En cours au Siège de l'ONU

Première Commission: Israël refuse de participer à la conférence visant à créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient

Soixante-quatorzième session,
9e séance – après-midi
AG/DSI/3629

Première Commission: Israël refuse de participer à la conférence visant à créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient

« Israël ne participera pas » à la conférence prévue au mois de novembre pour tenter de créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, a annoncé aujourd’hui la représentante d’Israël, cet après-midi, à l’occasion du débat général de la Première Commission, chargée du désarmement et de la sécurité internationale.  Comme les jours précédents, de nombreuses délégations avaient pour leur part estimé que la mise en place de telles zones à travers le monde constituait une importante contribution au processus de désarmement nucléaire alors que beaucoup considèrent, comme l’a déploré le Liechtenstein, que « la nouvelle course aux armements dont on s’inquiétait depuis quelques années est désormais bien là ».

La représentante d’Israël a jugé « contreproductive » cette conférence, réclamée depuis longtemps et décidée cette année par l’Assemblée générale à l’initiative de la Ligue des États arabes ».  Elle a averti qu’aucune architecture de sécurité ne pourrait être mise en œuvre au Moyen-Orient sans un engagement direct avec Israël et sans reconnaître le droit à l’existence d’Israël dans des frontières sûres et garanties.  Elle a invité les promoteurs de cette conférence à faire preuve du même enthousiasme pour s’attaquer aux « vrais problèmes du Moyen-Orient », en rappelant que cinq attaques chimiques avaient été commises par des États de la région à l’encontre de leur propre population civile depuis 1945 et en décomptant quatre violations du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires depuis 1970 au Moyen-Orient. 

Or, comme l’a rappelé la Guinée-Bissau, le Moyen-Orient reste « la dernière région du monde en mesure de le faire », qui n’a pas encore créé de zone exempte d’armes nucléaires.  Il existe actuellement cinq de ces « ZEAN », qui concernent l’Amérique latine et les Caraïbes (Traité de Tlatelolco, conclu en 1967); le Pacifique Sud (Traité de Rarotonga, 1985); l’Asie du Sud-Est (Traité de Bangkok, 1995); l’Afrique (Traité de Pelindaba, 1996); et l’Asie centrale (en anglais) (Traité de Semipalatinsk, 2006).  Elles contribuent aussi efficacement à la confiance et à la sécurité régionale, a rappelé le Tadjikistan, alors que beaucoup parmi la dizaine de délégations africaines qui ont pris la parole aujourd’hui rappelaient leur attachement au Traité de Pelindaba.  Ainsi, le Burkina Faso a fait valoir que l’instauration de zones exemptes d’armes nucléaires représente une catégorie de mesures de désarmement et de non-prolifération à part entière devant être appuyée. 

Hormis Israël, aucun des pays qui se sont exprimés aujourd’hui ne dispose de l’arme nucléaire.  Ils ont donc fréquemment insisté sur le respect de l’ensemble des obligations contenues dans le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), et notamment son article VI, par lequel les « États dotés » s’engagent à agir en faveur du désarmement nucléaire, ce dernier étant l’objectif ultime du TNP.  Or, cet objectif semble de plus en plus lointain, a déploré le Liechtenstein, qui a dénoncé l’accumulation des mesures visant à moderniser les armes, augmenter les stocks et abaisser les seuils d’utilisation des armes nucléaires, tous développements en contradiction avec l’article VI.

Toujours en matière d’armement nucléaire, les intervenants ont souhaité qu’entre rapidement en vigueur le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) et ont mis en avant le rôle positif du Traité d’interdiction des armes nucléaires signé en 2017 par 122 pays, présenté comme la seule évolution positive récente et « l’expression politique de l’engagement des États non dotés à prendre au sérieux l’article VI du TNP », dont l’adoption a été décrite comme « une leçon de multilatéralisme ».

Par ailleurs, de nombreux États, notamment africains, ont rappelé leur attachement aux traités d’interdiction des armes à sous-munitions et des mines antipersonnel, ainsi qu’au traité sur le commerce des armes et aux traités visant à combattre le trafic illicite d’armes.  La Côte d’Ivoire a aussi salué le « rôle inestimable » du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique en matière de partage de bonnes pratiques, notamment dans le cadre de la lutte contre la prolifération illicite des armes légères et de petit calibre. 

Plusieurs pays ont, par ailleurs, dénoncé le développement de nouvelles doctrines de sécurité considérant l’espace extra-atmosphérique comme un nouveau terrain de combat.  Face à ce constat, ils ont appelé à la mise en place d’un nouveau cadre juridique de prévention d’une course aux armements dans l’espace.  À cet égard, le représentant du Venezuela a salué les initiatives de la Russie et de la Chine, ainsi que le projet de traité visant à prévenir la prolifération d’armes dans l’espace.  Pour les mêmes raisons il a dit la nécessité d’un cadre juridique contraignant garantissant l’utilisation responsable des technologies de l’information et de la communication. 

La Première Commission doit conclure son débat général demain, vendredi 18 octobre, à partir de 15 heures.

Débat général sur tous les points de l’ordre du jour touchant le désarmement et la sécurité internationale

Déclarations

M. ANDRÉS FERNANDO FIALLO KAROLYS (Équateur) a rappelé que son pays était partie à la première zone exempte d’armes nucléaires au monde, créée par le Traité de Tlatelolco.  Dans ce contexte, il a exhorté tous les États Membres à multiplier de telles zones à travers le monde.  Il a jugé important que le désarmement nucléaire et la non-prolifération avancent de manière simultanée, avant de rappeler l’importance de la prochaine Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020.  Il a estimé que le meilleur hommage que les États pouvaient rendre aux victimes des bombardements nucléaires de Nagasaki et Hiroshima, il y a 75 ans, était de ratifier le Traité d’interdiction des armes nucléaires.  Il a souligné l’importance du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN), en souhaitant que celui-ci entre en vigueur aussi vite que possible. 

Le représentant a par ailleurs attiré l’attention sur la tenue, les 12 et 13 septembre derniers en Équateur, à l’initiative de son gouvernement, d’un séminaire international sur la science et la diplomatie.  Il a aussi rappelé que son pays avait adhéré à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (CIAC) ainsi qu’au protocole à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à lutter contre le trafic d’armes

Ms NELI RASHEVA (Bulgarie) a déclaré qu’en dépit des circonstances changeantes, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires restait le pilier du régime de la non-prolifération, ajoutant que la Bulgarie restait déterminée à voir sa mise en œuvre effective et son universalisation.  Dans ce contexte, la Bulgarie estime que le succès de la Conférence d’examen de 2020 sera aussi fonction de la détermination et de la capacité commune à être pragmatique et constructif. 

En tant que partie au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, qu’elle a signé et ratifié, la Bulgarie appelle à nouveau la République populaire démocratique de Corée à s’engager sérieusement dans le processus de discussions visant à l’abandon de son programme nucléaire et balistique.  Elle regrette aussi que le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire soit devenu caduc, à cause du refus de la Fédération de Russie de s’y conformer.  Pour cette raison, elle appelle ce pays à engager un dialogue avec les États-Unis sur l’avenir du Traité sur des mesures visant de nouvelles réductions et limitations des armements stratégiques offensifs (New START) au-delà de 2021.

M. PETER MATT (Liechtenstein) a rappelé que les divisions procédurales qui avaient marqué le début des travaux de la Première Commission étaient le résultat de profondes divisions au sein des États Membres et a jugé regrettable que ces dernières commencent à représenter un risque systémique pour les discussions intergouvernementales en matière de désarmement.  Le Liechtenstein, qui plaide constamment pour l’utilisation la plus efficace possible des ressources disponibles, notamment en ces temps de tensions géopolitiques et d’érosion de l’ordre international établi sur le droit, estime toutefois que les Nations Unies doivent demeurer un forum pour des discussions inclusives.  De ce fait, toute délégation doit pouvoir participer pleinement, conformément à la pratique établie et aux obligations juridiques auxquelles est soumis le pays hôte.  Ce sont là des questions d’intérêt légitime pour l’ensemble des États Membres, a-t-il souligné.

M. Matt a estimé que la nouvelle course aux armements, dont on s’inquiétait depuis quelques années est désormais bien là.  Il a cité plusieurs exemple de l’érosion de l’architecture de non-prolifération: l’extinction du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (TFI), l’absence d’efforts visibles pour proroger le Traité sur des mesures visant de nouvelles réductions et limitations des armements stratégiques offensifs (New START), les pressions sur le Plan d’action global commun ou encore le manque de respect par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) des résolutions du Conseil de sécurité.  La fin du Traité FNI est particulièrement inquiétante pour l’Europe, qui en avait été la principale bénéficiaire, a ajouté le représentant.  S’il en a rendu responsable la Fédération de Russie, du fait de ses violations du Traité, M. Matt a ajouté que ne pas avoir cherché à résoudre les désaccords dans le cadre du Traité, comme celui-ci le prévoyait, est également une violation de ses dispositions. 

Pour le Liechtenstein, les perspectives de la troisième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) ne sont pas très prometteuses.  Un demi-siècle de mise en œuvre déséquilibrée de ses différents piliers ont mis l’ensemble en péril et l’objectif ultime du TNP -la dénucléarisation totale– semble de plus en plus lointaine, alors que les mesures s’accumulent pour moderniser les armes, augmenter les stocks et abaisser les seuils d’utilisation des armes nucléaires, tous développements en contradiction avec l’article VI du Traité.  Pour M. Matt, le Traité d’interdiction des armes nucléaires représente la seule évolution récente positive et représente aussi l’expression politique de l’engagement des États non dotés à prendre au sérieux l’article VI du TNP.  En outre, son adoption constitue aussi une leçon de multilatéralisme.

Enfin, le représentant s’est inquiété de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique et du cyberespace.  Le Liechtenstein cherche à étendre aux cyberattaques le cadre juridique du Statut de Rome et d’autres traités internationaux.  Membre de la nouvelle Alliance pour le multilatéralisme, le Liechtenstein soutient aussi l’Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace.  Il estime que la cybersécurité, qui est une priorité majeure des gouvernements, est un domaine dans lequel les Nations Unies devraient jouer un rôle dirigeant. 

Mme NOA FURMAN (Israël) a déclaré que le non-respect des obligations et des normes en matière de désarmement et de contrôle des armes était une situation malheureusement assez commune dans la région du Moyen-Orient.  Elle a ainsi précisé que l’utilisation par des régimes du Moyen-Orient d’armes chimiques contre leur propre population s’était produite à cinq reprises depuis la Seconde Guerre mondiale et ce, en contradiction avec le Protocole concernant la prohibition d’emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques de 1925.  Deux cas additionnels de violation de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques font toujours l’objet d’enquêtes, a ajouté la représentante, qui a rappelé que le recours à des armes chimiques par le régime syrien avait été clairement avéré par le rapport du Mécanisme d’enquête conjoint de 2016. 

Mme FURMAN a par ailleurs fait état de quatre violations du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) depuis la naissance de ce traité.  « Deux autres cas de violations font encore l’objet d’enquête », a-t-elle poursuivi.  Elle s’est également inquiétée de la prolifération de toutes sortes d’armes et de leur transfert à des groupes terroristes au Moyen-Orient, au mépris des résolutions du Conseil de sécurité et de la stabilité de la région.

Par ailleurs, Mme Furman a noté que les États-Unis s’étaient retirés du Plan d’action global commun au mois de mai 2018.  Elle a expliqué cette situation en raison du non-respect par l’Iran de ses obligations relatives à la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, qui avait entériné le Plan d’action global commun.  Elle a dénoncé « les ambitions militaires et nucléaires de l’Iran, qui essaye de déstabiliser la région par tous les moyens », après avoir précisé que ce pays avait testé des dizaines de missiles depuis l’adoption de la résolution 2231 (2015).  Elle a exhorté tous les pays à faire preuve de tolérance zéro face aux activités illégales de l’Iran. 

S’agissant du Traité d’interdiction des armes nucléaires, la représentante d’Israël a rappelé que son pays souhaitait s’assurer que sa mise en œuvre ne permettrait pas l’existence d’exception.  Elle a dit la volonté de son pays de promouvoir le désarmement et a mentionné ses efforts de promotion de la sécurité et de la stabilité du cyberespace, en soulignant la nécessité de favoriser une prise de conscience du grand public des enjeux de la cybersécurité. 

Aux acteurs de la région qui prétendent qu’une architecture de sécurité peut être mise en œuvre au Moyen-Orient, sans engagement direct avec Israël et sans reconnaître le droit à l’existence d’Israël dans des frontières sûres et garanties, Mme Furman a répondu qu’une telle position n’était pas tenable.

La représentante a ajouté que l’initiative de la Ligue des États arabes d’organiser une conférence au mois de novembre visant à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient était en contradiction avec les règles et principes qui appellent à la création de telles zones par consensus.  Elle a ajouté que ce processus ne pouvait pas être imposé et ne pouvait viser l’État d’Israël.  Dans ce contexte, Israël ne participera pas à cette « initiative contre-productive et ne participera pas à la conférence de novembre », a-t-elle dit.  En raison de cette initiative, Israël s’abstiendra de participer à tout futur forum régional relatif au contrôle des armes, a-t-elle ajouté.  « Nous regrettons que les promoteurs de cette conférence ne fassent pas preuve du même enthousiasme pour s’attaquer aux vrais problèmes du Moyen-Orient », a-t-elle conclu. 

M. BANTIHUN GETAHUN (Éthiopie) a réitéré l’appui de sa délégation à l’universalisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, qui y voit un cadre pour arrêter le développement et la prolifération de telles armes.  L’Éthiopie attache, en outre, la plus grande importance aux mandats et fonctions de l’Agence internationale de l’énergie atomique qui promeuvent l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.  Elle a signé et ratifié les traités sur l’utilisation pacifique de l’énergie atomique et le Cadre de programme du pays pour la période jusqu’en 2023, pour la coopération technique dans les domaines agricole, sanitaire, de l’énergie et du renforcement des capacités humaines.  « Notre pays a aussi finalisé et conclu les amendements aux protocoles relatifs aux petites quantités de matières fissiles, et signé le protocole additionnel avec l’AIEA », a poursuivi le représentant.

Bien que signataire de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, l’Éthiopie ne possède pas d’armes chimiques ni d’industrie chimique relevant de la Convention, a précisé le représentant.  Quant à la lutte contre le trafic d’armes légères et de petit calibre, l’Éthiopie s’emploie à adopter une nouvelle politique nationale et des cadres juridiques afin d’améliorer la coopération et la coordination entre les forces de l’ordre à tous les niveaux. 

M. MODEST JONATHAN MERO (République-Unie de Tanzanie) a rappelé qu’il n’y aurait « pas de gagnant dans une guerre nucléaire » et a en conséquence invité les États dotés d’armes nucléaires à « respecter leurs obligations juridiques et éliminer totalement et sans condition les armes nucléaires, de manière transparente, irréversible et vérifiable ».  Les États non dotés de l’arme atomique doivent recevoir des assurances juridiques contraignantes universelles, inconditionnelles et non discriminatoires de la part de tous les États dotés d’armes nucléaires contre l’utilisation ou la menace d’utilisation à leur encontre des armes nucléaires sous quelque prétexte que ce soit, a souhaité le représentant. 

M. Mero a réitéré l’engagement de son pays à soutenir les efforts de la communauté internationale pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  Mais il a reconnu qu’en dépit des initiatives de son gouvernement, la Tanzanie continuait à faire face à des difficultés pour contrôler la propagation illicite des armes légères et de petit calibre en raison des retombées des conflits armés internationaux dans les régions des Grands Lacs, du Sahara et sub-saharienne. 

M. MAHMADAMIN MAHMADAMINOV (Tadjikistan) a estimé nécessaire de renforcer le régime de non-prolifération nucléaire en vue de sauvegarder et pérenniser le mécanisme multilatéral de désarmement.  Le représentant a ajouté que la Conférence d’examen de 2020 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) doit être l’occasion de réaffirmer l’engagement collectif à mettre en œuvre ce pilier de la sécurité mondiale.  Nous appelons les États dotés d’armes nucléaires à mettre en œuvre leurs obligations, notamment l’article VI sur l’élimination progressive et vérifiable de leurs arsenaux, a précisé le représentant.  Pour l’heure, a-t-il encore dit, nous encourageons l’établissement partout dans le monde de zones exemptes d’armes nucléaires, lesquelles contribuent efficacement à la confiance et à la sécurité régionale.  Le représentant a également souligné l’importance d’appliquer les dispositions de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, notant que son pays travaille à la création, « dans une perspective humanitaire », d’une zone débarrassée de ces explosifs en Asie centrale. 

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a réitéré le soutien de son pays à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour faciliter la coordination des activités de sécurité nucléaire entre États membres.  Il a rappelé la bonne coopération historique de l’Arménie avec toutes les structures pertinentes de l’AIEA, y compris les visites d’inspection et d’évaluation de l’Agence, qui ont confirmé l’engagement de son pays à respecter ses obligations internationales et son niveau de transparence élevé.

Le représentant a également insisté sur l’importance des initiatives de non-prolifération comme l’Initiative mondiale pour combattre le terrorisme nucléaire et l’Initiative de sécurité contre la prolifération.  Il a également indiqué que le Gouvernement arménien travaillait continuellement avec ses partenaires internationaux sur le plan bilatéral et multilatéral pour améliorer davantage ses capacités nationales de lutte contre la contrebande nucléaire.

M. Margaryan a également mis l’accent sur l’importance du désarmement régional, partant du principe que la paix et la sécurité mondiales dépendent directement de la stabilité régionale et sous-régionale.  À cette fin, un des éléments essentiels est un régime efficace de contrôle des armes conventionnelles dans l’architecture de sécurité régionale, a estimé le représentant.  Dès lors, l’Arménie insiste sur le plein respect des obligations juridiques qui découlent du Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe.  Dans la même veine, l’Arménie est un fervent défenseur de mesures de confiance au niveau régional et sous-régional, estimant que celles-ci peuvent contribuer à la désescalade des tensions et à la consolidation des arrangements de sécurité existants, créant ainsi un environnement propice aux questions liées à des conflits.  Compte tenu de la tendance croissante à la posture militaire, tels que les exercices militaires à grande échelle non notifiés dans des zones frontalières et les tentatives de renforcement militaire incontrôlées et déstabilisantes, la mise en œuvre des mesures de confiance régionales existantes gagne en pertinence, a soutenu le représentant.

Pour l’Arménie, la participation aux opérations de paix représente une contribution importante au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  C’est dans cet esprit qu’elle a augmenté son niveau d’implication dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et celles mandatées par l’Organisation, a précisé M. Margaryan, qui a cité en exemple sa participation à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  De plus, en adoptant son plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, l’Arménie s’est engagée, en février 2019, à intégrer le rôle des femmes dans sa réforme du secteur de la sécurité.

M. N’CHO VIRGILE AKIAPO (Côte d’Ivoire) a noté la complexité de la sécurité internationale en raison de la lenteur du désarmement en général, et de l’apparition de nouveaux défis stratégiques qui fragilisent davantage le multilatéralisme et certains piliers de la paix et de la sécurité internationales.  Ainsi, la question des armes nucléaires et autres armes de destruction massive préoccupe la Côte d’Ivoire.

En ce qui concerne la circulation illicite des armes légères et de petit calibre, le représentant a noté que le combat pour freiner efficacement la circulation illicite d’armes à travers le monde, responsables du décès de 500 000 personnes par an dans le monde, apparaît difficile.  Il est par conséquent impérieux de redéfinir les stratégies actuelles contre la prolifération de ces armes.  À ce sujet, il a salué le « rôle inestimable » joué par le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique en matière de partage de bonnes pratiques, notamment dans le cadre de la lutte contre la prolifération illicite des armes légères de petit calibre. 

Par ailleurs, M. Akiapo a demandé l’adoption de normes supplémentaires pour préserver l’espace extra-atmosphérique de toute utilisation inappropriée. 

M. MANUEL ANTONIO MADRIZ FORNOS (Nicaragua) s’est dit convaincu que la seule garantie contre le risque accidentel de catastrophe nucléaire était l’élimination complète, vérifiable et irréversible de toutes les armes nucléaires.  Il a ainsi souhaité l’entrée en vigueur rapide du Traité d’interdiction des armes nucléaires, « qui vient compléter le Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) », et du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN).  Le représentant a par ailleurs souligné l’importance d’une revitalisation de la Conférence du désarmement, unique instrument de négociations, des traités multilatéraux juridiquement contraignants. 

Pour le représentant, si les membres de la Commission du désarmement n’ont pas pu s’accorder cette année sur un programme de travail équilibré, cela est en partie dû aux difficultés rencontrées par des délégations pour obtenir les visas demandés.  Il a précisé que cela avait entravé la composition des délégations, « dont des experts viennent à New York depuis Genève ».  Le représentant a d’autre part appuyé l’initiative russo-chinoise d’un traité de prévention et d’interdiction du placement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique, initiative qui fait l’objet de projets de résolution qui seront soumis ultérieurement pour adoption. 

M. JOAO SOARES DE GAMA (Guinée-Bissau), s’est inquiété « de tensions croissantes entre les principaux acteurs de la scène internationale en matière de désarmement ».  Il s’est aussi dit « préoccupé » par le fait que le Moyen-Orient soit la dernière région du monde en mesure de le faire qui n’ait pas encore signé de traité pour devenir une zone exempte d’armes nucléaires.  « La Guinée-Bissau appelle non seulement au respect du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires mais appelle aussi les pays détenteurs à limiter l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins strictement civiles », a-t-il ajouté.

La circulation illicite des armes légères et de petit calibre constitue « une préoccupation majeure » pour la Guinée-Bissau, a poursuivi son représentant, qui a rappelé l’adhésion de la Guinée-Bissau au Protocole contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu de la Convention de Palerme et au Traité sur le commerce des armes.  « La conséquence désastreuse de ce fléau est clairement visible dans la région du Sahel, où opèrent plusieurs groupes terroristes avec d’importants arsenaux militaires », a-t-il fait observer. 

Le représentant a noté que les conflits ayant pris place dans son pays y avaient favorisé la prolifération des armes légères.  Il a indiqué que son pays avait échoué, pour des « raisons techniques », à détruire son petit stock d’armes à sous-munitions, malgré une tentative en ce sens le 1er mai 2016, effectuée en application du Traité d’interdiction, que la Guinée-Bissau a ratifié. 

M. YEMDAOGO ERIC TIARE (Burkina Faso) a renouvelé « sa foi » dans le multilatéralisme pour trouver des solutions aux problèmes mondiaux, y compris dans le domaine du désarmement, « qui a toujours occupé une place importante dans l’ordre du jour de l’ONU depuis sa création ». 

Le représentant a estimé que le Traité d’interdiction des armes nucléaires représentait une étape sur la voie du désarmement en complétant le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  De même, pour le Burkina Faso, l’instauration de zones exemptes d’armes nucléaires représente une catégorie de mesures de désarmement et de non-prolifération à part entière devant être appuyée. 

Le représentant a, d’autre part, rappelé que les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions étaient toujours des sources d’insécurité et a plaidé pour l’universalisation de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et de la Convention sur les armes à sous-munitions, ainsi que pour le financement des activités qui en découlent. 

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) a dénoncé la rhétorique belliqueuse et l’unilatéralisme d’un pays –qu’il n’a pas nommé– qu’il a accusé de mettre à mal l’ordre international et le multilatéralisme en détruisant l’architecture internationale de sécurité.  L’emploi unilatéral de moyens coercitifs augmente les risques de conflit qui peuvent par simple erreur de calcul entraîner des conséquences catastrophiques, a-t-il ajouté. 

« Le respect des trois piliers du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est essentiel pour garantir la vie sur la planète », a insisté le représentant avant d’exhorter les États dotés d’armes nucléaires à réduire leurs arsenaux jusqu’à pouvoir les éliminer.  Il a condamné la dissuasion nucléaire, y voyant un prétexte au maintien et au développement des armes nucléaires.  Notant que l’établissement de zones exemptes d’armes nucléaires était essentiel pour renforcer le régime de non-prolifération, le représentant du Venezuela a dit l’importance de la conférence de novembre pour la création d’une telle zone au Moyen-Orient. 

Par ailleurs, M. Suárez Moreno déclaré que l’espace extra-atmosphérique faisait partie du patrimoine commun de l’humanité avant de dénoncer l’augmentation de nouvelles doctrines de sécurité considérant l’espace comme un nouveau terrain de combat.  Face à ce constat, il a appelé à un nouveau cadre juridique afin de prévenir une course aux armements dans l’espace.  Il a salué les initiatives de la Fédération de Russie et de la Chine en ce sens ainsi que le projet de traité visant à prévenir la prolifération d’armes dans l’espace.  Pour les mêmes raisons, il a dit la nécessité d’un cadre juridique contraignant garantissant l’utilisation responsable des technologies de l’information et de la communication. 

M. FLAMEL ALAIN MOUANDA (République du Congo) a rappelé qu’on ne saurait dénier à un État Membre l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins civiles, son pays réitérant son attachement à la réalisation des objectifs communs de désarmement général et complet.  Le représentant a en outre salué le fait que, forte de ses nouveaux pouvoirs, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pourra désormais mettre en cause un pays responsable d’attaque chimique. 

Concernant les armes légères et de petit calibre, M. Alain a annoncé la mise en place d’une commission nationale de lutte contre la prolifération de ces armes.  Préoccupé par la montée du terrorisme international, il a encouragé les États à coopérer techniquement et de manière régulière avec les organisations régionales et internationale qui œuvrent dans le secteur de la non-prolifération et de la lutte contre le terrorisme, comme l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et INTERPOL. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a déploré que les dépenses militaires mondiales continuent d’augmenter à un rythme alarmant, encourageant une nouvelle course périlleuse aux armements.  D’après la Banque mondiale, près de 2 000 milliards de dollars ont été consacrés aux dépenses militaires en 2018, si bien qu’aujourd’hui le monde est sous la menace accrue d’un risque que des armes de destruction massive tombent entre les mains d’acteurs non étatiques malintentionnés, a-t-il ajouté. 

Le représentant a ainsi appelé tous les États parties à des accords de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération à respecter leurs obligations pour « sauver notre planète et libérer les générations futures du fléau des guerres ».  Il a en outre salué la décision de l’Assemblée générale de tenir une conférence le mois prochain sur l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient, ainsi que la désignation d’un Groupe de travail chargé, notamment, de promouvoir les usages à des fins de développement des technologies de l’information et de la communication dans le contexte de la sécurité internationale. 

M. OUSMANE KOUSSOURI (Niger) a rappelé que son pays avait adhéré au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en 1992 et ratifié le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) en 2002, ajoutant que son pays abritait une station du système international de surveillance de l’Organisation du TICEN.  Le Niger a été élu, au nom du Groupe des États d’Afrique, au poste de vice-président du Groupe de travail B qui s’occupe du régime de vérification du respect du TICEN, a-t-il encore précisé.

Le représentant a rappelé l’importance pour les pays en développement d’avoir accès à l’énergie nucléaire à des fins pacifiques en notant la contribution de la médecine nucléaire et de la radiothérapie pour l’éradication de la malaria et la lutte contre le cancer.  Il a rappelé que le Niger avait été élu pour un mandat de deux ans en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité le 7 juin 2019 après avoir fait campagne pour attirer l’attention sur la vision africaine des défis sécuritaires, dont la situation particulière de la sous-région du Sahel et du lac Tchad.

M. NKOPANE RASEENG MONYANE (Lesotho) a estimé que le besoin de mettre en sécurité la communauté internationale n’avait « jamais été aussi pressant ».  L’élimination totale des armes de destruction massive demeure l’ultime remède contre leur usage ou la menace de leur usage, a-t-il ajouté, avant de se féliciter que le Lesotho et trois autres pays du sud de l’Afrique (Zambie, République-Unie de Tanzanie, Botswana) aient rejoint les États signataires du Traité pour l’interdiction des armes nucléaires. 

Le représentant s’est inquiété de la lenteur des progrès en vue de l’application du Traité de non-prolifération.  Il a estimé que sa « crédibilité future » dépendait aussi de la mise en œuvre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, qui n’est pas encore ratifié par tous les États indiqués à l’annexe 2 du Traité, condition nécessaire à son entrée en vigueur.  « Cette situation fait craindre que le risque d’utilisation de l’arme nucléaire augmente », a-t-il mis en garde.

M. SAID MOHAMED OUSSEIN (Comores) a notamment souligné que les activités telles que les essais nucléaires, les menaces d’utilisation, le développement et la modernisation des arsenaux nucléaires constituaient une menace pour la sécurité internationale et contrevenaient gravement au régime de non-prolifération.  Il a ajouté qu’en aucune manière les armes nucléaires n’étaient un moyen de défense légitime et que leur emploi ou la menace de leur emploi ne pouvait, en aucun cas, être justifiées. 

Pour M. Oussein, le désarmement peut avoir un impact positif significatif sur le développement, les ressources économisées au cours du processus de désarmement devant être intégrées dans des programmes gérés par les États et dirigés par eux-mêmes en intégrant le développement socioéconomique. 

M. OMAR KADIRI (Maroc), s’est inquiété de l’émergence de « menaces multiformes » qui remettent en cause la paix et la sécurité.  Il note cependant des développements positifs, notamment l’organisation prochaine par le « Royaume frère » de Jordanie pour faire du Moyen-Orient une zone exempte d’armes nucléaires.  Il réaffirme le besoin de préserver et développer le Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et indique que son pays s’est investi dans plusieurs groupes dédiés à la sécurité dans le cyberespace.  Le Maroc soutient fermement les réformes de l’ONU engagées par le Secrétaire général des Nations Unies et notamment son Agenda pour le désarmement.  Il contribue activement au Traité pour l’élimination complète des armes nucléaires. 

Droits de réponse

Le représentant de l’Arabie saoudite a accusé le « régime syrien » d’avoir utilisé des armes chimiques, faisant état « d’actes avérés », ce qui oblige à appeler le Gouvernement syrien à coopérer avec tous les enquêteurs sur le terrain.  Il a ajouté que jamais son pays n’avait kidnappé le Premier Ministre libanais, « ce que lui-même a démenti ».  « La Syrie a assassiné deux présidents élus libanais et pourtant elle jette des accusations absurdes dans cette assemblée », a-t-il lancé.  Il a aussi demandé que le représentant de la République arabe syrienne n’utilise pas d’expressions erronées et irrespectueuses quand il s’adresse à lui.

Le représentant de la République arabe syrienne a réagi aux propos de son homologue saoudien en affirmant que celui-ci avait insulté le régime de son pays.  Sa motion d’ordre est un moyen de s’adresser à moi de manière irrespectueuse et de m’empêcher de m’exprimer, a-t-il lancé.  Après avoir été rappelé à l’ordre par la Présidente de la Commission, il a répondu que « le régime saoudien nous accuse de terrorisme en proférant des mensonges, sachant les crimes qu’a parrainés ce même régime ».  « Celui-ci finance des initiatives antiterroristes onusiennes tout offrant des millions de dollars à des terroristes et pour propager l’idéologie wahhabite », a encore accusé le représentant, qui a encore affirmé que les armes achetées par l’Arabie saoudite ne parvenaient jamais dans ce pays mais allaient « directement dans les poches des organisations terroristes qu’il finance, comme Al-Qaida ».  Pour le représentant, un premier ministre libanais a bien été kidnappé par l’Arabie saoudite, et il a dû sa libération à l’intervention d’un membre permanent du Conseil de sécurité. 

Le représentant de la République arabe syrienne a ensuite longuement accusé la représentante israélienne d’avoir menti pour détourner l’attention des armes de destruction massive mises au point par le « régime israélien » au nez et à la barbe de la communauté internationale.  Israël a menacé à plusieurs reprises par le passé d’utiliser des armes nucléaires contre de nombreux pays, a-t-il ajouté, accusant de complicité nucléaire des membres permanents du Conseil de sécurité qui apporteraient à Israël une expertise technique pour l’aider à développer son « programme nucléaire clandestin ». 

Le représentant de la République islamique d’Iran a répondu aux « accusations absurdes » d’Israël.  L’Iran estime qu’Israël est une « entité » qui « occupe des territoires palestiniens, tue des Palestiniens et il est coupable de 17 agressions contre ses voisins ».  « Ce sont des faits! », a-t-il martelé.  « Depuis 1948, Israël utilise des armes biologiques et chimiques contre le peuple palestinien et ses voisins arabes », a-t-il insisté, avant d’ajouter que « l’entité israélienne viole les résolutions de l’ONU et fournit des armes interdites à des organisations terroristes ».  Le représentant a ainsi dénoncé l’usage du phosphore blanc et d’uranium appauvri par Israël.  « Le régime israélien refuse d’adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et à la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région du Moyen-Orient », a-t-il continué, tout en rappelant que son pays était, lui, partie au TNP en tant qu’État non doté.  « Notre pays a reçu des menaces d’annihilation nucléaire par Israël, c’est pourquoi nous refusons toutes ses remarques! », a conclu le représentant.

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les déclarations faites par les représentants de la Bulgarie et du Liechtenstein.  « La décision d’adhérer ou non à des traités relève de la souveraineté des États », a affirmé le représentant.  Quant aux essais de missiles balistiques, ils relèvent du droit du pays à se doter des moyens de se défendre et il n’y a rien à en dire. 

Le représentant de l’Arabie saoudite a demandé à son homologue de la République arabe syrienne de faire corriger par ses enfants les vers de poésie qu’il a tenté de lire en arabe classique.  La Syrie a rasé des villes historiques, cela est documenté dans d’innombrables rapports, et nous nous en construisons de nouvelles, a-t-il ajouté. 

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu que le niveau d’éducation dans son pays « dépasse de 1000 ans celui de l’Arabie saoudite ».  « Nous combattons tous les associés terroristes du régime saoudien, à commencer par d’Al-Qaida et ses sbires ».  « C’est notre devoir en tant qu’État », a-t-il encore dit.  Il a répété que le régime saoudien rasait bien des villes « pour y détruire toute opposition ».  Quant aux rapports évoqués par son homologue, il les a qualifiés d’« imaginaires ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: Appels au maintien de la Mission de l’ONU et la levée des sanctions au Soudan

8643e séance – après-midi
CS/13991

Conseil de sécurité: Appels au maintien de la Mission de l’ONU et la levée des sanctions au Soudan

À deux semaines de la fin du mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), plusieurs membres du Conseil de sécurité ont demandé aujourd’hui la prorogation du mandat pour une période de six mois, la levée des sanctions économiques et financières imposées au Soudan et sa suppression de la liste des parrains du terrorisme.

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a relayé ces appels.  De retour de la visite qu’il a effectuée au Soudan, du 7 au 10 octobre, aux côtés du Commissaire de l’Union africaine, M. Smaïl Chergui, dont un arrêt d’un jour à El-Fasher, M. Jean-Pierre Lacroix a fait part de développements « remarquables » depuis sa dernière intervention au Conseil, le 26 août dernier.  Le Secrétaire général adjoint s’est attardé sur la signature le 11 septembre dernier de la Déclaration de Djouba sur les mesures de confiance en prévision des négociations et la relance économique. 

Cette Déclaration signée par le Conseil souverain et un certain nombre de groupes armés, dont plusieurs groupes du Darfour, est, a-t-il expliqué, une feuille de route et un accord de renforcement de la confiance.  Les parties ont effet convenu d’un cessez-le-feu, de l’ouverture de couloirs humanitaires, de la libération des prisonniers de guerre, de la levée des interdictions de voyager visant les dirigeants des mouvements et de la création d’un comité préparatoire des négociations de paix.  Pour la première fois dans l’histoire moderne du Soudan, ce processus est ouvert à presque tous les groupes armés, s’est réjoui le Secrétaire général adjoint.

Avec le Commissaire de l’Union africaine, a-t-il poursuivi, nous avons été en mesure de discuter avec nos interlocuteurs soudanais des défis liés au transfert des responsabilités principales de la MINUAD aux institutions gouvernementales, dont la protection des civils et la sécurité.  Nous avons aussi discuté de la perspective d’un engagement à plus long terme de l’Union africaine et de l’ONU après le retrait de la Mission.  Les responsables soudanais ont insisté sur la nécessité pour la communauté internationale d’appuyer sans équivoque le nouvel élan de paix au Darfour et déploré le fait que, malgré l’initiative du Premier Ministre de le rencontrer, le 30 septembre à Paris, Abdul Wahid al-Nur, chef du Mouvement de libération du Soudan (MLS), continue de rejeter le processus de transition et le nouveau Gouvernement. 

On attend toujours qu’il se joigne au processus, s’est impatienté le Secrétaire général adjoint, en appelant, avec le Soudan, à n’épargner aucun effort pour faire comprendre à tous les groupes concernés l’impératif de saisir l’élan de la paix.  Le Gouvernement, a-t-il encore indiqué, a demandé plus de temps pour formuler ses besoins s’agissant d’un possible mécanisme de suivi à la Mission mais un groupe de travail conjoint a été créé qui devrait finaliser les options à présenter en décembre 2019. 

Pour l’avenir immédiat, le Secrétaire général adjoint a proposé deux options au Conseil de sécurité.  La première option consisterait en un rééquilibrage géographique aux termes duquel l’effectif maximum autorisé du personnel en tenue et du personnel civil de la MINUAD serait inchangé pendant une période initiale de six mois.  Mais la MINUAD concentrerait sa présence géographique dans cinq à six bases d’opérations situées dans le centre du Jebel Marra, où des éléments armés sont encore actifs, contre 13 bases actuellement.  Selon une seconde option, le retrait de la MINUAD se déroulerait comme prévu pour s’achever à la fin de juin 2020. 

Le Secrétaire général a penché pour la première option, préconisant une approche qui alignerait la prochaine phase de transition du maintien à la consolidation de la paix au Darfour avec le rythme des pourparlers de paix à Djouba.  On ne retire pas une mission au moment où des négociations s’engagent après plus d’une décennie de conflit, ont acquiescé l’Allemagne, la Belgique, la France et la Pologne.  La transition ne réussira que si elle parvient à mener à bien deux priorités fixées par le Premier Ministre: faire la paix et relancer l’économie, a insisté la France.  À ce propos, le Secrétaire général adjoint a relayé l’appel du Secrétaire général à la levée de toutes les sanctions économiques et financières imposées au Soudan et à la suppression de ce dernier de la liste des pays parrains du terrorisme.  Il a été soutenu par l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et la Guinée équatoriale, et naturellement, par le Soudan. 

