a averti le Secrétaire général, en jugeant essentielle la coopération régionale.  Même son de cloche du côté de M. Zas qui a indiqué que l’OTSC donne la priorité aux frontières sud de l’Organisation, « notamment au regard de l’actualité en Afghanistan ».  Le délégué du Tadjikistan a, lui, rappelé la proposition de son pays de créer une « ceinture de sécurité » autour de l’Afghanistan, souhaitant une implication de l’ONU à cet égard.

Mais ce sont bien les violences que le Kazakhstan a connues en janvier dernier et la réponse apportée par l’OTSC qui ont été au cœur des déclarations.  « Cette intervention a contribué à protéger des infrastructures civiles et à éviter une crise », a estimé le Secrétaire général de l’OTSC.  Une position partagée par le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Sergey Vershinin, pour qui « l’opération légitime déployée par les alliés du pays » a permis d’éviter une catastrophe. 

Le Vice-Ministre russe a souligné que cette intervention de l’OTSC s’est faite à la demande du Président du Kazakhstan et que les forces de maintien de la paix de l’OTSC n’ont effectué aucun tir ni participé aux opérations des forces de sécurité, se limitant à la protection de certains sites.  « Elles se sont retirées dès la fin de la crise », a-t-il spécifié, appuyé par le Bélarus.  La Chine a, elle, apporté son soutien à toutes les mesures de nature à restaurer l’ordre au Kazakhstan, avant de rejeter toute ingérence étrangère motivée par la volonté d’y déclencher une révolution.

Le Kirghizistan s’est également réjoui que l’OTSC ait répondu dans les meilleurs délais à l’appel du Kazakhstan, soutenant que ces troubles ont démontré la présence de « cellules dormantes » d’organisations terroristes internationales en Asie centrale.  Le Kazakhstan a fait le même constat, en indiquant que les manifestations pacifiques se sont transformées en « émeutes armées », sous l’impulsion d’éléments criminels et d’extrémistes religieux, dont le but était de « prendre le pouvoir par la force ».

Le Chef de l’État s’est donc naturellement tourné vers l’OTSC pour lui demander une assistance pour stabiliser la situation dans son pays, le Conseil de sécurité ayant été dûment notifié de l’intention de l’Organisation, a expliqué la délégation kazakhstanaise.  Elle a enfin indiqué que l’intervention de l’OTSC s’est avérée « extrêmement ponctuelle et efficace » et que la situation est désormais « sous contrôle ».  Le complot visant à s’emparer du pouvoir par le biais d’émeutes armées a échoué, s’est-elle félicitée.

Plusieurs délégations ont néanmoins émis une note dissonante, à l’instar des États-Unis, qui ont noté que le déploiement de l’OTSC, le premier dans l’histoire de cette organisation, est intervenu avant qu’un dialogue ait pu se nouer.  « Si l’OTSC cherche à développer ses capacités de maintien de la paix, il convient de rappeler que ces opérations doivent pleinement respecter les droits humains et les libertés fondamentales », a fait remarquer la délégation américaine.

« Il y a encore beaucoup de choses que nous ignorons sur ces événements, mais nous notons que le Président Tokayev a mis en place une commission d’enquête pour établir les causes des violences », a réagi de son côté le Royaume-Uni.  Ce dernier a ainsi jugé crucial que cette enquête soit conduite de manière « transparente et efficace », tandis que la France a demandé que toute la lumière soit faite sur les circonstances ayant provoqué ces « événements dramatiques ».  L’état de droit doit demeurer une priorité, a-t-elle ajouté.

« Nous exhortons les autorités du pays à garantir un procès équitable pour les manifestants faisant l’objet d’une enquête, conformément au droit international », a appuyé la Norvège.  Enfin, le Brésil a plaidé en faveur du dialogue et de la négociation pour parvenir, par des moyens pacifiques, à un changement politique: « L’état de droit doit être préservé et les autorités du pays rester attentives aux aspirations légitimes du peuple du Kazakhstan ».

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Coopération entre l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation du Traité de sécurité collective

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a indiqué que la coopération avec les organisations régionales figure au cœur de la Charte des Nations Unies.  Une ONU plus efficace dépend d’une coopération étroite avec ces organisations, dont l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), a dit le Secrétaire général.  Il a loué le resserrement des liens entre l’ONU et l’OTSC dans de nombreux domaines tels que l’antiterrorisme, la criminalité, les migrations et la paix et la sécurité.  Le Chef de l’Organisation a précisé les domaines dans lesquels l’ONU et l’OTSC sont convenues de renforcer davantage encore leur coopération: l’alerte précoce, la prévention et la résolution des conflits, la lutte contre la criminalité internationale et la préparation aux catastrophes.

Dans le domaine de la lutte contre la criminalité organisée et le trafic de stupéfiants, M. Guterres a souligné le rôle important joué par le Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive de l’ONU, qui promeut des mesures contre la criminalité transfrontalière, le terrorisme et le trafic de stupéfiants en vue d’un développement pacifique durable.  Le Secrétaire général a souligné l’apport des pays de l’OTSC aux efforts onusiens de maintien de la paix.  Il a précisé que des experts de l’OTSC se sont ainsi récemment rendus au Liban, avant de dire son appréciation pour la participation de responsables de l’OTSC au Sommet des chefs de police des Nations Unies.  Il a dit attendre d’autres engagements de la part de l’OTSC notamment s’agissant du renforcement des capacités onusiennes.  M. Guterres a ensuite souligné l’importance de la coopération en Afghanistan, où la crise humanitaire s’aggrave de jour en jour.  Le haut fonctionnaire a estimé que sans un appui fort, ce pays risque de sombrer dans le désespoir et le terrorisme, la coopération régionale étant essentielle dans la réponse à apporter en Afghanistan. 

Le Secrétaire général a redit sa détermination à renforcer les liens avec les organisations régionales.  « Nous comptons, dans le même temps, sur la participation des organisations régionales à l’action de paix et de sécurité des Nations Unies. »  Il a dit compter sur le soutien de ces dernières, tant sur le plan politique que sur celui des capacités civiles et militaires.  « L’un des principaux objectifs de mon rapport sur Notre Programme commun est de bâtir –en favorisant les partenariats– un multilatéralisme plus inclusif, plus efficace et fonctionnant davantage en réseau. »  Le Secrétaire général a assuré qu’il continuera à organiser des réunions annuelles avec tous les dirigeants d’organisations régionales, en ajoutant qu’il est guidé dans ses efforts par la Charte des Nations Unies et les autres instruments relatifs au droit international des droits humains et au droit international humanitaire.  « Ensemble, nous sommes comptables de tout ce que nous faisons et de la manière dont nous procédons », a conclu M. Guterres.

M. STANISLAV ZAS, Secrétaire général de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), a souligné la valeur ajoutée des organisations régionales pour réduire les risques grâce à l’action préventive au niveau régional.  Il a mentionné la déclaration des ministres des affaires étrangères de l’OTSC sur l’attachement aux principes de la Charte des Nations Unies et le renforcement de la coopération pour la respecter scrupuleusement.  « Depuis la création de l’OTSC, l’entité est devenue plus large pour mieux faire face à tous les défis de sécurité dans sa zone », a expliqué M. Zas.  Le haut fonctionnaire s’est aussi dit extrêmement satisfait de la coopération de son organisation avec le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations Unies et le Conseil de sécurité en matière de lutte contre le terrorisme.  Parmi les domaines à développer, il a cité la nécessité d’empêcher le recours aux technologies de l’information et des communications (TIC) par les groupes terroristes et les liens entre trafic de stupéfiants et ressources au profit des groupes terroristes.  Il a cité la mise en place par l’OTSC d’un programme nommé « Mercenaires » pour lutter contre les filières de recrutement et une opération antistupéfiants nommée « Canal » en 2021, qui a permis de confisquer 5 tonnes de stupéfiants.  Par ailleurs, il a dit la volonté de l’OTSC d’unir ses forces avec l’ONU en matière de sécurité informatique afin de promouvoir des normes de comportement responsable en matière de sécurité numérique. 

« Un des grands axes de coopération de l’OTSC avec l’ONU à long terme concerne le maintien de la paix », a dit M. Zas, avant de citer en exemple une visite des experts de l’OTSC à la mission des Nations Unies au Liban début 2021.  Il a dit que 3 800 personnels de l’Organisation participent actuellement aux opérations de maintien de la paix.  Il a cité l’intervention récente de l’OTSC au Kazakhstan, conformément au Traité de sécurité collective, à la demande du Président du Kazakhstan.  Cette intervention, a-t-il affirmé, a contribué à protéger des infrastructures civiles et à éviter une crise.  Face à la montée des tensions à travers le monde, le Secrétaire général de l’OTSC a dit accorder une priorité aux frontières sud de l’Organisation, notamment au regard de l’actualité en Afghanistan.  Le Secrétaire général a conclu en disant qu’il est pertinent de développer la coopération avec l’ONU en matière de maintien de la paix et de lutte contre les nouvelles menaces.

M. SERGEY VERSHININ, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a dit que pour la présidence russe du Conseil ce mois-ci, cette réunion est un événement phare parce que la coopération entre l’ONU et les organisations régionales constitue un des grands axes du Conseil de sécurité, et la Fédération de Russie qui n’a de cesse de plaider pour un resserrement de cette coopération.  Les organisations régionales connaissent souvent mieux la situation sur le terrain, a fait valoir le Vice-Ministre, et l’OTSC joue ce rôle dans l’espace eurasien.  Il s’agit pourtant d’une organisation parfois mal connue par certains membres de la communauté internationale, a-t-il regretté, en espérant que cette séance sera un moyen d’y remédier.  Au cours des 20 dernières années, l’OTSC a fait ses preuves, a-t-il affirmé, avant de souligner sa neutralité et son caractère pacifique.  Le Vice-Ministre a rappelé que l’Organisation appuie notamment la coopération avec le Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale et que les principes juridiques de l’OTSC pour le maintien de la paix ont été renforcés, tout comme la coordination et les contacts en matière de maintien de la paix. 

Passant au Kazakhstan, le Vice-Ministre a estimé que « l’opération légitime déployée par les alliés du pays » a permis d’éviter une catastrophe.  Il a souligné que cette intervention de l’OTSC s’est faite à la demande du Président du Kazakhstan et que les forces de maintien de la paix de l’OTSC n’ont effectué aucun tir ni participé aux opérations des forces de sécurité, se limitant à la protection de certains sites.  Elles se sont retirées dès la fin de la crise, a-t-il tenu à préciser en outre.

Abordant la situation en Asie centrale, il a expliqué que l’Afghanistan est au cœur de l’attention de l’OTSC qui a notamment lancé deux initiatives de lutte contre le trafic de stupéfiants et de lutte contre le terrorisme dans le pays. 

Afin de garantir la sécurité informatique internationale, l’OTSC a mis en place l’opération « Proxy », a poursuivi M. Vershinin.  Elle a également créé un mécanisme pour la biosécurité, a-t-il expliqué, en ajoutant que l’Organisation lutte également contre la glorification du nazisme.

M. Vershinin s’est dit préoccupé par l’intensification des exercices militaires de l’OTAN à proximité des frontières des États Membres de l’OTSC.  Il a souligné que l’OTSC s’est adressée à plusieurs reprises à l’OTAN pour demander de coopérer sur le dossier afghan, mais que ces demandes sont restées lettre morte à ce jour.  Cela n’empêche que « notre organisation » est prête et désireuse de renforcer son partenariat avec la communauté internationale sur la base du droit international, a-t-il conclu.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a indiqué que son pays a suivi avec une vive préoccupation les affrontements violents qui ont eu lieu au Kazakhstan début janvier.  « Il y a encore beaucoup de choses que nous ignorons sur ces événements, mais nous notons que le Président Tokayev a mis en place une commission d’enquête pour déterminer les causes des violences. »  Il est crucial que cette enquête soit conduite de manière urgente, transparente et efficace, a insisté le délégué.  Il a aussi pris note que la force de l’OTSC a été déployée au Kazakhstan à l’invitation du Gouvernement pour stabiliser la situation.  Il était entendu que les déploiements devaient avoir recours à une force proportionnée et la souveraineté du pays être respectée, a-t-il ajouté, avant de rappeler que « les principes de souveraineté et d’intégrité territoriale sont au cœur de la Charte des Nations Unies. »  Enfin, il a apporté son soutien aux partenariats régionaux pour le maintien de la paix, pour autant que les partenaires respectent les valeurs et principes de la Charte.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a expliqué l’intérêt de faire coopérer l’ONU avec les organisations régionales par le fait que celles-ci sont au plus près du terrain et qu’elles sont les premiers témoins des crises.  « Ces organisations doivent également respecter et promouvoir les droits de l’homme, dont ceux des femmes ainsi que leur participation pleine, égale, substantielle et effective à tous les aspects de la vie publique », a ajouté M. de Rivière.  Parmi les priorités d’action collective, il a cité la lutte contre la menace émanant des groupes terroristes et la lutte contre la criminalité organisée.  S’agissant des défis, M. de Rivière a rappelé que la prise de pouvoir par la force des Taliban en Afghanistan est à l’origine d’une grave crise humanitaire et de l’effondrement de l’économie du pays, dont l’impact peut entraîner d’importantes répercussions dans toute la région et sur le plan international.  « La réaction de la communauté internationale a été très claire avec cinq exigences préalables à toute normalisation des relations avec les Taliban », s’est-il félicité avant de rappeler qu’une de ces conditions est la rupture des liens des Taliban avec les groupes terroristes.  Il s’est inquiété que les attaques de l’EI-K aient augmenté et que les groupes terroristes, dont Al-Qaida, se sentent renforcés depuis la prise de pouvoir des Taliban. 

Par ailleurs, il a indiqué que l’aide humanitaire exceptionnelle de 100 millions d’euros annoncée lors de la conférence de Genève le 13 septembre 2021 a été entièrement déboursée fin 2021, pour aider la population afghane.  Alors que les modalités de la présence des Nations Unies en Afghanistan doivent être bientôt revues, le représentant de la France a prévenu qu’il sera attentif à ce qu’elles répondent à la préoccupation constante que les droits humains, et en particulier des femmes et des filles, soient respectés, par tous, à commencer par les Taliban.  En ce qui concerne la situation au Kazakhstan, il a réitéré son souhait que toute la lumière soit faite sur les circonstances ayant conduit à ces événements dramatiques du mois de janvier, en rappelant que l’état de droit doit demeurer une priorité.

Pour M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), il ne fait aucun doute que le Conseil de sécurité est l’organe suprême chargé du maintien de la paix dans le monde, mais la Charte des Nations Unies, dans son Chapitre VIII, imagine une organisation qui collabore avec des organisations et entités régionales pour prévenir et gérer des crises, a-t-il souligné.  Une relation qui reste souvent sous-exploitée, a regretté le délégué, en appelant à la cultiver davantage, notamment avec l’OTSC.  Le Ghana a rédigé un document sur la coopération entre l’ONU et les entités régionales, a rappelé ensuite le représentant, en expliquant qu’elle doit se fonder sur des mécanismes clairs accompagnés de suivis et d’évaluations périodiques.  Concernant l’OTSC, le Ghana a encouragé la tenue de nouvelles consultations entre l’ONU et l’OTSC afin d’harmoniser leurs réponses dans la région eurasienne.  Le Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale devrait permettre aux deux organisations de travailler plus étroitement ensemble pour identifier les causes profondes des conflits dans cette région et y répondre de manière diplomatique et par la médiation, a souhaité le représentant.  Il a pris bonne note du déploiement d’une opération de l’OTSC au Kazakhstan en début d’année.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a soutenu la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, s’agissant notamment de la résolution des conflits.  Mon pays est fier des partenariats qu’il a noués en Asie centrale, a dit le délégué, en citant la plateforme C5+1, qui a pour but d’appuyer l’indépendance et la souveraineté des États d’Asie centrale.  Nous défendons une Asie centrale libre de choisir sa voie politique, économique et sécuritaire, a déclaré le délégué.  Il a précisé que la plateforme précitée, qui a été lancée en 2015, a nourri les efforts visant à répondre aux défis environnementaux et à des défis sécuritaires communs.  Le représentant s’est inquiété du récent déploiement de l’OTSC au Kazakhstan, qui a été le premier dans l’histoire de cette organisation.  Il a noté que ce déploiement est intervenu avant qu’ait pu se dérouler tout effort de dialogue.  Si l’OTSC cherche à développer ses capacités de maintien de la paix, il convient de rappeler que ces opérations doivent pleinement respecter les droits humains et les libertés fondamentales, a dit M. DeLaurentis.  Enfin, le représentant a réitéré l’appui de son pays aux organisations régionales, qui sont des moteurs de diplomatie.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a salué les efforts menés en vue du renforcement du partenariat entre l’ONU et l’OTSC.  Une bonne coopération entre l’ONU et les organisations régionales permet de mieux répondre aux crises, a dit le délégué, en soulignant l’importance du rôle en Afrique de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  Il a félicité l’OTSC pour le renforcement de ses capacités de maintien de la paix et ses efforts de lutte contre le terrorisme, la traite des êtres humains ou bien encore la criminalité transnationale organisée, qui contribuent ainsi à la réalisation des objectifs de l’ONU.  Le délégué a encouragé l’OTSC, l’ONU et les pays de la région à trouver des solutions communes aux défis sécuritaires, politiques et économiques que l’Asie centrale doit relever.  Enfin, M. Kiboino a encouragé l’OTSC et les autres organisations régionales à lutter de concert contre la piraterie.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a souligné la valeur ajoutée de la coopération entre les organisations régionales parce que les défis sécuritaires contemporains exigent des actions transfrontalières coordonnées et concertées.  Dans ce contexte, il s’est félicité de la coopération en cours entre l’ONU et l’OTSC sur la base de la déclaration commune de 2010 avant de saluer, en particulier, la contribution du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent et le trafic de stupéfiants.  Après avoir salué la qualité des relations diplomatiques entre l’Inde et les pays d’Asie centrale, le représentant de l’Inde a indiqué que le tout premier sommet Inde-Asie centrale en format virtuel tenu le 27 janvier 2022 a réuni le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan.  Le représentant de l’Inde a indiqué que l’Inde a offert une ligne de crédit d’un milliard de dollars pour soutenir des projets de développement en Asie centrale et des subventions pour mettre en œuvre de projets de développement communautaire à fort impact en vue de favoriser le développement socioéconomique.  « Nous avons créé une plateforme de dialogue Inde-Asie centrale », a dit M. Tirumurti avant de vanter les démarches de son pays pour moderniser les infrastructures du port de Chabahar en Iran, qui deviendra un maillon important du commerce entre les marchés d’Asie centrale et d’Asie du Sud.  Le représentant de l’Inde a exhorté la communauté internationale à prendre conscience des préoccupations des pays d’Asie centrale concernant l’évolution de la situation en Afghanistan, notamment au regard des risques liés au terrorisme international et au trafic de stupéfiants.  Dans le contexte de la pandémie COVID-19, il a en outre exhorté l’ONU et ses agences à continuer à travailler en étroite collaboration avec les organisations régionales pour assurer la résilience des chaînes d’approvisionnement en médicaments et vaccins.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a mis en avant le rôle vital que les organisations régionales et sous-régionales peuvent jouer dans la construction et le maintien de la paix, citant en exemple l’Union européenne.  Il ne fait aucun doute pour la représentante que le renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales renforce notre capacité collective à prévenir et résoudre les conflits, et à promouvoir les buts et objectifs plus larges de la Charte des Nations Unies.  Au cours des 15 années qui se sont écoulées depuis la création du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive, ce centre a soutenu les efforts des pays d’Asie centrale pour construire ensemble la paix et la sécurité dans leur région grâce à la coopération.  Ces efforts sont un processus continu, a relevé la représentante, mais en cherchant des solutions aux défis communs à travers la coopération, les pays de l’Asie centrale obtiennent de meilleurs résultats pour leurs ressortissants.  Elle en a voulu pour exemple les efforts conjoints dans la gestion des eaux transfrontalières, la problématique climat et sécurité, la lutte contre les stupéfiants et le commerce transfrontalier qui ont commencé à jeter les bases d’un développement plus solide et durable et de communautés et économies plus résilientes dans toute la région.  La déléguée a en conclusion vivement encouragé la priorisation des programmes pour les femmes et la paix et la sécurité et pour les jeunes et la paix et la sécurité dans le cadre de tous les partenariats avec les organisations régionales.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a souligné l’importance de renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, en particulier l’Union africaine.  Il a salué le rôle majeur joué par l’OTSC dans l’arrêt de la confrontation armée à la frontière entre le Tadjikistan et le Kirghizistan en janvier dernier.  Le règlement de ce conflit passe par la table des négociations, a dit le délégué.  S’agissant des récents événements au Kazakhstan, il a plaidé en faveur du dialogue et de la négociation pour parvenir par des moyens pacifiques à un changement politique.  L’état de droit doit être préservé et les autorités du pays doivent rester attentives aux aspirations légitimes du peuple du Kazakhstan, a-t-il recommandé.  Il a pris note des résultats significatifs obtenus sur ce dossier grâce à la coopération des membres de l’OTSC.  Le délégué a en outre souligné l’importance du travail de cette organisation sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  La coopération entre l’ONU et les organisations régionales doit être basée sur le respect de la démocratie, des droits humains et de l’état de droit, a conclu le représentant du Brésil.

