En cours au Siège de l'ONU

Biodiversité marine: le champ d’application du futur instrument juridiquement contraignant au centre des négociations intergouvernementales

Troisième session,
43e séance – matin
MER/2113

Biodiversité marine: le champ d’application du futur instrument juridiquement contraignant au centre des négociations intergouvernementales

Les délégations qui prennent part à la troisième session de la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine ont progressé aujourd’hui sur les négociations du futur « instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».

Alors que la première semaine de travaux s’est achevée aujourd’hui, les délibérations ont eu lieu au sein du Groupe de travail officieux sur « les ressources génétiques marines, y compris les questions liées au partage des avantages ».  Les échanges ont porté sur les articles 7 et 8 du futur instrument, le second délimitant le champ d’application que beaucoup ont situé, sur le plan temporel, au moment de l’entrée en vigueur du futur accord.  Le Groupe des États d’Afrique a toutefois envisagé que le futur instrument puisse avoir un effet rétroactif.

Concernant le champ d’application ratione materiae, il semble que les délégations soient d’accord pour exclure la pêche de poissons pêchés comme produits de base, tel que cela est prévu dans l’avant-projet d’accord.

Les travaux ont commencé par des commentaires sur l’article 7, intitulé « Objectifs », qui se décline en cinq alinéas.

Le premier alinéa -a)- comprend la liste de groupes de pays, futurs États parties, qui nécessitent de renforcer leurs capacités afin de tirer parti des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale: les États en développement, en particulier les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral, les États géographiquement désavantagés, les petits États insulaires en développement, les États côtiers d’Afrique et les pays en développement à revenu intermédiaire.

L’Iran a dit être d’accord pour voir figurer dans cette liste le groupe des pays à revenu intermédiaire, tandis que les États-Unis s’y sont opposés.  Sri Lanka a rappelé qu’il allait bientôt passer dans cette catégorie mais prévenu qu’il n’avait pas à lui seul les capacités de gestion des ressources génétiques marines.  De plus, 73% de la population mondiale vit dans les pays à revenu intermédiaire, a argué la délégation pour appuyer leur mention dans le texte.  La Palestine, parlant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77) a, sans ambages, déclaré qu’il ne souscrirait pas au retrait du groupe des pays à revenu intermédiaire de la liste, alors que l’Indonésie a demandé d’ajouter la catégorie des États qui sont formés d’archipels.  Pour l’Australie, il faut tout simplement retirer ce paragraphe de l’accord, a dit la délégation.

Le deuxième alinéa –b)- prévoit comme autre objectif de « promouvoir la production de connaissances et d’innovations techniques, notamment en encourageant et facilitant conformément à la Convention le développement et la conduite de la recherche scientifique marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».  Les Fidji, s’exprimant au nom de petits États insulaires du Pacifique, ont appuyé cet article, mais jugé trop faible le verbe « promouvoir » placé au début.  Le Japon a, pour sa part, préféré que cet objectif soit placé en première position. 

Pour le groupe CLAM (Core Latin American), c’est le troisième alinéa –c)- qui devrait figurer comme tout premier objectif: le Brésil, qui parlait au nom de ce groupe, a dit soutenir la proposition du G77 de mettre l’accent sur cet objectif, car étant le plus important de tous.  Le but envisagé ici est d’« encourager un partage [juste et équitable] des avantages qui découlent de l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».  Même son de cloche du côté de l’Indonésie, qui a plaidé pour que cet alinéa devienne le principal de l’article 7, un avis partagé par l’Union européenne (UE).  Le Japon a toutefois suggéré de supprimer les adjectifs « juste et équitable », car à ses yeux, cela laisse croire qu’il s’agit d’un « partage d’argent ».  La Suisse a quant à elle tenu à préciser que ce partage devait se faire de manière volontaire et d’un commun accord.

Les États-Unis ont fait la même remarque en ce qui concerne le caractère « volontaire » pour l’alinéa suivant -d)– selon lequel il faut « favoriser le développement et le transfert des techniques marines [, sous réserve de tous les intérêts légitimes, y compris, entre autres, les droits et les obligations des détenteurs, des fournisseurs et des bénéficiaires de ces techniques] ».  Pour la délégation américaine en effet, tout transfert des techniques marines doit se faire sur une base volontaire.

Sur le plan de la structure du texte, la Chine, le Canada et d’autres orateurs ont préconisé que les alinéas a) et d) soient transférés dans la partie de l’accord consacrée au transfert des techniques marines. 

De même, pour le dernier alinéa de l’article 7 -e)– qui prévoit comme objectif de « soutenir l’instauration d’un ordre économique international juste et équitable », le G77 a proposé de le déplacer pour le mentionner au préambule.  L’UE a également estimé que cette dernière phrase n’avait pas sa place dans cet article, un avis partagé par la Norvège, le Japon, et le Canada.   

Lors de l’examen de l’article 8 intitulé « Champ d’application [de la présente partie] [du présent Accord]] », le Canada a proposé que l’intitulé de l’article soit tout simplement « champ d’application ». 

Les négociateurs ont d’abord examiné le premier paragraphe de l’article 8 qui se lit comme suit: « [1. [La présente partie] [Le présent Accord] s’applique aux ressources génétiques marines [des] [auxquelles il est accédé dans les] [provenant des] zones ne relevant pas de la juridiction nationale.] » 

L’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a dit préférer l’expression « auxquelles il est accédé dans les », tandis que la Barbade, au nom de la CARICOM, a souhaité que tous les termes entre crochets soient conservés. 

L’UE a demandé d’ajouter, en fin de paragraphe, l’expression « qui sont collectées après l’entrée en vigueur de cet instrument », en faisant ainsi allusion aux ressources génétiques marines collectées dans des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Selon cette logique, il faudra enlever le verbe « accédé », a précisé la délégation. 

Singapour a interpellé les délégations sur le fait que les organismes marins peuvent se retrouver dans une zone de juridiction nationale, mais provenir d’une zone hors de la juridiction nationale, et vice-versa. 

Les discussions sont ensuite passé au deuxième paragraphe et à ses alinéas: « [2 [La présente partie] [Le présent Accord] s’applique:

[a) [À l’utilisation de poissons [d’échantillons] et autres ressources biologiques pour la recherche sur leurs propriétés génétiques] [Aux ressources génétiques marines, y compris les poissons, dans la mesure où ils sont collectés en tant que sujet de recherche sur leurs propriétés génétiques]; ] »

Le G77 a dit être d’accord avec ce paragraphe, ainsi que les petits États insulaires en développement du Pacifique.

« b) Aux ressources génétiques marines collectées in situ [et [auxquelles il est accédé] [obtenues] ex situ] [et [in silico] [[et] [aux] [sous forme de] [données] et [d’informations] de séquençage [génétique] [numérique]]; »

Le Groupe des États d’Afrique a souhaité que l’on retire le mot « obtenues ». 

« [c) Aux produits dérivés.]] »

Le groupe CLAM a soutenu cet alinéa sur les produits dérivés qui doivent selon lui être pris en compte, mais le Japon a demandé qu’il précise qu’il s’agit des ressources génétiques marines collectées in situ

La Fédération de Russie a quant à elle demandé que les deux paragraphes, 1 et 2, soient « jumelés ». 

Abordant ensuite les cas qui seraient exclus du champ d’application, les délégations ont parlé du troisième paragraphe: « [3. [La présente partie] [Le présent Accord] ne s’applique pas: 

[a) [À l’utilisation de poissons et autres ressources biologiques comme produits de base.] [Les poissons et autres ressources biologiques collectés au-delà d’un certain seuil exprimé en volume sont considérés comme des produits de base. »

Le groupe CLAM a dit vouloir proposer une simplification du libellé ci-dessus, souhaitant se focaliser sur l’activité de pêche plutôt que sur les produits de la pêche.  L’UE a été plus catégorique: selon elle, la gestion des poissons de pêche ne relève pas de l’instrument en cours de négociation.  La Fédération de Russie a dit, à son tour, que la pêche ne devait pas être prise en compte dans l’instrument. 

« [b) Aux ressources génétiques marines [auxquelles il est accédé] [obtenues] ex situ [ou [in silico] [[et] [aux] [sous forme de] [données] et [d’informations] de séquençage [génétique] [numérique]]; ] »

L’Indonésie a souhaité voir cet alinéa supprimé tout simplement. 

« [c) Aux produits dérivés;] »

Cuba a proposé d’enlever les alinéas b et c, arguant que la recherche scientifique devait être prise en compte pour ces ressources.  Pour la délégation cubaine, la seule exception au champ d’application doit concerner les activités de pêche ayant pour but final l’alimentation.  L’Alliance de la haute mer a proposé que le terme « poissons » soit remplacé par l’expression suivante: « ressources biologiques marines » afin d’éviter toute équivoque.

« [d) À la recherche scientifique marine.]] »

Enfin, l’article 8 prévoit encore, dans un quatrième paragraphe que: « [4. Le présent Accord s’appliquera, après son entrée en vigueur, aux ressources génétiques marines auxquelles il est accédé in situ, ex situ [et in silico] [[et] [aux] [sous forme de] [données] et [d’informations] de séquençage [génétique] [numérique]], y compris les ressources auxquelles il était accédé in situ avant son entrée en vigueur, mais [auxquelles il est accédé] [ou qui sont utilisées] ex situ ou [in silico] [[et] [sous forme de] [données] et [d’informations] de séquençage [génétique] [numérique]] après son entrée en vigueur.  ] »

L’UE a estimé qu’au vu des amendements qu’elle avait proposés au paragraphe 1, le paragraphe 4 devenait caduc.  La Suisse a été d’avis que les produits dérivés ou les informations relatives au séquençage ne devaient pas figurer dans cet article.  De ce fait, l’instrument ne devrait tenir compte que des ressources collectées in situ après l’entrée en vigueur de l’instrument.  Elle a abondé dans le sens du Japon, selon lequel il faut mentionner que l’instrument n’aura pas d’effet rétroactif.  La Norvège a également insisté pour que l’instrument ne concerne que les ressources collectées après l’entrée en vigueur de l’instrument.  Même avis pour la Nouvelle-Zélande, qui a proposé de supprimer les paragraphes 3 et 4, tandis que pour l’Australie, il est clair que cet instrument et le présent article ne concernent pas les poissons. 

Les États-Unis ont également milité pour qu’il soit dit que l’accord n’aura pas d’effet rétroactif.  La Chine a tenu à rappeler qu’en vertu de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, « lorsque le consentement d’un État à être lié par un traité est établi à une date postérieure à l’entrée en vigueur dudit traité, celui-ci, à moins qu’il n’en dispose autrement, entre en vigueur à l’égard de cet État à cette date ».  Ce à quoi le Groupe des États d’Afrique a répondu que la même Convention dispose, en son article 28, de la non-rétroactivité des traités, « à moins qu’une intention différente ne ressorte du traité ou ne soit par ailleurs établie ».  Faisant valoir que la question des ressources génétiques marines fait l’objet de discussions au sein de la communauté scientifique depuis plus de 15 ans, le Groupe a été d’avis qu’on ne pouvait insister pour que le champ d’application temporel ne concerne que la période après l’entrée en vigueur du futur accord.

En fin de séance, les délégations ont approuvé un nouveau programme de travail (en anglais) pour la seconde et dernière semaine des travaux. 

La Conférence intergouvernementale poursuivra sa session lundi 26 août, à 10 heures, en examinant les questions du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: climat de guerre froide entre Moscou et Washington après la fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire

8602e séance – après-midi
CS/13928

Conseil de sécurité: climat de guerre froide entre Moscou et Washington après la fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire

Quelques jours après l’annonce du premier test américain de missile de portée intermédiaire depuis la fin de la guerre froide, la Fédération de Russie et les États-Unis se sont rejetés l’un sur l’autre, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, la faute de l’extinction du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire –le Traité FNI- au milieu d’appels à la reprise du dialogue afin d’éviter une nouvelle course aux armements nucléaires.

Signé en 1987 entre les États-Unis et l’Union soviétique après la longue crise dite des « euromissiles », étendu ensuite aux États successeurs de l’URSS, le Traité FNI interdisait les tests et l’usage de missiles d’une portée de 500 à 5 500 kilomètres tirés du sol et ne concernait donc ni les missiles tirés de bombardiers, ni ceux lancés depuis des sous-marins. Il avait néanmoins, selon la Fédération de Russie -qui avait réclamé la tenue de la réunion- contribué à l’instauration progressive d’un climat de confiance sur la scène internationale. 

Cet accord était d’autant plus important, a estimé la Haut-Représentante pour les affaires de désarmement, Mme Izumi Nakamitsu, qu’il n’existe, en dehors de lui, aucune norme, aucun traité ou accord, autre que bilatéraux, réglementant les missiles.  « L’effondrement récent de ce Traité a levé l’une des rares restrictions au développement et au déploiement d’une catégorie de missiles déstabilisants et dangereux » a-t-elle prévenu, avant d’appeler les États à rechercher d’urgence un accord pour tracer une nouvelle voie pour le contrôle international des armes.

« Malheureusement, il est devenu de plus en plus clair que cet accord gênait nos partenaires américains », a affirmé Moscou qui avait réclamé la tenue de la réunion.  La délégation a notamment accusé les États-Unis d’avoir violé le Traité en déployant leur système antimissile Aegis en Europe de l’Est « soi-disant pour contrer la menace iranienne ».  Or, ce système pourrait être utilisé pour lancer des missiles Tomahawk en direction de la Russie, a dénoncé la délégation.  Elle a de plus vu dans l’annonce, par le Directeur du Pentagone du développement de nouveaux missiles, peu de temps après le retrait américain du Traité, le 2 août dernier, la preuve que Washington ne respectait pas l’accord bilatéral « depuis bien longtemps ». 

C’est plutôt la Russie qui a décidé de ne plus honorer ses obligations en élaborant un système de missile d’une portée expressément interdite par le Traité, à savoir le 9M729, ont contré les États-Unis, déplorant la menace que représente, pour toute l’Europe, le déploiement de ces missiles dans la partie occidentale de la Russie.  Dans ces conditions, les États-Unis ont estimé qu’ils n’avaient pas à respecter un accord que Moscou s’ingéniait à violer, affirmant par ailleurs que le système antimissile Aegis n’était pas interdit par le Traité. 

De même, a poursuivi le délégué, la Russie et la Chine ont développé de nouvelles capacités nucléaires au cours des 10 dernières années, et Beijing menace notamment de prendre pour cible les alliés américains qui hébergent nos missiles, alors qu’elle possède environ 2 000 missiles qui auraient été interdits par le Traité, si elle y avait été partie.  Nous prenons donc simplement les mesures qui s’imposent pour que les États-Unis aient la capacité de défendre leurs intérêts dans « ce monde post-traité créé par la Russie », s’est défendu Washington qui a dit demeurer ouvert à un contrôle des armes « efficace et vérifiable » auquel participeraient la Russie et la Chine et qui irait au-delà des traités axés uniquement sur certains types d’armes nucléaires ou portée de missile.  « Ce serait là une approche beaucoup plus efficace pour répondre aux menaces à la paix et à la sécurité internationales », a estimé la délégation.

La décision américaine de se retirer du Traité a été appuyé par les représentants du Royaume-Uni, de la France, de l’Allemagne et de la Pologne qui ont jugé que cette décision était logique au regard des initiatives russes.  « La Russie porte, à elle seule, la responsabilité pour la disparition du Traité », ont martelé ces délégations, pointant elles aussi le 9M729. 

À ce sujet, la Fédération de Russie a indiqué avoir proposé de fournir aux États-Unis, dans une « démarche de transparence inédite », des informations démontrant que ce système ne violait aucunement le Traité.  Mais les États-Unis n’ont pas daigné répondre présents et ont demandé aux pays de l’OTAN de ne pas se déplacer non plus, a déploré le représentant, accusant l’Europe de « raviver l’histoire ancienne » en soutenant Washington dans sa nouvelle course à l’armement. 

De son côté, le représentant chinois a jugé inexcusable que les États-Unis utilisent la Chine comme prétexte pour justifier leur retrait du Traité en proférant des accusations « infondées » et a insisté sur le caractère exclusivement défensif de sa doctrine militaire. 

Au cours de cette réunion, les États-Unis et la Russie ont été appelé à plusieurs reprises à renouer le dialogue afin de renégocier le Traité, ce « précieux instrument », mais aussi pour négocier la reconduction du Traité « New Start » de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques, qui arrive à échéance en février 2021.  La Côte d’Ivoire a notamment estimé qu’il incombait aux États disposant de l’arme nucléaire de donner des garanties de non-recours auxdites armes contre les États qui n’en sont pas dotés, notamment en adhérant au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

Mme IZUMI NAKAMITSU, Secrétaire générale adjointe et Haut-Représentante pour les affaires de désarmement, a rappelé que la question des missiles constitue une préoccupation aiguë pour la paix, la sécurité et la stabilité internationales depuis que les premières roquettes V2 ont été tirées sans distinction sur des villes d’Angleterre pendant la Seconde Guerre mondiale.  Depuis le mouvement des missiles à capacité nucléaire dans les Caraïbes, et la crise la plus grave de la guerre froide qui s’en est suivie, il y a près de 57 ans, l’acquisition, la prolifération, le déploiement et l’utilisation de missiles ont continué à jouer des rôles déstabilisateurs et même d’escalade dans les relations internationales, y compris entre des États dotés d’armes nucléaires et, dans certains cas, causant de graves dommages civils.

Aujourd’hui, les missiles ajoutent un élément dangereux et déstabilisateur aux points chauds régionaux, que ce soit en Asie du Nord-Est jusqu’au Sud de l’Asie du Sud, ainsi qu’au Moyen-Orient et en Europe, s’est préoccupée Mme Nakamitsu.  Ils contribuent directement à la reprise de la concurrence dans le domaine des armes stratégiques et entravent la réalisation des objectifs de désarmement à grande échelle.  De même, a-t-elle poursuivi, pendant des décennies, le rôle des missiles balistiques comme moyen de propulsion d’armes de destruction massive a été au centre des préoccupations du processus de désarmement nucléaire.  C’est pourquoi ces engins figurent au centre d’accords bilatéraux sur la limitation et la réduction d’armes stratégiques depuis déjà quatre décennies.

Pourtant, aujourd’hui, plus de 20 pays possèdent des missiles balistiques dotés de capacités dépassant le seuil de « capacité nucléaire » défini dans les directives du Régime de contrôle de la technologie des missiles (RCTM).  Et les États dotés de l’arme nucléaire recherchent activement de nouvelles capacités en matière de missiles et de défense antimissile, avec des conséquences peu claires et potentiellement négatives pour la paix et la sécurité internationales.

La Haut-Représentante a relevé que les missiles à armement conventionnel figurent aujourd’hui dans les arsenaux de nombreux États et de certains acteurs non étatiques et ont été utilisés comme armes de bombardement, souvent dans des villes.  Les progrès technologiques permettent aux missiles classiques d’être plus précis à longue portée, facilitant ainsi leur développement, leur transfert et leur utilisation.  La mise au point de systèmes d’armes utilisant une technologie de missile capable de manœuvrer à des vitesses hypersoniques pourrait déclencher une course aux armes déstabilisatrices, a noté Mme Nakamitsu. 

Elle a relevé que le lancement de missiles balistiques vers l’Arabie saoudite par des houthistes au Yémen a été particulièrement inquiétant.  De même, les préoccupations concernant les missiles balistiques n’ont toujours pas été résolues dans le cadre de la résolution 2231 (2015) qui avait avalisé le Plan d’action global commun.  De plus, des missiles terrestres et aériens ont été utilisés pour détruire des satellites en orbite terrestre, à trois reprises au cours de la dernière décennie.

Elle a souligné que l’effondrement récent du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire a levé l’une des rares restrictions au développement et au déploiement d’une catégorie de missiles déstabilisants et dangereux, rappelant dans la foulée que ce texte avait joué un rôle important pour mettre un terme à la guerre froide.  À l’instar du Secrétaire général, elle a appelé les États à rechercher d’urgence un accord pour tracer une nouvelle voie pour le contrôle international des armes.  Il importe de souligner que malgré ces évolutions inquiétantes, il n’existe aucune norme, aucun traité et accord réglementant les missiles, a-t-elle fait observer.  « Et à l’heure actuelle, seuls la Fédération de Russie et les États-Unis sont soumis à des restrictions juridiquement contraignantes concernant la quantité de certains types de missiles que ces États pourraient posséder. »

Elle a ensuite indiqué que le Régime de contrôle de la technologie des missiles et le Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques ne suffisent pas à traiter tous les aspects des menaces posées par les missiles et leur prolifération.  Et la dernière résolution adoptée par la Première Commission sur cette question remonte à 2008.  Ainsi, de plus en plus de pays, y compris ceux qui ne font pas partie des accords multilatéraux existants, continuent d’acquérir et de développer leurs capacités en matière de missiles balistiques.  Le Conseil de sécurité a d’ailleurs été activement saisi des activités menées en République populaire démocratique de Corée (RPDC).

« Empêcher la prolifération et l’émergence d’armes de déstabilisation reste une tâche essentielle et inachevée pour la communauté internationale dans le cadre des efforts de préserver la paix, la sécurité et la stabilité internationales », a affirmé la Haut-Représentante.  Elle a plaidé pour l’urgence d’adopter de nouvelles approches internationales, y compris des approches multilatérales juridiquement contraignantes, afin de traiter des divers aspects problématiques des missiles.  Ainsi, une attention accrue portée par le Conseil de sécurité à ces défis pourrait donner une impulsion à ces efforts.

Le 2 août dernier, les États-Unis ont « malheureusement » décidé de se retirer du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, a déploré M. DMITRY A.  POLYANSKIY (Fédération de Russie), rappelant que cet accord, conclu pendant la guerre froide, avait alors contribué à l’instauration progressive d’un climat de confiance sur la scène internationale.  Pendant un certain temps, le Traité a été bien respecté, a estimé le délégué russe.  Mais par la suite, il est devenu de plus en plus clair que cet accord gênait nos partenaires américains, qui désiraient plutôt imposer leurs mesures « unilatérales et injustes » à travers le monde, a-t-il affirmé.  Entre autres violations du Traité, le représentant est revenu sur le déploiement, par les États-Unis, du système antimissile Aegis en Europe de l’Est, notamment en Roumanie, « soi-disant pour contrer la menace iranienne ».  Or, il est clair que ce système pourrait être utilisé pour lancer des missiles Tomahawk en direction de la Russie, a dénoncé le représentant.

Deux semaines après le retrait américain du Traité, les États-Unis ont procédé, le 18 août dernier, à un test de missile de portée intermédiaire, le premier depuis la guerre froide, a poursuivi le représentant.  Au passage, il a rappelé que le dernier Traité START, un accord bilatéral entre les États-Unis et la Fédération de Russie sur la réduction et la limitation des armements stratégiques, arrivait à échéance en 2021 et que celui-ci était également en péril, « les États-Unis ne s’y intéressant pas ».  L’Administration américaine a démontré « à maintes reprises » qu’elle n’avait pas l’intention de reconduire ce Traité, a-t-il déploré. 

Washington, a-t-il encore accusé, souhaitait cette situation et a violé de manière délibéré le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, a encore accusé le représentant.  Ce dernier a notamment pointé les menaces sécuritaires qu’auraient proférées les États-Unis et la brièveté du délai dans lequel le Directeur du Pentagone a annoncé le déploiement d’un missile sol-sol, signe, selon lui, que les États-Unis violaient le Traité depuis bien longtemps. 

« Mais nous n’avons pas convoqué cette réunion pour accuser les États-Unis d’hypocrisie », a poursuivi le représentant.  Nous sommes plutôt venus exprimer notre stupéfaction face à la position adoptée par nos partenaires européens dans ce contexte, a-t-il déploré.  Le représentant a rappelé que la Russie avait présenté, en décembre 2018, un projet de résolution en appui au Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire qui, a-t-il précisé, ne comportait aucune critique à l’égard des États-Unis et qui appelait à la poursuite des efforts diplomatiques.  Nous avions également averti que la fin du Traité mettait en péril l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et provoquerait une nouvelle course à l’armement.  « Mais l’Europe ne nous a pas écouté », a-t-il déploré avant de lancer: « Êtes-vous contents d’avoir voté contre ce projet de résolution? » 

Les alliés européens de Washington devraient en effet comprendre qu’en tolérant les actions américaines, ils sont en train de raviver l’histoire ancienne, à l’époque où l’Europe risquait d’être touchée par des missiles.  « Nous n’avons aucune intention d’emprunter cette voie », a précisé le délégué russe, mettant l’Europe en garde contre la course à l’armement qu’appelle de leurs vœux les États-Unis, comme en témoigne, selon lui, le budget militaire américain, qui s’élèverait à 700 milliards de dollars.  Parallèlement, le représentant a affirmé que le budget militaire de la Russie était de 60 milliards de dollars, soit 20 fois moins, a-t-il précisé, que le budget équivalent de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). 

Les dépenses pour mettre au point des « armes interdites » par le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire ont d’ailleurs été introduites dans le budget militaire des États-Unis bien avant leur sortie du Traité, a en outre affirmé le représentant.  Au lieu de dépenser autant de ressources en matière d’armement, les pays occidentaux devraient allouer leur budget national au développement, a-t-il estimé. 

« Allez-vous assumer vos responsabilités pour ce qui s’est passé plutôt que d’accuser la Russie ou bien la Chine de représenter une menace pour la paix mondiale », s’est enfin interrogé le représentant.  La Russie garde espoir que la raison et l’instinct de préservation primeront sur les États-Unis car, a souligné le délégué, ce qui est en jeu c’est le destin même de l’humanité.  Le représentant a ensuite réaffirmé l’intention de son pays de renouer un « dialogue sérieux » en faveur de la stabilité et de la sécurité stratégique.  « Si cela ne tenait qu’à nous, nous ne serions pas arrivés à la situation dangereuses actuelle », a-t-il affirmé, avant d’appeler à régler « dès aujourd’hui », les problèmes dus aux « actions irresponsables » de Washington.

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a rappelé que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avait été conclu à la fin des années 1980 entre les États-Unis et l’Union soviétique.  Il a ensuite affirmé qu’il y a plus d’une décennie, la Russie « avait décidé de ne plus honorer ses obligations » en élaborant un système de missile d’une portée expressément interdite par le Traité, à savoir le 9M729.

Au début de ce mois, après six ans de diplomatie pour le préserver, les États-Unis ont décidé de se retirer d’un traité violé délibérément par la Russie, a dit le représentant.  Nos alliés de l’OTAN ont également conclu que la Russie avait violé de manière substantielle le Traité et ont pleinement appuyé le retrait des États-Unis en raison de l’intransigeance de la Russie.  Nous sommes réunis ici, a-t-il affirmé, car la Fédération de Russie préférerait un monde où les États-Unis continueraient d’honorer leurs engagements en vertu du Traité, mais pas la Russie. 

Illustrant son propos, le représentant des États-Unis a déclaré que de nombreux bataillons de missiles russes 9M729 ont été déployés en Russie du temps de l’existence du Traité, notamment dans la partie occidentale du pays, faisant peser une menace pour toute l’Europe.  De même, la Chine menace de prendre pour cibles les alliés américains qui hébergent des missiles des États-Unis, en dépit du fait que la Chine a déjà déployé des milliers de missiles à portée intermédiaire dans le but de faire peser un risque sur les États-Unis et leurs alliés.

Maintenant que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire n’existe plus, a-t-il poursuivi, nous prenons les mesures qui s’imposent face au déploiement sans cesse grandissant de missiles à portée intermédiaire, aussi bien par la Russie que par la Chine.  À l’heure actuelle, a-t-il insisté, les États-Unis ne disposent d’aucun missile à portée intermédiaire à lanceur terrestre, alors que la Russie en a déployé des bataillons entiers et que la Chine possède environ 2 000 missiles qui auraient été interdits par le Traité si ce pays y avait été partie.

Poursuivant, M. Cohen a affirmé que les efforts de recherche et développement, par les États-Unis, d’engins à capacité classique et lanceur terrestre n’étaient ni provocateurs, ni n’entraînaient d’effets déstabilisateurs.  Il s’agit, a-t-il affirmé, d’une réponse mesurée pour que les États-Unis aient la capacité de défendre leurs intérêts dans « ce monde post-traité créé par la Russie ».  Il a précisé que ces efforts de recherche remontent à décembre 2017 et n’étaient pas interdits par le Traité.  Il a également affirmé que le système antimissile Aegis ne représente pas une violation des obligations découlant du Traité, celui-ci n’ayant pas de capacités de lancement offensif de missiles balistiques ou de croisière.