« Le Soudan d’aujourd’hui n’a rien à voir avec celui de ces dernières décennies », a martelé le pays, se félicitant d’un nouveau départ après la « révolution glorieuse » de décembre dernier.  La situation au Darfour, a-t-il aussi estimé, ne doit plus être considérée comme relevant du Chapitre VII de la Charte.  Elle relève plutôt de la consolidation de la paix et du développement.  Le Soudan, ont pressé les États-Unis, doit nous informer rapidement de ce qu’il attend de la prorogation du mandat de la MINUAD.  Que la priorité soit donnée à la paix et à la stabilité, a répondu le Soudan. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2019/816)

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a indiqué qu’il revient juste du Soudan où il s’est rendu, du 7 au 10 octobre, aux côtés du Commissaire de l’Union africaine, M. Smaïl Chergui.  Pendant ma visite, a-t-il expliqué, je me suis entretenu avec le Premier Ministre Abdalla Hamdok, le Vice-Président du Conseil souverain, le général Mohamed Hamdan Dagalo et le corps diplomatique, sans oublier les hauts responsables des gouvernements central et local, dont le Gouverneur par intérim du Darfour septentrional, au cours d’un séjour d’un jour à El-Fasher. 

Le Secrétaire général adjoint a fait part de développements « remarquables » depuis sa dernière intervention au Conseil, le 26 août dernier.  Il a rappelé la formation du nouveau gouvernement dont les priorités sont la réalisation d’une paix globale et durable au Soudan et la relance économique.  Le 11 septembre, le Conseil souverain et un certain nombre de groupes armés, dont plusieurs groupes du Darfour, ont signé la Déclaration de Djouba sur les mesures de confiance en prévision des négociations.  La Déclaration, a-t-il estimé, est une feuille de route et un accord de renforcement de la confiance au terme de laquelle les parties sont convenues d’un cessez-le-feu, de l’ouverture de couloirs humanitaires, de la libération des prisonniers de guerre, de la levée des interdictions de voyager visant les dirigeants des mouvements et de la création d’un comité préparatoire des négociations de paix.  Les négociations ont donc commencé le 14 octobre à Djouba avec pour objectif de parvenir à un accord de paix d’ici au 14 décembre 2019.  Pour la première fois dans l’histoire moderne du Soudan, ce processus devrait être largement ouvert à presque tous les groupes armés, s’est réjoui le Secrétaire général adjoint. 

Mais, le 16 octobre, les négociations se sont arrêtées pendant 24 heures après que la MPLS-N dirigée par Abdel Aziz al-Hilu a suspendu sa participation, accusant le Gouvernement d’avoir violé la cessation des hostilités à Khor Waral, dans le Kordofan méridional.  Le même jour, le chef du Conseil souverain publiait un décret annonçant un cessez-le-feu sur l’ensemble du pays.  La situation sécuritaire globale est restée largement inchangée au Darfour, malgré plusieurs incidents.  Toutefois, la Mission a noté que le fait que les autorités aient détourné leur attention vers les problèmes sécuritaires à Khartoum a créé un vide dans le fonctionnement des institutions chargées de la sécurité dans les États du Darfour, où la criminalité s’est aggravée.  Entre temps, des affrontements armés sporadiques entre les forces du Gouvernements et l’Armée de Libération du Soudan-faction Abdul Wahid se sont poursuivis dans le Jebel Marra, avec des mouvements contre les positions des Forces armées du Soudan autour de Golo. 

La situation humanitaire, a poursuivi le Secrétaire général adjoint, est toujours caractérisée par les tendances identifiées dans le rapport spécial du 30 mai.  La Mission a continué de mettre en œuvre son mandat, y compris la composante « protection des civils ».  Malgré les problèmes, elle a poursuivi ses activités de transition, en menant avec l’équipe de pays des Nations Unies les activités des programme conjointes prévues dans le cadre des fonctions de liaison avec quatre États du Darfour.  L’extension de ces fonctions de liaison au Jebel Marra devrait commencer en janvier 2020, même si les questions de sécurité et la présence limitée de l’équipe de pays continuent de freiner le processus d’expansion dans le secteur. 

Avec le Commissaire de l’Union africaine, a indiqué le Secrétaire général adjoint, nous avons été en mesure de discuter avec nos interlocuteurs soudanais des défis liés au transfert des responsabilités principales de la Mission de l’ONU aux institutions gouvernementales, dont la protection des civils et la sécurité.  Nous avons aussi discuté de la perspective d’un engagement à plus long terme de l’Union africaine et de l’ONU après le retrait de la Mission.  Le Premier Ministre a clairement demandé une transition « bien séquencée » du maintien à la consolidation de la paix au Darfour, conforme aux priorités et au calendrier du Gouvernement et tenant compte des discussions en cours, tout en définissant les prochaines étapes. 

Le Secrétaire général adjoint a rappelé qu’après l’examen stratégique de la Mission, une référence spécifique avait été faite sur l’importance de la reprise des pourparlers de paix pour conclure un accord de paix global dans tout le Darfour et créer ainsi les conditions d’une stratégie de sortie réussie de la Mission. 

Pendant nos entretiens, a-t-il précisé, les responsables soudanais ont insisté sur la nécessité pour la communauté internationale d’appuyer sans équivoque le nouvel élan de paix au Darfour et les deux zones initiées avec les pourparlers en cours à Djouba.  Nos interlocuteurs, a-t-il avoué, ont déploré le fait que, malgré l’initiative du Premier Ministre de le rencontrer, le 30 septembre à Paris, Abdul Wahid al-Nur continue de rejeter le processus de transition et le nouveau gouvernement.  On attend toujours qu’il se joigne au processus, a souligné le Secrétaire général adjoint, en appelant à n’épargner aucun effort pour faire comprendre à tous les groupes concernés l’impératif de saisir l’élan de la paix. 

Le Gouvernement, a-t-il encore indiqué, a demandé plus de temps pour formuler ses besoins s’agissant d’un possible mécanisme de suivi à la Mission.  Toutefois, à la vingt-septième réunion tripartite sur la Mission, le 7 octobre dernier, à Khartoum, un groupe de travail conjoint a été créé qui devrait finaliser les options à présenter en décembre 2019.  S’agissant de l’avenir immédiat de la Mission, le Secrétaire général a proposé deux options au Conseil de sécurité.  La première consiste à faire passer le nombre de ses sites de 13 à 5 principalement au centre du Jebel Marra où les éléments armés sont toujours actifs.  Pendant une période initiale de six mois, la Mission aurait le même plafond pour le nombre d’hommes en uniforme.  Elle garderait une capacité de réserve adéquate pour pouvoir intervenir dans les endroits desquels elle s’est retirée.  En vertu de la seconde option, la Mission procèderait immédiatement à son retrait lequel devrait s’achever à la fin du mois de juin 2020.

Pour les deux options, il a été décidé, en accord avec le Gouvernement, que les sites fermés seraient remis aux autorités de transition.  L’ONU maintiendrait une présence dans les endroits évacués grâce aux fonctions de liaison qui seraient créées en regroupant la Mission, l’équipe de pays et les instituions soudanaises, en appui à l’état de droit, aux droits de l’homme et aux solutions durables en faveur des déplacés et des communautés locales.  Le Secrétaire général adjoint a préconisé, dans ce contexte, une approche qui alignerait la prochaine phase de transition du maintien à la consolidation de la paix au Darfour avec le rythme des pourparlers de paix à Djouba.  En conséquence, la première option serait plus conforme.  Il a conclu sur l’importance de la relance économique et a relayé l’appel du Secrétaire général à la levée de toutes les sanctions économiques et financières imposées au Soudan et à la suppression de ce dernier de la liste des pays parrains du terrorisme. 

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume Uni) a déclaré que l’allocution du Premier Ministre du Soudan, lors de la Semaine de haut niveau de l’Assemblée générale, est un bon exemple des changements intervenus, ces derniers mois.  On peut également considérer que la formation du Gouvernement, avec une présence forte de femmes, ainsi que la levée des restrictions à l’accès humanitaire sont des pas importants.  Tous ces efforts, ainsi que les pourparlers avec les groupes armés au Darfour et la transition doivent être encouragés et soutenus par les acteurs sur le terrain, dont l’Union africaine, a estimé le représentant.  S’agissant du mandat de la Mission de l’ONU, le représentant a jugé que, compte tenu de la situation toujours préoccupante, des consultations seront sans doute encore nécessaires.  Il faudra aussi laisser au Gouvernement soudanais le temps de faire des propositions. 

Pour M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) la question est de savoir comment soutenir au mieux le Gouvernement de transition face à ses priorités.  Il a dégagé deux priorités: garantir la stabilisation et la présence d’experts aux pourparlers et sécuriser les investissements étrangers; et obtenir de l’ONU et l’Union africaine un ensemble de mesures d’appui pour aider le Gouvernement soudanais.  Le représentant a donc voulu que l’on n’amoindrisse pas la capacité de la MINUAD pendant le processus de retrait.  Dans un premier temps, a-t-il estimé, il serait plus judicieux de maintenir sa présence pour préserver l’engagement international au moment « crucial » où les pourparlers de paix sont en cours et pour soutenir les efforts de médiation.  On ne retire pas une mission au moment où des négociations s’engagent après plus d’une décennie de conflit, a martelé le représentant. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) a lancé un appel à la mobilisation du Conseil de sécurité, en soutien à la transition soudanaise.  Elle a précisé que cette transition réussira si elle parvient à mener à bien deux priorités fixées par le Premier Ministre: faire la paix et relancer l’économie.  La France a promis un soutien économique de 60 millions d’euros pour la période de transition.  Elle entend aussi accélérer le traitement de la dette extérieure soudanaise et accueillir une conférence des bailleurs.  Mme Gueguen a estimé qu’il est temps de retirer le Soudan de la liste des États parrains du terrorisme.  Elle a salué l’accord entre le Bureau de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et les autorités soudanaises afin de permettre l’ouverture de plusieurs bureaux au Soudan, notamment au Darfour. 

Afin d’accompagner au mieux le processus de paix, la déléguée a jugé souhaitable de ne pas précipiter le départ de la MINUAD.  Elle a appuyé la recommandation du Secrétaire général et du Président de la Commission de l’Union africaine de maintenir, pour six mois, les effectifs de la MINUAD.  Le désengagement de la Mission au beau milieu des négociations risquerait de fragiliser le processus de paix, a-t-elle averti, à son tour, avant de suggérer de recentrer le mandat sur le processus de paix et les fonctions de liaison avec l’État.  Elle ajouté que la protection des civils et le soutien à l’acheminement de l’aide humanitaire doivent rester aussi des missions prioritaires pour la MINUAD, jusqu’à la fin de son mandat.  Enfin, la France est favorable à un mécanisme de suivi ambitieux après le départ de la MINUAD.  L’appui de l’ONU et de l’Union africaine à l’élaboration d’une nouvelle constitution et à la préparation des élections serait tout à fait pertinente, a conclu la représentante. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a jugé important de soutenir le Gouvernement soudanais pendant la phase de transition par une présence internationale.  Malgré les espoirs, il s’est dit préoccupé par la criminalité accrue et les attaques contre des ONG au Darfour et par les déplacements de population qui minent les espoirs des Soudanais.  Il a cité en particulier les violations perpétrées ces derniers mois contre les enfants dont 35 ont été tués ou mutilés.  La MINUAD joue un rôle « essentiel » pour vérifier les atrocités commises au Darfour.  Que se passera-t-il ensuite?  Le Gouvernement de transition, a voulu le représentant, doit informer rapidement le Conseil de ce qu’il attend de la prorogation du mandat.  Il y a une voie pour la paix au Soudan, tant que les parties restent engagées à y parvenir. 

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a déclaré que l’évolution de la situation politique au Soudan offre au Conseil de sécurité, une occasion « unique » de mettre en place une transition pacifique, en tirant profit de ce nouvel élan.  Elle a donc lancé un appel aux groupes armés pour qu’ils rejoignent dans leur ensemble ce mouvement.  La représentante a également estimé que le processus politique au Soudan est intimement lié à la situation au Darfour.  Alors que l’on discute du mandat de la MINUAD, il est essentiel d’y inclure le soutien au processus politique et à la surveillance de la situation au Darfour, a estimé la représentante. 

M. YAO SHAOJUN (Chine) a salué les efforts conduits par le Soudan pour lancer un processus de paix global et inclusif avec l’aide de ses partenaires internationaux.  Le Nations Unies doivent soutenir le pays dans ces efforts visant à relancer le processus de paix au Darfour.  La communauté internationale doit pour sa part aider le Soudan à faire repartir son économie et l’aider à maintenir la sécurité au Darfour.  Toute la procédure doit être conforme aux précédentes résolutions du Conseil de sécurité, a insisté le représentant, avant de rappeler que son gouvernement a contribué de façon significative à la MINUAD et qu’il entend maintenir son soutien pour pousser le Soudan sur la voie de la paix et de la prospérité.

M. ALEXANDER V.  REPKIN (Fédération de Russie) a constaté, à son tour, une évolution positive de la situation au Soudan.  Les endroits quittés par les Casques bleus restant stables, il a estimé qu’il faut rester dans l’optique d’une diminution de la présence de la MINUAD, dans l’esprit de la résolution 2429.  La priorité aujourd’hui est de consolider la paix et le développement.  Le représentant s’est donc rallié à l’appel visant la levée des sanctions contre le Soudan afin de faciliter la tâche à son gouvernement.  Il a en outre estimé qu’il faut tenir dûment compte de l’avis du Soudan dans tout renouvellement de mandat. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a salué les engagements des nouvelles autorités soudanaises concernant le respect des droits de l’homme et les libertés fondamentales des Soudanais.  Elle s’est aussi félicitée de l’accord signé par les autorités avec le Bureau de la Haut-Commissaire aux droits de l’homme le 25 septembre pour l’établissement d’un bureau au Soudan, tout en encourageant les autorités à mettre en œuvre cet accord pleinement et le plus vite possible.  Pour la Belgique, l’évolution actuelle au Soudan offre une opportunité « inédite » de construire une paix durable au Darfour et la Déclaration de Djouba du 11 septembre représente une étape « formidable ».  La représentante a ainsi appelé toutes les parties, en particulier les mouvements armés, à engager des négociations constructives, précisant que ce moment représente une occasion unique de mettre fin aux multiples conflits qui déchirent le pays depuis trop longtemps.

En ce qui concerne le Darfour, Mme Van Vlierberge a plaidé pour que soit assuré la protection des civils, y compris un accès humanitaire libre et sans entrave.  Elle a aussi souligné l’importance de la lutte contre l’impunité pour répondre aux violations contre les enfants et les femmes.  En outre, pour la Belgique, le processus de sortie de la MINUAD ne peut être déconnecté de l’évolution dans le reste du pays.  Ainsi, un renouvellement du mandat de la MINUAD de six mois s’impose, sans réduire ses effectifs militaires et civils, a précisé la représentante.  En ce qui concerne les conditions précises pour la transition et pour un mécanisme de suivi prudemment calibré au Darfour, elle a appelé à « la patience ».  Le Conseil doit prendre une décision mieux informée dans les mois à venir, après les recommandations du Groupe de travail Union africaine-ONU-Soudan. 

S’exprimant au nom des A3- Afrique du Sud, Côte d’Ivoire et son propre pays, Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale), s’est dite convaincue que les engagements relatifs aux mesures de confiance contenues dans la Déclaration de Djouba sont « la feuille de route idoine » pour mener à bien les 39 mois de la période de transition.  Elle s’est réjouie des profonds changements survenus, au cours de cette année, après toutes les pertes en vies humaines.  Les sacrifices consentis ont ouvert aux Soudanais la voie d’une paix durable propice au développement et à la prospérité, dans le cadre de la vision d’un « nouveau Soudan » conforme aux aspirations panafricaines énoncées dans la doctrine « Faire taire les armes d’ici à 2020 ». 

L’implication de la communauté internationale reste « essentielle » pendant et après cette période de transition, a souligné la représentante, en réitérant son appel à la levée immédiate des sanctions économiques et financières imposées au Soudan et à la suppression de ce dernier de la liste des parrains du terrorisme, pour faciliter les activités économiques et les investissements étrangers.  À l’instar du Soudan, a poursuivi la représentante, la MINUAD « a atteint un moment critique de son histoire ».  En préparant son retrait, il faudra veiller à ce qu’en cette période de transition du maintien à la consolidation de la paix, l’on prenne des décisions aux « implications transcendantales ». 

Cela signifie, s’est expliqué le représentant, qu’il faut prendre en considération tous les acteurs et le contexte global dans lequel opère la MINUAD.  Il a salué la stratégie conjointe Union africaine-ONU pour le successeur de la MINUAD et a espéré un retrait responsable.  Il a néanmoins conseillé de bien voir si les conditions sont réunies avant la fermeture de la MINUAD, compte tenu des capacités très limitées de l’État soudanais et du Gouvernement de transition d’exercer leur autorité sur l’ensemble du territoire.  Il faut tenir compte de la situation régionale, des attentes du peuple soudanais et de l’opinion des autorités, a insisté le représentant qui a encouragé des mesures punitives contre ceux qui entravent le processus de paix.  L’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et la Guinée équatoriale, a-t-il martelé, condamnent « la milice » d’Abu Wahid al-Nur et invitent le Conseil et la communauté internationale à faire de même. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a souhaité que le nouveau mandat de la MINUAD soit adapté à la situation sur le terrain et qu’il vienne confirmer son retrait futur.  Le mandat doit comprendre un appui à la transition politique et refléter les mesures prises pour l’après-retrait.  Le dialogue de Djouba, a dit à son tour le représentant, offre l’occasion de rétablir la paix au Darfour et le plan de retrait de la MINUAD doit tenir compte de ce développement.  Le représentant a aussi insisté sur l’appropriation nationale, saluant, à ce propos, la coopération étroite entre la Mission et les autorités soudanaises.  Une paix durable au Darfour passe par la poursuite de cette coopération, a-t-il insisté, avant de rappeler que le « nouveau Soudan » a besoin de notre appui » et cela commence par la levée des sanctions et son retrait de la liste des parrains du terrorisme.  Ces mesures, a estimé le représentant, démontreraient que la communauté internationale soutient « véritablement » le Soudan dans les actes et pas seulement dans les paroles.

Mme BERIOSKA ILUMINADA MORRISON GONZÁLEZ (République dominicaine) a exhorté les parties à négocier « de bonne foi », à maintenir l’élan et à prendre les engagements qui s’imposent pour rétablir la confiance du peuple soudanais dans ses autorités et garantir une paix durable.  En dépit des jalons positifs dans le domaine politique, il faut se garder de se détourner de la crise que traverse le Soudan, a-t-elle prévenu, soulignant que le Darfour est une zone truffée de conflits intercommunautaires non résolus et le théâtre d’une grave situation humanitaire, avec près de deux millions de personnes plongées dans une insécurité alimentaire, alors que 55% des terres arables sont en détérioration à cause de la sécheresse. 

Outre les violations des droits de l’homme, principalement contre les enfants et les femmes, la violence sexuelle reste alarmante, a ajouté la représentante qui a jugé impératif de renforcer le système judiciaire et d’établir les responsabilités pour ces crimes.  À cet égard, elle a salué l’ouverture de bureaux des droits de l’homme et la nomination de Mme Nemat Abdullah Mohammed Khair, première femme Présidente de la Cour suprême de justice.  La représentante a également fortement plaidé pour la prise en compte de la situation des femmes et s’est félicitée de ce que le nouveau Gouvernement comprenne la première femme Ministre des affaires étrangères, Mme Asma Mohamed Abdalla.  Elle a appelé au respect du quota de 40% de femmes au Parlement et à l’application de la proposition de créer des commissions nationales d’évaluation de la situation des femmes et des jeunes. 

M. ROLLIANSYAH SOEMIRAT (Indonésie) a d’abord cité les développements encourageants et longtemps espérés au Soudan, dont la signature de la Déclaration de Djouba; l’accord donné à l’ouverture d’un bureau des droits de l’homme; et l’ouverture de pourparlers de paix à Djouba qui devront avancer grâce à un dialogue inclusif et la cessation des hostilités.  Il a souligné   l’importance d’organiser un retrait responsable de la MINUAD, guidé par une évaluation soigneuse de la situation sur le terrain, y compris en envisageant son maintien.  Le retrait doit s’organiser de manière à préserver les acquis.  Le représentant a aussi insisté sur l’impératif de conduire des consultations « ponctuelles, amples et significatives » avec les autorités soudanaises sur un mécanisme de suivi.  L’Union africaine et l’ONU doivent harmoniser leurs initiatives avec tous les instruments à leur disposition.  Il ne faut pas perdre de vue, a-t-il mis en garde, les besoins humanitaires et les difficultés économiques persistantes.  Pour garantir la préservation des gains politiques, le Soudan doit pouvoir mobiliser une assistance financière, une aide commerciale et des investissements.  La communauté internationale doit, quant à elle, faire davantage pour alléger les souffrances de la population.

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a formé le vœu que la formation du Gouvernement, la Déclaration constitutionnelle et celle de Djouba présagent d’une nouvelle ère de paix au Soudan.  Il a loué les efforts du Conseil de souveraineté et du Gouvernement pour amener à la table de négociation les groupes armés.  Sans un accord inclusif, a-t-il prévenu, la paix restera difficile.  Le représentant s’est d’ailleurs dit préoccupé par l’insécurité au Darfour et déploré la violence dans le Jebel Marra.  Il a aussi condamné la récurrence des violations des droits de l’homme, notamment la violence sexuelle à l’égard des femmes et des enfants.  Il a donc mis l’accent sur l’importance de l’accord en vue de l’ouverture au Soudan d’un bureau des droits de l’homme.  Il a réaffirmé la responsabilité du Conseil de sécurité de veiller à une sortie réussie de la MINUAD pour éviter un vide qui pourrait faire renaître les tensions ou créer de nouvelles menaces. 

M. OMER MOHAMED AHMED SIDDIG (Soudan) a appuyé les conclusions du Rapport du Secrétaire général et confirmé que son pays connaît un nouveau départ après la « révolution glorieuse » de décembre dernier.  Le Gouvernement de transition s’est engagé dans plusieurs priorités dont la première est le retour de la paix.  C’est dans ce cadre que des négociations ont commencé lundi dernier à Djouba, a-t-il rappelé.  Il a dit espérer qu’un accord sera signé pour une nouvelle ère de paix au Soudan et a invité la communauté internationale à faire pression sur le chef rebelle Abdul Wahid pour obtenir de lui qu’il prenne part aux négociations. 

La situation au Darfour, a estimé le représentant, ne doit plus être considérée comme relevant du Chapitre VII de la Charte.  Elle relève plutôt, a-t-il jugé, de la consolidation de la paix et du développement.  Il a demandé au Conseil de sécurité de donner la priorité à la paix et la stabilité lorsqu’il examinera la prorogation du mandat de la MINAUD.  À son tour, le représentant a réclamé la levée des sanctions économiques et financières et le retrait du Soudan de la liste des parrains du terrorisme, « une activité à laquelle le peuple soudanais n’a jamais pris part ».  Pour garantir une transition sans heurt, il a plaidé pour que les activités humanitaires soient coordonnées par le Gouvernement.  Il a également plaidé pour une aide au renforcement des capacités administratives locales de l’état de droit.  C’est justement dans cette optique que le pays a signé un accord avec le Bureau de la Haut-Commissaire aux droits de l’homme pour la mise en place d’un bureau des droits de l’homme au Soudan, a-t-il souligné.

« Le Soudan d’aujourd’hui n’a rien à voir avec celui de ces dernières décennies », a martelé le représentant.  « C’est un pays qui veut se joindre au reste de la communauté internationale, qui est épris de paix, attaché au droit international et respectueux des droits de ses citoyens », a-t-il affirmé.  Le Gouvernement accorde une place particulière aux femmes dont l’une, fait historique dans la région, a été nommée Ministre des affaires étrangères, alors que trois autres ont été nommées dans le Gouvernement.  Quant au Conseil législatif de transition, il comptera au moins 40% de femmes, a-t-il assuré, avant de rappeler que les Soudanaises ont grandement contribué à la révolution.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: la Secrétaire générale adjointe à la communication présente les orientations de son département pour « capturer l’imagination et changer les esprits »

Soixante-quatorzième session,
9e séance – matin
CPSD/698

Quatrième Commission: la Secrétaire générale adjointe à la communication présente les orientations de son département pour « capturer l’imagination et changer les esprits »

Intervenant pour la première fois, ce matin, devant la Quatrième Commission dans le cadre de son examen des questions relatives à l’information, la nouvelle Secrétaire générale adjointe à la communication globale, Mme Melissa Fleming, qui a pris ses fonctions il y a tout juste six semaines, a expliqué aux délégations que sa première priorité à ce poste sera de présider à l’élaboration d’une stratégie de communication mondiale pour l’Organisation.

« Une stratégie axée sur le public et informée par des questions fondamentales comme ‘‘Quelles sont les valeurs de l’ONU?  Au service de qui sommes-nous?  Pourquoi l’ONU est-elle plus nécessaire que jamais?’’ » a déclaré la haut-fonctionnaire.

Son Département, a-t-elle précisé, cherchera à améliorer la communication de l’ONU dans un contexte d’évolution technologique perpétuelle.  « Nous ne pouvons plus seulement fournir des informations et relater des histoires; nous devons nous efforcer de capturer l’imagination et de changer les esprits », s’est-elle enthousiasmée.  Mme Fleming a toutefois estimé que l’impact du Département de la communication globale (DCG) doit rester « mesurable », assurant qu’une « culture de l’évaluation » oriente de plus en plus son activité.

En racontant des histoires et en donnant un visage humain à notre travail, nous nous efforcerons de sensibiliser l’opinion publique à l’importance du multilatéralisme, qu’il s’agisse de la lutte contre les changements climatiques, de la défense des droits de l’homme, du rôle joué par le maintien de la paix de l’ONU ou de la mise en œuvre des objectifs de développement durable, a argué Mme Fleming.

Ce faisant, nos campagnes de communication, nos couvertures, nos activités sur les réseaux sociaux et nos activités de sensibilisation auprès de différents publics doivent devenir davantage intégrées et se renforcer mutuellement avec l’aide de notre réseau mondial de centres d’information des Nations Unies (CINU).  Pour la Secrétaire générale adjointe, toucher les gens –où qu’ils se trouvent, dans les langues qu’ils parlent et sur les plateformes auxquelles ils ont accès– permet au DCG de servir de « passerelle » entre les mots et les actions, avec des informations qui aident à comprendre ce qui se passe dans le monde, ce que l’ONU fait pour y remédier, quelle est la contribution des États Membres, comment nous pouvons œuvrer « ensemble et individuellement » pour faire la différence.

Cette approche a été applaudie par le Soudan, l’Iraq et l’Argentine, entre autres, qui ont aussi insisté sur l’importance de toucher une audience mondiale en s’adressant à elle dans ses différentes langues, mais aussi sur les supports les plus pertinents.  Dès lors, ces délégations ont attiré l’attention de Mme Fleming sur le fossé numérique ainsi que les disparités au sein même d’un pays ou d’une région en termes d’accès à Internet pour qu’elle veille à ce que la stratégie de communication de l’ONU repose sur un panachage de médias traditionnels et de nouvelles technologies de l’information qui ont fait leurs preuves pas plus tard que lors du segment de haut niveau de l’Assemblée générale, en septembre 2019.

Mme Fleming a en effet évoqué des « résultats préliminaires frappants », puisque le débat général de l’Assemblée a fait l’objet de plus de 2,6 millions de visionnages sur la seule chaîne YouTube de l’ONU et que les « packages » vidéo UNifeed destinés aux radiodiffuseurs du monde entier ont été exploités à au moins 20 000 reprises le mois dernier, soit deux fois plus qu’en 2018.

Les comptes de réseaux sociaux de l’ONU ont en outre enregistré une hausse significative de fréquentation, dans toutes les langues et sur toutes les plateformes et le mois dernier, un nouveau podcast, UNcomplicated, a été lancé pour tenter de démystifier le fonctionnement de l’Organisation qui, au cours de ses deux premières semaines de diffusion seulement, a été écouté à 153 000 reprises, s’est enorgueillie la Secrétaire générale adjointe.

Mais, comme les années précédentes, c’est le multilinguisme qui a suscité le plus d’attentes de la part des délégations, surtout dans un contexte où le DCG cherche à mettre l’accent sur l’élargissement de ses audiences.  L’Argentine a ainsi souligné la demande croissante de contenus en espagnol sur l’ensemble des supports de l’ONU.  Cette langue représente aujourd’hui la deuxième en termes de fréquentation du site de l’ONU alors que seulement 32% du contenu est disponible en espagnol, a regretté la délégation.

Dès lors, les pays hispanophones ont demandé à la cheffe du Département d’y remédier mais également de sortir d’une « culture de la traduction » pour passer à une véritable « culture de la communication », avec des équipes multilingues, en vue d’enrichir les contenus hispaniques.  Pour cela, les CINU d’Amérique latine pourraient être mis à contribution, ont-ils suggéré.  La Secrétaire générale adjointe a soutenu cette idée en rappelant qu’avec un réseau de 59 CINU dans le monde, l’ONU a les moyens de communiquer dans 97 langues, voire davantage, ce qui en fait des relais privilégiés pour une « communication à échelle humaine et de proximité ».

Les pays lusophones se sont inscrits dans une logique similaire.  Bien que le portugais ne soit pas une langue officielle des Nations Unies, il représente une audience potentielle de 300 millions de lusophones répartie sur quatre continents.  Le portugais renforce la communication et le multilinguisme au sein de l’organisation, a noté leur porte-parole du Cabo Verde, faisant remarquer que les nouvelles dans cette langue fidélisent déjà la troisième audience la plus importante de l’ONU alors que la fréquentation des pages de l’ONU en portugais a bondi de 152% depuis mars 2018.

En début de séance, la Commission a adopté les 16 projets de résolution restants au titre de la décolonisation, dont deux ont fait l’objet d’un vote.

Elle poursuivra son débat général sur les questions relatives à l’information demain matin, à 10 heures.

Suite et fin du débat général sur les points relatifs à la décolonisation

Adoption de projets de textes sur la décolonisation (suite)

La Quatrième Commission a adopté sans mise aux voix une série de projets de résolution relatifs aux territoires non autonomes suivants: les Samoa américaines, Anguilla; les Bermudes; les Îles Vierges britanniques; les Îles Caïmanes, la Polynésie française, Guam; Montserrat; la Nouvelle-Calédonie; Pitcairn; Sainte-Hélène; les Tokélaou; les Îles Turques et Caïques et les Îles Vierges américaines. 

Elle a également adopté le projet de texte portant sur la Diffusion d’informations sur la décolonisation à l’issue d’un vote avec pour résultat 144 voix pour, 3 contre (États-Unis, Israël et Royaume-Uni,) et 2 abstentions (France et Togo).

La représentante du Royaume-Uni a expliqué qu’elle avait voté contre ce texte, dans la mesure où sa délégation considère que les obligations imposées par ce texte à l’ONU représentent une ponction insupportable de ses maigres ressources. 

Le projet de texte relatif à l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux a également fait l’objet d’un vote enregistré.  Le texte a été adopté par 109 voix pour, 3 voix contre (États-Unis, Israël et Royaume-Uni) et 43 abstentions.

Pour l’Argentine, qui soutient le droit à l’autodétermination de tous les peuples soumis à l’occupation étrangère, ce texte doit néanmoins être appliqué dans le cadre des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et du Comité spécial de la décolonisation.  Depuis 1965, toutes les prises de position concernant les îles Malvinas ont reconnu qu’il s’agit d’une situation coloniale spéciale.  La solution à ce différend de souveraineté passe par des négociations bilatérales entre le Royaume-Uni et l’Argentine et doit tenir compte des intérêts des habitants de ces îles, a souligné le représentant.

Le représentant de l’Espagne a dit respecter la résolution 1514 et, pour cette raison, souligne que le processus de décolonisation dans certains cas doit s’exercer dans le respect du principe d’intégrité territoriale.  C’est le cas de la « colonie » de Gibraltar, a-t-il précisé.  Dès lors, cette question doit être réglée par des négociations bilatérales entre le Royaume-Uni et l’Espagne.  S’agissant des missions de visite du Comité spécial de la décolonisation, l’Espagne a insisté sur le fait qu’elles doivent être approuvées par l’Assemblée générale et se fonder uniquement sur le principe de l’autodétermination.

La représentante des États-Unis a expliqué avoir voté contre cinq textes sur la décolonisation en raison de leur insistance sur l’indépendance, comme si c’était la seule alternative possible, excluant le statut d’association libre par exemple.  « Ce n’est pas à cette assemblée d’imposer quoi que ce soit », a-t-elle tranché en estimant que c’est aux territoires non autonomes de s’exprimer librement.

En outre, le paragraphe 15 de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux parle du retrait de la présence militaire de la Puissance administrante, or, les États-Unis estiment avoir le droit d’y maintenir une telle présence qui bien souvent est « bénéfique » aux populations locales.  La représentante américaine a également émis des réserves au sujet de la résolution sur Guam et de son droit à l’autodétermination, en soulignant qu’il s’agit du droit de l’ensemble de la population de l’île et pas uniquement d’une partie.  Il s’agit de garantir la non-discrimination et le suffrage universel, a-t-elle souligné.  En guise de précision, elle a également rappelé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 n’est pas juridiquement contraignant et n’implique pas d’obligation financière.  Il s’agit d’un cadre global pour le développement, selon les États-Unis, et chaque pays a un rôle à jouer, conformément avec ses intérêts nationaux.  Dans la même veine, les États-Unis ont tenu à souligner que les résolutions comme la résolution 1514 ne sont pas davantage juridiquement contraignantes.

Certains éléments de ce texte restent inacceptables pour le Royaume-Uni, qui s’attache à développer une relation moderne avec ses territoires, a assuré sa représentante.

La représentante de l’Australie a commencé par réaffirmer l’attachement de son pays au droit des peuples à l’autodétermination.  Elle a néanmoins émis des réserves sur le paragraphe 14 du dispositif de ce projet de résolution qui appelle les puissances administrantes à mettre fin à leurs activités militaires et à éliminer leurs bases militaires.  L’Australie a revendiqué le droit souverain des nations à défendre les territoires qu’elles administrent et souligne que cela ne va pas forcément à l’encontre des intérêts des peuples de ces territoires, a expliqué le représentant.  « En réalité, dans bien des cas, c’est bénéfique », a-t-elle argué, en citant le cas de la région du Pacifique où la France, l’Australie et la Nouvelle-Zélande coordonnent les réponses humanitaires et de secours d’urgence en faisant appel à leurs forces basées en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.  Ce sont aussi ces forces qui luttent contre la pêche illégale et la criminalité transnationale, a encore précisé l’intervenante.

La position australienne demeure que le langage du paragraphe 14 est « inacceptable » et la délégation a réitéré son appel pour qu’il soit abrogé des futures versions de ce texte.  En s’abstenant, l’Australie a exprimé son objection au paragraphe 14 du dispositif, mais également son soutien à d’autres éléments de cette résolution, a conclu le représentant.

Le représentant de l’Argentine a considéré que les visites du Comité spécial de la décolonisation ne peuvent être effectuées par des pays qui sont parties à un conflit de décolonisation et qu’elles doivent recevoir l’aval de l’Assemblée générale.

Tous les projets de texte adoptés ce matin figurent dans le rapport du Comité spécial de la décolonisation (A/74/23).

QUESTIONS RELATIVES À L’INFORMATION (A/74/21, A/74/283)

Déclaration liminaire

Pour sa première intervention en sa qualité de Secrétaire générale adjointe à la communication globale devant la Quatrième Commission, Mme MELISSA FLEMING, qui a pris ses fonctions il y a six semaines, a déclaré être impressionnée par la qualité, la diversité et l’impact des activités du Département qu’elle dirige, en grande partie grâce aux changements apportés au cours de l’année écoulée.  Elle l’a constaté dans la couverture du récent segment de haut niveau de l’Assemblée générale, caractérisée par une planification avancée plus stratégique et une production multimédia davantage intégrée, qui ont aidé le DCG à produire un contenu multilingue distribué en temps réel sur de multiples plateformes destinées au grand public.  « Les résultats préliminaires sont frappants ».  Ainsi, le débat général de l’Assemblée générale a fait l’objet de plus de 2,6 millions de visionnages sur la seule chaîne YouTube de l’ONU et les packages vidéo UNifeed destinés aux radiodiffuseurs ont été diffusés à au moins 20 000 reprises le mois dernier, soit deux fois plus qu’en 2018.  Nos comptes de réseaux sociaux ont enregistré une hausse significative de fréquentations, dans toutes les langues et sur toutes les plateformes: rien qu’en langue anglaise, les comptes onusiens Facebook, Instagram et Twitter, se sont enrichis de 350 000 abonnés de plus en septembre, s’est félicitée la haut-fonctionnaire.

Ma première priorité en tant que Secrétaire générale adjointe, a-t-elle annoncé, sera de diriger l’élaboration d’une stratégie de communication mondiale pour l’Organisation, une stratégie axée sur le public et informée par certaines questions fondamentales.  « Quelles sont les valeurs de l’ONU?  Au service de qui sommes-nous?  Pourquoi l’ONU est-elle plus nécessaire que jamais? » s’est-elle demandé.  Guidés par nos réponses, nous chercherons à améliorer la façon dont l’ONU aborde la communication, un objectif déjà reflété par le changement de nom en début d’année, de DPI à DCG, qui fait passer un service d’information publique à un service de communication globale.  À une époque où la technologie évolue rapidement, « nous ne pouvons pas seulement fournir des informations et relater des histoires; nous devons nous efforcer de capturer l’imagination et de changer les esprits », s’est-elle enthousiasmée.

Notre tâche consiste essentiellement à communiquer pour une cause, a-t-elle dit.  En racontant des histoires et en humanisant notre travail, nous nous efforcerons de sensibiliser le public au multilatéralisme, que ce soit sur des questions telles que la lutte contre les changements climatiques, la défense des droits de l’homme, le rôle joué par le maintien de la paix de l’ONU ou la mise en œuvre des objectifs de développement durable, a expliqué Mme Fleming.  « Ce faisant, nos campagnes de communication, nos couvertures, nos activités sur les réseaux sociaux et nos activités de sensibilisation auprès de différents publics doivent devenir davantage intégrées et se renforcer mutuellement avec l’aide de notre réseau mondial de centres d’information des Nations Unies.  Rappelant ensuite que l’impact du DCG doit toujours être « mesurable », la Secrétaire générale adjointe a estimé qu’une « culture de l’évaluation » oriente de plus en plus son activité.  « L’Unité de recherche sur l’évaluation et les communications du Département procède déjà à une analyse approfondie pour mesurer l’impact, identifier les lacunes et contribuer à la formulation de pratiques optimales et des leçons apprises.  « Un exemple en est l’analyse comparative de nos contenus afin de déterminer en quoi notre travail contribue à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, aide à lutter contre les stéréotypes sexistes et favorise la réalisation de l’ODD nº5 ».  Les résultats ont conduit à l’élaboration d’un cadre global visant à renforcer nos efforts dans ce domaine, a précisé la haut-fonctionnaire.

