En cours au Siège de l'ONU

La Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones hors de la juridiction nationale lance sa troisième session des négociations

Troisième session,
38e & 39e séances – matin & après-midi
MER/2108

La Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones hors de la juridiction nationale lance sa troisième session des négociations

« Il est temps d’identifier notre destination et de mener les travaux à bon port », a déclaré, ce matin, la Présidente de la Conférence intergouvernementale censée aboutir à un instrument international juridiquement contraignant « se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».

Mme Rena Lee, qui a préparé, avec la Division des affaires maritimes et du droit de la mer, un avant-projet d’accord pour cette troisième session de négociations, a précisé qu’il y avait encore « des structures à adapter et des formules à trouver ».  « Rien n’est convenu tant que tout n’est pas convenu », a-t-elle rappelé, tandis que de nombreuses délégations ont exprimé le souhait de voir naître un traité ambitieux, c’est-à-dire universel ou quasi universel.

Cet « avant-projet d’accord », a-t-elle précisé, est le fruit des discussions et propositions émises lors des deux précédentes sessions, celle de septembre 2018 et la dernière qui a eu lieu en mars et avril derniers.  Ce cycle de négociations se terminera par une quatrième et dernière session, au premier semestre de l’année 2020, dans l’objectif de présenter le texte à l’Assemblée générale au cours de la même année, comme prévu par la résolution 72/249.

Entre temps, le rapport d’évaluation mondial de 2019 sur la biodiversité et les services écosystémiques de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a été approuvé par l’Assemblée plénière de l’IPBES en mai 2019, a souligné le Secrétaire général de la Conférence ouverte aujourd’hui, qui est le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU.  M. João Miguel Ferreira de Serpa Soares a ainsi indiqué que 66% des océans enregistrent de façon croissante des impacts humains cumulatifs qui portent atteinte à la biodiversité.  Néanmoins, le rapport précise qu’il est possible de sauvegarder les espèces et les écosystèmes marins grâce à un ensemble coordonné d’interventions.  Le Conseiller juridique a vu là l’occasion pour la Conférence de jouer un rôle dans l’inversion de la tendance actuelle.

« Nous pouvons maintenant retrousser nos manches et aller au-delà des simples déclarations de principe », a, de ce fait, proposé le Canada en félicitant, comme la majorité des orateurs, la Présidente qui « s’est acquittée de sa tâche avec brio » en élaborant le nouveau document de travail.  À ce stade, même s’il n’y a pas encore de compromis, il demeure important d’avoir une vision commune afin de « ne pas tourner en rond », a remarqué le Japon.

La Chine a toutefois mis en garde sur le fait qu’un accord hâtif risquerait de mettre à mal son acceptation universelle, de même que la Fédération de Russie a recommandé de privilégier un bon texte et d’éviter de bâcler le travail en voulant respecter le calendrier préétabli pour les travaux.  Concernant le programme de travail de la session, le Groupe des États d’Afrique a salué le fait que les consultations parallèles aient été limitées à deux heures par jour.  Si l’Union européenne s’est dite ouverte à des consultations informelles en parallèle, elle a jugé surtout important de permettre à tous les États Membres de l’ONU de participer aux discussions en toute transparence, quel que soit leur format.

Le Core Latin American Group (CLAM) a lui aussi invité tous les pays à participer aux travaux de la présente session, qu’ils soient parties ou non à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il a également estimé que le futur instrument devrait prendre en compte la situation spécifique des pays sans littoral et des pays à revenu intermédiaire.  Même attente de la part des petits États insulaires en développement (PEID), comme l’a exprimé notamment l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) en soutenant que le document aurait pu faire mieux pour y répondre. 

Plusieurs délégations, telles que le Nigéria, Singapour et l’Égypte, ont également insisté sur l’importance du renforcement des capacités en faveur des pays en développement et sur la nécessité de faciliter les transferts de techniques marines à leur égard. 

Maintes fois citée lors du débat général, la question du « patrimoine commun de l’humanité » a été perçue comme cruciale par certains, dont le Groupe des 77 et de la Chine, désolés que l’avant-projet ne la mentionne même pas.   Pour le Groupe des États d’Afrique, adopter un traité sur la biodiversité marine sans faire référence à ce principe reviendrait à « lancer un navire en mer sans instrument de navigation à bord ».  Le groupe des pays les moins avancés (PMA) a été très clair à ce sujet: « les parties de l’océan ne relevant pas de juridictions nationales devraient être reconnues comme patrimoine commun de l’humanité ». 

À propos de la couverture géographique de l’instrument, la Turquie a appelé à un libellé plus clair et plus précis, s’agissant notamment des « zones au-delà de la juridiction nationale ». 

Dans l’ordre juridique international existant, le futur instrument doit éviter de compromettre ou dupliquer les instruments juridiques en vigueur, ont plaidé les États-Unis.  Il doit en outre être fondé sur des données scientifiques, a ajouté la délégation américaine.  Mais les Fidji, qui parlaient au nom des 12 petits États insulaires en développement du Pacifique, ont fait remarquer que les données scientifiques sont complétées par des connaissance traditionnelles qui méritent donc de figurer dans le futur instrument. 

La Conférence intergouvernementale a également entamé, dans l’après-midi, les discussions au sein du Groupe de travail officieux sur les questions interdisciplinaires, notamment l’examen des articles 2 à 4 de l’avant-projet.

Les travaux se poursuivront demain, mardi 20 août, d’abord par des consultations informelles en matinée, puis par des négociations en plénière dans l’après-midi dans le cadre du Groupe de travail officieux sur le renforcement des capacités et le transfert des techniques marines.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE (A/CONF.232/2019/L.3, A/CONF.232/2019/L.4, A/CONF.232/2019/6, A/RES/72/249, A/CONF.232/2019/1 ET A/AC.287/2017/PC.4/2)

Débat général

« Je déclare ouverte cette troisième session intergouvernementale », a décrété, à l’entame de la réunion d’aujourd’hui, Mme RENA LEE, Présidente de la Conférence intergouvernementale censée aboutir à un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

Mme Lee a rappelé que cette troisième et avant-dernière session faisait suite à l’adoption de la résolution 72/249, le 24 décembre 2017, dans laquelle l’Assemblée générale a décidé de convoquer, sous les auspices des Nations Unies, une conférence intergouvernementale chargée d’examiner les recommandations du Comité préparatoire créé par la résolution 69/292, du 19 juin 2015, afin d’élaborer le texte d’un futur instrument international juridiquement contraignant « dans les plus brefs délais ».

Conformément à la résolution 72/249, a poursuivi la Présidente, les négociations des deux prochaines semaines porteront sur l’ensemble des questions retenues en 2011 se rapportant à la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Plus précisément, a-t-elle ajouté, les discussions seront axées autour de quatre grands thèmes, à savoir: les questions concernant les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages; les mesures telles que les outils de gestion par zone, dont les aires marines protégées; les études d’impact sur l’environnement; et le renforcement des capacités ainsi que le transfert de techniques marines.

Mme Lee a en outre rappelé que durant la précédente session, qui a eu lieu du 25 mars au 5 avril 2019, les délégations avaient formé cinq groupes de travail officieux, lesquels avaient travaillé à l’aide d’un document préparé par ses soins.  « Les rapports oraux des facilitateurs de ces groupes de travail, présentés le 5 avril dernier, ont été mis en annexe de mes remarques de clôture », a ajouté Mme Lee, précisant que celles-ci avaient été publiées dans les six langues officielles de l’Organisation.  La Présidente a ajouté que cette deuxième session avait permis d’identifier non seulement des éléments de convergence entre États, mais également des questions nécessitant davantage de travaux, afin de parvenir à un résultat « juste, équilibré et tangible ».

À cette fin, Mme Lee a indiqué qu’elle avait préparé un nouveau document, un « avant-projet d’accord », pour faciliter les négociations des deux prochaines semaines, sur la base des discussions et propositions issues de la dernière session.  La Présidente a précisé que ce texte, élaboré avec l’aide de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer du Bureau des affaires juridiques du Secrétariat, avait été publié le 3 juillet dernier dans toutes les langues officielles des Nations Unies.  « Je pense que la Conférence est sur la bonne voie », a déclaré, en conclusion, Mme Lee, appelant les délégations à redoubler d’efforts pour faire avancer la protection de la biodiversité marine. 

M. JOÃO MIGUEL FERREIRA DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Conseiller juridique de l’ONU et Secrétaire général de la Conférence, a estimé que les deux premières sessions avaient contribué à jeter des bases solides pour cette nouvelle phase du processus.  Elles ont permis d’avancer sur les différentes questions posées en 2011, conduisant à l’identification d’options concrètes et au projet de traité à présent sur la table, a-t-il précisé.  J’ai l’espoir que ce document constituera une base solide pour les négociations à venir, a confié le Secrétaire général adjoint, qui a formé le vœu que les délégations s’y engagent avec le même esprit de collégialité et de manière aussi constructive que lors des précédentes sessions, avec l’intention de réduire les fossés existants. 

Depuis la dernière session, a-t-il poursuivi, le rapport d’évaluation mondial de 2019 sur la biodiversité et les services écosystémiques de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a été approuvé par l’Assemblée plénière de l’IPBES, lors de sa septième session, en mai 2019 à Paris.  Le rapport, préparé par 150 experts venant de 50 pays, avec le concours de 250 autres spécialistes, a fait apparaître que sur presque tout le globe, la nature a été altérée de manière significative par de multiples facteurs humains, la grande majorité des indicateurs d’écosystèmes et de biodiversité signalant un déclin rapide, selon M. Ferreira de Serpa Soares. 

Le rapport relève par ailleurs que 66% des océans enregistrent de façon croissante des impacts humains cumulatifs, qui découlent en premier lieu de facteurs de stress liés aux changements climatiques, notamment des anomalies de température à la surface des mers, une acidification des océans et des rayonnements ultraviolets.  De nombreux éléments prouvent que ces effets anthropogéniques ont un impact majeur sur la santé des écosystèmes marins, a souligné le Secrétaire général de la Conférence.  Toutefois, a-t-il dit, le rapport établit également qu’il est possible de sauvegarder les espèces et les écosystèmes marins grâce à un ensemble coordonné d’interventions.  Ainsi, a-t-il espéré, la Conférence peut jouer un rôle important dans l’inversion du déclin rapide que l’on constate actuellement. 

C’est d’autant plus important, a fait valoir M. Ferreira de Serpa Soares, qu’il est désormais clair que les processus océaniques et les changements climatiques sont inexorablement liés.  Un océan sain et résilient a un rôle crucial à jouer dans nos efforts d’adaptation et de mitigation.  Cette interrelation, a-t-il rappelé, a été reconnue ces dernières années, notamment dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et l’Accord de Paris.  Au seuil de cette troisième session, il s’est dit certain que les délégations ressentent l’urgence de leur travail, particulièrement à la lumière des changements transformatifs nécessaires pour stopper les tendances négatives qui menacent la nature et la biodiversité. 

Mme FEDA ABDELHADY-NASSER, de l’État de Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a promis que le Groupe resterait engagé à faire avancer ces négociations afin de parvenir à un traité qui soit « le résumé de nos ambitions communes ».  Elle a dit que le G77 avait examiné le projet de texte et entendait insister sur le principe de « patrimoine commun de l’humanité » qui doit être reflété dans les différentes parties du traité.  La représentante a souhaité des progrès « équilibrés » sur les quatre thématiques majeures des négociations, précisant quand même que la question du renforcement des capacités et du transfert des techniques marines est celle à laquelle le Groupe est le plus attaché.  La présidence du G77 organise d’ailleurs un évènement parallèle sur cette question au cours de la pause déjeuner de ce jour, a annoncé la déléguée.  Enfin, elle a dit souhaiter que le nouvel instrument permette de bien comprendre les besoins des pays en développement en matière de renforcement des capacités et de transfert des techniques marines. 

M. MOHAMMED BESSEDIK (Algérie), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a salué le fait que les consultations parallèles aient été limitées à deux heures par jour dans le programme de travail.  Il s’est toutefois plaint du manque de temps au cours de la pause déjeuner pour prendre part aux évènements parallèles qui sont souvent importants pour les délégations.  Mais face au choix qui doit être fait, il a donné la priorité à l’avancement des négociations pour parvenir à un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. 

Le délégué a estimé que les deux prochaines semaines seront les plus intenses depuis qu’a été lancée l’idée de cet instrument, il y a 15 ans.  Le Groupe des États d’Afrique a également estimé que la proposition de traité est une bonne base pour poursuivre les progrès, même si le Groupe n’est pas d’accord avec tout ce qui est inscrit dans le texte proposé, ou ce qui n’y est pas.  Mais, a relevé le représentant, « c’est aussi cela le multilatéralisme ».  Par exemple, le « patrimoine commun de l’humanité » est absent du texte proposé, même si on retrouve de temps en temps cette idée dans le libellé, a déploré le représentant.  Il a insisté sur l’importance de ce concept en en rappelant certains principes qui en découlent mais qui ne figurent pas dans le texte, comme l’équité inter et intragénérationnelle, l’usage pacifique et le partage des bénéfices.  De ce fait, adopter un traité sans faire référence à ce principe reviendrait à « donner vie à un traité de cette importance sans une âme », ou encore à « lancer un navire en mer sans instrument de navigation à bord ».  Le représentant a rappelé que ce principe est du reste pris en compte par l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM).  On ne peut imaginer ce qu’il serait advenu des fonds marins sans ce principe, a-t-il commenté.

Le Groupe a enfin déploré l’insuffisance de fonds qui ne permettent pas de soutenir la participation d’un plus grand nombre de délégués d’Afrique pour prendre part à ces négociations sur un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

M. PERKS MASTER CLEMENCY LIGOYA (Malawi) a indiqué qu’en tant que Président du Groupe des pays les moins avancés (PMA), son pays considère la conservation et la gestion durable des océans comme des questions cruciales non seulement pour l’économie et l’existence même de ces pays mais, aussi pour la survie de l’humanité.  Le Malawi, a-t-il fait observer, est à la fois un PMA et un pays enclavé, ce qui ne l’empêche pas de dépendre de l’océan.  En effet, a expliqué le représentant, plus de 80% des biens importés dans les pays en développement sans littoral sont transportés par mer.  En outre, nous devons tout l’oxygène que nous inhalons à l’océan, a-t-il ajouté, rappelant par ailleurs que son pays avait été frappé par le cyclone Idai, tout comme le Zimbabwe et le Mozambique. 

Pour le délégué, la nature interconnectée de l’océan signifie que tous les pays seront confrontés à la destruction des habitats, à l’acidification et au réchauffement des eaux, ainsi qu’à la surexploitation des ressources.  C’est pour ces raisons, a-t-il dit, que les PMA considèrent que les parties de l’océan ne relevant pas de juridictions nationales devraient être reconnues comme patrimoine commun de l’humanité.  De surcroît, le nouvel instrument doit, selon lui, prévoir des changements dans la façon dont la haute mer est utilisée, en termes de gouvernance, de protection des écosystèmes et de sauvegarde des moyens de subsistance de millions de communautés sur les côtes et à l’intérieur des terres. 

Intervenant au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), Mme JANINE ELIZABETH COYE-FELSON (Belize) a plaidé pour un engagement et un accord au niveau international pour faire face à la vulnérabilité particulière des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a appelé à prendre conscience que l’aggravation de phénomènes comme les changements climatiques, l’acidification des océans ou encore l’appauvrissement des ressources halieutiques et biologiques menace l’existence même de nombreuses petites îles.  Elle a espéré que la situation des PEID serait considérée comme une priorité et un cas particulier dans les réflexions du Comité préparatoire chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Commentant le projet de texte, elle a estimé qu’il pouvait faire mieux pour répondre aux attentes particulières des PEID.  L’AOSIS, a-t-elle annoncé, fera tout son possible pour que le futur instrument permette d’améliorer des pratiques et normes internationales pertinentes pour les PEID. 

M. ANDREAS PAPACOSTANTINOU, de l’Union européenne, a salué le fait que la Présidente ait mis l’accent, au cours des négociations précédentes, sur les acteurs, les processus et les mécanismes qui peuvent permettre d’arriver aux objectifs et fonctions escomptés du nouveau traité.  Pour l’Union européenne, il est important de trouver des accords sur ces fonctions clefs avant de discuter des définitions, des principes, du cadre institutionnel et de la question du financement.  Le représentant a salué le fait que le programme de travail prévoie des consultations informelles, souhaitant en outre que les négociations impliquant délégations et observateurs soient empreintes de transparence et d’inclusion, permettent une bonne gestion du temps ainsi que le renforcement de la confiance et la convergence entre les délégations. 

En matière de gestion du temps, le représentant s’est dit ouvert à des consultations informelles en parallèle, mais le plus important, a précisé l’observateur, est que tous les États Membres de l’ONU aient accès à toutes les discussions en toute transparence, quel que soit leur format.  Quant aux groupes de travail officieux, il a dit espérer qu’ils pourraient continuer de jouer un rôle majeur pour parvenir à la convergence sur le texte du futur traité.  Enfin, il a émis le vœu que le futur instrument permette de renforcer la coordination intersectorielle et la coopération entre les organisations régionales compétentes et les instruments pertinents.

Au nom du Forum des îles du Pacifique, M. SAMUELU LALONIU (Tuvalu) a appelé à ce que le futur instrument, issu de ces divers cycles de négociation, soit « à la hauteur des menaces qui pèsent sur la biodiversité marine ».  Dans ce cadre, le représentant a salué la mention faite, dans l’avant-projet d’accord, des connaissances traditionnelles.  Il a toutefois appelé à remplacer l’expression « en utilisant les meilleures informations scientifiques disponibles et les connaissances traditionnelles », par l’expression suivante: « en utilisant les meilleures informations scientifiques disponibles et les connaissances traditionnelles des populations locales ».  Cela permettrait de mieux souligner la complémentarité de ces deux groupes de connaissance dans le document, a-t-il estimé.

Le représentant a en outre appelé à renforcer l’inclusion des petits États insulaires en développement (PEID) au processus de négociation, et ce, afin que ces derniers puissent bénéficier au mieux du texte final.  Le représentant a enfin appelé tous les États à participer activement aux négociations pour « parvenir à bon port ».  Il les a invités à « pagayer dans le même sens et de façon coordonnée », avant de conclure, à l’attention de la Présidente de la Conférence: « Avec vous au gouvernail, nous sommes sur la bonne voie. »

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme JULIETTE BABB-RILEY (Barbade) a indiqué que les ministres des affaires étrangères de la CARICOM avaient souhaité, lors de leur réunion annuelle en mai dernier, que le projet de traité contienne des dispositions sur les circonstances particulières des PEID, ainsi que les modalités et mécanismes de renforcement efficace des capacités et du transfert des techniques marines.  De plus, le futur instrument doit trouver un équilibre entre la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité, a-t-elle souhaité.  La représentante a exprimé la volonté de la CARICOM de conclure ces négociations en 2020.  Elle a remercié la Division des affaires maritimes et du droit de la mer pour tout le soutien apporté aux délégations afin que les réunions intersessions soient aussi productives que possible.  Enfin, elle a appelé les États qui ne l’auraient pas encore fait à contribuer au fonds de contributions volontaires afin de permettre aux petites délégations de participer aux travaux de la Conférence.   

Au nom du Core Latin American Group (CLAM) (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa-Rica, Équateur, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine et Uruguay), M. MATA (Uruguay) a salué la Présidente de la Conférence et la Division des affaires maritimes et du droit de la mer pour avoir élaboré un document de travail sous la forme d’un avant-projet de traité, comme l’avait notamment proposé son groupe à l’issue de la deuxième session.  « Le nouveau format est particulièrement important et permettra de faire avancer nos négociations en se focalisant sur les questions clefs », s’est-il félicité, estimant que ce document, combiné à « un changement de dynamique », permettrait également de respecter les délais fixés par l’Assemblée générale dans sa résolution 72/249.

Le représentant a en outre remercié la présidence pour avoir pris en considération la demande de son groupe d’inclure les groupes de travail officieux au sein du programme de travail de la session.  Dans cette perspective, il a jugé bon de disposer de « versions mises à jour et révisées » du document de travail, à mesure des avancées des négociations de cette troisième session.

Le représentant a réaffirmé l’appui de son groupe à un « instrument universel », fruit de négociations « transparentes et ouvertes » auxquelles tous les États doivent pouvoir participer, « qu’ils soient parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ou non ».  Il a également estimé que le nouvel instrument devrait prendre en compte la situation spécifique des pays sans littoral et des pays à revenu intermédiaire.  Le représentant a enfin précisé que ni les négociations en cours, ni le futur instrument ne sauraient préjuger des différends entre États en suspens ou avoir un quelconque effet sur ces différends.

M. SATYENDRA PRASAD (Fidji), qui s’exprimait au nom des 12 petits États insulaires en développement du Pacifique, a salué l’approche inclusive de la Présidente de la Conférence intergouvernementale et son souci d’informer en amont les différents groupes de l’ONU, constatant que cela permet un échange d’informations fluide en vue de la troisième phase des négociations.  Il a plaidé pour que le futur instrument international juridiquement contraignant soit « juste, équitable et efficace » et pour qu’il prenne en compte les besoins spécifiques des petits États insulaires en développement du Pacifique afin de les soutenir dans la mise en œuvre de leurs obligations et de leurs droits conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Compte tenu de nos vulnérabilités, il convient de reconnaître la spécificité des petits États insulaires en développement (PEID) vis-à-vis des océans afin d’assurer une égalité de traitement, a souligné le représentant. 

En tant que PEID du Pacifique, a poursuivi le représentant, nous avons toujours cru que les connaissances accumulées par nos ancêtres au long des générations constituent un ensemble de données qui doivent influencer notre gestion et nos décisions de conservation dans le cadre du Programme concernant les zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Les systèmes de connaissance traditionnels constituent un complément à la science et devraient apparaître en tant que tels dans le futur instrument, a-t-il recommandé.  Il a par ailleurs souhaité que soient pris en considération les effets de l’océan sur la santé et la productivité au cours des négociations qu’il espère voir aboutir comme prévu en 2020. 

M. JUAN CUELLAR TORRES (Colombie), intervenant au nom d’El Salvador, de l’Érythrée, de la République islamique d’Iran, de la Turquie et de la Colombie, a précisé que la participation de ces pays aux négociations en cours ne devait avoir aucune incidence sur leur statut d’États non parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982.  Il a rappelé que, selon la résolution A/72/249 de l’Assemblée générale, « ni la participation aux négociations ni l’issue de celles-ci n’auront d’incidences sur le statut juridique des non-parties à la Convention ou à d’autres accords connexes au regard de ces instruments, pas plus que sur le statut juridique des parties à la Convention ou à d’autres accords connexes au regard de ces instruments ».  Tout en se félicitant que cela soit mentionné dans le projet de traité, il a regretté que la formule utilisée ne soit pas aussi claire que celle retenue lors de la deuxième conférence. 

Mme RODRIGUEZ ROMERO (Costa-Rica) a réaffirmé l’intention de son pays de participer de manière constructive aux négociations.  « Alors que nous faisons face à une crise climatique qui exige notre attention immédiate, nous en sommes à un moment crucial de la protection des aires marines internationales », a poursuivi la représentante. 

Parallèlement à ce troisième cycle de discussions, a-t-elle poursuivi, des négociations sont actuellement en cours, sous l’égide de l’Autorité internationale des fonds marins, en vue de l’élaboration d’un code minier pour les fonds marins.  Ces négociations ont trait à des zones qui correspondent à 90% des océans et « dans lesquelles nous n’avons investi que 0,0001% », a précisé la représentante.  Dans ce cadre, a-t-elle estimé, « le cadre réglementaire que nous nous apprêtons à négocier ici, à New York, ne saurait perdre de vue la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine inexplorée dans les fonds de la zone, à la lumière de l’éventuel commencement de l’exploitation minière ». 

La représentante a par ailleurs appelé, durant ce cycle de négociations de l’instrument international juridiquement contraignant, à mettre en œuvre un cadre normatif « solide », capable de garantir le « bien-être intégral des espaces marins mondiaux ».  Elle a espéré que les travaux de cette troisième session fassent avancer le processus devant aboutir à l’adoption, en 2020, d’un instrument susceptible de combler les « lacunes normatives » actuelles.  À cette fin, la représentante a appelé à ce que les négociations des deux prochaines semaines se déroulent « de bonne foi et de manière transparente », et à ce qu’elles soient guidées par la « foi absolue en notre capacité d’assurer notre survie et celle de la planète ». 

M. SUPARK PRONGTHURA (Thaïlande) a réaffirmé que le principe de patrimoine commun de l’humanité devrait présider à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Ce principe devrait contribuer à réaliser l’objectif de l’instrument et bénéficier aux États sur le terrain du renforcement des capacités et du transfert des techniques marines, a-t-il plaidé.  Le représentant a également souhaité qu’il soit accordé une grande importance à l’établissement de zones marine protégées et d’un réseau effectif d’outils de gestion par zones, également alignés sur les objectifs de développement durable.  Il a par ailleurs estimé que les évaluations d’impact environnemental sont des processus importants au regard de la protection environnementale marine et devraient prévoir la participation inclusive des États et des parties prenantes.  Enfin, s’agissant des questions de renforcement des capacités, il a appelé à ce qu’elles bénéficient aux États en développement, en fonction de leurs besoins et de leurs priorités. 

M. OMER MOHAMED AHMED SIDDIG (Soudan) a dit souhaiter que cette troisième conférence intergouvernementale soit couronnée de succès.  La délégation a aussi déploré l’absence de mention du « patrimoine commun de l’humanité » comme l’a fait auparavant le Groupe des États d’Afrique.  Il a rappelé que la plupart des pays du monde avaient toujours demandé que la Zone soit considérée comme faisant partie du patrimoine commun de l’humanité.  Il a dit espérer que le futur traité serait conforme aux principes de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a rappelé les enjeux spécifiques que revêt le futur instrument pour son pays, en tant qu’archipel.  Les questions liées à la pollution, par exemple, sont une source de préoccupation importante pour l’Indonésie, a-t-il précisé, appelant à ce que le nouvel instrument respecte les droits souverains des États côtiers et prenne en compte la spécificité des archipels.  Cette tâche est difficile mais pas impossible, a-t-il dit, appelant à conclure l’instrument le plus rapidement possible.  « Il faut un régime équitable et juste pour le partage des avantages », a-t-il notamment estimé, avant de renouveler l’intention de son pays de participer de manière constructive aux discussions. 

Mme JANE J. CHIGIYAL (Micronésie) a déclaré que son pays, en tant que « grand pays de l’océan », était impatient de voir l’aboutissement d’un nouvel instrument capable d’amener plus d’équité et de transparence pour atteindre les ambitions collectives.  Elle a mis l’accent sur l’importance des connaissances traditionnelles des populations autochtones et des communautés locales avant d’appeler les délégations à faire preuve d’ouverture et adopter une démarche inclusive.  La représentante s’est dite heureuse de constater la reconnaissance des circonstances spéciales des PEID.  Elle a exhorté les délégations à faire preuve d’innovation pour aborder la question des outils de gestion par zone, celle de l’évaluation de l’impact sur l’environnement, ainsi que celle du renforcement des capacités et transfert des techniques marines.  Elle a espéré l’aboutissement d’un instrument international juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale qui tienne compte des perspectives des petits États insulaires dont la dépendance à la mer ne fait aucun doute.  Il ne faut pas, a-t-elle aussi insisté, que la mise en œuvre de cet instrument puisse être un prétexte pour porter atteinte à la souveraineté nationale. 

Pour M. HAU DO SUAN (Myanmar), il ne faut pas que les principes arrêtés par le texte proposé portent préjudice aux droits, à la compétence juridictionnelle et aux devoirs des États tels que prévus par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  De ce fait, les droits et compétences juridictionnelles des États côtiers, y compris en ce qui concerne les plateaux continentaux en deçà et au-delà de 200 milles marins, et dans la zone économique exclusive, doivent continuer à être respectés, en vertu de la Convention précitée, a-t-il plaidé.  Le représentant est revenu sur plusieurs concepts contenus dans l’avant-projet, insistant surtout pour que le transfert des techniques marines se fasse de manière bilatérale, régionale et multilatérale, tout en donnant la priorité aux besoins des pays en développement.  Le Myanmar, a-t-il ajouté, souhaite que l’objectif de développement durable no 14 sur la conservation et l’exploitation durable des océans soit dûment pris en compte par le futur traité, tout comme les principes de « patrimoine commun de l’humanité » et de « distribution équitable des bénéfices ». 

M. YASSIN MOHAMMED (Érythrée) a estimé que l’avant-projet de traité présenté par la Présidente permettrait d’entamer des discussions réelles sur le futur instrument.  Il a reconnu que certaines questions nécessitaient encore des discussions approfondies, notamment celles concernant le partage des ressources génétiques marines, étant donné que les pays en développement n’ont pas par eux-mêmes les capacités technologiques nécessaires pour exploiter lesdites ressources. 

M. GENEROSO CALONGE (Philippines), qui s’est aligné sur la déclaration du G77, a voulu exprimer son appréciation à la Présidente pour avoir publié aussi tôt que possible le projet de texte de l’accord.  Il a promis de s’engager pleinement et de manière interactive dans les discussions, et de répondre rapidement aux propositions soumises au cours des réunions.  Le représentant des Philippines a aussi rappelé que le principe de patrimoine commun de l’humanité sous-tend le projet d’instrument et les discussions des délégations y relatives.

Pour M. PALSSON (Islande), « sans consensus, nous n’aurons pas d’instrument qui fonctionne ».  Le représentant a donc appelé à faire preuve de pragmatisme dans les négociations.  Dans cette perspective, il a recommandé de faire en sorte que la structure institutionnelle du futur instrument s’appuie sur les organismes régionaux et nationaux existants. 

Mme HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a espéré que cette troisième session conduise à identifier les mécanismes adéquats qui permettent au futur instrument de « coopérer » avec les mécanismes et normes existants « sans causer de doublons », notamment en matière d’activité de pêche et de transport maritime.  Tout en renouvelant la volonté de son pays de mieux protéger la biodiversité marine, la représentante a toutefois estimé qu’il ne fallait pas perdre de vue le point de départ des négociations, à savoir parvenir à un équilibre entre la conservation et l’utilisation durable des océans. 

Mme COUMBA GAYE (Sénégal) a estimé que le document de la Présidente était utile pour permettre aux délégations de « naviguer vers le texte définitif de l’instrument ».  Notant que les riches trésors de la mer sont ouverts à tous, elle a recommandé d’établir un accord qui tienne compte de l’ensemble des intérêts juridiques à la base des présentes négociations.  La déléguée a rappelé qu’en Afrique de l’Ouest, 60% de la population vit en bordure de mer et dépend ainsi des ressources maritimes.  Elle a regretté que le texte proposé pour les négociations ne fasse pas référence aux grands principes environnementaux et aux instruments juridiques pertinents. 

M. BABAJIDE ALO FAS (Nigéria) s’est félicité qu’après près de 15 années de discussions préparatoires, les délégations entament, avec cette troisième session de la Conférence intergouvernementale, une phase de négociation sur le futur instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  À cette occasion, il a réitéré la position constante du Nigéria en faveur d’une formulation claire et sans équivoque de la question du renforcement des capacités et du transfert des techniques marines, notamment pour les pays en développement.  Il a souhaité à ce sujet que soient précisés les modèles de financement et les mécanismes de mise en œuvre afin, a-t-il dit, de maximiser les bénéfices des abondantes ressources des zones ne relevant pas de juridictions nationales.  Il s’est enfin déclaré confiant quant à la possibilité de voir aboutir le nouveau traité dans les deux prochaines années, assurant la Présidente de la pleine coopération du Nigéria. 

M. TELLIER (Canada) a plaidé en faveur d’un futur traité « solide et efficace ».  Il a salué la Présidente pour son avant-projet d’accord, qu’il a jugé très utile.  « Nous pouvons maintenant retrousser nos manches et aller au-delà des simples déclarations de principe », a-t-il proposé.  « Vous vous êtes acquittée de votre tâche avec brio, et c’est maintenant à nous de traduire ces efforts en résultats concrets », a insisté le représentant, appelant à produire un traité « de haute qualité, clair et cohérent » et à trouver des « idées novatrices » pour régler les questions en suspens. 

M. MEMET MEVLÜT YAKUT (Turquie) a tout d’abord indiqué que la position de sa délégation concernant la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ne devait pas être interprétée comme une objection à l’ensemble des dispositions de ce texte, notamment celles portant sur la protection de l’environnement marin et l’utilisation durable des océans et de leurs ressources.

Passant au texte en cours d’élaboration, il a souhaité que le libellé soit plus clair et plus précis en ce qui concerne la définition de la couverture géographique de l’instrument, s’agissant notamment des « zones au-delà de la juridiction nationale ».  Ainsi, a-t-il notamment proposé, dans l’article 1, ce terme pourrait être défini comme signifiant « la haute mer au-delà des 200 milles marins de la ligne de base à partir de laquelle l’étendue de la mer territoriale est mesurée, et la Zone ».  De son avis, de telles clarifications sont nécessaires pour éviter des contradictions ou des redondances juridiques qui compliqueraient l’application de l’instrument.  Il a notamment relevé que certains États côtiers n’ont pas encore proclamé de zone économique exclusive ou d’autres zones juridictionnelles semblables au-delà de leurs eaux territoriales en accord avec le droit international, estimant que cela ne signifie pas pour autant, en ce qui concerne l’instrument, que les zones maritimes en question doivent être considérées comme étant au-delà de la juridiction nationale. 

M. ALI NASIMFAR (République islamique d’Iran) a dit que le principe directeur de la conservation et de l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale devait tenir compte d’un autre principe, celui du « patrimoine commun de l’humanité ».  Il a donc réclamé que ce dernier principe soit clairement inscrit dans le texte de l’instrument.  En ce qui concerne le transfert des techniques marines, il doit se faire selon les besoins des pays récipiendaires, a-t-il estimé, appelant en outre à ne pas utiliser le droit de la propriété intellectuelle pour faire obstacle à ces transferts.  Pour la délégation, il faut aussi éviter les chevauchements et les doublons entre le futur instrument et les instruments existants, tout en veillant à respecter les droits des États qui ne sont pas parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. UMASANKAR YEDLA (Inde) a appelé à ne pas retarder davantage l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant, et ce, dans l’intérêt de la préservation de la biodiversité marine.  Il a notamment jugé important de faire valoir, au sein du futur instrument, la notion de « patrimoine commun de l’humanité ».

M. YEE WOON CHIN (Singapour) a appelé à adopter une attitude constructive dans les négociations pour parvenir à un instrument « universel ou quasi universel ».  Nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir de nombreux États non parties à l’instrument si nous voulons remplir notre objectif, a-t-il insisté.  Il a par ailleurs appelé à faire en sorte que les transferts de techniques marines soient plus efficaces, souhaitant pour cela que tout le monde y participe, les bénéficiaires comme les détenteurs actuels de ces techniques.  Le représentant a en outre jugé très utile le format choisi pour les négociations, avec des groupes de travail officieux, pour discuter des détails de l’instrument.  Il a enfin appelé à fonder ce dernier sur des recherches scientifiques pertinentes.

M. EGGE (Norvège) a salué un texte de discussion « très utile », qui aide à mieux identifier les points nécessitant davantage de négociations.  Il a dit vouloir mettre l’accent sur la responsabilité de l’application du texte dans le cadre des réunions des Parties prévues dans l’avant-projet.  Il a d’ailleurs souhaité que le rôle de la Conférence des Parties (COP) soit clairement défini.  En ce qui concerne le renforcement des capacités, il a jugé important que chaque État soit en mesure de mettre en œuvre le futur instrument. 

De l’avis de M. LIU YANG (Chine), l’avenir collectif de la communauté internationale dépend de la biodiversité marine.  Il est donc crucial que le futur instrument soit conforme aux buts et objectifs de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et soit en harmonie avec les autres instruments juridiques pertinents, afin d’éviter des chevauchements, a-t-il plaidé.  Il faut notamment, a-t-il précisé, que les priorités des pays en développement soient prises en compte et que l’instrument soit universel.  À ce propos, le représentant a mis en garde sur le fait qu’un accord hâtif risquerait de mettre à mal son acceptation universelle.  Il faut donc « aller pas à pas et avancer de manière transparente », a prôné le représentant de la Chine.

Mme AAHDE LAHMIRI (Maroc) a insisté sur le respect des définitions déjà agréées à l’échelle internationale.  Elle a également souhaité que soient respectés les droits des États côtiers sur les ressources se trouvant sur leur plateau continental au-delà des 200 milles marins.

M. KAZI (Bangladesh) a relevé que l’avant-projet d’accord comportait encore de nombreux points d’achoppement et lacunes.  Il a toutefois espéré que ces questions en suspens puissent être réglées dans le cadre des groupes de travail officieux.  À cette fin, le représentant a jugé judicieux d’envisager toutes les lacunes dès maintenant, « avant qu’il ne soit trop tard » dans le cours du processus.  Par ailleurs, le représentant a estimé que le document dans sa forme actuelle ne faisait pas assez allusion à l’ampleur des défis auxquels font face les pays vulnérables, comme les PEID et les PMA, notamment en matière de transfert de technologie.

M. RISHY BUKOREE (Maurice) s’est dit plein d’espoir quant à la capacité de cette session à faire avancer les négociations.  « Le facteur temps est très important », a-t-il estimé.  « Nous avons les outils nécessaires et devons maintenant traduire nos paroles en actes », a invité le représentant.

M. BLOOM (États-Unis) s’est félicité de la publication dans les délais de l’avant-projet de texte.  En tant que pays côtier et partenaire majeur du renforcement des capacités dans le domaine de la recherche marine, les États-Unis s’efforcent de gérer les ressources marines en haute mer et de soutenir l’économie bleue, a-t-il affirmé.  S’agissant du nouvel instrument, il doit être fondé sur des données scientifiques et veiller à ne pas compromettre ou dupliquer les instruments existants, a souhaité le représentant, estimant que l’avant-projet de texte nécessiterait des révisions.  Il s’agit toutefois d’une bonne base de départ, a-t-il reconnu.  En conclusion, le représentant a prévenu qu’un instrument « acceptable pour beaucoup », mais qui laisserait de côté les principaux intervenants, ne serait pas un résultat satisfaisant.

M. YOSHIMOTO (Japon) a dit que même s’il n’y avait pas encore de compromis, il était important d’avoir une vision commune afin de ne pas tourner en rond.  Ainsi, il faut parvenir à des accords que les États seront en mesure de mettre en œuvre, a-t-il recommandé.  De même, il a voulu que les droits et obligations des États parties soient clairement établis dans le futur traité. 

M. LEONIDCHENKO (Fédération de Russie) a déclaré que sa délégation voulait contribuer à faire avancer le processus pour parvenir à un compromis.  Le plus important à ses yeux est le résultat et non le calendrier.  Bien qu’il faille, pour certains, parvenir à tout prix à un accord d’ici à l’an prochain, la Fédération de Russie estime qu’il faut privilégier un bon texte et éviter de bâcler le travail, a conclu le représentant.

M. HWANG JUN-SHIK (République de Corée) a appelé à faire en sorte que le nouvel instrument ne rentre pas en contradiction avec le droit de la mer en vigueur.  Il s’est dit prêt à travailler de manière constructive en ce sens.

M. KENFACK (Cameroun) s’est dit « préoccupé au plus haut point » par la santé des océans.  Le représentant s’est dit très attaché au principe de « patrimoine commun de l’humanité » dans le cadre des négociations, ainsi qu’aux études d’impact sur l’environnement, au renforcement des capacités et au transfert de techniques marines. 

M. ABDELAZIZ (Égypte) a insisté sur l’importance du renforcement des capacités et le transfert des techniques marines.  Il a estimé qu’il serait utile de tomber d’accord sur certaines questions de grande importance afin de faire avancer la protection du patrimoine commun de l’humanité qu’est la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

Mme BRUSENDORFF, du Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM), a expliqué comment son organisation œuvre à l’amélioration de la gestion de la biodiversité marine.  Elle a souligné que la biodiversité marine est cruciale pour le bon fonctionnement des écosystèmes marins.  C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, le renforcement des capacités et le transfert des techniques marines sont au cœur des activités du CIEM.

Mme SLOBODIAN, de l’Union internationale pour la conservation de la nature, s’est dite prête à appuyer la conclusion d’un accord dans la mesure des capacités de son organisation.

M. TROISI, de la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO, a estimé que la question du renforcement des capacités devait être abordée de manière globale, en prenant en compte les aspects liés à l’accès aux infrastructures physiques, au transfert de compétences et à l’échange de données scientifiques et technologiques.  Le représentant a en outre appelé à réaliser une analyse des coûts pour la création d’un futur mécanisme de renforcement des capacités et de transfert des techniques marines, tel que le prévoira le futur instrument. 

Mme AGOSTINI, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a fait part de l’engagement de son organisation pour la gestion durable des ressources halieutiques.  Ainsi, la FAO a élaboré un projet de stratégie pour l’intégration de la biodiversité par les États, qui sera présenté au cours de la prochaine réunion intergouvernementale de cette agence onusienne.  La représentante a souhaité que certaines terminologies et concepts mentionnés par le projet de traité tiennent compte des avancées faites par certains instruments et processus multilatéraux et par les organisations internationales pertinentes.

Mme BHOLA, du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a salué le projet de texte présenté par la Présidente qui, selon elle, constitue un bon point de départ pour les négociations.  Elle a mentionné l’existence d’un nouveau document portant sur la gestion des ressources maritimes des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, rédigé en coopération avec la FAO.

Mme KALAS, de l’ONG High Seas Alliance, a signalé l’existence d’une étude récente dont les conclusions mettent en garde contre le déclin de la biodiversité marine.  Cette étude, a-t-elle ajouté, souligne également combien les aires marines protégées sont l’un des outils les plus efficaces pour protéger la biodiversité marine.  La représentante a par conséquent appelé à avancer vers la conclusion de « cet accord historique » pour protéger la diversité de 70% des océans du monde et préserver « notre belle planète bleue ». 

Mme MURAKI GOTTLIEB, du Conseil international du droit environnemental, a souligné l’engagement solide des parties prenantes à faire avancer les négociations.  Elle a salué les solutions novatrices qui ont déjà pu voir le jour à l’issue des discussions des sessions précédentes. 

EXAMEN DE LA QUESTION VISÉE AUX PARAGRAPHES 1 ET 2 DE LA RÉSOLUTION 72/249 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Groupe de travail officieux sur les questions interdisciplinaires

Dans le cadre du premier Groupe de travail officieux de cette session, les délégations ont entamé, cet après-midi, des discussions sur les articles 2 à 4 de l’avant-projet d’accord rédigé par la Présidente de la Conférence.

Premier à être passé au crible des négociateurs, l’article 2 du document, intitulé « Objectif », se lit comme suit: « Le présent Accord a pour objectif d’assurer la conservation à long terme et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale par une application effective des dispositions pertinentes de la Convention et par un renforcement de la coopération et de la coordination internationales. »

Le Groupe des 77 et la Chine ont proposé de changer le titre pour « Objectif général » et de supprimer l’expression « à long terme » dans le libellé du texte, une proposition notamment soutenue par Nauru, le Nigéria, les Maldives et un groupe de pays d’Amérique latine, dénommé CLAM (Core Latin American Group).  Ce dernier a également suggéré la modification suivante: « Le présent Accord a pour objectif d’assurer la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale par une application effective des dispositions pertinentes de la Convention et, à cet égard, par un renforcement de la coopération et de la coordination internationales entre toutes les parties. »  Cela permettrait de séparer les objectifs des moyens d’y parvenir, à savoir la coopération et la coordination internationales, ont estimé les pays du CLAM, appuyés par la Jamaïque.

La Fédération de Russie, tout en appuyant la proposition du G77, a tout simplement appelé à supprimer la partie suivante de l’article 2: « et par un renforcement de la coopération et de la coordination internationales ».  La coopération et la coordination internationales ne sont pas un objectif, mais un moyen pour parvenir à notre fin, a fait observer la délégation.

Singapour a émis des doutes quant à l’opportunité de rajouter une mention sur les acteurs de la coopération internationale, ainsi que de limiter cette dernière aux seuls États parties.  Quant à l’Union européenne (UE), la Norvège, la Nouvelle-Zélande et les Philippines, elles s’y sont catégoriquement opposées.  De plus, parle-t-on ici des parties à l’Accord ou des parties à la Convention? s’est interrogée l’Algérie.  S’il s’agit de la Convention, nous trouvons cela problématique, a ajouté le pays, tout en émettant des réserves sur la portée de cette dernière.  La Suisse a de son côté suggéré de fusionner l’article 6 sur la coopération internationale avec l’article 2. 

Tout en appuyant la proposition du G77, Cuba a appelé à incorporer dans les objectifs de l’article 2 un élément de texte sur le principe du partage des avantages.  La Présidente de la Conférence a demandé à cette délégation de soumettre une proposition de texte étayant cette proposition, qu’El Salvador a immédiatement soutenue.

La Turquie a, elle, demandé de restreindre la référence à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de la façon suivante: « l’application effective des dispositions environnementales de la Convention ».  L’Algérie, l’Union européenne (UE) et les Philippines se sont opposées à la proposition turque.  « Cet accord n’est pas uniquement un traité environnemental », a fait remarquer la Chine, pour qui les objectifs devraient, en outre, faire mention des transferts de technologies et de la recherche scientifique.  « Il semble important de maintenir l’équilibre et l’intégrité de la Convention », a ajouté le représentant.

Le Canada s’est quant à lui déclaré satisfait du texte actuel.  « L’objectif devrait être le plus concis et précis possible », a estimé le pays, appelant les négociateurs à ne pas céder à la tentation d’inclure trop d’éléments dans le texte. 

Par ailleurs, les délégations se sont penchées sur l’article 3 de l’avant-projet, intitulé « Champ d’application », à commencer par son paragraphe 1: « Les dispositions du présent Accord s’appliquent aux zones ne relevant pas de la juridiction nationale. »

Pour l’Équateur, ni la participation aux négociations, ni leurs résultats futurs ne devraient affecter le statut juridique des pays qui ne sont pas parties à la Convention.  L’Équateur a ainsi proposé d’ajouter dans l’article 3 que le futur instrument vise à combler les lacunes actuelles de la Convention au-delà des limites de la juridiction nationale.  Le nouveau libellé proposé se lirait comme suit: « Les dispositions du présent Accord s’appliquent exclusivement aux zones ne relevant pas de la juridiction nationale, sans oublier les réglementations sur les pêches, les transports maritimes et les fonds marins. »

Il faudrait clarifier la portée géographique de l’article 3, a de son côté estimé la Turquie, proposant de rajouter la mention suivante: « Les dispositions du présent Accord s’appliquent aux zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Rien dans cet Accord ne saurait s’appliquer aux zones en deçà des 200 milles marins ». 

La Colombie a, quant à elle, proposé d’inclure que la portée de l’Accord exclue les mers fermées et semi-fermées, comme la mer des Caraïbes, dans laquelle aucune zone ne s’étant au-delà des 100 milles marins.  Le nouveau libellé proposé serait le suivant: « Les dispositions du présent Accord s’appliquent aux zones ne relevant pas de la juridiction nationale, en excluant les mers fermées et semi-fermées. »

Si nous citons des zones maritimes auxquelles ne s’appliquent pas l’Accord, a contrario les zones non citées de manière explicite dans le texte se verraient systématiquement appliquer l’Accord, ce qui est erroné, a rétorqué la Fédération de Russie, jugeant que la formulation de l’article 3 devait être concise et précise.  Or, selon elle, « le texte initial est proche de ce résultat ». 

Le G77 a quant à lui proposé de simplifier davantage le libellé actuel de la façon suivante: « L’Accord s’applique aux zones ne relevant pas de la juridiction nationale. »  Les États-Unis se sont dits prêts à soutenir la demande du G77, avant de rejeter les propositions visant à compliquer le texte actuel, que le pays a jugé satisfaisant.

L’Union européenne (UE) a quant à elle émis des réserves sur toutes les propositions visant à modifier légèrement ou à élargir le texte proposé.  Nous devrions même nous poser la question de la nécessité de mentionner une limitation géographique dans ce paragraphe 1, a estimé l’UE, notant que le renforcement des capacité et le transfert de technologies s’appliqueraient également aux zones relevant de la juridiction nationale.

Les délégations sont ensuite passées au paragraphe 2 de l’article 3: « Le présent Accord ne s’applique ni aux navires de guerre ou navires de guerre auxiliaires ni aux autres navires ou aéronefs appartenant à un État ou exploités par cet État tant que celui-ci les utilise exclusivement à des fins gouvernementales et non commerciales.  Cependant, chaque Partie doit s’assurer, en prenant des mesures appropriées qui ne compromettent pas les opérations ou la capacité opérationnelle des navires ou aéronefs de ce type lui appartenant ou exploités par elle, que ceux-ci agissent d’une manière compatible avec le présent Accord, pour autant que cela soit raisonnable dans la pratique. »

Nous ne sommes pas favorables à ce paragraphe, a déclaré le G77, appelant à le reformuler.  En effet, a expliqué le Groupe, le libellé actuel inclut tous les navires gouvernementaux n’offrant pas de services commerciaux, ce qui risque de poser un problème s’agissant des travaux de recherche scientifique réalisés au moyen de navires gouvernementaux.  « Nous ne sommes pas très heureux de ce paragraphe qui ne semble avoir aucun mérite », a renchéri l’Algérie.  Pourquoi ces exceptions sur les navires de guerre?  Nous sommes en 2019 et ne voyons aucune raison justifiant ces dispositions qui risqueraient, de cette façon, de promouvoir la réalisation d’exercices militaires dans des zones protégées, a estimé le pays, appuyé en cela par Sri Lanka.  Qu’est-ce qu’on essaie d’empêcher ou de prévenir en incluant ce paragraphe, s’est interrogée la Norvège.

Ce paragraphe reprend simplement une disposition standard du droit de la mer, a expliqué le Canada, estimant que la seconde partie du libellé répondait aux préoccupations de l’Algérie concernant la conduite d’exercices militaires dans les zones marines protégées.  Ce paragraphe reprend mot pour mot le contenu de l’article 236 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, intitulé « Immunité souveraine », a fait remarquer le groupe CLAM, appelant à séparer ce paragraphe 2 de l’article 3: il conviendrait, selon lui, de créer un nouvel article reprenant l’intitulé de la Convention, une proposition soutenue par l’Indonésie.  L’Union européenne (UE) s’est dite prête à analyser cette proposition, de même que l’Australie et la Fédération de Russie, qui a en revanche rejeté les autres propositions visant à modifier les champs d’application actuels.  « La Convention elle-même reflète les principes existants du droit international et nous ne voulons pas nous lancer dans un processus de révision de ces principes », a tranché la Fédération de Russie.  Le plus important est en effet de veiller à la cohérence avec la Convention et le droit coutumier, ont estimé les États-Unis.  « Difficile pour nous d’imaginer un accord sans ce libellé basique », a insisté le pays, tout en se disant ouvert à changer son emplacement dans le document. 