Le délégué a soutenu que pendant que les États-Unis œuvraient pour réduire la taille de leur arsenal nucléaire, la Russie et la Chine ont, ces 10 dernières années, développé de nouvelles capacités nucléaires et de missiles.  La Russie, a-t-il notamment affirmé, modernise et diversifie ses capacités nucléaires et la taille de son arsenal nucléaire devrait augmenter de manière significative au cours de la prochaine décennie.  Selon lui, la Russie disposerait de jusqu’à 2 000 ogives nucléaires non stratégiques de différents types.  Les États-Unis, a-t-il ajouté, n’en ont qu’un: la bombe à chute libre B-61.

M. Cohen a voulu savoir combien de missiles 9M729 la Russie avait produits et connaître leur emplacement.  Il a aussi voulu connaître les raisons de l’explosion du 8 août et l’objectif du système qui en était à l’origine.  Il s’est également soucié de l’augmentation rapide et de la diversification de l’arsenal nucléaire chinois.

Ces évolutions, couplées au comportement agressif et coercitif de la Russie et de la Chine, sont les moteurs de la détérioration de l’environnement sécuritaire, a-t-il accusé.  Les États-Unis ne resteront pas les bras ballants et prendront toutes les mesures qui s’imposent pour veiller à leur sécurité et à celle de leurs alliés et partenaires.  Nous le ferons en testant et mettant sur pied de nouveaux systèmes pour répondre aux défis que nous affrontons, mais également en nous préparant à prendre part à « une nouvelle ère de contrôle des armes ».

Les États-Unis, a-t-il dit, demeurent ouverts à un contrôle des armes efficace et vérifiable auquel participeraient la Russie et la Chine et qui irait au-delà des traités axés uniquement sur certains types d’armes nucléaires ou de portée de missile.  Ce serait là une approche beaucoup plus efficace pour répondre aux menaces à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il estimé.

« La Russie porte à elle seule la responsabilité pour la disparition du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire », a accusé M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) qui a également affirmé que cet État le violait « depuis longtemps » en mettant en place des systèmes de missile non conforme rapidement déployables.  Selon lui, la Russie aurait refusé de reconnaître leur existence jusqu’à ce que les États –Unis aient été en mesure de les identifier très clairement.  Le 1er février 2019, les États-Unis ont donc annoncé leur volonté de se retirer du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, retrait qui est devenu effectif le 2 août 2019.  Il a indiqué que de nombreux efforts diplomatiques avaient été déployés en direction de la Russie ces dernières années pour qu’elle reste en conformité avec le Traité.  Il a appuyé les explications données par les États-Unis concernant le calendrier de mise au point du nouveau missile américain.  Il a estimé que la Russie adoptait une tendance à l’agression. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) a regretté qu’aucune solution n’ait été trouvée pour maintenir en vigueur le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, notant que la fin de ce Traité accroît les risques d’instabilité en Europe et érode le système international de maîtrise des armements.  « La Russie porte la responsabilité de l’extinction du Traité, qu’elle a continué d’enfreindre en dépit de nos appels à une application conforme du Traité », a-t-elle affirmé.  Elle a averti que le développement d’un nouveau système de missile à portée intermédiaire par la Russie accroît la menace qui pèse sur les intérêts de sécurité européens. 

La représentante a appelé au rétablissement de la confiance mutuelle et du dialogue et a rejeté l’idée d’une « nouvelle course aux armements, dont nous paierions tous le prix ».  Elle a appelé à redoubler d’efforts pour préserver les instruments de maîtrise des armements conventionnels et nucléaires existants et refonder un cadre international robuste qui repose sur des instruments « réels, vérifiables et fondés sur le droit ».

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a relevé que dans un contexte où la communauté internationale peine à apaiser les tensions suscitées par la question du nucléaire, l’affaiblissement du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire vient raviver les craintes d’une relance de la course aux armements qui pourrait mettre à mal les acquis en matière de non-prolifération nucléaire.  Et cela risque, si l’on n’y prend garde, d’ouvrir la voie à une série d’initiatives qui contribueront, sans aucun doute, à complexifier le contrôle des missiles balistiques et des armes de destruction massive. 

La Côte d’Ivoire a donc lancé un appel pressant aux parties russe et américaine à renouer le dialogue, afin de sauver ce « précieux instrument » de coopération entre les deux plus grandes puissances nucléaires.  Le représentant a aussi rappelé que son pays fut parmi les premiers signataires du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en 2017, et a exhorté tous les États parties aux cadres bilatéraux et multilatéraux de non-prolifération à œuvrer davantage, à travers un dialogue constant, à la préservation des acquis actuels.  De même, M. Adom a souhaité que le Traité « New Start » de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques qui arrive à échéance en février 2021, soit renouvelé.  Il a estimé qu’il incombe aux États disposant de l’arme nucléaire de donner des garanties de non-recours auxdites armes contre les États qui n’en sont pas dotés, notamment par la conclusion d’un instrument international juridiquement contraignant.  Il a conclu en notant que les États dotés de capacités nucléaires ont un rôle encore plus crucial à jouer dans la préservation de la stabilité acquise depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. 

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) a regretté la fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire entre la Fédération de Russie et les États-Unis, qui a été communiquée au début de ce mois à causes de violations alléguées du Traité par une des parties.  Il s’est dit très préoccupé par l’escalade de tensions qui en découle.  Il a également craint la menace qui pèse sur l’architecture du désarmement et la non-prolifération, disant redouter la reprise de la course aux armements qui était reléguée aux temps de la guerre froide.  Le représentant a réitéré le ferme engagement de son pays à respecter les obligations découlant du Traité sur la non-prolifération.  Pour lui, le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire a été un « excellent complément » du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. 

L’humanité et la planète ne peuvent être exposées une fois de plus aux dommages catastrophiques sur le plan humanitaire et environnemental qu’entraînent l’utilisation, le développement et les essais de ces armes, a conclu le délégué avant d’appeler les parties à éviter les discours agressifs et les activités déstabilisatrices.  Il faut, les a-t-il invitées, réfléchir à leur retour à la table du dialogue en vue de restaurer les mesures qui encouragent la confiance par le biais d’un accord.  Un tel accord devra être mis en œuvre de manière effective et ses obligations respectées sur la durée, a-t-il précisé. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a estimé que la fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, les menaces qui pèsent sur le Plan d’action global commun ainsi que les incertitudes qui planent sur l’avenir du nouveau Traité de réduction des armements stratégiques et du dossier nord-coréen, ne rassurent pas.  Ces récents développements témoignent de la polarisation accrue au sein de la communauté internationale où la confiance et la coopération entre États marquent un profond recul, s’est-il inquiété.  Il a estimé que ce climat met à rude épreuve l’architecture mondiale de non-prolifération et de désarmement, et rend plus difficiles encore les progrès qui sont pourtant indispensables alors que les risques de prolifération augmentent. 

Il a rappelé que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire fut un des piliers de la sécurité européenne et mondiale pendant plus de 30 ans.  Grâce à lui près de 3 000 missiles équipés de têtes nucléaires ou conventionnelles ont été retirés du sol européen et détruits de manière vérifiable.  Ce Traité représentait également une contribution tangible à la réalisation des obligations des États-Unis et de la Russie en matière de désarmement au titre de l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, a—t-il ajouté, avant de déplorer la disparition de ce Traité.  Le représentant a regretté que la Russie n’ait pas répondu aux appels internationaux répétés lui demandant de reprendre l’exécution de ses obligations découlant du Traité, ce qui, a-t-il affirmé a entraîné la dissolution du Traité.  Il a appelé la Russie et les États-Unis à s’engager dans un dialogue constructif, afin de s’accorder sur des mesures de stabilisation et de rétablissement de la confiance, ainsi que pour élaborer des initiatives en vue de renforcer la stabilité stratégique et de réduire de manière résolue leurs arsenaux nucléaires.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a fait part de sa préoccupation face à la menace que posent les armes de destruction massive à l’échelle mondiale, notamment les armes nucléaires et leurs systèmes de lancement.  « Le seul moyen de nous prémunir d’une détonation volontaire ou accidentelle de ces armes réside dans leur élimination totale », a-t-il affirmé.

Dans ce cadre, le représentant a jugé très préoccupant le fait que les puissances nucléaires persistent à vouloir moderniser leurs arsenaux nucléaires et leurs systèmes de lancement, en violation flagrante du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Il a également déploré l’effondrement du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, qui fait peser, selon lui, le risque d’une future guerre nucléaire sur le monde.  Dans ce contexte, le représentant a exhorté la Fédération de Russie et les États-Unis à entamer des discussions en vue de reconduire le Traité Start, qui arrive à échéance en 2021. 

Le représentant a par ailleurs réaffirmé l’engagement de l’Afrique du Sud, « seul pays à avoir volontairement éliminé ses armes nucléaires », en faveur de l’éradication pure et simple des armes nucléaires, dans la ligne du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, ouvert à signature depuis le 20 septembre 2017.  Il a appelé la communauté internationale à signer et ratifier ce Traité, afin qu’il puisse entrer en vigueur.

Le représentant s’est en outre déclaré préoccupé par le non-respect des dispositions du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires concernant le désarmement et la non-prolifération.  Il a appelé la communauté internationale à prendre appui sur le cinquantième anniversaire de la signature du Traité pour faire avancer ces questions.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déploré la disparition du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, relevant que ce « Traité bilatéral historique » avait été signé à un moment critique de la guerre froide.  Il a rappelé que ce Traité avait permis aux États-Unis et à la Russie de détruire 2 700 missiles et de maintenir la stabilité et la paix de façon tangible en Europe.  Il a craint que l’extinction de ce Traité n’entrave la mise en œuvre d’autres traités mettant ainsi en péril la sécurité internationale.  Il s’est aussi soucié de la lente cadence des efforts de désarmement à travers le monde avant d’insister sur le fait que le seul moyen de mettre un terme à la menace des armes nucléaires est de les détruire complétement.

M. GUSTAVO MEZE-CUADRA (Pérou) a rappelé son engagement en faveur du désarmement nucléaire et de l’éradication totale de ces armes, par l’entremise du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et la création de zones exemptes d’armes nucléaires. 

Le représentant a appelé les puissances nucléaires à s’acquitter de leurs obligations au titre de l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Il a déploré l’effondrement du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire et a exhorté les États-Unis et la Fédération de Russie à régler leurs différends par la voie du dialogue.

Dans ce cadre, le représentant a invité ces deux pays à reconduire « le Traité Start III », d’ici à son échéance en 2021.  En conclusion, le représentant a appelé les puissances nucléaires à se montrer responsables et à éviter une nouvelle course aux armements nucléaires dangereuse pour l’ensemble de la planète. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a regretté l’extinction du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, « clef de voute de la sécurité euro-atlantique », qui avait permis la destruction de 3 000 missiles.  Il a affirmé que la Fédération de Russie était l’unique responsable de la fin de ce Traité, relevant qu’en mettant au point le système de missile 9M729, la Russie l’avait de fait violé.  Il a estimé que l’avenir du contrôle des armements mérite d’être examiné par le Conseil de sécurité, avant d’affirmer que les agissements de la Russie ont contribué à faire peser de nouvelles graves menaces de prolifération. 

En dépit de ces évolutions alarmantes, a-t-il poursuivi, nous sommes persuadés que les questions de prolifération doivent être traitées de manière prioritaire par la communauté internationale.  Il a réclamé des mesures tangibles pour éviter une escalade, en citant la nécessité d’établir des lignes de communication en cas de crise ainsi que des mesures permettant la réduction des ambiguïtés.  Il nous faut également établir une feuille de route pour avancer tout en renforçant les traités existants, a-t-il ajouté, pour ensuite demander des réductions vérifiables des grands arsenaux stratégiques. 

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) s’est inquiétée de l’évolution de la situation et du risque d’une nouvelle course à l’armement.  Elle a insisté sur l’importance du dialogue et « avant tout » de la diplomatie préventive, pour ensuite déplorer les sommes consacrées à l’industrie des armements, d’autant plus que la pauvreté et l’inégalité sont les causes fondamentales de la plupart des conflits actuels, provoqués par des pays dotés d’arsenaux toujours plus grands et plus sophistiqués.  Il a appelé les membres permanents du Conseil de sécurité à faire preuve de responsabilité, soulignant que la géopolitique ne peut être considérer comme un jeu à somme nulle, visant à déterminer qui possède le plus de missiles ou les missiles les plus sophistiqués où à plus grande portée.

Il a déploré la disparition du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire et a appelé la Russie et les États-Unis à coopérer l’un avec l’autre « dans l’intérêt de la planète entière ».  Les alliés des deux puissances doivent pour leur part créer les conditions nécessaires pour renforcer la confiance entre Washington et Moscou dans le but de renégocier ce Traité.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a rappelé que, bien qu’instrument bilatéral, le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avait eu des effets positifs pour tous les États, ayant contribué quelque peu à réduire la menace d’armes nucléaires et conventionnelles.  M. Djani a dès lors regretté la fin du Traité en estimant que cela constituait un grand retour en arrière dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  L’Indonésie regrette que les parties soient incapables de poursuivre le dialogue pour respecter le Traité, a déclaré M. Djani en s’inquiétant de la course aux armements qui pourrait résulter de la mort du Traité.  Étant donné que certains ont déjà commencé à moderniser leurs armes nucléaires et à développer de nouvelles technologies en matière d’armement, a-t-il affirmé, l’absence de ce Traité exacerbera la forte pression qui pèse déjà sur le désarmement mondial et le régime de non-prolifération, en étant une source d’instabilité.

Le représentant a appelé les parties à exercer le maximum de retenue pour le maintien de la stabilité régionale et mondiale, souhaitant que le système international basé sur des règles soit maintenu avec un multilatéralisme efficace et des négociations significatives.  Il a énuméré les instruments vitaux destinés à maintenir la paix et la stabilité, comme le Traité d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est, dont les obligations sont toujours valables.  L’Indonésie, a-t-il ajouté, souligne la nécessité impérative de préserver et de faire avancer les régimes de contrôle de l’armement, de désarmement et de non-prolifération.  Assurant de l’engagement de son pays dans ce sens, M. Djani a plaidé pour un contrôle de l’armement nucléaire et un désarmement nucléaire qui soient basés sur un traité.  Même si l’Indonésie espère que les parties en présence reviendront à la négociation pour élaborer un nouvel instrument plus efficace à la place du Traité disparu, le représentant a dit attendre la reprise des discussions sur l’avenir du Traité START et d’autres accords sur le contrôle de l’armement.  Enfin, il a réaffirmé l’engagement de son pays envers le Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est, dit Traité de Bangkok.

M. JUAN ZHANG (Chine) a déclaré que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avait été une grande importance pour la paix et la sécurité internationales et a estimé que les États-Unis et la Russie auraient dû régler leurs divergences afin de le préserver.  « Le retrait unilatéral des États-Unis aura des effets sur la stabilité régionale et internationale », a-t-il notamment prévenu, avant d’appeler la communauté internationale à être lucide sur les répercussions de l’extinction de ce Traité.  Le représentant a de plus jugé « inexcusable » que les États-Unis utilisent la Chine comme prétexte pour justifier leur retrait à ce Traité en proférant des accusations infondées.  « La paix et le développement sont les objectifs de la Chine, où les forces de la paix dominent sur celles de la guerre », a assuré le délégué chinois.  Il a appelé les États à prendre en compte les aspirations sécuritaires de tous de tous les États et à s’abstenir d’actes sapant les intérêts sécuritaires d’autres pays.

Poursuivant, M. Zhang a appelé les États-Unis à adopter un comportement responsable afin de préserver la stabilité régionale et internationale et éviter des actes unilatéraux « néfastes ».  Il a souligné que la Chine s’opposait catégoriquement au déploiement par les États-Unis de missiles à moyenne portée dans la région Asie et Pacifique.  « Nous invitons les États-Unis et la Russie à reprendre un dialogue propice au désarmement », a insisté le représentant de la Chine après avoir rappelé le caractère exclusivement défensif de sa doctrine militaire. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a rappelé que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avait joué un rôle déterminant pour assurer la sécurité européenne pendant 30 ans.  Elle a estimé que la Russie était la seule responsable de l’extinction de ce Traité.  Elle a ajouté que le déploiement du missile 9M729 représentait de fait une violation du Traité.  Elle a relevé que l’OTAN n’avait pas l’intention d’installer de nouveaux missiles sol-sol en Europe malgré la démarche russe.  La représentante de la Pologne a appuyé la décision américaine de se retirer du Traité, jugeant cette décision logique et compréhensible au regard des initiatives russes. 

En réponse aux commentaires de ses homologues sur les missiles russes 9M729, le représentant de la Fédération de Russie a affirmé que son pays avait tout fait pour calmer les préoccupations des États-Unis et de leurs alliés quant au fait que ces missiles ne violent pas le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire.  L’an dernier, lorsque nous avons enfin compris les préoccupations américaines à cet égard, nous leur avons proposé de leur fournir des informations exhaustives sur ces missiles pour leur faire comprendre qu’ils ne violaient en rien le Traité, a-t-il insisté.  Dans une « démarche de transparence inédite », nous avons même proposé de montrer ces missiles à des délégations étrangères.  Mais les États-Unis n’ont pas répondu présents et ont demandé aux pays de l’OTAN de ne pas se déplacer non plus, a déploré le représentant.

Par ailleurs, le représentant a déclaré que la Russie avait donné à Washington l’opportunité de sauver le Traité à plusieurs reprises.  « Mais c’est vous qui vous êtes retirés », a-t-il martelé, en direction de son homologue américain.  En réponse au système de défense antimissile américain et à son déploiement à nos frontières, nous avons dû mettre au point des systèmes nouveaux, s’est en outre justifié le représentant.  Mais la responsabilité première de l’effondrement du Traité incombe aux États-Unis et aux pays de l’OTAN, a-t-il insisté. 

« La séance d’aujourd’hui était bien prévisible », a poursuivi le délégué.  « Les États-Unis et leurs alliés, en dépit du bon sens, appliquent la politique de l’autruche et accusent la Russie de tous les maux », a-t-il affirmé accusant les pays occidentaux de vivre dans une « réalité virtuelle ».  « Nous, nous vivons sur Terre », a ajouté le représentant, appelant à donner une chance à la paix.  La Russie et la Chine « appelleront toutefois un chat un chat » et prendront les mesures qui s’imposent contre ceux qui menacent leur sécurité et l’ordre mondial, a-t-il mis en garde.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Négociations sur la biodiversité marine: les délégations débattent de la responsabilité et de la portée des études d’impact sur l’environnement

Troisième session,
42e séance – matin
MER/2112

Négociations sur la biodiversité marine: les délégations débattent de la responsabilité et de la portée des études d’impact sur l’environnement

Au quatrième jour du nouveau cycle de négociations intergouvernementales pour l’élaboration d’un instrument international sur la protection de la biodiversité marine, les débats ont été animés, ce matin, par le Groupe de travail officieux sur les études d’impact sur l’environnement, lesquelles constituent l’un des principaux volets du futur accord.  À cette occasion, les délégations ont principalement fait valoir la primauté de l’État partie dès lors qu’il s’agit d’évaluer l’impact sur l’environnement d’une activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle. 

Comme lors des premières journées, les délégations ont progressé article par article, en se basant sur l’avant-projet d’accord qui a été élaboré par Mme Rena Lee, la Présidente de la Conférence intergouvernementale, avec l’aide de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer.  Ce document reprend les quatre principaux thèmes retenus en 2011 pour le périmètre du futur instrument, dont celui des « études d’impact sur l’environnement ».  Les débats de ce matin ont porté sur trois des 20 articles de ce chapitre. 

En ouverture de la discussion sur le paragraphe 1 de l’article 30, intitulé « Vérification préliminaire », la Palestine, au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a proposé de supprimer la référence au promoteur de l’activité prévue, jugeant que c’est à l’État partie et à lui seul de déterminer si l’évaluation de l’impact sur l’environnement est requise.  De même, le G77 a souhaité que soit retirée la mention d’une « activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle ».  Cette double position a été partagée par l’ensemble des intervenants, notamment par les pays du groupe CLAM (Core Latin American) et de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Elle a même donné lieu à un rapprochement inattendu entre le G77 et les États-Unis –exceptionnellement en phase sur tous les alinéas de l’article- que les autres délégations n’ont pas manqué de saluer.  Favorable à une vérification plus générale s’agissant des conditions de vérification préliminaires, l’Union européenne a elle aussi approuvé ce paragraphe.

S’agissant du paragraphe 2, la première phrase a été validée par une majorité de délégations.  Les débats ont essentiellement porté sur le caractère « préliminaire » de la vérification et sur la deuxième phrase, selon laquelle l’étude d’impact s’impose « si l’activité prévue doit être exécutée à l’intérieur ou à proximité d’une zone désignée pour son importance ou sa vulnérabilité ».  L’Union européenne a demandé la suppression de ces deux mentions, rejointe par la Nouvelle-Zélande et le Canada.  Celui-ci a du reste relevé que la deuxième partie du paragraphe est déjà visée par l’article 27 du projet d’accord relatif aux « zones désignées comme importantes ou vulnérables sur les plans écologique ou biologique ».  Le Japon a lui estimé que ce paragraphe n’est pas nécessaire puisqu’il incombe aux États parties de décider si le seuil prévu par l’article 206 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est atteint. 

Le paragraphe 3, consacré au cas de figure où il n’y aurait pas lieu de procéder à une évaluation de l’impact sur l’environnement, a été plus discuté.  Nombre de délégations ont notamment contesté le principe d’une vérification des informations fournies par l’État partie à l’organe (ou le réseau) scientifique et technique qui serait créé par le futur instrument.  Les États-Unis, rejoints par le Japon et le Canada, ont catégoriquement rejeté cette possibilité, écartant également celle d’un contrôle par une organisation intergouvernementale.  Ils ont en revanche estimé utile de rendre publiques les informations ayant conduit un État partie à renoncer à une évaluation, une suggestion également formulée par la Norvège.  La Fédération de Russie a, quant à elle, proposé de supprimer ce paragraphe, rappelant son opposition à la création d’une institution scientifique dans le cadre de l’accord. 

Passant à l’article 31, intitulé « Détermination de la portée des études », les délégations ont débattu du paragraphe 1 qui envisage les « procédures » que les États parties devraient établir à cette fin.  Si le G77, le groupe CLAM et le groupe des États d’Afrique ont soutenu le libellé proposé, les États-Unis, le Canada et la Norvège ont à nouveau fait valoir que lesdites procédures devraient être celles, internes, de l’État partie.  De leur côté, les Philippines se sont déclarées favorables à l’établissement de procédures par un organe scientifique et technique. 

Aucun consensus ne s’est dégagé non plus sur le paragraphe 2 portant sur « l’identification des principaux [impacts] [enjeux] environnementaux [, sociaux, économiques, culturels et autres] ».  Si la plupart des intervenants ont approuvé l’inclusion de cette question dans le futur accord, ils se sont divisés sur les termes et sur la deuxième partie relative à la détermination de solutions de remplacement et des effets potentiels de l’activité prévue.  La Norvège, tout comme l’Union européenne et le Canada, a souhaité savoir quel serait le niveau de détail du futur accord, tandis que Singapour a jugé prématuré, à ce stade, de faire référence aux aspects socioéconomiques, jugeant plus pertinent d’en rester aux enjeux environnementaux. 

Le paragraphe 1 de l’article 32 intitulé « Étude d’impact et évaluation » a été généralement approuvé comme suit: « Un État partie qui a déterminé qu’une activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle nécessitait une étude d’impact sur l’environnement en vertu du présent Accord veille à ce que la prévision et l’évaluation des impacts dans une telle étude soient effectuées conformément à la présente partie, en utilisant les meilleures informations scientifiques et connaissances traditionnelles disponibles ».  Le paragraphe 2, qui dispose que « rien […] n’empêche les États Parties, en particulier les petits États insulaires en développement, de mener des études d’impact sur l’environnement conjointes », a, lui aussi, été globalement validé. 

Les délégations se sont davantage divisées sur le paragraphe 3, relatif à la question de savoir à qui il revient de se charger de l’étude d’impact.  Si le G77 a appuyé la variante 1 selon laquelle un État partie peut charger un tiers de cette tâche, l’Union européenne a déclaré ne pas pouvoir l’approuver sans savoir qui est le tiers.  Le Canada s’est, quant à lui, dit favorable à cette variante parce qu’elle ne crée pas d’obligation pour les États parties.  La variante 2, qui prévoit que l’étude soit menée par un consultant indépendant nommé par un groupe d’experts désigné par l’organe scientifique et technique, a été largement rejetée.  Au nom des petits États insulaires en développement, les Îles Salomon ont néanmoins proposé de fondre les deux variantes de ce paragraphe avec le paragraphe 4 relatif à l’établissement d’une liste d’experts.  Alors que certaines voix ont plaidé pour le rattachement de ces articles au chapitre sur le renforcement des capacités, la Norvège a vu dans cette idée de fusion une « bonne idée ».  « Mais qui assumerait les coûts et qui chargerait les experts de ces tâches? » s’est-elle interrogée. 

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux demain matin, vendredi 23 août, à 10 heures, en débattant au sein de son Groupe de travail officieux sur les études d’impact sur les ressources génétiques marines, y compris les questions liées au partage des avantages.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Somalie: devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial fait état d’une « fenêtre de plus en plus étroite » pour la réussite des réformes

8601e séance – matin
CS/13925

Somalie: devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial fait état d’une « fenêtre de plus en plus étroite » pour la réussite des réformes

Pour sa première intervention devant le Conseil de sécurité, le nouveau Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie a averti, ce matin, que « la fenêtre est de plus en plus étroite » pour permettre le succès des réformes et des processus électoraux en cours dans le pays, lesquels dépendent en grande partie de la reprise du dialogue et de la coopération entre le Gouvernement et les États fédérés. 

Selon M. James Swan qui présentait le dernier rapport du Secrétaire général, les signes de progrès sont légion dans le processus de paix et d’édification de l’État en Somalie, mais les Somaliens souhaitent à présent les voir se concrétiser, notamment au travers d’une réforme constitutionnelle, de mesures en matière de sécurité, d’un allègement de la dette et d’élections nationales en 2020/2021.  Pour espérer atteindre ces objectifs d’ici à l’an prochain, il est selon lui crucial d’« accélérer les efforts dans les mois à venir », ce qui nécessitera un consensus politique au niveau national et plus particulièrement entre le Gouvernement central et les États membres de la fédération. 

À ses yeux, le cycle électoral 2020/2021 offre l’occasion de faire progresser de manière décisive le processus de démocratisation, d’autant plus qu’un projet de loi électorale est examiné par le parlement fédéral et que la Commission électorale indépendante nationale s’apprête à enregistrer les électeurs.  Mais avant ce scrutin national, il convient de rester attentif au processus électoral dans les États membres de la fédération, a fait valoir M. Swam, indiquant suivre de près les développements dans le Galmudug, où une commission de réconciliation est à l’œuvre.  Il a également salué les efforts déployés au Djoubaland pour parvenir à un processus électoral consensuel, faute de quoi, a-t-il prévenu, il existerait un fort risque d’instabilité en cas de contestation des résultats. 

Les perspectives électorales dans ces deux États étaient également à l’esprit du Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), qui a rappelé que les élections qui doivent se tenir en fin d’année dans le Galmudug permettront de sceller la réconciliation des 11 clans qui composent cet État.  M. Francisco Caetano Jose Madeira a, en revanche, prévenu que la situation politique se dégrade dans le Djoubaland, où l’AMISOM s’emploie néanmoins à créer un environnement propice à la tenue du scrutin qui devrait débuter demain.

Le représentant de la Somalie a d’ailleurs prévenu des défaillances du processus électoral en cours dans cet État, regrettant notamment les méthodes adoptées par le président sortant du Djoubaland et avertissant du risque que fait peser sur le développement de la démocratie en Somalie ce « processus corrompu ».  La délégation somalienne a, en revanche, indiqué que si la stabilité est assurée dans le Galmudug, les bases d’une réconciliation nationale seront posées pour l’ensemble du pays.

Dans son intervention, M. Swan, qui est également à la tête de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), a estimé que les Somaliens doivent parvenir à s’entendre sur les questions prioritaires, à commencer par le partage du pouvoir et des revenus des ressources naturelles, les relations intergouvernementales, le système de gouvernance et le statut de Mogadiscio.  Une liste à laquelle la France a ajouté la mise en œuvre du plan de transition sécuritaire ainsi que l’intégration des forces régionales dans l’armée nationale somalienne.  « Il est donc urgent que ce dialogue puisse reprendre », a commenté la représentante française. 

