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Conseil de sécurité: forte d’une alternance politique « historique », la RDC doit maintenant pacifier l’est du pays, selon la Représentante spéciale

8486e séance – matin
CS/13741

Conseil de sécurité: forte d’une alternance politique « historique », la RDC doit maintenant pacifier l’est du pays, selon la Représentante spéciale

Alors que pour la première fois de son histoire, la République démocratique du Congo (RDC) vient de connaître une alternance pacifique à la tête de l’État, sa partie orientale continue d’être le théâtre d’affrontements armés et d’une grave crise humanitaire et sanitaire, exigeant l’engagement du futur gouvernement, a mis en garde la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la RDC.

Présentant le dernier rapport du Secrétaire général sur les activités de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MONUSCO), qu’elle dirige, Mme Leïla Zerrougui s’est félicitée de l’investiture du Président Étienne Tshisekedi, après son élection le 30 décembre 2018.  Si les résultats ont été contestés par une frange de l’opposition, la majorité des Congolais a accueilli « avec soulagement » l’entrée en fonctions du nouveau Chef d’État, qui succède à M. Joseph Kabila.

Le processus électoral constitue, pour Mme Zerrougui, une « étape décisive » vers le renforcement de la démocratie et de l’état de droit en RDC.  Les « premières indications données par le Président Tshisekedi concernant ses priorités », dont le Secrétaire général s’est félicité, ont été suivies de mesures de « décrispation », à commencer par la remise en liberté de prisonniers politiques et d’opinion, a noté la Représentante spéciale.  Au moment où l’opposant et candidat malheureux à la présidentielle, M. Martin Fayulu, est en mesure de tenir librement des meetings partout dans le pays, des annonces ont été faites en faveur du retour de personnalités politiques en exil, « un cap à maintenir », a dit la haut-fonctionnaire.

Des discussions pour la formation d’un nouveau gouvernement sont en cours entre le Front commun pour le Congo (FCC), qui a remporté la majorité des sièges législatifs sur les plans national et provincial, et la plateforme Cap pour le changement (CACH), soutien de la candidature du Président Tshisekedi, a encore indiqué Mme Zerrougui.  Elle a précisé qu’en attendant, le Chef de l’État a nommé les membres de son Cabinet et publié son programme d’urgence pour les 100 premiers jours de son mandat. 

Dans ce contexte, Mme Anny Tenga Modi, Directrice exécutive de l’ONG « Afia Mama », s’est lancée dans un plaidoyer en faveur des Congolaises, prônant l’amendement de la loi électorale qui devrait prévoir un quota d’élues.  La RDC a imputé la faible participation des femmes au sein des institutions à leur « timidité », à leur manque de formation, mais aussi à l’existence de « barrières traditionnelles ».

La Belgique s’est félicitée du renforcement des relations bilatérales esquissé par le Président Tshisekedi et a milité pour la restauration de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire, dont la faible présence explique « la violence inouïe » des attaques intercommunautaires planifiées à Yumbi, les 17 et 18 décembre 2018, qui ont provoqué la mort d’au moins 535 personnes et le déplacement de plus de 19 000 autres. 

À l’est du pays, les Maï-Maï et les Forces démocratiques alliées (ADF) multiplient les attaques contre les Forces armées de la RDC (FARDC), les civils et, à plusieurs reprises, contre le personnel humanitaire et celui de la MONUSCO, a dénoncé la Représentante spéciale parlant, dans les Kivu, d’une « violence structurelle » profondément enracinée et d’une dynamique des conflits directement liée à des questions identitaires, d’accès aux terres et aux ressources, et de problématiques régionales.  Avec la « montée des tensions » entre le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda, les États-Unis ont appuyé la décision de la MONUSCO de « réorienter » les efforts vers l’est de la RDC.  « Personne ne gagnera à une guerre par procuration dans les Grands Lacs », ont averti les États-Unis.

Dans son rapport, le Secrétaire général recommande au Conseil de sécurité de proroger, pour une période d’un an, soit jusqu’au 31 mars 2020, le mandat de la Mission, et d’ajuster sa présence, et notamment dans les provinces occidentales, « où il y a moins de problèmes, en particulier depuis les élections ».  Le Chef de l’Organisation propose de réduire le personnel en uniforme de 1 600 hommes, de 35 policiers et d’une unité de police constituée, et de 30% le nombre d’observateurs militaires.

Alors que la Fédération de Russie se disait prête à plancher sur un projet de résolution, la Chine et l’Indonésie qui a déployé 1 041 Casques bleus en RDC, ont toutes deux souhaité que le Gouvernement congolais et les pays fournisseurs de contingents puissent formuler des propositions sur le futur mandat, « dans la perspective d’une transition graduelle des responsabilités sécuritaires aux Forces armées congolaises ». 

Pour reconfigurer la Mission d’ici cet automne et entamer une transition vers d’autres formes d’appui à terme, la France a annoncé qu’elle compte proposer un « examen stratégique de l’action de la Mission », car, a-t-elle argué, il est indispensable que le Conseil puisse s’appuyer sur une évaluation approfondie de la situation et des besoins.  La RDC a plaidé pour l’insertion de la composante « désarmement, démobilisation, réintégration (DDR) » dans le nouveau mandat de la MONUSCO, « comme deuxième priorité stratégique après la protection des civils ».

Une telle disposition, a-t-elle expliqué, serait de nature à appuyer la dynamique postélectorale de « reddition massive » de combattants de groupes armés dans l’espace Kasaï, les deux Kivu, l’Ituri et le Haut-Katanga et à pousser d’autres à faire de même, ce qu’a vivement espéré la Côte d’Ivoire.  Pour la Représentante spéciale, l’un des défis actuels consistera à identifier rapidement des « options de réintégration » pour les centaines d’individus qui ont déposé les armes.

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (S/2019/159 ET S/2019/218)

Déclarations

M. LEÏLA ZERROUGUI, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo (RDC) et Chef de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation dans le pays (MONUSCO), a commencé par dire que son intervention d’aujourd’hui allait se faire dans un contexte nettement plus serein qu’en décembre ou janvier derniers.  « La passation de pouvoir, la première dans l’histoire de la RDC, s’est déroulée de façon pacifique entre un président sortant et un président élu », a-t-elle dit.  « Je n’occulterai pas ici le fait que les résultats des scrutins ont été contestés par une frange de l’opposition, mais nous pouvons aussi affirmer que la majorité des Congolais a accueilli avec soulagement la prise de fonctions du Président Tshisekedi », a-t-elle ajouté.  La haut-fonctionnaire a souligné que le processus électoral, toujours en cours avec les élections programmées des gouverneurs et la tenue des scrutins reportés dans quatre circonscriptions en raison de l’insécurité et de l’épidémie d’Ebola constitue, à ses yeux, une étape décisive vers le renforcement de la démocratie et de l’état de droit dans le pays.  Néanmoins, a-t-elle observé, les réactions de certains partis politiques et de leurs partisans aux résultats des élections sénatoriales de la semaine dernière « nous interpellent et révèlent la fragilité du processus politique en RDC ».

Lors de ses premières interventions publiques, le Chef de l’État s’est engagé à travailler en faveur de la consolidation de la paix, de l’état de droit et de la démocratie, et de la promotion des droits de l’homme.  Il a fait des déclarations d’intention suivies d’actes concrets, surtout en matière de « décrispation », a poursuivi Mme Zerrougui.  Les prisonniers politiques et d’opinion viennent d’être libérés, les réunions tenues sur l’ensemble du territoire par l’opposant et candidat à la présidentielle, M. Martin Fayulu, se déroulent sans entrave et des annonces ont été faites en faveur du retour des opposants politiques en exil.  Selon la Représentante spéciale, il est important de maintenir ce cap, notamment en préservant des espaces d’expression pour l’opposition, qu’elle a encouragée à travailler étroitement avec l’ensemble des partis politiques, les autorités congolaises et la société civile.  « Des discussions pour la formation d’un nouveau gouvernement sont actuellement en cours entre le Front commun pour le Congo (FCC), qui a remporté la majorité des sièges législatifs sur les plans national et provincial, et la plateforme Cap pour le changement, qui avait soutenu la candidature du Président Tshisekedi », a-t-elle indiqué.  Les deux parties se sont entendues la semaine passée sur la prochaine désignation d’un formateur qui sera en fait le futur premier ministre, s’est félicitée Mme Zerrougui, qui a espéré que la nouvelle équipe gouvernementale sera bientôt opérationnelle pour pouvoir travailler en fonction des orientations du programme du Président Tshisekedi.  L’un des défis actuels, a-t-elle précisé, consistera à identifier rapidement des « options de réintégration » pour des centaines d’ex-combattants de groupes armés au sein de leurs communautés et à s’attaquer aux causes profondes du conflit.

La Chef de la MONUSCO a fait ensuite état de plusieurs développements préoccupants dans l’est de la RDC.  Dans la région Grand Nord du Nord-Kivu, épicentre de la deuxième pire épidémie d’Ebola jamais observée dans le pays, les Maï-Maï et les Forces démocratiques alliées (ADF) continuent de mener des attaques contre les Forces armées de la RDC (FARDC), les civils et, à plusieurs reprises, contre le personnel humanitaire et celui de la MONUSCO.  La Mission n’épargne aucun effort pour protéger les civils et soutenir les FARDC et la Police nationale, alors que les équipes civiles poursuivent activement leurs bons offices, leur action de plaidoyer et les initiatives de dialogue au niveau local.  À la suite des attaques perpétrées contre les dispensaires ouverts à Butembo et à Katwa, la Mission a redéployé des personnels en uniforme et civil pour renforcer la sécurité des personnels médicaux, sur fond de préparatifs des élections nationales et provinciales.

À Minembwe, dans le Sud-Kivu, des affrontements entre des milices de deux communautés ont conduit à des déplacements notables de population, avec comme corollaire un risque d’aggravation de la situation sur place.  La MONUSCO appuie le renforcement de la présence des FARDC dans la zone, en plus d’avoir déployé des unités de combat et mené des efforts de médiation intercommunautaire, a précisé Mme Zerrougui.  Si le Gouvernement a exprimé sa volonté de renforcer sa réponse, reste que dans les Kivu, une « violence structurelle » est profondément enracinée, et que « la dynamique des conflits est directement liée à des questions identitaires, d’accès aux terres et aux ressources, et de problématiques régionales ».  Aussi un engagement additionnel sera-t-il nécessaire pour répondre à ces facteurs d’insécurité.  Les massacres « choquants » perpétrés à Yumbi en décembre 2018, qui ont fait 535 morts, 111 blessés et provoqué le déplacement de 19 000 personnes rappellent de manière troublante à quelle vitesse les violences peuvent dégénérer, a souligné la haut-fonctionnaire.  Dans ce contexte, elle a encouragé le Conseil de sécurité à continuer d’appuyer la consolidation des gains réalisés par le pays ces derniers mois et à le soutenir contre les menaces qui demeurent.  « Nous devons appuyer le Gouvernement dans ses efforts pour répondre aux attentes de la population congolaise, promouvoir le dialogue politique et saisir les opportunités, en particulier celle de réduire de manière conséquente les groupes armés présents dans certains secteurs », a-t-il déclaré.

Intervenant par visioconférence à partir de la RDC, Mme ANNY TENGA MODI, Directrice exécutive de l’ONG « Afia Mama », a fait le point sur la situation des femmes et des filles dans le pays, en commençant par saluer la maturité civique du peuple congolais et par rendre hommage à ceux qui ont perdu la vie pendant le processus de transition à la tête du pays.  Plusieurs femmes, a-t-elle souligné, figurent parmi les victimes.  Le processus électoral, a-t-elle rappelé, a été marqué par des contestations et des manifestations publiques, notamment contre des projets de loi liberticides et l’imposition par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de la machine à voter.  Malgré les failles, comme le manque de sensibilisation de l’opinion publique et le peu d’efforts pour assurer la parité parmi les candidats, les élections sont néanmoins « une référence » pour la région, a estimé l’oratrice.  Elle a tout de même dit craindre des conflits interethniques si les élections locales ne sont pas suffisamment accompagnées et appuyées.  Mme Modi a insisté sur l’importance de la participation des femmes aux processus de consolidation de la paix.  Elle a prôné une meilleure sensibilisation des hommes dans les parlements national et provincial à l’importance de la parité.  Des mesures spécifiques s’imposent également pour promouvoir l’intégration des femmes dans les forces de défense et de sécurité.  Elle a aussi réclamé l’application des lois et des mesures sur le programme « femmes, paix et sécurité » et milité pour l’amendement de la loi électorale qui devrait prévoir un quota pour les femmes.

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a déclaré que, depuis son entrée en fonctions, le Président Tshisekedi a réagi à ce « moment historique » en s’engageant à lutter contre la corruption, à mettre fin aux violations des droits de l’homme par les Forces armées congolaises, à améliorer la sécurité, à favoriser les investissements et à promouvoir le développement.  « Il s’est également engagé à collaborer étroitement avec la MONUSCO pour neutraliser les groupes armés et ouvrir la voie au retrait et au départ de la Mission », a souligné le représentant.

Deux mois à peine après ce transfert historique du pouvoir, le peuple congolais commence déjà à constater des développements positifs, a estimé M. Cohen.  Le mois dernier, le Président Tshisekedi a décidé d’arrêter et de poursuivre en justice les policiers accusés d’avoir tiré sur des manifestants pacifiques.  Il a libéré des prisonniers d’opinion et s’est engagé à réformer l’Agence nationale de renseignements, responsable d’abus, et à fermer les centres de détention non officiels.  Grâce en partie à ce vent de changement, des milliers de combattants déposent les armes « dans l’espoir de passer à une vie civile pacifique », s’est félicité le délégué.

Le représentant a appuyé la décision de la MONUSCO de réorienter les efforts de Kinshasa vers l’est de la RDC et de redoubler d’efforts pour s’attaquer aux causes profondes de la violence.  Dans cette région, la montée des tensions entre le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda est un motif de préoccupation, notamment en ce qui concerne les informations faisant état d’attaques transfrontalières.  « Personne ne gagnera à une guerre par procuration dans les Grands Lacs », a-t-il prévenu, en exhortant toutes les parties à s’abstenir de recourir à la violence et à respecter l’intégrité territoriale de tous les États de la région.

Deux ans après l’assassinat des experts de l’ONU Michael Sharp et Zaida Catalan, les États-Unis continuent de réclamer des comptes aux responsables de ces meurtres.  « Nous exhortons ce Conseil à continuer d’appuyer fermement le mécanisme de suivi de l’ONU à l’appui des enquêtes congolaises », a ajouté M. Cohen.

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a estimé que les Congolais avaient su tirer parti de l’occasion historique de rendre possible le premier transfert de pouvoir de façon démocratique et civilisée.  Elle a salué les progrès réalisés depuis les élections et s’est félicitée des décisions rendues publiques par la CENI informant de la poursuite du processus électoral et établissant le calendrier électoral des élections directes combinées avec celle des députés dans plusieurs circonscriptions.  La représentante a célébré la nomination de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo comme second Vice-Président de l’Union africaine lors de la trente-deuxième réunion des chefs d’État et de gouvernement à Addis-Abeba.  « Nous accueillons avec optimisme ses déclarations, dans lesquelles il réitère son engagement à travailler en faveur de la consolidation de la paix, de l’état de droit, de la démocratie, et la nécessité de renforcer le développement socioéconomique, d’éliminer la corruption, d’aborder le fléau des groupes armés, de lancer des réformes importantes dans le secteur de la sécurité et de renforcer les bonnes relations dans toute la région. »

La représentante a dit apprécier les mesures prises par le Gouvernement, comme la libération des prisonniers politiques, l’amélioration de la situation humanitaire et des droits de l’homme en RDC, tout en soulignant qu’il y a toujours 12,8 millions de personnes en attente d’aide humanitaire et de protection et en lançant un appel à la communauté internationale pour qu’elle alloue des fonds suffisants pour actualiser le plan de réponse humanitaire.  Condamnant les attaques subies fréquemment par le personnel humanitaire, elle a appelé toutes les parties aux conflits armés à garantir le plein accès à ce personnel dans de bonnes conditions de sécurité.  Enfin, elle a salué les progrès faits sur le plan du désarmement, avant d’appeler les États membres de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et autres acteurs internationaux à continuer de participer à la période postélectorale pour consolider la stabilité et la « gouvernabilité démocratique » de la RDC. 

Dans le cadre de l’ouverture de l’espace politique et de la construction de l’état de droit, M. MARC PECSTEEN DE BUYTWERVE (Belgique) a salué les dernières déclarations et gestes du nouveau Président, comme la libération de certains prisonniers politiques, ainsi que les récentes évolutions dans le contexte européen et bilatéral qui témoignent, selon lui, d’une volonté réelle « d’intensifier nos relations ».  Il a rappelé que le processus électoral n’était toutefois pas encore clos à Beni-Butembo et Yumbi, et, qu’entretemps, la formation d’un nouveau gouvernement se fait attendre.  Il a également pris note des témoignages qui font état d’une corruption de grande ampleur dans le cadre des élections sénatoriales.  La Belgique appelle le Président Tshisekedi, en tant que garant des institutions, à rétablir l’ordre institutionnel et l’état de droit, et à initier de manière crédible une lutte contre la corruption qui menace la gouvernance du pays.  Pour le représentant, la consolidation d’institutions nationales solides, compétentes et impartiales doit permettre de renforcer la légitimité de l’État, de prévenir de futures crises institutionnelles et de favoriser un enracinement durable de la culture d’alternance politique.

Le représentant s’est ensuite attardé sur « l’ampleur » de la tâche pour la restauration de l’État et de la pacification du territoire en RDC.  Il a rappelé « la violence inouïe » des récentes attaques intercommunautaires planifiées à Yumbi, la persistance des combats entre groupes armés dans le Masisi, les attaques mortelles des ADF dans le territoire de Beni et les récents combats à Minembwe.  La restauration de l’autorité de l’État, en a-t-il conclu, est indispensable pour assurer la pacifique du territoire, la résolution des causes profondes des conflits et la sécurité des populations ainsi que le développement et l’état de droit au profit du peuple congolais. 

La Belgique, a-t-il poursuivi, reste particulièrement attentive à l’avenir de la MONUSCO tant les défis demeurent grands pour assurer la protection des civils, stabiliser le pays et rétablir l’autorité de l’État.  Cet avenir doit reposer sur une véritable stratégie de sortie qui devra se fonder sur des points de référence clairement identifiés par une revue stratégique indépendante.  Le représentant a prôné un mandat intérimaire qui serait limité pour à la fois approfondir la réflexion sur ces points de référence et d’éviter un risque d’immobilisation dans un contexte changeant. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a constaté que la situation s’était améliorée depuis la dernière intervention de Mme Zerrougui, saluant notamment l’ouverture de l’espace politique par le Président Tshisekedi.  Il a appelé les autorités congolaises à poursuivre dans cette voie, encourageant par ailleurs le Représentant de la RDC à répondre, dans son intervention, à l’appel de la Directrice exécutive d’Afia Mama à une sensibilisation des hommes et des forces armées à l’importance de la parité.  Il faut plus de femmes sur les listes des élections municipales et plus de femmes parmi les observateurs électoraux.  Une éducation civique plus vaste s’impose, a-t-il insisté, se félicitant qu’une femme soit Conseiller militaire du Président congolais.  Le représentant allemand a ensuite voulu que l’on fasse le maximum pour renforcer l’état de droit, combattre la corruption et l’impunité, déplorant notamment que les forces armées soient toujours accusées de la violence sexuelle.

Le représentant s’est par ailleurs dit inquiet de la situation entre les pays voisins de la RDC et de ses répercussions dans l’est congolais.  Il a dit attendre avec intérêt la vision du Président de la RDC quant à l’avenir de la MONUSCO.  La stratégie de sortie ne peut être un objectif en soi.  Le message qu’il faut envoyer, c’est que la communauté internationale reste engagée.

Mme MOGASHOA (Afrique du Sud) a appuyé l’appel du Secrétaire général à réorienter les priorités de la MONUSCO vers l’est de la RDC et à proroger le mandat de la Mission pour une nouvelle période d’un an.  Cette prorogation, a-t-elle précisé, doit tenir compte de la vision du futur gouvernement qui doit avoir le temps nécessaire pour définir ses priorités avant le retrait de la MONUSCO. Toute stratégie de sortie doit être envisagée en fonction de l’évolution et de l’évaluation de la situation sécuritaire sur le terrain.  Mme Mogashoa a insisté sur l’importance qu’il y a à fermement appuyer la Brigade d’intervention de la MONUSCO pour neutraliser les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) et les Forces démocratiques alliées (ADF).  Elle a prôné une approche plus proactive, notamment par le biais de la Stratégie internationale d’appui en matière de sécurité et de stabilisation.  Elle a également engagé les signataires de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération à mettre en œuvre leurs engagements.  Elle a aussi prévenu que pour être efficaces les stratégies de désarmement, démobilisation et réintégration doivent tenir compte des perspectives économiques des personnes démobilisées.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a encouragé le nouveau Président congolais à démontrer son engagement à faire les réformes nécessaires à un développement inclusif et durable de son pays.  S’il y parvient, les historiens vont étudier les dernières élections comme un tournant important, en dépit des faiblesses du processus électoral.  S’il n’y parvient pas, a-t-elle mis en garde, ces élections seront vues comme une nouvelle déception pour la société congolaise qui s’est massivement prononcée en faveur du changement.  Les défis à relever passent par des réformes institutionnelles, sociales et économiques profondes, a souligné la représentante, qui s’est félicitée du projet des 100 jours du Président Tshisekedi, notamment la lutte contre la corruption, le renforcement des bonnes relations avec la région et la réouverture de la Maison Schengen. 

Elle a souligné l’importance des prochaines élections dans les villes de Beni, Butembo et Yumbi, demandé une enquête sur les violences intercommunautaires de décembre dernier à Yumbi et plaidé pour l’accès humanitaire aux zones touchées par l’Ebola.  Il convient, a poursuivi la représentante, d’adapter la MONUSCO à la réalité postélectorale, la priorité devant être la protection des civils.  La Mission doit également soutenir la transformation politique et le renforcement du pouvoir de l’État à tous les niveaux.  Pour la Pologne, a souligné la représentante, le Conseil de sécurité devrait donner quelques mois aux nouvelles autorités congolaises pour définir leur agenda et démontrer leur volonté de coopérer étroitement avec les Nations Unies en vue de stabiliser le pays.  Elle a invité le Secrétaire général à mener une évaluation stratégique indépendante de la Mission.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a noté avec satisfaction la stabilisation de l’environnement sociopolitique et sécuritaire en RDC, deux mois après les élections présidentielle, législatives et provinciales.  Les mesures prises par le Président Tshisekedi renforceront « sans aucun doute » cette dynamique positive, a-t-il poursuivi, citant la libération de 700 détenus, l’intensification des efforts diplomatiques en vue de la restauration de la confiance et du renforcement de la coopération entre la RDC, les pays voisins et la communauté internationale, et la reprise du dialogue avec les acteurs nationaux et internationaux.

La stabilité postélectorale a conduit le représentant à croire que l’amélioration de la situation sécuritaire à l’est du pays reste possible.  Il a exhorté les groupes armés opérant sur le territoire congolais, notamment dans le Kasaï, les provinces du Tanganyika et de l’Ituri, à s’inscrire dans le processus d’apaisement, à cesser toute activité déstabilisatrice et à s’engager résolument dans le processus de désarmement, démobilisation et réintégration en cours.  Il a appelé à un renforcement de la coopération entre la MONUSCO et les Forces armées de la RDC, ainsi qu’à la poursuite des opérations militaires conjointes, indispensables, selon lui, pour la neutralisation des groupes armés.  Le représentant s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation humanitaire dans l’est du pays, laquelle a été exacerbée par le retour d’Angola d’au moins 300 000 Congolais.  Il a appelé la communauté internationale à soutenir les efforts du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et demandé que la MONUSCO redéploie ses troupes et ses moyens pour se concentrer sur les foyers de violence et poursuivre le processus de stabilisation.

Mme MELANIE HIDALGO (République dominicaine) s’est inquiétée de la situation dans l’est de la RDC et a appelé les autorités congolaises, les pays de la région et la communauté internationale à mettre en œuvre les stratégies régionales contre les groupes armés.  Elle a estimé que les programmes de réintégration doivent mettre l’accent sur la situation des jeunes et appuyer le renforcement de leurs capacités.  Elle a également fait observer que le succès de programmes de collecte des armes dépend de l’offre de perspectives d’avenir durables aux anciens combattants.  La représentante s’est aussi souciée de la situation humanitaire, qui a provoqué un nombre considérable de déplacés, et a appelé les bailleurs de fonds à honorer leurs promesses.  Elle s’est notamment inquiétée de l’épidémie d’Ebola qui a déjà fait plus de 500 morts, et du fait que les équipes de secours ne peuvent pas atteindre les zones touchées en raison de l’insécurité.  Elle a condamné les attaques récentes contre le personnel humanitaire et médical.

Passant aux droits de l’homme, Mme Hidalgo a salué la décision du Président Tshisekedi de gracier 700 prisonniers politiques.  Elle s’est cependant dite alarmée par les violations des droits de l’homme perpétrées par les Forces armées congolaises et les groupes armés.  Elle a salué les efforts de la MONUSCO pour prévenir les attaques contre la population civile, estimant néanmoins que les mécanismes d’alerte précoce méritent d’être renforcés.  Elle a aussi jugé indispensable de travailler avec le Gouvernement pour mettre en œuvre un plan d’action de lutte contre la violence sexuelle.  Toute modification du mandat de la MONUSCO, a-t-elle conclu, doit se fonder sur une évaluation complète de la situation politique, sécuritaire et des droits de l’homme dans le pays.

M. PAUL DUCLOS (Pérou) s’est félicité des premières mesures mises en œuvre par le Président Tshisekedi, notamment la libération de 700 prisonniers politiques, dont nombre avaient été arrêtés avant les élections de décembre dernier.  Il a aussi salué l’accord sur le retour du représentant de l’Union européenne à Kinshasa, les efforts de lutte contre la corruption et les avancées réalisées pour la tenue d’élections à Beni, Butembo et à Yumbi.  Il s’est cependant inquiété de l’insécurité qui prévaut dans les régions du Kivu, du Kasaï et de Tanganyika, ainsi que de la situation humanitaire « critique ».  Le Pérou, a-t-il ajouté, est également alarmé par l’épidémie d’Ebola et espère que le troisième plan de réponse stratégique élaboré par le Ministre de la santé avec l’appui de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) permettra de contrôler cette crise.  Le représentant a salué le travail courageux du personnel médical au travers et la volonté affichée de créer un climat de confiance et de sérénité au sein de la population.  Il a demandé des mesures robustes contre l’impunité, en particulier pour les violences sexuelles.

M. WU HAITAO (Chine) s’est félicité du transfert pacifique de pouvoir en RDC, dont le nouveau Président est en train de former un nouveau gouvernement, témoignage de la réappropriation de ses priorités nationales par ce pays africain.  Il a souligné l’importance pour la MONUSCO de respecter pleinement la souveraineté de la RDC dans le cadre des efforts qu’elle déploie pour renforcer la sécurité et aider à contenir l’épidémie d’Ebola.  Plaidant pour un rôle plus important des partenaires internationaux, le représentant a attiré l’attention sur ce que pourra faire le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Pour l’heure, la MONUSCO est indispensable pour maintenir la paix et la stabilité, a ajouté le délégué, qui s’est prononcé en faveur de la prorogation du mandat de la Mission.  Il a souhaité que le Gouvernement et les pays fournisseurs de contingents puissent faire à cette occasion une évaluation en temps voulu et formuler des propositions au sujet du futur mandat, dans la perspective d’une transition graduelle des responsabilités sécuritaires aux Forces armées congolaises. 

M. DAVID CLAY (Royaume-Uni) a insisté sur l’importance d’aider les victimes de violence sexuelle et a parlé d’un projet lancé dans 15 villages de la région d’Ituri qui, s’est-il félicité, a démontré qu’il est possible de venir en aide aux victimes et de réduire l’incidence de ce type de violence.  Il a ensuite appelé à des efforts redoublés pour traduire en justice les auteurs de violences sexuelles et sexistes.  Le représentant s’est inquiété des violences de décembre dernier à Yumbi, qui auraient fait plus de 800 morts et a insisté pour que les responsables soient traduits en justice.  S’agissant du processus électoral, il s’est inquiété des derniers ratés du processus électoral et de l’impact que cela pourrait avoir sur les prochaines élections locales.  À son tour, il a souligné la nécessité d’un examen complet de la MONUSCO avant de se prononcer sur le renouvellement de son mandat.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que, depuis le début de l’année 2019, les développements positifs se poursuivent en RDC.  Il s’est félicité des visites effectuées par le nouveau Président congolais à ses homologues des Grands Lacs ainsi de sa participation au Sommet de l’Union africaine.  Il a souhaité que la RDC profite de cette période de transition pour renforcer sa coopération avec les pays voisins.  Sur le plan sécuritaire, en dépit d’une amélioration relative, la violence se poursuit dans de nombreuses régions, en particulier dans le Nord-Kivu, où les groupes armés prennent pour cible de manière répétée les populations civiles, a déploré le représentant.  Il s’est néanmoins félicité de la décision de certains groupes armés de déposer les armes, appelant les autres à faire de même.  Il a rappelé que la crise humanitaire demeure un sujet de préoccupation dans l’est du pays, avec 12,8 millions de personnes qui souffrent de malnutrition aigüe, une situation aggravée par l’épidémie d’Ebola.  En conclusion, le représentant a exhorté les autorités congolaises à faire la lumière sur l’assassinat des deux experts de l’ONU, il y a deux ans.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) s’est félicité des progrès en RDC, tout en soulignant qu’il reste encore à organiser les élections à Beni, Butembo et Yumbi, à désarmer, démobiliser et réintégrer les groupes armés et à veiller à ce que le futur gouvernement puisse s’attaquer aux questions pressantes dont la moindre n’est pas l’épidémie d’Ebola.  Le représentant s’est félicité du travail de la MONUSCO et a rappelé qu’elle compte 1 041 soldats indonésiens dont 28 femmes.  La Mission a un budget de 1,11 milliard de dollars.  Cela semble énorme mais, a fait observer le représentant, n’oublions pas que les 17 000 soldats de la paix travaillent dans un pays de 84 millions d’habitants éparpillés sur 2,34 millions de kilomètres carrés.  Cela veut dire qu’un Casque bleu doit protéger une moyenne de 4,941 personnes dans une zone de 1 347 kilomètres carrés.

S’il a dit comprendre les appels à une stratégie de sortie et à l’éventuel retrait de la Mission, le représentant s’est tout de même montré préoccupé qu’une mission aussi importante que la MONUSCO soit, « au pic de son action » priée de réduire ses capacités.  Le mandat et les ressources doivent aller de pair et le Conseil ne peut plus travailler en silos.  Pour assurer la bonne exécution des mandats, le Conseil doit discuter du budget des missions avec l’Assemblée générale.  Au moment où l’on parle du renouvellement du mandat de la MONUSCO, le représentant a insisté sur la nécessité de consulter les pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police et le Gouvernement congolais.  « Au bout du compte, nous sommes là pour sauver des vies, pour protéger les faibles.  La paix est un luxe que les Congolais méritent depuis longtemps.  Travaillons ensemble avec les Congolais et leur nouveau gouvernement pour assurer une paix durable en RDC », a conclu le représentant.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est félicité que, pour la première fois en RDC, le pouvoir politique ait fait l’objet d’un transfert pacifique à une opposition non armée.  Il a appelé les Congolais à ne tolérer aucune forme de violence, se disant à cet égard préoccupé par les attaques qui se multiplient entre les groupes armés et les Forces armées congolaises dans l’est du pays.  Selon lui, il faut progresser dans la démobilisation et la réintégration sociale des combattants qui sont prêts à déposer les armes.  Il a estimé que la MONUSCO doit continuer d’accompagner les efforts des autorités congolaises pour consolider la paix, tout en se disant opposé « par principe » à toute forme d’ingérence dans les affaires intérieures de la RDC.  Il s’est dit prêt à travailler sur un projet de résolution relatif au mandat de la MONUSCO.  

Rappelant que le Conseil de sécurité avait suivi de très près le processus électoral en RDC qui a conduit à « la première alternance pacifique à la tête du pays depuis son indépendance », M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a salué les gestes « forts » du Président Tshisekedi depuis son entrée en fonctions dans le sens de l’apaisement et de la réconciliation nationale, de l’ouverture de l’espace politique et en faveur du respect de l’état de droit, citant notamment la libération de 700 détenus politiques.  Le représentant a cité les prochaines étapes de la vie institutionnelle qui seront autant d’occasions de montrer les nouvelles orientations prises: les élections législatives et provinciales dans les zones qui n’ont pas pu voter en décembre, la formation du nouveau gouvernement et, en début d’année prochaine, l’organisation des premières élections locales de l’histoire de la RDC.  Il a également rappelé l’engagement pris par le Président Tshisekedi à mettre un terme aux conflits dont souffre le pays, à l’est en particulier, et aux affrontements intercommunautaires.  Plusieurs groupes armés ont déjà fait part de leur intention de déposer les armes, « une nouvelle donne porteuse d’espoir », a estimé M. Delattre, à condition que « collectivement nous fassions le nécessaire pour que ces miliciens puissent être désarmés et réintégrés ».  Sur tous ces aspects, la MONUSCO a un rôle à jouer, selon lui.

