En cours au Siège de l'ONU

Le Secrétaire général à l’Assemblée générale: « Ne venez pas avec un discours, venez plutôt avec un plan » au Sommet Action Climat en septembre

Soixante-treizième session,
Réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous
AG/12131

Le Secrétaire général à l’Assemblée générale: « Ne venez pas avec un discours, venez plutôt avec un plan » au Sommet Action Climat en septembre

À l’ouverture d’une réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous, organisée les 28 et 29 mars par l’Assemblée générale, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a exhorté les dirigeants du monde qui participeront au Sommet Action Climat qu’il organisera le 23 septembre prochain à New York, à venir « avec un plan », afin que nous puissions nous engager « une fois pour toute » sur « une voie durable ».  Avec le même sens de l’urgence, la Présidente de l’Assemblée générale, Mme María Fernanda Espinosa, les a priés d’« écouter les jeunes » car, il n’y a pas de « planète B ».

« Les changements climatiques sont en cours et nous affectent tous », a alerté le Secrétaire général.  « Onze ans, c’est tout ce qu’il nous reste pour changer de cap », a renchéri la Présidente de l’Assemblée.  De fait, le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a sonné l’alarme sur l’irréversibilité et l’ampleur de ce phénomène. 

Chaque semaine nous apporte un nouvel exemple de dévastation liée au climat, et aucun pays n’est à l’abri, a résumé M. Guterres, tout en notant que ce sont toujours les personnes pauvres et vulnérables qui sont les plus touchées.  Il suffit de voir le cyclone Idai qui vient de dévaster le Mozambique, le Malawi et le Zimbabwe.  Et la situation ne fera qu’empirer si « nous n’agissons pas dès maintenant », a-t-il averti.

Cette réunion en présence notamment de chefs d’État et de gouvernement, de la Secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), de l’Envoyé spécial pour le Sommet sur le climat 2019, ainsi que de nombreuses organisations de jeunes, s’inscrit dans le cadre d’une résolution* sur la « Sauvegarde du climat mondial pour les générations présentes et futures », adoptée par l’Assemblée générale le 20 décembre 2017.

Considérant qu’elle appartient à « la dernière génération qui peut éviter de causer des dommages irréparables à la planète », Mme Espinosa a jugé impératif d’écouter les milliers de jeunes étudiants qui se mobilisent dans le monde entier pour « réclamer des réponses au problème des changements climatiques ».  « Ma génération et les générations futures vont faire face à cette bataille pour vivre en bonne santé.  Le moment d’agir c’est maintenant! » a ainsi lancé à la tribune Mlle Shedonna Richardson, représentante de la jeunesse.  Dans les Caraïbes, on ne peut parler de développement durable sans tenir compte de la réalité des changements climatiques, a-t-elle témoigné.

« Nous n’avons pas d’excuse pour ne pas agir », a martelé M. Guterres.  Nous avons des outils pour répondre aux questions soulevées par les changements climatiques, la pression environnementale, la pauvreté et l’inégalité: le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques.  « Nous avons besoin d’ambition et de volonté politique », a encore reconnu le Secrétaire général, en appelant les États Membres à faire en sorte que le plan de travail adopté en décembre dernier à Katowice, en Pologne, par les Parties à la CCNUCC, puisse « libérer son plein potentiel ». 

La Présidente de l’Assemblée a réitéré son appel pour que 2019 soit l’année de l’action climatique à tous les niveaux et avec tous les acteurs.  Car chacun à son niveau peut améliorer son empreinte carbone à travers le choix des aliments consommés, les vêtements, les moyens de transport et les déchets générés.  « C’en est assez du gaspillage et des déchets générés par nos modes de consommation et de production », s’est élevée Mme Espinosa.  « Nous avons besoin de changements systémiques. » 

M. Guterres a justement décelé « un élan grandissant en faveur d’un changement transformationnel », alors qu’un nombre croissant de gouvernements, de villes et d’entreprises comprennent que des solutions climatiques peuvent renforcer nos économies tout en protégeant notre environnement.  Il a appelé notamment à mettre un terme aux subventions aux énergies fossiles et à l’agriculture non viable, et à s’orienter vers les énergies renouvelables, les véhicules électriques et des pratiques adaptées au climat.

« Notre avenir est entre vos mains, ne nous laissez pas tomber! », a plaidé la jeune représentante.  « Nous avons besoin d’une action multilatérale avec tous les gouvernements du monde », a conclu M. Guterres.  Ceux-ci doivent œuvrer main dans la main avec le secteur privé et la société civile.  « Ce sont les jeunes qui portent le flambeau, et l’avenir c’est maintenant. »

Après la séance d’ouverture, l’Assemblée a entamé un débat plénier de haut niveau sur le thème de la réunion, qui se poursuivra demain.

Dans l’après-midi, les participants se sont réunis autour de deux tables rondes pour examiner, d’une part, les synergies entre le climat et le programme de développement durable et, d’autre part, les moyens de mise en œuvre.

Cette réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous a également donné lieu à un déjeuner de travail décliné en « 12 tables de leaders », chacune présidée par un État et comprenant des participants représentant les jeunes, la société civile, le secteur privé, les organisations internationales et les milieux académiques.

* A/RES/72/219

RÉUNION DE HAUT NIVEAU SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE POUR TOUS

Déclarations liminaires

Mme MARÍA FERNANDA ESPINOSA, Présidente de l’Assemblée générale, a salué la présence des chefs d’État et de gouvernement à cette réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous qui témoigne, selon elle, de leur engagement.  Elle a également tenu à saluer le leadership du Secrétaire général, « véritable défenseur du climat ».

Appartenant à « la dernière génération qui peut éviter de causer des dommages irréparables à la planète », la Présidente a jugé impératif d’écouter les milliers de jeunes étudiants qui se mobilisent dans le monde entier pour « réclamer des réponses au problème du changement climatique ».  Leurs messages sont clairs et directs: « Il n’y a pas de planète B », « Le moment de sauver la planète est arrivé »; « Pas un degré de plus ou une espèce en moins ».  Dès lors, a-t-elle averti: « ne pas les écouter est une erreur, tout comme croire que nous disposons de beaucoup de temps! »

Mme Espinosa a articulé son intervention autour de trois problématiques: les changements climatiques en tant que défi qui doit être abordé dans le cadre d’une approche intergénérationnelle; l’interdépendance profonde qui existe entre l’Accord de Paris et le Programme de développement durable à l’horizon 2030; mais d’abord et avant tout l’urgence d’agir, car nous « sommes dans une phase critique ». 

En effet, a-t-elle insisté, « 11 ans, c’est tout ce qu’il nous reste pour changer de cap ».  De fait, le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a sonné l’alarme sur l’irréversibilité et l’ampleur de ce phénomène.  Elle en a voulu pour preuve le récent cyclone Idai qui a dévasté le Mozambique, le Malawi et le Zimbabwe, causant des centaines de morts et affectant des millions de personnes.  « L’une des pires catastrophes météorologiques de l’histoire de l’Afrique », a-t-elle déploré, reprenant à son compte les propos du Secrétaire général.  Ce ne sont là que des signes avant-coureurs de ce que nous devrions éviter, a-t-elle mis en garde.  Elle a tenu à saluer, à cet égard, la réaction rapide des équipes de gestion de secours d’urgence des Nations Unies depuis le début de la crise, tout en se joignant à l’appel humanitaire lancé par le Secrétaire général pour soutenir les victimes de cette catastrophe. 

La Présidente de l’Assemblée a donc réitéré son appel pour que 2019 soit l’année de l’action climatique à tous les niveaux et avec tous les acteurs.  Car, chacun à son niveau peut améliorer son empreinte carbone à travers le « choix des aliments consommés, les vêtements, les moyens de transport et les déchets générés ».  « Nous avons besoin de changements systémiques. » 

Pour Mme Espinosa, une croissance économique en harmonie avec la nature est possible à condition de modifier les modes de production et de consommation et d’éviter les gaspillages et les excès.  Elle a pointé du doigt ce paradoxe de voir 1,3 milliard de tonnes de nourriture gaspillées chaque année, alors que près de 2 milliards de personnes souffrent de la faim ou de malnutrition.

De plus, a-t-elle poursuivi, l’augmentation de la production agricole doit aller de pair avec des mesures de conservation des forêts, « poumons du monde », qui absorbent chaque année l’équivalent de 2 milliards de tonnes de dioxyde de carbone.

La bataille pour la durabilité se joue également dans les villes, où sont produits 70% des émissions mondiales de dioxyde de carbone, a poursuivi la Présidente, exhortant l’ensemble des délégations à s’engager pour que 2020 soit la dernière année d’augmentation de ces émissions causées par l’activité humaine.  À cette fin, elle a plaidé en faveur de davantage de coopération et de transfert de technologie.

Mme Espinosa a ensuite mis en relief la profonde interdépendance entre l’Accord de Paris et le Programme 2030.  Mieux, ils se renforcent mutuellement, car « sans action climatique, aucun programme de développement durable n’est possible ».  Une action climatique audacieuse présente également des avantages économiques d’envergure.  À lui seul, le secteur de l’énergie durable pourrait créer environ 18 millions d’emplois.  Dans le même temps, elle a évalué le coût de l’inaction à 2 milliards de dollars par an et mentionné l’impact sur la santé et le bien-être des populations.  Le nombre de personnes vivant dans la pauvreté en raison des effets climatiques, estimé à 26 millions par an, pourrait être réduit.  Il s’agit aussi de réduire le nombre des déplacés climatiques qui a atteint quelque 2 millions en 2018.  Dès lors, une approche intégrée est essentielle pour faire avancer le Programme 2030 et l’Accord de Paris, a-t-elle insisté, avant d’annoncer une série de manifestations prévue dans les mois à venir afin de « synchroniser encore plus ces engagements ».  Elle a cité les prochains forums politiques de haut niveau, sous les auspices de l’ECOSOC en juillet et de l’Assemblée générale en septembre ainsi que le Sommet sur le climat organisé par le Secrétaire général, une plateforme idéale pour renforcer l’engagement, mobiliser les ressources nécessaires pour répondre à l’urgence générée par les changements climatiques.

Enfin, la Présidente a préconisé d’aborder les changements climatiques dans le cadre d’une approche intergénérationnelle.  « Le rôle des jeunes en tant qu’agent de changement est central. »  C’est une question de survie pour tous, sans exception.  L’humanité est à la croisée des chemins et le moment est venu de décider quel chemin nous voulons emprunter, a-t-elle conclu, voyant dans le multilatéralisme et la coopération « nos meilleurs instruments ».

« Les changements climatiques sont en cours et nous affectent tous », a alerté M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU.  Chaque semaine nous apporte un nouvel exemple de dévastation liée au climat, et aucun pays n’est à l’abri, a-t-il déclaré, tout en notant que ce sont toujours les personnes pauvres et vulnérables qui sont les plus touchées. 

« Mes pensées vont aux centaines de milliers de personnes affectées par le récent cyclone Idai au Mozambique, au Malawi et au Zimbabwe. »  De tels phénomènes sont de plus en plus fréquents, leur impact est de plus en plus sévère et la situation ne fera qu’empirer si nous n’agissons pas dès maintenant, s’est alarmé le Secrétaire général, pour qui les changements climatiques mettent en péril des décennies de progrès en matière de développement inclusif et durable.

Toutefois, il est également vrai que la lutte contre les changements climatiques représente une occasion de consolider et d’accélérer les acquis du développement grâce à un air plus propre, une meilleure santé publique et davantage de sécurité pour les nations et les économies. 

« Nous n’avons pas d’excuse pour ne pas agir », a martelé M. Guterres.  Nous avons des outils pour répondre aux questions soulevées par les changements climatiques, la pression environnementale, la pauvreté et l’inégalité: le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques. 

« Nous avons besoin d’action, d’ambition et de volonté politique », a encore dit le Secrétaire général, en appelant les États Membres à faire en sorte que le plan de travail adopté en décembre dernier à Katowice, en Pologne, par les Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, puisse « libérer son plein potentiel ». 

Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il nous reste moins de 12 ans pour éviter des perturbations climatiques irréversibles et limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius de plus que les niveaux préindustriels.  Afin de « générer l’ambition nécessaire », le Secrétaire général a rappelé qu’il a convoqué un Sommet Action Climat, qui se tiendra le 23 septembre prochain, à New York. 

« Ne venez pas avec un discours, venez plutôt avec un plan », a enjoint le Secrétaire général en s’adressant aux dirigeants du monde, afin que nous puissions nous engager « une fois pour toutes » sur « une voie durable » et améliorer les contributions prévues déterminées au niveau national d’ici à 2020. 

M. Guterres a également demandé aux dirigeants de montrer comment parvenir à une réduction des gaz à effet de serre de 45% au cours de la prochaine décennie et à zéro émission globale en 2050, « comme le demande la science ». 

Si « l’économie verte représente l’avenir », nous devons nous assurer de ne laisser personne de côté, a-t-il averti, en particulier les femmes.  À cet égard, le Sommet Action Climat, qui réunira des représentants des gouvernements, du secteur privé et de la société civile, mettra l’accent sur la transition énergétique et l’investissement dans l’économie verte. 

Le Secrétaire général a décelé « un élan grandissant en faveur d’un changement transformationnel », alors qu’un nombre croissant de gouvernements, de villes et d’entreprises comprennent que des solutions climatiques peuvent renforcer nos économies tout en protégeant notre environnement. 

Il a appelé à mettre un terme aux subventions aux énergies fossiles et à l’agriculture non viable, et à s’orienter vers les énergies renouvelables, les véhicules électriques et des pratiques adaptées au climat.  Pour cela, a-t-il fait valoir, il faut accélérer la fermeture des usines de charbon et remplacer les emplois par des alternatives plus saines. 

« Nous avons besoin d’une action multilatérale avec tous les gouvernements du monde », a préconisé M. Guterres.  Ceux-ci doivent œuvrer main dans la main avec le secteur privé et la société civile.  « Ce sont les jeunes qui portent le flambeau, et l’avenir c’est maintenant », a conclu M. Guterres.

Pour Mlle SHEDDONA RICHARDSON, représentante de la jeunesse, originaire de la Grenade, les changements climatiques, le réchauffement de la planète et les gaz à effet de serre étaient des termes abstraits, jusqu’à ce que sa vie soit touchée par l’ouragan Ivan en 2004.  « Ce fut le jour où la Terre mère s’est rebellée après avoir été longuement maltraitée. »  Elle s’est souvenue de ces journées sans fin à attendre le retour de l’électricité pour reprendre le chemin de l’école et faire ses devoirs avant la tombée de la nuit.

La communauté des Caraïbes doit aujourd’hui affronter des inondations, la sécheresse, une saison d’ouragans de plus en plus longue et un manque de ressources, a déploré Mlle Richardson.  Pour les jeunes, l’impact des changements climatiques devient malheureusement « la nouvelle norme ».  Les jeunes sont davantage préoccupés « car le monde parle beaucoup et n’agit pas suffisamment ».

Pour les populations des petits États insulaires en développement des Caraïbes, ce sujet ne fait pas débat: « nous le vivons au jour le jour », a témoigné l’intervenante.  Dans sa Grenade natale, la qualité de vie est en péril du fait des changements climatiques.  « C’est là, une réalité qui menace nos économies, nos ressources et notre survie. »  Pour elle, on ne peut parler de développement durable sans tenir compte de la réalité des changements climatiques.  Autrement, « ma génération et les générations futures vont faire face à cette bataille pour vivre en bonne santé.  Le moment d’agir c’est maintenant! » a-t-elle lancé.

S’adressant à l’assistance, la jeune femme l’a enjointe à agir: « vous, les responsables, êtes tenus de relever le défi auquel nous faisons face et trouver une voie pour un développement durable pour tous.  « Notre avenir est entre vos mains, ne nous laissez pas tomber! »

Table ronde sur les « Synergies entre le climat et le Programme de développement durable »

« Nous parlons beaucoup et agissons peu » pour l’avenir de la planète a été le leitmotiv des jeunes largement repris à leur compte par les différents intervenants à la première table ronde consacrée au lien entre les changements climatiques et la réalisation des objectifs de développement durable à l’horizon 2030.  Lors de ce panel modéré par Mme Rhonda Inga King, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), l’accent a été mis sur la nécessité d’adopter un discours cohérent et d’impliquer tous les acteurs et secteurs de la société.  Il s’est agi de partager les expériences et les meilleures pratiques en matière d’intégration des objectifs climatiques dans divers objectifs de développement durable par le biais de politiques, de stratégies et de programmes nationaux.

Mettre en œuvre cette synergie suppose l’implication de tous les secteurs de la société dans le cadre d’une approche gagnant-gagnant, a suggéré Mme Martha Delgado, Sous-Secrétaire d’État aux affaires multilatérales et aux droits de l’homme du Mexique.  Il s’agit, pour elle, de « changer le discours dominant ».  Il faut impliquer les secteurs privés et faire preuve d’innovation, a abondé un responsable du Belize.  En effet, a reconnu, M. Thani bin Ahmed Al Zeyoudi, Ministre des changements climatiques et de l’environnement de l’État des Émirats arabes unis, si les institutions sont importantes, les gouvernements ne peuvent travailler seuls.  Il faut une réponse cohérente au niveau mondial et davantage de partenariats aux plans local, national, régional et international, a résumé la Présidente de l’ECOSOC.

En un mot, « briser les approches compartimentées » a plaidé une représentante d’ONU-Femmes.  Une démarche défendue par Mme Krishnee Appadoo, de l’Université de Maurice, pour qui il est essentiel de créer ce lien intergénérationnel dans le traitement de la question climatique et du développement durable et de ne pas être « effrayé par des mesures innovantes et ambitieuses ».  Il est évident que « nous devons apprendre de l’innovation des jeunes et de la sagesse des anciens », a-t-elle dit.  Les jeunes, aujourd’hui, sont « plus attentifs aux problèmes environnementaux » et doivent être intégrés dans le cadre d’une approche collective.  « Nous ne façonnons pas un avenir sûr pour eux.  Nous sommes en train de les condamner à un avenir intolérable et aujourd’hui, ils nous le rappellent », a constaté, amèrement, Mme Mary Robinson, Présidente du groupe des Sages, ancienne Présidente de l’Irlande

Mais tous ont reconnu que la mise en œuvre des objectifs de développement durable ne pourra être probante si les changements climatiques continuent de menacer notre planète.  Dans un environnement désertique où la vie peut être gravement affectée par les changements climatiques, le Ministre des Émirats arabes unis voit dans la transformation des habitudes et l’adoption de mesures proactives une opportunité de croissance et de développement pour tous.  Il a plaidé, à cet égard, en faveur de la résilience et de la promotion de l’économie verte.  Tous avaient à l’esprit le cyclone Idai, qui a dévasté le Mozambique, le Malawi et le Zimbabwe, l’une des pires catastrophes météorologiques de l’histoire du continent africain.

C’est dans le cadre d’une feuille de route et d’une vision globale que nous pourrons garantir les plus grandes synergies, a répondu en écho Mme Delgado. Cependant, a averti M. Manish Bapna, Vice-Président exécutif de l’Institut des ressources mondiales (WRI), en matière de réduction de gaz à effet de serre, « nous allons dans la mauvaise direction », puisque l’on enregistre une augmentation de 1,7% en 2018 par rapport à 2017.  De fait, a suggéré M. Pieter Taalas, Secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), en plus de l’atténuation, il faut penser à l’adaptation, car pour faire baisser les émissions, il faut se débarrasser des énergies fossiles.  Une responsable de la Banque mondiale a, dans ce contexte, mis en garde sur le fait que les changements climatiques peuvent entraver les acquis du développement.  Il faut aborder le développement dans le cadre d’un modèle fondé sur la durabilité, a-t-elle insisté.  Pourquoi ne pas échapper au modèle de croissance traditionnelle et envisager une approche économique complètement différente, a suggéré un représentant de l’Union interparlementaire (IPU)?

Table ronde sur les « Moyens d’exécution »

La Modératrice de cette deuxième table ronde, Mme JAYATHAM WICKRAMANAYAKE, Envoyée spéciale du Secrétaire général pour la jeunesse, a déclaré d’emblée que les changements climatiques sont devenus, au cours des années, « la priorité des priorités ».  Alors que l’environnement continue de se détériorer, nous devons garder à l’esprit que « l’avenir est façonné par les décisions que nous prenons aujourd'hui », d’où l’importance de trouver des moyens d’exécution des synergies entre le climat et les objectifs de développement.

À cet égard, Mme EVA SVEDLING, Secrétaire d’État à l’environnement et à l’énergie de la Suède, a rappelé l’adoption par son pays, en 2017, d’une nouvelle politique climatique qui prévoit, à terme, zéro émission.  Pour atteindre cet objectif, nous devons faire en sorte que le monde financier prenne la place qui lui revient dans la lutte contre les changements climatiques, a-t-elle argué, citant en exemple les politiques de l’Union européenne visant à trouver un lien entre la finance et les objectifs fixés tels que l’atténuation et l’adaptation.

À cet effet, Mme MARILYN CECI, Directrice exécutive, Présidente de Green Bonds, J.P. Morgan, a parlé de l’expansion du marché des obligations vertes et des transferts verts, notamment depuis la tenue de la 24ème Conférence des parties à la Convention-cadre sur les changements climatiques (COP24) à Katowice, en Pologne.

Pour profiter de cet élan, il faut assurer le transfert des technologies vers les pays en développement, a fait valoir Mme YASSMIN SALAH ELDIN FOUAD ABDELAZIZ, Ministre de l’environnement de l’Égypte.  Les technologies de gestion du carbone fonctionnent, malgré leur coût, pour autant qu’elles favorisent un environnement social favorable.  Toutefois, l’aspect financier demeure une condition essentielle aux transferts technologiques, a-t-elle reconnu. 

Une position partagée par M. HUSSAIN RASHEED HASSAN, Ministre de l’environnement des Maldives, qui a rappelé que, bien que son pays fasse part de ses préoccupations, la mise en place de projets de résilience majeurs demeure limitée pour des raisons économiques.  Mais les Maldives ont été en mesure de mettre en place des projets à petite échelle, notamment pour assurer la sécurité hydrique, en partenariat avec le Fonds vert pour le climat.  « Pour nous, les changements climatiques ne sont pas théoriques », a-t-il conclu.  « Il est temps d’agir. »  

Face à ces défis, M. JAVIER MANZANARES, Directeur exécutif du Fonds vert pour le climat, a déclaré que l’adaptation aux changements climatiques est la priorité de beaucoup de pays en développement, et la raison d’être du Fonds qui a un portefeuille de 5 milliards de dollars pour 102 projets dans 97 pays en développement.  Le Fonds mise avant tout sur le renforcement des capacités des États vulnérables et la mise en place d’instruments financiers adaptés.  Les ressources du Fonds vont à hauteur de 50% à l’atténuation des effets des changements climatiques et à 50% à l’adaptation, essentiellement dans les petits États insulaires et les États des pays d’Afrique, afin de favoriser la mise en place d’une véritable économie verte.  Pour renforcer les capacités, Mme NEZHA EL OUAFI, Représentante du Maroc, a indiqué que son pays a mis sur pied un Centre de compétences en changements climatiques.

Alors que les jeunes représentent la moitié de la population mondiale, Mme PRAMISHA THAPALIYA, Représentante jeunesse du Népal, a appelé le Fonds vert pour le climat à développer des mécanismes spécifiques, en se fondant sur les objectifs de développement durable.  Nous devons trouver les moyens d’interpeller la nouvelle génération, a reconnu la Ministre de l’environnement de l’Égypte, en insistant sur l’importance qu’il y a à développer des projets spécifiques.  « Il s’agit d’un principe d’équité intergénérationnel », a approuvé le Ministre de l’environnement des Maldives, pour qui, il y a urgence.

La Secrétaire d’État à l’environnement et à l’énergie de la Suède a d’ailleurs vanté la tradition de dialogue de son pays entre les entreprises, les syndicats, le monde politique, le milieu universitaire et la jeunesse.  Le dialogue climatique est un concept récent dans le monde des affaires, a concédé la Présidente de Green Bonds, J.P. Morgan, en invitant les jeunes à faire entendre leur voix. 

Nous avons besoin de partenaires, a renchéri le Directeur exécutif du Fonds vert pour climat, et il revient aux jeunes de veiller à ce que les institutions pertinentes prennent en compte leurs revendications.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Biodiversité marine: la Conférence intergouvernementale discute des « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées »

Deuxième session,
24e & 25e séances plénières – matin & après-midi
MER/2096

Biodiversité marine: la Conférence intergouvernementale discute des « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées »

En ce quatrième jour des travaux de la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur la haute mer, le Groupe de travail sur « les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées », a poursuivi son débat, entamé hier après-midi, sur les conditions de désignation des aires protégées marines et sur les instances devant évaluer et décider d’une telle opportunité.

En se référant au document établi par la Présidente pour faciliter les travaux de la conférence, les délégations ont surtout parlé des aires marines protégées, alors que la Norvège, l’Australie ou encore les Seychelles, ont prévenu que ces aires ne sont que l’un des outils de gestion par zone parmi la multitude pouvant s’appliquer en haute mer.

En effet, les aires marines protégées sont des espaces géographiques clairement définis, et gérés de façon à assurer à long terme la conservation de la nature.  Dans ces aires, la pêche ainsi que d’autres activités humaines sont restreintes, ce qui permet aux êtres vivants en déclin de se reconstituer tout en protégeant des espèces et des habitats vulnérables.  L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) indique que les aires marines protégées couvrent actuellement environ 6,35% des océans et elles sont de plus en plus reconnues comme un outil de gestion par zone efficace, à côté d’autres comme les réserves marines, les parcs marins, ou encore des zones marines de conservation spéciale.

Le 3 octobre 2018 par exemple, plus d’une douzaine de pays ont signé au Groenland un accord pour protéger une zone bien précise de la région Arctique, « le Haut-Arctique », dont la surface équivaut à la mer Méditerranée.  Ces pays se sont mis d’accord pour interdire la pêche commerciale dans cette zone pour les 16 prochaines années.

Au cours de la journée, les délégations ont donc plaidé pour la création d’autres outils de gestion par zone dans le cadre du futur instrument, y compris les aires maritimes protégées.  Elles ont globalement arrêté que les propositions de création de tels outils doivent être soumises par les États Membres au secrétariat du futur instrument.

Les critères de soumission proposés par le document de la Présidente ont été jugés pléthoriques par la Micronésie qui parlait au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique.  L’Argentine, intervenant pour le compte d’un groupe de pays d’Amérique latine, a rappelé que bien que nombreux, ces critères ne sont pas exhaustifs. 

Après la soumission du dossier, un comité scientifique devrait l’évaluer, ont suggéré la majorité des orateurs qui ont aussi insisté sur une décision qui doit être prise de manière consensuelle.  Mais, s’il n’est pas possible que tous soient d’accord, a préconisé la Turquie, alors il faut prévoir d’autres mécanismes de prise de décisions.  C’est en fin de compte un organe mondial qu’il reste à créer qui aura le dernier mot après l’avis technique du comité scientifique, ont suggéré les délégués. 

Pour le Saint-Siège, si l’on adopte une structure mondiale de désignation de ces aires protégées marines, il faut que les organes régionaux et sectoriels soient dûment consultés.  La Fédération de Russie préfère de son côté que les décisions finales soient prises par des organes sectoriels régionaux et non pas par une structure mondiale, et que ces aires marines protégées aient un temps de vie préétabli. 

Il ne faut pas non plus donner aux États côtiers adjacents le pouvoir de contribuer au processus de prise de décisions sur les outils de gestion par zone, a ajouté la délégation américaine qui ne veut pas que ces États aient un avantage sur les autres.  Un avis que ne partagent pas d’autres pays comme le Canada qui a plaidé pour la consultation des pays adjacents à l’aire marine en création, arguant que « cela pourrait avoir un impact sur leurs eaux territoriales ». 

Le débat était également polarisé sur le bien-fondé de tenir compte des savoirs traditionnels dans l’évaluation des soumissions.  Si plusieurs délégations, dont Belize, qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), ont dit préférer que « la détermination des aires s’appuie sur les informations scientifiques les plus fiables », d’autres en revanche ont souligné l’importance des savoirs traditionnels dont la pertinence est déjà reconnue dans d’autres instruments multilatéraux comme l’Accord de Paris sur le climat. 

Les travaux se sont achevés par l’examen du point sur la « relation avec les mesures prévues par les autres instruments, cadres et organes en vigueur ».  Les délégations ont insisté pour que le nouvel instrument ne vienne pas saper les mesures déjà mises en œuvre dans les régions et par les États côtiers adjacents. 

Demain, vendredi 29 mars, la journée sera consacrée aux travaux du Groupe sur l’« étude de l’impact sur l’environnement », mais avant, les délégations vont terminer les discussions sur « les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées ».

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE: (A/CONF.232/2019/L.1, A/CONF.232/2019/L.2, A/CONF.232/2019/1 et A/CONF.232/2019/INF.2)

Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées: suite des travaux

Le Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, a repris, ce matin, son débat entamé hier après-midi sur la détermination des aires protégées marines et sur les procédures devant guider la soumission et la désignation de celles-ci. 

Les délégations ont ainsi longuement commenté le document des négociations établi par la Présidente pour faciliter les travaux de la conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.

Elles ont été de nouveau nombreuses à insister sur le fait que la détermination des aires doit s’appuyer sur les informations scientifiques les plus fiables dont on puisse disposer, comme l’a rappelé le Belize qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM). 

Pour la Micronésie qui parlait au nom des petits États insulaire du Pacifique, il faudrait tout de même tenir compte des savoirs traditionnels.  Son représentant s’est insurgé contre ces délégations qui rejettent aujourd’hui ces savoirs qui sont pourtant inscrite dans des accords multilatéraux, notamment le Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation et l’Accord de Paris sur le climat, auxquels elles sont pourtant parties.  Ces savoirs traditionnels, a-t-il plaidé, viennent compléter les éléments scientifiques et ne les remplacent pas.  Il a aussi rappelé qu’ils sont l’héritage de millénaires de pratique de la mer des peuples du Pacifique par exemple.  Le Canada s’est dit tout à fait d’accord sur l’importance de ces savoirs. 

Revenant également sur les critères de désignation des aires protégées marines, la Micronésie a jugé pléthorique la liste proposée par le document de base des négociations, arguant qu’une aire protégée ne peut les remplir tous.  L’Argentine, intervenant pour le compte d’un groupe de pays d’Amérique latine, a rappelé que bien que nombreux, ces critères ne sont pas exhaustifs.  Il faudrait donc ajouter l’expression « entre autres » à la fin de l’énumération. 

Pour la Micronésie en outre, la décision sur la création des aires marines protégées doit être prise par la conférence des parties à l’instrument.  De plus, cela doit se faire selon une approche consensuelle.  Le Japon a partagé cet avis qui a fait la quasi-unanimité au sein du groupe de travail.  S’il n’est pas possible que tous tombent d’accord, a préconisé la Turquie, alors il faut prévoir d’autres mécanismes de prise de décisions.

Mais avant qu’une décision ne soit prise, les propositions doivent être soumises par les États Membres, ont suggéré la plupart des délégations qui ont aussi voulu que le secrétariat du futur instrument soit l’organe de dépôt desdites demandes.  Le Japon voudrait que, dans le dossier technique de soumission au secrétariat, les États inscrivent les coordonnées des scientifiques à contacter en cas de besoin d’informations complémentaires.  Il a insisté aussi sur le fait que l’organe scientifique d’évaluation des soumissions doit être constitué d’éminents scientifiques de renommée internationale. 

Les États-Unis ont tenu à préciser que même si la société civile peut participer au montage technique de la proposition, cette dernière doit être soumise par les États au secrétariat qui à son tour la ferait suivre à l’organe scientifique.  Et ces États doivent pouvoir accéder, en ligne, aux commentaires faites par l’organe scientifique d’évaluation et y répondre si besoin.  Il ne faut pas non plus donner aux États côtier adjacents le pouvoir de contribuer au processus de prise de décisions sur les outils de gestion par zone, a ajouté la délégation américaine qui ne veut pas que ces États aient un avantage sur les autres.  Ce n’est pas l’avis du Canada qui a plaidé pour la consultation des pays adjacents à l’aire marine en création, « puisque cela pourrait avoir un impact sur leurs eaux territoriales ». 

Ensuite, a exigé la Suisse, il faut de vastes consultations inclusives avant l’accord final de création d’aires marines protégées, afin de faciliter l’engouement de tous pour le respect des décisions prises.  Justement, Monaco a souligné que les décisions prises par l’instance désignée devront être rendues publiques et communiquées à toutes les parties prenantes.  Pour le Saint-Siège, si l’on adopte une structure mondiale de désignation de ces aires protégées marines, il faut que les organes régionaux et sectoriels soient dûment consultés.

Abondant dans le même sens, la Norvège a parlé d’un mécanisme régional auquel son pays appartient, tout en rappelant qu’il ne faut pas seulement se focaliser sur les aires marines protégées qui ne sont qu’un élément de la vaste palette des outils de gestion par zone.  Le pays soutient aussi qu’un organe régional peut bien faire la soumission des dossiers en lieu et place des États, même s’il est prêt à se ranger au compromis s’il s’avérait que l’option d’une soumission des États était retenue. 

La Fédération de Russie a indiqué également que des organisations sectorielles compétentes peuvent tout aussi être impliquées dans la prise de décisions sur la création des aires maritimes protégées.  La délégation a insisté sur le fait qu’un tel régime doit être limité dans le temps et souhaité que les décisions finales soient prises par des organes sectoriels régionaux et non pas par une structure mondiale. 

Dans l’après-midi, les délégations ont poursuivi les échanges sur « les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées ».  Elles ont de nouveau rappelé que ce sont les États qui devraient soumettre des dossiers de proposition de création d’outils de gestion par zone.  La République de Corée insiste même sur le fait que c’est exclusivement les pays qui devront soumettre les propositions, alors que pour Singapour, d’autres entités comme des organes sectoriels pourraient aussi le faire.  Cette délégation estime aussi que chaque soumission doit contenir certains éléments de manière obligatoire.  L’Australie a rappelé qu’il faut tenir compte, dans les négociations, de tous les types d’outils de gestion par zone et pas uniquement des aires maritimes protégées.

En effet, l’Union internationale pour la  conservation de la nature (UICN) a relevé que pas moins de six catégories différentes d’outils de gestion par zone couvrent déjà les eaux marines.  L’organisation a expliqué que plusieurs types d’outils peuvent coexister dans la même zone.  Étant donné que chaque zone a ses propres spécificités, l’UICN propose que des mesures intérimaires soient prises avant de les modifier au vu de la mise en œuvre de l’instrument.  Les acteurs non étatiques devraient aussi prendre part au processus de consultation sur la désignation d’outils de gestion par zone, a-t-elle souligné. 

Si les avis ont convergé sur le fait que c’est au secrétariat du futur instrument qu’il faut déposer les soumissions, certains États ont indiqué qu’en plus d’un organe scientifique qui va évaluer les dossiers, les États adjacents pourraient aussi être consultés.  L’Érythrée estime qu’il faut surtout définir clairement ce qu’on entend ici par « États côtiers adjacents ».  Les États adjacents n’ont pas besoin d’être consultés, mais leur avis peut être éventuellement demandé, a fait observer l’Australie, tandis que la République de Corée ne veut pas d’un mécanisme d’évaluation qui vienne saper le rôle des mécanisme régionaux existant déjà.

L’International Indian Treaty Council, une ONG de protection et de défense des peuples autochtones d’Amérique latine, d’Amérique du nord et du Pacifique, est revenu sur l’importance des savoirs traditionnels.  Son représentant a insisté sur la participation des peuples autochtones dans la gestion de la haute mer.  Il a rappelé que ces peuples ont une relation intime avec la nature, et cela du fait du respect mutuel qu’ils se vouent.  Ces peuples ont donc acquis des savoirs qu’ils veulent partager avec le monde, et il a affirmé que « la science et les savoirs traditionnels sont les deux faces d’une même médaille ».  Cette importance des savoirs traditionnels a été également saluée par Greenpeace.