Cet appel au dialogue a été repris à son compte par la Côte d’Ivoire, qui s’est elle aussi inquiétée de la persistance de tensions entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés, jugeant que cette crise institutionnelle est de nature à fragiliser le processus politique et à ralentir le rythme des réformes.  La Guinée équatoriale a exhorté les parties à faire preuve d’un « esprit de consensus », à l’instar de la reprise de la coopération entre la Chambre haute et la Chambre basse du Parlement fédéral, après sept mois de rupture.  « La distance qui s’instaure progressivement entre le Gouvernement fédéral somalien et ses États membres fédérés met en péril les progrès réalisés en Somalie, notamment sur le plan des élections fédérales, du renforcement de la sécurité et de l’allègement de la dette », a averti la délégation. 

S’agissant de la situation sécuritaire, qualifiée de préoccupante par le Représentant spécial en dépit d’une reconquête de territoires par les forces de sécurité somaliennes et leurs partenaires dans le Bas-Chébéli, la Fédération de Russie a relevé qu’elle est actuellement exacerbée par les affrontements interclaniques et le lancement du cycle électoral.  La délégation a ainsi plaidé pour l’édification d’un système de sécurité national unique, en mesure d’assurer à terme le transfert des prérogatives sécuritaires aux Somaliens eux-mêmes.  Un appel repris par les États-Unis qui ont mis l’accent sur l’important défi représenté par les Chabab, citant les récentes attaques à Mogadiscio et à Kismayo. 

Le Chef de l’AMISOM s’est cependant préoccupé de savoir qui contrôlera les nouvelles villes libérées, sachant que les Somaliens ne sont, pour le moment, pas en mesure de mettre en place des forces suffisamment formées et équipées.  « À quoi sert-il que l’AMISOM continue d’avancer et de libérer des villes au prix d’un coût immense si la Somalie ne peut pas prendre le relais pour contrôler et gérer ces villes? », s’est interrogé M. Madeira qui a regretté que la communauté internationale n’ait pas su anticiper les conséquences du rôle offensif de l’AMISOM. 

Sur une note plus positive, plusieurs délégations ont salué l’adoption, début août, entre le Gouvernement et le Fonds monétaire international (FMI), d’un quatrième programme de référence pour la période allant de mai 2019 à juillet 2020 préparant ainsi la Somalie à un allégement de la dette au titre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

Cette réunion a également été l’occasion d’entendre la Représentante spéciale du Secrétaire général sur les violences sexuelles en période de conflit, Mme Pramilla Patten, et la Directrice exécutive du Somali Women Development Center (SWDC), Mme Amina Arale, qui, toutes deux, ont dénoncé la stigmatisation des femmes en Somalie, dont les droits sont violés par toutes les parties en présence, et la faiblesse du système judiciaire à leur égard. 

LA SITUATION EN SOMALIE

Rapport du Secrétaire général sur la Somalie (S/2019/661)

Déclarations

M. JAMES SWAN, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), s’est dit heureux de s’exprimer pour la première fois devant le Conseil de sécurité depuis sa prise de fonctions en juin.  De retour dans un pays dont il suit l’évolution de près depuis des années, M. Swan s’est déclaré impressionné par les multiples signes de progrès.  Au cours de ses déplacements dans le pays, il a pu relever de nombreux exemples de relèvement, de développement, d’amélioration de la sécurité et des institutions.  Il a avoué avoir été ému par la résilience et le courage des Somaliens rencontrés.  Ce progrès est le témoin de ce que font les Somaliens et leurs partenaires dans le cadre du programme de consolidation de la paix et d’établissement d’un État, a-t-il souligné.  Ils souhaitent, selon lui, voir ces progrès avancer d’ici à la fin de 2020 au travers d’une réforme constitutionnelle, de mesures en matière de sécurité, d’un allègement de la dette pour financer le développement et d’avancées en vue des élections nationales. 

Si les progrès sont indéniables, la fenêtre qui s’offre à nous est de plus en plus étroite.  On risque de connaître des reculs et de ne pas respecter les délais fixés si le dialogue et la coopération ne reprennent pas entre les parties prenantes, a averti M. Swan.  Pour espérer atteindre ces objectifs, il faut accélérer les efforts dans les mois à venir, a-t-il dit.  Cela nécessitera également un consensus politique parmi les dirigeants somaliens au niveau national et particulièrement entre le Gouvernement central et les États membres de la fédération.  Il a dit attendre avec impatience la prochaine réunion du Forum de partenariat sur la Somalie, en octobre, qui donnera au pays et à ses partenaires internationaux l’opportunité de s’entendre sur les domaines d’action prioritaires. 

Pour le Représentant spécial, le cycle électoral 2020/2021 offre l’occasion de faire progresser de manière décisive le processus de démocratisation.  Les préparatifs techniques avancent, un projet de loi électorale est examiné par le Parlement fédéral et la Commission électorale nationale indépendante enregistre les électeurs.  M. Swan a encouragé la Chambre basse du Parlement à adopter ce projet de loi et le Gouvernement fédéral à mettre en place une mission chargée de la sécurité des élections.  Il a également souhaité que ces élections soient l’occasion de renforcer la participation des femmes au processus politique.  

Avant ces élections nationales, il convient de rester attentif au processus électoral dans les États membres de la fédération, a poursuivi le Représentant spécial.  Il a dit suivre de près les développements au Galmudug, où, avec le soutien du Gouvernement fédéral, un forum de réconciliation est mis en œuvre.  Nous encourageons ces efforts destinés à parvenir à un large consensus sur le processus électoral au sein de cet État membre de la Fédération, a-t-il indiqué.  Au Djoubaland, a ajouté M. Swan, des efforts sont également déployés pour parvenir à un processus électoral consensuel, faute de quoi il existerait un fort risque d’instabilité en cas de contestation des résultats.  À cette fin, l’ONU et les autres partenaires internationaux maintiennent leurs pressions sur les parties afin de trouver un compromis.  Tout échec mettrait en péril non seulement les processus électoraux dans cet État membre mais aussi certaines priorités nationales, notamment la préparation des élections de 2020, la lutte contre les Chabab et le programme de développement, a-t-il prévenu. 

De l’avis du Chef de la MANUSOM, la Constitution fédérale, une fois adoptée, fournira une vision pour tous les Somaliens, tout en définissant clairement les rôles respectifs des différents organes de l’État fédéral, ainsi que les relations avec et entre les État membres de la fédération.  Les Somaliens doivent désormais mener un dialogue inclusif pour parvenir à des accords sur les questions prioritaires, à commencer par l’attribution du pouvoir, les relations intergouvernementales, le système de gouvernance, le partage des ressources et le statut de Mogadiscio. 

Le Représentant spécial a ensuite indiqué que la situation sécuritaire demeure préoccupante, évoquant l’attaque perpétré par les Chabab contre l’administration régionale de Benadir, le 24 juillet.  Il a rendu hommage aux victimes de cet acte de violence, tout en faisant état de signes encourageants dans le domaine de la sécurité.  Les forces de sécurité somaliennes, qui œuvrent aux côtés de la MANUSOM, de l’ONU et des partenaires internationaux, progressent dans la reconquête et la stabilisation des territoires du Bas-Chébéli, à la périphérie de la partie de Mogadiscio un temps sous le contrôle des Chabab, s’est-il félicité, saluant l’efficacité de cette collaboration. 

Sur le plan économique, a poursuivi le Représentant spécial, des progrès sont réalisés en vue d’une reprise; les autorités gouvernementales ont considérablement amélioré les performances fiscales et renforcé la gouvernance.  Le point de décision en vertu de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) est à présent proche et c’est au Gouvernement fédéral de s’assurer que les préconditions seront remplies début 2020, a-t-il indiqué.  Dans le même temps, la crise humanitaire demeure l’une des plus longues dans le monde, a-t-il déploré, précisant que 2,2 millions de Somaliens sont aujourd’hui confrontés à une insécurité alimentaire aiguë.  De plus, a-t-il ajouté, on recense 2,6 millions de déplacés internes dans le pays.  L’ONU et le Gouvernement somalien ont lancé un plan de riposte à la sécheresse qui nécessite un financement de 686 millions de dollars.  Pour l’heure, seuls 350 millions ont été collectés, a-t-il précisé, appelant les États Membres à y contribuer de toute urgence.  Parallèlement, a souligné M. Swan, il convient de ne pas oublier les priorités de développement à long terme, lesquelles sont prises en compte dans le cadre du nouveau programme national de développement. 

M. FRANCISCO CAETANO JOSE MADEIRA, Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), a estimé que, malgré les défis, la situation politique, sécuritaire et économique demeure encourageante en Somalie.  Durant la période examinée, nous avons constaté les efforts du Gouvernement fédéral pour mettre en œuvre des engagements en matière de paix et sécurité et d’inclusion, s’est-il félicité, avant de citer aussi des progrès sur le plan de la réconciliation.

Il s’est félicité des initiatives d’intégration et de la préparation des élections qui doivent se tenir à la fin de l’année dans l’État de Galmudug.  Il a indiqué avoir rencontré la commission de réconciliation pour parler de sa composition, son degré de représentativité et sa mission.  Ces élections sont l’occasion de déboucher sur la formation d’un gouvernement et la réconciliation des 11 clans qui composent cet État, a-t-il précisé. 

M. Madeira a ensuite prévenu que la situation politique se dégrade dans le Djoubaland.  Il a cité des accords conclus entre les parties prenantes sur le rôle de l’AMISOM afin de créer un environnement propice à la tenue des élections et à la création d’un climat de sécurité à Kismayo et ailleurs.  Il a estimé qu’il est encore temps pour les parties de trouver un accord pour permettre la tenue d’élections dans cet État.  Il a appelé à examiner la loi électorale et l’enregistrement des électeurs et à identifier les emplacements qui peuvent être sécurisés grâce à l’intervention de l’AMISOM.

Le Chef de l’AMISOM a fait savoir que la Commission de l’Union africaine a animé un atelier à Kampala sur les mécanismes de règlement des différends électoraux à l’horizon 2020 et 2021.  Il a cité un plan qui prévoit la mise en place, par le Gouvernement, d’une équipe spéciale électorale chargée de mettre au point les concepts clefs pour cette élection. 

Poursuivant, M. Madeira s’est félicité de la bonne santé de l’économie somalienne avec des prévisions de croissance de 3% à 3,2% pour 2019, contre 2,8% en 2018.  Il a dit que le quatrième programme de référence conclu avec le Fonds monétaire international (FMI) devrait attirer l’octroi d’une tranche de crédit supérieure du FMI et de la Banque mondiale afin de permettre aussi un allègement de la dette.

L’AMISON a mené des opérations offensives ciblées dans plusieurs localités, dont Awdheegle, de façon à perturber les opérations des Chabab et les affaiblir.  Des villes ont été libérées en avril dernier et notre coopération avec le service de déminage des Nations Unies est de plus en plus étroite alors que nous avançons davantage dans les territoires ennemis. 

S’agissant de l’appui de l’AMISOM à la police et à l’armée, il s’est félicité du déploiement de policiers de l’AMISOM dans 31 centres, précisant par ailleurs que 970 policiers somaliens avaient suivi une formation sur les questions de genre.  M. Madeira a aussi cité des formations à l’attention des forces de maintien de la paix en matière de droit international humanitaire, droits de l’homme, droits des femmes et des enfants, conduite et discipline et les questions de violences sexuelles liées au conflit. 

M. Madeira s’est cependant préoccupé de savoir qui contrôlera les nouvelles villes libérées, sachant que les Somaliens ne sont, pour le moment, pas en mesure de mettre en place des forces suffisamment formées et équipées.

« À quoi sert-il que l’AMISOM continue d’avancer et de libérer des villes au prix d’un coût immense si la Somalie ne peut pas prendre le relais pour contrôler et gérer ces villes? » s’est interrogé le Chef de l’AMISOM. Il a regretté que la communauté internationale ne soit pas préparée à cette situation et n’ait pas su anticiper les conséquences du rôle offensif de l’AMISOM. Afin de permettre la consolidation des gains et le transfert des responsabilités de l’AMISOM aux forces somaliennes, il a appelé à poursuivre et accélérer nos efforts de formation des troupes somaliennes pour leur permettre de contrôler des villes et territoires repris. 

Mme PRAMILA PATTEN, Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles en période de conflit, a rappelé qu’elle s’était rendue en Somalie en juillet cette année, pour la première fois, bien que le pays soit une de ses priorités depuis une dizaine d’années.  Depuis 2013, son bureau, par le biais de l’Équipe d’experts sur l’état de droit et la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), aide le Gouvernement somalien à renforcer son système judiciaire officiel, a-t-elle dit. 

Relatant sa visite sur le terrain, Mme Patten a indiqué s’être rendue à Mogadiscio et à Baidoa, où elle a rencontré des officiels du Gouvernement, des parlementaires, des responsables de l’ONU et de l’Union africaine (UA), ainsi que du personnel de premier secours et des représentants de la société civile.  Si elle n’a pas pu rencontrer de survivants, elle a dit être satisfaite par le niveau d’informations qu’elle a obtenues par le biais du système de l’ONU et des partenaires, qui ont souligné combien la violence sexuelle en Somalie continue à être une grave source de préoccupation.  Selon eux, le nombre de cas répertoriés n’est que la pointe de l’iceberg, c’est-à-dire du grave problème structurel qui fait que d’innombrables femmes et filles sont soumises à la violence sexuelle ou vivent dans la peur de l’être.  Ces sources d’information ont insisté sur le mot « innombrable » car les victimes sont souvent invisibles ou inaccessibles, avec personne pour les aider ou pour signaler les cas.

À Baidoa, le Président de l’État du Sud-Ouest et d’autres membres du Gouvernement ont indiqué que l’insécurité persistante, notamment dans les camps de personnes déplacées, plaçait les femmes et les filles de groupes minoritaires à un haut risque d’être victimes de violences sexuelles, à cause d’un accès limité ou inexistant aux services de protection.  Ayant rencontré également plus de 35 organisations de la société civile et de services de secours à Mogadiscio, Mme Patten a dit avoir entendu décrire les problèmes que posent les prédateurs sexuels qui profitent de la faiblesse du système judiciaire et de la stigmatisation. 

Comme autres défis, a-t-elle dit, ils ont cité le fait qu’il est difficile d’aider les femmes handicapées à cause de l’insécurité et des attaques qui visent les secouristes.  La majorité des survivants n’ont en outre pas accès aux services de santé sexuelle et reproductive, tandis qu’il y a de nombreux enlèvements commis par les Chabab qui forcent les familles à accepter des mariages forcés.  Mme Patten a salué à ce propos une initiative pilote menée à Baidoa avec le soutien de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui offre une assistance pour la réintégration des femmes et filles libérées des Chabab.  Elle a cité les informations données par les travailleurs sociaux et notamment le cas d’une fille de 17 ans enlevée et mariée de force à un membre des Chabab, mais qui a réussi à s’échapper.  Dans ce contexte, Mme Patten a souligné la nécessité urgente d’aider davantage de victimes de l’extrémisme violent et du terrorisme.

Dans la deuxième partie de son exposé, la Représentante spéciale a parlé de l’impunité des auteurs de crimes de violence sexuelle en en expliquant les raisons: les victimes craignent souvent des représailles et souffrent des insuffisances du système judiciaire national, tandis que le recours au système de justice transitionnelle empêche de signaler les cas.  Malgré les efforts menés par le Gouvernement pour renforcer le système de justice officiel, beaucoup de survivants de violences sexuelles dépendent en effet de ces mécanismes de justice traditionnelle, ce qui comprend le droit coutumier, le xeer et la charia.  Mme Patten a rappelé que les filles sont souvent mariées à leur violeur pour éviter à leur famille la honte et l’opprobre.  Elle s’est inquiétée notamment du cas d’une fillette de 9 ans violée par un soldat quelques jours avant sa visite. 

Toutefois, la Représentante spéciale a fait part du dialogue constructif qu’elle a eu avec les autorités nationales, en se félicitant de l’absence de tentatives de nier la réalité de ces crimes.  La violence sexuelle continue à être perpétrée par toutes les parties au conflit, ont reconnu les instances nationales qui ont aussi exprimé leur volonté politique de combattre ce fléau.  Le Gouvernement s’est d’ailleurs engagé, à l’issue de la visite de terrain, à travailler avec le système des Nations Unies pour élaborer un nouveau plan de mise en œuvre du Communiqué conjoint, sous la forme d’un plan d’action pour mettre un terme à la violence sexuelle en période de conflit, qui se concentrera sur les éléments clefs des résolutions 2331 et 2467 du Conseil de sécurité. 

Parmi les messages clefs qu’elle a transmis au Gouvernement, elle a cité les suivants: la nécessité de lutter contre la violence sexuelle en période de conflit en tant que menace à la paix et à la sécurité, l’importance de s’atteler aux causes profondes et de lutter contre les inégalités, l’adoption rapide des projets de loi sur les délits et crimes sexuels, la nécessité de renforcer la participation des États fédérés à toutes les initiatives du Gouvernement fédéral, et l’implication d’un vaste panel de parties prenantes, dont la société civile.  Elle a assuré que son bureau continuerait à travailler avec le Gouvernement pour soutenir ses actions en ce sens.

Mme AMINA ARALE, Directrice exécutive de l’organisation Somali Women Development Center (SWDC), s’est présentée comme une jeune défenseure des droits humains et de la paix, née et élevée en Somalie.  Affirmant avoir été le témoin de violations des droits de l’homme dans son pays depuis 30 ans, elle a précisé que son organisation lutte contre les violences sexistes à l’égard des femmes et des filles.  Le SWDC, a-t-elle indiqué, a établi la première assistance téléphonique pour les victimes de violences sexuelles et sexistes.  Elle fournit également un appui médical, psychosocial, juridique et technique aux victimes, qui représentent plusieurs milliers de survivantes chaque année. 

Dans le cadre de cet exposé, Mme Arale a souhaité développer quatre points, à commencer par l’impact du conflit sur les femmes et les filles en Somalie.  Selon elle, le pays reste très inégalitaire et les discriminations entre les sexes touchent principalement les femmes.  À cet égard, la Somalie a un indice d’inégalité des genres de 0,77 sur un maximum de 1.  De fait, a insisté l’oratrice, la violence sexuelle et sexiste est persistante et entourée de silence.  Les groupes minoritaires ne s’expriment pas lorsque ce type de violence affecte leur communauté, par crainte de stigmatisation.  Dans ce contexte, Mme Arale a salué le projet de loi sur les crimes sexuels ainsi que les efforts visant à tenir les auteurs pour responsables.  Le processus législatif a été, selon elle, un exemple positif de politique inclusive tenant compte des besoins des survivantes. 

Toutefois, a-t-elle noté, beaucoup reste à faire.  Le pays n’a ainsi ni signé, ni adopté, ni mis en œuvre la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, tandis que le plan d’action national basé sur la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité reste lettre morte.  À ses yeux, il importe que le Gouvernement somalien accélère la mise en place d’une commission nationale des droits de l’homme et assure le respect du droit international humanitaire.  Le Gouvernement fédéral et les autorités régionales doivent aussi veiller à ce que l’impunité ne soit plus tolérée et que les violences sexuelles soient sanctionnées, y compris celles perpétrées par des membres des forces de sécurité.  Il est pour cela essentiel que le Gouvernement fasse des efforts pour sensibiliser les parties prenantes à ces violences, y compris les responsables religieux et les autorités locales et judiciaires. 

Mme Arale a, d’autre part, relevé que l’accès des femmes à la justice est particulièrement difficile en Somalie.  De fait, les femmes se retrouvent privées de leurs droits, tandis que les hommes continuent de rendre la justice.  À ce sujet, a-t-elle indiqué, la participation des femmes dans les autorités et les professions judiciaires est également très faible.  S’il y a maintenant quelques femmes procureures, il n’y a toujours aucune femme exerçant les fonctions de juge en Somalie, a-t-elle déploré.  L’inclusion des femmes en tant que juges et procureures permettrait, selon elle, de rendre le système judiciaire somalien plus représentatif.  L’accès à la justice doit en outre aider à autonomiser les femmes et à éliminer les inégalités sous-jacentes qui rendent les femmes plus vulnérables à la violence. 

Évoquant ensuite la participation des femmes au secteur de la sécurité, Mme Arale a rappelé que les femmes ont activement contribué à la paix en Somalie, après des années de guerre civile.  Pourtant, a-t-elle observé, 14 des accords de paix conclus au cours des trois dernières décennies ont échoué en raison de l’exclusion des femmes.  Si l’accord de 2020 a été signé après l’inclusion des femmes, le rôle de ces dernières en tant que contributrices clefs à la paix n’est pas reconnu, a encore dénoncé la Directrice exécutive du SWDC.  De fait, a-t-elle martelé, le Gouvernement somalien doit veiller à ce que les droits des femmes figurent au cœur des décisions relatives à la paix et à la sécurité.  Elle s’est félicitée à cet égard que les femmes représentent désormais 11% des effectifs des forces de police en Somalie, ce qui place le pays au troisième rang en Afrique. 

S’agissant enfin de la participation des femmes à la vie politique et économique, Mme Arale a regretté que les femmes aient été exclues des postes décisionnaires alors même qu’elles sont les principales sources de revenus pour 80% des foyers du pays.  Les femmes politiques font par ailleurs face à des mesures d’intimidation visant à les décourager.  Pour l’oratrice, le Conseil de sécurité devrait appeler la MANUSOM à travailler avec le Gouvernement au développement d’un mécanisme de protection des femmes dirigeantes et à la publication des progrès réalisés en faveur des femmes dans la société civile.  Il devrait également exhorter explicitement le Gouvernement à respecter les droits des femmes et de tous les défenseurs des droits de l’homme. 

M. STEPHEN HICKEY (Royaume Uni) a estimé que l’ONU doit continuer de jouer un rôle vital en Somalie.  Il a aussi jugé que le régime de sanctions est une partie importante du processus de réforme de la sécurité.  Tout en reconnaissant que l’adoption d’un plan d’action sur la violence sexuelle en temps de conflits témoigne de la volonté du Gouvernement somalien d’avancer sur cette question, le représentant s’est dit préoccupé par le fait que le projet de loi sur la violence sexuelle n’ait pu être adopté.  Concernant l’élection prévue dans le Djoubaland, il a appelé tous les acteurs à s’abstenir de recourir à la violence dans cet État et à impulser des changements positifs.  S’agissant de l’élection nationale prévue en 2020 et 2021, il a jugé vitale l’adoption d’une loi électorale en novembre 2019.  « Nous sommes inquiets que la représentation des groupes minoritaires, notamment des femmes, ne soit pas assez prise en considération », a dit le représentant du Royaume-Uni. 

Pour ce qui est de la sécurité, M. Hickey a appelé à une meilleure coopération entre les autorités somaliennes et la communauté internationale pour mettre en œuvre l’architecture nationale de sécurité arrêtée lors de la conférence de Londres.  Il a estimé que les opérations conjointes sont un bel exemple d’une coopération réussie entre les forces internationales et les forces de sécurité somaliennes, mais qu’il restait encore beaucoup à faire pour contrôler l’ensemble des territoires. 

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) a constaté que la Somalie continue de faire face à d’importants défis pour bâtir un État stable et prospère, évoquant notamment les récentes attaques perpétrées par les Chabab à Mogadiscio et à Kismayo, lesquelles ont notamment couté la vie au maire de la capitale.  Cependant, a-t-il noté, les efforts de réforme du Gouvernement fédéral sont source d’espoir.  Il a encouragé l’AMISON et les Somaliens à continuer d’œuvrer vers un transfert de responsabilités dans le domaine de la sécurité afin de stabiliser les zones libérées des Chabab.  Il a aussi souligné l’importance, pour les forces de police somaliennes, d’obtenir un appui dans le domaine du renforcement des capacités afin de stabiliser les zones reprises aux Chabab.

Sur le plan politique, M. Cohen a estimé que les réformes lancées par le Gouvernement, notamment le projet de loi électorale et la réforme constitutionnelle en cours, sont source d’espoir pour le développement et la croissance économique du pays.  Il a cependant regretté que ces réformes importantes n’aient pas encore été finalisées, ni mises en œuvre.  Le représentant a ensuite salué les efforts déployés par le Premier Ministre Khavre pour promouvoir la réconciliation entre les différents clans du pays et le Gouvernement fédéral, ainsi que l’appui qu’il accorde à l’intégration des milices locales à l’architecture sécuritaire nationale.  Il a appelé l’ensemble des parties à appuyer le déroulement d’élections pacifiques.

Alors que le pays avance sur la voie d’un système démocratique sur la base d’« une personne, une voix » pour préparer les élections nationales, les États-Unis soulignent l’importance d’une bonne coopération entre l’équipe spéciale du Gouvernement, la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS) pour assurer la sécurité à chaque étape du processus de planification et de mise en œuvre. 

M. Cohen s’est, par ailleurs, préoccupé du fait que le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë était estimé à 2,2 millions et que 5,4 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire urgente.  Les États-Unis ont consacré 670 millions de dollars à l’aide humanitaire en Somalie depuis 2018.

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a mis l’accent sur la situation politique de la Somalie, se félicitant notamment des mesures prises par le Gouvernement et les États de la fédération pour promouvoir la réconciliation.  Dans ce contexte, le représentant a appelé les parties à surmonter les obstacles actuels et à accorder la priorité aux intérêts de l’État car, a-t-il souligné, la phase à venir sera décisive pour l’avenir de la Somalie, avec les élections nationales de 2020.  Le succès de ce processus de reconstruction permettra de renforcer les progrès réalisés, notamment dans l’approche nationale en matière de sécurité.  Il permettra également de venir à bout de la réforme constitutionnelle, a souligné le délégué, espérant que le Gouvernement fédéral mettra en œuvre son plan de réformes politiques. 

Malheureusement, a poursuivi M. Alotaibi, la situation sécuritaire rappelle la menace terroriste des Chabab qui prennent pour cibles les personnels de l’ONU et ceux qui viennent en aide aux habitants dans le besoin.  Il a relevé que ces groupes ont des capacités accrues en matière d’engins explosifs improvisés, et a jugé nécessaire d’en tenir compte dans la réforme du système de sécurité de la Somalie.  S’agissant de la situation humanitaire, le représentant a relevé que 2,6 millions de Somaliens sont aujourd’hui des déplacées internes et que les prévisions climatiques ne sont guère encourageantes.  Selon lui, une saison très sèche pourrait entraver les efforts déployés par la Somalie pour répondre aux besoins en matière agricole.  Concluant sur une note plus positive, il a salué les progrès réalisés sur le plan économique, notant que, selon le Fonds monétaire international (FMI), le pays a satisfait les conditions pour débloquer une tranche de crédit. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a salué le rôle que jouent la MANUSOM, le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie, l’AMISOM, l’UA et l’IGAD, ainsi que les partenaires internationaux, pour faciliter le processus de consolidation de la paix en Somalie.  En ce qui concerne le processus politique, il a réitéré que les progrès réalisés devaient être renforcés, ce qui exige un dialogue authentique au niveau national entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés.  Il a aussi encouragé les parties prenantes à s’engager dans un dialogue et une réconciliation qui incluent tout le monde.  Le représentant a salué les progrès accomplis dans le processus législatif ainsi que la réitération des engagements pour le dialogue entre la Somalie et le « Somaliland ».

Passant à la situation sur le plan de la sécurité, M. Matjila s’est inquiété des attaques croissantes des Chabab et de l’utilisation de plus en plus fréquente des engins explosifs improvisés.  Nous saluons le succès des opérations offensives et de stabilisation qui ont été menées par l’armée nationale dans la région du Bas-Chébéli, avec le soutien de l’AMISOM et des partenaires internationaux, a-t-il ajouté, y voyant une bonne illustration de la lutte contre les Chabab.  Sur le plan humanitaire, le représentant a souligné les effets des changements climatiques et l’insécurité alimentaire qui affectent grandement les communautés vulnérables.  Il a soutenu l’appel lancé par le Secrétaire général pour intensifier la fourniture des secours et de la protection nécessaires.  S’agissant des élections, M. Matjila a partagé l’avis du Secrétaire général que les parties prenantes doivent arriver à un consensus sur les questions électorales, jugeant également crucial de créer des mécanismes de coordination pour la sécurité des élections. 

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) s’est inquiété de la persistance de tensions entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés sur fonds de préparation des élections.  Il a estimé que cette crise institutionnelle est de nature à fragiliser les efforts visant à renforcer le processus politique et à ralentir le rythme des reformes.  C’est pourquoi, il a appelé les parties à surmonter leurs différends pour permettre la tenue d’élections libres, crédibles et transparentes et parvenir à un partage du pouvoir.  Il a salué l’adoption d’une loi sur la lutte contre la corruption et la ratification, le 31 juillet 2019, de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. 

Face à la persistance des attaques ciblées des Chabab en dépit des raids aériens de la communauté internationale, il a jugé important de renforcer les capacités des forces nationales pour pouvoir contrôler les zones reprises au Chabab.  Dans le domaine économique, il a salué l’adoption le 1er aout 2019 entre le Gouvernement et le Fonds monétaire international (FMI) d’un quatrième programme de référence pour la période allant de mai 2019 à juillet 2020 préparant la Somalie à un allégement de la dette au titre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés.

