En cours au Siège de l'ONU

Le Comité spécial de la décolonisation appelle à des mesures pour une meilleure organisation des futures consultations sur la souveraineté de la Nouvelle-Calédonie

Session de 2019 
11e & 12e séances – matin & après-midi
AG/COL/3340

Le Comité spécial de la décolonisation appelle à des mesures pour une meilleure organisation des futures consultations sur la souveraineté de la Nouvelle-Calédonie

Le Comité spécial des 24 a achevé les travaux de sa session 2019 avec l’adoption sans vote des projets de résolution sur la Nouvelle-Calédonie et de quatre autres qui contiennent des demandes faites aux Puissances administrantes de la Polynésie française, de Guam, des Îles Turques et Caïques et des Îles vierges britanniques.

S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, le Comité spécial recommande à l’Assemblée générale de se féliciter du déroulement, le 4 novembre 2018, du référendum sur l’autodétermination et de prendre note de ses résultats, à savoir 56,67 pour cent de voix contre la pleine souveraineté et l’indépendance et 43,33 pour cent de voix en faveur des dispositions de l’Accord de Nouméa relatives à l’organisation de référendums supplémentaires sur l’autodétermination.

Sur ce point, il considère que des mesures appropriées pour l’organisation des consultations futures sur l’accession à la pleine souveraineté, y compris l’établissement de listes électorales « justes, régulières, crédibles et transparentes », sont indispensables à la réalisation d’un acte « libre, équitable et authentique » d’autodétermination.

Le Comité se félicite, à cet égard, du dialogue politique de haut niveau constant mené par les parties dans le cadre du Comité des signataires de l’Accord de Nouméa et des engagements qu’ils ont pris « de bonne foi » pour définir les modalités de réalisation d’un acte « incontestable » d’autodétermination, notamment l’établissement d’une liste électorale.

Cette dernière réunion a aussi été marquée par deux interruptions de séance pour permettre aux membres du Comité de s’accorder sur l’adoption du texte sur la Polynésie française, la Côte d’Ivoire ayant exprimé des réserves au sujet du paragraphe 9 par lequel le Comité spécial recommande à l’Assemblée de prier « de nouveau le Secrétaire général de continuer de lui faire part de tout fait nouveau sur les retombées environnementales, écologiques, sanitaires et autres des essais nucléaires pratiqués pendant 30 ans en Polynésie française ».

Tout en reconnaissant que les effets des essais nucléaires méritent l’attention et la solidarité de la communauté internationale, la délégation ivoirienne a estimé qu’il n’est « point besoin de spéculer sur la question, mais d’encourager les initiatives allant dans le sens de juguler ses effets ».  Il a salué les efforts initiés par la France sur cette question qui, a-t-il souligné, est de nature scientifique.  La Tunisie a insisté sur l’importance qu’il y a à préserver le consensus sur cette question et de trouver un compromis, notant par ailleurs qu’un Comité d’indemnisation des victimes a été créé en 2010 et qu’une autre structure a été lancée en 2017.

Le Comité a fini par adopter une version oralement amendée du texte qui, a expliqué la Présidente, contient dorénavant un nouveau paragraphe par lequel il recommande à l’Assemblée de prendre note des efforts déployés par la Puissance administrante concernant l’indemnisation des victimes et de l’encourager à prendre des mesures supplémentaires à cet effet.  Le texte a aussi été amendé pour refléter l’invitation du Comité spécial à se rendre dans le territoire.

Par le projet de résolution, le Comité recommande à l’Assemblée de prier la Puissance administrante d’intensifier son dialogue avec la Polynésie française afin de favoriser la mise en place rapide d’un processus d’autodétermination « équitable et effectif », dans le cadre duquel seront arrêtés le calendrier et les modalités de l’adoption d’un acte d’autodétermination.

La Puissance administrante devrait aussi être exhortée à garantir la souveraineté permanente du peuple de la Polynésie française sur ses ressources naturelles, y compris les ressources marines et les minéraux sous-marins.

Le Comité a également amendé oralement son projet de résolution sur la question de Guam dans lequel le territoire et la Puissance administrante, à savoir les États-Unis, seraient priés de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l’environnement du territoire et le préserver de toute dégradation et des effets de la militarisation.  Si elle adopte le texte, l’Assemblée prierait aussi le Secrétaire général de lui rendre compte de l’impact environnemental des activités militaires de la Puissance administrante dans le territoire.

Les États-Unis seraient appelés à continuer à transférer des terres aux propriétaires originels du territoire et de prendre toutes les mesures nécessaires pour répondre aux préoccupations du gouvernement de Guam concernant la question de l’immigration.  La Puissance administrante et le Gouvernement de Guam doivent entamer des négociations sur l’autodétermination, recommande encore le Comité spécial à l’Assemblée générale.

De son côté, le Royaume-Uni, en tant que Puissance administrante des Îles vierges britanniques et des Îles Turques et Caïques, devrait se voir engagé à apporter à ces deux territoires toute l’assistance nécessaire au lendemain des ouragans Irma et Maria de 2017.

L’Assemblée générale devrait, selon le Comité spécial, souligner qu’il importe de mettre en place, dans les Îles Turques et Caïques, une constitution qui reflète les aspirations et les vœux de sa population, et qu’il importe que l’ensemble des groupes et des parties intéressées participent au débat engagé sur la réforme constitutionnelle.

L’Assemblée devrait également prendre note des appels répétés de la Communauté des Caraïbes et du Mouvement des pays non alignés, en faveur de l’établissement d’un gouvernement du territoire élu démocratiquement et du plein rétablissement de la démocratie dans les Îles Turques et Caïques, selon les modalités fixées par la population.

Pour ce qui est des Îles Vierge britanniques, il importe, devrait dire l’Assemblée générale, de poursuivre les débats sur les questions d’ordre constitutionnel afin d’accorder au gouvernement du territoire de plus grandes responsabilités dans la mise en œuvre effective de la Constitution de 2007.

Dans ses remarques de clôture, la Présidente du Comité spécial, Mme Keisha Aniya McGuire, de la Grenade, a déclaré qu’à un an de la fin de la troisième Décennie internationale sur la décolonisation, il ne faut ménager aucun effort pour faire avancer cette cause.

À la suite de cette déclaration, la Syrie a demandé à la Présidente de préciser ses propos au sujet de l’amendement du paragraphe 8 du programme de travail.  La Présidente l’a renvoyée au procès-verbal de la session, avant que la Syrie ne rappelle « son droit de s’exprimer et d’exiger une réponse ».  Tout amendement ou ajout à un libellé, a-t-elle argué, doit être transmis aux délégations avant que le Comité ne se prononce.  Or dans ce cas, cela n’a pas été fait.  La Syrie a critiqué la manière dont cet amendement a été adopté.  Nous ne reconnaissons que la version de février 2019 du programme de travail, a-t-elle prévenu.

Selon la pratique établie, le projet de résolution sur l’appui accordé aux territoires non autonomes par les agences spécialisées et les institutions internationales associées aux Nations Unies sera soumis au Conseil économique et social (ECOSOC) à la session prévue les 23 et 24 juillet sur les questions de gestion et de coordination.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée ouvre, dans la discorde, la voie à des restrictions sur le commerce de « biens » utilisés pour infliger la peine capitale et la torture

Soixante-treizième session,
95e & 96e séances plénières - Matin & après-midi
AG/12160

L’Assemblée ouvre, dans la discorde, la voie à des restrictions sur le commerce de « biens » utilisés pour infliger la peine capitale et la torture

La poursuite du débat de l’Assemblée générale sur la responsabilité de l’État de protéger les populations contre les crimes de masse a été reléguée au second plan, aujourd’hui, par l’adoption d’une résolution très contestée, ouvrant la voie à des restrictions sur le commerce international d’instruments utilisés pour infliger la peine capitale et la torture.  De nombreux États Membres ont dénoncé l’absence de recherche du consensus lors des négociations, l’amalgame que fait le texte entre la pratique autorisée de la peine de mort et l’usage illégal de la torture, ainsi que sa remise en cause du principe de libre-échange.

Adoptée à l’issue d’un vote serré, par 81 voix pour, 20 voix contre et 44 abstentions, la résolution A/73/L.94 prie le Secrétaire général de solliciter les États Membres, en vue de réfléchir à l’établissement de normes internationales concernant l’importation, l’exportation et le transfert de biens utilisés pour infliger la peine capitale et la torture.  M. António Guterres sera chargé de présenter à l’Assemblée un rapport sur l’état de ces réflexions, à la prochaine session.

Qu’il s’agisse des « chambres à gaz mobiles » ou des « ceintures capables d’infliger des décharges électriques », les instruments de torture sont proprement « inhumains », a dénoncé la Roumanie qui, au nom de l’Union européenne, présentait la résolution.  C’est la raison pour laquelle la torture est illégale du point de vue du droit international, a rappelé le pays, précisant que 166 États ont ratifié à ce jour la Convention des Nations Unies contre la torture, qui engage les parties à prendre des mesures pour éviter que de tels actes ne soient commis sur leur territoire.  Pour éradiquer véritablement cette pratique, il convient maintenant de prendre des mesures contre le commerce des instruments de torture, a estimé la Roumanie.  La résolution, a-t-elle souligné, ne comporte « aucun jugement de valeur sur la peine de mort ».

Le texte prie également le Secrétaire général de créer, sur la base de son futur rapport, un groupe d’experts gouvernementaux pour examiner à partir de 2020 la possibilité de définir des normes internationales communes, les biens auxquels elles s’appliqueraient et les paramètres de leur définition.  M. Guterres devra soumettre à l’Assemblée le futur rapport du groupe d’experts à la soixante-quinzième session.  Les activités découlant de l’application de la résolution seront financées par des contributions volontaires.

L’adoption du texte a provoqué l’ire de nombreuses délégations, qui ont dénoncé la façon dont avaient été conduites les négociations.  

Ce projet de résolution n’a fait l’objet que de trois réunions informelles, s’est notamment plaint Singapour, accusant les auteurs du texte d’avoir précipité son adoption pour éviter de travailler avec l’ensemble des États Membres.  Les coauteurs ont tout simplement refusé le dialogue, a renchéri le Japon.  Ces méthodes de négociation « sans souplesse » nous ont empêché de proposer un amendement consensuel pour refléter la pluralité des positions des États Membres, a regretté l’Arabie saoudite, fustigeant le « manque de clarté » et les « ambiguïtés » d’un texte « élaboré sans logique ni professionnalisme ».  En conséquence, beaucoup d’États ne comprennent toujours pas le projet, a noté la Chine, qui a voté contre, avant d’ajouter: « Ce n’est pas constructif! » 

Le Soudan et la Malaisie ont déploré la façon dont les coauteurs ont contourné les grandes commissions de l’Assemblée, y compris la Troisième chargée des affaires sociales, humanitaires et culturelles.  « C’est un précédent grave », a jugé l’Égypte, notant que le Conseil des droits de l’homme a également été écarté.  De plus, les courtes négociations informelles se sont déroulées en l’absence d’experts du droit du commerce, s’est étonnée l’Indonésie, qui a condamné la tendance actuelle à saper le multilatéralisme dans les négociations.  « Le consensus n’est plus la norme et les résolutions servent davantage à opposer qu’à délibérer », a regretté le pays dans une position partagée par le Viet Nam, le Pakistan, la Libye, Israël, l’Inde, l’Algérie et le Myanmar.

Sur le fond, de nombreuses délégations ont jugé inacceptable la formulation qui concourrait, selon elles, à amalgamer peine de mort et torture. 

On met sur un pied d’égalité la peine capitale, qui ne fait pas l’objet d’un consensus en termes de droit international, et la torture, qui est, elle, clairement illégale, ont ainsi reproché Singapour, le Soudan, les États-Unis, la Libye et l’Iraq.  La résolution crée même un lien artificiel entre la pratique de la peine de mort et la torture, a renchéri l’Iran.  Or, jusqu’à preuve du contraire, la peine de mort ne va pas à l’encontre de la Convention contre la torture, a rappelé l’Arabie saoudite.  Aucun autre accord international existant n’apparente la peine de mort à une forme de torture, a précisé le Japon.  L’utilisation de la peine capitale est même un droit discrétionnaire dont dispose chaque État, a estimé l’Égypte. 

Tout cela s’apparente plutôt à une tentative de certains États de forcer les autres à supprimer la peine de mort, au mépris de la diversité culturelle, a dénoncé la Chine.  De fait, le groupe d’experts proposé par la résolution sera probablement non représentatif de cette diversité, a jugé la Jamaïque.  L’inclusion de la peine capitale dans ce texte est tout simplement inacceptable, ont à leur tour tranché l’Inde et le Viet Nam.

La volonté du texte d’imposer à terme des restrictions au commerce d’instruments utilisés pour infliger la torture n’a pas davantage fait l’unanimité. 

D’abord, « n’importe quel objet peut être utilisé pour torturer », a noté la Malaisie.  Le texte cherche carrément à faire obstacle au commerce international et à saper le système d’échange multilatéral, a dénoncé la Chine.  « On ne fixe pas des normes internationales en les imposant de la sorte », s’est impatienté Singapour, soulignant, aux côtés de la Libye, qu’il n’existait aucune preuve du lien entre la hausse du commerce international et celle de la torture.  Jusqu’à preuve du contraire, le commerce international semble plutôt favoriser l’essor des droits de l’homme, a noté le Pakistan.  De telles restrictions ouvriraient la voie à l’instrumentalisation du commerce international à des fins politiques, ont mis en garde l’Égypte et Israël.  Toute tentative de réguler le commerce international en invoquant les droits de l’homme est dangereuse, est même allé jusqu’à dire le Myanmar.  Quant aux États-Unis, ils ont tout simplement refusé d’accepter quelque directive que ce soit de l’Assemblée générale en matière de commerce. 

Plusieurs membres de l’Alliance pour un commerce sans torture se sont en revanche félicités de l’adoption du texte, qui permettra, selon Cabo Verde, de mettre véritablement un terme à la torture.  Rédigée de manière « équilibrée et transparente », cette résolution pourra être utilisée dans l’élaboration des futurs instruments internationaux contre la torture, a ajouté la Roumanie.  Quant aux négociations, elles se sont bien déroulées dans le plein respect des normes internationales, a estimé la Mongolie.  De même, sur le fond, le texte fait bien la distinction entre, d’un côté, la peine de mort et, de l’autre, la torture, ont affirmé l’Australie et l’Argentine.

Par ailleurs, l’Assemblée a adopté à l’unanimité la résolution A/73/L.95, dans laquelle elle décide de marquer le vingt-cinquième anniversaire de la Conférence internationale du Caire sur la population et le développement par une réunion plénière de haut niveau d’une demi-journée, qui aura lieu l’après-midi du 16 juillet prochain.

L’Égypte, qui était à l’initiative du texte avec le Canada, a salué à cette occasion le Programme d’action adopté en 1994 par 179 États à l’issue de la Conférence du Caire et prolongé en 2010, qui a consacré le lien entre population et développement.  « La réunion plénière de haut niveau sera une occasion précieuse d’échanger des points de vue et enseignements tirés de l’expérience pour continuer à appliquer les résultats de la Conférence », a précisé l’Égypte, appelant les États Membres et les acteurs de la société civile à participer activement.  La Fédération de Russie, qui s’est rangée au consensus, a toutefois estimé que le texte ne devait pas servir de précédent pour inviter davantage d’ONG à l’Assemblée.

D’autre part, l’Assemblée a adopté à l’unanimité la résolution A/73/L.88 sur le « Renforcement de la coopération internationale en matière d’aide aux victimes du terrorisme », dans laquelle elle demande à tous les États Membres d’élaborer des plans complets d’assistance aux victimes du terrorisme afin de répondre à leurs besoins immédiats et à ceux de leur famille en matière de réparation et de réadaptation.

L’Afghanistan, à l’initiative du texte, a appelé les États Membres à étudier les incidences du terrorisme sur les femmes et les enfants et à consulter davantage les organisations féminines pour l’élaboration de leurs plans d’aide aux victimes.  Le texte demande aussi au Bureau de lutte contre le terrorisme de continuer de mieux coordonner et harmoniser l’action que mènent les différentes entités signataires du Pacte mondial de coordination contre le terrorisme, en vue de faire davantage connaître les problèmes des victimes.

Nous souhaitons nous distancier des activités menées par le Bureau de lutte contre le terrorisme, a noté la Syrie, qui s’est pourtant jointe au consensus.  Elle a estimé que les travaux du Bureau vont à l’encontre du principe de « transparence et de neutralité » de l’ONU.  Nous avons perdu des dizaines de citoyens à cause des groupes terroristes sans jamais bénéficier d’aucun appui technique ni financier de la part des Nations Unies, dans notre lutte contre le terrorisme.  Au contraire, a regretté la Syrie, nous faisons l’objet de mesures économique coercitives de la part d’États qui, eux, se rangent du côté des terroristes.

Cette résolution est globale, « mais certains aspects sont encore à prendre avec des pincettes », a estimé, à son tour, la Fédération de Russie. L’Espagne, qui s’est enorgueillie de son « système intégral » de protection des victimes du terrorisme, s’est dite prête à partager son expérience avec les autres États Membres.

L’Assemblée a également achevé le débat tenu hier sur la responsabilité de protéger (« R2P ») en entendant les interventions de 25 délégations qui ont mis en avant l’importance d’une telle prévention, tout en prévenant des écueils à éviter.  Elles ont souligné notamment le rôle des organisations régionales et sous-régionales dans la prévention des « crimes de masse », l’importance de la participation des femmes aux processus de paix, la nécessité de protéger partout les civils et, enfin, l’importance des garanties de non-répétition pour éviter que ces crimes ne puissent se reproduire.

En même temps, de sérieuses réserves ont été émises par la République islamique d’Iran, Cuba et l’Afrique du Sud par rapport à l’engouement de la communauté internationale pour ce principe relativement nouveau qui, à leurs yeux, reste extrêmement ambigu et ne fait pas l’objet d’un consensus.  Pour l’Iran, il est prématuré de débattre des recommandations du Secrétaire général sur ce concept dans la mesure où il n’existe pas de consensus sur son interprétation, que ce soit sur le principe même ou sur sa portée.

C’est un dialogue interactif informel qui est nécessaire pour parvenir à un consensus à propos de ce concept « très controversé », a estimé le représentant iranien, appuyé en cela par son homologue de Cuba qui a, elle aussi, souligné que le principe de la R2P « est loin de faire l’objet d’un accord ».  Dès lors, elle ne comprend pas comment on pourrait parler du « renforcement » de ce principe sans consensus au préalable sur sa portée et sa signification.  Le terme même de « crimes atroces » ne fait pas partie des quatre catégories de crimes visés aux paragraphes 138 et 139 du Document final de 2005, a-t-elle aussi fait remarquer, lui reprochant d’être un terme ambigu pouvant être utilisé à des fins politiques.

D’un point de vue juridique, Israël a défendu l’idée d’appliquer le principe de la R2P dans le cadre des doctrines existantes et a été d’avis qu’il ne créait pas en soit de nouvelles responsabilités ou obligations.  De plus, Israël a appelé à tenir compte, dans le débat sur cette question, du rôle des acteurs non étatiques et des groupes terroristes.

Si toutes les délégations qui ont pris la parole aujourd’hui ont réaffirmé leur détermination à lutter contre les crimes de génocide et autres crimes, et à assurer la protection des civils, elles ont aussi reconnu que la responsabilité de prévention de ces crimes incombait en premier chef aux États souverains.  Si la communauté internationale peut intervenir au cas par cas, comme l’a rappelé l’Iran, ce doit être toujours par le truchement des Nations Unies et uniquement à la requête du pays concerné.  Seul le Conseil de sécurité peut utiliser les interventions au titre de la R2P et cela ne doit se faire qu’en dernière instance, a renchérit le représentant iranien.  Selon Cuba, seule la dignité humaine peut servir de référentiel « impartial » pour justifier les interventions au titre de ce principe.

L’Iran a d’ailleurs souligné que l’application en pratique de la R2P n’avait pas fait la preuve de son impartialité: tout comme Cuba, il a dénoncé la pratique du « deux poids, deux mesures ».  Même son de cloche chez l’Afrique du Sud qui a reproché à la R2P d’avoir été invoquée pour servir « les intérêts étroits de ceux qui veulent interférer dans les affaires internes d’autres États ».  

De nombreux intervenants ont notamment expliqué que la responsabilité de protéger pouvait servir de « prétexte pour l’intervention humanitaire », risquant ainsi d’ouvrir la voie à l’ingérence étrangère dans les affaires internes d’un pays allant, avec des motivations politiques, jusqu’au changement de régime.

Les États Membres devraient d’ailleurs cesser de vendre des armes à des régions volatiles, a fustigé le représentant de l’Iran, pointant du doigt l’hypocrisie de certains « chantres de la responsabilité de protéger ».

Si on veut tuer une idée, il suffit de renoncer au consensus et de mettre cette idée aux voix, a affirmé la Fédération de Russie.  C’est ce qui est en train de se produire avec la R2P, a déploré le pays, estimant que les multiples interprétations du principe en avaient dilué le contenu.  De même, le rapport du Secrétaire général ne reflète ni l’ensemble des positions des États Membres à ce sujet, ni les principaux points de désaccord qui devraient être justement débattus dans cette enceinte, a-t-il regretté.

Sur ce qui est fait sur le plan national pour mettre en œuvre ladite responsabilité, les États-Unis ont mentionné l’adoption d’une loi pour prévenir les atrocités de masse, basée sur des mécanismes d’alerte précoce.  Ce travail de collecte des données a notamment permis, en 2017, d’alerter rapidement sur le sort subi par les Rohingya au Myanmar et d’agir promptement pour les protéger, s’est enorgueilli le pays, ajoutant que les données ainsi collectées permettraient également de traduire les auteurs de crimes en justice.

Enfin, au niveau du système des Nations Unies, la nouvelle Conseillère spéciale pour la responsabilité de protéger a reçu le soutien de délégations telles que l’Argentine, l’Afrique du Sud et Israël.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) avec deux priorités stratégiques

8568e séance – matin 
CS/13867

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) avec deux priorités stratégiques

Ce matin, le Conseil de sécurité a décidé, à l’unanimité, de proroger, pour un an, le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), soit jusqu’au 30 juin 2020.  Pour la France, délégation porte-plume de la résolution 2480 (2019), cette décision est « un message ferme » qui souligne la nécessité de progrès urgents dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  La délégation malienne a d’ailleurs assuré de la volonté de son gouvernement de poursuivre cette mise en œuvre, les parties travaillant actuellement sur une nouvelle feuille de route.

La Mission, selon la résolution, est autorisée à utiliser tous les moyens nécessaires pour accomplir son mandat.  Sa principale priorité stratégique demeure d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix, par le Gouvernement, les groupes armés ainsi que par d’autres parties prenantes maliennes. 

Le Conseil a d’ailleurs décidé que les effectifs de la MINUSMA resteront au même niveau (au maximum 13 289 militaires et 1 920 policiers).  À ce propos, la République dominicaine a regretté la diminution du nombre des membres féminins au sein de la Mission.

Sa seconde priorité stratégique concerne plus particulièrement le centre du Mali.  La Mission doit en effet faciliter l’application d’une stratégie globale dirigée sur le plan politique par le Mali afin de protéger les civils, de réduire les violences intercommunautaires et de rétablir l’autorité et la présence de l’État ainsi que les services sociaux de base dans le centre du pays.  Le texte détaille ensuite les « tâches prioritaires » comme l’appui à la stabilisation et au rétablissement de l’autorité de l’État dans le centre du pays et la protection des civils.

Comme « autres tâches », il mentionne les projets à effet rapide et la « coopération avec les comités des sanctions ».  À ce propos, le texte souligne que les personnes ou entités inscrites sur la Liste relative aux sanctions imposées par la résolution 2374 (2017) ne bénéficieront d’aucun appui financier, opérationnel ou logistique de la part des entités des Nations Unies déployées au Mali, et ce, jusqu’à leur radiation de la Liste. 

Les trois membres africains du Conseil de sécurité (Afrique du Sud, Côte d’Ivoire et Guinée équatoriale) ont exprimé leurs préoccupations quant à l’approche adoptée par la résolution au sujet des sanctions, craignant qu’il y ait des conséquences inattendues sur les processus politiques.  Les trois délégations ont également attiré l’attention sur la nécessité de respecter la procédure du Comité des sanctions.  Celles-ci, a prévenu la Fédération de Russie, doivent être appliquées avec prudence par le Conseil de sécurité, notamment après avis d’experts. 

S’agissant des obligations découlant du droit international, le Conseil exhorte les autorités maliennes à amener tous les auteurs de crimes impliquant des violations des droits de la personne et atteintes à ces droits et des violations du droit international humanitaire, y compris des violences sexuelles et fondées sur le genre, à répondre de leurs actes devant la justice sans délai.  Le Conseil note que les autorités maliennes continuent de coopérer avec la Cour pénale internationale (CPI), conformément aux obligations souscrites par le Mali au titre du Statut de Rome, pour les questions relevant de la compétence de la Cour.  « Il s’agit d’un point absolument essentiel sur le chemin vers la stabilité durable », a estimé la France, tandis que les États-Unis ont tenu à rappeler qu’ils ne sont pas partie au Statut de Rome. 

L’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et la Guinée équatoriale ont aussi exprimé leurs inquiétudes de voir d’ores et déjà évoquées, dans la résolution, les questions concernant la stratégie de transition et de retrait de la MINUSMA, alors même que la situation au Mali est encore instable.  Selon les trois membres africains du Conseil, les discussions sur la transition et les mandats des opérations de maintien de la paix doivent se faire à l’aune d’une « évaluation factuelle et approfondie » des conditions politiques et sécuritaires sur le terrain.  De surcroît, ont-ils argué, de telles discussions ne doivent être envisagées que lorsque les circonstances sur le terrain connaissent une amélioration substantielle.

De leur côté, les États-Unis se sont dits « satisfaits » que la résolution prévoie l’élaboration par la MINUSMA d’un plan de transition pour un transfert progressif des responsabilités au Gouvernement malien. 

Dans l’ensemble les délégations ont salué le fait que cette résolution donne à la MINUSMA un mandat fort, pour lui permettre de travailler efficacement dans le contexte actuel de la situation sécuritaire au Mali.  La résolution permettra « sans doute » de faire des progrès dans le domaine politique, a résumé le Koweït en espérant notamment qu’elle apporte une solution aux nombreux problèmes, notamment sur le plan de la sécurité, dans le centre du Mali.  Les États-Unis ont toutefois rappelé qu’il revient en premier lieu au Gouvernement malien d’assurer la sécurité dans cette région. 

La République dominicaine et l’Allemagne ont, pour leur part, regretté que la résolution ne mentionne pas l’impact des changements climatiques sur la stabilité et la sécurité au Mali, « l’un des grands défis auxquels le Mali fait face » selon la première délégation, « des défis que la communauté internationale doit relever collectivement et urgemment » selon la deuxième.

Enfin, la Fédération de Russie n’a pas apprécié la mention, dans la résolution, des initiatives prises par le Secrétaire général en vue d’instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Il a estimé, comme il l’a fait pendant les consultations, que cette question ne devait pas figurer dans le texte puisqu’elle fait toujours l’objet de discussions, avant d’appeler à des « mesures conséquentes pour éviter des abus de la part des délégations porte-plume ». 

LA SITUATION AU MALI (S/2019/454)

Texte du projet de résolution (S/2019/532)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant l’ensemble de ses résolutions, des déclarations de sa présidence et de ses déclarations à la presse concernant la situation au Mali,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’unité et à l’intégrité territoriale du Mali, et insistant sur le fait que c’est avant tout aux autorités maliennes qu’il incombe d’assurer la stabilité, la sécurité et la protection des civils sur l’ensemble du territoire malien,

Réaffirmant les principes fondamentaux du maintien de la paix, y compris le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat, et conscient que le mandat de chaque mission de maintien de la paix est déterminé en fonction des besoins et de la situation du pays concerné, et rappelant la déclaration de son Président en date du 14 mai 2018 (S/PRST/2018/10),

Se déclarant vivement préoccupé par la détérioration constante des conditions de sécurité et de la situation humanitaire au Mali, en raison notamment du nombre élevé d’attaques asymétriques que continuent de perpétrer des groupes terroristes dans le nord du Mali et de l’escalade de la violence intercommunautaire dans le centre du pays, qui ont fait nombre de victimes innocentes, entraîné des déplacements massifs, laissé des populations dans une situation où elles ont cruellement besoin d’une assistance et privé de nombreux enfants d’accès à l’enseignement du fait de la fermeture d’écoles, et tout aussi préoccupé par le fait que la situation au Mali a des répercussions néfastes sur les pays voisins et la région du Sahel,

Insistant sur le fait que la sécurité et la stabilité au Mali sont inextricablement liées à celles du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, ainsi qu’à la situation en Libye et en Afrique du Nord,

Condamnant fermement les attaques répétées visant des civils, des représentants des institutions locales, régionales et centrales, ainsi que les forces de sécurité nationales et internationales et celles des Nations Unies, y compris les Forces de défense et de sécurité maliennes, la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (Force conjointe du G5 Sahel), la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), les forces françaises et la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM Mali),

Soulignant que l’instauration d’une paix et d’une sécurité durables dans la région du Sahel passe nécessairement par des efforts conjugués sur le plan politique et dans les domaines de la sécurité et du développement, au profit de toutes les régions du Mali, et par la mise en œuvre intégrale, effective et sans exclusive de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (« l’Accord »), qui permette d’associer toutes les parties, notamment tous les acteurs maliens favorables au processus de paix, et de garantir la participation entière, effective et véritable des femmes et des jeunes,

Constatant que davantage de progrès ont été accomplis pendant les neuf derniers mois qu’au cours des premières années qui ont suivi la signature de l’Accord, période qui a été marquée par la lenteur de la mise en œuvre, notant qu’un certain degré de volonté politique associé à des pressions internationales, notamment la perspective de sanctions, ont joué un rôle important dans l’obtention de ces résultats positifs, et soulignant que la MINUSMA, de même que les autres forces de sécurité mentionnées dans la résolution 2423 (2018), contribue de façon notable à la mise en œuvre de l’Accord et à la stabilisation au Mali,

Exprimant sa vive impatience face aux retards persistants pris par les parties dans l’application intégrale de dispositions clefs de l’Accord, regrettant la stagnation récente du processus de mise en œuvre mentionnée par l’Observateur indépendant dans son rapport d’avril 2019, notant que ces retards prolongés contribuent à créer un vide politique et sécuritaire qui compromet la stabilité et le développement du Mali ainsi que la viabilité de l’Accord, et soulignant qu’il importe que les parties s’emploient davantage à s’approprier la mise en œuvre de l’Accord et à lui donner la priorité,

Soulignant que le fait de prendre part à des hostilités en violation de l’Accord ou de prendre des mesures qui font obstacle à la mise en œuvre de l’Accord, y compris par des retards persistants, ou menacent cette mise en œuvre, fait partie des critères donnant lieu à désignation aux fins de sanctions, en application de la résolution 2374 (2017),

Soulignant également que la stabilisation de la situation dans le centre du Mali ne peut se faire sans une nouvelle stratégie renouvelée et pleinement intégrée englobant la poursuite simultanée de progrès sur les plans de la sécurité, de la gouvernance, du développement, de la réconciliation et de l’application du principe de responsabilité, ainsi que de la protection et de la promotion des droits de la personne,

Soulignant en outre qu’il importe d’assurer le succès du dialogue politique sans exclusive récemment annoncé afin de parvenir à un consensus sur les réformes politiques et institutionnelles essentielles,

Condamnant fermement toutes les violations du droit international des droits de l’homme et atteintes à celui-ci et toutes les violations du droit international humanitaire, y compris les exécutions extrajudiciaires et sommaires, les arrestations et détentions arbitraires, les mauvais traitements infligés aux prisonniers et la violence sexuelle et fondée sur le genre, ainsi que le meurtre, la mutilation, le recrutement et l’utilisation d’enfants, et les attaques visant des écoles, des hôpitaux, des agents humanitaires et du personnel médical, et demandant à toutes les parties de mettre fin à ces violations et atteintes et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international applicable,

Rappelant, à cet égard, qu’il importe que tous les auteurs de tels actes soient amenés à en répondre et que certains des actes mentionnés au paragraphe précédent peuvent constituer des crimes au regard du Statut de Rome, et notant que, les autorités de transition maliennes ayant saisi la Cour pénale internationale le 13 juillet 2012, le Procureur de la Cour a, le 16 janvier 2013, ouvert une enquête sur les allégations de crimes qui auraient été commis sur le territoire du Mali depuis janvier 2012,