Le Japon a quant à lui proposé de déplacer le paragraphe 4 de l’article 8 pour en faire le paragraphe 3 de l’article 3, une proposition concernant laquelle Nauru a émis des réserves.

Les délégations ont ensuite entamé des discussions sur l’article 4 de l’avant-projet, intitulé « Relation entre le présent Accord et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et autres instruments et cadres juridiques en vigueur pertinents et avec les organes mondiaux, régionaux et sectoriels pertinents ». 

Nous proposons de supprimer l’expression, « en vigueur » dans le titre, a déclaré le G77, soutenu en cela par l’UE, l’Australie, les pays membres du groupe CLAM, la Suisse, l’Indonésie, la Fédération de Russie, les États-Unis, Maurice et la Norvège.  Le Canada est même allé jusqu’à demander la suppression de l’expression « en vigueur » dans l’ensemble du document.  En revanche, la République de Corée a appelé à maintenir le titre de l’article 4 tel quel. 

Pour éviter toute contradiction avec la Convention, l’Algérie a proposé de supprimer la première phrase du paragraphe 1 de l’article 4: « Aucune disposition du présent Accord ne porte atteinte aux droits, à la juridiction et aux obligations des États en vertu de la Convention. »  Les États-Unis, la Norvège, le Canada, l’Australie, la Jamaïque et la République de Corée se sont toutefois prononcés contre cette proposition.

La Chine a quant à elle proposé d’ajouter l’élément suivant: « Le présent Accord est interprété et appliqué dans le contexte de la Convention et du droit international pertinent. » 

Passant brièvement à l’analyse du paragraphe 2 de l’article 4, la Nouvelle-Zélande a estimé qu’un article distinct devrait aborder la question des droits des États côtiers.  Les États-Unis ont quant à eux appuyé le texte actuel, tout en proposant une légère modification: remplacer « Les droits et la juridiction des États côtiers sur toutes les zones relevant de leur juridiction nationale » par « Les droits et la juridiction des États côtiers dans toutes les zones relevant de leur juridiction nationale ».  L’Australie a appuyé la proposition américaine.

Le texte ne devrait pas rentrer dans le détail des espaces maritimes, a de son côté estimé la Colombie.  « Cet instrument ne doit pas définir ces espaces », a insisté le pays, proposant de supprimer la mention suivante: « y compris le plateau continental jusqu’à 200 milles marins et au-delà et la zone économique exclusive ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité débat des moyens de renforcer le respect du droit international humanitaire

8596e séance – matin
CS/13917

Le Conseil de sécurité débat des moyens de renforcer le respect du droit international humanitaire

Conseil de sécurité                                         CS/13917

8596e séance – matin                                        13 août 2019

Soixante-dix ans après l’adoption, le 12 août 1949, des quatre Conventions de Genève, le Conseil de sécurité s’est interrogé, ce matin, sur les moyens de mieux appliquer le droit international humanitaire, ce corpus de lois qui, selon le Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a joué un rôle vital pour juguler la brutalité qui a cours en temps de conflit armé.  Face à la complexité croissante des conflits armés, le développement de nouvelles menaces, comme le terrorisme international et la multiplication des acteurs non étatiques, les intervenants ont confronté leurs vues sur les moyens juridiques et pratiques de faire face aux nouvelles évolutions. 

Les membres du Conseil ont pu s’appuyer sur des exposés liminaires de M. Miguel De Serpa Soares, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, M. Peter Maurer, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), et Mme Annysa Bellal, chercheuse et conseillère stratégique en droit international humanitaire à l’Académie de droit international humanitaire et de droits humains à Genève. 

Dans un premier temps, le Conseiller juridique de l’ONU a rappelé que l’Article 3 commun aux quatre Conventions, qui concerne les conflits armés non internationaux et énonce en quoi consiste un minimum de traitement humain, notamment à l’égard des personnes qui ne participent pas directement aux hostilités  ou encore des blessés et malades, avait marqué un moment historique pour l’humanité, car c’était la première fois que ce type de conflits armés se voyait réglementé par un traité multilatéral. 

M. De Serpa a également observé qu’il aura fallu attendre 1967 pour voir le Conseil de sécurité invoquer les Conventions de Genève dans une résolution.  Depuis, cet organe y fait expressément référence et a assuré un rôle crucial pour faire respecter le droit international humanitaire (DIH), que ce soit en mettant en place des tribunaux pénaux internationaux pour juger des crimes de guerre, des crimes de masse ou des crimes contre l’humanité, en créant des commissions d’enquêtes sur des violations du DIH ou en confiant aux opérations de maintien de la paix des mandats pour la protection des civils, sans oublier les autorisations de livraison transfrontière d’aide humanitaire et l’imposition de sanctions contre les auteurs de violations du DIH.

Le Ministre des affaires étrangères de la Pologne, M. Jacek Czaputowicz, qui présidait la séance, a estimé que le plus grand défi pour assurer la protection de la vie humaine dans le contexte des conflits modernes était le respect des règles existantes par les groupes armés étatiques et non étatiques, notant que les conflits modernes sont caractérisés par une augmentation du rôle des acteurs non étatiques. 

M. Czaputowicz a également relevé que l’intelligence artificielle et les systèmes d’armes létaux autonomes, comme les robots militaires et les armes cybernétiques, réduisaient le rôle et le contrôle des facteurs humains pendant la guerre et étaient davantage à même de causer des dommages indiscriminés aux civils.  Intervenant au nom de la Côte d’Ivoire et de la Guinée équatoriale, l’Afrique du Sud a, de plus, averti que les armes téléguidées et les systèmes d’armes létaux autonomes conduisaient à « déshumaniser la guerre » et a relevé que leur usage et les destructions qu’elles peuvent causer avaient de sérieuses implications juridiques, éthiques et pratiques pour le droit international humanitaire. 

« En tant que « document vivant », notre compréhension du droit international humanitaire doit refléter les réalités actuelles », avait insisté au préalable le Président du CICR en citant, lui aussi, plusieurs « dilemmes nouveaux », dont la guerre urbanisée, l’augmentation du nombre de groupes armés, et les nouvelles lignes de front ouverte par la technologie dans le cyberespace, les systèmes d’armes létaux autonomes et la technologie à distance. 

Si des délégations se sont interrogées sur les raisons de la persistance de violations du droit humanitaire, M. Maurer a estimé que la poursuite des violences ne signifiait pas que le droit était inadéquat, mais que les efforts pour le faire respecter étaient sont insuffisants.  En écho à de nombreuses interventions sur l’importance de renforcer l’état de droit pour mieux appliquer le DIH, M. Maurer a demandé aux États de participer à un dialogue constructif et ouvert avec le CICR sur ces questions importantes.  « Le monde, ne peut se permettre de passer à côté de l’opportunité de préserver l’humanité sur ces nouvelles frontières », a-t-il notamment affirmé.

Les Conventions de Genève constituent la clef de voute du droit international humanitaire qu’il s’agit de faire respecter, a rappelé le Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, M. Heiko Maas.  Or, « nous ne sommes pas à la hauteur des attentes des plus vulnérables, nous ne sommes pas à la hauteur de nos obligations juridiques et morales », a-t-il notamment déploré.

Préoccupée du fait que certaines parties iraient mêmes jusqu’à intégrer sciemment les violations de ces règles dans leur stratégie militaire pour priver les populations de tout secours et obtenir leur reddition, la France a incité la communauté internationale à faire de l’accès de l’aide humanitaire aux populations civiles sa priorité.  En ce sens, la France et l’Allemagne entendent présenter en septembre un appel à l’action humanitaire, destiné à identifier les actions concrètes que les États peuvent prendre pour renforcer le respect du droit international humanitaire. 

De son côté, Mme Annysa Bellal, conseillère stratégique en droit international humanitaire, a estimé que la pression par les pairs demeurait un mécanisme « intéressant » pour améliorer le système global de protection du DIH.  Elle a également proposé, dans le cadre de l’obligation de respecter et de faire respecter les Conventions de Genève, de conditionner le comportement des parties au conflit à l’aide financière qu’elles peuvent recevoir du Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix. 

PROMOTION ET RENFORCEMENT DE L’ÉTAT DE DROIT DANS LE CADRE DES ACTIVITÉS DE MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES (S/2019/629)

DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE

Déclarations

M. JOÃO MIGUEL FERREIRA DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations Unies, a rappelé que les quatre Conventions de Genève avaient été adoptées le 12 août 1949 puis entrées en vigueur le 21 octobre 1950, et qu’elles figurent depuis au cœur du droit international humanitaire (DIH).  Il a expliqué qu’elles n’étaient pas entièrement inédites à leur époque, les trois premières Conventions ayant été inspirées par d’autres traités.  Il a ensuite précisé la portée de chacune des quatre conventions. La première traite des blessés et des malades, parmi les forces armées, sur le champ de bataille ;  la deuxième, des blessés, malades et naufragés des forces armées opérant en mer ; et la troisième, des prisonniers de guerre ;  la Quatrième Convention étant, quant à elle, le premier traité conçu spécifiquement pour veiller à la protection des civils en temps de conflit armé. 

Après avoir précisé que la plupart des dispositions des quatre Conventions de Genève s’appliquait à des conflits internationaux, le Conseiller juridique s’est attardé sur l’Article 3 commun à ces quatre Conventions qui lui, concerne les conflits armés « ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des Hautes Parties contractantes ». Cet Article commun, a-t-il expliqué, comprend des dispositions relatives au traitement des personnes ne participant pas de manière active aux hostilités, y compris les membres des forces armées ayant déposé leurs armes.  L’Article 3 a marqué un moment historique pour l’humanité, a expliqué le Conseiller juridique, car c’était la première fois que les conflits armés non internationaux se voyaient ainsi réglementés par un traité multilatéral.  À ce titre, l’Article 3 occupe une place particulière dans le droit international humanitaire, d’autant plus, a-t-il ajouté, que c’est le dispositif le plus fréquemment appliqué dans le cadre des conflits armés contemporains qui revêtent souvent un caractère non international. 

S’attardant ensuite sur les objectifs communs et les valeurs partagées entre les Conventions de Genève et la Charte des Nations Unies, M. De Serpa Soares a fait observer que si la Charte de l’ONU ne fait pas référence directement au droit international humanitaire – et encore moins aux Conventions de Genève de 1949, qui lui sont postérieures - elle reprend dans son préambule l’importance de préserver les générations futures du fléau de la guerre et de proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, ainsi que dans la dignité et la valeur de la personne humaine.  En outre, l’Article 1 de la Charte appelle à réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux d’ordre humanitaire, entre autres.  Après avoir indiqué que le DIH était devenu l’un des domaines les plus importants du droit international, il a rappelé que l’Article 89 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève exige que, dans les cas de violations graves des Conventions, les Hautes Parties contractantes s’engagent à agir en coopération avec l’ONU et conformément à la Charte des Nations Unies.

Dans la pratique, l’ensemble des organes de l’ONU a eu à gérer, d’une manière ou d’une autre, différents aspects du DIH, a expliqué le Conseiller juridique.  Mais, a-t-il précisé, c’est seulement en 1967 que le Conseil de sécurité a invoqué pour la première fois les Conventions de Genève de 1949 dans une résolution.  Depuis, a-t-il ajouté, cet organe y fait souvent expressément référence et a assuré un rôle crucial pour faire respecter le DIH.  M. De Serpa Soares a cité plusieurs mesures concrètes, comme la mise en place de tribunaux pénaux internationaux pour juger des crimes de guerre, des crimes de masses ou des crimes contre l’humanité.  Il a aussi parlé de la création, également par le Conseil de sécurité, de commissions d’enquêtes sur des violations du DIH ou de mandats pour la protection des civils confiés aux opérations de maintien de la paix.  Le Conseil autorise également les organisations humanitaires à livrer une aide par-delà les frontières, appelle le Secrétaire général à faire rapport sur la protection des civils et impose des sanctions contre les auteurs de violations du DIH.  L’ampleur des mesures prises par le Conseil de sécurité démontre que celui-ci a beaucoup de potentiel et de souplesse pour veiller au respect du DIH, a estimé le Conseiller juridique.

M. De Serpa Soares a aussi fait observer que l’ONU était une entité auquel le droit international humanitaire s’applique, notamment dans un contexte où les opérations de maintien de la paix sont de plus en plus ciblées.  Bien que les Conventions de Genève de 1949 ne contiennent pas de dispositions spécifiques à la protection des Casques bleus, les personnels des missions doivent bénéficier de la protection de l’Article 3 des Conventions, a-t-il estimé.  Il a relevé que l’application de la Convention de 1994 sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé dans les pays qui n’y sont pas partie, ne peut se faire qu’avec la conclusion d’accords spéciaux sur les statuts des forces et le statut de la mission.  Il a ensuite exhorté le Conseil de sécurité à veiller à ce que les attaques contre les Casques bleus fassent l’objet d’enquêtes et de jugements 

M. De Serpa Soares a enfin mis l’accent sur le cadre spécifique confié à la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), qui s’est vu doté par le Conseil de sécurité d’un mandat spécifique pour mener des opérations offensives ciblées dans le plein respect du DIH.  Il a expliqué qu’il avait fallu établir des procédures afin que les personnes capturées par la MONUSCO soient traitées dans le respect des normes du droit international et conclure un accord avec le pays hôte pour veiller à ce que les personnes transférées à cet État soient traitées dans le respect des normes internationales en vigueur.  Enfin, il a fallu fournir des conseils à la Mission pour savoir comment traiter les actes contraires au DIH commis par son personnel. 

M. PETER MAUER, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a déclaré qu’en adoptant les Conventions de Genève, il y a 70 ans, les États avaient fait une déclaration essentielle: même en temps de conflit armé, entre pires ennemis, il doit y avoir des limites sur les souffrances que l’on peut s’infliger.  Symbole de notre humanité partagée, a-t-il ajouté, les Conventions de Genève ont permis de limiter les impacts dévastateurs des conflits.  Il y a vu « un des plus grands accomplissements de la coopération entre États », qui démontre ce qui est possible lorsque les États prennent des mesures collectives et individuelles pour honorer le droit et les principes humanitaires.  Loin d’être mus par de seuls nobles idéaux, a-t-il ajouté, les États qui ont négocié le texte connaissaient la réalité de la guerre et ont établis des règles pragmatiques pour protéger et respecter la vie et la dignité humaines.

Pour M. Mauer, le droit international humanitaire demeure un outil essentiel pour aider les États à gérer les défis découlant des conflits, y compris les opérations de lutte antiterroriste menées dans le cadre de conflit armé.  Il permet d’établir un équilibre entre les impératifs militaires et l’humanité.  Le Président du CICR a aussi expliqué que le droit international humanitaire était « visible » lorsque les malades et les blessés étaient évacués vers des lieux sûrs, lorsque les personnes détenues étaient traitées avec dignité, lorsque le sort des personnes disparues était enfin connu et lorsque l’aide humanitaire était livrée par-delà des lignes de conflit.  L’impact du droit international humanitaire se manifeste aussi au travers des actes de retenue, lorsque les civils sont épargnés d’un pilonnage direct ou que les professionnels médicaux peuvent travailler sans craindre d’être menacés ou ciblés.

Lorsqu’il est respecté, a-t-il poursuivi, le droit international humanitaire permet de limiter les risques de dommages physiques et sociaux aux communautés sur le long terme, et ainsi d’éviter l’effondrement total de villes et autres localités, réduisant le nombre de déplacés et permettant aux écoles, hôpitaux et marchés de rester ouverts.

Le Président du CICR a ensuite dénoncé les conséquences des violations du droit international humanitaire, à commencer par les tueries indiscriminées, les actes de torture et de viols, la destruction des villes et les traumatismes psychologiques.  Ces violations continues du droit ne signifient pourtant pas que le droit est inadéquat, mais plutôt que les efforts pour le respecter le sont, a-t-il nuancé.  À ses yeux, il importe non seulement d’intégrer le droit international humanitaire aux doctrines officielles et procédures militaires mais aussi de veiller à ce qu’il devienne une norme de comportement éthique parmi les forces armées et les individus.

M. Maurer a appelé les États à faire preuve de vigilance et à redoubler d’efforts pour ratifier les traités découlant du droit international humanitaire, renforcer les doctrines militaires et les règles d’engagement, et veiller à ce que l’entraînement militaire « socialise » les règles et principes du droit international humanitaire.  Il faut également développer une législation nationale qui soit compatible avec les obligations internationales et veiller à la formation des parlementaires et des professionnels dans le domaine juridique.

En tant que « document vivant », notre compréhension du droit international humanitaire doit refléter les réalités actuelles, a-t-il poursuivi.  Il a cité plusieurs « dilemmes nouveaux », notamment la guerre urbanisée, l’augmentation du nombre de groupes armés, ainsi que les nouvelles lignes de front ouvertes par la technologie dans le cyberespace ou encore les systèmes d’armes létaux autonomes.

Face à ces nouveaux défis, le CICR travaille aux cotés des États sur l’application des concepts de base du droit international humanitaire dans ces domaines émergeants, a indiqué M. Maurer.  Nous leur demandons de participer à un dialogue constructif et ouvert avec nous sur ces questions importantes, a-t-il  ajouté, avant d’affirmer en conclusion que le monde ne pouvait se permettre de passer à côté de l’opportunité de préserver l’humanité sur ces nouvelles frontières.

Mme ANNYSA BELLAL, conseillère stratégique en droit international humanitaire à l’Académie de droit international humanitaire et de droits humains à Genève, a indiqué avoir construit son exposé sur la base de l’Article 3 commun aux quatre Conventions de Genève.  Dans ce cadre, elle a choisi de développer trois points spécifiques, à commencer par la nature prolongée des conflits armés contemporains et la valeur de l’intégration du droit international humanitaire.  Compte tenu de leur nature, les conflits de notre temps ont de profonds impacts sur la santé mentale et physique de ceux qui subissent ces événements traumatisants, ce qui réduit les possibilités de construire un avenir solide dans l’après-conflit.  Dans ces circonstances, a-t-elle noté, aucune institution ne peut se permettre de travailler isolément.  D’autres règles de droit, comme les droits de l’homme, sont aussi pertinentes, de même que les normes relevant du développement humain, économique et social, a relevé la chercheuse. 

À ses yeux, il est important d’intégrer le droit international humanitaire dans tous les systèmes juridiques pertinents et de bâtir des passerelles entre les institutions de mise en œuvre afin de créer des ripostes efficaces, coordonnées et plus intégrées face à des situations prolongées de violence.  Cela a déjà été fait, a-t-elle noté.  Par exemple, le 15 avril 2019, l’Organisation mondiale de la Santé a dénoncé les violations du droit international humanitaire dans le cadre du conflit armé en Libye.  Pour Mme Bellal, cet appel, par une institution dont le droit international humanitaire n’est pas le mandat principal, est intéressant car il démontre que la communauté internationale ressent le besoin d’être associée à la mise en œuvre des normes humanitaires. 

De l’avis de la conseillère stratégique, il est évident que la reconstruction financière et économique d’un pays sortant d’un conflit peut conduire à la paix durable et bénéficier à la société.  À cet égard, le Fonds de consolidation de la paix des Nations Unies vise justement à offrir un engagement plus durable aux pays qui émergent d’un conflit.  Dans ce cas, le droit international humanitaire demeure applicable, a-t-elle indiqué.  C’est ainsi, a poursuivi la chercheuse, que sur les 33 pays ayant reçu un financement de ce Fonds, au moins 11 se trouvent dans une situation de conflit armé pour lequel le droit international humanitaire est applicable.  À ses yeux, on pourrait imaginer, dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 1 des Conventions, de conditionner le comportement des parties au conflit à l’aide financière qu’elles peuvent recevoir du Fonds. 

En deuxième point, Mme Bellal a constaté que la majorité des conflits sont de nature non internationale, avec des acteurs non étatiques.  Ce qui compte, c’est la protection des civils et de ceux qui ont déposé les armes, a-t-elle fait valoir.  De fait, les Conventions de Genève, leurs protocoles additionnels et le droit international humanitaire ont évolué pour réguler le comportement des acteurs non étatiques.  Selon la chercheuse, il est aujourd’hui bien connu que les groupes armés organisés doivent respecter le droit international humanitaire, y compris les règles se rapportant à la conduite des hostilités. 

Elle a jugé essentiel de sensibiliser les acteurs armés non étatiques au respect des normes internationales afin de renforcer la protection des civils.  D’après une étude récente, au moins cinq différents organes et agences de l’ONU ont élaboré des politiques et des consignes sur la façon d’engager un dialogue avec des acteurs non étatiques, a-t-elle précisé, citant le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, le Département des opérations de maintien de la paix, le Secrétariat des Nations unies, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés.  Toutefois, a-t-elle poursuivi, il y a des questions auxquelles la communauté internationale n’a pas suffisamment tenu compte, notamment sur la façon dont ces groupes peuvent mettre en œuvre le droit international humanitaire.  Il est par conséquent important d’accroître l’appropriation du droit international, a-t-elle plaidé. 

En dernier point, Mme Bellal a fait valoir que l’évaluation par les pairs est un processus bien connu dans la communauté scientifique.  Ce qui est positif dans ces examens, est que le produit fini est plus pertinent et contribue de façon significative au débat général.  Depuis la trente-deuxième conférence du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les États ont réaffirmé leur volonté d’œuvrer à la mise en œuvre du droit international humanitaire.  Si un consensus n’a pas encore été atteint, tous ont reconnu que le droit international humanitaire demeure le cadre juridique approprié pour réguler la conduite des parties au conflit.  Au niveau international, des mécanismes comme l’Examen périodique universel ont permis de faire avancer des questions politiquement sensibles comme le respect des normes en matière de droits de l’homme.  Reconnaître les avantages de la pression par les pairs demeure, selon elle, un mécanisme intéressant pour améliorer le système global de protection du droit international humanitaire. 

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a souligné que les quatre Conventions de Genève et les trois Protocoles qui les complètent constituent un corpus de lois important qui a joué un rôle vital pour juguler la brutalité qui a cours en temps de conflit armé.  Il a estimé que si l’on veut protéger les victimes des guerres, il importe d’assurer le respect des principes et règles du droit humanitaire, lesquels sont codifiés dans les conventions de Genève depuis 1949.  Selon le Ministre, le plus grand défi pour assurer la protection de la vie humaine dans le contexte des conflits modernes est le respect des règles existantes par les groupes armés étatiques et non étatiques.  Ensuite, du fait de nouvelles pratiques dans les conflits armés actuels, il faudrait adopter de nouvelles pratiques appropriées et des politiques qui soient en adéquation avec le droit international humanitaire, a-t-il estimé. 

M. Czaputowicz a aussi souligné que les acteurs non étatiques ne ciblent pas uniquement des adversaires, mais également la population civile.  De même, l’intelligence artificielle et les systèmes d’armes létaux autonomes, comme les robots militaires et les armes cybernétiques, réduisent le rôle et le contrôle des facteurs humains pendant la guerre.  Il a ainsi relevé que ces systèmes d’armes sont plus à même de causer des dommages indiscriminés aux civils. 

Préoccupé par le fait que les règles actuelles n’assurent pas toujours une protection appropriée aux civils, le Ministre a proposé un respect strict des règles générales par tous les acteurs, afin d’améliorer le sort des civils.  De même, des mécanismes efficaces de mise en œuvre des normes humanitaires et l’assurance de punition en cas de violation doivent s’imposer. 

Parmi les principes clefs des conventions de Genève, M. Czaputowicz a mis en exergue l’obligation de protéger les civils, les prisonniers de guerre, les blessés et les naufragés, et ensuite la nécessité de limiter le droit des parties en conflit sur la manière de conduire leurs opérations et sur le choix des armes utilisées.  Il a noté que la nouvelle réalité des conflits modernes fait voir une augmentation du rôle des acteurs non étatiques, tandis que la persistance de vides juridiques entrave la mise en œuvre du droit international humanitaire.  Le Ministre s’est donc interrogé sur la possibilité de modifier le droit international humanitaire, puisque seule une portion congrue de celui-ci peut s’appliquer aux acteurs non étatiques.  Ou alors, a—t-il suggéré, il faut partir du cadre existant pour élaborer de nouvelles règles adaptées aux nouveaux défis. 

Il a également noté que l’absence de mécanismes clairs de responsabilisation, applicables à tous, sans distinction, empêche l’imposition de sanctions.  Il a ainsi rappelé que le juriste polonais auteur du terme « génocide », Raphael Lemkin, avait jadis demandé « pourquoi le meurtre d’un million de personnes est moins important que celui d’une seule ».  Selon M. Czaputowicz, l’impunité ne sera éradiquée que lorsqu’on jugera tous les auteurs présumés d’atrocités.  Et c’est de prime abord la responsabilité des États, mais cela peut aussi se faire par le biais de la coopération judiciaire entre États et par la collaboration avec la Cour pénale internationale (CPI), a-t-il indiqué. 

M. HEIKO MAAS, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a rappelé qu’à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, au cours de laquelle des millions de personnes ont été tuées par les Allemands et de nombreuses villes réduites en cendre, la communauté internationale avait affirmé: « Plus jamais ça ».  Les Conventions de Genève ont été adoptées et demeurent aujourd’hui l’une des réalisations dont la communauté internationale est la plus fière.  Elles constituent, en effet, la clef de voute du droit international humanitaire qu’il s’agit de faire respecter, a-t-il souligné.  Si des questions relevant du droit international figurent régulièrement à l’agenda du Conseil de sécurité, des experts montrent que des violations continuent d’être commises.  « Peut-ont parler de progrès quand le Conseil de sécurité se réunit encore et encore et que des personnes civiles continent de mourir? », s’est-il interrogé, reconnaissant que la complexité des guerres et la présence de groupes extrémistes et terroristes sont autant de défis.  Jour après jour, des personnels humanitaires et médicaux sont attaqués, des écoles et des hôpitaux pris pour cibles, a-t-il dénoncé.  « Nous ne sommes pas à la hauteur des attentes des plus vulnérables, nous ne sommes pas à la hauteur de nos obligations juridiques et morales », a-t-il dit. 

Pour M. Maas, c’est une menace à la paix et à la sécurité internationales quand des dizaines de milliers de personnes meurent et que d’autres craignent pour leur vie.  De fait, il est de notre devoir d’appliquer et de faire appliquer le droit international humanitaire, a-t-il estimé.  « Respectons les principes dont nous sommes tous convenus il y a 70 ans », a-t-il plaidé, ajoutant que ceux qui attaquent les personnels humanitaires doivent être traduits en justice.  C’est pourquoi, a-t-il encore souligné, que nous contribuons aux enquêtes menées en Syrie.  Dans ce contexte, l’objectif de la diplomatie doit être de sensibiliser au droit international humanitaire, comme le font, à leur niveau, les Forces allemandes déployées sur différents théâtres. 

Ces mesures concrètes, pour l’application des Conventions de Genève et pour le respect du droit international humanitaire, font d’ailleurs partie des initiatives lancées conjointement par la France et l’Allemagne en avril dernier, a indiqué le Ministre, appelant tous les États Membres à se joindre aux deux pays.  « Nous ne devons pas oublier les horreurs dont nous avons été les témoins », a-t-il affirmé avant de souligner que les Conventions de Genève sont toujours un signe d’espoir et que tout progrès accompli dans leur mise en œuvre permettra de sauver des vies par dizaines. 

M. JUN ZHANQ (Chine) a exhorté les gouvernements et partis en conflit à « s’acquitter honnêtement » de leurs responsabilités en matière de droit international humanitaire (DIH).  « Les gouvernements sont les premiers responsables du respect du droit international humanitaire » a insisté le représentant de la Chine.  Le délégué s’est félicité des efforts du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) qui adhère au principe de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.  « La mise en œuvre du droit international humanitaire doit être renforcée en mettant l’accent sur les mécanisme existants », a insisté le représentant de la Chine.  Il a ensuite constaté que les nouvelles formes de conflits comme la cybertechnologie et les agissements de groupes armés non traditionnels remettent en cause l’applicabilité du droit international humanitaire. 

Par ailleurs, le représentant de la Chine a estimé que le Conseil de sécurité devrait accorder une grande importance aux causes sous-jacentes des conflits.  « Le Conseil de sécurité devrait s’acquitter avec honnêteté de ses missions de maintien de la paix et de la sécurité internationales », a encore insisté le représentant.  Il a appelé à favoriser le dialogue plutôt que la confrontation.  Il a ensuite rappelé que la Chine est un des premiers pays à avoir adhéré aux Conventions de Genève et que son pays les promeut en renforçant les législations nationales et en menant des formations dans l’armée et des activités de sensibilisation dans la société. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume –Uni) a fait valoir que le droit international humanitaire est le meilleur cadre juridique pour assurer la paix et la sécurité internationales.  Pour le Royaume-Uni, a-t-elle souligné, l’appui à la justice pénale internationale et au droit international humanitaire sont des éléments cruciaux de nos normes internationales.  De fait, a-t-elle ajouté, la justice et la responsabilisation pour les crimes les plus graves sont une mesure juste et cruciale pour construire la paix sur le long terme.  À cette aune, le Gouvernement britannique considère que la Cour pénale internationale a un rôle important de responsabilisation lorsque les États ne peuvent ou ne veulent pas se conformer au droit international humanitaire, a poursuivi Mme Pierce.  Elle a encore indiqué que, lors de la prochaine conférence du CICR , le Royaume-Uni présentera un rapport volontaire, avec pour sujets centraux la justice et la responsabilisation, la prévention des violences sexuelles et la lutte contre les traumatismes. 

Poursuivant, la représentante s’est inquiétée du fait qu’en Ukraine, les citoyens de Crimée sont privés d’accès aux services fondamentaux parce qu’ils ont été privés de citoyenneté, ce qui est contraire au droit international humanitaire.  Au Mali et au Sahel, la détérioration de la sécurité entraîne des violations du droit international humanitaire perpétrées par les milices et les forces armées.  Mais, c’est en Syrie que ces violations atteignent de terribles niveaux, a-t-elle dénoncé, évoquant la famine, les détentions arbitraires, les personnes chassées de leurs foyers à Alep et ailleurs, ce qui, là encore, est contraire au droit international humanitaire et au principe d’humanité. 

Nous n’avons pas de réponse quant au retour du droit international humanitaire en Syrie, ni sur les raisons pour lesquelles les autorités syriennes ne respectent pas les Conventions de Genève et bombardent des écoles et des hôpitaux.  Se félicitant de la commission d’enquête décidée par le Conseil, elle a assuré que les responsables devront répondre de leurs actes pour des violations relevant de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité.  Avant de conclure, la représentante a rappelé que l’effort humanitaire de son pays en Syrie s’élevait à plus de 3 millions de dollars et a affirmé que « ce n’est qu’ensemble que nous pourrons lutter contre la nature complexe des conflits ».

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud), qui s’est exprimé également au nom des deux autres pays africains membres du Conseil de sécurité (Côte d’Ivoire et Guinée équatoriale), a estimé que les Conventions de Genève sont la pierre angulaire du droit international humanitaire.  Il a déploré le fait que des milliers de gens, à travers le monde, continuent de payer un lourd tribut du fait des conflits armés, notamment les femmes et les enfants, et sont parfois obligés de se réfugier dans d’autres pays.  Le représentant a appelé la communauté internationale à trouver des solutions à la question de l’utilisation d’enfants soldats et au problème de l’exploitation et des abus sexuels en temps de conflit.  Et dans cette ère nouvelle d’extrémisme, le respect historique des travailleurs humanitaires, du personnel médical, des écoles et des hôpitaux et d’autres infrastructures civiles essentielles n’est plus de mise, a-t-il dit. 

Le délégué a relevé que les conflits en Afrique retardent la paix et la sécurité sur le continent, sachant qu’il s’agit là de prérequis pour la prospérité de l’Afrique.  Et ces défis sont plus inquiétants quand on note l’évolution des conflits traditionnels avec, par exemple, l’usage de technologies modernes qui laissent la place désormais à l’usage de nouvelles méthodes létales, y compris des armes téléguidées et des systèmes d’armes létaux autonomes qui conduisent à « déshumaniser la guerre ».  Ainsi, leur usage et les destructions qu’elles peuvent causer ont de sérieuses implications juridiques, éthiques et pratiques sur le droit international humanitaire. 

Le représentant a aussi demandé que le Conseil de sécurité assure le respect de la sécurité des humanitaires, puisque sans cela, a-t-il indiqué, il ne sera pas facile d’apporter de l’aide aux populations dans le besoin.  Pour les pays africains membres du Conseil, la meilleure manière d’assurer le respect du droit international humanitaire et de mettre fin aux souffrances des civils et des personnes vulnérables, est d’empêcher qu’il y ait des conflits armés.  De même, a souligné le représentant, la responsabilisation est tout aussi cruciale.  Il a appelé à mettre fin à l’impunité, notamment en poursuivant en justice les auteurs de crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Et c’est la responsabilité première des États de le faire, y compris par des mécanismes améliorés d’assistance légale mutuelle. 

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que la violence et la souffrance dans le monde ne diminuent pas malgré les engagements de la communauté internationale, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, de maintenir la paix et la sécurité internationales.  Il a estimé que la consolidation du droit international humanitaire est plus urgente que jamais et a déploré que les quatre Conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels ne bénéficiant pas du respect requis.  « Ces textes sont souvent ignorés et négligés comme on peut le voir en Palestine, en Syrie et dans les territoires rohingya », a ajouté le représentant du Koweït.  Il a estimé que le meilleur moyen de favoriser le respect du droit international humanitaire était de consolider l’état de droit. 

Le représentant a dit l’importance du Conseil de sécurité pour faire respecter le droit international humanitaire (DIH) et consolider l’état de droit en garantissant le respect à part entière des résolutions adoptées par l’ONU.  Il a rappelé que les Casques bleus sont aussi responsables de la protection des civils conformément au mandat qui leur a été confié.  Le représentant du Koweït a aussi jugé nécessaire de demander des comptes à ceux qui sont responsables de crimes de guerre, de crimes de masse et de crimes contre l’humanité.  Il a souligné l’importance des régimes de sanctions qui peuvent jouer un rôle important s’ils sont utilisés de manière efficace et transparente. 

Le non-respect des normes de droit international humanitaire a des conséquences « inacceptables » sur les populations civiles, a déploré M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine), dénonçant les États en conflit qui, « à dessein ou par omission », bafouent ces normes et manquent à leur responsabilité de protéger leur population.  À ses yeux, la prolifération de groupes non étatiques sans scrupules présente également un défi « des plus complexes », qui rend nécessaire une action urgente de la part des États affectés, ainsi que des organisations internationales et régionales.

Le représentant a, par ailleurs, appelé à diffuser davantage les principes fondateurs du droit international humanitaire, notamment dans le cadre de la formation des forces armées.  Il a également appelé à faire en sorte que ces principes soient disponibles dans toutes les langues minoritaires des populations affectées par des conflits.  Enfin, le représentant a estimé que le Conseil de sécurité devait garantir le respect des mandats des opérations de maintien de la paix de l’ONU, tout en tenant compte des caractéristiques sociale, économique et géopolitique qui pèsent sur la prolongation des conflits.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a constaté que les Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels sont trop souvent bafoués, que ce soit en Syrie, en Libye, au Yémen, en Palestine, en Afghanistan, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo ou encore au Soudan du Sud.  Certaines parties vont mêmes jusqu’à intégrer sciemment les violations de ces règles dans leur stratégie militaire pour priver les populations de tout secours et obtenir leur reddition, a-t-elle accusé.  Dans ce contexte, les efforts de la communauté internationale doivent, selon elle, s’intensifier autour de trois priorités, la première étant de garantir l’accès de l’aide humanitaire aux populations civiles.  Pour que le personnel humanitaire et médical puisse accéder aux civils, il doit être protégé de toute violence et ne pas être ciblé.  « On ne tire pas sur une ambulance », a lancé la représentante, saluant la prise en compte de cet enjeu avec la résolution 2286.  Du reste, a-t-elle ajouté, c’est pour passer des mots aux actes que la France a initié en 2017 une déclaration politique afin de favoriser la mise en œuvre de cette résolution aujourd’hui endossée par 44 États. 

Pour Mme Gueguen, la deuxième priorité est la prévention des violations du droit international humanitaire.  C’est ce que nous faisons en plaçant la protection des civils, et plus particulièrement des femmes et des enfants, au cœur des mandats des opérations de maintien de la paix, comme c’est le cas pour la MONUSCO, la MINUSMA et la MINUSCA, a-t-elle expliqué, appelant à ce que leurs moyens soient préservés.  Nous devons aussi veiller à ce que les forces non onusiennes soutenues par ce Conseil mènent leurs opérations dans le strict respect du droit international humanitaire, a souligné la représentante.  C’est, à ses yeux, ce que doit permettre le cadre de conformité des droits de l’homme de la Force conjointe du G5 Sahel.  S’agissant des actions militaires de la France, a-t-elle précisé, le droit international humanitaire est intégré dès la phase de planification et fait partie intégrante de notre coopération de sécurité et de défense. 

La troisième priorité mentionnée par Mme Gueguen est la lutte contre l’impunité.  Il convient, a-t-elle argué, de renforcer les capacités nationales pour mener des enquêtes impartiales et indépendantes.  Lorsque les mécanismes nationaux sont insuffisants ou inadaptés, il faut soutenir le recours aux mécanismes internationaux, a poursuivi la représentante, réitérant l’appel de la France à l’universalisation du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.  Elle a également jugé nécessaire d’améliorer la collecte d’informations, avant de qualifier d’avancée significative la mise en place de la base de données de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui répertorie les attaques contre les personnels et les infrastructures de santé.  Elle a ensuite annoncé que la France et l’Allemagne présenteront en septembre un appel à l’action humanitaire, destiné à identifier les actions concrètes que les États peuvent prendre pour renforcer le respect du droit international humanitaire. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a proposé plusieurs pistes « simples et concrètes » pour renforcer le respect du droit international humanitaire, à commencer par la diffusion de ses règles auprès de tous les acteurs concernés.  Pour ce faire, la représentante a proposé d’intégrer dans les programmes scolaires, « dès le plus jeune âge », les principes fondateurs du droit international humanitaire, afin d’ancrer une « culture d’humanité » dans la société.  Ces principes doivent également être intégrés à la formation du personnel militaire, a-t-elle estimé, soulignant également le rôle des commissions nationales de droit humanitaire pour sensibiliser le public à cette question en temps de paix.

Par ailleurs, la représentante a appelé les États Membres à prendre toutes les mesures nécessaires pour remplir leur obligation de « respecter et faire respecter » le droit international humanitaire.  À ses yeux, il appartient ainsi aux États de « donner l’exemple », en usant de leur influence lorsqu’ils participent à une coalition militaire ou appuient un groupe armé non étatique dans le cadre d’un conflit armé.  En tant que garant de la paix et la sécurité mondiales, le Conseil de sécurité doit aussi rappeler aux États Membres et aux parties à un conflit leurs obligations, a-t-elle estimé.

La représentante a, en outre, appelé à veiller à ce que les mesures prises dans le domaine de la lutte contre le terrorisme n’entravent pas le travail des organisations humanitaires, dont l’action est « neutre et impartiale », a-t-elle rappelé.  La représentante a ainsi indiqué que la Belgique et l’Union européenne (UE) organiseraient en septembre prochain, en marge du débat général de l’Assemblée générale, un évènement de haut niveau sur les effets des mesures antiterroristes sur l’espace humanitaire.

Enfin, la représentante a estimé que les États ne devaient pas uniquement se cantonner à des actions de préventions.  « Il est impératif de lutter contre l’impunité pour les crimes les plus graves », a-t-elle déclaré, appelant également le Conseil à renforcer son appui aux procédures judiciaires nationales, aux mécanismes hybrides et à la Cour pénale internationale (CPI).

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a constaté que beaucoup de choses avaient changé depuis l’adoption des Conventions de Genève, il y a 70 ans.  Les nouvelles technologies permettent d’apporter une meilleure précision, mais s’avèrent aussi être une force encore plus meurtrière, tandis que la montée en puissance de groupes armés non étatiques, notamment les groupes terroristes qui n’obéissent à aucune règle, créent moults défis pour les États qui cherchent à les vaincre.

Le représentant des États-Unis a rappelé que les Conventions de Genève font partis des rares textes bénéficiant d’une adhésion universelle.  « Nous avons plusieurs outils pour faire face aux violations du droit international humanitaire » a dit le représentant des États-Unis en citant notamment les tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda, pour l’ex-Yougoslavie, le Cambodge, la Sierra Leone et d’autres.  Il a toutefois alerté qu’afin d’assurer la pertinence à venir des Conventions, leur respect et la reddition de compte sont essentiels, indiquant ensuite que son gouvernement appuie les efforts visant à disséminer des informations précises sur le droit international humanitaire.  Ainsi, les formations des forces américaines englobent des informations détaillées sur le droit international humanitaire.  « La protection des civils et personnels et infrastructures humanitaires sont notre priorité », a insisté le représentant des États-Unis.  « Nous demandons à tous les États Membres et aux acteurs qu’ils soutiennent de respecter le droit international humanitaire et de demander des comptes à ceux qui ne le font pas », a-t-il conclu. 

M. DMITRY A.  POLYANSKIY (Fédération de Russie) a observé que l’histoire a connu des démarches différentes vis-à-vis des conflits armés.  Autrefois, a-t-il dit, la guerre était contraire au droit.  Hélas, il a fallu à l’humanité plusieurs siècles et deux conflits armés mondiaux pour comprendre l’humanisation de la guerre et élaborer en conséquence un corpus de protection.  Les Conventions de Genève sont ainsi devenues le socle du droit contemporain régissant les conflits armés, a souligné le représentant.  Leurs dispositions restent d’actualité, de même que d’autres instruments parfois plus anciens.  Il a ainsi rappelé qu’en novembre dernier s’était tenue l’assemblée parlementaire de l’OSCE, consacrée au cent-cinquantième anniversaire de la Déclaration de Saint-Pétersbourg interdisant les projectiles incendiaires en temps de conflit armé. 

Les Conventions de Genève ont représenté les leçons tirées de l’expérience amère des guerres mondiales, a résumé le représentant.  Il a affirmé qu’au cours de ces conflits, l’Allemagne avait refusé de respecter les normes en vigueur dans le droit international.  Les forces hitlériennes se sont laissé guider par une tactique de terre brûlée.  De plus, comme le montrent les recherches, les punitions collectives ont permis de réduire la population dans les territoires occupés et la famine a été utilisée comme arme de guerre.  Ces violations massives ont d’ailleurs été à l’origine des procès de Nuremberg, a-t-il encore rappelé, relevant que les accusés se sont justifiés en invoquant l’absence d’obligations concrètes vis-à-vis des civils.  C’est ce qui a entraîné la convocation de la conférence politique qui a donné vie en 1949 aux Conventions, avant l’adoption en 1977 de protocoles additionnels. 

Citant l’acte final des Conventions, le représentant a jugé que ces paroles sont toujours d’actualité.  Néanmoins, a-t-il concédé, les conflits continuent d’être une réalité et le Conseil de sécurité est toujours contraint d’attirer l’attention sur le respect du droit international humanitaire.  Aujourd’hui, a constaté le délégué, les conflits armés se font de plus en plus souvent suite à l’effondrement des institutions étatiques, après le renversement du gouvernement légitime par des forces soutenues de l’extérieur.  Dans ces conditions, de nombreux États sont tentés de dissimuler les crimes d’autres pays, a-t-il déploré, profitant de l’occasion pour répondre à son homologue américain.  « Comme notre État a été mentionné nommément, il semble que vous ayez des informations peu fiables », a-t-il lancé, réfutant notamment l’existence d’un conflit armé sur le territoire de la Crimée.  La situation en Syrie n’est pas un thème de discussion non plus, a-t-il argué, renvoyant au respect du droit international humanitaire « au-delà de l’Euphrate ».  « Il est peut-être temps de se pencher sur cette question », a-t-il indiqué.  En conclusion, le représentant a plaidé pour qu’en plus des mesures pour le soutien à la paix et à la sécurité, le Conseil se penche sur les mesures permettant de limiter l’intensité des conflits et de les humaniser. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a appelé la communauté internationale à garantir la mise en œuvre effective du droit international humanitaire.  Pour ce faire, le Conseil de sécurité doit, selon lui, s’ériger en partenaire de l’intégralité des parties à un conflit.  Cela suppose notamment, a-t-il ajouté, que le Conseil présente un front uni.  Dans ce cadre, le représentant a jugé primordial que les résolutions du Conseil, y compris les mesures de sanctions, telles que les embargos sur les armes, soient respectées par tous les États Membres.  M. Djani a également appelé les acteurs extérieurs à un conflit à faire preuve de retenue afin de ne pas envenimer la situation.

Par ailleurs, le représentant a appelé la communauté internationale à renforcer la capacité des pays en conflit à protéger leur population et respecter le droit international humanitaire.  La coopération Sud-Sud et triangulaire avec les pays en situation de post-conflit doit également faciliter l’échange de pratiques optimales en matière humanitaire, a-t-il dit.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré que le droit international humanitaire représente une norme minimale de dignité, et que les Conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels représentent les pierres angulaires de la protection des victimes des conflits, en particulier des civils.  Ces conventions représentent aussi un outil fondamental pour le travail du Conseil de sécurité visant à promouvoir la paix et la sécurité internationales.  Il a regretté que les discours au sein du Conseil de sécurité contrastent souvent avec la réalité sur le terrain.  « Nous pensons que la bonne mise en œuvre du droit international humanitaire va au-delà de l’application des mesures de protection et concerne aussi les moyens de renforcer l’état de droit et la lutte contre l’impunité.  Il a ensuite fait savoir que le Pérou avait créé une commission nationale d’étude du droit international humanitaire pour mieux diffuser ce droit.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: les membres du Conseil de sécurité condamnent l’attentat meurtrier à Benghazi et saluent l’engagement des parties à respecter la trêve proposée par l’ONU

8595e séance – après-midi
CS/13915

Libye: les membres du Conseil de sécurité condamnent l’attentat meurtrier à Benghazi et saluent l’engagement des parties à respecter la trêve proposée par l’ONU

Réunis d’urgence à la demande de la France sur la situation en Libye, les membres du Conseil de sécurité ont, cet après-midi, unanimement condamné un attentat à la voiture piégée survenu le jour même à Benghazi, dans lequel trois membres du personnel de l’ONU ont trouvé la mort.  Les Quinze ont également salué, toujours au cours de leurs interventions faites à titre national, l’annonce par les parties au conflit d’adhérer à la trêve humanitaire initialement proposée par les Nations Unies, et censée commencer dans la soirée à l’occasion de la fête musulmane de l’Eïd al-Adha.

L’attaque « épouvantable » d’aujourd’hui est survenue alors que les habitants de Benghazi s’apprêtaient à célébrer l’Eïd al-Adha, dans une zone « supposée être sous le contrôle sécuritaire total » de l’Armée nationale libyenne (ANL) du général Khalifa Belqasim Haftar, a souligné, à l’entame de la réunion, la Sous-Secrétaire générale de l’ONU aux opérations de maintien de la paix, précisant que l’attentat avait fait trois morts et trois blessés parmi le personnel de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL). 

Aux yeux de Mme Bintou Keita, cette attaque souligne à la fois le « danger constant » que représente le terrorisme dans l’ensemble de la Libye et les limites du contrôle exercé par les parties en l’absence « d’un gouvernement, d’une armée et d’une police uniques ».  Cela confirme également, a-t-elle ajouté, combien la reprise des combats dans le pays, il y a quatre mois, est en train de « créer un vide » dans lequel les éléments radicaux peuvent facilement s’engouffrer.  Dans ce cadre, la Sous-Secrétaire générale a expliqué la décision de l’Organisation de ne pas ordonner le rapatriement de son personnel sur place.  « L’ONU n’a aucunement l’intention de quitter la Libye », a-t-elle déclaré, estimant que sa place était aux côtés des Libyens, « à l’instar de nos collègues courageux qui ont fait le sacrifice de leur vie aujourd’hui ».

Dans ce contexte troublé, Mme Keita a toutefois notifié le Conseil d’un développement positif majeur.  Le Premier Ministre du Gouvernement d’entente nationale basé à Tripoli, M. Fayez el-Sarraj, et les forces de l’ANL, du général Haftar, ont tous deux accepté le principe d’une trêve, qui devait commencer dans la soirée, à l’entame de l’Eïd al-Adha, a-t-elle confirmé. 

Proposée aux parties par le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Ghassan Salamé, le 29 juillet dernier, cette trêve constitue la première phase du plan en trois étapes de M. Salamé pour sortir de l’impasse actuelle en Libye.  Ce plan comprend également la tenue d’une réunion internationale sur le conflit et l’organisation d’une réunion interlibyenne où toutes les régions du pays seraient conviées.  En outre, le Représentant spécial propose aux parties d’assortir la trêve annoncée de mesures de confiance, telles que l’échange de prisonniers et la libération de personnes enlevées ou détenues de façon arbitraire.

« C’est la première étape vers un retour à un processus politique », a salué, aujourd’hui, la haute fonctionnaire, pour qui il convient désormais de faire avancer les deux étapes suivantes du plan de M. Salamé. 

Faisant écho à son appel, le Royaume-Uni a proposé que le Conseil publie, dimanche 11 août, une nouvelle déclaration à la presse afin de soutenir la trêve et les efforts du Représentant spécial, une proposition également appuyée par la Pologne et la France.  Cette dernière, qui était à l’initiative de la réunion, a invité le Gouvernement d’entente nationale et l’ANL à saisir l’occasion qu’offre cette trêve, non seulement pour alléger les souffrances de la population libyenne, mais aussi pour avancer dans la direction d’une solution politique globale à la crise en Libye.

« Cette trêve est essentielle, afin d’éviter que la situation ne se dégrade encore davantage, pour permettre à la population de sortir des zones de conflit et pour permettre l’accès de l’aide humanitaire à ceux qui en ont urgemment besoin », a souligné la délégation.

Combiné avec le plan en trois points proposé par M. Salamé, un cessez-le-feu permanent permettrait en outre de relancer le processus politique et les négociations de paix afin d’aboutir à une Libye unifiée et démocratique, a renchéri l’Allemagne. 