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré que l’OTSC a joué un rôle primordial pour la préservation de la souveraineté et l’intégrité territoriale de ses États membres en faisant face aux nouvelles menaces en matière de sécurité internationale.  Il a appelé l’OTSC à poursuivre ses synergies avec l’ONU en matière de maintien de la paix.  S’agissant des troubles qui ont éclaté au Kazakhstan en janvier, le représentant a appuyé toutes les mesures permettant de restaurer l’ordre, avant de rejeter tout ingérence étrangère dans le souci d’y déclencher une révolution.  Il a indiqué que le Chine a adressé un message au Président de la République du Kazakhstan, M. Kassym-Jomart Tokayev, pour soutenir ses initiatives visant à restaurer la stabilité après les troubles du mois de janvier.  À cet égard, il a salué le rôle constructif de l’OTSC pour stabiliser la situation au Kazakhstan.

« En tant que voisine et amie du Kazakhstan », la Chine a dit sa volonté d’aider la Kazakhstan à se maintenir sur la voie de la stabilité et du développement économique.  Le représentant a appelé la communauté internationale à promouvoir le multilatéralisme afin d’éviter que certains États continuent de mener des politiques hégémoniques unilatérales qui portent atteinte aux objectifs de développement d’autres pays.  Il a dit la volonté de la Chine de coopérer avec l’OTSC et l’Organisation de coopération de Shanghai pour lutter contre le terrorisme et promouvoir la stabilité de la région.  Pour ce qui est de l’Afghanistan, le délégué a dit que la priorité est d’éviter une crise humanitaire et de restituer les avoirs afghans au Gouvernement afghan.

Pour M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), ce débat porte sur une « question cardinale » à savoir celle de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales qui sont « des acteurs clefs dans la réponse aux crises et conflits de leurs régions ».  Le choix de cette thématique amène à revisiter le rôle de premier plan de la coopération entre l’ONU et ces organisations régionales dans le contexte du maintien de la paix et de la sécurité internationales, conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, a fait valoir le représentant.  C’est dans un souci d’efficacité et d’une meilleure connexion avec le terrain qu’il faut renforcer cette coopération, a estimé M. Biang, qui en a voulu pour preuve le bilan positif des consultations régulières entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.  Il a estimé que l’implication des acteurs régionaux aux côtés des Nations Unies permet de mieux appréhender les menaces persistantes et de faciliter les réponses durables.  Il a concédé que, depuis quelques années, l’ONU a fait des efforts en ce sens, mais, selon lui, il faut aller plus loin, à commencer par un soutien régulier de l’ONU à la Force conjointe du G5 Sahel.

S’agissant de la coopération entre l’ONU et l’OTSC, il a rappelé que l’OTSC possède un potentiel politique, diplomatique et militaire significatif et qu’elle fait preuve d’engagement pour relever les défis communs à la paix et la sécurité régionales.  À cet égard, il a évoqué le « rôle décisif » joué par l’OTSC dans la stabilisation de la récente crise au Kazakhstan.  En guise de conclusion, le représentant a déclaré que « travailler en synergie avec les organisations régionales n’est pas une option mais un levier essentiel dans le contexte des crises actuelles ».

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a dit attacher une grande importance à la coopération de l’ONU avec les organisations régionales et sous-régionales en matière de prévention et de résolution des conflits.  L’expérience a montré que ces organisations ont une connaissance approfondie des particularités de chaque région, ce qui est essentiel pour relever plus efficacement les défis de la paix et de la sécurité.  L’un de ces défis, qui constitue une menace pour nous tous, est le terrorisme international.  La coopération et la coordination des efforts entre les États membres de l’OTSC sont essentielles dans la lutte contre le terrorisme dans une région qui a été particulièrement touchée par la situation complexe en Afghanistan.  Une interaction accrue entre l’ONU et l’OTSC, notamment dans le domaine de l’échange d’informations, serait encore plus pertinente dans ces circonstances, a ajouté la délégation, en soulignant que toutes les actions de lutte contre le terrorisme doivent respecter le droit international, en particulier le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a estimé que tout pays doit pouvoir décider, en toute liberté, à quel organisme régional il souhaite adhérer, qu’il s’agisse de l’OTSC, de l’OTAN, de l’UE ou de la Communauté d’États indépendants (CEI).  Elle s’est néanmoins particulièrement inquiétée de l’intervention récente de l’OTSC au Kazakhstan, en raison du « manque de transparence » qui a accompagné cette opération.  « Il y a également eu un manque de clarté quant au mandat des forces de l’OTSC déployées », a estimé Mme Dautllari avant de rappeler que toutes les organisations régionales doivent adhérer au droit international et au droit international humanitaire.  Après avoir exhorté les autorités kazakhstanaises à respecter leurs obligations internationales, la représentante a salué le travail du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale en matière de lutte contre le terrorisme, de démarcation des frontières, de gestion des eaux transfrontalières et de mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité. 

Par ailleurs, la représentante de l’Albanie a appelé à s’inspirer de l’OSCE, en tant que plus grande organisation régionale au monde, qui travaille pour la stabilité, la paix et la démocratie d’un milliard de personnes.  « En 2020, alors que nous présidions l’OSCE, nous nous sommes particulièrement attachés à promouvoir de manière active et constructive des solutions par la négociation et la diplomatie », a dit la représentante en rappelant que le dialogue doit rester la pierre angulaire des efforts de maintien de la paix mondiale et de la sécurité.  Elle a expliqué que la participation de son pays à plusieurs organisations régionales et internationales avait permis à son pays de construire des bonnes les relations de voisinage dans les Balkans et de promouvoir l’état de droit et les droits de l’homme, en particulier les droits de l’enfant, des femmes et des minorités.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a rappelé que son pays est membre de plusieurs organisations régionales et sous-régionales, notamment le Conseil de coopération du Golfe (CCG), la Ligue des États arabes et l’Organisation de la coopération islamique (OCI), et qu’il attache une grande importance aux points de vue régionaux dans la résolution des conflits, ainsi que dans la consolidation et le maintien de la paix.  À cette aune, il s’est réjoui de voir l’ONU renforcer sa relation avec l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC).  Pour le représentant, la coopération entre l’OTSC et l’ONU, ainsi qu’avec d’autres organisations sous-régionales d’Asie centrale, est d’autant plus justifiée à la lumière des récents développements en Afghanistan, qui engendrent des menaces pour la région, notamment en ce qui concerne la criminalité transnationale, le trafic de drogue, les activités terroristes et les flux de réfugiés.  À cet égard, il s’est félicité des contacts réguliers entre l’OTSC, le Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale et la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA). 

En ce qui concerne les événements récents au Kazakhstan, le délégué a réitéré le soutien des Émirats aux efforts du Gouvernement kazakhstanais pour maintenir la stabilité et la sécurité à l’intérieur de ses frontières.  Ces mesures sont essentielles pour maintenir la stabilité dans les pays voisins et dans la région dans son ensemble, a-t-il souligné, avant d’inviter le Conseil à veiller à ce que les perspectives régionales soient systématiquement incluses dans les points inscrits à son ordre du jour.  Selon lui, les facteurs de conflit, comme le terrorisme ou le trafic de drogue, ne peuvent être facilement contenus à l’intérieur des frontières des États, ni traités par un seul État.  Tenir compte de l’expérience, des connaissances et des points de vue des voisins est donc vital pour créer des stratégies globales de prévention et de règlement des conflits, a-t-il conclu.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a appuyé le développement de partenariats entre le Conseil et les organisations régionales pertinentes.  La coopération entre le Conseil et l’Union africaine (UA) est un très bon exemple, a dit la déléguée, pour qui la bonne gouvernance, l’état de droit et le respect des droits humains sont des éléments essentiels de la paix, de la sécurité et de la prospérité.  Évoquant la situation au Kazakhstan, elle a souligné l’importance des réformes politiques et du respect des droits humains.  « Nous exhortons les autorités du pays à garantir un procès équitable pour les manifestants faisant l’objet d’une enquête, conformément au droit international. »  Enfin, Mme Heimerback a salué l’engagement des pays de la région en faveur du processus de paix en Afghanistan.  La coopération régionale et internationale doit être basée sur les principes démocratiques, le respect des droits humains et l’état de droit, a conclu la représentante.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a dit accorder une attention particulière à la coopération de l’ONU avec les organisations régionales, en particulier dans le domaine du maintien de la paix.  L’Arménie, qui préside l’OTSC, a pour priorité de resserrer les liens entre les deux organisations.  Elle voudrait œuvrer à aider les pays membres de l’OTSC à participer aux opérations de maintien de la paix de l’ONU en renforçant notamment les capacités de leurs forces de maintien de la paix.  Notant que 20 ans après sa création en 2002, l’OTSC est devenue une organisation aux multiples fonctions, le représentant a expliqué que cela lui permet de répondre efficacement aux défis conjoints dans sa zone d’action notamment en termes de lutte contre le terrorisme et contre les combattants terroristes étrangers.  Revenant sur la récente intervention des forces de maintien de la paix collectives de l’OTSC au Kazakhstan, il a affirmé que cela avait permis de stabiliser la situation, et ce, à la demande du Président kazakhstanais.

M. MAGZHAN ILYASSOV (Kazakhstan) a souhaité informer le Conseil sur les « événements tragiques » survenus dans son pays, qui ont nécessité l’intervention ponctuelle d’un contingent de maintien de la paix de l’OTSC pour la première fois dans l’histoire de l’Organisation.  Il a indiqué que les manifestations ont commencé le 2 janvier en raison d’une forte hausse des prix du gaz liquéfié dans l’ouest du pays.  Il a ajouté que, malgré les mesures prises par le Gouvernement kazakhstanais pour répondre aux revendications, les manifestations pacifiques se sont transformées en « émeutes armées », sous l’impulsion d’éléments criminels et d’extrémistes religieux, comprenant des combattants étrangers, dont le but était de « prendre le pouvoir par la force ».  Ces événements ont fait des morts et de nombreux blessés, notamment parmi les forces de sécurité, a déploré le représentant. 

Il a ensuite rappelé qu’à la suite de la réunion spéciale du Conseil consacrée au Kazakhstan, le 5 janvier dernier, la situation dans le pays a été qualifiée de « menace terroriste » pour la sécurité de l’État et d’« acte d’agression ».  Conformément à la Charte des Nations Unies, qui reconnaît le droit de chaque État à la légitime défense, et sur la base de l’article 4 de la Traité de sécurité collective, le Chef de l’État kazakhstanais a demandé à l’OTSC de lui fournir une assistance au maintien de la paix pour stabiliser la situation dans le pays.  Cette demande, a-t-il précisé, a été soutenue par tous les membres de l’OTSC (Arménie, Bélarus, Fédération de Russie, République kirghize et Tadjikistan).  Assurant que le Conseil de sécurité avait été dûment informé de l’intention de l’OTSC, le délégué a indiqué que le contingent de maintien de la paix était entré au Kazakhstan le 6 janvier et que son intervention s’était avérée « extrêmement ponctuelle et efficace ».  Il a ajouté que, durant toute la durée de l’intervention, entre le 8 et le 19 janvier, des soldats de la paix ont assuré la sécurité des installations et infrastructures stratégiques du pays, sans participer aux opérations ni faire usage de leurs armes. 

Le 11 janvier, a poursuivi M. Ilyassov, le Président du Kazakhstan a déclaré que la mission de maintien de la paix des forces de l’OTSC avait achevé son intervention « avec succès ».  Le contingent a entamé son retrait le 13 janvier et, le 19 janvier, il s’était totalement retiré du territoire kazakhstanais, a-t-il expliqué, avant d’assurer que la situation est désormais « sous contrôle » et que le complot visant à s’emparer du pouvoir par le biais d’émeutes armées a échoué.  Qualifiant ces événements d’« expérience traumatisante » pour son pays, il a affirmé que des enquêtes sur leurs origines sont en cours et seront partagées avec la communauté internationale.  À ses yeux, l’OTSC a démontré à cette occasion sa pertinence et son efficacité en tant que mécanisme permettant d’assurer la stabilité et la sécurité des États qui se conforment aux règles et aux normes du Traité.  À cet égard, a-t-il conclu, le Kazakhstan est favorable à un accord d’interaction étroite entre l’ONU et des structures régionales telles que l’OTSC pour apporter une contribution significative au renforcement de la sécurité. 

Mme AIDA KASYMALIEVA (Kirghizistan) a rappelé les efforts de son pays pour un Afghanistan stable et prospère.  Nous avons ainsi été parmi les premiers pays à acheminer de l’aide humanitaire par avion, a indiqué la déléguée.  Elle a ensuite abordé les événements qui se sont récemment déroulés au Kazakhstan et ont montré la présence de « cellules dormantes » d’organisations terroristes internationales dans les pays d’Asie centrale.  L’initiative du Kazakhstan d’activer les mécanismes de sécurité collective de l’OTSC a confirmé l’opinion des membres de cette organisation quant aux menaces existantes à la sécurité, a argué la déléguée, en se réjouissant que l’Organisation ait répondu dans les meilleurs délais à l’appel du Kazakhstan: « Aujourd’hui, nous pouvons dire que l’OTSC est devenue l’une des organisations internationales clefs s’agissant de la sécurité en Eurasie. »

« Trente ans après la signature du Traité de sécurité collective et 20 ans après la mise en place de l’OTSC », M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a rappelé la transformation difficile d’une union intrinsèquement défensive en une organisation de sécurité multifonctionnelle dotée de véritables mécanismes collectifs pour lutter contre un large éventail de défis et menaces modernes.  « L’OTSC, en tant qu’organisation régionale au sens du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, apporte une contribution significative à la garantie de la sécurité et de la stabilité dans l’espace européen et eurasien. »  S’agissant de la situation en Afghanistan, il a dit que le Bélarus soutiendra les initiatives des partenaires de l’OTSC en marge des efforts des Nations Unies visant à promouvoir la sécurité en Afghanistan et dans les pays frontaliers pour neutraliser les menaces associées au terrorisme et à l’extrémisme.  Il a rappelé que son pays avait présenté en 2011 une initiative visant à développer la coopération entre l’OTSC et l’ONU dans ce domaine, pour illustrer son attachement au dialogue en cours entre les deux organisations à ce sujet. 

Par ailleurs, le représentant a précisé que les forces collectives de maintien de la paix de l’OTSC ont été activées pour la première fois en janvier 2022 au Kazakhstan sur la base d’un appel du Président de ce pays et dans le plein respect de la Charte des Nations Unies et du Traité de sécurité collective.  Il a cité le Président du Bélarus, M. Loukachenko, qui a déclaré, lors de la récente session extraordinaire du Conseil de sécurité collective de l’OTSC, que les actions des forces collectives de l’OTSC « ont permis de déjouer les plans de commanditaires d’un conflit fabriqué de toute pièce pour perturber le pays, et de normaliser la situation ».  Le représentant a estimé que cette expérience souligne la pertinence du développement du potentiel de l’OTSC dans le domaine du maintien de la paix.  Enfin, il a estimé que l’envoi d’hôpitaux mobiles, de médecins militaires ou d’unités de déminage ainsi que d’équipements et d’infrastructures pourrait devenir une forme possible de participation de l’OTSC au maintien de la paix de l’ONU dans le cadre des mandats du Conseil de sécurité.

M. JONIBEK HIKMAT (Tadjikistan) a expliqué que l’un des principes fondamentaux de la politique étrangère de tous les États membres de l’OTSC est leur reconnaissance du rôle central de l’ONU dans le système des relations internationales.  La coopération avec l’ONU et les organisations internationales opérant dans le domaine de la sécurité est une direction importante du travail de l’OTSC, a-t-il ajouté en rappelant que l’Asie centrale est l’une des régions relevant de la sécurité collective de l’OTSC.  Le délégué a plaidé pour que la coopération entre l’ONU et l’OTSC soit rehaussée, en invoquant notamment les menaces sécuritaires que posent l’Afghanistan et la recrudescence du trafic de stupéfiants.  Depuis la prise de contrôle des Taliban, la production d’opium en Afghanistan a augmenté de 6 800 tonnes, soit 320 tonnes d’héroïne pure, a-t-il signalé.  Au cours des sept premiers mois de 2021, les autorités compétentes du Tadjikistan ont saisi 484 kilogrammes de drogue, alors qu’au cours des quatre derniers mois sous le régime taliban, la saisie s’est élevée à environ 3 tonnes (2 780 kilogrammes), soit presque six fois plus, a mis en garde le représentant.  Il a donc jugé important de développer des mécanismes d’interaction entre l’OTSC et l’ONU dans la lutte contre le trafic de drogue.  L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) devrait être activement impliqué dans ce travail qu’il s’agisse de la consommation non médicale ou de la contrebande dans la zone de l’OTSC et au-delà, a-t-il suggéré.