En 2019, le Département a continué à innover.  La page d’accueil du site de l’ONU a été revampée, dans le cadre d’un processus plus large visant à le rendre plus cohérent, convivial et interactif.  L’application ONU Info a été mise à jour avec des fonctionnalités améliorées, notamment un accès simplifié au streaming en direct et aux vidéos dans toutes les langues.  Et le mois dernier, un nouveau podcast, Uncomplicated, a été lancé pour tenter de démystifier le fonctionnement de l’Organisation.  Au cours de ses deux premières semaines de diffusion seulement, le podcast a été consulté plus de 153 000 fois, dépassant largement le chiffre de référence de l’industrie pour les podcasts de longue durée, qui est de 30 000 lectures, s’est enorgueillie Mme Fleming.

Les réformes et progrès que nous avons mis en œuvre ne concernent pas uniquement une hausse du nombre de personnes touchées, mais également des résultats qualitatifs sur l’impact de nos communications, a assuré la Secrétaire générale adjointe, en soulignant le rôle clef joué par les centres d’information des Nations Unies à cet égard et les bureaux des coordonnateurs résidents de l’ONU.  Nous resterons guidés par vous, les États Membres, dans le cadre d’un processus de consultation que je poursuivrai, a-t-elle assuré.  Après avoir attiré l’attention sur les partenariats qui élargissent la portée des efforts du DCG, comme le Pacte des médias en faveur des objectifs de développement durable, lancé l’an dernier pour mobiliser les compagnies de médias et de divertissement au service du Programme à l’horizon 2030, la Secrétaire générale adjointe a également fait part de l’implication du secteur privé dans la promotion des objectifs de développement durable.  En septembre, l’ONU s’est associée à la société Sanrio pour lancer une version mondiale de leur campagne japonaise mettant en vedette le célèbre personnage Hello Kitty dans une série de vidéos visant à sensibiliser les enfants et leurs parents aux objectifs de développement durable.

« La communauté internationale est confrontée à des crises de plus en plus profondes tout en subissant une désillusion croissante vis-à-vis de la coopération multilatérale », a analysé Mme Fleming.  Même si les points de vue peuvent diverger quant à la gravité des problèmes auxquels nous sommes confrontés et à la meilleure façon de les résoudre, nous savons que la coopération internationale est la clef de notre avenir, « car si nous agissons seuls, nous périrons ensemble », a-t-elle mis en garde.  Toucher les gens –partout où ils se trouvent, dans les langues qu’ils parlent et sur les plateformes auxquelles ils peuvent accéder– permet au Département de communication globale de servir de passerelle entre les mots et les actions, avec des informations qui aident les populations à comprendre ce qui se passe dans le monde, ce que l’ONU fait pour y remédier, quelle est la contribution des États Membres, comment nous pouvons œuvrer ensemble et individuellement pour faire la différence.  « La précision, la rapidité et la fiabilité sont au cœur de nos activités.  À un moment où se disséminent la désinformation et la haine, les communications de l’ONU constituent une source d’informations fiables et factuelles permettant de promouvoir le travail de la seule organisation multilatérale au monde à réaliser les objectifs agréés au niveau international comme la voie à suivre pour une planète plus juste et plus pacifique », a ajouté, en conclusion, la Secrétaire générale adjointe.

Débat interactif

Compte tenu des chiffres avancés par Mme Fleming en termes d’audience, le représentant du Soudan s’est demandé si la nouvelle stratégie d’information prévoit suffisamment de projets pour atteindre les populations partout dans le monde.  Soulignant l’importance de la communication et de la sensibilisation aux objectifs de développement durable, mais aussi aux changements climatiques et à la consolidation et la pérennisation de la paix, il a demandé à Mme Fleming comment elle voit le rôle du DCG, notamment en Afrique, et en termes de communication dans les langues des communautés concernées.  Cela lui semble essentiel pour consolider la diplomatie préventive et pour promouvoir la paix et la lutte contre l’incitation à la haine.  Quelle est la possibilité de communiquer des informations rapidement et de permettre aux chaînes de télévision les plus regardées de diffuser des programmes sur les activités et messages de l’ONU dans toutes les régions du monde? a-t-il demandé.  Ne pourrait-on pas augmenter la visibilité des ambassadeurs de bonne volonté de l’ONU à cette fin? a-t-il suggéré.

Le représentant de l’Argentine a salué l’idée d’un dialogue entre le DCG et les missions permanentes.  S’agissant du changement de nom du Département, il a estimé qu’à juste titre cela reflète l’idée qu’il ne faut pas se focaliser sur New York et envisager la communication dans le cadre d’un dialogue et d’interactions élargis avec d’autres acteurs globaux.  Il est donc nécessaire, selon lui, de travailler avec les missions permanentes, les autres organes de l’ONU, la société civile et le public en général, a estimé le représentant qui a salué le travail de dialogue engagé l’an dernier par le DCG avec les missions permanentes.  S’agissant de l’accent nouveau qui sera mis sur le public, il a insisté sur la demande croissante de contenus en espagnols sur les supports de l’ONU.  L’espagnol est la deuxième langue des consultations du site Internet de l’ONU or, seulement 32% du contenu de ce site est disponible en espagnol, a constaté le représentant argentin en demandant à la Cheffe du Département d’y remédier.

Le représentant du Maroc a abordé la question des contraintes financières du DCG pour s’acquitter de son mandat, compte tenu des exigences du multilinguisme et la multiplication des questions et manifestations à couvrir.  Il a demandé à Mme Fleming s’il y avait des exemples de possibilités de soutien par les États Membres à cet égard.  Son homologue de l’Iraq a souligné l’importance du multilinguisme pour atteindre le plus grand nombre de personnes dans le monde et informer celles-ci des activités menées par l’ONU.  Il a également rappelé l’importance de préserver les canaux de communication traditionnels (radio, télévision, presse écrite) dans la stratégie du DCG pour diffuser les différentes informations pertinentes et atteindre les personnes n’ayant pas accès à l’Internet, compte tenu du fossé numérique persistant.  À cet égard, le représentant a souligné le rôle des Centres d’information des Nations Unies (CINU), encourageant le DCG à cibler les jeunes.  Pour la délégation, le Département doit réfléchir à une stratégie de communication élargie qui parvienne aux quatre coins du monde dans les langues locales, de manière à avoir un impact sur l’opinion publique notamment dans le domaine de la consolidation de la paix. 

Répondant à ces interventions, la Secrétaire général adjointe à la communication, Mme FLEMING, a salué les remarques du délégué soudanais les qualifiant de « fondamentales » et lui a assuré que la promotion de la paix, de la sécurité et de la tolérance fait partie des piliers de son Département.  Elle a relevé le rôle significatif des ambassadeurs de bonne volonté de l’ONU, dont certains se sont rendus au Soudan, et a précisé que son Département cherche à développer un « véritable réseau ».  Mme Fleming a invité la délégation à poursuivre ce dialogue avec son Département.

S’agissant de l’intervention de l’Argentine, elle lui a assuré qu’elle a l’intention de poursuivre le dialogue avec les missions permanentes et, comme l’a souligné le représentant du Maroc, de mettre sur pied un véritable réseau de « brainstorming » pour entendre tous les points de vue.  Pour elle, il ne s’agit pas de travailler uniquement à partir de New York.  Elle a estimé que les ressources locales représentent un atout unique et que, dans le contexte de la nouvelle réforme, les agences onusiennes travailleront plus étroitement ensemble sur le terrain et communiqueront dans la langue du pays.  Mme Fleming s’est dite impressionnée par la performance en termes d’audience du site et des réseaux sociaux en espagnol « qui dépasse parfois la popularité du site en anglais », et a encouragé des remontées du terrain pour enrichir les contenus hispaniques des supports de communication onusiens.

Elle a remercié le Maroc d’avoir proposé l’idée d’un « réseau d’amis du DCG » des missions permanentes en vue de soutenir le travail de son Département au-delà d’un soutien financier, se disant heureuse de travailler avec les missions permanentes dans ce contexte.  Réagissant à l’intervention de l’Iraq, elle a partagé son point de vue selon lequel il convient d’insister sur le public que nous voulons cibler.  Comment l’information est-elle reçue est la principale question à se poser pour Mme Fleming et, pour cela, il faut recourir à toute la palette de vecteurs d’information, y compris les médias traditionnels et les langues du terrain.  Dans ce contexte, la Secrétaire générale adjointe a salué les remarques au sujet du rôle des CINU, qui peuvent travailler dans 97 langues et même au-delà, ce qui en fait un relais de premier plan de « la communication au niveau humain et de proximité ».

Mme FEDA ABDELHADY-NASSER (État de Palestine), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine, a réaffirmé l’importance du multilinguisme « qui est universellement reconnu comme un des principaux facteurs d’unité et de compréhension internationale ».  La représentante, tout en notant que « des progrès avaient été accomplis », a réitéré les inquiétudes du Groupe concernant « la disparité qui demeure dans l’usage des différentes langues officielles dans la communication globale des Nations Unies ».  Elle a ajouté qu’« il est inacceptable, malgré les fréquents appels collectifs en ce sens, que des disparités linguistiques continuent d’être observées dans les communiqués de presse produits à l’issue des réunions au Siège de l’ONU et dans leur titre.  Nous désapprouvons cette injustice et demandons que toute désinformation de ce type soit évitée à l’avenir ».

La déléguée a aussi mis en garde contre « l’usage inapproprié de l’information publique, des inexactitudes et de l’information malhonnête, qui peuvent avoir des conséquences négatives sur les nations et leurs citoyens ».  Elle a estimé que le Département de la communication globale devrait « montrer l’exemple » en appliquant les pratiques optimales en termes de « précision, d’intégrité et de responsabilité ».  La représentante en a aussi appelé « à l’arrêt de l’usage des technologies de l’information et des communications, réseaux sociaux inclus, en défaveur de n’importe quel État, en particulier ceux qui sont membres du Groupe des 77 et de leurs citoyens ».  Elle a insisté sur le respect des principes « de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires internes, dans les règles internationalement reconnues de coexistence civile et de relations cordiales entre États ».

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SUPRIYANTO SUWITO (Indonésie) a espéré que les réformes du Département de la communication globale (DCG), qui incluent des efforts de renforcement de la planification stratégique, de la coordination en matière de communication, de partenariats et de mobilisation de nouvelles ressources se traduiront par une réelle amélioration et efficacité de la promotion de la compréhension des travaux des Nations Unies.  Il a dit apprécier les activités du DCG pour sensibiliser le public aux priorités de l’ONU par le biais de sa communication stratégique sur le développement durable, la paix et la sécurité.  Dans le domaine de la paix et de la sécurité, le représentant de l’ASEAN a encouragé le département à poursuivre ses efforts pour promouvoir les travaux de maintien et de consolidation de la paix de l’ONU.  Il a dit apprécier particulièrement les campagnes dédiées aux pays contributeurs de troupes et forces de police.  M. Koba a aussi invité tous les Départements de l’ONU à travailler ensemble pour promouvoir les développements des réformes de l’architecture de paix et de sécurité des Nations Unies, dont l’Action pour le maintien de la paix.  Tout en notant que les médias sociaux sont devenus un des outils les plus importants de l’information publique, le représentant de l’ASEAN a appelé à se rappeler que l’Internet n’est pas accessible à tous, et qu’il est important de maintenir le recours aux media traditionnels comme la radio, la télévision, et le support papier pour diffuser l’information.

Par ailleurs, le représentant de l’ASEAN a mis l’accent sur l’importance d’une communication multilingue et pas seulement dans les six langues officielles des Nations Unies.  Relevant que le DCG travaille avec 59 centres d’information de l’ONU dans le monde, dont trois dans l’ASEAN, le représentant a jugé indispensable de recourir aux langues locales dans ses efforts de communication.  Il a, en conclusion, souligné l’importance de partenariats entre le DCG et les secrétariats de ses organisations régionales et sous-régionales.  

Intervenant au nom des neuf États membres de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), M. JOSÉ LUIS FIALHO ROCHA (Cabo Verde) s’est félicité des relations établies depuis 1999 entre l’ONU et son groupe de pays.  Il a salué l’adoption, le 12 septembre 2019, de la résolution A/73/339 de l’Assemblée générale qui renouvelle cette coopération pour deux ans, en réaffirmant l’importance de la coopération régionale.

« Bien que le portugais ne soit pas une langue officielle des Nations Unies, il renforce la communication et le multilinguisme au sein de l’organisation », a estimé le représentant, avant d’appeler à respecter la parité entre les six langues officielles de l’ONU.  Il a dit que la Communauté des pays de langue portugaise se félicite des efforts du DCG pour disséminer des informations sur les travaux de l’ONU en portugais.

En outre, il a précisé que les nouvelles en langue portugaise constituent la troisième plus grande audience de l’ONU avant de rappeler l’existence de 300 millions de lusophones sur quatre continents.  Il a précisé que la fréquentation des pages de l’ONU en portugais a connu une hausse de 152% depuis mars 2018.  Il a particulièrement salué le travail des CINU qui s’évertuent à diffuser l’information partout dans le monde en s’appuyant sur les langues locales.  Le représentant a mis l’accent sur le CINU de Rio de Janeiro et salué la mise en place du centre de Luanda en Angola, conformément à la résolution 64/243 de l’Assemblée générale.

« Nous saluons l’engagement du Département de la communication globale en faveur du multilinguisme », a affirmé M. SEBASTIEN BRABANT, de l’Union européenne, qui s’est exprimé en anglais, puis en français et en espagnol.  « Le multilinguisme est une condition préalable à la mise en œuvre effective du mandat du Secrétariat et à la mise en place d’un système multilatéral équilibré et représentatif du monde actuel », a-t-il ajouté.  Le délégué a souligné que, malgré les contraintes budgétaires, il était essentiel de continuer à communiquer l’agenda et les valeurs des Nations Unies à travers différentes langues et plateformes médiatiques.  Le délégué s’est inquiété des attaques, en Europe et dans le monde contre la liberté d’expression, la liberté d’information et la liberté de la presse.  « Tous les jours, des journalistes sont intimidés, harcelés et même assassinés – ils doivent être protégés », a-t-il mis en garde.

M. ITT THIRARATH (Thaïlande) a souligné la nécessité d’un plan intégré de communication à l’échelle du système des Nations Unies, fruit d’une coopération entre toutes les entités.  Il a ensuite invité le Département de la communication globale à explorer des moyens innovants de permettre une meilleure interaction avec un large public.  Le représentant a mis l’accent sur l’importance d’une communication multilingue en précisant que le multilinguisme ne consiste pas seulement à casser les barrières linguistiques, mais aussi à jeter des ponts entre les cultures et les religions.  Il a aussi souhaité que la célérité avec laquelle l’information est diffusée ne vienne porter atteinte à sa qualité et à son exactitude.  Dans le contexte du soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, la Thaïlande a souhaité que l’on saisisse toute l’opportunité offerte par les technologies modernes pour mettre en exergue l’importance du multilatéralisme et susciter un soutien mondial à cette valeur. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a axé son intervention sur trois points, à savoir les défis du scénario de la communication globale, le multilinguisme dans la communication de l’ONU et le rôle des centres d’information des Nations Unies (CINU).  À la lumière de l’évolution des technologies de l’information, l’Argentine a invité le DCG à repenser sa stratégie de communication pour la rendre plus horizontale dans le but d’inclure l’ONU dans le dialogue mondial sur les thèmes prioritaires de l’Organisation, notamment sur les réseaux sociaux.  Le DCG doit utiliser au maximum les potentialités offertes par les nouveaux formats de communication pour renforcer les interactions avec les différents acteurs, y compris les États Membres, les médias mais surtout le public mondial.  Il ne faut pas pour autant perdre de vue la persistance d’un fossé numérique et les asymétries au sein même des pays et des régions, de manière à ce que la stratégie de communication de l’ONU tienne compte de la segmentation du public mondial, a estimé le représentant.

Il a demandé le respect du multilinguisme dans tous les supports de communication de l’ONU et appelé à sortir d’une « culture de la traduction » à une véritable culture de la communication, avec des équipes multilingues.  Saluant la hausse de la fréquentation du site Internet de l’ONU en espagnol, alors que seules 32% des informations publiées le sont en espagnol, l’Argentine a demandé au Secrétariat de répondre à cette demande croissante de contenus de la part des hispanophones.  Par le truchement des CINU d’Amérique latine, il est possible de produire des contenus sur les sujets à l’ordre du jour de l’ONU, a précisé le représentant.  Il s’est dit préoccupé de constater que les six langues officielles ne sont pas traitées sur un même pied d’égalité, en citant notamment les cas des communiqués de presse et de ONU Info qui n’existent qu’en deux langues, alors même qu’ils devraient être disponibles dans les six langues officielles.  Selon le représentant, il n’existe pas de justification à cette discrimination.  De même, les archives audiovisuelles de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité devraient être disponibles dans ces six langues officielles, a-t-il encore insisté.  L’Argentine a encouragé, en conclusion, le DCG à inclure davantage les CINU dans sa stratégie de communication et ses travaux, en particulier celui de Buenos Aires qui a notamment couvert la deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud.

M. MARWAN A. T. ABUSREWEL (Libye) a concentré son propos sur les nouvelles technologies de l’information et des communications.  « Aujourd’hui, il existe un véritable écart entre les populations, l’accès à l’information n’est pas le même pour tous », a-t-il regretté.  Le délégué a appelé à la création d’un environnement où tous peuvent avoir accès à des informations favorisant les idées de paix et de développement durable et permettant de lutter contre les discours de haine.

« Le Royaume saoudien accorde beaucoup d’importance aux médias et à la communication », a affirmé M. IBRAHIM ALTURKI (Arabie saoudite), avant d’appeler à promouvoir une « culture de paix pour lutter contre le crime et le terrorisme ».  Il a affirmé: « Mon pays a pour objectif de promouvoir la modération et de lutter contre les discours de haine. »  Le représentant s’est ensuite félicité de la création, par son pays, d’un centre de « guerre idéologique » et d’un centre de « combat contre les idéologies extrémistes ».  Le représentant a insisté sur le fait que son pays vise à « répandre la tolérance » et appelé à diffuser « une image véridique de notre pays qui doit être montrée au reste du monde ».  Il a annoncé que l’Arabie saoudite allait « redoubler d’efforts pour lutter contre la haine », avant de se dire préoccupé par « la désinformation diffusée par certains médias pour déstabiliser mon pays ».  La délégation a estimé que les médias de masse devaient jouer un rôle plus positif pour promouvoir les droits de l’homme, la justice et la paix.

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Sixième Commission: les délégations examinent à la loupe le système d’administration de la justice à l’ONU

Soixante-quatorzième session,
17e séance – matin
AG/J/3600

Sixième Commission: les délégations examinent à la loupe le système d’administration de la justice à l’ONU

Ce matin, la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, s’est penchée sur la question de l’administration de la justice à l’ONU, après avoir terminé son débat sur la portée et l’application du principe de compétence universelle. 

La Commission était saisie d’un rapport annuel du Secrétaire général qui rend compte du système d’administration de la justice interne, un système censé être « indépendant, transparent, professionnalisé, doté de ressources suffisantes et décentralisé », et qui a vu le jour en 2009. 

En cas de grief d’un fonctionnaire contre une décision administrative, celui-ci peut opter pour une procédure formelle exigeant le plus souvent un contrôle hiérarchique initial de cette décision, avant de saisir, si nécessaire, le Tribunal du contentieux administratif.  Son jugement peut ensuite être soumis au Tribunal d’appel, dont l’arrêt est définitif et obligatoire pour les parties.  Une procédure non formelle, par règlement amiable, est possible à tout moment devant le Bureau des services d’ombudsman et de médiation, et le fonctionnaire peut requérir l’assistance du Bureau de l’aide juridique au personnel. 

Examinant le fonctionnement du système, le représentant de la Gambie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a invité les États à se poser « les bonnes questions »: le système est-il doté des ressources financières suffisantes?  Est-il suffisamment décentralisé, transparent et professionnel?

D’autres intervenants comme la Nouvelle-Zélande, également au nom du Canada et de l’Australie, et la Suisse, ont clairement rappelé que la crainte des représailles et le manque de protection à cet égard constituaient un obstacle à l’accès à la justice interne par les fonctionnaires, tandis que la représentante américaine s’est élevée contre « des environnements professionnels marqués par le harcèlement et l’abus de pouvoir incompatibles avec les valeurs des Nations Unies ».

La majorité des délégations ont aussi déploré le retard accumulé par le Tribunal du contentieux administratif, même si les États-Unis ont salué le traitement numérique des données.  Le nombre de jugements rendus par le Tribunal est au plus bas, ont ainsi regretté les Pays-Bas et l’Union européenne. 

Les membres de la Commission ont pour la plupart félicité le Bureau des services d’ombudsman et de médiation pour son travail, décrit comme « sûr, accessible et fonctionnel » par les Pays Bas.  Le Mexique s’est inquiété de « l’augmentation de 35% du nombre de requérants nonfonctionnaires » auprès de ces services, même si, comme la Suisse et les Pays Bas, il a appuyé le projet pilote lancé par le Secrétaire général pour offrir aux non-fonctionnaires la possibilité de régler à l’amiable leurs différends survenus sur le lieu de travail. 

Au terme du débat sur le principe de compétence universelle, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a souligné que les États considèrent de plus en plus ce principe comme un moyen important de mettre fin à l’impunité pour les violations graves du droit international humanitaire et pour d’autres crimes internationaux.  Son délégué a donné des exemples d’enquêtes et d’instances pénales en cours sur le fondement de ce principe dans différents pays, à savoir: Allemagne, Argentine, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Irlande du Nord, Italie, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Sénégal, Suède et Suisse. 

En fin de séance, la Commission a ouvert l’examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, qui a été introduit par sa Présidente, Mme Maria Theofili (Grèce).  Mme Blanca Montejo, spécialiste des questions politiques, a fait ensuite le point sur le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité. 

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 18 octobre, à partir de 10 heures. 

PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE - A/74/144

Déclarations

M. AHMED M. A. ABRAHEEM (Libye) a réaffirmé que l’objectif des débats est avant tout la lutte contre l’impunité d’où le soutien de son pays à la Cour pénale internationale (CPI) bien qu’il ne soit pas partie au Statut de Rome.  La Libye, a-t-il assuré, a réformé ses structures judiciaires afin de garantir l’accès de la population aux tribunaux dans le cadre d’un processus indépendant et intègre.  Le représentant a évoqué divers accords internationaux bénéfiques à sa justice interne comme l’accord entre la CPI et le bureau du Procureur de Libye conclu en 2013, et un accord avec les États-Unis pour la justice pénale.  Par ailleurs, il a rappelé que la Libye partage les préoccupations exprimées sur le principe de compétence universelle et souhaité un équilibre entre son application légitime et la lutte contre l’impunité.  Si son système national est en mesure de rendre la justice, il a cependant besoin de l’aide de la communauté internationale, a-t-il conclu.

M. AHMED ABDELAZIZ ELGHARIB (Égypte) a demandé une clarification de la portée et de l’application du principe de compétence universelle, pour en faire un véritable instrument de lutte contre l’impunité.  Le principe de compétence universelle ne saurait remplacer le principe de compétence nationale et doit respecter le droit international, dont l’immunité des chefs d’État, a-t-il dit.  Il a espéré que la Commission s’éloignera des points de controverse et forgera un consensus.  Cette question ne devrait pas être renvoyée à la Commission du droit international (CDI) à ce stade, a conclu le délégué. 

Selon M. SUFIAN HUSSEIN MOHAMMED (Éthiopie), il faut veiller à ce que les juridictions soient dotées de la capacité adéquate dans les cas où « le lien géographique traditionnel entre une infraction et son auteur est aboli par la technologie ».  Le droit pénal éthiopien reconnaît la compétence universelle pour des crimes internationaux comme le génocide, le crime contre l’humanité, le crime de guerre, le terrorisme, le blanchiment d’argent et tous les crimes proscrits par les traités ratifiés par l’Éthiopie, y compris la production illicite et le trafic de drogue, ainsi que la production de photos et de publications indécentes.  Dans ce contexte, la coopération internationale est fondamentale pour l’application efficace du principe de compétence universelle. 

L’Union africaine a adopté un modèle de législation sur ce principe dans l’objectif d’assister les États dans son application, a rappelé M. Mohammed.  Il a rejoint les délégations qui ont exprimé leur inquiétude quant à la possibilité d’abus dudit principe à des fins politiques et en violation des normes du droit international.  Préconisant un mécanisme de vérification pour remédier, en temps voulu, à toute tentative de politisation de la compétence universelle, il a encouragé les États à contribuer aux travaux de la Commission du droit international (CDI) sur cette question.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a noté que seul le crime importe au regard de la compétence universelle mais que ce principe doit être « édulcoré » pour garantir la souveraineté des États et le respect du droit international.  Selon lui, cette compétence ne doit être utilisée qu’en « appoint » à la justice nationale et que pour les crimes graves comme les atrocités « sans être instrumentalisée pour des raisons politiques » afin de préserver sa crédibilité.  Pour le Cameroun, a-t-il précisé, la règle reste la primauté de ses tribunaux et toute exception à ce principe doit être fondée sur un traité et non sur la seule législation nationale du pays de l’auteur du crime.  Il a préconisé aussi d’attendre pour mettre en œuvre la compétence universelle que l’État où le crime a été commis ait clairement montré son incapacité à agir et juger.

Même si le Cameroun ne mentionne pas la compétence universelle dans sa législation interne, il prend en compte ces principes au travers de multiples conventions internationales, y compris celle de l’Union africaine qui autorise l’intervention dans un pays membre en cas de génocide ou de crimes contre l’humanité, a rappelé M. Nyanid.  La compétence universelle n’est pas assez encadrée; elle ne constitue pas un problème dans ses principes mais essentiellement dans les circonstances de son usage, a-t-il conclu.

M. SANDEEP KUMAR BAYYAPU (Inde) a rappelé que le principe de compétence universelle est une exception du droit pénal international, qui prévoit la compétence de l’État où le crime a été commis ou de l’État de nationalité de l’auteur.  Cette exception se justifie en raison de la nature grave du crime, a-t-il dit, en évoquant le crime de piraterie.  Le délégué a déclaré que ce principe s’applique à un nombre limité de crimes, tels que la piraterie en haute mer ou d’autres crimes prévus par les traités agréés par les États.  Par conséquent, nous soulignons l’importance d’éviter tout abus dans l’utilisation de ce principe, dont la définition n’est au demeurant pas suffisamment claire, a conclu M. Bayyapu. 

M. JHON GUERRA-SANSONETTI (Venezuela) a fait part de sa préoccupation devant l’usage indu du principe de compétence universelle, visible dans l’exercice « unilatéral, sélectif et politiquement motivé » qui en est fait par certains pays.  Pour lui, la limite à l’application de ce principe doit être la souveraineté et la compétence nationale des États, et le maintien du caractère « secondaire » de la compétence universelle.  Par ailleurs, les crimes qui justifient son application doivent être reconnus et établis au niveau international pour leur gravité.  En conclusion, le représentant vénézuélien a confirmé son souhait de continuer l’examen de ce sujet par la Sixième Commission. 

M. AL NASSER (Arabie saoudite) a indiqué qu’il est « trop tôt » pour adopter le principe de compétence universelle dans la mesure où ses procédures d’application manquent de clarté.  Il a souhaité une mise en œuvre de ce principe respectant le droit international, y compris les principes d’égalité et de souveraineté des États.  Il a mis en garde contre toute « politisation » de ce principe et souhaité un examen attentif des différentes approches suivies par les pays dans ce domaine.  Le délégué a jugé peu opportune l’adoption de ce principe, au regard précisément de la grande disparité dans les pratiques des États.  En conclusion, il a appelé les délégations à continuer de réfléchir sur la portée et l’application du principe de compétence universelle. 

M. SAAD AHMAD WARRAICH (Pakistan) a jugé que la question de la portée et de l’application du principe de compétence universelle et celle de l’immunité des chefs d’État soulèvent des préoccupations légitimes parmi les délégations.  Il a mis en garde contre toute sélectivité en la matière, sous peine de transformer ce principe en un « simple prétexte ».  Nous ne devons pas faillir dans notre responsabilité de prévenir les crimes les plus graves mais leur appliquer des normes juridiques et morales robustes, a-t-il dit.  Enfin, le délégué a rappelé que ce principe ne fournit pas un « permis » pour saper la souveraineté des États mais est un appel à la « non-indifférence » à l’endroit de l’impunité. 

M. SAMSON SUNDAY ITEGBOJE (Nigéria) a estimé que la tendance croissante consistant pour les auteurs de « crimes odieux », à traverser ou à trouver refuge dans des territoires autres que ceux où ils ont commis leurs crimes, dans le but d’échapper à la justice, rendait nécessaire pour la communauté internationale d’adopter des lois et mesures permettant de traduire en justice ces criminels dans le territoire où ils sont appréhendés, en vertu du principe de compétence universelle.  Il a réaffirmé l’engagement du Nigéria à lutter contre l’impunité et, en tant qu’État partie au Statut de Rome, à faire en sorte que le recours à la compétence universelle se fasse de manière équitable et pratique, « surtout dans les cas où ce principe est susceptible de déstabiliser politiquement un État ».

M. Itegboje a ainsi estimé que la compétence universelle devait, dans la mesure du possible, être utilisée « en dernier recours ».  Il a mis en garde contre toute utilisation « irréfléchie » de ce principe par certains États, dans le but d’exercer « prématurément » ou « à la hâte » une compétence sur certaines questions, quand il leur suffirait en réalité de coopérer avec l’État où le crime a été commis par le biais de mécanismes d’extradition ou d’assistance mutuelle.  « La compétence universelle ne doit pas être utilisée par des pays puissants pour imposer leurs juridictions nationales à des pays moins bien dotés, en privant ces derniers d’autorité en matière de poursuite », a-t-il tranché, appelant la communauté internationale à prendre des mesures pour mettre fin aux « manipulations politiques ». 

Selon Mme ANA LORENA VILLALOBOS BRENES (Costa Rica), l’augmentation du recours à la compétence universelle rend plus nécessaire un approfondissement de ce principe afin que le jugement des crimes les plus atroces ne se limite pas à un territoire.  À cette fin, la représentante s’est félicitée du dernier manuel des droits de l’homme édité par la Croix-Rouge internationale, qui facilite le travail des autorités judiciaires.  Elle a noté que depuis le début des travaux en 2009, il a été établi que « la lutte contre l’impunité concerne tous les pays ».  Elle a aussi marqué son intérêt pour la prise en compte des victimes avant d’appeler les États à réfléchir au meilleur mécanisme pour établir l’obligation des États de juger et d’extrader les suspects de crimes les plus graves présents sur leur territoire.

Mme MAITÊ DE SOUZA SCHMITZ (Brésil) a rappelé que le principe de compétence universelle est une exception du droit pénal international, qui prévoit la compétence de l’État où le crime a été commis ou de l’État de nationalité de l’auteur.  L’application de ce principe ne doit pas être arbitraire et utilisée à des fins autres que pour rendre justice, a-t-elle assuré.  La conciliation de ce principe avec le respect de l’immunité des chefs d’État étant la question la plus controversée, elle a exhorté les États Membres à faire montre de flexibilité sur le sujet.  Enfin, la déléguée du Brésil a indiqué qu’il n’est pas possible d’appliquer ce principe à un crime en vertu du seul droit international coutumier. 

Mme MARIA ANGELA ABRERA PONCE (Philippines) a rappelé que le principe de compétence universelle est intégré dans sa législation nationale par une clause de sa constitution et dans une loi de 2009 contre les crimes contre l’humanité et le génocide.  Elle a insisté néanmoins sur la primauté des juridictions nationales, le caractère « exceptionnel » de l’usage de la compétence universelle et sur le besoin de préciser son champ d’application, et réaffirmé le principe de l’immunité des chefs d’État.  Enfin, Mme Ponce a souhaité que les crimes couverts par la compétence universelle soient limités à ceux reconnus par le jus cogens auxquels les États ne peuvent se soustraire même par accord, « des crimes si graves qu’ils constituent des atteintes à toute la communauté internationale ». 

M. DIE MILLOGO (Burkina Faso) s’est dit favorable à l’application du principe de compétence universelle « sous certaines réserves ».  Il a rappelé que son pays est partie à plusieurs conventions prévoyant cette compétence, dont la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.  Il a déclaré que ce principe est une exception aux critères de compétence traditionnelle des États et doit concerner les crimes les plus graves.  Les abus de plus en plus observés au niveau international de ce principe et « son application à géométrie variable » ne rendent pas service aux intérêts de la paix et de la justice, a conclu M. Millogo, en plaidant pour une application « raisonnable ». 

Mme ZAKIA IGHIL (Algérie) a remarqué que l’application du principe de compétence universelle continue de poser des problèmes juridiques et politiques qui entachent sa crédibilité et ses objectifs.  Elle a ainsi évoqué la préoccupation de l’Union africaine pour l’usage abusif de ce principe contre des chefs d’État africains par la Cour pénale internationale (CPI) et demandé qu’il soit utilisé « de bonne foi, sans sélectivité ni ingérence, et comme un mécanisme secondaire et de dernier recours ».  Le principe, a souligné la représentante, doit préserver l’immunité accordée aux chefs d’État, un sujet inscrit dans le programme de travail de l’Assemblée générale à la demande des États africains.

Le débat sur la portée et l’application du principe de compétence universelle dure depuis 10 ans, a noté M. MAMADOU RACINE LY (Sénégal), convaincu que l’on ne peut plus « fermer les yeux devant les tueries de masse de civils innocents » et que « nous avons l’obligation historique de renforcer notre engagement contre l’impunité en vue du renforcement de la justice internationale ».  Le représentant a confirmé que ce principe a été intégré dans le droit interne sénégalais par une loi du 12 février 2007.  Il a toutefois confié ses inquiétudes sur « sa portée incertaine et son utilisation abusive », rappelant que son application doit reposer sur le respect de la souveraineté des États et la non-ingérence dans leurs affaires intérieures.  Insistant sur la responsabilité première des tribunaux nationaux et le caractère complémentaire de la compétence universelle, M. Ly a souhaité un consensus sur sa définition et son champ d’application.  Il a ajouté qu’à l’ONU, la seule et unique instance capable de s’en charger reste la Commission du droit international (CDI) et s’est donc félicité de l’inscription de ce point dans son programme de travail à long terme. 

Mme CHUNG YOON JOO (Singapour) a rappelé que le principe de compétence universelle est une exception à la compétence de l’État où a été commis le crime ou de l’État de nationalité.  « La compétence universelle est un dernier recours. »  Ce principe doit s’appliquer uniquement aux crimes les plus graves, a-t-elle dit, en suggérant d’examiner l’opinio juris et la pratique des États pour identifier de tels crimes.  Enfin, la représentante a souhaité une mise en œuvre de ce principe respectant le droit international, y compris les principes de souveraineté des États et l’immunité de leurs dirigeants. 

M. AMADOU JAITEH (Gambie), tout en souhaitant que les auteurs de crimes graves, tels les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, n’échappent pas à leur responsabilité, a souligné l’importance de respecter d’autres normes juridiques dans l’application du principe de compétence universelle, notamment l’égalité souveraine des États et leur compétence territoriale. 

Mme ANNETTE ANDRÉE ONANGA (Gabon) a indiqué que la constitution gabonaise établit comme principe fondamental la responsabilité pénale des hauts représentants de l’État devant la Haute Cour de justice.  Dans ce contexte, le principe de compétence universelle, dont la portée doit être limitée, doit être complémentaire et respectueux du principe de territorialité et ne saurait contredire la compétence des juridictions nationales.  La représentante a souhaité une mise en œuvre de ce principe respectant le droit international, y compris les principes d’égalité souveraine des États et d’immunité des chefs d’État.  Enfin, elle a pris note de l’inclusion de la compétence universelle dans le programme de travail à long terme de la Commission du droit international (CDI) et affirmé que cette question doit demeurer à l’ordre du jour de cette Commission. 

M. MUHAMMAD TAUFAN (Indonésie) a remarqué des différends entre États sur la définition de la portée de la compétence universelle, « d’autant plus difficile qu’il s’agit à la fois d’une question de droit international et de droit national ».  Le représentant a cité l’article 4 du Code pénal indonésien contre la piraterie et réaffirmé qu’il doit s’agir de crimes assez répugnants aux yeux de l’humanité pour justifier une action extraterritoriale.  Il a loué l’action du Tribunal des droits de l’homme d’Indonésie et appelé les États à la prudence et à la coopération dans l’application du principe de compétence universelle.

M. ALBERTO ESTEBAN CABALLERO GENNARI (Paraguay) a rappelé que la constitution de son pays reconnaissait l’existence d’un « ordre juridique supranational » et que le Paraguay était partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), dont il a également approuvé l’amendement dit de Kampala.  Par conséquent, a-t-il ajouté, la loi nationale paraguayenne de mise en œuvre du Statut de Rome condamne expressément le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Elle reconnaît clairement la distinction entre compétence nationale et compétence universelle et fixe les limites de la compétence nationale.  Dans ce cadre, a estimé M. Caballero, le principe de compétence universelle offre suffisamment de garanties pour traduire les auteurs des crimes les plus graves en justice.  Encadrée par les principes de subsidiarité et de bonne foi, dans les « situations graves et systématiques de crime contre l’humanité », la compétence universelle constitue un outil important pour venir à bout de l’impunité, à supposer qu’elle soit utilisée dans le respect des principes de la Charte des Nations Unies et du droit international. 

Mme CONDE (Guinée) a souligné la nécessité que les crimes les plus graves ne restent pas impunis.  Dans le même temps, elle a insisté sur l’importance fondamentale du principe de souveraineté des États.  La déléguée guinéenne s’est dite en faveur de l’application de la compétence de l’État sur le territoire duquel le crime a été commis ou de l’État de nationalité de l’auteur.  En conclusion, la déléguée a rappelé que « l’Union africaine a le droit d’agir en cas de crimes graves ».

Mme MINE OZGUL BILMAN (Turquie) a assuré que son pays reconnaît qu’il faut prévenir l’impunité pour les crimes internationaux les plus graves.  Dans ce contexte, et compte tenu du fait que l’obligation d’enquêter et d’engager des poursuites incombe à l’État où le crime a été commis ou dont un citoyen est le coupable présumé, la Turquie considère qu’une coopération judiciaire constructive entre les organes pertinents de ces États et des États tiers est de la plus haute importance.  Toutefois, a poursuivi la représentante, les États Membres nourrissent des inquiétudes légitimes quant à une utilisation « abusive » de la compétence universelle.  Certains experts font en effet valoir que, bien que la compétence universelle ait pour but de protéger les valeurs communes de la communauté internationale, son principe peut entraîner « une érosion des droits de l’homme, perturber l’ordre social international et violer la souveraineté des États », a-t-elle relevé.  À ses yeux, la compétence universelle peut en outre constituer une atteinte au principe d’égalité souveraine des États si elle est utilisée à mauvais escient et pour des motifs politiques.  La portée, les limites et l’application de cette juridiction exceptionnelle et subsidiaire doivent être examinées avec le plus grand soin, a-t-elle conclu. 

