En cours au Siège de l'ONU

L’Assemblée générale entame son débat de haut niveau sur la consolidation et la pérennisation de la paix en mettant l’accent sur la prévention

Soixante-douzième session,
83e et 84e séances plénières, Matin & après-midi
AG/12011

L’Assemblée générale entame son débat de haut niveau sur la consolidation et la pérennisation de la paix en mettant l’accent sur la prévention

Face à la multiplication des conflits dans le monde, les impératifs de la prévention, de la médiation et du développement ont figuré au cœur des appels des délégations venues participer, aujourd’hui, au lancement du débat de haut niveau de l’Assemblée générale sur la consolidation et la pérennisation de la paix.  « La paix durable, c’est la mise en place d’un environnement respectueux de la dignité humaine », a résumé le Roi des Belges Philippe 1er

Mais actuellement, « le monde, dans une grande mesure, recule », a diagnostiqué le Secrétaire général de l’ONU, prenant pour preuve, outre l’augmentation des conflits, le nombre record de personnes déplacées par la violence et de civils tués par des explosifs dans les villes, ainsi que la montée du nationalisme, du racisme et de la xénophobie.

C’est dans ce contexte qu’en 2016, l’Assemblée générale* et le Conseil de sécurité avaient adopté des « résolutions jumelles » dans le but de définir une nouvelle approche en matière de consolidation et de pérennisation de la paix, textes auxquels s’est ajouté par la suite le vaste projet de réforme de l’architecture de maintien de la paix engagé par l’actuel Secrétaire général.

« La difficulté aujourd’hui, c’est de faire de cette vision une réalité et de définir les manières d’agir les plus optimales », a constaté le Président de l’Assemblée générale, M. Miroslav Lajčák, souhaitant pour cela que l’ONU serve de moteur pour la diplomatie. 

En la matière, le Secrétaire général a vu dans le développement inclusif, ancré dans le respect des droits de l’homme, le meilleur outil de prévention contre les conflits violents et l’instabilité.  Investir dans la paix durable revient à investir dans les services de base, la protection des droits de l’homme, la promotion de la cohésion sociale et de l’énergie durable, sans oublier une éducation de qualité et des emplois décents pour les jeunes, a-t-il notamment indiqué.

Cette première journée de débat a été marquée par des appels pour des investissements plus solides dans le maintien de la paix et la prévention.  Le financement est essentiel, ont dit les délégations en s’appuyant sur un rapport de la Banque mondiale selon lequel chaque dollar dépensé pour la prévention permet de mettre 7 dollars de côté et de les investir dans le développement au lieu d’être dépensés en riposte.

M. António Guterres a, de son côté, souhaité que l’on porte les ressources du Fonds pour la consolidation de la paix à 500 millions de dollars par an.  Il a fait valoir notamment que le Fonds avait démontré sa capacité à intervenir rapidement face à l’imminence d’une situation de crise.

Outre ce fonds, le Secrétaire général a cité les autres moyens dont s’est récemment dotée l’ONU, comme son Conseil consultatif de haut niveau sur la médiation qui a été mandaté pour renforcer l’expertise des diplomates, ou encore le lancement, le mois dernier, d’une « Action pour le maintien de la paix » pour mobiliser davantage de soutien et rendre les missions de maintien de la paix de l’ONU plus fortes et plus sûres.  À cela s’ajoute le renforcement de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et la revitalisation du Bureau d’appui à la consolidation de la paix.

Les délégations ont par ailleurs été nombreuses à réclamer une plus grande cohérence entre les trois piliers de l’ONU et à insister sur l’importance des partenariats, notamment avec les organisations régionales et sous-régionales, le maintien de la paix ne devant pas, pour citer le Président de l’Assemblée, être un domaine d’expertise réservé à l’ONU.  « L’ONU ne peut pas se permettre de faire cavalier seul », a dit en écho la Ministre des affaires étrangères de la Suède.  Le cas de la Gambie a été cité comme exemple de ce qui peut être fait au niveau régional pour prévenir l’escalade, et grâce à une coopération étroite entre les tous les acteurs. 

Les appels se sont aussi multipliés en faveur d’une plus grande participation des femmes, à l’instar de l’actrice et Ambassadrice de bonne volonté pour le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Mme Michelle Yeoh, pour qui les femmes doivent être des agents actifs dans la résolution de conflits, pas seulement des bénéficiaires.

« Il faut opter pour une approche plus holistique qui mette les femmes au centre des discussions », a renchéri Mme Joy Onyesoh, Présidente de Women’s International League for Peace and Freedom (WILPF), au Nigéria, qui a jugé nécessaire d’appuyer la participation des femmes au niveau local.

Mais pour l’Envoyée du Secrétaire générale pour la jeunesse, ce qui importe avant tout, c’est de mettre un terme à l’exclusion des jeunes des processus de participation politique.  « La participation effective des jeunes, c’est de la prévention », a ainsi déclaré Mme Jayathma Wichramanayake.

Dans la même veine, M. Ishmael Beah, défenseur pour l’UNICEF des enfants affectés par la guerre, a invité les États Membres à se soucier du sort des enfants trouvés dans les rangs des groupes terroristes et extrémistes.  Cet ancien enfant soldat s’est notamment inquiété du fait que dans certains pays, comme l’Iraq, le Nigéria ou encore la France, ces enfants font face, dans le cadre des efforts de lutte contre le terrorisme, à des procès ou des châtiments, au lieu de bénéficier d’une véritable réhabilitation.

Enfin, le Président de la Colombie, M. Juan Manuel Santos Calderón, a insisté sur l’importance d’ouvrir les « portes de la démocratie » aux anciens combattants, citant le cas des Forces armées révolutionnaires de Colombie - Armée populaire (FARC-EP) qui sont devenues un parti politique de l’opposition, « ce qui leur permet d’agir auprès des populations sans brandir les armes ».

L’Assemblée générale poursuivra son débat de haut niveau sur la consolidation et la pérennisation de la paix demain, mercredi 25 avril, à partir de 10 heures.

* A/RES/70/262

RÉUNION DE HAUT NIVEAU SUR LA CONSOLIDATION ET LA PÉRENNISATION DE LA PAIX (A/72/L.49)

Déclarations liminaires

M. MIROSLAV LAJČÁK, Président de l’Assemblée générale, a estimé que si d’une certaine façon, l’ONU avait tenu ses promesses en évitant une autre guerre mondiale, d’un autre côté elle n’avait pas réussi à honorer son engagement découlant de la Charte: « Nous avons attendu trop longtemps pour agir.  Nous n’avons pas été là quand les gens avaient besoin de nous.  Nous aurions pu faire plus, répondre aux conflits et encore davantage pour les empêcher de se produire. »  C’est pourquoi, a-t-il rappelé, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité ont adopté en 2016 une nouvelle approche avec des résolutions sur la pérennisation de la paix et se sont ainsi engagés à agir de manière plus précoce et optimale pour prévenir les souffrances découlant des conflits.

La difficulté, aujourd’hui, c’est de faire de cette vision une réalité et de définir les manières d’agir les plus optimales, a-t-il constaté en citant les peuples qui attendent cela, en Syrie, au Soudan du Sud, au Yémen, en Libye, ou encore en Somalie et en Afghanistan.  Il s’est aussi alarmé de la montée en flèche des discours haineux et du mépris croissant pour les principes et systèmes que la communauté internationale a mis 70 ans à façonner.

Le Président de l’Assemblée générale a déclaré que la prévention devait être la priorité, mettant l’accent sur l’importance de la médiation et de la diplomatie menées au niveau tant local que national.  L’ONU doit agir davantage dans ce sens et être prête à agir grâce à ses bons offices, a-t-il souhaité en misant aussi sur les acteurs régionaux qui ont également un rôle critique à jouer.  Et finalement, cela doit se produire ici - sur la scène internationale, a-t-il ajouté en souhaitant que l’ONU serve de moteur pour la diplomatie.  Pour M. Lajčák, « on ne peut laisser les graines de violence contaminer les graines de la paix ».

Il a ensuite appelé à une plus grande cohérence entre les trois piliers de l’ONU.  On ne peut plus isoler le travail humanitaire ou le maintien de la paix, ni le développement durable, a-t-il constaté, plaidant pour plus de cohérence et de liens.

M. Lajčák a aussi insisté sur l’importance des partenariats, car le maintien de la paix ne doit pas, a-t-il dit, être un domaine d’expertise de l’ONU seule.  « Sans écouter les partenaires régionaux, tous nos efforts seront voués à l’échec », a-t-il fait observer, citant le cas de la Gambie comme exemple de ce qui peut être fait au niveau régional pour prévenir l’escalade.  Il a également appelé à faire appel davantage au secteur privé et à élaborer des partenariats novateurs pour attirer des financements.

Le financement est essentiel, a-t-il poursuivi en plaidant pour des investissements plus solides dans le maintien de la paix.  Citant un rapport de la Banque mondiale, il a indiqué que pour chaque dollar dépensé pour la prévention, 7 dollars sont mis de côté, 7 dollars qui, a-t-il insisté, pourront être investis dans le développement au lieu d’être dépensés en riposte.

Le Président de l’Assemblée générale a enfin plaidé pour une approche sans exclusive, déplorant notamment que les femmes soient souvent considérées comme des victimes et les jeunes comme des fauteurs de trouble.  Les enjeux sont bien trop élevés et les conséquences des conflits bien trop odieuses et c’est pour cela qu’il faut aller au-delà des déclarations et ajouter de la substance à nos paroles, a-t-il conclu.

Le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, a rappelé les « résolutions jumelles » adoptées par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité il y a deux ans, qui ont envoyé un message sans équivoque qu’il faut travailler mieux ensemble pour la pérennisation de la paix à toutes les étapes d’un conflit et dans toutes ses dimensions. 

Tout en relevant les avantages que présente la mondialisation, le Secrétaire général a remarqué que le monde, dans une grande mesure, recule.  Il en a pris pour preuve le nombre croissant de pays qui font l’expérience d’un conflit violent, le chiffre record de civils tués ou blessés par des explosifs dans les villes, le nombre record de personnes obligées de se déplacer à cause de la violence, de la guerre et de la persécution, les atroces violations des droits de l’homme, ou encore la montée du nationalisme, du racisme et de la xénophobie.

Le Secrétaire général a également noté que les inégalités augmentent, notamment pour les femmes et les filles.  « Tout cela nous indique que nous avons besoin d’une plus grande unité et de plus de courage », a-t-il dit en voulant jeter les bases d’une paix et d’un développement durables.

M. Guterres a souligné le message central de son rapport sur la consolidation et la pérennisation de la paix qui est que « nous devons renforcer la cohérence des efforts internationaux qui soutiennent les gouvernements nationaux et leurs peuples ».  Il a mis l’accent sur le besoin de partenariats opérationnels entre les acteurs les plus importants comme les gouvernements, l’ONU et les autres organisations internationales, les organisations régionales et sous-régionales, les institutions financières internationales, les organisations de la société civile, les groupes de femmes, les organisations de jeunes et le secteur privé.

Un renforcement des partenariats est en cours, a-t-il assuré avant de parler de ce que fait son Conseil consultatif de haut niveau sur la médiation qui a été mandaté pour renforcer l’expertise des diplomates chargés de soutenir l’action en faveur de la paix partout dans le monde.  Il a aussi indiqué avoir lancé, le mois dernier, une initiative appelée « Action pour le maintien de la paix », qui vise à mobiliser davantage de soutien et à rendre les missions de maintien de la paix de l’ONU plus fortes et plus sûres.

À cela s’ajoute un renforcement de la Commission de consolidation de la paix (CCP), en revitalisant le Bureau d’appui à la consolidation de la paix et en renforçant son rôle, a dit le Secrétaire général.  « Tous ces efforts commencent à porter des fruits », a-t-il constaté en citant le cas du Libéria, tout en reconnaissant qu’il reste encore beaucoup à faire.

À ce propos, il a mis l’accent sur l’inclusion des femmes dans les processus de consolidation de la paix et cité le Plan d’action en sept points des Nations Unies sur la participation des femmes dans ce domaine.  Il a aussi salué le nouveau rapport sur les jeunes, la paix et la sécurité qui reconnaît aussi la contribution majeure des jeunes à la cause de la paix.

Par-dessus tout, c’est le développement inclusif, ancré dans le respect des droits de l’homme, qui est le meilleur outil de prévention contre les conflits violents et l’instabilité, a affirmé le Secrétaire général en se référant à la feuille de route, le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a appelé à investir dans la paix durable, ce qui signifie des investissements dans les services de base, le travail en commun des agences de développement et humanitaires, la protection des droits de l’homme, la promotion de la cohésion sociale et de l’énergie durable.  Il a ajouté à cette liste une éducation de qualité et des emplois décents pour les jeunes, en plaidant au final pour « une approche holistique ».

Le Secrétaire général a ensuite détaillé ce que contient son rapport: des propositions visant à ce que l’appui concerté apporté aux États Membres par l’ensemble des organismes des Nations Unies soit plus efficace et plus efficient, grâce à une réforme des secteurs du développement, de la gestion et de la paix et la sécurité.  « Je suis déterminé à préparer l’Organisation des Nations Unies au monde de demain », a-t-il réitéré. 

Pour cela, son financement est essentiel, a averti le Chef de l’ONU en rappelant que, ces 10 dernières années, la communauté internationale avait consacré 233 milliards de dollars aux interventions humanitaires, au maintien de la paix et à l’accueil des réfugiés.

Appelant à investir beaucoup plus dans la prévention -parce qu’elle est efficace, économique et sauve des vies-, le Secrétaire général a fait remarquer ce que le Fonds pour la consolidation de la paix a déjà été capable de réaliser.  Le Fonds a en effet démontré sa capacité à apporter un appui aux partenaires nationaux, à soutenir la transition vers la paix et la stabilité, à renforcer la cohérence en distribuant des ressources par l’intermédiaire de plus de 25 organismes des Nations Unies et partenaires, y compris des gouvernements, et à faire concorder ses objectifs avec ceux des institutions financières internationales et d’autres acteurs. 

« Le Fonds est réactif et peut intervenir rapidement face à l’imminence d’une situation de crise », a relevé M. Guterres en soulignant aussi son rôle de catalyseur pour mobiliser des fonds auprès d’autres bailleurs.  Le Fonds finance des projets dans lesquels personne d’autre ne se risque à investir et il favorise la diversité et l’inclusion puisque nombre de ses programmes viennent en aide aux femmes et aux jeunes, a-t-il aussi remarqué.

Il a réitéré sa proposition d’accroître, de restructurer et de hiérarchiser le financement des activités de consolidation de la paix en faisant appel à des contributions volontaires, régulières et à des financements innovants.  « Je demande une nouvelle fois que l’on porte les ressources du Fonds à 500 millions de dollars par an », a plaidé M. Guterres avant de rappeler sa proposition d’augmenter de 50% le nombre de postes permanents au Bureau d’appui à la consolidation de la paix, ce qui pourra être fait sans engager de frais supplémentaires grâce aux économies découlant de la réforme.

Le Secrétaire général, qui a annoncé faire une intervention demain devant le Conseil de sécurité sur le même sujet, a appelé cet organe et l’Assemblée générale à continuer leurs efforts pour consolider la paix à tous les niveaux. 

Mme MICHELLE YEOH, actrice et Ambassadrice de bonne volonté pour le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a remarqué que dans un grand nombre de conflits de longue durée, « les civils sont devenus des cibles », ajoutant que la moitié des réfugiés dans le monde sont des enfants, « la plupart séparés de leur famille ».

Trop souvent, les femmes et filles sont en proie à l’esclavage et au mariage forcé, et les enfants victimes de violences, a insisté Mme Yeoh, pointant l’effet dévastateur de ces crimes sur leur développement et le risque pour ces victimes de répéter un cycle malheureux en devenant elles-mêmes prédatrices une fois adultes.  « Nous devons prévenir les conflits avant tout pour épargner des vies et des millions de dollars », a-t-elle aussi plaidé, soulignant le coût énorme des conflits pour la communauté internationale quand elle doit répondre à ces crises.

La communauté internationale ne doit pas faillir à ses responsabilités car « la prévention des conflits est notre mandat, nous devons l’assumer », a-t-elle poursuivi, avant d’évoquer l’autonomisation des femmes et leur participation dans la société comme facteurs essentiels pour la paix et la prospérité à long terme.  Dans le même sens, « les femmes devraient être des agents actifs dans les résolutions de conflits, pas seulement des bénéficiaires », a-t-elle insisté, ajoutant que l’égalité des sexes constituait un facteur important dans la réalisation de la paix et du développement durables et de la prévention des conflits.

Dans ce but, Mme Yeoh a appelé à une levée de fonds et à davantage de ressources pour faire avancer ce projet, « élément clef dans la réalisation du Programme 2030 ».  Mettant enfin en parallèle paix durable et développement durable, Mme Yeoh a argué qu’on ne pouvait pas avoir l’un sans l’autre, et que les inégalités menaient elles aussi à des conflits. 

M. ISHMAEL BEAH, défenseur pour l’UNICEF des enfants affectés par la guerre, a déclaré que si on consolide la paix sans tenir compte du sort des enfants, sans les protéger pour qu’ils deviennent des citoyens actifs de leur société et des êtres humains décents, tous les efforts déployés par l’ONU auront échoué.  Il s’est inquiété de l’état actuel du monde où tant d’enfants vivent en situation de conflit et sont la cible de violences.  Dans de nombreuses régions du monde, les enfants sont sujets à un niveau de brutalité inouïe, s’est-il alarmé, citant des cas d’enfants utilisés comme boucliers humains, d’enfants violés ou encore mariés de force.  M. Beah a relevé que ces pratiques sont devenues normales dans certains conflits, auxquelles il faut ajouter les problèmes de malnutrition et le manque d’accès à la santé et à l’éducation dont souffrent de nombreux enfants. 

Parmi toutes ces horreurs, M. Beah a toutefois relevé quelques lueurs d’espoir citant notamment la libération, la semaine dernière, au Soudan du Sud, de 250 enfants soldats.

Le défenseur des enfants affectés par la guerre a déploré le manque d’engagement des États à mettre en œuvre les « idées magnifiques » mises sur papier, regrettant aussi que nombre d’entre elles ne soient pas non plus juridiquement contraignantes.

M. Beah a encouragé les délégations à prendre connaissance d’un rapport de l’Université des Nations Unies consacré à la radicalisation et à la déradicalisation.  Il les a aussi invités à adopter des approches différentes pour traiter de la situation des enfants qui se trouvent au sein de groupes terroristes et extrémistes. 

Il a en effet déploré que dans certains pays ces enfants fassent l’objet de procès ou de châtiments, car leur association avec des groupes extrémistes est criminalisée, au lieu de faire un véritable effort de réhabilitation.  Il a noté que certains États poursuivent les jeunes dans le cadre de la législation contre le terrorisme, citant notamment le cas de l’Iraq où 1 400 femmes et enfants sont détenus en raison de leur affiliation à Daech.  Et au Nigéria, des milliers de jeunes sont détenus pour leur association avec Boko Haram alors que nombre d’entre eux auraient été arrêtés de manière arbitraire au moment où ils cherchaient à fuir le groupe.

M. Beah a également pointé la situation en France où, dans le cadre du durcissement de la lutte contre le terrorisme, une période de détention préventive allant jusqu’à trois ans est prévue pour les jeunes de moins de 16 ans arrêtés dans l’attente de leur procès ayant trait au terrorisme.  Ailleurs, les enfants soupçonnés d’appartenir à des groupes armés se voient retirer leur passeport et nier la possibilité de regagner leur pays d’origine, comme par exemple en Grande-Bretagne.

En conclusion, M. Beah a plaidé pour des exceptions à ces systèmes, pour pouvoir assurer avant tout la protection des enfants.  « Pour construire la paix dans le monde, nous devons veiller à ne pas violer les principes mêmes de la dignité humaine », a-t-il argué.

Mme JOY ONYESOH, Présidente de Women’s International League for Peace and Freedom (WILPF) au Nigéria, a rapporté l’histoire d’Amina, une très jeune mère de trois enfants qu’elle a rencontrée dans le nord-est du Nigéria.  Amina a fui les assauts de la secte terroriste Boko Haram avec un enfant dans le dos, a-t-elle relaté.  Mme Onyesoh a donné cet exemple pour sonner l’alerte et attirer l’attention sur le coût humain des conflits et le coût démesuré que payent les femmes.  « Il faut opter pour une approche plus holistique qui mette les femmes au centre des discussions », a-t-elle plaidé en demandant aussi d’amplifier la participation des femmes au niveau local. 

Mme Onyesoh a souligné le nombre important de femmes qui doivent vivre chaque jour en situation de conflit dans le monde et appelé à réduire les violences « issues du genre masculin ».  Elle a également recommandé de « prioriser » et de « hiérarchiser » ces questions en veillant à ce que la société civile participe activement à les résoudre.  Un accès amélioré à la justice et des aides financières pour le microdéveloppement sont aussi des éléments cruciaux, a-t-elle ajouté.

Se félicitant des travaux accomplis par les différentes missions sur le terrain et des propositions du Secrétaire général en matière d’amélioration du droit des femmes, Mme Onyesoh a cependant remarqué que « le financement dans ce but reste très inadéquat », un financement qui a même diminué chez les grands pays donateurs, a-t-elle remarqué.  Elle a donc appelé à un financement accru, notamment pour aider les associations de femmes de la société civile.  En outre, elle a rappelé le rôle des Nations Unies qui peut donner une lueur d’espoir dans beaucoup de pays en proie aux conflits.  Mais « sommes-nous engagés à prendre des mesures audacieuses? » s’est-elle demandé en guise de conclusion. 

« Et si je vous disais que les conflits sont positifs? » a lancé d’emblée, Mme JAYATHMA WICHRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse.  Citant les propos d’un jeune iraquien qu’elle avait rencontré dans un camp de déplacés près de Mossoul, elle a fait observer que l’émergence d’un conflit signifie qu’il y a des divergences d’opinions et une remise en cause du statu quo « qui met le monde en marche ».  Ce qui est problématique, a-t-elle poursuivi, c’est la manière dont nous cherchons à résoudre un conflit donné.  « Il revient donc à notre génération, a-t-elle souligné, de savoir comment résoudre les conflits par la paix. »

L’Envoyée du Secrétaire général a appelé à utiliser le potentiel et la créativité des jeunes à cette fin, notant que 408 millions d’entre eux vivent actuellement dans des situations de conflit et de violence. 

Elle a invité les États à lire l’étude sur les jeunes, la paix et la sécurité, qui a été présentée hier, devant le Conseil de sécurité, soulignant deux questions charnières qui s’imposent: comment atténuer la méfiance qu’éprouvent les jeunes vis à vis des institutions internationales et comment mettre un terme à l’exclusion des jeunes des processus de participation politique?

« La participation effective des jeunes, c’est de la prévention », a-t-elle souligné, en faisant valoir que celle-ci permettra dans la foulée de contrer leur méfiance envers les systèmes élaborés par la communauté internationale.

L’Envoyée pour la jeunesse a aussi appelé les États Membres à mettre l’accent sur la consolidation de la paix et à axer leur action sur le programme sur les jeunes, la paix et la sécurité mis en place par la résolution 2250 (2015).  Ce programme, a-t-elle expliqué, a été élaboré pour veiller à ce que les jeunes soient pris au sérieux en ce qui concerne leur avenir.  Elle a ensuite appelé l’Assemblée générale à se montrer prête à « faire la différence » et à aider la nouvelle génération en plaçant les droits des jeunes au centre de la pérennisation de la paix.

Elle a également appelé à augmenter les fonds consacrés aux initiatives des jeunes, plaidant notamment pour un financement adéquat de l’instrument jeunesse du Fonds pour la consolidation de la paix.  Aux yeux de l’Envoyée pour la jeunesse, les jeunes doivent être considérés comme des partenaires et non pas comme « des notes de bas de page ou des problèmes à gérer ».  Les gouvernements, a-t-elle ajouté, doivent être équipés de structures pour impliquer les jeunes et les intégrer à toutes les étapes du maintien et de la consolidation de la paix.

Mme Wichramanayake a cité en exemple un groupe de jeunes somaliens qui ont créé un groupe de riposte d’urgence aux attaques terroristes, tandis qu’en Colombie, un groupe de jeunes fait pression pour l’élaboration d’un nouvel accord de paix.  Enfin, elle a exhorté une nouvelle fois les États Membres à agir en faveur des jeunes.  « Une génération entière compte sur vous », a-t-elle déclaré.

Déclarations

S. M. PHILIPPE Ier, Roi des Belges, a rappelé comment son pays, situé au cœur de l’Europe, a souffert de deux conflits mondiaux avant de s’engager pleinement dans le projet des Nations Unies et la construction européenne parce qu’il s’agissait de deux projets de paix durable, fondé sur le dialogue, la solidarité et le respect d’autrui.  « Pour un pays comme le mien, qui a été, pendant des siècles, une terre de champs de batailles, accueillir la capitale de l’Europe pacifiée est non seulement une victoire sur l’histoire mais surtout l’aboutissement d’efforts soutenus. »  La paix durable, a poursuivi le Roi, c’est la mise en place d’un environnement respectueux de la dignité humaine.  C’est cette même paix durable que prône la Charte des Nations Unies.  Le Roi des Belges a donc déclaré « soutenir fermement » la direction donnée par le Secrétaire général de mettre la prévention de la violence au premier plan.  Le Programme 2030 est un instrument de prévention et donc de développement, a souligné le Roi.  Utilisons pleinement les instruments performants de détection de risques et de médiation que notre organisation a développés, a-t-il encouragé, ajoutant: « Unir ses forces en vue de mieux atteindre un objectif, ce n’est pas faire abandon de souveraineté mais au contraire en faire pleinement usage. »

Notre organisation, a encore dit le Roi, a également développé une longue expérience de consolidation de la paix.  C’est le travail commun des leaders, des institutions inclusives et représentatives, des femmes et des jeunes, et l’appropriation du processus qui créent le socle solide d’une paix durable.  Si la paix se forge par l’action, elle se réalise dans le temps, a reconnu le Roi.  Il faut du temps pour guérir les blessures causées par l’humiliation et la violence, pour démobiliser, désarmer et réinsérer, pour juger et punir, pour faire mémoire et pour que les victimes des humiliations trouvent en elles la force de tendre à nouveau la main.  Notre devoir collectif est de construire, sans tolérer de retard, le cadre qui rende possible une paix durable, et la Belgique entend assumer pleinement cet engagement et poursuivre cette ambition avec détermination, a conclu le Roi.

M. JUAN MANUEL SANTOS CALDERÓN, Président de la Colombie, a affirmé que mettre un terme à un conflit long d’un demi-siècle avait été le défi le plus difficile à relever pour son pays.  Il est plus difficile d’assurer la paix que de faire taire les canons, a-t-il souligné, avant d’appeler à faire de la paix une « possibilité historique » pour résoudre les problèmes liés à la guerre.

Le Président colombien a relevé que de nombreux défis découlaient des « tensions » entre la paix et la justice.  Face à une telle situation, l’approche de la Colombie a été de placer les victimes du conflit au centre des efforts de paix en privilégiant la justice transitionnelle, a-t-il expliqué.  M. Santos Calderón s’est félicité du fait que, pour la première fois en Colombie, les deux parties se sont accordées sur l’élaboration d’un même système de justice.  Il a expliqué que celui-ci était chargé de traduire en justice les auteurs des pires exactions commises durant le conflit et d’octroyer des réparations aux victimes.  Mais, pour nombre d’entre elles, a-t-il poursuivi, le plus grand espoir n’est pas d’identifier les coupables, mais de savoir ce qui est advenu de leur proche.  Une commission pour la vérité a donc été établie, de même qu’une unité de recherche des personnes disparues.  En moins d’un an et demi, ces trois entités ont obtenu des résultats notables, s’est félicité le Président.

M. Santos Calderón a ensuite rappelé que la Colombie avait déjà adopté, il y a sept ans, une « loi historique » sur le droit des victimes et la restitution des terres.  Le pays dispose aussi d’un système unique en matière de réparations qui permit de bénéficier à 800 000 victimes.  Dans ce cadre, 300 000 hectares de terres ont été restitués et 500 000 autres sont dans l’attente d’une décision judiciaire.  Huit mois après la signature de l’Accord de paix, les combattants ont commencé leur processus de réintégration, a poursuivi le Président, qui a cependant fait observer que la formulation de véritables projets de vie n’était pas chose aisée.  Il faut en effet trouver des ressources et former les personnes, sans quoi, a-t-il averti, tout est voué à l’échec. 

M. Santos Calderón a aussi insisté sur l’importance d’ouvrir les « portes de la démocratie » aux anciens combattants, précisant que les Forces armées révolutionnaires de Colombie - Armée populaire (FARC-EP) s’étaient désormais transformées en un parti politique de l’opposition, ce qui leur permet d’agir auprès des populations sans brandir les armes.

Le Président s’est ensuite attardé sur le problème du fléau du trafic de stupéfiants, qui a longtemps alimenté le conflit en Colombie.  Il a indiqué que la fin du conflit avait permis, pour la première fois, de régler « le problème de la feuille de coca ».  Une lutte a également été engagée contre les derniers maillons de la chaîne d’approvisionnement, qui a débouché sur des saisies record de drogue.  Cependant, a-t-il tempéré, une stratégie axée seulement sur la répression et le durcissement de la lutte contre le commerce de la drogue engendre trop de violence.  M. Santos Calderón a donc appelé à mettre un terme à la « destruction sociale » ainsi engendrée et à protéger le Colombie et la région, en changeant la stratégie mondiale de lutte contre les drogues.  Il a lancé un appel urgent, exhortant les États à se rendre compte qu’en continuant d’agir comme par le passé, on ne déboucherait que sur un plus grand nombre de prisonniers et d’organisations mafieuses.  Incarcérer les consommateurs de drogue ne sert à rien, a-t-il souligné, ce qu’il faut, c’est travailler ensemble pour réduire la demande.

« Construire la paix, c’est comme construire une cathédrale », a poursuivi le Président, évoquant un processus long et complexe.  Il a indiqué que l’année dernière, la Colombie avait enregistré son taux d’homicide le plus bas en plus de 40 ans.  Parmi les défis les plus complexes à relever dans l’immédiat, il a insisté sur l’importance des perspectives économiques et sociales à long terme.  C’est là que se joue le maintien de la paix, a-t-il souligné.

M. Santos Calderón a expliqué avoir fait de l’éducation et du droit à la santé des axes fondamentaux de l’approche de son gouvernement.  Quarante millions de dollars ont été investis dans la santé, l’infrastructure et le logement dans les régions qui ont le plus souffert du conflit.  L’accent est également mis sur l’autonomisation des femmes, notamment celles des communautés autochtones et afro-colombiennes, qui ont particulièrement souffert du conflit.  En Colombie, avec l’appui de la communauté internationale, nous avons rendu possible ce qui avait été jusqu’alors impossible, s’est-il félicité en conclusion.

M. MICHAEL D. HIGGINS, Président de la République d’Irlande, a déclaré que l’Accord de paix pour l’Irlande du Nord, signé le jour du vendredi saint il y a 20 ans, avait manifesté certaines des conditions identifiées par le Secrétaire général pour assurer la pérennisation de la paix.  M. Higgins a cité comme facteur bénéfique la participation directe des deux gouvernements engagés dans les négociations, l’octroi continu d’aides financières à la consolidation de la paix, le soutien fort de l’Union européenne et l’appui généreux des autres États Membres des Nations Unies.  Il a aussi cité l’engagement courageux d’organisations de la société civile, dont beaucoup étaient dirigées par des femmes, irlandaises du nord ou du sud. 

Investir dans la prévention des conflits n’est pas seulement un devoir moral mais aussi une preuve de prudence financière, a remarqué M. Higgins, qui a regretté que beaucoup d’États Membres aient hésité à engager des ressources dans la prévention des conflits.  « Nous savons que, quand les Nations Unies et les États Membres travaillent de manière cohérente pour soutenir les piliers de la paix et de la sécurité, des droits de l’homme et du développement, un véritable progrès durable et mesurable est possible », a-t-il affirmé.

Rappelant que l’activité humanitaire ne saurait être un substitut au dialogue politique et à la médiation, le Président a également affirmé que, si les Casques bleus avaient sauvé un nombre incalculable de vies, ils ne pouvaient être qu’« une seule partie d’une réponse plus complète ».  Pour nous engager en faveur de la pérennisation de la paix, nous devons renoncer au réalisme étroit et cynique, a encore déclaré le Président, qui a affirmé que la jeunesse était consternée à l’idée que ce qui est normatif relève de l’Assemblée générale alors que la force des puissants et des détenteurs du pouvoir prévaudrait au Conseil de sécurité.  Souvenons-nous de l’énergie et du courage qui ont animé nos prédécesseurs et consacrons-nous nous-mêmes à la cause de la paix universelle, a conclu M. Higgins. 

M. FAUSTIN ARCHANGE TOUADÉRA, Président de la République centrafricaine (RCA), a mis en avant les progrès de son pays depuis son arrivée au pouvoir en 2016 et a appelé à un renforcement de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA).  Qualifiant le moment de « charnière » pour l’histoire de son pays, il a énuméré les progrès réalisés depuis son arrivée au pouvoir, citant en particulier le redéploiement des forces armées nationales dans tout le pays et le « retour de l’état de droit ».

En plaçant la situation politique en RCA « sous le sceau de la responsabilité partagée », le Président a dit pleinement souscrire à la vision globale des Nations Unies, y compris en ce qui concerne la participation des femmes comme facteur de consolidation et de maintien de la paix.  Il a ainsi rappelé l’objectif d’une représentation politique paritaire que s’est fixé son pays pour 2030.

M. Touadéra a remarqué que l’accord de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement avait enregistré un franc succès et que les jeunes du pays y avaient massivement participé.  Il s’est félicité du Plan-cadre des Nations Unies accompagnant le processus de consolidation de la paix en RCA, et a appelé à soutenir les efforts de la Commission de consolidation de la paix sur les questions transfrontalières et régionales.

M. Touadéra a renouvelé ses remerciements aux Nations Unies et à la MINUSCA pour le « rôle incontournable de protection des populations civiles » joué par cette dernière.  C’est pour « éviter de faire échec aux efforts de consolidation de la paix » qu’il a appelé à un renforcement des effectifs de la Mission, avant de conclure en affirmant que son pays voudrait « devenir un modèle pour la communauté internationale ».

M. ADAMA BARROW, Président de la Gambie, a mentionné les avancées réalisées au cours de la transition réussie dans son pays, en premier lieu la réforme du secteur de la sécurité.  La sécurité s’est largement améliorée, a-t-il dit.  Le Président a insisté sur les politiques macroéconomiques, qui ont notamment permis une diminution des taux d’intérêt et une réduction des dépenses publiques, qui représentaient, en 2017, 1% du PIB.  « Le budget de la présidence a été diminué de 75% », a-t-il fait valoir. 

M. Barrow a mentionné la consultation nationale conduite en 2017 en vue de la mise en place de la Commission vérité, réconciliation et réparation pour rendre justice aux victimes des violations des droits de l’homme commises par le régime précédent.  « La suppression de la liberté d’expression et les attaques contre l’indépendance de la justice appartiennent au passé », a-t-il affirmé.

Le Président a affiché son optimisme concernant l’avenir de la Gambie, qu’il a présentée comme résolument engagée dans la voie de la pérennisation de la paix grâce à l’appui de ses partenaires internationaux.  « L’expérience de mon pays souligne l’importance de la solidarité internationale », a estimé M. Barrow, qui a assuré que la consolidation des dividendes de la paix était la priorité de son gouvernement.  Il a aussi reconnu les défis qui subsistent, les jugeant inhérents à toute transition démocratique.  En conclusion, M. Barrow a exhorté les partenaires de son pays à lui apporter leur soutien financier et matériel.  Il a notamment plaidé pour que le Fonds pour la consolidation de la paix soit « généreusement abondé, afin de financer rapidement des interventions cruciales pour appuyer les gouvernements ».

Pour M. JÜRI RATAS, Premier Ministre de l’Estonie, se concentrer sur la prévention des conflits permettrait d’économiser des ressources et surtout de sauver des vies.  L’Estonie, a-t-il assuré, est en faveur d’un système multilatéral fort et qu’il faut continuer de renforcer.  Il a toutefois reconnu que l’ONU n’avait pas toujours réalisé son plein potentiel.  C’est pour cette raison que le système des Nations Unies doit travailler de manière plus intégrée, flexible et coordonnée. 

L’Estonie appuie le programme de réformes du Secrétaire général et le concept de pérennisation de la paix, a poursuivi le Premier Ministre.  La paix ne sera pérenne que si l’on progresse en matière de développement et s’attaque aux causes profondes des conflits, a-t-il ajouté, soucieux de bâtir « une ONU avec une vision adaptée au but recherché ». 

Toutefois, a averti M. Ratas, il ne s’agit pas de se reposer uniquement sur le système des Nations Unies, car le rôle des États Membres est critique.  « Nous devons avoir la volonté de traduire en pratique des politiques adéquates pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable », a-t-il insisté.  Pour sa part, l’Estonie a été membre de la Commission de consolidation de la paix l’année dernière.  Au fil des ans, le pays a participé à diverses opérations de maintien de la paix, y compris au Liban et au Mali actuellement, et il contribue globalement à l’aide humanitaire et au développement, a fait valoir M. Ratas.

M. MIKHEIL JANELIDZE, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Géorgie, a rappelé que son pays faisait face à une occupation étrangère depuis 25 ans.  La cessation du mandat de la Mission d’observation des Nations Unies en Géorgie (MONUG), du fait d’un veto au Conseil de sécurité, et la fin de la mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), après l’agression militaire de la Fédération de Russie, ont créé un vide au niveau de la présence internationale dans les régions occupées, où les détentions arbitraires, les enlèvements et les assassinats sont monnaie courante, a déploré le Vice-Premier Ministre.

Le dispositif actuel de consolidation de la paix ne peut pas combler cette lacune, a déploré M. Janelidze.  En dépit des appels de la communauté internationale et de l’accord de cessez-le-feu obtenu avec la médiation de l’Union européenne en 2008, aucun progrès n’a été réalisé en matière de sécurité.  Même la mission civile de surveillance de l’Union européenne n’est pas autorisée à pénétrer dans les régions « illégalement occupées par la Russie », a-t-il ajouté.  Soulignant le lien important entre justice et pérennisation de la paix, il a dit espérer que la Russie finirait par respecter ses obligations internationales pour régler pacifiquement son conflit avec la Géorgie. 

Le Gouvernement géorgien agit en faveur de la réconciliation et s’efforce de renforcer la confiance, d’améliorer les liens économiques et les contacts entre les gens des deux côtés des lignes de séparation, a assuré le Vice-Premier Ministre.  Ce mois-ci, le Gouvernement a ainsi annoncé une initiative de paix intitulée « Vers un avenir meilleur » pour rapprocher les communautés des régions d’Abkhazie et de Tskhinvali.  

Mme MARIJA PEJČINOVIĆ BURIĆ, Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Croatie, a plaidé pour que l’accent soit mis sur les dimensions politique, sécuritaire, de développement ainsi qu’environnementale, afin d’assurer une véritable pérennisation de la paix.  Elle s’est félicitée des initiatives de réformes lancées par le Secrétaire général en la matière. 

En tant que victime d’agression, la Croatie a une expérience de première main en matière de redressement et de maintien de la paix, a poursuivi Mme Pejčinović Burić, qui a également cité la récente présidence croate de la Commission de consolidation de la paix.  Elle a récusé les stratégies « taille unique », plaidant pour l’adoption d’approches souples et adaptées à une situation donnée.  Aussi a-t-elle jugé nécessaire d’améliorer la collecte et l’analyse de données au sein de l’ONU.  Une participation active des organisations régionales et sous-régionales s’impose également, de même que la garantie d’un cadre financier approprié, notamment durant la période de transition fragile entre un conflit et la paix durable.

La Vice-Première Ministre a insisté sur l’importance de la prévention, moyen le plus idoine pour investir les ressources des États dans l’amélioration des conditions de vie de la population mondiale.  Elle a mis en garde contre les « conséquences effroyables » de l’absence de réaction appropriée de la part de la communauté internationale, rappelant que la Croatie en avait elle-même souffert.  Elle a toutefois fait observer qu’enterrer la hache de guerre ne revient pas à enterrer les problèmes existants, les parties à un conflit devant au contraire parvenir à régler leurs différends de manière ouverte et ne pas hésiter à aborder les questions difficiles.  Elle a aussi appelé à placer l’être humain au centre des efforts et insisté sur l’importance de l’appropriation nationale, de la santé, de l’emploi, de l’éducation, des infrastructures, sans oublier les partenariats public-privé.

M. JORGE ARREAZA, Ministre des affaires étrangères du Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, a rappelé que l’un des objectifs du Mouvement était l’adoption de mesures efficaces pour supprimer les actes d’agression et autres atteintes à la paix, promouvoir et encourager le règlement des différends internationaux par des moyens pacifiques.  Si la prévention des conflits est une responsabilité collective, c’est aussi une responsabilité nationale, a-t-il rappelé.  Il est en outre important que la communauté internationale et l’ONU utilisent « de bonne foi » les outils à leur disposition, sans interférer dans les affaires intérieures des États Membres et en respectant strictement les principes de la Charte des Nations Unies, a-t-il souligné.

M. Arreaza a souligné la nécessité d’inclure tous les segments de la société dans les processus de paix, y compris les femmes et les jeunes.  Lors de la dix-huitième Conférence ministérielle du Mouvement des pays non alignés, qui vient de se tenir à Bakou, en Azerbaïdjan, les ministres ont reconnu que les causes profondes des conflits devaient être traitées de façon coordonnée et exhaustive, en relation avec d’autres instruments sociaux, économiques et développementaux.  Ils ont également souhaité que ces efforts soient entrepris dès l’engagement des Nations Unies dans les situations de postconflit et continuent sans interruption après le départ des opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Parmi les causes structurelles des conflits, le représentant a cité la pauvreté, la faim, les inégalités, les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’injustice, le chômage, le manque de redevabilité et la mauvaise gestion des ressources naturelles.

M. Arreaza a pris note de l’accent mis par le Secrétaire général sur le renforcement de l’interface entre les engagements politiques des Nations Unies et les opérations de paix sur le terrain, ainsi que de ses propositions de réformes relatives à la paix et la sécurité, au développement et à la gestion interne, et au dispositif de consolidation de la paix.  En conclusion, il a rappelé qu’il ne peut y avoir de développement sans paix, ni de paix sans développement. 

M. MEVLÜT ÇAVUŞOĞLU, Ministre des affaires étrangères de la Turquie, s’exprimant d’abord au nom du Mexique, de l’Indonésie, de la République de Corée, de la Turquie et de l’Australie, le groupe MIKTA, a présenté celui-ci comme formé de fervents soutiens de la pérennisation de la paix.  Il a estimé que la résolution adoptée par l’Assemblée générale, et qui le sera sous la même forme par le Conseil de sécurité demain, fournissait aux Nations Unies l’orientation stratégique nécessaire.  Si des progrès ont été réalisés, il faut faire encore plus, a-t-il ajouté. 

En outre, les États du groupe MIKTA rappellent que la pérennisation de la paix est une tâche qui doit être assumée collectivement, par l’ensemble des acteurs concernés et de manière inclusive.  En même temps, les gouvernements nationaux ont la responsabilité première de l’établissement des priorités, stratégies et activités.  Par ailleurs, les membres du MIKTA soulignent le rôle clef joué par les femmes dans la prévention et le règlement des conflits, avant d’appuyer la vision du Secrétaire général sur la pérennisation de la paix. 

S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, M. Çavuşoğlu a déclaré qu’il y avait « trop de conflits dans le monde, trop de souffrances humaines », ajoutant: « Il est temps d’agir! »  Les États Membres s’accordent sur les paramètres de base, tels que la nécessité de remédier aux causes profondes des conflits, d’intervenir à un stade précoce ou de faire encore davantage appel à la médiation, a-t-il noté.  Dès lors, « nous connaissons les principes, nous avons les outils de base à notre disposition, mais alors, pourquoi n’avons-nous pas réussi »?

Pour le Ministre, souvent la communauté internationale se montre sélective dans ses réponses.  « Lorsque le régime Assad utilise des armes chimiques pour tuer des femmes et des enfants, nous réagissons tous.  Lorsque les membres permanents du Conseil de sécurité sont d’accord, c’est bien, nous pouvons faire respecter le droit international.  Lorsqu’ils ne sont pas d’accord, oubliez le droit international!  Lorsque Daech tue des civils innocents, nous réagissons tous et c’est la bonne chose à faire.  Mais lorsque PDY/FETÖ ou le PKK/PYD/YPF tue des civils innocents, certains pays préfèrent fermer les yeux, parce que ces organisations terroristes peuvent être utiles. »  Le Ministre a également déploré qu’une attaque terroriste au Moyen-Orient et en Afrique ne fasse pas les gros titres des journaux, à la différence d’une attaque en Occident.  « La vie humaine a-t-elle plus de valeur dans certaines régions du monde? » a-t-il demandé.

Dénonçant l’hypocrisie de l’époque, M. Çavuşoğlu a réclamé un changement de paradigme qui commencerait par l’ONU, jugeant que la réforme de l’Organisation est plus nécessaire que jamais.  Le Ministre a en particulier demandé une réforme du Conseil de sécurité pour le rendre plus « transparent, représentatif et démocratique ».  « Le Conseil ne fonctionne que lorsqu’il sert les intérêts de ses cinq membres permanents », a-t-il accusé.

