Yémen: face à l’absence de concessions des parties au conflit, la « pire crise humanitaire au monde » se poursuit, s’alarme l’Envoyé spécial de l’ONU
L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Ismail Ould Cheikh Ahmed, a assuré, ce matin devant le Conseil de sécurité, où il intervenait pour la dernière fois en cette qualité, que la « seule chose qui manque » pour mettre fin au conflit dans ce pays en proie à la « pire crise humanitaire au monde causée par l’homme », « c’est l’engagement des parties à faire des concessions et à accorder la priorité à l’intérêt national ».
« Pour la première fois, nous étions sur le point de parvenir à un accord sur une proposition élaborée en concertation avec les parties. Mais elles ont refusé de la signer à la dernière minute », a-t-il déploré, en expliquant que les houthistes n’étaient pas disposés à faire des concessions sur les arrangements de sécurité proposés.
« Seuls les décideurs yéménites sont capables d’arrêter la guerre et l’effusion de sang; je le répète, seuls les décideurs yéménites sont capables de mettre fin à la guerre et à l’effusion de sang », a insisté le haut fonctionnaire, que M. Martin Griffiths remplacera très prochainement.
Le Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), M. John Ging, a, de son côté, expliqué qu’après trois ans de conflit, la situation humanitaire au Yémen est « catastrophique », avec un nombre « sans précédent » de civils en détresse, de 22,2 millions au total, dont 8,4 millions en insécurité alimentaire et près de 400 000 enfants âgés de moins de 5 ans atteints de malnutrition aiguë.
En outre, a-t-il précisé, près de deux millions de personnes sont déplacées à travers le pays, et 1,1 million de cas de choléra ont été recensés depuis avril 2017.
Dans ce contexte, le Plan d’aide humanitaire lancé par l’ONU pour le Yémen en 2018 exige la mobilisation de 2,96 milliards de dollars pour prêter assistance à 13,1 millions de personnes, a précisé le Directeur. Il s’est donc félicité à cet égard de l’annonce d’une contribution de 930 millions de dollars de la part des Gouvernements de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, un geste également salué par le Koweït, les États-Unis, le Pérou et la Pologne.
Si cette somme devrait être transférée au 31 mars prochain, il n’en reste pas moins que seul un tiers de ce plan est financé, a relevé M. Ging, en annonçant l’organisation d’une conférence des donateurs le 3 avril à Genève.
Sur le plan logistique, le principal défi qui se pose aujourd’hui est, selon lui, la pratique de la coalition menée par l’Arabie saoudite consistant à dérouter les conteneurs transportés par cargo vers Aden, entraînant retards et coûts supplémentaires, s’est-il alarmé. Le Directeur des opérations a également dit que « les forces affiliées aux houthistes » poursuivent leur bombardement de zones peuplées.
Les combats ont été particulièrement sanglants et destructeurs dans la province de Taëz, se sont émus MM. Ging et Ould Cheikh Ahmed, en attirant l’attention sur ceux qui, le 28 janvier, ont causé la mort de dizaines de personnes et blessé des centaines d’autres.
Plusieurs membres du Conseil de sécurité ont pointé du doigt la République islamique d’Iran, accusée d’avoir violé l’embargo sur les armes applicables au Yémen, en transférant des armes aux houthistes, notamment des missiles balistiques qui auraient été tirés en direction de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.
Les délégations américaine et britannique ont réitéré leurs regrets devant le vote, hier, de la Fédération de Russie, contre un texte soulignant cette responsabilité, un « échec retentissant », selon le représentant du Yémen.
À l’inverse, son homologue russe a, pour sa part, estimé que la prorogation hier du Groupe d’experts chargé de surveiller le régime de sanctions en vigueur au Yémen était un motif de satisfaction, dans un dossier éminemment complexe. « Nous devrions relancer le processus politique sans conditions préalables, plutôt qu’accuser certains pays », a estimé le représentant.
Le représentant du Yémen a demandé au Conseil de sécurité d’agir pour contraindre les houthistes à respecter ses résolutions pertinentes, rappelant qu’aucun État souverain ne saurait accepter la présence de groupes armés sur son territoire.
