Quatrième Commission: représentants officiels et pétitionnaires présentent des visions contrastées des situations à Guam et au Sahara occidental
Les situations de Guam et du Sahara occidental ont largement dominé, aujourd’hui, les délibérations de la Quatrième Commission, chargée des questions de politiques spéciales et décolonisation, qui ont fait une large place aux pétitionnaires.
« Malgré le manque de volonté politique de notre Puissance administrante pour aborder la question de la décolonisation et le statut politique de Guam, nous restons déterminés à rechercher l’équité et la justice », a assuré le Lieutenant-gouverneur de ce territoire non autonome, M. Joshua Tenorio. Il a expliqué que le statut de territoire « non incorporé » aux États-Unis remonte à une jurisprudence de la Cour suprême sur les cas « insulaires » entre 1901 et 1910, laquelle a facilité l’expansion des États-Unis au-delà de leurs frontières et permis au Congrès américain d’appliquer de manière discriminatoire ou de refuser des protections et garanties prévues par la Constitution américaine aux peuples vivant dans ces « territoires non incorporés ». Le résultat est un statut de « citoyens de seconde zone » pour les habitants de son île.
Au cours des 40 dernières années, a poursuivi le Lieutenant-gouverneur, le Gouvernement de Guam n’a eu de cesse d’essayer de faire changer l’idée selon laquelle il n’existerait pas de voie pour la pleine représentation de son peuple dans une démocratie représentative ou encore pour un processus politique permettant aux habitants de Guam de voter aux élections nationales. Se résoudre au statu quo signifierait que l’autorité restera « injustement » une lointaine bureaucratie qui impose ses politiques et règlementations unilatéralement, a mis en garde M. Tenorio.
D’autres pétitionnaires sont allés plus loin, en revendiquant le droit à l’autodétermination même s’ils sont bien conscients que celui-ci sera « incertain » aussi longtemps que Guam restera un site militaire stratégique des États-Unis dans la région Asie-Pacifique. L’autodétermination est en contradiction avec la politique nationale de la Puissance administrante dans la région Asie-Pacifique et met en péril sa robuste présence militaire dans cette région, menaçant au passage les intérêts de sa sécurité nationale, a concédé l’une des pétitionnaires, là où d’autres ont dénoncé « l’hypermilitarisation » de l’île.
À ce titre, ils se sont opposés à la création d’un champ de tir sur les terres sacrées de Tai’Lalo, dénonçant aussi la réinstallation à Guam de Marines venus d’Okinawa sans accord préalable avec le peuple chamorro. Ces pétitionnaires ont déclaré compter sur la Quatrième Commission pour réaffirmer que la militarisation de l’île est contraire au droit à l’autodétermination de son peuple, avant d’exhorter le Comité spécial de la décolonisation à dépêcher une mission d’évaluation à Guam.
Au titre du Sahara occidental, pas moins de 25 pétitionnaires se sont exprimés, cet après-midi, sur une liste qui en comprend 131, à commencer par le représentant du Front POLISARIO, M. Sidi Omar, qui a revendiqué haut et fort le droit à l’autodétermination de son peuple et réclamé le respect de la légalité internationale et des résolutions pertinentes de l’ONU. Pour lui, la « loi du plus fort n’est pas une option » et « nier la vérité ne changera pas les faits », à savoir que l’ONU ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, tout comme elle ne reconnaît pas son occupation et l’annexion illégale de certaines parties du territoire.
Il a trouvé écho auprès de certains pétitionnaires qui ont dénoncé, à sa suite, les « multiples violations des droits de l'homme » des Sahraouis sous « occupation marocaine ». Certains ont été jusqu’à soutenir que la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) ne ferait que servir les intérêts de la « monarchie alaouite », tandis que le peuple sahraoui serait quotidiennement malmené par le « colon marocain ». Dès lors, ces intervenants ont proposé de mettre fin à la MINURSO et à son mandat pour contraindre le Conseil de sécurité à « endosser la responsabilité qui est la sienne de protéger le peuple sahraoui de la monarchie alaouite ».
À l’inverse, plusieurs pétitionnaires se sont livrés à un réquisitoire contre le leadership du Front POLISARIO, lui reprochant son administration des camps de Tindouf, qui ont été décrits comme « l’un des enfers les plus sinistres de la planète » ou encore comme « des prisons à ciel ouvert », dont les habitants seraient réduits au silence, maltraités et victimes de viols, dans une atmosphère de complète impunité.
D’autres se sont élevés contre le détournement de l’aide humanitaire en direction des camps de Tindouf, un fait révélé en 2015 par l’Office européen de lutte antifraude, et ont exigé à nouveau un recensement de la population de ces camps, une demande de longue date du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Une représentante du Département américain de la justice et de la Drug Enforcement Administration (DEA) a même avancé que des organisations criminelles, des cartels sud-américains ainsi que des groupes djihadistes comme Al-Qaida, Boko Haram ou Al-Chabab auraient infiltré les camps de la région, où ils recruteraient activement.
La Commission a également entendu, aujourd’hui, le Premier Ministre de Montserrat, qui a salué la décision du Comité spécial de la décolonisation de dépêcher une mission sur place, avec l’accord de la Puissance administrante, le Royaume-Uni. Sa principale requête a été qu’à l’issue de cette visite, le Comité spécial de la décolonisation, la Quatrième Commission et la Puissance administrante fixent un cadre assorti d’un échéancier clair pour la décolonisation complète de l’île.
La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 11 octobre, à partir de 10 heures, par les auditions de pétitionnaires sur la question du Sahara occidental.