Le représentant a également parlé de la hausse, depuis le début du mois de septembre 2021, du nombre de groupes terroristes dans les provinces afghanes limitrophes du Tadjikistan.  Dans les provinces du nord-est de l’Afghanistan, il y a plus de 40 camps et centres d’entraînement terroristes, avec plus de 6 000 combattants, a-t-il dénombré, pour expliquer les raisons des huit exercices militaires de grande envergure menés par l’OTSC en 2021, dont 5 ont eu lieu au Tadjikistan près de la frontière tadjiko-afghane.  Compte tenu de la situation afghane, l’OTSC envisage de renforcer les frontières sud de l’Organisation, a indiqué M. Hikmat.  À cet égard, il a rappelé la proposition « opportune » du Président du Tadjikistan, M. Emomali Rahmon, de créer une « ceinture de sécurité » autour de l’Afghanistan, souhaitant que l’ONU et d’autres organisations internationales et régionales soient impliquées dans la mise en œuvre de cette initiative.  Il a émis l’espoir que la nomination, en 2021 à la suite du sommet de l’OTSC à Douchanbé, d’un envoyé spécial de l’OTSC pour les activités de maintien de la paix en coopération avec l’ONU contribuera à l’intensification des activités et de la collaboration.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC adopte des décisions d’organisation pour 2022 et procède à deux nominations

Session de 2022,
9e séance plénière – matin
ECOSOC/7072

L’ECOSOC adopte des décisions d’organisation pour 2022 et procède à deux nominations

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a tenu une brève séance procédurale, ce matin, afin de statuer sur certaines questions, dont celle de la pratique de la « procédure de silence » qu’il a décidé de prolonger au cours de la session de 2022.  Après avoir révisé le mandat d’un organe et ajusté certaines dates de session, il a élu le Portugal au Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix, pour terminer le mandat de la Norvège s’achevant le 31 décembre 2022, et nommé la Représentante permanente de Saint-Vincent-et-les Grenadines comme membre supplémentaire du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti

La procédure de silence continuera donc d’être suivie, lorsque jugée nécessaire, pendant toute la session de 2022.  Les organes de session et les organes subsidiaires de l’ECOSOC pourront ainsi adopter leurs projets de décisions après leur communication à tous ses membres, avec copie à tous les autres États Membres pour leur information.  Les décisions seront considérées comme adoptées 72 heures après cette communication « si le silence n’est pas rompu ».  Cette décision (E/2022/L.3) s’appuie sur la décision 2020/205 du 3 avril 2020.  Pour chaque décision, le Conseil prendra note de l’adoption sous cette forme lors de la première séance plénière pouvant se tenir. 

Ce matin, le Conseil a également approuvé, par une résolution (E/2022/L.4), le mandat révisé du Comité des transports intérieurs de la Commission économique pour l’Europe.  Ce Comité, qui relève du système des Nations Unies, fournit un cadre général pour l’examen de tous les aspects du développement des transports intérieurs et de la coopération dans ce domaine, en s’attachant à exercer une gouvernance réglementaire interrégionale et intrarégionale notamment à travers les conventions de l’ONU relatives aux transports.  La délégation des États-Unis a tenu à préciser que bien que se ralliant au consensus, ils considèrent que les décisions prises par le Comité ne font pas forcément autorité dans les autres régions du monde. 

Le Conseil économique et social a ensuite nommé (décision E/2022/L.2), la Représentante permanente de Saint-Vincent-et-les Grenadines comme membre supplémentaire du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti.  En tant que Président dudit Groupe, le représentant du Canada s’est dit heureux d’accueillir Saint-Vincent-et-les Grenadines dont « l’arrivée enrichira la qualité du travail du Groupe consultatif et l’aidera à fournir des informations et des conseils utiles pour soutenir le développement socioéconomique d’Haïti ». 

L’ECOSOC a également pris une décision orale pour ajuster les dates de sessions de deux organes subsidiaires.  Ainsi, la cinquante-troisième session de la Commission de statistique se tiendra du 28 février au 2 mars, ainsi que le 4 mars 2022.  En outre, la session ordinaire du Comité chargé des organisations non gouvernementales se tiendra du 17 au 26 mai et le 7 juin 2022, alors que la reprise de la session se tiendra du 29 août au 7 septembre et le 15 septembre 2022. 

Le Conseil a ensuite approuvé l’ordre du jour provisoire de la vingt-quatrième session du Comité d’experts de la coopération internationale en matière fiscale et décidé (E/2022/45) que, dans la mesure du possible, la session se tiendra du 4 au 7 avril 2022, à New York, et qu’à défaut, elle se tiendra dans le courant du mois d’avril 2022 selon un format réduit au moyen de réunions informelles organisées sur une plateforme virtuelle.  Dans ce cas, les décisions du Comité seront adoptées selon une procédure d’approbation tacite et les modalités définitives seront arrêtées par les coprésidents du Comité, après consultation de tous ses membres. 

En ce qui concerne la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, l’ECOSOC a adopté trois décisions contenues dans le rapport sur la reprise de la trentième session (E/2021/30/Add.1).  En vertu de la décision I, l’ECOSOC a décidé que le groupe de travail intergouvernemental permanent à composition non limitée chargé d’améliorer la gouvernance et la situation financière de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime sera dirigé par un Bureau composé d’un président ou d’une présidente, d’un premier vice-président ou d’une première vice-présidente et de trois vice-présidentes ou vice-présidents représentant les cinq groupes régionaux.  Le Conseil a également décidé que les dates des réunions seront fixées par le Bureau du groupe de travail en consultation avec le Secrétariat, et que le groupe de travail continuera de tenir, au moins une fois par an, une réunion formelle qui comprendra un dialogue avec la direction exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). 

Dans sa décision II, l’ECOSOC a prévu les thèmes des débats thématiques devant se tenir aux trente et unième, trente-deuxième, trente-troisième et trente-quatrième sessions de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale porteront respectivement: Renforcement du recours aux preuves numériques dans le domaine de la justice pénale et de la lutte contre la cybercriminalité, y compris en ce qui concerne l’utilisation abusive et l’exploitation de mineurs à des fins d’activités illégales menées au moyen d’Internet; Amélioration du fonctionnement du système de justice pénale afin de garantir l’accès à la justice et d’instaurer une société sûre et sécurisée; Promotion de la coopération internationale et de l’assistance technique, notamment en matière d’extradition, d’entraide judiciaire et de recouvrement d’avoirs, afin de prévenir et combattre la criminalité organisée, la corruption, le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations et les autres formes de criminalité; Lutte contre les formes de criminalité nouvelles, émergentes et évolutives, y compris les crimes portant atteinte à l’environnement, la contrebande de marchandises et le trafic de biens culturels et autres infractions visant des biens culturels. 

Ensuite, par la décision III, le Conseil a pris note du rapport de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale sur les travaux de la reprise de sa trentième session. 

L’ECOSOC était également saisi des recommandations figurant dans le rapport sur la reprise de la soixante-quatrième session de la Commission des stupéfiants (E/2021/28/Add.1).  Il a adopté la décision I recommandée par ladite Commission, et ainsi entériné le fait que le groupe de travail intergouvernemental permanent à composition non limitée chargé d’améliorer la gouvernance et la situation financière de l’ONUDC sera dirigé par un Bureau composé d’un président ou d’une présidente, d’un premier vice-président ou d’une première vice-présidente et de trois vice-présidentes ou vice-présidents représentant les cinq groupes régionaux. Ces postes seront pourvus chaque année par roulement selon le principe de la répartition régionale.  Les membres du Bureau seront désignés conjointement par les Bureaux de la Commission des stupéfiants et de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale.  Leur nomination sera approuvée en plénière par les deux commissions. 

Le Conseil a décidé également que les dates des réunions seront fixées par le Bureau du groupe de travail en consultation avec le Secrétariat, et que le groupe de travail continuera de tenir, au moins une fois par an, une réunion formelle qui comprendra un dialogue avec la direction exécutive de l’ONUDC. 

Par la décision II du rapport de la Commission des stupéfiants, l’ECOSOC a pris note du rapport de celle-ci sur les travaux de la reprise de sa soixante-quatrième session. 

La prochaine séance plénière de l’ECOSOC sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission du développement social engage les États Membres à faciliter l’accès équitable et à prix raisonnable aux services de base

Soixantième session,
3e séance plénière – matin
SOC/4905

La Commission du développement social engage les États Membres à faciliter l’accès équitable et à prix raisonnable aux services de base

La Commission du développement social a terminé, ce matin, les travaux de sa soixantième session en engageant les États Membres à faciliter l’accès équitable et à prix raisonnable aux services de base.   

Entamée le 7 février dernier, cette session avait pour thème prioritaire: « Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030. »  

En adoptant par consensus le projet de résolution du même intitulé, la Commission estime que le relèvement après la pandémie de COVID-19 offre une occasion supplémentaire de mettre en place des cadres politiques intégrés à long terme pour la réalisation des objectifs de développement durable, et que ces cadres devraient viser simultanément à éliminer la pauvreté et la faim ainsi que la malnutrition, entre autres.   

Dans le contexte actuel, elle engage en outre les États Membres à veiller à ce que les personnes en situation de vulnérabilité soient véritablement associées à l’élaboration, à la mise en œuvre et au suivi des plans de relèvement après la COVID-19, se déclarant par ailleurs profondément préoccupée par l’écart entre les taux de vaccination, notamment entre les pays développés et les pays en développement. 

La Commission demande d’autre part aux États Membres de prévenir les effets néfastes de la pandémie de COVID-19 sur les enfants en en atténuant les conséquences socioéconomiques dévastatrices, notamment en assurant une éducation inclusive, équitable et accessible.  Elle engage également les États Membres à appliquer des politiques en faveur de l’autonomisation économique des femmes. 

À l’entame de ses travaux, la Commission a adopté un projet de résolution sur les aspects sociaux du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique par lequel elle note avec satisfaction l’entrée en vigueur, le 5 novembre 2021, du Traité portant création de l’Agence africaine du médicament.  Ce texte prend également note de l’élaboration du plan d’action prioritaire 2 du Programme de développement des infrastructures en Afrique, « un portefeuille solide » composé de 69 projets d’infrastructures devant être réalisés entre 2021 et 2030.   

La Commission a également choisi le thème prioritaire de sa soixante et unième session: « Plein emploi productif et travail décent pour toutes et tous: surmonter les inégalités pour accélérer le relèvement après la pandémie de COVID-19 et la mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030. »    

Elle a aussi adopté l’ordre du jour provisoire de la soixante et unième session et le projet de rapport de sa soixantième session.    

Ces projets de résolution seront ensuite transmis au Conseil économique et social (ECOSOC) pour adoption finale. 

La Commission a ensuite brièvement ouvert sa soixantième et unième session pour élire Mme Alya Ahmed Saif Al-Thani (Qatar) à sa présidence, ainsi que M. Or Shaked (Israël) et M. Daniel Zavala Porras (Costa Rica) à la vice-présidence.  L’élection des autres membres du Bureau a été reportée.

PRÉSENTATION ET DÉCISION SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION

Aspects sociaux du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique - E/CN.5/2022/L.4

Par ce texte, adopté par consensus et présenté par le Pakistan, au nom du G77 et de la Chine, l’ECOSOC, craignant que la crise actuelle de la COVID-19 ne risque de réduire à néant des décennies de progrès en matière de développement social, saluerait les progrès accomplis par les gouvernements africains pour ce qui est de s’acquitter des engagements qu’ils ont pris, dans le cadre de la mise en œuvre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique, d’affermir la démocratie et les droits de la personne et d’assurer une bonne gouvernance et une gestion économique rigoureuse.

Il prendrait note avec satisfaction de l’action menée par la Commission de l’Union africaine, qui a abouti au lancement de campagnes nationales pour mettre fin au mariage d’enfants et au mariage précoce ou forcé dans 24 pays (…) mais demeurerait préoccupé par le fait que, dans certains pays d’Afrique, les risques de mariage d’enfants et de mariage précoce ou forcé ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19.

L’ECOSOC prendrait par ailleurs note de l’achèvement de la première phase du Programme de développement des infrastructures en Afrique à l’appui de l’intégration régionale et continentale (…) et de l’élaboration du plan d’action prioritaire 2 du Programme de développement des infrastructures en Afrique, « un portefeuille solide » composé de 69 projets d’infrastructures devant être réalisés entre 2021 et 2030.

De même, le Conseil noterait avec satisfaction l’entrée en vigueur, le 5 novembre 2021, du Traité portant création de l’Agence africaine du médicament.

Explication de position  

Les États-Unis ont relevé que la plupart des questions qui figurent dans ce texte sont également abordées dans la résolution annuelle sur le NEPAD adoptée par l’Assemblée générale.  La délégation a souligné que la mise en œuvre du Programme 2030 ne doit pas modifier les accords conclus dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Les transferts de technologie doivent se faire de manière volontaire et sur la base d’un commun accord, a-t-elle notamment insisté.  En outre, l’expression « flux financiers illicites » n’a pas de définition convenue, tandis que le terme « droit au développement » ne fait pas l’objet d’une entente commune, a-t-elle ajouté, se déclarant préoccupée par le fait, que selon le projet de résolution, ce « droit protège les États et non les individus ».  Elle a également regretté l’omission de la référence à la Déclaration politique sur le VIH/sida de 2021, et le fait que le libellé n’accorde pas de caractère urgent à la violence sexuelle et aux mutilations génitales féminines.

Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030 - E/CN.5/2022/L.3

Par ce texte, adopté par consensus et présenté par l’Argentine, l’ECOSOC estimerait que le relèvement après la pandémie de COVID-19 offre une occasion supplémentaire de mettre en place des cadres politiques intégrés à long terme pour la réalisation des objectifs de développement durable, et que ces cadres devraient viser simultanément à éliminer la pauvreté et la faim ainsi que la malnutrition, entre autres.

Dans ce cadre, le Conseil engagerait les États Membres à faciliter l’accès équitable et à prix raisonnable aux services de base, « au moyen de programmes contribuant à l’égalité et à l’inclusion par l’affirmation de la dignité fondamentale de la personne humaine », aux soins de santé, au logement abordable, à la nutrition et à l’alimentation, à l’emploi et au travail décent, aux technologies de l’information et des communications et aux infrastructures.  

Il engagerait également les États Membres à appliquer des politiques en faveur de l’autonomisation économique des femmes qui prônent la participation pleine et productive des femmes au marché du travail et qui favorisent l’égalité salariale à travail égal, le partage des responsabilités entre les parents, la mise en place de structures d’accueil pour les enfants et la conciliation de la vie familiale avec la vie professionnelle.  

Dans le contexte actuel, le Conseil se déclarerait profondément préoccupé par l’écart entre les taux de vaccination, notamment entre les pays développés et les pays en développement et noterait que ce sont les pauvres et les plus vulnérables qui sont les plus touchés par la pandémie de COVID-19.  Il engagerait donc les États Membres à veiller à ce que les personnes en situation de vulnérabilité soient véritablement associées à l’élaboration, à la mise en œuvre et au suivi des plans de relèvement après la COVID-19.  

Il demanderait d’autre part aux États Membres de prévenir les effets néfastes de la pandémie de COVID-19 sur les enfants en en atténuant les conséquences socioéconomiques dévastatrices, notamment en assurant une éducation inclusive, équitable et accessible.  Il leur demanderait aussi, pendant le confinement, d’aider les établissements scolaires, les enseignants et les familles à assurer une source fiable de repas quotidiens et à disposer de solutions d’enseignement à distance accessibles et inclusives pour réduire les fractures numériques, tout en protégeant les enfants contre la violence, les mauvais traitements et l’exploitation en ligne et hors ligne.  

Enfin, l’ECOSOC prierait la communauté internationale de renforcer la coopération multilatérale, en mobilisant des ressources en faveur d’un relèvement inclusif et en recourant aux droits de tirage spéciaux et à la possibilité de les allouer volontairement aux pays qui en ont le plus besoin.

Explications de position

Pour les États-Unis, ce texte n’est pas contraignant et ne crée ni droits, ni obligations en vertu du droit international.  Toute référence à des principes spécifiques n’oblige pas les États à les appliquer ou à agir conformément à ceux-ci, a insisté la délégation qui a noté que les États ne sont pas obligés d’appliquer les instruments internationaux auxquels ils ne sont pas parties.  S’agissant du droit à l’éducation, la délégation a indiqué qu’aux États-Unis, ce sont les autorités locales qui s’occupent de l’éducation.  Elle a par ailleurs dit être préoccupée par le concept de « souveraineté alimentaire » qui, a-t-elle estimé, pourrait justifier le protectionnisme ou d’autres mesures ayant un impact négatif sur la sécurité alimentaire.  Elle s’est ensuite dissociée du paragraphe 21 du préambule et du paragraphe 5 du dispositif. 

La Libye, l’Arabie saoudite, le Yémen et le Sénégal se sont dissociés de certains libellés portant sur les discriminations croisées ainsi que sur les femmes et les filles, arguant leurs spécificités culturelles et religieuses.  

La Hongrie s’est dissociée du paragraphe 16 du dispositif, et jugé inacceptable d’inclure la question des migrants dans le projet de résolution.  Cela pourrait avoir pour conséquence d’exclure d’autres personnes vulnérables qui méritent pourtant une attention égale de la communauté internationale, a-t-elle indiqué.

Au nom de l’Union européenne, la France a estimé important que le projet de résolution comprenne des recommandations pour lutter contre les inégalités et l’exclusion.  Elle a salué les recommandations visant à promouvoir et à protéger le rôle des organisations de la société civile et à faciliter la participation et l’autonomisation des personnes en situation de vulnérabilité.  Les recommandations portant sur les défis auxquels sont confrontés les enfants, en particulier les filles, sont particulièrement importantes.  Elle a également souligné les engagements pris pour lutter contre les formes multiples et croisées de discrimination et de violence, voyant dans l’autonomisation des femmes et des filles une contribution cruciale à la réalisation du Programme 2030.  

Le Saint-Siège a regretté qu’il n’ait pas été possible de réaffirmer dans le texte que la famille joue un rôle clef dans le développement social et a le droit de « recevoir une protection et un soutien complets ».  La délégation a également déploré la présence d’une terminologie litigieuse liée à la discrimination et à la diversité.  La délégation s’est dite préoccupée par l’inclusion de nouveaux éléments dans le paragraphe 25 qui modifie le libellé bien établi du Programme 2030, soulignant que la Commission n’est pas mandatée pour apporter de tels changements.  La délégation a par ailleurs encouragé le Bureau à évaluer le calendrier des négociations futures au sein de la Commission afin de disposer de suffisamment de temps pour l’examen des projets et des consultations informelles substantielles.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen: l’Envoyé spécial informe le Conseil de sécurité du démarrage, la semaine prochaine, d’une série de consultations avec les parties yéménites

8966e séance – après-midi
CS/14793

Yémen: l’Envoyé spécial informe le Conseil de sécurité du démarrage, la semaine prochaine, d’une série de consultations avec les parties yéménites

Alors qu’une paix au Yémen se fait attendre, que pendant « trop longtemps » les Yéménites sont restés sans processus politique et sans espoir de voir ce conflit vieux de sept ans se terminer, et que la situation devient « incontrôlable » sur le terrain, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Hans Grundberg, a annoncé cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le lancement la semaine prochaine d’une série de consultations avec toutes les parties yéménites. 

L’initiative a été saluée par l’ensemble des délégations, même si des doutes ont été exprimés par celles du Yémen et des Émirats arabes unis, peu convaincues de la volonté des houthistes de se lancer dans le dialogue. 

L’Envoyé spécial a précisé qu’il tiendra des discussions bilatérales avec toutes les parties yéménites, y compris les belligérants, dans le but d’affiner le cadre général qu’il est en train d’élaborer et qui définira son plan pour progresser vers un règlement politique inclusif.  Grâce à ce processus, les intérêts des parties belligérantes seront pris en compte, a-t-il assuré avant de demander le soutien du Conseil de sécurité. 

Cette initiative a été soutenue par l’ensemble des membres du Conseil de sécurité, notamment par les États-Unis, la Fédération de Russie, la France ou la Chine, qui ont jugé qu’un processus de négociation s’impose de « toute urgence » en raison d’un conflit qui déborde largement des frontières yéménites et dans le contexte d’une situation socioéconomique et humanitaire « particulièrement préoccupante ».  Les membres du Conseil n’ont vu en effet aucun signe d’apaisement, au contraire: l’escalade des six dernières semaines, où en moyenne 21 civils ont été tués ou blessés chaque jour, montre que le Yémen a atteint de loin son bilan le plus lourd depuis au moins trois ans. 