Par ailleurs, il a relevé que les atteintes aux droits de l’Homme, dont les assassinats ciblés, les violences sexuelles et les enlèvements d’enfants restent une grande source de préoccupation pour la communauté internationale.  Notant l’insécurité alimentaire grandissante et les déplacements de population, le représentant de la Côte d’Ivoire a salué les actions remarquables du Gouvernement pour organiser la riposte face aux conséquences de la sécheresse. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a souligné l’importance des bonnes relations entre le Gouvernement fédéral somalien et ses États membres fédérés pour le développement du pays.  Or, la distance qui s’instaure progressivement entre ces derniers met, selon lui, en péril les progrès réalisés en Somalie, notamment sur le plan des élections fédérales, du renforcement de la sécurité et de l’allègement de la dette.  Il a, par conséquent, appelé les parties à faire preuve d’un esprit de consensus et de coopération, à l’instar de la reprise de la coopération entre la Chambre haute et la Chambre basse du Parlement fédéral, après sept mois de rupture.

Le représentant a, par ailleurs, appelé les parties à garantir la transparence et la tenue pacifique des processus électoraux en cours dans les États membres fédérés.  Il a également demandé aux autorités compétentes de garantir un niveau élevé de participation des femmes à ces scrutins, tout comme aux prochaines élections générales de 2020/2021.

Condamnant, enfin, les attaques perpétrées par les Chabab et Daech à Mogadiscio, le représentant a invité la communauté internationale à redoubler d’efforts pour aider le pays à finaliser la mise en œuvre de son architecture nationale de sécurité.

M. HAITAO WU (Chine) a rappelé que la Somalie, de par sa localisation dans la Corne de l’Afrique, a une position stratégique importante.  Le maintien de la paix et de la stabilité dans ce pays a donc un effet sur l’ensemble du continent, a-t-il estimé.  Le représentant s’est félicité que le Gouvernement somalien s’engage dans la reconstruction du pays et prépare des élections nationales en 2020.  Malgré ces avancées, la situation reste complexe, a-t-il constaté, invitant la communauté internationale à suivre de près les développements politiques et sécuritaires dans ce pays.  Il faut, selon lui, renforcer les capacités de gouvernance du Gouvernement sur la base de l’indépendance et de la souveraineté de la Somalie.  Dans ce cadre, a-t-il poursuivi, tous les États fédérés doivent respecter le Gouvernement fédéral. 

Le représentant a également appelé les partenaires internationaux de la Somalie à renforcer leurs synergies afin de permettre le transfert des tâches de sécurité de la MANUSOM aux forces somaliennes.  À cette fin, il convient d’aider les pays contributeurs de contingents à lutter de façon efficace contre le terrorisme, qui continue de sévir en Somalie.  Pour le délégué, il faut aussi fournir une aide économique au pays alors que la situation humanitaire s’y est détériorée.  La Chine appelle, par ailleurs, la communauté internationale à trouver des solutions économiques endogènes pour identifier les causes profondes du conflit somalien. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a salué les efforts du Président somalien pour raviver le dialogue mais s’est inquiété des tensions et de l’impasse politique actuelle.  Il s’est aussi dit préoccupé par « la vulnérabilité de la sécurité en Somalie », condamnant les attaques menées par le groupe terroriste Chabab.  Le représentant a salué, par ailleurs, les progrès réalisés dans le processus de révision constitutionnelle.  Il s’est ensuite penché sur le sort des filles et femmes somaliennes en appelant à investir pour qu’elles soient des vecteurs de progrès pour elles, leurs familles et leurs communautés.  Le système de quota envisagé, à cet égard, dans le projet de loi électorale est une bonne chose, selon lui, pour augmenter la représentation des femmes dans le système politique et donc pour promouvoir le développement socioéconomique.  En ce qui concerne les élections dans le Djoubaland, il a plaidé pour un processus électoral unique qui soit crédible, inclusif et pacifique.  M. Singer a ensuite relevé les effets négatifs qu’ont les changements climatiques en Somalie, notamment en termes d’insécurité alimentaire et d’accès à l’eau potable.  Il a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour la coopération humanitaire.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a salué la détermination du Gouvernement somalien à mettre en œuvre son programme ambitieux de réformes, citant aussi les préparatifs en cours pour les élections, la promotion de la réconciliation interne et les efforts pour alléger la dette nationale.  Il a toutefois noté les difficultés persistantes, qui exigent un engagement continu de la part de la communauté internationale.  Il ne faut pas, a-t-il poursuivi, que l’impasse politique entre le Gouvernement fédéral et les États fédérés mettent en danger les acquis durement gagnés; il faut au contraire un dialogue constructif.  L’Indonésie réaffirme son soutien à la MANUSOM, qui promeut un règlement politique mené par le Gouvernement et fournit des conseils sur les efforts de consolidation de la paix.

En ce qui concerne la menace que pose les Chabab, M. Syihab a condamné les récents attentats et appelé à maintenir la présence de la MANUSOM en lui fournissant les ressources nécessaires à l’accomplissement de sa mission.  Il a aussi plaidé pour une aide internationale capable de se déployer rapidement et de manière coordonnée.  Enfin, le représentant a rappelé qu’un tiers de la population a actuellement besoin d’aide humanitaire, citant les 2,2 millions de personnes en insécurité alimentaire et les 2,6 millions de personnes déplacées.  Il a déploré que seulement 40% du plan humanitaire pour la Somalie pour 2019 soit financé.  Pour la bonne conduite des opérations humanitaires, il a appelé au plein respect du droit international humanitaire.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a fait part de la préoccupation de son pays face au blocage des relations entre le Gouvernement fédéral somalien et ses États membres fédérés, blocage qui constitue, selon elle, un obstacle majeur à l’aboutissement de chantiers cruciaux pour l’instauration d’une paix durable en Somalie.  Parmi eux, la représentante a notamment cité la préparation et la tenue des élections de 2020/2021, le processus de révision constitutionnelle, l’accord sur le partage des pouvoirs et des revenus issus des ressources naturelles, la mise en œuvre du plan de transition sécuritaire, la mise en œuvre de l’architecture nationale de sécurité et l’intégration des forces régionales dans l’armée nationale somalienne.  « Il est donc urgent que ce dialogue puisse reprendre », a-t-elle insisté.

Par ailleurs, Mme Gueguen s’est dit préoccupée par les tensions autour du processus électoral qui doit débuter demain dans le Djoubaland.  Dans ce contexte, elle a appelé les parties à faire preuve d’esprit de compromis pour parvenir à un accord sur un processus électoral « unique, transparent et accepté par tous ».  La représentante a également appelé les parties à ne pas recourir à la violence et à privilégier le dialogue pour résoudre leurs différends. 

En outre, Mme Gueguen s’est dit préoccupée par la fréquence des attaques des Chabab, notamment à Mogadiscio.  Dans ce contexte, elle a salué les actions menées par l’armée nationale somalienne avec le soutien de l’AMISOM, qui ont permis de reprendre des villes clefs aux groupes terroristes.  La représentante a toutefois appelé les autorités fédérales somaliennes à intensifier leurs efforts et à accélérer la mise en œuvre du plan de transition sécuritaire de l’AMISOM vers les forces de sécurité du pays.  De ce point de vue, elle a jugé essentiel que les décisions du Conseil en matière de transition soient respectées.  Elle a de plus appelé le Conseil à envoyer un message clair aux partenaires de la Somalie sur la nécessité de contribuer au financement de l’AMISOM aux côtés de l’Union européenne (UE).

Enfin, la représentante a souligné l’importance de la coopération entre les différents ministères somaliens pour permettre à la justice d’être rendue pour les victimes de violations des droits de l’homme.  Mme Gueguen a également appelé l’ensemble des responsables locaux et religieux à s’engager afin que la loi sur les crimes sexuels soit adoptée et mise en œuvre sur l’ensemble du territoire.

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a appelé le Gouvernement fédéral somalien et ses États membres fédérés à résoudre leurs différends par la voie du dialogue, dans le but de faire avancer les questions clefs pour la reconstruction du pays, y compris les élections fédérales, le renforcement de la sécurité et l’allègement de la dette.  Dans cette perspective, le représentant a salué le rapprochement récent opéré entre la Chambre haute et la Chambre basse du Parlement fédéral. 

S’agissant du processus électoral dans le Djoubaland, le représentant a appelé les autorités étatiques et fédérales à conclure un accord afin de garantir un scrutin transparent et sans heurts, en évitant les « processus électoraux parallèles ». 

De manière générale, le représentant a insisté sur l’importance de garantir un niveau élevé de participation des femmes dans la vie politique du pays, afin notamment d’atteindre le quota de 30% de femmes élues au Parlement fédéral dans le cadre des futures élections générales de 2020/2021.

Le représentant a, par ailleurs, condamné les récentes attaques des Chabab en Somalie.  Il a estimé que seule une coopération étroite entre le Gouvernement fédéral somalien et ses États membres fédérés permettrait de venir à bout du groupe.  Enfin, le représentant s’est félicité de ce que la Somalie remplisse désormais les critères du Fonds monétaire international (FMI) pour bénéficier d’un allégement de sa dette.

M. JEROEN COOREMAN (Belgique) a déclaré que les prochaines élections au Djoubaland offrent l’opportunité aux parties somaliennes de démontrer leur volonté de jouer le jeu démocratique.  Il a prévenu que le fédéralisme ne peut fonctionner sans un véritable dialogue.  « Il faut être prêt à céder une partie du pouvoir » ,a-t-il dit avant d’appeler à une adoption rapide du projet de loi électorale.  Par ailleurs, il a constaté que les Chabab représentent la première menace à la paix et à la sécurité et a insisté sur la nécessité de forces armées et de police bien formées avec une stratégie réfléchie et des codes de conduite clairs.  Il a noté que 5,4 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire dans un pays particulièrement sensible au choc climatique et à une sècheresse qui entame les capacités de résilience.  Il a appuyé l’intégration des questions de violence sexuelle dans les critères de désignation des régimes de sanction. 

M. ALEXANDER V.  REPKIN (Fédération de Russie) a noté que la situation sécuritaire demeure précaire en Somalie.  Cette situation alarmante est, selon lui, exacerbée par les affrontements interclaniques qui se poursuivent et par le cycle électoral qui vient de démarrer.  La planification électorale représente un vrai défi, sans oublier l’activité terroriste des Chabab qui continuent de contrôler de vastes territoires, a-t-il relevé.  Le représentant a regretté à cet égard que le directeur du service antimines des Nations Unies ne soit pas présent à cette réunion, comme la Fédération de Russie l’avait réclamé.  Saluant les avancées des forces de sécurité dans le Bas-Chébéli, il a plaidé pour l’édification d’un système de sécurité national unique, en mesure d’assurer à terme le transfert des prérogatives en matière de sécurité aux Somaliens eux-mêmes. 

Pour le délégué russe, la MANUSOM continue de jouer un rôle clef dans le soutien au processus de reconstruction de l’État somalien.  La reconfiguration de la Mission doit, à ses yeux, aller de pair avec l’évolution des institutions somaliennes.  Il s’est, par ailleurs, déclaré préoccupé par la situation humanitaire, notamment par la faible pluviosité et le déplacement forcé d’un nombre croissant de personnes.  Il a cependant souhaité attirer l’attention du Conseil sur des tendances prometteuses, comme la main tendue par Mogadiscio aux États fédérés, la reprise de la coopération entre les deux chambres du Parlement et l’assainissement du secteur économique et financier.  Il a enfin affirmé qu’une lutte efficace contre les problèmes que connaît la Somalie n’est possible que dans le respect le plus strict de la souveraineté somalienne, sans inférence d’aucune sorte. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a appelé à accélérer les efforts dans les mois à venir pour atteindre les objectifs définis en marge des élections de 2020 et 2021.  Il a aussi appelé à une coordination régulière des efforts pour surmonter les défis qui subsistent.  Il a estimé que le Gouvernement fédéral et les États fédérés doivent pouvoir s’appuyer plutôt que de s’opposer.  « Il faut un processus électoral unique adopté d’un commun accord », a insisté le représentant de l’Allemagne.  Il s’est dit alarmé par la situation humanitaire qui s’est aggravée en raison de la sécheresse et des affrontements.  Il s’est félicité de l’engagement du Gouvernement à mettre en place un nouveau plan national de lutte contre les violences sexuelles en temps de conflit.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est félicitée de la bonne coopération entre les deux chambres du Parlement somalien et a émis l’espoir que les projets de loi actuellement à l’étude, notamment celui sur les violences sexuelles et sexistes, pourront être adoptés et promulgués prochainement.  Elle a estimé que les processus politiques à venir pourraient contribuer à une reprise d’un dialogue constructif entre le Gouvernement fédéral et les autorités régionales, au bénéfice de toute la population somalienne.  Il convient, selon elle, de parvenir à un consensus politique pour que ces réformes cruciales voient le jour. 

Mme Wronecka a, d’autre part ,qualifié de positifs les efforts du Gouvernement en faveur d’une inclusion politique et d’une plus forte participation des femmes.  Elle s’est, en revanche, déclarée préoccupée par la hausse du nombre d’attentats perpétrés par les Chabab et l’emploi accru par ce groupe terroriste d’engins explosifs improvisés dans ses attaques.  Pour la représentante, la communauté internationale devrait intensifier ses efforts pour lutter contre l’utilisation de produits chimiques précurseurs utilisés par les Chabab dans ces engins explosifs.  Elle a conclu son propos en exprimant son inquiétude face à la situation humanitaire, relevant notamment que les enfants paient un lourd tribut à la sécheresse et à la malnutrition. 

M. ABUKAR DAHIR OSMAN (Somalie) a réaffirmé l’engagement de la Somalie à coopérer avec l’AMISOM et les Nations Unies.  Il a encouragé le Conseil de sécurité à examiner toutes les questions abordées dans le contexte particulier de la reconstruction de l’État somalien.  Il a souligné qu’un État ne peut être fort que grâce à sa population avant d’indiquer que la période à l’examen a été l’occasion de montrer la volonté de réconciliation de la population somalienne.  Il a particulièrement salué les évolutions politiques et sécuritaires dans l’État de Galmudug, dont l’administration était partagée entre deux clans opposés en présence d’un groupe armé indépendant.  Il a cité en exemple le dialogue entrepris à Galmudug pour réunir toutes les parties et parvenir à une réconciliation large et inclusive, conduisant à un processus électoral transparent et pacifique. 

Le processus de réconciliation mis en place dans l’État de Galmudug, grâce à l’engagement soutenu du Gouvernement fédéral, représente une source d’inspiration et d’espoir pour l’ensemble de la Somalie, a-t-il affirmé.  Il a indiqué qu’une conférence à venir vise à rassembler les 11 clans de cet État.  Si la stabilité est assurée dans cet État au centre de la Somalie, les bases d’une réconciliation nationales seront posées pour l’ensemble du pays, a-t-il assuré. 

« Alors que des élections sont prévues demain au Djoubaland », le représentant de la Somalie a prévenu des défaillances de ce processus, regrettant notamment les méthodes adoptées par le président sortant de l’État de Djoubaland.  Il a rappelé que le Gouvernement fédéral somalien et ses partenaires internationaux ont à maintes reprises souligné le risque que fait peser sur le développement de la démocratie en Somalie ce « processus corrompu » au Djoubaland.  Néanmoins, il s’est félicité des progrès en cours pour les futures élections fédérales en 2020 et 2021, à commencer par le processus d’enregistrement des électeurs en cours. 

Le représentant a ensuite appelé les États de la fédération à renforcer le fédéralisme et à appuyer le Gouvernement fédéral en invitant les dirigeants à mettre de côté leurs divergences politiques.  Il a signalé que la résilience de la Somalie avait été mise à l’épreuve suite à l’attentat qui a couté la vie au maire de Mogadiscio.  Néanmoins, l’armée nationale a montré qu’elle était capable de reprendre des villes au Chabab et rétablir les administrations de ces villes, a-t-il indiqué.

M. Osman a précisé qu’un code de conduite est en cours de rédaction pour les forces de sécurité et cité la mise en place de formations relatives à la lutte contre les violences sexuelles.  « Pour la première fois en trois décennies des étudiants somaliens ont passé des examens harmonisés au niveau national », s’est aussi félicité le représentant de la Somalie.  S’il y a des signes clairs de stabilisation nationale, ces gains sont cependant précaires et doivent être soutenus par la communauté internationale, a-t-il insisté.  Il a exhorté les États à s’abstenir d’imposer des mesures de coercition à l’encontre d’autres pays. 

Poursuivant, le délégué a expliqué que les articles 53 et 54 de la Constitution confèrent au Gouvernement fédéral l’autorité exclusive pour engager des accords internationaux avec d’autres États, dont les traités relatifs aux frontières internationales, qu’il s’agisse des frontières terrestres et maritimes ou du contrôle de l’espace aérien de la Somalie.  Alors que le contour du nouvel État somalien est en train de se dessiner, M. Osman a rappelé qu’il est normal que cette évolution connaisse des divergences.  Nous encourageons nos partenaires à voir ces divergences comme une part normale du processus de reconstruction de l’État.  Le fédéralisme est en train de se consolider, a-t-il assuré, avant d’appeler le Conseil de sécurité et les partenaires internationaux à appuyer ce processus. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Biodiversité marine: les « outils de gestion par zone » au menu des négociations du futur accord sur les zones hors juridiction nationale

Troisième session,
41e séance – matin
MER/2111

Biodiversité marine: les « outils de gestion par zone » au menu des négociations du futur accord sur les zones hors juridiction nationale

De nombreuses propositions ont marqué les discussions de ce matin, au sein du Groupe de travail officieux sur « les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées », alors que la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale entamait le troisième jour de son avant-dernière session de négociation.

Les délégations, qui avaient devant elles l’avant-projet d’accord, ont surtout commenté l’article 16 consacré aux aires protégées, notamment les modalités de création ou de désignation de celles-ci.  La Présidente du Groupe de travail a indiqué qu’en séance informelle, hier après-midi, les délégués avaient échangé sur des définitions importantes figurant dans le document.  Elle a cité notamment les « outils de gestion par zone » et les « aires marines protégées » dont les définitions ont fait l’objet de débats.  Le second concept, a-t-elle précisé, fait partie intégrante du premier. 

En effet, les aires marines protégées sont des espaces géographiques clairement définis, qui sont gérés de façon à assurer à long terme la conservation de la nature.  Dans ces aires, la pêche ainsi que d’autres activités humaines sont restreintes, ce qui permet aux espèces en déclin de se reconstituer et aux espèces et habitats vulnérables d’être protégés.  L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) indique que les aires marines protégées représentent actuellement environ 6,35% des océans et qu’elles sont de plus en plus reconnues comme un outil efficace pour la gestion par zone.  Parmi les autres outils de gestion par zone en mer, on trouve les réserves marines, les parcs marins, ainsi que des zones marines de conservation spéciale.

Ce matin, les délégations ont d’abord procédé à l’examen du paragraphe 1 de l’article 16, qui se lit comme suit: « L’identification des aires qui ont besoin d’être protégées par la [création] [désignation] d’outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, se fonde sur les données scientifiques les plus fiables dont on puisse disposer, ainsi que sur [l’approche] [le principe] de précaution et sur une approche écosystémique, et tient dûment compte des connaissances traditionnelles des peuples autochtones et des communautés locales. »

La Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a dit préférer le terme « création » plutôt que « désignation ».  Le Japon a également choisi le mot « création » et ensuite le mot « approche », arguant que c’est le terme qui figurait dans la Déclaration de Rio.  La Suisse a objecté que « Rio, c’était en 1992 » et qu’il est peut-être temps de passer à autre chose. 

Les États fédérés de Micronésie, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a préféré le terme « principe » au lieu d’« approche ».  La Chine a souhaité ajouter l’expression « autres personnes et entités ayant des connaissances traditionnelles ».  En effet, a expliqué la Chine, « on ne peut affirmer que seuls les peuples autochtones seraient détenteurs de connaissances traditionnelles ».  L’Union européenne (UE) a, pour sa part, insisté sur la nécessité de tenir compte des connaissances traditionnelles des peuples autochtones.

Le Canada a dit préférer l’expression « approche » de précaution au lieu de « principe », car le premier terme se trouve déjà dans plusieurs accords internationaux.  La délégation a aussi estimé qu’il serait judicieux de parler d’outils de gestion par zone sans ajouter « y compris les aires marines protégées », étant donné que ces dernières font partie du grand ensemble que constituent les outils de gestion par zone. 

La plupart des délégations ont aussi souhaité que l’expression « des aires qui ont besoin d’être protégées » soit retirée, puisque le principe de ces aires est justement de faire l’objet de protection, jugeant l’expression redondante.

Au sujet du paragraphe 2 de l’article 16, il se lit comme suit: « Les critères permettant d’identifier les aires qui ont besoin d’être protégées par la [création] [désignation] d’outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, conformément à la présente partie peuvent inclure les facteurs suivants: »  Une liste de critères est ensuite mentionnée.

Le G77 a cité certains critères qui lui paraissant cruciaux.  Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Algérie a estimé pour sa part que cette liste pouvait être simplifiée. 

Le Belize, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a estimé qu’il fallait mettre sur un pied d’égalité les critères dit scientifiques et ceux issus de connaissances traditionnelles.  La délégation a également insisté pour que ces critères figurent plutôt en annexe, étant donné leur caractère évolutif.  Justement, le Costa Rica, s’exprimant au nom d’un groupe d’États d’Amérique latine ayant des vues similaires, le groupe CLAM (Core Latin American), a estimé que ces critères devaient être considérés comme une liste indicative. 

L’UE a elle aussi souhaité que cette liste, qu’elle a du reste proposé d’amender, soit renvoyée en annexe du futur instrument.  Pour le Japon, le fait de laisser ces critères dans le texte de l’instrument ferait courir le risque de modifier à volonté le libellé dudit instrument. 

La Chine a été d’avis de classer les critères par leur nature: sociale, biologique, économique, écologique, par exemple.  Mais pour d’autres délégations, comme celle des États-Unis, les critères socioéconomiques n’ont rien à faire dans cette liste.  L’Érythrée n’a pas partagé cet avis, encore moins la Nouvelle-Zélande, qui a même plaidé pour des critères culturels.  Pour Kiribati, pays qui a créé une vaste aire marine protégée avec l’aide de l’UNESCO, cette longue liste est confuse et risque de donner un travail superflu dans l’éventualité d’une création de nouvelles aires marines protégées. 

Alors que des délégations ont voulu que soit retiré le critère mentionné à l’alinéa q) -« effets préjudiciables des changements climatiques et de l’acidification des océans / vulnérabilité aux changements climatiques »-, l’UICN a plaidé pour qu’il soit conservé.  De son côté, le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (CDB) a souhaité que l’on considère les critères propres à ladite convention.

De façon générale, la représentante du Fonds mondial pour la nature (WWF) a insisté pour que les outils de gestion par zone soient établis de façon cohérente, tandis que l’Alliance de la haute mer a souhaité voir simplifier la liste de critères qui doivent être mis en annexe, comme beaucoup l’ont demandé.  La Fédération de Russie a voulu savoir si les critères énoncés étaient cumulatifs, estimant pour sa part qu’un seul critère serait suffisant pour créer une aire protégée.

Les délégations ont aussi discuté du paragraphe 3 de l’article 16, qui dispose que: « Les critères visés au paragraphe 2 sont précisés et révisés selon qu’il convient par [l’Organe] [le Réseau] scientifique et technique, pour examen par la Conférence des Parties. » 

Le G77 a exprimé sa préférence pour le terme « l’Organe » scientifique, un avis partagé par le Groupe des États d’Afrique et par les petits États insulaires en développement du Pacifique.  La Fédération de Russie a estimé qu’il fallait tenir compte du fait que certains organes existent déjà dans certaines régions.  De ce fait, il faudrait penser à créer des organes compétents dans les régions où il n’en existe pas encore, a suggéré la délégation russe. 

Le paragraphe 4 de l’article 16 a ensuite été examiné.  Il dispose que: « [L’Organe] [Le Réseau] scientifique et technique applique les critères visés au paragraphe 2 ainsi que tout critère qui pourrait être précisé et révisé conformément au paragraphe 3 pour identifier les aires à protéger par la [création] [désignation] d’outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées conformément à la présente partie.  Les États Parties [appliquent] [tiennent compte] eux aussi [de] ces critères lorsqu’ils [créent] [désignent] des outils de gestion par zone, y compris des aires marines protégées, conformément aux instruments et cadres juridiques [en vigueur] pertinents et des organismes mondiaux, régionaux et sectoriels pertinents. »

L’UE a souhaité la modification de ce paragraphe, de même que le Belize, au nom de la CARICOM.  Les deux délégations ont promis d’envoyer leurs suggestions par écrit au Secrétariat.  Au nom du groupe CLAM, le Costa Rica a tout simplement proposé d’éliminer le paragraphe 4 qui, à son avis, fait double emploi avec certaines parties de l’article 17.  Pour les petits États insulaires en développement du Pacifique aussi, ce paragraphe pose problème car il comporte deux idées distinctes.  De plus, la seconde phrase fait référence aux pratiques relatives à d’autres instruments, ce qui n’est pas opportun, ont-ils fait observer.  Monaco a renchéri en jugeant confuse la seconde phrase.

La délégation chinoise a, de son côté, estimé que les États parties pourront choisir de tenir compte des critères qui seront établis par le futur instrument dans la création des aires marines protégées, ou encore des critères établis par d’autres organes sectoriels régionaux.

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux demain matin, jeudi 22 août, à 10 heures, en débattant au sein de son Groupe de travail officieux sur les études d’impact sur l’environnement.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Futur accord sur la biodiversité marine: opposition entre pays développés et en développement sur la nature obligatoire de la coopération entre États parties

Troisième session,
40e séance – après-midi
MER/2110

Futur accord sur la biodiversité marine: opposition entre pays développés et en développement sur la nature obligatoire de la coopération entre États parties

Au second jour du nouveau cycle de négociations intergouvernementales pour l’élaboration d’un instrument international sur la protection de la biodiversité marine, les délégations ont débattu des modalités du transfert des techniques marines aux pays en développement et du renforcement des capacités de ces derniers, soit l’un des principaux volets du futur traité.  À cette occasion, les nations développées et les pays en développement se sont opposés sur le caractère obligatoire ou volontaire de la future coopération entre États parties, ainsi que sur l’opportunité de prendre en compte les besoins spécifiques des pays en développement à revenu intermédiaire.

Le troisième et avant-dernier cycle de négociations qui s’est ouvert hier au Siège de l’ONU, à New York, pour une durée de deux semaines, a pour objectif de faire avancer l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant, se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Conformément à la résolution 72/249 adoptée en 2018 par l’Assemblée générale, les négociations devraient culminer lors d’une dernière session intergouvernementale au premier semestre 2020, dans la perspective d’une présentation du texte à l’Assemblée la même année.

Comme lors de la première journée, les délégations ont avancé article par article, en se basant sur l’avant-projet d’accord élaboré par Mme Rena Lee, la Présidente de la Conférence intergouvernementale, avec l’aide de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer.  Ce document reprend les quatre principaux volets retenus en 2011 pour le périmètre du futur instrument: les questions concernant les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages; les mesures telles que les outils de gestion par zone, dont les aires marines protégées; les études d’impact sur l’environnement; et le renforcement des capacités ainsi que le transfert de techniques marines.  C’est ce dernier point qui a été débattu, cet après-midi, par les négociateurs de l’avant-projet.

Entamant la discussion par le paragraphe 2 de l’article 44, intitulé « Modalités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines », le Groupe des 77 et de la Chine (G77) a proposé de le modifier de la façon suivante: « Le renforcement des capacités et le transfert des techniques marines sont transparents et pilotés par les pays.  Le renforcement des capacités et le transfert des techniques marines s’inspirent des enseignements tirés de l’expérience, notamment ceux tirés des activités de renforcement des capacités et de transfert de techniques marines menées dans le cadre des instruments et cadres juridiques en vigueur et des organes mondiaux, régionaux et sectoriels pertinents. »  Le Groupe a ainsi suggéré de supprimer les phrases suivantes: « et, dans la mesure du possible, ne font pas double emploi avec les programmes existants », ainsi que: « et constituent un processus efficace, itératif, participatif, transversal et sensible à l’égalité des sexes ».  Les pays du groupe CLAM (Core Latin American) et la Norvège ont également appelé à effacer cette dernière phrase.