Soulignant que le Gouvernement malien et l’ONU doivent adopter des stratégies appropriées d’évaluation et de gestion des risques en matière de changements écologiques, de catastrophes naturelles, de sécheresse, de désertification, de dégradation des sols, d’insécurité alimentaire, d’accès à l’énergie et de changements climatiques, entre autres facteurs qui influent sur la sécurité et la stabilité du Mali,

Saluant la contribution des pays qui fournissent des contingents ou du personnel de police à la MINUSMA et rendant hommage aux soldats de la paix qui risquent leur vie et à ceux qui l’ont perdue,

Saluant également les mesures prises par la MINUSMA pour adopter une position plus ferme ces derniers mois et se félicitant de l’intensification de la fréquence et de l’ampleur des opérations de la Mission,

Conscient que, compte tenu des conditions particulièrement difficiles dans lesquelles elle est déployée, la MINUSMA opère en interaction avec d’autres forces de sécurité présentes dans la région et que ces dispositifs peuvent se renforcer l’un l’autre pour rétablir la paix et la stabilité au Mali et dans la région du Sahel,

Prenant note du rapport du Secrétaire général (S/2019/454),

Constatant que la situation au Mali continue de menacer la paix et la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali

1.    Exhorte le Gouvernement malien et les groupes armés que sont la Plateforme et la coalition Coordination (« les parties maliennes ») à continuer d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord en prenant d’urgence des mesures substantielles, constructives et irréversibles, et exhorte également les parties maliennes à signer sans délai une feuille de route révisée assortie d’un calendrier clair, réaliste et contraignant, portant sur un nombre restreint de priorités liées aux principaux piliers de l’Accord;

2.    Regrette vivement que la mise en œuvre de plusieurs dispositions de l’Accord évoquées au paragraphe 4 de la résolution 2423 (2018) ne soit pas encore achevée, voire amorcée dans certains cas, malgré ses appels répétés dans ce sens ces derniers mois, rappelle le paragraphe 3 de la résolution 2423 (2018), dans laquelle il a manifesté son intention de répondre au moyen des mesures prévues par la résolution 2374 (2017) dans le cas où les parties ne respecteraient pas les engagements pris dans la Feuille de route adoptée le 22 mars 2018 selon le calendrier établi;

3.    Souligne que les personnes ou entités inscrites sur la Liste relative aux sanctions imposées par la résolution 2374 (2017) ne bénéficieront d’aucun appui financier, opérationnel ou logistique de la part des entités des Nations Unies déployées au Mali, et ce jusqu’à leur radiation de la Liste, sans préjudice des dérogations prévues aux paragraphes 2, 5, 6 et 7 de la résolution 2374 (2017);

4.    Exhorte les parties maliennes à prendre immédiatement des dispositions concrètes pour mettre en œuvre les mesures prioritaires suivantes avant la fin du mandat actuel de la MINUSMA:

–assurer l’achèvement de la réforme constitutionnelle, y compris les réformes institutionnelles envisagées dans l’Accord, à l’issue d’une consultation sans exclusive à laquelle auront pleinement participé les parties maliennes, l’opposition politique et la société civile;

–achever le transfert aux collectivités territoriales des services déconcentrés de l’État, selon leurs domaines de compétence respectifs, achever le transfert de 30 pour cent des ressources de l’État aux autorités locales, en fonction d’un système de distribution équitable, en accordant une attention spéciale aux régions du nord et adopter, à la suite de consultations en bonne et due forme, une loi portant création d’une police territoriale à l’échelle régionale;

–régler les questions en suspens liées à la conception de Forces de défense et de sécurité maliennes reconstituées et réformées, y compris au moyen de consultations entre les parties maliennes au plus haut niveau, résoudre les questions en suspens concernant la formation d’au moins 3 000 membres des groupes armés signataires, leur intégration dans les Forces de défense et de sécurité maliennes et leur redéploiement, à l’issue d’un processus de consultation sans exclusive et bénéficiant de la participation et de l’assentiment sans réserve des parties maliennes et des autres parties prenantes concernées; élaborer et commencer à mettre en œuvre, de façon transparente et avec la participation et l’assentiment sans réserve des parties maliennes et des autres parties prenantes concernées, un plan global de redéploiement progressif dans le nord du Mali des Forces de défense et de sécurité maliennes reconstituées et réformées, dans le cadre plus large d’un projet national de réforme du secteur de la sécurité;

–créer la Zone de développement des régions du nord en adoptant la législation nécessaire, en rendant opérationnels le fonds de développement durable et les mécanismes de gestion inclusifs connexes et en menant un projet pilote qui devra être conçu conjointement par les parties maliennes et la société civile afin de faire en sorte que les populations du nord du Mali puissent bénéficier rapidement des dividendes de la paix;

–organiser un atelier de haut niveau, avec la pleine participation des parties maliennes et de la société civile, afin de formuler des recommandations concrètes qui seront appliquées dans des délais convenus et de garantir ainsi la participation pleine et entière des femmes dans les mécanismes établis en vertu de l’Accord, afin de soutenir et d’en surveiller l’application, y compris en assurant une plus grande représentation des femmes dans le Comité de suivi de l’Accord;

5.    Demande à toutes les parties maliennes d’assurer la participation pleine, effective et véritable des femmes aux mécanismes créés dans le cadre de l’Accord pour en appuyer et en suivre la mise en œuvre, notamment en veillant à accroître la représentation des femmes au Comité de suivi de l’Accord, en instaurant un quota de 30% de femmes dans toutes les fonctions et institutions politiques, comme énoncé dans la législation malienne, et en assurant la réalisation des objectifs liés à l’Accord énoncés dans le troisième plan national adopté par le Mali aux fins de l’application de la résolution 1325 (2000) et prie le Secrétaire général d’accorder une attention particulière à ces points dans ses rapports périodiques sur la MINUSMA;

6.    Prie le Secrétaire général d’évaluer tous les six mois, dans ses rapports périodiques sur la MINUSMA, les progrès accomplis dans la mise en œuvre des mesures prioritaires visées au paragraphe 4 ci-dessus, engage le Groupe d’experts créé en application de la résolution 2374 (2017) à identifier, dans ses rapports et ses mises à jour périodiques, les parties qui n’appliqueraient pas ces mesures prioritaires, et exprime son intention, si ces mesures prioritaires n’étaient pas mises en œuvre avant la fin du mandat actuel de la MINUSMA, d’appliquer les mesures prévues dans la résolution 2374 (2017) aux personnes et entités qui feraient ainsi obstacle à la mise en œuvre de l’Accord ou la menaceraient;

7.    Demande à toutes les parties maliennes de respecter strictement les dispositions en place en vue d’une cessation des hostilités et exige de tous les groupes armés qu’ils renoncent à la violence et rompent tous liens avec des organisations terroristes et la criminalité transnationale organisée, prennent des mesures concrètes pour prévenir les atteintes aux droits de la personne et les violences contre les civils, mettent fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants soldats, cessent toute activité entravant le rétablissement de l’autorité de l’État et des services sociaux de base et reconnaissent sans condition l’unité et l’intégrité territoriale de l’État malien, dans le cadre de l’Accord;

8.    Exhorte toutes les parties maliennes à coopérer pleinement avec le Représentant spécial du Secrétaire général et la MINUSMA et à garantir la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel de la Mission en lui assurant un accès immédiat et sans entrave à l’ensemble du territoire malien;

9.    Demande que soient inclus, dans les stratégies nationales et régionales, des programmes visant à lutter contre la stigmatisation des victimes de violence sexuelle et fondée sur le genre, à leur rendre justice et à faciliter leur réinsertion dans la collectivité;

10.   Prie le Représentant spécial du Secrétaire général d’user de ses bons offices pour encourager et soutenir la pleine mise en œuvre de l’Accord, notamment en dirigeant le secrétariat du Comité de suivi de l’Accord et en jouant un rôle central pour ce qui est d’aider les parties maliennes à définir des mesures de mise en œuvre et à les classer par ordre de priorité, conformément à l’application de l’Accord;

11.   Engage les parties maliennes à instaurer un dialogue plus structuré entre les sessions du Comité de suivi de l’Accord, notamment en créant un secrétariat spécialisé placé sous l’autorité du Ministre de la cohésion sociale, de la paix et de la réconciliation nationale, avec l’appui de l’équipe de médiation internationale, salue le rôle que joue le Comité pour surmonter les désaccords entre les parties maliennes, rappelle les dispositions du Pacte pour la paix au Mali conclu et signé le 15 octobre 2018 par le Gouvernement malien et l’Organisation des Nations unies, dans lequel les parties reconnaissent le caractère exécutoire des décisions et des arbitrages de l’équipe de médiation internationale en cas de divergence concernant la mise en œuvre de l’Accord, et prie les membres du Comité de suivi de l’Accord et les autres partenaires internationaux concernés de se mobiliser davantage pour appuyer la mise en œuvre de l’Accord en coordination avec le Représentant spécial du Secrétaire général et la MINUSMA;

12.   Demande à l’Observateur indépendant de continuer à publier régulièrement, y compris en les présentant au Comité de suivi de l’Accord, des rapports contenant des recommandations concrètes sur les mesures que toutes les parties doivent prendre afin d’accélérer la mise en œuvre intégrale, effective et sans exclusive de l’Accord, et demande également à toutes les parties de coopérer pleinement avec le Centre Carter pour l’aider à s’acquitter de son mandat d’Observateur indépendant;

13.   Engage toutes les parties à coopérer pleinement avec la Commission internationale d’enquête créée conformément aux dispositions de l’Accord et comme demandé dans la résolution 2364 (2017);

14.   Encourage tous les organismes compétents des Nations Unies, ainsi que les partenaires bilatéraux, régionaux et multilatéraux à fournir l’appui nécessaire à la mise en œuvre de l’Accord par les parties maliennes, notamment celle des dispositions relatives au développement durable;

Situation dans le centre du Mali

15.   Exhorte les autorités maliennes à s’employer sans tarder et de manière prioritaire, au titre du Cadre politique de gestion de la crise dans le centre du Mali, à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie globale axée sur les aspects politiques visant à protéger les civils, à réduire les violences intercommunautaires et à rétablir la présence et l’autorité de l’État ainsi que les services sociaux de base dans le centre du Mali et Exhorte également les autorités maliennes à désarmer sans délai toutes les milices, à renforcer l’action qu’elles mènent pour rétablir des relations pacifiques entre les communautés et à faire en sorte que tous les responsables de violations des droits de la personne et d’atteintes à ces droits et de violations du droit international humanitaire dans le centre du Mali aient à répondre de leurs actes et soient traduites devant la justice, et ce, dans les meilleurs délais;

16.   Engage la MINUSMA à poursuivre les efforts visant à faciliter le rétablissement de la présence et de l’autorité de l’État ainsi que des services sociaux de base dans le centre du Mali, notamment en aidant les autorités maliennes à atténuer les tensions intercommunautaires, à redéployer les Forces de défense et de sécurité maliennes, à assurer une protection efficace, dynamique et intégrée des civils et à lutter contre l’impunité, et engage également la Mission à renforcer ses activités de communication pour souligner le rôle des autorités maliennes et les responsabilités qui leur incombent en matière de protection des civils, tout en sensibilisant le grand public à son rôle et à ses limitations à elle;

Mandat de la MINUSMA

Principes généraux

17.   Décide de proroger le mandat de la MINUSMA jusqu’au 30 juin 2020;

18.   Décide que la MINUSMA continuera de compter au maximum 13 289 militaires et 1 920 policiers;

19.   Autorise la MINUSMA à utiliser tous les moyens nécessaires pour accomplir son mandat;

20.   Décide que la principale priorité stratégique de la MINUSMA demeure d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord par le Gouvernement, les groupes armés que sont la Plateforme et la coalition Coordination ainsi que par d’autres parties prenantes maliennes, et décide également que la seconde priorité stratégique de la MINUSMA est de faciliter l’application d’une stratégie globale dirigée sur le plan politique par le Mali afin de protéger les civils, de réduire les violences intercommunautaires et de rétablir l’autorité et la présence de l’État ainsi que les services sociaux de base dans le centre du Mali, en s’acquitter des tâches qui lui ont été confiées;

21.   Souligne que le mandat de la MINUSMA devrait être exécuté compte tenu de la hiérarchisation des tâches énoncée au paragraphe 20 ci-dessus et aux paragraphes 28 et 29 ci-dessous, prie le Secrétaire général de prendre en compte de cette hiérarchisation pour organiser le déploiement de la Mission et de prévoir les ressources budgétaires en conséquence, tout en veillant à allouer des ressources suffisantes aux fins de l’exécution du mandat, et affirme à cet égard qu’il faut accorder la priorité à l’appui à la mise en œuvre de l’Accord lorsqu’il s’agit de décider de l’usage des capacités et ressources disponibles, que le Représentant spécial du Secrétaire général, en consultation avec le Commandant de la force, doit pouvoir bénéficier de la souplesse voulue pour déployer les contingents de la MINUSMA d’un secteur à un autre afin de réagir rapidement, conformément au mandat de la MINUSMA, face à toute évolution des conditions de sécurité tant dans le nord que dans le centre du Mali et que le Représentant spécial du Secrétaire général, en consultation avec le Commandant de la force, devrait veiller à ce que la Mission soit dotée de moyens suffisants afin de mettre en œuvre de la deuxième priorité stratégique et prie le Secrétaire général de mener, dans les six mois suivant l’adoption de la présente résolution, une évaluation approfondie de la situation dans le nord et dans le centre du Mali et de la configuration de la mission pour ce qui est de l’exécution de ses priorités stratégiques principale et seconde;

22.   Prie la MINUSMA de continuer à s’acquitter de son mandat dans le cadre d’une démarche axée sur le dynamisme, la fermeté, la flexibilité et l’adaptabilité;

23.   Se déclare profondément préoccupé par les lourdes pertes que les soldats de la paix ont subies au Mali, et demande à la MINUSMA d’assurer la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé, de protéger les installations et le matériel et, à cet effet, de revoir périodiquement l’ensemble des mesures de sûreté et de sécurité mises en œuvre;

24.   Engage le Secrétaire général à garder à l’examen en permanence le concept de la Mission afin d’optimiser l’utilisation des ressources de celle-ci et de faire les ajustements opérationnels nécessaires, et prie le Secrétaire général de mettre en œuvre des solutions d’adaptation afin que la MINUSMA améliore l’efficacité du soutien qu’elle apporte à la mise en œuvre de l’Accord, en consacrant davantage d’attention aux tâches prioritaires ainsi que les recommandations visant à renforcer l’appui fourni dans le centre du pays qui figurent dans son rapport susmentionné;

25.   Engage également le Secrétaire général à mettre à jour en permanence le cadre stratégique intégré définissant la vision globale et les priorités communes des organismes des Nations Unies ainsi que la répartition des tâches entre eux pour pérenniser la paix au Mali, prie le Secrétaire général de veiller à une répartition efficace des tâches et à la complémentarité des efforts de la MINUSMA et de l’équipe de pays des Nations Unies, en tenant compte de leur mandat et de leurs avantages comparatifs relatifs, et d’adapter constamment le déploiement des moyens en fonction des progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la Mission, en soulignant qu’il importe que l’équipe de pays des Nations Unies dispose de ressources adaptées, insiste sur la nécessité critique de renforcer la présence et les activités de l’équipe de pays des Nations Unies dans les régions du nord et du centre du Mali, et demande aux États Membres et aux organisations compétentes d’envisager de fournir les fonds nécessaires à cette fin au moyen de contributions volontaires;

26.   Encourage la MINUSMA à poursuivre ses efforts visant à améliorer la coordination entre ses composantes civile, militaire et Police, y compris au moyen de l’application d’une démarche intégrée à la planification des opérations et au renseignement ainsi que par la mise en place de mécanismes de coordination internes spécifiques;

27.   Prie le Secrétaire général de continuer de veiller à ce qu’il y ait une coordination étroite et des échanges d’informations, selon qu’il convient, entre la MINUSMA, le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et les organisations sous-régionales, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest et le G5 Sahel, ainsi que les États Membres de la région;

Tâches prioritaires

28.   Décide que le mandat de la MINUSMA comportera les tâches prioritaires ci-après:

a)    Appui à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali

i)    Appuyer la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles prévues par l’Accord, en particulier dans son titre II, et surtout appuyer les efforts du Gouvernement visant à rétablir et étendre effectivement l’autorité de l’État et l’état de droit sur tout le territoire, notamment en concourant au bon fonctionnement des administrations intérimaires dans le nord du Mali selon les conditions énoncées dans l’Accord;

ii)   Appuyer la mise en œuvre des mesures de défense et de sécurité prévues par l’Accord, en particulier dans son titre III et à l’annexe 2, notamment:

–appuyer, surveiller et superviser le cessez-le-feu, y compris en continuant d’appliquer des mesures de contrôle relatives aux mouvements et à l’armement des groupes armés signataires, et lui rendre compte des violations du cessez-le-feu;

–soutenir le cantonnement et le désarmement, la démobilisation et la réintégration des groupes armés, notamment grâce à l’intégration dans les Forces de défense et de sécurité maliennes d’éléments des groupes armés signataires à titre de mesure provisoire, et la poursuite de l’exécution d’un programme de lutte contre la violence communautaire, dans le cadre d’une réforme sans exclusive et consensuelle du secteur de la sécurité, en tenant compte des besoins particuliers des femmes et des enfants, et sans préjudice des plans de la Commission nationale de désarmement, démobilisation et réinsertion et de la Commission d’intégration;

–soutenir l’élaboration par toutes les parties prenantes maliennes d’un plan complet de redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes réformées et reconstituées dans le nord du Mali, et faciliter ce redéploiement en apportant un soutien opérationnel et logistique et un appui dans le domaine des transports pendant les opérations coordonnées et les opérations conjointes, en contribuant à la planification, en intensifiant les échanges d’informations et en fournissant un appui dans le domaine de l’évacuation sanitaire, dans la limite des ressources disponibles et sans préjudice des principes fondamentaux du maintien de la paix;

–veiller à la cohérence des efforts internationaux, en étroite collaboration avec les autres partenaires bilatéraux, les donateurs et les organisations internationales œuvrant dans ces domaines, y compris l’Union européenne, afin de reconstruire le secteur malien de la sécurité dans le cadre défini par l’Accord;

iii)  Appuyer la mise en œuvre des mesures de réconciliation et de justice énoncées dans l’Accord, en particulier dans son titre V, grâce à la poursuite de ses activités actuelles, notamment en ce qui concerne l’appui aux travaux de la Commission d’enquête internationale, en consultation avec les parties, et à ceux de la Commission vérité, justice et réconciliation, l’appui aux agents de la justice et de l’administration pénitentiaire ainsi qu’aux autorités intérimaires du nord et du centre du pays, le but étant d’en améliorer l’efficacité, et l’appui technique aux institutions judiciaires maliennes s’agissant de la mise en détention des personnes soupçonnées d’infractions liées au terrorisme, d’atrocités criminelles ou d’activités liées à la criminalité transnationale organisée (y compris la traite des êtres humains, le trafic d’armes, de drogues ou de ressources naturelles et le trafic de migrants) risquant de déstabiliser le processus de paix, de la conduite des enquêtes et de l’exercice des poursuites concernant ces personnes, et s’agissant de la condamnation de celles qui ont été reconnues coupables de tels actes;

iv)   Concourir, dans les limites de ses moyens et dans ses zones de déploiement, à l’organisation, dans des conditions pacifiques, d’élections ouvertes à tous, libres, régulières, transparentes et crédibles, ainsi qu’à la tenue d’un référendum constitutionnel, notamment en apportant l’aide technique et en mettant en place les mesures de sécurité voulues, conformément aux dispositions de l’Accord;

b)    Appui à la stabilisation et au rétablissement de l’autorité de l’État dans le centre du pays

i)    Aider les autorités maliennes à réduire la violence et les tensions intercommunautaires en exerçant ses bons offices;

ii)   Soutenir le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes dans le centre du Mali, y compris en continuant d’apporter un soutien opérationnel et logistique et un appui dans le domaine des transports pendant les opérations coordonnées et les opérations conjointes, en contribuant à la planification, en intensifiant les échanges d’informations et en fournissant un appui dans le domaine de l’évacuation sanitaire, dans la limite des ressources disponibles et sans préjudice des principes fondamentaux du maintien de la paix;

iii)  Aider les autorités maliennes à faire en sorte que les responsables de violations des droits de la personne et d’atteintes à ces droits, ainsi que de violations du droit international humanitaire, aient à répondre de leurs actes et soient traduits en justice dans les meilleurs délais;

c)    Protection des civils

i)    Assurer, sans préjudice de la responsabilité prépondérante des autorités maliennes dans ce domaine, la protection des civils menacés de violences physiques;

ii)   Prendre des mesures actives, à l’appui des autorités maliennes, pour anticiper et décourager toute menace contre la population civile, notamment dans le nord et le centre du Mali, et pour y répondre efficacement, en adoptant une démarche globale et intégrée, et à cet égard:

–renforcer le dispositif d’alerte rapide et redoubler d’efforts pour détecter et constater les violations du droit international humanitaire et les violations du droit international des droits de l’homme et atteintes à celui-ci;

–renforcer les mécanismes de mobilisation et de protection de la population, y compris par des échanges avec les civils, des actions de proximité et des initiatives de réconciliation, de médiation, d’appui au règlement des conflits locaux et intercommunautaires et d’information du public;

–prendre des mesures évolutives, souples, énergiques et proactives pour protéger les civils, notamment par le déploiement de moyens terrestres et aériens, en fonction des disponibilités, dans les zones à haut risque où les civils courent le plus de dangers;

–atténuer les risques auxquels sont exposés les civils avant, pendant et après toute opération militaire ou policière, notamment en surveillant, en prévenant et en limitant au minimum les dommages que peuvent causer aux civils les opérations de la Mission et en y remédiant;

–empêcher le retour d’éléments armés actifs dans les principales agglomérations et les autres zones où les civils sont en danger, en n’y menant des opérations directes qu’en cas de menaces graves et crédibles;

iii)  Fournir une protection particulière aux femmes et aux enfants touchés par le conflit armé, notamment en déployant des conseillers pour la protection, des conseillers pour la protection des enfants et des conseillers pour la protection des femmes ainsi qu’en organisant des consultations avec des associations de femmes, et répondre aux besoins des victimes de violences sexuelles et fondées sur le genre commises en temps de conflit armé;

d)    Bons offices et réconciliation

i)    User de ses bons offices et de mesures de confiance et d’encouragement aux niveaux national et local pour appuyer un dialogue axé sur la réconciliation et la cohésion sociale avec toutes les parties prenantes et entre elles;

ii)   Encourager les initiatives visant à atténuer les tensions intercommunautaires, en gardant à l’esprit la responsabilité prépondérante des autorités maliennes en la matière;

iii)  Faciliter la tenue d’élections pacifiques, ouvertes à tous, libres, régulières, transparentes et crédibles;

iv)   Encourager et soutenir la pleine mise en œuvre de l’Accord par le Gouvernement malien et les groupes armés que sont la Plateforme et la coalition Coordination, ainsi que par tous les acteurs non signataires concernés, notamment en favorisant la véritable participation de la société civile, y compris des associations de femmes et de jeunes;

e)    Promotion et protection des droits de la personne

i)    Aider les autorités maliennes dans leur entreprise de promotion et de défense des droits de la personne, en particulier en ce qui concerne la justice et la réconciliation, notamment en concourant, dans la mesure du possible et du nécessaire et sans préjudice des responsabilités de ces autorités, à l’action qu’elles mènent en vue de traduire en justice sans délai ceux qui ont commis au Mali des violations graves des droits de la personne ou des atteintes graves à ces droits, ou des violations du droit international humanitaire, notamment des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, en tenant compte du fait que les autorités maliennes de transition ont saisi la Cour pénale internationale de la situation qui règne dans leur pays depuis janvier 2012;

ii)   Surveiller les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de la personne et atteintes à ces droits, notamment toutes les formes de violence sexuelle et fondée sur le genre et les violations et atteintes commises contre des femmes et des enfants sur tout le territoire du Mali, concourir aux enquêtes, recueillir des preuves et faire rapport au Conseil de sécurité à ce sujet, publiquement et régulièrement, et contribuer aux activités de prévention de ces violations et atteintes;

f)    Aide humanitaire

À l’appui des autorités maliennes, contribuer à créer des conditions de sécurité propices à l’acheminement sûr de l’aide humanitaire sous la direction de civils, conformément aux principes humanitaires, et au retour volontaire, en toute sécurité et dans la dignité, des déplacés et des réfugiés, ou à leur intégration locale ou leur réinstallation, en étroite coordination avec les acteurs humanitaires;

Autres tâches

29.   Autorise la MINUSMA à utiliser ses capacités existantes afin de concourir à l’exécution des autres tâches énumérées ci-après, d’une manière simplifiée et échelonnée, étant entendu que cela ne doit pas empiéter sur sa capacité à exécuter les tâches prioritaires et sachant que les tâches prioritaires et les tâches secondaires se renforcent mutuellement:

a)    Projets à effet rapide

Contribuer à la création d’un environnement sûr pour les projets à effet rapide, afin de concourir directement à la mise en œuvre de l’Accord dans le nord du Mali ou de répondre à des besoins particuliers dans le centre du pays, en se fondant sur une analyse approfondie du conflit;

b)    Coopération avec les comités des sanctions

Aider le Comité des sanctions et le Groupe d’experts créés en application de la résolution 2374 (2017) et échanger les informations voulues avec ces entités;

Aider le Comité du Conseil de sécurité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés et l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée par les résolutions 1526 (2004) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida, les Taliban et les personnes et entités qui leur sont associées, notamment en leur communiquant tout élément d’information utile concernant la mise en œuvre des mesures prévues au paragraphe 1 de la résolution 2368 (2017);

Autres forces de sécurité présentes au Mali et dans la région du Sahel

30.   Prie le Secrétaire général de veiller à ce que la MINUSMA, les Forces de défense et de sécurité maliennes, la Force conjointe du G5 Sahel, les forces françaises et les missions de l’Union européenne au Mali coordonnent comme il se doit leurs activités, échangent des informations et, selon qu’il convient, se prêtent l’appui voulu, dans le cadre de leurs mandats respectifs et des mécanismes existants, et prie également la MINUSMA d’organiser régulièrement des réunions de l’Instance de coordination au Mali, principal cadre permettant cette coordination, ces échanges d’informations et cet appui;

31.   Insiste sur le fait que les mesures de sécurité visant à répondre aux menaces auxquelles le Mali fait face ne peuvent être efficaces que si elles sont appliquées de façon pleinement conforme au droit international, en prenant toutes les précautions possibles pour réduire au minimum le risque que des civils soient blessés dans toutes les zones d’opérations, et prie la MINUSMA de veiller à ce que tout appui qu’elle apporterait aux autres forces de sécurité présentes au Mali, mentionnées au paragraphe 30 ci-dessus, le soit dans le strict respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes;

32.   Affirme que le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes réformées et reconstituées et la pleine mise en œuvre opérationnelle de la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel contribueront à la stabilité du Mali et de sa région, aideront la MINUSMA à s’acquitter de son mandat et ouvriront ainsi la voie à la mise en œuvre d’une stratégie de sortie de la mission, et demande instamment à cet égard à la MINUSMA, en coordination avec l’Instance de coordination au Mali, de développer une approche de transition à long terme assortie de conditions, afin de garantir une transition progressive, coordonnée et délibérée des responsabilités en matière de sécurité, sans mettre en péril la stabilité du Mali et de sa région;

Forces de défense et de sécurité maliennes

33.   Demande instamment à la MINUSMA et au Gouvernement malien de redoubler d’efforts en vue de parvenir à l’application rapide, intégrale et effective du mémorandum d’accord relatif à l’appui au redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes;

34.   Encourage les partenaires bilatéraux et multilatéraux à continuer d’apporter leur aide en vue d’accélérer le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes dans le centre du Mali et, une fois réformées et reconstituées, dans le nord du pays, notamment en fournissant le matériel et la formation nécessaires, en coordination avec le Gouvernement malien et la MINUSMA et dans le cadre de l’Accord;

35.   Condamne fermement les attaques terroristes qui continuent d’être commises contre les Forces de défense et de sécurité maliennes, se dit vivement préoccupé par les allégations répétées selon lesquelles les Forces de défense et de sécurité maliennes violeraient le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire dans la conduite d’opérations de lutte contre le terrorisme, notamment dans le centre du Mali, exhorte le Gouvernement malien à mener des enquêtes crédibles et transparentes sur les violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire qui auraient été commises par les Forces de défense et de sécurité maliennes, demande que les responsables de ces violations ou de ces atteintes soient amenés à répondre de leurs actes, prend note avec satisfaction des mesures que le Gouvernement malien a annoncé qu’il prendrait en réponse à plusieurs des allégations de violation susmentionnées, et demande instamment que ces mesures soient effectivement appliquées, compte tenu des conditions énoncées ci-dessus;

36.   Demande au Gouvernement malien d’appliquer toutes les recommandations faites par la MINUSMA dans le cadre de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes, et engage les partenaires internationaux à insister sur le fait que le respect du droit international des droits de l’homme, du droit international humanitaire et de l’application du principe de responsabilité est une condition nécessaire de tout partenariat avec les Forces de défense et de sécurité maliennes ou d’autres éléments armés;

Force conjointe du G5 Sahel

37.   Encourage le G5 Sahel à veiller à ce que la Force conjointe continue d’intensifier ses activités afin d’améliorer ses résultats opérationnels concrets;

38.   Souligne que l’appui opérationnel et logistique de la MINUSMA, apporté conformément aux modalités énoncées dans la résolution 2391 (2017), peut aider la Force conjointe, compte tenu des moyens à sa disposition, à mieux exécuter son mandat;

39.   Rappelle les dispositions du paragraphe 13 de la résolution 2391 (2017), prend note de la requête formulée par le G5 Sahel au cours de la mission du Conseil de sécurité dans le Sahel, menée en mars 2019, afin que les articles consommables essentiels que la MINUSMA fournit à la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel en application de l’accord technique conclu entre l’Organisation des Nations Unies, l’Union européenne et le G5 Sahel (« accord technique ») puissent être utilisés par tous les contingents du G5 Sahel opérant dans le cadre de la Force conjointe, exprime son soutien à l’utilisation des articles consommables essentiels fournis par la MINUSMA à la Force conjointe, à condition que cette dernière ou les autres partenaires se chargent de garantir leur acheminement dans les zones d’opérations situées à l’extérieur du territoire malien, et que la fourniture des articles consommables se fasse dans le strict respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes, rappelle les obligations d’établissement de rapports énoncées au paragraphe 33 (iii) de la résolution 2391 (2017), prie le Secrétaire général de fournir une évaluation de l’application du paragraphe 13 de la résolution 2391 (2017) à intégrer dans le rapport trimestriel de juin 2020 sur la MINUSMA, y compris des mises à jour sur le présent paragraphe et déclare son intention de ce fait de prendre une décision sur l’avenir du mécanisme énoncé au paragraphe 13 de la résolution 2391 (2017) à la fin du mandat en cours de la MINUSMA;

40.   Prie le Secrétaire général d’intensifier les activités d’échange d’informations entre la MINUSMA et les États du G5 Sahel moyennant la mise à disposition de données de renseignement pertinentes;

41.   Rappelle que, pour obtenir la confiance de la population et, partant, assurer l’efficacité et la légitimité de la Force conjointe, il est indispensable de respecter le cadre réglementaire visé dans la résolution 2391 (2017), et demande à la Force conjointe de coopérer avec l’ONU aux fins de l’application de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes, notamment en coopérant avec les mécanismes pertinents de suivi et de communication de l’information;

Forces françaises

42.   Autorise les forces françaises à user de tous moyens nécessaires, dans la limite de leurs moyens et dans leurs zones de déploiement, jusqu’à la fin du mandat confié à la MINUSMA par la présente résolution, pour intervenir à l’appui d’éléments de la Mission en cas de menace grave et imminente, à la demande du Secrétaire général, et prie la France de lui rendre compte de l’application du présent mandat au Mali et de coordonner la présentation de cette information avec celle que communiquera le Secrétaire général en application du paragraphe 64 ci-après;

