9012e séance, matin
CS/14856

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour le Mali appelle à redoubler d’efforts pour parvenir à un accord sur la transition

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Mali a appelé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, à n’épargner aucun effort pour parvenir à un accord sur la transition afin de créer un environnement plus propice à la stabilisation du pays où la situation est « extrêmement préoccupante », notamment en raison du vide sécuritaire dont tirent parti les groupes terroristes depuis le retrait des forces Barkhane et Takuba.

Malgré les efforts considérables déployés à cet effet, aucun consensus n’a été trouvé autour de la durée de la transition, s’est inquiété M. El-Ghassim Wane.  Il a également déploré l’absence de progrès notable dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et pour la réconciliation au Mali, une situation aggravée par l’absence de réunions de son Comité de suivi depuis octobre 2021, qui prive les parties et leurs partenaires internationaux de la plateforme tant attendue pour évaluer les défis à relever et chercher une voie consensuelle pour l’avenir.  

Au contraire, a indiqué le Représentant spécial, les trois derniers mois ont été marqués par des « actions et une rhétorique inquiétantes » et la persistance de tensions entre le Gouvernement et les mouvements signataires sur la question du Cadre stratégique permanent, mis en place dans le but déclaré de réconcilier les communautés du Nord. 

Or, le statu quo actuel comporte des « risques énormes » pour l’avenir de l’accord de paix, tout en augmentant les menaces auxquelles sont confrontés les Casques bleus déployés dans le nord du Mali, notamment à Kidal, Aguelhok et Tessalit.  « Dans ce contexte, le Conseil de sécurité pourrait exhorter les parties à tirer parti des synergies existantes entre les recommandations des Assises nationales de la Refondation et l’accord de paix, afin d’inverser le cycle des conflits récurrents dans le Nord », a préconisé le Représentant spécial. 

Tout en assurant que le Gouvernement de transition demeure engagé en faveur de la pleine mise en œuvre de l’accord de paix, y compris son volet relatif au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration/réinsertion (DDR), le représentant du Mali a affirmé pour sa part que l’instabilité politique et institutionnelle de son pays s’enracine dans des élections mal organisées et une mauvaise gouvernance.  Pour y remédier, le Gouvernement ambitionne de mener des réformes majeures, qui nécessitent la levée « immédiate » des sanctions « injustes, illégales, illégitimes et inhumaines » imposées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), a souligné le délégué qui a fustigé un acharnement visant à obtenir un « changement de régime ». 

Au cours de cette séance, les membres du Conseil de sécurité ont en outre pris acte du cortège de souffrances infligées aux populations civiles, visées au courant du mois de mars par des attaques récurrentes de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) dans le centre et le sud du pays.  Même si l’élément déclencheur de la reprise des violences dans la zone des trois frontières semble lié à des trafics locaux et à des dynamiques connexes, il convient de noter que ces incidents surviennent dans le contexte du retrait des forces Barkhane, de la France, et Takuba, de l’Union européenne, a relevé le Représentant spécial.  

Ce dernier a par ailleurs indiqué que suite à l’offensive des forces armées maliennes de la semaine dernière contre les éléments de Katiba Macina dans le village de Moura, au sud de Mopti, la MINUSMA a reçu des informations faisant état de graves violations des droits humains commises contre un grand nombre de civils au cours de cette opération.  Bien que la Mission ait pu effectuer un survol de reconnaissance le 3 avril sur le site de Moura, l’autorisation de déployer une mission intégrée n’a, jusqu’à présent, pas été accordée, a regretté le Représentant spécial, en exhortant les autorités maliennes à donner à la MINUSMA un accès au site des violations présumées, « conformément à son mandat ». 

À l’instar de l’Albanie, l’Irlande, les États-Unis ou encore la France, le Royaume-Uni s’est inquiété de la tendance manifeste à une recrudescence des violations des droits humains depuis le déploiement du groupe Wagner au Mali.  Les affirmations selon lesquelles le Mali s’offrirait les services de cette société de sécurité russe ont été rejeté avec force par la délégation du Mali.  

S’il a reconnu des atteintes aux droits de la personne dans le cadre des opérations antiterroristes menées dans le pays, le représentant malien a juré qu’il n’y avait aucune volonté délibérée des autorités d’accorder des « primes à l’impunité », la justice de son pays étant systématiquement saisie à chaque fois que des violations sont signalées.  Il en a voulu pour preuve l’ouverture d’enquêtes « approfondies » sur les allégations d’exactions présumées commises en mars sur des civils dans la zone de Moura. 

Arguant d’une coopération aux « racines historiques », la Fédération de Russie a dénoncé la « campagne de désinformation » au sujet des « soi-disant mercenaires russes », jugeant pour sa part « irresponsable » la décision de la France de retirer l’opération Barkhane, « sans consultations » avec la partie malienne, « en violation » des accords bilatéraux.   

La fin de son engagement militaire au Mali, c’est une décision que la France a dit aujourd’hui avoir prise en concertation avec les pays sahéliens et voisins, ainsi que les partenaires internationaux, laquelle ne saurait préjuger de l’appui de Paris à la MINUSMA, dont le mandat expire en juin.  Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans la région sahélienne, Paris examine un renforcement de son appui aux pays du golfe de Guinée dont les détails seront présentés prochainement au Conseil de sécurité, a annoncé la délégation. 