Assurant qu’ils sont « parrainés » par Téhéran, il a dénoncé les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire, dont les houthistes seraient également responsables.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Déclarations
M. ISMAIL OULD CHEIKH AHMED, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a déclaré que les parties poursuivent sur leur lancée destructrice à gains nuls sur le plan politique, plongeant le pays dans davantage de pauvreté et de destruction. Au cours des deux derniers mois, une nette escalade des opérations militaires a été observée à Hodeïda, à Jaouf, à Sanaa et à Beïda, ainsi que dans des zones près de la frontière yéméno-saoudienne. « Les houthistes continuent de tirer des missiles en Arabie saoudite », a-t-il affirmé.
Les combats ont été particulièrement sanglants et destructeurs dans la province de Taëz, notamment le 28 janvier, jour pendant lequel des dizaines de personnes ont été tuées et des centaines d’autres blessées, a déploré le haut fonctionnaire, en appelant à la retenue toutes les parties prenantes à Aden. M. Ould Cheikh Ahmed s’est dit particulièrement préoccupé par les informations faisant état du recrutement d’enfants soldats par toutes les parties au conflit, en particulier les houthistes, qui constitue une violation flagrante des droits des enfants.
Alors que le conflit s’aggrave, la crise économique et humanitaire aussi, faisant « de la crise humanitaire causée par l’homme au Yémen la pire au monde ». Depuis 2015, l’économie yéménite s’est effondrée et sa devise a perdu plus de 50% de sa valeur, avec pour corollaire une inflation spectaculaire et la difficulté pour la population de se procurer des articles de première nécessité. Les ménages yéménites perdent leur pouvoir d’achat.
Entre mars 2015 et aujourd’hui, le nombre d’habitants ayant besoin d’une aide sous une forme ou une autre est passé de 15,9 millions à 22,2 millions, a précisé l’Envoyé spécial. « Dans le contexte de ces défis humanitaires épouvantables, je salue la généreuse annonce de contributions d’un montant d’un milliard de dollars de la part de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en vue de soutenir l’action humanitaire et la reconstruction au Yémen, ainsi que leur engagement à lever 500 millions de dollars auprès d’autres donateurs dans la région. J’espère que ces initiatives se concrétiseront et que les fonds promis seront décaissés le plus rapidement possible pour améliorer la situation précaire actuelle », a déclaré M. Ould Cheikh Ahmed.
« Au cours des trois dernières années, et tout au long de mes rencontres continues avec les parties », a-t-il poursuivi, une base solide pour un accord a été établie avec l’approbation d’un cadre général à Bienne en 2015 et les discussions ayant eu lieu au Koweït en 2016.
« Ceux qui suivent de près le dossier reconnaîtront que les Nations Unies n’ont ménagé aucun effort pour aider les parties yéménites à trouver une solution pacifique. Au cours de mes interactions avec les parties, nous avons discuté des détails d’une feuille de route de la paix avec un calendrier clair, en tenant compte des besoins et des défis des parties », a expliqué M. Ould Cheikh Ahmed, alors qu’il s’exprimait aujourd’hui pour la dernière fois en sa qualité d’Envoyé spécial.
« Aujourd’hui, a-t-il ajouté, je voudrais annoncer que, pour la première fois, nous étions sur le point de parvenir à un accord sur une proposition de paix, élaborée en consultation avec les parties, mais qu’elles ont refusé de signer à la dernière minute », a-t-il expliqué. Au terme des consultations, il est devenu clair que les houthistes n’étaient pas disposés à faire des concessions sur les arrangements de sécurité proposés. « Cela a été une pierre d’achoppement majeure pour parvenir à une solution négociée », a constaté à regret le haut fonctionnaire.
« Nous avons une feuille de route pour la paix au Yémen », a-t-il assuré. La seule chose qui manque, c’est l’engagement des parties à faire des concessions et à accorder la priorité à l’intérêt national. C’est ce qui nous fait douter de leur réelle intention de mettre fin à cette guerre, s’est inquiété l’Envoyé spécial. « Seuls les décideurs yéménites sont capables d’arrêter la guerre et l’effusion de sang, je répète que seuls les décideurs yéménites sont capables de mettre fin à la guerre et à l’effusion de sang. »
M. JOHN GING, Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, a dit qu’après trois ans de conflit, la situation humanitaire était catastrophique. Un nombre sans précédent de 22,2 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire ou d’une protection, y compris 8,4 millions de personnes qui sont en insécurité alimentaire, a-t-il dit. Près de 400 000 enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë et près de deux millions de personnes sont déplacées, a poursuivi M. Ging, ajoutant qu’il y aurait 1,1 million de cas de choléra recensés depuis avril 2017.
