En cours au Siège de l'ONU

8187e séance – après-midi
CS/13220

Conseil de sécurité: « malgré une adversité toujours farouche, la paix est en marche en République centrafricaine »

« Malgré une adversité toujours farouche, la paix est en marche en République centrafricaine », a affirmé cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Parfait Onanga-Anyanga, appuyé par son homologue de l’Union africaine, M. Bedializoun Moussa Nébié.  Tous les intervenants ont néanmoins insisté sur la nécessité de continuer à soutenir tant le pays que la Mission de l’ONU. 

Venu présenter le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine, le Représentant spécial et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) a d’emblée reconnu qu’une « une grande partie de la population civile centrafricaine » continuait d’être affectée par des « violences et des abus inacceptables des droits de l’homme ».  Il a néanmoins attribué l’essentiel de ces violences et abus à des « groupes armés qui n’ont toujours pas renoncé à la violence criminelle et tardent à accepter la main tendue du dialogue offerte par le Gouvernement ».

C’est pourquoi, « malgré nos efforts, la voie de la paix, de la stabilité et de la réconciliation en Centrafrique reste longue et ardue », a poursuivi M. Parfait Onanga-Anyanga, d’autant que le retour compromis des réfugiés et des déplacés dans leurs lieux d’origine, « véritable drame humain », vient assombrir un tableau humanitaire déjà précaire.  « La vie de près de la moitié de la population centrafricaine serait inimaginable sans une assistance humanitaire d’urgence », a-t-il ajouté, avant de rendre hommage aux acteurs humanitaires.  Avec la protection de la population civile et la consolidation de l’État, la crise humanitaire a d’ailleurs été au centre des préoccupations des trois membres du Conseil -Pérou, Guinée équatoriale et Bolivie- qui sont intervenus en séance publique.

Mais, le Représentant spécial l’a affirmé, « ces sacrifices ne sont pas vains; nous regagnons chaque jour des pans entiers de la légitimité jadis perdue ».  M. Onanga-Anyanga a expliqué que le processus politique inclusif lancé par le Président Faustin Archange Touadéra se renforçait progressivement, de même que l’autorité de l’État, comme l’illustre l’installation de l’ensemble des préfets dans les 16 préfectures que compte le pays.  Ce processus, a-t-il ajouté, bénéficie de tout l’appui de la MINUSCA, ainsi que de celui de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation.

Au nom de l’Union africaine, M. Moussa Nébié, qui s’exprimait depuis Bouar, a détaillé la méthode de travail du Panel de l’Initiative, consistant à rencontrer les différents acteurs, y compris la société civile, les acteurs politiques locaux et les groupes armés, établir la confiance et recueillir leurs revendications pour les transmettre aux autorités, tout en les incitant à adhérer au processus de réconciliation.  Lui aussi s’est voulu optimiste, faisant valoir que « les progrès sont certes lents mais ce sont des progrès tout de même, compte tenu de la profondeur de la crise » que connaît le pays. 

Un des éléments essentiels du rétablissement de l’État est la profonde restructuration en cours des organes de sécurité et de défense, notamment des Forces armées centrafricaines (FACA), que le Représentant spécial du Secrétaire général a mis en avant.  Il a en particulier salué les progrès des FACA, devenues des « partenaires sur le champ des opérations » de la MINUSCA, ce qui, a-t-il insisté, était encore « inimaginable » il y a peu. 

Le Représentant spécial a salué le rôle central joué dans la réforme des FACA par la mission de formation de l’Union européenne (EUTM), dont le Directeur général de l’état-major de l’Union européenne, le général Esa Pulkkinen, a présenté la mission: le développement progressif d’une armée nationale forte de 9 800 personnes « contrôlée démocratiquement, professionnelle, crédible, responsable et équilibrée d’un point de vue ethnique et régional ».  Le redéploiement des FACA et des Forces de sécurité intérieures est un élément clef pour assurer le rétablissement des institutions publiques et des services dans l’ensemble du pays, ainsi que pour dissuader les groupes armés, a insisté le général.

Mais le général Pulkkinen a aussi averti qu’en cas de retrait de l’appui que la MINUSCA accorde aux FACA, les progrès réalisés jusqu’à présent seraient stoppés.  À elles seules, les FACA n’ont pas la capacité ni de se déployer, ni de s’entretenir.  L’élargissement de l’autorité de l’État cessera, a-t-il mis en garde. 