M. NEVEN MIMICA, Commissaire pour la coopération internationale et le développement de l’Union européenne, a salué la vision du Secrétaire général telle que présentée dans son rapport sur la consolidation et la pérennisation de la paix et a souhaité que la résolution qu’adoptera l’Assemblée générale permette de poursuivre les efforts en ce sens.  La pérennisation de la paix relève de la responsabilité tant des gouvernements que des sociétés et doit reposer sur les trois piliers des Nations Unies que sont la paix et la sécurité, le développement et les droits de l’homme, a poursuivi le Commissaire, qui s’est dit encouragé par les progrès réalisés jusqu’à présent, y compris par la Commission de consolidation de la paix (CCP) et le Bureau de consolidation de la paix, dont il a salué le « rôle charnière ».  La pérennisation de la paix constitue un cadre adapté pour les différentes phases de la réforme des Nations Unies, a-t-il ajouté en assurant que l’Union européenne appuyait une articulation équilibrée de ce processus.

Pour l’Union européenne, la pérennisation de la paix exigerait le recours à l’ensemble des outils dont disposent les Nations Unies, y compris la diplomatie préventive et la médiation.  M. Mimica a rappelé que la pérennisation de la paix était liée organiquement à la bonne gouvernance et à l’état de droit.  Le primat annoncé de la volonté politique devait être transcrit en actions concrètes, a-t-il ajouté.  Il a également insisté sur le respect, la protection et le développement des droits de l’homme et libertés fondamentales. 

De même, le développement économique et le renforcement de la résilience figurent au cœur de la prévention.  En ce sens, l’Union européenne est disposée à renforcer sa coopération et à échanger ses meilleures pratiques avec des partenaires multilatéraux.

Il faut également renforcer les capacités du système de développement des Nations Unies, a plaidé M. Mimica en rappelant que la paix était l’une des cinq priorités du Programme de développement durable à l’horizon 2030, comme l’ont décidé les États Membres en 2015.  L’Union européenne souhaite également un renforcement du lien entre activités humanitaires, de développement et de consolidation de la paix.

M. Mimica a ensuite présenté les mesures prises par l’Union européenne, notamment sa stratégie mondiale adoptée en 2016, son approche stratégique de la résilience dans l’action extérieure adoptée l’an dernier et le consensus européen sur le développement.  En janvier de cette année, l’Union européenne a en outre adopté son approche intégrée, qui constitue désormais le cadre pour un engagement plus inclusif dans les conflits et crises extérieures et pour la promotion de la sécurité humaine.  Ce approche, qui fait la part belle à l’appropriation locale et l’inclusivité, met aussi l’accent sur la nécessité d’une approche multilatérale forte, a poursuivi le Commissaire.  Enfin, l’Union européenne continuera de mettre l’accent sur le rôle des femmes et des jeunes et entend travailler en étroite collaboration avec les partenaires internationaux et régionaux.  Elle considère notamment comme très important le partenariat des Nations Unies avec la Banque mondiale.

M. JAVAD ZARIF, Ministre des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, a déclaré que l’attention renouvelée envers le maintien et la pérennisation de la paix revêt une importance singulière, notamment au vu des tensions que connaît sa région.  Il a appelé à répondre aux causes sous-jacentes des conflits, pointant notamment l’occupation, l’intervention étrangère et l’extrémisme.  Il a aussi averti que la promotion d’« illusions hégémoniques » et les tentatives d’obtenir la sécurité aux dépens des autres, par l’exclusion et la création de blocs, avaient « invariablement » provoqué tensions, conflits et courses à l’armement.

Le Ministre a appelé à s’orienter vers un nouveau paradigme qui permette de créer des régions fortes, au lieu de chercher à être « le plus fort d’une région ».  Il faut aussi, a-t-il enchaîné, se départir des blocs sécuritaires pour accepter les réseaux sécuritaires qui, a-t-il expliqué, privilégient le respect des intérêts de toutes les parties.

Le Ministre iranien a dénoncé les stratégies qui cherchent à créer des hégémonies régionales dans sa région et a appelé les États Membres à appuyer les efforts de l’Iran pour créer un réseau régional et sécuritaire solide.  L’Iran a d’ailleurs proposé d’organiser, dans le golfe Persique, un forum pour le dialogue régional, afin de relever les défis et de bâtir une paix durable dans la région.  Il a invité les pays de cette « voie navigable stratégique et volatile » à se joindre à cette initiative.  L’Iran s’attend également à ce que les Nations Unies appuient ce processus par le biais des dispositifs envisagés il y a 30 ans, mais jamais mis en œuvre, dans le paragraphe 8 de la résolution 598 du Conseil de sécurité.

M. HEIKO MAAS, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, qui a énuméré les conflits et les problèmes auxquels fait face la communauté internationale, a jugé nécessaire de repenser l’approche du futur: le dialogue et non la confrontation, le désarmement au lieu du réarmement, et la prévention à la place de l’intervention.  La communauté internationale doit montrer son aptitude à agir dans toutes les phases d’un conflit, de la prévention à la résolution du conflit, à la stabilisation, en passant par la consolidation de la paix après le conflit et le développement durable.  Nous devons être déterminés dans notre quête de solutions politiques, a poursuivi le Ministre.  Plus important encore, nous avons besoin que toutes les parties impliquées, en particulier le Conseil de sécurité, assument leur responsabilité politique. 

Prenant l’exemple de la présence de la communauté internationale dans la région du Sahel, où elle mène un large éventail de missions de paix et de formations, d’aide humanitaire et un soutien à la gestion des frontières, le Ministre a déclaré que ces mesures ne seraient couronnées de succès que si des processus de paix et de réconciliation acceptés par tous pouvaient être menés à leurs termes. 

Pour M. Maas, préserver et améliorer un ordre mondial reposant sur des règles et plaçant les Nations Unies en son centre est le meilleur moyen de créer la paix.  C’est la raison pour laquelle l’Allemagne soutient l’objectif du Secrétaire général de rendre l’ONU plus efficace et de se focaliser sur la prévention.  En outre, la politique de paix moderne doit être financée de la bonne manière, a déclaré le Ministre.  Elle n’est pas efficace quand des missions de maintien de la paix qui coûtent des milliards sont suivies par des plans de consolidation de la paix qui manquent de fonds.  C’est la raison pour laquelle l’Allemagne a répondu au saut qualitatif souhaité par le Secrétaire général.

L’Allemagne a ainsi plus que triplé son budget de prévention de crise, de stabilisation et d’aide humanitaire, le portant à 2,5 milliards d’euros en 2017, a fait valoir M. Maas.  L’Allemagne a été l’an dernier le deuxième plus important donateur du Fonds pour la consolidation de la paix l’année dernière, a-t-il ajouté, avant d’annoncer que son pays ferait une autre grande contribution cette année et d’appeler les autres États Membres, y compris ceux qui ne le font pas habituellement, à apporter leur part.  Rappelant en conclusion la candidature de l’Allemagne à un poste non permanent du Conseil de sécurité pour la période 2019-2020, le Ministre s’est engagé, en cas d’élection de son pays, à travailler avec tous les États Membres sur une politique de paix moderne et tournée vers l’avenir.

M. NÉSTOR FRANCISCO POPOLIZIO BARDALES, Ministre des affaires étrangères du Pérou, a estimé nécessaire « d’incorporer la nouvelle stratégie de paix pérenne sur le terrain » et rappelé que la paix, le développement et les droits de l’homme sont interdépendants.  « Il faut investir davantage dans la prévention et prendre en compte les causes profondes de conflits », a-t-il jugé.  Il s’est félicité de travailler avec les organisations régionales et avec les institutions financières pour faire de cette vision holistique une réalité. 

Le Ministre a mis en avant la réussite péruvienne en matière de lutte contre le terrorisme, d’avancées démocratiques et de réduction des inégalités, notant aussi que la classe moyenne péruvienne constitue un vrai « moteur du développement national ».  Il a néanmoins relevé des défis importants pour son pays, touché de plein fouet par les changements climatiques et les catastrophes naturelles, et par la corruption, « qui érode la gouvernance démocratique et mine nos efforts pour une paix durable et pérenne ».

Il a rappelé que lors du huitième Sommet des Amériques qui s’est récemment déroulé à Lima, il a été décidé de prioriser la lutte contre la corruption dans la région.  En tant que Président actuel du Conseil de sécurité, « nous avons voulu organiser une réunion de haut niveau pour une paix pérenne », a-t-il indiqué en annonçant un projet de résolution identique à celui de l’Assemblée générale sur la pérennisation de la paix, « pour travailler de concert ».  Estimant « indispensable de renforcer le multilatéralisme » avec des mesures efficaces, le Pérou accueille la réforme du Secrétaire général avec satisfaction, a-t-il dit en conclusion.

Mme INE ERIKSEN SØREIDE, Ministre des affaires étrangères de Norvège, a d’abord déploré que le nombre de conflits violents dans le monde ait triplé en moins d’une décennie, et que la nature de ces conflits ait changé, devenant plus complexe et s’étirant davantage dans le temps.  Elle s’est félicitée que la Norvège soit à la pointe en matière de donations en soutien de la paix, avant d’annoncer les accroître pour cette année encore.  La Ministre a appelé à modifier profondément l’investissement des ressources pour mieux prévenir les conflits et pérenniser la paix.  Rappelant que la Norvège dépense 1% de son PIB pour la pérennisation de la paix, la Ministre a invité les États Membres à faire de même.  Elle a proposé de réallouer certaines ressources et de les dépenser plus efficacement. 

Dans ce contexte, « l’agenda de la pérennisation de la paix est un changement de paradigme », a-t-elle observé.  En notant que les Nations Unies adoptent une nouvelle approche dans ce domaine, elle a appelé ses États Membres à lui permettre de s’équiper pour arriver à la suivre.  « Pour atteindre la paix, nous nous éloignons d’une approche compartimentée et embrassons une approche plus holistique et intégrée », a-t-elle souligné, tout en plaidant pour que les femmes et les enfants soient davantage associés au processus.  Enfin, Mme Søreidea a relevé que « la paix et le développement sont les deux faces d’une même pièce », en prenant l’exemple concret de la Colombie.  Adopter les accords de paix entre les différentes parties du conflit colombien « ne créerait pas seulement la paix, mais un développement plus durable et inclusif et solidaire » qui diminuerait les probabilités de conflits similaires dans le futur, a-t-elle conclu. 

M. SRDAN DARMANOVIĆ, Ministre des affaires étrangères du Monténégro, a constaté que les politiques de paix souffrent d’un manque de reconnaissance et de ressources.  Il a insisté sur l’importance des mécanismes d’alerte précoce et a appelé à privilégier une « culture de prévention », ainsi que la médiation.  Il a fait savoir que le Monténégro travaille actuellement à l’organisation d’une conférence de l’Initiative pour la médiation en Méditerranée dont il est membre.  M. Darmanović a expliqué que l’engagement de son pays envers la médiation découle de son expérience directe du temps du démantèlement de la Yougoslavie, le Monténégro ayant réussi à préserver la paix et à consolider l’« harmonie multiethnique » au sein de ses frontières.

Le Ministre a appelé à mieux exploiter le potentiel de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et à renforcer sa complémentarité avec le Conseil de sécurité.  Il a aussi insisté sur l’importance du financement pour répondre aux causes sous-jacentes des conflits.  La CCP peut avoir un effet catalyseur en la matière et il importe aussi d’élaborer de partenariats avec les institutions financières internationales, a-t-il préconisé.

Le Ministre a aussi jugé nécessaire de renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales.  Si nous voulons une paix durable, a-t-il poursuivi, il faut aussi privilégier l’inclusion, la responsabilité et la diversité.  Il a aussi recommandé de renforcer la capacité des femmes à exercer une influence sur les politique de consolidation de la paix et de développement, de même que l’investissement dans la jeunesse.  Le Monténégro a d’ailleurs joué un rôle actif dans la création du Bureau régional pour la coopération en faveur de la jeunesse dont l’objectif, a-t-il expliqué, est de favoriser la réconciliation entre les jeunes d’Albanie, de Bosnie-Herzégovine, de l’ex-République yougoslave de Macédoine, du Kosovo, du Monténégro et de la Serbie.

M. GUDLAUGUR THÓR THÓRDARSON, Ministre des affaires étrangères de l’Islande, a fait part de sa déception en ce qui concerne le Conseil de sécurité et notamment sur le dossier syrien.  « Cette instance responsable de la paix est entravée par son incapacité à s’entendre et à progresser sur les questions les plus pressantes », a-t-il déploré.  « Nous devons exiger du Conseil de sécurité qu’il montre l’exemple; des milliers de vies en dépendent », a-t-il ajouté. 

Sur une note positive, le Ministre a salué les efforts que l’ONU entreprend sous l’égide du Secrétaire général pour mieux garantir la paix et la sécurité.  Le budget des opérations de maintien de la paix, a-t-il rappelé, est quatre fois plus élevé que le budget ordinaire.  De plus, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est le cadre le plus puissant dont dispose la communauté internationale pour consolider et pérenniser la paix, a-t-il fait valoir.  « Si nous réalisons les objectifs de développement durable, nous consoliderons la paix et créerons les conditions nécessaires pour la pérenniser. »  M. Thórdarson s’est félicité de l’accent que met le Secrétaire général sur le rôle crucial des femmes à cet égard. 

M. DITMIR BUSHATI, Ministre des affaires étrangères de l’Albanie, a invité à réfléchir aux nombreuses fois où l’ONU a été confrontée à des crises sans moyens suffisants pour y répondre, comme actuellement en Syrie.  « De nouvelles approches sont nécessaires, une meilleure gestion des ressources et des outils » si les États Membres veulent placer la prévention, la paix, le développement et les droits de l’homme au cœur du projet onusien.

L’Albanie se déclare attachée à la protection des droits de l’homme et aux libertés fondamentales qui, si négligées, peuvent entraîner des conflits violents.  Le Ministre, qui a rappelé que l’Albanie soutient la CCP et les actions préventives, a réclamé un fonds pour financer des actions préventives sur le terrain.  Il a aussi rappelé que les femmes et les jeunes sont des atouts pour la pérennisation de la paix, invitant à les inclure davantage.

Les conflits en ex-Yougoslavie semblent désormais loin derrière, a dit M. Bushati en se félicitant des progrès en matière de sécurité et du développement d’un marché commun et d’un dialogue renoué entre le Kosovo et la Serbie.  Enfin, il a plaidé pour que le Western Balkans Found et le Regional Youth Cooperation Office, deux organismes dirigés de concert avec cinq autres pays des Balkans occidentaux, bénéficient d’un plus grand soutien de la part de l’ONU, y compris du Fonds pour la consolidation de la paix.

M. SALAHUDDIN RABBANI, Ministre des affaires étrangères de l’Afghanistan, a estimé que la réussite de l’agenda de pérennisation de la paix dépend du respect de principaux principes de la Charte et du droit international.  Il a rappelé que l’Afghanistan est l’une des questions majeures à l’agenda des Nations Unies.  Depuis 2001, a-t-il indiqué un Afghanistan démocratique a pu voir le jour, doté d’institutions viables et d’une société civile vibrante, et malgré les défis sécuritaires, le Gouvernement d’unité nationale est en train de consolider ces acquis.  Il a estimé que l’appui international doit être maintenu jusqu’à ce que les principaux facteurs d’instabilité aient été résolus.

Outre la promotion de la paix, l’Afghanistan doit combattre un réseau odieux de groupes terroristes qui menacent la stabilité du pays, a poursuivi le Ministre.  Il a espéré que la création du Bureau de lutte contre le terrorisme de l’ONU déboucherait sur la création de nouveaux modes de coopération entre les États Membres.  Des efforts supplémentaires s’imposent par ailleurs dans le domaine de la prévention pour détecter et désamorcer les facteurs de conflit, a-t-il estimé.

Le Ministre a aussi jugé impératif d’éliminer la pauvreté, de créer des perspectives économiques et de créer une culture de respect de l’état de droit.  En outre, l’octroi de l’aide publique au développement doit pouvoir s’adapter à l’évolution des situations au fur et à mesure que les États consolident leurs institutions et définissent leurs objectifs de développement.  M. Rabbani a enfin indiqué que le Processus de Kaboul pour la paix et la sécurité avait apporté un nouvel élan aux efforts de paix.  La proposition de paix présentée par le Président Ghani au mois de février contient en outre de nouvelles incitations en privilégiant l’appropriation nationale et le rôle des femmes.

M. IGOR CRNADAK, Ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, a indiqué que le développement est le meilleur moyen de prévenir les conflits.  Le renforcement des institutions doit être un élément clef des efforts de consolidation de la paix et être pris en compte dès la fin des hostilités, a-t-il dit.  Le Ministre a déclaré que dans son pays, la mise en place de mécanismes de consolidation de la paix solides avait été essentielle pour éviter un retour de la violence.  Il a en même temps prévenu que bâtir des institutions légitimes et efficaces pouvait prendre des années, voire des décennies. 

Le Ministre a souligné le rôle éminent joué par l’ONU et l’Union européenne dans le processus de relèvement de la Bosnie-Herzégovine après le conflit.  « Le processus d’intégration européenne a permis d’améliorer le dialogue dans la région », a-t-il relevé.  Selon le délégué, la colonne vertébrale de tout effort de paix est composée des citoyens du pays concerné qui doivent être ouverts au dialogue et respectueux les uns des autres.  Enfin, M. Crnadak a indiqué que la pérennisation de la paix requiert avant tout une forte volonté politique.

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a appelé à mobiliser la volonté politique à tous les niveaux pour opérationnaliser le programme de pérennisation de la paix.  Elle a insisté sur l’importance d’investir dans la paix, soulignant que des dizaines de milliards de dollars pourraient être économisés en privilégiant la prévention et le développement.  Des ressources adéquates sont donc nécessaires, et la Suède compte d’ailleurs apporter 24 millions de dollars au Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix. 

La Ministre a ensuite souligné que la création de sociétés inclusives était essentielle pour assurer la pérennisation de la paix et a appelé à s’attaquer à toutes les dimensions de l’inégalité, que ce soit sur la base des origines, du sexe, de la religion ou de l’orientation sexuelle d’une personne.  Pour éviter de replonger dans un conflit, a-t-elle poursuivi, il faut parvenir à des solutions politiques qui répondent aux causes profondes des conflits.  L’autonomisation des femmes est essentielle à cet égard.  Elle a aussi plaidé pour l’établissement d’un système indépendant pour accompagner les États dans leurs efforts de développement.  L’ONU ne peut pas non plus se permettre de faire cavalier seul, d’où l’importance d’appuyer les structures des organisations régionales et sous-régionales, a-t-elle ajouté.

M. ASADUZZAMAN KHAN, Ministre de l’intérieur du Bangladesh, a rappelé les crimes contre l’humanité endurés par son peuple lors de la guerre de libération de 1971.  C’est pourquoi nous avons ouvert nos portes aux millions de personnes déplacées de l’État Rakhine, au Myanmar, a-t-il dit, en soulignant les lourdes conséquences sociales et économiques de cet accueil.  Il a plaidé pour la pleine mise en œuvre des recommandations de la Commission Annan, avant de souligner les conséquences de la crise pour la paix dans la région et au-delà. 

M. Khan a ensuite rappelé la politique de « tolérance zéro » de son gouvernement vis-à-vis du terrorisme et souligné la nécessité de susciter l’engagement des communautés locales pour faire face à ce défi.  Enfin, il a demandé que les opérations de maintien de la paix de l’ONU soient dotées d’un financement suffisant, avant d’appuyer la vision du Secrétaire général concernant la pérennisation de la paix. 

Mme SHIRLEY AYORKOR BOTCHWEY, Ministre des affaires étrangères du Ghana, a approuvé le glissement normatif et conceptuel des Nations Unies vers une « démarche plus proactive » et transsectorielle vis-à-vis des problématiques de sécurité.  Elle a rappelé l’importance de se concentrer sur la prévention et de renforcer les partenariats aux niveaux national et international.  Le Ghana, contributeur de troupes de maintien de la paix sans discontinuer depuis plus de 40 ans, s’engage à continuer à jouer un rôle important « au sein des organisations régionales et sous-régionales » pour résoudre pacifiquement les différends, via ces contributions en hommes, mais aussi par la diplomatie et la médiation.  La représentante a notamment cité en exemple le partenariat stratégique entre l’ONU et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) responsable, a-t-elle appuyé, de nombreux succès dans la région.

Soulignant le rôle crucial des femmes, des jeunes et du secteur privé pour consolider une paix durable et pérenne, Mme Botchwey s’est aussi montrée préoccupée par la diminution, ces dernières années, des fonds alloués à l’aide aux pays touchés par des conflits violents.  Après avoir réitéré sa volonté de réintroduire une « culture de paix » au sein des États Membres, le respect interculturel et interconfessionnel, la Ministre a enfin réaffirmé son fort attachement à la Charte des Nations Unies, et renouvelé le souhait que l’Organisation soit financièrement mieux dotée pour réaliser ses buts.

M. JESUS DUREZA (Philippines), Conseiller présidentiel sur le processus de paix, a expliqué que le Gouvernement philippin, par le biais du Bureau du Conseiller présidentiel sur le processus de paix (OPAPP), approchait la consolidation de la paix de différentes façons, en ligne avec la vision de l’ONU sur la pérennisation de la paix et en prenant en compte tous les segments de la population.  Ainsi l’OPAPP se concentre-t-il sur les objectifs suivants: signature et mise en œuvre d’un accord de paix final avec le Parti communiste des Philippines-Nouvelle Armée populaire-Front démocratique national; développement socioéconomique dans les zones affectées par le confit; édification d’une culture de paix; appui continu au processus de paix.

Diverses initiatives font participer les jeunes, les populations autochtones, les femmes, les sultanats et d’autres parties prenantes au processus de paix, a continué M. Dureza.  Il a évoqué la création d’un mécanisme de cessez-le-feu entre le Gouvernement philippin et le Front de libération islamique Moro (MILF) et d’un mécanisme consultatif avec le Front de libération nationale Moro (MNLF).  En outre, pour préserver les gains de l’accord de paix final de 1996, le Gouvernement a proposé au Congrès de promulguer la loi fondamentale dite de Bangsamoro, « une plateforme de convergence » entre le Gouvernement et ces deux partis.  Enfin, a rappelé l’intervenant, quand la ville de Marawi a été assiégée par des terroristes en mai 2017, le Président Rodrigo Duterte a approuvé la création d’un « couloir de paix ».      

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a insisté sur l’importance du développement pour créer un monde sûr et prospère.  Il a souligné que l’action menée par l’ONU aux niveaux local et régional revient à consolider la paix.  Le Ministre a aussi noté que l’ampleur des défis actuels est un obstacle important pour la mise en œuvre de la Charte des Nations Unies.  Il a appelé à prendre des mesures de prévention tant au niveau national qu’international, avant d’appuyer le projet de réforme de l’architecture du maintien de la paix engagé par le Secrétaire général. 

Pour que la paix devienne pérenne, il importe d’utiliser tous les outils dont dispose la communauté internationale de manière cohérente, a prôné le Ministre.  Il a souligné que la prévention et la pérennisation de la paix résident au cœur des objectifs et des discours sur le repositionnement du système de développement.  Il a aussi appelé au plein respect des droits de l’homme, et des traités conclus en la matière, relevant que chaque fois que les principes consacrés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme sont violés, un risque élevé de conflit est encouru.

Mme MARGARET KOBIA (Kenya) a rappelé que les efforts visant la pérennisation de la paix devaient être dotés d’un financement adéquat et demandé la mobilisation de toutes les instances à cette fin, y compris la CCP.  Elle a souligné la contribution de son pays aux efforts de paix, tant régionaux qu’internationaux, en citant notamment l’aide au processus de relèvement de la Somalie, pays qui a vu la tenue d’élections démocratiques en 2016.  « Nous sommes également impliqués dans le processus de paix au Soudan du Sud », a-t-elle dit, en appelant la communauté internationale à appuyer politiquement et financièrement ces deux pays.  Enfin, la déléguée du Kenya a dit s’attendre à un document final fort et souhaité une revitalisation des travaux de l’Assemblée générale qui permette de mieux appuyer les efforts nationaux de paix. 

M. ZAKI ANWAR NUSSEIBEH, Ministre d’État des Émirats arabes unis, a estimé que, pour être efficace, l’approche de la consolidation et de la pérennisation de la paix devait être exhaustive et prendre en compte le contexte national spécifique, les dynamiques régionales et les facteurs internationaux des conflits actuels.  Il a fait remarquer que les Émirats arabes unis étaient le seul pays arabe à avoir participé à six coalitions internationales en Afghanistan, en Libye, en Somalie, en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, pendant la guerre du Golfe et dans la lutte contre Daech.  Le pays appartient également à la coalition arabe qui a lancé la campagne d’opérations humanitaires au Yémen. 

De plus, a continué M. Nusseibeh, les Émirats arabes unis ont déboursé plus de 861 millions de dollars depuis 2012 pour aider les réfugiés et les déplacés syriens.  En Iraq, ils se sont engagés à préserver l’héritage culturel dans les zones libérées de Daech, en contribuant notamment à la reconstruction de la Grande Mosquée et du minaret Hadba à Mossoul.  Ailleurs, les Émirats arabes unis apportent une aide humanitaire aux Rohingya déplacés.  Pays arabe moderne, progressif, qui autonomise les femmes et la jeunesse et reste résilient face aux idéologies nihilistes, les Émirats arabes unis peuvent servir de modèle, s’est enorgueilli le Ministre. 

M. TUDOR ULIANOVSCHI, Ministre des affaires étrangères et de l’intégration européenne de la République de Moldova, a interpellé l’Assemblée générale sur la cruauté des interventions militaires récentes dans le monde.  Soulignant, dans ce contexte violent, la force des idéaux de l’ONU et de son réseau, il a regretté que, trop souvent, l’Organisation ne parvienne pas à ses fins, voire qu’elle brille par son « inefficacité ».  « Nous sommes tombés dans le piège de formalités rigides qui nous écartent de nos objectifs, qui sont la paix et la sécurité internationales », a-t-il critiqué.  Prenant pour exemple l’est de la République de Moldova, où un conflit s’est enlisé depuis plus de 25 ans, M. Ulianovschi a appelé l’ONU à protéger la souveraineté des États indépendants et, dans le même temps, les États Membres à davantage se responsabiliser eux-mêmes.  « La responsabilité de maintenir la paix n’appartient pas seulement à l’ONU, mais à toute la communauté internationale », a-t-il rappelé.

Qualifiant les réformes entamées par le Secrétaire général de « mesures audacieuses », le Ministre s’est félicité du projet de résolution sur la consolidation et la pérennisation de la paix.  « Il nous faut faire front sur cette dynamique », a-t-il conclu.

Mme PASCALE BAERISWYL, Secrétaire d’État au Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, s’exprimant au nom des pays membres du Caucus des droits de l’homme et de la prévention des conflits, a été d’avis que la Déclaration universelle des droits de l’homme et les traités qui en découlent sont, comme le dit lui-même le Secrétaire général, « le meilleur outil de prévention dont nous disposons ».  En effet, les violations des droits de l’homme peuvent être à la fois la cause et la conséquence des conflits.  Si les pires violations des droits de l’homme surviennent souvent dans des situations de conflit où la population civile, y compris les femmes et les enfants, est particulièrement vulnérable, elles peuvent aussi signaler une instabilité potentielle ou l’escalade d’un conflit. 

La Secrétaire d’État a salué les efforts du Secrétaire général visant à intégrer la promotion et la protection des droits de l’homme dans toutes les activités des Nations Unies.  Elle a encouragé les États Membres à utiliser pleinement les liens entre les trois piliers de l’Organisation pour renforcer les activités de prévention et de pérennisation de la paix.  Convaincu que le Conseil des droits de l’homme peut jouer un rôle plus important à cet égard, elle a appelé les États à intensifier leurs échanges avec cet organe, et avec le reste du système onusien, à savoir le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix. 

S’exprimant également en sa capacité nationale, Mme Baeriswyl a salué le rapport du Secrétaire général sur la pérennisation de la paix et a souligné trois éléments cruciaux.  Premièrement, la meilleure prévention est le respect des normes agréées par tous, comme la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme et le droit international humanitaire.  À cet égard, elle a vanté une initiative suisse, « l’appel du 13 juin », qui demande que l’on utilise pleinement le potentiel de prévention des instruments des droits de l’homme.

Deuxièmement, a considéré la Secrétaire d’État, la pérennisation de la paix n’est pas possible sans une meilleure cohérence à l’intérieur du système onusien.  À cet effet, la Suisse met un accent particulier sur le renforcement du rôle du Coordonnateur résident et soutient un financement durable, innovant et prévisible de ce dernier.  Troisièmement, en ce qui concerne les partenariats, elle a cité l’exemple de la Gambie qui montre la valeur ajoutée d’une coopération étroite entre les tous les acteurs.  Immédiatement après le règlement pacifique de la crise postélectorale, l’effort conjoint de plusieurs acteurs, dont la Suisse, a apporté un appui déterminant à l’action menée par le nouveau gouvernement de ce pays pour pérenniser la paix. 

M. TARIQ AHMAD, Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni, a déclaré que « si, face aux immenses souffrances, nous voulons réaliser l’ambition de la Charte de préserver les générations futures du fléau de la guerre, alors le besoin de paix est plus grand que jamais ».  C’est pourquoi son pays soutient la vision du Secrétaire général en faveur de la consolidation et de la pérennisation de la paix, a-t-il dit, et en particulier son attention nouvelle sur la prévention des conflits. 

La pérennisation de la paix devrait être une priorité partagée par l’ensemble du système de Nations Unies, a estimé le Ministre d’État avant de fixer trois priorités sous-tendues par les valeurs de protection: un partenariat pour la paix plus fort entre l’ONU et la Banque mondiale; davantage de diplomatie préventive au sein des Nations Unies; et des transitions plus souples vers et à partir des opérations de maintien de la paix.  Il a aussi attiré l’attention sur l’importance de la lutte contre les violences et abus sexuels dans les conflits, dans laquelle son pays joue un rôle prédominant.  Enfin, il a appuyé la réforme des Nations Unies, dont la pérennisation de la paix est une composante, et souhaité davantage de créativité pour élargir la base des contributeurs à la consolidation de la paix, et davantage de partenariats.

M. MOHAMED ASIM, Ministre des affaires étrangères des Maldives, a insisté pour que l’ONU passe d’une approche de résolution des conflits a posteriori à une approche préventive, « juste moralement, mais aussi moins coûteuse », s’alignant ainsi sur les projets de réformes du Secrétaire général.  Constatant les dangers que les changements climatiques faisaient peser sur le petit archipel, le Ministre les a évoqués comme une source d’instabilité, à mettre sur le même plan que les troubles politiques.  Il a rappelé que le Conseil de sécurité avait déjà cité les changements climatiques comme une cause de conflit potentiel dans d’autres régions du globe, au lac Tchad ou en Somalie.  « Nous devons examiner plus en détail les impacts des changements climatiques sur les conflits, et préparer une réponse à ce défi », a-t-il insisté. 

M. Asim a décrit la consolidation de la paix comme une responsabilité collective, partagée entre les États, la société civile, les organisations internationales « et plus encore, par les Nations Unies ».  Ce faisant, il a rappelé qu’un seuil de coopération et de dialogue plus élevé était nécessaire entre le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, l’ECOSOC et les autres organes des Nations Unies pour progresser: « Nous devons regrouper les initiatives morcelées », a conseillé M. Asim en proposant une approche « holistique ».  Soulignant que les petits États avaient « une marge de manœuvre réduite en matière de prise de décisions » au sein des Nations Unies, il a émis le souhait que les Maldives soient élues au Conseil de sécurité pour le cycle 2019-2020.  Défendant la cause des petits États, il a enfin appelé l’ensemble des États Membres, quelle que soit leur taille, à œuvrer main dans la main, dans le respect de la Charte. 

M. ILDEFONSO CASTRO LÓPEZ, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Espagne, a souligné que la paix ne peut être réelle que si elle inclut tout le monde, précisant que son gouvernement accorde une attention particulière à la situation des femmes et des jeunes à cet égard.  La refonte de l’architecture de maintien de la paix à l’ONU doit donc être l’occasion de réaffirmer leur rôle central, a-t-il estimé.  Le Vice-Ministre a appelé à donner en particulier aux jeunes les moyens de contribuer à la paix et de contrer l’extrémisme violent.

M. Castro López a dénoncé les violations flagrantes des droits de l’homme, y voyant une grave menace à la paix.  En outre, les violations du droit international humanitaire peuvent parfois être si éhontées qu’elles mettent en péril toutes perspectives de paix, a-t-il averti, dénonçant notamment la tendance « affreuse » à prendre pour des cibles militaires les travailleurs et installations humanitaires.  Il a ensuite fait savoir que son gouvernement profitera du siège qu’il occupe au sein du Conseil des droits de l’homme pour attirer l’attention sur ce problème.  L’Espagne accueillera par ailleurs la troisième conférence internationale sur les écoles sûres.

M. ANDREJ LOGAR, Secrétaire d’État et Vice-Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, a appuyé la volonté du Secrétaire général de mettre l’accent sur la prévention.  « Si nous pensons que le coût de la prévention est trop élevé, rappelons-nous qu’aucun coût n’est au-dessus de la vie humaine. »  Il a souligné l’importance de sociétés résilientes pour la pérennisation de la paix, avant de souhaiter que les opérations de paix de l’ONU soient dotées de mandats robustes mais aussi flexibles.  Leur personnel doit être bien formé et l’équipement doit être adéquat, a-t-il ajouté.  En outre, « tous les efforts de pérennisation de la paix doivent respecter les droits humains », a exigé le Vice-Ministre.  Enfin, M. Logar a souligné la nécessité de mettre fin à l’impunité pour une paix durable et a apporté son appui à la Cour pénale internationale. 

M. JEAN-BAPTISTE LEMOYNE, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a mis l’accent sur le lien intrinsèque entre paix et développement, nombre de conflits et de guerres trouvant leur origine dans les questions de développement et de gouvernance.  Il a également rappelé qu’il était nécessaire, pour garantir une paix durable, que personne ne fût laissé de côté. 

Le Secrétaire d’État a salué le départ ordonné de l’ONUCI et la reconstruction des institutions ivoiriennes, rendant par ailleurs hommage à la mémoire de l’Ambassadeur Tanoh-Boutchoué, le Représentant permanent de la Côte d’Ivoire récemment décédé.

La France plaide pour que les pays les plus vulnérables se voient dotés des moyens de développer leurs propres capacités, afin d’être en mesure de traiter en amont les fragilités dont les crises se nourrissent, notamment le chômage des jeunes, l’absence de services et d’infrastructures publics, d’une administration forte ou encore d’un système judiciaire de qualité.  M. Lemoyne a ensuite estimé que la situation actuelle en Syrie montrait bien qu’il ne peut y avoir de solution durable à ce conflit tant que de tels éléments ne seront pas pris en compte et qu’une solution politique inclusive ne sera pas sérieusement engagée.

Le Secrétaire d’État a ensuite fait observer qu’au Sahel, la France défend une approche transversale et intégrée qui allie actions sécuritaires, humanitaires, politiques, de développement et de lutte contre les changements climatiques.

Après avoir apporté l’appui de la France à la volonté du Secrétaire général de donner plus de moyens au Fonds pour la consolidation de la paix, le Secrétaire d’État a affirmé que son pays mettait « très concrètement » en pratique le concept de pérennisation de la paix.  Il a notamment cité un réengagement massif de son gouvernement dans l’aide publique au développement, ainsi que l’élaboration d’une stratégie française pour la lutte contre les fragilités et la réponse aux crises.  Cette stratégie, a-t-il précisé, met l’accent sur la restauration ou le renforcement du contrat social entre l’État et la société.  Un fonds « paix et résilience » a aussi été mis en place, qui a vocation à financer des initiatives sur des bassins régionaux de crise, notamment autour du lac Tchad, au Sahel occidental, en République centrafricaine et au Moyen-Orient.

M. SOLTAN BIN SAAD AL-MURAIKHI, Ministre des affaires étrangères du Qatar, a encouragé une approche préventive et pacifique, et rappelé que le Qatar avait pour principe d’appuyer toutes les organisations capables de créer la paix.  Mettant un fort accent sur l’éducation comme principale force préventive de la radicalité et des conflits, M. Al-Muraikhi a mis en avant les aides fournies par son pays à « des dizaines de millions d’enfants à travers le monde » vivant en zone de conflit pour « leur permettre d’échapper au fléau de l’extrémisme et du terrorisme ».

Pour le Qatar, l’absence de justice sociale, la corruption, mais aussi les violations de la souveraineté des États sont à l’origine de la plupart des conflits.  En ce sens, le Ministre a appelé à éviter « les crises imaginaires » en s’abstenant de pratiquer de telles politiques.  Enfin, M. Al-Muraikhi a jugé que la coopération entre les différents organes des Nations Unies et les organisations régionales était « la clef » pour lutter contre les conflits à la racine.

Évoquant les conflits en Syrie, en Iraq, au Yémen et en République démocratique du Congo, M. TERENS NIKOLAOS QUICK, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Grèce, a mis l’accent sur la prévention, combinée avec une approche intégrée de la gestion des conflits et des crises.  D’où l’importance de renforcer la capacité de l’ONU à s’impliquer à toutes les phases, de l’identification des causes profondes jusqu’à ce que la paix s’enracine.  La prévention requiert aussi que les États Membres fassent preuve de leadership et donnent à l’ONU les moyens opérationnels, politiques et financiers dont elle a besoin, a fait valoir le Vice-Ministre. 

« La paix mondiale est l’affaire de tous », a déclaré M. Nikolaos Quick.  Elle ne peut pas être réalisée si les États n’améliorent pas leur gouvernance démocratique et l’état de droit.  Les droits de l’homme et les libertés fondamentales doivent être respectés et les objectifs de développement durable mis en œuvre.  La Grèce, a-t-il ajouté, considère que la consolidation et la pérennisation de la paix impliquent aussi l’inclusion des femmes et des jeunes, à la fois au niveau des missions onusiennes et en tant que membres de la société civile.  Depuis deux ans, la Grèce accueille la Conférence de Rhodes sur la sécurité et la stabilité, une réunion informelle au niveau ministériel des pays de la Méditerranée orientale.  La prochaine conférence se tiendra les 21 et 22 juin 2018. 

M. ANDREJS PILDEGOVIČS, Secrétaire d’État auprès du Ministère des affaires étrangères de la Lettonie, a plaidé pour que la protection et la promotion des droits de l’homme soient intégrées à tous les aspects du maintien de la paix, seule façon pour assurer une paix durable.  Il a indiqué que l’appui à la bonne gouvernance et à des institutions démocratiques solides compte parmi les contributions de la Lettonie à la mise en œuvre du développement durable.  Son pays mène en effet des projets dans les domaines de la gestion des eaux usées, la gouvernance électronique et les technologies vertes.

M. Pildegovičs a aussi insisté sur la nécessité, pour les femmes, de jouer un rôle clef dans le maintien de la paix, citant notamment les activités d’ONG lettones qui appuient les efforts des pays pour élargir les perspectives économiques des femmes et des filles.  L’éducation est également essentielle pour répondre aux défis sécuritaires et faire face au risque de radicalisation chez les jeunes, a-t-il ajouté.  Le Secrétaire d’État a aussi insisté sur le rôle des organisations régionales, précisant que des experts civils de son pays sont actuellement déployés au sein de la Mission de surveillance de l’Union européenne en Géorgie et de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine.

M. SERGIY KYSLYTSYA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a loué le rapport du Secrétaire général pour son aspect pratique et prospectif, et a approuvé ses recommandations, à la fois sur la plus grande mixité des forces sur le terrain et sur le renfort des opérations de maintien de la paix.  Le Vice-Ministre s’est aussi dit encouragé par le concept de prévention des conflits et s’est félicité que l’ONU « diversifie sa boîte à outils ».  Malgré des « lacunes » et des secteurs à améliorer, M. Kyslytsya a assuré qu’il n’y existait pas d’alternative à l’ONU.

Dans le cadre du conflit opposant l’Ukraine et la Russie depuis quatre ans dans les « régions occupées » du Donbass et la Crimée, M. Kyslytsya a évoqué un « moment charnière » pour l’ONU.  Il a dressé un parallèle avec le funeste exemple du Rwanda où, « en 1994, l’ONU n’avait pu empêcher un génocide ».  Le Vice-Ministre a ensuite accusé le Président russe Vladimir Putin « d’essayer d’annexer une partie de notre terre en violation de la Charte des Nations Unies ».  Pour lui, « l’attitude de la Russie est une tentative agressive de gouverner le monde en ne respectant pas la civilisation ». 

S’agissant du recours aux armes chimiques en Syrie, le Vice-Ministre a, là aussi, pointé du doigt la Russie, et son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, lui reprochant de protéger le régime syrien.  « L’impunité alimente l’impunité », a-t-il lancé, regrettant que le régime syrien, « comme Daech », ne soit pas inquiété pour ses actions. 

Il a espéré que la réforme de l’Organisation, « qui a tant tardé » selon lui, s’accompagne du rétablissement de la confiance et de mesures préventives, « au lieu de se limiter à une aide à posteriori ».  L’Ukraine a invité les États Membres à s’atteler à la tâche avec une plus grande détermination.  « Mon pays, depuis quatre ans, est l’exemple d’un potentiel non réalisé en matière de consolidation de la paix.  Nous sommes prêts à stopper l’agression de la Russie, et invitons l’ONU à intervenir dans le conflit.  L’ONU devrait jouer le rôle qui lui revient », a insisté le Vice-Ministre ukrainien. 

Mme TERESA RIBEIRO, Secrétaire d’État aux affaires étrangères et à la coopération du Portugal, a indiqué que son pays participe à sept opérations de maintien de la paix de l’ONU et compte accroître encore son engagement.  Ces opérations devraient suivre, chaque fois que possible, une stratégie de sortie réaliste et faisable, a-t-elle estimé, en souhaitant une plus grande synergie entre efforts de maintien de la paix et efforts de consolidation de la paix.  Elle a insisté sur le rôle essentiel joué par les femmes, les jeunes et les personnes âgées dans les processus de réconciliation après un conflit.  Mme Ribeiro a en outre souhaité un renforcement des liens entre l’ONU et la Communauté des pays de langue portugaise.  Enfin, Mme Ribeiro a insisté sur l’importance de doter les activités de consolidation de la paix d’un financement adéquat. 

M. YURI STERK, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie, a appuyé l’approche du Secrétaire général consistant à mettre la pérennisation de la paix au cœur de ses efforts de réforme de l’ONU.  Il a ensuite mentionné la décision de son pays de faire une contribution au « Fonds d’affectation spéciale de l’ONU pour la médiation ».  Pour la Bulgarie, « la pérennisation de la paix requiert une approche intégrée par le biais de liens plus robustes entre la paix, le développement, les droits de l’homme et l’action humanitaire ».  M. Sterk a rappelé l’aide de son pays au financement des activités onusiennes menées en Iraq et en Afghanistan.  Enfin, le Vice-Ministre a souhaité que l’Assemblée générale délibère de tous les aspects de la pérennisation de la paix. 

M. FERNANDO SIMAS MAGALHÃES, Sous-Secrétaire pour les affaires politiques multilatérales, l’Europe et l’Amérique du Nord du Brésil, a rappelé le rôle actif joué par son pays lors de la création de la CCP, ainsi que sa présidence de la formation pays pour la Guinée-Bissau.  En matière de paix et de sécurité, il a appuyé les approches qui privilégient la primauté de la politique, la prévention de conflits et les approches non militaires, y voyant des éléments essentiels du maintien de la paix.  Il a aussi plaidé pour plus de liens entre les trois piliers de l’ONU.  Cependant, a-t-il ajouté, il ne faut fusionner ces piliers, ni amalgamer les mandats des différentes entités de l’ONU, mais examiner comment rendre les mandats existants plus efficients.

M. Simas Magalhães a ensuite relevé que les recommandations du rapport du Secrétaire général, notamment celles ayant trait au rôle du Coordonnateur résident, mettent l’accent sur les pays en développement.  Il a appelé à éviter les fausses corrélations entre la pauvreté et les conflits, soulignant que la prévention des conflits ne concerne pas uniquement le monde en développement.  Nous ne devons pas perdre de vue le fait que l’Organisation a été créée suite à un conflit destructeur entre certains des pays les plus développés de l’époque, a-t-il fait observer.

Mme KATERINA SEQUENSOVA, Vice-Ministre des affaires étrangères pour la sécurité et les questions multilatérales de la République tchèque, a appuyé l’idée de placer la paix pérenne au cœur même des activités de l’ONU à travers ses trois piliers, à savoir paix et sécurité, développement et droits de l’homme.  Elle s’est félicitée à cet égard de l’engagement du Secrétaire général et du Président de l’Assemblée générale vis-à-vis de la prévention des conflits.  Selon elle, l’assistance de l’ONU aux États Membres devrait contenir trois aspects: renforcement de l’appropriation nationale du processus; mise au point de réponses ajustées au contexte des pays; et suivi de l’obtention de résultats sur le terrain.

Mme Sequensova a jugé crucial d’intensifier la coopération avec les partenaires internationaux, régionaux, sous-régionaux et nationaux et de promouvoir des partenariats innovants avec des institutions financières internationales et régionales.  Elle a également reconnu le lien direct qui existe entre parité des sexes et prévention des conflits.  Enfin, a-t-elle noté, la République tchèque contribue depuis longtemps au Fonds pour la consolidation de la paix et elle est membre du Comité d’organisation de la CCP.