Il a détaillé les efforts de l’ONU pour remédier à cette situation, l’Organisation apportant une aide alimentaire d’urgence à plus de sept millions de personnes en 2017. « Nous apportons une aide médicale à 3,2 millions de personnes », a déclaré M. Ging. Il a précisé que le Plan d’aide humanitaire pour le Yémen en 2018 demande la mobilisation de 2,96 milliards de dollars pour assister 13,1 millions de personnes. Assurer le financement de ce plan est crucial, a-t-il dit, en mentionnant l’annonce d’une contribution de 930 millions de dollars des Gouvernements de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. Cette somme devrait être transférée au 31 mars prochain, a-t-il dit. Néanmoins, seul un tiers de ce plan est financé, a déclaré M. Ging, en annonçant la tenue d’une conférence des donateurs le 3 avril.
Il a ensuite plaidé pour un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire, déplorant les obstacles bureaucratiques du fait des autorités yéménites. Ces dernières semaines, certains travailleurs humanitaires ont également fait l’objet de détentions temporaires sans raison, tandis que leur équipement est confisqué aux points de contrôle, a-t-il dit.
M. Ging a précisé que l’accès au pays s’est amélioré depuis la levée du blocus imposé par la coalition en décembre. « Notre principal défi aujourd’hui est la pratique de la coalition consistant à dérouter les conteneurs par cargo vers Aden, ce qui engendre des délais et des coûts supplémentaires », a-t-il dit. « L’aéroport de Sanaa demeure fermé aux vols commerciaux, empêchant des milliers de patients de se rendre à l’étranger pour recevoir des soins. »
M. Ging a jugé essentiel de maintenir le flux d’importations via tous les points d’entrée du pays, toute interruption ayant une incidence immédiate sur les prix des denrées alors que le risque de famine est bien réel. En janvier 2018, le prix des denrées est 55% plus élevé qu’avant l’escalade du conflit, a-t-il précisé. Le mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies est un système efficace pour examiner les importations via les ports de Hodeïda et de Salif, a-t-il dit, en se félicitant des efforts en cours pour renforcer ce mécanisme.
M. Ging a indiqué qu’en janvier, les agences onusiennes ont reçu 175 000 litres de carburant de la part de la coalition. Pour que de telles importations de pétrole puissent se poursuivre, les ports de Hodeïda et de Salif doivent rester ouverts, a insisté M. Ging.
Il a souligné la nécessité de payer les salaires des fonctionnaires, y compris ceux de près de 30 000 travailleurs du secteur de la santé, l’ONU et ses partenaires ne pouvant pas se substituer au secteur public. Toutes les parties doivent prendre les mesures nécessaires pour épargner les civils, lesquels continuent de souffrir du conflit, a-t-il dit. « Les forces affiliées aux houthistes poursuivent leur bombardement de zones peuplées », a-t-il dit, en mentionnant la frappe aérienne ayant touché le marché de Taëz et causé la mort d’au moins 60 civils.
En conclusion, M. Ging a exhorté tous les États Membres à prendre les mesures nécessaires afin que toutes les parties au conflit respectent le droit international.
M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a lui aussi déploré la gravité de la crise yéménite, en soulignant que le Gouvernement britannique est le deuxième plus important contributeur à l’assistance humanitaire fournie dans le pays. Mais l’aide seule ne suffira pas à répondre aux besoins du peuple yéménite, a-t-il prévenu. Toutes les parties doivent garantir un accès humanitaire aux populations en détresse, a-t-il insisté.