Pour la France, les défis importants qui restent à régler sont l’action « prédatrice » des congolais comme étrangers, financés par l’exploitation illégale des ressources naturelles, les tensions intercommunautaires comme les violences de Yumbi, les enquêtes sur les violences électorales; la lutte contre les violences sexuelles et celle contre l’épidémie d’Ebola.  Tous ces changements et défis, a estimé le représentant, vont nécessiter que l’ONU adapte son engagement dans le pays et reconfigure ses modes d’action pour appuyer au mieux le retour à la paix et à la stabilité dans l’ensemble du territoire congolais.  La France, a annoncé M. Delattre, compte donc proposer une revue stratégique de l’action de la Mission car il est indispensable que le Conseil puisse s’appuyer sur une évaluation approfondie de la situation et des besoins afin de reconfigurer la Mission d’ici cet automne et d’entamer une transition vers d’autres formes d’appui à terme.  Cette reconfiguration devra être entreprise en coordination avec les autorités congolaises, a-t-il précisé.

M. IGNACE GATA MAVITA WA LUFUTA (République démocratique du Congo) a parlé de la « grandiose » cérémonie de la première passation pacifique et historique du pouvoir au sommet de l’État congolais, suivie par l’installation des Assemblées nationale et provinciales et de la préparation des élections à Beni, Butembo et Yumbi, programmées pour le 31 mars 2019.  Il a aussi parlé des voyages que son nouveau Président a effectués auprès de ses homologues de l’Angola, du Kenya, de la République du Congo et de la Namibie, sans oublier sa présence au Sommet ordinaire de l’Union africaine à Addis-Abeba d’où il est revenu avec le titre de Vice-Président de l’organisation régionale.  Le représentant a également parlé du retour des exilés politiques et d’opinion et de la libération des prisonniers, notamment ceux qui étaient qualifiés de « cas emblématiques ».  Les tractations se poursuivent, a-t-il indiqué, sur la formation du gouvernement et, en attendant, le Président a nommé les membres de son Cabinet et publié son programme d’urgence pour les 100 premiers jours de son mandat.  Répondant aux commentaires de son homologue allemand, le représentant a convenu que les questions soulevées par la Directrice exécutive de l’ONG « Afia Mama » sont importantes et a assuré qu’elles seront prises en compte.  Les femmes, a-t-il affirmé, font partie intégrante de toutes les institutions du pays.  Il a imputé leur faible nombre à leur « timidité », à leur manque de formation mais aussi aux barrières traditionnelles.

Quant à la situation sécuritaire, le représentant a dénoncé en particulier les ADF dont le mode opératoire exige, selon lui, que les Forces armées congolaises et la MONUSCO revoient leurs stratégies.  Il a estimé que la dynamique des vagues de reddition massives des combattants dans l’espace Kasaï, les deux Kivu, l’Ituri et le Haut-Katanga doit être encouragée pour pousser d’autres groupes à faire de même.  Il a appelé la communauté internationale à soutenir ce processus de désarmement pour que les anciens combattants bénéficient de l’encadrement dont ils ont besoin pour leur réinsertion sociale.  Il a donc plaidé pour l’insertion de la composante « désarmement, démobilisation, réintégration (DDR) » dans le nouveau mandat de la MONUSCO, comme deuxième priorité stratégique après la protection des civils.

Le représentant a indiqué que son pays a effectivement fermé les sites qui servaient d’hébergement aux éléments FDLR, rapatriés désormais au Rwanda.  Une mesure semblable a été prise pour quelques éléments des ex-M23, basés en Ouganda, qui ont regagné la RDC.  Venant à la MONUSCO, il a plaidé pour un renouvellement d’un an du mandat, soit jusqu’en mars 2020.  Il faut, a-t-il précisé, redimensionner qualitativement les troupes qui doivent être aguerries et dont le nombre doit être réduit, à l’exception de la Brigade d’intervention rapide.  Il faut doter ces troupes en moyens et en équipements de manière à renforcer leurs capacités opérationnelles contre les menaces asymétriques, la priorité étant accordée à la Brigade d’intervention rapide.  Les élections étant terminées, le déploiement des troupes, a ajouté le représentant, doit prendre en compte les zones dans lesquelles la menace est avérée et un désengagement doit être envisagé dans les zones où la menace n’est plus attestée.

Les priorités stratégiques, a-t-il poursuivi, sont la prise en compte du DDR, la problématique du pillage des ressources naturelles et la dimension régionale de la crise de manière à obtenir des pays voisins, d’où proviennent les groupes armés étrangers, qu’ils s’engagent dans des dialogues politiques avec lesdits groupes.  En prévision de la stratégie de sortie, le représentant a estimé que l’on peut déjà amorcer le transfert des tâches de la MONUSCO au Gouvernement, à l’équipe de pays des Nations Unies et à d’autres parties concernées suivant un calendrier précis et établi de commun accord.

Le représentant a aussi estimé que pour faire face aux violences sexuelles et à l’utilisation des enfants dans les conflits armés, il faut éradiquer les groupes armés, appliquer le régime des sanctions pour mettre un terme au financement de ces groupes et à leur approvisionnement en armes et en munitions et exiger à toutes les entités qui interviennent dans le circuit illicite des activités de ces groupes le respect absolu des sanctions.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Constat sans appel à la Commission de la femme: l’argent est là, mais la volonté politique manque pour financer les services et infrastructures bénéficiant aux femmes

Soixante-troisième session,
10e séance plénière – après-midi
FEM/2177

Constat sans appel à la Commission de la femme: l’argent est là, mais la volonté politique manque pour financer les services et infrastructures bénéficiant aux femmes

La Commission de la condition de la femme a achevé sa première semaine de travaux par un débat sur les synergies et le financement des services et infrastructures pour les femmes, en droite ligne du thème prioritaire de la session: « les systèmes de protection sociale, l’accès aux services publics et les infrastructures durables au service de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles ».

« Il n’est pas question aujourd’hui de rechercher plus d’argent », a résumé Mme Christina Behrendt, Chef de l’Unité des politiques sociales à l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Selon elle, de toutes les interventions de cet après-midi, il ressort un « constat synergique »: « il faut des investissements intelligents des gouvernements en faveur des services et infrastructures dédiés aux femmes ».  C’est donc à juste titre que l’animatrice du débat, Mme Rena Tasuja (Estonie), Vice-Présidente de la Commission de la condition de la femme, avait insisté, en début de séance, sur l’importance des liens entre infrastructures durables et services sociaux.

De même, Mme Behrendt a rappelé que l’objectif ultime est de ne laisser personne de côté.  Et la priorité doit être de cibler ceux qui sont à la traîne en ce moment, notamment ces femmes qui souffrent de l’absence de services et infrastructures adaptées à leurs besoins en matière de santé, d’éducation, de transport, parmi d’autres. 

Les fonds qui seraient disponibles s’il n’y avait pas de flux illicites de capitaux ainsi que les fonds du secteur privé pourraient financer ces services et infrastructures, a renchéri la représentante de l’organisation non gouvernementale Women Engage for a Common Future.  Sa collègue de l’Alliance mondiale pour la justice fiscale est allée plus loin en insistant sur le fait que « l’argent est bien là, mais on ne peut en dire autant de la volonté politique ».  Elle s’est indignée des systèmes fiscaux iniques qui favorisent le blanchiment d’argent et les flux illicites de capitaux, notant qu’en fin de compte, ce sont les femmes qui en payent le plus lourd tribut. 

Les panélistes et intervenants ont aussi présenté des exemples de situations concrètes sur les inégalités en matière d’infrastructures affectant les femmes. 

Mme Gita Sen, Directrice du Centre Ramalingaswami sur l’égalité et les déterminants sociaux de la santé à la Fondation de santé publique de l’Inde, a cité la Recommandation 202 de l’OIT selon laquelle la couverture sanitaire universelle est importante pour assurer la pleine protection sociale.  Il faut donc des dépenses adéquates pour établir des infrastructures de santé appropriées, notamment des bâtiments, des équipements de qualité, sans oublier la nécessité d’avoir un personnel qualifié et accueillant.  Elle a insisté sur ce dernier aspect en expliquant que les femmes sont souvent humiliées quand elles demandent des services comme l’interruption volontaire de grossesse.  De même, les études menées notamment en Inde laissent voir que les femmes les moins nanties sont les moins bien servies dans les centres de soins.  Sans oublier qu’elles sont parfois retenues prisonnières si elles n’ont pas les moyens de payer.

Dans le cas où les infrastructures de santé existent déjà, il faut quand même veiller à ce que celles liées au transport ne constituent pas un obstacle pour l’accès aux soins des femmes rurales, a relevé Mme Sen.  Elle a également cité d’autres déterminants importants pour l’accès des femmes aux soins, comme le sentiment de peur qu’évoquent pour elles les espaces publics quand elles y sont constamment agressées.  Elle a conclu en estimant qu’en plus des infrastructures adaptées aux besoins des femmes, il faudrait également que leurs droits soient respectés à toutes les étapes, jusqu’à l’accès au centre de santé.

Mme Nato Kurshitashvili, spécialiste du genre à la Banque mondiale, a pour sa part comparé deux scénarios de femmes qui prennent les transports publics.  Dans le premier, une ingénieure vit dans un environnement où les transports, les crèches et les emplois sont accessibles.  La seconde, qui bénéficie de la même formation, évolue pour sa part dans un environnement où les bus sont vieux, les routes mauvaises, et où elle ne peut avoir un emploi correspondant à sa formation.  Elle a aussi évoqué une étude montrant l’ampleur du problème du harcèlement subi par les femmes dans les transports publics en Inde, avant de faire le lien entre les infrastructures de transport et la protection sociale, et partant, l’autonomisation des femmes. 

La conclusion est qu’il faut tenir compte des besoins des femmes dans la mise en œuvre des infrastructures de transport, pour que celles-ci soient sensibles à la question du genre.  Elle a parlé d’un exemple positif de projet mené en Jordanie avec l’appui de la Banque mondiale.  Dans ce pays, les transporteurs privés signent un cahier des charges avec le Gouvernement, s’engageant ainsi à assurer aux femmes un environnement sécurisé et agréable pour le transport. 

Mme Tara Patricia Cookson, chercheure à l’Université de British Columbia, et Directrice de l’organisation Ladysmith, a parlé d’une dame vivant dans les Andes en Amérique latine, Yesenia, qui avait été diagnostiquée d’un cancer du sein en 2013.  Pour suivre des soins, elle devait voyager en bus pendant toute une journée et résider loin de chez elle pendant des semaines.  Cette option ajoutait à son anxiété, sachant qu’elle avait deux enfants en bas âge et, surtout, qu’elle devait prouver régulièrement au centre de santé de son village et à l’école de sa localité qu’elle est bien présente dans le village afin de recevoir des fonds du Gouvernement. 

Pour Mme Cookson, cet exemple illustre à souhait l’incongruité de ces programmes supposément conçus pour aider les femmes, mais qui, dans leur mise en œuvre, sont accompagnés d’un bataillon de conditions.  « Tenez, par exemple, s’est indignée la chercheure, les femmes enceintes ont l’obligation de se rendre au centre de santé chaque semaine afin de conserver leurs subventions.  Mais elles sont parfois obligées de marcher pendant toute une journée pour constater que le centre de santé est fermé. »  Mme Cookson a regretté que des services dédiés aux femmes soient en définitive entachés d’abus et assortis de conditions qui peuvent violer certains de leurs droits fondamentaux.  Heureusement pour Yesenia, elle a pu guérir de son cancer et poursuivre ses activités.  En conclusion, Mme Cookson a demandé que ce genre de services s’accompagne d’infrastructures centrées sur les besoins réels des femmes ciblées. 

M. Fernando Filgueira, de l’Institut de recherche d’Uruguay, s’est désolé des données qui font voir que l’objectif de développement durable 10 sur la réduction des inégalités risquait de ne pas être réalisé d’ici à 2030.  Il a souligné la corrélation entre les inégalités entre les sexes et les inégalités de revenus au sein de la population mondiale.  Il a aussi présenté une étude menée en Amérique latine et qui fait voir que les femmes travaillent davantage sans rémunération que les hommes dans la région.  Malheureusement, comme elles sont engagées dans des tâches ménagères, leurs efforts ne sont pas quantifiés, et les services auxquels elles aspirent arrivent au second rang dans les priorités gouvernementales.  M. Filgueira a pris l’exemple de l’approvisionnement en énergie.  Les usines et sites d’emplois formels reçoivent en priorité l’énergie alors que les ménages où se trouvent les femmes sont relégués au second rang.  « Ces femmes travaillent tout de même pour le bien de la société! »  En termes de solution, il a parlé d’élargir l’assiette fiscale, une solution techniquement possible, a-t-il argué, afin de financer également les services et infrastructures en faveur des femmes.

Dans la même veine, Mme Maritza Rosabal, Ministre de la famille et de l’inclusion sociale de Cabo Verde, a parlé d’une étude menée dans son pays et qui laisse voir que 70% du travail des femmes dans le pays est non rémunéré.  C’est là le point de départ de la mise en place d’un programme gouvernemental qui tient compte de l’approche genre.  Désormais, les femmes prodiguant des soins à domicile voient leurs compétences reconnues, et les familles les plus vulnérables reçoivent un appui du Gouvernement. 

À Cuba, a témoigné sa déléguée, toutes les administrations dédiées aux questions du genre travaillent en synergie, et cela permet de mieux noter les avancées du pays, en mesurant les indicateurs nationaux de mise en œuvre des objectifs de développement durable.

Certains intervenants ont souligné que les gouvernements ne prennent pas de mesures adéquates en faveur de services et d’infrastructures dédiés aux femmes parce que les données manquent cruellement pour évaluer les besoins et retards en la matière.  Cette question des données sera au centre du débat que la Commission de la condition de la femme tiendra lundi 18 mars, à 10 heures. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission de l’ONU au Soudan du Sud

8484e séance – après-midi
CS/13738

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission de l’ONU au Soudan du Sud

Après une minute de silence en mémoire des 49 victimes de l’attaque perpétrée aujourd’hui en Nouvelle-Zélande contre deux mosquées, le Conseil de sécurité a décidé, cet après-midi, par la résolution 2459 (2019) de proroger jusqu’au 15 mars 2020 la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et de la doter d’un mandat qui met une nouvelle fois l’accent sur la protection des civils et la création des conditions permettant la fourniture de l’assistance humanitaire, ainsi que sur la surveillance et les enquêtes en matière de droits de l’homme et l’appui à l’exécution de l’Accord revitalisé.

Le Conseil autorise la Mission à utiliser tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de ces tâches, « en particulier la protection des civils » et prie le Secrétaire général de présenter, dans les 180 jours, un rapport écrit sur la planification future des sites de protection des civils.

Contrairement aux résolutions précédentes sur le renouvellement du mandat de la MINUSS, le texte d’aujourd’hui a été sanctionné par l’abstention de la Fédération de Russie, qui a critiqué le refus de certains États de reconnaître « la viabilité » de l’Accord revitalisé, alertant du « mauvais message » que le Conseil envoie aux parties.

Adoptée finalement par 14 voix pour, la résolution 2459 (2019), qui contient 40 paragraphes de fond, enjoint aux dirigeants sud-soudanais de mettre en œuvre le cessez-le-feu permanent décrété dans l’Accord revitalisé et les cessez-le-feu qu’ils ont respectivement demandés les 11 juillet 2016 et 22 mai 2017 ainsi que l’Accord sur la cessation des hostilités signé le 21 décembre 2017.

Le Conseil demande aussi aux signataires de l’Accord revitalisé de prendre les mesures nécessaires pour que les institutions et mécanismes de préparation à la transition puissent être opérationnels « dès que possible ».

Dans le cadre de l’appui de la mise en œuvre dudit accord, le Conseil appelle en outre la MINUSS à user de ses bons offices en fournissant des conseils ou une assistance technique et à participer aux travaux du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, ainsi qu’à la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée.

Le Conseil encourage l’Autorité intergouvernementale (IGAD), l’Union africaine, son Conseil de paix et de sécurité et les pays de la région à poursuivre leur coopération soutenue avec les dirigeants sud-soudanais afin que ces derniers honorent sans délai tous les engagements qu’ils ont pris dans le cadre des accords de cessation des hostilités et de l’Accord revitalisé.  Il prie instamment l’IGAD de pourvoir la présidence de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée.

La Fédération de Russie a insisté sur l’importance de l’Accord revitalisé et salué le compromis dont ont fait preuve les parties pour parvenir à une telle entente, constatant de surcroît que des progrès ont été réalisés sur le terrain depuis sa signature, en 2018, notamment en termes de réduction des combats et des violations des droits de l’homme.

Elle a donc déploré l’incapacité « des collègues » à se féliciter des accords conclus à Khartoum, « alors qu’ils ont déjà démontré leur importance ».  Elle a également critiqué le fait que le mandat « très précis » de la MINUSS est trop chargé de libellés relatif à l’égalité entre les sexes et aux droits de l’homme, lesquels semblent primer sur la mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  La Fédération de Russie a réfuté les méthodes de travail du porte-plume qui, a-t-il déploré, a refusé « une fois de plus » de tenir compte des préoccupations des autres membres du Conseil de sécurité.

À son tour, la Chine a estimé que la résolution mériterait d’être reformulée de manière que le Conseil de sécurité puisse reconnaître l’importance de l’Accord revitalisé, jugeant elle aussi que la MINUSS devrait se concentrer sur la facilitation de sa mise en œuvre.  Le Koweït a insisté, pour sa part, sur l’importance d’envoyer un « message d’encouragement » pour inciter à plus de progrès.

Le Conseil, a estimé le Soudan du Sud, devrait travailler avec nos leaders, l’IGAD et l’Union africaine à la mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  L’appui du Conseil aux dirigeants politiques et au peuple sud-soudanais est « absolument critique » pour une bonne mise en œuvre de l’Accord.  Le Soudan du Sud a d’ailleurs remercié le Japon et « tous ceux » qui l’ont aidé à mettre en œuvre l’Accord.  « C’est cet état d’esprit que nous attendons du Conseil et de la communauté internationale. »

Il n’est pas meilleur défenseur du peuple sud-soudanais que nous, ont rétorqué les États-Unis.  Notre position sur l’Accord revitalisé, a toujours été claire et constante.  Nous restons préoccupés, se sont-ils expliqués, par le manque d’engagement politique des parties à le mettre en œuvre.  Ayant déjà vu l’échec des accords précédents et la reprise du conflit et de l’instabilité, nous et le peuple sud-soudanais, ont martelé les États-Unis, attendons des leaders qu’ils démontrent un engagement clair à mettre en œuvre l’Accord, « par les mots et les actes ».  Comme nous l’avons déjà dit devant ce Conseil, nous appelons, ont-ils insisté, les leaders sud-soudanais à adhérer pleinement aux Accords de cessez-le-feu, à négocier des arrangements de sécurité et de partage du pouvoir, à se mettre d’accord sur des normes de transparence pour le financement du processus de paix, à autoriser l’accès humanitaire, à libérer les prisonniers politiques, à créer un tribunal hybride avec l’Union africaine et à ouvrir l’espace politique à l’opposition pacifique. 

En début de séance, la présidence française du Conseil de sécurité a condamné dans les termes les plus énergiques l’attaque odieuse « motivée par la haine » contre deux mosquées de Christchurch, en Nouvelle-Zélande.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2019/191)

Texte du projet de résolution S/2019/225

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1996 (2011), 2046 (2012), 2057 (2012), 2109 (2013), 2132 (2013), 2155 (2014), 2187 (2014), 2206 (2015), 2223 (2015), 2241 (2015), 2252 (2015), 2302 (2016), 2304 (2016), 2327 (2016), 2392 (2017), 2428 (2018) et 2406 (2018) et les déclarations de sa présidence S/PRST/2014/16, S/PRST/2014/26, S/PRST/2015/9, S/PRST/2016/1, S/PRST/2016/3, S/PRST/2017/4 et S/PRST/2017/25,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la République du Soudan du Sud, et rappelant l’importance des principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale,

Se disant à nouveau profondément alarmé et préoccupé par la crise politique, économique et humanitaire et les conditions de sécurité qui règnent au Soudan du Sud, ainsi que par les violences causées par les dirigeants politiques et militaires du pays depuis décembre 2013, et soulignant qu’il ne peut y avoir de solution militaire à la situation au Soudan du Sud,

Condamnant fermement tous les affrontements et autres violations de l’Accord sur la cessation des hostilités, la protection des civils et l’accès humanitaire du 21 décembre 2017, saluant la prompte évaluation desdites violations faite par le Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité, invitant l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) à lui communiquer rapidement ses rapports, et notant que l’Union africaine, l’IGAD et lui-même ont exigé que les parties qui commettent des violations des dispositions de l’Accord soient tenues d’en répondre,

Constatant avec satisfaction que la direction de l’IGAD contribue au processus de paix au Soudan du Sud, se félicitant que l’IGAD et ses États membres, la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, l’Union africaine – notamment son Conseil de paix et de sécurité – l’Organisation des Nations Unies et les pays de la région se soient engagés et s’emploient à dialoguer avec les dirigeants sud-soudanais afin de résoudre la crise actuelle, et saluant leur collaboration active et continue,

Soulignant que l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud de 2018 (l’Accord revitalisé) constitue un grand pas en avant dans le processus de paix et offre un véritable espoir de paix et de stabilité durables au Soudan du Sud, demandant aux parties sud-soudanaises de faire preuve de la volonté politique de régler le conflit par des moyens pacifiques, soulignant que la négociation d’arrangements de partage du pouvoir et de dispositions de sécurité, ainsi que le retour de toutes les parties sud-soudanaises à Djouba en toute sécurité, sont essentiels à la progression du processus de paix, et demandant aux parties de veiller à ce que les femmes participent pleinement et véritablement au processus et de s’acquitter des engagements pris dans l’Accord revitalisé en matière d’ouverture, notamment en ce qui concerne la diversité nationale, le genre, les jeunes et la représentation des différentes régions,

Prenant note de la diminution des violences politiques depuis la signature de l’Accord revitalisé et du respect du cessez-le-feu permanent dans la majeure partie du pays, et prenant note également des mesures visant à renforcer la confiance entre les signataires de l’Accord revitalisé et de la mise en place de la plupart des mécanismes de préparation à la transition prévus dans l’Accord,

Rappelant sa résolution 2117 (2013) et se déclarant vivement préoccupé par la menace que le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes légères et de petit calibre font peser sur la paix et la sécurité au Soudan du Sud,

Prenant note des mesures adoptées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2428 (2018),

Rappelant que les personnes ou entités qui sont responsables d’activités ou de politiques faisant peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité du Soudan du Sud, qui en sont complices ou qui y prennent part directement ou indirectement peuvent faire l’objet de sanctions ciblées conformément à ses résolutions 2206 (2015), 2271 (2016), 2280 (2016), 2290 (2016), 2353 (2017) et 2428 (2018), y compris les personnes qui préparent, donnent l’ordre de commettre ou commettent des actes contraires aux dispositions applicables du droit international des droits de l’homme ou du droit international humanitaire, des actes constitutifs d’atteintes aux droits de l’homme ou des actes de violence sexuelle et fondée sur le genre au Soudan du Sud, qui attaquent les missions des Nations Unies, les présences internationales de sécurité ou autres opérations de maintien de la paix ou le personnel humanitaire, et rappelant qu’il est prêt à imposer des sanctions ciblées,

Soulignant que l’application effective du régime de sanctions, notamment des mesures d’interdiction de voyager, est d’une importance capitale, tout comme le rôle clef que les États voisins, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales, peuvent jouer à cet égard et soutenant les efforts déployés pour renforcer encore la coopération,

Saluant l’action de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et soulignant qu’il importe que la Mission instaure une collaboration et une liaison efficaces avec les populations locales, ainsi qu’avec les acteurs humanitaires, notamment en leur communiquant régulièrement des informations sur son mandat, y compris ses activités prévues et ses capacités, sur les risques de sécurité et les questions connexes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des sites de protection des civils, pour s’acquitter de son mandat de protection des civils,

Conscient que le fait de protéger les civils sans avoir recours aux armes peut souvent compléter les mesures visant à créer un environnement protecteur, en particulier à décourager les violences sexuelles et fondées sur le genre à l’encontre des civils, et encourageant la MINUSS à étudier les méthodes civiles de protection qu’elle pourrait adopter, notamment au moyen de la mobilisation de la population et de sa stratégie de communication, le cas échéant et chaque fois que possible, pour mieux protéger les civils et l’encourageant également à dispenser à son personnel la formation nécessaire,

Conscient également de la situation humanitaire désastreuse et de l’insécurité alimentaire qui atteint des niveaux élevés dans le pays et, à cet égard, notant qu’il importe que la MINUSS contribue à instaurer des conditions propices à la fourniture d’une assistance humanitaire et à créer, en coordination avec les acteurs humanitaires, les populations déplacées et les autorités, les conditions d’un retour ou d’une réinstallation librement consentis, en connaissance de cause, en toute sécurité et dans la dignité des personnes déplacées et des réfugiés, afin qu’ils puissent retrouver des moyens de subsistance, notamment la culture de la terre à des fins de production alimentaire,

Condamnant fermement le fait que le Gouvernement sud-soudanais et les groupes d’opposition continuent de faire obstacle aux activités de la MINUSS, notamment en imposant de fortes restrictions à sa liberté de circulation, en dirigeant des attaques contre son personnel et en imposant des contraintes à ses opérations, nombre de ces actes ayant été qualifiés par le Secrétaire général de violations de l’Accord sur le statut des forces par le Gouvernement, et rappelant que, conformément audit Accord, la MINUSS et ses fournisseurs doivent jouir de la liberté de circuler sans entrave sur tout le territoire du Soudan du Sud en empruntant la route la plus directe possible, sans avoir besoin de permis de voyage ou de toute autre autorisation ou notification préalable, et du droit d’importer, en franchise de droits, taxes, redevances et frais, sans interdictions ou restrictions, du matériel, des fournitures, des carburants, des matériaux et d’autres biens,

Exigeant que toutes les parties, en particulier le Gouvernement sud-soudanais et l’APLS dans l’opposition, mettent fin à toutes les entraves imposées à l’action de la MINUSS, notamment celles qui l’empêchent d’exécuter son mandat de surveillance et d’enquête en matière de droits de l’homme,

Rappelant qu’il condamne fermement toutes les attaques lancées contre des civils, notamment les actes de violence à l’égard des femmes, des enfants et des personnes en situation vulnérable, toutes les violences à caractère ethnique et tous les discours haineux et incitations à la violence, et se disant gravement préoccupé par la perspective que ce qui a commencé comme un conflit politique puisse dégénérer en une véritable guerre ethnique, ainsi que l’a noté le Conseiller spécial pour la prévention du génocide, Adama Dieng,

Se déclarant vivement préoccupé par les rapports faisant état d’actes de violence sexuelle et fondée sur le genre, en particulier contre les femmes et les filles, notamment par les conclusions du rapport du Secrétaire général (S/2018/250) concernant le recours aux violences sexuelles comme tactique par les parties au conflit contre la population civile au Soudan du Sud, y compris les viols et les viols collectifs de femmes et de filles, les enlèvements, les mariages forcés et l’esclavage sexuel, les violences sexuelles liées au conflit et autres formes de violence contre les femmes et les filles étant devenues la norme et se poursuivant depuis la signature de l’Accord revitalisé et malgré l’interruption de la plupart des offensives militaires, comme exposé dans le rapport de février 2019 de la MINUSS et du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur les violences sexuelles liées au conflit dans le nord de l’État de l’Unité entre septembre et décembre 2018, mettant en évidence l’urgence et l’importance d’enquêtes rapides et de la fourniture d’une assistance et d’une protection aux victimes de violences sexuelles et fondées sur le genre,

Condamnant énergiquement toutes les violations des droits de l’homme, atteintes à ces droits et violations du droit international humanitaire, notamment les exécutions extrajudiciaires, les violences ethniques, les viols et les autres formes de violence sexuelle et fondée sur le genre, le recrutement et l’utilisation d’enfants, les disparitions forcées, les arrestations et détentions arbitraires, les actes de violence visant à terroriser la population civile, les actes visant des membres de la société civile et les attaques dirigées contre des écoles, des lieux de culte, des hôpitaux, des installations médicales, des moyens de transport et des membres du personnel des Nations Unies et du personnel associé et du personnel humanitaire et médical, commises par toutes les parties, dont les groupes armés et les forces de sécurité nationales, ainsi que toute incitation à commettre de telles violations et atteintes, condamnant également les actes de harcèlement dirigés contre les membres de la société civile, le personnel humanitaire et les journalistes et les actes qui les prennent pour cible ou visent à les faire taire, soulignant que quiconque est responsable de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits doit être amené à répondre de ses actes et qu’il incombe au premier chef au Gouvernement sud-soudanais de protéger les populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité, et se déclarant préoccupé que la signature de l’Accord revitalisé n’ait pas mis un terme aux infractions susceptibles de constituer des crimes internationaux, y compris des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, notamment aux viols et aux violences sexuelles,

Conscient de l’importance de la ratification, par le Gouvernement sud‑soudanais, du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, demandant instamment que ce Protocole soit immédiatement et pleinement appliqué, prenant note du rôle joué par le Gouvernement dans la négociation de la libération d’enfants par les parties au conflit, pressant toutes les parties de redoubler d’efforts pour mettre sans délai un terme au recrutement d’enfants par les groupes armés et faire libérer tous les enfants qui ont été recrutés jusque-là, et encourageant la poursuite des efforts à cet égard, en particulier au moyen de l’adoption des Principes de Paris par le Gouvernement,

Prenant note du rapport de la MINUSS et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la liberté d’expression au Soudan du Sud, se déclarant toujours préoccupé par la grave restriction de la liberté d’opinion, d’expression et d’association, condamnant la diffusion dans les médias de discours haineux et de messages incitant à la violence contre tel ou tel groupe ethnique, pratique qui pourrait contribuer sérieusement à provoquer des violences massives et à exacerber le conflit, et demandant au Gouvernement sud-soudanais de condamner et de contrecarrer immédiatement l’augmentation des discours haineux et de la violence ethnique et de promouvoir la réconciliation entre les Sud-Soudanais, notamment grâce à la justice et à l’application du principe de responsabilité,

Se déclarant vivement préoccupé par la situation tragique des personnes handicapées au Soudan du Sud, qui, notamment, sont négligées, soumises à des violences et privées de l’accès aux services de base, et soulignant que les besoins particuliers des personnes handicapées doivent être pris en charge dans le cadre des interventions humanitaires,

Réaffirmant qu’il est urgent de mettre fin à l’impunité au Soudan du Sud et de dénoncer et traduire en justice tous les responsables de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et autres atteintes portées à ceux-ci et soulignant l’importance de l’application du principe de responsabilité, de la réconciliation et de l’apaisement pour ce qui est de mettre fin à l’impunité et d’instaurer une paix durable, comme reconnu au chapitre V de l’Accord revitalisé, et, à cet égard, partageant les préoccupations du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine concernant les retards pris dans la constitution du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud,

Se déclarant vivement préoccupé par les rapports sur la situation des droits de l’homme au Soudan du Sud publiés par la MINUSS et le Secrétaire général, ainsi que par le rapport de la Commission d’enquête de l’Union africaine pour le Soudan du Sud et l’opinion individuelle y relative, se déclarant vivement préoccupé également par le fait que, selon certains rapports, notamment le rapport de la Commission d’enquête de l’Union africaine publié le 27 octobre 2015, il y avait des motifs raisonnables de croire que des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité avaient été commis, ou que, selon les rapports de la Commission sur les droits de l’homme au Soudan du Sud, publiés le 23 février 2018 et le 20 février 2019, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité avaient pu être commis, soulignant qu’il espère que ces rapports et les autres rapports crédibles sur la question seront dûment pris en compte par les mécanismes de justice transitionnelle et de réconciliation du Soudan du Sud, y compris ceux qu’établit l’Accord revitalisé, soulignant également qu’il importe de recueillir et de conserver les preuves afin que le Tribunal mixte pour le Soudan du Sud puisse les utiliser, et encourageant les efforts à cet égard,

