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matin & après-midi
MER/2082

La Conférence sur la biodiversité marine en haute mer ouvre le dossier des ressources génétiques marines

Les négociations sur un traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer se sont poursuivies, aujourd’hui, dans le cadre des Groupes de travail sur « les études d’impact sur l’environnement » et sur les « ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages », un enjeu de taille qui sera examiné jusqu’au 17 septembre.*

Les délégations ont commencé par examiner le champ d’application géographique pour les ressources génétiques marines.  Ce champ doit être le plus large possible, a conseillé le Groupe des États d’Afrique, favorable à un traité qui s’appliquerait aussi aux produits dérivés pour ne pas créer un vide juridique dans lequel s’engouffrer.  L’inclusion de ces produits a été rejetée par l’Union européenne, laquelle s’est également opposée à l’idée que le futur traité se limite à la zone internationale des fonds marins, « La Zone », comme l’a prôné la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Le consensus sera difficile à trouver, a pronostiqué la République de Corée, alors que les Philippines défendaient, avec d’autres comme la Colombie ou Samoa, l’idée d’une distinction entre les poissons comme produits commerciaux et les poissons comme ressources génétiques, ladite distinction devant être établie par « un organe scientifique » prévu par le futur traité. 

Auparavant, les délégations ont conclu leurs discussions sur les études d’impact sur l’environnement (EIE), un processus qui, au début de sa planification, cerne et évalue les risques environnementaux d’un projet spécifique.  Comme la veille, les discussions ont, sans l’ombre d’un consensus, tourné autour de l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, de la relation avec les procédures prévues par les instruments, cadres et organes existants et des activités pour lesquelles une telle étude est prescrite.

L’inscription éventuelle des évaluations stratégiques environnementales (ESE) dans le futur traité a également divisé les délégations.  Quels en sont les paramètres?  Quels liens établir avec les EIE? s’est interrogé le Mexique.  Quels programmes et quelles politiques seraient évalués stratégiquement? s’est aussi demandée la Chine.  Il faut tout simplement écarter ces évaluations du futur traité, ont tranché les États-Unis, arguant que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer n’en exige pas.

Les négociations reprendront demain mercredi 12 septembre à partir de 10 heures.

*A/CONF.232/2018/3

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE

Groupe de travail sur les études d’impact sur l’environnement

Les délégations ont poursuivi leurs discussions sur les études d’impact sur l’environnement (EIE), un processus qui, au début de sa planification, cerne et évalue les risques environnementaux d’un projet spécifique.  Comme hier, les discussions ont tourné autour de l’obligation de réaliser une étude d’impact sur l’environnement, de la relation avec les procédures prévues par les instruments, cadres et organes existants et des activités pour lesquelles une étude d’impact sur l’environnement est prescrite.

Les Maldives, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), ont fait observer que les normes en matière d’EIE varient énormément d’une région à l’autre et qu’il serait judicieux de trouver un terrain d’entente.  Il s’agirait, a poursuivi l’Autorité internationale des fonds marins, d’identifier les critères et de veiller à ce que les EIE soient validées par les bonnes institutions, comme la Commission juridique et technique du Conseil de l’Autorité, qui est chargée de préparer des évaluations stratégiques.  « Il s’agit d’un système complet et malgré tout assez souple. »  La liste des critères ne devrait pas être définitive, a estimé l’Union internationale pour la conservation de la nature.  Les questions à se poser sont « y a-t-il un impact probable à évaluer? » et « quel niveau d’évaluation est nécessaire? » a précisé le Fonds mondial pour la nature.  Le futur traité est donc l’occasion d’établir des normes juridiques minimales.  Le Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement en Antarctique ou « Protocole de Madrid » pourrait servir de « référence » pour la définition des critères, dans la mesure où son Annexe porte précisément sur les EIE, a fait valoir l’Islande.

Les États-Unis ont défendu le concept d’« équivalence fonctionnelle », qui dispenserait de mener une EIE si une l’avait déjà été dans un « contexte sectoriel » analogue.  Ils ont également encouragé les États à adopter des mesures de vérification des EIE.  Nauru, au nom des petits États insulaires en développement (PEID), a donc suggéré de mettre en commun les ressources de ces îles pour pallier le manque de financements et promouvoir une « internationalisation » des processus de prise de décisions ».  C’est le niveau « national » qui a été privilégié par l’Autriche, au nom de l’Union européenne.  Une position vigoureusement défendue par la Norvège, ou encore la Fédération de Russie, laquelle a également contesté l’idée que les processus puissent être supervisés par des commissions techniques extérieures.  Une telle idée suggèrerait que l’on ne peut pas faire confiance aux États, a-t-elle relevé, appuyée par les États-Unis ou la Nouvelle-Zélande.  Pour l’Australie, il revient à l’État du pavillon concerné de mener une EIE dans la plus grande transparence possible, y compris vis-à-vis des États côtiers, même s’ils ne participent pas à l’étude en tant que telle.

Les EIE doivent faire l’objet de consultations à toutes les étapes, avant toute décision sur leur lancement, a voulu l’Égypte, au nom du Groupe des 77 et de la Chine.  Il faut, ont préconisé à leur tour les Maldives, des consultations publiques avec les communautés autochtones locales détentrices de savoirs traditionnels.  Les informations basiques sur l’activité envisagée, une prévision de l’EIE et une description du « scénario du pire », voilà ce que devrait prévoir le futur traité, a estimé le Togo.  Toute activité qui pourrait affecter les fonds marins devra être « assujettie » aux EIE, a martelé le Togo, sans oublier les effets transfrontières, a ajouté la Colombie.