Ces propos sont venus appuyer le rappel par M. Onanga-Anyanga de la nécessité pour la MINUSCA de disposer des moyens d’exercer « une pression militaire significative » sur les groupes armés qui refusent toujours la paix, alors que l’augmentation de 900 Casques bleus des effectifs militaires de la Mission, décidée dans la résolution 2387 (2017) du 15 novembre dernier, n’est pas encore concrétisée.  La représentante de la RCA a elle aussi demandé au Conseil de veiller à ce que la Mission dispose des « moyens conséquents » à la mesure des « tâches colossales » qu’il lui a confiées. 

Au-delà de la Mission, c’est la République centrafricaine tout entière qui a besoin d’un soutien massif de la communauté internationale, a expliqué le Président de la formation République centrafricaine de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et Représentant permanent du Maroc.  M. Omar Hilale a précisé l’aide que la CCP apporte au pays, tout en regrettant que seuls 16% des projets financés en 2017 aient vu le jour.  La capacité d’absorption du Gouvernement, le manque de coordination entre les ministères et la présence des groupes armés empêchent la bonne utilisation des ressources financières internationales, a-t-il déploré.

Face aux « dirigeants politiques opportunistes qui ne veulent pas que la crise prenne fin » et emploient « tous les procédés possibles à cette fin » et dont l’entêtement a été dénoncé par le Représentant spécial, la représentante de la RCA s’est félicitée de l’extension dans la résolution 2399 (2018) des critères de désignation des personnes ou entités soumises aux sanctions du Conseil, jugées toujours nécessaires.  Elle en a souhaité l’application sans délai.  Le Président du Comité du Conseil de sécurité chargé des sanctions relatives à la République centrafricaine, M. Bernard Tanoh-Boutchoué, a présenté les activités de son Comité et insisté sur la nécessité d’une bonne coopération les acteurs régionaux. 

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Rapport du Secrétaire général sur la République centrafricaine (S/2018/125)

Déclarations

M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la République centrafricaine (RCA), a témoigné des violences et des atrocités qui continuent d’affecter une grande partie de la population civile centrafricaine, précisant qu’elles sont essentiellement le fait des groupes armés, « qui tardent à accepter la main tendue du dialogue offerte par le Gouvernement ».

Le Représentant spécial a aussi indiqué que le retour des réfugiés et des déplacés dans leurs lieux d’origine reste compromis par la violence et l’insécurité et a averti que ce « drame humain » vient assombrir un tableau humanitaire déjà précaire, « où la vie de près de la moitié de la population centrafricaine serait inimaginable sans une assistance humanitaire d’urgence ». 

« Malgré l’adversité toujours farouche, la paix est en marche en RCA », a poursuivi M. Onanga-Anyanga.  Le Gouvernement centrafricain est à pied d’œuvre pour restaurer l’autorité de l’État et renforcer les institutions démocratiques fraîchement établies.  Le processus politique inclusif initié par le Président Touadéra se renforce progressivement et une démarche politique impliquant les principaux acteurs et leurs partenaires sous-tend désormais les efforts multidimensionnels de sortie de crise en RCA. 

L’élargissement du Gouvernement pour le rendre plus représentatif de la société permet aujourd’hui les progrès tangibles dans l’extension de l’autorité de l’État avec l’installation de tous les préfets dans les 16 préfectures et de la majorité des sous-préfets, a ajouté le Représentant spécial.  En outre, le succès du projet pilote sur le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) donne l’espoir de lancer ce programme à plus large échelle, grâce à la contribution financière et technique de la Banque mondiale.

Les préparatifs pour le lancement des travaux de la Cour pénale spéciale sont bien avancés, a ajouté le Représentant spécial, se réjouissant que la campagne contre l’impunité, longtemps chronique et source de conflits récurrents, soit désormais lancée.  Bientôt, a-t-il ajouté, le dispositif de justice formel sera complété par la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle, permettant ainsi un meilleur équilibre entre justice et réconciliation nationale.  Le Représentant a estimé que le rôle central joué par la mission de formation de l’Union européenne (EUTM) dans la réforme des Forces armées centrafricaines (FACA) « est digne d’éloges ».  Il a expliqué que, de son côté, la MINUSCA renforce son action en appui aux forces de sécurité internes, notamment à travers le recrutement de gendarmes et de policiers.  Il faut maintenant tout faire pour assurer la pérennité de ces avancées, y compris par une mobilisation des ressources conséquentes pour les cinq prochaines années. 