Le Comité international sur la protection des câbles a ensuite rappelé l’importance de la protection des câbles marins qui sont cruciaux pour notre société de communication.  Cette organisation qui fut créée en 1958 vise à promouvoir la protection des câbles internationaux sous-marins contre les dangers de l’homme et de la nature.  Sa représentante a donc prévenu que garantir les communications internationales nécessite que des dispositions sur la protection des câbles marins soient clairement intégrées dans l’instrument à venir.

Les délégations ont aussi débattu de la « relation avec les mesures prévues par les autres instruments, cadres et organes en vigueur ».  Elles ont pour la plupart insisté pour que le nouvel instrument ne vienne pas saper les mesures déjà mises en œuvre dans les régions et par les États côtiers adjacents.  

Le document guidant les négociations prévoit l’institution « d’un (ou plusieurs) mécanisme(s) de coordination en vue de renforcer la coopération et la coordination entre les instruments et cadres juridiques en vigueur et les organes mondiaux, régionaux et sectoriels compétents en ce qui concerne les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées ».  Il est également prévu qu’« en vue de renforcer la coopération et la coordination, un groupe de travail composé d’organismes scientifiques relevant des instruments et cadres juridiques en vigueur et des organes mondiaux, régionaux et sectoriels compétents sera mis sur pied ». 

En outre, l’instrument pourrait prévoir un paragraphe indiquant que « la présente partie ne porte aucunement atteinte aux droits souverains et à la compétence des États côtiers sur les zones relevant de leur juridiction nationale, y compris la zone économique exclusive et le plateau continental jusqu’à 200 milles marins et au-delà ».

L’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, ainsi que la Palestine, parlant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), ont demandé un certain nombre d’éclaircissements sur certains termes usités.  L’Union européenne a noté que certains points de cette section sont déjà prévus dans d’autres parties du document de travail, ce qui fait doublon.  Afin de ne pas faire ombrage et saper les mesures déjà mises en œuvre dans les régions et par les États côtiers adjacents, la Micronésie, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a demandé qu’il soit tenu compte de l’environnement juridique international. 

C’est  aussi préoccupant par certains libellés, que les États-Unis ont également prévenu que le nouvel instrument ne doit pas saper les prérogatives d’autres instruments déjà en vigueur, notamment au sein d’organes mondiaux, régionaux et sectoriels de conservation de la biodiversité marine.  Les Palaos ont pour leur part rappelé qu’ils comptent déjà de nombreuses aires marines protégées dans leurs eaux territoriales.  Le pays n’entend pas voir ce nouvel instrument venir remettre en question des efforts déjà entrepris au niveau national.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité renforce son arsenal contre le financement du terrorisme par une résolution « historique » présentée comme « un acte politique fort »

8496e séance – matin & après-midi
CS/13754

Le Conseil de sécurité renforce son arsenal contre le financement du terrorisme par une résolution « historique » présentée comme « un acte politique fort »

Le Conseil de sécurité a adopté, aujourd’hui, une résolution « historique » qui renforce son arsenal contre le financement du terrorisme.  « Un acte politique fort », s’est réjouie la France, par la voix de son Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, coauteur du texte et Président du Conseil.  La résolution 2462 (2019) ne constitue pas une fin en soi.  Le temps de la mise en œuvre doit tout autant nous mobiliser et nous hisser à la hauteur de nos responsabilités, a déclaré M. Jean-Yves Le Drian.

Aujourd’hui, énumère le Conseil dans sa résolution de 37 paragraphes de fond, les terroristes lèvent des fonds par des entreprises commerciales légitimes, des organisations à but non lucratif, l’exploitation de ressources naturelles, les dons, le financement participatif et le produit des activités criminelles comme l’enlèvement contre rançon, l’extorsion, le commerce illicite et le trafic des biens culturels, la traite d’êtres humains, le trafic de drogues ou encore le commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  Ils peuvent déplacer et transférer des fonds grâce notamment à des sociétés écrans, à des passeurs ou encore aux nouveaux moyens de paiement tels que les cartes prépayées, les paiements mobiles ou les actifs virtuels. 

« Le défi, vous le voyez, est grand », a fait observer la France, et la détermination doit l’être tout autant, pour ne laisser de côté aucun aspect de la lutte contre le financement du terrorisme.  Dans sa résolution, le Conseil décide que tous les États veilleront, de manière conforme au droit international humanitaire, aux droits de l’homme et au droit des réfugiés, à ériger en infractions pénales graves la fourniture ou la collecte de fonds, de biens financiers ou de ressources économiques ou financières et d’autres services connexes dans l’intention de les utiliser pour des activités terroristes. 

La référence aux trois aspects du droit international n’est pas anodine.  Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) s’est inquiété de l’impact des mesures antiterroristes sur l’aide humanitaire.  Avec d’autres intervenants, il a dit craindre pour la faculté des agents humanitaires à franchir les frontières pour prêter assistance aux communautés qui vivent sur des territoires contrôlés par des « individus désignés comme terroristes ».  Personne, a rassuré l’Allemagne, ne peut se servir de cette résolution pour criminaliser des actions humanitaires indépendantes, neutres et impartiales.  Mais, a souligné le CICR, les engagements pris aujourd’hui en faveur du respect de l’action humanitaire ne seront d’aucune utilité s’ils ne sont pas mis en œuvre. 

Dans sa résolution, le Conseil demande aux États d’intensifier et d’accélérer l’échange d’informations opérationnelles et de renseignements financiers concernant les actes, les déplacements, la cadence des mouvements des terroristes, notamment les combattants terroristes étrangers, dont ceux qui retournent dans leur pays ou se réinstallent ailleurs.  Les États doivent aussi veiller à ce que les autorités compétentes puissent exploiter les données des cellules de renseignement financier et du secteur privé; utiliser davantage les renseignements et traces financiers pour déceler les réseaux terroristes et les bailleurs de fonds; et envisager la mise en place d’un mécanisme qui permette aux autorités compétentes d’obtenir des informations pertinentes pour repérer plus facilement les avoirs des terroristes.

Il s’agit pour les États d’accroître la traçabilité et la transparence des transactions financières et d’utiliser pleinement les technologies nouvelles afin d’ouvrir davantage l’accès aux services financiers et de concourir à l’application des mesures de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.  Les États doivent évaluer les risques associés à l’utilisation de liquidités, y compris les mouvements transfrontaliers illicites et d’autres produits, notamment les cartes à valeur stockée ou cartes prépayées, et les systèmes parallèles de transfert de fonds comme le « hawala ».  Ils doivent également évaluer et prévenir les risques potentiels associés à l’utilisation d’actifs virtuels et le risque que de nouveaux instruments financiers, comme les plateformes de financement participatif, soient détournés pour financer des actes de terrorisme. 

Le Conseil se félicite à cet égard des travaux que le Groupe d’action financière (GAFI), dont le Président a participé au débat, continue de mener au sujet des actifs virtuels et des prestataires de services d’actifs virtuels.  Face à la menace « protéiforme » d’un financement du terrorisme en constante mutation, il faut, a insisté la France, construire le partenariat le plus large possible, un partenariat qui, en associant l’ensemble des acteurs concernés -États, secteur privé, institutions multilatérales, société civile–, est seul à même d’apporter une réponse à la hauteur du défi. 

La France a lancé un appel à « tous les membres de ce partenariat » pour qu’ils se saisissent de la résolution adoptée aujourd’hui, mais également aux Nations Unies, en particulier au Bureau de lutte contre le terrorisme (BLT) et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT), pour qu’elles apportent aux pays qui en ont besoin l’assistance technique nécessaire pour développer leurs capacités en matière de lutte contre le financement du terrorisme. 

INTERPOL, qui est inclus dans la résolution, a rappelé que ses 194 États membres peuvent déjà utiliser sa base de données sur les documents de voyage perdus ou volés, qui contient à ce jour 85 millions de références.  Ils peuvent aussi solliciter la diffusion d’une « notice » contre tout acteur ou pour signaler tout mode opératoire en matière de financement du terrorisme.  S’agissant des régimes de sanctions, INTERPOL diffuse, au profit de 10 des 14 comités des sanctions du Conseil de sécurité, plus de 600 notices spéciales au sujet d’entités ou d’individus placés sous sanctions, dont plus de la moitié pour le seul Comité créé en vertu de la résolution 1267 (1999) contre Al-Qaida et les Taliban. 

La plus grande erreur, a mis en garde la France, serait de croire que le terrorisme est vaincu dès lors que ses prétentions territoriales ont été anéanties.  Al-Qaida et Daech, même s’ils reculent, ne disparaissent pas.  Il faut traiter le mal à la racine et intensifier les efforts pour les isoler, en asséchant leurs sources de financement.  Les États-Unis, qui ont salué l’adoption d’une résolution « historique », ont surtout épinglé le Hezbollah pour ses guerres en Syrie et au Liban et ses sociétés écrans, notamment pharmaceutiques, pour dissimuler ses activités de blanchiment d’argent. 

Les efforts, a estimé l’Allemagne, doivent s’inscrire dans une approche plus large, une approche qui mise sur des sociétés plus inclusives dans lesquelles tout le monde est traité avec respect et où chacun peut vivre une « vie qui en vaut la peine ».  La méthode la plus efficace de lutter contre le terrorisme et son financement, c’est de réaliser les objectifs de développement durable, a acquiescé la Guinée équatoriale. 

Le Programme 2030 reprenant la question des envois de fonds, les Philippines ont profité du débat pour lancer l’alerte: les agences de transfert sont utilisées pour acheminer des fonds aux terroristes.  Ces envois de fonds représentent 9,8% du PIB philippin et l’idée de les restreindre a touché une « corde sensible ».  Le défi est donc de trouver un équilibre entre les impératifs de la lutte contre le terrorisme et le confort tout aussi impératif de ceux qui se débattent dans une « captivité babylonienne » pour joindre les deux bouts dans les « terres bibliques » et aider leur famille restée au pays.  Ce dilemme a évidemment tenté les banques étrangères qui ont voulu prendre le relais en imposant des « taux de pirate », ont accusé les Philippines qui s’en sont aussi prises aux ONG dont l’argent est détourné vers le financement du terrorisme.  Dans sa résolution, le Conseil exhorte d’ailleurs les États Membres à procéder à intervalles réguliers à une évaluation des risques que présente leur secteur associatif. 

Il demande aussi aux États de renforcer la coopération internationale; de veiller à l’efficacité de l’échange de renseignements financiers dans le cadre de mécanismes bilatéraux et multilatéraux; de garantir que leurs cellules de renseignement financier servent d’agences centrales pour la collecte d’informations sur des transactions suspectes; de renforcer la coopération transfrontière entre les administrations douanières et fiscales; et d’améliorer la qualité des informations partagées à l’échelle internationale concernant le financement des combattants terroristes étrangers, par les petites cellules, en appliquant dans leur intégralité les normes établies par le GAFI. 

L’Union européenne n’a pas manqué de rappeler que les attentats terroristes perpétrés contre certains de ses États membres ont été réalisés avec des ressources financières modestes, « difficiles à détecter ».  Les terroristes essaieront toujours de trouver de nouvelles manières de financer leurs activités nuisibles.  Nous devons identifier les pistes et les bloquer, a encouragé le Président du GAFI.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES RÉSULTANT D’ACTES DE TERRORISME

Prévenir et combattre le financement du terrorisme

Texte du projet de résolution (S/2019/268)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1267 (1999), 1373 (2001), 1452 (2002), 1526 (2004), 1617 (2005), 1624 (2005), 2129 (2013), 2133 (2014), 2170 (2014), 2178 (2014), 2195 (2014), 2199 (2015), 2249 (2015), 2253 (2015), 2322 (2016), 2331 (2016), 2341 (2017), 2347 (2017), 2354 (2017), 2368 (2017), 2370 (2017), 2388 (2017), 2395 (2017), 2396 (2017) et les déclarations de sa présidence sur la question,

Réaffirmant que le terrorisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, constitue une des menaces les plus graves contre la paix et la sécurité internationales et que tout acte de terrorisme est criminel et injustifiable, quels qu’en soient les motivations, le moment, le lieu et les auteurs,

Soulignant que c’est aux États Membres qu’il incombe au premier chef de contrer les actes de terrorisme et réaffirmant l’obligation qui est la leur de prévenir et de réprimer le financement des actes terroristes et demandant à nouveau à tous les États de devenir partie dès que possible aux conventions internationales relatives à la lutte antiterroriste et aux protocoles s’y rapportant, y compris la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et d’envisager, selon qu’il conviendra, de ratifier d’autres conventions internationales comme la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et les Protocoles s’y rapportant, qui visent à faciliter la coopération internationale en matière pénale, d’y adhérer et de les mettre en œuvre,

Rappelant en outre à tous les États Membres l’obligation qu’ils ont de veiller à ce que toutes personnes qui participent au financement, à l’organisation, à la préparation ou à la perpétration d’actes de terrorisme ou y apportant un appui soit traduite en justice, et à ce que, outre les mesures qui pourraient être prises contre ces personnes, ces actes de terrorisme soient érigés en infractions graves dans la législation et la réglementation nationales et à ce que la peine infligée soit à la mesure de la gravité de ces actes,

Réaffirmant que les États Membres doivent faire en sorte que toute mesure prise pour combattre le terrorisme soit conforme à toutes leurs obligations au titre du droit international, en particulier le droit international des droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire, soulignant que le respect des droits de l’homme, les libertés fondamentales et l’état de droit sont complémentaires et que leurs effets et ceux de mesures antiterroristes efficaces se renforcent mutuellement et font partie intégrante de toute action antiterroriste efficace, notant qu’il importe de respecter l’état de droit pour prévenir et combattre efficacement le terrorisme, et constatant que le fait de se soustraire à ces obligations internationales ou à d’autres, dont celles résultant de la Charte des Nations Unies, est un des facteurs contribuant à une radicalisation accrue à la violence et favorise un sentiment d’impunité,

Notant avec une vive inquiétude que les terroristes et les groupes terroristes lèvent des fonds par divers moyens, notamment, mais pas uniquement l’utilisation à des fins illégales d’entreprises commerciales légitimes et d’organisations à but non lucratif, l’exploitation de ressources naturelles, les dons, le financement participatif, le produit des activités criminelles, notamment mais non exclusivement l’enlèvement contre rançon, l’extorsion, le commerce illicite et le trafic des biens culturels, la traite d’êtres humains, y compris à des fins d’exploitation sexuelle, le trafic de drogues et le commerce illicite des armes légères et de petit calibre,

Notant également avec une vive inquiétude que les terroristes, y compris les combattants terroristes étrangers, et les groupes terroristes peuvent déplacer et transférer des fonds, notamment par l’intermédiaire d’institutions financières ou en utilisant à des fins illégales des entreprises légitimes et des organisations à but non lucratif, notamment comme entreprises, sociétés écrans ou passeurs de fonds, ainsi qu’en utilisant les nouveaux moyens de paiement tels que les cartes prépayées, les paiements mobiles ou les actifs virtuels,

Constatant avec une vive préoccupation que les terroristes peuvent mettre à profit la criminalité transnationale organisée comme source de financement ou appui logistique, sachant que la nature et l’étendue des liens entre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée varient selon le contexte, et soulignant qu’il importe de renforcer la coordination de l’action menée aux niveaux local, national, régional, infrarégional et international pour régler ce grave problème, dans le respect du droit international,

Se déclarant de nouveau préoccupé de constater que les terroristes et leurs partisans continuent d’utiliser les technologies de l’information et des communications, en particulier Internet, pour faciliter des actes de terrorisme, et s’en servent pour recruter à cette fin ou inciter à commettre, financer ou planifier des actes de terrorisme,

Sachant que les innovations sur le plan des technologies de la finance, des produits et des services financiers peuvent offrir d’importantes perspectives économiques mais également être utilisées à mauvais escient, notamment pour financer le terrorisme,

Insistant sur le rôle central de l’Organisation des Nations Unies, et en particulier de son Conseil de sécurité, sur le plan de la lutte antiterroriste, et soulignant le rôle essentiel du Groupe d’action financière (GAFI) dans l’établissement de normes internationales pour prévenir et combattre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération du financement, et de ses homologues régionaux, prenant note avec satisfaction de la stratégie globale de lutte contre le financement du terrorisme et du plan d’opérations adoptés par le Groupe,

Engageant les États Membres à coopérer activement avec le GAFI, y compris en participant au suivi des risques de financement du terrorisme,

Déterminé à continuer de soutenir les efforts tendant à empêcher les groupes terroristes d’avoir accès à des fonds et à des services financiers, notamment au moyen des travaux que mènent les organes de l’Organisation des Nations Unies chargés de la lutte contre le terrorisme et le GAFI et ses organismes régionaux pour renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et les circuits de financement du terrorisme à l’échelle mondiale et appliquer notamment les mesures prises à cet effet,

Se félicitant de l’adoption par son Comité contre le terrorisme de l’additif aux Principes directeurs relatifs aux combattants terroristes étrangers (S/2018/1177), qui comprend notamment des recommandations précises pour ce qui est de contrer le financement du terrorisme, et soulignant qu’il importe d’appliquer ces principes de manière intégrale et effective,

Se félicitant des mesures prises sur les plans national, régional et multilatéral pour encourager la coopération internationale afin de prévenir et de réprimer le financement du terrorisme,

Prenant note avec appréciation de la tenue de la conférence internationale de lutte contre le financement de Daech et d’Al-Qaida (« No Money for Terror »), qui s’est tenue à Paris les 25 et 26 avril 2018 ainsi que de la déclaration finale issue de la conférence et attendant avec intérêt la tenue de la prochaine conférence, prévue en 2019 en Australie,

Réaffirmant que les sanctions sont un instrument important prévu par la Charte des Nations Unies pour le maintien et le rétablissement de la paix et de la sécurité internationales, y compris la lutte contre le terrorisme et son financement,

Notant avec inquiétude qu’un grand nombre d’États Membres n’ont pas appliqué ou érigé en infraction l’interdiction visée à l’alinéa d) du paragraphe 1 de la résolution 1373 (2001) et que la fourniture de services financiers et autres services connexes à des personnes ou à des entités terroristes, même en l’absence d’un lien avec un acte terroriste précis, permet à celles-ci de se livrer plus facilement à des activités terroristes,

Sachant combien il est nécessaire de renforcer les capacités des États Membres, qui en font la demande, en vue de les aider à se prendre en main eux-mêmes, afin qu’ils puissent combattre plus efficacement le terrorisme et le financement du terrorisme et tirer meilleur parti des instruments et mécanismes internationaux existants,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Réaffirme sa résolution 1373 (2001), dans laquelle il a décidé en particulier que tous les États devaient prévenir et réprimer le financement des actes de terrorisme et s’abstenir d’apporter quelque forme d’appui que ce soit, actif ou passif, aux personnes ou entités impliquées dans des actes de terrorisme, y compris en éliminant le recrutement de membres de groupes terroristes et en mettant fin à l’approvisionnement en armes des terroristes;

2.    Souligne qu’il a décidé, dans sa résolution 1373 (2001), que tous les États Membres devaient ériger en infraction la fourniture ou la collecte délibérée par leurs nationaux ou sur leur territoire, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, de fonds que l’on prévoit d’utiliser ou dont on sait qu’ils seraient utilisés pour perpétrer des actes de terrorisme, et, dans sa résolution 2178 (2014), que tous les États Membres devaient ériger en infractions pénales graves les déplacements, le recrutement et le financement des combattants terroristes étrangers;

3.    Souligne que l’obligation concernant l’interdiction, énoncée à l’alinéa d) du paragraphe 1 de la résolution 1373 (2001), s’applique au fait de mettre, directement ou indirectement, des fonds, actifs financiers, ressources économiques ou services financiers ou autres services connexes à la disposition de personnes ou d’entités terroristes, quelle qu’en soit la raison, y compris, mais pas exclusivement, le recrutement, l’entraînement ou le voyage, même en l’absence d’un lien avec un acte terroriste précis;

4.    Engage vivement tous les États à appliquer les normes internationales détaillées que constituent les quarante recommandations révisées du GAFI sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et sur le financement du terrorisme et de la prolifération et les notes interprétatives;

5.    Décide que tous les États veilleront, de manière conforme aux obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, à ériger en infractions pénales graves dans leur législation et leur réglementation internes, de façon à pouvoir engager des poursuites et réprimer, proportionnellement à la gravité de l’infraction, la fourniture ou la collecte délibérée, directe ou indirecte, de fonds, de biens financiers ou de ressources économiques ou financières et d’autres services connexes, directement ou indirectement, dans l’intention d’utiliser les fonds, ou sachant qu’elles le seront, à des personnes ou à des entités terroristes, quelle qu’en soit la raison, y compris, mais pas exclusivement, le recrutement, l’entraînement ou le voyage, même en l’absence d’un lien avec un acte terroriste précis;

6.    Exige des États Membres qu’ils fassent en sorte que toutes les mesures prises pour contrer le terrorisme, y compris celles prises pour contrer le financement du terrorisme figurant dans la présente résolution, soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés;

7.    Demande aux États Membres de mener des enquêtes financières sur les affaires liées au terrorisme et de rechercher des moyens de surmonter les difficultés relatives à la collecte d’éléments de preuve en vue d’obtenir des condamnations pour financement du terrorisme;

8.    Demande également aux États Membres d’enquêter plus efficacement sur les affaires de financement du terrorisme et d’engager des poursuites de sorte que, s’il y a lieu, les personnes et entités condamnées pour financement du terrorisme fassent l’objet de sanctions pénales efficaces, proportionnées et dissuasives;

9.    Souligne la nécessité pour tous les États Membres de respecter pleinement les mesures qu’il a imposées dans sa résolution 2368 (2017) et rappelle qu’il a notamment chargé l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée par les résolutions 1526 (2004) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida, les Taliban et les personnes et entités qui leur sont associées de recueillir des informations sur les cas de non-respect des mesures de sanction imposées dans la résolution 2368 (2017), notamment en réunissant les données recueillies auprès de toutes sources pertinentes, et que le Comité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’État islamique d’Iraq et du Levant (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés doit examiner les cas signalés;

10.   Souligne qu’il importe d’appliquer effectivement les dispositifs de gel des avoirs établis à la suite de la résolution 1373 (2001), y compris d’envisager des demandes de parties tierces formulées par d’autres États;

11.   Invite les États à envisager de rendre publiques les listes concernant le gel des avoirs établies à l’échelle nationale et régionale à la suite des résolutions 1373 (2001), 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015);

12.   Souligne qu’il importe d’appliquer rigoureusement les mesures visées au paragraphe 1 de la résolution 2368 (2017) et prie instamment tous les États Membres de participer activement à l’application de ces mesures et à l’actualisation de la Liste relative aux sanctions contre l’EIIL (Daech) et Al-Qaida et d’envisager de faire figurer, lorsqu’ils présentent de nouvelles demandes d’inscription, les noms des personnes et entités impliquées dans le financement du terrorisme;

13.   Demande aux États d’investir des ressources dans l’application de régimes de sanction conformément aux dispositions des résolutions 1373 (2001), 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) et de saisir des fonds dans le cadre d’enquêtes;

14.   Prie instamment tous les États de procéder en particulier à une évaluation nationale des risques de financement du terrorisme et de répertorier tous les secteurs de l’économie les plus exposés à ce risque, tels que, notamment, les services non financiers tels que la construction, les produits de base et les produits pharmaceutiques, conformément aux normes du GAFI, et accueille avec satisfaction les directives établies à ce sujet par l’Organisation des Nations Unies, notamment le manuel d’orientation à l’intention des États Membres sur l’évaluation des risques de financement du terrorisme, et par le GAFI;

15.   Prie instamment les États Membres qui ne l’ont pas encore fait de créer des cellules de renseignement financier fonctionnant de manière indépendante et autonome en vue de renforcer les mesures qu’ils ont instaurées pour prévenir et combattre le financement du terrorisme, conformément aux normes établies par le GAFI;

16.   Demande aux États Membres de renforcer l’accès des cellules de renseignement financier aux informations ainsi que les capacités d’analyse du financement du terrorisme de ces dernières, notamment en élaborant, conjointement avec les autorités compétentes, des indicateurs de risque spéciaux et en coopérant avec le secteur privé pour surveiller les sources et les modes de financement du terrorisme et l’évolution des tendances en la matière;

17.   Invite instamment les États Membres à établir ou à renforcer, sur le plan national, un dispositif permettant aux autorités compétentes, en particulier les cellules de renseignement financier, les services de renseignement, les organes de répression, le ministère public et les autorités judiciaires, de recueillir et de partager les informations relatives au financement du terrorisme;

18.   Engage les États Membres à renforcer les capacités de leurs systèmes de contrôle et de réglementation des opérations financières et à empêcher ainsi les terroristes de lever, de transférer et d’exploiter des fonds, notamment en veillant à ce que le secteur privé respecte l’obligation de signalement et d’information et en prenant en considération les évaluations par pays réalisées par les entités compétentes, telles que la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme et le GAFI et son réseau mondial;

19.   Demande aux États Membres d’intensifier et d’accélérer l’échange, en temps voulu, d’informations opérationnelles et de renseignements financiers pertinents concernant les actes, les déplacements, la cadence des mouvements des terroristes et des réseaux de terroristes, notamment les combattants terroristes étrangers, dont ceux qui retournent dans leur pays ou se réinstallent ailleurs, dans le respect du droit international, y compris le droit international des droits de l’homme, et de la législation nationale, y compris:

a)    de veiller à ce que les autorités compétentes puissent exploiter les renseignements financiers obtenus auprès des cellules de renseignement financier et les informations financières pertinentes recueillies auprès du secteur privé, dans le strict respect du droit international, y compris le droit international des droits de l’homme;

b)    de renforcer l’intégration et l’utilisation de renseignements financiers dans les affaires liées au terrorisme, y compris en resserrant la coordination entre les organes concernés;

c)    d’utiliser davantage les renseignements financiers et les traces financières pour déceler les réseaux terroristes et les bailleurs de fonds;

d)    d’envisager la mise en place d’un mécanisme qui permette aux autorités compétentes d’obtenir des informations pertinentes, notamment mais pas exclusivement sur des comptes bancaires, afin de repérer plus facilement les avoirs des terroristes dans le strict respect du droit international, y compris le droit international des droits de l’homme;

20.   Demande à tous les États d’accroître la traçabilité et la transparence des transactions financières, dans le respect du droit international, y compris le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire:

a)    d’utiliser pleinement les technologies nouvelles dans les domaines de la finance et de la réglementation afin d’ouvrir davantage l’accès aux services financiers et de concourir à l’application effective des mesures de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme;

b)    de faire en sorte que les institutions financières, y compris dans le même groupe financier, ainsi que les entreprises et professions non financières désignées puissent échanger des informations en vue d’atténuer les risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme et de mettre à la disposition des autorités compétentes des informations complètes au sujet d’activités criminelles, sans déroger aux mesures applicables dans le pays hôte;

c)    d’évaluer les risques associés à l’utilisation de liquidités et d’effets au porteur négociables, y compris les mouvements transfrontaliers illicites de liquidités, ainsi que d’autres produits financiers, notamment les cartes à valeur stockée ou cartes prépayées, et les systèmes parallèles de transfert de fonds (y compris le hawala); de prendre les mesures voulues pour neutraliser ces risques;

d)    d’évaluer et de prévenir les risques potentiels associés à l’utilisation d’actifs virtuels et, au besoin, le risque que de nouveaux instruments financiers, notamment mais non exclusivement les plateformes de financement participatif, soient détournés pour financer des actes de terrorisme et prendre des mesures pour faire en sorte que ceux qui fournissent ces actifs se conforment aux obligations que leur impose la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme;

21.   Se félicite à cet égard des travaux que le GAFI continue de mener au sujet des actifs virtuels et des prestataires de services d’actifs virtuels, y compris les modifications apportées en octobre 2018 aux normes établies par le Groupe et la déclaration relative à la réglementation des actifs virtuels, et engage les États Membres à faire en sorte que les prestataires de services d’actifs virtuels appliquent les règlements fondés sur les risques concernant la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et à recenser les systèmes fondés sur les risques permettant de contrôler et de superviser efficacement ces prestataires;

22.   Engage les autorités nationales compétentes, en particulier les services de renseignement financier et les services de renseignement, à continuer d’établir des partenariats efficaces avec le secteur privé, y compris les institutions financières, le secteur de la technologie financière et les sociétés du secteur d’Internet et des médias sociaux, notamment en ce qui concerne les sources et les modes de financement du terrorisme et l’évolution des tendances dans ce domaine;

23.   Conscient que les organisations à but non lucratif jouent un rôle déterminant dans les économies et les systèmes sociaux nationaux, exhorte les États Membres à procéder à intervalles réguliers à une évaluation des risques que présente leur secteur associatif ou à tenir à jour toute évaluation existante, afin de recenser les organisations exposées à un risque de financement du terrorisme et à faciliter la mise en place d’une approche fondée sur les risques, engage les États Membres à collaborer avec le secteur associatif pour éviter que ces organisations, y compris les sociétés écrans, soient utilisées à des fins illégales par les terroristes ou pour leur compte, tout en rappelant que les États doivent respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales et rappelant les recommandations et documents d’orientation pertinents précédemment établis par le GAFI à ce sujet, et en particulier sa recommandation 8;

24.   Prie instamment les États, lorsqu’ils élaborent et appliquent des mesures visant à contrer le financement du terrorisme, de tenir compte de effets qu’elles pourraient avoir sur des activités exclusivement humanitaires, y compris médicales, menées par des acteurs humanitaires impartiaux, conformément à l’obligation que leur impose le droit international humanitaire;

25.   Engage les États Membres à redoubler d’efforts et à prendre des mesures résolues pour recenser les affaires pénales relatives à la traite d’êtres humains et au trafic de bien culturels qui financent le terrorisme afin d’amener les responsables à répondre de leurs actes et à fournir à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, selon qu’il conviendra, les informations pertinentes concernant de telles affaires;

26.   Demande à nouveau aux États Membres d’empêcher les terroristes de tirer profit, directement ou directement, du versement de rançons ou de concessions politiques et les encourage à intensifier la coopération et les échanges d’information à cette fin;

27.   Exhorte les États qui ne l’ont pas encore fait à adopter et à appliquer les mesures législatives et autres pour ériger en infractions, au regard du droit interne, la fabrication, la possession, le stockage et le commerce des armes légères et de petit calibre, dans leur juridiction, afin de faire en sorte que ceux qui se livrent à de telles activités fassent l’objet de poursuites pénales sur le plan national;

28.   Demande aux États Membres de renforcer la coopération internationale en vue de prévenir et de combattre le financement du terrorisme, y compris:

a)    de veiller à l’efficacité de l’échange de renseignements financiers pertinents dans le cadre de mécanismes bilatéraux et multilatéraux et de faire en sorte que les autorités compétentes soient en mesure d’exercer leurs pouvoirs pour donner suite aux demandes de coopération internationale;

b)    de garantir que leurs cellules de renseignement financier servent d’agences centrales pour la collecte d’informations portant sur des transactions suspectes et d’autres informations concernant le blanchiment d’argent ou des infractions préparatoires à ce type d’opérations ou encore le financement du terrorisme, communiquées par les entités déclarantes et qu’elles utilisent activement des voies précises, sûres et protégées pour faire connaître, de leur propre initiative ou sur demande, des informations et le résultat de l’analyse de ces informations aux autorités compétentes concernées;

c)    de renforcer la coopération transfrontière entre les administrations douanières et fiscales et de mieux coordonner les opérations des services de police et de douane menées sur le plan international;

d)    d’améliorer la qualité des informations partagées à l’échelle internationale par les cellules de renseignement financier concernant le financement des combattants terroristes étrangers, y compris ceux qui retournent dans leur pays ou se réinstallent ailleurs, par les petites cellules et par les terroristes sur les activités de ceux qui lèvent ou réunissent des fonds ou facilitent par d’autres moyens le financement du terrorisme, en appliquant dans leur intégralité les normes établies par le GAFI dans ce domaine;

29.   Rappelle que tous les États doivent se prêter mutuellement la plus grande assistance dans les enquêtes ou procédures pénales relatives au financement ou à l’appui d’actes de terrorisme;

30.   Engage les États Membres à aider à renforcer la capacité des autres États Membres, qui en font la demande, pour contrer la menace que représente le financement du terrorisme;

31.   Engage également les États Membres à utiliser au mieux les capacités de police de l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), notamment les bases de données et rapports d’analyse pertinents en vue de prévenir et de combattre le financement du terrorisme;

32.   Engage les États Membres et les organismes des Nations Unies, en particulier l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), à continuer de mener des recherches et de recueillir des informations pour mieux comprendre la nature et l’étendue des liens entre le terrorisme, notamment son financement, et la criminalité transnationale organisée;

33.   Prie les entités des Nations Unies, en particulier le Bureau de lutte contre le terrorisme et l’ONUDC, de continuer de coopérer avec les États Membres et de leur fournir, à leur demande et en tenant compte des lacunes en matière d’application et de capacités qui ont été recensées par la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme dans ses rapports, en particulier lorsqu’ils ont trait aux rapports d’évaluation mutuelle établis par le GAFI et ses organismes régionaux, une assistance technique et un renforcement des capacités afin de les aider à s’acquitter pleinement de leurs obligations internationales respectives en vue de prévenir et de combattre le financement du terrorisme;

34.   Demande au Bureau de lutte contre le terrorisme, en coopération étroite avec l’UNODC et en consultation avec la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions et d’autres entités signataires du Pacte mondial de coordination contre le terrorisme, ainsi qu’avec les institutions financières internationales telles que le Fonds monétaire international et la Banque mondiale et d’autres parties prenantes, y compris les homologues régionaux du GAFI, de resserrer la coordination en vue de dispenser une assistance technique intégrée concernant les mesures de lutte contre le financement du terrorisme, y compris une assistance permettant de renforcer la capacité des États Membres qui en font la demande, et d’appliquer effectivement la présente résolution;

35.   Prie instamment, conformément à sa résolution 2395 (2017), la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme de renforcer sa procédure d’évaluation relative à la répression du financement du terrorisme, notamment en effectuant des visites de suivi ciblées en complément à ses évaluations complètes, et de présenter chaque année, en consultation avec l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions, au Bureau de lutte contre le terrorisme, par l’intermédiaire du Comité contre le terrorisme, un résumé thématique de l’évaluation des lacunes recensées et des domaines où l’adoption de mesures s’impose aux fins de l’application des principales dispositions de ses résolutions pertinentes concernant le financement de la lutte contre le terrorisme en vue de proposer une assistance technique et un renforcement des capacités ciblés, en prenant en considération, selon qu’il conviendra, les rapports d’évaluation mutuelle établis par le GAFI et ses homologues régionaux, et de veiller à l’affectation de ressources suffisantes pour mener ces tâches à bien;

36.   Prie le Comité contre le terrorisme et le Comité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés de tenir, dans un délai de 12 mois, une réunion conjointe spéciale sur les menaces et tendances associées au financement du terrorisme ainsi que sur l’application des dispositions de la présente résolution;

37.   Prie instamment la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme et l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions à établir, avant la tenue de la réunion conjointe spéciale, un rapport sur les mesures prises par les États Membres pour désorganiser le financement du terrorisme et, à cet égard, invite les États Membres à leur communiquer par écrit, d’ici à la fin de 2019, des informations sur les mesures prises à cet effet;

38.   Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

Par visioconférence à partir de Rome, M. VLADIMIR VORONKOV, Secrétaire général adjoint au Bureau de lutte contre le terrorisme, a annoncé d’emblée qu’il vient de signer un mémorandum d’accord avec la « Guardia di Finanza », « une agence très connue d’expertise et de renforcement des capacités dans le domaine de la lutte contre le financement du terrorisme ».  L’adoption de la résolution 2462 (2019), a-t-il estimé, survient à un moment critique, les dernières attaques perpétrées dans le monde étant la preuve que les flux financiers, à la fois licites et illicites, continuent de parvenir aux groupes terroristes.  Contrairement aux précédentes résolutions sur le financement du terrorisme, le texte adopté aujourd’hui permet de prendre en compte les principales questions émergentes, comme les typologies novatrices de financement du terrorisme.

