En cours au Siège de l'ONU

Le Conseil de sécurité examine les moyens de tirer le meilleur profit des opérations de l’ONU au service de la pérennisation de la paix

8033e séance – matin 
CS/12969

Le Conseil de sécurité examine les moyens de tirer le meilleur profit des opérations de l’ONU au service de la pérennisation de la paix

Le Conseil de sécurité a débattu, aujourd’hui, des moyens pour faire en sorte que les opérations de paix de l’ONU soient à la « hauteur de leur potentiel », selon l’expression utilisée par la Vice-Secrétaire générale, Mme Amina J. Mohammed, et servent l’objectif fondamental de la pérennisation de la paix.

Coûteuses, « symboles de l’inaction de l’ONU », ces opérations ont en effet essuyé les critiques de nombreux intervenants, parmi la cinquantaine qui se sont exprimés.  Pour y remédier, ils ont notamment plaidé pour des mandats de mission réalistes et des stratégies de retrait pensées en amont.

Pour ce débat, la présidence égyptienne avait fait distribuer une note de cadrage*, précisant le concept novateur de « pérennisation de la paix » que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale ont entériné en 2016 dans deux résolutions jumelles.  

Celle-ci est un « objectif et un processus tendant à la définition d’une vision commune d’une société, prenant forme au sortir d’un conflit » et englobe les activités visant à prévenir et régler les conflits, à s’attaquer à leurs causes profondes et à s’engager sur la voie de la réconciliation nationale, du relèvement et du développement.

« La pérennisation de la paix est par nature un processus politique », a affirmé la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Mohammed.  Elle a indiqué que ce concept exigeait de promouvoir des synergies accrues au sein du système onusien, trop « fragmenté », et de faire de la prévention des conflits la priorité de l’Organisation.  

Au titre des mesures prises, Mme Mohammed a mentionné les liens accrus entre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la pérennisation de la paix, ainsi que l’autorité renforcée des coordonnateurs résidents. 

De son côté, le Conseiller à l’Institut international pour la paix et ancien membre du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix, M. Youssef Mahmoud, a rappelé, à l’instar de nombreux intervenants, qu’une paix durable dépendait des solutions politiques apportées aux conflits.  

À cet égard, les acteurs internes, notamment les jeunes et les femmes, « agents principaux de la paix », ont un rôle crucial à jouer, a-t-il dit.  « Les pays sortant de conflit ne sont pas des « pages blanches » et leurs populations ne sont pas des « projets ».

« En se référant régulièrement à la consolidation de la paix comme relevant d’une “phase postconflit”, le Conseil la relègue au second plan », a estimé, pour sa part, le Président du Groupe consultatif d’experts chargé de l’examen du dispositif de consolidation de la paix, M. Gert Rosenthal.  Il a en conséquence pleinement approuvé la priorité du Secrétaire général de prévenir la violence en répondant en amont aux griefs qui la nourrissent.  

Il a en outre invité à tirer pleinement parti de la Commission de consolidation de la paix, véritable « passerelle », selon le représentant du Kazakhstan.

Les délégations ont avancé d’autres propositions pour améliorer l’efficacité des opérations de paix, à la fois « pour les personnes qu’elles servent et celles qui payent les factures », selon l’expression de la déléguée des États-Unis, qui s’en est pris aux « rapports jargonneux » de l’ONU.  Prenant l’exemple de la Mission en République démocratique du Congo (MONUSCO), qui s’est « fourvoyée », la représentante a, en particulier, plaidé pour une stratégie claire de retrait des missions.

Même son de cloche du côté du représentant de l’Égypte, qui a déploré le déploiement trop long des missions de l’ONU en Haïti et au Libéria.  Il a en outre insisté sur la confiance dont les efforts onusiens doivent bénéficier au sein du pays hôte. 

De son côté, le délégué de l’Éthiopie a exhorté le Conseil à adopter des mandats clairs, réalistes, actualisés et bien séquencés, tandis que son homologue du Sénégal l’a invité à doter les missions de ressources suffisantes.

Le délégué de la Fédération de Russie a demandé à ne pas « surcharger les mandats de fonctions génériques », ce qui entraînera d’inévitables dépassements budgétaires.

Parmi les autres pistes explorées, le délégué du Royaume-Uni a souhaité qu’un rôle accru soit joué par les équipes de pays de l’ONU, toute situation n’exigeant pas en effet le déploiement d’une opération de paix.  Les délégations ont également été nombreuses à souhaiter un partenariat renforcé avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine, qui a démontré sa capacité de réaction face aux crises sur le continent.

Le concept de pérennisation de la paix, « fort large » comme le reconnaît la note de cadrage précitée, n’a néanmoins pas fait l’unanimité parmi les intervenants.  Le représentant russe a fait entendre une note discordante en indiquant que son pays ne pouvait pas approuver l’idée que la pérennisation de la paix passe par une intégration des piliers de la paix et du développement.

* S/2017/692

LES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Leur possible contribution à l’objectif premier du maintien d’une paix durable

Lettre datée du 7 août 2017, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de l’Égypte auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2017/692)

Déclarations

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a rappelé que les États Membres avaient reconnu les liens étroits entre paix et sécurité, droits de l’homme et développement durable dans les deux résolutions jumelles votées en 2016 par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité. 

La pérennisation de la paix requiert une stratégie inclusive soutenant toutes les activités des opérations de paix et prenant en compte le « continuum » de la paix, de la prévention et de la résolution des conflits jusqu’au maintien et à la consolidation de la paix et au développement de long terme.

Elle a souligné la nécessité que les opérations de maintien de la paix disposent de mandats clairs, réalistes, actualisés, bien séquencés, flexibles et assortis de priorités correctement identifiées.  « Le maintien de la paix doit être à la hauteur de son potentiel en tant qu’outil essentiel de la pérennisation de la paix. »

Mme Mohammed a indiqué que la pérennisation de la paix était par nature un processus politique conjuguant activités de développement, mesures préventives, médiation, gestion et résolution des conflits.  « La vision du Secrétaire général va au-delà de la prévention des crises et des conflits violents et prend en compte la nature changeante de ces crises », a-t-elle dit, ajoutant que cette vision demandait des synergies accrues au sein du système onusien.

La montée en puissance de la diplomatie au service de la paix, prônée par le Secrétaire général, s’inscrit dans cette vision, a-t-elle poursuivi.  La Vice-Secrétaire générale a indiqué que les mesures de prévention devaient être le fait des autorités nationales reconnaissant les besoins de toutes les composantes de la société, y compris les femmes et les jeunes, véritables « agents du changement ».

Elle a ensuite affirmé que la pérennisation de la paix passait également par un partenariat avec la société civile, les institutions financières et les partenaires régionaux et sous-régionaux, tels que l’Union africaine.  « La Commission de consolidation de la paix a un rôle unique à jouer dans la mobilisation de tous ces partenaires et j’invite ce Conseil à engager ladite commission plus activement. » 

Elle a également appelé le Conseil à doter les missions de paix d’un financement adéquat.

Soulignant la nécessité d’améliorer l’examen des opérations de maintien de la paix et de les réformer, Mme Mohammed a jugé qu’il était impératif d’un point de vue opérationnel de recruter davantage de femmes.  L’implication des femmes accroît les chances de pérenniser la paix et réduit les risques d’abus sexuels, a-t-elle dit.

Elle a ensuite défendu une vision plus large de la prévention, laquelle doit devenir la priorité de l’ONU.  « À cette fin, nous avons pris des mesures importantes pour faire pièce à la fragmentation du système et améliorer la manière dont l’ONU sert les personnes dans le besoin », a-t-elle dit.  « Il est crucial de reconnaître que le développement est une fin en soi et une composante centrale de notre travail. » 

La réforme du système de l’ONU a été pensée pour renforcer les liens entre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la pérennisation de la paix, a-t-elle poursuivi.  Le Secrétaire général a également appelé au renforcement de l’autorité des coordonnateurs résidents afin d’assurer une meilleure reddition de comptes et efficacité, a-t-elle dit.

La Vice-Secrétaire générale a déclaré que chaque mission de paix devait être considérée dans le contexte particulier dans lequel elle s’inscrivait.  L’une des plus importantes contributions à la paix est la préparation d’un retrait de la mission et d’une transition sans heurt vers l’équipe de pays, a-t-elle dit, en citant les succès enregistrés à cet égard au Libéria et en Côte d’Ivoire.

« En Haïti et au Darfour, les programmes communautaires de réduction de la violence visent à prévenir le recrutement des jeunes par les groupes criminels, contribuant, ce faisant, à la stabilité. »

Mme Mohammed a en outre souligné la nécessité de promouvoir l’égalité entre les genres, en particulier lorsque la composante civile des missions prend le relais de la composante militaire.

Enfin, la Vice-Secrétaire générale a déclaré que les opérations de maintien de la paix étaient des instruments politiques accompagnant « idéalement » les processus de paix locaux. 

« Un engagement accru de tous les membres d’un Conseil uni et fort –tant individuellement que collectivement- est essentiel pour faire en sorte que les États Membres, le système onusien et tous les partenaires se mobilisent en faveur d’une vision et d’un but communs intégrant véritablement tous les piliers et activités de l’ONU », a-t-elle conclu.

M. YOUSSEF MAHMOUD, Conseiller à l’Institut international pour la paix et ancien membre du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix, venu présenter le rapport de ce groupe et ce qu’il implique en termes de changement dans les opérations de maintien de la paix, a mis l’accent sur les « trois P » -politique, partenariats et personnes– termes clefs qui dévoilent l’esprit du rapport.

Parmi les changements suggérés par le Groupe dans l’objectif de pérenniser la paix, il en a cité trois.  Le premier consiste à reconnaître que les pays sortant de conflit ne sont pas des « pages blanches » et que leurs populations ne sont pas des « projets », mais que les acteurs internes de tous les niveaux de la société sont les agents principaux de la paix. 

Il a souligné l’humilité et le respect qu’exige une telle démarche, ce qui va à l’encontre de l’idée que se font certains intervenants extérieurs convaincus que les pays concernés manquent des compétences et ressources nécessaires pour s’en sortir. 

Cette « myopie », a-t-il poursuivi, conduit au deuxième changement qui consisterait à remettre en question des hypothèses et valeurs qui étayent certains modèles et certaines approches techniques basés sur les réserves.  Une telle approche repose sur le renforcement des institutions étatiques centrales mais ne tient pas compte des risques de corruption de groupes puissants, a-t-il expliqué.

La troisième chose à changer relève de la politique.  M. Mahmoud a rappelé qu’une paix durable dépend de solutions politiques, ce qui veut dire que les belligérants doivent abandonner la violence pour travailler sur le terrain politique.

Sur le plan pratique, ces modifications obligent à repenser la façon dont on analyse la paix et les conflits au moment où se préparent ou sont revues les opérations de paix.  Il faut évaluer non seulement les facteurs de la violence et de l’instabilité mais aussi ce qui fonctionne encore, sans se concentrer uniquement sur ce qui doit être réparé. 

Cela peut se faire par le biais d’enquêtes sur les capacités de résilience des sociétés et des gens ordinaires, et en évaluant les engagements en faveur de la cause de la paix des acteurs aux plans national, bilatéral et régional.

M. Mahmoud a insisté sur l’importance de la perspective régionale et de celle, unique, des femmes et des jeunes.  Il a tenu à préciser que plusieurs missions de maintien de la paix mènent certaines analyses de ce type.

Outre l’analyse nécessaire, il faut également mettre au point un accord stratégique de pérennisation de la paix, comme le souhaite clairement le Conseil de sécurité, un accord qui reflète une compréhension commune de ce que recouvre le concept de pérennisation de la paix, conformément à l’esprit et à la lettre de la résolution 2282 (2016).  Cet accord donnerait les grandes lignes des responsabilités du pays hôte et des acteurs nationaux, en précisant le rôle de soutien du système de l’ONU et en prévoyant des seuils pour mesurer les résultats et faciliter l’appropriation nationale. 

De même, cela répondrait à l’appel du Secrétaire général de créer des synergies entre les piliers de l’ONU, dont le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Pour conclure, il a posé quatre questions au Conseil de sécurité: Les missions ont-elles la capacité au plus haut niveau de trouver des solutions politiques?  Ont-elles les connaissances et expertises nécessaires pour mener des analyses stratégiques et participatives afin d’évaluer leurs chances de contribuer à la pérennisation de la paix?  Ont-elles un accord stratégique et contraignant, ainsi qu’une stratégie de sortie, visant la pérennisation de la paix?  Enfin, est-ce que les missions ont des mécanismes de consultation mettant les personnes au centre pour garantir l’appropriation nationale incluant tous et suscitant la confiance?

M. GERT ROSENTHAL, Président du Groupe consultatif d’experts chargé de l’examen du dispositif de consolidation de la paix, a expliqué que cet examen avait fait ressortir une contradiction, « enracinée dans la Charte des Nations Unies », et qui revêt trois aspects principaux. 

Tout d’abord, a-t-il dit, la « segmentation » des responsabilités assignées par la Charte à chacun des organes intergouvernementaux –Assemblée générale, Conseil de sécurité et Conseil économique et social (ECOSOC)– a conduit à une approche « fragmentée et confuse ».  « Même s’il y a des empiètements dans l’exécution des mandats, il n’en reste pas moins que les piliers traditionnels de la paix, des droits de l’homme et du développement “opèrent” séparément dans les “silos” auxquels nous nous sommes habitués », a déclaré le Président. 

Par ailleurs, le Conseil de sécurité, a-t-il analysé, continue d’agir comme si les conflits dans le monde répondaient à une « séquence inaltérable de dynamiques », comme si le rétablissement, le maintien et la consolidation de la paix s’imbriquaient dans une sorte de « continuum naturel ».  En se référant régulièrement à la consolidation de la paix comme relevant d’une phase « postconflit », le Conseil la relègue au second plan, en a conclu M. Rosenthal.  Enfin, selon lui, la priorité numéro un est de prévenir la violence en répondant en amont aux griefs qui la nourrissent.

Depuis le précédent examen en date de 2015, plusieurs nouveaux faits ont émergé, a-t-il dit, à commencer par le fait que le nouveau Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a vigoureusement plaidé en faveur de la prévention des conflits, « y compris avant de prendre ses fonctions ». 

En outre, l’adoption, le 25 septembre 2015, du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a fait de la « promotion de sociétés pacifiques et inclusives » un élément à part entière du développement durable.  De plus, l’adoption, par le Conseil de sécurité, de la résolution 2282 (2016), simultanément à la résolution 70/262 par l’Assemblée générale, a parachevé l’examen des activités onusiennes dans le domaine de la consolidation de la paix, a observé M. Rosenthal. 

Celui-ci s’est également félicité de l’adoption, par l’Assemblée, de la résolution 71/243, qui définit les mandats des examens quadriennaux complets des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies.  Enfin, le Président s’est réjoui de la proposition « imminente » du Secrétaire général concernant la restructuration du pilier « paix et sécurité », qui s’appuiera sur les documents préliminaires déjà en circulation.

Pour M. Rosenthal, la tâche la plus importante dans ce contexte est d’assurer la cohérence de l’action.  « Même si elle est partielle, une solution se trouve dans la résolution 2286 (2016).  Elle consiste à tirer pleinement parti du potentiel offert par la Commission de consolidation de la paix (CCP) et ses organes subsidiaires en vue de lier entre elles les contributions des trois principaux organes intergouvernementaux pour répondre aux causes profondes des conflits et promouvoir une paix durable. » 

C’est d’autant plus pertinent, a-t-il expliqué, que la CCP est un organe consultatif formé aux deux tiers d’États Membres issus de l’Assemblée, du Conseil de sécurité et de l’ECOSOC.

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a rappelé que, depuis des années que les États Membres travaillent pour adapter les opérations de maintien de la paix aux complexités des conflits actuels, on était passé de missions classiques à des missions multidimensionnelles chargées de tâches variées en vue de la pérennisation de la paix. 

Reconnaissant qu’il fallait faire davantage d’efforts en ce sens, il a suggéré de mener des analyses exhaustives du contexte opérationnel.  Il faudrait également, une fois que le déploiement d’une opération est décidé, définir des objectifs clairs et réalisables, ce qui permettra ensuite de mieux planifier la stratégie de retrait de la mission.

Le représentant a en outre recommandé d’envoyer un personnel bien entraîné pour exécuter toutes les tâches confiées à la mission.  M. Rosselli a aussi plaidé en faveur de solutions politiques lorsque l’on planifie les opérations de maintien de la paix. 

Il a ensuite souhaité voir renforcer la coordination entre ces opérations et la Commission de consolidation de la paix, les équipes de pays et les diverses entités chargées du développement. 

Enfin, outre les ressources nécessaires à la mission, il est indispensable de prévoir un processus de transition.

M. CARL SKAU (Suède) a estimé qu’il faut reconnaître « la primauté de la politique » dans les stratégies de prévention, de gestion et de règlement des conflits.  Des stratégies à long terme tenant compte des causes sous-jacentes des conflits sont « essentielles », a insisté le représentant.  Le travail doit être axé sur les personnes et orienté vers les résultats.

La consolidation de la paix doit être un processus ouvert, impliquant les gouvernements et tous les segments de la société, y compris les femmes, et mettre en place les bonnes stratégies politiques exige des analyses d’une qualité supérieure, au fait du contexte particulier et couvrant tout le cycle d’un conflit. 

L’ensemble du système des Nations Unies doit s’y impliquer, a prôné le représentant, en particulier la Commission de consolidation de la paix (CCP) qui est particulièrement bien placée pour réunir les acteurs internationaux autour de la réponse coordonnée et stratégique qu’il faut pour consolider la paix. 

Pour véritablement y parvenir, a poursuivi le représentant, tous les instruments de paix et de sécurité des Nations Unies doivent fonctionner en tandem avec les efforts déployés dans les domaines du développement, des droits de l’homme et de l’aide humanitaire, et ce, dès le début d’une mission. 

La manière dont le système des Nations Unies travaille ensemble doit être la question que l’on se pose tous les jours et pas seulement quand on réfléchit à la stratégie de sortie.  Quand le Conseil de sécurité demande à une équipe de pays des Nations Unies d’avancer sur le devant de la scène, il doit reconnaître sa responsabilité de lui donner les capacités et les ressources nécessaires à son mandat.  Il faut à tout prix éviter « la falaise financière » de laquelle on s’approche trop souvent lors des processus de transition. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a partagé la vision du Secrétaire général pour la réforme de l’ONU.  L’ONU doit garantir que les civils auxquels elle vient en aide puissent, à terme, vivre de manière indépendante, sans sa présence, a-t-elle dit, ajoutant que les opérations de maintien de la paix ne pouvaient pas à elles seules produire une paix durable.

Elle a indiqué que la paix durable ne pouvait être atteinte que lorsque les autorités des pays hôtes assumaient leurs responsabilités.  Elle a fait part de son inquiétude devant les « rapports jargonneux » de l’ONU et des termes aussi vagues que ceux de « synergies ».  L’essentiel est d’accroître la valeur de l’action de l’ONU, pour les personnes qu’elle sert et pour celles qui payent les factures, a-t-elle déclaré.

« Tous les outils de l’ONU sont-ils nécessaires?  Veut-on créer l’indépendance ou la dépendance? » a demandé Mme Haley.  Elle a mis en garde contre des missions telles que la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) « dont on ne voit pas la fin et qui s’est fourvoyée ». 

La mission doit travailler avec un gouvernement qui ne coopère pas et lui est parfois hostile, a-t-elle dit.  La déléguée a souligné la nécessité d’une stratégie claire de retrait des missions et d’une transition viable, comme cela a été le cas au Libéria, exemple à suivre « même si toutes les situations sont uniques ».

Elle a évoqué la situation très difficile au Soudan du Sud, où elle a appelé l’ONU à « rassembler les pièces du puzzle » et à mobiliser ses ressources en vue de rechercher une solution politique.  Celle-ci ne pourra néanmoins devenir réalité que si les parties sud-soudanaises ont la volonté d’y parvenir, a-t-elle affirmé. 

En conclusion, Mme Haley a estimé que le programme pour la pérennisation de la paix du Secrétaire général constituait une « occasion historique » pour tirer le meilleur profit des ressources considérables de l’ONU et achever une paix durable.

Après avoir indiqué que des améliorations étaient nécessaires aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, M. KORO BESSHO (Japon) a affirmé que la question devrait être: Comment pouvons-nous renforcer l’impact de la consolidation de la paix sur le terrain?  Les Casques bleus d’aujourd’hui doivent être suffisamment préparés pour répondre aux défis actuels. 

Comment pouvons-nous y parvenir?  Le représentant a annoncé plusieurs domaines prioritaires dont le premier est le renforcement de capacités.  Les pays fournisseurs de contingents ont l’obligation d’envoyer du personnel doté de la formation et de la capacité à respecter les normes de l’ONU et de faire leur travail de manière efficace. 

M. Bessho a ajouté que des troupes capables et bien préparées ne pouvaient pas fonctionner sans mandats réalistes qui répondent aux besoins actuels.  Le rôle du Conseil ici est d’une importance essentielle.  « Nous devons nous engager dans des discussions plus sérieuses sur des mandats concis et stratégiquement prioritaires qui donnent aux missions les outils pour réussir », a-t-il dit. 

Des évaluations franches de ce dont on a besoin sur le terrain sont également nécessaires.  Des repères plus clairs contribueront grandement à répondre et à adapter les tâches des missions à court et à long terme, a estimé le représentant pour lequel la consolidation de la paix et les efforts locaux de réconciliation devraient aussi recevoir une attention accrue dans les efforts pour une paix durable. 

Le Japon soutient le développement de la pratique consistant à s’appuyer régulièrement sur les conseils de la Commission de consolidation de la paix (CCP) tout au long du cycle de vie de la mission, y compris lors de la formation, de l’examen et de la réduction des missions.  À l’étape de retrait, les conseils de la CCP pourraient favoriser des transitions plus fluides entre les missions et l’équipe de pays des Nations Unies, a estimé le représentant.  

Mme ANNE GUEGUEN (France) a souligné la nécessité de continuer de placer la paix durable au cœur des objectifs des opérations de maintien de la paix.  Le Conseil, a-t-elle dit, doit jouer un rôle dans l’adaptation permanente des missions, mandatées bien souvent aussi pour renforcer les capacités des autorités locales dans de nombreux domaines, du désarmement à la réforme du secteur de la sécurité, en passant par la lutte contre l’impunité.

Par ailleurs, les opérations de maintien de la paix ne peuvent jouer le rôle décisif qui est le leur toutes seules, a fait remarquer la représentante, qui a rappelé la responsabilité du pays hôte, tout en soulignant l’importance de la synergie entre des initiatives politiques prises par le Conseil de sécurité, les voisins du pays en crise, les organisations régionales et les médiateurs ad hoc.  « Il est également un domaine crucial pour la stabilité de long terme mais trop souvent négligé: le domaine économique et social », a noté Mme Gueguen. 

En outre, elle a estimé que les transitions du maintien de la paix vers la consolidation de la paix constituent un pivot pour assurer l’enracinement de la paix durable.  « Ces transitions ne peuvent réussir qu’en favorisant l’appropriation par le gouvernement des enjeux politiques et sécuritaires, mais aussi économiques et sociaux liés au départ de l’opération », a-t-elle prévenu.  Cela a été le cas en Côte d’Ivoire où, dès 2014, l’ONUCI a changé de paradigme, passant d’un mandat largement sécuritaire à un mandat de soutien au renforcement des capacités ivoiriennes, a ajouté la représentante.  « Aujourd’hui, au Libéria et en Haïti, un mouvement comparable est en marche », s’est-elle félicitée.

M. TEKEDA AEMU (Éthiopie) a demandé que les opérations de paix suivent une stratégie politique claire, ainsi qu’une stratégie de retrait définie en amont afin d’assurer une transition sans heurts.  Il a exhorté le Conseil à adopter des mandats clairs, réalistes, actualisés et bien séquencés, comme l’avait prôné le Secrétaire général devant le Conseil en avril dernier.

La pérennisation de la paix exige un « changement d’état d’esprit » au sein de l’ONU et une meilleure coordination entre ses diverses entités, a-t-il dit.  Il a ensuite souligné l’importance des partenariats mondiaux et régionaux de l’ONU, tels qu’avec l’Union africaine (UA), organisation qui a montré sa capacité à réagir immédiatement à des crises.  Cette division du travail doit être utilisée à bon escient, a-t-il affirmé. 

Enfin, il a espéré que la prochaine consultation entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA soit l’occasion de renforcer la coopération entre les deux organisations.

M. LIU JIEYI (Chine) a rappelé que les menaces sécuritaires et non sécuritaires ne cessent d’évoluer, ce qui exige du Conseil qu’il adapte les opérations de maintien de la paix, et de l’ONU qu’elle mette l’accent sur la prévention des conflits.  Il a jugé essentiel de s’engager en faveur des objectifs de la Charte des Nations Unies, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. 