Le représentant a indiqué que le conflit en cours au Yémen a permis l’émergence d’un « espace non contrôlé » au sein duquel peuvent opérer les groupes terroristes, comme en témoignent les tirs de missiles balistiques effectués en direction de l’Arabie saoudite. « Nous sommes d’accord avec le Groupe d’experts chargé de surveiller la mise en œuvre du régime de sanctions applicables au Yémen, lequel a conclu à la responsabilité de l’Iran dans le transfert d’armes dans ce pays après l’imposition de l’embargo », a ajouté le représentant en conclusion.
M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté les parties à œuvrer pour inverser la tendance négative constatée l’année dernière au Yémen, le risque de fragmentation du pays étant bien réel. Le processus politique doit être ouvert, a-t-il dit. Il a insisté sur la gravité de la situation humanitaire dans le pays, avant de condamner toutes les attaques indiscriminées visant des civils, y compris les missiles balistiques des houthistes contre l’Arabie saoudite.
Assurer un accès humanitaire sans entrave n’est pas un acte de commisération, mais une obligation en vertu du droit international, a-t-il déclaré. Le délégué a demandé le plein accès aux ports et aéroports du pays, avant d’exhorter les parties à coopérer pleinement avec le mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies. « Nous exhortons les États Membres à ne pas inspecter les navires qui ont été inspectés par ce mécanisme », a-t-il affirmé.
Insistant sur l’importance de la lutte contre l’impunité, le délégué a mentionné l’examen en cours par un groupe d’experts éminents, mandaté par le Conseil des droits de l’homme, des violations des droits de l’homme et appelé les parties à l’appuyer.
Enfin, il a réitéré les demandes de son pays s’agissant de la situation au Yémen: des négociations substantielles, un accès humanitaire et le respect du droit international.
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a noté que la situation au Yémen s’était à nouveau complexifiée ces dernières semaines, suite notamment à l’assassinat de l’ancien Président Ali Abdullah Saleh et la prise de contrôle, par une coalition de groupes sudistes opposés au Président Abdrabbo Mansour Hadi, de la plus grande partie de la ville d’Aden. Il a averti que cette évolution récente éloignait la perspective d’une issue politique et ne devait pas remettre en cause l’intégrité territoriale du Yémen.
Le représentant a ensuite affirmé que la priorité de la communauté internationale doit être de répondre à la crise humanitaire que connaît le Yémen, « parmi les plus graves au monde ». Il a estimé que le Plan d’aide humanitaire de la coalition constitue une étape encourageante et a souligné que pour garantir son efficacité, celui-ci doit être mis en place en pleine coordination avec l’ONU et les organisations non gouvernementales.
Il a précisé que les approvisionnements humanitaires et commerciaux doivent être permis par tous les ports, y compris ceux de Hodeïda et de Salif, et tous les aéroports, notamment celui de Sanaa. Il a aussi souligné que la levée du blocus doit être reconduite sans ambiguïté, pour une période permettant une plus grande prévisibilité aux acteurs humanitaires et commerciaux.
M. Delattre s’est dit préoccupé par le risque de dégradation de la sécurité et de la stabilité régionales. Il a évoqué le vote, hier, du renouvellement technique du régime de sanctions, regrettant toutefois que le Conseil n’ait pas réussi à s’entendre sur « le premier projet mis au vote ».
Il a ensuite indiqué que la France continuera d’être mobilisée sur la question des transferts de technologies et biens balistiques dans la région, précisant qu’il s’agit d’un sujet que le Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France abordera lors que son déplacement à Téhéran le 5 mars.
Plus le conflit s’enlise, plus il apparaît évident qu’il n’y a pas de solution militaire au Yémen, a enchaîné le délégué. Il a estimé que la nomination du nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Martin Griffiths, donne l’opportunité à toutes les parties de se réengager sérieusement sans préconditions dans les négociations.
« Notre objectif à tous doit rester de parvenir à une cessation durable des hostilités et d’encourager les parties à renouer le dialogue », a-t-il insisté. La France espère que la relance du processus politique permettra de sortir de cette impasse catastrophique.
M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a remarqué que le Conseil de sécurité n’avait pas discuté de la situation au Yémen depuis près de trois mois, ce qui, a-t-il relevé, ne reflète pas l’urgence du terrain. Dénonçant la violence et s’inquiétant de la situation humanitaire, il a jugé que les efforts du Conseil étaient « clairement insuffisants » pour qu’il assume sa responsabilité. Le représentant a fait le parallèle avec la situation humanitaire en Syrie pour laquelle le Conseil a réussi à trouver un consensus, en demandant que le même effort soit consenti pour le Yémen.