M. Voronkov a ensuite fait le point sur les priorités que s’est fixées le Bureau de lutte contre le terrorisme en matière de financement du terrorisme.  Il a parlé de l’importance d’élargir la portée de l’action pour inclure le partage des renseignements, les évaluations du risque sectoriel et les partenariats public-privé.  Il faut également concevoir la lutte contre le financement du terrorisme comme un ensemble global qui comprend une variété de sujets liés entre eux: la sensibilisation à l’échelle du système, la coordination interagences, les examens judiciaires et un engagement continu en faveur des ressources humaines et de la technologie.  Ce n’est qu’en adoptant une approche globale et multidimensionnelle que les institutions et systèmes financiers nationaux et internationaux pourront être correctement protégés de tout « abus terroriste ».

Le Secrétaire général adjoint a aussi préconisé de travailler de manière plus rapprochée avec le Groupe d’action financière (GAFI) et les organes régionaux du type du GAFI dans le domaine du renforcement de capacités.  Il a appelé les États Membres à mettre leurs experts nationaux à la disposition des programmes de lutte contre le financement du terrorisme de l’ONU pour que les pays bénéficiaires puissent se familiariser avec les meilleures pratiques.  Un appui financier conséquent s’impose également pour augmenter la capacité des États à prévenir et à détecter le moindre signe de financement du terrorisme.

M. MARSHALL BILLINGSLEA, Président du Groupe d’action financière (GAFI), a indiqué que la résolution qui vient d’être adoptée, permet d’avancer sur la voie ouverte par la conférence « no money for terror », qui s’est tenue à Paris, les 25 et 26 avril 2018.  Le GAFI attend avec intérêt la prochaine conférence, prévue en 2019, en Australie.  Fondé en 1989 par le G7, le GAFI, qui va célébrer son trentième anniversaire, focalisera ses efforts sur trois priorités: s’attaquer aux risques de financement illicites associés aux monnaies virtuelles et aux actifs associés, prendre des mesures supplémentaires pour renforcer les efforts internationaux de lutte contre le financement du terrorisme, et renforcer ses activités de lutte contre le financement de la prolifération des armes de destruction massive.

Comme le souligne la résolution, a ajouté le Président du GAFI, il est important que tous les États comprennent leur vulnérabilité au financement du terrorisme et utilisent cette compréhension pour atténuer les risques.  Saluant le fait que des informations utiles sur ces risques se trouvent dans les rapports de l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée par les résolutions 1526 (2004) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida, les Taliban et les personnes et entités qui leur sont associées, M. Billingslea a indiqué que le GAFI prépare actuellement des rapports confidentiels sur les sources et méthodes de financement de Daech et Al-Qaida ainsi que des contre-mesures que les États pourraient prendre.  Le GAFI veille à ce que tous les pays évaluent précisément les risques de financement du terrorisme et répondent comme il se doit.

Les risques de financement du terrorisme dépassent les secteurs financier et bancaire.  Les États doivent identifier tous les secteurs, y compris les services non financiers comme la construction, les produits de base et les produits pharmaceutiques.  M. Billingslea a, par exemple, expliqué que des groupes comme le Hezbollah, les Forces armées révolutionnaires de Colombie et Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) ont profité de la confusion entre les activités commerciales légales et illégales pour financer leurs attaques terroristes, sans compter les enlèvements contre rançon.  La résolution, a poursuivi le Président, demande à tous les États de faire le nécessaire pour rompre le cercle vicieux « paiements de rançon - financement du terroriste ».  Plus globalement, les États doivent traiter des contextes qui créent un environnement propice au terrorisme et au financement du terrorisme.  La corruption, une gouvernance faible ou inefficace et le manque de respect de l’état de droit peuvent mener à l’instabilité régionale et rendre les économies vulnérables au financement du terrorisme.  L’une des priorités du GAFI, cette année, est d’organiser des ateliers sur le renforcement de la capacité des États à poursuivre en justice ces crimes. 

Vantant le mérite des sanctions financières ciblées, le Président a indiqué que ces outils sont essentiels pour tout arsenal de lutte contre le terrorisme et a déploré, en conséquence, un manque de mise en œuvre.  Moins d’un cinquième des États évalués par le GAFI sont à jour.  Pour lutter contre le financement du terrorisme, nous devons renforcer la coordination entre les agences et le partage d’informations entre et au sein des États.  Les États devraient échanger plus d’informations avec les autorités pertinentes comme les cellules de renseignement financier, les forces de l’ordre et les services de renseignements.  Les pays doivent veiller à ce que toutes les agences puissent communiquer et coopérer.  Il est tout aussi important de travailler avec le secteur privé car les grandes banques ont accès à des données énormes qu’elles peuvent exploiter dans la lutte contre le financement du terrorisme.  Les gouvernements doivent, à leur tour, fournir des informations aux institutions financières. 

Les terroristes, a prévenu le Président, essaieront toujours de trouver de nouvelles manières de financer leurs activités nuisibles.  Nous devons identifier les pistes et les bloquer.  Les terroristes tenteront d’échapper aux sanctions mais nous devons protéger l’efficacité de nos outils.  Les terroristes auront toujours besoin de financement et nous devons punir ces comportements. 

Mme MERCY BUKU, Spécialiste de la lutte contre le financement du terrorisme, s’est d’abord lancée dans un vibrant plaidoyer pour l’accès de tous aux services bancaires.  Un compte bancaire permet à un individu de mieux gérer son argent et constitue un moyen de lutte contre la pauvreté, a-t-elle dit, insistant sur le lien entre inclusion financière et promotion du développement durable.  Or, a-t-elle fait observer, plus d’un milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à des services bancaires, en majorité dans les pays en développement.  En Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, les transferts financiers, notamment via les plateformes mobiles, permettent de promouvoir l’inclusion financière.  Mais ces services financiers innovants ne sont pas sans risque car ils peuvent être exploités par les groupes terroristes.  Mme Buku a donc jugé fondamental de réglementer ces services pour parer au danger terroriste.  Elle a prôné une meilleure coopération internationale, notamment avec le secteur privé, pour parvenir à un équilibre entre inclusion financière et intégrité financière. 

Pour M. JEAN-YVES LE DRIAN, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, qui présidait ce Conseil, la plus grande erreur serait de croire que le terrorisme est vaincu dès lors que ses prétentions territoriales ont été anéanties.  Al-Qaida et Daech, même s’ils reculent, ne disparaissent pas.  Au contraire, ils s’adaptent.  Chassés des territoires, ils se muent en réseaux clandestins et lorsqu’ils ne peuvent franchir les frontières, ils utilisent le cyberespace pour piloter, depuis l’étranger, ou inspirer, au cœur même de nos sociétés, les artisans de leurs projets criminels.  En tant que gouvernants, a poursuivi le Ministre, notre première responsabilité est d’assurer la sécurité de nos concitoyens, ce qui signifie qu’il faut aller jusqu’au bout du combat contre le terrorisme, en anticipant toujours sur les mutations de la menace et en adaptant la réponse.

Il faut traiter le mal à la racine, a estimé le Ministre, et intensifier les efforts pour isoler les terroristes, en asséchant leurs sources de financement.  Les terroristes, a-t-il expliqué, savent orienter à leur profit les trafics, le banditisme et même certains flux économiques conventionnels.  Chassés de leurs territoires, ils ont appris à investir les nouveaux espaces financiers virtuels où ils exploitent les possibilités offertes par les nouvelles technologies.  Les réseaux de la terreur savent comment amasser des fonds en ouvrant en ligne des cagnottes, a indiqué le Ministre, les accusant de pervertir la pratique de la hawala pour transférer des fonds à l’autre bout du monde, mais aussi de transformer leurs ressources en crypto-monnaie, pour faire l’acquisition de drones dans le cyberespace. 

« Le défi, vous le voyez, est grand », et la détermination doit l’être tout autant, pour ne laisser de côté aucun aspect de la lutte contre le financement du terrorisme.  Telle est l’ambition, a dit le Ministre, qui a conduit la France à organiser la conférence « No money for terror » à Paris, en avril 2018, et à promouvoir l’adoption d’un agenda ambitieux et la constitution de la coalition de Paris contre le financement du terrorisme.  Telle sera aussi l’ambition de l’Australie, qui prend la suite de la France et qui réunira la coalition de Paris, à Melbourne, en novembre 2019.  Telle est enfin l’ambition qui a conduit la France à porter cette question au sein du Conseil de sécurité, en lui proposant l’adoption d’une doctrine de référence, de nature à guider l’action de la communauté internationale en matière de lutte contre le financement du terrorisme.

L’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité est un acte politique fort, a souligné le Ministre, mais elle ne constitue pas une fin en soi.  « C’est un commencement, celui du temps de la mise en œuvre, qui doit tout autant nous mobiliser et dans laquelle il nous faut démontrer que nous sommes à la hauteur de nos responsabilités. »

Face à cette menace protéiforme et en constante mutation, il faut construire le partenariat le plus large possible, a poursuivi le Ministre, un partenariat qui, en associant l’ensemble des acteurs concernés -États, secteur privé, institutions multilatérales, société civile– est seul à même d’apporter une réponse à la hauteur du défi.  Le Ministre a lancé un appel à « tous les membres de ce partenariat » pour qu’ils se saisissent de la résolution adoptée aujourd’hui et s’engagent à la mettre en œuvre sous tous ses aspects, mais également aux Nations Unies, en particulier au Bureau de la lutte contre le terrorisme (BLT) et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT), pour qu’elles apportent aux pays qui en ont besoin l’assistance technique nécessaire pour développer leurs capacités en matière de lutte contre le financement du terrorisme.

M. A.M. FACHIR, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a appelé à combler les écarts dans la mise en œuvre des instruments internationaux liés à la prévention et à la lutte contre le financement du terrorisme, citant notamment la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI).  Il a aussi jugé nécessaire de renforcer les capacités d’adaptation des États pour leur permettre de répondre à des défis de plus en plus dynamiques et complexes.  Le financement du terrorisme s’oriente vers des cyberactivités, notamment des transactions en ligne sophistiquées que les autorités ont de plus en plus de mal à déceler et à contrer, a-t-il alerté.

Le Vice-Ministre a aussi estimé que la lutte contre le financement du terrorisme doit se dérouler dans un contexte de renforcement de la coopération et de la coordination internationale.  Il a appelé à procéder à des échanges d’informations et de meilleures pratiques, à fournir une assistance technique et des ressources adéquates pour appuyer le renforcement des capacités, comme celles des unités de renseignements financiers et de répression, et à une meilleure coordination entre les agences pertinentes de l’ONU.  Nous devons, a-t-il insisté, nous adapter à une technologie en pleine évolution et aux nouvelles méthodes de financement.  Nous devons adopter une approche novatrice, non seulement pour repérer les fonds terroristes, mais également pour prévenir « la création d’argent terroriste ».

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a dit qu’il est plus important que jamais de travailler ensemble pour barrer l’accès aux ressources non seulement de Daech mais aussi des extrémistes de droite.  Les terroristes peuvent mener des attaques horribles avec de petites sommes d’argent, a souligné le représentant qui a demandé à tous les États d’appliquer toutes les normes internationales contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.  Il a aussi souligné l’importance qu’il y a à partager les informations, à lancer des poursuites judiciaires et à assurer un équilibre entre inclusion financière et intégrité financière.  Le délégué a appelé l’attention sur les mesures prises par son pays, y compris le partenariat solide qu’il a mis en place entre les secteurs public et privé, lequel a permis, par exemple, d’identifier rapidement les auteurs de l’attaque du pont de Londres, le 3 juin 2017.  Une approche impliquant tous les segments de la société est essentielle dans la lutte contre le terrorisme.  La résolution adoptée aujourd’hui est un pas important qui doit être efficacement mise en œuvre par tous les États, a conclu le représentant.

Nous ne pouvons prévenir le financement du terrorisme sans remédier aux causes profondes de l’attrait exercé par les groupes terroristes, a prévenu Mme JOANNA WRONECKA (Pologne).  Elle a plaidé pour une action précoce dès l’expression des premiers symptômes de radicalisation.  Elle a aussi insisté sur une détection précoce des circuits financiers des terroristes et a appelé les États à appliquer l’approche basée sur les risques recommandée par le GAFI.  La traçabilité des transactions suspectes est cruciale, a-t-elle poursuivi, en rappelant que les différences entre les législations peuvent aussi être exploitées par les groupes terroristes.  Afin d’y remédier, la représentante a prôné une meilleure coopération entre les autorités nationales et le secteur privé mais aussi, à son tour, pour partage d’informations renforcé.  Elle a aussi insisté sur la pertinences des sanctions financières, tout en reconnaissant leurs potentielles conséquences humanitaires « non souhaitées ». 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a souligné l’importance de la résolution 1373 (2001) qui contribue énormément à entraver tout appui direct aux groupes terroristes.  La question principale reste néanmoins de s’attaquer aux causes profondes du terrorisme, y compris Daech.  Le représentant a estimé que la résolution adoptée aujourd’hui se fonde sur les nombreux acquis de la lutte contre le terrorisme.  Elle met à juste titre l’accent sur le partage d’informations et le renforcement des capacités.  Le représentant a tout particulièrement insisté sur la coopération avec le secteur bancaire, la création d’unités d’enquête spécialisées et la mise en œuvre de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme.  Au Koweït, a-t-il par exemple indiqué, une loi a été votée pour assurer la transparence dans toutes les transactions financières.  Le pays a d’ailleurs mis en œuvre les 40 recommandations du GAFI et a renforcé son expertise et ses capacités de lutte contre le financement du terrorisme. 

Pour M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne), la lutte contre le terrorisme n’est pas seulement une question de force militaire, de travail policier, de prévention et de déradicalisation.  C’est avant tout une course contre la montre pour les connaissances et les informations, a estimé le représentant, pour lequel il s’agit de trouver les empreintes laissées par les terroristes et remonter jusqu’à « chez eux ».  La plupart des terroristes évitent le secteur financier formel et préfèrent les circuits informels et anonymes, comme la hawala, les coursiers et les téléphones prépayés.  Le représentant s’est donc félicité de ce que la résolution adoptée aujourd’hui exhorte les États à surveiller de près les systèmes informels.  L’Allemagne, a-t-il dit, appelle à la réglementation des transferts de fonds par les circuits informels et salue le travail du GAFI dont les normes internationales peuvent servir de point de départ.

À ce jour, a noté le représentant, au-delà des régimes de sanctions du Conseil de sécurité, le financement du terrorisme est combattu par deux autres régimes de sanctions autonomes: celui contre les groupes terroristes en général et celui contre Daech et Al-Qaida en particulier.  Mais les efforts doivent s’inscrire dans une approche plus large, a estimé le représentant, une approche qui mise sur des sociétés plus inclusives dans lesquelles tout le monde est traité avec respect et où chacun peut vivre une « vie qui en vaut la peine ». 

Il a salué le rôle inestimable des organisations humanitaires comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans les différents conflits.  Ces organisations, a-t-il rappelé, ont critiqué la résolution adoptée aujourd’hui et « elles méritent qu’on les écoute ».  Sans argent, il n’y a pas d’aide humanitaire.  Il faut donc éviter les obstacles à l’accès du personnel humanitaire aux fonds, dans les zones de conflit.  Le représentant a estimé que la résolution a su trouver le bon équilibre entre les mesures antiterroristes et le respect de l’espace humanitaire, y compris les transactions financières.  Même si « un texte peut toujours être interprété », personne ne peut utiliser cette résolution pour criminaliser des actions humanitaires indépendantes, neutres et impartiales.  Toutes les mesures agréées aujourd’hui doivent rester conformes au droit international, y compris le droit international humanitaire, les droits de l’homme et les droits des réfugiés.  À ce sujet, la résolution est tout à fait claire, s’est réjoui le représentant. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a appelé tous les États à mettre en œuvre la résolution adoptée aujourd’hui « de manière responsable ».  L’intensité des activités des groupes terroristes est directement liée à leur capacité financière, a-t-il souligné, en encourageant les États à s’appuyer sur le GAFI et à partager les résultats de leurs enquêtes.  Il a mis en garde contre la politisation de la lutte contre le financement du terrorisme, estimant que c’est « à la mode » de parler d’extrémisme violent et de penser qu’il suffit d’actionner des moyens « non militaires » pour en venir à bout.  Or, la réhabilitation et la prévention ne marchent pas toujours, a mis en garde le représentant, ajoutant que toute négociation avec un groupe terroriste est « un crime grave ».  Il a salué l’inclusion de la question de l’approvisionnement en armes des groupes terroristes dans la résolution.  Avec cet ajout, le Conseil vient de renforcer son arsenal, s’est-il félicité.  Le délégué a dit que son pays est prêt à offrir son assistance technique pour une bonne mise en œuvre de la disposition sur l’approvisionnement en armes. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a indiqué que son pays a commémoré, la semaine dernière, l’attentat du 22 mars 2016 qui avait fait 32 morts et 340 blessés.  Il a estimé que la résolution adoptée aujourd’hui, un texte « essentiel », compile de manière cohérente et transparente les conventions internationales contre le financement du terrorisme.  Cette résolution comble également des lacunes importantes liées à l’évolution rapide de l’infrastructure électronique du financement.

Le représentant s’est dit particulièrement préoccupé par le recours croissant à la traite des êtres humains, à l’exploitation sexuelle et au trafic d’espèces sauvages à des fins terroristes.  Il a relevé que ces dernières années, le trafic d’espèces sauvages a généré des profits considérables pour les organisations terroristes d’Afrique, telles que Boko Haram.  Pour lutter contre ce phénomène d’une manière efficace, il a jugé crucial que les États développent une base légale pour la criminalisation du financement du terrorisme et qu’ils créent des services de renseignement financier performants, en coopération avec le secteur privé et les organisations de la société civile. 

Il a évoqué le travail « considérable » du GAFI et a accueilli favorablement le fait que la nouvelle résolution demande aux États de mettre en œuvre ses normes et recommandations.  Le représentant a par ailleurs jugé important de prendre en compte les effets potentiellement néfastes des politiques de lutte contre le terrorisme sur le travail des organisations humanitaires « dont l’action est neutre et impartiale ».

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a souligné l’importance de la lutte contre le financement du terrorisme en Afrique centrale, une région vulnérable au blanchiment d’argent et aux autres formes de financement du terrorisme.  La région a donc adopté des règles qui font actuellement l’objet de mise à jour pour mieux les aligner avec les recommandations internationales dont celles du GAFI.  Onze types de financement du terrorisme ont été identifiés en Afrique centrale dont la traite des êtres humains, le trafic des ressources naturelles, les enlèvements et le blanchiment d’argent.  Il est très important, a estimé le représentant, que les mesures internationales soient en phase avec les mesures régionales.  En définitive, a-t-il conclu, la méthode efficace de lutter contre le terrorisme et son financement, c’est de réaliser les objectifs de développement durable. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) s’est félicité d’avoir coparrainé la résolution adoptée aujourd’hui.  Son pays, a-t-il souligné, prépare un plan d’action pour prévenir et lutter contre le financement du terrorisme, dans le cadre du Plan stratégique du Comité national contre les activités de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.  Le représentant a souligné l’importance pour les États d’œuvrer au niveau national et d’informer leur secteur privé pour mettre efficacement en œuvre cette résolution. 

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a déclaré que l’ampleur de la menace exige une évaluation collective de nos stratégies et cadres normatifs en vue d’une réponse adaptée et mieux coordonnée qui permettra d’éliminer tout vide ou dysfonctionnement pouvant être exploité par les terroristes.  Cette démarche implique des mesures aux plans international, régional et national.  Sur le plan international, la lutte contre le financement du terrorisme est une priorité nécessitant la mobilisation de tous, l’harmonisation des cadres juridiques et la mutualisation des moyens.  Les pays devront également promouvoir une coopération multiforme notamment dans les secteurs de la justice, de la police et des finances.  Le partage d’informations et de bonnes pratiques étant un élément clef de la stratégie de lutte, une attention particulière devra être accordée à la mise en place de mécanismes de coopération formels entre les services de douanes des différents pays, et à l’accroissement de la surveillance aux frontières.

Sur le plan régional, le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent de l’Afrique de l’Ouest constitue une réponse majeure et une contribution de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à la lutte contre le blanchiment des capitaux.  Cette institution spécialisée œuvre avec les États, les gouvernements et les institutions financières en vue de renforcer leurs moyens de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.  Sur le plan national, il incombe aux États de renforcer leurs arsenaux juridiques antiterroristes, notamment la pénalisation du financement du terrorisme et l’application intégrale des sanctions imposées par les Nations Unies.  À la suite de l’attaque terroriste survenue en mars 2016 à Grand-Bassam, la Côte d’Ivoire a renforcé son dispositif en prenant des mesures visant notamment à relever le niveau de vigilance par l’intensification du renseignement.  Les capacités opérationnelles des unités de lutte antiterroriste ont été renforcées grâce à des moyens matériels, à la formation et à la coopération internationale, et la population a été sensibilisée aux comportements à adopter en cas d’attaque terroriste.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a noté que la résolution adoptée aujourd’hui s’inscrit dans l’esprit de la conférence « Pas d’argent pour la terreur » organisée en avril 2018 par la France.  Le Pérou estime que la lutte contre le financement du terrorisme représente non seulement une obligation internationale, mais aussi une stratégie pour les États en vue de prévenir, limiter et bloquer la capacité des groupes terroristes de passer à l’acte.  À cet égard, le représentant a relevé que la résolution aborde les formes classiques et nouvelles du financement du terrorisme, ainsi que les défis de la criminalité organisée.  Dans un contexte en perpétuelle évolution, a-t-il ajouté, il faut renforcer la coordination interinstitutionnelle, notamment pour l’échange d’informations conformément aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI) et du Groupe d’action financière d’Amérique latine (GAFILAT).  À cet égard, le Pérou compte sur l’appui de la communauté internationale pour renforcer ses capacités nationales. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a salué la résolution « historique » adoptée aujourd’hui qui vient compléter l’arsenal du Conseil.  Les nouvelles obligations prévues par ce texte permettront de mieux lutter contre le financement du terrorisme et les États doivent maintenant les mettre en œuvre, a-t-il dit.  Cette résolution souligne notamment la nécessité de mettre en œuvre les sanctions financières ciblées contre Daech et Al-Qaida.  À cet égard, a affirmé M. Cohen, les États-Unis partagent leurs informations avec leurs partenaires et le secteur privé.  Le représentant a appelé à une lutte contre le financement de groupes terroristes comme le Hezbollah, qui continue de saper la stabilité internationale et qui mène une guerre sur deux fronts, en Syrie et au Liban.  Le Hezbollah utilise des sociétés écrans, notamment pharmaceutiques, pour dissimuler ses activités de blanchiment d’argent.  Le Hezbollah et les autres groupes terroristes doivent être reconnus pour ce qu’ils sont: une menace à la paix et à la sécurité internationales, a martelé M. Cohen.  Il a d’ailleurs mentionné le partenariat de son pays avec l’Arabie saoudite, avant de préciser que les États-Unis ont frappé de sanctions 36 individus et entités.  Mettons à jour nos outils de lutte contre le financement du terrorisme, a conclu le délégué. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a dit que pour éradiquer le financement du terrorisme, il faut améliorer la coopération internationale, appliquer les résolutions de l’ONU et renforcer des organes comme le GAFI.  La Chine, ajouté le représentant, propose trois démarches dans la lutte contre le financement du terrorisme; le respect des principes de la Charte des Nations Unies et du droit international, l’adoption de mesures et de politiques intégrées et le partage d’informations économiques, et la lutte contre la pauvreté.  Les pays en développement font face à ce défi immense alors qu’ils n’ont pas les ressources.  Pour éviter qu’ils ne deviennent des havres et des sanctuaires pour les terroristes, il faut renforcer la communauté internationale, en particulier la coopération technique.  La communauté internationale doit parvenir à une synergie des stratégies contre le financement du terrorisme et en l’occurrence, ne pas oublier le rôle que peut jouer l’Internet.  Il faut donc, a-t-il dit, cadenasser le système financier international et soutenir le travail du GAFI, en particulier dans la région d’Asie. 

Mme NOSIVIWE NOLUTHANDO MAPISA-NQAKULA, Ministre de la défense de l’Afrique du Sud, a souligné qu’au cours de son existence, l’Union africaine a développé un cadre élargi de politiques, d’instruments juridiques et de programmes contre le terrorisme et ses causes sous-jacentes.  De son côté, l’Afrique du Sud, a dit la Ministre, s’est engagée dans la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité, des normes internationales du GAFI.  Ces mesures sont appuyées par le cadre législatif national et la Stratégie nationale de lutte contre le terrorisme.  Elles sont mises en œuvre avec l’aide du Centre du renseignement financier et les autres structures gouvernementales pertinentes.  Le partage des informations, la coordination et les partenariats public-privé sont des éléments essentiels.  Au niveau régional, a poursuivi la Ministre, l’Afrique du Sud participe pleinement aux efforts visant à mettre en place une législation contre le financement du terrorisme et des cadres régulatoires qui prévoiront l’assistance technique et le renforcement des capacités.  Du côté des Nations Unies, a conclu la Ministre, il est important que la lutte contre le terrorisme tienne dûment compte des raisons qui poussent les personnes vulnérables dont les jeunes à se radicaliser, et de la nécessité de protéger l’assistance humanitaire et médicale

M. SIRODJIDDIN MUHRIDDIN, Ministre des affaires étrangères du Tadjikistan, a mentionné les mesures prises par son pays dans la lutte contre le financement du terrorisme, notamment l’approbation du « concept national sur la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et les armes de destruction massive 2018-2025 ».  Le Ministre a insisté sur le trafic de stupéfiants et rappelé que la sécurité de son pays dépend en grande partie de la situation en Afghanistan voisin, où sévissent des réseaux terroristes, dont Daech.  Il s’est donc félicité de l’état de la coopération entre les deux pays et espérer des actions plus robustes de la part des autres pays de la région.  Le Ministre a indiqué que son pays compte accueillir une conférence sur le trafic des stupéfiants, au mois de mai, pour précisément renforcer la coopération régionale et internationale et identifier des mesures efficaces. 

L’argent est le poumon du terrorisme, a déclaré M. TEODORO L. LOCSIN JR, Secrétaire aux affaires étrangères des Philippines, qui a expliqué que dans son pays, le financement du terrorisme est un éventail complexe, constitué de flux illicites, de blanchiment d’argent, du trafic de drogue, et parfois même d’envois des Philippins de l’étranger.  Le tout est facilité par des frontières physiques, financières et cybernétiques « poreuses ».  Après les recommandations du GAFI, les Philippines ont élaboré, pour la période 2018-2022, une Stratégie nationale de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et procédé à un exercice national d’évaluation des risques dont celui qui représente les envois de fonds, « principal moteur de l’économie philippine ».  Mais les agences de transfert monétaires ont été utilisées pour acheminer des fonds aux terroristes et ce sont les envois effectués par les canaux informels qui ont financé l’attaque terroriste de Marawi en 2017.

Ces envois de fonds représentant 9,8% du PIB philippin et l’idée de les restreindre a touché une « corde sensible » dans la population.  Le défi est donc de trouver un équilibre entre les impératifs de la lutte contre le terrorisme et le confort tout aussi impératif de ceux qui se débattent dans une « captivité babylonienne » pour joindre les deux bouts dans les « terres bibliques » et aider leur famille restée au pays.  Ce dilemme a évidemment tenté les banques étrangères qui ont voulu prendre le relais en imposant des « taux de pirate ».  « Les banquiers seront toujours des banquiers », s’est résigné le représentant.

M. Locsin a ensuite dirigé ses critiques contre les ONG dont l’argent est détourné vers le financement du terrorisme.  Ces ONG, a-t-il expliqué, opèrent dans le sud des Philippines.  Marawi, a-t-il conclu, illustre la symbiose entre terrorisme et trafic de stupéfiant.  Mais la zone a pu être reprise après six mois, avec un nombre de morts « fantastique »: 1 000 jihadistes tués contre 165 soldats philippins.  « Nous n’avons tout simplement rien à faire des critiques de l’opinion publique.  Ce ne sera pas joli mais nous les aurons tous », a conclu le représentant, en paraphrasant son Président. 

M. TEODOR-VIOREL MELEŞCANU, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie, a dit que son gouvernement a pris une série de mesures législatives et administratives pour assurer la protection de toutes les personnes sur son territoire, en veillant en même temps à ce que la lutte contre le terrorisme soit menée conformément aux obligations internationales et aux dispositions internationales et nationales des droits de l’homme.  À cette fin, a ajouté le Ministre, nous avons mis en place une structure spéciale qui s’appelle le Système national de prévention et de lutte contre le terrorisme.  Plusieurs autorités de ce système participent directement aux activités de lutte contre le financement du terrorisme et ont développé une stratégie qui s’appuie beaucoup sur la dimension préventive.

La Roumanie a pénalisé le financement du terrorisme dès 2002 et un processus visant à clarifier la législation est en cours.  Nous soutenons, en même temps, l’élaboration et la mise en œuvre de programmes et de mesures ciblés visant à renforcer la protection du système financier contre toute utilisation illégale par des personnes ou entités impliquées dans des activités terroristes ou criminelles, a indiqué le Ministre.  Il a ajouté que son pays a d’ailleurs coparrainé la résolution adoptée aujourd’hui par le Conseil.  Nous pensons, a-t-il conclu, qu’il est nécessaire d’améliorer et de mettre à jour nos informations concernant les sources et les méthodes utilisées par les groupes terroristes pour obtenir du financement.    

M. JÜRI LUIK, Ministre de la défense de l’Estonie, a indiqué que la lutte contre le défi mondial du financement du terrorisme commence au niveau national.  « Seuls les États peuvent veiller à ce que leur législation soit bien mise en œuvre.  Seuls les États peuvent se doter des capacités suffisantes et des moyens technologiques adaptés. »  Jugeant essentielle la coopération internationale, le Ministre a insisté sur le rôle du GAFI et de son organe régional, le Comité d’experts sur l’évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.  L’Estonie, a-t-il dit, a adhéré à t la Convention pour la répression du financement du terrorisme et soutient toutes les initiatives de l’ONU, de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe.  La législation estonienne permet d’ailleurs la pleine application des résolutions pertinentes du Conseil, a conclu M. Luik, en estimant nécessaire que les organisations de la société civile soient mieux sensibilisées à la menace du financement du terrorisme. 

Mme LASHA DARSALIA, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Géorgie, a expliqué que la lutte contre le terrorisme restait à ce jour l’une des priorités de la Géorgie, et que les mesures ciblées prises par le Gouvernement ont permis de considérablement réduire le nombre de supporters de Daech et leur influence dans le pays.  Le Gouvernement évalue régulièrement les défis majeurs, y compris la manière de gérer les personnes qui auraient des liens avec le terrorisme international, qu’ils soient géorgiens ou étrangers vivant en Géorgie, ainsi que les Géorgiens impliqués dans les conflits au Moyen-Orient.

Toutefois, les territoires occupés représentent toujours un problème majeur pour les efforts de lutte contre le terrorisme du Gouvernement, a indiqué la Vice-Ministre, car ils pourraient être utilisés pour des activités illégales telles que le trafic d’armes, y compris de destruction massive, qui pourraient tomber dans les mains des terroristes et menacer la sécurité de toute la région.  Elle a affirmé qu’au cours de ces dernières années, il y a eu plusieurs tentatives de trafic de matériaux nucléaires et radioactifs qui ont pu être déjouées par les forces de l’ordre géorgiennes.  Mais en l’absence d’une présence internationale à la frontière des territoires occupés, il est quasiment impossible de mener des opérations de vérification.  La Vice-Ministre va fait état du renforcement de la législation antiterroriste depuis 2013, ainsi que de la Stratégie nationale et du Plan d’action pour la période 2019-2021, qui s’articulent autour de sept piliers allant de la prévention à la déradicalisation, en passant par la lutte contre le financement du terrorisme et contre les combattants terroristes étrangers.

Mme SIMONA LESKOVAR, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, s’est inquiétée de ce que les nouvelles technologies permettent désormais aux terroristes de collecter et de distribuer les fonds nécessaires à leurs activités.  Elle a jugé nécessaire d’établir des partenariats efficaces avec le secteur privé et fournir une formation continue aux parties prenantes.  La Vice-Ministre a indiqué qu’en 2016, la Slovénie a adopté une nouvelle loi sur la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme qui rend obligatoire l’examen du dossier de tout client qui effectue une transaction de plus de 1 000 euros.  La loi prévoit aussi l’établissement d’un registre reprenant les véritables propriétaires des comptes.  Outre la coopération entre les différentes unités nationales de lutte contre le terrorisme, la Slovénie organise des cours de formation sur la typologie et les indicateurs du financement du terrorisme, à l’intention du secteur bancaire, des compagnies d’assurance, des sociétés de courtage et des bureaux de change.  Sur le plan régional, et à la lumière des liens entre terrorisme et criminalité organisée, la Slovénie a proposé la création de l’Initiative de lutte contre le terrorisme dans les Balkans occidentaux.

L’attentat terroriste perpétré à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, nous rappelle que notre système commun de protection contre le terrorisme doit être flexible, a estimé Mme GILLIAN BIRD (Australie).  Bien que l’évolution du système financier international ait favorisé la croissance économique, il offre également des moyens additionnels aux groupes terroristes pour financer leurs attaques.  Il est donc important de renforcer la lutte contre le financement du terrorisme à l’échelle mondiale, notamment le blanchiment d’argent.  De son côté, l’Australie s’est engagée dans la mise en œuvre des accords internationaux et l’adaptation de ses lois nationales.  La mise en place de partenariats public-privé tels que la « Fintel Alliance » permet une collaboration étroite entre divers secteurs et un meilleur partage d’informations.  Mme Bird s’est dite impatiente de poursuivre ces efforts lors de la Conférence ministérielle antiterroriste qui se tiendra en novembre prochain. 

D’après M. AMMAR AL ARSAN (République arabe syrienne), la crédibilité de l’ONU dans la lutte contre le financement du terrorisme dépend de la mise en œuvre des résolutions adoptées sur la question.  Celle qui vient d’être votée met exclusivement l’accent sur le financement de groupes ou d’individus, a noté le représentant qui a rejeté l’évaluation « déroutante » du Président du Groupe d’action financière (GAFI) sur la Syrie.  La Syrie, a défendu le représentant, a mis en œuvre les recommandations du GAFI et coopéré afin d’identifier les déficiences éventuelles dans leur mise en œuvre.  Déjà en 2014, le GAFI avait reconnu que la Syrie avait mis en œuvre les recommandations, a-t-il rappelé, mais certains membres du GAFI ont insisté pour nommer son pays dans le rapport.  « Nous invitons le GAFI à se rendre à Damas pour faire le point », a offert M. Al Arsan.

« Nous sommes préoccupés par l’oisiveté et l’incompétence des Nations Unies et de la communauté internationale pour ce qui est de demander des comptes à certains États sur leur financement et la fourniture en armes de groupes terroristes armés », a accusé le délégué pour qui l’ONU ne manque pourtant pas d’instruments.  Il a déploré l’absence de moyens pour contraindre les États à respecter les recommandations du GAFI et à appliquer les résolutions de l’ONU.  Il a en outre accusé le Qatar « qui a sciemment fourni des milliards de dollars à Daech et à d’autres groupes terroristes sous prétexte de payer des rançons pour libérer des otages. »  Le paiement de rançons aux groupes terroristes est interdit par les résolutions du Conseil de sécurité, a rappelé M. Al Arsan.  La Syrie est le pays qui a le plus souffert du terrorisme, a-t-il poursuivi; les pertes économiques sont immenses.  La Syrie demeure néanmoins le principal partenaire de la communauté internationale dans la lutte contre le terrorisme, a-t-il fait valoir, mais elle ne reçoit toujours pas d’aide financière à cette fin.  « Au contraire nous subissons un blocus financier », a déploré le représentant. 

M. OMAR CASTAÑEDA SOLARES (Guatemala) a indiqué que la brutalité des attaques terroristes génère un sentiment considérable d’insécurité aux conséquences globales et a pointé la vulnérabilité de tous les États à de tels actes.  Il a souligné les liens croissants entre activités terroristes et réseaux de la criminalité transnationale.  Il a demandé un contrôle plus strict du commerce des armes légères et de petit calibre et souligné la pertinence du Traité sur le commerce des armes.  Les États doivent tout faire pour empêcher que des armes de destruction massive ne tombent entre les mains de groupes terroristes, a-t-il dit, avant de souligner que rien ne peut justifier un acte terroriste. 

