Conseil de sécurité: les parties au Mali doivent dialoguer dans l’esprit de l’Accord de paix, prévient le Représentant spécial du Secrétaire général
Il est « extrêmement important » que toutes les parties poursuivent le dialogue « dans le cadre de l’esprit de l’Accord de paix, qui demeure le socle pour un retour à la paix et à la stabilité au Mali », a prévenu ce matin, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), M. Mahamat Saleh Annadif, alors que le Conseil de sécurité examinait le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation dans ce pays.
Adressée par visioconférence depuis Bamako aux signataires de l’Accord d’Alger de 1995 comme aux membres du Conseil de sécurité, cette mise en garde intervient dans un contexte politique qualifié de « pas important » pour la classe politique et la société civile, à savoir le lancement des préparatifs d’un dialogue national inclusif. Ce dialogue, qui devait initialement porter sur des consultations des parties prenantes sur la révision de la Constitution, a progressivement englobé les réformes politiques et institutionnelles majeures prévues dans l’Accord.
Malgré une diminution significative du nombre d’attaques contre des civils et du nombre de civils tués et blessés durant les trois derniers mois, le climat politique malien est aussi caractérisé, selon M. Annadif, par un « malaise ». Ce dernier est apparu après la désignation par le Président malien Ibrahim Boubacar Keita de trois facilitateurs censés diriger l’organisation et la tenue du dialogue, à savoir le Médiateur de la République, Baba Akhib Haïdara, l’ancien Premier Ministre, Ousmane Issoufi Maïga, et l’activiste politique et ancienne Ministre du Gouvernement, Aminata Dramane Traoré.
Cette tension a été aggravée par l’annonce faite par le Gouvernement de sa volonté de revoir certaines dispositions de l’Accord de paix durant ce dialogue, a fait observer le Représentant spécial. Conséquence directe: certains partis d’opposition, dont la coalition Front pour la sauvegarde de la démocratie dirigée par le Chef de l’opposition Soumaïla Cissé, ont exprimé des réserves quant au choix des facilitateurs tandis que d’autres ont annoncé qu’ils ne participeraient pas au dialogue national inclusif, indique le rapport.
Reconnaissant des retards dans la mise en œuvre de certaines dispositions de l’accord, le représentant du Mali a dit « comprendre l’impatience » des partenaires. Ces retards sont justifiés a-t-il dit, par « le déficit de ressources financières » et « la détérioration de l’environnement sécuritaire », en particulier dans le centre du Mali où les « forces du mal » montent les populations les unes contre les autres, « alimentant les violences intercommunautaires ».
« La multiplication des attaques terroristes ces dernières semaines dans la région du Sahel, souligne l’urgence pour la communauté internationale de s’investir davantage à nos côtés », a-t-il poursuivi, appelant la Communauté internationale à fournir à la Force conjointe du G5 Sahel « les moyens humains, matériels et financiers nécessaires à la réalisation de son mandat ».
La situation sécuritaire reste en effet source de préoccupations dans le nord et le centre du pays, notamment avec des attaques des groupes terroristes contre les civils, ainsi que contre les forces de la MINUSMA et la Force conjointe du G5 Sahel, a reconnu le représentant de la Côte d’Ivoire. Selon lui, le Conseil se trouve donc dans « l’urgence de poursuivre le renforcement des capacités logistiques et opérationnelles des Forces armées maliennes, notamment dans la collecte et l’analyse d’informations. Il doit également faire preuve de pragmatisme et changer de paradigme en matière de lutte antiterroriste, y compris en s’appuyant sur les acquis du G5 Sahel.
La protection des civils et la mobilisation de fonds nécessaires à la Force conjointe du G5 Sahel pour lui permettre de surmonter ces défis doivent être prioritaires pour le Conseil de sécurité, a aussi plaidé le représentant de l’Afrique du Sud, appelant dans le même temps les autorités maliennes et le Conseil à soutenir la médiation et le dialogue religieux, interethnique et intercommunautaire partout au Mali.
La menace représentée par les groupes terroristes exige en effet de conduire une approche globale de la situation au Mali, prenant en compte les aspects sécuritaires, humanitaires et de développement, ont plaidé l’Indonésie et la Chine. Pour ces pays, il est déterminant de rétablir la présence de l’État dans le nord du pays, déployer les services sociaux de base, progresser dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et d’aligner le régime de sanctions aux principes des Nations Unies. Les sanctions doivent permettre de soutenir les efforts de paix, et non de les saper, a approuvé l’Afrique du Sud.