Le Représentant spécial a par ailleurs fait observer qu’« il n’y a pas si longtemps, la simple idée d’une action commune MINUSCA-FACA était inimaginable ».  Nous sommes désormais partenaires sur le champ des opérations, comme récemment à Paoua, ou encore à Obo, dans le sud-est du pays, s’est-il félicité. 

Poursuivant en anglais, il a assuré que la MINUSCA n’épargnera aucun effort pour veiller à ce que la politique de tolérance zéro soit partie intégrante de son devoir de protéger.  Il a toutefois averti que si la MINUSCA ne dispose pas de la capacité pour exercer des pressions militaires sur les groupes armés qui demeurent réticents à accepter la paix, aucun processus de paix ne pourra voir le jour. 

Il a également indiqué que les 900 troupes supplémentaires, autorisées par le Conseil de sécurité lors du renouvellement du mandat de la MINUSCA, arriveront prochainement et permettront de renforcer les efforts déployés par la Mission pour réduire la menace posée par les groupes armés.

M. Onanga-Anyanga a par ailleurs fait savoir que ces derniers mois, les préfets de plusieurs régions avaient conclu des accords préliminaires avec les communautés et les acteurs armés, permettant l’instauration de cessez-le-feu au niveau local, de réduire la violence liée à la transhumance et d’améliorer l’accès à l’aide humanitaire et aux opportunités économiques. 

De l’avis du Représentant spécial, des efforts urgents sont toutefois nécessaires pour traduire le plan de redressement et de consolidation de la paix de la RCA en un programme effectif capable d’opérer un changement dans la gouvernance et la vie de la population.  Il a ensuite salué la décision du Chef de l’État d’accorder la priorité à l’élargissement de l’autorité de l’État et l’amélioration des services sociaux. 

Pour M. Onanga-Anyanga, la situation en RCA n’est pas aussi désespérée que semblent l’indiquer les chiffres.  Avec l’appui continu du Conseil de sécurité, les sacrifices et l’engagement de chacun, à commencer par les Centrafricains, il y a des raisons de demeurer optimiste et d’être convaincu que la paix, la stabilité et la prospérité seront bientôt à portée de main, a-t-il notamment affirmé.

M. BEDIALIZOUN MOUSSA NÉBIÉ, Représentant spécial de l’Union africaine (UA) pour la République centrafricaine, qui s’exprimait par visioconférence depuis Bouar, « à 450 kilomètres de Bangui », a expliqué la méthode utilisée par le Panel de facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation pour contribuer à la réconciliation dans le pays. 

M. Moussa Nébié a ainsi déclaré que les membres du Panel avaient établi un premier contact avec les groupes armés, lors duquel ils leur ont remis un message du Président de l’Union africaine, les invitant à adhérer à l’Initiative.  Le Panel a également rencontré les acteurs locaux de la vie politique.  Les conclusions des différents échanges ont été remises au Chef de l’État, au Président de l’Assemblée nationale, au corps diplomatique, aux membres de la société civile et au grand public via une conférence de presse. 

Le Représentant spécial a annoncé qu’une deuxième tournée du Panel aurait lieu en mars, au cours de laquelle il rencontrera les mêmes acteurs pour récupérer leurs propositions écrites, renforcer la confiance et obtenir un engagement plus ferme en faveur de la non-violence et du respect de l’autorité de l’État.  Les revendications des différents acteurs seront soumises au Gouvernement pour examen et un séminaire sera organisé à l’intention des groupes armés et des acteurs locaux de la société civile, avant un dialogue avec le Gouvernement, a encore précisé M. Moussa Nébié.

À l’issue de la première rencontre, des signes d’espoir pour un accord de paix étaient perceptibles, a affirmé le Représentant spécial, selon qui tous les groupes armés rencontrés ont accueilli favorablement le message du Président de l’Union africaine, exprimé leurs préoccupations et accepté d’en discuter.  Un groupe de contact permanent a été établi entre le Panel et les groupes armés, qui a permis au premier d’interpeller les seconds, lesquels avaient eu des « activités ou des velléités » de violences, a-t-il ajouté.

Pour M. Moussa Nébié, qui a également attribué les résultats obtenus aux autres acteurs internationaux, « les progrès sont certes lents mais ce sont des progrès tout de même, compte tenu de la profondeur de la crise politique » dans le pays.  Le Représentant spécial a enfin plaidé pour un soutien continu et accru du Conseil de sécurité et de la communauté internationale tout entière au processus de réconciliation en République centrafricaine, notamment sous la forme d’encouragements au Président du pays et à son gouvernement, d’un appel aux groupes armés et d’un appui au Panel pour qu’il puisse poursuivre son programme. 