Les attaques transfrontalières se sont intensifiées et il est devenu beaucoup plus difficile pour les acteurs humanitaires de travailler au Yémen, ont déploré les intervenants et en premier lieu le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths.  Pour preuve, la semaine dernière, cinq membres du personnel de l’ONU en mission officielle dans la province d’Abyan ont été enlevés, tandis que deux autres travailleurs de l’ONU arrêtés à Sanaa en novembre dernier sont toujours détenus, s’est-il inquiété en soulignant lui aussi la nécessité d’une approche durable. 

M. Grundberg a misé sur les discussions qui vont s’ouvrir, y voyant une « réelle opportunité » de tracer une voie pacifique.  Tous les efforts doivent être faits pour faire comprendre aux parties qu’il n’y a pas de solution militaire durable et que leur quête est vaine, a plaidé l’Envoyé spécial, convaincu qu’un processus politique sous les auspices de l’ONU, soutenu par ce Conseil, est « notre meilleure voie à suivre ».

En attendant, et afin de limiter les souffrances des populations civiles, le Conseil de sécurité doit obtenir un cessez-le-feu immédiat et faire respecter l’embargo sur les armes qu’il a décidé dans ses résolutions, notamment la 2616 (2021), ont insisté des membres du Conseil, dont le Mexique, l’Albanie et le Gabon. 

Le Yémen et les Émirats arabes unis se sont toutefois montrés sceptiques, tout en soutenant le projet de l’Envoyé spécial.  Le représentant du pays concerné a relevé qu’à ce jour, aucune condamnation, pas plus que les résolutions du Conseil de sécurité, n’ont dissuadé les milices houthistes de continuer de déstabiliser son pays et toute la région.  Armés par l’Iran, les miliciens continuent de mener des attaques terroristes par drones en visant les civils et les installations civiles d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, a dénoncé la délégation yéménite.

La représentante des Émirats arabes unis a, de son côté, affirmé que les houthistes ont clairement montré au monde leur refus de tenir leurs promesses et de s’engager dans un processus politique. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/50)

Déclarations

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a qualifié d’inquiétants les récents développements au Yémen.  Il devrait être « évident pour tout le monde » que les enjeux sont devenus importants, après les attaques d’Ansar Allah le mois dernier contre les Émirats arabes unis, a-t-il estimé.  Il a mentionné à cet égard l’aéroport civil et les zones industrielles voisines qui ont été ciblés, avec un bilan de trois morts parmi les civils.  Ces attaques, en plus de celles qui ont frappé l’Arabie saoudite, montrent à quel point ce conflit risque de devenir incontrôlable, à moins que des efforts sérieux ne soient déployés, de toute urgence, par les parties yéménites, la région et la communauté internationale pour mettre fin à ce conflit, a-t-il mis en garde. 

Par ailleurs, le mois dernier, les lignes de front se sont multipliées, avec un nombre record effroyable de victimes civiles, a observé l’Envoyé spécial.  La frappe aérienne de la coalition sur un centre de détention à Sadaa, a tué ou blessé plus de 300 détenus, faisant d’elle le pire incident pour les victimes civiles en trois ans.  La forte augmentation des frappes aériennes au Yémen, y compris sur les zones résidentielles et les infrastructures civiles à Sanaa et Hodeïda, est également alarmante selon M. Grundberg qui a rappelé une fois de plus à toutes les parties leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.

Il a poursuivi son exposé en soulignant que la guerre continue par ailleurs de se dérouler sur le terrain économique, les parties belligérantes se disputant les ressources, les flux commerciaux et la politique monétaire.  Cette guerre économique frappe irréfutablement l’ensemble de la population, a-t-il noté.  L’Envoyé spécial a indiqué que le mois dernier a été marqué par des pénuries particulièrement graves de carburant et de dérivés pétroliers, notamment dans les zones contrôlées par Ansar Allah, mettant à rude épreuve la vie quotidienne des populations.  La guerre se déroule également dans le domaine public avec une rhétorique médiatique de plus en plus hostile, combinée à l’intimidation, à la détention et au harcèlement des professionnels et des militants des médias au Yémen, a encore déploré le haut fonctionnaire.  Il a regretté que cela contribue à créer un environnement toxique alors qu’il y a un besoin de dialogue. 

Mais, malgré tous ces défis, il existe une issue à cette guerre, a-t-il assuré en faisant remarquer que laisser la guerre se poursuivre est un choix, tout comme y mettre fin.  « Même s’il ne sera pas facile d’y mettre fin, je crois fermement que c’est possible. »  L’Envoyé spécial a indiqué être en train d’élaborer un cadre qui définira son plan pour progresser vers un règlement politique inclusif, y compris la mise en place d’un processus à plusieurs volets.  Grâce à ce processus, les intérêts des parties belligérantes peuvent être pris en compte dans le contexte d’un programme yéménite plus large selon les trois axes politique, sécuritaire et économique. 

Dans le cadre de cet effort, M. Grundberg a annoncé qu’il allait entamer la semaine prochaine une série de consultations bilatérales visant à affiner ce cadre.  Il s’engagera avec de multiples parties prenantes yéménites, y compris les parties belligérantes, les partis politiques, les représentants de la société civile et les experts yéménites dans les domaines politique, sécuritaire et économique.  Les consultations exploreront les priorités des Yéménites à court et à long terme, ainsi que leurs aspirations et leur vision plus large pour mettre fin au conflit.  Assurer l’inclusivité et l’inclusion des femmes sera un aspect important des consultations, a-t-il assuré, avant de demander le soutien du Conseil de sécurité pour encourager tous les acteurs à participer de manière constructive sans délai.

Selon l’Envoyé spécial, il s’agit d’une « réelle opportunité » pour les parties yéménites de tracer une voie pacifique vers l’avant.  Pendant trop longtemps, a-t-il poursuivi, les Yéménites ont été sans processus politique et sans espoir que ce conflit puisse se terminer.  En lançant un « processus structuré » qui essaye d’aborder les éléments clefs du conflit, l’espoir d’une fin aux batailles militaires, politiques et économiques dévastatrices peut être restauré. 

Concluant son intervention, l’Envoyé spécial a affirmé que mettre fin à cette guerre nécessitera des compromis inconfortables qu’aucune partie belligérante n’est actuellement disposée à faire.  « Il nous incombe donc à tous, y compris au Conseil, de déployer tous les efforts possibles pour faire comprendre aux parties à ce conflit qu’il n’y a pas de solution militaire durable et que leur quête d’un moment d’équilibre parfait sur le champ de bataille, lorsque l’autre côté est suffisamment affaibli pour accepter son sort, est vain. »  Un processus politique sous les auspices de l’ONU, soutenu par ce Conseil, est notre meilleure voie à suivre, a-t-il dit. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré que la guerre au Yémen continue de menacer des millions de vies à travers le pays et ne montre actuellement « aucun signe d’apaisement ».  Bien au contraire, l’escalade des six dernières semaines a eu des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles, avec en moyenne 21 civils tués ou blessés chaque jour, soit « de loin, le bilan le plus lourd depuis au moins trois ans ».  M. Griffiths a rappelé que les attaques transfrontalières se sont elles aussi intensifiées.  Il a rappelé à toutes les parties leurs obligations au titre du droit international humanitaire et a demandé que les responsables de toute violation grave répondent de leurs actes. 

Tout au long d’un conflit vieux désormais de sept ans, les partenaires humanitaires ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour réduire les souffrances des populations, a fait remarquer M. Griffiths, qui a rappelé qu’en 2021, près de 200 organisations ont collaboré dans le cadre du plan d’intervention de l’ONU pour aider plus de 11 millions de personnes chaque mois.  Mais, a-t-il rappelé, « travailler au Yémen est souvent beaucoup plus difficile qu’il ne devrait l’être ».  Il a rappelé les restrictions auxquelles les travailleurs humanitaires restent confrontés et a rappelé que le droit international humanitaire exige de toutes les parties qu’elles facilitent l’accès et garantissent la liberté de mouvement des humanitaires.  Il a rappelé et condamné l’enlèvement la semaine dernière de cinq membres du personnel de l’ONU en mission officielle dans la province d’Abyan et a rappelé que deux autres travailleurs de l’ONU arrêtés à Sanaa en novembre dernier sont toujours détenus alors qu’un troisième, arrêté à Mareb en décembre dernier, vient d’être libéré. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a rappelé que c’est le financement qui est, « de loin », le plus grand défi auquel sont confrontés les organismes d’aide.  L’opération humanitaire -une bouée de sauvetage pour des millions de personnes au Yémen– « est sur le point de commencer à faire beaucoup moins », a-t-il averti, en expliquant que les agences d’aide vont rapidement se trouver à court d’argent.  À la fin du mois de janvier, près des deux tiers des principaux programmes d’aide des Nations Unies avaient déjà été réduits, voire fermés, a-t-il annoncé.  Et, a-t-il ajouté, « à partir du mois prochain », les huit millions de personnes que le Programme alimentaire mondial (PAM) aide et dont il a déjà dû limiter les rations depuis décembre, « ne recevront probablement pas de nourriture du tout ».  M. Griffiths a ensuite décrit une série de programmes qui seraient rapidement réduits ou supprimés.  « L’ampleur des lacunes actuelles est sans précédent au Yémen », a-t-il ajouté. 

Si ces lacunes ne sont pas comblées, ce sera un arrêt de mort pour les personnes dont les mécanismes d’adaptation ont été complètement épuisés et qui dépendent de l’aide pour survivre, a averti M. Griffiths, qui a précisé que les agences font « ce qu’elles peuvent ».  Aucune de ces solutions n’est durable.  Nous ne pouvons pas laisser l’opération d’aide au Yémen s’effondrer, a poursuivi le chef d’OCHA, qui a remercié les Gouvernements de la Suède et de la Suisse d’avoir coorganisé avec les Nations Unies un événement d’engagement de haut niveau pour le Yémen le 16 mars.  Il a « imploré » tous les donateurs de profiter de cette occasion pour démontrer leur engagement envers le peuple du Yémen.

M. Griffiths s’est dit conscient de la nécessité d’avoir une approche plus durable que la simple assistance humanitaire.  C’est possible, a-t-il estimé, en estimant que le cadre économique des Nations Unies offre « une voie à suivre » à cet égard car il rassemble des initiatives qui pourraient faire une différence immédiate « en stimulant les revenus, en réduisant les prix et en renforçant la stabilité macroéconomique ».  En conclusion, M. Griffiths a déclaré que la meilleure chose que l’on puisse faire pour le peuple yéménite serait de « trouver une fin juste et durable à la guerre ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie), Président du Comité du Conseil de sécurité établi en application de la résolution 2140 (2014), a détaillé l’activité du Comité sur la période allant du 19 février 2021 à ce jour.  Depuis la dernière intervention de son prédécesseur devant ce Conseil, les membres du Comité se sont réunis à quatre reprises en présentiel et à trois reprises en virtuel, a-t-il indiqué.  Il a précisé que le Comité avait, le 26 mars dernier, entendu une présentation du Groupe d’experts sur l’attaque qui a frappé l’aéroport d’Aden le 30 décembre 2020.  Le 17 décembre, le Comité a entendu pour la première fois la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  Il a indiqué que le rapport final du Groupe d’experts a été transmis au Comité le 23 décembre puis à ce Conseil le 26 janvier.  Les discussions sur les six recommandations soumises au Comité se poursuivent, a-t-il encore précisé.  Le Président a souligné qu’elles ont trait à un embargo sur les armes ciblé, la préservation de l’économie yéménite ou bien encore le respect du droit international humanitaire.  Le Comité a continué de recevoir les rapports d’inspection de navires du Mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies, a ajouté en conclusion le Président.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a regretté l’escalade notable du conflit, en dénonçant les attaques transfrontalières commises par des houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.  « La dernière attaque ayant visé l’aéroport international d’Abha a blessé 12 civils, tandis que l’attaque du 17 janvier contre les Émirats arabes unis en a tué trois », a-t-elle déploré.  Rappelant qu’il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit, la représentante britannique a appelé toutes les parties à s’engager dans le nouveau processus de paix placé sous l’égide de l’ONU.  Elle a appuyé la proposition de l’Envoyé spécial d’entamer de vastes consultations avec les parties au conflit, saluant son approche inclusive qui permettra, selon elle, à un large éventail de Yéménites d’avoir la possibilité de participer.  Elle a précisé que le Royaume-Uni avait organisé une réunion sur le Yémen fin janvier au cours de laquelle Oman, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les États-Unis ont planché sur une solution politique urgente et globale.  Alors que la réponse humanitaire se heurte à de graves pénuries de financement et que nous approchons du septième anniversaire du conflit, la représentante s’est inquiétée que seulement trois millions de personnes recevront des rations alimentaires complètes en février et deux millions en mars.  Elle a donc encouragé les donateurs à se montrer aussi généreux que possible. 

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a redit sa condamnation des nombreuses attaques perpétrées par les houthistes contre des cibles émiraties et saoudiennes.  Les attaques contre des infrastructures civiles essentielles, en plus d’être injustifiables, constituent une violation du droit international humanitaire, aggravent les souffrances humaines et accroissent les exigences imposées aux opérations humanitaires, a-t-elle déploré.  Elle s’est faite l’écho de l’appel du Secrétaire général aux parties pour qu’elles fassent preuve d’un maximum de retenue, encouragent les actions de désescalade et respectent les principes de proportionnalité, de distinction et de précaution.  Un cessez-le-feu national et l’avancement du processus politique, facilités par l’Envoyé spécial de l’ONU, sont la feuille de route vers la solution du conflit yéménite et la formule pour avancer vers une paix durable dans la péninsule arabique, selon la représentante mexicaine.  Elle a insisté en outre sur la nécessité de respecter l’embargo sur les armes, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2616 (2021). 

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a condamné vigoureusement les attaques commises le mois dernier par les houthistes, y compris contre des sites saoudiens et émiriens, ajoutant que les États-Unis allaient les « aider à défendre leur territoire ».  Les houthistes continuent de détenir des étrangers, dont du personnel de l’ONU, et à occuper les locaux qui abritaient l’ambassade des États-Unis, a-t-il dénoncé.  Il a accusé les houthistes de vouloir semer l’instabilité dans toute la région, appelant à un « front uni » pour montrer aux houthistes que leurs attaques ne peuvent rester impunies. 

Le représentant a constaté une « escalade dangereuse » au Yémen et appelé les houthistes à respecter le droit international humanitaire et à participer à un processus de paix piloté par l’ONU.  Il a salué les efforts de l’Envoyé spécial et estimé que le retour à un processus de négociations s’imposait de toute urgence.  Il a appelé toutes les parties à soutenir le travail de M. Griffiths et à lui permettre de rencontrer tous les secteurs de la société yéménite.  Il a jugé inacceptable la volonté des houthistes d’imposer des conditions préalables à une rencontre avec l’Envoyé spécial.

M. Mills a rappelé que plus de 20 millions de Yéménites ont besoin d’aide humanitaire, appelant les donateurs à verser des fonds.  Il s’est également dit préoccupé par la situation du pétrolier SAFER et a appelé les houthistes à agir de manière à éviter une catastrophe humanitaire et environnementale. 

Mme ALLEGRA PAMELA R. BONGO (Gabon) a constaté que la crise multidimensionnelle au Yémen est loin de voir son épilogue et que le Gouvernement d’union nationale, « qui avait suscité tant d’espoirs lors de sa formation », n’est pas en mesure d’exercer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire yéménite, ni de faire face aux nombreux défis qui s’y posent.  L’escalade de la violence est des plus préoccupantes, a poursuivi Mme Bongo, avec des débordements sur les pays voisins qui risquent de déstabiliser la région.  Le Gabon appelle à la trêve des combats et au respect de l’embargo sur les armes, partant du principe qu’il n’y a pas de solution militaire à cette crise, comme l’a affirmé sa représentante.  Les populations civiles ne doivent pas continuer à être la cible des attaques meurtrière, s’est-elle indignée en dénonçant l’impunité qui prévaut au Yémen.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à être solidaires avec les femmes yéménites face aux abus et violations des droits fondamentaux qu’elles subissent.  Au-delà de l’indispensable cessez-le-feu, la sortie de crise au Yémen passe selon elle par un dialogue inclusif.  Avant de conclure, la représentante a appelé à une mobilisation de la communauté internationale à la hauteur de la détresse des populations.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) s’est dit vivement préoccupé par l’escalade du conflit qui hypothèque les chances d’un cessez-le-feu et qui a des conséquences terribles sur l’ensemble de la région du Golfe où vivent et travaillent neuf millions d’Indiens.  Il a dénoncé les attaques intervenues récemment contre les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, qui ont blessé plusieurs citoyens indiens.  Le représentant a particulièrement dénoncé la rhétorique belliqueuse d’Ansar Allah avant de s’inquiéter de l’impact croissant du conflit sur la sécurité maritime dans la région.  Il a demandé la libération par Ansar Allah des membres d’équipage du navire Rawabi dont sept sont des Indiens.  Il s’est particulièrement inquiété de la crise humanitaire résultant de l’effondrement de l’économie yéménite avant d’exhorter les donateurs à soutenir financièrement les besoins des agences onusiennes.  Il a salué le cadre économique présenté par OCHA pour le Yémen.  Il a exhorté les parties à renoncer aux options militaires et à s’engager dans un dialogue en faveur d’un processus politique piloté par les Yéménites.  Enfin, il a exhorté les pays de la région ayant une influence sur les parties yéménites à n’épargner aucun effort pour parvenir à un processus politique inclusif respectueux de la souveraineté du Yémen. 

M. DAI BING (Chine) s’est inquiété de la détérioration de la situation au Yémen et a exhorté toutes les parties à cesser les hostilités.  Il a condamné les attaques houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, en se félicitant des initiatives prises par ces deux pays pour garantir leur propre sécurité.  Le Conseil de sécurité se doit de suivre de près la situation au Yémen, a-t-il recommandé, souhaitant aussi qu’il joue activement son rôle pour parvenir à une désescalade et pour voir la crise yéménite réglée à travers une solution politique.  Pour cela, il a demandé à toutes les parties de faire preuve de la volonté politique nécessaire et de coopérer avec l’Envoyé spécial, en prévenant que la réponse humanitaire ne saurait se substituer à un règlement politique.  Sur la plan humanitaire, le délégué a salué l’arrivée récente d’aide et de pétrole au port de Hodeïda.  Il a appelé la communauté internationale, et notamment les donateurs, à fournir une aide plus durable.  La Chine a pris une part active aux travaux du Comité de sanctions sur le Yémen, a rappelé son représentant, en soulignant que le mandat de ce Comité et celui du Groupe d’experts arrivent à expiration.  « La Chine espère qu’ils seront prorogés. »

Pour Mme SHERAZ GASRI (France), la stratégie des différentes parties au conflit qui espèrent, par la poursuite des combats, se placer en meilleure position pour négocier ensuite est « sans issue ».  Elle a réitéré l’appel de la France à un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  Alors que le conflit déborde « désormais largement des frontières yéménites », elle s’est inquiétée des risques de déstabilisation de la région et a condamné fermement les attaques des houthistes en direction des territoires saoudien et émirien, jugeant « inacceptables » les tirs de missiles.  Elle a également jugé « extrêmement préoccupant » le bilan humain de l’escalade de la violence, demandant de donner la « priorité absolue » à la protection des civils, y compris des personnels humanitaires et médicaux, ainsi que des infrastructures civiles.  Tout doit être fait pour garantir un plein accès humanitaire à l’ensemble des personnes dans le besoin, a poursuivi Mme Gasri, qui a appelé à la levée de « l’ensemble des obstacles bureaucratiques ».  Pour la France, la Conférence des donateurs, prévue le 16 mars, est une échéance importante.  Répondre aux besoins humanitaires est une responsabilité collective et un devoir moral et « la France sera au rendez-vous », a-t-elle assuré.