Certes, la communauté internationale ne peut rester passive face à ces attaques. Mais la MINUSMA est une mission de maintien de la paix et non une mission de lutte contre le terrorisme, ont objecté les États-Unis, pour qui on ne peut pas continuer de soutenir une mission si les parties refusent de mettre pleinement en œuvre leur propre accord.
Soulignant le peu de progrès réalisés par le Gouvernement malien et les signataires dans la mise en œuvre de l’Accord d’Alger et observant que certaines parties s’en sont même retirées, la représentante américaine a déclaré: « Cela n’est pas acceptable. » Pour elle, il est « impossible » de laisser passer une autre année sans mise en œuvre de l’Accord de paix, dont la signature remonte à 2015. Sinon, a-t-elle prévenu, il faudra opter pour une autre approche de la paix et de la sécurité au Mali.
LA SITUATION AU MALI - S/2019/782
Déclarations
M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), intervenant par visioconférence depuis Bamako, a souligné que le rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali est présenté à un moment où « les nouvelles qui viennent de ce pays ne sont pas réjouissantes ». Il a déploré les attaques « macabres » sur Boulikessi et Mondoro de la semaine dernière, ainsi que la mort, il y a 48 heures, d’un Casque bleu à Aguelhok et la blessure d’un autre aux environs de Bandiagara.
Le Représentant spécial a néanmoins estimé que des avancées significatives ont été enregistrées dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, notamment les réformes politiques et institutionnelles, les questions liées à la défense, la sécurité et le développement socioéconomique.
Au titre de ces avancées, il a cité la promulgation, en juillet dernier, de la Loi d’entente et de la loi établissant les principes fondamentaux de la création, de l’organisation et du contrôle de la zone de développement des régions du Nord, laquelle pose les « bases de la relance du développement au niveau local ».
M. Annadif a aussi relevé la tenue, en septembre à Bamako, de l’atelier qui a validé les termes de références du dialogue national inclusif et son lancement officiel par le Premier Ministre Boubou Cisse. Il a noté à cet égard que les principales réformes politiques et institutionnelles prévues par l’Accord figurent « en bonne place » dans les termes de référence validés.
Depuis hier, 7 octobre, les débats ont été engagés au niveau local, et se poursuivront au niveau des cercles puis des régions, avant de remonter vers la capitale pour le débat national fin octobre ou début novembre, a-t-il précisé en félicitant la classe politique malienne et la société civile pour « ce pas important ». Le Représentant spécial a aussi lancé un appel aux différentes sensibilités pour qu’elles prennent part au débat de manière à garantir une participation massive et « véritablement inclusive ».
Cependant, a regretté M. Annadif, la non-tenue de la trente-huitième session du Comité de suivi de l’Accord (CSA) prévue à Kidal le 17 septembre a créé « un malaise » entre les parties signataires, amplifié par l’annonce par le Gouvernement de sa volonté de revoir certaines dispositions de l’Accord à l’occasion du dialogue national inclusif. Il a donc jugé « extrêmement important » d’appeler toutes les parties prenantes à poursuivre le dialogue dans le cadre de l’Accord qui demeure « le socle » pour un retour à la paix et à la stabilité au Mali.
Abordant le pilier défense et sécurité de l’Accord, le Représentant spécial a expliqué que la planification du redéploiement des 1006 combattants issus du Mécanisme opérationnel de coordination, et désormais partie intégrante des Forces de défense et de sécurité maliennes, est « en bonne voie ». Cet effectif sera porté à près de 1840. Quant à la nomination d’un secrétaire permanent du Conseil de sécurité nationale, elle devrait, selon lui, faciliter l’adoption de la politique nationale de défense et de sécurité indispensable pour la mise en œuvre cohérente de la réforme du secteur de la sécurité au Mali.
Avec le démarrage des activités du cadre politique de gestion de la crise du Centre, le Gouvernement malien « affiche sa détermination à remédier à la situation », s’est encore félicité M. Annadif. Grâce à ces efforts conjugués avec ceux de la MINUSMA, il a relevé une diminution significative du nombre d’attaques contre des civils et du nombre de civils tués et blessés durant les trois derniers mois. Il a appelé à une présence accrue des FDSM dans le Centre, en coordination avec la MINUSMA. Il a enfin indiqué que le Gouvernement prévoit le démarrage, dès le 11 octobre, du programme de réhabilitation communautaire, qui prendra en charge le désarmement et le démantèlement des groupes d’autodéfense et les jeunes à risque, en particulier dans les régions du Centre.
