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Yémen: face à l’absence de concessions des parties au conflit, la « pire crise humanitaire au monde » se poursuit, s’alarme l’Envoyé spécial de l’ONU

8191e séance – matin
CS/13227

Yémen: face à l’absence de concessions des parties au conflit, la « pire crise humanitaire au monde » se poursuit, s’alarme l’Envoyé spécial de l’ONU

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Ismail Ould Cheikh Ahmed, a assuré, ce matin devant le Conseil de sécurité, où il intervenait pour la dernière fois en cette qualité, que la « seule chose qui manque » pour mettre fin au conflit dans ce pays en proie à la « pire crise humanitaire au monde causée par l’homme », « c’est l’engagement des parties à faire des concessions et à accorder la priorité à l’intérêt national ».

« Pour la première fois, nous étions sur le point de parvenir à un accord sur une proposition élaborée en concertation avec les parties.  Mais elles ont refusé de la signer à la dernière minute », a-t-il déploré, en expliquant que les houthistes n’étaient pas disposés à faire des concessions sur les arrangements de sécurité proposés.

« Seuls les décideurs yéménites sont capables d’arrêter la guerre et l’effusion de sang; je le répète, seuls les décideurs yéménites sont capables de mettre fin à la guerre et à l’effusion de sang », a insisté le haut fonctionnaire, que M. Martin Griffiths remplacera très prochainement. 

Le Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), M. John Ging, a, de son côté, expliqué qu’après trois ans de conflit, la situation humanitaire au Yémen est « catastrophique », avec un nombre « sans précédent » de civils en détresse, de 22,2 millions au total, dont 8,4 millions en insécurité alimentaire et près de 400 000 enfants âgés de moins de 5 ans atteints de malnutrition aiguë.

En outre, a-t-il précisé, près de deux millions de personnes sont déplacées à travers le pays, et 1,1 million de cas de choléra ont été recensés depuis avril 2017.

Dans ce contexte, le Plan d’aide humanitaire lancé par l’ONU pour le Yémen en 2018 exige la mobilisation de 2,96 milliards de dollars pour prêter assistance à 13,1 millions de personnes, a précisé le Directeur.  Il s’est donc félicité à cet égard de l’annonce d’une contribution de 930 millions de dollars de la part des Gouvernements de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, un geste également salué par le Koweït, les États-Unis, le Pérou et la Pologne. 

Si cette somme devrait être transférée au 31 mars prochain, il n’en reste pas moins que seul un tiers de ce plan est financé, a relevé M. Ging, en annonçant l’organisation d’une conférence des donateurs le 3 avril à Genève.

Sur le plan logistique, le principal défi qui se pose aujourd’hui est, selon lui, la pratique de la coalition menée par l’Arabie saoudite consistant à dérouter les conteneurs transportés par cargo vers Aden, entraînant retards et coûts supplémentaires, s’est-il alarmé.  Le Directeur des opérations a également dit que « les forces affiliées aux houthistes » poursuivent leur bombardement de zones peuplées.

Les combats ont été particulièrement sanglants et destructeurs dans la province de Taëz, se sont émus MM. Ging et Ould Cheikh Ahmed, en attirant l’attention sur ceux qui, le 28 janvier, ont causé la mort de dizaines de personnes et blessé des centaines d’autres. 

Plusieurs membres du Conseil de sécurité ont pointé du doigt la République islamique d’Iran, accusée d’avoir violé l’embargo sur les armes applicables au Yémen, en transférant des armes aux houthistes, notamment des missiles balistiques qui auraient été tirés en direction de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. 

Les délégations américaine et britannique ont réitéré leurs regrets devant le vote, hier, de la Fédération de Russie, contre un texte soulignant cette responsabilité, un « échec retentissant », selon le représentant du Yémen.

À l’inverse, son homologue russe a, pour sa part, estimé que la prorogation hier du Groupe d’experts chargé de surveiller le régime de sanctions en vigueur au Yémen était un motif de satisfaction, dans un dossier éminemment complexe.  « Nous devrions relancer le processus politique sans conditions préalables, plutôt qu’accuser certains pays », a estimé le représentant. 

Le représentant du Yémen a demandé au Conseil de sécurité d’agir pour contraindre les houthistes à respecter ses résolutions pertinentes, rappelant qu’aucun État souverain ne saurait accepter la présence de groupes armés sur son territoire. 

Assurant qu’ils sont « parrainés » par Téhéran, il a dénoncé les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire, dont les houthistes seraient également responsables.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. ISMAIL OULD CHEIKH AHMED, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a déclaré que les parties poursuivent sur leur lancée destructrice à gains nuls sur le plan politique, plongeant le pays dans davantage de pauvreté et de destruction.  Au cours des deux derniers mois, une nette escalade des opérations militaires a été observée à Hodeïda, à Jaouf, à Sanaa et à Beïda, ainsi que dans des zones près de la frontière yéméno-saoudienne.  « Les houthistes continuent de tirer des missiles en Arabie saoudite », a-t-il affirmé. 

Les combats ont été particulièrement sanglants et destructeurs dans la province de Taëz, notamment le 28 janvier, jour pendant lequel des dizaines de personnes ont été tuées et des centaines d’autres blessées, a déploré le haut fonctionnaire, en appelant à la retenue toutes les parties prenantes à Aden.  M. Ould Cheikh Ahmed s’est dit particulièrement préoccupé par les informations faisant état du recrutement d’enfants soldats par toutes les parties au conflit, en particulier les houthistes, qui constitue une violation flagrante des droits des enfants. 

Alors que le conflit s’aggrave, la crise économique et humanitaire aussi, faisant « de la crise humanitaire causée par l’homme au Yémen la pire au monde ».  Depuis 2015, l’économie yéménite s’est effondrée et sa devise a perdu plus de 50% de sa valeur, avec pour corollaire une inflation spectaculaire et la difficulté pour la population de se procurer des articles de première nécessité.  Les ménages yéménites perdent leur pouvoir d’achat. 

Entre mars 2015 et aujourd’hui, le nombre d’habitants ayant besoin d’une aide sous une forme ou une autre est passé de 15,9 millions à 22,2 millions, a précisé l’Envoyé spécial.  « Dans le contexte de ces défis humanitaires épouvantables, je salue la généreuse annonce de contributions d’un montant d’un milliard de dollars de la part de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en vue de soutenir l’action humanitaire et la reconstruction au Yémen, ainsi que leur engagement à lever 500 millions de dollars auprès d’autres donateurs dans la région.  J’espère que ces initiatives se concrétiseront et que les fonds promis seront décaissés le plus rapidement possible pour améliorer la situation précaire actuelle », a déclaré M. Ould Cheikh Ahmed.

« Au cours des trois dernières années, et tout au long de mes rencontres continues avec les parties », a-t-il poursuivi, une base solide pour un accord a été établie avec l’approbation d’un cadre général à Bienne en 2015 et les discussions ayant eu lieu au Koweït en 2016.

« Ceux qui suivent de près le dossier reconnaîtront que les Nations Unies n’ont ménagé aucun effort pour aider les parties yéménites à trouver une solution pacifique.  Au cours de mes interactions avec les parties, nous avons discuté des détails d’une feuille de route de la paix avec un calendrier clair, en tenant compte des besoins et des défis des parties », a expliqué M. Ould Cheikh Ahmed, alors qu’il s’exprimait aujourd’hui pour la dernière fois en sa qualité d’Envoyé spécial.

« Aujourd’hui, a-t-il ajouté, je voudrais annoncer que, pour la première fois, nous étions sur le point de parvenir à un accord sur une proposition de paix, élaborée en consultation avec les parties, mais qu’elles ont refusé de signer à la dernière minute », a-t-il expliqué.  Au terme des consultations, il est devenu clair que les houthistes n’étaient pas disposés à faire des concessions sur les arrangements de sécurité proposés.  « Cela a été une pierre d’achoppement majeure pour parvenir à une solution négociée », a constaté à regret le haut fonctionnaire. 

« Nous avons une feuille de route pour la paix au Yémen », a-t-il assuré.  La seule chose qui manque, c’est l’engagement des parties à faire des concessions et à accorder la priorité à l’intérêt national.  C’est ce qui nous fait douter de leur réelle intention de mettre fin à cette guerre, s’est inquiété l’Envoyé spécial.  « Seuls les décideurs yéménites sont capables d’arrêter la guerre et l’effusion de sang, je répète que seuls les décideurs yéménites sont capables de mettre fin à la guerre et à l’effusion de sang. »

M. JOHN GING, Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, a dit qu’après trois ans de conflit, la situation humanitaire était catastrophique.  Un nombre sans précédent de 22,2 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire ou d’une protection, y compris 8,4 millions de personnes qui sont en insécurité alimentaire, a-t-il dit.  Près de 400 000 enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë et près de deux millions de personnes sont déplacées, a poursuivi M. Ging, ajoutant qu’il y aurait 1,1 million de cas de choléra recensés depuis avril 2017. 

Il a détaillé les efforts de l’ONU pour remédier à cette situation, l’Organisation apportant une aide alimentaire d’urgence à plus de sept millions de personnes en 2017.  « Nous apportons une aide médicale à 3,2 millions de personnes », a déclaré M. Ging.  Il a précisé que le Plan d’aide humanitaire pour le Yémen en 2018 demande la mobilisation de 2,96 milliards de dollars pour assister 13,1 millions de personnes.  Assurer le financement de ce plan est crucial, a-t-il dit, en mentionnant l’annonce d’une contribution de 930 millions de dollars des Gouvernements de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.  Cette somme devrait être transférée au 31 mars prochain, a-t-il dit.  Néanmoins, seul un tiers de ce plan est financé, a déclaré M. Ging, en annonçant la tenue d’une conférence des donateurs le 3 avril. 

Il a ensuite plaidé pour un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire, déplorant les obstacles bureaucratiques du fait des autorités yéménites.  Ces dernières semaines, certains travailleurs humanitaires ont également fait l’objet de détentions temporaires sans raison, tandis que leur équipement est confisqué aux points de contrôle, a-t-il dit. 

M. Ging a précisé que l’accès au pays s’est amélioré depuis la levée du blocus imposé par la coalition en décembre.  « Notre principal défi aujourd’hui est la pratique de la coalition consistant à dérouter les conteneurs par cargo vers Aden, ce qui engendre des délais et des coûts supplémentaires », a-t-il dit.  « L’aéroport de Sanaa demeure fermé aux vols commerciaux, empêchant des milliers de patients de se rendre à l’étranger pour recevoir des soins. »

M. Ging a jugé essentiel de maintenir le flux d’importations via tous les points d’entrée du pays, toute interruption ayant une incidence immédiate sur les prix des denrées alors que le risque de famine est bien réel.  En janvier 2018, le prix des denrées est 55% plus élevé qu’avant l’escalade du conflit, a-t-il précisé.  Le mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies est un système efficace pour examiner les importations via les ports de Hodeïda et de Salif, a-t-il dit, en se félicitant des efforts en cours pour renforcer ce mécanisme. 

M. Ging a indiqué qu’en janvier, les agences onusiennes ont reçu 175 000 litres de carburant de la part de la coalition.  Pour que de telles importations de pétrole puissent se poursuivre, les ports de Hodeïda et de Salif doivent rester ouverts, a insisté M. Ging. 

Il a souligné la nécessité de payer les salaires des fonctionnaires, y compris ceux de près de 30 000 travailleurs du secteur de la santé, l’ONU et ses partenaires ne pouvant pas se substituer au secteur public.  Toutes les parties doivent prendre les mesures nécessaires pour épargner les civils, lesquels continuent de souffrir du conflit, a-t-il dit.  « Les forces affiliées aux houthistes poursuivent leur bombardement de zones peuplées », a-t-il dit, en mentionnant la frappe aérienne ayant touché le marché de Taëz et causé la mort d’au moins 60 civils. 

En conclusion, M. Ging a exhorté tous les États Membres à prendre les mesures nécessaires afin que toutes les parties au conflit respectent le droit international. 

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a lui aussi déploré la gravité de la crise yéménite, en soulignant que le Gouvernement britannique est le deuxième plus important contributeur à l’assistance humanitaire fournie dans le pays.  Mais l’aide seule ne suffira pas à répondre aux besoins du peuple yéménite, a-t-il prévenu.  Toutes les parties doivent garantir un accès humanitaire aux populations en détresse, a-t-il insisté. 

Le représentant a indiqué que le conflit en cours au Yémen a permis l’émergence d’un « espace non contrôlé » au sein duquel peuvent opérer les groupes terroristes, comme en témoignent les tirs de missiles balistiques effectués en direction de l’Arabie saoudite.  « Nous sommes d’accord avec le Groupe d’experts chargé de surveiller la mise en œuvre du régime de sanctions applicables au Yémen, lequel a conclu à la responsabilité de l’Iran dans le transfert d’armes dans ce pays après l’imposition de l’embargo », a ajouté le représentant en conclusion.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté les parties à œuvrer pour inverser la tendance négative constatée l’année dernière au Yémen, le risque de fragmentation du pays étant bien réel.  Le processus politique doit être ouvert, a-t-il dit.  Il a insisté sur la gravité de la situation humanitaire dans le pays, avant de condamner toutes les attaques indiscriminées visant des civils, y compris les missiles balistiques des houthistes contre l’Arabie saoudite. 

Assurer un accès humanitaire sans entrave n’est pas un acte de commisération, mais une obligation en vertu du droit international, a-t-il déclaré.  Le délégué a demandé le plein accès aux ports et aéroports du pays, avant d’exhorter les parties à coopérer pleinement avec le mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies.  « Nous exhortons les États Membres à ne pas inspecter les navires qui ont été inspectés par ce mécanisme », a-t-il affirmé. 

Insistant sur l’importance de la lutte contre l’impunité, le délégué a mentionné l’examen en cours par un groupe d’experts éminents, mandaté par le Conseil des droits de l’homme, des violations des droits de l’homme et appelé les parties à l’appuyer. 

Enfin, il a réitéré les demandes de son pays s’agissant de la situation au Yémen: des négociations substantielles, un accès humanitaire et le respect du droit international. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a noté que la situation au Yémen s’était à nouveau complexifiée ces dernières semaines, suite notamment à l’assassinat de l’ancien Président Ali Abdullah Saleh et la prise de contrôle, par une coalition de groupes sudistes opposés au Président Abdrabbo Mansour Hadi, de la plus grande partie de la ville d’Aden.  Il a averti que cette évolution récente éloignait la perspective d’une issue politique et ne devait pas remettre en cause l’intégrité territoriale du Yémen.

Le représentant a ensuite affirmé que la priorité de la communauté internationale doit être de répondre à la crise humanitaire que connaît le Yémen, « parmi les plus graves au monde ».  Il a estimé que le Plan d’aide humanitaire de la coalition constitue une étape encourageante et a souligné que pour garantir son efficacité, celui-ci doit être mis en place en pleine coordination avec l’ONU et les organisations non gouvernementales. 

Il a précisé que les approvisionnements humanitaires et commerciaux doivent être permis par tous les ports, y compris ceux de Hodeïda et de Salif, et tous les aéroports, notamment celui de Sanaa.  Il a aussi souligné que la levée du blocus doit être reconduite sans ambiguïté, pour une période permettant une plus grande prévisibilité aux acteurs humanitaires et commerciaux.

M. Delattre s’est dit préoccupé par le risque de dégradation de la sécurité et de la stabilité régionales.  Il a évoqué le vote, hier, du renouvellement technique du régime de sanctions, regrettant toutefois que le Conseil n’ait pas réussi à s’entendre sur « le premier projet mis au vote ». 

Il a ensuite indiqué que la France continuera d’être mobilisée sur la question des transferts de technologies et biens balistiques dans la région, précisant qu’il s’agit d’un sujet que le Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France abordera lors que son déplacement à Téhéran le 5 mars.

Plus le conflit s’enlise, plus il apparaît évident qu’il n’y a pas de solution militaire au Yémen, a enchaîné le délégué.  Il a estimé que la nomination du nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Martin Griffiths, donne l’opportunité à toutes les parties de se réengager sérieusement sans préconditions dans les négociations. 

« Notre objectif à tous doit rester de parvenir à une cessation durable des hostilités et d’encourager les parties à renouer le dialogue », a-t-il insisté.  La France espère que la relance du processus politique permettra de sortir de cette impasse catastrophique.

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a remarqué que le Conseil de sécurité n’avait pas discuté de la situation au Yémen depuis près de trois mois, ce qui, a-t-il relevé, ne reflète pas l’urgence du terrain.  Dénonçant la violence et s’inquiétant de la situation humanitaire, il a jugé que les efforts du Conseil étaient « clairement insuffisants » pour qu’il assume sa responsabilité.  Le représentant a fait le parallèle avec la situation humanitaire en Syrie pour laquelle le Conseil a réussi à trouver un consensus, en demandant que le même effort soit consenti pour le Yémen.

Pour répondre à la situation humanitaire, M. Orrenius Skau a appelé le Conseil à réitérer son appel pour une cessation durable des hostilités, à exiger des parties qu’elles remplissent leurs obligations découlant du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et qu’elles assurent un accès humanitaire et commercial sans entrave.  Il est maintenant essentiel que les ports du Yémen restent ouverts et opérationnels, en développant leurs capacités, a-t-il prôné. 

Il a aussi appelé toutes les parties à s’abstenir de mesures susceptibles de restreindre les livraisons d’alimentation, de médicaments et de carburant.  La Suède et la Suisse recevront avec les Nations Unies la Conférence de contributeurs de haut niveau de 2018 pour le Yémen, le 3 avril à Genève, a-t-il ajouté. 

En outre, la Suède estime que la nomination du nouvel Envoyé spécial est l’occasion de relancer le processus politique, les membres du Conseil et les acteurs régionaux devant, dans ce contexte, user de leur influence pour s’assurer que les parties s’engagent avec l’Envoyé.

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a rappelé que la crise humanitaire au Yémen est la pire au monde, affirmant que seule une solution politique permettra de mettre fin au conflit.  Le peuple yéménite doit impérativement avoir accès à l’aide humanitaire, a-t-elle affirmé, en remerciant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis de leur récente annonce de contributions d’un montant d’un milliard de dollars. 

Les États-Unis ont, quant à eux, fourni 700 millions de dollars depuis septembre 2016, un effort qui sera maintenu à l’avenir, a assuré la représentante.  La représentante américaine a souligné les préoccupations sécuritaires légitimes de l’Arabie saoudite, accusant la République islamique d’Iran de violer le régime de sanctions imposées au Yémen. 

Hier, la délégation russe a exercé son droit de veto, a regretté la représentante, parce que le projet de texte britannique faisait mention de l’implication de l’Iran, alors que le transfert d’armes par Téhéran vers le Yémen a été établi par le Groupe d’experts. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a mentionné la prorogation du Groupe d’experts hier par le Conseil, qui est un élément de progrès dans un dossier yéménite éminemment complexe.  « Nous devons relancer le processus sans conditions préalables, plutôt qu’accuser certains pays », a affirmé le représentant russe.  Force est de constater que le processus n’est pas arrivé à son terme, tandis que la situation humanitaire est catastrophique, a-t-il poursuivi.

Il a fait état des efforts faits pour améliorer cette situation, tout en ajoutant que ces efforts humanitaires ne règleront pas, seuls, la situation.  Le délégué a en conséquence jugé capital de relancer un dialogue politique au Yémen.  Le nouvel Envoyé spécial aura un rôle essentiel à jouer à cette fin, a-t-il conclu.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) s’est désolé de constater que l’accès à l’aide humanitaire est étranglé au Yémen.  La rhétorique de plus en plus belliqueuse des parties au conflit a créé une situation intenable dans le pays, où les agences humanitaires doivent pouvoir circuler librement, a-t-il insisté. 

Il y aurait plus de 1 000 cas de diphtérie recensés, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), s’est-il alarmé.  Aussi le représentant a-t-il demandé la réouverture de tous les ports et la levée des entraves aux voies d’accès aux villes assiégées. 

Il a en conclusion plaidé en faveur d’une action ferme de la part du Conseil de sécurité pour parvenir à une solution pacifique du conflit. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est dite très préoccupée par la détérioration de la situation humanitaire au Yémen.  Des mesures rapides sont nécessaires pour mettre fin à cette situation, a-t-elle dit.  Elle a jugé essentielle l’ouverture des ports yéménites et a exhorté les parties à lever toutes les entraves bureaucratiques au bon acheminement de l’aide humanitaire. 

Elle a salué l’annonce de contribution de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en vue de financer la réponse humanitaire.  Les parties doivent cesser leurs attaques contre les civils et les protéger, a-t-elle affirmé. 

Enfin, la déléguée s’est dite convaincue qu’il n’y aura pas d’amélioration au Yémen sans un processus politique robuste, ouvert à tous, y compris les femmes et les jeunes, facilité par l’ONU. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a jugé préoccupant de voir la crise empirer au Yémen, estimant toutefois qu’il n’est pas trop tard pour mettre fin à cette situation.  L’intégrité territoriale dans le pays n’est toujours pas garantie, a-t-il souligné, en déplorant les attentats qui y sont commis. 

Mais cette crise ne pourra être résolue qu’au travers d’une solution politique, a assuré le représentant, qui s’est à cet égard félicité de la nomination du nouvel Envoyé spécial, sous l’égide duquel le processus politique doit être relancé. 

Le délégué a également exhorté les bailleurs de fonds à financer le Plan d’aide humanitaire en faveur du Yémen, souhaitant que la Conférence d’annonces de contributions qui se tiendra à Genève le 3 avril serait couronnée de succès.

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) s’est inquiété de l’impasse dans laquelle se trouve le processus politique au Yémen.  Il a constaté que les perspectives d’un règlement politique s’éloignent, faisant planer le risque de voir le Yémen devenir un État en déliquescence.  Il a averti que cette escalade met en péril la stabilité de toute la région et a invité les parties à une cessation immédiate des hostilités et à s’engager de manière significative dans la voie du règlement politique de cette crise.  Il a notamment exhorté les parties à s’impliquer véritablement dans les pourparlers de paix qui se tiendront sous peu à Muscat, à Oman.

Le représentant s’est aussi préoccupé de la détérioration de la situation humanitaire, notamment des 22 millions de personnes nécessitant une aide d’urgence.  Il a appelé les parties belligérantes à parvenir à un cessez-le-feu qui permettrait l’acheminement sans entrave de l’assistance humanitaire.  Il a ensuite salué la réouverture, par la coalition arabe, des différents ports devant permettre l’acheminement des vivres. 

Le délégué s’est aussi félicité du lancement du Plan d’aide humanitaire de 2018 pour le Yémen et a salué les « gracieuses contributions » de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit consterné par la situation humanitaire au Yémen, avant de juger indispensable une solution politique.  Le nouvel Envoyé spécial doit recevoir le soutien nécessaire du Conseil, a-t-il dit.  Il a condamné toute violation des droits de l’homme au Yémen, avant d’exhorter le Conseil à rester uni et à œuvrer pour protéger les civils. 

Il a demandé l’ouverture permanente des ports yéménites, le plein accès à l’aéroport de Sanaa et la cessation des menaces pesant contre les travailleurs humanitaires au Yémen.  Le délégué a en outre espéré l’adoption d’une déclaration présidentielle dans les plus brefs délais. 

Il a salué les annonces de contribution de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en faveur du Plan d’aide humanitaire.  Le régime de sanctions reste essentiel pour parvenir à une solution politique, a conclu le délégué du Pérou. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a confié être alarmé par la grave situation humanitaire qui prévaut au Yémen et a appelé à augmenter l’aide et à fournir un accès sans entrave à toutes les zones du pays.  À ce titre, il a salué la décision de la coalition d’ouvrir tous les ports terrestres, aériens et maritime du Yémen pour permettre l’entrée et la sortie de fournitures. 

Il a salué le Plan d’aide humanitaire de 2018 pour le Yémen, qui vise à récolter 2,96 milliards de dollars pour aider 13 millions de personnes.  Il a aussi fait part de son appréciation à la Suède et à la Suisse pour l’organisation, en avril, de la Conférence d’annonces de contributions pour le Yémen, ainsi qu’à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis qui ont déjà contribué à près d’un milliard de dollars et visent à lever 500 millions de dollars supplémentaires.

Le représentant a ensuite appelé à redoubler d’efforts pour résoudre les tensions intrayéménites et renforcer la lutte contre le terrorisme, engageant notamment les forces politiques yéménites à faire front commun pour empêcher les terroristes de consolider leurs forces. 

Il a aussi appelé les parties à faire preuve de souplesse pour résoudre la « question complexe » du retrait des forces, du désarmement et de la création d’un gouvernement d’unité nationale. 

Le délégué a estimé que le Conseil de sécurité doit repenser sa stratégie eu égard à la situation au Yémen afin de la lier à l’ensemble des piliers de l’ONU.

M. SHEN BO (Chine) a appelé la communauté internationale à accroître ses efforts auprès des parties pour les aider à trouver une solution négociée.  Selon lui, la prorogation hier du mandat du Groupe d’experts est de nature à contribuer aux conditions nécessaires à l’émergence d’un accord entre les parties. 

Le représentant s’est ensuite félicité de la nomination du nouvel Envoyé spécial, M. Martin Griffiths.  Il s’est ensuite déclaré préoccupé par l’étendue des souffrances endurées par le peuple yéménite, auquel la Chine continuera de fournir une aide humanitaire par le biais de canaux bilatéraux et multilatéraux. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a déclaré que la résolution adoptée hier était un élément important en vue de parvenir à une solution à la situation chaotique au Yémen.  Il est urgent d’agir au Yémen, a-t-il dit, en ajoutant que toute action devait respecter les principes et buts de la Charte des Nations Unies. 

Il a exhorté les autorités yéménites à œuvrer pour améliorer la situation humanitaire au Yémen, avant de saluer le soutien précieux des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite.  Les États Membres doivent respecter l’embargo sur les armes et s’abstenir d’entraver l’aide humanitaire, a-t-il dit. 

Enfin, le représentant de la Guinée équatoriale a exhorté les parties au conflit à remédier aux conséquences désastreuses de la guerre sur les civils. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a affirmé qu’il n’y aura pas de solution militaire au règlement de la crise au Yémen.  Il a fait valoir les efforts de médiation déployés par son propre pays en ce sens, avant de dénoncer les tirs de missile balistique effectués par les houthistes en direction de l’Arabie saoudite, et les allégations d’attaques commises par eux contre les Émirats arabes unis.  Il s’agit là d’un « développement dangereux », a-t-il prévenu, estimant que le Conseil de sécurité ne peut accepter de telles actions contre un État souverain. 

La sécurité des passages maritimes est également une question d’importance, a poursuivi le représentant, pour qui les attaques ou les menaces d’attaques contre des navires dans la mer Rouge doivent être catégoriquement condamnées. 

Le Koweït s’est enfin félicité de l’annonce, par la coalition, d’un plan global d’opérations humanitaires, qui a été salué par le Secrétaire général de l’ONU, un plan assorti de contributions d’un montant d’un milliard de dollars, soit le tiers de l’appel humanitaire lancé par l’ONU en 2018 pour le Yémen. 

M. KHALED HUSSEIN MOHAMED ALYEMANY (Yémen) a dénoncé les agissements des houthistes qui ont fait retomber le Yémen dans la guerre.  Il a salué la nomination du nouvel Envoyé spécial et apporté le soutien de son pays à l’exécution de son mandat. 

Aucun État souverain ne saurait accepter la présence de groupes armés sur son territoire, a-t-il affirmé.  Le Conseil de sécurité doit agir pour que les houthistes respectent les résolutions du Conseil, a affirmé le délégué.  Les houthistes doivent rendre les missiles fournis par la République islamique d’Iran et cesser d’attaquer les pays voisins et d’enrôler des enfants, a-t-il lancé. 

Les houthistes n’ont aucun égard pour les droits de l’homme et ont une mentalité proche de celle de Daech, a-t-il dit.  Le délégué a accusé les houthistes d’œuvrer à la déstabilisation de la région et à l’avancement des visées expansionnistes de l’Iran.  « Les houthistes ne sont pas prêts à faire des concessions. »

Il a déploré le fait que le Conseil ait échoué hier à envoyer un signal fort à l’Iran.  « C’est un échec retentissant. »  L’Iran cherche à déstabiliser toute la région en parrainant le terrorisme, a-t-il dit.  Il a dénoncé les violations du droit humanitaire par les houthistes, ceux-ci empêchant le bon acheminement de l’aide humanitaire. 