Suite du débat général sur les points relatifs à la décolonisation
Auditions des pétitionnaires
Guam
M. JOSHAU TENORIO, Lieutenant-gouverneur de Guam, s’est dit insatisfait par le statut politique de territoire non autonome de Guam. « Malgré le manque de volonté politique de notre Puissance administrante pour aborder la question de la décolonisation et le statut politique de Guam, nous restons déterminés à rechercher l’équité et la justice », a-t-il d’emblée assuré avant d’ironiser sur le fait que la Puissance administrante s’est pourtant construite sur l’idée que son propre colonialisme était injuste. Cependant, l’essence même de cette nation « comme havre de démocratie et d’indépendance » est remise en cause par la réalité, elle-même étant devenue une puissance coloniale, a-t-il remarqué. « Du fait de leur existence même, les États-Unis ne sont pas censés avoir de colonies - et ils ont du mal à faire face à cette réalité », a constaté le Lieutenant-gouverneur, pour lequel le statu quo est inacceptable. Au cours des 40 dernières années, le Gouvernement de Guam n’a eu de cesse d’essayer de faire changer l’idée selon laquelle il n’existerait pas de voie pour sa pleine représentation dans une démocratie représentative ou encore pour un processus politique permettant aux habitants de Guam de voter aux élections nationales. Cela signifie aussi que l’autorité restera une lointaine bureaucratie qui impose ses politiques et règlementations unilatéralement, a poursuivi M. Tenorio, pour lequel cet état de fait est tout simplement injuste.
Il a rappelé que l’état de droit dans les territoires américains se fonde sur une jurisprudence de cas jugés par la Cour suprême américaine entre 1901 et 1910 et communément appelée « les cas insulaires ». Ces cas ont facilité l’expansion des États-Unis au-delà de leurs frontières et permis au Congrès américain d’appliquer de manière discriminatoire ou de refuser des protections et garanties prévues par la Constitution américaine aux peuples vivant dans leurs « territoires non incorporés ». Ces « cas insulaires » ont créé la justification constitutionnelle du colonialisme, a affirmé M. Tenorio, en soutenant que ces territoires étaient la propriété de Guam, et ne faisaient pas partie des États-Unis. Dès lors, dans les territoires non incorporés, la Constitution américaine ne s’applique pas pleinement à la population, en faisant de facto « des citoyens de seconde zone ».
Ce contrôle unilatéral de Guam par le Gouvernement américain se fonde toujours sur une jurisprudence qui remonte à une époque où le système politique américain était dominé par une idéologie raciste, a argué le représentant du territoire, mais même plus récemment, la Puissance administrante a utilisé le système judiciaire fédéral pour interférer dans des processus internes de Guam, dont celui de décolonisation en empêchant les dépenses publiques de fonds pour faire avancer un plébiscite, conformément à la loi de Guam. Il a expliqué que les natifs de Guam, le peuple autochtone des Chamorro, ont la distinction politique d’être des « sujets d’une autorité transférée par le colonisateur espagnol aux États-Unis par le Traité de Paris ». Le droit à l’autodétermination, par le truchement d’un référendum populaire, leur est refusé depuis 32 ans par la Puissance administrante, alors même que des progrès ont été faits en termes d’éducation et de préparation de toute la communauté à un processus légitime de décolonisation, s’est indigné M. Tenorio. En plus de cette « injustice », les Chamorro se sont fait déposséder de leurs terres et ressources, les empêchant dès lors de réaliser leur droit au développement, a-t-il ajouté.
À l’approche de la fin de la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, le Lieutenant-gouverneur s’est dit préoccupé par la lenteur des progrès dans le processus de décolonisation de Guam. Il a exhorté « sa » puissance administrante à honorer le droit des peuples colonisés de disposer librement d’eux-mêmes et de décider de leur avenir. Il n’en demeure pas moins que le leadership local et le Gouvernement local sont unis et engagés à progresser sur la voie de la décolonisation et que malgré les « imperfections » de leur relation avec les États-Unis, ils ne perdent pas espoir d’une meilleure collaboration à l’avenir. À ce sujet, il a remercié le Gouvernement fédéral américain d’avoir accordé une subvention de 300 000 dollars à la Commission pour la décolonisation de Guam en vue de financer des études et activités dans l’éducation publique. Le Lieutenant-Gouverneur a ensuite abordé la question de la restitution des terres par les États-Unis au Gouvernement local de Guam, et en particulier d’une parcelle située à Litekyan, pour laquelle il y a controverse à la suite de l’annonce de la construction d’un futur champ de tir militaire. La « profanation » de cette parcelle et d’autres aurait également un impact environnemental, a-t-il précisé.
Un autre point d’achoppement pour M. Tenorio est l’accord de libre association signé par les États-Unis avec les Gouvernements souverains de États librement associés de Micronésie, sans une contribution significative du Gouvernement de Guam, alors que ce dernier souhaite participer à la prochaine phase de ces relations. Avant de conclure, le Lieutenant-gouverneur a réitéré sa demande au Comité des vingt-quatre de dépêcher une mission de visite à Guam, avec l’accord de la Puissance administrante, en vue « d’approfondir » le dialogue relatif à la décolonisation.
« Nos terres, notre langue, notre religion et nos opportunités de développement ont été définitivement altérées par l’endoctrinement et l’assimilation de ceux qui ont planté leurs drapeaux sur les nations des autochtones », a accusé Mme REGINE LEE, sénatrice de Guam. Elle s’est inquiétée des effets des changements climatiques et de la montée du niveau des eaux sur les îles en général, soulignant que « le manque de souveraineté des territoires non automnes est un obstacle majeur » à leur capacité d’action. La sénatrice a déploré qu’en tant que « possession » des États-Unis, Guam n’a généralement pas accès aux fonds de développement qui viennent en aide aux petites îles indépendantes. « Nous ne participons pas de façon significative au cadre gouvernemental de la puissance administrante », a-t-elle regretté. Mme Lee a par ailleurs dénoncé les atteintes à l’environnement, la militarisation, les changements démographiques et l’absence de missions d’évaluation comme des manquements aux engagements de la Quatrième commission.
« Trois cents ans de colonialisme et de militarisation ont détruit la symbiose naturelle entre notre société et son environnement et tous les deux sont aujourd’hui menacés », a estimé SABINA PEREZ, sénatrice de Guam, s’exprimant au nom de l’organisation Prutehi Litekyan/Save Ritidian. Son association s’oppose à la création d’un centre d’entraînement au tir sur les terres sacrées de Tai’Lalo, un centre qui met en danger, selon elle, les ressources en eau de 80% de la population, des sites culturels et des espèces naturelles. Elle a dénoncé la réinstallation à Guam de Marines venus d’Okinawa sans accord préalable du peuple chamorro. Mme Perez a exhorté la Quatrième Commission à réaffirmer que la militarisation est contraire au droit à l’autodétermination de son peuple. Elle l’a appelée aussi à dépêcher une mission d’évaluation à Guam.