Par ailleurs, la situation humanitaire dans le Centre continue de se dégrader, a averti le Chef de la MINUSMA. Avec la reprise du cycle de la violence, le nombre des déplacements internes avoisine les 171 000, soit le chiffre le plus élevé depuis 2015. Pour faire baisser le niveau de violence, il a jugé essentiel le retour des services de l’État, sécuritaires, judiciaires et sociaux.
M. JOSÉ SINGER WEISINGER, Président du comité des sanctions établi par la résolution 2374 (2017), a indiqué que le comité s’était réuni cinq fois depuis janvier dernier et a précisé le thème de ces réunions.
Ainsi, le 7 février, il a tenu des consultations officieuses pour examiner le rapport à mi-parcours du Groupe d’experts sur le Mali, soumis au Conseil de sécurité en accord avec le paragraphe 4 de la résolution 2432 (2018). Le 12 avril, les membres du Comité ont entendu un exposé de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, Mme Pramila Patten, sur la violence sexuelle au Mali. En mars, le comité a signé avec INTERPOL un accord visant à publier et diffuser les notices spéciales d’INTERPOL et des Nations Unies. En août, le Groupe d’experts a présenté son rapport aux membres du Conseil de sécurité.
M. Singer Weisinger a aussi informé le Conseil de sécurité de son intention de se rendre à Bamako du 16 au 18 octobre prochain. Il profitera de l’occasion pour s’entretenir avec les autorités et s’informer de la situation sécuritaire, de même que des progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord de paix et de réconciliation au Mali. Il examinera aussi les moyens de s’engager avec les autres pays de la région pour promouvoir la paix et la stabilité au Mali. Depuis sa mise en place, le comité a inscrit huit personnes sur la Liste des sanctions, a-t-il indiqué par ailleurs.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a salué les actions menées par les autorités maliennes, notamment le lancement le 16 septembre dernier du dialogue politique qui devrait permettre à toutes les forces vives du pays de faire entendre leur voix sur les questions relatives aux réformes politiques et constitutionnelles. La Côte d’Ivoire appelle les parties prenantes à privilégier l’intérêt national et à accorder une place aux femmes.
La situation sécuritaire dans le nord et le centre du pays demeure une source de préoccupation; les attaques de groupes terroristes restent récurrentes, visant tant les civils, que les forces de la MINUSMA et la Force G5 Sahel. Le Conseil de sécurité se trouve dans « l’urgence de poursuivre le renforcement des capacités logistiques et opérationnelles des Forces armées maliennes, notamment dans la collecte et de l’analyse des informations », a déclaré le représentant, se félicitant de l’adoption par le Gouvernement malien du Plan de sécurisation intégrée du centre, qui devrait contribuer à réduire les violences et les tensions intercommunautaires.
Au regard de la situation humanitaire, le délégué a noté que le nombre de déplacés internes ne cesse de croître, citant le dernier rapport du Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour qui le nombre de ces personnes est passé de 84 300 en janvier à 168 500 en juillet de cette année. « Tous ces paramètres, ainsi que les signaux inquiétants qui se multiplient imposent à notre Conseil d’aller plus loin et de faire preuve de pragmatisme dans le soutien à la lutte contre le terrorisme en Afrique. Cela implique un changement de paradigme en matière de lutte contre le terrorisme, qui doit être envisagé à l’échelle sous-régionale, s’appuyant sur les acquis du G5 Sahel », a-t-il conclu.
Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a salué la qualité et l’engagement constant de la MINUSMA, qui a souffert d’attaques récemment et perdu au moins 38 soldats maliens. La communauté internationale ne peut rester passive face à ces attaques et le conseil doit redoubler d’efforts, a-t-elle ajouté, estimant que la MINUSMA n’était « pas une mission ordinaire » et que la crise au Mali perdurait de manière dangereuse. Les organisations terroristes opèrent en nombre inacceptable et le statu quo n’est pas acceptable, a-t-elle ainsi affirmé.
La représentante a loué les efforts en cours pour stabiliser la situation dans le centre du pays en faveur du rétablissement de l’autorité de l’État et de la réconciliation et encouragé une plus grande participation des femmes au dialogue inclusif national. Toutefois, elle a jugé la tendance très inquiétante: le Gouvernement et les signataires ont fait peu de progrès dans la mise en œuvre de l’Accord d’Alger au cours des trois mois écoulés et le manque de progrès dans le dialogue entre les parties, dont certaines se sont retirées faute de moyens, n’est pas acceptable. On ne peut continuer de soutenir une mission si les parties refusent de mettre pleinement en œuvre leur propre accord a insisté Mme Craft.