Pour répondre à la situation humanitaire, M. Orrenius Skau a appelé le Conseil à réitérer son appel pour une cessation durable des hostilités, à exiger des parties qu’elles remplissent leurs obligations découlant du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et qu’elles assurent un accès humanitaire et commercial sans entrave. Il est maintenant essentiel que les ports du Yémen restent ouverts et opérationnels, en développant leurs capacités, a-t-il prôné.
Il a aussi appelé toutes les parties à s’abstenir de mesures susceptibles de restreindre les livraisons d’alimentation, de médicaments et de carburant. La Suède et la Suisse recevront avec les Nations Unies la Conférence de contributeurs de haut niveau de 2018 pour le Yémen, le 3 avril à Genève, a-t-il ajouté.
En outre, la Suède estime que la nomination du nouvel Envoyé spécial est l’occasion de relancer le processus politique, les membres du Conseil et les acteurs régionaux devant, dans ce contexte, user de leur influence pour s’assurer que les parties s’engagent avec l’Envoyé.
Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a rappelé que la crise humanitaire au Yémen est la pire au monde, affirmant que seule une solution politique permettra de mettre fin au conflit. Le peuple yéménite doit impérativement avoir accès à l’aide humanitaire, a-t-elle affirmé, en remerciant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis de leur récente annonce de contributions d’un montant d’un milliard de dollars.
Les États-Unis ont, quant à eux, fourni 700 millions de dollars depuis septembre 2016, un effort qui sera maintenu à l’avenir, a assuré la représentante. La représentante américaine a souligné les préoccupations sécuritaires légitimes de l’Arabie saoudite, accusant la République islamique d’Iran de violer le régime de sanctions imposées au Yémen.
Hier, la délégation russe a exercé son droit de veto, a regretté la représentante, parce que le projet de texte britannique faisait mention de l’implication de l’Iran, alors que le transfert d’armes par Téhéran vers le Yémen a été établi par le Groupe d’experts.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a mentionné la prorogation du Groupe d’experts hier par le Conseil, qui est un élément de progrès dans un dossier yéménite éminemment complexe. « Nous devons relancer le processus sans conditions préalables, plutôt qu’accuser certains pays », a affirmé le représentant russe. Force est de constater que le processus n’est pas arrivé à son terme, tandis que la situation humanitaire est catastrophique, a-t-il poursuivi.
Il a fait état des efforts faits pour améliorer cette situation, tout en ajoutant que ces efforts humanitaires ne règleront pas, seuls, la situation. Le délégué a en conséquence jugé capital de relancer un dialogue politique au Yémen. Le nouvel Envoyé spécial aura un rôle essentiel à jouer à cette fin, a-t-il conclu.
M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) s’est désolé de constater que l’accès à l’aide humanitaire est étranglé au Yémen. La rhétorique de plus en plus belliqueuse des parties au conflit a créé une situation intenable dans le pays, où les agences humanitaires doivent pouvoir circuler librement, a-t-il insisté.
Il y aurait plus de 1 000 cas de diphtérie recensés, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), s’est-il alarmé. Aussi le représentant a-t-il demandé la réouverture de tous les ports et la levée des entraves aux voies d’accès aux villes assiégées.
Il a en conclusion plaidé en faveur d’une action ferme de la part du Conseil de sécurité pour parvenir à une solution pacifique du conflit.
Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est dite très préoccupée par la détérioration de la situation humanitaire au Yémen. Des mesures rapides sont nécessaires pour mettre fin à cette situation, a-t-elle dit. Elle a jugé essentielle l’ouverture des ports yéménites et a exhorté les parties à lever toutes les entraves bureaucratiques au bon acheminement de l’aide humanitaire.
Elle a salué l’annonce de contribution de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en vue de financer la réponse humanitaire. Les parties doivent cesser leurs attaques contre les civils et les protéger, a-t-elle affirmé.