Mme JULIA FAYE MUNOZ, de l’Organisation Hagan Famalao’an Guahan, qui s’occupe de défendre les droits des femmes et des filles chamorro, a dressé un tableau alarmant de la violence perpétrée à l’encontre des femmes de Guam, qui aurait le deuxième taux le plus élevé de viols des États-Unis, soit 64,2 viols pour 100 000 habitants. Entre 2016 et 2017, il y a eu une hausse de 38% des viols recensés à Guam et de 20% des offenses sexuelles alors que de nombreuses victimes sont des mineures. Elle a également fait état de nombreux cas d’atteintes sexuelles sur des mineurs par les membres du clergé et de 200 poursuites judiciaires en attente de jugement. La violence familiale une autre forme de crime largement répandue avec 796 cas en justice en 2017, soit 48,8% de plus que l’année précédente, a encore indiqué Mme Munoz. En 2017, les Chamorro représentaient 41% des personnes arrêtées à Guam, soit 1 191 personnes. Mme Munoz a en conclusion soutenu que la violence à l’encontre des femmes autochtones peut être associée à la colonisation, arguant que la violation des droits collectifs de ces communautés représente un facteur de risque pour la violence sexiste.
M. MELVIN WON PAT-BORJA, de la Commission sur la législation du Gouvernement de Guam, a noté que la décision de la justice américaine considérant comme anticonstitutionnelle l’organisation d’un référendum réservé aux autochtones s’appuie sur la privation des droits qu’elle entraînerait pour les résidents américains non autochtones de Guam. Or, le statut de Guam (Insular Cases) spécifie que les résidents de l’île ne bénéficient pas de la pleine et entière protection de la Constitution, a-t-il rappelé, qualifiant cette situation « d’ironique ». Selon lui, ce jugement utilise la défense des droits civiques pour priver un peuple de son « droit sacré à l’autodétermination ». Il s’est félicité de la réaction des insulaires et indique que 2 000 personnes ont manifesté à Guam en mars dernier pour soutenir le droit à l’autodétermination du peuple chamorro.
M. Pat-Borja a dénoncé la militarisation continue de l’île et le changement de sa composition démographique, qui fait du peuple Chamorro « une minorité dans son propre pays », comme à l’opposé des recommandations du rapport du Secrétaire général sur la deuxième Décennie internationale pour l’éradication du colonialisme. Il a appelé à une visite d’une mission de l’ONU à Guam.
Mme RIKKI ORSINI, Conseillère politique auprès de la Commission législative pour l’autodétermination de Guam, a « imploré » la Quatrième Commission d’exhorter la Puissance administrante à respecter de bonne foi ses obligations internationales et à maintenir sa « confiance sacrée » dans le peuple chamorro, dont elle fait partie, en vue de la réalisation de son autodétermination. Elle a dénoncé « l’hypermilitarisation » de Guam qui va à l’encontre des valeurs traditionnelles de son peuple, à commencer par le respect de la nature et de l’environnement, et qui reste un obstacle majeur à son autodétermination.
Le désir d’autodétermination du peuple de Guam, a-t-elle observé, est en conflit avec la politique nationale de la Puissance administrante pour la région Asie-Pacifique et met en péril sa robuste présence militaire dans cette région ainsi que ses infrastructures militaires, menaçant au passage ses intérêts de sécurité nationale. Dès lors, il ne fait aucun doute pour la pétitionnaire que tant que Guam restera un site stratégique pour la présence américaine en Asie, le sort de son autodétermination restera incertain. Elle a par conséquent imploré l’ONU à s’engager aux côtés de son peuple pour faire respecter son droit à l’autodétermination tel que stipulé dans la résolution 1514 de l’Assemblée générale.
« Les Chamorros constituaient 91% des habitants de Guahan (Guam) juste avant leur placement sur la liste des territoires non automnes. En dépit des admonestations des Nations Unies, les États-Unis ont drastiquement altéré la démographie du territoire, dont les Chamorro ne représentent plus que 42% de la population », a expliqué Mme KELLY MARSH (TAITANO). Elle s’est présentée comme une non chamorro, non autochtone « n’ayant pas connu d’autre maison que celle de Guahan (Guam).
La pétitionnaire a déploré que la langue des autochtones ait été bannie tout au long des 51 ans d’administration militaire et des 20 ans d’administration par un gouverneur nommé par Washington. Elle a dénoncé les contaminations liées aux installations militaires qui continuent à être bâties sur l’île.
« Le système du colonisateur vise à éradiquer les droits et les cultures autochtones », a accusé SAMANTHA BARNETT, de l’organisation Independent Guahan. « Nous sommes otages des États-Unis et notre statut politique est une cage », at-elle insisté. La pétitionnaire a dénoncé une décision de la justice américaine, qui considère « notre référendum sur le statut politique comme inconstitutionnel ». Elle se réjouit du fait qu’en réponse à ce jugement, « des milliers de Chamorros et leurs alliés ont manifesté dans les rues de Guahan (Guam) pour défendre leur droit à l’autodétermination. »
Selon elle, la réinstallation de Marines venus d’Okinawa constitue « l’assaut final contre le peuple autochtone, le réduisant au rang de minorité sur ses propres terres. » Elle a aussi dénoncé de nombreux types de contaminations liées aux activités militaires américaines causant « cancers et diabètes » au sein de la population, avant d’appeler la Quatrième Commission à dépêcher une mission d’évaluation à Guahan (Guam). « Nous verrons la décolonisation de notre vivant! » s’est exclamée Mme Barnett.