M. NYANG LIN AUNG (Myanmar) a réaffirmé que la compétence première revient à l’État où a été commis le crime et demande le respect au pied de la lettre de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des États.  À ce propos, il a vivement critiqué le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar comme « un exemple classique d’abus » imposé à son pays sans son consentement.  Il l’a décrit comme un instrument « purement politique » qui constitue un précédent négatif pour l’application future du principe de compétence universelle.

Selon Mgr FREDRIK HANSEN, Observateur du Saint-Siège, l’égalité souveraine des États, la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et l’immunité des représentants de l’État sont des principes fondamentaux des relations internationales, qui ne sauraient être remis en question.  Parallèlement, a-t-il estimé, la communauté internationale a « le devoir » de faire en sorte que les auteurs des crimes les plus graves soient tenus pour responsables.  « Garantir la responsabilité est essentiel pour la sauvegarde de l’état de droit aux niveaux national et international. »   Le représentant a par conséquent appelé à poursuivre le dialogue sur la portée et l’application du principe de compétence universelle « pour qu’il n’y ait pas de refuge pour les auteurs des crimes les plus odieux contre l’humanité », sans que cela ne se traduise par des « abus ».  Il est possible de parvenir à un équilibre, sur la base des principes en vigueur dans les conventions internationales et la pratique des États, comme le principe aut dedere aut judicare et le principe de subsidiarité. 

De plus, le représentant a estimé que tout État désireux d’exercer sa compétence universelle devait avoir un lien avec les faits reprochés ou avec les parties concernées, tel que la présence de l’auteur ou de ses victimes sur son territoire.  À ses yeux, la compétence universelle ne saurait ainsi justifier la tenue de procès par contumace.  Il a appelé à veiller à définir clairement les conditions de levée de l’immunité des représentants de l’État et à éviter que la compétence universelle ne génère des conflits entre États.  Il a estimé que les crimes justifiant l’exercice de la compétence universelle devaient se cantonner au génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, ainsi qu’aux « menaces et tentatives » de commettre ces crimes, surtout si elles engendrent des déplacements de populations. 

M. CHRISTOPHER BRADLEY HARLAND, représentant du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), s’est félicité de l’intérêt que continue d’accorder l’Assemblée générale au principe de compétence universelle, eu égard notamment aux crimes de guerre.  Ce principe est un des principaux outils permettant de garantir une prévention des violations graves du droit international humanitaire et, le cas échéant, de prévoir une enquête et des sanctions, a-t-il souligné.  Il a ajouté que les Conventions de Genève de 1949 enjoignent aux États de poursuivre les auteurs d’atteintes graves, indépendamment de leur nationalité, puis de les juger ou extrader.  Pour le CICR, c’est d’abord aux États qu’incombe la responsabilité d’enquêter sur les allégations et de poursuivre les auteurs des violations graves du droit international humanitaire.  S’ils ne le font pas, l’exercice de la compétence universelle par d’autres États peut devenir un mécanisme efficace pour garantir la responsabilisation et limiter l’impunité, a fait valoir le représentant. 

À cet égard, a-t-il poursuivi, le CICR se félicite de l’augmentation croissante des poursuites nationales engagées sur la base de la compétence universelle pour des cas de violations graves du droit international humanitaire.  Depuis 2018, a-t-il précisé, des enquêtes extraterritoriales sur des crimes internationaux présumés commis en situation de conflit armé ont ainsi été menées par des juridictions nationales en Argentine, Allemagne, Autriche, Belgique, France, Norvège, Suède et Suisse.  De plus, au moins 15 procès sont programmés ou en cours en Autriche, Allemagne, Belgique, Espagne, Finlande, France, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède et Suisse.  Enfin, a-t-il noté, au moins neuf jugements ont été rendus par des tribunaux nationaux sur la base de la compétence universelle en Allemagne, Finlande, France, Pays-Bas et au Royaume-Uni. 

ADMINISTRATION DE LA JUSTICE À L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES - A/74/172, A/74/171, A/74/169

Déclarations

« Le Groupe africain continuera de renforcer l’administration de la justice au sein de l’ONU », a déclaré M. AMADOU JAITEH (Gambie), au nom du Groupe des États d’Afrique.  Il a souligné les enjeux importants autour de l’administration de la justice au sein de l’ONU.  « Nous devons nous poser les bonnes questions: le système est-il doté des ressources financières suffisantes?  Est-il suffisamment décentralisé, transparent et professionnel?  Ses méthodes de travail sont-elles conformes au droit international? »  Il a apporté son soutien aux entités judiciaires de l’ONU et les a appelées à redoubler d’efforts.  Enfin, M. Jaiteh a plaidé pour une efficacité accrue de l’administration de la justice au sein de l’ONU.

M. ERIC CHABOUREAU, délégué de l’Union européenne, a déclaré accorder une grande importance au bon fonctionnement de l’administration de la justice à l’ONU.  Il a salué le travail du Tribunal du contentieux administratif et du Tribunal d’appel des Nations Unies, auxquels il a attribué la bonne administration de la justice au sein de l’Organisation.  Il a également salué le Bureau de l’aide juridique au personnel pour son soutien aux personnes travaillant pour l’Organisation dans le monde entier.  Le représentant s’est en revanche déclaré inquiet du faible nombre de jugements prononcés par le Tribunal du contentieux administratif en 2018, du grand nombre de cas en suspens à la fin 2018 et du nombre d’affaires soumises en 2019.  Il a également noté que la durée moyenne des affaires traitées par le Tribunal du contentieux administratif n’a pas baissé de manière significative en dépit d’un amendement à son statut.  De plus, pour la première fois depuis 2013, la proportion des appels interjetés contre des jugements du Tribunal du contentieux administratif au nom du Secrétaire général a été supérieure à celle de ceux provenant du personnel. 

M. Chaboureau a par ailleurs salué l’action du Bureau de l’administration de la justice, chargé de la mise en œuvre de la stratégie de sensibilisation, jugeant crucial d’améliorer la connaissance du système de justice interne au sein du personnel.  Il a aussi applaudi les actions menées par le Bureau des services d’ombusdman et de médiation en faveur des fonds et programmes.  Constatant d’autre part que le nombre d’enquêtes pour harcèlement sexuel a considérablement augmenté en 2018, il a accueilli favorablement la proposition formulée par le Conseil des chefs de secrétariat des Nations Unies pour la coordination d’une politique modèle en la matière.  Enfin, eu égard aux cas de représailles contre des membres du personnel ayant porté plainte devant un tribunal de l’ONU, il a approuvé la proposition du Secrétaire général visant à donner aux chefs de bureaux du Secrétariat des responsabilités de prévention, de contrôle et de protection, dans les limites des ressources disponibles. 

Mme OATES (Nouvelle-Zélande), également au nom du Canada et de l’Australie, a félicité son compatriote Graeme Colman, premier néozélandais élu juge au Tribunal d’appel des Nations Unies avant de rappeler que le système de justice interne des Nations Unies a été créé il y a 10 ans et nécessite l’engagement des États pour s’améliorer.  Elle a affirmé que l’accès à la justice est primordial dans l’état de droit, de même que la protection contre les représailles, une représentation appropriée et une justice efficace.  S’étonnant de « la tendance à l’autoreprésentation du personnel » au Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies, elle a préconisé « une boîte d’outils » à l’usage des plaignants. 

En outre, Mme Oates a requis des fonds additionnels pour le Bureau de l’aide juridique au personnel et a déploré les cas en suspend au Tribunal du contentieux administratif.  « Justice différée est justice refusée », a-t-elle dit.  Elle a approuvé le travail de médiation de l’Ombudsman qui permet d’identifier les contentieux sur les lieux de travail et rendre l’Organisation plus efficace.

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) a estimé que l’administration de la justice à l’ONU devait s’appuyer sur les principes d’indépendance, de transparence, de professionnalisme, de décentralisation, d’égalité et de respect de la procédure régulière.  Le représentant s’est dit préoccupé par l’augmentation de 35% du nombre total de dossiers soumis par des non-fonctionnaires du Secrétariat au Bureau de l’Ombudsman de l’ONU.  Il a toutefois noté que le Bureau avait fourni des services à 173 non-fonctionnaires dans le cadre du projet pilote visant à proposer des services de règlement amiable des différends aux non-fonctionnaires, adopté en janvier 2019 par l’Assemblée générale, dans sa résolution 73/276.  Le représentant a espéré que ce projet pourra contribuer, dans le futur, à une diminution du nombre de cas et a invité le Secrétaire général à inclure dans son prochain rapport des données sur le nombre de cas résolus.  Il a en outre appelé à mettre l’accent sur les mécanismes de prévention et de résolution informelle des conflits au sein du système d’administration de la justice. 

Mme EMILY PIERCE (États-Unis) a fait remarquer qu’après 10 ans d’existence, le système d’administration de la justice à l’ONU, qui devrait être indépendant, transparent et professionnel, a connu des progrès et des défis.  Afin d’assurer la confiance du personnel dans le système, il faut s’assurer que les présidents des tribunaux disposent des moyens pour exercer leurs mandats.  Le représentant s’est félicité des efforts pour résorber le retard des affaires au Tribunal du contentieux administratif qui a nui à la crédibilité de l’administration de la justice.  Des résultats sont visibles, s’est réjouie Mme Pierce, grâce au traitement numérique des données, et aux indicateurs d’efficacité; le rythme de traitement des dossiers est déjà supérieur à l’année dernière.  Néanmoins, elle a déploré « des environnements professionnels marqués par le harcèlement et l’abus de pouvoir » et des représailles incompatibles avec les valeurs des Nations Unies.  D’où la nécessité d’une plus grande transparence du système et d’une meilleure publication des directives judiciaires.  Enfin, la représentante américaine a souhaité que le Bureau de l’aide juridique au personnel puisse mieux résoudre les problèmes avant qu’ils n’atteignent le niveau de contentieux grâce à une augmentation de ses moyens. 

Mme NATHALIE SCHNEIDER RITTENER (Suisse), jugeant qu’un système de protection efficace contre les représailles est indissociable d’un système de justice interne équitable et efficace, a appuyé les recommandations du Conseil de justice interne en la matière.  Elle a remercié le Secrétaire général pour le lancement de ses cinq initiatives pour améliorer la prévention et le règlement des conflits du travail impliquant des non-fonctionnaires.  La représentante a salué en particulier la proposition du Secrétaire général de mettre en place un projet pilote offrant aux non-fonctionnaires un accès à des services de règlement à l’amiable des différends par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies.  Enfin, elle a rappelé la gageure que représente une procédure d’arbitrage contre l’ONU et appuyé l’idée du Secrétaire général d’étudier des moyens moins coûteux. 

M. SYDNEY KEMBLE (Pays-Bas) a insisté sur l’importance de l’administration de la justice à l’ONU et fait part de « développements préoccupants » lors de l’année écoulée.  Il a salué le travail accompli par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation, qui est « sûr, accessible et fonctionnel. » Le représentant a salué la proposition du Secrétaire général de mettre en place un projet pilote offrant aux non-fonctionnaires un accès à des services de règlement à l’amiable des différends par le Bureau.  D’après lui, « ce projet pilote doit continuer ».  Le délégué a salué la nomination des nouveaux juges au sein Tribunal du contentieux administratif et espéré qu’ils remédient au grand nombre d’affaires en suspens.  Le nombre de jugements rendus par le Tribunal est au plus bas, a-t-il déploré, en suggérant des pistes pour y remédier. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Deuxième Commission réfléchit aux meilleurs moyens de partager les fruits de la mondialisation dans un monde de plus en plus interconnecté

Soixante-quatorzième session,
16e séance – matin
AG/EF/3522

La Deuxième Commission réfléchit aux meilleurs moyens de partager les fruits de la mondialisation dans un monde de plus en plus interconnecté

Un système commercial multilatéral actualisé, renforcé, ouvert, transparent, équitable et basé sur des règles est un moteur de prospérité et de croissance, ont asséné nombre de délégations de la Deuxième Commission (questions économiques et financières) ce matin.  Voyant dans les tentations protectionnistes actuelles des entraves au développement durable, elles ont voulu rappeler, comme l’ont résumé le Groupe des 77 et la Chine, qu’« il n’y a pas d’alternative au multilatéralisme ».

Le multilatéralisme et le rôle des Nations Unies dans la promotion du développement sont en effet plus pertinents que jamais dans un monde de plus en plus interconnecté et interdépendant, ont insisté l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Cuba ou encore le Bhoutan.  Nous vivons des tensions commerciales entre les plus grandes économies au monde, a constaté le Népal, en regrettant que cela crée des incertitudes, en ayant en outre, dans un monde interconnecté, des ramifications à grande échelle.

En effet, a relevé la Communauté des Caraïbes (CARICOM), les avantages et les coûts des systèmes économiques mondiaux continuent d’être inégalement répartis, ce qui débouche sur des modèles de développement non durables, mettant ainsi en péril la réalisation collective du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  En outre, la montée des tensions commerciales, le protectionnisme et des actions unilatérales ont ralenti la croissance et sapé la confiance placée en l’ONU et d’autres institutions internationales, a regretté l’ASEAN.

Alors, comment faire en sorte que tous les pays et tous les peuples puissent tirer parti de la mondialisation et comment mettre un terme à la dynamique du nivellement par le bas?  Ce sont les questions sur lesquelles se penche un rapport du Secrétaire général présenté, ce matin, et intitulé « Tenir les promesses de la mondialisation: promouvoir le développement durable dans un monde interconnecté ».  Dans ce débat, le G77 et la Chine ont plaidé pour de nouvelles approches fondées sur la responsabilité et la promesse de garantir l’inclusion et la participation de ceux qui sont le plus en retard pour créer un monde plus inclusif, juste et durable.

Les défis spécifiques auxquels font face les pays à revenu intermédiaire ont été évoqués à maintes reprises au cours de cette discussion.  Les facteurs de croissance ne sont généralement pas les mêmes dans les pays à faible revenu et dans les pays à revenu élevé, ce qui pose des difficultés pour les pays à revenu intermédiaire, qui doivent définir et essayer de nouvelles stratégies de croissance plus efficaces pour éviter de tomber dans le « piège du revenu intermédiaire », a expliqué M. Hamid Rashid, du Département des affaires économiques et sociales (DESA) de l’ONU.  Depuis 2010, quelques pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, à savoir l’Argentine, la Fédération de Russie et le Venezuela, ont atteint le statut de pays à revenu élevé, puis sont retombés dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire, parce que la croissance de leur PIB avait faibli, à la suite de la dégradation de la conjoncture économique nationale et internationale.  Ceci montre à quel point les pays à revenu intermédiaire sont vulnérables aux chocs économiques internes et externes, a expliqué M. Rashid.

Par exemple, la Thaïlande a noté que si les pays à revenu intermédiaire ont bénéficié de la mondialisation à travers une expansion économique robuste et plusieurs opportunités, ils ont, dans le même temps, fait face à des inégalités multidimensionnelles qui sapent leur croissance à long terme.  C’est dans l’optique de sortir du piège du revenu intermédiaire que le pays a lancé la politique « Thaïlande 4.0 » afin d’opérer une transformation: passer d’une économie fondée sur la connaissance et la valeur à une économie guidée par des technologies et une innovation qui soient écologiquement viables.

À cet égard, le Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire a réitéré sa demande que le système des Nations Unies pour le développement élabore une stratégie globale et à long terme pour faciliter le développement durable à travers l’offre d’un appui coordonné aux pays à revenu intermédiaire.  Pour leur part, l’Indonésie et la Namibie ont demandé la révision des critères utilisés pour classifier les pays.  Quant à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), elle a recommandé de tirer parti des possibilités qu’offre la quatrième révolution industrielle pour les pays à revenu intermédiaire.  En effet, cela permet de renforcer leurs capacités -institutionnelles, financières et technologiques- à soutenir la croissance et à éviter le « piège du revenu intermédiaire ».

Si la technologie a été considérée, à maintes reprises, comme un moteur dans la mondialisation, plusieurs délégations se sont inquiétées de la fracture technologique et numérique.  Mme Shamika Sirimanne, Directrice à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a souligné que les technologies nouvelles pourraient aider à remédier aux problèmes de développement pressants et accélérer les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable.  Toutefois, sans intervention ni accompagnement, les nouvelles technologies n’aideront pas à réaliser ces objectifs, a-t-elle prévenu, préconisant un renforcement des capacités des pays qui en ont besoin. 

En Asie du Sud-Est, le programme « ASEAN numérique » a été lancé pour promouvoir l’utilisation des technologies numériques, avec notamment le « Réseau des villes intelligentes de l’ASEAN » qui comprend 26 villes de 10 pays et vise un développement urbain durable.  L’Arabie saoudite, qui souhaite créer une société numérique et lancer des activités industrielles de pointe, a déjà lancé une plateforme de réalité virtuelle pour les pèlerins du Hadj, au nombre de trois millions cette année.  Quant à El Salvador, il a annoncé avoir créé un secrétariat à l’innovation chargé de moderniser l’État, qui est en train d’élaborer un programme pour la transformation numérique du pays sur les 10 prochaines années, un pas nécessaire pour remplir les conditions de compétitivité dans le cadre de la quatrième révolution industrielle.

La Deuxième Commission reprendra ses travaux vendredi 18 octobre, à 10 heures, pour débattre de deux points à l’ordre du jour: les technologies de l’information et des communications au service du développement durable et les groupes de pays en situation particulière.

MONDIALISATION ET INTERDÉPENDANCE

a) Rôle des Nations Unies dans la promotion du développement à l’heure de la mondialisation et de l’interdépendance

b) Science, technologie et innovation au service du développement durable

c) Culture et développement durable

d) Coopération pour le développement des pays à revenu intermédiaire

Présentation de rapports

Mme MARION BARTHELEMY, Directrice du Bureau de l’appui aux mécanismes intergouvernementaux et de la coordination au service du développement durable du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a présenté le rapport A/74/239 du Secrétaire général intitulé « Tenir les promesses de la mondialisation: promouvoir le développement durable dans un monde interconnecté ».  Ce rapport cherche notamment à répondre aux questions suivantes, a dit Mme Barthelemy: comment faire en sorte que tous les pays et tous les peuples puissent tirer parti de la mondialisation et comment mettre un terme à la dynamique du nivellement par le bas?

Le rapport met en lumière certains des succès et des problèmes les plus récents liés à la mondialisation dans le contexte de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, notamment dans les domaines de la réduction des inégalités par le commerce et le développement, de la compréhension des migrations et de leurs répercussions, et de la mise à profit des technologies numériques pour le bien de tous.  Pour réaliser le Programme 2030, le Secrétaire général préconise dans son rapport d’adopter de nouvelles approches fondées sur l’impératif du partage équitable des responsabilités et sur la promesse consistant à ne pas faire de laissés-pour-compte.

Mme SHAMIKA SIRIMANNE, Directrice de la Division de la technologie et de la logistique à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a présenté devant la Deuxième Commission le rapport « Science, technologie et innovation au service du développement durable » (A/74/230), qui examine l’incidence des technologies nouvelles et naissantes sur le développement durable.  Elle a comparé l’époque actuelle à l’époque atomique: les pays en développement et les pays les moins avancés (PMA), qui ne participent pas au développement des technologies de pointe, seront touchés par leurs conséquences, et doivent donc participer au débat sur leur utilisation au sein de Nations Unies, a-t-elle expliqué.

La nouvelle vague technologique est souvent associée aux chaînes de blocs, à l’intelligence artificielle, aux biotechnologies et aux nanotechnologies, à Internet des objets.  Dans ce rapport, le Secrétaire général explique comment ces innovations peuvent améliorer les secteurs de l’agriculture, de la santé et de l’éducation numérique.  Les technologies nouvelles et naissantes pourraient aider à remédier aux problèmes de développement pressants et à accélérer les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), selon le rapport.

Au même moment, l’évolution rapide de la technique pose des problèmes aux gouvernements et aux sociétés qui doivent alors s’adapter, améliorer leur capacité d’évaluation et de prospective des technologies, afin d’être en mesure d’estimer et d’affronter les risques possibles.  L’intelligence artificielle peut avoir des conséquences inattendues et négatives sur certains marchés, par exemple accroître les fossés numériques.  Elles peuvent aussi accroître les préjugés et les discriminations.

Mme Sirimanne a prévenu que sans intervention ni accompagnement, les nouvelles technologies n’aideront pas à réaliser les objectifs de développement durable.  Il faut aider les sociétés à s’adapter à ces changements rapides, a souligné Mme Sirimanne, en renforçant les capacités.  Il faut enfin élargir le spectre de l’orientation technologique à la protection de l’environnement sans se cantonner au pur aspect technologique, a aussi expliqué la représentante de la CNUCED.

Le rapport conclut que de profondes transformations seront nécessaires pour mettre en œuvre le Programme 2030 et atteindre les ambitieux objectifs de développement durable.  Ceux-ci peuvent être réalisés seulement en mobilisant la science, la technologie et l’innovation au profit du développement durable.  À cette fin, ces dernières devraient faire partie intégrante des stratégies nationales de développement, et être promues par les gouvernements et les autres parties prenantes de manière coordonnée et cohérente.

Mme MARIE PAUL ROUDIL, Directrice du Bureau de New York de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a présenté le rapport A/74/286 de l’UNESCO qui dresse un tableau d’ensemble des progrès réalisés dans le domaine de la culture et du développement durable depuis août 2017.  La culture étant interdépendante de tous les aspects du développement humain, elle représente actuellement une source de potentialités insuffisamment explorées, a souligné Mme Roudil.  Elle a constaté un progrès particulier vers l’objectif de développement durable no 11 (villes et communautés durables) grâce à plusieurs initiatives conduites par l’UNESCO dans les domaines de la préservation du patrimoine ou des économies créatives.

La promotion de l’éducation artistique et du multilinguisme a contribué à nourrir la diversité culturelle et à enrichir le dialogue et les échanges interculturels et intergénérationnels.  En outre, l’Année internationale des langues autochtones en 2019 a permis de sensibiliser à la richesse du patrimoine linguistique mondial (7 000 langues).

Le renforcement des synergies entre les mandats et les activités des Nations Unies, la consolidation des partenariats avec la société civile et le secteur privé et l’amélioration de la coopération avec les États Membres et les autorités municipales permettront d’intégrer la culture de manière plus cohérente dans le Programme 2030, relève le rapport.

En outre, dans le cadre des efforts visant à « ne laisser personne de côté », la culture peut donner la parole à des groupes tels que les migrants, les femmes et les filles, les enfants et les jeunes, les minorités ethniques et les peuples autochtones, dont les perspectives peuvent guider les progrès dans la réalisation des ambitions mondiales.  D’ailleurs des efforts pour la promotion des droits culturels pour faire face aux problèmes d’égalité entre les sexes ont été déployés.

L’enthousiasme manifesté par les États Membres pour le Forum des Ministres de la culture de l’UNESCO, qui doit se tenir en novembre 2019 (le premier de ce genre en 21 ans), est de bon augure pour l’avenir du développement durable axé sur la culture.  « Mettre la culture au cœur du développement est un investissement fondamental », a conclu Mme Roudil.

M. HAMID RASHID, Chef du service recherche et développement du DESA, a présenté le rapport A/74/269 intitulé « Coopération pour le développement des pays à revenu intermédiaire », qui évalue les besoins des pays à revenu intermédiaire en matière de coopération pour le développement.  Ces pays constituent un groupe hétérogène mais sont un moteur de la croissance mondiale, qui accueille la majorité des pauvres du monde, a résumé M. Rashid.  Très variés sur le plan de la superficie, de la population, de la géographie et du patrimoine naturel, ils représentent près d’un tiers du produit intérieur brut (PIB) mondial et sont d’importants moteurs de la croissance mondiale.  Ils font face à un certain nombre de défis et de risques en matière de développement, liés non seulement à des aspects financiers ou à leur reclassement dans la catégorie des pays à revenu élevé, mais aussi principalement à leurs capacités institutionnelles, sociales et technologiques.

Créer et garantir des conditions favorables à la mise au point, à l’adoption et à l’adaptation de nouvelles technologies, notamment des techniques d’exploitation des énergies renouvelables, des biotechnologies et des technologies numériques, demeure une stratégie de développement essentielle pour les pays à revenu intermédiaire.

Le système des Nations Unies pour le développement coopère activement avec les pays à revenu intermédiaire dans plusieurs domaines afin de progresser considérablement dans la mise en œuvre du Programme 2030, de renforcer et de promouvoir l’évaluation de la pauvreté multidimensionnelle et de favoriser l’innovation technologique et le transfert de technologie.  À cette fin, l’Organisation fournit un appui institutionnel, technique et statistique et un appui au renforcement des capacités aux niveaux national, régional et mondial.

Dans de nombreux pays à revenu intermédiaire, l’enjeu majeur du développement n’est pas uniquement d’ordre financier et ne porte pas simplement sur le fait d’être reclassé dans la catégorie des pays à revenu élevé.  Il s’agit plutôt de renforcer leurs capacités institutionnelles, financières, sociales et technologiques afin de maintenir la croissance et d’éviter de tomber dans le « piège du revenu intermédiaire ».  Les facteurs de croissance ne sont généralement pas les mêmes dans les pays à faible revenu et dans les pays à revenu élevé, ce qui pose des difficultés pour les pays à revenu intermédiaire, qui doivent définir et essayer de nouvelles stratégies de croissance plus efficaces pour éviter ce piège.

Depuis 2010, quelques pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, à savoir l’Argentine, la Fédération de Russie et le Venezuela, ont atteint le statut de pays à revenu élevé, puis sont retombés dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire, parce que la croissance de leur PIB a faibli, à la suite de la dégradation de la conjoncture économique nationale et internationale.  Ceci montre à quel point les pays à revenu intermédiaire sont vulnérables face aux chocs économiques internes et externes.

Concernant le transfert de technologie, la classification des pays à revenu intermédiaire repose uniquement sur le critère du PIB par habitant et ne tient pas compte d’autres mesures du développement, notamment l’indice de pauvreté multidimensionnelle.  Ceci peut les empêcher d’accéder aux nouvelles technologies et de les importer à des conditions souples et favorables, indispensables pour doper la croissance de la productivité et éviter le « piège » du revenu intermédiaire.  Pour échapper au piège, une transformation structurelle s’impose.  Les technologies de pointe, notamment celles qui touchent à l’exploitation des énergies renouvelables, les biotechnologies et les technologies numériques peuvent offrir de nouvelles possibilités de croissance et accélérer la réalisation des objectifs de développement durable, selon le rapport.

Concernant le commerce international, le volume des échanges assurés par les pays à revenu intermédiaire a diminué en 2018, principalement en raison d’une faible croissance de la demande d’importation de marchandises dans la plupart des pays développés.  Les progrès techniques qui conduisent à l’automatisation des tâches, en particulier pour les emplois manufacturiers, peuvent également menacer le modèle de développement reposant sur l’exportation de biens manufacturés, appliqué dans de nombreux pays à revenu intermédiaire.

Le rapport conclut que le Programme 2030 ne pourra être mené à bien, si les pays à revenu intermédiaire ne sont pas en mesure de réaliser l’ensemble des objectifs de développement durable.  L’environnement économique international actuel présente de nombreux risques pour ces pays: conditions d’accès au marché moins favorables en raison du protectionnisme, risques de démantèlement partiel des chaînes de valeur mondiales, risques de sorties de capitaux et de surendettement, renforcement des restrictions aux flux migratoires.  Soit, plus généralement, l’affaiblissement des engagements internationaux en faveur du multilatéralisme, notamment en matière de l’aide publique au développement (APD) et de la lutte contre les changements climatiques.

Dialogue interactif

La représentante du Mexique a posé une question à la Directrice de la CNUCED: que faire pour que la moitié de la population qui n’a pas accès à Internet ne soit pas laissée pour compte et tire avantage de la transformation numérique?

Sans accès à Internet, on reste en effet un « oublié de la révolution numérique », a répondu la représentante de la CNUCED, Mme Sirimanne, en précisant que la moitié de la population mondiale n’a pas accès à Internet.  Dans les PMA, c’est même 80% de la population qui n’y a pas accès, a-t-elle ajouté.  Nous devons tous œuvrer pour sensibiliser les gouvernements et les partenaires de développement au fait que l’accès aux technologies de l’information et des communications (TIC) est vital, a-t-elle conclu.

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, Mme SAHAR NASSER (État de Palestine) a plaidé pour de nouvelles approches fondées sur la responsabilité et la promesse de garantir l’inclusion et la participation de ceux qui sont le plus en retard pour créer un monde plus inclusif, juste et durable.  « Redoublons de vigueur pour réduire les inégalités grâce au commerce et au développement, pour comprendre la migration et ses effets, et pour mettre le potentiel des TIC au service du bien commun », a exhorté la représentante.  « Nous devons réaffirmer notre engagement à créer un environnement international favorable pour le développement et à trouver les moyens nécessaires de mise en œuvre, notamment dans les domaines de la finance, du commerce international, de la technologie et du renforcement des capacités des pays en développement », a-t-il ajouté.

Il n’y a pas d’alternative au multilatéralisme, a proclamé la déléguée, en soulignant que c’est la pierre angulaire d’une approche renouvelée d’une mondialisation plus inclusive, durable et équitable.  Mme Nasser a souligné la nécessité de mobiliser et d’intensifier le financement pour la science, la technologie et l’innovation, en particulier dans les pays en développement, en appui aux objectifs de développement durable, de respecter et de comprendre la diversité culturelle, et d’améliorer la compréhension interculturelle et le dialogue.  Elle a aussi réitéré que les pays à revenu intermédiaire font face à des défis majeurs pour réaliser les objectifs de développement durable.  Il faut relever les défis des pays qui ont passé le seuil de la catégorie des pays à revenu intermédiaire supérieur mais qui ont encore des vulnérabilités et des retards structurels.

Au nom du Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire, Mme KIRA CHRISTIANNE D. AZUCENA (Philippines) a déclaré qu’identifier, mesurer et réduire la pauvreté, améliorer l’accès aux services sociaux, renforcer les systèmes de protection sociale et améliorer la durabilité environnementale font partie des défis des pays à revenu intermédiaire.  À cela, elle a ajouté d’autres difficultés liées à la gestion des ressources naturelles, la dépendance aux exportations de produits de base, les effets des catastrophes et des changements climatiques, les dettes et la volatilité des taux de change et des flux de capitaux.  Les dettes de ces pays ont augmenté de 8% par an de 2009 à 2018 et totalisaient, en 2018, les 2 000 milliards de dollars, a-t-elle précisé.

Face à ces défis, la représentante a plaidé pour que les stratégies de coopération ciblées et différenciées visant à promouvoir la croissance économique et à éliminer la pauvreté soient accompagnées d’actions concrètes pour réduire les inégalités et pour autonomiser les femmes, à s’attaquer aux changements climatiques, à réduire les risques de catastrophe, à promouvoir des infrastructures durables, à promouvoir la science, l’innovation ainsi que le partage des technologies et des expériences.  Elle a invité les Nations Unies et les partenaires financiers internationaux à élaborer une façon de mesurer les progrès du développement durable qui soit transparente et qui aille au-delà du revenu par habitant.

La représentante a ensuite encouragé les banques, les institutions financières internationales et les donateurs bilatéraux à inclure des critères d’éligibilité multidimensionnels dans leurs politiques financières.  Le but est d’offrir une assistance plus ponctuelle, échelonnée et progressive, qui s’adapte le mieux à la nature multidimensionnelle du développement durable ainsi qu’aux opportunités et aux défis présentés par les diverses réalités des pays à revenu intermédiaire.  À cet égard, a indiqué la représentante, le Groupe réitère sa demande que le système des Nations Unies pour le développement élabore une stratégie globale et à long terme visant à faciliter le développement durable à travers l’offre d’un appui coordonné aux pays à revenu intermédiaire.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. COSMOS RICHARDSON (Sainte-Lucie) a souligné que les défis de développement des 14 États membres de la CARICOM sont exacerbés par l’environnement mondialisé.  Une croissance économique lente et volatile, de forts taux de chômage, une forte incidence de la pauvreté, des inégalités de revenu et de richesse, l’exigence de durabilité environnementale dans un contexte de forte vulnérabilité aux catastrophes résultant des changements climatiques, autant de facteurs qui continuent d’entraver la mise en œuvre du Programme 2030, a expliqué le représentant.  Les objectifs de développement durable ne pourront être atteints sans ressources engagées à cette fin et il faut combler le fossé entre l’aspiration et la réalisation, a asséné M. Richardson.

Les avantages et les coûts des systèmes mondiaux continuent d’être inégalement répartis et débouchent sur des modèles de développement non durables, a constaté M. Richardson.  Il a donc recommandé de promouvoir une croissance équitable et inclusive et de stimuler l’investissement dans l’infrastructure.  Il faut aussi une meilleure transparence dans les questions fiscales internationales, ce qui requiert une meilleure coopération au niveau mondial.  En conclusion, le représentant de la CARICOM a demandé de ne pas se contenter de paroles creuses mais de chercher à relever véritablement tous les défis internationaux.

M. BURHAN GAFOOR (Singapour), s’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a noté que la montée des tensions commerciales, le protectionnisme et des actions unilatérales ont renforcé les incertitudes de l’économie mondiale, ralenti la croissance et sapé la confiance placée en l’ONU et d’autres institutions internationales.  Tout cela met en péril notre réalisation collective du Programme 2030, a-t-il affirmé.  L’ASEAN accorde beaucoup d’importance à un système économique ouvert et inclusif, transparent et basée sur les règles, a dit le représentant, en assurant que l’ASEAN a toujours soutenu le multilatéralisme et promu une intégration plus poussée de ses membres et de ses partenaires externes.

Le représentant a également souligné qu’un système commercial multilatéral ouvert et basé sur les règles est un moteur de prospérité et de croissance pour la région et le monde entier.  Il permet, en outre, de sortir des millions de gens de la pauvreté.  M. Gafoor a estimé que malgré ses limites, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) demeure le forum ultime pour tous les pays, développés et en développement, qui travaillent de concert pour bâtir un cadre commercial mondial.  « Maintenant encore plus que jamais, nous avons besoin de plaider contre le protectionnisme et renforcer le système commercial multilatéral », a déclaré le délégué.

Il a ensuite présenté le programme « ASEAN numérique » visant à promouvoir les technologies numériques au sein des populations.  L’une des initiatives phares, à cet effet, est le « Réseau des villes intelligentes de l’ASEAN » qui a été lancé en 2018.  Ainsi, 26 villes de 10 pays vont œuvrer pour l’avènement d’un développement urbain durable.  L’ASEAN entend également établir un guichet unique en mettant en œuvre un mécanisme d’échange des données douanières, alors que dans le même temps, la connectivité est renforcée par la mise en place d’infrastructures durables.  Enfin, l’ASEAN entend poursuivre son soutien en faveur du renforcement du rôle de l’ONU dans la gouvernance mondiale.

Mme ELENA MELNIK (Fédération de Russie) a fait remarquer que les objectifs de développement durable sont indivisibles et multidimensionnels.  Elle a souligné le devoir de la communauté internationale d’utiliser les effets positifs de la mondialisation pour le bien être de toute l’humanité et la réalisation de ces objectifs.  Persuadée que la mondialisation sera le remède aux inégalités, elle a jugé que dans un contexte d’interdépendance, on ne pouvait oublier le rôle des institutions de Bretton Woods, du G20 et de tant d’organisations multilatérales.

Se félicitant que 30 pays à faible revenu soient devenus des pays à revenu intermédiaire ces 30 dernières années, elle a expliqué que les nouvelles technologies et l’ntelligence artificielle pouvaient contribuer à une croissance durable.  La Russie, a-t-elle dit, a pris des mesures concrètes en ce sens, créant des infrastructures pour transférer et stocker les données au bénéfice de la population mondiale.  Dans une ère de changements profonds pour l’économie mondiale, il est nécessaire de créer un espace économique en Eurasie, a-t-elle ensuite affirmé.  La représentante a aussi parlé de ce que fait son pays pour promouvoir la culture au service du développement durable.  En tant que « l’un des pays les plus multinationaux du monde », la Russie soutient le multiculturalisme, notamment en modernisant dans ses villes les « Maisons de la Culture », qui, historiquement, ont servi les échanges culturels en Russie.

Selon Mme SILVANY PASARIBU (Indonésie), la mondialisation a aussi ses revers comme la difficile répartition des biens acquis, compte tenu du manque de transfert de technologie et des TIC.  Les Nations Unies doivent être au cœur des dispositifs pour réaliser les objectifs de développement durable et pour accompagner les transformations, a insisté la représentante.  En ce qui concerne les pays à revenu intermédiaire, qui jouent, selon elle, un rôle de plus en plus actif au niveau international, elle a noté qu’ils créaient des synergies avec les autres pays en développement.  Néanmoins, ces pays se heurtent à des difficultés spécifiques, a expliqué la représentante, qui a appelé à utiliser un classement catégoriel n’ayant pas uniquement le PIB comme critère.  Elle a aussi appelé à la pleine exploitation des TIC dans les pays en développement pour la croissance mondiale et parvenir aux objectifs de développement durable, sans sous-estimer les risques inhérents aux nouvelles technologies, « potentiellement destructrices d’emplois si elles sont mal gérées ».

Pour M. JUAN MIGUEL GONZALEZ PEÑA (Cuba), le multilatéralisme et le rôle des Nations Unies dans la promotion du développement sont plus pertinents que jamais dans un monde de plus en plus interconnecté et interdépendant.  Le représentant a rejeté les actions unilatérales, protectionnistes et excluantes, promues essentiellement par les États-Unis, qui ne défendent que leurs intérêts nationaux et affaiblissent le cadre des institutions multilatérales, au détriment de solutions globales et multilatérales aux défis auxquels l’humanité est confrontée.

Le représentant a déploré le creusement du fossé entre Nord et Sud alors que les ressources pour faire face aux problèmes tels que la pauvreté ou la faim existent.  Malheureusement, c’est la volonté politique qui manque, a-t-il ajouté.  Il a réitéré la nécessité d’un nouvel ordre économique international, fondé notamment sur l’équité, le bénéfice commun et la coopération entre tous les États, un ordre qui corrige les inégalités actuelles et garantisse aux générations présentes et futures un développement économique et social juste.  Il faut que les pays en développement aient accès à la souveraineté technologique et un meilleur accès au financement, à l’investissement, à de meilleures capacités, à l’infrastructure et au transfert de technologie.