Il a salué l’annonce de contribution de l’Arabie saoudite en faveur de la réponse humanitaire au Yémen et exhorté les États Membres à en faire de même.  Les houthistes exploitent la crise humanitaire en jouant les victimes, a-t-il affirmé, en déplorant l’échec de la communauté internationale pour qu’ils s’assoient à la table des négociations. 

Enfin, le délégué du Yémen a exhorté le Conseil à ne pas abandonner le peuple yéménite. 

 

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Le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 26 février 2019 les sanctions contre le Yémen après le rejet d’un projet visant à en élargir les critères d’imposition

8190e séance – après-midi
CS/13225

Le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 26 février 2019 les sanctions contre le Yémen après le rejet d’un projet visant à en élargir les critères d’imposition

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, reconduit jusqu’au 26 février 2019 les sanctions applicables aux personnes ou entités qui entravent la réussite de la transition politique au Yémen, empêchent la mise en œuvre des décisions prises par la Conférence de dialogue national sans exclusive ou encore commettent, commanditent ou préparent des actes violant les droits de l’homme ou le droit international humanitaire dans le pays.  Il a en outre prorogé jusqu’au 28 mars 2019 le mandat du Groupe d’experts défini dans ses résolutions 2140 (2014) et 2216 (2015), qui délimitent le régime de sanctions.

La résolution 2402 (2018) a été adoptée à l’unanimité sur la base d’un projet présenté par la Fédération de Russie, qui avait quelques instants plus tôt opposé son veto à un texte concurrent, préparé par le Royaume-Uni.  La Bolivie a également voté contre le texte britannique, tandis que la Chine et le Kazakhstan s’abstenaient et que les 11 autres membres du Conseil votaient pour.

Alors que la résolution adoptée reconduit les sanctions dans les mêmes termes que les résolutions précédentes, le texte du Royaume-Uni élargissait les critères d’imposition des sanctions en vigueur.  Avant le double vote, la délégation britannique avait vivement encouragé les membres du Conseil à appuyer son projet, qui reprenait les conclusions du Groupe d’experts, selon lequel des armes d’origine iranienne auraient été introduites au Yémen après l’imposition de l’embargo.

La délégation russe avait prévenu qu’elle s’y opposerait.  Souhaitant dissiper tout « malentendu », le représentant avait affirmé être d’accord avec la plupart des dispositions du texte britannique, mais a ajouté qu’il ne pouvait pas « accepter certaines des conclusions du Groupe d’experts, qui restent à vérifier ».  Dans son rapport, le Groupe d’experts indique avoir identifié des « débris de missiles, de l’équipement militaire nécessaire à leur lancement et des véhicules aériens téléguidés militaires d’origine iranienne » qui ont été introduits au Yémen après la mise en place de l’embargo ciblé sur les armes. 

En même temps, la Fédération de Russie avait annoncé la mise aux voix de sa propre résolution, dans un souci d’assurer la continuité des travaux du Groupe d’experts.  Après le vote, son représentant a d’ailleurs fait remarquer que son pays n’avait pas été le seul membre du Conseil de sécurité à rejeter « des éléments qui se réfèrent à des conclusions invérifiées » du Groupe d’experts, en assurant un nouvelle fois que son pays n’avait pas souhaité « tuer dans l’œuf » le projet britannique.  Il ne s’agissait pas de désigner l’Iran comme coupable, mais simplement de proroger le mandat du Comité, a-t-il affirmé.

Qualifiant les propos russes de « pervers », son homologue des États-Unis a assuré que le Groupe d’experts avait démontré la responsabilité de l’Iran s’agissant de la vente et du transfert de missiles balistiques aux houthistes.  La provenance des missiles tirés en Arabie saoudite depuis le Yémen a été clairement établie, a-t-elle argué, accusant l’Iran de promouvoir le « chaos » au Moyen-Orient et de rendre le monde « de plus en plus dangereux ».

Condamnant lui aussi l’Iran, le représentant de la France a justifié son vote en faveur du texte russe par sa volonté de maintenir l’intégrité du régime de sanctions et du mandat du Groupe d’experts.  Il a été rejoint par son collègue du Koweït, qui a dénoncé les tirs de missiles balistiques par les houthistes contre « un pays frère », l’Arabie saoudite, et leurs tentatives de faire de même contre les Émirats arabes unis.

La Chine, qui s’était abstenue sur le projet du Royaume-Uni, a quant à elle expliqué qu’elle avait voté en faveur du texte qui reflétait le plus large consensus au sein du Conseil de sécurité.  Notant que des éléments importants du projet britannique rejeté étaient sources de divergences, elle a jugé peu judicieux de prendre des mesures hâtives et estimé que les consultations devaient se poursuivre. 

La Bolivie a pour sa part expliqué son opposition au texte britannique par un manque de consultations, une seule séance en tout, désapprouvant en outre la tendance consistant à impliquer d’autres acteurs que ceux sur lesquels le Conseil de sécurité est tombé d’accord.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Lettre datée du 26 janvier 2018, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Groupe d’experts sur le Yémen dont le mandat a été défini dans la résolution 2342 (2017) du Conseil de sécurité (S/2018/68)

Texte du projet de résolution (S/2018/157)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2014 (2011), 2051 (2012), 2140 (2014), 2201 (2015), 2204 (2015), 2216 (2015), 2266 (2016) et 2342 (2017) et les déclarations de son président relatives au Yémen, en date du 15 février 2013 (S/PRST/2013/3), du 29 août 2014 (S/PRST/2014/18), du 22 mars 2015 (S/PRST/2015/8), du 25 avril 2016 (S/PRST/2016/5) et du 15 juin 2017 (S/PRST/2017/7),

Réaffirmant son ferme attachement à l’unité, la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale du Yémen,

Se déclarant préoccupé par les difficultés politiques, économiques et humanitaires et les problèmes de sécurité, notamment la violence, que continue de connaître le Yémen, et par les dangers posés par le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes,

Demandant de nouveau à toutes les parties yéménites de choisir la voie du dialogue et de la concertation pour régler leurs différends, de renoncer à recourir à la violence à des fins politiques et de s’abstenir de toute provocation,

Réaffirmant que toutes les parties doivent s’acquitter des obligations que leur impose le droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il convient,

Exprimant son appui et son attachement à l’action menée par l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen en vue d’appuyer le processus de transition au Yémen,

Se déclarant profondément préoccupé de constater que certaines zones du Yémen se trouvent sous le contrôle d’Al-Qaida dans la péninsule arabique, dont la présence, l’idéologie extrémiste violente et les agissements sont préjudiciables à la stabilité du Yémen et de la région, et ont des conséquences humanitaires dévastatrices pour la population, s’inquiétant de la présence croissante au Yémen d’éléments affiliés à l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech), qui pourraient être encore plus nombreux à l’avenir, et réaffirmant sa volonté de répondre à la menace, sous tous ses aspects, que constituent Al-Qaida dans la péninsule arabique, l’EIIL (Daech) et tous les autres personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés,

Rappelant l’inscription d’Al-Qaida dans la péninsule arabique et de personnes qui y sont associées sur la Liste relative aux sanctions contre l’EIIL (Daech) et Al‑Qaida, et soulignant à cet égard la nécessité d’une vigoureuse application des mesures édictées au paragraphe 2 de la résolution 2253 (2015), comme outil majeur de lutte contre le terrorisme au Yémen,

Notant l’importance capitale de l’application effective du régime de sanctions institué par les résolutions 2140 (2014) et 2216 (2015) et le rôle clef que les États de la région peuvent jouer à cet égard, et préconisant que la coopération soit encore renforcée,

Rappelant les dispositions du paragraphe 14 de la résolution 2216 (2015) imposant un embargo ciblé sur les armes,

Profondément affligé par la détérioration constante de la situation humanitaire effroyable que connaît le Yémen, se déclarant vivement préoccupé par les obstacles de toutes sortes qui gênent l’acheminement de l’aide humanitaire, notamment les restrictions entravant la fourniture de produits de première nécessité à la population civile du Yémen,

Soulignant la nécessité que le Comité créé en application du paragraphe 19 de la résolution 2140 (2014) (« le Comité ») discute des recommandations figurant dans les rapports du Groupe d’experts,

Considérant que la situation qui règne au Yémen continue de menacer la paix et la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Réaffirme la nécessité de procéder rapidement et intégralement à la transition politique à la suite de la Conférence de dialogue national sans exclusive, comme le prévoient l’Initiative du Conseil de coopération du Golfe et son mécanisme de mise en œuvre, en application des résolutions 2014 (2011), 2051 (2012), 2140 (2014), 2201 (2015), 2204 (2015), 2216 (2015) et 2266 (2016) et au vu des attentes du peuple yéménite;

2.    Décide de reconduire jusqu’au 26 février 2019 les mesures imposées par les paragraphes 11 et 15 de la résolution 2140 (2014), réaffirme les dispositions des paragraphes 12, 13, 14 et 16 de ladite résolution et réaffirme également les dispositions des paragraphes 14 à 17 de la résolution 2216 (2015);

Critères de désignation

3.    Réaffirme que les dispositions des paragraphes 11 et 15 de la résolution 2140 (2014) et du paragraphe 14 de la résolution 2216 (2015) s’appliquent aux personnes et entités désignées par le Comité, ou visées dans l’annexe de la résolution 2216 (2015) comme se livrant ou apportant un appui à des actes qui menacent la paix, la sécurité ou la stabilité du Yémen;

4.    Réaffirme les critères de désignation énoncés au paragraphe 17 de la résolution 2140 (2014) et au paragraphe 19 de la résolution 2216 (2015);

Présentation de rapports

5.    Décide de proroger jusqu’au 28 mars 2019 le mandat du Groupe d’experts énoncé au paragraphe 21 de la résolution 2140 (2014) et au paragraphe 21 de la résolution 2216 (2015), déclare son intention de le réexaminer et de se prononcer, le 28 février 2019 au plus tard, sur une nouvelle prorogation, et prie le Secrétaire général de prendre dès que possible les mesures administratives requises pour rétablir le Groupe d’experts, en consultation avec le Comité, jusqu’au 28 mars 2019, en faisant au besoin appel aux compétences des membres du Groupe créé conformément à la résolution 2140 (2014);

6.    Prie le Groupe d’experts de présenter au Comité un bilan à mi-parcours le 28 juillet 2018 au plus tard, et de lui remettre, après concertation avec le Comité, un rapport final le 28 janvier 2019 au plus tard;

7.    Charge le Groupe de coopérer avec les autres groupes d’experts qu’il a créés pour épauler ses comités des sanctions, notamment l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée par la résolution 1526 (2004), dont le mandat a été prorogé par la résolution 2253 (2015);

8.    Demande instamment à toutes les parties et à tous les États Membres, ainsi qu’aux organisations internationales, régionales et sous-régionales, de coopérer avec le Groupe d’experts, et prie instamment tous les États Membres concernés d’assurer la sécurité des membres du Groupe et de leur donner libre accès, notamment aux personnes, documents et lieux pertinents pour l’exécution de son mandat;

9.    Souligne qu’il importe de tenir des consultations avec les États Membres concernés, selon que de besoin, afin d’assurer l’application de toutes les mesures énoncées dans la présente résolution;

10.   Demande à tous les États Membres qui ne l’ont pas encore fait de présenter dès que possible un rapport au Comité sur les mesures qu’ils auront prises en vue d’appliquer concrètement les mesures visées aux paragraphes 11 et 15 de la résolution 2140 (2014) et au paragraphe 14 de la résolution 2216 (2015), et rappelle à ce propos que les États Membres qui effectuent une inspection de chargements en application du paragraphe 15 de la résolution 2216 (2015) sont tenus de présenter par écrit un rapport au Comité, comme prévu au paragraphe 17 de la résolution 2216 (2015);

11.   Rappelle le rapport du Groupe de travail informel sur les questions générales relatives aux sanctions (S/2006/997) concernant les meilleures pratiques et méthodes, notamment les paragraphes 21, 22 et 23 du rapport, qui traitent des mesures susceptibles de clarifier les normes méthodologiques appliquées par les mécanismes de surveillance;

12.   Réaffirme qu’il suivra en permanence la situation au Yémen et se tiendra prêt à examiner l’opportunité des mesures énoncées dans la présente résolution, y compris de leur renforcement, de leur modification, de leur suspension ou de leur levée, selon ce que dicterait l’actualité;

13.   Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations avant les votes

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a présenté le projet de résolution de son pays, en soulignant que la situation au Yémen a provoqué une des pires crises humanitaires au monde, a créé des zones de non-droit qui profitent aux groupes terroristes et compromet la situation dans la région.  Alors que tant d’attention est portée à la situation que connaît la Syrie, on ne peut ignorer la situation terrifiante qui prévaut au Yémen, a-t-il lancé, avant d’appeler les États à faire preuve d’unité pour mettre un terme à un conflit « dévastateur ».

Le représentant a appelé à utiliser le régime de sanctions pour faire pression sur les parties belligérantes au Yémen, et a jugé vital que le travail du Groupe d’experts se poursuive.  Il a aussi estimé qu’on peut ignorer la menace croissante que présente l’utilisation de missiles balistiques, pointant notamment les attaques récentes contre des cibles civiles en Arabie saoudite.  Il a appelé le Conseil à faire front uni dans la condamnation de tels actes. 

M. Allen s’est dit vivement préoccupé par le fait que la République islamique d’Iran n’ait pas pris les mesures nécessaires pour contrer la vente ou le transfert de missiles vers l’alliance houthiste, dénonçant notamment le fait que cet État ne respecte pas le paragraphe 14 de la résolution 2216 (2015).  Le Conseil de sécurité doit faire preuve de fermeté face à une telle situation, a-t-il affirmé.

Le délégué s’est aussi inquiété de la situation humanitaire qui prévaut au Yémen et a encouragé l’ensemble des États à répondre favorablement à l’appel humanitaire pour le Yémen.  Il a précisé que le dispositif du projet de résolution aborde cette question.

M. Allen a ensuite souligné que la nomination d’un nouvel envoyé spécial sera essentielle pour faire avancer le processus de résolution de la crise au Yémen.  Tant qu’il n’y aura pas de règlement pérenne du conflit, le régime de sanctions doit être maintenu, a-t-il estimé. 

Il a appuyé l’intégrité des groupes d’experts dans leur ensemble, soulignant que même si les conclusions auxquelles ils peuvent arriver sont difficiles, leur travail est nécessaire pour le bon fonctionnement des Nations Unies. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie), qui présentait un projet de résolution concurrent, a déclaré que sa délégation ne serait pas en mesure d’appuyer le texte de la délégation britannique, « mais nous insistons pour qu’il n’y ait aucun malentendu: nous approuvons la plupart des dispositions contenues dans ce projet, mais nous ne pouvons accepter certaines des conclusions du Groupe d’experts, qui doivent être vérifiées », a-t-il dit.  « Nous sommes par principe opposés à la reconduction technique des mandats, mais estimons que c’est justifié dans ce cas. »  « La situation au Yémen est bien plus complexe qu’on cherche à nous le faire croire », a estimé le délégué. 

La Fédération de Russie a souligné qu’au cours des consultations sur ce projet de texte, celle-ci n’a pas été le seul membre du Conseil de sécurité à rejeter des éléments qui se réfèrent à des conclusions invérifiées du Groupe d’experts.  « Nous avons tenté de dire à nos collègues que ce n’était pas la bonne approche, alors que nous devrions présenter un front uni. »

« Jouer de telles cartes géopolitiques est très dangereux dans une région clivée par les antagonismes entre sunnites et chiites », a analysé la Fédération de Russie.  « Nous avons même lancé une initiative pour lancer des consultations dans le sens de la recherche d’une solution prévoyant une sécurité mutuelle pour toutes les parties », a argué la délégation.  « Mais comme nous voulons que le Groupe d’experts puisse poursuivre son travail sans interruption, nous proposons la prorogation technique de son mandat dans un projet distinct. »

Déclarations après les votes

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a dénoncé l’intervention de la Fédération de Russie, qualifiant ses propos de « pervers ».  Elle a dénoncé l’échec à adopter le texte présenté par le Royaume-Uni, s’inquiétant notamment de la possibilité d’un élargissement du conflit dans la région.

La représentante a affirmé que le Groupe d’experts avait démontré que l’Iran avait échoué à prévenir la vente et le transfert de missiles balistiques aux houthistes.  Elle a précisé que les experts étaient arrivés à cette conclusion après avoir constaté que les missiles qui ont frappé l’Arabie saoudite étaient de fabrication iranienne.  Elle s’est alarmée que de tels engins soient utilisés pour cibler les capitales de pays voisins.

Mme Eckels-Currie a regretté que la résolution « pleine de bon sens » du Royaume-Uni ait échoué.  Aujourd’hui, la diplomatie préventive a échoué et les principes de la Charte ont été foulés du pied, a-t-elle ajouté.  Elle a notamment pointé les votes de la Russie, de la Bolivie, de la Chine et du Kazakhstan, accusant ces pays de chercher à protéger l’Iran de toute responsabilité et d’avoir manqué à protéger des « partenaires » comme l’Arabie saoudite.  Au lieu de cela, s’est-elle insurgée, ils ont invité l’Iran à continuer de promouvoir le chaos au Moyen-Orient et de rendre le monde de plus en plus dangereux. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a jugé essentiel que le régime de sanctions soit maintenu et que le Groupe d’experts soit renouvelé pour qu’il puisse poursuivre son travail.  Le représentant a ensuite condamné fermement tout manquement par l’Iran aux obligations nées de la résolution 2216 (2015), qui impose de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert direct ou indirect de missiles balistiques et leurs composants, ainsi que de drones au bénéfice des individus et entités sous sanctions onusiennes, en particulier les houthistes.  La France continuera d’être mobilisée sur la question des transferts de technologies et biens balistiques dans la région dans les mois à venir, a-t-il assuré. 

M. Delattre s’est aussi dit très préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire et par les violations massives du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Le Yémen est dans un état de stress alimentaire généralisé, a-t-il déclaré, en demandant un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave.  Enfin, le représentant a appelé la communauté internationale à rester mobilisée pour lancer une nouvelle dynamique politique et encourager les parties yéménites à renouer le dialogue.  L’unité de notre Conseil sur ce point est clef, a conclu M. Delattre. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a expliqué que la Chine appuie le renouvellement du régime de sanctions applicables au Yémen et du mandat du Groupe d’experts chargé de surveiller sa mise en œuvre.  Le représentant s’est félicité du texte adopté, qui reflète le plus large consensus au sein du Conseil de sécurité et a relevé que des éléments importants du projet britannique rejeté étaient sources de divergences.  La Chine estime peu judicieux de prendre des mesures hâtives et estime que les consultations doivent se poursuivre.  Nous n’avons pas de « dessein caché », nous appuyons les décisions de consensus et les solutions politiques et inclusives issues de concertations et respectueuses des résolutions pertinentes, a ajouté le représentant. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a insisté sur l’importance de préserver le régime de sanctions.  Il a appelé à restreindre la marge de manœuvre des entités qui représentent une menace à la paix et à la stabilité au Yémen, et à privilégier une résolution politique du conflit.  Il a aussi engagé à aborder les faits au Yémen de manière équilibrée et sur la base des preuves à disposition.

Le représentant a condamné le tir de missiles vers l’Arabie saoudite, ainsi que toute action « condamnable » identifiée dans le rapport du Groupe d’experts.  Il a appelé à appuyer les efforts du nouvel Envoyé spécial et à rétablir la confiance entre toutes les parties au conflit.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a déclaré qu’il avait voté contre le projet britannique en raison du manque de consultations dont ce texte a fait l’objet, une seule séance en tout.  Il a affirmé que le projet n’avait pas obtenu un consensus suffisant, avant de désapprouver la tendance consistant à impliquer d’autres acteurs que ceux sur lesquels le Conseil de sécurité est tombé d’accord.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a indiqué qu’elle avait appuyé la reconduction du mandat du Groupe d’experts, avant de juger important que le Conseil de sécurité respecte l’indépendance du régime de sanctions, dont l’embargo sur les armes est un élément important. 

M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a salué l’adoption de la résolution présentée par son pays prorogeant le mandat du Comité des sanctions.  Il a appelé à tenir compte de l’ensemble des facteurs concernant le rôle de l’Iran et de l’Arabie saoudite, dans l’espoir de pacifier la situation au Yémen.

Le représentant a ensuite assuré que la Russie ne souhaitait pas tuer dans l’œuf la résolution britannique, mais s’y était opposée en raison de l’absence d’un consensus sur certains aspects clefs du texte.  Il ne s’agissait pas de désigner l’Iran comme coupable, mais simplement de proroger le mandat du Comité, a-t-il fait observer.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a regretté que le premier projet de texte n’ait pas été adopté.  Le régime de sanctions et le mandat du Groupe d’experts devaient être renouvelés, a-t-il ajouté, avant de regretter que les préoccupations de sa délégation concernant des questions relatives à la situation humanitaire n’aient pas été traitées de manière adéquate.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a appuyé le projet britannique, car celui-ci aurait renouvelé les sanctions du Comité 2140 et prorogé le mandat du Groupe d’experts, tout en attirant l’attention sur la présence et les tirs de missiles balistiques par les houthistes sur « un pays frère », l’Arabie saoudite, et leurs tentatives de faire de même contre les Émirats arabes unis. 

Il a appelé tous les États Membres à se conformer aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, avant d’insister sur l’importance de lInitiative du Conseil de coopération du Golfe, des mécanismes relatifs aux sanctions et du dialogue national yéménite.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Accusé d’ingérence, l’Envoyé spécial du Secrétaire général au Burundi « précise » ses préoccupations face au projet de révision constitutionnelle

8189e séance – matin
CS/13224

Accusé d’ingérence, l’Envoyé spécial du Secrétaire général au Burundi « précise » ses préoccupations face au projet de révision constitutionnelle

Tout en reconnaissant au Burundi le droit souverain de modifier sa Constitution, M. Michel Kafando, Envoyé spécial du Secrétaire général, a « précisé » ce matin, devant le Conseil de sécurité, les préoccupations exprimées par celui-ci sur les enjeux du référendum prévu le 18 mai dans son rapport.  Le document a été vivement critiqué par le représentant du Burundi, qui l’a accusé de violer « de façon flagrante le principe du respect de l’égalité souveraine des États » avant de demander au Conseil de retirer son pays de son ordre du jour.

Prenant note de la « décision irrévocable » du Gouvernement burundais d’aller à la révision constitutionnelle, M. Kafando a estimé que la préoccupation exprimée par le Secrétaire général devait « être comprise comme son souci de recherche du consensus autour d’une question aussi primordiale pour l’avenir, voire le destin du Burundi ».

Dans son rapport, le Secrétaire général constate notamment que la révision constitutionnelle envisagée prévoit une extension à sept ans du mandat présidentiel; un possible examen après cinq ans des quotas ethniques –60% de Hutus et 40% de Tutsis– appliqués dans les instances du pouvoir exécutif, au Parlement et dans l’appareil judiciaire; la suppression du poste de deuxième vice-président et la création d’un poste de premier ministre; et une adoption simplifiée des lois ordinaires, qui se ferait désormais à la majorité simple et non plus des deux tiers. 

Tout en affirmant que le Burundi, État souverain, a de ce fait le droit de modifier sa Constitution, le Secrétaire général observe que pareille entreprise doit être menée « de manière inclusive » de façon à obtenir « la participation la plus large possible et à dégager un consensus parmi les principaux intervenants politiques ».  Ceci, ajoute-t-il « passe par un environnement politique et des conditions de sécurité qui emportent la confiance de tous les acteurs politiques concernés ». 

Or, le Secrétaire général constate que certains des changements proposés sont déjà remis en question par l’opposition.  Et de rappeler que l’Accord d’Arusha, qui a « clairement défini la nature et les causes du conflit au Burundi », a favorisé la stabilité et l’unité après 10 ans de guerre.  « C’est sur cette base que les Burundais, œuvrant ensemble avec l’appui de la région et de la communauté internationale, peuvent construire un avenir plus solide pour leur pays », ajoute le Secrétaire général. 

Le rapport note aussi que « de nombreuses parties prenantes et de nombreux partenaires du Burundi » se sont dits préoccupés par le fait que les révisions proposées pourraient anéantir certains des progrès rendus possibles par l’Accord de paix et de réconciliation d’Arusha pour le Burundi.  Il cite en particulier « la possibilité de supprimer les quotas ethniques consacrés dans l’Accord d’Arusha ». 

Défendant le rapport, M. Kafando a qualifié d’« évidence historique » le fait que la stabilité et le développement du Burundi durant les 15 dernières années « sont essentiellement le fruit du large consensus qui a prévalu aux négociations et à l’adoption de l’Accord d’Arusha ».  Lequel, a-t-il ajouté, ne se limite pas uniquement aux équilibres ethniques et de genre, retenus dans la nouvelle Constitution. 

D’ailleurs, l’article 299 de la Constitution burundaise de 2005 dispose qu’« aucune procédure de révision ne peut être retenue si elle porte atteinte à l’unité nationale, à la cohésion du peuple burundais », a encore fait observer l’Envoyé spécial, qui a défendu sa propre action, affirmant n’avoir été guidé dans son action que par « un seul objectif: tirer la sonnette d’alarme pour que l’avenir en construction du peuple burundais soit l’apanage du peuple burundais et éviter ainsi les éternels recommencements dont ce pays a tant souffert ».

Le représentant du Burundi, M. Albert Shingiro, a vivement dénoncé cette position, affirmant que le nouveau projet de constitution garantissait au contraire la stabilité et la paix, la protection de l’opposition politique, la protection des droits de l’homme et des minorités, la protection de la souveraineté, ainsi que les quotas ethniques et de genre prévus dans l’Accord d’Arusha.  Il a dénoncé les références du rapport à la révision constitutionnelle comme une « ingérence osée » dans les affaires intérieures de son pays, ajoutant que l’ONU et les États Membres étaient « loin de constituer un cadre de discussion des affaires constitutionnelles des États souverains ». 

Affirmant que la situation au Burundi était « globalement calme » et ne présentait aucune menace à la paix et à la sécurité internationales, le représentant a estimé qu’il n’existait « aucun critère objectif » pouvant justifier le maintien du pays à l’ordre du jour du Conseil de sécurité et en a donc demandé le retrait.

Les membres africains du Conseil ont tous plaidé en faveur d’un dialogue inclusif.  Si la Guinée équatoriale a insisté sur l’appropriation nationale du processus de dialogue, la Côte d’Ivoire, soucieuse de l’impasse dans laquelle se trouve ledit dialogue, a exprimé l’espoir que la réforme constitutionnelle ne remette pas en cause les acquis de l’Accord historique d’Arusha, « élément central de la réconciliation entre les acteurs politiques burundais ».  Pour sa part l’Éthiopie a mis en avant les difficultés économiques considérables du pays et plaidé pour un soutien international fort et pour l’instauration d’un environnement permettant d’éviter une résurgence de la violence.

Ces difficultés économiques sont, entre autres, le fait du retour de nombreux réfugiés en provenance de Tanzanie.  Le Président de la formation Burundi de la Commission de consolidation de la paix, M. Jürg Lauber, a rappelé que 13 000 d’entre eux étaient rentrés l’an dernier et que pas moins de 60 000 étaient attendus en 2018, ce qui crée une pression croissante sur les communautés d’accueil.  Mentionnant les efforts du Fonds pour la consolidation de la paix pour les soulager, M. Lauber a insisté sur le rôle indispensable, pour redresser la situation actuelle du pays, du processus de dialogue placé sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est.

* S/2018/89

LA SITUATION AU BURUNDI

Rapport du Secrétaire général sur la situation au Burundi (S/2018/89)

Déclarations

M. MICHEL KAFANDO, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Burundi, a déclaré que la situation politique au Burundi demeurait tendue et caractérisée par « quelques mesures restrictives de libertés ».  Seul le parti majoritaire et quelques autres formations politiques qui lui sont alliées, peuvent mener des activités politiques sans entrave, a-t-il expliqué, avant d’ajouter que la conjoncture économique était loin de s’améliorer, en raison de la persistance de la situation politique.  « Or, un tel environnement ne peut être propice à l’organisation d’élections crédibles », a-t-il fait observer.