M. PAUL KEHOE, Ministre de la défense de l’Irlande, a insisté sur l’importance de la coopération internationale pour relever le défi du financement du terrorisme.  L’ONU a, à ce titre, un rôle crucial à jouer, en particulier ce Conseil, a-t-il dit, ajoutant que son pays est candidat à un siège non permanent au Conseil pour les années 2021-2022.  L’Irlande, a-t-il poursuivi, apporte une réponse au financement du terrorisme sur le plan national mais aussi sur le plan international, en particulier au sein du GAFI.  L’Irlande participe également activement aux efforts de l’Union européenne.  Le Ministre a plaidé pour la transparence dans les structures des entreprises, des fonds et des organisations.  Toute dissimilation pourrait faciliter le transfert de fonds à des activités terroristes.  Mais, a prévenu le Ministre, les mesures antiterroristes ne doivent en aucun saper nos obligations en vertu du droit international, y compris les droits de l’homme et le droit international humanitaire. 

Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a souligné quatre points.  Premièrement, il faut assortir chaque enquête sur un acte terroriste d’une enquête financière spécifique.  Même des crimes mineurs et à petit budget peuvent laisser des traces financières susceptibles d’être utilement exploitées pour mieux comprendre l’environnement terroriste et y répondre plus efficacement.  Une coopération étroite entre les forces de l’ordre et les cellules de renseignement financier devrait être constamment encouragée et promue.  Deuxièmement, les analyses et les recommandations du GAFI sont importantes.  Les États Membres doivent mettre en œuvre la résolution adoptée aujourd’hui de manière cohérente et à assurer le plus haut niveau de coopération.  Troisièmement, a poursuivi la représentante, l’Italie est fortement impliquée dans la lutte contre le financement du terrorisme.  Son Bureau d’enquête contre le terrorisme travaille conformément à un protocole qui prévoit enquêtes préalables et échanges systématiques d’informations avec les cellules de renseignement financier et les autres organes de contrôle.  Une attention particulière est accordée aux opérations suspectes et aux personnes inscrites sur les listes des sanctions.  Des centaines de milliers de noms sont vérifiés chaque année.  Enfin, la représentante a souligné que l’équilibre entre les sanctions et la protection des droits de l’homme et de la dignité de la personne reste une priorité pour l’Italie. 

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a détaillé le Plan d’action en 20 points adopté par son pays contre le terrorisme, lequel a permis de faire chuter considérablement les attaques terroristes.  Elle a aussi parlé des lois contre le financement du terrorisme et l’état de mise en œuvre des recommandations du GAFI.  Nous accordons, a-t-elle dit, une attention particulière à l’évaluation des risques que présente le secteur associatif, pour qu’aucun de ses fonds ne finance une entreprise terroriste.  Revenant au GAFI, la représentante a estimé que davantage de pays devraient être associés à son processus de prise de décisions.  La déléguée a, à son tour, souligné la nécessité de remédier aux causes profondes du terrorisme, dont les violations incessantes des droits de l’homme dans les territoires occupés, dont la Palestine et le Jammu-et-Cachemire.  Elle n’a pas manqué de dénoncer les « suprématistes blancs » qui diabolisent l’Islam. 

M. ROBERT MARDINI, Observateur permanent du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) auprès de Nations Unies, a estimé que la résolution adoptée aujourd’hui par le Conseil montre que les États continuent d’appuyer le droit international humanitaire et les principes de l’action humanitaire.  Il s’est toutefois inquiété de l’impact des mesures de lutte contre le terrorisme sur l’aide humanitaire.  Tout en reconnaissant la légitimité de ces mesures, le CICR demeure préoccupé par l’impact des sanctions et des législations antiterroristes, qui peuvent avoir pour effet de « criminaliser et de restreindre l’action humanitaire ».  Il en va de notre capacité à franchir les frontières pour prêter assistance aux communautés vivant sur des territoires contrôlés par des « individus désignés comme étant des terroristes », a renchéri M. Mardini, qui a dénoncé les obstacles grandissants à l’exécution du mandat de la Croix-Rouge. 

La communauté internationale, a poursuivi l’observateur, doit donc trouver un juste équilibre entre les préoccupations légitimes des États concernant la sécurité et l’importance d’une assistance humanitaire impartiale.  « Les engagements pris aujourd’hui en faveur du respect de l’action humanitaire ne sont d’aucune utilité pour les populations s’ils ne sont pas mis en œuvre », a-t-il argué, avant d’encourager les États Membres à consulter les organisations humanitaires afin de trouver des solutions « concrètes » à ce problèmes « vital ». 

Malgré les progrès réalisés dans la lutte contre Daech, il est « crucial » de tarir les sources de financement du terrorisme, a déclaré M. YASUHISA KAWAMURA (Japon).  Pour ce faire, nous devons veiller à la « stricte application » des résolutions du Conseil de sécurité.  Le Japon, a rappelé le représentant, accueillera les Jeux olympiques en 2020, et entend prendre toutes les mesures nécessaires pour faire face aux menaces potentielles.  Le Gouvernement du Japon collabore étroitement avec le secteur privé, et poursuit un dialogue avec les institutions financières afin de favoriser le partage d’informations.  Des lignes directrices contraignantes ont également été mises en place dans le secteur bancaire afin de détecter les transferts de fonds suspects.  À l’échelle mondiale, le Japon continue de coopérer étroitement avec le GAFI et de fournir un appui financier aux projets pertinents du Fonds monétaire international (FMI) et de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a précisé le représentant. 

M. GUILLERMO ROQUE FERNÁNDEZ DE SOTO VALDERRAMA (Colombie) a indiqué que la Colombie s’est fermement engagée dans le renforcement de ses capacités de prévention et de répression du terrorisme.  Il s’est dit conscient que des délits comme la corruption, le trafic illicite de drogues ou d’armes, la traite de personnes, le trafic illicite de migrants, ou encore le blanchiment d’argent ont permis le renforcement d’organisations terroristes qui sont aujourd’hui en mesure de déstabiliser les États et la communauté internationale dans son ensemble.  En Colombie l’appareil judiciaire va se doter d’outils innovants pour pouvoir faire face aux nouvelles formes que prend la menace terroriste.

En tant que membre du Groupe d’action financière d’Amérique latine (GAFILAT), la Colombie a fait l’objet de quatre évaluations du Groupe d’action financière du Fonds monétaire international (FMI)qui a notamment salué les mesures prises pour le gel des actifs d’organisations terroristes et le respect des régimes de sanctions du Conseil de sécurité.  La nouvelle politique de défense et de sécurité de la Colombie veille à ce que le crime et le terrorisme ne soient ni justifiés ni validés comme moyens d’action politique.  Le représentant a remercié le Conseil d’avoir condamné l’attaque terroriste qui a visé l’école de police de Bogota en janvier dernier.  La Colombie, a-t-il conclu, est préoccupée par la montée en puissance de groupes terroristes qui utilisent de faux prétextes religieux pour miner les valeurs et principes des États et menacer la paix et la stabilité internationales. 

Le terrorisme, a voulu souligner Mme AMAL MUDALLALI (Liban), ne peut être associé à une religion ou à un groupe.  « C’est une maladie mondiale qui requiert un remède mondial. »  Le Liban, a-t-elle dit, a été en première ligne de la lutte contre le terrorisme, en particulier contre Daech.  Elle a évoqué les mesures législatives pour perturber les flux financiers qui alimentent Daech.  Elle a aussi rappelé l’adhésion de son pays à la Convention pour la répression du financement du terrorisme de 1999.  Le Comité national antiterroriste, composé de représentants de 11 agences financières et du maintien de l’ordre, se réunit régulièrement, a-t-elle indiqué, avant de souligner la nécessité de remédier aux causes profondes du terrorisme, en promouvant, entre autres, le développement durable. 

Pour M. MOHAMED FATHI AHMED EDREES (Égypte), la lutte contre le financement du terrorisme concerne toutes les organisations terroristes sans distinction aucune.  Il faut agir sérieusement à l’encontre des États et des entités terroristes qui utilisent des ONG et des organisations caritatives comme « façades » pour collecter et distribuer des fonds.  Il faut aussi s’attaquer à la relation qui existe entre ces organisations et les réseaux de criminalité transnationale organisée.  Le représentant a également plaidé en faveur du renforcement de la collaboration aux niveaux national, régional et international pour s’adapter aux grandes avancées dans les technologies utilisées par les groupes terroristes pour financer leurs activités, comme la cybermonnaie.

Sur le plan national, a expliqué M. Edrees, l’Égypte a ratifié la majorité des conventions internationales et mis en œuvre les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI).  Pour leur part, les institutions financières égyptiennes doivent respecter les règles d’identification en vue de prévenir le blanchiment d’argent alors que le système de transferts de fonds en Égypte se limite aux institutions bénéficiant d’un permis.  Dans le cadre de la lutte contre les nouveaux moyens de financement du terrorisme, l’Égypte a mis en garde le public en le sensibilisant aux dangers de la monnaie virtuelle, et a distribué une liste des sites les plus utilisés à cet égard.  Elle a également mis en place des règles strictes pour les paiements par Internet ou via les téléphones mobiles, y compris des moyens pour identifier les usagers de ces services.

M. GUSTAVO MARTIN PRADA, de l’Union européenne, a salué l’initiative de la France visant à donner un nouvel « élan politique » à la lutte contre le financement du terrorisme.  Ce financement est un phénomène « dynamique, en constante évolution », a-t-il relevé, alors que les réseaux terroristes ont recours à de nouvelles méthodes telles que les fondations et le financement participatif.  Nous devons donc adapter nos moyens, notamment en renforçant la transparence des entreprises et des trusts, tout en améliorant la coopération internationale.  Toutefois, a-t-il noté, les attentats terroristes perpétrés contre des pays de l’Union européenne ont été réalisés avec des ressources financières modestes, difficiles à détecter.  Il faut approfondir la coopération entre les États en matière de renseignement et d’enquêtes, notamment en établissant des partenariats public-privé pour la transparence des transactions financières.  Ces mesures ne doivent touetois pas entraver l’action humanitaire, a prévenu le représentant, en insistant sur le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Une lutte efficace contre le financement du terrorisme requiert coordination et coopération entre les États et les Nations Unies, a-t-il conclu. 

En tant que place financière d’importance mondiale, la Suisse assume une responsabilité particulière, a dit M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse).  Son engagement a été reconnu par le Groupe d’action financière (GAFI), auquel elle a démontré la solidité et l’efficacité de son dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.  La Suisse participe activement à l’évolution et la mise en œuvre des normes internationales en la matière.  Le représentant a ajouté que pour être efficace au niveau mondial, la lutte contre le financement du terrorisme nécessite un engagement fort de tous les États, en particulier au sein des fora multilatéraux spécialisés que sont le GAFI et les groupes spéciaux régionaux de type GAFI qui lui sont affiliés.  La force de ces organismes est le système d’évaluations mutuelles sur la base d’une méthodologie d’évaluation et de suivi commune, précise en transparente. 

Ensuite, a indiqué M. Favre, bien que les législations sur la lutte contre le terrorisme et son financement soient indispensables, elles ne s’attaquent pas aux causes profondes qui favorisent le développement du terrorisme et qui incluent la pauvreté, les carences de gouvernance, la corruption, l’inégalité, le manque d’éducation ou l’absence de perspectives pour la population.  Les efforts pour lutter contre le terrorisme doivent donc être déployés en amont et de manière ciblée sur la prévention de l’extrémisme violent et de la radicalisation qui mène au terrorisme, ainsi que sur le développement économique et la coopération internationale.  La Suisse appelle la communauté internationale, y compris le Conseil de sécurité et ses organes subsidiaires, à veiller à ce que les mesures prises dans le cadre de la lutte antiterroriste soient les plus ciblées possibles et compatibles avec le droit international, et plus particulièrement le droit international humanitaire.  À ce sujet, la Suisse regrette le fait que la résolution adoptée aujourd’hui ne soit pas plus claire sur ces aspects. 

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a remarqué qu’en tant qu’économie ouverte, plaque-tournante du transport international et centre financier mondial, Singapour court le risque de devenir un point de transit de fonds illicites.  Fort de son expérience dans la lutte contre le financement du terrorisme, le représentant a identifié trois éléments clef pour combattre ce phénomène: la bonne gouvernance, des partenariats avec l’industrie et la coopération internationale.  Il a notamment cité la mise en place, dès 1999, d’un comité de pilotage de haut niveau chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, mais aussi la règlementation sévère qui cherche à protéger le système financier de toute forme d’exploitation.  Compte tenu de la sophistication croissante des activités terroristes, Singapour revoit régulièrement sa législation.  Ensuite, un partenariat de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme avec l’industrie a vu le jour en avril 2017.  Enfin, M. Gafoor a plaidé pour une coopération renforcée dans le cadre de mécanismes bilatéraux, régionaux et internationaux. 

M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a salué l’adoption de la résolution, y voyant un jalon dans les efforts visant à établir un cadre normatif pour criminaliser le financement du terrorisme.  Il a notamment salué la reconnaissance du rôle essentiel joué par le GAFI dans l’établissement des normes internationales pour la prévention et la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la prolifération des armes.  Il a toutefois constaté que de nombreuses résolutions, comme les 1267 et 1988, qui font du gel des avoirs un élément central des obligations des États appelle à la présentation régulière de rapports de mise en œuvre.  Or, ces rapports ne sont plus mis à jour depuis plus de 10 ans.  Il a également relevé que la résolution d’aujourd’hui ne prévoit pas de mesures effectives en cas de non-respect de l’obligation de faire rapport.  Le représentant a aussi fait observer que le GAFI a déjà établi une liste des risques posés par Daech, Al-Qaida, Jamaat-ud-Dawa, la Fondation Falah-i-Insaniyat, Lashkar-e-Taiba, Jaish-e-Mohammed, le réseau Haqqani et les personnes affiliées aux Taliban.  Il a appelé à une application effective des régimes de sanctions imposés par l’ONU.

Selon M. GEORG HELMUT ERNST SPARBER (Liechtenstein), les débats publics devraient informer le processus de rédaction des projets de résolution et se tenir avant l’adoption des textes.  Il a appelé à promouvoir des législations domestiques solides, soulignant que les intermédiaires financiers doivent faire preuve de circonspection et que les unités de renseignements financiers sont essentielles à la mise en œuvre effective de ces législations.  Ainsi l’unité de renseignement financier du Liechtenstein aide, par l’intermédiaire du Groupe Egmont, d’autres pays à renforcer leurs capacités dans ce domaine.  Le représentant s’est alarmé des liens entre le terrorisme, la traite des personnes et l’esclavage moderne, soulignant que les deux derniers phénomènes sont de plus en plus fréquemment employés comme tactique terroriste et pour lever de fonds.  Il a appelé le Conseil de sécurité à se montrer plus cohérent lors de la création des listes de trafiquants d’être humaines établie en vertu du régime de sanctions contre la Libye.  Il a évoqué le lancement par le Liechtenstein, l’Australie et l’Université des Nations Unies (UNU), d’une commission du secteur financier sur l’esclavage moderne et la traite des êtres humains: l’Initiative du Liechtenstein, a-t-il précisé, exhorte les États et le secteur financier à collaborer. 

M. Sparber s’est par ailleurs préoccupé du fait que « la résolution d’aujourd’hui pourrait déboucher de facto ou de jure sur l’obstruction de l’action humanitaire ».  Il a appelé à éviter tout dispositif pouvant rendre l’utilisation d’argent liquide pour l’octroi de l’aide plus difficile, entraver l’utilisation des services bancaires par les acteurs humanitaires ou décourager ces derniers d’opérer dans des environnements où les groupes terroristes demeurent opérationnels.  Le Liechtenstein encourage le Conseil à fournir des directives cohérentes aux États pour éviter toutes conséquences involontaires liées à la mise en œuvre de ses résolutions et à veiller à ce que les acteurs humanitaires disposent de l’espace nécessaire pour opérer.

Au nom du Danemark, de la Finlande, de l’Islande et de la Suède, Mme MONA JUUL (Norvège) a insisté sur le caractère « crucial » de la coopération internationale et de la mise en œuvre des résolutions du Conseil.  En vue de tarir les revenus des groupes terroristes, elle a prôné un meilleur échange d’informations renforcé et des réactions rapides aux demandes de coopération.  Nous devons faire en sorte que nos cellules de renseignement financier soient dotées de la technologie nécessaire pour analyser les informations et identifier les tendances.  Nous devons aussi renforcer les partenariats avec le secteur privé et la société civile et garder à l’esprit les conséquences humanitaires négatives que peuvent avoir les mesures contre le financement du terrorisme. 

M. EMMANUEL ROUX, Représentant spécial de l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) auprès des Nations Unies, a remercié les membres du Conseil de sécurité d’avoir inclus INTERPOL dans les dispositions de cette résolution, qui encourage à faire le meilleur usage des bases de données et outils d’analyse qu’il met à la disposition de ses 194 États membres.  La lutte contre le financement du terrorisme est l’un des cinq piliers de la Stratégie mondiale contre le terrorisme d’INTERPOL, qui est au côté des services d’application des lois et des cellules de renseignement financier pour tracer et briser les mécanismes du financement du terrorisme.  Alors que le texte appelle les États à intensifier l’échange d’informations entre services de police et cellules de renseignement financier, le fichier d’analyse criminelle d’INTERPOL sur les combattants terroristes étrangers -50 000 profils à ce jour- contient des informations financières en plus des données nominatives.  Nous recommandons également depuis longtemps, a rappelé le représentant, de donner directement aux cellules de renseignement financier l’accès à notre réseau sécurisé I24/7 et à nos 17 bases de données.  Nos États membres, a-t-il précisé, peuvent tout d’abord bénéficier et utiliser notre base de données sur les documents de voyage perdus ou volés, qui contient à ce jour 85 millions de références.  Les terroristes utilisent souvent de tels documents falsifiés, voire volés « en blanc » en zone de conflits pour effectuer des transactions financières illégales, a observé le haut fonctionnaire.

Il est également possible de solliciter la diffusion d’une notice INTERPOL contre tout acteur ou pour signaler tout mode opératoire en matière de financement du terrorisme, a-t-il relevé.  Cela mettra l’information à la disposition de tout ou partie de nos États Membres, chacun restant parfaitement maître, a-t-il assuré, de la diffusion de ses informations via nos canaux de communication sécurisés.  S’agissant des régimes de sanctions, INTERPOL diffuse aujourd’hui, au profit de 10 des 14 comités des sanctions, plus de 600 notices spéciales au sujet d’entités ou d’individus placés sous sanctions, dont plus de la moitié pour le seul Comité 1267, permettant de faciliter la mise en œuvre des interdictions de voyager, mais également le gel des avoirs criminels. 

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. SAMUEL MONCADA (Venezuela) a estimé qu’il ne faut pas oublier de traiter de façon globale les conditions propices à la propagation du terrorisme, un phénomène qui progresse sur le terreau des inégalités économiques, de la pauvreté extrême, de l’occupation étrangère ou encore des systèmes politiques répressifs.  Le Mouvement des non-alignés est prêt à prendre des mesures rapides et efficaces pour lutter contre le terrorisme, que ce soit par le biais de procès ou d’extradition des terroristes, mais aussi en interdisant la commission d’actes terroristes dans des États tiers.  Le Mouvement appelle les Nations Unies à apporter son assistance au renforcement des capacités des pays qui le demandent.  À titre national, le représentant a affirmé que le Venezuela est victime d’actes terroristes contre ses infrastructures, en particulier son réseau électrique.  Le Président a même échappé à une tentative d’attentat.  Le représentant a demandé au Conseil de sécurité d’obtenir la stricte application de ses résolutions sur le terrorisme et son financement.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a jugé important de mettre l’accent sur les cryptomonnaies et les paris en ligne.  Elle a aussi attiré l’attention sur les liens entre la traite des êtres humains et le financement du terrorisme.  Elle a rappelé le rôle du Qatar dans la coalition internationale contre Daech qui, s’est-elle félicitée, vient d’abandonner son dernier bastion.  Elle a passé en revue les instruments internationaux auxquels est partie le Qatar, précisant en outre qu’un mémorandum d’accord avait récemment été conclu avec les États-Unis.  Le Qatar, a annoncé la représentante, compte par ailleurs offrir 75 millions de dollars, sur les 10 prochaines années, au Bureau de lutte contre le terrorisme de l’ONU.  Elle a ensuite indiqué que son gouvernement avait adopté plusieurs lois pour combattre, entre autres, la cybercriminalité, ainsi que pour réglementer les ONG.  Un groupe de lutte contre le financement du terrorisme a aussi été mis sur pied.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé les propos du pape François et du Grand Imam d’Al-Azhar, Ahmad Al-Tayyeb selon lesquels « il faut cesser de soutenir les mouvements terroristes alimentés par le financement, la fourniture d’armes et de stratégies, et par des tentatives de justification avec l’utilisation des médias.  Tous ces éléments doivent être considérés comme des crimes internationaux menaçant la sécurité et la paix dans le monde. »  Toutes les résolutions du Conseil de sécurité ainsi que les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI) devraient être soigneusement mises en œuvre pour « suivre l’argent » et empêcher que les profits du blanchiment d’argent, du trafic d’êtres humains, de la vente et du trafic illicites d’antiquités, ainsi que de la vente d’armes et de munitions, ne soient utilisés à des fins terroristes.  Il faut aussi penser aux dizaines de milliers de filles et de femmes utilisées et maltraitées par des groupes terroristes pour répandre leurs dangereuses idéologies.  Pour prévenir efficacement le financement du terrorisme, il est donc indispensable de rompre son lien avec le crime transnational organisé et de traduire en justice les criminels.  L’Observateur a ajouté qu’il était important d’assurer que les mesures contre le terrorisme respectent les droits de l’homme, l’état de droit et le droit international humanitaire.  « Il ne doit pas y avoir de conflit entre la prévention du financement du terrorisme et l’aide humanitaire. »  

Se félicitant de l’approfondissement du cadre normatif dont dispose le Conseil de sécurité grâce à l’adoption de cette résolution, M. NUNO VAULTIER MATHIAS (Portugal) a indiqué que son pays dispose d’un régime solide et efficace pour lutter contre le financement du terrorisme, conformément aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI).  « Les autorités opérationnelles concernées ont accès à un large éventail de renseignements financiers, y compris les bases de données nationales complètes, et coopèrent de manière proactive et en collaboration avec leurs homologues étrangers à des fins d’enquête », a-t-il précisé.  Le Portugal, a fait valoir le représentant, a adopté tous les instruments juridiques internationaux de référence relatifs au terrorisme, hormis la Convention pour la répression d’actes illicites liés à l’aviation civile internationale, dont le processus de ratification est en cours. 

Pour Mme NOA FURMAN (Israël), le financement du terrorisme et le blanchiment d’argent constituent le combustible qui fait tourner le moteur du terrorisme.  Par conséquent, pour le combattre efficacement, il faut couper les sources de financement.  La région du Moyen-Orient a souffert du rôle destructeur du financement du terrorisme, a poursuivi la représentante, en reprochant au terrorisme palestinien de saper tout espoir de paix et plus particulièrement au Hamas d’abuser des organisations caritatives et humanitaires pour financer ses activités.  En ce qui concerne le régime iranien, « il faudrait une journée entière pour expliquer comment ce sponsor d’État du terrorisme utilise des techniques sophistiquées et échappe aux régimes de sanctions contre le financement du terrorisme », a ironisé la représentante, en affirmant que son principal intermédiaire est le Hezbollah.

Israël a pris des mesures actives et proactives pour combattre les menaces terroristes permanentes qui le visent.  Une nouvelle loi antiterroriste pénalise les cercles d’influence qui soutiennent matériellement et par d’autres moyens les terroristes et leurs actes et la délégation espère qu’elle pourra servir de modèle à l’échelle mondiale.  Au-delà de sa législation nationale, Israël a tout fait pour combattre le terrorisme au niveau international.  Depuis son accession au statut d’observateur du Groupe d’action financière (GAFI), le Groupe a félicité Israël pour ses efforts dans la lutte contre le financement du terrorisme et son utilisation efficace des renseignements.  Israël met en œuvre des sanctions financières ciblées, notamment contre le régime iranien.  Mme Furman a ensuite mis en garde contre l’autofinancement des activités terroristes par des opérations et activités qui semblent légitimes ou encore par la contrebande de fonds, de biens et d’objets de valeurs à travers les frontières, et contre les abus des nouvelles technologies financières, y compris les portefeuilles électroniques et les actifs virtuels.

Mme CHRYSTIA FREELAND, Ministre des affaires étrangères du Canada, a déclaré d’emblée qu’à l’heure actuelle, la suprématie blanche et l’islamophobie sont devenues les principales menaces terroristes dans le monde et a ajouté que son pays continue de « forger une approcher à long terme » de la lutte contre le terrorisme et les idéologies extrémistes qui l’alimentent.  Elle a rappelé les mots du Premier Ministre Justin Trudeau, qui a appelé les dirigeants du monde à « dénoncer la haine avec conviction » et à la combattre « ensemble ».  Il n’existe pas de profil unique de la radicalisation, a rappelé la Ministre, pour qui les nations doivent agir contre le terrorisme en se basant sur les faits, dans le respect des droits de l’homme.  La complexité de la menace terroriste multiforme nous oblige à adopter une approche holistique et non strictement militaire, en mettant l’accent sur l’éducation et l’implication de la société civile, notamment les femmes.  En outre, une approche tenant compte des droits de l’homme permet de faire la différence entre des gains à court terme et une victoire qui s’inscrit dans la durée.  Alors que les réseaux terroristes sont opportunistes et exploitent les failles juridiques pour mener à bien leurs attaques, le Canada continue de lutter contre le financement du terrorisme par le renforcement des capacités, en collaboration avec ses partenaires bilatéraux, régionaux et internationaux. 

M. MOHAMMED ATLASSI (Maroc) a fait observer qu’entre 2014 et 2016, les recrutements à travers des mesures incitatives, comme le financement de leurs déplacements et des émoluments mensuels, ont permis le flux de plus de 40 000 combattants terroristes en Iraq et en Syrie.  Après avoir énuméré les moyens employés par les terroristes pour assurer le financement de leurs activités, notamment la vente illicite de biens culturels ou de pétrole, l’enlèvement contre rançon et des trafics de tout genre, le représentant a constaté que les mesures prises et les comités mis en place ont eu un impact indéniable sur l’assèchement des sources de financement du terrorisme.  Toutefois, a-t-il signalé, sans la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et sans l’intensification de la coopération entre le secteur privé et les États aux niveaux régional et sous-régional, on ne peut avoir des résultats tangibles.

M. Atlassi a ensuite parlé de l’arsenal juridique dont dispose le Maroc pour lutter, entre autres, contre le blanchiment de capitaux, citant notamment la loi numéro 43-05 qui donne pleine compétence à l’Unité de traitement du renseignement financier en matière de réception et de traitement des demandes émanant du Conseil concernant le gel des biens et des avoirs.  En application de la résolution 2253 (2015), le Maroc a également communiqué au Comité des sanctions un rapport qui fournit des informations actualisées sur les actions et initiatives prises par le Royaume en vue d’assurer une mise en œuvre optimale des dispositions des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a salué l’adoption de la résolution d’aujourd’hui et encouragé le renforcement de la coopération entre le Bureau de lutte contre le terrorisme, la direction exécutive du Comité contre le terrorisme, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et INTERPOL ainsi que d’autres organisations multilatérales et régionales et des banques pour améliorer les capacités visant à identifier, analyser, enquêter et partager les informations pertinentes au sujet des sources et des flux financiers d’organisations terroristes.  Mais il faut aller plus loin, a-t-il plaidé, en proposant des mesures innovatrices pour identifier et traquer les transferts de fonds irréguliers ainsi que les flux financiers illicites.  Dans ces efforts, il faut mettre l’accent sur les techniques de renseignements financiers et former les autorités compétentes au blanchiment d’argent ainsi qu’aux activités financières suspectes.  De même, il a encouragé une coopération étroite entre les unités de contrôle financier et les agences de maintien de l’ordre.  Tous les États Membres doivent promulguer des lois pour faire du financement du terrorisme un acte pénal, a tranché le représentant.  Pour sa part, le Kazakhstan, qui a conclu 35 accords bilatéraux avec des unités de renseignements financiers d’autres États Membres, suit de près les 2000 individus inscrits sur sa liste nationale dont 46 ont été traduits en justice.

Mme ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) a affirmé que son pays avait été l’objet d’actes terroristes orchestrés depuis l’étranger qui avaient provoqué la mort de plus de 3 400 personnes.  Dans la majorité des cas, ces actes ont été autorisés par les États-Unis ou par des pays sous leur protection, a-t-elle accusé.  Elle a dénoncé l’action des États qui promeuvent le financent d’actes terroristes dans le but de provoquer, entres autres, des changements de régime.  Elle a ensuite dénoncé le sabotage du réseau électrique du Venezuela, affirmant que cet « acte terroriste perpétré dans le cadre de la guerre non conventionnelle menée par les États-Unis » contre ce pays.

La représentante a par ailleurs indiqué que Cuba s’est doté d’une loi de lutte contre le terrorisme et que la législation cubaine traite aussi du crime de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.  La Banque centrale cubaine dispose en outre d’une unité qui fonctionne comme une cellule de renseignement financier et qui permet de déceler toute transaction suspecte.  En 2012, un mémorandum d’accord a aussi été signé avec les pays membres du Groupe d’action financière d’Amérique latine (GAFILAT).

M. MOHD SUHAIMI AHMAD TAJUDDIN (Malaisie) a indiqué que son pays fait face à une augmentation du financement du terrorisme en raison de la réadaptation et de la décentralisation de Daech et des combattants terroristes étrangers.  Il a expliqué que les principales sources de financement proviennent de sources légitimes, notamment de revenus tirés d’activités licites, de prélèvement de pensions, de contributions familiales et de dons du public.  L’autofinancement est la méthode de levée de fond la plus commune pour les déplacements ou les opérations dans les zones de conflit, a-t-il fait remarquer.  De plus, les combattants terroristes étrangers profitent des frontières poreuses de la Malaisie pour transporter de l’argent liquide.  Le représentant a aussi fait état d’une augmentation de l’utilisation de comptes bancaires pour toucher les donations de sympathisants, les transférer et les retirer lorsque les terroristes se trouvent dans les zones de combats.  Il en va de même pour les agences d’envois de fonds et les « hawala ».

M. Ahmad Tajuddin a ensuite expliqué que les institutions financières de la Malaisie appliquent des mesures préventives pour éviter d’être utilisées par des terroristes et déceler toute transaction suspecte.  Une plateforme pour le secteur public et privé a aussi été établie en 2017 par l’Unité de renseignement financier, la police royale malaisienne et d’autres institutions financières pour cibler les transactions suspectes.  Le pays dispose également d’un système réglementaire effectif pour mettre en œuvre les mesures de sanctions financières mandatées par le Conseil de sécurité.

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a indiqué que son pays avait progressivement aligné son cadre normatif sur les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité pour contrer le financement du terrorisme, en prévoyant, notamment, des pénalisations sévères pour toute activité de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme.  Il a aussi recommandé au Conseil de renforcer l’application des régimes de sanction existants.  En outre, le Viet Nam appuie les efforts de mise en œuvre du plan d’action de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour la prévention et la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent pour la période 2018-2025.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance cruciale d’intensifier la coopération entre États pour ce qui est du partage d’informations sur les transactions suspectes, et de renforcer les capacités pour répondre aux menaces que représentent les nouvelles méthodes de financement.  Une collaboration effective avec le secteur privé s’impose, a-t-il ajouté, précisant que la Banque d’État du Viet Nam partage de manière régulière, avec les forces de l’ordre, les informations sur les transactions suspectes.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a dit qu’après avoir mis à jour les lois sur la prévention du blanchiment d’argent et la lutte contre le terrorisme, pour qu’elles reflètent les normes internationales et contiennent les dispositions nécessaires permettant de répondre aux demandes des pays étrangers d’identifier, geler, saisir et confisquer les produits des crimes et des avoirs, le Gouvernement a créé un Groupe de travail chargé de renforcer les enquêtes et de coordonner les activités de lutte contre le terrorisme, l’extrémisme et le financement terroriste.  S’agissant de la coopération internationale, le Bangladesh a pris toutes les mesures possibles conformément à la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Bien que l’influence et le financement des groupes terroristes aient diminué, nous devons rester vigilants, a plaidé le représentant.  « Nous devons élargir et approfondir la sensibilisation contre le financement du terrorisme pour atteindre un public plus large, et renforcer les capacités pour doter les gouvernements et les institutions des connaissances nécessaires pour lutter contre le financement du terrorisme sur Internet. »  La coordination entre les mécanismes sur le terrain, dans et entre les pays, y compris la coordination dans des secteurs tels que le blanchiment d’argent, le trafic de drogue, le trafic d’êtres humains et le crime organisé devrait être accrue. 

Pour M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq), l’adoption de la résolution aujourd’hui marque une étape importante dans la lutte contre le financement du terrorisme. 

En dépit de la victoire militaire remportée par les forces iraquiennes, avec l’aide la coalition internationale contre Daech, il faut, a prévenu le représentant, promouvoir les mesures nécessaires pour prévenir le financement du terrorisme.  Le Gouvernement iraquien ne ménage aucun effort à cet égard, ce dont témoignent les quatre projets lancés en collaboration avec l’ONU, et la nomination d’un Conseiller spécial.  Le pays s’est également doté d’une Stratégie nationale de lutte contre le terrorisme et son financement.  Pour endiguer celui de Daech, le Gouvernement iraquien a brisé les liens entre les institutions financières contrôlées par le groupe terroriste et les pays étrangers.  La liste noire de ces institutions a été diffusée dans les 70 pays de la coalition internationale et plusieurs mémorandums d’accord ont été signés pour le partage de renseignements financiers.  Par ailleurs, le gel des avoirs a été décrété conformément aux recommandations du Comité de sanctions du Conseil de sécurité, a précisé le représentant.

Mme AUDRA PLEPYTĖ (Lituanie) a déclaré qu’une approche intégrée dans la lutte contre le financement du terrorisme reste primordiale.  Cela passe par le renforcement des cadres nationaux et opérationnels pour collecter, analyser et partager les informations, par une anticipation constante des risques, par une évaluation améliorée des abus des nouveaux instruments financiers et le renforcement des partenariats public-privé.  Le financement du terrorisme est insignifiant en Lituanie où une seule condamnation pour financement du terrorisme a été enregistrée.  Mais le pays reste vigilant et engagé dans la coopération internationale pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.  Réaffirmant l’importance de la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité sur ce sujet, la représentante a averti que la cybermonnaie risque d’être utilisée pour le financement du terrorisme et d’autres formes de criminalité en ligne.  Ainsi, il est très important de dissuader les terroristes de lever des fonds à travers les médias sociaux, d’abuser des réseaux de financement participatif et des services en ligne. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a appuyé les résolutions du Conseil de sécurité dans le domaine de la lutte contre le financement du terrorisme, qui ont été intégrées dans le système juridique national.  Les mises à jour des listes de sanctions conformément aux résolutions du Conseil ont été faites rapidement.  La Turquie, a ajouté le représentant, a soutenu et parrainé un certain nombre de résolutions qui incluent des entités et des individus.  « Nous continuerons de jouer un rôle actif dans ce domaine », a assuré le délégué.  « Nous devons garder à l’esprit que de nombreuses organisations terroristes comme Daech, le Parti des travailleurs du Kurdistan et sa branche syrienne « Unités de protection du peuple kurde », ont aussi recours aux méthodes conventionnelles pour les transactions financières telles que les « hawala », pour financer leurs activités par le biais d’organisations de façade », a-t-il dénoncé.  Conformément à la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité, le gel des avoirs s’avère un outil efficace pour priver les individus et les entités de leurs capacités financières et les empêcher d’utiliser et d’abuser des systèmes financiers légaux.  Les approches sélectives dans la mise en œuvre de cet outil ne permettent que la dégénérescence du système envisagé dans ladite résolution.  « La cohérence doit être notre principe directeur si nous voulons disposer d’un système efficace pour prévenir le financement du terrorisme et combler les lacunes dans ce domaine », a conclu le représentant. 