Beaucoup de questions à l’ordre du jour du Conseil relèvent en effet des affaires internes des États concernés, a estimé le délégué, qui a plaidé pour des approches sur mesure pour chaque situation.  La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour empêcher la diffusion des idéologies extrémistes et renforcer les capacités des pays en développement pour lutter contre les groupes terroristes, a poursuivi le représentant. 

En outre, l’ONU doit prendre au sérieux les préoccupations des pays fournisseurs de contingents, à l’heure où leurs Casques bleus sont tenus d’exercer des responsabilités de plus en plus nombreuses et complexes dans le paysage du maintien de la paix. 

M. JONATHAN ALLEN (Royaume-Uni) a appuyé la vision du Secrétaire général en faveur de la pérennisation de la paix, laquelle exige des synergies accrues au sein du système onusien.  Le point de départ de toute opération de maintien de la paix est constitué par les informations rassemblées par l’ONU sur une situation de conflit donnée, a-t-il dit. 

Il a exhorté le Conseil à se montrer davantage « discipliné » quand il établit les mandats des missions.  Ceux-ci doivent être séquencés et comprendre « des seuils de réussite », a-t-il poursuivi.  Le délégué a souligné la nécessité de miser davantage sur les équipes de pays, toutes les situations n’exigeant pas en effet le déploiement d’une opération de maintien de la paix.

Il a en outre demandé un examen plus régulier de ces opérations et s’est réjoui du prochain examen de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Le délégué a affirmé qu’il ne pouvait pas y avoir de retrait satisfaisant d’une mission sans qu’une solution politique n’ait été trouvée dans le pays hôte.

À cette fin, il a appelé les représentants du Secrétaire général à explorer toutes les pistes possibles et souligné le rôle que pouvaient jouer les équipes de pays. 

Enfin, il a exhorté le Conseil à « hausser le ton » lorsque cela est nécessaire, ce dernier étant trop souvent dans l’impasse et dans l’incapacité d’agir même lorsque ses résolutions sont bafouées. 

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) a estimé que les missions de maintien de la paix devraient privilégier des mandats clairs qui puissent être mis en œuvre de manière réaliste.  « Les mandats ne doivent pas être figés, mais susceptibles d’évoluer » en fonction de la situation sur le terrain, a-t-il préconisé, soulignant qu’il ne faut pas craindre de réduire les effectifs d’une mission ou de mettre l’accent sur les tâches de police ou de réforme du secteur de la sécurité lorsque c’est nécessaire. 

La transition de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) à la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) permettra ainsi de passer d’une phase de gestion de la crise à une phase de renforcement des institutions de l’état de droit et de la police nationale et de suivi de la situation en matière de droits de l’homme dans le pays, a déclaré le représentant à titre d’exemple. 

Il a rappelé qu’il existe à Brindisi, en Italie, un Centre stratégique de ressources de maintien de la paix.  Pour sa délégation, l’ONU doit œuvrer à « notre objectif commun » en étroite coopération avec les organisations régionales et ses autres partenaires.  L’implication de la société civile est essentielle à cet égard, notamment s’agissant des femmes, qui peuvent jouer un rôle déterminant dans la médiation et la prévention des conflits. 

Lui aussi opposé au cloisonnement entre les piliers des Nations Unies, M. Lambertini s’est déclaré favorable à la revitalisation de la Commission de consolidation de la paix (CCP).

M. FODÉ SECK (Sénégal) a indiqué que le concept de pérennisation de la paix permettait de remédier à la fragmentation de l’action de l’ONU et des acteurs pertinents dans le domaine de la paix et de la sécurité.  Il a ensuite souligné les obstacles qui empêchent les opérations de paix de l’ONU de remplir pleinement leur mandat en évoquant la situation au Mali.

La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) opère dans un environnement délicat marqué par des attaques contre le personnel de l’ONU et peine à réunir les capacités nécessaires, a-t-il déploré.

Le délégué a souligné la nécessité que les missions de l’ONU soient dotées des capacités nécessaires et de mandats réalisables définis sur la base d’informations objectives.  Cela requiert, avant tout déploiement, une évaluation franche et claire des exigences, notamment en matière de ressources, a-t-il dit.

Le délégué a estimé que les opérations de paix, en tant qu’outils politiques, pouvaient aider à promouvoir la prévention des conflits, la médiation, la protection des civils en période de conflit et le maintien de la paix.

Enfin, le représentant du Sénégal a exhorté le Conseil à renforcer sa coopération avec l’Union africaine et à « réussir » les stratégies de sortie des missions afin de pérenniser la paix. 

M. DOVGANYUK (Kazakhstan) a considéré que la formulation des mandats devrait être informée, dès le départ, par une vision stratégique du Conseil, dans le cadre de laquelle tous ses membres puissent avoir le temps de se lancer dans des consultations intensives avec des experts. 

Le maintien de la paix exige en effet une cohérence, un engagement et une coordination entre l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social (ECOSOC), ainsi qu’avec les équipes de pays de l’ONU et la Commission de consolidation de la paix (CCP), laquelle peut jouer le rôle de « passerelle » entre tous les acteurs, et prêter main forte dans la mobilisation des ressources. 

Aussi est-il important de renforcer le Bureau d’appui à la consolidation de la paix et le Fonds pour la consolidation de la paix, avec l’engagement de long terme des bailleurs de fonds, de la Banque mondiale et des banques régionales. 

Pour le Kazakhstan, le succès dépendra aussi de « chronologies réalistes » pour le déploiement des opérations de maintien de la paix et l’assistance au développement.  Il sera également garanti par l’implication des femmes et des jeunes dans la consolidation de la paix, a fait remarquer le délégué, qui a également encouragé à se pencher sur les causes profondes des conflits, telles que les crises socioéconomiques ou la gestion frauduleuse et l’appropriation des ressources naturelles.

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a dit qu’en ce qui concerne la transition entre les activités de maintien de la paix vers la consolidation de la paix, cinq éléments étaient à retenir.  Premièrement, l’appropriation nationale est une condition indispensable pour la création de capacités de base à la fois efficientes et efficaces pouvant conduire à l’établissement d’un État plus stable et plus viable.  L’objectif du renforcement institutionnel est de réduire la dépendance des gouvernements des pays sortant de conflit à la communauté internationale et de promouvoir l’autosuffisance. 

Deuxièmement, le consensus entre les parties prenantes nationales et internationales sur un large programme de consolidation de la paix est important pour la réussite du renforcement institutionnel et des efforts de consolidation de la paix dans leur ensemble.  S’il y a un manque de compréhension des deux côtés, il y aura peu de progrès tangibles pour assurer une paix durable.

Troisièmement, a continué le représentant, l’Ukraine soutient l’approche consistant à intégrer la perspective du renforcement institutionnel, adaptée à chaque pays et situation, dans les mandats respectifs des missions de l’ONU dès leur début. 

Quatrièmement, le représentant a dit croire au pouvoir transformateur des organisations régionales et sous-régionales en matière de consolidation de la paix. 

Enfin, la Commission de consolidation de la paix (CCP) est la mieux à même de rassembler des acteurs externes et non étatiques dans le but d’assurer la création d’institutions crédibles, légitimes, responsables et résilientes dans les pays sortant d’un conflit.  Le Conseil devrait la considérer comme un outil viable à sa disposition lorsque les situations ne sont plus une « étape de crise » mais encore considérées comme fragiles et méritent une attention plus dévouée, ciblée et soutenue.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré qu’un long chemin avait été parcouru dans l’évolution de l’architecture de consolidation de la paix depuis les deux précédents examens.  Toutefois, ces deux examens ont reconnu que le pays hôte portait la responsabilité première de rétablir et maintenir la paix sur l’ensemble de son territoire et d’assurer la sécurité de ses citoyens. 

Pour sa délégation, « surcharger les mandats de fonctions génériques » n’améliorera pas leur efficacité, et entraînera d’inévitables dépassements budgétaires.  La délégation russe a été d’avis que les Casques bleus eux-mêmes ne devaient pas prendre part à un conflit.  Il s’est déclaré heureux d’entendre aujourd’hui de la part de plusieurs membres du Conseil de sécurité que le principal objectif des opérations de maintien de la paix était d’accompagner les processus politiques. 

En revanche, la Fédération de Russie ne peut pas appuyer l’idée que la pérennisation de la paix passe par une intégration des piliers de la paix et du développement, deux concepts qui ne sont pas forcément liés entre eux, selon lui.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a déclaré qu’une paix durable n’était possible qu’en s’attachant à comprendre les causes profondes des conflits.  La pérennisation de la paix, a-t-il relevé, dépend de la « diplomatie préventive », telle que la médiation, menée par le biais d’un « processus politique actif », ainsi que d’objectifs clairs et mesurables des missions de maintien de la paix, définis en fonction des ressources et des capacités, ainsi que du strict respect des mandats. 

Le succès des interventions, a ajouté le représentant, dépend également de l’établissement d’échéances réalistes des opérations de maintien de la paix et des activités de consolidation de la paix. 

En outre, l’indépendance, la neutralité et le respect des États et des droits de leurs peuples doivent être respectés en tout temps afin que l’ONU demeure un acteur légitime, capable de promouvoir un règlement politique des conflits. 

Le représentant a également plaidé pour un renforcement des alliances stratégiques avec les organisations régionales et sous-régionales, telles que l’Union africaine. 

Enfin, il a souligné que, comme l’a démontré l’exemple de la Colombie, l’inclusion de la société civile était essentielle au succès de tout processus de pérennisation de la paix.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a dénoncé le « fardeau irréaliste » qui pèse sur les opérations de maintien de la paix, celles-ci étant devenues, selon lui, le symbole de l’inaction de l’ONU.  Il a souligné la nécessité de remédier aux failles opérationnelles et techniques de ces missions, de promouvoir une vision globale des mandats et de prévoir des ressources suffisantes, sous peine de ruiner les efforts d’ores et déjà consentis.

Prenant l’exemple de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), qui a permis de diminuer la souffrance humaine dans cet État du Soudan, le délégué a défendu une coordination plus étroite avec le pays hôte, en invitant à méditer les leçons du passé. 

Il a insisté sur la confiance dont les efforts onusiens doivent bénéficier au sein du pays hôte.  C’est un critère de base, a-t-il insisté, en prenant l’exemple vertueux de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI).  La Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) a des difficultés pour parvenir à un partenariat stratégique en raison de l’absence d’une vision commune du Conseil sur la situation au Soudan du Sud, a-t-il déploré.

Il a demandé que les stratégies de retrait des missions obéissent à des critères clairs, définis en amont, et à un échéancier, en prenant les contre-exemples de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) et de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), missions qui ont été déployées trop longtemps.

M. Aboulatta a plaidé pour une révision des mandats des missions de l’ONU en République centrafricaine, au Soudan du Sud et en République démocratique du Congo (RDC) pour prendre en compte les impératifs opérationnels et politiques.

Enfin, il a souligné le rôle important joué par la Commission de consolidation de la paix et mentionné la réunion ministérielle sur les opérations de paix de l’ONU que son pays devrait accueillir en 2018.

M. DUCLOS (Pérou) a indiqué que l’institutionnalisation des objectifs concrets devait faire systématiquement partie de la phase de planification des opérations de maintien de la paix, en s’appuyant sur les contributions de tous les acteurs nationaux, y compris des femmes et des enfants. 

Après avoir plaidé pour un renforcement du rôle de la Commission de consolidation de la paix (CCP), le Conseil de sécurité, en établissant les mandats, doit prendre en compte les aspects politiques, en faisant preuve de pragmatisme et de souplesse. 

Pays contributeur de troupes, qui se prépare à servir la communauté internationale en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, le Pérou a réaffirmé en conclusion son attachement à la formulation de réponses plus efficaces de la part des Nations Unies, pour leur permettre de s’acquitter des objectifs de la Charte.

M. TORE HATTREM (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a déclaré que le Conseil de sécurité pouvait contribuer à la pérennisation de la paix en mettant l’accent sur une perspective à long terme dans les mandats de ses missions de maintien de la paix.  Il a donné pour exemple la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), qui prendra la relève de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), permettant à Haïti de consolider les gains réalisés afin de parvenir à une paix durable. 

Les opérations de maintien de la paix, a poursuivi le représentant, devraient également être axées sur les populations et sur l’inclusion, en collaboration avec les communautés locales, y compris les femmes, comme l’a recommandé le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix. 

En outre, a conclu M. Hattrem, un financement stable et durable est essentiel à la consolidation de la paix, afin d’éviter les conséquences économiques négatives associées au processus de transition à la fin des missions de maintien de la paix.

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) a déclaré que le grand défi pour la paix est la résilience de courte durée « aux tensions et aux velléités déstabilisatrices récurrentes » dans les pays encore fragiles, avertissant que les efforts de l’ONU pour instaurer, maintenir et consolider la paix resteraient vains si la paix recherchée n’est pas pérenne.

Il a également pointé du doigt le cloisonnement qui existe entre les différents organes concernés par la recherche de la paix et le « prisme étroit » à travers lequel la consolidation de la paix a été perçue « jusqu’à présent ».

Pour le représentant, lorsqu’elles disposent de mandats clairs, réalistes et réalisables, tout en bénéficiant de l’appui politique nécessaire, les opérations de maintien de la paix restent l’un des outils les plus souples et les plus adaptés dont l’ONU dispose pour faire face aux défis du maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Il a néanmoins constaté que les mandats non adaptés aux situations sur le terrain engendrent des résultats mitigés et peuvent mettre en danger aussi bien les populations à protéger que les contingents sur le terrain.  M. Laassel a jugé primordial d’adapter les missions de maintien de la paix aux mandats et aux besoins sur le théâtre des opérations, estimant notamment que chaque mission devait être considérée dans son contexte politique et sécuritaire particulier.

Il a également estimé que la création d’une opération ne devait pas être une fin en soi, ni la seule solution envisagée.  Il est important, a-t-il par ailleurs affirmé, que des efforts de stabilisation et de règlement pacifique du conflit soient entrepris simultanément aux opérations militaires de protection des civils.

À hauteur de 0,5% des dépenses militaires mondiales, a poursuivi le délégué marocain, le rôle crucial des opérations de consolidation de la paix et d’instauration d’une paix durable est indéniable.

Mme CAITLIN WILSON (Australie), intervenant au nom du groupe CANZ (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), a constaté que les transitions ratées au sortir d’une mission de maintien de la paix faisaient augmenter le risque de rechute dans un conflit.  Elle a jugé urgent d’améliorer les transitions, évoquant notamment la fermeture prochaine de la Mission des Nations Unies au Libéria, la réduction de la présence au Darfour et la transition en Haïti.

Des transitions effectives, a-t-elle souligné, nécessitent un processus de consultations élargi et l’accès à des financements pour veiller à ce que les approches en matière de ressources et de politiques soient appropriées.  La représentante a aussi appelé le Conseil à travailler de manière rapprochée avec le Secrétariat et la Commission de consolidation de la paix (CCP).  Elle a ensuite noté un manque de capacité « troublant » en ce qui concerne l’aptitude de l’équipe de pays de l’ONU au Libéria à s’atteler à des tâches importantes.

Tournant ensuite son attention sur la question du financement « qui doit être prévisible et durable », Mme Wilson a appelé à une meilleure coordination avec les autres contributeurs à la consolidation de la paix, qu’il s’agisse d’agences de l’ONU, d’institutions financières internationales ou de partenaires régionaux et bilatéraux. 

Elle a aussi estimé que les donateurs avaient un rôle clef à jouer pour faire face à la fragmentation du financement de la consolidation de la paix.  Outre la rationalisation des ressources existantes consacrées à la consolidation de la paix, la déléguée a aussi appelé à autonomiser l’architecture de consolidation de la paix pour lui permettre d’interagir auprès des institutions financières internationales afin d’obtenir des financements.  Il faut également mettre davantage l’accent sur la participation des femmes, a-t-elle ajouté.

Mme Wilson a par ailleurs appelé à poursuivre les efforts pour aligner les processus de réforme avec les perspectives de pérennisation de la paix, exhortant notamment le Conseil, le Secrétariat et les fonds et programmes à maintenir l’attention sur les raisons pour lesquelles les réformes ont été lancées.

Elle a estimé que la Conférence des ministres de la défense sur le maintien de la paix, qui doit se dérouler à Vancouver au mois de novembre, permettra de faire avancer cet objectif.

M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a soutenu toute initiative visant à renforcer la relation du Conseil de sécurité avec le Conseil des droits de l’homme et ses mécanismes.  Remarquant que les opérations de maintien de la paix ne s’attaquaient pas toujours aux causes des conflits, il a suggéré de mieux aborder la situation sur le terrain en tenant compte des expériences couronnées de succès.  Il a jugé nécessaire d’avoir une connaissance très fine des circonstances du pays.

Le représentant a rappelé le rôle important que doit jouer le dispositif des Nations Unies pour la consolidation de la paix pour recenser les conditions devant être réunies dans le pays hôte pour la pérennisation de la paix et éviter le prolongement du mandat de la mission de l’ONU.  Le risque de retomber dans le conflit étant très important, la transition doit être menée avec l’appui du pays d’accueil, a-t-il souligné en attirant aussi l’attention sur l’importance de disposer de ressources adéquates pour les missions onusiennes.

Enfin, a-t-il plaidé, le Conseil de sécurité doit déterminer l’existence de toute menace à la paix et formuler des recommandations pour maintenir la paix et la sécurité internationales.  Il a engagé le Conseil de sécurité à intégrer le concept de paix durable dans ces recommandations.

M. SAMUEL MONCADA (Venezuela), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a déclaré que les opérations de maintien de la paix de l’ONU ne devraient pas être utilisées comme substituts au règlement pacifique des conflits et à la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits. 

La mise en œuvre des tâches confiées aux opérations de maintien de la paix doit être fondée sur « l’appropriation nationale », de la préparation jusqu’au terme des missions.  Il devrait exister une synergie entre les activités de maintien de la paix et la consolidation de la paix, afin d’en garantir la pérennisation. 

Les principes de souveraineté, de l’intégrité territoriale et de non-ingérence des États doivent être assurés, a-t-il ajouté, afin d’assurer le succès des opérations de maintien la paix.  La prévention des conflits est une responsabilité collective et nationale, a relevé le représentant, ajoutant que la diplomatie préventive et le strict respect du droit international étaient également nécessaires à la prévention et à la pérennisation de la paix. 

Il réitéré l’attachement du Mouvement au rapport du Comité spécial des opérations de maintien de la paix en tant que forum unique à même de procéder à l’étude de tous les aspects de la question.  Enfin, il a souhaité que les consultations en cours tiennent compte des ressources durables et prévisibles nécessaires à la pérennisation de la paix. 

M. MEYER (Brésil) s’est dit favorable à une stratégie qui tienne compte de tout le processus de paix, de la prévention au développement à long terme, en passant par la résolution du conflit et le maintien de la paix.  Le Conseil de sécurité, a-t-il estimé, doit garantir le financement total des opérations de maintien de la paix et prévoir des mandats appropriés avec un équipement adéquat. 

Pour le succès de ces opérations, il a recommandé de faire le lien entre la formulation des politiques et la mise en œuvre sur le terrain, ainsi qu’entre les consultations au sein du Conseil et le Secrétariat et les pays fournisseurs de troupes.

Éviter de replonger dans le conflit est tout aussi essentiel que le maintien de la paix, a-t-il poursuivi avant de commenter les conclusions du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix.  Il a ainsi souligné l’importance de donner la priorité au processus politique dans les efforts de pérennisation de la paix. 

Il a aussi estimé que les activités de consolidation de la paix ne devaient pas être subordonnées à des financements volontaires.  Le représentant a globalement appuyé l’architecture de consolidation de la paix des Nations Unies, notamment en sa qualité de Président de la formation Guinée-Bissau de la Commission de consolidation de la paix (CCP).  Le Brésil a assuré la promotion des projets à impact rapide par exemple.  Il a espéré que la pérennisation de la paix serait intégrée dans le plus de missions possible.

M. CARLOS ARTURO MORALES LÓPEZ (Colombie) a déclaré que des ajustements structurels sont nécessaires pour que les missions de maintien de la paix soient véritablement efficaces.  Cependant, il s’est dit convaincu que « nous avançons dans la bonne direction dans la tâche cruciale d’unir nos efforts afin de contribuer à la pérennisation de la paix et de la sécurité à l’échelle mondiale ». 

Il a donné pour exemple le processus de paix dans son pays qui, en tenant compte des réalités politiques et sociales sur le terrain, et avec la volonté politique du Gouvernement et le soutien du Conseil de sécurité, a été un succès.  En outre, l’appropriation nationale de ce processus, a-t-il relevé, a été déterminante. 

Il a plaidé pour que la prévention des conflits devienne l’un des piliers essentiels de l’action des Nations Unies.  Cette « culture de prévention des conflits », a ajouté le représentant, devra inclure des aspects tels que le développement économique, la cohésion sociale et la protection des droits de l’homme.

M. TANMAYA LAL (Inde) a déclaré que les problèmes structurels des opérations de maintien de la paix étaient dus au fait que la nature des interventions avait changé de façon importante au cours des dernières années, avec l’implication croissante d’acteurs non étatiques et de réseaux terroristes internationaux.

Il est essentiel d’investir davantage dans le dialogue politique et de combler l’écart entre les ressources allouées aux opérations de maintien de la paix et à celles dévolues à la pérennisation de la paix, a-t-il ajouté.  Il a déploré le fait que les agences de l’ONU chargées de mettre en œuvre les programmes liés à la paix opèrent hors du cadre du Conseil de sécurité et disposent de peu de ressources financières. 

Il est important que les missions de maintien de la paix soient financées de façon adéquate à long terme et prévoient des mesures de transition, notamment afin de restaurer la légitimité de l’État et de mettre en place les conditions nécessaires à une paix durable, a relevé le représentant.

Il a proposé d’étudier la possibilité d’octroyer un pourcentage des fonds destinés aux opérations de maintien de la paix aux activités de construction et de pérennisation de la paix. 

M. GÜVEN BEGEÇ (Turquie) a déclaré qu’il y avait beaucoup de mérite à donner la priorité à l’obtention de solutions politiques en matière de prévention et de résolution de conflit.  Il a estimé que la médiation était un instrument clef dans lequel il importait d’investir davantage, affirmant que celui-ci devrait être utilisé plus souvent afin de trouver une issue politique pacifique aux conflits et de répondre à leurs causes profondes.

Le représentant a ensuite constaté que la pérennisation de la paix comprend les objectifs de développement durable, de même que la protection et la promotion des droits de l’homme et de l’état de droit.  Afin de renforcer l’efficacité des efforts de pérennisation de la paix, le délégué a engagé l’ONU à déployer des missions plus intégrées sur le terrain, capables de renforcer les capacités des pays hôtes et de créer des partenariats avec des organisations régionales et internationales pertinentes.  Il a également appelé à doter les missions de mandats plus clairs et moins ambigus.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a axé son intervention sur trois aspects: l’intégration d’une vision de long terme dès le début de la mission, le caractère inclusif de l’ensemble de l’appui, et en particulier le rôle central des femmes et de la jeunesse, et l’importance de garder en perspective les causes profondes des conflits pour agir à toutes les étapes. 

Selon le représentant, la pérennisation de la paix passe par une vision d’ensemble.  Les objectifs à atteindre sont à définir dès le début d’une intervention dans un pays, de façon à permettre à l’opération de paix de se retirer une fois les objectifs remplis.  Dans ce contexte, la mission doit mettre à disposition et offrir dès ses premiers jours les outils qui permettront plus tard, au pays d’assumer seul sa sécurité.  Un élément important de la pérennisation de la paix réside dans l’existence d’un secteur de la sécurité fiable.

En outre, une paix pérenne implique la participation de tous dans le processus décisionnel, hommes et femmes.  Afin de garantir la prise en compte des besoins et aspirations spécifiques des femmes, il est indispensable de permettre à celles-ci de participer à la prise de décisions concernant les aspects qui sont susceptibles d’exercer un impact sur leur vie. 

La résolution 1325 (2000) a tracé la voie en cette matière.  La résolution 2250 (2015) sur les jeunes, la paix et la sécurité est complémentaire en soulignant l’importance de la jeunesse dans le domaine des actions menées en faveur de la paix et de la sécurité.

Le représentant a aussi mis l’accent sur l’importance de la médiation, de la réconciliation et le fait de garder une attention particulière pour les causes des conflits.  Il s’agit de soutenir les autorités pour recréer un contrat social fort dans lequel l’État se montre capable de fournir les services de base. 

Enfin, la coopération avec l’équipe de pays doit être absolue: son travail sur des thèmes fondamentaux, tels que la gouvernance, la chaîne pénale, les élections, la justice transitionnelle, est essentiel pour pérenniser la paix et complémentaire aux efforts de l’opération de maintien de la paix, a indiqué le représentant.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a dit, en sa qualité de Président du Groupe des Amis de la paix durable, vouloir continuer à travailler avec le Secrétaire général et les États Membres à faire mieux comprendre le défi systémique de la fragmentation des travaux de l’Organisation.  Il a souhaité pour cela que l’ONU utilise tous les outils de la diplomatie préventive et de la consolidation de la paix. 