Si comme d’autres membres du Conseil, les A3 –Ghana, Gabon et Kenya– ont exhorté les autorités à intensifier leurs enquêtes pour que les auteurs d’atrocités ne restent pas impunis, ils se sont aussi prononcés pour le renforcement des capacités logistiques de la MINUSMA afin de lui permettre d’accroître son efficacité opérationnelle.  De son côté, la Présidente de l’ONG WILDAF, Mme Bouaré Bintou Founé Samaké, a appelé à consulter les femmes maliennes avant le renouvellement du mandat de la MINUSMA afin d’en renforcer la dimension de genre.

LA SITUATION AU MALI (MINUSMA) - S/2022/278

Déclarations

M. EL-GHASSIM WANE, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali, a déclaré que la situation d’ensemble dans ce pays est extrêmement préoccupante.   Les civils sont confrontés à d’immenses souffrances.  Il n’y a pas eu de progrès notable dans la mise en œuvre de l’accord de paix.  De plus, malgré les efforts considérables déployés à cet effet, aucun consensus n’a été trouvé autour de la durée de la transition.  En outre, le mois de mars a vu plusieurs attaques meurtrières perpétrées par l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) dans la région de Ménaka et dans le sud de celle de Gao, s’est alarmé le Représentant spécial.  Les affrontements dans la région de Ménaka ont causé la mort d’au moins 40 civils et le déplacement d’environ 3 640 ménages.  En réaction à ces incidents, la Mission a intensifié ses patrouilles dans la ville de Ménaka, permettant aux forces de défense et de sécurité maliennes et aux groupes signataires de se mobiliser plus fortement pour répondre à la situation.   

 Même si l’élément déclencheur de la reprise des violences dans la zone des trois frontières semble lié à des trafics locaux et à des dynamiques connexes, il convient de noter que ces incidents surviennent dans le contexte du retrait des forces Barkhane et de Takuba.  Faisant face à moins de pression, les groupes terroristes bénéficient d’une latitude d’action plus grande, posant un danger accru tant aux civils qu’à nos opérations, a analysé le Représentant spécial.  Face à ces défis, il a jugé impératif que le niveau des capacités et des troupes de la MINUSMA soit maintenu, et que des réponses adéquates soient trouvées aux défis liés à l’insuffisance de ces mêmes capacités ainsi qu’aux restrictions nationales des pays contributeurs de troupes et de police. 

Poursuivant, M. Wane a indiqué que l’offensive des forces armées maliennes de la semaine dernière contre les éléments de Katiba Macina dans le village de Moura, au sud de Mopti, a permis de neutraliser un grand nombre d’éléments terroristes contrôlant la zone.  Dans le même temps, la MINUSMA a également reçu des informations faisant état de graves violations des droits humains commises contre un grand nombre de civils au cours de cette opération.  Si la Mission a pu effectuer un survol de reconnaissance le 3 avril, l’autorisation de déployer une mission intégrée n’a, jusqu’à présent, pas été délivrée, a regretté le Représentant spécial.  Il a salué l’annonce, hier soir, par le procureur du tribunal militaire de Mopti, de l’ouverture d’une enquête, y compris le déploiement sur le terrain du personnel nécessaire, et a exhorté les autorités maliennes à apporter la coopération nécessaire pour que la MINUSMA ait accès au site des violations présumées, conformément à son mandat.

 Si les opérations militaires et sécuritaires sont une nécessité absolue dans la lutte contre le terrorisme, l’expérience a montré, à maintes reprises, qu’une telle approche ne peut, à elle seule, apporter une stabilité durable, surtout dans un environnement aussi complexe que celui qui prévaut au centre du Mali, a souligné le haut fonctionnaire.  Elles doivent être menées de manière à minimiser autant que possible les dommages causés aux civils, à respecter les droits humains et les principes du droit international humanitaire et être complétées par des mesures pratiques et durables axées sur les causes profondes du conflit et de la violence.   

Au cours de la période sous revue, a enchaîné le Représentant spécial, aucun progrès tangible n’a été réalisé dans le processus de paix, une situation aggravée par le fait que le Comité de suivi de l’Accord ne s’est pas réuni depuis octobre de l’année dernière, privant les parties et leurs partenaires internationaux de la plateforme tant attendue pour évaluer collectivement les défis à relever et chercher une voie consensuelle pour l’avenir.   Au contraire, les trois derniers mois ont été marqués par des actions et une rhétorique inquiétantes, non conformes à l’esprit de l’Accord, s’est inquiété M. Wane.  En outre, des tensions subsistent entre le Gouvernement et les mouvements signataires sur la question du Cadre stratégique permanent, la structure mise en place par ces derniers dans le but déclaré de réconcilier les communautés du Nord.  Il a averti que le statu quo actuel comporte des « risques énormes » pour l’avenir de l’accord de paix, tout en augmentant les menaces auxquelles sont confrontés les Casques bleus déployés dans le nord du Mali, notamment dans des localités telles que Kidal, Aguelhok et Tessalit.  Dans ce contexte, le Conseil de sécurité pourrait souhaiter exhorter les parties à tirer parti des synergies qui existent entre les recommandations des Assises nationales de la Refondation et l’accord de paix, afin d’inverser le cycle des conflits récurrents dans le Nord, a-t-il préconisé.