Contribution de l’Union européenne

43.   Engage l’Union européenne, notamment son Représentant spécial pour le Sahel, l’EUTM Mali et la Mission PSDC de l’Union européenne au Mali à continuer d’aider les autorités maliennes s’agissant de la réforme du secteur de la sécurité et du rétablissement de l’autorité et de la présence de l’État dans le centre du pays, l’engage également, pour ce faire, à coopérer étroitement avec la MINUSMA, et prie le Secrétaire général de renforcer la coopération entre la MINUSMA et l’EUTM Mali et la Mission PSDC de l’Union européenne au Mali, notamment en faisant en sorte que les activités de ces missions soient plus complémentaires et en définissant des modalités d’entraide possible, y compris au moyen d’un accord technique, en veillant à ce que cela ne nuise pas à la capacité de la MINUSMA de s’acquitter de son mandat et de poursuivre ses priorités stratégiques;

Capacités de la MINUSMA, sûreté et sécurité du personnel de la Mission

44.   Souligne qu’il importe de doter la MINUSMA des capacités d’action dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat dans des conditions de sécurité complexes marquées notamment par des menaces asymétriques, tout en garantissant à son personnel un niveau optimal de sûreté et de sécurité;

45.   Engage vivement les États Membres à faire en sorte que les contingents et les effectifs de police qu’ils fournissent disposent des capacités nécessaires, notamment pour ce qui est des compétences linguistiques, des formations préalables au déploiement et, le cas échéant, des formations in situ et du matériel, y compris les capacités facilitatrices, et que ces capacités soient adaptées au contexte opérationnel, note les effets néfastes que pourraient avoir sur l’exécution du mandat les restrictions nationales qui n’ont pas été déclarées et acceptées par le Secrétaire général préalablement au déploiement et demande aux États Membres, lorsqu’ils fournissent des contingents, de limiter les restrictions voire de s’abstenir d’en imposer;

46.   Prie le Secrétaire général de s’employer à augmenter le nombre de femmes dans les effectifs de la Mission et de veiller à ce que ces dernières participent de manière effective à tous les aspects des opérations;

47.   Condamne fermement les attaques visant le personnel de maintien de la paix, souligne qu’elles peuvent constituer des crimes de guerre au regard du droit international, insiste sur la nécessité d’amener les responsables de ces actes à en répondre, demande au Gouvernement malien d’enquêter sans tarder sur ces actes et d’en traduire les auteurs en justice, afin d’empêcher que le sentiment d’impunité incite à davantage de violence contre les soldats de la paix, demande à la MINUSMA d’aider le Gouvernement malien à cet égard, et souligne par ailleurs qu’il importe que la Mission dispose des moyens nécessaires pour promouvoir la sûreté et la sécurité des soldats de la paix des Nations Unies et prie le Secrétaire général de veiller à ce que les pays qui fournissent des contingents reçoivent des informations suffisantes au sujet de tactiques, de techniques et de procédures actualisées visant à réduire les pertes militaires dans un environnement asymétrique avant tout déploiement au Mali;

48.   Prie le Secrétaire général de continuer à prendre toutes les mesures nécessaires pour évaluer et renforcer la sûreté et la sécurité du personnel de la MINUSMA, conformément au plan d’action élaboré par la Mission à cet égard, notamment en:

–renforçant les capacités de la Mission en matière de renseignement et d’analyse, y compris ses moyens de surveillance et d’observation, dans les limites de son mandat;

–assurant une formation, des connaissances et fournissant du matériel de protection contre les engins explosifs et en assurant une formation dans ce domaine, y compris en aidant davantage les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police à déployer les véhicules résistants aux mines adaptés au terrain nécessaires pour répondre aux besoins actuels de la force;

–améliorant le fonctionnement logistique de la Mission, en particulier en sécurisant ses itinéraires de ravitaillement, y compris grâce à la poursuite du déploiement de bataillons spécialisés en convois de combat et à l’utilisation de techniques modernes telles que des systèmes à capteurs multiples, la centralisation du renseignement et des systèmes de drones, et en envisageant d’utiliser d’autres itinéraires logistiques;

–renforçant la protection des camps, y compris en équipant de toute urgence les installations qui n’en sont pas encore dotées de dispositifs d’alerte rapide en cas de tirs indirects, tels que des radars terrestres;

–améliorant les procédures d’évacuation sanitaire primaire et secondaire et en déployant davantage de capacités d’évacuation sanitaire;

–prenant des mesures énergiques et efficaces pour améliorer la planification et le fonctionnement des installations et des dispositifs de sûreté et de sécurité de la MINUSMA;

–prévoyant des plans de renouvellement des capacités essentielles sur le long terme ainsi qu’en réfléchissant à des options novatrices pour promouvoir les partenariats entre les pays fournisseurs de matériel, de contingents ou de personnel de police;

49.   Demande aux pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police d’appliquer intégralement et effectivement les dispositions des mémorandums d’accord signés avec l’Organisation des Nations Unies et de déclarer toutes les restrictions nationales;

50.   Rappelle ses résolutions 2378 (2017) et 2436 (2018) et en particulier les demandes faites au Secrétaire général relatives à l’utilisation des données portant sur l’évaluation des opérations de maintien de la paix, figurant dans ces résolutions;

51.   Se félicite des initiatives prises par le Secrétaire général en vue d’instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, réaffirme son soutien à l’élaboration d’un cadre global et intégré de gestion de la performance qui définisse des critères de performance clairs permettant d’évaluer l’ensemble du personnel civil et du personnel en tenue des Nations Unies déployé dans des opérations de maintien de la paix ou appuyant celles-ci, qui facilite l’exécution effective et intégrale des mandats et qui comporte des méthodes globales et objectives fondées sur des indicateurs clairs et bien définis permettant de sanctionner les résultats insuffisants et d’encourager et de récompenser les excellents résultats, et engage le Secrétaire général à l’appliquer à la MINUSMA;

52.   Demande aux États Membres, en particulier à ceux de la région, de garantir la libre circulation, sans entrave ni retard, à destination et en provenance du Mali, de l’ensemble du personnel, du matériel, des vivres, fournitures et autres biens destinés à l’usage exclusif et officiel de la MINUSMA, afin de faciliter l’acheminement de ses moyens logistiques en temps opportun et dans de bonnes conditions d’économie et d’efficacité, et prie à cet égard le Secrétaire général de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour faciliter l’approvisionnement logistique de la Mission et pour consolider les itinéraires de ravitaillement, y compris grâce à l’utilisation d’autres itinéraires;

Obligations découlant du droit international, politique en matière de droits de l’homme et aspects connexes

53.   Exhorte les autorités maliennes à amener tous les auteurs de crimes impliquant des violations des droits de la personne et atteintes à ces droits et des violations du droit international humanitaire, y compris des violences sexuelles et fondées sur le genre, à répondre de leurs actes devant la justice sans délai, et note à cet égard que les autorités maliennes continuent de coopérer avec la CPI, conformément aux obligations souscrites par le Mali au titre du Statut de Rome, pour les questions relevant de la compétence de la Cour;

54.   Exhorte toutes les parties à s’acquitter des obligations qui sont les leurs, conformément au droit international humanitaire, de respecter et de protéger les agents humanitaires et le personnel médical ainsi que leurs installations et les secours humanitaires, et à prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre et faciliter le libre passage des acteurs humanitaires, dans de bonnes conditions de sécurité et sans délai, afin que l’aide humanitaire puisse être apportée à toutes celles et tous ceux qui en ont besoin, tout en respectant les principes directeurs concernant l’aide humanitaire des Nations Unies et le droit international applicable;

55.   Réaffirme que c’est aux autorités maliennes qu’il incombe au premier chef de protéger les civils au Mali, rappelle ses résolutions antérieures sur la protection des civils en période de conflit armé, le sort des enfants en temps de conflit armé et les femmes et la paix et la sécurité, demande à la MINUSMA et à toutes les forces militaires présentes au Mali d’en tenir compte et de se conformer aux dispositions du droit international humanitaire, du droit des droits de l’homme et du droit des réfugiés, et rappelle l’importance que revêt la formation à cet égard;

56.   Se félicite que les autorités maliennes aient adopté un troisième plan d’action aux fins de l’application de la résolution 1325 (2000) et prie la MINUSMA de considérer la problématique femmes-hommes comme une question transversale touchant tous les aspects de son mandat et d’aider les autorités maliennes à garantir la participation pleine et effective et la représentation des femmes à tous les niveaux de la mise en œuvre de l’Accord, notamment pour ce qui est de la réforme du secteur de la sécurité, du processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, des initiatives de réconciliation et des opérations électorales;

57.   Engage instamment toutes les parties à donner suite aux conclusions sur les enfants et le conflit armé au Mali adoptées par son groupe de travail le 19 juin 2018, invite le Gouvernement malien à continuer de renforcer le cadre juridique relatif à la protection de l’enfance, note que le Gouvernement malien ait souscrit à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, l’engage à recenser les écoles qui ont été fermées, prises pour cible ou menacées, lui demande de veiller à ce que la protection des droits de l’enfant soit prise en compte dans le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion et dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité, demande instamment à tous les groupes armés de mettre en place et d’appliquer des plans d’action visant à faire cesser et à prévenir les six violations graves commises contre des enfants, telles que recensées par le Secrétaire général, notamment le recrutement et l’utilisation d’enfants et les actes de violence sexuelle commis sur des enfants, et prie la MINUSMA de considérer la protection de l’enfance comme une question transversale touchant tous les aspects de son mandat;

58.   Demande instamment à toutes les parties de prévenir et d’éliminer les violences sexuelles liées aux situations de conflit et d’après conflit, les invite à appliquer les dispositions du Communiqué conjoint sur la lutte contre la violence sexuelle et fondée sur le genre signé par l’ONU et le Gouvernement malien en mars 2019, invite les autorités maliennes à continuer de prendre des mesures en faveur de l’adoption du projet de loi relatif à la prévention et à la répression de la violence fondée sur le genre et à la lutte contre cette violence, demande au groupe armé qu’est la Plateforme de mettre en œuvre les engagements énoncés dans son Communiqué sur la prévention des violences sexuelles liées au conflit au Mali de juin 2016, et au groupe armé qu’est la coalition Coordination de prendre des engagements similaires, et prie la MINUSMA de soutenir les efforts déployés à cet égard;

59.   Prie le Secrétaire général de veiller à ce que la Mission respecte à la lettre la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles, et de le tenir informé de tous cas de conduite répréhensible au regard de cette politique, et prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de prendre des mesures de prévention appropriées, notamment l’organisation d’une formation de sensibilisation avant le déploiement, et de faire en sorte que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes aient à en répondre pleinement;

60.   Demeure gravement préoccupé par l’ampleur de la crise alimentaire et humanitaire qui continue de sévir au Mali, et par l’insécurité qui entrave l’accès humanitaire, et invite les États Membres et les organisations internationales et régionales à répondre rapidement à l’appel humanitaire et à contribuer plus généreusement encore;

Questions relatives à l’environnement

61.   Prie la MINUSMA d’être sensible aux effets qu’ont sur l’environnement les activités qu’elle mène pour exécuter les tâches qui lui sont confiées et de maîtriser ces effets, selon qu’il convient et conformément aux résolutions de l’Assemblée générale et aux règles et règlements applicables de l’ONU;

Atténuation de la menace des armes légères et de petit calibre et des engins explosifs

62.   Demande aux autorités maliennes de s’attaquer au problème de la prolifération et du trafic d’armes légères et de petit calibre, notamment en mettant en place un dispositif sûr et efficace de gestion, d’entreposage et de sécurisation des stocks d’armes et de munitions, conformément à la Convention de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes et au Programme d’action sur les armes légères et à la résolution 2220 (2015);

63.   Demande aux autorités maliennes de resserrer la coopération avec l’Organisation des Nations Unies, les organismes régionaux et infranationaux et le secteur privé afin de réagir de la manière la plus appropriée face à la menace des engins explosifs;

Rapports du Secrétaire général

64.   Prie le Secrétaire général de lui faire rapport tous les trois mois après l’adoption de la présente résolution sur la suite donnée à celle-ci, en particulier:

i)    sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord et l’élaboration et l’exécution d’une stratégie globale axée sur les aspects politiques et visant à rétablir la présence et l’autorité de l’État et les services sociaux de base dans le centre du Mali, à protéger les civils et à réduire les violences intercommunautaires, ainsi que sur l’action menée par la MINUSMA pour faciliter la réalisation de ces objectifs;

ii)   sur la coordination, l’échange d’informations et, selon qu’il convient, l’appui opérationnel et logistique entre la MINUSMA, les Forces de défense et de sécurité maliennes, la Force conjointe du G5 Sahel, les forces françaises et les missions de l’Union européenne au Mali;

65.   Prie également le Secrétaire général, lorsqu’il sollicitera les vues de toutes les parties prenantes, y compris le Représentant spécial, en consultation avec le Commandant de la force, d’adresser tous les six mois au Conseil de sécurité une lettre comportant exclusivement et de manière approfondie:

i)    des informations sur les problèmes de sécurité au Mali, les progrès dans les opérations de la mission, la performance et la relève des contingents, ainsi qu’ainsi qu’une mise à jour des débats à l’Instance de coordination au Mali sur la coordination des responsabilités en matière de sécurité, comme énoncé au paragraphe 33 ci-avant;

ii)   une mise à jour sur l’application du cadre stratégique intégré susmentionné, qui comprenne un plan de transition visant à déléguer certaines tâches à l’équipe de pays des Nations Unies, en fonction des mandats et des avantages relatifs de chaque entité et sur la base d’un recensement des capacités et des lacunes, une stratégie de mobilisation des ressources faisant intervenir tous les partenaires multilatéraux et bilatéraux, ainsi qu’un éventuel plan de retrait à long terme de la Mission en prenant pour critères l’amélioration des conditions de sécurité et de la situation politique, ainsi que les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord;

66.   Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a déclaré que la résolution adoptée aujourd’hui envoie un message ferme quant à la nécessité de progrès urgents dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Elle définit cinq mesures, concrètes et réalistes, dont le Conseil de sécurité souhaite voir la pleine réalisation d’ici un an et dont la mise en œuvre fera l’objet d’un premier bilan à mi-parcours par le Secrétaire général d’ici six mois, a rappelé le représentant.  Les conséquences associées à l’absence de respect de cet objectif sont également clairement établies: ceux qui bloquent la mise en œuvre de l’Accord s’exposent aux sanctions, a souligné M. Delattre. 

La résolution 2480 (2019) tire également les conséquences de la dégradation de la situation dans le centre du Mali, a ajouté le représentant, et elle appelle les autorités maliennes à y déployer sans délai une stratégie globale pour mettre fin aux violences et assurer le retour de l’État.  La résolution demande à la Mission de veiller à consacrer suffisamment de moyens à son mandat dans le centre du pays.  La résolution trace également une perspective claire s’agissant de l’avenir de la MINUSMA, en établissant que sa stratégie de sortie repose sur le redéploiement des forces armées maliennes sur l’ensemble du territoire malien ainsi que sur la pleine opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, sans pour autant porter atteinte aux efforts consentis jusqu’ici pour la stabilisation du Mali et du Sahel. 

Le Conseil de sécurité continue, à cet égard, de promouvoir une logique de partenariats entre les différentes présences de sécurité déployées sur le terrain, dans le respect des mandats de chacun, a estimé M. Delattre.  À ce titre, il étend le périmètre géographique du soutien apporté par la MINUSMA à la Force conjointe du G5 Sahel dans le cadre de l’accord technique, pour autant que toutes livraisons au-delà des frontières maliennes soit réalisées par un tiers, et en contrepartie d’un engagement du Conseil à réexaminer le dispositif mis en place par la résolution 2391 (2017) d’ici un an. 

Conformément aux recommandations formulées dans le cadre de la stratégie Action pour le maintien de la paix, cette résolution entend octroyer « un mandat clair, réaliste et concis » à la MINUSMA, a réitéré le représentant.  En outre, elle rappelle l’importance du respect par le Mali de ses obligations en vertu du Statut de Rome.  « Il s’agit d’un point absolument essentiel sur le chemin vers la stabilité durable », a prévenu M. Delattre qui s’est dit convaincu qu’au Sahel, plus que partout ailleurs, il importe que l’ONU et les gouvernements locaux prennent pleinement en compte dans leurs actions les impacts sécuritaires des changements climatiques et des autres facteurs environnementaux. 

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a expliqué le vote en faveur du texte de la part des pays africains membres du Conseil (Guinée équatoriale, Afrique du Sud et Côte d’Ivoire).  Il a expliqué que ces pays ont voté en faveur du texte dans l’intérêt de la paix, de la sécurité et de la stabilité du Mali et de la région du Sahel.  Il a aussi estimé que le maintien de la présence de la MINUSMA au Mali est essentiel à la stabilité de ce pays et de l’ensemble de la région du Sahel.  Ces pays encouragent les autorités maliennes à redoubler d’efforts, avec le soutien de la MINUSMA, afin d’appliquer pleinement l’accord de paix, indispensable à la matérialisation de sa vision politique, économique et de développement, ceci dans l’intérêt supérieur du peuple malien. 

Par ailleurs, ces délégations s’inquiètent du fait que les questions concernant la stratégie de transition et de retrait de la MINUSMA sont d’ores et déjà évoquées alors même que la situation au Mali est encore instable.  Le délégué a donc rappelé que les discussions sur les transitions et les mandats des opérations de maintien de la paix doivent se faire à l’aune d’une évaluation factuelle et approfondie des conditions politiques et sécuritaires sur le terrain.  De surcroît, de telles discussions ne doivent être envisagées que lorsque les circonstances sur le terrain connaissent une amélioration substantielle, a-t-il estimé.

Les trois pays africains du Conseil ont aussi réitéré leur adhésion au soutien de la MINUSMA à la Force conjointe du G5 Sahel, tout en se félicitant du fait que cette question continue de retenir l’attention du Conseil de sécurité. 

En ce qui concerne les sanctions, le représentant a dit que, dans le principe, elles peuvent être adoptées en tant qu’instruments utiles pour contribuer de manière constructive à un processus politique, comme le prévoit la Charte des Nations Unies.  Les pays africains sont toutefois préoccupés de l’approche adoptée par la résolution et du contexte dans lequel les sanctions peuvent être utilisées, craignant que cela ait des conséquences inattendues sur les processus politiques.  Les trois délégations attirent également l’attention des membres du Conseil de sécurité sur la nécessité de respecter la procédure régulière du Comité des sanctions, avant de souligner qu’il est important de laisser aux membres du Conseil suffisamment de temps pour délibérer sur les questions dont ils sont saisis.  En conclusion, la Guinée équatoriale, l’Afrique du Sud et la Côte d’Ivoire ont encouragé toutes les parties maliennes, y compris les femmes, à participer pleinement et sans exclusive au processus politique de sortie de crise au Mali. 

M. JOSUÉ ANTINOE FIALLO BILLINI PORTORREAL (République dominicaine) a indiqué avoir voté en faveur de la résolution parce que convaincu que la MINUSMA doit continuer à appuyer les efforts des parties maliennes en matière de sécurité et de stabilité.  La Mission doit aussi poursuivre son mandat de soutien à l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Toutes les parties maliennes ont intérêt à appliquer l’Accord, a insisté le représentant qui a, dans la foulée, regretté la diminution du nombre des membres féminins au sein de la MINUSMA.  Il a aussi déploré l’occasion manquée de consacrer des dispositions à l’impact des changements climatiques dans la résolution qui est selon lui « l’un des grands défis auxquels le Mali fait face ».

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a expliqué que ce nouveau mandat devrait permettre à la MINUSMA de s’impliquer davantage dans le centre du pays afin d’appuyer les efforts du Gouvernement pour stabiliser cette région en proie à des conflits intercommunautaires.  Le représentant s’est impatienté face à la lenteur de la mise en place de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, avant de terminer en souhaitant un avenir de paix pour le peuple malien. 

Mme KARIN GOEBEL (Allemagne) a souligné quatre aspects de la résolution qui, en premier lieu, confirme la priorité stratégique de la Mission, à savoir l’appui à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  En deuxième lieu, la MINUSMA a aujourd’hui une série de tâches clairement définies afin de soutenir le Gouvernement malien à affronter la crise dans le centre du Mali.  La représentante a salué le fait que la nécessité d’un appui opérationnel de la Mission à la Force conjointe du G5 Sahel ait été reconnue.  Elle a en revanche regretté que la résolution ne fasse pas mention des négociations sur les impacts des changements climatiques sur la stabilité et la sécurité au Mali.  Ce sont des défis que la communauté internationale doit relever collectivement et urgemment, a-t-elle estimé. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a salué le fait que la résolution mentionne le fait que la responsabilité de stabiliser le Mali revient en premier lieu au Gouvernement.  La délégation regrette cependant que la résolution ne reconnaisse pas assez l’impact des changements climatiques sur la situation sécuritaire dans le pays.  Elle a invité les Nations Unies, pour l’avenir, à tenir compte des changements climatiques dans toute stratégie qui sera mise en œuvre au Mali.

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a dit qu’il est important de soutenir le Mali à restaurer l’autorité de l’État et à protéger les populations.  La résolution contient à son avis des « critères clairs et précis » pour la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Selon le représentant, la MINUSMA dispose maintenant d’un mandat approprié pour accomplir sa mission et faire face à la situation catastrophique dans le centre et le nord du Mali. 

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a souligné la nécessité de donner à la MINUSMA un mandat adéquat pour faire face à l’escalade de la violence et responsabiliser les parties signataires, ce que la résolution adoptée aidera à accomplir.  Il a salué le fait que le centre du Mali, la région la plus dangereuse du pays, soit désormais au cœur de la seconde priorité stratégique de la Mission, visant à renforcer le soutien aux efforts du Gouvernement malien pour améliorer la protection des civils et le respect des droits de l’homme en rétablissant dans le centre une présence de l’État constructive et respectueuse de ces droits.  Le délégué a en même temps rappelé qu’il revient en premier lieu au Gouvernement malien d’assurer la sécurité dans cette région. 

Les États-Unis ne cachent pas leur déception devant la lenteur de la mise en œuvre de l’accord de paix de 2015, a dit le délégué américain avant de rappeler que le texte adopté ce matin prévoit des critères d’évaluation des progrès dans les dispositions de l’Accord relatives à la politique et à la sécurité.  Nous nous attendons à ce que les parties réalisent rapidement des progrès significatifs par rapport à ces critères, a-t-il dit. 

Pour renforcer cette attente, il a noté que le Comité des sanctions est sur le point de désigner davantage de personnes sous le régime de la résolution 2374, ce qui enverra un message clair aux parties que le Conseil tiendra responsables ceux qui bloquent les progrès dans la mise en œuvre de l’Accord.

Il a rappelé que la MINUSMA est une mission particulière qui évolue dans un environnement sécuritaire marqué par la présence d’extrémistes ciblant les Casques bleus.  Il a apprécié en particulier l’appel de la résolution à améliorer la performance des troupes et de la police de la Mission.  Le représentant a aussi noté avec satisfaction que la résolution prévoit l’élaboration par la MINUSMA d’un plan de transition pour un transfert progressif des responsabilités au Gouvernement malien. 

En outre, les États-Unis notent que le texte fait référence à la Cour pénale internationale (CPI) à laquelle ils ne sont pas liés, puisque non signataires du Statut de Rome.  M. Hunter a tenu cependant à rappeler l’attachement des États-Unis à la justice internationale, notamment dans des situations de crime contre l’humanité ou pour les cas de génocide.

La délégation a salué par ailleurs le fait que le texte prévoie un appui aux contingents de la Force conjointe du G5 Sahel qui opèrent en dehors du Mali, par la fourniture de biens consommables, par le biais du mécanisme de soutien remboursable prévu dans la résolution 2391 et dans l’accord technique entre l’ONU, l’UE et le G5.  Il a dit attendre une évaluation de cette option par le Secrétaire général pour examiner la nécessité de maintenir ce mécanisme ou non.

Pour le représentant des États-Unis, le terrorisme est une réalité pour le Sahel comme pour d’autres régions du monde.  Il a donc suggéré d’appréhender cette question au cours d’un débat plus large sur les défis du terrorisme en Afrique de l’Ouest, en tenant par exemple compte des efforts déployés dans la région pour lutter contre ce fléau.  Il a enfin dit espérer que les parties maliennes voient en cette nouvelle résolution une invitation à mettre en œuvre l’accord de paix. 

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a observé qu’à travers l’adoption de cette résolution, le Conseil de sécurité envoie un message d’unité quant à la situation au Mali.  Par ce texte, le Conseil confirme que le rôle de la MINUSMA dans ce pays reste important.  Le représentant a souhaité voir renforcer la présence de la Mission dans le centre du Mali pour restaurer la présence de l’État.  Ceux qui font obstacle à ce processus doivent en être tenus responsables, a averti le représentant. 

M. ALEXANDER V. REPKIN (Fédération de Russie) a insisté sur le fait que le rôle premier de la MINUSMA doit être d’accompagner l’accord de paix de 2015.  Il a aussi dit que les sanctions doivent être appliquées avec prudence par le Conseil de sécurité, notamment après avis d’experts. 

Pour la Fédération de Russie, toute question majeure du maintien de la paix doit faire l’objet de discussions au sein du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, notamment avec la contribution des pays contributeurs de contingents.  En ce qui concerne la stratégie d’amélioration de l’efficacité des missions de maintien de la paix, évoquée dans la résolution, il a rappelé qu’elle fait toujours l’objet de discussions et que, dès lors, elle ne devrait pas figurer dans le texte adopté.  Malheureusement, cet avis n’a pas retenu l’attention au cours des négociations, a-t-il regretté, avant d’appeler à des mesures conséquentes pour éviter des abus de la part des délégations porte-plume. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a apprécié que le rapport du Secrétaire général insiste sur l’importance de la présence de la MINUSMA au Mali.  La restauration de l’autorité de l’État et le redéploiement des Forces de défense et de sécurité réformées et reconstituées sont aussi importants, a-t-il ajouté.  À cet égard, le renouvellement du mandat de la Mission, avec la hiérarchisation de ses tâches, ainsi que la coordination avec d’autres présences de sécurité au Mali et dans la région du Sahel et une division du travail avec l’équipe de pays des Nations Unies sont des mesures qui permettront de nouveaux progrès et empêcheront la détérioration de la situation au Mali, à son avis.  Il y a de nombreux domaines dans lesquels il faut davantage progresser, a ajouté le représentant en espérant des progrès dans les mois à venir sur un ensemble de mesures prioritaires énumérées par la résolution.  Avant de terminer, il a demandé à toutes les parties maliennes d’avoir la volonté politique d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. 

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a été d’avis que la situation au Mali requiert la poursuite du mandat de la MINUSMA.  De plus, a-t-il estimé, la sécurité au Mali est liée à celle des pays voisins et de toute la région.  C’est pourquoi la Chine souhaite que la MINUSMA poursuive son soutien au G5 Sahel, a dit le représentant. 

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a dit qu’il avait voté en faveur de l’adoption de la résolution car il faut selon lui que la MINUSMA ait un mandat fort et qu’elle puisse travailler efficacement dans le contexte de la situation sécuritaire actuelle au Mali.  De l’avis du représentant, les dispositions de la résolution apportent une réponse adéquate à la situation, ce qui permettra sans doute de faire des progrès dans le domaine politique, a-t-il espéré.  Elle apportera à coup sûr une solution aux nombreux problèmes dans le centre du Mali en particulier le défi sécuritaire, a déclaré le représentant. 

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a promis qu’il allait transmettre les observations faites par les membres du Conseil aux autorités maliennes.  Il a assuré de la volonté de son gouvernement de poursuivre la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  En ce moment, a-t-il annoncé, les parties maliennes travaillent sur une nouvelle feuille de route, assortie de tâches et de chronogrammes réalistes, qui sont conformes aux étapes prévues par la résolution de ce matin. 

Par ailleurs, le Cadre politique de gestion de la crise au centre du Mali, présenté par le Gouvernement est, a expliqué M. Konfourou, la réponse holistique combinant l’approche politique et l’approche militaire.  De même, le processus d’organisation du dialogue inclusif voulu par le Président malien est entré dans sa phase active, notamment avec l’installation des éminentes personnalités nationales chargées de le conduire, a-t-il dit. 

Revenant sur la résolution adoptée par le Conseil, le représentant s’est félicité du fait que la MINUSMA ait pour mandat de continuer d’accorder une priorité stratégique à l’appui de la mise en œuvre de l’accord de paix.  M. Konfourou a aussi salué le fait que le texte prévoie comme seconde priorité stratégique pour la MINUSMA le soutien au Mali et à ses forces armées et de sécurité, en vue de la stabilisation durable de la situation sécuritaire dans les régions du centre du Mali.  Il a terminé en rappelant que ce nouveau mandat nécessite la mise à disposition de moyens matériels, financiers et humains adéquats.  C’est pour cette raison, a-t-il justifié, que le Gouvernement du Mali ne cesse de plaider pour voir les capacités opérationnelles de la MINUSMA renforcées, de manière à permettre à la Mission d’accomplir pleinement et efficacement son mandat. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité de la décolonisation entend les pétitionnaires de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie, de Guam, des Îles Turques et Caïques et des Îles Vierges Britanniques

Session de 2019, 
9e & 10e séances plénières – matin & après-midi
AG/COL/3339

Le Comité de la décolonisation entend les pétitionnaires de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie, de Guam, des Îles Turques et Caïques et des Îles Vierges Britanniques

Aujourd’hui, le Comité spécial de la décolonisation a multiplié les auditions de pétitionnaires et adopté ses résolutions « traditionnelles » sur huit territoires non autonomes et sur l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.

Le Chef du Bureau des affaires internationales de la Présidence a été clair: « La Polynésie française n’est pas une colonie.  C’est un pays autonome, qui se gouverne lui-même tout en faisant librement partie de la République française ».  Il a parlé d’une situation « choisie et revendiquée par la grande majorité des Polynésiens », comme le montrent les résultats des scrutins démocratiques locaux où en mai 2018, les partis autonomistes ont obtenu 76,9% des suffrages.  Autonomie?  La pétitionnaire de l’« Association de l’Union chrétienne des Jeunes de Polynésie » en a douté.  La réinscription en 2013 de la Polynésie sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU a été un moment « historique » mais le peuple en attend toujours les résultats, a-t-elle fait savoir.

La France maintient un contrôle total sur les ressources naturelles et exerce sa souveraineté sur les eaux polynésiennes sans le consentement des communautés côtières, a renchéri le pétitionnaire de l’« Association Mporuroa E Tatou ».  Lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle, le Président Emmanuel Macron avait affirmé que le colonialisme est un crime contre l’humanité pour lequel des excuses s’imposent.  Mais aujourd’hui, la France fait de son mieux pour que l’on oublie cette question, a ajouté le pétitionnaire de l’« Église protestante Ma’ohi ».  Le Parlement français se propose même aujourd’hui d’adopter une loi organique sur la contribution « positive » de la Polynésie au programme nucléaire français.  C’est une « provocation » et une « vision scandaleuse » des souffrances du peuple ma’ohi qui a vu une hausse de 30% des taux de cancer, a affirmé le pétitionnaire du « Cabinet d’avocats Neuffer ».

De leur côté, le Président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie et le représentant du Front de libération nationale kanak socialiste (FNKLS) ont dénoncé les irrégularités dans le référendum du 4 novembre 2018 dernier à l’issue duquel 43,33% des votants se sont prononcés en faveur de la pleine souveraineté du pays.  Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui présentait le projet de résolution dont est saisi le Comité spécial, a relevé que le taux de participation était de 81,01%.  Mais qu’est-il advenu des 19% restants? a-t-il demandé, en dénonçant le système du vote par procuration qui a écarté les jeunes étudiants kanaks en France et ailleurs, et les prisonniers; l’inefficacité des bureaux de vote décentralisés; l’absurdité d’un système électoral qui a rejeté l’inscription de beaucoup de Kanaks; et les nombreuses erreurs administratives qui ont écarté des électeurs.  Le représentant a aussi noté que 4 066 Kanaks inscrits dans l’annexe des listes électorales pour les élections provinciales ont été empêchés d’exercer leur droit de vote.  

Le second référendum, sur les trois prévus par l’Accord de Nouméa, doit impérativement rectifier les choses, ont dit les intervenants qui ont aussi constaté le retard pris par la France, Puissance administrante, dans le transfert des compétences non régaliennes, en particulier l’enseignement supérieur, la communication audiovisuelle et le régime du contrôle de légalité des provinces, des communes et de leurs établissements publics et du régime comptable et financier des collectivités publiques. 