Pour M. KHALED MOHAMMED A. ALRAYES (Arabie saoudite), « la culture est l’âme de la vie ».  Les cultures variées sont un vecteur de rapprochement et sont donc un corollaire du développement et de la coexistence, a-t-il insisté.  Ayant foi dans le multiculturalisme, notamment dans le domaine social et économique, le pays intègre la culture comme partie intégrante de sa stratégie de développement et dans ses efforts visant la réalisation des objectifs de développement durable au niveau national.  Se félicitant des riches coutumes et du patrimoine de son pays, le représentant a mentionné la création d’un ministère de la culture, en juin 2018.

Le royaume souhaite créer une société numérique, lancer des activités industrielles de pointe, attirer les investissements et améliorer la compétitivité économique du pays, a-t-il expliqué en précisant que l’Arabie saoudite renforce ses infrastructures, notamment le très haut débit, et améliore la qualité des TIC.  Le représentant a aussi indiqué que l’Arabie saoudite pourvoit aux pèlerins du Hadj, au nombre de trois millions cette année, des services de TIC, à travers l’initiative « pèlerinage intelligent », ainsi qu’une plateforme de réalité virtuelle qui aide les pèlerins à accomplir les rites lors de leur parcours spirituel.

M. MUDASHIRA HUSAIN (Nigéria) a jugé important de renforcer la coopération et de renouveler l’engagement en faveur du multilatéralisme dans le contexte du développement durable.  Le représentant s’est dit préoccupé par la persistance de la fracture technologique entre les régions, les pays et les peuples.  Il a appelé les partenaires de développement à soutenir les pays en développement pour qu’ils parviennent à une société de l’information inclusive et centrée sur l’humain. Plus généralement, il a appelé le système des Nations Unies et les États Membres à renforcer leur coopération en matière de développement avec les pays à revenu intermédiaire afin que ceux-ci puissent attirer les investisseurs et stimuler leurs capacités de production.

En venant aux migrations, M. Husain a dit qu’elles font partie intégrante de la mondialisation et qu’elles contribuent à la croissance.  Si le monde est sincère dans l’engagement de ne laisser personne de côté, il doit réduire les inégalités envers les migrants, a-t-il ajouté.

Mme ALEJANDRA GONZALEZ VARGAS, représentante de la jeunesse du Mexique, a noté avec préoccupation la progression des inégalités due à la mondialisation.  Au sujet des migrations, qui concernent environ 3% de la population mondiale, elle a réaffirmé l’appui du Mexique au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, et condamné fermement les discours de haine et de xénophobie ainsi que les actes de violence qui en résultent.  Il faut respecter les cultures d’origine, et la mondialisation doit valoriser leur contribution au développement durable, a estimé la jeune déléguée.

Quant aux TIC, l’Institut mexicain de la jeunesse a lancé un programme pour donner aux jeunes les connaissances et compétences exigées sur le marché du travail.  Le Mexique est favorable à un système commercial multilatéral universel, fondé sur des règles, juste et transparent dans le cadre de l’OMC.  Il est préoccupé par les tendances à la fuite de capitaux, le protectionnisme unilatéral, le démantèlement partiel de chaînes de valeur mondiales, les restrictions migratoires et l’affaiblissement des engagements multilatéraux.

Mme PAVEENA SUTTHISRIPOK (Thaïlande) a noté que si les pays à revenu intermédiaire ont bénéficié de la mondialisation à travers une expansion économique robuste et plusieurs opportunités, ils ont, dans le même temps, fait face à des inégalités multidimensionnelles qui sapent leur croissance à long terme.  C’est dans l’optique de sortir du piège du revenu intermédiaire que la Thaïlande a lancé la politique « Thaïlande 4.0 » afin de transformer son économie en une économie fondée sur la connaissance et la valeur, une économie guidée par des technologies et une innovation qui soient écologiquement viables.  Au cœur de cette politique se trouve l’ambition de développement des ressources humaines du pays.  C’est pourquoi la Thaïlande consacre la plus grande part de son budget à l’éducation de qualité pour tous.  La scolarité est gratuite pendant 15 ans, de la maternelle au secondaire, y compris pour les enfants de migrants, a affirmé Mme Sutthisripok.  Pour préparer cette ressource humaine à la quatrième révolution technologique, les autorités ont, en outre, mis l’accent sur la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques.

M. LI GEN (Chine) a remarqué que si, du fait de la mondialisation, les habitants du monde sont plus connectés que jamais, l’inégalité entre riches et pauvres ne fait que s’accroître.  Cela se fait ressentir dans les pays à revenu intermédiaire, qui subissent aussi les changements climatiques et le protectionnisme de certains pays, a-t-il relevé.  Le représentant a réaffirmé l’attachement de la Chine aux efforts de développement, estimant notamment que ce n’est qu’avec le développement que l’on pourra s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Il a plaidé pour un consensus mondial et des résultats concrets, donnant l’exemple de ce qu’a fait son pays en reliant des villes de 16 pays d’Asie-Pacifique par voie ferrée.  De plus, ces forums attirent des entreprises du monde entier, s’est enorgueilli le représentant. La Chine, a-t-il assuré, ouvre son marché pour que le monde puisse en tirer parti.  En conclusion, il a défendu une mondialisation ouverte et bénéfique à tous.

M. MAHESH KUMAR (Inde) a préconisé de prendre des mesures pour inverser les tendances « antimondialisation ».  Il faut, a-t-il ainsi recommandé, un multilatéralisme collaboratif et effectif pour gérer les opportunités et les enjeux auxquels le monde fait face collectivement.  La gouvernance mondiale doit refléter les réalités actuelles, a-t-il ajouté, avant d’appeler à créer un environnement économique favorable et un système commercial équitable pour pouvoir réaliser pleinement le potentiel de la mondialisation.  Il nous faut aussi réduire le fossé numérique pour que la quatrième révolution industrielle soit inclusive.  Des changements transformateurs sont nécessaires pour mettre en œuvre le Programme 2030 et réaliser les objectifs de développement durable, a conclu le représentant, qui a appelé l’ONU à organiser des discussions sur les systèmes de valeurs devant guider les efforts dans les domaines liés à la mondialisation.

Mme AYSHA ALMENHALI (Émirats arabes unis) a déclaré que 2019 avait été nommé « Année internationale de la tolérance » aux Émirats arabes unis.  Convaincus de l’importance d’un partenariat efficace aux niveaux régional et international pour réaliser le Programme 2030, les Émirats défendent des valeurs qui rejettent la violence et l’extrémisme, et s’attachent à préserver les sites religieux historiques.  La représentante a vanté l’ouverture d’esprit de son pays et a fait valoir qu’il rénove des minarets et des églises en zones de conflit.

Engagés dans les TIC, les Émirats veulent renforcer les initiatives dans le domaine de la révolution technologique, le tout sans que personne ne soit laissé de côté.  Ils travaillent actuellement sur un projet de satellite collaboratif en partenariat avec d’autres États arabes, premier projet du genre, a signalé la représentante.  Enfin, elle a dit que son pays allait organiser une exposition en 2020 sur l’intelligence artificielle, avec la participation de 4 000 décideurs, dirigeants et groupes de réflexion.

Selon Mme OUMIA PABA SALE (Cameroun), pour tirer pleinement parti du potentiel de la mondialisation, il faudra relever les défis qui se posent en termes d’immigration, de réduction des inégalités, de paix et sécurité.  Reconnaissant que la mondialisation pourrait être un levier pour l’éradication de la pauvreté mais, la représentante a prévenu qu’il faudrait faire preuve d’audace en réformant pour de bon l’architecture de la gouvernance mondiale avec un système commercial multilatéral actualisé, renforcé, ouvert, transparent et équitable, dans le cadre des règles de l’OMC.

Le Cameroun, qui soutient le Pacte de Marrakech, note avec satisfaction que la pénétration rapide des technologies mobiles contribue à créer des emplois, à réduire la faim et à rendre le monde plus durable.  C’est pourquoi il plaide pour la mise en œuvre d’infrastructures numériques abordables dans les pays en développement.  L’informatique en nuage, les réseaux sociaux, les cyberattaques mettent à rude épreuve les réglementations nationales, a-t-elle cependant noté.  C’est pourquoi le Cameroun a exhorté la communauté internationale à se pencher sur les questions de la cybersécurité dans tous les pays, y compris les pays en développement.  Enfin, Mme Paba Sale a condamné les flux financiers illicites, la propagation des « fake news », la criminalité transnationale et la circulation des déchets polluants.  Elle a réaffirmé sa volonté de refonte du système des Nations Unies pour le développement, conformément à la résolution des Nations Unies A/72/279.

M. KALDEN DORJI (Bhoutan) a dit que, malgré les bénéfices de la mondialisation, il est inquiétant de voir le fossé qui ne cesse de s’agrandir entre les possibilités qu’elle offre et les gains réels pour des millions de gens pris dans « le piège de la pauvreté, de la peur, de l’anxiété et du désespoir » à cause des conséquences négatives du phénomène.  Il faut donc au plus vite adopter de nouvelles approches qui s’appuient sur les impératifs du partage des responsabilités et de la promesse de ne laisser personne à la traîne, a recommandé M. Dorji, en demandant à l’ONU de jouer les premiers rôles.  Le représentant a expliqué que les défis auxquels le monde fait face sont nombreux et multidimensionnels, ce qui les rend difficiles à régler par un seul État.  Paradoxalement, il a souligné que le multilatéralisme est remis en cause alors même qu’on en a le plus besoin en ce moment.

Guidé par la philosophie du bonheur national brut, le Bhoutan a toujours fait attention à préserver l’équilibre entre la croissance économique, le développement social, la durabilité environnementale et la préservation culturelle, a dit le représentant.  Il a insisté sur le rôle de la culture dans la perspective de réaliser un développement qui soit durable et pour contrecarrer les effets déstabilisants de la mondialisation.

M. WADE HENCKERT (Namibie) a déploré l’accession de son pays à la catégorie des pays à revenu intermédiaire « qui est utilisée pour lui refuser des financements concessionnels nécessaires pour son développement ».  Le représentant a demandé la révision des critères utilisés pour classifier les pays en recourant à ceux utilisés par le Comité des politiques de développement qui sont le revenu, l’indice du capital humain, et l’indice de vulnérabilité économique.  Il a fait savoir que les changements climatiques ont un effet déterminant sur la productivité en Namibie, et que cela affecte donc sa vulnérabilité économique.

Les pays vulnérables aux changements climatiques ont besoin de financement pour atténuer les impacts et développer leurs capacités d’adaptation, a-t-il ajouté.  M. Henckert a demandé aux partenaires de développement d’intensifier les efforts et de respecter leurs engagements en matière de financement climatique, conformément à l’Accord de Paris sur le climat et le principe des responsabilités communes mais différenciées.  Il a souligné la nécessité de soutenir le Fonds vert pour le climat et le Fonds pour la neutralité en matière de la dégradation des terres.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a annoncé que son pays avait créé un secrétariat à l’innovation, qui concentrera son travail sur la modernisation de l’État, la formation de personnel ainsi que la mise en place de politiques mettant l’accent sur le développement et l’innovation.  Il est également en train d’élaborer un programme pour la transformation numérique du pays sur les 10 prochaines années, qui est nécessaire à la compétitivité dans le cadre de la quatrième révolution industrielle.  En outre, El Salvador souhaite que l’utilisation des technologies se transforme aussi en moyen de réduire les inégalités.  À cet égard, la représentante a souligné l’importance de la coopération internationale et du transfert de technologie orienté vers des résultats concrets et centrés sur les personnes en matière de développement durable.

À propos de coopération, elle a fait part de sa préoccupation quant à la classification des pays par groupe de revenu, qui est basée sur le seul indicateur de revenu par habitant, sans tenir compte d’autres éléments tels que les inégalités sociales et les vulnérabilités territoriales ou les changements climatiques.  En effet, si les pays à revenu intermédiaire tels que El Salvador ont fait des progrès économiques, ils restent confrontés à d’autres défis spécifiques pour lesquels la coopération internationale peut jouer un grand rôle.

Mme PRATHAMA UPRETY (Népal) a noté qu’il y a un déséquilibre dans le partage des bénéfices de la mondialisation au sein et entre les nations.  Elle a noté que les deux catalyseurs majeurs de la mondialisation, le commerce et la technologie, connaissent des moments particuliers de nos jours.  Ainsi, nous vivons des tensions commerciales entre les plus grandes économies au monde, ce qui crée des incertitudes et perturbe les chaînes de valeurs, a-t-elle constaté.  Dans un monde interconnecté, a-t-elle relevé, une telle situation a des ramifications à grande échelle.

En ce qui concerne les technologies, les bénéfices de celles-ci ne vont pas à tous de manière équitable, a regretté Mme Uprety.  Alors que la fracture numérique s’accroît, les pays en développement, notamment les PMA, n’arrivent pas à s’adapter aux nouveaux modes de production et de consommation.  Il faut donc des réformes de la gouvernance mondiale et de l’architecture financière internationale de toute urgence, afin de faire que la mondialisation soit véritablement globale, a plaidé la représentante.  Parmi les mesures avancées par le Népal, elle a cité le transfert de technologie en faveur des pays en développement, les investissements dans des infrastructures de connectivité telles que les routes, les voies ferrées, les voies fluviales et les réseaux de transmission.  La déléguée a terminé son propos en affirmant que la mobilité des personnes est un aspect crucial de la mondialisation, et c’est également un courant majeur de notre temps.

Mgr FREDRICK HANSON, observateur du Saint-Siège, a cité le pape François pour qui « la dimension globale doit être prise en compte sans jamais perdre de vue le niveau local ».  Pour parvenir à un tel équilibre, la mondialisation doit s’appuyer sur la dignité inhérente à chaque personne et sur la reconnaissance de la solidarité nécessaire et réelle entre les individus et les peuples, a poursuivi l’observateur.  D’autre part, a-t-il ajouté, la mondialisation est nuisible lorsqu’elle se manifeste, par exemple, par des actions unilatérales en réponse à des défis internationaux, des politiques partisanes ou nationalistes étroites qui excluent et aliènent, la domination du puissant sur le faible, ou encore l’imposition de la volonté et des idéologies des nantis sur ceux qui sont démunis.

Le fait de ne pas reconnaître que la communauté internationale est une famille de nations partageant un même destin et une maison commune est au cœur des nombreux défis auxquels le multilatéralisme est confronté aujourd’hui, a expliqué le représentant, en soulignant que les conséquences les plus dévastatrices de cette mondialisation négative se font sentir dans les pays les plus défavorisés et dans les secteurs de population les plus faibles.  Il a donc prôné une coopération multilatérale plus efficace pour faire face à ces impacts négatifs et promouvoir le bien commun de tous dans un monde encore plus interconnecté.

Pour Mme CLAUDIA LINKE-HEEP, de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), mettre en perspective les opportunités résultant de la quatrième révolution industrielle est important pour les pays à revenu intermédiaire car cela renforcerait leurs capacités institutionnelles, financières et technologiques à soutenir la croissance et à éviter le « piège du revenu intermédiaire ».  L’industrialisation inclusive et durable est essentielle pour aider ces pays à dépasser leurs propres problèmes, dont la modernisation industrielle, a expliqué la représentante.

L’ONUDI soutient cette catégorie de pays dans trois domaines fondamentaux.  Elle les aide à surmonter la fracture technologique entre pays développés et pays en développement par le transfert et l’adaptation de nouvelles technologies au niveau multisectoriel.  Deuxièmement, elle encourage le capital humain en élargissant les plateformes visant à renforcer le développement de compétences industrielles, en particulier pour les jeunes et les femmes.  Troisièmement, elle aide les pays à revenu intermédiaire à réaliser une transformation industrielle verte par la mise en place de technologie bas-carbone et de système circulaires, l’adoption d’une gestion des déchets circulaire et des modèles d’affaires fondés sur les complémentarités et les synergies propices à renforcer la productivité.   Garantir le développement industriel inclusif et durable contribue à réduire les inégalités entre et au sein des pays, a assuré la représentante.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: Élection de 14 États au Conseil des droits de l’homme et nomination de la Sénégalaise Fatoumata Ndiaye à la tête des services de contrôle interne

Soixante-quatorzième session,
17e séance – matin
AG/12204

Assemblée générale: Élection de 14 États au Conseil des droits de l’homme et nomination de la Sénégalaise Fatoumata Ndiaye à la tête des services de contrôle interne

L’Assemblée générale a élu, aujourd’hui à bulletin secret, 14 membres du Conseil des droits de l’homme pour pourvoir les sièges qui deviendront vacants le 31 décembre 2019.  L’Assemblée a par ailleurs nommé, sur recommandation du Secrétaire général de l’ONU*, Mme Fatoumata Ndiaye, du Sénégal, Secrétaire générale adjointe aux services de contrôle interne, pour un mandat de cinq ans allant du 25 octobre 2019 au 24 octobre 2024.

Le Conseil des droits de l’homme, qui siège à Genève et tient trois sessions ordinaires annuelles, est composé de 47 États élus directement et individuellement à bulletin secret, selon le principe de répartition géographique équitable, à la majorité de 97 voix des membres de l’Assemblée générale.  Ils siègent pour un mandat de trois ans et sont rééligibles une fois. 

Ce matin, la Namibie (175 voix), le Soudan (175 voix), la Mauritanie (172 voix) et la Libye (168 voix) ont été élus pour pourvoir les quatre sièges vacants du Groupe des États d’Afrique. 

Pour le Groupe des États d’Asie-Pacifique, l’Indonésie (174 voix), le Japon (165 voix), la République de Corée (165 voix) et les Îles Marshall (123 voix) ont gagné leur place au Conseil des droits de l’homme.  L’Allemagne (174 voix) et les Pays-Bas (172 voix) ont été élus aux deux sièges vacants du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États. 

Les deux sièges du Groupe des États d’Europe orientale sont allés à l’Arménie (144 voix) et à la Pologne (124 voix).  Pour ceux du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes, le Brésil, réélu avec 153 voix, siègera avec un nouveau venu, le Venezuela qui a battu le Costa Rica avec 105 voix contre 96 voix.  L’élection du Venezuela a d’ailleurs été accueilli par les applaudissements d’une partie de l’hémicycle. 

Les États élus au Conseil des droits de l’homme doivent observer les normes les plus strictes en matière de promotion et de défense des droits de l’homme, coopérer pleinement avec le Conseil, et se soumettre à la procédure d’examen périodique universel au cours de leur mandat.  À la majorité des deux tiers des membres présents et votants, l’Assemblée générale peut suspendre le droit de siéger au Conseil d’un membre qui aurait commis des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme.

Les pays sortants, le 31 décembre 2019, sont l’Afrique du Sud, l’Arabie saoudite, la Chine, la Croatie, Cuba, l’Égypte, la Hongrie, l’Islande, l’Iraq, le Japon, le Rwanda, la Tunisie et le Royaume-Uni. 

Quant au Bureau des services de contrôle interne (BSCI), sa nouvelle Chef, Mme Fatoumata Ndiaye, apporte avec elle une expérience de plus de 24 ans dans l’audit, les investigations et l’évaluation, conjuguée à de réelles connaissances dans la supervision et la coordination des ressources humaines, des finances, du budget, de la technologie de l’information, des services administratifs et des opérations. 

L’Assemblée générale tiendra sa prochaine séance plénière, mardi 22 octobre à partir de 10 heures, pour examiner les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et de la Décennie 2001-2010 pour faire reculer le paludisme. 

* A/74/488

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen: les membres du Conseil de sécurité saluent la désescalade mais exigent le respect des accords conclus pour alléger les souffrances

8642e séance – matin
CS/13990

Yémen: les membres du Conseil de sécurité saluent la désescalade mais exigent le respect des accords conclus pour alléger les souffrances

Les membres du Conseil de sécurité ont salué, ce matin, les premières « lueurs d’espoir » apparues au Yémen, notamment avec la désescalade dans le Sud. Mais ils ont aussi constaté la fragilité de cette évolution et le caractère « catastrophique » de la situation humanitaire, ce qui les a amenés à demander que soit conclu un véritable accord de paix global, afin d’alléger les souffrances de la population.

Présentant par visioconférence depuis Riyad un état des lieux, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Martin Griffiths, a parlé d’un calme relatif à Aden et d’une absence notable de combats intenses dans les zones de conflit, grâce à « la retenue des belligérants » sur le terrain.

M. Griffiths a en particulier salué les efforts diplomatiques de l’Arabie saoudite, qui parraine les pourparlers de Djedda entre le Gouvernement du Yémen et le Conseil de transition du Sud, région où l’agitation risquait depuis l’été d’ajouter à la guerre civile qui oppose le Gouvernement et les milices houtistes depuis cinq ans.  L’Envoyé spécial a souligné l’importance d’un accord rapide entre les deux parties, afin de rétablir la souveraineté du Gouvernement à Aden et le fonctionnement des institutions étatiques sur l’ensemble du territoire.  « Il existe des possibilités qu’il faudra saisir, mais les défis persistent » a-t-il conclu, en souhaitant pouvoir exposer « davantage de raisons d’espérer » lors de son prochain compte-rendu.   

Les réunions organisées en septembre avec les parties yéménites, en marge de l’Assemblée générale, par les membres permanents du Conseil ainsi que l’Allemagne, le Koweït et la Suède, ont déjà permis de lever certains obstacles à la discussion.  Mais la confiance est indispensable pour que l’accord sur la démilitarisation du port d’Hodeïda soit pleinement mis en œuvre, a notamment prévenu M. Griffiths.

« Cette lueur d’espoir, nous souhaitons qu’elle se cristallise mais nous n’y sommes pas encore », a appuyé la représentante du Royaume-Uni.  « Les représentants du Sud doivent être associés au Gouvernement pour enclencher un cercle vertueux » a-t-elle estimé, en saluant également, comme beaucoup d’autres intervenants, l’action facilitatrice de l’Arabie saoudite.

Concernant le conflit entre le Gouvernement et les houtistes, plusieurs  membres du Conseil ont jugé essentiel de mettre pleinement en œuvre les accords déjà conclus, regroupés principalement dans l’Accord de Stockholm de décembre dernier, approuvé par le Conseil dans sa résolution 2451 (2018), accords qui ont déjà contribué à réduire les violences.  Pourtant, la représentante du Royaume-Uni s’est dite très inquiète de l’intensification des attaques des houthistes contre l’Arabie saoudite ces derniers mois, alors que ses homologues de la France et de l’Allemagne saluaient l’annonce, le 20 septembre, par ces mêmes houthistes, de l’arrêt de leurs frappes.

Les membres du Conseil sont toutefois apparus d’accord pour dire qu’il fallait aller au-delà des engagements actuels.  Seul un accord de paix global permettra de mettre durablement fin aux souffrances de la population yéménite, ont-ils reconnu, en accord avec le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock . 

En dépit de la relative baisse de tension, 30 lignes de front sont actuellement ouvertes au Yémen a rappelé M. Lowcock, qui a cité le chiffre de 13 civils tués chaque jour en moyenne en septembre, soit le mois le plus meurtrier pour les civils depuis le début de l’année.  Pour lui, les belligérants doivent impérativement honorer leurs obligations au titre du droit international humanitaire.  Pour accéder aux populations, le défi est permanent, « en particulier au nord » a-t-il insisté, en évoquant le spectre de la famine et un risque élevé de choléra faute d’hygiène.

« Treize morts par jour ce n’est pas acceptable », ont renchéri les États-Unis, qui se sont présentés comme le principal bailleur de fonds du Yémen, avec plus de 2 milliards de dollars depuis 2015.  La hausse brutale du prix du carburant, entrave l’acheminement de l’aide, la délivrance des services d’hygiène de base et de l’eau, ont alerté plusieurs intervenants, notamment les représentants de la Belgique et de la République dominicaine.

En fin de séance, le représentant du Yémen a assuré que son gouvernement s’efforçait de garantir la paix et faisait preuve « d’une grande souplesse » dans la mise en œuvre des accords.  Le Gouvernement est ainsi prêt à déployer des observateurs pour faciliter la désescalade et prévenir les incidents et violations de l’Accord de Stockholm, a-t-il ajouté.  Mais il a demandé à la communauté internationale de garantir l’application des accords conclus, faute de quoi les chances de paix ne peuvent que s’amenuiser.  En effet, a-t-il accusé, « les milices houthistes se nourrissent de la guerre dans le pays , tout comme l’Iran ».

Enfin, avec le Royaume-Uni, le représentant yéménite a mis en garde contre le risque de marée noire de grande ampleur lié à l’abandon du pétrolier Safer en mer Rouge, susceptible de déverser des quantités de pétrole « quatre fois supérieures à celle de la marée noire de l’Exxon Mobil dans les années 90 » en Alaska, a-t-il précisé. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a rappelé les cinq priorités définies par l’ONU pour répondre à la situation au Yémen: la protection des civils, l’accès humanitaire, le financement des opérations de secours, le soutien à l’économie et la recherche d’une solution politique. 

Sur le premier point, M. Lowcock a donné le chiffre effroyable de 13 morts en moyenne par jour au cours du mois de septembre, soit le mois le plus meurtrier pour les civils depuis le début de l’année.  Rappelant que 30 lignes de front étaient actuellement ouvertes au Yémen, il a renouvelé les appels de l’Organisation à un cessez-le-feu national immédiat, toutes les parties au conflit devant honorer instamment leurs obligations au titre du droit international humanitaire en protégeant les civils et les infrastructures civiles. 

M. Lowcock a également souligné le défi permanent que représente l’accès humanitaire à travers le pays, en particulier dans le nord, tant sont nombreuses les restrictions de déplacements imposées par les autorités du mouvement Ansar Allah.  Il a déploré que l’accès ait été rendu impossible par ces dernières dans les zones touchées par de récentes inondations ayant affecté plus de 12 000 familles des localités de Hajjah et Hodeïda. 

M. Lowcock a ensuite abordé la situation dans le sud du pays où, a-t-il salué, progressent les pourparlers entre le Gouvernement et le Conseil de transition du Sud, les parties étant conscientes qu’une reprise des hostilités dans la région impacterait les populations civiles et la conduite des opérations humanitaires.  Or, a-t-il noté, plusieurs organisations ont récemment suspendu leurs programmes dans des zones d’Abiyan et de Chaboua en raison d’affrontements. 

Pour ce qui est du financement de l’aide humanitaire, le Coordonnateur des secours d’urgence a reconnu que nombre d’agences avaient encore le plus grand mal à mobiliser les fonds nécessaires à leur bon fonctionnement.  Il a néanmoins salué les contributions effectuées en marge du débat général de l’Assemblée générale par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Koweït, qui ont alloué respectivement 550, 200 et 88 millions de dollars aux différents dispositifs humanitaires onusiens.  M. Lowcock a précisé que le plan d’aide était désormais financé à hauteur de 65%. 

Abordant le volet économique de la situation au Yémen, M. Lowcock a expliqué que, parce que le pays importe à peu près la totalité de ses biens, les prix avaient plus que doublé depuis l’effondrement de l’économie nationale l’an dernier.  « Les biens de consommation les plus élémentaires sont de fait hors de prix pour des millions de personnes, au point que celles-ci ne sont pas en mesure d’acheter la nourriture vendue sur les marchés », a-t-il précisé.  S’il a salué les efforts du Gouvernement pour stabiliser le taux de change, payer davantage de fonctionnaires et consolider l’économie, il a retenu que ceux-ci ne pourraient suffire à lever l’obstacle majeur que constitue le manque de devises étrangères.  « J’appelle les partenaires du Yémen à injecter de manière régulière des devises étrangères de façon à stabiliser le taux de change sur la durée et permettre ce faisant une baisse durable des prix de la nourriture et d’autres marchandises, notamment le carburant », a lancé M. Lowcock. 

À propos précisément du carburant, le Secrétaire général adjoint a signalé que les prix excessifs du carburant sapaient l’acheminement de l’aide humanitaire, le fonctionnement des systèmes municipaux de fourniture d’eau et des usines d’assainissement et celui des hôpitaux.  En conclusion, M. Lowcock a déclaré que les fonds reçus récemment au titre du plan d’aide permettraient aux agences humanitaires de maintenir en vie des millions de personnes: « Plus doit être fait pour non seulement réduire les souffrances de ces personnes mais pour y mettre fin », a-t-il dit. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a souligné que la situation dans le sud du pays restait volatile, marquée par un calme relatif à Aden et l’absence notable de combats intenses dans les zones de conflit.  M. Griffiths a voulu voir dans cette évolution le témoignage de la retenue des belligérants sur le terrain.  Saluant les efforts diplomatiques de l’Arabie saoudite qui parraine les pourparlers de Djeddah, il a rappelé l’importance d’un accord rapide entre le Gouvernement du Yémen et le Conseil de transition du Sud: « Il est de la première importance que le Gouvernement retourne à Aden et que les institutions étatiques redeviennent pleinement opérationnelles », a-t-il dit.  

M. Griffiths a jugé que la confiance était indispensable pour que l’Accord sur Hodeïda soit pleinement mis en œuvre et, qu’à cet égard, l’établissement d’un centre d’opération conjointe rattachée à la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda, avait déjà entraîné une réduction significative des violations du cessez-le-feu.  D’autre part, M. Griffiths a salué la libération de 290 détenus par les autorités d’Ansar Allah et l’autorisation du Gouvernement de faire entrer dans Hodeïda des navires transportant du carburant.  « Cette importance décision permettra de répondre aux besoins humanitaires », a-t-il dit. 

Enfin, l’Envoyé spécial a noté que l’évolution de la situation offrait des motifs d’espoir, en souhaitant toutefois que, lors de la prochaine séance d’information du Conseil de sécurité sur le Yémen, les indications positives et les raisons d’espérer soient encore plus franches et nombreuses.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a salué la réduction des violences sur place, tout en estimant qu’un dernier effort était nécessaire.  Sur le plan humanitaire, en dépit des bonnes nouvelles, certains éléments risquent de plonger la population dans la famine: 13 victimes par jour, c’est beaucoup trop, a déclaré la représentante.  Sur le plan politique, elle s’est dite très inquiète de l’intensification des attaques houthistes contre l’Arabie saoudite ces derniers mois.

Cette lueur d’espoir, nous souhaitons qu’elle se cristallise et soit plus visible, mais nous n’y sommes pas encore, a résumé Mme Pierce.  Pour le Royaume-Uni, le Conseil de sécurité doit appeler toutes les parties à tout faire pour franchir cette prochaine étape et doit clairement faire davantage.  Dans le Sud, l’inclusion est la clef de la stabilité: les représentants du Sud doivent être associés au Gouvernement pour enclencher un cercle vertueux.  La représentante a en ce sens salué l’action des Saoudiens, qui ont participé aux pourparlers avec le Conseil de transition du Sud et les dirigeants du mouvement. 

Mme Pierce a mis en garde contre le risque de marée noire, qui dégraderait l’environnement et les capacités de pêche si le pétrolier Safer venait à exploser.  Enfin elle a demandé à chacun de contribuer à l’assistance humanitaire, comme l’a fait son pays, qui a versé 87% de sa contribution. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit se réjouir des signes positifs encourageants en vue de la résolution du conflit dont a fait état M. Griffiths, même si la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm a été lente.  Le Koweït, qui appuie toutes les initiatives visant le règlement définitif de cette guerre, reste disposé à accueillir de nouveau une rencontre visant à parvenir à la paix au Yémen, sur la base des trois paramètres agréés dans la résolution 2216 (2015) et l’Accord de de Stockholm, a dit le représentant. 

Concernant la situation humanitaire, le Koweït reste engagé à alléger la souffrance des populations.  Il a versé 600 millions de dollars au plan de secours humanitaire, dont 350 millions entièrement versés aux organismes de secours.  Pour cette raison, la délégation souligne l’importance de ne pas mettre des entraves à la livraison et acheminement de l’aide humanitaire et des produits pétroliers au port d’Hodeïda, a conclu le représentant. 

Pour M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis), les informations sur l’insécurité alimentaire sont inquiétantes, même avec l’aide des agences humanitaires.  Les États-Unis ont versé 2,2 milliards de dollars depuis 2013 ce qui en fait l’un des plus grands bailleurs au Yémen, a fait observer le représentant.

Mais la seule façon de mettre fin aux souffrances est d’en finir avec la guerre par une solution politique, a poursuivi le représentant.  La mise en œuvre de l’Accord sur Hodeidah ne peut suffire sans une solution plus large.  En même temps, les États-Unis se réjouissent de constater que les discussions entre le Gouvernement du Yémen et le Conseil de transition du Sud ont bien avancé.  Ils espèrent que ces discussions permettront aux Nations Unies d’avancer vers un accord d’ensemble.  L’heure est venue d’agir de manière concrète, a conclu le représentant.

M. NICOLAS DE RIVIÉRE (France) a jugé la situation humanitaire au Yémen « catastrophique » et estimé que la réponse du Conseil devait être à la hauteur.  La protection des civils et des personnels humanitaires et celle des infrastructures civiles doivent être une priorité absolue.  Tout doit être fait pour garantir un accès humanitaire immédiat, sûr et sans entrave, a-t-il insisté, dénonçant les restrictions croissantes imposées par les houthistes et appelant à verser les contributions nécessaires sans délais.

Seule une solution politique permettra de mettre durablement fin aux souffrances de la population yéménite et elle doit intervenir au plus vite, a rappelé le représentant, qui a demandé aux parties de rechercher une telle solution le plus rapidement et activement possible.  Il a déploré que l’Accord sur Hodeïda ne soit pas entièrement mis en œuvre.  Il a en revanche salué l’annonce faite par les houthistes le 20 septembre de l’arrêt de leurs frappes et la désescalade qui s’en est ensuivie. 

M. de Rivière a dit redouter que les affrontements au Sud n’ouvrent un nouveau front.  Il a salué les progrès permis par le dialogue de Djeddah lancé à l’initiative de l’Arabie saoudite.  Il a souhaité qu’un accord, jugé imminent, aboutisse effectivement au plus vite.

Mme BERIOSKA ILUMINADA MORRISON GONZÁLEZ (République dominicaine) a dit espérer que les négociations en vue d’aboutir à l’ouverture de couloirs humanitaires aboutiront rapidement, afin de soulager les souffrances de la population.  Elle s’est dite encouragée que l’Accord sur Hodeïda reste en vigueur mais s’est inquiétée que la démarcation des zones minées ne soit pas encore achevée, alors qu’elle est indispensable à la facilitation d’un accès humanitaire effectif et à la reprise de l’activité économique, surtout dans les ports.  La représentante s’est notamment inquiétée de l’augmentation brutale du prix du carburant, à Sanaa et ailleurs, qui entrave le fonctionnement des services de base, y compris des hôpitaux, et renchérit le prix des aliments. 

Au-delà du conflit, le sous-développement continue de priver des millions d’enfants d’éducation et d’espoir, a ajouté Mme Morrison González, qui a insisté sur l’urgence absolue de verser les contributions nécessaires au plan de réponse humanitaire, de façon qu’il bénéficie de financements suffisants et prévisibles.  Ce n’est de toute façon que par la voie politique qu’il pourra être mis fin à ce conflit, a conclu la représentante. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a jugé que l’initiative lancée à Djeddah était « louable ».  Avec l’annonce de la cessation des attaques contre l’Arabie saoudite, il est à espérer que ces initiatives conduisent à la paix, car cette crise n’a pas d’issue militaire, a poursuivi le représentant, ajoutant qu’il était important de respecter et de mettre en œuvre l’Accord de Stockholm.

M. Nebenzia a également estimé que la meilleure manière de résoudre la question humanitaire était de parvenir à la conclusion d’un accord de paix général qui aurait pour effet de restaurer la paix et la confiance de manière globale dans la région.

M. PAUL DUCLOS (Pérou) a estimé que les informations fournies par MM. Lowcock et Griffiths, ainsi que celles récoltées auprès des organisations de la société civile et des organismes des Nations Unies, permettaient d’appréhender la situation de manière équilibrée et objective.  De plus, l’Envoyé spécial a fait état de signes positifs qui peuvent aboutir à des progrès tangibles vers une paix durable au Yémen, s’est réjoui le représentant, citant la décision unilatérale de Ansar Allah de libérer les prisonniers et de cesser ses attaques sur le territoire saoudien.  Le Pérou attend, de même que les membres de la Coalition internationale dirigée par l’Arabie saoudite intervenant au Yémen, une réponse aux demandes de la communauté internationale, car il est important de réduire les tensions sur le terrain.  À cet égard, le Pérou salue les bons offices déployés par l’Arabie saoudite et espère que ces efforts aboutiront à un accord permettant de consolider les institutions yéménites et de garantir l’intégrité territoriale du pays. 

M. JUN ZHANG (Chine) a salué la médiation de l’Arabie saoudite qui a permis des pourparlers entre le Gouvernement et le Conseil de transition du Sud: il est essentiel que les parties continuent de discuter dans l’intérêt de leurs populations, dans le respect de la souveraineté et de l’indépendance du Yémen, a-t-il estimé. 

Il est essentiel aussi de mettre en œuvre les accords déjà conclus comme l’Accord sur Hodeïda qui a contribué à réduire les violences, a poursuivi M. Zhang.  Il faut de même saluer les progrès réalisés dans le déminage et la gestion des ports, essentiels à la reprise de l’activité économique et à la livraison de l’aide humanitaire.  Le représentant a appelé l’Envoyé spécial à conserver le lien établi avec toutes les parties pour jeter les bases d’un accord solide.  Il a conclu en regrettant que la situation humanitaire ne cesse de se dégrader, avec un risque de famine et de choléra.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a dit se réjouir du bon fonctionnement du mécanisme de désescalade et du Centre des opérations conjointes.  Mais la Belgique appelle les parties à mettre en œuvre entièrement l’Accord de Stockholm, soit l’accord concernant le port d’Hodeïda, mais aussi la libération de tous les prisonniers et les mesures concernant la ville de Taïz. 

Le Représentant a également estimé que les prochaines étapes du processus politique devaient être inclusives, avec une participation significative des femmes et des jeunes.  Dans ce contexte, la Belgique salue les pourparlers organisés par l’Arabie saoudite à Djeddah visant à trouver une solution à la situation dans le sud du pays.

Dans un autre domaine, la Belgique reste préoccupée par la crise humanitaire et l’impact des pénuries de carburant.  Elle exhorte donc les parties à faciliter l’accès de l’aide humanitaire et à respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme.  Elle les appelle aussi à cesser toutes les hostilités dans l’ensemble du pays et à protéger les enfants de la violence.

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a regretté qu’ en dépit d’une position unifiée du Conseil de sécurité selon laquelle le conflit au Yémen ne peut être résolu militairement, la violence se poursuive sans interruption dans divers provinces du pays.  Il a exhorté toutes les parties au conflit à faire de la protection des civils une priorité et à respecter au niveau national un cessez-le-feu afin de prévenir des déplacements de population, des pertes humaines et des dégâts aux infrastructures supplémentaires.  En outre, toutes les restrictions sur les flux d’aide et d’importation d’articles humanitaires doivent cesser, a exhorté le représentant.