Mme Gasri a apporté son soutien à l’action de l’Envoyé spécial pour maintenir une dynamique politique, « seule porte de sortie au conflit ».  Elle l’a remercié pour ses efforts et a appelé tous les acteurs à coopérer pleinement avec lui, sans conditions préalables.  Rappelant que les paramètres internationaux pour résoudre le conflit au Yémen sont « bien connus », la représentante a souligné l’importance d’un dialogue inclusif avec la pleine participation des femmes au processus de paix.  La représentante a enfin déclaré que le pétrolier SAFER reste « une urgence et une priorité » et a appelé les houthistes à coopérer avec les Nations Unies pour éviter une catastrophe écologique. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a décrit le quotidien « chaotique » de la population yéménite prisonnière d’un conflit qui voit de nombreuses femmes décéder de complications liées à l’accouchement en raison des contraintes liées à la guerre.  Rappelant qu’il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, le représentant a dit que le pays a besoin sans délai d’un cadre de résolution du conflit.  C’est pourquoi il a exhorté les parties à s’engager dans un processus de dialogue politique sans exclusive permettant la participation de tous les segments de la société, dont les femmes.  « Un cessez-le-feu immédiat devait être la priorité », a-t-il insisté avant d’appeler à trouver une solution au problème du pétrolier SAFER et à la détention du navire marchand Rawabi.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a mentionné de nombreuses tendances préoccupantes au Yémen, en premier lieu, le niveau sans précédent de violences commises contre les civils.  Le délégué a rappelé que 600 civils ont été tués et blessés en janvier, soit le bilan mensuel le plus élevé depuis trois ans.  Il a également noté que les attaques commises par les houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis en février ont aussi causé des pertes civiles.  « Les attaques contre les civils sont inacceptables et doivent être condamnées sans équivoque », a clamé le délégué, en demandant le respect du droit international humanitaire.  Il a souhaité que chaque violation fasse l’objet d’une enquête impartiale et que les responsables soient traduits en justice. 

Le délégué a ensuite évoqué le sort des enfants yéménites qui, en sept ans de guerre, ont été privés de leurs droits à la santé, à l’éducation et à une vie familiale normale.  « Pour notre plus grande honte », plus de 10 000 enfants ont été tués ou blessés en raison du conflit, a accusé le délégué.  Bien qu’ils ne soient pas les seuls à avoir commis de graves violations contre les enfants, les houthistes ont fait de l’endoctrinement et du recrutement d’enfants un élément constitutif de leur pouvoir, a-t-il poursuivi.  Nous devons tout faire pour garantir le respect du droit international et préserver ce qui reste de l’enfance des enfants du Yémen, a-t-il demandé en concluant.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a affirmé que son pays se réserve, et a le droit, de prendre toutes les mesures visant à protéger sa population civile contre les activités agressives des terroristes houthistes.  S’adressant directement à l’Envoyé spécial, elle lui a demandé: « Quand les activités de ce groupe cesseront-elles? »  Du point de vue de la délégation, le temps est venu pour la communauté internationale de faire cesser les activités de ces milices.  Elle a demandé avant tout à la communauté internationale d’exercer des pressions sur ce groupe et ses alliés et soutiens.  Cela passe par la mise en œuvre des sanctions décidées par le Conseil de sécurité, y compris l’embargo sur les armes, a plaidé la représentante. 

Elle a également déclaré que son pays reste en faveur d’un volet politique pour le règlement du conflit.  « Mais force est de constater que les houthistes ont clairement montré au monde leur refus de tenir leurs promesses et de s’engager dans un processus politique. »  La représentante a appelé une fois de plus la communauté internationale à mettre un terme aux activités des houthistes, afin d’orienter le Yémen vers une ère de paix. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) s’est dite préoccupée par la détérioration d’une situation sécuritaire qui a plongé les provinces de Mareb et Chaboua dans un conflit armé et qui continue d’avoir un impact négatif sur la situation économique et humanitaire de tout le Yémen.  Toutes les parties doivent faire de la protection des personnes et des infrastructures civiles une priorité et respecter les principes de proportionnalité, de distinction et de précaution, conformément aux normes du droit international humanitaire, a-t-elle tonné.  Elle a appelé les parties à s’engager immédiatement en faveur d’un cessez-le-feu national et d’un processus politique pour trouver une solution durable au conflit.  Elle a appuyé les efforts de l’Envoyé spécial visant à développer un cadre pour un processus politique inclusif de concert avec les parties et d’autres acteurs.  Mme Oppong-Ntiri a dit attendre des mesures concrètes et a précisé qu’en insistant sur un processus inclusif, elle fait sien l’appel à la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects des négociations politiques.  Les femmes yéménites doivent faire partie de la solution, a martelé la représentante.

Elle s’est indignée qu’alors que 80% de la population dépend de l’aide et que le risque de famine pointe à l’horizon, les belligérants multiplient les obstacles bureaucratiques aux opérations humanitaires.  Elle a salué la Conférence des donateurs pour le Yémen convoquée par la Suisse et la Suède au mois de mars, pour lever une somme de 3,9 milliards de dollars.  S’agissant de la situation économique, elle a appelé les parties à tenir sans plus tarder leurs engagements, en vertu des accords de Stockholm.  Sans l’ouverture des ports de Sanaa et de Hodeïda aux importations commerciales et à l’aide humanitaire, l’économie du Yémen poursuivra sa chute et la famine ne pourra être évitée, a prévenu la représentante.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a dit condamner « fermement » les attaques répétées visant des civils et des infrastructures civiles au Yémen, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, d’autant qu’elles violent le principe fondamental du droit international humanitaire.  Pour cette raison, la délégation a demandé au Conseil de sécurité de prendre des mesures « pertinentes » afin de tenir tous les auteurs responsables de leurs actes.  Elle a ensuite jugé « évident » qu’il ne peut y avoir de solution militaire à la crise au Yémen, tout recours au terrorisme ou à la violence pour faire avancer des intérêts politiques ou idéologiques devant être condamné.  Le moment est au contraire venu pour toutes les parties de reconsidérer leur « ligne dure » et de faire les compromis nécessaires pour sortir de l’impasse actuelle.  Elles doivent donc convenir d’un cessez-le-feu et travailler « intentionnellement » vers une solution politique négociée, a-t-elle suggéré, avant d’exprimer son soutien aux efforts de l’Envoyé spécial pour élaborer un cadre politique pour une sortie de crise.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) s’est dite choquée de constater que le mois de janvier 2022 marque le mois le plus meurtrier jamais enregistré pour les civils au Yémen dans ce conflit sanglant.  « On estime que plus de 650 civils ont perdu la vie ou ont été blessés au cours du seul mois », a-t-elle précisé avant de noter que le peuple yéménite, de Mareb à Taëz, de Chaboua à Hodeïda, continue de payer un prix épouvantable tandis que les parties belligérantes sèment le chaos dans leur pays.  Dans ce contexte, elle a réitéré la condamnation du Secrétaire général et partagé sa profonde préoccupation face aux frappes aériennes de la coalition à travers le pays ces dernières semaines, y compris celles de Saada, qui ont frappé un centre de détention où des migrants étaient détenus - le pire incident de victimes civiles au Yémen en trois ans.  « Le message que nous avons relayé maintes et maintes fois au sein de ce Conseil est toujours d’actualité: il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit », a dit la représentante de l’Irlande.  C’est pourquoi, elle a appelé à une désescalade immédiate de la violence et a appelé toutes les parties à s’engager de bonne foi avec l’Envoyé spécial en faveur d’une solution politiquement négociée et inclusive, avec la participation pleine, égale et significative de diverses femmes, ainsi que la participation des jeunes et la société civile de tous horizons politiques.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a appuyé le renouvellement du mandat du Comité et du Groupe d’experts à la fin de ce mois.  Elle s’est dite vivement préoccupée par la grave escalade militaire au Yémen, ainsi que par la poursuite des attaques transfrontalières, notamment celles visant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.  La représentante a appelé les parties à faire montre de la plus grande retenue, avant de qualifier de « choquantes » les souffrances infligées aux civils.  « Il est déplorable que de récentes attaques aient frappé des infrastructures civiles », a tonné la déléguée, en demandant aux parties de respecter le droit international humanitaire.  Elle s’est dite alarmée par les violations des droits humains, avant d’exhorter les parties à garantir la sécurité du personnel onusien.  Il est évident qu’il ne peut y avoir de solution militaire au Yémen, a tranché la représentante.  « Il ne s’agit pas d’un exercice rhétorique mais de la leçon que nous avons acquise d’expérience des autres conflits dans le monde. »  Enfin, rappelant l’urgence d’une aide humanitaire au Yémen, Mme Heimerback a salué le projet de l’ONU de convoquer une conférence des donateurs le mois prochain à Genève.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a jugé préoccupante la situation au Yémen, en particulier l’escalade des hostilités dans les provinces de Mareb et Chaboua, ainsi que la prise pour cible de civils, tant au Yémen qu’au-delà de ses frontières, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis.  La Fédération de Russie estime notamment que les tentatives de déplacer les hostilités du Yémen vers les pays voisins pourraient entraîner une nouvelle escalade de la violence.  Inquiète de cette « menace réelle pour la sécurité régionale », le représentant a demandé instamment aux parties au conflit de respecter strictement le droit international humanitaire.  La Fédération de Russie a dit appuyer les activités de médiation de l’Envoyé spécial, espérant qu’il serait bientôt en mesure de formuler des propositions concrètes pour une feuille de route en vue d’un règlement fondé sur la prise en compte des opinions de tous les éléments de la société yéménite et des représentants de toutes les confessions, forces politiques et régions du pays.  Il a notamment appuyé le nouveau cadre de consultation proposé par l’Envoyé spécial.

M. Polyanskiy a jugé la situation socioéconomique et humanitaire du Yémen « particulièrement préoccupante » et cela, sur l’ensemble du territoire, « quel que soit son contrôle ».  Aucun des districts du pays ne peut être considéré comme sûr en termes d’alimentation durable et d’approvisionnement médical, a ajouté le représentant, qui a rappelé à toutes les parties la nécessité d’un accès humanitaire sans entrave et demandé la levée du blocus naval, terrestre et aérien du pays.  Le représentant, qui s’est dit préoccupé par les informations faisant état de l’enlèvement de cinq membres du personnel des Nations Unies près d’Aden, a rappelé la dimension régionale du conflit, en particulier le problème de la sécurité maritime.  Il a également rappelé la résolution 2598 du Conseil de sécurité et d’autres initiatives, « y compris le concept russe de sécurité collective », visant à stabiliser la situation dans toute la région du golfe Persique. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a particulièrement fustigé les conséquences de l’ingérence iranienne qui permet aux houthistes de continuer à déstabiliser le Yémen et toute la région, en violant les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a évoqué des rapports internationaux qui ont prouvé que le régime iranien continue de fournir des armes aux miliciens, ce qui a des conséquences également sur la sécurité maritime internationale.  Il a rappelé que l’utilisation par « la milice houthiste » de missiles et de drones pour attaquer les civils et les installations civiles du Royaume d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis constitue une grave violation du droit international et du droit international humanitaire. 

Il a exhorté la communauté internationale à condamner avec la plus grande fermeté les actes terroristes commis par les houthistes qui menacent la paix et la stabilité régionales.  Il a appelé le Conseil à assumer ses responsabilités et à prendre une position décisive pour arrêter les attaques.  Il l’a exhorté à entreprendre des sanctions contre les houthistes arguant qu’aucune condamnation n’a jusqu’ici dissuadé les milices houthistes de poursuivre leur guerre et leurs attaques terroristes.  Il a accusé les miliciens houthistes d’être responsables de la grave situation humanitaire qui frappe la population yéménite.

Le représentant du Yémen a remercié les donateurs internationaux qui soutiennent un mécanisme de décaissement de fonds qui aide la Banque centrale du Yémen à maintenir la valeur de la monnaie nationale et à limiter les souffrances de la population.  Il a appelé à ne pas attendre la fin de la guerre pour régler les questions humanitaires et aider au relèvement économique.  « Le Gouvernement yéménite attend également avec impatience la tenue d’une conférence des donateurs sur le Yémen en mars prochain », a dit le représentant avant d’appeler la communauté internationale à maintenir le Yémen en tête de liste de ses priorités.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Commission du développement social: la lutte contre l’exclusion et l’essor de l’agriculture durable au cœur des solutions contre la faim et la pauvreté  

Soixantième session,
Réunions virtuelles, matin & après-midi
SOC/4904

Commission du développement social: la lutte contre l’exclusion et l’essor de l’agriculture durable au cœur des solutions contre la faim et la pauvreté  

À la veille de sa séance de clôture, la Commission du développement social a poursuivi, aujourd’hui, son débat général sur le thème prioritaire de sa soixantième session, permettant aux États Membres et aux ONG d’égrener mesures, programmes et recommandations destinés à combattre les fléaux de la faim et de la pauvreté dans l’optique d’une reprise post-COVID-19 inclusive et résiliente.  Une longue liste dans laquelle la lutte contre l’exclusion sociale et le développement de l’agriculture durable ont à nouveau figuré en bonne place.  

Insistant sur le concept de dignité, le Mouvement international ATD Quart Monde a ainsi souligné l’importance de donner une voix à chacun, y compris aux personnes les plus difficiles à atteindre.  Toutes les politiques visant à surmonter la pauvreté et l’exclusion sociale doivent être développées avec la participation significative de ceux qui en font l’expérience, a soutenu l’ONG, qui a souhaité à cet égard que la discrimination fondée sur le statut socioéconomique soit reconnue comme un « véritable défi » pour les personnes vivant dans la pauvreté.  

Elle a également appelé davantage de justice environnementale, observant que les personnes vivant dans l’extrême pauvreté sont aussi les plus durement touchées par les effets des changements climatiques.  De fait, a-t-elle préconisé, les politiques et mécanismes climatiques doivent suivre les Principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme des Nations Unies et être évalués en fonction de leurs impacts sur les 20% les plus pauvres de la population mondiale.  

Dans le même ordre d’idées, UNANIMA International a jugé crucial que, dans le cadre de leurs efforts de développement, les États Membres placent la lutte contre le sans-abrisme au cœur de leurs stratégies.  L’éradication de ce phénomène social et de ses causes profondes est nécessaire à la fois pour l’autonomisation de toutes les femmes et les filles, et pour une reprise véritablement inclusive, a fait valoir l’ONG, avant d’appeler la communauté internationale à s’attaquer au problème spécifique du sans-abrisme familial par le biais d’allocations de ressources.  Un appel partagé par Save the Children International, qui a rappelé que la COVID-19 risque de pousser plus de 100 millions d’enfants supplémentaires dans la pauvreté.  

L’exclusion affecte également les peuples autochtones, qui sont victimes d’une « discrimination pandémique », a relevé Franciscans International, en prenant l’exemple du Guatemala, où certaines mesures gouvernementales prises au cours de la pandémie, telles que les limites à la liberté de mouvement et de réunion, ont eu des effets négatifs sur ces populations, en particulier sur leur droit à une alimentation adéquate.  Dans ce contexte, l’ONG a appelé tous les États à lutter contre les menaces affectant les moyens de subsistance traditionnels et la souveraineté alimentaire de ces peuples.    

De son côté, la Turquie a attiré l’attention de la Commission sur le sort des réfugiés et des migrants, précisant avoir élargi dès avril 2020 son système de protection sociale à ces personnes jusqu’alors privées de couverture.  Elle a également rappelé qu’elle accueille sur son territoire environ 4 millions de Syriens, dont 1,7 million sont des enfants et 825 000 des jeunes, auxquels elle permet une participation active à la vie sociale, économique et culturelle.    

Autre sujet récurrent de cette discussion générale, la transition vers une agriculture durable a été présentée par plusieurs délégations comme un moyen efficace de lutter contre la faim.  Le Royaume-Uni, qui a appelé les États Membres à respecter les engagements pris en faveur de l’innovation agricole lors de la COP26 à Glasgow, y a vu une façon de répondre à la demande croissante en nourriture autant qu’un gage d’alimentation de qualité, tandis que le Nigéria mettait l’accent sur la nécessaire augmentation de la productivité et des revenus des petits exploitants agricoles via des moyens de production durables.  Autant de projets que le pays espère pouvoir financer grâce à la restitution de ses avoir volés.       

Observant que la plupart des pauvres dans le monde sont employés dans le secteur agricole, le Saint-Siège a, quant à lui, jugé essentiel de soutenir le développement rural et de renforcer la résilience des petits exploitants et des agriculteurs familiaux.  Pour l’observateur, ces efforts doivent s’inscrire dans une approche multidimensionnelle abordant les « formes variées et excessives de désordre moral et social qui engendrent des formes de pauvreté toujours nouvelles ».  Il a été rejoint dans cette analyse par la Congrégation de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur, qui a indiqué avoir établi, dans les 72 pays où elle est présente, des programmes d’autonomisation des femmes et des filles basés sur l’agriculture durable.  

Loin de ces problématiques, le délégué de l’Afghanistan s’est alarmé de la progression de la pauvreté et de la faim dans son pays depuis la prise de pouvoir par les Taliban.  Estimant que l’amplitude de la crise requiert une augmentation significative du financement humanitaire, il a salué le lancement du plan de réponse humanitaire pour l’Afghanistan, le 11 janvier, recommandant toutefois que cette aide vitale soit gérée directement par l’ONU et les ONG afin de ne pas profiter au régime taliban.  

La Commission du développement social conclura les travaux de sa soixantième session demain, mercredi 16 février, à partir de 10 heures.  

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE - E/CN.5/2022/2

Thème prioritaire: Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030 - E/CN.5/2022/3

Examen des plans et programmes d’action pertinents des organismes des Nations Unies concernant la situation de certains groupes sociaux

Discussion générale

Le Canada a expliqué avoir lancé une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté visant à réduire le taux de pauvreté de moitié d’ici à 2030.  Les premiers résultats sont encourageants, même si certaines couches vulnérables, notamment les populations autochtones, restent à la traine.  Le Canada soutient également les pays en développement en vue de les accompagner dans la réalisation du Programme 2030, et a déboursé 1 milliard de dollars pour le fonds de lutte contre la pauvreté du Fonds monétaire international (FMI).  Le Canada a également une politique étrangère féministe qui cherche à défendre la dignité humaine partout dans le monde.  La délégation a ensuite invité les donateurs internationaux qui ont promis d’agir contre la pauvreté de joindre le geste à la parole. 

La Turquie a fait remarquer qu’au-delà de sa réponse interne aux défis de la COVID-19, elle s’est portée au secours de 160 États durant la crise, dont 44 pays africains.  Elle prévoit à présent de partager 15 millions de doses de vaccin et de mettre à disposition son propre vaccin, Turkovac, une fois qu’il sera homologué.  Elle a d’autre part indiqué que l’accessibilité à son programme de soutien social a été élargi dès avril 2020 afin de venir en aide aux personnes qui n’avaient pas jusqu’alors de protection sociale, notamment les réfugiés et les migrants.  À cet égard, la délégation a rappelé que la Turquie accueille environ 4 millions de Syriens, dont 1,7 million sont des enfants et 825 000 des jeunes.  Selon elle, une société inclusive doit parvenir à libérer le potentiel réel des migrants en leur permettant de participer activement à la vie sociale, économique et culturelle du pays d’accueil.  

La délégation de l’Afghanistan s’est alarmée de l’étendue de la souffrance humaine dans son pays depuis la prise de pouvoir par les Taliban, et a déclaré que l’amplitude de la crise requiert une augmentation significative de financement.  Elle a salué le lancement du plan de réponse humanitaire pour l’Afghanistan le 11 janvier dernier par les partenaires humanitaires et l’ONU.  Elle a aussi soutenu l’appel du Secrétaire général à injecter des fonds afin de payer les salaires des fonctionnaires, des enseignants et du personnel médical et de prévenir la banqueroute du système bancaire.  Il est également important de veiller à ce que l’aide humanitaire et financière soit gérée par les agences de l’ONU et les ONG pour assurer qu’elle ne profite aux Taliban, a-t-elle insisté.