Les pétitionnaires de Guam ont fait part de la « frustration » du gouvernement local face au manque de souplesse de la Puissance administrante, les États-Unis, dans le dossier du transfert des terres à leurs propriétaires originels.  La militarisation joue un rôle « énorme » dans l’emprise coloniale de Guam qui connaît actuellement la plus importante expansion militaire de son histoire récente, a dit le Directeur exécutif de la Commission de la décolonisation.  Sans un véritable processus de décolonisation, notre opinion et nos conseils demeureront ceux de subordonnés, sans aucune autorité juridique pour influencer les décisions, a constaté le Lieutenant-gouverneur de Guam.

L’un des deux pétitionnaires des Îles Turques et Caïques a déploré la dégradation de la situation et dénoncé avec virulence la recommandation de la Commission des affaires étrangères du Parlement britannique de mettre en œuvre « par la force ou par décret », trois lois dans les territoires d’outre-mer: la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe; le remplacement du système « d’appartenance » des Turques et Caïques par un droit « automatique » pour tout citoyen britannique ou du Commonwealth à devenir citoyen des Îles Turques et Caïques, avec droit de vote et droit de se porter candidat aux élections; et l’imposition d’un registre qui permettrait au Royaume-Uni « d’espionner » comme il veut, les avoirs financiers de n’importe quel client d’une banque off-shore installée aux Îles Turques et Caïques.  Le « rapport de force » que le Royaume-Uni établit ainsi a également été dénoncé par l’Envoyé spécial du Premier Ministre des Îles Vierges britanniques.

Tous les pétitionnaires ont insisté pour que le Comité spécial effectue une visite dans leur territoire, comme il l’a décidé pour Montserrat. 

Le Comité a adopté sans mise aux voix les projets de résolution traditionnels relatifs à l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies, les Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes, l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, ainsi que sur les territoires non autonomes suivants: Montserrat, les Samoa américaines , Anguilla, les Bermudes, les Îles Caïmanes, Pitcairn, Sainte-Hélène et les Îles Vierges américaines.

Le Comité a également adopté les recommandations et conclusions de son Séminaire des Caraïbes (A/AC.109/2019/CRP.2) qui s’est tenu à la Grenade du 2 au 4 mai 2019.  

COMITÉ SPÉCIAL CHARGÉ D’ÉTUDIER LA SITUATION EN CE QUI CONCERNE L’APPLICATION DE LA DÉCLARATION SUR L’OCTROI DE L’INDÉPENDANCE AUX PAYS ET AUX PEUPLES COLONIAUX

Questions des Îles Vierges britanniques (A/AC.109/2019/4) (A/AC.109/2019/L.14)

Audition d’un pétitionnaire

L’Envoyé spécial du Premier Ministre des Îles Vierges britanniques, M. ELIEZER BENITO WHEATLEY, a déclaré que l’objectif de sa présence « n’est pas d’embarrasser le Royaume-Uni, ni d’exiger l’indépendance des Îles Vierges Britanniques ».  La priorité, c’est de remettre l’économie sur pied après le passage des ouragans Irma et Maria, et d’obtenir le respect des droits de nos habitants, comme le stipule la Charte des Nations Unies. 

Après les destructions causées par les ouragans, beaucoup reste à faire même si la situation s’est plus ou moins normalisée.  Nous avons toujours besoin, a dit l’Envoyé spécial, de l’aide de nos partenaires.  Il a remercié le Royaume-Uni et les Nations Unies pour le soutien reçu, se félicitant de la coopération renforcée avec l’ONU, et en particulier l’assistance technique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) à la mise en place d’une économie durable.  Les Îles Vierges Britanniques souhaitent d’ailleurs devenir membre associé de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED).

En général, a reconnu l’Envoyé spécial, le Royaume-Uni a été un bon partenaire mais notre engagement auprès du Comité spécial, « c’est notre droit ».  Il a reproché au Royaume-Uni d’avoir établi un rapport de force s’agissant du secteur de l’immobilier, de la lutte contre les flux financiers illicites ou encore du mariage entre deux personnes de même sexe que « nous refusons de reconnaître ».  M. Wheatley a, une nouvelle fois, appelé le Comité à effectuer une visite dans le terrain et a espéré que le Royaume-Uni donnera son accord, comme il l’a fait avec Montserrat.

M. Wheatley a également appelé le Comité spécial à aider le territoire à prendre une décision informée sur les trois opérations de la décolonisation, en pensant en particulier à la libre association. 

Questions de Guam (A/AC.109/2019/9) (A/AC.109/2019/L.16)

Audition de pétitionnaires

M. JOSHUA TENORIO, Lieutenant-gouverneur de Guam, a indiqué que l’approbation, en 1987, de la loi sur le Commonwealth est jusqu’ici le stade le plus avancé sur le plan de la décolonisation.  Une mission du Comité spécial, a-t-il argué, permettrait d’éveiller la conscience de la Puissance administrante et d’accorder la priorité à la décolonisation.  Il a décrié les processus juridiques imposés par les États-Unis qui entravent directement la capacité du Gouvernement du Guam à exécuter son mandat.

La Puissance administrante, a-t-il poursuivi, n’a pas donné suite à la proposition du Gouvernement de Guam sur une voie constructive vers un statut souverain.  L’équipe américaine n’a pas négocié de bonne foi tout comme elle n’a pas réussi à concilier le choix de sa bureaucratie avec notre besoin de justice et d’équité, a-t-il déploré.  Dans le respect de la résolution 1541 de l’Assemblée générale des Nations Unies, Guam a donc lancé un processus pour que son peuple s’exprime sur son futur statut politique.  Mais ce processus a été stoppé net par les tribunaux américains, même si les résultats de la consultation auraient eu un caractère non contraignant.

M. Tenorio a relevé que la résolution du Comité spécial ne reflète pas correctement la question du transfert des terres aux propriétaires originels du territoire.  Le dernier transfert remonte à 2011 et les terres qui ont été identifiées en 1977 n’ont toujours pas été transférées.  D’autres le sont effectivement mais entre les agences militaires et civiles de la Puissance administrante.  Dans sa résolution, le Comité devrait donc prier cette dernière de transférér les terres et non de « continuer » à le faire.  Ce programme de transfert est inefficace depuis 30 ans, a tranché le pétitionnaire. 

Il s’est attardé sur le cas des 1 217 hectares de Puntan Litekyan qui devaient être restitués aux propriétaires originels mais qui ont fini par être revendiqués par la Puissance administrante.  Cette dernière a donc pu créer une aire de protection de la faune, en transférant les terres entre ses agences et donc en privant de leurs droits légitimes les propriétaires originels.  Comme si cela ne suffisait pas, l’armée américaine a décidé d’utiliser 300 hectares à proximité de Litekyan pour construire un champ de tir, ce qui peut surprendre dans une zone censée protéger la faune.  On nous dit, s’est emporté le pétitionnaire, que ce champ de tir est important pour former l’armée, servir les intérêts géopolitiques et défendre Guam face à de prétendus « rivaux dans le monde ».  Mais en dépit des évaluations environnementales et les enquêtes culturelles qu’a dit avoir menées la Puissance administrante, l’armée a maintenu sa décision de construire le champ de tir alors qu’il y a des alternatives raisonnables.

M. Tenorio n’a pas caché la « frustration » du gouvernement local qui ne cesse d’appeler la Puissance administrante à la souplesse sur ce dossier.  Nous ne pouvons qu’espérer qu’elle trouvera une alternative mais nous savons aussi que, sans un véritable processus de décolonisation, notre opinion et nos conseils demeureront ceux de subordonnés, sans aucune autorité juridique pour influencer les décisions.  Le Comité spécial doit vraiment effectuer une visite à Guam qui vit une situation complexe, a conclu le pétitionnaire.

M. MELVIN WON PAT-BORJA, Directeur exécutif de la Commission de la décolonisation, de Guam, a expliqué que l’éducation sur l’autodétermination demeure une priorité du Gouvernement de Guam qui a lancé un plan stratégique tentant d’exploiter au mieux les ressources limitées du territoire.  Une « petite » bourse a été allouée par le Département de l’intérieur américain, mais cette somme sera complètement épuisée le 30 septembre prochain et l’on ne sait toujours pas si la Puissance administrante continuera de financer ce plan. 

Le gouvernement local et le gouvernement fédéral semblent avoir des perspectives très différentes sur le processus de décolonisation.  Le système de justice fédéral est en train d’être utilisé pour entraver notre élan, les contentieux ayant immobilisé notre action.  Le pétitionnaire a expliqué que la législation locale reflète la résolution 1541 de l’Assemblée générale mais que les options sur lesquelles doit se prononcer le peuple pendant le plébiscite prévu continuent d’être un point d’achoppement.  Beaucoup d’entre nous sont découragés par l’échec des négociations et la majorité peine à comprendre le rôle de l’ONU dans ce processus.  Face à un peuple sans souveraineté qui n’arrive pas à obtenir le consentement de sa Puissance administrante, l’ONU doit faire en sorte que notre voix soit entendue, a pressé le pétitionnaire.

M. Won Pat-Borja a rappelé que la militarisation joue un rôle « énorme » dans l’emprise coloniale de Guam qui connaît actuellement la plus importante expansion militaire de son histoire récente.  Notre statut nous rend impuissants dans les négociations avec la Puissance administrante et le Japon.  Aujourd’hui, l’armée américaine estime que Guam est le « lieu idéal » pour relocaliser les « Marines » d’Okinawa.  Le fait que le territoire soit considéré comme relevant de sa souveraineté, permet à l’Administration américaine d’aller de l’avant sans « nous écouter ».  Le pétitionnaire a dénoncé le manque de respect flagrant pour les sites et objets historiques et les restes des ancêtres découverts lors de la construction du champ de tir à Litekyan.  Malgré la résistance et les manifestations, nos préoccupations sont ignorées. 

L’Accord programmatique de 2009 est la seule expression tangible de la voix de Guam, a dit le pétitionnaire, mais même cet accord est critiqué.  Le gouvernement local coopère de bonne foi avec la Puissance administrante et participe constructivement aux négociations même sans véritable représentation.  Mais, a prévenu le pétitionnaire, nous commençons à en avoir assez de cette « course folle ».  Nous commençons à nous méfier « des carottes » que l’on agite devant nous car elles pourraient n’être encore une fois que des promesses vaines.

Questions des Îles Turques et Caïques (A/AC.109/2019/15) (A/AC.109/2019/L.20)

Audition de pétitionnaires

M. BENJAMIN ROBERTS, Forum des Îles Turques et Caïques, a regretté l’absence de progrès, en parlant d’une détérioration de la situaation « à cause » de la Puissance administrante.  Il a attiré l’attention sur le dernier rapport de la Commission des affaires étrangères du Parlement britannique qui recommande de mettre en œuvre « par la force ou par décret », trois lois dans ses territoires d’outre-mer, dont les Îles Turques et Caïques.  Il s’agit de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe; et du remplacement du système « d’appartenance » des Turques et Caïques par un droit « automatique » pour tout citoyen britannique ou du Commonwealth à devenir citoyen des Iles Turques et Caïques, avec droit de vote et droit de se porter candidat aux élections.  Il s’agit enfin de l’imposition d’un registre qui permettrait au Royaume-Uni « d’espionner » comme il veut, les avoirs financiers de n’importe quel client d’une banque off-shore installée aux Îles Turques et Caïques.

Où sont l’esprit et la lettre de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies? s’est indigné le pétitionnaire.  Comprenez-vous pourquoi cet Article est si important pour nous et pourquoi une visite du Comité spécial est indispensable pour constater de visu « les abus » de la Puissance administrante?  Il est également revenu sur la vague migratoire qui s’est abattue sur les Îles à partir « de l’un de ses voisins ».  Mais cela, c’est une question à laquelle le Royaume-Uni reste totalement indifférente, a-t-il taclé. 

M. ALPHA GIBBS, Expert comptable des Îles Turques et Caïques, a dénoncé les violations des droits de l’homme commises par la Puissance administrante, le Royaume-Uni, à l’encontre des citoyens nés dans ces Îles; l’absence de responsabilité et le non-respect de l’Article 73 de la Charte.  Il s’est déclaré extrêmement préoccupé qu’en dépit des demandes répétées, le Royaume-Uni n’ait opéré aucun changement.  Au contraire, il continue d’effectuer des « changements de gardes », en nommant des gouverneurs à tour de rôle, sans aucune consultation préalable des représentants élus des Îles Turques et Caïques, ou des citoyens. 

Le pétitionnaire a attiré l’attention sur les rapports du Bureau britannique d’audit qui indiquent que seule une « petite fraction des gouverneurs nommés dans les territoires d’outre-mer sont réellement préparés pour ces postes ».  Le Bureau ajoute que les restrictions constitutionnelles imposées aux citoyens des Îles Turques et Caïques empêchent tout recours contre les manquements d’un gouverneur. 

Le pétitionnaire a également dénoncé l’inefficacité des mécanismes de contrôle des frontières, laquelle favorise la migration clandestine alors que, du point de vue de la Constitution, l’administration de la police et de la défense relève de la responsabilité du gouverneur.  Il faut ajouter à la situation le fait que tous les frais de rapatriement en cas d’interception des migrants sont entièrement à la charge du trésor public des Îles Turques et Caïques et, le plus souvent, que la bonne gouvernance, responsabilité du Gouverneur, n’est pas absolument assurée. 

Le pétitionnaire a aussi attiré l’attention du Comité des 24 sur le fait que, malgré ses multiples résolutions, le peuple est systématiquement exclu des postes de direction, ce qui a créé la fuite des jeunes diplômés à l’étranger.  Il a par ailleurs réclamé le droit de vote des ressortissants des Îles qui résident à l’étranger et dénoncé la tentative de rendre caduque la loi électorale et d’accorder le droit de vote aux non-citoyens.  Il n’a pas manqué de fustiger les diverses mesures prises par le Royaume-Uni pour retarder la croissance et le développement des Îles Turques et Caïques et accélérer un mouvement de recul vers la dépendance.  Il a donc réclamé une évaluation « impartiale et neutre » des conditions de vie dans les Îles et l’envoi d’une mission du Comité spécial qui ne doit pas oublier d’évaluer la situation des droits de l’homme. 

Questions diverses

Le représentant de la République arabe syrienne a indiqué que son Représentant permanent, Rapporteur du Comité spécial, a reçu le 16 avril dernier, copie d’une lettre du Front POLISARIO adressée à la Présidente du Comité.  Cette lettre fait référence à une invitation de cette dernière à participer au Séminaire régional de la Grenade, le 2 avril dernier.  Mais dans la lettre, la Présidente a jugé bon de préciser que le Front POLISARIO devait lui-même couvrir ses frais de voyage. 

Pourtant, s’est étonné le représentant, ces frais ont toujours été couverts par l’ONU pour précisément permettre au Front POLISARIO de participer aux travaux du Comité spécial sur un pied d’égalité.  Nous avons demandé en vain une réunion d’urgence pour discuter de cette situation, s’est impatienté le représentant.  C’est bien la première fois, a-t-il insisté, que l’on demande au Front POLISARIO de couvrir ses propres frais de voyage, dans ce qui semble une décision « unilatérale » de la Présidente du Comité.  « Soit on couvre les frais de tout le monde, soit on ne couvre les frais de personne », a tranché le représentant qui n’a pas manqué de rappeler la prérogative exclusive de la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires de se prononcer sur les questions de financement. 

La Présidente du Comité spécial a rappelé que l’article 6 du règlement intérieur du Séminaire régional lui réserve la prérogative des invitations et du financement des voyages.  Pour la première fois, a-t-elle souligné, le Séminaire a connu la participation de deux participants du Sahara occidental à savoir M. Sidi Mohamed Omar, du Front POLISARIO, et M. Mhamed Abba.  Le Secrétariat de l’ONU m’ayant informée qu’il ne prendrait en charge que les frais d’un seul participant, j’ai décidé que, dans ce cas, aucun des deux participants ne voyagerait aux frais de l’Organisation.

La Présidente a été soutenue par le Chili, la Sierra Leone, la Dominique, la Grenade, la Côte d’Ivoire, l’Indonésie, Antigua-et-Barbuda et St-Kitts et Nevis.

Le représentant de la Syrie a tout de même rappelé que le Secrétariat n’a pas consulté le Bureau du Comité spécial et souligné que l’article 6 du règlement intérieur du Séminaire régional ne dit rien sur le financement ou les invitations.  La Présidente du Comité spécial a appelé les États membres de la région du Pacifique à lui dire, avant le 1er novembre, lequel d’entre eux se porte candidat pour accueillir le prochain séminaire régional.

Question de la Polynésie française (A/AC.109/2019/7) (A/AC.109/2019/L.24)

Audition de pétitionnaires

M. ENGEL RAYGADAS, Chef du Bureau des affaires internationales de la Présidence de la Polynésie française, a mis l’accent sur la diversité du peuple de la Polynésie française -Tahitiens de souche, d’ascendance européenne, asiatique ou mélange des deux, voire de ces trois origines- pour expliquer son unicité et sa tolérance.  « Cette situation qui nous convient parfaitement est rendue possible grâce à notre statut de très large autonomie institutionnelle, établie grâce à un dialogue continu avec l’État français depuis 35 ans. »  Le représentant a qualifié ce statut d’« unique au monde »: une gouvernance démocratique et libre, sans aucune oppression ni confiscation de richesses de la part de la France.

Revenant sur les étapes de la construction et de la reconnaissance de cette autonomie, le représentant a rappelé le nombre important de jeunes polynésiens s’étant engagés dans l’armée française au moment de la Première Guerre mondiale, et de volontaires du territoire engagés en 1940 dans « le célèbre Bataillon du Pacifique ».  C’est après cette deuxième guerre que le général de Gaulle avait proposé une nouvelle forme de relations entre la France et ses colonies, en évoquant même la possibilité d’une décolonisation.  En 1946, dans le cadre de l’Union française, les Établissements français de l’Océanie n’étaient plus une colonie, a poursuivi le représentant, en précisant le statut de Territoire d’Outre-mer (TOM) qu’adoptèrent ces Établissements.  Puis, en 1957, a eu lieu une véritable décentralisation: les élus locaux ont obtenu une autonomie relative par rapport au gouverneur et à la métropole dans un certain nombre de domaines.  Les Établissements français d’Océanie sont alors devenus la Polynésie française.  Lors du référendum constitutionnel de 1958, les TOM restés dans la communauté française et la Polynésie française ont décidé de conserver ce statut.

Le représentant a expliqué que le tournant qui s’est opéré au début des années 1960, avec l’ouverture au monde du territoire, a conduit à des négociations entre les autonomistes polynésiens et le Gouvernement français et à la loi du 12 juillet 1977 accordant à la Polynésie française une autonomie de gestion administrative et financière.  Le remplacement du Gouverneur par un haut-commissaire a aussi permis de rompre avec le système colonial.  Si l’Assemblée territoriale avait de larges pouvoirs, cela ne satisfaisait pas les autonomistes et une nouvelle loi, le 6 septembre 1984, a octroyé un véritable statut d’autonomie interne à la Polynésie française.  Cela a donné lieu à la reconnaissance de l’identité polynésienne, avec un drapeau, un hymne et un ordre de décoration, à une intégration sans précédent de toutes les ethnies et à l’instauration d’une fête officielle le 29 juin.

Si un nouveau bouleversement économique et social a eu lieu depuis la fin des essais nucléaires en Polynésie française en 1996, l’État français a investi chaque année plus d’un milliard et demi d’euros dans le territoire (éducation, communication, santé, solidarité, environnement…), sans oublier les dispositifs de défiscalisation qui ont permis des opérations dans de nombreux secteurs (logement social, transport aérien, tourisme, industrie).

Le représentant a fait valoir le caractère évolutif de l’autonomie polynésienne.  Il a parlé de la loi organique du 27 février 2004 qui accorde à la Polynésie française, désormais appelée « pays d’outre-mer », une autonomie de gouvernement et d’administration très large, inscrite dans la Constitution française.  Un toilettage du Statut d’autonomie a été adopté le 22 mai 2019 par le Parlement français pour plus d’efficacité et pour pouvoir y intégrer des revendications ponctuelles.  La Polynésie française peut désormais adhérer à des organisations internationales, a-t-il donné comme exemple.  Le représentant a dit apporter au Comité un livret réalisé par l’Assemblée de la Polynésie française sur son histoire, pour l’éclairer sur les 35 années de processus d’autonomie. 

« La Polynésie française n’est pas une colonie.  C’est un pays autonome, qui se gouverne lui-même tout en faisant librement partie de la République française. »  C’est ainsi que le pétitionnaire a conclu son intervention en assurant que cette situation est « choisie et revendiquée par la grande majorité des Polynésiens » comme le montrent les résultats des scrutins démocratiques locaux.  En mai 2018, les partis autonomistes ont obtenu 76,9% des suffrages.

Mme TIARE MAOHI TAIRUA, Association de l’Union chrétienne des Jeunes de Polynésie, a fait remarquer que le rapport indépendant sur les essais nucléaires en Polynésie prouve à quel point il est important d’éclairer le Comité spécial sur les menaces auxquelles fait face la Polynésie française.  Ce rapport évoque également le degré « d’autonomie » qui n’en est pas vraiment une, a-t-elle rappelé, avant de se poser des questions sur la volonté réelle des Nations Unies de mettre fin aux processus de décolonisation.  Les « progrès », a-t-elle dit, ne sont en fait que le reflet d’un colonialisme contemporain.  Nous voulons donc donner aux membres du Comité spécial l’occasion d’examiner par eux-mêmes le degré d’autonomie de la gouvernance en Polynésie.  La réinscription du territoire sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU a été un moment « historique » mais le peuple polynésien en attend toujours les résultats. 

M. PHILIPPE NEUFFER, cabinet d’avocats Neuffer, a dénoncé les essais nucléaires et attiré l’attention sur la question des dédommagements.  Après 30 ans d’essais, les conséquences continuent de se faire ressentir, l’équivalent de 720 bombes lancées sur Hiroshima ayant explosé.  Cela fait 20 ans que le dernier essai nucléaire a été effectué et on constate à présent l’ampleur des conséquences sur la santé et l’environnement.  Il a aussi dénoncé la mauvaise gestion des déchets nucléaires qui polluent l’océan de l’ensemble de la région du Pacifique. 

M. Neuffer a accusé la Puissance administrante d’avoir présenté les essais nucléaires comme « un risque négligeable ».  Des centaines de demandes de réparations ont été présentées maintenant que la population connaît un taux de cancer de 30% de plus qu’auparavant.  Il a indiqué que l’Assemblée nationale avait voté, en février 2017, un texte sur le retrait de la mention du « risque négligeable ».  Mais, ce libellé a de nouveau été inséré grâce à un amendement à la loi de 2019 sur les critères de l’établissement des responsabilités.  Il a déploré qu’une évolution si importante ne soit pas reflétée dans la résolution.

M. FRANÇOIS PIHAATAE, Association Mporuroa E Tatou, s’est félicité de ce que l’Assemblée générale reconnaisse « progressivement » le droit de la Polynésie française, Ma’ohi, au contrôle de ses ressources naturelles et marines.  Il a accusé la Puissance administrante, la France, de ne pas respecter le droit international dans ce domaine puisqu’elle exploite et maintient un contrôle total sur les ressources naturelles, privant le peuple polynésien de son droit à l’autodétermination et au développement.  La France continue également d’exercer sa souveraineté sur les eaux polynésiennes sans le consentement des communautés côtières, premières victimes des activités extractives.  La France refuse en outre de nettoyer l’atoll et de dédommager ses habitants qui subissent encore les conséquences des essais nucléaires. 

M. TAAROANUI MARAEA, Église protestante Ma’ohi, a estimé que la Commission du droit international doit être félicitée pour son travail sur les crimes contre l’humanité.  Il a relevé que le document de travail sur Ma’ohi mentionne à peine la plainte présentée à la Cour pénale internationale (CPI).  Pourquoi cela n’est-il pas digne d’être pris en compte par l’ONU?  Est-ce lié aux pressions exercées par la Puissance administrante?  Le pétitionnaire a relevé que, lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle, le Président Emmanuel Macron avait affirmé que le colonialisme est un crime contre l’humanité pour lequel des excuses s’imposent.  Il doit maintenant honorer cet engagement, a affirmé M. Maraea qui a relevé qu’au contraire, la France fait de son mieux pour que l’on oublie cette question.  L’Église a donc pris l’initiative de transmettre une communication spéciale au Conseil des droits de l’homme.  Le pétitionnaire a aussi parlé des procédures en cours, en France, concernant l’adoption d’une loi organique sur la contribution « positive » de la Polynésie au programme nucléaire français.  C’est une « provocation » du Parlement français et une « vision scandaleuse » des souffrances du peuple Ma’ohi.  Il a salué le fait que le paragraphe de la résolution sur cette question ait été modifié.

M. RICHARD TUHEIAVA, membre élu de l’Assemblée Ma’ohi pour le Groupe Tavini Huiraatira, a réaffirmé le droit à l’autodétermination du peuple polynésien, un droit qui a été reconnu par l’Assemblée générale dans ses résolutions à la suite d’un examen approfondi de la relation de dépendance qui existait avec la Puissance administrante en 2013.  Depuis, cette relation n’a pas changé, a-t-il affirmé, ce qui signifie qu’il faut maintenant se doter des moyens de mettre en œuvre le mandat de la décolonisation de l’Assemblée générale, a exigé le pétitionnaire.

Le Comité spécial, a-t-il suggéré, pourrait commencer par renforcer le libellé des résolutions sur la Polynésie française s’agissant des obligations de la Puissance administrante.  Le pétitionnaire a promis de mettre à la disposition du Comité le programme de travail sur Ma’ohi qui a été développé pour mettre en œuvre les procédures prévues par l’Assemblée générale en vue de la décolonisation.  Le programme prévoit notamment une visite du Comité sur place.  Avant de conclure, le pétitionnaire a une nouvelle fois jugé « incompréhensible » la suppression dans la résolution de 2018 du paragraphe qui demandait au Secrétaire général de fournir régulièrement des informations sur les effets des essais nucléaires.  Il a donc salué le fait que le nouveau libellé de la résolution de 2019 reprenne cette demande.

M. JAMES SHRI BHAGWAN, Conseil des Églises du Pacifique, a déploré l’absence de mise en œuvre de la résolution sur la décolonisation et regretté que l’ONU n’ait pas assumé ses responsabilités.  Nous ne comprenons pas cette lenteur alors que le programme de travail sur cette question n’a aucune incidence financière.  Depuis la réinscription de Ma’ohi dans la liste des territoires non autonomes en 2013, notre Conseil n’a cessé de plaider pour que le programme de travail permette la collecte des avis sur la situation « coloniale » de Ma’ohi et la préparation d’un véritable processus de décolonisation, à l’image de celui en cours en Nouvelle-Calédonie.  Il a dénoncé l’ingérence de la Puissance administrante qui viole la Charte puisqu’elle refuse de reconnaître la réinscription de la Polynésie sur la liste des territoires non autonomes.  La coopération entre la Puissance administrante et le Comité spécial est caractérisée par le mépris de la première, a dit le pétitionnaire qui a fait observer que le programme de travail sur Ma’ohi peut être élaboré avec ou sans la Puissance administrante.  La situation actuelle prive en effet les autres États Membres de leur faculté de se prononcer. 

Question de la Nouvelle-Calédonie (A/AC.109/2019/11) (A/AC.109/2019/L.22)

Audition de pétitionnaires

M. ROCH WAMYTAN, Président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, a affirmé que l’analyse de résultats de la consultation du 4 novembre 2018 sur l’accession du pays à la pleine souveraineté montre que la majorité kanak indépendantiste a été rejointe par des personnes d’autres communautés et ce, malgré le fait qu’elle ait été rendue minoritaire dans le corps électoral, depuis plusieurs décennies, par la puissance de tutelle et la colonie de peuplement qu’elle a mise en place.

Les élections provinciales du 12 mai dernier ont abouti, pour la première fois, à une majorité indépendantiste au Congrès, soit 26 élus indépendantistes, 25 non-indépendantistes et 3 du nouveau parti Éveil océanien qui représente la communauté wallisienne et futunienne et qui refuse de se positionner pour un camp ou pour un autre.  Pour M. Wamytan, c’est aussi grâce à cette majorité indépendantiste et aux voix de l’Éveil océanien qu’il a lui-même été porté à la présidence du Congrès, le 24 mai dernier.  Il a vu dans cette élection à majorité océanienne le « signe d’un changement et d’une volonté des Océaniens de construire un pays à leur image, selon leurs valeurs et leur culture ».  Il a expliqué que cette mandature est la dernière de l’Accord de Nouméa, estimant qu’elle est cruciale pour l’avenir du pays puisqu’elle doit être celle de « l’achèvement » de cet accord.   

Cette même mandature doit également veiller à l’achèvement du transfert des dernières compétences, à savoir l’enseignement supérieur, l’audiovisuel et le contrôle de la légalité, a-t-il rappelé, ajoutant qu’il incombe à cette dernière mandature de finaliser l’ensemble des mesures de décolonisation et d’émancipation fixées par l’Accord d’Oudinot d’août 1988 et confirmées par celui de Nouméa, 10 ans plus tard.  Au titre d’autres dossiers importants, il a évoqué l’emploi et l’insertion professionnelle, mais aussi l’exploitation des ressources minières telles le nickel et le cobalt, la Nouvelle-Calédonie étant le deuxième pays au monde, après l’Australie, à détenir des réserves.  Le pétitionnaire a également évoqué l’autonomie financière, l’intégration du pays dans la région océanienne, les nouveaux défis écologiques ou encore la transition énergétique et numérique.  Pour le Président du Congrès, les solutions apportées à ces problématiques permettront à la population calédonienne de se prononcer « en toute connaissance de cause sur la question de l’accession de leur pays à la pleine souveraineté ».

Il a appelé à cet effet de régler les questions liées à l’absence d’un président à la tête du Gouvernement calédonien, à la division de la classe politique et à la méfiance mutuelle.  Il a d’autre part exprimé son inquiétude face aux difficultés qui subsistent autour des listes électorales spéciales pour le prochain référendum et les élections provinciales à venir.  Il a jugé indispensable que l’ensemble des recommandations des rapports des experts de l’ONU soient appliquées et que tous les partenaires de l’Accord de Nouméa s’efforcent de préparer au mieux la population à « exercer son acte d’autodétermination ».  Il a proposé à l’État français de discuter de la question des listes électorales, dans quelques semaines, quand se réunira le Comité des signataires de l’Accord de Nouméa.  Il a enfin dénoncé l’impact négatif de l’immigration des métropolitains qui a rendu le peuple calédonien « minoritaire » dans son propre pays, le « noyant » dans le corps électoral.   

M. MICKAEL FORREST, Front de libération nationale kanak socialiste (FLNKS), a indiqué qu’à l’issue du référendum du 4 novembre 2018, 43,33% des votants se sont prononcés en faveur de la pleine souveraineté du pays.  Ces résultats s’inscrivent dans un contexte où « le peuple kanak a accepté l’inscription des victimes de l’histoire » qui aujourd’hui participent à la construction du pays et qui n’osent pas apporter leur appui au projet de société kanak car « nos adversaires entretiennent la peur du lendemain ».  Le pétitionnaire a regretté que la Puissance administrante rende cette théorie possible, en multipliant les actions de police contre les jeunes et en publiant régulièrement le taux d’emprisonnement à Camp Est, une prison française à Nouméa, caractérisée par la surpopulation des jeunes kanaks. 

Le pétitionnaire a particulièrement dénoncé les prises de position répétées des plus hauts responsables de l’État français en faveur du maintien de la situation « coloniale ».  Pourtant, a-t-il enchaîné, plus de 80% des Kanaks se sont exprimés pour le « oui » à la pleine souveraineté et ils ont été rejoints par beaucoup de citoyens d’origine européenne, polynésienne et asiatique.  Le projet politique du FNLKS pour un État libre et démocratique « doit nous engager à démocratiser davantage notre objectif politique ». 