Enfin, la déléguée s’est dite convaincue qu’il n’y aura pas d’amélioration au Yémen sans un processus politique robuste, ouvert à tous, y compris les femmes et les jeunes, facilité par l’ONU.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a jugé préoccupant de voir la crise empirer au Yémen, estimant toutefois qu’il n’est pas trop tard pour mettre fin à cette situation. L’intégrité territoriale dans le pays n’est toujours pas garantie, a-t-il souligné, en déplorant les attentats qui y sont commis.
Mais cette crise ne pourra être résolue qu’au travers d’une solution politique, a assuré le représentant, qui s’est à cet égard félicité de la nomination du nouvel Envoyé spécial, sous l’égide duquel le processus politique doit être relancé.
Le délégué a également exhorté les bailleurs de fonds à financer le Plan d’aide humanitaire en faveur du Yémen, souhaitant que la Conférence d’annonces de contributions qui se tiendra à Genève le 3 avril serait couronnée de succès.
M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) s’est inquiété de l’impasse dans laquelle se trouve le processus politique au Yémen. Il a constaté que les perspectives d’un règlement politique s’éloignent, faisant planer le risque de voir le Yémen devenir un État en déliquescence. Il a averti que cette escalade met en péril la stabilité de toute la région et a invité les parties à une cessation immédiate des hostilités et à s’engager de manière significative dans la voie du règlement politique de cette crise. Il a notamment exhorté les parties à s’impliquer véritablement dans les pourparlers de paix qui se tiendront sous peu à Muscat, à Oman.
Le représentant s’est aussi préoccupé de la détérioration de la situation humanitaire, notamment des 22 millions de personnes nécessitant une aide d’urgence. Il a appelé les parties belligérantes à parvenir à un cessez-le-feu qui permettrait l’acheminement sans entrave de l’assistance humanitaire. Il a ensuite salué la réouverture, par la coalition arabe, des différents ports devant permettre l’acheminement des vivres.
Le délégué s’est aussi félicité du lancement du Plan d’aide humanitaire de 2018 pour le Yémen et a salué les « gracieuses contributions » de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit consterné par la situation humanitaire au Yémen, avant de juger indispensable une solution politique. Le nouvel Envoyé spécial doit recevoir le soutien nécessaire du Conseil, a-t-il dit. Il a condamné toute violation des droits de l’homme au Yémen, avant d’exhorter le Conseil à rester uni et à œuvrer pour protéger les civils.
Il a demandé l’ouverture permanente des ports yéménites, le plein accès à l’aéroport de Sanaa et la cessation des menaces pesant contre les travailleurs humanitaires au Yémen. Le délégué a en outre espéré l’adoption d’une déclaration présidentielle dans les plus brefs délais.
Il a salué les annonces de contribution de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis en faveur du Plan d’aide humanitaire. Le régime de sanctions reste essentiel pour parvenir à une solution politique, a conclu le délégué du Pérou.
M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a confié être alarmé par la grave situation humanitaire qui prévaut au Yémen et a appelé à augmenter l’aide et à fournir un accès sans entrave à toutes les zones du pays. À ce titre, il a salué la décision de la coalition d’ouvrir tous les ports terrestres, aériens et maritime du Yémen pour permettre l’entrée et la sortie de fournitures.
Il a salué le Plan d’aide humanitaire de 2018 pour le Yémen, qui vise à récolter 2,96 milliards de dollars pour aider 13 millions de personnes. Il a aussi fait part de son appréciation à la Suède et à la Suisse pour l’organisation, en avril, de la Conférence d’annonces de contributions pour le Yémen, ainsi qu’à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis qui ont déjà contribué à près d’un milliard de dollars et visent à lever 500 millions de dollars supplémentaires.
Le représentant a ensuite appelé à redoubler d’efforts pour résoudre les tensions intrayéménites et renforcer la lutte contre le terrorisme, engageant notamment les forces politiques yéménites à faire front commun pour empêcher les terroristes de consolider leurs forces.
Il a aussi appelé les parties à faire preuve de souplesse pour résoudre la « question complexe » du retrait des forces, du désarmement et de la création d’un gouvernement d’unité nationale.
Le délégué a estimé que le Conseil de sécurité doit repenser sa stratégie eu égard à la situation au Yémen afin de la lier à l’ensemble des piliers de l’ONU.