De plus, le G77 et les petits États insulaires en développement (PEID) du Pacifique ont proposé de supprimer le mot « en vigueur » dans l’expression « instruments et cadres juridiques en vigueur pertinents ».  Tout en acceptant cette modification, l’Union européenne (UE) et Sainte-Lucie ont appelé à aller plus loin en supprimant également le terme « pertinent ». 

L’UE a aussi appelé à employer l’expression « piloté par les besoins », plutôt que « piloté par les pays » dans la première phrase du paragraphe 2, une proposition immédiatement rejetée par les pays du groupe CLAM.  L’UE a ensuite appelé à conserver l’injonction de ne pas faire « double emploi avec les programmes existants », ce que la République de Corée et les États-Unis ont appuyé.  Plusieurs ont cependant demandé que la notion de « double emploi » soit précisée, craignant notamment qu’elle puisse être un frein à la mise en œuvre de programmes identiques d’un pays en développement à l’autre.

S’agissant du paragraphe 3 de l’article 44, les pays du groupe CLAM ont appelé à conserver l’expression « évaluation des besoins [au cas par cas ou sur une base régionale] ».  L’UE a de son côté estimé que tous les États parties devraient pouvoir bénéficier potentiellement des dispositions de l’accord.  Quant aux États-Unis, ils ont appelé à remplacer l’expression « États Parties en développement » par « États Parties en développement bénéficiaires ».  Ils ont en outre proposé de supprimer la partie suivante: « ou sur une base régionale], et répondent à ces besoins et priorités ». 

L’Australie a par ailleurs demandé des précisions concernant les futures attributions du mécanisme qui serait institué par la Conférence des Parties, tel que le précise la dernière phrase du paragraphe 3 de l’article 44: « Ces besoins et priorités peuvent faire l’objet d’une auto-évaluation ou être facilités par un mécanisme pouvant être institué par la Conférence des Parties. »

Les délégations ont ensuite commenté le paragraphe 4 du même article, qui se lit comme suit: « Des modalités, procédures et directives détaillées relatives au renforcement des capacités et au transfert de techniques marines [peuvent] [sont] élaborées et adoptées par la Conférence des Parties. »  L’UE a estimé que, si ce paragraphe devait être maintenu, le terme « peuvent » devrait être préféré à l’expression « sont ».  Du même avis, les États-Unis se sont dits potentiellement favorables à la mise en place de directives supplémentaires au paragraphe 4, à condition qu’elles ne se soldent pas part l’instauration de mesures obligatoires. 

À l’inverse, le G77 a estimé que, pour éviter des retards dans les mesures adoptées, un mandat clair devait être conféré à la Conférence des Parties, assorti d’un délai pour l’élaboration de modalités, procédures et directives détaillées relatives au renforcement des capacités et au transfert de techniques marines.  Cette position a été fermement défendue par le Togo, Cuba et les Maldives.  « La question est suffisamment cruciale, et donc on ne devrait pas attendre longtemps pour participer à la gouvernance des zones au-delà de la juridiction nationale », a renchéri le Cameroun.  Les directives doivent être suffisamment détaillées pour étayer les modalités suivies, a ajouté le Nigéria, défendant l’imposition d’un délai « très rapide » d’un an après l’adoption de l’accord, une position approuvée par Sainte-Lucie. 

La question reste de savoir comment ces modalités établies par la Conférence des Parties interagiraient avec celles que nous sommes en train d’inclure aux articles 44 et 45, a toutefois noté la Suisse: est-ce qu’il s’agirait uniquement d’appliquer ces articles ou d’aller plus loin?

Le paragraphe 4 devrait tout bonnement être supprimé, a quant à lui tranché le Japon.

Passant à l’analyse de l’article 43, intitulé « Coopération dans le domaine du renforcement des capacités et du transfert de techniques marines », le G77 a appelé à supprimer l’expression « en vigueur » au paragraphe 1, ainsi qu’à choisir « assurent la coopération », plutôt que « facilitent la coopération ».  De même, au paragraphe 3, le Groupe a opté pour « l’obligation de coopérer », au détriment de « l’obligation de promouvoir la coopération ».  Le Belize a quant à lui jugé que ce paragraphe 3 n’allait pas suffisamment loin pour répondre aux besoins de coopération différents selon les pays en matière de technologie.  Le Belize a de plus proposé un article supplémentaire, numéroté 43 bis, qui se rapporterait à l’Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port (PSMA).

À l’opposé du G77, les États-Unis ont rejeté l’expression « assurent la coopération », estimant que cela n’était pas possible.  Le pays a également rejeté le terme « facilitent la coopération », jugeant qu’il manquait de clarté, au profit de l’expression « favorisent la coopération ».  Le transfert de technologies et le renforcement des capacités doivent s’effectuer sur la base du volontariat et selon des termes agréés, a insisté le délégué américain.  La coopération doit se faire selon des termes strictement volontaires, a renchéri la Fédération de Russie, appelant à ne pas alourdir le texte avec des conditions de coopération qui pourraient être détaillées dans des accords ultérieurs entre les parties.  Dans ce cadre, les États-Unis et la Russie ont tous deux préféré « l’obligation de promouvoir la coopération », contre « l’obligation de coopérer » dans le paragraphe 3 de l’article 43. 

À quoi renvoie véritablement « l’obligation de promouvoir la coopération »? s’est cependant interrogé le Cameroun, jugeant que l’expression n’était pas à la hauteur de l’ambition de l’instrument.

Par ailleurs, les États-Unis et le Canada ont appelé à supprimer la référence aux pays à revenu intermédiaire dans la liste des États parties en développement dont il faudrait reconnaître les besoins particuliers, au paragraphe 3.  Le G77 a de son côté refusé catégoriquement cette proposition.

Passant à l’analyse de l’article 42, intitulé « Objectifs » du renforcement des capacités et transfert de techniques marines, le G77 a jugé satisfaisant le libellé existant.  L’UE a toutefois estimé que cet article mélangeait les objectifs et les moyens de les atteindre. 

Les États-Unis, la Fédération de Russie et la Suisse ont quant à eux appelé à supprimer toutes les dispositions du paragraphes f), ce à quoi plusieurs pays en développement se sont opposés.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les tensions dans le Golfe persique mobilisent un débat sur le Moyen-Orient

8600e séance – après-midi
CS/13923

Conseil de sécurité: les tensions dans le Golfe persique mobilisent un débat sur le Moyen-Orient

Lors d’un débat du Conseil de sécurité sur les menaces à la paix et à la sécurité au Moyen-Orient, l’évolution récente de la situation dans le Golfe persique, sur fond de délitement de l’accord sur le nucléaire iranien, a cristallisé les échanges d’une trentaine de délégations, la Fédération de Russie allant jusqu’à appeler les États-Unis et la République islamique d’Iran à la retenue et à un règlement diplomatique de leur différend. 

Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, Chef de cabinet du Secrétaire général, a réaffirmé que le Plan d’action global commun « reste le seul cadre reconnu au niveau international pour traiter la question du programme nucléaire iranien », et ce, bien que les États-Unis se soient retirés de cet accord en 2018.  Les désaccords profonds quant au programme nucléaire iranien ne font qu’exacerber les différends dans le Golfe, a-t-elle reconnu, déplorant la série d’incidents survenus ces dernières semaines dans le détroit d’Ormuz et les voies maritimes adjacentes. 

Le Secrétaire d’État des États-Unis, M. Michael Pompeo, s’est du reste inquiété des difficultés de garantir la sécurité dans ce détroit, fustigeant au passage le rôle de l’Iran qui, selon lui, « continue de semer la terreur et des troubles en Syrie, en Iraq et au Yémen avec de terribles conséquences pour les populations ».  Depuis juillet, a-t-il ajouté, l’Iran a bafoué ses engagements nucléaires et a continué l’enrichissement de son uranium, tout en poursuivant ses attaques contre l’Arabie Saoudite et en confisquant plusieurs pétroliers. 

Pour le chef de la diplomatie américaine, il est aujourd’hui temps de promouvoir des processus innovants pour résoudre d’anciens problèmes.  C’est pourquoi, a-t-il dit, les États-Unis et la Pologne ont lancé en février le processus de Varsovie et ses ateliers pour traiter de toutes les questions pertinentes au Moyen-Orient, y compris celle de la sécurité en mer. 

La réponse de la Fédération de Russie ne s’est pas fait attendre.  Reprochant à M. Pompeo de parler de « la coalition contre l’Iran, mais jamais de dialogue » et de présenter ce pays comme « une sorte d’empire du mal », le représentant russe a réitéré l’opposition de Moscou au processus de Varsovie dont le format a été, selon lui, décidé de façon « trop hâtive ».  Une stratégie collective serait, à ses yeux, préférable à une « recette sur la base d’intérêts géopolitiques trop étroits ». 

Préconisant un dialogue, assorti de mesures de confiance et de contrôle, le représentant russe a souligné que des pourparlers ne peuvent aboutir que si les parties sont prêtes à faire preuve de respect mutuel sur la base des principes de la diplomatie.  Il n’est donc « pas logique qu’au mépris de la résolution 2231, les États-Unis appellent l’Iran à s’engager dans des pourparlers sans conditions préalables », a-t-il souligné, affirmant toutefois que son pays continuerait de tenter de convaincre les États-Unis et l’Iran à dialoguer « de manière civilisée ». 

Le Royaume-Uni a jugé qu’il serait pertinent d’entamer cet échange sur la question du détroit d’Ormuz, évoquant l’arraisonnement d’un de ses pétroliers par les gardiens de la révolution iranienne.  Tout en reconnaissant le droit de l’Iran à assurer sa légitime défense, la représentante britannique a relevé que la protection par l’Iran de ses intérêts nationaux contribuait à créer des problèmes dans la région et a rappelé qu’il importe aussi d’empêcher ce pays de se doter de moyens nucléaires qui représenteraient une menace pour le Moyen-Orient et au-delà. 

À son instar, la France a réaffirmé son attachement au Plan d’action global commun, faisant valoir qu’« il n’existe pas aujourd’hui d’alternative pour empêcher la prolifération nucléaire en Iran ».  Un avis partagé par le Ministre allemand des affaires étrangères, M. Andreas Michaelis.  Toutefois, a-t-il souligné, « nous ne sommes pas naïfs: le Plan d’action global commun « n’est qu’une pièce du puzzle » et les menaces que fait peser l’Iran dans la région doivent être contrées.  L’Union européenne a, pour sa part, regretté l’imposition de sanctions par les États-Unis, tout en faisant part de ses inquiétudes face aux activités de missiles balistiques iraniens et le transfert desdits missiles à des acteurs étatiques et non étatiques.

Premier concerné par ce débat, l’Iran a assuré ne pas chercher la confrontation, avertissant cependant qu’il ne pourrait rester indifférent face à la violation de sa souveraineté.  En tant que pays ayant la plus longue côte dans le Golfe persique et la mer d’Oman, il s’est dit déterminé à continuer de garantir la sûreté et la sécurité de la navigation maritime dans cette zone, particulièrement dans le détroit d’Ormuz.  Il a par ailleurs imputé l’instabilité et l’insécurité dans la région à la présence militaire des États-Unis et à l’afflux d’armes américaines, lesquelles transforment le Moyen-Orient en une « véritable poudrière ». 

Face à la détermination iranienne, l’Arabie saoudite a déclaré militer pour la défense des droits des peuples à vivre en paix, « loin des ingérences et des violences commises par des milices comme les houthistes et le Hezbollah », proches de l’Iran.  Le Royaume a également réfuté la thèse selon laquelle le chiisme de l’Islam serait à l’origine des désaccords entre l’Iran et d’autres pays musulmans, affirmant que les différences entre sunnites et chiites ne sont apparues qu’après la Révolution iranienne, la constitution de la République islamique d’Iran disposant que le pays doit répandre sa révolution à l’étranger.

« Derrières les portes closes, nombre des dirigeants de la région s’accordent pour dire que l’Iran représente la principale menace à la paix au Moyen-Orient », a renchérit le représentant d’Israël qui a soutenu que les actions de Téhéran avaient contribué à rapprocher Israël de ses voisins arabes.

Ce dernier a, par ailleurs, accusé l’Autorité palestinienne d’extrémisme et de refuser de participer à des négociations bilatérales directes, des propos vertement critiqués par l’Observateur permanent de la Palestine qui a taxé le délégué d’Israël de « menteur » et souligné qu’il représente le « le Gouvernement le plus extrémiste qu’Israël ait connu ».  La délégation palestinienne a appelé à une réelle volonté politique pour mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité relatives au conflit israélo-palestinien, prédisant dans la foulée que le « deal du siècle » que préparent les États-Unis échouera. 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Les défis à relever pour la paix et la sécurité au Moyen-Orient (S/2019/643)

Déclarations

Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de cabinet du Secrétaire général, a entamé son exposé en constatant que la situation au Moyen-Orient demeure complexe, caractérisée par des conflits de longue durée, des tensions géopolitiques au niveau régional, des problèmes de gouvernance ainsi que des problèmes de développement socioéconomiques dans plusieurs pays.  Ces dernières semaines, des défis à cette aspiration se sont fait jour.  La série d’incidents dans le détroit d’Ormuz et les voies maritimes adjacentes ont conduit à une forte montée des tensions.  Il est essentiel que les droits et devoirs liés à la navigation soient respectés, conformément au droit international, a souligné Mme Ribeiro Viotti, appelant à la retenue et au dialogue véritable afin d’éviter qu’une erreur de calcul mineure ne conduise à une confrontation majeure, avec des conséquences désastreuses bien au-delà de la région.  De plus, des désaccords profonds quant au programme nucléaire iranien ne font qu’exacerber les différends dans le Golfe.  Cela étant, le Plan d’action global commun reste le seul cadre reconnu au niveau international pour traiter la question du programme nucléaire iranien, a-t-elle assuré. 

En Syrie, l’Envoyé spécial, M. Geïr Pedersen, n’épargne aucun effort pour finaliser la mise en place du comité constitutionnel qui doit ouvrir la voie à un processus politique sous supervision de l’ONU, conformément à la résolution 2254 et à la mise en œuvre de mesures de renforcement de la confiance, a poursuivi Mme Ribeiro Viotti.  Toutefois, a-t-elle relevé, les Nations Unies sont préoccupées par la poursuite de combats dans le nord-ouest du pays, lesquels risquent de saper les efforts destinés à relancer le processus politique. 

Au Yémen, l’ONU continue de fournir une assistance humanitaire désespérément nécessaire à la population, tandis que l’Envoyé spécial, M. Martin Griffiths, reste engagé dans la mise en application de l’Accord sur Hodeïda.  Nous espérons que cela conduira à des discussions plus larges et plus inclusives sur les moyens de mettre un terme au conflit, a-t-elle confié, évoquant également le conflit israélo-palestinien, qui demeure la question la plus ancienne inscrite à l’agenda de l’ONU pour la paix et la sécurité.  Une solution juste et acceptable pour les deux parties est essentielle pour l’avenir de toute la région, a souligné la Chef de cabinet.  L’ONU reste disposée à soutenir les efforts visant à permettre aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre côte à côte et en paix, dans deux États démocratiques et à l’intérieur de frontières sûres et reconnues, sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies. 

Comme dans les autres régions, concrétiser la promesse d’un plein respect des droits humains, des libertés fondamentales et du droit international humanitaire nécessite engagement et audace, si l’on veut mettre fin aux conflits, traiter les causes profondes de la violence et maintenir la paix.  Dans la même veine, a-t-elle poursuivi, le traitement de la menace du terrorisme et de l’extrémisme violent doit s’accompagner d’une réponse aux préoccupations sécuritaires et d’un respect des obligations au titre des droits de l’homme.  De même, accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est intrinsèquement lié à la résolution et à la prévention des conflits.  Dans ce contexte, une plus grande participation des femmes à la gouvernance et aux activités économiques ferait non seulement progresser les revenus familiaux et les économies nationales mais réduirait aussi les vulnérabilités aux chocs socioéconomiques tout en libérant un énorme potentiel, a-t-elle souligné.  Pourtant, il reste encore un long chemin à parcourir pour amender les lois discriminatoires et veiller à une plus grande participation politique des femmes.  Alors que les droits des femmes et des filles sont foulés au pied par les terroristes et les extrémistes, il convient aussi, selon Mme Ribeiro Viotti, de mettre l’accent sur le renforcement de l’égalité de genre dans les travaux du Conseil.  De même, a-t-elle ajouté, la puissance des jeunes est essentielle, comme l’a reconnu le Conseil dans sa résolution historique sur la jeunesse, la paix et la sécurité.  La création d’emplois est notamment impérative, de même que l’investissement dans l’éducation et la formation.

Mais la première des priorités, a-t-elle souligné, doit être d’éviter que les foyers de crise les plus aigües ne débordent.  Le maintien des canaux de communication doit être la première des priorités, suivi des mesures de renforcement de la confiance afin d’éloigner les parties de la confrontation et de les mener vers le dialogue.

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a déclaré que nous avons besoin d’une approche positive pour restaurer la paix et la croissance économique au Moyen-Orient.  Il a estimé que la promotion de l’entreprenariat des jeunes, la lutte contre la corruption et l’accès à l’éducation étaient autant de clefs pour libérer le potentiel économique de la région, notant par ailleurs l’incertitude entourant les dynamiques qui y ont cours, maintien le Moyen-Orient sous le feu des projecteurs.  Alors que la guerre n’est pas terminée en Syrie, nous sommes témoin de la pire crise humanitaire au monde au Yémen où 13 millions de personnes souffrent de la faim.  Le conflit israélo-palestinien persiste et nous risquons une confrontation militaire dans le golfe persique, a-t-il ajouté avant de mettre l’accent sur les risques posés par le terrorisme et la radicalisation.  Il est de notre responsabilité collective et morale de trouver le moyen de mettre fin aux souffrances des civils, et le Conseil de sécurité doit pour sa part trouver des moyens de lutter contre les politiques agressives dans la région

Notant que la sécurité au Moyen-Orient est indissociable de l’ordre mondial, le Ministre polonais a souligné que toutes les crises au Moyen-Orient ont des conséquences sur l’ordre économique et social mondial.  « Si la défaite de l’EIIL en Syrie et en Iraq représente un pas dans la bonne direction, nous sommes encore loin d’avoir éradiqué ce mal dans le monde », a-t-il insisté, notant aussi que le retour des combattants étrangers représente une menace pour leur pays d’origine. 

M. Czaputowicz s’est également inquiété de la prolifération de missiles capables de transporter des armes de destruction massive, relevant que les conséquences tragiques des lacunes dans les systèmes de contrôle se manifestent de manière répétée lors des attaques menées par les houthistes au Yémen.  Il a ensuite exhorté tous les pays à adopter des normes de contrôle nationales des technologies et des vecteurs.  Le Ministre s’est également préoccupé de l’annonce par l’Iran qu’il n’honorera pas tous les dispositifs du Plan d’action global commun.

Par ailleurs, le Ministre a estimé que les attaques et confiscations des navires représentent une menace à la liberté de navigation dans des eaux qui jouent un rôle clef dans l’approvisionnement mondial d’énergie.  Il a appelé à renforcer la sécurité des infrastructures énergétiques critiques afin de minimiser la fluctuation du prix du brut et de renforcer la sécurité des stocks.  De plus, le comportement responsable des États du Moyen-Orient dans le cyberespace permettrait de renforcer la cyberstabilité régionale.

Rappelant que la Pologne a organisé un débat sur le droit international humanitaire à l’occasion du soixante-dixième anniversaire des Conventions de Genève, M. Czaputowicz a souligné que la résolution des tensions au Moyen-Orient passe par des démarches multilatérales.  C’est pourquoi, il a appelé les États à se rallier au processus de Varsovie, dont les groupes de travail ont pour ambition d’examiner des questions horizontales concernant le Moyen-Orient. 

M. MICHAEL R.  POMPEO, Secrétaire d’État des États-Unis d’Amérique, a déclaré que l’Administration Trump est en train de « raviver » le leadership des États-Unis au Moyen-Orient.  « Nous nous préoccupons des issues et non pas des gestes », a-t-il affirmé, citant les accomplissements des six derniers mois, à commencer par le démantèlement de Daesh.

Il a fait part de la volonté de son pays de nouer des coalitions et d’appuyer des efforts multilatéraux efficaces pour faire face aux défis communs: le conflit en Libye fait rage, plus de 1,5 million de réfugiés syriens n’ont toujours pas regagner leur foyer et les groupes terroristes islamistes sont à la recherche de failles pour les exploiter.  Il s’est particulièrement inquiété des difficultés de garantir la sécurité en haute mer dans le détroit d’Ormuz et a fustigé le rôle de l’Iran qui, selon lui, « continue de semer la terreur et des troubles en Syrie, en Iraq et au Yémen avec de terribles conséquences pour les populations ».  Depuis juillet, l’Iran a bafoué ses engagements nucléaires et a continué l’enrichissement de son uranium.  L’Iran a également continué de mener des attaques contre l’Arabie saoudite et a confisqué plusieurs pétroliers, a-t-il accusé, avant de dénoncer un tir de missile.  Le Secrétaire d’État des États-Unis a déclaré qu’il reste peu de temps pour empêcher l’Iran de posséder des armes nucléaires. 

« D’Alep à Aden et de Tripoli à Téhéran, il faudrait une plus grande coopération » a insisté M. Pompeo.  Il nous faut des processus innovants pour résoudre d’anciens problèmes, et c’est pourquoi que nous avons, avec la Pologne, lancé en février le processus de Varsovie et ses ateliers pour traiter de toutes les questions pertinentes au Moyen-Orient.  M. Pompeo a notamment cité la cybersécurité, les droits de l’homme, la lutte contre le terrorisme, et la sécurité en mer.  Il a remercié les pays qui ont rejoint le processus de Varsovie et salué la volonté de la Roumanie et Bahreïn d’accueillir certains de ses ateliers de travail. 

M. ANDREAS MICHAELIS, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a constaté que le Moyen-Orient a toujours été considéré comme une région instable.  « C’est même un lieu commun que de dire que cette région peut être déstabilisée facilement » , a-t-il observé.  Mais aujourd’hui, le Moyen-Orient change.  Certes, a constaté le Ministre, ce n’est pas encore la région prospère que l’on espérait, voire éclore dans les années 90.  Il est au contraire ravagé par les conflits et est devenu la proie de groupes terroristes.  De fait, a-t-il constaté, la combinaison de tous ces facteurs rend la situation plus instable que jamais.  Nous devons changer cette situation et tendre vers une stabilité à long terme, a-t-il plaidé, jugeant qu’il incombe aussi aux pays de la région de créer un climat politique propice qui permettrait à la population syrienne de ne plus craindre la violence ou la faim.  Et si les États de la région doivent apporter leur pierre à l’édifice, cette tâche incombe aussi à d’autres acteurs.  Ce n’est que si tous les acteurs externes dépassent leurs intérêts étroits à court terme que l’on pourra progresser vers un Moyen-Orient vivant en paix et en sécurité.  Pour cela, a poursuivi le Ministre, il importe de respecter pleinement le droit international, notamment le droit international humanitaire qui est aujourd’hui foulé au pied en Syrie.  Il faut aussi concevoir des stratégies de désescalade, a-t-il ajouté, estimant que la recherche de solutions est une nécessité absolue lorsque le droit international est mis à mal.  Il s’est, de fait, prononcé pour la collaboration de tous les acteurs externes et la prise de décisions multilatérales. 

S’agissant de la Syrie, le Ministre a estimé que l’effusion de sang doit cesser.  À cette fin, il a appelé à la création de passerelles entre les différents processus en cours.  À propos de l’Iran, il a rappelé que le pays doit respecter le régime de vérification le plus strict possible sous la coupe de l’AIEA.  C’est la bonne garantie pour obtenir un Iran exempt d’armes nucléaires, a-t-il souligné.  Toutefois, a-t-il dit, nous ne sommes pas naïfs: le Plan d’action global commun « n’est qu’une pièce du puzzle » et les menaces que fait peser l’Iran dans la région doivent être contrées, a plaidé le Ministre.  À cet égard, il a indiqué que la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne se penchent sur les moyens de favoriser la coopération pour ce qui est de la navigation régionale.  Évoquant Israël et le conflit avec les Palestiniens, il a estimé que les États-Unis ont un rôle de facteur de stabilité à jouer.  Nous espérons qu’ils continueront à aider les deux parties à avancer vers une solution des deux États, a-t-il souligné.  Le Moyen-Orient est une toile complexe et une région fascinante dont les peuples méritent de vivre en paix et dans la stabilité, a-t-il affirmé. 

M. ZHAOXU MA (Chine) a déclaré que les ramifications de la situation au Moyen-Orient s’étendent bien au-delà des frontières des pays touchés, compromettant ainsi la paix et la sécurité régionales.  Il a appelé à redoubler d’efforts face à la situation dans la région, jugeant par ailleurs déterminant de respecter la souveraineté et l’intégrité nationale de tous les pays.  Il a dénoncé l’utilisation délibérée ou la menace de recours à la force.  « Défendre le droit des Palestiniens est de la responsabilité de la communauté internationale » a insisté le représentant de la Chine avant de rappeler la pertinence de la solution des deux États.

Notant qu’une des causes des crises au Moyen-Orient est la pauvreté, il a estimé judicieux de promouvoir le développement durable et l’éducation des jeunes afin d’offrir aux sociétés concernées de meilleures perspectives sociales et économiques.  Il a appelé à établir des partenariats de coopération régionaux pour ensuite dire la nécessité de lutter contre la corruption, la criminalité et la radicalisation.  S’agissant de la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, il a souligné la pertinence du Plan d’action global commun, avant d’appeler à en garantir son application intégrale. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a déploré les profondes divisions dans la région du Moyen-Orient ainsi que les « pertes tragiques » dans sa diversité religieuse, ethnique et culturelle.  Il s’est inquiété de voir menacée l’intégrité territoriale de la Syrie, du Yémen et de la Libye, ainsi que des difficultés dont souffrent des millions de personnes dans la région.  Il a plaidé pour un investissement dans l’éducation, un facteur clef de la paix et du développement, et pour la protection des institutions et les infrastructures éducatives en temps de conflit.  Le représentant a également soulevé le problème du manque de liberté de réunion pacifique et d’expression, ainsi que ceux du mariage précoce ou forcé, de la violence sexuelle et liée au genre, du manque d’opportunités pour les femmes et les jeunes de participer au processus de prise de décisions.

M. Singer Weisinger s’est aussi inquiété des effets déstabilisateurs des changements climatiques, appelant à lutter collectivement contre ce phénomène.  L’ONU doit aussi continuer ses efforts pour faire face à l’insécurité alimentaire, a-t-il recommandé en soulignant que ces problèmes exacerbent les vulnérabilités sociales, économiques et institutionnelles, constituant des causes potentielles de nouveaux affrontements.  Les changements climatiques sont un « multiplicateur de conflits », a-t-il estimé.  Le représentant a également plaidé pour que le Conseil de sécurité donne la priorité au contrôle des armes de destruction massive et chimiques, en mettant aussi l’accent sur la lutte contre le trafic illicite d’armes.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a noté que les conflits de la région puisent leurs racines dans la Première Guerre mondiale et la dissolution de l’Empire ottoman.  Depuis la fin de la Société des Nations et la création de l’ONU, la trajectoire de la région est préoccupante et jonchée de risques de confrontation.  On a vu la difficulté de gérer cette situation, a-t-elle commenté, ajoutant que  « nos efforts n’ont pas toujours abouti mais l’alternative serait pire ».  Même si c’est imparfait, la désescalade est, selon elle, la meilleure façon de rétablir la paix et la stabilité.  C’est la raison pour laquelle le Royaume-Uni reste un fervent partisan des efforts des Nations Unies pour faire respecter le droit international.  À cet égard, a-t-elle observé, plusieurs membres du Conseil de sécurité ont mentionné ces dernières semaines des façons de relever ensemble des défis sous-jacents.  Peut-être l’heure n’est-elle pas encore venue, mais il serait important de chercher ce qui est possible, a-t-elle plaidé.  Une possibilité serait de commencer par le détroit d’Ormuz et d’entamer un dialogue avec tous les acteurs de cette région.  La représentante a estimé que l’Iran a un rôle à jouer au Moyen-Orient et a le droit à la légitime défense.  Mais la défense de ses intérêts nationaux contribue à créer des problèmes dans la région, a constaté la représentante, rappelant qu’il importe de l’empêcher de se doter de moyens nucléaires qui représenteraient une menace pour la région et au-delà. 