Intervenant par vidéoconférence depuis Bruxelles, le général ESA PULKKINEN, Directeur général de l’état-major de l’Union européenne, a souligné que le redéploiement progressif et coordonné des unités des Forces armées centrafricaines (FACA) est crucial pour rétablir l’autorité de l’État et permettre à l’ONU et à l’Union européenne de réaliser leurs objectifs stratégiques.  Il a expliqué que la mission de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM) est une mission non armée qui contribue à la réforme du secteur de la défense dans le cadre de la réforme du secteur de sécurité coordonné par la MINUSCA.  La mission appuie notamment le développement progressif des FACA en des forces « contrôlées démocratiquement, professionnelles, crédibles, responsables et équilibrées d’un point de vue ethnique et régional ».

Il a indiqué que des FACA formées par l’EUTM avaient commencé à être déployées dans des opérations menées avec l’appui de la MINUSCA, « mais en petit nombre et avec des contraintes logistiques considérables ».  Le général a ajouté que la performance avait été jugée « favorable. »  Le redéploiement des Forces armées et des Forces de sécurité est un élément crucial pour le rétablissement des institutions publiques et des services dans l’ensemble du pays mais aussi pour dissuader les groupes armés.

Le général a précisé qu’une armée forte de 9 800 soldats est prévue d’ici à 2021, avec environ 4 500 hommes redéployés à l’extérieur de Bangui.  Cet effort de taille, notamment en matière de développement des infrastructures et des capacités, nécessitera un appui logistique effectif, a-t-il prévenu.  Alors que l’armée est largement confinée à Bangui, la MINUSCA a un rôle essentiel à jouer pour permettre à l’EUTM de tirer parti des avancées réalisées jusqu’à présent.

Le général a aussi souligné que l’appui fourni par la MINUSCA pour assurer le déploiement progressif et coordonné des garnisons est « absolument critique » pour le rétablissement de l’autorité de l’État.  Une armée décentralisée, capable de se déployer en dehors de Bangui est essentielle, a-t-il ajouté, non sans avertir que si l’appui que la MINUSCA accorde aux FACA est retiré, les progrès réalisés jusqu’à présent seront stoppés net.  L’élargissement de l’autorité de l’État cessera.

M. OMAR HILALE, Président de la formation République centrafricaine de la Commission de consolidation de la paix, a indiqué que sa formation fournit un accompagnement politique à la République centrafricaine, promeut une approche cohérente et intégrée dans les efforts de maintien de la paix et attire l’attention sur les lacunes capacitaires du pays.  La République centrafricaine étant à une étape critique de son histoire, le Président de la formation a souligné l’importance de lui apporter un soutien financier, seuls 16% des projets d’ores et déjà financés en 2017 ayant vu le jour.  La capacité d’absorption du Gouvernement, le manque de coordination entre les ministères et la présence des groupes armés empêchent la bonne utilisation des ressources financières internationales, a-t-il dit. 

M. Hilale a noté les progrès accomplis dans le rétablissement de l’autorité de l’État, avec le déploiement des préfets et de sous-préfets, et le redéploiement, au cours de l’armée, de la police et de la gendarmerie.  Le Président de la formation a souligné l’importance de la lutte contre l’impunité et les défis de la Cour pénale spéciale, dont le manque de ressources.  Il a également mentionné les lacunes dans la protection des témoins et des victimes, avant d’appeler à l’adoption rapide du projet de règles de procédure et d’administration de la preuve.  Cette Cour est cruciale pour remédier aux crimes internationaux, y compris les attaques contre les soldats de la paix de la MINUSCA. 

M. Hilale a également demandé qu’un soutien soit apporté au système judiciaire national.  Il a fermement soutenu l’Initiative africaine visant à la mobilisation de tous les efforts de paix en appui à la Feuille de route de Libreville, avant de se féliciter de la conclusion de la première série de consultations avec les groupes armés.  M. Hilale a salué la contribution de plus de 250 000 dollars du Fonds pour la consolidation de la paix et plaidé pour l’opérationnalisation rapide de la Commission Vérité, justice, réparation et réconciliation annoncée lors du Forum de Bangui en 2015.  La reprise économique, a-t-il conclu, sera l’élément clef pour maintenir la confiance dans les institutions de l’État et surmonter la crise humanitaire. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire), Président du Comité établi en application de la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine, a salué le lancement des consultations politiques dans le cadre de l’Initiative de l’Union africaine.  Il s’est en revanche inquiété de l’aggravation de la violence dans le sud-est et de nord-ouest du pays.  Tournant ensuite son attention sur les activités de son Comité, il a indiqué que les réunions publiques du 6 septembre et du 26 janvier avaient permis de se faire une idée complète de la manière de répondre au trafic d’armes par-delà les frontières et au braconnage des ressources naturelles.  Il a souligné que la coopération régionale est essentielle pour contrer les nombreux défis auxquels font face les pays d’Afrique centrale.  Il a toutefois averti que sans régime de sanctions, il sera difficile d’éliminer de manière efficace les racines du conflit.