Se déclarant profondément alarmé et préoccupé par le fait que près de 4,3 millions de personnes ont été déplacées, que la crise humanitaire persiste et que quelque 6,2 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire grave, selon le rapport d’évaluation établi à partir du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire publié en février 2019, et 7,1 millions de personnes ayant besoin d’aide pour survivre, et par le fait que 2,2 millions d’enfants dans le pays ne sont pas scolarisés, soulignant la responsabilité que portent toutes les parties au conflit pour les immenses souffrances du peuple sud-soudanais, notamment la destruction ou la détérioration des moyens de subsistance et de production, saluant les efforts déployés par les organismes humanitaires des Nations Unies, les partenaires et les donateurs pour apporter un appui immédiat et coordonné à la population, et demandant à la communauté internationale de poursuivre ces efforts en vue de satisfaire les besoin humanitaires croissants de la population du Soudan du Sud,

Condamnant le fait que toutes les parties entravent la circulation des civils et les déplacements des acteurs humanitaires qui cherchent à atteindre les civils ayant besoin d’assistance, se déclarant préoccupé par l’imposition de taxes et de droits qui entravent le déploiement de l’aide humanitaire à travers le pays, et rappelant qu’il faut que toutes les parties au conflit autorisent et facilitent, conformément aux dispositions pertinentes du droit international et aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire, notamment les principes d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance, l’accès complet, sûr et sans entraves du personnel, du matériel et des fournitures et l’acheminement rapide de l’aide humanitaire à tous ceux qui en ont besoin, en particulier aux déplacés et aux réfugiés,

Condamnant fermement toutes les attaques dirigées contre le personnel et les installations humanitaires, qui ont entraîné la mort d’au moins 112 agents depuis décembre 2013, y compris l’attaque perpétrée contre le complexe hôtelier Terrain le 11 juillet 2016 et les attaques dirigées contre du personnel médical et des hôpitaux, notant avec inquiétude la fréquence croissante des actes de harcèlement et d’intimidation dirigés contre des agents humanitaires, et rappelant que les attaques visant le personnel et les biens humanitaires indispensables à la survie de la population civile peuvent constituer des violations du droit international humanitaire,

Exprimant sa profonde reconnaissance aux soldats de la paix de la MINUSS et aux pays fournisseurs de contingents et de personnel de police pour les mesures qu’ils prennent dans le cadre de l’exécution du mandat de la Mission dans un environnement difficile, notamment afin de protéger les civils menacés de violences physiques, y compris les ressortissants étrangers, et de sécuriser le périmètre des sites de la MINUSS et au-delà, soulignant que le Secrétaire général ne devrait accepter aucune restriction nationale qui nuise à l’efficacité de l’application du mandat, et soulignant également que l’absence de direction et de commandement efficaces, le refus d’obéir aux ordres, l’inaction face aux attaques perpétrées contre des civils, et l’insuffisance des équipements et des ressources financières risquent de compromettre l’exécution efficace du mandat dont chacun partage la responsabilité,

Accueillant avec satisfaction l’engagement pris par le Secrétaire général d’appliquer rigoureusement sa politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des agressions sexuelles, prenant note des différentes mesures prises par la MINUSS et les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police pour combattre l’exploitation et les agressions sexuelles, mais se déclarant toujours gravement préoccupé par les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles imputées à des soldats de la paix au Soudan du Sud, soulignant qu’il importe au plus haut point que les pays qui fournissent des contingents et du personnel de police, ainsi que la MINUSS, selon le cas, enquêtent rapidement sur ces allégations de façon crédible et transparente, et que les auteurs de telles infractions pénales ou de fautes répondent de leurs actes, et soulignant également qu’il faut prévenir l’exploitation et les agressions sexuelles et améliorer les mesures prises pour donner suite aux allégations, conformément à la résolution 2272 (2016),

Conscient des problèmes considérables de ressources et de capacités auxquels se heurte la MINUSS dans l’exécution de son mandat, remerciant la Mission des efforts qu’elle fait pour assurer la sécurité des déplacés qui cherchent protection sur ses sites, tout en constatant qu’il importe de trouver des solutions durables pour les déplacés, conformément aux Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays, et soulignant à cet égard que la Mission devrait étendre sa présence, notamment au moyen de déploiements et de patrouilles systématiques, dans les zones de déplacement, de retour et d’intégration locale,

Soulignant que les obstacles persistants à la pleine application de la résolution 1325 (2000) et aux résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité, notamment la résolution 2242 (2015), ne seront éliminés qu’au moyen d’un engagement ferme en faveur de l’autonomisation et de la participation des femmes et du respect de leurs droits, d’orientations concertées, d’informations et d’activités cohérentes et d’un appui, afin que la participation des femmes à tous les niveaux de la prise de décisions soit renforcée, et en garantissant la représentation pleine et effective des femmes dans toutes les sphères et à tous les niveaux de l’action politique, du processus de paix et du gouvernement de pré-transition et de transition, saluant l’engagement relatif à l’inclusion des femmes dans l’Accord revitalisé, notamment le taux minimum de 35% de femmes, et demandant à toutes les parties de redoubler d’efforts afin que ces engagements soient remplis,

Se déclarant profondément préoccupé par les menaces visant des installations pétrolières et des sociétés pétrolières et leurs employés, et engageant vivement toutes les parties à garantir la sécurité de l’infrastructure économique, condamnant les attaques dirigées contre des installations pétrolières et des sociétés pétrolières et leurs employés, ainsi que tous les affrontements qui se déroulent à proximité de ces installations, et priant instamment toutes les parties d’assurer la sécurité de l’infrastructure économique,

Condamnant fermement les actes d’obstruction, les détentions et les violences auxquels le Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires a dû faire face de la part de représentants du Gouvernement sud-soudanais et demandant au Gouvernement de mener à bien ses investigations, d’en publier les conclusions et de faire en sorte que les responsables de ces actes doivent en répondre,

Condamnant fermement également les attaques commises contre le personnel et les installations des Nations Unies et de l’IGAD par les forces gouvernementales, les forces de l’opposition et d’autres groupes, notamment la destruction en vol, en décembre 2012, d’un hélicoptère des Nations Unies par l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS), l’attaque d’avril 2013 contre un convoi des Nations Unies, l’attaque de décembre 2013 contre le camp de la MINUSS à Akobo, la destruction en vol, en août 2014, d’un hélicoptère des Nations Unies par des groupes armés non identifiés, le rapt et la détention, en août 2014, d’une équipe de surveillance et de vérification de l’IGAD, le rapt et la détention de membres de la MINUSS et la confiscation de leur matériel par des forces d’opposition dans l’État du Haut-Nil en octobre 2015, l’attaque de février 2016 contre le site de protection des civils de Malakal, les attaques de juillet 2016 contre le site de protection des civils de Djouba et le complexe hôtelier Terrain, le rapt et la détention de membres du personnel des Nations Unies et du personnel associé, les multiples attaques contre les camps de la Mission à Bor, Bentiu, Malakal et Melut, ainsi que la disparition, imputée à l’APLS, et la mort de trois agents locaux d’un organisme des Nations Unies et d’un vacataire local dans l’État du Haut-Nil, et demandant au Gouvernement sud-soudanais de mener à bien en toute diligence les enquêtes qu’il a ouvertes sur ces attaques et de poursuivre les responsables en justice,

Constatant que la situation au Soudan du Sud continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Exige de toutes les parties au conflit qu’elles mettent immédiatement un terme aux combats dans l’ensemble du Soudan du Sud et engagent un dialogue politique, et enjoint aux dirigeants sud-soudanais de mettre en œuvre le cessez-le-feu permanent décrété dans l’Accord revitalisé et les cessez-le-feu qu’ils ont respectivement demandés les 11 juillet 2016 et 22 mai 2017 ainsi que l’Accord sur la cessation des hostilités signé le 21 décembre 2017, et de veiller à ce que les injonctions et décrets émis par la suite, ordonnant à leurs commandants de contrôler leurs forces et de protéger les civils et leurs biens, soient pleinement appliqués ;

2.    Exige du Gouvernement sud-soudanais qu’il respecte les obligations énoncées dans l’Accord sur le statut des forces entre le Gouvernement sud-soudanais et l’Organisation des Nations Unies et cesse immédiatement d’entraver la MINUSS dans l’exécution de son mandat, enjoint au Gouvernement de cesser immédiatement d’empêcher les intervenants humanitaires internationaux et nationaux de venir en aide aux civils et de faciliter la liberté de circulation du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires et demande au Gouvernement de prendre des mesures pour dissuader quiconque d’entreprendre une action hostile ou autre susceptible d’entraver la Mission ou les acteurs humanitaires internationaux ou nationaux, et pour que les responsables de telles actions répondent de leurs actes ;

3.    Exprime son intention d’envisager toutes les mesures appropriées, comme en témoigne l’adoption des résolutions 2206 (2015), 2290 (2016), 2353 (2017) et 2428 (2018), contre ceux qui entreprennent des actions qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité du Soudan du Sud, met l’accent sur l’inviolabilité des sites de protection de l’Organisation des Nations Unies, souligne expressément que les personnes et entités responsables ou complices d’attaques contre le personnel et les locaux de la MINUSS et le personnel des organisations humanitaires, ou qui ont pris part, directement ou indirectement, à de telles attaques, peuvent répondre aux critères de désignation et, à cet égard, prend note du rapport spécial du Secrétaire général sur la prorogation du mandat de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (S/2018/143) daté du 20 février 2018, dans lequel il est indiqué que le réapprovisionnement régulier des parties en armes et en munitions au Soudan du Sud avait eu une incidence directe sur la sécurité du personnel des Nations Unies et la capacité de la Mission de s’acquitter de son mandat, prend note également du communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en date du 8 février 2018 dans lequel celui-ci a indiqué qu’il faudrait veiller à ce que les signataires de l’Accord de cessation des hostilités soient privés des moyens de continuer de combattre, et insiste sur les mesures adoptées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2428 (2018), notamment l’embargo sur les armes, pour priver les parties des moyens de continuer à combattre et prévenir toute violation de l’Accord de cessation des hostilités ;

4.    Salue le rapport du Président par intérim de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, Augostino S. K. Njoroge, du 22 janvier 2019, couvrant la période allant d’octobre 2018 à décembre 2018, se félicite de la diminution progressive des affrontements entre les parties au conflit, demande aux signataires de l’Accord revitalisé de prendre les mesures nécessaires pour que les institutions et mécanismes de préparation à la transition puissent être opérationnels dès que possible, conformément au calendrier arrêté dans l’Accord revitalisé, condamne les violations de l’Accord sur la cessation des hostilités commises par toutes les parties, notamment le recours continu aux violences sexuelles et fondées sur le genre dans les attaques, et l’attaque dirigée contre les représentants du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires, qui nuisent aux mesures de renforcement de la confiance entre les parties au conflit, souligne que l’absence de mesures de sécurité réalistes pourrait freiner le processus de paix, et demande à toutes les parties de garantir la participation pleine et effective des jeunes, des femmes, des diverses communautés, des groupes confessionnels et de la société civile à tous les efforts de règlement du conflit et de consolidation de la paix ;

5.    Décide de proroger le mandat de la MINUSS jusqu’au 15 mars 2020 ;

6.    Décide également de maintenir l’effectif global de la MINUSS à un maximum de 17 000 militaires, parmi lesquels un groupe dont l’effectif sera fixé par le Secrétaire général –4 000 hommes au maximum– composera la Force de protection régionale, et les effectifs de police à 2 101 policiers au maximum, dont les agents de police, les membres d’unités de police constituées et 78 responsables des questions pénitentiaires, prie le Secrétaire général de prendre les dispositions nécessaires pour procéder rapidement à la constitution de forces et de matériel, demande au Secrétaire général de faire effectuer une étude des capacités militaires et de police après que les signataires de l’Accord revitalisé ont négocié des dispositifs permanents de sécurité, et se déclare prêt à envisager d’opérer les ajustements requis en conséquence à la MINUSS, y compris à la Force de protection régionale, compte tenu des conditions de sécurité sur le terrain ;

7.    Décide d’assigner à la MINUSS le mandat ci-après et l’autorise à user de tous les moyens nécessaires pour s’acquitter des tâches suivantes :

a)    Protection des civils :

      i)    Protéger les civils se trouvant sous la menace de violences physiques, quelle qu’en soit la source, dans les limites de ses moyens et de ses zones de déploiement, et particulièrement les femmes et les enfants, notamment en continuant de recourir à ses conseillers pour la protection des enfants et ses conseillers pour la protection des femmes, les postes vacants dans ces domaines de spécialité devant être pourvus dans les plus brefs délais ;

      ii)   User de dissuasion à l’égard de toute violence contre les civils, y compris les étrangers, en particulier en procédant à des déploiements préventifs et en patrouillant activement, en accordant une attention particulière aux déplacés, notamment mais non exclusivement à ceux qui se trouvent dans des sites de protection et des camps de réfugiés, au personnel humanitaire et aux défenseurs des droits de l’homme, et en identifiant les menaces et attaques contre la population civile, y compris par des échanges réguliers avec les civils et une collaboration étroite avec les organisations humanitaires, de défense des droits de l’homme et de développement et les organisations de la société civile dans les zones à risque de conflit élevé, notamment, le cas échéant, les écoles, lieux de culte, hôpitaux et installations pétrolières, en particulier là où le Gouvernement sud-soudanais est incapable d’assurer une telle sécurité ou ne le fait pas ;

      iii)  Mettre en œuvre à l’échelle de la Mission une stratégie d’alerte rapide coordonnant la collecte, le suivi, la vérification, la notification immédiate et la diffusion des informations et les mécanismes de réaction, notamment pour riposter à des menaces ou à des attaques contre les civils qui peuvent donner lieu à des violations des droits de l’homme, à des exactions ou à des violations du droit international humanitaire, ainsi que pour parer à l’éventualité d’attaques futures contre le personnel et les installations des Nations Unies ;

      iv)   Préserver la sûreté et la sécurité publiques à l’intérieur et autour des sites de protection des civils de la MINUSS ;

      v)    Décourager et prévenir les violences sexuelles et sexistes, dans les limites de ses moyens et de ses zones de déploiement, ainsi qu’il est signalé au paragraphe 41 du rapport spécial du Secrétaire général du 10 novembre 2016 (S/2016/951) ;

      vi)   User de bons offices et de mesures de confiance et d’encouragement pour appuyer la stratégie de protection de la Mission, en particulier en ce qui concerne les femmes et les enfants, notamment en aidant à la prévention, à l’atténuation et au règlement des conflits intercommunautaires (au moyen, notamment, de la médiation et du dialogue de proximité) pour favoriser une réconciliation durable à l’échelle locale et nationale, élément essentiel de la prévention de la violence et de l’édification de l’État à long terme, et aider les autorités compétentes et les organisations de la société civiles, dans la limite des ressources disponibles, à élaborer et mettre en place des programmes de lutte contre la violence au sein de la collectivité qui tiennent compte des questions de genre, en coopération et en coordination avec les partenaires de développement et les représentants locaux, en particulier les femmes et les jeunes ;

      vii)  Créer des conditions de sécurité propices au retour ou à la réinstallation volontaire, en connaissance de cause, en toute sécurité et dans la dignité des déplacés et des réfugiés, y compris en surveillant les services de police, les institutions chargées de la sécurité et les organismes publics et les acteurs de la société civile, en veillant à ce qu’ils respectent les droits de l’homme et en procédant avec eux, si cela est compatible avec la Politique de diligence voulue des Nations Unies en matière de droits de l’homme et strictement conforme à cette politique, à une coordination opérationnelle axée sur la protection, notamment dans le cadre d’activités de sensibilisation aux questions de la violence sexuelle et sexiste et du sort des enfants en temps de conflits armés ainsi qu’en apportant, dans les limites des ressources existantes, une assistance technique ou des conseils sur le droit international humanitaire, et en appuyant les enquêtes et les poursuites concernant les cas de violences sexuelles et sexistes et de violences sexuelles liées aux conflits ainsi que d’autres violations des droits de l’homme ou atteintes à ceux-ci, le but étant de renforcer la protection des civils ;

      viii) Apporter un renfort à l’organisation du retour ou de la réinstallation volontaire, en toute sécurité, en connaissance de cause et dans la dignité des personnes déplacées qui quittent un site de protection des civils des Nations Unies, en coordination avec les acteurs humanitaires et les autres parties prenantes et dans la limite des ressources existantes ;

b)    Instauration des conditions nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire :

      i)    Contribuer, en étroite coordination avec les intervenants humanitaires, à créer des conditions de sécurité propices à l’acheminement de l’aide humanitaire, afin de permettre l’accès rapide, en toute sécurité et sans entrave du personnel de secours à tous ceux qui se trouvent dans le besoin au Soudan du Sud et l’acheminement en temps voulu de l’aide humanitaire, en particulier aux déplacés et aux réfugiés, en rappelant la nécessité de se conformer aux dispositions pertinentes du droit international et de respecter les principes directeurs des Nations Unies concernant l’aide humanitaire, notamment l’humanité, l’impartialité, la neutralité et l’indépendance ;

      ii)   Garantir la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé, le cas échéant, et la sécurité de leurs installations et du matériel nécessaire à l’exécution des tâches prescrites ;

      c)    Surveillance et enquêtes en matière de droits de l’homme :

      i)    Suivre les cas de violations des droits de l’homme, d’atteintes à ces droits et de violations du droit international humanitaire, enquêter sur toutes atteintes et violations, les constater et en rendre compte immédiatement, publiquement et régulièrement, notamment lorsqu’elles sont susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre ;

      ii)   Suivre particulièrement les cas de violations et sévices dont sont victimes des enfants et des femmes, y compris toutes formes de violence sexuelle et sexiste commises en période de conflit armé, enquêter sur ces cas, les vérifier et en rendre compte expressément et publiquement en accélérant la mise en œuvre des dispositifs de suivi, d’analyse et de communication de l’information sur la violence sexuelle liée aux conflits et en renforçant le mécanisme de surveillance et de communication de l’information concernant les violations et sévices à l’encontre d’enfants ;

      iii)  Suivre les cas de discours haineux et d’incitation à la violence, enquêter sur ces cas et en rendre compte, en coopération avec le Conseiller spécial pour la prévention du génocide ;

      iv)   Agir en coordination avec les mécanismes internationaux, régionaux et nationaux chargés de suivre les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, notamment lorsqu’elles sont susceptibles de constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité, d’enquêter sur celles-ci et de les signaler, partager des informations avec ces mécanismes et leur apporter un concours technique, selon que de besoin ;

d)    Appuyer l’exécution de l’Accord revitalisé et le processus de paix

Exécuter, dans les limites des moyens disponibles, les tâches ci-après à l’appui de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et du processus de paix, en ayant à l’esprit que les tâches visées au paragraphe 10 et exécutées par la Force de protection régionale sont indispensables à la création d’un environnement propice à la mise en œuvre de ces derniers :

      i)    User de ses bons offices pour appuyer le processus de paix, en fournissant notamment des conseils ou une assistance technique, dans la limite des ressources disponibles ;

      ii)   Participer aux travaux du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité visant à exécuter son mandat, qui consiste à surveiller le cessez-le-feu et à en suivre l’application, notamment en facilitant le travail du Mécanisme et en l’aidant à constater les violences commises et à recueillir des informations sur celles-ci et en veillant, d’une manière générale, à ce qu’il permette effectivement d’identifier les auteurs de ces violences ;

      iii)  Participer et concourir activement aux travaux de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, en particulier au niveau sous-national ;

8.    Souligne qu’à long terme, la viabilité du processus de paix ne pourra être assurée sans l’adhésion totale de toutes les parties et la participation de la société civile, des femmes et des jeunes, exhorte toutes les parties à participer de bonne foi au processus de paix afin d’aboutir aux compromis nécessaires à la paix et à la stabilité au Soudan du Sud, rappelle aux parties que la MINUSS s’acquittera uniquement des tâches liées au processus de paix énoncées à l’alinéa d) du paragraphe 7, et note son intention de continuer à examiner activement les tâches et la composition de la MINUSS, en tenant compte de l’évolution du processus de paix et de l’application de l’Accord revitalisé ;

9.    Prend note de la demande formulée par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine évoquée par le Secrétaire général dans sa lettre au Conseil de sécurité (S/2019/110) et se déclare prêt à envisager de réviser le mandat et la composition de la Force de protection régionale conformément aux principes et normes de maintien de la paix des Nations Unies, une fois que les parties à l’Accord se seront entendues sur des arrangements de sécurité permanents et auront formé un Gouvernement provisoire d’union nationale revitalisé ;

10.   Décide que la MINUSS continuera d’inclure une force de protection régionale, rappelle que, comme le prévoit la résolution 2304 (2016), la force est chargée d’assurer un environnement sûr à Djouba et alentour et dans d’autres régions du Soudan du Sud, selon que de besoin, et autorise celle-ci à user de tous les moyens nécessaires, notamment en prenant résolument des dispositions, le cas échéant, et en effectuant activement des patrouilles, pour s’acquitter de son mandat, de manière à :

      i)    Favoriser les conditions susceptibles de garantir la libre circulation, à l’intérieur, en dehors et autour de Djouba, en protégeant les modes d’entrée et de sortie de la ville et les principales voies de communication et de transport à l’intérieur de Djouba ;

      ii)   Protéger l’aéroport pour le maintenir en service ainsi que les installations clefs à Djouba, essentielles au bien-être de sa population, que le Représentant spécial du Secrétaire général aura désignées ;

      iii)  Combattre rapidement et efficacement tout acteur qui, selon des informations crédibles, prépare ou mène des attaques contre les sites de protection des civils de l’ONU, d’autres locaux des Nations Unies, le personnel des Nations Unies, des intervenants humanitaires internationaux et nationaux, ou des civils ;

11.   Se félicite des efforts déployés par l’IGAD, l’Union africaine, le Conseil de paix et de sécurité et les pays de la région pour trouver des solutions durables aux problèmes qui menacent la paix et la sécurité au Soudan du Sud, encourage ces parties à poursuivre leur coopération soutenue avec les dirigeants sud-soudanais afin que ces derniers honorent sans délai tous les engagements qu’ils ont pris dans le cadre des accords de cessation des hostilités et de l’Accord revitalisé, souligne l’appui apporté par l’IGAD au dialogue national, en coopération avec l’ONU et l’Union africaine, et prie instamment l’IGAD de pourvoir la présidence de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée ;

12.   Affirme qu’il est crucial que, pour l’exécution de son mandat, la MINUSS puisse utiliser toutes ses bases sans restriction, notamment mais non exclusivement sa base de Tomping et, à cet égard, demande au Gouvernement sud-soudanais de respecter l’obligation qui lui incombe, au titre de l’Accord sur le statut des forces, de garantir à la Mission l’accès sans entrave aux locaux de l’ONU ;

13.   Rappelle sa résolution 2086 (2013) et réaffirme les principes fondamentaux du maintien de la paix, tels qu’énoncés dans la déclaration de son président publiée sous la cote S/PRST/2015/22, à savoir le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou de défense du mandat, et est conscient que le mandat de chaque mission de la paix est déterminé en fonction des besoins et de la situation du pays concerné et qu’il escompte l’exécution intégrale des mandats qu’il autorise ;

14.   Insiste sur le fait que la priorité doit être accordée à la protection des civils dans les décisions concernant l’utilisation des capacités et ressources disponibles de la Mission, souligne que le mandat de la MINUSS énoncé aux paragraphes 7 et 10 de la présente résolution inclut le pouvoir d’user de tous les moyens nécessaires pour mener à bien les activités inscrites audit mandat, en particulier la protection des civils, et souligne que de telles dispositions consistent notamment, dans les limites des capacités et des zones de la MINUSS, à défendre les sites de protection des civils, à établir autour des sites des zones qui ne soient pas utilisées à des fins hostiles par quelque force que ce soit, y compris, s’il y a lieu, en étendant les zones exemptes d’armes aux sites de protection des civils de la Mission, à faire face aux menaces qui pèsent sur les sites, à fouiller les personnes cherchant à s’y introduire et à saisir les armes des personnes qui s’y trouvent ou tentent d’y pénétrer, en expulsant les intervenants armés des sites de protection des civils et en leur interdisant l’entrée de ces sites ;

15.   Constate l’importance de recourir au renforcement des capacités, à la facilitation, à la médiation et au dialogue local, et encourage la MINUSS, s’il y a lieu et lorsqu’elle le peut, à étudier la façon dont elle peut s’appuyer sur ces outils pour améliorer ses capacités en matière de protection, de collecte d’informations et d’appréciation de la situation, et pour mener à bien les activités prescrites par son mandat, notamment s’agissant de la protection des civils ;

16.   Invite et encourage le Représentant spécial du Secrétaire général à diriger les opérations d’une MINUSS intégrée, à coordonner toutes les activités du système des Nations Unies dans la République du Soudan du Sud et à exercer ses bons offices en jouant un rôle de premier plan dans le cadre de l’assistance prêtée par les entités du système des Nations Unies présentes au Soudan du Sud à la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, à l’Union africaine, à l’IGAD et aux autres intervenants, ainsi qu’aux parties, aux fins de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et de la promotion de la paix et de la réconciliation, souligne à cet égard le rôle central du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité ainsi que l’importance de l’aide que celui-ci reçoit de la MINUSS pour exécuter son mandat, et réaffirme à cet égard le rôle crucial que l’Organisation des Nations Unies assume en coordination avec les organisations régionales et d’autres intervenants pour favoriser un dialogue politique entre les parties, contribuer à œuvrer à la cessation des hostilités et amener les parties à un processus de paix ouvert à tous ;

17.   Demande à la MINUSS de renforcer ses activités de prévention de la violence sexuelle et sexiste et de lutte contre celle-ci, notamment en veillant à ce que le risque de violence sexuelle et sexiste soit pris en compte dans les systèmes de collecte de données, d’analyse des menaces et d’alerte précoce de la Mission et en se concertant avec les rescapé(e)s de violences sexuelles et les associations de femmes, demande également à la MINUSS de tenir dûment compte, dans tous les aspects de son mandat, de la question transversale que constitue la problématique femmes‑hommes, réaffirme l’importance des conseillers pour les questions de genre, des compétences et du renforcement des capacités en la matière pour que la Mission puisse mener à bien son mandat en tenant compte des questions de genre, et encourage les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police à prendre des mesures pour déployer davantage de femmes dans les composantes militaire et civile de la Mission et dans sa composante de police ;

18.   Demande à la MINUSS de continuer à intensifier sa présence et de patrouiller plus activement dans les zones à risque élevé de conflit et à forte concentration de déplacés et de réfugiés, en prêtant une attention particulière aux femmes et aux enfants, notamment dans le cadre de l’exécution de sa stratégie d’alerte rapide, dans toutes les zones, et sur les principaux itinéraires de mouvements de population, d’étendre sa présence, notamment par un déploiement et des patrouilles systématiques, aux zones de déplacement, de retour, de réinstallation et de réinsertion pour créer des conditions de sécurité propices au retour volontaire, en connaissance de cause, en toute sécurité et dans la dignité des déplacés et des réfugiés, et d’examiner périodiquement son déploiement géographique de manière à disposer ses forces au mieux pour s’acquitter de sa mission ;

19.   Constate que l’exécution effective du mandat de la MINUSS relève de la responsabilité de toutes les parties prenantes et qu’elle dépend de plusieurs facteurs essentiels, notamment la question de savoir si le mandat est bien défini, réaliste et réalisable ; la volonté politique, l’efficacité et la responsabilité des dirigeants à tous les niveaux ; l’adéquation des ressources ; les directives et la formation en matière de politiques, de planification et d’opérations ; se félicite à cet égard des initiatives lancées par le Secrétaire général pour instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et, comme indiqué au paragraphe 1 de sa résolution 2436 (2018), se déclare de nouveau favorable, à l’élaboration d’un dispositif de gestion de la performance complet et intégré qui définisse des normes de performance claires pour l’évaluation de l’ensemble du personnel civil et en uniforme des Nations Unies qui travaille dans les opérations de maintien de la paix ou les appuie, qui permette la bonne et pleine exécution des mandats, qui prévoie des méthodes complètes et objectives fondées sur des critères précis et bien définis pour sanctionner les résultats insuffisants et récompenser ou reconnaître les résultats exceptionnels, et lui demande de l’appliquer à la Mission ; et salue les initiatives du Secrétaire général visant à donner effet à la Politique relative à la vérification et à l’amélioration de la préparation opérationnelle, à conduire des évaluations de la performance du personnel en tenue et du personnel civil des Nations Unies et à utiliser le Système de préparation des moyens de maintien de la paix afin que les décisions en matière de déploiement des Casques bleus soient fondées sur les résultats, et lui demande de poursuivre ses efforts à cet égard ;

20.   Rappelle la déclaration de son président S/PRST/2015/22 et sa résolution 2272 (2016), et prie le Secrétaire général de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour s’assurer que la MINUSS respecte pleinement la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de veiller à ce que les antécédents de tous les membres du personnel de la Mission soient vérifiés afin de garantir qu’ils n’ont eu aucun comportement sexuel répréhensible pendant qu’ils étaient au service des Nations Unies et de faire figurer des renseignements à cet égard dans les rapports périodiques qu’il lui adressera sur la MINUSS, y compris les examens des pays qui fournissent des contingents et du personnel de police à la Mission réalisés conformément aux directives opérationnelles énoncées dans la résolution 2272 (2016), et prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de prendre les mesures préventives et disciplinaires qui s’imposent pour que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes fassent l’objet d’enquêtes et soient tenus pleinement responsables ;

21.   Prie la MINUSS de veiller à ce que tout appui fourni à des forces de sécurité non onusiennes soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes ;

22.   Prie également la MINUSS d’aider, dans la limite des ressources disponibles, le Comité créé par le paragraphe 16 de la résolution 2206 (2015) et le Groupe d’experts créé par la même résolution, en ce qui concerne les mesures énoncées dans la résolution 2428 (2018), notamment les dispositions relatives à l’embargo sur les armes, et encourage tout particulièrement l’échange rapide d’informations entre la MINUSS et le Groupe d’experts, demande instamment à toutes les parties et à tous les États Membres, ainsi qu’aux organisations internationales, régionales et sous-régionales, de coopérer avec le Groupe d’experts, et prie instamment tous les États Membres concernés d’assurer la sécurité des membres du Groupe d’experts et de leur donner libre accès aux personnes, documents et sites pour permettre au Groupe de s’acquitter de son mandat ;

23.   Condamne avec la plus grande fermeté toutes attaques et menaces visant le personnel de la MINUSS et les installations des Nations Unies, notamment l’obstruction, la détention et les violences imposées en décembre 2018 à une équipe du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires par des responsables du Gouvernement sud-soudanais, ainsi que toutes attaques ou menaces visant le personnel et les installations de l’IGAD, souligne que de telles attaques peuvent constituer des violations de l’Accord sur le statut des forces ou des crimes de guerre, exige de toutes les parties qu’elles respectent l’inviolabilité des locaux des Nations Unies et s’abstiennent immédiatement de toute violence contre les personnes qui y sont rassemblées, réaffirme que le Gouvernement sud-soudanais est lié par les dispositions de l’Accord et exige la libération immédiate et en toute sécurité des membres du personnel des Nations Unies et du personnel associé enlevés et détenus ;

24.   Condamne les affrontements qui ont eu lieu à Malakal en février 2016 et les combats survenus à Djouba en juillet 2016, et exhorte l’Organisation des Nations Unies à tenir compte des enseignements à retenir de façon à ce que les réformes menées au sein de la MINUSS lui permettent d’être mieux en mesure d’exécuter son mandat, en particulier concernant la protection des civils, et en vue d’améliorer la chaîne de commandement de la MINUSS, d’accroître l’efficacité de ses opérations, de renforcer la sûreté et la sécurité du personnel et de faire en sorte que la MINUSS soit mieux à même de gérer les situations complexes ;

25.   Condamne dans les termes les plus vifs les attaques dirigées contre l’aide humanitaire et le pillage de secours humanitaires, notamment de vivres et de médicaments, ainsi que le pillage d’installations telles qu’hôpitaux, installations médicales et entrepôts, exige des parties qu’elles permettent, conformément aux dispositions applicables du droit international et aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence, à savoir l’humanité, l’impartialité, la neutralité et l’indépendance, l’accès rapide, sûr et libre du personnel, du matériel et des fournitures de secours, et l’acheminement rapide de l’aide humanitaire à tous ceux qui se trouvent dans le besoin partout au Soudan du Sud, en particulier aux déplacés et aux réfugiés, et qu’elles cessent d’utiliser les hôpitaux, écoles et autres bâtiments publics à des fins susceptibles d’en faire les cibles d’attaques, souligne l’obligation de respecter et de protéger tout le personnel médical et tous les agents humanitaires dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, leurs moyens de transport et leur équipement ainsi que les hôpitaux et les autres installations médicales, souligne également que tout retour doit se faire volontairement, en connaissance de cause et dans la dignité et la sécurité, et qu’il en va de même de toute autre solution durable concernant les déplacés et les réfugiés et note qu’il faut respecter la liberté de mouvement des civils et leur droit de demander asile ;