M. Lewicki s’est toutefois félicité des développements positifs survenus depuis la dernière séance du Conseil de sécurité à ce sujet, dans la libération unilatérale de détenus par Ansar Allah.  « Nous espérons que toutes les parties s’appuieront sur cet élément pour parvenir à des progrès tangibles » sur la mise en œuvre de la partie de l’Accord de Stockholm concernant l’échange de prisonniers », a déclaré le représentant, qui s’est également félicité de l’engagement financier de l’Arabie saoudite, qui permettra aux agences humanitaires de continuer à fournir une assistance cruciale.

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a d’abord exprimé sa vive préoccupation face à l’ampleur de la détérioration continue de la situation humanitaire au Yémen, « qui fait craindre une menace de famine généralisée ».  Il a également dit redouter que, comme l’indique le rapport du Secrétaire général, un conflit prolongé au Yémen puisse faire de ce pays le plus pauvre du monde, avec près de 80% de la population vivant sous le seuil de pauvreté, dont 65% dans une pauvreté extrême. 

Le représentant a estimé que seul un dialogue inclusif, avec l’appui des acteurs régionaux et internationaux, permettrait de trouver une issue pacifique et durable à la crise yéménite.  Il a ainsi salué l’adoption de la Déclaration présidentielle du 29 août 2019 appuyant les actions de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Martin Griffiths, visant à relancer les négociations globales.  Après avoir appelé le Conseil de sécurité à poursuivre les efforts en vue d’assurer le succès des pourparlers de Djeddah, le représentant a exhorté les belligérants à appliquer sans réserve l’Accord de Stockholm, dont la partie relative au redéploiement des forces militaires des ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa.  Il a répété que le conflit pouvait être résolu par le dialogue inclusif parce qu’« ouvert à la participation des populations du Sud, des femmes et de la société civile ».  

Mme AMPARO MELE COLIFA (Guinée équatoriale) s’est inquiétée que les progrès tant attendus dans le cadre de l’Accord de Stockholm ne soient pas au rendez-vous, ainsi que de la tournure qu’a pris le conflit ces derniers mois.  La représentante n’en a pas moins reconnu les efforts inlassables de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, du Comité de coordination du redéploiement et des Nations Unies.  Elle a aussi estimé que le niveau de collaboration entre les différentes parties avait permis d’avancer.  Elle a ainsi salué le « résultat positif » produit par le comité de coordination en juillet et septembre, qui a permis l’accord sur les ports et l’activation du mécanisme d’action tripartite sur le cessez le feu.  Mais il est important que ces accords se traduisent concrètement sur le terrain, a fait observer Mme Mele Colifa.

L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont manifesté la volonté de faciliter un dialogue entre les parties yéménites, a rappelé Mme Mele Colifa, qui a souhaité que cette initiative contribue aux efforts des Nations Unies.

La représentante a aussi cité un rapport des Nations Unies sur les droits de l’homme citant une série d’atrocités constitutives de crimes de guerre: elle a appelé les parties au conflit à veiller au respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et à trouver une solution politique pérenne pour sortir du « cauchemar » en cours depuis cinq ans.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a salué les progrès enregistrés ces derniers mois, notamment la libération des prisonniers, l’annonce de la cessation d’attaques contre l’Arabie saoudite ou encore les pourparlers lancés à Djeddah.  Ce sont des mesures de nature à restaurer la confiance, a estimé le représentant, ajoutant qu’il faudrait maintenant progresser vers un accord plus global de paix.  L’Allemagne qui déplore le manque de progrès dans la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, reste engagée à jouer le rôle qui est le sien, a dit son représentant.

Le représentant a jugé « glaçante » la situation humanitaire et dénoncé les entraves imposées à l’accès de l’aide.  Aujourd’hui, cinq millions de personnes en sont privées, a-t-il déploré, saluant toutefois les contributions de l’Arabie saoudite.  Dans ce contexte, M. Schulz a appelé les parties à faciliter l’accès aux populations dans le besoin de l’aide et des travailleurs humanitaires.

M. ROLLIANSYAH SOEMIRAT (Indonésie) a déclaré qu’améliorer la sécurité et accélérer la désescalade devaient constituer la priorité au Yémen.  C’est pourquoi l’Indonésie se réjouit des signes positifs allant dans ce sens, y compris les développements positifs survenus à Aden et la réduction de la violence dans le sud du pays.  L’autre priorité doit être la reprise des pourparlers de paix avant la fin de cette année.  Et à cette fin, le Gouvernement du Yémen, les milices houthistes, de même que les autres parties prenantes, doivent reprendre le dialogue dans le but de s’engager dans une cessation plus large des hostilités et pour mettre un terme au conflit.

Par ailleurs, la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm doit se poursuivre, avec l’application intégrale de l’Accord sur Hodeïda.  À cet égard, l’Indonésie salue l’activation du mécanisme tripartite d’amélioration du cessez-le-feu et de désescalade.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du sud) a demandé aux parties au conflit d’œuvrer pour la désescalade et de s’engager pleinement dans la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm.  Tous les pays qui ont une influence sur ces parties doivent les exhorter au dialogue, a-t-il dit.

Le représentant a déploré que la situation humanitaire ne cesse de s’aggraver, affirmant que 80% de la population, soit 24 millions de personnes, avaient besoin d’aide et de protection humanitaires sous une forme ou une autre. Parmi cette population, il faut compter que les deux tiers sont déjà dans une situation de préfamine et que 85 000 enfants de moins de 5 ans sont déjà morts de faim, a jouté le représentant.

M. Matjila a rappelé que, selon l’UNICEF, deux millions d’enfants ne vont plus à l’école et que 2 500 garçons ont rejoint les groupes de combattants, tandis que plus de la moitié des filles yéménites ont été mariées de force.  Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme estime quant à lui que, depuis le début du conflit, presque 7 000 civils ont été tués et 10 000 autres blessés.  Ce conflit a également déplacé des milliers de personne fuyant les combats et privés des millions de personne de nourriture et de médicaments.  Pour ces raisons, l’Afrique du Sud lance à nouveau un appel en faveur d’un accès de l’aide humanitaire.  Elle demande également que les parties prennent toutes les mesures pour respecter leurs obligations au titre des Conventions de Genève.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a assuré que son gouvernement s’efforçait de garantir la paix et de mettre fin aux souffrances de la population, faisant preuve d’une grande souplesse dans la mise en œuvre des accords et acceptant les suggestions de M. Griffiths.  Mais les milices houthistes se nourrissent de la guerre dans le pays, tout comme l’Iran qui les appuie et finance leurs activités de déstabilisation dans la région, a-t-il accusé.  Le représentant a insisté sur l’importance de l’Accord de Stockholm, qui doit être pleinement mis en œuvre car il permettrait alors d’alléger les souffrances du peuple.  Il a salué les efforts du Comité pour le redéploiement.

Conformément aux accords conclus à la sixième session du comité,  le Gouvernement s’est dit prêt à déployer des observateurs pour faciliter la désescalade et prévenir les incidents et violations de l’accord, a expliqué le représentant.  Mais il a ajouté que la communauté internationale et le Conseil de sécurité devraient faire davantage pour garantir l’application de l’Accord de Stockholm car, si les accords conclus ne sont pas appliqués, les chances de paix ne peuvent que s’amenuiser.

M. Al-saadi a salué les efforts de l’Arabie saoudite pour faciliter le dialogue en faveur du rétablissement de l’État à Aden et de l’intégrité du territoire yéménite.  L’objectif est de mettre fin aux tentatives de coup d’État lancées par les milices houthistes avec le soutien de l’Iran, a-t-il ajouté.  Les milices houthistes continuent cependant de refuser les propositions pour rouvrir aux vols intérieurs l’aéroport de Sanaa qu’elles occupent, obligeant les gens à emprunter de longs itinéraires, a ainsi dénoncé le représentant.  Les houthistes ont certes libéré des prisonniers mais cela ne suffit pas, a-t-il insisté, affirmant que ces libérations ne devraient pas faire l’objet de conditions.

M. Al-saadi a rappelé que le Gouvernement avait donné accès à 10 navires qui doivent décharger leur cargaison mais a, là encore, insisté sur le rôle « néfaste » des milices houthistes, qu’il a accusées d’entraver l’accès de l’aide humanitaire et d’intimider les personnels humanitaires.  Il a demandé sur ce point des mesures strictes pour garantir le statut des organismes d’aide présents au Yémen.

S’agissant du cas du pétrolier Safer, le représentant a mis en garde contre le risque de catastrophe de grande ampleur, des quantités importantes de pétrole « quatre fois supérieures à celle de la marée noire de l’Exxon Mobil dans les années 90 » étant susceptibles de se déverser.  Il est temps de garantir au Yémen l’établissement d’un État fédéral stable, a conclu M. Al-saadi.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: pour dissiper le « soupçon », les délégations plaident pour une application clarifiée et encadrée du principe de compétence universelle

Soixante-quatorzième session,
15e et 16e séances – matin & après-midi
AG/J/3599

Sixième Commission: pour dissiper le « soupçon », les délégations plaident pour une application clarifiée et encadrée du principe de compétence universelle

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a entendu aujourd’hui des appels insistants pour un encadrement et une clarification du principe de compétence universelle, afin de dissiper le « soupçon » politique qui peut entourer l’application de ce principe, vu, par de nombreuses délégations, comme un instrument important dans la lutte contre l’impunité. 

La trentaine d’orateurs à s’être exprimés aujourd’hui ont, dans leur ensemble, insisté sur la complexité de ce principe et sur les divergences très nettes que son application soulève parmi les États Membres.  « Les règles du droit international sur cette question sont loin d’être établies », a affirmé le délégué de la Chine. 

Ce dernier, à l’instar de nombre de ses collègues, a agité le spectre d’un usage « abusif » de ce principe, susceptible de « déstabiliser les relations internationales ».  « Trop souvent, la compétence universelle est utilisée à des fins politiques plutôt que dans le but de promouvoir l’état de droit », a renchéri la déléguée d’Israël. 

Son homologue du Kenya a vu dans de tels abus « une menace à la paix et à la sécurité internationales », tandis que le représentant du Soudan a rappelé que « l’application de ce principe à l’encontre de hauts responsables qui jouissaient de l’immunité a provoqué de graves crises internationales ».

Les délégations ont suggéré quelques pistes pour prévenir de tels abus, en réclamant tout d’abord des « règles claires », selon le mot du délégué de l’Argentine.  « Le recours à l’application du principe de la compétence universelle doit être rationnel et dicté par un usage judicieux, responsable et conforme au droit international », a déclaré le délégué du Maroc. 

Même son de cloche du côté du délégué de la Thaïlande, qui a indiqué que le principe de compétence universelle doit être fondé sur une base juridique solide, là encore, pour prévenir « les abus ».  « Les crimes transfrontières tels que le terrorisme, la piraterie, la criminalité transnationale organisée et la traite des personnes constituent une telle base juridique », a-t-il précisé. 

Le délégué du Rwanda a rappelé que l’Union africaine a créé une loi type sur la compétence universelle qui constitue un modèle pour son pays et peut être adaptée à ses conditions locales.  Il a en outre souhaité la création d’une instance « de recours » au cas où le dirigeant d’un pays serait inculpé. 

Le délégué de la Slovaquie a, lui, estimé que l’établissement d’une juridiction pénale universelle sous l’égide de la Commission du droit international (CDI) contribuerait à débarrasser la justice internationale de tout « soupçon d’interférence politique ».

De son côté, le délégué britannique a jugé prématuré d’établir une définition ferme et définitive des crimes couverts par la compétence universelle.  Une liste ou une méthodologie précise, a-t-il expliqué, « réduiraient les options des États en matière de compétence juridictionnelle ». 

Son homologue israélienne a réclamé des « lignes directrices », suggérant, par exemple, que les poursuites soient engagées uniquement par les autorités de l’État ayant le « lien juridictionnel le plus proche ».  Son homologue du Kenya a, elle, appelé la CDI à fournir de telles lignes directrices. 

Enfin, les délégations ont affiché certaines divergences sur l’inclusion de la compétence universelle dans le programme de travail à long terme de la CDI.  Si les délégations de la Thaïlande et de l’Argentine s’en sont félicitées, d’autres ont fait part de leur doute, à l’instar du délégué britannique, tandis que le Soudan a jugé une telle inclusion « prématurée ».

La Commission reprendra ses travaux demain, jeudi 17 octobre, à 10 heures. 

PROTECTION DIPLOMATIQUE - A/74/143

Déclaration

M. THABO MICHAEL MOLEFE (Afrique du Sud) a regretté que près de 20 ans après l’adoption des articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, la question d’une convention fasse toujours l’objet de divisions, malgré l’approbation générale de ces articles, ce qui empêche la Sixième Commission d’en traiter le fond et nourrit les réticences des État hésitants envers cette convention.  M. Molefe a ensuite souligné que les questions de la responsabilité de l’État et de la protection diplomatique sont étroitement liées, la seconde étant l’application de la première.  Il a appuyé le travail de la Commission du droit international (CDI) sur la protection diplomatique, mais s’est inquiété de la portée de certains articles comme l’article 19, qui pourrait créer une obligation générale de protection diplomatique et « se muer en droit coutumier ».  Une convention, à son sens, permettrait de clarifier la portée de ces articles. 

PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPETÉNCE UNIVERSELLE A/74/144

Déclarations

M. MATUS KOSUTH (Slovaquie) s’est dit soucieux de débarrasser la justice internationale de tout soupçon d’interférence politique.  En l’absence de cadre réellement universel d’assistance juridique et d’adhésion universelle au Statut de Rome, la compétence universelle demeure la seule garantie contre l’impunité des auteurs de crimes en violation du droit international.  L’élaboration d’une convention sur la prévention et le châtiment des crimes contre l’humanité, telle que recommandée par la Commission du droit international (CDI) ou la conclusion d’un traité sur l’entraide judiciaire ne lèseraient aucunement les autres juridictions: au contraire, elles renforceraient la CDI et se complèteraient mutuellement par la création d’un cadre légal destiné à garantir la reddition de comptes.  L’idée que les crimes les plus graves au regard du droit international ne sauraient rester impunis, quels que soient leurs auteurs et où qu’ils se trouvent, est la raison même d’une stricte application de la compétence universelle au bénéfice de tous.

M. XU CHI (Chine) a rappelé que la question de la portée et de l’application du principe de compétence universelle avait été inscrite à l’ordre du jour de la Commission dans le but de définir ce principe « avec prudence » et de se prémunir contre un usage « abusif » de la compétence universelle, susceptible de « déstabiliser » les relations internationales.  Dans ce cadre, le représentant a mentionné l’existence de différences fondamentales entre États Membres concernant la pratique et l’opinio juris en matière de compétence universelle.  « Les règles du droit international sur cette question sont loin d’être établies », a-t-il affirmé, ajoutant que les justifications invoquées pour avoir recours à la compétence universelle étaient « essentiellement » basées sur le principe aut dedere aut judicare (obligation d’extrader ou de poursuivre) dans les traités et la pratique de la compétence extraterritoriale des États.  Selon lui, les États faisant valoir leur compétence sont d’ores et déjà liés, à des degrés divers, aux personnes et à leurs crimes.  Dans d’autres cas, a-t-il poursuivi, cette compétence est en réalité la compétence des instances judiciaires internationales.  « Aucune d’entre elles ne constitue une véritable compétence universelle et ne saurait être considérée comme une preuve à l’appui de la compétence universelle », a tranché le représentant.

Sur cette base, le délégué chinois a rejeté la pratique de certains États consistant à faire valoir, au nom de la compétence universelle, une compétence extraterritoriale « incompatible avec le droit international en vigueur » et « non communément acceptée », à des fins politiques et de violation de l’immunité.  Dénonçant ces usages « clairement abusifs » de la compétence universelle, M. Xu a estimé qu’il fallait se conformer strictement aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, y compris l’égalité souveraine des États et la non-ingérence dans leurs affaires internes, ainsi que respecter le principe d’immunité, de façon à trouver un équilibre entre la lutte contre l’impunité et le maintien de la stabilité des relations internationales.

M. ZUKAL (République tchèque) a estimé que la compétence universelle était un « outil important et utile » pour traduire en justice les auteurs de crimes graves du point de vue du droit international.  À ses yeux, la lutte contre l’impunité pour ces crimes qui « choquent la conscience de la communauté internationale » et le déni de refuge pour leurs auteurs se justifient par le fait que les crimes en question « violent les valeurs universelles ».  Le représentant a ainsi affirmé que la compétence universelle était un principe « communément admis » du droit international.  « Nous sommes d’avis qu’en définir la portée et l’application est une question purement juridique qui ne devrait pas être assortie de considérations politiques évitables », a-t-il estimé. 

Le représentant a toutefois reconnu l’existence de différences entre États Membres, notamment en ce qui concerne la nature coutumière de la compétence universelle et les procès par contumace.  Il a appelé à faire avancer le débat pour clarifier la portée et l’application de la compétence universelle, en référant le sujet à un corps d’experts indépendant et apolitique tel que la Commission du droit international (CDI), qui permettrait selon lui de sortir de l’impasse actuelle. 

M. ALEJANDRO GUILLERMO VERDIER (Argentine) a affirmé que la compétence universelle est « un outil exceptionnel et subsidiaire » qui est utilisé en conformité avec le droit international quand l’État où a eu lieu le crime ne peut pas ou ne veut pas exercer sa compétence.  Il a expliqué que la compétence universelle nécessite des règles claires car une compétence sans limite peut provoquer des conflits entre États, notamment si des individus sont soumis à des abus de procédure ou à des poursuites politiquement motivées.  Il s’est félicité en conclusion de l’inclusion du sujet dans le programme de travail à long terme de la Commission du droit international (CDI). 

Mme SARAH GOLDIE WEISS (Israël) a insisté sur les divergences de vues qui entourent la portée et l’application du principe de compétence universelle.  Il est préférable que les États continuent de débattre de ce sujet au sein de la Sixième Commission, qui suit la règle du consensus, plutôt que la Commission du droit international (CDI), a-t-elle dit.  « La décision de la CDI d’inclure ce point à son programme à long terme est prématurée et contreproductive. »  La représentante a insisté sur la complexité de ce point et la difficulté de disposer dans ce domaine d’une pratique des États suffisante.  La vaste majorité des affaires dans ce domaine sont en effet confidentielles et inaccessibles au public, a-t-elle noté.  Elle a rappelé la nature subsidiaire de ce principe.  Trop souvent, « la compétence universelle est utilisée à des fins politiques plutôt que dans le but de promouvoir l’état de droit », a estimé la déléguée.  Elle a plaidé pour un certain nombre de « lignes directrices » dans ce domaine, suggérant, par exemple, que les poursuites soient engagées uniquement par les autorités de l’État avec le « lien juridictionnel le plus proche ».

M. PHILIP DIXON (Royaume-Uni) a insisté sur la distinction entre la compétence universelle et la compétence de mécanismes internationaux comme la Cour pénale internationale (CPI) établis par traité, ou la compétence extraterritoriale de tribunaux nationaux, par exemple pour la conduite de leurs ressortissants à l’étranger.  Il a rappelé les contraintes liées à l’usage de la compétence universelle, en raison de la primauté de la compétence des États sur leur territoire, justifiée par des raisons pratiques liées à l’enquête et aux poursuites.  C’est pour cette raison, a-t-il ajouté, que « seul un petit nombre de crimes est soumis à la compétence des tribunaux du Royaume-Uni quand ceux-ci n’ont pas de lien apparent avec notre pays ». 

M. Dixon a noté le manque de consensus international sur la compétence universelle et conclu qu’il serait prématuré d’établir une définition ferme et définitive des crimes couverts par ce principe.  Une liste ou une méthodologie précise, a-t-il expliqué, « réduiraient les options des États en matière de compétence juridictionnelle ».  Il est préférable selon lui que la décision d’appliquer la compétence universelle à un crime particulier fasse l’objet d’une collaboration entre les États.  Le représentant, en conclusion, a rappelé que le Royaume-Uni doute que le sujet doive être traité par la Commission du droit international (CDI). 

M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a indiqué que le principe de compétence universelle ne fait pas l’objet d’un consensus.  « L’application de ce principe à l’encontre de hauts responsables qui jouissent de l’immunité a provoqué et provoquera de graves crises internationales », a-t-il dit.  Il a souligné le manque de clarté, notamment s’agissant des crimes pour lesquels ce principe s’appliquerait.  Au vu de cette « grande incertitude », le représentant du Soudan a insisté sur la nécessité de s’accorder sur des critères clairs, pour éviter une utilisation abusive et politisée de ce principe.  Il a plaidé pour le respect absolu de la souveraineté des États et de leur compétence juridictionnelle.  La compétence universelle est une compétence subsidiaire, a-t-il dit.  Le délégué a rappelé que l’État où le crime a été commis et l’État de nationalité ont la responsabilité d’entamer des poursuites.  Enfin, il a invité « à ne pas se précipiter », jugeant prématurée toute étude de la Commission du droit international (CDI) sur le sujet. 

Selon M. AMMAR AL-ARSAN (République arabe syrienne), l’application par certains gouvernements du principe de compétence universelle démontre des lacunes graves qui peuvent mettre en péril l’ordre international.  Il a estimé que le rapport du Secrétaire général montre une utilisation abusive du principe pour d’autres objectifs et que la Commission du droit international (CDI) ne devrait pas faire figurer cette question sur son programme de travail à long terme.  Pour le représentant syrien, la priorité est de préserver le droit de la politique en rejetant la tentative par certains gouvernements d’élargir la compétence universelle au mépris de la souveraineté de la Syrie. 

À ce titre, le représentant a fortement critiqué la citation à comparaître envoyée par le Gouvernement allemand à des fonctionnaires syriens, en rappelant à ce pays les 480, voire le millier de combattants d’origine allemande toujours détenus en Syrie.  Il a, par ailleurs, renouvelé ses attaques contre le Mécanisme indépendant pour la Syrie, lié à la compétence universelle, qu’il a déclaré « illégal et sans fondement juridique » et dont il a exhorté les États à refuser le financement par l’ONU dans le contexte d’une crise de liquidités de l’Organisation.

M. JULIAN SIMCOK (États-Unis) a rappelé que son pays avait une longue histoire en droit international, notamment dans la lutte contre la piraterie.  À ses yeux, il reste essentiel de savoir comment la compétence universelle doit s’exercer et quelles sont les pratiques et opinions des États sur le sujet.  Par conséquent, il a assuré que les États-Unis restaient disposés à explorer davantage les questions d’application pratique, ainsi que les points de consensus entre les États.

M. HASSAN LASRI (Maroc) a indiqué que le principe de la compétence universelle est un instrument de justice pénale qui demeure complémentaire des juridictions nationales et trouve sa justification dans la lutte contre l’impunité.  La lutte du Maroc contre l’impunité des crimes faisant l’objet de l’exercice de la compétence universelle a été consacrée par la Constitution, a-t-il dit.  Il a précisé que le Maroc a adhéré au protocole facultatif à la Convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Le recours à l’application du principe de la compétence universelle devrait être rationnel et dicté par un usage judicieux, responsable et conforme au droit international, a déclaré le délégué marocain.  « En d’autres termes, les principes de souveraineté nationale et de non-ingérence contenus dans la Charte des Nations Unis ne devraient pas pâtir de son application abusive ou estropiée. »

M. NATTHAKIT SINGTO (Thaïlande) a indiqué que le principe de compétence universelle devait se fonder sur une base juridique solide, conforme aux principes du droit international, afin de prévenir ses abus à des fins politiques.  Selon lui, les crimes transfrontières tels que le terrorisme, la piraterie, la criminalité transnationale organisée et la traite des personnes constituent une base juridique solide.  Il a dans le même temps appelé au renforcement des juridictions nationales et indiqué que son pays se conforme à ses obligations d’extradition ou de poursuite découlant de traités internationaux ou d’accords bilatéraux.  Enfin, M. Singto a insisté sur l’importance d’une plus grande clarté dans la portée et la définition de ce principe et salué l’inclusion de ce point dans le programme de travail à long terme de la Commission du droit international (CDI). 

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) a souligné l’absence d’uniformité dans la pratique concernant le recours à la compétence universelle.  Bien que la majorité des pays s’accordent à dire que la compétence universelle est applicable à des crimes internationaux, tels que le génocide, le crime de guerre, le crime contre l’humanité, le crime d’agression et la piraterie, de nombreux pays considèrent qu’elle s’applique également en cas de crimes contre la santé ou contre l’environnement, de corruption et d’évasion fiscale.  Pour sa part, le représentant a estimé que le recours à la compétence universelle devait se limiter aux crimes internationaux.  La capacité d’un État à poursuivre des auteurs de crimes sans lien territorial ou de nationalité découle d’enfreintes à des valeurs universelles ou de violations de normes erga omnes.  À l’inverse, a-t-il expliqué, les crimes caractérisés par un lien territorial ou de nationalité avec les juridictions nationales, notamment dans les cas de crimes transnationaux, ne doivent pas être considérés comme relevant de la compétence universelle. 

La compétence universelle est de nature « complémentaire et exceptionnelle », a fait valoir le représentant.  À ses yeux, elle doit uniquement s’exercer dans les cas « d’incapacité institutionnelle ou de manque de volonté politique manifeste » de la part des juridictions nationales.  Il a en outre estimé que l’immunité des chefs d’État était applicable aux tribunaux étrangers, y compris lorsque ces derniers prétendent exercer la compétence universelle. 

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a appuyé les mécanismes créés pour lutter contre l’impunité et remercié les pays qui ont extradé des auteurs du génocide de 1994 tout en soulignant que neuf fugitifs inculpés par la Cour pénale internationale (CPI) n’ont toujours pas été extradés.  Le représentant a toutefois regretté que l’abus du principe de compétence universelle soit plus rarement mentionné dans les rapports alors qu’il contribue à « une crise de crédibilité du droit international ».  Il a déploré « la manipulation de ce principe par des hommes politiques et législateurs non africains afin d’en inculper certains, tout en acquittant d’autres ».  Pour garantir son application de bonne foi et éviter la confusion, a-t-il ajouté, une discipline doit être établie.  L’Union africaine a ainsi créé une loi type sur la compétence universelle qui constitue un modèle pour le Rwanda mais peut être adaptée à ses conditions locales.  Il a en outre souhaité la création d’une instance « de recours » au cas où le dirigeant d’un pays serait inculpé. 

Préoccupé par l’utilisation indue du principe de compétence universelle, notamment dans le cadre de l’exercice « unilatéral, discrétionnaire et à des fins politiques » de la compétence de tribunaux de pays développés contre des personnes morales ou individuelles issues de pays en développement, sans que cette compétence n’émane d’une norme ou d’un traité international, M. FURDORA (Cuba) a estimé que l’Assemblée générale devait formuler des directives.  Dans la pratique, le représentant a estimé que la compétence universelle doit s’appliquer dans le respect absolu de la souveraineté des États et de leurs juridictions nationales, selon une logique supplétive, en se limitant à des circonstances exceptionnelles et lorsqu’il n’existe aucun autre recours pour lutter contre l’impunité.  Pour le représentant, l’immunité des chefs d’État, du personnel diplomatique et d’autres hauts fonctionnaires, qui découle du droit international, ne doit pas être remise en cause par ce principe.  Il a plaidé en faveur de l’élaboration d’une « norme ou directive internationale » pour établir clairement les conditions du recours au principe de compétence universelle.  À ses yeux, ce dernier ne devrait être utilisé que dans les cas bien précis de « crime contre l’humanité », à condition qu’aucun autre moyen ne soit envisageable pour traduire les auteurs en justice et que l’État où les faits ont été commis ou le pays de nationalité des auteurs donne son approbation.

Mme SUSAN WANGECI MWANGI (Kenya) a redit la détermination de son pays à lutter contre l’impunité.  Elle a mis en garde contre une application sélective et arbitraire du principe de compétence universelle, estimant qu’elle peut constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales.  Les concepts fondamentaux de ce principe, ainsi que son cadre conceptuel, doivent être clairement présentés afin d’avoir une bonne compréhension de la portée et de l’application de ce principe, a-t-elle dit.  Elle a estimé que l’ONU est l’enceinte idoine pour remédier aux divergences de vues entourant ce principe et espéré que cette Commission se montre disposée à discuter des paramètres, de la portée et des limitations de ce principe.  Elle a en outre appelé la Commission du droit international (CDI)à fournir des lignes directrices pour une bonne application de ce principe. 

M. HÉCTOR ENRIQUE JAIME CALDERÓN (El Salvador) a souligné que la pratique juridique nationale établie par la Cour suprême salvadorienne précise que la compétence universelle vise les crimes imprescriptibles du point de vue du droit international, quand le droit interne ne permet pas d’engager des poursuites ou d’accorder des réparations aux victimes.  El Salvador a mis en place des mesures pour juger des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis durant le conflit armé qu’il a traversé.  Ces politiques, a assuré le représentant, sont en conformité avec de nombreux instruments juridiques internationaux intégrés dans son droit national, comme la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention relative aux droits de l’enfant. 

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a déclaré que la portée et l’application du principe de compétence universelle est un thème d’une importance « capitale » pour son pays.  Le Mali, a-t-il précisé, « se remet doucement mais sûrement de la crise multidimensionnelle qui l’affecte depuis 2012 ».  L’ONU, a poursuivi le représentant, doit accorder une importance particulière à ce principe aux fins d’offrir au monde un cadre idéal de justice pour combattre l’impunité.

Le Mali, a indiqué M. Konfourou, considère que l’avènement d’une justice universelle est une aubaine pour trancher définitivement les questions de « justice orientée ».  Ce principe constitue à ses yeux un outil fondamental pour assurer et garantir la répression des violations graves du droit international, car des crimes continuent d’être perpétrés par les groupes terroristes et narcotrafiquants, notamment au Mali.  Son pays, a-t-il expliqué, a incorporé la compétence universelle dans son droit interne, tandis que le cadre juridique mis en place conforte sa stratégie de lutte contre le terrorisme.  Le représentant a salué ici la « franche collaboration » entre la Cour pénale internationale (CPI) et le Mali qui a permis la condamnation du terroriste malien M. Ahmad Al-Faqi Al-Madhi pour la destruction des mausolées et sites historiques à Tombouctou, lors de l’occupation du nord du pays par les terroristes en 2012.  Il a toutefois jugé impératif de définir les contours de la compétence universelle et de préciser sa portée et son application.

M. THABO MICHAEL MOLEFE (Afrique du Sud) a dit que la compétence universelle, si utile pour éviter l’impunité d’auteurs de crimes graves, n’est pas sans failles car la coopération entre États peut faire défaut pour les poursuites.  L’Afrique du Sud est ainsi engagée dans l’élaboration d’une convention multilatérale pour l’aide juridique et l’extradition en cas de crimes graves.  La compétence universelle, a-t-il constaté, n’est pas appliquée uniformément.  Elle souffre d’abus et représente un défi pour la souveraineté et l’intégrité territoriale des États et devrait être abordée avec « sensibilité politique et prudence », en particulier pour la question de l’immunité.  En conclusion, M. Molefe a suggéré, pour sortir de l’impasse sur cette question, d’en confier l’étude technique à la Commission du droit international (CDI) tout en maintenant les discussions plus politiques à la Sixième Commission.

Il n’y a pas d’acceptation commune de ce principe de compétence universelle, a dit M. ALEXANDER S. PROSKURYAKOV (Fédération de Russie).  Il a préconisé le renforcement des mécanismes d’entraide pénale entre États pour lutter contre l’impunité. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: la situation au Sahara occidental fait l’objet d’interprétations divergentes entre le Maroc et l’Algérie

Soixante-quatorzième session,
8e séance – matin
CPSD/697

Quatrième Commission: la situation au Sahara occidental fait l’objet d’interprétations divergentes entre le Maroc et l’Algérie

La situation au Sahara occidental, a une nouvelle fois, dominé aujourd’hui les délibérations de la Quatrième Commission (questions de politiques spéciales et décolonisation), qui a clôturé son débat général sur la décolonisation. Regrettant une « répétition d’échanges stériles » depuis des années, le Maroc a demandé que cette question spécifique soit exclusivement traitée par le Conseil de sécurité à l’avenir, tandis que l’Algérie a déploré l’impasse dans laquelle se trouve le processus de paix, appelant, en sa qualité d’observateur officiel, à un dialogue direct entre le Front POLISARIO et Rabat.

« Les sessions de la Quatrième Commission se répètent et demeurent figées dans des échanges répétitifs qui n’apportent ni contribution au règlement des problèmes ni valeur ajoutée aux négociations en cours », a estimé le représentant marocain.  Celui-ci a déploré le traitement parallèle de la question du « Sahara marocain » au Conseil de sécurité et à la Quatrième Commission, jugeant « absurde » et « aberrant » le fait que ces deux organes adoptent « deux résolutions complètement différentes sur la même question » à quelques jours d’intervalle.  « La question du Sahara marocain ne doit plus être examinée par la Quatrième Commission », a-t-il exhorté, considérant qu’« elle doit laisser le Conseil de sécurité prendre ses responsabilités ».

Son homologue de l’Algérie a estimé, pour sa part, que l’impasse dans laquelle se trouve le processus de paix au Sahara occidental est désormais porteuse de sérieuses menaces sur la sécurité de la région.  Selon lui, ce blocage exige un surcroît d’effort de la part des parties, « au-delà des égoïsmes nationaux et régionaux ».  En sa qualité d’observateur, l’Algérie « ne ménagera aucun effort pour accompagner de ses encouragements les frères marocains et sahraouis afin de faire prévaloir ensemble la logique de paix et d’entente sur celle de la tension et de l’instabilité », a-t-il assuré.

Son collègue marocain a assuré les délégations que « le processus de décolonisation des provinces du sud a été bel et bien achevé en 1975, conformément à la légalité internationale ».  Un argument récusé par le représentant algérien, qui a rétorqué qu’aucun doute ne pèse sur la nature du conflit, qui demeure à ses yeux une question de décolonisation inachevée.

Ce dernier a rappelé qu’en 1966, l’Assemblée générale avait affirmé le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance, conformément à la résolution 1514 (XV).  Le délégué marocain a, quant à lui, vanté les mérites de l’autonomie, qui constitue la « forme la plus moderne et démocratique de l’autodétermination et offre des solutions de type gagnant-gagnant ».  Il a catégoriquement exclu la possibilité d’un « référendum » qui serait « mort et enterré depuis deux décennies! » a-t-il lancé.  Il n’est plus possible, a-t-il argué, de lier l’autodétermination à un référendum, d’autant que ce terme n’est « plus mentionné dans les résolutions du Conseil de sécurité ni dans les rapports du Secrétaire général depuis 2001 ».

Plusieurs délégations africaines, comme la République centrafricaine, ont exprimé leur soutien au plan marocain d’autonomie et salué le pays pour la mise en œuvre, depuis 2015, du nouveau modèle de développement pour le « Sahara marocain », doté d’un budget de 8 milliards de dollars.  D’autres États Membres du continent ont, à l’instar de l’Éthiopie, regretté l’impasse dans laquelle se trouve le processus de paix du Sahara occidental, invitant le Secrétaire général de l’ONU à relancer au plus vite les pourparlers et à nommer un nouvel envoyé personnel pour le Sahara occidental à cette fin.

Par ailleurs, la question des Îles Falkland (Malvinas) a donné lieu à de vifs échanges entre plusieurs États d’Amérique latine, d’un côté, et le Royaume-Uni, de l’autre.  La délégation britannique a ainsi exercé son droit de réponse en réaction aux propos tenus par la Bolivie au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) et du Costa Rica.  Selon lui, il n’y a « aucun doute » sur la souveraineté de Londres sur les « îles Falkland », estimant qu’il ne peut y avoir de discussion à ce sujet si les habitants de l’archipel ne le souhaitent pas.

À l’inverse, l’Argentine a réaffirmé que les « Malvinas » « font partie intégrante du territoire argentin », avant de dénoncer une « occupation illégale du Royaume-Uni et de rappeler que « 10 résolutions des Nations Unies demandent aux Gouvernements britannique et argentin de reprendre le dialogue » afin de résoudre ce différend.  Elle a aussi réaffirmé que « le principe du droit à l’autodétermination est inapplicable dans ce cas ».

En fin de séance, la Commission a adopté six projets de résolution se rapportant à la décolonisation.  Les textes relatifs aux Renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies; aux Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes; à l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies ont fait l’objet d’un vote enregistré alors que ceux sur les Dispositifs offerts par les États Membres aux habitants des territoires non autonomes en matière d’études et de formation; la question du Sahara occidental et la question de Gibraltar ont été adoptée sans mise aux voix.

La Commission adoptera les projets de textes restants demain matin, jeudi 17 octobre, à 10 heures.

Suite et fin du débat général sur les points relatifs à la décolonisation

« Nous lançons un appel aux puissances administrantes pour qu’elles permettent la décolonisation rapide des territoires non autonomes au cas par cas », a affirmé M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie), en s’exprimant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC).  Suite au sommet de Punta Cana de janvier 2017, il a réaffirmé la volonté de faire de la région une « zone exempte de toute colonisation ».

La CELAC a insisté sur la souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas et la nécessité de reprendre des négociations bilatérales pour les Gouvernements britannique et argentin afin d’arriver le plus rapidement à une solution « pacifique et définitive ».  Après avoir rappelé que le cas de Porto Rico était traité par le Comité spécial de la décolonisation depuis 46 ans, le groupe a réaffirmé le droit à l’autodétermination et à l’indépendance de son peuple, ainsi que son « caractère latino-américain ».  Il a aussi appelé à « des efforts pour parvenir à la bonne gouvernance des Îles Turques et Caïques ». 

Le représentant a énuméré toutes les résolutions du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental, insistant sur la nécessité de les appliquer. Il a exprimé « l’appui énergique » de son groupe au Secrétaire général de l’ONU pour parvenir à une solution définitive, juste et durable » au conflit.  Il a, en outre, demandé au Département de la communication globale de travailler dans toutes les langues officielles.

M. SULTAN MOHAMMED THANI AL FAZARI (Oman) a apporté son soutien aux efforts internationaux visant à trouver des solutions réalistes, concrètes et de long terme au différend relatif au Sahara occidental.  À cet égard, il a salué la participation du Maroc, du Front POLISARIO, de l’Algérie et de la Mauritanie aux deux tables rondes organisées par l’Envoyé personnel du Secrétaire général à Genève en décembre 2018 et mars 2019.