Djibouti a plaidé en faveur d’une solidarité mondiale accrue afin que l’éradication de la pauvreté se poursuive avec plus de vigueur.  À cet égard, la délégation a insisté sur une approche multidimensionnelle et a appelé à mieux coordonner les actions multinationales.  Le programme « Djbouti ici », le second plan de réduction de la pauvreté à l’horizon 2025, traduit la volonté du pays à suivre l’élan du Programme 2030.  De plus, face à la pandémie de COVID-19, le pays a mis sur pied un ensemble des mesures pour le relèvement, tout en plaçant la technologie au centre de l’innovation sociale.

Le Paraguay a insisté sur l’importance de mettre sur pied des systèmes de santé robustes pour lutter contre la pandémie et appuyer le relèvement.  Il a indiqué que son système de protection sociale met l’accent sur les personnes et les régions vulnérables et implique les différents secteurs de la société civile qui travaillent avec les institutions nationales et les communautés locales.  Pour améliorer ce système, le Gouvernement a augmenté l’investissement dans ce domaine et a mené d’autres activités comme la fourniture des vivres aux personnes nécessiteuses.  Le soutien à la reprise économique comprend également l’octroi de crédits aux entreprises pour appuyer la création d’emplois et renforcer la productivité.

Le Sénégal a indiqué que la COVID-19 est venue perturber son plan de développement, entraînant une baisse de la production ainsi que des pertes d’emplois et de revenus, facteurs de pauvreté et d’insécurité alimentaire.  Pour y faire face, le Gouvernement sénégalais a fait le choix de privilégier le bien-être de ses citoyens, au travers de programmes de résilience économique et sociale.  Malgré une récession de 0,7%, il a également entrepris un plan d’action prioritaire 2021-2023 destiné à relancer son activité économique et à revenir à l’émergence programmée.  L’accent a été mis sur les facteurs de croissance que sont l’industrialisation, le logement et le numérique, a précisé la délégation, ajoutant qu’une attention particulière est également accordée à l’autonomisation économique des femmes et des jeunes dans des domaines comme l’agriculture, la pêche et l’artisanat.  Elle a par ailleurs indiqué que la réduction des inégalités et la protection des plus vulnérables sont des priorités dans le cadre des efforts de reprise.  

Pour le Kenya, il est important de mettre sur pied des bases de développement afin d’assurer que tous les citoyens puissent s’émanciper de la pauvreté d’ici à 2030.  Un programme de filet de sécurité sociale a été mis en œuvre depuis une décennie.  Et avec l’appui de ses partenaires internationaux, le Gouvernement a renforcé la sécurité sociale des Kényans en avril 2020 afin de faire face à la pandémie, a fait savoir la délégation qui a également indiqué que les plus démunis bénéficient de transferts de fonds directs, le Kenya restant attaché à un développement inclusif basé sur l’épanouissement de la personne.

Les États-Unis ont demandé aux États Membres de se réengager envers les 10 objectifs du Sommet mondial pour le développement social de 1995.  La délégation a ensuite appelé à alléger le travail de la Commission du développement social en éliminant les résolutions récurrentes ou qui font double emploi, préconisant en outre de renvoyer à des comités d’experts et techniques des thèmes comme la jeunesse ou l’éducation.  Il faut également reformer le programme de travail surchargé de la Commission dont chaque session devrait se concentrer sur une thématique unique comme ce fut le cas en 2020 lorsque la question du sans-abrisme a été examinée, a estimé la délégation qui a par ailleurs proposé de condenser la session annuelle en trois ou quatre jours.   

Le Saint-Siège a souhaité que la lutte contre la pauvreté et la faim, la création d’emplois décents et d’opportunités génératrices de revenus, et la mise à disposition de moyens de subsistance durables pour tous demeurent des priorités dans le cadre de la reprise post-COVID-19.  À cette fin, l’observateur a jugé essentiel de construire au niveau national des systèmes de protection sociale complets, notamment pour les travailleurs, indépendamment de leurs conditions d’emploi.  Pour briser le cycle de la pauvreté, a-t-il ajouté, il convient aussi d’investir dans l’éducation, de garantir des allocations maternité et de prévoir des services de garde d’enfant abordables, notamment pour les familles en situation de vulnérabilité.  Enfin, observant que la plupart des pauvres dans le monde sont employés dans le secteur agricole, il a souligné la nécessité de soutenir le développement rural et de renforcer la résilience des petits exploitants et des agriculteurs familiaux.  À ses yeux, les efforts doivent s’inscrire dans une approche multidimensionnelle abordant les « formes variées et excessives de désordre moral et social qui engendrent des formes de pauvreté toujours nouvelles ». 

Le Nigéria a qualifié l’éradication de la pauvreté de « plus grand défi mondial ».  Pour le surmonter et maintenir des moyens de subsistance pour tous, il faut d’abord surmonter la COVID-19, a-t-il soutenu, appelant à une répartition juste et équitable des vaccins, compte tenu des conséquences à long terme de cette pandémie.  La délégation a ajouté que le pays s’est engagé sur la voie de la reprise par le biais d’un plan de stabilité économique qui comprend des programmes de soutien à l’agriculture et à l’alimentation en vue de bâtir des systèmes résilients et durables.  Dans le cadre de ce programme, qui vise à sortir 100 millions de personnes de la pauvreté d’ici 10 ans, le Gouvernement met en œuvre des programmes de sécurité sociale et d’autonomisation professionnelle, ainsi que des transferts de liquidités.  Il s’emploie également à garantir une meilleure répartition des ressources, a précisé la délégation, selon laquelle l’accent est mis sur l’augmentation de la productivité et des revenus des petits exploitants agricoles via des moyens de production durables.  Elle a d’autre part fait état d’un renforcement de la lutte contre les flux financiers illicites et des efforts de récupération des avoirs volés, lesquels doivent permettre de financer les projets sociaux et de faire reculer la pauvreté.  

La Congrégation de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur a jugé impératif que les États Membres abandonnent les idéologies d’accumulation et de destruction et favorisent celles qui privilégient le bien-être des personnes et de la planète, déplorant dans la foulée que les gouvernements continuent d’ignorer les préoccupations et les besoins des plus marginalisés.  La Congrégation a ensuite indiqué qu’elle a établi, dans les 72 pays où elle est présente, des programmes qui autonomisent les femmes et les filles grâce à une agriculture durable.  Elle a exhorté les gouvernements à mettre en place des économies sensibles au genre et qui assurent un financement adéquat des services publics, afin d’octroyer des soins de santé universels de qualité, ainsi que l’éducation et la protection sociale. 

La FEMM Foundation a rappelé qu’elle avait proposé de mettre à la disposition de la Commission son travail et son expertise sur les questions de santé sexuelle et reproductive des femmes afin de les aider à prendre en charge leur santé et prospérer au sein de leurs communautés.  Combler le fossé en matière de santé pour bâtir des sociétés plus résilientes c’est aussi combattre la faim et la pauvreté, a ajouté la délégation qui a indiqué que le programme de la fondation est prêt à être intégré dans la composante « santé » des programmes de protection sociale des pays.  

Pour l’ONG Franciscans International, les mesures de relèvement doivent s’attaquer aux formes structurelles de discrimination pandémique, notamment contre les peuples autochtones.  Évoquant la situation au Guatemala, elle a constaté que certaines mesures gouvernementales prises au cours de la pandémie, telles que les limites à la liberté de mouvement et de réunion, ont eu des effets négatifs sur les peuples autochtones, en particulier leur droit à une alimentation adéquate.  Lorsque les communautés ont protesté contre les mesures affectant leurs moyens de subsistance et leur bien-être, elles ont été violemment réprimées, a dénoncé l’ONG, qui a regretté que les autorités guatémaltèques n’aient pas donné la priorité aux initiatives conçues par les communautés autochtones et la société civile dans leurs plans de reprise.  Dans ce contexte, l’ONG a appelé tous les États à lutter contre les menaces qui affectent l’alimentation adéquate des peuples autochtones, y compris les menaces contre leurs moyens de subsistance traditionnels et leur souveraineté alimentaire.  

La World Youth Alliance (WYA) a reconnu que la COVID-19 a interrompu, modifié ou annulé bon nombre de plans et projets des jeunes.  Elle a relevé que cette situation d’incertitude a provoqué beaucoup de stress parmi les jeunes qui ont besoin de stabilité et d’outils pour affronter l’avenir avec résilience.  Le développement du capital humain est fondamental pour le développement de nos sociétés et doit être privilégié auprès des personnes en situation de vulnérabilité qui cherchent activement à échapper à la pauvreté et à la faim.  En effet, le capital humain est nécessaire pour atteindre chacun des ODD, ce qui en fait une approche fondamentale pour réaliser le Programme 2030, a estimé la délégation. 

Le Royaume-Uni a estimé que la lutte contre la pauvreté et la faim nécessite d’accélérer les possibilités de l’agriculture durable.  Alors que le monde fait face à une « triple menace », liée aux conflits, aux changements climatiques et à la COVID-19, il a également appelé à des actions anticipatives pour éviter des famines, notamment par le biais d’un renforcement des moyens humanitaires mené de concert avec les ONG et la société civile.  Dans ce cadre, il convient de disposer de données robustes pour pouvoir faire des projections et engager des politiques sur le long terme, a-t-il soutenu, rappelant l’appel lancé à cet égard par le G7 sous la présidence britannique.  Pour la délégation, la famine doit être prise en compte dans une approche trans-sectorielle afin de prévenir les morts évitables, en particulier de jeunes et de bébés.  Évoquant par ailleurs les programmes adoptés dans le cadre du Commonwealth pour améliorer la nutrition des enfants et des femmes, elle a jugé que la lutte contre la faim requiert une transition vers une agriculture durable, gage d’une alimentation de qualité.  À cette fin, elle a enjoint la communauté internationale à honorer les engagements pris lors de la COP26 pour inverser les effets des changements climatiques d’ici à 2030.  

VIVAT International, qui regroupe des ONG religieuses actives sur la question environnementale, a demandé une aide technologique et financière pour renforcer ses capacités afin de lui permettre de construire des laboratoires de culture de bambou servant à la production de semis.  Elle a recommandé de promouvoir le travail décent, l’éducation et les compétences pour assurer à chacun des moyens de subsistance durables.  Il faut aussi veiller à la cohérence entre les questions liées au climat, à la biodiversité, à la réduction des risques de catastrophe et aux ODD; soutenir le transfert de technologie, en renforçant la coopération scientifique et technologique; et promouvoir les investissements durables dans les infrastructures.   

Attirant l’attention sur l’aggravation de la « cyberviolence » durant la pandémie, Blue Tree Foundation, une organisation de la jeunesse de la République de Corée, a indiqué que, dans son pays, où 90% des jeunes utilisent des smartphones, l’incidence de la violence à l’école a plus que triplé en 2020 par rapport à l’année précédente.  Ce phénomène est aujourd’hui un problème pour les pays développés déjà numérisés comme pour les pays en développement qui se numérisent rapidement, a-t-elle relevé, avant de présenter son dispositif de prévention de la cyberviolence, « Blue Elephant », qui œuvre avec des parlementaires et des instituts de recherche à la révision des lois relatives à cette question.  

L’ONG Make Mothers Matter, qui s’emploie à faire entendre la voix des mères, a alerté sur le fait que le taux de mortalité lié à la pandémie est 1,6 fois plus élevé pour les hommes que pour les femmes.  Avec la perte de leur mari ou partenaire, les mères ont vu leur charge de travail augmenter encore et, faute d’aide sociale, sont menacées de tomber avec leur famille dans la pauvreté extrême.  Pour les mères, l’augmentation du travail non rémunéré ainsi que les pertes d’emplois, le veuvage et le travail supplémentaire dû aux changements climatiques sont des facteurs qui aggravent la pauvreté et contribuent à des niveaux élevés d’anxiété, a-t-elle ajouté, avant d’appeler les États Membres à protéger, dans le cadre de leur reprise post-COVID-19, le travail et le bien-être de ces femmes.  

Comment les gouvernements et les ONG peuvent-ils contribuer à réduire la fracture numérique et ainsi parvenir à un modèle éducatif à la fois universel et hybride, a voulu savoir une déléguée de la jeunesse de Transdiaspora Network, Inc., un réseau qui promeut l’égalité des chances pour la jeunesse dans toute sa diversité culturelle, avant de s’interroger sur les mesures susceptibles de favoriser l’accès des jeunes aux postes à responsabilité.  

L’Organisation mondiale pour l’éducation préscolaire (OMEP) a relevé que la pauvreté des enfants implique souvent de multiples chevauchements de privations qui perturbent les besoins et les processus cruciaux pour leur développement.  Pendant une pandémie, assurer un bon départ à tous les enfants est plus que jamais vital.  Pour l’organisation, ce n’est pas un acte de charité, mais plutôt un devoir moral, un acte de justice sociale et de protection des droits de l’homme.  Selon elle, la protection et l’éducation de la petite enfance est l’investissement le plus rentable qu’un pays puisse faire pour briser le cycle de la pauvreté et des inégalités intergénérationnelles et construire une société plus cohésive et pacifique.

L’ONG UNANIMA International a jugé crucial que, dans le cadre des efforts déployés pour réaliser le Programme 2030, les États Membres placent la lutte contre le sans-abrisme au cœur de leurs stratégies de développement.  L’éradication de ce phénomène social et de ses causes profondes est nécessaire à la fois pour l’autonomisation de toutes les femmes et les filles, et pour une reprise post-COVID-19 véritablement inclusive et résiliente, a-t-elle fait valoir, en appelant la communauté internationale à s’attaquer au problème spécifique du sans-abrisme familial par le biais de politiques sensibles au genre et de mesures d’allocation de ressources.  Elle a également recommandé aux États Membres de fournir un accès à des services de qualité aux femmes et aux enfants victimes de violence sexiste ainsi qu’à tous ceux qui subissent le sans-abrisme.  

La Red Dot Foundation a indiqué que son travail porte sur l’égalité des sexes, la sécurité et la justice, et que ses plateformes visent à combler l’écart dans le signalement des cas de violence sexuelle et sexiste.  Que ce soit en raison de l’augmentation de la violence domestique et du harcèlement en ligne, d’une plus grande perte d’emplois ou d’une part accrue du travail de soins, les femmes portent le plus lourd fardeau de la pandémie, a constaté l’ONG.  Elle a demandé des investissements supplémentaires pour l’éducation sur les droits, les préjugés inconscients et la formation à l’intervention des témoins.  Elle s’est inquiétée de la pénurie de ressources pour fournir des conseils et des soins de santé mentale de bonne qualité.  Des investissements supplémentaires sont également nécessaires pour les lignes d’assistance téléphonique, les centres de conseil, les cercles d’écoute par les pairs et l’éducation sur la santé mentale dans les écoles et les collèges.  L’ONG a aussi souligné la nécessité d’investir davantage dans la création d’emplois dans les zones rurales et semi-urbaines, et de donner aux jeunes une plateforme pour participer activement au développement social.

Creators Union of Arab a mis en exergue le modèle de l’Égypte en matière de lutte contre la pauvreté et la faim, saluant la détermination de ce pays à atteindre les ODD en dépit des difficultés engendrées par la pandémie et la nécessité d’une reprise.  La « Vision 2030 » de l’Égypte est basée sur l’amélioration de la qualité de vie du citoyen et la consolidation des principes de justice et d’intégration sociale, a-t-elle précisé, avant de détailler plusieurs mesures prises par l’État égyptien avant et après le déclenchement de la crise actuelle, en particulier l’initiative pour une « vie décente », les efforts d’élimination des bidonvilles, les campagnes de soutien de l’emploi, le programme de transferts monétaires en direction des plus pauvres et la transformation numérique du secteur de l’éducation. 

Miss CARICOM Foundation Intl Inc. a appelé à utiliser l’éducation à la technologie numérique pour encourager les jeunes à l’entreprenariat dans les petites entreprises en les connectant à des modèles et stratégies d’éradication de la pauvreté et d’élimination de la faim.  L’ONG a aussi mis l’accent sur l’importance d’investir dans les capacités humaines et les infrastructures de base, d’assurer la sécurité économique et de renforcer les systèmes de protection sociale, insistant en outre sur l’importance d’appuyer l’inclusion numérique et l’égalité des chances grâce à des partenariats.  Elle a ensuite fait savoir qu’elle travaille à la conception d’un programme d’acquisition et de développement des compétences des jeunes, ainsi qu’à la création d’une communauté pour aider les jeunes à gagner des moyens de subsistance en temps de crise.

L’Institute of the Blessed Virgin Mary - Loreto Generalate a recommandé la création d’un fonds mondial pour la protection sociale afin de doter les pays les moins avancés des ressources nécessaires pour maintenir des programmes de protection sociale pour les enfants et autres groupes hautement vulnérables, et appuyer la participation et le retour d’information de chaque groupe et communauté.  La délégation a relevé que la technologie est une ressource essentielle pour l’éducation, le développement et la création de richesses dans le monde postpandémique, s’inquiétant toutefois de l’augmentation de la « discrimination technologique ».  Elle a enfin recommandé de créer des emplois décents et durables, et mettre à disposition des ressources pour la requalification et le perfectionnement des compétences afin répondre aux exigences du marché du travail.  

Alors que la COVID-19 risque de pousser plus de 100 millions d’enfants supplémentaires dans la pauvreté, l’ONG Save the Children International a jugé urgent d’adopter des solutions telles que les prestations universelles pour enfants.  L’expérience montre que la fourniture d’une aide au revenu régulière et l’accès inclusif aux protections dès la petite enfance peuvent aider à améliorer le développement de l’enfant, a-t-elle souligné, avant de plaider pour des systèmes de protection sociale plus inclusifs.  Notant à cet égard que seulement 1 enfant sur 4 dans le monde bénéficie d’une telle protection, elle a fait état d’importantes disparités régionales, 82,3% des enfants en Europe et Asie centrale ayant une couverture sociale, contre 15,4% dans les États arabes et 12,6% en Afrique.  Afin de préserver l’avenir des enfants et de mieux reconstruire après la pandémie, elle a appelé à combler cette lacune en introduisant progressivement des allocations familiales universelles. 

Pour « International Longevity Center Global Alliance », de nombreuses personnes âgées ont connu un déclin fonctionnel accéléré au cours de la pandémie.  Elles ont donc besoin d’une aide supplémentaire pour l’évaluation et la gestion de leurs conditions, afin de reprendre des forces et de se réengager dans la société.  Même si la pandémie de COVID-19 a gravement affecté la vie des personnes âgées, l’ONG a estimé qu’il est temps d’intensifier les efforts pour promouvoir les moyens par lesquels les personnes âgées peuvent rester fortes et bien vieillir.  De ce fait, il faut renforcer les soutiens sociaux et physiques qui peuvent leur permettre d’avoir une meilleure qualité de vie.  Dans le contexte de la reprise postpandémique, il serait tout aussi important de tenir compte des besoins des personnes âgées dans la conception et la mise en œuvre des politiques.  Il s’agirait par exemple de construire des cadres pour un vieillissement en bonne santé et pour combattre l’âgisme; de promouvoir un environnement adapté aux personnes âgées; ou encore d’améliorer la mesure, le suivi et la recherche sur l’expérience des personnes âgées affectées par la COVID-19. 