26.   Exige que toutes les parties mettent fin immédiatement à toutes formes de violence, de violation des droits de l’homme et d’atteinte à ces droits et de violation du droit international humanitaire, notamment aux viols et aux autres formes de violence sexuelle et sexiste, et amènent les responsables de tels actes à rendre des comptes afin de rompre le cycle de l’impunité qui prédomine actuellement ;

27.   Condamne toutes les violations des règles applicables du droit international commises par toutes les parties au conflit, en particulier à l’encontre des enfants, prie avec insistance toutes les parties au conflit de mettre en œuvre les mesures prescrites dans les Conclusions sur le sort des enfants touchés par le conflit armé au Soudan du Sud adoptées le 17 décembre 2018 par le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé, en particulier la libération immédiate de tous les enfants enrôlés dans leurs rangs et les mesures visant à prévenir et faire cesser les meurtres et mutilations d’enfants, se félicite que certains groupes aient récemment libéré des enfants, engage vivement le Gouvernement sud‑soudanais à élaborer et mettre en œuvre un plan d’action global de lutte contre l’ensemble des violations et exactions subies par les enfants, et engage vivement l’APLS dans l’opposition à mettre en œuvre son plan d’action visant à faire cesser et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants ainsi que le meurtre ou l’atteinte à l’intégrité physique d’enfants, et souligne qu’il faut que le Gouvernement sud‑soudanais fournisse rapidement aux enfants touchés par les conflits armés une aide appropriée à la réinsertion et à la réadaptation et réduise autant que possible le risque de ré-enrôlement tout en veillant à répondre aux besoins particuliers des filles et des enfants handicapés, tels que l’accès aux soins de santé, à un soutien psychosocial et à des programmes éducatifs, et demande à la communauté internationale d’apporter son soutien à ces efforts ;

28.   Prie la MINUSS de continuer à engager le dialogue avec les parties au conflit en ce qui concerne l’élaboration et la mise en œuvre de plans d’action, en application de sa résolution 1612 (2005) et de ses résolutions ultérieures sur le sort des enfants en temps de conflit armé, et d’appuyer les efforts visant à libérer les enfants associés à des groupes et forces armés sur l’ensemble du territoire sud‑soudanais ;

29.   Engage vivement les Forces sud-soudanaises de défense du peuple, l’APLS dans l’opposition et les autres groupes armés à empêcher que de nouveaux actes de violence sexuelle soient commis, demande instamment au Gouvernement sud-soudanais et à l’APLS dans l’opposition de donner effet aux engagements et plans d’action qu’ils ont adoptés conjointement et unilatéralement en vue de la prévention de la violence sexuelle liée au conflit, qui mettent l’accent sur la prévention, la responsabilité et le renforcement de l’assistance aux victimes, et engage vivement les dirigeants des Forces sud-soudanaises de défense du peuple à donner des ordres exprès concernant la prévention de la violence sexuelle liée au conflit, et exige du Gouvernement sud‑soudanais qu’il prenne des mesures concrètes pour que les membres de ses forces qui se rendent responsables d’actes de violence sexuelle aient à en répondre ;

30.   Demande instamment aux parties à l’Accord revitalisé de démilitariser les zones civiles conformément aux dispositions du chapitre 2 de l’Accord afin de réduire la prolifération et le détournement d’armes légères et d’autres armes ;

31.   Insiste sur le fait que la recherche de la vérité et la réconciliation sont essentielles pour instaurer la paix au Soudan du Sud et, à cet égard, souligne que la Commission vérité, réconciliation et apaisement a un rôle primordial à jouer dans la consolidation de la paix au Soudan du Sud, comme indiqué dans l’Accord revitalisé, en conduisant les efforts visant à parvenir à la cohésion nationale et à promouvoir la paix, la réconciliation nationale et l’apaisement ;

32.   Prend note des mesures prises par l’Union africaine en vue de la mise en place du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud prévu par le chapitre V de l’Accord revitalisé et de l’action menée à ce jour par l’Organisation des Nations Unies, se félicite que l’Union africaine ait officiellement demandé à l’Organisation de lui apporter une assistance technique en vue de la mise en place du Tribunal mixte et prie le Secrétaire général de continuer à fournir une assistance technique à la Commission de l’Union africaine et au Gouvernement sud-soudanais pour la mise en place du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud et l’application des autres parties du chapitre V de l’Accord revitalisé, notamment en ce qui concerne l’établissement de la Commission vérité, réconciliation et apaisement ;

33.   Prend note également du communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine du 8 février 2018 et à cet égard demande au Gouvernement sud‑soudanais de signer sans plus attendre le Mémorandum d’accord portant création du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud conclu avec l’Union africaine, et prie la communauté internationale de prêter son soutien à la création de ce tribunal ;

34.   Demande au Gouvernement sud-soudanais de mener à bien en toute diligence et transparence les enquêtes sur les allégations de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, dans le respect de ses obligations internationales, et l’invite à publier les comptes rendus de ces enquêtes ;

35.   Demande également au Gouvernement sud-soudanais, tout en prenant note du paragraphe 3.2.2 du chapitre V de l’Accord revitalisé, d’amener tous les responsables de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits et de violations du droit international humanitaire à répondre de leurs actes, de garantir à toutes les victimes de violences sexuelles l’égale protection de la loi et l’égal accès à la justice, et de garantir l’égal respect des droits des femmes et des filles à l’occasion de ces procédures, et note que l’application de mesures globales de justice transitionnelle, y compris de mesures visant à assurer le respect du principe de responsabilité, à rechercher la vérité et à apporter des réparations, est fondamentale pour parvenir à l’apaisement et à la réconciliation, et, soulignant l’importance de l’état de droit dans la promotion du processus de paix, exhorte le Gouvernement sud-soudanais à accorder la priorité à la restauration et à la réforme de l’état de droit et du secteur de la justice, se félicite à cet égard des premières mesures prises en ce sens par le Gouvernement, notamment le déploiement, avec l’aide de la MINUSS, de tribunaux itinérants, et prie instamment le Gouvernement de prendre des mesures supplémentaires à cet égard ;

Rapports

36.   Prie le Secrétaire général de présenter, dans les 180 jours à compter de la prorogation du mandat de la Mission, un rapport écrit sur la planification future des sites de protection des civils, y compris une évaluation de chaque site, un bilan du modèle actuel de sécurisation de ces sites, des recommandations clarifiant le rôle et les responsabilités de la MINUSS et des autres parties concernées, et des recommandations concernant les mesures à prendre pour promouvoir des conditions de sécurité propices au retour ou à la réinstallation volontaire, en toute sécurité, en connaissance de cause et dans la dignité des résidents des sites de protection des civils, en vue de la mise en place de solutions durables pour toutes les personnes déplacées, et encourage l’ONU à organiser de vastes consultations avec les services compétents du Gouvernement sud-soudanais, ainsi que les organisations humanitaires, les acteurs du développement, les communautés locales et les organisations de la société civile concernés aux fins de l’élaboration dudit rapport ;

37.   Prie le Secrétaire général de continuer à lui faire rapport tous les mois sur les violations de l’Accord sur le statut des forces ou sur les manœuvres d’obstruction visant la MINUSS ;

38.   Prie le Secrétaire général de lui rendre compte de l’exécution du mandat de la MINUSS et des manœuvres d’obstruction qu’elle rencontre dans l’exécution de son mandat, dans un rapport écrit détaillé devant être soumis dans les 90 jours suivant l’adoption de la résolution, puis tous les 90 jours par la suite, et souligne que ce rapport devra notamment comprendre :

•     Des informations sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Politique de diligence voulue ;

•     Des informations précises et détaillées sur la manière dont la Mission s’acquitte de ses tâches de protection des civils, notamment, mais pas exclusivement, sur la capacité de réaction et la performance des contingents et les nouvelles zones de patrouille et les déploiements systématiques ;

•     Des informations sur la prise en compte de la problématique femmes-hommes dans tous les aspects du mandat de la Mission ;

•     Des informations sur les mesures prises pour décourager et prévenir les violences sexuelles et sexistes ;

•     Des informations sur la participation des femmes aux processus de paix ;

•     Des informations sur les mesures prises pour améliorer la sûreté et la sécurité du personnel de l’Organisation des Nations Unies ;

•     Des informations sur les mesures prises pour régler les problèmes de performance recensés lors des évaluations mentionnées aux paragraphes 18 et 19 ;

•     Un rapport exhaustif sur les questions relatives aux droits de l’homme au Soudan du Sud ;

•     Des recommandations sur les mesures à prendre pour adapter la MINUSS à la situation sur le terrain ;

39.   Prie le Secrétaire général de lui rendre compte, dans ses rapports trimestriels, de l’assistance technique fournie en application du paragraphe 30 ci‑dessus, invite l’Union africaine à communiquer au Secrétaire général, aux fins de l’établissement de son rapport, des informations sur les progrès accomplis dans la mise en place du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud, et déclare son intention d’évaluer, lorsqu’il recevra les rapports du Secrétaire général, le travail accompli en vue de l’établissement du Tribunal mixte, conformément aux normes internationales ;

40.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Entre satisfaction et perplexité, la Cinquième Commission examine le nouveau dispositif de prestation de services centralisée

Soixante-treizième session,
29e séance – matin
AG/AB/4315

Entre satisfaction et perplexité, la Cinquième Commission examine le nouveau dispositif de prestation de services centralisée

Le choix qui nous est offert aujourd’hui est clair: réaliser des économies dans les fonctions administratives de l’ONU ou assister à une plus grande dispersion des fonds disponibles pour l’exécution des mandats, a résumé le CANZ face à la satisfaction des uns et la perplexité des autres à la lecture du nouveau dispositif de prestation de services centralisée que la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a examiné ce matin. 

Le CANZ -Canada, Australie, Nouvelle-Zélande- s’est dit, avec l’Union européenne et la Suisse, satisfait de la nouvelle proposition du Secrétaire général: confier, d’ici à mi-juin 2021, à quatre centres installés à Nairobi, Shenzhen, Budapest et Montréal, 202 des 387 tâches administratives exécutées par le Secrétariat de l’ONU dont l’administration des ressources humaines et les paiements.  Où est passé Mexico City? s’est étonné le Mexique devant une mise à l’écart qui pourrait porter préjudice à la langue espagnole, deuxième langue la plus parlée au monde et l’une des six langues officielles de l’ONU.  Dans la sélection des villes d’accueil, a prévenu le Groupe des États d’Afrique, nous examinerons avec soin « l’influence » qu’ont eu les ressources extrabudgétaires. 

Ces ressources, explique en effet, le Secrétaire général dans son rapport, font partie, avec le budget ordinaire et celui des opérations de maintien de la paix, de la bourse de ces « Centres de services partagés ».  Le Secrétaire général demande pour 2019, un montant de 9,5 millions de dollars, rabaissé par le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) à 9 157 400 dollars, et pour 2020, 50,9 millions.  Par la création des centres, le Secrétaire général promet une réduction annuelle des coûts administratifs de 23,0 millions de dollars et des économies de 49 millions, au cours des cinq premières années.

Quant au choix des villes d’accueil, le Secrétaire général rappelle une dizaine de critères dont « la nécessité de veiller à ce que l’ensemble des activités du Secrétariat soit assuré sans interruption partout dans le monde grâce à la mise en place d’un modèle d’appui en relais, qui devrait permettre que certaines opérations soient traitées à tour de rôle par divers centres de services partagés situés dans différents fuseaux horaires ». 

Fuseau horaire?  De nombreuses délégations se sont étonnées.  L’Assemblée générale n’a jamais fixé ce critère, se sont exclamés les États-Unis.  Comment expliquer que Montréal ait été choisi alors qu’elle est si éloignée des pays francophones d’Afrique? ont renchéri le Groupe des 77 et la Chine.  Pour couvrir de façon « optimale » les 9 000 clients et personnels en Afrique, le Sénégal a expliqué que la candidature de Dakar a été motivée par son appartenance à l’espace francophone « où se déroulent la plupart des missions de maintien de la paix ».

Pourquoi quatre centres et pas un seul, se sont en outre impatientés les États-Unis, en avouant leur perplexité.  Quatre centres, c’est contraire au principe même de la prestation « centralisée », censé consolider les services, améliorer la prestation et renforcer l’harmonisation.  Quatre centres, c’est risquer de perpétuer les fragmentations et d’empêcher un contrôle adéquat de la prestation, ont-ils diagnostiqué.  Pourquoi quatre centres alors que les premières propositions parlaient de trois, voire de deux? s’est aussi étonné le Japon alors que le CCQAB avance déjà l’idée d’autres centres. 

Les questions qu’il faut se poser a estimé la Suisse, c’est: quels sont les facteurs clefs qui doivent prévaloir lors de la transformation du dispositif afin de garantir des gains qualitatifs à long terme pour l’ONU?  De quelle manière le dispositif peut anticiper et intégrer les changements découlant de la numérisation, de l’automatisation et des nouvelles méthodes de travail?  Comment peut-on préserver le bien-être du personnel administratif et atténuer les effets négatifs potentiels de la transformation du dispositif?

La Commission, qui a aussi examiné la gestion des charges à payer pour l’assurance après cessation de service, s’est également attaquée à la question des activités d’achat au Secrétariat de l’ONU dont le niveau global est resté relativement stable aux alentours de 3 milliards de dollars entre 2012 et 2017, année durant laquelle les transports aériens sont restés le principal secteur de dépenses avec 515 millions de dollars.  Si les délégations ont analysé les contours du nouveau « Bureau de la gestion de la chaîne d’approvisionnement », la Chine a fait observer que les achats auprès des pays en développement ne représentaient que 38,7% de la valeur totale en 2017. 

Le Groupe des 77 a appelé à des mesures « plus actives et plus innovantes » pour promouvoir une participation plus large des fournisseurs du Sud aux opportunités d’affaires avec l’ONU.  Le Groupe s’est d’ailleurs étonné de la notion « d’achat durable ».  Que renferme ce concept? a demandé la Fédération de Russie.  Est-il applicable à l’ONU?  Nous devons d’abord en discuter, car « oui à la concurrence mais avec des critères clairs ».  En matière de concurrence, « il n’y a pas qu’Adam Smith ».  Il y a aussi des États Membres et des personnels dont il faut protéger les compétences, s’est énervée la Fédération de Russie.  Les activités d’achat, a rétorqué l’Union européenne, doivent inclure des critères et des spécificités compatibles avec la protection de l’environnement, l’intégration sociale, le développement économique durable et la protection des droits de l’homme. 

La Cinquième Commission, qui travaille surtout à huis-clos, devrait tenir une autre séance publique le vendredi 22 mars. 

BUDGET-PROGRAMME DE L’EXERCICE BIENNAL 2018-2019

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur le dispositif de prestation de services centralisée au Secrétariat de l’ONU (A/73/791)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné celui du Secrétaire général (A/73/706) sur un projet révisé du dispositif qui tienne pleinement compte du fait que « les fonctions pouvant être assurées à distance, à savoir les tâches de traitement administratif (administration des ressources humaines, paiements et états de paie notamment), seront regroupées dans des centres de services partagés. 

Il est donc question de créer quatre centres à Nairobi, Shenzhen, Budapest et Montréal qui, une fois installés, permettront une réduction annuelle des coûts de 23,0 millions de dollars et des économies de 49,0 millions de dollars au cours des cinq premières années.  Les Centres de Nairobi et de Budapest devraient commencer à fonctionner au premier trimestre 2020 et à la mi-2021, tous les clients devraient être servis par les Centres de services partagés.

Parmi les 387 tâches administratives exécutées ou non dans Umoja, les Centres pourront assumer les 202 qui peuvent être exécutées depuis n’importe quel lieu et sur celles-ci, 80 devraient être exécutées dès la première année, à savoir 35 tâches d’administration des ressources humaines, 39 tâches financières et 6 tâches relevant des services internes.  Quant aux tâches restantes, elles feront l’objet d’un réexamen à l’occasion de la seconde phase.  Le CCQAB estime que les tâches sont trop nombreuses et recommande d’accroître l’offre des Centres voir de créer un autre centre.

Étant donné le grand nombre de clients francophones en Afrique, le CCQAB s’inquiète aussi du décalage horaire entre cette région et Montréal, où se trouve le Centre qui serait chargé de fournir des services en français aux clients d’Afrique.  Le CCQAB note aussi que le Bureau du Directeur des Services partagés, qui rendra compte au Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, serait hébergé dans le Centre de Nairobi et que l’une des principales raisons pour lesquelles les quatre Centres relèveraient d’une même structure de gestion et de suivi de la performance opérationnelle est qu’il faut pouvoir équilibrer la charge de travail, de sorte que lorsque l’un des Centres est fortement sollicité, les tâches puissent être transférées à un ou plusieurs autres Centres.

Les quatre Centres géreraient également sept bureaux locaux d’appui aux clients: le Centre de Nairobi gérerait les bureaux de Beyrouth et d’Addis-Abeba; le Centre de Budapest, les bureaux de Genève et de Vienne; celui de Shenzhen, le bureau de Bangkok; et celui de Montréal, les bureaux de New York et de Santiago.  La mise en place de ces bureaux n’est qu’une mesure transitoire pour aider les fonctionnaires pendant la période où les tâches administratives seraient transférées aux Centres, « de façon à laisser au personnel le temps de se familiariser avec le nouveau système de service et d’appui, d’apaiser les inquiétudes et de vaincre la résistance de celles et ceux qui auraient peut-être préféré le statu quo ».  Le CCQAB recommande de réexaminer la question des bureaux locaux d’appui aux clients après un an pour déterminer s’ils sont toujours nécessaires.

Au départ, les Centres seraient financés à la fois au moyen du budget ordinaire, des budgets des opérations de maintien de la paix et de ressources extrabudgétaires.  Par la suite, les ressources seraient revues à la hausse ou à la baisse, selon l’évolution de la taille des entités clientes et la complexité des tâches.  Pour 2019, le montant s’établirait 9 522 700 dollars, dont 6 543 900 dollars pour couvrir les coûts de fonctionnement (récurrents) et 2 978 800 dollars pour couvrir les coûts de démarrage (ponctuels).  Pour 2020, le montant des ressources nécessaires s’établirait à 50 948 500 dollars.  Quelque 684 postes seraient créés dont 27 au Bureau du Directeur des services partagés.  Après avoir recommandé des réductions dans les postes, le personnel, les consultances, les voyages, la formation, la mise en service de la nouvelle application iNeed et les services contractuels, le Comité consultatif recommande à l’Assemblée générale d’approuver la création et l’emplacement des Centres à compter du 1er janvier 2020 ainsi qu’un budget total d’un montant de 9 157 400 dollars, y compris la création de 679 postes.  L’Assemblée devrait aussi prendre compte du fait qu’un montant de 1 831 500 dollars devra être prélevé sur les ressources extrabudgétaires au cours de la période allant du 1er juillet au 31 décembre 2019.

Dans ce contexte, le Centre de services régional d’Entebbe demeurerait un centre régional important et continuerait de jouer un grand rôle dans l’exécution du mandat de l’ONU.  Depuis sa création, quelque 7,71 millions de dollars ont été investis dans les locaux et 9,77 millions de dollars dans les installations de formation et les infrastructures techniques, éléments qui n’entrent pas dans le cadre du dispositif de prestation de services centralisée.  Le Secrétariat prévoit aussi de recourir, jusqu’à la fin 2019, aux services du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui fournira un appui administratif au système des coordonnateurs résidents dans 131 bureaux de coordonnateurs et dans 3 bureaux régionaux du Bureau de la coordination des activités de développement.  Pour ces services, le PNUD facturera au Secrétariat un montant forfaitaire global de 19,6 millions de dollars, auquel s’ajouteront un montant correspondant à 4% des dépenses de personnel et un montant correspondant à 8% des dépenses autres que les dépenses de personnel, au titre de l’appui à la gestion.  Cet accord devrait être modifié en 2020 si l’Assemblée générale approuve le dispositif de prestation de services centralisée.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. MAJED S. F. BAMYA, de l’État de Palestine, a indiqué que son Groupe est prêt à discuter de la proposition du Secrétaire général et à voir dans quelle mesure il est resté fidèle au mandat donné par les États Membres dans la résolution 72/262C.  Nous comptons aussi, a-t-il ajouté, demander des clarifications sur la répartition des coûts, la prévisibilité du mode de financement proposé et son incidence sur la rentabilité.  Le Groupe prend note des économies réalisables pendant les cinq premières années mais note aussi, a fait observer l’orateur, qu’elles ne sont pas réparties de manière équilibrée entre les quatre Centres.  Nous entendons donc voir comment on peut injecter plus d’efficacité dans les Centres où les coûts de personnel sont les plus élevés.  Nous voulons, a-t-il poursuivi, en savoir plus sur l’appui offert à ces Centres pour assurer leur viabilité et demandons un plan de suivi de la réalisation des avantages assortis d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs précis, y compris d’objectifs en matière de réduction des coûts et d’amélioration des services.

Le représentant s’est aussi inquiété du fait que Montréal ait été choisi pour les clients francophones, nombreux et géographiquement éloignés.  Il a conclu en prévenant que pour son Groupe, le Centre d’Entebbe est une question prioritaire.  Comment le Secrétaire général compte-t-il assurer son utilisation optimale?

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE (Nigéria) s’est demandé pourquoi, compte tenu des fuseaux horaires, les services administratifs et de paie des clients en Afrique doivent être installés en dehors du continent alors qu’il existe des villes africaines capables de les assurer.  Le CCQAB, a rappelé le représentant, ne s’est jamais opposé à l’idée de créer d’autres centres en Afrique.  Nous comptons donc sur le nombre adéquat de centres correspondant aux diverses fonctions et aux exigences linguistiques de l’Afrique et pourquoi la création d’un centre dans un pays francophone pour les 9 000 employés et clients de la région.  Le représentant a aussi noté « un manque de clarté » sur le processus: le grand nombre de tâches restantes plaide en effet pour la création d’un autre centre.  Le représentant a prévenu que son Groupe examinera avec une attention toute particulière l’influence des ressources extrabudgétaires sur la sélection des villes d’accueil des centres.  Mon Groupe, a-t-il aussi prévenu, demandera des explications sur la suppression de 391 postes dans les projets de budget du Centre d’Entebbe et d’autres opérations de maintien de la paix pour l’exercice allant du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021 et de 24 postes financés au moyen du compte d’appui à ces opérations.  Quel en sera l’impact en Afrique qui abrite la plupart des opérations?

M. JAN DE PRETER, de l’Union européenne, a fermement appuyé l’objectif de créer un Secrétariat de l’ONU véritablement mondial, mieux adapté à la mise en œuvre de ses mandats, appuyé par des services administratifs fournissant « le nécessaire, quand c’est nécessaire et là où c’est nécessaire ».  Il est temps que l’Organisation évolue et qu’elle se hisse à la hauteur de ses objectifs.  Le dispositif, a-t-il argué, devrait garantir une prestation des services plus efficace et plus rapide, avec des avantages avérés tant sur le plan qualitatif que quantitatif.  Le dispositif est essentiel pour tirer pleinement parti des avantages « réels » d’Umoja, le progiciel de gestion intégré.  L’objectif général de l’exercice, a insisté le représentant, est donc d’accroître l’efficacité tout en garantissant à tous les clients des normes élevées et uniformes de de prestation de services.  Cela permettra d’améliorer la qualité de l’exécution des mandats et servira au mieux les objectifs stratégiques des Nations Unies.  L’Union européenne, a conclu le représentant, réaffirme la nécessité de maintenir un élan global dans l’ensemble des initiatives de réforme de la gestion et de leur mise en œuvre, afin d’apporter « aussi rapidement que possible » des améliorations concrètes à l’Organisation.  « Nous pensons que la Cinquième Commission devrait prendre une décision sur le dispositif dans les plus brefs délais », a exhorté le représentant. 

Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), M. KENT VACHON (Canada) a estimé que le choix qui s’offre à la Commission est claire: réaliser des économies dans les fonctions administratives de l’Organisation ou assister à une plus vaste dispersion des fonds disponibles pour l’exécution des mandats.  Il a plaidé pour la mise en œuvre du dispositif « qui fait partie de la solution ».  Le représentant a mis en garde contre le statu quo, celui « des services fournis de manière inefficace, coûteuse et incohérente, et presque entièrement dans une seule des langues de travail de l’ONU ».

Au nom du Lichtenstein, M. FELIX SIEGFRIED WANNER (Suisse) a soutenu la « vision » et souhaité que les délibérations sur ce point s’orientent sur les questions suivantes et d’abord, quels sont les facteurs clefs qui doivent prévaloir lors de la transformation du dispositif afin de garantir des gains qualitatifs à long terme pour l’ONU?  Deuxièmement, de quelle manière le dispositif peut anticiper et intégrer les changements découlant de la numérisation, de l’automatisation et des nouvelles méthodes de travail?  Troisièmement, comment peut-on préserver le bien-être du personnel administratif et atténuer les effets négatifs potentiels de la transformation du dispositif?

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) s’est avouée préoccupée.  L’Assemblée, s’est-elle expliquée, n’a jamais fixé le critère du fuseau horaire.  Nous sommes perplexes: pourquoi quatre centres et non un seul comme l’ont fait d’autres organismes du système des Nations Unies.  Quatre centres?  C’est  contraire au principe même de la prestation « centralisée », censé consolider les services, améliorer la prestation et renforcer l’harmonisation.  Quatre centres, c’est risquer de perpétuer les fragmentations et d’empêcher un contrôle adéquat de la prestation.  Nous repoussons depuis trop longtemps une décision sur cette question mais nous voulons une décision qui améliore l’Organisation, la rende plus adaptée à son objectif et donne les avantages et les résultats escomptés, a souligné la représentante. 

M. JESÚS VELÁZQUEZ CASTILLO (Mexique) a reconnu les attentes générées par le dispositif mais s’est interrogé sur les critères qui ont présidé au choix des villes d’accueil.  Il s’est en effet étonné de la disparition, dans le dernier rapport du Secrétaire général, de Mexico City.  Une décision, a-t-il prévenu, qui pourrait porter préjudice à la langue espagnole, deuxième langue la plus parlée au monde et l’une des six langues officielles de l’ONU.  Le représentant a jugé utile de reconsidérer cette décision. 

M. CHEICK NIANG (Sénégal) a jugé difficile de concilier les objectifs globaux de la réforme notamment la prestation de services flexible, de qualité et à moindre coût, avec les propositions du Secrétariat.  Le représentant a émis de sérieuses réserves sur la transparence du processus, la pertinence du concept de « follow the sun » et les implications du recours sans précédent à des ressources extrabudgétaires.  M. Niang a réclamé le rapport du consultant qui a servi de base à ces propositions.  Le nombre des tâches restantes est de 80, ce qui a amené le CCQAB à suggérer au Secrétaire général d’envisager toutes les options, y compris la création de centres supplémentaires.  Une telle démarche, a commenté le représentant, requiert des ressources additionnelles et nécessiterait impérativement l’autorisation de l’Assemblée générale.  Dès lors, la réforme telle qu’elle a été conçue, apparaît comme « incomplète et à minima », a tranché le représentant. 

Il a aussi dénoncé l’approche « fragmentaire et incohérente » pour prendre en charge le personnel et les clients francophones situés majoritairement en Afrique.  Il a réitéré l’appel en faveur de l’établissement d’un centre en Afrique francophone pour couvrir de façon optimale les 9 000 clients et personnels concernés de la région.  La candidature de Dakar a d’ailleurs été motivée, entre autres, par l’appartenance du Sénégal à l’espace francophone où se déroulent la plupart des missions de maintien de la paix, a-t-il rappelé. 

M. PHILIP OCHEN ANDREW ODIDA (Ouganda) a souligné que le Centre d’Entebbe fournit des prestations à 72% des opérations de terrain de l’ONU dans le monde, soit 19 missions et 19 400 membres du personnel.  Ce Centre traite 155 000 fiches de paie, 25 000 demandes de déplacements ou bien encore 8 700 bourses.  Pourquoi quatre centres? s’est demandé le représentant, en regrettant la manière dont se sont déroulées les consultations avec les États Membres.  Il aurait fallu, s’est-il expliqué, consulter d’abord les pays qui accueillent déjà des centres.  Le représentant s’est également étonné des 49 millions de dollars d’économies brandies alors qu’il s’attendait au double.  Il a, à son tour, déploré que le fait que l’on ait ignoré les clients francophones en Afrique.  Compte tenu du fuseau horaire, il faut revenir sur le choix de Montréal, a-t-il conclu. 

Mme YASUKO NISHIMURA (Japon) a appuyé le dispositif parce qu’il assurerait une utilisation « plus judicieuse » des ressources tout en en reconnaissant les conséquences sociales « douloureuses ».  Malgré d’« inévitables sacrifices », une prestation centralisée des services servirait l’intérêt de l’ONU et de tous ses membres, a-t-elle souligné.  Nous devons, a-t-elle encouragé, renoncer aux considérations politiques, ce qui serait un gaspillage de ressources.  Par exemple, a-t-elle avoué, nous ne sommes pas tout à fait convaincus que la proposition du Secrétaire général soit le meilleur modèle possible.  Pourquoi quatre centres alors que les premières propositions parlaient de trois voire de deux?  La représentante a voulu des explications. 

M. DAOPENG FU (Chine) a souhaité que la mise en œuvre du dispositif soit un processus graduel.  La Chine, a-t-il indiqué, aide le Secrétariat à améliorer son plan de consolidation et à réfléchir à d’autres services administratifs non couverts par les centres de services partagés, afin de renforcer la centralisation de la prestation.  Comme la réforme de ce dispositif affectera le personnel, la Chine a pris note des mesures proposées par le Secrétaire général pour atténuer les impacts.  Comme les centres régionaux existant soutiennent les opérations de maintien de la paix, le Secrétariat devrait continuer de les utiliser efficacement pour préserver les investissements et les résultats. 

C’est l’efficacité, a dit M. GUNJUNG LYU (République de Corée), que nous recherchons dans nos débats sur le dispositif.  La création de quatre centres est-elle la voie la plus efficace? s’est-il demandé.  L’approche basée sur les fuseaux horaires a-t-elle été bien adoptée par la Cinquième Commission? s’est-il encore demandé.  Nous devrions procéder par étape, a proposé le représentant: s’entendre sur le nombre des centres et leur structure de base, et puis sélection des villes d’accueil. 

M. JOSEPH MASILA (Kenya) a appuyé la proposition du Secrétaire général et salué les économies projetées, en pointant les contraintes financières que subit l’ONU.  Il a aussi soutenu les recommandations du Secrétaire général visant à atténuer les conséquences de ce dispositif pour le personnel et promis que si Nairobi venait à être choisi comme lieu d’implantation d’un des centres, son gouvernement travaillera avec l’ONU pour une opérationnalisation sans heurt. 

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur la gestion des charges à payer au titre de l’assurance maladie après la cessation de service (A/73/792)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné celui du Secrétaire général (A/73/662) qui s’oppose à ses deux conclusions, d’une part, « des scénarios prévoyant une réduction de la part des cotisations dues par les organisations pourraient être envisagés », et, d’autre part, « la précédente proposition de financement n’était pas présentée avec exhaustivité ».  Le Comité rappelle tout de même que ses conclusions et recommandations ont dûment été approuvées par l’Assemblée générale.

Le Secrétaire général propose à nouveau de financer les charges à payer au titre de l’assurance maladie après la cessation de service, en particulier d’appliquer le système par capitalisation pour financer intégralement les nouveaux engagements au titre de l’assurance maladie après la cessation de service pour le personnel recruté à partir du 1er janvier 2022, tout en conservant le système par répartition pour financer les engagements existants.  Il indique que, si son rapport a été approuvé par le Comité de haut niveau sur la gestion en décembre 2018, le Groupe de travail interinstitutions sur l’assurance maladie après la cessation de service n’est pas toujours parvenu à un consensus en raison du caractère sensible de certains sujets mentionnés dans son rapport.

Le Secrétaire général fait sept recommandations et d’abord que le Groupe de travail des normes comptables du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination (CCS) engage des discussions en vue de déterminer quels actifs devraient pouvoir servir à contrebalancer les engagements au titre de l’assurance maladie après la cessation de service.  Le Secrétaire général recommande aussi que les organismes des Nations Unies envisagent de suivre les pratiques de référence en ce qui concerne les conditions faites aux tiers administrateurs et qu’ils continuent de débattre, sous les auspices du Comité de haut niveau sur la gestion, des possibilités de maîtriser les dépenses.

Les organismes devraient également continuer d’étudier toutes les possibilités d’harmonisation concernant l’assurance maladie qui seraient de nature à favoriser la mobilité interorganisations.  En outre, selon le Secrétaire général, le financement par répartition des engagements de l’Organisation au titre de l’assurance maladie après la cessation de service concernant les fonctionnaires recrutés avant le 1er janvier 2022 devrait être maintenu.  Les engagements concernant le personnel recruté à partir du 1er janvier 2022 devrait être financé par la mise en place d’une cotisation prélevée sur les états de paie correspondant à 5,35% de la masse salariale et par la création de réserves financières spéciales.  La cotisation à prélever sur la masse salariale devrait être revue et ajustée tous les trois ans en fonction des variations du niveau projeté des réserves spéciales.