L’Envoyé spécial a précisé que la sécurité connaissait une amélioration notable sur toute l’étendue du territoire, même si des violations des droits de l’homme et d’autres abus continuent d’être rapportés, en particulier depuis le lancement, le 12 décembre dernier, de la campagne de sensibilisation en vue du référendum constitutionnel.  Il a par ailleurs jugé « toujours préoccupante » la situation humanitaire. 

« La décision irrévocable du Gouvernement burundais d’aller à la révision constitutionnelle sera tranchée par le référendum prévu, en principe, en mai 2018 », a constaté M. Kafando.  La préoccupation exprimée dans son rapport par le Secrétaire général –notamment à propos de la possibilité de supprimer de la Constitution les quotas ethniques consacrés dans l’Accord d’Arusha- ne saurait être interprétée comme une ingérence dans les affaires intérieures du pays en lui déniant son droit souverain à réviser sa Constitution, a plaidé M. Kafando.  Au contraire, a expliqué l’Envoyé spécial, elle doit être comprise comme son souci de recherche du consensus autour d’une question « aussi primordiale pour l’avenir, voire le destin » du Burundi. 

Pour M. Kafando, c’est une « évidence historique » que la stabilité et le développement du Burundi, ces 15 dernières années, sont essentiellement le fruit du large consensus qui a prévalu aux négociations et à l’adoption de l’Accord d’Arusha.  Il a rappelé l’article 299 de la Constitution burundaise de 2005, toujours en vigueur, qui dispose qu’« aucune procédure de révision ne peut être retenue si elle porte atteinte à l’unité nationale, à la cohésion du peuple burundais ».

L’Envoyé spécial a fait valoir que l’ONU, avec l’Union africaine, la Communauté d’Afrique de l’Est et l’Union européenne sont les garants de l’Accord d’Arusha, dont la quintessence ne se limite pas uniquement aux équilibres ethniques et de genre, retenus dans la nouvelle Constitution.  Le partage des pouvoirs, la bonne gouvernance politique, la démocratie pluraliste basée sur le principe de large consensus et la protection des droits des minorités, restent au cœur de l’Accord d’Arusha qui, comme on le sait, a été à la base de la Constitution burundaise de 2005, actuellement en cours de révision, a-t-il dit. 

« Tout cela aurait pu être possible si la volonté politique avait présidé au dialogue interburundais, placé sous l’égide de la région de l’Afrique de l’Est », a ajouté M. Kafando, qui a rendu hommage aux efforts du Médiateur et du Facilitateur du dialogue interburundais, l’ex-Président Benjamin Mkapa de Tanzanie.

« Maintenant que la région a décidé de poursuivre le dialogue », il revient à l’Union africaine et à l’ONU de rester fortement engagées en vue de l’aboutissement de la médiation, a poursuivi l’Envoyé spécial, ajoutant que le dialogue demeure indispensable, car la situation au Burundi « reste un sujet de préoccupation ».  Prenant note du communiqué du Gouvernement burundais du 14 février dernier, dans lequel ce dernier se disait prêt à ne ménager aucun effort pour coopérer avec l’ONU dans le respect de sa souveraineté, M. Kafando a estimé que cette bonne coopération « existait déjà ». 

Enfin, l’Envoyé spécial a précisé que sa contribution au rapport du Secrétaire général n’avait « guère outrepassé ses obligations et encore moins été guidée par une quelconque partialité ».  « Un seul objectif a guidé son action: tirer la sonnette d’alarme pour que l’avenir en construction du peuple burundais soit l’apanage du peuple burundais et éviter ainsi les éternels recommencements dont ce pays a tant souffert », a-t-il affirmé en conclusion.

M. JÜRG LAUBER (Suisse), Président de la formation Burundi de la Commission de consolidation de la paix (CCP), après avoir rappelé le calendrier des réunions de cette formation au cours des mois écoulés, a indiqué que celle-ci avait été informée fin janvier des défis relatifs au retour au Burundi des réfugiés en provenance de Tanzanie.  Alors qu’ils sont 13 000 à être déjà rentrés en 2017, et pas moins de 60 000 prévus pour faire de même en 2018, le Président a prévenu de la pression croissante que ces rapatriements feraient peser sur les communautés d’accueil. 

La formation a également été informée des défis économiques et sociaux de taille qui se posent au Burundi, en particulier une balance commerciale négative, une inflation considérable, le chômage et une pénurie de réserves de devises étrangères, a déclaré M. Lauber.  Il a annoncé qu’il se rendrait prochainement au Burundi, ajoutant qu’il avait l’intention de se concentrer sur les efforts de médiation engagés par la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), et la marche à suivre pour garantir des élections démocratiques et pacifiques.  M. Lauber a mentionné par ailleurs comme priorités de son déplacement la poursuite du dialogue avec le Gouvernement et les bailleurs de fonds internationaux à l’appui du redressement économique du pays, la situation humanitaire et la réconciliation nationale. 

Ces priorités sont tout à fait similaires à celles définies par le Fonds pour la consolidation de la paix, qui a approuvé trois nouveaux projets pour un montant total de 6,5 millions de dollars au Burundi, dont la moitié permettra de venir en aide à quatre communautés accueillant un nombre élevé de réfugiés, a relevé M. Lauber.  Pour la CCP, le processus de dialogue placé sous l’égide de la CAE demeure un instrument indispensable pour redresser la situation actuelle au Burundi. 

M. Lauber s’est déclaré, en conclusion, convaincu qu’une signature rapide du Mémorandum d’accord entre le Gouvernement et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et l’Union africaine, et le déploiement subséquent d’observateurs dans le pays, permettraient de fournir une vue d’ensemble plus précise de la situation des droits de l’homme et de garantir un espace sûr pour la société civile au Burundi.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a estimé que la situation au Burundi devait être réglée par un processus de dialogue inclusif, mené par les Burundais eux-mêmes.  Il a exhorté toutes les parties burundaises à y participer, avant de souligner le rôle constructif que l’ONU peut jouer pour le succès de ce dialogue. 

Le représentant a souhaité le retour à la normale dans le pays, estimant que l’environnement sécuritaire s’était grandement amélioré.  Le Burundi, en tant que pays souverain, a le droit de procéder à toute initiative législative bonne pour le pays, a-t-il ajouté, ajoutant que le référendum prévu en mai 2018 relève de la souveraineté nationale, avant d’appeler au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Burundi. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a exhorté toutes les parties à engager un dialogue pour mettre fin à la crise, appelant les dirigeants de la sous-région à participer à la revitalisation des efforts de la Communauté d’Afrique de l’Est pour poursuivre les négociations.  Selon le représentant, la détérioration de la situation socioéconomique mérite l’attention de la communauté internationale, y compris dans les domaines de la santé et de l’énergie, et des efforts doivent également être entrepris pour assurer un financement humanitaire adéquat. 

M. Umarov a ensuite déclaré que le retour des réfugiés devait être entrepris dans le respect du droit international.  Réaffirmant l’importance d’une approche régionale pour identifier les causes profondes des tensions, il a déclaré que la mise en œuvre complète de l’Accord d’Arusha était essentielle pour prévenir la violence et améliorer la situation sur le terrain.

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) a affirmé qu’il était préoccupé par l’état d’avancement du processus politique, la question des droits de l’homme et la situation humanitaire.  Concernant le processus politique, le représentant s’est dit soucieux de l’impasse du dialogue politique en dépit des efforts de médiation de la communauté internationale.  La Côte d’Ivoire regrette que le dialogue interburundais n’ait pas enregistré de progrès significatifs, à l’approche d’échéances importantes comme le référendum sur le projet de révision constitutionnelle prévu en mai 2018 et l’élection présidentielle de 2020.

M. Tanoh-Boutchoué a toutefois dit espérer que les changements envisagés dans le cadre de la réforme constitutionnelle ne remettront pas en cause les acquis de l’Accord historique d’Arusha, qui a permis au pays de jouir de 10 ans de paix et de stabilité et qui reste, au-delà des divergences d’interprétation, un élément central de la réconciliation entre les acteurs politiques burundais.  Le représentant a invité les parties burundaises à un dialogue politique inclusif et encouragé le Gouvernement du Burundi à œuvrer à la mise en place d’un climat sociopolitique apaisé devant permettre, sur la base de l’Accord d’Arusha, la participation de tous les acteurs au processus de paix et de réconciliation dans ce pays.

Inquiet de la persistance des allégations de violations des droits de l’homme au Burundi, M. Tanoh-Boutchoué a exhorté les autorités burundaises à faire toute la lumière sur ces faits et au cas où ils seraient avérés, à prendre toutes les mesures pour y mettre un terme, pour identifier leurs auteurs et les traduire en justice.  En outre, préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire au Burundi, le représentant a encouragé les autorités burundaises à créer les conditions favorables au retour de ces réfugiés, et invité les Nations Unies, les partenaires bilatéraux et humanitaires, à apporter leur concours et assistance à cet effet. 

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a encouragé toutes les parties à faciliter le travail du facilitateur désigné par la Communauté d’Afrique de l’Est, en respectant l’Accord d’Arusha, pierre angulaire du processus de dialogue et de réconciliation nationale en cours.  Le représentant a pris note des efforts du Gouvernement burundais pour rétablir la situation sécuritaire, avant de se féliciter de sa décision d’accueillir en avril le Sommet du Marché commun de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe. 

Il a ensuite salué le retour des réfugiés dans le pays, soulignant la nécessité de mettre en place les conditions nécessaires pour garantir un rapatriement sûr et librement consenti.  Le représentant s’est ensuite élevé contre les mesures de sanctions unilatérales prises par des États Membres, les considérant comme illégales au regard du droit international.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a jugé crucial de préserver le niveau de stabilité actuellement constaté au Burundi.  Il a défendu un processus de dialogue inclusif, sur la base de l’Accord d’Arusha et de la Constitution burundaise et a jugé crucial de revitaliser le processus de dialogue, exhortant à cette fin toutes les parties burundaises à y participer.  Le représentant a souhaité la tenue d’élections démocratiques et pacifiques en 2020, avant d’insister sur les difficultés économiques considérables du pays, aggravées notamment par le retour des réfugiés.  Il a plaidé en conséquence pour un soutien international fort et pour l’instauration d’un environnement permettant d’éviter une résurgence de la violence.  Enfin, M. Alemu a noté la robustesse des institutions burundaises, tout en souhaitant qu’elles soient plus inclusives. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a encouragé le Gouvernement burundais à faire des progrès dans ses relations avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.  Il a ensuite salué le travail réalisé par l’Envoyé spécial du Secrétaire général « dans le cadre d’une diplomatie préventive pleinement respectueuse de la souveraineté » du Burundi.

M. ALBERT SHINGIRO (Burundi) a indiqué que, sur le plan politique, son pays se préparait « déjà » au référendum constitutionnel de 2018 et aux élections générales de 2020 et que la priorité du Gouvernement était d’amener à bon port ces deux grands rendez-vous électoraux en créant en amont un environnement propice à l’organisation des élections « démocratiques, libres, transparentes et apaisées ».  Il a fait savoir que l’opération d’inscription sur les listes électorales pour les deux scrutins s’était déroulée dans de bonnes conditions du 8 au 17 février, et a précisé que les chiffres provisoires montrent qu’au total, plus de cinq millions de Burundais se sont inscrits sur les listes.

Le représentant a ensuite affirmé que le dialogue interburundais, sous la facilitation de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), « se poursuit normalement », ajoutant que, « contrairement à ce que dit le rapport du Secrétaire général », le dialogue n’est pas au point mort.  M. Shingiro a notamment indiqué que dans son communiqué final, le dix-neuvième Sommet des chefs d’État de la CAE, qui s’est tenu à Kampala le 23 février 2018, avait apprécié l’excellent travail déjà réalisé par la médiation et la facilitation du dialogue interburundais.  « Ce déficit profond entre l’appréciation de la région, qui est proche du Burundi géographiquement, politiquement et culturellement, et la position pessimiste de ce rapport et de certains acteurs exogènes par rapport à l’état d’avancement du dialogue interburundais, constitue une anomalie qui devrait interpeler l’attention du Conseil de sécurité », a-t-il dénoncé.

Tournant ensuite son attention sur la réforme constitutionnelle, le représentant a insisté sur le fait qu’il s’agit d’un exercice qui relève exclusivement de la souveraineté nationale du Burundi.  Il est clair, a-t-il poursuivi, que l’ONU et les États Membres sont loin de constituer un cadre de discussion des affaires constitutionnelles des États souverains. 

M. Shingiro s’en est pris ensuite au rapport du Secrétaire général, l’accusant de violer « de façon flagrante le principe du respect de l’égalité souveraine des États » consacré par la Charte en s’octroyant le droit de commenter le projet de référendum constitutionnel du Burundi.  Le représentant s’est en particulier insurgé contre la référence faite, dans les paragraphes 4 à 8 du même rapport, à la révision constitutionnelle au Burundi, référence qu’il a dénoncée comme une « ingérence osée » dans les affaires intérieures de l’État burundais.  En émettant des critiques au droit souverain du peuple burundais à amender sa Constitution, « alors que l’ONU n’a jamais émis les mêmes préoccupations dans des cas similaires d’amendement constitutionnel », le rapport viole en outre l’Article 2.1 de la Charte, a poursuivi le représentant.  « Ce double standard dans le traitement des États doit être découragé pour ne pas constituer un précédent dangereux dans le fonctionnement de l’ONU », a-t-il mis en garde.

M. Shingiro a en outre affirmé que, contrairement à ce que dit le rapport à son paragraphe 4, le nouveau projet de constitution garantit la stabilité et la paix, la protection de l’opposition politique, la protection des droits de l’homme et des minorités, la protection de la souveraineté, ainsi que les quotas ethniques et de genre prévus dans l’Accord d’Arusha de 2000.

Quant à la situation sécuritaire dans le pays, elle est « globalement bonne », à l’exception de « quelques cas isolés de criminalité de droit commun », a poursuivi M. Shingiro.  Le représentant a souligné que le « retour massif » des réfugiés et le fait de confier au Gouvernement l’organisation et l’accueil du vingt-et-unième Sommet du Marché commun de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe constituaient « un thermomètre du retour à la normalité ».  Il a également cité une délégation des députés de l’Assemblée législative de la Communauté d’Afrique de l’Est qui aurait affirmé, à l’issue d’une visite sur le terrain, avoir trouvé « un pays paisible et calme ».  À propos des retours, le représentant a cité le chiffre de 200 000 Burundais rentrés, affirmant que son pays en attendait plus de 60 000 rapatriés en 2018.

M. Shingiro s’est ensuite inscrit en faux contre les paragraphes du rapport qui cherchent, selon lui, à singulariser la jeunesse du parti au pouvoir, les Imbonerakure, comme étant à la base de l’insécurité, au lieu d’adresser un appel à la retenue à tous les jeunes affiliés aux partis politiques.  Il a dénoncé le caractère partial du rapport, faisant observer qu’aucun appel n’avait été lancé aux jeunes de l’opposition, dont certains ont fui le pays après avoir tué et violé durant l’insurrection de 2015.

Le délégué a assuré que le Burundi restait « très engagé » à la protection des droits humains à travers plusieurs mécanismes, citant notamment la Commission vérité et réconciliation ainsi que l’observatoire national pour la prévention et l’éradication du génocide, crime de guerre et crime contre l’humanité.  Il a également rappelé que, lors de son message à la nation du 31 décembre 2017, le Président burundais a pris une mesure par la grâce présidentielle de libérer environ 2 000 prisonniers et a rappelé les « gestes d’apaisement » pris au lendemain du coup d’État et de l’insurrection de 2015.

M. Shingiro a également dénoncé un manque de coopération entre le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et les ministères sectoriels concernés par les questions humanitaires, ainsi qu’un gonflement des chiffres dans l’élaboration de son plan de réponse humanitaire 2018 pour le pays.  Il a par ailleurs indiqué que le projet d’accord de coopération avec le Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme est en cours de discussions et qu’à la mi-janvier, le Burundi avait demandé à ce dernier de proposer de nouvelles dates pour la reprise des discussions.  Bujumbura attend la réponse de Genève à cet égard, a-t-il ajouté.

M. Shingiro a enfin demandé au Conseil de sécurité d’envisager de retirer le Burundi de son ordre du jour car, a-t-il affirmé, la situation dans le pays est globalement calme et ne présente aucune menace à la paix et à la sécurité internationales.  Il n’y a aucun critère objectif qui justifie le maintien du Burundi à l’ordre du jour du Conseil, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: le Conseil de sécurité exige une cessation sans délai des hostilités d’au moins 30 jours consécutifs pour instaurer une pause humanitaire durable

8188e séance – après-midi
CS/13221

Syrie: le Conseil de sécurité exige une cessation sans délai des hostilités d’au moins 30 jours consécutifs pour instaurer une pause humanitaire durable

« De façon à instaurer une pause humanitaire durable propre à permettre l’acheminement immédiat de l’aide humanitaire ainsi que l’évacuation sanitaire des personnes gravement malades et des blessés », le Conseil de sécurité a adopté, aujourd’hui à l’unanimité, une résolution qui « exige que toutes les parties cessent sans délai les hostilités pendant au moins 30 jours consécutifs sur l’ensemble du territoire syrien ». 

Longuement négociée avant d’être adoptée à l’unanimité, la résolution 2401 (2018) a été présentée par ses deux principaux coauteurs, le Koweït et la Suède, comme strictement humanitaire.

La cessation des hostilités vise toutes les opérations militaires, à l’exception de celles dirigées contre Daech, Al-Qaida et le Front el-Nosra, ainsi que « tous les autres individus, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés ».

Le Conseil, qui demande à toutes les parties de lever immédiatement le siège des zones peuplées, notamment dans la Ghouta orientale, à Yarmouk, à Fouaa et à Kafraya, exige en outre que, immédiatement après le début de la cessation des hostilités, toutes les parties « accordent chaque semaine aux convois humanitaires de l’ONU et de ses partenaires d’exécution, notamment ceux qui transportent des fournitures médicales et chirurgicales, un accès sûr, durable et sans entrave » aux populations qui en ont le plus besoin, en particulier dans des zones difficiles d’accès et assiégées.  Immédiatement après de la cessation des hostilités, l’ONU et ses partenaires devront également être autorisés à procéder à des évacuations sanitaires sûres et sans conditions, en fonction de l’urgence et de la nécessité médicale.

Le Conseil, qui « exige que toutes les parties ouvrent un dialogue » afin d’instaurer la pause humanitaire, demande à tous les États Membres concernés de « coordonner les efforts visant à surveiller la cessation des hostilités » et d’user de leur influence auprès des parties pour en assurer le respect, ainsi que celui des engagements existants.  Il leur demande aussi d’appuyer l’action menée pour créer les conditions propices à un cessez-le-feu durable et souligne que les États Membres doivent « donner les garanties nécessaires ». 

Le Secrétaire général devra faire rapport au Conseil sur l’application de la résolution et le respect de ses dispositions par toutes les parties concernées en Syrie, dans les 15 jours.

Après l’adoption unanime du texte, toutes les délégations ont rendu hommage aux deux « porte-plume », et plusieurs, à l’image de la Chine, se sont félicitées que le Conseil ait pu parler à l’unisson.

Avant le vote, la Suède avait insisté sur le caractère « strictement humanitaire » du texte, destiné à permettre « d’apaiser la violence, de sauver des vies et de briser l’impasse sur la situation humanitaire ».  Après l’adoption, le Koweït a lui aussi fait observer que la résolution ne pouvait toutefois pas mettre un terme immédiat aux souffrances humaines. 

« Vitale au sens propre », la résolution doit être considérée comme une « première étape » selon la France, qui a vu « une réponse minimale à la demande des acteurs humanitaires ».  De nombreuses délégations l’ont rappelé: le retour à la paix et à une stabilité durable en Syrie passe par des négociations politiques.  La plupart ont mis en avant le processus de Genève et la résolution 2254 (2015) du Conseil, mais le processus d’Astana et les récentes discussions de Sotchi ont également été cités.  C’est « tout un éventail de questions » dont il faut encore s’occuper, a fait observer la Fédération de Russie, alors que le Kazakhstan annonçait une réunion à Astana, « à la mi-mars ou avant », dans l’espoir de voir des mesures supplémentaires pour garantir le strict respect du cessez-le-feu.  « Rien ne serait pire que de voir cette résolution rester lettre morte », a prévenu la France.

Plusieurs représentants ont déploré qu’il ait fallu attendre aussi longtemps pour parvenir à une résolution unanime.  « Pendant que nous pesions les virgules », les forces d’Assad continuaient de bombarder la Ghouta orientale, a grincé le Royaume-Uni.  L’on a voté aujourd’hui un texte « qui aurait pu être adopté il y a trois jours », ont renchéri les États-Unis, avant d’accuser la Fédération de Russie d’avoir « retardé les choses ».

S’il a fallu du temps pour parvenir à un accord, c’est parce que nous nous opposions au « schéma restrictif » d’une mise en place « immédiate » d’un cessez-le-feu pour une période indéterminée, s’est expliquée la Fédération de Russie, qui a dénoncé une approche « déconnectée de la réalité et irréalisable ».  Alors que, ces derniers jours, les discussions du Conseil ont été dominées par la situation dans la Ghouta orientale, la Fédération de Russie a fait observer avec insistance que la résolution concernait tout le pays.  L’aide humanitaire doit être acheminée partout en Syrie, a-t-elle ajouté, en appelant à des accords humanitaires « concrets ». 

« Petit pas en avant », la résolution ne doit pas moins être appliquée au plus vite.  « Sans délai, ce qui veut dire “maintenant, immédiatement” », a lancé le Royaume-Uni, en référence à l’un des termes longuement négociés du texte.  Les Pays-Bas ont d’ailleurs demandé au Conseil de « se tenir prêt à se réunir sans délai si la situation l’exige ».  Mais si elle a dit adhérer à l’appel à la trêve lancé par la France, la Syrie a exigé que soient également appliquées « les 29 autres résolutions », ajoutant qu’on n’avait « pas besoin de réunions d’urgence ni de nouvelles résolutions et encore moins de rapports fondés sur des données peu fiables ».  Selon notre entendement, a conclu la Syrie, les résolutions s’appliquent également à la Turquie et à Efrin, aux forces de la coalition dont les États-Unis, et à l’agression israélienne, y compris dans le Golan.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Texte de la résolution (S/RES/2401 (2018))

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2042 (2012), 2043 (2012), 2118 (2013), 2139 (2014), 2165 (2014), 2175 (2014), 2191 (2014), 2209 (2015), 2235 (2015), 2249 (2015), 2254 (2015), 2258 (2015), 2268 (2016), 2286 (2016), 2332 (2016), 2336 (2016) et 2393 (2017), et les déclarations de son président des 3 août 2011 (S/PRST/2011/16), 21 mars 2012 (S/PRST/2012/6), 5 avril 2012 (S/PRST/2012/10), 2 octobre 2013 (S/PRST/2013/15), 24 avril 2015 (S/PRST/2015/10) et 17 août 2015 (S/PRST/2015/15),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi qu’aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,

Se disant à nouveau profondément affligé par la persistance de la situation humanitaire effroyable que connaît la Syrie, notamment dans la Ghouta orientale, dans la province d’Edleb, dans la partie nord de la province de Hama, à Roukban et à Raqqa, et par le fait que le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire d’urgence, notamment d’une assistance médicale, dépasse 13,1 millions – dont 6,1 millions sont des déplacés, 2,5 millions vivent dans des zones difficiles d’accès, y compris des réfugiés palestiniens, et des centaines de milliers sont des civils pris au piège dans des zones assiégées,

Exprimant son indignation devant l’escalade de la violence, qui a atteint un niveau inacceptable, dans plusieurs régions du pays, en particulier dans la province d’Edleb et dans la Ghouta orientale mais également dans la ville de Damas, notamment les bombardements d’artillerie visant des locaux diplomatiques, et devant les attaques visant des civils et des installations civiles ainsi que des installations médicales, qui aggravent d’autant les souffrances endurées et provoquent de nombreux déplacements de populations, et rappelant à cet égard les obligations qu’imposent à toutes les parties le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, ainsi que toutes ses décisions pertinentes, notamment celle de mettre fin aux attaques visant des civils et des installations civiles, en particulier les attaques lancées contre des écoles et des installations médicales,

S’inquiétant pour les personnes retournant dans certaines zones, notamment celles reprises à l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech), qui sont polluées par des restes explosifs de guerre et qui ont besoin d’une aide pour retrouver résilience et stabilité, et se déclarant préoccupé face à la situation humanitaire à Raqqa,

Se disant à nouveau profondément troublé par le fait que l’aide humanitaire des Nations Unies n’a pas pu être acheminée dans les zones assiégées ces derniers mois, s’inquiétant vivement de la situation désastreuse des centaines de milliers de civils pris au piège dans les zones assiégées de la République arabe syrienne, en particulier dans la Ghouta orientale, à Yarmouk, à Fouaa et à Kafraya, réaffirmant que les sièges imposés aux populations civiles en Syrie sont une violation du droit international humanitaire, et demandant la levée immédiate de tous les sièges,

Se déclarant préoccupé par la situation humanitaire des déplacés qui se trouvent à Roukban et insistant sur la nécessité d’assurer l’accès du personnel humanitaire à Roukban depuis le territoire syrien et de trouver une solution durable,

Notant que les travaux actuellement menés sur les zones de désescalade pour réduire la violence constituent un pas vers un cessez-le-feu global à l’échelle nationale, et soulignant que toutes les parties doivent respecter les engagements qu’elles ont pris dans le cadre des accords de cessez-le-feu existants et que l’accès humanitaire doit faire partie de ces efforts, conformément au droit international humanitaire,

Réaffirmant que les États Membres doivent veiller à ce que les mesures qu’ils prennent pour lutter contre le terrorisme soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, en particulier le droit international des droits de l’homme, le droit des réfugiés et le droit international humanitaire,

Soulignant que la situation humanitaire continuera de se détériorer en l’absence d’un règlement politique du conflit syrien qui soit conforme aux dispositions de la résolution 2254 (2015), et demandant à toutes les parties d’avancer dans ce sens et d’instaurer des mesures de confiance, y compris la libération rapide de toute personne détenue arbitrairement, en particulier les femmes et les enfants,

Exprimant son indignation devant le fait que ses résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2268 (2016), 2332 (2016) et 2393 (2017) ne sont toujours pas pleinement appliquées,

Considérant que la situation humanitaire catastrophique qui règne en Syrie continue de faire peser une menace sur la paix et la sécurité dans la région,

Soulignant que l’Article 25 de la Charte des Nations Unies fait obligation aux États Membres d’accepter et d’appliquer ses décisions,

1.       Exige que toutes les parties cessent les hostilités sans délai et s’engagent immédiatement à assurer la pleine mise en œuvre de cette demande par toutes les parties, de façon à instaurer une pause humanitaire durable d’au moins 30 jours consécutifs sur l’ensemble du territoire syrien pour permettre d’acheminer durablement, en toute sécurité et sans entrave l’aide humanitaire et les services connexes et de procéder à l’évacuation sanitaire des personnes gravement malades et des blessés, conformément au droit international applicable;

2.       Affirme que la cessation des hostilités ne s’appliquera pas aux opérations militaires dirigées contre l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech), Al-Qaida et le Front el-Nosra et tous les autres individus, groupes, entreprises et entités associés à Al-Qaida ou à l’EIIL, ainsi que les autres groupes terroristes qu’il a désignés comme tels;

3.       Demande à toutes les parties de respecter et d’honorer les engagements qu’elles ont pris au titre des accords de cessez-le-feu conclus antérieurement, y compris l’application intégrale de la résolution 2268 (2016), demande à tous les États Membres d’user de leur influence auprès des parties pour assurer le respect de la cessation des hostilités et des engagements existants et d’appuyer l’action menée pour créer les conditions propices à un cessez-le-feu durable, et souligne qu’il faut que les États Membres donnent les garanties nécessaires;

4.       Demande à tous les États Membres concernés de coordonner les efforts visant à surveiller la cessation des hostilités, en faisant fond sur les arrangements existants;

5.       Exige que, immédiatement après le début de la cessation des hostilités, toutes les parties accordent chaque semaine aux convois humanitaires de l’Organisation des Nations Unies et de ses partenaires d’exécution, notamment ceux qui transportent des fournitures médicales et chirurgicales, un accès sûr, durable et sans entrave à toutes les zones et populations recensées dans le cadre de l’évaluation des besoins réalisée par l’Organisation des Nations Unies dans toutes les régions de la Syrie, en particulier les 5,6 millions de membres de 1 244 communautés ayant cruellement besoin d’aide, y compris les 2,9 millions de personnes vivant dans des zones difficiles d’accès et assiégées, compte tenu de l’évaluation des conditions de sécurité faite par l’Organisation;