Il faut également que le Conseil de sécurité continue à concevoir des mandats d’opérations de maintien de la paix et de missions politiques spéciales suffisamment flexibles, en lien avec la réalité du terrain, et qui couvrent toute les phases de l’après-conflit.

Le représentant a aussi souhaité une meilleure coordination entre le Conseil de sécurité et les pays fournisseurs de contingents, les contributeurs sur le plan financier, les États hôtes, les organisations régionales, les agences du système, les autorités nationales et la société civile. 

Il a émis l’espoir de voir la réforme proposée par le Secrétaire général se traduire en une architecture de pérennisation de la paix plus efficace en termes de prévention, de maintien et de consolidation de la paix. 

Il a plaidé en faveur d’un vrai changement institutionnel qui repose sur les piliers de la transparence, l’inclusion, la responsabilité et un plus grand appui financier et logistique des opérations de maintien de la paix.

Mme JOANNE ADAMSON, de l’Union européenne, a plaidé pour une action et une coopération internationales « sans précédent » afin de faire face à l’échec des mesures de pérennisation de la paix, qui est à la base des défis multiples auxquels fait face la communauté internationale.  Il est urgent, a-t-elle insisté, de confronter cette insécurité globale grandissante. 

Pour ce faire, elle a préconisé la poursuite de solutions politiques, à travers la prévention et la résolution politique des conflits.  Le maintien de la paix n’est pas une fin en soi, a poursuivi la représentante, ajoutant que les mandats des opérations de maintien de la paix doivent être souples et s’adapter aux conditions sur le terrain.

Les activités de prévention des conflits de l’ONU devraient s’articuler de concert avec la Stratégie globale de l’Union européenne de façon stratégique et cohérente, en accord avec la Charte des Nations Unies, et inclure le partage des renseignements et de l’analyse lors de leurs opérations respectives.  Cette stratégie doit mettre l’accent sur une action rapide afin de favoriser la prévention des conflits, a ajouté la représentante.

En outre, a-t-elle relevé, une plus grande intégration entre les activités de maintien de la paix et de développement doit être une priorité.

Mme MINNA-LIINA LIND (Estonie) a rappelé que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies jouaient un rôle essentiel, en donnant pour preuve que, selon les recherches sur le sujet, les activités menées dans ce cadre permettent de réduire de plus de 90% le nombre de morts parmi les civils. 

Notant cependant le caractère de plus en plus instable et complexe des crises, elle a reconnu la nécessité de rechercher tous les moyens possibles de s’attaquer aux instabilités dans le monde avant qu’elles ne se transforment en conflits armés.  Pour l’Estonie, il faut mettre l’accent sur les mesures préventives et les solutions politiques.  « Nous soutenons pleinement les efforts du Secrétaire général à cet égard », a-t-elle dit.

La représentante a en outre jugé important de se concentrer sur une transition postconflit capable de mettre en œuvre une paix durable, expliquant qu’il fallait pour cela des mandats plus concrets et plus forts pour les opérations de maintien de la paix des Nations Unies.

Mme Lind a ensuite appelé les différents acteurs du maintien de la paix à travailler ensemble pour résoudre les conflits, en recommandant de veiller à bien comprendre les causes du conflit.  Elle a jugé utile de disposer d’unités spécialisées au sein des missions de maintien de la paix de l’ONU lorsque cela est nécessaire, par exemple pour le renseignement.  Parmi les autres recommandations qu’elle a faites, elle a mis l’accent sur l’importance de la prévention en vue de la pérennisation de la paix.

Mme NOA FURMAN (Israël) a dit qu’avec la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) à ses frontières, Israël avait appris que son soutien ne valait rien si ces forces étaient inefficaces.  La communauté internationale doit insister sur la mise en œuvre intégrale des mandats de maintien de la paix.  Comme le Conseil étudie actuellement le renouvellement du mandat de la FINUL, il est temps d’examiner la situation dans le sud du Liban, a indiqué la représentante. 

Malgré la présence de la FINUL sur le terrain, « nous avons remarqué une tendance inquiétante », a-t-elle dit.  Le Hezbollah a multiplié par 10 son arsenal de missiles et de roquettes et a stocké des armes sophistiquées, a dénoncé Mme Furman.  Il installe délibérément ces armes dans les villages et les villes, exploitant les civils libanais comme boucliers humains.

Le Hezbollah a même tenté de dissimuler ses activités militaires sous la prétendue organisation non gouvernementale « Green Without Borders ».  Ces activités montrent, selon elle, la récurrence des violations flagrantes par le Hezbollah de la résolution 1701 (2006).

Il est extrêmement important que la FINUL s’attaque aux activités illégales qui se déroulent dans le sud du Liban et aide le Gouvernement libanais à étendre son contrôle sur l’ensemble de son territoire.  Le Conseil de sécurité doit garantir l’accomplissement complet du mandat de la FINUL et devrait rester pleinement informé de la situation réelle sur le terrain, y compris des obstructions et des contestations à la mise en œuvre du mandat. 

« Nous aimerions également saisir cette occasion pour affirmer le soutien d’Israël à la FNUOD dont les forces vont progressivement revenir aux positions de l’ONU dans la zone de séparation », a ajouté la représentante.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a rappelé que son pays était un des principaux contributeurs de troupes d’opérations de maintien de la paix des Nations Unies dans le monde depuis six décennies.  Cet objectif exige des mandats avec des tâches réalistes, de la flexibilité pour s’adapter aux changements sur le terrain et des stratégies claires de retrait.  Lorsque des vies sont menacées, l’objectif du maintien de la paix doit primer sur la limitation des coûts. 

Le manque de ressources suffisantes résulte inévitablement de la non-mise en œuvre des mandats des Casques bleus, a estimé la représentante.  « Nous devrions parler de l’amélioration des capacités, et non des compressions du budget de maintien de la paix », a encore suggéré Mme Lodhi.

La pleine mise en œuvre des mandats exige une communication entre leurs concepteurs et leurs rédacteurs et ceux qui les mettent en œuvre sur le terrain.  Pour y parvenir, a conseillé la représentante, « nous devrions renforcer l’interaction entre les parties prenantes, améliorer la circulation des informations dans toutes les directions et à toutes les étapes, et améliorer les capacités pour générer des analyses et évaluations précises et objectives et puis les introduire dans les processus décisionnels ». 

Un partenariat efficace avec les pays fournisseurs des contingents devrait s’étendre du déploiement et des aspects opérationnels à un rôle dans la prise de décisions et la formulation des politiques.  Le Conseil de sécurité doit conduire ce partenariat.  Le dialogue est important et doit être continu et durable. 

Il faut également une interface plus complète entre les activités de maintien de la paix et de consolidation de la paix grâce à l’engagement précoce de la Commission de consolidation de la paix (CCP) dans le cadre des stratégies de sortie et de transition. 

Une convergence accrue entre les perspectives des partenaires de développement et des pays hôtes, basée principalement sur les priorités de ces derniers, est essentielle, a encore suggéré Mme Lodhi. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a encouragé le rôle du Conseil de sécurité à trouver de meilleurs moyens de promouvoir des solutions politiques durables aux crises.  Les solutions sont aussi multidimensionnelles que les causes des conflits, a souligné le représentant, expliquant que les missions seules ne peuvent pas apporter la paix mais qu’elles peuvent néanmoins faire leur part dans un contexte plus large.  En traitant des causes structurelles et sous-jacentes des conflits, nous devons, a insisté le représentant, étudier les véritables moteurs de tous les cycles d’un conflit et pas seulement les différentes étapes.  Le Conseil devrait donc exploiter les informations recueillies par le système des Nations Unies, les bureaux sur le terrain et les différents mécanismes et procédures.  Une analyse intégrée lui permettrait de mieux définir les objectifs stratégiques et élaborer des mandats « intelligents » pour pouvoir utiliser plus efficacement les différents instruments. 

Il faut, a poursuivi le représentant, un engagement international bien coordonné et bien séquencé.  Nous n’avons toujours pas compris, a-t-il regretté, que le retrait des soldats de la paix ne saurait marquer la fin de l’engagement de l’ONU et de la communauté internationale.  Cet engagement, dans lequel les opérations de maintien de la paix sont une « partie organique », exige une planification soigneuse, des critères bien précis et des mécanismes de surveillance fiables de même qu’une approche véritablement intégrée et des ressources adéquates et souples.  Le représentant s’est d’ailleurs attardé sur l’exemple de la Mission au Mali que l’Allemagne soutient.  Mon pays, a-t-il rappelé, est le plus gros contributeur du Fonds pour la consolidation de la paix et du Fonds d’affectation du Département des affaires politiques, sans compter les contributions importantes qu’il a faites aux mécanismes de stabilisation mis en place par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans différents pays dont l’Iraq.  Le représentant a enfin conseillé le renforcement du rôle de conseiller de la Commission de consolidation de la paix auprès du Conseil de sécurité.  Il a aussi estimé que le rôle des coordonnateurs résidents devrait davantage tendre vers un appui à l’agenda pour une paix durable.

M. GEORG SPARBER (Liechtenstein) a estimé que, dans ses efforts de maintien de la paix, l’ONU doit insister sur la promotion et le renforcement de l’état de droit et de ses institutions aux niveaux national et régional.  La dissuasion est un instrument essentiel de la prévention et, en la matière, la Cour pénale internationale (CPI) est le dernier recours, la responsabilité primaire d’enquêter et de poursuivre les crimes graves revenant aux États, a insisté le représentant.  Mais, a-t-il poursuivi, adhérer au Statut de Rome est un moyen de renforcer l’état de droit et les institutions judiciaires au niveau national parce que les États sont obligés de prouver leur capacité et leur volonté de poursuivre les responsables des crimes graves.  Adhérer au Statut de Rome et coopérer avec la CPI est donc un exemple concret de la mise en œuvre du seizième objectif de développement durable.  Il est important, dans ce cadre, que le Conseil de sécurité appuie ce travail, en assurant coopération et cohérence avec la Cour, y compris en partageant les informations et en aidant les États à protéger les témoins et exécuter les mandats d’arrêt. 

Le Conseil de sécurité, a encore insisté le représentant, a la responsabilité de mettre fin et de prévenir les atrocités de masse dans les situations de conflit.  Le Code de conduite de l’ACT sur l’action du Conseil contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, lequel compte 113 États signataires, est une bonne illustration de la volonté des Membres de l’ONU de rappeler le Conseil à sa responsabilité.  L’Assemblée générale aussi se sent plus responsable, s’est réjoui le représentant, en se félicitant de la création du Mécanisme d’établissement des responsabilités pour la Syrie qu’elle a créé quand le Conseil de sécurité s’est retrouvé dans l’impasse.  

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a déclaré que la pérennisation de la paix pouvait permettre de prévenir les conflits et d’assurer la reconstruction postconflit.  Les opérations de maintien de la paix doivent faire partie intégrante des outils disponibles afin d’assurer la pérennisation de la paix.  Les fonctions de diplomatie politique et de prévention des conflits doivent être mieux intégrées aux opérations de maintien de la paix de l’ONU.

En outre, a ajouté le représentant, la coopération entre l’ONU, les États Membres, et les organisations régionales et sous-régionales doit être accrue.  Il a de plus encouragé les Nations Unies à consulter de façon approfondie les parties prenantes impliquées dans les opérations de maintien de la paix, y compris les pays contributeurs de troupes. 

Le représentant a demandé au Secrétaire général d’examiner les options à sa disposition afin de restructurer les mécanismes liés à la paix et à la sécurité de l’ONU.  Enfin, il a plaidé pour un financement stable et adéquat des opérations de maintien de la paix et des activités de pérennisation de la paix.

M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud) a plaidé en faveur du renforcement de la prévention des conflits, ce qui implique de mettre davantage l’accent sur le rôle principal des politiques.  La mise en place de systèmes d’alerte précoce est tout à fait pertinent à cet égard.  L’Afrique du Sud et la Slovaquie coprésident le Groupe des Amis de la réforme du secteur de la sécurité, a-t-il rappelé en mettant l’accent sur les approches préventives de la pérennisation de la paix. 

Une action préventive est d’autant plus utile que le coût de la gestion des conflits est élevé, a-t-il remarqué.  Il faut donc, a-t-il déduit, que les Nations Unies passent de la gestion des conflits à la mise en place d’un environnement propice au dialogue inclusif, à une transition pacifique et à une paix sur le long terme. 

L’Architecture africaine de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) se concentre sur la prévention et la gestion des conflits, ainsi que sur la consolidation de la paix, a-t-il poursuivi en donnant l’exemple de la Force africaine en attente et de sa capacité de déploiement rapide. 

La mise en œuvre conjointe d’un cadre de l’UA pour des partenariats renforcés dans le domaine paix et sécurité reflète l’engagement de l’UA dans quatre domaines: prévention et médiation des conflits et paix durable; réponse aux conflits; gestion des causes profondes; et examen permanent et renforcement des partenariats. 

Le représentant a par ailleurs plaidé en faveur d’une bonne représentation des deux sexes au sein des structures de maintien de la paix des Nations Unies, une condition importante selon lui pour parvenir à des processus efficaces de pérennisation de la paix. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a rappelé son statut de pays contributeur de troupes depuis 1958, dont six missions en cours.  Elle s’est prévalue de son expérience pour affirmer que les missions ne peuvent pas se contenter d’adopter des formules toutes prêtes.  Elle a appelé à saisir l’occasion du Programme de développement durable à l’horizon 2030 pour améliorer les mandats prévus par l’ONU. 

Soulignant la nécessité de développer les capacités d’édifier des États pacifiques, inclusifs et résilients, elle a relevé la responsabilité de permettre un leadership, une appropriation et une reddition de comptes sur le long terme.

Insistant sur l’absence de solution unique, elle a souhaité que les mandats des opérations de maintien de la paix tiennent compte des différents facteurs qui causent les conflits et la fragilité.  Elle a recommandé aux Casques bleus de rester pleinement engagés sur le terrain avec les communautés locales.

En outre, a-t-elle remarqué, « nous savons que les personnes sont moins tentées de revenir à la violence si leurs droits sont respectés ».  Elle a donc appelé à tenir compte des droits de l’homme dans le maintien de la paix.  Pour l’Irlande, les mandats dans ce domaine doivent aussi prendre en compte les besoins spécifiques des femmes et des enfants, ainsi que l’égalité entre les sexes. 

La représentante a aussi considéré que le retrait de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) serait un test pour le système de l’ONU, dans la mise en œuvre de l’approche de pérennisation de la paix.

M. TAREQ MD ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a appelé à élargir le rôle du processus politique au sein des opérations de maintien de la paix afin de résoudre les conflits et d’assurer la pérennisation de la paix.  Il a déclaré que l’ONU devrait concentrer son action là où des opérations de maintien de la paix ont des chances réalistes d’atteindre leurs objectifs, à l’aide d’une orientation stratégique claire. 

Il a proposé la création d’un mécanisme institutionnel permettant des consultations régulières entre les pays contributeurs de troupes, les forces de sécurité nationales et le Conseil de sécurité.  Il a en outre plaidé pour que la mise sur pied des opérations de maintien de la paix se fasse sur une base réaliste, afin de préserver la crédibilité et la sécurité du personnel des Nations Unies.

Enfin, a-t-il conclu, l’allocation de ressources prévisibles et durables doit être une priorité afin d’assurer l’efficacité des opérations de maintien de la paix.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a fait une analogie entre un traitement médical et les opérations de maintien de la paix pour plaider en faveur non seulement de la prévention mais aussi de la prescription nécessaire lorsque les symptômes apparaissent.  Une mission de l’ONU doit être basée sur un diagnostic soigneux, a-t-il expliqué en recommandant de s’adapter aux situations changeantes. 

Il a pris l’exemple de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) pour laquelle l’ONU a fait preuve de souplesse en procédant à des modifications sur le plan géographique lorsque la situation s’est détériorée au centre du Mali.

Rappelant que les missions de l’ONU ne devaient pas durer pour toujours, le représentant a recommandé de fixer des jalons pour mesurer les progrès, notamment au niveau des institutions des droits de l’homme et du statut des femmes.  Le Conseil de sécurité devrait être ferme avec les pays qui ne coopèrent pas avec les Nations Unies, a-t-il lancé, souhaitant que les pays hôtes soient tenus responsables et visant en particulier le Soudan du Sud. 

Tout comme un médecin, un Casque bleu doit avoir les bons outils, a-t-il ajouté en prônant une modernisation des opérations de maintien de la paix.  Enfin, il a demandé aux pays fournisseurs de contingents qui ne l’ont pas encore fait de souscrire aux Principes de Kigali. 

Le représentant a par ailleurs souligné l’importance de fournir des hélicoptères aux missions qui en ont besoin pour le bon accomplissement des mandats.

M. KORNELIOS KORNELIOU (Chypre) a déclaré que son pays avait continuellement bénéficié, depuis les années 60, de l’implication des Nations Unies dans le but de parvenir à la paix et à la réunification de l’île, par l’intermédiaire de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP) et aux bons offices du Secrétaire général. 

Cette Force est un exemple d’opération de maintien de la paix efficace dont la continuation est indispensable aussi longtemps qu’un règlement du conflit n’est pas trouvé.

D’après la longue expérience de Chypre, a ajouté le représentant, la priorité la plus importante est d’arrêter le conflit et de s’assurer qu’il ne reprend plus.  En outre, assurer une paix durable et prévenir les conflits sont tout aussi importants. 

Par ailleurs, éradiquer les causes profondes des conflits devrait servir de base à la participation de l’ONU.  Tout examen des opérations de maintien de la paix devrait être guidé par la situation sur le terrain, a indiqué M. Korneliou, qui a estimé que l’objectivité et l’impartialité sont des principes clefs garantissant la crédibilité et l’efficacité des Nations Unies. 

Aussi longtemps que Chypre reste sous occupation militaire turque, il est clair que la présence de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre est absolument nécessaire.  Dans le même temps, l’ONU demeure le forum par lequel un règlement peut être atteint et devrait être la priorité de tous les efforts, a soutenu le représentant. 

M. KENNEDY MAYONG ONON (Malaisie) a appelé à prendre en compte les différentes composantes de chaque mission et recommandé de faire participer activement les pays hôtes à la consolidation de la paix.  Ceux-ci et le Conseil de sécurité doivent passer d’une approche paix et sécurité à une approche centrée sur le citoyen, a-t-il précisé. 

Il a conseillé de développer des opérations de maintien de la paix en suivant des approches plus stratégiques et en faisant participer les communautés.  La Malaisie a acquis une expérience en matière de formation au maintien de la paix, a-t-il indiqué, notamment pour rapprocher les intervenants de la population locale et gagner sa confiance. 

Il a souligné le rôle des femmes et des jeunes en tant que médiateurs pour la pérennisation de la paix.  De leur côté, les Casques bleus peuvent aider le pays hôte à parvenir à cet objectif, a-t-il ajouté.

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a appelé à une plus grande cohérence entre les activités de construction, de maintien et de consolidation de la paix, ainsi que de développement.  Il déclaré que les mandats des opérations de maintien de la paix devaient être clairs et réalistes, et constamment adaptés en fonction des réalités sur le terrain. 

Il a ajouté que les principes de consentement des parties, d’impartialité et de non-usage de la force sauf en cas de défense et de défense du mandat devaient être observés.  Certaines incertitudes concernant les fondements juridiques de l’utilisation de la force doivent être clarifiées, a-t-il noté.

En outre, les États qui se relèvent d’un conflit doivent être en mesure d’identifier les priorités de reconstruction et de mettre en œuvre les activités de développement. 

Par ailleurs, les opérations de maintien de la paix doivent respecter les principes de l’indépendance politique, de l’égalité souveraine des États et de l’intégrité territoriale, de même que le droit international humanitaire et les droits de l’homme.

M. SAMSON SUNDAY ITEGBOJE (Nigéria) a expliqué que la doctrine de la prévention dans les opérations de maintien de la paix ne visait pas seulement à éviter que des conflits n’éclatent, mais aussi à rester engagé dès les premiers signes de conflit et jusqu’à la phase de redressement.  Même lorsque le déploiement d’une mission n’est pas encore nécessaire, la menace de la force a un effet dissuasif à l’égard des parties, a-t-il aussi noté. 

Une approche unique n’est pas envisageable, a-t-il dit en souhaitant que chaque mandat s’adapte au conflit en présence.  Il a suggéré de prévoir des mandats progressifs pour mieux s’adapter à l’évolution de la situation sur le terrain. 

Pour la pérennisation de la paix, le représentant a misé sur l’implication de la société civile et de toutes les parties prenantes y compris les dirigeants communautaires et religieux.  Il faut aussi, a-t-il plaidé, que les pays hôtes s’approprient les processus de paix.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a déclaré que, pour briser le cycle des conflits et arriver à des solutions durables, « nous devons constamment évoluer et adapter les outils de maintien de la paix ».  Une stratégie globale visant à mettre en place des solutions pérennes fondées sur un accord politique ferme est essentielle, a-t-il noté. 

« Nous devons nous assurer, a poursuivi le représentant, que les opérations de maintien de la paix redonnent espoir aux populations et favorisent la crédibilité de l’ONU, et non le contraire. »  Il a salué les initiatives visant à éliminer l’exploitation sexuelle et la reddition de comptes des Casques bleus. 

Les mandats des opérations de maintien de la paix doivent être flexibles lorsque les circonstances l’exigent afin de refléter les réalités politiques et opérationnelles sur le terrain, et ce, pour toute la durée du conflit, a-t-il dit.  Cependant, l’action des agences de l’ONU n’est pas toujours aussi coordonnée qu’elle le devrait, a déploré le représentant, ajoutant qu’une approche intégrée et cohérente était donc nécessaire. 

À cet effet, a-t-il relevé, le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix a formulé des recommandations importantes visant à réformer et à renforcer les opérations de maintien de la paix par le biais d’une stratégie politique plus efficace. 

Pour le représentant, la réforme du secteur de la sécurité est un élément clef permettant de résoudre les causes profondes de l’insécurité, de favoriser le développement, la protection des civils et l’état de droit, de même que la consolidation de la paix.

M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a rappelé que son pays coprésidait le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix, avec la Norvège et l’Éthiopie.  Il a estimé que le Secrétariat et les États Membres devaient augmenter le niveau d’investissement en termes d’analyse, de stratégie et de planification, en vue de disposer de missions plus efficaces. 

Le Secrétariat doit notamment améliorer ses analyses pour que le Conseil de sécurité puisse mieux comprendre les dynamiques de terrain lorsqu’il doit ajuster les mandats.  Le représentant a aussi plaidé en faveur d’une stratégie politique complète qui prenne en compte tout le processus de pérennisation de la paix.

En outre, la stratégie globale de pérennisation de la paix doit refléter les partenariats stratégiques avec les parties prenantes autres que l’ONU, a ajouté le représentant avant de souligner l’importance des partenariats stratégiques avec les organisations régionales et notamment l’Union africaine. 

En ce qui concerne les activités de consolidation de la paix, il a recommandé les mêmes partenariats ainsi que d’autres avec des acteurs tels que les banques de développement et la société civile. 

En tant que Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP) cette année, il s’est attaché à renforcer de tels partenariats, a-t-il témoigné.  Il faut respecter l’appropriation nationale, a-t-il aussi recommandé.

M. OLIVIER MARC ZEHNDER (Suisse) a estimé qu’un dispositif unique regroupant l’ensemble des opérations de paix était le mieux adapté pour faire face à la complexité des défis actuels.  Les mandats de maintien de la paix devraient, dès le début et sans discontinué, couvrir tout l’éventail des réponses appropriées. 

Les transitions seraient ainsi plus fluides entre les différentes phases d’une mission.  Une telle approche cadrerait par ailleurs avec la vision du Secrétaire général en matière de prévention qui intègre sur un même plan tous les piliers de l’action de l’ONU, à savoir la paix, la sécurité, le développement durable et les droits de l’homme. 

Abordant la question du financement, le représentant a dit que pour que le Conseil de sécurité puisse pleinement assumer son rôle central dans la prévention et le règlement pacifique des conflits, il devait pouvoir tirer pleinement parti des divers outils à sa disposition. 

Un budget insuffisant au départ est souvent à l’origine de coûts élevés par la suite, a-t-il constaté avant d’inviter l’ensemble des États Membres « à apporter leur soutien au financement de tout le cycle du conflit, en particulier des mesures de prévention et du dispositif de consolidation de la paix ».  

M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) a appelé à passer d’un état d’esprit réactif à une attitude proactive, soulignant que le concept de pérennisation de la paix appelle à envisager la consolidation de la paix d’une manière plus holistique qui englobe la prévention et la résolution de conflit ainsi que l’établissement des fondements d’une paix durable.

Il a également indiqué que les efforts de pérennisation de la paix ne doivent pas uniquement dépendre des opérations de paix et de sécurité, mais reposer sur une approche qui assure le bien-être des populations locales tout en promouvant leurs droits sociaux et politiques. 