Les opérations de maintien de la paix, précise-t-il, n’ont pas été prises en compte dans les projections relatives à la détermination du taux de capitalisation.  Les projections actuarielles au 31 décembre 2017 portaient sur 31 615 fonctionnaires actifs et retraités (dont 25 496 pour le Secrétariat) mais sur 16 875 fonctionnaires actifs et retraités d’opérations de maintien de la paix.  Le Comité consultatif note qu’au 31 décembre 2017, les fonctionnaires actifs et retraités des opérations de maintien de la paix représentaient environ 40% du nombre total des fonctionnaires du Secrétariat (25 496) et des opérations (16 875).  L’exclusion d’un nombre aussi important de fonctionnaires conduit à s’interroger sur l’exactitude et la portée des projections.  Il estime d’emblée que la proposition de financement devrait être également applicable à ce personnel.

Le Comité consultatif doute par ailleurs du mécanisme d’accumulation de droits à prestations proposé et espère que des justifications et des précisions supplémentaires sur les modifications qu’il est proposé d’apporter aux formules de répartition des primes d’assurance maladie de tous les régimes entre l’Organisation et les participants dans le cadre du mécanisme envisagé seront communiquées à l’Assemblée générale.

Déclarations

M. MARCO BRESCHI, Président de la Fédération des associations d’anciens fonctionnaires internationaux (FAAFI), a estimé que le mécanisme d’accumulation de droits à prestations, y compris les nouveaux critères d’éligibilité alourdiraient le fardeau des futurs retraités.  Le CCQAB, a-t-il relevé, n’est pas non plus convaincu de la pertinence de ce mécanisme.  Il a insisté sur le fait que le CCQAB ne soutient pas les recommandations que le Secrétaire général a faites sur le financement. 

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, Mme NADA TARBUSH, de l’État de Palestine, a annoncé que son Groupe est profondément conscient des implications à long terme qu’une décision sur cette question peut avoir sur les futurs budgets de l’ONU et des membres de son personnel.  Elle a dit attendre avec intérêt de poursuivre les discussions sur la création d’un organe spécialisé chargé de fournir aux entités du système des Nations Unies un cadre de coopération pour traiter des questions complexes relatives à l’assurance et de tirer parti des avantages obtenus par le Groupe de travail interinstitutions sur l’assurance maladie après la cessation de service. 

EXAMEN DE L’EFFICACITE DU FONCTIONNEMENT ADMINISTRATIF ET FINANCIER DE L’ONU

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur les activités d’achat au Secrétariat de l’ONU (A/73/790)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné celui du Secrétaire général (A/73/704).  Le CCQAB conclut d’emblée que ce dernier ne présente pas, en ce qui concerne la planification des achats, l’analyse de la demande (passée et présente) et la gestion des marchés, le degré de détail et d’analyse suffisant pour servir de base à l’élaboration et à l’application d’une stratégie d’achat. 

Le Comité note que le niveau global des achats est resté relativement stable: 3,08 milliards de dollars en 2012, 3,36 milliards de dollars en 2014, 3,47 milliards de dollars en 2016 et 3,06 milliards de dollars en 2017 année durant laquelle les transports aériens sont restés le principal secteur de dépenses avec 515 millions de dollars, devant les technologies de l’information et des communications, l’alimentation et la restauration, le carburant et les bâtiments et travaux publics. 

S’agissant du nouveau cadre d’achats, le nouveau Bureau de la gestion de la chaîne d’approvisionnement comprend la Division de la logistique, la Division des achats, la Division de l’appui au personnel en tenue et le Service de facilitation des opérations et de la communication.  Cette nouvelle structure intégrée permettra d’accélérer la fourniture des services en rapprochant la logistique et les achats dans le but notamment de renforcer la collaboration entre les deux fonctions.  Le Comité d’examen des fournisseurs a été rattaché au Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité.

Dans ce cadre, le Secrétaire général a délégué des pouvoirs illimités en matière d’achats, en deçà de plafonds, aux responsables d’entité qui, à leur tour, ont délégué des pouvoirs aux chefs d’administration et à des fonctionnaires chargés des achats qualifiés.  En conséquence, un seuil plus élevé pour les marchés de faible valeur et un examen unique par les comités des marchés ont été mis en place.  Les achats de biens et services à haut risque, d’un coût élevé ou intrinsèquement complexes, considérés comme des biens et services stratégiques, seront effectués en s’appuyant sur l’appui opérationnel central assuré par le Département de l’appui opérationnel.  C’est également ce Département qui, au niveau central, aura le pouvoir de signer les lettres d’attribution. 

Il revient à la Division de la transformation opérationnelle et des questions de responsabilité du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité de surveiller et d’évaluer l’exercice des pouvoirs délégués en matière d’achats.  Par ailleurs, le Comité d’examen des adjudications permet aux soumissionnaires non retenus de contester une procédure de passation des marchés concurrentielle ayant donné lieu à une adjudication de plus de 200 000 dollars. 

Des mesures et mécanismes supplémentaires sont aussi prévus pour renforcer la transparence et le contrôle, notamment la mise au point d’un tableau de bord permettant de visualiser des données en temps réel dans Umoja, la mise en place de restrictions après la cessation de service, la protection des lanceurs d’alerte, la formation à la déontologie, l’application du Code de conduite des fournisseurs des Nations Unies et la mise en œuvre du dispositif de transparence financière.

Le CCQAB estime qu’il est urgent d’instaurer un dispositif de responsabilisation solide et opérationnel.  En la matière, le rôle du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité devrait être davantage défini et rendu opérationnel.

Comme le Bureau régional d’achat d’Entebbe a été renommé « Section de l’appui aux achats » et rattaché directement au Bureau du Directeur de la Division des achats, le Comité consultatif relève que le Secrétaire général ne propose pas d’élargir le rôle actuel du Bureau, lequel se limite pour l’essentiel à l’Afrique et que ses effectifs resteraient maintenus à 22 postes.  Comment le Bureau pourrait s’acquitter d’un rôle à l’échelle mondiale?  Toute proposition tendant à modifier le nom, la structure, les rôles et les fonctions du Bureau, découlant du projet de gestion de la chaîne d’approvisionnement, nécessite l’approbation de l’Assemblée, tranche le CCQAB. 

Quant à la proposition de créer un nouveau type de centre régional d’achat, consacré à l’information, aux savoirs et au renforcement des capacités dans la région de l’Asie et du Pacifique ou dans celle de l’Amérique latine et des Caraïbes, le CCQAB compte que le Secrétaire général la justifiera pleinement en fournissant une analyse de l’emplacement, des fonctions, des avantages mesurables et des incidences financières.  S’agissant de l’attribution de marchés à des fournisseurs issus de pays en développement et de pays en transition, il estime que le Secrétaire général devrait analyser l’incidence des séminaires et formations organisés, notamment en renforçant la participation aux appels d’offres des fournisseurs de ces pays.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. BAMYA de l’État de Palestine, a noté le risque que le statu quo dans les activités d’achat au Secrétariat, malgré la réforme de la gestion.  Il a appelé à des mesures « plus actives et plus innovantes » afin de promouvoir une participation plus large et plus significative des fournisseurs des pays en développement.  Il a estimé que la délégation de pouvoir doit être accompagnée de suffisamment de directives, de moyens et de mécanisme de responsabilité.  Notant l’introduction d’application mobile d’information générale sur les achats, M. Bamya a souligné que toutes les initiatives doivent être appliquées de manière cohérente, universelle, non-discriminatoire et transparente.  Mon Groupe, a-t-il promis, cherchera des informations détaillées sur les efforts réalisés pour atteindre les fournisseurs qui ne sont pas en mesure d’accéder au système.  Quant à la notion d’achat durable, il s’est étonné que le Secrétariat insiste sur ce concept alors que l’Assemblée générale ne l’a pas encore approuvé.  Ce concept doit s’appuyer sur une analyse raisonnable de sa définition et de la manière dont il peut être appliqué concrètement à l’ONU. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, Mme CAROLINE NALWANGA MAGAMBO (Ouganda) a demandé une réflexion, au sein du Secrétariat, sur la responsabilité qui peut être partagée et l’autorité qui être déléguée.  Nous comptons que le rôle du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité dans la surveillance et l’évaluation de la fonction achat soit plus définie afin de renforcer les mécanismes de conformité et de responsabilité.  Mon Groupe, a-t-elle dit, demande au Secrétaire général de continuer d’explorer d’autres moyens novateurs de promouvoir les achats en Afrique qui est un » partenaire important et unique ».  Saluant le changement de nom du Bureau régional d’achat d’Entebbe qui devient Section de l’appui aux achats, Mme Magambo s’est réjouie de l’intention du Secrétaire général de renforcer ce bureau conformément à la résolution 72/266B de l’Assemblée générale.  Elle a voulu en savoir plus sur la manière dont le Bureau assumera un « rôle mondial » étant donné qu’aucune information ni analyse n’a été fournie sur les améliorations apportées, ni sur l’efficacité, les économies, les avantages qualitatifs et quantitatifs.  Avant de terminer, elle a réitéré la nécessité d’un système d’achat transparent qui prenne en compte les spécificités sur le terrain et d’un système de responsabilité bien défini.  Elle a ajouté la nécessité de développer des stratégies d’achat et des processus de planification afin de consolider les acquis et d’éviter les opérations d’achat non coordonnés, la dispersion des efforts multiples et une utilisation inefficace des ressources.  Il faut équité, égalité et non-discrimination dans les opportunités d’affaires avec les Nations Unies, en particulier pour les fournisseurs africains, a-t-elle insisté. 

M. SERGE CHRISTIANE de l’Union européenne a appuyé les efforts pour une fonction achat plus stratégique, une coopération renforcée entre les entités onusiennes et une professionnalisation accrue du personnel des achats.  Le délégué a défendu un accès « juste et transparent » aux marchés de l’Organisation, y compris pour les prestataires venant de pays où l’ONU opère.  Il a salué les progrès accomplis pour une diversification géographique accrue des prestataires.  Il a souhaité un meilleur alignement entre les activités d’achat de l’ONU et les objectifs de développement durable.  Les activités doivent inclure des critères et des spécificités compatibles avec la protection de l’environnement, l’intégration sociale, le développement économique durable et la protection des droits de l’homme, a tranché le représentant.

M. BRIAN THOMAS CONROY (États-Unis) a indiqué qu’avec la réforme et la nouvelle approche intégrée de gestion de la chaîne d’approvisionnement, son pays s’attend à ce que la fonction achat continue d’évoluer pour devenir plus réactive, avec des contrôles et des contrepoids efficaces, y compris la séparation des responsabilités entre les fonctions commerciales et techniques tout au long du processus d’acquisition.  Le représentant a appuyé l’avis du CCQAB selon lequel la nouvelle structure intégrée exige un cadre de responsabilité robuste et opérationnel.  Il faut des capacités d’évaluation des résultats et la mise en place d’un système clair, simple et transparent de délégation des pouvoirs.  Cela veut dire les bons systèmes appropriés, le bon personnel et le bon contrôle interne suivant l’approche « trois lignes de maîtrise des risques ».  Le représentant a estimé qu’il y a d’autres moyens d’optimiser la prestation de services et de regrouper les activités d’achat, notamment en exploitant pleinement Umoja, en utilisant mieux les systèmes de contrats et en renforçant la collaboration et la coopération à l’échelle du système.  Nous encourageons également de nouveaux progrès dans la mise en œuvre de la méthodologie de soumission dans les services de fret aérien, a ajouté le représentant. 

M. DONG WEN (Chine) a souligné la nécessité d’une gestion plus « rigoureuse » des achats.  Les Départements doivent renforcer leur coordination afin de maintenir les coûts à un niveau raisonnable.  Le représentant a d’ailleurs fait observer les achats auprès des pays en développement ne représentaient que 38,7% de la valeur totale en 2017.  Il a appelé à la transparence, à la célérité et à la responsabilité. 

M. JOSEPH MASILA (Kenya) a plaidé pour une fonction achat plus stratégique et salué les efforts en faveur des fournisseurs des pays en développement et des pays en transition.  Les efforts en faveur d’une professionnalisation accrue des activités d’achat constituent un pas dans la bonne direction, a-t-il dit.  Une stratégie en matière d’achats robuste doit être basée sur une analyse empirique rigoureuse et des considérations financières saines afin de conduire à des décisions éclairées.  Enfin, le délégué a estimé que le rapport ne contient pas un niveau de détail et d’analyse suffisants. 

M. SERGEY B. KONONUCHENKO (Fédération de Russie) s’est dit favorable à des mesures supplémentaires de transparence pour une meilleure logique dans les décisions et une franche concurrence entre fournisseurs.  Le représentant a voulu des informations supplémentaires sur la mise en œuvre des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  Le prochain rapport du Secrétaire général devrait contenir plus de détails et renoncer à toutes considérations environnementales; l’Assemblée ne s’étant pas prononcée sur la question.  Que renferme le concept d’« achat durable »? a-t-il demandé.  Est-il applicable?  Les États Membres doivent d’abord discuter du bien-fondé de ce concept car « oui à la concurrence mais avec des critères clairs ».  En matière de concurrence, « il n’y a pas qu’Adam Smith ».  Il y a aussi des États Membres et des personnels dont il faut protéger les compétences. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: le Conseil de sécurité proroge de six mois le mandat de la MANUA, sans le modifier en raison de divergences entre ses membres

8485e séance – après-midi
CS/13739

Afghanistan: le Conseil de sécurité proroge de six mois le mandat de la MANUA, sans le modifier en raison de divergences entre ses membres

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, prorogé jusqu’au 17 septembre 2019 le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), sur fond de désaccords entre ses membres. 

La résolution 2640 (2019) a pu être adoptée à l’unanimité des « quinze » parce qu’elle proroge seulement de six mois, au lieu de 12, le mandat actuel* de la Mission et parce qu’elle ne le modifie pas.  Un autre projet de résolution présenté par l’Allemagne et l’Indonésie n’avait pas fait l’objet d’un consensus lors des négociations.

Le représentant allemand a confirmé que le texte adopté ne correspond pas à celui sur lequel les deux délégations porte-plumes ont travaillé ces dernières semaines, et autour duquel pourtant un consensus « très fort » aurait émergé.  Malheureusement, a-t-il déclaré, des « questions sans rapport » avec la MANUA ont rendu « impossible » de mettre aux voix le projet initial, qui faisait référence à des éléments importants tels que les élections à venir, les droits des femmes et la protection des enfants.  Un regret également exprimé par son homologue afghane, qui a constaté la « divergence d’opinions » entre les membres du Conseil de sécurité.

« Nous avons maintenant six mois pour réfléchir en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain », a ajouté le délégué allemand, secondé par l’Indonésie, qui a toutefois pris note de l’unité démontrée par le Conseil de sécurité au moment du vote sur le texte de compromis.

Pour la représentante de la France, il est regrettable que « des divergences entre certains membres du Conseil autour de sujets sans lien direct avec le mandat de la MANUA, voire avec les responsabilités du Conseil, nous conduisent à […] un renouvellement technique de six mois ».  C’est la raison pour laquelle elle a souhaité que ce délai soit mis à profit pour « dépasser » les différends bilatéraux et revenir au « cœur » du mandat.

Les États-Unis ont nommément accusé la Chine d’avoir pris le Conseil « en otage » de ses « priorités politiques nationales » -en particulier l’Initiative « Une Ceinture et une Route »- « en dépit de ses liens ténus avec l’Afghanistan et de ses problèmes connus de corruption, de surendettement, de dégâts environnementaux et de manque de transparence ».

Des propos rejetés par le délégué chinois, qui a reproché à son collègue américain ses « préjugés » au sujet de cette Initiative, laquelle, s’est-il enorgueilli, est saluée depuis six ans par la communauté internationale et vise notamment à appuyer le développement de l’Afghanistan grâce à des partenariats.  Selon lui, cette initiative de coopération économique, qui met l’accent sur la transparence et le « respect des règles de l’économie de marché », ne répond à « aucune considération géopolitique ».  Au contraire, a ajouté le délégué, c’est l’entêtement d’un autre membre du Conseil à rejeter les contributions positives des autres qui a « empoisonné » l’atmosphère des négociations.

La Fédération de Russie a concouru à cette lecture de la situation, en affirmant que la Chine avait joué un rôle important pour trouver des « solutions acceptables ».  La délégation a, pour sa part, fustigé les « méthodes de travail » du Conseil, blâmant une « influence venue de l’extérieur » qui n’est pas « acceptable ».  Par ailleurs, certains membres, a-t-il poursuivi, ont préféré « ignorer » des formulations préalablement agréées, « mettant à mal nos efforts » pour régler les problèmes de l’Afghanistan.

La Belgique a regretté que le Conseil n’ait pu parvenir à un consensus sur une résolution plus détaillée, soulignant qu’un mandat d’un an aurait permis une meilleure planification des tâches.  Notant que l’Afghanistan fait face à l’impact des changements climatiques, la Pologne a pour sa part encouragé le Gouvernement afghan à œuvrer à l’élaboration de stratégies de gestion des risques pour faire face aux défis liés à la paix et à la sécurité.  Le Royaume-Uni a, quant à lui, rappelé l’importance de l’échéance de l’élection présidentielle prévue en juin 2019.

Dans le libellé de la très brève résolution adoptée aujourd’hui, le Conseil « considère que le mandat renouvelé de la MANUA appuie l’idée de voir l’Afghanistan assumer pleinement le contrôle et la prise en charge des domaines de la sécurité, de la gouvernance et du développement, conformément aux objectifs de la Décennie de la transformation (2015-2024) ».

Le texte souligne enfin qu’il est crucial de pouvoir compter sur une présence ininterrompue et adéquate de la Mission et des organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans les provinces, « agissant en étroites consultation et coordination avec le Gouvernement afghan et à l’appui de ses priorités » pour répondre aux besoins et assurer la sécurité.

*CS/13240

LA SITUATION EN AFGHANISTAN (S/2019/193)

Texte du projet de résolution S/2019/223

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions antérieures sur l’Afghanistan, en particulier sa résolution 2405 (2018) portant prorogation jusqu’au 17 mars 2019 du mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA),

Mettant l’accent sur le rôle important que l’Organisation des Nations Unies continuera de jouer dans la promotion de la paix et de la stabilité en Afghanistan,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de l’Afghanistan, ainsi que son appui continu au Gouvernement et au peuple afghans, qui reconstruisent leur pays et renforcent leurs institutions démocratiques,

Soulignant qu’il est important qu’un processus politique global et inclusif, dirigé et contrôlé par les Afghans, favorise un règlement pacifique du conflit et un règlement politique complet, et saluant les progrès accomplis à cet égard,

Rappelant la volonté du Gouvernement et du peuple afghans de renforcer la position de leur pays en tant que plateforme de la coopération internationale,

Se félicitant du consensus stratégique qui s’est établi entre le Gouvernement afghan et la communauté internationale quant au Cadre de responsabilité mutuelle de Genève adopté à la Conférence de Genève,

1.    Accueille avec satisfaction le rapport du Secrétaire général en date du 28 février 2019 (S/2019/193) ;

2.    Salue la détermination de l’Organisation des Nations Unies à collaborer durablement avec le Gouvernement et le peuple afghans, réaffirme son soutien sans réserve aux activités de la MANUA et du Représentant spécial du Secrétaire général, et insiste sur la nécessité de continuer à doter la MANUA de ressources suffisantes pour qu’elle puisse s’acquitter de son mandat ;

3.    Prend note avec satisfaction des efforts que fait la MANUA pour donner suite aux conclusions issues de l’examen stratégique de la Mission, des tâches qui lui sont confiées, des priorités définies et des ressources correspondantes ;

4.    Décide de proroger jusqu’au 17 septembre 2019 le mandat de la MANUA, tel que défini dans ses résolutions 1662 (2006), 1746 (2007), 1806 (2008), 1868 (2009), 1917 (2010), 1974 (2011), 2041 (2012), 2096 (2013), 2145 (2014), 2210 (2015), 2274 (2016), 2344 (2017) et 2405 (2018), en particulier aux paragraphes 6 et 7 ;

5.    Considère que le mandat renouvelé de la MANUA appuie l’idée de voir l’Afghanistan assumer pleinement le contrôle et la prise en charge des domaines de la sécurité, de la gouvernance et du développement, conformément aux objectifs de la Décennie de la transformation (2015-2024) ;

6.    Demande à toutes les parties afghanes et autres parties internationales de se concerter avec la MANUA dans le cadre de l’exécution de son mandat et de l’action qu’elle mène pour promouvoir dans tout le pays la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé ;

7.    Souligne qu’il est crucial de pouvoir compter sur une présence ininterrompue et adéquate de la MANUA et des autres organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans les provinces, agissant en étroites consultation et coordination avec le Gouvernement afghan et à l’appui de ses priorités pour répondre aux besoins et assurer la sécurité, sur la base du principe d’unité d’action des Nations Unies et conformément à l’objectif d’efficacité de l’ensemble du système des Nations Unies ;

8.    Prie le Secrétaire général de lui présenter tous les trois mois un rapport sur l’évolution de la situation en Afghanistan dans lequel seront évalués les progrès réalisés au regard des critères définis pour mesurer et suivre l’avancement de la mise en œuvre du mandat, y compris au niveau infranational, et des priorités de la MANUA définies dans la présente résolution ;

9.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Décolonisation: le Séminaire régional pour les Caraïbes du Comité des Vingt-Quatre se tiendra à la Grenade du 2 au 4 mai 2019

2e séance plénière – après-midi
AG/COL/3330

Décolonisation: le Séminaire régional pour les Caraïbes du Comité des Vingt-Quatre se tiendra à la Grenade du 2 au 4 mai 2019

Cet après-midi, le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux (Comité des 24) s’est réuni pour fixer les préparatifs du Séminaire régional pour les Caraïbes, qui se tiendra à la Grenade du 2 au 4 mai 2019.

Ce Séminaire sur la mise en œuvre des activités relatives à la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme aura pour thème* « Accélérer la décolonisation grâce à un engagement renouvelé et à l’adoption de mesures pragmatiques ».

La Présidente du Comité, Mme Keisha McGuire, de la Grenade, a exprimé les remerciements des membres du Comité au Gouvernement de la Grenade, rappelant que c’est la deuxième année consécutive que le séminaire a lieu dans ce pays.  Elle a précisé qu’à la date de la dernière réunion du Comité, le 21 février 2019, aucun autre pays ne s’était porté volontaire pour l’accueillir.  Cette année, la date a été légèrement avancée pour que le séminaire ne tombe pas pendant le mois du ramadan.

Compte tenu des réductions budgétaires supplémentaires pour la période biennale 2018-2019, en particulier pour ce qui est des voyages, le Comité a de plus en plus de mal à s’acquitter de ses deux mandats principaux, à savoir les visites dans les territoires non autonomes et l’organisation de séminaires régionaux.  La Présidente a donc appelé ses membres à faire savoir au plus tôt si oui ou non ils comptent participer au séminaire, de manière à éviter des coûts excessifs.

Le Comité a également décidé que l’anglais, le français et l’espagnol seront les trois langues officielles du séminaire.

La délégation officielle du Comité sera composée de 10 personnes, dont la Présidente, ses conseillers, les membres du Bureau et les représentants des quatre groupes régionaux.  La Présidente a indiqué attendre les nominations de ces représentants au plus tôt pour que le Secrétariat puisse commencer à préparer le voyage de tous les participants.

Le Comité va inviter, à ses frais, un certain nombre d’experts et de représentants d’ONG à participer au séminaire, ainsi que des représentants élus ou nommés de territoires non autonomes.

Seront également conviés des représentants de puissances administrantes, d’autres États Membres, d’agences spécialisées des Nations Unies et d’organisations régionales sont également invités à venir, mais leurs frais de voyage et d’hébergement ne seront pas pris en charge par l’ONU. 

En début de séance, la Présidente a exprimé les condoléances des membres du Comité aux victimes de l’accident d’avion d’Ethiopian Airlines ainsi qu’à celles de l’attaque d’aujourd’hui contre deux mosquées en Nouvelle-Zélande.

 

*     A/AC.109/2019/19

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Commission de la condition de la femme: examen de six rapports nationaux et discussion sur « les femmes et les filles d’ascendance africaine »

Soixante-troisième session,
7e & 8e séances plénières – matin & après-midi
FEM/2176

Commission de la condition de la femme: examen de six rapports nationaux et discussion sur « les femmes et les filles d’ascendance africaine »

Chaque jour dans le monde, 137 femmes sont tuées par un membre de leur famille.  Ces chiffres macabres d’ONU-Femmes datant de 2017 laissent voir l’ampleur du fléau de la violence sexuelle et sexiste, l’un des sujets phares abordés ce matin par les six délégations (Cabo Verde, Honduras, Panama, Arabie saoudite, Slovaquie et Algérie) qui ont conclu la série d’exposés volontaires lancée hier après-midi sur le thème « Autonomisation des femmes et lien avec le développement durable ». 

Ces pays ont ainsi présenté des initiatives mises en place chez eux pour lutter contre un phénomène qui touche également « les femmes et les filles d’ascendance africaine ».  Ces dernières étaient au cœur du sujet de la table ronde de l’après-midi, au cours de laquelle les intervenants ont souligné le racisme qui est à la base de cette violence et des discriminations à l’égard des femmes.

« La violence à l’égard des femmes et des filles touche toutes les générations, ne connaît pas de frontières géographiques et est considérée comme un obstacle majeur à la réalisation des droits de la personne et à la concrétisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », reconnaît l’Assemblée générale dans sa résolution 70/1.  Ainsi, pas moins de 70% des femmes dans le monde ont subi au cours de leur vie de la violence physique ou sexuelle de la part de leur partenaire intime, alors qu’au moins 200 millions de femmes et de filles ont subi une forme de mutilation génitale.

En plus de la violence physique qui est la plus médiatisée, car la plus visible, on note également la violence psychologique, y compris le harcèlement qui prend de l’ampleur dans les environnements numériques.  Un tableau sombre qui oblige donc les pays à agir. 

C’est ainsi qu’au Honduras, un programme pour l’égalité des genres appelé « Ciudad Mujeres » met en place les moyens de lutte contre la violence à l’encontre des femmes dans les cinq départements les plus affectés du pays, par le biais d’un « mécanisme pour les femmes ».  En Slovaquie, un numéro de téléphone vert permet aux femmes en détresse de communiquer 24 heures sur 24, tandis que le projet « Her Story » a permis de publier des manuels scolaires promouvant l’égalité des sexes. 

Au Panama, l’arsenal juridique a été modifié afin de punir plus sévèrement les auteurs de ces crimes, notamment pour les cas de féminicides.  De même, le pays accorde du prix à l’autonomisation économique des femmes et entend les aider à s’émanciper de la dépendance économique de leurs conjoints qui, dans certains cas, sont également leurs bourreaux.  Autre exemple au Cabo verde où, après avoir purgé leur peine, les auteurs de violence sont astreints à un programme de réhabilitation pour empêcher une rechute dans la spirale de la violence.

ONU-Femmes a recensé 144 pays qui ont adopté des lois sur la violence domestique et 154 sur le harcèlement sexuel.  Cependant, même lorsque des lois existent, cela ne signifie pas qu’elles sont conformes aux normes et recommandations internationales ou qu’elles sont appliquées.  Le Programme d’action de Beijing de 1995 identifie pourtant les mesures spécifiques que les gouvernements doivent prendre pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes et des filles. 

Ces dernières années, toujours selon ONU-Femmes, les voix des survivants et des activistes, à travers des campagnes telles que #MeToo, #TimesUp, #Niunamenos, #NotOneMore, #BalanceTonPorc et d’autres, ont atteint un crescendo qui ne peut plus être réduit au silence.  Il est question de braquer les projecteurs sur les histoires des filles et femmes.

C’est pour répondre à ce besoin de sensibilisation, en particulier aux problèmes des femmes et filles d’ascendance africaine, que la déléguée d’Afrique du Sud, intervenant au cours de la table ronde de l’après-midi, a suggéré la création d’une « instance permanente des personnes d’ascendance africaine ».  Elle a mis sur le compte de l’esclavage, de la traite des Noirs et de la colonisation, la perpétuation jusqu’à aujourd’hui de la discrimination à l’égard de ces personnes.  Plusieurs intervenants, dont deux expertes, ont plaidé pour améliorer la collecte de données sur ce fléau, des données qui doivent être « ventilées » et « ethnico-épidémiologiques ».

La Coordonnatrice générale du Réseau des femmes africaines, latino-américaines, afro-caribéennes et de la diaspora a observé que la violence à l’égard de ces femmes revêt des composantes racistes, et que « ces jeunes filles finissent par en avoir assez d’être noires », ce qui leur occasionne énormément de problèmes psychologiques et d’estime de soi.  Ayant 50% de moins de chances d’avoir un emploi que les autres femmes, les femmes d’ascendance africaine sont surreprésentées parmi les travailleuses domestiques, a-t-elle aussi remarqué.  Un problème auquel on peut remédier en commençant par améliorer le taux de scolarisation des filles d’ascendance africaine, ce que fait le Brésil par le biais de politiques de discrimination positive.

Demain, vendredi 14 mars, à 15 heures, la Commission de la condition de la femme tiendra un débat interactif sur les synergies et les financements pour faire avancer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles. 

SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE » (E/CN.6/2019/2 et E/CN.6/2019/5)

Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives (E/CN.6/2019/3)

Thème de l’évaluation: autonomisation des femmes et lien avec le développement durable (conclusions concertées de la soixantième session) (E/CN.6/2019/4)

Dialogue interactif

Cabo Verde

Mme MARITZA ROSABAL PEÑA, Ministre de l’éducation, de la famille et de l’inclusion sociale de Cabo Verde, a déclaré que les femmes représentent 52,9% des pauvres du pays et 53,7% des chômeurs.  De plus, 58,4% des femmes du pays sont inactives, dont 22% à cause du poids des tâches ménagères.  En matière de participation, les femmes représentent 23% des parlementaires de Cabo Verde. 

Le Gouvernement a introduit les objectifs de développement durable dans les plans nationaux, en veillant à avoir des indicateurs sensibles au genre pour évaluer les efforts du pays en matière d’autonomisation des femmes et des filles, a indiqué la Ministre.  Dans les plans stratégiques de développement des municipalités comme dans les plans d’action des ministères, l’aspect genre occupe désormais une place prépondérante.  Mme Peña a précisé que le budget national tient également compte de la sexospécificité.  Désormais, la plupart des programmes sociaux, comme l’accès au logement pour les plus démunis, ciblent en priorité les femmes.  Dans le domaine scolaire, par exemple, aucune jeune femme ne peut plus être mise en congé du fait d’une grossesse.

La Ministre a également donné des exemples de ce qui s’est amélioré sur les plans juridique et judiciaire.  Dans le cadre de la lutte contre les violences sexistes, les enquêtes criminelles sont obligatoires en cas de crime sexiste, a-t-elle indiqué.  Elle a aussi parlé d’un programme de réhabilitation des personnes condamnées pour ce type de crime, récemment lancé par le Gouvernement. 

Après cette présentation, la déléguée de l’Espagne a demandé quel rôle les partenaires internationaux pourraient jouer pour renforcer l’autonomisation des femmes de Cabo Verde.  Cabo Verde, a répondu la Ministre, est récemment passé dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire et, de ce fait, il ne peut plus bénéficier de certaines facilités propres aux pays les moins avancés.  Elle a néanmoins souhaité que l’Espagne, « un partenaire traditionnel de Cabo Verde », poursuive sa collaboration avec le pays.  Le Gouvernement entend également exploiter les possibilités offertes par la coopération triangulaire, a ajouté la Ministre.

Le représentant de l’Uruguay, « autre pays du Sud », est intervenu pour saluer sa collaboration avec Cabo Verde.  « Nous remercions l’Uruguay qui nous a ouvert la voie », a réagi la Ministre de Cabo Verde, avant d’expliquer que ce pays avait en effet offert son assistance technique pour l’amélioration du cadre réglementaire de protection des femmes à Cabo Verde, ce qui avait permis à celui-ci de « gagner du temps ».

Honduras

La Ministre en charge de l’Institut national des femmes du Honduras, Mme ANA AMINTA MADRID, est venue brosser un tableau des acquis et des efforts en cours au Honduras pour l’autonomisation des femmes en lien avec le développement durable.  Le Honduras a une feuille de route détaillée pour son développement durable qui intègre la dimension parité entre les sexes, a d’abord expliqué la Ministre. 