Le Représentant spécial a rappelé que le non-achèvement de la Transition dans les délais convenus a conduit la CEDEAO à imposer des sanctions économiques et financières en janvier dernier, notant que l’impasse persiste, exacerbant les tensions entre le Mali et la CEDEAO.  Le Mali a demandé 24 mois supplémentaires pour mettre fin à la Transition, mais cette durée a été jugée trop longue lors du Sommet extraordinaire de la CEDEAO qui s’est tenu à Accra le 25 mars et a approuvé un délai de 12 à 16 mois, a rappelé le haut fonctionnaire. 

« Aucun effort ne doit être épargné pour parvenir à un accord sur la Transition.  Cela permettrait non seulement de lever les sanctions, une mesure essentielle compte tenu de la situation humanitaire actuelle, mais aussi de créer un environnement plus propice à la poursuite des autres processus fondamentaux pour la stabilisation du pays », a insisté le Représentant spécial.  Faisant état d’une forte aspiration à la paix et à une meilleure gouvernance, qui s’est également exprimée lors des Assises nationales de la refondation, il a appelé les acteurs politiques maliens à collectivement intérioriser cette aspiration et être à la hauteur des attentes de leur peuple.   Dans l’intérêt du peuple malien, la MINUSMA doit recevoir toutes les ressources dont elle a besoin pour combler le fossé qui continue d’exister entre ce qu’elle est chargée de faire et ce qu’elle peut réellement faire, a conclu M. Wane. 

Mme BOUARÉ BINTOU FOUNÉ SAMAKÉ, Présidente de l’ONG WILDAF/Mali et ancienne Ministre de la promotion de la femme de l’enfant et de la famille du Mali, a constaté que son pays se trouve aujourd’hui confronté à une crise multidimensionnelle, caractérisée par des défis politiques, sécuritaires, culturels, identitaires et institutionnels.  L’insécurité au Mali a pris une dimension multiforme et multi-acteurs qui a un impact très négatif sur les populations, a-t-elle souligné, rappelant en outre que le retrait de l’opération Barkhane a créé une méfiance des Occidentaux face à une probable coopération des autorités de transition avec la société de sécurité russe Wagner.  À cela s’ajoute la non mise à disposition d’un calendrier pour les élections et d’un chronogramme de la transition, ce qui a mis dos à dos le Mali et ses partenaires européens, notamment la France, mais aussi ses voisins africains de la CEDEAO.  De plus, des combats intensifs entre les forces armées maliennes et les groupes terroristes, au centre et au nord du pays, se multiplient ces derniers temps.  Dans ce contexte, Mme Samaké a dénoncé les difficultés de déplacement rencontrées par les ONG, la limitation de certaines libertés fondamentales, la rareté des ressources financières, ainsi que la monté des courants fondamentalistes qui sapent les questions de genre et la paupérisation des femmes, surtout en milieu rural.  

Face à ces défis, exacerbés par la détérioration de la situation sécuritaire, la représentante de la société civile a préconisé de coordonner les efforts du Conseil de sécurité et du Gouvernement malien afin de promouvoir un cadre juridique et des ressources propices à la construction d’un secteur de la sécurité plus inclusif, efficace et transparent.  Elle a également appelé de ses vœux le renforcement de la dimension de genre dans le volet sécurité du mandat de la MINUSMA, notamment en consultant les femmes maliennes avant le renouvellement du mandat.  Mme Samaké a aussi appelé à l’intensification des programmes d’autonomisation des femmes en permettant à ces dernières de surmonter les obstacles politiques, juridiques et institutionnels qui entravent leur recrutement, rétention et promotion dans le secteur de la sécurité.  Après avoir demandé l’inscription des changements climatiques dans le mandat de la Mission, elle a appelé à la mise en place de mécanismes de responsabilisation efficaces pour mettre fin à l’impunité de toute forme de violence à l’égard des femmes et des groupes sous-représentés au sein des institutions de sécurité.  Elle a également appelé à favoriser l’inclusion en amont des femmes qui font partie du secteur de la sécurité et des organisations de la société civile dans les négociations des dispositions des arrangements sécuritaires des accords de paix maliens, des politiques de sécurité nationale et des dépenses militaires.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a dit qu’il est gravement préoccupé par la situation au Mali, notamment des informations faisant état de violations des droits humains par des éléments des forces armées maliennes accompagnés de mercenaires russes du groupe Wagner, se référant aux violations massives qui auraient causé la mort de centaines de civils dans le village de Moura.  Il a pris note de l’ouverture d’une enquête par le procureur de Mopti, et a demandé que la MINUSMA puisse également mener sa propre enquête, sans entrave et en toute indépendance, pour établir les faits et faire rapport au Conseil de sécurité.  Il est indispensable que la MINUSMA utilise l’ensemble des moyens à sa disposition pour protéger les civils, a-t-il ajouté.  Le représentant a ensuite souligné que la lutte contre le terrorisme ne saurait en aucun cas justifier des violences indiscriminées contre les civils, qui ne font que renforcer les groupes terroristes.  À ce titre, il a observé avec inquiétude l’offensive menée depuis le début de l’année par l’État islamique au Grand Sahara dans la zone des trois frontières, relevant que cette dégradation de la situation sécuritaire intervient alors que la guerre menée par la Russie en Ukraine vient aggraver une situation alimentaire déjà critique.