M. HALEBONOE SETSABI, Vice-Ministre des affaires étrangères et des relations internationales du Lesotho, a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur du règlement pacifique des différends et insisté, à la suite du Mouvement des pays non alignés, sur la nécessité d’utiliser les outils à la disposition des Nations Unies de bonne foi et non pour s’ingérer dans les affaires intérieures des États Membres.  M. Setsabi en a appelé à une coopération plus étroite entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, tant au plan stratégique qu’opérationnel.  Le Lesotho peut témoigner que cette coopération peut aider à relever les défis qui affectent la stabilité, a poursuivi le Vice-Ministre, qui a attribué la « relative paix et stabilité » que connaît son pays à une telle coopération.  Le Lesotho a récemment adopté un programme national de réforme, qui touche notamment au secteur de la sécurité, mis en place en coopération avec divers partenaires régionaux et avec le PNUD.

M. Setsabi a ensuite rappelé que les processus de consolidation et de pérennisation de la paix relevaient en premier lieu de la responsabilité de l’État, mais a ajouté que d’autres acteurs nationaux pouvaient jouer un rôle clef, et notamment les femmes et les jeunes, dont la participation est indispensable pour la pérennisation de la paix comme pour le développement durable.  Il a également appelé à la participation d’organisations de la société civile et régionales, ainsi que des institutions financières internationales.  M. Setsabi a ensuite appelé à consacrer davantage de ressources à la mise en place de systèmes et structures qui permettent de soutenir la paix et le développement, et d’éviter toute escalade d’un conflit.  Enfin, le Vice-Ministre a estimé qu’en l’absence de réforme du Conseil de sécurité, l’architecture de paix et de sécurité continuera de subir des contraintes.  Le Lesotho demande donc une telle réforme, afin de rendre le Conseil de sécurité plus représentatif, plus démocratique et plus réactif face à l’imminence de conflits. 

M. GITESH SHARMA, du Ministère des relations extérieures de l’Inde, a approuvé le rapport du Secrétaire général sur la pérennisation de la paix, jugeant les suggestions utiles pour augmenter l’efficacité du système onusien.  Il a aussi salué le projet de résolution à ce sujet qui devrait être adopté par l’Assemblée générale.  Néanmoins, il a jugé difficile de progresser en matière de pérennisation de la paix quand les fonds disponibles pour la consolidation de la paix ne représentent que 1% du budget annuel de l’ONU.  Les options de financement spécifique présentées par le Secrétaire général dans le rapport pour résoudre ces problèmes de fonds inadéquats seraient une bonne piste, selon lui.  Quoi qu’il en soit, « les actions concrètes nécessiteront un investissement plus soutenu », a-t-il insisté.

Les efforts d’autonomisation des femmes et des jeunes dans le cadre de la pérennisation de la paix ont aussi été salués par le représentant, qui a cité en exemple une brigade entièrement féminine déployée par l’Inde au Libéria dans le cadre de la MINUL et ce, dès 2007.  « Tous les piliers des Nations Unies doivent être enclenchés » pour atteindre les objectifs de paix et de prospérité, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Abyei: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 15 octobre 2018 le mandat de la FISNUA et réclame des progrès mesurables sur la démarcation de la frontière

8240e séance - matin
CS/13311

Abyei: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 15 octobre 2018 le mandat de la FISNUA et réclame des progrès mesurables sur la démarcation de la frontière

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, de proroger jusqu’au 15 octobre 2018 le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA) en conditionnant toute future extension à une série de « mesures spéciales » visant à assurer des « progrès mesurables » sur la démarcation de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud, qui se disputent la souveraineté sur le territoire.

Par sa résolution 2412 (2018), adoptée à l’unanimité, le Conseil de sécurité décide en outre de maintenir à son niveau actuel de 4 791 militaires l’effectif maximum autorisé de la Force, et ce, jusqu’au 15 octobre 2018.  À moins qu’il n’en décide autrement, le Conseil prévoit de réduire cet effectif maximum à 4 250 militaires à compter de cette date.

La Conseil avait déjà menacé dans sa précédente résolution sur Abyei, adoptée le 15 novembre 2017, de ne pas reconduire le mandat de la FISNUA, à moins que le Soudan et le Soudan du Sud ne prennent une série de mesures pour mettre effectivement en œuvre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière prévu par l’Accord de 2011 entre les deux pays.

La résolution adoptée ce jour précise ces conditions en demandant des « progrès mesurables » qu’elle détaille.  Ces progrès concernent les patrouilles aériennes et terrestres de la FISNUA; un accord à conclure sur les quatre bases d’opérations du Mécanisme conjoint; la tenue de réunions dudit Mécanisme conjoint; des progrès à réaliser sur les questions politiques et la sécurité et sur l’établissement de couloirs du passage de la frontière; et la tenue de réunions de la Commission frontalière mixte et du Comité mixte de démarcation.

Le Secrétaire général devra informer le Conseil de « tout progrès », au plus tard le 15 septembre 2018.

Texte du projet de résolution S/2018/380

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses précédentes résolutions et déclarations du Président concernant la situation au Soudan et au Soudan du Sud, notamment ses résolutions 1990 (2011), 2024 (2011), 2032 (2011), 2046 (2012), 2047 (2012), 2075 (2012), 2104 (2013), 2126 (2013), 2156 (2014), 2179 (2014), 2205 (2015), 2230 (2015), 2251 (2015), 2287 (2016), 2318 (2016), 2352 (2017) et 2386 (2017) et les déclarations du Président S/PRST/2012/19 et S/PRST/2013/14, ainsi que les déclarations du Président à la presse des 18 juin 2012, 21 septembre 2012, 28 septembre 2012, 6 mai 2013, 14 juin 2013, 14 février 2014, 17 mars 2014, 11 décembre 2014 et 27 novembre 2015,

Se félicitant des progrès faits dans la mise en œuvre du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière ainsi que de la dynamique qu’il a créée entre les parties, tout en notant que les mesures énoncées au paragraphe 9 de la résolution 2386 (2017) n’ont pas encore été complètement mises en œuvre, et priant instamment les parties de les appliquer sans délai,

Soulignant que les Gouvernements soudanais et sud-soudanais doivent pleinement mettre en œuvre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, conformément à la résolution 2046 (2012) du Conseil, à la feuille de route du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine du 24 avril 2012 et au communiqué du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité du 31 octobre 2017,

Saluant le concours que continuent de prêter aux parties le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine et la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA),

Prenant acte du rapport du Secrétaire général en date du 3 avril 2018 (S/2018/293),

Constatant que la situation qui règne à Abyei et le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud continue de menacer gravement la paix et la sécurité internationales,

1.    Décide de proroger jusqu’au 15 octobre 2018 le mandat de la FISNUA modifié par sa résolution 2024 (2011) et le paragraphe 1 de sa résolution 2075 (2012) et décide également que la présente prorogation sera la dernière à moins que les parties prennent les mesures spéciales énoncées au paragraphe 3;

2.    Décide de maintenir l’effectif maximum autorisé de 4 791 militaires jusqu’au 15 octobre 2018, et décide également qu’au 15 octobre 2018, l’effectif maximum autorisé sera réduit à 4 250 militaires, à moins qu’il ne décide de proroger le mandat modifié par la résolution 2024 (2011) et le paragraphe 1 de la résolution 2075 (2012), conformément aux paragraphes 1 et 3;

3.    Décide que les deux parties doivent également accomplir des progrès mesurables sur la démarcation de la frontière et notamment:

      1)    Accorder une autorisation permanente à toutes les patrouilles aériennes et terrestres de la FISNUA, y compris l’atterrissage dans la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, et approuver 100 % des demandes de sorties au plus tard 72 heures après qu’elles ont été faites afin de faciliter la pleine liberté de mouvement de la FISNUA et du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière;

      2)    Finaliser l’accord sur les quatre bases d’opérations du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière et tenir une réunion du Comité spécial de la zone des 14 miles afin de convenir de l’emplacement de la base d’opérations près de Safaha/Kiir Adem;

      3)    Tenir au moins deux réunions du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité afin que les deux parties se retirent de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée;

      4)    Accomplir davantage de progrès pour ce qui est d’établir les couloirs du passage de la frontière de la phase I entre le Soudan et le Soudan du Sud et obtenir l’ouverture du couloir Kosti-Renk;

      5)    Ouvrir deux couloirs supplémentaires parmi les 10 couloirs de passage recensés dans la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, conformément aux directives du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine et du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, et mettre au point un plan pour l’ouverture des couloirs de passages restants;

      6)    Tenir au moins deux réunions de la Commission frontalière mixte et du Comité mixte de démarcation pour établir la version finale du rapport du Comité à la Commission, débattre de la démarcation des sections convenues de la frontière, conformément à la décision du 5 mars prise par le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, et reprendre les pourparlers sur la démarcation de la frontière et notamment les négociations sur les zones contestées dans le cadre des accords signés;

4.    Prie instamment le Secrétaire général de l’informer de tout progrès fait dans l’application des mesures prises aux termes des paragraphes 3 et 9 de la résolution 2386 (2017), au plus tard le 15 septembre 2018;

5.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les jeunes doivent avoir voix au chapitre dans le maintien et la promotion de la paix et de la sécurité internationales

8241e séance – matin
CS/13312

Conseil de sécurité: les jeunes doivent avoir voix au chapitre dans le maintien et la promotion de la paix et de la sécurité internationales

À la veille de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur la consolidation et la pérennisation de la paix, plus de 75 délégations ont aujourd’hui tenté d’évaluer la contribution des jeunes au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité internationales à la suite de l’adoption, en décembre 2015, de la résolution 2250 (2015), la première à pleinement reconnaître une telle contribution.  Les participants ont notamment examiné les recommandations formulées dans une étude indépendante* réalisée à la demande du Conseil et discuté des mesures à prendre pour traduire la résolution dans la pratique. 

À l’origine de la résolution 2250 (2015) et de l’étude, il y a ce constat que, jusqu’à présent, les États et le système multilatéral ont eu du mal à consulter réellement les jeunes -pour l’ONU, toute personne âgée de 18 à 29 ans-, à travailler avec eux et à les intégrer pleinement aux activités de paix et de sécurité, expliquait la présidence péruvienne du Conseil dans une note de cadrage**.  Avec la Suède, le Pérou travaille sur un nouveau projet de résolution destiné à compléter la résolution 2250 (2015).

« Ce n’est pas tous les jours que le Conseil de sécurité a l’opportunité de se pencher sur un rapport indépendant qui contient les voix de plus de 4 000 jeunes de toutes les régions du monde, qui représentent eux-mêmes les aspirations de millions d’autres jeunes », s’est exclamée l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, Mme Jayathma Wickramanayake, nommée en juin dernier.

On commence à réaliser que les jeunes sont « les absents de la paix », a estimé l’Envoyée, qui a estimé que l’étude menée sous la direction de M. Graeme Simpson offrait une nouvelle conception du rôle des jeunes.  En effet, celle-ci reconnaît que seule une minorité d’entre eux s’engagent dans la violence et met en garde contre les « politiques de panique » déclenchées par les présomptions infondées selon lesquelles les jeunes seraient violents.

« Je pense que nous pouvons tous reconnaître que ma génération représente une promesse, et non un danger », a insisté Mme Wickramanayake, âgée elle-même de 27 ans: « Il faut nous voir comme un atout, pas comme un problème. »

En 2016, environ 408 millions de jeunes vivaient dans des zones touchées par un conflit armé ou frappées par la criminalité organisée, ce qui signifie qu’au moins un jeune sur quatre est touché d’une manière ou d’une autre par l’un de ces fléaux, a relevé M. Simpson.  L’auteur principal de l’étude a expliqué que celle-ci avait été réalisée avec un groupe consultatif d’experts nommé par le Secrétaire général et en associant des jeunes de tous horizons.  

Soucieuse de contrer « les idées fausses » et de combattre la « violence de l’exclusion », l’étude présente à l’intention des États Membres et des autres acteurs concernés une stratégie à long terme pour améliorer la conception des politiques et programmes en vue de renforcer l’influence positive des jeunes en matière de paix et de sécurité.  Les propositions visent à investir dans les capacités des jeunes, élargir leur inclusion dans les sphères politique, économique et socioculturelle et édifier des partenariats avec les jeunes à l’ONU ou en dehors.

« Le stéréotype du jeune, c’est un jeune homme avec une arme à feu, tandis que les jeunes femmes sont inévitablement reléguées au statut de victimes passives », a dénoncé M. Simpson, qui a noté que de tels stéréotypes sexistes privaient les jeunes de leur voix et de leadership, alors qu’ils sont des moteurs de changement et des sources innovantes de paix.

La plupart des jeunes ne sont pas impliqués dans la violence et mènent tout simplement leur vie, a insisté M. Simpson, qui a rendu hommage à ceux qui font preuve de courage, de créativité et de résilience en travaillant en faveur de la paix et de la sécurité, même s’ils manquent cruellement de reconnaissance. 

Une représentante de la société civile en Haïti, Mme Sophia Pierre-Antoine, a ensuite expliqué qu’elle avait participé aux consultations pour la région d’Amérique latine et des Caraïbes, au cours desquelles les jeunes ont fait part de leur rejet des forces qui terrorisent les pauvres, les peuples autochtones, les minorités ethniques et religieuses, les personnes handicapées et malades et les jeunes LGBT.

« Notre représentation ne doit pas être symbolique », a averti une autre jeune représentante de la société civile, Mme Kessy Ekomo-Soignet.  Venue de la République centrafricaine, celle-ci a souligné que 72% de la population avait moins de 35 ans dans son pays, « l’un des pires où être jeune ».  Pourtant, a-t-elle nuancé, notre position dans les classements mondiaux n’est pas une fatalité car « l’autre partie de l’Histoire, les jeunes l’écrivent aujourd’hui ».

L’exclusion de l’expérience des jeunes et la méfiance qu’ils expriment vis-à-vis des autorités nationales et internationales devrait nous servir d’avertissement à tous, a souligné le Secrétaire d’État pour les affaires régionales et les affaires multilatérales globales de la Roumanie, s’exprimant en tant que Président de la Commission de consolidation de la paix.  Tout au long de la journée, nombre des intervenants, tout en insistant sur le potentiel des jeunes comme agents d’un changement nécessaire, ont en effet mis en garde contre les risques de voir ces mêmes jeunes recourir à la violence -ou être embrigadés par des groupes extrémistes ou terroristes- s’ils se sentent exclus de la société, que ce soit des processus de prise de décisions ou du marché du travail.

C’est pourquoi la plupart des participants se sont aussi attachés à décrire les initiatives prises pour améliorer l’éducation et renforcer l’intégration des jeunes et leur apport aux processus de paix et aux initiatives liées à la sécurité et à la consolidation de la paix, un effort qu’ils ont en outre étroitement associé au Programme de développement durable à l’horizon 2030.

*   A/72/761-S/2018/86

**  S/2018/324

LA JEUNESSE, LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

Exposés

Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a relevé qu’elles étaient trois jeunes femmes à faire des exposés au Conseil de sécurité aujourd’hui, un fait sans précédent dans cette instance.  Elle a salué le large processus participatif entrepris, avec l’appui des Nations Unies, pour la rédaction de l’étude indépendante sur l’apport des jeunes aux processus de paix et de règlement des conflits.

« Ce n’est pas tous les jours que le Conseil de sécurité a l’opportunité de se pencher sur un rapport indépendant qui contient les voix de plus de 4 000 jeunes de toutes les régions du monde, qui représentent eux-mêmes les aspirations de millions d’autres jeunes », s’est exclamée l’Envoyée spéciale.  Ces jeunes nous ont donné pour mission de porter leur vision au Conseil, a-t-elle ajouté.

Il y a trois ans aujourd’hui, le Conseil de sécurité convoquait la deuxième réunion de son histoire sur le rôle des jeunes dans la paix et la sécurité, présidée par le Prince héritier de Jordanie, alors âgé de 23 ans, a rappelé Wickramanayake.  On a reconnu à cette occasion que les jeunes sont le moteur du changement mais que, bien souvent, ils ne sont pas en première ligne et un appel a été lancé pour leur donner la possibilité de contribuer à orienter notre avenir commun.  Des milliers de jeunes se sont ralliés à cet appel et leur mobilisation a conduit le Conseil à adopter la résolution 2250 (2015).

Depuis l’adoption de cette résolution, a expliqué l’Envoyée spéciale, des coalitions de jeunes pour la paix et la sécurité se sont créées dans plusieurs pays.  Des partenaires de la société civile se sont mobilisés pour appuyer leurs travaux et les équipes de pays des Nations Unies ont lancé des programmes ambitieux.  Le débat d’aujourd’hui, à la veille de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur la consolidation et la pérennisation de la paix, montre que l’on commence à réaliser que les jeunes sont le « lien manquant » dans la réflexion sur la paix.  Pourtant le thème « Les jeunes, la paix et la sécurité », est situé au centre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-elle souligné.

À cet égard, l’étude indépendante sur l’apport des jeunes aux processus de paix et de règlement des conflits nous offre une nouvelle conception du rôle des jeunes, a-t-elle dit.  L’étude reconnaît notamment que seulement une minorité d’entre eux s’engagent dans la violence et elle met en garde contre la « politique de panique » déclenchée par les présomptions infondées selon lesquelles les jeunes seraient violents.

« Je pense que nous pouvons tous reconnaître que ma génération représente une promesse, et non un danger », a insisté la jeune Wickramanayake.  « Il faut nous voir comme un atout, pas comme un problème. »

Le Conseil de sécurité, a-t-elle estimé, a l’opportunité de corriger la méfiance qui existe entre les jeunes, leurs gouvernements et le système multilatéral en ouvrant de nouvelles voies à leur participation et à leur contribution.  Elle a souhaité que le Conseil tienne compte des recommandations formulées dans l’étude en question.  À cette fin, a-t-elle elle-même suggéré, il faut appuyer le travail des jeunes pour la consolidation de la paix.  Il faut donner la priorité à leur engagement politique.  Ainsi faut-il faire une place aux jeunes et écouter leur voix à la table des négociations en Syrie, au Soudan du Sud, en Colombie, au Yémen, au Myanmar et ailleurs.

L’Envoyée spéciale pour la jeunesse a également souhaité que tous les pays mettent fin aux limites d’âge concernant la participation politique des jeunes.  Après avoir personnellement rencontré des jeunes en Iraq, en Somalie et en Colombie, qui lui ont parlé de l’impact de la résolution 2250 (2015), elle a enjoint la communauté internationale à continuer sur cet élan.  J’espère, a-t-elle conclu, que vous allez décider que les jeunes ne sont plus un point subsidiaire à l’ordre du jour, mais le point le plus important pour le Conseil de sécurité et l’Organisation.  

M. GRAEME SIMPSON, auteur principal de l’étude sur les jeunes et la paix et la sécurité, s’est dit honoré d’avoir été nommé par le Secrétaire général avec comme mandat d’établir les contributions positives des jeunes dans le monde en termes de consolidation et de pérennisation de la paix, de règlement des conflits et de prévention de la violence.  Sur 1,8 milliard de jeunes dans le monde -définis par les Nations Unies comme les personnes de 18 à 29 ans – près d’un quart, soit 408 millions, souffrent d’exclusion et de marginalisation, a indiqué M. Simpson, en expliquant pourquoi l’étude s’était penchée en particulier sur ces personnes qui sont tant exposées à la violence: le rapport ne pouvait reproduire le problème qu’il a précisément pour objectif de résoudre.

Avec les 21 experts également nommés par le Secrétaire général pour cette étude, « nous avons mené sept consultations régionales de jeunes, complétées par des consultations nationales et en ligne, des recherches spécifiques aux pays dans 27 d’entre eux, de nombreuses études thématiques, ainsi que des sondages d’organisations dédiées à la consolidation de la paix menés par des jeunes, d’États Membres et d’entités des Nations Unies », a expliqué l’auteur.  M. Simpson a aussi parlé des 281 groupes de discussion organisés dans 44 pays et indiqué que les responsables de l’étude avaient ainsi entendu plus de 4 200 jeunes de partout dans le monde.

Un des messages clefs des jeunes est que la confiance s’amenuise entre eux et les gouvernements et organisations multilatérales, voire les organisations internationales de la société civile.  Ils sont traités comme « un problème à résoudre » ou, pire, comme une menace, ont-ils constaté en déplorant d’être toujours étiquetés ainsi.

« Le stéréotype du jeune, c’est un jeune homme avec une arme à feu, tandis que les jeunes femmes sont inévitablement reléguées au statut de victimes passives », a dénoncé M. Simpson, qui a noté que de tels stéréotypes sexistes privaient les jeunes de leur voix et de leadership, alors qu’ils sont des moteurs de changement et des sources innovantes de paix.

En découlent des « présupposés politiques », comme le risque accru de violence qui résulterait de la croissance de la population jeune ou le fait que les jeunes réfugiés et migrants représenteraient de nouvelles menaces en termes de terrorisme et de crime.  Une troisième idée est que la plupart des jeunes sont susceptibles d’être recrutés par des groupes extrémistes violents.  M. Simpson a affirmé qu’il n’existait aucune preuve à l’appui de ces « politiques de panique ».  Il a aussi remarqué qu’on n’avait pas évalué la rentabilité économique des mesures de sécurité prises en vertu de ces politiques.

La plupart des jeunes ne sont pas impliqués dans la violence et mènent tout simplement leur vie, a souligné l’auteur, tout en rendant hommage à ceux qui font preuve de grand courage, de créativité et de résilience en travaillant en faveur de la paix et de la sécurité.  Il a toutefois regretté que ces activités manquent cruellement de reconnaissance et de soutien.

M. Simpson a poursuivi en soulignant ce travail important des jeunes dans toutes les phases des cycles de paix et de conflit, en particulier leur rôle crucial dans les processus formels de paix.  Il a mis en évidence leur contribution à la cohésion sociale, par le niveau local, les communautés et les familles.  En outre, les jeunes travaillent à résoudre des conflits de types différents, a-t-il noté en saluant les partenariats innovants qu’ils utilisent.  À cela s’ajoutent les nouveaux chemins et espaces qu’ils utilisent en faveur de la paix: l’art, la culture, le sport, le cyberespace, les médias sociaux et les nouvelles technologies.  Enfin, les jeunes, a-t-il remarqué, passent par la voie des manifestations et protestations pacifiques, afin de rechercher la justice, de combattre la corruption, de demander la liberté de mouvement ou encore de lutter contre la violence des armes. 

Pour investir dans les atouts des jeunes, M. Simpson a recommandé aux États Membres et aux acteurs internationaux de les inclure de façon globale.  Il faut, a-t-il détaillé, des politiques qui incluent véritablement les jeunes dans les forums politiques, une inclusion économique complète des jeunes au-delà d’un simple emploi, une protection des jeunes contre la violence, la reconnaissance de leurs expérience et contributions uniques, un investissement dans l’éducation à la paix, et enfin, un leadership par les jeunes dans le désengagement et la réintégration des anciens combattants.

L’auteur principal de l’étude a prôné une réorientation des efforts en recommandant notamment de passer des réactions aux problèmes à une véritable approche de prévention.  Il faut aussi passer d’un investissement dans la sécurité pure et dure à un investissement dans les travaux menés par les jeunes en faveur de la paix.  L’expert a également plaidé pour que les États s’engagent dans de nouveaux partenariats avec des organisations centrées sur ou dirigées par des jeunes, avant d’appeler aussi à embrasser une nouvelle culture qui s’éloigne des conceptions romantiques ou diaboliques de la jeunesse.

Les propositions formulées dans l’étude visent trois grands domaines d’action, a enfin indiqué M. Simpson: investir dans les capacités des jeunes, élargir leur inclusion dans les sphères politique, économique et socioculturelle, et édifier des partenariats avec les jeunes à l’ONU ou en dehors.

Mme SOPHIA PIERRE-ANTOINE, représentante de la société civile, a expliqué être née en Haïti en 1991, alors que se déroulait un coup d’État.  Elle a mentionné le témoignage d’une jeune fille haïtienne, qui lui a confié qu’elle n’avait pas peur d’un autre tremblement de terre, après celui qui a frappé le pays en 2010, mais de la violence sexuelle.  « Le récit dominant qui fait des jeunes femmes des victimes impuissantes doit changer », a-t-elle ajouté.  Elle a déploré la violence qui domine les rapports dans les communautés haïtiennes avec lesquelles elle travaille, ainsi que la « masculinité toxique » qui empêche des jeunes hommes d’exprimer leurs sentiments.  « Le récit dominant qui voit dans les jeunes hommes des individus violents doit changer », a-t-elle poursuivi.

Mme Pierre-Antoine a indiqué qu’elle a fait partie des consultations de l’étude de progrès pour la région d’Amérique latine et des Caraïbes, au cours de laquelle les jeunes qui y ont participé ont fait part de leur rejet des forces qui terrorisent les pauvres, les peuples autochtones, les minorités ethniques et religieuses, les personnes handicapées et malades et les jeunes LGBT.

La jeune femme a ensuite formulé ses attentes à l’endroit du Conseil de sécurité.  Elle l’a invité à soutenir les jeunes dans leur lutte contre le racisme, la xénophobie, l’intolérance religieuse, la transphobie, le sexisme et les discriminations frappant les personnes handicapées.  « Cela est indispensable pour repenser les relations de pouvoir qui brisent nos sociétés. »  Elle a invité le Conseil à reconnaître la force que confère le fait d’avoir de multiples identités et à garantir que l’âge et le genre fassent partie intégrante des discussions sur la paix et la sécurité.

Mme Pierre-Antoine a également souligné l’importance de la résolution 2250 (2015) pour assurer l’inclusion des générations les plus jeunes, ainsi que la participation des jeunes femmes aux programmes de règlement et de consolidation de la paix.  Au niveau international, nous, les jeunes, contribuons aux efforts de paix et de sécurité avec des ressources et un appui très limités, a-t-elle dit.  « Imaginez ce que nous pourrions accomplir si nous siégions en plus grand nombre au sein des gouvernements, des agences onusiennes et des structures dirigeantes des secteurs privé et public. »  C’est en appuyant nos initiatives et nos efforts que la pérennisation de la paix pourra devenir réalité, a-t-elle conclu.

Mme KESSY EKOMO-SOIGNET, Directrice de l’organisation URU, de la République centrafricaine (RCA), a souligné que 72% de la population avait moins de 35 ans de son pays, « l’un des pires où être jeune ».  Pourtant, a-t-elle nuancé, notre position dans les classements mondiaux n’est pas une fatalité car « l’autre partie de l’Histoire, les jeunes l’écrivent aujourd’hui ».

L’intervenante s’est félicitée de la reconnaissance du rôle des jeunes dans la construction de la paix, pour prévenir et mettre fin à la violence, faire taire les armes et promouvoir le dialogue au sein de leurs organisations et espaces de rencontre.  Elle a expliqué qu’elle travaillait au quotidien avec ses pairs en RCA et avec d’autres jeunes dans le monde.

D’après la Directrice de l’organisation URU, la résolution 2250 (2015) et l’étude indépendante présentée aujourd’hui sont « des outils stratégiques clefs pour nous permettre de créer une nouvelle relation avec nos autorité et l’ONU ».  Toutefois, a-t-elle averti, notre représentation ne doit pas être symbolique, ni se limiter aux lancements et manifestations publics.  « Valider la représentation de la jeunesse comme une faveur qui lui est faite ne fait qu’élargir le fossé entre la jeunesse et l’État », a-t-elle lancé.

C’est seulement récemment que le rôle des jeunes a commencé être mis en exergue en RCA, a poursuivi la jeune femme.  « Nous avançons avec le sentiment que nous aidons notre pays et que nous apportons notre pierre à l’édifice », a-t-elle témoigné.

Mme Ekomo-Soignet a lancé un appel au partenariat, estimant que le progrès ne serait possible que si nous acceptons d’aller au-delà de nos préjugés et de nos beaux discours. Elle a dit attendre en particulier du Conseil de sécurité et des États Membres qu’ils adoptent des quotas afin de garantir la participation des jeunes et la parité des sexes à tous les stades des processus politiques liés à la paix et à la sécurité.  De leur côté, les gouvernements doivent institutionnaliser des mesures pour assurer la participation des jeunes.

En particulier, elle a demandé aux États de créer des espaces protégés pour les jeunes et de les associer à l’évaluation de leurs besoins économiques.  Les programmes pour l’emploi doivent aller à la rencontre des jeunes les plus marginalisés.  « Nous vous demandons de protéger l’état de droit en protégeant les jeunes des arrestations arbitraires », a-t-elle ajouté.

En conclusion, Mme Ekomo-Soignet a souhaité un investissement d’un dollar par jeune d’ici à 2025 pour le dixième anniversaire de la résolution 2250 (2015).

Déclarations

M. JACEK KRZYSZTOF CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a indiqué que la seule manière d’empêcher que des jeunes ne se tournent vers l’extrémisme est de leur offrir les moyens d’un engagement constructif dans la société.  « Si les jeunes continuent d’être exclus des efforts de paix nationaux et internationaux, alors l’instabilité et l’extrémisme continueront d’être des menaces », a-t-il prévenu.  Le Ministre a appelé à investir dans l’enseignement, mentionnant le projet que mène son pays au Liban pour réhabiliter des écoles accueillant des enfants de réfugiés et des communautés locales.

Dans le droit fil de la résolution 2250 (2015), le Ministre a demandé la participation accrue des jeunes dans les efforts de paix, avant d’insister sur l’apport des jeunes polonais dans l’instauration d’une culture de paix dans son pays.  Les jeunes ont en effet joué un rôle crucial au sein de Solidarnosc, mouvement non violent de lutte contre un régime communiste autoritaire.  Le Ministre a ensuite cité les liens bien connus du pape Jean-Paul II avec les jeunes et rappelé qu’en 2016, des jeunes du monde entier se sont rendus à Cracovie pour rencontrer le pape François.  « Les jeunes de toutes les régions du monde ont besoin d’un environnement positif pour développer leur potentiel. »  Enfin, M. Czaputowicz a mentionné le rôle prééminent des gouvernements dans le processus d’autonomisation des jeunes.  « Si nous voulons bâtir un avenir meilleur pour les générations futures, nous n’avons pas d’autre choix que d’investir dans les jeunes et de leur donner une voix dans tous les processus de prise de décisions. »

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a vu dans les jeunes de véritables « agents du changement » et souhaité qu’ils soient associés étroitement à tous les niveaux des processus de prévention et de règlement des conflits.  Il a appuyé la recommandation d’allouer, à l’occasion du dixième anniversaire de la résolution 2250 (2015), la somme de 1, 8 milliard de dollars d’ici à 2025 à des programmes centrés sur la jeunesse.  Il a aussi plaidé pour l’adoption d’un cadre mondial global centré sur la jeunesse.

Le délégué a ensuite mentionné les progrès accomplis dans son pays où les jeunes kazakhs sont de plus en plus associés aux processus de décision.  « En 2002, nous avons créé le Congrès de la jeunesse constitué de mouvements et d’organisations de la jeunesse. »  M. Umarov a cité les efforts fructueux pour empêcher que les jeunes ne se tournent vers l’extrémisme violent.  Le Kazakhstan est une mosaïque de 130 groupes ethniques et de 16 religions majeures qui vit dans la paix et croit à la tolérance, a-t-il dit.  Enfin, M. Umarov a insisté sur l’importance de la stratégie mondiale « Kazakhstan 2050 », qui vise à faire du Kazakhstan l’un des 30 pays les plus développés au monde.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIB (Koweït) s’est référé à la résolution 2250(2015), un texte « historique », pour rappeler que l’autonomisation des jeunes dans n’importe quelle société dépend du développement et de la prospérité de chaque pays.  Se disant préoccupé par les défis qui entravent la mise en œuvre de l’agenda « Jeunes, paix et sécurité », le représentant a mentionné l’accès aux besoins les plus essentiels.  Dans la région arabe, a-t-il souligné, le taux de chômage, le plus élevé au monde, atteint 30%.  Il faut, a-t-il ajouté, réaliser que les conflits « ont détruit le rêve et le futur des jeunes », que « le terrorisme a pris en otage leur innocence ».

Comme exemples positifs, le représentant a cité la création du Ministère koweitien pour la jeunesse en 2013, et le fait que Koweït City a été désignée « capitale de la jeunesse arabe » sous le slogan « Ici les jeunes ».  Il a insisté sur la nécessité de mettre en place les objectifs de développement durable et, à cette fin, de soutenir les jeunes et les organisations de la société civile qui s’occupent d’eux.  Il faut aussi mettre en place des réseaux pour protéger les jeunes dans les zones touchées par les conflits. « Les jeunes sont notre meilleur investissement », a-t-il conclu. 

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a rappelé que son pays avait appuyé la résolution 2250 (2015).  Les jeunes sont un trésor et un défi monumental, a-t-elle estimé, faisant observer que, s’ils étaient ignorés, les jeunes pouvaient devenir des forces d’instabilité dans les conflits.

La représentante a souligné la nécessité de tirer profit au plus vite du potentiel des jeunes, en voyant en eux des agents du changement.  Elle a mentionné le travail d’une jeune ressortissante du Bangladesh, appuyée par son pays, qui œuvre auprès d’autres jeunes pour éviter qu’ils ne soient recrutés par des organisations terroristes.  L’extrémisme violent est une menace et nous devons offrir aux jeunes une éducation d’avenir pour qu’ils s’en détournent, a-t-elle estimé.  Elle a mentionné un programme spécifique pour renforcer la résilience des communautés face « au stress économique » et éviter que les jeunes ne versent dans l’extrémisme violent.

Les États-Unis ont, par leurs ambassades et consulats, des liens forts avec les organisations de jeunes dans le monde entier, a encore déclaré la représentante, pour qui il faut faire fond sur la résolution 2250 (2015) pour passer des paroles aux actes.  Exhortant le Conseil à en faire davantage, elle a conclu en déclarant que « les jeunes sont notre avenir et notre présent ».

Mme ANNE GUEGUEN (France) a déclaré qu’il fallait « combattre les idées reçues et les stéréotypes et prendre la mesure du potentiel qu’incarne la jeunesse » avant de constater avec regret que les jeunes étaient souvent perçus comme un « fardeau », voire comme une « menace ».  En réalité, a-t-elle ajouté, les jeunes sont victimes de discriminations et demeurent exclus des processus de prise de décisions, des institutions politiques et du marché de l’emploi.  C’est d’autant plus dommageable, a poursuivi Mme Gueguen, qu’ils démontrent une réelle capacité à se mobiliser et à proposer des solutions innovantes, non seulement aux problèmes qu’ils rencontrent, mais également aux défis concernant la société tout entière.  Selon la représentante, pour mettre fin à l’exclusion des jeunes ou à leur recrutement par des groupes armés, l’accès à l’éducation demeure la principale solution, à plus forte raison qu’il s’agit aussi d’un facteur clef de réduction des risques de conflit. 

Mentionnant, par ailleurs, le rôle grandissant des jeunes en matière de maintien de la paix et de la sécurité, la représentante a appelé à renforcer la mise en œuvre de l’agenda « Jeunes, paix et sécurité », notamment en enrichissant la base fournie par la résolution 2250 (2015).  Dans cette perspective, elle a apporté le soutien de la France à l’initiative du Pérou visant à aboutir à un nouveau projet de résolution.  Au-delà de l’action du Conseil, a enfin déclaré Mme Gueguen, l’ONU dans son ensemble devrait se mobiliser davantage pour permettre une meilleure participation des jeunes dans tous les secteurs.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a relevé avec préoccupation que, d’après l’étude à l’ordre du jour, près de 408 millions de jeunes âgés de 15 à 29 ans vivaient en 2016 dans des zones affectées par des conflits armés ou par la violence organisée ou encore qu’au moins un jeune sur quatre était touché par ces phénomènes.  Elle a jugé essentiel de protéger les jeunes des conséquences des conflits, conformément au droit humanitaire international.

Mme Guadey a déploré l’exclusion des jeunes des cadres politiques pour la prévention des conflits, et la prise en compte limitée de leur point de vue dans les efforts de développement.  Elle a vu dans l’étude un point de départ pour une réflexion globale dans le contexte des trois piliers de l’ONU.  La pleine mise en œuvre des recommandations qu’elle contient devrait également être envisagée au niveau national. 

Les forts taux de chômage et la pauvreté continuent d’être des causes de conflit et de l’extrémisme dans le monde, a fait observer Mme Guadey, pour qui il faut offrir des opportunités d’emploi et d’éducation aux jeunes afin de promouvoir la paix et de prévenir la recrudescence des conflits, tout en renforçant la résilience.

Il va falloir se concentrer sur le développement durable pour tous, a insisté la représentante, en particulier assurer l’accès à l’éducation, aux services de base et à des emplois décents.  « Il faut éviter que les jeunes ne tombent entre les mains d’extrémistes violents ou groupes armés », a-t-elle ajouté.  Il est essentiel de trouver des solutions durables pour ceux qui ont été touchés par un conflit armé et les aider à se réintégrer dans la société.  Pour Mme Guadey, le Conseil de sécurité pourrait donner suite à l’étude dans le contexte de l’examen des situations de pays, tout en prenant en compte les préoccupations des jeunes qui ont été rendus particulièrement vulnérables par des situations de conflit. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a souligné le rôle important que doit jouer la jeunesse dans l’édification de sociétés pacifiques et exemptes de terrorisme.  La question de la jeunesse est liée à la question de l’extrémisme violent, que nous le voulions ou non, a-t-il dit, expliquant que les jeunes qui cherchent leur identité et n’ont parfois pas d’éducation sont vulnérables à l’extrémisme violent et déplorant le rôle des réseaux sociaux.  Il a également souligné le danger posé par les groupes non étatiques qui s’opposent aux autorités locales et a mis en garde contre toute instrumentalisation politique des jeunes.

Le représentant a jugé essentiel un travail de prévention national systématique contre l’extrémisme violent. Internet comme les médias traditionnels devraient promouvoir des valeurs positives de respect et de dialogue, en tenant compte des spécificités locales, a-t-il estimé.  Il a demandé que les jeunes soient protégés de toute interférence politique jusqu’à ce qu’ils aient atteint la maturité.  Il a en outre insisté sur l’importance du sport pour renforcer l’estime de soi des jeunes, avant de dénoncer le mépris actuel pour les familles au nom de l’individualisme.

Le représentant a rappelé que la communauté internationale devait respecter et soutenir les efforts nationaux d’autonomisation des jeunes dans les pays en conflit.  Il a présenté les grandes lignes de la politique pour la jeunesse en Russie, qui vise notamment à la pleine réalisation du potentiel des jeunes.

Enfin, et malgré l’importance du débat d’aujourd’hui, M. Polyanskiy a jugé important de respecter la répartition des compétences entre les organes onusiens, le Conseil étant chargé du maintien de la paix et de la sécurité.  « Les enjeux de la jeunesse devraient être traités par les institutions spécialisées », a-t-il conclu.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a averti que, « si nous ne tenons pas compte de cette tendance à long terme qu’est la croissance démographique des jeunes sans emploi, nous nous trouverons dans une situation problématique ».  La représentante a ensuite proposé d’avoir une discussion à l’ECOSOC ou à l’Assemblée générale sur le développement économique des jeunes pour compléter le débat d’aujourd’hui.  Plus de la moitié de la population mondiale est âgée moins de 30 ans, ce qui signifie que les jeunes sont des acteurs clefs à toutes les étapes de la vie, a poursuivi la représentante.  « Si nous ne répondons pas à leurs aspirations, il sera très difficile pour les pays de poursuivre leur trajectoire à la hausse », a-t-elle insisté, ajoutant: « Nous avons vu ce qu’il se passe dans des pays où l’opinion de la jeunesse n’est pas prise en compte, comme en Syrie. »

Pour Mme Pierce, permettre aux jeunes de faire entendre leur voix est un premier pas.  Au Royaume-Uni, la Chambre des communes organise tous les ans un débat avec les jeunes, a-t-elle expliqué.  Dans le même esprit, Londres a réuni, la semaine dernière, les représentants des jeunes des pays du Commonwealth, qui ont souvent évoqué le sujet de la prévention de l’extrémisme violent.

Appuyer les représentants de la jeunesse doit aller au-delà de plateformes, a reconnu Mme Pierce.  Il faut avant tout leur donner une éducation.  Notant que 131 millions de jeunes filles n’avaient pas de possibilités d’éducation dans le monde, elle a indiqué que l’éducation des jeunes filles était une priorité du Ministère des affaires étrangères britannique et apporté son soutien à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  Ce débat public, a-t-elle conclu, est « une occasion en or pour faire fond sur la stratégie lancée par le Conseil en 2015 ».    

M. THÉODORE DAH (Côte-d’Ivoire), qui s’est félicité de l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2250 (2015) qui reconnaît formellement le rôle positif et les droits des jeunes, a estimé qu’il ne suffisait pas seulement de concevoir des projets pour les jeunes, mais qu’il fallait penser ces projets avec les jeunes.  En Côte d’Ivoire, a-t-il ajouté, cette approche participative a donné lieu à la création d’un ministère « exclusivement dédié » à la question de la promotion de la jeunesse et de l’emploi des jeunes.  Dans cette même logique, le Gouvernement ivoirien a mis en place l’agence emploi jeunes, afin d’appuyer les initiatives en faveur de l’emploi des jeunes, ainsi qu’un conseil national de la jeunesse, dont le rôle est d’aider à mieux prendre en compte les préoccupations des jeunes dans l’élaboration des politiques publiques.  « L’investissement des jeunes est indispensable pour garantir la pérennisation de la paix, une génération après l’autre », a conclu M. Dah.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a rappelé l’exhortation de Nelson Mandela aux jeunes: « Soyez les scénaristes de votre destin et les étoiles qui montrent la voie d’un avenir meilleur. »  « Notre rôle est d’écouter les jeunes et de les inclure et de les soutenir autant que possible », a ajouté la représentante, pour qui il est temps de battre en brèche le récit dominant destructeur qui voit dans les jeunes des acteurs de conflit ou des victimes.  « Nous devons utiliser à plein leur potentiel pour qu’ils deviennent des bâtisseurs de paix », a-t-elle affirmé.

Mme Schoulgin Nyoni a jugé que l’autonomisation politique, sociale et culturelle des jeunes était un préalable à tout engagement.  La pleine participation des jeunes aux processus de consolidation de la paix est cruciale, a-t-elle ajouté, demandant à ce qu’on investisse dans les jeunes et à entendre leurs voix.  « Nous devons reconnaître la diversité des jeunes dans nos analyses », a poursuivi la représentante, qui a souligné la nécessité de ne laisser aucun jeune de côté et de reconnaître la spécificité des défis que ces derniers doivent relever.  « Enfin, nous devons continuer d’œuvrer pour que ces questions restent inscrites à l’ordre du jour du Conseil », a-t-elle conclu.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a affirmé que les jeunes contribuent de manière essentielle à la prévention et à la résolution de conflits, ainsi qu’à la pérennisation de la paix.  Les jeunes, a-t-elle souligné, ont en effet un désir légitime de participer au processus de prise de décisions concernant leur propre avenir.  Elle a aussi vu dans le pouvoir transformateur des jeunes l’occasion de renforcer les sociétés composées d’éléments très divers et de les rendre plus inclusives.

Elle a jugé impératif d’intégrer les perspectives des jeunes de façon plus structurelle aux travaux du Conseil de sécurité et de l’ONU dans son ensemble, et a encouragé le Conseil à se montrer ouvert en permettant à davantage de jeunes d’intervenir.  Qui plus est, on doit faire davantage référence au rôle des jeunes dans les mandats et le suivi des opérations de maintien de la paix et des opérations politiques spéciales, a-t-elle estimé, citant notamment le cas de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM).

La déléguée a par ailleurs appelé à ce que la mise en œuvre de la résolution 2250 tienne compte des différents besoins des jeunes en s’appuyant sur une analyse complète des causes sous-jacentes, exhortant aussi à des efforts de mise en œuvre « plus explicites ».  Les Pays-Bas jouent déjà leur rôle en appuyant des programmes qui favorisent la participation des jeunes dans le nord du Mali, ainsi que la formation à la démocratie et aux droits de l’homme dans plusieurs pays.  Au niveau national, des programmes communautaires ont été mis sur pied dans des villes comme La Haye pour prévenir la radicalisation, a indiqué la représentante.

M. WU HAITAO (Chine) a plaidé pour que la communauté internationale s’attache davantage à la protection des jeunes en situation de conflit.  À cet égard, il a souhaité que le Conseil de sécurité renforce sa coopération internationale sur la base de son mandat et lutte contre les terroristes et les extrémistes violents qui entendent nuire à la jeunesse.  Le délégué a insisté sur l’importance de prévenir l’influence de leur idéologie sur les jeunes, notamment sur Internet.  « Il faut couper la main sombre des terroristes et des extrémistes qui est tendue vers nos jeunes », a-t-il martelé.

Ensuite, a poursuivi M. Wu, pour résoudre les questions problématiques dans les « endroits chauds », il faut trouver des solutions politiques en se basant sur les buts et principes de la Charte des Nations Unies.  « Nous devons veiller à la participation constructive des jeunes aux processus de paix et tenir compte de leurs besoins », a-t-il dit.  À cette fin, il a jugé nécessaire de se concentrer sur les racines des conflits, comme la pauvreté extrême et le manque de ressources, et de renforcer l’éducation des jeunes.  C’est pourquoi il a plaidé pour que la communauté internationale aide les pays en développement à renforcer leurs capacités en matière de développement durable, notamment à travers la coopération avec les organisations régionales, dont l’Union africaine, et sous-régionales.

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a indiqué que la grande majorité des jeunes du monde voulait participer aux efforts de paix, en particulier auprès de leurs communautés.  « Les jeunes ont soif de paix », a-t-elle affirmé, avant d’appeler à la pleine application de la résolution 2250 (2015) et de se dire vivement préoccupée par les conditions de vie des 400 millions de jeunes vivant dans des zones de conflit.