Cela ne pourra être possible que si nous préservons l’accord qui fait partie de l’architecture mondiale de non-prolifération, a poursuivi la déléguée.  « Il n’y a pas de meilleure solution, il n’y a pas d’autre solution », a-t-elle martelé.  Cependant, a-t-elle ajouté, nous restons pleinement attachés au mécanisme existant et à la poursuite du commerce avec l’Iran.  Nous saluons aussi les efforts du Président Emmanuel Macron pour rapprocher les points de vue à ce sujet.  La représentante a, en revanche, déploré que, plutôt d’appuyer un règlement politique en Syrie, conformément à la résolution 2254, l’Iran ait choisi d’appuyer le régime d’Assad et une solution militaire par le biais de milices.  Ce comportement représente une menace pour la paix et la stabilité régionales, a dénoncé la déléguée, non sans rappeler qu’en juillet, un pétrolier britannique a été arraisonné par l’Iran dans le détroit d’Ormuz, au mépris de la liberté de navigation dans ce détroit. 

En Syrie, a-t-elle encore déclaré, il ne peut y avoir de reconstruction sans un processus politique, conformément à la résolution 2254.  Or, la situation reste dramatique à Edleb et nous avons besoin de réponses, a-t-elle lancé.  « Pourquoi le droit international humanitaire est-il foulé au pied par le régime et ses alliés? »  Le crime suppose une responsabilité des auteurs, a fait valoir la représentante, plaidant aussi pour une désescalade alors que Daech continue de représenter une menace.  Elle a ensuite indiqué que le Royaume-Uni continuera de soutenir le Gouvernement iraquien pour que les conditions qui ont permis à Daech de voir le jour ne se représentent pas.  S’agissant du Liban, elle a salué le rôle de la FINUL tout en jugeant inacceptable que la force onusienne n’ait toujours pas accès aux tunnels du Hezbollah.  Enfin, évoquant le conflit israélo-palestinien, elle a appelé le Gouvernement des États-Unis à apporter un plan viable pour que des progrès politiques soient consentis par les deux parties.  Tant qu’il n’y aura pas de progrès politiques, des mesures doivent être prises pour soutenir l’économie palestinienne, a-t-elle préconisé, ajoutant en guise de conclusion qu’une paix pérenne ne sera possible qu’avec un Israël vivant côte à côte avec un État palestinien dans les frontières de 1967. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a estimé qu’il est crucial de développer une approche régionale et multidimensionnelle sur les questions relatives à la paix et la sécurité au Moyen-Orient.  Pour la Belgique, une telle approche régionale permet de prendre en compte les causes profondes des tensions et des conflits, les dynamiques régionales et les défis communs sécuritaires qui les sous-tendent.  La représentante a noté que cette approche régionale peut s’inscrire sur les aspects politiques et de sécurité, en vue de définir et bâtir un espace commun de paix et de sécurité et les aspects économiques et financiers, en vue de construire une zone de prospérité partagée.  Enfin, les aspects sociaux, culturels et humains en vue de favoriser de nouveaux contrats sociaux inclusifs basés sur l’éducation, les opportunités économiques pour les jeunes, l’égalité pour les femmes, le respect des droits de l’homme et le partage équitable des richesses nationales. 

Revenant sur les questions de sécurité, Mme Vlierberge a indiqué que les armes de destruction massive, notamment chimiques et nucléaires, restent un point d’attention central.  Ainsi, le désarmement, la non-prolifération et la lutte contre l’impunité pour l’utilisation d’armes chimiques sont des priorités.  De même, il est primordial que la responsabilisation pour les attaques chimiques en Syrie soit établie.  Dans le même esprit, a-t-elle argué, la résolution 2231 (2015) reste la meilleure base multilatérale disponible en vue d’engager l’Iran sur les questions de non-prolifération nucléaire et leur impact sur la stabilité régionale et la sécurité internationale.  Le Plan d’action global commun doit donc être préservé et les défis auxquels il fait face actuellement doivent être surmontés. 

La déléguée a aussi rappelé que lors des printemps arabes de 2011, les populations se sont mobilisées pour revendiquer plus de droits, de liberté, d’égalité, de démocratie et d’opportunités économiques.  Et certaines de ces attentes sont restées en souffrance.  Il faudra donc que toute solution durable dans la région repose sur l’appropriation de celle-ci par les sociétés et les populations. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) a salué la tenue de ce débat qui, a-t-elle remarqué, permet d’aborder l’ensemble des enjeux relatifs à la zone d’Afrique du Nord et du Moyen Orient.  Soulignant l’ampleur des défis auxquels la région est confrontée, la représentante s’est inquiétée de la persistance de la menace terroriste et prévenu que le défi de la radicalisation violente ne serait pas résolu sans des solutions politiques inclusives et un effort accru pour la stabilisation des territoires libérés et pour la reconstruction, la où les conditions politiques sont réunies.  La France continuera, a-t-elle assuré, à se mobiliser en vue d’assécher les sources de financement du terrorisme, conformément à la résolution 2462 adoptée en mars. 

Mme Gueguen a cité une autre menace qui mérite des réponses collectives, à savoir la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs vers des acteurs étatiques et non étatiques.  Elle a fait part de la vigilance de la France quant au respect de l’interdiction du recours aux armes chimiques, « alors que le régime syrien, mais aussi Daech, les ont utilisées ».  La France réaffirme aussi son plein attachement au Plan d’action global commun, a-t-elle déclaré, estimant qu’« il n’existe pas aujourd’hui d’alternative pour empêcher la prolifération nucléaire en Iran ».  Elle a dit regretter le retrait américain de l’accord et a exprimé sa préoccupation quant aux mesures récemment prises par l’Iran en contradiction avec ses obligations dudit accord.  Elle a appelé la communauté internationale à œuvrer pour préserver cet accord et à bâtir une stratégie de long terme pour la gestion de cette crise, qui ne peut à ses yeux se réduire à une politique de pression.  Il faut une approche globale pour résoudre les différentes questions en suspens sur le nucléaire, le balistique et la stabilité régionale, a-t-elle recommandé.

Venant aux défis politiques, elle a mentionné les cas de la Syrie et du Yémen, où les violations du droit international humanitaire sont quotidiennes.  Elle s’est inquiétée en particulier de l’intensification des bombardements du régime syrien et de son allié russe à Edleb, avant d’appeler à une cessation immédiate des hostilités et à la pleine mise en œuvre de l’Accord de Stockholm.  Au Yémen, elle a plaidé pour un accès humanitaire rapide, complet et sans entrave à toutes les populations et demandé la mise en œuvre des Accords de Stockholm, avec le souhait d’une reprise du dialogue politique, sans préalable.

Au-delà de la réponse d’urgence aux crises, elle a appelé à mettre en place des solutions politiques pluralistes et inclusives en vue de la stabilité à long terme de la région.  Elle a donné la priorité à la prévention de nouveaux conflits et à la désescalade par le dialogue, invitant à travailler à la mise en place d’un dialogue inclusif et équilibré avec les États de la région qui sont en première ligne, avec les partenaires internationaux et dans le cadre des organisations multilatérales concernées.  À plus long terme, elle a souhaité des mesures de confiance, qui garantissent notamment la liberté de navigation dans les détroits.  Mme Gueguen a demandé également de promouvoir des solutions politiques inclusives sous l’égide des Nations Unies, et notamment d’œuvrer au renforcement des institutions étatiques.  Elle a encouragé les autorités iraquiennes à cet égard à poursuivre leurs efforts en vue de la reconstruction des zones libérées de Daech et la réconciliation de tous les Iraquiens.  En Syrie, a-t-elle ajouté, seule une solution politique crédible pourra réduire le potentiel déstabilisateur de la crise et permettre une paix durable.  Mme Gueguen a aussi rappelé la nécessité impérative de faire participer les femmes au processus de paix.

Enfin, elle a réitéré l’attachement de la France au multilatéralisme et au rôle des Nations Unies, ainsi qu’au respect du droit international.  Elle a prôné une solution juste et équilibrée pour arriver à une paix durable entre Israéliens et Palestiniens et réitéré son soutien à I’UNRWA.  Elle a aussi appelé le Conseil de sécurité à jouer son rôle de « premier garant du respect du droit international »: il lui appartient entre autres d’appeler dans les conflits l’ensemble des belligérants au respect du droit applicable.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a souligné qu’il n’y a pas de solution unique qui s’appliquerait à toutes les facettes de la question du Moyen-Orient, notamment au vu de la diversité des défis de chaque pays de la région.  Il a appelé à la fin des destructions d’infrastructures physiques et sociales dans la région, se disant préoccupé également par la montée de groupes radicaux qui causent des dommages qui vont au-delà de la région.  Le représentant a estimé que la question israélo-palestinienne est la base de toutes autres, affirmant que sa résolution aurait un impact positif dans toute la région. 

Le représentant a ensuite interpellé la communauté internationale sur la crise au Yémen qui demeure la pire crise humanitaire au monde.  M. Matjila a aussi déploré le retrait des États-Unis du Plan d’action global commun, invitant ce pays à reconsidérer sa position au sujet du « plus important accord diplomatique dans le domaine de la non-prolifération nucléaire depuis fort longtemps ».  Pour résoudre les causes profondes des défis sécuritaires au Moyen-Orient, le représentant a invité le Conseil de sécurité à faire montre de volonté politique et d’agir de bonne foi pour résoudre des conflits de longue date comme la question de Palestine.  Il a enfin insisté pour le respect du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et de parvenir à un Moyen-Orient exempt d’arme nucléaire. 

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a noté que le Moyen-Orient continue d’être au premier rang des sujets abordés au Conseil de sécurité.  Aujourd’hui, a relevé le représentant, les Nations unies se penchent sur huit dossiers au Moyen-Orient: le dossier israélo-palestinien depuis des décennies, et plus récemment ceux de la Syrie et de la Libye.  Dans ce contexte, cinq pays arabes voient leur territoire occupé.  La région connaît en outre six conflits internes et un tiers des réfugiés mondiaux proviennent de la région arabe, a-t-il énoncé.  À ses yeux, le point commun à ces conflits est l’occupation et la présence d’éléments terroristes qui viennent attiser les conflits.  À propos du conflit israélo-palestinien, le délégué a déploré que, depuis l’entrée d’Israël aux Nations Unies, la politique de ce pays ait été de ne pas respecter la Charte de l’ONU et les résolutions du Conseil de sécurité.  Pour le représentant, l’occupation israélienne de la Palestine, du Golan syrien et de territoires libanais constitue la cause profonde des conflits au Moyen-Orient. 

« Cela fait des années que nous nous efforçons de juguler ces conflits, il faut à présent s’employer à les prévenir et la Charte de l’ONU est le premier outil pour ce faire », a-t-il dit, précisant que le Koweït avait essayé en créant le Conseil de coopération du Golfe et en servant de médiateur pour régler des différends dans la région.  « Nous avons même aidé à ouvrir des dialogues avec la République islamique d’Iran, en vertu des principes d’impartialité et de non-ingérence », a-t-il indiqué.  Alors que le nombre des réfugiés arabes s’élève à 24 millions dans le monde, des solutions politiques aux problèmes de la région demeurent notre priorité, a-t-il assuré.  Outre l’occupation, il s’agit de prendre en compte l’éducation et la culture en investissant dans l’avenir, ce que le Koweït s’efforce de faire en venant en aide aux pays amis.  Avant de conclure, il a appelé à la sauvegarde du patrimoine culturel régional, détruit par les terroristes mais aussi par les autorités d’occupation, notamment à Jérusalem. 

M. DMITRY A.  POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé qu’afin de trouver des solutions, il faut se tourner vers l’avenir mais aussi regarder vers l’arrière pour ne pas reproduire les erreurs du passé.  Il a souligné que les actions unilatérales ne se rapprochent pas de la solution aux problèmes, et que celle-ci devient d’autant plus difficile lorsque certains États Membres se placent au-dessus des lois.  Il a appelé à une union des efforts régionaux et internationaux, ce postulat devant être, selon lui, le point de départ de toute initiative au Moyen-Orient.  Constatant que l’ingérence dans les affaires intérieures d’autres pays a provoqué la mort de centaines de milliers de personnes dans la région, il a observé que des États sont devenus les otages d’objectifs opportunistes et d’acteurs extérieurs qui mènent une guerre par procuration. 

Il a ainsi déclaré avoir pris note de la déclaration de M. Michael Pompeo, ajoutant que « beaucoup » dépend de ses propos.  « Vous avez employé beaucoup de mots à connotation négative.  Vous avez parlé une fois de plus de la coalition contre l’Iran, mais jamais de dialogue », a-t-il lancé.  « Or, cette notion est au cœur même de toute action diplomatique », a-t-il poursuivi, reprochant au Secrétaire d’État des États-Unis d’avoir présenté l’Iran comme « une sorte d’empire du mal ».  Le délégué s’est inquiété des tensions observées dans le Golfe persique.  Sur fond d’accusations persistantes, on assiste à des menaces militaires qui pourraient mener à un conflit, a-t-il noté, appelant les parties à faire montre de retenue et à régler leurs problèmes de façon diplomatique, sans avoir recours aux ultimatums et aux menaces. 

La Russie, a indiqué le représentant, a présenté aux Nations Unies une notion de sécurité collective dans le Golfe persique, assortie de mesures de confiance et de contrôle.  Ce dispositif doit être inclusif, universel et global, ouvert à tous les États de la région, a-t-il préconisé, y voyant le prélude à un dispositif post-crise dans le Moyen-Orient.  Il a ensuite réitéré son opposition au processus de Varsovie dont le format a été, selon lui, décidé de façon trop hâtive.  Une stratégie collective serait préférable à une recette sur la base d’intérêts géopolitiques trop étroits, a-t-il dit.  La proposition russe doit, quant à elle, pouvoir se concrétiser, grâce à un dialogue constructif.  À cet égard, a-t-il indiqué, la Russie organisera les 18 et 19 septembre une table ronde d’experts sur cette question. 

Le représentant a souligné que, d’une manière générale, des pourparlers ne peuvent aboutir que si les parties sont prêtes à faire preuve de respect mutuel sur la base des principes de la diplomatie.  Il n’est donc pas possible, à ses yeux, d’inviter l’Iran à des discussions tout en lui imposant des sanctions.  « Il n’est pas logique qu’au mépris de la résolution 2231, les États-Unis appellent l’Iran à s’engager dans des pourparlers sans conditions préalables », a-t-il souligné, affirmant toutefois que son pays continuerait de tenter de convaincre les États-Unis et l’Iran à dialoguer de manière civilisée. 

Évoquant à son tour le conflit israélo-palestinien, il a constaté que la situation en Cisjordanie ne s’améliore pas plus que celle de Jérusalem-Est.  Les agissements d’Israël sont illégaux au regard du droit international et constituent un des plus graves obstacles à la mise en place d’une paix globale au Moyen-Orient, a dénoncé le délégué.  Pour la Russie, a-t-il réaffirmé, le principe fondamental de la création de deux États pour deux peuples reste le seul possible et doit être favorisé, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité.  Enfin, pour ce qui est de la Syrie, a-t-il poursuivi, l’opération antiterroriste des Forces aériennes russes a permis d’avancer.  « Nous n’avons jamais dit ou décidé que la Syrie devait être un havre de paix », a-t-il commenté, tout en appelant la communauté internationale à « unir ses efforts et à éviter les deux poids, deux mesures contre le terrorisme ». 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a salué la richesse de la diversité culturelle, ethnique et religieuse du Moyen-Orient en déplorant que la région reste le lieu de confrontations nombreuses avec des ravages terribles au sein des populations.  Il a déploré les centaines de milliers de morts en Syrie, les épidémies qui se succèdent au Yémen et l’absence d’espoir pour la population palestinienne.  Il faut consolider l’état de droit pour favoriser le développement économique conformément aux objectifs de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il insisté.  Le représentant a ensuite appelé le Conseil de sécurité à exiger le plein respect de ses résolutions pour que le droit international et le droit international humanitaire soient pleinement respectés au Moyen-Orient.  Il faut également respecter les régimes de non-prolifération des armes de destruction massive, a-t-il ajouté. 

Le délégué a également jugé urgent de régler la question palestinienne pour parvenir à une solution des deux États.  Il a, par ailleurs, dénoncé les attaques contre des navires dans le détroit d’Ormuz en avertissant du risque de conflits qui peuvent en découler.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a déclaré que le respect des principes du multilatéralisme et du droit international représente le point de départ des résolutions des crises au Moyen-Orient.  « Investir dans la paix c’est renforcer les capacités des communautés locales de régler leurs différends », a-t-il insisté.  Le représentant a constaté que le conflit palestinien est au cœur de toutes les autres crises et a insisté sur l’urgence de résoudre la crise palestinienne, notamment en assurant l’indépendance de la Palestine dans ses frontières de 1967. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est inquiété des récentes déclarations et décisions faisant suite à des événements dans le Golfe persique qui risquent de plonger le Moyen-Orient dans l’incertitude.  Il a jugé nécessaire de déployer une stratégie conjointe mondiale pour instaurer la confiance et la paix entre les peuples du Moyen-Orient.  « Cela passe par des politiques de cohésion nationale pour harmoniser la coexistence entre les religions et cultures en présence », a-t-il insisté.  Il a jugé urgent la résolution de la question palestinienne en mettant en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Le représentant de la Guinée équatoriale s’est, par ailleurs, inquiété d’une tendance aux changements de régimes par le biais d’ingérences extérieures. 

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a relevé que la complexité des questions liées au Moyen-Orient et des menaces multiformes qu’elles suscitent imposent la recherche de solutions innovantes, à travers une action concertée des Nations Unies et des organisations régionales, ainsi qu’une coopération renforcée entre l’ensemble des pays de la région.  La Côte d’Ivoire a donc préconisé le dialogue comme solution pour renforcer la compréhension mutuelle et créer la confiance nécessaire à un règlement global de ces crises.  Il a précisé que ces négociations devront être inclusives et prendre également en compte des questions telles que le dialogue des cultures et des religions, les droits des minorités, la participation des femmes et des jeunes aux processus de paix et de développement. 

Concernant la question du nucléaire iranien, le représentant a réaffirmé que le Plan d’action global commun constitue une solide garantie pour la mise en œuvre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  Au sujet de la crise israélo-palestinienne, il a invité les protagonistes à renoncer à la violence et aux actions unilatérales en vue de favoriser la solution des deux États.  C’est également le dialogue qu’il a dit privilégier dans le cadre de la crise syrienne, avant d’appeler à un règlement politique de la crise au Yémen. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a déclaré que la paix et la stabilité s’appuient sur la fluidité du commerce.  Il a ajouté que la réalisation d’une paix et d’un développement durable dans la région repose sur une responsabilité commune.  Il a dit que l’un des défis les plus importants de la région est la répercussion catastrophique du terrorisme qui menace la stabilité des États.  Il a souligné l’importance des travaux de la onzième réunion du groupe en charge de lutter contre Daech qui s’est tenue au Bahreïn les 16 et 17 avril derniers.  Il a souligné l’importance d’assécher les flux financiers qui nourrissent les groupes terroristes. 

Par ailleurs, s’agissant du conflit israélo-palestinien, il a insisté sur l’importance de parvenir à la solution des deux États et de permettre à la Palestine de trouver son indépendance dans les frontières du 4 juin 1967.  Le représentant a ensuite fustigé les milices soutenues par l’Iran qui continuent de détruire le Yémen et de menacer l’Arabie saoudite.  Il a annoncé que son pays sera l’hôte, en fin d’année, d’une conférence sur la sécurité aérienne et maritime pour aborder notamment les graves dangers posés par l’Iran sur la navigation maritime dans la région. 

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a indiqué que le Moyen-Orient a connu des tragédies épouvantables depuis le début du XXe siècle en raison des abus des puissances coloniales.  Il a déclaré que la principale source des crises au Moyen-Orient est l’occupation par Israël de plusieurs territoires arabes dont le Golan syrien.  Il a aussi exigé que les Forces turques mettent un terme à leur présence illégale sur le territoire syrien.  Il a affirmé que la Turquie avait recours à des mercenaires qui viennent appuyer des groupes terroristes abusivement baptisés « armée syrienne libre ».  Il a appelé à faire face à la menace des armes de destruction massive avant d’appeler Israël à placer ses installations sous le contrôle de l’AIEA conformément à la résolution 487 du Conseil de sécurité.  « L’heure est venue pour nos peuples de vivre dans la sécurité et d’instaurer la coexistence pacifique entre les civilisations et les cultures », a conclu le représentant de la Syrie avant d’exhorter le Conseil de sécurité à cesser toute approche partiale. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a rappelé que, pendant des siècles, les peuples du Moyen-Orient de l’Afrique du Nord avaient vécu dans la paix et l’harmonie, une réalité qui est tout autre aujourd’hui.  Il a relevé qu’à l’heure actuelle, le principal défi de la région est de maintenir en vie les perspectives de résolution du conflit israélo-palestinien.  Il a regretté de voir que la vision de la solution des deux États soit délibérément affaiblie par des pratiques unilatérales et illégales dans les territoires palestiniens occupés.  Il a plaidé pour un plan de paix qui permette un État palestinien indépendant, souverain, contigu et viable, avec Jérusalem-Est comme capitale, vivant côte-à-côte avec Israël.

En ce qui concerne la Syrie, le représentant a dénoncé les crimes horrifiants du « régime brutal d’Asad » et les autres menaces dont pâtissent la population, ainsi que les crimes bien établis des organisations terroristes comme Daech, Al-Qaida et autres groupes affiliés, ainsi que le PKK et sa branche syrienne le PYD-YPG.  Il a rappelé qu’il ne pouvait y avoir qu’une solution politique basée sur la résolution 2254 pour mettre fin à la guerre civile en Syrie.

Le représentant s’est également inquiété de la détérioration de la situation au Yémen, assurant vouloir continuer de soutenir les efforts menés sur le plan international pour promouvoir la sécurité et la stabilité du pays tout en protégeant son unité et son intégrité.  Concernant la Libye, il a dit qu’il ne pouvait y avoir de solution militaire, mais seulement un dialogue politique pour parvenir à la paix et à la stabilité.  Il a appelé les acteurs régionaux et internationaux à jouer leur rôle pour contribuer à mettre fin à ce conflit.  Il faut de toute urgence revenir à un processus facilité par l’ONU, a-t-il recommandé.  Enfin, le représentant a appelé la communauté internationale et en particulier le Conseil de sécurité à jouer un rôle plus constructif dans la résolution des conflits au Moyen Orient, en respectant les principes de base du droit international et les résolutions des Nations Unies. 

M. SILVIO GONZATO, Observateur de l’Union européenne (UE), a identifié comme défi majeur à la paix et la sécurité au Moyen-Orient le fléau du terrorisme qui est exacerbé par la radicalisation et l’extrémisme violent.  Il a noté que l’un des défis au Moyen-Orient est le manque de confiance entre les parties et l’absence d’horizon politique pour de nombreux citoyens. 

L’UE s’est ensuite dit inquiète des mesures prises par l’Iran en juillet dernier, et qui vont à l’encontre de ses engagements en vertu du Plan d’action global commun.  L’Observateur a appelé l’Iran à revenir sur ces décisions immédiatement et de s’abstenir de toute nouvelle escalade tout en respectant de nouveau ses obligations.  Il a rappelé la promesse de l’UE de respecter ses engagements en vertu de l’accord, y compris en ce qui concerne la levée des sanctions pour le bien du peuple iranien.  L’UE regrette donc la nouvelle imposition desdites sanctions par les États-Unis et a assuré sur sa volonté de préserver le Plan d’action global commun, « un élément clef du régime de non-prolifération nucléaire » qui est de l’intérêt de tous.  M. Gonzato a également fait part de l’inquiétude de l’UE face aux activités de missiles balistiques iraniens et le transfert desdits missiles à des acteurs étatiques et non étatiques.  Il a aussi déploré les entraves à la navigation dans le Golfe, rappelant les obligations des uns et autres en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. 

M. Gonzato a en outre appelé au respect du droit international humanitaire au Yémen et en Syrie, tout en insistant sur l’importance de processus politiques pour parvenir à la paix dans ces deux crises.  Il a dit que l’UE se tient disposée à participer à la reconstruction de la Syrie quand une transition politique réelle et inclusive sera négociée par les parties syriennes, sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et du Communiqué de Genève. 

En ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, l’Union européenne reste engagée à une résolution par le biais de la solution des deux États qui viendra mettre fin à l’occupation qui dure depuis 1967.  L’UE est également disposée à œuvrer à la reprise des pourparlers concernant les questions en suspens et pour parvenir à une paix durable.  Il a indiqué que les colonies de peuplement israéliennes menacent les perspectives de paix et l’éventualité de la solution des deux États. 

L’Union européenne a aussi promis d’œuvrer, avec tous les partenaires de la région, pour lutter contre le terrorisme.  L’Observateur a noté que le manque de confiance qui prévaut dans la région est un des défis majeurs, avant de souligner que les solutions aux conflits du Moyen-Orient ne peuvent être trouvées que par la coopération multilatérale.  L’absence de mise en œuvre des politiques arrêtées et le non-respect du droit international sont de réels défis pour la paix au Moyen-Orient, a-t-il dit.  La communauté internationale doit donc s’évertuer à rendre applicables les politiques arrêtées, et s’assurer que le droit international soit pleinement respecté. 

M. ABDALLAH Y.  AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a pris note de la note de cadrage de la présidence polonaise du Conseil de sécurité sur ce débat et sa volonté de recherche des causes profondes des conflits au Moyen-Orient.  Certains prétendent que ces conflits ont des origines ethniques et religieuse qui remontent à des siècles, a-t-il observé.  « C’est faux, s’agissant surtout des deux principales entités qui menacent la paix régionale, à savoir Israël et l’Iran », a-t-il dit.  Selon lui, le conflit israélo-palestinien n’a jamais été religieux.  La cohabitation entre les deux peuples n’a réellement commencé à changer que lorsque le mouvement sioniste a fait main basse sur les habitations des Palestiniens.  « Il n’y a donc pas de revanche entre les Palestiniens et les Juifs en Palestine », a assuré le représentant.  Déplorant que l’ONU ait consacré nombre de ses résolutions à Israël, depuis la résolution 181 qui a porté création de cet État indépendant, il a également regretté que les autorités israéliennes poursuivent leurs atermoiements alors même que la solution des deux États s’est imposée à la communauté internationale. 

S’agissant de l’Iran, le représentant a également réfuté la thèse selon laquelle le chiisme de l’Islam serait à l’origine des désaccords entre l’Iran et d’autres pays musulmans.  Les différends entre sunnites et chiites ne sont pas une incarnation du conflit avec l’Iran, a-t-il affirmé.  Les différences ne sont apparues qu’après la révolution iranienne, la Constitution de la République islamique d’Iran disposant que le pays doit répandre sa révolution à l’étranger, a poursuivi le délégué.  Il a assuré que l’Arabie saoudite milite pour la défense des droits des peuples à vivre en paix, loin des ingérences et des violences commises par des milices comme les houthistes et le Hezbollah.  Reconnaître ces principes de base permettra à la région de consacrer ses ressources humaines et culturelles mais aussi de lutter contre le terrorisme et l’occupation étrangère, a-t-il encore plaidé, ajoutant que son pays appuie tous les efforts visant au développement du Moyen-Orient, meilleur rempart contre le terrorisme et les visées expansionnistes de certains. 

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a dit que la région a besoin d’une sécurité qui s’appuie sur un système de sécurité collective.  Il a estimé que l’occupation israélienne est la cause de nombreuses crises dans la région.  Il a appelé à rendre justice au peuple palestinien en créant un État indépendant viable avec Jérusalem-Est comme capitale.  Pour promouvoir le développement durable et la stabilité dans la région du Moyen-Orient, le représentant de l’Iraq a appelé à lutter contre la corruption, promouvoir le droit des femmes, offrir des opportunités professionnelles aux jeunes, promouvoir la bonne gouvernance, lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 

M. MAJID TAKHT-RAVANCHI (République islamique d’Iran) a relevé que toutes les initiatives menées jusqu’à présent pour résoudre la question de la Palestine avaient ignoré le principe selon lequel, seule la fin de l’occupation peut permettre de faire cesser le conflit.  Le soi-disant « deal du siècle » va lui aussi sans doute échouer à cause de cela, a-t-il prédit.  Selon lui, les États-Unis, en soutenant l’occupation, sont responsables de la prolongation du conflit, comme pour presque tous les autres conflits de la région.  Il a pris pour preuve l’implication des États-Unis en Afghanistan, en Iraq, en Syrie et au Yémen, où le pays soutient, selon lui, des groupes terroristes et des actions illicites comme les cyberattaques au Moyen-Orient.

Hier, a poursuivi le représentant, a marqué le soixante-sixième anniversaire du coup d’État orchestré par les États-Unis et le Royaume-Uni contre le Gouvernement démocratiquement élu de l’Iran.  Il a énuméré les interférences américaines qui ont suivi en Iran comme « le soutien à Saddam lors de l’agression de Iran » ou encore l’attentat contre un vol commercial iranien qui avait fait 290 morts.  Selon le représentant, une des principales causes d’instabilité et d’insécurité dans la région est la présence militaire des États-Unis, qui a déployé plus de 70 000 hommes au Moyen-Orient, tandis que le nombre d’installations militaires dans la région a augmenté, passant de 4 en 1990 à 41 en 2018, la plupart étant des installations américaines. 