6.       Exige également que, immédiatement après le début de la cessation des hostilités, toutes les parties autorisent l’Organisation des Nations Unies et ses partenaires d’exécution à procéder à des évacuations sanitaires sûres et sans conditions, en fonction de l’urgence et de la nécessité médicale, compte tenu de l’évaluation des conditions de sécurité faite par l’Organisation;

7.       Demande une nouvelle fois, en particulier aux autorités syriennes, que toutes les parties s’acquittent sans délai des obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international des droits de l’homme, le cas échéant, et le droit international humanitaire, notamment en ce qui concerne la protection des civils, garantissent le respect et la protection de l’ensemble du personnel médical et des agents humanitaires dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, de leurs moyens de transport et de leur matériel, ainsi que des hôpitaux et des autres installations médicales, et mettent en œuvre intégralement et immédiatement les dispositions de toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité;

8.       Exige de toutes les parties qu’elles permettent au personnel médical et aux agents humanitaires dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, à leur matériel, à leurs moyens de transport et à leurs fournitures, notamment les articles chirurgicaux, d’accéder en toute sécurité et sans entrave aux populations dans le besoin, conformément au droit international humanitaire, et exige de nouveau de toutes les parties qu’elles démilitarisent les installations médicales, les écoles et les autres établissements civils, s’interdisent d’établir des positions militaires dans des zones habitées et s’abstiennent de lancer des attaques contre des installations civiles;

9.       Prend note avec satisfaction des cinq demandes formulées par le Coordonnateur des secours d’urgence le 11 janvier 2018 au cours de sa mission en Syrie, et exhorte toutes les parties à faciliter l’application de celles-ci et d’autres mesures, de façon à garantir la fourniture durable d’une aide humanitaire plus efficace et respectueuse des principes établis en Syrie en 2018;

10.     Demande à toutes les parties de lever immédiatement le siège des zones peuplées, notamment dans la Ghouta orientale, à Yarmouk, à Fouaa et à Kafraya, exige que toutes les parties autorisent l’acheminement de l’aide humanitaire, y compris l’aide médicale, cessent de priver les civils de denrées alimentaires et de médicaments indispensables à leur survie, et permettent l’évacuation rapide, en toute sécurité et sans entrave, de tous les civils qui souhaitent partir, et souligne que les parties doivent se mettre d’accord sur des pauses humanitaires, des jours de tranquillité, des cessez-le-feu localisés et des trêves afin que les organismes humanitaires puissent avoir un accès sûr et sans entrave à toutes les zones touchées en Syrie, rappelant que le droit international humanitaire interdit d’utiliser la famine contre les civils comme méthode de combat;

11.     Demande que l’exécution des programmes humanitaires d’action antimines soit accélérée d’urgence sur l’ensemble du territoire syrien;

12.     Prie le Secrétaire général de lui faire rapport sur l’application de la présente résolution et le respect de ses dispositions par toutes les parties concernées en Syrie, dans les 15 jours suivant l’adoption de la présente résolution et, par la suite, dans le cadre des rapports qu’il lui soumet concernant l’application des résolutions 2139 (2014), 2165 (2014), 2191 (2014), 2258 (2015), 2332 (2016) et 2393 (2017);

13.     Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations

Coauteur de la résolution, M. OLOF SKOOG (Suède) a expliqué que le Koweït et son pays ont présenté ce texte en réponse aux appels désespérés de l’ONU et de la communauté humanitaire pour une trêve en Syrie.  « Nous avons fait de notre mieux pour prendre en compte les avis des divers membres du Conseil de sécurité », a-t-il déclaré, tout en précisant que l’élément central de ce texte est l’appel à la cessation des hostilités en Syrie pendant une période initiale de 30 jours, afin de permettre l’accès humanitaire et de procéder aux évacuations sanitaires.  Le texte demande aussi la levée des sièges dans tout le pays et rappelle notamment au Gouvernement syrien ses obligations en vertu du droit international humanitaire.  La cessation des hostilités, a précisé le représentant, ne concerne pas les actions militaires menées contre les groupes terroristes et leurs affiliés.  Ce texte n’est pas un accord de paix en Syrie.  Les parties sont tenues de respecter les accords qu’ils ont déjà signés.  Le texte d’aujourd’hui est une résolution humanitaire et le rôle de ce Conseil est de pousser les parties au conflit à respecter la cessation des hostilités afin de mettre fin aux souffrances du peuple syrien.  Avec une adoption à l’unanimité, le représentant a émis l’espoir de voir les choses changer. 

Après l’adoption de la résolution, M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït), second coauteur du texte, a approuvé la déclaration de son homologue de la Suède.  L’adoption à l’unanimité du texte, « après de très longues négociations », montre que le Conseil de sécurité peut se prononcer à l’unanimité lorsque la situation l’exige, a-t-il déclaré, avant de remercier ses homologues.  Rappelant les dispositions principales du texte, le représentant a fait observer que le texte ne peut pas mettre un terme immédiat à la souffrance humaine mais a estimé qu’il représentait un « signe très positif » de l’unité du Conseil de sécurité et sa disposition à « faire preuve de solidarité pour mettre fin aux souffrances ».  Il faut maintenant appliquer la résolution adoptée, a poursuivi le représentant.  Le Conseil aura encore beaucoup à faire pour mettre fin à la tragédie dont nous sommes témoins en Syrie, a-t-il poursuivi.  Cette solution n’est que temporaire; « seule une solution politique permettra de mettre fin au conflit », sur la base du Communiqué de Genève de 2012 et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

Le représentant a appelé au dialogue sur les questions humanitaires, lesquelles devraient, selon lui, « relever de la procédure ».  On ne peut utiliser le veto dans de telles situations, a-t-il affirmé, en rappelant que son pays soutient l’initiative franco-mexicaine et celle du Groupe ACT -Groupe Responsabilité, cohérence et transparence- visant à suspendre le cours au veto ou à ne pas s’opposer à un texte dans les cas de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de génocide.  Le représentant a également insisté sur le droit international humanitaire, y compris les quatre Conventions de Genève. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a dûment remercié les deux délégations porte-plume pour leur travail et le sacrifice de leur temps pendant les négociations.  La représentante a illustré la situation en Syrie avec les témoignages de deux médecins et d’une mère qui « attend que son enfant meure parce qu’au moins, au paradis, il y a de la nourriture ».  Aujourd’hui, a dit la représentante, le Conseil de sécurité a enfin pris des mesures contre le niveau dévastateur des souffrances humaines en Syrie.  Les États-Unis, a-t-elle souligné, ne veulent rien de plus que de voir la mise en œuvre du « cessez-le-feu ».  Nous devons tous, a-t-elle insisté, presser « le régime d’Assad » de respecter la résolution.  Mais, a regretté la représentante, nous répondons un peu tardivement à la crise.  Elle a évoqué l’appel plein d’émotions que le Secrétaire général a lancé mercredi dernier et le projet de résolution qui était déjà prêt.  « Mais la Russie a retardé les choses.  Elle est ensuite passée au lendemain, le jour où la Fédération de Russie, pour encore retarder les choses, a demandé une séance publique au cours de laquelle 14 membres du Conseil se sont dits prêts à imposer un cessez-le-feu.  « Mais la Russie s’est opposée au vote. »  Hier, le Conseil s’est réuni pendant des heures, prêt à voter, « mais une nouvelle fois, la Russie a retardé les choses ».

Voter était devenu une obligation morale pour tout le monde, « saut pour la Russie, sauf pour la Syrie, sauf pour l’Iran », a accusé la représentante.  Nous votons aujourd’hui pour un « cessez-le-feu » qui aurait pu sauver des vies, il y a trois jours, s’est-elle désolée, en parlant d’une résolution qui ne contient aucun changement « si ce n’est quelques mots et quelques virgules ».  Le peuple syrien ne devrait pas avoir à mourir en attendant que la Russie organise enfin sa position à partir de Moscou ou en discute avec la Syrie, a martelé la représentante, en prévenant: « nous ne connaissons peut-être pas les Syriens dont la situation nous alarme, mais eux nous connaissent ».  « Nous les avons trahis. »

La résolution, a-t-elle poursuivi, marque un moment d’unité qu’il faut saisir et maintenir au-delà des 30 jours.  La représentante a espéré qu’il s’agit là d’un tournant, un tournant où la Fédération de Russie encouragera avec les autres une solution politique au conflit et prendra des mesures pour rétablir les vraies responsabilités dans l’utilisation des armes chimiques en Syrie.  Les progrès doivent commencer par une adhésion « au cessez-le feu et sans excuse ».  « Ne soyons pas naïfs, et ne laissons pas le régime d’Assad continuer à bombarder des écoles, des hôpitaux et des maisons sous le prétexte fallacieux de la lutte contre le terrorisme. » 

Les bombardements doivent cesser, s’est impatientée la représentante.  Il faut donner sa chance « au cessez-le-feu ».  Elle a demandé « aux partisans d’Assad », à savoir la Fédération de Russie et l’Iran, de traiter de ce que le Secrétaire général a appelé « l’enfer sur terre ».  L’objectif de la résolution est clair: stopper les opérations militaires dans la Ghouta orientale, une fois pour toutes, et permettre l’accès humanitaire.  La représentante a douté que le régime syrien respectera la résolution mais elle a dit y adhérer parce que « nous le devons aux innocents en Syrie qui implorent notre aide ».  Elle a conclu en défiant ses collègues de faire respecter le « cessez-le-feu » et de mettre tout en œuvre pour que les dispositions de la résolution se concrétisent sur le terrain.  « C’est le seul moyen de restaurer la crédibilité du Conseil car le peuple syrien a assez attendu », a-t-elle averti

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a remercié les deux coauteurs pour leurs « efforts inlassables de compromis » qui ont permis d’adopter la résolution « après de longues consultations », durant lesquelles, a-t-il ajouté, « la plupart des délégations souhaitaient réellement » trouver une solution.  Le texte, a-t-il noté, pousse les autorités syriennes à faire en sorte que les hostilités cessent le plus rapidement possible et que l’accès humanitaire soit rouvert.  Pourquoi a-t-il fallu autant de temps pour adopter le texte? s’est interrogé le représentant, qui a expliqué que la Fédération de Russie « s’opposait au schéma restrictif » de mise en place « immédiate » d’un cessez-le-feu pour une période indéterminée « car cela n’est pas réalisable ».  Une telle approche « déconnectée de la réalité » ne permettrait pas de résoudre la situation.  Il faut des accords humanitaires « concrets », a affirmé le représentant, qui a souhaité que « tous les acteurs influents » contribuent à ce que des solutions soient trouvées.  Il a dénoncé le fait que des groupes armés « se soustraient » à leurs obligations contrairement à la Fédération de Russie qui remplit toutes les siennes et contribue aux efforts humanitaires, de même que les autres partenaires du processus d’Astana, auxquels M. Nebenzia a rendu hommage.

La résolution dit clairement qu’elle ne s’applique pas aux terroristes de Daech, Al-Qaida et du Front el-Nosra ni à leurs affiliés, a-t-il rappelé.  « La lutte va se poursuivre », a promis le représentant, qui a appelé les différents acteurs internationaux à se coordonner sur le terrain, y compris avec les autorités syriennes, dans le respect du droit international, « dont la souveraineté » de la République arabe syrienne.  Le représentant, qui a relevé que son homologue américaine a cité son pays un nombre incalculable de fois, a accusé les États-Unis d’avoir un agenda en Syrie et de soutenir des « acteurs douteux ». 

M. Nebenzia a jugé important que la résolution adoptée mette l’accent sur les activités de déminage.  La situation traitée par la résolution ne concerne pas seulement la Ghouta orientale, a-t-il insisté à plusieurs reprises, en citant notamment Damas, où, a-t-il rappelé, des missions diplomatiques, y compris celle de son pays, ont été visées.  L’aide doit être acheminée partout en Syrie, y compris à Yarmouk, à Fouaa et à Kafraya avant de rappeler que c’est « tout un éventail de questions » dont il faut encore s’occuper.  Enfin, le représentant s’est dit « très inquiet » des « menaces d’agression portées contre la Syrie et sa souveraineté par les États-Unis » et a conclu en affirmant que l’interprétation de cette résolution ne devait en aucun cas « être laxiste ».

Pour M. FRANÇOIS DELATTRE (France), cette résolution est « vitale au sens propre », car « l’arrêt des combats est important pour sauver les vies des populations dans la Ghouta orientale notamment ».  Il a rappelé que la cessation des hostilités a été au cœur de l’appel conjoint lancé hier par le Président Macron et la Chancelière Merkel en direction du Président Putin de la Fédération de Russie.  La résolution est « un sursaut tardif contre le déferlement de la violence contre les civils dans la Ghouta orientale et ailleurs en Syrie », a déclaré le délégué.  Une cessation des hostilités pour une période initiale de 30 jours est une première étape.  C’est même une réponse minimale à la demande des acteurs humanitaires.  Il revient ainsi au régime syrien de faire respecter cette cessation des hostilités et permettre aux humanitaires d’atteindre les civils.  Pour la France en effet, « chaque minute compte et peut faire basculer des vies » et rien ne serait pire, a prévenu le représentant, que de voir cette résolution rester lettre morte.

Il a insisté sur le fait que la stabilité durable en Syrie passe par des négociations politiques dans le cadre du processus de Genève et en droite ligne de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Les ingrédients majeurs pour une confrontation régionale sont réunis aujourd’hui en Syrie, a prévenu M. Delattre tout en mettant en garde contre la propagation du conflit.  « Notre génération sera jugée sur notre capacité ou non à mettre un terme à la tragédie syrienne », a-t-il déclaré, ajoutant que le plus difficile reste à faire.  Il a lancé un double appel: le premier est la mobilisation pour la mise en œuvre complète de cette résolution, a-t-il souligné en interpellant la Fédération de Russie et les garants du processus d’Astana.  Le deuxième appel de la France est d’utiliser cette trêve comme levier pour aller vers une solution politique à la crise syrienne.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) s’est félicité de l’adoption de la résolution, tout en ajoutant qu’il avait fallu beaucoup trop de temps pour y parvenir.  « Pendant que nous pesions les virgules », les forces d’Assad continuaient de bombarder.  Rappelant que le conflit en Syrie entre dans sa huitième année, il a estimé que la situation dans la Ghouta orientale et d’autres régions était « bien pire que ce nous ne pouvions l’imaginer ».  Dénonçant ceux qui qualifient les informations arrivant de la Ghouta orientale de propagande, le représentant a répété que ce qui s’y passe est « l’enfer sur terre ».  Prendre pour cible des civils, systématiquement et quotidiennement est une violation du droit international humanitaire mais aussi un crime de guerre, a-t-il souligné. 

Il faut, a dit le représentant, prendre des mesures concrètes pour sortir de cet enfer ceux qui s’y trouvent « de la faute d’un seul homme ».  Il a appelé à la mise en œuvre des dispositions de la résolution « sans délai, ce qui veut dire “maintenant, immédiatement” ».  Si une partie ne respecte pas les termes de la résolution, il faudra revenir dans cette salle immédiatement, a-t-il ajouté, avant d’insister sur la « responsabilité particulière de la Syrie et de ses alliés », en citant l’Iran.  La résolution adoptée aujourd’hui « n’est qu’un petit pas en avant », a estimé le représentant, qui a demandé que soit envoyé au « régime Assad » un message clair pour l’arrêt des combats et l’engagement sincère dans les négociations de Genève.

M. MA ZHAOXU (Chine) a reconnu, à son tour, que la résolution est le fruit d’efforts et de patience après de longues négociations.  Il a dûment remercié les coauteurs et salué le fait que le Conseil ait parlé d’une seule voix.  Il a invité la communauté internationale à travailler de concert pour la mise en œuvre de cette résolution et souligné que ce que la Chine veut, c’est une solution politique soucieuse de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la Syrie.  Il faut une solution, négociée par toutes les parties et sous la houlette des Nations Unies, qui tienne compte des préoccupations de toutes les parties, dont la lutte contre le terrorisme. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a remercié les porte-plume de cette résolution que sa délégation a, du reste, soutenue.  Le Kazakhstan se range aussi derrière le soutien affiché par le Secrétaire général de l’ONU pour une cessation immédiate des hostilités, parce que « la Ghouta orientale ne peut attendre ».  Il a rappelé que ces derniers jours, des chefs d’État et de gouvernement à travers le monde ont appelé le Gouvernement syrien à respecter les droits de l’homme, et que les deux parties fassent preuve de retenue.  Dans le même temps, les facteurs externes qui attisent les tensions doivent s’arrêter immédiatement afin de ne pas mettre en danger la sécurité régionale, a suggéré le représentant. 

Nous espérons que tous les pays qui ont une influence sur le terrain en Syrie et qui y conduisent des campagnes militaires contre le terrorisme vont agir de concert contre ce fléau, et prendront des mesures pratiques pour la mise en œuvre de cette résolution, a plaidé le délégué.  En outre, toutes les parties doivent permettre un accès humanitaire aux sites affectés et l’évacuation des gens ayant besoin de soins médicaux. 

Le représentant a ensuite transmis un message de son Ministre des affaires étrangères qui souhaite que ses collègues des pays garants du processus d’Astana prennent des mesures supplémentaires pour garantir le strict respect du cessez-le-feu au cours de leur réunion prévue à Astana à la mi-mars ou avant.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) s’est réjoui de l’accord auquel est parvenu aujourd’hui le Conseil pour mettre fin aux atrocités commises dans la Ghouta orientale et s’est donc félicité de l’adoption à l’unanimité de la résolution, rendant hommage, à son tour, aux deux délégations porte-plume.  Il faut désormais attendre les mesures qui seront prises sur le terrain, a poursuivi le représentant, qui a rappelé l’obligation de tous les États Membres à veiller à ce que toutes les dispositions du texte soient appliquées et qui a insisté sur la « responsabilité particulière » des autorités syriennes à l’égard de leur propre peuple.  La résolution est un « bon pas dans la bonne direction, mais il faut faire beaucoup, notamment pour assurer les responsabilités politiques et le retour des réfugiés, a poursuivi le représentant, pour qui, dès aujourd’hui, le Conseil de sécurité doit se tenir prêt à se réunir sans délai si la situation l’exige. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a rappelé que mercredi dernier, dans cette même salle, elle avait insisté pour que le Conseil de sécurité agisse pour mettre un terme à la tragédie dans la Ghouta orientale.  Elle a salué l’adoption de cette résolution, invitant en outre les parties en Syrie à respecter le droit humanitaire en permettant que l’aide parvienne aux civils, une obligation à la fois juridique et morale, a-t-elle souligné. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a déclaré que son pays avait suivi attentivement le processus de négociation et a rendu hommage aux deux délégations porte-plume qui ont permis une adoption de la résolution à l’unanimité.  « Il n’est jamais trop tard pour bien faire », a ajouté le représentant, en invoquant une expression espagnole.  « Il ne reste plus qu’à appliquer » les dispositions de la résolution 2401, a-t-il encouragé, avant de lancer un appel à toutes les parties concernées pour qu’elles fassent tous les efforts possibles pour sauver la vie de la population syrienne et apaiser ses très longues souffrances.  L’adoption de la résolution « nous fait échapper à la honte », a encore estimé le représentant, qui a toutefois ajouté qu’on n’y échapperait réellement que si le cessez-le-feu était mis en œuvre et que l’aide humanitaire parvenait aux civils dans les jours à venir.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a dit espérer une mise en œuvre rapide de cette résolution pour apaiser les souffrances des populations syriennes.  Il a salué les deux porte-plume, ainsi que la volonté de la délégation de la Fédération de Russie de se joindre au consensus.  Il a aussi rappelé qu’il n’y a pas de solution militaire en Syrie, et que le dialogue doit prévaloir, que ce soit à Genève ou à Astana. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) s’est dit heureux que le Conseil ait envoyé le bon message, celui de la cessation des hostilités afin de permettre aux humanitaires d’accéder aux populations.  Il a remercié les deux pays porteurs du texte qui ont pris en considération les avis de toutes les délégations.  Il a dit espérer que l’esprit positif qui a amené à l’adoption de cette résolution va continuer de régner entre ceux qui ont une grande influence sur les parties en Syrie. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué les efforts des deux coauteurs du projet de résolution et la souplesse dont ont fait preuve les membres du Conseil de sécurité, insistant sur l’importance de maintenir l’unité du Conseil de sécurité, « en particulier pour ce qui concerne sa responsabilité de protection des civils ».  Le Pérou suivra de près la mise en œuvre de la résolution par toutes les parties impliquées, a ajouté le représentant, qui a rendu hommage aux différents acteurs humanitaires sur le terrain.  Il a souhaité que la résolution adoptée aujourd’hui soit un pas de plus sur le chemin de la paix. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUE (Côte d’Ivoire) a rendu hommage aux efforts des deux délégations porte-plume, avant de demander que le texte adopté soit respecté par tous les acteurs, « sur tous les champs de bataille en Syrie ».  Il s’est dit persuadé que seule une solution politique acquise par la négociation permettra de mettre fin au conflit et a souhaité que les 30 jours de trêve réclamés par la résolution permettent la relance des différents processus politiques de négociation, que ce soit « à Genève, à Astana ou à Sotchi »

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a indiqué que des dizaines de roquettes ont touché Damas ces derniers jours, frappant entre autres le siège du Croissant-Rouge arabe syrien.  Il a dit adhérer à l’appel à la trêve lancé par la France mais a précisé qu’il fallait également mettre en œuvre les 29 autres résolutions du Conseil de sécurité sur la Syrie.  À son homologue du Royaume-Uni, il a demandé s’il n’avait pas souvenance des atrocités commises par les troupes britanniques en Iraq, en Palestine ou contre l’Argentine dans un différend lié à une île située à des milliers de kilomètres du Royaume-Uni.  « Et maintenant, c’est votre gouvernement qui nous empêche de lutter contre le terrorisme sur notre territoire », a-t-il lancé à l’endroit du délégué britannique, en accusant aussi le Royaume-Uni de soutenir le terrorisme en Syrie.

Le représentant syrien a affirmé que son gouvernement avait pris toutes les mesures de désescalade afin de protéger les civils, rappelant que les accords d’Astana demandent que tous les belligérants rompent tout lien avec les groupes terroristes, ce qui n’a pas été fait.  « Ils ont plutôt utilisé ces accords pour se réorganiser, recevant des instructions d’autres États, dont certains membres de ce Conseil », a-t-il accusé.  La Syrie n’a donc d’autre choix que de répondre à l’appel de sa population, otage des groupes armés dans la Ghouta orientale, et qui demande protection.  Mais, a fait observer le représentant, les appels des huit millions de Syriens ne parviennent pas aux oreilles de la France, des États-Unis et du Royaume-Uni.  Il a ironisé sur le fait que ces pays n’écoutent que les groupes terroristes, notamment Daech et El-Nosra.

Il s’est dit en outre surpris que des projets de résolution soient négociés au sein du Conseil de sécurité sans la participation du pays concerné.  Il a aussi accusé le Coordonnateur humanitaire de l’ONU de donner des informations erronées au Conseil, alors que son représentant en Syrie fournit des données plus positives sur l’accès humanitaire en Syrie.  On n’a pas besoin de réunions d’urgence ni de nouvelles résolutions et encore moins de rapports fondés sur des données peu fiables, a dit le représentant.  La communauté internationale a plutôt besoin de mettre en œuvre les 30 résolutions qu’elle a déjà adoptées, a-t-il martelé.  Selon notre entendement, a prévenu le représentant, les résolutions s’appliquent également à la Turquie et à Efrin, aux forces de la coalition dont les États-Unis, et à l’agression israélienne, y compris dans le Golan.  Il a demandé aux pays concernés d’arrêter de tenir des réunions à Paris, à Washington et à Londres sur des « plans de partition de la Syrie », « cela finira tôt ou tard par se retourner contre vous », a-t-il prévenu, en faisant valoir le droit de son pays de se défendre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des ONG suspend sa session après avoir recommandé le statut consultatif pour 223 organisations

Session de 2018,
16e séance - matin
ECOSOC/6890-ONG/869

Le Comité des ONG suspend sa session après avoir recommandé le statut consultatif pour 223 organisations

Le Comité des ONG, organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC), a adopté ce matin le rapport oralement amendé* de la session qu’il a tenue du 29 janvier au 7 février dernier.  Sur les 483 demandes de statut consultatif examinées, dont 162 des sessions précédentes, le Comité a répondu favorablement à 223 ONG. 

Trois statuts peuvent être recommandés:  le statut consultatif général est réservé aux grandes ONG internationales dont les domaines d’action et de travail couvrent la majorité des points contenus dans l’agenda de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  Le statut consultatif spécial est octroyé aux ONG travaillant dans un domaine spécifique et qui ne sont concernées que par certaines activités de l’ECOSOC.  La Liste regroupe les ONG qui ne rentrent dans aucune de ces deux catégories et qui ont plutôt tendance à travailler d’une manière plus technique et/ou restreinte.

Au cours de sa session, le Comité a rejeté la demande de statut de deux ONG américaines: « Iran Human Rights Documentation Center » et « US Committee for human Rights in North Korea ».  Il a reporté l’examen des demandes de statut consultatif de 241 autres ONG et clos les dossiers de 16 organisations qui n’ont pas répondu aux questions supplémentaires malgré les trois rappels obligatoires.  Le Comité a en outre recommandé à l’ECOSOC de retirer le statut consultatif spécial de trois ONG qui ont cessé d’exister: « Associacion de Técnicos Superiores y Peritos Judiciales de Andalucia »; « Honeypot Village » et « Partnership Network International ». 

Sur les six demandes de reclassement, le Comité a reporté l’examen de cinq et répondu positivement au dossier de l’ONG belge « International Federation of Consular Corps and Associations » qui passe de la Liste au statut consultatif spécial.  Le Comité a pris note du changement de nom de cinq organisations et a reporté sa décision sur quatre autres, réservant également sa réponse à une demande de fusion. 

Pendant cette session, le Comité a dialogué avec 24 ONG et sur les 494 rapports quadriennaux que les ONG sont tenues de présenter sur les activités qu’elles ont menées en rapport avec le travail de l’ECOSOC, il a pris note de 490 rapports.

Le Comité, qui est composé de 19 membres élus pour un mandat de quatre ans, a prévu une reprise de session du 21 au 31 mai 2018 et réservé la journée du 11 juin pour adopter son rapport final.

*E/C.2/2018/CRP.34/REV.1

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité spécial de la décolonisation se rend en Nouvelle-Calédonie en prévision du référendum d’autodétermination

Session de 2018,
1re séance plénière – après-midi
AG/COL/3315

Le Comité spécial de la décolonisation se rend en Nouvelle-Calédonie en prévision du référendum d’autodétermination

Le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux a tenu, cet après-midi, la réunion d’organisation de sa session 2018 prévue du 11 au 22 juin *.

En présence du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, de nombreuses délégations ont fait part de leur désir de faire partie du trio qui se rendra en Nouvelle–Calédonie du 12 au 16 mars prochain, sur invitation de la France, Puissance administrante, en prévision du référendum d’autodétermination fixé au plus tard en novembre 2018.  Au nom du Groupe du « fer de lance mélanésien », le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a dit attendre avec intérêt les conclusions de la réunion prévue à Paris, du 27 au 29 mars 2018, entre le Comité de signataires de l’Accord de Nouméa et la Puissance administrante sur les questions en suspens relatives au statut politique futur de la Nouvelle-Calédonie.

La Troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme (2011-2020) approchant de sa fin, le Président élu du Comité spécial et Représentant permanent d’Antigua-et-Barbuda a invité ses collègues à intensifier leurs efforts pour la mise en œuvre, au cas par cas, de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.  M. Walton Alfonso Webson a aussi invité les membres du Comité à mettre l’accent sur le maintien et le renforcement d’un dialogue honnête et d’une coopération franche et constructive avec les puissances administrantes et les territoires non autonomes.

Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a salué la seconde visite que le Comité s’apprête à effectuer en Nouvelle-Calédonie, après celle de 2004.  Le territoire, a-t-il souligné, vit sa phase la plus critique avant le référendum d’autodétermination et sa situation nécessite un suivi étroit de toutes les parties concernées, y compris le Comité spécial.  Il a proposé que les Fidji fassent partie de la délégation, au nom du Groupe du « fer de lance mélanésien » qui comprend également Vanuatu, les Îles Salomon et le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS).