« Cela fait 23 ans, la durée de ma vie, que nous avons choisi le cadre des Nations Unies pour échapper au colonialisme », a rappelé LEONARDO ORSINI, de l’organisation Bay Area Independant Guahan. « Tous les ans, nous déversons notre colère, notre chagrin et notre, impatience devant cette commission », a-t-il continué, « sans grand dynamisme politique de sa part ni de réel désir de la Puissance administratrante d’en finir avec le colonialisme ». Le représentant s’est ensuite fait accusateur: « Nous sommes conscients que l’armée américaine nous empoisonne, nous pousse hors de notre île », a-t-il martelé, estimant que, ce faisant, elle « met en danger notre écosystème et nos sites ancestraux ».
M. ANDREW PAUL GUMATAOTAO, de DukDuk Goose Inc, une compagnie de production culturelle à but non lucratif dont la mission est de « reconnecter et inspirer l’amour de la terre, de l’océan et de notre culture » à travers des productions média depuis la perspective des Chamorro et de la Micronésie. Cette année, la campagne « nous sommes les protecteurs » a été lancée pour donner les moyens à la prochaine génération de faire face aux défis majeurs qui se posent à « notre île et notre région », a-t-il expliqué, citant à titre d’exemple le brûlage illégal, les espèces invasives et surtout les changements climatiques et la militarisation à outrance de l’île. Avant de conclure, le pétitionnaire a dénoncé les mesures insidieuses prises par la Puissance administrante pour s’opposer au droit à l’autodétermination du peuple Chamorro et à la décolonisation de Guam.
Mme PIM LIMTIACO, de l’Association Guahan Coalition for Peace and Justice, a expliqué que la santé des habitants de Guam était affectée par la militarisation de l’île. Elle a énuméré les exemples où l’île est moins bien lotie que la métropole: l’espérance de vie y est de 73,3 ans contre 78,6 ans aux États-Unis, le taux de cancer y augmente et 21% de la population de l’île a du mal à se procurer une couverture médicale contre 13% des Américains. Il a appelé l’ONU à user son influence pour contraindre les États-Unis à engager un processus de décolonisation, demandant à la Quatrième Commission de dépêcher une mission à Guam.
Monserrat
M. DONALDSON ROMEO, Premier Ministre de Montserrat, a remercié le Comité spécial de la décolonisation d’avoir décidé de se rendre à Montserrat en décembre prochain. Ses membres seront ainsi en mesure d’évaluer ce qui a été fait au fil des dernières années pour retirer ce territoire de la liste de la Quatrième Commission. Montserrat a toujours eu le droit et les moyens pour être libéré de façon politique, économique et sociale, a-t-il précisé, mais « hélas » la population de Montserrat n’a pas toujours été consciente de ses droits, sans quoi l’ile serait depuis longtemps autonome sur le plan économique et d’autres.
Même avant l’éruption volcanique, les risques étaient connus, mais ils ont été dissimulés pour éviter des dépenses « après tout modestes » au Royaume-Uni, a-t-il affirmé. Cependant la bonne nouvelle est que finalement une mesure significative a été prise en matière de recouvrement économique, après dix ans d’efforts: grâce à l’aide du Royaume-Uni, la fibre optique sera installée à Montserrat, un projet d’un montant de 4,9 millions de livres. Il aura fallu 10 ans pour que le Royaume-Uni en arrive à ce stade, a regretté le Premier Ministre, ajoutant que le réseau routier et les projets de logements nécessitent eux aussi des investissements. Même s’il est reconnaissant à Londres de l’appui apporté aux ressortissants de Montserrat qui se sont installés au Royaume-Uni au cours des dix dernières années, le Premier Ministre a expliqué que son Gouvernement a du mal à retenir du personnel qualifié sur l’île, dans la mesure où celui-ci préfère s’installer au Royaume-Uni.
Lorsque la mission de visite du Comité spécial de la décolonisation se rendra à Montserrat, elle aura l’occasion de visiter la seule école secondaire de l’ile, une école qui ne dispose pas de réfectoire, a-t-il poursuivi en expliquant que ce projet est bloqué depuis plus d’une décennie. De même les puits géothermiques sont à l’arrêt également, faute de financements, et les salaires gelés depuis trois ans, a-t-il poursuivi. Le Premier Ministre a demandé une assistance en matière d’éducation et pour construire un hôpital et des logements sociaux, mais également la nomination d’un nouveau facilitateur sur l’île. Sa principale requête est qu’après la visite du Comité spécial de la décolonisation, la Quatrième Commission, le Comité spécial de la décolonisation et le Royaume-Uni mettent sur pied un cadre assorti d’un échéancier clair pour la pleine décolonisation de Montserrat.
Nouvelle-Calédonie
« Kanaky-Nouvelle-Calédonie est toujours dans une phase critique de son histoire puisqu’elle prépare le second référendum en novembre 2020 », a estimé M. MICKAEL FORREST, du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS). « Le FLNKS tire un bilan positif de la première consultation, puisque 80% du peuple kanak s’est exprimé en faveur du oui », s’est-il réjoui, avant d’ajouter: « Nous avons perdu la bataille des chiffres, mais gagné la bataille politique. »
Il a ensuite dénoncé des « manœuvres visant à favoriser les partisans profrançais », notamment le fait que, selon lui, la majorité des médias étaient partisans du « non », ou encore « l’appui financier de la grande bourgeoisie locale » au camp non indépendantiste. Il a aussi pointé « le problème scandaleux des listes électorales » et « les difficultés s’agissant du vote par procuration ».
Le pétitionnaire a regretté que « l’audit de la décolonisation demandé par le FLNKS et accepté par la puissance de tutelle soit resté à quai, la faute à des manœuvres régulières, notamment ici à New York. » Il a rappelé que le Secrétaire général de l’ONU avait répondu au Premier Ministre français que l’Organisation n’était « pas mandatée pour réaliser un tel audit ». Or, selon lui, « c’est bien le Comité spécial qui reçoit mandat de l’Assemblée générale pour accompagner Kanaky-Nouvelle-Calédonie. »
« L’immigration massive organisée déséquilibre la société », a-t-il déploré, avant de conclure en réaffirmant, « notre ferme détermination de voir Kanaky-Nouvelle-Calédonie accéder à l’indépendance l’an prochain ».