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, de l’Union africaine, a estimé qu’il faut agir sans tarder et de manière concertée pour couper les sources de financement du terrorisme.  Cela suppose que l’on tienne compte de la capacité avérée des groupes terroristes d’adapter leurs méthodes et d’innover.  Elle a d’ailleurs relevé la tendance accrue de ces groupes à se tourner vers les réseaux de la criminalité transnationale organisée pour générer des ressources et acquérir des moyens logistiques pour commettre leurs actes violents.  Ils tirent ainsi partie de systèmes et de technologies financiers existants.  Ces groupes utilisent bien souvent des ONG et autres organisations caritatives comme façade pour leurs transferts de fonds.

La représentante a appelé au respect des cadres juridiques régionaux et internationaux pour combattre le financement du terrorisme.  Elle a mis l’accent sur l’importance des renseignements financiers qui ont souvent permis souvent de traquer les terroristes, y compris en Afrique.  Le renforcement des cellules de renseignements financiers est d’ailleurs un des éléments clef de la stratégie de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent de l’Union africaine, a affirmé la représentante.

Le terrorisme ne connaît ni religion, ni race, ni nationalité, et peut frapper n’importe où, a déclaré Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis), en rappelant l’attaque commise en Nouvelle-Zélande.  La lutte contre le terrorisme appelle une stratégie à plusieurs volets, s’attaquant tant à la haine qu’aux idéologies et à des groupes spécifiques, tels que Daech.  Cette lutte demande également une surveillance constante des transactions financières.  Mme Nusseibeh a appelé les États à veiller à ce que les terroristes ne puissent pas utiliser les institutions financières et les organisations à but non lucratif pour financer leurs attaques, notamment en renforçant la coopération internationale.  En outre, les États qui financent le terrorisme doivent être redevables de leurs actions.  Pour leur part, les Émirats arabes unis comptent s’acquitter de leurs obligations régionales et internationales en matière de lutte contre le financement du terrorisme, en veillant notamment à l’application des résolutions du Conseil de sécurité. 

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a condamné le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations.  Il a appelé à la mise en œuvre de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999, des résolutions du Conseil et des recommandations du GAFI.  Il a souligné l’importance des organisations régionales dans la lutte antiterroriste, en insistant sur le rôle joué par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dont la présidence est assurée par la Slovaquie.  Sous ladite présidence, la Conférence antiterroriste qui s’est récemment tenue a mis en lumière les pistes d’amélioration des mécanismes de coopération intergouvernementaux. 

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a indiqué que la lutte contre le terrorisme est l’un des principes directeurs de la politique étrangère de son pays.  Il y a deux semaines, le Brésil a adopté une loi facilitant la mise en œuvre immédiate des résolutions du Conseil en ce qui concerne les sanctions frappant des individus et entités affiliés à des groupes terroristes.  Toute action antiterroriste doit respecter le droit international, a-t-il dit.  Il a rappelé que l’interprétation large des législations antiterroristes par les cours et tribunaux nationaux a pu, par le passé, entraver l’action humanitaire.  Il a souligné la nécessité de remédier aux causes profondes du terrorisme, phénomène qui « n’a que peu à voir avec l’argent ».  Enfin, le délégué a plaidé pour des mesures contre toute action ou discours incompatibles avec le respect de la diversité. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a appelé à s’attaquer aux causes profondes du terrorisme.  Regrettant que les terroristes continuent à trouver de nouveaux moyens pour financer leurs actes, il a pointé du doigt l’Iran.  Le Bahreïn a obtenu des résultats concluants dans la lutte contre le terrorisme et se dit prêt à partager son expérience.  Au niveau national, a expliqué le représentant, le pays s’est doté d’un cadre qui inclut plusieurs lois sur la lutte contre le terrorisme, son financement et le blanchiment d’argent.  Le Royaume participe pleinement aux cadres internationaux visant à lutter contre le financement du terrorisme, et fait partie des membres du Groupe d’action financière (GAFI).  Il travaille à la mise en œuvre d’un plan d’action conjoint entre les pays de la coalition pour assécher les sources de financement du terrorisme à l’échelle mondiale et a accueilli des réunions internationales et régionales sur ce thème. 

Saluant l’adoption de la résolution 2462 (2019), M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a constaté qu’une approche plus nuancée pour combattre le financement du terrorisme avait été privilégiée récemment.  Il a appelé à renforcer la capacité des États à collecter des preuves d’activité terroriste, introduire un régime de pénalisation cohérent pour l’ensemble des acteurs, promouvoir la coopération entre le secteur privé et public, y compris les plateformes de réseaux sociaux, et sensibiliser davantage.  Le représentant a ensuite appelé à garantir l’application de tous les instruments juridiques de lutte contre le financement du terrorisme, déplorant qu’en dépit de leur engagement, certains États rechignent à le faire.  Il a dénoncé l’agression lancé contre son pays en 2014, signalant un afflux de munitions et de combattants dans les régions de l’Est, souvent sous le couvert de convois humanitaires.  Il a fait le point sur le bilan humain de la situation.  Notant que l’islamisme n’avait jamais fait partie de l’histoire de la Crimée avant son occupation par la Russie, il s’est interrogé sur la fréquence de l’emploi actuel de cette accusation.  Il a appelé à maintenir, voire renforcer, les sanctions imposées à « l’État agresseur ».

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a appelé le Conseil de sécurité à veiller, dans un an, lors de l’examen de la mise en œuvre de la résolution 2462 (2019), et après une évaluation équitable des risques, à ce que les ONG puissent continuer d’opérer dans un espace libre et que les acteurs humanitaires puissent fournir de l’aide.  Elle a ensuite salué les efforts déployés pour renforcer la coopération entre les secteurs public et privé.  Elle a expliqué qu’aux Pays-Bas, le Procureur public, la police, les unités de renseignement financier et les sociétés privés, notamment les banques et les compagnies d’assurance, partagent des informations sur des personnes et transactions liées au terrorisme.  Depuis sa création, ce partenariat a permis de signaler plus de 300 transactions suspectes supplémentaires.  La représentante a également appelé à coordonner davantage les efforts de l’ONU, du Groupe d’action financière (GAFI), du Forum antiterroriste mondial, du Groupe Egmont et de la Coalition mondiale pour combattre Daech.  Elle a ensuite indiqué qu’il y a 15 jours, deux hommes avaient été arrêtés à Amsterdam et accusés d’avoir vendu les kalachnikovs et explosifs utilisés pour perpétrer les attentats de Paris de 2015.  « Quatre ans après les faits, c’est bien là la preuve que les enquêtes financières sont essentielles pour appréhender les terroristes et leurs complices », a-t-elle affirmé.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a prévenu que le combat contre le terrorisme et son financement suppose une volonté politique ferme de la part de tous les États ainsi que des normes internationales efficaces.  Notant que pendant un certain nombre d’années, Daech a perçu des montants importants de pétrodollars et d’autres dons financiers sans oublier, les gains considérables découlant de la vente de biens culturels iraquiens et syriens et de l’exportation illégale de pétrole, le représentant en a conclu que les normes internationales existantes sont inefficaces et que de nombreux pays ne les mettent pas réellement en œuvre.  Pourtant, pour des raisons politiques évidentes, ces pays n’ont jamais figuré sur une quelconque liste des sanctions des institutions qui définissent les normes internationales.

Ces pays, qui n’ont pas à être comptables de leurs actes, se sentent enhardis et continuent de financer le terrorisme.  Or, les activités antiterroristes ne peuvent être efficaces qui si elles ne s’appliquent pas de manière sélective et ne sont pas soumises au « deux poids, deux mesures ».  Certains pays, a-t-il poursuivi, utilisent à la fois le terrorisme et la lutte antiterroriste comme des instruments de politique étrangère ».  Il a cité à titre d’exemple ceux qui accusent les autres d’être des « parrains du terrorisme », pour des raisons politiques sans légitimité aucune.

Il est d’autant plus ironique, a dit le représentant, que certains de ces pays soient précisément ceux qui ont créé des groupes terroristes et retiré des listes des sanctions des terroristes notoires pour leur donner l’asile.  Il faut se souvenir, a dit en conclusion le représentant, que l’occupation et l’invasion étrangères sont le terreau du terrorisme.  Même si la résistance d’un peuple ne doit pas être associée à un acte terroriste, il est évident que pour « déraciner » le terrorisme, il faut mettre un terme à l’invasion et l’occupation étrangères.  À défaut, « terroristes et occupants vont former une coalition » et c’est déjà le cas, a affirmé le représentant, puisque Israël soutient des terroristes en Syrie, y compris en soignant les plaies de leurs sœurs et frères de la terreur.

Selon M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOG (Équateur), la prévention du terrorisme est tout aussi importante que la lutte contre le financement du terrorisme.  Il faut donc, en amont, traiter les causes de ce fléau et, en aval, lutter contre le financement du terrorisme.  Le Gouvernement a ainsi adopté diverses lois dont la loi contre le blanchiment d’argent et la loi contre les délits de financement du terrorisme.  Des progrès significatifs ont été accomplis dans le domaine législatif, a estimé le représentant citant un rapport du Groupe d’action financière (GAFI).  Pour autant, l’Équateur n’a pas été épargné par des troubles sécuritaires.  Ce qui a amené le Gouvernement à mettre en œuvre des politiques de sécurisation des frontières notamment celles du nord.  Le pays s’est aussi lancé dans la lutte contre la corruption qui figure parmi l’un des moyens efficaces de lutte contre le terrorisme. 

Mme RAZ (Afghanistan) a expliqué que la lutte contre le financement du terrorisme occupe une place centrale dans la stratégie antiterroriste de son pays.  Une équipe de travail interagences a d’ailleurs été mise sur pied à cette fin.  De plus, le pays œuvre depuis longtemps pour empêcher les Taliban et les groupes affiliés de bénéficier des recettes du trafic de stupéfiants.  L’an dernier, environ 3 000 opérations antidrogue ont été menées, conduisant à l’arrestation de près de 3 500 individus.  Des dizaines de laboratoires et d’entrepôts ont été détruits et plus de 200 tonnes de drogues ont été confisquées.

La représentante a réclamé une approche régionale plus cohérente, notamment de la part de ses voisins directs, pour faire face aux activités criminelles transnationales, dont le trafic d’armes, de combattants terroristes et de précurseurs chimiques.  L’Afghanistan s’efforce aussi d’empêcher les Taliban de tirer des revenus de l’exploitation illite des ressources naturelles et de l’extorsion dans les activités minières.  Elle a signalé que l’application des sanctions liées au gel des avoirs est laxiste et jugé nécessaire d’établir de nouvelles listes des individus impliqués dans le trafic de stupéfiants et des sponsors qui fournissent des contributions financières aux Taliban.

M. JOSEPH MUSYOKA MASILA (Kenya) a rappelé que son pays a souffert des horreurs du terrorisme des Chabab, membres du réseau Al-Qaida.  Nous avons répondu fermement à cette menace, en renforçant nos capacités nationales et la coopération internationale.  Nous avons internalisé les bonnes pratiques internationales et les instruments internationaux et nous avons créé des institutions et des mécanismes pour assurer une mise en œuvre équilibrée de la Stratégie antiterroriste des Nations Unies, a indiqué le représentant dont le pays participe à la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM).  Les Chabab, a-t-il dit, imposent des taxes sur le passage de l’aide humanitaire dans les zones qu’ils contrôlent.  Ils entretiennent un réseau profondément enraciné et omniprésent dans le commerce illicite, les envois de fonds à l’étranger et autres activités criminelles. 

Dans son effort pour combattre le financement du terrorisme, le Kenya a promulgué des lois pour enrayer le blanchiment d’argent et réduire les produits du crime.  D’importants progrès ont été réalisés depuis la mise en place de mesures pour détecter et signaler les transactions suspectes dans le secteur financier formel du pays.  Des mesures sont également en place pour surveiller le secteur informel.  Le représentant a estimé que la vraie lutte contre le financement du terrorisme devrait se focaliser sur l’amélioration des capacités de la police et des autres forces de l’ordre pour bien contrôler les frontières et les activités illégales comme le flux des armes de petit calibre et la traite des personnes.  Améliorer la capacité des entrepreneurs locaux à surveiller et partager les informations avec les autorités grâce à des modèles comme la police de proximité contribuerait à réduire le financement du terrorisme, a ajouté M. Masila. 

M. SAMI BOUGACHA (Tunisie) a vu dans l’adoption de la résolution l’engagement de la communauté internationale à mettre en œuvre les instruments de lutte contre le financement du terrorisme.  La promotion du système de lutte contre le terrorisme ne doit toutefois pas détourner l’attention de l’impératif de la prévention et des préoccupations d’ordre sécuritaires.  Le représentant a appelé les États à adopter des stratégies de lutte qui tiennent compte de toutes les facettes de la question.  La Tunisie, a-t-il dit, s’est dotée d’un Comité national de lutte contre le terrorisme.  Un plan d’action contre le blanchiment du terrorisme a aussi été adopté, et un Registre national des organisations du secteur associatif a été élaboré pour promouvoir la transparence. 

M. ABDALLAH Y. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a décrié les attentats odieux de Christchurch, avant de saluer longuement la tolérance à l’égard de la religion musulmane qu’ont manifestée le Gouvernement et le peuple de la Nouvelle-Zélande.  De tels attentats démontrent que le terrorisme peut être financé avec très peu de ressources, d’où l’importance de mettre l’accent sur la prévention.  Il a parlé de la lutte que mène son pays contre Daech, Al-Qaida et le Hezbollah, une lutte qui nécessite le tarissement des sources de financement.  Pour l’Arabie saoudite, a affirmé le représentant, il devient impossible de tolérer les pratiques « suspectes » de certains pays et leur extrémisme politique qui est une porte d’entrée pour le terrorisme.  L’Arabie saoudite, a-t-il rappelé, a ouvert des centres de conseil et un centre de lutte contre la « terreur intellectuelle ».  Elle a aussi été l’un des premiers pays à combattre la radicalisation et à créer un centre de lutte contre le financement du terrorisme avec l’aide des États-Unis.  Sur le plan international l’Arabie saoudite a aussi financé le Centre de lutte contre le terrorisme de l’ONU.

M. Al-Mouallimi a affirmé que les houthistes et la milice du Hezbollah, qui sont appuyés par l’Iran, représentent une « menace réelle ».  L’Arabie saoudite exhorte donc le Conseil à les désigner comme groupe terroriste et à les frapper de sanctions.  Le représentant a aussi averti du risque d’infiltration de groupes et combattants terroristes et a insisté sur l’importance du partage d’informations.  Il a conclu en prévenant à son tour que l’occupation de territoires ouvre la voix au terrorisme.

Répondant aux « insultes » proférées par le « régime syrien » contre son pays, le représentant du Qatar a rejeté les mensonges et les accusations qui ne sont que la répétition de propos fallacieux.  Vous connaissez tous, a-t-il dit, les raisons du terrorisme, ces dernières années.  Sans le terrorisme d’État du « régime syrien » et sans l’utilisation d’armes chimiques contre son propre peuple, nous ne serions pas ici pour parler de Daech en Syrie.  Il est inacceptable d’entendre des « sermons » sur la menace du terrorisme, tout droit sortis d’une imagination fertile.  Le Qatar ne finance pas le terrorisme et au contraire, il aide les victimes syriennes de ce fléau.  Le Qatar a joué un rôle fondamental dans la lutte contre le terrorisme en Syrie et dans le monde, et en dépit des déclarations de la Syrie, il continuera son action contre la menace terroriste. 

« L’Ukraine a une fois de plus raconté ses légendes sur l’agression russe », a ironisé le représentant de la Fédération de Russie.  Dans une décision rendue le 19 avril 2017, la Cour internationale de Justice, a dit le représentant, a déterminé que les revendications de l’Ukraine ne sont pas « plausibles ».  Il est donc regrettable que ce pays continue de manipuler le Conseil de sécurité pour diffuser sa propagande. 

Le représentant de la Syrie a affirmé que le Qatar est le seul pays à avoir financé en liquide Daech et le Front el-Nosra pour mener des activités en Syrie, en ayant versé, entre autres, une rançon de 11 millions de dollars pour la libération d’un journaliste américain, en violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité.  De plus, un membre de la famille royale qatarie et ancien ministre des affaires étrangères a, sur le plateau de la chaine britannique, confirmé que son pays a bien versé la somme de 137 milliards de dollars pour provoquer la chute du Président Bachar Al-Assad.  Un autre ministre qatari a avoué au quotidien français, Le Monde, que le Front el-Nosra fait un « bon travail ».  Quand un pays verse 137 milliards de dollars pour écraser les rêves de tout un peuple, il ne peut prétendre chercher à lutter contre le financement du terrorisme, s’est indigné le représentant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Biodiversité marine: les délégations débattent des champs d’application du futur instrument sur la conservation de la biodiversité en haute mer

Deuxième session,
22e & 23e séances plénières – matin & après-midi
MER/2095

Biodiversité marine: les délégations débattent des champs d’application du futur instrument sur la conservation de la biodiversité en haute mer

Au troisième jour des négociations visant à établir un instrument sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales, les délégations ont plongé dans le vif du débat sur les divers champs d’application du futur instrument (géographique, matériel et temporel), tout en discutant de la question de l’accès aux ressources et notamment du partage des avantages.

Le Groupe de travail informel sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages était donc à pied d’œuvre dans la matinée, alors qu’ont débuté dans l’après-midi les travaux du Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées. 

À la lumière du Document établi par la Présidente de la Conférence pour faciliter les négociations, les délégations ont en majorité décidé que le champ d’application géographique de l’instrument doit être « la haute mer et la Zone ».  Un avis du reste partagé par la Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), ainsi que par les Fidji, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique.  La Suisse propose que ce champ d’application géographique soit clairement décrit au tout début de l’instrument, tandis que Maurice milite également pour des précisions sur la question de la colonne d’eau placée au-dessus du plateau continental étendu. 

En effet, s’il est clair que l’État côtier peut jouir des ressources de sa zone économique exclusive et de son plateau continental, il y a des cas où le plateau continental est étendu au-delà de 200 milles marins, la limite au-delà de laquelle commence la haute mer.  Dans ce cas, que faut-il donc faire des ressources contenues dans la colonne d’eau située au-dessus de ce plateau continental étendu?  Il a été constaté par le passé que les activités d’exploration et d’exploitation du plateau continental étendu conduisent nécessairement à des perturbations du sous-sol marin et de la colonne d’eau qu’il surplombe, et peuvent par conséquent gêner et perturber les activités que les autres pays pratiquent librement sur la haute mer (navigation, pêche), et aboutir à des conflits d’usage.  D’où ces appels à des précisions lancés par certains États.

Au sujet du champ d’application matériel, la plupart des orateurs ont plaidé pour que le nouvel instrument ne s’applique pas aux poissons en tant que produits de base ou comme ressources de subsistance pour les communautés côtières.  Il ne viserait donc que les poissons utilisés pour la recherche scientifique en haute mer.

En ce qui concerne le champ d’application temporel, le document des négociations prévoit que « le présent instrument s’applique aux ressources génétiques marines recueillies après son entrée en vigueur ».  Certains ont salué cette disposition car, pour les États-Unis par exemple, il n’est pas question d’établir un instrument aux effets rétroactifs.  Pour éviter toute équivoque, la Chine a suggéré de mentionner que « l’instrument entre en vigueur pour chaque État quand celui-ci a déposé ses instruments d’adhésion ».  Pour cette délégation, une telle mention serait conforme à la Convention de Vienne sur le droit des traités. 

Pour ce qui est de l’accès aux ressources, y compris les questions liées au partage des avantages, certains pays comme le Japon affirment que l’accès aux ressources génétiques de la haute mer doit être libre, car « les recherches y relatives ont des retombées non négligeables pour l’ensemble de l’humanité ».  De ce fait, « pourquoi demander l’accord des États côtiers pour accéder à des ressources ne faisant pas partie de leur juridiction nationale? », ont-ils demandé.  Cuba a répondu qu’il est utile d’avoir des règles pour encadrer justement ces recherches en haute mer.

Dans l’après-midi, le Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, a entamé les négociations sur la détermination des aires marines protégées.  Nombre de délégations ont indiqué que les « informations scientifiques fiables et solides » doivent être la base de la désignation des aires protégées.  Pour d’autres, il serait aussi judicieux de tenir compte des savoirs traditionnels.  Les avis étaient également partagés en ce qui concerne les facteurs socioéconomiques comme critères de détermination des aires protégées, alors que la raison d’être même d’une telle liste de critères a été remise en question.

Ce point sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, sera de nouveau examiné demain, jeudi 28 mars, au cours des séances du matin et de l’après-midi.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE: (A/CONF.232/2019/L.1, A/CONF.232/2019/L.2, A/CONF.232/2019/1 et A/CONF.232/2019/INF.2)

Groupe de travail informel sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au « partage des avantages »: suite des travaux

Le Groupe de travail sur les ressources génétiques marines a repris, ce matin, les discussions entamées hier après-midi sur le champ d’application, l’accès aux ressources et le partage des avantages des ressources génétiques marines, en se référant au document établi par la Présidente de la Conférence pour faciliter les négociations.

En ce qui concerne le champ d’application, les délégations ont d’emblée évoqué le champ d’application géographique.  La plupart d’entre elles ont choisi l’option qui prévoit que « la présente partie s’applique aux ressources génétiques marines de la haute mer et de la Zone ».  Un avis du reste partagé par la Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), ainsi que par les Fidji, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique.  Les États-Unis ont insisté pour que soit ajoutée une phrase précisant que « l’instrument ne devrait pas empiéter sur les zones relevant de la juridiction nationale ». 

En tout état de cause, la Suisse propose que ce champ d’application géographique soit clairement décrit au tout début de l’instrument.  En effet, « pourquoi un État côtier aurait-il des droits sur les ressources génétiques de la haute mer? » a demandé l’Australie, tandis que Maurice a également milité pour des précisions sur la question de la colonne d’eau placée au-dessus du plateau continental étendu. 

Au sujet du champ d’application matériel, le document de base indique que « le présent instrument s’applique à l’utilisation de poissons et autres ressources biologiques pour la recherche sur leurs propriétés génétiques ».  De ce fait, il ne s’applique pas, entre autres, « à l’exploitation du poisson et autres ressources biologiques à titre de produits de base ». 

La Chine a ainsi précisé que « le nouvel instrument ne doit pas s’appliquer aux poissons en tant que produits de base ou comme ressources de subsistance pour les communautés côtières ».  Une grande majorité de pays, dont les États-Unis, l’Australie ou encore le Canada, se sont rangés à cet avis, alors que la Chine a proposé que le libellé indique clairement que « cet instrument ne s’applique pas aux ressources halieutiques ».  Pour la Norvège, il faut considérer l’intention du navire se trouvant en haute mer: soit l’utilisation du poisson comme bien de consommation, soit comme objet d’étude.  Mais pour la Thaïlande, « il sera difficile de vérifier si le poisson qu’un navire envisage de pêcher sera dédié à la consommation ou servira pour la cause de la science ». 

Le Japon ne voudrait pas que soit mentionnée la question des poissons dans l’instrument, puisque le sujet est largement traité par la Convention sur la diversité biologique.  Le Chili rappelle pour sa part qu’il faut se garder de mettre en péril les zones de pêches en haute mer, arguant que l’Accord de New York sur les stocks de poissons est l’instrument international approprié sur la question, une position partagée par la République islamique d’Iran.  Pour le Saint-Siège, étant donné que les dispositions générales de l’instrument sont déjà claires sur la question, cette section sur le champ d’application matériel devient de facto superfétatoire. 

La question du champ d’application temporel a été aussi longuement discutée.  Le document des négociations prévoit que « le présent instrument s’applique aux ressources génétiques marines recueillies après son entrée en vigueur », ou alors, en seconde option, que cette section soit laissée sans texte ni précision sur le début d’applicabilité de l’instrument.  L’Argentine propose une troisième option qui mentionnerait que « l’instrument s’applique aux ressources dont l’utilisation est postérieure à l’entrée en vigueur de l’instrument ».  Pour les États-Unis, il n’est pas question d’établir un instrument aux effets rétroactifs.  C’est pourquoi la Suisse propose que l’instrument ne concerne que les ressources marines génétiques collectées en haute mer après son entrée en vigueur. 

Pour éviter toute équivoque, la Chine suggère même de mentionner que « l’instrument entre en vigueur pour chaque État quand celui-ci a déposé ses instruments d’adhésion ».  Pour la délégation, une telle mention serait conforme à la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Cette proposition a reçu l’assentiment de la Norvège et de l’Australie, entre autres. 

Dans la section sur l’accès aux ressources et le partage des avantages, la Turquie est d’avis que l’expression « ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale » demeure floue tant que l’on n’apporte pas des précisions techniques et une définition consensuelle de la haute mer.  Pour le Japon, il ne fait aucun doute que l’accès aux ressources génétiques de la haute mer doit être libre, car les recherches y relatives ont des retombées non négligeables pour l’ensemble de l’humanité.  De ce fait, « pourquoi demander l’accord des États côtiers pour accéder à des ressources ne faisant pas partie de leur juridiction nationale? », s’est interrogée la délégation nippone.  Les États-Unis ne militent pas non plus pour une restriction d’accès, d’autant plus qu’il faut « respecter la liberté scientifique en haute mer », a précisé l’Australie.  « Aucune des options proposées ne limite la recherche en haute mer », a objecté Cuba qui voit plutôt en ces mesures une manière de règlementer et faciliter la recherche.

D’une manière générale, la Chine estime qu’il faut que toutes les dispositions de l’instrument soient en cohérence avec la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Le Japon milite pour sa part pour un instrument qui sera clair et évitera les doublons.  Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Algérie a rappelé que l’objectif de ce nouvel instrument est justement d’éliminer les lacunes des instruments et accords existant déjà. 

Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées  

Animé par la déléguée de la Nouvelle-Zélande, Mme ALICE REVELL, le Groupe de travail sur les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, a abordé, dans l’après-midi, la question des « règles de procédure concernant les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées », notamment le point sur la « détermination des aires ». 

Le document des négociations dispose, entre autres, que « la détermination des aires s’appuie sur les informations scientifiques les plus fiables dont on puisse disposer, sur les savoirs traditionnels et sur les normes et critères scientifiques internationalement reconnus ».  Le représentant de l’Algérie, s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, ainsi que la Palestine, parlant au nom du Groupe des 77, ont demandé le bien fondé des facteurs économiques et sociaux comme critères de détermination des aires protégées.  Pour de nombreux orateurs, les facteurs socioéconomiques sont tout de mêmes pertinents, comme l’a affirmé le Bangladesh

Pour la Chine par contre, cette détermination doit reposer sur « les informations scientifiques fiables et solides ».  L’Union européenne pense qu’il faut définir ce que l’on entend par « critères scientifiques internationalement reconnus ».  La République de Corée souhaite qu’un organe spécifique établisse la liste de base, au lieu d’avoir une foultitude de critères dans un instrument international.

De même, pour l’Union européenne, s’il faut avoir une liste indicative de critères de détermination des aires protégées, comme celle contenue dans le document, il vaut mieux laisser la liste ouverte car il est impossible de tout mettre dans l’instrument.  Les États fédérés de Micronésie, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, pensent plutôt qu’il faut établir une liste claire, sinon l’instrument ne pourra être mis en œuvre du fait d’un vide juridique.  Néanmoins, cette délégation suggère que ladite liste soit constamment mise à jour.  Ce dernier point a été partagé par des délégations comme l’Inde, la Norvège ou encore le Sénégal.  Le Cameroun demande de son côté que la Convention sur la diversité biologique soit consultée pour compléter la liste des critères de détermination des aires protégées marines.

La Micronésie insiste sur l’importance de déterminer les aires protégées en se basant également sur les savoirs traditionnels, puisque dans le Pacifique par exemple, les peuples ont pu naviguer pendant des millénaires en s’appuyant sur ces savoirs.  Dans le même esprit, l’Argentine, au nom des pays d’Amérique latine, estime que l’on pourrait convoquer ces savoirs traditionnels quand cela est nécessaire.  Mais selon le Japon, la détermination des aires protégées doit s’appuyer exclusivement sur des normes et critères scientifiques.  « Comment les savoirs traditionnels peuvent-ils être utiles à cette fin? » s’est étonné le délégué. 

Les débats ont aussi porté sur « l’instance/organe de décision prévu et chargé de définir, sur la base des informations scientifiques les plus fiables dont on puisse disposer et de l’avis de l’organe scientifique/technique prévu, des normes et critères supplémentaires présidant à la détermination des aires ».  Pour la Nouvelle-Zélande, cela n’empêche pas que les États puissent aussi identifier des aires protégées en se basant sur des critères reconnus.  Les États-Unis suggèrent que ce soient les États qui proposent les sites d’aires protégées marines, même si d’autres parties prenantes peuvent aussi apporter des contributions au cours de ce processus.  De son côté, la Fédération de Russie penche pour une approche régionale pour l’établissement des aires protégées marines.  Et dans le cas où aucun organe régional n’existe, alors les États parties de ladite région peuvent se référer aux critères existants ailleurs. 

Selon Monaco, les normes et critères peuvent être créés plus tard, alors que la Turquie veut que les décisions sur la détermination et la désignation des aires protégées soient prises par consensus.  Enfin, le Paraguay a pris la parole au nom d’un groupe d’une dizaine de pays pour insister pour que soient prises en compte les priorités des pays sans littoral qui ne peuvent prétendre aux aires marines protégées.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: réuni d’urgence, le Conseil de sécurité débat de la reconnaissance unilatérale par les États-Unis de la souveraineté israélienne sur le Golan

8495e séance – après-midi
CS/13753

Syrie: réuni d’urgence, le Conseil de sécurité débat de la reconnaissance unilatérale par les États-Unis de la souveraineté israélienne sur le Golan

Réuni d’urgence à la demande de la République arabe syrienne pour une séance houleuse, le Conseil de sécurité a, ce soir, été informé de la situation dans le Golan, au lendemain de la décision du Gouvernement des États-Unis de reconnaître unilatéralement, le 25 mars dernier, la souveraineté d’Israël sur ce territoire syrien occupé, selon les résolutions pertinentes des Nations Unies.

« Nous espérons que les derniers développements ne seront pas utilisés comme excuse pour prendre des mesures de nature à saper la stabilité relative de la situation au Golan et au-delà », a déclaré la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, qui a rappelé que la position de l’ONU sur la question est reflétée dans les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont les 242 (1967) et 497 (1981).

Si le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a noté que le cessez-le-feu entre Israël et la Syrie est maintenu, en dépit d’un certain nombre de violations de l’Accord de 1974 sur le dégagement des forces, les États-Unis ont en revanche dénoncé la présence « quotidienne » des Forces armées syriennes dans la zone de séparation, que surveille la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD).

« Les États-Unis et ce Conseil ne peuvent accepter comme une nouvelle norme la présence syrienne dans la zone de séparation », a argué le représentant américain qui a appelé la Fédération de Russie à user de son influence auprès du « régime d’Assad » pour contraindre ses forces à s’en retirer « immédiatement ».  Le représentant russe a tout simplement jugé « inacceptable » que la dynamique positive observée jusqu’ici dans le Golan soit torpillée par des mesures unilatérales qui, a-t-il dénoncé, sapent l’assainissement politique en Syrie et représentent un obstacle majeur à la normalisation des relations entre Israël et les États arabes. 

À en croire le représentant des États-Unis, la décision du Président Donald Trump de reconnaître la souveraineté sur le Golan n’affecte pas l’Accord sur le dégagement, pas plus qu’elle ne porte atteinte au mandat de la FNUOD.  D’une importance cruciale sur les plans stratégique et sécuritaire pour l’État d’Israël, cette décision, a analysé le représentant américain, peut contribuer à la stabilité.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à ne pas « fermer les yeux sur les menaces du régime syrien, qui commet des atrocités, et de l’Iran et d’acteurs terroristes, dont le Hezbollah, qui cherchent à utiliser le plateau du Golan pour lancer des attaques contre Israël ». 

« Le Golan syrien occupé », a corrigé son homologue de la République arabe syrienne, en rejetant les termes « hauteurs » et « plateau », un champ lexical qui trahirait selon lui l’enjeu stratégique que ce territoire recouvre aux yeux d’Israël.  Les États-Unis sont un vaste pays, alors pourquoi ne cèderaient-ils pas un ou deux États, comme la Caroline du Nord ou la Caroline du Sud, « la terre natale de Lindsay Graham », a-t-il ironisé.

« Ce qui est pris par la force sera repris par la force », a mis en garde le délégué syrien, en ajoutant qu’Israël verra « comment nous recouvrerons les terres qui nous appartiennent ».  Pour lui, le « papier » signé par le Président américain et dont il a « fait cadeau » au Premier Ministre israélien n’a aucune valeur et « sonne le glas du rôle de médiateur » des États-Unis, qu’il a qualifiés de « pays ennemi », « hors-la-loi ». 

Son homologue d’Israël s’est inscrit en faux contre cette lecture, remerciant pour sa part les États-Unis d’avoir reconnu la souveraineté « éternelle » de son pays sur le Golan, garant de sa « survie ».  À qui l’ONU compte-t-elle « céder » le Golan? s’est-il interrogé.  « Aux factions jihadistes, aux milices chiites? »  Le délégué a avancé que le Président syrien lui-même aurait appelé le Hezbollah à utiliser ce « plateau » pour attaquer Israël.

« N’avez-vous pas honte?  Où étiez-vous lorsque votre gouvernement gazait des enfants?  Ou étiez-vous lorsqu’il lançait des barils d’explosifs contre la population?  N’avez-vous pas honte!? » s’est emporté le délégué israélien, qui a accusé son collègue syrien de complicité dans le « meurtre » de plusieurs centaines de milliers de Syriens.  « Honte à vous, Israël! » lui a rétorqué le représentant de la Syrie, en l’accusant de présenter l’occupation du Golan comme une nécessité sécuritaire au mépris de l’Histoire.

Comme tous les autres membres du Conseil, à l’exception des États-Unis, la France a indiqué qu’elle ne reconnaissait « absolument pas » la souveraineté israélienne sur le Golan.  « Toute tentative de s’écarter du droit international et des résolutions de ce Conseil pour y substituer des décisions unilatérales est vouée à l’échec », a-t-elle prévenu.

Jugeant inopportune la tenue de cette réunion, qui répond à une demande « profondément cynique » de la Syrie, l’Allemagne –opposée à l’annexion du Golan–, a dénoncé les « crimes atroces » d’un « régime » qui s’en prend à son propre peuple, jusqu’à utiliser contre lui des armes chimiques à maintes reprises.  L’ONU, « organisation dont mon pays est un membre fondateur », est née des cendres de la Seconde Guerre mondiale provoquée par la « lecture politique erronée » de l’Allemagne nazie, a rétorqué le représentant de la Syrie.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a rappelé comment le Conseil de sécurité a été amené, par sa résolution 350 (1974), à établir la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD).  La situation au Golan est restée relativement calme jusqu’à l’éclatement du conflit en Syrie en 2011, a-t-elle expliqué. 

Le Secrétaire général a pris note de la proclamation officielle en date du 25 mars du Président des États-Unis, M. Donald Trump, qui a reconnu la souveraineté d’Israël sur le Golan syrien occupé, ainsi que des réactions des États Membres face à cette décision.

Mme DiCarlo a tenu à réitérer la déclaration du Secrétaire général selon laquelle « la position de l’ONU sur le Golan est connue et claire ».  Cette position est reflétée dans les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment 242 (1967) et 497 (1981), et de l’Assemblée générale. 

« Nous espérons que les développements récents ne seront pas utilisés comme excuse pour prendre des mesures qui pourraient saper la stabilité relative de la situation au Golan et au-delà », a dit la Secrétaire générale adjointe.  « Nous continuerons de suivre de près les développements sur le terrain et tiendrons le Conseil informé, comme il conviendra », a-t-elle encore assuré. 

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. JEAN-PIERRE LACROIX, a fait le point sur la situation dans la zone d’opération de la FNUOD au cours de ces trois derniers mois.  Le cessez-le-feu entre Israël et la Syrie est maintenu, en dépit d’un certain nombre de violations de l’Accord sur le dégagement des forces de 1974, observées par la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) qui en a informé les parties.  Les tirs de missiles et de roquettes qui ont eu lieu les 29 novembre, 20 janvier et 11 février montrent le risque d’escalade dans la zone.  Pour M. Lacroix, il est essentiel que toutes les parties respectent l’Accord sur le dégagement à tout moment pour pouvoir maintenir la stabilité dans le Golan.  Il a également insisté sur l’importance pour les parties de rester en liaison avec la FNUOD et a appelé le Conseil de sécurité à soutenir les efforts pour sensibiliser les deux parties et les acteurs régionaux au risque d’escalade et à la nécessité de maintenir le cessez-le-feu qui tient depuis longtemps la Syrie et Israël.