L’International Federation on Ageing (IFA) a rappelé que le Rapport mondial sur l’âgisme, publié en 2021, présente une vision franche et alarmante de l’impact de l’âgisme sur la santé et le bien-être.  Bien que les personnes âgées représentent une part disproportionnée de la charge mondiale de morbidité, 100% des études examinées pour le Rapport mondial ont trouvé des preuves de l’exclusion systématique des personnes âgées de la recherche ou des essais cliniques en cardiologie, rhumatologie, oncologie et d’autres domaines où la vulnérabilité aux maladies est plus élevée chez les personnes âgées.  La délégation a déploré que des millions de personnes âgées vivent dans une telle pauvreté qu’elles ne pourront peut-être jamais se remettre des effets socioéconomiques, psychologiques ou physiques de la COVID-19.  Elle a appelé à des actions concertées pour assurer et protéger les contributions et les droits fondamentaux des personnes âgées.

Le Mouvement international ATD Quart Monde a fait valoir que l’existence juridique est une condition indispensable pour que chacun accède à ses droits et à la reconnaissance au sein de la société.  À cet égard, il a souhaité que la discrimination fondée sur le statut socioéconomique soit reconnue comme un véritable défi pour les personnes vivant dans la pauvreté.  Pour l’ONG, le bien-être et la dignité pour tous impliquent également de donner à tous une voix, un pouvoir et une représentation, y compris à ceux qui sont les plus difficiles à atteindre.  Dans ce cadre, toutes les politiques visant à surmonter la pauvreté et l’exclusion sociale doivent être développées avec la participation significative des personnes qui en font l’expérience, a-t-elle préconisé, avant d’en appeler à la justice environnementale, car les personnes vivant dans l’extrême pauvreté sont aussi les plus durement touchées par les effets des changements climatiques.  De fait, les politiques et mécanismes climatiques doivent suivre les Principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme des Nations Unies et être évalués en fonction de leurs impacts sur les 20% les plus pauvres de la population mondiale, a-t-elle souligné. 

L’ONG Irene Menakaya School Onitsha and African Cultural Promotions Inc a souhaité que cette session de la Commission alerte le monde sur la nécessité de rendre les systèmes éducatifs plus résilients aux crises et plus ouverts à l’innovation et à de nouvelles possibilités d’apprentissage.  Selon elle, l’éducation sur les compétences d’autonomisation, la productivité et le taux de production contribuera à une reprise inclusive et résiliente post-COVID-19 et, ce faisant, permettra d’accélérer la mise en œuvre des ODD 1 et 2.  Il est donc temps de faire de l’éducation inclusive sur les modalités d’éradication de la pauvreté et l’élimination de la faim une priorité absolue et de s’unir pour trouver des solutions ensemble, a-t-elle plaidé.  

La Haiti Cholera Research Funding Foundation Inc. USA a indiqué qu’entre autres programmes, elle aide à la nutrition de la petite enfance en Floride.  Elle s’est inquiétée du sort des millions d’enfants qui souffrent de malnutrition dans le monde, ainsi que des millions d’autres souffrant de l’obésité.  Elle a demandé une aide financière à l’ONU et aux États Membres pour lui permettre de fournir une aide alimentaire à ces enfants dans le besoin. 

Le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a indiqué que les programmes de lutte contre cette autre pandémie ont été gravement affectés par la COVID-19.  Malheureusement, le prix fort est payé par les plus vulnérables comme les toxicomanes et les réseaux sanitaires qui aidaient dans la lutte contre le VIH sont désormais mobilisés par la riposte contre la COVID-19 et nécessitent un soutien appuyé.  Pour l’ONUSIDA, les individus doivent figurer au cœur de la lutte contre les pandémies.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Somalie: le Conseil de sécurité examine l’état d’avancement du processus électoral à la veille d’importantes échéances pour la sécurité du pays

8965e séance – matin
CS/14792

Somalie: le Conseil de sécurité examine l’état d’avancement du processus électoral à la veille d’importantes échéances pour la sécurité du pays

Les membres du Conseil de sécurité ont examiné ce matin la situation en Somalie, où le processus électoral, très en retard, a été récemment relancé, et alors que se profilent deux échéances pour le Conseil: la fin de son autorisation donnée à la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) pour lutter contre les Chabab, le 31 mars, et la fin de son autorisation accordée aux États et aux organisations régionales qui coopèrent avec les autorités somaliennes dans la lutte contre la piraterie et les vols à main armée au large des côtes somaliennes, le 3 mars.  Plusieurs des membres se sont également ému de l’aggravation de la situation humanitaire dans le pays, frappé par une interminable sécheresse. 

Le Représentant spécial et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), M. James Swan, a rappelé que le processus électoral a pris un an de retard sur le calendrier prévu par la Constitution.  Comme la plupart des membres du Conseil après lui, il a considéré comme une « évolution positive » la complétion des élections de la Chambre haute et l’accélération du rythme des élections de la Chambre du peuple à la suite de la tenue en janvier d’un Conseil consultatif national, qui a permis, comme l’a fait observer le représentant de la Somalie, de relancer le processus.  Mais les mêmes intervenants ont également invité les responsables somaliens à accélérer le rythme, afin que le futur Gouvernement puisse se consacrer à combler les besoins de sa population en matière de sécurité, de construction de l’État ou de développement.  La Chine a toutefois recommandé que la communauté internationale accompagne les dirigeants dans une appropriation nationale de ce processus, sans exercer des pressions. 

Toujours dans le cadre du processus électoral, M. Swan et les membres du Conseil ont rappelé l’importance d’une meilleure représentation des femmes au Parlement, conformément aux engagements pris d’un minimum de 30% au sein de ce dernier.  L’Irlande a demandé l’application du principe « une personne, une voix », en se réjouissant des progrès signalés par le Représentant spécial dans la perspective des élections à venir. 

L’instabilité de la situation sécuritaire dans le pays a été un autre sujet de préoccupation pour les membres du Conseil alors que les discussions sur le devenir de la mission de l’Union africaine sont en cours.  M. Swan a rappelé que la configuration future de la mission qui doit succéder à l’AMISOM est « en cours d'examen » et que les Nations Unies participent « activement » aux discussions entre le Gouvernement fédéral somalien, l’Union africaine et les principaux donateurs. Il a apprécié les progrès accomplis lors des discussions techniques tenues à Mogadiscio du 27 janvier au 9 février. 

C’est aussi ce qu’a déclaré le Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), M. Francisco Caetano Jose Madeira, qui a affirmé que les difficultés entre l’Union africaine et les autorités somaliennes ont été aplanies, conduisant à l’adoption d’une approche en neuf points.  Selon lui, la nouvelle mission sera un mécanisme de transition qui viendra appuyer les autorités somaliennes en bénéficiant des acquis de l’AMISOM.  Le représentant de la Somalie a confirmé l’accord, ajoutant que la future mission devra être agile et mobile. Elle devra être capable de lutter efficacement avec des capacités à la mesure de la menace. 

Au nom des trois membres africains du Conseil (les A3), le Ghana a invité les parties prenantes à prendre « pleinement » en compte les points de vue des pays contributeurs de troupes.  Comme la Somalie, mais aussi la Fédération de Russie ou la Chine, les A3 souhaitent pour la future mission un financement « prévisible et durable ».  Le Royaume-Uni a demandé une mission qui soit « réaliste, efficace et abordable », et en mesure de soutenir la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie.  La France a souhaité que le passage de l’AMISOM à la future mission ne soit « pas uniquement un changement de nom », mais permette de gagner en efficacité.  La Fédération de Russie a souhaité une « approche équilibrée », tenant dûment compte des préoccupations des autorités somaliennes, tout en disant qu’il est encore trop tôt pour fermer les portes de la mission de l’Union africaine.  Les États-Unis se sont montrés soucieux de parvenir à un accord avant l’échéance du 31 mars, après une reconduction technique de trois mois. 

Les États-Unis se sont aussi inquiétés de l’autre échéance, celle du 3 mars, qui concerne l’autorisation donnée aux États de prendre des mesures pour lutter contre la piraterie au large des côtes somaliennes.  Ils ont souhaité l’adoption d’une nouvelle résolution dans un esprit de consensus, alors que la Somalie annonçait qu’elle ne « demanderait pas » le renouvellement de la résolution, estimant que cette lutte avait, après 15 années d’existence, « atteint ses objectifs ».  Si le Royaume-Uni a assuré n’avoir « aucune objection de principe au désir du Gouvernement fédéral de Somalie de passer à un cadre bilatéral de coopération maritime », il a souhaité une prorogation de la résolution 2608 (2021) jusqu’à ce qu’un tel cadre soit en place, afin d’éviter toute lacune opérationnelle. 

Enfin, plusieurs membres du Conseil ont appelé à l’intensification de l’aide humanitaire face à l’aggravation de la sécheresse.  L’Irlande a, en particulier, appelé la communauté internationale à tirer les leçons du succès de 2017, quand la famine a été évitée, comme de l’échec collectif en 2011, lorsqu’elle s’est installée dans des circonstances que la représentante a jugées « très similaires à celles d’aujourd'hui ».  Le Royaume-Uni et les Émirats arabes unis ont mis en avant leur assistance et ont également établi un lien entre les questions de sécurité et les changements climatiques.  Le Plan de réponse humanitaire pour la Somalie n’est à ce jour financé qu’à hauteur de 2%, a prévenu M. Swan. 

LA SITUATION EN SOMALIE (S/2022/101)

Déclarations

M. JAMES SWAN, Représentant spécial et Chef de la Mission dassistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), a rappelé que le processus électoral en Somalie avait désormais plus d’un an de retard sur le calendrier prévu par la Constitution.  S’il a vu comme une « évolution positive » la complétion des élections de la Chambre haute et l’accélération du rythme des élections de la Chambre du peuple à la suite du Conseil consultatif national de janvier, il a ajouté qu’il fallait encore accélérer le rythme.  Le Représentant spécial a rappelé qu’à ce jour, 130 des 275 sièges à la Chambre du peuple ont été pourvus et que 60 autres seront bientôt ouverts au scrutin.  M. Swan a en outre rappelé que 23 femmes ont été élues à ce jour à la Chambre du peuple, soit environ 22% du total, un chiffre « bien en deçà du quota » de 30% de femmes que les dirigeants politiques somaliens se sont engagés à atteindre pour les deux chambres du Parlement.  Il a donc exhorté tous les acteurs somaliens à redoubler d’efforts pour atteindre cet objectif. 

M. Swan a assuré que les Nations Unies continueront à fournir un soutien technique, matériel et consultatif aux organes de gestion des élections, au Bureau du Premier Ministre, au Conseil consultatif national (CCN) « et aux ambassadeurs de bonne volonté qui plaident pour la représentation des femmes ».  Rappelant que la Mission continue de recevoir des rapports sur des irrégularités présumées, il a invité les différents acteurs à « rectifier le tir pour améliorer le processus », afin de garantir que les élections soient crédibles et leur résultat acceptable par le public somalien.  Ceci, a-t-il expliqué, est essentiel pour permettre au futur gouvernement de se concentrer sur les priorités nationales du pays, y compris les problèmes de sécurité, la construction de l’État et le développement. Il a rappelé que les Nations Unies se coordonnent avec les partenaires internationaux pour veiller à assurer un consensus et des messages communs.  Il a par ailleurs attribué les tensions politiques sporadiques entre dirigeants somaliens à des manœuvres et des postures, rapidement maîtrisées, mais qui font peser un risque réel de conflit suite à « une erreur de calcul ».  Il a rappelé le rôle d’apaisement joué par les Nations Unies et leurs partenaires et a plaidé en faveur de « la retenue, du compromis et de solutions pragmatiques fondées sur le consensus ». 

Le Représentant spécial a rappelé que les Chabab continuent de représenter un défi de sécurité majeur, notamment en raison d’une utilisation plus intense d’engins explosifs improvisés, en particulier à Mogadiscio.  Il a rappelé que la configuration future de la Mission de l’Union africaine en Somalie est « en cours d’examen » et que les Nations Unies participent « activement » aux discussions entre le Gouvernement fédéral somalien, l’Union africaine (UA) et les principaux donateurs.  Les discussions techniques tenues à Mogadiscio du 27 janvier au 9 février ont permis de réaliser des progrès, a-t-il estimé.  Quant à la mise en œuvre du plan de transition somalien, essentiel tant pour la reconfiguration de l’AMISOM que pour le rythme du transfert des responsabilités de celle-ci aux forces de sécurité somaliennes, elle doit pour M. Swan rester une priorité urgente. 

M. Swan a qualifié d’extrêmement grave la situation humanitaire dans le pays, où 7,7 millions de Somaliens auront besoin d’une aide humanitaire en 2022. Il a rappelé que la Somalie est le pays le plus gravement touché par la sécheresse qui sévit dans la Corne de l’Afrique, alors que les prochaines pluies ne sont pas attendues avant avril.  L’opération humanitaire en Somalie dispose du savoir-faire nécessaire pour apporter une aide vitale aux personnes dans le besoin mais manque de ressources, a plaidé le Représentant spécial, qui a rappelé que le Plan de réponse humanitaire pour 2022 n’est actuellement financé qu’à hauteur de 2%.  Il a donc appelé les donateurs à accroître leur soutien.  La réponse humanitaire ne constitue pas une solution à long terme, a toutefois ajouté M. Swan, qui a rappelé les mesures prises par la famille des Nations Unies pour renforcer le lien entre l’humanitaire, le développement et la consolidation de la paix. 

M. Swan a rappelé que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et l’inclusion des jeunes reste au cœur du travail de l’ONU dans le pays.  Il a notamment rappelé le lancement, en novembre dernier, d’un nouveau programme « Femmes, paix et protection » pour promouvoir la participation des femmes aux processus de consolidation de la paix.  Il y a vu un investissement qui permettra aussi d’améliorer la protection des femmes et des filles contre les violences sexuelles dans les conflits. 

En conclusion, et malgré une situation politique, sécuritaire et humanitaire instable, M. Swan a dit garder l’espoir de voir le pays faire de nouveaux progrès « dans les mois à venir et au-delà ».  Il a néanmoins averti que cela suppose que les dirigeants somaliens mettent leurs différends de côté pour le bien du peuple somalien, concluent des élections crédibles dans les meilleurs délais et se concentrent ensuite sur les priorités nationales urgentes. 

M. FRANCISCO CAETANO JOSE MADEIRA, Représentant spécial du Président de la Commission de lUnion africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), a souligné l’attachement des autorités somaliennes au processus électoral, tout en reconnaissant la lenteur dudit processus.  Il a aussi salué le fait que 28 femmes aient été élues.  Il a assuré que l’UA, au travers de l’AMISOM, continue d’appuyer la Somalie.  « Mon objectif a toujours été d’écouter toutes les parties prenantes. »  Il a déclaré que la Somalie a besoin d’un appui international fort dans ce contexte électoral.  L’AMISOM s’est concentrée sur la sécurité des élections, en œuvrant notamment au renforcement des capacités des forces somaliennes, a dit M. Madeira.  Il a ajouté que l’AMISOM a amélioré son soutien opérationnel aux forces de police somaliennes, avant d’admettre que l’insécurité dans le pays reste préoccupante.  Il a mentionné la récente flambée de violence qu’il a imputée aux Chabab.  Il a aussi mentionné la résurgence de Daech, en particulier à Mogadiscio, estimant qu’elle doit s’évaluer à l’aune du contexte régional.  Les Chabab ont gagné en audace et en détermination dans leurs tentatives visant à mettre à mal le processus en cours, a mis en garde M. Madeira.  Il a déclaré que l’AMISOM a renforcé ses efforts de stabilisation en Somalie, en citant la récente neutralisation de cinq responsables des Chabab. 

Puis, le Représentant spécial a évoqué le remplacement de l’AMISOM par une autre mission, ainsi que le transfert futur des tâches sécuritaires aux autorités somaliennes.  En vue de cet objectif, les difficultés avec les autorités somaliennes ont été aplanies, conduisant à l’adoption d’une approche en neuf points, a expliqué M. Madeira.  Il a aussi mentionné la tenue de discussions techniques qui ont débouché sur l’élaboration de documents stratégiques à même d’apporter des réponses aux questions du Conseil.  Il a déclaré que la nouvelle mission serait un mécanisme de transition en appui aux autorités somaliennes, permettant à celles-ci de s’appuyer sur les acquis de l’AMISOM.  M. Madeira a estimé que cette nouvelle mission de l’Union africaine, ainsi que le bon transfert des tâches sécuritaires aux autorités somaliennes, nécessiteront un appui international robuste.  Il a aussi souligné la nécessité que les autorités somaliennes renforcent leurs capacités d’actions en ce qui concerne la neutralisation des engins explosifs et la collecte de renseignements.  La transition en Somalie est un processus complexe, a-t-il reconnu, en appelant à « l’unité » de tous les amis de la Somalie. 

M. OLOF SKOOG, Chef de la délégation de lUnion européenne (UE) auprès des Nations Unies, a jugé pertinente l’évaluation de la situation en Somalie, à l’aune du sommet Union européenne-Union africaine qui doit se tenir dans quelques jours à Bruxelles les 17 et 18 février prochains.  Il a qualifié la situation d’« extrêmement fragile et instable », en dépit des progrès, notamment en matière de réformes économiques.  La tendance croissante à la violence et à l’extrémisme, l’évolution de la menace des Chabab, combinés à la pandémie de COVID-19 et à une sécheresse dévastatrice sans précédent, sont les principaux moteurs des besoins humanitaires aigus, avec 2,9 millions de personnes déplacées et plus de 4,6 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë et à la faim, a-t-il détaillé, avant de juger « impératif » d’adopter une approche globale basée sur les liens pour créer des synergies entre les engagements humanitaires, les efforts de développement et la consolidation de la paix et la réconciliation. 

M. Skoog a estimé que la Somalie se trouve actuellement « à la croisée des chemins », notamment pour réaliser ses priorités immédiates que sont la conclusion d’élections parlementaires, une transition pacifique du pouvoir et la formation d’un gouvernement opérationnel capable de répondre aux attentes de sa population.  Elle doit également s’engager avec la communauté internationale, a-t-il ajouté. Cela implique que la politique soit « placée au centre », d’autant que depuis des mois, les partenaires et voisins de la Somalie n’ont cessé d’exhorter ses dirigeants à travailler dans un esprit de compromis pour surmonter les derniers obstacles politiques afin de finaliser un processus électoral inclusif dans les meilleurs délais et dans le respect des accords auxquels ils sont parvenus.  Le peuple somalien mérite le dévouement total de ses dirigeants à sa sécurité, son bien-être et son progrès, a-t-il aussi plaidé. 

En ce qui la concerne, l’UE, en collaboration avec des partenaires internationaux, a aidé la Somalie à conclure les élections attendues et à mener une transition de pouvoir ordonnée et pacifique.  L’année dernière, une enveloppe immédiate de 3,5 millions d’euros en faveur de la société civile a été débloquée pour mettre en pratique l’accord électoral.  L’UE soutient également, et de manière continue, une présence sécuritaire internationale face aux menaces des Chabab.  En plus d’un milliard d’euros d’aide au développement et d’aide humanitaire, l’UE est le plus grand investisseur dans le secteur de la sécurité et le premier contributeur de l’AMISOM, avec plus de 2,3 milliards d’euros depuis 2007.  Elle a également déployé une opération maritime, opération ATALANTA, qui a contribué avec succès à la répression de la piraterie au large des côtes somaliennes, a cité le chef de la Mission. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est félicitée de la récente accélération du rythme des élections à la Chambre basse, estimant que l’achèvement du processus électoral permettrait d’éviter une incertitude politique prolongée et des risques accrus pour la sécurité et la stabilité de la Somalie, ainsi que d’affaiblir les Chabab et d’ouvrir la voie à la Somalie pour accéder au financement international.  Elle a exhorté les dirigeants politiques somaliens à privilégier l’intérêt national, à donner la priorité à la conclusion d’un processus électoral pacifique et crédible, et à veiller à ce que les forces de sécurité ne soient pas utilisées comme des instruments politiques.  Elle a espéré que les élections à la Chambre basse seront achevées d’ici au 25 février et que l’objectif de 30% de femmes élues sera atteint.  Mme Woodward a insisté sur l’importance d’un accord rapide sur la future mission de l’Union africaine en Somalie reconfigurée, qui soit « réaliste, efficace et abordable », et en mesure de de soutenir la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie.  Elle a salué les récents progrès accomplis en ce sens et a encouragé le Gouvernement fédéral somalien à indiquer clairement comment il compte générer les forces et les capacités nécessaires à la mise en œuvre du plan de transition pour la Somalie. 