Pour ce Groupe, il est important que toutes les options soient présentées au peuple néo-calédonien, afin qu’il comprenne ce que ce référendum signifie et en accepte la finalité, quel qu’en soit le résultat.  Il est important, a insisté le représentant, d’éduquer les électeurs et de sensibiliser le public, comme le recommandait lui-même le Comité spécial après sa visite en 2004.  Le représentant a donc invité les autorités de Nouméa, les parties politiques et la Puissance administrante à continuer de renforcer les programmes de plaidoyer et de sensibilisation.

Pour le Groupe du « fer de lance mélanésien », il est fondamental que la liste des électeurs néocalédoniens soit « authentique, crédible et intègre », ce qui est une autre recommandation du Comité spécial.  Il a invité ce dernier à considérer la question du transfert des pouvoirs et compétences qui avait été définie dans l’Accord de Nouméa du 5 mai 1998.  Ces mesures doivent être respectées quel que soit le résultat du référendum d’autodétermination.  

Ses homologues de la Sierra Leone et du Timor-Leste ont également exprimé leur souhait de faire partie de la délégation en Nouvelle-Calédonie.  Pour la représentante du Timor-Leste, il est déplorable qu’il n’y ait pas eu d’avancées sur l’autodétermination depuis 2002, date à laquelle son propre pays a été retiré de la liste des territoires non autonomes.

Le délégué de l’Indonésie a insisté sur le fait que la situation de chaque territoire est unique et que le processus de décolonisation doit se faire au cas par cas, avec la collaboration des puissances administrantes.  Sa collègue de Cuba a salué les dialogues officieux constructifs avec les puissances administrantes, ce qui a permis au Comité spécial de se tenir au courant de la situation des territoires non autonomes.

Élevé sous « la dictature de Salazar » qui maintenait sous occupation des territoires éloignés du Portugal, le Secrétaire général de l’ONU a rappelé, dans son propos liminaire, que le dialogue et la coopération entre le Comité spécial, les puissances administrantes et les territoires non autonomes et d’autres parties était « crucial ».  Il a exprimé sa solidarité avec les territoires non autonomes affectés pas les ouragans en 2017 et salué l’initiative du Comité spécial d’appeler les puissances administrantes et les agences onusiennes à aider ces territoires dans leurs efforts de reconstruction.

Le Comité spécial attend toujours que des pays se proposent pour accueillir le Séminaire régional de la région du Pacifique en 2018.  D’ici au 8 mars, si aucun État de la région ne s’est proposé, les autres membres du Comité spécial pourront se porter candidat, a indiqué le Président élu qui prend ses fonctions aux côtés de Mme Anayansi Rodríguez Camejo, de Cuba, et MM. Dian Triansyah Djani de l’Indonésie, et Adikalie Foday Sumah de la Sierra Leone, comme Vice-Présidents.  M. Bashar Ja’afari de la Syrie assumera les fonctions de rapporteur.

En plus de ses 29 membres, le Comité spécial compte comme observateurs l’Argentine, le Bangladesh, l’Espagne, le Liban, le Mozambique, le Maroc, la Turquie et l’Uruguay.

Les territoires non autonomes dont le Comité spécial s’occupe sont Anguilla, Bermudes, îles Vierges américaines, Îles Vierges britanniques, Îles Caïmans, Îles Turques et Caïques, Guam, Montserrat, Pitcairn, Samoa américaines, Sainte-Hélène et Tokélaou.  Gibraltar, les Îles Falkland (Malvinas), la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et le Sahara occidental sont également inscrits à l’ordre du jour du Comité.

* A/AC.109/2018/L.1 et A/AC.109/2018/L.2

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: « malgré une adversité toujours farouche, la paix est en marche en République centrafricaine »

8187e séance – après-midi
CS/13220

Conseil de sécurité: « malgré une adversité toujours farouche, la paix est en marche en République centrafricaine »

« Malgré une adversité toujours farouche, la paix est en marche en République centrafricaine », a affirmé cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Parfait Onanga-Anyanga, appuyé par son homologue de l’Union africaine, M. Bedializoun Moussa Nébié.  Tous les intervenants ont néanmoins insisté sur la nécessité de continuer à soutenir tant le pays que la Mission de l’ONU. 

Venu présenter le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine, le Représentant spécial et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) a d’emblée reconnu qu’une « une grande partie de la population civile centrafricaine » continuait d’être affectée par des « violences et des abus inacceptables des droits de l’homme ».  Il a néanmoins attribué l’essentiel de ces violences et abus à des « groupes armés qui n’ont toujours pas renoncé à la violence criminelle et tardent à accepter la main tendue du dialogue offerte par le Gouvernement ».

C’est pourquoi, « malgré nos efforts, la voie de la paix, de la stabilité et de la réconciliation en Centrafrique reste longue et ardue », a poursuivi M. Parfait Onanga-Anyanga, d’autant que le retour compromis des réfugiés et des déplacés dans leurs lieux d’origine, « véritable drame humain », vient assombrir un tableau humanitaire déjà précaire.  « La vie de près de la moitié de la population centrafricaine serait inimaginable sans une assistance humanitaire d’urgence », a-t-il ajouté, avant de rendre hommage aux acteurs humanitaires.  Avec la protection de la population civile et la consolidation de l’État, la crise humanitaire a d’ailleurs été au centre des préoccupations des trois membres du Conseil -Pérou, Guinée équatoriale et Bolivie- qui sont intervenus en séance publique.

Mais, le Représentant spécial l’a affirmé, « ces sacrifices ne sont pas vains; nous regagnons chaque jour des pans entiers de la légitimité jadis perdue ».  M. Onanga-Anyanga a expliqué que le processus politique inclusif lancé par le Président Faustin Archange Touadéra se renforçait progressivement, de même que l’autorité de l’État, comme l’illustre l’installation de l’ensemble des préfets dans les 16 préfectures que compte le pays.  Ce processus, a-t-il ajouté, bénéficie de tout l’appui de la MINUSCA, ainsi que de celui de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation.

Au nom de l’Union africaine, M. Moussa Nébié, qui s’exprimait depuis Bouar, a détaillé la méthode de travail du Panel de l’Initiative, consistant à rencontrer les différents acteurs, y compris la société civile, les acteurs politiques locaux et les groupes armés, établir la confiance et recueillir leurs revendications pour les transmettre aux autorités, tout en les incitant à adhérer au processus de réconciliation.  Lui aussi s’est voulu optimiste, faisant valoir que « les progrès sont certes lents mais ce sont des progrès tout de même, compte tenu de la profondeur de la crise » que connaît le pays. 

Un des éléments essentiels du rétablissement de l’État est la profonde restructuration en cours des organes de sécurité et de défense, notamment des Forces armées centrafricaines (FACA), que le Représentant spécial du Secrétaire général a mis en avant.  Il a en particulier salué les progrès des FACA, devenues des « partenaires sur le champ des opérations » de la MINUSCA, ce qui, a-t-il insisté, était encore « inimaginable » il y a peu. 

Le Représentant spécial a salué le rôle central joué dans la réforme des FACA par la mission de formation de l’Union européenne (EUTM), dont le Directeur général de l’état-major de l’Union européenne, le général Esa Pulkkinen, a présenté la mission: le développement progressif d’une armée nationale forte de 9 800 personnes « contrôlée démocratiquement, professionnelle, crédible, responsable et équilibrée d’un point de vue ethnique et régional ».  Le redéploiement des FACA et des Forces de sécurité intérieures est un élément clef pour assurer le rétablissement des institutions publiques et des services dans l’ensemble du pays, ainsi que pour dissuader les groupes armés, a insisté le général.

Mais le général Pulkkinen a aussi averti qu’en cas de retrait de l’appui que la MINUSCA accorde aux FACA, les progrès réalisés jusqu’à présent seraient stoppés.  À elles seules, les FACA n’ont pas la capacité ni de se déployer, ni de s’entretenir.  L’élargissement de l’autorité de l’État cessera, a-t-il mis en garde. 

Ces propos sont venus appuyer le rappel par M. Onanga-Anyanga de la nécessité pour la MINUSCA de disposer des moyens d’exercer « une pression militaire significative » sur les groupes armés qui refusent toujours la paix, alors que l’augmentation de 900 Casques bleus des effectifs militaires de la Mission, décidée dans la résolution 2387 (2017) du 15 novembre dernier, n’est pas encore concrétisée.  La représentante de la RCA a elle aussi demandé au Conseil de veiller à ce que la Mission dispose des « moyens conséquents » à la mesure des « tâches colossales » qu’il lui a confiées. 

Au-delà de la Mission, c’est la République centrafricaine tout entière qui a besoin d’un soutien massif de la communauté internationale, a expliqué le Président de la formation République centrafricaine de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et Représentant permanent du Maroc.  M. Omar Hilale a précisé l’aide que la CCP apporte au pays, tout en regrettant que seuls 16% des projets financés en 2017 aient vu le jour.  La capacité d’absorption du Gouvernement, le manque de coordination entre les ministères et la présence des groupes armés empêchent la bonne utilisation des ressources financières internationales, a-t-il déploré.

Face aux « dirigeants politiques opportunistes qui ne veulent pas que la crise prenne fin » et emploient « tous les procédés possibles à cette fin » et dont l’entêtement a été dénoncé par le Représentant spécial, la représentante de la RCA s’est félicitée de l’extension dans la résolution 2399 (2018) des critères de désignation des personnes ou entités soumises aux sanctions du Conseil, jugées toujours nécessaires.  Elle en a souhaité l’application sans délai.  Le Président du Comité du Conseil de sécurité chargé des sanctions relatives à la République centrafricaine, M. Bernard Tanoh-Boutchoué, a présenté les activités de son Comité et insisté sur la nécessité d’une bonne coopération les acteurs régionaux. 

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Rapport du Secrétaire général sur la République centrafricaine (S/2018/125)

Déclarations

M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la République centrafricaine (RCA), a témoigné des violences et des atrocités qui continuent d’affecter une grande partie de la population civile centrafricaine, précisant qu’elles sont essentiellement le fait des groupes armés, « qui tardent à accepter la main tendue du dialogue offerte par le Gouvernement ».

Le Représentant spécial a aussi indiqué que le retour des réfugiés et des déplacés dans leurs lieux d’origine reste compromis par la violence et l’insécurité et a averti que ce « drame humain » vient assombrir un tableau humanitaire déjà précaire, « où la vie de près de la moitié de la population centrafricaine serait inimaginable sans une assistance humanitaire d’urgence ». 

« Malgré l’adversité toujours farouche, la paix est en marche en RCA », a poursuivi M. Onanga-Anyanga.  Le Gouvernement centrafricain est à pied d’œuvre pour restaurer l’autorité de l’État et renforcer les institutions démocratiques fraîchement établies.  Le processus politique inclusif initié par le Président Touadéra se renforce progressivement et une démarche politique impliquant les principaux acteurs et leurs partenaires sous-tend désormais les efforts multidimensionnels de sortie de crise en RCA. 

L’élargissement du Gouvernement pour le rendre plus représentatif de la société permet aujourd’hui les progrès tangibles dans l’extension de l’autorité de l’État avec l’installation de tous les préfets dans les 16 préfectures et de la majorité des sous-préfets, a ajouté le Représentant spécial.  En outre, le succès du projet pilote sur le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) donne l’espoir de lancer ce programme à plus large échelle, grâce à la contribution financière et technique de la Banque mondiale.

Les préparatifs pour le lancement des travaux de la Cour pénale spéciale sont bien avancés, a ajouté le Représentant spécial, se réjouissant que la campagne contre l’impunité, longtemps chronique et source de conflits récurrents, soit désormais lancée.  Bientôt, a-t-il ajouté, le dispositif de justice formel sera complété par la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle, permettant ainsi un meilleur équilibre entre justice et réconciliation nationale.  Le Représentant a estimé que le rôle central joué par la mission de formation de l’Union européenne (EUTM) dans la réforme des Forces armées centrafricaines (FACA) « est digne d’éloges ».  Il a expliqué que, de son côté, la MINUSCA renforce son action en appui aux forces de sécurité internes, notamment à travers le recrutement de gendarmes et de policiers.  Il faut maintenant tout faire pour assurer la pérennité de ces avancées, y compris par une mobilisation des ressources conséquentes pour les cinq prochaines années. 

Le Représentant spécial a par ailleurs fait observer qu’« il n’y a pas si longtemps, la simple idée d’une action commune MINUSCA-FACA était inimaginable ».  Nous sommes désormais partenaires sur le champ des opérations, comme récemment à Paoua, ou encore à Obo, dans le sud-est du pays, s’est-il félicité. 

Poursuivant en anglais, il a assuré que la MINUSCA n’épargnera aucun effort pour veiller à ce que la politique de tolérance zéro soit partie intégrante de son devoir de protéger.  Il a toutefois averti que si la MINUSCA ne dispose pas de la capacité pour exercer des pressions militaires sur les groupes armés qui demeurent réticents à accepter la paix, aucun processus de paix ne pourra voir le jour. 

Il a également indiqué que les 900 troupes supplémentaires, autorisées par le Conseil de sécurité lors du renouvellement du mandat de la MINUSCA, arriveront prochainement et permettront de renforcer les efforts déployés par la Mission pour réduire la menace posée par les groupes armés.

M. Onanga-Anyanga a par ailleurs fait savoir que ces derniers mois, les préfets de plusieurs régions avaient conclu des accords préliminaires avec les communautés et les acteurs armés, permettant l’instauration de cessez-le-feu au niveau local, de réduire la violence liée à la transhumance et d’améliorer l’accès à l’aide humanitaire et aux opportunités économiques. 

De l’avis du Représentant spécial, des efforts urgents sont toutefois nécessaires pour traduire le plan de redressement et de consolidation de la paix de la RCA en un programme effectif capable d’opérer un changement dans la gouvernance et la vie de la population.  Il a ensuite salué la décision du Chef de l’État d’accorder la priorité à l’élargissement de l’autorité de l’État et l’amélioration des services sociaux. 

Pour M. Onanga-Anyanga, la situation en RCA n’est pas aussi désespérée que semblent l’indiquer les chiffres.  Avec l’appui continu du Conseil de sécurité, les sacrifices et l’engagement de chacun, à commencer par les Centrafricains, il y a des raisons de demeurer optimiste et d’être convaincu que la paix, la stabilité et la prospérité seront bientôt à portée de main, a-t-il notamment affirmé.

M. BEDIALIZOUN MOUSSA NÉBIÉ, Représentant spécial de l’Union africaine (UA) pour la République centrafricaine, qui s’exprimait par visioconférence depuis Bouar, « à 450 kilomètres de Bangui », a expliqué la méthode utilisée par le Panel de facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation pour contribuer à la réconciliation dans le pays. 

M. Moussa Nébié a ainsi déclaré que les membres du Panel avaient établi un premier contact avec les groupes armés, lors duquel ils leur ont remis un message du Président de l’Union africaine, les invitant à adhérer à l’Initiative.  Le Panel a également rencontré les acteurs locaux de la vie politique.  Les conclusions des différents échanges ont été remises au Chef de l’État, au Président de l’Assemblée nationale, au corps diplomatique, aux membres de la société civile et au grand public via une conférence de presse. 

Le Représentant spécial a annoncé qu’une deuxième tournée du Panel aurait lieu en mars, au cours de laquelle il rencontrera les mêmes acteurs pour récupérer leurs propositions écrites, renforcer la confiance et obtenir un engagement plus ferme en faveur de la non-violence et du respect de l’autorité de l’État.  Les revendications des différents acteurs seront soumises au Gouvernement pour examen et un séminaire sera organisé à l’intention des groupes armés et des acteurs locaux de la société civile, avant un dialogue avec le Gouvernement, a encore précisé M. Moussa Nébié.

À l’issue de la première rencontre, des signes d’espoir pour un accord de paix étaient perceptibles, a affirmé le Représentant spécial, selon qui tous les groupes armés rencontrés ont accueilli favorablement le message du Président de l’Union africaine, exprimé leurs préoccupations et accepté d’en discuter.  Un groupe de contact permanent a été établi entre le Panel et les groupes armés, qui a permis au premier d’interpeller les seconds, lesquels avaient eu des « activités ou des velléités » de violences, a-t-il ajouté.

Pour M. Moussa Nébié, qui a également attribué les résultats obtenus aux autres acteurs internationaux, « les progrès sont certes lents mais ce sont des progrès tout de même, compte tenu de la profondeur de la crise politique » dans le pays.  Le Représentant spécial a enfin plaidé pour un soutien continu et accru du Conseil de sécurité et de la communauté internationale tout entière au processus de réconciliation en République centrafricaine, notamment sous la forme d’encouragements au Président du pays et à son gouvernement, d’un appel aux groupes armés et d’un appui au Panel pour qu’il puisse poursuivre son programme. 

Intervenant par vidéoconférence depuis Bruxelles, le général ESA PULKKINEN, Directeur général de l’état-major de l’Union européenne, a souligné que le redéploiement progressif et coordonné des unités des Forces armées centrafricaines (FACA) est crucial pour rétablir l’autorité de l’État et permettre à l’ONU et à l’Union européenne de réaliser leurs objectifs stratégiques.  Il a expliqué que la mission de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM) est une mission non armée qui contribue à la réforme du secteur de la défense dans le cadre de la réforme du secteur de sécurité coordonné par la MINUSCA.  La mission appuie notamment le développement progressif des FACA en des forces « contrôlées démocratiquement, professionnelles, crédibles, responsables et équilibrées d’un point de vue ethnique et régional ».

Il a indiqué que des FACA formées par l’EUTM avaient commencé à être déployées dans des opérations menées avec l’appui de la MINUSCA, « mais en petit nombre et avec des contraintes logistiques considérables ».  Le général a ajouté que la performance avait été jugée « favorable. »  Le redéploiement des Forces armées et des Forces de sécurité est un élément crucial pour le rétablissement des institutions publiques et des services dans l’ensemble du pays mais aussi pour dissuader les groupes armés.

Le général a précisé qu’une armée forte de 9 800 soldats est prévue d’ici à 2021, avec environ 4 500 hommes redéployés à l’extérieur de Bangui.  Cet effort de taille, notamment en matière de développement des infrastructures et des capacités, nécessitera un appui logistique effectif, a-t-il prévenu.  Alors que l’armée est largement confinée à Bangui, la MINUSCA a un rôle essentiel à jouer pour permettre à l’EUTM de tirer parti des avancées réalisées jusqu’à présent.

Le général a aussi souligné que l’appui fourni par la MINUSCA pour assurer le déploiement progressif et coordonné des garnisons est « absolument critique » pour le rétablissement de l’autorité de l’État.  Une armée décentralisée, capable de se déployer en dehors de Bangui est essentielle, a-t-il ajouté, non sans avertir que si l’appui que la MINUSCA accorde aux FACA est retiré, les progrès réalisés jusqu’à présent seront stoppés net.  L’élargissement de l’autorité de l’État cessera.

M. OMAR HILALE, Président de la formation République centrafricaine de la Commission de consolidation de la paix, a indiqué que sa formation fournit un accompagnement politique à la République centrafricaine, promeut une approche cohérente et intégrée dans les efforts de maintien de la paix et attire l’attention sur les lacunes capacitaires du pays.  La République centrafricaine étant à une étape critique de son histoire, le Président de la formation a souligné l’importance de lui apporter un soutien financier, seuls 16% des projets d’ores et déjà financés en 2017 ayant vu le jour.  La capacité d’absorption du Gouvernement, le manque de coordination entre les ministères et la présence des groupes armés empêchent la bonne utilisation des ressources financières internationales, a-t-il dit. 

M. Hilale a noté les progrès accomplis dans le rétablissement de l’autorité de l’État, avec le déploiement des préfets et de sous-préfets, et le redéploiement, au cours de l’armée, de la police et de la gendarmerie.  Le Président de la formation a souligné l’importance de la lutte contre l’impunité et les défis de la Cour pénale spéciale, dont le manque de ressources.  Il a également mentionné les lacunes dans la protection des témoins et des victimes, avant d’appeler à l’adoption rapide du projet de règles de procédure et d’administration de la preuve.  Cette Cour est cruciale pour remédier aux crimes internationaux, y compris les attaques contre les soldats de la paix de la MINUSCA. 

M. Hilale a également demandé qu’un soutien soit apporté au système judiciaire national.  Il a fermement soutenu l’Initiative africaine visant à la mobilisation de tous les efforts de paix en appui à la Feuille de route de Libreville, avant de se féliciter de la conclusion de la première série de consultations avec les groupes armés.  M. Hilale a salué la contribution de plus de 250 000 dollars du Fonds pour la consolidation de la paix et plaidé pour l’opérationnalisation rapide de la Commission Vérité, justice, réparation et réconciliation annoncée lors du Forum de Bangui en 2015.  La reprise économique, a-t-il conclu, sera l’élément clef pour maintenir la confiance dans les institutions de l’État et surmonter la crise humanitaire. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire), Président du Comité établi en application de la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine, a salué le lancement des consultations politiques dans le cadre de l’Initiative de l’Union africaine.  Il s’est en revanche inquiété de l’aggravation de la violence dans le sud-est et de nord-ouest du pays.  Tournant ensuite son attention sur les activités de son Comité, il a indiqué que les réunions publiques du 6 septembre et du 26 janvier avaient permis de se faire une idée complète de la manière de répondre au trafic d’armes par-delà les frontières et au braconnage des ressources naturelles.  Il a souligné que la coopération régionale est essentielle pour contrer les nombreux défis auxquels font face les pays d’Afrique centrale.  Il a toutefois averti que sans régime de sanctions, il sera difficile d’éliminer de manière efficace les racines du conflit.

Le Président du Comité a ensuite salué le travail du Service de la lutte antimines de l’ONU qui assure la bonne gestion des armes et des munitions, améliore leur stockage et construit des armureries permanentes en dehors de Bangui.  Il a également évoqué le travail du Groupe d’experts, attirant notamment l’attention sur l’inscription, le 17 mai, de M. Abdoulaye Hissène, sur la « Liste ».  Il a assuré que son Comité comprend pleinement les efforts déployés par les autorités de la République centrafricaine pour réarmer les Forces de défense et de sécurité, tout en soulignant la nécessité d’assurer une gestion sûre des armes et des munitions.

M. Tanoh-Boutchoué a affirmé que son Comité a déployé de nombreux efforts pour donner aux États Membres des indications sur le respect de l’embargo sur les armes.  À l’avenir, le Comité entend aussi élargir le dialogue avec les autorités nationales pour que l’embargo soit réellement perçu comme une façon d’aider le Gouvernement à réarmer les Forces de défense et de sécurité dans les règles.  Le Président du Comité a par exemple estimé que la détérioration de la situation sécuritaire dans le sud-est et le nord-ouest du pays justifie une mise en œuvre effective de l’embargo.

Il a aussi abordé la question de l’interdiction de voyager et remercié les autorités kényanes pour avoir transmis au Groupe d’experts des informations fiables indiquant qu’un individu sanctionné, M. François Bozizé, voyageait sous un nom d’emprunt.  Il a exhorté la République centrafricaine et les pays de la région à retirer de la circulation tous les passeports volés, falsifiés ou perdus, sans oublier les passeports diplomatiques invalidés.

Il a fait savoir que les avoirs de M. Abdoulaye Hissène avaient été gelés et noté néanmoins que les autorités centrafricaines n’ont toujours pas gelé les comptes et les avoirs de MM. Alfred Yékatom et Eugène Nagaïkosset, à qui elles auraient en outre continué de verser un salaire.  Il a exhorté les autorités à geler immédiatement les avoirs de ces deux individus.  M. Tanoh-Boutchoué a fait part de son intention de se rendre en République centrafricaine et dans les pays voisins pendant le courant de l’année.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a dit être engagé à soutenir la consolidation de la paix en RCA, citant en exemple la division d’ingénieurs des forces armées péruviennes envoyée sur place.  Il a jugé urgent de résoudre la crise humanitaire, en réaffirmant trois aspects fondamentaux.  Le premier est la nécessité urgente de mettre fin à la violence.  Il s’est inquiété en effet de la violence interethnique, des attaques contre la population civile et contre le personnel de la MINUSCA et les travailleurs humanitaires.  Il a salué les efforts de la MINUSCA et de l’Union européenne qui appuient la construction des forces militaires et politiques centrafricaines. 

Le deuxième point important pour le Pérou est la nécessité d’édifier et de consolider l’État en étendant sa présence sur tout le territoire.  Il a salué à cet égard les efforts de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation, lancée par l’Union africaine, qui a pour objet de faciliter le dialogue entre les groupes armés et la société civile.  Il est important, a-t-il ajouté, d’arriver à un accord pour faire avancer la mise en œuvre du plan d’expansion des préfectures, celles-ci ayant vocation à promouvoir la stabilité, la sécurité et le développement du pays.

En troisième lieu, le représentant a parlé de la protection de la population civile qui exige davantage d’efforts, tout en reconnaissant ce que font les autorités centrafricaines pour renforcer le système judiciaire et lutter contre l’impunité.  Le Pérou appuie le travail de la MINUSCA en matière de protection des civils et d’assistance humanitaire, a-t-il enfin déclaré avant de s’inquiéter que la force autorisée ne soit pas encore déployée à 100%.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est inquiété de l’impact du conflit et de la violence sur la population civile, constatant par ailleurs que la situation actuelle favorise les activités mafieuses et le pillage des ressources naturelles.  Il a aussi déploré le fait que malgré le succès des élections de mars 2016 et la présence de l’ONU dans le pays, les violations de droits de l’homme et les abus sexuels persistent.  Il s’est en revanche félicité des avancées réalisées par le Gouvernement en matière de désarmement, démobilisation et réintégration.  Le représentant a appelé à la mise en œuvre de l’Accord tripartie signé le 23 mai 2011 à Khartoum.  Il a aussi insisté sur l’importance de la réforme du secteur de la sécurité et de la défense, avant de citer le rôle des organisations régionales pour trouver une issue au conflit, à commencer par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a cité divers chiffres figurant dans le dernier rapport du Secrétaire général pour illustrer la situation humanitaire de la République centrafricaine où, par exemple, 2,5 millions de personnes ont un besoin urgent d’aide humanitaire.  Il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle maintienne son appui et se prépare à faire face à l’augmentation des besoins.  Il a condamné les attaques incessantes des groupes armés contre les civils et la MINUSCA et salué les efforts de la Mission pour identifier les régions qui ont besoin de capacités supplémentaires pour protéger la population.  Il a également souligné la nécessité de renforcer l’autorité de l’État, la coopération interinstitutions et la formation des Forces armées centrafricaines.

Le représentant a aussi salué les efforts constants du Gouvernement centrafricain pour assurer un dialogue inclusif, en vue d’aboutir à un accord entre toutes les parties.  Il s’est félicité des mesures prises pour rétablir les tribunaux et mettre fin à l’impunité et condamné les incitations à la violence, en particulier lorsqu’ils sont motivés par des considérations ethniques ou religieuses.  Il a lancé un appel au désarmement et s’est réjoui des programmes de déminage.  Enfin, il a évoqué les initiatives des organismes régionaux et sous-régionaux, qui sont « transcendantales pour un processus de réconciliation », pour autant que ces derniers agissent dans le strict respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la République centrafricaine.

Mme AMBROISINE KPONGO (République centrafricaine) a déclaré qu’après la fin de la transition politique et l’organisation d’élections crédibles et démocratiques, tous les espoirs étaient permis et que des progrès notables avaient été constatés dans plusieurs domaines, à la satisfaction de tous.  Or, « comme par enchantement », les violences intercommunautaires et ethniques ont resurgi sur presque toute l’étendue du territoire.  À la lecture du rapport du Secrétaire général, la représentante a avoué s’être dit que son pays n’était pas loin d’une rechute, « car nous sommes arrivés à la conclusion que 2017 a été l’année la plus critique, l’année de tous les dangers pouvant conduire au basculement ». 

S’interrogeant sur « ces combattants qui, au lieu de s’en prendre à leurs adversaires, attaquent les pauvres villageois, incendient les maisons et des villages entiers », elle a salué l’opération conjointe menée par les Forces de la MINUSCA et les Forces armées centrafricaines (FACA) dans la région de Paoua et a encouragé de telles actions « partout où le besoin se fait sentir », estimant qu’elles pourront à la longue réduire les tensions.