En réponse, le représentant libyen a fait savoir que le Conseil présidentiel de la Libye était effectivement disposé à répondre positivement à l’appel à la trêve lancé par le Représentant spécial, à condition qu’elle s’applique sur toutes les zones de conflit et qu’elle ne soit pas l’occasion de mener des actions militaires, de déplacer des troupes ou de faire intervenir l’aviation.  « La soi-disant Armée nationale libyenne prétend avoir éliminé le terrorisme, mais on voit bien que son agression contre Tripoli est un désastre qui a fait de nombreuses victimes, causé le déplacement de plus de 100 000 personnes, endommagé des infrastructures et exacerbé les souffrances des populations », a par ailleurs dénoncé la délégation. 

La Fédération de Russie a toutefois mis en garde que toute tentative visant à identifier les coupables parmi les belligérants serait contre-productive et saperait les perspectives de dialogue entre les parties. 

Plusieurs membres du Conseil, dont la Belgique, le Royaume-Uni, la Russie, l’Allemagne et la République dominicaine, ont par ailleurs appelé les États Membres à respecter l’embargo sur les armes en Libye afin d’éviter que des « appuis externes » ne contribuent à l’aggravation de la crise actuelle.  La Guinée équatoriale a de plus appelé à « rectifier le tir » en réduisant le nombre de « personnes tierces » impliquées dans le conflit. 

À l’instar de l’Indonésie et de la Guinée équatoriale, nombre des membres du Conseil de sécurité ont également appelé à ce qu’une enquête « minutieuse » soit immédiatement ouverte par les autorités locales pour faire toute la lumière sur l’attentat d’aujourd’hui et traduire ses auteurs en justice. 

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

À l’entame de la réunion, Mme BINTOU KEITA, Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, a abordé « la nouvelle tragique » de l’attentat à la voiture piégée qui s’est produit aujourd’hui à Benghazi.  Cette attaque a fait plusieurs victimes, y compris des membres du personnel de l’ONU qui travaillaient et vivaient dans la ville, a-t-elle indiqué, avant de préciser que trois membres du personnel onusien avaient trouvé la mort dans l’attentat et que trois autres avaient été blessés.  Des dizaines de Libyens ont également été blessés.

Cette attaque « épouvantable » est survenue alors que les habitants de Benghazi s’apprêtaient à célébrer l’Eïd al-Adha, dans une zone « supposée être sous le contrôle sécuritaire total » de l’Armée nationale libyenne (ANL) du général Khalifa Belqasim Haftar, a poursuivi la Sous-Secrétaire générale.  À ses yeux, cela souligne le « danger constant » que représente le terrorisme dans toute la Libye, ainsi que les limites du contrôle exercé par les parties en l’absence « d’un gouvernement, d’une armée et d’une police uniques ».  Cela confirme également, a ajouté Mme Keita, que la reprise récente des combats est en train de « créer un vide » dans lequel les éléments radicaux qui aspirent au chaos et à la violence peuvent facilement s’engouffrer.  « L’ONU n’a aucunement l’intention de quitter la Libye », a ensuite affirmé la Sous-Secrétaire générale, soulignant que la place de l’Organisation était aux côtés des Libyens, « à l’instar de nos collègues courageux qui ont fait le sacrifice de leur vie aujourd’hui ».

Mme Keita a ensuite attiré l’attention sur les autres développements significatifs qui ont eu lieu aujourd’hui en Libye.  En effet, a-t-elle expliqué, le Premier Ministre du Gouvernement d’entente nationale, M. Fayez el-Sarraj, et les forces de l’ANL du général Haftar ont tous deux répondu favorablement à l’appel du 29 juillet du Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Ghassan Salamé, en faveur de l’instauration, à partir de ce soir, d’une trêve à l’occasion de l’Eïd al-Adha.  « J’espère qu’ils respecteront réellement, de bonne foi, leur engagement public », a appelé la haute fonctionnaire de l’ONU, avant de déclarer: « La violence insensée et absurde doit cesser. »

« Aucune des deux parties ne pourra sortir vainqueur du conflit actuel », a en outre estimé la Sous-Secrétaire générale.  « Aujourd’hui apporte clairement la preuve qu’il y a déjà beaucoup de perdants, dont la majorité sont des civils innocents. »  Plus de quatre mois de combats ont démontré qu’aucune victoire militaire rapide ne permettrait de résoudre la « situation complexe » sur le terrain, a-t-elle affirmé, jugeant que la situation actuelle ne permettait ni de combattre efficacement le terrorisme, ni de résoudre la « tragédie de la migration illégale », ni de libérer le potentiel économique de la Libye au bénéfice de ses habitants et de la stabilité de la région.

Mme Keita a ensuite indiqué qu’en amont de l’annonce de la trêve, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) avait travaillé d’arrache-pied pour rétablir la confiance entre les parties.  Les mesures humanitaires immédiates proposées, telles que l’échange de prisonniers et de dépouilles mortelles et l’autorisation de rendre visite ou de téléphoner aux prisonniers, peuvent contribuer à réduire les tensions afin de permettre à la trêve de bien avoir lieu, a-t-elle ajouté.  Elle a exhorté les parties à se saisir de cette occasion, notant que « c’est la première étape vers un retour à un processus politique ».  Il est essentiel, a-t-elle affirmé, d’« étendre et approfondir » la trêve au travers de ces mesures de rétablissement de la confiance et que les parties avancent rapidement vers l’organisation d’une conférence internationale afin qu’elles puissent s’engager de nouveau sur une feuille de route pour sortir le pays du conflit et le remettre sur la voie d’un processus démocratique.  Conformément à la proposition du Représentant spécial, a-t-elle précisé, cette conférence serait ensuite suivie d’une réunion interlibyenne.  Elle a de plus estimé que la déclaration du Conseil, dans laquelle celui-ci fait part de son appui à la trêve, avait été importante pour démontrer l’unité renouvelée du Conseil de sécurité sur la question libyenne, ainsi que son engagement en faveur de l’initiative en trois points proposée par le Représentant spécial.

Mme Keita a par ailleurs déploré le chaos qui règne dans le sud de la Libye, selon elle miné par des querelles intercommunautaires, notamment entre les groupes tebu et ahali à Mourzouq.  Ces tensions, qui sont exacerbées par la polarisation sur l’ensemble du territoire national, ont pris un mauvais tournant, a-t-elle alerté, avant de préciser que le 4 août, trois raids aériens de l’ANL contre des éléments tebu ont causé la mort de 45 personnes.  Elle a ensuite appelé à faire en sorte que les tensions intercommunautaires à Mourzouq ne s’étendent pas à d’autres villes du sud du pays.  La Sous-Secrétaire générale a par conséquent exhorté le Conseil à veiller à ce que la trêve ne soit pas appliquée uniquement dans les zones sous le contrôle clair d’une des deux parties, mais bien dans l’ensemble de la Libye.

Avant d’achever son intervention, Mme Keita a abordé le cas de Mme Siham Sergewa, une juriste et parlementaire enlevée de son domicile le 17 juillet et dont on est sans nouvelles depuis.  C’est une attaque « inacceptable » contre une femme juriste et un crime contre toutes les femmes libyennes et la perspective de voir les femmes jouer un rôle dans la vie politique de la Libye, a-t-elle condamné, appelant les autorités de Benghazi à trouver les responsables de cet enlèvement « lâche ».

Mme ANNE GUEGUEN (France) a déclaré qu’il était essentiel que le Conseil de sécurité se réunisse en urgence étant donné les développements en Libye ces dernières heures.  Le conflit libyen est à un moment critique, a-t-elle souligné.  Elle a condamné l’attaque contre le personnel de la MANUL, à Benghazi, et a demandé que les circonstances de cet acte soient établies sans délai et que les responsables soient traduits en justice.

La représentante a ensuite salué la trêve acceptée aujourd’hui par les deux parties, « qui est une première étape importante pour alléger les souffrances de la population libyenne et créer les conditions pour aller vers une solution politique durable, permettant à la Libye de retrouver la paix et la stabilité ».  Elle a appelé l’ANL et le Gouvernement d’entente nationale à observer cette trêve à travers la Libye et dans la durée, de façon à permettre le temps des discussions nécessaires pour aller plus loin.  Cette trêve est essentielle afin d’éviter que la situation ne se dégrade encore davantage, pour permettre à la population de sortir des zones de conflit et pour permettre l’accès de l’aide humanitaire à ceux qui en ont urgemment besoin, a-t-elle insisté.

Poursuivant, Mme Gueguen a estimé que la trêve doit être accompagnée de mesures de confiance afin d’ouvrir la voie à un cessez-le-feu durable, assorti de garanties crédibles. 

Elle a également affirmé que la mise en œuvre d’un cessez-le-feu durable qui s’inscrive dans la relance du processus politique sous l’égide du Représentant spécial est la seule issue. 

La France appelle les parties libyennes à reprendre les discussions sur cette base, sous l’égide du Représentant spécial, afin que les éléments d’un accord répondant aux préoccupations de toutes les parties et surtout aux attentes de la population libyenne puissent être rapidement réunis sur la base des principes agréés à Paris, Palerme et Abou Dhabi. 

Elle a précisé que ces paramètres doivent être assortis de réformes économiques et sécuritaires, avec pour priorité la mise en œuvre rapide d’une gouvernance transparente de la banque centrale, la réforme de la gestion des revenus pétroliers, l’unification des institutions financières et sécuritaires, au bénéfice de tous les Libyens.  Ils doivent également être complétés par des dispositions solides en matière sécuritaire et sous-tendus par le respect des résolutions du Conseil de sécurité, en particulier s’agissant de l’embargo sur les armes.

La France appelle instamment toutes les parties à saisir l’occasion qu’offre cette trêve pour avancer dans la direction d’une solution politique globale et soutient, dans cette optique, le principe d’une déclaration à la presse proposé par le Royaume-Uni. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a condamné l’attentat perpétré aujourd’hui à l’encontre de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) à Benghazi, et a exprimé ses condoléances aux familles des victimes.  Elle a appelé toutes les parties à respecter la trêve annoncée et remercié le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye pour les efforts qu’il déploie afin de faire en sorte que cette trêve ait bien lieu.  « C’est un moment essentiel pour les parties libyennes », a-t-elle estimé, appelant ces dernières à saisir cette occasion afin d’assurer la reprise du dialogue politique. 

Par ailleurs, la représentante a salué la décision de l’ONU de ne pas procéder à une évacuation de son personnel sur place en Libye, et ce, malgré les dangers actuels.  Elle a enfin appelé tous les pays à appliquer et respecter l’embargo sur les armes et à tout faire pour que les parties reprennent rapidement un dialogue politique.

La représentante a enfin proposé que le Conseil publie demain une déclaration à la presse sur la situation en Libye, afin de démontrer son unité sur la question et son appui à la trêve et aux efforts du Représentant spécial.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a déploré et condamné l’attaque contre le personnel de la MANUL à Benghazi ce matin, tout en précisant qu’il est de la responsabilité des autorités locales d’identifier et de condamner les criminels coupables de cet attentat.  Elle a aussi regretté le fait que le droit international humanitaire ait de nouveau été violé de manière flagrante au cours des derniers jours en Libye, les civils en étant les premières victimes.  Ces crimes ne doivent rester impunis, que ce soit devant les tribunaux nationaux ou à la Cour pénale internationale (CPI), a-t-elle dit. 

Mme Van Vlierberge a en outre exigé que l’accord donné par le Gouvernement d’entente nationale et l’Armée nationale libyenne à la proposition de trêve du Représentant spécial soit respecté.  Elle a exhorté les protagonistes à transformer cette trêve en un cessez-le-feu durable.  En parallèle, un dialogue politique doit reprendre, sans conditions et sous la médiation du Représentant spécial Salamé, a—t-elle affirmé.  Elle a enfin demandé le respect de l’embargo sur les armes, et que cesse le recours au recrutement de combattants, y compris de mercenaires étrangers et d’éléments terroristes, criminels et listés par le Conseil de sécurité.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a condamné l’attentat de Benghazi, avant de demander au Conseil de sécurité de soutenir l’action du Représentant spécial du Secrétaire général.  Il a salué le fait que les parties au conflit aient accepté la trêve proposée par le Représentant spécial et soutenue par le Conseil de sécurité.  Le représentant a rappelé qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise en Libye, tout en invitant les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire.  Dans le cadre de la célébration de l’Eïd al-Adha par les pays arabes et musulmans, le délégué a dit souhaiter que cette célébration leur apporte paix et prospérité. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a condamné l’attentat perpétré aujourd’hui à l’encontre de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) à Benghazi.  Il a dit attendre avec impatience les résultats de l’enquête qui sera menée par les autorités locales.  Pour l’heure, le représentant a renouvelé son soutien en faveur de tous les membres du personnel de la MANUL, ainsi que du Représentant spécial pour la Libye.

Par ailleurs, le représentant a salué l’annonce par les parties de leur volonté d’honorer la trêve proposée par M. Salamé, à l’occasion de l’Eïd al-Adha.  Il les a appelées à la respecter, avant d’exhorter tous les acteurs internationaux bénéficiant d’une influence sur les parties à œuvrer en ce sens.  Le représentant a en outre exhorté l’ensemble des parties libyennes à se mettre d’accord sur un cessez-le-feu permanent et à souscrire au plan en trois points proposé par M. Salamé, dans le but de relancer le processus politique qui devrait permettre d’aboutir à une Libye unifiée et démocratique.

Le représentant a enfin appelé tous les États Membres à faire respecter l’embargo sur les armes décrété par le Conseil concernant la Libye. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a condamné dans les termes les plus fermes l’attentat perpétré aujourd’hui contre la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), et a transmis ses condoléances aux familles des victimes.  Il a ensuite rappelé le bilan de l’attentat qui a frappé Tajoura au mois de juin, ainsi que les « évènements déchirants » qui se sont produits cette semaine dans le village de Mourzouq, dans le district de Qalaa, faisant plus de 100 victimes, dont 42 décès.  Il s’est inquiété de la létalité des attaques menées depuis le mois de mai, notant que les appuis externes, qui se font en violation de l’embargo sur les armes, viennent aggraver la crise.  Il a appelé l’ensemble des parties à respecter le caractère sacré de l’Eïd, pour ensuite exiger le maintien de cessez-le-feu et la repise du dialogue politique sous les auspices de l’ONU.

Dans une déclaration très courte, M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a condamné l’attentat d’aujourd’hui à Benghazi.  Il a appuyé l’annonce d’une trêve à l’occasion de l’Eïd al-Adha, ainsi que les mesures de confiance proposées par le Représentant spécial.  Il a ensuite exhorté les parties au conflit à garantir un accès humanitaire sans entrave à ceux qui en ont besoin et à protéger la population civile.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a condamné dans les termes les plus forts la « lâche attaque » perpétrée dans une zone commerçante du quartier al-Hawari de Benghazi, et a appelé à traduire les auteurs de cet acte ignoble devant les tribunaux compétents.  Il a constaté que plus de quatre mois après le début des hostilités pour le contrôle de la capitale Tripoli, la crise libyenne est plus que jamais dans l’impasse.  Cette première attaque contre du personnel de la MANUL doit interpeller notre Conseil sur la nécessité de convaincre les parties prenantes à accepter un cessez-le-feu à court terme, a-t-il estimé.

Le représentant a ensuite signalé que les livraisons avérées d’armes aux parties en conflit alimentent un conflit « dont l’enlisement éloigne les chances d’un cessez-le-feu et d’une reprise immédiate du dialogue interlibyen ».  Dans ce contexte, la Côte d’Ivoire salue l’annonce faite ce jour par le général Khalifa Haftar d’une trêve à la veille de l’Eïd al-Adha et se félicite de l’engagement du Gouvernement d’entente nationale de sa disponibilité à accepter aussi un cessez-le-feu humanitaire à l’occasion de cette célébration.  Le représentant a ensuite exhorté les belligérants à prolonger la trêve et à relancer le processus politique de sortie de crise.

M. YAO SHAOJUN (Chine) a condamné l’attentat de Benghazi.  Il a ensuite salué l’évolution sur le terrain avec des réponses positives des parties à la proposition de trêve du Représentant spécial.  Il a appelé les parties libyennes à se focaliser sur les intérêts nationaux, et a invité la communauté internationale à soutenir le processus politique appuyé par le Représentant spécial, tout en respectant la souveraineté nationale du pays.  La Chine s’est enfin dite disposée à apporter sa contribution pour faire revenir la paix en Libye.

Mme KGAUGELO THERMINA MOGASHOA (Afrique du Sud) a présenté les condoléances de sa délégation aux familles des victimes de l’attentat de ce jour à Benghazi, y compris celles des personnels onusiens.  L’Afrique du Sud, a-t-elle dit, condamne cet attentat à la voiture piégée et appelle toutes les parties au conflit à respecter la trêve humanitaire à laquelle elles se sont engagées en rapport avec la célébration de l’Eïd al-Adha.  Mme Mogashoa a ensuite déploré les quelque 1 100 morts du fait de la bataille de Tripoli, ainsi que les plus de 100 000 déplacés. 

La représentante s’est également préoccupée du prix payé par les migrants africains qui essayent de traverser la Méditerranée.  À ce propos, elle a rappelé au Conseil que le navire humanitaire espagnol « Open Arms » demeure bloqué en mer depuis neuf jours au large des côtes de l’île la plus méridionale de l’Italie, sans qu’aucun gouvernement européen ne se montre disposé à accueillir les 121 migrants qui se trouvent à son bord.  Le navire fait face à une amende qui peut atteindre un million d’euros s’il accoste en Italie, a précisé la déléguée, avant de demander au Conseil de traiter de toutes les questions relatives à la Libye avec « le même sentiment d’urgence », y compris celles portant sur le sort et les attaques de migrants.  La représentante a ensuite salué le fait que le Gouvernement d’entente nationale et le général Haftar aient accepté l’appel du Représentant spécial du Secrétaire général à une trêve humanitaire.  Selon elle, cette trêve ouvre une fenêtre d’opportunité pour encourager toutes les parties à retourner aux négociations et à rechercher une solution politique durable en Libye. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a condamné l’attentat d’aujourd’hui à Benghazi, et a demandé à ce qu’une enquête soit immédiatement ouverte pour faire la lumière sur cette attaque.  Il a également appelé toutes les parties à respecter le droit international humanitaire dans le cadre du conflit en cours.

Par ailleurs, le représentant a salué le plan en trois points proposé par le Représentant spécial pour la Libye, à commencer par sa proposition d’établir une trêve à l’occasion de l’Eïd al-Adha.  Le représentant a salué les parties pour avoir accepté de l’appliquer.  Enfin, le représentant a appelé le Conseil à continuer de faire preuve d’unité sur la question. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a condamné l’attentat à la voiture piégée qui a entraîné le décès de trois fonctionnaires des Nations Unies à Benghazi, aujourd’hui.  Le représentant a appelé à ouvrir une enquête minutieuse afin de faire toute la lumière sur cette attaque et de traduire ses auteurs en justice.  Il a salué les membres défunts du personnel de l’ONU pour leur engagement et leur sacrifice en faveur de la paix.

Le représentant s’est dit « consterné » face à cette attaque et a appelé toutes les parties à respecter la trêve annoncée à l’occasion de l’Eïd al-Adha.  Il a rappelé l’attaque aérienne tragique contre un centre de migrants à Tajoura, le 2 juillet dernier, qui avait fait de nombreuses victimes, pour ensuite exhorter les parties à respecter le droit international humanitaire afin de garantir la sécurité des civils libyens.

Le représentant s’est en outre dit préoccupé face à l’implication de « personnes tierces » dans le conflit et a appelé à rectifier le tir en en réduisant le nombre. 

M. GERARDO TALAVERA (Pérou) a condamné l’attentat de ce jour à Benghazi.  Il a déploré le fait que le conflit en Libye ouvre la route à des groupes extrémistes.  Il a salué le plan en trois points du Représentant spécial, saluant notamment la trêve acceptée par les parties.  Il a enfin exhorté toutes les parties ayant une influence sur les protagonistes à faire pression sur elles pour assurer le respect du droit international humanitaire en Libye. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a rappelé que depuis plusieurs semaines, de nombreux migrants quittant la Libye ont péri en Méditerranée, et a fait savoir qu’au cours de la minute de silence observée en début de séance, il a également eu une pensée pour ces morts.  Toutes les vies humaines importent, a-t-il souligné.  Il a ensuite déploré la présence, en Libye, de terroristes venus de Syrie et d’Iraq, avant de rappeler l’importance qu’il y a de lutter contre ce fléau international.  Le délégué a souligné que les véritables causes de la migration tiennent des situations de conflit et des crises économiques.  Il ne faut pas lutter contre les migrants, mais bien contre les causes des migrations, a-t-il martelé. 

M. Polyanskiy a aussi déploré la situation catastrophique que connaît la Libye depuis 2011, et a invité ceux qui ont créé ce chaos en Libye et dans les pays voisins à reconnaître leur tort. 

Il a insisté sur l’importance de disposer d’institutions nationales libyennes unies, et a déploré le manque de confiance entre les parties libyennes en conflit.  Il a appelé l’ONU à jouer un rôle majeur pour faciliter les pourparlers, tout en saluant la trêve obtenue grâce aux bons offices du Représentant spécial.  M. Polyanskiy a par ailleurs plaidé pour le respect de l’embargo sur les armes en Libye.  Il a ensuite estimé que les tentatives d’identifier les coupables parmi les belligérants seraient contre-productives et n’auraient pour conséquence que de saper les perspectives de dialogue entre les parties. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a fait part de ses condoléances aux proches et aux familles des victimes de l’attentat de Benghazi, ainsi qu’à l’ensemble du personnel de la MANUL.  Condamnant fermement cette attaque, elle a appelé à ce que ses auteurs soient traduits en justice.

Il est regrettable que cette attaque ait eu lieu un jour avant l’Eïd al-Adha, au moment de l’annonce de la trêve, a déploré la représentante.  Cela démontre l’importance de cette trêve et nous rappelle à quel point le personnel de l’ONU se sacrifie au service de la paix, a-t-elle ajouté, avant d’appuyer la proposition faite par le Royaume-Uni de publier, demain, une déclaration à la presse sur la Libye.

M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a condamné les attentats de ce jour, avant de faire part de la disponibilité du Gouvernement d’entente nationale à lutter contre le terrorisme.  Il a aussi rappelé l’enlèvement d’une femme parlementaire dont le sort reste inconnu.  « La soi-disant Armée nationale libyenne prétend avoir éliminé le terrorisme, mais on voit bien que son agression contre Tripoli est un désastre qui a fait de nombreuses victimes, causé le déplacement de plus de 100 000 personnes, endommagé des infrastructures et exacerbé les souffrances des populations », a-t-il affirmé.

M. Elmajerbi a ensuite indiqué que le Conseil présidentiel s’était réuni en réponse à l’appel à la trêve lancé par le Représentant spécial à l’occasion de l’Eïd al-Adha.  Celui-ci a dit être disposé à y répondre positivement, à condition, a précisé le délégué, que la trêve s’applique sur toutes les zones de conflit, qu’elle ne soit pas l’occasion de mener des actions militaires, de déplacer des troupes ou faire intervenir l’aviation.  Il a terminé son propos en rappelant qu’il ne saurait y avoir de solution militaire à la crise en Libye, et que le dialogue est la seule voie de sortie du conflit.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: des délégations appellent la Syrie à libérer les personnes en détention arbitraire

8593e séance – matin
CS/13913

Conseil de sécurité: des délégations appellent la Syrie à libérer les personnes en détention arbitraire

La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a exigé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, la libération des personnes en détention arbitraire par toutes les parties au conflit en Syrie.  Mme Rosemary DiCarlo intervenait dans le cadre d’une réunion convoquée par les États-Unis au cours de laquelle il a été souligné à maintes reprises que cette question est centrale à tout processus politique de paix.

Dans son intervention, Mme DiCarlo a notamment exhorté les parties au conflit à transmettre les informations et documents relatifs aux détenus, aux personnes enlevées et aux personnes portées disparues et à fournir des informations sur leurs proches aux familles, identifier et rendre leurs dépouilles, transmettre une liste de tous les endroits où les personnes sont détenues et faciliter l’accès à ces endroits à une tierce partie neutre.  Elle a également demandé au Gouvernement syrien et aux autres parties concernées de pleinement coopérer avec le Mécanisme international, impartial et indépendant et avec la Commission d’enquête. 

Dans un contexte marqué par les difficultés d’accès aux centres de détention et aux détenus en Syrie, Mme Rosemary DiCarlo a expliqué que l’ONU ne dispose pas de statistiques officielles, mais que les chiffres provenant de récits corroborés par la Commission d’enquête sur la Syrie font état de 100 000 personnes détenues, enlevées ou portées disparues, « en grande partie, mais pas exclusivement, par le Gouvernement syrien ».  Elle a également indiqué que selon le régime de Damas, le nombre de personnes détenues par les groupes armés affiliés avec l’opposition syrienne s’élèverait à 16 000.

Mme DiCarlo a rappelé que l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen, a fait de cette question une de ses priorités et qu’il cherche à faire progresser ce dossier dans le cadre du groupe de travail dont l’ONU est membre aux côtés de l’Iran, la Fédération de Russie et la Turquie et qui a facilité, depuis sa création en décembre 2017, quatre opérations d’échange, dont une la semaine dernière.  Elle a cependant estimé que les parties doivent dépasser les échanges sur le principe « un pour un », et s’engager dans des actions unilatérales de libération, regrettant que seulement 109 personnes aient été libérées à ce jour. 

Alors que les morts en détention continuent, en grande partie suite à des actes de torture ou en raison des conditions inhumaines de détention, Mme DiCarlo a de plus indiqué que de nombreuses familles n’ont aucune information sur le sort de leurs proches: les lieux de détention ne sont pas accessibles pour l’ONU, les registres des hôpitaux et des cimetières ne sont pas publics et les familles de ces détenus morts ne peuvent souvent pas obtenir leurs certificats de décès et les dépouilles de leurs proches.  Mme DiCarlo a de plus averti que l’impact de cette situation sur les femmes est d’autant plus grave qu’elles risquent de perdre leurs droits juridiques, y compris au logement et à la propriété, si elles ne peuvent pas expliquer où se trouve leur mari, ni justifier son décès faute de certificat de décès. 

Les Quinze ont d’ailleurs entendu le témoignage de deux femmes syriennes, cofondatrices de l’ONG « Families for Freedom », venues partager la détresse des familles sans nouvelles de leurs proches.  Elles ont également appelé le Conseil de sécurité à adopter une résolution afin de faire pression sur le régime syrien et les groupes armés de l’opposition et d’exiger la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement en Syrie. 

« C’est votre responsabilité de protéger les Syriens d’un système qui tue, torture et détient illégalement ses propres citoyens, en violation flagrante du droit international », ont-elles affirmé, soulignant par ailleurs que « la première étape vers une paix durable et la justice est la vérité, la fin des disparitions forcées, ainsi que la libération des milliers de civils arbitrairement détenus et privés de liberté ». 

Renchérissant, les États-Unis ont de plus estimé que la libération immédiate des civils détenus dans les prisons du régime d’Assad permettrait de tracer la voie vers la mise en œuvre de la résolution 2254, mais aussi de faire avancer les efforts déployés par l’Envoyé spécial pour relancer le processus politique et de créer un élan pour permettre au régime d’Assad et à l’opposition syrienne de travailler ensemble.

La délégation américaine a déploré que les efforts déployés pour négocier la libération des détenus sous les auspices des garants d’Astana se soient focalisés sur des échanges « un contre un » entre les forces armées du régime et de l’opposition, ignorant ainsi la détresse des milliers de civils « qui représentent la grande majorité des personnes détenues par le régime ». 

« Si la Syrie n’arrive pas à régler les questions à l’origine du conflit qui a commencé en 2011, elle ne pourra pas retrouver sa place au sein du concert des nations », a ajouté le Royaume-Uni, tandis que la France a souligné l’importance des dizaines de milliers de photos de cadavres de détenus affamés et torturés contenues dans le dossier « César ».

La Fédération de Russie a cependant regretté la « politisation contre-productive » d’une question humanitaire et la stigmatisation du Gouvernement syrien, fustigeant dans la foulée une démarche visant à « mettre des bâtons dans les roues » au processus politique syrien. 

La délégation russe a notamment prévenu que toute tentative de lancer de nouvelles enquêtes du Conseil de sécurité ne pourra que saper le processus « complexe » de renforcement de la confiance entre les parties.  « Personne ne profiterait d’une évolution aussi négative », a-t-elle affirmé, avant d’engager ses « collègues occidentaux » à faire toute la lumière sur le sort des personnes détenues de manière arbitraire dans la Ghouta orientale et dans le sud-ouest de la Syrie. 

Les « pratiques systématiques » des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France ont également été rejetées par la délégation syrienne qui a déploré que le Conseil de sécurité demeure « incapable » de faire face à la principale cause des souffrances du peuple syrien, à savoir le terrorisme, qui, selon la Syrie, est soutenu par les trois pays susmentionnés. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a rappelé qu’en juin, le Conseil de sécurité avait adopté la résolution 2474 sur « les personnes portées disparues dans les conflits armés », une résolution qui est depuis devenue une « lueur d’espoir » pour de nombreux Syriens.  Elle a ensuite expliqué que dans le contexte actuel marqué par les difficultés d’accès aux centres de détention et aux détenus en Syrie, l’ONU ne dispose pas de statistiques officielles sur les personnes détenues, enlevées ou portées disparues.  Les chiffres dont elle dispose proviennent de récits corroborés par la Commission d’enquête sur la Syrie et des organisations des droits de l’homme.  Même si l’ONU ne peut pas vérifier ces chiffres, les rapports font état de 100 000 personnes détenues, enlevées ou portées disparues, en grande partie, mais pas exclusivement, par le Gouvernement syrien, a précisé Mme DiCarlo. 

De nombreuses familles n’ont aucune information sur le sort des êtres chers, a-t-elle déploré.  Les lieux de détention ne sont pas accessibles pour l’ONU ou les autres organisations de suivi internationales, alors que les registres des hôpitaux et des cimetières ne sont pas publics.  Mme DiCarlo a également affirmé que les morts en détention continuent, en grande partie suite à des actes de torture ou en raison des conditions inhumaines de détention.  Pour les familles de ces détenus morts, la situation est d’autant plus intolérable qu’elles ne peuvent souvent pas obtenir leurs certificats de décès et les dépouilles de leurs proches.  L’impact de cette situation sur les femmes est d’autant plus grave qu’elles risquent de perdre leurs droits juridiques, y compris au logement et à la propriété en Syrie, si elles ne peuvent pas expliquer où se trouve leur mari ni justifier son décès faute de documentation officielle comme un certificat de décès. 

Mme DiCarlo a ensuite indiqué que la Commission d’enquête sur la Syrie avait pu obtenir par un transfuge militaire syrien plus de 50 000 photos qui, rendues publiques en 2014, montrent près de 7 000 corps portant des marques de torture.  Suite à la reprise du contrôle de certaines provinces par le régime syrien, a-t-elle poursuivi, l’ONU a continué de recevoir des informations sur des cas d’arrestation arbitraire et de disparition de civils, y compris dans les « soi-disant » zones qui tombent sous les « accords de réconciliation ».  Les organisations de défense des droits de la personne ont signalé des cas de détention et de disparition de réfugiés syriens qui sont rentrés en Syrie, alors que les enquêtes du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) indiquent que la crainte de la détention est un des facteurs qui empêchent le retour des personnes déplacées et des réfugiés dans leur pays. 

La Secrétaire générale adjointe a toutefois reconnu que ces abus ne sont pas uniquement le fait du régime syrien et que les groupes terroristes comme l’EIIL ou Hay’at Tahrir el-Cham ont également commis des crimes haineux.  Les groupes armés affiliés avec l’opposition syrienne ne sont pas en reste puisqu’ils auraient créé des centres de détention dans différentes zones sous leur contrôle où les soldats gouvernementaux capturés, les collaborateurs soupçonnés de travailler avec le Gouvernement et les membres d’autres groupes armés opposés sont retenus et parfois exécutés, a-t-elle indiqué.  Le Gouvernement syrien affirme que le nombre de personnes détenues par ces groupes armés s’élève à 16 000, mais, sans accès à ces centres de détention, l’ONU ne peut vérifier ce chiffre, a précisé Mme DiCarlo.

Après avoir exigé que justice soit faite pour ces cas d’abus, indépendamment de leurs responsables, la Secrétaire générale adjointe s’est préoccupée du sort des milliers d’étrangers, dont la plupart sont des femmes et des enfants qui sont les membres de famille des combattants étrangers, qui sont aujourd’hui détenus dans le camp de Hol.  Elle a exhorté tous les États Membres à garantir le rapatriement de leurs nationaux dans le but de les faire comparaître en justice, mais aussi pour procéder à leur réhabilitation et leur réintégration, conformément aux normes du droit international.

Elle a ensuite rappelé que l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pederson, a fait de la question des détenus l’une de ses priorités et cherche à faire progresser ce dossier dans le cadre du groupe de travail dont l’ONU est membre aux côtés de l’Iran, la Fédération de Russie et la Turquie.  Depuis sa création en décembre 2017, a-t-elle indiqué, ce groupe a facilité quatre opérations d’échange, dont une la semaine dernière.  Cependant, le nombre de libérations de détenus à ce jour reste insuffisant puisque seules 109 personnes ont été libérées, a-t-elle regretté.  Elle a souligné que les parties doivent dépasser les échanges sur le principe « un pour un », les appelant ensuite à s’engager dans des actions unilatérales de libération.  Elle a aussi estimé que le groupe de travail devrait se réunir plus régulièrement et adopter les procédures relatives aux personnes portées disparues soumises par les Nations Unies.  L’ONU se propose d’organiser la prochaine réunion du groupe de travail à Genève.

Poursuivant, Mme DiCarlo a exigé la libération des personnes en détention arbitraire, et en particulier des femmes et des enfants, par toutes les parties au conflit syrien.  Ces parties doivent respecter leurs obligations au titre du droit international et transmettre les informations et documents relatifs aux détenus, aux personnes enlevées et aux personnes portées disparues et établir un mécanisme avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour gérer ces informations, en coordination avec le Bureau de l’Envoyé spécial, a-t-elle demandé.  De plus, elles doivent fournir des informations sur leurs proches aux familles, identifier et rendre leurs dépouilles, transmettre une liste de tous les endroits où les personnes sont détenues et faciliter l’accès à ces endroits à une tierce partie neutre.

Mme DiCarlo a aussi demandé au Gouvernement syrien et aux autres parties concernées de pleinement coopérer avec le Mécanisme international, impartial et indépendant et avec la Commission d’enquête.  Elle a ensuite réitéré la demande du Secrétaire général pour que la situation en Syrie soit déférée devant la Cour pénale internationale. 

Mme HALA AL GHAWI, de « Families for Freedom », s’est présentée au Conseil en tant que médecin et cofondatrice de cette organisation non gouvernementale, qui fait campagne pour la libération des personnes détenues en Syrie et leur accès à la justice.  Elle a expliqué avoir quitté la Syrie à la fin de l’année 2011 après le placement en détention de son époux.  Si ce dernier a depuis lors retrouvé la liberté, le frère et le beau-père du docteur Hala, ainsi que sept de ses cousins, ont été emprisonnés en 2013 et elle reste à ce jour sans nouvelles d’eux.  « Nombre de mes collègues médecins ont également été incarcérés par le Gouvernement syrien pour avoir aidé des manifestants blessés », a-t-elle expliqué, affirmant que plusieurs d’entre eux ont péri sous la torture pendant leur détention.  Elle a déclaré s’exprimer devant le Conseil en mémoire de ces personnes et des centaines de milliers de Syriens disparus et assassinés. 

Mme Al Ghawi a ensuite exprimé la « profonde frustration » que lui inspire l’inaction des personnes présentes dans cette salle face aux souffrances des prisonniers syriens et de leurs familles.  « Nous sommes dans la huitième année du conflit syrien et au moins 100 000 personnes sont encore portées disparues, beaucoup d’entre elles étant victimes d’abus, de privations et de torture », a-t-elle souligné.  Il importe, selon elle, que les familles soient informées du sort de leurs membres et que les responsables de leurs souffrances rendent des comptes. 

Notant que les conditions de détention des prisonniers syriens sont bien documentées par les organisations syriennes et internationales des droits de l’homme, le docteur Al Ghawi a indiqué avoir rencontré et soigné, depuis 2011, plusieurs dizaines de survivants.  Les détenus en Syrie font face à des abus physiques et sexuels, à des cas de torture, à la faim et à des conditions de vie extrêmes, a-t-elle alerté.  Ils sont le plus souvent entassés dans des cellules étroites et sombres et certains sont placés durant des mois dans des cellules de confinement de la taille d’un cercueil.  Il arrive, a-t-elle précisé, que des détenus passent des jours entourés de cadavres, ce qui entraîne chez eux des troubles psychologiques et physiques.  Les femmes détenues sont quant à elles sujettes à des violences sexuelles et sexistes à une forte fréquence. 

Évoquant l’expérience traumatisante de son mari, enfermé dans une cellule si petite qu’il ne pouvait même pas s’assoir, le docteur Al Ghawi a insisté sur l’incertitude que vivent les familles quant au sort de leurs proches victimes de disparitions forcées.  Dans l’espoir d’une réponse et au prix de déplacements dangereux, des mères se rendent chaque jour dans des tribunaux et des centres de détention, a-t-elle relaté.  Elles rentrent souvent brisées, sans informations nouvelles, et pourtant y retournent encore et encore.  « Les familles veulent des tombes pour faire leur deuil.  Ce simple droit est quelque chose qu’il nous faut demander aujourd’hui », a déploré la praticienne, exhortant le Conseil à agir pour que cessent ces souffrances. 

« Ce Conseil doit adopter une résolution pour mettre la pression sur le Gouvernement syrien et sur toutes les parties belligérantes afin que soit publiée une liste faisant figurer le nom de tous les détenus, ainsi que leur localisation et leur statut actuels, et qu’il soit immédiatement mis fin à la torture et aux mauvais traitements », a plaidé la cofondatrice de « Families for Freedom ».  De plus, a-t-elle ajouté, si un détenu vient à mourir, un certificat de décès ne peut suffire: un rapport doit être remis aux familles, établissant la cause réelle de la mort et le lieu d’inhumation du corps. 

Pour le docteur Al Ghawi, les organisations humanitaires internationales et la Commission d’enquête de l’ONU doivent bénéficier d’un accès sans condition aux centres de détention.  Il faut également que des organisations médicales puissent examiner l’état de santé de chaque détenu.  Quant à la résolution qu’elle appelle de ses vœux, elle doit exiger la libération immédiate et unilatérale de toutes les personnes détenues arbitrairement en Syrie.  Pour cela, a-t-elle souligné, un calendrier doit être prévu pour l’identification et la remise en liberté de tous détenus, dans le cadre d’un processus de paix placé sous la surveillance d’un organisme international et indépendant.  « Une Syrie nouvelle et pacifique ne pourra être construite tant que des personnes y seront encore torturées et exécutées », a-t-elle conclu, avertissant le Conseil qu’il serait tenu pour responsable en cas d’échec. 

Mme AMINA KHOULANI, de « Families for Freedom », a raconté que trois de ses frères avaient été enlevés par le régime syrien il y a huit ans, alors qu’ils manifestaient pour une Syrie plus libre et démocratique.  Elle a dit avoir reconnu le corps de l’un d’eux sur des images publiées par un déserteur de l’armée il y a quatre ans.  Et en juillet dernier, elle a appris, par des communiqués des autorités, que ses deux autres frères étaient décédés durant leur détention.  Elle a affirmé avoir été elle-même détenue pendant six mois par une branche de l’armée de l’air du fait de son activisme, et que son époux avait également passé deux ans et demi en détention. 

Mme Khoulani a expliqué être l’une des fondatrices de « Families for Freedom », un mouvement créé en 2017 et dirigé par des femmes dont les proches sont détenus ou ont disparu.  Provenant de divers horizons, elles sont unies dans leur demande que soit mis un terme aux détentions arbitraires et disparitions forcées et réclament justice pour les disparus et leurs familles, et l’assurance que les responsables de leurs souffrances puissent rendre des comptes. 

Elle a ensuite relevé qu’environ 100 000 Syriens demeurent disparus, pour la majorité détenus par le régime, même si des groupes armés d’opposition et des groupes extrémistes comme Daech sont également coupables de détention et de disparition.  Elle a souligné que nombre de ces disparus endurent des tortures barbares au quotidien et que l’exécution de certains d’entre eux est peut-être prévue.  Peu parmi eux auront un procès équitable, a-t-elle déploré. 

Elle a déploré que malgré les photos de César et la publication de rapports, les disparitions se poursuivent, y compris parmi les personnes qui cherchent à rentrer en Syrie.

Elle a accusé le Conseil de sécurité d’avoir complètement failli face aux détenus syriens et leurs familles.  « C’est votre responsabilité de protéger les Syriens d’un système qui tue, torture et détient illégalement ses propres citoyens, en violation flagrante du droit international », a-t-elle souligné.  Ainsi, « vous avez laissé des veto et des excuses faire obstacle à ce qui est juste », a-t-elle déploré, avant de demander au Conseil de faire de la question des détentions et des disparitions forcées en Syrie une priorité.

Mme Khoulani a ensuite engagé le Conseil a adopté une nouvelle résolution afin de faire pression sur le régime syrien et les groupes armés d’opposition sur le sort des personnes détenues, et permettre également aux organisations humanitaires de visiter les centres de détention.  Il faut que les personnes comme elle, dont les proches ont été exécutés ou torturés à mort, sachent quel est le lieu de leur sépulture afin de pouvoir faire convenablement leur deuil.  « La première étape vers une paix durable et la justice est la vérité, et la fin des détentions arbitraires et des disparitions forcées, ainsi que la libération des milliers de civils arbitrairement détenus et privés de liberté », a-t-elle affirmé. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a déclaré que les disparitions forcées et les pratiques de détention et de torture constituent l’une des grandes tragédies du conflit syrien.  Il a rappelé qu’en 2013, un soldat qui avait fait défection, connu sous le nom de code de César, avait fait clandestinement sortir de Syrie plus de 53 000 photographies montrant plus de 6 700 victimes de torture décédées alors qu’elles été détenues par le régime syrien.

Il a indiqué que le sort des personnes disparues sous le régime d’Assad est la première des préoccupations des Syriens lorsqu’il s’agit, pour ceux qui ont quitté le pays, d’envisager un retour en Syrie ou une solution politique au conflit.  Il a expliqué que les États-Unis ont réclamé la tenue de cette réunion, convaincus de l’impératif politique et humanitaire d’améliorer la transparence et l’accès aux prisons du régime et d’obtenir la libération des civils détenus arbitrairement par le régime.  La question des détenus est essentielle, a-t-il insisté.

M. Cohen a ensuite affirmé qu’outre le témoignage courageux des Syriens et les photos de César, il existe des données minutieuses qui démontrent l’étendue et la gravité des crimes commis contre des civils innocents dans les prisons du régime.  Depuis 2011, les groupes de documentation syriens estiment que jusqu’à 215 000 personnes, dont 35 000 prisonniers de conscience, ont été détenues, en grande majorité par le régime, et que 14 000 personnes ont été tuées à la suite de torture, dont 177 enfants.  Près de 128 000 personnes se trouvent actuellement dans les geôles du régime syrien, y compris des travailleurs humanitaires, des médecins, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des femmes et des enfants.  Il a aussi cité des centres de détention précis, à savoir les branches du renseignement militaire 215, 227, 235 et 251, les services du renseignement de l’armée de l’air de l’aéroport de Mezzeh, ainsi que la prison de Sednaya.

Le représentant a ensuite averti qu’il ne sera pas possible d’atteindre une solution politique telle que décrite dans la résolution 2254 sans que cessent ces pratiques.  Les États-Unis appellent donc à la libération immédiate, unilatérale des civils détenus dans les prisons du régime d’Assad afin de tracer la voie vers la mise en œuvre de la résolution 2254.  Cette mesure « réalisable » de renforcement de la confiance permettrait notamment de faire avancer les efforts déployés par l’Envoyé spécial pour relancer le processus politique et de créer un élan pour permettre au régime d’Assad et à l’opposition syrienne de travailler ensemble, a-t-il indiqué.

M. Cohen a aussi engagé le régime d’Assad à fournir à l’ONU un accès immédiat aux centres de détention syriens, notamment ceux où des actes de torture et d’abus ont été documentés.  Un tel accès est impératif pour veiller à ce que les conditions dans ces centres respectent les normes juridiques internationales appropriées, a-t-il précisé.

Le délégué a par ailleurs constaté que les processus parallèles n’avaient pas généré de résultats concrets et a appelé à consolider les efforts relatifs aux détenus et aux personnes portées disparues au sein du Bureau de l’Envoyé spécial, à Genève.  Des mises à jour sur cet aspect de la résolution 2254 doivent de plus être intégrées aux sessions mensuelles du Conseil de sécurité sur la Syrie, a-t-il ajouté.

M. Cohen a par ailleurs déploré que les efforts déployés pour négocier la libération des détenus sous les auspices des garants d’Astana se soient focalisés sur des échanges « un contre un » entre les forces armées du régime et de l’opposition, ignorant ainsi la détresse des milliers de civils « qui représentent la grande majorité des personnes détenues par le régime ».  Et ces efforts ont d’ailleurs été sapés ces derniers temps, le régime ayant détenu, l’année passée, des centaines d’anciens combattants qui avaient signé des soi-disant accords de réconciliation négociés par la Russie.

Le représentant des États-Unis a demandé à la Russie, au nom des garants d’Astana, de consolider les efforts de son groupe de travail et de renouveler son engagement à négocier la libération des victimes, à réclamer la cessation des pratiques de détention du régime, et à fermement appuyer les mécanismes de vérité et de reddition de comptes.  Il a aussi vivement exhorté le régime d’Assad à prendre des mesures concrètes allant dans ce sens.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a condamné le recours par le régime syrien à des pratiques « dégradantes et inhumaines », telles que la torture, les arrestations arbitraires et les disparitions forcées, qui datent, selon elle, « de bien avant » les soulèvements de 2011.  Aux yeux de la représentante, ces abus ont été une « marque distinctive » du régime de Damas, dont Mme Gueguen a estimé qu’il était lancé dans une « dynamique d’anéantissement et de négation de toute forme d’opposition quelle qu’elle soit ».  Ces pratiques ont toutefois atteint une « ampleur inédite » au cours des huit dernières années de conflit, a-t-elle ajouté, au point de revêtir désormais un caractère « systématique ». 

La représentante a appelé à faire toute la lumière sur les violations « massives » des droits de l’homme commises en Syrie.  Pour ce faire, la représentante a souligné le rôle de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie, dont les rapports « impartiaux » permettent de « refléter la réalité de la tragédie syrienne ».  Elle a notamment salué la publication du rapport de la Commission sur les détentions, qui a été présenté au Conseil en format Arria, en novembre dernier, et a estimé que le Conseil de sécurité doit continuer à recevoir des briefings réguliers sur ces questions. 

Mme Gueguen a aussi insisté sur l’impératif de la justice.  « Les crimes commis par le régime ne doivent pas rester impunis », a-t-elle affirmé, soulignant l’importance des preuves accumulées par le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011.  Grâce notamment au dossier « César » remis à la France, a-t-elle indiqué, dossier qui réunit les photos de dizaines de milliers de cadavres de détenus affamés et torturés, des mandats d’arrêt internationaux ont été émis par un juge d’instruction français à l’encontre de trois hauts responsables de « l’appareil répressif syrien ».  Mme Gueguen a estimé qu’il s’agissait là d’un premier pas essentiel pour la lutte contre l’impunité en Syrie.

La représentante s’est ensuite attardée sur l’impératif de la sécurité des personnes.  Il n’y aura pas de normalisation de la situation en Syrie sans la création, sur le terrain, d’un environnement sûr pour les civils, a-t-elle prévenu, appelant Damas à changer de comportement, en mettant fin à ces pratiques et en garantissant un accès « neutre » à tous les lieux de détention, « sans délais et sans entrave ».  Face à l’ampleur des détentions arbitraires et disparitions forcées en Syrie, Mme Gueguen a appelé à libérer sans condition toutes les personnes détenues pour des motifs politiques.  Elle a aussi appelé les alliés de Damas à faire pression sur le régime en ce sens.  « C’est une simple mesure de confiance », a-t-elle insisté, doublée, selon elle, d’une « obligation morale » et d’une « nécessité politique ». 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a appelé à la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement.  Huit ans après le début du conflit et cinq ans après la publication des photos de « César », plus de 100 000 personnes sont portées disparues et 14 000 auraient succombé à la torture.  De plus, l’Allemagne dispose d’informations selon lesquelles 17 000 personnes ont été arrêtées de façon arbitraire et 140 personnes sont décédées suite à des tortures depuis le début 2019.

Le représentant s’est félicité que quatre échanges de prisonniers aient été possibles grâce aux efforts du groupe de travail d’Astana.  Ces échanges d’un faible nombre de prisonniers restent cependant insuffisants au regard du grand nombre de personnes encore détenues, a-t-il cependant estimé.

M. Schulz a demandé au régime syrien de publier une liste complète des personnes détenues et de communiquer aux familles toutes les informations en sa possession sur les personnes portées disparues, y compris les lieux de sépulture.  « Ne pas permettre aux familles de faire leur deuil ne fait qu’ajouter au crime abominable », a dit le représentant de l’Allemagne.  Il a estimé que la paix en Syrie ne sera pas possible tant que la vérité ne sera pas connue et les responsables des crimes poursuivis. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) est revenu sur les souffrances de milliers de familles syriennes suite à la disparition ou la détention de leurs proches.  Les conséquences à long terme de cette situation sont graves, a-t-il confié, ajoutant qu’il s’agit avant tout d’une question humanitaire.  C’est la raison pour laquelle le Koweït a insisté sur la réunion d’aujourd’hui et exige leur libération.  Il se félicite du possible accord, dans le cadre du mécanisme d’Astana, pour la libération d’un plus grand nombre de détenus.