M. WALTON ALFONSO WEBSON (Antigua-et-Barbuda) a insisté sur l’importance du droit à l’autodétermination de chaque peuple, un droit inaliénable grâce auquel sa délégation peut aujourd’hui s’exprimer ici librement, a souligné le représentant, qui souhaiterait que ce droit puisse s’appliquer aux 17 territoires non autonomes toujours inscrits à l’ordre du jour de la Quatrième Commission.  Il a invité le Comité spécial de la décolonisation et la Commission à engager un dialogue constructif avec les puissances administrantes et les peuples de ces territoires pour pouvoir avancer sur la voie de la décolonisation.  Il faut redoubler d’efforts, a-t-il insisté, pour respecter le mandat de la décolonisation, et c’est aux puissances administrantes d’adopter les feuilles de route adéquates permettant à chaque territoire non autonome d’accéder à l’autodétermination en cultivant une approche au cas par cas.  Le représentant a également lancé un appel aux puissances administrantes pour qu’elles respectent leurs obligations de veiller au bien-être des populations de leurs territoires.  En conclusion, il a appuyé l’idée de régler les conflits par le biais de solutions politiques négociées, en insistant sur le respect des droits politiques et humains des peuples des territoires non autonomes.  Sa délégation a remercié le Royaume-Uni pour sa coopération avec le Comité spécial de la décolonisation et Montserrat, et salué la prochaine visite du Comité sur place.  S’agissant des Îles Falkland/Malvinas, il a demandé au Secrétaire général de redoubler d’efforts dans ses bons offices pour parvenir à une solution pacifique à ce conflit de souveraineté.  Antigua-et-Barbuda a également apporté son appui au processus politique en cours, sous l’égide de l’ONU, pour la question du Sahara occidental.

Mme LOREEN RUTH BANNIS-ROBERTS (Dominique) s’est félicité de la tenue de deux cycles de tables rondes organisés avec la participation du Maroc, du Front POLISARIO, de l’Algérie et de la Mauritanie.  Elle a salué la volonté de tous les participants de se retrouver autour d’une troisième, afin de trouver des terrains d’entente.  La représentante a estimé que le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental présenté au Conseil de sécurité le 11 avril 2007 constitue une proposition sérieuse et crédible pour résoudre ce différend.  Par ailleurs, elle a jugé important de procéder à un recensement des populations présentes dans les camps de Tindouf.

M. CHRISTIAN GUILLERMET-FERNANDEZ (Costa Rica) a apporté tout son soutien au mandat du Comité spécial de la décolonisation.  Il a constaté qu’il existe encore des territoires qui n’ont pas pu exercer leur droit à l’autodétermination, appelant à trouver les moyens adéquats pour respecter toutes les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale sur la décolonisation.  Compte tenu de la lenteur des progrès, le délégué a estimé qu’il va falloir proclamer une quatrième Décennie de l’élimination de la colonisation. Il a réaffirmé la position du Costa Rica à propos du droit de souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas.  Les revendications argentines sont justes, a-t-il tranché, en rappelant que le soutien du Costa Rica s’est exprimé dans différentes instances internationales et régionales comme la CELAC.  Dès lors, la délégation a appelé au rapprochement des parties concernées dans un cadre bilatéral.  S’agissant du Sahara occidental, il a plaidé pour une solution politique juste, durable et démocratique à ce différend.

M. ALIE KABBA (Sierra Leone) a notamment appuyé la résolution 2468 du Conseil de sécurité adoptée le 30 avril dernier, un texte qui atteste de l’engagement de l’ONU à prêter assistance à toutes les parties sur la voie escarpée menant à un règlement politique du différend du Sahara occidental.  Il a ajouté que les consultations en cours entre l’Envoyé personnel du Secrétaire général, le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie doivent susciter un nouvel élan, cela dans le seul intérêt du « peuple du Sahara ».  Le représentant a assuré la Commission de l’engagement de son pays à travailler et coopérer avec les autres États pour trouver une solution à cette crise, laquelle affecte directement la paix, la sécurité et le développement dans la région.  Il a conclu, en réitérant l’attachement de son pays au bon fonctionnement du Comité des Vingt-Quatre.

« Les puissances administrantes doivent honorer leurs promesses et transmettre toutes les informations nécessaires à l’ONU », a affirmé M. JORGE ARTURO REYES HERNÁNDEZ (Venezuela).  Il a appelé toutes les puissances administrantes à participer au Comité spécial sur la décolonisation.  Le représentant a affirmé que les États-Unis s’étaient emparés de Porto Rico, il y a 121 ans, dénonçant une « situation d’oppression coloniale » et évoquant les difficultés sociales des Portoricains.  Le délégué a lancé un appel à respecter le droit à l’autodétermination et à l’indépendance du peuple portoricain.  Il a aussi appelé l’Assemblée générale des Nations Unies à se pencher sur ce cas.  En conclusion, le délégué a exhorté les États Membres à redoubler d’efforts sur la question du Sahara occidental pour aboutir à une solution « juste, durable et mutuellement acceptable ».

« La France coopère pleinement avec les Nations Unies depuis plus de 30 ans » sur le dossier de la Nouvelle-Calédonie, a affirmé M. PIERRE COCHARD (France), évoquant « un processus exigeant, transparent et serein ». Il s’est félicité du bon déroulement de la consultation de novembre 2018, qui a enregistré un taux de participation de 81%.  Notant que 56,7% des électeurs avaient refusé l’indépendance, le représentant a précisé que deux autres consultations seraient organisées en août ou septembre 2020, puis d’ici à 2022.

Afin d’étayer son propos, M. Cochard a rappelé que la Nouvelle-Calédonie avait accueilli, début 2019 et pour la quatrième année consécutive, une mission d’expertise onusienne « qui a apporté son savoir-faire s’agissant des travaux de révision des différentes listes électorales. »  Il a ajouté qu’un panel d’experts des Nations Unies et une mission ministérielle du Forum des îles du Pacifique étaient également venus observer la consultation de 2018.

Concernant la Polynésie française, le délégué a estimé que la collaboration avec le Comité spécial pour la décolonisation « n’a pas lieu d’être ».  Il a rappelé que le Président du territoire, M. Edouard Fritch, avait demandé, le 8 octobre dernier, le retrait de la Polynésie française de la liste des territoires non autonomes.  Le délégué a rappelé le statut de « large autonomie » dont bénéficie la Polynésie française, dotée d’un Président et d’un Parlement démocratiquement élus.  « Nous souhaitons que la décision d’inscription sur la liste des territoires non autonomes soit revue pour tenir compte de cette réalité et de la volonté de la population polynésienne », a conclu la France.

Mme MOSES CHIKANYAIR (Zimbabwe) a regretté que près de 30 ans après la création de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), par la résolution 690 du Conseil de sécurité, il n’ait toujours pas été possible d’organiser un référendum d’autodétermination.  Elle a appuyé le droit inaliénable du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination en soulignant l’importance de la résolution 2468 du Conseil de sécurité, qui prolonge le mandat de la MINURSO jusqu’au 31 octobre 2019.  Elle a demandé l’inclusion au mandat de la MINURSO d’une dimension évaluation des droits de l’homme, afin de s’assurer que les violations des droits du peuple sahraoui puissent être documentées et leurs auteurs poursuivis.  La représentante a salué la décision de l’Union africaine d’établir un mécanisme visant à appuyer les efforts de l’ONU pour trouver une solution pacifique, juste et durable à la question du Sahara occidental en phase avec les résolutions pertinentes de l’Union africaine et de l’ONU. 

M. TEBURORO TITO (Kiribati) a estimé que l’engagement de l’Union africaine était essentiel pour déterminer les moyens de sortir de la crise au Sahara occidental, en raison du contexte socioculturel de cette question à l’ordre du jour de la Commission.  Il a salué le rôle positif et constructif du Maroc, dont les propositions respectent, selon lui, l’approche multilatérale, réaliste et pragmatique prônée par l’ONU et visent l’autonomie la plus large possible pour le peuple du Sahara occidental.

Mme SAADA DAHER HASSAN (Djibouti) a estimé qu’à un an de la fin de la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, cette session représente l’occasion de renouveler « notre solidarité » avec les peuples en lutte qui aspirent à exercer leur droit à disposer d’eux-mêmes, conformément à la résolution 1514 (1960).  Concernant la situation au Sahara occidental, Djibouti a déclaré soutenir le processus politique mené sous l’égide exclusif des Nations Unies et rend hommage aux efforts déployés par le Secrétaire général pour instituer un dialogue franc et constructif entre les parties afin de parvenir à une solution politique mutuellement acceptable et négociée au différend régional.  La représentante a réaffirmé le soutien de sa délégation à la solution de compromis proposée par le Maroc.  Il faut tout mettre en œuvre afin de préserver les gains acquis lors des dernières rencontres, a demandé la représentante, avant d’insister sur la nomination prochaine d’un nouvel envoyé personnel du Secrétaire général qui poursuivra sur la base de ces acquis.  Djibouti a salué l’engagement des parties concernées à se réunir pour une troisième table ronde, comme stipulé dans la résolution 2468, afin d’œuvrer à une solution politique rapide à ce différend régional.

M. MANZI TCHILABALO KARBOU (Togo) a commencé par rendre hommage à l’ex-émissaire de l’ONU pour le Sahara occidental, M. Horst Köhler, qui a pu rétablir une dynamique et un élan en faveur du processus politique, via des tables rondes ayant réuni le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie.  Il a appelé à maintenir cette dynamique afin que le dialogue ne puisse plus jamais être interrompu jusqu’à la résolution pacifique et définitive du différend du Sahara occidental.  Profondément attaché aux idéaux de paix et de stabilité, le Togo s’est déclaré convaincu que la négociation constitue la seule issue réaliste qui puisse permettre de parvenir à une paix durable dans cette partie du Maghreb.  C’est pourquoi la délégation a appelé les parties à éviter des positions tranchées et à garder à l’esprit que seule une approche pragmatique et réaliste peut conduire au règlement de cette crise et à l’atténuation des tensions qu’elle fait régner sur l’ensemble de la région et au-delà.  Dès lors, le Togo a appelé la Mauritanie, le Maroc et l’Algérie à soutenir et continuer de participer à l’initiative des Nations Unies ayant conduit à l’amorce de négociations directes via les deux tables rondes de Genève.  M. Karbou a aussi demandé aux protagonistes d’avoir constamment à l’esprit les défis socioéconomiques qui sont à relever pour l’ensemble de la région.  Il a ensuite pris acte des efforts du Maroc visant à développer la région du « Sahara », notamment par la réalisation de projets socioéconomiques et s’est félicité du renforcement des actions visant à assurer et protéger les droits de l’homme dans la région.  Pour finir, le délégué a estimé que le règlement de la question du Sahara occidental reste une responsabilité partagée par toutes les parties prenantes et que seule une amélioration sensible des relations entre elles, en particulier entre le Maroc et l’Algérie, peut conduire à « cette fin heureuse ».

M. JEAN-CLAUDE FELIX DO REGO (Bénin) a accueilli avec appréciation les deux tables rondes tenues entre l’Algérie, le Maroc, la Mauritanie et le Front POLISARIO en vue de trouver une solution politique rapide à ce différend régional, espérant la tenue d’une troisième rencontre sous le même format, conformément à la résolution 2468.  Dans le cadre de ce processus, il a rappelé que le plan d’autonomie marocain apparaît bien comme la solution de compromis du fait qu’il se conforme au droit international et aux résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité.  « Cette initiative vise à parvenir à une solution politique négociée et mutuellement acceptable, basée sur le réalisme telle que recommandée par les résolutions successives du Conseil de sécurité », a déclaré la délégation.  Elle a ensuite souligné le caractère prioritaire du processus politique, et soutenu à cet égard toute initiative du Conseil de sécurité qui permettrait l’adoption d’un calendrier et des paramètres concerts pour des négociations crédibles.  Tout en félicitant le Maroc pour le nouveau modèle de développement du Sahara lancé en 2015, pour les réalisations substantielles dans le domaine des droits de l’homme à Laayoune et Dakhla, le Bénin a insisté sur le fait qu’aucune des initiatives ne serait couronnée de succès sans l’engagement de toutes les parties.

M. AMBROISINE KPONGO (République centrafricaine) a estimé que le Gouvernement du Maroc déploie des efforts louables en vue d’arriver à un compromis et une solution politique réaliste, pragmatique et durable au différend sur le Sahara occidental.  Elle s’est félicitée de la tenue de deux tables rondes entre l’Algérie, le Maroc, la Mauritanie et le Front POLISARIO en vue de trouver une solution à ce différend, conformément aux résolutions 2414 et 2440 du Conseil de sécurité.  « Le plan d’autonomie marocain est la solution de compromis », selon la représentante centrafricaine, qui a estimé qu’elle est conforme au droit international, à la Charte des Nations Unies et aux résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité.  Elle a salué la décision des participants d’organiser une troisième table ronde, conformément à la résolution 2468.  « Le nouveau modèle de développement du Sahara lancé par le Maroc en 2015 et doté d’un budget de 8 milliards de dollars afin d’améliorer le niveau de vie de la population et de l’autonomiser en bénéficiant des ressources de la Région est à féliciter », a ajouté le délégué.  Elle s’est, par ailleurs, félicitée des réalisations du Maroc dans le domaine des droits de l’homme, exprimant sa vive préoccupation vis-à-vis de la situation des violations perpétrées dans les camps de Tindouf.  C’est pourquoi elle a appelé au recensement des résidents de ces camps, conformément au droit international humanitaire (DIH), au mandat du HCR, aux recommandations du Secrétaire général et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

M. DEREJE KORE GURACH (Éthiopie) a regretté l’impasse dans laquelle se trouve le conflit du Sahara occidental.  Inquiet de constater que les parties restent diamétralement opposées dans leurs interprétations de la situation, il les a appelées à trouver des points de convergence et à reprendre des discussions directes sans condition, en accord avec les décisions pertinentes de l’Union africaine (UA) et de l’ONU.  Le représentant a ensuite invité le Secrétaire général à reprendre au plus vite les pourparlers de paix pour revigorer le processus en accord avec la décision de l’Assemblée générale de l’Union africaine (UA) de juillet 2018.  En même temps, a-t-il ajouté, nous exhortons le Conseil de sécurité à renouveler le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) en mettant l’accent sur la dimension évaluation des droits de l’homme.

M. LAZAROUS KAPAMBWE (Zambie) s’est demandé quels sont les facteurs qui pourraient expliquer la lenteur des progrès en matière de décolonisation des dernières années.  Serait-ce parce que les Nations Unies passent des résolutions inadéquates pour soutenir cette cause ou plutôt parce que les États Membres ne font pas grand-chose pour soutenir ce processus?  Dès lors, le représentant a appelé les États Membres à redoubler d’efforts et à garantir que les délibérations en cours débouchent sur les résultats escomptés en matière d’autodétermination.  Il faut parvenir à des solutions durables, justifiables et acceptables par toutes les parties concernées mais surtout par les peuples de ces territoires non autonomes, a estimé le représentant.

La Zambie a fait sienne la position de l’UA sur la décolonisation, y compris le seul territoire du continent africain qui reste toujours inscrit sur la liste des territoires non autonomes, le Sahara occidental.  M. Kapambwe a rappelé que son pays a fait partie de la conférence de la SADC, en solidarité avec le Sahara occidental, qui a eu lieu en mars 2019.  Cette conférence a réaffirmé le droit inaliénable du Sahara occidental à l’autodétermination, a précisé le représentant, avant de saluer la reprise des pourparlers entre le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie.  Il les a encouragés à aller de l’avant au nom du peuple sahraoui.  Avant de conclure, le délégué a appelé le Secrétaire général à nommer un successeur à l’ex-Envoyé personnel pour le Sahara occidental, M. Horst Köhler.

« Ma délégation soutient le processus mené sous l’égide exclusive des Nations Unies », a affirmé M. AHMED ABDALLAH (Comores), en appelant à appliquer les résolutions du Conseil de sécurité adoptées depuis 2007.  Il s’est félicité des deux tables rondes déjà organisées en Suisse entre les quatre parties concernées et salue leur engagement en faveur d’une troisième.  Le représentant a appuyé plan d’autonomie marocain, de même que le nouveau modèle de développement mis en place par Rabat.  Il s’est enfin inquiété des violations des droits de l’homme dans les camps de Tindouf, et a demandé l’enregistrement des populations, conformément aux principes du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Pour M. FERNANDO DELFIM DA SILVA (Guinée-Bissau) la question du Sahara occidental constitue un sujet important.  Il n’existe, selon lui, pas d’autres voies pour le règlement de cette question que le processus politique en cours sous l’égide de l’ONU.  Il s’est ensuite félicité de la tenue en Suisse de deux tables rondes entre le Maroc, l’Algérie, la Mauritanie et le Front POLISARIO, sous les auspices de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, Horst Köhler, auquel le représentant a rendu hommage pour ses efforts en vue de trouver une solution politique rapide à ce différend régional.  Le représentant a espéré que la troisième table ronde sera porteuse de progrès et couronnée de succès et que le Secrétaire général procèdera prochainement à la nomination d’un nouvel Envoyé personnel pour cette question.  En attendant que ces efforts aboutissent, la Guinée-Bissau a encouragé le Maroc à poursuivre ses efforts en vue de trouver une solution politique mutuellement acceptable, notamment son initiative pour une autonomie du Sahara qu’elle juge crédible et réaliste.

« Les sessions de la Quatrième Commission se répètent et demeurent figées dans des échanges répétitifs qui n’apportent ni contribution au règlement des problèmes ni valeur ajoutée aux négociations en cours », a affirmé M. OMAR HILALE, (Maroc).  Il a dénoncé le traitement parallèle de la question du « Sahara marocain » par le Conseil de sécurité et la Quatrième Commission et qualifié « d’absurde et d’aberrant » que ces deux organes adoptent « deux résolutions complètement différentes sur la même question », à quelques jours d’intervalle.  « La question du Sahara marocain ne doit plus être examinée par la Quatrième Commission », a-t-il martelé, « elle doit laisser le Conseil de sécurité prendre ses responsabilités ».

« Le processus de décolonisation des provinces du sud du Maroc a été bel et bien achevé en 1975, conformément à la légalité internationale », a affirmé le délégué.  Il a ensuite entamé une démonstration juridique détaillée en trois points, s’appuyant sur la Charte des Nations Unies, l’Accord de Madrid de 1975 et le droit coutumier, reconnu selon lui par un avis du 16 octobre 1975 de la Cour internationale de Justice.  M. Hilale a ensuite vanté les mérites de l’autonomie, solution éprouvée par les 70 accords de ce type signés dans le monde depuis la fin de la seconde Guerre mondiale.  Il a estimé qu’elle constitue la « forme la plus moderne et la plus démocratique de l’autodétermination et offre des solutions de type gagnant-gagnant. »  Le représentant s’est montré catégorique sur la question d’une éventuelle consultation populaire: « Le référendum est mort et enterré depuis deux décennies! », a-t-il tranché.  Il a estimé qu’il n’est plus possible de lier l’autodétermination à un référendum, d’autant qu’il n’était « plus mentionné dans les résolutions du Conseil de sécurité ni dans les rapports du Secrétaire général depuis 2001 ».  Le délégué s’est, par ailleurs, félicité des récents progrès des négociations, notant que « les deux tables rondes organisée à Genève ont créé un élan positif dans le processus politique ».

« Les populations du Sahara marocain prennent pleinement part à la vie politique de la région, notamment à travers une forte participation aux processus électoraux aux niveaux régional et local », a estimé M. Hilale.  Il a rappelé que son pays avait lancé en 2015 le nouveau modèle de développement pour le Sahara marocain « avec un budget colossal de 8 milliards de dollars », ajoutant que le nouveau port atlantique de Dakhla, doté d’un budget de 96 millions de dollars « constituera une plaque tournante des échanges avec l’Afrique et l’Amérique latine ».  Il a estimé que les Commissions du Conseil national des droits de l’homme, installées à Laâyoune et Dakhla renforceront « la promotion et la protection de ces droits au Sahara marocain ».  Le délégué a affirmé que la région est devenue « une destination touristique prisée » et en a voulu pour preuve l’organisation récente de grands forums internationaux.  Il s’est félicité de l’ouverture récente du consulat honoraire de Côte d’Ivoire à Laâyoune et a annoncé que « d’autres pays frères africains s’apprêtent à faire de même. »

M. Hilale a déploré les « violations des droits de l’homme dans les camps de Tindouf par le mouvement séparatiste armé, le POLISARIO, avant de dénoncer « un blocus militaro-sécuritaire » de ces camps qui « connaissent depuis plusieurs mois des contestations, manifestations et soulèvements populaires contre le POLISARIO. »  Il a cité le rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité, en date du 9 octobre 2019, évoquant les cas d’enlèvement et de torture de trois blogueurs, la disparition forcée d’un ex-cadre du POLISARIO et la séquestration de quatre femmes.  Il en a appelé à l’enregistrement des populations des camps auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), « conformément au droit international » afin de les protéger.  « L’absence de cet enregistrement encourage malheureusement le détournement de l’aide humanitaire par le groupe armé, le POLISARIO, dénoncé par le HCR, le Programme alimentaire mondial et l’Union européenne », a-t-il déploré. 

« Le plan d’autonomie marocain est la seule et unique incarnation de la solution », a martelé M. Hilale, qui a appelé à une reprise du « processus politique exclusivement onusien ».  En conclusion, il a réaffirmé « le plein soutien du Maroc à l’intégrité territoriale des Émirats arabes unis et leur pleine souveraineté sur les trois îles occupées d’Abou Moussa, de Grande et de Petite Tomb. »

Au moment où la troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme arrive à son terme, M. SOFIANE MIMOUNI (Algérie) s’est dit d’avis que cette session offre l’opportunité de dresser le bilan de l’œuvre accomplie dans ce domaine et de mesurer le chemin qui reste à entreprendre pour la réalisation des objectifs « que nous nous sommes fixés ».  Cette troisième décennie devait, selon le représentant, contribuer à relancer le mouvement d’émancipation des peuples.  Elle avait ainsi suscité de grands espoirs pour l’application du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes dans les 17 territoires non autonomes restants.  Dès lors, le représentant a estimé légitime de s’interroger aujourd’hui sur les résultats de cette décennie, sur son apport à la valeur ajoutée globale de la décolonisation et de savoir si les Nations Unies ont réussi à assumer la responsabilité particulière qui leur échoit en ce domaine.  À l’évidence, de nombreux obstacles continuent de compromettre l’action de l’ONU, « qui reste pourtant garante de l’exercice du droit à l’autodétermination des peuples des territoires non autonomes », a constaté M. Mimouni.  Il a remarqué que le peuple du Sahara occidental attend toujours l’opportunité d’exercer ce droit, alors même que cette question a été inscrite en 1963 sur la liste des territoires non autonomes, et demeure, depuis plus d’un demi-siècle, au centre des efforts de l’ONU.

Il a rappelé qu’en 1966, l’Assemblée générale avait reconnu le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et affirmé depuis son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance conformément à la résolution 1514 (XV).  Invitée à donner son avis, la Cour internationale de Justice (CIJ) a, pour sa part, affirmé qu’elle n’avait « pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale quant à la décolonisation du Sahara occidental et, en particulier, l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire ».  C’est dire donc qu’aucun doute ne pèse sur la nature de ce conflit, en a conclu le représentant, pour lequel il reste une question de décolonisation inachevée et l’ONU, tout comme l’UA, considère que la seule solution, juste et durable à ce conflit est celle qui permettrait au peuple du Sahara occidental d’exercer librement son droit à l’autodétermination.

Les efforts du Secrétaire général de l’ONU et du Conseil de sécurité en faveur du parachèvement du processus de décolonisation du Sahara occidental bénéficient du soutien de l’Algérie, a-t-il assuré, avant de rendre hommage à l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général, M Horst Köhler, pour ses efforts ayant permis d’insuffler une nouvelle dynamique au processus.  Mais, en dépit des efforts louables de la communauté internationale et des nombreuses décisions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, le peuple du Sahara occidental continue « malheureusement » à subir les conséquences dévastatrices de l’exil, de l’occupation et à faire face à l’injustice, à la privation et au déni de ses droits les plus élémentaires, a constaté M. Mimouni.  L’impasse qui caractérise le processus de paix au Sahara occidental est désormais porteuse de sérieuses menaces sur la paix et la sécurité de la région, a-t-il poursuivi en exprimant sa profonde préoccupation.  C’est dire que la situation de blocage du processus de paix au Sahara occidental exige, « au-delà des égoïsmes nationaux et régionaux », un surcroît d’effort, selon le délégué, voire un « sursaut » pour marquer une rupture avec l’enlisement actuel du processus et relancer les termes d’un règlement juste et durable de ce conflit qui pourvoit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.

Dans ce contexte, l’Algérie a formé l’espoir que les efforts du Secrétaire général et de son prochain envoyé personnel puissent donner lieu à une relance effective du processus de règlement de ce conflit et que les deux parties s’engagent, en bonne foi et sans condition préalable, dans des négociations en vue d’une solution politique mutuellement acceptable conforme à la légalité internationale.  M. Mimouni a salué l’appel du Secrétaire général qui, dans son rapport, « prie instamment les membres du Conseil de sécurité, les amis du Sahara occidental et les autres acteurs concernés d’encourager le Maroc et le Front POLISARIO à saisir l’occasion qui se présente à eux et à continuer de participer de bonne foi et sans condition préalable au processus engagé ».  L’Algérie a ardemment souhaité que cet appel du Secrétaire général soit entendu et que les deux parties au conflit puissent faire preuve de sagesse politique et de responsabilité et engagent des négociations sur une base sérieuse.

Le dialogue direct, « source de confiance et d’espérance et dont les vertus sont confirmées », reste, pour le représentant, l’outil le plus efficace pour construire une paix durable.  Il revient dès lors, aux deux parties de renouer le dialogue de manière sincère et de faire un pari gagnant sur l’avenir au bénéfice de la région du Maghreb arabe, a estimé le représentant.  Pour sa part, l’Algérie, en sa qualité d’observateur officiel du processus de paix, continuera à apporter sa contribution à un règlement juste et durable au conflit du Sahara occidental, a assuré M. Mimouni.  « En ce sens, il ne ménagera aucun effort pour accompagner de ses vœux et de ses encouragements les frères marocains et sahraouis pour faire prévaloir ensemble la logique de la paix et de l’entente sur celle de la tension et de l’instabilité ».

Adoption de projets de textes

La Quatrième Commission a adopté six projets de résolution se rapportant à la décolonisation ce matin.

Les textes relatifs aux Renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’alinéa de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies; aux Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes; à l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies ont fait l’objet d’un vote enregistré alors que ceux sur les Dispositifs offerts par les États Membres aux habitants des territoires non autonomes en matière d’études et de formation; la question du Sahara occidental et la question de Gibraltar ont été adoptée sans vote.

S’agissant du projet de texte relatif aux Renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’alinéa de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies, adopté par 161 voix pour, 2 contre (États-Unis et Israël) et 3 abstentions (France, Guinée-Bissau et Royaume-Uni), la représentante du Royaume-Uni a expliqué l’abstention de sa délégation par le fait qu’il appartient à la puissance administrante, et non à l’Assemblée générale, de déterminer si un territoire non autonome a atteint le degré de gouvernance suffisant pour son autodétermination.

Le projet de résolution sur les Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes, adopté par 162 voix pour, 2 contre (États-Unis et Israël) et 3 abstentions (El Salvador, France et Royaume-Uni), a suscité une explication de vote de l’Argentine pour laquelle ce texte s’inscrit dans le droit fil de la résolution 1514 sur la décolonisation dont l’applicabilité à un territoire dépend du principe d’autodétermination.  Cela suppose qu’il a un sujet actif, c’est-à-dire un peuple soumis au joug de l’occupation étrangère, a argué le représentant argentin, or, si cela n’est pas le cas, ce principe ne peut s’appliquer.  C’est précisément le cas des îles Malvinas dont les habitants ont été expulsés par le Royaume-Uni pour être remplacés par des ressortissants britanniques.  Dès lors, le principe de l’autodétermination ne s’applique pas à cette situation coloniale spéciale dont la solution passe par des négociations bilatérales entre les deux parties, a-t-il soutenu en rappelant que l’Assemblée générale avait validé l’exclusion de l’application du principe de l’autodétermination à ces îles.  Il a également dénoncé l’exploitation unilatérale par le Royaume-Uni des ressources naturelles des Malvinas, ce qui est contraire aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Le projet de résolution sur l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies a été adopté par 115 voix pour, 2 contre (États-Unis et Israël) et 52 abstentions.

Expliquant son vote, le représentant de l’Argentine a estimé que ce projet doit s’appliquer conformément aux prises de position de l’ONU, du Comité spécial de la décolonisation et de la Commission sur les territoires non autonomes alors que son homologue du Royaume-Uni a réaffirmé le soutien de sa délégation aux institutions spécialisées dans leurs efforts visant à aider les territoires non autonomes mais a insisté sur le respect des statuts de ces institutions.  C’est la raison pour laquelle le Royaume-Uni s’est abstenu.

S’agissant du projet de résolution relatif à 14 territoires non autonomes, la représentante du Royaume-Uni a fait une déclaration générale pour dire que sa délégation va rejoindre le consensus sur ce texte qui couvre huit territoires britanniques d’outre-mer.  Elle a néanmoins regretté « l’approche obsolète » du Comité spécial de la décolonisation qui ne tiendrait pas compte de la modernisation de la relation du Royaume-Uni avec ses territoires d’outre-mer.  Pour le Royaume-Uni, certains libellés sont inacceptables dans ces résolutions parce qu’ils ne reflètent pas cette relation moderne.

Enfin, l’Union européenne a tenu à exprimer sa position sur le texte relatif à la question du Sahara occidental qui a été adopté par consensus, ce dont elle s’est réjouie.  Elle a salué les efforts du Secrétaire général pour relancer le processus politique en vue du règlement de cette question.  Reconnaissante à l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, M. Horst Köhler, pour son travail, l’UE l’a remercié pour l’étroite collaboration dont il a fait preuve avec l’UE tout au long de son mandat.  L’UE, a indiqué le représentant, assure son plein soutien au Secrétaire général pour la relance du processus politique et insiste sur la participation des femmes et des jeunes à ce processus.  Le délégué a noté avec préoccupation l’insuffisance du financement pour les réfugiés dans les camps de Tindouf et appelé à un recensement du CICR dans ces camps.  Il s’est également dit préoccupé des implications de ce conflit sur la stabilité et la sécurité de la région.

Droits de réponse

Le Royaume-Uni a exercé son droit de réponse en réaction aux interventions faites par la Bolivie au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) et du Costa Rica, affirmant n’avoir « aucun doute » sur la souveraineté de son pays sur les « îles Falkland ». Il a insisté sur le respect du droit à l’autodétermination, martelant « qu’il ne peut y avoir de discussion sur la souveraineté des îles Falkland si les îles Falkland ne le souhaitent pas. »

L’Iran a dénoncé les « déclarations infondées » du Maroc quant à la souveraineté des Émirats arabes unis sur trois îles du golfe Persique.  Il a qualifié l’intervention marocaine de « violation du droit international, en particulier du principe de non-ingérence ».  Le représentant a ensuite estimé que « le Maroc ne respecte pas le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui », plaidant en faveur d’un processus politique, sous l’égide de l’ONU en vue d’obtenir « une paix, juste, durable et équitable ».

En réponse au Royaume-Uni, l’Argentine a réitéré les déclarations du Président de son pays et de son Ministre de l’éducation devant l’Assemblée générale et le Comité spécial pour la décolonisation qui ont réaffirmé que les Malvinas « font partie intégrante du territoire argentin ».  Elle a dénoncé une « occupation illégale du Royaume-Uni et rappelé que « 10 résolutions des Nations Unies demandent aux Gouvernements britannique et argentin de reprendre le dialogue » afin de résoudre ce différend.  Elle a aussi réaffirmé que, selon elle, « le principe du droit à l’autodétermination est inapplicable dans ce cas ».

Les Émirats arabes unis ont dénoncé les « revendications infondées du représentant de l’Iran ».  « Il est regrettable que l’Iran essaie d’effacer l’histoire de mon pays », a-t-il affirmé, ajoutant que « ces trois îles, dans le golfe Persique arabe, ont une longue histoire d’appartenance à mon pays. »  Ils en ont appelé à un règlement pacifique par des négociations avec l’Iran ou devant la Cour internationale de Justice.

Répondant à l’Iran, le Maroc a réitéré le droit des Émirats arabes unis à la souveraineté sur les îles Abou Moussa, Petite et Grande Tomb.  Le Maroc a aussi appelé « le distingué représentant de l’Iran à s’abstenir des agissements qu’il perpétue à l’égard des camps de Tindouf ».

En réponse aux Émirats arabes unis, l’Iran a réaffirmé sa souveraineté sur les trois îles.  « Les Émirats arabes unis ne peuvent contester notre souveraineté », a-t-il mis en garde, avant d’ajouter que « cette démarche est sans fondement et n’a pas de place dans cette commission ».  La délégation a accusé les Émirats arabes unis « d’utiliser la commission pour justifier leur politique d’expansion dans le golfe Persique ».  Il les a appelés « à mettre un terme à leur politique hostile au peuple iranien ».  Sur la question du Sahara occidental, le représentant iranien a insisté sur « le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui par la voie d’un référendum ».

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission alertée sur les impacts de la lutte antiterroriste et des mesures coercitives unilatérales en matière de droits de l’homme

Soixante-quatorzième session,
21e & 22e séances plénières, matin & après-midi
AG/SHC/4268

La Troisième Commission alertée sur les impacts de la lutte antiterroriste et des mesures coercitives unilatérales en matière de droits de l’homme

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, culturelles et humanitaires, a poursuivi aujourd’hui son examen de la protection et la promotion des droits de l’homme, concentrant ses débats sur la protection de ces droits dans le contexte de plus en plus complexe de la lutte antiterroriste ainsi que sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales, l’indépendance des juges et des avocats, le droit au développement et la promotion d’un ordre international démocratique et équitable.

Face aux menaces croissantes que font peser, sur les droits de l’homme, le terrorisme et les mesures coercitives unilatérales, deux rapporteurs spéciaux ont tiré le signal d’alarme dans leur domaine respectif.  En charge de la promotion et de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Mme Fionnuala Ní Aoláin a ainsi attiré l’attention de la Commission sur la prolifération, depuis le 11 septembre 2001, d’instruments de « droit souple » -un droit simplement recommandé, par opposition au caractère contraignant du droit impératif- dans la régulation et la gouvernance de la lutte antiterroriste. 

De fait, a observé l’experte, un nombre toujours plus grand d’États recourent aux normes de droit souple pour réglementer les activités de prévention et de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  On assiste en outre à l’évolution de certaines normes du droit souple en normes de droit impératif, ce qui tend, selon elle, à « marginaliser les droits de l’homme dans l’architecture antiterroriste ».  Autre motif de préoccupation: ces lois dites souples ont été élaborées, non pas au sein du système multilatéral et des institutions mondiales, mais dans des « clubs d’États » créés à cette fin, qui ne sont ni équitables ni ouverts et qui sont également caractérisés par une absence d’expertise en matière de droit international et de droits de l’homme, a-t-elle déploré.

Pour Mme Ní Aoláin, cette opacité a des implications pour la souveraineté et l’égalité des États dans le processus d’établissement des normes, d’autant plus, a-t-elle prévenu, que certaines des lois souples ainsi élaborées peuvent se retrouver, via un parcours détourné, intégrées à des résolutions du Conseil de sécurité, entre autres.

La Rapporteuse spéciale a donc appelé à faire briller sur cette « zone grise » la « lumière antiseptique du jour » pour permettre aux États et aux experts des droits de l’homme d’interagir afin de saisir les implications de cet élargissement du droit souple. 

Dans un domaine connexe, le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats a fait état d’une « énorme menace » pesant sur les sociétés et les institutions, celle de la corruption mondiale et transnationale. 

Préoccupé par le peu de progrès réalisés pour enrayer le phénomène, M. Diego García-Sayán a notamment alerté que « la corruption a un effet dévastateur sur le système judiciaire en sapant à juste titre la confiance des populations dans son administration ». 

À cette menace s’ajoute celle du poids du crime organisé sur le travail des juges et des magistrats partout dans le monde.  Un danger rendu particulièrement prégnant du fait de l’essor de la criminalité transnationale, qui, a ajouté le Rapporteur spécial, a de graves conséquences sur la sécurité et la santé publiques, les institutions démocratiques et la stabilité économique.  Cette forme de criminalité, qui empiète sur les frontières nationales et régionales, utilise « non seulement les armes et la violence, mais aussi l’argent et les pots-de-vin pour corrompre les institutions », a-t-il énoncé. 

En écho à ces avertissements, la question des effets négatifs des mesures coercitives unilatérales aurait pu allonger la longue liste des menaces auxquelles est confronté l’exercice des droits de l’homme.  Elle n’a toutefois pu être abordée que partiellement, le Rapporteur spécial en charge de ce thème n’ayant pu participer à la réunion « en raison de circonstances indépendantes de sa volonté ».  Le Président de la Commission s’est engagé à transmettre à M. Idriss Jazairy les commentaires des délégations, notamment ceux de la République islamique d’Iran et de la République arabe syrienne, qui ont toutes deux dénoncé le « terrorisme économique » pratiqué à leur encontre par les États-Unis. 

Venu s’exprimer sur la participation publique et le processus décisionnel dans les espaces de gouvernance mondiaux, l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a expressément estimé qu’un tel ordre ne peut « accepter le recours à des mesures coercitives unilatérales », y voyant autant de menaces pour le multilatéralisme.  Dans cet esprit, M. Livingstone Sewanyana a appelé les forums intergouvernementaux, intersectoriels et privés à s’ouvrir à la société civile afin de réduire le déficit démocratique du processus décisionnel mondial et de gagner ainsi en légitimité et en crédibilité.

De son côté, le Rapporteur spécial sur le droit au développement, M. Saad Alfarargi, a mis en évidence les liens existant entre le droit au développement et la réduction des risques de catastrophe et ses implications pratiques, dans le contexte où, depuis 1980, le nombre d’événements catastrophiques annuel ne cesse de croître, en raison des changements climatiques, de la croissance de la population, de l’urbanisation et de la dégradation ou la perte des écosystèmes naturels. 

Avant lui, M. Zamir Akram, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement, avait fait le point sur les travaux de son instance, désormais focalisée sur l’élaboration d’un projet d’instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement. 