Le représentant a aussi insisté sur l’importance de l’appropriation nationale, jugeant nécessaire de doter les missions de mandats réalistes, « taillés sur mesure » en fonction de chaque contexte local, et mis en œuvre en tenant compte des perspectives locales et nationales.  Il a également souligné que la participation des femmes était « politiquement indispensable » pour assurer l’efficacité opérationnelle de l’ensemble du processus.

Poursuivant son intervention, M. Plasai a appelé à veiller à ce que chaque Casque bleu soit doté du savoir, des aptitudes et des attitudes nécessaires pour pouvoir s’acquitter de ses fonctions.  Il a aussi plaidé pour une bonne gestion des stratégies de sortie, estimant que la planification de la transition et de l’appui « postmission » devait être mise en place à un stade précoce.

Le représentant a également jugé important d’aligner le mandat des missions aux priorités nationales, pour ensuite appeler au renforcement des capacités des organisations régionales et sous-régionales.  Les échanges de vues entre ces dernières, le Conseil de sécurité et les autres entités de l’ONU doivent aussi être encouragés, a-t-il ajouté.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a rappelé que son pays était un contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, en particulier à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), ainsi qu’aux opérations sous commandement de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) au Kosovo et en Afghanistan. 

« L’Arménie maintiendra son niveau actuel de participation au Liban et au Mali et nous disposons des capacités suffisantes pour accroître le nombre de troupes au sein de la FINUL et celui des personnels de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) », a précisé le représentant. 

Il a ajouté que seul un dialogue global et sincère entre les parties à un conflit serait de nature à éviter une escalade de la situation sur le terrain et à ouvrir la voie à une solution politique et à la réconciliation entre les peuples.

Mme NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam) a jugé important d’améliorer l’efficacité des missions de maintien de la paix en définissant clairement les mandats de chacune en rapport avec le contexte du pays hôte.  Elle a salué à cet égard les récentes évaluations menées au sujet des activités de maintien de la paix avec une attention accrue sur la diplomatie préventive et la médiation.

La représentante a également plaidé en faveur d’une plus grande cohérence entre les activités de maintien de la paix et de la consolidation de la paix, ce qui requiert une plus grande coordination entre le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix (CCP) dans les discussions sur les politiques à long terme de pérennisation de la paix. 

Il faut aussi mener des consultations plus inclusives, lors de la formulation des mandats des missions, entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de troupes.

La représentante a aussi misé sur la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales dont l’expérience sur le terrain est significative.  Elle a tenu à rappeler l’importance, dans toutes ces activités, de respecter pleinement le droit international et la Charte des Nations Unies, en particulier les principes d’impartialité politique et de non-ingérence dans les affaires internes des pays.  Elle s’est aussi montrée soucieuse de la sécurité et de la bonne conduite du personnel de l’ONU.

Mme GABRIELA MARTINIC (Argentine) a rappelé que la phase d’élaboration des mandats des opérations de maintien de la paix prenait désormais en compte de multiples composantes pour en faire de véritables « tremplins » de la paix durable. 

Le nouveau concept de paix durable exige en effet de concevoir des mandats qui tiennent compte des processus politiques à l’œuvre dans les pays en conflit.  Il faut donc, dans cette perspective, s’attacher à l’expertise de la Commission de consolidation de la paix. 

La représentante a enfin cité en exemple le Plan commun de transition mis au point par la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) et l’équipe de pays des Nations Unies en Haïti.

M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) a jugé très important de disposer d’un cadre analytique permettant au Conseil d’examiner les changements nécessaires dans les mandats des missions de maintien de la paix de l’ONU.  Un tel cadre peut établir une meilleure coordination et une cohérence opérationnelle entre les opérations de maintien de la paix et l’équipe de pays des Nations Unies sur le terrain. 

Il faut aussi que la phase de définition des opérations de maintien de la paix prenne en compte les contextes historique, politique et économique des situations en présence, grâce à des outils analytiques pertinents.  De l’avis de la délégation, une telle analyse permet de faire le bon diagnostic des causes sous-jacentes du conflit et donc de la situation de conflit. 

L’autre question importante pour les Maldives est le développement des capacités de l’État et de ses institutions, un objectif que les opérations de maintien de la paix peuvent aider à atteindre.

Mme BELEN SAPAG MUÑOZ DE LA PEÑA (Chili) a souligné la nécessité pour le Conseil de sécurité d’agir de manière efficace et cohérente afin de remédier aux causes profondes des conflits.  Elle a défendu une appropriation nationale des efforts de paix, en concertation avec les acteurs internationaux, avant d’insister sur le rôle important joué par la société civile.

La Commission de consolidation de la paix (CCP) est très utile pour la mobilisation de tous les acteurs, a affirmé la déléguée chilienne.  Elle a demandé que les opérations de paix soient examinées périodiquement et s’est félicitée des efforts en cours visant à accroître le nombre de femmes occupant des postes de haut niveau en leur sein. 

Enfin, elle s’est prononcée en faveur d’une vision pratique et cohérente du concept de la pérennisation de la paix.

M. MANSOUR AYYAD SH A ALOTAIBI (Koweït) a plaidé en faveur du concept de diplomatie préventive, que le Conseil doit systématiser dans la phase d’élaboration des mandats des opérations de maintien de la paix. 

Partisan de consultations intensives avec les pays contributeurs de troupes, le représentant a souligné l’importance du partenariat entre l’ONU et l’Union africaine, qu’il a considéré comme un exemple à suivre en matière de coopération pour le déploiement des opérations de paix.

M. CHARLES THEMBANI NTWAAGAE (Botswana) a adhéré à l’avis selon lequel la responsabilité des Nations Unies est de faire en sorte que les solutions politiques promeuvent la prévention, intègrent les droits de l’homme et renforcent l’engagement et l’autonomisation des femmes et des filles.  Le représentant a insisté sur la prévention des conflits et sur le fait que le maintien de la paix doit viser à promouvoir la réconciliation nationale, le renforcement des capacités nationales et la mise en place d’institutions garantes d’une paix durable.  Il a rappelé la participation de son pays à différentes opérations de maintien de la paix et sa contribution au budget de ces opérations.  Il a aussi rappelé le rôle de chef de file que son pays a joué dans les efforts de médiation en République démocratique du Congo, au Mozambique ou encore au Lesotho.  Il n’a pas oublié de souligner que son ancien Président, M. Festus Mogae, dirige actuellement la Commission mixte de suivi et d’évaluation pour le Soudan du Sud.  Il s’est à ce propos félicité du Cadre pour un partenariat renforcé dans les domaines de la paix et de la sécurité que viennent de signer l’ONU et l’Union africaine.

M. DENIS RÉGIS (Haïti) a indiqué que la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) touchait à sa fin.  Le Gouvernement et le Conseil en sont convenus, a-t-il dit, en soulignant le retour de la stabilité dans son pays et la bonne tenue des dernières élections.  « À travers la Mission, l’ONU a largement contribué à ce résultat. »

Il a jugé essentielle la consolidation continue des acquis par le renforcement des institutions nationales.  L’appropriation par ces institutions des fonctions exercées par la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) sera le critère déterminant du succès de la Mission, a-t-il noté.

M. Régis a indiqué que son gouvernement et l’ONU œuvraient de conserve à la mise en place d’un nouveau cadre de coopération stratégique, qui reflétera la nouvelle réalité sur le terrain.  Le délégué a souhaité que le débat sur l’objectif de la pérennisation de la paix ne fasse pas abstraction de la question de l’extrême pauvreté.

Déclarant que l’ONU ne pouvait pas se soustraire à ses responsabilités, il a salué le plan du Secrétaire général prévoyant la nomination de défenseurs des droits des victimes dans le cadre des activités de paix de l’ONU.  « Cette approche –nous le souhaitons vivement- doit s’étendre à tous les cas d’atteinte aux droits humains et de préjudices moraux et matériels dont une mission aurait été elle-même la cause », a conclu le délégué.

M. TEODORO LOPEZ LOCSIN, JR. (Philippines) a rappelé les règles qui régissent les nombreuses participations de son pays aux opérations de maintien de la paix: la prérogative exclusive du Président philippin de décider du déploiement des troupes, l’autorité du Conseil de sécurité, un mandat clair et réaliste, un calendrier et une stratégie de sortie fixes et le consentement du pays hôte.  Le représentant a estimé qu’il faut davantage investir dans les solutions politiques locales, lesquelles seraient appuyées par les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  S’agissant de la déontologie et de la discipline, il a préconisé une formation avant et pendant le déploiement des Casques bleus, laquelle formation insisterait sur le leadership et la responsabilité de toute la chaîne de commandement.  Pour surmonter la culture de l’impunité, il faut aussi, a-t-il poursuivi, de véritables échanges d’informations et des initiatives novatrices pour renforcer les capacités sur la base des meilleurs pratiques.  Quant à la sécurité des Casques bleus, le représentant a estimé que les opérations de maintien de la paix devraient travailler plus étroitement avec les communautés et les ONG locales.  S’agissant du renforcement de la capacité opérationnelle, il s’est joint aux appels pour que le Secrétariat de l’ONU se montre plus transparent dans la sélection des pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police. 

Après avoir souligné la participation active de son pays à différentes opérations de maintien de la paix, M. LUKE DAUNIVALU (Fidji) a estimé qu’une partie importante des efforts visant à parvenir à une paix durable réside dans les règles applicables aux Casques bleus.  La loi cardinale qui voulait que ces soldats n’interviennent qu’avec la permission du pays hôte, qu’ils fassent preuve d’impartialité et qu’ils ne recourent à la force qu’en cas de légitime défense, doit peut-être être réexaminée pour répondre aux nouvelles menaces et s’adapter à la réalité du terrain.  Dans ce cadre, le mandat d’une mission est de la première importance, a souligné le représentant, en rappelant que lorsque l’ONU a évalué celui de sa mission en Somalie, elle en était venue à la conclusion qu’il était « vague et prêtant à une myriade d’interprétations ».  Il est donc impératif, a plaidé le représentant, d’avoir des objectifs clairs pour éviter toute ambiguïté voire des pertes en vies humaines. 

L’élaboration d’un bon mandat exige des consultations structurées entre le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police et le Secrétariat de l’ONU.  Il faut aussi sensibiliser le personnel des opérations de maintien de la paix aux discussions politiques en cours et aux approches à l’étude.  La manière dont l’ONU équipe les soldats de la paix est cruciale pour tout succès.  En toutes choses, a conclu le représentant, il faut s’attarder sur le rapport du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, dont les débats de cette année sont une source incontournable.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: Le nouveau Chef de la MANUL multiplie les consultations politiques à l’approche de la fin de la période de transition

8032e séance – après-midi
CS/12967

Libye: Le nouveau Chef de la MANUL multiplie les consultations politiques à l’approche de la fin de la période de transition

À l’approche de la fin de la période de transition, prévue le 17 décembre prochain, le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Ghassan Salamé, s’est dit « convaincu », devant le Conseil de sécurité, que « notre attachement à l’Accord politique libyen comme cadre de référence ne doit pas nous empêcher de nous adresser à tous les Libyens, quels que soient leurs statuts et leurs positions passées ou présentes, de sorte de pouvoir garantir une réconciliation pour tous ».

Pour sa toute première intervention devant le Conseil de sécurité en cette qualité, M. Salamé a dressé un bilan de ses activités au cours du mois écoulé, depuis sa nomination, qui fait également de lui le Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL).  Un mois d’août marqué par des consultations intensives sur les plans interne et externe, y compris avec les pays voisins, comme la Tunisie, l’Algérie, l’Égypte ou l’Italie.

« De mes entrevues, un tableau émerge clairement.  La population est exaspérée par la détérioration de ses conditions de vie.  À Tripoli, je suis passé de manière répétée devant la même banque entre 10 heures et 22 heures, et les gens y étaient si nombreux que j’ai cru qu’ils manifestaient.  Non!  Ils patientaient de pouvoir retirer une fraction de leur salaire mensuel, soit l’équivalent d’environ 25 dollars », a relaté M. Salamé, venu présenter au Conseil le tout dernier rapport* en date du Secrétaire général sur la situation en Libye.

« Les gens n’en peuvent plus des coupures d’électricité et d’eau, qui entraînent celles des réseaux téléphoniques et d’Internet.  Ils ne comprennent pas comment on peut être pauvre dans un pays doté de richesses naturelles, notamment du pétrole, mais où il faut faire la queue pendant une journée pour obtenir 20 litres d’essence. »

La conviction qu’une économie prédatrice s’est enracinée dans le pays se répand parmi la population, comme si celui-ci alimentait volontairement sa propre crise, au profit de quelques-uns et au détriment de tous les autres, ce qui met en évidence un « grave problème de gouvernance » qu’il faut résoudre de toute urgence.

« À moins de relever les défis économiques, la situation humanitaire ne fera que s’aggraver », a prévenu le Représentant spécial, qui a également fait état des préoccupations sécuritaires.  « Lors de ma première nuit à Tripoli, je me suis endormi au son des rafales de coups de feu », a-t-il dit.

Tandis que de nombreux civils meurent ou sont blessés dans des affrontements armés ou à cause des restes explosifs de guerre, des milliers d’autres sont détenus de manière prolongée, la plupart privés de procès équitables, a poursuivi le Chef de la MANUL, avant de rappeler que l’attaque perpétrée contre le point de passage d’al-Fuhaqa le 24 août dernier avait été attribuée à Daech.

Après avoir reconnu que la situation sécuritaire s’est améliorée dans certaines régions du pays, notamment à Tripoli, M. Salamé a identifié plusieurs éléments qui font obstacle sur le plan politique.  Tout d’abord, l’incertitude qui plane sur le « sens » à donner à la fin de la période de transition politique, prévue le 17 décembre prochain par l’Accord politique.

« L’une des tâches les plus urgentes est de bâtir un consensus entre Libyens sur la signification juridique et politique à donner à cette date anniversaire », a-t-il expliqué, en prévenant des risques que ferait peser sur le pays un « vide constitutionnel ».  Le Chef de la MANUL s’est félicité de constater que la plupart de ses interlocuteurs semblent s’accorder sur l’idée d’amender l’Accord politique, à propos duquel « j’espère pouvoir faire une annonce dans les prochains jours ».

De son côté, le représentant de la Libye, M. Elmahdi S. Elmajerbi, a souhaité que ces efforts aboutissent et puissent faciliter la formation d’un gouvernement d’entente nationale, qui devra selon lui relever de multiples défis, du terrorisme aux migrations illégales, en passant par la gestion des ressources naturelles, les violations des droits de l’homme et l’absence d’état de droit.

Le Représentant spécial a en outre rappelé que la légalité du vote, le 29 juillet dernier, qui visait à finaliser le projet de constitution est en cours d’examen par les tribunaux.  À cela, s’ajoute le besoin grandissant d’organiser de nouvelles élections, lesquelles doivent être précédées d’un engagement formel des parties à en accepter les résultats, a souligné le haut fonctionnaire. 

Enfin, a-t-il encore noté, les Libyens doivent pouvoir combiner ces trois éléments en un « ensemble politique », dont les modalités restent à définir.

Après que le Président du Comité des sanctions applicables à la Libye en vertu de la résolution 1970 (2011), M. Carl Skau, a présenté un bilan des travaux de cet organe subsidiaire du Conseil de sécurité au cours des derniers mois, le représentant libyen a tenu à rappeler qu’en ce qui concerne le « gel des avoirs », il serait souhaitable de trouver une formule qui en permette une meilleure gestion, dans la mesure où « ces fonds appartiennent au peuple libyen et aux générations futures ».

De son côté, le délégué de la Bolivie a été d’avis que la mise en œuvre du mandat du Comité 1970 ne pourra que contribuer à la stabilisation de la situation économique en Libye.  Il a toutefois espéré que le prochain rapport de cet organe comprendrait un chapitre sur « la production et la redistribution des ressources issues de l’industrie pétrolière libyenne ».

Si le représentant libyen s’est félicité du retour graduel de l’ONU dans son pays, son homologue de l’Uruguay a estimé qu’après six ans, il est difficile de qualifier de « succès » l’intervention de l’Organisation en Libye, au regard de la « situation institutionnelle indéfinie » dans laquelle cohabitent deux structures gouvernementales distinctes, sur fond d’affrontements armés fréquents.

Force est de constater, s’est désolé le représentant, que poursuivre dans la même veine mènera au même résultat.  Aussi a-t-il appelé le nouveau Représentant spécial à considérer d’autres options en vue de rétablir le calme dans le pays.

* S/2017/726

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale convoque du 20 au 22 mars 2019, à Buenos Aires, la deuxième Conférence des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud

Soixante et onzième session,
95e séance plénière - matin
AG/11933

L’Assemblée générale convoque du 20 au 22 mars 2019, à Buenos Aires, la deuxième Conférence des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud

L’Assemblée générale a décidé*, ce matin, que la deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud aura lieu à Buenos Aires, du 20 au 22 mars 2019.  L’Assemblée a aussi transmis** un projet de « Déclaration politique » à la Réunion de haut niveau sur l’évaluation du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, prévue les 27 et 28 septembre 2017.

La Conférence de haut niveau sur la coopération Sud-Sud, qui se tiendra avec la participation des chefs d’État et de gouvernement, devrait se conclure le 22 mars, à Buenos Aires, par un document final « concis, ciblé, tourné vers l’avenir et pragmatique » dont le projet devrait être finalisé d’ici au mois de février 2019.  Dans sa résolution, l’Assemblée générale prie d’ailleurs le Secrétaire général de présenter d’ici à la fin du mois de janvier 2018 des suggestions concernant le thème principal de la Conférence, en tenant compte de l’importance de la coopération Sud-Sud, de la coopération triangulaire et de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Dénonçant le coût de ce type de réunions, le représentant des États-Unis a estimé que les États Membres feraient mieux d’affecter l’argent prévu au personnel.  L’idée de dépenser pour des réunions « non productives » devrait être abandonnée au profit d’actions concrètes visant à pourvoir aux besoins des pays en développement, a-t-il poursuivi.  Le représentant s’est d’autant plus inquiété que tout porte à croire que la Conférence sera convoquée tous les ans.  La transparence dans l’affectation des ressources doit être une question centrale, a-t-il insisté, afin de répondre aux besoins croissants du monde.  Dans sa résolution, l’Assemblée générale rappelle que tous les coûts afférents à la Conférence et à son organisation seront financés par des ressources extrabudgétaires.  Elle accueille avec satisfaction l’offre généreuse du Gouvernement argentin d’en « assumer tous les frais ».

Toujours ce matin, l’Assemblée a transmis à la Réunion de haut niveau sur l’évaluation du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, qui se tiendra les mercredi 27 et jeudi 28 septembre 2017, un projet de « Déclaration politique ».  Au nom de l’Union européenne, la représentante de l’Estonie a estimé que le projet de texte aurait dû inclure des références plus marquées aux recommandations du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes.  Tous les acteurs pertinents, a-t-elle insisté, doivent être mobilisés pour assurer la mise en œuvre la plus efficace du Plan d’action mondial, à savoir les gouvernements, les organisations internationales et régionales, la société civile, les institutions nationales des droits de l’homme et le secteur privé.  L’Union européenne, a souligné la représentante, aurait souhaité un libellé plus robuste sur les institutions nationales des droits de l’homme. 

Son homologue du Royaume-Uni a martelé que la traite des personnes est un problème mondial qui exige une réponse mondiale.  Il s’est félicité de ce que la résolution mentionne le Programme de développement durable à l’horizon 2030, et a réclamé une coordination véritable et cohérente entre les trois piliers des Nations Unies ainsi que le renforcement du Groupe interinstitutions.  Il a confirmé que son Premier Ministre participera bien à la Réunion de haut niveau. 

L’Assemblée générale a également pris note du rapport*** du Conseil de sécurité qui couvre la période du 1er août 2015 au 31 décembre 2016, au cours de laquelle le Conseil a adopté 102 résolutions et 31 déclarations présidentielles, fait 150 déclarations à la presse et tenu 356 réunions officielles dont une sur la création de la Mission des Nations Unies en Colombie, en janvier 2016.  Aujourd’hui, la représentante colombienne a salué la contribution du Conseil au processus de paix dans son pays.

Son homologue du Chili a regretté que le rapport n’ait pas une approche plus analytique, se félicitant tout de même du regain de transparence dans le processus de sélection et de nomination du Secrétaire général.  La représentante de Cuba a aussi dénoncé un rapport qui ne permet pas aux États d’évaluer comme il se doit l’action du Conseil de sécurité.  Elle en a profité pour défendre l’augmentation du nombre des sièges non permanents et pour fustiger, une nouvelle fois, un droit de véto « obsolète ».  La tendance du Conseil de sécurité à usurper le rôle d’autres organes de l’ONU, dont celui de l’Assemblée générale, doit cesser, a-t-elle aussi estimé, ajoutant qu’il est temps de sauvegarder l’équilibre entre les différents organes des Nations Unies.  Nous avons besoin d’un organe véritablement transparent, représentatif, démocratique et efficace, a-t-elle conclu.

La représentante du Mexique a dit attendre des rapports moins descriptifs et plus thématiques.  Le rapport, s’est-elle expliquée, devrait comporter une section sur les mesures qui ont fait l’objet d’un vote et une autre sur les désaccords, afin d’assurer la transparence.  Revenant, à son tour, au droit de veto, elle a insisté pour que son exercice soit suspendu dans les cas de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Elle a donc invité les pays qui ne l’ont pas encore fait, y compris les membres permanents du Conseil, à se rallier à cette position déjà soutenue par la France.  En concluant, elle a souligné la nécessité d’adapter constamment les opérations de maintien de la paix à la situation sur le terrain.

Son homologue de Singapour s’est dit déçu de la décision tardive de tenir cette réunion, ce qui a donné peu de temps aux États pour se préparer correctement à un débat informé.  Il a plaidé pour un rapport plus analytique et moins factuel.  Il serait utile, a-t-il noté, d’obtenir un résumé des résultats obtenus et de l’impact des décisions et des déclarations du Conseil, afin de déterminer le résultat des interventions sur le terrain.  Il faut une plus grande transparence sur la forme et le fond, a-t-il dit. 

En début de séance, l’Assemblée générale a pris note d’une note**** du Secrétaire général sur les 66 questions inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Elle a aussi pris note***** du fait que la Libye a effectué le paiement nécessaire pour réduire ses arriérés en deçà du montant spécifié à l’article 19 de la Charte des Nations Unies concernant le droit de vote.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera publiée dans le Journal des Nations Unies.

*A/71/L.83
**A/71/L.81
***A/71/2
****A/71/300
*****A/71/764/Add.8

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Guinée-Bissau: Le Chef du BINUGBIS demande aux partis signataires de l’Accord de Conakry de s’entendre sur un « pacte de stabilité »

8031e séance – après-midi
CS/12966

Guinée-Bissau: Le Chef du BINUGBIS demande aux partis signataires de l’Accord de Conakry de s’entendre sur un « pacte de stabilité »

Si la situation politique en Guinée-Bissau s’est apaisée depuis quelques semaines, la mise en œuvre de l’Accord de Conakry et de la feuille de route de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), « principaux cadres de résolution de la crise », est toujours dans l’impasse, a constaté, cet après-midi, le Représentant spécial du Secrétaire général pour ce pays, M. Modibo Touré, en exhortant les parties prenantes à se réengager en faveur du dialogue et à s’entendre sur un « pacte de stabilité ».

« En juillet, pour la première fois depuis le début de la crise en 2015, des discussions bilatérales se sont déroulées entre le Président de la République, le Premier Ministre, le Président de l’Assemblée nationale du peuple et les dirigeants des principaux partis politiques », s’est félicité M. Touré, alors qu’il y a encore trois mois, « les tensions avaient atteint un nouveau sommet », marquées par une montée de la « rhétorique incendiaire » et des « menaces de manifestations violentes ».

Aussi le haut fonctionnaire a-t-il lancé un appel à la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO et au Conseil de sécurité de l’ONU, auquel il était venu présenter le dernier rapport* en date du Secrétaire général sur l’évolution de la situation en Guinée-Bissau et les activités du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix dans ce pays (BINUGBIS), qu’il dirige.

« Je leur demande d’exhorter le Président de la République à respecter son engagement à appliquer l’Accord de Conakry dans les délais prévus, et le leadership du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et de Cabo Verde (PAIGC) à réintégrer les membres restants des 15 parlementaires qui en ont été exclus », a lancé M. Touré.

M. Touré a dit attendre en outre du leadership du PAIGC et du Parti pour le renouveau social (PRS), ainsi que des trois autres partis représentés au Parlement, qu’ils concluent un accord sur un « pacte de stabilité en mesure de garantir la viabilité d’un gouvernement inclusif ».