Il a jugé par ailleurs que le second référendum doit permettre de rétablir la justice pour les quelque 2 800 Kanaks qui n’ont pu s’exprimer en novembre dernier.  Le FLNKS entend appliquer l’Accord de Nouméa à la lettre et convaincre ainsi les indécis pour emporter les 8% de voix manquantes.  Il a par ailleurs constaté le retard pris par la France dans le transfert des compétences non régaliennes, prévu par l’Accord de Nouméa, en particulier l’enseignement supérieur, la communication audiovisuelle, le régime du contrôle de la conformité constitutionnelle des provinces, des communes, de leurs établissements publics, et du régime comptable et financier des collectivités locales.  Il a appelé la Puissance administrante à mettre en œuvre une « véritable plateforme de préparation à la future coopération de la Kanaky/Nouvelle-Calédonie comme un réel partenaire diplomatique ».  Cette plateforme doit être une priorité selon M. Forrest, qui a prié le Comité spécial d’appuyer cette proposition. 

Au nom du Groupe des fers de lance mélanésiens, M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a présenté le projet de résolution dont est saisi le Comité spécial.  Il a insisté sur le plein respect de l’Accord de Nouméa, de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance et des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  Il a salué la participation de la France, Puissance administrante, et son partenariat constructif qui distingue la Nouvelle-Calédonie des autres territoires non autonomes.  Cette année, a-t-il dit, les éléments clefs de la résolution de l’année dernière ont été renforcés.  Le texte reconnaît clairement l’importance et le respect de la feuille de route pour l’autodétermination présentée par la Nouvelle-Calédonie, en vertu de l’Accord de Nouméa, qui prévoit des référendums en 2020 et 2022.  Dans cet esprit, le représentant a appelé toutes les parties impliquées, la Puissance administrante et le Comité spécial à veiller à ce que les prochaines étapes du processus d’autodétermination soient justes, équitables, transparentes et soucieuses des aspirations des Néocalédoniens. 

L’aspect fondamental du projet de résolution, a poursuivi le représentant, c’est l’accent mis sur l’importance critique des listes électorales pour le référendum d’autodétermination et les élections municipales et provinciales, puisque leur complexité et leur accessibilité suscitent de profondes inquiétudes.  Arguant que ces listes nécessiteraient plus de transparence, d’équité, de crédibilité et d’intégrité, il a rappelé que lors du référendum de novembre 2018, 81,01% de l’électorat s’est rendu aux urnes.  Nous voudrions savoir ce qu’il est advenu des 19%, a-t-il dit, en dénonçant le système du vote par procuration qui a écarté les jeunes étudiants kanaks en France et ailleurs, et les prisonniers; l’inefficacité des bureaux de vote décentralisés; l’absurdité d’un système électoral qui a rejeté l’inscription de beaucoup de Kanaks; et les nombreuses erreurs administratives qui ont écarté des électeurs.  Le représentant a noté que 4 066 Kanaks inscrits dans l’annexe des listes électorales pour les élections provinciales ont été empêchés d’exercer leur droit de vote.  Il a en outre plaidé pour que l’on explique mieux aux Néocalédoniens le futur statut politique qu’ils choisiront.  Il s’est aussi inquiété du fossé persistant entre les différents groupes ethniques, en particulier les Kanaks, en termes d’égalité et d’accès aux services de base.  Le coût élevé de ces services rend l’accès des Kanaks et des populations moins nanties problématique.  Il a prôné le renforcement du programme « Cadres pour l’avenir » et un rééquilibrage des initiatives socioéconomiques prises par la Puissance administrante. 

M. PRASAD (Fidji) est revenu sur les lacunes identifiées dans le processus électoral du dernier référendum en Nouvelle-Calédonie et a appelé à y remédier, avec le soutien des Nations Unies, avant les deux prochaines échéances référendaires.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Instrument d’ingérence ou de défense des droits de l’homme, la responsabilité de protéger divise l’Assemblée générale

Soixante-treizième session,
93e & 94e séances plénières - Matin & après-midi
AG/12159

Instrument d’ingérence ou de défense des droits de l’homme, la responsabilité de protéger divise l’Assemblée générale

Signe de la controverse qui entoure ce concept de droit international relativement jeune, l’Assemblée générale a organisé, aujourd’hui, pour la troisième fois seulement depuis sa formulation officielle en 2005, un débat sur la responsabilité de protéger.  Plusieurs États Membres ont à cette occasion dénoncé les « zones d’ombres » entourant ce principe, voire son « utilisation sélective » pour justifier une ingérence dans les affaires « d’États plus faibles ».  D’autres, au contraire, ont appelé l’Assemblée à s’emparer davantage de ce concept fondamental de défense des droits de l’homme, voire d’y consacrer un instrument international dédié.

Les dirigeants du monde entier ont entériné à l’unanimité la responsabilité de protéger en réponse aux génocides qui ont été perpétrés au milieu des années 1990 au Rwanda et à Srebrenica, en Bosnie-Herzégovine, a rappelé à l’entame du débat la Chef de Cabinet du Secrétaire général, Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, en référence au Sommet mondial de 2005.  C’est en effet à cette occasion, à New York, que la responsabilité de protéger, souvent appelée « R2P », est née en tant que norme du droit international.

« C’est à chaque État qu’il incombe de protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité », énonce ainsi le Document final du Sommet, adopté par tous les gouvernements de l’époque lors de la soixantième session de l’Assemblée générale.  « Ce devoir comporte la prévention de ces crimes, y compris l’incitation à les commettre, par les moyens nécessaires et appropriés », précise le document.

Or, 14 ans plus tard, les activités criminelles contre les civils, notamment les femmes et les enfants, prolifèrent, sans parler des violences sexuelles et des attaques prenant pour cible des minorités ethniques, dont certaines pourraient être considérées comme des crimes de génocide, a déploré Mme Ribeiro Viotti.  « Aucun de ces crimes n’est inévitable », a-t-elle ajouté, appelant les États Membres à bâtir, dans le cadre de ce troisième débat sur la R2P, un consensus pour apporter les réponses nécessaires. 

Venue présenter le rapport du Secrétaire général sur la « Responsabilité de protéger: enseignements tirés de l’expérience en matière de prévention », la Chef de Cabinet a toutefois reconnu les craintes légitimes nourries par certains pays envers la R2P, un principe qui comporte selon elle un « risque du deux poids, deux mesures » et « d’utilisation sélective ».  D’où l’importance d’en débattre, a estimé Mme Ribeiro Viotti, soulignant la concomitance opportune de la réunion d’aujourd’hui avec le lancement par M. António Guterres de la Stratégie des Nations Unies pour la lutte contre les discours de haine, le 18 juin dernier.

Le débat, parfois vif, qui s’en est suivi s’est articulé autour de trois principaux thèmes: le devoir individuel qu’a chaque État de protéger sa population et prévenir les crimes dont elle pourrait être victime; la responsabilité de la communauté internationale de prendre des mesures préventives, diplomatiques ou autres, pour renforcer les institutions des États Membres en ce sens; et, enfin, lorsqu’un État manque manifestement à la responsabilité de protéger, la conduite d’actions collectives, conformément à la Charte des Nations Unies, pour protéger les populations.

La souveraineté de chaque État, qui constitue un droit en soi, implique aussi des responsabilités, y compris celle de protéger sa population, ont estimé les Émirats arabes unis, posant ainsi les bases du premier volet.  Les pays européens prennent cette responsabilité très au sérieux, a, quant à elle, affirmé l’Union européenne (UE), dont les membres ont nommé des « personnes référentes pour les questions relatives à la responsabilité de protéger à l’échelle nationale ».  Nous ne sommes pas les seuls, a poursuivi l’UE, citant les résultats positifs obtenus lors des réunions annuelles des personnes référentes à l’échelle nationale qui ont eu lieu à Helsinki, en juin 2018, et à Bruxelles, en mai 2019, durant lesquelles toutes les régions du monde étaient représentées.  Encouragée par ces avancées, la Slovénie a appelé tous les pays n’ayant pas encore nommé de personnes référentes sur la R2P à le faire dans les plus brefs délais.

De nombreux pays ont estimé que la responsabilité de protéger passait par le devoir de chaque pays de gérer sa diversité comme une force et non comme une faiblesse.  Le Costa Rica a ainsi appelé les États Membres à éviter les discours de haine, susceptibles de dégénérer en génocides, crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.  Il est également important de renforcer les mécanismes d’état de droit pour refléter la société dans son ensemble, a estimé le pays, et ce, afin d’éviter les discriminations envers certains groupes.  De telles discriminations s’incarnent notamment aujourd’hui dans l’islamophobie, a déploré à sa suite le Pakistan, affirmant que, dans certaines régions du monde, le sentiment antimusulman était instrumentalisé de manière dangereuse par la classe politique pour se faire élire.

Il existe en effet un décalage entre l’établissement progressif de cadres normatifs nationaux pour la protection des civils et le respect dans les faits des droits des populations, ont constaté les Îles Marshall, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique.  Même constat chez les pays baltes, qui ont dénoncé le décalage de plus en plus grand entre les promesses et le vécu des populations vulnérables.  « Il faut agir avant que les atrocités ne soient commises, car une fois que la violence se déchaîne les capacités d’agir sont limitées », ont-ils déclaré, appelant à mieux traduire les signes d’alerte précoce en opportunité d’action concrète et à intégrer davantage ces mécanismes d’alerte dans les dispositifs nationaux.  Chaque État doit également œuvrer au renforcement de sa société civile et de ses médias, ont ajouté les pays baltes, car les militants et les journalistes contribuent aux systèmes d’alerte précoce.

De nombreux États Membres ont par ailleurs souligné le rôle de la communauté internationale dans la prévention des crimes visés par la R2P. 

Cette responsabilité n’incombe pas uniquement à l’ONU, mais également aux organisations régionales, a déclaré l’Australie, estimant que ces dernières étaient souvent mieux placées pour identifier les défis sécuritaires émergeants et mettre en place des mécanismes d’alerte précoce innovants, comme dans le cadre du Partenariat Asie-Pacifique pour la prévention des atrocités.  La Mission régionale d’assistance aux Îles Salomon (RAMSI) fournit justement un bon exemple d’intervention rapide pour la prévention des crimes dans la région, a souligné de son côté Nauru, au nom du Forum des Îles du Pacifique.  Créée en 2003, cette mission a été conçue comme un partenariat entre les Îles Salomon et 15 pays de la région du Pacifique, afin de jeter les bases de la stabilité à long terme du pays.

De nombreux pays ont encore souligné le rôle de premier plan devant être joué par l’ONU pour prévenir les crimes atrocités.

Cependant, le Conseil de sécurité semble à l’heure actuelle bien trop divisé pour agir à temps, a déploré le Danemark, au nom du Groupe des amis de la responsabilité de protéger, qui se compose de 51 États Membres et de l’UE.  Le pays a appelé à améliorer la coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l’homme afin que ce dernier soit plus rapidement mis au courant des situations menaçant les droits de l’homme.  « La R2P repose sur les épaules de tous les États Membres », a insisté le Danemark.  L’Assemblée générale et le Conseil des droits de l’homme de l’ONU ont en effet le devoir de pallier l’incapacité du Conseil à faire face aux crimes atroces, a renchéri la Norvège, au nom du Groupe des pays nordiques, appelant à utiliser davantage les missions d’établissement des faits des Nations Unies pour y parvenir.  C’est ce qu’a fait l’Assemblée avec succès en 2016, a rappelé Oslo, avec la création du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011.  C’est aussi ce qu’a fait le Conseil des droits de l’homme en 2018, avec la création du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar.

Le Conseil de sécurité devrait en outre mieux utiliser les conseils spéciaux et mécanismes d’experts sur la responsabilité de protéger, en les invitant davantage à venir s’exprimer à New York sur les questions d’alerte précoce, a estimé la Slovénie, demandant également au Conseil de planifier davantage d’exposés avec la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et les membres de missions d’établissement des faits.

Le Conseil doit en outre comprendre que le droit de veto n’est pas un privilège, mais une responsabilité internationale, a déclaré le Mexique, qui s’exprimait aussi au nom de la France.  Citant l’Initiative franco-mexicaine, à laquelle souscrivent désormais 120 États, le pays a appelé les membres permanents du Conseil de sécurité à s’engager à ne pas utiliser leur veto dans les cas d’atrocités de masse.  « Il est indéfendable d’utiliser le droit de veto à des fins politiques », a insisté le Mexique.  D’autres États Membres, comme les pays baltes, ont appuyé le Code de conduite du Groupe ACT « Groupe Responsabilité, cohérence et transparence », qui appelle les membres du Conseil de sécurité, permanents et non permanents, à ne pas voter contre un projet de résolution destiné à prévenir ou mettre fin à des atrocités de masse.

Plusieurs États ont également estimé que la communauté internationale devait s’investir davantage pour appuyer les organisations locales de défense des droits de la personne, soutenir les organisations de femmes et de jeunes et lutter contre les discours de haine par des moyens innovants.  C’est notamment le cas en Europe, s’est enorgueilli l’UE, où la Commission européenne a mis en place un dispositif de coopération entre les organisations de la société civile qui surveillent les contenus publiés en ligne et les entreprises d’informatique qui peuvent les retirer.

Pour aller plus loin dans ces différents domaines, l’UE et ses membres ont appelé à l’élaboration d’un instrument international sur la responsabilité de protéger, une position loin de faire l’unanimité parmi les États Membres. 

Ce n’est pas l’absence de moyens légaux à notre disposition, mais le manque de volonté politique d’agir qui pose un problème, a ainsi estimé le Pakistan, opposé à l’idée d’inscrire la R2P dans un instrument international spécifique.  « Rien ne suggère que la notion de R2P a transformé l’attitude des États Membres », a insisté Islamabad, jugeant que l’édifice soutenant ce principe était de plus en plus fragile.  Certains instruments internationaux existent déjà en la matière et permettraient, s’ils étaient respectés, de faire avancer la R2P, ont estimé les Émirats arabes unis, appelant notamment la communauté internationale à ratifier la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. 

La question de l’intervention de la communauté internationale dans les cas où la prévention échoue a fait l’objet d’une controverse plus vive encore.  Si de nombreux États Membres ont estimé que l’ONU se devait d’agir lorsqu’un État manquait à sa responsabilité de protéger sa population, d’autres ont toutefois dénoncé le manque de clarté du principe de la R2P, voire son instrumentalisation.

Le concept de responsabilité de protéger n’est pas une invitation à intervenir, a notamment estimé le Soudan.  Une action ne peut avoir lieu que lorsque tout le reste a échoué, a ajouté le Rwanda, précisant que les interventions devaient s’abstenir de toute tentative visant à obtenir un changement de régime et se concentrer sur la nécessité de sauver des vies.  De ce point de vue, le Brésil aurait ainsi souhaité que le rapport du Secrétaire général établisse une « séparation plus marquée entre prévention et réaction ».  Il faut aussi résister à la tentation de se référer au concept « d’atrocité criminelle », qui n’est pas défini par le droit international, a appelé Brasilia, estimant qu’il existait des crimes « atroces » ne faisant pas partie de la R2P, comme le crime d’agression. 

Nous sommes également préoccupés par l’absence de précision dans la définition de la R2P et de sa portée, a déclaré la Bolivie, regrettant la persistance de « zones d’ombres ».  Dans quel cas un État ne protège pas sa population?  Quelles en sont les conséquences?  Comment empêcher que la R2P soit utilisée comme une excuse pour des interventions à visée politique et économique déguisées en humanitarisme?  Comment éviter que la responsabilité de protéger ne devienne un outil d’ingérence dans les affaires intérieures des États? s’est interrogée la Bolivie.  Il semble que la R2P masque une politique du « deux poids, deux mesures » de la part de certains pays « racistes et aux visées expansionnistes », a poursuivi la Bolivie.  Aujourd’hui, « le chapitre de l’ingénuité de l’interventionnisme humanitaire » est bel et bien clos, a insisté le pays, rejetant l’inclusion de la R2P à l’ordre du jour de la prochaine session de l’Assemblée générale. 

L’organisation de séances comme aujourd’hui pour politiser le concept de la R2P et approfondir les divergences au sein de l’Assemblée générale sur des questions humanitaires nobles témoigne d’un manque total de professionnalisme, a surenchéri la Syrie, dénonçant l’interventionnisme de certains gouvernements, qui prétendent vouloir protéger les civils dans des pays comme la Libye au nom de la R2P, alors qu’ils ne cherchent qu’à épuiser leurs ressources et porter atteinte à leur intégrité nationale.  « Les gouvernements qui défendent la R2P ont un palmarès impressionnant en matière d’agression et d’occupation », a ironisé Damas, précisant que les mêmes États qui sont intervenus en Libye ont également commis des crimes de guerres en Syrie et en Iraq.  Pourquoi accepterions-nous votre instrumentalisation de ce principe pour mener des attaques contre des États Membres?  « On veut nous faire revenir au temps de la Ligue des Nations, une époque de mise sous tutelle des Nations non dominantes », a encore la Syrie.  La R2P n’est qu’une tentative des États puissants visant à faire de l’ingérence dans des États plus faibles, a également estimé la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  On ne doit pas laisser le principe de la R2P être instrumentalisé ou détourné par un pays ou un groupe de pays à des fins politiques, s’est indigné à son tour le Myanmar, appelant à ce que la détermination des crimes de génocide, crimes de guerre, nettoyages ethniques et crimes contre l’humanité se fonde sur des informations factuelles, impartiales et objectives.

Il n’est pas étonnant que les pays qui s’opposent à la responsabilité de protéger soient ceux qui commettent des atrocités contre leur population, a ironisé le Royaume-Uni, citant le Myanmar et la Syrie.  Plus apaisant, le Portugal a, quant à, lui proposé d’améliorer la cohérence et la clarté du concept de responsabilité de protéger en le rattachant à celui, bien établi, de la responsabilité des États pour des actes illicites commis sur le plan international.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: face à l’escalade du conflit à Edleb, l’Envoyé spécial appelle à un nouveau mode d’appui international en faveur de la paix en Syrie

8567e séance – matin
CS/13865

Conseil de sécurité: face à l’escalade du conflit à Edleb, l’Envoyé spécial appelle à un nouveau mode d’appui international en faveur de la paix en Syrie

« Nous avons clairement besoin d’un mode renouvelé d’appui international » en faveur de la paix en Syrie, a déclaré ce matin, au Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour ce pays.  M. Geir Pedersen, qui intervenait par visioconférence depuis Genève, a aussi jugé qu’il était grand temps de stabiliser la situation à Edleb, de parvenir à un cessez-le-feu national, de créer un comité constitutionnel et d’instaurer un climat de confiance entre les parties syriennes.

« Depuis le début de mon mandat, ce Conseil m’a offert son plein appui », a apprécié M. Pedersen.  « Après six mois à ce poste, je réalise combien cela est complexe et difficile, mais j’entrevois aussi les possibilités de tracer la voie pour sortir de ce conflit », a-t-il assuré. 

Notant que les discussions et la coopération internationales peuvent aider les Syriens à surmonter les obstacles auxquels ils font face, l’Envoyé spécial a constaté que pour l’heure, « aucun groupe international de négociation ne regroupe tous les principaux acteurs internationaux dont le soutien peut garantir des mesures concrètes et réciproques à tous les niveaux ».  De ce fait, M. Pedersen a dit envisager de trouver une formule qui tiendrait compte des exigences du format d’Astana, de celles du « Small Group format », sans oublier les membres permanents du Conseil de sécurité.  Par ailleurs, il a dit espérer que la question syrienne sera à l’ordre du jour des discussions qui vont débuter demain, au Japon, dans le cadre du G20.

« J’ai hâte de tester directement, lors de mes engagements à venir, si une formule pour laquelle j’ai veillé à avoir l’adhésion de tous, peut faire avancer la mise en place d’un comité constitutionnel », a annoncé l’Envoyé spécial.  Il a aussi dit vouloir consulter prochainement le Gouvernement à Damas, ainsi que les dirigeants de la Commission de négociation syrienne, pour finaliser les détails en suspens et permettre à l’ONU de faciliter les travaux du comité constitutionnel à Genève.

Si le comité constitutionnel peut être « une porte d’entrée », il ne résoudra pas à lui seul le conflit ou les défis auxquels la Syrie est confrontée, a toutefois averti M. Pedersen.  Il a fait observer que les choses pourraient avancer si des mesures tangibles et réciproques de confiance entre les parties étaient mises en œuvre, y compris sur le terrain.  Par exemple, des progrès concernant les détenus, les personnes enlevées et les personnes disparues pourraient avoir un réel impact. 

À Edleb, où se trouvent trois millions de civils, M. Pedersen a mis en garde contre le risque d’un « scénario pas de guerre, pas de paix », à savoir: des lignes de front pratiquement gelées; cinq armées internationales dans un risque de confrontation perpétuel; la poursuite de la violation de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de la Syrie; le fait que des personnes déplacées et des réfugiés ne peuvent toujours pas rentrer chez eux; une insurrection renforcée de Daech avec des groupes terroristes et des combattants étrangers; et toujours pas de solution politique en vue.  Selon M. Petersen, « Edleb n’est pas seulement un problème humanitaire, qui ne concerne que la Syrie; c’est potentiellement une poudrière qui pourrait conduire à une escalade régionale. »

Par ailleurs, l’Envoyé spécial n’a pas manqué d’insister sur le respect du droit international humanitaire dans la lutte contre le terrorisme.  En effet, « même les guerres ont des règles qu’il faut respecter », a déclaré le Koweït. 

Les États-Unis ont, pour leur part, exigé que les groupes sur le terrain, y compris Hay’at Tahrir el-Cham, la Fédération de Russie et le régime d’Assad, « cessent immédiatement les opérations militaires et reviennent aux lignes originales de l’accord de cessez-le-feu de Sotchi de 2018 ».  De même, a indiqué le représentant américain, le Conseil de sécurité doit reconnaître que les efforts du groupe d’Astana pour faire avancer le processus politique ont échoué et il est temps d’encourager l’Envoyé spécial à essayer d’autres voies pour parvenir à une solution politique en vertu de la résolution 2254 (2015).  « En attendant que le régime d’Assad et la Russie prennent des mesures concrètes en vue d’une désescalade complète, immédiate et vérifiable à Edleb, les États-Unis continueront à appliquer des pressions diplomatiques et économiques par tous les moyens disponibles pour isoler le régime et ses alliés », a-t-il prévenu.  Les sanctions imposées à la Syrie sont essentielles au règlement du conflit, a renchéri l’Allemagne.

Le représentant syrien s’est quant à lui élevé contre ceux qui considèrent le Conseil de sécurité comme une « entité privée », dénonçant également la « politisation des sanctions ».  Même son de cloche pour son homologue russe qui a demandé à certains pays de renoncer aux sanctions unilatérales qui ne cessent d’aggraver la situation sur le terrain.  « Ce sont les civils qui en souffrent le plus », a-t-il martelé en promettant que son pays allait poursuivre son aide bilatérale à la Syrie, et son aide multilatérale à travers l’ONU.  Il a par ailleurs assuré que les garants d’Astana s’évertuent toujours à mettre en œuvre le mémorandum de septembre dernier, tout en arguant que « la stabilité de la région d’Edleb serait assurée s’il n’y avait pas d’ingérence étrangère ». 

Dans le nord-est de la Syrie, a plaidé la France, « nous devons poursuivre nos efforts pour éradiquer totalement et durablement la menace de Daech et stabiliser la région ».  C’est le message unanime qu’ont porté les directeurs politiques de la coalition internationale contre Daech réunis à Paris, le 25 juin. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

Intervenant en visioconférence depuis Genève, M. GEIR PEDERSEN, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a présenté la situation politique du pays.  Dans la région d’Edleb, où se trouvent trois millions de civils, les frappes aériennes, bombardements, tirs de roquette et de mortier et l’usage indiscriminé de la force continuent de tuer des civils et de déplacer des centaines de milliers de personnes.  M. Pedersen a insisté pour que la lutte contre le terrorisme respecte les droits de l’homme et le droit international humanitaire.  De fait, les lignes de front ne se sont pas déplacées, du moins pas de manière significative, a-t-il affirmé avant de souligner que le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham a une présence importante dans la zone de désescalade.  Il s’est également inquiété de rapports faisant état d’échanges de tirs entres des forces gouvernementales syriennes et des postes militaires turcs à Edleb.  « Edleb n’est pas seulement un problème humanitaire, qui ne concerne que la Syrie; c’est potentiellement une poudrière qui pourrait conduire à une escalade régionale. »

Tant la Turquie, où il s’est rendu au début du mois, que la Fédération de Russie, où il se rendra la semaine prochaine, lui ont assuré qu’elles restaient attachées au mémorandum d’accord de septembre 2018 et avaient constitué un groupe de travail.  Encore faut-il attendre de voir si ces assurances se reflètent sur le terrain, a ajouté l’Envoyé spécial.  Il a appelé à « un cessez-le-feu à l’échelle nationale », comme le prévoyait la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

Outre Edleb, M. Pedersen a mentionné deux situations humanitaires préoccupantes à Roukban et Hol.  Il a estimé que l’escalade et les troubles actuels envoient également le « mauvais signal » aux réfugiés syriens.  Ainsi, cela ne fait que renforcer leurs doutes sur les conditions de sécurité, la conscription et les moyens de subsistance en Syrie, a—t-il argué. 

M. Pedersen a insisté sur l’importance de stabiliser la situation à Edleb, pour éviter le risque d’un « scénario pas de guerre, pas de paix », à savoir: des lignes de front pratiquement gelées; cinq armées internationales dans un risque de confrontation perpétuel; la poursuite de la violation de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de la Syrie; le fait que des personnes déplacées et des réfugiés ne peuvent toujours pas rentrer chez eux; une insurrection renforcée de Daech avec des groupes terroristes et des combattants étrangers; et toujours pas de solution politique en vue.

L’Envoyé spécial a rappelé avoir essayé de relancer un processus politique dirigé par les Syriens et fondé sur la résolution 2254 (2015).  « J’ai hâte de tester directement, lors de mes engagements à venir, si une formule pour laquelle j’ai veillé à avoir l’adhésion de tous, peut faire avancer la mise en place d’un comité constitutionnel », a-t-il annoncé.  Il a aussi dit vouloir consulter prochainement le Gouvernement à Damas, ainsi que les dirigeants de la Commission de négociation syrienne, estimant qu’il est temps de finaliser les détails en suspens, afin de permettre à l’ONU de faciliter les travaux du comité constitutionnel à Genève.

Si le comité constitutionnel peut être « une porte d’entrée », il ne résoudra pas à lui seul le conflit ou les défis auxquels la Syrie est confrontée, a toutefois averti M. Pedersen.  Il a fait observer que les choses pourraient avancer si des mesures tangibles et réciproques de confiance entre les parties étaient mises en œuvre, y compris sur le terrain.  Par exemple, des progrès concernant les détenus, les personnes enlevées et les personnes disparues pourraient avoir un réel impact.  Il a ajouté avoir accordé la priorité à la libération unilatérale de femmes, d’enfants, de malades et de personnes âgées.  Ensuite, l’amélioration de l’accès à l’information et à la communication est une autre étape.  De ce fait, le Gouvernement et l’opposition devraient établir et consolider des listes d’individus qu’ils détiennent ou sur lesquels ils détiennent des informations, ainsi que ceux qu’ils recherchent.  C’est là le vœu des Syriens de tous horizons, à l’intérieur et hors du pays, qui plaident, sans y croire véritablement, pour une solution politique. 

L’Envoyé spécial pour la Syrie a rappelé l’importance d’inclure les femmes dans tout processus politique, ajoutant aussi qu’un tel processus ne doit pas se limiter à des réunions à Genève, mais doit inclure des actions concrètes sur le terrain afin d’inspirer la confiance.  En fin de compte, c’est aux parties de prendre les mesures qui s’imposent.  Pour l’heure, débloquer l’impasse sera difficile, car il y a beaucoup de méfiance et les positions sont inflexibles.  M. Pedersen a néanmoins affirmé que les discussions et la coopération internationales peuvent aider les Syriens à surmonter ces obstacles.  Or pour l’heure, a-t-il déploré, aucun groupe international de négociation ne regroupe tous les principaux acteurs internationaux dont le soutien peut garantir des mesures concrètes et réciproques dans toutes les dimensions. 

L’Envoyé spécial a dit envisager de trouver une formule qui tiendrait compte des exigences du format d’Astana, de celles du « Small Group format » et enfin des membres permanents du Conseil de sécurité.  Par ailleurs, il a espéré que la question syrienne sera à l’ordre du jour des nombreuses discussions qui vont débuter demain dans le cadre du G20. 

« Depuis le début de mon mandat, ce Conseil m’a offert son plein appui », a apprécié M. Pedersen.  « Après six mois à ce poste, je réalise combien cela est complexe et difficile, mais j’entrevois aussi les possibilités de tracer la voie pour sortir de ce conflit », a-t-il assuré.  Il est temps de stabiliser la situation à Edleb et de réaliser un cessez-le-feu national, a-t-il répété.  Il est plus que temps de créer un comité constitutionnel.  Il est également temps de promouvoir des mesures de confiance.  « Nous avons clairement besoin d’un mode renouvelé d’appui international », a conclu l’Envoyé spécial. 

Selon lui, c’est ce genre d’actions qui indiquerait que nous nous engageons sur une voie politique conforme à la résolution 2254 (2015), à travers un comité constitutionnel travaillant dans un environnement sûr, calme et neutre, ouvrant la voie à des élections libres et équitables sous la supervision de l’ONU, et à un accord politique durable. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a déclaré que « les États-Unis n’accepteront aucune tentative du régime d’Assad et de ses alliés d’utiliser des moyens militaires à Edleb ou ailleurs pour saboter, contourner ou retarder davantage les efforts de l’Envoyé spécial Pedersen visant à maintenir le processus politique ».  Les membres de ce Conseil ne peuvent pas non plus accorder au régime d’autres retards pour appliquer la résolution 2254 (2015).  « L’escalade des attaques du régime contre des zones civiles, des installations et des acteurs humanitaires, y compris l’attaque d’hier sur une ambulance transportant des Casques blancs, montre que le régime d’Assad continue de croire que la force permettra de résoudre le conflit, alors que Damas cherche activement à éviter de négocier une solution politique avec des représentants de l’opposition syrienne. »

Le Conseil de sécurité doit reconnaître que les efforts du groupe d’Astana pour faire avancer le processus politique ont échoué, a estimé M. Cohen.  Le temps est venu d’encourager l’Envoyé spécial Pedersen à essayer d’autres voies pour parvenir à la solution politique énoncée dans la résolution 2254 (2015), en se concentrant sur la préparation d’élections à l’échelle nationale, observées par l’ONU, auxquelles participeraient environ cinq millions de réfugiés syriens, en assurant la libération des détenus et en instaurant un cessez-le-feu national.  « Edleb ne doit pas devenir un autre Alep », et les États-Unis estiment que des progrès sur le front politique et une véritable désescalade sont encore possibles, mais pour cela « le régime d’Assad doit reconnaître qu’un système politique sain doit tenir compte de plus d’un point de vue ».

Selon le représentant américain, « la relance du processus politique en Syrie peut et devrait commencer par un cessez-le-feu vérifiable à Edleb et dans le nord de Hama ».  Les groupes sur le terrain, y compris Hay’at Tahrir el-Cham, la Russie et le régime d’Assad, doivent immédiatement cesser leurs opérations militaires et revenir aux lignes originales de l’accord de cessez-le-feu de Sotchi de 2018.  La Turquie devrait être chargée d’éliminer les forces terroristes de la région.  Et le statut final d’Edleb devrait être négocié entre les parties, sous la médiation de l’ONU.  Les États-Unis reconnaissent qu’il n’y a pas de voie à suivre sans la coopération de la Russie et du régime d’Assad, a insisté M. Cohen.  Par conséquent, a-t-il dit, « les États-Unis appellent la Russie à “désescalader” ses opérations militaires, exhortent le régime à faire de même et à s’engager avec les États-Unis dans un processus étape par étape pour la mise en œuvre de la résolution 2254, qui aboutira à la stabilisation finale de Edleb et de la Syrie au sens large ».  « En attendant que le régime d’Assad et la Russie prennent des mesures concrètes en vue d’une désescalade complète, immédiate et vérifiable à Edleb, les États-Unis continueront à appliquer des pressions diplomatiques et économiques par tous les moyens disponibles pour isoler le régime et ses alliés », a prévenu M. Cohen, même si « notre préférence est de travailler ensemble sur une approche progressive ».