Par ailleurs, la MINUSMA est une mission de maintien de la paix et ne peut être une mission de lutte contre le terrorisme, a prévenu Mme Craft, qui a noté que le G5 Sahel avait déjà déployé une force conjointe pour faire face à ces problèmes, force à laquelle participent les États-Unis. Pour la représentante, il est donc impossible de laisser passer une autre année sans mise en œuvre des Accords d’Alger de 2015. Si c’est le cas, il faudra opter pour une autre approche de la paix et sécurité au Mali, a-t-elle averti.
M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a salué les progrès enregistrés dans la mise en œuvre de l’Accord de paix, notamment du processus de désarmement. Toutefois, il a exprimé des inquiétudes concernant la situation dans le nord et le centre du Mali et insisté sur la nécessité d’accélérer les efforts pour assurer le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes. Il est déterminant de rétablir la présence de l’État et de s’occuper de la situation sécuritaire dans le nord du pays, a-t-il insisté.
Le représentant a salué les efforts de réconciliation dans le centre du pays, efforts qui sont soutenus par les partenaires internationaux. Il a ajouté que les efforts menés en faveur de la réconciliation nationale, du rétablissement de la présence de l’État et la fourniture des services de base à la population devaient être prioritaires, de même que la réponse aux défis de sécurité.
À cet égard, M. Syihab a remercié la MINUSMA et salué ses efforts d’ajustement à la situation. Pour l’Indonésie, il est indispensable de conduire une approche globale de la situation au Mali prenant en compte à la fois les aspects sécuritaires, humanitaires et le développement. Le représentant a donc appelé la communauté internationale à progresser dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.
M. HAITAO WU (Chine) a estimé que le processus de paix et réconciliation, même s’il avance lentement, avait connu quelques progrès, notamment avec le dialogue politique qui s’est engagé entre les parties. C’est pourquoi la communauté internationale doit continuer d’examiner la situation par la voie d’un soutien à la paix, à la stabilité et au développement. Le régime de sanctions doit donc suivre les principes des Nations Unies, a plaidé le représentant, insistant sur les besoins en développement du Mali.
Le représentant a également déclaré que le terrorisme qui frappe le Mali devait être combattu de manière collective. C’est pour cette raison que la Chine a octroyé 300 millions de yuans pour soutenir la Force conjointe du G5 Sahel. La Chine, qui a déployé 420 Casques bleus au Mali, estime aussi qu’il faut dans le même temps, continuer de soutenir la MINUSMA, compte tenu du contexte difficile dans lequel la Mission est déployée. Le soutien doit pouvoir lui permettre notamment de protéger ses soldats, a conclu le représentant.
M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a déclaré que les récentes attaques dans le pays venaient rappeler la nécessité urgente pour la communauté internationale d’apporter un soutien ferme et concret aux efforts des pays de la région dans leur combat contre le terrorisme. Après avoir constaté la persistance de la « menace jihadiste », le représentant a exhorté à davantage de synergies et à privilégier des mécanismes et initiatives susceptibles d’affaiblir les terroristes et d’ouvrir de nouvelles perspectives en vue d’un retour à la paix. Dans cet objectif, le dialogue national inclusif est le cadre idoine pour aborder les questions les plus épineuses, a estimé M. Esono Mbengono.
Prenant note du report de la trente-huitième session du Comité de suivi de l’Accord de paix et de réconciliation au Mali, le représentant a appelé toutes les parties maliennes à s’abstenir de se retirer du dialogue et à poursuivre les négociations. Ce travail conjoint devrait rapidement conduire à la redistribution des services sociaux de base, des services publics, notamment au déploiement des éléments des Forces de défense et de sécurité maliennes reconstituées dans les régions du Nord, a-t-il estimé.
M. Esono Mbengono a appuyé par ailleurs le communiqué du Conseil de paix et sécurité de l’Union africaine tenu le 25 juillet dernier, ainsi que la Déclaration de Ouagadougou du 14 septembre, qui réaffirme le principe du respect de l’intégrité territoriale des États. Il a de même soutenu le Plan quinquennal d’action d’un milliard de dollars de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) visant à l’intensification de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, y compris le trafic des armes, du tabac et des drogues.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a salué le lancement du dialogue national inclusif, qui doit contribuer à des réformes politiques et institutionnelles qui forgeront le futur État du Mali et répondront aux défis présentés par la situation dans le nord et dans le centre du pays , afin de préserver la souveraineté et l’intégrité du pays. La pleine mise en œuvre de cet accord est essentielle et les femmes doivent participer de manière active au processus de dialogue, a poursuivi le représentant, qui s’est dit préoccupé par l’instabilité qui perdure dans le nord et le centre du pays. Il a ainsi condamné les récentes attaques, qui ont fait de nombreux morts et a demandé que les auteurs de ces attentats soient traduits en justice.
