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Le Conseil de sécurité reconduit d’un an l’Opération de l’ONU et de l’Union africaine au Darfour, reportant à plus tard la question de son retrait

8654e séance – après-midi
CS/14007

Le Conseil de sécurité reconduit d’un an l’Opération de l’ONU et de l’Union africaine au Darfour, reportant à plus tard la question de son retrait

À la demande expresse du nouveau Gouvernement soudanais, le Conseil de sécurité a décidé, cet après-midi, de proroger pour une durée d’un an le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et de maintenir le niveau actuel de ses effectifs jusqu’au 31 mars 2020, date à laquelle le Conseil entend prendre une décision finale quant au calendrier de retrait de l’Opération.

La question du rythme et de l’ampleur du retrait de la MINUAD, créée en 2003 afin d’instaurer la paix dans la province soudanaise du Darfour, divise depuis maintenant deux ans les membres du Conseil.  En juillet 2018, ces derniers s’étaient toutefois mis d’accord, dans la résolution 2429, sur une réduction progressive des effectifs de l’Opération dans la perspective d’un retrait au 30 juin 2020, « sous réserve qu’aucun changement important n’intervienne dans les conditions de sécurité au Darfour et que les grands indicateurs soient atteints ». 

En juin 2019, dans sa résolution 2479, le Conseil avait pourtant reconduit la MINUAD pour une durée de quatre mois, jusqu’à la date d’aujourd’hui, sans modification de son mandat, ni réduction supplémentaire du plafond de ses effectifs.  Cette prorogation « à titre provisoire et exceptionnel », faisait suite au renversement par l’armée soudanaise de l’ex-Président du pays, M. Omar al-Bashir, et reflétait les préoccupations du Conseil quant à la période d’incertitude politique et sécuritaire traversée par le Soudan.

Depuis lors, la situation dans le pays a été marquée par des développements positifs, comme le note la résolution 2495 (2019), adoptée aujourd’hui à l’unanimité par le Conseil.  Le texte salue en effet la signature, le 17 août, de la Déclaration constitutionnelle sur la mise en place d’un nouveau gouvernement de transition dirigé par des civils et d’institutions de transition, l’entrée en fonctions, le 21 août, du Premier Ministre et du Conseil souverain et la formation, le 8 septembre, du nouveau Gouvernement.  Le Conseil salue également l’amélioration des conditions de sécurité au Darfour, tout en se déclarant préoccupé par la précarité de la situation sécuritaire dans certaines zones de la province.  Il se félicite, enfin, des décisions prises par le Gouvernement soudanais pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et de l’accord signé, le 25 septembre, entre ce dernier et la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, afin d’ouvrir un bureau de pays et des bureaux locaux au Soudan.

Eu égard à ces évolutions, conformément au courrier adressé le 22 octobre au Secrétaire général par le nouveau Gouvernement soudanais, le Conseil décide de reconduire la MINUAD jusqu’au 31 octobre 2020 et de maintenir son mandat actuel d’appui au processus de paix et aux activités de consolidation de la paix, ainsi que de protection des civils. 

Sur la base des recommandations du Rapport spécial du Président de la Commission de l’UA et du Secrétaire général de l’ONU (S/2019/816), le Conseil décide en outre de maintenir jusqu’au 31 mars 2020 les plafonds actuels en matière d’effectifs militaires et policiers de la MINUAD, qui conservera toutes ses bases d’opérations pendant la période, à l’exception de son état-major de secteur au Darfour méridional.  Ce dernier sera fermé et restitué au Gouvernement soudanais, qui s’est engagé à l’utiliser à des fins exclusivement civiles.

Quant au calendrier de retrait de l’Opération, le Conseil annonce son intention de se prononcer sur les mesures à prendre et sur la mise en place d’une présence de suivi de l’Opération, d’ici au 31 mars 2020.  Il se basera pour cela sur le rapport spécial que le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’UA sont tenus de lui présenter, le 31 janvier 2020 au plus tard.

Lors de la précédente reconduction de l’Opération au mois de juin, certains membres du Conseil, à l’instar de la Fédération de Russie, avaient appelé à respecter le calendrier de retrait, fixé au 30 juin 2020.  Les conditions sont réunies pour passer du maintien à la consolidation de la paix, avait alors affirmé la Russie.  D’autres, au contraire, à l’image du Royaume-Uni et de l’Allemagne, tous deux porte-plumes de la présente résolution, avaient jugé nécessaire de marquer une pause dans le processus de retrait de la MINUAD. 

La prorogation pour un an du mandat de l’Opération répond efficacement à la volonté des autorités soudanaises « d’éviter un vide sécuritaire au Darfour », s’est félicité le Royaume-Uni, qui a vu dans cette adoption à l’unanimité l’ouverture d’un nouveau chapitre dans l’histoire des relations entre le Soudan et le Conseil.  Nul doute que cette reconduction de 12 mois de l’Opération, dont cinq dans sa forme actuelle, permettra d’éviter qu’un tel vide sécuritaire ne se produise, a affirmé la France.  C’est également la marque de notre vif soutien envers la paix au Darfour et le Premier Ministre soudanais, a estimé l’Allemagne, exhortant tous les groupes armés à se rallier sans conditions préalables aux négociations de paix. 