Le représentant a ensuite appelé les autorités de transition à se concentrer sur la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger, y voyant la réponse adéquate pour apaiser durablement les relations entre les groupes armes signataires et les autorités de Bamako.  Or, aucun progrès n’a été réalisé depuis plusieurs mois, s’est-il inquiété.  Il a également engagé les autorités de transition à proposer une stratégie concrète pour traiter la crise au Centre et à finaliser la transition politique et le retour à l’ordre constitutionnel.  Pour atteindre ces trois objectifs, la MINUSMA reste nécessaire, a estimé M. de Rivière.  Il a ensuite indiqué que la décision de la France de mettre fin à son engagement militaire au Mali a été prise en concertation avec les pays sahéliens et voisins, ainsi que les partenaires internationaux.  Cependant, nous entendons maintenir un appui à la MINUSMA et restons engagés dans la lutte contre le terrorisme dans la région sahélienne, a-t-il ajouté, avant de préciser que Paris examine un renforcement de son appui aux pays du golfe de Guinée dont les détails seront présentés au Conseil prochainement.

M. RAJESH PARIHAR (Inde) s’est déclaré alarmé que les terroristes aient de plus en plus recours à des engins explosifs improvisés pour cibler les forces de sécurité maliennes et les soldats de la paix, réitérant son appel à une mise en œuvre rapide des dispositions de la résolution 2589 (2021) sur la « protection des protecteurs ».  Å ses yeux, la nature multidimensionnelle des défis auxquels le Mali est confronté est enracinée dans les déséquilibres de longue date de son système constitutionnel, administratif et sécuritaire, qui n’ont pas été corrigés depuis des décennies.  « Pour une crise aussi complexe, il ne peut donc y avoir de solution miracle », a-t-il estimé.   

Il a appelé à aborder ces défis par le biais d’une approche globale, intégrant notamment la mise en œuvre de l’accord de paix de 2015, ainsi que des réformes politico-électorales et le renforcement des institutions de sécurité.  Les demandes réelles des autorités nationales et régionales d’entreprendre des mesures contre-offensives contre les groupes armés et terroristes doivent être traitées de toute urgence, a insisté le représentant qui a réclamé un soutien robuste à la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel).  Le délégué indien a ensuite encouragé le dialogue entre le Mali et la CEDEAO en vue de parvenir au plus tôt à un accord sur un calendrier acceptable pour la transition politique et les élections, conduisant au retour à l’ordre constitutionnel.  Pour sa part, a-t-il ajouté, l’Inde continue à rester étroitement engagée avec le Mali dans la sphère du partenariat de développement, ce qui se reflète dans la construction en cours de 393 kilomètres de ligne à haute tension à Bamako et à Sikasso, la deuxième plus grande ville du Mali. 

S’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a appelé au rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel au Mali, espérant cela conférera au gouvernement élu la légitimité nécessaire pour mettre en œuvre l’accord de paix.  Il a salué, dans ce contexte, le dialogue noué par le Secrétaire général avec les autorités de transition et les acteurs régionaux en vue de l’adoption d’une approche consensuelle sur les questions de paix et de sécurité au Mali.  Évoquant le renouvellement en juin prochain du mandat de la MINUSMA, il s’est prononcé pour le renforcement des capacités logistiques de la Mission pour lui permettre d’accroître son efficacité opérationnelle.  Outre les conditions de sécurité difficiles, le représentant s’est dit préoccupé par la lenteur de la mise en application de l’accord de paix et l’absence de calendrier pour le retour de l’ordre constitutionnel.  À ses yeux, la solution la plus viable est de faire en sorte que les autorités de transition respectent le protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance et conviennent d’un échéancier rapide.  Il a toutefois relevé que des pourparlers sont en cours entre Bamako et les médiateurs de la CEDEAO pour finaliser un chronogramme.  