Il est clair, a estimé la représentante, que ce sont les rivalités entre les groupes armés et les milices d’autodéfense qui sont à l’origine de l’intensification et de la persistance des violences.  Ces violences, a-t-elle affirmé, sont fomentées par des « dirigeants politiques opportunistes qui ne veulent pas que la crise prenne fin » et emploient « tous les procédés possibles à cette fin ».  La représentante s’est donc félicitée que les incitations à la violence et les discours à caractère incendiaire aient été retenus comme critère de désignation dans la résolution 2399 (2018) adoptée fin janvier, par laquelle le Conseil de sécurité a renouvelé le régime de sanctions à l’égard de ceux qui menacent le processus de paix en République centrafricaine.  Elle a souhaité que cette résolution soit mise en œuvre sans délai. 

Concernant « l’autre source de préoccupation », à savoir le rétablissement et l’extension de la présence et de l’autorité de l’État, la représentante a précisé que le Gouvernement mettait « efficacement en œuvre, avec l’appui de la MINUSCA » sa feuille de route.  Toutefois, a-t-elle fait observer, « les réactions négatives de certains groupes armés peuvent constituer un sérieux frein » à ce processus.  Rappelant les « tâches colossales » que la résolution 2387 (2017) confère à la MINUSCA, elle a demandé au Conseil de sécurité de veiller à ce que la Mission dispose des « moyens conséquents » à la mesure des défis. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: réuni d’urgence pour examiner la situation dans la Ghouta orientale, le Conseil de sécurité est divisé sur la demande de cessation des hostilités

8186e séance – après-midi
CS/13219

Syrie: réuni d’urgence pour examiner la situation dans la Ghouta orientale, le Conseil de sécurité est divisé sur la demande de cessation des hostilités

Réuni d’urgence à la demande de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité a, aujourd’hui, affiché ses divergences quant à une cessation des hostilités en Syrie, et notamment dans la Ghouta orientale, « exemple vivant de catastrophe humanitaire qui se déroule sous nos yeux », selon les mots du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Mark Lowcock.

« Tout le monde sait que près de 400 000 personnes y sont assiégées depuis plus de quatre ans.  Tout le monde sait que des milliers d’enfants y souffrent de malnutrition aiguë, une situation que nous n’avons pas connue ailleurs en Syrie depuis le début du conflit.  Tout le monde sait que plus de 700 personnes ont besoin d’une évacuation médicale d’urgence vers des hôpitaux situés à Damas, à quelques kilomètres de là à peine », a déclaré M. Lowcock, qui s’exprimait depuis Genève par visioconférence.

À Genève, où précisément le Bureau de l’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, a été inondé de milliers d’appels à l’aide lancés par des civils piégés dans la Ghouta orientale à l’aide d’applications de messagerie instantanée, a relaté M. Lowcock. 

« Ce dont nous avons besoin, c’est d’une cessation durable des hostilités, qui permette la livraison immédiate, sûre, sans entrave et soutenue de l’aide et des services humanitaires, ainsi que l’évacuation des malades et des blessés graves », a exhorté le haut fonctionnaire, en rappelant aux membres du Conseil le caractère « contraignant » de leurs obligations juridiques en vertu du droit international humanitaire.

Les demandes formulées par le Secrétaire général adjoint sont reflétées dans un projet de résolution que les délégations de la Suède et du Koweït ont fait circuler auprès des autres membres du Conseil, et dont l’adoption a été demandée dans les plus brefs délais par certains d’entre eux, voire dès aujourd’hui par le Royaume-Uni et les États-Unis.

Leur homologue de la Fédération de Russie ne l’a pas entendu de cette oreille, rappelant qu’il n’y avait « pas d’accord » sur ce texte, avant de juger regrettable le principe d’une mise aux voix « symbolique » en l’absence de garanties sur la mise en œuvre et la viabilité d’une telle cessation des hostilités.

Comme l’ont rappelé aujourd’hui plusieurs membres du Conseil, le texte à l’étude, auquel la délégation russe a dit vouloir apporter des amendements, déciderait d’une cessation des hostilités dans toute la Syrie pour une période initiale de 30 jours consécutifs, afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire et l’évacuation sanitaire des personnes gravement malades et des blessés.

Pour la République arabe syrienne, les efforts se rapportant à ce projet de résolution sont « biaisés », « puisque notre avis n’a même pas été recueilli », a-t-il assuré.  « Y aurait-il eu un projet de résolution demandant l’acheminement de l’aide humanitaire à l’opposition armée modérée », si des terroristes se servaient du bois de Boulogne ou de Central Park comme de bases pour mener leurs attaques contre Paris et Manhattan? a ironisé le représentant syrien.

Ce ne sont pas des terroristes, mais des civils qui se retrouvent dans les salles d’urgence « de fortune » des hôpitaux de la Ghouta orientale, a rétorqué sa collègue des États-Unis, en dénonçant la « barbarie » du « régime de Bashar Al-Assad ».  « C’est exactement ce que nous avons vu se passer à Alep en 2016 et à Hama et Homs avant cela », a-t-elle tonné, convaincue que Damas veut « soumettre » tous ses adversaires grâce aux bombardements et aux sièges.

Au contraire, pour le délégué russe, les leçons tirées de la situation à Alep amènent à penser que l’objectif recherché aujourd’hui est de provoquer un « scandale » et de mettre la pression sur Damas tout en jetant l’« opprobre » sur Moscou.  Il a prévenu des répercussions d’une telle approche sur le processus d’Astana, portant sur la création de quatre zones de « désescalade » dans le pays, et dont la Fédération de Russie est l’un des trois garants, avec la Turquie et la République islamique d’Iran.

« En tant qu’ambassadeurs et en tant qu’êtres humains, je crois que nous nous trouvons aujourd’hui face à un “test” », a de son côté estimé la Suède, porte-plume, aux côtés du Koweït, du projet de résolution débattu.  « Prenons garde, a-t-il dit, que la tragédie syrienne ne soit pas également le tombeau des Nations Unies », a tranché quant à lui le représentant de la France, en balayant lui aussi l’argument de la lutte antiterroriste brandi par la Syrie et la Russie.

En 2017, 175 000 personnes ont bénéficié chaque mois d’une aide humanitaire, mais au cours des trois derniers mois, à peine 22 000, sachant que les niveaux d’accès de l’aide l’an dernier étaient déjà inférieurs de 40% à ceux de 2016, s’est alarmé M. Lowcock, qui est aussi le Coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU.

« Lorsqu’une génération entière est dépouillée de son avenir, lorsque les attaques contre les hôpitaux sont devenues la nouvelle norme, lorsque des sièges de villes et de quartiers entiers sont devenus une réalité durable pour des centaines de milliers de personnes, la communauté internationale doit prendre des mesures urgentes et concrètes », a lancé le Secrétaire général adjoint.

« Combien de temps allons-nous rester inactifs avant que celle-ci ne puisse parler d’une seule voix et dire: Assez! » a martelé le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, M. Sabah Khalid Al Hamad Al Sabah, qui présidait la séance.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré qu’au cours des trois derniers jours, le Bureau de l’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie à Genève avait reçu des milliers d’appels à l’aide émanant de civils piégés dans la Ghouta orientale sur des applications de messagerie instantanée. 

Il a lu celui d’un travailleur humanitaire dans la région: « Au cours des deux derniers mois, les opérations militaires se sont transformées en un processus de ciblage systématique des civils.  La plupart des raids aériens prennent intentionnellement pour cibles les bâtiments résidentiels civils.  Des familles entières ont péri sous les décombres.  Aujourd’hui, alors que les combats s’intensifient, je vous demande, en tant que père qui attend maintenant la naissance de mon premier enfant, et en tant qu’humanitaire essayant de préserver ce qui reste de la vie, d’agir pour mettre fin aux opérations systématiques contre les civils et ouvrir les voies de l’aide humanitaire. »

« Vous êtes tous conscients, en tant qu’États Membres, que vos obligations en vertu du droit international humanitaire sont bel et bien ça: des obligations contraignantes », a-t-il déclaré aux membres du Conseil.  Les efforts de lutte antiterroriste ne peuvent se substituer à l’obligation de respecter et de protéger les civils.  Ils ne justifient pas leur mise à mort et la destruction de villes et de quartiers entiers, a lancé le haut fonctionnaire.

Au cours des 24 dernières heures, de nombreux tirs d’artillerie et bombardements aériens se seraient poursuivis contre plusieurs communautés de la Ghouta orientale, causant la mort d’au moins 50 personnes et en blessant au moins 200.  Selon certaines sources, le nombre total de victimes depuis le 19 février est proche de 300 personnes, a précisé le Secrétaire général adjoint. 

Vingt-trois attaques contre des infrastructures civiles essentielles ont été signalées depuis cette date.  Au moins sept établissements de santé auraient été touchés le 21 février.  Le seul centre de soins de santé primaires de la ville de Modira aurait été mis hors service par des frappes aériennes et un hôpital de la ville de Douma a subi d’importants dégâts causés par les barils d’explosifs à proximité. 

Toujours à Douma, un centre d’obstétrique a été endommagé.  Un hôpital de la ville de Jisrein aurait été attaqué, provoquant la mort d’une infirmière.  Les deux centres de la ville de Douma et de la ville de Harasta auraient été endommagés par le bombardement.  Enfin, deux centres appartenant aux Casques blancs ont été endommagés par les bombardements dans les villes de Saqba et Jisrein, a ajouté M. Lowcock.

« La Ghouta orientale est un exemple vivant de catastrophe humanitaire entièrement connue, prévisible et évitable qui se déroule sous nos yeux », a-t-il résumé.  « Tout le monde sait que près de 400 000 personnes sont assiégées.  Et qu’elles ont été assiégées depuis plus de quatre ans.  Tout le monde sait que dans la Ghouta orientale, des milliers et des milliers d’enfants sont confrontés à la malnutrition aiguë, une situation que nous n’avons pas connue ailleurs en Syrie depuis le début du conflit.  Tout le monde sait que plus de 700 personnes ont besoin d’une évacuation médicale urgente vers les hôpitaux situés à quelques kilomètres de la ville de Damas », a-t-il plaidé.

Selon des informations recueillies par l’ONU, au moins 346 civils ont été tués depuis le début de ce mois et près de 900 personnes ont été blessées, a poursuivi le Coordonnateur des secours d’urgence.  Pendant ce temps, des frappes au sol depuis la Ghouta orientale tuent et blessent des dizaines de civils dans la ville de Damas. 

Plus tôt cette semaine, l’UNICEF a publié une déclaration vierge, une déclaration vide, car l’agence ne trouve plus les mots pour décrire la brutalité de cette guerre.  Le seul message de l’UNICEF était qu’« aucun mot ne rendrait justice aux enfants tués, à leurs mères, à leurs pères et à leurs proches ».

« Cette violence effroyable se produit alors que nous faisons face à des contraintes considérablement accrues sur notre capacité à atteindre les personnes piégées derrière les lignes de conflit », s’est alarmé M. Lowcock.  « Au cours des derniers mois, nous avons eu plus de difficultés à accéder aux personnes se trouvant dans des zones difficiles d’accès et assiégées, notamment par le biais de convois transversaux.  Depuis le 1er décembre, nous déployons depuis trois mois seulement trois convois en ligne atteignant 67 200 personnes.  Seulement 7 200 d’entre elles se trouvaient dans les zones assiégées, soit moins de 2% de la population globale assiégée.  En 2017, en novembre, quelque 53 convois transversaux ont atteint des personnes dans le besoin, soit en moyenne près de cinq convois par mois. » 

Au total, a précisé M. Lowcock, ce sont près de deux millions de personnes qui ont été atteintes au cours des 11 premiers mois de 2017, soit environ 175 000 personnes en moyenne par mois.  « Donc en 2017, 175 000 par mois; au cours des trois derniers mois, 22 000 par mois », a-t-il relevé.  En outre, les niveaux d’accès pour l’aide humanitaire de 2017 étaient eux-mêmes près de 40% inférieurs à nos niveaux d’accès en 2016.

« Lorsqu’une génération entière est dépouillée de son avenir, lorsque les attaques contre les hôpitaux sont devenues la nouvelle norme, lorsque des sièges de villes et de quartiers entiers sont devenus une réalité durable pour des centaines de milliers de personnes, la communauté internationale doit prendre des mesures urgentes et concrètes », a lancé M. Lowcock. 

« Ce dont nous avons besoin, c’est d’une cessation soutenue des hostilités, qui permette la livraison immédiate, sûre, sans entrave et soutenue de l’aide et des services humanitaires, l’évacuation des malades et des blessés graves et l’allégement des souffrances du peuple syrien », a-t-il dit. 

« Vous pouvez toujours sauver des vies dans la Ghouta orientale - et ailleurs en Syrie.  Je vous exhorte à le faire.  Des millions d’enfants, de femmes et d’hommes battus et assiégés dépendent d’une action significative de ce Conseil. »

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a remercié la présidence d’avoir agréé la demande de son pays qui souhaitait la tenue d’une séance publique du Conseil sur la Ghouta orientale.  Il est grand temps de parler franchement ce qui se passe dans la Ghouta orientale, a-t-il dit, en dénonçant la « psychose mondiale » qui s’est emparée des médias s’agissant de la situation dans cette banlieue de Damas.  Il a rappelé que les mêmes discours catastrophistes avaient été de mise pour ce qui concerne Alep.  « Les Casques blancs qui se disent sauveteurs de la population civile coopèrent avec des groupes terroristes et sont à la source d’une désinformation généralisée », a-t-il affirmé en relevant qu’on a le sentiment que l’armée syrienne prend délibérément pour cible des hôpitaux.  « C’est une technique de désinformation bien connue », a-t-il dénoncé.  Dans la Ghouta orientale, il reste des combattants intransigeants, liés à des organisations terroristes telles que le Front el-Nosra, qui trouvent refuge dans des hôpitaux et prennent pour cible Damas quotidiennement, a déclaré le délégué, en déplorant que ces éléments ne soient pas mentionnés dans les médias. 

Le représentant a accusé certaines délégations qui disent défendre les droits de l’homme de prétendre que la situation à Damas n’est pas aussi grave que celle dans la Ghouta orientale.  « Combien de personnes doivent périr pour qu’une telle situation soit dénoncée? » a-t-il lancé, déplorant « l’hystérie de masse autour de la Ghouta orientale ».  Il a comparé la situation avec la destruction totale de la ville de Raqqa par la coalition qui, a-t-il dit, s’était déroulée sans que personne ne tire la sonnette d’alarme.  La coalition a certes chassé Daech mais les États-Unis ont oublié la population civile de Raqqa, a-t-il poursuivi, ajoutant que les mines y font 50 victimes par jour.

Le délégué russe a déclaré que la population de la Ghouta orientale était utilisée par les terroristes comme bouclier humain.  « Au lieu d’appuyer le processus d’Astana, on continue de tout faire pour le compromettre », a-t-il regretté, en fustigeant par ailleurs les « clubs fermés » qui se créent.  Parmi ces « clubs », il a mentionné le partenariat international de la lutte contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, qui va à l’encontre des cadres agrées internationaux.  L’ONU devrait renoncer à toute coopération avec ce partenariat qui n’a aucune légitimité et n’est pas appuyé par un nombre suffisant de délégations, a-t-il demandé. 

Mentionnant le projet de résolution du Koweït et de la Suède, le délégué a indiqué qu’il n’y avait pas d’accord sur ce texte.  Ce projet propose un cessez-le-feu pour 30 jours, mais quelles garanties mettrons-nous en place pour faire respecter ce cessez-le-feu? a-t-il demandé.  M. Nebenzia a regretté une mise aux voix « symbolique » de ce texte sans que ces détails n’aient été pris en compte.  Le Conseil, a-t-il souhaité, doit prendre des mesures réalisables, qui ne soient pas démagogiques ni déconnectées de la réalité.  Il a jugé impossible de faire en sorte que des convois humanitaires puissent atteindre les populations dans un délai de 48 heures et au-delà.  Les leçons tirées de la situation à Alep nous font penser que l’objectif, ici, est de provoquer un scandale et de mettre la pression sur la Syrie tout en jetant l’opprobre sur la Russie, a déclaré le délégué russe.  « Je doute que cela puisse contribuer au succès du processus de Genève. »

M. OLOF SKOOG (Suède) a rappelé à toutes les parties de respecter leurs obligations en vertu du droit international, comme les a intimées M. Mark Lowcock, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence avant lui.  La Suède et le Koweït, délégations porte-plume, ont fait circuler un projet de résolution en vue de parvenir à une cessation des hostilités pour une période consécutive de 30 jours afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire et l’évacuation sanitaire des personnes gravement malades et des blessés. 

Le représentant a appelé les États Membres, en particulier les garants du processus d’Astana –à savoir la Turquie, la Russie et la République islamique d’Iran– à user de leur influence auprès des parties pour assurer le respect de la cessation des hostilités et des engagements existants, et éviter la catastrophe humanitaire. 

Réagissant aux propos de son collègue russe, il a affirmé que les convois étaient prêts à partir et la trêve humanitaire à être instaurée.  « Je pense que nous sommes face à un test, en tant qu’ambassadeurs et en tant qu’êtres humains. »

M. SABAH KHALID AL HAMAD AL SABAH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, a déclaré que la Ghouta orientale, où 400 000 personnes vivent « l’enfer sur terre », ne peut pas attendre plus longtemps.  Il a fait état d’un bilan de 1 200 civils tués cette semaine, et la communauté internationale reste « inerte ».  « Combien de temps allons-nous rester inactifs avant qu’elle puisse parler d’une seule voix et dire: Assez! » 

Le Koweït et la Suède, en réponse à un appel lancé par les Nations Unies, ont décidé de présenter un projet de résolution très clair qui demande, à des fins humanitaires, une cessation des hostilités pour une période initiale de 30 jours consécutifs sur tout le territoire syrien. 

Aussi le Chef de la diplomatie koweïtienne a-t-il appelé tous les États Membres à voter en faveur ce projet.  « Si nous ne mettons pas fin à ce bain de sang, cela encouragera les coupables à continuer de commettre des crimes en toute impunité. »

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a indiqué que la situation dans la Ghouta orientale est un « enfer sur terre ».  Elle a mentionné les témoignages de certains habitants de la Ghouta orientale décrivant une situation insupportable.  Les images et les vidéos sont disponibles montrant ces souffrances, a-t-elle dit. 

Ce ne sont pas des terroristes, mais des civils qui se retrouvent dans les urgences des hôpitaux, a-t-elle dit, en dénonçant la barbarie du régime de Bashar Al-Assad, lequel a utilisé les mêmes tactiques à Alep.  Le régime veut continuer de gazer ces populations et compte sur la Fédération de Russie pour empêcher le Conseil de sécurité d’agir, a-t-elle poursuivi, en dénonçant le cynisme de la Russie. 

Elle a cité le projet de résolution, qui a fait l’objet de négociations depuis trois semaines.  « Nous sommes prêts à voter, ici et maintenant », a-t-elle dit, en louant les consultations étroites menées par la Suède et le Koweït.  « Combien faudra-t-il encore de cruauté pour que le Conseil dise assez et mette un terme à cette situation monstrueuse? » a-t-elle lancé. 

La déléguée des États-Unis a indiqué que la situation dans la Ghouta orientale ne peut pas continuer et exhorté le Conseil à agir.  « Arrêtons les bombardements », a-t-elle conclu. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a exprimé la solidarité de son pays avec le peuple syrien.  Il n’y a pas de solution militaire à la crise syrienne, a-t-il dit, en appelant de ses vœux une solution politique.  Les parties syriennes doivent reprendre les discussions, sous la houlette de l’ONU, a encouragé le délégué de la Chine. 

Il a ensuite dénoncé les attaques lancées par les organisations terroristes en Syrie et demandé l’adoption de normes internationales harmonisées contre ces organisations. 

Le Conseil doit favoriser une solution politique et parler d’une même voix, afin de parvenir à des progrès dans cette voie, a conclu le représentant. 

« Ce qui se passe sous nos yeux dans la Ghouta orientale est sans précédent dans l’abomination », a déclaré M. FRANÇOIS DELATTRE (France).  Il a rappelé que plus de 350 civils étaient morts depuis le début de ce mois, notant aussi que le Président de la France avait condamné avec la plus grande force ces bombardements indiscriminés contre les zones habitées et les infrastructures civiles et demandé l’instauration immédiate d’une trêve pour permettre les évacuations médicales et l’accès humanitaire aux populations.

Il a estimé que le régime de Damas et ses alliés, « prétextant la lutte contre les terroristes jihadistes », avaient décidé de s’en prendre à des populations civiles.  Pas un endroit n’est ainsi épargné, a-t-il souligné, notant en particulier que les équipements médicaux et vitaux pour la population sont délibérément ciblés.  Il a jugé « épouvantables » les rapports qui parviennent des ONG et du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.  Alors que plus de 700 personnes ont besoin d’une évacuation médicale d’urgence, ces évacuations sont systématiquement refusées depuis plusieurs mois par le régime de Damas, a-t-il déploré, avant de rappeler que les attaques contre les hôpitaux et les personnels de santé sont constitutives de crimes de guerre dont les responsables devront répondre.

La Russie a demandé cette réunion publique pour que toutes les parties puissent être entendues, a relevé M. Delattre tout en marquant son étonnement: « Mais de quelles parties parle-t-on? »  « De ce régime qui massacre sa propre population?  Des centaines de milliers de civils, des femmes et des enfants qui sont martyrisés, assiégés, bombardés? »  Le représentant a prévenu que ces hommes, ces femmes et ces enfants n’ont plus de voix.  Ils n’ont plus d’espoir, a-t-il lancé.

Il a aussi annoncé que la France entendait examiner les amendements proposés par la Fédération de Russie au projet de résolution conjoint du Koweït et de la Suède, en soulignant le caractère urgent de l’adoption de ce texte au vu de l’urgence absolue sur le terrain.  Car, a-t-il expliqué, la cessation des hostilités n’est pas une concession.  « C’est la réponse minimale aux demandes répétées des Nations unies et des acteurs humanitaires, relayées par les membres de ce Conseil ».

En ce qui concerne le processus politique, M. Delattre a rappelé que la France avait toujours défendu « le primat de la solution négociée sur la solution militaire, et la recherche d’une solution politique qui réponde aux aspirations du peuple syrien, assure une paix durable et endigue le terrorisme ».  Il a ainsi plaidé pour une transition politique dans le cadre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité afin de mettre fin de manière durable et crédible aux souffrances du peuple syrien. 

En conclusion, le représentant a appelé chacun des membres du Conseil de sécurité au sursaut et au rassemblement.  « Prenons garde, a-t-il dit, que la tragédie syrienne ne soit pas aussi le tombeau des Nations Unies. »

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a dénoncé les bombardements incessants qui causent des centaines de victimes civiles et déploré que les convois d’aide n’arrivent pas jusqu’aux zones difficiles d’accès, comme la Ghouta orientale, malgré les nombreux appels de l’ONU et de plusieurs pays, comme le Pérou, pour obtenir un accès immédiat et sûr à toutes les régions de la Syrie.  Cet « enfer sur terre » mérite notre condamnation la plus énergique, a-t-il martelé. 

Il a souligné les objectifs de cessation immédiate des hostilités pendant 30 jours dans le but de faire passer l’aide, et de mise en place du plan de réponse humanitaire, ainsi que les cinq priorités énoncées par M. Mark Lowcock, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, les considérant comme des mesures indispensables et urgentes.

Le représentant a aussi demandé de faire preuve d’une vraie volonté politique pour renverser la tendance actuelle des événements.  Il a enfin demandé aux membres du Conseil de sécurité, et en particulier à ceux qui peuvent avoir une influence sur le terrain, de montrer au monde qu’ils sont unis et qu’ils connaissent leur devoir d’arriver à un accord, afin de communiquer de manière claire que la priorité est donnée à l’être humain, avant d’autres intérêts. 

« Ce Conseil doit pouvoir être à la hauteur des circonstances et assumer ses délicates mais importantes responsabilités », a-t-il conclu en mettant l’accent sur les souffrances humaines en Syrie.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a condamné toutes les attaques aveugles contre les civils, accusant « le régime » d’avoir transformé la ville en un enfer sur terre où les populations sont piégées, constamment prises pour cible et coupées de toute forme d’aide.  Le Conseil va-t-il rester là les bras ballants et regarder passivement les événements se dérouler?  Qu’est-il advenu des acquis si chèrement payés du droit international humanitaire? s’est demandé le représentant. 

Il a demandé au Conseil de prendre des mesures décisives aujourd’hui car « le monde nous regarde ».  Les Pays-Bas, a-t-il dit, appellent toutes les parties, en particulier « le régime syrien » et ses alliés, à arrêter de cibler les civils, à cesser les attaques contre les hôpitaux et à faciliter immédiatement l’accès humanitaire. 

Le représentant a estimé que le projet de résolution dont est saisi le Conseil comprend des mesures claires et réalisables.  Certains disent, a-t-il reconnu, qu’il n’est pas réaliste mais, a-t-il argué, avec une bonne dose de volonté politique de la part des parties au conflit, la cessation des hostilités peut devenir une réalité, une réalité que nous attendons de toute urgence. 

La cessation des hostilités, s’est expliqué le représentant, permettra l’acheminement de l’aide alimentaire et médicale, et les évacuations.  Les parties au conflit et ceux qui ont de l’influence sur elles ont la lourde responsabilité d’assurer la sécurité des opérations humanitaires et de prévenir le déplacement forcé des civils, a ajouté le représentant. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) s’est dit vivement préoccupé de la situation dans la Ghouta orientale et l’escalade des hostilités dans d’autres régions de la Syrie.  S’il s’est félicité qu’une aide vitale ait pu être acheminée à plus de 7 000 personnes le 14 février dernier, il n’en reste pas moins que cela demeure insuffisant, a reconnu le représentant. 

Il a dit que les membres du Conseil de sécurité se sont récemment engagés dans des discussions constructives sur l’instauration d’une trêve humanitaire de 30 jours dans un premier temps.  « Pour parvenir à la mettre en œuvre, nous aurons besoin de la volonté politique de toutes les parties au conflit », a assuré M. Alemu. 

Le Conseil devrait, « à l’unisson », appuyer l’action humanitaire des Nations Unies et de ses partenaires.  « À cet égard, s’il n’est pas parfait, le projet de résolution à l’étude nous donne une occasion d’agir concrètement. »

« Rien ne justifie des attaques aveugles contre des civils en Syrie », a déclaré Mme JOANNA WRONECKA (Pologne).  Elle a encouragé tous les acteurs à agir pour améliorer la situation sur le terrain et soulager les souffrances des civils.  Quant aux zones de désescalade, qui englobent la Ghouta orientale, leur objectif était de permettre un accès sans entrave de l’aide humanitaire, a-t-elle déclaré. 

Elle a demandé la création de conditions propices à un cessez-le-feu permanant, en soulignant la nécessité de l’unité du Conseil pour parvenir à cet objectif. 

Enfin, la représentante de la Pologne a appuyé le projet de texte des délégations de la Suède et du Koweït et souhaité son adoption dans les plus brefs délais. 

« C’est l’enfer sur terre », a déclaré M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni), en reprenant à son compte l’expression utilisée hier par le Secrétaire général pour parler de la situation dans la Ghouta orientale.  « Nous devons au peuple de cette enclave de mettre fin aux hostilités », a-t-il dit, applaudissant le travail remarquable fourni par les acteurs humanitaires et les Casques blancs, qui opèrent dans des conditions déplorables. 

Après avoir accusé le régime de Bashar Al-Assad d’être responsable de ce siège, le représentant a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas assumé ses responsabilités.  Il a relevé la contradiction selon laquelle l’escalade des violences se produit dans une des zones dites de « désescalade » dont la Fédération de Russie est supposée être l’un des garants. 

La délégation britannique s’est félicitée, en conclusion, du projet de résolution présenté par le Koweït et la Suède et dont il a espéré qu’il pourrait être adopté ultérieurement aujourd’hui. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a estimé que l’évolution de la situation humanitaire et l’état dans lequel se trouve la population de la Ghouta orientale exigeaient une action particulièrement urgente.  Avec l’augmentation importante du nombre de victimes et de dégâts matériels aux infrastructures, la communauté internationale, a-t-il précisé, est obligée de prendre d’urgence des mesures pour éviter que des vies humaines supplémentaires soient perdues. 