Par ailleurs, M. Cohen a tenu à réagir à l’exposé du représentant de la Syrie présenté le 25 juin lors de la réunion d’information humanitaire sur ce pays.  Selon lui, « le manque de respect à la limite du mépris qu’il a montré à ce Conseil est inacceptable ».  Et cela, dans une session où ce représentant « n’a eu aucun mal à accepter une séance d’information d’un général russe en treillis militaire qui a aidé à poursuivre la guerre ».  M. Cohen a jugé « scandaleux que ce représentant, dont le gouvernement a utilisé à maintes reprises des armes chimiques contre ses propres civils, empêchant l’aide humanitaire d’atteindre les nécessiteux, violant les normes internationales et le droit international en visant intentionnellement des hôpitaux, des écoles et des ambulances, cherche à donner des leçons au Conseil ».  Enfin, l’allégation selon laquelle la Syrian American Medical Society (SAMS) serait une branche du Gouvernement américain simplement parce que les États-Unis sont l’un des nombreux pays y contribuant est à la fois choquante et ridicule. 

Préoccupée par les violations du droit international humanitaire à Edleb, Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a appelé à un cessez-le-feu dans la région.  La représentante a déploré les attaques dont sont victimes les travailleurs humanitaires sur le terrain.  Sur le plan politique, elle a promis le soutien de son pays au travail de l’Envoyé spécial, avant de rappeler que le processus de Genève, encadré par l’ONU, est le seul forum agréé pour la recherche de la paix en Syrie. 

Selon la déléguée, la grande question à l’heure actuelle concerne la volonté des autorités syriennes à participer au processus de paix.  Elle a invité l’Envoyé spécial à s’engager sur d’autres voies prévues par la résolution 2254 (2015) du Conseil si jamais le comité constitutionnel ne peut prendre corps.  Elle a en outre demandé des éclaircissements de la part des autorités syriennes sur les cas de détenus et des cas de décès de ces derniers, tout en les invitant à « jouer la carte de la clarté ».  En concluant, elle a appelé les autorités syriennes à dialoguer plus positivement avec l’Envoyé spécial. 

M. FRANCOIS DELATTRE (France) a jugé urgent, compte tenu de la dégradation de la situation sur le terrain, de parvenir à un gel immédiat des lignes de front en vue d’un cessez-le-feu national, conformément à la résolution 2254 (2015).  Notre priorité, a-t-il dit, doit avant tout se porter sur Edleb, où la poursuite de l’offensive fragilise « dangereusement » les efforts de l’Envoyé spécial en vue de relancer le processus politique.  « Plutôt que de contribuer à la reprise du dialogue, le régime, encouragé par ses alliés, tente toujours d’imposer les armes au mépris des souffrances de son peuple.  Voilà au fond de quoi il s’agit, même si on ne cessera de nous dire qu’il est question de lutte contre le terrorisme. »  Condamnant les attaques contre le personnel et les infrastructures humanitaires et médicaux, le représentant a trouvé « écœurant que le régime prétende que les travailleurs humanitaires soient complices des organisations terroristes ».  M. Delattre a souligné « la responsabilité particulière de la Russie, dont l’appui aérien est essentiel à la poursuite de l’offensive du régime ».  Il a ainsi réitéré son appel à ce que la Russie réaffirme son attachement au cessez-le-feu et fasse pression sans plus attendre sur le régime pour qu’il cesse les combats. 

Dans le nord-est, a continué le représentant, nous devons poursuivre nos efforts pour éradiquer totalement et durablement la menace de Daech et stabiliser la région.  C’est le message unanime qu’ont porté les directeurs politiques de la coalition internationale contre Daech réunis à Paris, le 25 juin.  La France a aussi décidé à cette fin d’allouer 50 millions d’euros supplémentaires en Syrie, principalement ciblés sur le nord-est.  Ensuite, M. Delattre a rappelé « l’urgence de réaliser des avancées sur le volet politique pour ouvrir une réelle perspective de paix et de réconciliation ».  Il a assuré l’Envoyé spécial de son plein appui pour finaliser un « paquet constitutionnel » crédible et équilibré.  À cet égard, la mise en place de mesures de confiance susceptibles de créer un environnement sûr et neutre est essentielle.  Enfin, le représentant a souligné l’importance de la question électorale en vue des échéances à venir. 

M. MA ZHAOXU (Chine) a insisté sur l’importance pour les acteurs syriens de s’entendre pour faire avancer le processus politique.  Le délégué a souligné qu’un environnement sécuritaire stable est crucial à cet égard, avant de rappeler le soutien chinois au processus d’Astana.  Il a invité la communauté internationale à harmoniser les normes nécessaires pour la poursuite du dialogue intersyrien et à agir de manière résolue contre tous les groupes terroristes présents dans le pays.  L’avenir et le destin du pays, a insisté le représentant, sont entre les mains du peuple syrien, avant de rappeler que tout processus politique doit privilégier le principe d’appropriation nationale. 

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a réaffirmé son profond attachement au dialogue comme mode privilégié de règlement des différends en général, et du conflit syrien en particulier, dans le cadre d’un processus politique inclusif, bénéficiant de l’accompagnement de la communauté internationale.  À cet égard, il a tenu à saluer la tenue, les 16 et 17 mai 2019, à Ankara, de la réunion du Groupe de travail conjoint sur la situation à Edleb, et exhorté les garants du processus d’Astana à poursuivre leurs efforts afin de faire respecter le cessez-le feu par les belligérants.

M. Moriko a accueilli favorablement la décision de Moscou et Ankara de se réunir, en marge du prochain sommet du G20, prévu fin juin à Osaka (Japon), afin d’évaluer leurs efforts dans le cadre de la relance du processus politique.  Il a, en outre, encouragé le Groupe de travail conjoint et les parties syriennes à poursuivre leur coopération dans le cadre du processus ayant permis la libération réciproque de détenus.  Pour finir, il a fait part de sa préoccupation face à la reprise des combats dans la province d’Edleb et ses graves conséquences sur une situation humanitaire déjà désastreuse. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a appelé à éviter davantage d’hostilités militaires et davantage de conséquences humanitaires, en réitérant son appel à la désescalade à Edleb.  Elle s’est aussi inquiétée du manque d’élan dans le processus politique.  Le Conseil de sécurité devrait fournir l’appui nécessaire à cet effet, a-t-elle recommandé.  Notant que l’on dispose d’un cadre international pour soutenir le processus politique syrien –la résolution 2254 et le Communiqué de Genève–, elle a estimé que tous les éléments nécessaires de ce processus étaient clairs: les parties doivent immédiatement cesser les attaques contre les civils et les États Membres doivent soutenir les efforts pour parvenir à un cessez-le-feu, tandis que l’ONU doit convoquer les parties pour des négociations officielles.  Le succès de ces mesures exige un engagement constructif des parties, a-t-elle dit.

En ce qui concerne la responsabilité pour crimes de guerre, Mme Wronecka a exhorté les parties à condamner la détention arbitraire, la prise d’otages et les disparitions forcées.  Elle leur a aussi demandé de protéger les travailleurs humanitaires et les journalistes.  En conclusion, elle a réitéré la position commune de l’Union européenne sur la reconstruction de la Syrie. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a lancé un appel à l’unité du Conseil pour la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) en vue de trouver une solution politique.  Il s’agit pour lui d’une feuille de route pour une paix durable en Syrie.  Il a souligné le soutien de son pays aux efforts de l’Envoyé spécial en vue d’établir un forum dont l’objectif est d’appuyer les objectifs de paix, une opportunité pour revitaliser la coopération internationale et soutenir le processus de Genève.  Par ailleurs, l’escalade de la violence, notamment dans le nord-ouest de la Syrie, sape les efforts entrepris dans le cadre du processus politique et aggrave davantage la situation humanitaire dans le pays, tout en ayant un effet déstabilisateur sur l’ensemble de la région, notamment en raison du déplacement des populations.  M. Matjila a également mis en garde contre l’exacerbation des différends politiques et les menaces de propagation du terrorisme.  « Les situations politique et humanitaire en Syrie ne peuvent être traitées séparément », a-t-il fait valoir. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a jugé urgent de progresser sur les questions cruciales de la composition représentative du comité constitutionnel, son processus de prise de décisions et son mandat, afin d’aboutir à des élections libres et supervisées par l’ONU.  Tout délai supplémentaire à cet égard est « inacceptable ».  Selon le représentant, les parties doivent trouver des mesures propres à favoriser un climat d’entente, dont la libération des détenus, l’identification des personnes disparues et le rapatriement des dépouilles mortelles.  De même, a-t-il plaidé, il faut éviter l’escalade du conflit et préserver l’accord sur Edleb signé par la Fédération de Russie et la Turquie.  Des millions de Syriens se trouvent dans une situation de vulnérabilité, a rappelé le représentant, et le moment est venu d’agir rapidement sur la plan politique. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a rappelé que le 25 juin dernier, le général de division et Chef du Centre de réconciliation russe, M. Alexey Bakin, a fait un exposé au Conseil de sécurité sur la situation humanitaire en Syrie où il se trouve.  Le délégué a ainsi rappelé que dans la région d’Edleb, les combattants d’El-Nosra ne cessent d’attaquer les populations civiles, les soldats syriens et la base russe.  « Exiger de nous de ne pas réagir à ces attaques ne fait pas sens », s’est indigné M. Safronkov.  « Nous ne frappons pas les civils », a-t-il dit, avant de rappeler que même si le Front el-Nosra est présenté comme l’opposition modérée, il restera un groupe terroriste, « quel que soit l’habit qu’on voudra lui faire porter ».  Il a aussi assuré que les garants d’Astana s’évertuent toujours à mettre en œuvre le mémorandum de septembre dernier.  « Au lieu d’exiger de nous que nous mettions en œuvre ce que nous nous sommes promis de faire, il serait utile que la communauté internationale apporte sa contribution dans la lutte contre le terrorisme en Syrie », a-t-il encore exigé.  Il a ajouté que « la stabilité de la région d’Edleb serait assurée s’il n’y avait pas d’ingérence étrangère ».  On exige de nous des clarifications sur la situation sur le terrain, et quand nous invitons nos représentants sur le terrain à le faire, des délégations se permettent de douter de leurs explications, s’est-il indigné, en notant que cette pratique est le fait de pays ayant eux-mêmes violé l’intégration territoriale de la Syrie.

M. Safronkov a indiqué que les autorités russes poursuivent leurs discussions avec les parties syriennes avec le même objectif: parvenir à relancer le processus de Genève, en accord avec la résolution 2254 (2015).  Malgré la situation actuelle, nous sommes optimistes, a—t-il indiqué, en notant que les forces militaires russes sont présentes en Syrie du fait de l’invitation des autorités légitimes.  Le délégué a aussi appelé à agir pour le relèvement de la Syrie, en coopération avec les autorités centrales.  Il faut aussi, a-t-il prôné, travailler au retour volontaire des déplacés et réfugiés.  Il a en outre demandé à certains pays de renoncer aux sanctions unilatérales qui ne cessent d’aggraver la situation sur le terrain.  « Ce sont les civils qui en souffrent le plus », a—t-il martelé en promettant que la Fédération de Russie va poursuivre son aide bilatérale avec la Syrie, et son aide multilatérale à travers l’ONU.  Le représentant a également plaidé pour le retour de la Syrie dans la « famille arabe ».  L’histoire nous enseigne que les interventions extérieures ont détruit plusieurs pays arabes, a-t-il souligné.  Enfin, il a insisté sur le fait que le dialogue et la coopération sont les voies pour parvenir à la paix en Syrie.  « Ce qui est vrai pour la Syrie l’est aussi pour l’Iran et pour tous les pays de la région. »

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a indiqué que le conflit d’Edleb crée une situation « potentiellement catastrophique » pour la Syrie et la région sur les plans humanitaire et sécuritaire.  La Belgique a rappelé que les parties au conflit ont l’obligation de protéger les civils et de respecter les principes de distinction et de proportionnalité du droit international humanitaire.  La délégation invite aussi les parties à réaffirmer leur plein engagement en faveur des accords de cessez-le-feu du mémorandum russo-turc signé le 17 septembre 2018.  La Belgique appelle également les parties à saisir toutes les occasions qui s’offrent à la diplomatie, y compris en marge du G20. 

Pour la délégation, la solution au conflit est politique.  M. Pecsteen de Buytswerve a estimé que seule la création d’un comité constitutionnel crédible pourra témoigner de la volonté politique des parties au conflit de travailler de façon constructive à une solution à cette crise cyclique.  Il a enfin souligné qu’il revient à l’Envoyé spécial de dessiner « l’horizon de paix » dont a besoin le peuple syrien, ajoutant que l’Envoyé spécial doit se saisir de la question des arrestations et détentions illégales de Syriens. 

Pour M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie), le respect du cessez-le-feu et la désescalade des tensions en Syrie doivent être une priorité.  C’est pourquoi M. Syihab a encouragé le Conseil à apporter son plein appui aux efforts en cours pour l’établissement d’un comité constitutionnel dans le cadre du Communiqué de Genève et de la résolution 2254 (2015).  Il a insisté en premier lieu sur le fait que « le processus politique doit être mené par les Syriens eux-mêmes ».  Cela doit guider l’ensemble du processus pour aboutir à une solution politique inclusive, dans le respect de la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays.  Il a, en outre, encouragé l’ouverture de canaux de communication entre les parties et le rétablissement de la confiance.  Dans ce contexte, a-t-il poursuivi, le Conseil doit créer une atmosphère propice pour encourager les négociations. 

Le représentant a salué les efforts de l’Envoyé spécial, avec l’appui des pays clefs, visant à finaliser la composition et les termes de référence d’un comité constitutionnel.  Il a vu dans la première réunion des membres de ce comité prévue à Genève un pas concret à même d’ouvrir la voie au processus politique en Syrie.  Cela permettrait, selon lui, d’envoyer un signal fort et positif non seulement à la communauté internationale mais également au peuple syrien.  Enfin, il a mis en exergue l’importance de compromis et exhorté toutes les parties à éviter toute action de nature à nuire au processus politique. 

D’après M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine), le Conseil de sécurité doit veiller à ce que soient préservées les conditions nécessaires pour un processus de paix global, crédible, revitalisé et inclusif, qui soit fondé sur la confiance de toute la population syrienne, y compris les millions de réfugiés.  De plus, le Conseil doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour garantir la protection de la population civile dans l’ensemble de la Syrie, tandis que toutes les parties doivent se conformer au droit international humanitaire.  Le représentant a insisté ensuite sur la nécessité de progresser sur la composition du comité constitutionnel, conformément à la résolution 2254 (2015), y compris en assurant la participation à part entière des femmes.   

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a rappelé qu’il faut tout faire pour parvenir à une solution politique en Syrie.  Ainsi, il faut s’appuyer sur la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et s’évertuer à mettre enfin en œuvre le comité constitutionnel.  Elle a plaidé pour que les parties ne sapent pas les efforts de l’Envoyé spécial et s’engagent pour un dialogue « sans tabou ».  La représentante a en outre encouragé l’Envoyé spécial à utiliser toutes les possibilités qui s’offrent à lui pour établir le comité constitutionnel et faire ainsi avancer le processus de résolution politique de la crise syrienne. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a repris à son compte les propos de son homologue des États-Unis à l’endroit du représentant syrien.  « Je me permets d’appuyer » ce qui a été dit car, s’est-il interrogé, « que peut-on attendre d’un gouvernement qui bombarde et torture ses citoyens »?  Les photos qui ont circulé en disent long, selon lui, sur les pratiques de ce régime.  « Que peut-on attendre d’un gouvernement qui bombarde les travailleurs humanitaires et les qualifie de terroristes? »  S’adressant ensuite au représentant de la Fédération de Russie, le représentant s’est dit surpris de voir critiquée et qualifiée d’obsolète l’approche basée sur le respect du droit.

M. Heusgen a ensuite souscrit à l’intervention de l’Envoyé spécial, s’élevant contre les bombardements qui ciblent des innocents.  Soulignant que de telles attaques ne peuvent être justifiées « sous couvert d’actions antiterroristes », il a fermement condamné ces attaques ciblées « confirmées par les services de renseignement ».  Il a appelé la Fédération de Russie à cesser son soutien militaire, « ne serait-ce que pendant quelques jours », précisant qu’une telle pause pourrait faire progresser de manière significative le processus politique de Genève.  « Il n’y a pas de solution militaire », a-t-il insisté, ajoutant que les sanctions imposées à la Syrie n’étaient pas dépassées, mais plutôt essentielles au règlement du conflit.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que la résolution 2254 (2015) est claire sur le processus politique qui doit s’engager en Syrie, notamment la mise en place d’un comité constitutionnel et la tenue ensuite d’élections libres dans le pays.  Le Koweït a condamné le ciblage des civils par les parties au conflit, rappelant que lutter contre le terrorisme ne dispense aucune partie de ses obligations en vertu du droit international et du droit international humanitaire.  « Même les guerres ont des règles qu’il faut respecter », a-t—il dit.  Le Koweït appelle également à la mise en œuvre de mesures de confiance entre les parties en conflit, y compris en ce qui concerne les personnes détenues, tuées ou disparues.  Il faut lutter contre l’impunité en Syrie, a souligné M. Alotaibi, avant de conclure en plaidant pour un accord politique qui va permettre de garantir la souveraineté syrienne sur son territoire.  Sur ce dernier point justement, le Koweït a rappelé que « le Golan syrien est un territoire syrien occupé ». 

M. BASHAR JA’AFARI (Syrie) a voulu faire quelques remarques « pour que ce débat ne déraille pas ».  Aujourd’hui, a-t-il précisé, « nous parlons du droit politique et non de l’assistance humanitaire sur laquelle nous n’allons pas nous appesantir ».  Son pays, l’un des pères fondateurs de cette Organisation, croit dans la diplomatie multilatérale.  Le représentant s’est élevé contre ceux qui considèrent le Conseil de sécurité comme une « entité privée » et contre la politisation des sanctions.  Cet organe est responsable de la paix et de la sécurité internationales.  « Rien de plus, rien de moins! »

M. Ja’afari a demandé au représentant des États-Unis quelle serait sa réaction « si un pays tiers envoyait des médecins à la frontière entre les États-Unis et le Mexique sans autorisation préalable »?  Le droit humanitaire doit respecter la législation, a-t-il dit, rappelant, à cet égard, que l’OCHA et quelque 27 organisations humanitaires travaillent en Syrie avec l’approbation de son gouvernement.  Il a dénoncé ceux qui, sous couvert de l’humanitaire, s’adonnent au renseignement.  M. Ja’afari s’est ensuite tourné vers la représentante du Royaume-Uni pour l’inviter à respecter le règlement en matière de motion d’ordre.  Il faut suivre la procédure, « nous ne sommes pas dans un cirque », s’est-il emporté. 

Le représentant syrien a déploré, par ailleurs, le silence du Conseil après plus de 50 ans d’occupation du Golan syrien.  « Israël impose ses lois, encouragé en cela par la position de l’Administration américaine qui est revenue sur les engagements pris en faveur d’une paix durable. »  Au représentant de l’Allemagne qui a accusé la Syrie de s’attaquer aux travailleurs humanitaires, M. Ja’afari a répondu qu’il s’agissait pour lui de terroristes car sinon, « que faisaient-ils dans l’aire de séparation au Golan?  Pourquoi ne sont-ils pas passés par la frontière avec le Liban ou la Turquie? »  Il s’est ensuite élevé contre les agissements de M. Nickolay Mladenov, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, qui « continue d’outrepasser son mandat et ses fonctions, ce qui ne peut être toléré », a-t-il dit, soulignant « disposer de preuves ». 

Le représentant du Royaume-Uni a repris la parole pour expliquer que sa délégation avait interrompu le discours de la Syrie l’avant-veille afin de rappeler que « les Casques blancs ne sont pas un groupe terroriste » comme le représentant syrien semblait l’affirmer.  De plus, a-t-il ajouté, « la longueur du discours présenté par le délégué syrien au cours de la présente séance démontre à suffisance son manque de respect pour cet organe ». 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge de quatre mois le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD)

8566e séance – matin
CS/13864

Le Conseil de sécurité proroge de quatre mois le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD)

Le Conseil de sécurité a décidé à l’unanimité, ce matin, de proroger de quatre mois, soit jusqu’au 31 octobre 2019, le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD).  Pour l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et la Guinée équatoriale, cette résolution signifie qu’il faut reconnaître l’incertitude sur les plans politique et de la sécurité qui règne actuellement au Soudan, tandis que pour le pays lui-même, il n’existe pas de raisons valables pour que la mission reste davantage.

Par la résolution 2479 (2019), le Conseil décide que la MINUAD doit continuer de s’acquitter de son mandat tel qu’il est énoncé dans la résolution 2429 (2018).  Il décide également de prolonger, « à titre provisoire et exceptionnel », la période de réduction des effectifs militaires de l’Opération, afin qu’elle puisse conserver des capacités d’autoprotection. 

Dans l’intervalle, le Secrétaire général devra rendre compte oralement de la situation sur le terrain « dans les 60 jours suivant l’adoption de la présente résolution ».  Avec le Président de la Commission de l’Union africaine (UA), il devra aussi faire un rapport spécial, au plus tard le 30 septembre 2019, contenant une évaluation de la situation sur le terrain et des recommandations sur la réduction des effectifs de la MINUAD.  Ce rapport spécial contiendra aussi une stratégie politique conjointe de l’UA et de l’ONU précisant les options en vue d’un mécanisme de suivi à la mission.

Un délai plus large aurait permis une évaluation conjointe « approfondie » par l’UA et l’ONU ainsi que la mise en place d’initiatives de médiation, a estimé l’Afrique du Sud au nom des trois pays africains membres du Conseil qui auraient préféré une prorogation de six mois.  Il a fait en revanche remarquer que la prorogation décidée aujourd’hui confirme et complète les décisions de l’UA de reporter le retrait de la MINUAD.

Le Soudan, plus impatient, s’est appuyé sur l’amélioration constante de la situation au Darfour pour dire que la résolution aurait dû tenir compte de ces progrès sur le terrain.  Réitérant la détermination de son gouvernement à revenir à la normalité au Darfour et à éliminer les causes profondes du conflit, il a insisté sur le fait qu’il n’existe « pas de raisons valables pour que la mission reste ».  Le Conseil de sécurité devra tenir compte de cela lorsqu’il examinera à nouveau la situation dans quatre mois, a-t-il suggéré. 

Pour le Royaume-Uni et l’Allemagne, cette résolution marque « une pause nécessaire » dans la stratégie de sortie de la MINUAD.  Cette pause permettra d’assurer la sécurité des civils, de poursuivre les efforts en faveur de la paix et la stabilité durables, ainsi que de se préparer à traiter les causes profondes du conflit au Soudan, a défendu le Royaume-Uni.  Son homologue allemand a souligné qu’en adoptant cette résolution, le Conseil de sécurité avait « débranché son pilotage automatique ».  Cela veut dire qu’il n’y aura pas de retrait à l’aveugle de la MINUAD. 

« Les quatre prochains mois devraient permettre de clarifier la situation politique au Soudan », ont prédit les États-Unis, qui ont émis le vœu que le Conseil militaire de transition passe le pouvoir à un gouvernement dirigé par des civils, capable de progresser dans la création des conditions favorables au retrait de la MINUAD.

Le Royaume-Uni, porte-plume du texte, a prévenu que sans amélioration de la situation sur le terrain, on se retrouvera dans la même position d’incapacité de maintenir la paix et de procéder au retrait de la MINUAD.  Il a souligné l’occasion qui s’offre aux responsables soudanais de mettre un terme à la violence, installer un gouvernement civil et aider le Soudan à instaurer la stabilité pour que le pays puisse rejoindre le concert des Nations.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2019/445)

Texte du projet de résolution (S/2019/525)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures et toutes les déclarations de sa présidence concernant la situation au Soudan et soulignant qu’il importe de s’y conformer pleinement,

Réaffirmant avec force son attachement à la souveraineté, à l’unité, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Soudan,

Prenant acte du Rapport spécial du Président de la Commission de l’Union africaine et du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (S/2019/445),

Considérant que la situation au Soudan menace la paix et la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide de proroger jusqu’au 31 octobre 2019 le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD);

2.    Décide que la MINUAD devrait continuer de s’acquitter de son mandat tel qu’il est énoncé dans la résolution 2429 (2018) et décide également de prolonger, à titre provisoire et exceptionnel, la période de réduction des effectifs militaires de l’Opération, comme énoncé au paragraphe 5 de la résolution 2429 (2018), afin qu’elle puisse conserver des capacités d’autoprotection;

3.    Prie instamment le Secrétaire général de lui rendre compte oralement de la situation sur le terrain dans les 60 jours suivant l’adoption de la présente résolution et demande au Secrétaire général et au Président de la Commission de l’Union africaine de lui faire un rapport spécial, au plus tard le 30 septembre 2019, comme suit:

i)    Une évaluation de la situation sur le terrain et des recommandations sur la conduite à suivre au sujet de la réduction des effectifs de la MINUAD;

ii)   Une stratégie politique conjointe de l’Union africaine et de l’Organisation des Nations Unies précisant les options en vue d’un mécanisme de suivi à la MINUAD;

4.    Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a jugé nécessaire cette résolution qui décide de marquer une pause dans le retrait de la MINUAD.  Cette pause est nécessaire pour pouvoir assurer la sécurité des civils, poursuivre les efforts en faveur de la paix et de la stabilité durables, ainsi que pour se préparer à traiter les causes profondes du conflit au Soudan.  Le représentant a appelé les autorités soudanaises à protéger le personnel et les biens de l’ONU au Soudan.  Les Forces d’appui rapide doivent se retirer des sites de la MINUAD, a-t-il aussi exigé en rappelant la nécessité d’instaurer un gouvernement civil à Khartoum qui soit accepté par les Soudanais et la communauté internationale.

Sans amélioration de la situation sur le terrain, on se retrouvera dans la même position d’incapacité de maintenir la paix et de procéder au retrait de la MINUAD, a mis en garde le représentant, craignant ainsi que le Conseil de sécurité ne se retrouve encore dans l’obligation de proroger le mandat de la mission.  Il a indiqué aux responsables soudanais le choix qui s’offre à eux: mettre un terme à la violence, mettre en place un gouvernement civil et aider le Soudan à instaurer la stabilité pour que le pays puisse rejoindre le concert des Nations. 

Pour M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne), cette résolution montre que le Conseil de sécurité a « débranché son pilotage automatique » et qu’il est prêt à être à la hauteur de son mandat.  Cette résolution signifie qu’il n’y aura pas de retrait à l’aveugle de la MINUAD et qu’on n’ignorera pas la situation qui prévaut à Khartoum, s’est-il félicité.  Il a apprécié que cette pause donne le temps aux acteurs soudanais de parvenir à la solution que la population exige et que la communauté internationale attend: un gouvernement civil.  C’est fondamental pour répondre aux aspirations de la population et pour instaurer la paix.  Cette résolution montre aussi que nous avons entendu l’appel de l’Union africaine, a ajouté le représentant.  Mais « pause » ne signifie pas « pause dans la réalisation du mandat de la mission », notamment lorsqu’il s’agit de protéger les civils, a prévenu le représentant.

M. Heusgen a par ailleurs salué la décision du Gouvernement de retirer le « décret 102 » qui attribuait les sites de la MINUAD aux Forces d’appui rapide.  C’est une étape importante, a-t-il estimé tout en exigeant que les camps des Nations Unies passent sous le contrôle d’un futur gouvernement de civils dans le cadre d’une feuille de route réaliste.  Celle-ci doit, a-t-il précisé, garantir la remise des sites au gouvernement civil.  « Cette résolution montre également que nous avons les yeux rivés sur la paix durable au Soudan », a ajouté le délégué en plaidant pour la poursuite de l’action de la communauté internationale, pour la recherche de solutions pour les déplacés et pour le développement économique du Soudan. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a dit que son pays avait toujours été favorable à un retrait responsable et prudent de la MINUAD en fonction de la situation sur le terrain.  Dès lors, a-t-il poursuivi, pour décider de la fermeture de la mission, « nous avons besoin d’avoir un gouvernement légitime et pleinement reconnu par la communauté internationale ».  Pour lui, l’incertitude politique actuelle au Soudan justifie entièrement que le retrait de la mission soit « momentanément interrompu ». 

Le représentant a saisi cette occasion pour condamner avec fermeté les violences survenues ces dernières semaines à Khartoum et dans d’autres villes, en demandant que leurs auteurs en répondent devant la justice.  Pour M. Delattre, l’enjeu aujourd’hui est de reprendre le dialogue politique pour parvenir à une transition négociée et consensuelle, portée par un pouvoir dirigé par des civils.  À cet égard, il a tenu à saluer les efforts entrepris par l’Union africaine, appuyés notamment par la médiation éthiopienne, et appelé les Nations Unies à soutenir pleinement ces initiatives.  Pour finir, il a attiré l’attention sur la situation préoccupante au Darfour et appelé la communauté internationale à tout mettre en œuvre pour éviter l’embrasement de cette région. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a remercié les membres du Conseil pour leur efforts visant à garantir que la MINUAD s’acquitte de son mandat de protection des civils, de soutien à l’aide humanitaire pour 1,2 million de personnes déplacées et d’assistance à la création d’un processus politique inclusif au Darfour.  Faisant référence aux récents affrontements armés, il a estimé que la MINUAD devait continuer à exercer son plein mandat.  Il a fait valoir que la sécurité à Khartoum étant intrinsèquement liée à celle au Darfour, ce délai supplémentaire de quatre mois laisse le temps aux Forces d’appui rapide de se retirer des sites de la mission et de s’assurer que le futur transfert de ces sites et du siège de la MINUAD se fasse pour l’usage communautaire.  Pour l’heure, nous soutenons la décision de l’ONU de ne pas transférer ces sites aux Forces d’appui rapide et de conserver les sites pour des activités civiles, a-t-il dit.

Les quatre prochains mois devraient permettre de clarifier la situation politique nationale, a poursuivi le représentant en émettant le vœu que le Conseil militaire de transition passe à un gouvernement dirigé par des civils, capable de progresser dans la création des conditions favorables au retrait de la MINUAD.  Toutefois, si les négociations s’arrêtent ou que les conditions de sécurité continuent de se détériorer, nous examinerons de plus près le retrait de la mission, a-t-il dit.  Il a exhorté les parties prenantes à soutenir ces efforts au cours des prochains mois.

Mme MADUISCA BATISTA DÍAZ (République dominicaine) a souligné qu’avec cette résolution, le Conseil de sécurité montre que l’ONU ne peut pas se permettre de sortir de son mandat de maintien de la paix au Soudan par un échec.  La MINUAD a la responsabilité de protéger la population civile, a rappelé la représentante qui a mis en exergue la poursuite des violations des droits de l’homme en particulier contre les femmes et les filles, des conflits intercommunautaires, des déplacements internes et des restrictions à l’acheminement de l’aide humanitaire.  Après 12 années de déploiement de la MINUAD, nous ne pouvons permettre à cette mission de ne pas donner les résultats escomptés, a estimé la représentante.  De son avis, la situation actuelle nécessite une présence internationale forte s’inscrivant dans un mandat de protection de la population civile, ainsi qu’un engagement effectif du Gouvernement envers le bien-être du peuple soudanais. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) s’est félicité de l’unité du Conseil sur cette question et s’est dit favorable à une stratégie de sortie.  Il a plaidé pour que le retrait de la MINUAD se fasse de telle sorte qu’il ne crée pas un vide sécuritaire.  C’est pourquoi il s’est déclaré en faveur d’une « évaluation honnête » de la situation sur le terrain.  Il a souhaité que le prochain rapport du Secrétaire général et de l’Union africaine permette de formuler des recommandations sur la suite à donner en ce qui concerne le retrait de la MINUAD.  Le représentant a tenu à rappeler, pour finir, que l’Indonésie avait été le fer de lance de la stabilité au Darfour et l’un des principaux fournisseurs de contingents. 

Pour M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud), qui parlait aussi au nom de la Côte d’Ivoire et de la Guinée-Équatoriale, cette résolution signifie qu’il est important de reconnaître l’incertitude sur les plans politique et de la sécurité qui règne actuellement au Soudan.  Les trois pays africains membres du Conseil auraient préféré une prorogation de six mois, afin de disposer du temps nécessaire pour évaluer de manière exhaustive la situation, a dit le représentant.  Cela aurait aussi permis une évaluation conjointe approfondie par l’Union africaine et l’ONU ainsi que la mise en place d’initiatives de médiation.  Il a ajouté que cette prorogation confirme et complète les décisions de l’Union africaine de reporter le retrait. 