La délégation a fait une présentation ce matin en utilisant un support vidéo, préparé en collaboration avec les organisations de la société civile, pour dévoiler les différents domaines d’action des politiques publiques, notamment à travers un programme appelé « Ciudad Mujeres ».  Ce programme prévoit des actions non seulement pour la lutte contre les violences faites aux femmes et la lutte contre le mariage et les grossesses précoces, mais aussi en faveur de la jouissance des droits économiques et de l’accès au microcrédit, à l’éducation et à la formation professionnelles pour les femmes.  Il comprend aussi des directives pour le renforcement des cadres normatifs et législatifs et pour les investissements dans le domaine de la santé, y compris sexuelle et reproductive, et la planification familiale, ainsi que des actions de lutte contre le trafic de femmes.  Depuis l’entrée en vigueur de ce programme, le nombre de morts violentes de femmes a baissé de 45%, mais 52% de cas de plus de violence domestique ont été rapportés.

Une des représentantes de la délégation du Honduras qui vient de la société civile a mis en exergue le rôle de cette dernière dans ces efforts.  Il va falloir, selon elle, créer des mécanismes pour garantir l’application effective des nouvelles lois, ce qui suppose un engagement de la part de tous les acteurs du secteur public.  Si la représentante de la société civile hondurienne a salué la volonté politique de l’État de mettre en application le cadre normatif, elle a relevé que les droits sexuels et reproductifs sont toujours débattus.  À son avis, de nouvelles mesures s’imposent pour appliquer les lois dans ce domaine.  Par ailleurs, il faut créer des mécanismes pour venir en aide aux femmes victimes de violence, mais le pays se heurte à des problèmes de financement, a-t-elle regretté. 

Commentant ces exposés, la représentante de la République dominicaine a salué les progrès réalisés par le Honduras en matière d’égalité entre les sexes.  Elle a demandé à la Ministre de donner plus d’informations sur le programme « Ciudad Mujeres ».  Son homologue du Panama a également salué le travail accompli par l’Institut national des femmes au Honduras.  Elle a demandé des précisions sur la façon dont le Gouvernement aborde la mise en œuvre au niveau local des programmes nationaux en faveur des femmes.

Dans sa réponse, la Ministre du Honduras a expliqué que l’initiative « Ciudad Mujeres » est le programme qui permet de mettre en application la politique sur le genre du Gouvernement dans tous les secteurs.  Les 14 institutions qui y participent déclinent ainsi les nouvelles orientations et politiques de parité hommes-femmes dans le travail et dans l’éducation, de réduction de la violence à l’égard des femmes et du nombre de grossesses précoces, d’accès aux services de santé et à l’aide à l’enfance.  L’Institut national des femmes, qui est chargé de cette politique, participe de manière active à l’ensemble de ce processus.  Un « mécanisme pour les femmes » est chargé plus spécifiquement de la lutte contre la violence à l’égard de femmes et les grossesses précoces dans les cinq départements les plus frappés par ces phénomènes.  Une action est également menée au niveau des villes pour qu’elles disposent de budgets adéquats leur permettant d’intégrer une approche sexospécifique et de soutenir les orientations fixées par le programme « Ciudad Mujeres ».

Panama

Mme LIRIOLA LEOTEAU, Directrice de l’Institut national des femmes du Panama, a expliqué que les programmes nationaux ont été alignés sur les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le Gouvernement du Panama a aussi pris un ensemble de mesures, telles que la création d’une plateforme nationale en faveur des femmes.  Elle a parlé de « la fenêtre d’opportunités en faveur des femmes », un mécanisme présent dans toutes les provinces, et notamment près des communautés autochtones, afin de rapprocher les femmes des services sociaux essentiels.  Désormais, les services publics ayant un rôle à jouer pour l’égalité des sexes sont prioritaires pour recevoir des fonds publics, a ajouté Mme Leoteau, avant de signaler que la présence de femmes aux postes de direction a été renforcée dans l’administration. 

Dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes, les lois ont été revues afin de punir plus sévèrement les auteurs de ces crimes, notamment pour les cas de féminicides.  Les femmes politiques sont spécialement protégées afin de promouvoir leur engagement dans la vie publique.  De même, les femmes victimes de violence reçoivent un soutien pour qu’elles puissent quand même poursuivre leurs études et s’insérer dans le monde de l’emploi.  Le Panama accorde du prix à l’autonomisation économique des femmes et entend les aider à s’émanciper de la dépendance économique de leurs conjoints qui, dans certains cas, sont également leurs bourreaux.  Un tel constat a été fait grâce au travail de la police spécialisée en violence sexiste, qui a pu établir un profil des auteurs de violence. 

La présentation du Panama s’est terminée par une courte vidéo, en espagnol, mettant en exergue le dynamisme des femmes rurales.  La délégation de El Salvador a ensuite voulu savoir si les programmes sous-régionaux de soutien à l’entrepreneuriat féminin étaient aussi mis en œuvre au Panama.  Effectivement, a réagi la Directrice de l’Institut national des femmes du Panama, en précisant que le Panama met en œuvre le même programme qui a été lancé par le Conseil des ministres d’Amérique centrale.  Néanmoins, ce programme a été modifié pour tenir compte des spécificités de son pays, a-t-elle indiqué. 

La représentante de la République dominicaine a pour sa part salué les efforts déployés par le Panama, avant de s’enquérir des mesures de prise en charge des victimes de violence sexiste.  La Directrice de l’Institut national des femmes du Panama a répondu que les centres de soutien aux victimes ont, en leur sein, des personnels formés à cette tâche.  Elle a salué leur professionnalisme qui a contribué à faire baisser le taux de féminicide dans le pays.  À une question de la délégation du Honduras sur le fonctionnement des mécanismes locaux de soutien aux femmes, la délégation du Panama a expliqué que le Gouvernement avait établi des partenariats avec toutes les parties prenantes, notamment les organisations de la société civile, avant de confirmer « la volonté politique ferme du Panama d’améliorer la condition de la femme ». 

Arabie saoudite

Dans leur présentation conjointe, la Secrétaire d’État du Conseil des affaires de la famille de l’Arabie saoudite, Mme HALA ALTUWAJRI, et la Princesse HAIFA AL MOGRIN ont affirmé que le programme « Saudi Vision 2030 » est un programme ambitieux qui repose sur une société dynamique et une économie qui offre des chances à tous, notamment grâce à un environnement de travail adapté aux femmes.  Elle a fait état de différentes initiatives gouvernementales dont le but est d’accroître la part des femmes dans le secteur du travail à tous les niveaux. 

Les politiques et mesures adoptées par le Gouvernement saoudien sont intersectorielles et portent notamment sur le renforcement du cadre normatif.  Le Ministère du travail et du développement social a notamment interdit les inégalités salariales, tandis que le programme de transformation sociale à l’horizon 2020 contient des initiatives pour encourager les femmes à devenir économiquement indépendantes.  Ainsi, leurs moyens de transport sont pris en charge et des crèches sont mises en place.  De plus, au niveau universitaire, de nouveaux masters leur sont ouverts et 47% des diplômés sont des femmes. 

La Secrétaire d’État a signalé une hausse de la participation des femmes au marché du travail de 130% dans le secteur privé depuis 2016, ainsi qu’une augmentation de 113% de la représentation des femmes dans le système judiciaire depuis 2017.  En 2017, le pays a aussi connu une hausse de 150% des femmes occupant des postes diplomatiques.  Le Gouvernement encourage les femmes à occuper des postes de haut niveau, a insisté la délégation, qui a aussi reconnu le rôle de la société civile, notamment l’Assemblée Ennahdha, qui offre aux femmes les compétences nécessaires pour devenir les leaders de demain.

L’autonomisation des femmes est promue par le biais de différents programmes politiques et en veillant à lever les obstacles sur le marché du travail, a résumé la représentante saoudienne qui n’a pas manqué de rappeler qu’en 2017, un décret a été passé pour lever l’interdiction de conduire pour les femmes.  Il existe également une plateforme d’audit qui veille au plein respect des règles en matière d’égalité entre les sexes dans le milieu du travail.  Elle a également indiqué que le congé de maternité est de 10 semaines, prorogeable d’un mois, et qu’il existe l’option d’un congé de parenté partiellement payé de trois ans.  La Secrétaire d’État a également parlé des prêts et des financements spécifiques accordés aux entreprises de femmes qui souhaitent devenir indépendantes économiquement. 

S’agissant de la collecte des données, Mme Altuwajri a précisé que l’Observatoire national pour les femmes en est chargé.  C’est un cadre de référence qui épaule les politiques nationales de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réalisation des objectifs de développement durable en tenant compte de la dimension du genre.  Il existe également une Commission de la femme dont le rôle est de mesurer et documenter la situation des femmes en Arabie saoudite.  Par ailleurs, le Bureau national de statistique développe désormais des données ventilées par sexes.  En conclusion, la Secrétaire d’État a affirmé que le Gouvernement saoudien cherche à promouvoir les mécanismes d’égalité entre les sexes en les rendant plus visibles sur les plans régional et international. 

Comment le Programme « Saudi Vision 2030 » défend-il le rôle des femmes dans les processus de prise de décisions et comment cadre-t-il avec les indicateurs de développement du Programme 2030? a demandé la représentante des Émirats arabes unis pour lancer la session de questions-réponses.  De son côté, la représentante des Maldives a souhaité connaître les mesures prises pour accroître la proportion des femmes sur le marché du travail à des poste de haut niveau.

Le Programme « Saudi Vision 2030 », a expliqué la délégation de l’Arabie saoudite, met l’accent sur l’inclusion des femmes à tous les niveaux, qu’il s’agisse de leur participation au marché du travail ou de leur carrière.  Elle a rappelé que l’Ambassadrice de l’Arabie saoudite en poste à Washington en ce moment est le fruit de cette vision qui doit permettre aux femmes de pouvoir prétendre à ce type de poste.  Elle a en même temps reconnu que la plupart des chômeurs dans son pays sont des femmes souvent instruites.  Il faut donc prévoir des mesures incitatives pour les femmes comme le travail à temps partiel ou à domicile, des formations professionnelles et la création de crèches, pour leur permettre de trouver un équilibre entre travail et famille.

Slovaquie

Mme LUBICA ROZBOROVA, experte du Département de l’égalité des sexes et de l’égalité des chances au Ministère du travail, des affaires sociales et de la famille de la Slovaquie, a présenté la stratégie nationale d’égalité des sexes 2014-2019 qui guide les actions du pays dans le cadre de l’autonomisation des femmes.  Cette stratégie s’accompagne d’un plan d’action national qui compte 64 actions prioritaires.  De plus, une nouvelle loi contre la discrimination prévoit des mesures de discrimination positive en faveur des femmes.

La lutte contre les violences faites aux femmes est coordonnée sur le plan national, avec notamment un numéro de téléphone vert pour permettre aux femmes en détresse de pouvoir communiquer 24 heures sur 24.  En outre, un projet « Her story » qui vise les élèves a permis de publier des manuels scolaires promouvant l’égalité des sexes.  Un documentaire et des courtes vidéos vont suivre afin de mieux sensibiliser les jeunes sur ces questions.  De nombreux projets nationaux en matière d’autonomisation bénéficient du soutien de l’Union européenne (UE), a souligné Mme Rozborova.

La délégation du Luxembourg a d’ailleurs voulu savoir de quels partenariats la Slovaquie bénéficie dans cette lutte contre les violences à l’encontre des femmes.  La déléguée de la Slovaquie a répondu en mentionnant de nouveau des fonds européens qui ont permis de lancer une campagne contre la violence sexiste dans les médias sociaux en avril 2017, une campagne qui ciblait les jeunes de moins de 20 ans. 

La préoccupation de la délégation de la Namibie s’est portée sur le partage des tâches domestiques et les mesures qui facilitent le travail des femmes.  La Slovaquie a répondu en citant des initiatives comme ce concours des meilleures entreprises qui vise à créer l’émulation chez les employeurs mettant en œuvre des mesures facilitant le travail des jeunes mères ou appliquant des politiques d’égalité salariale.  Un autre exemple est ce projet intitulé « Famille et travail » qui permet à l’État d’octroyer des subventions directes aux entreprises privées créant des crèches en leur sein.  En outre, les pères sont également encouragés à participer à la garde des enfants en bas âge, moyennant des allocations gouvernementales.  Ces incitations financières ont permis certaines avancées, puisqu’on est passé de 26 pères engagés dans ce programme en 2009 à 705 en 2018.

Algérie

La Ministre de la solidarité nationale, la famille et la condition de la femme de l’Algérie, Mme GHANIA EDDALIA, a abordé dans un premier temps les progrès engrangés par les femmes africaines « qui reflètent les espoirs de l’Afrique en termes de paix et de justice sociale », citant à cet égard les objectifs de l’Agenda 2063 et de la Décennie de la femme africaine 2010-2020 de l’Union africaine.

S’agissant de l’Algérie, la question des femmes a été intégrée dès 1962, date de l’indépendance, dans les politiques nationales, notamment par le renforcement des institutions et de la législation.  La Constitution algérienne, qui a été amendée en 2016, garantit l’égalité des chances dans le monde du travail, tandis que le Code pénal criminalise le harcèlement sexuel et la violence verbale, physique et psychologique. 

En outre, le nombre de femmes élues a augmenté en Algérie: elles représentent actuellement 30% des élus aux niveaux national et local.  Quatre partis politiques ont une femme à leur tête et il y a eu des candidates à la présidence, a précisé la Ministre.  En ce qui concerne la lutte contre la violence à l’égard des femmes, elle est menée sur tout le territoire par son ministère.  Par ailleurs, il existe des centres d’aide aux victimes de violence domestique et des centres de soins pour les femmes âgées.

Alors que 60% des diplômés universitaires sont des femmes en Algérie, l’État cherche à encourager l’entrepreneuriat des femmes, notamment par un programme de microcrédit ainsi qu’un programme national de soutien aux femmes rurales.  L’Algérie compte quatre femmes générales dans l’armée, et 24% de ses forces de sécurité sont des femmes, a poursuivi la Ministre.  Elle a souligné l’importance accordée par son gouvernement à la femme en tant qu’agent de la paix, en particulier au niveau du continent africain.  Elle a par ailleurs proposé de créer une banque de données, en coopération avec ONU-Femmes, pour disposer de statistiques ventilées par sexes, ce qui se fait déjà au niveau de chaque ministère. 

L’Algérie encourage les femmes à occuper des postes de responsabilité, a affirmé la Ministre en précisant que c’est d’ailleurs l’un de ses axes stratégiques.  En ce qui concerne le renforcement des mécanismes nationaux, l’Algérie dispose de différents outils pour promouvoir et protéger les femmes, à commencer par son Ministère de la solidarité nationale, la famille et la condition de la femme.  Il y a aussi le Conseil national pour les femmes, ainsi qu’une commission sectorielle traitant des questions sociales ou encore le Conseil national des droits de l’homme.  Le défi qu’il reste à relever en Algérie est de parvenir à la parité dans tous les domaines, a conclu la Ministre. 

Après avoir salué l’engagement politique du Gouvernement algérien en faveur de l’autonomisation des femmes et de la parité, la représentante de Cuba a voulu connaître les stratégies qui visent à augmenter la présence des femmes et des filles dans l’éducation supérieure.

La Ministre de l’Algérie lui a répondu que la politique algérienne en matière d’éducation se fonde sur le principe de l’éducation gratuite pour tous et la solidarité scolaire, et cela, du primaire jusqu’à l’université.  Cette stratégie a permis aux filles de poursuivre leur éducation « sans avoir à se poser de questions », y compris celles issues de milieux défavorisés que l’État soutient notamment par des cours supplémentaires et des bourses, ainsi que la gratuité des moyens de transport pour les étudiants universitaires.

Questions nouvelles, tendances, domaines d’intervention et approches novatrices en vue d’aborder les problèmes ayant une incidence sur la situation des femmes, notamment l’égalité des sexes

Dialogue interactif sur les femmes et les filles d’ascendance africaine

La table ronde de cet après-midi portait sur le rôle des femmes et des filles d’ascendance africaine dans la promotion de leur propre autonomisation et de l’égalité entre les sexes, ainsi que leur contribution au développement durable et au respect des droits humains.

« C’est pour nous, aujourd’hui, une opportunité de discuter des politiques et programmes pertinents dans deux champs de réflexion distincts », a expliqué le Président de la table ronde, M. MAURICIO CARABALI BASQUERO (Colombie), qui est l’un des vice-présidents de la Commission de la condition de la femme.  Tout d’abord, le renforcement de la participation politique et de l’autonomisation économique des femmes et des filles d’ascendance africaine, notamment par l’élargissement de l’accès à la protection sociale et aux services publics, à l’éducation, aux soins de santé et au logement.  Ensuite, répondre aux inégalités, à la discrimination et à la violence auxquelles font face femmes et filles d’ascendance africaine, y compris dans les problématiques interdépendantes de la langue, de l’origine sociale, de l’accès à la propriété et du handicap, entre autres. 

Mme DOMINIQUE DAY, membre du Groupe de travail d’experts des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine, a commencé par souligner la vulnérabilité des femmes et des filles de cette catégorie, une vulnérabilité « démultipliée » par l’« intersectionnalité » lorsque les femmes vivent avec plus d’une cause d’oppression, par exemple celles qui sont noires mais également lesbiennes.  L’experte a attiré l’attention sur les « arrestations massives » qui ont eu lieu cette semaine en relation avec le scandale de pots-de-vin dans les procédures d’admission aux universités, qui a révélé que des parents achetaient le droit d’entrée dans des établissements prestigieux pour leurs enfants.  « L’accès à l’université, c’est l’accès au pouvoir », a-t-elle résumé, et « l’argent peut acheter le pouvoir ».  Dans le même ordre d’idées, elle a relevé combien le patriarcat et le racisme limitent l’accès de certaines personnes à leurs droits fondamentaux, de la santé jusqu’aux processus politiques.  Pour donner les moyens de lutter contre ces problèmes, Mme Day a vigoureusement plaidé en faveur de systèmes de collecte de données ventilées, même si elle a reconnu qu’il est difficile de simplement « quantifier » l’accès d’une personne à ses droits. 

Il faut des « données ethnico-épidémiologiques » ventilées, a renchéri Mme CAREN PAOLA YAÑEZ, Coordonnatrice générale du Réseau des femmes africaines, latino-américaines, afro-caribéennes et de la diaspora, en y voyant une première étape de la lutte contre la pauvreté subie par les femmes d’ascendance africaine.  Celles-ci sont en effet trois fois plus nombreuses à être pauvres dans les centres urbains par rapport aux autres femmes.  De plus, avec moitié moins de chances d’avoir un emploi que les autres femmes, les femmes d’ascendance africaine sont surreprésentées parmi les travailleuses domestiques, a-t-elle ajouté.  Elles sont aussi sous-représentées dans les systèmes politiques de nos régions, a-t-elle déploré.  Mme Yañez a également souligné que la violence à l’égard de ce groupe comporte des composantes racistes.  « Ces jeunes filles finissent par en avoir assez d’être noires, ce qui leur occasionne énormément de problèmes psychologiques et d’estime de soi. » 

Mme BATHABILE OLIVE DLAMINI, de l’Afrique du Sud, a mis sur le compte de l’esclavage, de la traite des Noirs et de la colonisation la perpétuation jusqu’à aujourd’hui de la discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine.  Elle aussi a souhaité que soient levés les obstacles à la collecte de données ventilées, avant d’apporter son soutien à la création d’une « instance permanente des personnes d’ascendance africaine ».

Au Mexique, un cadre normatif interdit la discrimination et les entités fédérales ont adopté des lois correspondantes, a assuré Mme NADINE GASMAN, Présidente de l’Institut national des femmes (INMUJERES), tout en reconnaissant que la lutte contre les discriminations visant les femmes reste un « work in progress ».  Au Brésil, a enchaîné Mme ERONILDES VASCONCELOS CARVALHO, Secrétaire nationale des politiques en faveur des femmes, les politiques de lutte contre les discriminations à l’égard des femmes d’ascendance africaine se basent sur la reconnaissance de leur identité.  Par ailleurs, pour remédier à la faible scolarisation de ces filles, des politiques de discrimination positive ont été mises en place.

Au sujet de l’accès à l’enseignement supérieur, Mme VALDECIR NASCIMENTO, Coordonnatrice exécutive d’ODARA (Institut des femmes noires) au Brésil, a expliqué qu’au cours des 15 dernières années, son organisation s’était efforcée de promouvoir l’accès de tous à l’université, notamment des femmes noires.  Elle a accusé le nouveau Gouvernement de son pays d’être « raciste et fondamentaliste » et de pratiquer la discrimination raciale en se basant sur la religion.  Nous disposons, a-t-elle assuré, de données et d’instituts nationaux qui établissent de manière irréfutable que les personnes d’ascendance africaine sont les plus vulnérables au Brésil.  « Notre pays devrait avoir honte », a martelé la panéliste, en s’émouvant du fait que, chaque année, 32 000 personnes d’ascendance africaine sont tuées, la plupart du temps par la police.  Et maintenant l’État brésilien veut adopter une loi qui empêcherait de faire traduire devant les tribunaux les auteurs de ces meurtres, s’est-elle alarmée, en rappelant que celui de la militante LGBTQ Marielle Franco était toujours irrésolu.  Prévenant que nous allons « assister à un retour en arrière » dans son pays, elle s’est demandé comment ne pas créer une « société de laissés-pour-compte » dans de telles conditions. 

M. SAMI NEVALA, Directeur de programme au sein de l’Unité de la recherche et de la collecte de données de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, a expliqué qu’une fraction seulement des violences et des discriminations commises à l’encontre des femmes et des filles d’ascendance africaine était signalée.  Selon lui, le renforcement de l’autonomisation doit être une priorité et il faut multiplier les campagnes de sensibilisation pour dissuader les profilages raciaux et les délits de faciès. 

Pour sa part, Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a souligné l’impact que peut avoir non seulement le fait d’être noire, mais aussi d’être femme, ou encore d’appartenir simultanément à une minorité sexuelle.  Les femmes d’ascendance africaine sont sous-représentées au niveau politique, en raison d’un racisme qu’il faut déraciner, y compris au sein des institutions censées défendre les droits des femmes, dont l’ONU même, où la discrimination à leur égard existe, a déclaré la Directrice exécutive sous des applaudissements.  Elle a rendu hommage aux femmes noires qui militent dans certains des groupes les plus actifs de lutte contre le sexisme et le racisme.  « Les femmes d’ascendance africaine sont également les fers de lance du mouvement #MeToo », a poursuivi la Directrice exécutive.  Elle a ajouté qu’il faut continuer à s’organiser et à investir dans l’éducation « de nos filles » et dans une formation tout au long de la vie pour que celles-ci soient en mesure de constamment améliorer leur éducation. 

Lors de l’échange entre les panélistes et les délégations, le représentant du Brésil est intervenu pour condamner les actes de violence qui ont coûté, l’an dernier, la vie à Marielle Franco, assurant que traduire en justice ses meurtriers est une priorité de son gouvernement et de la ville de Rio de Janeiro.  Mais il a jugé tout à fait « irresponsable » d’accepter la présence de certaines délégations à la tribune.  « Nous comprenons l’émotion », néanmoins, nous ne pouvons prêter le flanc à de telles accusations, a tranché le délégué. 

Du côté des organisations non gouvernementales, la représentante de Bridge Foundation a expliqué qu’au nombre des initiatives prises par cette organisation de défense des droits des jeunes, figure celle lancée par trois déléguées canadiennes, et qui consiste à aider les jeunes d’ascendance africaine de Nouvelle-Ecosse à reprendre contact avec leurs familles et leurs racines dans leurs pays d’origine. 

La représentante de l’Association internationale des juristes démocrates a, pour sa part, critiqué l’incapacité des États-Unis à se pencher sur les causes sous-jacentes de la discrimination à l’égard des Noirs, en particulier des femmes.  Elle a cité en exemple Stacey Abrams, première Américaine noire à avoir obtenu l’investiture d’un des deux partis pour une élection de gouverneur, avant de mentionner le mouvement Black Lives Matter ou encore la Conférence nationale des avocats noirs, qui est présidée par une Noire.  S’exprimant au nom d’International Grail, une « Américaine congolaise du Bronx », comme elle s’est présentée elle-même, s’est demandé comment il serait possible d’apporter un soutien aux communautés issues de la diaspora africaine, en particulier aux États-Unis. 

La représentante de US Human Rights Network a quant à elle expliqué que l’esclavage connaît aux États-Unis une postérité dans le système carcéral, dans l’accès à l’éducation et aux emplois les mieux rémunérés.  Alors que les Africains-Américains ne forment que 13% de la population, ils représentent 30% de la population carcérale, a dénoncé l’intervenante.  Dans le domaine de la santé, les dépressions parmi les femmes noires sont de 50% supérieures au nombre de celles parmi les femmes blanches, a-t-elle poursuivi.  En outre, 27% des familles noires, souvent monoparentales, vivent en dessous du seuil de pauvreté alors qu’elles ne représentent que 11% des foyers monoparentaux.  C’est la raison pour laquelle elle a demandé l’adoption de « mesures spéciales » pour réduire les disparités dans les droits humains.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Commission de la condition de la femme: à un an de « Beijing+25 », États Membres, société civile et secteur privé font l’état des lieux

Soixante-troisième session,
5e & 6e séances plénières – matin & après-midi
FEM/2175

Commission de la condition de la femme: à un an de « Beijing+25 », États Membres, société civile et secteur privé font l’état des lieux

La Commission de la condition de la femme a poursuivi, aujourd’hui, les travaux de sa soixante-troisième session par une table ronde ministérielle, le matin, puis un examen des rapports de six pays (Italie, Qatar, Espagne, Philippines, Égypte et Bulgarie) sur le thème « Autonomisation des femmes et lien avec le développement durable », qui a entraîné un dialogue avec les délégations. 

La table ronde avait pour but d’examiner la suite donnée à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes –la fameuse Conférence de Beijing de 1995- et à la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, tenue en 2000, intitulée « Les femmes en l’an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle ».

Le coup d’envoi de ce débat de haut niveau a été donné par la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, qui a mis en exergue l’importance du partage des meilleures pratiques à des fins d’examen et d’évaluation, à la veille du vingt-cinquième anniversaire de la Conférence de Beijing.  Le but est d’accélérer les actions prévues dans le cadre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, l’agenda mondial pour l’amélioration des droits humains des femmes et des filles qui définit des objectifs stratégiques pour la réalisation de l’égalité des sexes dans 12 domaines critiques.

Mme Mlambo-Ngcuka a annoncé que 2020 serait « une année essentielle pour faire le point sur cette mise en œuvre », avertissant qu’il faudrait le faire « avec une honnêteté cruelle », en vue de mener les changements nécessaires et adopter des mesures concrètes pour combler les lacunes.  Elle a encouragé les jeunes, « ceux qui sont nés au moment de l’adoption de la Déclaration de Beijing et après », à y contribuer.

Près de 40 États Membres, souvent représentés au niveau ministériel, ont pris part à la table ronde, à laquelle ont également participé des représentants d’organisations régionales, d’ONG, ainsi que des parlementaires et des journalistes.  Les représentants de gouvernements ont dressé un tableau rapide des actions phares menées dans leur pays respectif pour appliquer les recommandations de Beijing, fournissant de nombreux exemples d’institutions spécialisées dans les droits et l’autonomisation des femmes et de mesures favorisant la parité dans les organes gouvernementaux.  L’Institut national de la femme (Argentine) et le Forum ministériel des femmes (Fidji) ont été mentionnés, parmi bien d’autres. 

Dans le cadre de ce débat, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a mis l’accent sur le rôle de premier plan que jouent les femmes en tant que défenseuses des droits de la personne et a exigé qu’elles soient prises en compte dans le contexte de Beijing+25.  Ces femmes, a-t-il remarqué, sont souvent ciblées et stigmatisées comme étant des personnes qui remettent en question des traditions et des dogmes culturels.

Lors des exposés volontaires des six délégations venues dans l’après-midi présenter leurs progrès, il a souvent été question de ce qui est fait dans le domaine de l’emploi.  Le Ministre du développement, du travail et des affaires sociales du Qatar s’est félicité du meilleur accès au marché du travail qu’ont désormais les femmes de son pays.  En Espagne, la loi prévoit une égalité salariale progressive: l’on vise d’abord les entreprises de plus de 250 employés puis celles de 100 et enfin de 50 employés. 

En Italie, pays qui s’est doté en 2017 d’une stratégie nationale sur l’égalité des genres, l’État facilite le financement des petites et moyennes entreprises (PME) dirigées par des femmes.  Il aide également les parents à payer les frais de crèche.  Pour ce qui est des Philippines, le congé maternité est passé de 60 à 105 jours.  Il bénéficie aux femmes employées dans le secteur public comme dans le secteur privé.

La Commission de la condition de la femme se réunira à nouveau demain, jeudi 14 mars, à 10 heures, pour continuer son dialogue avec les délégations présentant des rapports nationaux sur l’autonomisation des femmes en lien avec le développement durable.  Une table ronde se tiendra dans l’après-midi sur le sujet: « Les femmes et les filles d’ascendance africaine ».

SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE » (E/CN.6/2019/2 et E/CN.6/2019/5)

Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives (E/CN.6/2019/3)

Dialogue interactif de haut niveau sur l’accélération de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing: partage des meilleures pratiques à des fins d’examen et d’évaluation à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la conférence

Ce matin, la table ronde ministérielle de la Commission de la condition de la femme avait pour mission d’examiner la suite donnée à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes (1995) et à la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale (2000) qui s’intitulait « Les femmes en l’an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIe siècle ».

Le coup d’envoi de ce dialogue interactif de haut niveau a été donné par Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, qui a mis en exergue l’importance du partage des meilleures pratiques à des fins d’examen et d’évaluation, à la veille du vingt-cinquième anniversaire de la conférence de 1995, le but étant d’accélérer les actions prévues dans le cadre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.

C’était l’occasion non seulement pour de nombreux ministres et représentants de gouvernement, mais aussi pour des parlementaires, des journalistes et des représentants de la société civile, de brosser un tableau rapide des actions phares menées dans leurs pays pour atteindre cet objectif et notamment faire en sorte que l’égalité des sexes se traduise dans les politiques publiques et ailleurs.  Toutes les délégations ont réaffirmé leur engagement ferme à appliquer concrètement les recommandations du Programme d’action de Beijing y voyant des lignes directrices communes pour aller de l’avant.

De l’avis de la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, il est plus qu’opportun de commencer dès maintenant l’examen de ce qui a été réalisé au cours des 25 dernières années dans le contexte de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing sur le plan national.  Pour Mme Mlambo-Ngcuka, 2020 sera une année essentielle pour faire le point sur cette mise en œuvre et il faudra le faire « avec une honnêteté cruelle », en vue de mener les changements nécessaires et adopter des mesures concrètes pour combler les lacunes.  Elle a en outre souhaité que cela encourage les jeunes, « ceux qui sont nés au moment de l’adoption de la Déclaration de Beijing et après », à y contribuer.  Tous les secteurs de la société doivent être impliqués dans cette mise en œuvre au niveau national, a-t-elle prôné, suggérant notamment que les médias, les milieux universitaires et les secteurs publics et privés contribuent à la rédaction des rapports nationaux.  La Directrice exécutive d’ONU-Femmes s’est dite consciente du fait que le Programme d’action n’est pas toujours populaire mais, comme l’a dit le Secrétaire général hier, « il faut résister aux résistances ».

Sur la base des rapports nationaux que les pays sont en train de présenter et/ou de préparer, des rapports régionaux seront consolidés, a-t-elle précisé, et la session de l’Assemblée générale de 2020 sera l’occasion de présenter un état des lieux aux chefs d’État.  Avant cela, se tiendra le Forum international des femmes où la société civile pourra s’exprimer.  La France s’est proposée pour accueillir ce Forum, et le Mexique a annoncé ce matin vouloir coprésider ce Forum.  La chef d’ONU-Femmes compte aussi sur une participation importante des jeunes à cet évènement, tandis que la représentante de l’Alliance internationale des femmes y a vu la reconnaissance du rôle central que joue la société civile dans la promotion du Programme d’action de Beijing.

Cette annonce du Mexique s’inscrit dans l’engagement du pays en faveur de l’égalité entre les sexes, a expliqué la délégation en vantant la parité qui a été atteinte pour la première fois au sein du Gouvernement mexicain.

Au cours de la discussion, les délégations ont donné de nombreux exemples de la mise en place de mesures favorisant une telle parité dans les organes gouvernementaux et de la création ou de l’existence d’institutions spécialisées dans les droits et l’autonomisation des femmes.  Le Gouvernement de l’Espagne, par exemple, compte actuellement 65% de femmes, qui détiennent notamment les portefeuilles de l’économie et des finances.  Il y a aussi une commissaire nationale chargée de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui contribue à l’agenda des femmes, a indiqué la représentante avant d’expliquer que la sécurité sociale prend désormais en charge des congés parentaux de 16 semaines. 