Le délégué a d’autre part constaté que le terrorisme continue de menacer la stabilité du Mali.  Il a déploré la recrudescence des attaques extrémistes menées contre la population civile, l’armée et le personnel de la MINUSMA, saluant l’ouverture d’enquêtes sur les tirs de roquettes qui ont visé des Casques bleus le 22 mars dernier.  Il a cependant souhaité un meilleur partage des informations entre les forces armées maliennes et la Mission afin que de tels incidents puissent être évités à l’avenir.  Le représentant s’est ensuite alarmé de la présence au Sahel de mercenaires en provenance de Libye.  Le retrait de ces groupes extrémistes requiert un suivi serré et une coordination en matière de DDR avec les pays voisins, a-t-il dit.  Dénonçant par ailleurs la détérioration de la situation des droits humains au Mali, il a enjoint les autorités de transition à intensifier leurs enquêtes sur les cas de violations afin que les auteurs d’atrocités soient traduits en justice.  Enfin, après avoir appelé les donateurs à financer plus généreusement l’appel humanitaire de l’ONU pour le Mali, il s’est félicité des investissements de 8,4 millions de dollars du Fonds de consolidation de la paix dans des projets concernant la jeunesse, les agricultrices et la violence en période électorale.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a demandé à intensifier les efforts pour parvenir à la stabilité et la sécurité au Mali où la situation politique et sécuritaire est dégradée.  Elle a encouragé les autorités nationales à fixer un calendrier pour des élections le plus rapidement possible.  À cet égard, elle a pris note des contacts encourageants qui ont eu lieu entre les autorités maliennes et la CEDEAO, notamment au sujet de la préparation du dialogue national.  Elle a estimé que l’appui du Conseil de sécurité aux efforts nationaux et régionaux reste nécessaire à ce moment critique, soulignant en outre que la stabilité à long terme du Mali exige également un renouvellement des engagements en faveur des piliers et fondements de l’Accord pour la paix et la réconciliation pour garantir sa mise en œuvre par les autorités locales en coopération avec les partenaires régionaux et internationaux.   

Préoccupée par la situation sécuritaire dans le centre du Mali, la représentante a appelé à finaliser la stratégie politique globale en appui à la stabilité de la région.  Il est également important de promouvoir la participation effective significative et sur pied d’égalité des femmes dans tous les processus politiques.  Elle s’est inquiétée des menaces posées par les groupes terroristes et a condamné la récente attaque à dans le centre du Mali qui a tué des Casques bleus égyptiens.  Cela montre qu’il faut intensifier les efforts pour lutter contre l’extrémisme et le terrorisme conformément au droit international, a-t-elle estimé.  La déléguée s’est également souciée de la dégradation de la situation humanitaire et a demandé à la communauté internationale de fournir une aide humanitaire et des services de base aux 7,5 millions de personnes qui ont un besoin urgent d’aide.  

S’il a reconnu les efforts des forces de sécurité maliennes au cours des derniers mois pour combattre les organisations terroristes, M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a estimé que la lutte contre l’extrémisme n’exonère pas l’État de ses responsabilités en matière de droits humains et de droit international humanitaire.  Préoccupé par les informations faisant état de victimes civiles lors de l’opération à Moura fin mars, le représentant a appelé les autorités à coopérer étroitement avec la MINUSMA pour faire la lumière sur ce qui s’est passé.  Il a également demandé instamment aux autorités de continuer à travailler avec la CEDEAO et l’Union africaine afin de parvenir dans les meilleurs délais à un accord sur un calendrier électoral pour mettre fin à la transition et permettre à l’État d’aborder les nombreuses réformes en suspens avec la légitimité « irremplaçable » du vote populaire. 

Le représentant a rappelé qu’il reste encore de nombreuses tâches à accomplir pour réaliser les engagements pris par les signataires de l’accord de paix, de la décentralisation de l’administration publique au nécessaire processus de DDR.  Il a jugé urgent de réactiver les mécanismes chargés de la mise en œuvre de cet instrument afin d’éviter de perdre les progrès accomplis, notamment dans le nord du pays.  Pour neutraliser la violence au Mali, a-t-il ajouté, il faut remédier à la situation précaire du développement économique, mettre fin à l’exclusion historique de certains groupes de la scène politique nationale et combattre l’impunité par le biais d’un système judiciaire efficace et indépendant.

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a appelé le Gouvernement de transition à progresser dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali et à garantir la participation des femmes à tous les niveaux du processus politique et électoral.  Saluant les efforts inlassables déployés par la MUNISMA pour protéger la population civile et préparer la transition politique, le représentant a présenté ses condoléances à la Mission après la mort, le mois dernier, de trois Casques bleus égyptiens.  Le délégué a rappelé à cet égard que les attaques contre la MINUSMA peuvent faire l’objet de sanctions du Conseil de sécurité, avant d’exhorter les autorités de transition à mener des enquêtes crédibles sur les actions menées contre des soldats de la paix et sur les atteintes aux droits humains perpétrées dans le pays. 