Plus de la moitié de la population mondiale a moins de 30 ans, a ensuite rappelé Mme Mele Colifa.  Elle a estimé que le taux de chômage très élevé des jeunes en Afrique découlait des différents niveaux de développement, mais aussi des conflits, affirmant que « la lutte contre l’extrémisme violent doit s’enraciner dans notre engagement en faveur du développement durable ».

La représentante a enfin rappelé la foi inébranlable du Président de son pays dans la jeunesse africaine, qui est l’avenir du continent mais aussi du monde.  « Nous devons renforcer les aptitudes des jeunes pour qu’ils contribuent aux efforts de paix », a-t-elle conclu.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) s’est inquiété de l’avenir des quelque deux milliards de jeunes, en particulier pour ceux qui sont confrontés à des conflits.  Dans de nombreux cas, a-t-il remarqué, la frustration et l’impuissance causées par les morts et les déplacements liés aux conflits, ou encore l’endoctrinement par des groupes terroristes ou armés, poussent les jeunes à chercher une vengeance ou à trouver une stabilité économique par d’autres moyens.  Il a aussi rappelé que les pratiques interventionnistes et les politiques de changement de régime avaient eu des effets collatéraux et ont apporté le chaos, le terrorisme et la militarisation.  

Le représentant a souligné que la résolution 2250 (2015) appelle à la participation des jeunes dans les prises de décisions, surtout pour la consolidation de la paix, la participation politique et la résolution de conflits.  Il a cité le cas de la Colombie où les jeunes ont joué un rôle positif pour que le processus de paix continue.  Il a ensuite parlé de la prévention où, là encore, les jeunes et les organisations de la société civile peuvent avoir un effet positif, en tirant parti des dynamiques et priorités locales.  Il a cité les organisations de jeunes qui, en République démocratique du Congo, élaborent des stratégies pour pallier le manque de sécurité, de services de base, de soins médicaux et d’éducation.  Le représentant a appelé la communauté internationale à appuyer ce genre d’organisation, avant d’attirer l’attention sur le sort des jeunes des territoires palestiniens occupés.

Pour M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou), il faut cesser de percevoir les jeunes comme un problème et les considérer désormais comme des acteurs à part entière des processus de paix.  Pour y parvenir, le représentant a plaidé en faveur de la création d’espaces de dialogue ouverts et sécurisés, permettant aux jeunes de prendre part aux processus de consolidation et de construction de la paix dans leurs communautés nationales respectives. 

Il convient également de lutter contre la discrimination des jeunes en se mobilisant contre les stéréotypes qui les stigmatisent et en encourageant leur participation active à la vie publique, a ajouté le représentant.  C’est justement l’objet du projet de résolution présenté conjointement par le Pérou et la Suède, dans le but de compléter la résolution 2250 (2015) du Conseil de sécurité.  « Le moment est venu de changer radicalement notre façon de penser pour reconnaître les jeunes comme l’élément qui manque à la paix », a déclaré M. Meza-Cuadra tout en appelant l’ensemble des États Membres à soutenir le projet de résolution présenté.

M. DIDIER REYNDERS, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Belgique, a salué les conclusions de l’étude présentée aujourd’hui, en ce qu’elles bousculent, selon lui, « plusieurs conceptions stéréotypées » et démontrent que les jeunes possèdent une « importante capacité d’action en faveur de la paix ».  Pour libérer ce potentiel, M. Reynders a estimé que les États devaient encourager avant tout l’accès à l’éducation, pour aider les jeunes à devenir des « citoyens conscients, critiques et ouverts, responsables et capables de réfléchir de manière constructive à leur place et à leur rôle dans la société ». 

Il est également évident, a poursuivi le Vice-Premier Ministre, qu’une insertion effective des jeunes ne pourra avoir lieu que si les États garantissent « la dignité, la protection et la qualité de vie auxquelles ils ont droit ».  M. Reynders a enfin jugé important d’intensifier les efforts visant à associer davantage la jeunesse à la réalisation des objectifs de développement durable.

Mme MARIJA PEJČINOVIĆ-BURIĆ, Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères et européennes de la Croatie, a souligné la nécessité de voir dans les jeunes des agents du changement et de tourner le dos aux conceptions faisant de la jeunesse un défi à relever.  Nous savons que les stéréotypes sur les jeunes femmes comme victimes et les jeunes hommes comme acteurs violents nuisent à l’autonomisation des jeunes, a-t-elle déclaré.  Elle a souligné l’importance de l’éducation, qui va au-delà des efforts d’alphabétisation et d’acquisition de compétences et permet de promouvoir la tolérance et une « citoyenneté mondiale ».  Elle a appelé à la mise en place des conditions permettant aux jeunes de réaliser tout leur potentiel.  « C’est seulement par le biais d’une approche holistique et multidisciplinaire que nous parviendrons à des résultats tangibles dans le domaine de l’autonomisation des jeunes », a estimé Mme Pejčinović-Burić.  Enfin, elle a cité ces mots de Nelson Mandela: « Les jeunes sont capables de mettre à bas les tours de l’oppression et de hisser les bannières de la liberté. »

M. MOHAMED ASIM, Ministre des affaires étrangères des Maldives, a souligné que l’énergie et la passion dont font généralement preuve les jeunes devraient être mises au service de la paix, de la sécurité et du maintien de la stabilité.  « Nous avons besoins d’envisager des réformes politiques et institutionnelles pour que la jeunesse s’engage de manière plus productive en faveur de la création d’un environnement favorable à la paix », a déclaré le Ministre.  Pour M. Asim, cela suppose également de reconnaître que, dans de nombreux pays, les jeunes sont bien souvent victimes de stéréotypes et de stigmatisation.  On leur reproche notamment d’être des facteurs d’insécurité, a-t-il précisé.  Selon lui, cela conduit à formuler des politiques publiques ciblant les jeunes comme « un problème à régler », au lieu de considérer la jeunesse comme un vivier de solutions innovantes. 

Le Ministre a par ailleurs mis l’accent sur le rôle des médias, et en particulier les médias sociaux, dans la formation des générations futures.  « Il est important de limiter la diffusion de fausses informations et de propager des idéologies qui contribuent à l’unité et à la cohésion sociale auprès des jeunes », a-t-il déclaré, appelant à trouver le bon équilibre entre, d’une part, la liberté d’expression et, d’autre part, la nécessité de lutter contre l’incitation à la violence et à l’extrémisme.

« Les jeunes savent que les sociétés, pour vivre dans la paix et la sécurité, ont besoin de davantage que d’une simple absence de violence », a déclaré M. GUDLAUGUR THÓR THÓRDARSON, Ministre des affaires étrangère de l’Islande.  « Ils veulent sauver la planète et sont conscients que les changements climatiques sont une cause potentielle de conflit pour les futures générations. »  Il a dénoncé les visions erronées faites des jeunes, en particulier des jeunes hommes et notamment dans les médias, certaines forces politiques utilisant ces visions à des fins justement politiques.  « Les sociétés qui autorisent les jeunes à participer à la vie publique ont moins de risques de voir la violence surgir », a décrété le Ministre qui a, en plus, dénoncé la répression des jeunes et des militants par les autorités syriennes.  Enfin, le Ministre a invité le Conseil à prendre en compte les jeunes dans la formulation des mandats de maintien de la paix et à travailler main dans la main avec l’Assemblée générale pour faire avancer le programme sur les jeunes M. Graeme Simpson, auteur principal de l’étude sur les jeunes et la paix et la sécurité et la paix et la sécurité.

M. MEVLÜT ÇAVUŞOĞLU, Ministre des affaires étrangères de la Turquie, a rappelé qu’il y avait à l’heure actuelle environ 1,8 milliard de jeunes dans le monde, soit le nombre le plus élevé jamais atteint dans l’histoire de l’humanité.  Malheureusement, s’est-il inquiété, ces derniers sont la cible d’idéologies extrémistes, radicales et terroristes de la part de groupes tels que Daech, Al-Qaida, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), le Parti de l’Union démocratique (PYD) et les Unités de protection du peuple (YPG).  Selon le Ministre, les principaux facteurs à l’origine de la radicalisation des jeunes sont la xénophobie, l’islamophobie, la discrimination religieuse et ethnique et la marginalisation socioéconomique.  « Nous devons y mettre fin », a-t-il appelé, tout en plaidant en faveur d’une approche globale, à commencer par l’investissement dans l’éducation des jeunes et la mise en œuvre de programmes visant à leur réintégration.

Mme MARGARET KOBIA, Ministre du service public, de la jeunesse et des questions de genre du Kenya, a indiqué que la population de son pays était composée à 78% de personnes âgées de moins de 35 ans.  Étant donné la forte proportion de jeunes parmi la population kényane, la Ministre a affirmé que l’autonomisation des jeunes et leur participation accrue dans tous les secteurs de la société étaient des priorités pour son gouvernement.  Cependant, a regretté Mme Kobia, la participation des jeunes dans les processus de prise de décisions demeure insuffisante.  Afin de remédier à cet état de fait, la Ministre a déclaré que son pays était sur le point de lancer un certain nombre d’initiatives pour sensibiliser les jeunes au maintien de la paix aux niveaux national, régional et local, dans le cadre du plan d’action kényan de mise en œuvre de la résolution 2250 (2015).

Par ailleurs, la Ministre a indiqué que l’extrémisme violent et la radicalisation des jeunes continuaient d’être un problème important au Kenya.  Pour y faire face, Mme Kobia a appelé à lutter contre l’incitation à la violence à l’encontre de certaines religions ou groupes ethniques minoritaires, selon elle, à l’origine de la propagation d’idéologies radicales parmi les jeunes victimes de stigmatisation.

M. VÄINO REINART, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Estonie, a insisté sur l’importance de la résolution 2250 (2015), se félicitant par ailleurs de l’étude indépendante sur les jeunes, la paix et la sécurité.  Il a dit espérer que cette étude serait suivie de la mise en œuvre de ses recommandations et permettrait d’enclencher un véritable engagement avec les jeunes sur les questions concernant la paix et la sécurité.

M. Reinart a appelé à placer les jeunes au cœur des stratégies de prévention et à appuyer leur accès équitable à l’éducation et au marché du travail, ainsi qu’à appuyer la promotion du respect de leurs droits et libertés fondamentales.  En outre, les partenariats de consolidation de la paix qui intègrent les jeunes, les femmes et les organisations de la société civile sont essentiels à la consolidation et au maintien de la paix.

Le Vice-Ministre a souligné qu’une fois qu’un conflit s’achève, il est important de veiller à ce que les jeunes puissent participer aux activités postconflit et au processus de prise de décisions.  Il a ensuite indiqué qu’afin de faire davantage entendre la voix des jeunes, l’Estonie avait abaissé de 18 à 16 ans l’âge minimum requis pour pouvoir voter dans les élections locales.

M. SRDAN DARMANOVIČ, Ministre des affaires étrangères du Monténégro, a demandé une participation accrue des jeunes aux processus de prise de décisions.  « Mon pays appuie tous les efforts visant à souligner les besoins et priorités des jeunes et à apporter des solutions durables à leurs problèmes », a-t-il déclaré.  Il a indiqué que la politique de la jeunesse de son pays pour les années 2017 à 2021 visait notamment à faciliter l’accès des jeunes au marché de l’emploi, ainsi qu’à une éducation de qualité.  « Nous croyons fermement que l’investissement dans la jeunesse est le meilleur investissement pour la stabilité et la prospérité de notre société. »  Le Ministre a ensuite souligné le rôle actif joué par son pays pour jeter des ponts entre les jeunes des différents pays des Balkans occidentaux, estimant que « c’est à la fois un impératif démocratique et démographique que d’associer activement les jeunes aux processus de prise de décisions ».

M. SERGIY KYSLYTSYA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a assuré que son gouvernement envisagera d’intégrer les recommandations de l’étude de M. Graeme Simpson à sa politique nationale pour les jeunes, précisant qu’une attention notable sera accordée aux problèmes découlant de la tendance qu’ont les gouvernements de considérer comme les jeunes « comme un problème à résoudre ».  Pour ce faire, il a recommandé d’adopter des politiques pour la jeunesse axées sur l’intégration sociale et la prise en compte du potentiel positif et créateur des jeunes.

M. Kyslytsya a ensuite souligné que les jeunes comptaient parmi ceux qui souffrent le plus en Ukraine du fait de « l’agression de la Russie contre la Crimée et le Donbass », précisant que plus de 60% des personnes déplacées sont des jeunes femmes.  Des dizaines de milliers de jeunes se sont portés volontaires pour appuyer les forces armées et protéger l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Les organisations de jeunes jouent également un rôle actif pour fournir une aide humanitaire, a-t-il ajouté.

Le Vice-Ministre a ensuite exhorté la Russie à cesser la pratique illégale consistant à enrôler les jeunes hommes des « territoires occupés ».  Quelle que soit la fierté que nous inspirent les actes de notre jeunesse, le fait d’avoir à repousser une agression étrangère et à en gérer les conséquences n’était pas le sort qu’on lui envisageait, a-t-il déploré.

M. Kyslytsya a par ailleurs souligné que l’éducation aurait un rôle important à jouer pour créer un avenir pour les jeunes ukrainiens. Une réforme du système éducatif a été lancée en 2017 afin de transformer le secteur en un environnement novateur. Le Gouvernement appui aussi le Pacte ukrainien pour la jeunesse 2020 qui cible la création d’emplois et de perspectives éducatives pour les jeunes moyennant des partenariats entre le secteur privé et les institutions éducatives.  L’Ukraine, a-t-il indiqué, a su se départir d’une position condescendante consistant à « travailler avec les jeunes » pour privilégier une approche axée sur la « participation des jeunes ».

Mme PASCALE BAERISWYL, Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Suisse, a cité Gandhi -« si nous voulons parvenir à la paix réelle dans ce monde, nous devons commencer par les jeunes »- avant de rappeler que près de la moitié de la population mondiale a moins de 24 ans.  Elle a jugé primordial de prendre en compte à la fois les besoins et les vulnérabilités de la jeunesse, et plus encore d’utiliser son immense potentiel.  Elle a ensuite mis l’accent sur l’inclusion et l’éducation.

Concernant l’inclusion, Mme Baeriswyl a appelé à faire participer les jeunes dans les processus de prise de décisions dès aujourd’hui, arguant que c’est à la fois un mandat moral et de l’intérêt de la communauté internationale.  Ainsi, pour pérenniser la paix, celle-ci doit être « portée, adoptée et mise en œuvre par les jeunes », a-t-elle précisé.  La représentante a rappelé qu’il existait à travers le monde de nombreuses initiatives visant à inclure les jeunes, citant notamment le Parlement africain de la jeunesse et le même qui existe pour l’Europe.  Elle a aussi invité à encourager ceux et celles qui, « jusqu’à présent », ont choisi de ne pas participer aux processus électoraux ou référendaires, soulignant que la démocratie « est le fruit d’un travail sans relâche ».  Mme Baeriswyl a également insisté sur le rôle des jeunes dans les pays en conflit pour rechercher une solution durable, citant le soutien que son pays apporte à la « Civil Society Support room », qui accueille à Genève plus d’un millier de représentants, pour la plupart âgés de moins de 30 ans, représentant plus de 400 organisations non gouvernementales syriennes lors des négociations placées sous l’égide des Nations Unies.

« Éduquer, c’est allumer un feu », a poursuivi la représentante, qui a rappelé que le monde avait « besoin de grands changements ».  Elle a rappelé, qu’en vertu même du Programme de développement durable à l’horizon 2030, tous les jeunes devraient avoir accès à une éducation inclusive, de qualité et équitable.  Rappelant que près de la moitié des réfugiés ont moins de 18 ans, elle a évoqué le « germe de futures générations perdues », ajoutant qu’une petite minorité pouvait faire le choix de la violence.  C’est pourquoi il faut briser le cercle vicieux de la misère, a plaidé Mme Baeriswyl, qui a rappelé que la Suisse avait augmenté de 50% son budget destiné aux activités d’éducation dans des contextes fragiles, notamment en réhabilitant des écoles au Proche-Orient.  S’il est difficile de prévoir combien de temps il faudra pour surmonter de multiples défis, « la meilleure façon de prédire l’avenir est de le créer », a conclu la représentante, en appelant la communauté internationale à agir ensemble avec ses jeunes.

M. CHRISTIAN LEFFER, délégué de l’Union européenne, a appelé à lutter contre les stéréotypes dont sont souvent victimes les jeunes et qui les poussent parfois à se tourner vers l’action violente.  À l’inverse, le représentant a appelé à changer les mentalités de façon à reconnaître le potentiel de la jeunesse dans la stabilisation et le maintien de la paix.  Affirmant qu’il s’agissait là d’une question prioritaire pour l’Union européenne, M. Leffer a également appelé à « maximiser » l’implication des jeunes dans les activités de maintien de la paix via la création de partenariats, à l’instar du Partenariat Union africaine-Union européenne. 

Mme ANNE SIPILÄINEN, Sous-Secrétaire d’État aux affaires étrangères de la Finlande, a appelé à une mise en œuvre effective de la résolution 2250 (2015), soulignant qu’une approche inclusive prenant en compte les jeunes, les femmes et la société civile, était nécessaire pour obtenir de bons résultats en matière de consolidation de la paix.  Elle a déploré que les jeunes femmes peinent à faire entendre leur voix, notamment dans les situations de conflit, et a annoncé que la Représentante spéciale pour la médiation du Ministère des affaires étrangères de la Finlande mettrait, dans son travail, l’accent sur les jeunes et les femmes.

Mme Sipiläinen a ensuite indiqué que, dans son pays, les organisations de jeunes avaient joué un rôle actif pour promouvoir la résolution 2250, ajoutant que son gouvernement entendait continuer à les appuyer dans ce sens grâce au « réseau 2250 », qui regroupe des ONG et parties prenantes qui représentent les jeunes.  Elle a aussi mis l’accent sur l’importance de l’éducation et de l’alphabétisme numérique pour contribuer au relèvement et bâtir un avenir pacifique.

M. JENS FRØLICH HOLTE, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Norvège, a indiqué que son pays était fier d’avoir contribué financièrement à la réalisation de l’étude indépendante.  « Il n’y a pas de plus grande ressource que notre jeunesse », a-t-il ajouté.  Le représentant a indiqué que la Norvège avait pris une série de mesures concrètes pour mettre en œuvre la résolution 2250 (2015), à commencer par son engagement dans les efforts de paix et de réconciliation en Colombie, aux Philippines et au Soudan du Sud.  Le pays appuie en outre plusieurs mouvements de jeunes, dont le Youth Civil Activism network (YouthCAN).

La Norvège a également doublé son aide en matière d’éducation au cours des quatre dernières années, a souligné le Secrétaire d’État.  Elle copréside avec la Jordanie le Groupe des Amis des Nations Unies sur la prévention de l’extrémisme violent, qui partage les meilleures pratiques pour inclure les jeunes et la société civile et, en 2014, le Gouvernement a lancé son plan d’action contre la radicalisation et l’extrémisme violent qui vise à prévenir ce phénomène chez les jeunes. 

Mme SIMA SAMI I. BAHOUS (Jordanie) a salué la résolution 2250 (2015), qui a permis, selon elle de reconnaître la nécessité de renforcer la participation des jeunes dans les processus de paix, notamment en augmentant leur participation à tous les niveaux et en luttant contre le stéréotype selon lequel la jeunesse serait responsable de la violence.  « Il faut considérer les jeunes comme des partenaires dans la lutte contre le terrorisme pour parvenir à une culture paix », a-t-elle ainsi déclaré, ajoutant que, dans de nombreux pays en guerre, les jeunes constituaient la majorité de la population.  Malheureusement, dans ces pays, les jeunes ne bénéficient pas d’un accès suffisant à l’éducation, a déploré la représentante, qui a appelé à investir davantage dans le secteur. 

« Il faut aussi améliorer la confiance entre les jeunes et ceux qui leur donnent le pouvoir », a déclaré Mme Bahous.  Pour ce faire, elle a appelé à lutter directement contre la radicalisation et l’extrémisme violent, en faisant notamment en sorte que la réponse de la communauté internationale soit davantage centrée sur les causes profondes à l’origine des inégalités sociales.  En ce sens, la représentante a estimé que les stratégies antiterroristes devaient mettre l’accent sur le développement durable et l’accès à une éducation moderne capable de répondre aux besoins des marchés du travail. 

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) s’est dit convaincu que les jeunes étaient les moteurs de la paix et de la prospérité.  Partisan d’approches novatrices, il appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 2250 (2015), soulignant que l’Italie avait été le premier pays à appuyer la création du mandat d’envoyé spécial pour la jeunesse.

Le représentant a ensuite annoncé que son pays avait décidé de financer une initiative majeure pour appuyer les politiques en faveur des jeunes en affectant 500 000 dollars au financement d’un programme sur la contribution des jeunes à la paix durable dans le cadre des objectifs de développement durable.  Un projet pilote est prévu en Afrique.  Le Gouvernement italien a aussi décidé de nommer deux « délégués jeunesse » qui participeront aux travaux de l’ONU.  Il est également favorable à la création d’un groupe de travail officieux sur les jeunes, la paix et la sécurité.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a estimé que la résolution 2250 (2015) représentait un jalon important pour la consolidation de la paix.  En effet, selon lui, les jeunes souffrent de manière disproportionnée des conflits, non seulement parce qu’ils en sont les victimes, mais également parce que la guerre coupe la jeunesse de son accès à l’éducation et à l’emploi.  Les jeunes, a-t-il poursuivi, sont par ailleurs de plus en plus tentés par l’extrémisme violent et la criminalité organisée. 

Néanmoins, M. Giacomelli da Silva a estimé qu’il convenait d’éviter les préjugés amalgamant la jeunesse et la violence.  Pour ce faire, il a appelé la communauté internationale à s’attaquer davantage aux facteurs socioéconomiques qui contribuent à faire sombrer les jeunes dans la violence.  Cela suppose à ses yeux la création de mécanismes garantissant la participation des jeunes à toutes les étapes des processus de paix, ainsi qu’une plus grande participation des jeunes aux instances politiques nationales. 

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a souligné l’ampleur des défis auxquels doivent faire face les jeunes du monde entier, y compris les inégalités socioéconomiques, l’exclusion sociale et politique, la discrimination et le manque d’opportunités économiques.  Les jeunes sont également les principales victimes des conflits armés, des crises humanitaires et des situations d’occupation étrangère, a ajouté la représentante, pour qui la marginalisation découlant de ces différents facteurs joue malheureusement un rôle dans l’attrait qu’exercent les idéologies terroristes sur la jeunesse. 

Afin de mettre un terme à cette évolution, Mme Lodhi a appelé à inclure davantage les jeunes dans les processus de prise de décisions et dans les institutions politiques.  Elle a affirmé que son pays faisait figure de chef de file international en la matière, via la mise en œuvre de stratégies d’intégration de la jeunesse à la société pakistanaise, notamment par leur autonomisation au niveau local et l’apport de formation pour mieux accéder à l’emploi.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a noté que les jeunes de moins de 25 ans représentaient la majorité de la population des pays fragiles ou touchés par un conflit.  Les jeunes représentent aussi un tiers des populations déplacées, ce qui appelle à promouvoir la pleine mise en œuvre de la résolution 2250 (2015), a-t-il indiqué.

Le représentant a encouragé le Conseil de sécurité à se pencher sur ceux des domaines d’intervention recommandés par l’étude qui relèvent de son domaine de responsabilité, afin d’appuyer de manière concrète les actions en faveur des jeunes.  Il a relevé que de nombreux griefs présentés par les jeunes étaient liés aux abus commis par les acteurs du secteur de la sécurité, ou à l’échec de ce dernier à protéger les citoyens des menaces et atteintes aux droits de l’homme.  Il a appelé à renforcer la sensibilisation des jeunes au secteur de la sécurité, son travail et ses responsabilités, ainsi qu’aux défis qu’il affronte.  Il a aussi estimé que les jeunes devraient jouer un rôle actif pour rétablir la justice et la sécurité dans le cadre de la consolidation de la paix postconflit.

M. MOHAMMED SAHIB MEJID MARZOOQ (Iraq) a souligné que les jeunes iraquiens avaient énormément souffert des guerres qui ont secoué le pays au cours des dernières décennies.  Pour s’assurer d’une meilleure intégration des jeunes à la société iraquienne, le représentant a indiqué que son gouvernement s’efforçait d’accroître leur participation à la libération des terres tombées entre les mains de Daech, mais également à la lutte contre l’extrémisme violent et aux différents processus nationaux de prise de décisions.  « L’Iraq tente de faire des jeunes des agents de la paix », a ainsi résumé le représentant, ajoutant que le pays s’était doté d’une stratégie nationale pour les jeunes pour la période 2015-2020, qui comprend notamment la promotion d’idéologies positives et des campagnes de condamnation du terrorisme. 

Le représentant a également indiqué que l’Iraq avait pour ambition, à l’intention de sa jeunesse, d’accueillir des événements sportifs internationaux.  Le pays encourage en outre la participation des jeunes aux élections et aux campagnes électorales, a-t-il ajouté, citant la création, en octobre dernier, du Parlement des jeunes iraquiens.  Enfin, M. Marzooq a appelé la jeune diaspora iraquienne à revenir dans le pays et à investir dans sa reconstruction.

M. JONAS BERING LIISBERG, Secrétaire d’État pour la politique étrangère du Danemark, a appelé à écouter les jeunes, avertissant qu’à défaut, ces derniers risquaient de constituer une source d’instabilité.  Il a rappelé la tenue récente, en Côte d’Ivoire, d’un sommet conjoint de l’Union européenne et de l’Union africaine consacré à l’investissement dans la jeunesse et a imputé son succès à la participation des jeunes aux débats.  Il a ensuite appelé à faire de la résolution 2250 (2015) une réalité.

M. Liisberg a déclaré que son pays appuyait, au Mali, l’ONG « Think Peace » qui combat la radicalisation, et a appelé les États Membres à s’inspirer de cette initiative.  Une participation significative des jeunes est essentielle pour assurer l’avènement d’une paix durable, a-t-il souligné.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a rappelé qu’environ 300 000 enfants et jeunes vivaient à l’heure actuelle dans des zones de conflit.  Outre les dommages physiques et matériels causés par ces conflits, la violence guerrière affecte également les jeunes sur le plan psychologique, ce qui rend d’autant plus difficile leur intégration en temps de paix, a-t-il poursuivi.  Trop souvent, l’économie informelle qui pullule durant les conflits est le seul pourvoyeur d’emploi parmi la jeunesse, a en outre déploré le représentant. 

Pour lutter contre ces situations, M. García Moritán a appuyé l’appel lancé par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) demandant aux États Membres de protéger davantage les jeunes et les enfants touchés par les conflits, via la mise en œuvre d’initiatives politiques au niveau national.  « L’éducation n’est pas seulement un droit de l’homme, c’est également un mécanisme essentiel de protection des jeunes », a notamment déclaré le représentant, ajoutant qu’une bonne éducation permettait aux jeunes de se transformer en acteurs du maintien de la paix en situation de postconflit.  Outre l’éducation, il a estimé que les gouvernements devaient redoubler d’efforts pour garantir un meilleur accès des jeunes à l’emploi, ajoutant que l’intégration économique de la jeunesse contribuait à terme à la consolidation de la paix.

M. GHOLAMHOSSEIN DEHGHANI (République islamique d’Iran) a rappelé que le monde était habité par la plus importante population de jeunes de tous les temps.  Si elle constitue un atout pour l’édification d’un avenir plus prospère, cette situation représente aussi un défi énorme car il faut aider les jeunes à s’autonomiser et les encourager à participer de manière effective aux processus de prise de décisions.  Le représentant a rappelé que les idéologies extrémistes et les groupes terroristes représentaient les plus importantes menaces à la paix et à la sécurité et que les jeunes en étaient les premières victimes, ainsi que la cible privilégiée des activités de recrutement de ces groupes.  Des comportements xénophobes répandus, proches du racisme, constatés dans certains pays, représentent un autre défi qui augmente l’aliénation des jeunes partout dans notre monde interconnecté par la migration et les nouvelles technologies des communications, a ajouté le représentant.

M. Dehghani a appelé à combattre la marginalisation et la radicalisation par l’éducation et la sensibilisation, ainsi qu’en luttant contre la pauvreté et la discrimination, en mettant un terme aux occupations étrangères, notamment en Palestine, et en résolvant de manière effective les situations de conflit.  L’éducation civique et le dialogue ont aussi leur rôle à jouer et les jeunes doivent pouvoir véritablement participer de manière active aux activités lancées dans ce sens, a poursuivi le représentant.  Il a aussi appelé à protéger les jeunes des risques de radicalisation en ligne, estimant que les plateformes de médias devaient être incitées à agir de manière responsable en redoublant d’efforts pour contrôler les contenus échangés.

M. YURI STERK, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie, a déclaré que la participation active de la jeunesse à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques figurait depuis longtemps au nombre des priorités des autorités bulgares, en particulier l’autonomisation des jeunes et leur participation aux processus de prise de décisions.  M. Sterk a par conséquent réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la résolution 2250 (2015), qui consacre le rôle des jeunes en tant que « partenaires de la paix ».  Pour mettre en œuvre cette résolution, le Vice-Ministre a souligné que son pays s’appuyait fortement sur la société civile et encourageait notamment les jeunes à s’engager comme volontaires auprès d’associations en faveur d’initiatives sociales diverses, telles que l’intégration des réfugiés ou des personnes handicapées à la société bulgare, le développement durable et la défense des droits de l’homme. 

S’exprimant en tant que Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. DAN NECULĂESCU, Secrétaire d’État pour les affaires régionales et les affaires multilatérales globales de la Roumanie, a remarqué que l’exclusion de l’expérience des jeunes et la méfiance qu’expriment ceux-ci vis-à-vis des autorités nationales et internationales devraient servir d’avertissement pour tout le monde.  Il a cité à cet égard les conclusions de l’étude indépendante sur les jeunes, la paix et la sécurité.  Pour sa part, la CCP reconnaît l’importance d’inclure les jeunes -femmes et hommes- dans les activités de consolidation de la paix, en les considérant comme des partenaires à mobiliser, a-t-il assuré.  Ainsi la Commission a-t-elle directement écouté des jeunes parler de leur expérience en la matière dans des pays aussi divers que le Burundi, le Libéria, le Kirghizistan et les Îles Salomon.

Pour qu’ils puissent participer aux efforts de consolidation de la paix, il faut donner des opportunités aux jeunes, à commencer par une éducation de qualité -y compris quand ils sont réfugiés ou déplacés- ainsi que des emplois, a toutefois rappelé le Président de la CCP.  Reconnaissant par ailleurs que les organisations de jeunes manquent de financement, il a fait valoir que l’initiative pour la promotion de la jeunesse et de l’égalité des sexes du Fonds pour la consolidation de la paix avait alloué près de 15 millions de dollars à des programmes ciblés au cours des deux dernières années.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a noté que les accords de paix échouent lorsque les dirigeants, « majoritairement les hommes », ne prennent pas suffisamment en compte les intérêts de l’ensemble de la population.  Il a parlé du travail accompli par son pays au Soudan du Sud pour inciter, par le biais des activités de la Fondation Berghof, les jeunes et les femmes à faire part de leurs préoccupations et visions lors des pourparlers du Forum de revitalisation de haut niveau dirigé par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).

Le représentant a aussi jugé nécessaire de mieux comprendre les raisons pour lesquelles certains jeunes s’orientent vers des groupes extrémistes.  Il a notamment cité un rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sur l’extrémisme en Afrique selon lequel 71% des personnes sondées indiquaient s’être tournées vers l’extrémisme en raison des actions du Gouvernement, comme le meurtre ou l’arrestation d’un membre de leur famille ou d’un ami.  Cela signifie que toutes les actions menées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme doivent être conformes aux obligations internationales en matière de droit de l’homme, en a déduit le délégué.

Il a par ailleurs appelé à promouvoir la formation et l’emploi des jeunes, ces derniers étant essentiels à la mise en œuvre des objectifs de développement durable, en exigeant un plus grand dynamisme de la part du secteur privé, dont le rôle est essentiel pour créer de nouveaux emplois.  En la matière, l’Allemagne travaille sur des modèles de coopération avec le secteur privé qui mettent l’accent sur l’efficacité de l’emploi, la formation et l’éducation.  Le représentant a ensuite appelé les États à s’inspirer du fait que l’Allemagne envoie chaque année deux délégués jeunesse qui participent aux travaux de l’Assemblée générale.

Si l’Allemagne est élue au Conseil pour la période 2019-2020, elle accordera la plus haute importance à la mise en œuvre de l’agenda sur les jeunes, la paix et la sécurité, a-t-il par ailleurs promis.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a estimé que la prise en compte des aspirations de la jeunesse était plus que jamais une priorité.  Dans ce cadre, les stéréotypes faisant l’amalgame entre les jeunes et la violence n’ont, selon lui, plus leur place.  « Si nous devons promouvoir un cliché, ce doit être celui des jeunes en tant que partenaires de changement », a-t-il proposé.  Le représentant mexicain a ainsi appelé à lever les obstacles qui empêchent les jeunes de se réaliser pleinement, y compris le manque d’intégration économique et la discrimination religieuse.  Ces derniers sont à ses yeux les véritables facteurs qui poussent les jeunes vers le terrorisme et la violence.

Pour renforcer la paix durable dans les communautés, le représentant a estimé qu’il convenait d’investir davantage dans l’éducation et la création d’emplois décents pour les jeunes.  Il a estimé que son pays avait redoublé d’efforts ces dernières années pour autonomiser les jeunes, notamment via la mise en place d’un programme national de la jeunesse, qui a permis de trouver des solutions institutionnelles pour garantir les droits sociaux des 37,9 millions de jeunes que compte le Mexique.  Entre autres mesures, le représentant a mentionné l’adoption d’un plan national pour la santé des adolescents, d’un plan national pour la prévention de la violence et de la maltraitance des adolescents et d’un programme pour combattre la discrimination et les appels à la haine entre jeunes sur Internet.

M. JORGE MORAGAS SÁNCHEZ (Espagne) a indiqué que son pays faisait partie du Groupe des « champions de la jeunesse » et était fermement engagé à mettre en œuvre la résolution 2250 (2015).  Face aux défis politiques, économiques et sociaux actuels, il a appelé à promouvoir le « rôle actif » des jeunes dans la promotion de la paix, la stabilité et la prospérité de leur société.  Cette démarche est également essentielle pour combattre la radicalisation, l’extrémisme, les discours haineux et l’intolérance, des menaces face auxquelles les jeunes sont particulièrement vulnérables, a-t-il dit.

Le représentant a appelé à ne pas se limiter à la seule création d’espaces pour la jeunesse, soulignant qu’il est essentiel pour les jeunes de pouvoir se faire entendre directement et d’intégrer leurs perspectives dans tout débat politique ou social.  C’est uniquement en agissant ainsi qu’il sera possible de rétablir la confiance des jeunes dans les institutions et de les inciter à travailler à leur amélioration et renforcement, a-t-il estimé.

Au niveau national, a poursuivi M. Moragas Sánchez, l’Espagne a décidé, dans le cadre de l’initiative européenne pour un dialogue structuré, d’inclure pour la première fois des représentants des départements de ministères ayant compétence sur des questions clefs qui concernent les jeunes, comme les affaires intérieures, la justice, l’administration publique ou encore le logement.  Des actions ont également été lancées pour former les travailleurs qui interviennent auprès des jeunes afin de détecter et de prévenir la radicalisation violente, et des efforts visent en outre à améliorer les conditions d’employabilité des jeunes pour leur permettre d’obtenir un emploi décent.

Le représentant a toutefois souligné que ces actions nécessitaient l’adoption d’une approche sexospécifique, jugeant essentiel de ne pas perdre le lien avec le programme sur les femmes, la paix et la sécurité.  Il a ensuite rappelé la tenue, en mai 2017, à Malaga, de la Conférence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), consacrée au travail avec les jeunes pour renforcer la sécurité et la coopération en ligne.  Cet événement a débouché sur l’adoption du Décalogue de Malaga, un élément essentiel de la lutte contre la radicalisation et la prévention de l’extrémisme, a-t-il rappelé.

M. FRANCISCO ALBERTO GONZALEZ (Colombie) a indiqué que son pays avait fortement investi dans l’éducation des jeunes: il garantit notamment un accès gratuit à l’éducation jusqu’à 11 ans.  Quant à l’éducation supérieure, M. Gonzales a indiqué que le taux de formation des jeunes colombiens était passé de 14% à 37%.  Les enseignements dispensés mettent désormais l’accent sur des valeurs pacifiques, la diversité et la pensée critique, a-t-il précisé. 

S’agissant de l’emploi, le représentant a déclaré que la Colombie avait mené des campagnes de sensibilisation visant à promouvoir la création d’emplois décents.  Le pays s’est également efforcé de lever les obstacles auxquels sont confrontés les jeunes pour trouver un premier emploi.  Alors que la Colombie entame une étape importante de son processus de paix, M. Gonzales a enfin déclaré que la participation des jeunes à tous les niveaux de la société colombienne était une priorité.

M. TOSHIYA HOSHINO (Japon) a appelé à redoubler d’efforts pour autonomiser les jeunes, regrettant que leurs voix ne se fassent pas davantage entendre lors des processus importants de prise de décisions.  En outre, des jeunes femmes et des jeunes membres de minorités sexuelles se voient nier l’accès au pouvoir ou aux opportunités de participation politique, a-t-il déploré.  Le délégué a parlé des initiatives lancées par le Japon grâce au Programme mondial pour les consolidateurs de la paix qui, a-t-il indiqué, a permis de former des centaines de jeunes, originaires du Japon ou de pays touchés par des conflits.

Le représentant a ensuite attiré l’attention sur l’importance de veiller à la bonne santé mentale des jeunes, estimant qu’un appui psychosocial est impératif dans le cadre de la consolidation de la paix et de la reconstruction après conflit.  Il a salué la mise en œuvre du projet pilote de l’ONU pour la cohésion sociale, la prévention de conflit, la réduction de la violence et la sécurité humaine, qui vise à soutenir les jeunes centrafricains.  Il a expliqué que ce projet aide ces jeunes à se réintégrer, en améliorant la fourniture de services et en promouvant la cohésion sociale.  L’initiative, a-t-il ajouté, a permis aussi de fournir des soins médicaux et psychosociaux aux femmes et filles victimes de violences sexuelles.

M. MICHAEL O’TOOLE (Irlande) a appelé le Secrétaire général à présenter un rapport annuel sur la mise en œuvre de la résolution 2250 (2015), jugeant par ailleurs important de nommer un point focal sur les jeunes, la paix et la sécurité.  Il a noté les synergies entre cette question et la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité, les objectifs de développement durable et la question des droits de l’homme, sans oublier l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU.  Il a appelé les États Membres à véritablement mettre en œuvre les recommandations de l’étude afin de réellement accorder aux jeunes une voix.

Le représentant a ensuite parlé de la célébration récente du vingtième anniversaire de l’Accord du vendredi saint, pierre angulaire du processus de paix en Irlande du Nord, ajoutant que son pays sait trop bien à quel point le traumatisme d’un conflit peut être transmis aux générations suivantes.

Il a par ailleurs indiqué que l’Irlande envoyait chaque année, depuis 2015, deux « délégués jeunesse » qui participent aux travaux de l’Assemblée générale.  Ces derniers ont effectué un sondage auprès de leurs pairs, qui a révélé que les jeunes se sentaient marginalisés des discussions sur les processus de paix.  Il a appelé les États Membres à adopter eux aussi des programmes de « délégués jeunesse ».

M. NASSIR ABDULAZIZ AL-NASSER, Haut Représentant des Nations Unies pour l’Alliance des civilisations, a déclaré que l’autonomisation des jeunes était au cœur des préoccupations de l’Alliance, qui a lancé plusieurs initiatives visant à renforcer le rôle de la jeunesse dans le maintien de la paix, y compris un programme de consolidation de la paix destiné aux jeunes dont l’objectif est de former des futurs leaders.  En outre, le Haut Représentant a mentionné le lancement par l’Alliance d’un fonds de solidarité pour la jeunesse, qui fournit aux organisations dirigées par des jeunes des ressources pour les aider à mettre en œuvre des projets de renforcement du dialogue interculturel et interconfessionnel.

Reconnaissant, par ailleurs, le rôle de la technologie et des plateformes numériques, l’Alliance des civilisations a créé, dans le cadre de ses initiatives médiatiques, une série d’ateliers sur Internet visant à promouvoir la compréhension mutuelle des personnes appartenant à des groupes religieux et culturels différent.  

Mme NASLY ISABEL BERNAL PRADO (Chili) a souligné les synergies entre les résolutions 1325 et 2250, notant que les jeunes femmes jouent un rôle important en matière de consolidation de la paix.  Elle a appelé à créer davantage de synergie pour mieux tenir compte de la situation des jeunes femmes et des enfants, dans le cadre de conflits.  Elle a appuyé la proposition, formulée dans l’étude indépendante, de créer des fonctions de consultant sur cette question.  La déléguée a aussi insisté sur l’importance de promouvoir l’éducation, y compris lors de situation de conflits, et appelé à veiller à la sécurité des établissements scolaires.

Au niveau national, a poursuivi la représentante, le Chili affecte des fonds à tout un éventail de questions liées au respect des droits de l’homme.  Un sous-secrétariat pour l’enfance a récemment été créé dans le but de mieux coordonner les services consacrés à l’enfance, a-t-elle indiqué.

M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) a appelé à investir dans les jeunes afin de leur permettre de contribuer à la paix.  Il faut aussi démonter les obstacles structurels qui limitent la participation des jeunes et mettre l’accent sur les partenariats et les actions collaboratives pour faire des jeunes des partenaires essentiels pour la paix, a-t-il ajouté.

Le représentant a rappelé que les jeunes sud-africains avaient souvent été à l’avant-garde de la bataille pour la liberté et ajouté qu’ils l’étaient également maintenant pour combattre la pauvreté, l’inégalité et le chômage dans le pays.  Le Gouvernement a donc créé de nombreux programmes pour appuyer leur éducation, la création d’emplois et leur développement.  M. Zaayman a souligné que le chômage des jeunes était un problème pressant, raison pour laquelle le Gouvernement a mis sur pied une initiative pour l’emploi des jeunes.  Un groupe de travail sur les jeunes permet par ailleurs aux représentants de la jeunesse de se faire entendre au plus haut niveau.

Le représentant s’est, en outre, inquiété du fait que les programmes pour la jeunesse tendent à mettre l’accent sur le rôle des jeunes hommes au détriment des jeunes femmes, une situation exacerbée par le fait que les jeunes femmes sont davantage la cible de violence sexuelle.  Il a souhaité que cette réunion débouche sur le renforcement de la résolution 2250 (2015).

M. KHALED HUSSEIN MOHAMED ALYEMANY (Yémen) a constaté que les jeunes étaient majoritaires dans les pays en proie à un conflit, comme le Yémen.  La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour que la voix des jeunes soit entendue, a-t-il ajouté, en demandant un « rajeunissement » de l’ONU.  Le représentant a demandé la pleine application de la résolution 2250 (2015).

En 2011, les jeunes étaient au cœur de la demande de changement au Yémen, a précisé le représentant, qui a déploré qu’aujourd’hui, ces mêmes jeunes soient dans une situation catastrophique dont il a rendu responsables les agissements des houthistes.  Il a mentionné les réunions tenues dans son pays dans le cadre de la Conférence de dialogue national, affirmant qu’elles avaient vu une participation massive des jeunes.  Le document final de la Conférence demandait notamment la création d’un conseil national de la jeunesse et leur participation accrue aux processus décisionnels, a précisé M. Alyemany, qui a dénoncé le « rêve brisé » des jeunes yéménites et les nombreuses et graves violations dont ils sont victimes de la part des houthistes.  Les houthistes ont recruté des enfants pour les envoyer au combat, a encore affirmé le représentant, qui a conclu en demandant à la communauté internationale de protéger les jeunes yéménites. 

Mme ALYA AHMED SAIF A L-THANI (Qatar) a appelé à faire des efforts concertés au niveau international pour relever les défis auxquels sont confrontés 1,8 milliard de jeunes.  Le Qatar, a-t-elle indiqué, met tout en œuvre pour renforcer la contribution des jeunes aux efforts de paix, notamment par le biais de son comité consultatif pour la jeunesse.  Elle a aussi signalé que, en 2016, le Qatar avait organisé, à l’Assemblée générale, un débat thématique de haut niveau sur la nécessité de protéger les jeunes de l’extrémisme violent.  Le pays a en outre lancé une initiative pour l’éducation des réfugiés syriens.  La représentante a également indiqué que le Qatar est membre fondateur du Fonds mondial pour la résilience et la participation des jeunes. 

Mme NOA FURMAN (Israël) a souligné la nécessité de mettre fin à l’endoctrinement des jeunes par les groupes terroristes pour les amener à commettre des actes violents.  Des groupes comme le Hamas recrutent des jeunes pour des « camps d’été terroristes », où ils apprennent à « poignarder un Juif, poser une bombe et faire un cocktail Molotov », a-t-elle dénoncé. Elle a jugé diabolique cet empoisonnement de l’esprit des jeunes et demandé que les camps d’été demeurent des lieux ludiques et d’unité.

La représentante a ensuite mentionné le programme lancé par le Président israélien, appelé « Espoir israélien », qui vise à unir les jeunes musulmans, chrétiens et juifs dans le pays au service de la paix.  Mme Furman a en outre mentionné les nombreuses initiatives de jeunes palestiniens et israéliens visant à promouvoir une entente mutuelle et à jeter les bases d’une paix durable. « Écoutons les voix des jeunes car elles comptent », a-t-elle dit, avant d’estimer en conclusion que la résolution 2250 (2015) n’était qu’un point de départ.