C’est d’autant plus important à ses yeux que, le mois prochain, expirera le mandat de trois mois de la Mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau (ECOMIB), chargée d’aider ses acteurs politiques à appliquer pleinement l’Accord de Conakry, et que s’ouvre une période préélectorale sensible, avec la tenue, respectivement en 2018 et 2019, de scrutins législatifs et présidentiel.

Dans un tel contexte, le soutien financier de la communauté internationale demeure plus que jamais nécessaire, a rappelé le Représentant spécial, rejoint sur ce point par le Président de la formation Guinée-Bissau de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. Mauro Vieira, pour qui les élections ne pourront probablement pas remédier à l’impasse actuelle « sans une solution politique à la crise ».

De retour d’un déplacement en Guinée-Bissau, le Président du Comité des sanctions applicables à ce pays, M. Elbio Rosselli (Uruguay), qui s’est ensuite exprimé en sa qualité nationale, a fait état de désaccords persistants entre ses interlocuteurs sur place quant aux noms qui doivent figurer sur la liste des mesures décidées par le Conseil de sécurité, chacun rejetant sur l’autre les responsabilités de l’impasse actuelle.

De son côté, le représentant du Togo, M. Kakou Kpayedo, qui s’exprimait au nom de la CEDEAO, a affirmé la détermination de cette organisation sous-régionale à prendre, « si nécessaire », des sanctions ciblées à l’encontre de « tous ceux » qui entraveraient la bonne application de l’Accord de Conakry. 

Son homologue de la Bolivie a rejeté catégoriquement l’imposition de « toute sanction unilatérale », le Président du Comité des sanctions annonçant pour sa part qu’il comptait recommander une « révision » de la liste des individus et entités visés par ces mesures.

Pour le représentant de la CEDEAO, aucun progrès significatif n’a été enregistré sur les points de contention que sont la nomination d’un premier ministre jusqu’aux élections législatives de 2018, la formation d’un gouvernement inclusif et la réintégration de 15 députés du PAIGC.

La représentante de la Guinée-Bissau, Mme Maria-Antonieta Pinto Lopes D’Alva, a assuré les membres du Conseil que son pays est conscient qu’il devra faire preuve d’un « engagement interne vigoureux » pour parvenir à une solution durable. 

Selon elle toutefois, les crises institutionnelles qui secouent son pays demeurent circonscrites à la sphère politique.  Le « vrai » pays, a-t-elle observé, vit dans la paix civile, « sans troubles depuis cinq ans ».

De l’avis du Représentant spécial toutefois, les progrès accomplis dans la réforme du secteur de la sécurité au cours de la période à l’examen ont été « lents », malgré des développements positifs, notamment l’approbation récente d’un ambitieux programme commun triennal sur la justice.

La croissance économique, en revanche, devrait atteindre 5,2% en raison d’une nouvelle récolte considérable de cajou dans un contexte de prix attractifs sur les marchés internationaux, a remarqué M. Touré.  De plus, selon le Fonds monétaire international (FMI), le pays a réalisé des progrès notables dans l’amélioration des cadres macroéconomiques et de la gestion des dépenses publiques.  

Et une meilleure mobilisation des ressources intérieures en l’absence de soutien budgétaire a permis le paiement régulier des salaires des fonctionnaires, ce dont s’est également enorgueillie la représentante de la Guinée-Bissau.

« L’engagement concerté sur le long terme de la CEDEAO, de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), de l’Union africaine, de l’Union européenne et des Nations Unies reste crucial pour appuyer la mise en œuvre de l’Accord de Conakry », a prévenu le Représentant spécial.  

« Ce n’est qu’en remplissant les conditions minimales posées par l’Accord que le pays pourra avancer dans le processus de réformes, organiser des élections crédibles et apaisées, canaliser les ressources nationales, et mobiliser l’assistance internationale nécessaire au soutien de ses efforts de développement socioéconomique pour le bien-être de son peuple », a résumé le Chef du BINUGBIS.

Il a donc encouragé la CEDEAO à mener une mission d’évaluation de la mise en œuvre de l’Accord de Conakry, en vue de recommander des actions appropriées, et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine à Bissau à effectuer sa visite prévue avant la fin de l’année conjointement avec le Conseil de sécurité de l’ONU.

Par la voix du Togo, la CEDEAO l’a rappelé aujourd’hui: « Une persistance de la crise ferait courir des dangers à l’Afrique de l’Ouest, déjà confrontée au terrorisme et à la criminalité transnationale, fléaux qui eux-mêmes se nourrissent de l’instabilité chronique, de la pauvreté et du désarroi social qu’elle engendre. »

* S/2017/695

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Soudan du Sud: Le Conseil de sécurité est invité à appuyer sans réserve et dans l’unité les initiatives régionales de paix

8030e séance – matin
CS/12965

Soudan du Sud: Le Conseil de sécurité est invité à appuyer sans réserve et dans l’unité les initiatives régionales de paix

Le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, la situation au Soudan du Sud, toujours en proie au conflit deux ans après l’Accord de paix, alors que se déploie progressivement la Force de protection régionale (FPR) autorisée par la résolution 2304 (2016) et que l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) a appelé à mettre en place un Forum de revitalisation de l’Accord de paix.

Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, M. El Ghassim Wane, l’Envoyé spécial pour le Soudan et le Soudan du Sud, M. Nicholas Haysom, et le Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation (JMEC), M. Festus Mogae, ont insisté sur la nécessité de relancer le processus de paix et demandé au Conseil de sécurité de se montrer uni pour appuyer sans réserve les efforts de paix de la région.

Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a expliqué que le déploiement de la Force de protection régionale (FPR) n’avait pas vraiment avancé ce dernier mois, tout en précisant que la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) continue de discuter avec le Gouvernement sud-soudanais afin d’accélérer le processus.

Après avoir confirmé qu’il y avait eu des « malentendus » à propos de l’hébergement du contingent rwandais de la FPR à Djouba, il s’est félicité de ce que les incompréhensions aient été levées après l’intervention du Représentant spécial du Secrétaire général, M. David Shearer.  D’ailleurs aujourd’hui, le représentant du Soudan du Sud, M. Akuei Bona Malwal, a assuré au Conseil de sécurité que son gouvernement apportait un soutien sans réserve au déploiement de la Force, tout en regrettant un « manque de consultations » s’agissant de son opérationnalisation, laquelle est au cœur des discussions entre le Gouvernement, l’ONU, l’Union africaine et l’IGAD.

Sur le plan politique, les intervenants ont surtout constaté l’absence de mise en œuvre de l’Accord de paix signé le 26 août 2015 entre le Président sud-soudanais, M. Salva Kiir, et son ancien Premier Vice-Président et principal opposant, M. Riek Machar.  Le Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation (JMEC), qui s’exprimait aujourd’hui par visioconférence depuis la base de la MINUSS à Djouba, a rappelé que cet accord aurait dû ouvrir la voie à des progrès considérables dans la paix et la gouvernance et déploré qu’il ait fallu, « depuis le premier jour », tenter de persuader chaque partie de contribuer à sa mise en œuvre, aucune d’entre elles ne se montrant prête à faire des compromis.  Le résultat, a-t-il regretté, est la très faible mise en œuvre d’un accord qui doit être revitalisé.

Le problème, a expliqué l’Envoyé spécial pour le Soudan et le Soudan du Sud, qui était, lui, à Addis-Abeba, vient de ce que les gains engrangés sur le champ de bataille continuent de guider la stratégie tant du Gouvernement que de ses opposants.  « À côté de ses efforts de pacification militaire, le Gouvernement fait croire à des efforts de réconciliation, y compris par la libération limitée de prisonniers politiques », a-t-il ajouté, estimant en outre que l’insécurité actuelle, l’absence d’institutions solides et la fragmentation ethnique grandissante contrecarrent l’organisation d’élections crédibles d’ici un an et sont de nature à aggraver encore le conflit.

De fait, l’insécurité continue de régner dans plusieurs régions, d’autant qu’il n’existe toujours pas de cessez-le-feu.  Comme l’a expliqué le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, les combats se poursuivent notamment dans l’État du Haut-Nil, alors que les forces gouvernementales essayent toujours de s’emparer de Pagak, la place forte des opposants de l’Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (APLS dans l’opposition).  

Ces combats ont une incidence directe sur les civils ainsi que sur les opérations humanitaires destinées à soulager leurs souffrances.  En juillet, la communauté humanitaire a recensé 136 incidents, soit le chiffre mensuel le plus élevé depuis décembre 2013, dont 49 impliquaient des violences contre le personnel ou les biens des acteurs humanitaires.  Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a notamment mentionné six incidents majeurs de pillage qui ont entraîné la perte de plus de 670 tonnes de nourriture destinées aux populations civiles les plus vulnérables.  Comme l’a rappelé le représentant du Japon, un Sud-Soudanais sur trois est réfugié ou déplacé. 

Son homologue du Soudan du Sud a affirmé que son gouvernement n’avait pas pour politique d’entraver le travail des organisations humanitaires.  Il a réclamé une présentation « responsable » des faits et un « dialogue ouvert, honnête et compréhensif » avec les agences humanitaires.

Quant aux efforts de paix, les initiatives sont pourtant nombreuses.  L’Envoyé spécial pour le Soudan et le Soudan du Sud a longuement décrit les différents efforts régionaux dont l’initiative de l’Ouganda, axée sur la réunification de certaines factions du parti APLS, qui n’a pas abouti à ce stade, du fait de l’absence de la faction « dans l’opposition » de M. Riek Machar.  L’Envoyé spécial a aussi indiqué que le Haut-Représentant de l’Union africaine (UA) et ancien Président du Mali, M. Alpha Oumar Konaré, attendait l’adoption de la stratégie globale de l’UA pour le Soudan du Sud et défendait la primauté de solutions internes et une présence robuste de la Force régionale de protection.

Mais c’est surtout des initiatives de l’IGAD dont il a été question.  L’Envoyé spécial pour le Soudan et le Soudan du Sud a fait état de l’élan suscité par la décision prise le 12 juin dernier par les chefs d’État de l’organisation régionale de convoquer un Forum de revitalisation de haut niveau pour l’Accord de paix de 2015.  Il s’agit de rassembler le Gouvernement et les groupes d’opposition sud-soudanais dans un dialogue sur la manière de mettre en œuvre l’Accord.  L’Envoyé spécial a dit voir dans cette initiative « un réel potentiel ».

Il s’est toutefois dit préoccupé par la prudence avec laquelle l’IGAD engage les acteurs de l’opposition, ce qui pourrait alimenter les doutes sur l’impartialité de l’organisation régionale.  L’Envoyé spécial a également déploré que le Président Salva Kiir, faisant fi de ses engagements vis-à-vis de l’IGAD, continue de donner la priorité au dialogue national et à la réunification des branches du parti APLS, le processus de revitalisation étant cantonné à un « rôle supplétif ».  C’est également l’observation que le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a faite après la visite du Chef de son département, M. Jean-Pierre Lacroix, qui était à Djouba du 1er au 3 août.

Pour l’Envoyé spécial, il est crucial de voir les initiatives de l’IGAD et de l’Union africaine comme complémentaires.  « Avec la logique sous-jacente du dialogue national, le processus de réunification des APLS, le Forum de revitalisation de l’IGAD et le Plan d’action de l’Union africaine, on pourrait avoir l’impression que ces initiatives vont s’affaiblir l’une l’autre », a-t-il reconnu.  Pour l’éviter et en promouvoir au contraire la complémentarité, l’Envoyé spécial a souligné l’importance d’un engagement clair en faveur d’un processus de paix inclusif et crédible.

Le Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation (JMEC) a, pour sa part, expliqué que sa tâche consistera à aider l’IGAD à organiser le Forum.  Toutefois, a-t-il fait observer, on ne sait pas sur quoi les choses déboucheront même si des objectifs ont été fixés.  À ces yeux, le Forum permettra d’étudier les moyens de relancer le processus de paix « en tenant compte des réalités actuelles ». 

Pour le représentant du Soudan du Sud, le processus de revitalisation doit simplement consister à imprimer un nouvel élan « plutôt qu’à renégocier l’Accord ».  Le fait que le Gouvernement provisoire d’union nationale ait largement mis en œuvre l’Accord sur le règlement du conflit et la cessation unilatérale des hostilités déclarée par le Président Salva Kiir ne signifie pas qu’un chèque en blanc a été donné aux rebelles pour qu’ils poursuivent leurs attaques et leurs provocations contre la population locale et que l’armée sud-soudanaise restera assise, les bras croisés.  

Les trois intervenants principaux l’ont tous rappelé: pour que le processus de paix réussisse, il faut que les différents acteurs fassent preuve de volonté politique.  Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a ainsi estimé que les mêmes hommes qui « assument une responsabilité directe » dans le conflit et les malheurs de la population « peuvent sortir le pays du gouffre, mais il faut une véritable volonté politique de mettre fin aux opérations militaires, de négocier pacifiquement et de faire les compromis nécessaires pour parvenir à une paix durable ».

C’est pourquoi, il a appelé le Conseil de sécurité à se prononcer « fermement, à l’unanimité et sans réserve » pour les efforts de paix dans la région, y compris ceux de l’IGAD et du Forum de revitalisation, tout en jugeant « plus que nécessaire » d’assurer une étroite coordination entre l’IGAD, l’Union africaine, les Nations Unies et la communauté internationale dans son ensemble pour mettre fin aux souffrances de la population civile et aider le pays à se placer sur une trajectoire plus positive.

Les quatre membres du Conseil de sécurité qui ont pris la parole, à savoir l’Uruguay, la Bolivie, le Kazakhstan et le Japon, ont soutenu cette approche, en appelant à la cessation des hostilités et à la reprise d’un dialogue politique sans exclusive, qui se déroulerait dans la transparence avec le soutien de la MINUSS.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: Le Conseil de sécurité juge qu’il n’est pas nécessaire d’apporter de nouveaux ajustements aux sanctions frappant les Taliban

8029e séance – matin
CS/12964

Afghanistan: Le Conseil de sécurité juge qu’il n’est pas nécessaire d’apporter de nouveaux ajustements aux sanctions frappant les Taliban

Dans une déclaration présidentielle adoptée ce matin, le Conseil de sécurité a déterminé qu’il n’était pas nécessaire, « à ce stade », d’apporter de nouveaux ajustements aux sanctions à l’encontre des Taliban, contenues dans sa résolution 2255 (2015).

Les Taliban sont frappés du gel des avoirs financiers, de l’interdiction de voyager et d’un embargo sur les armes.

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité a examiné l’application des mesures édictées dans sa résolution 2255 (2015) et déterminé qu’il n’était pas nécessaire à ce stade d’y apporter de nouveaux ajustements.  Il prie l’Équipe de surveillance de présenter au Comité créé par la résolution 1988 (2011) deux autres rapports annuels détaillés et indépendants, comme indiqué dans l’annexe 1 de sa résolution 2255 (2015), à compter du 30 avril 2018.  Il continuera d’examiner l’application des mesures édictées dans sa résolution 2255 (2015) et, le cas échéant, d’y apporter des ajustements afin d’appuyer la paix et la stabilité en Afghanistan.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Après la crise de Jérusalem, Israël et la Palestine doivent se réengager en faveur de la solution des deux États, affirme le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques

8028e séance – matin
CS/12963

Après la crise de Jérusalem, Israël et la Palestine doivent se réengager en faveur de la solution des deux États, affirme le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques

La crise, le mois dernier, qui a secoué la vieille ville de Jérusalem, « foyer des sites sacrés des trois religions monothéistes », a démontré que les tensions peuvent dégénérer, menaçant de « modifier » la nature du conflit israélo-palestinien et d’embraser la région, a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Miroslav Jenča.

« Il est par conséquent essentiel que les partenaires régionaux et internationaux demeurent déterminés à mettre fin à l’occupation, à résoudre toutes les questions relatives au statut final, en vue de concrétiser la vision de deux États coexistant en paix et en sécurité sur la base des résolutions pertinentes de l’ONU, et à soutenir les dirigeants palestiniens et israéliens dans les mesures qu’ils doivent prendre à l’appui d’une paix durable », a souligné le haut fonctionnaire, venu informer les membres du Conseil de la situation au Moyen-Orient au cours du mois écoulé.

La crise de Jérusalem a démontré le caractère intenable du conflit israélo-palestinien et l’urgente nécessité d’un horizon politique, a-t-il résumé, en rappelant qu’à la suite de l’attaque commise le 14 juillet –au cours de laquelle deux policiers ont été tués par trois assaillants dans la vieille ville–, trois Israéliens avaient été poignardés à mort et six Palestiniens tués lors de manifestations « dans l’ensemble » pacifiques, des violences qui ont soulevé des questions quant à l’usage disproportionné de la force par les Forces de sécurité israéliennes. 

Il s’est cependant félicité des efforts déployés par Israël et la Jordanie pour mettre fin à la crise.

Plusieurs autres incidents qui se sont produits au cours des dernières semaines ont été relevés par le Sous-Secrétaire général, dont la mort de deux Palestiniens tués, y compris un civil.  « Le 28 juillet, un Palestinien a été tué par les Forces de sécurité israéliennes pour avoir manifestement tenté de poignarder un soldat à la jonction de Goush Etzion, en Cisjordanie.  « Le 2 août, à Yavneh, un civil israélien a été grièvement blessé au cours d’une attaque à l’arme blanche perpétrée par un Palestinien. »

En outre, le 8 août, des militants à Gaza ont tiré une roquette en direction du sud d’Israël, attaque à laquelle l’aviation israélienne a répliqué par un missile contre des locaux du Hamas à Gaza, faisant trois blessés.  Enfin, le 17 août, une attaque-suicide a fait un mort et cinq blessés dans la bande de Gaza.

Le Sous-Secrétaire général a fait aussi état de développements politiques susceptibles de remettre en question encore davantage la confiance entre les parties, en particulier l’adoption, en première lecture, d’un amendement à la Loi fondamentale: « Jérusalem, capitale d’Israël ».

S’il venait à être approuvé, a-t-il précisé, ce texte affermirait le contrôle israélien de Jérusalem-Est occupée et restreindrait la capacité des deux parties à parvenir à une solution négociée conforme aux résolutions de l’ONU et aux accords antérieurs, a prévenu M. Jenča, en soulignant l’impact démographique d’une telle législation, susceptible de déclencher un nouveau cycle de violences.

M. Jenča s’est ensuite attardé sur une série d’incidents relatifs aux colonies de peuplement israéliennes, notant que le 3 août dernier, le Premier Ministre israélien, M. Benjamin Nétanyahou, avait, en personne, donné le coup d’envoi de la construction de 1 000 nouveaux logements dans la colonie de Beitar Illit.  Il y a vu une décision en mesure de conforter l’idée que « ceux qui œuvrent à l’obstruction de la solution des deux États sont en train de prendre la main ». 

Abordant la situation dans la bande de Gaza, le Sous-Secrétaire général a déclaré que la situation humanitaire s’y est détériorée, en s’appuyant sur les conclusions de l’équipe de pays des Nations Unies qui affirme que ce territoire pourrait tout simplement devenir invivable d’ici à 2020. 

« Les mesures punitives prises par l’Autorité palestinienne contre la bande de Gaza depuis avril ne font qu’aggraver les conséquences du bouclage imposé par Israël.  Quelles que soient les différences politiques entre les factions palestiniennes, le peuple gazaoui n’a pas à en payer le prix », a analysé M. Jenča.

Notant qu’environ 29 000 personnes restent déplacées à l’intérieur de la bande de Gaza deux ans près le conflit entre le Hamas et les forces israéliennes, le Sous-Secrétaire général a encouragé Israël et l’Autorité palestinienne à renforcer leur engagement en vue d’améliorer le Mécanisme pour la reconstruction de Gaza et les bailleurs de fonds à répondre généreusement à l’appel humanitaire d’un montant de 25 millions de dollars lancé en juillet.

Au Liban, la situation dans la zone de déploiement de la Force intérimaire des Nations Unies (FINUL) dans le sud du pays est restée généralement calme, a poursuivi M. Jenča. 

En outre, les opérations militaires contre les militants se poursuivent à la frontière avec la Syrie et le soutien apporté aux forces armées libanaises et à d’autres institutions sécuritaires du pays « comme seuls garants de la sécurité et de la stabilité du Liban » demeure important, a-t-il noté.  

Au Golan syrien, le cessez-le-feu entre Tel-Aviv et Damas a été respecté, en dépit des risques que fait peser le conflit en cours en Syrie.

Déçu de la lenteur des progrès en vue du règlement du conflit israélo-palestinien, le représentant de l’Uruguay a dit qu’il s’était attendu à d’autres résultats depuis la remise du rapport du Quatuor pour le Moyen-Orient. 

Son homologue de la Bolivie a pour sa part demandé la pleine mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, et d’éviter tout atermoiement que la Puissance occupante pourrait exploiter pour poursuivre la colonisation.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Deux hauts responsables décrivent devant le Conseil de sécurité la « triple tragédie » qui frappe le Yémen

8027e séance – matin
CS/12961

Deux hauts responsables décrivent devant le Conseil de sécurité la « triple tragédie » qui frappe le Yémen

Le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, les propositions de deux hauts responsables de l’ONU afin de régler la situation au Yémen, pays qui fait face à « une triple tragédie » constituée par la famine, une épidémie de choléra sans précédent et un véritable « choléra politique » entravant la voie vers la paix.  Les deux hommes ont notamment exigé le retour à la table des négociations des parties au conflit.

Par ailleurs, en début de séance, le Conseil a observé une minute de silence à la mémoire des victimes de l’attaque terroriste qui a frappé, hier, la ville de Barcelone.

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Stephen O’Brien, a décrit le « tourbillon de peurs et de destructions » qui s’est emparé du pays.  Il a rappelé que près de sept millions de personnes étaient menacées de famine et 16 millions étaient privées d’accès à l’eau potable ou à l’assainissement.  Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), 500 000 cas de choléra auraient été recensés au Yémen.

Mettant en garde contre un « brouillard statistique », le Coordonnateur des secours d’urgence a rappelé que ces chiffres représentaient « des visages humains et d’énormes souffrances ».  M. O’Brien a en particulier dénoncé la brutalité des méthodes de guerre.  « Même les guerres obéissent à des règles, ou du moins elles le devraient. »

Il a rappelé que seule la coalition dirigée par l’Arabie saoudite avait les moyens aériens pour mener des frappes comme celles qui ont tué au moins 12 civils à Sanaa au début du mois.

« Les parties au conflit continuent d’empêcher les importations de produits de base et de médicaments, alors que le pays doit importer 90% de ces derniers », a-t-il accusé.  Il a en outre déploré que le mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies mis en place en juin 2016 pour faciliter l’importation de produits commerciaux essentiels soit contourné par le Gouvernement et la coalition.

La fermeture de l’aéroport de Sanaa empêche toujours des milliers de Yéménites de se rendre à l’étranger, a continué le Secrétaire général adjoint, qui y a vu là « les manœuvres pernicieuses » des autorités locales appuyées par les parties au conflit. 

M. O’Brien a en conséquence demandé la réouverture de l’aéroport et du port d’Hodeïda, le déploiement du personnel humanitaire dans les zones où les besoins sont les plus grands –« dans le nord du pays »- et la fin du détournement de l’aide.

M. O’Brien a ensuite présenté les résultats obtenus grâce aux efforts humanitaires, rappelant que quelque 120 partenaires étaient parvenus à aider 5,9 millions de personnes cette année.  Il a notamment rappelé que 222 centres de traitement du choléra et 926 points de réhydratation orale avaient pu être installés pour répondre à l’épidémie de choléra.

Le Coordonnateur des secours d’urgence a néanmoins fait observer que le plan d’aide humanitaire pour le pays n’avait recueilli à ce jour que 39% des 2,3 milliards de dollars demandés.  Les fonds doivent être fournis maintenant, a insisté le Secrétaire général adjoint, qui a affirmé que les prévisions de besoins n’étaient en aucun cas « gonflées », ajoutant que, même si le conflit cessait à cet instant, les fonds demandés resteraient nécessaires.

M. O’Brien a apporté son soutien à l’appel du Haut-Commissaire aux droits de l’homme en faveur de la création d’un mécanisme international indépendant d’enquête.  « Les parties au conflit savent fort bien qui commet toutes les atrocités aujourd’hui au Yémen. »

Enfin, il a exigé le retour à la table des négociations afin d’aboutir à une solution politique et mettre fin à la « honte » éprouvée devant la situation dans ce pays.

Un point de vue pleinement partagé par l’Envoyé spécial du Secrétaire général au Yémen, M. Ismail Ould Cheikh Ahmed, qui s’exprimait par visioconférence depuis Amman, en Jordanie.  Il a avancé des propositions afin de guérir le pays des « tensions politiques » qui continuent de saper les institutions étatiques dont dépendent les Yéménites et du « choléra politique » qui empêche le retour de la paix.

Il a ainsi exhorté les parties à assurer, dans un premier temps, le flux continu de l’aide humanitaire, le paiement des salaires des fonctionnaires et le contrôle de la contrebande d’armes.  « Cette proposition vise à assurer le fonctionnement sûr et ininterrompu du port d’Hodeïda, qui est actuellement une artère clef pour l’ensemble de l’économie yéménite », a-t-il expliqué. 