« Nous sommes convaincus que les dirigeants soudanais utiliseront efficacement le temps imparti pour remédier à l’impasse politique, instaurer la stabilité et réaliser les aspirations du peuple soudanais », a déclaré M. Matjila.  Cette fois-ci, il convient de s’assurer que tous les sites des équipes de la MINUAD sont utilisés à des fins civiles, comme prévu, a poursuivi le représentant.  « Nous espérons que la visite commune prévue à Khartoum du Premier Ministre éthiopien, du Président de l’Union africaine et du Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine aidera les parties prenantes soudanaises à se mettre d’accord sur un arrangement transitoire commun », a indiqué M. Matjila.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a été d’avis que la situation au Soudan appelle une pause dans le processus de retrait de la MINUAD.  Malheureusement, a regretté la représentante, le Conseil de sécurité ne peut pas adopter des mesures à long terme au Soudan à cause de la situation qui y prévaut.  Elle a espéré que cette prorogation n’aurait pas d’incidence négative, notamment sur le mandat de la mission.

M. ALEXANDER V. REPKIN (Fédération de Russie), qui a réitéré l’importance de respecter le délai prévu pour le retrait de la MINUAD, a souligné la nécessité d’un retrait responsable de la mission.  Les conditions sont réunies pour commencer une transition, pour passer de la phase de maintien de la paix à celle de la consolidation de la paix, a estimé le représentant, qui a demandé aux membres du Conseil de s’abstenir de toute tentative visant à généraliser à tout le Soudan la situation au Darfour.  Il a salué la décision du Conseil militaire de transition de retirer le décret 102 octroyant aux Forces d’appui rapide les sites de la MINUAD.  Cela signifie que les autorités soudanaises tiennent leur promesse, a-t-il justifié.  Il a également pris position contre toute tentative de remettre en cause la stratégie de sortie de la mission. 

M. MA ZHAOXU (Chine) s’est félicité de l’adoption à l’unanimité de la résolution qui proroge le mandat de la MINUAD pour quatre mois et demande une évaluation de la situation au Darfour.  Il a fait part de son inquiétude, à cet égard, de l’instabilité de la situation au Darfour.  Il a, en outre, souligné les efforts du Gouvernement du Soudan qui joue, selon lui, un rôle vital dans la stabilité au Darfour.  C’est pourquoi il s’est déclaré en faveur de la primauté de la direction par le Gouvernement.  La Chine, a-t-il rappelé, a été active pour défendre le processus de paix au Darfour, étant notamment l’un des importants fournisseurs de contingents à la MINUAD et ayant joué un rôle constructif pour la stabilité et le développement dans la région.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a estimé que la stratégie de sortie de la MINUAD devait se poursuivre en dépit de l’adoption de cette résolution.  Selon le représentant, le Soudan est tout à fait apte à protéger sa population.  Il a vu cette période de quatre mois comme une opportunité de suivre l’évolution de la situation au Soudan.  Avant de terminer, il a souligné la nécessité de renforcer la capacité du Gouvernement soudanais à protéger la population et à préserver la paix.  Il a insisté sur l’importance de ne pas interférer dans les affaires intérieures du Soudan. 

M. OMER MOHAMED AHMED SIDDIG (Soudan) a réitéré que la situation au Darfour s’améliore en permanence.  Il a dit avoir compté sur le fait que les délégations « porte-plume », dans la rédaction de la résolution, tiennent compte des améliorations sur le terrain.  Pour le Soudan, il est important de garder la stratégie de sortie graduelle prévue pour la mission au Darfour.  Il a ensuite réaffirmé la détermination du Gouvernement du Soudan à revenir à la normalité au Darfour et à traiter les causes profondes du conflit.  Il n’existe pas de raisons valables pour que la mission reste, a-t-il insisté.  Le Conseil de sécurité devra tenir compte de cela lorsqu’il examinera à nouveau la situation dans quatre mois, a-t-il suggéré.  « Le maintien de la paix n’est plus utile au Darfour car la MINUAD a aidé à asseoir la paix et la sécurité au Darfour. »  Le représentant a réitéré la détermination de son gouvernement à assurer le succès du mandant de la MINUAD qui est une mission « purement africaine ». 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

​​​​​​​Conseil de sécurité: la Présidente du Comité des sanctions au Soudan présente son rapport trimestriel dans le contexte des incertitudes politiques

8565e séance – après-midi
CS/13863

​​​​​​​Conseil de sécurité: la Présidente du Comité des sanctions au Soudan présente son rapport trimestriel dans le contexte des incertitudes politiques

La Représentante permanente de la Pologne, Mme Joanna Wronecka, a fait aujourd’hui au Conseil de sécurité le compte rendu des activités du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 1591 (2005) relative au Soudan, au cours de la période allant du 26 mars au 18 juin 2019, marquée par la transition politique.

La Présidente du Comité a exprimé son intention de se rendre au Soudan, précisant qu’aucune date n’a été arrêtée du fait de la situation politique et sécuritaire qui prévaut dans le pays, laquelle a aussi empêché le Groupe d’experts du Comité d’aller dans le pays.

Au cours d’une réunion tenue le 12 avril dernier, le Coordonnateur du Groupe d’experts s’était d’ailleurs inquiété du retrait progressif de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et de ses implications sur sa faculté de travailler au Darfour.  Il avait ajouté que la période de transition au Soudan pourrait avoir un impact sur le travail de son Groupe, notamment en terme logistique. 

Le Coordonnateur avait fait part de l’intention du Groupe de coordonner son travail avec l’Union africaine et d’autres entités de l’ONU présentes au Soudan, tout en adoptant une approche régionale comme l’a demandé le Comité des sanctions.  En présentant le programme de travail du Groupe d’experts, le Coordonnateur avait dit que les experts entendent continuer à surveiller les éventuelles violations des sanctions, tout en suivant le processus politique de paix.  Ils entendent également enquêter sur les groupes armés darfouriens qui se trouvent en Libye et dans la région, tout en travaillant en collaboration avec les Groupes d’experts des Comités sur la Libye, le Soudan du Sud et la République centrafricaine.

Le 21 juin dernier, les Comités des sanctions sur la Libye, le Soudan et le Soudan du Sud ont discuté des activités des groupes armés darfouriens et envisagé la meilleure façon d’empêcher la déstabilisation.

Peu avant, le 6 juin, le Comité des sanctions sur le Soudan a reçu le rapport trimestriel des experts sur la situation au Darfour, y compris les activités de la MINUAD, le processus de paix, les activités des groupes armés, le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, ainsi que le respect des sanctions imposées par le Conseil de sécurité.

C’est par sa résolution 1556 du 30 juillet 2004 que le Conseil de sécurité a imposé un embargo sur les armes à tous individus et entités non gouvernementales, y compris les milices janjaouid, présents dans tous les États du Darfour-Nord, du Darfour-Sud et du Darfour-Ouest au Soudan.   Par sa résolution 1591 du 29 mars 2005, il a élargi la portée de cet embargo à toutes les parties à l’Accord de cessez-le-feu de N’Djamena et à tout autre belligérant dans les trois États et créé un comité chargé de suivre l’application de l’embargo sur les armes et de deux mesures supplémentaires imposées par la résolution, à savoir l’interdiction de voyager et le gel des avoirs des personnes que désignerait le Comité. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: multiplication des appels pour préserver le Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien

8564e séance – matin
CS/13862

Conseil de sécurité: multiplication des appels pour préserver le Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien

À quelques semaines du quatrième anniversaire du Plan d’action global commun, les appels se sont multipliés, aujourd’hui, au Conseil de sécurité, pour préserver cet accord sur le nucléaire iranien, entériné par la résolution 2231 (2015) et considéré par beaucoup comme un des outils les plus importants de non-prolifération et un instrument essentiel pour prévenir une escalade des tensions au Moyen-Orient.  La décision des États-Unis de se retirer du Plan d’action a été une nouvelle fois décriée, de même que celle de l’Iran de renoncer à certains de ses engagements.

Nous sommes peut-être aujourd’hui à un tournant critique pour l’avenir du Plan d’action, a dit craindre l’Union européenne, qui a décrit le Plan d’action comme un accord nucléaire réalisant les objectifs fixés.  Il n’y a aucune autre alternative « crédible et pacifique », a-t-elle asséné.  Le Plan est le résultat de 12 années de diplomatie intense et de négociations techniques, a rappelé la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix.  Mais après leur retrait, s’est inquiétée Mme Rosemary DiCarlo, les États-Unis ont en outre décidé de ne pas prévoir d’exceptions en ce qui concerne le commerce de pétrole avec l’Iran et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire. 

Par réaction, a-t-elle aussi regretté, l’Iran a décidé de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde si les autres participants ne tiennent pas compte de ses exigences dans les secteurs bancaire et pétrolier dans un délai de 60 jours.  Cette décision, a argué l’Iran, est pleinement conforme aux paragraphes 26 et 36 du Plan d’action qui stipulent qu’en cas de réimposition de sanctions, nous avons le droit de mettre un terme, entièrement ou en partie, à nos obligations.

Les États-Unis, a-t-il accusé, nous demandent de mener des négociations sans condition préalable.  Mais pour eux, cela veut dire se retirer d’un accord considéré comme un succès majeur du multilatéralisme, réimposer des sanctions, punir les États qui mettent en œuvre la résolution 2231, appliquer une politique de pression maximale, imposer sanctions sur sanctions, punir toute une nation, mener une guerre économique d’envergure, se livrer à du terrorisme économique et à l’aventurisme militaire, envoyer des drones dans l’espace aérien iranien, renforcer la présence militaire dans le golfe Persique, fomenter des plans pour diviser les pays et aviver les tensions pour vendre plus d’armes dans la région. 

Nous n’allons pas, et ce Conseil ne devrait pas non plus, rester les bras ballants alors que l’Iran s’attaque à nos partenaires dans la région et aux navires commerciaux dans le Golfe, ont rétorqué les États-Unis.  Les groupes soutenus par l’Iran parlent ouvertement de l’aide militaire qu’ils continuent de recevoir de Téhéran, et le coordonnateur de l’appui militaire aux terroristes et aux hommes de main se déplace librement, en violation de l’embargo sur les armes et de l’interdiction de voyager, ont-ils argué.  Le défi que l’Iran lance au Conseil et son comportement « irresponsable » ne doivent pas être minimisés au nom d’un accord qui ne lui barre pas vraiment la route aux armes nucléaires. 

La majorité des délégations a rappelé l’Iran à son obligation de respecter pleinement la résolution 2231.  La Belgique, facilitatrice de la mise en œuvre de la résolution, a en effet évoqué les activités de l’Iran relatives aux missiles et aux lanceurs d’engins spatiaux, que certains États Membres décrivent comme des activités « en contradiction » avec l’annexe B de la résolution.  Elle a aussi fait référence aux contre-arguments de l’Iran basés sur une différente interprétation du paragraphe 3 de la même annexe.  D’autres informations, a-t-elle dit, mentionnent les transferts d’armes iraniennes dans la région, « une autre source de désaccord ». 

Exprimant, comme d’autres, son attachement au Plan d’action tant que l’Iran respectera ses engagements, la France a prévenu que la disparition de cet accord marquerait un dangereux retour en arrière, « porteur d’incertitudes et potentiellement de lourdes conséquences pour la région, pour le régime de non-prolifération et pour notre sécurité collective ».  La Fédération de Russie a également dit craindre « un point de non-retour », s’inquiétant du « double langage » et des signaux « très difficiles à interpréter, même pour un spécialiste de la cryptologie ».  Elle a refusé l’idée que les accords internationaux soient pris en otage par la « cuisine interne » de certains pays et a dit comprendre la « grande déception » de l’Iran à qui l’on demande de respecter strictement le Plan d’action sans pouvoir en tirer les bénéfices.  L’Iran, a-t-il plaidé, a le droit d’attendre des participants restants qu’ils lui démontrent l’intérêt qu’il y a à rester attaché au Plan. 

Ceux qui sont restés fidèles au Plan d’action, a souligné l’Union européenne, savent qu’aux côtés de la mise en œuvre par l’Iran de ses engagements, la levée des sanctions permettant la normalisation du commerce et des relations économiques avec ce pays constitue une partie essentielle de l’arrangement.  L’Union européenne a promis de faire tout pour que le peuple iranien tire les dividendes du Plan d’action.  Elle a parlé de l’opérationnalisation prochaine de l’INSTEX, « Instrument in Support of Trade Exchanges », un véhicule qui conduira à des canaux financiers efficaces et qui permettra un commerce légitime avec l’Iran, conformément aux lois et règlementations européennes et internationales.  Les États-Unis y ont vu une tentative de « contourner » les prescrits de l’annexe B de la résolution 2231.

NON-PROLIFÉRATION (S/2019/488S/2019/492S/2019/514)

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a d’abord rappelé que le Plan d’action global commun sur la question nucléaire iranienne, approuvé par la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, est le résultat de 12 années de diplomatie intense et de négociations techniques.  Le Plan et la résolution ont été durement gagnés.  Ils doivent être vus comme le succès du multilatéralisme, de la non-prolifération nucléaire, du dialogue et de la diplomatie.  La Secrétaire générale adjointe a attiré l’attention sur le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) qui déclare que l’Iran continue à honorer ses engagements. 

Dans le même temps, a-t-elle poursuivi, nous sommes préoccupés par les derniers développements.  Les États-Unis ont décidé de ne pas prévoir d’exceptions, en ce qui concerne le commerce de pétrole avec l’Iran, et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire dans le cadre du Plan d’action.  Ces actes peuvent entraver la capacité de l’Iran d’appliquer certaines dispositions du Plan d’action, a prévenu la Secrétaire générale adjointe. 

Il est tout aussi regrettable d’entendre l’Iran proclamer, le 8 mai 2019, son intention de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde, et qu’il s’affranchira des limites et des mesures de modernisation du réacteur à eau lourde d’Arak si les autres participants ne tiennent pas compte de ses exigences dans les secteurs bancaire et pétrolier dans un délai de 60 jours. 

Il faut aussi regretter l’annonce, faite le 17 juin 2019, que l’Iran pourrait dépasser le 27 juin la limite de ses stocks d’uranium enrichi au titre du Plan.  L’Iran doit continuer de mettre en œuvre tous ses engagements en dépit des défis considérables auxquels il est confronté, a encouragé la Secrétaire générale adjointe. 

Elle a salué les initiatives des autres participants dont la pleine mise en œuvre doit être une priorité.  Il est essentiel que le Plan d’action fonctionne, y compris qu’il génère des bénéfices économiques concrets pour le peuple iranien.  Les États Membres et les autres acteurs pertinents devraient également travailler avec les participants au Plan d’action pour le préserver.  Dans le même temps, l’Iran doit répondre aux préoccupations exprimées par les États Membres concernant ses activités relatives aux restrictions prévues dans l’annexe B de la résolution 2231.

Les derniers événements dans le Golfe rappellent que nous sommes à la croisée des chemins.  Elle a appelé tous les États Membres à éviter les actions qui pourraient détériorer la situation.  Elle a exhorté toutes les parties à dialoguer et recourir à la diplomatie pour rapprocher leurs points de vue, à désamorcer les tensions pour éviter les mauvais calculs et les accidents.  « S’il est une chose que le monde ne peut s’offrir, c’est une confrontation majeure dans la région du Golfe », a dit la Secrétaire générale adjointe en paraphrasant le Chef de l’Organisation. 

Pour ce qui est de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015), en particulier son annexe B, Mme DiCarlo a indiqué que sur les dispositions relatives au nucléaire, elle n’a pas reçu des nouvelles informations sur l’approvisionnement, le commerce ou le transfert vers l’Iran.  La filière d’approvisionnement créée pour le transfert de matériels nucléaires vers l’Iran reste un important mécanisme de transparence.  Tous les États et le secteur privé sont encouragés à la mettre pleinement en œuvre et à la soutenir.  Le Secrétaire général a pris note de l’annonce du 3 mai par les États-Unis selon laquelle l’implication des États dans certaines activités prévues au paragraphe 2 de l’annexe B peut désormais être exposée à des sanctions. 

Deuxièmement, concernant les dispositions sur les missiles balistiques, la France, l’Allemagne, l’Iran, Israël, la Fédération de Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont transmis leurs points de vue sur les tirs d’essai de missiles balistiques à moyenne portée, le 1er décembre 2018, les vols d’essai, entre décembre 2018 et février 2019, et le lancement de lanceurs spatiaux, entre janvier et février 2019.  Les informations reçues reflètent des opinions divergentes sur la conformité de ces initiatives avec le paragraphe 3 de l’annexe B qui appelle l’Iran à n’entreprendre aucune activité relative aux missiles balistiques capables de porter des armes nucléaires, y compris les lancements utilisant la technologie des missiles balistiques.

Le rapport parle également de l’analyse des pièces retirées des missiles balistiques lancés en Arabie saoudite par les houthistes entre mars et juin 2018.  Ces pièces ont été fabriquées entre 2000 et 2010, et d’autres ont été vendues aussi récemment qu’en 2012.  Dans l’analyse, les dates de production et de vente sont incompatibles avec les missiles Scud dont on sait qu’ils se trouvaient dans les stocks yéménites avant le déclenchement du conflit actuel au début de 2015. 

Troisièmement, s’agissant des dispositions sur les armes, le rapport donne des informations sur les personnes inculpées au Royaume-Uni pour avoir exporté des pièces d’avions de combat des États-Unis vers l’Iran par des entreprises localisées dans divers pays. 

Le Secrétariat a aussi examiné un certain nombre d’armes et de matériels militaires trouvés au Yémen, dont un deuxième missile sol-air, des ailes d’un nouveau type de drone, et un nouveau type de navire de surface chargé d’explosifs.  Le Secrétariat est certain que ces armes et matériels sont de fabrication iranienne.  Mais il n’est pas en mesure d’affirmer qu’ils ont été exportés de l’Iran après le 16 janvier 2016. 

Le rapport fait état aussi d’un discours du dirigeant du Hamas et d’une déclaration du porte-parole de la brigade Al-Qods, en mai, qui a mis en exergue le soutien de l’Iran au Hamas et au Jihad islamique à Gaza.  Toute exportation iranienne d’armes après le 16 janvier 2016 est une violation de l’annexe B de la résolution 2231 (2015).  Le rapport souligne également la participation d’entités iraniennes dans les expositions organisées à l’étranger sur les armes de défense. 

Enfin, le rapport donne des informations supplémentaires sur les anciens et les nouveaux voyages qu’aurait effectué le général Qasem Soleimani.  Il donne aussi des informations sur une personne et plusieurs entités figurant sur la liste de la résolution 2231 (2015) qui auraient violé les mesures d’interdiction de voyager et de gel des avoirs.  Pour faciliter la mise en œuvre de ces mesures, les informations relatives aux personnes et entités de la liste doivent être mises à jour par le Conseil, a conclu la Secrétaire générale adjointe. 

M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA, de l’Union européenne, a parlé au nom de la Haute Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, en sa qualité de Coordonnatrice de la Commission conjointe établie par le Plan d’action global commun.  Nous ne sommes, a-t-il rappelé, qu’à quelques semaines du quatrième anniversaire de l’adoption « historique » du Plan d’action, élément phare de l’architecture mondiale de la non-prolifération nucléaire qui offre à la communauté internationale les garanties nécessaires sur le programme nucléaire iranien.  Comme l’a confirmé l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), dans son quinzième rapport, l’Iran a continué d’honorer ses engagements.  Il doit continuer à le faire, a prévenu le représentant. 

Ceux qui sont restés fidèles au Plan d’action, a-t-il poursuivi, savent qu’aux côtés de la mise en œuvre par l’Iran de ses engagements, la levée des sanctions permettant la normalisation du commerce et des relations économiques avec ce pays constitue une partie essentielle de l’arrangement.  L’Union européenne et ses 28 États membres regrettent profondément que les États-Unis se soient retirés du Plan d’action.  Le fait qu’ils aient « réimposé » des sanctions unilatérales, qu’ils n’aient pas prorogé les dérogations sur la vente du pétrole et qu’ils n’aient pas renouvelé celles sur les projets liés à la non-prolifération a un impact « significatif » sur l’économique iranienne, a souligné le représentant.

La Haute Représentante, a-t-il dit, continuera à faire tout pour que le peuple iranien voit des résultats et tire les dividendes du Plan d’action.  L’opérationnalisation de l’INSTEX, « Instrument in Support of Trade Exchanges », un véhicule qui conduira à des canaux financiers efficaces, avance.  Elle permettra un commerce légitime avec l’Iran, conformément aux lois et règlementations européennes et internationales.

Mais dans le même temps, a poursuivi le représentant, l’Union européenne note avec préoccupation l’annonce que l’Iran a faite le 8 mai dernier.  Nous l’avons dit, a rappelé le représentant: l’Union européenne n’accepte aucun ultimatum et elle évaluera le respect du Plan d’action à l’aune de ce que fera l’Iran par rapport à ses engagements liés au nucléaire et au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). 

Un certain nombre de projets sont mis en œuvre en appui à l’annexe II du Plan d’action sur la coopération nucléaire civile.  Créé en vertu de l’annexe IV, le Groupe de travail sur l’approvisionnement demeure un instrument « unique » de non-prolifération, de transparence et d’établissement de la confiance.  Nous reconnaissons, a insisté le représentant, les problèmes résultant du retrait des États-Unis et de la réimposition des sanctions.  Toutefois, le Groupe de travail sur l’approvisionnement demeure un mécanisme du Conseil de sécurité et toute demande de transfert est approuvée par tous ses 15 membres. 

En dehors du Plan d’action, l’Union européenne ne cesse d’appeler à l’apaisement et à la fin des initiatives militaires dans la région.  Elle n’a d’ailleurs cessé d’exhorter l’Iran à s’abstenir de toute activité qui pourrait approfondir la méfiance comme les tests de missiles balistiques qui sont contraires à la résolution 2231 (2015).  Grâce au Plan d’action, a martelé le représentant, l’Union européenne a pu avoir des discussions avec l’Iran sur les questions régionales.  C’est grâce à ce Plan d’action que le dialogue et les autres canaux de communication ont pu être mis en place et fournir une plateforme « utile » pour les discussions. 

Nous sommes peut-être aujourd’hui à un tournant critique pour l’avenir du Plan d’action, a dit craindre le représentant, décrivant le Plan comme un accord nucléaire qui fonctionne et qui réalise les objectifs fixés.  Il n’y a aucune autre alternative « crédible et pacifique » et avec ses partenaires, l’Union européenne continuera à travailler sans relâche pour préserver le Plan d’action aussi longtemps que l’Iran honorera ses engagements. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), parlant en sa qualité de facilitateur de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015), a cité le rapport du Secrétaire général qui voit le Plan d’action global commun comme un achèvement majeur dans le domaine de la non-prolifération nucléaire, ainsi que dans le dialogue et la diplomatie.  Rappelant avoir endossé le rôle de facilitateur depuis janvier, pour une durée de deux ans, il a assuré de son intention de soutenir et améliorer la mise en œuvre de la résolution au nom du Conseil de sécurité, en suivant les directives établies par son prédécesseur.  Ce ne sera pas chose facile, a-t-il reconnu, en soulignant les difficultés que rencontre actuellement la mise en œuvre du Plan d’action global commun.

En présentant le septième rapport du facilitateur, tel qu’approuvé par le Conseil de sécurité, il a indiqué ne pas vouloir entrer dans les détails, qui sont très techniques, mais a présenté trois points. 

Le premier a porté sur les deux réunions du Conseil tenues dans le format 2231, les 3 avril et 24 juin, la dernière ayant permis aux membres de discuter des recommandations figurant dans le septième rapport du Secrétaire général avant sa publication.  En deuxième lieu, il a indiqué avoir tenu, en tant que facilitateur, des consultations bilatérales avec les États Membres et leurs représentants, y compris l’Iran, pour discuter de questions relatives à la mise en œuvre de la résolution 2231.  Son troisième point a porté sur les deux derniers rapports de l’AIEA concernant la période février-mai 2019, le dernier assurant que, pour la quinzième fois, l’Iran tient ses engagements pris dans le Plan d’action global commun.  À cette occasion, M. Pecsteen de Buytswerve a salué le rôle central -impartial, factuel et professionnel- joué par l’Agence dans la mise en œuvre du Plan.

Le facilitateur a ensuite abordé, « en toute impartialité », les points de désaccord, dans la perspective de trouver des solutions qui agréent les parties.  Il a évoqué les différentes lettres envoyées dans le cadre du processus de la 2231.  En ce qui concerne les activités de l’Iran relatives aux missiles et aux lanceurs d’engins spatiaux, il a noté les lettres envoyées par les États Membres qui décrivent des activités « en contradiction » avec l’annexe B.  Il a aussi fait référence aux contre-arguments de l’Iran basés sur une différente interprétation du paragraphe 3 de la même annexe (interdiction à l’Iran de mener des « activités liées aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires »).  Les divergences sur ce texte constituent un point litigieux récurrent, a-t-il observé.  D’autres lettres mentionnent les transferts d’armes iraniennes qui auraient lieu dans la région, une autre source de désaccord.

Abordant par ailleurs le « recul » dans la mise en œuvre et le respect du Plan d’action global commun, le facilitateur a noté les inquiétudes exprimées après le renforcement des sanctions économiques imposées par les États-Unis depuis leur retrait du Plan, ainsi que, plus récemment, la fin de certaines exemptions pour des projets de non-prolifération nucléaire, ce qui affecte le respect de la résolution 2231.  Il a aussi noté les préoccupations quant aux récentes annonces faites par l’Iran sur le non-respect de certains engagements.  Une autre inquiétude exprimée par certains États Membres, et par la Commission conjointe, concerne l’impact des sanctions imposées à nouveau par les États-Unis sur les travaux du Groupe de travail sur l’approvisionnement et les éventuelles difficultés de mise en œuvre et sur ceux de la Commission conjointe.  Or, M. Pecsteen de Buytswerve a fait remarquer que les procédures d’approvisionnement sont au cœur du mécanisme du Plan d’action global commun.

En conclusion, le facilitateur a regretté la détérioration du contexte actuel, qui nuit au respect de la résolution 2231 et au Plan d’action global commun.  Celui-ci jouit d’un très large soutien de la part de la communauté internationale, a-t-il rappelé.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a confirmé l’attachement de son pays au Plan d’action, « la meilleure façon de prévenir l’apparition des armes nucléaires en Iran ».  Ce plan, a-t-elle dit, est essentiel pour assurer notre sécurité.  Elle a donc regretté une nouvelle fois la décision des États-Unis de s’en retirer et de réimposer des sanctions.  Tant que l’Iran respectera pleinement le Plan, le Royaume-Uni fera tout son possible pour l’appuyer, a-t-elle indiqué, signalant que les derniers rapports de l’AIEA confirment que l’Iran respecte bien ses engagements.  La représentante s’est toutefois inquiétée de la menace de l’Iran de cesser de respecter le Plan et de dépasser les limites imposées à ses stocks d’uranium enrichi.  Elle a exhorté l’Iran à ne pas agir de la sorte.

Elle a également relevé que l’Iran « prétend » ne pas mettre de charges nucléaires sur les missiles.  Or, ces missiles sont conçus pour cela, « ce qui signifie que l’intention est là ».  Le Royaume-Uni, a-t-elle indiqué, procède à une évaluation de la situation dans le cadre du Régime de contrôle de la technologie des missiles (RCTM I).  La représentante a aussi dénoncé les transferts d’armes effectués par l’Iran, en violation des résolutions du Conseil de sécurité, s’appuyant sur les faits relayés dans le rapport.  La technologie des missiles employée par l’Iran est « déstabilisatrice » pour la région, a-t-elle insisté, ajoutant que « le comportement de l’Iran représente un danger grave pour la paix et la stabilité de la région ». 

Au début de la semaine, lors des consultations du Conseil de sécurité, nous avons dit, a-t-elle rappelé, que nous sommes « presque certains » que ce sont bien les Gardiens de la révolution islamique qui ont mené, au mois de mai, les attaques contre des pétroliers et « presque convaincus » que ces Gardiens sont également à l’origine de l’attaque du 13 juin dans la mer d’Oman.  La représentante a appelé au dialogue pour apaiser les tensions.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a constaté que quatre années après sa conclusion, le Plan d’action global commun est « plus que jamais » à la croisée des chemins, pointant notamment une « série d’évènements défavorables », à commencer par le retrait unilatéral d’un des acteurs clefs et la montée des tensions dans le golfe Persique.  Voyant dans ce plan un cadre inclusif susceptible d’aider à tempérer les ambitions nucléaires militaires iraniennes, le représentant a estimé qu’il est nécessaire de conjuguer les efforts pour prévenir le délitement du consensus actuel autour du Plan d’action.  Il a souhaité que les réponses aux insuffisances potentielles du Plan soient élaborées dans le cadre de la Commission conjointe.

Convaincu que le maintien de l’accord sur le nucléaire iranien est tributaire de l’engagement des parties signataires, M. Adom a exhorté les parties concernées à la retenue et à s’abstenir de tout acte hostile.  Il a condamné les récentes attaques dans le détroit d’Ormuz et a appelé à une enquête « impartiale » afin d’en identifier les auteurs.  Il a également fait savoir que la Côte d’Ivoire souhaite vivement que les autorités iraniennes renoncent à toute décision de se retirer du Plan d’action.

« Les défis qui nous mobilisent au Conseil sont plus nombreux et plus graves que jamais, et nos responsabilités sont immenses, sur les enjeux de la non-prolifération comme sur l’ensemble des dossiers régionaux dont nous avons à traiter », a déclaré d’emblée M. FRANÇOIS DELATTRE (France).  Notre responsabilité est dans ce contexte d’être pleinement mobilisés pour trouver une issue aux crises susceptibles d’émerger, a-t-il poursuivi.  C’est précisément cet engagement et cette mobilisation collective qui ont permis dès 2003, à l’initiative des E3, et avec le soutien du Conseil, de tracer le chemin vers des négociations avec l’Iran qui ont mené à l’adoption du Plan d’action global commun en 2015.  Cet accord a été scellé par l’adoption de la résolution 2231, « une résolution portée par les cinq membres permanents de ce Conseil », reflet de leur unité sur les enjeux de la non-prolifération, a rappelé M. Delattre.  La France, a-t-il dit, reste résolument attachée à la préservation de ce cadre.  Elle continuera activement ses efforts pour mettre en œuvre ses obligations au titre du Plan d’action global commun, avec ses partenaires de l’Union européenne, tant que l’Iran respectera ses engagements nucléaires.

Le Plan d’action global commun, a poursuivi le représentant, est un instrument de non-prolifération « indispensable » et « une pierre angulaire » pour la stabilité au Moyen-Orient.  Il a appelé chacun à s’abstenir d’annonces et de mesures susceptibles de l’affaiblir et de précipiter une escalade des tensions dans la région.  Pour la France, le retrait des États-Unis de l’accord l’an dernier, et les sanctions adoptées depuis par eux, ont ouvert une phase d’incertitude très préoccupante.  La France est également préoccupée par les récentes annonces iraniennes quant au non-respect des dispositions du Plan d’action.  Notre position reste claire, a martelé le représentant: l’Iran doit impérativement continuer à mettre en œuvre pleinement ses obligations nucléaires.  Au-delà des annonces, l’Iran doit s’abstenir de toute mesure qui le placerait en violation de ses engagements.  Le représentant a souligné que le Plan d’action résulte d’un équilibre « fragile ».  Toute cessation, même partielle, des engagements iraniens aurait des conséquences en termes de risque de prolifération nucléaire et déstabiliserait plus encore la région. 

Le représentant a également fait part de ses préoccupations par rapport au non-respect continu par l’Iran des dispositions de la résolution 2231, notamment sur ses activités balistiques et sur les transferts d’armes diverses vers d’autres acteurs au Moyen-Orient.  Il est « indispensable » que l’Iran cesse ces activités et se conforme pleinement aux résolutions adoptées par ce Conseil, a exigé M. Delattre avant de lancer « un appel urgent au pragmatisme et à la lucidité ». 