Selon M. DIAN TRIANSYAH DJANI(Indonésie), le bien-être et l’avenir des jeunes relèvent de chacun d’entre nous.  Les jeunes ont beau représenter la génération la plus interconnectée qui soit, ils restent confrontés à un grand nombre de défis qui menacent la paix et la stabilité au sein des communautés.  Promouvoir l’inclusion est important, car il faut donner aux jeunes un sentiment d’appartenance.  Autonomiser les jeunes également, a-t-il poursuivi, car il s’agit de les protéger contre la propagande et la radicalisation.  Enfin, il faut placer les jeunes au cœur des efforts de développement et concevoir avec soin des programmes d’éducation.

Tant que les conflits perdurent, ils feront le lit des extrémistes qui s’efforcent de recruter des jeunes, a prévenu le représentant, pour qui « nous ne devons jamais permettre aux jeunes d’emprunter le chemin de la violence ».  Pour sa part, l’Indonésie a promulgué la loi relative à la jeunesse qui promeut leurs droits. « Nous devons parler la langue des jeunes », a conclu M. Djani.  

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Panama) a vu la résolution 2250 (2015) comme un texte « phare » qui doit être appliqué intégralement.  « Mon pays a accueilli plus de 60 jeunes, peu après l’adoption de la résolution, pour discuter de la prévention des conflits », a-t-il dit en ajoutant que le Panama avait reçu, l’an dernier, l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse.  Le représentant a dénoncé la menace que font peser sur les jeunes les organisations criminelles et terroristes, avant de détailler les initiatives prises par le Panama pour autonomiser les jeunes.  L’éducation est un élément clef, a-t-il dit à cet égard.  Le délégué a constaté, « pétri d’horreur », que de plus en plus de jeunes filles sont victimes de violence sexuelle dans les zones de conflit.  Enfin, le représentant a mentionné le programme de bourses mis en place dans son pays pour prévenir l’abandon scolaire, avant de souligner l’importance du sport pour l’édification d’une culture de paix.

M. AMIRTH ROHAN PERERA (Sri Lanka) a fait remarquer que nous vivons dans un monde où 46% de la population a moins de 24 ans.  La situation démographique a évolué en fonction des migrations et des mouvements de réfugiés, a noté le représentant.  Pour lui, « il ne s’agit pas de paniquer mais d’agir rapidement et d’espérer ».  Il a donc appelé la communauté internationale à renouveler son engagement en faveur du Programme 2030 et à s’attaquer aux causes profondes qui rendent les jeunes vulnérables à l’extrémisme violent.  Il faut créer un environnement qui leur permette d’exploiter leur plein potentiel, a-t-il précisé.

La Sri Lanka, confrontée à une population vieillissante, est « un véritable exemple en matière de développement humain en Asie du Sud », a fait valoir M. Perera en expliquant pourquoi les jeunes sont précieux et indispensables pour garantir le succès de la société.  « Les enfants et la jeunesse sont notre présent. »  À Sri Lanka, les insurrections ainsi qu’un conflit dévastateur ont entraîné l’adoption de réformes politiques, a dit le représentant en mentionnant notamment la création d’un conseil de la jeunesse et l’organisation de formations pour la réinsertion d’anciens combattants et enfants soldats.  Une politique nationale de réconciliation a également été adoptée en 2016, qui inclut une refonte du secteur de l’éducation et des manuels scolaires.  Enfin, a fini d’expliquer M. Perera, un programme de formation sociale et émotionnelle pour les enfants âgés de 3 à 5 ans a été lancé afin d’éviter la création d’un cycle de discrimination et de violence dès la petite enfance.   

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador) a souligné le rôle crucial joué par les jeunes de son pays dans l’instauration d’une culture de paix après le conflit qui a déchiré El Salvador.  Mon pays voit les jeunes comme des acteurs à risque, des sujets de droit et des acteurs du changement, a-t-il dit.  Le représentant a souligné la nécessité de lutter contre la violence et appelé la Commission de consolidation de la paix à jouer à cet égard un rôle plus inclusif, même si ladite Commission doit se concentrer sur les cas les plus urgents.  M. Escalante Hasbún a ensuite dénoncé les représentations négatives des jeunes dans les médias.  Enfin, le représentant a mentionné l’engagement de son pays en faveur de la résolution 2250 (2015) et de la résolution 1325 (2000) sur les femmes et la paix et la sécurité.

M. JORGE SKINNER-KLEÉ ARENALES (Guatemala) a constaté que les jeunes sont souvent les plus vulnérables dans les conflits et qu’ils sont instrumentalisés pour défendre des idéologies qui vont à l’encontre de leur bien-être, a plutôt prôné leur participation et intégration politique.  Dans différentes régions, les jeunes ont toutefois été un moteur de transformation sociale, a-t-il noté.  Le représentant a d’ailleurs plaidé pour que les questions relatives au thème « Jeunes, paix et sécurité » ne soient pas dissociées de la mise en œuvre du Programme 2030.  Il reste encore des lacunes entre la reconnaissance officielle des jeunes dans ces domaines et le rôle qui leur est donné sur le terrain, a-t-il relevé.  Il faut placer ce groupe au cœur du développement, a-t-il conclu, réitérant son engagement en faveur de la culture de la prévention des conflits.

M. BACHIR SALEH AZZAM (Liban) a rappelé que 60% de la population du Liban et du monde arabe dans son ensemble a moins de 25 ans.  Malheureusement, l’optimisme n’est plus de mise parmi les jeunes de la région, en raison des frustrations politiques et d’un manque d’opportunités, a-t-il déploré.  Le taux de chômage des jeunes au Liban était ainsi de 37% en août 2017.  Soulignant la nécessité d’associer plus étroitement les jeunes aux efforts de paix, le représentant a détaillé la politique nationale pour la jeunesse du Liban, dont l’élaboration a été en particulier le fruit des organisations de la société civile et de jeunes et qui vise à autonomiser les jeunes.  M. Azzam a salué le niveau sans précédent de participation des jeunes au processus électoral en cours dans son pays.  Enfin, il a demandé que les jeunes soient placés au cœur des stratégies nationales de lutte contre l’extrémisme violent.

M. CHARLES T. NTWAAGAE (Botswana) a considéré que l’adoption de la résolution 2250 (2015) avait été une étape importante dans la reconnaissance du rôle crucial des jeunes dans la prévention et le règlement des conflits.  « La fourniture d’une éducation de qualité pour les jeunes est essentielle », a-t-il dit à cet égard, avant de demander une représentation accrue des jeunes dans les institutions nationales.  Le délégué a signalé que le Ministre botswanais des investissements, du commerce et de l’industrie, récemment nommé, est âgé d’à peine 30 ans.  « Mon gouvernement a accru ses efforts pour rendre le Botswana attractif pour les investissements directs étrangers en vue de créer des emplois pour les jeunes », a-t-il poursuivi.  Enfin, le représentant a appelé au renforcement du partenariat entre le Conseil de sécurité et le Bureau de l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse.

Mme NARJES SAIDANE, Observatrice permanente de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a souhaité que la question des jeunes, la paix et la sécurité puisse faire l’objet d’un suivi régulier au sein du Conseil de sécurité.  L’OIF, avec ses 84 États membres, reconnaît la jeunesse comme « l’un des acteurs incontournables dans la réussite de ses actions », a ajouté la représentante.  L’Organisation s’attache ainsi, depuis 2014, à inclure les jeunes au sein de ses instances à tous les niveaux en s’inspirant de l’approche fondée sur les droits de l’homme.

« Les plus de 35 ans, nous sommes aujourd’hui la minorité alors que nous attendons encore de la majorité qu’elle s’adapte aux exigences de la minorité », a relevé Mme Saidane.  L’étude indépendante souligne de manière pertinente qu’il nous faut nous éloigner des stéréotypes simplistes, alors que les jeunes dans leur majorité ne demandent qu’à participer à la paix et au développement et le font déjà, a-t-elle plaidé.  

L’OIF est favorable à un partenariat solide au sein d’un espace francophone qui est « bien loin d’être épargné par la violence », a dit la représentante.  Il faut donner la parole aux jeunes, comme dans la campagne « Libres ensemble » lancée en 2016 sur les réseaux sociaux, et comme ce sera le cas dans le cadre du réseau francophone de prévention de la radicalisation qui est sur le point de se mettre en place.  Il convient plus que jamais de restaurer la confiance entre les jeunes et les décideurs, a poursuivi la représentante, qui a mentionné une étude du PNUD réalisée en 2017 sur les déterminants de la radicalisation au Sahel, laquelle avait souligné que la violence de l’État envers les citoyens était un déclencheur de conflit.

L’OIF met également l’accent sur l’insertion économique des jeunes, a poursuivi Mme Saidane.  L’Organisation a une stratégie numérique pour mobiliser des fonds de soutien à des initiatives en ce sens et accompagner des politiques de formation professionnelle, et il existe une agence universitaire francophone.  L’OIF se veut une institution de mobilisation, a résumé Mme Saidane, car aucun pays ni aucune organisation ne peut réussir seul, d’où l’intérêt du débat d’aujourd’hui.  L’Observatrice permanente a aussi évoqué l’alliance entre l’OIF, le Commonwealth, la Communauté des pays de langue portugaise et celle de pays de langue ibéro-portugaise, toutes quatre dirigées par des femmes, qui ont lancé un appel à la recherche d’une meilleure convergence entre les différents mécanismes en place.

M. MICHAEL DOUGLAS GRANT (Canada) s’est dit fier d’avoir appuyé le processus de recherche « novateur et participatif » de l’étude sur les jeunes, la paix et la sécurité.  D’après lui, cette étude apporte une contribution importante aux discussions sur la consolidation et la pérennisation de la paix qui auront lieu cette semaine.  La gestion des aspirations non satisfaites des jeunes et de leur inclusion dans la société constitue un élément essentiel de toute mesure visant à prévenir les conflits violents, a-t-il fait valoir.

Il existe une véritable synergie entre le programme pour les jeunes, la paix et la sécurité et le programme pour les femmes, la paix et la sécurité, a fait remarquer M. Blanchard.  Le représentant a rappelé que le Canada met actuellement en œuvre « une politique étrangère féministe » et une « politique d’aide internationale féministe » pour faire en sorte que les perspectives liées à l’égalité des sexes soient intégrées à tous les efforts de paix et de sécurité et au développement.  

M. Grant a ensuite reconnu que certains des travaux les plus importants étaient réalisés par la société civile au niveau des simples citoyens et au niveau local.  Par l’intermédiaire de son nouveau programme sur la voix et le leadership des femmes, le Canada affectera 150 millions de dollars sur cinq ans pour répondre aux besoins d’organisations de femmes locales dans les pays en développement, a-t-il annoncé.  Enfin, le représentant a jugé crucial de mobiliser les jeunes et d’en faire « un élément d’intervention contre l’extrémisme violent ». 

M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a indiqué que son pays s’était doté d’une politique nationale pour la jeunesse qui vise à protéger les droits des jeunes et à renforcer le rôle des organisations non gouvernementales, des autorités locales et des médias pour la mettre en œuvre.  De son côté, l’Union pour la jeunesse de l’Ouzbékistan participe activement à la vie socio-politique du pays.  Le représentant a estimé qu’avoir une politique effective en matière de jeunesse est encore plus important face à l’ampleur des menaces de radicalisation des jeunes dans le monde, affirmant que la plupart des crimes liés à l’extrémisme violent étaient commis par des personnes de moins de 30 ans.

M. Ibragimov a annoncé qu’au mois de juin, l’Ouzbékistan accueillerait, en collaboration avec l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), une conférence internationale consacrée au rôle de la jeunesse dans la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation qui mènent au terrorisme.

M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a appuyé l’adoption d’une nouvelle résolution par le Conseil de sécurité sur la jeunesse, la paix et la sécurité.  « Nous considérons qu’il est essentiel de compléter le cadre normatif dans ce domaine et de contribuer à en réduire la fragmentation », a déclaré M. Braun.  De fait, le représentant a noté avec regret que trop de jeunes n’avaient plus confiance en leur gouvernement et en la communauté internationale.  « Ils se sentent exclus des systèmes de gouvernance, ce qui engendre un grand sentiment d’injustice », a-t-il dit, appelant à lutter contre la stigmatisation des jeunes pour faciliter leur intégration dans les processus de paix, de croissance économique et de développement sociale.  Pour suivre cette évolution, M. Braun s’est prononcé en faveur de la création d’un rapport annuel de mise en œuvre du Secrétaire général sur la jeunesse, la paix et la sécurité, ainsi que de la tenue de débats annuels sur la question au Conseil.

M. KAHA IMMADZE (Géorgie) a mentionné la dernière initiative de paix de son pays qui vise à faciliter l’accès à l’éducation des jeunes des régions géorgiennes occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud.  Il est urgent de remédier aux nombreuses violations des droits de l’homme constatées dans ces régions, a-t-il dit, en mentionnant le récent meurtre du jeune géorgien Archil Tatunashvili.  En raison de l’occupation russe, les jeunes géorgiens de ces régions ne peuvent pas participer au processus de prise de décisions qui les affectent, a-t-il dit.  En conclusion, le représentant a exhorté la communauté internationale à protéger les droits des jeunes habitants des régions géorgiennes occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud.

M. MAHFUZUR (Bangladesh) a mentionné la « vision » de la Première Ministre du Bangladesh, appelée « Bangladesh digital », visant à faire des jeunes des agents du changement.  Il a cité l’engagement de son pays pour offrir une éducation qui favorise l’esprit critique et une culture de paix parmi les jeunes.  Le délégué a indiqué que les jeunes font partie de la solution au défi de l’extrémisme violent.  « Ils doivent être enrôlés comme sentinelles contre les éléments extrémistes dans leur communauté. »  Enfin, le représentant a souligné la pertinence et la nécessité d’investir dans les jeunes non seulement pour les pays concernés mais aussi pour le monde entier.

M. SAUD HAMAD GHANEM HAMAD ALSHAMSI (Émirats arabes unis) a salué l’approche participative adoptée par l’étude.  Dans cet esprit, il a plaidé pour une approche plus nuancée lorsque sont abordées les problématiques relatives à la jeunesse.  Dans le cadre de la paix et de la sécurité, les jeunes sont des alliés indispensables, notamment dans le monde arabe, où de nombreux jeunes sont confrontés à la violence.  En 2016, a fait observer le représentant, les Émirats arabes unis ont nommé un jeune ministre d’État à la jeunesse, qui a développé une stratégie nationale pour la jeunesse, « ce qui sous-tend une politique d’engagement, pierre angulaire de notre société pacifique et prospère ».

Les difficultés de la région ne pourront être résolues sans exploiter pleinement le potentiel des jeunes, a argué M. Alshamsi.  Il a souligné l’importance d’une bonne éducation et d’un marché de l’emploi concurrentiel.  Face au cycle de l’extrémisme et de la violence qui frappe la région, il faut se concentrer sur la prévention et offrir des solutions modérées, a-t-il plaidé.  Ainsi le Centre pour la jeunesse arabe fournit-il des opportunités aux jeunes et au développement durable de leurs communautés. 

Mme ISABELLE f. PICCO (Monaco) a indiqué que le Groupe des amis du sport au service du développement et de la paix, que Monaco copréside avec la Tunisie, s’attache à promouvoir cet « instrument unique de rassemblement des communautés et des peuples », un outil qui, a-t-elle estimé, mériterait d’être davantage intégré aux stratégies de prévention de conflit, de réhabilitation postconflit et de consolidation de la paix.  La représentante a fait observer que le sport avait été utilisé à plusieurs reprises dans le cadre d’opérations de maintien de la paix, notamment récemment en 2018, dans le cadre de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), où la division des affaires civiles a organisé un tournoi de football afin de promouvoir l’éducation et la cohésion sociale.  Elle a aussi souligné l’importance des activités sportives dans le « quotidien fait de promiscuité des camps de réfugiés et de déplacés ».  Pour Monaco, le sport devrait pouvoir faire partie intégrante de l’éducation dans tous les pays.

M. FRANCISCO ANTONIO CORTORREAL (République dominicaine) a souligné le caractère historique de la résolution 2250 (2015).  Les jeunes ont un rôle crucial à jouer dans les efforts de paix, a-t-il estimé.  Il a jugé urgent l’accès des jeunes à une éducation de qualité.  Il s’est dit consterné par la violence faite aux jeunes femmes, avant de rappeler la menace posée par les changements climatiques qui peuvent être responsables de troubles sociaux, ajoutant que les jeunes devaient être « sensibilisés aux conséquences des changements climatiques ». Le représentant a demandé que soit apporté un fort appui aux jeunes qui œuvrent à la consolidation de la paix, les ressources octroyées jusqu’à présent étant insuffisantes.  Enfin, il a indiqué que le programme « Jeunesse, la paix et la sécurité » serait l’une des priorités de son pays au Conseil, s’il est élu, comme souhaité, pour les deux prochaines années.

M. MOHAMED FATHI AHMED EDREES (Égypte) a fait observer que son pays était un « pays jeune » et a parlé de la « force motrice » de la jeunesse.  L’Égypte a accueilli en novembre dernier le Forum de la jeunesse mondiale qui, avec plus de 3 000 participants du monde entier, a examiné la question des jeunes sous toutes ses dimensions, notamment les menaces à la paix et la sécurité du fait du terrorisme et de l’immigration irrégulière, ainsi que l’impact des conflits sur le développement, a rappelé le représentant.

L’action invoquée aujourd’hui n’aura de résultats que si elle est accompagnée par le renforcement de la participation des jeunes dans leurs communautés et des efforts visant à les protéger de l’extrémisme et des conflits, a estimé M. Edrees.  À cet égard, a-t-il insisté, l’éducation et les opportunités économiques sont clefs, y compris pour faire face à la reconstruction après les conflits.  Il faut permettre aux jeunes de préciser leurs besoins et leurs priorités et traiter des causes profondes des conflits, afin d’éviter la dérive extrémiste.

M. Edrees a invité le Secrétaire général à accorder dans ses prochains rapports une importance spéciale aux jeunes dans les territoires arabes occupés.  Pour sa part, l’Égypte a lancé un programme visant à améliorer la capacité des jeunes à prendre des décisions.  Le pays reconnaît en outre que les organisations de la société civile jouent un rôle important dans les politiques de prévention de l’extrémisme des jeunes.  Enfin, le représentant a salué l’action des bénévoles et des médias, qui peuvent jouer un rôle important pour promouvoir la culture de la paix et lutter contre les idéologies violentes.

Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) a déclaré qu’en matière d’intégration des jeunes, il n’existait pas de meilleur outil que l’éducation.  C’est la raison pour laquelle, a-t-elle dit, le Portugal appuie la Plateforme mondiale pour les étudiants syriens, qui fournit, selon elle, un parfait exemple de la façon dont la communauté internationale peut travailler de concert, afin de créer des opportunités au bénéfice des victimes de crises. 

Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a souligné l’importance de la participation des jeunes dans la vie publique, mentionnant, parmi les engagements pris par son pays en leur faveur, la consécration d’une place de choix dans la Constitution marocaine, l’adoption d’un quota pour les jeunes au Parlement ou encore le lancement de la stratégie nationale intégrée de la jeunesse 2015-2030 et la célébration chaque année de la Fête de la jeunesse.  « L’instauration d’un dialogue permanent avec les jeunes sur les questions concernant la jeunesse, la paix et la sécurité leur permettra de renforcer leurs défenses contre les discours de haine », a en outre affirmé la représentante.

Mme LALA MEHDIYEVA (Azerbaïdjan) a insisté sur la tradition de tolérance de son pays, devenu depuis le lancement du « Processus de Bakou » en 2008 une plateforme mondiale de dialogue.  Elle a mentionné la mise en œuvre fructueuse des politiques ayant abouti à l’autonomisation des jeunes et à leur meilleure intégration sociale et économique.  « En 2014, l’Azerbaïdjan a accueilli le premier Forum mondial sur les politiques de la jeunesse, qui a vu plus de 700 participants venant de 165 pays », a-t-elle rappelé.  Enfin, la représentante a indiqué que le volontariat était un autre outil puissant pour promouvoir l’autonomisation des jeunes.

M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a dénoncé les représentations négatives qui entourent les jeunes, lesquels sont de véritables agents du changement, comme ils l’ont montré en Tunisie depuis 2011.  Le représentant a souligné la nécessité d’instaurer un environnement propice à l’épanouissement des jeunes et de considérer les jeunes avant tout comme titulaires de droits.  Il a noté la participation élevée des jeunes tunisiens au processus électoral en cours dans son pays.  Il a demandé que soit remédié aux causes profondes des défis socioéconomiques que les jeunes doivent relever et d’assurer l’égalité entre les genres, rappelant par ailleurs que son pays avait adopté en juillet 2017 une loi visant à l’élimination des violences faites aux femmes.

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a jugé indispensable de s’attaquer aux causes profondes de l’exploitation et du recrutement des jeunes par des groupes extrémistes.  Il faut en outre associer les jeunes à la construction du pays, car ils ont un rôle important à jouer à l’heure de réaliser les objectifs de développement durable.  Le Bahreïn a pour sa part mis en œuvre, depuis 2003, une stratégie nationale pour la jeunesse et a récemment organisé un forum sur leur rôle dans l’édification de la paix et la lutte contre le terrorisme.

En coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’ECOSOC, le Bahreïn a créé un prix pour autonomiser les jeunes, a ajouté le représentant.  Le pays a lancé des initiatives pionnières, dont un concours, pour offrir aux jeunes l’environnement dont ils ont besoin pour exprimer toute leur créativité.  M. Alrowaiei a par ailleurs salué le rôle du sport en tant que vecteur de paix et jugé important de préserver Internet comme « un espace positif ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Forum sur le financement du développement: lancement d’un fonds commun pour éviter la « concurrence stérile » des agences de l’ONU

Forum sur le financement du développement,
1ere 2e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6904

Forum sur le financement du développement: lancement d’un fonds commun pour éviter la « concurrence stérile » des agences de l’ONU

« C’est l’argent qui gouverne le monde. »  Cet adage a été rappelé aujourd’hui par le Président de l’Assemblée générale alors que le Conseil économique et social (ECOSOC) entamait son Forum annuel sur le financement du développement, sachant qu’il faut 7 000 milliards de dollars par an pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Afin d’éviter « la concurrence stérile » des agences de l’ONU, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU a lancé le « Fonds commun ». 

Ce Forum qui s’étale sur quatre jours prévoit aussi une réunion spéciale de haut niveau avec les institutions de Bretton Woods, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED). 

Nous savons déjà que certains objectifs de développement durable risquent de rester lettre morte, a prévenu le Président de l’Assemblée générale, M. Miroslav Lajčák.  Il faut encourager tous les moyens d’appuyer le développement: le commerce, la science, la technologie et l’innovation.  Mais le financement reste la question centrale et nous ne pouvons y échapper, a souligné le Président, appelant à une approche stratégique et ciblée, celle du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement. 

M. Lajčák a annoncé la convocation, le 11 juin prochain, d’une manifestation de haut niveau sur la question car, « l’argent est là ».  Il faut tout simplement le connecter aux priorités car trop d’obstacles bloquent les connexions et les flux.  « Nous devons dégager les goulets d’étranglement », a-t-il insisté.  Ces propos ont été confirmés par le Directeur général de l’Agence française de développement et Président de l’Association des agences internationales de développement.  M. Rémy Rioux a avoué que les 20 agences membres de son association ont près de 800 milliards de dollars en main.

Le nouveau « Fonds commun pour le Programme 2030 », espère le Secrétaire général dans ses propositions de réforme, sera capitalisé à hauteur de 290 millions de dollars par an.  Les promesses de contributions faites aujourd’hui dépassent les 71 millions de dollars, dont 47 millions pour 2018.

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, a identifié cinq domaines qui méritent l’attention de la communauté internationale: la mobilisation des ressources nationales; la coopération au développement; un environnement mondial favorable à l’investissement à long terme; l’aide aux pays ayant des besoins urgents, tels que ceux qui sont touchés par des crises ou des catastrophes; et enfin les partenariats avec le secteur privé.

La plupart de ces propositions sont reprises dans le « rapport du Groupe de réflexion interinstitutions sur le financement du développement » que le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Liu Zhemin, a présenté.  Le rapport note que la reprise cyclique de l’économie est l’occasion d’élaborer des politiques contre les problèmes tenaces et d’accélérer la réalisation des objectifs de développement durable. 

Pour aller de l’avant, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a annoncé la tenue, en septembre prochain à New York, d’une réunion de haut niveau sur le financement de ces objectifs.  Un financement qui doit être inclusif et ne laisser personne de côté, a martelé la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme Marie Chatardovà, qui a livré cinq messages. 

« Ce qui importe, c’est un système mondial équitable », car, a expliqué le Haut-Représentant du Fonds pour la paix de l’Union africaine, « si vous êtes sur le Titanic, peu importe que vous soyez en première classe ou en troisième classe, vous ne vous en sortirez pas seul ».   M. Donald Kaberuka a en effet expliqué que contrairement aux objectifs du Millénaire pour le développement qui plaçaient l’aide publique au développement (APD) au centre de tout, le Programme 2030 met en avant la mobilisation des ressources nationales.  Si l’Afrique renforçait cette mobilisation de seulement 13%, elle n’aurait aucun problème à réaliser le Programme 2030, a-t-il affirmé, alors qu’aujourd’hui, il manque à son continent quelque 2 500 milliards de dollars par an.

Le Haut-Représentant a donc réclamé des améliorations dans le fonctionnement des institutions financières internationales et le commerce mondial, sans oublier de fustiger les relents du protectionnisme.  Il a tout de même plaidé pour l’augmentation de l’APD mais une « APD intelligente », celle qui va d’abord aux pays fragiles comme la Syrie, le Yémen ou la République centrafricaine.  Traiter de la fragilité, ce n’est pas seulement un problème d’argent, c’est mettre en place des institutions permettant aux gens de prendre en main leur destin et d’entreprendre.  L’« APD intelligente », a-t-il poursuivi, c’est celle qui mobilise les marchés et qui réduit les risques par la création des richesses.   

L’ECOSOC, qui a adopté son ordre du jour* provisoire, reprendra son Forum demain mardi 24 avril à partir de 10 heures.

*E/FFDF/2018/1

FORUM SUR LE SUIVI DU FINANCEMENT DU DÉVELOPPEMENT

Déclarations

Mme MARIE CHATARDOVÀ, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a lancé quelques messages et d’abord celui de la volonté de mettre en œuvre le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement est « plus forte que jamais ».  L’embellie récente de l’économie mondiale est encourageante, mais les vulnérabilités économiques persistantes, l’escalade des tensions géopolitiques et les catastrophes naturelles peuvent faire dérailler rapidement les progrès en matière de développement, a mis en garde la Présidente.  Le développement, a-t-elle rappelé, est la meilleure manière de prévenir les crises, car la réalisation des objectifs de développement durable contribue à atténuer l’impact des crises financières, des catastrophes naturelles et des changements climatiques, tout en minimisant les risques d’instabilité et de conflit.

La Présidente a lancé son deuxième message à la communauté internationale qui doit tenir ses promesses et agir sur le terrain.  Il faut, par exemple, mettre en place des stratégies nationales intégrées de développement durable qui offrent une vision à long terme du financement des objectifs de développement durable.  Les politiques, plans et cadres de régulation mis en place aujourd’hui auront des implications même après 2030.

Troisième, a poursuivi la Présidente, il faut encourager les investissements à long terme et à large échelle dans les objectifs de développement durable.  Elle a dit avoir été impressionnée par la « Foire aux investissements dans ces objectifs » dont le niveau d’engagement des gouvernements, des investisseurs privés et des institutions financières et de développement à explorer des solutions innovantes.

La Présidente a aussi invité la communauté internationale à renouveler son engagement en faveur du multilatéralisme et donc du Programme d’action d’Addis-Abeba.  Elle a rappelé que la coopération au développement demeure un élément central du financement du développement.  Les pays développés doivent tenir leur promesse en matière d’aide publique au développement (APD) et de lutte contre les changements climatiques.  Les banques multilatérales de développement, les institutions financières et les acteurs de la coopération Sud-Sud devraient tous renforcer leurs contributions à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Le cinquième message est que les investissements en faveur des objectifs de développement durable doivent être inclusifs et ne laisser personne sur le côté.  Il faut combler le fossé du financement et des capacités dans les pays les plus vulnérables.  La Présidente a rappelé que cette édition du Forum a été précédée d’un processus de préparation solide dont la Conférence de haut niveau, au Qatar, qui a permis d’adopter les « Dix messages de Doha » pour renforcer la cohérence et la coopération dans la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba.  Le document final de ce forum doit contenir un ensemble de recommandations et d’engagements concrets pour permettre des progrès dignes de ce nom, a conclu la Présidente.

« C’est l’argent qui gouverne le monde.  Si cet adage n’a jamais été vrai, il l’est maintenant », a déclaré M. MIROSLAV LAJČÁK, Président de l’Assemblée générale.  Il a d’abord donner les bonnes nouvelles que sont les progrès depuis l’adoption, il y a trois ans, du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement.  Le taux de pauvreté est à la baisse, l’accès à l’éducation primaire et à l’électricité s’élargit et la proportion des personnes malnutries continue à baisser.  Mais avant de nous autocongratuler, a mis en garde le Président, passons aux mauvaises nouvelles.  Nombreux sont ceux qui sont toujours laissés de côté: 42% des populations d’Afrique subsaharienne vivent dans l’extrême pauvreté, 2 milliards de personnes ont un accès très limité à l’eau et l’impact des changements climatiques est toujours aussi dévastateur dans les pays les plus vulnérables. 

Nous savons déjà que certains objectifs de développement durable risquent de rester lettre morte et que les fonds promis pour la lutte contre les changements climatiques sont insuffisants.  L’action, c’est maintenant ou jamais, a prévenu le Président, en appelant à une action ambitieuse, y compris sur le front du financement.  Il faut donc encourager tous les moyens d’appuyer le développement: le commerce, la science, la technologie et l’innovation.  Mais le financement reste la question centrale, nous ne pouvons y échapper.  Le « prix » du Programme 2030 est estimé à 7 000 milliards de dollars par an, a rappelé le Président et il manque aux pays en développement 2 500 milliards par an.  Le Président a donc appelé à une approche stratégique et ciblée, celle du Programme d’action d’Addis-Abeba, et soulignant dans ce cadre la pertinence du Forum, il a jugé que la « Foire aux investissements dans les objectifs de développement durable » qui a eu lieu hier est un bon exemple d’action positive.  Pour poursuivre sur cette lancée, le Président a annoncé la convocation, le 11 juin prochain, d’une manifestation de haut niveau sur le financement du développement car « l’argent est là.  Il faut tout simplement le connecter aux priorités car trop d’obstacles bloquent les connexions et les flux ».  « Nous devons dégager les goulets d’étranglement », a conclu le Président. 

Intervenant par visioconférence, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a indiqué qu’il n’est pas possible de surmonter les obstacles à la mobilisation des ressources de manière isolée.  Il a invité les pays développés à tenir leur engagement en faveur de l’APD et a appelé à un système commercial international véritablement ouvert et juste.  Il a également invité la communauté internationale à lutter contre le blanchiment de capitaux, les fraudes fiscales et les flux financiers illicites.  Il a annoncé l’organisation, en septembre prochain, d’une réunion de haut niveau sur le financement des objectifs de développement durable à New York. 

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme AMINA J.  MOHAMMED, a noté qu’une reprise économique généralisée a soutenu les progrès dans de nombreux domaines, même si des faiblesses importantes et des risques à moyen terme dans l’économie mondiale continuent de remettre en question les efforts.  En conséquence, les perspectives de développement de centaines de millions de personnes restent en péril.  Il faut donc une réponse globale et systémique pour rester sur la bonne voie.  La Vice-Secrétaire générale a identifié cinq domaines qui méritent l’attention de la communauté internationale.

Premièrement, la mobilisation des ressources nationales est fondamentale.  Le leadership, l’appropriation et la mise en œuvre, au niveau national, sont au cœur du Programme 2030.  C’est pourquoi les stratégies nationales intégrées de développement durable et les cadres de financement peuvent fournir une vision à long terme et une plateforme pour soutenir le financement national.  Cela est particulièrement important dans le contexte des dépenses d’infrastructures indispensables.  La communauté internationale doit contribuer à la lutte contre l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent et les flux financiers illicites qui minent les ressources nationales.

Deuxièmement, la coopération au développement est essentielle pour soutenir la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le respect des engagements pris en matière d’aide publique au développement (APD) doit être une priorité.  Bien que l’APD ait augmenté en termes réels, elle a malheureusement stagné dans les pays où elle est la plus nécessaire. 

Troisièmement, nous avons besoin, a dit la Vice-Secrétaire générale, d’un environnement mondial favorable à l’investissement à long terme.  Elle a fait observer que le « court-termisme » menace constamment les efforts d’éradication de la pauvreté.  Le rapport du Groupe de réflexion interinstitutions sur le financement du développement montre, par exemple, que la plupart des dirigeants d’entreprise affirment qu’ils retarderaient volontiers des investissements même dans des projets à bon rendement au profit de leurs bonus trimestriels.  Cet état d’esprit doit changer, a-t-elle tranché.

Quatrièmement, la communauté internationale doit trouver les moyens de débloquer rapidement les ressources et l’accès au financement pour les pays ayant des besoins urgents, tels que ceux qui sont touchés par des crises ou des catastrophes.  La saison des ouragans de 2017 dans l’Atlantique a causé ravages et destructions dans les Caraïbes et a inversé le cours du développement des pays touchés.  Pour Mme Mohammed, ces catastrophes ont souligné la nécessité d’un large éventail de mesures pour soutenir les pays confrontés à de tels défis, notamment en finançant l’adaptation aux changements climatiques.  Il existe bien des solutions novatrices en train d’être mises au point dans ce domaine, comme des mécanismes d’assurance pouvant être soutenus au besoin, ou des prêts qui réduisent le remboursement en cas de crise.  Cependant, beaucoup de ces mesures attendent encore d’être mises en œuvre ou vulgarisées.

Les ressources doivent également cibler plus efficacement les secteurs qui font partie intégrante de la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-elle préconisé.  Par exemple, pour atteindre l’objectif d’accès universel à l’eau potable et à l’assainissement, nous devons tripler le montant dépensé à environ 114 milliards de dollars par an.  Cela implique un changement majeur dans l’échelle des investissements.  De même, en ce qui concerne l’énergie propre et abordable, des gains impressionnants sont réalisés à mesure que le prix des énergies renouvelables diminue, mais là encore, les besoins d’investissement dépassent considérablement les dépenses actuelles.

Cinquièmement, la Vice-Secrétaire générale a invité les gouvernements et les partenaires du secteur privé à travailler plus efficacement pour surmonter les problèmes de financement actuels.  Il faut donc penser de manière innovante à la manière de catalyser l’intérêt croissant et le potentiel d’investissement du secteur privé en faveur des objectifs de développement durable. 

Elle a promis que le système des Nations Unies était déterminé à aider les États Membres dans leurs efforts de financement et de mise en œuvre du Programme 2030.  C’est pourquoi le Secrétaire général organise une réunion de haut niveau à cet effet en septembre prochain.  « L’ONU aidera les pays à négocier des partenariats, à rechercher des financements innovants, à mobiliser des ressources pour le développement durable et à renforcer les capacités nécessaires », a-t-elle promis.  L’ONU travaille à l’amélioration de sa cohérence et à son efficacité, en mettant l’accent sur l’obtention de résultats collectifs sur le terrain, en droite ligne de la proposition du Secrétaire général de repositionner le système des Nations Unies pour le développement et de sa vision globale de la réforme.

Le Haut-Représentant du Fonds pour la paix de l’Union africaine, M. DONALD KABERUKA, a rappelé qu’à l’époque des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en 2000, l’hypothèse fondamentale du financement du développement était d’augmenter le flux de l’aide publique au développement (APD) et son efficacité.  Le paradigme était celui des flux d’APD du Nord vers le Sud. 

Aujourd’hui avec les objectifs de développement durable, le paradigme n’est plus le même: c’est la mobilisation des ressources, y compris au niveau national, c’est « le cœur même » des objectifs de développement durable.  Ce n’est plus l’APD, a réitéré M. Kaberuka qui a tout de même réclamé une « APD intelligente » allant principalement vers les pays fragiles comme la Syrie, le Yémen ou la République centrafricaine.  Une « APD intelligente », c’est aussi mobiliser le marché et c’est traiter de la réduction des risques par la création de richesse.  Vaincre la pauvreté, c’est traiter de la fragilité.  Or, l’approche que l’on applique aujourd’hui ne le fait pas. 

Traiter de la fragilité, ce n’est pas seulement un problème d’argent, c’est la mise en place d’institutions permettant aux gens de prendre en main leur destin, d’entreprendre.  Nationales ou internationales, les entreprises n’investissent que dans un climat sûr.  Le haut représentant a invité le Forum à mettre au cœur de son débat le cas des États fragiles. 

La solution, a-t-il poursuivi, est de réunir secteur privé et société civile.  En Afrique, par exemple, une augmentation de la mobilisation des ressources de 13% seulement permettra de réaliser les objectifs de développement durable.  Le continent doit se doter de capacités, élargir son assiette fiscale et régler la question des flux illicites de capitaux.  Pour ce faire, le Haut-Représentant a appelé à des efforts pour améliorer les institutions internationales et le commerce international.  Il a plaidé contre le protectionnisme car nous devons travailler de façon multilatérale.  « Si vous êtes sur le Titanic, peu importe que vous soyez en première classe ou en troisième classe, vous ne vous en sortirez pas seul. »  « Ce qui importe, c’est un système mondial équitable. » 

Le Ministre des affaires étrangères du Qatar, M. SULTAN BIN SAAD AL-MURAIKHI, a rappelé l’organisation de la Conférence sur le financement du développement et la Conférence de suivi de Monterey, qui a eu lieu à Doha, l’année dernière, au cours de laquelle, les participants ont renouvelé l’importance de la mise en œuvre effective des objectifs de développement durable et de réunir tous les acteurs autour de ces objectifs.  Le Ministre a aussi rappelé que la Conférence a mis l’accent sur la nécessité de fournir l’aide à ceux qui en ont besoin, d’encourager l’investissement privé, et de promouvoir les partenariats durables.  Dans sa conclusion, M. Al-Muraikhi a réitéré qu’en dépit du blocus imposé à son pays, le Qatar continuera son aide au développement. 

M. LIU ZHEMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a présenté le « Rapport du Groupe de réflexion interinstitutions sur le financement du développement » (E/FFDF/2018/2).  Le Rapport indique qu’en 2017, la plupart des types de flux de financement du développement ont augmenté et des progrès ont été accomplis dans tous les domaines d’intervention du Programme d’action d’Addis-Abeba.  Ces progrès ont été étayés par une large reprise de l’économie mondiale, une augmentation de l’investissement et une situation favorable des marchés financiers.  Mais cette dynamique positive n’est pas uniforme car la croissance par habitant demeure négative ou négligeable dans de nombreux pays où les taux de pauvreté sont élevés.  Tout porte à croire néanmoins que la croissance devrait se poursuivre et offrir une base pour accomplir de nouveaux progrès en matière de financement du développement et de réalisation des objectifs de développement durable. 

Il faut toutefois garder à l’esprit que la reprise cyclique de l’économie mondiale masque d’importantes faiblesses et des risques à moyen terme.  Un resserrement désordonné des conditions financières et les augmentations connexes des taux d’intérêts et de la vulnérabilité liée à l’endettement, l’adoption de politiques de repli ou une escalade des tensions géopolitiques pourraient remettre en cause les progrès en matière de développement.  La persistance de fortes inégalités compromet la réalisation d’une croissance vigoureuse et du développement durable.  La baisse de l’investissement privé dans les infrastructures, combinée à une nouvelle augmentation des émissions mondiales de carbone en 2017, rappelle brutalement l’incapacité, à ce jour, d’aligner suffisamment les investissements sur le développement durable à long terme.  Si l’on n’y porte pas remède, les obstacles structurels continueront de compromettre les perspectives de développement durable. 

La reprise cyclique de l’économie est l’occasion d’élaborer des politiques qui visent à régler des problèmes tenaces et d’accélérer la réalisation des objectifs de développement durable.  Le Programme d’action d’Addis-Abeba offre un cadre pour les actions individuelles et la coopération internationale dans ce sens.  Dans son rapport de 2018, le Groupe de réflexion interinstitutions sur le financement du développement présente une évaluation des progrès et des lacunes dans les sept domaines d’intervention et offre des lignes d’action propres à mettre le monde sur la voie d’une croissance et d’un développement plus durables.  Les sept domaines sont ressources publiques intérieures; entreprises et financements privés aux niveaux national et international; investissement et activité commerciale privés; coopération internationale au service du développement; commerce international comme moteur du développement; dette et viabilité; règlement des problèmes systémiques; science, technologie, innovation et renforcement des capacités; et données, contrôle et suivi. 

Plusieurs messages fondamentaux se dégagent de l’analyse du Groupe de réflexion qui analyse aussi le financement de l’investissement dans certains objectifs de développement durable à savoir les objectifs 6 (eau et assainissement), 7 (énergie abordable et propre), 11 (villes et communautés durables), 12 (modes de production et de consommation durables) et 15 (écosystèmes terrestres).

Comme premier message, le Groupe dit que les stratégies nationales intégrées de développement durable et les cadres de financement doivent inspirer les politiques, les plans et les filières de projets.  Les stratégies intégrées offrent une vision à long terme qui ne se limite pas aux cycles politiques à court terme et évite la pensée cloisonnée.  Les stratégies doivent intégrer des politiques, des plans et des cadres réglementaires à moyen terme.  Les mesures nationales doivent aussi bénéficier d’un environnement mondial favorable à même de faciliter les investissements de qualité sur le long terme, en particulier pour les pays en développement.

Le Groupe estime aussi que les motivations des acteurs des institutions financières publiques et privées doivent être alignées sur le développement durable à long terme.  Sans un horizon d’investissement à long terme, certains risques, tels que ceux liés aux changements climatiques, ne seront pas intégrés dans la prise de décisions.  Il convient de revoir les mécanismes incitatifs dans l’ensemble du système financier et de les aligner sur les objectifs de développement durable.

Le financement public, privé et mixte, poursuit le Groupe, contribuent au financement des investissements relatifs aux objectifs de développement durable.  Les approches et instruments novateurs modifient rapidement la situation en matière de financement du développement.  Les caractéristiques des projets et des pays et les priorités des politiques nationales déterminent quel modèle de financement est le mieux adapté aux différents investissements spécifiques et quels acteurs sont les mieux placés pour gérer les risques d’investissement et fournir des services de manière équitable et efficace par rapport au coût.

Les politiques et les actions publiques sont au cœur du Programme d’action d’Addis-Abeba, rappelle le Groupe.  La conduite des affaires publiques joue un rôle indispensable pour ce qui est de fixer des règles, fournir des orientations, promouvoir la cohérence et surmonter les obstacles structurels qui entravent les transformations structurelles axées sur le développement durable. 

Le Groupe aborde également trois questions intersectorielles: les nouvelles technologies, l’égalité des sexes et l’’accent à mettre sur les plus pauvres et les plus vulnérables, pour faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte. 

Le Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), M. ROBERTO AZEVEDO, a rappelé que la part des pays en développement dans le commerce international est passée de 28% à 48% en 10 ans.  Cette croissance peut garantir la reprise économique dans ces pays, a estimé le haut fonctionnaire qui a noté un problème: « l’ombre du protectionnisme » qui se jette sur l’économie mondiale et la réalisation des objectifs de développement durable.  Il a appelé les pays à régler leurs différends « de manière constructive » et par la coopération.  Il faut promouvoir l’entrepreneuriat et y renforcer la présence des femmes.

L’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), M. ACHIM STEINER, a réitéré l’importance de la coopération dans le domaine du financement du développement.  La force du PNUD est de comprendre ce qui se fait au niveau national, ce qui se passe sur le terrain, a déclaré M. Steiner, contrairement à la vie des marchés boursiers.  Le haut fonctionnaire a mis en avant quelques paradoxes: les technologies offrent des perspectives économiques énormes mais elles augmentent les inégalités et les risques et détruisent l’emploi.  Les dettes publiques sont à la hausse.  Pour financer le développement, l’argent est là.  Le problème est de l’aligner avec les priorités du développement.  Le PNUD, qui est présent dans plus de 127 pays, peut apporter son expertise dans ce domaine, a réitéré M. Steiner.

M. MUKHISA KITUYI, Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a parlé d’un environnement du commerce international marqué par la progression du protectionnisme et la paralysie de l’OMC.  Il s’est inquiété des blocages dans la mise en œuvre des normes sur la pêche durable qui ont été adoptées depuis deux ans.  Pour trouver une parade à ce blocage, il a suggéré à l’ONU de prendre notamment en convoquant la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer pour réglementer les questions de pêches dans le cadre des objectifs de développement durable.  Il a ensuite plaidé pour le soutien aux pratiques commerciales positives comme l’initiative de la Zone de libre-échange continentale africaine qui vient d’être mise en place à Kigali.  Cela peut avoir un impact sur l’essor des peuples, a-t-il argué, tout en ajoutant qu’il faille également faciliter les investissements.  M. Kituyi a insisté sur l’importance du transfert des technologies.  Il a aussi invité la communauté internationale à actualiser les mécanismes de restructuration de la dette souveraine. 

M. TAO ZHANG, Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), a relevé que l’économie mondiale continue son essor, même si certains pays émergents dont l’économie est basée sur les produits de base semblent s’essouffler.  Il a aussi tiré la sonnette d’alarme face au niveau d’endettement inquiétant de certains pays en développement.  Pour y faire face, le FMI suggère que ceux qui empruntent renforcent aussi leur capacité de gestion de la chose publique, tandis que les créanciers doivent s’assurer de l’impact de leurs prêts.  Le FMI est disposé à apporter sa contribution pour renforcer les normes internationales en matière de viabilité de la dette.  Le Fonds conseille également aux pays en développement lourdement endettés de diversifier leur économie, en pariant par exemple sur le commerce et l’entrepreneuriat à petite échelle et en y encourageant la présence des femmes.