Cette proposition comprend un plan pratique pour remettre le contrôle du port à un comité de personnalités issues des secteurs économique et sécuritaire du Yémen, sous la supervision de l’ONU, a-t-il déclaré.  

L’Envoyé spécial a ajouté que le comité serait chargé de veiller au bon acheminement des marchandises humanitaires et commerciales transitant par ce port et au bon transfert des recettes portuaires en vue de financer la reprise du versement des salaires aux fonctionnaires. 

« Ces initiatives devraient contribuer à la restauration de la confiance parmi les parties et constituer un premier pas vers une nouvelle cessation des hostilités et une reprise des discussions. »

Se voulant optimiste, l’Envoyé spécial a noté qu’il existait encore un consensus pour parvenir à une solution politique et soutenir le processus de paix parrainé par l’ONU.

La voie vers la paix au Yémen est clairement dessinée et nous avons en main les propositions idoines pour restaurer la confiance entre les parties, a déclaré l’Envoyé spécial.  Il a précisé que l’élément manquant pour l’heure était la claire intention des parties de mettre fin à la guerre.  « Ce n’est un mystère pour personne que de nombreux marchands de guerre au Yémen ne veulent pas la paix. »

M. O’Brien avait exprimé un avis similaire en rappelant que la tragédie humaine dans ce pays était « le résultat direct de politiques et tactiques délibérées de la part des différentes parties et de leurs puissants alliés ».

Si le représentant du Yémen a indiqué que son gouvernement avait agréé les propositions de l’Envoyé spécial, il a déploré que les Houthistes et les partisans de l’ancien Président Ali Abdallah Saleh continuent de les rejeter.

« Ils veulent détruire l’État national et le remplacer par un État sectaire », a-t-il accusé.  « Le conflit est dans l’impasse car la guerre est lucrative pour les auteurs du coup d’État. »  S’agissant de la lutte contre le choléra, le délégué a précisé que son gouvernement coopérait avec les agences humanitaires, avant de demander une aide accrue de la communauté internationale.

Enfin, les représentants de la Bolivie et de l’Uruguay se sont exprimés, le premier, pour dénoncer « l’indifférence » de la communauté internationale vis-à-vis de la situation au Yémen, le second, pour exhorter le Conseil à mettre en place des mécanismes d’enquête indépendants et impartiaux sur les violations des droits de l’homme.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil examine le rapport final du Groupe d’experts en présence des familles de deux experts assassinés au Kasaï en mars

8026e séance – matin
CS/12958

RDC: le Conseil examine le rapport final du Groupe d’experts en présence des familles de deux experts assassinés au Kasaï en mars

Les membres du Conseil s’inquiètent de la poursuite des violences et de la lenteur avec laquelle est appliqué l’Accord politique du 31 décembre

L’examen, ce matin, par le Conseil de sécurité, du rapport final du Groupe d’experts des Nations Unies sur la République démocratique du Congo (RDC)* a été l’occasion pour les membres du Conseil de sécurité de rendre un hommage appuyé aux deux experts du Groupe -Michel Sharp et Zaida Catalán- assassinés fin mars au Kasaï en même temps que leur interprète, en présence de membres de leur famille. 

Les membres du Conseil ont en outre fait part de leurs préoccupations face à la poursuite du pillage des ressources naturelles du pays, dont le trafic illicite représente une importante source de financement pour les nombreux groupes armés responsables de multiples exactions.  De même, ils se sont inquiétés de la lenteur avec laquelle est mis en œuvre l’Accord politique conclu le 31 décembre dernier ainsi que des incertitudes qui pèsent toujours sur le processus électoral. 

« Cette séance ne peut être une séance comme les autres », a déclaré dès l’ouverture du débat la représentante de la France, qui, comme tous les autres intervenants à sa suite, a présenté ses condoléances aux membres présents des familles des deux victimes.  

« C’est en public, face aux familles des deux experts assassinés, qu’il faut exiger la justice pour ces meurtres », a ajouté le représentant du Royaume-Uni, qui a rappelé que c’est le Conseil de sécurité qui leur avait demandé de collecter les informations pour lesquelles ils ont été assassinés, qui leur avait demandé « d’être ses yeux et ses oreilles ».

Également présent lors du débat, le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et de l’intégration régionale de la RDC, M. Léonard She Okitundu, a assuré que les auteurs de l’assassinat des deux experts seraient « sévèrement sanctionnés ».

Toutefois, M. She Okitundu a jugé « inopportune » la mise en place d’une enquête internationale indépendante sur l’assassinat des deux experts, recommandée dans le rapport final.  Pour le Ministre, le Gouvernement de la RDC collabore déjà avec les mécanismes de l’ONU mis sur pied et avec les instances des pays d’origine des deux victimes. 

Il a reçu l’appui de la Fédération de Russie, qui a estimé que Kinshasa faisait déjà preuve d’un niveau élevé de coopération dans le cadre de l’enquête avec les Gouvernements de la Suède et des États-Unis, pays dont les victimes étaient ressortissantes.

En revanche, plusieurs autres membres du Conseil ont appuyé l’idée d’une enquête internationale ou d’un mécanisme de suivi, y compris la Suède et les États-Unis, qui enquêtent déjà sur place auprès des autorités congolaise.

Si l’assassinat des deux experts témoigne des conditions dans lesquelles travaille le personnel des Nations Unies en RDC, il est aussi un rappel des souffrances imposées à un grand nombre de civils innocents dans ce pays, a fait observer le Président du Comité chargé des sanctions relatives à la RDC (le « Comité 1533 »), M. Amr Abdellatif Aboulatta, de l’Égypte.

M. Aboulatta a estimé que le rapport présentait « une image complexe des différents défis auxquels la RDC est confrontée », qu’il s’agisse de l’évolution des groupes armés qui sévissent dans le pays, de plus en plus connectés à des groupes étrangers, ou du pillage des ressources naturelles.  À propos de celles-ci, il a noté la relative efficacité de la traçabilité des minéraux mise en place et qui, bien qu’imparfaite, a considérablement réduit les possibilités pour les groupes armés de tirer directement profit de leur exploitation illicite.

À sa suite, plusieurs délégués ont souhaité le perfectionnement du système et surtout son extension au traçage de l’or, dans l’exploitation illégale duquel sont impliqués de hauts responsables militaires congolais, a affirmé le représentant de l’Italie.

Plusieurs orateurs ont également fait le lien entre les violences qui ravagent plusieurs régions -marquées par de nombreuses violations des droits de l’homme sur lesquelles enquêtaient les experts assassinés- et la non-application de l’Accord politique du 31 décembre, « seule feuille de route crédible pour permettre une sortie de la crise que connaît le pays », selon la représentante française.

Cet accord doit être clairement mis en œuvre, ont demandé plusieurs représentants.  « À défaut, que se passera-t-il? » a demandé le représentant du Royaume-Uni, qui a fait état de 430 violations des droits de l’homme recensées officiellement depuis le début de l’année, soit plus que durant toute l’année 2015. 

Le Vice-Premier Ministre s’est voulu rassurant sur ce point.  Le processus d’enregistrement des électeurs progresse et les élections « auront bel et bien lieu en RDC, conformément au calendrier électoral qui sera publié par la Commission électorale nationale indépendante », a-t-il assuré.

Pour l’avenir, les États-Unis estiment que le travail du Groupe d’experts et celui du Comité n’est « pas achevé » et la Suède appuie la recommandation du Secrétaire général de prolonger de 18 mois le mandat du Groupe.  Pour M. She Okitundu en revanche, la question a été réglée par la résolution 2360 (2017) qui a prévu une prolongation du mandat du Groupe d’experts jusqu’au 1er août 2018.

Quant aux sanctions elles-mêmes, prévues par la résolution 2360 (2017) jusqu’au 1er juillet 2018, le Président du Comité 1533 a annoncé son intention d’organiser en fin d’année une réunion avec les États de la région, à l’occasion de laquelle il présentera un résumé des réactions au rapport final du Groupe d’experts ainsi que ses impressions sur la visite qu’il entend faire en octobre en RDC.  Ce sera, a-t-il estimé, l’occasion de promouvoir une discussion sur l’efficacité du régime de sanctions et les moyens de renforcer sa contribution à la paix et la stabilité dans le pays. 

* S/2017/672/Rev.1

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Lettre datée du 8 août 2017, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo dont le mandat a été reconduit par la résolution 2293 (2016) du Conseil de sécurité (S/2017/672/Rev.1)

Déclarations

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte), Président du Comité des sanctions établi en application de la résolution 1533 (2004) du Conseil de sécurité (Comité 1533), s’est exprimé sur trois points: le rapport final du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo (RDC), les travaux du Comité depuis octobre 2016, date de la dernière présentation de la question au Conseil, et les perspectives de travail du Comité pour les mois à venir.

Le rapport final présente une image complexe des différents défis auxquels la RDC est confrontée, a expliqué M. Aboulatta.  Le Groupe a pu observer des changements dans la dynamique des conflits dans le pays, manifestés par une nouvelle fragmentation des groupes armés, qui opèrent de manière à la fois plus décentralisée et très fortement liée.  Les groupes armés nationaux et étrangers sont de plus en plus interconnectés, ce qui a des conséquences sur le niveau de violence, a ajouté le Président du Comité.

Comme le Groupe d’experts le précise, la mise en place de la traçabilité des minéraux en RDC a considérablement réduit les possibilités pour les groupes armés de tirer directement profit de l’exploitation et du commerce de plusieurs minéraux -étain, tantale, tungstène- tandis que s’amenuisaient celles d’en tirer des bénéfices indirects. 

Mais le Groupe a constaté que le système de traçabilité de l’Initiative de la chaîne d’offre d’étain de l’ITRI, quoique bien conçu et inspiré par de bonnes intentions, présente des lacunes.  Il a également constaté plusieurs ruptures de la chaîne de traçabilité des minerais dans la province du Nord-Kivu.

Le Groupe d’experts a également observé des violations continues du droit international humanitaire et des droits de l’homme, tels que des viols d’enfants dans le Sud-Kivu, des attaques contre la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), ainsi que le meurtre de deux membres du Groupe d’experts, Michael Sharp et Zaida Catalán, en mars, au Kasaï.

M. Aboulatta a rappelé à cet égard que le rapport final présente huit recommandations, dont quatre sont adressées au Gouvernement de la RDC et quatre au Conseil de sécurité.  L’une de ces dernières concerne les enquêtes relatives à l’assassinat des deux experts, a rappelé M. Aboulatta, qui a attiré l’attention du Conseil sur la présence dans la salle des parents de Michel Sharp ainsi que de la sœur et de la mère de Zaida Catalán.

L’assassinat des deux experts, fait sans précédent, témoigne des conditions dans lesquelles travaillent les experts des Nations Unies en RDC ou dans d’autres pays, a poursuivi M. Aboulatta.  C’est aussi un rappel des souffrances imposées à un grand nombre de civils innocents en RDC.

C’est dans ce contexte que le Comité et le Groupe d’experts jouent un rôle actif pour aborder les difficultés à long et à court terme auxquels la RDC est confrontée, a poursuivi le président du Comité. 

Il a présenté ses efforts pour impliquer les autorités de la RDC et celles des pays de la région des Grands Lacs, afin de promouvoir des synergies entre les acteurs des Nations Unies qui travaillent sur les questions liées aux sanctions et encourager les efforts de coopération entre acteurs régionaux et internationaux, l’objectif étant de mettre en place une approche commune pour parvenir à la paix et la stabilité. 

M. Aboulatta a ensuite présenté les différentes activités entreprises par le Comité pour maintenir le dialogue avec la RDC, en insistant sur la volonté de promouvoir la coopération et la collaboration entre les différents acteurs des Nations Unies et ceux de la région.  Il a rappelé notamment que la fin du pillage et du trafic illicite des ressources naturelles était indispensable pour permettre à la RDC de surmonter ses conflits et de se lancer sur la voie du développement. 

Les prochains mois seront cruciaux pour la RDC et le Comité veillera à ce que son travail et celui du Groupe d’experts contribuent à une évolution positive, a assuré M. Aboulatta.  Le Comité demeure engagé à préserver son dialogue avec le Gouvernement de la RDC et ceux de la région, a-t-il insisté, en annonçant son intention d’effectuer une nouvelle visite en RDC fin octobre, afin d’obtenir des informations sur le terrain.

M. Aboulatta a annoncé qu’il organiserait ensuite, au Siège, une réunion du Comité avec les États de la région, à l’occasion de laquelle il présentera un résumé des réactions au rapport final du Groupe d’experts ainsi que ses impressions sur sa visite d’octobre.

Cette réunion sera également l’occasion de promouvoir une discussion sur l’efficacité du régime de sanctions et les moyens de renforcer sa contribution à la paix et la stabilité en RDC, a conclu le Président du Comité. 

« Cette séance ne peut être une séance comme les autres », a déclaré d’emblée Mme ANNE GUEGUEN (France) qui est revenue sur l’assassinat, en mars dernier, de Zaida Catalán et Michael Sharp, et pour qui la présence des familles de Zaida et de Michael rappelle à nouveau, « s’il en était besoin », le caractère abject de ce crime.  « Madame Maria Moresby, Madame Elizabeth Moresby, Monsieur John Sharp, Madame Michele Sharp, permettez-moi, au nom de la France, de vous adresser une nouvelle fois nos plus sincères condoléances pour la perte de vos enfants, de votre sœur, et de vous exprimer notre admiration et gratitude pour le travail de Michael et de Zaida », a-t-elle déclaré.

Notant que le groupe d’enquête qui avait été mis en place en avril dernier avait constaté que des recherches et investigations plus poussées s’imposent, la représentante a ensuite appelé le Secrétaire général à mettre en place sans délai un mécanisme spécial d’enquête pour permettre aux autorités judiciaires compétentes de mener des poursuites effectives afin que justice soit rendue. 

« Nous le devons à la mémoire de ces deux experts.  Nous le devons à leurs proches, aux nombreux groupes d’experts mis en place par ce Conseil, à tous les personnels des Nations Unies et au peuple congolais lui-même si éprouvé », a-t-elle lancé.

La représentante s’est ensuite inquiétée de la situation actuelle en RDC évoquant notamment la violence dans les Kasaï, « qui demeure à un niveau insoutenable », la propagation de l’insécurité jusqu’au Tanganyika, l’augmentation des conflits intercommunautaires, mais aussi les évasions de détenus, « dans des proportions inhabituelles ».

Elle a estimé qu’un retournement de cette « triste dynamique » passe nécessairement par des efforts accrus pour empêcher l’impunité des auteurs de violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme, « quelle que soit leur affiliation ».  Elle a aussi appelé les autorités congolaises à coopérer pleinement avec l’équipe d’experts internationaux mise en place par le Conseil des droits de l’homme en juin dernier.

Alors que l’échéance fixée pour la tenue des élections se rapproche, Mme Gueguen s’est par ailleurs dite préoccupée de l’accumulation des retards dans la mise en œuvre de l’Accord du 31 décembre, « la seule feuille de route crédible pour permettre une sortie de la crise que connaît le pays ». 

Elle a jugé urgent de mettre en œuvre l’Accord dans son intégralité, appelant notamment les autorités congolaises à prendre toutes les mesures nécessaires afin que soient organisées, comme convenu dans l’Accord, des élections crédibles et inclusives au plus tard en décembre 2017.  Il est en particulier urgent que soit publié le calendrier électoral, a-t-elle ajouté.

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a salué la mémoire des deux experts du Comité assassinés, avant de souligner l’importance de mettre sur pied un mécanisme spécial d’enquête et de suivi dirigé par l’ONU pour faire la lumière sur cet assassinat. 

Elle s’est élevée contre la poursuite du trafic illicite de ressources naturelles dans l’est de la RDC, qui ne fait que renforcer le conflit armé qui sévit dans le pays.  « Sans transition démocratique, nous devons nous attendre à d’autres cycles de violence généralisée », a prévenu la représentante, en appelant les autorités congolaises à annoncer rapidement un calendrier électoral « et à s’y tenir ».  Sans quoi, a-t-elle annoncé, les États-Unis seront favorables au renforcement du régime de sanctions du Conseil de sécurité applicables à la RDC. 

Le travail du Groupe d’experts et du Comité n’est pas achevé et « il nous faut continuer à chercher des moyens de rétablir la paix et la sécurité en RDC », a ajouté en conclusion Mme Sison.

Mme IRINA SCHOULGIN-NYONI (Suède) a condamné dans les termes les plus forts les meurtres de Zaida Catalán et de Michael Sharp, jugeant intolérable que des personnes mandatées par le Conseil de sécurité pour enquêter sur des violations des droits de l’homme soient tuées d’une manière aussi brutale.

La représentante s’est ensuite inquiétée de la fragilité de la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, « y compris sa dimension ethnique ».  Elle a qualifié de particulièrement préoccupantes les informations concernant la remobilisation d’anciens combattants, et a appelé à améliorer de manière significative la réintégration de ces derniers, notamment des enfants soldats.

Elle a aussi constaté que les revenus tirés des minerais de sang permettaient d’alimenter le conflit.  À ce titre, elle s’est félicitée de l’imposition, par l’Union européenne, d’une réglementation qui exige des importateurs qu’ils contrôlent la chaîne d’approvisionnement de ces minerais.

La représentante suédoise s’est aussi préoccupée de la situation dans les Kasaï et au Tanganyika, constatant que l’étendue de la violence avait un impact négatif direct sur la paix et la sécurité.  Elle a également parlé de l’incident de Kavumu, dans la province du Sud-Kivu, où 42 cas de viols aggravés contre des enfants ont été signalés.

Elle a voulu une plus grande collaboration entre la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé, la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit et le Comité des sanctions. 

La déléguée a ensuite appelé à respecter et à mettre en œuvre les régimes de sanctions et à fournir au Groupe d’experts les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat.  À cet égard, la Suède appuie la recommandation de prolonger son mandat de 18 mois afin de leur accorder le temps nécessaire pour obtenir des informations dans le cadre d’un régime plus rigoureux.

La déléguée a par ailleurs parlé du processus démocratique en RDC, appelant à la pleine mise en œuvre de l’Accord du 31 décembre.  Des élections libres, justes, crédibles et inclusives demeurent le seul moyen pacifique et viable de sortir de l’actuelle crise politique qui alimente autrement, comme l’illustre le conflit dans les Kasaï, davantage d’instabilité et de conflit, a-t-elle déclaré.

Revenant ensuite sur la mort des deux experts, la représentante a appuyé la proposition de création, par le Secrétaire général, d’un mécanisme de suivi qui permettrait d’établir la vérité et de traduire les auteurs en justice.  Elle a aussi appelé à tirer les leçons des possibles défaillances du système.  « Ce qui est arrivé à Zaida Catalán et à Michael Sharp ne doit jamais se reproduire », a-t-elle affirmé.

M. VOLODYMYR PAVLICHENKO (Ukraine) a souligné le rôle important joué par le régime de sanctions pour réduire certaines menaces en République démocratique du Congo (RDC).  Par exemple, il permet d’empêcher que les groupes armés bénéficient de l’exploitation illicite de certaines ressources naturelles, comme le tungstène, a-t-il expliqué, avant de souligner le retard pris dans la mise en place d’un système de traçabilité s’agissant de l’or.

Il a ensuite dit sa préoccupation devant la détérioration de la situation sécuritaire en RDC, laquelle est étroitement liée à la « stagnation politique » que connaît le pays.

Enfin, soulignant l’importance que les auteurs des meurtres des deux experts de l’ONU soient traduits en justice, le délégué de l’Ukraine a exhorté le Secrétaire général à mettre sur pied un mécanisme de suivi placé sous son autorité, comme le fit son prédécesseur après la tragédie de l’hôtel Terrain au Soudan du Sud.

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a souhaité que les coupables du meurtre des deux membres du Groupe d’experts soient rapidement traduits en justice et jugés.  Il a demandé aux autorités congolaises d’enquêter et de coopérer avec les enquêtes de la Suède et des États-Unis. 

Le travail du Groupe d’experts, auquel appartenaient Michael Sharp et Zaida Catalán, met en évidence l’exploitation illicite de ressources naturelles, alors que la fin de ce trafic illégal est essentielle pour la paix en RDC, a fait observer le représentant. 

Pour le délégué, le Gouvernement de la RDC a pris « quelques mesures » pour lutter contre ces trafics et assurer une meilleure traçabilité des minéraux.  Le représentant l’a donc encouragé à poursuivre dans cette voie, notamment pour lutter contre le trafic illicite d’or, dans lequel, a-t-il ajouté, il est connu que de hauts militaires de la RDC sont impliqués.

Les deux experts ont été assassinés alors qu’ils enquêtaient sur les violations des droits de l’homme commises notamment au Kasaï, en proie depuis plusieurs mois à la violence, a rappelé le représentant, qui a souhaité que les autorités de la RDC coopèrent pleinement avec l’équipe d’experts internationaux des droits de l’homme nommé par le Haut-Commissaire aux droits de l’homme.

L’Italie reste préoccupée par le peu de progrès dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de la Saint-Sylvestre, étape essentielle dans l’organisation d’élections démocratiques et transparentes.  Pour le représentant, il est urgent de préparer la tenue au plus vite de telles élections.

L’Italie, attachée au régime de sanctions, est disposée à travailler, sur la base du rapport final du Groupe d’experts, avec les autres membres du Conseil de sécurité pour poursuivre ce régime. 

M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a demandé que les auteurs des meurtres des deux experts de l’ONU soient traduits en justice.  Il a exhorté le Secrétaire général à mettre rapidement sur pied un mécanisme de suivi placé sous son autorité, afin d’éviter qu’une telle tragédie ne se reproduise.

Il a souligné l’importance de la tenue d’élections crédibles en RDC, de nature à conduire à une passation démocratique du pouvoir à la fin de cette année, conformément à l’Accord politique du 31 décembre 2016.  La bonne application du régime de sanctions, y compris les recommandations antérieures formulées par le Groupe d’experts, est dans l’intérêt de toutes les parties prenantes en RDC et dans celui de la communauté internationale et des pays de la région, a affirmé le délégué du Japon.

En conclusion, M. Kawamura a appelé la RDC et les autres pays concernés à coopérer de manière accrue avec le Comité et le Groupe d’experts.

Après avoir présenté ses condoléances aux familles des deux experts assassinés, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que les régimes de sanctions ne peuvent pas constituer une fin en soi et n’avaient pour objectif que de favoriser le dialogue politique.

Préoccupé de l’intensification des affrontements entre forces gouvernementales et groupes armés en RDC, il s’est élevé contre les accusations selon lesquelles la faute en reviendrait aux soldats congolais, qui feraient un usage disproportionné de la force et se rendraient coupables de violations des droits de l’homme.  Ce qu’il faut privilégier, a dit le délégué, c’est la mise en œuvre de l’Accord du 31 décembre, dont les modalités reviennent toutefois exclusivement au Gouvernement et au peuple congolais. 

La délégation a ensuite encouragé les pays de la région à redoubler d’efforts pour mettre fin au trafic illicite de ressources naturelles en provenance de RDC.  M. Nebenzia s’est tout particulièrement élevé contre l’utilisation frauduleuse des certificats de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs pour exporter de l’or. 

S’agissant enfin de la création d’un mécanisme d’enquête et de suivi par le Secrétaire général pour faire la lumière sur les circonstances de la mort des deux experts, il a estimé que Kinshasa faisait déjà preuve d’un niveau élevé de coopération dans le cadre de l’enquête avec les Gouvernements de la Suède et des États-Unis.

M. JONATHAN ALLEN (Royaume-Uni) a estimé que la question traitée aujourd’hui devait l’être en public.  C’est en public, face aux familles des deux experts assassinés, qu’il faut exiger la justice pour ces meurtres, car c’est le Conseil de sécurité qui leur avait demandé de collecter les informations pour lesquelles ils ont été assassinés, qui leur avait demandé d’être ses yeux et ses oreilles, a déclaré le représentant. 

Il faut garantir la redevabilité, a-t-il ajouté, estimant qu’une première mesure avait été prise avec l’adoption de la résolution 2360 (2017) mais qu’il fallait faire encore davantage.  Le Royaume-Uni se félicite donc de la suggestion du Secrétaire général de mettre en place un mécanisme de suivi. 

Cinq mois après les meurtres de Michael Sharp, Zaida Catalán et leur interprète, la redevabilité n’est pas encore garantie et les commanditaires des deux assassinats ne sont pas arrêtés, a rappelé le délégué, qui a affirmé que les deux experts avaient été tués car ils dénonçaient les violations des droits de l’homme dans les Kasaï.

Il faut reconnaître le lien entre les violences en RDC et la non-application de l’Accord du 31 décembre, a en outre affirmé le représentant.  Cet accord doit être clairement mis en œuvre.  « À défaut, que se passera-t-il? » a demandé le représentant, qui a fait état de 430 violations des droits de l’homme recensées officiellement depuis le début de l’année, soit plus que durant toute l’année 2015. 