Le représentant a appelé à faire en sorte que les paroles et les actes du Conseil de sécurité soient conformes aux Conventions de Genève pour ce qui est des personnes détenues ou portées disparues en temps de conflit.  Il a appelé toutes les parties à mettre fin aux conditions de détention inhumaines et à assurer la libération des femmes, des enfants et des personnes âgées.  Il faut aussi que les familles puissent connaître le sort de leurs proches et que les détenus puissent avoir accès aux soins de santé et à la satisfaction de leurs besoins primaires.  M. Alotaibi a également appelé à rendre compte du nombre de personnes décédées et à les identifier, à rendre leurs dépouilles lorsque cela est possible et à indiquer leurs lieux de sépulture.  Enfin, le Koweït exige que les personnes responsables de ces « crimes horribles » soient tenues pour responsables de leurs actes devant la loi.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé que la détention arbitraire de civils syriens par le régime fait partie des causes des manifestations de 2011.  Elle a demandé que soit mis fin aux persécutions auxquelles se livre le Gouvernement sur sa population.  Elle a précisé que des milliers de familles ont été informées cette année du décès d’un proche dans les prisons syriennes sans qu’aucune explication ne soit donnée sur les causes du décès.  Elle a demandé aux autorités syriennes de fournir à l’ONU un accès aux centres de détention et de lui remettre une liste de tous les détenus.  Elle a aussi jugé indispensable d’obtenir la liste des lieux de sépulture et sites funéraires afin que les familles puissent faire leur deuil.  Elle s’est tournée vers le représentant syrien en lui demandant un signe de la part de son gouvernement. 

La représentante du Royaume-Uni a ensuite demandé que des observateurs indépendants puissent avoir accès à tous les lieux de détention.  Elle a salué les échanges de prisonniers intervenus entre le régime syrien et les groupes armés, tout en précisant que ces échanges ne pouvaient se substituer aux responsabilités des parties s’agissant des questions de détention abusive.  « Si la Syrie n’arrive pas à régler les questions à l’origine du conflit qui a commencé en 2011, elle ne pourra pas retrouver sa place au sein du concert des nations », a conclu la représentante.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a estimé que la formulation des réponses adéquates au sort des personnes détenues ou portées disparues fait partie intégrante des processus de sortie de crise et de consolidation de la paix.  Face aux 10 000 demandes d’informations faites au CICR sur des personnes disparues en Syrie, le délégué a dit que ces chiffres interpellent le Conseil de sécurité sur l’acuité du problème, et l’engagent à agir pour apporter des réponses idoines à cette question qui s’ajoute à une situation humanitaire déjà préoccupante.  Il a ensuite exhorté le Conseil à renforcer la mise en œuvre des dispositions pertinentes de la résolution 2474 (2019) sur les personnes disparues en période de conflit armé. 

M. Ipo a rappelé qu’il incombe au Gouvernement syrien et aux groupes rebelles de prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’assurer la protection des civils, mais également de veiller à ce que les personnes détenues soient traitées avec dignité, et dans le strict respect des normes internationales en la matière.  De même, il leur revient de contribuer pleinement aux enquêtes visant à identifier et à localiser les personnes portées disparues.  Il a enfin salué la libération réciproque, le 31 juillet dernier, de détenus en Syrie, dans le cadre du quatrième projet du groupe de travail sur la libération des détenus et personnes enlevées, ainsi que la remise des corps et l’identification des personnes disparues, tel que cela avait été prévu par le processus d’Astana. 

Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a souligné que les parties au conflit syrien avaient l’obligation de garantir la dignité et la sécurité des personnes détenues, en conformité avec le droit international humanitaire.  En ce sens, elle a appelé à mettre immédiatement fin à toutes les détentions arbitraires en Syrie et à procéder à la libération unilatérale des détenus, en particulier les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes vivant avec un handicap.  À ses yeux, le Gouvernement syrien doit, en tant que principal responsable de la protection de la population civile, faire toute la lumière sur les circonstances dans lesquelles des milliers de Syriens ont perdu la vie en détention et présenter les résultats de ces enquêtes aux familles des victimes, auxquelles il est également impératif, selon elle, de restituer les dépouilles mortuaires de leurs proches.  La représentante a ajouté que ce processus prendrait sans doute des années et devrait se faire avec la participation des familles comme des organisations de la société civile.  Les familles des personnes disparues ont le droit de savoir où se trouvent leurs proches et doivent également bénéficier d’un soutien psychologique, légal et économique, a-t-elle poursuivi.  Dans le cas contraire, a mis en garde la déléguée dominicaine, le ressentiment des civils syriens risquerait de donner lieu à de nouvelles violences à l’avenir.  « L’impunité n’est pas une option viable », a-t-elle insisté en conclusion.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a souligné qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit en Syrie et qu’une solution politique passant par le dialogue est la seule manière de parvenir à une paix stable et durable.  Ce dialogue nécessite de la confiance entre les parties au conflit.  Or, a-t-elle argué, il ne sera pas possible de créer une telle confiance sans perspective de justice et de responsabilité.  Dès lors, la représentante a dit soutenir pleinement l’Envoyé spécial pour la Syrie dans la poursuite de ses actions concrètes en faveur des détenus, des personnes enlevées ou portées disparues.  Si des échanges de prisonniers ont eu lieu ces derniers mois, le chemin à parcourir reste encore long, a-t-elle commenté. 

Mme Van Vlierberge a estimé que le non-respect des obligations qu’imposent les droits de l’homme, le droit international humanitaire et les résolutions du Conseil de sécurité ne peut rester sans suite.  De fait, la représentante appelle tous les États Membres à utiliser leur influence sur les parties au conflit afin de promouvoir la libération des personnes détenues arbitrairement ou illégalement.  Il importe également que l’ONU ait un accès libre et inconditionnel à tous les lieux de détention et que les victimes et leurs familles aient droit à la justice et à la réparation. 

Convaincue que les efforts de réconciliation et de paix sont mis en péril si des familles entières sont laissées dans l’ignorance quant au sort de leurs proches et que l’impunité continue de régner sur ces disparitions, la représentante a rappelé qu’en vertu de la résolution 2474, les familles ont un droit d’information qui doit être respecté par toutes les parties au conflit.  « Au lieu de semer des graines de discorde, plantons des graines pour une paix juste, stable et durable », a-t-elle conclu.     

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a souligné que les avancées au sujet des personnes détenues et portées disparues sont importantes pour envoyer un signal fort au peuple syrien et à la communauté internationale.  Il a espéré que le groupe de travail des garants d’Astana, dont l’ONU fait partie, pourra parvenir à des résultats plus concrets sur ce dossier.  Il a pris note des efforts de l’Envoyé spécial, qui a fait de cette question l’une de ses priorités.

Compte tenu de la complexité de la question syrienne, l’Indonésie appelle à éviter la politisation de cette question et appelle à une approche constructive, basée sur une meilleure communication et le dialogue.  Aussi la communauté internationale devrait-elle renforcer ses mesures d’appui à un processus politique dirigé par les Syriens, a poursuivi le représentant.  Avant de conclure, il a rappelé les obligations de toutes les parties, en vertu du droit international humanitaire, à garantir la protection des droits de la personne de tous les citoyens.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a exprimé des doutes quant aux motivations ayant conduit à la convocation de cette réunion.  « Plutôt que d’entendre de nouvelles informations de nature à renforcer la confiance, nous avons entendus des informations non objectives », a regretté le représentant, avant de fustiger une démarche visant à « mettre des bâtons dans les roues » au processus politique syrien.  « Nous sommes très déçus par l’intervention de nos collègues occidentaux et en particulier de notre collègue des États-Unis »,a-t-il ajouté. 

Le représentant russe a déclaré qu’il aurait souhaité obtenir des informations à propos des territoires syriens occupés illégalement pour savoir comment la loi s’y applique et comment la justice y est rendue.  « Combien de personnes sont emprisonnées ou portées disparues dans les territoires sous contrôle de groupes armés qui portent atteinte à la souveraineté de la Syrie »? a encore demandé le représentant russe, avant de regretter la « politisation contre-productive » d’une question humanitaire et la stigmatisation d’une seule partie au conflit, à savoir le Gouvernement syrien.  M. Polyanskiy a ensuite exhorté la communauté internationale à aider la Syrie à se relever de cette « crise intérieure qui est malheureusement attisée de l’extérieur ». 

Par ailleurs, le représentant russe a rappelé qu’au tout début du mois d’août, dans le cadre du processus d’Astana, s’est tenue une réunion d’un groupe de travail qui a permis d’améliorer la confiance entre les parties.  Le 31 juillet s’est déroulée la quatrième opération de libération et d’échange de prisonniers par l’entremise d’un mécanisme unique qui a permis l’échange de 110 prisonniers depuis novembre 2018.  « Avec l’aide d’experts du CICR et de l’ONU, nous mettons également en place les modalités d’une base de données où seront mentionnées les personnes disparues », a indiqué M. Polyanskiy.  Il a ensuite prévenu que toute tentative de lancer de nouvelles enquêtes du Conseil de sécurité ne pourra que porter atteinte aux processus en cours et saper le processus complexe de renforcement de la confiance entre les parties.  Personne ne profiterait d’une évolution aussi négative, a-t-il indiqué, avant d’engager ses collègues occidentaux à faire toute la lumière sur le sort des personnes détenues de manière arbitraire dans la Ghouta orientale et dans le sud-ouest de la Syrie.  De telles questions ne doivent pas être posées à Damas, a-t-il affirmé. 

M. Polyanskiy a par ailleurs relevé que le nord-est de la Syrie est en ruines, relevant notamment que 1 200 personnes sont décédées depuis début 2019 suite aux frappes aériennes de la coalition.  Il a fait savoir que 17 000 personnes ont pu quitter le camp de Deïr el-Zor grâce à l’implication de la Russie et du régime syrien.  De nombreuses personnes ont également pu quitter le camp de Roukban grâce aux efforts du Centre russe pour la réconciliation.  Le représentant a aussi qualifié la situation dans le camp de Hol de catastrophique et a accusé « la puissance occupante » d’être responsable des « conditions dignes d’un camp de concentration » qui y prévalent.  Il a aussi pointé les « déclarations contradictoires » de l’Administration américaine selon lesquelles l’EIIL aurait été vaincu en Syrie.  Mais la présence continue des États-Unis semble suggérer que leurs objectifs ne s’alignent pas avec le respect de la souveraineté de la Syrie, a-t-il commenté.

M. WU HAITAO (Chine) a dit accorder la plus grande attention à la question des personnes détenues et portées disparues en Syrie, et a noté que l’Envoyé spécial, M. Pederson, en a fait une priorité.  Ses efforts vont dans le sens du renforcement de la confiance mutuelle entre les parties notamment par le biais des échanges de prisonniers, a-t-il expliqué, avant de saluer la libération, par le Gouvernement syrien, de certains détenus.

La Chine appelle la communauté internationale à fournir une assistance humanitaire renforcée à la population syrienne et à participer aux efforts de reconstruction tout en respectant les principes de neutralité, d’impartialité et de non-politisation de ces questions.  Elle souhaite voir le processus politique syrien avancer, et appelle les parties syriennes à penser à l’avenir du pays.  La communauté internationale doit les encourager à adopter des mesures volontaires propices à la réconciliation, a-t-il ajouté.

M. PAUL DUCLOS (Pérou) a salué les efforts des pays garants du processus d’Astana, qui ont permis la libération de dizaines de détenus depuis novembre 2018.  Il a toutefois appelé à redoubler d’efforts pour faire avancer plus rapidement ce dossier.  Le représentant a notamment jugé nécessaire de disposer d’informations plus précises sur la situation des personnes détenues et disparues, et d’adopter des lois nationales pour la protection des détenus avant, durant et après leur libération.  Il a également appelé à offrir à leurs familles un soutien matériel, psychologique et juridique.  Pour ce faire, le représentant a estimé que la communauté internationale avait un rôle très important à jouer, notamment via l’adoption d’un ensemble de pratiques optimales et de normes techniques, ainsi qu’en octroyant des ressources financières et en exerçant une influence positive sur les parties.  Il a appelé à accorder une attention particulière au sort des enfants syriens disparus, étant donné leur « extrême vulnérabilité ».  Le représentant a enfin jugé crucial que le Gouvernement syrien et l’opposition se focalisent sur la recherche de solutions « à grande échelle » pour procéder à des échanges de prisonniers et à des libérations simultanées de groupes de détenus. 

Aux yeux de Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale), les rapports récents sur la question des détentions arbitraires en Syrie sont « clairs et sans équivoque ».  Quoique la pratique des détentions arbitraires ait cours dans l’ensemble du pays et soit utilisée par toutes les parties au conflit, c’est dans les zones sous le contrôle du Gouvernement qu’elle est de loin le plus répandue, a-t-elle relevé.  La représentante a par conséquent appelé toutes les parties à faire la lumière sur le sort des personnes disparues dans le cadre des hostilités et à libérer les personnes détenues arbitrairement, dans le respect des résolutions 2254 (2015) et 2258 (2015) du Conseil de sécurité.  Les personnes détenues par les autorités sans la moindre justification légale doivent quant à elles être immédiatement libérées, a-t-elle ajouté.  La représentante a en outre souligné que les familles des victimes de disparition forcée avaient le droit de connaître la vérité sur le sort réservé à leurs proches, ainsi que de récupérer leurs dépouilles mortuaires. 

La représentante a par ailleurs pris note du fait que, le 31 juillet dernier, le régime syrien et les groupes d’opposition avaient procédé à la libération simultanée de plusieurs détenus, dans une zone sous le contrôle des forces d’opposition.  De manière générale, elle a appelé les parties à procéder à la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement.  À défaut, et en l’absence de mesures pour rendre justice aux victimes, a-t-elle mis en garde, aucune avancée ne pourra être réalisée en faveur de la conclusion d’un accord politique.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a attiré l’attention sur l’impact à long terme sur les familles, les amis et la communauté dans son ensemble de la question des personnes disparues.  Il a rappelé à toutes les parties, dont les groupes armés non étatiques, leurs responsabilités juridiques et obligations morales de protéger les personnes détenues et de documenter leur situation.  Fort de l’expérience de son pays en matière de réconciliation nationale, le représentant de l’Afrique du Sud a mis l’accent sur le processus de vérité, justice et redevabilité pour solidifier le processus de paix et commencer le processus de réconciliation nationale.  Dans ce contexte, il a salué les efforts du groupe d’Astana et de l’ONU qui ont permis d’effectuer, le 31 juillet, des échanges de prisonniers entre le Gouvernement et l’opposition dans le district d’Abu al-Zindeen, au nord d’Alep.  « La seule façon de parvenir à une paix durable est de faciliter un processus de dialogue intersyrien sur la base de la résolution 2254 », a insisté M. Matjila. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a réaffirmé d’emblée que la Pologne soutient tout effort visant à faire émerger une Syrie qui soit pacifique, souveraine, démocratique, indépendante et entière.  Mais, a-t-elle constaté, le soutien au processus en cours, sous l’égide des Nations Unies, n’est pas suffisant.  Il faut des mesures pratiques, comme l’a indiqué l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen, dans son plan en cinq points présenté au Conseil de sécurité plus tôt cette année.  Le cadre qu’il a défini porte notamment sur la question extrêmement importante des détenus et des personnes enlevées et portées disparues en Syrie, a rappelé la représentante. 

Les huit années de conflit en Syrie ont causé des souffrances indescriptibles, a-t-elle noté, en évoquant les milliers de personnes en détention arbitraire, dont un grand nombre subit des mauvais traitements, y compris la torture et les viols.  Mme Wronecka a également parlé des nombreuses personnes portées disparues dont les familles n’ont plus aucune nouvelle. 

Face à ce constat, la Pologne appelle à la libération des toutes les personnes détenues arbitrairement, en particulier des femmes, des enfants et des personnes âgées.  Tout progrès dans ce domaine contribuerait à renforcer la confiance mutuelle entre les parties, a affirmé la représentante, qui y voit un moyen pour créer un climat propice à une paix durable.  Agir sur ce plan pourrait, selon elle, ouvrir la voie à un processus de transition politique négocié. 

M. LOUAY FALOUH (République arabe syrienne) a rejeté et dénoncé les « pratiques systématiques » des délégations des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France, les accusant d’exploiter la tribune du Conseil de sécurité pour dénigrer le Gouvernement syrien.  Ces délégations n’ont pas la légitimité de convoquer une réunion sur la situation dans notre pays alors qu’ils sont impliqués dans l’agression militaire de la Syrie où ils se sont rendus responsables de milliers de morts, a-t-il affirmé. 

« Ces gouvernements ne se sont en réalité jamais intéressés aux droits de l’homme et n’ont fait que manipuler les dispositions de la Charte des Nations Unies pour mettre en œuvre un agenda colonialiste qui ne vise qu’à renverser des gouvernements légitimes. »

Le représentant a assuré que sa délégation n’est pas opposée à la tenue de réunions sur la situation en Syrie à condition que leur objectif soit d’échanger des points de vue sincères aboutissant à de vrais solutions pour permettre le retour à la paix et la prospérité pour tous les Syriens. 

M. Falouh a ensuite suggéré d’examiner ce qui a été dépensé par les Gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France en armement pour « régler des comptes » avec le Gouvernement syrien.  Il a regretté que le Conseil de sécurité se base sur des sources d’information « suspectes » qui induisent en erreur la communauté internationale.

Il a aussi déploré que le Conseil de sécurité demeure « incapable » de faire face à la principale cause des souffrances du peuple styrien, à savoir le terrorisme, qui est soutenu par les Américains, les Britanniques et les Français.  Il a affirmé que ces gouvernements soutiennent le groupe terroriste El-Nostra dans le nord-ouest du pays, rappelant dans la foulée que les groupes terroristes ont exécuté des milliers de Syriens.  Il a fustigé les gouvernements occidentaux qui financent des groupes armés terroristes religieux et qui les font passer pour une opposition syrienne modérée. 

Poursuivant, le délégué syrien a salué les mesures pratiques mises en place par le groupe de travail d’Astana en matière d’échange de prisonniers, précisant que les initiatives de réconciliation nationale du Croissant-Rouge arabe syrien avaient porté des fruits.  Il a assuré que les autorités judiciaires syriennes faisaient leur travail conformément à la Constitution et aux procédures prévues par les Codes civil et pénal de la Syrie.  « Nous sommes engagés à détruire les foyers du terrorisme en Syrie pour parvenir à une réconciliation nationale durable et nous souhaitons que toutes les forces étrangères quittent notre territoire », a insisté le représentant syrien.  Il a indiqué qu’il aurait souhaité que le Conseil de sécurité puisse entendre le témoignage de victimes de tortures pratiquées par les forces de l’opposition syrienne.

Reprenant la parole, la représentante du Royaume-Uni a rappelé « officiellement » que le Conseil de sécurité peut débattre de tout sujet en matière de paix et de sécurité internationales et a interpellé le représentant syrien pour lui dire « qu’il sera peut-être intéressé de savoir que pas moins de neuf pays ont demandé la réunion du Conseil de sécurité d’aujourd’hui ».  Il vaudrait mieux, a-t-elle ajouté, qu’il utilise le temps qui lui est imparti pour répondre à la question à l’ordre du jour, à savoir les personnes détenues et portées disparues en Syrie.  Le Royaume-Uni, a-t-elle rappelé, demande aux autorités syriennes de présenter une liste des personnes détenues et des personnes décédées, y compris de leurs lieux de sépulture.  « S’il y a une guerre en Syrie, c’est parce que le Gouvernement syrien s’est attaqué à son peuple.  C’est aussi simple que cela », a-t-elle tranché.

Lui répondant, le représentant de la Syrie a indiqué que le Conseil de sécurité doit œuvrer à trouver une solution au conflit tout en respectant la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Ses résolutions stipulent aussi qu’il faut y mettre fin au terrorisme, a-t-il souligné.  C’est pourquoi il a demandé aux membres du Conseil qui ont une présence militaire en Syrie de mettre fin aux mesures coercitives unilatérales imposées aux Syriens et à leurs ingérences dans le processus politique syrien.  Il leur a également demandé de préciser leur position par rapports aux activités du groupe terroriste El-Nosra et d’autres qu’il les a accusés de soutenir.

« Le Royaume-Uni et ses partenaires n’appuient pas le terrorisme », a rétorqué la représentante du Royaume-Uni, avant d’inviter le représentant syrien à retirer ses propos.  Tant qu’il n’y aura pas de processus politique viable en Syrie, le Royaume-Uni ne participera pas à la reconstruction de la Syrie, a-t-elle tranché, avant de rappeler que l’objectif de cette réunion du Conseil de sécurité est de demander aux autorités syriennes des informations sur les détenus et d’exiger un accès du CICR à ses centres de détention. 

À son tour, le représentant de la Fédération de Russie a contesté les propos de la délégation du Royaume-Uni selon lesquels il y aurait une unanimité au sein du Conseil de sécurité sur la question syrienne.  « Faire de cette séance du Conseil de sécurité une séance de tribunal n’est pas acceptable », a-t-il jugé. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité appelle à renforcer l’appui à l’UNOWAS dans un contexte marqué par l’intensification des violences au Mali et au Burkina Faso

8592e séance – matin
CS/13912

Le Conseil de sécurité appelle à renforcer l’appui à l’UNOWAS dans un contexte marqué par l’intensification des violences au Mali et au Burkina Faso

Le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, une déclaration présidentielle par laquelle il se déclare notamment vivement inquiet de l’intensification des violences intercommunautaires dans le centre du Mali et au Burkina Faso et appelle par ailleurs à l’achèvement des processus politiques en cours dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest.  Il souligne aussi qu’il importe de fournir au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) un appui accru et des ressources suffisantes.

Le Conseil de sécurité prie notamment le Secrétaire général de l’ONU de lui présenter, le 15 novembre au plus tard, les recommandations issues de l’examen stratégique du mandat et les activités de l’UNOWAS, le but étant d’éclairer les débats du Conseil sur le renouvellement du mandat de ce Bureau qui, note le Conseil, est de plus en plus sollicité, notamment en Guinée-Bissau, dans les pays ayant achevé leur transition et dans le cadre des activités menées conjointement avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Mission de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL).

Par cette déclaration, adoptée à l’unanimité de ses membres, le Conseil de sécurité se dit profondément préoccupé par la détérioration constante des conditions de sécurité et de la situation humanitaire dans les pays du Sahel.  Il insiste notamment sur le fait que la sécurité et la stabilité au Mali sont inextricablement liées à celles du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, ainsi qu’à la situation en Libye et en Afrique du Nord.

S’agissant d’appuyer une action régionale face à la crise dans la région du bassin du lac Tchad, où quelque 2,5 millions de personnes ont été déplacées, le Conseil de sécurité se réjouit de ce que la conférence de haut niveau sur la région du bassin du lac Tchad, tenue à Berlin les 3 et 4 septembre 2018, ait permis de mobiliser des ressources supplémentaires aux fins de la stabilisation de la région. Il se félicite aussi du Forum de coopération régionale des gouverneurs du bassin du lac Tchad qui s’est tenu à Niamey les 17 et 18 juillet 2019.

Par ce texte, le Conseil de sécurité porte également son attention sur les processus politiques en cours dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest.  Il se félicite notamment que les élections présidentielles tenues en 2019 au Nigéria, au Sénégal et en Mauritanie et les élections législatives en Guinée-Bissau se soient déroulées dans des conditions généralement pacifiques.  Il espère également que le dialogue intertogolais donnera lieu à l’organisation, en 2020 au Togo, d’une élection présidentielle libre, juste, crédible, pacifique et respectant les délais voulus.

S’agissant de la Guinée-Bissau, le Conseil prend note du compromis entre les dirigeants politiques nationaux, permettant qu’un nouveau Premier Ministre soit nommé et que la date du 24 novembre 2019 soit fixée pour l’élection présidentielle.  Sur cette base, il demande de nouveau que le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau réduise progressivement ses effectifs et transfère des tâches à l’UNOWAS.

Pour ce qui est de la Gambie, il se félicite de la création de la Commission nationale des droits de l’homme et de la Commission vérité, réconciliation et réparations ainsi que du démarrage des auditions, le 7 janvier 2019, « une étape importante dans la recherche par le pays de la justice, de la paix et de la réconciliation ».  Le Conseil souhaite aussi que la réconciliation nationale progresse en Sierra Leone et au Libéria.

CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité accueille avec satisfaction le rapport du Secrétaire général sur le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) et l’exposé fait le 24 juillet 2019 par le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas.

Le Conseil rappelle ses résolutions 2480 (2019), 2423 (2018), 2391 (2017), 2359 (2017), 2349 (2017) et 2320 (2016) ainsi que les déclarations de sa présidence publiées sous les cotes S/PRST/2017/2, S/PRST/2017/10, S/PRST/2018/3 et S/PRST/2018/16.

Le Conseil exprime son plein appui au Représentant spécial dans l’accomplissement de son mandat et à l’UNOWAS pour ses activités en cours. Il note que l’UNOWAS est de plus en plus sollicité, notamment en Guinée‑Bissau, dans les pays ayant achevé leur transition et dans le cadre des activités menées conjointement avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Mission de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL), et souligne à nouveau qu’il importe de fournir au Bureau un appui accru et des ressources suffisantes à cet égard.

Le Conseil de sécurité se félicite de ce que l’UNOWAS et le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC) continuent de coopérer en vue d’appuyer la mise en œuvre de la Déclaration de Lomé, du 30 juillet 2018, et de combattre les menaces transrégionales qui pèsent sur la paix et la sécurité en Afrique de l’Ouest, en Afrique centrale et au Sahel, notamment grâce aux systèmes d’alerte rapide et, à cet égard, demande que la CEDEAO, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, l’UNOWAS et le BRENUAC coopèrent pour lutter contre la criminalité maritime, la criminalité organisée et la piraterie dans le golfe de Guinée.

Le Conseil salue la décision du Secrétaire général de soumettre le mandat et les activités de l’UNOWAS à un examen stratégique, souligne que cet examen devra se faire en toute indépendance et prie le Secrétaire général de lui présenter, le 15 novembre 2019 au plus tard, les recommandations qui en seront issues, assorties d’observations, s’agissant notamment des domaines dans lesquels des améliorations peuvent être apportées et des priorités sur lesquelles il convient de se pencher ou de se recentrer, y compris la lutte antiterroriste, les effets des changements climatiques sur la sécurité et les violences intercommunautaires, dans le cadre de la vaste thématique que constituent la prévention des conflits et la pérennisation de la paix, le but étant d’éclairer les débats du Conseil sur le renouvellement du mandat de l’UNOWAS, qui vient à expiration le 31 décembre 2019.

Le Conseil réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de tous les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

Le Conseil insiste sur le fait que la sécurité et la stabilité au Mali sont inextricablement liées à celles du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, ainsi qu’à la situation en Libye et en Afrique du Nord.

Le Conseil prend note du dialogue intertogolais et espère qu’il servira de fondement à l’organisation, en 2020 au Togo, d’une élection présidentielle libre, juste, crédible, pacifique et respectant les délais voulus.

Le Conseil se félicite de ce que les élections présidentielles tenues en 2019 au Nigéria, au Sénégal et en Mauritanie et les élections législatives en Guinée-Bissau se soient déroulées dans des conditions généralement pacifiques.

Le Conseil se dit profondément préoccupé par la détérioration constante des conditions de sécurité et de la situation humanitaire dans les pays du Sahel et engage les acteurs régionaux et internationaux à continuer de se mobiliser pour aider ces pays à faire face aux problèmes de paix et de sécurité qu’ils rencontrent, se félicite à cet égard des efforts déployés par le Secrétaire général pour adapter l’appui de l’ONU sur le terrain, au Burkina Faso et au Niger, et demande à être tenu informé de l’avancement de ces processus transversaux intégrés dans le cadre des rapports périodiques sur l’UNOWAS.

Le Conseil rappelle sa résolution 2458 (2019) et prend note du compromis auquel les dirigeants politiques bissau-guinéens ont récemment consenti, permettant qu’un nouveau Premier Ministre soit nommé et que la date du 24 novembre 2019 soit fixée pour l’élection présidentielle, et demande de nouveau que le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau réduise progressivement ses effectifs et transfère des tâches à l’UNOWAS.

Le Conseil engage les autorités et la population gambiennes à poursuivre leurs efforts visant à consolider la paix en réformant le système politique et le secteur de la sécurité, en mettant en place des mécanismes de justice transitionnelle et en révisant la Constitution. Il se félicite de la création de la Commission nationale des droits de l’homme et de la Commission vérité, réconciliation et réparations ainsi que du démarrage des auditions, le 7 janvier 2019, qui marque une étape importante dans la recherche par le pays de la justice, de la paix et de la réconciliation.

Le Conseil rappelle qu’aux termes de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, les États parties doivent s’assurer que le processus d’amendement ou de révision de leur constitution repose sur un consensus national comportant, le cas échéant, le recours au référendum, et, tout en se déclarant préoccupé par la polarisation croissante de la situation, demande à l’UNOWAS d’encourager tous les acteurs politiques à recourir au dialogue pour régler leurs différends à cet égard.

Le Conseil souhaite que les réformes politiques en cours dans la région soient consolidées pour prévenir les violences et l’instabilité et que la réconciliation nationale progresse en Sierra Leone et au Libéria. Il souligne que l’ONU doit continuer d’apporter un soutien à cet égard, y compris dans un autre cadre que celui des missions, et salue le rôle que la Commission de consolidation de la paix et le Fonds pour la consolidation de la paix jouent s’agissant de consolider et de pérenniser la paix.

Le Conseil souligne que les parties prenantes nationales en Guinée-Bissau, en Côte d’Ivoire, en Guinée et au Togo doivent collaborer pour faciliter la préparation en temps voulu et la tenue, dans les délais fixés, d’élections véritablement libres, justes, crédibles et pacifiques et prendre toutes les mesures qui s’imposent pour prévenir les violences, et leur demande instamment de garantir des conditions égales à tous les candidats et toutes les candidates et de favoriser la participation pleine et véritable des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, notamment en vue d’accroître le nombre de femmes aux hautes fonctions de l’État, conformément aux dispositions constitutionnelles de chaque État et aux engagements pris aux niveaux national, régional et mondial.

Le Conseil insiste sur l’importance du rôle que jouent les femmes dans la prévention et le règlement des conflits, dans la consolidation de la paix et dans les situations d’après-conflit et souligne qu’elles doivent participer sur un pied d’égalité à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité et y être pleinement et véritablement associées, comme il l’a dit dans ses résolutions pertinentes, notamment les résolutions 1325 (2000) et 2242 (2015).

Le Conseil rappelle que pour s’attaquer aux causes profondes de la crise, il importe d’élaborer et d’appliquer des stratégies globales en tenant compte de la problématique femmes-hommes. Il se félicite de l’action menée par l’UNOWAS et la CEDEAO en faveur de la participation systématique des femmes aux initiatives visant à lutter contre le terrorisme et à prévenir l’extrémisme violent, qui peut conduire au terrorisme, et demande à l’UNOWAS d’aborder ces questions dans ses comptes rendus périodiques.

Le Conseil se dit à nouveau préoccupé par les problèmes de sécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel, en particulier par les menaces que représentent le terrorisme, la piraterie maritime, les conflits entre pasteurs et agriculteurs et la criminalité transnationale organisée, notamment la traite des êtres humains, le trafic d’armes et de drogues et l’exploitation illégale de ressources naturelles, qui peuvent être liés entre eux, et se félicite des efforts consentis par l’UNOWAS pour appuyer les dispositifs régionaux d’analyse et d’alerte rapide.

Le Conseil se félicite que les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel soient à l’origine d’initiatives visant à combattre l’insécurité dans la région et salue les efforts qu’ils déploient, ainsi que les mesures prises par l’Union africaine et la CEDEAO, en vue de renforcer la sécurité dans les régions frontalières et la coopération régionale et de remédier aux conséquences du terrorisme et de la criminalité transnationale organisée, y compris au moyen de la Force multinationale mixte et de la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel. Le Conseil réaffirme que les États Membres doivent veiller à ce que les mesures qu’ils prennent pour lutter contre le terrorisme soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, en particulier le droit international des droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire, selon qu’il convient. Le Conseil souligne à cet égard qu’il convient de se doter de cadres juridiques et de stratégies visant à remédier au problème posé par l’accroissement du nombre de personnes associées à des groupes extrémistes violents et terroristes qui sont placées en détention. Il souligne que l’action en matière de sécurité doit concorder avec les objectifs politiques afin de permettre le rétablissement de la sécurité civile, la mise en place d’une gouvernance efficace permettant de fournir des services essentiels et la revitalisation des économies locales de façon à fournir des moyens de subsistance compte tenu de l’explosion démographique de la jeunesse. Le Conseil encourage la CEDEAO et le G5 Sahel à répertorier les domaines de complémentarité sur le plan de la prévention des conflits et de la pérennisation de la paix dans la région et rappelle également l’important rôle que joue l’UNOWAS dans la fourniture d’une aide technique au Secrétariat permanent du G5 Sahel.

Le Conseil se félicite de l’étude au sujet des conflits entre les pasteurs et agriculteurs de la région qu’a menée à bien l’UNOWAS, qui en a conclu que la concurrence pour les ressources naturelles, la croissance démographique rapide, la faiblesse de la gouvernance, les pressions exercées par les facteurs climatiques et écologiques et la circulation des armes légères et de petit calibre étaient autant d’éléments générateurs de tensions. Il encourage la CEDEAO et ses États membres, appuyés par l’UNOWAS, à faire face à ces défis de façon coordonnée et holistique. Le Conseil se dit à nouveau vivement préoccupé par l’intensification des violences intercommunautaires dans le centre du Mali et au Burkina Faso et rappelle que pour stabiliser cette région et protéger la population civile, il faut une intervention qui soit pleinement coordonnée et dirigée par les gouvernements de ces pays, avec l’appui de l’UNOWAS et de la communauté internationale, et qui vise à obtenir des progrès simultanés sur les plans de la sécurité, de la gouvernance, de l’aide humanitaire et du développement, de la réconciliation ainsi que de la protection et de la promotion des droits de la personne.

Le Conseil rappelle que le commerce illicite d’armes légères et de petit calibre demeure une menace pour la paix et la sécurité internationales, notamment en Afrique de l’Ouest et au Sahel.

Le Conseil rappelle ses résolutions 2331 (2016) et 2388 (2017) et condamne à nouveau avec la plus grande fermeté tous les actes de traite des êtres humains, y compris le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats, en violation du droit international, dans les zones touchées par un conflit armé. Il se félicite de la coordination entre l’Union européenne, l’Union africaine et l’ONU, qu’il encourage à continuer de coopérer, notamment dans le cadre du groupe de travail conjoint, qui vise à sauver la vie des migrants et réfugiés, y compris des victimes de la traite, et de les protéger le long de l’itinéraire qu’ils empruntent, en particulier en Libye.

Le Conseil se déclare préoccupé par la situation humanitaire globale de la région, qui résulte notamment de la violence, des déplacements forcés, de l’extrême pauvreté et des inégalités sociales, y compris les violences sexuelles et fondées sur le genre, et demande une action d’envergure sur le plan humanitaire et en matière de développement ainsi que le décaissement des fonds annoncés.

Le Conseil déplore les pertes de vies humaines causées par les activités terroristes dans la région du bassin du lac Tchad, prend note des progrès accomplis dans la mise en œuvre de sa résolution 2349 (2017) s’agissant d’appuyer une action régionale face à la crise dans la région du bassin du lac Tchad, où quelque 2,5 millions de personnes ont été déplacées, et salue les efforts que continuent de déployer les pays concernés. Il se réjouit de ce que la conférence de haut niveau sur la région du bassin du lac Tchad, tenue à Berlin les 3 et 4 septembre 2018, ait permis de mobiliser des ressources supplémentaires aux fins de la stabilisation de la région.  Il se félicite des mesures prises par les gouvernements de la région du bassin du lac Tchad et les organisations régionales et sous-régionales pour empêcher une nouvelle aggravation de la crise, tout en constatant qu’il faut renforcer l’action menée aux échelons national et régional pour faire face à l’insécurité et répondre aux besoins sur le plan humanitaire et sur celui du relèvement rapide.  À cet égard, il se félicite du Forum de coopération régionale des gouverneurs du bassin du lac Tchad qui s’est tenu à Niamey les 17 et 18 juillet 2019.

Le Conseil est conscient des effets néfastes des changements climatiques, des changements écologiques et des catastrophes naturelles, notamment la sécheresse, la désertification, la dégradation des terres et l’insécurité alimentaire, sur la stabilité en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, il maintient que les gouvernements et les organismes des Nations Unies doivent mettre en place des stratégies à long terme, fondées sur des évaluations des risques, pour favoriser la stabilisation et la résilience et il encourage l’UNOWAS à continuer de tenir compte des informations à ce sujet dans ses activités.

Le Conseil souligne qu’il faut renforcer l’action collective de toute la région du Sahel, conformément aux cadres existants, se félicite à cet égard du resserrement de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine, en particulier dans le contexte du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité et de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063.

Le Conseil souligne qu’il faut adopter une démarche plus intégrée et plus multisectorielle face aux questions indissolubles que sont le développement, l’action humanitaire, les droits de la personne et la paix et la sécurité, y compris pour ce qui est de s’attaquer aux causes profondes des crises, d’aider les groupes de population vulnérables, notamment les migrants et les réfugiés, de prévenir de nouvelles tensions et de nouvelles violences, de dénoncer et traduire en justice les responsables de violations des droits de la personne, de lutter contre l’exclusion et la pauvreté, de renforcer la résilience des institutions et des populations, de promouvoir une bonne gouvernance et d’édifier des sociétés pacifiques, justes et inclusives.

Le Conseil se félicite des efforts collectifs menés dans le cadre de l’ONU s’agissant de recalibrer la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et d’élaborer le Plan d’appui des Nations Unies pour le Sahel, qui vise à en renforcer l’efficacité, conformément aux besoins du peuple sahélien et aux priorités nationales et régionales et en étroite collaboration avec les partenaires et les pays de la région. Le Conseil encourage l’action menée pour instaurer une cohérence et une coordination accrues dans le système des Nations Unies ainsi qu’avec les partenaires de la région, grâce à l’application efficace du Plan d’appui des Nations Unies pour le Sahel, en coordination avec le Représentant spécial et l’UNOWAS.

Le Conseil prie instamment les États Membres et les autres acteurs, dont le PNUD, d’aligner leurs activités sur la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et d’unir leurs efforts en vue de mobiliser les ressources nécessaires à cette fin, et prie le Secrétaire général de le tenir informé des progrès accomplis s’agissant d’accroître la cohérence et l’efficacité de l’action de l’ONU au Sahel.

Le Conseil prie le Secrétaire général de continuer de l’informer des efforts faits par l’UNOWAS dans les domaines mentionnés dans la présente déclaration et demande de nouveau que l’UNOWAS fasse le point, dans ses comptes rendus périodiques, sur l’état d’avancement de l’application de la résolution 2349 (2017).

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité face à une multiplicité d’appels à veiller à la santé mentale et à la réintégration des enfants associés à des groupes armés

8591e séance – matin
CS/13909

Le Conseil de sécurité face à une multiplicité d’appels à veiller à la santé mentale et à la réintégration des enfants associés à des groupes armés

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé a sonné l’alerte, aujourd’hui, face au nombre croissant de meurtres et de mutilations d’enfants à l’occasion d’un débat public du Conseil de sécurité au cours duquel un accent marqué a été placé sur l’importance de la santé mentale et l’urgence de la réintégration des enfants associés à des groupes armés.

Venue présenter le dernier rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé, Mme Virginia Gamba a indiqué que plus de 24 000 violations graves commises contre des enfants ont été confirmées par l’ONU dans 20 situations de pays en 2018, dont 12 000 cas de meurtre ou de mutilation.  De plus, un nombre considérable de cas de viol et d’autres formes de violence sexuelle n’est pas signalé, par peur de représailles, ou en raison du pouvoir des assaillants et du manque de services pour les victimes, a-t-elle indiqué.

« Dix ans après l’adoption de la résolution 1882, ces faits sont le signe que nous avons encore un long chemin à parcourir pour mettre un terme aux graves violations commises à l’encontre des enfants en temps de conflit armé », a déclaré de son côté la Directrice exécutive de l’UNICEF.

Apportant un visage humain au débat d’aujourd’hui, l’Ambassadrice d’UNICEF Canada, Mme Mariatu Kamara, est venue témoigner de son expérience pendant la guerre civile en Sierra Leone où des rebelles l’ont prise en otage lorsqu’elle avait 11 ans, puis mutilée en lui coupant les deux mains à la machette, avant qu’elle ne tombe dans la mendicité.  Forte de cette expérience, elle se consacre désormais à plaider la cause des enfants handicapés issus de conflits armés et axe son action sur les services d’appui psychologique.

Ancien enfant soldat soudanais, enrôlé de force à l’âge de 7 ans par un groupe rebelle opposé au Gouvernement de Khartoum, M. Majok Peter Awan a lui aussi mis en exergue l’importance d’un soutien psychosocial et de l’accès à l’éducation pour ces enfants. 

Aujourd’hui professionnel de la protection de l’enfance, M. Awan a signalé que 420 millions d’enfants à travers le monde grandissent dans un environnement affecté par les conflits, et a souligné qu’il faudrait mobiliser au moins 200 millions de dollars par an pour renforcer le paquet minimum d’assistance en santé mentale pour ces enfants.  Aussi a-t-il appelé les États Membres à intégrer la question de la santé mentale dans leurs lois nationales, ainsi que dans les politiques et plans d’intervention d’urgence, et à promettre d’allouer au moins 5% de leur budget consacré à la santé à la question santé mentale. 

Le sort des enfants retirés des mains de groupes armés a été soulevé à de multiples reprises, à commencer par la Représentante spéciale qui a indiqué que plus de 13 500 enfants ont pu bénéficier d’un appui à la réintégration après avoir été enrôlés de force par des groupes armés.  À ces yeux, ces chiffres justifient l’ampleur des efforts déployés pour établir des plans d’action conjointe avec l’ensemble des parties à un conflit, ainsi que pour intégrer des libellés et des préoccupations portant sur les enfants et les conflits armés au sein des dialogues et processus de paix. 

Pour autant, Mme Gamba a constaté que « beaucoup trop d’enfants » continuent d’être détenus en raison d’un conflit et a exhorté à ce que les enfants témoins de niveaux alarmants de violence ne soient pas ostracisés davantage une fois libérés des mains de groupes ou de forces armées. 

Il faut permettre à ces enfants d’être considérés pour ce qu’ils sont: des victimes d’un conflit, y compris ceux associés à des combattants étrangers qu’on ne saurait priver d’une nationalité, a martelé Mme Gamba. 

« Lorsqu’ils quittent ces groupes, ces enfants devraient recevoir de toute urgence la protection nécessaire et une aide humanitaire après cette expérience traumatisante, endurée parfois pendant des années, mais au lieu de cela, ils sont ostracisés, rejetés et enfermés », a dénoncé de son côté Mme Fore, qui a appelé les États Membres à appuyer des programmes de réintégration holistiques et établis sur des faits.

Au nom du Groupe des Amis des enfants touchés par les conflits armés, le Canada s’est accordé sur le fait que les enfants anciennement associés à des groupes tels que Daech devraient être traités en premier lieu comme des victimes, tandis que l’Indonésie a appelé à redoubler d’efforts pour trouver un rôle constructif dans la société à ces enfants souvent perçus comme dangereux et immoraux.  L’Allemagne a, de plus, relevé que « très souvent, pour les enfants soldats, rester dans le groupe armé est parfois plus avantageux que de retourner dans les communautés ». 

La Fédération de Russie a toutefois mis en garde contre le risque de voir des groupes armés non étatiques se servir de la protection des droits des enfants pour se légitimer auprès du Conseil de sécurité.  Elle a aussi souligné que la responsabilité première de la protection des enfants en temps de conflit armé est en premier lieu du ressort des États concernés.

À noter par ailleurs que la Directrice exécutive de l’UNICEF s’est également déclarée particulièrement alarmée de l’utilisation répandue d’armes explosives et de leur impact sur les enfants, notant que ces engins provoquent, à l’heure actuelle, la grande majorité des victimes chez les enfants. 

Cette réunion a également été marquée par une multiplicité d’appels à appuyer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et à tout mettre en œuvre afin que les écoles ne soient pas détruites ou utilisées à des fins militaires.  De nombreuses délégations se sont également prononcées en faveur du déploiement de professionnels de la protection de l’enfance au sein des missions de maintien de la paix.

LE SORT DES ENFANTS EN TEMPS DE CONFLIT ARMÉ (S/2019/509 ET S/2019/605)

Déclarations

Mme VIRGINIA GAMBA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé, a indiqué que l’année 2019 marque le vingtième anniversaire de l’adoption de la résolution du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, ainsi que le dixième anniversaire de la résolution 1882 (2009) par laquelle cet organe a jugé nécessaire de renforcer ce mandat en mettant l’accent sur les meurtres, les mutilations, le viol et autres formes de violence sexuelle.

Mme Gamba a ensuite fait savoir qu’elle s’était rendue au Mali le mois dernier où elle avait participé à une réunion conjointe avec des représentants des communautés dogon et peule.  Elle a expliqué que suite à ces échanges, il lui était apparu comme une évidence que la protection des enfants peut être un facteur de renforcement de la confiance entre parties belligérantes.  Facteur qui, a-t-elle ajouté, peut avoir un impact positif sur les processus et accords de paix comme en témoigne l’engagement des deux groupes à cesser les hostilités.

Elle a ensuite indiqué que là où le mécanisme de surveillance et de communication de l’information est mis en œuvre, les gouvernements avaient notamment établi des comités interministériels ou adopté des lois pour la protection de l’enfance, des efforts qui, s’est-elle félicitée, ont permis de réaliser des progrès rapides.  Trois nouveaux plans d’action ont été signés avec des acteurs non étatiques, mais, a-t-elle tempéré, de tels outils ne sont que le début du processus pour mieux protéger les enfants.  D’où l’importance pour les gouvernements concernés et le Conseil de sécurité de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour veiller à la pleine mise en œuvre de ces engagements.

Mme Gamba a souligné que le travail à l’échelon régional et sous-régional est essentiel aux efforts d’implication directe et a espéré disposer prochainement d’outils supplémentaires pour renforcer la protection des enfants.  L’accès et les acteurs qui œuvrent sur le terrain doivent être une priorité, a-t-elle insisté, avant de rappeler le lancement, en 2018, avec l’Union africaine et l’Union européenne, de la campagne « ACT to Protect » déjà mise en œuvre au Mali et en Somalie.

Poursuivant, la Représentante spéciale a alerté, ainsi qu’il en ressort du rapport du Secrétaire général, que même si les violations sont en baisse dans quatre catégories, on constate une augmentation du nombre de meurtres, de mutilations et de violences sexuelles: plus de 12 000 enfants ont été tués ou mutilés, tandis que plus de 13 500 ont bénéficié d’un appui à la réintégration.

S’attardant sur le nombre record de cas vérifiés d’enfants tués ou mutilés en 2018, Mme Gamba s’est inquiétée du fait qu’un nombre sans précédent de violations est attribué à des forces nationales et internationales.  Aussi a-t-elle jugé essentiel que le Conseil de sécurité redouble d’efforts pour veiller à ce que les parties respectent les principes de distinction, proportionnalité et nécessité militaire.  Elle a également exhorté les parties au conflit à émettre des ordres de commandement visant spécifiquement à réduire le nombre de victimes parmi les enfants.

La Représentante spéciale s’est notamment inquiétée de l’impact des engins non explosés, les engins explosifs improvisés (EEI) et les mines qui provoquent des handicaps graves et à long terme.  Elle s’est dite convaincue qu’une « victoire facile » est à portée de main dans ce domaine à condition que la communauté internationale fasse preuve de la volonté nécessaire pour réduire l’utilisation de ces engins et les déblayer une fois les accords de paix conclus.

Mme Gamba a ensuite signalé qu’un nombre considérable de cas de viol et d’autres formes de violence sexuelle n’est pas signalé, y compris lorsque les garçons en sont victimes.  Elle a imputé cela à la peur de représailles, au pouvoir des assaillants et au manque de services pour les victimes, entre autres.  Selon elle, des mécanismes renforcés de reddition de comptes et des services de soins adaptés pour les survivants permettraient de réaliser des progrès significatifs dans ce domaine.

De plus, a-t-elle enchaîné, beaucoup trop d’enfants continuent d’être détenus en raison d’un conflit.  Elle a exhorté à ce que les enfants témoins de niveaux alarmants de violence ne soient pas ostracisés davantage une fois libérés des mains de groupes ou de forces armées.  Il faut permettre à ces enfants d’être considérés pour ce qu’ils sont: des victimes d’un conflit.  Et cela est particulièrement vrai pour les enfants associés à des combattants étrangers, a-t-elle ajouté, avant de souligner qu’aucun enfant ne doit se voir priver d’une nationalité.

La Représentante spéciale a également appelé à prioriser l’action sur le terrain et à protéger le personnel qui effectue cette tâche, notant qu’en 2018, les opérations militaires, l’insécurité, les contraintes d’accès humanitaire et les menaces, entre autres, avaient empêché les spécialistes de la protection de l’enfance d’effecteur leur mission la plus fondamentale.  Face à cette situation, elle a appelé le Conseil de sécurité et les États Membres à mettre l’accent sur la nécessité de l’accès humanitaire dans les résolutions et lors des relations bilatérales.

Mme Gamba s’est par ailleurs félicitée du nombre important d’enfants retirés des mains des parties à un conflit et à avoir obtenu une aide à la réintégration.  Elle a expliqué que ces libérations avaient pu être effectuées en raison de la mise sur pied de plans d’action, de l’émergence d’un processus de paix ou du lancement d’un dialogue entre un gouvernement et des groupes armés.  Ces chiffres, a-t-elle souligné, justifient l’ampleur des efforts déployés pour établir des plans d’action conjointe avec l’ensemble des parties à un conflit, ainsi que pour intégrer des libellés et des préoccupations portant sur les enfants et les conflits armés au sein des dialogues et processus de paix.  Elle a aussi dit l’importance de veiller à ce que les enfants libérés bénéficient de l’existence de programmes adéquats, financés et immédiatement disponibles.  Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ces enfants une fois libérés, ni de les faire attendre pour obtenir une aide à la réintégration, a-t-elle insisté.  C’est pour cela que la réintégration et l’examen des véritables besoins en la matière est si urgente, a-t-elle ajouté avant de conclure.

Mme HENRIETTA FORE, Directrice exécutive de l’UNICEF, a relevé qu’en 2018, plus de 24 000 violations vérifiées avaient été perpétrées contre des enfants en temps de conflit armé, comparativement à 21 000 l’année précédente.  Les meurtres et mutilations en représentent la moitié, a-t-elle déploré.  Elle s’est plus particulièrement alarmée de l’utilisation répandue d’armes explosives et de leur impact sur les enfants, notant que ces engins provoquent, à l’heure actuelle, la grande majorité des victimes chez les enfants lors des conflits.  Ces derniers représentent plus de deux tiers des civils tués ou blessés par des restes de guerre explosifs, et en raison de leur taille, ils encourent davantage de risque d’être handicapés ou de succomber aux lésions par souffle.

« Dix ans après l’adoption de la résolution 1882, ces faits sont le signe que nous avons encore un long chemin à parcourir pour mettre un terme aux graves violations commises à l’encontre des enfants en temps de conflit armé », a-t-elle affirmé.