Le Vice-Président du Programme 2030 de la Banque mondiale, M. MAHMOUD MOHIELDIN, a réitéré que l’APD reste essentielle pour le développement.  Mais il faut aussi mobiliser les ressources nationales en mettant l’accent sur le recouvrement fiscal et la gouvernance financière et économique.  Il a également mis en garde contre l’accumulation des dettes publiques.  Il faut prendre au sérieux l’avertissement du FMI selon lequel deux cinquièmes des pays du monde sont dans une situation d’endettement intolérable.  Il faut accorder toute l’attention voulue à la viabilité de la dette.  S’agissant des technologies, la Banque mondiale travaille à la numérisation des économies, a indiqué M. Mohieldin qui a rappelé l’importance d’investir dans le capital humain comme la santé et l’éducation. 

Au nom des Commissions économiques régionales, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Mme ALICIA BARCENA, a parlé de l’assistance technique des Commissions régionales qui travaillent à l’augmentation des recettes fiscales et à la bonne gestion économique.  Les Commissions travaillent à la stabilité des pays laquelle est la condition sine qua non à la mobilisation des capitaux.  Les régions, a indiqué Mme Barcena, s’inquiètent de l’augmentation rapide des taux d’intérêt qui risque de déstabiliser les économies et les marchés.  La Secrétaire exécutive a tout de même appelé les États à accélérer la réforme des politiques fiscales et des dépenses publiques pour les aligner avec les exigences des objectifs de développement durable.  Elle a parlé de l’impôt direct, de la fiscalité agricole, de la lutte contre les flux illicites des capitaux, de l’aide fiscale aux petites et moyennes entreprises.  Elle a aussi parlé des partenariats public-privé, en particulier pour les infrastructures et d’une ponction systématique de 5% du PNB pour financer les projets de résilience face au risque de catastrophes. 

Première table ronde ministérielle

Animée par la Vice-Présidente de l’ECOSOC, Mme Marie Chatardová, cette première table ronde a permis aux ministres et représentants des États et des organisations internationales de présenter les politiques et les développements institutionnels pour appuyer la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba. 

L’aide publique au développement (APD) a été mentionnée comme l’un des moyens de financer les efforts de développement, en particulier dans les pays les moins avancés (PMA).  En tant que plus grand contributeur de l’APD, l’Union européenne (UE) a dit vouloir encore intensifier ses efforts, a assuré son Commissaire à la coopération internationale et au développement, M. NEVEN MIMICA.  Un nouveau plan sera bientôt annoncé, a-t-il promis tout en rappelant que l’UE a débloqué, l’an dernier, pas moins de 900 millions d’euros en faveur de l’Afrique subsaharienne.

C’est en effet un appel à augmenter l’APD qu’a lancé le Vice-Ministre de l’industrie et du commerce de la République démocratique populaire lao, M. SOMCHITH INTHAMITH.  La République démocratique populaire lao compte sur cette aide pour sortir de la catégorie des PMA d’ici à 2024, a-t-il avoué, avant de présenter des mesures comme la loi sur l’investissement étranger direct (IED).  Le Vice-Ministre a également plaidé pour des accords entre débiteurs et créanciers afin d’assurer la viabilité de la dette souveraine. 

Les financements mixtes.  C’est ce qu’a préconisé Mme ELISSA GOLBERG, Secrétaire d’État aux politiques stratégiques et aux affaires internationales du Canada.  Le secteur privé, s’est-elle expliqué, ne s’implique pas facilement dans le développement durable.  Il faut y faire appel mais aussi élargir la base des partenaires.  Une approche multisectorielle conduit à de meilleures options financières, a confirmé le Chef du Département de la coopération internationale de l’Agence pour le développement et la coopération de la Suisse, M. PIO WENNUBST.  Il a parlé des fonds de pension qui manipulent des sommes énormes mais qui sont souvent lents à réagir et très prudents dans leurs investissements.  Le but est de parvenir à une « complémentarité » entre investisseurs.  Il faut donc « une approche synergique » surtout pour des pays mal cotés par les agences de notation.  À ce propos, l’orateur a insisté sur la lutte contre la corruption et l’amélioration de la gouvernance.  L’UE a d’ailleurs débloqué une somme de 13 millions d’euros entre 2015 et 2017 pour des programmes de bonne gouvernance dans plus de 80 pays en développement.  « Nous voulons lutter, entre autres, contre les flux financiers illicites et l’évasion fiscale », a confirmé son Commissaire à la coopération internationale et au développement, faisant valoir « qu’il n’y a pas de solution miracle au financement du développement ».

Le secteur privé a largement été sollicité aujourd’hui.  La Banque mondiale, a témoigné Mme KARIN FINKELSTON, entend mettre à contribution la capacité d’innovation de ce secteur privé.  En tant que Vice-Présidente des partenariats, des communications et de la sensibilisation du Groupe de la Banque mondiale, elle a parlé du financement de programmes et projets nationaux pour attirer le secteur privé.  La Banque entend « créer des marchés durables » pour pouvoir se retirer et laisser les manettes au secteur privé dans un environnement dénué de risque.

Réduire les risques, c’est renforcer les cadres institutionnels et réglementaires, ont noté des intervenants comme la Ministre de l’investissement et de la coopération internationale de l’Égypte, dont le pays vient justement de bénéficier d’un soutien de la Banque mondiale.  Mme SAHAR NASR a parlé des ajustements législatifs qui ont permis de booster la bonne gouvernance, améliorer le secteur de prêts hypothécaires en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) ou encore renforcer les filets de sécurité sociale grâce, par exemple, à un programme de cantines scolaires en coopération avec l’UE.

En Ukraine, la guerre fait dérailler le décollage économique car une bonne partie du produit intérieur brut (PIB) est désormais alloué au secteur de la sécurité depuis l’invasion russe, a affirmé le Ministre des finances, M. OLEKSANDR DANYLIUK.  Un nouveau système de marché publique a permis par exemple de faire des économies de 30% par rapport aux dépenses de l’ancien système qui était gangrené par la corruption.  En outre, le pays a dû réajuster ses partenariats, puisque son premier partenaire commercial était la Fédération de Russie.  Désormais, un accord d’association avec l’UE lui assure des débouchés commerciaux. 

Il ne faut pas oublier que « sans les gouvernements locaux, il ne peut y avoir de développement durable », a rappelé M. MPHO PARKS TAU, Président de Cités et gouvernements locaux unis (CGLU).  Il s’est impatienté devant les difficultés structurelles qui freinent l’accès des villes aux financements.  Il a estimé que les réformes budgétaires et fiscales pourraient augmenter les fonds destinés aux gouvernements locaux tout comme les mécanismes de décentralisation.  Il est bien beau de nous demander, pays en développement, de mobiliser des ressources nationales, s’est plaint le représentant d’El Salvador, qui a dénoncé la mauvaise foi des entreprises, nationales ou pas, qui ne sont pas très enclines à payer les impôts.  Il a aussi dénoncé le « piège » dans lequel sont tombés les pays à revenu intermédiaire, comme le sien, et dont on barre l’accès à l’APD et aux prêts concessionnels.

Il faut renforcer la coopération internationale, a suggéré le Secrétaire d’État allemand à la coopération économique et au développement, M. NORBERT BARTHLE.  La création de nouveaux partenariats avec les pays en développement fait effectivement partie de la stratégie adoptée par la présidence allemande du G20.  Le but est de doubler d’ici à 2020 le montant alloué à l’assistance technique à la mobilisation des ressources nationales.  L’ONU pourrait aussi renforcer ses efforts en la matière, a plaidé M. MOHAMED ASIM, Ministre des affaires étrangères des Maldives.  Elle pourrait plaider la cause des petits États insulaires en développement (PEID) auprès des institutions financières internationales, a-t-il ajouté. 

Deuxième table ronde ministérielle

À l’occasion de cette table ronde, des ministres et des responsables d’agence de développement ont expliqué ce qu’ils ont accompli pour mobiliser les fonds. 

En la matière, M. RÉMY RIOUX, Directeur général de l’Agence française de développement, a observé quatre tendances depuis 2015: l’activation de nouveaux mécanismes de financement, des prêts concessionnels pratiqués par les banques de développement, d’importants outils donnés aux institutions financières et le rapprochement des agences de développement avec les banques de développement.  La France a d’ailleurs décidé d’augmenter de 0,38% à 0,55% son APD dont 50% sera toujours réservée à l’Afrique.  M. Rioux a défendu le rôle des banques de développement en Afrique qui sont devenues tout aussi importantes que les institutions internationales.  En tant que Président de l’Association des agences internationales de développement, il a indiqué que les quelque 20 agences membres disposent près de 800 milliards de dollars de financement.  L’APD est « cruciale », a acquiescé Mme ULRIKA MODEER, Secrétaire d’État à la coopération pour le développement de la Suède.  Elle a d’ailleurs promis que son pays continuera à y consacrer 0,7% de son PNB.  La Ministre a appelé les autres gouvernements à respecter leurs engagements.

L’APD peut par exemple contribuer à la réforme structurelle des économies, a poursuivi M. LIU ZHEMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, qui a aussi insisté sur la coopération internationale en matière fiscale, dont la lutte contre l’évasion fiscale.  Pour cela, il faut que les institutions financières internationales se prémunissent de toute politisation, a estimé M. MOHAMMAD KHAZAEE, Vice-Ministre des affaires économiques de la République islamique d’Iran.  Mme KAYULA SIAME, Secrétaire permanente au Ministère du commerce et de l’industrie de la Zambie, a d’ailleurs réclamé, une nouvelle fois, la suppression des subventions. 

Chez nous la priorité, c’est la relance du secteur de l’énergie et l’implication du secteur privé, a indiqué M. BAMBANG P.S. BRODJONEGORO, Ministre de la planification du développement national de l’Indonésie.  Pour ce faire, le pays s’efforce de simplifier sa réglementation.  Le but est de lever les obstacles à l’investissement et de promouvoir ainsi les partenariats public-privé.  Le commerce international étant un des moteurs du développement, l’Indonésie a numérisé tous les services d’exportation et des douanes. 

Le problème, c’est que les exportations ont chuté, a confié M. KHURELBAATAR CHIMED, Ministre des finances de la Mongolie.  Après une croissance de 10% à 17% tirée par le secteur minier, la Mongolie doit reconnaître aujourd’hui que le choix d’un développement fondé sur l’industrie extractive a été une erreur.  Le pays se bat désormais contre sa dette et les intérêts qui devraient avaler 60% du PNB. 

Les pays doivent se méfier de l’endettement qui finit par les priver des moyens de financer leur développement, a conseillé la Secrétaire d’État aux affaires étrangères et à la coopération du Portugal.  Comment parvenir à un système de financement à long terme? Mme TERESA RIBEIRO a prescrit l’innovation, la modernisation de l’administration, la satisfaction des besoins des investisseurs et une compréhension de leurs motivations.  Il faut mettre en place une structure durable du financement pour ne plus trop dépendre des fluctuations de l’économie, a ajouté la Secrétaire d’État à la coopération pour le développement de la Suède.  Elle a prôné des « partenariats transfrontaliers » qui verraient des entreprises d’États voisins travailler ensemble.  En Suède, le Gouvernement a créé les « bons verts », des obligations dont les premières ont été émises en 2008 pour financer des projets verts.  La Suède a en outre lancé, en janvier dernier, un centre du développement durable. 

En Colombie, a expliqué M. SERGIO LONDONO ZUREK, Directeur général de l’Agence de coopération auprès de la présidence colombienne, le Gouvernement vient de prendre des mesures fiscales pour développer les zones sorties du conflit, pour favoriser la création d’emplois et développer le tourisme pour en faire un levier de l’économie, en partenariat avec des acteurs nationaux et internationaux. 

LANCEMENT DU FONDS COMMUN POUR LE PROGRAMME DE DÉVELOPPEMENT DURABLE À L’HORIZON 2030

Mme AMINA J. Mohammed, Vice-Secrétaire générale, a indiqué que ce Fonds commun fait partie des initiatives du Secrétaire général, dont le Pacte de financement qui est l’une des grandes nouveautés de sa réforme pour hisser le système des Nations Unies à la hauteur des enjeux du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Ce Fonds entend mettre un terme à la « concurrence stérile » entre les agences onusiennes tout en renforçant leur collaboration, a-t-elle expliqué.  Selon la Vice-Secrétaire générale, ce Fonds est différent des précédentes initiatives dont il s’inspire, y compris « Unis dans l’action ».  Il s’inscrit en droite ligne du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement. 

 Des délégations ont fait d’emblée des annonces de contribution.  L’Union européenne a promis 30 millions d’euros pour les trois prochaines années, soit 10 millions dès maintenant.  La Secrétaire d’État suédoise au développement international a annoncé 20 millions de dollars pour 2018, car « la Suède a foi dans le système des Nations Unies ».  Le Directeur de l’Agence espagnole pour le développement international et la coopération, a promis 10 millions de dollars.  Le Chef du Département de la coopération internationale de l’Agence pour le développement et la coopération de la Suisse a annoncé 3 millions de Francs suisses « pour commencer » tandis que le Secrétaire d’État norvégien au développement international a promis 10 millions de couronnes norvégiennes pour 2018 et pour l’Irlande, ce sera 500 000 euros.  La représentante du Rwanda n’a pas fait d’annonce de contribution mais a estimé que le Fonds ne saurait être le seul mécanisme de financement des objectifs de développement durable.

La Vice-Secrétaire générale a salué la générosité de ces délégations et les assurer de la disposition de l’ONU à tenir compte de leurs suggestions. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Instance permanente: les peuples autochtones réclament le statut d’observateur à l’Assemblée générale et la création d’un tribunal international

Dix-septième session,
9e séance – matin
DH/5391

Instance permanente: les peuples autochtones réclament le statut d’observateur à l’Assemblée générale et la création d’un tribunal international

L’Instance permanente sur les questions autochtones a achevé, aujourd’hui, la première semaine de sa session annuelle qu’elle tient sur le thème « Les droits collectifs des peuples autochtones sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources ».  Elle a tenu un dernier dialogue sur la suite donnée au Document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones de septembre 2014.  Des organisations autochtones en ont profité pour réclamer à l’Assemblée générale un statut d’observateur et la création d’un tribunal international spécial pour la défense de leurs droits.

Il faut un meilleur système pour une participation effective des peuples autochtones aux travaux des Nations Unies, a plaidé l’Administratrice générale de la bande des Mille Lacs des Ojibwe, après que la Chef de Cabinet adjointe du Président de l’Assemblée générale eut reconnu que la première audition interactive organisée, mardi dernier, avec les autochtones « n’a pas été ce que beaucoup d’entre vous attendaient ».  Forcément, a rétorqué le Parlement sami de la Suède, puisque de nombreux États en ont rejeté les conclusions.  Nous avons d’ailleurs abordé ce problème avec le Président de l’Assemblée générale, a-t-il révélé.

L’Administratrice générale des Mille Lacs a donc plaidé pour « un nouveau statut » à l’Assemblée générale qui ne s’appliquerait qu’aux gouvernements ou institutions de gouvernance des peuples autochtones, distinguant les véritables représentants des ONG dont la vocation n’est pas d’exercer le droit à l’autodétermination, a-t-elle asséné.  Le temps est venu pour les Nations Unies d’accorder « un nouveau statut » aux peuples autochtones, a renchéri M. Jens Dahl, membre de l’Instance.  

Si elle n’a pas adhéré formellement à l’idée de ce nouveau statut, la Finlande a suggéré au Conseil des droits de l’homme de tenir une table ronde ou un atelier d’experts sur la manière d’institutionnaliser la participation des peuples autochtones aux travaux de l’ONU.  La Finlande est restée sourde aux mises en garde de la Fédération de Russie contre d’autres mécanismes qui viendraient compromettre ceux dont l’ONU s’est déjà dotée.  Nous demandons tout simplement un statut « d’observateur » à l’Assemblée générale, a tranché le Congrès mondial amazigh, soutenu par M. Alvaro Pop, membre de l’Instance, même si l’Administratrice générale des Mille Lacs a plaidé pour la prise en compte des « spécificités régionales » et pour un système qui fonctionne pour tous les peuples autochtones du monde entier.

Compte tenu des « failles » dans la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, la Bolivie a exigé une nouvelle fois la création d’un tribunal international pour défendre les droits autochtones.  Ce qu’il nous faut, c’est une convention juridiquement contraignante sur la protection de ces peuples, a ajouté l’Afrique du Sud.  Blackstar Community for Better Living Initiatives Inc. a soulevé un problème plus urgent, celui de la crise de l’eau.  Il a appelé l’Instance permanente à convoquer un groupe de coordination autochtone sur l’eau et une réunion pour réfléchir à la création d'un forum mondial des peuples autochtones sur l'eau.

À partir de lundi 23 avril, l’Instance permanente tiendra des négociations à huis clos sur ses recommandations finales. 

INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES

Suite donnée au document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones

Adopté le 25 septembre 2014, le document final (A/RES/69/2), qui comprend 40 paragraphes, commence par: « Nous, chefs d’État et de gouvernement, ministres et représentants des États Membres… sommes assemblés au Siège de l’ONU à New York en ces 22 et 23 septembre 2014… pour réaffirmer le rôle important et continu des Nations Unies dans la promotion et la protection des droits des peuples autochtones…Nous réaffirmons notre appui à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007, et les engagements que nous avons pris…de nous concerter et de coopérer de bonne foi avec les peuples autochtones intéressés -par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives- avant d’adopter et d’appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de les concerner, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, conformément aux principes applicables énoncés dans ladite Déclaration. »

Déclarations

M. ALVARO POP, Secrétaire exécutif du Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes, et Coprésident du Groupe d’appui interorganisations sur les questions concernant les peuples autochtones, a indiqué que le Plan d’action du système de l’ONU pour l’application de la Déclaration de 2007 sur les droits des peuples autochtones avait enregistré certains succès, s’agissant en particulier de la sensibilisation de l’opinion publique.  Un groupe de communication a été mis sur pied pour élaborer des messages et assurer leur diffusion en plusieurs langues et en ligne.  Un Groupe de travail sur une stratégie internationale du développement et sur les politiques nationales, représentant pratiquement toutes les régions du monde, a aussi été créé.  L’Amérique latine s’est dotée d’un plan régional conjoint, constitué de représentants des gouvernements et des peuples autochtones, et marquant un pas important pour améliorer la coordination.

Le Secrétaire exécutif a déploré le fossé entre la Déclaration et sa mise en œuvre, relevant aussi que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 tient très peu compte des peuples autochtones.  À mesure que les cadres de développement seront mis en œuvre, il faudra prêter une attention plus soutenue à la voix des autochtones, a conseillé le Secrétaire exécutif qui a annoncé que la prochaine réunion du Groupe d’appui aura lieu en Colombie, au mois de septembre.

M. Pop a ensuite passé en revue les grandes lignes d’un plan d’action pour la zone ibéro-américaine qui vient d’être d’approuvé dans le cadre du suivi de la Conférence mondiale de 2014.  Ce plan, a-t-il expliqué, reconnaît l’importance d’une coexistence harmonieuse et de la nécessité de tisser des liens interculturels.  Il insiste sur la prise en compte du point de vue des autochtones dans le suivi du Programme 2030 et sur une participation plus visible des femmes dans ce suivi.  C’est le Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes (FILAC) qui apporte une assistance technique, a indiqué le Secrétaire exécutif.

Le Chef de Cabinet adjoint du Président de la soixante-douzième session de l’Assemblé générale, Mme SOFIA BORGES, a réaffirmé l’engagement des États Membres à consulter et à coopérer avec les organisations autochtones avant de prendre toute mesure les concernant.  L’Assemblée générale, a-t-elle dit, continue de promouvoir la participation des autochtones aux travaux des Nations Unies, comme en atteste la résolution 70/232 qui demande à son Président de consulter les États sur la participation des peuples autochtones aux organes des Nations Unies.  Le Président a donc mené des consultations, à cette fin, pendant deux sessions consécutives. 

En vertu de la résolution 70/321 qui demande notamment au Président de l’Assemblée de mener des auditions informelles avec les peuples autochtones, la première audition interactive a été organisée mardi dernier.  « Le résultat n'a pas été ce que beaucoup d'entre vous attendaient, a-t-elle reconnu, mais il y a eu des progrès. »  Le 28 avril, le Président aura une réunion avec des jeunes autochtones du Canada pour parler de leur participation aux travaux ces Nations Unies mais aussi des questions liées à l’emploi, à l’éducation, à la radicalisation et à la prévention contre l’extrémisme violent. 

Il faut un meilleur système pour une participation effective des peuples autochtones aux travaux des Nations Unies, a estimé Mme MELANIE BENJAMIN, Administratrice générale de la bande des Mille Lacs des Ojibwe (Minnesota).  Elle indiqué que les relations entre les Ojibwe et le Gouvernement américain se sont nouées avant la création même de l’État du Minnesota.  Expliquant qu’elle fait partie d’un peuple composé de plusieurs groupes jusqu’au Canada, elle a précisé que le système de gouvernance comprend comme partout des branches exécutive, législative et judiciaire.  Nous sommes donc, a-t-elle dit, un peuple autonome béni par une économie en croissance et considérant que les ressources naturelles sont des dons de la nature qu’il faut respecter et non exploiter à des fins économiques.

Représentante d’un « peuple souverain », elle a nié aux États-Unis le droit de parler au nom des Ojibwe.  Elle a d’ailleurs appelé l’ONU à accorder aux groupes autochtones un nouveau statut qui leur permettrait de participer « effectivement » à ses travaux.  « Nous sommes les seuls à pouvoir formuler notre propre point de vue », a-t-elle argué.  Ce nouveau statut, a-t-il précisé, s’appliquerait uniquement aux gouvernements ou institutions de gouvernance des peuples autochtones.  Des normes devront être mises en place pour distinguer les véritables représentants des gouvernements et institutions autochtones et, par exemple, les ONG qui n’ont pas vocation à exercer le droit à l’autodétermination des peuples autochtones.  En revanche les experts et les conseillers devront être connus comme parties prenantes à la gouvernance.

S’agissant du plan d’action, il faut que les représentants des gouvernements autochtones aient leur mot à dire sur toutes les activités.  Ils devraient avoir le droit de soumettre documents et résolutions, sans pour autant affecter le système existant car le propos n’est pas de « bâillonner nos amis ».  D’autres auditions sur cette question sont prévues, dans les deux prochaines années, a annoncé Mme Benjamin, insistant encore sur la participation des autochtones.  Elle a appelé les agences de l’ONU à s’organiser en conséquence « pour bien entendre la voix des autochtones ».  Il faut aussi porter ces discussions au-delà de New York et faire des consultations régionales « un élément central ».

Il ne faut pas oublier de financer comme il se doit ces consultations régionales, a souligné Mme TERRI HENRY, membre de l’Instance permanente.  Elle a reconnu qu’aux États-Unis, les chefs de tribu ont encore du mal à créer des groupes d’influence pour faire entendre leur voix.  Je vais m’y employer, a-t-elle promis, voulant surfer sur la vague des autochtones qui veulent « sauter les barrières et se libérer des chaînes » pour avoir des consultations « libres » entre eux.

Les peuples autochtones ne sont pas un danger pour les États, ils veulent seulement savoir ce qui est fait pour eux, a renchéri M. LES MALEZER, autre membre de l’Instance.  Il a montré les limites du document final de la Conférence mondiale dont le processus de suivi n’a commencé que deux ans après son adoption; le prochain examen devant avoir lieu en 2019.  On nous dit, a-t-il dit, qu’il faut être patients avec les États, surtout ceux qui ont voté contre le document final.  Mais sur les 19, 2 États seulement sont revenus sur leur vote.  Faudra-t-il encore attendre quatre ans pour que les autres fassent de même? s’est impatienté M. Malezer, en avouant son inquiétude.  Nous avions placé notre espoir dans les objectifs de développement durable mais « j’ai l’impression que l’on ne fait que s’écarter des engagements pris ».  « La patience ne sert à rien, il faut secouer le système », a-t-il estimé, rappelant au Secrétaire général de l’ONU sa promesse de faire des droits de l’homme l’une de ses priorités. 

Ce que nous demandons ce n’est pas de voir un autre fonctionnaire du Département des affaires économiques et sociales s’occuper de notre cas.  Nous voulons, dans un premier temps, que le système des Nations Unies fasse un meilleur travail parce que jusqu’ici, il n’a pas été « à la hauteur » de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  « Ce système doit prouver qu’il prend nos droits au sérieux. »  Il continue même à faire la distinction entre ONG autochtones et ONG « normales », a dénoncé, à son tour, M. JENS DAHL, membre de l’Instance, qui a aussi estimé que le temps est venu pour les Nations Unies d’accorder un nouveau statut aux peuples autochtones.

Dialogue interactif

Nous soutenons l’idée selon laquelle les peuples autochtones doivent participer effectivement aux travaux des organes de l’ONU, a affirmé la Nouvelle-Zélande arguant de la « plus haute priorité » que son Gouvernement accorde aux relations avec les Maoris.  La participation des autochtones ne pourrait qu’enrichir les travaux des Nations Unies, a ajouté le Mexique.  Chez nous, a dit le Chili, ces peuples font déjà partie des processus de prise de décisions.  Ils sont d’ailleurs dûment représentés dans la délégation chilienne à l’Examen période universel du Conseil des droits de l’homme.  Au Paraguay, le plan national sur les peuples autochtones a été élaboré avec leur pleine participation.  Le problème est encore plus simple en El Salvador dont la Constitution de 2010 en a fait un « État pluriculturel et pluriethnique ».  En Bolivie, des autochtones siègent au Parlement et au Gouvernement, le Président lui-même est un autochtone. 

À l’ONU, des mécanismes de participation des peuples autochtones existent déjà et il est inutile d’en créer d’autres, a mis en garde la Fédération de Russie.  Cette position a été contrée par la Finlande qui a carrément suggéré au Conseil des droits de l’homme de tenir une table ronde ou un atelier d'experts sur la manière d’institutionnaliser cette participation.  Nous demandons tout simplement un statut « d’observateur » à l’Assemblée générale, a lancé le Congrès mondial amazigh, soutenu par M. Alvaro Pop, membre de l’Instance.  N’oublions pas les spécificités régionales, a mis en garde l’Administratrice générale de la bande de Gaza des Mille Lacs des Ojibwe, du Minnesota.  Elle a prôné le consensus pour avoir un système qui fonctionne pour tous les peuples autochtones du monde entier.  En attendant, la Finlande a estimé que les auditions informelles du Président de l'Assemblée générale sont un outil essentiel pour préparer le suivi du document final de la Conférence mondiale.  Mais, a rétorqué le Parlement sami de la Suède, de nombreux États ont rejeté les conclusions de la dernière audition, mardi dernier.  Nous avons d’ailleurs abordé ce problème avec le Président de l’Assemblée générale, a-t-il révélé.

Même aux niveaux local et régional, le Canada s’arroge le droit de sélectionner nos représentants, a accusé Metis Settlements General Council, fustigeant ce « paternalisme ».  La Chef de Cabinet adjointe du Président de l’Assemblée générale a exhorté les parties prenantes à prendre part aux autres auditions prévues en 2019 et en 2020.  Elle a aussi transmis le message d’encouragement et d’espoir du Président de l’Assemblée selon lequel « nous devons répondre à des questions complexes dont l’examen demande du temps. »  Pour avancer, la Finlande a demandé aux organismes du système des Nations Unies de consulter plus systématiquement les peuples autochtones.  L’année dernière, notre Conseil exécutif a examiné une version révisée de la politique d’engagement avec les peuples autochtones, a affirmé l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).

C’est la qualité de l’engagement des États Membres qui doit surtout nous préoccuper, a insisté l’Afrique du Sud.  La mise en œuvre de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, s’est-elle expliquée, a été marquée par des failles.  Ni la Suède, ni la Finlande, ni la Norvège n'ont mis en place des plans d'action ou des stratégies de mise en œuvre de la Déclaration, a renchéri le Parlement sami de la Suède, au nom des Parlements sami de Finlande et Norvège. Au Bangladesh, a expliqué, Parbatya Chattagram Jana Samiti, malgré des progrès remarquables, le rapport national volontaire qui a été présenté aux Nations Unies en 2017 a judicieusement omis les problèmes auxquels sont toujours confrontés les peuples autochtones, en particulier les femmes et les enfants.  Au Luxembourg aussi, il y a eu des progrès, selon l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Le Parlement luxembourgeois vient de ratifier la Convention n°169 relative aux peuples indigènes et coloniaux.  Mais, l’OIT a dit attendre un « cadre juridique clair » car bien souvent les mesures d'exécution sont mises en place sans pour autant renforcer les capacités institutionnelles.  Le Parlement sami de la Suède a quant à lui prévenu qu’il rejetterait tout texte qui ne parlerait pas d’autonomie, conformément à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. 

Mais quelle est la définition internationale exacte de « peuples autochtones »? s’est demandé la Fédération de Russie.  Les définitions varient d’un pays à l’autre, a-t-il fait observer, voyant là la difficulté juridique d’appréhender des peuples qui s’étendent par-delà les frontières.  De toute façon, en Russie, les droits des peuples autochtones n’existent tout simplement pas, a rétorqué un représentant des Peuples autochtones de Sibérie et de l’Extrême-Orient russe.  On nous a dépossédé, a-t-il accusé, de plus de 90%.  « Ne croyez pas aux mensonges des autorités russes » sur une situation où presque tous les hommes autochtones ont un casier judiciaire.  Une nouvelle fois, la Bolivie a exigé la création d’un tribunal international pour défendre les droits des peuples autochtones.

Ce qu’il nous faut, c’est une convention juridiquement contraignante sur la protection des peuples autochtones, a ajouté l’Afrique du SudBlackstar Community for Better Living Initiatives Inc., a soulevé un problème plus urgent, celui de la crise de l’eau.  Il a appelé l’Instance à convoquer un groupe de coordination autochtone sur l’eau et une réunion pour réfléchir à la création d'un forum mondial des peuples autochtones sur l’eau.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission du désarmement achève sa session 2018 en jetant les bases du succès de son cycle triennal 2018-2020

Session de 2018,
373e et 374e séances – matin
CD/3769

La Commission du désarmement achève sa session 2018 en jetant les bases du succès de son cycle triennal 2018-2020

La Commission du désarmement a achevé, ce matin, sa session 2018 qu’elle tenait depuis le 2 avril, en lançant un nouveau cycle triennal 2018-2020.  La Présidente, Mme Gillian Bird, de l’Australie, a salué une session qui a permis « d’établir de solides fondations » sur lesquelles il faut s’appuyer pour parvenir en 2020, à des recommandations consensuelles.  L’année dernière, à la fin du précédent cycle triennal, la Commission s’était mise d’accord, pour la première fois depuis 1999, sur des recommandations relatives aux armes classiques, mettant ainsi fin à une impasse de 17 ans.

En 2020, la Commission devrait transmettre à l’Assemblée générale ses conclusions sur le désarmement nucléaire et sur la nouvelle thématique des mesures de confiance à établir pour éviter une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Elle a adopté aujourd’hui son rapport* amendé oralement et ceux** de ses deux Groupes de travail, présentés par leurs Présidents, Mme Diedre Mills, de la Jamaïque, et M. Jeroen Cooreman, de la Belgique. 

La Présidente de la Commission a espéré que les recommandations du Groupe I sur le désarmement nucléaire contribueraient à la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en 2020.  Comme une réunion préparatoire est prévue à Genève du 23 avril au 4 mai, la Présidente a invité les délégués qui s’y rendent à garder à l’esprit l’occasion « unique » pour la Commission de faire des propositions.  Les recommandations du Groupe de travail I pourront aussi contribuer à la quatrième session extraordinaire sur le désarmement que l’Assemblée générale a décidé de tenir du 14 au 16 mai 2018. 

La Commission, a promis sa Présidente, suivra également de près les discussions importantes qui se tiennent à Vienne sur la « viabilité de l’espace extra-atmosphérique ».

Le représentant de la Chine a salué le succès de cette première session du nouveau cycle triennal, se félicitant notamment que les discussions sur la course aux armements dans l’espace aient permis aux États de s‘expliquer et d’exprimer leur attachement à des mesures de transparence et de confiance entre les grandes nations.  En matière de désarmement nucléaire, même si les avis divergent toujours, a-t-il relevé, la Chine milite pour l’interdiction et la destruction complètes des armes nucléaires.  La mesure la plus concrète serait de ne pas utiliser ces armes, et encore moins de menacer de le faire.

Pour son homologue de l’Équateur, les rapports des deux Groupes de travail sont « truffés de bonnes idées ».  Il a, à son tour, salué le fait que les délégations aient pu faire valoir leurs intérêts, tout en tenant compte de l’intérêt commun de parvenir au désarmement, « un désarmement qui sauve des vies », a-t-il plaidé en reprenant les propos du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres.

Outre Mme Gillian Bird, le Bureau de la Commission est composé à la vice-présidence de MM. Mustapha Abbani, de l’Algérie; Bassem Hassan, de l’Égypte; Volodymyr Leschenko, de l’Ukraine; Nirupam Dev Nath, du Bangladesh; Surendra Thapa, du Népal; et René Zelený, de la République tchèque.  La Représentante de la Jamaïque, Mme Diedre Nichole Mills, fait office de Rapporteur.

Créée en 1978, la Commission du désarmement est un organe subsidiaire de l’Assemblée générale qui se réunit annuellement mais qui fonctionne par cycle triennal de négociations.  Elle soumet pour approbation ses recommandations à l’Assemblée générale à la fin de chaque cycle.  Depuis sa création, la Commission a fait 16 recommandations portant notamment sur la création de zones exemptes d’armes nucléaires.

*A/CN.10/2018/L.1

** A/CN.10/2018/WG.I/CRP.4 et A/CN.10/2018/WG.II/CRP.5

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Instance permanente: sonnette d’alarme face à la situation des femmes et des filles autochtones, en proie à une véritable « épidémie de meurtres »

Dix-septième session,
7e & 8e séances – matin & après-midi
DH/5390

Instance permanente: sonnette d’alarme face à la situation des femmes et des filles autochtones, en proie à une véritable « épidémie de meurtres »

Les autochtones ont dépeint, aujourd’hui, devant leur Instance permanente, la situation très difficile des femmes, en proie à une véritable « épidémie de meurtres » selon l’Union of BC Indian Chiefs du Canada.  Le sort des jeunes, tout aussi dramatique, a aussi été mis en lumière.

Ces préoccupations ont été soulevées dans un long débat sur les activités menées dans les six domaines d’action de l’Instance permanente sur les questions autochtones, à savoir la santé, l’éducation, les droits de l’homme, le développement économique et social, l’environnement et la culture. 

L’Instance a également poursuivi son débat sur le thème de l’année: « Droits collectifs des peuples autochtones sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources », avant de faire le point sur ses travaux futurs.

Membre de l’Instance, Mme Tarcila Rivera Zea, a estimé que la situation des femmes et des filles autochtones est tellement préoccupante qu’elle mérite de faire l’objet d’un dialogue de haut niveau.  Elle a réclamé le renforcement des cadres juridiques et institutionnels des États, précisant que les femmes et les filles autochtones n’ont toujours pas un accès égal à l’éducation et à la santé.  Le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a en effet appelé à des mesures urgentes.  Il a parlé d’un nouveau document qui dresse un tableau « très sombre » du taux de mortalité chez les femmes autochtones.

Les femmes et les filles sont en proie à une véritable « épidémie de meurtres », a alerté, à son tour, l’Union of BC Indian Chiefs, qui a imputé ce phénomène à la « violence » dans les territoires autochtones et à l’arrivée de travailleurs avec à la « mentalité hypermasculine ».  La situation aux États-Unis n’est pas meilleure qu’au Canada.  Mme Terri Henry, autre membre de l’Instance, a signalé que les femmes autochtones sont 10 fois plus victimes des homicides que la moyenne nationale.  Les cas de disparitions forcées sont fréquents, en raison de la traite de personnes, l’esclavage moderne et le trafic d’organes. 

Face à une telle situation, Mme Henry a demandé à l’Instance permanente de presser les États-Unis d’adopter une loi proclamant la date du 5 mai comme « journée de sensibilisation aux disparitions forcées parmi les femmes et les jeunes autochtones ».  Le Congrès national des premiers peuples de l’Australie s’est quant à lui alarmé du fait que les femmes autochtones, qui constituent 33% de la population carcérale en Australie, ont 32 fois plus de chance d’être incarcérées après avoir été victimes de violence.  Les jeunes autochtones, eux, représentent 50% des prisonniers australiens.  Dans le monde entier, ces jeunes, a indiqué Mme Tarcila Rivera Zea, membre de l’Instance, sont vulnérables aux gangs, à la traite des personnes et aux trafics de toute sorte, sans compter le taux élevé de prévalence du VIH/sida et la malnutrition.

La séance d’aujourd’hui a également été marquée par les trois interventions du Flying Eagle Woman Fund qui a dénoncé le projet de construction d’une mine de souffre en territoire Menominee, dans le Wisconsin, risquant de contaminer l’eau, les cultures et les plantes médicinales.  « Nous sommes le peuple du riz sauvage.  Que serons-nous sans cette herbe? » a lancé la jeune déléguée de 18 ans, la gorge nouée.  « Allons-nous les laisser nous détruire pour de l’argent dont ils n’ont même pas besoin? »  Dans une intervention interrompue par des sanglots, son homologue de la Native Youth Alliance, qui était à Standing Rock pendant quatre mois, s’est demandé: « Aurons-nous un jour l’assurance de pouvoir vivre en sécurité?  « On est en train de tuer la Terre nourricière et il est de notre devoir de la protéger. »

La Bolivie a carrément souhaité que l’Instance soit rebaptisée « instance permanente sur les droits des peuples autochtones » et a appelé à la création d’une cour internationale de justice pour les peuples autochtones.  « Il est grand temps que nous ayons notre propre système de défense », a renchéri CIDOB, qui a regretté qu’aujourd’hui, les peuples autochtones ne puissent saisir aucune instance judiciaire pour assurer la défense de leurs droits.  

L’Instance poursuivra ses travaux demain, vendredi 20 avril, à partir de 10 heures.

INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES

Débat sur les activités menées dans les six domaines d’action de l’Instance permanente en relation avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

Les six domaines d’action sont la santé, l’éducation, les droits de l’homme, le développement économique et social, l’environnement et la culture.  L’Instance permanente qui a mis l’accent sur les femmes, les jeunes et les enfants autochtones, a entendu un exposé de Mme TARCILA RIVERA ZEA.

Ce membre de l’Instance a engagé les États à encourager la participation des femmes, des jeunes et des enfants autochtones aux décisions liées à six domaines d’action.  Il faut, a-t-elle conseillé, renforcer le cadre juridique et institutionnel.  Elle a d’ailleurs rappelé que depuis sa création l’Instance a formulé plus de 170 recommandations sur les femmes et plus de 100 autres sur les jeunes.   

Les femmes, s’est réjouie Mme Zea, sont de plus en plus présentes dans les discussions internationales, notamment celles sur la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques.  « Nous sommes sur le point d’avoir une réelle influence. »  Pour aller de l’avant, Mme Zea a jugé nécessaire de tenir un dialogue au plus haut niveau sur la situation des femmes autochtones et de consolider les progrès enregistrés par les organismes des Nations Unies comme le Fonds pour la population (FNUAP), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’Organisation pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), et l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) qui considèrent désormais les femmes autochtones comme des « partenaires dotées de droits ».

Mais, a tempéré Mme Zea, il y a un fossé entre engagements et mise en œuvre, s’agissant, en particulier du principe de consentement libre, préalable et éclairé.  Nous sommes loin du respect de nos droits fonciers, nous sommes toujours les plus vulnérables à l’impact des changements climatiques et nous avons moins de ressources pour faire face aux catastrophes naturelles. 

Mme Zea a aussi souligné que les jeunes filles autochtones n’ont toujours pas un accès égal à l’éducation et quand elles vont à l’école, le niveau de l’enseignement laisse à désirer, leur donnant une formation incomptable non seulement avec le marché de l’emploi mais aussi avec leur culture.  Les jeunes restent vulnérables aux gangs, à la traite des personnes et aux trafics de toute sorte, sans compter le taux élevé de prévalence du VIH/sida et la malnutrition.  Les jeunes font face au mépris voire la condamnation des connaissances ancestrales, s’agissant en particulier de la santé.  Le système, a avoué Mme Zea, nous maintient dans la pauvreté.  Sans le respect de leurs droits, les peuples autochtones seront en danger.

Elle a lancé un appel aux organismes des Nations Unies pour qu’ils proposent des solutions innovantes et concrètes en faveur des conditions de vie des peuples autochtones.

Un document sur le taux de mortalité chez les femmes autochtones vient justement d’être lancé par le FNUAP, a indiqué M. LUIS MORA, Fonds, qui a constaté que les femmes n’ont pas un accès égal aux soins de santé maternelle.  Le tableau, « très sombre », appelle à des mesures urgentes.  Depuis sa création, l’Instance a consacré 16% de ses recommandations à la santé des femmes et des filles autochtones, et 6% à la violence fondée sur le sexe.  Malheureusement, 10% seulement des recommandations ont vu un début de réalisation.  Quand ils présentent leurs rapports, les États se contentent d’énumérer les activités et les processus sans s’attarder sur les résultats. 

Des résultats qui tardent à venir aux États-Unis, a tranché Mme TERRI HENRY, Membre de l’Instance permanente, qui a parlé d’un pays où les femmes autochtones sont plus touchées que les autres par la violence, les disparitions forcées et les assassinats.  Les autochtones américaines sont 10 fois plus victimes des homicides que la moyenne nationale.  Les cas de disparition forcée sont dus à la traite de personnes, à l’esclavage moderne et aux trafics d’organes.  Mme Henry a réclamé aux États-Unis la proclamation de la date du 5 mai comme « journée de sensibilisation aux disparitions forcées parmi les femmes et des jeunes autochtones ».  Elle a demandé à l’Instance permanente de presser les États-Unis d’adopter une loi à cette fin.

Dialogue interactif

En Namibie, le 9 août est proclamée « Journée nationale des peuples autochtones ».  Des mesures ont été prises pour mieux l’intégrer les San à la société et à l’économie, pour développer l’enseignement dans les langues tribales, pour égaliser l’accès à la terre et pour renforcer la lutte contre la malnutrition.  Mais la priorité reste l’accès à l’éducation des peuples autochtones parce que les interventions publiques ne sont jusqu’ici révélées peu efficaces.  Aussi, le Ministère chargé des communautés marginalisées consacre 60% de son budget à l’éducation, y compris en prenant en charge les frais de scolarité et l’hébergement des étudiants.  La situation semble meilleure au Viet Nam où toutes les ethnies sont égales en droits, y compris les peuples autochtones.  Ici aussi, la priorité du Gouvernement est la conservation des langues autochtones et d’ailleurs le pays a lancé avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) un projet pilote d’enseignement bilingue autour de sept langues autochtones.  Les plus de 500 cours ont été dispensés à plus 120 000 élèves autochtones.  Des manuels scolaires sont également publiés en langues autochtones, dont 26 langues autochtones sont employées dans les émissions de radio et de télévision auxquelles accèdent plus de 80% de la population vietnamienne.  Les États-Unis ont affirmé mettre en œuvre le Protocole d’accord de 2012 sur l’enseignement des langues autochtones pour améliorer les résultats scolaires jeunes autochtones.  L’État de Norvège appuie quant à lui le Centre de technologie linguistique sami de l’Université de Tromsø qui a développé une technologie et des moyens pratiques qui facilitent la lecture et l’écriture en sami.  Il faut aller plus loin, a estimé l’Équateur, et créer un espace sud-américain des langues autochtones.   

Pour ce qui est de la santé, les Philippines luttent contre le mépris des connaissances médicales autochtones.  Au Brésil, l’accès à la santé est universel et financé par le Gouvernement, y compris pour tous les peuples autochtones qui sont d’ailleurs bien représentés dans le personnel médical.  En 2019, le Gouvernement des États-Unis proposera un budget de 5,2 milliards de dollars pour le service de santé dédié aux plus de 2,2 millions d’Amérindiens.  Les tribus elles-mêmes gèrent 60% de ce budget, dont les priorités sont la lutte contre les opiacées, l’alcool, le diabète et les maladies mentales. 

S’agissant du travail, l’Organisation internationale du Travail (OIT) agit sur le terrain en collaboration avec les gouvernements et les membres de la société civile.  En Bolivie, elle travaille avec les associations de femmes et le Gouvernement pour créer des opportunités d’emplois.  Au Bangladesh, l’OIT a formé un tandem avec une alliance des syndicats afin d’améliorer notamment les conditions de travail des femmes autochtones.  Ce sont 16 projets que le Fonds international de développement agricole (FIDA) a approuvés en faveur des peuples et communautés autochtones du monde entier.  Le Fonds y a investi la somme de 184 millions de dollars et a lancé un appel pour financer le Mécanisme d’assistance aux peuples autochtones, lequel a permis par le passé de donner un coup de main aux communautés autochtones en matière de développement rural.  Le Conseil d’administration du FIDA, où les peuples autochtones sont très bien représentés, a soutenu 127 projets.  L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a annoncé la création d’une nouvelle catégorie de membres pour les organisations des peuples autochtones.  Aux Philippines, il y a environ 3 400 représentants des peuples autochtones dans les organes de décision, du niveau municipal au niveau régional.  Le FIDA a indiqué qu’en 2018, les efforts porteront davantage sur les jeunes autochtones.