Les hostilités intracommunautaires au centre du pays provoquent elles aussi des pertes en vies humaines -dont celles de femmes et d’enfants- et sont préoccupantes, a poursuivi le représentant. La protection des civils doit être une priorité et le Conseil doit soutenir et donner les moyens de régler les conflits par le truchement de médiation et d’un dialogue interethnique, religieux et entre communautés partout au Mali, a-t-il insisté.
M. Matjila a salué les efforts consentis en matière de désarmement, démobilisation et réintégration, qui contribuent au redéploiement des forces maliennes au nord et au centre du pays et l’action de la MINUSMA qui aide le Gouvernement à rétablir les services destinés à la population. Mais la communauté internationale doit de son côté mobiliser les fonds nécessaires. Ainsi, la Force conjointe du G5 Sahel reste importante et les Nations Unies doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que les défis auxquels elle est confrontée soient surmontés.
Quant aux sanctions, l’Afrique du Sud estime qu’elles doivent permettre de soutenir les efforts de paix, et non de les saper. Il faut donc veiller à ce qu’elles ne les entravent pas de quelque manière que ce soit. Pour le représentant, si la lutte antiterroriste n’est pas convenablement menée, tous les pays de la région en souffriront.
M. ISSA KONFOUROU (Mali) a assuré que son gouvernement s’attelait actuellement « à l’organisation très prochaine du dialogue national inclusif », avant de préciser que le processus visait à établir un inventaire approfondi des problèmes puis de proposer un plan d’action avec des échéances prédéfinies. Les consultations ont déjà commencé et doivent se terminer avant la fin du mois, a-t-il précisé.
Sur le plan de la sécurité, le représentant s’est félicité de « progrès tangibles ». Il a évoqué notamment l’intégration de 2 000 ex-combattants au sein du programme de désarmement, démobilisation et réintégration. La moitié d’entre eux a reçu la formation nécessaire pour pouvoir rejoindre les rangs de « l’Armée nationale reconstituée », a-t-il assuré.
Évoquant la situation dans le centre du Mali, M. Konfourou s’est inquiété: « les groupes terroristes, de narcotrafiquants, de trafiquants de migrants et autres sont bien déterminés à déstabiliser davantage le Mali, les pays voisins et la région ». Selon lui, ces « forces du mal » montent les populations les unes contre les autres, « alimentant les violences intercommunautaires ». Il a annoncé l’adoption d’un « Plan de sécurisation intégré des régions du centre du Mali », doté de mesures politiques et sécuritaires.
« La multiplication des attaques terroristes ces dernières semaines dans la région du Sahel, souligne l’urgence pour la communauté internationale de s’investir davantage à nos côtés », a estimé M. Konfourou. Il a appelé à fournir à la Force conjointe du G5 Sahel « les moyens humains, matériels et financiers nécessaires à la réalisation de son mandat ». Il a ajouté que les États membres du G5 Sahel étaient « pleinement conscients que le tout sécuritaire ne saurait apporter une paix durable » et qu’ils travaillaient ensemble à la mise en œuvre du « Programme d’investissements prioritaires » afin d’offrir des opportunités aux populations, en particulier à la jeunesse.
Le Fonds de développement durable, l’instrument financier dédié au développement des régions du nord du Mali, a été doté de 72 millions de dollars, a encore expliqué le représentant. Au 28 juin, le Gouvernement a déjà alloué 21% du budget national aux autorités locales sur les 30% prévus par l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, s’est-il félicité, estimant que ces efforts financiers constituaient « une illustration parfaite de la volonté du Gouvernement malien de respecter l’Accord ».
La Commission justice, vérité et réconciliation, commencera ses auditions publiques en décembre prochain, a par ailleurs annoncé le représentant. Jusqu’ici, elle a reçu 14 191 dépositions de victimes et elle conserve désormais tous les faits survenus au Mali entre 1960 et 2019, a précisé le représentant, qui a ajouté que son mandat avait été prorogé jusqu’au 21 décembre 2021.
« Je comprends l’impatience de mes partenaires concernant les retards constatés dans la mise en œuvre de certaines dispositions de l’Accord », a concédé M. Konfourou. Il les a justifiés par « la détérioration de l’environnement sécuritaire » et « le déficit de ressources financières », appelant les partenaires du Mali à « honorer leurs engagements ».