Sahara occidental
M. SIDI M. OMAR, représentant du Front POLISARIO, a rappelé que, contrairement à la plupart des anciennes colonies africaines, la décolonisation du Sahara occidental avait été « violemment interrompue » en 1975 par l’occupation illégale du territoire par le Maroc, qui se poursuit aujourd’hui. Comme elle le fait chaque année devant cette Commission, la Puissance occupante, le Maroc, et ses défenseurs vont à nouveau avoir recours à la désinformation et fabrication des faits pour présenter leurs données inexactes au sujet du Sahara occidental, a-t-il prédit. Il n’en reste pas moins que « nier la vérité ne changera pas les faits », a tranché le représentant du POLISARIO pour lequel il ne fait pas de doute que l’ONU ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur ce territoire, tout comme elle ne reconnaît pas son occupation et l’annexion illégale de certaines de ses parties. Le Sahara occidental reste un territoire non autonome et son peuple a le droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance, conformément à la résolution 1514 de l’Assemblée générale de 1960 et d’autres résolutions pertinentes, a réaffirmé aujourd’hui M. Sidi Omar.
Alors qu’il resserre son occupation illégale, le Maroc continue de perpétrer des violations massives des droits de l’homme contre les civils sahraouis, y compris des femmes, des hommes, des enfants et des personnes âgées, a-t-il accusé. « Des arrestations arbitraires, des actes de torture et des passages à tabac sont monnaie courante de la part des autorités marocaines contre la population civile sahraouie », a poursuivi le représentant, en affirmant que la plupart de ces actes sont commis en l’absence de surveillance internationale, en raison de la « censure médiatique » et du « blocage militaire » imposés par le Maroc sur les « territoires sahraouis occupés ». Le pétitionnaire a ensuite dénoncé « l’exploitation et le pillage » des ressources naturelles sahraouies par le Maroc, de même que la production et l’exportation massives par ce pays de cannabis, qui ferait, selon lui, l’objet d’un trafic considérable au même titre que d’autres stupéfiants via le « mur militarisé » par les forces marocaines au Sahara occidental. Ce trafic illicite serait une source majeure de financement des organisations terroristes transnationales opérant dans les régions du Sahara et du Sahel, s’est alarmé M. Omar.
Sous la supervision de l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général, M. Horst Kölher, les deux parties au conflit s’étaient rencontrées à Genève, à deux reprises, en décembre 2018 puis en mars 2019, en présence également de délégations des pays voisins, l’Algérie et la Mauritanie. Le processus sous conduite de l’ONU a permis aux Sahraouis d’entrevoir un « rare espoir », a relaté le pétitionnaire. « Toutefois, l’intransigeance démontrée par la délégation marocaine au cours des pourparlers a rapidement compromis les chances de faire des progrès sur le fond ou de renforcer la confiance mutuelle entre les deux parties », a déploré M. Omar. Après la démission, le 22 août 2019, de M. Köhler, le processus de paix s’est retrouvé dans une impasse, en dépit des concessions et des sacrifices consentis par le Front POLISARIO, a-t-il constaté à regret, en accusant le Maroc d’avoir exploité cette pause pour intensifier ses « actions déstabilisantes » au Sahara occidental. « Il est impératif de ne pas perdre davantage de temps pour rétablir l’élan pris par le processus politique », a exhorté le représentant. « Notre droit inaliénable à librement déterminer notre avenir ne peut être supplanté par les réalités coloniales créées par la Puissance occupante dans le territoire au cours de son occupation prolongée et par l’intensification de ses politiques de peuplement et de répression », a ajouté le pétitionnaire. Dès lors, la question principale qui se pose à ce Comité est très simple, a-t-il estimé: « Est-ce que nous permettons à la ‘loi du plus fort’ de prévaloir dans le cas du Sahara occidental et, dès lors, de ne pas contester l’occupation illégale du Territoire par le Maroc? Ou allons-nous défendre sans réserve les principes de la légalité internationale et des résolutions de l’Assemblée générale relatives à cette question? ». Pour lui, la principale question à laquelle la Quatrième Commission doit répondre est de savoir si l’on va autoriser la « loi du plus fort » de gagner dans le cas du Sahara occidental, et autoriser que l’occupation illégale marocaine se poursuive ou si l’on va défendre les principes de la légalité internationale et les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale sur cette question. Pour M. Sidi Omar et le peuple sahraoui la loi du plus fort n’est pas une « option ».
M. DANIEL DART, de l’organisation DEC Projects, s’est passionné pour la question du Sahara occidental il y a trois ans. Il a affirmé « avoir lu tous les articles et livres qu’il avait pu trouver » sur le sujet et s’être rendu à plusieurs reprises dans la région. « Plus j’en apprenais et plus j’étais dégoûté par les actes du Maroc, mais aussi par le silence et la passivité de l’ONU », a-t-il accusé. Le pétitionnaire a dénoncé les « violations massives des droits de l’homme » qu’il a imputées au Maroc. Il s’est ensuite lancé dans une diatribe contre la Quatrième Commission. « Depuis 44 ans, vous niez le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui! Que cette Commission existe encore est une honte pour la communauté internationale, vous n’avez rien fait pour dénoncer le Maroc et ses mensonges! » s’est-il exclamé. « Vous êtes face à une guerre et vous restez les bras croisés », a-t-il continué, avant d’appeler à la signature d’une lettre qu’il a rédigée pour l’organisation d’un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui.
M. MOHAMED ALI ARKOUKOU, de l’organisation Familles déplacées, a dit défendre le « territoire occupé » de la République du Sahara occidental et souhaité « faire entendre la voix des Sahraouis ». La poursuite de cette dernière situation coloniale en Afrique est imputable, selon lui, à l’incapacité de l’ONU de faire appliquer un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui, mais également à l’influence de la France et du Royaume marocain. Pour lui, la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) ne fait que servir les intérêts de la monarchie alaouite alors que le peuple sahraoui est malmené au quotidien par le « colon marocain ». Nous sommes un peuple occupé mais condamnons la manière avec laquelle le Conseil de sécurité traite de cette question, a lancé le pétitionnaire, en demandant le démantèlement du Comité des amis du Sahara occidental. Il a également demandé au Conseil de mettre fin à la MINURSO et à son mandat. Le Conseil de sécurité doit endosser la responsabilité qui est la sienne et protéger le peuple sahraoui de la monarchie alaouite.