Pour ce qui est des droits de l’homme, le développement économique et social, l’environnement, les États-Unis ont créé des juridictions spéciales pour connaître des cas de violence contre les femmes autochtones.  Ceci n’a pas empêché une jeune représentante des Menominee de Wisconsin de soulever un autre problème, celui de la crise de l’eau dont est victime son peuple.  Elle a demandé l’arrêt immédiat d’un projet minier qui contamine l’eau, « si vous voulez vraiment la survie de mon peuple ».  Les Tatars de Crimée ont lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle se penche sur la situation des communautés tatares sous occupation russe.  La Finlande, qui préside le Conseil de l’Arctique pour la période 2017-2019, a pour priorité la protection de l’environnement, l’éducation, l’accès à Internet et la météorologie.  La coopération et la participation des peuples autochtones sont des éléments centraux des travaux du Conseil.  Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a dit mener une politique de promotion des activités des défenseurs de l’environnement.  Il a plaidé pour une meilleure participation des autochtones aux travaux des Nations Unies.

Au Japon, les Aïnous sont déjà représentés dans les Assemblées locales et le Gouvernement reconnaît dûment leur statut de peuple autochtone.  Cela ne suffit pas, a argué Fujika Ariarakawa d’Okinawa qui a demandé son indépendance pure et simple au Japon et la réparation des fautes du passé.  Il en a profité pour réitérer son opposition à la création d’une nouvelle base militaire américaine sur ses terres ancestrales.  Le Parlement sami de Finlande aussi a dit craindre l’expulsion de son peuple des terres sur lesquelles le Gouvernement entend faire tracer un chemin de fer.  Il a demandé à l’Instance de faire pression sur le Gouvernement de la Finlande.  Celui de l’Australie doit respecter la souveraineté du peuple yolngu et sa liberté de parler sa langue, a martelé la Yolngu Nation and Aboriginal Rights Coalition.  

Reprise du débat sur le thème « Droits collectifs des peuples autochtones sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources »

Au nom du Grand Chef Abel Bossum, le Grand Conseil des Crees a souligné la relation « unique » qu’entretiennent les peuples autochtones avec leurs terres.  Les enjeux sont donc très importants pour les générations à venir, a-t-il souligné, avant d’appeler le Canada à mettre ses lois en conformité avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Malgré ses engagements, le Canada continue de violer les normes de la Déclaration et de nier nos droits, a renchéri l’Union of BC Indian Chiefs.  Nos réserves ne représentent plus que 0,2% de la superficie totale du territoire canadien, toutes nos autres terres ont été spoliées, nous continuons d’être considérés comme les « pupilles de la nation » et nos intérêts ne cessent d’être sacrifiés sur l’autel des intérêts commerciaux, a dénoncé l’Union qui s’est vivement opposée au projet de construction d’un gazoduc qui « va détruire l’environnement ».

Elle a aussi averti que les communautés autochtones du Canada sont victimes d’une véritable « épidémie de meurtres » contre leurs femmes et leurs filles, imputant ce phénomène à la « violence » que subissent les territoires et à l’arrivée de travailleurs à la « mentalité hypermasculine ».

À son tour, Global Indigenous People´s Caucus a vivement dénoncé « l’assassinat des eaux », ou « aquacide », s’inquiétant notamment du nombre important de militants incarcérés ou harcelés.  Le Caucus a réclamé un rapport sur cette question et appelé à l’abandon de la doctrine de la découverte.  AIM-West a averti que la présence d’une mine d’extraction à Santa Clara, en Californie, risque de détruire un territoire « sacré ».  L’Anipa-Red Indígena Nacional s’est inquiété de l’adoption de lois nuisibles au profit des exploitations minières et de la militarisation des territoires autochtones.

Les délégations autochtones australiennes ont aussi décrit une situation préoccupante, à l’instar de la NSW Aboriginal Land Council qui a indiqué qu’un problème grave découle du fait que les différents niveaux de l’État n’en sont pas au même stade dans la mise en œuvre de la Déclaration.  Les autorités de la Nouvelle-Galles du Sud ont même refusé tout dialogue, s’est-il indigné.  « Nous sommes victimes d’un véritable phénomène néocolonialiste », a renchéri la Yolngu Nation and Aboriginal Rights Coalition qui appelé l’Instance à voter une pétition pour reconnaître le droit ancestral de la Nation Yolngu sur ses terres.  Même son de cloche du côté du Congrès national des premiers peuples de l’Australie qui a accusé les autorités d’hypocrisie, fustigeant le manque de progrès en matière de respect des droits.  Le Congrès a souligné que les autochtones représentent 27% de la population carcérale, une des pires situations au monde qui affectent particulièrement les jeunes autochtones dont le taux est de 50% dans les prisons alors que celui des femmes autochtones est de 33%.  Ces femmes ont 32 fois plus de chance d’être incarcérées après avoir été victimes de violence.

Un des rares à faire état d’une situation positive a été l’Observateur du Groenland qui a indiqué que si les Groenlandais se prononcent pour l’indépendance, des pourparlers seront directement lancés avec le Danemark pour définir la marche à suivre, en ce qui concerne par exemple le transfert des droits sur les hydrocarbures.  La gestion du sous-sol relève déjà du Gouvernement du Groenland.  « Le processus graduel de transfert d’autorité mis en place par le Danemark est un exemple à suivre », a affirmé l’observateur.

Du côté des États Membres, le Paraguay a réitéré le fait que son plan national d’utilisation des territoires reconnaît le droit des peuples autochtones à maintenir et protéger tout ce qui concerne leur patrimoine et savoir ancestral, tandis qu’El Salvador a parlé du lancement d’un vaste chantier de régularisation des titres fonciers qui accorde une attention particulière aux femmes.  Le Chili par la voix d’un de ses 10 maires autochtones, a évoqué les projets de recyclage pour protéger la nature, « un des principes des Mapuches » et le Costa Rica a dit vouloir renforcer son système de gestion publique pour l’avènement d’une société débarrassée du racisme et facilitant l’accès des autochtones à toute une gamme de services, dans le respect de leur culture.

À son tour, le Bangladesh a indiqué que le règlement du litige foncier de Chittagong Hill Tracts est en cours et nécessite la coopération de toutes les parties impliquées, tout en assurant le désir de son gouvernement de préserver la diversité ethnique du pays.  Le Népal a, pour sa part, espéré que la stabilité politique dont il jouit enfin permettra de renforcer les droits garantis par la Constitution.  La République dominicaine a d’ailleurs estimé que la participation des autochtones permettra de relever le niveau des débats de la FAO, notamment en ce qui concerne la sécurité alimentaire, et a recommandé de créer des ponts entre Rome et New York.

Débat sur les travaux futurs de l’Instance permanente, notamment sur les questions intéressant le Conseil économique et social (ECOSOC) et sur les questions nouvelles

La Présidente de l’Instance a annoncé la décision d’accorder une attention particulière à la question de l’environnement, insistant pour que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones soit le cadre de référence de tout plan de développement.  La Présidente a souhaité « un bon voyage » au pacte mondial pour l’environnement.  Le Congrès mondial amazigh a voulu que la prochaine session soit entièrement consacrée au thème des droits de l’homme des peuples autochtones, soulignant que les actes graves commis contre les défenseurs des droits de son peuple est le problème le plus aigu et le plus urgent.  « On frappe, on blesse, on tue », en Algérie, au Maroc, dans l’Azawad, dans le nord du Mali, s’est alarmé le Congrès.  Le Canada et l’Australie ont recommandé à l’Instance de travailler à l’adoption de l’initiative pour une plus grande participation des peuples autochtones.

La Bolivie a carrément souhaité que l’Instance soit rebaptisée « instance permanente sur les droits des peuples autochtones », et comme le principe de consentement libre, préalable et éclairé n’est pas respecté, elle a appelé à la création d’une cour internationale de justice pour les peuples autochtones.  « Il est grand temps que nous ayons notre propre système de défense », a renchéri CIDOB, qui a regretté qu’en l’état actuel, les peuples autochtones ne puissent saisir aucune instance judiciaire pour assurer la défense de leurs droits.  

Avant d’en venir aux travaux futurs de l’Instance, le Fonds vert pour le climat a dit avoir déployé de nombreux efforts pour veiller à ce que les autochtones bénéficient du financement vert.  Le Fonds a déjà mobilisé 12 milliards de dollars pour financer ses projets dont 33 bénéficieront directement aux communautés autochtones.  Le Fonds s’est aussi doté d’une nouvelle politique environnementale qui reconnaît le rôle important joué par ces peuples contre les effets des changements climatiques.  Le Fonds veille au respect du principe de consentement libre, préalable et éclairé et a fait appel à des spécialistes autochtones pour veiller, comme points focaux, à la bonne mise en œuvre de cette politique.  La prise en compte de la perspective autochtone prévaut aussi à la Plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES).  La stratégie mondiale en matière de biodiversité pour la période 2011-2020 en est une des illustrations.  La Plate-forme IPBES a invité les délégations à consulter, à partir du 1er mai en ligne, les éléments de sa stratégie pour les communautés locales et les peuples autochtones et à faire des commentaires et des contributions.

Les initiatives de ces deux entités ont été saluées par la Nouvelle-Zélande.  La Présidente de l’Instance a souligné que le fait que certaines des zones de la planète les plus riches en biodiversité soient habitées par des autochtones, fait d’eux « les gardiens de la diversité biologique ».  Ils sont aussi les premiers touchés par les conséquences directes des changements climatiques, compte tenu de leurs liens étroits avec la nature et leurs ressources.  Les peuples autochtones doivent donc pouvoir participer directement à la lutte contre le réchauffement de la planète.  L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a de son côté voulu que l’on appréhende mieux l’influence des changements climatiques sur la migration des communautés autochtones.

Migration?  La représentante de Native Youth Alliance, qui était à Standing Rock pendant quatre mois, a parlé des oléoducs et autres industries extractives qui empiètent et détruisent les terres sacrées des autochtones.  Dans une intervention interrompue à plusieurs reprises par ses sanglots, elle a exhorté les communautés autochtones à continuer de se battre pour assurer la protection et le respect de leurs terres.  « Réfléchissez à l’impact environnemental sur nos terres, réclamez des normes.  Aurons-nous un jour l’assurance que nous pourrons vivre en sécurité? a-t-elle lancé.  « On est en train de tuer la Terre nourricière et il est de notre devoir de la protéger. »  L’année dernière, a rappelé, à son tour, Sengwer Indigenous Peoples, du Kenya, nous avons demandé l’aide de l’Instance pour stopper un projet de construction dans les forêts où vivent les Sengwer.  La représentante, dont le compagnon a été blessé pendant les manifestations, a souligné que ce n’est qu’après le meurtre, le 16 janvier 2018, d’un membre de sa communauté par des gardes forestiers, que l’Union européenne a cessé de financer ce projet lequel a depuis été repris par la Finlande.  Elle a donc appelé ce pays à cesser de financer le Service des forêts kényan jusqu’à ce qu’il respecte le droit des Sengwer à leurs terres, s’inquiétant par ailleurs des répercussions d’une prise en main de certains projets par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Il faut aussi mettre un terme aux projets de conservation coloniaux, comme le projet de la tour d’eau.

La Commission autochtone des femmes de Colombie a lancé le même appel à la fin des projets qui mettent en péril la survie de la planète.  Le Forest Peoples Programme a abondé dans ce sens, tandis que RAIPON a appelé à la création d’un front commun contre les changements climatiques, en recours au savoir autochtone et à la science.  Intervenant pour la troisième fois depuis le début de la journée, le Flying Eagle Woman Fund a une nouvelle fois appelé à l’unité contre les projets qui violent les terres autochtones.  Parbatya Chattagram Jana Samhati Samiti s’est inquiété de ce que le Gouvernement du Bangladesh n’ait encore affecté ni fonds ni personnel à la Commission chargée de régler le différend foncier de Chittagong Hill Tract.  À ce jour, aucune personne spoliée n’a pu récupérer ses terres, a précisé la Chittagong Hill Tracts Jumma Refugee´s Welfare Association.

La United Confederation of Taino People, qui a attiré l’attention sur le « statut colonial oppressif » imposé à Boricua (Porto Rico), a décrit une ville servant de décharge pour les multinationales.  La ville a été balayée par l’ouragan Irma, avec les problèmes de santé publique que l’on sait.  L’organisation a appelé à la fin des discriminations dans la manière dont l’ONU finance les programmes en faveur des autochtones.  Ceux qui vivent dans des pays développés ont les conditions de vie souvent plus proches des pays en développement que des pays du Nord, s’est expliquée l’organisation.  Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a justement parlé des initiatives pour élargir l’accès des communautés autochtones aux financements.  C’est la politique de l’emploi qu’il faut mieux diriger en faveur des autochtones, a estimé le Guatemala.

Pour finir en beauté, le Grand Chef Wilton Littlechild, au nom de l’International Indian Treaty Council, a rappelé la tenue, du 1er au 9 juillet, des jeux traditionnels autochtones, lesquels ont rassemblé 1 600 athlètes du monde entier.  Cet évènement a été une occasion « unique » pour présenter des jeux vieux de plusieurs siècles et de célébrer nos cultures, s’est-il félicité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Après la fermeture de la MINUL, le 30 mars, le Conseil de sécurité souligne que l’ONU continuera d’être un partenaire important du Libéria

8239e séance – après-midi
CS/13308

Après la fermeture de la MINUL, le 30 mars, le Conseil de sécurité souligne que l’ONU continuera d’être un partenaire important du Libéria

Vingt jours après la fin du mandat de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), le Conseil de sécurité s’est réuni cet après-midi pour examiner le rapport final du Secrétaire général sur cette mission achevée après 15 ans d’existence au service de la paix.  À cette occasion, le Conseil a adopté une déclaration présidentielle par laquelle il se félicite des « remarquables avancées » que le peuple et le Gouvernement libériens ont accomplies depuis 2003 et souligne que l’ONU continuera d’être un partenaire important du Libéria après la fermeture de la MINUL.  Comme le fait observer le Secrétaire général, il s’agit d’aider le Libéria à surmonter ses difficultés en termes de pérennisation de la paix et de réalisation du développement durable.

La communauté internationale célèbre aujourd’hui « un véritable jalon historique pour le Libéria », a annoncé le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de maintien de la paix, M. Alexander Zouev, en évoquant le chemin parcouru depuis l’adoption de la résolution 1509 (2003) du Conseil.

Présidente de la formation Libéria de la Commission de la consolidation de la paix, Mme Irina Schoulgin Nyoni, de la Suède, a, pour sa part, jugé impératif que la Commission continue de soutenir un leadership politique renouvelé et durable sur les réformes structurelles.  « Poursuivre ces réformes aidera à extirper certaines des causes du conflit », a-t-elle assuré. 

M. Chid Liberty, un jeune entrepreneur libéro-américain et promoteur de l’usine de textile « Liberty & Justice », qui distribue gratuitement des uniformes scolaires aux enfants nécessiteux du Libéria, a ensuite plaidé pour le renforcement du secteur privé et des investissements dans ce pays. 

Caractérisant souvent la MINUL de « succès », les membres du Conseil se sont unanimement félicités de la tenue des élections présidentielle et législatives de 2017, et de la passation de pouvoirs d’Ellen Johnson Sirleaf à George Manneh Weah le 22 janvier 2018, la première entre deux chefs d’État démocratiquement élus depuis 44 ans.

« Le Libéria est un pays qui vit en paix avec lui-même et avec ses voisins », conclut M. António Guterres dans son rapport.  Lorsque la MINUL a été déployée, en octobre 2003, rappelle-t-il, le Libéria était un État « en complète déliquescence » et certaines zones de Monrovia ainsi que de l’intérieur du pays étaient contrôlées par trois factions belligérantes.  Le pays a été marqué par un quart de siècle de crise politique et par 14 années de brutales guerres civiles.

Aux termes de sa déclaration présidentielle, le Conseil prie le Secrétaire général d’entreprendre, dans un délai d’un an, une étude du rôle que la MINUL a joué dans le règlement des conflits et des problèmes endurés par le Libéria.

Le Conseil se félicite de la poursuite de la mise en œuvre du plan de consolidation de la paix au Libéria, intitulé « Pérenniser la paix et assurer le développement: plan de consolidation de la paix au Libéria » (S/2017/282), présenté par le Secrétaire général en application de la résolution 2333 (2016).  À cet égard, il encourage toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour honorer leurs engagements et concourir à la réussite de cette entreprise.  Il importe, souligne-t-il notamment, que les autorités libériennes « fassent davantage pour s’attaquer aux causes profondes du conflit ». 

Préoccupé par le fait qu’au Libéria, les femmes et les filles continuent d’être victimes de nombreux actes de violence sexuelle et sexiste, le Conseil demande à nouveau au Gouvernement libérien de satisfaire à la nécessité urgente et impérative de lutter contre l’impunité et de traduire en justice tous les auteurs de tels crimes. 

« Les réalisations de la MINUL montrent qu’il est possible d’engranger des succès quand les conditions sont réunies », ont estimé les États-Unis, qui ont noté une excellente collaboration de la MINUL avec le Gouvernement libérien, œuvrant pour réaliser un objectif commun, avec un mandat réalisable, à l’appui d’une solution pour aider le pays à se relever du chaos. 

La France a salué dans la fin de la MINUL « un nouveau succès pour le maintien de la paix, pour le Conseil de sécurité et pour les Nations Unies dans leur ensemble, alors que les Nations Unies sont si souvent et injustement clouées au pilori ».  Quelle que soit l’ampleur des avancées réalisées jusqu’ici, « nous ne devons toutefois pas sous-estimer les défis auxquels le Libéria doit encore faire face sur le chemin du développement et de la paix durables », a toutefois nuancé le représentant, qui a préconisé une « action volontariste pour traiter les causes profondes du conflit ».   

Pour la Côte d’Ivoire, voisine du Libéria, ce pays est désormais « réconcilié avec lui-même » et entretient d’excellentes relations avec ses voisins.  Résumant l’opinion de ses collègues, le représentant a jugé important que la mobilisation internationale se poursuive, de sorte que les partenaires du Libéria soutiennent les efforts déployés par le Gouvernement pour pérenniser la paix et renforcer les investissements déjà effectués, afin de stabiliser durablement le pays.  La Guinée équatoriale a souhaité que ce dénouement positif s’étende à la Guinée-Bissau voisine, qui connaîtra une élection présidentielle en novembre prochain.  Quant à l’Éthiopie, elle a vu dans le départ de la MINUL un succès non seulement pour le Libéria, mais également pour toute l’Afrique.

Le représentant du Libéria a salué un moment de fierté et de joie pour les Libériens, sachant d’où ils reviennent.  « Fermons-nous un chapitre aujourd’hui sans difficultés?  Ma réponse à cette question est un “Non” emphatique! » a-t-il lancé, reconnaissant que bien des défis restaient à relever.  Mais il a assuré que les questions en suspens resteraient au premier plan des préoccupations du gouvernement actuel, avant de solliciter à son tour le soutien de la communauté internationale. 

LA SITUATION AU LIBÉRIA

Rapport final du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies au Libéria

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Alors que la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) a pris fin le 30 mars 2018, le Conseil de sécurité se félicite des remarquables avancées et des progrès notables que le peuple et le Gouvernement libériens ont accomplis depuis 2003 pour ce qui est de consolider durablement la paix et la stabilité et salue l’inlassable ardeur avec laquelle ils ont mis en place des mécanismes et des institutions démocratiques et veillé à les respecter.  Il relève des améliorations considérables en ce qui concerne la cohésion sociale, les conditions de sécurité globales dans le pays et les droits de l’homme, qui sont de plus en plus respectés, autant d’éléments déterminants pour la consolidation de la paix et la stabilité. 

À cet égard, le Conseil félicite le Gouvernement libérien d’avoir organisé et tenu les élections présidentielle et législatives de 2017 et d’avoir réglé pacifiquement les différends, concourant ainsi à renforcer la résilience des institutions démocratiques du Libéria.  Il exprime sa gratitude à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, à l’Union africaine et à toutes les missions d’observation internationales, régionales et nationales d’avoir contribué à la transparence du processus électoral et procédé aux évaluations en temps voulu.  Il se félicite de l’aide multiforme qu’a apportée la MINUL aux élections de 2017. 

Le Conseil rend hommage, pour leur action décisive, à la MINUL et aux membres de son personnel civil et en tenue, en particulier à ceux qui ont perdu la vie au service de la paix, de la stabilité et du développement pendant les quatorze années qu’a duré la Mission.  Il saisit également cette occasion pour saluer les efforts du Secrétaire général ainsi que ceux de son Représentant spécial, M. Farid Zarif, et de tous ses prédécesseurs.  Il loue la détermination avec laquelle le personnel de la MINUL s’est acquitté de ses tâches à des moments particulièrement difficiles, comme celui où l’épidémie d’Ebola a touché le pays en 2014.  Il remercie les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police et les donateurs de l’appui qu’ils ont apporté à l’exécution des mandats de la MINUL. 

Le Conseil prie le Secrétaire général d’entreprendre, dans un délai d’un an, et dans la limite des ressources disponibles, une étude du rôle que la MINUL a joué dans le règlement des conflits et des problèmes endurés par le Libéria grâce à des missions de bons offices, des activités de médiation politique, le régime de sanctions et d’autres mesures lui ayant permis de mener à bien son mandat et de laisser la place à l’équipe de pays des Nations Unies.  Il attend avec intérêt les résultats de cette étude, y compris les enseignements supplémentaires qui auront été tirés de l’expérience et d’autres recommandations qui pourraient être formulées à propos des pratiques exemplaires pour les missions de maintien de la paix en période de transition, et exprime son intention d’examiner les possibilités d’en tenir compte dans le cadre des travaux qu’il continue de mener pour améliorer l’efficacité globale des activités de maintien de la paix des Nations Unies.

Le Conseil se félicite de la poursuite de la mise en œuvre du plan de consolidation de la paix au Libéria, intitulé « Pérenniser la paix et assurer le développement: plan de consolidation de la paix au Libéria » (S/2017/282), présenté par le Secrétaire général en application de la résolution 2333 (2016) à l’issue de consultations étroites entre l’Organisation des Nations Unies, le Gouvernement libérien et les partenaires.  Il prend note des mesures prises pendant la première phase du plan et au début de la deuxième pour aider le Gouvernement libérien à doter le pays des capacités pérennes indispensables pour préserver durablement la paix et, à cet égard, il encourage toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour honorer leurs engagements et concourir à la réussite de cette entreprise.  Il souligne qu’il importe que les autorités libériennes fassent davantage pour s’attaquer aux causes profondes du conflit, relancer les processus de réconciliation, faire avancer la réforme foncière, poursuivre les réformes constitutionnelles et institutionnelles, en particulier dans les secteurs de la justice et de la sécurité, favoriser la participation active des femmes et des jeunes à la consolidation de la paix, étendre l’autorité de l’État et les services sociaux à l’ensemble du pays, continuer d’œuvrer au respect des droits de l’homme et instaurer la confiance entre les citoyens libériens et les institutions gouvernementales. 

Le Conseil constate avec satisfaction que le Gouvernement projette de faire participer les citoyens à la mise au point du programme de développement national, et que sa vision, favorable aux pauvres et pleinement conforme aux objectifs de développement durable et au Programme 2030, devrait permettre de réduire la pauvreté au Libéria et d’améliorer la situation économique des personnes en situation vulnérable, en particulier des femmes et des jeunes.

Le Conseil demande au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel de mettre ses bons offices, selon que de besoin, à la disposition du Gouvernement libérien et du Coordonnateur résident des Nations Unies.

Le Conseil rappelle l’examen de haut niveau de l’application de sa résolution 1325 (2000) et les engagements qu’il a pris dans sa résolution 2242 (2015), dans laquelle il a réaffirmé l’importance du rôle joué par les femmes dans la consolidation de la paix, note à nouveau le lien majeur entre, d’une part, la participation active des femmes aux efforts en matière de prévention et de règlement des conflits et de reconstruction et, d’autre part, l’utilité et la viabilité à long terme de ces efforts, et souligne à cet égard l’importance de l’autonomisation des femmes et de leur participation sur un pied d’égalité à tous les efforts faits pour maintenir et promouvoir la paix et la sécurité au Libéria.

Le Conseil demeure préoccupé par le fait qu’au Libéria, les femmes et les filles continuent d’être victimes de nombreux actes de violence sexuelle et sexiste, et demande à nouveau au Gouvernement libérien de satisfaire à la nécessité urgente et impérative de lutter contre l’impunité et de traduire en justice tous les auteurs de tels crimes, de s’engager plus avant à cet égard, notamment en mettant à exécution son plan d’action national sur la violence sexuelle et sexiste et en améliorant l’accès des femmes et des filles à la justice.

Le Conseil souligne que l’exploitation et les atteintes sexuelles dont se rendent coupables des soldats de la paix sont inacceptables et affirme son appui à la politique de tolérance zéro du système des Nations Unies concernant toutes les formes d’exploitation et d’atteintes sexuelles.  Il note avec satisfaction les mesures que la MINUL a prises pour lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles et engage l’équipe de pays des Nations Unies à améliorer l’efficacité des garanties existantes, à veiller à ce que l’intérêt des bénéficiaires soit toujours prioritaire et à faciliter l’amélioration des normes et la restauration de la confiance à l’échelle du système.  Il demande à l’équipe de pays de veiller, comme il est indiqué dans le document S/2018/344, à ce que toute allégation en suspens au 30 juin 2018 soit transmise à l’équipe régionale déontologie et discipline basée à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), et toute nouvelle allégation au Bureau du Coordinateur résident, qui sera chargé de transmettre les plaintes à l’équipe déontologie et discipline basée à la MINUSMA et au Département de l’appui aux missions, qui prendront les mesures d’examen et de suivi nécessaires.

Le Conseil souligne que l’ONU continuera d’être un partenaire important du Libéria après la fermeture de la MINUL.  Il prend note du communiqué publié le 23 mars 2018 à l’issue de la conférence sur l’avenir du Libéria et de la poursuite des activités que le système des Nations Unies mène dans le pays en y maintenant une solide équipe de pays composée de 16 organismes, fonds et programmes.

Le Conseil souligne l’importance de l’appui que les partenaires bilatéraux et multilatéraux continuent d’apporter au Libéria, au moment où il entre, à la suite de la fermeture de la MINUL, dans une nouvelle phase de son développement, et engage l’ONU, l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest et l’Union du fleuve Mano à continuer de jouer un rôle majeur dans la consolidation et la pérennisation de la paix au Libéria.  Il est conscient de l’importance du rôle que joue la Commission de consolidation de la paix au Libéria et l’engage à poursuivre sa participation active.

Déclarations

M. ALEXANDER ZOUEV, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de maintien de la paix, s’est réjoui d’annoncer que la communauté internationale célébrait aujourd’hui « un véritable jalon historique pour le Libéria ».  Il a rappelé que la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) avait pris fin le 30 mars dernier, après avoir rempli avec succès le mandat pour lequel elle avait été déployée il y a près de 15 ans.

M. Zouev a caractérisé le Libéria de 2003 comme « un pays en ruines, ayant une population traumatisée et vivant dans un État prédateur après 14 ans de guerre civile ».  S’il a personnellement été témoin de la portée de ces destructions, il a aussi discerné l’opportunité d’un renouveau dès 2004 en travaillant sur les dossiers délicats du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants. 

Le Sous-Secrétaire général a évoqué le chemin parcouru depuis l’adoption de la résolution 1509 (2003) jusqu’à ce jour, alors que le Conseil de sécurité est saisi du rapport final du Secrétaire général sur la MINUL, qui aborde les récents développements et la fermeture de la Mission. 

Les institutions nationales ont montré qu’elles étaient capables d’organiser des élections, s’est félicité M. Zouev.  Le Gouvernement et ses partenaires continueront de devoir veiller à ce que celles-ci reçoivent les investissements et les ressources nécessaires à leur développement.  Le Président Weah continue de consolider son gouvernement et sa vision « propauvres » pour le pays, a poursuivi le Sous-Secrétaire général, qui a cité à titre d’exemple le lancement, la semaine dernière, par le Gouvernement, d’une feuille de route pour son programme de développement, qui place les plus pauvres au cœur de la gouvernance publique.  À l’avenir, a souligné M. Zouev, il sera essentiel que tous les partenaires continuent de travailler main dans la main pour mettre en œuvre ce programme aligné sur les objectifs de développement durable.

Par ailleurs, le Sous-Secrétaire général a relevé que le Gouvernement avait réitéré qu’il était pleinement attaché à la liberté d’expression.

La fin du mandat de la MINUL montre bien quelle est la confiance que nous avons placée dans le pays et combien nous sommes convaincus qu’il avance vers une paix pérenne, a poursuivi M. Zouev, pour qui il appartient maintenant au peuple et au Gouvernement libériens de continuer de construire une nation unifiée, dotée d’un gouvernement redevable qui continue de lutter contre la corruption, une nation où tous les citoyens partagent les bénéfices de ses ressources naturelles et humaines, en charge de son propre destin, et où le Gouvernement garantit sécurité, protection et services à tous. 

Les Nations Unies resteront dans le pays pour soutenir la population et le Gouvernement du Libéria, a assuré M. Zouev, aux yeux de qui l’héritage de la MINUL confirme la valeur du maintien de la paix.  La Mission a réussi à prévenir la résurgence d’un conflit armé et à avancer sur la voie d’une paix et d’un développement durables, a-t-il conclu. 

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède), Présidente de la formation Libéria de la Commission de la consolidation de la paix (CCP), a indiqué que la Commission était attachée à la paix au Libéria.  La CCP a soutenu le Gouvernement et la MINUL en élaborant le plan de consolidation de la paix exigé par la résolution 2333 (2016).  Au cours des 15 années d’une mission réussie, la MINUL a été à l’avant-garde des efforts pour jeter les bases essentielles de la paix au Libéria, a poursuivi Mme Schoulgin Nyoni.  Elle a désarmé plus de 100 000 combattants et protégé des millions de civils, aidé à recréer la police, la justice et les institutions de sécurité, facilité l’aide humanitaire, et soutenu le développement des capacités nationales pour promouvoir et protéger les droits de l’homme.  En outre, 202 Casques bleus ont perdu la vie pendant ces 15 ans. 

Demain, le Libéria ne figurera plus au programme de travail du Conseil de sécurité et la mission de maintien de la paix des Nations Unies aura terminé ses opérations, a ajouté Mme Schoulgin Nyoni.  La CCP et l’ONU sont pourtant très impliquées dans le soutien du Libéria dans ce nouveau chapitre.  En ce qui concerne la transition de la MINUL à la présence des Nations Unies, la Commission a constamment recommandé la poursuite des bons offices et de l’accompagnement politique de l’ONU ainsi que l’offre d’expertise nécessaire aux analyses politiques et la mise en œuvre du plan de consolidation de la paix après la fermeture de la MINUL. 

Tenir la promesse des objectifs de développement durable est essentiel pour renforcer la résilience, réussir les transitions et réduire le risque de conflit violent ou de retour au conflit, a poursuivi Mme Schoulgin Nyoni, qui a souligné les défis majeurs à relever pour lesquels l’appui de la communauté internationale sera nécessaire.  De nombreuses causes du conflit demeurent.  La décentralisation, les questions foncières ou encore l’accès à la justice et une capacité accrue des institutions liées à la sécurité sont cruciaux pour la poursuite de la consolidation de la paix.  Le Plan national de développement doit en tenir compte.  Renforcer l’état de droit et assurer la réconciliation nationale sont aussi essentiels.  En outre, la loi sur la violence contre les femmes reste en suspens.

Pour Mme Schoulgin Nyoni, il est impératif que la CCP continue de soutenir un leadership politique renouvelé et durable sur les réformes structurelles.  Continuer ces réformes aidera à extirper certaines des causes du conflit.  À cette fin, une plus grande intégration des efforts de paix de l’ONU est essentielle.  Cela implique de s’assurer que le soutien à la paix soit fidèlement reflété dans le Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement (PNUAD) et que toutes les composantes du système des Nations Unies sur le terrain soutiennent le Plan national de développement d’une manière efficace et coordonnée. 

Il est clair que les progrès concrets concernant les réformes dépendent également de la croissance économique et des capacités financières.  La situation économique difficile a un impact négatif persistant sur la population.  Néanmoins, le Gouvernement affiche clairement une volonté politique et a l’énergie nécessaire.  Une illustration en est la baisse de 25% de son salaire décidé par le Président. 

Ce dernier a aussi déclaré qu’il avait besoin du soutien de la communauté internationale et a souligné l’importance du partenariat, a rappelé Mme Schoulgin Nyoni.  La Commission continuera de travailler étroitement avec la Banque mondiale et d’autres institutions financières internationales et encourage un engagement plus grand du secteur privé, a-t-elle assuré.  Le Fonds d’affectation spéciale pluripartenaire pour le Libéria, avec un financement prévisible des partenaires internationaux en combinaison avec le soutien catalytique du fonds de maintien de la paix, a le potentiel d’être un mécanisme efficace pour permettre la mise en œuvre continue des priorités du pays en matière de consolidation de la paix, a-t-elle conclu. 

M. CHID LIBERTY, entrepreneur libéro-américain et promoteur de l’usine de textile « Liberty & Justice », a expliqué que sa famille est arrivée aux États-Unis quand il était âgé de 5 ans, afin d’y trouver refuge et de fuir la situation politique tendue du Libéria d’alors.  Il a aussi rappelé que durant son adolescence, la guerre civile faisait rage dans son pays d’origine, avec notamment l’utilisation d’enfants soldats et les violences sexuelles.  Aujourd’hui, a-t-il ajouté, le Libéria est devenu un pays pacifique, grâce à des organisations de la société civile tels que « Leymah Gbowee’s Liberian Women’s Mass Action for peace », ou encore avec le soutien de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), et des dirigeants politiques locaux tels que Mme Ellen Johnson Sirleaf -l’ancienne Présidente-, « sans oublier le Conseil de sécurité ». 

M. Liberty a aussi rappelé son tourment quand, enfant lui-même, il voyait circuler des photos de jeunes garçons au Libéria habillés en treillis déchirés et portant des armes à feu.  Il a fait part de la joie qui l’habite aujourd’hui en voyant, quand il se rend au travail à Monrovia le matin, des enfants habillés en uniformes scolaires.  « Les seules marches que nos enfants font sont celles du chemin de l’école ou des sites de jeux », s’est-il réjoui.  Son entreprise, « Liberty & Justice », confectionne et distribue gratuitement des uniformes scolaires aux enfants nécessiteux du pays.  La compagnie peut équilibrer ses comptes par des produits de sa marque « Uniform » vendus aux États-Unis grâce à un partenariat avec les magasins Bloomingdale’s, a-t-il expliqué. 

L’entrepreneur a souligné qu’à son retour au Libéria en 2009, le taux de pauvreté avoisinait 80% et que le même chiffre exprimait le taux de chômage dans le pays.  C’est ce contexte qui l’a motivé, avec ses partenaires, à ouvrir une usine et donner du travail aux femmes, notamment les déplacées, qui comptaient parmi les plus défavorisés.  Il s’est félicité du fait que les agents de sécurité de son usine soient tous des anciens enfants soldats qui aujourd’hui protègent les mêmes femmes qui furent leurs victimes hier.

M. Liberty a parlé du cas d’une employée de son usine, Mme Jennah, qui est arrivée en 2010, tellement pauvre qu’elle portait des sandales de couleurs différentes.  Une femme seule, avec des enfants à charge, et qui ne savait pas lire et encore moins écrire.  Aujourd’hui, a-t-il témoigné, elle est la meilleure employée de son usine et, après huit ans, elle peut désormais lire et écrire grâce à des programmes sociaux mis en place par l’entreprise. 

M. Liberty a dit merci au Conseil de sécurité pour le soutien apporté à son pays, assurant que les investissements qu’il y avait consentis n’avaient pas été vains.  Selon lui, alors que la MINUL vient de fermer ses portes, le Libéria est dorénavant un succès en matière d’après conflit.  « Mission accomplie », a-t-il lancé. 

Désormais, il s’agit de renforcer le secteur privé dans le pays, a poursuivi l’entrepreneur.  La population, en majorité jeune, doit être éduquée, employée et impliquée dans le processus politique.  Il faut donc investir dans la jeunesse du Libéria, notamment en faveur des jeunes entrepreneurs du pays afin que ces derniers créent des emplois d’avenir, construisent une base fiscale locale et soutiennent la société civile.  Il a reconnu que d’aucuns continuent de juger très risqué d’investir au Libéria.  Il a néanmoins expliqué qu’à partir de son expérience personnelle dans le pays, et ayant vu une génération perdue, « le risque d’y investir n’est pas aussi grand que le fait de ne pas y investir ».

Pour Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis), la MINUL a grandement contribué à la paix et à la sécurité dans un pays déchiré par une guerre civile effroyable et de multiples violations des droits de l’homme.  « La MINUL a fait la différence sur le terrain », a-t-elle dit, ajoutant que la Mission avait surmonté les difficultés pour parvenir à une transition et permis de sauver des vies. 

« Les réalisations de la MINUL montrent qu’il est possible d’engranger des succès quand les conditions sont réunies », a estimé Mme Tachco.  Ainsi la Mission a-t-elle bénéficié d’une excellente collaboration avec le Gouvernement du pays, œuvrant pour réaliser un objectif commun, avec un mandat réalisable, à l’appui d’une solution pour aider le pays à se relever du chaos.  Avec les élections de 2017, nous avons compris tout le chemin parcouru par le Libéria et ses institutions, a poursuivi Mme Tachco.

« La réconciliation ne signifie pas simplement oublier le passé », a ensuite souligné la représentante.  Dans cet esprit, elle a félicité le Gouvernement pour la tenue de la conférence sur la réconciliation visant à trouver une identité nationale, pour sa stratégie de la paix et de la réconciliation nationale et pour avoir suivi les recommandations de la Commission vérité et réconciliation.  Elle a souhaité que la Commission libérienne des droits de l’homme continue de se développer et a salué la création d’un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a salué les efforts de la MINUL pour stabiliser le Libéria, ce dont témoignent en particulier les mesures prises pour la bonne tenue de la dernière élection présidentielle.  Il a rendu hommage à tous ceux qui ont perdu la vie au sein de la Mission afin que le pays puisse aujourd’hui vivre en paix.  Il a aussi salué, sur le plan sécuritaire, le fait que les autorités peuvent désormais s’acquitter des fonctions qui échoyaient naguère encore à la MINUL. 

Le représentant a néanmoins regretté la lenteur des réformes du système de la justice.  Il a relevé que le nouveau Président du pays faisait assurément face à de nombreux défis, dont celui du rétablissement de la confiance des populations en leur système judiciaire.  La Fédération de Russie invite les autorités à faire face aux causes profondes qui avaient conduit au conflit, y compris les différends fonciers.  M. Polyanskiy a également souligné l’importance de la bonne coopération avec les pays voisins, notamment la Côte d’Ivoire, où vivent de nombreux réfugiés libériens.  Il a enfin souhaité que les autorités œuvrent à la stabilité du pays et à son essor économique et social. 

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a salué la fermeture de la MINUL.  Alors que la Mission avait été déployée il y a 15 ans dans un État en déliquescence, elle quitte aujourd’hui un pays à l’aube d’une ère nouvelle, a-t-il ajouté, estimant que l’investiture du Président Weah avait constitué « un jalon sur la voie de la transformation de cette république, la plus ancienne d’Afrique ».  Le représentant a aussi salué le rôle de premier plan de la société civile pour rétablir la paix au Libéria, jusqu’à la tenue d’un processus électoral transparent et inclusif.

Il reste toutefois des défis à relever, a reconnu M. Radomski, notamment sur le plan socioéconomique.  Le représentant a salué l’engagement du Président à lutter contre la corruption, promouvoir la bonne gouvernance et avancer sur la voie de la réconciliation nationale pour pérenniser la paix et jeter les bases d’un développent durable.  En conclusion, il a souligné l’importance pour les Nations Unies de rester engagées.  « Il est de notre devoir de préserver les acquis de la MINUL », a-t-il insisté.  Enfin, il a rendu hommage aux 202 Casques bleus qui ont perdu la vie au service de la paix au Libéria.

M. THÉODORE DAH (Côte d’Ivoire) a estimé que le Libéria était désormais réconcilié avec lui-même et entretenait d’excellentes relations avec les pays voisins, dont la Côte d’Ivoire.  Le récent voyage du Président George Weah à Abidjan en est la parfaite illustration, a ajouté le représentant.  Il a salué la contribution essentielle des acteurs politiques libériens qui, à une période cruciale de l’histoire de leur pays, ont accepté de placer l’intérêt national au-dessus de toute autre considération.  Reconnaissant que de nombreux défis restaient à relever, le représentant s’est dit convaincu que l’engagement et la volonté politique des nouvelles autorités permettraient au Libéria de repartir sur des bases solides.  Il a aussi noté la détermination du Gouvernement à combattre la corruption, à promouvoir la bonne gouvernance et à faire avancer le processus de réconciliation nationale. 

Il importe que la mobilisation internationale se poursuive, a insisté M. Dah, de sorte que les partenaires du Libéria soutiennent les efforts déployés par le Gouvernement pour pérenniser la paix et renforcer les investissements déjà effectués, ceci afin de stabiliser durablement le pays.  En outre, la consolidation des résultats acquis en vue de la pérennisation de la paix et de la stabilité demeure essentielle pour prévenir tout risque de retour en arrière.  Il appartient donc à l’équipe de pays des Nations Unies, en rapport avec le Gouvernement libérien et les organisations régionales et sous-régionales, de travailler à l’unisson, en vue de la réalisation d’un tel objectif, a conclu le représentant.

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) a présenté le départ de la MINUL comme un succès pour le Libéria, mais également pour toute l’Afrique.  Il a salué le travail de la MINUL, paraphrasant le nouveau Président du pays qui a affirmé que l’ONU avait eu un impact indélébile sur la vie des Libériens.  Il a rappelé que l’Éthiopie avait contribué à ce succès par l’envoi de contingents.  Il a souhaité que le travail de la MINUL fasse l’objet d’une évaluation et que des leçons en soient tirées. 

Le représentant a ensuite prôné la réconciliation et la promotion de la démocratie au Libéria.  Il a également jugé essentiel de mettre en œuvre le plan de consolidation de la paix pour le Libéria et a invité la communauté internationale, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine et les Nations Unies, à continuer d’accompagner le pays pour y pérenniser la paix.

Mme SCHOULGIN NYONI (Suède), s’exprimant cette fois au nom de son pays, a salué le caractère spécial de cette dernière séance du Conseil consacrée à la MINUL, en précisant qu’elle était « la seule diplomate suédoise en poste à Monrovia en 2004 et 2005 », alors que la MINUL nouvellement installée commençait à peine à apporter l’espoir.  La bonne transition de la MINUL vers l’équipe de pays de l’ONU atteste du professionnalisme de la Mission comme du chemin parcouru par le Libéria, a-t-elle estimé, en soulignant la soif de démocratie dans le pays et l’apaisement de la situation sécuritaire. 

De nombreuses causes profondes du conflit demeurent néanmoins, a nuancé Mme Schoulgin Nyoni, en rappelant qu’il ne peut y avoir de paix sans développement.  Elle a plaidé notamment pour une bonne gestion des vastes ressources du pays au service du peuple libérien.  Enfin, elle a jugé ambitieux le programme de réduction de la pauvreté du nouveau Président, avant de rappeler qu’il est essentiel que le soutien international à ce pays ne faiblisse pas. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a, avec le retrait de la MINUL, salué « un nouveau succès pour le maintien de la paix, pour le Conseil de sécurité et pour les Nations Unies dans leur ensemble, alors que les Nations Unies sont si souvent et injustement clouées au pilori ».  Ce succès, a-t-il noté, s’inscrit dans le sillage de ceux récemment obtenus en Côte d’Ivoire, en Sierra Leone ou encore en Haïti. 

« Le départ de la MINUL ne marque pas la fin de la présence des Nations Unies au Libéria, bien au contraire », a assuré M. Delattre.  Il ouvre le chapitre d’une nouvelle forme d’appui de la part du système des Nations Unies, avec des structures et des instruments plus adaptés aux besoins actuels de la population libérienne.  Il est également indispensable que la communauté internationale au sens large continue de soutenir le Libéria, a-t-il déclaré.  « Le Libéria a récemment pu montrer l’ampleur des progrès qu’il avait réalisés sur le chemin de la démocratisation et de la stabilisation », s’est félicité M. Delattre, en faisant part de la volonté de la France d’accompagner le Président Weah dans la réalisation des orientations qu’il a définies pour son pays. 

Quelle que soit l’ampleur des avancées réalisées jusqu’ici, « nous ne devons toutefois pas sous-estimer les défis auxquels le Libéria doit encore faire face sur le chemin du développement et de la paix durables », a nuancé le représentant, qui a averti qu’une stabilisation durable ne saurait faire l’économie d’une « action volontariste pour traiter les causes profondes du conflit ».    

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a félicité le peuple du Libéria pour les dernières élections pacifiques et pour le long chemin parcouru vers la paix.  Il a apporté son soutien au Président Weah qui entend lutter contre la corruption et relancer l’économie.  Pour cela, il est important que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine et l’ONU apportent leur soutien au pays.  Le représentant a invité le Gouvernement à s’atteler à l’autonomisation des femmes et des jeunes.  Il a aussi souligné le rôle des dirigeants religieux pour la consolidation de la paix. 

Des fonds sont nécessaires pour la reconstruction du Libéria, a poursuivi M. Tumysh, qui a souhaité que la communauté internationale réagisse favorablement aux demandes du pays.  Il a aussi invité le Gouvernement national à trouver des moyens de diversifier son économie, sans oublier le renforcement des droits de l’homme.  Il a enfin estimé que les leçons tirées de l’expérience de la MINUL pourraient aider au succès d’autres missions de maintien de la paix des Nations Unies. 