Les États côtiers adjacents doivent en effet être notifiés des EIE et de leurs résultats, a renchéri le Maroc.  Tous les États doivent être consultés sur les activités pour lesquelles une EIE est prescrite, a estimé l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (IUCN) alors que l’approche régionale était défendue par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Si une EIE est justifiée, le contenu et le processus devraient être harmonisés entre les régions, a acquiescé le Comité international de protection des câbles, ajoutant que les entreprises privées, propriétaires des câbles sous-marins, doivent être consultées à chaque étape de l’EIE.

Quelles modalités l’instrument devrait-il prévoir pour faciliter l’échange d’informations concernant les études d’impact sur l’environnement?  L’Union européenne a défendu la création d’un « centre d’échange » qui devrait être géré, selon Nauru, par le secrétariat du futur traité et dont les informations seraient ouvertes au public, a ajouté le Mexique.  Sans centre d’échange, pas d’informations sur les besoins liés au renforcement des capacités, ont dit les États-Unis.  Le centre pourrait être un véritable centre d’études environnementales, a pronostiqué le Sénégal.

Le futur traité devrait-il comporter des dispositions sur les évaluations stratégiques environnementales?  Il faut des normes, a estimé l’Algérie.  Ici aussi, l’approche régionale a été privilégiée par Antigua-et-Barbuda, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), qui a insisté sur des informations démontrant l’importance des évaluations, sur la participation du public et sur le principe du pollueur-payeur.  Il est difficile, a argué l’Union européenne, d’évaluer l’effet des activités dans les zones au-delà de la juridiction nationale, en particulier leurs effets cumulatifs qui peuvent être soumis à la fois à des EIE et à des évaluations stratégiques.  Ces évaluations, qu’elles soient menées collectivement ou individuellement, nécessitent une coopération régionale ad hoc ou fondée sur des accords existants.  Tenant de l’approche régionale pour les EIE, la Fédération de Russie s’est prononcée pour une approche mondiale s’agissant des évaluations stratégiques puisque les activités concernées sont déjà couvertes par des cadres et arrangements internationaux.

Le Mexique s’est en effet interrogé sur l’opportunité d’inscrire les évaluations stratégiques dans le futur traité.  Quels en sont les paramètres?  Quels liens établir avec les EIE?  Quels programmes et quelles politiques seraient évalués stratégiquement? s’est aussi demandé la Chine.  On peut envisager un mandat et une portée clairs, a estimé la République islamique d’Iran.  Non, il faut tout simplement renoncer aux évaluations stratégiques dans le futur traité, ont tranché les États-Unis.  La Convention sur le droit de la mer n’en exige pas.  On peut tout de même réfléchir aux éléments à mettre en place, a plaidé le Nigéria qui, avec le Sénégal, a souligné l’importance des évaluations stratégiques dont les résultats pourraient enrichir les EIE.  Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a appuyé cette position.    

Groupe de travail sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages

Les délégations ont examiné le champ d’application géographique, l’accès et le partage des avantages des ressources génétiques marines (RGM), y compris les questions relatives au partage des avantages. 

Le but, a prévenu, l’Égypte, au nom du Groupe de 77 et la Chine, est d’éviter de fragiliser les ressources marines, ce qui doit clairement figurer dans le futur traité.  Le champ d’application doit être le plus large possible, a conseillé l’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique.  Le nouvel instrument doit s’appliquer aux produits dérivés pour ne pas créer un vide juridique dans lequel on pourrait s’engouffrer.  Il faut une distinction « pratique » entre les différents poissons et les autres ressources biologiques qui ne sauraient être couverts par le même régime juridique, ont plaidé les Maldives, au nom l’Alliance des petits États insulaires.  La Barbade, au nom de la CARICOM, a plutôt voulu que le champ d’application se limite à la zone, les zones économiques exclusives et le plateau continental étant épargnés.

Au-delà de la zone aussi, ont insisté, avec le Pérou, la Thaïlande et la Nouvelle-Zélande, l’Union européenne qui s’est opposée à l’inclusion des produits dérivés.  Il faut couvrir les ressources « ex situ et in silico », a insisté, à son tour, Nauru, au nom des petits États insulaires en développement (PEID).  L’instrument doit être clair, a prévenu l’Argentine, et ne toucher en aucun cas les ressources des zones relevant de la juridiction nationale.  Cette position a été fermement appuyée par la Chine.  Le consensus sera difficile, à reconnu la République de Corée, alors que les Philippines défendaient, avec d’autres comme la Colombie et Samoa, l’idée d’une distinction entre les poissons comme produits commerciaux et les poissons comme ressources génétiques, ladite distinction devant être établie par « un organe scientifique » prévu par le futur traité. 

Il faut se concentrer sur les ressources en tant que telles et non sur leur valeur potentielle, a mis en garde le Saint-Siège, prônant une distinction entre ressources vivantes et non vivantes dont la valeur économique varie d’une espèce à l’autre.  Nous devons avoir un certain degré de « certitude juridique » s’agissant des ressources marines du plateau continental, a estimé Maurice qui a demandé un débat sur la biodiversité marine dans la zone de plateau continental.

 

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