M. MULA AHMED, qui parlait au nom de la Sahrawi Association in the United States, a dénoncé l’absence de liberté d’expression au Sahara occidental et accusé le Maroc de continuer de l’occuper. Il s’agit d’une question de droit international, d’autodétermination et de la capacité de l’ONU de faire respecter ses propres résolutions, a-t-il estimé. Toutefois, au fil des ans, la situation sur le terrain a changé, et le pétitionnaire a fait état de violations des droits de l’homme des Sahraouis qui « osent parler d’autodétermination » au Sahara occidental. Il faut que l’Envoyé personnel du Secrétaire général puisse avoir l’autorité de faire respecter les résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il exigé, en reprochant son manque d’implication sur cette question à l’Union africaine. Il a salué l’initiative des États-Unis de limiter le renouvellement du mandat de la MINURSO à des périodes de six mois.
Mme CARROLL EADS, de Capitol Hill Prayer Partners, s’est inquiétée de la situation des jeunes dans les camps de Tindouf, où, selon elle, les écoles enseigneraient la haine aux enfants. Elle a dit que la situation dans les camps pousse de nombreux jeunes à se livrer à des activités illicites et clandestines dont le trafic d’armes, de personnes et de drogues, voire à des activités terroristes. Face à cette impasse, la pétitionnaire a estimé que le plan marocain pour l’autonomie du Sahara occidental demeure l’option la plus crédible pour permettre un développement économique rapide et viable et une résolution politique viable.
« Les Sahraouis sont pris au piège dans une situation désespérée. Le Hezbollah a créé des camps de formation près de Tindouf pour les recruter dans leurs rangs terroristes et les utiliser pour leurs activités criminelles comme les trafics de drogue et d’armes », a assuré Mme SUSAN ASHCRAFT, du Ministère de la justice des États-Unis, Drug Enforcement Administration. Selon elle, des organisations criminelles, des cartels sud-américains ainsi que des groupes djihadistes comme Al-Qaida, Boko Haram ou Al Shebab ont infiltré les camps de la région et y recrutent activement.
La pétitionnaire a affirmé qu’Adnan Abou Walid Al Sahraoui, membre du Front POLISARIO, avait participé à l’attaque du 4 octobre 2017 qui a fait quatre morts parmi des soldats américains. Elle lui a également imputé l’enlèvement de travailleurs humanitaires européens, avant de soutenir que le Hezbollah aurait fourni des armes au Front POLISARIO, dont des missiles sol-air qui peuvent abattre un aéronef commercial. Elle a, en conclusion, apporté son soutien à l’initiative d’autonomie proposée par le Maroc.
Mme SHERRY ERB s’est demandé pourquoi l’ONU autorisait un groupe militaire à gérer de manière exclusive un camp de réfugiés sans aucun contrôle et sans rendre de comptes. Elle a indiqué que l’aide humanitaire distribuée dans les camps de Tindouf depuis 40 ans étaient quantifiée selon des chiffres que surestimerait le Front POLISARIO. En l’absence de tout contrôle gouvernemental ou national, les excédents de l’aide humanitaire allouée aux camps de Tindouf se retrouvent dans de nombreux pays d’Afrique du Nord, comme cela a été documenté par l’Office européen de la lutte antifraude en 2014. Elle a jugé qu’il était temps de demander de la transparence au sujet de l’administration des camps de Tindouf.
« Je me suis rendue à trois occasions dans les camps de Tindouf, la première fois il y a 20 ans », a relaté Mme DONNA SAMS, de l’organisation Antioch Community Church. Elle a souhaité évoquer trois problématiques majeures: les enfants, les jeunes et les familles. « Les conditions dans les camps sont dures et les opportunités limités », a-t-elle constaté à regret.
Elle a ensuite accusé les responsables du Front POLISARIO de détourner l’aide humanitaire, poussant les enfants des camps à la déscolarisation pour se livrer à des activités criminelles afin de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. « Les jeunes sont dans un vide et se tournent vers les armes, la drogue et le trafic d’êtres humains pour gagner de l’argent », a-t-elle déploré. Les familles sont brisées et vivent divisées entre les camps de Tindouf et le Maroc.
« Le Plan d’autonomie proposé par le Maroc est la meilleure solution », a-t-elle estimé, avant de conclure: « le Gouvernement marocain apprécie l’éducation, donnera davantage de chance aux enfants et aux jeunes pour l’avenir et les familles seront réunies. »
Mme ANA MARIA STAME, de Centrist Democratic International Women, a dénoncé « l’un des enfers les plus sinistres de la planète: les camps de Tindouf qui sont une prison à ciel ouvert ». Les habitants de ces camps sont réduits au silence par le leadership du POLISARIO, a-t-elle affirmé, faisant état de tortures et de mauvais traitements des prisonniers du POLISARIO alors que les visites médicales sont interdites et qu’ils n’ont recours à aucune justice. Ces pratiques barbares sont menées en toute impunité, s’est-elle indignée, en reprochant au pays hôte de sous-traiter la protection des réfugiés sahraouis au POLISARIO.
Mme FATEMATU JATRI EMHAMED, du Peace and Justice Center à Decorah, Iowa, a plaidé pour une solution politique pacifique et pour le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. Rappelant que cette Commission existe pour décoloniser des territoires, elle a estimé qu’elle devrait avoir honte de son incapacité de faire appliquer ses propres résolutions faute de coopération de la Puissance coloniale marocaine. La représentante a également dénoncé le soutien de la France au Maroc et l’inaction de l’ONU.
Mme TANYA WARBURG, de Freedom for all, a déclaré que les vols et les viols étaient monnaie courante dans les camps de Tindouf sous contrôle du Front POLISARIO, soutenant que les victimes de viols étaient emprisonnées si elles osaient dénoncer leurs auteurs. « Parce qu’elles n’ont aucun recours, l’impunité encourage les violeurs », a-t-elle déploré, avant de relater le témoignage d’un sahraoui violé pour avoir dénoncé la mort de son père et de sa sœur. Mettant l’accent sur la vulnérabilité des réfugiés des camps de Tindouf face à la criminalité des membres du Front POLISARIO, Mme Tanya Warburg a exhorté le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à procéder à un recensement et à un suivi de la situation de ces réfugiés. « Après 44 ans, les camps de Tindouf doivent être démantelés et les réfugiés réinstallés au Maroc ou ailleurs », a-t-elle insisté en conclusion.