Le Secrétaire général adjoint est également revenu sur le retour progressif et la pleine reprise des opérations de la FNUOD dans le secteur bravo, y compris des patrouilles et des visites d’évaluation.  La Force a également progressé dans la remise en état et la réoccupation de certains postes vacants.  Mais le Groupe d’observateurs ne sera pas maintenu dans la zone de séparation, tant que les conditions ne le permettront pas. 

La FNUOD continue d’utiliser régulièrement le point de passage de Quneitra, qui a rouvert en octobre 2018, pour transporter des équipements et du personnel entre les secteurs alpha et bravo.  Ce point de passage est important pour la mise en œuvre efficace du mandat de la mission, a-t-il précisé.

La fin du redéploiement et la reprise des opérations de la FNUOD dans le sud de la zone d’opérations seront facilités par le déploiement auprès de la mission d’une nouvelle compagnie mécanisée en juillet de cette année pour occuper les positions 85 et 68, a encore expliqué M. Lacroix.

Il en a profité pour assurer aux membres du Conseil et aux pays contributeurs de troupes que le retour graduel de la mission dans le secteur bravo se fait, en gardant toujours à l’esprit la sécurité du personnel de la FNUOD et du Groupe d’observateurs.  Il a reconnu que le personnel de l’ONU était exposé à une menace significative et continue dans la zone d’opérations de la FNUOD où il reste des explosifs de guerre et de potentielles « cellules dormantes » de groupes armés, y compris de groupes terroristes.  La FNUOD, en consultation avec les parties, continue d’évaluer la situation dans la zone de séparation pour voir si les conditions permettent son retour aux postes laissés vacants.

Pour le Secrétaire général adjoint, on ne saurait trop insister sur le soutien et la coopération des parties avec la FNUOD.  Il est essentiel que le matériel et les technologies nécessaires puissent être déployés sans problème et rapidement, et la coopération d’Israël et de la Syrie reste cruciale à cet égard.  Une telle coopération est également critique pour garantir la liberté de mouvement et l’accès aux positions des Nations Unies dans la zone d’opérations et pour réduire les retards et les programmes rencontrés par le personnel de l’ONU à la barrière technique vers les postes d’observation.  La pleine utilisation du point de passage de Quneitra est essentielle surtout au moment où la mission accroît ses opérations dans le secteur bravo.

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a rappelé que le mandat de la FNUOD est parfaitement clair: il ne doit y avoir aucune activité militaire dans la zone de séparation, y compris des opérations militaires des Forces armées syriennes.  Or, la présence quotidienne de ces forces dans la zone de séparation réduit la zone tampon « essentielle » pour atténuer les tensions entre les parties et maintenir la paix.  C’est une violation de l’Accord sur le dégagement et une menace au cessez-le-feu conclu en 1973.  « Les États-Unis et ce Conseil ne peuvent accepter comme une nouvelle norme la présence syrienne dans la zone de séparation », a-t-il argué.  Par conséquent, les États-Unis appellent la Fédération de Russie à user de son influence auprès du « régime d’Assad » pour contraindre les forces syriennes à respecter l’Accord sur le dégagement des forces et à se retirer « immédiatement » de la zone de séparation.  Les activités militaires syriennes dans et autour de cette zone ont provoqué des malentendus et des hostilités avec Israël et mis les soldats de la paix de la FNUOD en danger, a poursuivi M. Hunter. 

Les États-Unis, a-t-il poursuivi, sont également alarmés par les informations faisant état de la présence du Hezbollah dans la zone de séparation, « ce qui accroît encore le potentiel des hostilités ».  Il n’y a aura aucune chance entre la Syrie et Israël tant que le Hezbollah sera présent dans la zone de séparation, lui qui a démontré sa volonté de risquer la vie de ses compatriotes libanais pour attaquer Israël et lui « qui n’a aucun scrupule à mettre en danger la vie du peuple syrien ».  Comme nous l’avons déjà dit, a martelé le représentant, les États-Unis appuient fermement et affirment le droit souverain d’Israël à la légitime défense.  Les événements récents montrent clairement que les activités des Forces armées syriennes dans le secteur bravo vont au-delà de celles convenues dans l’Accord sur le dégagement.  Le représentant a donc encouragé la FNUOD et le Groupe d’observateurs du Golan à reprendre les inspections dans les zones de limitation du secteur bravo dès que possible.

Le 25 mars, a-t-il rappelé, le Président Trump a signé une proclamation affirmant que les États-Unis reconnaissent que le plateau du Golan fait partie de l’État d’Israël.  « Cette annonce n’affecte pas l’Accord sur le dégagement de 1974, et nous ne pensons pas non plus qu’elle porte atteinte au mandat de la FNUOD », a-t-il argué.  La Force continue de jouer un rôle vital dans le maintien de la stabilité entre Israël et la Syrie, principalement en veillant à ce que la zone de séparation soit une zone tampon sans présence ni activité militaire autres que celles de la FNUOD.  Cette décision, a estimé le représentant, revêt une importance cruciale sur les plans stratégique et sécuritaire pour l’État d’Israël.  Elle peut contribuer à la stabilité et « comme nous l’avons dit hier, laisser à des régimes comme ceux de la Syrie et de l’Iran le contrôle du plateau du Golan serait fermer les yeux sur les menaces du régime syrien qui commet des atrocités, et de l’Iran et d’acteurs terroristes, dont le Hezbollah, qui cherchent à utiliser le plateau du Golan pour lancer des attaques contre Israël. 

Depuis des décennies, a conclu le représentant, les habitants du plateau du Golan sont soumis à la même administration et aux mêmes lois que le reste d’Israël.  La déclaration du Président Trump ne fait que constater les « circonstances uniques » qui justifient la reconnaissance de la souveraineté israélienne.  « Pour être clair, les États-Unis soutiennent l’objectif d’une paix sûre et durable entre Israël et tous ses voisins, y compris la Syrie.  Une telle paix devrait être réalisée par des discussions directes.  Or Israël n’a pas pour le moment de partenaire pour la paix en Syrie. »

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a souligné que le plateau du Golan est un territoire syrien occupé par Israël, une situation qui va à l’encontre des décisions du Conseil de sécurité.  Il a déploré la décision américaine de reconnaître la souveraineté israélienne sur le Golan et a appuyé le droit de la Syrie d’exercer sa souveraineté et de protéger son intégrité territoriale.  Le représentant a salué le travail de la FNUOD, y voyant une rare source de stabilité dans la région.  Il faut la préserver et le Conseil doit s’y atteler, a-t-il dit.  Il a appelé les parties à faire preuve de retenue et à éviter toute escalade des tensions.  L’occupation israélienne des territoires arabes est une menace constante à la paix et à la sécurité dans la région et au-delà, a-t-il souligné.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a rappelé que le Golan est occupé par Israël depuis 1967 et, qu’en 1981, ce pays a pris la décision d’annexer ce territoire, une décision jamais reconnue par le Royaume-Uni.  La représentante a rappelé les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont la 497 (1981), qui affirmait que l’annexion du Golan était « nulle et non avenue ».  La décision des États-Unis de reconnaître la souveraineté israélienne sur ce territoire n’a donc aucun fondement juridique.  La représentante a appelé la Syrie, l’Iran et le Hezbollah à ne prendre aucune mesure susceptible de menacer les civils.  La résolution 242 (1967), qui consacre le principe « terre contre paix », est une bonne base pour résoudre le conflit entre Israël et ses voisins arabes, dont la Syrie, a estimé Mme Pierce.  Elle s’est félicitée des efforts déployés par les États-Unis en faveur du processus de paix, appelant ce pays à présenter dans les meilleurs délais son plan pour lui ménager des chances de succès.  Elle a conclu en renouvelant son soutien à la FNUOD et en se disant prête à discuter des modalités de la prorogation de son mandat, qui expire au mois de juin.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a souligné à son tour que le plateau du Golan est un territoire occupé par Israël et qu’une annexion par la force est illégale, en vertu du droit international, dont la Charte des Nations Unies et la résolution 497 (1981) du Conseil de sécurité.  Le règlement de la question du Golan ne peut être trouvé que dans des négociations entre les parties au conflit, conformément au droit international.  La représentante a exprimé son plein appui à la FNUOD et à son rôle critique dans la stabilisation de la région.  Elle s’est donc dite préoccupée par les activités militaires dans la zone de séparation et alarmée par les tirs répétés de missiles, de roquettes et d’armes lourdes et par la présence accrue des Forces armées syriennes.  Toutes ces activités sont des violations claires de l’Accord sur le dégagement des forces et constituent une menace au cessez-le-feu et à la sécurité du personnel de la Force, a-t-elle martelé.  En attendant le rétablissement de la Force dans toute la zone de séparation, il est crucial, a conclu la représentante, que les parties facilitent le renforcement de ses capacités et lui permette de mener ses opérations sans restriction administrative. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a souligné que grâce aux efforts de la Syrie déployés sous la houlette russe, la situation dans le Golan syrien, durant l’été 2017, a pu être stabilisée.  Les problèmes et la présence de différents groupes armés et terroristes dans la zone de séparation ont pu être éliminés et les principaux acteurs ont pu garantir le fonctionnement adéquat de la FNUOD, grâce notamment à la contribution de la police russe.  Le point de passage de Quneitra a pu être rétabli, traçant la voie pour le retour à la situation d’avant crise, et des activités de déminage ont pu être menées.

Le représentant a donc jugé inacceptable que cette dynamique positive soit torpillée par des mesures unilatérales qui, a-t-il dénoncé, sapent les mesures d’assainissement politique en Syrie et représentent un obstacle majeur à la normalisation des relations entre Israël et les États arabes. 

Il a dénoncé le fait que les États-Unis aient officiellement reconnu la souveraineté d’Israël sur le Golan syrien, y voyant un mépris du droit international et une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité.  C’est aussi contraire au principe « terre contre paix » et à l’Initiative de paix.  Pour la Fédération de Russie, le plateau du Golan est un territoire syrien occupé puis annexé illégalement par Israël. 

Le représentant a appelé à des négociations directes, préoccupé par une décision qui hypothèque la possibilité de trouver une issue au conflit et qui risque au contraire d’exacerber encore les tensions dans la région.  Cette décision, s’est-il alarmé, a tout un « éventail déplorable » de mesures unilatérales adoptées par les États-Unis ces deniers temps.  Il a cité le retrait du Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien, la violation de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité, la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël, sans oublier l’accord pour la création d’une armée au Kosovo.

Le représentant a appelé les États-Unis et « ceux à qui viendrait l’idée de suivre ce mauvais exemple », à revenir sur cette « décision agressive » et à respecter la Charte afin de garantir le bon fonctionnement des relations internationales.  Il a prévenu que les décisions arbitraires et contraires au droit international sont vouées à l’échec.  Le statut du Golan syrien demeure inchangé car il a été consacré par les résolutions du Conseil de sécurité.  Le représentant a appelé les États-Unis à préserver leur rôle de médiateur « impartial » pour pouvoir véritablement contribuer à la recherche d’une issue au conflit au Moyen-Orient.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a exhorté les parties à éviter de commettre des actions contraires à l’Accord sur le dégagement.  Saluant le rôle stabilisateur de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD), il a estimé que le retour progressif au secteur bravo doit rester une priorité.  Il également souligné que la sécurité et l’intégrité physique du personnel de la FNUOD doivent être garanties.  Il est inadmissible d’acquérir des territoires par la force, a conclu le représentant.  

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) s’est déclaré préoccupé par le regain de tensions constaté dans la zone de déploiement de la FNUOD, appelant les parties à cesser les hostilités et à se retirer du secteur.  Il a tenu à réitérer la position de son pays sur le respect de l’intégrité territoriale des États et le règlement pacifique des conflits, des principes « fondamentaux » et conformes à l’« inadmissibilité » de l’acquisition par la force de territoires, en l’occurrence le Golan syrien occupé.  Il s’est élevé contre les violations unilatérales du droit international.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a indiqué que la position belge par rapport au Golan reste inchangée: nous ne considérons pas la souveraineté d’Israël sur les territoires occupés par Israël depuis juin 1967, y compris le plateau du Golan et nous ne considérons ces territoires comme faisant partie du territoire de l’État d’Israël.  L’acquisition de territoire par la force est illégale au titre du droit international, a martelé le représentant qui a réitéré ses vives préoccupations quant aux conséquences plus larges de la reconnaissance de l’annexion illégale, notamment dans la région.

Passant à la FNUOD, qui « joue un rôle indispensable en préservant la stabilité régionale », le représentant s’est préoccupé des violations du cessez-le-feu.  Il a appelé les parties au conflit et la FNUOD à établir une meilleure communication afin de créer davantage de confiance et prévenir toute détérioration de la situation.  M. Pecsteen de Buytswerve s’est aussi préoccupé de la menace significative posée par la présence de munitions non explosées, de restes de guerre explosifs et de mines, en particulier dans la partie sud de la zone de séparation.  Il a jugé indispensable que les parties soutiennent tous les efforts de la FNUOD à cet égard.

En conclusion, il a dit ne pouvoir accepter des situations où la loi est imposée par la force et la voie de fait.  Il revient au Conseil, a-t-il dit, de s’opposer à des actes unilatéraux qui sapent non seulement l’ordre juridique international mais également toute perspective de paix.

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) s’est opposé à l’annexion du Golan syrien, contraire au droit international même s’il a estimé que la présence des forces syriennes dans la zone de séparation peut être une source de préoccupation pour Israël.  La tenue de cette séance, a-t-il lancé, répond à une demande « profondément cynique » de la Syrie.  Damas, s’est-il expliqué, se rend, depuis huit ans, coupable de violations répétées du droit international et s’en prend à son propre peuple, jusqu’à recourir à maintes reprises à des armes chimiques.  À la lumière des « informations horribles », des « crimes atroces », ou encore de conditions de détention inhumaines en Syrie, nous ne pouvons que nous étonner de cette réunion, a tranché le représentant.

Mme NICHOLA NAKULUNGA SABELO (Afrique du Sud) s’est déclarée profondément préoccupée par la décision que vient de prendre un membre du Conseil de sécurité de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le Golan syrien, jugeant que cette action unilatérale ne contribue en rien à une solution pacifique à long terme au conflit au Moyen-Orient.  Après avoir rappelé les termes de la résolution 497 (1981), elle a affirmé que cette décision illustre l’échec du Conseil de sécurité face aux violations continues de ses propres résolutions.  Si le Conseil de sécurité parlait d’un autre pays qui aurait commis des violations aussi flagrantes, il n’aurait pas hésité à agir.  Le Conseil pratique une politique à géométrie variable, a dénoncé la représentante.

M. WU HAITAO (Chine) a rappelé que le cessez-le-feu dans le Golan syrien a tenu jusqu’à présent, malgré des violations dans la zone de déploiement de la FNUOD.  Il a salué le rôle constructif joué par la Force, qui cherche à préserver ce cessez-le-feu.  Il a rappelé, à son tour, que le Golan est reconnu par la communauté internationale comme un territoire occupé, une série de résolutions du Conseil de sécurité exhortant d’ailleurs Israël à s’en retirer. 

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a dit rester préoccupé par l’escalade des tensions engendrées par de nombreuses violations de l’Accord sur le dégagement de 1974 et a exhorté les parties à mettre un terme à leurs opérations dans la zone de séparation et à y retirer tout matériel militaire et tout personnel armé.  Il a aussi souligné l’importance, pour elles, de maintenir une collaboration étroite avec la FNUOD afin d’éviter une aggravation de la situation le long de la ligne de cessez-le-feu et de créer les conditions du retour de cette Force sur les positions abandonnées en 2014.  La Côte d’Ivoire exhorte aussi les parties à œuvrer pour la levée des restrictions imposées en matière de circulation de la Force et à coopérer étroitement avec la mission onusienne pour mener à bien les opérations de déminage et de dépollution dans la zone concernée.

« Ces territoires occupés par Israël depuis 1967 n’appartiennent pas à Israël », a déclaré M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale), en se référant aux résolutions sur les hauteurs du Golan adoptées tant par l’Assemblée générale que par le Conseil de sécurité.  Toute action unilatérale qui chercherait à modifier cet état de fait ne ferait qu’alimenter les conflits dans la région.  Le représentant a noté que le contexte opérationnel de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) a évolué au cours des derniers mois depuis que la Syrie a récupéré des territoires occupés par des groupes armés.  Selon lui, le Conseil doit insister auprès des parties pour qu’elles reconnaissent que la FNUOD doit pouvoir continuer d’utiliser le point de passage de Quneitra sans aucune restriction.  De même, il faut que le Gouvernement syrien et les groupes armés qui opèrent dans la zone de séparation fassent en sorte que leurs actions n’aient pas d’impact de l’autre côté de la frontière et que le Gouvernement israélien s’abstienne de violer l’Accord sur le dégagement.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) s’est inquiété de l’escale des tensions entre les parties à l’Accord sur le désengagement des forces et les a appelées à en respecter les termes et à préserver le cessez-le-feu.  La pleine coopération avec l’ONU est nécessaire pour éviter toute escalade, a dit le représentant qui a appelé à une reprise totale des activités de la FNUOD dans le secteur bravo.  Le représentant a rejeté catégoriquement la décision des États-Unis de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le Golan syrien, avertissant que cela risque de miner le cessez-le-feu, d’exacerber les tensions et de remettre en doute la crédibilité du Conseil de sécurité.  Il a appelé les parties à respecter le droit international et les résolutions du Conseil de sécurité, et à coopérer pour rétablir la paix au Moyen-Orient.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a indiqué que son pays ne reconnaît absolument pas la souveraineté israélienne sur le Golan, laquelle est contraire au droit international.  « Toute tentative de s’écarter du droit international et des résolutions de ce Conseil pour y substituer des décisions unilatérales est vouée à l’échec. »  Elle a appelé le Conseil à veiller sur les principes fondamentaux qui conditionnent la paix et la sécurité internationales et regretté que la décision américaine affaiblisse l’action collective du Conseil. 

Dans un contexte tendu, à l’heure où les risques d’escalade régionale sont élevés, le rôle de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) est essentiel, a-t-elle dit.  Elle a salué les efforts de la Force en vue d’un redéploiement progressif à l’est de la ligne de cessez-le-feu et réitéré son attachement à la liberté de mouvement de la Force. 

La déléguée a appelé le Conseil à éviter que les derniers développements ne fassent peser une incertitude sur l’avenir de la FNUOD.  « Les membres de ce Conseil doivent donc répéter sans ambiguïté leur attachement à son mandat. »  Mme Gueguen a appelé les parties à respecter la totalité de leurs engagements au titre de l’Accord sur le dégagement de 1974 et à permettre le déploiement des équipements et des personnels requis.  Le rôle de la Force pour préserver le cessez-le-feu et prévenir une escalade des tensions doit être préservé et renforcé, a conclu la déléguée de la France. 

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dit avoir demandé la tenue de cette réunion après la décision unilatérale du Président des États-Unis de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le Golan syrien occupé.  Nous adressons demain, a-t-il annoncé, une lettre à la présidence du Conseil décrivant dans le détail la réalité du déploiement de la FNUOD dans le Golan.  Mais notre thème d’aujourd’hui n’est pas la FNUOD, c’est la tentative d’annexion d’une terre syrienne.  Le représentant a insisté sur le fait que ce territoire s’appelle le « Golan syrien occupé », et non les « hauteurs » ou le « plateau » du Golan, des termes stratégiques qui traduisent la volonté d’Israël de les conquérir.  Il ne s’agit pas d’un plateau, a argué le représentant.  La région a aussi des vallées et des rivières et au moment où débutait cette séance, Israël effectuait un bombardement aérien contre Alep, avec des dégâts matériels. 

Le représentant a lu les mots d’une petite syrienne originaire d’un village du Golan occupé et brandi sa photo.  Il a condamné la déclaration du Président des États-Unis sur le statut juridique du Golan syrien occupé, affirmant que le papier qu’il a signé le 25 mars et dont « il a fait cadeau » au Premier Ministre israélien est sans fondement.  Ces pratiques américaines révèlent des « tendances dangereuses », puisqu’elles remettent en cause le droit international et « humilient » les Nations Unies, en faisant fi de leurs résolutions pertinentes, comme la résolution 497 (1981).  Aucune administration américaine n’avait jusqu’ici nié l’occupation israélienne du Golan syrien.  Ce comportement unilatéral, cette « gifle cinglante » montre que Washington n’accorde plus aucune valeur à l’ONU et « sonne le glas » de son rôle de médiateur au Moyen-Orient, a tranché le représentant. 

Nous voyons dans les réactions des États Membres et des membres du Conseil de sécurité, s’est-il réjoui, le signe rassurant que les États-Unis et Israël sont dans l’illégalité.  Aux yeux du peuple syrien, les États-Unis sont devenus « un pays ennemi, hors-la-loi, occupant nos terres ».  Le représentant a accusé ce pays de détruire les infrastructures syriennes, de soutenir les terroristes, d’imposer un embargo et de s’en prendre militairement à son pays.  La question que nous posons aujourd’hui à la conscience de l’humanité est: « Avez-vous regardé de près les conséquences véritables de cette violation américaine des résolutions? »  Si le Conseil de sécurité avait fait front dès le départ, on n’en serait pas arrivé à ce « stade de mépris » du droit international.  Cela a été une « négligence dangereuse », a tonné le représentant en prévenant « ce qui est pris par la force sera repris par la force ».  Réitérant que le Golan syrien occupé « nous appartient », M. Ja’afari a affirmé que jamais il ne sera « un pion dans le jeu électoral » qui se joue d’un côté comme de l’autre. 

Après tout, le territoire américain est vaste, a-t-il poursuivi.  Les États-Unis pourraient faire cadeau à Israël d’un État ou deux, comme la Caroline du Sud et la Caroline du Nord, « l’État de Lindsey Graham ».  Le représentant a ensuite rejeté les propos de l’Allemagne et non du « régime allemand », qui a tenté de faire dévier cette réunion de son sujet et qui s’est éloigné du protocole diplomatique en vigueur dans une telle enceinte.  L’ONU, a-t-il souligné, est née des cendres de la Seconde Guerre mondiale, une guerre provoquée par la « lecture politique faussée » de l’Allemagne nazie.  J’ai passé des années dans cette Organisation et je trouve honteux que nous ne puissions pas en respecter les règles, s’est-il emporté. 

M. DANNY BEN YOSEF DANON (Israël) a souligné que le Golan a toujours été un territoire israélien et a remercié les États-Unis de l’avoir reconnu.  Il a salué l’engagement sincère de ce pays et sa volonté de garantir la sécurité et le droit à la légitime défense d’Israël.  Il a invité les autres États Membres à reconnaître le Golan comme une partie intégrante d’Israël.  Le représentant est revenu sur l’historique de cette terre, soulignant que depuis 1967, le plateau du Golan garantit la survie d’Israël.  Il a rappelé le début de la guerre lancée en 1973, par la Syrie, le jour même du Yom Kippour.  Depuis le Golan, Israël a pu observer les manœuvres de la Syrie et lancer sa contre-attaque.

Interpelant directement le représentant de la Syrie, le délégué israélien l’a accusé d’être complice du meurtre de plusieurs centaines de milliers de Syriens.  « N’avez-vous pas honte?  Où étiez-vous lorsque votre gouvernement gazait des enfants?  Ou étiez-vous lorsqu’il lançait des barils d’explosifs contre la population?  N’avez-vous pas honte!? »  Et à qui l’ONU compte « donner » le Golan?  Aux factions jihadistes, aux milices shiites?  Le représentant a affirmé que le Président syrien a lui-même dit que le Hezbollah devrait utiliser le plateau du Golan pour cibler Israël.

Le représentant a rappelé qu’en février 2018, l’Iran avait lancé un drone vers Israël à partir de la Syrie, après avoir lancé, en janvier 2018, un missile sol-sol à moyenne portée vers les nord d’Israël, également à partir de la Syrie.  Le régime syrien, qui ne représente même plus son peuple, se laisse faire par son marionnettiste, l’Iran, a-t-il ironisé.  La communauté internationale pense-t-elle vraiment qu’Israël cèderait le plateau du Golan à un dictateur criminel?  La souveraineté d’Israël sur le Golan est « éternelle », la présence des Juifs y remontant à des millénaires.  Le plateau du Golan est inséparable d’Israël et la reconnaissance internationale de sa souveraineté est garante de la stabilité.

Reprenant la parole, la représentante du Royaume-Uni est venue à la rescousse de son collègue de l’Allemagne, qui représente un pays partenaire défendant les principes de la Charte des Nations Unies.  Nous savons tous comment est née l’ONU mais aujourd’hui ce sont les autorités syriennes qui ne respectent ni les valeurs des Nations Unies ni l’interdiction des armes chimiques et qui affament « leur propre peuple ». 

Son homologue de la Syrie a tenu à préciser qu’il a fait référence à l’Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale et qu’il s’est adressé à son collègue allemand et pas à son pays.  Il y a, a-t-il dit, une leçon importante à tirer du fait que 14 des 15 membres du Conseil de sécurité ont rappelé aujourd’hui que l’annexion du Golan syrien est illégale.  Si un mathématicien pouvait calculer le nombre d’heures consacrées à l’occupation israélienne de terres arabes, nous serions déjà millionnaires, s’est exclamé le représentant.  « À chaque fois qu’un Israélien est au pied du mur, il y a un Américain pour l’aider. » 

Le représentant a dénoncé le « spectacle de marionnettes » auquel s’est livré le représentant israélien et lui a retourné son injonction: « Honte à vous, Israël! »  Il a accusé ce pays de présenter l’occupation du Golan comme une nécessité sécuritaire, tout en ignorant l’histoire.  « Soit nous respectons le droit, soit nous revenons à la loi de la jungle. »  Le Golan syrien occupé appartient à la Syrie et ne pas reconnaître un droit mène à une guerre.  Souhaitez-vous vivre en paix, en acceptant le principe « terre contre paix » ou préférez-vous rejeter la paix? a demandé le représentant.  Certains veulent nous mettre à terre mais Israël verra comment nous recouvrerons les terres qui nous appartiennent, a prévenu le représentant. 

« Je n’ai jamais pensé que je serais un jour d’accord avec la Syrie », a lancé à son tour le représentant d’Israël, qui a convenu que « l’ONU est obsédée par Israël ».  Il suffit en effet de compter le nombre de déclarations et de résolutions dont Israël fait l’objet.  Le représentant a estimé que si la même attention était accordée à la Syrie, la situation dans ce pays ne serait pas celle qu’elle est aujourd’hui.  S’adressant au peuple syrien, il a affirmé que « le jour viendra où vous aurez un gouvernement qui accordera une véritable attention à vos droits.  Nous pensons à vous et nous prions pour vous ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Faute de consensus, le Comité spécial des opérations de maintien de la paix achève sa session sans recommandations

261e séance plénière – après-midi
AG/PK/236

Faute de consensus, le Comité spécial des opérations de maintien de la paix achève sa session sans recommandations

Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, qui avait commencé ses travaux le 22 février, a fermé ses portes aujourd’hui avec 20 jours de retard, sans avoir adopté ses recommandations* faute de consensus sur certaines questions, dont celles des capacités africaines de maintien de la paix et du financement du Fonds pour la paix de l’Union africaine. 

Quoique déçu, le Président du Groupe de travail plénier du Comité, M. Richard Arbeiter du Canada, a insisté sur les accords importants qui ont été trouvés au cours de cette session, concernant la perspective genre, les restrictions nationales, les services médicaux et la formation du personnel de maintien de la paix.  Il a espéré pouvoir faire fond sur ces progrès, à la prochaine session du Comité, invoquant le principe de Nelson Mandela « soit nous gagnons, soit nous apprenons ».  Ce n’est pas la première fois que le Comité se trouve dans cette situation, a reconnu le Président du Comité, M. Tijjani Muhammad Bande du Nigéria.

Les délégations ont tout de même dit craindre que cette absence de consensus ne créée un précédent dangereux.  Faisant fond sur les « compromis douloureux », comme l’a dit l’Union européenne, les délégations ont insisté sur les efforts qu’ils ont faits pour aplanir les divergences et rapprocher les positions. 

Arguant de sa « souplesse » le Mouvement des pays non alignés qui représente plus de 80% des pays fournisseurs de contingents, a fini par s’interroger sur les priorités des États membres.  L’intimidation, a-t-il dit, ne saurait être tolérée dans ce « temple du multilatéralisme » qu’est l’ONU.  Pour les États-Unis, « la ligne rouge » était le Fonds pour la paix de l’Union africaine, compte tenu du manque de transparence.  Nous avons demandé en vain, ont-ils rappelé, de revenir sur cette question l’année prochaine.

Pour éviter ce genre d’impasse, il faut revoir les méthodes de travail, ont estimé certaines délégations qui se sont donc félicitées de l’intention du Président du Comité de créer à cet effet « un groupe des amis du Président ».  L’échec de cette année ne veut pas dire que le Comité est obsolète ou inutile, a déclaré la France.  Saisissons au contraire cette occasion pour s’interroger sur les écueils, dont les méthodes de travail ou la nature même du rapport du Comité.  La réforme du maintien de la paix est inéluctable et elle doit commencer « ici même, au C34 », a ajouté l’Indonésie.

En prévision de la Réunion ministérielle que le Département des opérations de paix organise le 29 mars prochain sur l’initiative « Action pour la paix », les délégations ont tenu à réaffirmer collectivement leur engagement en faveur du multilatéralisme.  Malgré l’impasse, le rôle du Comité ne saurait être sous-estimé, a fait observer la Thaïlande.

Le rapport du Comité est subdivisé en plusieurs sections: introduction, questions d’organisation, y compris l’ouverture et la durée de la session, l’élection des membres, examen du projet du rapport du Groupe de travail plénier et adoption du rapport qui sera présenté à l’Assemblée générale.  Seules manquent cette année, « les propositions, recommandations et conclusions » du Comité.

Le Comité spécial est chargé d’améliorer le fonctionnement des 14 opérations de paix déployées actuellement dans le monde et de leurs 88 268 soldats et 12 932 civils.

*- A/AC.121/2019/L.3

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Somalie: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 mars 2020 le mandat de la Mission en Somalie (MANUSOM) et met l’accent sur les futures élections

8494e séance – après-midi
CS/13752

Somalie: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 mars 2020 le mandat de la Mission en Somalie (MANUSOM) et met l’accent sur les futures élections

Le Conseil de sécurité a prorogé aujourd’hui par la résolution 2461 (2019), adoptée à l’unanimité, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) jusqu’au 31 mars 2020.

Dans ce texte long de 21 paragraphes de fond, qui met l’accent sur les élections de 2020-2021, le Conseil demande à la MANUSOM de maintenir et de renforcer sa présence dans tous les États membres de la fédération et se félicite que la Mission, le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS), l’équipe de pays des Nations Unies et la Mission de l’Union africaine (AMISOM) entretiennent de solides relations. 

En collaboration avec le BANUS, la MANUSOM est priée d’aider le Gouvernement fédéral somalien, sur les plans politique et technique, ainsi que sur les plans opérationnel et logistique, à organiser, en 2020-21, des élections pacifiques, libres et régulières qui soient ouvertes à tous, selon le principe « une personne, une voix ».  La Mission doit aider la Commission électorale à s’acquitter de son mandat constitutionnel, notamment l’objectif consistant à mener une campagne nationale d’inscription sur les listes électorales d’ici à la fin du premier trimestre 2020, à organiser les opérations de vote et à coordonner l’appui électoral apporté à la Somalie par la communauté internationale. 

La MANUSOM doit aussi aider les entités des Nations Unies à assurer l’application de la Politique en cas d’appui de l’ONU à l’AMISOM et au secteur de la sécurité en Somalie.  En collaboration avec ses partenaires internationaux, elle est priée d’aider le Gouvernement fédéral à appliquer la Stratégie et le Plan d’action nationaux pour prévenir et combattre l’extrémisme violent.  La MANUSOM doit aussi continuer de fournir à la Commission nationale des droits de l’homme des conseils techniques et un appui au renforcement des capacités. 

L’adoption unanime de la résolution a été saluée par la Somalie qui a souligné que la MANUSOM apporte une assistance essentielle à son gouvernement.  Elle a remercié le Secrétaire général pour son engagement personnel.  Il nous tarde, a déclaré la Somalie, de faire respecter ensemble les principes de l’ONU.  Elle s’est dite confiante que le Conseil de sécurité et les partenaires au développement s’accorderont sur l’importance d’identifier des solutions somaliennes aux problèmes somaliens.  Aujourd’hui, plus que jamais, a-t-elle assuré, le peuple somalien veut assumer le rôle qui lui revient au sein de la communauté internationale.

Les États-Unis ont estimé que l’alinéa 15 du préambule et le paragraphe 21 du dispositif qui parlent des « effets néfastes des changements climatiques et écologiques » auraient dû se focaliser sur l’impact de la sécheresse. 