M. SHEN BO (Chine) a appelé la communauté internationale à accroître ses efforts auprès des parties pour les aider à trouver une solution négociée. Selon lui, la prorogation hier du mandat du Groupe d’experts est de nature à contribuer aux conditions nécessaires à l’émergence d’un accord entre les parties.
Le représentant s’est ensuite félicité de la nomination du nouvel Envoyé spécial, M. Martin Griffiths. Il s’est ensuite déclaré préoccupé par l’étendue des souffrances endurées par le peuple yéménite, auquel la Chine continuera de fournir une aide humanitaire par le biais de canaux bilatéraux et multilatéraux.
M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a déclaré que la résolution adoptée hier était un élément important en vue de parvenir à une solution à la situation chaotique au Yémen. Il est urgent d’agir au Yémen, a-t-il dit, en ajoutant que toute action devait respecter les principes et buts de la Charte des Nations Unies.
Il a exhorté les autorités yéménites à œuvrer pour améliorer la situation humanitaire au Yémen, avant de saluer le soutien précieux des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite. Les États Membres doivent respecter l’embargo sur les armes et s’abstenir d’entraver l’aide humanitaire, a-t-il dit.
Enfin, le représentant de la Guinée équatoriale a exhorté les parties au conflit à remédier aux conséquences désastreuses de la guerre sur les civils.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a affirmé qu’il n’y aura pas de solution militaire au règlement de la crise au Yémen. Il a fait valoir les efforts de médiation déployés par son propre pays en ce sens, avant de dénoncer les tirs de missile balistique effectués par les houthistes en direction de l’Arabie saoudite, et les allégations d’attaques commises par eux contre les Émirats arabes unis. Il s’agit là d’un « développement dangereux », a-t-il prévenu, estimant que le Conseil de sécurité ne peut accepter de telles actions contre un État souverain.
La sécurité des passages maritimes est également une question d’importance, a poursuivi le représentant, pour qui les attaques ou les menaces d’attaques contre des navires dans la mer Rouge doivent être catégoriquement condamnées.
Le Koweït s’est enfin félicité de l’annonce, par la coalition, d’un plan global d’opérations humanitaires, qui a été salué par le Secrétaire général de l’ONU, un plan assorti de contributions d’un montant d’un milliard de dollars, soit le tiers de l’appel humanitaire lancé par l’ONU en 2018 pour le Yémen.
M. KHALED HUSSEIN MOHAMED ALYEMANY (Yémen) a dénoncé les agissements des houthistes qui ont fait retomber le Yémen dans la guerre. Il a salué la nomination du nouvel Envoyé spécial et apporté le soutien de son pays à l’exécution de son mandat.
Aucun État souverain ne saurait accepter la présence de groupes armés sur son territoire, a-t-il affirmé. Le Conseil de sécurité doit agir pour que les houthistes respectent les résolutions du Conseil, a affirmé le délégué. Les houthistes doivent rendre les missiles fournis par la République islamique d’Iran et cesser d’attaquer les pays voisins et d’enrôler des enfants, a-t-il lancé.
Les houthistes n’ont aucun égard pour les droits de l’homme et ont une mentalité proche de celle de Daech, a-t-il dit. Le délégué a accusé les houthistes d’œuvrer à la déstabilisation de la région et à l’avancement des visées expansionnistes de l’Iran. « Les houthistes ne sont pas prêts à faire des concessions. »
Il a déploré le fait que le Conseil ait échoué hier à envoyer un signal fort à l’Iran. « C’est un échec retentissant. » L’Iran cherche à déstabiliser toute la région en parrainant le terrorisme, a-t-il dit. Il a dénoncé les violations du droit humanitaire par les houthistes, ceux-ci empêchant le bon acheminement de l’aide humanitaire.
Il a salué l’annonce de contribution de l’Arabie saoudite en faveur de la réponse humanitaire au Yémen et exhorté les États Membres à en faire de même. Les houthistes exploitent la crise humanitaire en jouant les victimes, a-t-il affirmé, en déplorant l’échec de la communauté internationale pour qu’ils s’assoient à la table des négociations.
Enfin, le délégué du Yémen a exhorté le Conseil à ne pas abandonner le peuple yéménite.