Alarmé par la détérioration de la situation sécuritaire au Mali, M. MILLS a dénoncé les violations des droits humains perpétrées par des groupes armés et par les forces armées maliennes, ces dernières agissant avec le groupe Wagner, société privée de sécurité russe.  Il a également déclaré suivre de près les informations faisant état de centaines de personnes tuées à Moura, dans le centre du Mali, et de l’exécution de 35 personnes dans la région centrale de Ségou, invitant les autorités de transition à autoriser la MINUSMA à accéder à ces deux endroits pour mener des enquêtes rigoureuses.  À l’aune de ces manquements, le délégué américain a enjoint les autorités maliennes à renoncer à leur partenariat avec le groupe Wagner qui, a-t-il rappelé, est impliqué dans d’autres violences en Afrique, notamment en République centrafricaine.  Il a d’autre part condamné les incidents du 22 mars et les tirs de roquettes par les forces armées maliennes contre des Casques bleus, exhortant le Gouvernement de transition à coopérer avec la MINUSMA sur le terrain.  Enfin, après avoir regretté que Bamako et la CEDEAO ne se soient encore mis d’accord sur un calendrier acceptable de transition politique, il a appelé à la poursuite du dialogue en vue d’un retour rapide de la démocratie au Mali. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a déclaré que les autorités maliennes doivent mener des enquêtes crédibles et impartiales sur les circonstances peu claires qui ont entouré la mort de plusieurs centaines de personnes lors d’une opération antiterroriste à Moura, et faciliter les enquêtes indépendantes de la MINUSMA.  Après avoir rappelé que la fin de la période de transition et le retour à l’ordre constitutionnel auraient dû avoir lieu en février, la représentante a dénoncé la grave escalade des menaces à la sécurité, la situation humanitaire désastreuse et le rétrécissement dramatique de l’espace civique.  L’augmentation rapide des attaques terroristes au Mali est une source de graves préoccupations, alors que des groupes islamistes armés prolifèrent, s’emparant de villages entiers, perpétrant des assassinats ciblés et d’autres crimes en toute impunité, a-t-elle ajouté.  La déléguée s’est aussi déclarée profondément préoccupée par les méthodes employées par les mercenaires affiliés à la Russie qui opèrent au Mali et dans la région.  

Mme Dautillari a ensuite appelé le Conseil de sécurité à maintenir un engagement fort au Mali, afin de favoriser le développement et de renforcer la résilience des communautés locales.  Elle a également exhorté les autorités maliennes à garantir la liberté de circulation et d’action de la MINUSMA.  La crise politique et le manque d’engagement ont contribué à de graves retards dans la mise en œuvre de l’accord d’Alger, s’est encore inquiétée la représentante qui, outre la mise en œuvre dudit accord, a appelé les autorités à s’engager de manière constructive avec la CEDEAO, la MINUSMA et les partenaires internationaux pour accélérer le processus de transition et établir un calendrier pour la tenue d’élections afin de rétablir l’ordre constitutionnel.  

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est déclarée encouragée par l’apparent rapprochement entre Bamako et la CEDEAO sur la chronologie de la transition politique.  À cette aune, elle a exhorté les dirigeants de la transition du Mali à maintenir un dialogue constructif avec la CEDEAO et à honorer leur promesse d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel.  La déléguée a toutefois constaté qu’un an et demi après la prise du pouvoir par les militaires, la situation sécuritaire et humanitaire montre peu de signes d’amélioration.  Elle s’est notamment alarmée des recrutements d’enfants dans les conflits armés, des fermetures d’écoles et du risque de dénutrition aiguë. 

Dénonçant l’augmentation drastique des atteintes aux droits humains dans le pays, la représentante a rappelé que l’État a la responsabilité d’assurer la reddition de comptes et de lutter contre l’impunité, y compris à l’égard d’acteurs extérieurs utilisés par les autorités de transition, comme le groupe Wagner.  À cet égard, elle a appuyé l’appel de la Commission nationale malienne des droits de l’homme pour que des enquêtes indépendantes soient menées sur les allégations de violations des droits humains à Moura.  La MINUSMA doit pouvoir enquêter sur ces allégations dans le cadre de son mandat, a-t-elle ajouté.  La déléguée a ensuite souligné qu’il incombe au Conseil de sécurité d’assurer la sûreté et la sécurité des soldats de la paix au Mali, particulièrement au moment où les forces française Barkhane et européenne Takuba entament leur retrait.  Dans ce contexte, a-t-elle souligné, le pays hôte ne doit pas prendre ses responsabilités à la légère, et cela commence par le respect fondamental de la MINUSMA.

M. DAI BING (Chine) s’est félicité des efforts déployés par les autorités maliennes et la CEDEAO pour faciliter un rapprochement sur les questions politiques en suspens.  Selon lui, Bamako est une force importante dans la lutte antiterroriste dans la région du Sahel, les opérations menées dans le centre et le nord du Mali ayant permis de réduire les capacités des groupes terroristes et d’assurer le retour des personnes déplacées.  S’agissant des allégations de violations perpétrées par les forces de défense et de sécurité maliennes dans le cadre de ces opérations, le représentant a souligné que le Gouvernement se dit prêt à mener une enquête, même s’il assure avoir toujours respecté les droits humains.  Les risques sécuritaires auxquels le Mali est confronté étant toujours d’actualité, comme l’illustre le recours aux engins explosifs improvisés, le représentant a encouragé le Conseil de sécurité à donner à la MINUSMA les moyens de s’acquitter de son mandat. 

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) s’est alarmé des informations faisant état d’un massacre dans le village de Moura, dans la région de Mopti, au centre du Mali.  Il a demandé une enquête approfondie et transparente sur ces allégations prenant note de l’intention du procureur du tribunal militaire de Mopti d’en ouvrir une.  La MINUSMA doit se voir accorder un accès sans entrave, rapide et sûr à Moura pour mener sa propre enquête et prendre des mesures pour assurer la protection des civils, a exigé M. Flynn pour lequel les responsables de ces violations doivent être traduits en justice, indépendamment de leur nationalité.  Il a ajouté qu’il est préoccupé par les informations faisant état de la présence du groupe Wagner au Mali qui alimente les tensions, accroît l’instabilité et la violence, et entrave les efforts de la MINUSMA pour protéger les civils et apporter un soutien aux forces armées maliennes.  