Le représentant s’est dit effaré du niveau de violence en RDC, notamment au Kasaï.  S’il s’est félicité que certains miliciens aient été arrêtés et jugés, il a rappelé qu’il était fait état de recrutements généralisés d’enfants par certains groupes armées, ou de viols d’enfants.

Il a également rappelé que ces groupes armés haineux finançaient leurs activités par le trafic de ressources naturelles, et a appelé à une application intégrale du régime de sanctions existant.  Le représentant a enfin salué le travail du Président du Comité 1533. 

M. WU HAITAO (Chine) a estimé que la sécurité des personnels de l’ONU devait être garantie et que toute entorse à cette règle est « inacceptable ».  Après s’être félicité des efforts déployés par le Gouvernement congolais pour rétablir la paix et la sécurité dans le pays et organiser des élections, le représentant a affirmé que le retour de la stabilité constituerait un fondement important de la reconstruction de la RDC. 

Pour sa délégation, les solutions fournies par la communauté internationale ne s’avèreront vraiment efficaces que si elles respecteront le leadership de Kinshasa.  À cet égard, la Chine a considéré que les sanctions ne sont pas une fin en soi. 

Elle s’est enfin félicitée de la décision du Comité des sanctions de se rendre en RDC en octobre prochain.

M. FODÉ SECK (Sénégal) a salué le travail du Groupe d’experts, dont il a rappelé le contexte « difficile et douloureux », marqué par l’assassinat de deux de ses membres.  Pour le Sénégal, la diminution des cas de violence liés au contexte électoral, mentionnée dans le rapport final du Groupe d’experts, constitue cependant un signe encourageant dans la perspective d’élections démocratiques et transparentes, que le Sénégal appelle de ses vœux.

Le Sénégal appelle donc la communauté internationale à mettre à la disposition de la RDC les ressources nécessaires et promises pour assurer le succès du processus électoral.

Le représentant a jugé préoccupante la poursuite de l’insécurité dans l’est de la RDC et s’est inquiété notamment de la résilience des différents groupes armés, malgré les efforts des forces armées congolaises et de la MONUSCO.  Il faut donc travailler davantage pour couper ces groupes de leurs soutiens extérieurs et de leur financement, a poursuivi le représentant, qui a notamment fait observer les éléments du rapport faisant état des ressources apportées aux groupes armés par la diaspora, via les réseaux sur Internet. 

M. Seck a noté que l’exploitation illégale des ressources naturelles et leur commerce illicite alimentaient également les groupes armés et a insisté sur la nécessité de travailler avec tous les acteurs concernés sur le plan international, régional et sous-régional, et notamment avec les États de la région des Grands Lacs, afin de mettre en place des mécanismes efficaces de contrôle et de traçabilité des ressources stratégiques.

Le représentant a rappelé à cet égard que le rapport du Groupe d’experts reconnaissait l’efficacité de ces systèmes, bien qu’encore imparfaits.  Pour le Sénégal, il faut appliquer le même régime à l’or, source des trafics les plus lucratifs.  M. Seck a également rappelé l’importance d’une coopération internationale pour couper l’approvisionnement en armes des « forces négatives ».

Le représentant a rappelé que le meurtre des deux experts constituait une violation grave du droit international humanitaire.  Le Sénégal soutient les efforts déployés par la RDC en termes d’enquêtes, menées en coopération avec les Nations Unies et les autres parties intéressées. 

M. BARLYBAY SADYKOV (Kazakhstan) s’est dit préoccupé de constater le mécontentement croissant de la population congolaise vis-à-vis de la situation politique dans son pays, aggravé par les conditions économiques actuelles.  Il a vivement encouragé la Commission électorale à coopérer avec la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) dans les préparatifs des prochaines élections. 

Après avoir dénoncé la hausse des violations des droits de l’homme, en particulier les femmes et les filles, en RDC, le représentant a lancé un appel en faveur d’un désarmement volontaire et de la réinsertion des ex-combattants. 

« Nous devons nous atteler à la prévention et à la stabilisation du pays, voilà pourquoi nous demandons le respect de la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Accord du 31 décembre dernier », a ajouté le délégué.

M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a déclaré que les conditions atroces dans lesquelles les deux membres du Groupe d’experts avaient perdu la vie rappelaient les difficultés et les tragédies auxquelles sont confrontées de nombreuses victimes des violences en RDC.  Elles rappellent aussi les sacrifices constants que consent le personnel des Nations Unies sur le terrain, qu’il soit militaire, policier ou civil.  « Ces sacrifices méritent notre gratitude et notre respect », a ajouté le représentant.

L’Uruguay soutiendra toutes les enquêtes nécessaires à l’identification des responsables de ces actes lâches.  Le représentant a pris note du résumé analytique de la Commission d’enquête des Nations Unies, transmis hier au Conseil de sécurité, et a invité tous les membres du Conseil à examiner en détail son contenu, et spécialement ses recommandations.

M. Bermúdez a ensuite rendu hommage au travail du Comité 1533.  Il a cité notamment la visite du Président du Comité en RDC l’an passé et les réunions organisées en présence des représentants spéciaux du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé et chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  L’Uruguay souhaite que le Comité continue dans cette voie et appuie l’idée d’une nouvelle visite de sa présidence en RDC en octobre. 

Le représentant a également rendu hommage au travail du Groupe d’experts et a dit souscrire à ses différentes analyses.  L’Uruguay est préoccupé par les activités des groupes armés, les violations des droits de l’homme et l’absence de progrès concrets dans le processus politique. 

Le représentant a rappelé l’urgence d’une mise en œuvre rapide et de bonne foi de l’Accord politique du 31 décembre, afin que puissent être organisées des élections démocratiques, crédibles et inclusives au plus tard en décembre 2017.

Après avoir un rendu un hommage appuyé aux deux experts assassinés, M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a souhaité que tout soit mis en œuvre pour faire traduire en justice les auteurs de ce crime.  Devant l’escalade des violences dans différentes régions du pays, l’Union africaine et les pays de la région ont une immense responsabilité pour rétablir la paix et la sécurité, a-t-il estimé. 

Mais pour cela, il faut s’attaquer aux autres problèmes, dont le trafic illicite des ressources naturelles, en particulier l’or.  Les situations humanitaire et des droits de l’homme dans le pays sont également sources de préoccupation, a noté le représentant. 

Prenant note de la volonté du Président du Comité 1533 de se rendre en RDC en octobre prochain, le délégué éthiopien a souhaité que cette visite soit de nature à favoriser l’application des différentes mesures prévues par les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rendu hommage au travail du Groupe d’experts et à ses deux membres assassinés en mars au Kasaï.  Il a exprimé sa préoccupation face à l’absence de résultats dans l’enquête sur les responsables du double meurtre, qui doit aboutir à l’arrestation et au jugement de ces derniers par les tribunaux compétents dans le respect de la souveraineté nationale de la RDC.  

La Bolivie est consciente des difficultés croissantes rencontrées par le Groupe d’experts et le Comité 1533 dans leurs travaux, du fait de la réorganisation des différents groupes armés et de leurs liens avec des groupes étrangers. 

Si le mécanisme de traçabilité des minerais permet de réduire les revenus des groupes armés, il comporte encore des lacunes qui doivent être comblées, a fait observer le représentant.  En particulier, l’or n’est pas soumis à cette traçabilité, a-t-il rappelé, avant d’insister sur la nécessité de lutter contre les paradis fiscaux.

Le représentant s’est dit préoccupé par le pillage systématique des ressources de la RDC par les groupes armés, des membres des forces armées ou encore par des entreprises multinationales.  Pour assurer la fin des hostilités et le développement social et économique, il est essentiel que les États maintiennent un contrôle effectif sur leurs ressources, a-t-il ajouté. 

Il a en outre estimé que le régime de sanctions ne pouvait constituer une fin en soi.  Les sanctions ne devraient être imposées qu’en cas de menace contre la paix et la sécurité internationales ou d’agression et devraient être élaborées dans des conditions très transparentes et être soumises à des évaluations périodiques, a poursuivi M. Llorentty Solíz. 

Seul le Conseil de sécurité peut appliquer de telles sanctions, a ajouté le représentant, qui a dénoncé la tendance à appliquer des sanctions unilatérales, y voyant une violation des principes de la Charte des Nations Unies comme du multilatéralisme.

La Bolivie salue les efforts du Représentant spécial du Secrétaire général pour assurer la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre, et elle exhorte les différentes parties à travailler dans la cadre d’un dialogue sans exclusive et dans le respect de la Constitution de la RDC.

M. LÉONARD SHE OKITUNDU, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et de l’intégration régionale de la RDC, a affirmé que les auteurs de l’assassinat des deux experts de l’ONU, Michael Sharp et Zaida Catalán, seront « sévèrement sanctionnés ».  S’adressant aux parents des deux victimes, présents dans la salle, il a rappelé que « Michael et Zaida étaient, certes, au service des Nations Unies mais également, et d’une manière indirecte, à celui de mon pays à qui ils ont rendu d’appréciables services en sillonnant son territoire pour dénoncer tout ce qui constitue une entrave à la paix ». 

« Notre devoir nous impose de donner un sens à leur sacrifice et de conjuguer nos efforts pour que cette paix qu’ils ont tant désirée devienne réalité », a-t-il dit.

Soulignant l’importance de la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre 2016, le Vice-Premier Ministre a déclaré que les dissensions internes au sein de certains partis politiques de l’opposition, « inhérentes à tout processus politique », n’enlevaient rien au Gouvernement de sa légalité issue de l’investiture par le Parlement national.

Les opérations d’actualisation du fichier électoral ont suffisamment évolué, a-t-il dit, ajoutant que les opérations d’enrôlement « proprement dites » devraient débuter avant la fin de ce mois.  « Les élections auront bel et bien lieu en RDC, conformément au calendrier électoral qui sera publié par la Commission électorale nationale indépendante », a-t-il assuré.

Concernant le volet sécuritaire, M. She Okitundu a indiqué que les capacités opérationnelles des Forces démocratiques alliées (ADF) avaient sensiblement diminué, avant de rappeler le cas des 340 combattants des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) qui s’étaient rendus aux forces congolaises il y a trois ans et restent cantonnés en RDC.

Il a déploré que les appels de son pays pour leur réinstallation dans un pays tiers en dehors des pays de la région des Grands Lacs soient restés lettre morte.  Le Vice-Premier Ministre a ensuite condamné « l’activisme militaire » de l’ex-Mouvement du 23 mars (ex-M23) et exhorté le Conseil à envisager des sanctions à leur endroit.

Il a également promis que toute la lumière serait faite sur les allégations des graves violations des droits de l’homme portées contre les forces armées de la RDC. 

Revenant sur la mort des deux experts de l’ONU, il a indiqué que l’enquête avait permis d’identifier 16 suspects.  Neuf d’entre eux sont déjà aux arrêts, a-t-il dit, rappelant que 19 audiences avaient déjà eu lieu.  Le Vice-Premier Ministre a souligné que la justice congolaise collaborait déjà avec l’ONU, avant de mentionner la nomination de trois experts internationaux par le Haut-Commissaire des droits de l’homme. 

Le déplacement de ces experts, ainsi que de ceux de l’Union africaine, doit s’opérer dans le strict respect des termes de référence déterminés et s’inscrire dans le cadre de l’assistance à apporter aux enquêtes diligentées par la justice militaire congolaise, a-t-il estimé.

M. She Okitundu a souligné l’excellente coopération de son pays avec les experts du FBI, ainsi que l’acceptation de son gouvernement de collaborer avec la Suède dans les enquêtes menées par la justice congolaise malgré l’absence d’une convention d’entraide judiciaire entre la RDC et la Suède.

Enfin, s’agissant de la recommandation contenue dans le rapport relative à la mise en place d’une enquête internationale indépendante sur l’assassinat des deux experts, le Vice-Premier Ministre a jugé « inopportune » la mise en place d’une telle enquête, dans la mesure où son Gouvernement collabore déjà avec les mécanismes de l’ONU mis sur pied et avec les instances des pays d’origine des deux victimes. 

« Quant à la demande de prorogation du mandat du Groupe d’experts, mon gouvernement estime que cette question a déjà été réglée dans la résolution 2360 (2017) du Conseil qui le prorogeait jusqu’au 1er août 2018 », a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Kosovo entre dans une « période d’incertitude » et un « vide » de gouvernance, prévient le Chef de la MINUK

8025e séance – matin
CS/12957

Le Kosovo entre dans une « période d’incertitude » et un « vide » de gouvernance, prévient le Chef de la MINUK

Suite aux élections législatives anticipées du 11 juin dernier, qui se sont déroulées sans « irrégularités ou incidents majeurs », le Kosovo est entré dans une « période d’incertitude » marquée par la reconfiguration de son paysage politique et un « vide fonctionnel », a prévenu, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, M. Zahir Tanin.

« La phase de transition s’est avérée être semée d’obstacles.  La principale coalition n’a pas été en mesure de parvenir à une majorité absolue, certaines des parties ont accru leur représentation de manière marginale et l’opposition de longue date a pris un élan significatif », a résumé M. Tanin, venu présenter au Conseil le dernier rapport* en date du Secrétaire général sur la situation au Kosovo, qui couvre la période allant du 16 avril au 15 juillet.

Mais ce scrutin a mis à jour un « changement de mentalités » chez de nombreux votants, en particulier les jeunes, davantage préoccupés des problématiques de l’accès à l’emploi ou à l’éducation que de la « rhétorique ethno-nationaliste », qui a échoué à mobiliser l’électorat comme par le passé. 

Une nouvelle donne qui informe d’ores et déjà la prochaine campagne électorale, celle des municipales prévues en octobre prochain, a relevé le Représentant spécial, qui dirige également la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK).

« Aucun parti ni aucune coalition préélectorale n’ayant obtenu une majorité en état de gouverner, aucune alliance postélectorale n’a été constituée afin de former un gouvernement », a constaté le Secrétaire général dans son rapport, une impasse déplorée aujourd’hui par la majorité des membres du Conseil.

Si le rapport conclut qu’au cours de la période considérée, le dialogue entre Belgrade et Pristina mené sous les auspices de l’Union européenne (UE) a peu progressé, le Représentant spécial a toutefois fait état d’un nouveau développement le 24 juillet, après que le Président de la Serbie, M. Aleksandar Vučić, a affirmé que la viabilité des progrès dans son pays passe par le règlement de la situation au Kosovo. 

Le Chef d’État, a poursuivi M. Tanin, a prévenu qu’à moins de résoudre « le conflit historique entre Serbes et Albanais », les deux peuples seraient confrontés à l’« échec ».

Pour le Premier Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, M. Ivica Dačić, la relance du dialogue de haut niveau tiendra à la volonté des deux parties de faire des compromis, volonté qui a selon lui fait défaut jusqu’à présent à l’autre partie, qui préfère les mesures unilatérales. 

À l’inverse, Mme Vlora Çitaku, du Kosovo, a dénoncé l’attitude « très agressive et peu constructive » de la Serbie, qui ne cesserait d’entraver la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade, citant notamment le soutien apporté par la Serbie aux « structures parallèles serbes » au Kosovo.  Soulignant la dangerosité de solutions reposant sur une base ethnique, Mme Çitaku a mis en garde contre le rejet du multiculturalisme. 

La réconciliation politique ne peut, pour le Représentant spécial, faire fi de toutes les divisions et doit s’accompagner d’une réconciliation populaire et sociétale, que la MINUK s’est efforcée de promouvoir par de multiples initiatives au cours des mois écoulés. 

Un des obstacles sur lesquels bute une telle réconciliation, c’est la question des personnes disparues au cours du conflit au Kosovo, le Ministre des affaires étrangères serbe affirmant que les crimes commis au « Kosovo-Metohija » doivent faire, sans exception, l’objet de poursuites judiciaires.

Une tâche improbable à en croire la Fédération de Russie, qui a qualifié de « déplorable » l’état de l’appareil judiciaire au Kosovo.  Il s’est par ailleurs vigoureusement opposé à la proposition des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni de clôturer la MINUK, dont la présence sur place est pour Moscou primordiale.

Le délégué russe a également rejeté les appels lancés par ces mêmes membres du Conseil, rejoints par le Japon, pour changer la périodicité de l’examen de la situation au Kosovo, en la rendant semestrielle.

* S/2017/640

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ

Rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (S/2017/640)

Déclarations

M. ZAHIR TANIN, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo et Chef de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a indiqué que la période à l’examen avait été marquée par la tenue, le 11 juin, des élections législatives anticipées, qui ont fait voler en éclats la coalition au pouvoir.  « La phase de transition s’est avérée être semée de défis.  La principale coalition n’a pas été en mesure de parvenir à une majorité absolue, mais certaines des parties ont accru leur représentation de manière marginale, cependant que l’opposition de longue date a pris un élan significatif. »  Par conséquent, a constaté le haut fonctionnaire, le paysage politique du Kosovo a été reconfiguré de la manière la plus visible depuis de nombreuses années.  Un facteur qui, selon lui, a pu contribuer à cette évolution est le changement de mentalités « spectaculaire » chez de nombreux électeurs, en particulier les jeunes, pour lesquels l’emploi, l’accès à l’éducation et les opportunités économiques, la lutte contre la corruption et le renforcement de l’état de droit sont des préoccupations majeures.  La « rhétorique ethno-nationaliste » n’a pas mobilisé la majorité des électeurs comme par le passé, a encore noté M. Tanin, en prenant acte des « repositionnements politiques » touchant toutes les parties à l’approche des élections municipales prévues en octobre.

Par ailleurs, les observateurs de l’Union européenne ont estimé que les élections législatives s’étaient bien déroulées, avec un taux de participation de 41%, comparable à celui de 2014, même si de nombreux nouveaux votants se sont rendus aux urnes partout au Kosovo.  Dans les zones serbes, le taux de participation a été le plus important constaté de mémoire récente, rompant avec la tendance précédente qui consistait à boycotter les élections au Kosovo, a noté le Représentant spécial.  Il a toutefois regretté que l’élection n’ait pas permis d’impulser un élan en faveur de la participation des femmes.  Mais la plus vive préoccupation soulevée par ce processus électoral, a prévenu M. Tanin, c’est qu’il a accaparé toute l’énergie des institutions au cours des trois derniers mois, créant un « vide fonctionnel » qui a entravé les progrès économiques et sociaux et en matière de gouvernance.  Fin juillet, par exemple, le Fonds monétaire international (FMI), en l’absence d’un gouvernement légitime pour mener à bien l’examen, a annulé l’acompte final d’un financement étalé sur deux ans.  Et au cours de la période écoulée, l’investissement étranger a chuté de deux tiers, en raison, à l’évidence, d’un « climat d’incertitude politique ».

Le Chef de la MINUK a ensuite attiré l’attention sur un nouveau développement important dans la région, à savoir l’initiative du Président de la Serbie d’ouvrir un dialogue interne sur le Kosovo, un sujet dont M. Tanin s’est entretenu en personne avec le Chef d’État serbe.  Le Représentant spécial a expliqué que le 24 juillet dernier, le Président Vučić avait déclaré publiquement que la viabilité des progrès de la Serbie passe par le règlement de la situation au Kosovo et prévenu que si le conflit historique entre Serbes et Albanais n’était pas résolu, cela représenterait un échec pour les deux peuples.  M. Tanin a indiqué que ce discours avait été salué par « le Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères du Kosovo ».  « Comme l’histoire le démontre, la recherche d’un compromis juste, difficile et parfois douloureux exige un leadership vigoureux », a ajouté le Représentant spécial, en soulignant que des problèmes régionaux exigent des « solutions régionales ». 

Mais la réconciliation politique ne peut, par définition, faire fi de toutes les divisions, a rappelé M. Tanin.  Elle doit s’accompagner d’une réconciliation populaire et sociétale, qui repose sur la confiance et la coopération à tous les niveaux.  C’est l’un des objectifs de la MINUK, a assuré le haut fonctionnaire en faisant état de plusieurs initiatives prises en ce sens, comme, par exemple, une table ronde de niveau international organisée à Genève, conjointement avec le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, pour sensibiliser à la question des personnes disparues au cours du conflit au Kosovo qui représente « un obstacle de taille à la réconciliation sociétale ».  Par ailleurs, en juin dernier, la Mission a facilité une réunion entre les maires de 10 municipalités au sud-est du Kosovo, au cours de laquelle des questions relatives à la coopération économique et aux risques de radicalisation et d’extrémisme idéologique ont été abordées.

Le Représentant spécial s’est enfin félicité de constater que, le 5 juillet, les Chambres spécialisées pour le Kosovo, situées à La Haye, sont devenues opérationnelles et en mesure de recevoir toute présentation ou tout acte d’accusation émanant du Bureau du Procureur spécialisé.  Les Chambres spécialisées peuvent désormais pleinement exercer leurs activités judiciaires et aucun obstacle juridique ne s’oppose à ce qu’elles soient saisies d’écritures ou d’accusations, a précisé M. Tanin.

M. IVICA DAČIĆ, Premier Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de Serbie, a estimé que le renforcement de la MINUK envoyait un message important concernant le rôle des Nations Unies comme élément qui chapeaute la présence internationale au Kosovo-Metohija.  Il a toutefois regretté qu’étant donné l’environnement sensible dans lequel la MINUK travaille, celle-ci s’abstient souvent, selon lui, de critiquer les institutions provisoires d’auto-administration du Kosovo, estimant qu’une telle attitude n’incitait pas lesdites institutions provisoires à adopter une position plus constructive.

M. Dačić s’est ensuite félicité du succès obtenu aux élections anticipées par la « Liste serbe », estimant que celle-ci témoignait de l’unité politique des Serbes du Kosovo-Metohija, et y voyant la garantie de la poursuite d’une politique de défense de leurs intérêts.  Il s’est toutefois dit préoccupé de l’impasse actuelle dans laquelle se trouve le dialogue entre Belgrade et Pristina.  Il s’est dit particulièrement inquiet des propos tenus, à son retour de France, par Ramush Haradinaj, « candidat au poste de premier ministre du Kosovo », qui a parlé de « notre ennemi serbe » et affirmé vouloir leur « infliger pire traitement que par le passé ».  Le Ministre serbe a appelé les institutions judiciaires du Kosovo-Metohija et de la communauté internationale à ne pas rester inactives face à de tels discours haineux, ni à ceux formulés par des dirigeants politiques albanais qui appellent à la création d’une « Grande Albanie ».  De tels propos représentent une menace supplémentaire au processus de réconciliation et à la normalisation des relations, a-t-il avertit.

Le Ministre a affirmé que Belgrade continuait, malgré les obstacles, de participer de manière constructive au dialogue avec Pristina, avec pour objectif de résoudre les questions en suspens et contribuer à la création de conditions favorables aux progrès de la région de l’ouest des Balkans dans la perspective d’une adhésion à l’Union européenne.  Il a relevé des progrès dans les aspects techniques du dialogue, notamment les télécommunications, mais a reproché à « l’autre partie » d’être en retard dans la mise en œuvre de l’accord sur l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe.  Il a aussi dénoncé la poursuite des « actions unilatérales » imposées par Pristina, pointant notamment du doigt une directive interdisant l’utilisation des passeports serbes émis par le Directorat de coordination du Ministère de l’intérieur de la Serbie pour entrer et sortir du Kosovo-Metohija.  Pristina ne cherche pas à obtenir de véritables progrès dans la normalisation des relations, a accusé le Ministre, appelant à une plus grande pression internationale.

Poursuivant son intervention, M. Dačić a affirmé qu’il n’y aura pas de réconciliation tant que les crimes commis au Kosovo-Metohija ne feront pas l’objet de poursuites judiciaires.  Il a notamment dénoncé le fait qu’aucun jugement n’avait à ce jour été rendu par la justice kosovare à propos de la mort d’un millier de Serbes depuis la fin du conflit.  Il a notamment qualifié de choquant le récent acquittement de toutes les personnes accusées de crimes de guerre dans l’affaires Kleçka, ainsi que la décision de la Cour constitutionnelle du Kosovo d’acquitter Sami Lushtaku, un ancien membre de l’Armée de libération du Kosovo (ALK) qui avait été condamné à 12 ans de prison pour crime de guerre.  « Ces instances ne font que démontrer qu’il n’y aucune intention de cesser de relativiser les crimes commis par les membres de l’ALK terroriste dans la province sud de Serbie », s’est-il insurgé, dénonçant par ailleurs le fait que 18 ans après les faits, aucun des auteurs du massacre de Staro Gracko n’avait été appréhendé.

M. Dačić a averti que tant que des « dirigeants de clans paramilitaires et de cartels criminels » pourront se déplacer librement au Kosovo, la démocratisation de la société restera lettre morte, soulignant qu’un avenir européen commun ne pourra être bâti que sur la base d’une véritable renonciation de ce « legs criminel ».