En Argentine, a expliqué sa représentante, il existe un institut national de la femme qui est chargé de suivre les progrès dans l’égalité entre les sexes.  Il y a aussi un plan national en ce sens, datant de 2015, ainsi qu’un plan national d’égalité des chances.  La délégation des Fidji a également fait valoir les mesures prises sur le plan des institutions, comme la création du Forum ministériel des femmes, véritable espace de consultation et de collaboration efficace pour promouvoir les droits des femmes aux Fidji. 

Si un mécanisme national de promotion de la condition de la femme a été mis en place en Chine, la délégation a fait remarquer que la mise en œuvre du Programme d’action de Beijing passe notamment par une politique de développement qui s’appuie sur l’égalité hommes-femmes. 

La représentante de l’Union africaine a indiqué avoir fait un examen à mi-parcours de l’application du Programme d’action de Beijing en 2015, qui s’inscrivait aussi dans l’Agenda 2063 de l’Afrique.  L’année 2015 avait été sacrée l’Année de l’autonomisation des femmes pour l’Afrique.  Cet examen s’est concentré sur les réformes constitutionnelles et législatives dans lesquelles 16 pays africains se sont engagés, alors que 20 pays ont mis en place des plans d’action nationaux pour faire avancer l’égalité entre les sexes.  L’Union africaine estime cependant qu’il faut plus de soutien législatif et plus de ressources pour les mettre en œuvre.  L’Union africaine a également constaté une sous-représentation des femmes dans la sphère politique d’où l’intérêt des systèmes de quotas en Afrique.  La baisse du nombre des femmes dans les milieux politiques a également préoccupé l’Union interparlementaire.

Des quotas sont justement en place en Allemagne pour assurer la présence de 30% de femmes dans les conseils d’administration des compagnies et 50% dans la fonction publique.  L’Italie cherche aussi à promouvoir la présence des femmes dans le leadership des entreprises et accorde des financements sexospécifiques.

La Lettonie a donné un exemple de bonnes pratiques dans le domaine politique en indiquant que le Gouvernement fait activement participer les différentes parties prenantes dans la formulation et la mise en œuvre des politiques pour l’égalité hommes-femmes, y compris la société civile et les ONG.  En Irlande, un rapport sur la parité dans la sphère politique est en cours de préparation, a indiqué le représentant de ce pays, qui a expliqué que le Programme d’action de Beijing avait donné une impulsion politique à de nombreux changements sur le plan national, notamment de nouvelles lois. 

De son côté, la délégation australienne a fait état de progrès significatifs en termes de sécurité économique des femmes, et de l’emploi des femmes autochtones. 

Au Malawi, la Constitution a été amendée en 2017 pour faire passer l’âge de la majorité à 18 ans et éliminer l’exigence du consentement des parents pour lutter contre les mariages précoces.  La Zambie a adopté une approche similaire avec des mesures de lutte contre les mariages précoces et l’adoption de quotas d’enrôlement des filles dans l’éducation secondaire et universitaire.

Des investissements dans l’éducation des filles sont également faits en Sierra Leone, pays où les politiques et programmes cherchent à accélérer l’égalité hommes-femmes, y compris par le truchement de nouvelles législations et grâce au financement de projets de femmes.  Il reste néanmoins des écarts significatifs au niveau de l’enrôlement scolaire et les femmes sont toujours sous-représentées en politique. 

Une représentante de Google est venue soutenir le concept selon lequel les droits des femmes sont des droits numériques et vice versa.  C’est pourquoi Google a passé un partenariat avec ONU-Femmes pour faire connaître les histoires des femmes victimes de violences sexistes.  Elle a reconnu l’importance d’une approche sexospécifique dans les pays émergents pour que les femmes et les filles y « soient connectées ».  C’est l’engagement pris par Google.

Pour l’Union européenne la parité hommes-femmes est une question fondamentale dans le contexte de la réalisation des droits de la personne, y compris sexuels et génésiques.  Après l’adoption des Déclaration et Programme d’action de Beijing, l’Union européenne a mis en place des examens annuels, et l’esprit de Beijing a été repris dans la plateforme 2020 de l’Union et guide ses stratégies.

Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a mis l’accent sur le rôle de premier plan des femmes en tant que défenseuses des droits de la personne et a exigé qu’elles soient prises en compte dans le contexte de Beijing+25, compte tenu du fait qu’elles sont souvent ciblées et stigmatisées comme étant des personnes qui remettent en question des traditions et des dogmes culturels.

La représentante du Groupe de travail des Nations Unies sur la question de la discrimination à l’égard des femmes dans la loi et dans la pratique, qui se concentre sur les femmes privées de libertés et de droits, publie des rapports thématiques et fait des visites sur le terrain, y compris dans des pays non signataires de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  Elle a constaté des progrès significatifs depuis la Conférence de Beijing en termes de législation et de réduction des inégalités dans l’enseignement notamment mais, malgré ces réussites, les violations des droits des femmes persistent dans les secteurs public et privé.  Aujourd’hui, il existe même un risque de retour en arrière, a-t-elle averti.

Thème de l’évaluation: autonomisation des femmes et lien avec le développement durable (conclusions concertées de la soixantième session) (E/CN.6/2019/4)

Dialogue interactif

Italie

M. LORENZO FONTANA, Ministre de la famille et des personnes handicapées de l’Italie, a assuré que son pays s’engage à respecter ses promesses en matière de mise en œuvre des objectifs de développement durable, notamment en ce qui concerne l’objectif 5 sur l’égalité des genres.  Une stratégie nationale a été élaborée à cet effet en 2017 et cible cinq domaines majeurs qui sont identifiés comme les « cinq P »: les personnes, la planète, la prospérité, la paix et les partenariats. 

En dépit d’une plus grande participation des femmes dans le secteur économique, le Ministre a reconnu que des disparités persistent en matière salariale.  Il a aussi noté que la présence des femmes à des postes décisionnels au sein de la fonction publique est toujours rare.  L’État a tout de même consenti à faciliter le financement des petites et moyennes entreprises (PME) dirigées par des femmes. 

En outre, la question de la conciliation de la vie familiale avec la vie publique est centrale en Italie, notamment, a expliqué M. Fontana, dans un contexte démographique européen marqué par la baisse du taux de natalité.  De ce fait, le Gouvernement aide les parents à payer les frais de crèche, tandis que les horaires de travail sont assouplis pour les parents dont les enfants nécessitent des soins particuliers.  Le Ministre a indiqué que l’autonomisation des femmes passe également par la lutte contre la violence sexiste.  Un plan stratégique de lutte contre la violence faite aux femmes a ainsi été établi.  Globalement, les données fournies par l’Institut national de statistique permettent de mesurer les améliorations en rapport avec les cibles de l’objectif 5 de développement durable.

Après cet exposé, le délégué de la Bulgarie a demandé des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement italien.  Le Ministre Fontana, d’Italie, a répondu que les parents d’enfants de moins de 3 ans reçoivent une allocation mensuelle de 1 500 euros.  De plus, une aide supplémentaire est octroyée aux parents d’enfants souffrant de maladies chroniques.  Le Ministre a ensuite réagi à une interpellation du Mexique, qui voulait savoir comment la stratégie nationale de développement durable avait été élaborée.  Elle a été rédigée en 2016 et publiée en 2017, a-t-il répondu.  La stratégie, qui s’aligne sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, tient compte des lacunes du pays et identifie les moyens d’y remédier. 

Qatar

M. YOUSIF BIN MOHAMMED AL-OTHMAN FAKHROO, Ministre du développement, du travail et des affaires sociales du Qatar, a fait part des avancées dans le statut de la femme au Qatar, signalant en particulier un meilleur accès au marché du travail.  Environ 37% des femmes âgées de 25 ans à 29 ans y ont accès, contre 49% des femmes âgées de 30 ans à 34 ans.  De plus, 30% des femmes participent aux processus de prise de décisions.  Selon le rapport sur le développement humain, le Qatar se classe à la trente-neuvième place dans le monde et à la première dans le monde arabe, a ajouté le Ministre.  Il a exprimé la fierté de son pays qui a lancé l’initiative « Éduquer un enfant ».  Celle-ci aide 10 millions d’enfants défavorisés dans 50 pays à recevoir une éducation primaire de qualité.  Il a par ailleurs indiqué que l’égalité entre hommes et femmes est garantie par la loi qatarie s’agissant de l’inscription sur les listes électorales, du droit de vote et du droit de se présenter à une élection.  Des femmes occupent des postes de ministre, d’ambassadeur ou encore de procureur, a-t-il ajouté.  Le Ministre a également indiqué que le Qatar est l’un des principaux contributeurs financiers à l’étude internationale sur la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité.  La Qatar appuie les efforts du Secrétaire général pour éradiquer les atteintes sexuelles et assurer une égalité entre les genres au sein de l’ONU, a-t-il assuré avant de présenter une vidéo sur le sujet.

Les représentants de l’Iraq et du Ghana ont entamé l’échange avec la délégation en commençant par demander des détails sur les mesures prises au Qatar pour garantir aux femmes un équilibre entre vie professionnelle et vie familiale.  Des précisions sur la politique de lutte contre les violences faites aux femmes ont aussi été demandées. 

M. GHANAM AL KUWARI, Sous-Secrétaire aux affaires sociales au Ministère du développement, du travail et des affaires sociales du Qatar, a répondu en évoquant le congé de maternité de deux mois octroyé aux femmes fonctionnaires, celles-ci bénéficiant en plus d’horaires aménagés pendant deux années après une naissance.  Le Qatar, a-t-il poursuivi, a mis en place 52 projets de lutte contre les violences faites aux femmes.  Apportant d’autres précisions, Mme NAJAT AL-ABDULLA, Directrice aux affaires familiales au Ministère du développement, du travail et des affaires sociales du Qatar, a indiqué que la police prodigue des conseils pour éviter les violences dans le cadre conjugal.  « Les discriminations entre hommes et femmes dans le monde du travail sont par ailleurs combattues vigoureusement. »  Elle a aussi évoqué les aides octroyées pour développer l’entrepreneuriat des femmes et des jeunes.  De manière générale, la Constitution du Qatar consacre l’égalité entre tous les citoyens, a-t-elle souligné.

Espagne

Mme SILVIA BAUBENT, Directrice générale de l’Institut des femmes et de l’égalité des chances de l’Espagne, a déclaré que son gouvernement a adopté deux lois organiques sur l’égalité des sexes.  Les entreprises ont pris des mesures sur l’égalité salariale et les autorités nationales font tout pour aider les femmes à concilier vie familiale et vie professionnelle, tout en facilitant leur implication dans les secteurs de travail où elles sont sous-représentées.  Pour obtenir des résultats, les efforts visent aussi la lutte contre les stéréotypes sexistes qui bloquent l’entrée des filles et des femmes dans les filières scientifique et technique. 

L’importance de l’égalité des sexes dans les programmes espagnols de coopération internationale a ensuite été expliquée par Mme TERESA BARBA, Directrice générale adjointe pour le développement des politiques.  Dans le monde entier, les centres culturels espagnols veillent à la promotion de l’égalité.  Depuis 2014, l’évaluation des programmes de coopération s’effectue sur la base des données sexospécifiques.

Mme IZASKUN LANDAIDA, Directrice de l’Institut basque pour les femmes, s’est attardée sur les initiatives propres au Gouvernement de sa région.  Elle a attiré l’attention sur les lois relatives à l’autonomisation des femmes, comme celle de 2015 sur la protection des agricultrices.  Elle a aussi parlé du programme visant à impliquer les hommes dans les campagnes contre la violence faite aux femmes et n’a pas oublié de mentionner la stratégie de 2018 pour réduire les disparités salariales. 

L’Argentine a salué l’implication de la société civile espagnole dans toutes les initiatives espagnoles liées à l’égalité des sexes, objectif 5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le Portugal, qui a parlé de sa propre loi sur l’égalité salariale, s’est dit curieux d’en savoir plus sur la manière dont son voisin assure le respect de ses dispositions juridiques.  La Directrice générale de l’Institut espagnol des femmes et de l’égalité des chances a expliqué que la loi prévoit une égalité salariale progressive: l’on vise d’abord les entreprises de plus de 250 employés puis celles de 100 et enfin de 50 employés.  En outre, dès 2021, le congé de maternité sera augmenté à 16 semaines tant pour les femmes que les hommes. 

Philippines

Mme RHODORA BUCOY, Présidente de la Commission de la condition de la femme des Philippines, a mentionné le cadre juridique « très robuste » mis en place pour l’autonomisation des femmes et des filles dans son pays.  Cette autonomisation est « cruciale » pour réaliser le Programme 2030. 

Lui faisant écho, Mme MARY ANNE E. R. DARAUAY, Autorité nationale pour le développement économique, a dit travailler pour l’intégration de la dimension « égalité hommes-femmes » dans les programmes de mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Elle a parlé de la « Magna Carta », le principal instrument juridique national pour l’autonomisation des femmes.  Comme mesure de suivi des conclusions concertées de la soixantième session de la Commission de la condition de la femme de l’ONU, elle a mentionné l’augmentation du congé de maternité de 60 à 105 jours, pour toutes les employées des secteurs privé et public.  Elle a aussi parlé d’un « modèle de parentalité responsable », avec un accès élargi aux services de santé reproductive.  Elle a aussi cité la promulgation d’une loi relative à la couverture sanitaire universelle et des efforts pour garantir l’accès universel à l’éducation supérieure, indépendamment de l’origine sociale. 

Toutes les entités du Gouvernement sont tenues de formuler un plan annuel pour l’autonomisation des femmes et l’application de la « Magna Carta », en y consacrant 5% de leur budget.  Un audit est d’ailleurs mené tous les ans pour surveiller la bonne affectation des fonds.  Le pays veille aussi à renforcer la participation des femmes aux processus de prise de décisions; les femmes occupant, par exemple, 43% des « positions de troisième niveau » au sein du Gouvernement.  Mme Darauay a également attiré l’attention sur les efforts accrus pour collecter des données statistiques sur le genre et les enfants.  Toutes les institutions publiques doivent mettre en place des points focaux sur l’égalité entre les sexes, a-t-elle affirmé, ajoutant en conclusion que cette pratique est déclinée au niveau local.

L’Australie a rappelé que les Philippines figurent en bonne place dans les classements internationaux sur l’autonomisation des femmes.  Dans le secteur privé par exemple, les femmes représentent 30% des postes de direction.  « Bravo », a lancé l’Australie.  La prolongation du congé de maternité a été dûment saluée par la Thaïlande, qui l’a elle-même fait passer de 90 à 98 jours, conformément aux recommandations de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Elle a tout de même demandé des précisions sur le financement de la couverture sanitaire universelle aux Philippines.  Nous la finançons principalement par l’impôt et notamment les taxes sur l’alcool et le tabac, a répondu la représentante de l’Autorité nationale pour le développement économique.

Égypte

Mme MAYA MORSY, Présidente du Conseil national des femmes de l’Égypte, a souligné que la Constitution de 2014 prévoit, pour la première fois dans l’histoire du pays, un quota de 35% de femmes dans les assemblées locales.  Lancée en mars dernier, la Stratégie nationale de développement vise à aligner les efforts avec le Programme 2030.  Un Observatoire national de la femme a été créé et un cadre réglementaire pénalise désormais la violence faite aux femmes.  Quant au congé de maternité, il est passé de trois à quatre mois.  La plupart des avancées, a fait observer Mme Morsy, ont été réalisées à partir de 2017, « Année de la femme égyptienne » proclamée par le Président Abdel Fattah Al Sisi.

La Présidente du Conseil national des femmes s’est aussi félicitée de ce que 38 millions de femmes bénéficient de subventions pour l’achat de nourriture et 10 millions d’un appui à l’accès aux soins de santé.  Le Conseil national des femmes a aussi conclu un partenariat avec la Banque centrale égyptienne pour élargir l’accès aux microcrédits à près de deux millions de femmes.  La lutte contre la violence faite aux femmes n’est pas en reste: un manuel publié par la plus haute autorité religieuse, l’Université al-Azhar, sert de guide contre ce fléau.  La campagne « Parce que je suis un homme », qui place les hommes au centre de la lutte, est venue opportunément renforcer les efforts.

L’Observatoire national de la femme, a expliqué, M. MAGUED OSMAN, membre du Conseil national des femmes, est un mécanisme d’évaluation de l’autonomisation de la femme.  C’est en réalité un mécanisme d’appui à la prise de décisions fondé sur des données chiffrées.  Les femmes égyptiennes représentent 54% des jeunes inscrits à l’université et 66% des titulaires de diplômes du cycle supérieur.  Entre 2014 et 2017, la part des femmes dans la population active a augmenté de 7% même si leur taux de chômage n’a que timidement diminué, passant de 24,3% à 23,2%. 

ONU-Femmes a particulièrement salué le fait qu’une nouvelle loi pénalise désormais le fait de déshériter les filles et les femmes.  L’Union européenne a encouragé l’Égypte à poursuivre son travail de protection des défenseurs des droits de l’homme, tout en s’enquérant des plans pour marquer le vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, l’an prochain.  La Présidente du Conseil nationale des femmes a parlé des campagnes de sensibilisation sur ce qui a été fait à Beijing et sur ce qu’il reste à faire.  Cette année, l’Égypte a déjà consacré 16 jours à la promotion des droits des femmes et entend institutionnaliser l’initiative pour que chaque année, 16 jours soient consacrés à des campagnes sur l’autonomisation des femmes et des filles.

Bulgarie

M. GEORGI VELIKOV PANAYOTOV, Représentant permanent de la Bulgarie auprès des Nations Unies, a salué la pertinence de l’exercice de ce jour.  La société civile joue un rôle majeur dans mon pays, a-t-il dit, avant de préciser que le principe d’égalité entre les sexes est consacré dans la Constitution bulgare.  Il a mentionné l’adoption récente d’un amendement sur les violences domestiques, les peines ayant été alourdies.  La Bulgarie, a-t-il fait savoir, est signataire de tous les instruments internationaux de lutte contre les violences faites aux femmes.  Il a évoqué le congé de maternité, qui est de 58 semaines rémunérées dans son pays, ainsi que le congé de paternité, qui est de 15 jours.  Les familles ont par ailleurs droit à des allègements fiscaux pour chaque enfant.  La sous-représentation des femmes dans la vie publique est un gaspillage de capital humain et un fardeau économique, a-t-il estimé, mais sans oublier de signaler que les femmes constituent 53% des thésardes et 23% des ingénieurs en Bulgarie.  En outre, la moitié des vice-premiers ministres sont des femmes, alors que la mairie de Sofia est dirigée par une femme, a-t-il ajouté. 

Poursuivant la présentation, Mme ELENA TRIFFONOVA, Fondation bulgare pour la recherche sur le genre, a évoqué les efforts de la société civile pour renforcer l’autonomisation des femmes.  La lutte contre les violences domestiques et la réduction des écarts salariaux entre hommes et femmes font partie des priorités.  Il y a eu 37 cas de féminicides en 2018, 34 en 2017, a-t-elle précisé.  Il n’y a pas de statistiques officielles sur ce problème mais on estime qu’une femme sur quatre aurait été victime de violences en Bulgarie, a-t-elle poursuivi.  Elle a détaillé un projet de prévention des violences conjugales avec le lancement notamment de trois campagnes de sensibilisation.  Enfin, elle a dénombré 130 femmes et 32 enfants qui ont trouvé refuge dans des centres de crise après des violences domestiques. 

Le délégué de l’Italie a demandé des précisions sur la politique de lutte contre les violences domestiques, à l’instar de la déléguée de Singapour, qui a précisé que son pays vient d’élargir la définition pénale du viol.  Son homologue de l’Autriche a souligné la réticence des hommes à user de leur congé de paternité et demandé des précisions sur les congés de maternité et de paternité en Bulgarie. 

Ces congés commencent au jour du départ de l’hôpital après la naissance, a répondu M. Panayotov.  Toujours en droit du travail, aucun employeur en Bulgarie n’a le droit de demander à la mère d’un enfant âgé de moins de 6 ans de faire des heures supplémentaires.  Sur la lutte contre les violences, il a précisé que des faits ont été érigés en infraction pénale, alors que ce n’était pas le cas auparavant, tandis que les peines ont été alourdies.  Ainsi, les auteurs de violences sexuelles ou psychologiques sont désormais passibles de 10 ans de prison. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission de la condition de la femme débat d’alliances pour renforcer la protection sociale, les services et les infrastructures en faveur des femmes

Soixante-troisième session,
4e séance plénière – après-midi
FEM/2174

La Commission de la condition de la femme débat d’alliances pour renforcer la protection sociale, les services et les infrastructures en faveur des femmes

« Bien plus qu’une dépense superflue, mobiliser des fonds en faveur de la protection sociale universelle est un investissement en faveur de la plus importante ressource d’un pays: les citoyens. »  Cette déclaration de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, a planté le décor du débat ministériel de haut niveau de cet après-midi, seule activité du deuxième jour de la session annuelle de la Commission de la condition de la femme qui s’est tenue dans la foulée d’une manifestation de haut niveau à l’Assemblée générale sur « Les femmes au pouvoir ».

Après l’ouverture des travaux hier et les nombreux appels pour multiplier les actions en faveur des femmes, les participants ont débattu aujourd’hui sur les moyens de « construire des alliances pour des systèmes de protection sociale, l’accès aux services publics et des infrastructures durables pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles ».  Car, comme l’a relevé Mme Mary Robinson, Présidente du Groupe des Sages, « les femmes sont les grandes oubliées des systèmes de protection sociale ». 

Ce débat, animé par le Ministre de l’égalité, de l’immigration et de l’intégration de l’Irlande, M. David Stanton, a permis aux panélistes et aux délégations d’insister sur la nécessité de bâtir des partenariats pour renforcer les systèmes de protection sociale ciblant les femmes, et partant, renforcer leur autonomisation.  Mme Bachelet, qui fut la première Directrice exécutive d’ONU-Femmes et deux fois Présidente du Chili, a conseillé, à cet égard, de déterminer ce qui peut être fait en matière de protection sociale par le secteur public, d’une part, et par le secteur privé, d’autre part. 

L’ancienne chef d’État chilienne a aussi insisté sur le fait que toute initiative -nationale ou internationale- doit tenir compte de l’aspect genre.  Elle a d’ailleurs promis qu’elle allait s’atteler à ce que le travail des rapporteurs spéciaux prenne en compte la parité des genres, réagissant ainsi à l’interpellation de la Présidente de l’organisation Plan International, Mme Anne-Birgitte Albrectsen, qui a également déploré que les États Membres aient « oublié », lors de la création d’ONU-Femmes, de doter cette agence dédiée aux femmes de fonds adéquats pour mener à bien son travail.

Mme Albrectsen a ensuite plaidé pour une intégration totale du genre dans toutes les politiques sociales.  Par exemple, lorsque l’on prend soin d’une victime de violence sexuelle, il faut en même temps aborder la question de la « masculinité toxique », a-t-elle recommandé.  Elle a aussi préconisé, lorsqu’on investit dans les manuels scolaires, de s’assurer que le contenu comprenne des modules sur le genre et qu’il y ait des images valorisant des femmes.

À sa suite, Mme Mary Robinson, ancienne Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui fut la première femme à la tête de l’Irlande, s’est inquiétée spécifiquement de l’absence de protection sociale pour les 740 millions de femmes qui travaillent dans le secteur informel.  Les filles pâtissent elles aussi particulièrement de ce manque, a-t-elle observé, notamment dans le domaine scolaire: l’école peut être une expérience traumatisante pour des filles qui n’ont pas accès à des installations appropriées lorsqu’elles sont en période de menstruation. 

Mme Robinson a regretté que les gouvernements se focalisent le plus souvent sur l’immédiat, c’est-à-dire les échéances électorales, alors qu’il vaut mieux « regarder sur le long terme ».  Elle a pris l’exemple de la question des changements climatiques qui nécessite la réduction urgente des émissions de gaz à effet de serre.  Au lieu de cela, a-t-elle ironisé, les gens deviennent végétariens pour éviter de consommer de la viande.  Selon elle, il faut que la société civile se mobilise davantage pour arriver à des actions de plus grande envergure.

Après ces constats des panélistes, des délégations ont présenté tour à tour les expériences d’alliances qu’elles ont mises en pratiques pour renforcer l’autonomisation des femmes et des filles.

Le Conseiller fédéral et Chef du Ministère de l’intérieur de la Suisse a fait valoir les alliances mises en place dans son pays entre les gouvernants et les populations qui sont régulièrement consultées, par voie référendaire, sur des questions essentielles de la vie publique, y compris les questions de protection sociale. 

En Estonie, a témoigné la Ministre de la santé et du travail, des ONG ont pris l’initiative de créer, en 2002, des centres pour la prise en charge de femmes victimes de violence.  Puis, le Gouvernement a accordé des subventions à ces structures.  Cette alliance a évolué à tel point que ces centres sont désormais entièrement financés par l’État, mais ce sont les organisations de la société civile qui continuent à offrir les services aux victimes, 24 heures sur 24. 

Il faut toutefois « faire attention à la privatisation des services sociaux », a prévenu la représentante de l’organisation Oxfam International, arguant que cela peut conduire à la fourniture de « prestations sociales au rabais » au détriment des femmes. 

En République de Corée, a expliqué la Ministre de l’égalité du genre et de la famille, c’est une alliance de neuf agences nationales qui lutte contre la violence sexuelle et sexiste, un combat redynamisé depuis la vague du mouvement « Me Too ». 

Sur un autre continent, au Nigéria, une alliance avec la Banque africaine du développement (BAD) permet au Gouvernement de financer des programmes de protection sociale qui visent les familles les plus vulnérables.

Même son de cloche chez son voisin du Cameroun.  Mme Marie-Thérèse Abena Ondoa, la Ministre camerounaise de la femme et de la famille, a ainsi parlé d’un ensemble de programmes visant des groupes vulnérables, dont celui des femmes autochtones.  Des campagnes au niveau communautaire permettent aussi de faire face à des problèmes tels que le mariage précoce, les mutilations génitales féminines et la prise en charge des réfugiés.

Une représentante de Handicap International a insisté sur la vulnérabilité spécifique touchant les femmes handicapées.  Celles-ci, en effet, ne peuvent pas facilement bénéficier de services de santé, souffrent plus souvent du chômage ou sont victimes de violence.  Il faut donc améliorer les infrastructures d’accessibilité, tout en mettant sur pied un mécanisme supplémentaire pour aider les enfants de mères handicapées.  Handicap International estime qu’il faut éviter à tout prix que ces enfants ne soient placés de force dans une autre famille. 

Un autre objet de frustration a trait aux services de santé génésiques en faveur de jeunes femmes, a déclaré la représentante d’Ipass Nigeria.  Pour cette ONG, même quand la loi autorise les avortements, les infrastructures de santé ne sont pas forcément accueillantes et elles ont tendance à stigmatiser les femmes, les poussant ainsi à se tourner vers des interventions clandestines très risquées pour leur santé. 

La représentante de la Nouvelle-Zélande a expliqué que les alliances sont incontournables, puisqu’aucun gouvernement ne peut travailler seul.  C’est ainsi que les autorités de son pays collaborent avec les femmes kiwis afin d’améliorer leur sort et « réparer des injustices du passé colonial du Royaume-Uni ». 

« Les alliances au Danemark sont visibles », s’est enorgueillie pour sa part la représentante danoise en faisant remarquer le grand nombre d’ONG faisant partie de la délégation nationale à cette session de la Commission de la condition de la femme.

Demain, mercredi 13 mars, la Commission tiendra, à 10 heures, un dialogue interactif de haut niveau sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, avant d’examiner, à 15 heures, des exemples nationaux du lien entre autonomisation de la femme et développement durable. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Message des « femmes au pouvoir » à l’Assemblée générale: « on ne doit jamais consentir à ramper quand on sent le besoin de s’élever »

Soixante-treizième session,
Manifestation de haut niveau, matin
AG/12126-FEM/2172

Message des « femmes au pouvoir » à l’Assemblée générale: « on ne doit jamais consentir à ramper quand on sent le besoin de s’élever »

S’il fallait résumer le sentiment général de ce matin, lors de la manifestation de haut niveau que l’Assemblée générale a tenue sur « Les femmes au pouvoir », ce sont les mots de l’activiste américaine du siècle dernier, Helen Keller, repris par la Présidente de l’Assemblée, Mme María Fernanda Espinosa Garcés, qui le font le mieux: « On ne doit jamais consentir à ramper quand on sent le besoin de s’élever ».

Pas moins de 10 des 21 femmes présidentes et chefs de gouvernement dans le monde ont témoigné, aujourd’hui, de leur expérience personnelle.  Présentées comme modèles pour susciter l’émulation, elles ont imprimé un élan politique de taille aux travaux de la Commission de la condition de la femme, ce dont s’est réjouie la Présidente de la soixante-troisième session de ladite Commission, l’Irlandaise Geraldine Byrne Nason.

Dans un monde toujours marqué par une culture masculine dominatrice, comme l’a décrit le Secrétaire général, M. António Guterres, parler de l’égalité des sexes est fondamentalement une question de pouvoir.  Les structures du pouvoir ont été établies par les hommes, il y a des siècles, a acquiescé la Première Ministre de l’Islande, Mme Katrín Jakobsdóttir, et aujourd’hui, il s’agit de les changer pour y faire accéder les femmes.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes: plus de 90% des chefs d’État sont des hommes et 76% des parlementaires le sont aussi, alors que la grande majorité des pays n’ont jamais été gouvernés par une femme.  Tirant la sonnette d’alarme, la Présidente de l’Assemblée générale, quatrième femme élue à ce poste depuis la création de l’ONU en 1945, a averti que si cette tendance se poursuit, il faudra 107 ans pour parvenir à la parité dans les enceintes politiques.

Pourtant l’absence ou la sous-représentation des femmes dans la vie politique a un impact direct sur la reconnaissance de leurs droits dans les sociétés, a confirmé la Présidente de l’Estonie, Mme Kersti Kaljulaid, pour laquelle il ne fait pas de doute qu’à partir du moment où les femmes intègrent un gouvernement, les lois changent et la législation sociale avance.

Quels sont les freins à une plus forte représentation des femmes dans la sphère politique?  Les stéréotypes et les préjugés restent présents, a souligné la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et les questions de sécurité, Mme Federica Mogherini.  Mais cela peut être aussi, a-t-elle nuancé, l’absence ou l’insuffisance de bases juridiques et constitutionnelles solides qui rendent les changements possibles, un avis défendu par la Présidente du Népal, Mme Bidhya Devi Bhandaria.  Tant que les parlements seront dominés par les hommes qui occupent aussi la majorité des postes législatifs, ces bases ne risquent pas d’évoluer aussi vite qu’il le faudrait, a fait observer la Ministre de la défense de la Bosnie-Herzégovine, Mme Marina Pendeš. 

D’où l’appel unanime lancé aujourd’hui par « les femmes au pouvoir » pour que leurs pairs n’hésitent plus à s’engager en politique.  C’est à elles que revient d’abord la lourde tâche d’abattre « les obstacles du silence et de la discrimination ».  Si les femmes ont « conquis » leurs droits, l’heure est venue de passer à l’action pour assurer leur présence à tous les niveaux politiques. 

Mme Mary Robinson, ancienne Présidente de l’Irlande, a milité pour la solidarité entre femmes et entre générations mais aussi pour le mentorat, deux aspects qu’elle dit avoir retrouvés ici aujourd’hui.  C’est aux femmes d’ouvrir la voie à celles qui leur succèderont et de savoir capitaliser sur les générations à venir, car « notre avenir deviendra le passé d’autres femmes », comme disait la poétesse irlandaise, Eavan Boland.

Le mantra de la Haute Représentante de l’Union européenne est: « si les hommes peuvent le faire, les femmes aussi peuvent le faire », alors que pour Mme Mary Robinson, le message à faire passer aux jeunes filles, c’est « croyez en vous », à l’image de cette jeune suédoise de 16 ans qui est devenue en quelques mois la « super star » de la lutte contre les changements climatiques. 

Mais pour cela, il est crucial que « l’égalité commence à la maison », d’où l’importance du rôle de la mère, dépositaire de l’éducation des enfants dans la plupart des sociétés.  La Présidente de la Croatie, Mme Kolinda Grabar-Kitarović, et la cheika Al Mayassa, du Qatar, ont insisté sur le rôle de l’éducation et l’accès à la santé, deux outils « puissants » de l’émancipation économique et politique des femmes.

En capitalisant sur l’architecture internationale pour faire avancer la condition de la femme, dont le Programme de développement durable à l’horizon 2030, « une arme puissante en faveur de l’égalité », les femmes ont été sommées de devenir le rempart du multilatéralisme, les championnes de la démocratie, mise à mal dans le monde actuel, et les agents de la paix et de la réconciliation.  Les femmes ont prouvé que leur apport aux processus de paix, c’est leur don d’exploiter les dénominateurs communs et de trouver des solutions orientées vers l’avenir plutôt que de ressasser le passé, a dit la Haute Représentante de l’Union européenne.