Le représentant s’est également inquiété de l’augmentation du nombre de victimes civiles résultant d’attaques menées par des groupes extrémistes armés dans la zone des trois frontières.  Il a aussi demandé une action globale et intégrée pour lutter contre la discrimination et la violence sexuelle et sexiste à l’encontre des femmes, exhortant à rendre justice aux survivantes.  Après avoir condamné les attaques contre les Casques bleus, il a appelé les autorités à créer un environnement sûr pour les civils et la MINUSMA.  M. Flynn a également souligné que l’accord de paix de 2015 demeure un cadre essentiel pour assurer une paix et une stabilité durables au Mali, et a regretté la lenteur des progrès accomplis dans sa mise en œuvre.  Il a enfin engagé les autorités de transition à convenir d’un calendrier acceptable pour le retour à l’ordre constitutionnel et à la tenue d’élections.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a salué la détermination des autorités de transition maliennes à régler progressivement les problèmes que connaît leur pays, notamment leur engagement à rétablir l’ordre constitutionnel.  La création d’un groupe de travail pour préparer des élections et le lancement d’un processus de négociation avec l’Union africaine et la CEDEAO démontre, selon elle, l’attitude constructive de Bamako et « l’absence d’agenda caché par les militaires ».  Appelant les parties à poursuivre le dialogue et les intermédiaires à ne pas relâcher leurs efforts, la déléguée s’est inquiétée de l’escalade de la situation dans les régions du nord du pays, où la réduction de la présence militaire française « crée un vide dans le domaine de la sécurité ».  Sur ce point, elle a estimé que la décision « irresponsable » de retrait total de l’opération Barkhane, prise sans consultation avec la partie malienne, viole les accords bilatéraux.  Elle a également déclaré partager les évaluations du rapport du Secrétaire général sur les conséquences négatives des actions de la France et de ses partenaires de l’Union européenne sur le mandat de la MINUSMA, notamment en matière de risques sécuritaires pour les Casques bleus.  On ne sait pas non plus comment le départ de Barkhane et de la force européenne Takuba affectera les capacités de la Force conjointe du G5 Sahel, qui doit être à l’avant-garde du combat contre le terrorisme dans la région, a-t-elle relevé. 

Observant que le Mali se retrouve seul face à de graves défis transfrontaliers, la représentante a estimé que les autorités du pays ont le droit souverain de décider avec qui elles souhaitent travailler à cette fin.  À cet égard, elle a souligné que la coopération entre la Russie et le Mali a des racines historiques.  Elle a ainsi rappelé que la Russie fournit une assistance aux forces armées maliennes en matière de préparation au combat et de formation des personnels militaires et des employés.  Elle a dénoncé la « campagne de désinformation sur les soi-disant mercenaires russes », estimant qu’elle fait partie d’un « jeu géopolitique sans scrupules ».  Cela ne contribue pas à la stabilisation du Mali, tout comme les sanctions régionales et les restrictions décidées par des pays occidentaux ne font qu’exacerber une situation déjà difficile, a souligné la déléguée.  Selon elle, les « sanctions antirusses sans précédent » prises ces dernières semaines démontrent l’importance pour les pays visés par de telles mesures de défendre leur indépendance et de surmonter les « conséquences du colonialisme ».  Elle a ensuite encouragé Bamako à mener une politique équilibrée, assurant que la Russie continuera d’apporter son soutien aux Maliens, y compris dans le cadre d’un effort collectif, pour favoriser la stabilisation du pays.

Mme MAITÊ DE SOUZA SCHMITZ (Brésil) a exhorté les autorités maliennes de transition à autoriser une enquête impartiale sur les informations faisant état d’exécutions sommaires de civils à Moura, qui auraient été perpétrées par des membres des forces armées maliennes avec le soutien de combattants étrangers.  Le seuil actuel des violences est directement lié à la quasi-paralysie de la mise en œuvre de l’accord de paix, a-t-elle estimé.  Elle a averti que le report du retour au cadre constitutionnel et l’absence d’un calendrier acceptable pour les élections menacent la crédibilité du processus de réconciliation, dans un environnement qui devient plus complexe avec la présence de groupes terroristes et les signes d’une aggravation de la situation humanitaire.  La représentante a ensuite exhorté les autorités de transition à collaborer avec la CEDEAO pour que les sanctions, imposées en réponse au report des élections, puissent être levées dans un avenir proche. 