Poursuivant, Mme Fore a indiqué qu’en 2018, UNICEF avait pu atteindre 6,9 millions d’enfants et d’adolescents et leur fournir une éducation d’urgence dans un contexte de crise humanitaire, tout en plaçant davantage l’accent sur les besoins des enfants handicapés vivant en temps de conflit.  Un appui psychosocial a également été dispensé à 3,6 millions de jeunes pour les aider à gérer des niveaux toxiques de stress et reconquérir l’enfance qu’ils méritent.  Elle a toutefois estimé que des efforts supplémentaires s’imposent pour répondre aux besoins en santé mentale des enfants, un domaine qui, a-t-elle insisté, exige un financement beaucoup plus robuste et durable.

La Directrice exécutive de l’UNICEF s’est aussi souciée du sort des enfants aux mains de groupes armés, bannis par leur communauté en raison de leur lien avec des groupes désignés comme terroristes.  Lorsque ces enfants quittent ces groupes, ils devraient recevoir de toute urgence la protection nécessaire et une aide humanitaire après cette expérience traumatisante, endurée parfois pendant des années.  Mais au lieu de cela, ils sont ostracisés, rejetés et enfermés, a-t-elle déploré, avant de rappeler que la résolution 2427 stipule que les enfants associés à des groupes armés doivent être considérés comme des victimes, y compris ceux qui auraient commis des crimes.

Elle a expliqué qu’un enfant rejoint un groupe armé après avoir subi des contraintes extrêmes, la coercition, la peur ou une forme de manipulation ou tout simplement pour survivre.  Les faits montrent qu’ils sont rarement poussés par l’idéologie, a-t-elle insisté.  Et au lieu d’être détenus, ils doivent être réintégrés dans leur société moyennant une approche holistique pour répondre à leurs besoins complexes.  L’UNICEF a d’ailleurs mis sur pied des programmes de réintégration à cette fin et appelle par ailleurs les États Membres à réintégrer les enfants associés aux groupes armés et à appuyer les approches holistiques et les programmes établis sur des faits.

Mme Fore s’est par ailleurs inquiétée de l’usage excessif de la force militaire contre des civils, y compris des enfants, qui participent à des manifestations pacifiques et a appelé les autorités à faire preuve de retenue.

Mme MARIATU KAMARA, Ambassadrice d’UNICEF Canada, a rappelé que c’est lorsque le Revolutionary United Front (RUF) a commencé ses attaques contre la frontière de la Sierra Leone, en 1991, que les deux pays ont sombré dans une des guerres civiles les plus violentes, au cours de laquelle les enfants sont devenus la cible de belligérants sans foi ni loi, forcés de se battre en leur nom et contre leur volonté.  Il y a eu des meurtres, des viols et des mutilations et aujourd’hui, ces enfants sont perçus comme des ennemis et rejetés par leurs communautés.  Leur avenir est en jeu faute de moyens comme l’éducation, les services de conseil ou encore les formations professionnelles qui pourraient leur donner les outils nécessaires pour un avenir meilleur.

« C’est mon histoire, pas un scénario de film ou une histoire imaginaire », a poursuivi Mme Kamara, qui a espéré que son témoignage contribuera à pousser le Conseil de sécurité à « aller dans la bonne direction ».  Née dans un petit village en Sierra Leone, elle avait 11 ans en 1991 quand la guerre civile a frappé son pays, le faisant sombrer dans la violence pendant 11 ans.  Un jour, les rebelles ont attaqué son village et trois de ses cousins et elle-même ont été capturés et pris en otage pour une journée.  Les rebelles lui ont coupé les deux mains à la machette et l’ont laissée pour morte.  Quelques heures plus tard, elle s’est retrouvée au milieu de cadavres, alors qu’elle perdait beaucoup de sang et était terriblement confuse.  Elle a réussi à trouver refuge dans la forêt, où, le lendemain, un homme l’a trouvée et lui a sauvé la vie.  Grâce à la force de sa volonté et avec l’aide d’inconnus, elle a réussi à se rendre à l’hôpital de Freetown. 

Après son traitement, elle a passé de longues années à « mendier » tout en vivant dans un camp pour personnes amputées.  Elle y a rejoint les rangs d’une troupe de théâtre qui, à travers ses productions, cherchait à sensibiliser le public à la cause des personnes amputées en Sierre Leone.  Grâce à la « gentillesse d’une famille canadienne », elle a pu s’installer au Canada et aller à l’école pour la première fois de sa vie.  Plus tard, Mme Kamara s’est consacrée à l’étude des violences à l’égard des femmes et des enfants dans le cadre d’un programme de plaidoyer à Toronto et a publié ses mémoires sous le titre A Bite of the Mango.

Son travail dans le domaine de la protection des enfants en temps de conflit armé a commencé il y a quelques années, lorsqu’elle est devenue Ambassadrice de l’UNICEF.  Cette nomination m’a donné l’opportunité de donner une voix à ceux qui n’ont jamais pu raconter leurs histoires et de militer pour la cause des enfants affectés par les conflits armés, a expliqué Mme Kamara, dont l’objectif est de faire en sorte que ce genre d’atrocité ne soit plus permis à l’avenir. 

« C’est un honneur pour moi d’être Ambassadrice de l’UNICEF », a déclaré l’intervenante, qui en a fait une plateforme pour partager sa propre histoire et celle de beaucoup d’autres enfants en vue de sensibiliser le monde à l’impact des conflits sur les enfants dans le monde.  C’est dans ce contexte qu’elle est retournée pour la première en Sierra Leone, où elle a pu constater de ses propres yeux le travail « formidable » qui y a été fait pour promouvoir les droits et le bien-être des enfants.  Mme Kamara a depuis lancé son propre projet en Sierra Leone pour les amputés de la guerre avec un accent particulier sur les femmes et les enfants, auxquels le projet apporte des services de conseil psychologique.

Mme Kamara a ensuite demandé aux membres du Conseil de sécurité de mettre l’accent sur la protection des enfants en temps de conflit armé, notamment en déployant des spécialistes de la protection des enfants dans les théâtres de conflits.  De plus, elle a demandé que les processus de paix tiennent compte des besoins spécifiques des enfants.

M. MAJOK PETER AWAN, ancien enfant soldat, aujourd’hui professionnel de la protection de l’enfance, a raconté son histoire personnelle, celle d’un jeune garçon de 7 ans enrôlé de force par un groupe rebelle opposé au Gouvernement de Khartoum.  Après une formation militaire intensive de six mois, il est ensuite assigné à la garde rapprochée du commandant du groupe rebelle, où il lui est interdit même de jouer.  Il réussit à s’enfuir à l’âge de 15 ans et rejoint un camp de réfugiés où il a passé deux ans à réapprendre à vivre en société.

Ensuite, avec l’aide de son oncle maternel et d’acteurs du domaine de la protection de l’enfance, il a pu aller à l’école jusqu’à l’université, avant de devenir Coordonnateur de la protection et du soutien psychosocial des enfants au Soudan du Sud pour le compte de l’ONG « Child Holland ».  Il a dit se voir chaque jour à travers ces innocents enfants affectés par la guerre, avouant que cette position le rend triste et lui rappelle des souvenirs douloureux.  Dans le même temps, il se sent heureux de voir que de nos jours, le monde est pour le moins conscient de la protection de l’enfance et s’y attèle, même si beaucoup de choses restent à faire.  Il a rappelé qu’en 2018, près de 50 millions d’enfants avaient besoin de protection humanitaire, tout en regrettant que la protection de l’enfance ne soit pas toujours une priorité quand la réponse humanitaire est mobilisée.  Elle reste donc sous-financée et peu considérée, même dans des environnements où les enfants sont pourtant exposés à des risques, a-t-il déploré. 

M. Awan a donc invité le Conseil de sécurité à assurer que les enfants affectés par les conflits reçoivent tout le soutien nécessaire pour guérir leurs blessures physiques et psychologiques, sinon, a-t-il averti, leur passé restera à jamais un fardeau.  Alors que 420 millions d’enfants à travers le monde grandissent dans un environnement affecté par les conflits, M. Awan a souligné qu’il faut mobiliser au moins 200 millions de dollars par an pour renforcer le paquet minimum d’assistance en santé mentale pour ces enfants.  Il a invité les États Membres à promouvoir le droit à la santé mentale et le bien-être psychologique dans les fora internationaux.  Il les a implorés d’intégrer la question de la santé mentale dans leurs lois nationales, ainsi que dans les politiques et plans d’intervention d’urgence, et de promettre d’allouer au moins 5% de leur budget consacré à la santé à la question santé mentale. 

M. Awan les a également invités à investir dans des systèmes de protection de l’enfance aux niveaux national, régional et international.  Ceci inclurait d’augmenter les fonds de long terme dédiés aux programmes de réintégration d’anciens enfants soldats, mais également en faveur des services de soutien pour les survivants de violence sexuelle, des enfants handicapés et d’autres qui sont dans le besoin.  Il a enfin souhaité que les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales disposent des moyens adéquats pour assurer le suivi des questions relatives aux enfants affectés par les conflits armés, tout en mettant la pression sur les pays qui violent les droits des enfants.

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a déclaré qu’en dépit de l’adoption de plusieurs résolutions concernant les enfants dans les situations de conflit armé, le Conseil de sécurité peine encore à les appliquer.  Selon le Ministre, bien que l’on ne connaisse pas toute l’ampleur de la violence, de la négligence et de l’exploitation à l’encontre des enfants en temps de conflit armé, le rapport du Secrétaire général recense plus de 20 pays où ont été constatés des cas de violations graves contre des enfants, et un nombre alarmant de cas impliquent des acteurs étatiques. 

Le Ministre a plaidé pour des solutions politiques à tous les conflits, notamment en s’attaquant aux causes profondes de ces derniers.  Il a aussi suggéré que la protection des enfants soit prise en compte à toutes les phases du cycle du conflit.  Il a ajouté que la protection des enfants vulnérables constituait une priorité pour les efforts de développement international de la Pologne, notamment ceux victimes de handicap.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) s’est inquiétée du nombre de violations graves sans précédent commises contre les enfants, en insistant que ces données sont considérées comme des sous-estimations.  Elle a indiqué que la Belgique, en sa qualité de Présidente du Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés, a contribué à faire émerger un consensus sur deux séries de conclusions.  « L’une concerne des graves violations des droits de l’enfant en Syrie et l’autre au Myanmar », a-t-elle précisé, en estimant que l’unité du Conseil de sécurité sur ces deux questions était un signal important.  La représentante de la Belgique a indiqué que son pays a organisé des réunions conjointes avec les comités des sanctions et mis l’accent sur le suivi des conclusions adoptées.  Elle a proposé que la Représentante spéciale puisse régulièrement s’exprimer devant le Conseil sur des situations nationales, comme ce fut le cas pour le Yémen et la République centrafricaine. 

Par ailleurs, la représentante de la Belgique a estimé que le mécanisme de surveillance et de communication de l’information de l’ONU est essentiel pour ce mandat et que le rapport du Secrétaire général sur les enfants en temps de conflit armé est un instrument fondamental pour engager le dialogue avec les parties au conflit et obtenir des engagements concrets à travers, notamment, des plans d’action nationaux.  « Une telle approche fondée sur des données factuelles est essentielle pour préserver la crédibilité et l’indépendance du mandat CAAC », a insisté Mme Van Vlierberge.  La représentante de la Belgique a aussi mis l’accent sur l’importance de la prévention en expliquant que les enfants qui ont suivi des programmes de soutien psychosocial et d’éducation deviennent moins vulnérables au « ré-recrutement ».

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré que les enfants sont l’espoir de chaque pays et a appelé à redoubler d’efforts pour les protéger, en particulier en temps de conflit armé.  En 2018, 12 000 enfants ont été tués ou blessés, « un chiffre record et déplorable », s’est indigné le représentant, avant d’appeler à redoubler d’efforts pour atténuer les conflits.  Le Conseil de sécurité doit s’acquitter de son devoir dans ce domaine en utilisant tous les moyens politiques à sa disposition, a-t-il estimé. 

Le représentant a aussi jugé nécessaire d’appuyer les pays concernés afin qu’ils puissent eux aussi s’acquitter de leurs responsabilités en termes de protection de l’enfance, insistant notamment sur le rôle de chef de file de ces États et l’importance de la coopération internationale dans ce domaine.

Pour la Chine, il est également souhaitable d’intégrer le volet protection des enfants dans les processus de paix et de renforcer les mécanismes de protection des enfants.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) s’est inquiété de la dégradation du sort des enfants en temps de conflit armé, puisque l’ONU a relevé 24 000 violations en tout genre dans 21 pays en 2018, contre 21 000 en 2017.  Il a aussi cité 12 038 meurtres et mutilations d’enfants relevés par le mécanisme de surveillance créé par la résolution 1612 (2005).  Il a cité en exemple les réalisations de la Côte d’Ivoire, qui était inscrite de 2003 à 2006 à l’annexe du rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé.  Il a notamment rappelé que les forces armées des Forces nouvelles avaient, dès 2005, signé, avec les Nations Unies, le tout premier plan d’action pour la protection de l’enfant en temps de conflit armé.  Ce plan d’action, et tous ceux qui ont suivi, ont permis grâce à la collaboration des Nations Unies et des ONG partenaires, la libération de centaines d’enfants et leur réinsertion dans le système scolaire et le tissu social, s’est-il félicité. 

Le représentant ivoirien a aussi souligné des efforts de son pays pour regrouper des ex-enfants soldats dans un centre de transit, afin de faciliter leur réintégration sociale, à travers des formations aux petits métiers et la scolarisation.  Il a signalé que les progrès enregistrés en 2007 ont valu à la Côte d’Ivoire d’être le premier pays retiré de l’annexe du rapport du Secrétaire général sur les enfants en temps de conflit armé.  À ses yeux, ce résultat démontre qu’une bonne coopération entre les États affectés, les Nations Unies et les partenaires internationaux dans la mise en œuvre des normes internationales et des programmes de réintégration est indispensable à la protection des enfants dans les conflits armés.

Par ailleurs, le représentant a mis l’accent sur l’importance de la formation adéquate de toutes les composantes des institutions sécuritaires.  Illustrant son propos, il a précisé que les autorités ivoiriennes ont introduit l’enseignement des droits et la protection de l’enfant dans le programme d’instruction des écoles de formation militaire et des unités de combats depuis le 10 mars 2004, avec la mise en place de points focaux décentralisés.  Il s’est félicité que toutes les régions militaires de Côte d’Ivoire disposaient aujourd’hui d’une cellule de protection des droits de l’enfant.

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a particulièrement salué le témoignage de M. Awan, ancien enfant soldat et aujourd’hui agent de protection de l’enfance, y voyant une « source d’inspiration pour nous tous ».  Pour la représentante, protéger les enfants aujourd’hui signifie éviter les conflits futurs et la radicalisation d’un grand nombre de jeunes.  Elle a dit apprécier l’accent qui a été mis, dans le rapport du Secrétaire général, sur les besoins des personnes handicapées et sur leur réintégration.  Les États-Unis demeurent profondément préoccupés par la persistance de violations et de sévices à l’encontre des enfants, en particulier en « Birmanie », en République démocratique du Congo, au Mali, au Soudan, au Soudan du Sud, en Somalie et en Syrie.  En outre, les États-Unis souscrivent aux conclusions du Groupe de travail qui réaffirment que les régimes de Damas et de Naypyidaw répondent immédiatement aux appels lancés par le Conseil de sécurité en vue de prendre des mesures pour mettre un terme au recrutement et à l’utilisation d’enfants.  Mme Norman-Chalet a aussi appelé à mieux intégrer la question des enfants en temps de conflit armé lors des discussions sur des situations de conflit au sein du Conseil de sécurité.

La représentante a ensuite salué le fait que les forces démocratiques syriennes aient signé un plan d’action visant à mettre un terme au recrutement et à l’utilisation d’enfants en Syrie, les mesures prises par le Gouvernement du Yémen et la coalition en vue de renforcer la protection des enfants.  Elle s’est aussi félicitée du fait qu’en RDC, grâce aux efforts de spécialistes de la protection de l’enfance de l’ONU, les commandants de 14 groupes armés aient renoncé à recruter des enfants soldats et libéré ceux qui se trouvaient dans leurs rangs.  L’engagement de la MINUSCA auprès des groupes armés semble aussi créer une ouverture en faveur du changement.  En interagissant auprès des groupes armés, en établissant la confiance et en proposant des alternatives à la violence, les acteurs de l’ONU qui opèrent sur le terrain sont capables de tracer de nouvelles voies vers une paix durable, s’est-elle félicitée.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a appelé à prendre acte des progrès accomplis depuis l’adoption de la Convention des droits de l’enfant en 1989, y compris la libération de plus de 130 000 enfants en près de 20 ans.  Le représentant a toutefois souligné que les défis restants étaient considérables, à l’image des 25 000 violations vérifiées contre des enfants en 2018, dont 12 000 meurtres et mutilations.  « C’est un record intolérable », a-t-il estimé, appelant le Conseil de sécurité à renforcer son action pour mieux protéger plus de 200 millions d’enfants confrontés quotidiennement à la guerre à travers le monde.  À cette fin, M. de Rivière a tout d’abord appelé à faire pleinement usage des mécanismes créés par le Conseil, à commencer par la résolution 1882 (2009), adoptée à l’unanimité à l’initiative de la France. 

Dans le cadre de ce texte, M. de Rivière a notamment salué les récentes visites de Mme Gamba en République centrafricaine (RCA) et au Mali.  Il a estimé que les déplacements sur le terrain étaient indispensables pour dialoguer avec les autorités et les groupes armés, qui demeurent, selon lui, les principaux responsables des violations graves contre les enfants.  De ce point de vue, le représentant s’est dit encouragé par la signature de nouveaux plans d’action par le Mouvement patriotique pour la Centrafrique et les Forces démocratiques syriennes. 

Le déploiement de conseillers pour la protection de l’enfance joue également un rôle essentiel, a poursuivi le représentant, estimant que ces conseillers avaient remporté de nombreux succès au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  « Il est indispensable que leur fonction et leur spécificité soient conservées au sein des opérations de paix », a-t-il insisté.

M. de Rivière a en outre réaffirmé l’importance des annexes au rapport du Secrétaire général qui listent les parties aux conflits armés ayant commis des violations graves contre les enfants.  « Leur fonction dissuasive et incitative n’est plus à démontrer », a-t-il indiqué.

Au nombre des mécanismes créés par le Conseil, le représentant a également mentionné le fait que les violences sexuelles, grâce à la résolution 1882 (2009), sont désormais un critère d’inscription des parties à la « liste noire ».  Il a toutefois admis que 10 ans après l’adoption de ce texte, ces violences persistaient.  La coopération entre les deux Représentantes spéciales sur les violences sexuelles et sur les enfants en temps de conflit armé est essentielle pour y mettre fin, a estimé le représentant, appelant également ces dernières à renforcer leurs interactions avec les comités des sanctions, ainsi que leurs échanges d’informations sur des cas individuels.

M. de Rivière a en outre appelé les États qui ne l’ont pas encore fait à adopter le « bloc constitutionnel » pour la protection des enfants dans les conflits, en signant et ratifiant le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, et en endossant les Principes et Engagements de Paris, les Principes de Vancouver et la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  « Ce corpus juridique doit être pleinement mis en œuvre », a-t-il appelé.  À ses yeux, cela implique aussi de sanctionner et de juger les auteurs de crimes graves commis contre les enfants, en ayant recours aux mécanismes judiciaires nationaux, mixtes ou internationaux.  Cela implique également de garantir l’accès des enfants à l’éducation, à la santé et aux autres services essentiels, dans des écoles et des hôpitaux sécurisés, a-t-il ajouté. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est dit alarmé par les chiffres qui figurent dans le dernier rapport du Secrétaire général sur les enfants en temps de conflit armé.  Cela se passe souvent dans des situations inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, a remarqué le représentant, mais aussi dans d’autres pays où il est question de recrutement d’enfants par les groupes armés, d’assassinats, de séquestrations, de mutilations et d’autres formes de violence ainsi que d’attaques visant des écoles et des difficultés d’accès des enfants à l’aide humanitaire.  Plus de 24 000 violations contre des enfants ont été enregistrées et documentées en 2018 dans 20 pays, s’est indigné le représentant, s’inquiétant également du fait que le nombre de violations aux mains des forces nationales et internationales est en hausse. 

« Cette situation ne peut durer », a-t-il tranché en exhortant les parties aux différents conflits à assumer leur responsabilité de protéger les enfants et à adopter les mesures qui s’imposent pour éviter ces violences.  Il s’est également soucié du nombre croissant d’attaques visant des écoles et des hôpitaux, en soulignant l’impact négatif que cela peut avoir pour la réalisation des objectifs de développement durable.  Ainsi, il a appelé au respect de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et à lutter contre l’impunité dans le domaine des violences contre les enfants en temps de conflit armé.  Il a aussi engagé tous les acteurs impliqués dans la protection des droits des enfants à redoubler d’efforts.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a promis un financement de Berlin pour des programmes régionaux de prévention en faveur des enfants, et a insisté pour que la fonction de Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé soit préservée.  L’Allemagne se dit également préoccupée par la violence sexiste et sexuelle dont les vrais chiffres ne sont pas connus du fait des préjugés et des discriminations.  M. Schulz a plaidé pour une assistance non discriminatoire en faveur des victimes de violences sexuelles.  Il a aussi condamné les attaques contre les écoles et les hôpitaux, en Syrie et au Yémen notamment, avant d’appeler tous les États à signer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles. 

Le représentant a ensuite annoncé que l’Allemagne et la France entendent proposer, le mois prochain, au Conseil de sécurité, un texte sur la protection des civils.  Il a souligné que l’impunité doit cesser en cas de violence contre les civils, avant de plaider pour que des fonds adéquats soient dédiés à la réintégration des enfants soldats, puisque, « très souvent, pour ces enfants, rester dans le groupe armé est parfois plus avantageux que de retourner dans les communautés », a-t-il fait observer.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a souligné la grande vulnérabilité des enfants en temps de conflit armé, mais aussi dans les crises humanitaires et les déplacements forcés de personnes en raison de leur dépendance.  Il a également mis l’accent sur les violences sexuelles, la violence sexiste et la traite de personnes qui aggravent encore davantage cette vulnérabilité.  Le Pérou regrette la propagation de tels actes illicites par des acteurs étatiques et exige que l’accent soit mis sur de mesures préventives mais également sur des mesures correctives.

Le représentant a mis l’accent sur l’importance des synergies entre les différentes agences onusiennes et les ONG pour venir en aide aux enfants en temps de conflit armé.  Il a appelé au respect de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et des Principes de Vancouver et a appuyé les programmes éducatifs, de formations professionnelles et psychologiques à l’intention des enfants ex-combattants en vue de faciliter leur réintégration dans la vie normale.

Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a demandé le renforcement des mesures de protection des enfants en temps de conflit armé, plaidant notamment pour l’institution de postes de conseillers à la protection de l’enfance au sein des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales.  Elle a aussi demandé la fin de l’impunité pour les auteurs de violences sexuelles sur les enfants.

Trop souvent, les enfants restent stigmatisés à cause des actes qu’on les a forcés à commettre, a-t-elle déploré, tout en appelant à une meilleure protection et à des programmes de réintégration appropriés.  La déléguée a également jugé nécessaire d’assurer la sûreté des écoles dans le contexte des conflits armés.

Il est préoccupant de constater que, 10 ans après l’adoption de la résolution 1882 (2009), des dizaines de milliers d’enfants sont toujours mutilés, enlevés, victimes de violences sexuelles et privés d’accès à l’aide humanitaire, a déploré M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud).  Le représentant s’est notamment dit troublé par le fait que 24 000 violations graves contre des enfants aient été vérifiées en 2018 par les Nations Unies dans 20 pays différents.  « Les enfants représentent une part alarmante des victimes de la guerre », a ainsi déploré M. Matjila.

Dans ce contexte, le représentant a salué les efforts déployés par Mme Gamba afin de conclure des plans d’action avec les parties à des conflits armés pour mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants.  « Il est essentiel que ces plans soient concrets et que leurs mesures, assorties de délais, soient mises en œuvre », a-t-il déclaré, saluant la libération de 13 000 enfants par des groupes armés. 

Le représentant a également mentionné l’importance de la résolution 2467 (2019) pour la prévention des violences sexuelles et la protection des filles contre ces violations graves en temps de conflit.

M. Matjila s’est en outre dit préoccupé par la pratique consistant à détenir des enfants perçus comme étant associés à des parties.  « Il est important de traiter ces enfants en premier lieu comme des victimes », a-t-il déclaré, appelant les pays concernés à développer des programmes en vue de leur réintégration dans la société.  Le représentant a notamment salué les efforts de la République démocratique du Congo (RDC), de la République centrafricaine et du Soudan du Sud en ce sens.  Il a enfin mis l’accent sur la nécessité de traduire en justice les auteurs de ces violations pour permettre aux enfants de « grandir et devenir des adultes, sans peur ni séquelles imprévues ».

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué la libération et la réinsertion de quelque 13 000 enfants soldats, mais s’est dit gravement préoccupé par les chiffres record pour les six violations graves contre les enfants qui sont recensées et documentées par le mécanisme de surveillance et de communication de l’information. 

Passant en revue les différentes résolutions adoptées au fil des ans par le Conseil de sécurité pour garantir la protection des enfants face aux violations graves et leur accès à l’aide humanitaire, il a estimé que la solution passe par la réalisation de la paix et a souligné l’importance de la protection et de la réintégration des enfants dans leurs sociétés.  Le Koweït soutient tout effort en ce sens et réitère la nécessité de fournir des ressources humaines, financières et techniques adéquates aux opérations de maintien de la paix pour qu’elles puissent assurer la protection des enfants.  À ce titre, le représentant a proposé de déployer des spécialistes de la protection des droits des enfants sur le terrain.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a fait six propositions visant à mieux protéger les enfants en temps de conflit.  Relevant que la plupart des violations illustre un mépris total pour le droit international et le droit international humanitaire, elle a appelé le Conseil de sécurité à tenir un débat sur la question du respect du droit international humanitaire.  Elle a aussi annoncé que son pays organisera, en novembre prochain, une conférence internationale sur ce thème.  Troisièmement, elle a demandé l’amélioration des mesures de réinsertion des enfants soldats, notamment en augmentant les financements à cet effet, tout en insistant sur l’importance du soutien psychosocial.

La quatrième proposition de Mme Pierce vise à renforcer les mesures de lutte contre la privation de l’accès humanitaire qui, a-t-elle indiqué, affecte en premier les enfants.  Elle a ensuite demandé, comme cinquième proposition, de meilleurs mécanismes nationaux de protection des enfants, tout en soulignant l’importance pour les États d’adhérer aux Principes de Paris et à ceux de Vancouver.  Comme sixième proposition, Mme Pierce a demandé que la communauté internationale reste vigilante face aux attaques ciblant les écoles, tout en évoquant les cas récents et inquiétants qui ont eu lieu dans la région anglophone du Cameroun et dans l’est de l’Ukraine.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a relevé que le Conseil de sécurité prend systématiquement des mesures visant à protéger les enfants et prête une attention particulière aux six catégories de violations des droits de l’enfant qui font l’objet de la surveillance du mécanisme créé à cet effet.  Il s’est dit convaincu que les tentatives de diluer le mandat du Conseil de sécurité en essayant de le pousser à considérer cette question en dehors du mandat de maintien de la paix sont infondées et contreproductives, soulignant qu’il existe des agences spécialisées pour s’en occuper. 

M. Polyanskiy a ensuite salué les efforts de réintégration des ex-enfants soldats et a appelé la communauté internationale à fournir une assistance aux États qui vivent cette réalité.  Les mécanismes du Conseil de sécurité sont le plus efficaces lorsqu’ils fonctionnent dans le cadre d’une collaboration étroite avec les pays frappés par des conflits, a d’ailleurs fait remarquer le représentant.

Le représentant a aussi attiré l’attention sur le risque de voir des groupes armés non étatique se servir de la protection des droits des enfants pour se légitimer auprès du Conseil de sécurité.  Tous les coupables de ces crimes doivent, après des enquêtes adéquates, rendre des comptes, a tranché le représentant, qui a exhorté la communauté internationale à se limiter à veiller au respect des normes du droit international.  La responsabilité première de la protection des enfants en temps de conflit armé est en premier lieu du ressort des États concernés, a-t-il rappelé.

La délégation a de plus estimé que les déclarations, orientations ou principes que l’on a vu émerger ces dernières années sur la question de la protection des enfants en temps de conflit armé ne peuvent en aucun cas se substituer aux normes du droit international et du droit international humanitaire.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) s’est dit gravement préoccupé par l’ampleur et la sévérité des violences à l’encontre des enfants en 2018, en évoquant notamment les mutilations et les meurtres.  Il a mis l’accent sur l’importance de la réintégration des enfants enrôlés de force par des groupes armés.  Cela signifie la réunification avec leurs familles et un retour à la vie normale, mais également que le Conseil de sécurité se penche sur les causes profondes des conflits et fasse tout son possible pour empêcher le recrutement d’enfants soldats à l’avenir.  L’autre impératif est, selon le représentant, la lutte contre l’impunité des groupes armés qui utilisent des enfants à des fins militaires.

Pour l’Indonésie, le processus de réintégration doit être perçu à travers la lentille de la prévention des conflits.  Soulignant que trop souvent encore les enfants associés à des groupes armés sont perçus comme dangereux et immoraux, le représentant a appelé à redoubler d’efforts pour trouver un rôle constructif dans la société à ces enfants qui sont victimes de discrimination.  Pour cela, il faut leur apporter un soutien psychosocial et mental et leur garantir un accès à l’éducation, a-t-il poursuivi, saluant au passage l’action de l’UNICEF, du Bureau de la Représentante spéciale pour le sort des enfants en temps de conflit armé ainsi que celle d’ONG spécialisées pour faciliter la transition des anciens enfants soldats vers une vie normale.

Les partenariats entre les autorités nationales et le personnel sur le terrain, dont les Casques bleus et les personnels humanitaires, sont essentiels pour renforcer les efforts dans le domaine de la protection des enfants, a-t-il ajouté, en demandant des formations adéquates sur cette question.  Le représentant a demandé que l’intérêt des enfants soit pris en compte de manière prioritaire dans toutes les actions, et a plaidé en faveur d’une approche sur mesure du maintien de la paix pour mettre fin aux violations des droits des enfants en temps de conflit armé.

M. OMAR KADIRI (Maroc) s’est inquiété du fait que les enfants victimes de conflit soient spoliés de leur enfance et vivent des expériences traumatisantes, avant d’être ensuite stigmatisés dans la société.  Il a invité la communauté internationale à adopter une approche qui tienne compte de la reddition de comptes pour les auteurs de telles violations, et de la justice en faveur des enfants.  Il a aussi évoqué la prévention des conflits qui doit passer par le respect des droits de l’homme et par des investissements en faveur du développement durable.  Le représentant a aussi demandé une protection particulière pour ces enfants qui courent le plus de risques d’être enrôlés dans des groupes armés; notamment les enfants placés, ceux vivant dans la rue, les réfugiés et les immigrés, entre autres. 

M. Kadiri a rappelé que le Maroc a été parmi les premiers pays à ratifier les Principes de Paris, et il a annoncé que son pays s’engage aujourd’hui à adhérer aux Principes de Vancouver sur le maintien de la paix et la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants soldats. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a rappelé que la protection des enfants dans les zones de conflit est essentielle et a rappelé que le recrutement des enfants par des milices ou groupes armés est illégal au regard du droit international et de la législation yéménite.  Les milices houthistes ont pourtant recruté plus de 30 000 enfants, dont 3 000 ont trouvé la mort, a affirmé le représentant, en rappelant que cela constitue une grave violation du droit international.  Il a également accusé les milices houthistes d’avoir porté atteinte à la vie de plus de quatre millions d’enfants, notamment aux 1,6 million d’enfants qui sont privés d’éducation en raison de la destruction d’un grand nombre d’écoles.  Les enfants qui se trouvent dans les zones sous le contrôle des milices sont endoctrinés et incités à la violence, s’est aussi inquiété le représentant, ajoutant que cela pourrait avoir un effet négatif sur l’avenir du pays. 

Pour sa part, le Gouvernement du Yémen fait son possible pour assurer la protection des enfants sur tout son territoire et attend une accélération dans la mise en œuvre de la feuille de route signée en 2014.  Le représentant a invité la Représentante spéciale, Mme Gamba, à se rendre au Yémen pour y constater de ses propres yeux la situation sur le terrain et les efforts des autorités en faveur de la protection des droits des enfants.

Mme MARI SKÅRE (Norvège) a déclaré que la protection des enfants ne constituait pas seulement un pas positif pour les individus et leurs communautés, mais contribuait aussi d’une manière plus large au succès des efforts de réconciliation, de réintégration et de développement, à la prévention des conflits et à la paix durable.  Elle a estimé que la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, lancée à Oslo en 2015 et ratifiée par 95 pays, était une initiative clef pour promouvoir l’éducation des enfants, notamment des filles.  Elle a rappelé que le principal objectif de cette démarche était d’empêcher que des écoles soient détruites, attaquées ou utilisées à des fins militaires.  Par ailleurs, elle a indiqué que la Conférence internationale sur l’élimination de la violence sexuelle dans les crises humanitaires, qui s’est tenue à Oslo en mai 2019, a été l’occasion d’envoyer un message fort pour rappeler que la lutte contre les violences sexuelles était une urgence humanitaire.  Par ailleurs, elle a souligné l’importance de la résolution 2427 adoptée en 2018 pour la réintégration des enfants associés à des groupes armés.    

M. GEORG HELMUT ERNST SPARBER (Liechtenstein) a demandé que les responsables des atrocités commises en Syrie contre les enfants répondent de leurs actes, avant de saluer à cet effet le travail mené par le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.  Il a déploré le fait qu’au Yémen, on a recensé 11 779 graves violations commises contre les enfants entre 2013 et 2018, soulignant que les morts et blessés causés par les frappes aériennes restent les plus importants parmi ces violations.  Pour la délégation, le Conseil de sécurité a la responsabilité de mettre fin à ces violations et de faire respecter ses résolutions et les principes du droit international humanitaire. 

Le Liechtenstein souligne que les viols et les autres formes de violence sexuelle contre les enfants, y compris le trafic à des fins sexuelles, sont généralement sous-documentés, notamment à cause de la stigmatisation qui y est associée, surtout quand les victimes sont des hommes ou des garçons.  De ce fait, une culture du silence sape la redevabilité et l’accès à la justice, contribuant ainsi à renforcer la violence et les stéréotypes sexistes.  M. Sparber s’est donc félicité de voir que la Cour pénale internationale (CPI) a établi récemment que certains actes commis contre les enfants soldats s’apparentaient au viol.  Il a dit que cela va désormais constituer la base d’examen de la violence sexiste en période de conflit pour le Conseil de sécurité et d’autres parties prenantes. 

S’exprimant au nom du Groupe des Amis des enfants touchés par les conflits armés, un réseau informel de 42 États Membres intéressés et représentant les cinq groups régionaux des Nations Unies, M. RICHARD ARBEITER (Canada) s’est dit consterné par l’ampleur et la gravité des violations commises contre les enfants.  « En ce dixième anniversaire de la résolution 1882, nous sommes particulièrement préoccupés par la forte augmentation des cas de meurtres et de mutilations d’enfants », a-t-il souligné, exhortant toutes les parties engagées dans un conflit armé à s’acquitter pleinement des obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire, des droits de la personne et du droit des réfugiés.  À cet égard, le représentant a salué la signature de plans d’action et l’engagement direct de la Représentante spéciale, Mme Virginia Gamba, avec les parties belligérantes pour mettre fin à ces violations.  Toutefois, a-t-il mis en garde, sans une mise en œuvre efficace et rapide, ces plans ne permettront pas d’éliminer les souffrances des enfants dans les conflits armés.  Il s’est donc félicité des efforts déployés par l’ONU et le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur cette question pour donner suite aux plans d’action. 

Le Groupe des Amis des enfants touchés par les conflits armés se réjouit par ailleurs de la libération récente de 13 600 enfants des forces armées et des groupes armés ainsi que du travail de la Coalition mondiale pour la réintégration des enfants soldats, a poursuivi M. Arbeiter.  Selon lui, les enfants anciennement associés à des groupes tels que Daech devraient être traités en premier lieu comme des victimes, conformément à la résolution 2427, et la détention des enfants dans les conflits armés ne devrait servir qu’en dernier recours.  Le Groupe, a-t-il ajouté, applaudit le lancement de la campagne « Agir pour protéger » destinée à catalyser l’attention mondiale et les efforts visant à prévenir les violations graves commises contre les enfants.

Soulignant la contribution des organisations régionales et sous-régionales à cette action, le Groupe se réjouit des autres mesures adoptées par le Conseil cette année, notamment la résolutions 2467, qui préconise une approche axée sur les victimes de violences sexuelles dans les conflits et les enfants nés de viols en temps de guerre.  Il a également recommandé au Conseil de déployer des conseillers à la protection des enfants dans les opérations de maintien de la paix.

Insistant sur l’importance de la lutte contre l’impunité pour prévenir les crimes graves, il a salué les efforts de la Cour pénale internationale contre les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, y compris le recrutement d’enfants, notant qu’une véritable justice nécessite des réparations et un soutien psychosocial. 

Intervenant ensuite en sa capacité nationale, le représentant du Canada a indiqué que la lutte contre la vulnérabilité face aux violations graves ne relève pas de la seule responsabilité du Conseil de sécurité et que tous le États Membres ont leur rôle à jouer.  Il a indiqué que les efforts du Canada ont surtout porté sur l’élaboration des Principes de Vancouver, endossées par 91 pays depuis leur lancement en 2017.  Il a également collaboré à l’élaboration de lignes directrices pour leur mise en œuvre.  Ce nouvel outil, qui a été lancé hier, se révèle une ressource pratique pour les organisations militaires, policières et civiles qui participent à des opérations de maintien de la paix des Nations Unies, a-t-il indiqué.  Il a aussi parlé de la création, en juin, au Canada, du Centre d’excellence Roméo Dallaire pour la paix et la sécurité dont l’objectif est de soutenir la mise en œuvre des Principes de Vancouver par les forces armées canadiennes.  De plus, si le Canada est élu pour siéger au Conseil en 2021-2022, il continuera à travailler avec tous les États Membres pour placer la protection des enfants au centre des efforts de paix et de sécurité. 

M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a déclaré que les attaques contre les écoles et les hôpitaux, ainsi que leur utilisation à des fins militaires ne peuvent pas continuer en toute impunité, réaffirmant l’engagement du Portugal en faveur de l’accès à l’éducation dans les situations d’urgence.  Il a par conséquent invité les gouvernements ne l’ayant pas encore fait à souscrire à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.

Le représentant a également souligné l’importance des principes de Kigali (2005) sur la protection des civils et des Principes de Vancouver (2017), qui complètent ceux de Paris, sur la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants soldats.  « Dans leur ensemble, ces principes doivent constituer un cadre de référence pour nos actions futures », a-t-il estimé. 

Le représentant a en outre appelé à rester vigilant envers les situations de violence sexuelle contre les enfants en temps de guerre.  Il a salué, à cet égard, les mesures prises par le Conseil avec l’adoption de la résolution 2467 (2019), qui a permis la reconnaissance d’une approche centrée sur les victimes et les rescapés des violences sexuelles.  Le représentant a ainsi appelé à « tout faire » pour mettre fin à l’impunité concernant l’exploitation et la violence sexuelles dont sont victimes les enfants. 

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA (Équateur) s’est inquiété que la situation des enfants soit de plus en plus préoccupante dans le monde, relevant que près d’un enfant sur cinq vit aujourd’hui dans une situation de conflit.  Il a appelé à la responsabilité des États pour protéger les enfants en précisant que la Constitution de l’Équateur stipule que les enfants représentent un groupe prioritaire.  Il a souligné qu’il était de la responsabilité des États d’éradiquer toutes les formes de violence contre les enfants.  Le représentant a salué la qualité du rapport du Secrétaire général sur l’importance de garantir aux enfants l’accès à l’éducation et appuyé l’importance de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  Il a appelé à tout mettre en œuvre afin que les écoles ne soient pas détruites et ne soient pas utilisées à des fins militaires

Mme ELISENDA VIVES BALMAÑA (Andorre) s’est dite alarmée par les chiffres qui ressortent du rapport du Secrétaire général, s’indignant notamment du fait que les enfants tués et blessés ne cessent d’augmenter.  Elle a salué le fait que les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité et le Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé aient élargi les domaines d’attention et la réponse aux besoins des enfants victimes de conflits armés.  En plus de cela, elle a reconnu le mérite de différentes initiatives de sensibilisation de l’opinion publique mondiale dont la campagne « ACT to Protect » du Bureau de la Représentante spéciale, Mme Gamba, portée conjointement avec l’UNICEF.

Mme Vives Balmaña a ensuite insisté sur l’importance de l’éducation.  Grâce à elle une action sur trois volets est possible, a remarqué la représentante, en citant la prévention efficace, l’épanouissement des filles et des garçons sans exception et la lutte contre la stigmatisation des victimes rescapées au moment de leur réintégration dans la société.  Elle est également revenue sur l’importance de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, alors que l’on assiste à un nombre croissant d’attaques contre les écoles ou de leur utilisation à des fins militaires.

M. KORO BESSHO (Japon) a souligné que les enfants affectés par les conflits courent un grand risque de retomber dans la violence et les conflits à l’âge adulte, ce qui constitue un obstacle à la paix et la sécurité.  Le délégué a noté que même quand les enfants soldats retournent dans leur communauté, ils font face à d’importants obstacles, y compris la stigmatisation et les difficultés d’ordre économique, toutes choses pouvant les pousser à retourner vers les groupes armés. 

M. Bessho a ensuite indiqué qu’en Afrique et dans d’autres régions, le Japon œuvre aux côtés de l’UNICEF pour faciliter les programmes de réintégration, et dans une perspective plus générale, à apporter un soutien aux enfants se trouvant dans des contextes de conflit.  C’est ainsi que le pays a consacré 6 millions de dollars l’an dernier à des programmes dans ce sens au Nigéria et en Ouganda.  Enfin, le Japon a invité tous les pays à respecter le caractère sanctuarisé des écoles et des hôpitaux, des sites importants pour les enfants, a précisé le représentant. 

M. MOHAMED FATHI AHMED EDREES (Égypte) a condamné les violations graves commises contre les enfants en temps de guerre, à l’instar des 24 000 cas de violations contre des enfants vérifiées par les Nations Unies en 2018.  Les cas avérés de meurtres ont notamment atteint un niveau record, a-t-il déploré. 

Le représentant a appelé non seulement à protéger l’intégrité physique et mentale des enfants, mais également à leur donner la chance de commencer une vie nouvelle après la résolution des conflits.  Le représentant a également appelé les belligérants à prendre les mesures nécessaires pour renforcer la protection des enfants dans les conflits armés.  De ce point de vue, il a appuyé les recommandations formulées dans le rapport du Secrétaire général, à savoir la nécessité de respecter les principes de proportionnalité dans le recours à la force et de garantir l’accès humanitaire aux enfants en cas de conflit.  Il a également jugé que la question des enfants soupçonnés d’activités terroristes devait être prise en compte dans toute sa complexité.

À ses yeux, cela nécessite une coopération internationale étroite, tout en laissant à chaque État le soin de résoudre le problème dans le respect de son arsenal juridique national et sans ingérence étrangère.  Le représentant a également appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits et du terrorisme, y compris l’exclusion sociale et économique.  Il a enfin souligné que l’Égypte, qui préside actuellement l’Union africaine (UA), attachait une grande importance au renforcement des capacités de l’Afrique à protéger les populations civiles.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a déploré que de petites filles ou petits garçons soient utilisés comme esclaves sexuels ou boucliers humains, pour ensuite dire l’urgence de financer des programmes de réinsertion durable pour enfants.  Il a souligné l’importance de programme de prise en charge des traumatismes psychosociaux.  Il a appelé à condamner les politiques visant à stigmatiser les enfants et à diffuser des stéréotypes nuisibles aux enfants.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance d’améliorer les statistiques sur la prise en charge des enfants victimes des conflits. 

M. ARIEL RODELAS PENARANDA (Philippines) a rappelé que, durant la bataille de Marawi, dans le sud des Philippines, des enfants avaient été recrutés par des groupes rebelles pour en faire des soldats, des coursiers et des espions.  Nous sommes heureux d’avoir été en mesure de reprendre Marawi des mains de Daech, a déclaré le représentant, exprimant son indignation face au rôle que le groupe terroriste a fait jouer aux enfants dans le conflit, « bien souvent au prix de leur vie ».  Depuis lors, a poursuivi le représentant, le Gouvernement philippin a intensifié la reconstruction, la réhabilitation et la réintégration de Marawi, y compris en procédant à l’élimination des munitions non explosées, dont sont souvent victimes les enfants.

Le représentant a par ailleurs parlé de l’adoption, en janvier dernier par les autorités du pays, de la loi 11188, intitulée « Loi de protection spéciale des enfants en situation de conflit armé », dans laquelle les Philippines réaffirment que des enfants ne sauraient être recrutés par les forces gouvernementales ou être autorisés à participer à un conflit.  Cette loi précise en outre que les enfants doivent être traités « comme des victimes et non comme des ennemis », et qu’ils doivent être protégés contre la torture, les mutilations, l’enlèvement, le viol et le meurtre.  La nouvelle loi prohibe également les attaques contre des écoles, hôpitaux, lieux de culte, garderies, terrains de jeux et parcs de loisirs.  Enfin, la loi 11188 dénonce l’utilisation par des groupes rebelles d’écoles afin de promouvoir leur idéologie de guerre et de transformer les enfants en soldats.

M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse) a invité les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier les protocoles additionnels aux Conventions de Genève, car ces traités sont fondamentaux pour la protection des civils, y compris les enfants, en période de conflit armé. 

Afin d’assurer la protection efficace des enfants dans les conflits armés, il a souligné que la crédibilité du mécanisme de surveillance et de communication de l’information, établi par la résolution 1612 (2005) du Conseil de sécurité, doit être garantie en toutes circonstances.  Ensuite, pour mettre en œuvre en temps voulu des plans d’action et, par là même, avoir un réel impact sur le terrain, la Suisse demande au Secrétaire général et aux États Membres d’allouer suffisamment de ressources humaines, financières et techniques en faveur de la protection des enfants dans les conflits armés.  La Suisse soutient également le déploiement et le travail des spécialistes en protection de l’enfant, par exemple en Syrie. 

Le représentant a par ailleurs demandé au Conseil de sécurité d’être plus cohérent dans sa considération du point de l’ordre du jour relatif aux enfants dans les conflits armés pour toutes les questions thématiques et les situations des pays.  Enfin, M. Favre a demandé aux États de prendre des mesures concrètes pour mettre fin aux attaques contre les écoles et dissuader les forces armées et les groupes armés non étatiques d’utiliser les écoles à des fins militaires.  Il a aussi appelé les États Membres à approuver la Déclaration sur la sécurité des écoles. 

M. SERGIO MANRIQUE TREJO BLANCO (El Salvador) s’est dit vivement préoccupé par les effets des conflits armés sur les enfants, déplorant les mutilations, atteintes sexuelles et meurtres d’enfants à travers le monde.  Il a également déploré la forte augmentation du nombre de violations avérées des droits de l’enfant.  En tant que représentant d’un pays ayant subi le fléau de la guerre pendant une décennie, il a indiqué qu’El Salvador avait adopté une loi spécifique pour protéger les enfants du recrutement et de l’exploitation sexuelle.

Le représentant a en outre jugé indispensable de renforcer l’accompagnement psychologique et éducatif des enfants en temps de conflit armé, ainsi que la mise en œuvre de programmes de réinsertion des enfants libérés après un conflit, afin d’éviter qu’ils ne soient à nouveau en proie au recrutement et à la stigmatisation.  Le représentant a enfin dit souscrire aux Principes de Vancouver (2017), qui offrent selon lui des instruments innovants pour identifier les violations d’enfants en temps de conflit.

M. STEFANO STEFANILE (Italie) a indiqué que l’Italie avait organisé, le 8 juillet 2019, à Bruxelles, en collaboration avec la Belgique, un événement consacré à la protection des enfants en marge du soixante-dixième anniversaire de la Convention de Genève et du trentième anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant.  Il a indiqué qu’en 2018, l’Italie avait consacré 10% de son budget humanitaire à l’éducation et la protection des enfants.

Le représentant a par ailleurs jugé déterminante la coopération entre organisations régionales et sous-régionales pour protéger les enfants.  Il reste encore beaucoup à faire alors que 24 000 violations ont été répertoriées dans 20 pays, a-t-il noté.  « Nous devons assurer le respect de nos engagements politiques », a-t-il insisté, avant de souligner l’importance du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant. 

« Les enfants ne sont pas les personnes de demain, mais les personnes d’aujourd’hui », a déclaré M. YURIY VITRENKO (Ukraine), estimant qu’ils avaient le droit d’être « pris au sérieux ».  Il a appelé à lutter contre l’impunité pour les violations contre les enfants et leur recrutement en temps de conflit.  « Si nous ne pouvons pas protéger les enfants aujourd’hui, comment pouvons-nous prétendre protéger le futur de l’humanité? » s’est-il interrogé.

Suite à l’agression de la Fédération de Russie dans l’est de l’Ukraine, a par ailleurs dénoncé le représentant, les enfants du Donbass ont été privés de la possibilité de réaliser pleinement leurs droits, tels que définis dans la Convention relative aux droits de l’enfant et ses protocoles facultatifs.  Chaque escalade de la violence dans la zone menace notamment l’accès à l’eau pour des dizaines de milliers d’enfants, dont plus d’une centaine ont perdu la vie depuis le début du conflit, s’est-il indigné.

Le représentant a ensuite brandi la photo d’un enfant ukrainien de Donetsk, âgé de 16 ans.  « Il aimait la vie et elle le lui rendait bien », a-t-il souligné.  Cela fait maintenant cinq ans, il y a une semaine, que cet adolescent a été abattu de sang-froid par des russes aux environs de Donetsk, a regretté le représentant.  Selon lui, il aurait été torturé et tué d’une balle dans la tête simplement parce qu’il portait un ruban bleu et jeune aux couleurs du drapeau ukrainien.  Au moins deux des meurtriers ont fui la justice et se cachent actuellement en Russie, a affirmé le représentant, avant d’appeler le Secrétariat des Nations Unies à inclure la situation des enfants ukrainiens dans les rapports thématiques de l’ONU sur la question. 