Mme NANCY HUFF, de Teach the Children International, a fustigé le détournement de l’aide humanitaire en direction des camps de Tindouf, qu’aurait révélé dès 2014 l’Office européen de lutte antifraude. L’aide ainsi détournée servirait, selon lui, à alimenter un véritable marché noir organisé, aux dépens de la population, par les « voleurs corrompus » du Front POLISARIO. La pétitionnaire a estimé que si les dirigeants du POLISARIO s’étaient livrés à de telles exactions à l’échelle des camps de Tindouf, ils ne peuvent pas administrer un territoire entier. C’est la raison pour laquelle Mme Huff a appelé l’ONU à adopter le plan d’autonomie tel que proposé par le Maroc, seul moyen à ses yeux d’offrir un avenir productif aux Sahraouis des camps de Tindouf.
M. JONATHAN HUFF, des Services d’instruction de sûreté et de sécurité, a affirmé que les camps de Tindouf avaient tissé des liens avec des groupes terroristes à travers toute l’Afrique du Nord et que, de ce fait, leur présence est une source d’instabilité dans toute la région du Sahel. Le Maroc a fait beaucoup, dans ce contexte, pour faire du Sahara une région développée, a estimé le pétitionnaire, qui a qualifié le plan d’autonomie proposé par le Maroc de « sérieux et de crédible ». Ce plan, selon nombre d’acteurs clefs de cet important dossier onusien, pourrait former le socle d’un règlement pacifique au Sahara, a-t-il estimé.
Mme VERONICA JANE BAHAIJOUB, de l’organisation Family Protection, a axé son intervention sur les abus des droits de l’homme commis par le Front POLISARIO l’accusant « d’entreposer des réfugiés » aux alentours de la ville de Tindouf, dans le sud-ouest de l’Algérie. Elle a donné la définition juridique de « l’entreposage », à savoir la pratique consistant à garder des réfugiés dans des situations protégées avec une mobilité limitée, dans l’oisiveté forcée et la dépendance, avec leurs vies indéfiniment en suspens ». Rappelant que l’Algérie est signataire des deux Conventions de 1951 relatives au statut de réfugié et son Protocole de 1967, elle s’est demandé pourquoi les réfugiés de Tindouf continuent à être privés de ce statut juridique, de l’emploi rémunéré, de la liberté de mouvement et de papiers d’identité. Elle a affirmé qu’il n’y avait ni liberté d’expression, ni de société civile indépendante et de judiciaire indépendant ou de partis politiques sur place et que l’accès aux camps de Tindouf par des observateurs des droits de l’homme externes est limité et sujet à des exigences de visas stricts de la part des autorités militaires algériennes.
Le Maroc a été accusé d’être un État policier et pourtant, a-t-elle soutenu, la population du Sahara occidental jouit de la liberté de se déplacer librement dans tout le Royaume et à l’étranger, a remarqué la pétitionnaire, alors que le Front POLISARIO a refusé un recensement dans les camps, ce qui permettrait, selon elle, d’améliorer l’assistance. Citant le rapport de l’Office européen antifraude de 2015, elle a rappelé qu’il était question de détournement de l’aide adressée aux camps de Tindouf dont les habitants dépendent pratiquement exclusivement de l’aide internationale. « Alors que les membres du Front POLISARIO vivent bien, voyagent et dépensent librement pour leur propagande, les réfugiés restent privés de leurs droits humains fondamentaux », s’est-elle indignée, en ajoutant que même une faction dissidente du Front POLISARIO, les Khat Achahid, aurait confirmé l’enrichissement du Front POLISARIO aux dépens de la population locale. La pétitionnaire a salué la décision du Secrétaire général de l’ONU d’installer un système électronique pour assurer la surveillance de l’aide humanitaire internationale dans les camps de Tindouf. Cela n’exclut cependant pas, selon elle, l’impératif d’un recensement dans ces camps, une demande de longue date du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Conseil de sécurité.
M. ERIC JENSEN, en sa qualité d’ancien chef de mission de l’ONU au Sahara occidental, a retracé l’histoire du différend sahraoui au cours des 20 dernières années et les péripéties qui ont amené le Conseil de sécurité à appuyer la proposition marocaine d’autonomie régionale. « Ce conflit qui dure depuis une génération est très couteux pour les deux parties », a-t-il ajouté avant d’appeler à l’urgence d’une solution politique.
« Ce sont 90 000 personnes qui sont incarcérées dans les camps de Tindouf », a affirmé M. SYDNEY SAMON ASSOR, du Surrey Three Faith Forum, estimant qu’ils y sont retenus par les responsables du Front POLISARIO. Il a dit lutter pour leur « libération », bien que beaucoup lui aient assuré que c’était une « cause perdue ». Le pétitionnaire a dénoncé le détournement de l’aide humanitaire à tous les niveaux. « L’aide qui arrive à Oran est réduite de moitié une fois sur place pour être revendue, puis elle l’est encore de moitié par les chauffeurs qui doivent l’acheminer vers les camps », a-t-il soutenu. Selon lui, l’existence des camps est artificiellement maintenue de manière à profiter à « une clique d’élus ». M. Assor a cité les conclusions du rapport de l’Office européen de lutte antifraude pour étayer son propos, avant de déplorer le fait que les organisations humanitaires n’ont pas accès au terrain.
Mme VANESSA RAMOS, de l’American Association of Jurists, a pointé du doigt l’exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara occidental par le Maroc, estimant qu’il est de la responsabilité de l’ONU de réaffirmer et de combattre l’existence de toute forme de colonialisme, y compris celui exercé par le biais d’une exploitation économique « incompatible avec la Charte des Nations Unies ». Face à ces pratiques et aux violations des droits du peuple du Sahara occidental, y compris les détentions arbitraires, le pétitionnaire a exhorté l’Organisation à protéger effectivement les droits culturels, sociaux, civiques, politiques et économiques du peuple du Sahara occidental et le Maroc à mettre fin à ses activités militaires dans la région, conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.