Il a également accusé la communauté internationale de s’être montrée incapable de créer au Kosovo-Metohija une société reposant sur la primauté du droit, formulant toutefois l’espoir que les Chambres spécialisées étant maintenant opérationnelles, il sera dorénavant possible d’inculper les personnes accusées d’avoir commis des crimes de guerre à l’encontre des Serbes et des non-Albanais.  

M. Dačić a également longuement mis l’accent sur la faiblesse des retours des membres des communautés minoritaires, fait qu’il a attribué tant à la faible protection apportée par la police face aux pressions qu’à une « discrimination institutionnelle ».  Il a voulu que les prochains rapports du Secrétaire général consacrent davantage de place aux pressions exercées sur les membres des communautés minoritaires.  Il a notamment souligné que, 18 ans après le conflit, seul 1,8% des Serbes déplacés ont pu rentrer.  Il a aussi appelé à intensifier les activités et programmes de rétablissement de la confiance, avant d’exhorter la communauté internationale à redoubler d’efforts pour protéger le patrimoine culturel et religieux serbe.

Enchaînant, le Ministre a déclaré que la reprise du dialogue de haut niveau tiendra à la volonté de part et d’autre de faire des compromis, volonté qui, a accusé M. Dačić, a fait défaut jusqu’à présent à l’autre partie « qui préfère les mesures unilatérales ».  Le Ministre a préconisé une démarche courageuse, réaliste et tournée vers l’avenir, à l’image de l’initiative du Président serbe de lancer à travers le pays une vaste consultation sur l’avenir du Kosovo-Metohija.

Anticipant par ailleurs sur la déclaration de Mme Çitaku, du Kosovo, le Ministre a affirmé qu’elle allait parler de « génocide » et se présenter comme une victime.  Mais « les grandes victimes de l’épuration ethnique, ce sont les Serbes », a-t-il lancé.  Il a notamment rappelé qu’à Pristina vivaient avant la guerre 44 835 Serbes et qu’en 2011, selon le recensement des autorités du Kosovo, il en restait environ 200.  M. Dačić a cité de nombreux autres chiffres concernant la population d’autres villes, faisant à chaque fois état de 200 à 400 fois moins de Serbes aujourd’hui qu’avant la guerre.  S’en prenant directement à son interlocutrice, M. Dačić a par ailleurs déclaré que « Mme Çitaku n’est pas Kosovare, elle est Albanaise.  Les Kosovars en tant que peuple n’existent pas. »

« Regardons la réalité en face et fermons les portes de la MINUK », a affirmé Mme VLORA ÇITAKU, du Kosovo, arguant que les temps avaient changé depuis 1999.  Elle a indiqué qu’aucune raison ne justifiait désormais l’existence de la Mission et que les ressources qui lui étaient allouées –400 millions de dollars depuis 2009– pourraient être affectées à meilleur escient.

Elle a exhorté les États Membres à agir en ce sens, ajoutant que le débat de ce jour était sans intérêt au regard des défis pressants auxquels le monde fait face.  Elle a souligné la tenue pacifique des dernières élections au Kosovo, ainsi que le taux de participation élevé constaté au sein de la communauté serbe.

Mme Çitaku a affirmé que tous les partis au Kosovo partageaient l’objectif de l’intégration euro-atlantique et que le Kosovo s’attelait à entamer le partenariat pour la paix avec l’OTAN.  « Nous n’épargnerons aucun effort pour convaincre nos compatriotes serbes que l’armée du Kosovo sera également la leur. » 

Elle a ensuite dénoncé l’attitude « très agressive et peu constructive » de la Serbie, qui ne cesse d’entraver la normalisation des relations, citant notamment le soutien apporté par la Serbie aux « structures parallèles serbes » au Kosovo.  « La normalisation ne peut être unilatérale », a-t-elle affirmé.

Elle a souligné la dangerosité de solutions reposant sur une base ethnique, mis en garde contre le rejet du multiculturalisme et dénoncé le débat surgi il y a quelques jours en Serbie s’agissant d’un « accord historique » entre la Serbie et le Kosovo et appelant au « compromis ».

« Permettez-moi de le dire haut et fort.  Le Kosovo n’est pas un projet provisoire.  Le Kosovo est là pour toujours », a-t-elle dit, ajoutant, en conclusion, que la normalisation et la réconciliation ne pouvaient pas être atteintes par le biais de la « partition et de la subjugation ».

Mme IRINA SCHOULGIN-NYONI (Suède) a affirmé que des progrès clairs et indéniables avaient été réalisés au Kosovo depuis la fin du conflit, il y a maintenant près de deux décennies.  Cependant, construire des sociétés pacifiques et prospères nécessite une vigilance constante et un engagement inébranlable de tous les dirigeants politiques, ainsi que de la communauté internationale, a-t-elle dit.

La représentante a dit espérer l’achèvement de la session constitutive de l’Assemblée et la formation du gouvernement.  Un nouveau gouvernement doit commencer rapidement à mettre en œuvre les réformes nécessaires au Kosovo, a-t-elle ajouté, précisant que la Suède attendait avec intérêt de poursuivre sa coopération bilatérale pour le développement, ainsi que dans les domaines de la démocratie, des droits de l’homme, de l’état de droit et des développements durable et socioéconomique.

Elle a également jugé essentiel que la question du statut n’empêche pas le Kosovo de suivre son chemin européen et d’adhérer à des organisations internationales.  Dans le cadre du processus de normalisation, la participation des femmes est essentielle pour favoriser une paix et une stabilité durables et inclusives, a-t-elle poursuivi.

M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a rappelé que son pays adhérait aux principes du respect strict de l’intégrité territoriale et de la résolution 1244 (1999), comme fondements du règlement de la situation au Kosovo.  Il a reconnu l’importance de la réunion officieuse de haut niveau organisée le 3juillet par la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires extérieures et de sécurité, et l’engagement pris par les deux dirigeants en faveur de la relance du dialogue entre Belgrade et Pristina.  Il y a vu un premier pas après la pause imposée par les processus électoraux en Serbie et au Kosovo.  Il a aussi invité les dirigeants kosovars à travailler ensemble et à progresser dans la désignation de leurs autorités.  

M. Bermúdez a condamné une nouvelle fois les discours ultranationalistes, haineux ou qui invitent à la déstabilisation.  Il a dit voir avec intérêt le dialogue interne lancé par le Président Vučić de Serbie sur le Kosovo et a estimé que le travail des dirigeants régionaux en faveur d’accords mutuellement bénéfiques pouvait servir les deux communautés.

L’Uruguay considère en effet comme essentiel d’avancer sur le chemin de la réconciliation dans le respect des minorités et en veillant à leur intégration.  À cet égard, le représentant a fait part de sa préoccupation face aux atteintes à la liberté de circulation des Serbes du Kosovo, notamment par le refus des autorités kosovares de reconnaître la validité des passeports émis par la Serbie et les difficultés qu’elles leur font quand ils demandent des passeports kosovars. 

Il s’est en revanche félicité de la mise en place à Pristina d’un centre de documentation sur les personnes disparues, initiative qui rassemble Serbes et Albanais. Il a souhaité davantage de coopération concernant les retours de personnes déplacées et la protection des édifices religieux ou culturels.

Le représentant a rappelé le travail effectué par les différentes composantes de la présence internationale sur place –la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX), La Force de paix au Kosovo (KFOR), l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)- et s’est félicité des initiatives et mesures prises par les groupes de femmes ou de jeunes.

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) s’est félicitée du bon déroulement des élections législatives de juin dernier au Kosovo, preuve selon elle qu’il est désormais en mesure de créer de véritables institutions politiques et d’adhérer à l’Union européenne.  Les États-Unis, a-t-elle souligné, sont prêts à travailler avec le Kosovo sur un programme conjoint, notamment en vue de faciliter le dialogue entre Pristina et Belgrade et de renforcer la croissance économique en promouvant un Kosovo stable et multiethnique.  

« LA MINUK est un succès », a estimé Mme Sison, pour qui la Mission n’a cependant « plus de raison d’être », à la lumière des progrès accomplis ces dernières années. 

Par ailleurs, selon la délégation, le Conseil de sécurité devrait changer la périodicité de l’examen de cette question à son ordre du jour, en s’en saisissant tous les six mois seulement.  De son côté, le Secrétaire général devrait procéder dès à présent à une évaluation budgétaire en vue de réduire les effectifs et éviter tout doublon au sein de la Mission, a préconisé la représentante.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a constaté que les interventions de M. Ivica Dačić, Premier Vice-Premier ministre et Ministre des affaires étrangères de Serbie, et de Mme Vlora Çitaku, du Kosovo, étaient chargées d’émotion, ce qui tient, selon le représentant, à la complexité des problèmes, laquelle témoigne de l’importance de la MINUK. 

L’Éthiopie favorise le dialogue entre Belgrade et Pristina et soutient le processus mené sous l’égide de l’Union européenne, mais elle constate aussi que les progrès sont maigres, notamment en ce qui concerne des éléments clefs comme la mise en place de l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe. 

Le représentant a souhaité que les nouveaux dirigeants de Belgrade et Pristina fassent preuve d’esprit constructif, ce qui suppose qu’ils s’abstiennent de toute mesure ou déclaration susceptible de créer des tensions ou de briser la confiance.

L’Éthiopie estime, avec le Chef de la MINUK, que la coopération doit être aussi sociale et culturelle.  Le respect du patrimoine culturel mutuel est à cet égard un élément clef.  Un autre élément clef est la question démographique, a poursuivi le représentant, qui s’est par ailleurs félicité des efforts pour impliquer la jeunesse et les femmes dans le processus de réconciliation et pour lutter contre tout risque de radicalisation.

L’Éthiopie salue le rôle de la mission « État de droit » de l’Union européenne et celui de la Force de paix au Kosovo (KFOR).  La stabilité au Kosovo et dans toute la région sera tributaire de la volonté de dialogue et de négociations de part et d’autre, a conclu le représentant.  

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) s’est dit convaincu que la régularisation des relations entre Pristina et Belgrade serait de nature à stabiliser l’ensemble des Balkans.  Il a exhorté les deux capitales à mettre en œuvre les accords conclus dans le cadre du dialogue.  Le représentant a en outre salué la tenue sans incidents des élections législatives, exhortant les acteurs politiques à désigner un premier ministre et à créer une dynamique constructive entre l’exécutif et l’opposition. 

La délégation a également attiré l’attention sur l’importance de protéger les minorités.  Apportant son soutien à la MINUK et à la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX), le délégué a rappelé que la Force de paix au Kosovo (KFOR) est dirigée par un Italien.  L’heure est, pour son pays, venue de procéder à une évaluation de la présence des Nations Unies au Kosovo, a préconisé le représentant, qui a réitéré l’importance, en conclusion, de renoncer à toute rhétorique belliqueuse pour les parties en présence.

M. GORGUI CISS (Sénégal) a salué la bonne tenue des élections législatives du 11 juin au Kosovo mais a regretté la faible représentation des femmes dans la nouvelle Assemblée.  Il a souhaité que les difficultés actuelles à former une nouvelle majorité gouvernementale soient rapidement dépassées.  Le Sénégal encourage les parties au dialogue entre Pristina et Belgrade à redoubler d’efforts et se félicite des efforts en ce sens de l’Union européenne, y compris de la réunion officieuse de haut niveau organisée le 3 juillet.

Pour le représentant, la question des personnes disparues doit être prioritaire.  Le Sénégal salue par ailleurs les efforts déployés, notamment dans le cadre de la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX), pour lutter contre l’extrémisme violent, le terrorisme ou la criminalité organisée.  Il se félicite également des efforts de la Mission en faveur de la justice de transition, des droits de l’homme, du processus de normalisation entre Belgrade et Pristina et en faveur des jeunes.

Il appelle au plein respect des engagements déjà pris, y compris dans le domaine de la protection du patrimoine culturel.  Le représentant a enfin salué les travaux de la MINUK, de l’Union européenne et de sa mission EULEX, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de la Force de paix au Kosovo (KFOR).

M. WU HAITAO (Chine) a salué les efforts consentis de part et d’autre pour trouver une solution aux problèmes du Kosovo, se félicitant des efforts déployés par Belgrade et Pristina pour relancer le dialogue sur de nouvelles bases.

La réconciliation et la coexistence pacifique de toutes les communautés est un élément déterminant du règlement des questions en suspens, a encore noté le représentant, qui a considéré par ailleurs que le Conseil devrait rester saisi de la situation au Kosovo.

M. VOLODYMYR MIALKOVSKYI (Ukraine) a souligné que la situation politique au Kosovo restait préoccupante en raison de l’incapacité des groupes politiques à parvenir à un accord sur la répartition des postes, lequel constitue une condition préalable nécessaire à une administration efficace.  Cette impasse crée des tensions inutiles et pourrait compromettre les efforts visant à préserver la paix et la stabilité dans la région, a-t-il dit.

L’Ukraine, a-t-il ajouté, demande aux dirigeants du Kosovo de faire preuve d’unité et de prouver leur volonté de relever les défis immédiats et à long terme, y compris le développement économique, la situation énergétique, le renforcement de l’état de droit, les relations avec la Serbie.  L’Ukraine espère également que les nouvelles autorités accorderont la priorité à la mise en œuvre des accords conclus dans le cadre du dialogue mené par l’Union européenne entre Belgrade et Pristina, y compris sur la création de l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe, l’intégration judiciaire, la protection des droits fondamentaux ou les libertés.

De même, le délégué ukrainien a dit partager pleinement les appels en vue de commencer une discussion ciblée sur la reconfiguration de la MINUK et de reconsidérer la régularité des séances d’information du Conseil sur le Kosovo.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a appelé de ses vœux le plein respect de la résolution 1244 (1999), y compris celui de l’intégrité territoriale de la Serbie.  Pour la Bolivie, les parties doivent respecter les engagements pris dans le cadre des négociations menées sous les auspices de l’Union européenne et œuvrer en faveur d’un règlement pacifique par le dialogue.

La Bolivie invite notamment les parties à mettre en place les dispositions de l’Accord de Bruxelles conclu il y a quatre ans pour mettre en place l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe.  Les parties doivent en outre s’abstenir de toute rhétorique belliqueuse susceptible d’échauffer les esprits.

La Bolivie salue le travail de la MINUK pour protéger les droits des communautés et promouvoir la réconciliation, permettre le retour des personnes déplacées et organiser la première assemblée des jeunes du Kosovo.  Elle souhaite la poursuite des bons offices de la Mission. 

Le représentant a pris note de la décision du Secrétaire général de créer un fonds d’affection spéciale en faveur de victimes d’intoxication au plomb pendant leur déplacement dans des camps dans le nord du Kosovo.

Enfin, la Bolivie estime que la mise en place de chambres judiciaires spécialisées au Kosovo est un pas vers la réconciliation.

M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a affirmé que les défis relatifs à la situation au Kosovo ne justifiaient pas que le Conseil s’en saisisse tous les trois mois.  « Le Conseil s’est exprimé à de nombreuses reprises sur la nécessité d’adapter les mandats aux situations sur le terrain et la MINUK est un bon exemple », a—t-il dit, rappelant que le risque de violence au Kosovo était bien moins élevé qu’au Moyen-Orient et en Afrique.

Il a plaidé pour un examen de la Mission afin de déterminer les fonctions que celle-ci peut, seule, assumer et considérer une réduction de son personnel.  Le représentant du Japon a ensuite pris bonne note des récentes remarques du Président serbe sur « un règlement définitif du conflit » et souligné l’importance de parvenir à un compromis. 

En conclusion, M. Kawamura a appelé toutes les parties à s’abstenir de toute rhétorique incendiaire et exhorté le nouveau Gouvernement kosovar à mettre en place l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe.

M. BARLYBAY SADYKOV (Kazakhstan) a constaté que les dernières élections législatives en date avaient modifié en profondeur l’horizon politique au Kosovo.  Il s’est félicité de voir que les dirigeants serbes et kosovars se sont récemment accordés sur la marche à suivre dans le cadre du dialogue entre Pristina et Belgrade, affirmant qu’il faut se concentrer sur la réconciliation communautaire et le respect des droits de l’homme. 

Le représentant a ensuite plaidé pour engager les jeunes dans un tel processus, soulignant également le rôle que la société civile peut jouer dans la stabilisation du Kosovo, avec le soutien des partenaires internationaux. 

En conclusion, le Kazakhstan a encouragé toutes les parties à surmonter leurs différends politiques.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a estimé que la situation au Kosovo était calme et s’est félicité de la tenue d’élections « justes et libres » le 11 juin.  Il a souhaité que soit désormais formé un gouvernement qui relance la marche du pays vers l’intégration européenne, y compris par l’indispensable dialogue avec la Serbie, sous les auspices de l’Union européenne.

Le représentant a souhaité que le Kosovo puisse devenir rapidement membre de l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), afin de pouvoir mieux lutter contre la criminalité organisée.  Les frontières sur la carte sont consacrées, elles ne seront plus modifiées, a également affirmé le représentant, pour qui cette question ne devrait pas revenir tous les trois mois au Conseil de sécurité. 

Alors que 600 millions de dollars d’économie ont été faits cette année pour les opérations de maintien de la paix, le budget de la MINUK, au contraire, augmente, a dénoncé le représentant, qui s’est dit « déçu » de cette orientation.  Quel message envoyons-nous sur les activités du Conseil de sécurité lorsque nous finançons des panneaux solaires au Kosovo alors que nous devons faire des économies au Darfour ou au Soudan du Sud, a-t-il demandé. 

Il n’y a pas de problème important de sécurité au Kosovo, a rappelé le représentant, qui a cité en ce sens le rapport de la Force de paix au Kosovo (KFOR).  Pour le Royaume-Uni, l’heure est venue pour le Conseil de sécurité de se réunir moins fréquemment sur la question du Kosovo.

« Le Conseil doit se concentrer sur des situations qui menacent réellement la paix et la sécurité internationales, ce qui n’est pas le cas du Kosovo », ce dont chacun dans cette salle devrait se réjouir, a-t-il conclu.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a exprimé, une nouvelle fois, le souhait de son pays d’une révision du rythme d’examen de la situation au Kosovo par le Conseil.  « Alors que le Conseil fait face à une charge de travail en constante augmentation, plus rien ne justifie le maintien de briefings trimestriels sur la question du Kosovo, dont la situation n’est pas comparable à celle des crises pour lesquelles l’engagement intensif du Conseil est essentiel. »

Elle a plaidé pour la poursuite du recentrage des actions de la MINUK et leur coordination avec les autres acteurs présents au Kosovo, jugeant que « l’immobilisme actuel » n’était pas satisfaisant.

La tenue dans le calme des récentes élections au Kosovo est un nouveau succès dans la construction d’une culture démocratique apaisée dans ce pays, a poursuivi Mme Gueguen.  La déléguée a toutefois déploré le climat d’intimidation et de violences contre certains candidats et électeurs dans les municipalités serbes du Kosovo.

Elle s’est ensuite déclarée convaincue que l’avenir du Kosovo ne se jouait plus au sein de ce Conseil mais bien dans le cadre du dialogue politique entre Pristina et Belgrade mené sous l’égide de l’Union européenne. 

La représentante française a demandé la mise en œuvre dans les meilleurs délais des accords de 2013 et 2015, y compris s’agissant de la création de l’Association/communauté des municipalités à majorité serbe. 

« Enfin, la poursuite des efforts engagés pour la consolidation de l’état de droit au Kosovo doit demeurer une priorité », a conclu Mme Gueguen.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est rangé du côté du Premier Vice-Premier Ministre de la Serbie.  Il a n’a pas souscrit au « bilan positif » dressé par plusieurs membres du Conseil, faisant état pour sa part de « dysfonctionnements » politiques majeurs au Kosovo. 

Ainsi, les partis qui ont remporté les élections ne parviennent pas à former un gouvernement, donnant le sentiment que Pristina manque à ses engagements dans le cadre du dialogue qui est le sien avec Belgrade.  Le représentant a demandé que des garanties soient fournies pour le respect des droits des Serbes, accusant le Kosovo de « continuer » de s’en prendre aux Serbes, d’incendier leurs propriétés et d’empêcher le retour des réfugiés. 

Le délégué a affirmé que l’agence anticorruption du Kosovo, dont les bureaux sont installés dans des locaux appartenant à l’Église orthodoxe serbe, refuse de s’acquitter d’un arriéré de 400 000 euros de loyer.  L’Église a donc l’intention de se tourner vers la justice, sans savoir s’il sera donné suite à sa plainte, compte tenu de l’état « déplorable » de l’appareil judiciaire. 

En effet, a poursuivi M. Nebenzia, les juges albanais du Kosovo remplacent peu à peu les fonctionnaires internationaux et sont soumis à des pressions.  Et les autorités refuseraient de mettre en œuvre l’accord de 2011 sur la liberté de circulation. 

Le délégué russe s’est également élevé contre la « diffusion » du radicalisme au Kosovo, un territoire utilisé selon lui pour recruter des combattants terroristes qui partent ensuite à l’étranger.  Il a en outre rejeté les accusations selon lesquelles la Fédération de Russie chercherait à modifier les frontières des Balkans occidentaux.

Pourtant, en 1992, a-t-il rappelé, « les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN » ont déclenché une guerre dans la région sans se soucier de conséquences.  Mais il est aujourd’hui « à la mode » d’accuser la Russie de maux dont elle n’est pas responsable, parlant de « diffamation ».  « Arrêtez de dénigrer la Russie, qui a toujours respecté ses partenaires », a tranché le représentant. 

Enfin, M. Nebenzia a jugé « inadéquat » de parler de réduction de la présence de l’ONU au Kosovo, dans la mesure où cette organisation joue un rôle primordial sur place.  Il s’est donc vigoureusement opposé à la clôture de la MINUK, ajoutant qu’il n’est pas possible de supprimer une structure qui permet d’avoir une vision objective de la situation au Kosovo. 

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a estimé que ce qui se passe au Kosovo affecte de manière directe la paix et la sécurité dans toute la région.  C’est pourquoi l’Égypte se félicite de la bonne tenue des élections du 11 juin et appelle les parties à s’entendre pour former un gouvernement. 

Par ailleurs, l’Égypte est préoccupée par les difficultés que rencontre le dialogue entre Belgrade et Pristina, mené sous les auspices de l’Union européenne, qui est pourtant le cadre approprié pour œuvrer en faveur du rapprochement.  Le représentant s’est donc félicité de la tenue de la réunion officieuse de haut niveau du 3 juillet.  En revanche, l’Égypte appelle toutes les parties à s’abstenir de toute rhétorique agressive.

Enfin, le représentant a estimé que la communauté internationale devait continuer d’inciter Belgrade et Pristina à discuter et à trouver des solutions de compromis, tout en accélérant l’intégration régionale dans les institutions européennes, ce qui serait de nature à améliorer la situation dans l’ensemble des Balkans occidentaux.

Reprenant la parole, M. Dačić, Premier Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a rejeté les propos tenus par Mme Vlora Çitaku, du Kosovo, l’accusant de faire acte de « propagande ».  Selon lui, elle aurait insulté le Conseil de sécurité et la Serbie.  Il s’est également dit en désaccord avec la position des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France, qui s’aligneraient sur celle du Kosovo selon laquelle la MINUK doit être retirée.  « Est-ce que quelqu’un va parler de ces 200 000 Serbes persécutés, dont 1% à peine a pu rentrer chez lui? » a-t-il demandé.

Reprenant à son tour la parole, Mme Çitaku, du Kosovo, s’est dite fière « de ne pas avoir de descendants de Milošević dans son paysage politique », ajoutant: « Nous sommes fiers du passé de nos dirigeants. »  Elle a estimé qu’il n’était pas le moment ni le lieu de discuter de qui est venu en premier dans les Balkans, avant de préciser: « Je suis d’origine ethnique albanaise, fière citoyenne du Kosovo et ces identités coexistent en parfaite harmonie en moi. »

Mme Çitaku a rappelé que le Kosovo avait des frontières délimitées au sein de la Yougoslavie bien avant que celle-ci disparaisse.  Par ailleurs, l’indépendance du Kosovo n’est pas le fruit d’une sécession mais celui de l’éclatement des composantes de la Yougoslavie, a-t-elle ajouté.  Elle a également rappelé que la Cour internationale de Justice (CIJ) avait été saisie d’une demande d’avis consultatif sur la déclaration unilatérale d’indépendance et qu’elle avait jugé qu’elle était légitime.

« Le Kosovo n’est pas le paradis sur terre et il reste beaucoup à faire pour améliorer le niveau de vie de nos concitoyens, lutter contre la corruption ou la criminalité », a reconnu Mme Çitaku, mais c’est le cas de nombreux pays, y compris dans les Balkans occidentaux, a-t-elle ajouté.  

Mme Çitaku a ensuite cité le nombre des électeurs qui s’étaient prononcés dans les municipalités à majorité serbe lors du scrutin du 11 juin, soit 123 077 votes.  Sachant que seules les personnes majeures votent, combien de citoyens serbes cela représente-t-il, a-t-elle demandé, avant d’inviter M. Ivica Dačić, Premier Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de Serbie, « à venir au Kosovo » pour se rendre compte de la réalité.

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