LA SITUATION EN SOMALIE

Texte du projet de résolution (S/2019/266)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions et les déclarations de sa présidence sur la situation en Somalie,

Réaffirmant son attachement à la souveraineté, à l’intégrité territoriale, à l’indépendance politique et à l’unité de la Somalie, et soulignant l’importance de faire en sorte que les effets déstabilisateurs des crises et des différends régionaux ne se propagent pas en Somalie,

Se déclarant profondément préoccupé par la menace que les Chabab continuent de représenter, ainsi que par la présence d’éléments affiliés liés à l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, connu également sous le nom de Daech), condamnant les attaques perpétrées récemment, à savoir celle du 1er janvier 2019 contre le complexe des Nations Unies, celles du 22 mars et du 28 février qui ont tué et blessé des citoyens somaliens et celles commises dans la région, et se déclarant de nouveau résolu à appuyer les efforts visant à dissiper la menace posée par les Chabab en Somalie, dans le respect du droit international applicable, y compris le droit international des droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire,

Saluant le courage dont ont fait preuve le personnel de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et les forces de sécurité somaliennes et les sacrifices qu’ils ont consentis dans le cadre de la lutte contre les Chabab, félicitant la Mission et les forces de sécurité somaliennes qui ont assuré la sécurité et constatant que la sécurité fournie par la Mission demeure essentielle à ce stade,

Soulignant le rôle essentiel que joue la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) en aidant le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération par ses conseils stratégiques, ses bons offices, ses activités de renforcement des capacités et son action de coordination de l’appui apporté par les partenaires internationaux, et soulignant que le mandat de la Mission complète celui de l’AMISOM, celui de l’équipe de pays des Nations Unies en Somalie et l’appui fourni par d’autres partenaires internationaux,

Saluant le rôle que joue la MANUSOM en exécutant son mandat, déplorant de nouveau que le Gouvernement fédéral somalien ait décidé d’expulser le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie, Nicholas Haysom, rappelant également qu’il compte sur la pleine coopération de la Somalie avec l’Organisation des Nations Unies, notamment avec le nouveau représentant spécial du Secrétaire général, une fois qu’il aura été nommé, et, à cet égard, se félicitant que le Gouvernement fédéral somalien et l’Organisation se soient engagés récemment à approfondir leur partenariat, et exprimant son appui sans réserve au Représentant spécial adjoint du Secrétaire général, Raisedon Zenenga, et au Représentant spécial pour la Somalie du Président de la Commission de l’Union africaine et Chef de l’AMISOM, Francisco Caetano José Madeira,

Se déclarant inquiet des tensions qui persistent entre le « Somaliland » et le Puntland et soulignant qu’il importe que le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération demeurent résolus à poursuivre un dialogue politique inclusif en vue du règlement pacifique des différends qui menacent la paix et la sécurité intérieures,

Soulignant qu’un règlement politique inclusif est indispensable dans la perspective des élections de 2020/21 devant se tenir selon le principe « une personne, une voix » et qu’il importe d’appliquer rapidement les grandes mesures politiques, économiques et sécuritaires prévues dans le Cadre de responsabilité mutuelle arrêté conjointement, le plan de transition – assorti de conditions et d’un calendrier précis – organisant le transfert aux institutions et forces de sécurité somaliennes de la responsabilité principale en matière de sécurité et le plan de mise en œuvre du dispositif de sécurité nationale, qui, ensemble, aux niveaux politique et économique et en matière de développement, posent les jalons d’une bonne application de la feuille de route politique, considérant qu’il incombe au premier chef au Gouvernement fédéral somalien de veiller au bon respect de ces jalons en étroite coopération avec les États membres de la fédération, soulignant qu’il importe d’œuvrer à la mise en œuvre effective dans un esprit de responsabilité mutuelle, insistant sur le fait que la MANUSOM, par l’appui qu’elle apporte, joue un rôle central à cet effet, et soulignant qu’un appareil de sécurité et un système judicaire compétents, responsables, susceptibles d’être acceptés, d’un coût abordable et reposant sur un règlement politique sont essentiels à une paix durable en Somalie,

Se félicitant des progrès accomplis début 2018 par le Gouvernement fédéral somalien dans la réforme du secteur de la sécurité et les réformes économiques et politiques, notant que le Gouvernement fédéral somalien s’est engagé à renforcer le fédéralisme et à organiser en 2020/21 des élections qui se tiendront selon le principe « une personne, une voix », seront pleinement inclusives, crédibles et pacifiques et assureront la représentation de tous les Somaliens, et prenant acte des engagements qu’il a pris en ce qui concerne l’actuel Programme de référence du Fonds monétaire international et un plan de transition assorti de conditions,

Se déclarant préoccupé par les retards importants pris dans la consolidation du système fédéral somalien et la rédaction et l’adoption par le Parlement de la loi électorale, invitant le Gouvernement fédéral somalien et le Parlement à s’efforcer de parachever la loi électorale, se félicitant que le Gouvernement fédéral somalien se soit récemment rendu dans le Jubbaland et soulignant qu’il importe de progresser dans la réalisation des grandes priorités, notamment le partage du pouvoir et des ressources, la révision constitutionnelle, le fédéralisme fiscal et l’élaboration et la mise en œuvre du cadre juridique pour les élections, priorités qui nécessitent toutes la conclusion d’accords politiques pouvant servir de base à l’adoption de projets de lois au Parlement fédéral,

Se félicitant que le Gouvernement fédéral somalien ait élaboré en 2018 un plan de transition assorti de conditions et d’un calendrier précis organisant le transfert progressif des tâches de sécurité incombant à l’AMISOM aux institutions et forces de sécurité somaliennes, sur la base du dispositif national de sécurité entériné le 8 mai 2017 et du Pacte de sécurité adopté par le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération et tous les partenaires internationaux ayant participé à la Conférence de Londres sur la Somalie qui s’est tenue le 11 mai 2017, et se félicitant que certains progrès aient été accomplis dans la mise en œuvre du nouveau modèle d’organisation de la police,

Se déclarant préoccupé du retard pris dans la mise en œuvre du dispositif national de sécurité et du plan de transition, soulignant qu’il importe que les forces de sécurité somaliennes et les autres parties concernées se plient aux dispositions du plan de transition et qu’elles mènent notamment des opérations conjointes avec l’AMISOM, dans le respect du mandat de celle-ci, demandant aux dirigeants somaliens de parvenir à de nouveaux accords politiques sur les questions en suspens en vue de permettre la mise en œuvre du dispositif national de sécurité, et rappelant l’importance que revêt l’Approche globale pour la sécurité, qui est le principal mécanisme permettant de coordonner l’appui qu’apporte la communauté internationale au Gouvernement fédéral somalien en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité,

Se déclarant très inquiet de la crise humanitaire qui continue de frapper la Somalie du fait de la sécheresse et du conflit qui perdure, préoccupé en outre du nombre de réfugiés et de déplacés, condamnant avec la plus grande fermeté les attaques contre le personnel humanitaire et médical, se félicitant des efforts déployés à cet égard par le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération et les organismes des Nations Unies et de la mobilisation et du soutien généreux des donateurs, qui s’emploient à faire face à la crise et continuent d’apporter un appui au plan d’aide d’humanitaire, et encourageant une plus grande coopération avec les acteurs humanitaires internationaux et nationaux en vue de satisfaire aux besoins immédiats et de contribuer à renforcer la résilience, y compris des déplacés,

Condamnant la poursuite des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits ainsi que des violations du droit international humanitaire, notamment les violations perpétrées contre les enfants et les violences sexuelles et fondées sur le genre commises dans les situations de conflit, rappelant le rapport de l’Organisation des Nations Unies sur la protection des civils en date du 10 décembre 2017 et les conclusions en date de 2017 sur le sort des enfants touchés par le conflit armé (S/AC.51/2017/2), se déclarant préoccupé par les violences ayant précédé les élections dans l’État du Sud-Ouest et par le comportement qu’auraient adopté les forces de police de cet État, demandant au Gouvernement fédéral somalien de faire toute la lumière sur ces faits et d’amener les responsables à en répondre, soulignant qu’il importe de respecter, de protéger et de promouvoir les droits de l’homme, de mettre fin à l’impunité et d’amener quiconque – acteur étatique ou non – est responsable de violations des droits de l’homme ou d’atteintes à ces droits ou de violations du droit international humanitaire commises en Somalie à en répondre, et réaffirmant son soutien à la politique de tolérance zéro adoptée par l’Organisation des Nations Unies à l’égard de toutes les formes d’exploitation et de violence sexuelles,

Conscient des effets néfastes que les changements climatiques et écologiques et les catastrophes naturelles, entre autres facteurs, ont sur la stabilité de la Somalie, notamment la sécheresse, la désertification, la dégradation des sols et l’insécurité alimentaire, soulignant que, face à ces facteurs, il importe que les gouvernements et les organismes des Nations Unies adoptent des stratégies appropriées d’évaluation et de gestion des risques, et rappelant la déclaration de son président S/PRST/2011/15,

1.    Décide de proroger jusqu’au 31 mars 2020 le mandat de la MANUSOM établi au paragraphe 1 de la résolution 2158 (2014);

2.    Condamne avec force les attaques perpétrées récemment par le groupe terroriste des Chabab, y compris les attaques menées dans la région, et, eu égard à l’attentat terroriste perpétré le 1er janvier 2019 contre le complexe des Nations Unies à Mogadiscio, qui a fait trois blessés parmi le personnel et les prestataires de l’Organisation, encourage l’Organisation à continuer d’œuvrer au renforcement de la sécurité du complexe, en collaboration avec le Gouvernement fédéral somalien et l’AMISOM;

3.    Demande à la MANUSOM de maintenir et de renforcer sa présence dans tous les États membres de la fédération, dans le respect des normes de sécurité fixées par l’Organisation et si les conditions de sécurité le permettent, se félicite que la MANUSOM, le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS), l’équipe de pays des Nations Unies et l’AMISOM entretiennent de solides relations, et souligne qu’il importe que toutes les entités continuent de renforcer leurs relations à tous les niveaux, y compris dans le cadre du Forum de coordination des hauts responsables;

4.    Se déclare très satisfait de l’appui qu’apporte la MANUSOM au Gouvernement fédéral somalien selon les dispositions du paragraphe 1 de la résolution 2158 (2014), notamment en ce qui concerne l’élaboration d’un règlement politique inclusif, la préparation d’élections inclusives devant se tenir en 2020/21 selon le principe « une personne, une voix », l’organisation d’élections au niveau des États, la révision constitutionnelle, la médiation, la prévention et le règlement des conflits, la mise en place d’une police et d’une justice fédérale indépendantes, le renforcement de l’état de droit, la réforme du secteur de la sécurité et la coordination de l’appui fourni au renforcement des capacités en matière de lutte anticorruption;

5.    Exhorte le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à hâter le processus de règlement politique inclusif mené sous l’égide du Gouvernement somalien, en entretenant des contacts réguliers à haut niveau, en agissant dans le cadre du Conseil national de sécurité, en collaborant avec le Parlement et en tenant un dialogue inclusif, et prie en outre la MANUSOM d’apporter son appui à cet égard;

6.    Souligne qu’il importe que la réconciliation dans tout le pays, y compris entre les clans et en leur sein, constitue le fondement de toute démarche en faveur de la stabilité à long terme, exhorte le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à poursuivre les pourparlers sur la réconciliation aux niveaux local, régional et national, prend note des progrès accomplis dans la mise au point du cadre de réconciliation nationale, demande au Gouvernement fédéral somalien et à l’État du Sud-Ouest de donner suite aux allégations faisant état de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits pendant la période ayant précédé les élections de l’État du Sud-Ouest, exhorte le Gouvernement fédéral et le « Somaliland » à reprendre leur dialogue, et prie la MANUSOM de continuer d’appuyer ces efforts en coopération étroite avec les partenaires;

7.    Se félicite de l’accord sur un système de représentation conclu à Baidoa, le 5 juin 2018, entre le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération et de la création de bureaux de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) au niveau infranational, et invite instamment le Gouvernement fédéral et le Parlement somaliens à finaliser et à adopter la loi électorale d’ici à la mi-2019 et à faire en sorte que les prochaines élections fédérales soient organisées conformément aux obligations et aux engagements pris sur le plan international par la Somalie;

8.    Souligne qu’il importe que la MANUSOM, en collaboration avec le BANUS, aide le Gouvernement fédéral somalien, sur les plans politique et technique, ainsi que sur les plans opérationnel et logistique, à organiser, en 2020/21, des élections pacifiques, libres et régulières qui soient ouvertes à tous, selon le principe « une personne, une voix », l’accent étant mis sur la CENI aux niveaux national et infranational pour lui permettre de s’acquitter de son mandat constitutionnel, conformément à son Plan stratégique opérationnel pour 2017-2021, notamment l’objectif consistant à mener une campagne nationale d’inscription sur les listes électorales d’ici à la fin du premier trimestre de 2020, à organiser les opérations de vote et à coordonner l’appui apporté à la Somalie par la communauté internationale sur le plan électoral;

9.    Réaffirme qu’il importe que tous les Somaliens, y compris les femmes, les jeunes, les personnes handicapées, les personnes déplacées et les réfugiés, participent pleinement, équitablement et effectivement à la prévention et au règlement des conflits, à la consolidation de la paix et aux élections, exhorte le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à accroître la représentation et la participation des femmes et des jeunes à tous les niveaux de la prise de décisions, et demande à la MANUSOM de continuer à fournir des conseils techniques et à renforcer les capacités dans ce sens;

10.   Accueille avec satisfaction les progrès faits par le Gouvernement fédéral somalien pour ce qui est de se conformer aux prescriptions du programme de référence en cours du Fonds monétaire international, encourage le Gouvernement fédéral somalien à continuer de s’acquitter des engagements qu’il a pris en faveur d’une gestion financière saine, transparente et responsable, y compris les mesures de mobilisation des recettes, d’allocation des ressources, d’exécution du budget et de lutte contre la corruption énoncées dans le Nouveau Partenariat pour la Somalie, exhorte le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à instaurer des cadres pour la gestion des ressources et le partage du pouvoir, et prie la MANUSOM de continuer à collaborer avec ses partenaires pour offrir un soutien et des conseils stratégiques afin de renforcer la capacité qu’a le Gouvernement de fournir des services, d’attirer les investissements et d’aider la Somalie à avancer sur la voie de la normalisation avec les institutions financières internationales et l’allégement de la dette;

11.   Exhorte le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à accélérer, avec l’appui de la MANUSOM et des partenaires internationaux que sont l’AMISOM et le BANUS, la mise en œuvre des principales réformes du secteur de la sécurité, notamment celle d’un dispositif national de sécurité cohérent, comportant une composante militaire et civile, exhorte le Gouvernement fédéral somalien à reprendre l’exécution du plan de transition assorti d’un calendrier précis prévoyant que les responsabilités en matière de sécurité de l’AMISOM seront progressivement transférées aux institutions et aux forces somaliennes chargées de la sécurité, à créer et à intégrer des forces régionales et fédérales aptes, rentables, acceptables et responsables et à se doter de structures garantes de l’état de droit qui soient efficaces et responsables, afin de pouvoir s’acquitter de la responsabilité principale d’assurer la sécurité de tous, rappelle au Gouvernement fédéral somalien et aux États membres de la fédération l’engagement qu’ils ont pris d’entretenir un dialogue permanent au sujet des réformes du secteur de la sécurité, et souligne qu’il importe d’investir dans des institutions garantes de l’état de droit qui soient efficaces et responsables;

12.   Se félicite que le Gouvernement fédéral somalien ait achevé l’évaluation de l’état de préparation opérationnelle des forces régionales et l’enregistrement biométrique de l’Armée nationale somalienne, pouvant ainsi procéder au versement régulier des salaires, et se félicite également que des progrès relatifs aient été accomplis dans la mise en œuvre du nouveau modèle de police;

13.   Souligne qu’il importe que le Gouvernement fédéral somalien et les partenaires internationaux collaborent dans la mise en œuvre des réformes de politique et de sécurité convenues et menées par les autorités somaliennes, se félicite de l’engagement pris par les partenaires internationaux, y compris les nouveaux donateurs, de fournir un appui, conformément au Pacte de sécurité qui a été avalisé à la Conférence de Londres sur la Somalie, reconnaissant que des mécanismes de coordination de partenariat mutuellement convenus demeurent essentiels pour arrêter les priorités et coordonner les ressources et l’appui, engage le Gouvernement fédéral somalien à redynamiser les structures de coordination dans le cadre de l’Approche globale pour la sécurité, et demande à la MANUSOM d’assurer une coordination et de fournir des conseils stratégiques pour accélérer la mise en œuvre de cette approche;

14.   Engage le Gouvernement fédéral somalien, la MANUSOM et le BANUS à poursuivre et renforcer leur coopération dans la mise en œuvre de la Politique de diligence voulue des Nations Unies en matière de droits de l’homme, et demande à la MANUSOM d’aider les entités des Nations Unies à assurer, à l’échelle du système des Nations Unies, l’application de la Politique en cas d’appui de l’ONU à l’AMISOM et au secteur de la sécurité en Somalie, en s’employant tout particulièrement à renforcer l’engagement pris auprès du Gouvernement fédéral somalien, notamment en ce qui concerne les mesures de réduction des risques;

15.   Souligne qu’il importe au plus haut point de veiller à ce que toutes les mesures prises pour réformer le secteur de la sécurité et celles prises, le cas échéant, pour lutter contre le terrorisme soient conformes aux obligations qui incombent à la Somalie en vertu du droit international, en particulier humanitaire, des droits de l’homme et des réfugiés, applicable, notamment pour ce qui est de faire cesser et d’empêcher l’utilisation, le recrutement et le réenrôlement d’enfants en période de conflit armé, demande à la MANUSOM, en collaboration avec ses partenaires internationaux, de continuer d’aider le Gouvernement fédéral somalien à appliquer la Stratégie et le Plan d’action nationaux pour prévenir et combattre l’extrémisme violent afin de renforcer la capacité de la Somalie de prévenir et de combattre le terrorisme, et engage la Somalie à devenir partie aux conventions et aux protocoles relatifs à la lutte internationale contre le terrorisme;

16.   Se déclare préoccupé par toutes les violations du droit international humanitaire ainsi que par les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, y compris celles qui sont associées à la violence sexuelle ou sexiste en période de conflit, commises notamment par les Chabab et leurs affiliés liés à l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech), demande à toutes les parties de respecter leurs obligations au regard du droit international et de s’acquitter des obligations qui sont les leurs au titre du droit international humanitaire applicable, et de prendre toutes les précautions possibles pour protéger la population civile et d’éviter que des civils ne soient tués ou blessés ou, à tout le moins, de réduire le plus possible le nombre de victimes civiles, et réaffirme qu’il est urgent et impératif de traduire en justice tous les auteurs de ces violations et atteintes;

17.   Condamne fermement les violations et exactions commises, en particulier par les Chabab en Somalie, contre des enfants, y compris le recrutement et l’utilisation d’enfants, les viols, les violences sexuelles et les enlèvements, exhorte toutes les parties au conflit à prendre les mesures voulues pour y mettre fin et prévenir toute récidive, et à identifier les auteurs de tels actes, à considérer comme victimes les enfants qui ont été libérés ou autrement séparés des forces armées et groupes armés, et à cesser – lorsque la pratique contrevient au droit international applicable – de détenir des enfants pour atteinte à la sécurité nationale, demande au Gouvernement fédéral somalien d’appliquer dans son intégralité la Convention relative aux droits de l’enfant de 1989 (la Convention) et les plans d’action signés en 2012, l’ordonnance du commandement de l’Armée nationale somalienne sur la protection des droits de l’enfant avant, pendant et après les opérations et les instructions permanentes sur la remise d’enfants, et souligne la nécessité pour la Somalie de renforcer le cadre juridique et opérationnel relatif à la protection de l’enfance, y compris en devenant partie aux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention;

18.   Salue les efforts déployés par le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération, les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires humanitaires pour acheminer l’aide à ceux qui en ont le plus besoin, encourage tous les partenaires, y compris les donateurs, à poursuivre leurs efforts humanitaires en 2019, condamne fermement tout détournement de l’aide humanitaire et toutes actions faisant obstacle à cette aide, notamment les attaques visant le personnel humanitaire et médical, exige à nouveau que toutes les parties permettent et facilitent le libre passage, en toute sécurité et sans restrictions, de l’aide humanitaire afin qu’elle puisse être rapidement distribuée à tous ceux qui en ont besoin sur l’ensemble du territoire somalien, y compris en démantelant les postes de contrôle illégaux et en levant les barrières administratives, et souligne qu’il importe de tenir une comptabilité exacte de l’aide humanitaire fournie par la communauté internationale;

19.   Se déclare gravement préoccupé par la poursuite des expulsions forcées de personnes déplacées en Somalie, souligne que toute expulsion doit se faire dans le respect des cadres nationaux et internationaux applicables, et demande au Gouvernement fédéral somalien et aux États membres de la fédération ainsi qu’à tous les acteurs concernés d’appliquer des solutions durables au problème des personnes déplacées et de créer les conditions propices à un retour volontaire et pérenne, en toute sécurité et dans la dignité, des réfugiés et des personnes déplacées dans leur région de résidence, avec le soutien de la communauté internationale;

20.   Félicite le Gouvernement fédéral somalien d’avoir signé la Convention relative aux droits des personnes handicapées et d’avoir promulgué, en décembre 2018, le projet de loi sur l’organisme national chargé des personnes handicapées, souligne la nécessité pour le Gouvernement fédéral somalien d’accélérer la nomination au mérite des commissaires nationaux aux droits de l’homme, la création de la Cour constitutionnelle et la mise en place du Conseil supérieur de la magistrature, invite le Gouvernement fédéral somalien à appliquer les lois visant à protéger les droits de l’homme et à poursuivre les responsables de violations des droits de l’homme, d’atteintes à ces droits, de violations du droit international humanitaire et de violences sexuelles et sexistes liées aux conflits, engage le Gouvernement fédéral somalien, avec l’appui de l’ONU, à donner effet le plus rapidement possible au Communiqué conjoint et au Plan d’action national visant à mettre fin aux violences sexuelles commises en période de conflit, et prie la MANUSOM de continuer de fournir à la Commission nationale des droits de l’homme des conseils techniques et un appui au renforcement des capacités et d’aider le Gouvernement fédéral somalien à promouvoir et protéger les droits de l’homme en Somalie;

21.   Prie l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement fédéral somalien de tenir compte, dans les programmes qu’ils appliquent à la Somalie, des répercussions néfastes des changements climatiques et écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, notamment en engageant des évaluations des risques et des stratégies de gestion des risques relatives à ces facteurs, et prie le Secrétaire général de faire figurer des informations sur ces évaluations dans les rapports qu’il est tenu de présenter selon qu’il convient;

22.   Prie le Secrétaire général de le tenir régulièrement informé de l’application de la présente résolution, de répertorier les progrès faits dans la réalisation des principaux objectifs politiques de référence et de lui faire rapport à leur sujet, oralement et au moyen de quatre rapports écrits au moins, le premier devant lui être présenté le 15 mai 2019 au plus tard et les autres tous les 90 jours par la suite;

23.   Décide de rester activement saisi de la question.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: pour certaines délégations, une « fenêtre d’opportunité unique » existe pour mettre fin au conflit en Syrie

8493e séance – matin
CS/13751

Conseil de sécurité: pour certaines délégations, une « fenêtre d’opportunité unique » existe pour mettre fin au conflit en Syrie

Certaines délégations ont indiqué, ce matin, devant le Conseil de sécurité, à l’occasion d’une séance sur la situation humanitaire et le processus politique en Syrie, qu’il existe une « fenêtre d’opportunité unique », selon les mots de la France, de mettre fin à un conflit, entré dans sa neuvième année.  « Ensemble, nous pouvons mettre un point final aux combats et nous consacrer au processus politique », a renchéri la Fédération de Russie. 

La séance a été ouverte par la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et de la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, qui a fait le point sur les objectifs poursuivis par l’Envoyé spécial pour la Syrie: dialogue approfondi entre le Gouvernement et l’opposition, et règlement négocié du conflit.  Il est temps de passer des paroles aux actes et de montrer qu’une « autre Syrie » est possible, a-t-elle déclaré. 

Cette autre Syrie a été au cœur de la déclaration de la France qui a noté « la convergence des différentes positions » sur la nécessité de vaincre le terrorisme, d’améliorer la situation humanitaire et de parvenir à une « solution inclusive » sur la base de la résolution 2254 (2015).  Le Conseil devrait tirer profit de ces convergences et se saisir de cette « étroite fenêtre d’opportunité », a-t-elle dit.

La Fédération de Russie a, à son tour, souligné l’évolution importante en Syrie, marquée notamment par la victoire contre Daech, même si elle a jugé « prématuré », à l’instar de Mme DiCarlo, de « parler de la fin du conflit syrien ».  Le représentant s’est néanmoins prononcé pour un « véritable partenariat international », non seulement pour appuyer la lutte antiterroriste mais aussi pour assurer le relèvement économique de la Syrie. 

« La défaite militaire proclamée de Daech offre une fenêtre d’opportunité aux parties au conflit de faire taire définitivement les armes et de s’engager résolument, à travers un dialogue constructif, dans le règlement politique de la crise », a renchéri la Côte d’Ivoire.  Pour le Koweït, une solution politique durable au conflit passe par la révision de la Constitution, des élections crédibles et transparentes et le retour sûr des réfugiés.

Plusieurs délégations ont pointé le rôle particulier que doivent jouer les autorités syriennes, à commencer par les États-Unis qui les ont exhortées à prendre des « mesures concrètes ».  Une impatience partagée par le Royaume-Uni qui a exhorté le « Gouvernement à faire ce qui est bon pour son peuple », tandis que la Pologne lui a demandé de participer aux négociations de « bonne foi » et sans conditions préalables.

Le processus politique doit être mené par les Syriens, a rétorqué la Syrie, pour qui la discussion sur la Constitution doit se tenir sans ingérence étrangère.  Elle a entamé son propos en citant un ancien directeur du Musée du Louvre, selon lequel « chaque homme civilisé a deux parties: la sienne et la Syrie ».

La situation humanitaire du pays a été abondamment évoquée, à commencer par le Directeur au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  M. Ramesh Rajasingham a mis en garde contre les « risques réels » d’une catastrophe humanitaire à Edleb et dans le nord-ouest de la Syrie.  Il a indiqué que près de 2,2 milliards de dollars ont été promis lors de la Conférence de Bruxelles III pour financer le Plan de réponse humanitaire, couvrant ainsi près de 65% des opérations dans le territoire syrien.

« La crise humanitaire en Syrie est essentiellement une crise de protection », a précisé l’Allemagne, ajoutant que la lutte antiterroriste ne doit pas primer sur le droit international.  S’il a salué les contributions financières annoncées à Bruxelles, le Pérou a rappelé que seul un règlement politique permettra de surmonter la « catastrophe humanitaire ». 

Enfin, plusieurs délégations, dont celles du Koweït et de la Syrie, ont dénoncé la décision des États-Unis de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan.  L’annexion d’un territoire par la force est une violation du droit international et doit être condamnée, a appuyé l’Afrique du Sud.  La décision américaine confirme les propos que nous avons tenus dès le début de la crise, a affirmé la Syrie: l’objectif de cette guerre, c’est de pérenniser la colonisation israélienne sur les territoires occupés, y compris le plateau du Golan, et de détruire la Syrie. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

Entré dans sa neuvième année, le conflit syrien est loin d’être terminé, a prévenu Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et de la consolidation de la paix.  S’agissant du nord-est du pays, elle a espéré que l’accord récent entre la Fédération de Russie et la Turquie apaiserait les tensions.  Elle a reconnu que la semaine dernière, les « Forces démocratiques syriennes » ont pris le contrôle de Baghouz, le dernier bastion de Daech, mais, a-t-elle prévenu, ce dernier constitue toujours une menace.  Les besoins humanitaires demeurant pressants, il faut à tout prix éviter l’escalade militaire.  La lutte contre le terrorisme ne peut primer sur le droit humanitaire.  Le Gouvernement syrien, l’opposition et les autres parties prenantes doivent coopérer pour alléger les souffrances humaines.  « Il y a urgence », a martelé Mme DiCarlo.

Elle a rappelé les objectifs poursuivis par l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen: lancer un dialogue approfondi entre le Gouvernement et l’opposition; mettre en œuvre des mesures concrètes en faveur des détenus; faire en sorte que tous les Syriens participent au processus politique et aboutir à un règlement négocié du conflit.  Le sort des détenus a déjà fait l’objet de la réunion que le Groupe de travail créé à cet effet a tenu le 18 mars dernier, à Moscou.  Le Bureau de l’Envoyé spécial a fait plusieurs propositions, dont celle de dépasser le principe d’échange de détenus.  L’ONU a en outre proposé que le Groupe de travail se réunisse une nouvelle fois à Genève. 

Il est temps, s’est impatientée Mme DiCarlo, de passer des paroles aux actes et montrer qu’une autre Syrie est possible.  Des discussions se tiennent d’ailleurs sur le mandat et la composition du comité constitutionnel qui, dans l’idéal, devrait comprendre au moins 30% de femmes.  Concluant sur le Golan syrien, la Secrétaire générale adjointe a assuré que les efforts de l’ONU pour faciliter le processus politique en Syrie continueront de s’appuyer sur les principes de souveraineté nationale et d’intégrité territoriale. 

M. RAMESH RAJASINGHAM, Directeur au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a averti que la situation à Edleb et dans les zones avoisinantes du nord-ouest de la Syrie est gravement préoccupante.  L’accord conclu le 17 septembre 2018 entre la Turquie et la Fédération de Russie pour établir une zone démilitarisée a donné lieu à une réduction de la violence mais ces dernières semaines ont été marquées par une augmentation « alarmante » du nombre de victimes parmi les civils et de nouveaux déplacements.  Les pilonnages s’intensifient le long des lignes de front tout comme les frappes aériennes et les attaques dans les zones urbaines à coup d’engins explosifs improvisés.  Les zones résidentielles d’Alep ont également été la cible de tirs de mortier et de tireurs embusqués.  Le mois dernier, 90 personnes ont été tuées, dont la moitié était des enfants, et au moins 86 000 personnes ont fui cette dernière flambée de violence.  Les risques d’une catastrophe humanitaire sont réels et une opération militaire d’envergure compromettrait la réponse humanitaire.

Poursuivant, M. Rajasingham a indiqué que des dizaines de milliers de déplacés, dont la majorité sont des femmes et des enfants, continuent d’arriver au camp el-Hol, dans la province de Hassaké, en provenance de la province de Deïr el-Zor.  La plupart de ces déplacés sont dans un état de santé extrêmement faible, ayant parcouru des centaines de kilomètres dans des camions sans toiture, exposés pendant de longues périodes à des affrontements intenses, après avoir vécu pendant des années dans une privation extrême et subi les abus de Daech.  Depuis le mois de décembre, plus de 140 personnes ont perdu la vie sur la route de el-Hol ou peu de temps après avoir atteint le camp, dont 80% étaient des enfants de moins de 5 ans.

La population du camp dépasse désormais les 72 000, après avoir connu une augmentation de 25 000 personnes depuis le mois dernier.  D’autres arrivées sont attendues, a prévenu le représentant d’OCHA, inquiet d’un possible débordement.  La situation à el-Hol et dans le sud-est de Deïr el-Zor présente des défis complexes en matière de protection, à commencer par l’absence « notable », dans le camp, d’hommes adultes et de garçons de plus de 15 ans.  À Hajin, Baghouz et d’autres zones directement touchées par les opérations contre Daech, la destruction des habitations et des infrastructures, ainsi que le risque élevé de contamination par les explosifs sont des obstacles sérieux au retour des dizaines de milliers de civils déplacés.

Quant au camp de fortune de Roukban, des efforts ont été faits pour une solution en faveur des 41 000 personnes qui y vivent dont 95% souhaitent partir, tout en craignant pour leur protection.  Quelque 362 personnes ont quitté le camp depuis le 23 mars dernier pour un centre d’accueil dans la ville de Homs.  Des discussions sont en cours avec le Gouvernement de la Syrie, la Fédération de Russie, les États-Unis et la Jordanie pour affiner le processus et répondre aux préoccupations soulevées par les habitants de Roukban.  Il faut, a dit le représentant d’OCHA, une approche bien planifiée afin de respecter les principales normes de protection.  Il a remercié les bailleurs de fonds pour les promesses de contributions annoncées, le 14 mars dernier, à la troisième Conférence de Bruxelles.  Près de 2,2 milliards de dollars ont été promis pour financier le Plan de réponse humanitaire, couvrant ainsi près de 65% des opérations dans le territoire syrien.  Les organisations humanitaires ont démontré leur capacité d’action, a conclu le haut fonctionnaire, qui a précisé que l’an dernier, 5,5 millions de personnes ont reçu de l’aide en Syrie à partir de Damas et des points de passage aux frontières.

Le conflit syrien entrant dans sa neuvième année, M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a jugé qu’il est temps que le régime syrien et ses alliés prennent des mesures concrètes pour y mettre un terme.  Le comité constitutionnel devrait pouvoir mettre en place des dirigeants qui protègent au lieu de nuire à la population.  Le représentant a appelé à l’application intégrale de la résolution 2254 (2015) du Conseil, y compris le règlement politique, le cessez-le-feu et un accès humanitaire sans entrave.  Il a, dans la foulée, exprimé son soutien aux efforts des Nations Unies visant à revitaliser le processus politique.  Cependant, a-t-il tempéré, ces efforts resteront vains si la violence ne cesse pas.  À cet égard, il s’est déclaré profondément préoccupé par les récentes frappes aériennes menées par la Syrie et la Fédération de Russie dans les zones démilitarisées.  Il s’est également inquiété de l’épuisement, le mois dernier, de l’aide humanitaire destinée à Roukban. 

Il a plaidé pour un troisième convoi humanitaire et a invité la Fédération de Russie à faire pression sur le régime syrien pour qu’il l’autorise.  Le représentant s’est tout de même dit satisfait de la coordination du retour des réfugiés et des déplacés, estimant que ces personnes doivent avoir des informations précises sur la situation qui les attend.  Le représentant a aussi soutenu une démarche menée par les Nations Unies pour résoudre la question des détenus, ajoutant que son pays s’est engagé à verser 2 millions de dollars au Mécanisme international, impartial et indépendant sur les crimes commis en Syrie. 

Notre réponse doit être fondée sur les besoins et respecter pleinement les principes humanitaires, a déclaré M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne), s’exprimant également au nom du Koweït et de la Belgique, en tant que porte-plumes.  « La crise humanitaire en Syrie est essentiellement une crise de protection », a-t-il précisé.  Gravement préoccupé par la situation à Edleb, il a réitéré l’avertissement du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), à savoir que toute offensive militaire provoquerait une catastrophe humanitaire incontrôlable et ingérable.  « La lutte contre le terrorisme ne doit pas entraver l’action humanitaire impartiale. »

S’agissant de la situation des personnes déplacées dans le nord-est, le camp el-Hol fonctionne au-delà de ses capacités, s’est inquiété M. Heusgen, en appelant toutes les parties à permettre à l’ONU et ses partenaires d’accéder aux personnes dans le besoin.  Ensuite, le Conseil doit suivre de près la situation sécuritaire des rapatriés et des réfugiés à Roukban et ailleurs en Syrie.  « Soyons clairs: il appartient à ceux qui encouragent des réinstallations plus nombreuses et rapides de prouver que les conditions nécessaires sont en place », a insisté le représentant.  Enfin, a-t-il promis, l’Allemagne, le Koweït et la Belgique s’engagent à verser les contributions qu’ils ont annoncées lors de la troisième Conférence de Bruxelles sur l’avenir de la Syrie et de la région.   

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a salué la chute du dernier bastion de Daech, qui ne sonne pas pour autant la fin de la lutte contre le groupe terroriste tant il garde intactes ses capacités de nuisance.  Le représentant a reconnu la gravité de la situation humanitaire en Syrie et rappelé que son pays a débloqué cette année une somme de 40 millions de livres sterling.  Appuyant les efforts de la Turquie pour prévenir l’escalade militaire dans le nord-est, il a prévenu que le conflit syrien perdurera tant que ses causes sous-jacentes ne seront pas réglées.  Le régime Assad, s’est-il expliqué, maintient le même cap qui a conduit au conflit, tout en entravant l’acheminement de l’aide humanitaire.  « Il est temps que le Gouvernement syrien fasse ce qui est bon pour son peuple », s’est impatienté le représentant.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit que ce mois de mars a vu de nombreux jalons dans la crise syrienne dont le premier est le neuvième anniversaire du conflit.  Il a exhorté toutes les parties à respecter le cessez le feu, les droits de l’homme et l’accès durable de l’aide humanitaire.  Le représentant a estimé qu’il était plus que jamais nécessaire de trouver une solution durable dans le cadre d’un dialogue mené par les Syriens.  Le deuxième jalon, a-t-il poursuivi, est la troisième Conférence de Bruxelles qui nous rappelle que la situation humanitaire continue de se dégrader.  Il a salué les promesses faites et a demandé aux pays de respecter leurs engagements.  Depuis le début de ce conflit, a rappelé le délégué, le Koweït a débloqué plus d’un milliard de dollars. 

Le représentant a insisté sur l’importance de trouver une solution politique durable au conflit, sous l’égide des Nations Unies et qui passerait notamment par la révision de la Constitution, des élections crédibles et transparentes, et le retour sûr des réfugiés.  Le troisième jalon, a-t-il conclu, est le fait que Daech a perdu du terrain.  Mais il faut l’éliminer « totalement », sans oublier ses sources de financement et sa logistique.  En conclusion, le représentant a dénoncé la décision des États-Unis de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan. 

Mme HARSHANA BHASKAR GOOLAB (Afrique du Sud) a dit que la seule solution durable en Syrie est une solution politique à trouver dans le cadre d’un dialogue mené par les Syriens afin de parvenir à une transition reflétant la volonté de tout le peuple.  La solution doit garantir la protection de toutes les communautés syriennes et s’agissant de la situation humanitaire, la représentante a appelé la communauté internationale à soutenir les efforts des Nations Unies.  De nombreux Syriens souhaitant rentrer chez eux, il est essentiel d’assurer les conditions d’un retour sécurisé.  Dans une société aussi complexe et aussi diverse que la Syrie, il ne peut y avoir de solution militaire au conflit.  Mme Goolab a rappelé la résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité demandant le retrait de toutes les forces des Territoires occupés, y compris le plateau du Golan.  Or, 40 ans après l’occupation du Golan, Israël est toujours là, en violation flagrante des décisions du Conseil de sécurité.  L’annexion d’un territoire par la force est une violation du droit international et doit, à ce titre, être condamnée, a martelé la représentante.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a rappelé que plus de 12 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire multisectorielle en Syrie et qu’il y a six millions de personnes déplacées dont 870 000 se trouvent dans des sites de dernier recours.  Elle a néanmoins entrevu une lueur d’espoir à la suite de la troisième Conférence de Bruxelles qui a enregistré des annonces de contributions record de 7 milliards de dollars pour venir en aide du peuple syrien en Syrie et dans les pays d’accueil.