« Quand aurais-je le droit de voter à un référendum pour décider de l’avenir de mon territoire? » s’est demandé Mme Rahab Mohamed Nafe, après avoir expliqué qu’elle avait grandi dans les camps de réfugiés avec deux litres d’eau par jour en plein désert. Elle a demandé que la promesse de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) d’organiser un référendum soit enfin respectée. « J’ai eu une bourse d’études à 18 ans qui m’a permis de passer d’une vie de réfugiée à celle d’étudiante européenne », a-t-elle dit, avant d’espérer qu’elle sera la dernière étudiante sahraouie à devoir venir à New York pour demander la décolonisation de son pays.
M. SAID AYACHI, Président du Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui, une ONG algérienne, a affirmé que le peuple sahraoui vit une tragédie immense et une injustice violente et intolérable, « dont nous sommes tous en partie responsables à cause de notre silence et de notre inaction ». Malgré les dénonciations justifiées et répétées, malgré les multiples rapports vérifiés et établis par des ONG et des observateurs internationaux, les droits de l’homme continuent d’être violés par le Maroc au Sahara occidental, a-t-il affirmé, « ce territoire que le Royaume occupe depuis 44 ans sans que nul ne lui en ait donné le mandat ».
Le pétitionnaire a affirmé que le Maroc terrorise quotidiennement de façon délibérée la population sahraouie aux mains de son armée, de sa police et de son administration, expliquant cela par l’intention d’intimider les Sahraouis et de les réduire au silence, voire de les empêcher de revendiquer légitimement leur droit à la liberté et la dignité. Il a fait état de fosses communes et d’exécutions judiciaires ainsi que de prisonniers sahraouis dans les prisons marocaines pour avoir revendiqué leur liberté. Le pétitionnaire a également accusé le Maroc d’exploiter, en toute illégalité les ressources naturelles du Sahara occidental avec la complaisance de certains États étrangers. Pour le pétitionnaire, 27 ans après la création de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui n’a toujours pas eu lieu, à cause de manœuvres dilatoires, de tergiversations infinies et de l’arrogance des autorités marocaines et de sa posture de défi vis-à-vis de la communauté internationale. Dès lors, il a demandé un élargissement du mandat de la Mission pour protéger les Sahraouis et faire respecter les droits de l’homme au Sahara occidental et d’organiser ce référendum le plus rapidement possible.
M. YOUSSOUF COULIBALY, professeur à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako, a assuré que le Front POLISARIO était incapable d’assurer la sécurité des Sahraouis car il serait dépourvu d’autorité légitime. Le pétitionnaire a estimé que si le Sahara est devenu un territoire de non-droit, cela est dû à la situation d’instabilité qui prévaut dans et aux alentours du camp de Tindouf. « Cette situation constitue l’un des facteurs de crise et de déstabilisation des États du Sahel avec des connexions régulières entre groupes armés au Nord du Mali et membres du Front POLISARIO », a-t-il asséné. L’ONU gagnerait sur tous les plans à accepter le plan d’autonomie élargie proposée par le Royaume du Maroc, a-t-il ajouté.
M. NYKAKY LYGEROS a insisté sur le niveau de développement des provinces du sud du Maroc et sur la représentativité des élus locaux du Sahara. « Le Front POLISARIO est illégitime », a-t-il affirmé avant de dénoncer « l’appareil de propagande, enraciné dans le passé, du Front POLISARIO ». Selon lui, aucun substrat politique, social ou culturel ne peut soutenir la viabilité de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), et beaucoup ont abandonné cette idée. La vie à Laâyoune prouve que la population locale se moque des « prétentions absurdes du POLISARIO et de la RASD ».
M. BRIAN JAMISON, de Date Palm Consulting, a déclaré qu’il intervenait à titre personnel sans être rémunéré ni invité à le faire. Il a expliqué s’être rendu à six reprises dans les camps sahraouis pour y observer leurs efforts « pour survivre et transformer le sable en terre ». Il a rappelé que depuis l’arrivée des premiers Casques bleus au début des années 1990, deux générations de Sahraouis attendent que justice soit rendue.
« La proposition du Maroc est la meilleure solution », a estimé M. ANDREW ROSEMARIE, de l’International Law Chambers, Europe, qualifiant son plan d’autonomie d’« équitable, de flexible et de prévisible ». Il a mis en avant les succès économiques et les progrès démocratiques du Maroc pour étayer son propos.
M. JOSE REVERT CALABUIG, Juristes pour la Paix et les Droits de l’Homme, a dit que le Sahara Occidental est un territoire militairement occupé. Il a expliqué que le recours, par le Maroc, à la déportation forcée, au transfert de colons Marocains, à la construction de colonies illégales et à la torture sont autant d’actes en contradiction avec les conventions de Genève, leur premier protocole, ainsi que la quatrième Convention de La Haye de 1907 relative aux obligations de la Puissance occupante.
Mme MARIA INES MIRANDA NAVARRO, de l’Association internationale des juristes pour le Sahara occidental, a dénoncé le « silence incompréhensible » de la Quatrième Commission sur ce dossier. Elle s’est aussi étonnée de celui de l’Espagne, Puissance coloniale qui parle de Gibraltar mais pas du Sahara occidental. « Le peuple sahraoui a été divisé, enfermé, maltraité, ses droits à l’autodétermination et à la souveraineté bafoués, tandis que les responsables vivent en toute impunité », a déploré la pétitionnaire.
Mme JANET LENZ, Not Forgotten, International Faith and Peace Dialogue, a déclaré avoir passé beaucoup de temps dans les camps de Tindouf en tant que travailleuse humanitaire américaine. Elle a estimé que le peuple sahraoui a été trahi parce qu’il lui a été demandé de déposer les armes en échange de l’organisation d’un référendum qui n’a jamais eu lieu. Elle a pris la défense de la nation sahraouie déplacée de force.