Le Président du Comité a ensuite salué le travail du Service de la lutte antimines de l’ONU qui assure la bonne gestion des armes et des munitions, améliore leur stockage et construit des armureries permanentes en dehors de Bangui.  Il a également évoqué le travail du Groupe d’experts, attirant notamment l’attention sur l’inscription, le 17 mai, de M. Abdoulaye Hissène, sur la « Liste ».  Il a assuré que son Comité comprend pleinement les efforts déployés par les autorités de la République centrafricaine pour réarmer les Forces de défense et de sécurité, tout en soulignant la nécessité d’assurer une gestion sûre des armes et des munitions.

M. Tanoh-Boutchoué a affirmé que son Comité a déployé de nombreux efforts pour donner aux États Membres des indications sur le respect de l’embargo sur les armes.  À l’avenir, le Comité entend aussi élargir le dialogue avec les autorités nationales pour que l’embargo soit réellement perçu comme une façon d’aider le Gouvernement à réarmer les Forces de défense et de sécurité dans les règles.  Le Président du Comité a par exemple estimé que la détérioration de la situation sécuritaire dans le sud-est et le nord-ouest du pays justifie une mise en œuvre effective de l’embargo.

Il a aussi abordé la question de l’interdiction de voyager et remercié les autorités kényanes pour avoir transmis au Groupe d’experts des informations fiables indiquant qu’un individu sanctionné, M. François Bozizé, voyageait sous un nom d’emprunt.  Il a exhorté la République centrafricaine et les pays de la région à retirer de la circulation tous les passeports volés, falsifiés ou perdus, sans oublier les passeports diplomatiques invalidés.

Il a fait savoir que les avoirs de M. Abdoulaye Hissène avaient été gelés et noté néanmoins que les autorités centrafricaines n’ont toujours pas gelé les comptes et les avoirs de MM. Alfred Yékatom et Eugène Nagaïkosset, à qui elles auraient en outre continué de verser un salaire.  Il a exhorté les autorités à geler immédiatement les avoirs de ces deux individus.  M. Tanoh-Boutchoué a fait part de son intention de se rendre en République centrafricaine et dans les pays voisins pendant le courant de l’année.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a dit être engagé à soutenir la consolidation de la paix en RCA, citant en exemple la division d’ingénieurs des forces armées péruviennes envoyée sur place.  Il a jugé urgent de résoudre la crise humanitaire, en réaffirmant trois aspects fondamentaux.  Le premier est la nécessité urgente de mettre fin à la violence.  Il s’est inquiété en effet de la violence interethnique, des attaques contre la population civile et contre le personnel de la MINUSCA et les travailleurs humanitaires.  Il a salué les efforts de la MINUSCA et de l’Union européenne qui appuient la construction des forces militaires et politiques centrafricaines. 

Le deuxième point important pour le Pérou est la nécessité d’édifier et de consolider l’État en étendant sa présence sur tout le territoire.  Il a salué à cet égard les efforts de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation, lancée par l’Union africaine, qui a pour objet de faciliter le dialogue entre les groupes armés et la société civile.  Il est important, a-t-il ajouté, d’arriver à un accord pour faire avancer la mise en œuvre du plan d’expansion des préfectures, celles-ci ayant vocation à promouvoir la stabilité, la sécurité et le développement du pays.