Pour la Pologne, il ne saurait cependant y avoir de paix sans justice et dans un climat d’impunité pour les violations graves du droit international humanitaire.  Toute opération militaire doit être conforme à ce droit et aux droits de l’homme pour protéger les civils pris entre les feux croisés.  La protection des civils et l’accès humanitaire sans entrave ne sont pas un choix mais une obligation pour toutes les parties au conflit, a martelé la représentante, ajoutant que ceux qui ne l’honorent pas doivent répondre de leurs actes.  Dans la foulée, elle a appelé les parties à pleinement respecter l’accord sur la zone de désescalade à Edleb. 

S’agissant de la situation humanitaire dans le camp de Roukban, la représentante a dit compter sur une solution à long terme et s’est dite encouragée par les récentes mesures prises par les autorités syriennes pour autoriser un autre convoi interagences.  Il n’y a pas, a-t-elle martelé, de solution militaire au conflit.  Seule une solution politique, conforme à la résolution 2254 du Conseil de sécurité et au Communiqué de Genève, peut ouvrir la voie à la paix.  La représentante a dit attendre la mise en place du comité constitutionnel qui marquerait un premier pas vers un processus politique sous l’égide des Nations Unies et qui permettrait l’émergence d’un cadre intrasyrien pour un accord politique.  Les autorités syriennes ont un rôle particulier à jouer, en prenant part aux négociations de bonne foi et sans conditions préalables.

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) a souligné la nécessité d’alléger les souffrances en Syrie, pays plongé dans la « désolation ».  Il a souhaité que l’acheminement de l’aide humanitaire respecte les principes de neutralité et d’impartialité et qu’un accès humanitaire accru aux zones difficiles d’accès soit assuré.  Il a évoqué les conditions d’accès au camp de Roukban et plaidé pour qu’un autre convoi humanitaire puisse y être dépêché.  Le délégué s’est dit vivement inquiet par la situation à Edleb et a appelé au respect de l’accord de cessez-le-feu en vue d’éviter l’escalade.  Il a salué l’approche ambitieuse de l’Envoyé spécial en vue d’un processus politique le plus inclusif possible.  Une paix durable en Syrie ne pourra être instaurée qu’avec l’apport de tous les Syriens, en particulier les femmes, a-t-il acquiescé. 

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a dit demeurer préoccupé par les chiffres alarmants révélés par OCHA, notant, entre autres, que le nombre de déplacés internes dans le camp el-Hol, « refuge de la majorité des personnes fuyant l’ultime poche de résistance de l’État islamique », est passé de 9 721 en décembre 2018 à 70 480 le 20 mars 2019.  Il a salué la tenue, à Bruxelles, de la troisième Conférence des donateurs, laquelle a permis de mobiliser 7 milliards de dollars.  Le représentant a ensuite fait part de son plein soutien aux cinq priorités définies par l’Envoyé spécial pour la Syrie, lors de son exposé devant le Conseil de sécurité le 26 février 2019.  Il s’est dit d’avis qu’il convient d’approfondir le dialogue avec le Gouvernement syrien, l’opposition et la société civile, notamment à travers la Commission syrienne des négociations.  Le représentant a également affirmé que la défaite militaire proclamée de Daech offre une fenêtre d’opportunité aux parties au conflit de faire taire définitivement les armes et de s’engager résolument, à travers un dialogue constructif, dans le règlement politique de la crise.  La Côte d’Ivoire appelle aussi les belligérants à préserver le cessez-le-feu dans la zone démilitarisée d’Edleb afin de permettre l’acheminement de l’aide et exhorte également les parties syriennes à s’accorder sur la mise en place effective du comité constitutionnel.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a souligné l’évolution importante en Syrie, marquée par la victoire contre Daech.  « Il est prématuré de parler de la fin du conflit syrien », a-t-il reconnu, en appuyant les efforts de l’Envoyé spécial sur le plan politique et en plaidant pour la désescalade dans tout le pays.  À Edleb, a-t-il affirmé, mon pays s’attache à la mise en œuvre du mémorandum d’accord signé avec la Turquie.  Mais la situation est dangereuse, cette région étant aux mains des terroristes de Hay‘at Tahrir el-Cham.  Il a accusé ce groupe terroriste de se livrer, avec les Casques blancs, à des simulacres d’attaques chimiques pour incriminer le Gouvernement syrien.  Si nous ne faisons rien, Edleb pourrait devenir le foyer d’une « internationale terroriste », a-t-il prévenu, ajoutant que ce groupe terroriste n’est en rien différent de Daech.  « Si quelqu’un le pense, il se trompe. »

Évoquant la Conférence de Bruxelles III, le représentant a préconisé un changement de paradigme: la rencontre dans la capitale belge ne doit pas devenir le cadre de violations des principes de l’aide humanitaire et d’attaques contre le régime syrien.  Le délégué s’est prononcé pour un véritable partenariat international, non seulement pour appuyer la lutte antiterroriste en Syrie mais aussi pour assurer le relèvement économique, auquel la Russie contribue déjà.  « Ensemble, nous pouvons mettre un point final aux combats et nous consacrer au processus politique », a encouragé le représentant.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est inquiété de constater que le changement du rapport des forces ces derniers mois ne s’est pas encore traduit par un cessez-le-feu durable en Syrie.  À la perspective d’une nouvelle escalade de la violence dans le nord-est du pays, notamment à Edleb, il a appelé le Gouvernement syrien et tous les acteurs du conflit à prévenir une détérioration de la situation.  Il est urgent de répondre aux besoins humanitaires de plus de 70 000 personnes déplacées au camp el-Hol, a poursuivi le représentant.  Saluant les contributions financières récemment annoncées à Bruxelles, il a néanmoins rappelé que seul un règlement politique pour une paix durable en Syrie permettra de surmonter la catastrophe humanitaire.  En conclusion, il a réaffirmé l’engagement du Pérou vis-à-vis du processus de Genève et de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Syrie. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a prié la communauté internationale de respecter pleinement la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Seul un processus dirigé par et pour les Syriens peut conduire à un règlement politique durable de la crise, a-t-il fait valoir.  À cet égard, il a souligné l’importance d’établir, « de façon mesurée et sans précipitation », un comité constitutionnel crédible et inclusif.  Préoccupé par la situation humanitaire en Syrie, le représentant a également souhaité la création de 4 000 abris supplémentaires et davantage de réponses sur les fronts de l’alimentation, de l’eau, de l’assainissement et de la santé.  En conclusion, il a appuyé l’avis du Secrétaire général selon lequel la communauté internationale a l’obligation morale d’aider les Syriens à s’unir autour d’une vision pour leur avenir. 

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a jugé nécessaire de poursuivre le processus de négociation mené sous l’égide de l’ONU, même s’il reste difficile de fixer un calendrier pour la formation du comité constitutionnel.  À cette fin, il a appelé toutes les parties, en particulier les autorités syriennes, à prendre les mesures nécessaires et à privilégier leur coopération avec l’Envoyé spécial, et il a espéré que la réunion d’Astana sur la Syrie, prévue en avril, permettra d’avancer.  Revenant sur la situation humanitaire, le représentant a jugé indispensable de maintenir la Syrie au centre des préoccupations de la communauté internationale et de fournir un appui financier à plus de 12 millions de personnes innocentes.  Alarmé par l’offensive sanglante de Baghouz, il a appelé les parties à faire preuve de modération et à donner la priorité à la protection des civils conformément au droit international humanitaire. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a noté que le dénominateur commun des objectifs de l’Envoyé spécial est de susciter la confiance et d’approfondir le dialogue afin de faire avancer le processus.  Or, la confiance entre les parties au conflit ne sera pas possible sans perspective de justice.  Comme mesure concrète, elle a appelé toutes les parties à exercer leur influence afin de libérer les personnes détenues arbitrairement.  La représentante a ajouté que la Conférence de Bruxelles III a souligné le rôle essentiel de la société civile.  Une société civile dynamique qui est prise en considération au niveau politique et qui illustre le droit de se réunir et de s’exprimer librement, constitue l’épine dorsale de toute communauté, a souligné la représentante.  Bruxelles III, a-t-elle poursuivi, a également mis un accent particulier sur les femmes syriennes.  Le Ministre belge des affaires étrangères a en effet organisé un dîner pour elles et leur rôle dans le processus de paix.  La représentante a souligné la nécessité d’une participation significative des femmes à hauteur d’au moins 30% dans tous les organes de décision. 

Elle a appelé à une cessation nationale des hostilités afin de garantir la protection des civils.  Elle s’est dite gravement préoccupée par la recrudescence de la violence à Edleb et a jugé impératif que toutes les parties, y compris les garants d’Astana, restent pleinement engagées à respecter l’accord signé en septembre, vu qu’une opération militaire majeure pourrait provoquer une crise humanitaire démesurée.  Pour ce qui est de la reconstruction, Mme Van Vlierberge a dit que son pays adhère pleinement à la position de l’Union européenne.  Nous ne serons prêts à aider à la reconstruction que lorsqu’une transition politique globale, véritable et inclusive, négociée par les parties syriennes au conflit sur la base de la résolution 2254 (2015) et du Communiqué de Genève de 2012, sera fermement engagée.

M. WU HAITAO (Chine) a salué les efforts de l’ONU pour trouver une solution politique en Syrie et améliorer la situation humanitaire.  Le peuple syrien demande une fin rapide du conflit, a martelé le représentant, qui a appelé l’ONU à opérationnaliser le comité constitutionnel.  Ce comité, a-t-il souligné, doit tenir compte de tous les points de vue, y compris celui du Gouvernement syrien.  Rappelant l’importance de la lutte contre le terrorisme, le représentant a voulu que l’on appuie les efforts des parties.  Quant à l’action humanitaire, il a insisté sur le respect de la souveraineté nationale de la Syrie.  Il n’a pas manqué de rappeler que son pays a débloqué une somme « très importante » pour les réfugiés syriens, dont le retour devrait sonner le début de la reconstruction.  La Chine, a conclu le représentant, appuie les efforts de l’ONU en Syrie mais ces efforts doivent être conformes à la résolution 2254 (2015) et respecter l’intégrité territoriale du pays. 

Pour M. FRANÇOIS DELATTRE (France), même si la défaite territoriale de Daech en Syrie marque une nouvelle étape importante dans la lutte contre l’organisation terroriste, cette victoire ne doit pas faire oublier l’ampleur des défis à relever pour éviter une résurgence de Daech, sous une forme ou une autre.  La menace que fait peser le groupe terroriste, qui a basculé dans la clandestinité tout en disposant d’importantes réserves, reste réelle.  M. Delattre a également exprimé ses préoccupations face à la mainmise du groupe terroriste Hay‘at Tahrir el-Cham sur la quasi-totalité de la zone de désescalade d’Edleb.  Il a appelé à une réflexion commune pour apporter une réponse coordonnée à cette menace, tout en préservant l’accord de cessez-le-feu agréé par la Russie et la Turquie.  La France tient également à souligner l’importance du cessez-le-feu national, a-t-il ajouté.

S’agissant de l’impératif de la protection des civils, du personnel humanitaire et médical, le représentant a rappelé que toutes les parties doivent respecter leurs obligations en vertu du droit international et que ces obligations ne sont pas négociables.  Il a également exigé la garantie d’un accès humanitaire immédiat, sûr, complet, sans entrave et durable sur l’ensemble du territoire syrien.  Il est inacceptable, a-t-il martelé, que le régime syrien continue d’entraver l’accès humanitaire dans la Ghouta orientale et le sud-ouest, pour punir les populations.  Il est urgent, a pressé le représentant, qu’un nouveau convoi humanitaire puisse être déployé au camp de Roukban « immédiatement ». 

M. Delattre en a profité pour rappeler que le retour chez eux des déplacés de Roukban doit se faire dans le respect du droit international humanitaire et être organisé en étroite coordination avec les Nations Unies.  De plus, il faut accroître la réponse humanitaire dans le nord-est du pays pour faire face à l’afflux de personnes déplacées, et la France, a-t-il affirmé, prend d’ores et déjà toute sa part à cet effort, des financements d’urgence ayant été débloqués à cet effet.  Le soutien aux populations syriennes et aux pays accueillant des réfugiés nécessite une mobilisation de tous et de tous les instants, a souligné le représentant. 

Dans ce contexte, une solution politique sur la base de la résolution 2254 et du Communiqué de Genève reste la condition préalable à la stabilisation durable de la Syrie et de la région, a poursuivi M. Delattre qui a exigé que tous les éléments de la feuille de route endossée il y a plus de trois ans par le Conseil de sécurité soient mis en œuvre sous l’égide des Nations Unies.  À ses yeux, le comité constitutionnel, pour autant qu’un accord sur sa composition et ses règles de fonctionnement soit trouvé, pourrait contribuer utilement au processus politique.

Notant que les principaux obstacles au retour des réfugiés sont d’ordre politique et sécuritaire, le représentant s’est dit préoccupé par les informations indiquant que les services de sécurité syriens arrêtent arbitrairement des réfugiés qui rentrent chez eux.  Dans les zones reconquises par le régime, ces pratiques sont à la fois en violation des droits de l’homme et, de surcroît, des accords de reddition.  Le représentant a rappelé la Russie à sa responsabilité de garante de ces accords.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a rappelé les propos de l’ancien Directeur du Musée du Louvre, André Perreault, selon lequel « chaque homme civilisé a deux parties: la sienne et la Syrie ».  Il a aussi convoqué Diderot qui disait: « la politique n’est pas une anecdote frivole mais une responsabilité ».  L’objectif de cette guerre, a poursuivi le représentant, est de pérenniser la colonisation israélienne sur les territoires occupés, y compris le plateau du Golan, et de détruire la Syrie.  La décision américaine de reconnaître la souveraineté d’Israël sur le Golan confirme les propos que nous avons tenus dès le début de la crise, a affirmé le représentant.  Les États-Unis et d’autres ont utilisé toutes les armes à leur disposition, y compris l’appui aux groupes terroristes et aux groupes radicaux, et le recours aux idéologies religieuses, pour parvenir à leur objectif.  Ils ont même fait appel aux combattants terroristes étrangers et manipulé l’aide humanitaire pour écorcher la crédibilité du Gouvernement syrien.  Mais l’objectif d’Israël et des autres gouvernements de détruire la Syrie est une « erreur monumentale » vouée à « un échec cuisant », a prévenu le représentant. 

Il a parlé de la question des personnes détenues depuis 1791 jours dans le camp de Roukban qui, a-t-il souligné, est géré par les Américains.  Le Gouvernement syrien a pris toutes les mesures nécessaires pour libérer ces personnes et dûment demandé aux États-Unis de démanteler le camp.  Nous appuyons, a dit le représentant, le travail de l’Envoyé spécial et notamment sur le retrait de la présence étrangère « illégale » du territoire syrien.  Le processus politique doit être mené par les Syriens, a martelé le représentant pour qui la discussion sur la Constitution doit se tenir sans ingérence étrangère. 

En réponse aux États-Unis, qui ont expliqué que le conflit syrien a commencé avec le meurtre par le Gouvernement syrien d’un jeune garçon de 13 ans, il y a neuf ans, le représentant a répondu que son gouvernement n’a tué ni brûlé le corps de ce jeune homme.  « C’est un mensonge », s’est-il emporté.  Quant à la demande du représentant américain d’autoriser un troisième convoi à Roukban, il a indiqué que l’ONU a pu voir que 80% des habitants du camp veulent partir.  Pourquoi dans ces conditions envoyer un convoi humanitaire?  Même le Croissant-Rouge veut partir, a dit le représentant.  La demande d’un troisième convoi est d’ailleurs contradictoire avec l’interdiction du Gouvernement américain de faire accoster les navires qui transportent l’aide humanitaire en Syrie.  À son homologue américain, il a demandé: où sont les combattants de Daech qui auraient fui les villes qu’ils tenaient?  Qui va leur demander des comptes?  Pourquoi ces combattants se réfugient dans les camps des américains?  « C’est la Syrie qui est la victime de ce conflit », a renchéri le représentant en reprenant les mots du Premier Ministre du Qatar selon lequel « 137 milliards de dollars ont été investis pour détruire la Syrie ».  « C’est un scandale! » a estimé le représentant. 

 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

De retour du Mali et du Burkina Faso, une délégation du Conseil de sécurité dresse un bilan de la situation sécuritaire au Sahel

8492e séance – matin
CS/13750

De retour du Mali et du Burkina Faso, une délégation du Conseil de sécurité dresse un bilan de la situation sécuritaire au Sahel

Tout juste de retour du Mali et du Burkina Faso, les délégations de la France, de l’Allemagne et de la Côte d’Ivoire ont, ce matin, informé les membres du Conseil de sécurité de leurs activités dans ces deux pays, où ils ont conjointement dirigé une mission entre le 21 et le 26 mars. 

Le représentant de la France, pays qui préside les travaux du Conseil ce mois-ci, a rappelé le triple objectif de cette mission.  Premièrement, témoigner un soutien à la mise en œuvre de l’Accord de paix et de réconciliation de 2015 au Mali.  Deuxièmement, évaluer l’état d’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S).  Troisièmement, mesurer la détérioration de la situation sécuritaire au Burkina Faso.

Lors de son premier segment, au Mali, la mission du Conseil a expliqué que la visite avait permis aux trois délégations de s’entretenir avec le Président du pays, M. Ibrahim Boubacar Keïta, son Premier Ministre, ainsi que des membres du gouvernement et des membres de la société civile.  Tous ont souligné le rôle crucial joué par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), dont les activités seront examinées lors d’une séance du Conseil le 29 mars.

Pour sa part, le Conseil a insisté sur la nécessité d’accélérer et de donner la priorité à la mise en œuvre de l’Accord de paix, ainsi qu’à la nécessité de briser le cycle de la violence qui sévit dans le centre du Mali depuis plusieurs mois maintenant.  Les membres du Conseil ont également encouragé la MINUSMA à poursuivre sa mission de protection des civils et à soutenir les efforts du Gouvernement sur le plan sécuritaire, a ajouté le délégué français.

Quant à la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S), son commandant, le général Hanana Ould Sidi, le Secrétaire permanent du G5 Sahel, M. Mamane Sidikou, ainsi que les Ministres des affaires étrangères du Burkina Faso et du Mali ont informé les membres du Conseil des efforts déployés pour l’opérationnaliser.  « La Force conjointe a pu mener trois opérations depuis le début de l’année 2019, malgré les retards imputables à l’attaque terroriste contre le quartier-général du G5 Sahel à Sévaré, perpétrée en juin 2018 », a précisé le représentant de la Côte d’Ivoire.

Les interlocuteurs du Conseil ont cependant fait ressortir, a-t-il ajouté, les difficultés liées aux dispositions de l’accord technique, en particulier des contraintes territoriales du soutien que la MINUSMA peut fournir à la Force conjointe.  « En conséquence, seuls deux des sept bataillons de la Force conjointe opérant sur le territoire malien peuvent en bénéficier », a précisé le représentant ivoirien, en recommandant une révision de l’accord technique, afin de mieux l’adapter aux réalités du terrain, afin de renforcer l’efficacité de la Force conjointe.

Rendu à Ouagadougou, le Conseil a eu une séance de travail avec les membres du Gouvernement burkinabé, qui ont exposé leurs priorités dans le cadre des activités censées impulser le développement économique et social dans l’espace géographique du G5 Sahel.  À cette occasion, les responsables gouvernementaux ont informé les membres de la délégation de leur volonté de veiller au respect des droits de l’homme et de conduire des enquêtes sur des violations présumées commises par les forces de défense et de sécurité.

Devant les « informations accablantes » portées à sa connaissance, le représentant de l’Allemagne a indiqué que le « message, c’est que le combat doit être mené dans le respect des droits de l’homme ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Biodiversité marine: les négociations pour un futur traité se poursuivent sur la question des ressources génétiques marines et de leur partage

Deuxième session,
20e & 21e séances plénières – matin & après-midi
MER/2094

Biodiversité marine: les négociations pour un futur traité se poursuivent sur la question des ressources génétiques marines et de leur partage

Après le démarrage, hier, de la deuxième session de négociation sur un futur traité relatif au droit de la mer, qui aura pour but « la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité dans les zones marines ne relevant pas des juridictions nationales », les discussions se sont poursuivies aujourd’hui sur l’un des quatre thèmes à l’étude: les ressources génétiques marines, y compris le partage des avantages.

Le Groupe de travail informel de la Conférence intergouvernementale chargé de cette question s’est penché sur plusieurs sections du Document établi par la Présidente de la Conférence pour faciliter les négociations.  Les États Membres ont indiqué leurs préférences par rapport aux différentes options proposées, soulevant des questions et, parfois, demandant des éclaircissements.

Le matin, la discussion portait sur la section intitulée « Partage des avantages », qui concerne l’utilisation des ressources génétiques marines de la haute mer.  Des divergences de vue ont émergé notamment par rapport à l’idée de définir des objectifs section par section au lieu de présenter les objectifs globaux du futur traité dans une section à part entière, au début du document. 

La base juridique du futur instrument a également fait l’objet de controverses car, si la plupart des pays défendent le principe du patrimoine commun de l’humanité lorsqu’il est question de la haute mer et de ses ressources génétiques, d’autres contestent son applicabilité.  Ainsi, la Fédération de Russie a-t-elle argué que le mandat de la Conférence intergouvernementale ne doit porter aucunement atteinte aux bases de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

Or, selon ce pays, appliquer la notion du patrimoine commun de l’humanité reviendrait à « rouvrir la Convention ».  Par conséquent, dès lors qu’on ne reconnaît pas les ressources génétiques marines comme faisant partie de ce patrimoine, il n’existe plus de base juridique pour parler de partage de leurs avantages sous forme pécuniaire, d’après la Russie qui estime donc que « ce partage doit se faire sur une base strictement volontaire et non pécuniaire ».

Prenant le contrepied, le Groupe des 77 et la Chine, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et d’autres délégations ont revendiqué le caractère non volontaire de ce partage et exigé que le futur accord couvre les avantages pécuniaires et non pécuniaires.  Leur contre-argument, était que même si la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est considérée comme la « Constitution des océans », ce traité est appelé à évoluer pour refléter l’évolution du droit international, de la science et de la technologie.

Dans l’après-midi, le Groupe de travail s’est focalisé sur les questions relatives au centre d’échange, aux droits de la propriété intellectuelle et, enfin, à la surveillance de l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Le Groupe a également brièvement abordé les points portant sur le champ d’application de l’accès aux ressources et le partage des avantages.

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux mercredi 27 mars, à partir de 10 heures.

CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE: (A/CONF.232/2019/L.1, A/CONF.232/2019/L.2, A/CONF.232/2019/1 et A/CONF.232/2019/INF.2)

Groupe de travail informel sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au « partage des avantages »: suite des travaux

Il faudrait un « régime simple et pratique » de partage des avantages, a tout d’abord plaidé le représentant de la Norvège, souhaitant que les connaissances sur les aires marines protégées soient mises à la disposition du plus grand nombre de pays.  Il a d’ailleurs insisté sur la responsabilité de partager les informations entre États parties, notamment par le biais de banques de données scientifiques communes.  Il a aussi mis l’accent sur l’intérêt de permettre aux pays en développement de participer aux croisières scientifiques, avant de réfuter l’idée du partage des avantages pécuniaires.

La délégation de la Chine a pour sa part pris position sur les « objectifs », au nombre de 10, énoncés dans cette section: ils sont acceptables, selon elle, mais y a-t-il vraiment lieu d’avoir une section qui leur soit consacrée dans cette partie du document?  Il aurait peut-être été préférable de regrouper les objectifs de l’ensemble du futur accord dans une partie globale, a commenté la délégation chinoise.  Idem pour les « approches et principes du partage des avantages », qui fait l’objet de la section suivante du chapitre.  Cette idée a été partagée par l’Australie, le Canada, le Saint Siège et l’Islande, entre autres.

Où qu’ils se trouvent dans le document, les objectifs du partage des avantages doivent être énoncés très clairement et doivent être mesurables, a estimé de son côté le Conseil international pour le droit de l’environnement, qui a mis l’accent sur l’aspect opérationnel du partage des avantages.  La portée de ce que couvrent « les avantages » est la question clef, selon la représentante qui a appelé à tenir compte des pays à capacités limitées comme les petits États insulaires en développement (PEID).  Le Conseil a indiqué avoir élaboré un document sur « une approche par niveau » qui traite des questions relatives aux modalités du partage des avantages des ressources génétiques marines et de leurs bénéficiaires.

La Chine et l’Australie ont été d’avis qu’il fallait mettre l’accent sur les avantages non pécuniaires, comme le transfert des techniques marines et la participation à des croisières scientifiques ou encore le partage des échantillons.  La Chine a donc proposé de restructurer cette partie du document en tenant compte des différentes formes de partage et de leurs modalités.  Le Canada et l’Australie ont également souligné que le futur accord devait souligner les obligations des États parties dans ce domaine.

De son côté, le représentant des Fidji a insisté sur le fait que cet instrument n’a pas pour vocation de créer un nouvel ordre mondial, mais qu’il faut également sortir du statu quo actuel, y compris dans le contexte plus large des objectifs de développement durable, et plus spécifiquement l’objectif 14.7.

Pour ce qui est du texte de la sous-section, le représentant des Fidji a préconisé de mettre en avant les spécificités des pays en développement et les circonstances particulières des PEID, un point de vue partagé par les représentants des Samoa, des États fédérés de Micronésie et des Tonga.  Il a soulevé la question de savoir qui vont être propriétaires des ressources génétiques marines et des aires marines protégées avant de pouvoir prendre des décisions sur les modalités de leur partage.

Le contexte international a changé en ce qui concerne le lien entre les plateaux continentaux et les ressources en haute mer, a fait remarquer la délégation de Cuba.  Ce sujet, a-t-elle ajouté, implique tous les pays.  Les actions qui se réalisent en haute mer ont donc des incidences qui relèvent des juridictions nationales, a expliqué la représentante pour justifier sa position.  Pour Cuba, la valeur ajoutée du futur accord figure dans la responsabilité commune du partage.  C’est pourquoi, pour l’instant, la délégation cubaine souhaite maintenir tous les principes de ce partage qui figurent dans le document.

Le Saint Siège a demandé des éclaircissements sur le concept de partage des avantages pécuniaires, notamment par rapport aux paiements et leurs modalités.  Quant aux avantages non pécuniaires, la délégation a estimé qu’ils devaient bénéficier à tous.  Elle a préconisé d’appliquer le principe du patrimoine commun de l’humanité comme base juridique pour orienter les négociations, un point de vue partagé par le Viet Nam, la République islamique d’Iran, la Thaïlande, le Népal et l’Érythrée.  La Colombie a estimé qu’on ne peut parler de conservation de la biodiversité marine si l’on n’accepte pas ce principe de patrimoine commun de l’humanité, qui justifie précisément le partage équitable des avantages découlant des ressources génétiques marines.  Cette approche est toutefois ancrée dans des valeurs morales, a fait observer le représentant de l’Islande en soulignant que ces valeurs ne sont pas forcément les mêmes pour tous les pays.

L’Indonésie a vu le principe de partage des avantages comme s’appliquant seulement aux États parties au futur accord, un partage qui se ferait de manière non volontaire et qui comprendrait les avantages pécuniaires et non pécuniaires, une position reprise par son homologue de l’Iran et d’autres.

Diamétralement opposée à ces positions, la Fédération de Russie a contesté l’applicabilité du principe du patrimoine commun de l’humanité comme base juridique du nouvel accord en rappelant que le mandat de la Conférence est de ne pas porter atteinte aux bases de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Or, en appliquant la notion du patrimoine commun de l’humanité cela reviendrait à « rouvrir la Convention ».  Par conséquent, si l’on ne reconnaît pas les ressources génétiques marines comme faisant partie de ce patrimoine, il n’y a pas de base juridique pour parler de partage de leurs avantages sous forme pécuniaire.  Ainsi, la Russie plaide pour un partage des avantages sur une base strictement volontaire et non pécuniaire.

Réagissant à cette interprétation, la représentante de la CARICOM, a estimé que même si l’on parle de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer comme étant « la Constitution des océans », ce document doit être en évolution, « un texte vivant », pour pouvoir refléter l’évolution du droit international, de la science et de la technologie.

Allant dans le même sens, le Groupe des 77 et la Chine a estimé que les avantages liés à l’utilisation des ressources génétiques marines doivent être plus que des avantages non pécuniaires et que leur partage ne saurait se faire uniquement sur une base volontaire.  « Cela ne nous suffit pas », a-t-il martelé.

L’océan au-delà des juridictions nationales représente un écosystème unique et il est difficile de concevoir sa subdivision en différentes zones, a considéré l’Érythrée, pays favorable à la création d’un fonds d’affectation spéciale pour ce qui est du partage équitable des avantages liés à l’utilisation des ressources génétiques marines.  Une position reprise par la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui a précisé que les avantages partagés ne visent pas un gain privé mais plutôt à disposer de ressources pour protéger tout l’écosystème marin, y compris de la haute mer.

Partisane d’un régime pragmatique qui facilite l’utilisation rationnelle des ressources génétiques marines et favorise le partage des avantages liés à ces ressources, la Nouvelle-Zélande a souligné qu’on ne connaît pas grand-chose encore sur ces ressources et que, par conséquent, le futur accord ne devrait pas entraver la recherche. 

Passant dans l’après-midi à d’autres questions, le Groupe de travail informel a abordé le sujet du centre d’échange décrit dans le document de base des négociations comme un « centre d’échange chargé de favoriser l’utilisation transparente des ressources génétiques marines, de diffuser des données et des informations scientifiques ainsi que des renseignements au sujet du renforcement des capacités et du transfert de techniques, et d’améliorer la coopération et la coordination ». 

Pour Singapour, ce centre d’échange doit être appréhendé comme un diffuseur d’informations, et de ce fait, il n’a pas besoin d’un fonds d’affectation spéciale, celui-ci pouvant être prévu ailleurs dans l’instrument pour couvrir d’autres besoins.  « Il faut effectivement prévoir le fonds d’affectation ailleurs », a renchéri le Canada qui préfère parler du centre comme d’un « dépositaire d’informations ».  Si le fonds d’affectation spéciale est créé, alors il faut bien en surveiller le fonctionnement, a suggéré le Conseil international du droit de l’environnement, une organisation de la société civile. 

Ces centres peuvent aussi servir de site de renforcement de capacités, a noté l’Union européenne, alors que l’Australie, bien que d’accord avec l’idée du centre, ne partage pas toutes les fonctions qui lui seraient dévolues.  Le Brésil, au nom d’un groupe de pays d’Amérique latine, a estimé que l’importance de ce centre vaut bien le chapitre spécifique qui lui sera consacré dans l’instrument. 

Il faut toutefois éviter de mettre la charrue avant les bœufs, a tempéré la délégation des États-Unis pour qui il faut d’abord négocier sur tous les chapitres avant de revenir sur le sujet du centre d’échange.  Il faut d’abord s’entendre sur le contenu de l’instrument, a acquiescé la Norvège, alors que la Suisse a insisté pour qu’il y ait un seul centre mondial. 

Le centre doit se focaliser sur la diffusion de l’information scientifique et le renforcement des capacités afin de ne pas entraîner de dépenses énormes, a prévenu le Japon.  En effet, « un centre de ce type nécessite des ressources humaines et financières importantes », a souligné la représente de l’organisation non gouvernementale (ONG) Deep Ocean Stewardship Initiative qui rêve d’une « plateforme mondiale en ligne qui concentre toutes les recherches scientifiques en haute mer ».  La République de Corée et la Fédération de Russie, pour leur part, sont d’avis que ce centre ne semble pas déterminant, puisque de nombreuses structures existent déjà avec des fonctions similaires à celles que l’on veut lui faire jouer.

Les délégations ont ensuite débattu des « droits de propriété intellectuelle ».  La première option du document des négociations prévoit que « les ressources génétiques marines auxquelles il est accédé sous le régime du présent instrument ne sont brevetables que lorsqu’elles sont modifiées par une intervention humaine aboutissant à un produit susceptible d’application industrielle ».  Cet avis a été partagé par le Groupe des 77 et la Chine qui souhaite tout de même des précisions sur les chevauchements entre cette option et les prescriptions et directives en vigueur au sein de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).  Le Sri Lanka s’est prononcé dans le même sens, en préconisant « un texte qui ne soit pas contradictoire avec les textes de l’OMPI ».  Au nom de la CARICOM, la Barbade dit être d’accord avec le libellé de cette première option, mais avec de légères modifications. 

La deuxième option prévue dispose que « les États parties appliquent le présent instrument d’une manière compatible avec les droits et obligations découlant des accords conclus en la matière sous les auspices de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle et de l’Organisation mondiale du commerce ».  La troisième option, qui prévoit de ne pas légiférer sur la question dans l’instrument, a rallié la délégation de l’UE qui a argué que les questions de droits de la propriété intellectuelle sont déjà régies par l’OMPI et l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  De même pour les États-Unis selon lesquels le futur traité risque de saper les régimes de droits de propriété intellectuelle déjà en vigueur.

Des pays tels que l’Australie, le Japon, la République de Corée, la Fédération de Russie, le Canada et Singapour ont indiqué que des discussions sont en cours à l’OMPI et à l’OMC et qu’il vaut donc mieux ne pas se prononcer dans cet instrument.  Ce n’est pas la position de la République islamique d’Iran qui a insisté pour que ces questions soient débattues dans le cadre du futur instrument, puisque l’OMPI n’est pas compétente pour des questions hors des juridictions nationales. 

L’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné l’ironie de la situation qui veut que les questions de ressources génétiques ne soient traitées ni par l’OMC ni par l’OMPI qui se rejettent mutuellement la compétence.  Il faut donc que nous nous y attelons, a-t-elle estimé.  La représentante des Fidji, parlant au nom des PEID, a aussi tiré la sonnette d’alarme en disant qu’alors que l’on négocie, des ressources génétiques marines sont déjà brevetées, alors même que l’on devrait les considérer comme faisant partie du patrimoine de l’humanité.  Elle a aussi souligné que l’OMPI semble débordé par le poids des tâches. 

Les délégations ont aussi planché sur « la surveillance de l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ».  L’une des options prévues par le document de base veut que « l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale fasse l’objet d’une surveillance dont les modalités sont définies dans la présente partie ».  Cette option n’a pas reçu l’agrément du Japon qui a mis en garde quant aux dépenses énormes qui découleraient de cette mesure.  Celle-ci contribuerait en plus à « décourager les chercheurs », a-t-il prédit.  Obliger des scientifiques à faire des transmissions récurrentes de données peut s’avérer couteux, ont précisé les États-Unis, avant que la République de Corée ne dise clairement son opposition à toute surveillance.

Cependant, la Turquie a milité pour une telle surveillance.  Il est important, selon ce pays, d’avoir un organe scientifique chargé de coordonner ces activités.  Même son de cloche du côté de la Papouasie-Nouvelle-Guinée qui a insisté sur la traçabilité qu’assurerait un organe de surveillance.  Adoptant une approche médiane, la Chine a opté pour une méthode de surveillance « plus légère ».  Il ne doit pas y avoir de surveillance de la recherche scientifique au-delà de ce que prévoit la Convention des Nations Unie sur le droit de la mer en la matière, a-t-elle argué. 

Le Groupe de travail a ensuite brièvement abordé les points portant sur le champ d’application et de l’accès aux ressources et le partage des avantages.  Globalement, la plupart des délégations ont marqué leur faveur pour que « la présente partie s’applique aux ressources génétiques marines de la haute mer et de la Zone ».  La Turquie est revenue sur son appel lancé hier qui insiste sur une définition préalable du concept de haute mer. 

Par ailleurs, au sujet du « Champ d’application temporel », certains pays ont voulu que l’instrument s’applique à toutes les ressources génétiques marines de la haute mer, alors que pour d’autres, l’option I est de mise, c’est-à-dire que « le présent instrument s’applique aux ressources génétiques marines recueillies après son entrée en vigueur ».  La Barbade a dit préférer qu’aucune indication temporelle ne soit mentionnée dans l’instrument.  L’UE a tout de même précisé que les activités de pêches ne doivent pas être prises en compte dans ce traité.  Une préoccupation partagée par la Fédération de Russie pour qui il faut faire un distinguo entre le poisson comme produit de consommation et le poisson vu comme une ressource génétique. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.