Face au risque d’escalade causé par les incidents dans le golfe d’Oman, il importe que l’ensemble des acteurs concernés fassent preuve de la plus grande retenue, privilégient la voie du dialogue et du règlement pacifique, et contribuent ainsi à une désescalade régionale.  La France encourage et soutient à cet égard, tous les efforts de médiation entre les parties.  Cette crise doit être aussi l’occasion de s’engager dans la recherche de mécanismes régionaux de stabilisation et de sécurité, alors que la disparition du Plan d’action global commun marquerait un dangereux retour en arrière, porteur d’incertitudes et potentiellement de lourdes conséquences pour la région, pour le régime de non-prolifération et pour notre sécurité collective, a mis en garde M. Delattre.  Nous devons tous œuvrer pour éviter un tel scénario, dont nous paierions tous le prix, a averti le représentant, en appelant chacun « autour de cette table du Conseil » à se rallier à l’objectif de préserver l’accord nucléaire.

Nous sommes, a estimé, M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne), à un moment clef de la mise en œuvre du le Plan d’action global commun que nous devons tous préserver, tant que l’Iran respectera pleinement ses engagements.  Regrettant la décision américaine de se retirer du Plan et de ne pas renouveler les dérogations aux fins de projets de non-prolifération nucléaire qui sont pourtant essentielles, le représentant s’est dit préoccupé de la réponse de l’Iran de ne plus respecter les restrictions sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde.  L’Allemagne veut travailler avec les autres parties pour aider l’Iran à bénéficier des allègements prévus par l’accord, a assuré le représentant, en attirant l’attention sur l’opérationnalisation prochaine du système « INSTEX ». 

Il a encouragé tous les États, y compris l’Iran, à respecter les dispositions de l’annexe B de la résolution 2231.  Les questions qui ne sont pas liées au Plan d’action doivent être traitées à part, a-t-il estimé, avant d’exprimer sa préoccupation face aux transferts d’armes par l’Iran « qui ont des effets négatifs sur la sécurité européenne ».  Inquiet de la précision croissante des missiles iraniens, il a exhorté l’Iran à cesser ses essais de tirs balistiques.  Le représentant s’est particulièrement dit préoccupé par les transferts de la technologie des missiles balistiques au houthistes au Yémen et dans la bande de Gaza « qui sont une violation des résolutions 2231 (2015) et 2216 (2015) ».  Il a insisté sur l’interdiction de tout transfert d’armes vers des acteurs non étatiques.  « Ces activités sont troublantes », a-t-il déclaré à l’adresse de l’Iran. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a tout simplement estimé que le retrait des États-Unis du Plan d’action est « contraire » aux objectifs fixés.  Le Plan, a-t-il rappelé à son tour, a été adopté à l’unanimité par le Conseil de sécurité et représente un « véritables succès » de la diplomatie multilatérale.  Ce plan est un des plus importants outils de non-prolifération au monde.  L’Iran, qui est le pays le plus contrôlé de la planète, respecte à la lettre toutes ses obligations, comme l’indique le rapport du Secrétaire général, a fait observer le représentant.

Il a refusé l’idée que les accords internationaux soient pris en otage par la « cuisine interne » de certains pays.  Les États-Unis sont devenus « un pays nuisible » qui tente de punir tous ceux qui cherchent à mettre en œuvre les dispositions du Plan.  Nous exhortons l’Iran à rester attaché à ses engagements envers la communauté internationale, a conseillé le représentant qui s’est inquiété du « double langage » et des signaux « très difficiles à interpréter, même pour un spécialiste de la cryptologie ».  Le représentant a dit craindre « un point de non-retour ».

Il faut dépasser les intérêts égoïstes, a-t-il encouragé, et veiller au respect du Plan.  Faire monter les enchères et multiplier les provocations ne sert à rien.  On ne peut pas régler tous les problèmes par les sanctions militaires et économiques, a-t-il estimé.  Le représentant a dit comprendre la « grande déception » de l’Iran à qui l’on demande de respecter strictement le Plan d’action sans pouvoir en tirer les bénéfices.  L’Iran, a-t-il plaidé, a le droit d’attendre des participants restants qu’ils lui démontrent l’intérêt qu’il y a à rester attaché au Plan.

Quant aux armes et matériel connexe, retrouvés au Yémen, qui seraient de fabrication iranienne, le représentant russe a insisté sur le « problème de la compétence » des inspecteurs.  L’origine iranienne de ces armes n’a pas été prouvée, et sans certitude, pourquoi continuer à aborder cette question dans les rapports du Secrétaire général? s’est-il demandé.  On attise la situation de manière artificielle dans le golfe Persique, a-t-il mis en garde, se disant peu convaincu des « preuves » de la culpabilité de l’Iran.  Il a rappelé les événements qui ont précédé l’invasion de l’Iraq et a plaidé pour une architecture inclusive de sécurité impliquant tous les pays de la région.  Il a appelé à des mesures de désescalade, arguant le compromis et les efforts collectifs coordonnés sont la seule voie à suivre.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a estimé que le Plan d’action global commun est la plus grande réalisation diplomatique dans le domaine de la non-prolifération nucléaire depuis la signature du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) en 1996.  Il a dit partager l’avis du Secrétaire général qui indique, dans son rapport, que ces efforts diplomatiques sont une « réalisation durement gagnée » qui doit être préservée et servir d’inspiration.  Le représentant a salué le fait que l’Iran ait respecté ses engagements, comme en témoigne le quinzième rapport de l’AIEA soumis au Conseil de sécurité le 31 mai dernier.  Il a donc invité les autres parties au Plan d’action à respecter leurs engagements.

Le représentant a regretté à son tour la décision des États-Unis de se retirer de l’accord.  L’élimination complète des armes nucléaires, a-t-il souligné, est la seule garantie qui vaille.  Le représentant a rappelé que le désarmement nucléaire et la non-prolifération sont deux processus qui se renforcent mutuellement.  Il a plaidé pour le droit inaliénable des parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Fervent défenseur des zones exemptes d’armes nucléaires, l’Afrique du Sud, a-t-il dit, plaide pour que la création d’une zone au Moyen-Orient.  Le représentant a salué la résolution 73/546 de l’Assemblée générale sur la convocation en 2019 d’une conférence chargée d’examiner la création d’une telle zone.  Le représentant a conclu en exprimant sa préoccupation face à la montée des tensions dans le golfe Persique et de son impact sur la paix et la sécurité internationales. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déploré le retrait des États-Unis du Plan d’action et la décision de l’Iran de ne plus respecter les limites imposées sur les réserves d’uranium enrichi et d’eau lourde.  Il a appelé au strict respect de toutes les restrictions prévues dans l’annexe B de la résolution 2231.  Il a engagé les autorités iraniennes à ne mener aucune activité en lien avec les missiles balistiques et les a appelées à faire preuve de prudence et de modération.  Le développement du programme de missiles balistiques pourrait être considéré comme « une provocation ou une escalade » et attiser les tensions dans une région particulièrement instable, a-t-il prévenu.

Selon l’AIEA, a indiqué Mme JOANNA WRONECKA (Pologne), l’Iran a honoré ses engagements en vertu du Plan d’action global commun.  L’Agence, a-t-elle poursuivi, a confirmé l’absence d’activités nucléaires de l’Iran.  Elle s’est dite tout de même préoccupée par l’annonce du pays de ne plus respecter les restrictions imposées sur ses stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde.  Elle a appelé l’Iran à rester attaché au Plan d’action et à la résolution 2231.  Elle a aussi appelé la communauté internationale à trouver une solution pacifique aux conflits régionaux car un conflit au Moyen-Orient pourrait avoir des conséquences dangereuses même au-delà de la région.  Elle a appelé l’Iran à coopérer avec la communauté internationale pour désamorcer les tensions et à mettre un terme à ses activités balistiques.  Au Moyen-Orient, les tensions et la méfiance ne sont pas tenables.  L’Iran doit s’abstenir de toute rhétorique incendiaire.

Pour M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie), il ne fait aucun doute que tout le monde est d’accord pour dire que le Plan d’action a été un succès « historique » du multilatéralisme.  Il a exprimé son attachement à la pleine mise en œuvre du Plan et à la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité.  Il s’est félicité du respect par l’Iran de ses engagements, comme cela a du reste été confirmé dans les 15 rapports de l’AIEA.  Il a regretté le fait que le retrait des États-Unis pourrait saper la mise en œuvre du Plan et s’est, dans le même temps, inquiété de la décision de l’Iran de réduire ses engagements en vertu du Plan.  Le représentant a appelé tous les signataires du Plan à y rester attachés et recourir au dialogue pour régler les divergences sur l’interprétation du Plan et de la résolution 2231 (2015).  Il a appelé l’Iran à tenir compte des préoccupations internationales pour préserver la stabilité de la région.

Les questions qui ne sont pas liées au Plan d’action et à la résolution devraient être examinées de manière distincte, a tout de même souligné le représentant, tout en reconnaissant que la situation qui prévaut dans la région influence d’une manière ou d’une autre la mise en œuvre du Plan et de la résolution.  Il a appelé les parties à faire preuve de retenue et à s’abstenir d’actions qui pourraient envenimer la situation.  L’objectif global, a-t-il rappelé, est d’assurer un usage pacifique de l’énergie nucléaire par l’Iran. 

M. WU HAITAO (Chine) a indiqué que le Plan est d’une importance cruciale pour préserver la non-prolifération et la stabilité au Moyen-Orient.  L’AIEA a indiqué 15 fois de suite que l’Iran respecte bien ses obligations.  La Chine, a dit le représentant, espère que l’Iran continuera de le faire et que les autres parties prendront des mesures positives.  Il a regretté le retrait des États-Unis et les sanctions unilatérales qu’ils imposent à l’Iran.  Il a plaidé pour un commerce juste avec l’Iran et estimé que le rapport du Secrétaire général devrait aussi refléter les préoccupations « légitimes » de ce pays.  À son tour, il s’est inquiété de l’escalade des tensions au Moyen-Orient et a appelé au calme et à la retenue.  Il a prôné le dialogue pour dissiper les tensions et appelé les parties concernées à prendre des mesures concrètes pour préserver le Plan d’action.

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) a jugé le rapport du Secrétaire général « équilibré et complet » et souligné le respect par l’Iran des dispositions du Plan d’action et de la résolution 2231 (2015).  À son tour, elle s’est dite préoccupée par l’impact du retrait des États-Unis et a prié l’Iran de continuer à honorer ses obligations.  Le Plan d’action n’est qu’une partie de la résolution 2231, a rappelé la représentante, pour qui le non-respect de certaines dispositions de l’annexe B de ladite résolution suscite des inquiétudes.  Elle a encouragé l’Iran à tenir compte de ces préoccupations, le mettant en garde contre sa décision de dépasser les limites relatives à l’uranium enrichi et à l’eau lourde.  Elle a encouragé toutes les parties à créer les conditions nécessaires pour que le Plan d’action reste en vigueur. 

Le septième rapport du Secrétaire général reflète le même « sentiment de préoccupation » que de nombreux États partagent depuis plusieurs semaines, a estimé M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis).  Le rapport paraît alors que l’Iran continue de déstabiliser le Moyen-Orient non seulement en appuyant les groupes terroristes et ses hommes de main, mais aussi en s’attaquant désormais aux navires commerciaux.  Les conclusions du rapport du Secrétaire général ajoutent une couche au tableau déjà troublant du comportement de l’Iran, a poursuivi le représentant.  Le rapport, a-t-il précisé, détaille l’inspection sur les armes et le matériel connexe retrouvés au Yémen et dit qu’ils sont « clairement » de fabrication iranienne.  L’enquête rejette l’excuse que l’Iran n’a cessé de répéter: cet arsenal était au Yémen bien avant l’adoption de la résolution 2231.  « C’est manifestement faux », a martelé le représentant.

Les groupes appuyés par l’Iran parlent ouvertement de l’aide militaire qu’ils continuent de recevoir de Téhéran en violation de l’embargo sur les armes.  Le rapport du Secrétaire général cite en effet le discours du chef du Hamas et les propos du porte-parole des brigades Al-Qods.  Celui qui coordonne l’appui militaire de l’Iran, c’est le général Qasem Soleimani, et selon le rapport, il continue à voyager librement dans tout le Moyen-Orient malgré l’interdiction imposée par la résolution 2231.  Il n’est pas le seul à voyager, s’est impatienté le représentant, dénonçant le « laxisme » dans la mise en œuvre de la résolution.

Il a ensuite attiré l’attention du Conseil sur les derniers exemples concrets de la manière dont l’Iran déstabilise la région: menaces contre les navires étrangers et l’espace aérien international, prolongation de la violence au Yémen et contribution à l’expansion des groupes terroristes et des hommes de main dans tout le Moyen-Orient.  Ces informations, a-t-il noté, montrent bien que l’Iran continue à envoyer des armes dans toute la région, en violation flagrante des résolutions du Conseil.  Le 8 mai, a dit à son tour le représentant, l’Iran a décidé de renoncer à certains de ses engagements nucléaires, une menace qui risque de compromettre la paix et la sécurité régionales et internationales.  L’AIEA, a-t-il affirmé, a déjà indiqué que l’Iran a installé de nouvelles centrifugeuses sophistiquées dont le nombre est une violation des limites imposées. 

Mais, s’est emporté le représentant, l’Iran continue de nier qu’il cachait et gardait des archives secrètes sur ses armes nucléaires.  Si Israël ne les avait pas subtilisées, les scientifiques iraniens aurait pu s’en inspirer pour relancer un autre programme.  Les actes de l’Iran sont profondément contreproductifs et ne font que l’isoler.  Le défi que l’Iran lance au Conseil et son comportement irresponsable ne doivent pas être minimisés au nom d’un accord qui ne lui barre vraiment la route aux armes nucléaires. 

L’Iran doit assumer ses responsabilités et attribuer ses problèmes économiques à sa mauvaise gestion, à sa corruption et à l’affectation de ses ressources à ses opérations militaires dans la région.  C’est son comportement qui est la cause de son déclin économique, pas les États-Unis, a tranché le représentant, condamnant les efforts des autres gouvernements pour « contourner » l’annexe B de la résolution 2231.  Y a-t-il quelqu’un ici qui croit sincèrement que l’Iran n’est pas derrière les transferts d’armes dans les zones de conflit dans la région?  Nous l’avons dit clairement, a conclu le représentant: nous voulons dialoguer avec l’Iran pour négocier un accord qui servirait vraiment la paix et la sécurité internationales.  Mais, a-t-il prévenu, nous n’allons pas, et ce Conseil ne devrait pas non plus, rester les bras ballants alors que l’Iran s’attaque à nos partenaires dans la région et aux navires commerciaux dans le Golfe.  Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour faire cesser le comportement « diabolique » de l’Iran, y compris par des mises à jour régulières du régime des sanctions. 

Pour M. PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), le Plan d’action global commun est une « œuvre maitresse » du multilatéralisme et l’une des grandes réussites de la non-prolifération nucléaire.  Rappelant qu’il garantit, depuis son entrée en vigueur il y a trois ans, le caractère exclusivement pacifique du programme iranien, ce qui a été à nouveau confirmé par l’AIEA pour la quinzième fois, M. Pecsteen de Buytswerve a estimé qu’au-delà d’être un accord nucléaire, ce plan est un outil de construction de la confiance.

Partageant les inquiétudes de ses partenaires européens quant aux activités balistiques iraniennes, il a appelé l’Iran à s’abstenir de ces activités, en particulier les lancements de missiles balistiques qui contreviennent à la résolution 2231.  Préoccupé également par les activités iraniennes qui contribuent à l’instabilité régionale, y compris les transferts de missiles et d’armes aux acteurs étatiques et non étatiques, notamment aux houthistes au Yémen, il a demandé à l’Iran le respect de toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  L’Iran doit engager un dialogue sérieux sur ces préoccupations, notamment avec les autres acteurs de la région.

Revenant à l’accord nucléaire, M. Pecsteen de Buytswerve a regretté le retrait des États-Unis, la réimposition de sanctions unilatérales américaines et la levée des exemptions dans le domaine du nucléaire qui empêchent, non seulement l’Iran, mais les autres États Membres des Nations Unies -parties et non parties au Plan d’action– de mettre en œuvre leurs engagements au titre de la résolution 2231, agréée par tous les membres du Conseil et soutenue par la communauté internationale.

Cependant, tout en comprenant la difficile position économique et politique de l’Iran, la Belgique, a dit le représentant, tout comme ses partenaires européens, rejette l’approche du « less for less » et appelle l’Iran à respecter la résolution 2231 dans son intégralité, y compris les mesures restrictives qui figurent à l’annexe B.

En conclusion, M. Pecsteen de Buytswerve a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue.  Démanteler un accord nucléaire qui fonctionne ne nous placerait pas en meilleure position pour discuter des questions régionales ou apporter une solution immédiate aux risques auxquels il répond, a-t-il mis en garde.  « Il n’y a pas d’alternative crédible au Plan d’action et notre devoir est de le préserver », a-t-il tranché.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a appuyé la mise en œuvre du Plan d’action global commun et a salué la détermination des parties à le préserver.  Cet accord a atteint les objectifs fixés en dépit du retrait des États-Unis, a-t-il affirmé, notant que tous les rapports de l’AIEA indiquent que l’Iran, « soumis au régime de contrôle le plus strict au monde », respecte ses engagements.  Il s’est inquiété des allégations selon lesquelles l’Iran violerait certaines dispositions du paragraphe 3 de l’annexe B de la résolution 2231.  Il a appelé l’Iran à s’abstenir de toute activité ou rhétorique déstabilisatrice, parlant de l’intention de ce dernier de ne plus respecter les limites imposées aux stocks d’uranium enrichi et d’eau lourde.  Le représentant a conclu en appelant les signataires du Plan d’action à poursuivre leur coopération et a salué l’engagement des Européens à poursuivre les relations économiques et commerciales avec l’Iran.  L’échec du Plan d’action aurait un impact dévastateur, a-t-il souligné.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit que la paix et la sécurité internationales ne sont pas possibles tant que des armes nucléaires existent.  Le représentant a apporté son appui au Plan d’action global commun et la résolution 2231 (2015) car nous sommes attachés à toutes les résolutions du Conseil de sécurité, surtout celles qui visent la sécurité et la paix au Moyen-Orient.  Il a condamné les dernières attaques contre les navires pétroliers.  Préoccupé par les activités dans les eaux internationales et par l’origine des missiles tirés contre l’Arabie saoudite, il a condamné ce type d’attaques qui mettent en péril la vie des civils.  Il a rappelé les résolutions de la Ligue des États arabes demandant à l’Iran de mettre fin à ses activités qui menacent les pays voisins.  Il a réaffirmé l’importance pour la Conseil de sécurité de faire un suivi de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015) « pour que l’Iran et les autres États respectent leurs obligations ». 

M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a souligné que le Plan d’action global commun repose sur deux piliers: les engagements de l’Iran relatifs au nucléaire et les engagements des autres relatifs aux retombées économiques pour le peuple iranien.  Il a souligné que les 15 rapports consécutifs de l’AIEA confirment que son pays a continué de respecter pleinement ses engagements.  « Le premier pilier est donc entièrement respecté. »

Le deuxième pilier est composé de deux engagements complémentaires: la levée des sanctions et la normalisation des relations économiques et commerciales.  Par la résolution 2231, le Conseil de sécurité avait levé l’ensemble des sanctions contre l’Iran et en vertu du Plan d’action, l’Union européenne et les États-Unis se sont engagés à s’abstenir de toute mesure conçue de manière intentionnelle pour avoir un effet négatif sur la normalisation des relations économiques et commerciales et de toute mesure pouvant saper le succès du Plan.  Le Plan engage aussi les États-Unis à éviter toute ingérence dans les bénéfices tirés de la levée des sanctions.

Mais que s’est-il passé dans la pratique?  Les États-Unis, a rappelé le représentant, se sont retirés du Plan et ont réimposé des sanctions.  Ils continuent de menacer de manière éhontée de contraindre les États à violer la résolution 2231 sous risque de punitions. 

C’est un comportement « irresponsable », sans précédent dans l’histoire du Conseil de sécurité, a tranché le représentant.  Les États-Unis ne respectent pas leurs obligations découlant de la résolution 2231, ne permettent pas à l’Iran de mettre en œuvre certaines parties du Plan et empêchent d’autre États d’honorer leurs obligations découlant de la résolution.

Un an après le retrait des États-Unis, la seule réaction de l’Iran a été d’offrir de nouvelles chances aux parties restantes, notamment aux E3, pour compenser les conséquences de ce retrait, a affirmé le représentant.  À cause de notre « politique de patience stratégique » pour préserver le Plan, nous avons payé le prix d’une guerre économique imposée par les États-Unis et de leur politique de pression maximale, à commencer par la tentative de réduire à zéro les exportations de pétrole et de perturber le libre-échange.

Pour protéger la sécurité et les intérêts nationaux et apporter un équilibre au Plan, l’Iran, a indiqué le représentant, a décidé, le 8 mai, de limiter la mise en œuvre de ses engagements concernant le niveau des réserves d’uranium enrichi et d’eau lourde.  Cette décision, a-t-il ajouté, est pleinement conforme aux paragraphes 26 et 36 du Plan qui stipulent qu’en cas de réimposition de sanctions, l’Iran a le droit de mettre un terme, entièrement ou en partie, à ses obligations.

M. Takht Ravanchi a ajouté que si des mesures pratiques ne sont pas prises dans les 60 prochains jours par les autres participants au Plan, l’Iran sera contraint de suspendre ses engagements sur les limites de l’uranium enrichi et la modernisation du réacteur à eau lourde d’Arak.  Il a appelé les E3 à prendre des mesures adéquates, sérieuses et pratiques pour préserver le Plan ou assumer, comme les États-Unis, la pleine responsabilité des conséquences éventuelles.

L’Iran, a-t-il poursuivi, est déterminé à faire front contre le terrorisme économique des États-Unis et la communauté internationale doit elle aussi savoir résister au harcèlement et au mépris des lois qu’affichent les États-Unis.  Nous ne devons pas laisser les inventions, la désinformation et la manipulation des États-Unis dicter l’ordre du jour.  Le représentant a pointé du doigt la « campagne de désinformation » sur le programme de missiles balistiques de l’Iran dont les engins, a-t-il insisté, sont uniquement conçus pour porter des ogives classiques car ils ne sont pas capables de transporter des armes nucléaires.

Il a aussi récusé l’affirmation des États-Unis selon laquelle les sanctions ne touchent pas la population.  C’est tout le contraire, s’est-il indigné, avertissant que ce sont les plus vulnérables qui en souffrent le plus, à commencer par les personnes gravement malades qui nécessitent des médicaments et des équipements médicaux de l’étranger.  Toutes les importations de médicaments sont bloquées, malgré les affirmations des États-Unis qui prétendent qu’il existe des exceptions.  « Quelle hypocrisie! » 

Les États-Unis « militarisent » les vivres et les médicaments, ce qui revient à punir collectivement toute une nation et à constituer un crime contre l’humanité.  Les États-Unis, a-t-il encore accusé, nous demandent de répondre « à la diplomatie par la diplomatie » et de mener des négociations sans condition préalable.  Mais pour eux, cela veut dire se retirer d’un accord considéré comme un succès majeur du multilatéralisme, réimposer des sanctions, punir les États qui mettent en œuvre la résolution 2231, appliquer une politique de pression maximale, imposer sanctions sur sanctions, punir toute une nation, mener une guerre économique d’envergure, se livrer à du terrorisme économique et à l’aventurisme militaire, envoyer des drones dans l’espace aérien de l’Iran, renforcer la présence militaire dans le golfe Persique, fomenter des plans pour diviser les pays et aviver les tensions pour vendre plus d’armes dans la région.

Tant que les sanctions « illégales » seront appliquées, a-t-il prévenu, nous ne pourrons pas croire à l’offre d’un dialogue « honnête et authentique ».  Tout le monde sait, a dit M. Takht Ravanchi, que le drone abattu le 20 juin dernier survolait l’espace aérien iranien.  Il a conseillé aux États-Unis d’accepter la responsabilité de cet acte « illégal », rejetant accusations fallacieuses et campagnes de désinformation.  Leurs dires, a-t-il ajouté, n’ont même pas été confirmés par leurs alliés les plus proches dont l’un d’eux a même déclaré aujourd’hui ne pas avoir de preuves suffisantes, a-t-il fait observer.  Les États-Unis, a-t-il conclu, doivent cesser « leur aventurisme » dans le golfe Persique.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité reconduit pour un an les sanctions concernant la RDC

8563e séance – matin 
CS/13861

Le Conseil de sécurité reconduit pour un an les sanctions concernant la RDC

Le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé jusqu’au 1er juillet 2020 les sanctions sur les armes et transports transfrontaliers imposées aux groupes armés non étatiques en République démocratique du Congo (RDC), ainsi que le gel des avoirs et les restrictions pesant sur les déplacements des personnes impliquées dans des activités compromettant la stabilité du pays.  Le Conseil a également reconduit jusqu’au 1er août 2020 le mandat du Groupe d’experts de son Comité chargé de surveiller l’application du régime de sanctions en RDC.

Pour se prononcer sur le sort du régime de sanctions en RDC, le Conseil était saisi du rapport final de son Groupe d’experts de quatre personnes sur le pays.  Créé par la résolution 1533 (2004), ce dernier a pour fonction d’aider le Comité du Conseil en charge de l’application des sanctions, en lui fournissant des informations sur les nouvelles personnes et entités représentant une menace pour la stabilité de la RDC et susceptibles d’être visées par les sanctions. 

Dans son rapport final, le Groupe d’experts note que, depuis l’élection présidentielle congolaise du 30 décembre 2018, de plus en plus de groupes armés semblent prêts à se rendre.  Il précise toutefois que de nombreux groupes armés d’origine locale ou étrangère continuent de menacer gravement la sécurité du pays, dont les Forces démocratiques alliées (ADF), qui s’attaquent régulièrement à des civils et à l’armée du pays; Nduma défense du Congo – Rénové (NDC-R), un groupe local qui a étendu son emprise territoriale dans le Nord-Kivu; et le Conseil national de la résistance pour la démocratie (CNRD), un groupe armé rwandais établi depuis peu dans le Sud-Kivu.  Le Groupe note aussi que la collaboration entre groupes armés locaux et étrangers sur le territoire congolais aggrave la situation, en particulier dans le Sud-Kivu, où plusieurs groupes armés burundais, dont la Résistance pour un État de droit (RED Tabara), collaborent avec des groupes armés locaux des plaines centrales du territoire d’Uvir.

Sur la base de ce rapport, le Conseil a adopté à l’unanimité la résolution 2478 (2019), dans laquelle il décide de reconduire jusqu’au 1er juillet 2020 le régime de sanctions imposées en RDC.  Ces sanctions incluent notamment des mesures visant à empêcher la fourniture, la vente ou le transfert d’armes à toutes les personnes et entités non gouvernementales menant des activités en RDC.  Ces mesures sur les armes ne s’appliquent cependant plus, depuis 2008, au Gouvernement de la RDC, ni à la livraison d’armes à destination de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).

Le Conseil reconduit également les mesures sur les transports transfrontaliers en vertu desquelles les gouvernements de la région doivent veiller à ce qu’aucun aéroport civil ou militaire et aucun moyen de transport ne soit utilisé sur leurs territoires respectifs à des fins incompatibles avec les sanctions sur les armes, grâce notamment à un renforcement des contrôles douaniers aux frontières séparant l’Ituri et les Kivus des États voisins.

Le Conseil reconduit en outre les sanctions financières et restrictions concernant les déplacements des personnes désignées par le Comité des sanctions comme se livrant à des actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité de la RDC.  Concrètement, le Conseil impose à tous les États de prendre les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire de ces personnes et de geler les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques de ces personnes se trouvant sur leur territoire.

Parallèlement, dans sa résolution, le Conseil décide de proroger jusqu’au 1er août 2020 le mandat du Groupe d’experts du Comité des sanctions et exprime son intention de réexaminer ce mandat en vue de se prononcer, le 1er juillet 2020 au plus tard, sur une nouvelle prorogation. 

Le Conseil prie en outre le Groupe d’experts de lui présenter, après concertation avec le Comité des sanctions, un rapport à mi-parcours, le 30 décembre 2019 au plus tard, et un rapport final, le 15 juin 2020 au plus tard.  Il demande également au Groupe d’experts d’adresser des mises à jour mensuelles au Comité, sauf les mois où ces rapports doivent lui être remis.  Le Conseil prie enfin le Groupe d’experts de faire au Comité, tous les 12 mois, des propositions de mise à jour des informations figurant sur la liste relative aux sanctions concernant la RDC.

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (S/2019/469)

Texte du projet de résolution (S/2019/522)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions précédentes, en particulier la résolution 2360 (2017), ainsi que les déclarations de sa présidence concernant la République démocratique du Congo,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo et de tous les États de la région, et soulignant que les principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale doivent être pleinement respectés,

Prenant note du rapport final (S/2019/469) du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo (le « Groupe d’experts »), créé en application de la résolution 1533 (2004) et reconduit dans ses fonctions par les résolutions 1807 (2008), 1857 (2008), 1896 (2009), 1952 (2010), 2021 (2011), 2078 (2012), 2136 (2014), 2198 (2015), 2293 (2016), 2360 (2017) et 2424 (2018),

Rappelant que le Gouvernement congolais doit enquêter rapidement et de manière approfondie sur le meurtre des deux membres du Groupe d’experts et des quatre Congolais qui les accompagnaient et traduire les auteurs en justice, se félicitant que le Secrétaire général se soit engagé à faire en sorte que l’Organisation ne ménage aucun effort pour que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice, saluant les travaux de l’équipe des Nations Unies déployée afin d’appuyer l’enquête nationale, en accord avec les autorités congolaises, et se réjouissant de la poursuite de cette coopération,

Constatant que la situation en République démocratique du Congo constitue toujours une menace pour la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide de reconduire jusqu’au 1er juillet 2020 les mesures énoncées aux paragraphes 1 à 6 de la résolution 2293 (2016), notamment les réaffirmations qu’il y a faites;

2.    Réaffirme que les mesures décrites au paragraphe 5 de la résolution 2293 (2016) s’appliquent aux personnes et entités que le Comité aura désignées à raison des actes définis au paragraphe 7 de cette même résolution ainsi qu’au paragraphe 3 de la résolution 2360 (2017);

3.    Décide de proroger jusqu’au 1er août 2020 le mandat du Groupe d’experts tel que défini au paragraphe 6 de la résolution 2360 (2017), exprime l’intention de le réexaminer et de se prononcer, le 1er juillet 2020 au plus tard, sur une nouvelle prorogation, et prie le Secrétaire général de prendre dès que possible les mesures administratives requises pour rétablir le Groupe d’experts, en consultation avec le Comité, en faisant au besoin appel aux compétences des membres du Groupe créé conformément aux résolutions antérieures;

4.    Prie le Groupe d’experts de lui présenter, après concertation avec le Comité, un rapport à mi-parcours, le 30 décembre 2019 au plus tard, et un rapport final, le 15 juin 2020 au plus tard, et d’adresser des mises à jour mensuelles au Comité, sauf les mois où ces rapports doivent lui être remis;

5.    Réaffirme les dispositions concernant l’établissement de rapports énoncées dans la résolution 2360 (2017);

6.    Rappelle les directives régissant la conduite des travaux du Comité telles qu’adoptées par celui-ci le 6 août 2010, prie les États Membres d’appliquer, selon qu’il convient, les procédures et critères qui y sont énoncés, notamment en ce qui concerne les inscriptions sur la liste et les radiations de la liste, et rappelle sa résolution 1730 (2006) à cet égard;

7.    Prie le Groupe d’experts de faire au Comité, tous les douze mois, des propositions de mise à jour des informations figurant sur la liste relative aux sanctions concernant la République démocratique du Congo formulées conformément aux directives et en consultation avec les États à l’origine des inscriptions et des États de résidence ou de nationalité concernés sur les points suivants:

a)    les éléments permettant d’identifier les personnes, groupes, entreprises et entités désignées par le Comité;

b)    les personnes inscrites sur la liste qui seraient décédées, ainsi qu’une évaluation des renseignements pertinents tels que la certification du décès et, autant que possible, l’état des avoirs gelés et le lieu où ils pourraient se trouver ainsi que le nom de tout ayant droit ou copropriétaire inscrit sur la liste qui pourrait prétendre à des avoirs dégelés;

c)    les groupes, entreprises et entités inscrits sur la liste qui auraient cessé d’exister ou dont la disparition a été dûment constatée, ainsi qu’une évaluation des renseignements pertinents;

d)    tout élément qu’il serait pertinent d’ajouter ou de modifier dans l’exposé des motifs;

8.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.