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie), qui s’exprimait au nom du Groupe des pays baltes, s’est félicité de la signature de plans d’action nationaux sur les enfants et les conflits armés.  Il a toutefois estimé qu’il ne s’agit là que d’une première étape, la mise en œuvre desdits plans d’action étant ce qui importe le plus.  Le représentant s’est également dit encouragé par le constat du rapport du Secrétaire général, selon lequel le nombre des enfants libérés des forces et des groupes armés a, pour la première fois l’an dernier, dépassé celui des enfants recrutés par ces entités.  Il a salué la libération de 40 garçons par des groupes tribaux en Iraq et l’accession du Soudan au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.  Il s’est en revanche déclaré préoccupé par les niveaux record atteints par les cas vérifiés de meurtres et de mutilations d’enfants depuis la création du mécanisme de contrôle, ainsi que par l’augmentation depuis 2017 du nombre de violations attribuées à des acteurs étatiques et à des forces armées. 

S’agissant des violences sexuelles, le représentant a souligné l’importance d’un service de soutien efficace et de programmes de réinsertion tenant compte du genre pour les enfants qui y survivent.  Poursuivre les coupables et les tenir pour responsables est essentiel à la justice et à la prévention de futurs crimes, a-t-il martelé, se félicitant de récentes condamnations par la Cour pénale internationale.  À propos des enfants associés à des forces ou des groupes armés, il a plaidé pour qu’ils soient considérés comme des victimes et non comme des menaces pour la sécurité, et que leur réintégration dans la société soit une priorité.  Il a salué la collaboration entre l’ONU et les autorités locales de la région de Zintan, en Libye, en faveur de la réinsertion d’enfants ainsi que la bonne coopération entre la Représentante spéciale et l’Union européenne, notamment dans le cadre de la campagne « ACT to Protect ».

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a souligné que le respect du droit international humanitaire est la condition préalable pour assurer la protection des enfants et a appelé à redoubler d’efforts pour veiller à ce que toutes les parties le respectent.  Le Brésil a entériné la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, convaincu que les écoles devraient être un havre de paix et non des cibles militaires.  « Protéger les enfants de la guerre devrait être le dénominateur commun de nos efforts visant à galvaniser la paix », a-t-il encore insisté.

M. SATYENDRA PRASAD (Fidji) a jugé inacceptables les violences subies par les enfants à travers dans le monde.  « L’éducation et les infrastructures de santé devraient être des zones sûres pour toutes les parties en conflits », a-t-il ajouté, avant d’exhorter tous les États à signer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  « Faire en sorte qu’il y ait plus de femmes parmi les Casques bleus est aussi un moyen de mieux protéger les enfants et les femmes », a-t-il estimé.  Il a aussi mis l’accent sur l’importance de renforcer les systèmes de santé en notant que plus d’enfants mouraient en raison de manque de soins que de la guerre. 

M. HASEEB GOHAR (Pakistan) a déploré le fait qu’en 2018, le monde ait enregistré un nombre record de violations contre des enfants.  Il a appelé les parties à un conflit à assumer leur responsabilité en protégeant les enfants dans les zones sous leur contrôle. 

Le représentant a par ailleurs appelé à redoubler d’efforts pour lutter contre l’impunité pour les auteurs de violations et a appelé à tout faire pour empêcher l’éclatement des conflits armés.  « La prévention est l’instrument le plus efficace de protection des enfants », a-t-il en effet estimé, appelant en outre les parties à respecter leurs engagements en mettant en place des mesures d’atténuation des risques.  Le représentant a également appelé à identifier les auteurs des violations et à les traduire en justice. 

Tout en appuyant le mandat de Mme Gamba, le représentant a enfin demandé de ne pas utiliser ce dernier à des fins politiques. 

Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) s’est dite préoccupée par le nombre élevé de cas avérés d’assassinats et de mutilations d’enfants en raison de l’utilisation d’engins explosifs dans des zones densément peuplées.  Elle a rappelé aux parties à des conflits que le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme n’était pas facultatif.  La représentante a expliqué que la Slovénie finançait de nombreux programmes visant à mettre fin aux violations contre des enfants, y compris un programme de sensibilisation aux risques des mines pour les enfants syriens réfugiés en Jordanie et un programme de renforcement du bien-être psychosocial destiné aux enfants ukrainiens, dans le but d’appuyer la réinsertion des enfants mutilés par le conflit. 

Poursuivant, la représentante a appelé le Conseil de sécurité à faire systématiquement figurer la protection des enfants dans les mandats des opérations de maintien de la paix.  Elle a aussi appuyé les efforts de la Cour pénale internationale (CPI) pour poursuivre les auteurs de violations contre des enfants et a soutenu la création d’un instrument multilatéral portant sur l’entraide judiciaire et l’extradition des auteurs.

M. ABDALLAH Y. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a déclaré qu’Israël continuait de « tuer et mutiler des enfants en Palestine qui ne peuvent se défendre qu’avec des pierres ».  Le représentant saoudien a aussi fustigé les « pratiques des milices sectaires iraniennes en Syrie ».  Il a affirmé que l’Iran endoctrine des enfants innocents en leur faisant faire des marches militaires et en leur faisant scander des slogans dont ils ne comprennent pas le sens.  Il s’est aussi inquiété de l’influence de l’Iran sur les enfants au Yémen.  Le représentant a ensuite vanté l’assistance humanitaire proposée par l’Arabie saoudite au peuple yéménite qui aurait permis, selon lui, de sauver les vies de dizaines de milliers d’enfants au Yémen.  Il a dit la responsabilité des rebelles yéménites qui ne respectent pas les résolutions des Nations Unies. 

M. JORGE SKINNER-KLÉE ARENALES (Guatemala) a condamné le recrutement d’enfants et a appelé à agir pour prévenir de tels agissements.  Il a rappelé l’importance de la coopération prévue par le protocole facultatif de la Convention relative aux droits de l’enfant, pour ensuite souligner que toutes les populations civiles touchées par les conflits ont besoin de protection.  « Nous nous sommes ralliés aux 89 pays qui ont ratifié la Déclaration sur la sécurité dans les écoles », a encore indiqué le représentant du Guatemala avant de souligner la responsabilité morale et politique des États Membres de protéger les enfants.     

M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a tout d’abord considéré qu’une des clefs du problème lié à la protection des enfants en temps de conflits armés est le renforcement des partenariats.  Toutes les parties prenantes doivent travailler étroitement pour examiner les tactiques évolutives utilisées pour recruter des enfants, notamment par le biais de plateformes en ligne et de réseaux sociaux, a plaidé le représentant.  Selon lui, le plaidoyer et l’éducation dispensés par les communautés peuvent contribuer à prévenir ce fléau.  De même, a-t-il poursuivi, l’intégration de la protection de l’enfance dans le mandat des missions de maintien et de consolidation de la paix est cruciale.  Pour cela, a-t-il dit, les personnels de l’ONU impliqués dans ces opérations doivent recevoir préalablement à leur déploiement une formation spécifique relative aux enfants affectés par les conflits armés. 

Pour ce qui est des Casques bleus thaïlandais, a précisé M. Srivihok, ils sont formés pour porter assistance aux populations dans le cadre de leurs efforts de maintien de la paix et de promotion du développement durable.  À cette fin, ils sont notamment sensibilisés au droit international, à la protection de l’enfance, aux questions liées au genre et à la violence sexuelle en période de conflit.  Le représentant a rappelé, à cet égard, que son pays avait ratifié les Principes de Vancouver sur le maintien de la paix et la prévention du recrutement et de l’utilisation d’enfants soldats.  Enfin, il a annoncé que la Thaïlande s’employait à accueillir le premier centre régional d’excellence sur la question des enfants et des conflits armés afin de renforcer la collaboration sur cette question. 

Mme NOA FURMAN (Israël) a indiqué que dans sa région, les enfants continuent d’être victimes de la violence: 1 854 l’ont payé de leur vie en Syrie et 1 689 au Yémen.  Faisant sienne la condamnation faite, par le rapport du Secrétaire général, du recrutement d’enfants par des groupes terroristes comme l’État islamique d’Iraq et du Levant, elle a également affirmé soutenir les efforts menés en faveur de la réinsertion des enfants soldats et de la création d’une coalition mondiale à cette fin.  Évoquant la situation de son propre pays, elle a déclaré assister à l’exploitation quotidienne de jeunes Palestiniens par le Hamas et d’autres groupes terroristes.  Ces enfants, manipulés et utilisés comme boucliers humains, entendent leurs chefs appeler au meurtre de tous les Juifs, ce qui constitue une forme de maltraitance et la plus flagrante des violations du droit international, a dénoncé la représentante. 

Si elle salue la reconnaissance par le Secrétaire général du phénomène de recrutement de ces enfants par le Hamas, le Jihad islamique et autres groupes terroristes, Mme Furman estime que davantage pourrait être dit pour décrire la façon dont ils sont cyniquement manipulés dans ce contexte.  Dans le même temps, a-t-elle souligné, de nombreuses écoles ont dû fermer ces derniers mois dans le sud d’Israël en raison du tir de roquettes par le Hamas depuis Gaza, privant de cours plus de 300 000 écoliers.  Elle a regretté que le rapport de cette année ne condamne toujours pas la poursuite du ciblage de civils et de villes d’Israël par des roquettes, des obus de mortiers et des engins incendiaires.  « Si nous voulons faire plus pour protéger les enfants dans les conflits armés, nous devons avoir le courage de condamner les groupes terroristes qui sont responsables de ces conflits ainsi que des mutilations, blessures et décès d’enfants », a-t-elle martelé, exprimant l’espoir que des progrès seront accomplis sur cette voie lors de la prochaine réunion consacrée à cette question en 2020. 

M. ALEJANDRO GUILLERMO VERDIER (Argentine) a partagé les préoccupations du Secrétaire général face à l’augmentation « alarmante » des violations graves des droits de l’enfant en 2018, alors que, parallèlement, les conflits armés en cours connaissent, selon lui, une recrudescence générale.  Le représentant a également condamné le nombre record d’assassinats d’enfants cette année-là.  Il a appelé à prendre toutes les mesures nécessaires pour traduire les auteurs de ces violations graves en justice.

Le représentant a également appelé à faire en sorte que les programmes de réinsertion des enfants soient « tournés vers l’avenir » et correspondent aux besoins spécifiques des enfants.  Il a notamment jugé essentiel que la réinsertion soit adaptée aux besoins des enfants les plus vulnérables, y compris les enfants handicapés.

M. LUIS HOMERO BERMÚDEZ ÁLVAREZ (Uruguay) a condamné l’augmentation des violations des droits des enfants en situation de conflit, notamment en Syrie, en Afghanistan et au Yémen.  « La violence sexuelle continue également d’être protégée par une omerta », a-t-il déploré.  Dans ce contexte, le représentant a noté l’augmentation « effarante » des violations perpétrées par des agents étatiques et des forces internationales, signe, selon lui, que la hausse des violations constatées dans le monde est liée aux États eux-mêmes.  Le représentant a appelé à utiliser tous les mécanismes internationaux à disposition pour lutter contre cette tendance.  Il a ainsi exhorté tous les États ne l’ayant pas fait à adhérer à la Convention relative aux droits de l’enfant et à ses protocoles facultatifs, à appliquer la résolution 2286 (2016) du Conseil et à souscrire aux Principes de Paris et de Vancouver, ainsi qu’à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.

Le représentant a en outre appelé à lancer une réflexion sur la production et la commercialisation responsables des armes.  À ses yeux, le Conseil doit quant à lui assumer sa responsabilité en renvoyant les cas de violation à la Cour pénale internationale (CPI), le cas échéant. 

M. HERMOGENES LÓPEZ GARCÍA DE LOMANA (Espagne) a mis l’accent sur l’importance de la dimension de l’éducation y voyant la seule clef permettant de parvenir à la réconciliation et la réinsertion des anciennes parties et victimes des conflits.  Il a précisé que l’Espagne venait d’organiser à Palma de Majorque la troisième Conférence internationale sur la sûreté des écoles.  Il a mis l’accent sur la dimension du genre, en notant que les filles sont les premières à être déscolarisées lorsqu’un conflit commence et les dernières à être rescolarisées lorsque celui-ci s’achève. 

Il s’est félicité que la conférence susmentionnée ait permis à 78 délégations nationales et 13 délégations internationales de mettre en commun les enseignements et définir une riposte commune.  « Nous espérons bientôt dépasser les 100 adhésions à la Déclaration d’Oslo sur la sécurité dans les écoles », a encore insisté le représentant de l’Espagne. 

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a jugé urgent de « passer à la mise en œuvre » en réalisant le programme « ACT to Protect » et en fournissant des services aux enfants touchés par la guerre.  L’Irlande a augmenté les dépenses accordées à l’éducation parce que l’éducation est le meilleur moyen d’aider les enfants à surmonter leur traumatisme.  Le représentant a appelé au respect du droit international humanitaire et à assurer la redevabilité et la reddition de comptes pour toute violation.  « Nous devons faire davantage pour que les résolutions adoptées soient appliquées et assurer que tous les auteurs de violences faites aux enfants soient poursuivis et condamnés », a-t-il souligné.    

M. HAM SANG WOOK (République de Corée) a insisté sur l’importance stratégique qu’il y a à réintégrer les enfants affectés par des conflits armés.  Il a estimé qu’une meilleure réintégration des enfants soldats permettrait notamment d’aider à mettre fin au « cercle vicieux de la violence ».  À ses yeux, les programmes de réintégration doivent adopter une approche communautaire pour éviter les stigmatisations.  Il faut pour cela convaincre les communautés des bénéfices qu’elles peuvent tirer de la réintégration des enfants, a-t-il précisé.  

Par ailleurs, le représentant a appelé à redoubler d’efforts pour lutter contre les violences sexuelles à l’encontre des enfants, dans la droite lignée de la résolution 1882 (2009) du Conseil.  Or, 10 ans après l’adoption du texte, le Secrétaire général fait toujours mention dans son rapport de 900 cas avérés de violences sexuelles contre des enfants, a-t-il déploré, appelant à mettre l’accent sur l’aide médicale et psychologique aux victimes dans les programmes de lutte contre les violences sexuelles à l’encontre des enfants.

Enfin, le représentant a appelé à lutter contre l’impunité pour les auteurs de violations graves contre les enfants.  Il a appelé à renforcer les institutions étatiques en inscrivant les criminels dans les rapports du Secrétaire général sur la question et à mettre en place des sanctions précises contre les auteurs. 

Mme PAULOMI TRIPATHI (Inde) a constaté que des violations graves contre les enfants étaient toujours perpétrées par un large éventail d’acteurs dans les situations complexes de conflit armé.  Les réseaux terroristes et autres acteurs non étatiques continuent notamment d’exploiter les enfants pour mener à bien leurs « sombres desseins », a-t-elle déploré, soulignant la complexité, dans certains cas, du lien entre l’appareil étatique et les acteurs non étatiques.  La représentante a appelé à redoubler d’efforts pour lutter contre l’impunité des réseaux terroristes et acteurs non étatiques. 

Elle a également appelé à une meilleure intégration des dispositifs de protection de l’enfance au sein des processus de paix.  La mise en œuvre de plans de protection et de réintégration des enfants est également essentielle, a-t-elle estimé, jugeant que les opérations de maintien de la paix devaient disposer des ressources suffisantes pour s’acquitter de leur mandat en matière de protection de l’enfance. 

Malgré le mandat clair octroyé par le Conseil au Secrétaire général en la matière, la représentante s’est dite déçue de constater que M. Guterres continue de faire référence dans son rapport à des situations où il n’y a pas de conflit armé, ce qui contribue malheureusement selon elle à une « politisation » de son mandat.

M. DAMIANO BELEFFI (Saint-Marin) a regretté que les enfants continuent de payer le plus lourd tribut des conflits armés.  Il a exhorté les parties aux conflits de respecter leurs obligations au regard du droit international humanitaire.  Il a appelé tous les États à adhérer à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, l’éducation étant, a-t-il affirmé, un outil puissant pour la paix.  « En aidant les enfants victimes des conflits, nous semons les graines d’un meilleur avenir », a-t-il indiqué.

M. GERARDUS VAN DEN AKKER, de l’Union européenne, a salué l’adoption, en avril 2019, de la résolution 2467 qui reconnaît que les femmes et les filles sont touchées de manière disproportionnée par les conflits.  Il a demandé au Secrétariat d’établir un bilan des efforts de consolidation des fonctions de protection au sein des missions de maintien de la paix.  Il a salué la contribution du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés qui est présidé par la Belgique, se félicitant notamment des condamnations prononcées à l’encontre du régime syrien et du Myanmar.  La campagne « ACT to Protect » doit apporter sa pierre à l’édifice de la protection pour faire cesser les six violations les plus graves à l’égard des enfants, a-t-il estimé. 

Mme CLARE HUTCHINSON, Représentante spéciale pour les femmes, la paix et la sécurité de l’Organisation du Traité de l’Atlantique-Nord (OTAN), a salué les efforts déployés par le Conseil de sécurité et la communauté internationale en faveur de la protection de l’enfance.  Elle s’est notamment félicitée de l’initiative « ACT to Protect », et a assuré que l’OTAN considère cette question comme un impératif moral et un élément essentiel pour rompre le cycle de la violence.  Depuis l’introduction du thème des enfants et des conflits armés au sommet de l’OTAN de 2012 à Chicago, des progrès considérables ont été accomplis pour développer des mesures pratiques destinées à lutter contre les violations visant des enfants en temps de conflit, a fait valoir la Représentante spéciale.  De l’adoption par le Conseil de l’Atlantique-Nord du programme « Protection des enfants dans les conflits armés – En avant », en 2015, à la récente réaffirmation de cet engagement au sommet de Bruxelles, en 2018, cette question est devenue une pièce centrale de l’approche de l’Organisation en faveur de la protection des civils, a-t-elle expliqué. 

Avec les Nations Unies, a-t-elle poursuivi, nous avons mis au point des mesures orientées vers le terrain pour mieux combattre les violations dont sont victimes les enfants en temps de conflit, en particulier des procédures opératoires standard concernant six violations graves.  De plus, des formations relatives aux enfants et aux conflits armés sont désormais obligatoires pour tous les personnels de l’OTAN déployés dans le cadre de missions et d’opérations.  Des points focaux ont en outre été établis sur cette question à tous les niveaux de la structure de commandement de l’Organisation, en concertation avec l’ONU et d’autres acteurs internationaux, a insisté Mme Hutchinson, reconnaissant que beaucoup reste néanmoins à faire. 

Outre l’exploitation sexuelle des enfants, dossier qu’elle considère comme prioritaire, l’OTAN entend renforcer sa coordination avec d’autres acteurs internationaux pour promouvoir les droits de l’enfant, améliorer la responsabilisation et mieux respecter le droit international et les normes internationales, a-t-elle indiqué. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a appelé tous les États Membres à ratifier et mettre pleinement en œuvre la Convention relative aux droits de l’enfant et ses Protocoles facultatifs, ainsi que les autres instruments juridiques internationaux pertinents.  Il a aussi appelé les gouvernements à souscrire à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, aux Principes de Vancouver et aux Principes de Paris, ainsi qu’à inclure des provisions sur la protection des enfants dans les processus de paix, en particulier concernant les groupes armés non étatiques.  Le représentant a précisé que le Kazakhstan avait ratifié tous les traités pertinents et souscrit à toutes les initiatives internationales en matière de protection des enfants.

Par ailleurs, le représentant a estimé que l’accès des enfants à l’éducation, à des soins de santé et à des services de base était un facteur essentiel de prévention des conflits et de construction de société durables.  Par conséquent, le représentant a jugé que les investissements dans le développement, l’éducation et l’amélioration des conditions de vie des enfants étaient des éléments clefs pour prévenir leur recrutement.

Le représentant a également appelé à renforcer la réintégration et la réinsertion des enfants après un conflit.  Les programmes de réinsertion doivent, selon lui, être revus pour les rendre plus efficaces et permettre aux enfants de reprendre une vie normale et de devenir des moteurs du changement.  De ce point de vue, il a fait savoir que son pays avait rapatrié, en 2019, 595 citoyens kazakhs qui étaient partis rejoindre les rangs de Daech, dont 156 femmes et 406 enfants.

M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a condamné le recrutement des enfants pour en faire des « armes de guerre », estimant que ce problème trouve sa source dans le « délitement » des pays.  « Nous sommes effarés par les difficultés auxquelles fait face la protection des enfants dans les zones de conflits », a-t-il notamment commenté.  Il a relevé que, dans les pays en développement, les principales causes des conflits incluent la pauvreté extrême, la mauvaise gouvernance, les problèmes économiques, les inégalités politiques, sociales et économiques et le très fort taux de chômage.  Pour toutes ces raisons, les jeunes sont plus facilement manipulés et radicalisés, a expliqué que le représentant, pour qui la réalisation des objectifs de développement durable à l’horizon 2030 demeure l’outil le plus efficace pour lutter contre les sources des conflits.  Il est indispensable de relever le défi du développement économique qui est à l’origine de la plupart des conflits, a-t-il souligné. 

M. OMER MOHAMED AHMED SIDDIG (Soudan) a indiqué que son pays avait été en mesure, au cours des deux dernières années, de libérer des enfants soldats enrôlés par des groupes armés et de les réinsérer à la vie sociale.  « Ils ont pu surmonter leur traumatisme, guérir et réintégrer leurs familles », a-t-il salué, soulignant que la question des droits de l’enfant serait pleinement prise en compte dans les futures négociations de paix au Darfour, dans le Nil-Bleu et au Kordofan méridional. 

Le représentant a affirmé le rôle du Soudan en faveur de la paix et de la sécurité au Soudan du Sud et en République centrafricaine, où son pays agit, selon lui, de manière à garantir la mise en œuvre des accords de paix, notamment en veillant au respect des droits des enfants, aux côtés de l’Union africaine (UA) et d’autres États du continent.

Le représentant a ensuite mis l’accent sur trois mesures pour protéger les enfants en temps de conflit:  former les forces armées sur les procédures en vigueur;  organiser des campagnes de sensibilisation sur l’importance de protéger les enfants et de dénoncer les recrutements d’enfants;  et veiller à l’examen minutieux de l’âge des nouvelles recrues.

M. FABIEN STEPHAN YVO RAUM (Luxembourg) a d’emblée déploré qu’en 2018, les violations visant des enfants en temps de conflit armé soient en nette progression par rapport à l’année précédente.  Des milliers d’enfants sont retenus dans des centres de détention de combattants terroristes étrangers présumés, dans des conditions inappropriées à leur âge et à leur vulnérabilité, a-t-il fustigé.  À ses yeux, tous les mineurs qui sortent d’un environnement traumatisant doivent être considérés en premier lieu comme des victimes, avec pour priorités leur prise en charge et réhabilitation psychosociale.  À l’avant-veille du dixième anniversaire de la résolution 1882, qui a ajouté les meurtres et les mutilations d’enfants aux crimes graves reconnus par le cadre normatif « enfants dans les conflits armés », le représentant a estimé que ce texte n’avait rien perdu de son actualité. 

Dans de nombreux conflits contemporains, a-t-il en effet constaté, le déni d’accès à l’aide humanitaire aux populations civiles est utilisé comme arme de guerre et les enfants en sont les premières victimes.  De surcroît, l’utilisation et le ciblage des écoles et des hôpitaux à des fins militaires exposent les enfants à de multiples dangers, comme les bombardements ou l’enlèvement et le recrutement par des groupes armés.  À cet égard, M. Raum a exhorté tous les États membres qui ne l’ont encore fait à endosser la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et à mettre en œuvre la résolution 2143 afin de dissuader les parties au conflit d’utiliser les écoles à des fins militaires.  Évoquant enfin les nombreux cas d’abus sexuels contre des filles et des garçons dans les conflits en cours, il a plaidé pour que les auteurs et les responsables de tels crimes soient jugés par une justice pénale internationale, et en dernier ressort par la Cour pénale internationale. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. DANG DINH QUY (Vietnam) a affirmé que l’ASEAN demeurait engagée en faveur de la protection des droits des enfants en situation de conflit, aussi bien au niveau régional que national.  En octobre 2018, a-t-il indiqué, l’Association a organisé un dialogue sur la Convention relative aux droits de l’enfant pour sensibiliser l’opinion publique à sa mise en œuvre.  La même année, la Représentante spéciale chargée de la question de la violence à l’encontre des enfants a participé à un dialogue annuel à Jakarta, aux côtés de la Commission de l’ASEAN sur la promotion et la protection des droits des femmes et des enfants.  En cette dixième année anniversaire de la résolution 1882 (2009), le représentant a réaffirmé que l’ASEAN demeurait fermement attachée à combattre les violations des droits de l’enfant. 

En sa qualité nationale, le représentant a indiqué que le Viet Nam, en tant que Président de l’ASEAN en 2020, travaillerait étroitement avec les pays de l’Association pour promouvoir les arrangements existants et explorer de nouvelles possibilités concernant la protection des enfants.  Le renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales devrait également permettre de mieux protéger les enfants, a-t-il estimé.  Le représentant a de plus appelé à redoubler d’efforts pour garantir la continuité de l’éducation en période de conflit.  Il a également appelé à s’attaquer davantage à l’élimination des restes explosifs de guerre en situation de postconflit.

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a regretté que le rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés n’ait pas pris en compte les observations et recommandations de son pays formulées dans une note en date du 10 mai dernier.  Le rapport, a-t-il noté, relève que la police fédérale iraquienne a recruté cinq garçons afin de protéger un point de contrôle, ce qui s’est avéré inexact.  « Les forces de sécurité iraquiennes, qui ont fait leurs preuves contre le terrorisme, ont-elles vraiment besoin de cinq enfants pour assurer la protection d’un point de contrôle? » s’est-il interrogé. 

Il a également estimé que le paragraphe 76 du rapport est non conforme à la réalité du terrain, notant que les organisations terroristes ont les moyens de mener des attaques contre les civils, y compris contre les écoles et les hôpitaux. 

Le représentant s’est d’autre part déclaré gravement préoccupé par la description faite par le Secrétaire général d’un conflit opposant des belligérants en Iraq.  Or, a-t-il fait valoir, il s’agit d’une guerre menée par l’État contre une organisation terroriste qui n’a que mépris pour l’humanité et notre pays.  Face à cet état de fait, la justice iraquienne est indépendante dans ses jugements et respecte les normes internationales, a-t-il souligné.  Et le Gouvernement iraquien fait quant à lui des efforts pour garantir des procédures justes et transparentes, ajoutant même des amendements pour protéger les enfants victimes du terrorisme.  Dans ce contexte, a ajouté le délégué, l’Iraq réaffirme son plein appui aux efforts de l’ONU afin de fournir un environnement sûr aux enfants.  Le Gouvernement fera tout son possible pour tenir comptables ceux qui ont enfreint la loi, a assuré le représentant, indiquant par ailleurs que, 30 ans après l’invasion du Koweït par Saddam Hussein, son pays a désormais des relations de bon voisinage avec ce pays ami. 

M. HAU DO SUAN (Myanmar) a affirmé que son gouvernement est disposé à prévenir les violations et abus contre les enfants.  Le Myanmar a notamment pris des mesures afin d’établir des mécanismes préventifs et renforcer sa coopération avec des partenaires internationaux comme l’ONU, notamment avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé.  Le 24 juillet dernier, le Parlement de l’Union a adopté la très attendue loi sur les droits des enfants dont le chapitre XVII est dédié exclusivement à la question des enfants et les conflits armés, a-t-il indiqué.  Ce texte criminalise notamment six violations parmi les plus graves, et un comité interministériel relatif à ces six violations a d’ailleurs été mis en place en janvier dernier.

Le représentant a ensuite indiqué que depuis la signature, en 2012, du plan d’action conjoint avec l’ONU, près de 1 000 mineurs avaient été libérés et avaient pu réintégrer leur communauté.  De même, le nombre d’enrôlements a drastiquement baissé au fil des ans et est désormais limité à quelques dizaines.  En plus des sessions de renforcement de capacités organisées dans le pays avec l’appui de l’ONU, une campagne de sensibilisation nationale avait été lancée en 2013 afin de mettre fin au recrutement d’enfants soldats par les forces armés.  Le Myanmar envisage aussi de ratifier prochainement le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. 

M. Suan a aussi assuré que les auteurs de violations des droits de l’homme, notamment celles ciblant les femmes et les enfants, sont traduits en justice, y compris les membres des forces armées.  Le Myanmar entend en outre poursuivre sa collaboration avec le Bureau de la Représentante spéciale, ainsi qu’avec le Groupe de travail du Conseil de sécurité et d’autres partenaires, afin de « bâtir un avenir meilleur pour nos enfants ». 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) s’est déclarée profondément préoccupée par la gravité et l’ampleur des menaces qui pèsent sur les enfants au Moyen-Orient.  Elle a cité à cet égard les violations sans cesse croissantes commises en Syrie, les meurtres et la mise en détention d’enfants palestiniens par les forces israéliennes et le recrutement de mineurs par les houthistes au Yémen.  Dans ce contexte, a-t-elle souligné, les Émirats arabes unis sont déterminés à alléger les souffrances des enfants, notamment grâce à l’acheminement d’une aide humanitaire.  Le pays a pris en compte les besoins des enfants dans le cadre de l’aide de 5 milliards de dollars fournie au Yémen ces quatre dernières années, a fait valoir la représentante.  À cela s’ajoute l’engagement pris avec l’Arabie saoudite d’un financement supplémentaire de 240 millions de dollars pour soutenir les opérations du Programme alimentaire mondial (PAM). 

Dans le cadre de leurs efforts humanitaires, les Émirats arabes unis sont convaincus que l’éducation n’est pas seulement un droit propre à tout enfant mais aussi un instrument essentiel pour réduire les différends et mettre fin à l’exploitation des enfants dans ces conflits.  À cette fin, le pays a fourni une assistance dans le domaine de l’éducation à plus de 270 000 étudiants par le truchement du PAM, construit 150 classes temporaires et alloué une aide de 35 millions de dollars à l’UNICEF afin de contribuer au salaire des enseignants. 

À cet égard, Mme Alhefeiti s’est dite inquiète de l’exploitation des enfants et des écoles faite par les houthistes au Yémen.  Elle a notamment exprimé sa préoccupation quant à l’utilisation d’écoles comme centres de stockage d’armes et lieux de recrutement, d’entraînement et de détention d’enfants, exhortant le Conseil de sécurité à les tenir comptables de ces graves violations.  La représentante a assuré que la coalition soutenant la légitimité du Yémen, dont son pays est membre, prend au sérieux la protection des civils dans les conflits armés, et notamment celle des enfants.  La coalition, a-t-elle ajouté, continue également de travailler étroitement avec l’ONU et d’autres partenaires internationaux pour renforcer la protection des enfants au Yémen, comme l’atteste le Mémorandum d’accord signé en mars dernier avec la Représentante spéciale Virginia Gamba. 

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a constaté avec regret que les garçons et les filles continuaient de subir recrutements forcés, violences sexuelles et les pires violences à travers le monde, 10 ans après l’adoption de la résolution 1882 (2009).  Il s’est aussi inquiété des conséquences de la destruction des écoles qui prive les enfants d’éducation et donc d’espoir.  Il a salué l’importance de la Déclaration d’Oslo sur la sécurité dans les écoles. 

Le représentant de la Géorgie s’est particulièrement inquiété de la « situation des droits des enfants dans les régions occupées de l’Abkhazie et Tskhinvali/Ossétie-du-Sud » en estimant que ces droits continuaient d’être violés par la Puissance occupante.  Il a dit que l’interdiction de l’enseignement en langue géorgienne dans ces deux régions était particulièrement préoccupante.  « En 2015, la langue géorgienne a été interdite à l’école primaire dans les dernières écoles géorgiennes du district de Gali, pour se traduire petit à petit à une interdiction complète dans l’ensemble de l’Abkhazie », a-t-il indiqué.  Les enseignants sont soumis à des pressions et depuis 2017, l’enseignement du géorgien est interdit aussi dans la région de Tskhinvali/Ossétie-du-Sud.  Des enfants qui traversent la ligne d’occupation pour pouvoir suivre des cours en géorgien en territoire géorgien sont à leur retour fouillés et détenus pendant des heures si des livres en langue géorgienne sont trouvés dans leur cartable.  La fermeture du dernier point de passage dans la région d’Abkhazie en juillet 2019 a encore compliqué la situation des élèves de langue géorgienne qui souhaitaient passer leur examen en territoire géorgien.  « Cette fermeture arbitraire empêche aussi les enfants géorgiens demeurant dans le territoire occupé d’aller se faire soigner de l’autre côté de la ligne d’occupation », a déploré le représentant.  Il a indiqué que son gouvernement avait lancé une initiative de paix « un pas vers un meilleur avenir » pour améliorer les conditions humanitaires, économiques et sociales des populations, notamment des enfants, résidant en Abkhazie et Tskhinvali.   

Pour M. DAVID PAUL CHARTERS, du Saint Siège, le thème du débat d’aujourd’hui appelle à marquer une pause et à réfléchir tant la juxtaposition d’enfants et de conflits armés semble incongrue alors même qu’ils sont marqués à vie physiquement, psychologiquement et émotionnellement par ces conflits.  Ces périodes sont trop souvent marquées par l’impossibilité pour ces enfants d’avoir accès à une aide essentielle à leur survie, a poursuivi l’observateur, évoquant aussi la ruée vers les minéraux et d’autres ressources précieuses de l’Afrique qui oblige de nombreux enfants à renoncer à leur éducation pour travailler dans les mines.  Pires encore sont les cas où ils sont forcés de combattre sous le prétexte fallacieux de venir en aide à leurs familles appauvries, a-t-il dénoncé.  Dès lors, l’observateur a appelé à se pencher sur les causes profondes de cette situation, et plus précisément en quoi les préjudices socioéconomiques et le manque d’opportunités font des conflits armés une alternative pour les jeunes. 

M.  Charters a plaidé en faveur de l’éducation pour la paix dans les familles et les écoles, et a souligné le rôle crucial que peuvent jouer les femmes comme « enseignantes de la paix » pour s’attaquer à ces causes profondes.  Il a également dénoncé les attaques contre les écoles, les hôpitaux et les abris qui sont contraires au droit international humanitaire et « doivent cesser », en particulier à Edleb, en Syrie. 

L’observateur a espéré que ce débat public contribuera à sensibiliser la conscience collective et veiller à ce que « ces enfants invisibles » ne soient pas oubliés, à ce qu’on fasse davantage pour libérer les enfants soldats et que les jeunes victimes d’autres formes de violences puissent compter sur le soutien nécessaire à leur réintégration, y compris les enfants issus de ces violences sexuelles.

Mme FARZANA ZAHIR (Maldives) a rappelé que son pays a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant en 1991.  Elle a plaidé pour l’adoption de lois criminalisant toute violence sexuelle contre des enfants dans tous les pays, tout en appelant l’ONU à poursuivre la mise en œuvre de ses politiques de tolérance zéro en la matière.  La déléguée a aussi demandé que le Conseil de sécurité œuvre à la nomination de conseillers à la protection de l’enfance dans toutes les missions de maintien de la paix, tout en veillant à ce que les questions liées à la protection de l’enfance soient intégrées à titre prioritaire dans les négociations.  Elle a enfin insisté pour que tous les États apportent leur soutien aux enfants en temps de conflit armé, y compris en faveur d’enfants handicapés.

M. GUILLERMO ROQUE FERNANDEZ DE SOTO VALDERRAMA (Colombie) a indiqué que le Secrétaire général faisait référence, dans son rapport, aux violations graves des droits des enfants perpétrées par des groupes armés illégaux en Colombie.  Le rapport reconnaît toutefois les efforts du Gouvernement colombien pour garantir les droits des enfants, a-t-il ajouté, y compris le décret 1434 de 2018, qui renforce de manière significative la prévention du recrutement et de l’utilisation des enfants, ainsi que des violences sexuelles à leur encontre.  À ce décret s’ajoute la création d’une commission intersectorielle pour la prévention du recrutement et d’autres violations graves des droits des garçons et des filles (CIPRUNNA), créée en 2007, qui centralise les stratégies pour régler ce problème. 

Malheureusement, certains groupes armés continuent de recruter des enfants en Colombie, a déploré le représentant, notamment l’Armée de libération nationale (ELN), qui est régulièrement mentionnée dans la « liste noire » des parties qui commettent des violations graves.  Ce groupe a également recours aux mines antipersonnel, qui privent les enfants d’un accès à l’éducation et à la santé dans les zones sous son contrôle, a-t-il déploré.  Non seulement l’ELN refuse systématiquement de prendre des mesures qui permettraient d’améliorer la protection des enfants, mais le groupe continue au contraire d’intensifier ses attaques contre la société colombienne, a ajouté le représentant.  Conscient des défis auxquels est confrontée la Colombie pour mettre fin au recrutement d’enfants, il a affirmé la volonté des autorités du pays de redoubler d’efforts en ce sens.

M. DEE-MAXWELL SAAH KEMAYAH (Libéria) a demandé que soit comblé le déficit de financement en faveur de la réhabilitation et la réintégration d’enfants affectés par les conflits, notamment ceux qui ont été forcés de prendre les armes.  Ainsi, un financement adéquat devrait venir en soutien aux efforts des gouvernements, des organisations sous-régionales et régionales, tout en permettant de bâtir des structures de protection sociale des enfants, et établir des stratégies de prévention.  Le Libéria, qui est passé d’une situation de confit à la paix, a ainsi mis l’accent sur un programme de renforcement de la protection sociale des enfants, une priorité de développement pour ce pays dont 63% de la population est jeune et constitue, de ce fait, la pierre angulaire pour une paix, une démocratie et un développement qui soient durables.

Mme LACHEZARA STOIANOVA STOEVA (Bulgarie) a rappelé que l’objectif du débat de ce jour est de trouver des réponses aux défis liés à la situation des enfants en situation de conflit armé.  Elle a estimé que la prévention était une dimension clef en ajoutant que la formation du personnel civil et militaire des missions de maintien de la paix était primordiale.  À ce titre, elle a salué la pertinence des Principes de Vancouver pour opérationnaliser la protection des enfants au sein des missions de maintien de la paix.  Elle s’est particulièrement inquiétée que les enfants associés à des groupes armés soient trop souvent perçus comme des menaces plutôt que comme des victimes.  Elle a jugé indispensable de trouver des alternatives à la détention de ces jeunes, mais aussi de lutter contre l’impunité. 

M. SUDQI ATALLAH ABD ALKADETR AL OMOUSH (Jordanie) a appelé à l’établissement de mécanismes de réinsertion des enfants victimes d’abus en temps de conflit armé.  C’est dans cette optique que la Jordanie a endossé les principaux traités et accords internationaux promouvant la protection des enfants, a-t-il indiqué.  Il a noté que cette protection doit également avoir lieu dans le cadre des activités de maintien de la paix de l’ONU.  C’est d’ailleurs ce que les soldats de la paix jordaniens s’attèlent à faire. 

Le représentant a par ailleurs indiqué que la Jordanie accueille également près de 1,3 million de réfugiés syriens et a lancé des programmes de réhabilitation et de formation afin que ces derniers puissent s’intégrer dans la société jordanienne.  Il a salué la campagne lancée par l’ONU, « ACT to Protect », qui braque les projecteurs sur les violations des droits de l’enfant.  M. Al Omoush a terminé son propos en demandant à la communauté internationale d’investir sur « ces petits cœurs » afin de s’assurer que « ces petites mains soient consacrées à construire et non à détruire ». 

M. MOHAMMAD WALI NAEEMI (Afghanistan) a souligné que les enfants étaient les principales victimes du conflit en cours en Afghanistan et qu’ils représentent le tiers des 3 062 victimes civiles avérées dans le pays.  Il a indiqué que la Mission des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) avait fait état de 1 207 victimes parmi les enfants au premier semestre 2019, dont 327 morts et 880 blessés.  Nombre d’entre ces victimes ont succombé dans des attentats-suicides commis récemment à Logar, Kandahar et Nangarhar, a déploré le représentant, affirmant que les Taliban et autres groupes armés illégaux continuaient d’utiliser et de cibler des enfants dans le cadre de leurs opérations.  « Ils les attirent, leur font un lavage de cerveau et les forcent à participer au conflit en tant que soldats et kamikazes », a dénoncé M. Naeemi, avant d’exhorter les Taliban à renoncer à ces pratiques néfastes. 

M. Naeemi a indiqué que son gouvernement avait pris des mesures concrètes pour assurer la protection des enfants afghans, en appliquant une politique de tolérance zéro en matière de recrutement d’enfants dans les forces de sécurité et de défense nationales.  Selon lui, les résultats de ces efforts se reflètent dans le fait qu’aucun enfant n’a été recruté en 2018 dans l’armée ou la police afghanes.  D’autres mesures ont été prises pour renforcer notre architecture juridique globale en la matière, a ajouté le représentant, mentionnant la promulgation, en 2019, d’une loi sur la protection des droits de l’enfant et la création d’une commission nationale sur la protection des droits de l’enfant, chargée du suivi et de la mise en œuvre de cette loi.  En outre, des bureaux spéciaux de poursuites des auteurs de violations contre les enfants ont été créés dans les provinces afghanes, a-t-il ajouté.

M. Naeemi a ensuite affirmé que son gouvernement travaillait en étroite coopération avec le Bureau de Mme Gamba et l’équipe de pays des Nations Unies en Afghanistan pour mettre en œuvre le plan d’action et faire en sorte que les polices nationale et locale afghanes soient retirées de la « liste noire » du Secrétaire général, sur la base des progrès notables réalisés pour mettre fin au recrutement des mineurs. 

M. RAUF ALP DENKTAŞ (Turquie) a indiqué que la crise en Syrie a eu des conséquences dramatiques pour les enfants.  Ainsi, en plus des crimes du « régime brutal d’Assad » qui mène des frappes aériennes indiscriminées et fait usage de barils d’explosifs, d’armes chimiques et de tirs d’artillerie, il faut ajouter des crimes contre les enfants dont sont auteurs les terroristes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et leur branche syrienne qu’est le PYD/YPG, a-t-il affirmé.  Le représentant a noté que le rapport du Secrétaire général laisse voir que ce dernier groupe a été celui qui aura le plus utilisé les enfants soldats en Syrie l’année dernière.  La Turquie estime, quant à elle, que le PKK ne compte pas moins de 700 enfants soldats, dont la majorité est d’origine kurde ou d’autres groupes ethniques comme les Araméens.  Le représentant a également accusé le PYD/YPG d’avoir ciblé des écoles, les transformant en sites de stockage de munitions, privant ainsi les enfants de leur droit fondamental à l’éducation. 

M. Denktaş a ensuite déploré le fait que des accords aient été signés avec de tels groupes sous la forme de plans d’action, avant de marteler que tout groupe terroriste doit être traité comme tel.  Il n’est pas question de saluer l’engagement d’une organisation terroriste à limiter son niveau de criminalité, a-t-il souligné. 

Le représentant a par ailleurs indiqué que la Turquie accueille 3,6 millions de réfugiés syriens, dont 1,7 million ont moins de 18 ans, et parmi eux, 444 000 qui sont nés dans leur pays d’accueil.  La Turquie a mobilisé des moyens nécessaires afin d’assurer des conditions de vie dignes aux enfants syriens, a-t-il affirmé, en soulignant que l’éducation et les soins de santé sont gratuits pour ces derniers.

M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a appelé à protéger et garantir le droit des enfants et à veiller à ce que justice soit faite en cas de crime contre les enfants.  Il a souligné que malgré les conflits armés, le droit à l’éducation doit rester de mise.  C’est pourquoi la fondation qatarienne sur « l’éducation avant tout » apporte un soutien à l’éducation des enfants à travers le monde, y compris ceux se trouvant dans les contextes de conflit armé.  Le représentant a aussi invité toutes les parties à un conflit à ne pas cibler les écoles et à adhérer à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  Il a rappelé que le Qatar a signé un accord en septembre dernier avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé.  Ainsi, un centre sur les enfants et les conflits armés sera bientôt opérationnel à Doha, au Qatar, entièrement financé par le pays hôte. 

M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a partagé la préoccupation du Secrétaire général face à l’ampleur et à la sévérité des violations commises contre des enfants en 2018.  Toute approche globale de la protection des enfants en temps de conflit armé doit miser sur la responsabilité de rendre compte de ses actes, et, à cet égard, la Malaisie attend que les mécanismes de justice nationaux et internationaux fassent leurs preuves contre les responsables de ces violations.  Le représentant a également appelé à l’intégrité et à l’impartialité lorsqu’il est question des inscriptions sur les listes en annexe du rapport du Secrétaire général.

Le représentant s’est associé à l’appel du Secrétaire général pour assurer l’accès humanitaire aux enfants, tout comme la protection du personnel humanitaire sur le terrain.  Il a suggéré que les Nations Unies développent un guide pratique pour la collecte des données en cas de déni d’accès humanitaire.  Cela contribuerait à normaliser et à renforcer le travail de l’équipe spéciale de surveillance et d’information du mécanisme de surveillance et d’information, a-t-il estimé.

La Malaisie est convaincue, en outre, que les opérations de maintien de la paix et les missions politiques doivent garder une capacité de protection des droits des enfants tout au long de leurs processus de transition, consolidation ou réduction.  Pour ce qui est de la réintégration, le représentant a estimé qu’il s’agit d’un effort de longue durée qui requiert la responsabilité partagée de toutes les parties prenantes.  Avant de conclure, il a encouragé tous les États Membres à signer la Déclaration sur la sécurité des écoles.

Mme NADYA RIFAAT RASHEED, de l’État de Palestine, a noté que les chiffres confirmés par l’ONU en 2018 indiquent que le nombre d’enfants palestiniens tués ou blessés par les « forces d’occupation israéliennes » est le plus élevé depuis 2014.  Elle a précisé que 2 756 enfants palestiniens ont été blessés en 2018 et que ce nombre continue de croître en 2019.  « La violence des colons continue d’avoir un impact sévère sur les enfants palestiniens », a–t-elle ajouté en dénonçant le harcèlement et les attaques contre des enfants palestiniens par des colons sous le regard des forces israéliennes.  « Depuis 2000, plus de 10 000 enfants palestiniens ont été arrêtés et maltraités par le système pénitencier israélien », a-t-elle aussi dit.  Elle s’est inquiétée des conséquences physiques et traumatiques de ces maltraitances. 

La représentante a aussi dénoncé la poursuite d’attaques contre des écoles palestiniennes et la fermeture d’infrastructures scolaires.  Elle a attiré l’attention sur les conséquences du blocus de Gaza sur la souffrance des enfants.  La représentante de la Palestine a ensuite demandé qu’Israël, son armée et ses colons soient ajoutés à la liste des parties responsables de graves violations contre les enfants.  Elle a estimé que l’absence de cette inclusion minait la crédibilité de cette liste et demeurait une occasion ratée de tenir Israël responsable de ses actes. 

Mme VICTORIA MANGAY SULIMANI (Sierra Leone) est revenue sur les violations et abus des droits de l’homme infligés aux enfants dans son pays pendant la guerre civile qui y a fait rage durant les années 90.  Qu’il s’agisse de violences sexuelles, d’enlèvements, de mariages forcés ou de travail forcé, « en substance, nos enfants ont été exposés à des violations massives dont les conséquences personnelles et sociales se font encore ressentir », a-t-elle regretté.  Mais ce triste chapitre a été fermé il y a 17 ans, et depuis, la Sierra Leone est plus consciente que jamais de sa responsabilité de protéger les enfants et du fait que le développement durable ne peut se faire dans un contexte postconflit si l’on n’agit pas rapidement pour mettre fin à ces crimes horribles. 

Partageant l’expérience de son pays, la représentante a rappelé que l’accord de paix signé à Lomé, au Togo, prévoyait déjà la protection des enfants victimes du conflit.  La démobilisation, le désarmement et la réintégration de tous les anciens combattants, y compris des enfants, s’en est rapidement suivie et, pour combattre l’impunité et améliorer la justice transitionnelle, la Commission Vérité et réconciliation a été mise sur pied ainsi que le Tribunal international hybride pour la Sierra Leone.  C’est ce tribunal qui a prononcé le premier verdict contre le recrutement et l’utilisation d’enfants dans les conflits armés, alors que sa décision sur l’esclavage sexuel et les mariages forcés a été une reconnaissance de ces actes proscrits comme crimes au regard de la jurisprudence pénale internationale, a-t-elle souligné.  Sur le plan de la réintégration sociale, la loi sur l’éducation a guidé la réforme de ce secteur et, actuellement, la politique « éducation de qualité gratuite » pour tous les enfants est en place.

Mme Sulimani a ensuite mis en garde contre les effets indirects des coupes budgétaires à l’ONU sur les efforts de maintien de la paix et les mandats de protection des civils dont les enfants.  Elle a appelé les États Membres à considérer les enfants associés à des groupes armés comme des victimes qui ont droit à la pleine protection de leurs droits.  Elle a également appelé les États Membres et le Conseil de sécurité à faire plus pour lutter contre l’impunité et traduire en justice les responsables des violations des droits des enfants, y compris des attaques contre des écoles et des hôpitaux.  De plus, les États Membres doivent assurer des financements suffisants et durables aux programmes de réintégration des enfants soldats pour leur permettre de devenir à terme des agents du changement et du développement durable.

Mme MILICA PEJANOVIĆ ĐURIŠIĆ (Monténégro) a constaté que des millions d’enfants dans le monde sont pris au piège de conflits armés dans lesquels ils ne sont plus juste des spectateurs, mais trop souvent des victimes tuées, blessées, mutilées, violées ou recrutées par des groupes armés.  Reprenant les chiffres du dernier rapport du Secrétaire général sur les enfants dans les conflits armés, la représentante a condamné dans les termes les plus fermes toute forme de violation des droits des enfants et a appelé toutes les parties aux conflits à respecter le droit international humanitaire et à ne plus attaquer des écoles et des hôpitaux.

Sur une note plus positive, elle s’est félicitée de la réintégration de plus de 10 000 enfants soldats en 2018, et a salué la création de la Coalition mondiale pour la réintégration des enfants soldats.  La représentante a ensuite passé en revue les différents instruments internationaux signés et/ou ratifiés par le Monténégro en matière de protection des enfants, y compris la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et les Principes de Vancouver sur le maintien de la paix et la prévention du recrutement d’enfants soldats.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a relevé que les enfants vivant en zones de conflit sont rendus particulièrement vulnérables en raison du manque d’accès humanitaire.  Il convient dès lors d’identifier et de combattre les tentatives visant à isoler les personnes vivant en zones de conflit du reste du monde, a plaidé le représentant. 