La déléguée a par ailleurs relevé que le Mali subit déjà l’impact négatif d’autres conflits sur les prix des denrées alimentaires et qu’il existe un risque réel que la situation actuelle se transforme en une catastrophe humanitaire.  S’agissant du renouvellement du mandat de la MINUSMA, elle a considéré essentiel que celle-ci dispose des ressources nécessaires pour soutenir la mise en œuvre de l’accord de paix et la transition politique, ainsi que pour protéger les civils et soutenir la restauration de l’autorité de l’État malien dans le centre du pays.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est déclaré horrifié par les informations selon lesquelles des centaines de personnes auraient été tuées à Moura à la suite d’une opération antiterroriste menée par les forces armées maliennes avec l’implication présumée du groupe Wagner.  Il a demandé une enquête urgente, transparente et impartiale afin de traduire les responsables en justice.  Le Gouvernement malien doit accorder à la MINUSMA un accès complet à Moura sans plus tarder, a exigé le représentant, qui s’est inquiété de la tendance manifeste à une recrudescence des violations des droits humains depuis le déploiement du groupe Wagner au Mali.  Tout comme la présence de mercenaires russes a entraîné une augmentation des violations des droits humains et des abus en République centrafricaine l’année dernière, nous craignons de voir la même chose au Mali, a ajouté le représentant.   

Soulignant que la MINUSMA doit être en mesure de mener à bien ses tâches en matière de droits humains, le délégué a dénoncé les restrictions croissantes imposées par les autorités maliennes aux opérations de la Mission, appelant au respect de la liberté de circulation et l’accord sur le statut des forces.  En ce qui concerne la transition politique, il a appuyé le dialogue de la CEDEAO avec les autorités maliennes sur l’établissement d’un calendrier révisé pour les élections, afin que les sanctions puissent être progressivement levées.  

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a assuré que le retour à l’ordre constitutionnel au Mali figure parmi les priorités du Gouvernement de transition.  Il a cependant fait valoir que l’instabilité politique et institutionnelle de son pays prend son origine dans des élections mal organisées et dans la mauvaise gouvernance.  C’est pourquoi, a-t-il dit, le Gouvernement de transition tient à faire des réformes majeures visant notamment à assurer une stabilité des institutions, tout en créant les conditions minimales de sécurisation pour permettre la tenue d’élections.  À cette aune, il a demandé la levée immédiate des sanctions « injustes, illégales, illégitimes et inhumaines » prises par la CEDEAO et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), non sans dénoncer un acharnement visant à asphyxier le peuple malien, à le punir pour ses choix politiques et à obtenir un changement de régime.  Évoquant ensuite la situation sécuritaire, le délégué a indiqué que le Gouvernement continue de renforcer les capacités des forces armées maliennes, ce qui « donne des résultats très encourageants » sur le terrain.  Depuis décembre 2021, a-t-il rappelé, les forces de défense et de sécurité maliennes infligent de lourdes pertes aux groupes extrémistes et sécurisent les populations.  À ce sujet, il a souhaité répondre aux accusations selon lesquelles le Gouvernement malien recourrait à une société de sécurité privée.  « Je le redis ici et avec force: le Mali n’a pris aucun engagement de cette nature », a-t-il protesté, reconnaissant toutefois qu’à la faveur de sa coopération avec la Russie, son pays continue de se procurer du matériel militaire pour sa sécurité et fait appel à des instructeurs russes.  

S’agissant de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le délégué a assuré que le Gouvernement reste engagé à permettre son accélération, tout comme il est déterminé à renforcer la participation des femmes au processus de paix.  Si le processus de désarmement, démobilisation et réintégration/réinsertion (DDR) connaît quelques difficultés, en dépit des propositions du Gouvernement, ce dernier est dans l’attente de la liste des mouvements signataires pour permettre le démarrage du volet réinsertion des anciens combattants, a précisé M. Konfourou.  Il a également souligné que, contrairement aux affirmations du Secrétaire général, le Gouvernement reste engagé dans la mise en œuvre des programmes de développement des régions du Nord.  

Abordant ensuite la situation des droits humains, le représentant a reconnu que la crise complexe que traverse le Mali depuis une dizaine d’années et la perte du contrôle de certaines parties du territoire national ont entraîné des atteintes à ces droits.  Cependant, il n’y a aucune volonté délibérée des autorités maliennes d’accorder des « primes à l’impunité », a-t-il affirmé, relevant que la justice malienne est systématiquement saisie chaque fois que des violations sont signalées.  Il a précisé que les opérations militaires en cours dans la zone de Moura font suite à des renseignements qui ont permis de localiser la tenue d’une rencontre entre différents « katibas » et ont confirmé que ce secteur était un « sanctuaire terroriste ».  À propos des « événements de Moura », il a signalé l’ouverture, par la Gendarmerie nationale, d’enquêtes approfondies sur les allégations d’exactions présumées commises en mars sur des civils dans cette zone.  En attendant les conclusions de ces investigations, il a appelé toutes les parties prenantes à la retenue et à éviter les qualificatifs de massacres ainsi que les allégations sans fondement proférées à l’encontre des forces armées maliennes.   

Il a par ailleurs estimé que la détérioration continue de la situation humanitaire au Mali est due à la mauvaise saison de pluie enregistrée l’année dernière, à l’impact négatif des sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA sur les populations, ainsi qu’à l’insécurité dans les régions du centre du pays.  Pour y remédier, le Gouvernement travaille, avec l’appui des partenaires bilatéraux et multilatéraux, à apporter l’assistance nécessaire aux Maliens en situation de vulnérabilité, a-t-il dit, avant d’insister à nouveau sur la nécessaire levée des sanctions, « surtout au moment où nos forces armées gagnent en confiance et remportent des victoires sur plusieurs fronts ».

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