Un autre facteur déstabilisant, a poursuivi le représentant, est l’afflux d’armes américaines dans la région qui est devenu une « véritable poudrière ».  Il a également cité les conséquences de la stratégie américaine qui consiste à « diviser pour mieux régner », dénonçant notamment les déclarations « iranophobes » des responsables américaines.  Il a accusé ceux-ci de diffuser des fausses informations contre l’Iran pour justifier leur politique dans la région, « dans le but d’empêcher l’Iran de jouer son rôle dans la région », alors que le pays existe depuis des millénaires. 

Nous ne cherchons pas la confrontation, a assuré le représentant tout en disant ne pas pouvoir rester indifférent face à la violation de la souveraineté de l’Iran.  « Pour préserver nos frontières et nos intérêts, nous exercerons vigoureusement notre droit à l’auto-défense », a-t-il déclaré.  En tant que pays qui a la plus longue côte dans le golfe persique et la mer d’Oman, l’Iran est déterminé à continuer de garantir la sûreté et la sécurité de la navigation maritime dans cette zone, particulièrement dans le détroit d’Ormuz, a dit le représentant en prévenant que toute tentative de monter une coalition artificielle pour sécuriser la navigation dans cette zone échouerait.  Les pays du littoral sont responsables de la sécurité du Golfe persique, a-t-il rappelé en soulignant l’initiative iranienne de créer un dialogue régional dans la lignée de la résolution 598.

M. MOHAMED FOUAD AHMED (Égypte) a rappelé que le conflit israélo-palestinien est l’un des plus vieux de la région et a dénoncé une situation d’injustice qui nuit à la cause palestinienne.  Il a souligné que ce conflit est l’une des causes de l’insécurité dans la région et a demandé la reprise de l’Initiative de paix arabe.  Le représentant a appelé à engager des réformes pour maintenir les États-nations, au lieu de les détruire par le biais de l’ingérence étrangère et en mettant un terme aux tensions sectaires.  Il a aussi appelé à condamner ces pays qui forment, financent et envoient les terroristes dans les pays du Moyen-Orient.  Il a également souligné l’importance de parvenir à un Moyen-Orient exempt d’arme nucléaire, appelant toutes les parties à apporter leur soutien à l’organisation de la conférence sur le sujet en novembre prochain, en Jordanie. 

M. DANNY BEN YOSEF DANON (Israël) a déclaré que la récente attaque terroriste qui a frappé Israël la semaine dernière démontre la nature du principal mal qui frappe le Moyen-Orient.  Illustrant son propos, il a indiqué que deux jeunes palestiniens ont attaqué des policiers israéliens au couteau à Jérusalem, alors qu’ailleurs un autre Palestinien en voiture tentait d’écraser deux jeunes Israéliens qui se trouvaient à un arrêt de bus.  Il a aussi indiqué que l’armée israélienne avait intercepté, samedi soir, des terroristes qui prévoyaient une attaque. 

Hamas tient en otage deux civils israéliens et les dépouilles de deux soldats qu’il refuse de restituer.

« Nous vivons une époque historique alors qu’il y a 70 ans le monde a été le témoin du rétablissement de l’État juif au Moyen-Orient », a insisté le représentant israélien.  « Et il y a 40 ans, la poignée de main entre Sadate et Begin a été l’occasion de prouver au monde arabe que nous pouvions vivre en paix et en sécurité. »

Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, une vague sans précédent de normalisation est en train de balayer la région, pendant qu’Israël améliore ses relations avec ses voisins arabes.  Nous avons le droit de nous trouver au Moyen-Orient »,a insisté le représentant d’Israël, tout en regrettant que les dirigeants palestiniens continuent de réfuter le lien historique des juifs à leur terre et d’entraver la normalisation des relations au Moyen-Orient.  « Entendez-mon message, Israël n’est pas votre ennemi », a lancé le représentant israélien aux pays arabes.

M. Danon a ensuite affirmé que la principale menace qui pèse sur nous est celle de l’Iran et sa volonté d’acquérir l’arme nucléaire.  Il a dénoncé le tir d’un missile balistique d’une portée de 1 000 kilomètres le mois dernier et l’appui de 7 milliards de dollars accordé par l’Iran à des groupes terroristes, dont un soutien passé récemment de 6 à 30 millions de dollars par mois au Hamas.  L’objectif de Téhéran est d’exporter la révolution iranienne, a-t-il accusé, mais il n’a réussi qu’à rapprocher Israël de ses voisins arabes.  Derrière les portes closes, a poursuivi le représentant, nombre des dirigeants de la région s’accordent pour dire que l’Iran représente la principale menace à la paix au Moyen-Orient.

Il a affirmé que ses voisins arabes savent qu’Israël est un moteur de la lutte contre la radicalisation et s’est étonné que l’Iran veuille détruire Israël alors que l’extrémisme, a-t-il affirmé, est présent au sein de l’Autorité palestinienne.  M. Danon a notamment affirmé que la semaine dernière, suite à la publication d’un rapport sur le racisme au sein de l’Autorité palestinienne, son représentant aurait cité une résolution « antisémite et révoquée » de l’ONU, affirmant que le sionisme est une forme de racisme.  L’extrémisme de Téhéran et de Ramallah est contraire au sentiment de la majorité des arabes qui estiment qu’Israël fait partie de la solution.

« Malgré tout cela, Israël veut le dialogue par le biais de négociations bilatérales directes », a-t-il assuré, or la partie palestinienne refuse cette voie.  Il a appelé les peuples arabes à comprendre qu’Israël n’est pas le problème mais fait partie de la solution visant à créer un avenir meilleur pour la région.  Intervenant ensuite en arabe, le représentant d’Israël a appelé les Arabes de toute la région, à « prendre conscience de ce que l’Égypte et la Jordanie savent déjà, à savoir qu’Israël n’est pas votre ennemi ». 

La normalisation est dans notre intérêt mutuel et de ce fait, nous sommes prêts à participer à des négociations directes.  Mais la Palestine s’assiéra-t-elle à la table des négociations? a lancé le représentant.  Israël, a-t-il dit, attend avec impatience l’émergence d’un Sadate palestinien pour se joindre à nos mesures audacieuses. 

M. SAUD HAMAD GHANEM HAMAD ALSHAMSI (Émirats arabes unis), s’exprimant au nom du Groupe arabe « excepté l’Iraq », a rappelé que tous les problèmes de la région avaient conduit les dirigeants arabes à tenir une session d’urgence à La Mecque fin mai 2019.  Il a aussi rappelé que la Déclaration du trentième Sommet arabe annuel tenu à Tunis le 31 mars 2019 avait appelé à mettre en œuvre cinq mesures pour réaliser la sécurité et la stabilité régionales. 

La première est l’intensification des efforts pour mettre fin à toutes les formes de tension et de conflit, dans une vision unifiée visant à renforcer la solidarité arabe en vue de sécuriser et de stabiliser les pays arabes et d’améliorer leur capacité à faire face aux défis politiques, sécuritaires, économiques et culturels.  À cet égard, le Groupe a souligné la nécessité de parvenir à un règlement juste et global de la crise palestinienne et de tout le conflit israélo-arabe pour parvenir à la paix, à la sécurité et à la stabilité au Moyen-Orient, ce qui exige le retrait d’Israël de tous les territoires occupés par lui depuis juin 1967, l’instauration d’un État palestinien indépendant ayant Jérusalem-Est pour capitale, ainsi que la fin de toutes les formes d’extrémisme religieux exercées par la Puissance occupante dans les lieux saints de Jérusalem.  Le Groupe arabe est déterminé à poursuivre ses efforts pour relancer des négociations sérieuses et efficaces, afin de résoudre les problèmes liés au statut final, a dit le représentant.  Il continuera également de s’employer à mettre fin aux crises et aux problèmes auxquels sont confrontés la Libye, la Syrie, le Yémen, le Soudan et la Somalie, ainsi qu’à appuyer les efforts de reconstruction en Iraq. 

Comme deuxième mesure, les dirigeants arabes ont appelé à protéger la région des ingérences étrangères et à veiller à ce que tous les États de la région respectent les principes du bon voisinage et s’abstiennent de tout recours à la force ou à la menace de la force.  Le groupe arabe a dès lors réaffirmé son rejet et sa condamnation du ciblage des villes et territoires saoudiens par des missiles balistiques.  Il a aussi condamné la politique du Gouvernement iranien et ses interventions en cours dans les affaires arabes « qui alimentent les conflits religieux et sectaires ».  L’Iran, a précisé le représentant, ne doit pas soutenir les groupes qui alimentent ces conflits, en particulier dans les États arabes du Golfe, ni les milices et les groupes armés dans les États arabes, et notamment cesser ses interventions au Yémen.  « Nous demandons également à l’Iran de cesser de soutenir les milices antigouvernementales au Yémen ou de leur fournir des armes, et de s’abstenir de transformer le Yémen en une plateforme de lancement de missiles contre les États voisins du Yémen ou de menacer la navigation maritime dans le détroit de Baab al-Mandab et la mer Rouge. »

Troisièmement, a poursuivi le représentant, il faut renforcer la coordination en matière de sécurité entre les États arabes et intensifier les efforts internationaux visant à lutter contre toutes les formes d’extrémisme et de terrorisme, y compris l’élimination de leurs sources de financement.  Quatrièmement, il faut prendre des mesures concrètes pour mettre en œuvre les résolutions internationales relatives à la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient, notamment en appuyant la grande conférence que l’ONU tiendra sur cette question.  Enfin, cinquième mesure prônée par le Groupe arabe: mettre l’accent sur un développement inclusif pour améliorer la situation sociale et économique de la région en intensifiant les efforts collectifs visant à renforcer et à stimuler la coopération économique et en investissant dans les ressources naturelles, financières et humaines des pays arabes. 

Mme NASRIA FLITTI, Observatrice de la Ligue des États arabes, a souligné que les États arabes sont conscients de la nécessité de résoudre les crises au Moyen-Orient et d’atténuer les souffrances des civils, notamment des femmes et enfants.  Elle a noté qu’alors que certaines parties apportent leur aide pour résoudre les crises, d’autres, par contre, essayent d’envenimer la situation.  Elle a notamment dénoncé l’ingérence iranienne dans les affaires intérieures de pays arabes. 

La déléguée a noté que le conflit palestinien s’aggrave, pointant notamment la poursuite des activités de peuplement israéliennes et qui sapent de fait la possibilité de la solution des deux États et toute perspective de paix dans la région.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à demander des comptes à Israël pour la violation constante de ses résolutions.  Elle a appelé à mettre fin à l’occupation des terres palestiniennes et établir un État palestinien indépendant, sur les frontières du 4 juin 1967.  Elle a rappelé que le Sommet arabe de Tunis, qui s’est tenu en mars dernier, avait réitéré que l’Initiative de paix arabe est le plan le plus idoine pour résoudre la question palestinienne.  À cette occasion, les dirigeants arabes ont également déclaré que Jérusalem-Est devait être la capitale d’un État palestinien indépendant, rejetant par la même occasion la reconnaissance de la ville comme capitale d’Israël. 

M. RIYAD H.  MANSOUR, l’Observateur permanent de la Palestine, a estimé qu’il est impossible d’examiner, comprendre et résoudre les causes profondes de la situation qui prévaut au Moyen-Orient sans évoquer la question palestinienne.  Ainsi, éviter de parler de cette injustice vécue par les Palestiniens serait ignorer les profondeurs de la méfiance, de la colère et du désespoir semés dans la région par la question, a-t-il affirmé, notant que les populations ne croient plus au droit international, ni à l’équité du système international.  Cela continue aussi de nourrir des histoires toxiques de doubles standards, y compris au sein de la jeunesse qui constitue la majorité des populations du monde arabo-musulman.  Il a relevé que l’échec de tenir Israël pour responsable de ses actes a fait prospérer une culture destructrice d’impunité, laquelle a en retour nourri un climat favorable à la prolifération de conflits dans la région.  Et ces conflits ont créé un terreau fertile à l’expansion de l’extrémisme et du terrorisme, ainsi que des conflits religieux, a-t-il déploré.  Il a mis en garde contre l’idée de provoquer un conflit religieux en Palestine, pointant notamment les « provocations » israéliennes à Jérusalem-Est, notamment sur l’esplanade des Mosquées. 

M. Mansour a également parlé du coût humain de cette impunité avec des déplacements forcés de millions de civils, dont cinq millions et demi de Palestiniens.  Selon lui, ceux qui ne reconnaissent pas ces faits sapent les vrais efforts de résoudre les causes profondes du conflit, et partant, la stabilisation de la région.  Il a appelé à emprunter un chemin différent qui puisse assurer la justice, les droits de l’homme, la sécurité et la dignité pour tous.  Ainsi, résoudre les crises du Moyen-Orient passe par une solution juste à la question palestinienne, en accord avec le droit international et les résolutions pertinentes de l’ONU.  Nous connaissons tous la solution, a-t-il insisté, mais certains ambassadeurs qui viennent ici vivent dans un monde de fantaisie et persistent à faire la sourde oreille.

Pour l’Observateur, le problème n’est pas que les résolutions du Conseil de sécurité soient irréalistes, mais que l’on n’a jamais essayé de les mettre en œuvre.  Ainsi un membre permanent utilise son droit de veto afin de saper les actions du Conseil, et cela aggrave la situation et bloque toute tentative de mettre un frein à l’occupation et à la résolution pacifique du conflit, a-t-il dénoncé.  De même, imposer des solutions injustes va conduire à des échecs, avec des conséquences politiques, sécuritaires, sociales et humaine graves.  Il a donc appelé à une réelle volonté politique pour mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité relatives au conflit israélo-palestinien.  Le « deal du siècle » ne permettra pas de réaliser la paix et échouera, a-t-il d’ailleurs prédit.  Ce qu’il faut, c’est mobiliser le volonté politique pour mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité relatives au conflit israélo-palestinien.

L’observateur a ensuite réagit à la déclaration du représentant d’Israël, dénonçant les allégations selon lesquelles les Palestiniens n’auraient jamais fait de compromis historique et ne veulent pas une solution au conflit.  Ce délégué représente le Gouvernement le plus extrémiste qu’Israël ait connu.  Alors qui détruit les perspectives de la solution des deux États, la partie palestinienne ou le gouvernement extrémiste d’occupation? a-t-il lancé.  Il a taxé le délégué d’Israël de « menteur », arguant que ce dernier a choisi de ne pas accepter la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité, ni les promesses des pays arabes de vouloir œuvrer pour la paix.

M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a estimé que le règlement juste et global de la question palestinienne est une question essentielle pour parvenir à la paix au Moyen-Orient.  Cela passe par le respect du principe des deux États et la reconnaissance de la Palestine comme État indépendant dans ses frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.  C’est pourquoi, il a demandé l’arrêt des toutes les activités de colonisation.  Le représentant du Qatar a souhaité une action urgente de la communauté internationale pour parvenir à la paix en Syrie, en Libye et au Yémen.  Il a salué la contribution du Conseil de coopération du Golfe qui a grandement contribué à la paix et à la sécurité internationales au Moyen-Orient et dans le monde.

Par ailleurs, le délégué a dénoncé l’imposition du blocus illégal qui frappe le Qatar depuis trois ans et qui constitue selon lui « un grave précédent dans les relations internationales ».  Illustrant les contributions de son pays, il a précisé que le Qatar est un des principaux contributeurs du Bureau de l’ONU de lutte contre le terrorisme.  « Nous avons aussi soutenu la scolarisation de 10 millions d’enfants dans 50 pays » a-t-il insisté. 

Mme AMAL MUDALLALI (Liban) a fait remarquer que le Conseil avait tenu déjà 11 séances sur des questions relatives au Moyen-Orient ce mois d’août, alors qu’on est encore que le 20 du mois, ce qui reflète la détérioration de la situation sur les plans sécuritaire et humanitaire.  Après avoir recensé les problèmes multiples dans les territoires palestiniens occupés, en matière politique, économique, humanitaire et en droit international, ainsi que le manque d’espoir, elle a accusé la politique israélienne de toujours créer des faits sur le terrain.  Cela prive les Palestiniens d’un avenir indépendant et souverain et de la chance de vivre dans la paix et la dignité, a-t-elle estimé.  Citant des « exemples criants », comme l’expansion des colonies israéliennes, elle a aussi parlé des violations israéliennes relatives à la mosquée Al-Aqsa, « le troisième site sacré de l’Islam ».  Les sites sacrés doivent être respectés, a-t-elle exigé.  La représentante a demandé à cet égard à l’ONU et au Conseil de sécurité de faire en sorte que soient appliqués les résolutions, les conventions de Genève et le droit international.

Notant aussi la crise existentielle que connaît l’UNRWA, Mme Mudallali a exprimé son inquiétude, en tant que représentante d’un pays qui accueille des réfugiés, par rapport aux conséquences de cette crise sur les réfugiés palestiniens et les communautés d’accueil.  Elle a appelé la communauté internationale à trouver une solution durable à cette situation financière de l’agence.  Elle a aussi, sur le plan politique, réitéré que la question israélo-palestinienne ne se résoudra que par une paix juste et intégrale, basée sur les résolutions de l’ONU, le droit à l’autodétermination, les frontières de 1967, l’Initiative de paix arabe, et une solution à deux États qui donne naissance à l’État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale.

Passant à la situation de son pays, la représentante a indiqué que le Liban s’était placé sur la voie du redressement économique et que le Gouvernement progressait dans des initiatives cruciales, comme la Conférence CEDRE.  Sur le front sécuritaire, le Gouvernement, a-t-elle indiqué, fait de son mieux pour maintenir la stabilité, en particulier à la frontière sud, avec l’aide de la communauté internationale et des Nations Unies.  Mais la situation reste fragile, a-t-elle reconnu.  Le Premier Ministre Harriri a confirmé la semaine dernière au Secrétaire d’État des États-Unis l’engagement du Liban à poursuivre le processus de négociations concernant les frontières terrestres et maritimes.  Le Premier Ministre a aussi réaffirmé l’engagement du Liban à appliquer la résolution 1701 (2006) et a assuré être prêt à passer de la cessation des hostilités à un cessez-le-feu dans le cadre d’un mécanisme onusien, à condition qu’Israël fasse sa part pour mettre en œuvre la résolution.  Mme Mudallali a, à cet égard, relevé les violations quotidiennes d’Israël sur la souveraineté libanaise et ce, en tout impunité.  Des violations qui prennent un tour dangereux puisqu’Israël continue d’utiliser l’espace aérien libanais pour mener ses opérations militaires contre la Syrie, a-t-elle noté. 

Concernant le renouvellement du mandat de la FINUL, qui doit être décidé dans quelques jours, la représentante a cité une lettre du Ministre des affaires étrangères libanais qui exprime le soutien fort du Liban au mandat actuel de la Mission et son plein engagement à mettre en œuvre la résolution 1701, y compris le retrait sans délai des forces israéliennes des territoires occupés libanais.  La représentante a conclu en saluant le « formidable travail » de la Mission et le « professionnalisme » de son personnel.

M. ALOMOUSH (Jordanie) a dit que le Moyen-Orient est l’otage d’intérêts politiques divers.  Il a relevé que la question palestinienne reste au cœur des défis de la région.  C’est pourquoi le pays a toujours appuyé une solution pacifique visant à parvenir à la solution des deux États, avec notamment l’avènement d’un État palestinien indépendant, ayant pour capitale Jérusalem-Est, et installé sur les frontières en vigueur en 1967.  La Jordanie a toujours appelé à la fraternité entre les peuples, a dit le représentant en expliquant que « la ville de la paix », Jérusalem, est au centre des priorités pour ce pays qui est gardien de la ville sainte.  Le délégué a dénoncé toute tentative de changer le statut historique de la ville, appelant Israël à cesser ses pratiques. 

Il a, en outre, plaidé pour le bon fonctionnement de l’UNRWA qui doit recevoir le soutien nécessaire pour ne pas se retrouver sur la longue liste des conséquences de l’inaction de la communauté internationale pour parvenir à une solution durable. 

La Jordanie est également l’un des premiers États qui a reçu des réfugiés syriens, a-t-il rappelé.  Il a indiqué que selon l’UNICEF, il y aurait 15 millions d’enfants non scolarisés dans la zone d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.  Selon le représentant, c’est une situation dangereuse qui peut servir de terreau fertile au terrorisme.  Enfin, le délégué a promis que la Jordanie poursuivrait son rôle politique et diplomatique afin de parvenir à une paix durable, jusqu’à ce que soient rendus les territoires arabes occupés, et jusqu’à ce que soit rendue possible l’indépendance de la Palestine. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité appelle à respecter les principes du droit international humanitaire et à protéger les civils en période de conflit armé

8599e séance – après-midi
CS/13922

Le Conseil de sécurité appelle à respecter les principes du droit international humanitaire et à protéger les civils en période de conflit armé

Le Conseil de sécurité a réaffirmé, cet après-midi, l’importance fondamentale des Conventions de Genève pour la protection des personnes touchées par les conflits armés.

Dans une déclaration présidentielle adoptée à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de l’adoption, le 12 août 1949, de ces traités, le Conseil de sécurité a également rappelé la nécessité de promouvoir le respect des règles et des principes du droit international humanitaire, en particulier de protection des civils en période de conflit armé, et de s’attaquer aux causes profondes des conflits armés par le dialogue, la médiation, les consultations et les négociations politiques.

Par ce texte, le Conseil exprime par ailleurs sa grave préoccupation face aux situations où le droit international humanitaire n’est pas respecté, notamment les attaques aveugles ou les attaques contre des civils et des biens de caractère civil tels que les écoles.  Il condamne également l’utilisation de la famine comme méthode de guerre contre les civils, le déni illicite d’accès à l’aide humanitaire et au personnel humanitaire, les attaques contre le personnel médical ou humanitaire exclusivement consacré à des tâches médicales et les attaques contre les hôpitaux et autres installations médicales ayant droit à protection au titre du droit international humanitaire.

Le Conseil exhorte en outre les États qui ne l’ont pas encore fait à envisager de devenir parties, dans les plus brefs délais, aux Protocoles additionnels aux Conventions de Genève, et à prendre les mesures appropriées pour honorer leurs obligations au titre de ces instruments.

Déclaration présidentielle

À l’occasion du soixante-dixième anniversaire des Conventions de Genève du 12 août 1949, les traités qui ont été rédigés et adoptés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le Conseil de sécurité en réaffirme l’importance fondamentale pour la protection des personnes touchées par des conflits armés.  Il rappelle la responsabilité primordiale qui est la sienne, au titre de la Charte des Nations Unies, de maintenir la paix et la sécurité internationales et rappelle, à cet égard, la nécessité de promouvoir le respect des règles et des principes du droit international humanitaire, en particulier de protection des civils en période de conflit armé, et de s’attaquer aux causes profondes des conflits armés par le dialogue, la médiation, les consultations et les négociations politiques.

Le Conseil rappelle l’obligation des États parties aux Conventions de Genève et au Protocole additionnel I de 1977 de respecter et faire respecter ces instruments en toutes circonstances et se félicite du concours constant que le Comité international de la Croix-Rouge apporte aux États qui s’emploient à appliquer le droit international humanitaire. Le Conseil a conscience que, lorsqu’elles sont observées, les Conventions de Genève de 1949 et en particulier l’article 3 commun concernant les conflits armés de caractère non international, les Protocoles additionnels y relatifs et les autres règles du droit international humanitaire, lorsqu’ils s’appliquent, offrent une protection importante aux populations touchées par des conflits armés.  Il a également conscience des efforts consentis par les États pour s’acquitter des obligations que leur impose le droit international humanitaire et les encourage à poursuivre ces efforts.  Il souligne en outre l’importance des mécanismes nationaux, régionaux et internationaux existants en matière de formation, de conseil juridique, d’assistance technique et d’échange d’information, ainsi que celle des mécanismes de renforcement des capacités d’application du droit international humanitaire existants à l’intention des États parties dont les autorités nationales en font la demande.

Le Conseil réaffirme qu’il condamne énergiquement les violations du droit international humanitaire commises par toutes les parties aux conflits armés, ainsi que les violations du droit international des droits de l’homme applicable et les atteintes à ces droits, et demande à toutes les parties de s’acquitter de leurs obligations juridiques.  Il rappelle qu’il importe de respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, de mettre fin à l’impunité des violations et des atteintes et de veiller à ce que les responsables répondent de leurs actes.  Il exprime sa grave préoccupation face aux situations où le droit international humanitaire n’est pas respecté, notamment les attaques aveugles ou les attaques contre des civils et des biens de caractère civil tels que les écoles.  Il condamne également d’autres violations du droit international humanitaire, notamment l’utilisation de la famine comme méthode de guerre contre les civils, le déni illicite d’accès à l’aide humanitaire et au personnel humanitaire, les attaques contre le personnel médical ou humanitaire exclusivement consacré à des tâches médicales et les attaques contre les hôpitaux et autres installations médicales ayant droit à protection au titre du droit international humanitaire.

Le Conseil rappelle que les États parties aux Conventions de Genève ont l’obligation de rechercher les personnes présumées avoir commis, ou avoir donné l’ordre de commettre, une infraction grave auxdites Conventions et qu’ils doivent déférer ces personnes devant leurs propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité, ou peuvent, s’ils préfèrent, les remettre pour jugement à un autre État partie intéressé à la poursuite, pour autant que celui-ci ait retenu contre lesdites personnes des charges suffisantes.  Le Conseil exhorte les États qui ne l’ont pas encore fait à envisager de devenir parties, dans les plus brefs délais, aux Protocoles additionnels aux Conventions de Genève, et à prendre les mesures appropriées pour honorer leurs obligations au titre de ces instruments.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen: l’Envoyé spécial du Secrétaire général avertit sur le risque de « fragmentation du pays »

8598e séance – matin
CS/13920

Yémen: l’Envoyé spécial du Secrétaire général avertit sur le risque de « fragmentation du pays »

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen a averti, ce matin, au Conseil de sécurité, que la fragmentation du Yémen devient une menace de plus en plus importante et a appelé à redoubler d’efforts pour trouver une issue au conflit, notamment en incluant les parties prenantes des provinces du sud au processus de paix. 

« Il n’y a pas de temps à perdre, car les enjeux deviennent trop importants pour l’avenir du Yémen, du peuple yéménite et de la région toute entière », a insisté M. Martin Griffiths, qui intervenait par visioconférence depuis Amman en Jordanie.

L’Envoyé spécial a notamment indiqué que lors de ses rencontres avec les parties, celles-ci lui ont assuré leur ferme désir à parvenir à une solution politique, de faire avancer les discussions à cette fin et de reprendre la transition politique.  « Mais ce sentiment d’urgence contraste douloureusement avec les efforts engagés jusqu’ici pour résoudre le conflit », a-t-il déploré. 

M. Griffiths a aussi insisté sur la nécessité d’inclure toutes les parties prenantes, y compris celles des provinces du Sud, au processus de paix, notant qu’il existe tout un éventail de points de vue qui doivent être pris en compte pour déterminer l’avenir du sud du pays ainsi que du Yémen dans son ensemble. 

Il a également espéré que l’ensemble des parties yéménites considéreront les événements à Aden, théâtre d’affrontements, le 7 août, entre les brigades de protection présidentielle et les forces du Conseil de transition du Sud, comme le signal que le conflit doit cesser promptement et pacifiquement.  Il a mis en garde que la situation qui y prévaut risque d’endommager encore davantage le tissu social du Yémen et de voir la violence se propager à d’autres provinces du Sud, et de permettre, par ailleurs, l’expansion des activités de groupes extrémistes comme Al-Qaida dans la péninsule arabique, « avec un impact potentiellement terrible pour les civils et pour les perspectives de paix ». 

M. Griffith a d’ailleurs salué les efforts de la coalition pour rétablir le calme, notamment les efforts déployés par l’Arabie saoudite pour organiser un dialogue à Djeddah pour discuter de la situation.  « Même si la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm a eu un impact politique significatif et un bénéfice tangible sur le terrain, il ne peut pas être considéré comme une condition préalable à la paix dans l’ensemble du Yémen », a-t-il souligné. 

Lui emboitant le pas, le représentant du Yémen s’est lui aussi félicité de l’appel lancé par l’Arabie saoudite à toutes les parties en vue d’une réunion à Djeddah pour préserver les acquis nationaux.  La délégation a, elle aussi, averti que le « plan de désintégration » du pays s’aggrave et a vivement dénoncé l’appui des Émirats arabes unis à l’intervention « illégitime » du Conseil de transition du Sud, de même que le « projet » de l’Iran dans la région.