En troisième lieu, le représentant a parlé de la protection de la population civile qui exige davantage d’efforts, tout en reconnaissant ce que font les autorités centrafricaines pour renforcer le système judiciaire et lutter contre l’impunité.  Le Pérou appuie le travail de la MINUSCA en matière de protection des civils et d’assistance humanitaire, a-t-il enfin déclaré avant de s’inquiéter que la force autorisée ne soit pas encore déployée à 100%.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est inquiété de l’impact du conflit et de la violence sur la population civile, constatant par ailleurs que la situation actuelle favorise les activités mafieuses et le pillage des ressources naturelles.  Il a aussi déploré le fait que malgré le succès des élections de mars 2016 et la présence de l’ONU dans le pays, les violations de droits de l’homme et les abus sexuels persistent.  Il s’est en revanche félicité des avancées réalisées par le Gouvernement en matière de désarmement, démobilisation et réintégration.  Le représentant a appelé à la mise en œuvre de l’Accord tripartie signé le 23 mai 2011 à Khartoum.  Il a aussi insisté sur l’importance de la réforme du secteur de la sécurité et de la défense, avant de citer le rôle des organisations régionales pour trouver une issue au conflit, à commencer par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a cité divers chiffres figurant dans le dernier rapport du Secrétaire général pour illustrer la situation humanitaire de la République centrafricaine où, par exemple, 2,5 millions de personnes ont un besoin urgent d’aide humanitaire.  Il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle maintienne son appui et se prépare à faire face à l’augmentation des besoins.  Il a condamné les attaques incessantes des groupes armés contre les civils et la MINUSCA et salué les efforts de la Mission pour identifier les régions qui ont besoin de capacités supplémentaires pour protéger la population.  Il a également souligné la nécessité de renforcer l’autorité de l’État, la coopération interinstitutions et la formation des Forces armées centrafricaines.

Le représentant a aussi salué les efforts constants du Gouvernement centrafricain pour assurer un dialogue inclusif, en vue d’aboutir à un accord entre toutes les parties.  Il s’est félicité des mesures prises pour rétablir les tribunaux et mettre fin à l’impunité et condamné les incitations à la violence, en particulier lorsqu’ils sont motivés par des considérations ethniques ou religieuses.  Il a lancé un appel au désarmement et s’est réjoui des programmes de déminage.  Enfin, il a évoqué les initiatives des organismes régionaux et sous-régionaux, qui sont « transcendantales pour un processus de réconciliation », pour autant que ces derniers agissent dans le strict respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la République centrafricaine.

Mme AMBROISINE KPONGO (République centrafricaine) a déclaré qu’après la fin de la transition politique et l’organisation d’élections crédibles et démocratiques, tous les espoirs étaient permis et que des progrès notables avaient été constatés dans plusieurs domaines, à la satisfaction de tous.  Or, « comme par enchantement », les violences intercommunautaires et ethniques ont resurgi sur presque toute l’étendue du territoire.  À la lecture du rapport du Secrétaire général, la représentante a avoué s’être dit que son pays n’était pas loin d’une rechute, « car nous sommes arrivés à la conclusion que 2017 a été l’année la plus critique, l’année de tous les dangers pouvant conduire au basculement ». 

S’interrogeant sur « ces combattants qui, au lieu de s’en prendre à leurs adversaires, attaquent les pauvres villageois, incendient les maisons et des villages entiers », elle a salué l’opération conjointe menée par les Forces de la MINUSCA et les Forces armées centrafricaines (FACA) dans la région de Paoua et a encouragé de telles actions « partout où le besoin se fait sentir », estimant qu’elles pourront à la longue réduire les tensions.

Il est clair, a estimé la représentante, que ce sont les rivalités entre les groupes armés et les milices d’autodéfense qui sont à l’origine de l’intensification et de la persistance des violences.  Ces violences, a-t-elle affirmé, sont fomentées par des « dirigeants politiques opportunistes qui ne veulent pas que la crise prenne fin » et emploient « tous les procédés possibles à cette fin ».  La représentante s’est donc félicitée que les incitations à la violence et les discours à caractère incendiaire aient été retenus comme critère de désignation dans la résolution 2399 (2018) adoptée fin janvier, par laquelle le Conseil de sécurité a renouvelé le régime de sanctions à l’égard de ceux qui menacent le processus de paix en République centrafricaine.  Elle a souhaité que cette résolution soit mise en œuvre sans délai. 

Concernant « l’autre source de préoccupation », à savoir le rétablissement et l’extension de la présence et de l’autorité de l’État, la représentante a précisé que le Gouvernement mettait « efficacement en œuvre, avec l’appui de la MINUSCA » sa feuille de route.  Toutefois, a-t-elle fait observer, « les réactions négatives de certains groupes armés peuvent constituer un sérieux frein » à ce processus.  Rappelant les « tâches colossales » que la résolution 2387 (2017) confère à la MINUSCA, elle a demandé au Conseil de sécurité de veiller à ce que la Mission dispose des « moyens conséquents » à la mesure des défis. 

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