Notant que 2019 marque le trentième anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant, le délégué a assuré que son pays continue de donner la priorité à la protection de ces droits.  Il a en voulu pour preuve les dispositions spécifiques prévues par la législation nationale, l’implication de l’Arménie dans le cadre de la coopération internationale sur cette question et sa collaboration avec le CICR pour la création d’abris et la sécurisation d’écoles dans les régions frontalières de son territoire.  À cet égard, il a dénoncé le fait que l’Azerbaïdjan cible délibérément et sans discernement, selon lui, des personnes et des infrastructures civiles au Nagorno-Karabakh, tout en diffusant une propagande haineuse par le biais de ses programmes scolaires.  De telles pratiques sont non seulement contraires au droit international humanitaire et aux droits de l’homme, mais sapent également les efforts visant à créer un environnement propice à la paix et à la réconciliation, a-t-il averti.   

Aujourd’hui, nous demandons au Conseil de sécurité d’agir immédiatement pour empêcher la « catastrophe » d’une action militaire imminente contre notre pays, a déclaré M. SAMUEL MONCADA (Venezuela), affirmant qu’une telle action avait été annoncée par les États-Unis.  Le représentant a ainsi dénoncé le « plan systématiquement appliqué » par le Président Donald Trump, afin « d’étouffer l’économie » vénézuélienne par l’entremise de « mesures coercitives », au détriment des droits des personnes les plus vulnérables, dont les femmes et les enfants. 

Le représentant a ajouté que les « mesures d’extorsion » de Washington avaient pour objet de « piller la richesse nationale », en s’appropriant « illégalement » des raffineries, de l’or monétaire et d’autres instruments financiers d’une valeur de plus de 30 000 millions de dollars, qui auraient pu satisfaire les besoins vitaux de la population du pays.

À ses yeux, ce « blocus économique » et ce « vol à l’échelle planétaire » témoignent d’une « cruauté monstrueuse typique des crimes de guerre », en criminalisant l’achat d’aliments essentiels pour le soutien de plus de six millions de familles vénézuéliennes.  Il a affirmé que le Gouvernement américain tente de « créer une famine » au Venezuela pour s’approprier ses ressources naturelles et « recoloniser » le pays.  Selon lui, ce « terrorisme économique » s’est doublé d’une agression politique caractérisée par la violation de la souveraineté vénézuélienne, le 23 février, ainsi que par le financement et l’organisation d’un coup d’État manqué, le 30 avril. 

« Le Président Trump, assailli par des accusations contre son gouvernement, réveille les démons du racisme, des conflits internes et de la guerre internationale », a dénoncé le représentant, accusant les États-Unis de « chercher une excuse » pour procéder à « l’invasion à très court terme » du Venezuela.  Le représentant en a voulu pour preuve la multiplication des survols d’avions espions américains dans la région ces derniers jours.  Au cours des deux dernières semaines, ces survols se sont produits de manière quotidienne et se sont accompagnés de déclarations « provocatrices et menaçantes » sur la capacité de Washington à attaquer immédiatement le Venezuela, au cas où le Président Trump en donnerait l’ordre. 

Le représentant a aussi dénoncé le fait qu’hier, le 1er août 2019, le Président Trump a annoncé aux médias qu’il envisageait d’imposer un blocus naval et une quarantaine au Venezuela.

« Les conflits armés ont des conséquences graves et souvent irréparables sur les enfants », a déclaré M. KHODADAD SEIFI PARGOU (République islamique d’Iran), pour lequel la protection des enfants dans ces situations n’est pas une option, mais bien une obligation.  Sauver les enfants, c’est sauver l’avenir, a-t-il poursuivi.  Pour y arriver concrètement, la meilleure façon reste, selon lui, de mettre fin aux conflits en cours et d’éviter leur réémergence ou l’émergence de nouveaux conflits.  À titre d’exemple, il a cité l’occupation continue de la Palestine, où chaque année, a-t-il dénoncé, de plus en plus d’enfants sont tués, blessés, arrêtés et emprisonnés par les forces israéliennes.  Il s’agit pour l’Iran de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, et pourtant, a constaté le représentant, les forces israéliennes n’ont jamais été inscrites sur la liste qui figure en annexe du rapport annuel du Secrétaire général, ce qui, aux yeux de la délégation, remet en cause sa crédibilité et son impartialité.  Ce sentiment d’impunité ne fait qu’encourager Israël à tuer encore plus d’enfants, s’est-il indigné, avant de pointer un autre cas de deux poids, deux mesures, à savoir celui du Yémen, où la plupart des décès d’enfants ont été imputés aux frappes aériennes des forces de la coalition.  « Mais en réalité, il n’existe pas de coalition », a-t-il confié.  « Il n’y a que les Saoudiens qui continuent de tuer les enfants yéménites », a-t-il accusé, en rappelant que l’Arabie saoudite figure pourtant parmi les pays retirés de cette liste.  « N’est-il pas temps de mettre un terme à cette approche? » a lancé le représentant à la salle en condamnant ces actes « inhumains » qui représentent une violation flagrante du droit international.

Mme MARIA DE JESUS DOS REIS FERREIRA (Angola) a estimé que l’élimination du traitement inhumain qui est celui des enfants pris au piège des conflits armés est de la plus grande importance et constitue un sujet de consensus pour la communauté internationale.  Si des progrès ont permis de réduire le nombre d’enfants soldats dans le monde, par le biais notamment de systèmes de contrôle et de déclaration, de plans d’action nationaux et d’un nouvel accent mis sur les principes fondamentaux du droit international humanitaire, de nombreux défis demeurent, a constaté la représentante.  Elle a jugé que les parties au conflit et la communauté internationale doivent faire davantage pour protéger les enfants et les jeunes affectés par des conflits armés. 

Pour progresser sur cette question, il convient en premier lieu de renforcer les efforts de prévention des conflits.  L’Angola appelle d’autre part à réinsérer, et non à punir, les enfants associés à des groupes armés, en leur faisant bénéficier d’une éducation de qualité et de services de santé.  Il plaide en outre pour une implication des jeunes dans le règlement des conflits et les processus de paix et de développement.  Le pays prévoit enfin de venir en aide aux gouvernements cités en annexes du rapport pour leur permettre de mettre en œuvre les plans d’action préconisés par le Conseil.  Concluant sur une note positive, la représentante s’est félicitée des résultats encourageants obtenus par la campagne « Children, Not Soldier » et des engagements pris par les gouvernements participant à cette initiative.

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a déclaré que l’Arménie s’est rendue coupable de nombreuses violations du droit international humanitaire en commettant des « crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et d’actes de génocide » contre l’Azerbaïdjan.  Il a dénoncé des « actes de nettoyage ethnique » et de violences commis par l’Arménie, lesquels ont, selon lui, fait des milliers de victimes parmi les civils, dont de nombreux enfants.  « En février 1992, le plus important massacre a été commis contre les civils azéris de la ville de Khodjaly, au Nagorno-Karabakh, région de l’Azerbaïdjan. »  Suite à la guerre, 3 888 citoyens azéris sont portés disparus, dont 718 civils, parmi lesquels 71 enfants.  Il a regretté que malgré le cessez-le-feu, les forces arméniennes aient continué à bombarder des objectifs civils, dont des écoles en avril 2016.  Il a affirmé que ce fait avait été documenté par le Haut-Commissariat pour les réfugiés. 

M. TAYE ATSKESELASSIE AMDE (Éthiopie) a jugé encourageant d’apprendre que près de 14 000 enfants dans le monde ont été libérés de différentes formes de détention et réinsérés dans la société.  Le représentant a en revanche exprimé sa déception quant au nombre des violations graves enregistrées en 2018 à l’encontre d’enfants en situation de conflit.  Il s’est également déclaré préoccupé par les effets des conflits armés sur les enfants, souvent contraints à des déplacements forcés.  De surcroît, a-t-il dit, les activités de groupes terroristes, tels les Chabab et Boko Haram, qui recrutent et enlèvent des enfants pour les utiliser dans leur guerre asymétrique, voire en faire des kamikazes, se poursuivent sans relâche.  Cette situation, qui affecte tout particulièrement la Somalie et le Nigéria, constitue un défi supplémentaire pour les missions de maintien de la paix de l’ONU ainsi que les opérations de soutien à la paix sous pilotage africain, a-t-il observé. 

En tant que pays contributeur de contingents aux opérations de paix de l’ONU et de l’Union africaine, l’Éthiopie accorde une grande importance à la formation adéquate de ses troupes, notamment en matière de respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.  En tant que pays d’accueil pour les réfugiés, elle continue en outre de fournir une protection internationale aux enfants réfugiés, parmi lesquels figurent des mineurs non accompagnés.  Le représentant a ajouté que la pénalisation du recrutement et de l’exploitation des enfants est un des fondements du système légal éthiopien.  Il a ensuite encouragé la Représentante spéciale à renforcer la coopération entre son Bureau et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en vue de la pleine mise en œuvre des plans d’action signés par les parties à un conflit armé.   

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a déploré les violations flagrantes qui subissent les enfants à travers le monde.  Après avoir rappelé que son pays a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant et son Protocole facultatif sur les enfants en temps de conflits armés, le représentant a affirmé que la coalition internationale au Yémen s’est engagée à respecter les droits de l’enfant.  C’est pourquoi elle a signé un protocole d’accord avec le Bureau de la Représentante spéciale en vue de protéger les enfants.  Il a ensuite déploré les abus que subissent les enfants yéménites de la part des milices houthistes. 

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a expliqué que l’utilisation d’enfants soldats obéit à certains prérequis comme la pauvreté, la discrimination, les inégalités, l’exclusion, une culture politique de violence, des tensions religieuses ou encore identitaires et historiques.  Il a estimé que mettre fin à ce fléau passe donc par l’identification des causes profondes et par la construction de sociétés dans lesquelles les droits des enfants et leur dignité sont respectés. 

Le représentant a indiqué que 500 000 enfants rohingya sont réfugiés au Bangladesh depuis août 2017 en raison des violences extrêmes dans l’État rakhine.  Et pendant cet exil, ils ont vécu des souffrances et des traumatismes immenses qui mettront des années avant de se dissiper, a-t-il déploré.  Ces enfants ne savent pas quand ils pourront rentrer chez eux et s’ils ne peuvent rentrer chez eux en sécurité et dans la dignité, a-t-il alerté, alors il y aura un réel danger de voir une « génération perdue » d’enfants rohingya qui manqueront de capacités nécessaires pour leur avenir.  M. Bin Momen a invité le Myanmar à établir des conditions propices à leur retour dans l’État rakhine, tout en exhortant la communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité, à donner les orientations nécessaires à la résolution de la crise.  

M. WAEL AL KHALIL (République arabe syrienne) a dénoncé le rapport du Secrétaire général qui contiendrait, selon lui, des informations erronées.  Il s’est notamment dit étonné que les activités des forces armées syriennes soient traitées à la même enseigne que celles des forces armées turques « qui sont pourtant une force d’agression.  Il a aussi pointé la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé qui, a-t-il regretté, n’a pas cru utile de répondre à la demande du Gouvernement syrien concernant la transmission des cas de violations répertoriés sur son territoire, afin qu’ils soient avérés par les autorités syriennes.  Les lois syriennes permettent le respect et la protection des droits des enfants, a-t-il assuré.

Le représentant a ensuite affirmé que la Turquie est l’un des soutiens des groupes terroristes qui sont en activité aujourd’hui à Edleb.  Il a aussi accusé ce pays d’avoir financé certains groupes terroristes tout en menant une agression en Syrie, comme en témoignent les 10 550 soldats turcs présents en Syrie.  Face à ces faits, il a souligné que son pays a le droit de prendre les mesures qui s’imposent pour défendre son intégrité territoriale. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil de sécurité s’inquiète de la récente flambée de l’épidémie d’Ebola et de l’état de la sécurité dans les zones touchées

8590e séance – matin
CS/13908

RDC: le Conseil de sécurité s’inquiète de la récente flambée de l’épidémie d’Ebola et de l’état de la sécurité dans les zones touchées

Le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, une déclaration présidentielle par laquelle il se déclare de nouveau gravement préoccupé par la récente flambée épidémique du virus Ebola en République démocratique du Congo.

La déclaration précise que les préoccupations du Conseil portent plus particulièrement sur l’état global de la sécurité dans les zones touchées par l’épidémie d’Ebola, en particulier les attaques contre le personnel humanitaire et médical, ce qui compromet gravement l’intervention d’urgence et facilite la propagation du virus dans le pays et la région.  Le Conseil demande à tous les groupes armés de mettre immédiatement un terme aux hostilités.

Par cette déclaration, le Conseil de sécurité condamne avec la plus grande fermeté toutes les attaques et menaces visant délibérément le personnel médical et le personnel humanitaire.  Il exige aussi que le personnel humanitaire et médical « dont l’activité est d’ordre exclusivement médical » puisse se rendre en toute sécurité et sans entrave auprès des patients et des autres personnes dans le besoin,

Le Conseil souligne qu’il importe que les gouvernements et la société civile des pays touchés et des pays à risque collaborent d’urgence avec les partenaires concernés en vue de mieux se préparer à prévenir, détecter et traiter d’éventuels cas, ainsi qu’en vue de mettre en œuvre les stratégies vaccinales les meilleures et les plus efficaces pour endiguer l’épidémie.

La déclaration note de plus que la maladie pouvant se propager vite, y compris dans les pays voisins, elle pourrait avoir de graves conséquences humanitaires et nuire à la stabilité régionale.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE/EBOLA

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité se déclare de nouveau gravement préoccupé par la récente flambée épidémique du virus Ebola en République démocratique du Congo.  Il note que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que l’épidémie d’Ebola dans ce pays constituait une urgence de santé publique de portée internationale.

Le Conseil souligne la nécessité d’une action rapide contre Ebola, la maladie pouvant se propager vite, y compris dans les pays voisins, ce qui pourrait avoir de graves conséquences humanitaires et nuire à la stabilité régionale.

Le Conseil salue de nouveau les efforts déployés par le Gouvernement de la République démocratique du Congo, l’OMS et d’autres organismes des Nations Unies, la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), l’Union africaine, les organisations humanitaires, les donateurs internationaux et tous ceux apportant leur appui à l’action visant à contenir la maladie et soigner les patients atteints du virus, sachant que les conditions sont difficiles.

Le Conseil souligne qu’il faut poursuivre la coordination et la collaboration avec la République démocratique du Congo face à l’épidémie d’Ebola, ainsi qu’avec les États de la région, selon qu’il convient.

Le Conseil souligne qu’il importe que les gouvernements et la société civile des pays touchés et des pays à risque collaborent d’urgence avec les partenaires concernés en vue de mieux se préparer à prévenir, détecter et traiter d’éventuels cas, ainsi qu’en vue de mettre en œuvre les stratégies vaccinales les meilleures et les plus efficaces pour endiguer l’épidémie.  Il salue la contribution des organisations non gouvernementales concernées à la lutte contre l’épidémie et leur participation à la coordination des interventions, en appui aux autorités nationales.

Le Conseil salue les efforts déployés par le Coordonnateur des Nations Unies pour l’action d’urgence contre l’Ebola, David Gressly, afin de faciliter l’action de santé publique menée par l’OMS en appui au Gouvernement de la République démocratique du Congo et se félicite que le Secrétaire général soit déterminé à combattre et contenir l’épidémie, y compris en fournissant au Coordonnateur des ressources suffisantes.

Le Conseil se déclare de nouveau gravement préoccupé par l’état global de la sécurité dans les zones touchées par l’épidémie d’Ebola, en particulier les attaques contre le personnel humanitaire et médical dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, qui compromet gravement l’intervention d’urgence et facilite la propagation du virus en République démocratique du Congo et dans la région, et demande à tous les groupes armés de mettre immédiatement un terme aux hostilités.

Le Conseil condamne avec la plus grande fermeté toutes les attaques et menaces visant délibérément le personnel médical et le personnel humanitaire dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, y compris les meurtres de membres du personnel de santé, ainsi que les attaques contre leurs moyens de transport et leur matériel, les hôpitaux et autres installations médicales, sachant qu’il faut veiller à ce que leurs auteurs répondent de leurs actes et soient traduits en justice par les autorités compétentes.  Il rappelle à cet égard les dispositions de la résolution 2286 (2016).

Le Conseil exige que le personnel humanitaire et médical dont l’activité est d’ordre exclusivement médical puisse se rendre en toute sécurité et sans entrave auprès des patients et des autres personnes dans le besoin, et souligne que les équipes d’intervention et les installations médicales doivent être respectées et protégées et ne doivent en aucun cas être prises pour cible, conformément au droit international.

Le Conseil souligne qu’il faut adopter une approche d’ensemble ancrée localement, en gagnant la confiance de la population, surtout des personnes les plus exposées, afin d’intervenir efficacement.  Il préconise également une intervention d’ensemble s’inscrivant dans la durée, qui aille au-delà de l’épidémie actuelle et consiste à apporter un appui aux établissements de santé, à répondre aux besoins essentiels des populations touchées et à leur fournir des services de base, en République démocratique du Congo et dans la région, le but étant de prévenir toute épidémie future ou d’en réduire l’impact au minimum.

Le Conseil souligne qu’il importe que la communauté internationale renforce son appui et se mobilise davantage, notamment en versant rapidement l’intégralité des contributions financières en faveur de l’intervention et en apportant une assistance technique, une coopération scientifique et des moyens humains, le but étant de maîtriser la maladie de façon permanente.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale appelle à renforcer la coopération avec le Forum des îles du Pacifique et rend hommage au feu Président tunisien, Béji Caïd Essebsi

Soixante-treizième session,
102e séance plénière – matin
AG/12168

L’Assemblée générale appelle à renforcer la coopération avec le Forum des îles du Pacifique et rend hommage au feu Président tunisien, Béji Caïd Essebsi

L’Assemblée générale a souligné, ce matin, l’intérêt qu’il y a à accroître la coopération et la coordination entre organismes des Nations Unies et les membres du Forum des îles du Pacifique et a encouragé le Secrétaire général et les dirigeants du Forum à tenir leur prochaine réunion en septembre 2019, en marge du débat général.

Elle a, auparavant, rendu hommage au feu Président tunisien, Béji Caïd Essebsi.

En adoptant par 137 voix pour, zéro contre et 12 abstentions la résolution A/73/L.104, l’Assemblée générale a également indiqué attendre « avec intérêt » l’examen de haut niveau convoqué le 27 septembre 2019 en vue d’examiner les progrès accomplis pour répondre aux besoins prioritaires des petits États insulaires en développement grâce à la mise en œuvre des Orientations de Samoa.

Le texte a été présenté par Nauru qui, en sa qualité de Président du Forum, a expliqué que ce texte bisannuel comportait un certain nombre d’innovations « notables », dont un préambule qui souligne désormais l’importance que les membres du Forum attachent à la proclamation de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable. 

Par cette résolution, l’Assemblée générale prend également note avec satisfaction de la visite qu’a effectuée le Secrétaire général dans la région des membres du Forum des îles du Pacifique du 12 au 18 mai 2019.  Le texte évoque aussi la tenue, du 2 au 6 juin 2020, à Lisbonne, de la Conférence des Nations Unies visant à appuyer la réalisation de l’objectif de développement durable no 14: conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable.  Le texte porte également sur les activités opérationnelles des bureaux multipays, l’Assemblée générale précisant attendre avec intérêt que de nouvelles consultations inclusives soient tenues avec tous les pays concernés afin de finaliser l’examen desdits bureaux.

Nauru a toutefois regretté que cette résolution, pour la première fois de son histoire, ait été l’objet d’un vote.  « Si nous avons demandé un vote, a expliqué la Chine avant la mise aux voix, c’est parce que ses coauteurs n’ont pas souhaité nous consulter et ont présenté ce projet “controversé” à l’Assemblée sans daigner nous écouter. »  La délégation chinoise a indiqué s’être abstenue pour exprimer son insatisfaction quant à la démarche suivie et a appelé les négociateurs à davantage prendre en compte, à l’avenir, les « préoccupations légitimes » des pays de la région.

À l’issue du vote, la Fédération de Russie s’est également déclarée déçue du fait que les négociateurs aient refusé d’examiner les amendements introduits lors des consultations sur le texte et les a invités instamment à rechercher un consensus, en particulier pour les questions délicates. 

La délégation indonésienne a plus spécifiquement regretté certaines références introduites « très tard » dans le processus de négociation, et le fait « qu’un État Membre » continuerait de se mêler des affaires internes de l’Indonésie en violation des principes de la Charte.

La version finale de ce texte a en revanche été saluée par les États-Unis, qui ont jugé « normal » d’aider les pays qui se heurtent à des difficultés de développement en raison de leur situation géographique particulière, et ont appelé l’ONU à renforcer encore davantage sa coopération avec le Forum. 

En début de séance, l’Assemblée générale a observé une minute de silence à la mémoire du feu Président Béji Caïd Essebsi de la Tunisie, qui est décédé le 25 juillet dernier. 

Dans son hommage, le Secrétaire général a déclaré que le Président Caïd Essebsi était un grand homme d’État et sa disparition représente une perte immense pour toute la région.  « L’infinie tristesse qui saisit la Tunisie et se manifeste partout ailleurs témoigne du rôle crucial qu’il a joué dans l’histoire de son pays depuis l’indépendance, et en particulier ces dernières années. » 

« Le Président Caïd Essebsi restera dans les mémoires comme un personnage historique du monde arabe et africain ayant guidé son pays vers la démocratie et le plein respect des droits et libertés fondamentales de ses concitoyens et concitoyennes.  Il a fait preuve d’une grande sagesse et d’un leadership moral en choisissant le dialogue et le consensus à des moment critiques de la transition démocratique de la Tunisie. »

« Alors que la Tunisie pleure la disparition de ce pionnier, les Tunisiens peuvent être fiers du riche héritage qu’il laisse derrière lui », a confié le Secrétaire général, qui voyait en lui un partenaire indéniable des Nations Unies, « un partenaire sur lequel on pouvait compter et un allié indispensable dans la recherche de solutions aux conflits dans la région et un soutien sans faille de l’action menée par l’ONU en Libye ». 

S’exprimant au nom du Ministre des affaires étrangères tunisiennes, le représentant de la Tunisie a déclaré que de la lutte pour l’indépendance de la Tunisie, à son parcours aux côtés du Président Bourguiba et à son retour sur la scène politique en 2011, le « premier Président tunisien élu librement en 2014 », a toujours favorisé le consensus, une approche inclusive et la réconciliation des Tunisiens avec leur histoire.  Il n’a eu de cesse de rechercher la paix et la stabilité dans la région, a souligné le représentant tunisien, qui a rappelé que le processus démocratique auquel il avait contribué avait débouché, entre autres, sur l’attribution, en 2015, du prix Nobel de la paix au Quartet du dialogue national.

« Tout au long de sa vie, tout comme au moment de sa mort, il aura laissé un message d’unité.  Qu’il repose en paix et dans la certitude que la Tunisie a tracé un chemin irréversible sur la voie du progrès, de la liberté et de la démocratie. »

Les représentants des grands groupes régionaux sont également intervenus pour se faire l’écho de ces paroles d’hommage.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: face au « carnage » d’Edleb, le chef de l’humanitaire de l’ONU avertit que la déconfliction n’est plus efficace

8589e séance – matin
CS/13903

Syrie: face au « carnage » d’Edleb, le chef de l’humanitaire de l’ONU avertit que la déconfliction n’est plus efficace

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a alerté ce matin, devant le Conseil de sécurité, que la déconfliction ne s’avère pas efficace pour assurer la protection des civils dans le nord-ouest de la Syrie, dénonçant dans la foulée l’inaction de cet organe pour mettre fin à la dernière intensification des violences.

« Vous savez ce qui se passe et vous n’avez rien fait depuis 90 jours alors que le carnage se poursuit devant vos yeux », a déclaré le Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock.  « Allez-vous encore hausser les épaules? » 

Citant les chiffres publiés le 26 juillet par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, ce dernier a notamment indiqué qu’au moins 450 civils avaient été tués depuis fin avril dernier dans le nord-ouest du pays, dont plus d’une centaine rien qu’au cours des deux dernières semaines.  Des dizaines de civils ont également été tués ou blessés à la suite des bombardements menés par le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham.

Les membres du Conseil de sécurité ont également entendu la Directrice des politiques de l’ONG Physicians for Human Rights (PHR) expliquer que depuis que Damas et la Fédération de Russie ont intensifié leurs attaques à Edleb et dans le nord de Hama, le 26 avril dernier, l’ONG avait reçu des informations faisant état de 46 attaques contre des établissements de santé et avait été en mesure de confirmer 16 d’entre elles.  « Et nous comptons toujours », a lancé Mme Susannah Sirkin, qui s’est insurgée du fait que les accords conclus par les Nations Unies pour informer toutes les parties de l’emplacement des établissements de santé dans le but de les protéger ont été violés à maintes reprises. 

« Les hôpitaux, qui devraient être les lieux les plus sûrs à Edleb, sont précisément le contraire: ce sont des cibles », a-t-elle déploré, avant que plusieurs membres du Conseil de sécurité, dont le Royaume-Uni, la France et les États-Unis, ne réclament le lancement d’une enquête sur ces attaques.

M. Lowcock a de plus indiqué que son équipe et les organisations humanitaires se réuniraient prochainement pour déterminer s’il faut continuer à fournir aux parties les coordonnées liées à la déconfliction.  « Il est important de savoir si les informations fournies sont effectivement utilisées pour protéger les civils, ou au contraire pour les cibler », a-t-il notamment expliqué.

« Lorsque le régime d’Assad et la Russie ne cessent d’attaquer des hôpitaux et autres biens de caractère civil, qui ont été nombreux à communiquer à l’avance le fait qu’ils abritent des civils, il est difficile de nier que ces frappes ne sont pas un acte délibéré », a renchéri la représentante des États-Unis, tandis que le Royaume-Uni a voulu savoir pourquoi les infrastructures civiles et humanitaires qui font l’objet d’une déconfliction sont toujours visées par les frappes syriennes et russes.

La France a estimé de son côté que la restauration du cessez-le-feu à Edleb s’impose d’urgence et a de plus souligné que la lutte contre les groupes terroristes ne doit pas servir de prétexte à des bombardements indiscriminés.  Aussi a-t-elle appelé la Fédération de Russie à exercer les pressions nécessaires sur le régime syrien afin d’éviter la poursuite des violences.

Dans son intervention, le Secrétaire général adjoint a également défendu avec force la qualité des informations transmises par son bureau au Conseil de sécurité, indiquant notamment qu’il existe de nombreuses images satellitaires qui illustrent l’impact des combats des trois derniers mois, à commencer par celles qui témoignent d’un niveau de destruction digne d’une campagne de terre brûlée dans la ville de Kafr Nabutha ou la destruction presque entière de 17 villages.  « Il n’y a pas de pénurie d’informations au sujet d’Edleb.  Nous savons exactement ce qui s’y est produit au cours des trois derniers mois », a-t-il tranché.

Ces affirmations n’ont cependant pas satisfait la Fédération de Russie qui a déploré que l’ONU ait été « une fois de plus » victime de fausses informations diffusées par les groupes terroristes.  « On dit que la Russie fait exprès de bombarder des écoles et des hôpitaux, mais c’est un mensonge », s’est notamment indigné le représentant russe.  Selon lui, si la situation humanitaire à Edleb est préoccupante, c’est en raison des raids terroristes du groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham, qui utiliserait des infrastructures civiles à des fins militaires, et non pas des frappes russes et syriennes. 

Le délégué russe a en outre dénoncé une démarche de propagande des pays occidentaux dont le but est de « conserver l’enclave terroriste d’Edleb », avant de demander à la communauté internationale de ne pas « gêner les efforts russes en donnant un couvert politique aux groupes terroristes ».

Par la voix du Koweït, les porte-plume sur le dossier humanitaire, parmi lesquels figurent également la Belgique et l’Allemagne, ont par ailleurs rappelé avoir tenté, « réunion après réunion », de faire adopter des projets de déclaration sur l’escalade militaire et son impact humanitaire, mais que le Conseil n’avait pas été capable de faire front commun et d’être uni autour de ces initiatives.  « Ce Conseil ne peut rester les bras croisés et voir Edleb devenir l’une des pires catastrophes humanitaires du XXIsiècle », se sont-ils notamment impatientés.

À noter également que les États-Unis ont annoncé leur intention de demander la tenue d’un briefing consacré à question des détenus et des personnes disparues en Syrie afin de mobiliser une « action urgente ».

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a commencé par relater l’histoire du docteur Mohammed Abrash, un chirurgien exerçant à l’hôpital central d’Edleb.  En fonctions dans ce site depuis 2011, ce médecin lui a dit être habité par la peur au vu des destructions et bombardements autour de lui, y compris dans les sites médicaux.  Le Secrétaire général adjoint a également parlé du drame de trois jeunes filles qui avaient été transportées dans cet hôpital après que leur maison a été bombardée et dont une seule aura survécu. 

Selon le Secrétaire général adjoint, depuis 90 jours maintenant, les bombardements du Gouvernement syrien et de la Fédération de Russie ont produit un carnage dans la « soi-disant » zone de désescalade d’Edleb.  Il a rappelé que le 26 juillet dernier, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a indiqué qu’au moins 450 civils ont été tués depuis fin avril dernier, dont plus d’une centaine rien qu’au cours des deux dernières semaines.  Des centaines d’autres personnes ont été blessées et plus de 440 000 déplacées.  Dans le même temps, des dizaines de civils ont également été tués ou blessés à la suite des bombardements menés par le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham, et des groupes armés qui lui sont associés. 

M. Lowcock a ensuite apporté des réponses à des questions qui lui avaient été posées à huis clos par des membres du Conseil le 18 juillet dernier.  Il a notamment affirmé que les informations qu’il apporte au Conseil de sécurité viennent de sources directes et variées qui sont confirmées après des vérifications d’usage.  De même, les équipes de l’ONU sur le terrain « nous disent ce qu’elles voient », et les partenaires, avec qui l’ONU travaille parfois depuis des années, fournissent également des informations.  L’ONU utilise aussi des images satellitaires et des images géolocalisées et datées des sites médicaux.  Le Secrétaire général adjoint a aussi expliqué qu’il existe de nombreuses images satellitaires qui illustrent l’impact de combats des trois derniers mois au sud d’Edleb: la comparaison des images satellitaires prises entre avril et fin juin de la ville de Kafr Nabutha témoigne d’un niveau de destruction provoquée par une campagne de bombardements visant à établir une politique de terre brulée.  D’autres images indiquent que 17 villages ont été pratiquement entièrement détruits et vidés de leurs habitants.

Des informations proviennent également des organisations humanitaires et de leurs partenaires, a-t-il ajouté, faisant observer que celles-ci sont appelées par les États Membres qui les financent à leur fournir des informations sur leurs dépenses.  Et certains d’entre vous, a-t-il poursuivi, employez même des organes indépendants chargés de vérifier la véracité de leurs dires.

Il y a également le témoignage des populations d’Edleb elles-mêmes, a-t-il ajouté, indiquant qu’il avait eu une conversation vidéo, hier, avec des personnes déplacées qui lui avaient dit qu’elles sont « bombardées tous les jours par les Russes et le régime ». 

M. Lowcock a ensuite reconnu que les membres du groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham rendent la vie quotidienne difficile à Edleb, tout en indiquant que selon les estimations, pour chaque combattant du groupe, on compte 100 civils. 

« Il n’y a pas de pénurie d’informations au sujet d’Edleb.  Nous savons exactement ce qui s’y est produit au cours des trois derniers mois », a-t-il affirmé.

Au sujet des zones de déconfliction, M. Lowcock a dit avoir transmis à la Fédération de Russie, à la Turquie et à la coalition internationale des informations sur les sites abritant les civils et les mouvements humanitaires.  Il a jugé important de savoir si ces informations fournies sont effectivement utilisées pour protéger les civils, ou au contraire pour les cibler.  Il a dit avoir reçu des réponses des autorités turques au sujet de six attaques liées à des lieux ou mouvements de déconfliction, mais que son Bureau attend toujours la réaction de la partie russe.  Il a ensuite affirmé que dans le contexte actuel, la déconfliction ne s’avère pas efficace pour protéger ceux qui utilisent le système.  Son équipe et les organisations humanitaires se réuniront prochainement pour déterminer s’il faut fournir aux parties des information liées à la déconfliction.

Enchaînant, M. Lowcock a dit avoir pris connaissance de la lettre des autorités syriennes en date du 16 juillet, et dans laquelle ces dernières affirment que 119 hôpitaux de la province d’Edleb ont été réquisitionnés par les terroristes et ne peuvent donc plus être considérés comme des centres de soins ou des infrastructures civiles.  M. Lowcock a relevé que plusieurs desdits sites n’ont pas été nommés.  Pour ceux qui l’ont été, il a indiqué que l’hôpital de Maarret el-Nouman fonctionne bien depuis décembre 2014 avec l’aide de l’ONU, tandis que les sous-sols de l’hôpital d’Ibn Sina ont pu être réhabilités avec des fonds onusiens et sont opérationnels depuis le mois d’avril de cette année.  Quant aux affirmations des autorités syriennes qu’il n’y a plus de système d’ambulances à Edleb, M. Lowcock a rappelé que des images de ces derniers jours laissent voir des ambulances à l’œuvre. 

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a ensuite affirmé que les informations pertinentes dont dispose l’ONU seront transmises au Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables, afin que les responsables de tels actes en répondent et à condition que les sources d’information soient d’accord.

Poursuivant son intervention, le Coordonnateur des secours d’urgence a fait savoir qu’entre janvier et mai de cette année, six millions de personnes en Syrie ont reçu une aide humanitaire.  Il a précisé que 2,9 millions sont atteintes en moyenne chaque mois et que 85% de l’aide atteint des zones où les besoins sont sévères.  Notant que certains rapports prétendent que l’aide humanitaire ne parvient qu’aux zones qui ne sont pas sous le contrôle du Gouvernement, il a répondu que cela n’est pas véridique étant donné que la plupart des gens recevant de l’aide sont dans des zones contrôlées par le Gouvernement.  Il s’est en revanche dit préoccupé par le sort de 24 000 personnes qui demeurent dans le camp de Roukban et a réclamé un accès pour que l’ONU puisse leur venir en aide.

Dans le nord-est de la Syrie, a-t-il enchaîné, 734 000 personnes obtiennent une aide sur une base mensuelle, y compris 70 000 civils se trouvant dans le camp de Hol où trois hôpitaux de campagne ont été ouverts le mois dernier.  M. Lowcock a cependant avoué demeurer extrêmement préoccupé par le sort des personnes qui y vivent et a appelé les États Membres à rapatrier leurs ressortissants et à prendre toutes les mesures pour éviter des situations d’apatridie. 

De même, les agences humanitaires ont renforcé leurs opérations transfrontières, notamment en faveur de ceux ayant fui le nord d’Edleb, permettant d’atteindre 1,2 million de personnes.  En ce moment, a-t-il noté, cette aide transfrontière est le seul moyen d’apporter de l’assistance à trois millions de civils de la région. 

Enfin, M. Lowcock a déploré que le Conseil de sécurité ait ignoré les appels à l’aide lancés précédemment par les populations syriennes.  « Vous savez ce qui se passe et vous n’avez rien fait depuis 90 jours alors que le carnage se poursuit devant vos yeux », s’est-il indigné.  « Allez-vous encore hausser les épaules?  Ou allez-vous entendre les enfants d’Edleb et faire quelque chose? » 

Depuis le début du conflit en Syrie, les attaques contre des établissements de santé et leur personnel constituent une « stratégie de guerre délibérée, inhumaine et illégale », a condamné Mme SUSANNAH SIRKIN, Directrice des politiques au sein de Physicians for Human Rights (PHR), une organisation non gouvernementale (ONG) dont les experts scientifiques et médicaux vérifient, documentent et signalent les violations des droits de l’homme sur le territoire syrien depuis huit ans.  Lorsque des hôpitaux sont pris pour cible, les pertes enregistrées vont bien au-delà des simples bâtiments détruits, a souligné Mme Sirkin.  De même, lorsque des travailleurs médicaux sont assassinés, le bilan humain s’étend au nombre exponentiel des malades qui meurent par la suite en raison de l’absence d’accès à un traitement médical. 

Selon Mme Sirkin, les travaux « méticuleux » effectués par PHR depuis le début du conflit syrien font apparaître un « mépris flagrant pour la vie civile », comme en témoignent, a-t-elle estimé, les attaques répétées du Gouvernement syrien contre des établissements et du personnel de santé depuis 2011.  Ainsi, de mars 2011 à juillet 2019, son ONG a corroboré 578 attaques contre 350 établissements distincts et documenté le meurtre de 890 membres du personnel médical.  D’après Mme Sirkin, sur ces 578 attaques, 521 ont été perpétrées par Damas et ses alliés, soit 91%.  « Chacune de ces attaques contre un établissement de santé en activité constitue un crime de guerre », a souligné Mme Sirkin.  Si on les considère dans leur ensemble, ces agressions constituent des crimes contre l’humanité, a-t-elle ajouté, dénonçant la « destruction généralisée et systématique » d’établissements de santé et l’assassinat de centaines de médecins, infirmiers, pharmaciens et ambulanciers par le Gouvernement syrien et ses alliés russes, avec pour seul objectif de « briser le moral des gens ». 

Au fil des ans, le Secrétaire général a régulièrement partagé ces chiffres avec le Conseil de sécurité, a rappelé Mme Sirkin.  « Pourtant, ces crimes continuent d’être perpétrés en toute impunité », s’est-elle étonnée.  À Alep, PHR a ainsi recensé 161 attaques contre des établissements de santé, dont 54 en 2016, a-t-elle indiqué, précisant que ces attaques avaient également contraint des dizaines de milliers de civils à fuir.  « Trois ans plus tard, le monde observe en silence la même escalade de la violence à Edleb et dans le nord-ouest de la Syrie », a déploré Mme Sirkin, mettant le Conseil en garde contre ce qui risque de devenir la « pire crise humanitaire du XXIe siècle ».  Depuis que Damas et la Fédération de Russie ont intensifié leurs attaques à Edleb et dans le nord de Hama, le 26 avril dernier, PHR a ainsi reçu des informations faisant état de 46 attaques contre des établissements de santé, a-t-elle indiqué.  « À ce jour, en utilisant notre méthodologie rigoureuse, nous en avons confirmé 16 et nous comptons toujours », a précisé Mme Sirkin, ajoutant que 1,3 million de personnes déplacées étaient à l’heure actuelle prises au piège dans cette zone « soi-disant démilitarisée ». 

De plus, les accords conclus par les Nations Unies pour informer toutes les parties de l’emplacement des établissements de santé dans le but de les protéger ont été violés à maintes reprises, s’est insurgée Mme Sirkin.  « Les Gouvernements syrien et russe connaissent l’emplacement exact de la plupart des établissements de santé et continuent néanmoins de les prendre pour cible », a-t-elle accusé.  Dans ces conditions, Mme Sirkin a salué le courage du personnel médical, qui continue de fournir des soins salvateurs aux patients tout en essuyant des bombardements.  « Les hôpitaux, qui devraient être les lieux les plus sûrs à Edleb, sont précisément le contraire: ce sont des cibles », a-t-elle déploré.  Elle a ensuite précisé qu’« au moins » 14 centres de soins avaient essuyé des frappes en dépit du fait qu’ils avaient transmis leurs coordonnées aux parties belligérantes à travers le mécanisme de déconfliction d’OCHA. 

« Votre inaction collective actuelle est une dérogation claire à votre responsabilité de protéger », a par ailleurs regretté Mme Sirkin, estimant que les civils syriens avaient été abandonnés par le Conseil et les gouvernements qui auraient pu mettre fin au carnage.  Mme Sirkin a appelé la Syrie et la Russie à mettre immédiatement fin aux attaques contre les hôpitaux et autres infrastructures civiles vitales en Syrie.  Elle a également exhorté le Secrétaire général à ouvrir immédiatement une enquête sur ces attaques à Edleb, dans le nord de Hama et à l’ouest d’Alep.  « Nous vous appelons à faire tout votre possible pour mettre fin au massacre et protéger les civils pris au piège en Syrie », a enfin déclaré Mme Sirkin, estimant que « l’incapacité persistante » du Conseil à mettre un terme à l’impunité pour ces crimes nuisait fortement à sa crédibilité.  Elle a ensuite rendu hommage aux professionnels de la santé syriens.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït), qui s’exprimait au nom des porte-plume sur le dossier de l’humanitaire en Syrie qui sont la Belgique, l’Allemagne et le Koweït, a déploré les « horreurs » auxquelles les civils syriens ont à faire face dans le nord-ouest syrien, une région qui subit une campagne militaire depuis les trois derniers mois.  Plus d’enfants ont trouvé la mort ces quatre derniers mois que pendant toute l’année 2018 selon certains rapports, s’est-il indigné, et des centaines de civils sont morts.

Des hôpitaux, des écoles et des marchés ont été délibérément visés et détruits par des frappes aériennes, alors même que beaucoup de ces infrastructures civiles avaient fait l’objet d’une « déconfliction ».  C’est juste inacceptable, a-t-il tranché en condamnant ces frappes.  Il a appelé l’ensemble des parties à prendre des mesures pour protéger les civils et les infrastructures civiles et humanitaires, conformément au droit international humanitaire.  Les porte-plume s’attendent aussi à ce qu’elles respectent les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Ils ont souligné que la lutte contre les groupes terroristes ne les dégage pas de leurs obligations en vertu du droit international humanitaire. 

Le représentant a également de nouveau appelé à la pleine mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu conclu dans le cadre du mémorandum d’accord russo-turc de septembre 2018.  Il n’existe pas de solution militaire au conflit syrien, a affirmé M. Alotaibi, en ajoutant que les porte-plume sont d’avis que le Conseil de sécurité a une responsabilité envers les Syriens, en particulier ceux qui vivent à Edleb, et appellent à la protection des civils qui vivent dans cette région.  C’est pourquoi, réunion après réunion, ils ont essayé de faire adopter des projets de déclaration sur l’escalade militaire et son impact humanitaire, a rappelé le représentant.  Mais, a-t-il regretté, le Conseil n’a pas été capable de faire front commun et d’être uni autour de ces initiatives.  Le délégué s’est demandé si l’inaction du Conseil est partiellement responsable du triplement du nombre de personnes déplacées du nord-ouest syrien, qui dépasse 440 000 personnes aujourd’hui.  « Ce Conseil ne peut rester les bras croisés et voir Edleb devenir l’une des pires catastrophes humanitaires du XXIsiècle », s’est impatienté le représentant.

Le délégué a également relevé que la situation dans le camp de Roukban est catastrophique et a estimé que ses habitants doivent pouvoir quitter le camp de manière volontaire, sûre et digne.  Pour ce qui est du retour des réfugiés, il a indiqué que la position des porte-plume reste inchangée, à savoir qu’ils doivent pouvoir rentrer chez eux de manière sûre, digne et volontaire.  Ils exigent en outre un accès humanitaire sans entrave, inconditionnel, sûr et durable.

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a condamné dans les termes les plus forts l’escalade des opérations militaires menées par le régime d’Assad et la Russie dans le nord-ouest de la Syrie, notant également que la situation humanitaire s’aggrave de jour en jour.  « La sombre réalité qui prévaut sur le terrain devrait pousser chacun de nous a mettre immédiatement un terme à cette violence », a-t-elle affirmé.  Plus de 440 000 personnes ont déjà été déplacées depuis le début de l’offensive au mois d’avril et la sombre réalité est que les plus de 3,5 millions de personnes qui se trouvent dans la province d’Edleb n’ont nulle part où aller pour échapper à la prochaine frappe, un fait, a-t-elle affirmé, dont le régime d’Assad et l’armée de l’air russe ont pleinement conscience.  Elle a aussi dénoncé les informations transmises le 22 juillet indiquant qu’un marché de la ville de Maarret el-Nouman avait été pris pour cible par le régime d’Assad et l’armée de l’air russe, tuant au moins 35 personnes.

« Lorsque le régime d’Assad et la Russie ne cessent d’attaquer des hôpitaux et autres biens de caractère civil, qui ont été nombreux à communiquer à l’avance le fait qu’ils abritent des civils, il est difficile de nier que ces frappes ne sont pas un acte délibéré », a affirmé la représentante.  Mme Norman-Chalet a aussi déclaré que les États-Unis ne failliront pas dans leur appui au travail courageux des Casques blancs et des travailleurs médicaux et humanitaires.  Ces derniers ne sont pas des terroristes et méritent notre protection, a-t-elle souligné.

La déléguée a ensuite exhorté le régime d’Assad et ses alliés à revenir immédiatement au cessez-le-feu et à assurer un accès sans entrave à l’aide pour répondre au « désastre » humanitaire provoqué par les frappes aériennes.  Elle a aussi appuyé le lancement d’une enquête sur les attaques contre les centres de soins dans le nord-ouest de la Syrie et a encouragé les agences humanitaires à fournir les informations dont elles disposent à ce sujet à la Commission d’enquête et au Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.  Elle a également engagé les membres du Conseil de sécurité à veiller à ce que l’ONU dispose de la marge de manœuvre nécessaire pour assurer les livraisons d’aide transfrontières par tous les points de passage agréés.

Tournant son attention sur le camp de Roukban, la représentante américaine a dénoncé le fait que les 24 000 personnes qui y demeurent se voient systématiquement nier l’accès à l’aide en raison des délais bureaucratiques imposés par le régime syrien et la Russie.  Elle a exhorté la Russie à expédier et obtenir toutes les autorisations du régime pour permettre à une équipe d’évaluation et à un convoi de l’ONU de s’y rendre immédiatement.  Elle a ensuite signalé que nombre des personnes qui demeurent à Roukban choisissent de rester dans « les conditions humanitaires les plus difficiles » car elles ne peuvent pas couvrir leurs propres frais de transport ou parce qu’elles ne veulent pas retourner dans des zones contrôlées par le régime par peur de représailles, entre autres.

Mme Norman-Chalet s’est aussi préoccupée du problème des détentions arbitraires et a insisté sur l’impératif politique et humanitaire d’améliorer la transparence et l’accès au régime carcéral et d’obtenir la libération des Syriens détenus arbitrairement.  Les États-Unis comptent d’ailleurs demander la tenue, au cours des prochaines semaines, d’un briefing consacré à question des détenus et des personnes disparues en Syrie, afin de mobiliser une action urgente pour répondre à cette question.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a dit ressentir de la frustration à se retrouver à entendre, mois après mois, des comptes rendus affligeants de l’escalade des tensions à Edleb et ses environs sans pouvoir agir.  Elle a ensuite affirmé que la responsabilité de l’inaction du Conseil incombe à trois États Membres.

Elle a dénoncé les multiples atteintes au droit international, en exigeant que les auteurs de ces crimes aient à rendre des comptes.  « L’univers tendra vers la justice », a-t-elle affirmé, avertissant les responsables des crimes commis dans le nord-ouest syrien qu’ils ne resteront pas impunis.  Elle a demandé aux parties, la Syrie et la Russie, ce qu’elles font pour protéger les civils et comment leurs forces établissent un distinguo entre terroristes et civils sur le terrain.  Elle leur a également demandé quelle partie du droit international humanitaire autorise des attaques contre des civils au nom de la lutte antiterroriste, expliquant n’avoir trouvé aucune mention de cela dans les conventions internationales.

Mme Pierce a aussi voulu savoir ce que disent les doctrines syrienne et russe sur les règles d’engagement et la notion de la proportionnalité.  Pourquoi le mécanisme de déconfliction ne fonctionne-t-il pas et pourquoi les infrastructures civiles et humanitaires qui font l’objet d’une déconfliction sont toujours visées par leurs frappes? a-t-elle demandé.

Elle a ensuite appelé l’ONU à mener une enquête transparente et crédible sur les frappes qui ont visé des infrastructures civiles et humanitaires à Edleb. 

Poursuivant, la déléguée a rappelé que si un hôpital est utilisé comme cible militaire, les conventions de Genève stipulent qu’une alerte doit être donnée au préalable.  Or, cela n’a pas été le cas en Syrie, ce qui fait de ces attaques un crime de guerre, a–t-elle poursuivi.  Elle a ensuite insisté sur l’impératif d’un processus politique durable en Syrie, soulignant que l’aide à la reconstruction en dépend.

Rappelant, enfin, que la Charte des Nations Unies stipule qu’il faut agir pour préserver les générations futures du fléau de la guerre, elle s’est adressée à ses homologues russe et chinois pour leur demander quelle partie de cette phrase n’est pas claire.

M. WU HAITAO (Chine) a appelé la communauté internationale à travailler ensemble pour trouver une solution à la crise syrienne.  Il a estimé qu’au vu de la situation complexe à Edleb, les parties doivent dialoguer pour arriver à un consensus.  Il a aussi dit soutenir la Fédération de Russie et la Turquie dans la mise en œuvre des accords sur les zones de désescalade.  Il a ensuite invité l’ONU et ses partenaires à poursuivre leur appui humanitaire en Syrie, y compris dans des camps de déplacés.  Au sujet du camp de Roukban notamment, il a demandé une réponse appropriée à la situation qui y prévaut, relevant que la plupart des gens qui s’y trouvent veulent rentrer chez eux et appelant la communauté internationale à les aider dans ce sens.

Poursuivant, le délégué chinois a relevé que le Gouvernement syrien élimine activement les engins non explosés et réhabilite les régions libérées et a estimé que ces efforts doivent être reconnus.  De ce fait, les sanctions économiques contre ce pays sont contreproductives, a-t-il jugé.  De même, l’aide apportée en Syrie doit se faire dans le respect de la souveraineté du pays et dans le respect des principes universels en la matière.  Enfin, sur le plan politique, la Chine a dit appuyer l’ONU comme médiateur pour chercher une solution tenant compte des préoccupations de toutes les parties. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a rappelé que 400 personnes avaient trouvé la mort à Edleb, Hama et Alep depuis le mois d’avril, dont 33 enfants au cours du seul mois écoulé.  « Ils ont tous été surpris par la mort alors qu’ils se trouvaient chez eux, à l’école, à l’hôpital, dans un camp pour personnes déplacées ou sur un marché », a déploré le représentant, précisant en outre qu’environ 40 attaques contre des établissements de santé avaient été enregistrées au cours des trois derniers mois, soit une attaque tous les deux jours et demi.

Le représentant a appelé les membres du Conseil à agir pour mettre fin à cette situation.  « Nous ne devons pas être les témoins silencieux de ce que certains semblent considérer comme un “chapitre supplémentaire” dans l’histoire de la Syrie », a-t-il insisté, appelant à une cessation immédiate des attaques contre les civils à Edleb et dans le reste du pays.

Le représentant a appelé à entamer un processus politique « ouvert, crédible et durable » pour tous les Syriens, sous l’égide de l’ONU et sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil.  Des progrès sur la question de la libération des personnes détenues et de la localisation des personnes disparues s’imposent également, a-t-il estimé.