De son côté, la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires a indiqué qu’en dépit de l’urgence de la situation, les agences continuent d’être confrontées à des restrictions significatives, alors que le Yémen reste la plus grande opération humanitaire au monde, 12 millions de personnes, en moyenne, y recevant une aide chaque mois.  Mais, a-t-elle alerté, tout cela est sur le point de s’arrêter, puisque seuls 34% des besoins humanitaires de l’année ont été couverts à ce jour.  De ce fait, il est prévu de fermer le mois prochain des programmes destinés à 2,5 millions d’enfants souffrant de malnutrition, et dans l’immédiat, plus de 23 000 bébés qui souffrent de malnutrition aiguë risquent de mourir.

« Cette situation est tragique car nous savons qu’avec des ressources adéquates, nous pouvons sauver des millions de vies et faire reculer le choléra car nous y sommes parvenus l’an dernier », a affirmé Mme Ursula Mueller.  La Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence a notamment rappelé qu’une réponse robuste avait permis de faire chuter le nombre de nouveau cas d’un million en 2017 à 380 000 en 2018, pour ensuite avertir que cette année, le nombre de nouveaux cas dépasse déjà les 500 000, avec plus de 800 décès, soit cinq fois plus qu’à la même période l’an dernier.

Pour l’Envoyé spécial, le fait que l’Accord sur Hodeïda ait permis, huit mois après sa signature, que l’aide continue de parvenir par le biais des ports peut être considéré comme une grande victoire qui bénéficie aux civils à Hodeïda et ailleurs au Yémen.  De ce fait, mettre en œuvre les autres aspects de l’Accord sur Hodeïda serait une étape importante vers la reprise du processus de paix.  Il a indiqué avoir, en collaboration avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), présenté une proposition aux parties en conflit pour faire avancer la mise en œuvre de la première phase de l’Accord, et a précisé que leur réponse est attendue d’ici le 25 août. 

La plupart des huit membres du Conseil de sécurité qui se sont exprimés au cours de cette réunion ont eux aussi insisté, à l’instar du Koweït, sur l’impératif de trouver une solution politique au conflit et ont lancé de nombreux appels à la reprise du dialogue.  Les États-Unis ont, en outre, appelé les parties à participer de bonne foi aux pourparlers de « réconciliation » proposés par l’Arabie saoudite. 

Des préoccupations ont aussi été exprimées au sujet du risque de catastrophe écologique et humanitaire que fait peser le pétrolier délabré « Safer » amarré près du port de Ras Issa et qui, faute de maintenance, présente des risques de rupture avec 1,1 million de barils dans ses soutes.  L’Envoyé spécial a indiqué qu’un accord avait été conclu pour permettre à une mission d’évaluation de l’ONU d’être déployée le 27 août afin d’examiner le navire.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, intervenant par visioconférence depuis Amman, en Jordanie, a averti que la fragmentation du Yémen devient une menace de plus en plus importante.  Il n’y a donc pas de temps à perdre, car les enjeux deviennent trop importants pour l’avenir du Yémen, du peuple yéménite et de la région toute entière.  M. Griffiths a indiqué que lors de ses rencontres avec les parties, celles-ci lui ont assuré leur ferme désir à parvenir à une solution politique, de faire avancer les discussions à cette fin et de reprendre la transition politique.  Mais ce sentiment d’urgence contraste douloureusement avec les efforts engagés jusqu’ici pour résoudre le conflit, a-t-il déploré. 

L’Envoyé spécial a reconnu que « rien n’est simple au Yémen », rappelant qu’au début de son mandat, par exemple, on lui avait assuré de l’imminence de la réouverture de l’aéroport de Sanaa.  Or, ce n’est toujours pas le cas.  Les vols à caractère humanitaire âprement négociés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) durant des mois restent encore attendus, tandis que la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, une mesure de renforcement de la confiance avec un but humanitaire, a démontré à quel point de tels accords sont vulnérables lorsque l’engagement en faveur d’une solution pacifique vacille.  Pour l’Envoyé spécial, la liste des frustrations est longue et ne saurait s’étendre. 

S’agissant de Hodeïda, M. Griffith a rappelé que le cœur de l’Accord de Stockholm repose sur l’établissement d’un cessez-le-feu dans toute la province et le besoin d’assurer l’acheminement de l’aide humanitaire par les ports.  Huit mois après sa signature, il n’y a pas eu d’opération militaire majeure dans la ville d’Hodeïda, et on a noté une baisse significative de la violence, s’est-il félicité.  L’aide continue de parvenir par le biais des ports, ce qui est en soi une grande victoire qui bénéficie aux civils à Hodeïda et ailleurs au Yémen. 

De ce fait, mettre en œuvre les autres aspects de l’Accord sur Hodeïda serait une étape importante vers la reprise du processus de paix, a-t-il souligné.  Il a ensuite indiqué avoir, en collaboration avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), présenté une proposition aux parties en conflit pour faire avancer la mise en œuvre de la première phase de l’Accord.  Leur réponse est attendue d’ici le 25 août, a-t-il précisé, pour ensuite souligner qu’« Hodeïda » est une mesure temporaire conçue pour prévenir toute détérioration supplémentaire.  L’Accord n’a jamais été conçu pour établir un précédent sur la manière de répondre aux causes sous-jacentes du conflit. 

Il s’est ensuite félicité du fait qu’il y ait un accord destiné à faciliter l’accès d’une mission d’évaluation de l’ONU qui devrait être déployée, le 27 août, afin d’évaluer le pétrolier délabré Safer, amaré près du port de Ras Issa.  Cette mission est essentielle pour atténuer les graves conséquences environnementales provoquée par toute fuite de pétrole provenant des cales du navire.

Dans le même temps, a-t-il poursuivi, les négociations sur la mise en œuvre des échanges de prisonniers sont en cours.  Les parties ont passé plusieurs jours à Stockholm et ont tenu des séances techniques détaillées au cours des mois suivants sur la question.  Pour l’Envoyé spécial, la lenteur de ces négociations prolonge les souffrances des prisonniers et de leurs familles.  M. Griffith s’est aussi dit frustré que les progrès sur Hodeïda n’aient pas été plus rapides et qu’il n’y a eu aucune mise en œuvre concrète des accords sur Taëz et les échanges de prisonniers et de détenus.  Il a rappelé que l’Accord de Stockholm constitue une étape clef dans le processus de paix au Yémen et serait d’un grand bénéfice pour les parties et le peuple yéménite s’il était mis en œuvre.  Il a ajouté que cette mise œuvre ne doit pas outrepasser l’impératif global de mettre fin au conflit.

Poursuivant, l’Envoyé spécial a indiqué que les opérations militaires se sont poursuivies dans plusieurs provinces, notamment Sanaa, Saada, Taëz, Jaouf, Beïda, Hajjah et Dalea, ainsi que à la frontière du Yémen avec l’Arabie saoudite.  L’impact des opérations militaires sur les civils est terrible, comme le démontre l’attaque de fin juillet d’un marché à Saada.  Il a condamné les efforts continus du groupe Ansar Allah qui cible délibérément les infrastructures civiles en Arabie saoudite, avertissant que tout menace contre la vie des civils et provocation militaire ne fera qu’aggraver le clivage entre les parties et d’augmenter l’impact du conflit au-delà des frontières du pays. 

Au sujet de la situation à Aden et Abyan, il a indiqué que le 7 août dernier, des affrontements ont eu lieu entre les brigades de protection présidentielle et les forces du Conseil de transition du Sud.  Ces dernières ont pris le contrôle des camps militaires et des institutions d’Aden et la nuit dernière, elles ont pris des mesures provocatrices pour étendre leur contrôle militaire dans la province d’Abyan.  Il a condamné ces violences ayant fait de nombreuses victimes civiles, ainsi que les efforts déployés par le Conseil de transition du Sud pour prendre le contrôle des institutions de l’État par la force.  Il a aussi déploré le harcèlement dont sont victimes, à Aden, les Yéménites originaires du Nord.  Il a averti du risque d’endommager davantage le tissu social du Yémen et de voir la violence se propager à d’autres provinces du Sud.  À ce moment, a-t-il confessé, il est difficile de savoir où ces événements nous mèneront.  M. Griffith a salué les efforts de la coalition pour rétablir le calme, notamment les efforts déployés par l’Arabie saoudite pour organiser un dialogue à Djeddah pour discuter de la situation. 

L’Envoyé spécial a également mis en garde contre les dangers d’une résurgence des activités de groupes extrémistes comme Al-Qaida dans la péninsule arabique, avertissant qu’une nouvelle fragmentation du secteur de sécurité à Aden et ailleurs pourrait permettre l’expansion des activités de ces extrémistes, avec un impact potentiellement terrible pour les civils et pour les perspectives de paix.  La situation sur le terrain évolue rapidement et il faut saisir chaque opportunité pour progresser, a-t-il insisté. 

M. Griffiths a rappelé que des questions à long terme sur l’avenir du Yémen restent non résolues et a insisté sur la nécessité d’inclure toutes les parties prenantes, y compris celles des provinces du Sud, au processus de paix.  Il existe tout un éventail de points de vue qui doivent être pris en compte pour déterminer l’avenir du sud du pays ainsi que du Yémen dans son ensemble.  Il a espéré que l’ensemble des parties prenantes yéménites considéreront les événements à Aden comme le signal que le conflit doit cesser promptement et pacifiquement.  Même si la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm a eu un impact politique significatif et un bénéfice tangible sur le terrain, cela ne peut pas être considéré comme une condition préalable à la paix dans tout le Yémen, a-t-il estimé. 

Mme URSULA MUELLER, Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, a noté que les événements des dernières semaines ont montré, une nouvelle fois, la volatilité du conflit au Yémen.  Ses effets se font notamment sentir dans les souffrances et les injustices infligées à des millions de civils, a-t-elle déploré.  Depuis des mois, a-t-elle indiqué,  le Bureau de la coordination des affaires humanitaires préconise cinq priorités visant à réduire les souffrances au Yémen, lesquelles ont été entérinées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2451.  La première de ces priorités, a-t-elle rappelé, concerne le droit international humanitaire, alors que le conflit continue d’avoir des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles.  Ce mois-ci, des combats à Aden entre les forces du Gouvernement et celles affiliées au Conseil de transition du Sud ont fait quelque 300 tués et blessés, parmi lesquels des civils, a-t-elle noté.  Depuis lors, les violences ont diminué à Aden mais des combats font rage ailleurs, a poursuivi la Secrétaire générale adjointe, appelant à une désescalade urgente dans tout le pays, si possible par le biais d’un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  Dans tous les cas, a-t-elle martelé, toutes les parties doivent respecter le droit international humanitaire, et tout doit être fait pour épargner les civils et les infrastructures civiles.  Cela passe, a-t-elle dit par la vérification des cibles ou l’annulation d’une attaque si elle doit causer des dommages trop graves à la population civile. 

La deuxième priorité se rapporte à l’accès humanitaire, a-t-elle poursuivi, évoquant un point positif à ce sujet.  Après des mois de discussions, le Programme alimentaire mondial (PAM) et les autorités houthistes ont, en effet, signé un accord qui contient des dispositions techniques destinées à empêcher tout détournement de l’aide alimentaire.  Il renforce aussi les méthodes d’identification des personnes ayant besoin d’une assistance alimentaire, s’est-elle félicitée.  Cependant, en raison des retards pour la finalisation de cet accord, le PAM a dû suspendre son assistance à 850 000 personnes à Sanaa il y a deux mois, mais les distributions ont à présent pu reprendre, a ajouté Mme Mueller.  Elle a également indiqué que les autorités houthistes ont aussi accepté le principe d’une évaluation par les services de l’ONU du pétrolier SAFER, qui, faute de maintenance, présente des risques de rupture avec 1,1 million de barils dans ses soutes.  Une fuite créerait une catastrophe environnementale et humanitaire, a-t-elle averti.

Pour le reste, a enchaîné Mme Mueller les agences continuent d’être confrontées à des restrictions significatives.  Plus de 100 projets humanitaires sont ainsi dans l’attente d’autorisation des autorités Ansar Allah dans le nord, lesquelles ont imposé, ces derniers mois, plus de 50 directives officielles et des dizaines d’autres de nature informelle, lesquelles fond double emploi ou se contredisent.  Le Fonds humanitaire pour le Yémen attend le feu vert pour 39 projets, dont 32 sont bloqués par les autorités Ansar Allah au nord, les autres attendant l’autorisation du Gouvernement du Yémen.  En moyenne, les projets sont bloqués pendant plus de 90 jours.  Et on peine à comprendre pourquoi des délais aussi longs sont imposés dans un contexte d’urgence grave, a-t-elle dit.  De plus, au-delà des délais bureaucratiques, les agences doivent aussi faire face à des restrictions de mouvement, a-t-elle dénoncé.  Néanmoins, alors que la tension montait à Aden en août dernier, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’UNICEF ont pu vacciner plus de 400 000 personnes contre le choléra.  Le Yémen reste la plus grande opération humanitaire au monde, a résumé la Coordonnatrice, précisant que chaque mois, 12 millions de personnes, en moyenne, y reçoivent une aide. 

Mais, a-t-elle alerté, tout cela est sur le point de s’arrêter.  Mme Mueller a, en effet, indiqué que s’agissant du financement des opérations d’aide, seuls 34% des besoins ont été couverts, jusqu’à présent en 2019.  À la même période, l’an dernier, le plan était financé à hauteur de 45%, grâce notamment aux contributions de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, et ces financements ont permis de sauver des millions de vie.  Notant que les principaux donateurs, à savoir les voisins du Yémen au sein de la coalition, n’ont pour l’heure versé qu’une part inférieure à ce qu’ils avaient promis, elle a averti que des programmes essentiels cessent de fonctionner.  Certains sont déjà annulés, comme des campagnes de vaccination et des programmes de prévention du choléra, s’est-elle inquiétée.  Et au cours des prochains jours, les programmes d’assainissement vont aussi s’arrêter dans quatre gouvernorats, ce qui va exposer 300 000 personnes déplacées à des risques de choléra.  En septembre, a-t-elle poursuivi, nous serons forcés de fermer des programmes destinés à 2,5 millions d’enfants souffrant de malnutrition, et dans l’immédiat, plus de 23 000 bébés qui souffrent de malnutrition aiguë risquent de mourir. 

Cette situation est tragique car nous savons qu’avec des ressources adéquates, nous pouvons sauver des millions de vies et faire reculer le choléra car nous y sommes parvenus l’an dernier, a-t-elle affirmé.  Elle a rappelé qu’une réponse robuste avait permis de faire chuter le nombre de nouveau cas d’un million en 2017 à 380 000 en 2018, pour ensuite avertir que cette année, le nombre de nouveaux cas dépasse déjà les 500 000, avec plus de 800 décès, soit cinq fois plus qu’à la même période l’an dernier.  Par ailleurs, une nouvelle évaluation a également montré que le risque de famine perd du terrain.  C’est la conséquence du doublement de l’aide alimentaire dans certaines zones.  Mais sans financement, ce risque s’intensifiera à nouveau, a-t-elle mis en garde. 

Passant au quatrième point de son bilan, à savoir l’économie yéménite, Mme Mueller a brossé un tableau sombre, notant que la monnaie nationale, le rial, perd encore de sa valeur.  Un rapport récent du Fonds monétaire international (FMI) prévoit une dévaluation plus importante, avec une inflation atteignant jusqu’à 45%, ce qui signifie que les prix des produits de première nécessité vont encore augmenter.  Par le passé, a-t-elle rappelé, des injections de devises via la banque centrale avaient permis de stabiliser le taux de change.  Nous espérons que les partenaires du Yémen vont à nouveau fournir un soutien, a-t-elle déclaré.  À ses yeux, seule une solution politique permettra de résoudre de façon durable la situation humanitaire dramatique dans le pays.  Elle a, par conséquent, exhorté toutes les parties prenantes à appuyer les efforts de l’Envoyé spécial, M. Martin Griffiths, pour mettre fin au conflit le plus rapidement possible. 

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que cela fait huit mois que l’Accord de Stockholm est entré en vigueur, mais que celui-ci a été marqué par de nombreux blocages.  Il a noté que le blocus de Taëz se poursuit et les parties ont du mal à mettre en œuvre de l’Accord sur Hodeïda.  Le représentant a souligné qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise et a appelé à procéder à une désescalade de la situation en mettant en œuvre notamment les trois points de l’Accord de Stockholm.  Le représentant a aussi condamné les attaques contre les civils et a salué les mesures prises par l’Arabie saoudite pour protéger son territoire, estimant que les attaques des houthistes contre ce pays représentent une violation du droit international. 

Le délégué a en outre relevé que la crise humanitaire au Yémen demeure préoccupante, rappelant que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait dû suspendre ses opérations à Sanaa pendant deux mois, avant de les reprendre après avoir obtenu des garanties.  Il a invité toutes les parties à se garder d’entraver le travail des humanitaires et à assurer la sécurité de ces derniers.  Il a terminé en appelant les parties yéménites à mettre en œuvre l’Accord sur Hodeïda. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a exprimé sa préoccupation face à l’intensification des combats durant le mois de juillet au Yémen, d’abord à Aden, puis à Sanaa, au détriment de la population civile.  La détérioration des infrastructures civiles, telles que les hôpitaux, les écoles et les marchés, ne fait qu’empirer les conditions de vie des citoyens yéménites, a déploré le représentant, appelant toutes les parties à ne pas ouvrir de nouvelles lignes de front et à mettre un terme aux attaques, conformément à la résolution 2216 (2015) du Conseil de sécurité et aux dispositions de l’Accord sur Hodeïda. 

Le Gouvernement yéménite et les houthistes doivent en outre continuer à travailler de concert pour mettre en œuvre l’Accord de Stockholm, a déclaré le représentant, saluant la réunion qui a eu lieu le mois dernier sur cette question entre les parties, à bord d’un navire des Nations Unies sur la mer Rouge.  Par ailleurs, le représentant a exhorté les parties à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour faciliter la mise en œuvre du plan de réponse humanitaire de l’ONU au Yémen, dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  La seule issue possible au conflit est de nature politique, a-t-il souligné en conclusion.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a déclaré être préoccupé par le risque d’enlisement du conflit au Yémen.  Il a constaté que l’impasse du processus politique, de même que les violents combats de ces derniers jours à Aden, notamment à proximité de l’aéroport international et marqués, entre autres, par la prise du palais présidentiel par des séparatistes, font craindre une escalade de la situation.  Il a souligné que la fragmentation continue du conflit yéménite révèle sa complexité et met en relief l’impérieuse nécessité d’associer toutes les parties au processus de paix. 

Le représentant a salué les efforts déployés par les forces régionales qui ont permis d’obtenir un cessez-le-feu immédiat et le retrait du Conseil de transition du Sud des points clefs d’Aden.  M. Adom a appelé toutes les parties à s’inscrire dans la recherche d’une solution globale, à travers notamment la mise en œuvre intégrale des Accords de Stockholm et sur Hodeïda.  Enfin, la Côte d’Ivoire a exhorté les partenaires bilatéraux et multilatéraux à poursuivre leurs appuis en faveur du financement de l’aide humanitaire pour sauver des vies, alléger les souffrances du peuple yéménite et répondre aux besoins particuliers des femmes et des filles qui sont les plus vulnérables en période de conflit. 

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) s’est dit préoccupé par la flambée de violences et les affrontements à Aden.  Cette poursuite des combats ne fait qu’exacerber la situation humanitaire que l’ONU s’emploie à atténuer sur le terrain, a-t-il constaté.  Dans ce contexte, le représentant a appelé les parties au conflit à se conformer à l’accord de cessez-le-feu et à participer de bonne foi aux pourparlers de « réconciliation » proposés par l’Arabie saoudite.  Achever le travail initié par la conférence du dialogue national est la meilleure façon, pour les Yéménites, de forger leur avenir politique.  Il est également essentiel que les parties respectent les institutions, notamment la branche de la banque centrale située à Aden, et permettent un accès humanitaire sans entrave aux personnes touchées par ce conflit, a-t-il dit.

Le délégué s’est ensuite félicité de l’accord passé entre le Gouvernement et les houthistes pour que l’aide humanitaire accède à Sanaa.  Le PAM et l’ensemble des organisations humanitaires doivent pouvoir opérer sans menace de diversion ou de corruption, a-t-il souligné.  Il a espéré que la signature de cet accord par les houthistes permettra la poursuite de l’assistance humanitaire dans le pays, laquelle est essentielle pour les millions de Yéménites qui en dépendent.  M. Cohen a, par ailleurs, relevé que l’arrêt et la réduction des programmes humanitaires de l’an dernier démontre l’importance du financement de cette assistance.  À cette aune, il a appelé les donateurs à redoubler d’efforts et à tenir les promesses faites en février dernier, à Genève. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a exhorté toutes les parties impliquées dans les combats au Yémen à cesser les hostilités et à mettre en œuvre les accords de Stockholm.  « Mettre en œuvre ces Accords est d’une importance critique pour renforcer la confiance et parvenir à un accord politique plus large », a insisté le représentant.  Il s’est dit particulièrement inquiet des récents développements dans le sud du Yémen et a encouragé les acteurs régionaux de continuer à trouver une solution en phase avec le processus de médiation de l’ONU et les Accords de Stockholm.  Il s’est félicité des développements positifs dans la région, destinés à promouvoir la coopération, avant d’exhorter les pays de la région à donner la priorité au dialogue afin de régler les différends politiques qui persisteraient.

Par ailleurs, le représentant de l’Afrique du Sud s’est dit extrêmement inquiet en raison de la crise humanitaire au Yémen en notant que 15 millions de personnes, soit la moitié de la population du pays, est victime de privation.  De plus, 1,1 million de personnes sont touchées par le choléra et 3,3 millions ont dû fuir selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.  Cette crise humanitaire sans précédent dans cette région rend urgent la cessation des hostilités pour laisser place à une solution pacifique et inclusive, a-t-il souligné.  Dans ce contexte, le représentant de l’Afrique du Sud a exhorté toutes les parties à respecter leurs obligations au regard du droit international, pour ensuite saluer la réouverture de la distribution de nourriture par le Programme alimentaire mondial (PAM) après une fermeture partielle en juin 2019. 

M. HAITAO WU (Chine) a déploré les récents affrontements qui ont eu lieu à Aden.  Il a dit espérer que toutes les parties prenantes agiront en tenant compte de l’intérêt suprême du peuple yéménite.  Il a invité les parties à régler leurs différends par la voie du dialogue et en accord avec les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a aussi appelé les pays de la région à s’investir en faveur de la paix au Yémen.  M. Wu a demandé que l’Accord de Stockholm soit pleinement mis en œuvre, avant de souligner que la Chine est en faveur de la protection de la souveraineté du Yémen.  Pour le représentant, c’est le peuple yéménite qui souffre le plus, et il a donc invité les bailleurs de fonds à tenir leur promesse afin que l’aide soit fournie à tous ceux dans le besoin.  Pour sa part, la Chine s’engage à poursuivre son appui humanitaire au Yémen. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déploré la persistance des violences sur le territoire yéménite ces dernières semaines, « entre les forces séparatistes et le Gouvernement légitime du Yémen », notamment à Aden.  Saluant les derniers rapports faisant état du retrait des forces séparatistes de certaines positions à Aden, le représentant a espéré que cette évolution laisse présager d’un retour au dialogue et de mesures de compromis et de réconciliation. 

Le représentant a, par ailleurs, déploré l’absence de progrès tangibles dans la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, en raison, selon lui, de la « rigidité » des parties.  Il a appelé le Conseil de sécurité et les pays bénéficiant d’une influence sur ces dernières à exercer « la pression politique nécessaire » pour relancer leur engagement en faveur de l’Accord de Stockholm.  Cela suppose, a-t-il ajouté, que les parties fassent preuve de davantage de souplesse sur certaines questions, comme la composition des forces locales et la distribution des revenus des ports à travers la banque centrale yéménite.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a estimé que les derniers développements au Yémen compliquent les efforts du Conseil de sécurité pour parvenir à une solution politique.  Selon le représentant, les violations du dialogue et des résolutions pertinentes du Conseil, notamment la résolution 2216, entravent ces efforts visant à construire un Yémen pacifié.  Il y a quelques jours, a-t-il dénoncé, l’autorité de l’État a été usurpée par une intervention illégitime du Conseil de transition du Sud, appuyé par les Émirats arabes unis.  Dans ces conditions, le Gouvernement yéménite réitère sa position condamnant la rébellion armée qui mine la stabilité et l’unité du Yémen et va à l’encontre de l’objectif de l’Alliance arabe, à savoir mettre un terme à ce « putsch » et au projet de l’Iran dans la région.  Or, a déploré le délégué, ce « plan de désintégration » se poursuit et s’aggrave malgré les appels lancés par le Gouvernement de l’Arabie saoudite.  Il a imputé la responsabilité de cette rébellion au Conseil de transition du Sud et a appelé les Émirats arabes unis à cesser leur soutien à ces milices. 

Le représentant s’est félicité de la « position sincère » de l’Arabie saoudite exprimée dans les communiqués de l’Alliance arabe, lesquels appellent les milices rebelles à se retirer de l’ensemble des institutions civiles et militaires et de permettre le retour des forces légitimes et à épargner la ville d’Aden et ses habitants.  Le Gouvernement s’est félicité aussi de l’appel lancé par l’Arabie saoudite à toutes les parties en vue d’une réunion à Djeddah pour préserver les acquis nationaux.  Les forces du Conseil de transition du Sud ont néanmoins poursuivi leur escalade militaire sur le terrain, a-t-il regretté, condamnant à nouveau l’appui des Émirats à ces milices. 

Le Gouvernement yéménite souligne, par ailleurs, la nécessité de mettre en œuvre l’Accord de Stockholm, notamment son volet relatif à Hodeïda, a poursuivi le délégué.  Il a aussi appelé à mettre en œuvre les opérations de redéploiement et à revitaliser le mécanisme de surveillance tripartite.  S’agissant de la situation alarmante du pétrolier Safer, dont la cargaison de brut menace de se déverser dans la mer, le représentant a demandé une intervention de toute urgence pour contraindre les milices houthistes à permettre à des équipes techniques de l’ONU d’accéder à ce navire et à le décharger, « ce qui est encore loin d’être le cas ».  En effet, a-t-il dit, les houthistes semblent ignorer la catastrophe que pourrait causer cette situation, sans oublier les conséquences sur les moyens de subsistance des habitants de cette zone côtière. 

Accusant ensuite les houthistes de se livrer à des enlèvements et autres exactions, de mener des activités de piraterie, de se servir de mines terrestres et de placer des engins explosifs improvisés en mer, ce qui menace les couloirs de circulation internationaux, le représentant a également affirmé que ces milices entravent l’acheminement de l’aide humanitaire et s’emparent des biens des organisations qui s’en chargent.  Il a, d’autre part, condamné de façon catégorique les attaques menées contre l’Arabie saoudite, la dernière ayant visé le champ pétrolifère de Cheïba.  Pour le représentant, les milices houthistes ont « normalisé » leurs relations avec le régime iranien « au vu et au su de tous ».  « Nous rejetons cela et appelons le Conseil de sécurité à faire de même », a-t-il dit, estimant que ces faits sont en contravention avec la Charte de l’ONU et les résolutions du Conseil.  Selon lui, il est temps que ce Conseil assume ses responsabilités et mette en œuvre ses propres résolutions sur le Yémen. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité adopte son projet de rapport annuel (2018) qui sera soumis à l’Assemblée générale

8597e séance – matin
CS/13919

Le Conseil de sécurité adopte son projet de rapport annuel (2018) qui sera soumis à l’Assemblée générale

Le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, son projet de rapport annuel destiné à l’Assemblée générale, qui couvre la période du 1er janvier au 31 décembre 2018.  Cette décision sera reflétée dans une note du Président du Conseil de sécurité portant la côte S/2019/666. 

En soumettant aux membres du Conseil le rapport 2018 des activités de cet organe, le représentant du Royaume-Uni a souligné l’importance de cette présentation.  C’est un mécanisme, a-t-il relevé, qui permet à tous les États Membres de l’ONU d’être informés des activités du Conseil de sécurité. 

Le représentant du Royaume-Uni a rappelé que, en vertu de l’Article 24 de la Charte des Nations Unies, ce sont les membres de l’Organisation qui confèrent au Conseil de sécurité la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Ce même Article invite donc le Conseil à soumettre des rapports annuels à l’Assemblée générale pour examen. 

Conformément à la note S/2015/944 du 10 décembre 2015, le rapport comporte une introduction sous forme de synthèse approuvée par tous les membres qui auront siégé durant la période considérée.  L’introduction peut notamment renseigner brièvement sur les principales activités du Conseil, la tendance de ses travaux et la nature des décisions qu’il a prises, durant la période considérée.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.