La Troisième Commission poursuivra, jeudi 17 octobre 2019, à partir de 10 heures, son examen de la protection et la promotion des droits de l’homme sous ses différents aspects. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Application des instruments relatifs aux droits de l’homme (A/74/40, A/74/44, A/74/48, A/74/55, A/74/56, A/74/146, A/74/148, A/74/228, A/74/233, A/74/254, A/74/256)

Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales (A/74/147, A/74/159, A/74/160, A/74/161, A/74/163, A/74/164, A/74/165, A/74/167, A/74/174, A/74/176, A/74/179, A/74/181, A/74/183, A/74/185, A/74/186, A/74/190, A/74/191, A/74/197, A/74/198, A/74/212, A/74/213, A/74/215, A/74/226, A/74/227, A/74/229, A/74/243, A/74/245, A/74/255, A/74/261, A/74/262, A/74/178, A/74/189, A/74/270, A/74/271, A/74/277, A/74/285, A/74/314, A/74/318, A/74/335, A/74/349, A/74/351, A/74/358, A/74/460)

Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux (A/74/166, A/74/188, A/74/196, A/74/268, A/74/273, A/74/275, A/74/276, A/74/278, A/74/303, A/74/311, A/74/342)

Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne (A/74/36)

Exposé de la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste

Mme FIONNUALA NÍ AOLÁIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a indiqué que l’espace qu’occupe la société civile et les défenseurs des droits de l’homme continue de figurer en première ligne du mauvais usage des lois et mesures antiterroristes, précisant que 66% des communications que son mandat a reçues entre 2005 et 2018 portent sur cette problématique.  Ce n’est pas là un moyen efficace de lutter contre le terrorisme, a-t-elle souligné.

Elle s’est félicitée de l’établissement du Groupe des Amis des victimes du terrorisme, avec à sa tête l’Afghanistan et l’Espagne.  Elle a également encouragé les États Membres à suivre l’exemple de pays comme la France qui ont introduit dans leur dispositif législatif une approche basée sur les droits de l’homme pour la protection des victimes du terrorisme.  En effet, a-t-elle poursuivi, les victimes ont davantage besoin de droits que de platitudes et autres discours sur la solidarité. 

La Rapporteuse spéciale a ensuite indiqué que cette année, elle s’était rendue au Kazakhstan pour un « dialogue ouvert », ainsi qu’en Belgique où elle avait pu aborder la problématique de l’application de la peine de mort dans le contexte de crimes liés au terrorisme.  La question des combattants étrangers a été aussi à l’ordre du jour de son mandat lors de la conférence régionale qui s’est tenue au Qatar en octobre 2018. 

En venant à son rapport, Mme Ní Aoláin a expliqué que celui-ci est consacré au rôle du droit souple et des nouvelles institutions dans la régulation et la gouvernance de la lutte antiterroriste.  Une attention particulière est accordée à l’impact de la prolifération d’instruments de droit souple, et des initiatives d’établissement des normes qui y sont liées, sur la gouvernance mondiale et la promotion et protection des droits de l’homme.

La Rapporteuse spéciale a expliqué que le droit souple est une catégorie qui pose un réel défi en matière de législation pour les États car il est rarement admis d’une loi qu’elle soit souple.  Or ce type de loi peut avoir un impact positif en matière des droits de l’homme, en donnant une clarté aux États sur la nature et la forme précise de leurs obligations juridiques, en plus de fournir des outils législatifs innovants face aux défis et problèmes nouveaux. 

Cependant, a-t-elle noté, les lois souples sont en augmentation constante dans le domaine de l’action antiterroriste et contrairement à d’autres domaines juridiques, ce droit souple est en train d’être créé par une architecture antiterroriste complexe qui a la capacité de mettre en œuvre des normes souples d’une manière qui les rend effectivement « impératives » et contraignantes pour les États dans la pratique.

Mme Ní Aoláin s’est également préoccupée de la « profonde marginalisation » des droits de l’homme dans l’architecture antiterroriste.  Une grande portion de ces lois dites souples n’ont pas été élaborées en dehors du système multilatéral et des institutions mondiales mais dans des « clubs d’États » créés à cette fin et qui ne sont ni équitables, ni ouverts.  Et ces nouvelles institutions sont également caractérisées par une absence d’expertise en matière de droit international et de droits de l’homme, a-t-elle déploré.

Rappelant que l’établissement de normes juridiques en matière de terrorisme n’a cessé de croître depuis le 11 septembre, la Rapporteuse spéciale a prévenu que la prolifération de lois ne signifie pas qu’elles sont meilleures, de même que la multiplication de règles ne débouche pas forcément sur une plus grande efficacité.  Elle a expliqué que le droit souple occupe une grande partie de ce nouvel espace juridique et que l’absence d’intégration d’une dimension des droits de l’homme est profondément problématique en matière de respect des normes juridiques internationales.

Mme Ní Aoláin a mis en garde au sujet des implications, pour la souveraineté et l’égalité des États dans le processus d’établissement de normes, de l’élaboration de lois souples au sein d’institutions fermées qui limitent la participation d’acteurs des droits de l’homme, lesquelles normes se retrouvent ensuite, via un parcours détourné, intégrées à des résolutions du Conseil de sécurité, entre autres. 

Elle a également estimé les instruments de droit souple élaborés par les entités de l’ONU dans le domaine de la lutte antiterroriste doivent référencer les obligations découlant des traités des droits de l’homme et inclure de manière consistante des normes relatives aux droits de l’homme.

Elle a aussi insisté sur l’importance de rendre les processus d’établissement et d’évaluation de normes plus participatif, notamment en y incluant la société civile et des experts en droit international des droits de l’homme, en droit international humanitaire et en droit des réfugiés.  Un tel processus et une plus grande transparence, couplés à une expertise significative, permettraient d’améliorer le respect des droits de l’homme au sein des normes établies et de leur mise en œuvre, a-t-elle affirmé.  Mme Ní Aoláin a insisté sur l’impératif d’assurer une participation véritable de la société civile.  Cela ne revient pas, a-t-elle affirmé, à inviter les groupes ou individus occasionnellement, ni uniquement ceux qui ne sont pas critiques dans leur analyse, organiser une séance photo et ignorer ensuite leur contribution, tout en proclamant que la société civile est un partenaire essentiel dans la lutte contre le terrorisme. 

La Rapporteuse spéciale a vivement recommandé d’augmenter l’appui financier et institutionnel afin de renforcer la composante des droits de l’homme au sein de l’architecture antiterroriste de l’ONU.  Elle a également exhorté le Groupe d’action financière (GAFI) et le Forum mondial de lutte contre le terrorisme, entre autres, à embaucher du personnel spécialisé et à intégrer les droits de l’homme dans tous les aspects d’établissement des normes.

Mme Ní Aoláin a également fait part de sa profonde préoccupation face à l’absence de cohérence ou de compréhension de la part des États, organisations internationales et autres acteurs, quant au fait que les nouvelles normes et institutions empiètent sur les droits de l’homme et les obligations en matière de droit international des États. 

La prolifération du droit souple et de nouvelles institutions dans le cadre de la lutte contre le terrorisme exige l’attention de tous les États car ils en ressentent tous les effets régulateurs, a-t-elle souligné.  À ses yeux, la « zone grise » de la pratique des États exige la « lumière antiseptique du jour » pour qu’États et experts des droits de l’homme interagissent de manière véritable pour saisir les implications de l’élargissement du droit souple et de la prolifération des nouvelles institutions.  L’efficacité de la loi, a-t-elle souligné, dépend du fait de savoir ce à quoi on est tenu.

Car l’un de ses objectifs est d’identifier où existent les incohérences juridiques, particulièrement celles qui affectent la pleine jouissance des droits de l’homme.  Pour finir, elle a prié les États d’accorder une attention particulière, en ces temps de prolifération de « lois flexibles » et de nouvelles institutions dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, aux « zones grises » et brèches en matière de droit.  Elle admet qu’un travail de réparation considérable doit être fait pour s’assurer que ces nouvelles normes soient conformes aux obligations du droit international. 

Dialogue interactif

Comment les États peuvent-ils veiller à ce que la société civile soit mieux intégrée aux dispositifs antiterroristes? ont demandé les États-Unis qui ont fait part de leur appui au Forum mondial de lutte contre le terrorisme, y voyant un modèle en la matière.  La délégation a aussi dénoncé la pratique de certains États qui utilisent la lutte contre le terrorisme pour réprimer des minorités religieuses. 

L’Espagne a salué le rôle des femmes dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. 

La Suisse s’est félicitée de la proposition de la Rapporteuse spéciale d’intégrer de manière plus systématique les normes des droits de l’homme dans les instruments de droit souple.  Elle a cependant dit craindre qu’une formalisation de ces instruments ne bloque la création de droit souple, laquelle offre aux États un appui pratique, rapide et conforme aux droits de l’homme pour la mise en œuvre du droit impératif.  Si ce risque existe, comment éviter qu’il se concrétise, s’est-elle interrogée. 

Que pouvons-nous faire au niveau multilatéral pour vous aider et garantir la participation de la société civile à la lutte antiterroriste? a demandé à son tour l’Irlande

L’Union européenne a souhaité savoir si des mesures avaient été prises en faveur de personnels spécialisés dans la lutte antiterroriste.  Comment cela pourrait-il contribuer à l’élaboration de normes dans ce domaine?

Le Royaume-Uni a estimé que le processus de définition des normes devrait être plus ouvert et a préconisé une plus grande participation des experts de la société civile. 

La Fédération de Russie a souligné qu’il n’existe pas d’approche globale basée sur les droits de l’homme dans la lutte antiterroriste, pour ensuite affirmer que les droits de l’homme sont souvent utilisés comme un outil politique pour recourir à la méthode du « deux poids, deux mesures ».  Pour elle, la coopération est indispensable et doit reposer sur le strict respect des normes internationales, y compris pour protéger les droits de l’homme, a insisté la délégation, qui a pris note du rôle et de la place du « droit souple » dans la lutte antiterroriste. 

Les Pays-Bas ont souhaité connaître les étapes envisageables pour les différentes parties prenantes sur le terrain. 

De son côté, le Mexique a noté que, face à l’absence de traité sur la lutte antiterroriste, les résolutions des organes de l’ONU doivent veiller à ce que les mesures prises respectent le droit international.  Il a aussi relevé que, dans son rapport, la Rapporteuse spéciale signale que les États devraient veiller à incorporer les normes de droit souple élaborées dans des environnements fermés et non transparents au processus d’élaboration de normes contraignantes du Conseil de sécurité.  À cet égard, il a souhaité savoir comment les États et les organismes internationaux pourraient mettre en œuvre cette recommandation. 

La Chine a jugé qu’il convient de mettre en œuvre de manière équilibrée la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et d’éliminer les causes du terrorisme, tout en aidant les pays à atteindre les objectifs de développement durable.  À ce sujet, elle a voulu connaître les meilleures pratiques relevées par la Rapporteuse spéciale. 

Enfin, le Kazakhstan a rappelé que la Rapporteuse spéciale s’était rendue récemment dans le pays et a assuré avoir pris note des recommandations de son rapport. 

Au sujet du défi que représente l’extrémisme violent qui débouche sur le terrorisme, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste a souligné qu’il n’existe pas de définition, au niveau international, de l’extrémisme ou de l’extrémisme violent.  Elle a également insisté sur le fait que les États ne doivent pas utiliser la lutte contre le terrorisme pour lutter contre ceux qui pensent différemment, alors même que ce phénomène est en augmentation.

Mme Ní Aoláin a également indiqué avoir travaillé avec des entreprises en ligne comme Facebook.  Le danger ici serait que trop de régulation risque de porter atteinte aux droits, a-t-elle signalé.

La Rapporteuse spéciale a ensuite rappelé que l’implication de la société civile est essentielle et va de l’intérêt collectif.  En écoutant la société civile, on a de meilleures politiques, de meilleurs résultats, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, a expliqué Mme Ní Aoláin.

En réponse à la Suisse, sur les risques de durcissement de ces processus, Mme Ní Aoláin a expliqué qu’en les rendant plus transparents, on s’assure qu’ils sont davantage connus.  Il faut, a-t-elle souligné, que les États soient prêts à entendre des messages contraires aux leurs, et à prendre en compte les recommandations de la société civile.

Sur la question de l’amendement des différents instruments mentionnés, Mme Ní Aoláin a recommandé que l’on fasse référence au respect du droit international.  Elle a également appelé à garantir une implication cohérente avec les différentes entités et les différents experts, et à mettre davantage d’informations en ligne sur ce que font les organes comme le Groupe d’action financière (GAFI). 

Mme Ní Aoláin s’est par ailleurs déclarée préoccupée par le recours à la peine de mort dans le contexte du terrorisme, par exemple en Iraq.  La Rapporteuse spéciale a ensuite indiqué que le Mexique a reconnu l’importance d’adopter une approche sexospécifique en matière de lutte antiterroriste et a regretté que ces questions soient marginalisées dans l’élaboration de normes souples. 

Saluant, en conclusion l’ouverture et la transparence dont le Kazakhstan a fait preuve lors de sa venue, Mme Ní Aoláin a souligné la valeur et l’intérêt de ces visites.

Exposé du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats

M. DIEGO GARCÍA-SAYÁN, Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats, a attiré l’attention sur trois thèmes principaux à la veille du trente-cinquième anniversaire de l’adoption des « Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature », confrontés selon lui à de graves menaces.  La première, une « énorme menace », a-t-il averti, est la corruption mondiale et transnationale et ses conséquences sur les sociétés et les institutions: selon une étude réalisée en 2018 dans 180 pays, sur un indice 100, plus des deux tiers des pays et territoires ont obtenu moins de 50 points et la moyenne se situait à 43.  Le plus préoccupant est que la majorité des pays évalués n’ont pas fait ou ont fait peu de progrès et que seuls une vingtaine ont avancé.  Or la corruption a un effet dévastateur sur le système judiciaire en sapant à juste titre la confiance des populations dans son administration.  Le Rapporteur spécial a donc insisté sur la nécessité non seulement de respecter l’indépendance de la justice, mais aussi de mettre en place des mesures pour la protéger. 

En deuxième lieu, il a dénoncé le poids du crime organisé sur le travail des juges et des magistrats partout dans le monde avec une menace particulière émanant du crime transnational, avec de graves conséquences sur la sécurité et la santé publiques, les institutions démocratiques et la stabilité économique.  Le crime transnational, affirme-t-il, pose une menace grave à la paix et au développement ainsi qu’à la souveraineté des États, utilisant non seulement les armes et la violence, mais aussi l’argent et les pots de vin pour corrompre les institutions.

Enfin, il a rappelé que les « Principes de Bangalore sur la déontologie judiciaire » ont établi des normes internationales sur l’éthique des juges et une conduite éthique de la justice.  Ils ont élaboré des principes d’indépendance, d’impartialité et d’intégrité, de bonne conduite et d’équité ainsi que de rapidité.  Aussi, le Rapporteur a appelé la communauté internationale à poursuivre ses efforts pour faire appliquer et respecter les « Principes fondamentaux » et les « Principes de Bangalore ».  Il a recommandé de promouvoir ces principes ainsi que la Convention contre la corruption et suggéré la création d’un groupe de travail intergouvernemental d’experts à composition ouverte pour étudier la possibilité de compléter les « Principes fondamentaux ».  Toutes ces questions pourront être avantageusement prises en considération lors du quatorzième Congrès des Nations Unies sur la prévention du crime l’an prochain, à Kyoto, a-t-il conclu.

Dialogue interactif

Les États-Unis se sont opposés aux États qui exercent des pressions politiques sur le judiciaire.  Ils se sont par ailleurs félicités du rôle des réseaux sociaux pour soutenir l’action des juges et des avocats et ont demandé au Rapporteur spécial s’il a noté des divergences majeures entre les comportements de ces professionnels et les organes nationaux. 

L’Espagne a estimé que l’exigence d’intégrité du judiciaire doit être complétée par l’aide apportée par l’État.  Selon elle, ces principes doivent être remis à jour car les juges font aujourd’hui face à la criminalité transnationale organisée qui parfois compte sur la connivence du pouvoir politique. 

Le Liechtenstein a voulu en savoir davantage sur la portée de la formation des juges dans le processus d’indépendance du système judiciaire.  Affirmant chercher à améliorer les procédures nationales de nomination des magistrats, il a voulu avoir les conseils du Rapporteur spécial à ce propos. 

Pour la Norvège, les juges et les procureurs doivent pouvoir exercer leurs fonctions sans interférence du politique.  Il est, selon elle, essentiel d’assurer l’indépendance du système judiciaire dans son ensemble.  À cet égard, elle a tenu à saluer l’action de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et notamment de son groupe d’experts chargé de lutter contre la corruption à grande échelle. 

Le Pérou a jugé indispensable de compléter les Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature adoptés en 1985 et de mettre en œuvre des politiques publiques fermes et efficaces pour combattre la corruption, tout en garantissant l’application des mécanismes juridiques internationaux. 

L’Union européenne a estimé que la lutte contre la corruption mondiale transnationale et ses effets sur la magistrature doit être la priorité des États.  Notant que la Convention contre la corruption est au cœur de cette action, elle a souhaité savoir comment inclure dans ce texte les recommandations du Rapporteur spécial. 

Les Maldives ont évoqué les difficultés que rencontrent les États pour parvenir à un équilibre entre l’action des juges et une justice indépendante.  Elles ont fait état du projet de leur gouvernement de rendre plus transparente l’évaluation des juges et assuré que les recommandations du Rapporteur spécial seront des directives utiles. 

La Fédération de Russie a souligné que les activités des juges et des avocats sont indispensables à l’exercice des droits de l’homme, à l’accès à la justice et à des procès équitables.  De leur indépendance dépend le sort des individus.  Selon elle, le plus grand danger réside dans la corruption, qu’il convient de combattre par le biais de la coopération internationale.  Pour la Fédération de Russie, il est fondamental d’élaborer des règles communes, à l’image des Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature.  Dans ce cadre, a-t-elle souligné, la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale est l’instance idoine pour analyser et améliorer lesdits Principes fondamentaux.  Elle a appelé les procédures spéciales des droits de l’homme à fournir à cette Commission toute l’aide dont elle a besoin dans ce sens. 

La Lituanie a estimé que les Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature devraient faire mention des pressions exercées par d’autres États.  Elle a ainsi dénoncé les agissements d’un comité d’enquête diligenté par la Fédération de Russie pour mener, entre juillet 2018 et avril 2019, des enquêtes sur des faits survenus en territoire lituanien en 1991. 

Suite à ces interventions, le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats a insisté sur l’importance d’assurer la stabilité dans leurs fonctions et d’éviter tout mécanisme de destitution et de transfert arbitraire.  Il a aussi souligné l’importance du principe de la transparence dans le processus de désignation et de sélection des juges.

Pour ce qui est du rôle des juges et procureurs face à la corruption, notamment transnationale, M. García-Sayán a expliqué que le fonctionnement de la justice ne peut être efficace que si les juges et procureurs sont indépendants.  Lorsque les juges et procureurs perdent leur indépendance, cela réduit leur légitimité car on se fiera davantage aux décisions venant d’un juge indépendant, plutôt qu’à ce qui provient d’un juge qui obéit à des critères politiques ou qui est aux mains de la corruption. 

Quant aux mécanismes les plus adéquats pour y parvenir, nous aborderons cette question lors d’un sommet en avril prochain, a poursuivi M. García-Sayán, avant d’appeler à élargir les Principes fondamentaux aux Principes de Bangalore sur la déontologie judiciaire.

Commentaires adressés au Rapporteur spécial sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme

M. CHRISTIAN BRAUN, Président de la Troisième Commission, a indiqué que M. IDRISS JAZAIRY, Rapporteur spécial sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme, n’a pas été en mesure de participer à la réunion de ce jour en raison de circonstances indépendantes de sa volonté.  M. Braun a précisé que, dans son rapport, M. Jazairy examine certaines questions juridiques découlant de l’application de mesures coercitives unilatérales.  Sous cet angle, le Rapporteur spécial s’intéresse à la situation dans un certain nombre de pays et prône des mesures susceptibles de remédier aux violations des droits de l’homme qui voient le jour dans ces situations.  Le Président de la Commission a invité les délégations à lui faire des observations ou à lui poser des questions, assurant que leurs interventions seront transmises au Rapporteur spécial.

Saisissant cette occasion, le Venezuela, qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, a réaffirmé la position du Mouvement concernant les mesures coercitives unilatérales utilisées comme moyens de pression politique, économique et financière.  Ces mesures violent la Charte des Nations Unies ainsi que les normes et principes du droit international, a-t-il souligné, notant que cette position a été réaffirmée le 26 septembre dernier, lors de la réunion des ministres des affaires étrangères du Mouvement sur ce thème.  Dans ce contexte, le Venezuela a dit attendre avec intérêt la présentation des prochains rapports du Rapporteur spécial.

La République islamique d’Iran a dénoncé les mesures coercitives unilatérales prises par les États-Unis à son encontre en faisant état des effets de ces mesures sur les « enfants papillons », ces enfants atteints d’une grave maladie de peau nécessitant des bandages spécifiques.  En raison des sanctions américaines, l’importation de ces bandages est devenue presque impossible, a regretté la délégation, ajoutant que les souffrances de ces enfants témoignent de la violence contre les civils iraniens.  Rappelant enfin que ces sanctions tuent et peuvent constituer des crimes contre l’humanité, elle a évoqué un « terrorisme économique ». 

La Fédération de Russie a dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui violent le droit international et empêchent la communauté internationale de régler les crises.  Ces pratiques nuisent au système des relations internationales et ne permettent que rarement d’aboutir aux résultats escomptés, a-t-elle commenté, accusant certains États d’avoir des objectifs politiques opportunistes. 

La Chine a relevé que l’Assemblée générale et le Conseil des droits de l’homme ont adopté des résolutions qui mettent en avant les effets des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme.  Pourtant certains pays continuent de mener cette politique, notamment l’un d’eux qui utilise sa puissance d’État pour exercer des pressions sur d’autres pays, a dénoncé la délégation.  En tant que fervente défenseuse du multilatéralisme, la Chine s’oppose à toute forme de mesure unilatérale et appelle les pays concernés à recourir à la coopération pour régler les problèmes. 

La République arabe syrienne a relevé que les mesures coercitives unilatérales ont des incidences destructrices sur le pays et les populations.  Ces mesures visent des personnes vulnérables et empêchent, entre autres, l’importation de matériels d’imagerie médicale, a-t-elle dénoncé.  De plus, l’imposition de mesures coercitives unilatérales constitue un blocus de facto et une forme de terrorisme économique qui contredit les discours sur les besoins humanitaires. 

Rappelant qu’elle a elle-même connu une décennie de « sanctions injustifiées », l’Érythrée s’est inquiétée de la multiplication de telles sanctions, qu’elle a qualifiées de mesures « inhumaines ».  Pour y remédier, elle a voulu savoir quels efforts permettraient une implication de la communauté internationale en matière de sensibilisation. 

Cuba a elle aussi rappelé qu’elle subit depuis plus de 60 ans un blocus imposé par les États-Unis, encore durci cette année.  Elle a réitéré son opposition à de telles mesures et a indiqué qu’elle présenterait au cours de la session un projet de résolution sur les droits de l’homme et les mesures coercitives unilatérales. 

Exposé du Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement

M. ZAMIR AKRAM, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement, a rappelé qu’à l’origine, le mandat du Groupe de travail était de surveiller et d’évaluer les progrès en matière de promotion et de mise en œuvre du droit au développement aux niveaux national et international.  Mais au fil des années, ce mandat a évolué et le Groupe de travail est maintenant focalisé, en vertu de la résolution 39/9 du Conseil des droits de l’homme, adoptée en septembre 2018, sur l’élaboration d’un projet d’instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement. 

À sa dernière session, qui s’est tenue du 29 avril au 3 mai derniers à Genève, le Groupe de travail, outre des dialogues interactifs tenus avec le Rapporteur spécial sur le droit au développement et d’autres experts sur la question, a commencé à discuter du projet.  Des divergences de vues sont apparues sur un tel instrument, en particulier sur son contenu et sa portée.  Certains États Membres ainsi qu’un groupe politique n’ont pas participé aux discussions car, selon eux, une norme internationale contraignante n’est pas le mécanisme approprié pour réaliser le droit au développement, a indiqué M. Akram, appelant les délégations à s’engager sur cette importante question.

Au cours de cette session, le Groupe de travail a recommandé que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) prenne les mesures nécessaires et mette à disposition des ressources pour la réalisation et la visibilité de ce droit.  Le HCDH a également été appelé à identifier des projets tangibles dédiés à ce droit.  Le Groupe de travail a aussi recommandé que son Président conduise des consultations approfondies avec les parties prenantes, dont les organisations régionales, les commissions économiques régionales et autres organisations, sur la préparation du projet d’instrument juridiquement contraignant. 

Toutes ces recommandations ont été entérinées par le Conseil des droits de l’homme en septembre dernier.  Dans sa résolution 42/23, il demande ainsi au Groupe de travail de commencer, à sa vingt et unième session, à œuvrer à l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant, s’appuyant sur le texte que rédigera son Président-Rapporteur et qu’il aura préparé en collaboration et avec l’assistance d’experts en droit international des droits de l’homme.  Ce projet sera ensuite envoyé aux États Membres avant la prochaine session du Groupe de travail en avril 2020, a précisé le Président, ajoutant qu’il est déjà engagé dans ce processus de larges consultations avant rédaction. 

Il a indiqué avoir reçu, à ce jour, 26 réponses à ses demandes de contributions, dont 1 de la part d’un groupe politique, 5 envoyées par des États Membres, 2 par des organisations intergouvernementales, 5 d’organisations régionales et 13 d’organisations de la société civile. 

Dialogue interactif

Le Venezuela a dénoncé l’impact des mesures coercitives unilatérales sur la réalisation du droit au développement, pour ensuite réitérer l’appel du Mouvement des pays non alignés en faveur de la tenue, sous les auspices de l’ONU, d’une conférence de haut niveau sur le droit au développement.

Le Pakistan a souligné que la réduction des risques de catastrophe fait partie du droit au développement.  La délégation a aussi appelé à étudier les liens entre le droit au développement et les conflits, l’occupation ou encore les mesures coercitives financières.

Lui emboîtant le pas, la République islamique d’Iran a dénoncé l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les droits de sa population, décriant un « crime contre l’humanité » et un acte de « terrorisme économique ».

La Fédération de Russie a espéré que les recommandations du Groupe de travail permettront de créer une base normative et juridique robuste, avant que Cuba n’indique qu’elle compte présenter un projet de résolution consacré au droit au développement, dans la perspective de l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant.

La Chine a regretté que le droit au développement n’ait pas été pleinement mis en œuvre à travers le monde et a appelé à mettre l’accent sur l’innovation et l’utilisation de nouvelles technologies.  La Chine espère qu’un texte juridiquement contraignant sera adopté.

Suite à ces interventions, le Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement a assuré que l’impact des mesures coercitives unilatérales et des situations de catastrophe sur la réalisation du droit au développement sera pris en compte dans le cadre de l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant.

Exposé du Rapporteur spécial sur le droit au développement

M. SAAD ALFARARGI, Rapporteur spécial sur le droit au développement, a indiqué que son rapport explorait les liens explicites entre le droit au développement et la réduction des risques de catastrophe et ses implications pratiques, dans le contexte où, depuis 1980, le nombre d’événements catastrophiques par année ne cesse de croître, en raison des changements climatiques, de la croissance de la population, de l’urbanisation et de la dégradation ou la perte des écosystèmes naturels.  Or la réduction des risques de catastrophe est partie intégrante du développement économique et social, en plus d’être essentiel au développement durable.  Et à ce titre, le droit au développement est explicitement mentionné au paragraphe 19(c) des principes directeurs du Cadre de Sendai, créant de fait un lien avec la réduction des risques de catastrophe, a-t-il dit. 

Afin d’intégrer le droit au développement aux efforts de réduction des risques de catastrophe, M. Alfarargi a appelé les gouvernements à promouvoir des canaux de participation à tous les étages de la préparation, mise en œuvre et suivi des politiques et programmes de réduction des risques.  Ce processus devrait inclure la participation active de toutes les parties prenantes, dont les gouvernements, les organisations régionales, gouvernementales et non gouvernementales par exemple, ainsi que le secteur privé et les médias.  Il importe également d’assurer la participation des plus désavantagés, notamment les personnes handicapées, les femmes et les enfants.

Notant par ailleurs l’importance, pour les États, d’établir des plateformes nationales de réduction des risques de catastrophe, M. Alfarargi s’est inquiété du fait qu’à ce jour, seuls 65 pays en disposent.  Il a également estimé que les États devraient disposer ou collecter un minimum de données ventilées par sexe, âge et handicap.  Ils devraient en outre mettre en place des mécanismes d’accès facile à l’information en cas de catastrophe, et prévoir des recours juridiques pour veiller à ce que ces accès ne soient pas niés.  En outre, les technologies de communication des alertes doivent être accessibles, y compris aux personnes handicapées.  Le rapport contient en outre plusieurs recommandations pour assurer la pleine participation des personnes handicapées aux efforts de réduction des risques de catastrophe. 

Dialogue interactif

L’Égypte a réitéré qu’il est temps d’adopter un instrument international contraignant sur le droit au développement, avertissant dans la foulée que les efforts n’aboutiront pas si aucune aide n’est apportée aux pays les moins avancés.

Cabo Verde a voulu des précisions sur la recommandation demandant une participation active de l’ensemble des parties prenantes pour aider les pays particulièrement vulnérables aux changements climatiques.

La Zambie, au nom du Groupe des États d’Afrique, a jugé nécessaire de procéder à une évaluation complète de la mise en œuvre des droits sociaux, politiques et culturels pour que chaque pays puisse discuter des difficultés rencontrées. 

Que peut-on faire pour intégrer le droit au développement dans certains cadres, tel que le Cadre de Sendai? a demandé l’Afrique du Sud.

L’Union européenne s’est opposée à l’élaboration d’une norme internationale juridiquement contraignante.  Elle a ensuite voulu savoir comment le Rapporteur spécial évalue l’impact sur le droit au développement des violations des droits de l’homme, y compris ceux des femmes et des filles.

« Nous devons consolider la solidarité internationale, et non dicter des priorités ou des conditions », a estimé l’Érythrée, qui a voulu plus de précisions sur les avantages des partenariats. 

Rappelant lui aussi que les pays en développement sont davantage exposés aux phénomènes climatiques extrêmes, Djibouti a apporté son soutien à la mise en place d’un instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement. 

Les Maldives ont rappelé que les pays en développement sont menacés de manière disproportionnée face aux catastrophes et ont souhaité davantage d’informations sur les modalités de financement de « mesures ciblées ».

Cuba a souhaité connaître l’avis du Rapporteur spécial concernant l’importance de la coopération internationale, notamment sur le transfert des technologies.

L’Azerbaïdjan a voulu que des informations sur les personnes déplacées suite à un conflit armé figurent dans les prochains rapports du Rapporteur spécial, tandis que l’Indonésie a demandé plus d’informations sur le renforcement des capacités en matière de réduction des risques de catastrophe.

La République islamique d’Iran a attiré l’attention sur les cas où, suite à une catastrophe naturelle, les partenaires du développement ont été confrontés à des difficultés dans leurs activités d’assistance en raison de l’existence de mesures unilatérales qui auraient, par exemple, entravé la délivrance des autorisations nécessaires. 

De son côté, la Chine a appelé le Rapporteur spécial à renforcer sa coopération avec les mécanismes chargés du droit au développement.

En matière de réduction des risques de catastrophe, il faut renforcer la résilience, a préconisé dans un premier temps le Rapporteur spécial sur le droit au développement, répondant à ces commentaires.  Cela est un élément essentiel du travail auquel chaque pays doit s’atteler notamment dans la mise en œuvre du Cadre de Sendai.  S’il est appliqué de manière adéquate dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe, le droit au développement donnera plus de chance de réussite aux efforts déployés par la communauté internationale. 

Le Rapporteur spécial a également insisté sur l’aspect sexospécifique, conscient de l’impact des catastrophes sur les femmes, « premières victimes des défaillances du développement ».  Il a souligné que la mise en œuvre des objectifs de développement durable est la « pierre angulaire de toute la coopération internationale entre les pays », a-t-il insisté.  Ironisant, il a ajouté: « ce n’est sûrement pas dans le “secteur catastrophes” que nous allons mobiliser des fonds ».  Il a également insisté sur l’importance de la collecte de données ventilées et de bien informer les communautés affectées.

S’agissant des problèmes rencontrés par les petits États insulaires en développement, il a suggéré aux pays souffrant d’une situation similaire d’établir une « plateforme commune » regroupant l’ensemble des problèmes afin d’identifier les différentes entraves au développement. 

Exposé de l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable

M. LIVINGSTONE SEWANYANA, Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable, a indiqué que son deuxième rapport devant la Troisième Commission avait pour thème la participation publique et le processus décisionnel dans les espaces de gouvernance mondiaux et leur impact sur l’ordre international démocratique et équitable.  Parmi ces espaces, a-t-il précisé, figurent le Groupe des Sept (G7), le Groupe des Vingt (G20), le groupe comprenant le Brésil, la Fédération de Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud (BRICS), le Groupe des 77, le Mouvement des pays non alignés, le Forum économique mondial et le groupe Bilderberg. 

Il a indiqué que les groupes intergouvernementaux, multisectoriels et privés ont acquis une grande importance aux niveaux géopolitique, économique et financier en raison du rôle qu’ils jouent dans le développement de l’ordre international, parallèlement au système de l’ONU.  Toutefois, a-t-il relevé, ces groupes restent largement inaccessibles au public, particulièrement aux gens dont la vie et les moyens de subsistance sont touchés par les décisions prises, contribuant ainsi au déficit démocratique dans le processus décisionnel mondial.

Après avoir rencontré, dans le cadre de la préparation de son rapport, des représentants des États Membres participant aux groupes cités précédemment mais aussi de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, du Forum économique mondial et de la société civile, M. Sewanyana a pu constater que l’influence des forums mondiaux de gouvernance est largement reconnue.  De l’établissement des priorités économiques à la coordination des réponses aux défis transnationaux tels que la migration, le commerce équitable, la paix et la sécurité mondiales, sans oublier les changements climatiques, le terrorisme et la corruption, les décisions de ces groupes intergouvernementaux, multisectoriels et privés affectent non seulement leurs membres et ceux qui travaillent avec eux mais également des populations vivant à l’extérieur de leurs territoires, a noté l’Expert indépendant. 

Il a de plus prédit que l’influence de ces forums devrait même gagner en ampleur compte tenu de la nature de plus en plus transfrontalière des défis politiques et économiques auxquels est confronté le monde.  Indépendamment de la structure et du mode de fonctionnement de ces espaces de gouvernance, la participation du public est une valeur fondamentale qui doit être soutenue pour garantir que le travail de ces groupes contribue à un ordre international démocratique et équitable, a plaidé M. Sewanyana. 

À ses yeux, la participation de la société civile est d’une importance cruciale pour assurer la transparence et la légitimité des processus de prise de décisions des forums mondiaux, ainsi que leur crédibilité.  Cette participation signifie que les décisions prises soient éclairées par un large éventail d’acteurs, comme les populations marginalisées qui sont les plus vulnérables aux conséquences des décisions prises.  De fait, a-t-il poursuivi, les mesures prises par le biais d’un processus participatif sont susceptibles d’être plus efficaces et durables parce qu’elles ont été approuvées par les populations affectées et des experts indépendants.  Reste que, par manque d’information et de vision des objectifs poursuivis par les forums, les représentants de la société civile ne pensent pas systématiquement à participer, a-t-il déploré. 

De plus, a poursuivi M. Sewanyana, la nature étatique des groupes de gouvernance mondiaux et leur approche improvisée en matière de participation de la société civile renvoie le message que les organisations extérieures et le grand public n’ont pas de rôle spécifique à jouer dans ces espaces.  Et l’absence d’information disponible sur la façon de s’impliquer vient renforcer le sentiment partagé selon lequel ces espaces sont exclusifs. 

Cela étant, l’Expert indépendant a indiqué que de nombreuses organisations ont considéré leur participation à ces forums comme un accomplissement, notamment parce qu’elles ont vu leurs priorités reprises dans des documents de fin de sommet.  D’autres continuent cependant d’exprimer des doutes quant à l’impact de ces documents et l’intérêt de leur participation.  Elles craignent en effet que l’absence de mécanismes de mise en œuvre et de suivi, de perspectives à long terme, d’obligations de rapport et de cibles financières ne réduisent ces résultats qu’à des formules rhétoriques, a-t-il expliqué. 

Pour parvenir à une participation effective du public à ce niveau mondial de gouvernance, il importe aussi de garantir un environnement sûr et propice au niveau local, a soutenu M. Sewanyana.  Il faut en outre que les États prennent leurs responsabilités et diligentent des enquêtes sur toutes les allégations de représailles à l’encontre d’acteurs de la société civile à la suite de leur participation ou tentative de participation, a-t-il affirmé.  De fait, a conclu l’Expert indépendant, un ordre international démocratique et équitable ne peut être atteint que si les espaces de gouvernance mondiaux consentent à devenir des espaces centrés sur la personne. 

Dialogue interactif

Le Venezuela, au nom du Mouvement des pays non alignés, s’est inquiété du recours croissant à l’unilatéralisme et aux mesures imposées unilatéralement, et a lancé un appel en faveur de la démocratie. 

Les Maldives ont jugé nécessaire d’élargir aux petits États insulaires en développement l’espace de participation au processus multilatéral.

La Fédération de Russie a plaidé en faveur d’un dialogue constructif entre les gouvernements et la société civile.  La délégation a par ailleurs estimé que le rapport penche en faveur de certains sujets tels que les groupes marginalisés, ce qui, selon elle, l’éloigne de son objectif.  Elle a recommandé à l’Expert de prêter attention à l’impact qu’ont de telles décisions sur son mandat.

La Chine a insisté sur le fait qu’il faille respecter la souveraineté et l’indépendance des pays et éviter l’ingérence.

Cuba s’est dite de plus en plus préoccupée au vu des attaques contre le multilatéralisme, dénonçant tout particulièrement la politique des États-Unis qui se sont retirés de plusieurs accords internationaux, dont l’Accord de Paris.  Il est difficile de parvenir à un ordre démocratique et équitable dans de telles circonstances, a estimé la délégation.

Réagissant à ces commentaires, l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a souligné qu’un ordre démocratique et équitable ne peut accepter le recours à des mesures coercitives unilatérales.  « Celles-ci sont une véritable menace au multilatéralisme », a-t-il prévenu.  Il a appelé les États à agir de concert pour réduire le recours à de telles mesures, ainsi que leurs répercussions négatives sur les sociétés.  Il s’est également inscrit contre toutes représailles, y voyant une entrave à la participation équitable de tous.

Il a souligné que les petits États insulaires en développement doivent faire entendre leur voix, et ce, à tous les niveaux si « nous voulons engranger des réussites ». 

L’Expert s’est ensuite élevé contre la prolifération des espaces de gouvernance mondiale à l’extérieur du système des Nations Unies.  C’est, a-t-il averti, un phénomène qui impacte le fonctionnement même du système multilatéral. 

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