Pour M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), le constat dressé par les deux intervenants est sans appel: c’est une catastrophe humanitaire qui se joue dans le nord-ouest syrien.  Les vies de plus de trois millions de civils, dont un million d’enfants, sont en jeu.  Au-delà de la réponse à l’urgence, nous devons plus que jamais concentrer nos efforts sur trois priorités, a demandé le représentant, à savoir la restauration du cessez-le-feu à Edleb, le respect du droit international humanitaire, et la recherche d’une solution politique durable.

La France condamne avec la plus grande fermeté les frappes qui continuent à viser de manière indiscriminée les civils et les infrastructures civiles et humanitaires et appelle les signataires de l’accord de cessez-le-feu, la Russie et la Turquie, à tenir leurs engagements et à assurer sa mise en œuvre effective dans le nord-ouest en vue d’un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  La Russie doit exercer les pressions nécessaires sur le régime syrien afin d’éviter la poursuite des violences, a exigé le représentant, en soulignant que la lutte contre les groupes terroristes ne doit pas servir de prétexte à des bombardements indiscriminés.  La France se tient prête à réagir en cas de nouvel usage avéré d’armes chimiques, a-t-il mis en garde.

Les parties au conflit doivent prendre leurs responsabilités pour protéger les populations civiles, a poursuivi M. de Rivière, en notant que le ciblage délibéré d’infrastructures civiles et humanitaires, comme des hôpitaux et des écoles, est une violation inacceptable du droit international humanitaire.  La France appelle les Nations Unies à mener une enquête sur ces incidents.  Elle exige en outre un accès humanitaire immédiat, sûr, complet, durable et sans entrave à l’ensemble du territoire syrien.  C’est la responsabilité en première ligne du régime syrien, a-t-il souligné, avant d’insister sur l’urgence d’un nouveau convoi humanitaire pour le camp de Roukban.

Pour ce qui est de la relance d’un processus politique durable, la France soutient pleinement les efforts de l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pederson.  Le représentant a estimé qu’il appartient à l’Envoyé spécial, « et à lui seul », d’annoncer la formation du comité constitutionnel et de le réunir à Genève.  Il a également appelé à préparer dès maintenant la tenue d’élections libres et transparentes, sous la supervision des Nations Unies et auxquelles l’ensemble des Syriens, y compris les réfugiés, participeront.

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a appelé les parties au conflit à la cessation immédiate des hostilités et au strict respect du droit international humanitaire.  Il les a aussi invitées à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les populations et les infrastructures civiles.  Au regard de l’acuité de la situation des réfugiés et des personnes déplacées internes, il a lancé un appel pressant aux partenaires internationaux à tenir leurs promesses de financement faites lors de la troisième Conférence de Bruxelles sur l’avenir de la Syrie et la région, relevant que seuls 23% des 3,3 milliards de dollars nécessaires pour porter assistance à plus de 11 millions de Syriens ont été réunis à ce jour.  Le représentant a également souligné que les réponses aux besoins des populations en détresse doivent s’accompagner d’une intensification des efforts visant à obtenir un cessez-le-feu immédiat, indispensable à l’acheminement sécurisé de l’aide humanitaire, entre autres.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a appelé les parties en conflit en Syrie à respecter le droit international humanitaire et à protéger les civils.  « Trop c’est trop », a-t-il martelé, demandant que prenne fin la souffrance des populations dans le nord-ouest de la Syrie.  Selon le représentant, des discours au Conseil de sécurité ne suffisent pas à décrire la souffrance des civils, notamment des femmes et des enfants qui représentent 76% de la population du nord-ouest du pays. 

Le représentant a aussi déploré le fait que malgré la transmission des coordonnées des hôpitaux dans le cadre du mécanisme de déconfliction, ces sites continuent d’être ciblés.  Il s’est également inquiété de la situation déplorable dans les camps de Hol et de Roukban.  L’Indonésie appelle à l’unité du Conseil de sécurité, notamment en vue de la protection des vies de la population et demande que la question ne soit pas politisée et que le dialogue et la coordination prévalent au sein du Conseil.  Le délégué a également rendu hommage aux humanitaires qui ont perdu la vie sur le terrain en Syrie. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a fait observer que les exposés de M. Mark Lowcock sur le Yémen et la Libye sont « très différents » de ceux qu’il fait sur la Syrie.  Face aux invectives prononcées contre la Syrie et la Russie, il est revenu sur les propos de sa collègue britannique qui, a-t-il affirmé, a accusé la Russie de se moquer du Conseil de sécurité, pour ensuite renvoyer cette accusation à ceux qui s’en prennent à la Russie dans le contexte syrien.  Il y a vu une démarche de propagande des pays occidentaux, affirmant que « l’objectif de mes collègues occidentaux est de conserver l’enclave terroriste d’Edleb ».

M. Nebenzia a ensuite indiqué que la situation humanitaire en Syrie avait fait l’objet, hier à Moscou, d’un briefing du Ministère de la défense russe auquel les États membres du Conseil avaient été conviés.  Résumant les conclusions de ce briefing, le délégué russe a reconnu que la situation humanitaire à Edleb est préoccupante mais en raison des raids terroristes et non pas des frappes russes et syriennes.  Il a affirmé qu’il existe un afflux d’armes vers les terroristes et a relevé que M. Mark Lowcock avait « oublié » de mentionner combien de civils ont été tués suite à des frappes terroristes. 

S’agissant des frappes contre les centres de soins, il a fait observer qu’avant l’escalade de la situation, il n’existait qu’une douzaine d’hôpitaux en Syrie, et a noté que dans son intervention, Mme Susannah Sirkin, de l’ONG Physicians for Human Rights, n’avait fait état que de 16 cas d’attaques confirmées contre ces centres.  Cela représente à peine le tiers du nombre d’incidents dont il est question, a-t-il relevé.  Il a également affirmé que le marché qui aurait été visé par des frappes russes et syriennes n’avait pas fait l’objet de frappes, comme le confirment les images de drones russes du 25 juillet.  Il a regretté que les Nations Unies aient, « une fois de plus », été victimes de fausses informations diffusées par les groupes terroristes.  Ces « infox » sont reprises par l’ONU et les médias occidentaux, a regretté le représentant, avant d’appeler l’ONU à ne pas divulguer des informations non vérifiées.

« On dit que la Russie fait exprès de bombarder des écoles et des hôpitaux, mais c’est un mensonge », s’est indigné le représentant.  S’agissant du principe de distinction, il a rappelé que lorsque la coalition a rayé de la carte des villes comme Raqqa, ce principe n’a jamais été évoqué.  Face à ce deux poids, deux mesures, il a martelé que le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham, qui opère à Edleb, utilise des infrastructures civiles à des fins militaires et des civils comme boucliers humains.  Cela va à l’encontre de la souveraineté territoriale syrienne, a tranché le représentant. 

Se penchant ensuite sur le camp de Roukban, M. Nebenzia a noté que la situation y reste difficile, précisant que la Russie continue de coopérer avec l’ONU et la Croix-Rouge dans ce contexte.  Il s’est ensuite alarmé de la situation « catastrophique » qui prévaut dans le camp de Hol.  Rappelant que les forces d’occupation sont responsables des populations vivant dans les zones occupées, il s’est demandé pourquoi les États-Unis n’apportent pas d’aide au camp de Roukban.

En conclusion, le délégué russe a réitéré que la Russie continuera à faire son possible pour parvenir à la paix et à une solution politique en Syrie.  Elle continuera à travailler avec la Turquie dans le cadre du mémorandum d’accord de septembre 2018 et demande à la communauté internationale de ne pas « gêner ses efforts en donnant un couvert politique aux groupes terroristes ».

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a exigé que les opérations militaires soient menées dans le respect du droit international et du droit international humanitaire.  Selon elle, la protection des civils n’est pas un choix, mais bien une obligation légale qui incombe à toutes les parties au conflit.  Et ceux qui ne respectent pas ce principe doivent en rendre compte.  Mme Wronecka a estimé que la lutte contre les groupes terroristes ne peut justifier des violations du droit international, soulignant qu’attaquer des sites médicaux est une violation flagrante de ce droit.  Elle a plaidé pour que la zone de désescalade d’Edleb soit respectée afin d’éviter une catastrophe humanitaire. 

La représentante a également tiré la sonnette d’alarme devant l’état piteux des installations hospitalières en Syrie, relevant que celles qui fonctionnent encore sont mal équipées et ne peuvent apporter des soins aux blessés, et encore moins aux personnes handicapées.  Elle a enfin appelé à fournir une assistance humanitaire aux populations déplacées des camps de Hol et de Roukban. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a dénoncé les « statistiques alarmantes » découlant du conflit syrien, ce « cauchemar » qui augmente au même rythme que les défis humanitaires auxquels il donne naissance.  Il s’est dit particulièrement troublé par la montée des violences ces dernières semaines dans les zones de désescalade qui avaient été créées dans le cadre du processus d’Astana, signe pour lui de la « profonde volatilité » à laquelle le pays est en proie.  À Edleb, a rappelé le représentant, 450 personnes ont trouvé la mort dans les combats au cours des trois derniers mois seulement et plus 440 000 ont été contraintes de fuir leur foyer.  « Pour ceux qui connaissent Venise, en Italie, cela reviendrait à vider deux fois la ville », a-t-il indiqué, à titre de comparaison. 

Partout des voix s’élèvent pour dénoncer « l’échec de la diplomatie et des nations les plus puissantes », a souligné le représentant, précisant que de nombreux citoyens à travers le monde en venaient même à remettre en cause le travail, voire l’existence des organisations internationales et de leurs organes décisionnels, à l’instar du Conseil de sécurité.  Le représentant a lancé un appel à l’action et à la fin de « l’indifférence internationale ».  Il a également appelé les parties à cesser leurs attaques contre des civils et infrastructures civiles, en particulier les établissements de santé.  Enfin, le représentant a espéré que les prochaines réunions des garants du processus d’Astana, prévues les 1er et 2 août prochains à Nour-Soultan, puissent se traduire par une diminution de l’escalade actuelle des combats et raviver le cessez-le-feu conclu en septembre 2018. 

Mme KGAUGELO THERMINA MOGASHOA (Afrique du Sud) s’est dite profondément préoccupée par la situation humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie où des frappes aériennes ont visé des marchés et des zones résidentielles, faisant des victimes civiles, notamment parmi les femmes et les enfants qui représentent 76% de la population locale.  Elle a également dénoncé la destruction d’infrastructures civiles, depuis début avril, citant 37 incidents ayant visé des centres médicaux et 47 ayant pris pour cible des écoles et des centres d’assainissement d’eau.  Cette escalade des tensions a également entraîné des déplacements massifs de personnes, a remarqué la représentante.

L’Afrique du Sud condamne en outre les attaques visant le personnel humanitaire et juge impératif que les signataires du mémorandum de cessez-le-feu de septembre 2018 s’engagent à le respecter, a poursuivi la représentante.  Tout en reconnaissant la menace terroriste, elle a demandé à ce que les parties veillent à ne pas lutter contre ce fléau au détriment de la population civile et a souligné que cette lutte doit s’inscrire dans les paramètres fixés par le droit international.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a noté avec préoccupation l’intensification de la violence sur le territoire syrien et la détérioration grave de la situation humanitaire qui en découle.  Le nord-ouest du pays continue de faire l’objet de toutes les attentions, du fait de la densité de sa population, de son climat sécuritaire très volatile et des risques accrus liés au contrôle étendu qu’exercent les groupes terroristes sur la région, a-t-il précisé.  Le représentant a ainsi noté combien les principes fondamentaux du droit international humanitaire et des droits de l’homme étaient bafoués dans cette zone, où les raids aériens ne faisant pas la distinction entre civils et combattants continuent d’augmenter.  Les attaques contre des écoles, des établissements de santé et des installations d’alimentation en eau potable sont également en hausse, a déploré le représentant, et ce, malgré le fait que les coordonnées géographiques de plusieurs de ces infrastructures civiles aient été communiquées aux autorités syriennes. 

Ces actes constituent des violations flagrantes du droit international et des crimes de guerre, a-t-il estimé, appelant à ouvrir des enquêtes pour identifier et punir leurs auteurs.  Les pays bénéficiant d’une influence sur les parties peuvent et doivent faire davantage pour promouvoir une solution politique au conflit sur la base de la résolution 2254 (2015) et du Communiqué de Genève, a en outre estimé le représentant, appelant notamment à préserver l’accord conclu en septembre 2018 entre la Turquie et la Fédération de Russie.  Dans l’intervalle, le représentant a appelé à augmenter les efforts humanitaires dans l’ensemble de la Syrie, et non pas seulement dans le nord-ouest du pays.  Il a également appelé les autorités syriennes à autoriser l’ONU à mener une évaluation complète des conditions de vie dans le camp de Roukban. 

Mme SIRKIN, de Physicians for Human Rights, a repris la parole pour préciser que contrairement aux dires de la délégation russe, elle n’avait pas confirmé que le tiers des allégations d’attaques avait effectivement eu lieu.  Elle a expliqué que le chiffre de 16 attaques confirmées à ce jour tient du fait que le processus de confirmation est en cours et se fait de manière minutieuse.

 

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Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour la Libye esquisse un plan pour éviter une « guerre civile totale »

8588e séance – matin
CS/13902

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour la Libye esquisse un plan pour éviter une « guerre civile totale »

Alors que les combats pour le contrôle de la capitale libyenne font rage et menacent de s’étendre à l’ensemble du pays, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Ghassan Salamé, a proposé, ce matin, au Conseil de sécurité, trois mesures qui permettraient selon lui d’éviter que le pays ne sombre dans une « guerre civile totale », à savoir l’instauration d’une trêve humanitaire à l’occasion de l’Eïd al-Adha, aux alentours du 10 août, la convocation d’une conférence internationale sur la question et la tenue d’une réunion interlibyenne de représentants issus de toutes les régions du pays.

« Le conflit armé en Libye ne montre aucun signe de ralentissement », a déploré M. Salamé, également Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), qui s’exprimait par visioconférence depuis Tripoli.  Selon lui, en effet, ni le Gouvernement d’entente nationale, basé dans la capitale, ni l’Armée nationale libyenne (ANL) du général Khalifa Belqasim Haftar ne semblent vouloir entamer des pourparlers.  À l’inverse, le conflit, initialement cantonné à Tripoli et à ses alentours, s’est étendu à l’est de la capitale et dans le centre du pays, où les deux parties intensifient leurs raids aériens, a noté M. Salamé.

À ses yeux, cette recrudescence des attaques aériennes est alimentée par le transfert continu d’armes aux parties depuis l’étranger, avec la « complicité, voire l’appui clair », de certains gouvernements, en violation de l’embargo sur les armes.  Au point que la Libye est en train de devenir une zone de recyclage d’anciennes armes et un site d’expérimentation de nouveaux équipements, a mis en garde M. Salamé.  « Plus que jamais les Libyens combattent les guerres d’autres pays, qui semblent satisfaits de régler leurs différends au détriment de la population du pays », a-t-il déploré.  

Parallèlement, le vide sécuritaire causé par les combats à Tripoli et dans les alentours est exploité par Daech dans le sud et le centre du pays, a noté M. Salamé, ajoutant que certaines armes livrées par des appuis étrangers tombent aux mains des groupes terroristes ou leur sont vendues et que certains extrémistes tentaient même de se refaire une légitimité en rejoignant les combats.  « C’est une recette catastrophique », s’est alarmé le haut fonctionnaire, appelant les parties à agir avant que le pays ne devienne un « sanctuaire pour les organisations terroristes ». 

M. Salamé a aussi indiqué que le pétrole, dont la production est mise en péril en raison des problèmes d’approvisionnement en eau et en électricité, risque de devenir une arme de guerre, ce qui aurait également, selon lui, des conséquences désastreuses.

De son côté, la Libye a dénoncé le silence du Conseil de sécurité devant les atrocités commises sur son territoire et les cas avérés d’ingérence dans les affaires intérieures libyennes, l’appelant notamment à condamner les pays qui soutiennent le général Haftar. 

« Si le Conseil avait pris des mesures fortes, l’attaque de Tripoli ne se serait jamais produite », a martelé le représentant de la Libye, qui a par ailleurs indiqué que les forces du Gouvernement d’entente nationale combattent les groupes terroristes en s’appuyant sur des partenariats stratégiques, notamment avec les États-Unis.

La délégation libyenne a également appelé l’ONU à appuyer la proposition du Gouvernement d’entente nationale d’organiser un large rassemblement national, afin d’adopter des lois électorales pour organiser des élections dans le pays d’ici à la fin de l’année. 

Les États-Unis ont appelé à un retour rapide à un processus politique, sous médiation de l’ONU, tandis que la France a engagé les parties à s’accorder sur les paramètres d’une sortie de crise, rappelant qu’en février, à Abu Dhabi, elles s’étaient entendues sur les principes d’une unification des institutions, devant conduire à la formation d’un gouvernement de transition en vue de la préparation des élections. 

Parallèlement, les violations massives de l’embargo sur les armes au bénéfice des deux parties doivent cesser, a exigé Paris, appuyé par de nombreux membres du Conseil de sécurité qui ont entendu l’intervention du Président du Comité 1970 du Conseil de sécurité sur la Libye.

De son côté, la Chine a incité à la prudence afin d’éviter que les sanctions en Libye n’affectent le bien-être de la population.  Il faut aussi éviter que les sanctions ne soient « politisées » et détournées pour peser d’une manière ou d’une autre dans le processus, a renchéri l’Afrique du Sud. 

La situation des migrants a également préoccupé de nombreux membres du Conseil de sécurité qui ont condamné le raid aérien du 2 juillet contre le centre de migrants à Tajoura, dans lequel des dizaines de migrants ont trouvé la mort.  Cette tragédie a notamment poussé l’Allemagne et d’autres à réclamer la fermeture immédiate des centres de détention où 5 000 migrants se trouvent encore.

L’importance d’une collaboration étroite entre les Nations Unies et l’Union africaine pour venir à bout de la crise libyenne a par ailleurs été soulignée à plusieurs reprises, notamment par la Guinée équatoriale, la Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud.

Pour sa part, la Fédération de Russie a estimé que « tout ce qui se passe » dans le pays est le résultat de la destruction des institutions de l’État libyen en 2011.  « La crise en Libye est l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire dans le cadre d’expériences géopolitiques », a insisté la délégation.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

« Le conflit armé en Libye ne montre aucun signe de ralentissement », a déploré à l’entame de son discours, M. GHASSAN SALAMÉ, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL).  Le haut fonctionnaire de l’ONU, qui s’exprimait par visioconférence depuis Tripoli, a précisé que près de 1 100 personnes, dont 106 civils, avaient d’ores et déjà trouvé la mort dans les combats en cours autour de la capitale libyenne.  De plus, des centaines de milliers de personnes ont été contraintes de quitter Tripoli et ses environs, a-t-il ajouté, dont des dizaines de milliers de réfugiés qui ont trouvé refuge en Tunisie.  M. Salamé a également indiqué que plus de 100 000 civils résidaient actuellement à proximité de la ligne de front, auxquels s’ajoutent plus de 400 000 personnes qui se trouvent dans des zones directement affectées par les combats.  Ces derniers ont contribué à une détérioration de la situation humanitaire des habitants, a précisé le Représentant spécial, notant les difficultés d’accès de la population à la nourriture et aux soins de santé.

Parallèlement, les parties ne cessent d’ignorer les appels en faveur de la désescalade du conflit, a déploré M. Salamé, comme en témoigne, selon lui, l’intensification des attaques aériennes perpétrées aux moyens d’avions de combat et de drones.  Le périmètre géographique du conflit s’est quant à lui étendu, a-t-il indiqué, précisant que, le 26 juillet, les forces du Gouvernement d’entente nationale avaient lancé un raid aérien contre la principale base arrière de l’Armée nationale libyenne (ANL), dans la région de Joufra.  Le lendemain, a-t-il ajouté, les forces du général Khalifa Belqasim Haftar ont lancé, en réponse, un raid contre la base aérienne du Gouvernement d’entente nationale à Misrata.

Le Représentant spécial a ensuite alerté que le recrutement de mercenaires étrangers ne cesse d’augmenter, tout comme le recours à l’artillerie lourde et aux attaques terrestres.  Dans ce contexte, aucune des deux parties ne s’acquitte de ses obligations du point de vue du droit international humanitaire, a-t-il déploré, à l’image, selon lui, de l’attaque aérienne « tragique » contre un centre de migrants à Tajoura, le 2 juillet dernier, alors même que les coordonnées précises du centre avaient été préalablement communiquées aux parties.  Cette attaque a fait 53 morts et au moins 87 blessés, dont des enfants, a indiqué M. Salamé, ajoutant que des migrants qui tentaient de fuir le site avaient de plus été « cruellement abattus » par les gardes du centre.  Comme si cela ne suffisait pas, en dépit des efforts de l’ONU pour transférer les migrants dans des zones plus sûres, les autorités ont récemment relogé 200 migrants dans des installations qui avaient subi des bombardements.  À cela s’ajoute la tragédie des 150 migrants morts en mer Méditerranée, le 25 juillet, à la suite du naufrage de leurs navires, a indiqué M. Salamé, appelant à trouver une solution aux causes profondes de la question des migrants dans le pays.  Il a précisé que 5 000 migrants sont toujours détenus dans des centres gérés par des agences gouvernementales, et que 3 800 d’entre eux sont exposés aux combats.  Dans ces conditions, M. Salamé a exhorté les autorités libyennes à relâcher tous les migrants détenus dans ces centres.  De son côté, la MANUL a élaboré un plan pour procéder à la fermeture progressive et ordonnées des centres.  Il a appelé le Conseil à appuyer sa mise en œuvre.  M. Salamé s’est également dit alarmé par l’augmentation de la fréquence des attaques contre l’aéroport de Mitiga, avertissant que certains avions civils avaient manqué de peu d’être frappés.

Le Représentant spécial a ensuite signalé que les parties croient encore pouvoir atteindre leurs objectifs par des moyens militaires, précisant que l’ANL est déterminée à reprendre Tripoli, cependant que le Gouvernement appelle les forces du général Haftar à quitter la zone avant toute reprise des pourparlers.  M. Salamé a condamné les appels réciproques à la haine, à la violence et aux assassinats dans les médias libyens et a appelé les parties à cesser ces tactiques afin d’instaurer un dialogue.

Il a aussi découragé toute tentative d’établir un parlement parallèle à Tripoli et s’est inquiété de la persistance des autorités de l’est de la Libye à établir un comité parallèle pour les élections municipales.  De tels efforts ne feront qu’entraver la transition fragile du pays vers la démocratie, a-t-il notamment averti.

La Libye est en train de devenir une zone de recyclage d’anciennes armes et une zone d’expérimentation de nouveaux équipements militaires transférés dans le pays avec « la complicité, voire l’appui clair », de gouvernements étrangers, a par ailleurs averti M. Salamé.  Selon lui, ces appuis externes ont contribué à l’intensification des attaques aériennes, qui ne cessent d’aggraver le confit.  Il a également alerté que l’importation d’armes est accompagnée de pilotes, de formateurs et de techniciens étrangers.  Plus que jamais les Libyens combattent les guerres d’autres pays qui semblent satisfaits de régler leurs différends au détriment de la population du pays, a-t-il notamment déploré.  

Parallèlement, le vide sécuritaire causé par les combats à Tripoli et dans les alentours est exploité par Daech dans le sud et le centre du pays, a noté M. Salamé, qui s’est aussi préoccupé du fait que certaines armes livrées par des appuis étrangers tombent aux mains des groupes terroristes ou leur sont vendues.  Certains extrémistes tentent même de se refaire une légitimité en rejoignant les combats, a-t-il ajouté.  « C’est une recette catastrophique », s’est alarmé le haut fonctionnaire, appelant les parties à cesser les hostilités avant que le pays ne devienne un « sanctuaire pour les organisations terroristes ».

Dans ce contexte, la MANUL réduit son emprunte en raison de la situation sécuritaire dégradée à travers le pays, a regretté M. Salamé.  Toutefois la Mission ne veut pas quitter la Libye et continue de s’entretenir avec les parties pour parvenir à une désescalade.  La MANUL a notamment rétabli une présence opérationnelle dans l’est du pays pour démontrer son engagement à servir tous les Libyens et s’efforce de faire de même dans le sud, où les attaques terroristes ont cependant repris de plus belle, a-t-il précisé.

Sur le plan humanitaire, M. Salamé a indiqué que seuls 30% des 202 millions de dollars nécessaires pour répondre aux besoins humanitaires du pays en 2019 avaient été alloués à ce jour.  Il a appelé les donateurs internationaux à combler le manque de financement actuel.  Outre la situation humanitaire très difficile, la production de pétrole est mise en péril en raison des problèmes d’approvisionnement en eau et en électricité, a indiqué le Représentant spécial.  « Le pétrole risque de devenir une arme de guerre dans ce conflit », a-t-il mis en garde, ce qui aurait, selon lui, des conséquences désastreuses.  Il a aussi indiqué que la situation est désastreuse dans le sud du pays en proie à une augmentation de la violence communale, notamment dans la ville de Mourzouq.

Le Représentant spécial a déploré que le personnel de santé et les agents humanitaires continuent d’être pris pour cible dans des attaques, constatant également une recrudescence des disparitions et détentions arbitraires.  M. Salamé a notamment dénoncé l’enlèvement d’un membre élu de la Chambre des représentants à Benghazi par un groupe inconnu et a appelé à sa libération immédiate.  Les enlèvements contre rançon ont également augmenté de façon alarmante à Tripoli, a-t-il précisé.

Face au risque d’une « guerre ouverte au sud de la Méditerranée », M. Salamé a proposé trois mesures: l’instauration d’une trêve à l’occasion de l’Eïd al-Adha, aux alentours du 10 août, assortie d’un échange de prisonniers et de la libération des personnes enlevées ou détenues de façon arbitraire; la tenue d’une réunion internationale sur le conflit libyen; et, enfin, l’organisation d’une réunion interlibyenne où toutes les régions du pays seraient conviées.  « L’heure est venue de mettre fin au climat de suspicion actuel », a estimé M. Salamé, avant d’appeler les autorités à prendre des mesures pour lutter contre la corruption, réformer l’économie et le secteur sécuritaire, lutter contre la traite des personnes et garantir le monopole étatique des forces armées.

M. Salamé a également constaté que rien n’avait été fait pour faire face à la fragmentation des groupes armés et la prolifération des armes légères.  L’État libyen, a-t-il insisté, ne pourra être effectif sans exercer un monopole complet sur les armes.

Il a également estimé que l’ONU devrait être prête à fournir un appui matériel et technique pour accompagner les parties à mettre fin aux hostilités et à reprendre le processus politique.  Le Représentant spécial a ensuite salué les efforts entrepris en ce sens par l’Union européenne (UE), l’Union africaine (UA) et la Ligue des États arabes.  L’heure est également venue pour le Conseil de faire entendre sa voix afin d’éviter une « guerre civile totale » en Libye, a-t-il ajouté.  Seul votre appui permettra d’aider les Libyens à tourner la page de cet épisode « sombre et violent » de leur histoire, a déclaré M. Salamé.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne), s’exprimant en tant que Président du Comité 1970 du Conseil de sécurité sur la Libye, a présenté le rapport du Comité pour la période allant du 22 mai au 29 juillet 2019.Il a indiqué qu’une réunion informelle du Comité avait eu lieu le 31 mai dernier et qu’à cette occasion, les membres avaient décidé de prendre des décisions sur quatre des six recommandations qui leur étaient soumises par le Groupe d’experts.Trois de ces mesures visent à assurer une mise en œuvre plus effective des sanctions, et la dernière porte sur le renforcement des mesures visant à empêcher l’exportation illégale du pétrole depuis la Libye, y compris le brut et les produits pétroliers raffinées.

Le Comité a ensuite transmis, le 17 juillet, une note verbale à tous les États Membres afin de leur rappeler leurs obligations dans le cadre de l’application des sanctions établies par le Conseil de sécurité en rapport avec la Libye.Le Groupe d’experts a également soumis de nouveaux éléments au Comité au sujet des violations de l’embargo sur les armes, notamment en rapport avec les frappes aériennes qui ont eu lieu à Tajoura, le 2 juillet.

Le Comité a également tenu une réunion conjointe le 21 juin dernier avec le Comité 1591 du Conseil de sécurité sur le Soudan et le Comité 2206 sur le Soudan du Sud.Les débats ont porté sur la présence de groupes armés du Darfour en Libye et au Soudan du Sud et des moyens communs de gérer la situation.

En ce qui concerne l’interdiction de voyager, a poursuivi le Président, le Comité entend examiner la possibilité d’une exemption pour Mme Aisha Qadhafi.Dans le même temps, le Comité estime que la présence continue de M. Qadhaf Al-Dam en Égypte, au-delà du 23 mai 2019, en l’absence d’une extension de l’exemption par le Comité, est une violation de l’interdiction de voyage.

M. Schulz a par ailleurs indiqué que le 3 juillet, le Groupe d’experts avait soumis trois noms à inscrire dans la liste des sanctions du fait de leur implication dans le trafic de pétrole et d’autres ressources naturelles en Libye.Enfin, le Président du Comité a évoqué de la situation de M. Moncef Kartas, l’un des experts, qui avait été interpellé le 26 mars dernier en Tunisie.Une Cour d’appel tunisienne a ordonné sa libération le 22 mai dernier et le Comité entend continuer de suivre cette situation de près puisque la poursuite judiciaire n’est pas close.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a souligné que les prochaines semaines seront cruciales.  Elle a indiqué que son pays entend poursuivre son soutien aux efforts onusiens pour mettre fin à la violence en Libye et établir un processus de paix. 

La représentante a ensuite invité tous les États Membres à respecter leurs obligations afin de parvenir à la paix, notamment en évitant d’armer les parties au conflit.  À ce propos, elle a regretté que ces derniers continuent de recevoir des armes provenant de l’extérieur, comme l’a expliqué le Président du Comité des sanctions.  Sur le plan humanitaire, Mme Pierce a exhorté la communauté internationale à trouver le moyen de protéger les migrants en Libye, y compris ceux se trouvant dans des centres de détention.   

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a constaté que la poursuite des combats à Tripoli, dans son quatrième mois, offre aux terroristes une occasion de se regrouper, menace la stabilité de la production pétrolière libyenne et alimente une situation humanitaire de plus en plus grave.  Les États-Unis ont appelé à un cessez-le-feu et demandé le retour rapide à un processus politique sous médiation des Nations Unies, a-t-elle indiqué, tout comme ils appellent toutes les parties à travailler de manière constructive avec le Représentant spécial et la MANUL, afin de parvenir à une solution politique longtemps attendue à ce conflit.  Elle a souligné qu’une paix et une stabilité durables en Libye ne seront possibles que par le biais d’une solution politique.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a fait écho à l’appel du Représentant spécial à une trêve humanitaire à l’occasion de l’Eïd al-Adha, et à la reprise du dialogue politique.Il a insisté sur l’enlisement de la situation sur le terrain et le risque d’escalade qui rappellent l’urgence d’un cessez-le-feu durable et sans condition.Alors que les combats entreront bientôt dans leur cinquième mois, ils s’intensifient et font désormais peser le risque d’une escalade d’ampleur, s’est-il inquiété.La situation en Libye est une priorité humanitaire, a-t-il insisté, évoquant notamment les 1 000 morts et plus de 120 000 personnes déplacées provoqués par les combats, ainsi que le bombardement du camp de réfugiés de Tajoura.

Relevant également la vulnérabilité de la situation des migrants et des réfugiés en Libye, le représentant a exhorté les autorités libyennes à mettre fin à leur détention systématique et à se conformer à leurs obligations relatives au respect du droit international humanitaire.Il a également jugé essentiel que les infrastructures civiles ne soient pas employées à des fins militaires, et que les personnes civiles, et notamment les migrants, ne soient pas utilisées comme des boucliers humains. Il a en outre averti que cette situation met en péril les efforts politiques et diplomatiques conduits par M. Salamé, et éloigne la perspective d’une sortie de crise politique.

Relevant que les seuls bénéficiaires de la poursuite des combats sont les groupes terroristes et criminels, le représentant de la France a appelé les acteurs libyens à se dissocier « sans ambiguïté » de ces groupes, estimant tout aussi important d’engager dans un travail sérieux, sous l’égide des Nations Unies, sur la gouvernance économique, financière et monétaire de la Libye.

La France exige en outre que les violations massives de l’embargo sur les armes au bénéfice des parties cessent.Afin d’éviter que la situation ne se dégrade encore davantage, ces dernières doivent accepter une trêve humanitaire, sans condition et sans limite de temps, à l’occasion de l’Eïd al-Adha, le 10 août.Cette trêve, a espéré le représentant, pourrait ouvrir la voie à un cessez-le-feu durable, assorti de garanties crédibles et d’une supervision internationale.

M. de Rivière a jugé urgent d’agir en faveur de la reprise du dialogue politique, et de travailler dès à présent sur des mesures de confiance susceptibles de conduire à cet objectif.Il a appelé les parties à s’accorder sur les paramètres d’une sortie de crise, rappelant qu’en février, à Abu Dhabi, elles s’étaient entendues sur les principes d’une unification des institutions, devant conduire à la formation d’un gouvernement de transition en vue de la préparation des élections.Les paramètres d’Abu Dhabi restent valables, et doivent être assortis de réformes économiques et financières en vue d’une gouvernance transparente de la banque centrale, la réforme des revenus pétroliers, et l’unification des institutions financières, au bénéfice de tous les Libyens, a conclu M. de Rivière en appelant les parties libyennes à reprendre les discussions sur cette base, et sous l’égide du Représentant spécial.

Pour Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique), la situation à Tripoli reste très préoccupante alors que le drame des migrants au large des côtes libyennes se poursuit et « doit nous interpeller ».  Il est grand temps que la protection des civils devienne véritablement une préoccupation des belligérants, s’est-elle impatientée en appelant les parties à s’abstenir de toute violation grave notamment à l’égard des enfants, y compris par leur recrutement et leur utilisation dans les combats.  Elle a dénoncé les attaques visant le personnel et les installations médicales en Libye, et a rappelé, « encore une fois », que ceux qui se sont rendus coupables de violations graves du droit international humanitaire, et plus largement, ceux qui menaceraient la paix en Libye, devront rendre compte de leurs actes.  Tous les chefs, militaires ou civils, qui exercent un contrôle, une autorité et un commandement effectif sur leurs subordonnés pourraient être tenus pénalement responsables des crimes commis et poursuivis devant les tribunaux internationaux ou la Cour pénale internationale, les a-t-elle mis en garde.

Notant ensuite que le vide sécuritaire dans le sud du pays profite aux groupes terroristes, la représentante a estimé que la poursuite de l’option militaire ne mènera qu’à davantage de chaos et à une déstabilisation durable du pays, sans oublier qu’elle menace les progrès politiques accomplis depuis deux ans.  Dès lors, la Belgique appelle les parties à retourner sans condition à la table de négociation et les exhorte à s’engager de bonne foi et de manière constructive sur les propositions et idées avancées par le Représentant spécial.  L’urgence d’un cessez-le-feu reste d’actualité et les rumeurs d’une nouvelle offensive autour de Tripoli sont alarmantes, a poursuivi la représentante.  La Belgique insiste en outre sur l’importance d’une participation significative et égale des femmes pour parvenir à une solution inclusive et durable, et appelle au strict respect par tous de l’embargo sur les armes décrété par le Conseil de sécurité.

La représentante a également espéré que le Conseil de sécurité pourra prochainement adopter une résolution afin que personne en Libye ne doute de sa volonté et de sa détermination.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a déploré les bombardements des centres hospitaliers et des centres de détention.  Il a dit soutenir les plans allemand et français visant la relocalisation des migrants pris au piège du conflit libyen.  La République dominicaine demande également aux autorités libyennes de collaborer avec le Bureau de la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI) afin de traduire en justice les personnes ciblées par des mandats d’arrêt.

Le représentant a également regretté la violation de l’embargo sur les armes en Libye, se disant sidéré de « la désinvolture avec laquelle on parle désormais de l’usage des armes de plus en plus sophistiquées en Libye ».  Il a prédit que ceux créant le désordre en Libye ne pourront aller bien loin dans leur entreprise, et qu’ils seront traduits en justice.   

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a appelé à trouver une solution immédiate pour régler la question des détentions de migrants dans des centres gouvernementaux à travers la Libye.  Elle a également appelé les parties à fournir un accès humanitaire « sûr et sans entrave » aux personnes dans le besoin, y compris dans les prisons et les centres de détention.  Elle a, en outre, exhorté les parties à mettre un terme aux attaques contre des écoles et des hôpitaux.

La représentante polonaise s’est en outre déclarée très préoccupée par les violations de l’embargo sur les armes en Libye.  Elle a appelé à y mettre fin, pour ensuite exhorter les parties à régler le conflit par des moyens pacifiques et par le dialogue.  Elle a salué les efforts entrepris par M. Salamé en ce sens.

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a averti du risque de désintégration de la Libye, soulignant que tout ce qui se passe dans le pays est le résultat de la destruction des institutions de l’État libyen en 2011.  « La crise en Libye est l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire dans le cadre d’expériences géopolitiques », a-t-il notamment affirmé.  Il a également averti que la situation actuelle favorise l’arrivée de terroristes venant de Syrie.  La Fédération de Russie n’a jamais et n’aura jamais un agenda caché en Libye, a-t-il ensuite promis, avant d’expliquer que son pays a toujours clairement exposé ses positions aux parties en conflit, leur expliquant que l’ONU doit jouer un rôle central dans la résolution de la crise.  Il a, de ce fait, salué le programme de sortie de crise du Représentant spécial, lequel ne pourra être mis en œuvre, a-t-il averti, que si les acteurs intérieurs et extérieurs respectent les règles établies par l’ONU.

Le délégué russe s’est ensuite préoccupé de la situation déplorable dans laquelle se trouvent les migrants en Libye, et a demandé à la communauté internationale de ne point lutter contre les migrants, mais plutôt contre les réseaux qui les exploitent.  Il a aussi réclamé une approche globale sur les violations de l’embargo sur les armes en Libye.  Il a enfin appelé toutes les parties à renoncer à des projets unilatéraux en Libye, les exhortant à adopter des approches privilégiant le bien-être du peuple libyen.

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a regretté que plus de deux mois après le début des hostilités pour le contrôle de la capitale Tripoli, la crise libyenne est plus que jamais dans l’impasse.  Préoccupé par les conséquences sécuritaires et humanitaires des combats, il a également appelé l’ensemble des États Membres à élever une vive protestation face au sort des migrants subsahariens victimes de toutes sortes d’abus et de violations de leurs droits dans les centres de détention, et dont 53 ont péri, le 2 juillet, lors du bombardement du centre de Tajoura.  Il a appelé à une enquête crédible et indépendante sur cette attaque, afin de traduire les auteurs de cet acte devant les tribunaux compétents.  La Côte d’Ivoire souhaite, par ailleurs, que les migrants repêchés au large des côtes libyennes soient traités avec dignité, et que leur rapatriement dans leurs pays d’origine, s’ils y consentent, se déroule en étroite collaboration avec les agences spécialisées des Nations Unies.

S’agissant des violations continues de l’embargo sur les armes, le représentant a appelé à la mise en œuvre effective de la résolution 2473 (2019), qui prescrit la stricte application de l’embargo, à travers le contrôle des vaisseaux au large des côtes libyennes.  Elle encourage aussi une solution politique rapide, pour permettre l’extension de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire national, afin d’empêcher la lancinante et dangereuse sanctuarisation de l’État islamique dans certaines parties du pays.

Le représentant a ensuite encouragé le Représentant spécial à coopérer davantage avec l’Union africaine, et a rappelé le communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, publié le 5 juillet 2019, qui souligne sa disponibilité à œuvrer, en étroite collaboration avec les pays de la région, à la recherche de solutions durables à la crise en Libye. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a regretté cette « guerre absurde » entre « fils d’une même nation » et a appelé au respect de l’embargo sur les armes en Libye.  Face à la prolifération des appels à la haine, notamment sur les réseaux sociaux, le représentant a également appelé les Libyens à s’abstenir de tout discours susceptible d’exacerber les tensions.

Le délégué koweïtien a, en outre, déploré l’attaque du 2 juillet contre un centre de détention pour migrants, à Tajoura.  Rejetant également les attaques contre des civils, des agents humanitaires et le personnel de santé, il a appelé toutes les parties à la retenue et au respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme. 

Le représentant s’est en outre dit préoccupé par la recrudescence des opérations terroristes dans le sud de la Libye, notamment les attaques contre des installations civiles.  Il a appelé la communauté internationale et l’ONU à soutenir le pays pour lutter contre Daech et les groupes terroristes qui exploitent le vide sécuritaire causé par les combats en cours.  Enfin, M. Alotaibi a appelé les parties à œuvrer en faveur de la tenue d’élections parlementaires libres et transparentes.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a déclaré qu’il n’existe pas de solution militaire au conflit en Libye.  Il a déploré la situation des migrants vivant dans des conditions inhumaines dans le pays, avant de condamner le bombardement du centre de détention des migrants de Tajoura.  Il a appelé la communauté internationale à examiner la question de ces migrants qui meurent en essayant de traverser la Méditerranée. 

Le représentant a ensuite souligné l’importance d’une collaboration étroite entre les Nations Unies et l’Union africaine pour venir à bout de la crise libyenne, tout en condamnant les ingérences extérieures dans les affaires intérieures libyennes.  Le délégué a aussi dénoncé le silence du Conseil de sécurité qui reste « les bras croisés », ce qui, a-t-il relevé, favorise une certaine permissivité dans ce conflit qui a fait des milliers de victimes.  Il a réclamé l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat et le retour au processus politique, étant donné que ce conflit libyen a des impacts sur plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique centrale et même australe.  Il a enfin demandé le respect de l’embargo sur les armes sur la Libye.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a déploré la recrudescence des frappes aériennes en Libye et a appelé les parties à s’accorder immédiatement sur une cessation des hostilités.  Il a également appelé à l’ouverture d’enquête indépendante sur le bombardement du centre de migrants de Tajoura, le 2 juillet dernier.

Plus la crise dure, plus elle exacerbe les difficultés humanitaires de la population du pays, a par ailleurs déploré le représentant, condamnant également la prolifération des activités terroristes et de la criminalité transnationale organisée dans certaines régions de la Libye.

Le représentant a par ailleurs déploré l’impasse politique actuelle entre les parties au conflit.  Il est préoccupant de constater que les deux parties n’ont toujours pas accepté de reprendre le processus politique, ce qui est pourtant indispensable pour une désescalade des combats, a-t-il insisté, exhortant ces dernières à créer un environnement propice à la tenue d’une conférence nationale, avec l’appui de la communauté internationale. 

Soulignant le rôle devant être joué par l’Union africaine (UA) dans la résolution du conflit, le représentant a également rappelé l’importance des sanctions, un outil, selon lui, utile pour faire avancer le processus politique.  Toutefois, les sanctions ne devraient pas être politisées pour peser d’une manière ou d’une autre dans le processus, a-t-il nuancé.  Dans ce cadre, le représentant s’est déclaré préoccupé par les violations répétées de l’embargo sur les armes.  Il a exhorté les auteurs de ces pratiques, qui ne servent selon lui qu’à torpiller les progrès et prolonger le conflit, à y mettre un terme.

M. WU HAITAO (Chine) a déploré les répercussions du conflit dans le Sahel, en Méditerranée et dans d’autres régions et a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour relancer le dialogue.  Les parties prenantes doivent répondre aux appels de la communauté internationale en mettant immédiatement fin aux hostilités et en reprenant le dialogue, a-t-il insisté.

Le processus de paix doit par ailleurs être mené par et pour les Libyens, a estimé le représentant, appelant la communauté internationale à respecter la souveraineté du pays.  Les États bénéficiant d’une influence sur les parties devraient toutefois œuvrer de manière constructive à la reprise des pourparlers, a-t-il ajouté, appelant l’Union africaine (UA) et la Ligue des États arabes à agir en ce sens.

Il convient en outre de régler la question des sanctions, a déclaré le représentant, appelant au strict respect de l’embargo sur les armes.  Il faut toutefois faire preuve de prudence et éviter que les sanctions n’affectent le bien-être de la population, a-t-il ajouté.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a fait part de son inquiétude face aux violations de l’embargo sur les armes en Libye.  Il a présenté les condoléances de l’Indonésie à la suite du naufrage du navire qui a coûté la vie à plus d’une centaine de personnes, le 25 juillet dernier, en Méditerranée.  Il a aussi condamné les bombardements qui ont frappé, aujourd’hui, des écoles et des hôpitaux au sud de Tripoli, pour ensuite appeler toutes les parties à éviter de cibler les infrastructures civiles. 

Le délégué a appelé à un cessez-le-feu en Libye, arguant que la solution militaire ne sera d’aucune utilité.  Il a aussi appuyé la tenue d’une conférence nationale au plus tôt afin de débattre de la situation dans le pays, entre Libyens.  Enfin, il a plaidé pour une trêve humanitaire afin de prévenir davantage de pertes en vies humaines.

Mme AGAPI NEHRING (Allemagne) a appelé le Conseil de sécurité à envoyer un message fort et non équivoque à toutes les parties libyennes, et à ceux qui les soutiennent à l’international, réclamant la cessation immédiate des combats en Libye et le règlement du conflit par une solution politique et non pas militaire.  Rappelant que depuis avril, les affrontements ont causé la mort de plus de 1 000 personnes et provoqué une catastrophe humanitaire, la déléguée a condamné dans les termes les plus forts les attaques visant des civils, des infrastructures civiles et du personnel médical.  À la suite de la tragédie de Tajoura, l’Allemagne demande en outre la fermeture immédiate de tous les centres de détention en Libye.  Elle exhorte aussi toutes les parties à revenir à la table de négociation et à respecter un cessez-le-feu immédiat et appuie la relance du processus politique inclusif en Libye sous l’égide des Nations Unies.  Elle demande à tous les acteurs internationaux d’utiliser leur influence pour faire revenir les parties libyennes au processus politique.

Dénonçant ensuite les violations de l’embargo sur les armes, la représentante a estimé que cet afflux massif d’armes était l’une des causes principales du désastre humanitaire en Libye.  L’Allemagne exhorte toutes les parties à prendre les mesures nécessaires pour respecter à la lettre le régime de sanctions et en particulier l’embargo sur les armes.  Le Comité des sanctions du Conseil de sécurité a clairement fait part de cette exigence dans sa lettre datée du 17 juillet 2019, a rappelé la représentante, qui, dans la foulée, a exigé que le Conseil agisse plus fermement sur ce dossier car il y va de sa crédibilité et de sa capacité à faire respecter le droit international et ses propres décisions.

Elle s’est par ailleurs dite soulagée à la suite de la libération de M. Moncef Kartas, qui est l’un des membres du Comité des sanctions sur la Libye, et a réitéré que la Tunisie doit respecter ses obligations sous la Convention de 1946 sur les privilèges et immunités des Nations Unies, et arrêter toutes les procédures judiciaires contre M. Moncef Kartas ou, à défaut, demander l’autorisation de les poursuivre, conformément à la Convention.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a regretté le bombardement tragique d’un centre de détention de migrants le 2 juillet dernier, les naufrages récents d’embarcations de migrants au large des côtes libyennes, ainsi que les attaques contre les civils et le personnel humanitaire en Libye.  Nous faisons face à un cercle vicieux de catastrophes exacerbé par les violations de l’embargo sur les armes, violations dont profitent, au final, les terroristes, a déploré le représentant, appelant à tenir les auteurs de crimes et violations pour responsables.

Le délégué péruvien a, en outre, appelé à un retour au dialogue et à l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat et sans conditions.  Dans cette perspective, il a appelé les pays bénéficiant d’une influence sur les parties à agir immédiatement afin de faire respecter le droit humanitaire et les droits de l’homme en Libye.

M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a rappelé qu’avant le 4 avril dernier, la Libye attendait la tenue d’une conférence nationale en laquelle les Libyens avaient placé tous leurs espoirs.  Malheureusement, l’attaque de Tripoli est venue tout saper, a-t-il déploré.  Quatre mois après le début de l’attaque, on dénombre des milliers de morts, des centaines de milliers de déplacés et un grand nombre d’infrastructures détruites, y compris des hôpitaux, et le bombardement du centre de détention des migrants Tajoura, le 3 juillet dernier, qui a fait des dizaines de victimes.  Il a fait savoir que le Gouvernement d’entente nationale avait prié le Conseil de sécurité d’établir une mission d’enquête en rapport avec cet événement et de traduire les responsables en justice.  Malheureusement, a-t-il regretté, rien n’a été fait.

Le délégué a ensuite indiqué que Benghazi avait connu des moments similaires le 17 juillet lorsque des miliciens armés s’étaient rendus au domicile d’une députée.  Ils ont tiré sur son époux et l’ont enlevée et on est sans nouvelles d’elle depuis lors, a-t-il déploré.  Il a noté que de tels faits se produisent alors que le général Haftar prétend œuvrer pour la sécurité.  Au contraire, a-t-il poursuivi, il essaye de faire taire des voix dissidentes et viole les droits de l’homme.

Le délégué a regretté le silence du Conseil de sécurité devant ces atrocités et le fait qu’il n’ait jamais condamné l’attaque de Tripoli, ni les cas avérés d’ingérence extérieure dans les affaires intérieures de la Libye ou encore les activités de groupes terroristes dans le pays.  Les forces du Gouvernement d’entente nationale combattent ces groupes terroristes en s’appuyant sur des partenariats stratégiques comme celui avec les États-Unis, a—t-il indiqué.  Il a relevé que des rapports pertinents du Groupe d’experts font état d’ingérences étrangères en Libye, avant de demander au Conseil de sécurité de s’acquitter de ses responsabilités en condamnant les pays qui soutiennent le général Haftar.

M. Elmajerbi a souligné qu’il ne saurait y avoir de solution militaire et encore moins de vainqueur dans ce conflit, ajoutant que le seul perdant est bien la Libye.  Le délégué a indiqué que le Gouvernement d’entente nationale appelle à organiser un large rassemblement national avec toutes les parties prenantes de la société civile, et avec l’appui de l’ONU, afin d’adopter les lois électorales qui vont présider la tenue des élections dans le pays d’ici à la fin de l’année.  Il a émis le vœu que cette proposition des autorités libyennes sera endossée par la communauté internationale et des organismes pertinents.  Revenant sur l’attaque de Tripoli, il a affirmé que celle-ci ne se serait jamais produite si le Conseil de sécurité avait pris des actes forts. 

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