Faire cesser les hostilités est impératif pour garantir un accès sûr des équipes d’assistance, répartir l’aide humanitaire et évacuer les blessés et les malades, a-t-il plaidé.

M. Ndong Mba a lancé un appel à toutes les parties pour qu’elles prennent les mesures nécessaires à la réduction de la violence, appelant aussi à donner les garanties attendues pour les zones de désescalade, dont la Ghouta orientale fait partie. 

Il a prôné un dialogue franc, direct et inclusif, qui est à son avis la seule voie de sortie possible pour résoudre la crise syrienne.  Au Conseil de sécurité, il a demandé de redoubler d’efforts pour que les adversaires reviennent à la table des négociations. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rappelé que 500 000 personnes ont perdu la vie depuis le conflit en Syrie.  Il a regretté que le nombre de personnes ayant besoin d’une aide d’urgence ne cesse de croître, a-t-il dit, avant de demander l’acheminement de l’aide humanitaire à Raqqa.  Il a plaidé pour une revitalisation du processus de Genève, en s’appuyant sur les résultats tangibles atteints à Sotchi et à Astana.

Le délégué a exhorté les parties à respecter les zones de désescalade et à protéger les civils.  Il a dit son désaccord avec l’application d’une approche de deux poids, deux mesures sur la situation humanitaire en Syrie.  « Nous ne permettrons pas que le Conseil soit instrumentalisé et devienne une caisse de résonance de discours bien connus », a-t-il dit.  « Ma délégation ne comprend pas que le Conseil n’ait pas pu se prononcer sur les six attaques perpétrées contre l’ambassade de Russie à Damas », a poursuivi le délégué.

Il a rejeté la politisation de la question humanitaire en Syrie, avant d’espérer que les appels lancés au Conseil de sécurité trouvent un écho.  Dans le même temps, si le projet de résolution du Koweït et de la Suède était mis aux voix, en sachant qu’il ne sera pas adopté, alors l’objectif n’est pas humanitaire, mais politique, a-t-il dit.

Il a félicité la Fédération de Russie pour avoir présenté un libellé amendé du projet pour poursuivre les négociations, en soulignant la nécessité de l’unité du Conseil.  Il a lancé un appel aux membres du Conseil, en particulier la Suède et le Koweït, pour qu’ils changent de cap.  « Nous pouvons être unis et nous acquitter de nos responsabilités », a-t-il conclu.

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUE (Côte d’Ivoire) a fait part de sa préoccupation devant la dégradation de la situation humanitaire en Syrie du fait de la recrudescence des combats sur le terrain, notamment dans la Ghouta orientale où l’on déplore, depuis lundi, la mort de 40 civils et 150 blessés, de même que la destruction de nombreux hôpitaux et écoles. 

Face à cette escalade, la Côte d’Ivoire en appelle au sens de la responsabilité des parties en présence, afin de faire cesser le drame de la Ghouta orientale. 

Le pays réitère également sa conviction et sa position de principe selon laquelle la réponse à la crise en Syrie ne saurait être militaire, mais plutôt passer par le dialogue et un processus politique ouverts, comme le prévoit la feuille de route de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

Le pays soutient en outre le projet de résolution initié par le Koweït et la Suède et visant l’arrêt des hostilités pour une période de 30 jours en vue d’un accès humanitaire immédiat aux populations assiégées. 

M. DIDAR TEMENOV (Kazakhstan) a exhorté toutes les parties sur le terrain et en dehors du pays à prévenir toute violence supplémentaire et à permettre aux organisations humanitaires de prêter assistance aux populations en détresse.  « Nous avons vraiment besoin d’une cessation des hostilités à travers toute la Syrie pour l’ensemble des opérations militaires », a-t-il déclaré, en jugeant crucial que les membres du Conseil de sécurité tombent d’accord sur le projet de résolution relatif à la cessation des hostilités de la Syrie. 

Le Kazakhstan a déclaré qu’il soutenait les cinq requêtes identifiées par le Coordonnateur des secours d’urgence lors de sa mission en Syrie le 11 janvier 2018. 

Il a annoncé en conclusion que les ministres des affaires étrangères des pays garants du processus d’Astana –Fédération de Russie, Turquie et République islamique d’Iran– doivent se réunir à Astana en mars prochain pour s’entretenir de toutes les questions liées au développement sur le terrain.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dit son opposition à la demande du Président du Conseil de sécurité qu’il limite son intervention à cinq minutes.  Le délégué de la Fédération de Russie a pris la parole pour faire part de son incompréhension devant une telle demande.  Le Président a dit qu’il n’avait pas pris de décision, en encourageant simplement le délégué syrien à respecter la note 507.  Le délégué syrien a dit qu’il ne connaissait pas cette note et trouvait injuste cette limitation à cinq minutes.

« Je prends la parole devant vous, alors que des centaines de roquettes s’abattent sur Damas », a-t-il dit, en déplorant la mort de deux enfants.  Il a accusé le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, de n’avoir pas entendu l’opinion du Gouvernement syrien, avant de fustiger certains membres du Conseil pour leur partialité.

Il a rappelé que les groupes terroristes, présentés comme modérés, utilisaient des hôpitaux et écoles comme centres militaires et la population comme un bouclier.  Certains acteurs, la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, voudraient dénier le droit du peuple syrien de définir son avenir constitutionnel, a-t-il dit.  Quant au projet de résolution, il a indiqué que les efforts s’y rapportant sont biaisés, puisque l’avis de la Syrie n’a même pas été recueilli, a-t-il poursuivi.

Il a invité à imaginer des terroristes utilisant le bois de Boulogne ou Central Park pour mener des attaques contre Paris et Manhattan.  « Y aurait-il eu un projet de résolution demandant l’acheminement de l’aide humanitaire à l’opposition armée modérée? » a-t-il ironisé.  Le délégué a dénoncé les agissements des groupes terroristes, avant de dénoncer la « crise morale et professionnelle de l’ONU ».  Certains hauts fonctionnaires de l’ONU déforment des faits et des chiffres et s’appuient sur des informations peu fiables pour nourrir leur rapport, a-t-il regretté.

Le délégué a déclaré que son gouvernement envoyait des lettres à la Présidence et au Secrétariat pour faire état des tirs lancés contre Damas.  Or, le Secrétariat continue d’oublier les souffrances des huit millions d’habitants de Damas, a-t-il dit.  « Nous savons tous que des groupes terroristes contrôlent l’aide humanitaire qui entre dans la Ghouta orientale. »  Il a déploré que cela ait échappé au « radar de M. Lowcock », ainsi que le terrorisme insensé dans la Ghouta orientale. 

L’ONU ignore également les destructions causées par la coalition internationale dirigée par les États-Unis.  « Il est vrai que les États-Unis ont utilisé les mêmes techniques au Viet Nam. » 

Enfin, le délégué a promis que son gouvernement ne plierait pas devant les terroristes et ceux qui veulent la division de la Syrie.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission du désarmement tiendra sa session du 2 au 20 avril et discutera pour la première fois de la course aux armements dans l’espace

CD/3759

La Commission du désarmement tiendra sa session du 2 au 20 avril et discutera pour la première fois de la course aux armements dans l’espace

La Commission du désarmement, qui a adopté ce matin l’ordre du jour* d’une session prévue du 2 au 20 avril 2018, a décidé de s’attaquer, pour la première fois, à la course aux armements dans l’espace.

N’ayant pu s’entendre sur l’opportunité d’examiner la question des armes classiques, la Commission a donc retenu deux questions de fond: « recommandations en vue de la réalisation de l’objectif du désarmement nucléaire et de la non-prolifération des armes nucléaires », et pour la première fois « préparation de recommandations pour promouvoir la mise en œuvre pratique des mesures de transparence et de confiance dans les activités dans l’espace extra-atmosphérique dans le but d’éviter une course aux armements dans l’espace ».

La Présidente et Représentante permanente de l’Australie s’est félicitée de ce que la Commission jouera un rôle de pionnier dans les discussions sur le désarmement de l’espace extra-atmosphérique.  Mme Gillian Bird a souhaité des débats productifs, constructifs et orientés vers des résultats. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a soulevé la question de la documentation, arguant que les recommandations sur lesquelles la Commission compte fonder les discussions n’ont jamais été entérinées par l’Assemblée générale.  Ces recommandations ont été faites en 2013 par le Groupe d’experts gouvernementaux chargé de mener une étude sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales.**

Comme la Commission ouvre un nouveau cycle triennal (2018-2020), sa Présidente a encouragé les parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) à tirer parti de ce cycle pour apporter des contributions substantielles à la Conférence d’examen du TNP qui tombe précisément en 2020.  La Commission pourrait aussi donner le ton de la Conférence internationale de haut niveau des Nations Unies sur le désarmement nucléaire qu’organise l’Assemblée générale du 14 au 16 mai 2018, à New York.

Par ailleurs, aucun consensus n’a pu émerger du débat sur l’opportunité d’examiner la question des armes classiques.  Pour les délégués de l’Équateur et du Mexique, il n’y a pas de raison valable d’en discuter puisque que la troisième Conférence d’examen sur les armes légères est déjà prévue en juin prochain à New York.  De plus, a ajouté le délégué du Nicaragua, les petites délégations n’ont pas assez de personnels pour couvrir toutes ces réunions parallèles.

Les représentants du Royaume-Uni et de la France ont, en revanche, milité pour des discussions officieuses afin de « capitaliser sur le succès de la réflexion de l’an dernier ».  Pour le représentant de la Turquie, il s’agit de « garder en vie la tradition de discussions officieuses afin de rebondir sur les avancées après 17 ans d’impasse sur les armes classiques ».

Au cours de cette session, la Présidente sera secondée aux Vice-Présidences par MM. Mustapha Abbani, de l’Algérie; Bassem Hassan, de l’Égypte; Volodymyr Leschenko, de l’Ukraine; Nirupam Dev Nath, du Bangladesh; et Surendra Thapa, du Népal.  Mme Diedre Nichole Mills, de la Jamaïque, assumera les fonctions de Rapporteur.  Les groupes régionaux, qui n’ont pas encore transmis les noms de leur candidat, ont été invités à le faire.

La Commission travaillera en plénière et au sein de deux groupes de travail.

*A/CN.10/L.80

**A/68/189

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Secrétaire général et son prédécesseur appellent les États à embrasser l’esprit de la Charte des Nations Unies, et à en utiliser tous les outils

8185e séance – matin
CS/13216

Le Secrétaire général et son prédécesseur appellent les États à embrasser l’esprit de la Charte des Nations Unies, et à en utiliser tous les outils

Exceptionnellement réunis à l’occasion d’un débat ministériel du Conseil de sécurité consacré aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, l’actuel Secrétaire général, M. António Guterres, et son prédécesseur, M. Ban Ki-moon, ont exhorté aujourd’hui les États Membres à embrasser pleinement « l’esprit » de la Charte et à utiliser tous ses instruments pour agir.  Le conflit syrien et plus spécialement la situation dans la Ghouta orientale, banlieue de Damas violemment bombardée ces derniers jours et qualifiée par M. Guterres d’« enfer sur terre », était dans l’esprit de la plupart des intervenants. 

Premier orateur de cette réunion souhaitée par le Koweït -dont la présidence du Conseil de sécurité coïncide ce mois-ci avec le vingt-septième anniversaire de sa libération des forces iraquiennes de Saddam Hussein-, le Secrétaire général a déclaré que la Charte, rédigée après le total écroulement de l’ordre international lors de la Seconde Guerre mondiale, avait aidé à remettre le monde d’aplomb.  La Charte a résisté à l’épreuve du temps, a-t-il ajouté, en louant la pertinence et la capacité d’adaptation de ce document.  Il a cité comme preuve de cette souplesse le fait qu’une des activités emblématiques des Nations Unies, les opérations de maintien de la paix, ne soient pas même mentionnées dans la Charte.

M. Guterres a insisté sur l’émergence de nouvelles menaces, la complexité accrue des conflits et une instabilité qui a des conséquences bien au-delà de ses foyers d’origine.  Répondre au défi des migrations, des changements climatiques et des inégalités mettra à l’épreuve la Charte et notre capacité à assurer un meilleur monde pour tous, a-t-il averti. 

Le Secrétaire général a une nouvelle fois souligné l’importance de la prévention et appelé à un rééquilibrage de l’approche collective de la paix et la sécurité internationales.  « Notre but doit être de tout faire pour aider les pays à éviter l’émergence des crises les plus graves pour l’humanité », a-t-il dit, en précisant que ses bons offices étaient « disponibles pour tous les États Membres pour aider à prévenir, gérer et résoudre les conflits ».

En matière de maintien de la paix, le Secrétaire général a déploré que l’ONU soit devenue « la baby-sitter des crises » en se limitant à les contenir.  « Cela n’est pas soutenable », a-t-il dit, même si le Ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire a ensuite loué le succès de la mission de l’ONU dans son pays.  Pour M. Guterres, la réforme en cours au sein de l’ONU vise à recentrer le maintien de la paix autour d’attentes réalistes, et il a pressé le Conseil de fournir des mandats « clairs et pertinents » aux opérations de maintien de la paix. 

Enfin, M. Guterres a rappelé que les régimes de sanctions devaient être organisés de manière à n’avoir pas de « conséquences inattendues » sur le plan humanitaire et a mis en avant l’importance de la coopération des Nations Unies avec les organisations régionales, en premier lieu l’Union africaine, avant d’assurer les États Membres que le Secrétariat se tenait prêt à les aider à pleinement « embrasser l’esprit de la Charte ». 

Prédécesseur immédiat de M. Guterres à la tête des Nations Unies, M. Ban a, lui, plaidé pour la réforme, « qui se fait attendre depuis longtemps », du Conseil de sécurité, afin d’en rendre le processus décisionnel plus souple.  Il a notamment appelé le Conseil, dans les situations les plus graves, à ne pas se contenter de lancer des appels à l’action et à agir.  Il s’est en particulier montré très préoccupé de la situation au Moyen-Orient, tout en présentant la crise dans la péninsule coréenne comme « notre défi le plus sérieux et le plus imminent à l’heure actuelle ».

Lors du débat, plusieurs délégations ont appelé à une telle réforme du Conseil, ou du moins de certaines de ses pratiques.  La France, la Suède ou encore les Pays-Bas ont ainsi appelé une nouvelle fois à la suspension du droit de veto en cas de situations impliquant des crimes graves, qu’il s’agisse de la proposition du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT) ou de l’initiative politique conjointe franco-mexicaine.  Le représentant du Royaume-Uni s’y est, pour sa part, engagé.

Mais c’est bien la situation en Syrie qui a fait l’objet des plus nombreux développements.  Pour de nombreuses délégations, le Conseil a l’obligation d’agir, comme il l’avait fait il y a 27 ans au Koweït.  Légitimée par le Conseil, l’opération militaire conduite en 1991 illustre ce que la communauté internationale peut accomplir face à une invasion, dans le respect de la légalité internationale, a ainsi commenté le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, M. Sabah Khalid Al Hamad Al Sabah.

« La souveraineté, bien sûr, est d’une importance critique mais elle n’est pas une excuse pour qu’un régime s’en prenne à son propre peuple, comme le “régime d’Assad” le fait en Syrie, sans que ce Conseil ne fasse rien », a asséné, pour sa part, la représentante des États-Unis.

Mais la position des États-Unis s’est heurtée à celle de la Fédération de Russie, dont le représentant, appuyé par son homologue de la Bolivie, a dénoncé ceux qui veulent « installer la démocratie par les bombes ».  L’intégrité territoriale et la souveraineté nationale de la Syrie demeurent une « monnaie d’échange » pour des acteurs géopolitiques extérieurs à ce pays, a analysé le représentant russe, qui a demandé la tenue, demain, d’une séance publique du Conseil de sécurité pour discuter de la situation dans la Ghouta orientale. 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales

Lettre datée du 1er février 2018, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent du Koweït auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2018/85)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général des Nations Unies, a exprimé en préambule sa grande tristesse face aux souffrances endurées par la population civile de la Ghouta orientale, qu’il a qualifiée d’« enfer sur terre ».  Il a donc exhorté à la suspension des combats dans cette région et au bon acheminement de l’aide humanitaire.  Cette tragédie se déroule devant nos yeux et nous ne pouvons pas nous permettre qu’elle se poursuive, a-t-il dit.

Le Secrétaire général a ensuite rappelé qu’il y a 27 ans, ce mois-ci, qu’a eu lieu la libération du Koweït des forces de Saddam Hussein.  Il a vu dans l’anniversaire de cet événement, résultant d’une mesure prise par la communauté internationale pour défendre la Charte, une illustration adaptée au débat de ce jour.  La Charte des Nations Unies a résisté à l’épreuve du temps, a-t-il affirmé.  Rédigée après le total écroulement de l’ordre international, elle a aidé à remettre le monde d’aplomb et elle fait aujourd’hui partie des remparts contre les crimes internationaux, a ajouté le Secrétaire général. 

Pour M. Guterres, les principes de la Charte –le non-recours à la force, le règlement pacifique des différends, la non-intervention, la coopération, l’autodétermination et la souveraine égalité des États Membres– demeurent à la base des relations internationales.  Les valeurs que la Charte proclame –l’égalité des droits, la non-discrimination, la tolérance et les relations de bon voisinage– sont les principes directeurs de l’harmonie internationale.  Le Secrétaire général a souligné l’émergence de nouvelles menaces, la complexité accrue des conflits, rappelant que les conséquences de l’instabilité allaient bien au-delà de son origine. 

Répondre au défi des migrations, des changements climatiques et des inégalités mettra à l’épreuve la Charte et notre capacité à assurer un meilleur monde pour tous, a poursuivi M. Guterres.  « Si les principes de la Charte demeurent plus pertinents que jamais, nous devons continuer à en adapter les outils, à utiliser ces derniers avec une plus grande détermination, et nous devons retourner aux racines de la Charte pour mieux servir les peuples », a-t-il déclaré.

Le Secrétaire général a ensuite mis l’accent sur l’importance de la prévention et appelé à un rééquilibrage de l’approche collective relative à la paix et à la sécurité internationales.  Notre but doit être de tout faire pour aider les pays à éviter l’émergence des crises les plus graves pour l’humanité, a-t-il dit, ajoutant que cette vision allait au-delà des conflits pour embrasser aussi les catastrophes naturelles.  Nous devons nous engager en faveur de tous les droits humains et éliminer les discriminations basées sur le genre, la religion, la race, la nationalité ou tout autre élément, a poursuivi M. Guterres. 

Le Secrétaire général a rappelé que la prévention des conflits incombait au premier chef aux États Membres, avant de citer les instruments prévus au Chapitre VI de la Charte pour faciliter le règlement pacifique des différends, parmi lesquels la négociation, l’arbitrage, la conciliation ou encore la médiation.  Il a encouragé les États Membres à accepter la clause de juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice et à faire davantage appel à la Cour et à d’autres tribunaux internationaux pour éviter une escalade des différends.  Il a en outre rappelé que le nouveau Conseil consultatif sur la médiation avait pris, il y a quelques semaines, sa première initiative.  Mes bons offices sont disponibles pour tous les États Membres pour aider à prévenir, gérer et résoudre les conflits, a encore déclaré le Secrétaire général, qui a exhorté une nouvelle fois le Conseil à assumer ses responsabilités et à promouvoir un règlement politique en Syrie, avant d’ajouter que la pérennisation de la paix était un élément clef de la prévention, laquelle dépend aussi de la promotion du développement durable.

Si les opérations de maintien de la paix n’apparaissent pas dans la Charte, cette activité emblématique de l’ONU est enracinée dans ses principes, démontrant la flexibilité de la Charte, a poursuivi M. Guterres, qui a ensuite mentionné les défis auxquels le maintien de la paix doit faire face.  Souvent, les Casques bleus sont déployés indéfiniment dans des environnements dangereux où il n’y a pas de paix à préserver, où aucune solution politique n’est en vue, où de multiples groupes armés opèrent, a-t-il fait observer.  Pour toutes ces raisons, l’ONU finit par être « la baby-sitter de crises » et se limite à les contenir, a poursuivi M. Guterres, pour qui cette attitude « n’est pas soutenable ». 

Le Secrétaire général a indiqué que les efforts de réforme en cours au sein de l’ONU visaient à recentrer le maintien de la paix autour d’attentes réalistes, à déployer des forces bien structurées et équipées et à mobiliser le soutien nécessaire de la part des pays hôtes.  Il a souhaité que le Conseil fournisse des mandats clairs et pertinents, avant d’appeler tous les États Membres à lui apporter leur appui.  Dans le même temps, le maintien de la paix n’est pas la solution à toutes les situations de crise, a également fait valoir M. Guterres, qui a mis en avant d’autres types d’action, comme les opérations antiterroristes menées par une coalition d’États Membres.  Là aussi, des mandats clairs et prévisibles, ainsi qu’un financement pérenne, sont essentiels, a-t-il insisté. 

Le Secrétaire général a rappelé que le nombre de régimes de sanctions décidés par les Nations Unies était le plus élevé de toute l’histoire de l’Organisation.  Puisque leur mise en œuvre va au-delà des États Membres, une attention plus grande doit être portée sur le secteur privé, en particulier le secteur financier, a-t-il dit, avant de rappeler qu’il allait « prendre bien soin d’éviter des conséquences inattendues, y compris sur le plan humanitaire », du fait de l’imposition de sanctions.

Souhaitant tirer les enseignements de l’application des Chapitres VI, VII et VIII, le Secrétaire général a souligné l’importance des acteurs régionaux, et en particulier le dynamisme du partenariat entre l’ONU et l’Union africaine, matérialisé par la signature de deux nouveaux accords-cadres sur la paix et la sécurité et le développement durable.  Il a de nouveau appelé la communauté internationale à « assurer le financement des forces africaines opérant en Somalie, au Sahel et autour du lac Tchad ». 

Les réformes engagées dans les domaines de la paix et de la sécurité, du développement et de la gestion, ont pour but de rendre l’ONU plus efficace dans la réalisation de la vision contenue dans la Charte, a encore affirmé le Secrétaire général, qui a conclu en affirmant que le Secrétariat se tenait prêt à aider les États Membres à pleinement embrasser l’esprit de la Charte. 

M. BAN KI-MOON, huitième Secrétaire général des Nations Unies, a fait remarquer que « le monde est complètement différent de ce qu’il était il y a 70 ans, lors de la fondation des Nations Unies », soulignant qu’on était passé de guerres à grande échelle entre États à des défis mondiaux nouveaux et de plus en plus nombreux.  Il a cité en exemple de ces défis les changements climatiques, les dizaines de millions de réfugiés, l’extrémisme violent, le terrorisme et la prolifération nucléaire.  Il a mis en parallèle la quatrième révolution industrielle, qui a permis des avancées technologiques énormes comme l’intelligence artificielle, la nanotechnologie et l’ingénierie biologique, tout en soulignant que cela aurait également un impact important sur l’environnement sécuritaire du futur.

Dans ce contexte, « certains remettent en question le rôle et l’efficacité des Nations Unies dans leur ensemble », a noté M. Ban, qui a fait valoir que, sans l’ONU, la communauté internationale n’aurait pas réussi à éviter une autre guerre, ni à faire de progrès importants en termes d’éradication de la pauvreté extrême, de promotion de la santé publique et d’accès à l’éducation.  Et d’ajouter: « Qui d’autre aurait pu donner une légitimité aux actions que le Conseil de sécurité prend pour résoudre les conflits aujourd’hui? »

Les responsabilités principales dévolues au Conseil de sécurité pour maintenir la paix et la sécurité internationales sont donc plus que jamais nécessaires, en a déduit l’ancien Secrétaire général, avant de saluer les relations de travail améliorées du Conseil avec les autres piliers du système des Nations Unies et l’accent qu’il met sur le concept de « maintien de la paix ».  En s’attaquant aux causes profondes du conflit et en œuvrant à leur prévention, aux côtés des parties prenantes nationales et internationales, le Conseil et l’Organisation seront plus forts, a-t-il assuré. 

M. Ban a prôné une réforme du Conseil de sécurité afin de pouvoir répondre efficacement aux défis de sécurité non traditionnels et transnationaux tels que les changements climatiques, le terrorisme et l’extrémisme violent, la prolifération nucléaire ou encore l’insécurité transfrontalière, faisant valoir la nécessité de rendre plus souple son processus décisionnel.  « La réforme du Conseil de sécurité se fait attendre depuis longtemps », a-t-il observé.

M. Ban a en même temps rappelé que « la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité incombe aux États Membres eux-mêmes », dénonçant l’incapacité de certains dirigeants nationaux à s’acquitter de leurs responsabilités de protéger leurs propres citoyens, alors qu’ils se cachent derrière les concepts de l’appropriation nationale et de la souveraineté des États.  Faisant le bilan des leçons apprises, il a estimé que le Conseil de sécurité ne devait pas, dans de telles situations, se contenter de lancer des appels à l’action, mais qu’il devait agir. 

M. Ban a ensuite abordé divers conflits internationaux et régionaux.  Au Moyen-Orient, il a recommandé de se « préparer à l’ère post-EIIL (État islamique d’Iraq et du Levant) ».  Le Conseil de sécurité, à son avis, doit se concentrer davantage sur le nord de la Syrie, la guerre civile en cours dans le pays, la tension sur les hauteurs du Golan et la crise syrienne des personnes déplacées et des réfugiés.  « Ces problèmes pourraient refaire surface, menacer gravement la stabilité régionale et provoquer d’autres conflits entre les États de la région », a-t-il averti, en précisant notamment qu’une telle instabilité pourrait conduire à exacerber les tensions entre l’Iran et l’Arabie saoudite et rapprocher Israël et l’Iran d’un conflit direct.  Quant à Daech, il a rappelé qu’on ne pouvait exclure qu’après sa défaite au Moyen-Orient, l’organisation terroriste aille « s’installer dans des endroits vulnérables tels que la Libye ».  M. Ban a également fait état de ses préoccupations concernant la propagation du terrorisme et de l’extrémisme violent au Sahel, rappelant qu’il avait mis sur pied, en juin 2013, la « Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel ».

M. Ban a ensuite souhaité que l’ONU, en particulier le Conseil de sécurité, continue à renforcer le multilatéralisme.  Il a appelé tous les Membres de l’ONU à appliquer fidèlement et complètement le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques tout en faisant face à d’autres nouveaux défis, notamment la prolifération des armes de destruction massive.

M. Ban s’est enfin longuement attardé sur la situation dans la péninsule coréenne, estimant qu’il y avait là « notre défi le plus sérieux et le plus imminent à l’heure actuelle ».  Pour M. Ban, qui a rappelé les lourdes sanctions imposées l’an passé par le Conseil à la RPDC, « il est essentiel que le Conseil de sécurité agisse de manière ferme et unifiée jusqu’à la fin du démantèlement complet, vérifiable et irréversible des armes nucléaires et des programmes de la Corée du Nord ».  Il a aussi exhorté les autorités de la RPDC à respecter pleinement les résolutions pertinentes du Conseil, tout en invitant tous les États Membres à faire leur part pour aider à résoudre le problème par des efforts diplomatiques.  « Ce n’est que lorsque nous chercherons des solutions à tous ces problèmes par des moyens pacifiques que nous pourrons faire respecter les principes et les buts consacrés dans la Charte des Nations Unies », a-t-il estimé.

Se félicitant de la participation des athlètes nord-coréens aux Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang, en République de Corée, le huitième Secrétaire général a également salué la récente reprise du dialogue intercoréen et l’atmosphère réconciliatrice qui en résulte entre les deux États.  Il a appelé à conserver cette dynamique de dialogue durement acquise en vue d’un processus plus significatif et plus authentique de réconciliation, de paix et de dénucléarisation ultime de la RPDC, condition nécessaire à ses yeux pour garantir la stabilité dans toute l’Asie du Nord-Est.  M. Ban a dit compter sur un appui sans réserve de la part de l’ONU, et sur le Conseil de sécurité pour faire avancer l’ensemble du processus dans ce sens, estimant en outre que les États-Unis pouvaient jouer un rôle crucial dans l’engagement avec la RPDC.

M. Ban a conclu son intervention sur un sujet qui lui est cher, à savoir le « pouvoir unique du sport de contribuer à la paix et au développement », se disant « heureux d’avoir revu cette énergie positive » dans son pays lors des Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang. 