Dans la perspective du passage de la phase du maintien de la paix à celle de consolidation de la paix en 2020, l’Allemagne a insisté pour que la mission politique spéciale destinée à prendre le relais de la MINUAD soit adaptée aux besoins du Soudan.  Nous espérons en effet qu’il s’agit de la dernière prorogation de la MINUAD, ont déclaré les États-Unis, estimant que le Soudan avait tout intérêt, également, à ce que la Mission se retire l’an prochain.

Invité à s’exprimer, ce dernier a remercié le Conseil pour son appui au Gouvernement civil soudanais durant la période de transition actuelle, à l’image de la reconduction de la MINUAD et du maintien de sa présence géographique et de ses effectifs jusqu’au 31 mars.  Cela nous donne les coudées franches pour préparer une paix globale dans l’ensemble du pays et mettre en œuvre des mesures de confiance avec les groupes armés, a salué le représentant soudanais.  Le pays s’est également dit prêt à étudier les options disponibles pour définir un mécanisme idoine, destiné à prendre le relais de la MINUAD.  En gage de son engagement en faveur de la paix, le Soudan a annoncé la création d’une commission nationale pour la paix, qui sera chargée de la coopération entre les institutions de l’État pour pallier les effets du conflit.  Pour tourner définitivement la page du conflit, le pays a également demandé à la communauté internationale d’appuyer sa radiation de la liste des États soutenant le terrorisme, qui constitue actuellement un frein au développement économique soudanais.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD – (S/2019/816)

Texte du projet de résolution (S/2019/849)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures et toutes les déclarations de sa présidence concernant la situation au Soudan, et soulignant qu’il importe de s’y conformer et de les appliquer pleinement,

Réaffirmant avec force son attachement à la souveraineté, à l’unité, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Soudan,

Réaffirmant les principes fondamentaux du maintien de la paix, à savoir notamment le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat, considérant que le mandat de chaque mission de maintien de la paix est adapté à la situation du pays concerné, soulignant que les mandats qu’il autorise sont conformes aux principes fondamentaux, réaffirmant qu’il escompte l’exécution intégrale de ces mandats et rappelant à cet égard sa résolution 2436 (2018),

Se félicitant de la signature, le 17 août 2019, de la Déclaration constitutionnelle sur la mise en place d’un nouveau gouvernement de transition dirigé par des civils et d’institutions de transition, et se félicitant également de l’entrée en fonctions du Premier Ministre et du Conseil souverain, le 21 août 2019, et des Ministres, le 8 septembre 2019,

Se félicitant de l’engagement pris dans la Déclaration constitutionnelle d’instaurer une paix juste et globale au Soudan en s’attaquant aux causes profondes du conflit et à ses conséquences, approuvant à cet égard le lancement des négociations de paix, le 14 octobre 2019, et notant avec satisfaction le rôle du Gouvernement sud-soudanais dans l’appui à ces négociations,

Demande au Gouvernement soudanais, aux mouvements armés du Darfour et à toutes les parties concernées, y compris les représentants des personnes déplacées, à saisir l’occasion et à engager des négociations de paix inclusives, sans conditions préalables et dans le respect de la Déclaration constitutionnelle, et encourageant les parties au conflit à conclure rapidement un accord de paix,

Soulignant qu’il est impératif que le retrait de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) tienne compte des progrès réalisés dans le processus de paix,

Notant avec satisfaction l’amélioration des conditions de sécurité au Darfour, tout en se déclarant préoccupé par le fait que la sécurité demeure précaire dans certaines parties du Darfour en raison des activités déstabilisatrices d’un certain nombre d’acteurs, qui aggravent l’insécurité, les menaces contre les civils, les violences intercommunautaires et les actes criminels, et compromettent le développement et l’état de droit,

Saluant les décisions prises par le Gouvernement soudanais pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et créer des conditions plus favorables pour les acteurs humanitaires, et encourageant la pleine application de ces décisions afin d’assurer un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave dans l’ensemble du Darfour,

Se félicitant de l’accord signé le 25 septembre 2019 entre le Gouvernement soudanais et la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme en vue de l’ouverture d’un bureau de pays et de bureaux locaux au Soudan, et encourageant la mise en service rapide de ces bureaux,

Prenant note du rapport spécial du Président de la Commission de l’Union africaine et du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (S/2019/816),

Prenant note également de la lettre datée du 22 octobre 2019, adressée au Secrétaire général de l’Organisation par le Gouvernement soudanais,