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït), qui a évoqué les victimes des guerres civiles successives au Libéria, a ensuite reconnu que la MINUL s’était acquittée de ses fonctions avec succès.  Il s’est réjoui de débattre d’un ordre du jour au Conseil de sécurité « de façon positive ».  D’après lui, la MINUL représente un exemple parfait de participation aux niveaux international, régional et local, qui a permis de construire un État en mesure de s’autogérer. 

Le représentant a souligné l’importance de l’équipe de pays, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et de la Commission de consolidation de la paix, compte tenu de la situation économique difficile, et afin de réaliser le développement durable.  Il s’est également félicité du rôle joué par les acteurs politiques pour résoudre leurs différends avant les dernières élections. 

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a noté que le Libéria devait encore relever des défis importants car consolider la paix nécessite des efforts au quotidien.  Il a salué le rôle de l’ancienne Présidente Sirleaf et a souligné la mission cruciale du Président Weah qui lui a succédé démocratiquement en janvier dernier.  Il a ensuite cité un certain nombre de chantiers, notamment les questions de sécurité et de renforcement de l’état de droit.  Le représentant a aussi rappelé l’épidémie d’Ebola, qui avait affecté le pays et la région en 2014, soulignant l’importance pour la communauté internationale de s’assurer que cela ne se reproduira plus.  Il a conclu en saluant le travail mené dans le pays par la MINUL.

M. WU HAITAO (Chine) s’est dit confiant dans le fait que, sous la direction du Président Weah, le Libéria et son peuple pourraient réaliser de grands progrès.  Il a félicité la MINUL de sa contribution au maintien de la paix et à la stabilité au Libéria.  La Chine, a-t-il rappelé, a toujours insisté pour dire que les opérations de maintien de la paix devaient faire l’objet d’ajustements en temps voulu, en fonction de la situation sur le terrain et en respectant la volonté du pays concerné. 

La MINUL, s’est félicité le représentant, est « une véritable success story », qui devra être étudiée pour que nous en tirions les leçons nécessaires.  Qu’il s’agisse de la consolidation d’une nation ou de la lutte contre l’épidémie d’Ebola, la Chine s’est toujours tenue aux côtés du Libéria et elle a participé activement à la MINUL, a également fait valoir le représentant.  À l’avenir, a-t-il assuré, la Chine continuera de faire avancer sa politique africaine sur la base des valeurs d’amitié et de bénéfices partagés, et de jouer « un rôle constructif sur le continent africain ». 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé que, pendant la crise d’Ebola, la Guinée équatoriale avait prêté 3 millions de dollars aux pays affectés, y compris le Libéria.  Il a salué l’aboutissement du processus politique ayant mené à la paix dans le pays, notamment grâce à l’implication de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de l’Union africaine et de l’ONU.  Pour le représentant, cette expérience montre l’importance de la composante régionale dans la recherche de la paix.

M. Ndong Mba a déclaré que le Libéria était un excellent exemple en ce qu’il montre que le sens du compromis des acteurs politiques peut conduire à une solution, même dans les situations les plus complexes.  Il a dit souhaiter que ce dénouement positif puisse s’étendre à la Guinée-Bissau voisine, qui connaîtra une élection présidentielle en novembre prochain.  Il a enfin salué le rôle de la MINUL, rendant aussi hommage au personnel onusien ayant perdu la vie au Libéria.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a rendu hommage au personnel des Nations Unies ayant servi au Libéria, notamment les 202 soldats de la paix qui ont payé de leur vie leur service dans le pays.  Au titre des enseignements de l’expérience libérienne, le représentant a noté que la MINUL avait encouragé l’appropriation nationale.  Ainsi, les forces de police nationale ont radicalement changé entre le temps du début de la Mission en 2003 et aujourd’hui, s’est-il félicité.  La MINUL a aussi coordonné ses efforts avec ceux d’autres acteurs comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a-t-il fait observer, sans oublier le rôle joué par la formation Libéria de la Commission de consolidation de la paix.

En revanche, un des aspects négatifs de la MINUL tient au temps très long qu’a duré la Mission, a estimé le représentant, qui a déploré que le Conseil n’ait pas établi une feuille de route claire au moment de sa création.  On aurait dû avoir un mandat plus réaliste, a-t-il concédé. 

Désormais, a estimé M. Allen, l’ONU doit jouer un rôle de coordination entre les donateurs en faveur de la mise en œuvre des objectifs de développement durable dans le pays.  Dans le même temps, l’ONU doit également s’assurer de la redevabilité des autorités nationales.  Après avoir rappelé que le conflit au Libéria avait fait près de 250 000 morts, le représentant a conclu en disant souhaiter que l’on puisse voir bientôt d’autres Libéria.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a exhorté le nouveau Président à s’appuyer sur le travail accompli par l’Administration précédente afin de faire du Libéria un pays inclusif et pacifique.  Elle a souligné la nécessité de remédier aux causes profondes du conflit et de pérenniser la paix, l’équipe de pays des Nations Unies ayant à cet égard un rôle crucial à jouer.  Il faudra renforcer cette équipe, ainsi que le Bureau du Coordonnateur résident, a déclaré la représentante, afin de jeter les bases d’institutions fortes et d’assurer la pleine participation des femmes.  Enfin, tirant les leçons de la bonne transition au Libéria, Mme Gregoire Van Haaren a souligné l’importance d’une planification de la stratégie de sortie d’une mission, estimant qu’on aurait pu prévoir davantage de temps entre la tenue des élections au Libéria et le départ de la MINUL. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a souligné, en examinant le cas de la consolidation de la paix au Libéria, l’importance de l’accompagnement de la communauté internationale, de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et des organisations régionales et sous régionales comme l’Union africaine et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  Ce pays est aussi un exemple de la façon dont une mission des Nations Unies peut soutenir les efforts nationaux pour parvenir à une paix durable, a-t-il ajouté.  Le Pérou exprime sa satisfaction d’avoir pu contribuer à la consolidation de la paix au Libéria, a ajouté le représentant en insistant sur la nécessité d’aller de l’avant en suivant trois objectifs.

Le premier est la réconciliation nationale, qui nécessite l’accélération de la mise en œuvre du plan de consolidation de la paix.  Le deuxième est le respect des droits de l’homme, a-t-il poursuivi en saluant la création d’un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme au Libéria.  Le troisième réside dans les réformes institutionnelles.  Le représentant a en effet souligné l’importance de l’édification d’institutions démocratiques.  Il s’est félicité à cet égard du programme en faveur des pauvres adopté par le Gouvernement du Libéria, qui s’inscrit dans le plan de consolidation de la paix et des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. ISRAEL CHOKO DAVIES (Libéria) a indiqué que cette séance n’était pas seulement un moment historique, puisque c’était la dernière réunion du Conseil de sécurité sur le Libéria et la MINUL, mais aussi un moment de fierté et de joie pour les Libériens, quand on sait d’où ils reviennent.  Il y a maintenant huit ans, a-t-il rappelé, que le Libéria avait demandé au Secrétaire général de placer le pays à l’ordre du jour de la Commission de consolidation de la paix (CCP). 

Voulant exprimer ses remerciements pour tout ce qui a été accompli depuis, M. Davies a commencé par « Dieu tout puissant et la communauté internationale dans son ensemble ».  Le représentant a adressé en particulier sa reconnaissance à la CEDEAO, l’Union africaine, l’Union européenne et, « bien sûr, l’ONU et tous ses organes ainsi que la CCP ».  Il n’a pas manqué de citer non plus le soutien reçu d’individus et d’institutions philanthropes, avant de rendre un hommage particulier aux Libériens eux-mêmes et à la MINUL.

« Fermons-nous un chapitre aujourd’hui sans difficultés?  Ma réponse à cette question est un “Non” emphatique! » a poursuivi le représentant, qui a reconnu que bien des défis restaient à relever.  Il a cité la décentralisation, la propriété foncière et les différends en suspens, la corruption, la violence contre les femmes et les filles, l’économie en difficulté, ainsi que les infrastructures en mauvais état, parmi tant d’autres problèmes.  Il a assuré que ces questions resteraient au premier plan des préoccupations du gouvernement actuel, avant de solliciter le soutien sans faille de la communauté internationale.  « Pas seulement des donateurs traditionnels, a-t-il précisé, mais de tout le monde. »

M. Davies a réitéré l’engagement de son pays à respecter l’état de droit, en particulier la liberté d’expression et la bonne gouvernance.  Il a misé sur le Plan de développement national, la Feuille de route pour la réconciliation, le plan de consolidation de la paix, le Fonds d’affectation spéciale multidonateurs et le programme en faveur des pauvres.  « Nous continuerons à nous appuyer sur les réalisations des anciens leaderships et feront en sorte qu’aucun Libérien ne soit laissé de côté », s’est-il engagé.  Avant de conclure, M. Davies a salué la mémoire des 202 Casques bleus qui ont perdu la vie en luttant pour la paix au Libéria.  « Aujourd’hui, le Libéria se relève », a-t-il assuré.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

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8238e séance – matin
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Colombie: le processus de paix a permis de tenir les élections législatives dans un environnement nettement moins violent, affirme le Représentant spécial

Les membres du Conseil rendent hommage à leur collègue de Côte d’Ivoire, l’Ambassadeur Bernard Tanoh-Boutchoué, décédé la nuit dernière

Le processus de paix entamé en 2006 entre le Gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée populaire (FARC-EP) a permis une réduction notable de la violence lors des élections législatives du 11 mars dernier, auxquelles les FARC-EP ont participé sous la forme du parti politique Force alternative révolutionnaire commune (FARC), a déclaré, ce matin, au Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Colombie, M. Jean Arnault. 

Pour sa part, le Vice-Président de la Colombie, M. Óscar Adolfo Naranjo Trujillo, a assuré le Conseil que son pays faisait tout pour remédier aux défis qui subsistent, en particulier les assassinats des défenseurs des droits de l’homme dans les anciennes zones de conflit.

Les élections législatives de mars « marquent une étape importante de la transition vers la paix en Colombie et de la transition des FARC-EP de l’emploi des armes vers l’engagement politique », a estimé le Représentant spécial, qui présentait le dernier rapport* du Secrétaire général sur la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie.  À cinq semaines de l’élection présidentielle, « la campagne a pour l’heure confirmé la tendance vers une réduction de la violence électorale », a-t-il ajouté.

Alors que la Cour constitutionnelle colombienne vient juste de valider la constitutionnalité de la participation du parti politique FARC et l’attribution de 10 sièges au Parlement à ses membres, conformément à l’Accord de paix et malgré de faibles résultats électoraux, M. Arnault a cité parmi les éléments positifs la publication des décrets destinés à faciliter l’ouverture des comptes en banque des coopératives des FARC-EP.  Autre signe positif, la récente approbation d’un programme pour la protection des communautés, des responsables communautaires et des défenseurs des droits de l’homme dans les zones affectées par le conflit. 

C’est un point important car, comme s’en sont inquiétés ensuite de nombreux membres du Conseil, de multiples chefs communautaires et défenseurs des droits de l’homme ont été assassinés ou attaqués ces derniers mois.  « Les meurtres de responsables communautaires et de défenseurs des droits de l’homme sont la conséquence d’un vide sécuritaire dans les territoires abandonnés par les anciens combattants », a notamment affirmé le représentant du Kazakhstan, alors que son homologue des États-Unis jugeait inacceptable que « des zones autrefois contrôlées par les FARC-EP tombent aux mains de groupes illégaux ». 

M. Arnault a donc appelé à instaurer la sécurité dans les zones rurales et à lutter contre ces attaques.  L’Unité spéciale d’investigation créée à cette fin, conformément à l’Accord de paix, s’est ainsi saisie de 58 affaires de meurtre de chefs communautaires et de défenseurs des droits de l’homme. 

M. Arnault a détaillé d’autres défis qui subsistent, en soulignant tout d’abord la nécessité d’accélérer la réintégration des anciens combattants, « les lacunes dans ce domaine pouvant en effet encourager les anciens combattants à rejoindre des groupes criminels ».  Le décret prévoyant l’accès des combattants à la terre devrait être approuvé rapidement, a-t-il dit. 

Cet accès à la terre est fondamental pour que chacun ait un moyen de subsistance, trouver une solution à la substitution des cultures de coca et prévenir la violence contre les défenseurs des droits de l’homme, a fait remarquer ensuite la représentante des États-Unis, alors que son homologue de la Bolivie demandait des progrès s’agissant de la loi d’amnistie, rappelant que près de 4 000 anciens combattants des FARC-EP restent emprisonnés. 

Malgré ces inquiétudes, l’ensemble des délégations ont salué le processus de paix colombien, « succès indéniable » selon le représentant de la Pologne et « source d’inspiration pour l’Afrique et le monde », de l’avis de son homologue de l’Éthiopie. 

Si le verre paraît à moitié vide, c’est parce que nous devons encore garantir la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, a affirmé le Vice-Président colombien, pour qui le pays est « en train de surmonter les défis actuels, pour que la paix devienne une réalité irréversible ».  « Nous ne baissons pas la garde », a-t-il assuré, ajoutant que son pays n’acceptera pas la criminalité organisée. 

Quel que soit le gouvernement qui sortira des urnes lors de la prochaine élection présidentielle, l’important est la pérennisation de la paix, a insisté M. Naranjo Trujillo, qui a parlé d’une « révolution silencieuse et pacifique » en marche, en citant notamment le renforcement des mesures visant à garantir la transition des FARC-EP des armes vers la paix, comme la possibilité pour les coopératives mises en place par les anciens combattants d’ouvrir des comptes bancaires. 

Par ailleurs, en début de séance, le Conseil de sécurité a observé une minute de silence à la mémoire de l’Ambassadeur et Représentant permanent de la Côte d’Ivoire, M. Bernard Tanoh-Boutchoué, décédé la nuit précédente.  Président du Conseil pour le mois d’avril, le représentant du Pérou a présenté ses condoléances au Gouvernement et au peuple de la Côte d’Ivoire, en louant l’immense savoir et la compétence diplomatique de M. Tanoh-Boutchoué.  « Bernard n’était plus lui-même ces dernières semaines et était d’une humeur introspective inhabituelle », a commenté le représentant de l’Éthiopie, tandis que son homologue de la Côte d’Ivoire a assuré qu’il continuera de vivre dans le « jardin de nos souvenirs ». 

* S/2018/279

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53)

Rapport du Secrétaire général sur la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie (S/2018/279)

Déclarations

M. JEAN ARNAULT, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a rappelé que, le 11 mars dernier, des millions de Colombiens avaient voté lors des élections législatives, marquant une étape importante de la transition vers la paix en Colombie et de la transition du recours aux armes à l’engagement politique des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP).  « L’élection présidentielle est dans cinq semaines et, dans un contexte marqué par une polarisation politique, la campagne a pour l’heure confirmé la tendance vers une réduction de la violence électorale », a estimé M. Arnault.

Le Représentant spécial a précisé que la Cour constitutionnelle colombienne avait approuvé la loi sur le statut de l’opposition, un instrument prévu par l’Accord de paix et qui était à l’ordre du jour du Parlement colombien depuis 1991.  Cette loi prévoit notamment l’accès des partis d’opposition aux médias et à un financement supplémentaire.  La nuit dernière, la Cour a également déclaré à l’unanimité la constitutionnalité de la participation à la vie politique des anciens FARC-EP, y compris celle de l’attribution au parti de 10 sièges au Parlement, comme prévu par l’Accord de paix.

S’agissant de la réintégration économique des membres des FARC-EP, le Représentant spécial a mentionné la publication des décrets destinés à faciliter l’ouverture des comptes en banque des coopératives des FARC-EP.  À l’exception de ceux visés par des sanctions internationales, les anciens combattants auront accès à des services bancaires, sur un pied d’égalité avec la population, ce qui doit faciliter leur réintégration. 

Autre signe positif, M. Arnault a mentionné l’approbation, il y a deux jours, d’un programme pour la protection des communautés, des responsables communautaires et des défenseurs des droits de l’homme dans toutes les zones affectées par le conflit.  « Ce programme était l’un des principaux engagements prévus par l’Accord de paix », a fait observer le Représentant spécial.  Il repose sur un postulat de départ que M. Arnault a jugé pertinent, à savoir que les autorités locales et les communautés sont les mieux placées pour identifier les menaces et les mesures de protection adéquates. 

Le Représentant spécial a ensuite détaillé les défis qui subsistent, mentionnant l’arrestation d’un des chefs des FARC-EP pour trafic de drogue, qui a ébranlé un pays toujours divisé par le processus de paix.  « Les appels au calme émanant des chefs des FARC-EP, en particulier du Président du parti Timoléon Jiménez, et leurs exhortations à poursuivre sur la voie de l’Accord de paix, ont été très importants pour remédier à la défiance des anciens combattants dans les zones de réintégration », a estimé M. Arnault.  Le Gouvernement s’est engagé à accélérer la mise en œuvre de l’Accord de paix, notamment s’agissant de la réintégration, a poursuivi le Représentant spécial, qui a salué le fait que la Juridiction spéciale pour la paix avait pu endosser ses responsabilités dans ce cas d’espèce, conformément à l’Accord de paix. 

M. Arnault a souligné la nécessité d’accélérer la réintégration des anciens combattants avant la fin du mandat du Gouvernement, les lacunes dans ce domaine pouvant encourager les anciens combattants à rejoindre des groupes criminels tels que ceux responsables du récent assassinat de ressortissants équatoriens.  « Les ingrédients d’une percée sont connus: des projets productifs viables, des coopératives fonctionnelles et des terres disponibles; et la plus grande partie de la préparation technique et juridique a été accomplie », a-t-il dit, en souhaitant l’approbation rapide du décret prévoyant l’accès des combattants aux terres. 

M. Arnault a souligné la nécessité de l’activation de la Commission nationale sur les garanties de sécurité, afin d’assurer la sécurité dans les zones rurales et de remédier aux menaces et attaques contre les chefs communautaires et les défenseurs des droits de l’homme.  L’Unité spéciale d’investigation, prévue, comme la Commission, par le programme de protection des communautés précité, a élargi ses enquêtes pour inclure les meurtres de ces chefs communautaires après s’être concentrée sur le meurtre des membres des FARC-EP.  « Jusqu’à présent, elle a pris en charge 58 affaires de meurtre de chefs communautaires et de défenseurs des droits de l’homme », a précisé le Représentant spécial. 

S’il est trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur le processus de paix, nous avons observé qu’il a permis une réduction notable de la violence lors des élections législatives, a poursuivi M. Arnault.  Le processus a créé une série d’institutions visant à surmonter la violence dans les zones de conflit, a-t-il expliqué, jugeant qu’il s’agit là d’un « changement substantiel ». 

Enfin, M. Arnault a mentionné la reprise des négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), ces deux parties ayant marqué leur intérêt pour un appui de l’ONU à la mise en œuvre d’un futur cessez-le-feu.  Le Conseil prendra les décisions adéquates en temps voulu, a-t-il estimé, rappelant que les parties avaient maintenu leur engagement envers l’Accord de paix, malgré des circonstances parfois défavorables. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé que l’Accord de paix signé après 50 ans de conflit était historique et représentait « une source d’inspiration pour le monde entier ».  Elle a assuré la Colombie de son appui.  Au titre des progrès remarquables accomplis au cours des trois derniers mois, elle a évoqué la tenue des élections législatives de mars.  « Nous sommes à un tournant de cette transition pacifique des FARC-EP », a constaté la représentante, qui a fait observer que les deux parties concernées continuaient à mettre en œuvre l’Accord.  S’agissant de l’Armée de libération nationale (ELN), autre mouvement militaire armé, elle s’est félicitée de la reprise du dialogue avec le Gouvernement.

Mme Pierce a toutefois fait part de sa préoccupation face à l’insécurité qui perdure dans certaines zones frappées par le conflit.  À cet égard, a-t-elle estimé, les mesures de protection rapprochée des anciens dirigeants des FARC-EP sont autant de mesures clefs qui permettent d’aller de l’avant.  Elle s’est dite « rassurée » d’entendre le Représentant spécial parler de l’arrestation d’un ancien dirigeant des FARC-EP accusé de trafic de drogue et par les appels au calme.  Elle s’est en revanche inquiétée du niveau de la violence à l’encontre des dirigeants communautaires et des militants des droits de l’homme et a salué « la riposte » du Gouvernement pour enquêter sur ces violences.  Il est indispensable, a ajouté la représentante, de mettre en œuvre des projets de réintégration et de développement rural pour éviter que d’anciens membres des FARC-EP ne rejoignent des groupes criminels. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a jugé le processus de paix en Colombie « vital » pour garantir la paix et le développement durable.  Une mise en œuvre complète de l’Accord est donc indispensable et il est essentiel que les parties fassent des compromis pour créer les conditions propices à la mise en œuvre de tous les engagements pris entre le Gouvernement et les FARC-EP, a estimé le représentant. 

La Chine est prête à fournir une assistance constructive à cette fin.  M. Ma a salué le rôle majeur joué par le Représentant spécial du Secrétaire général et la Mission de vérification pour aller de l’avant, et a souhaité que la Mission puisse continuer à appuyer l’accord signé entre l’Armée de libération nationale (ELN) et le Gouvernement. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a salué la bonne tenue des élections législatives en Colombie, y voyant un pas dans la bonne direction.  Nous suivons de près la situation en Colombie, qui est une source d’inspiration en Afrique, a expliqué le représentant.

M. Alemu a exhorté le Conseil à continuer d’appuyer les parties en vue de la pleine mise en œuvre de l’Accord de paix.  Il a souligné la nécessité d’accélérer la réintégration des anciens combattants des FARC-EP, avant de constater le vide sécuritaire dans certaines zones du pays.  Il faut en faire davantage pour appliquer la loi d’amnistie, a également estimé le représentant, qui a souhaité par ailleurs que les négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN) aboutissent à un cessez-le-feu durable.  Enfin, M. Alemu a réaffirmé son soutien à la mise en œuvre de l’Accord de paix et souligné l’aspect crucial du succès du processus de paix pour la Colombie, mais aussi pour le monde. 

Pour Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis), « la préservation d’un accord de paix revêt une importance toute particulière ».  « Nous avons tous un rôle à jouer pour garantir le succès de l’Accord en Colombie », a ajouté la représentante, qui a salué les progrès accomplis par le Gouvernement colombien au cours des derniers mois.  Mais, a-t-elle insisté, le Gouvernement doit étendre son contrôle à l’ensemble du pays.  « Nous ne pouvons pas accepter que des zones autrefois contrôlées par les FARC-EP tombent aux mains de groupes illégaux », a-t-elle mis en garde. 

Mme Haley a recommandé de continuer de réintégrer les anciens combattants dans la vie civile et de se pencher sur les questions foncières.  Elle a en effet jugé que l’amélioration de l’accès aux terres était fondamentale pour que chacun ait un moyen de subsistance, pour trouver une solution à la substitution des cultures de coca et pour prévenir la violence contre les défenseurs des droits de l’homme.

De leur côté, les FARC-EP doivent aussi honorer leurs engagements, coopérer avec le Gouvernement et participer pleinement et de façon honnête au processus de justice transitionnelle, a poursuivi la représentante.  Le succès du processus de paix en Colombie est « indissociable des efforts que nous menons tous pour combattre le trafic des drogue », a-t-elle ajouté, affirmant que le Gouvernement devait partager toutes les informations dont il dispose à cet égard.  Les États-Unis sont prêts à apporter leur aide pour le relèvement du pays, a-t-elle conclu. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a mentionné les développements positifs constatés ces trois derniers mois en Colombie, à commencer par la bonne tenue des élections législatives en mars dernier.  Le représentant a notamment salué le lancement de la Juridiction spéciale pour la paix, instrument de justice transitionnelle clef prévu par l’Accord de paix.  Il a également salué la signature du décret qui formalisera le droit de propriété foncière de 2,5 millions de fermiers colombiens.  « Étant donné que cette question de propriété foncière a été la cause principale d’un demi-siècle de conflit armé, nous pensons que cette disposition consolidera la paix », a affirmé M. Umarov.

Le représentant a toutefois mentionné certaines tendances alarmantes, en particulier les meurtres de responsables communautaires et de défenseurs des droits de l’homme, conséquences selon lui d’un vide sécuritaire dans les territoires abandonnés par les anciens combattants.  Les efforts de réintégration de ces combattants doivent être renforcés, a encore déclaré M. Umarov, qui a par ailleurs salué la reprise des pourparlers de paix à Quito, en Équateur, entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN). 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a rendu hommage au courage politique du Gouvernement colombien qui a pris l’initiative d’un processus de paix historique avec les FARC-EP.  Il a salué le soutien apporté par les Nations Unies, notamment le Conseil de sécurité, au désarment et à la transition politique de ce groupe armé.  Il a rappelé que ce soutien se poursuivait depuis septembre dernier par le suivi de la réincorporation des anciens combattants, « une étape cruciale en vue de la mise en œuvre durable de l’Accord de paix ». 

Au sujet du mandat confié à la seconde mission des Nations Unies en Colombie, M. Delattre a insisté sur trois points.  Il a d’abord félicité les autorités colombiennes pour l’organisation et le bon déroulement des élections législatives du 11 mars dernier auxquelles a participé la Force alternative révolutionnaire commune (FARC).  Les institutions colombiennes et l’Accord de paix sortent renforcés de cet exercice démocratique à l’issue duquel des anciens combattants vont rejoindre le Sénat et la Chambre des représentants, a estimé le représentant. 

Le second point porte sur la sécurité des femmes et hommes engagés en faveur de la paix dans les zones affectées par le conflit.  M. Delattre a salué les mesures prises par le Gouvernement en vue de mettre un terme au degré élevé de violence dans ces zones, en particulier des assassinats de dirigeants de la société civile, de défenseurs des droits de l’homme et de personnes engagées dans les programmes de substitution des cultures de coca.  Le représentant a souligné qu’en l’absence de progrès dans ce domaine, les dividendes de la paix tardaient à être perçus par les populations locales. 

Enfin, la France attire l’attention sur la question de l’accès à la terre et à des sources de revenus.  M. Delattre a expliqué qu’une fois que sera résolue la question de l’accès à la terre, dont la restitution des terres spoliées au cours du conflit -qui fait l’objet de procédures judiciaires-, ce sont les projets économiques qui donneront aux anciens combattants la perspective d’un avenir au sein de la communauté nationale colombienne.  Cette réintégration économique est la clef d’un processus de paix durable, a insisté le représentant.  Elle bénéficie et continuera de bénéficier d’un large soutien de la communauté internationale, y compris de la France et de l’Union européenne via des instruments financiers, a-t-il assuré. 

Enfin, M. Delattre a souhaité que le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN) parviennent à un nouveau cessez-le-feu dans les meilleurs délais et que les négociations puissent aboutir à une paix historique en Colombie.

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a salué le ferme engagement des deux parties et leurs efforts pour surmonter les défis à la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Il s’est également félicité du fait que les élections législatives du 11 mars aient été les plus inclusives et les moins violentes depuis des décennies.  Il a aussi salué le début des travaux « essentiels » de la Juridiction spéciale pour la paix, et a souhaité que ses procédures pourront être rapidement adoptées.

Le représentant s’est néanmoins inquiété de la poursuite des meurtres de défenseurs des droits de l’homme, de dirigeants communautaires et de membres des FARC-EP et de leur famille.  Cette situation profondément préoccupante souligne la nécessité, pour l’État, de combler le vide sécuritaire et de veiller au respect de l’état de droit et des droits de l’homme, a-t-il estimé.

M. Orrenius Skau a souligné que la pleine réintégration politique, juridique et socioéconomique des anciens membres des FARC-EP revêtait la plus haute importance.  À ce titre, il a appelé à progresser dans la mise en œuvre des dispositifs d’amnistie, la création de projets productifs ainsi sur la question clef qu’est, a-t-il souligné, l’accès à la terre.  La Suède espère d’ailleurs que le décret autorisant l’accès des anciens combattants aux terres sera promptement approuvé.  En outre, une réforme agraire complète est nécessaire pour que l’Accord de paix puisse rapidement livrer les dividendes de la paix à tous les Colombiens.  Une perspective de genre s’impose également, notamment pour les volets réintégration et sécurité, a ajouté le représentant, qui a aussi demandé que soit renforcée la lutte contre la violence sexiste.  Il a ensuite salué la reprise de pourparlers entre le Gouvernement et l’ELN.

Le représentant a par ailleurs affirmé que le cas de la Colombie démontrait comment un Conseil de sécurité unifié pouvait contribuer à la paix et a appelé l’ONU et les partenaires internationaux de la Colombie à continuer d’accorder leur plein appui aux parties.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a félicité la Colombie et les Colombiens qui, grâce aux efforts d’appropriation nationale, ont fait un grand progrès sur la voie de la pérennisation de la paix.  Toutefois, a-t-il souligné, il reste encore un travail immense à abattre.  Malgré une amélioration de la situation dans le pays, certains problèmes persistent.  Le représentant a pleinement soutenu l’assistance fournie aux Colombiens par la Mission de vérification de l’ONU sous la houlette de M. Arnault. 

M. Polyanskiy a noté que le rapport du Secrétaire général sur la Mission relevait une série d’écueils, notamment les obstacles bureaucratiques auxquels sont confrontées les FARC-EP et les meurtres d’anciens combattants et de dirigeants communautaires.  Des groupes armés illégaux prennent le contrôle de territoires libérés par les FARC-EP, a-t-il déploré.  Il a tenu à souligner que le rapport ne mentionnait pas l’arrestation, le 9 avril dernier, d’un ancien membre des FARC-EP, négociateur de l’Accord de paix et qui devait occuper un poste parlementaire. 

Le représentant s’est néanmoins dit satisfait que les principaux éléments de l’Accord de paix restent en vigueur.  Les questions en suspens nécessitent une attention particulière de la communauté internationale qui considère à juste titre la Colombie comme un exemple réussi de relèvement postconflit.  La Mission doit se concentrer sur la mise en œuvre de son mandat à la veille de l’élection présidentielle, a-t-il recommandé. 

Mme HEDDA SAMSON (Pays-Bas) a appelé à améliorer la sécurité dans les anciennes zones de conflit, se disant préoccupée par les nouvelles activités des groupes armés qui s’y déroulent.  Elle a réclamé la pleine mise en œuvre du Plan Horus de redéploiement des forces de sécurité dans 595 districts ruraux, en coordination avec les autres efforts déployés au niveau national pour rétablir l’autorité de l’État, citant notamment le renforcement des institutions civiles et la fourniture de services.  La priorité doit également être accordée à la protection des dirigeants communautaires et sociaux et les défenseurs des droits de l’homme, notamment à l’approche des élections, a poursuivi la représentant. 

Mme Samson a appelé à adopter une approche sans exclusive et à continuer de faire de la réintégration politique socioéconomique et juridique des anciens membres des FARC-EP une priorité.  Des progrès sur le plan de l’amnistie, de l’accès aux terres et de projets productifs sont nécessaires, a-t-elle ajouté.  Elle a aussi réclamé la mise en œuvre des dispositifs sexospécifiques relatifs aux garanties de sécurité et à la réintégration des anciens combattants femmes.  Elle a salué la tenue prochaine du Forum des coordonnateurs pour les questions d’égalité des sexes, organisé par la Mission de vérification de l’ONU.

Les Pays-Bas appellent en outre à la reprise des négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN).  Ils encouragent toutes les parties à s’engager à conclure à un accord de cessez-le-feu et à donner une chance à la paix.

M. THÉODORE DAH (Côte d’Ivoire) a remercié les membres de Conseil pour leur hommage à l’Ambassadeur Tanoh-Boutchoué, qu’il a décrit comme passionné par son travail.  Il a salué la tenue des premières élections législatives inclusives en Colombie le 11 mars dernier.  Au-delà des résultats, ces élections, a—t-il relevé, constituent une étape importante du processus de réconciliation et de paix intercolombien.  La Côte d’Ivoire nourrit l’espoir de voir l’élection présidentielle, prévue au mois de mai 2018, consolider davantage ces acquis.  Le représentant s’est également félicité de la décision du Président colombien de reprendre les négociations qui avaient été suspendues avec l’Armée de libération nationale (ELN), à la suite de plusieurs attentats perpétrés par ce groupe. 

Sur le plan judiciaire, M. Dah a salué le démarrage effectif des travaux de la Cour spéciale de justice qui reste l’une des composantes essentielles de la justice transitionnelle, en application de l’Accord de paix de novembre 2016.  Le représentant a invité le Gouvernement colombien à poursuivre les réformes engagées par la prise de mesures concrètes, en vue de permettre la réintégration des ex-FARC-EP, l’accès à la propriété foncière et le développement de projets productifs et de coopératives.  Il l’a exhorté de ce fait à faciliter la réussite de l’intégration socioéconomique des ex-combattants.  Par ailleurs, la Côte d’Ivoire fait part de son inquiétude face à la résurgence de la violence ainsi que les assassinats dont sont encore victimes certains leaders des ex-FARC-EP, a ajouté le représentant. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a dit considérer le processus de paix en Colombie comme un exemple pour le monde.  « Les parties ont donné espoir à des millions de Colombiens qui vivaient dans la peur », a-t-il ajouté, avant d’insister sur le caractère historique des élections législatives du 11 mars dernier.  Soulignant l’engagement indéfectible des parties en faveur du processus de paix, il s’est dit optimiste, ajoutant que, si ce processus devait se solder par un échec, ce serait un échec non seulement pour la Colombie, mais aussi pour chaque membre de ce Conseil.  Il a noté que l’aspect le plus délicat de cet accord restait la réintégration des anciens combattants et appelé à des progrès s’agissant de la loi d’amnistie.  Près de 4 000 membres des FARC-EP demeurent emprisonnés, a rappelé M. Llorentty Solíz.  Le représentant s’est aussi dit alarmé par les assassinats de défenseurs des droits de l’homme.  Enfin, il a salué la reprise des pourparlers de paix entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a appuyé le processus de paix en Colombie, « un véritable exemple à utiliser pour d’autres régions du monde ».  S’agissant de l’évolution de la situation politique, il a estimé que le résultat des élections législatives du 11 mars est « la preuve du sérieux avec lequel le Gouvernement colombien et les parties s’attèlent à la pérennisation de la paix ».  Il a encouragé la reprise des négociations de paix entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN). 

Sur le processus de réintégration des anciens membres des FARC-EP, le représentant a souligné le rôle joué par le Gouvernement, en collaboration avec les agences des Nations Unies et les organisations non gouvernementales, notamment pour ce qui est des mesures prises pour renforcer la confiance entre les parties.  Il a encore souligné que des garanties de sécurité devaient être données pour éviter la résurgence des violences dans les zones les plus frappées.  Il faut, a-t-il insisté, protéger les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme. 

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a estimé que le processus de paix en Colombie constituait un « succès indéniable ».  Il a salué la bonne tenue des élections législatives et le fait que 10 sièges au Parlement, seront, comme prévu par l’Accord de paix, occupés par des membres des FARC-EP.  Il a néanmoins déploré la méfiance grandissante des anciens combattants des FARC-EP envers le Gouvernement, les premiers redoutant que ce dernier ne respecte pas ses engagements.  Il faut accélérer la réintégration économique de ces anciens combattants, a-t-il dit.  Il a ensuite déploré l’augmentation significative de la violence dans les anciens fiefs des FARC-EP.  Enfin, le représentant a déploré que les anciens combattants femmes des FARC-EP soient quelque peu oubliées dans le processus de réintégration actuel.  « Les enjeux sont plus élevés que jamais en Colombie », a-t-il conclu.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est félicité des avancées enregistrées dans le processus politique en Colombie.  Ainsi, avec les élections législatives du mois dernier, un pas important a-t-il été franchi dans la transition, marquant « le caractère irréversible du processus », a-t-il estimé.  Il a dit espérer que ce même esprit prévaudrait pour la prochaine élection présidentielle.  La situation montre bien que des négociations franches, directes et inclusives peuvent permettre de régler un problème quand il y a une volonté sincère d’aller de l’avant, a ajouté le représentant. 

Toutefois, a reconnu M. Ndong Mba, il reste encore des défis à relever, notamment en ce qui concerne la sécurité et la réinsertion socioéconomique des anciens combattants, ce qui pourrait retarder la consolidation définitive du processus de paix.  À ce sujet, le représentant a estimé que le renforcement des mesures de sécurité dans les zones les plus touchées, les enquêtes menées par le Procureur sur les assassinats et les mesures foncières allaient dans le bon sens, de même que la reprise des pourparlers avec l’Armée de libération nationale (ELN).  En conclusion, il a demandé au Conseil de sécurité de continuer d’appuyer le processus de paix en Colombie, tout en respectant le rôle de chef de file du pays et de la population. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a réaffirmé son appui au processus de paix en Colombie.  Il a salué le courage du Gouvernement colombien pour résoudre le grand conflit avec les FARC-EP à travers une solution négociée.  Il a souligné en particulier les efforts que le Gouvernement consent pour adapter la législation nationale à l’Accord de paix, garantir la sécurité, affirmer la présence de l’État dans les territoires et promouvoir la réintégration socioéconomique des ex-combattants, notamment dans les zones rurales.

La démocratie et la participation étant des éléments fondamentaux de la consolidation de la paix, le représentant s’est félicité du fort taux de participation aux récentes élections législatives.  Il a également apprécié la reprise du dialogue entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN).  Mais il s’est inquiété des meurtres d’ex-combattants commis en dehors des secteurs territoriaux de formation et de réintégration.  De plus, il a réitéré sa condamnation de l’assassinat de trois journalistes équatoriens détenus par des dissidents des FARC-EP. 

« Il est indispensable de confronter avec fermeté les ennemis de la paix », a insisté M. Meza-Cuadra, qui a rappelé qu’une paix durable ne pourrait reposer que sur l’état de droit.  Il a toutefois estimé que « les Colombiens peuvent regarder l’avenir avec optimisme ».  La Colombie, a-t-il conclu, est aujourd’hui un pays qui renaît. 

M. ÓSCAR ADOLFO NARANJO TRUJILLO, Vice-Président de la Colombie, a affirmé que « la paix en Colombie, c’est la paix en Amérique latine ».  Nous allons progresser dans cette voie de la paix, même si des difficultés subsistent, a-t-il ajouté.  Le Vice-Président a appelé à la mobilisation de tous pour que la paix devienne une réalité irréversible en Colombie.  Nous sommes en train de surmonter les défis actuels, a-t-il assuré, en se félicitant du soutien du Conseil.

Si le verre paraît à moitié vide, c’est parce que nous devons encore garantir la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, a poursuivi M. Naranjo Trujillo.  Il a fait observer ce paradoxe que, si le taux d’homicides est au plus bas globalement en Colombie, les assassinats ont, en revanche, augmenté dans certaines zones, en raison des agissements des groupes criminels.  « Nous ne baissons pas la garde », a-t-il affirmé, affirmant que le pays renforçait ses capacités pour garantir la transition des FARC-EP des armes vers la paix.  Le Vice-Président a jugé remarquable leur participation au dernier processus électoral –sous la forme du parti politique Force alternative révolutionnaire commune- même si ce dernier a eu moins de voix qu’escompté.  « Nous avons eu des élections législatives avec la participation de milliers de Colombiens supplémentaires », s’est-il félicité.

Soulignant la nécessité d’avancer s’agissant de la réintégration des anciens combattants, M. Naranjo Trujillo a détaillé les mesures prises pour leur garantir un accès à des terres et à des projets productifs, afin qu’ils deviennent agriculteurs.  Ils peuvent désormais ouvrir des comptes bancaires et disposent d’une caisse de retraite.  « Nous avançons », a affirmé le Vice-Président. 

Quel que soit le gouvernement qui sortira des urnes lors de la prochaine élection présidentielle, l’important est la pérennisation de la paix, a poursuivi le Vice-Président.  Il a indiqué que son pays faisait tout pour éradiquer le trafic de drogue et chasser les organisations criminelles, assurant: « Nous n’allons pas accepter la criminalité organisée. »  Enfin, M. Naranjo Trujillo a souligné la nécessité de bâtir un pont entre la Colombie rurale et la Colombie urbaine, avant de conclure: « Une révolution silencieuse et pacifique est en marche en Colombie. » 

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Conférence sur la biodiversité marine: après trois jours de discussions « très harmonieuses », les délégations se donnent rendez-vous en septembre

Session d’organisation,
matin
MER/2071

Conférence sur la biodiversité marine: après trois jours de discussions « très harmonieuses », les délégations se donnent rendez-vous en septembre

Après trois jours de débats sur l’organisation de la Conférence intergouvernementale censée aboutir en 2020 à « un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale », la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee, de Singapour, a salué, ce matin, « l’esprit de coopération » qui a prévalu et la « souplesse » dont ont fait preuve les délégations.  Espérons que l’ambiance « très harmonieuse » qui a prévalu est un avant-goût des négociations à venir, a ajouté la République dominicaine.

C’est en décembre 2017 que l’Assemblée générale avait décidé de convoquer une conférence intergouvernementale pour examiner les recommandations du Comité préparatoire sur le futur instrument international qui se rapporte à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Le rapport du Comité préparatoire étant paru en juillet dernier, la Conférence a prévu quatre sessions de fond, dont la première aura lieu du 4 au 17 septembre 2018, au Siège de l’ONU.  Les trois journées de réunion qui se sont clôturées aujourd’hui avaient pour objectif d’organiser les négociations.

La Présidente a résumé l’ensemble des décisions prises pendant ces journées.  Les délégations, a-t-elle rappelé, se sont accordées sur une « approche souple » des négociations pour pouvoir apporter des ajustements au fil de l’eau.  Des organes subsidiaires et/ou groupes de travail informels seront ainsi créés en fonction des besoins, a-t-elle expliqué, tout en prenant bonne note de la volonté des délégations d’éviter, « dans la mesure du possible », les réunions parallèles.

La Conférence s’est également mise d’accord sur le fait que la première session des négociations, en septembre, se focalisera sur les questions de fond, en ne consacrant pas trop de temps aux questions de procédure.  Les discussions, a précisé la Présidente de la Conférence, s’articuleront autour de quatre grands axes thématiques à débattre en plénière ou en groupes de travail informels: l’accès et le partage des ressources génétiques marines; les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées; l’évaluation de l’impact sur l’environnement; et le renforcement des capacités et transfert de technologies marines.  Si des groupes de travail informels devaient être créés, a ajouté Mme Lee, ils resteront sous « l’autorité de la présidence ».

À la demande du Groupe des États d’Afrique et de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), la première session de fond de septembre ménagera également des créneaux pour discuter des dates des deuxième, troisième et quatrième sessions de fond.  La Présidente a toutefois rappelé que la décision finale sur ce point reviendra à l’Assemblée générale.

Afin de faciliter le lancement des négociations formelles, la Conférence a prié, cette semaine, Mme Lee de préparer un « document concis d’aide à la discussion », qui se basera notamment sur le rapport du Comité préparatoire.  D’autres documents produits par le Comité préparatoire seront également pris en compte, a précisé la Présidente.  « Ce ne sera pas un début de traité », a-t-elle prévenu tout en concédant que le document ouvrira la voie à un « projet de traité zéro ».  Mme Lee a assuré les délégations qu’elle ferait de son mieux pour leur remettre le document durant le mois de juin et, dans tous les cas, avant le 25 aout 2018.

Dans son rapport, publié en juillet 2017, le Comité préparatoire formule des recommandations sur certains éléments du futur texte, dont: l’obligation des États de coopérer aux fins de la conservation et de l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale; l’identification, sur la base de critères scientifiques fiables, d’aires marines protégées à l’intérieur desquelles des mesures de protection seraient nécessaires; la nécessité de renforcer les capacités des pays en développement pour faciliter leur accès aux ressources génétiques marines; le transfert des techniques marines à ces pays pour faciliter la conservation de la biodiversité marine, notamment via une assistance scientifique et technique; et la création d’un centre d’échange ou de bases de données pour faciliter l’échange d’informations.

Par ailleurs, les délégations sont parvenues, cette semaine, à un consensus sur la composition du Bureau de la Conférence, qui sera composé de la présidente et de 15 vice-présidents, dont trois représentants par groupe régional siégeant en leur capacité nationale.  Après l’objection formulée hier par le Groupe des États d’Afrique, la Présidente a précisé que cette décision ne saurait « en aucun cas » créer de précédent pour la répartition géographique des bureaux d’autres processus de négociation.  Elle a également demandé que les vice-présidents ne changent pas d’une session de fond à une autre, pour « garantir la continuité ».  Mme Lee a enfin enjoint aux différents groupes régionaux de proposer « au plus vite » leurs vice-présidents au Secrétariat, afin de procéder à l’élection des membres du Bureau dès le début de la première session de fond en septembre.

Outre le Bureau, les délégations se sont également entendues sur l’adoption mutatis mutandis du Règlement intérieur de l’Assemblée générale pour l’appliquer à la Conférence.  La Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence se calquera également sur celle de cette session de l’Assemblée et sera donc composée de Cabo Verde, de la Chine, des États-Unis, de la Fédération de Russie, de l’Indonésie, de l’Irlande, de l’Ouganda, de la République dominicaine et de l’Uruguay.

La Présidente s’est dite « frappée » par « l’esprit de coopération », la « souplesse » et la démarche « constructive » dont ont fait preuve toutes les délégations.  Il est à espérer, a ajouté la République dominicaine, que ces discussions « très harmonieuses » présagent d’une « très grande harmonie » dans les négociations de septembre. 

La Conférence intergouvernementale pour la négociation d’un instrument international juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale tiendra sa première session de fond, au Siège de l’ONU, du 4 au 17 septembre 2018.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.