M. SABAH KHALID AL HAMAD AL SABAH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, a commencé par citer le Préambule de la Charte des Nations Unies: « Nous, peuples des Nations Unies, résolus à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances, à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites, à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international, à favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande. »

M. Al Sabah a ensuite présenté la Charte comme un instrument du droit international à la disposition des États Membres, dont il est nécessaire de mettre en œuvre et de respecter les buts et principes « sur un pied d’égalité », dans le respect de la souveraineté et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États ainsi que dans le respect des droits de l’homme.  Or, certains États y circonviennent de façon flagrante, comme nous en avons fait l’expérience au Koweït, a dénoncé M. Al Sabah, qui a précisé que le sujet à l’ordre du jour du Conseil n’avait « pas été choisi par hasard ».  En réalité, ces buts et principes représentent la « première ligne de défense » de petits pays comme le mien, a expliqué le Vice-Premier Ministre.  C’est la raison pour laquelle, chaque année, le 26 février, le Koweït fête sa « libération ».  Légitimée par le Conseil de sécurité, l’opération militaire conduite en 1991 au Koweït illustre aux yeux de M. Al Sabah ce que la communauté internationale peut accomplir face à une invasion, dans le respect de la légalité internationale. 

Aujourd’hui, plus que jamais, l’importance de la Charte demeure, a poursuivi M. Al Sabah, qui a observé que les mesures prises par le Conseil en temps de crise l’étaient souvent en réaction après que les événements se sont produits, alors que la Charte prévoit aussi des outils de diplomatie préventive.  Quant à l’alerte précoce, elle requiert une volonté politique du Conseil en temps opportun, comme l’ont rappelé le massacre de Srebrenica ou le génocide au Rwanda.  Le Ministre s’est dit convaincu du rôle décisif que les organisations régionales et internationales concernées peuvent jouer dans ce contexte. 

Le Conseil lui-même dispose de maints outils pour résoudre les crises avant même qu’elles n’éclatent, mais la possibilité d’y faire appel dépend de son unité, malheureusement mise à mal par les divergences et l’exercice du droit de veto, a également fait observer M. Al Sabah.  Il en a voulu pour preuve le conflit syrien, qui a coûté la vie à 400 000 personnes en sept ans.  Aussi le Vice-Premier Ministre a-t-il salué les efforts consentis par le Secrétaire général pour améliorer les piliers paix et sécurité des Nations Unies et a apporté son soutien à son action en faveur de la diplomatie préventive.

Dans la mesure où les causes profondes des conflits sont surtout liées à des problèmes économiques et de développement, le Vice-Premier Ministre a également tenu à rappeler la nécessité de ne pas négliger les liens que paix et sécurité entretiennent avec les questions de développement.  Il a ainsi rappelé que l’objectif 16 de développement durable mettait l’accent sur la promotion de sociétés pacifiques et inclusives pour le développement durable, l’accès à la justice pour tous et le renforcement des institutions responsables et efficaces à tous les niveaux.

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangère de la Pologne, a souligné l’engagement indéfectible de son pays en faveur de la paix et de la sécurité internationales.  Il a rappelé qu’aux termes de l’Article 2 de la Charte, les États Membres doivent s’acquitter de bonne foi de leurs obligations.  Le respect des obligations du droit international de bonne foi postule par conséquent que les États doivent s’abstenir de tout acte contraire à la bonne exécution de leurs obligations et, si un État ne respecte pas cet Article 2, la Charte s’en trouve fragilisée, a ajouté le Ministre. 

M. Czaputowicz a estimé que le Conseil était le gardien des principes de la Charte et devait en conséquence être considéré comme le garant en dernier ressort de la souveraineté territoriale des États, du règlement pacifique des différends, de l’interdiction du recours à la force ou bien encore du respect des droits de l’homme.  Soulignant l’importance de poursuivre en justice les auteurs des crimes les plus graves, le Ministre s’est dit très préoccupé par les violations du droit humanitaire et de la Convention sur les armes chimiques en Syrie.  Il a dénoncé le bombardement, hier, de la Ghouta orientale, ajoutant que rien ne pouvait justifier des attaques indiscriminées contre des civils innocents.  Ces attaques doivent cesser et les parties au conflit doivent se conformer à leurs obligations, a-t-il déclaré, en appelant à la cessation des hostilités en Syrie.  Enfin, le Ministre a tenu à rappeler que le Conseil avait l’obligation, selon la Charte, d’agir en conformité avec ses principes. 

M. MARCEL AMON-TANOH, Ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, a tout d’abord indiqué que son pays, qui siégeait au Conseil de sécurité en 1990-91, avait grandement contribué au « triomphe » des valeurs inscrites au Préambule de la Charte en jouant un « rôle décisif » dans l’adoption des résolutions 678 (1990) et 687 (1991), relatives à la fin de l’annexion du Koweït par l’Iraq. 

Le Ministre a ensuite souligné que la pérennité de l’architecture de maintien de la paix et de la sécurité internationales repose sur la capacité d’adaptation de la Charte aux exigences liées à chaque période majeure de l’Histoire.  Il convient, dans ces conditions, de mesurer l’impact du changement de la nature des conflits et de l’apparition des nouvelles menaces globales sur l’efficacité des instruments de la Charte, a-t-il ajouté. 

Insistant sur l’impérieuse nécessité de promouvoir une « culture de la prévention », M. Amon-Tanoh a constaté que l’efficacité des bons offices du Secrétaire général reposait sur la capacité de ce dernier à incarner l’autorité morale de l’Organisation ainsi que sur sa force de persuasion.  Appelant à faire de la prévention des conflits un élément majeur de l’ingénierie des Nations Unies dans le domaine de la paix et de la sécurité, il a notamment encouragé l’encadrement et le soutien aux mécanismes d’alerte rapide mis en place par les organisations sous-régionales et régionales, ainsi que l’appui à l’émergence de mécanismes de prévention constitués par les structures de la société civile.

M. Amon-Tanoh a aussi constaté que l’efficacité des instruments de la Charte était mise à rude épreuve lorsqu’ils sont confrontés à de graves violations des droits de l’homme et aux crimes de masse tels que perpétrés en Somalie, en 1993, au Rwanda, en 1994, et en Bosnie, en 1995, « alors même qu’une opération de maintien de la paix était présente sur le terrain ».  Il n’en a pas moins souligné les « transformations profondes et multidimensionnelles » des opérations de maintien de la paix, inspirées par les leçons du massacre de Srebrenica, en Bosnie et du « génocide des Tutsis » au Rwanda.  Certes ces réponses sont encore imparfaites, mais elles sont dans bien des cas les seules qui aient pu sauver des millions d’êtres humains et permis de nombreux succès dans plusieurs pays, a-t-il commenté.

Le Ministre a notamment indiqué que le succès de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) avait été l’aboutissement d’un processus au cours duquel son pays avait expérimenté toutes les mesures prévues par la Charte et adoptées par le Conseil de sécurité.  Il a cité, entre autres, un accord politique et l’autorisation des parties préalables au déploiement de l’ONUCI ainsi qu’un régime de sanctions comprenant un embargo sur les armes, les diamants et des sanctions individuelles.  Il a aussi cité l’autorisation de recourir à la force pour détruire les armes lourdes qui menaçaient les civils, et le respect de l’accord politique et du résultat des urnes, certifié par les Nations Unies.

M. Amon-Tanoh a en outre souhaité que le système de maintien de la paix et de la sécurité internationales apporte de nouvelles réponses pour faire face aux défis globaux, notamment le terrorisme et les changements climatiques.  Il a réclamé une coopération plus étroite entre l’ONU et les organisations régionales qui, a-t-il souligné, constituent un atout décisif dans le combat contre le terrorisme, à l’exemple du G5 Sahel et de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM).  « Notre Conseil doit aller plus loin dans son soutien à ces structures qui mènent déjà des guerres que les Nations Unies ne sont pas prêtes à faire », a-t-il affirmé.

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a déclaré que, trop souvent, les États Membres invoquent la Charte des Nations Unies non pas pour agir, mais pour excuser leur inaction.  Or, la Charte engage tous les États Membres à rechercher la paix et la sécurité sur la base du respect du principe de l’égalité des droits et de l’autodétermination.  Elle appelle les États Membres à respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales de tous.  « La souveraineté, bien sûr, est d’une importance critique », a déclaré la représentante.  Mais la souveraineté n’est pas une excuse pour qu’un gouvernement utilise « la violence et le viol » pour expulser un groupe minoritaire vers un pays voisin, comme l’ont fait les forces de sécurité birmanes, a dénoncé Mme Haley.  Et la souveraineté n’est pas une excuse pour qu’un régime s’en prenne à son propre peuple, comme le « régime d’Assad » le fait en Syrie, sans que ce Conseil ne fasse rien.  La souveraineté n’est pas une excuse pour qu’une dictature abuse de son peuple, déclenche la violence, fomente un conflit régional, puis s’en tire sans laisser de traces.  Si c’était vrai, nous n’aurions aucune raison d’être ici, s’est élevée la représentante.

Pour que les termes de la Charte aient un sens, tous les États Membres doivent rendre des comptes et s’y conformer, et le Conseil de sécurité doit être disposé à agir en cas de violation, a poursuivi Mme Haley.  Trop d’États Membres ont manqué à leur obligation de respecter les sanctions imposées par le Conseil contre la RPDC, a-t-elle poursuivi, ajoutant que, « en attendant, Pyongyang continue de développer son arsenal nucléaire, menace ses voisins et refuse catégoriquement de discuter de la dénucléarisation.  Nous devons faire mieux ».  Pendant trop longtemps, le Conseil a vu l’Iran jouer un rôle profondément déstabilisateur au Moyen-Orient sans s’attaquer à la menace régionale urgente qu’il représente, a ensuite accusé la représentante des États-Unis, qui a ajouté qu’en Ukraine, « la Russie reste une force d’occupation en Crimée et une force déstabilisatrice dans l’est de l’Ukraine ». 

« Permettez-moi de le répéter: les droits souverains des nations sont fondamentaux.  Mais lorsque nous ne respectons pas le principe de la souveraineté en permettant aux régimes de Kim, d’Assad et de Putin d’agir en toute impunité, c’est le contraire qui est vrai. » 

« Lorsque le Conseil de sécurité demande des comptes aux nations qui violent la Charte des Nations Unies, nous protégeons la souveraineté », a argué Mme Haley, qui a ensuite cité en exemple l’invasion du Koweït par l’Iraq en 1990.  « Après l’invasion, Saddam Hussein a ignoré 11 résolutions du Conseil de sécurité lui demandant de se retirer.  Et puis, le 29 novembre 1990, le Conseil de sécurité a invoqué à juste titre le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.  Cela a donné à Saddam Hussein une dernière chance de faire ce qui était juste.  En janvier 1991, après avoir refusé d’obtempérer, une coalition de 34 pays menée par les États-Unis a commencé à se battre pour libérer le Koweït.  Les efforts de cette coalition ont été couronnés de succès.  La preuve est ici même aujourd’hui, avec la présidence du Conseil de sécurité par la nation souveraine du Koweït », a conclu la représentante.

M. MUKHTAR TLEUBERDI, Premier Vice-Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a déclaré qu’aujourd’hui, le monde était plus proche que jamais du moment où des conflits internationaux sont sur le point d’éclater.  Les menaces posées par l’utilisation des armes de destruction massive, la rivalité croissante entre puissances régionales, ainsi que les tensions entre blocs régionaux, ainsi que la crise de confiance entre les acteurs clefs des relations internationales sont source de sérieuses préoccupations, a-t-il analysé.  Cette situation exige un changement de paradigme « urgent et spectaculaire » dans la manière de concevoir le dialogue de haut niveau et des « plateformes délibératives » propices à entreprendre des actions concrètes, a estimé M. Tleuberdi, qui a rappelé que la vision que son pays avait élaborée pour réaliser un « monde sans guerres » était contenue dans le manifeste Le Monde, XXIe siècle.

Considérant que l’un des principaux objectifs de la Charte des Nations Unies est de « préserver les générations futures du fléau de la guerre » et d’« adopter des mesures collectives efficaces pour prévenir et éliminer les menaces à la paix », nous devons donc faire un effort concerté et déterminé pour y parvenir, a dit le Premier Vice-Ministre, qui a présenté une stratégie de résolution des conflits articulée autour de trois phases: la réconciliation de la paix et de la sécurité avec les objectifs de développement durable pour réaliser une paix durable; une approche régionale pour répondre aux problèmes transfrontaliers tels que le terrorisme, la détérioration de l’environnement et la pauvreté; et une coordination et une interaction des entités des Nations Unies pour améliorer la situation dans le monde. 

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a exhorté le Conseil à agir dans l’unité pour appliquer les principes de la Charte, comme il a pu le faire en Colombie, au Libéria, dans la lutte contre Daech ou encore pour dénoncer le programme nucléaire militaire de la République populaire démocratique de Corée.  Le manque d’unité du Conseil est une entrave au progrès, a-t-il ajouté, en mentionnant l’occupation russe en Ukraine. 

Nous devons pouvoir coopérer en vue d’alléger les souffrances du peuple syrien, a poursuivi M. Allen, pour qui « nos échecs sont frustrants et ont des conséquences dévastatrices ».  Le représentant a affirmé que la Ghouta orientale, loin d’être une « zone de désescalade », était une zone de destruction et de mort et a exhorté le Conseil à agir pour y remédier.  Il a jugé inacceptables les échecs sur le volet des armes chimiques en Syrie, avant d’assurer que son pays ne voterait jamais contre un texte permettant d’éviter des atrocités de masse. 

M. Allen a par ailleurs souligné la nécessité de remédier au fléau des crimes sexuels au sein des opérations de maintien de la paix.  Nous devons nous demander ce que nous pouvons faire pour nous montrer à la hauteur des principes de la Charte, a-t-il conclu. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a affirmé que la Charte des Nations Unies, qui doit être protégée, avait permis de donner une voix aux sans-voix.  Il s’est ensuite lancé dans un plaidoyer en faveur de l’égalité souveraine et de la coexistence pacifique des États, qui doivent s’émanciper de la « mentalité de la guerre froide ».  Il est important, a poursuivi le représentant, de promouvoir la sécurité commune dans le cadre d’une approche globale, en s’attaquant aux différents foyers de conflit, approche dont le Conseil de sécurité, chargé de maintenir la paix et la sécurité, est le garant.  La Chine, Membre fondateur des Nations Unies, est prête à défendre les normes internationales fixées par la Charte des Nations Unies.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a tout d’abord rappelé que la Ligue des Nations avait échoué à prévenir l’irruption de la Seconde Guerre mondiale, principalement en raison de l’indifférence de ses membres face au « mépris flagrant » des buts et principes du droit international régissant les relations entre États.  Il a ensuite appelé à appliquer les principes de la Charte d’une manière qui concorde avec les réalités actuelles et a fait part de son appui au programme de réforme de l’ONU.

Évoquant les problèmes liés au terrorisme, à la prolifération des armes de destruction massive, aux changements climatiques ou encore aux pandémies sanitaires, le représentant a souligné que personne ne pouvait y échapper, ni prétendre disposer de la panacée pour y répondre seul.  Pour y faire face, nous devons travailler ensemble en honorant les buts et principes de la Charte, a-t-il souligné. 

M. Alemu a reconnu que les échecs du passé avaient entaché la crédibilité de l’ONU, pour ensuite attirer l’attention sur les situations où l’Organisation avait su être à la hauteur de ses principes.  Grâce à cela, a-t-il enchaîné, un pays, dont l’intégrité territoriale avait été violée il y a 27 ans, a pu recouvrer sa souveraineté et préside aujourd’hui le Conseil de sécurité, s’est-il félicité, rappelant dans la foulée que l’Éthiopie avait siégé au Conseil pendant la guerre du Golfe et avait appuyé toutes les résolutions visant à rétablir la souveraineté du Koweït.

M. Alemu a ensuite regretté que le Conseil de sécurité ne fasse pas un meilleur usage des instruments que la Charte met à sa disposition et qui lui permettraient, entre autres, de dépasser les politiques contre-productives découlant d’intérêts nationaux étroits qui, a-t-il mis en garde, créent ensuite des politiques de « deux poids, deux mesures » et sapent la crédibilité de l’organe.  Il a appelé les États Membres à faire preuve de consistance dans leur « fidélité » aux principes de la Charte, avertissant que tout échec entraîne de graves conséquences, comme son pays a d’ailleurs pu en être témoin.  Il a ensuite cité l’Empereur Hailé Sélassié, qui avait déclaré devant l’Assemblée générale, en 1963, que « cette organisation et chacun de ses membres ont une responsabilité écrasante et impressionnante: absorber la sagesse de l’Histoire et l’appliquer aux problèmes du présent pour que les générations à venir puissent naître, vivre, et mourir en paix ».

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a souligné l’importance de la sécurité collective comme instrument de prévention, ajoutant que les sanctions ne pouvaient être une fin en soi.  Il a mentionné les succès engrangés par l’ONU durant les sept dernières décennies, avant d’insister sur la pertinence intacte de la Charte et de ses principes.  Ces principes doivent rester sacrés et être défendus par tous les pays, en vue de défendre le bien commun, a déclaré le représentant, qui en a déploré les violations, avant d’exhorter l’ONU à changer afin de conserver sa pertinence dans un monde en évolution.  Les États Membres doivent être suffisamment courageux pour rénover l’Organisation, a poursuivi M. Esono Mbengono, tout en soulignant le rôle vital de l’ONU.  Le représentant a appelé au respect des choix des pays lorsqu’ils arrêtent des modèles de développement.  Enfin, il a rappelé que la sécurité de son pays avait été menacée en décembre dernier, ajoutant qu’un massacre avait pu être évité. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a attiré l’attention sur l’importance du principe de règlement pacifique des différends, plaidant en faveur d’une Organisation plus active dans la promotion des moyens pacifiques prévus au Chapitre VI de la Charte: « négociation, enquête, médiation, conciliation, arbitrage, règlement judiciaire, et recours aux organismes ou accords régionaux ».  Pour sa part, le Pérou reste engagé en faveur du droit international et de son développement progressif. 

C’est la raison pour laquelle le représentant s’est dit préoccupé par l’interprétation faite de la Charte, à laquelle sont attribuées des catégories absolues et prêtés des principes au détriment d’autres.  En effet, a-t-il expliqué, souvent, on observe une contradiction entre, d’un côté, les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale, et de non-ingérence, et de l’autre, ceux de justice et de respect des obligations pour les États que leur confie la même Charte, y compris en matière de droits de l’homme.  Le résultat est souvent une impasse, qui, de manière regrettable, empêche la coopération requise pour que le système de sécurité collective puisse promouvoir une diplomatie préventive efficace.  Nous devons garder à l’esprit que les principes du Chapitre II de la Charte sont orientés vers l’action collective, et qu’il y a donc complémentarité, a ajouté le représentant.

M. OLOF SKOOG (Suède) a affirmé qu’il incombait à chaque État Membre d’honorer et de défendre les règles inspirées par la Charte, soulignant qu’il s’agit là d’une obligation juridique qui doit être honorée de bonne foi.  Il a déploré que les principes de la Charte demeurent hors de portée pour de nombreuses personnes dans le monde, pointant notamment « la poursuite de l’agression et l’annexion illégale » en Ukraine, les souffrances intolérables infligées à la population civile en Syrie, ainsi que l’incapacité à trouver une issue au conflit israélo-palestinien.  Il a aussi cité la situation au Yémen, en République démocratique du Congo, en Libye et au Myanmar.

Le représentant a estimé que les membres permanents du Conseil de sécurité avaient une responsabilité particulière en vertu de la Charte.  Il a notamment jugé « totalement inacceptable » le recours au veto pour protéger des « intérêts nationaux étroits » dans des situations d’atrocités de masse, et a appelé à respecter le Code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT) et de l’initiative franco-mexicaine qui vise à limiter le recours au veto dans de telles circonstances.

Le représentant s’est ensuite attardé sur la question de la résolution pacifique des différends et a appelé le Conseil de sécurité à avoir davantage recours aux mesures précoces, citant notamment en exemple sa prompte réponse face à la crise en Gambie, l’an dernier.  Il a aussi appelé le Conseil à appuyer les efforts de médiation et les bons offices d’une manière unifiée.  Le Conseil doit aussi faire plein usage du Chapitre VIII de la Charte et encourager le règlement des différends par l’intermédiaire des dispositifs régionaux.  Il devrait aussi envisager plus activement la possibilité de faire des renvois à la Cour internationale de Justice (CIJ), a-t-il ajouté. 

Le représentant a par ailleurs engagé le Secrétaire général à faire davantage usage de l’Article 99 de la Charte qui lui permet de porter à l’attention du Conseil toute affaire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il a rappelé que le Secrétaire général avait récemment agi de la sorte en attirant l’attention sur la situation du Myanmar.

Après avoir rappelé les principes de la Charte des Nations Unies, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a constaté que, malheureusement, le monde avait été témoin, tout au long de son histoire, de nombreuses violations de ces mêmes principes.  En conséquence, la charge de travail du Conseil de sécurité ne diminue pas devant la multiplication des foyers de conflit, souvent provoqués par des interventions extérieures, a observé le représentant, qui a déploré que les mesures unilatérales, telles que les sanctions ou le fait de brandir la menace de la force, se substituent aux mesures collectives. 

M. Nebenzia a ensuite vivement contesté les déclarations de son homologue des États-Unis, lui demandant de cesser de parler de « régime russe »: « nous sommes une république, avec un président élu, comme en Syrie », a tranché le représentant.  La Fédération de Russie a rappelé que le « chaos » avait été « semé » au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, donnant naissance à une « internationale terroriste », qui sème « l’horreur et la souffrance ».  Quant à la question de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale de la Syrie, elle demeure une « monnaie d’échange » pour des acteurs géopolitiques extérieurs à ce pays, a analysé le représentant, en s’en prenant à « ceux qui ont pensé pouvoir y installer la démocratie par les bombes ».  Le représentant a ensuite proposé que la présidence du Conseil de sécurité organise, demain, une séance publique pour discuter de la situation dans la Ghouta orientale. 

Par ailleurs, le représentant a dénoncé des « ingérences claires de l’extérieur », qui avaient entraîné un changement anticonstitutionnel de gouvernement en Ukraine.  « Pourquoi, en 2014, n’a-t-on pas prêté d’attention à ce qui nous réunit aujourd’hui? » a-t-il ironisé.  La Fédération de Russie souhaite la résolution du conflit en Ukraine le plus rapidement possible, a assuré M. Nebenzia, qui a néanmoins ajouté que, lorsque Kiev « sabote » le processus de Minsk tout en « vendant au reste du monde » sa « propagande » sur ce qui se passe dans l’est de l’Ukraine, cela pose problème.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a déclaré que, face aux défis mondiaux actuels, « rien n’est plus efficace que le multilatéralisme ».  « La conviction profonde de la France est qu’à chaque fois que nous acceptons que la résolution de crises internationales se déroule hors du cadre multilatéral, hors du système de règles dont nous nous sommes dotés en 1945, nous laissons la loi du plus fort l’emporter », a-t-il remarqué.  Appelant le Conseil de sécurité à poursuivre ses efforts pour tirer pleinement parti des outils que la Charte met à sa disposition pour remplir sa responsabilité principale en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, le représentant a ensuite mis l’accent sur trois axes.

M. Delattre a d’abord préconisé de rendre plus opérationnel le règlement pacifique des différends en faisant de la prévention des conflits une réalité.  Il a rappelé que l’Article 33 de la Charte met l’accent sur la négociation et a cité deux exemples de négociations réussies grâce à la persévérance des acteurs concernés: le Plan d’action global commun relatif au programme nucléaire de l’Iran et le processus de paix en Colombie.  Le représentant a salué en ce sens la création du Haut Conseil de la médiation, y voyant un moyen de renforcer encore la capacité d’action du Secrétaire général, et a rappelé que le rôle premier des envoyés spéciaux du Secrétaire général était justement d’être des médiateurs, notamment en Syrie, en Libye ou au Yémen.  Il a ensuite rappelé que la médiation n’était que « l’ingrédient » de la prévention et a appelé à la mobilisation pour éviter la dégradation de situations de tensions en véritables conflits, ce qui implique d’« avoir une vision proactive et globale ».

Le représentant a ensuite mis l’accent sur la promotion du respect du droit international et le recours à la justice internationale pour assurer le règlement pacifique des différends.  Il a rappelé à cet égard le rôle essentiel joué par la Cour internationale de Justice, « organe établi par la Charte ».  Il a ensuite rappelé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales « ne pouvait se concevoir sans respect et protection des droits de l’homme et du droit international humanitaire », citant la « litanie insupportable » des violations de ce type en Syrie, au Yémen ou en « Birmanie ».  Le respect des droits de l’homme et du droit international « n’est pas une concession ou une faveur mais une impérative obligation », a poursuivi M. Delattre, qui a rappelé le partenariat international lancé en janvier contre l’impunité de ceux qui se sont rendus coupables de l’utilisation d’armes chimiques, avant de souligner le rôle de la Cour pénale internationale (CPI).  Il a également rappelé une nouvelle fois la proposition franco-mexicaine tendant à une suspension volontaire et politique du recours au droit de veto en cas d’atrocités de masse.

Enfin, M. Delattre a rappelé que, « lorsque les circonstances l’exigent », le Conseil avait « non seulement la possibilité, mais également l’obligation » de faire usage d’outils permettant de faire respecter les principes et buts de la Charte.  Parmi ces outils, le représentant a cité en premier lieu les opérations de maintien de la paix, rappelant à la fois leurs succès et leurs difficultés.  Il a plaidé pour que le Conseil, mais aussi l’Assemblée générale, les États hôtes, les pays fournisseurs de contingents ou les organisations régionales travaillent ensemble à les rendre encore plus efficaces.  Il a souligné en ce sens la « clairvoyance » de la Charte, dont le Chapitre VIII est relatif aux accords régionaux.  Il a également rappelé les « progrès spectaculaires » réalisé ces dernières années par le Conseil pour adopter des sanctions ciblées, minimisant ainsi leur impact sur les populations civiles.  Enfin, citant le cas de la libération du Koweït en 1991, il a rappelé que l’usage de la force « dans le respect des règles de la Charte » était « parfois indispensable pour faire respecter le droit international ».

En conclusion, M. Delattre a rappelé que la Charte avait été réformée par le passé, citant l’élargissement du Conseil de sécurité en 1965.  La France est favorable à une réforme du Conseil et sa position est bien connue, a-t-il ajouté, estimant que le Conseil devait « se montrer exigeant avec lui-même pour trouver les moyens de surmonter ses divisions ». 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a indiqué que la Charte, vieille désormais de 72 ans, était un « texte vivant » et fournissait tous les instruments nécessaires pour le maintien et la restauration de la paix.  Les États membres du Conseil ont l’obligation de se mettre d’accord afin que le Conseil puisse agir de manière efficace, a-t-il ajouté. 

Le représentant a mentionné trois domaines dans lesquels le Conseil pourrait agir de manière plus efficace.  Le premier d’entre eux est la prévention, a-t-il déclaré, ajoutant que l’un des moyens les plus efficaces de prévenir un conflit armé était le règlement pacifique des différends.  Il a ainsi exhorté les États Membres à accepter la clause de juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice.  M. van Oosterom a dans un deuxième temps plaidé pour l’amélioration des opérations de maintien de la paix et exhorté le Conseil à adopter des « mandats robustes ».  Enfin, le représentant a mis l’accent sur la redevabilité en exhortant le Conseil à agir afin que les décisions de la Cour pénale internationale soient mises en œuvre. 

M. van Oosterom a également plaidé pour la suspension du droit de veto des membres permanents du Conseil en cas d’atrocités de masse.  Les membres du Conseil ont l’obligation de trouver un terrain d’entente afin que le Conseil puisse agir de manière efficace, a-t-il réitéré, ajoutant que « les souffrances en Syrie, en particulier dans la Ghouta orientale, doivent cesser immédiatement ». 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a déclaré que le multilatéralisme était en péril, demandant que soit respectée l’égalité entre États souverains et rejetant l’emploi de la force ou la menace de la force, sauf lorsque tous les autres moyens pacifiques de résolution des conflits ont été épuisés.  Tous les efforts que nous fournissons au plus haut niveau resteront insuffisants si l’on ne s’attaque pas aux causes profondes des conflits, que ce soit le colonialisme ou l’impérialisme, qui est contraire au droit international, a assuré le représentant.  Il s’est ensuite élevé contre les interventions militaires conduites par des puissances étrangères ou le renversement anticonstitutionnel de gouvernements.

 

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