Le Royaume-Uni se félicite des résultats obtenus dans la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes grâce aux « efforts fructueux de la Somalie et de la communauté internationale », a poursuivi la représentante qui a dit n’avoir « aucune objection de principe au désir du Gouvernement fédéral de la Somalie de passer à un cadre bilatéral de coopération maritime ».  Elle s’est toutefois dite favorable à une prorogation de la résolution 2608 (2021) jusqu’à ce qu’un tel cadre soit en place afin d’éviter toute lacune opérationnelle. 

Enfin, Mme Woodward a rappelé que le Royaume-Uni avait récemment annoncé une aide humanitaire supplémentaire de 18,3 millions de dollars pour faire face aux effets de la sécheresse actuelle, en plus des 47,5 millions de dollars d’aide humanitaire déjà engagés.  Estimant qu’il fallait « tirer les leçons de 2017 », elle a invité la communauté internationale à agir rapidement pour améliorer l’accès aux populations touchées et pour renforcer la résilience à plus long terme aux chocs climatiques. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a imputé les retards dans le processus électoral aux divergences politiques entre les parties prenantes.  Il les a appelées à coopérer afin que le processus débouche sur l’élection présidentielle, arguant que tout retard ne fait que servir les ennemis de la Somalie, dont les Chabab.  Il a en effet insisté sur la nécessité de lutter contre le terrorisme, en Somalie et dans le monde, avant de louer la contribution « colossale » de l’AMISOM à la stabilité du pays.  Il a plaidé pour un financement prévisible de cette mission dont la transition et la reconfiguration exigeront l’appui de la communauté internationales.  Le délégué a dit attendre avec impatience les propositions sur cette transition. 

Au nom du A3 –Gabon, Ghana, Kenya, M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a dit prendre note des bons points, dont les avancées en matière électorale, mais aussi des mauvais points, liés notamment à la participation des femmes.  Il a appelé le Gouvernement fédéral à conclure l’élection de tous les membres de la Chambre basse, avant le 25 février, conformément au calendrier convenu.  Tout retard nuit au développement du pays, a prévenu le représentant, en appelant toutes les forces politiques à faire preuve de souplesse pour défendre les intérêts du peuple somalien.  

Il s’est également dit « inquiet » des menaces sécuritaire posées par les Chebab, qui poursuivent leurs attaques contre le Gouvernement fédéral.  Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à aider la Somalie et l’AMISOM à répondre à cette menace terroriste.  Alors que des négociations sur la mission de transition en Somalie débuteront au mois de mars, le représentant a dit que son groupe sera « très « attentif » et a voulu que l’on tienne pleinement compte des points de vue de toutes les parties prenantes, y compris les pays contributeurs de troupes.  Il a plaidé pour un financement « prévisible et durable » pendant toute la durée du mandat de la future mission, soit jusqu’au transfert des responsabilités sécuritaires au Gouvernement fédéral.  Le représentant n’a pas manqué de souligner l’attachement de son groupe à la souveraineté et à l’intégrité territoriales de la Somalie.  

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a fait part de sa vive préoccupation face à l’évolution de la situation en Somalie, tout en reconnaissant que des progrès significatifs avaient été réalisés ces dernières semaines.  Néanmoins, a-t-il ajouté, les calendriers électoraux n’ont pas été respectés.  Il s’est aussi inquiété du déploiement des forces de sécurité somaliennes dans le contexte des élections et a rappelé qu’elles ne doivent pas intervenir dans ce cadre.  Il a souhaité l’achèvement rapide d’élections crédibles. 

À propos de la future mission de l’Union africaine chargée de succéder à l’AMISOM, le représentant a rappelé que la prolongation technique de l’autorisation accordée en décembre dernier par le Conseil de sécurité arrive à expiration le 31 mars.  Il a souhaité que les différentes parties concernées puissent apporter leurs contributions dans les plus brefs délais, afin d’adapter la mission à l’évolution de la menace présentée par les Chebab. Le représentant a également rappelé que l’autorisation du Conseil concernant la lutte contre la piraterie au large de la côte somalienne arrive à expiration le 3 mars et a souhaité l’adoption d’une nouvelle résolution dans un esprit de consensus.  Il a enfin fait part de l’inquiétude des États-Unis face à la sécheresse qui sévit actuellement en Somalie. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) s’est dite préoccupée par le retard du processus électoral.  Elle a appelé les autorités fédérales somaliennes et les États membres de la fédération à mener ce processus à son terme dans les plus brefs délais, avant de saluer les efforts pour atteindre le quota de 30% de femmes élues.  Les Somaliens ont urgemment besoin d’un gouvernement pleinement légitime qui puisse répondre aux défis auxquels le pays est confronté, a-t-elle martelé. 

Notre deuxième priorité, a poursuivi la représentante, doit être de redéfinir le partenariat entre la Somalie et la communauté internationale pour faire face aux menaces sécuritaires.  Elle a rappelé que, le mois prochain, le Conseil de sécurité devra se prononcer sur la sécurité maritime au large de la Somalie, ainsi que sur l’avenir de l’AMISOM.  Nous devons mettre à profit cette période pour faire le bilan des initiatives menées jusqu’ici et rechercher des améliorations, dans le dialogue avec toutes les parties prenantes, à commencer par les autorités somaliennes. 

Mme Broadhurst a salué le fait que la Somalie et l’Union africaine aient trouvé un accord sur le principe d’une mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) qui prendrait la suite de l’AMISOM.  La France, a-t-elle dit, appelle toutes les parties à œuvrer pour que le passage de l’AMISOM à ATMIS ne soit pas uniquement un changement de nom, mais permette de gagner en efficacité. Enfin, la déléguée a jugé important que cette mission puisse mener des actions plus vigoureuses et mieux coordonnées contre les Chebab, tout en accompagnant, conformément à un calendrier « ambitieux », le transfert de responsabilités au profit des forces somaliennes. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a exprimé sa préoccupation devant la lenteur du processus électoral en Somalie et les menaces qui pèsent sur sa crédibilité.  Le programme de réforme économique convenu avec le Fonds monétaire international (FMI) est gravement menacé, à moins qu’un nouveau gouvernement ne soit formé au début de cette année, a-t-elle mis en garde.  Si tel est le cas, elle a prévenu que le financement international du développement en Somalie, y compris de la Banque mondiale, pourrait être considérablement réduit.  Cela aura un effet préjudiciable sur les efforts visant à instaurer la paix, la stabilité et le développement en Somalie, a-t-elle encore craint. 

La représentante a également fait part de ses préoccupations quant à la situation en matière de protection face aux actes non seulement des Chabab, mais aussi des forces de l’État.  Elle a exhorté les autorités somaliennes à enquêter et à poursuivre les auteurs de violences sexuelles et de violations graves contre les enfants conformément aux engagements antérieurs.  Elle a aussi appelé à l’intensification des efforts pour la mise en œuvre du plan de transition somalien, qui a pris du retard.  Pour parvenir à la justice et à la sécurité en Somalie, il est essentiel de construire et de soutenir un gouvernement local responsable et de renforcer sa capacité à fournir des services de base à la population, a-t-elle dit, avant de saluer les progrès réalisés vers l’objectif d’une AMISOM reconfigurée.  

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a jugé « choquants » les chiffres cités par M. Swan sur la situation humanitaire et a parlé de « l’une des plus graves sécheresses de l’histoire récente de la région ».  Cette crise humanitaire, qui ne cesse d’empirer, aggrave les nombreux défis politiques et sécuritaires, y compris les risques sécuritaires liés au climat, a ajouté la représentante.  Elle a appelé la communauté internationale à se mobiliser et à soutenir le peuple somalien, en fournissant dès maintenant des fonds supplémentaires, en facilitant les flux financiers et en titrant les leçons du succès de 2017, quand la famine a été évitée, comme de l’échec collectif en 2011, lorsqu’elle s’est installée dans des circonstances « très similaires à celles d’aujourd’hui ».  L’Irlande contribuera au nécessaire effort humanitaire, a promis la représentante, avant de condamner les attaques contre les travailleurs et les biens humanitaires, et de réclamer un accès humanitaire sûr et sans restriction à tout le pays. 

Mme Byrne Nason s’est félicitée des progrès vers l’achèvement des élections, qui arrivent « enfin ».  Elle a toutefois appelé les autorités somaliennes à « faire un dernier effort » pour que le processus soit mené à bien, de manière équitable et transparente afin que le Gouvernement puisse ensuite se consacrer au peuple somalien.  La représentante a rappelé que l’Irlande insiste sur l’importance qu’il y a à ce que les femmes jouent un rôle égal dans la vie politique et la sphère publique.  Elle s’est donc dit heureuse des progrès signalés en ce sens par le Chef de la MANUSOM, y voyant une étape encourageante dans la perspective des élections à venir, pour lesquelles elle a souhaité que soit appliqué le principe « une personne, une voix ». 

Mme Byrne Nason a condamné les attaques perpétrées par les Chebab et s’est inquiétée des informations faisant état de violences sexuelles et sexistes généralisées.  Elle a demandé que les autorités somaliennes protègent les civils, veillent à l’établissement des responsabilités et offrent des services à toutes les victimes.  La représentante a rappelé que son pays participe activement aux discussions sur une future mission de l’UA en Somalie, s’est félicitée du récent accord sur une proposition-cadre et a dit attendre avec impatience les plans détaillés.  La sécurité maritime s’inscrivant dans ce contexte, elle a souhaité un consensus sur le renouvellement de la résolution sur la sécurité maritime au large de la côte somalienne. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a exhorté les autorités somaliennes à rester concentrées sur le processus électoral.  Un processus juste, opportun, inclusif et transparent est crucial pour conserver la confiance du peuple somalien, a-t-il déclaré, en demandant la pleine participation des femmes.  Il a demandé que le quota de 30% de femmes élues à la Chambre basse soit respecté.  Il a ensuite condamné les attaques perpétrées par les Chabab, ainsi que leurs tentatives visant à perturber le processus électoral.  Il a souhaité qu’un consensus se dégage sur les contours de la nouvelle mission et prôné une voie « réaliste », s’agissant du transfert de responsabilités au profit des forces somaliennes.  Enfin, le représentant a estimé que la sécheresse que connaît la Somalie montre combien les changements climatiques peuvent aggraver les défis sécuritaires.  Ce Conseil doit en tenir compte, a conclu le représentant du Mexique. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a demandé que l’accent soit mis sur le soutien à la voie politique et a encouragé toutes les parties à s’engager dans un dialogue positif en donnant la priorité à la tenue d’élections équitables et inclusives.  Elle a jugé positifs les récents développements en la matière et souhaité que le quota de 30% de femmes élues dans les deux chambres puisse être respecté.  Elle a aussi rappelé l’importance de garantir la sécurité et la protection des femmes candidates à des fonctions politiques.  Elle a ensuite demandé que soit apportée à la Somalie une assistance lui permettant de faire face aux menaces sécuritaires et notamment aux Chabab, dont les activités empêchent la construction d’une paix durable.  Elle a souhaité que les pourparlers sur la reconfiguration de l’AMISOM soient « menés à bien avec précision », en insistant sur un transfert par « étapes calculées » des responsabilités en matière de sécurité aux forces de sécurité somaliennes, afin d’éviter de laisser un vide dont profiteraient les Chabab. 

La représentante s’est inquiétée de la détérioration de la situation humanitaire et a souligné l’importance de l’acheminement complet, sûr et sans entrave de l’aide tout en assurant la protection des travailleurs humanitaires. Les Émirats arabes unis ont récemment fourni un pont aérien pour transporter plusieurs tonnes d’aide alimentaire afin de minimiser l’impact de la sécheresse et ont envoyé un navire chargé de réservoirs d’eau et de matériel de secours pour les personnes déplacées, a-t-elle rappelé.  Mme Alhefeiti a exhorté l’ONU, l’AMISOM et les partenaires à aider la Somalie à faire face aux impacts des changements climatiques qui accroissent l’insécurité alimentaire.  Elle a plaidé plus largement pour une plus grande utilisation des énergies renouvelables dans les processus de paix.  La représentante s’est également félicitée des efforts internationaux qui ont permis d’interdire les exportations de charbon de bois de la Somalie et l’efficacité des mesures de lutte contre la piraterie.  Elle y a vu la démonstration de ce qui peut être réalisé grâce au renforcement des partenariats et à l’action multilatérale. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a salué les progrès accomplis dans la mise en œuvre des accords sur les élections du 17 septembre 2020 et du 27 mai 2021.  Il a pris note de l’achèvement du processus concernant la Chambre haute et dit espérer que les élections à la Chambre du peuple suivraient le même schéma.  Il a salué le fait que 26% de femmes aient été élues à la Chambre haute, y voyant une réalisation historique qui devrait faire progresser la représentation des femmes dans tous les aspects de la politique somalienne, y compris à l’occasion des élections à la Chambre du peuple.  Le représentant a par ailleurs remercié les contingents de l’AMISOM et les forces armées somaliennes pour leur travail courageux face au terrorisme, dans un contexte dangereux et instable.  Il a cité les tirs de mortier revendiqués par les Chabab qui ont atteint, le 27 novembre à Baidoa, le complexe des Nations Unies, le premier jour des élections de la Chambre du peuple dans la ville.  Il s’est également dit profondément préoccupé par les « niveaux alarmants de violations graves contre les enfants » dont a fait état la Représentante spéciale pour la protection des enfants dans les conflits armés, Mme Gamba. 

Le délégué a rappelé « l’interaction décisive » entre le processus électoral et la stabilité en Somalie.  Il a reconnu que les retards accumulés dans le processus électoral avaient initialement été imputables à des considérations sanitaires mais a ajouté que le report des élections, « les sièges législatifs vides, les mandats politiques étirés » présentent en soi des risques pour la stabilité politique, encore accrus par l’activité des Chabab.  C’est pourquoi le Brésil soutient les accords conclus sur les élections et exhorte la Somalie à les mettre pleinement en œuvre et à achever la sélection de ses représentants, a-t-il dit avant de souhaiter que les différents acteurs politiques, nationaux comme locaux, accordent dans les prochains mois la priorité à la stabilité de la fédération. 

M. BING DAI (Chine) a affirmé que « le processus électoral en Somalie avance envers et contre tous ».  Il a espéré que les dirigeants somaliens continueront de dissiper leurs différends et concluront au plus vite ledit processus.  De l’avis de la délégation chinoise, la communauté internationale devrait, au lieu d’exercer des pressions, accompagner les dirigeants dans une appropriation nationale de ce processus.  Le représentant a aussi souhaité que, de son côté, le Conseil de sécurité dote l’AMISOM de moyens suffisants et efficaces pour remplir sa mission en tenant compte du plan de transition élaboré par les autorités somaliennes.  Il faut éviter tout déficit de financement qui risquerait de miner les efforts de lutte contre le terrorisme, a mis en garde le représentant, rappelant que la Somalie est un pays stratégique dans la région qu’il ne faut pas « saper ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a souhaité l’achèvement du processus électoral dans les meilleurs délais et salué l’accord politique du 9 janvier dernier.  Un processus électoral crédible et transparent sera bénéfique au développement, à la sécurité et à la stabilité de la Somalie, a déclaré le délégué.  Rappelant que la démocratie est bien plus que la tenue d’élections, « une construction laborieuse jour après jour », il a demandé que toutes les composantes de la société somalienne soient dûment représentées.  Il a en outre insisté sur le quota de 30% de femmes élues à la Chambre basse.  Il a, à son tour, salué les progrès accomplis s’agissant des contours d’une mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) qui prendrait la suite de l’AMISOM, avant de rappeler que le mandat de cette dernière s’achève le 31 mars.  L’ATMIS devra répondre efficacement à tous les défis et passer le « flambeau de la sécurité » aux forces somaliennes, a-t-il insisté.  Enfin le représentant s’est dit profondément préoccupé par la situation humanitaire « critique » dans le pays et a demandé l’apport d’une aide aux près de huit millions de personnes qui en ont besoin. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a déclaré que la Somalie continue d’avancer dans son processus électoral et souhaité son achèvement conformément aux accords conclus.  Toutes les parties doivent œuvrer à la mise en place d’un modèle pérenne de gouvernance fédérale, a-t-elle poursuivi.  Elle a qualifié la situation sécuritaire de « tendue », les Chebab continuant de perpétrer des attaques meurtrières, y compris contre le personnel de l’AMISOM.  Elle a salué les avancées enregistrées s’agissant de la nouvelle architecture de sécurité qui doit voir le jour en Somalie et a dit attendre avec impatience la présentation des recommandations sur la reconfiguration de l’AMISOM, tout en souhaitant une « approche équilibrée », prenant dûment compte des préoccupations des autorités somaliennes.  Il est trop tôt pour fermer les portes de la mission de l’UA, a-t-elle argué, en demandant un financement prévisible et pérenne.  Enfin, la représentante a exhorté l’ONU à continuer d’aider la Somalie, tout en évitant les ingérences dans les affaires intérieures du pays. 

M. ABUKAR DAHIR OSMAN (Somalie) a annoncé que 45% des sièges à la Chambre basse du Parlement fédéral ont été pourvus, ajoutant que ce résultat met en lumière le fait que le Gouvernement somalien s’est engagé en faveur d’un processus libre et transparent.  La convocation récente du Conseil consultatif national a débouché sur des rectifications qui ont permis de progresser dans le processus électoral, lequel a recouvré sa crédibilité et la confiance dont il jouissait auprès de la population, a ajouté le représentant, qui a confirmé la volonté de son gouvernement d’achever le processus. 

En matière de sécurité, il a déclaré qu’un accord avec l’Union africaine a été obtenu sur les modalités d’une mission de transition.  Une feuille de route a été établie qui prévoit trois tâches clefs: un nouveau concept d’opérations conjointes, une proposition conjointe pour une nouvelle mission et un plan d’appui logistique.  Le Gouvernement somalien et les membres de l’Union africaine ont conclu un accord qui se concentre sur le nouveau mandat, les objectifs stratégiques et les stratégique de sortie de la future mission, a expliqué le représentant.  La mission devra être agile, mobile et à même de lutter efficacement avec des capacités à la mesure des menaces.  Elle s’appuiera sur le plan de transition somalien qui vise à former des forces de sécurité autonomes pour que le pays puisse assumer pleinement ses responsabilités en matière de sécurité. 

Le représentant a également rappelé l’attachement de son pays à la sécurité maritime.  Il a été décidé, à cet égard, de mettre en place une formation pour la police, les garde côtes et d’autres départements avec pour objectif de créer des unités chargées spécifiquement de la criminalité en mer, « y compris la pêche illégale pratiquée dans les eaux territoriales somaliennes ».  Il a conclu en déclarant que la Somalie ne demandera pas le renouvellement de la résolution portant sur la lutte contre la piraterie au large de sa côte car ce texte a « atteint ses objectifs », après 15 années d’existence. 

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