La Présidente de l’Assemblée générale a estimé que le meilleur hommage que nous puissions rendre aux femmes à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la Conférence de Beijing est précisément de lutter pour leur accès au pouvoir et leur leadership dans le monde. 

MANIFESTATION DE HAUT NIVEAU SUR LE THÈME « LES FEMMES AU POUVOIR »

Séance d’ouverture

Mme MARÍA FERNANDA ESPINOSA GARCÉS, Présidente de l’Assemblée générale, a inauguré cet évènement de haut niveau sur le thème « Les femmes au pouvoir » en rappelant que l’histoire de l’humanité a été écrite par les hommes et les femmes, mais qu’elle a aussi été marquée par la violence et la discrimination à l’encontre des femmes alors même que ces femmes ont été les protagonistes des transformations sociales et politiques les plus importantes.  Des milliers de femmes ont lutté, mais la plupart d’entre elles ont été « effacées, rendues invisibles », a dénoncé Mme Espinosa.

Le chemin du droit des femmes a été extrêmement long et aucune des avancées n’auraient été possible sans la lutte des femmes autochtones, rurales, migrantes, travailleuses, artistes, jeunes, handicapées, scientifiques et toutes les autres, a-t-elle martelé.  Malheureusement, a-t-elle constaté, il reste encore beaucoup de lacunes à combler, de choses à changer.  Alors que le monde dispose aujourd’hui d’une solide architecture internationale pour faire avancer la condition des femmes, y compris le Programme de développement durable à l’horizon 2030 « qui est une arme puissante en faveur de l’égalité », il faut maintenant s’atteler à la mise en œuvre, a-t-elle recommandé.

Mme Espinosa a saisi cette occasion pour rendre hommage au Secrétaire général qui a réussi à réaliser la parité aux plus hauts niveaux de leadership du système des Nations Unies, ce qui prouve, à ses yeux, qu’il s’agit bien d’une question de volonté politique.  Mais dans le domaine de la participation politique, les chiffres parlent d’eux-mêmes puisque plus de 90% des chefs d’État sont des hommes et 76% des parlementaires le sont aussi.  La grande majorité des pays n’ont jamais été gouvernés par une femme et si cette tendance se poursuit, il faudra 107 ans pour parvenir à la parité, a prévenu Mme Espinosa.  C’est d’autant plus grave, a-t-elle estimé, qu’en 2015, on avait projeté qu’il ne faudrait que 30 ans, ce qui montre bien « le retour en arrière » frappant qui est en cours.

La Présidente de l’Assemblée générale a donné des lignes directrices pour guider les débats de cet évènement de haut niveau, à commencer par le recensement des défis auxquels font face les femmes en politique.  Certains stéréotypes sociaux persistent, a-t-elle en effet noté en constatant que les femmes continuent à s’opposer à la résistance des hommes, parfois au sein même de leurs partis.  L’absence ou la sous-représentation des femmes dans la vie politique a pourtant un impact direct sur la reconnaissance des droits des femmes dans nos sociétés, a regretté la Présidente.

Les bénéfices de la présence des femmes dans les enceintes politiques et dans les prises de décisions: tel est le deuxième angle qu’elle a proposé pour les discussions.  Pour Mme Espinosa, il est essentiel d’associer « l’autre moitié de l’humanité » à la prise de décisions, sans quoi la réalisation du Programme 2030 sera compromise et les progrès dans les processus de paix, la santé, l’éducation et la protection sociale en feront les frais.

« Les droits que nous avons, nous les avons conquis », a-t-elle martelé.  La lutte pour la participation politique des femmes est, pour Mme Espinosa, « le meilleur hommage que nous puissions rendre aux femmes à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la Conférence de Beijing ».  Si elle a jugé important de réclamer les droits des femmes et de souligner leurs conquêtes, elle a aussi invité les femmes à passer à l’action pour assurer leur présence à tous les niveaux politiques et faire entendre la voix des femmes jeunes.  Il ne s’agit pas d’une question de chiffres ou de statistiques, mais plutôt d’une question de qualité, a-t-elle précisé, ajoutant qu’il s’agit de prouver comment, par l’exercice du pouvoir, les femmes peuvent construire des sociétés plus inclusives.

C’est la raison pour laquelle la présence des chefs d’État est aussi importante aujourd’hui, a-t-elle estimé en les appelant à en finir avec « les obstacles du silence et de la discrimination », pour mener les nations à bon port.  Elle a conclu son intervention par une citation de Helen Keller: « On ne doit jamais consentir à ramper quand on sent le besoin de s’élever. »

Le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, a indiqué que nous vivons dans un monde dominé par des hommes et avec une « culture masculine dominatrice ».  De ce fait, « l’égalité des genres est fondamentalement une question de pouvoir ».  Et c’est pourquoi il dit avoir poussé avec insistance pour la parité des genres au sein des Nations Unies.  Il s’est ainsi félicité du fait que, pour la première fois, le Conseil de gestion de l’Organisation compte en son sein plus de femmes que d’hommes.  De même, la parité est de mise pour la fonction de coordonnateur résident, et l’ONU est en voie d’atteindre la parité pour les postes de direction d’ici à 2021.  « Nous lutterons pour résister à ces résistances et nous n’abanderons pas », a-t-il promis.

Pour le Secrétaire général, la parité est nécessaire pour changer les relations de pouvoir au sein des sociétés.  Il a expliqué que le monde a besoin de ces modifications dans les relations de pouvoir afin de véritablement faire avancer la paix et la sécurité pour tous, de promouvoir les droits de l’homme pour tous, et d’assurer le développement pour tous.  Il a rappelé que lorsque les femmes sont autour de la table, les chances de paix augmentent.  Et lorsque les femmes ont les mêmes opportunités que les hommes au travail, le développement s’accélère.  De même, quand le genre est au cœur de l’action humanitaire, l’assistance a plus d’impact et bénéficie à tous.  Pour le Secrétaire général, la recette est simple: « quand on exclut les femmes, tout le monde en paye le prix, et quand les femmes sont incluses, c’est le monde qui en ressort gagnant ».  Faisant référence au thème de la session de la Commission de la condition de la femme, il a plaidé pour des infrastructures durables, afin de bâtir des sociétés, changer les relations de pouvoir, combler les lacunes et s’attaquer aux préjugés.  Cela signifie donc « préserver les acquis et repousser les frontières du possible ». 

Reprenant les paroles d’Eavan Boland, la Présidente de la Commission de la condition de la femme, Mme GERALDINE BYRNE NASON, s’est adressée à la salle en disant que « notre avenir deviendra le passé d’autres femmes ».  Elle s’est dite ravie que cette réunion puisse donner une impulsion politique au travail de fond de la Commission.  « Les femmes ne cherchent pas à prendre le pouvoir des hommes mais simplement à avoir le pouvoir sur leur propre vie », a-t-elle assuré en remarquant toutefois que cela s’avère difficile, surtout à un moment où le multilatéralisme est mis à mal. 

C’est d’autant plus une raison pour que les femmes travaillent main dans la main pour faire avancer le changement dans les structures de pouvoir et y assurer leur représentation, a-t-elle estimé.  Il faut pour cela du courage politique, qui doit être impérativement soutenu par la législation, a-t-elle recommandé, car l’autonomisation doit être fondée sur des lois.  En conclusion, Mme Byrne Nason a remercié les centaines de femmes présentes ici aujourd’hui, car « si on trouve les mots, il y aura toujours une oreille pour les entendre ».

Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a invité les femmes à « faire pression sur les pressions ».  Elle a salué la parité en vigueur au sein des Nations Unies, tout en se désolant du fait qu’actuellement dans le monde, seul 10 pays ont des gouvernements paritaires et à peine 5% des grandes entreprises ont des femmes au poste de président-directeur général.  Malheureusement, les institutions ont été créées par et pour les hommes, a-t-elle déploré.

Les femmes ont donc l’obligation de pousser pour le changement, partout où elles se trouvent, afin d’ouvrir la voie pour celles qui viendront après elles, a plaidé Mme Mlambo-Ngcuka.  Pour elle, les femmes qui sont à des postes de responsabilité aujourd’hui sont des privilégiées, alors que celles qui le seront demain devraient l’être de droit.  La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a recommandé d’agir pour la décennie restante de mise en œuvre des objectifs de développement durable, afin qu’elle soit une décennie de changement pour les femmes et pour le monde entier. 

Table ronde de haut niveau sur le thème « Comment les femmes au pouvoir changent le monde »

Animée dans un premier temps par M. RICHARD LUI, journaliste de la chaîne de télévision MSNBC, cette table ronde a accueilli trois présidentes, une vice-présidente et la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la sécurité, qui sont venues témoigner de leurs propres expériences et faire des recommandations pour aller de l’avant.

La Présidente de la Lituanie, Mme DALIA GRYBAUSKAITĖ, qui jouit toujours de plus de 63% de taux d’approbation après 10 ans au pouvoir, a d’abord regretté la sous-représentation des femmes en politique, rappelant qu’aujourd’hui il n’y a toujours que 10 femmes présidentes dans le monde et encore moins de femmes premiers ministres.  Elle a reconnu que poursuivre une carrière politique suppose pour une femme de sortir de sa zone de confort et de s’exposer à des attaques souvent biaisées.  De plus, même si les nouvelles technologies permettent de nos jours de faire passer des messages à de larges audiences sans avoir à débourser des sommes considérables et sans avoir à se déplacer comme dans le passé, cet outil du changement politique a aussi ses travers, a-t-elle relevé: il permet aux femmes d’être plus visibles, mais les expose à un environnement anonyme où toute personne peut les attaquer.  Cela ne l’a pas empêchée d’encourager les femmes à se lancer en politique, arguant qu’il est d’autant plus important que les femmes s’engagent en politique qu’elles ont « ce sens des responsabilités ».  Elle-même s’est lancée dans le métier au moment où son pays traversait une crise profonde, et le Premier Ministre britannique, Mme May, a fait la même chose, a-t-elle rappelé. 

La remerciant pour « son honnêteté », le modérateur a ensuite passé la parole à la Présidente du Népal, Mme BIDHYA DEVI BHANDARIA, qui a partagé son parcours politique en précisant qu’elle venait « du bas de l’échelle sociale ».  Sa décision de s’engager en politique était motivée par son désir de défendre les droits des femmes.  Lorsqu’il est question d’égalité hommes-femmes, il ne faut jamais perdre de vue la notion d’équité, a-t-elle déclaré.  Il faut changer la donne en se fondant sur sa propre expérience, a-t-elle recommandé en expliquant que s’il existe une base juridique et constitutionnelle solide, alors ces changements sont possibles.  Elle en a voulu pour preuve qu’au Népal, près de 40% des représentants de la vie politique sont aujourd’hui des femmes, grâce à des garanties constitutionnelles et juridiques et des quotas obligatoires de femmes dans les enceintes politiques.

Lui emboîtant le pas, la Présidente de Trinité-et-Tobago, Mme PAULA-MAE WEEKES, s’est dite optimiste quant à la possibilité de réaliser les objectifs de développement durable d’ici à 2030 dans les Caraïbes.  Elle s’est basée sur les avancées significatives des femmes au cours des dernières années et a rappelé que 30% des députés sont désormais des femmes.  Cependant, elle s’est dite consciente du fait qu’il faut aller plus loin.  En attendant, elle a fait part de sa « fierté », car ce niveau de représentation des femmes a été atteint naturellement et non pas grâce à la législation. 

La Vice-Présidente de la Colombie, Mme MARTA LUCÍA RAMÍREZ, a fait part quant à elle des efforts de son pays pour identifier les obstacles qui empêchent les femmes d’accéder au pouvoir.  Pour parvenir à l’égalité hommes-femmes, il faut, à ses yeux, disposer d’une base juridique solide et provoquer des changements culturels au sein même de la société.  En tant que première Vice-Présidente de la Colombie, elle a pris en charge elle-même cette question. 

La représentation des femmes en politique reste très faible en Amérique latine, et la grande majorité des postes législatifs sont toujours aux mains des hommes, a-t-elle rappelé avant d’appeler la société dans son ensemble à devenir un moteur du changement.  Pour avoir été opposée dans des « primaires » au Président Iván Duque, où elle avait défendu l’idée d’un gouvernement paritaire, elle est d’autant plus fière de faire partie du premier gouvernement paritaire en Colombie.

Avec la Ministre de l’éducation, Mme Ramírez travaille actuellement pour faire en sorte que plus de femmes aient accès à l’éducation supérieure et que leurs salaires soient alignés sur ceux des hommes.  Combler ces lacunes salariales « injustifiables » suppose, selon elle, un travail avec le secteur privé, un secteur qui s’est engagé à soutenir cette transformation sociale.  Elle attend de voir les résultats à la fin de son mandat et persiste à dire que le changement doit venir de la société et des changements de mentalités.  C’est précisément là que la Vice-Présidente voit le rôle primordial des mères dans l’éducation de leurs enfants.  Les jeunes filles doivent devenir agents de transformation pour parvenir à cette égalité, et le véritable leadership féminin, c’est celui qui va tisser des liens et créer des espaces pour les autres femmes, a-t-elle conclu.

Mme FEDERICA MOGHERINI, Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a commencé son propos en relevant, à cette table ronde, la situation « inédite d’un homme qui présente des femmes, ce qui reste assez rare ».  Parlant de sa propre expérience, elle s’est souvenue des questions qui avaient été soulevées lors de sa prise de fonctions au poste de haute représentante à cause de son « jeune âge », estimant avec le recul que c’était d’abord le fait qu’elle soit une femme, puis son âge, qui dérangeaient « l’establishment masculin », d’autant plus qu’elle allait occuper un poste diplomatique de haut niveau. 

Forte de cette expérience, le mantra de Mme Mogherini est que « si les hommes peuvent le faire, les femmes peuvent le faire aussi ».  C’est cette idée qu’il faut renforcer auprès des femmes et des jeunes filles du monde, qu’elles occupent des postes de responsabilité ou pas, de manière à encourager plus de femmes, et notamment les jeunes, à s’engager sur cette voie. 

Pour la Haute Représentante, les femmes au pouvoir en politique ont une double responsabilité: façonner des espaces pour les femmes et adopter les bonnes politiques pour les protéger, les autonomiser et les associer aux processus de paix et de réconciliation.  Parlant par expérience, Mme Mogherini a affirmé que lorsque les femmes participent aux négociations de paix, cela permet de trouver des solutions axées sur l’avenir plutôt que de s’attarder sur le passé.  Elle a expliqué qu’en effet, les femmes sont plus enclines à comprendre l’importance des dénominateurs communs pour pouvoir avancer.  Les accords qu’elles négocient sont en général plus durables, a remarqué la chef de la diplomatie européenne, qui a également mis l’accent sur la « crise actuelle de la démocratie dans le monde ».  Pour elle, cela s’explique en partie par le fait que les citoyens ne se reconnaissent pas dans leurs représentants.  Cela montre que l’autonomisation des femmes et leur représentation à tous les niveaux dans les enceintes politiques est un moyen de renforcer la vitalité des démocraties du monde.

La Présidente de la République de Malte, Mme MARIE-LOUISE COLEIRO PRECA, qui intervenait par visioconférence, a soutenu l’idée de célébrer la visibilité des femmes aux postes de responsabilité pour inciter d’autres à leur emboîter le pas.  Elle a également appelé ses pairs à militer pour les femmes dans l’espace politique et économique. 

Le modérateur ayant ensuite invité les panélistes à raconter des anecdotes qui ont marqué leurs carrières politiques, la Haute Représentante de l’Union européenne a relaté une discussion qu’elle avait eue avec la Secrétaire d’État américaine, Mme Madeleine Albright.  Celle-ci s’était vu dire, après quelques mois en poste: « Madeleine, tu as pris du poids ».  Ce à quoi elle aurait rétorqué: « Non, en fait je prends de l’importance » (« my skin is getting thicker »).

Pour la Présidente du Népal, c’était l’occasion de raconter l’histoire de son village natal où les enfants n’avaient pas accès à l’éducation et à la santé.  Étant la fille de « l’homme le plus éduqué du village » qui mourut à 32 ans pour n’avoir pas pu accéder aux soins médicaux, elle a réalisé que l’accès à l’éducation et à la santé devrait être un droit pour tous.  Ce vécu a été son inspiration pour s’engager en politique dans le but de devenir un moteur du changement.

De son côté, la Vice-Présidente de la Colombie a parlé de celle qui a été son modèle et son inspiration: une femme qui a lutté pour le droit de vote des femmes et qui a été la première juge en Colombie.  Elle s’est juré de reprendre son flambeau et, lorsqu’elle a été Ministre de la défense, elle a lutté pour que les femmes puissent faire une carrière militaire. 

Dans le cadre de la discussion qui a suivi, avec l’ensemble des délégations des États Membres, la représentante de la France a soutenu l’idée d’établissement de quotas afin de s’assurer que femmes et hommes partagent le pouvoir.

Celle de la Hongrie a indiqué que son pays entend encourager les femmes à se lancer, puisque « le partage du pouvoir entre les sexes est une équation gagnant-gagnant ».  La Hongrie est le pays de l’Union européenne qui a le plus bas écart salarial entre les sexes, s’est-elle félicitée. 

La Vice-Présidente de la République dominicaine a invité les femmes à remettre en cause le statut quo alors que la déléguée du Canada a plaidé pour des modèles féminins qui feront avancer les choses.  Elle a mis en garde contre les retours en arrière, se félicitant d’être la première femme afghane et musulmane au sein du Gouvernement canadien.  Elle a aussi déploré la violence en ligne qui fait des victimes chez les femmes notamment.

Les panélistes ont reconnu qu’elles n’avaient pas imaginé, dans leur enfance, qu’elles pourraient accéder au pouvoir.  La Présidente de la Lituanie a, pour sa part, avoué que même aujourd’hui, « elle croit rêver », mais elle a dit apprécier la réaction de son entourage qui lui rappelle l’étendue de ses responsabilités.  Les panélistes ont ensuite démonté le préjugé de la représentation de la femme sous l’angle de la beauté.  Pour elles, on peut prendre soin de son physique en tant que femme tout en conquérant le pouvoir et en l’assumant. 

La deuxième partie de la table ronde a été animée par Mme SHERY AHN, journaliste à Bloomberg TV.  Deux présidentes d’Europe de l’Est et deux premières ministres sont intervenues pour enrichir la discussion.

Mme KOLINDA GRABAR-KITAROVIĆ, Présidente de la Croatie, a remarqué tout d’abord que l’une des questions fréquemment posées aux femmes au pouvoir est celle de l’adéquation de la vie publique avec la vie familiale.  Le monde a besoin de femmes au pouvoir, a-t-elle ensuite déclaré en se justifiant par le fait qu’il faut respecter la représentation des deux sexes sur le plan démographique, ce qui contribue au respect de l’exigence démocratique de représentation de toute la population.  Elle a aussi invoqué un argument économique et invité à se départir du préjugé selon lequel les femmes sont dépendantes des hommes pour subvenir à leurs besoins.

De façon générale, a-t-elle ajouté, la parité est nécessaire dans tous les aspects de la vie sociale et elle permet de stimuler le développement.  La Présidente de la Croatie a fait observer que le produit intérieur brut (PIB) mondial augmenterait de 31% si la parité était atteinte.  Elle a enfin indiqué que les femmes sont cruciales pour gérer les questions de paix et sécurité.  Elle a relevé que si le monde compte 10 femmes chefs d’État, seules trois d’entre elles ont été élues au suffrage universel direct.  Enfin, pour elle, « l’égalité commence à la maison ».  Elle a demandé d’éviter de mettre les enfants dans des boîtes et de « tuer » leur génie, sans quoi on permet aux préjugés de détourner les femmes des filières scientifiques. 

Forte de ce constat, la Présidente de l’Estonie, Mme KERSTI KALJULAID, a demandé aux femmes de ne pas céder aux préjugés.  Elle a aussi estimé que les femmes dirigeantes doivent tenir compte du rythme de la société, c’est-à-dire de l’évolution des mœurs, afin de ne pas heurter les sensibilités.  À son avis et « aussi surprenant que cela puisse paraître », les femmes de la société civile sont plus à même de faire bouger les choses que celles au pouvoir sur qui tous les projeteurs sont braqués.  Celles qui sont au pouvoir doivent donc garantir aux femmes de la société civile le droit de manifester sans être réprimées, afin de faire avancer les choses.  Revenant au problème des préjugés, la Présidente a mentionné le fait que lorsqu’elle est en déplacement à l’étranger, les services de protocole la prennent souvent pour une ministre ou un membre de la délégation « parce que les gens ne s’attendent pas à voir une femme présidente ».  Si elle prend cela avec humour, elle s’assure que cela ne se reproduise pas. 

Mme KATRÍN JAKOBSDÓTTIR, Première Ministre de l’Islande, a rappelé que les structures du pouvoir ont été établies par les hommes il y a des siècles et que donc aujourd’hui, faire accéder les femmes au pouvoir exige de changer ces structures.  Elle a aussi parlé de son cas personnel, louant le modèle sociétal islandais de partage des tâches ménagères entre conjoints.  Elle a assuré que c’est grâce à cet aménagement qu’elle a pu se consacrer à sa carrière politique alors qu’elle est mère de trois enfants.  De plus, pour la dirigeante, « il est totalement inacceptable qu’au XXIsiècle, des femmes subissent encore des violences sexuelles et sexistes ».  Pour y mettre un terme, elle a demandé des alliances entre femmes et hommes.  C’est ce qui s’est passé avec la vague du mouvement « Me Too » qui a conduit le pays à modifier sa législation après un débat social entre les deux sexes.

Pour éviter que ce genre de violence se perpétue, la Ministre de la coopération et de l’intégration africaine de la Guinée, Mme DJÉNÉ KEÏTA, a demandé que les femmes, dépositaires de l’éducation des enfants dans la plupart des sociétés, fassent des garçons des champions de l’initiative « HeForShe ».  Elle a salué la résilience des femmes au pouvoir, « celles-là qui ont fait face à de l’adversité et parfois des supplices atroces au cours de leur parcours, mais qui ont tout de même réussi à arriver au sommet ».  Elle a ainsi déploré la violence sexuelle et sexiste qui marque la vie des femmes, prenant en exemple le mariage précoce qui constitue un obstacle à l’épanouissement des femmes. 

« Quand je vous regarde », a relevé une députée de la Fédération de Russie à l’endroit des femmes dirigeantes, « j’imagine ce que vous avez dû endurer ».  La représentante de la Douma a mentionné les préjugés sexistes, tels que la beauté ou la douceur, qui sont accolés aux femmes.  Elle a en même temps fait remarquer qu’arriver au pouvoir n’est pas tout et qu’il faut évaluer la gestion faite par les femmes pour la comparer à celle des hommes.

Dans un message vidéo, Première Ministre de la Nouvelle-Zélande, Mme JACINDA ARDERN, a rappelé être la troisième femme du pays à occuper ce poste.  Elle a invité à faire en sorte que le sexe ne soit pas une entrave aux aspirations des femmes qui veulent diriger.  Dans un langage imagé, elle a indiqué que les femmes se sont tellement battues « pour entrer dans la salle » qu’il serait opportun pour elles de « bloquer la porte du pied » afin de permettre à leurs congénères d’y accéder à leur tour. 

En tout cas, elles sont déjà cinq à avoir été Présidentes de la Suisse, a témoigné M. ALAIN BERSET, Conseiller fédéral et Chef du Département de l’intérieur de la Suisse.  Il a tout de même modestement avoué que ce n’est pas un motif de fierté, « puisque l’élection se fait chaque année » et aussi car les femmes suisses n’ont acquis le droit de vote qu’en 1971.  Avec la participation des femmes au Gouvernement, ce sont les lois qui ont changé, a-t-il souligné.  Par exemple, l’homme n’est plus le chef de la famille, et c’est un cabinet marqué par une forte présence féminine qui a récemment décidé d’adopter la prudente option de « détourner le pays de l’énergie nucléaire ». 

En Estonie, a renchéri la Présidente, c’est également les femmes qui ont permis d’avoir une législation sociale forte.  La conséquence positive est que le pays est désormais celui au monde ayant le taux de mortalité néonatal le plus bas.

La représentante de la Géorgie s’est félicitée du fait que son pays ait élu une femme à sa tête l’an dernier.  Elle a tout de même relevé que les femmes en affaires prospèrent plus que dans le domaine politique.  C’est pourquoi les panélistes ont également unanimement reconnu l’importance pour les jeunes femmes d’avoir des modèles féminins afin de pouvoir susciter l’émulation chez elles. 

Table ronde de haut niveau sur le thème « L’avenir du leadership des femmes »

Animée par Mme FOLLY BAH THIBAULT, journaliste à Al Jazeera, cette table ronde a été l’occasion pour Mme MARY ROBINSON, Présidente de la Fondation Mary Robinson et du Conseil des Sages, mais aussi ancienne Présidente de l’Irlande et militante passionnée de l’égalité hommes-femmes, de saluer l’enthousiasme des femmes et des jeunes filles présentes ici, à l’ONU, et de relever « ce sentiment de mentorat » qui prévaut. 

C’est précisément dans cet esprit qu’elle fait partie des 30 dirigeantes signataires de la lettre ouverte publiée cette année à l’occasion de la Journée internationale des femmes par trois collègues de haut niveau des Nations Unies, l’ancienne Ministre argentine des affaires étrangères, Mme Susana Malcorra, l’ancienne Première Ministre néo-zélandaise, Mme Helen Clark, et la politicienne bulgare et ancienne Directrice de l’UNESCO, Mme Irina Bokova.  Dans cette lettre, elles appellent le monde à réinvestir dans des politiques et des cadres assurant l’égalité et l’inclusion des sexes et à remettre en cause les structures patriarcales qui persistent. 

Lors de la conférence de Cancún sur le climat, Mme Robinson avait noté que les femmes ministres présentes y avaient pris conscience de leur « position de pouvoir » qui leur permettait de décider qui allait participer à leurs délégations.  Cela leur avait permis d’y associer des jeunes femmes et des femmes autochtones de leurs pays. 

Forte de ces constats, Mme Robinson a appelé le monde, et plus particulièrement les femmes, à réfléchir à des stratégies pour donner la voix aux jeunes femmes en martelant que le potentiel générationnel est significatif et qu’il faut associer toutes les femmes à ce combat commun pour une participation plus marquée des femmes dans la sphère politique.  Elle en a profité pour faire sienne la notion de liberté défendue par Rosa Luxembourg qui avait dit que « la liberté, c’est toujours la liberté pour ceux qui pensent différemment ».  La femme est la meilleure ambassadrice de la diversité, a-t-elle ajouté.

Pour la cheika AL MAYASSA BINT HAMAD BIN KHALIFA AL THANI, Présidente des musées du Qatar, qui a été présentée comme « une inspiration pour les femmes du monde arabe » et la fille de la Première Dame, Moza bint Nasser, quand on parle de leadership des femmes cela couvre tout le spectre des femmes aux premières loges jusqu’à celles qui opèrent en coulisse.  Elle a dit avoir eu beaucoup de chance, parce que son père l’a toujours traitée de la même façon que ses cinq frères et que sa mère était une pionnière de l’engagement et du travail des femmes.  Sans la vision de son père, « qui est un homme », il n’y aurait pas eu de Première Dame du Golfe, un poste que sa mère occupe toujours. 

Pour la cheika Al Mayassa, l’équilibre entre les sexes est une question qui s’adresse autant aux hommes qu’aux femmes.  Notant qu’au Qatar aujourd’hui, il y a plus de femmes diplômées que d’hommes, et que de nombreuses femmes travaillent, y compris dans ses équipes, elle a mis l’accent sur la nécessité de créer des structures qui permettent aux femmes d’être à la fois mères et de poursuivre leur carrière.  C’est dans cet esprit qu’elle a mis en place une garderie dans ses propres bureaux.

La modératrice d’Al Jazeera est revenue sur les acquis des femmes au Qatar, en notant que ce n’est pas forcément la perception que l’on a de ce pays, et a demandé à la panéliste comment cela était compatible avec les traditions et la culture locale.

La cheika Al Mayassa n’a pas hésité à dire qu’il n’y a pas de traditions culturelles qui disent que les choses sont telles qu’elles sont, et que l’islam a donné les mêmes droits aux hommes et aux femmes.  À ses yeux, ce sont des obstacles structurels qui persistent.  Chaque pays doit trouver les meilleures pratiques pour autonomiser ses femmes et leur permettre de choisir la vie qu’elles veulent mener.

Lui succédant, la Ministre de la défense de la Bosnie-Herzégovine, Mme MARINA PENDEŠ, a remarqué que « quoi que l’on dise », le leadership des femmes, qu’il soit politique ou économique, reste de nos jours « un phénomène » à défaut d’être devenu la norme.  Forte de sa propre expérience, elle a affirmé que les femmes sont tout aussi efficaces que les hommes, y compris dans le secteur de la défense.  Depuis sa prise de fonctions, et dans le but de leur garantir plus de visibilité, elle a demandé à ses équipes de travailler sur la mise en œuvre concrète de la résolution 1325 de l’ONU, précisant que son objectif est de faire passer le pourcentage de femmes dans l’armée de 8% à 10%.  Pour la Ministre, l’éducation et la santé sont les deux facteurs clefs de l’autonomisation des femmes. 

Cependant, avec 21% de femmes au Parlement, et tant que les femmes ne s’engagent pas en politique, il sera difficile de changer la donne sur le terrain, a-t-elle remarqué en appelant les femmes à être plus présentes dans la vie publique, tout en reconnaissant l’importance des cadres juridiques nationaux pour cela.

« Chaque fille est un leader né », a affirmé d’emblée Mme MUNIBA MAZARI, artiste, humanitaire, animatrice à la télévision et ambassadrice de bonne volonté pour ONU-Femme au Pakistan.  Elle a mis l’accent sur cette notion de mentorat et de solidarité entre femmes, allant même jusqu’à reformuler le dicton selon lequel derrière chaque grand homme, il y a une femme, en le complétant en affirmant que « derrière chaque grande femme, il y a aussi une femme ».  Dans son cas, c’était sa mère. 

Pour Mme Mazari, les femmes ne demandent pas une faveur, mais simplement l’exercice de leurs droits fondamentaux, ce qui commence par l’éducation.  « Puisque nous parlons de femmes leaders, mon fils de 8 ans n’a aucun problème à accepter l’égalité entre les hommes et les femmes », a-t-elle affirmé pour dénoncer les idées préconçues qui perpétuent ces inégalités.  Elle a lancé un appel aux femmes occupant des postes de responsabilité pour qu’elles deviennent les porte-voix de celles qui n’en ont pas.

À la question de savoir ce qu’il faut dire aujourd’hui à la génération montante, la Présidente de la Fondation Mary Robinson et du Conseil des Sages s’est empressée de répondre que l’important pour les jeunes filles est de « croire en elles », citant le cas de cette jeune suédoise de 16 ans qui est devenue une « super star » de la lutte contre les changements climatiques.  C’est aussi ce qui l’a amenée à reprendre les paroles de Kofi Annan pour lequel « on n’est jamais trop jeune pour diriger, et jamais trop vieux pour apprendre ».

Dans le cadre de la discussion qui a suivi ces interventions, la représentante du Royaume-Uni a mis l’accent sur la situation des femmes dans les zones de conflit: comment leur permettre de sortir de leur silence?  De manière générale, elle a incité les femmes à « arracher » une place à la table des négociations en ajoutant simplement leur chaise. 

Venues témoigner des succès d’un processus progressif pour augmenter la participation des femmes dans la sphère politique, la représentante de Cuba a indiqué que les femmes représentent aujourd’hui, dans son pays, 48,4% du Conseil d’État, 77% des postes de juge et occupent le poste de procureur général.  Au Timor-Leste, a renchéri la représentante de ce pays, les femmes représentent 44% des parlementaires et occupent presque un quart des postes de ministre, et seulement 33% de la fonction publique.  Ce constat a poussé la représentante du Timor-Leste à défendre un système de quotas pour garantir une présence minimum des femmes à tous les échelons, une approche qui reste controversée, comme l’a remarqué la modératrice.

En Belgique, les quotas se sont révélés efficaces pour assurer la présence des femmes dans les conseils d’administration et sur les listes électorales, a indiqué un ministre belge qui a reconnu toutefois qu’il n’existe pas un instrument unique pour permettre l’accès des femmes aux postes de leadership politique et économique.  Pour lui, le pire obstacle pour les femmes reste souvent la présence de « murs de verre », illustrant son propos par l’exemple anecdotique de cette femme cycliste qui, lors d’une course, avait rattrapé les cyclistes hommes, ce qui lui avait valu de devoir interrompre sa course. 

Ce sont, en effet, souvent des stéréotypes qui bloquent les femmes, a rebondit la modératrice avant de demander ce qu’il en est au sein de l’armée à la Ministre de la défense de la Bosnie-Herzégovine.  Celle-ci a soutenu l’approche des quotas pour ouvrir la voie aux femmes dans un premier temps.

 

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