Estimant que la situation au Soudan menace la paix et la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide de proroger jusqu’au 31 octobre 2020 le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD);

2.    Demande au Gouvernement soudanais, aux mouvements armés du Darfour et à toutes les autres parties prenantes de participer véritablement aux négociations de paix et de démontrer qu’ils font avancer ces négociations en vue d’instaurer une paix juste et globale, de façon à permettre à la MINUAD de se retirer pleinement;

3.    Décide que la MINUAD continuera de s’acquitter du mandat énoncé dans la résolution 2429 (2018) et, conformément aux tâches existantes et en coopération avec l’équipe de pays des Nations Unies, concentrera ses efforts sur:

i)    l’appui au processus de paix, notamment à la médiation entre le Gouvernement soudanais et les mouvements armés du Darfour; le travail de la Commission de paix nationale; le soutien à la mise en œuvre de tout accord de paix, conformément à la priorité stratégique actuelle du Gouvernement soudanais, qui cherche à instaurer une paix juste et globale;

ii)   l’appui aux activités de consolidation de la paix, y compris le renforcement des équipes chargées de la liaison avec les États et leur extension au Jebel Marra;

iii)  la protection des civils; la surveillance des droits de l’homme et la communication d’informations sur les atteintes à ces droits, notamment les violences sexuelles et fondées sur le genre et les violations graves commises contre des enfants; la facilitation de l’aide humanitaire et la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire; l’appui à la création des conditions de sécurité nécessaires au retour volontaire éclairé, sûr, digne et durable des réfugiés et des personnes déplacées ou, le cas échéant, à leur intégration au niveau local ou à leur réinstallation dans un autre lieu;

4.    Prend note de la première option prévue au paragraphe 45 a) du rapport spécial du Président de la Commission de l’Union africaine et du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (S/2019/816) et décide que, jusqu’au 31 mars 2020, la MINUAD maintiendra ses plafonds actuels en matière d’effectifs militaires et policiers et, en outre, qu’elle maintiendra pendant cette période toutes ses bases d’opérations pour exécuter son mandat, à l’exception de son état-major de secteur au Darfour méridional, qui sera fermé conformément aux dispositions du paragraphe 5 de la présente résolution, tout en se tenant prêt à fermer rapidement et de façon responsable d’autres bases d’opérations sur décision du Conseil;

5.    Prend acte de l’engagement pris par le Gouvernement soudanais, conformément aux règles et règlements de l’Organisation des Nations Unies, d’utiliser à des fins exclusivement civiles les bases d’opérations restituées par la MINUAD, et prie instamment le Gouvernement soudanais de veiller à ce que les bases d’opérations qui ont déjà été restituées par la MINUAD et celles qui le seront à l’avenir soient également utilisées à des fins exclusivement civiles;

6.    Prie le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’Union africaine de lui présenter, au plus tard le 31 janvier 2020, un rapport spécial consacré aux questions suivantes:

i)    l’évaluation de la situation sur le terrain; l’état d’avancement du processus de paix; la situation des bases d’opérations déjà restituées par la MINUAD; des recommandations sur les mesures à prendre concernant la réduction des effectifs de la MINUAD;

ii)   les options concernant la mise en place d’une présence de suivi de la MINUAD, compte tenu des vues et des besoins du Gouvernement soudanais;

7.    Annonce qu’il a l’intention, compte tenu des conclusions du rapport spécial demandé au paragraphe 6 de la présente résolution, de se prononcer, d’ici au 31 mars 2020, sur les mesures à prendre concernant le retrait et la sortie responsables de la MINUAD conformément au paragraphe 1 de la présente résolution, et qu’il entend adopter à la même occasion une résolution établissant la présence de suivi de la MINUAD;

8.    Décide de rester saisi de la question.

à suivre...

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: L’ECOSOC décrit comme la « destination par excellence » pour accélérer la réalisation des objectifs de développement durable

Soixante-quatorzième session,
22e séance plénière – matin
AG/12208

Assemblée générale: L’ECOSOC décrit comme la « destination par excellence » pour accélérer la réalisation des objectifs de développement durable

La vision et l’engagement à passer à l’action que l’on a vus en 2015, lors de l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030, sont toujours intacts, a affirmé aujourd’hui à l’Assemblée générale, la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC).  Mme Inga Rhonda King, qui présentait le rapport 2018-2019*, a décrit l’ECOSOC et son Forum de haut niveau pour le développement durable comme la « destination par excellence » pour faire avancer les choses. 

La capacité des objectifs de développement durable de dépasser les frontières traditionnelles de la coopération internationale au développement a été une source d’inspiration, a-t-elle dit.  Ces objectifs sont désormais inclus dans les agendas et programmes d’action des villes, des communautés, du milieu scientifique et du monde des affaires, qu’il s’agisse des banques, des grandes surfaces ou autres. 

La manière avec laquelle les États Membres se sont appropriés le Programme 2030, s’est réjouie la Présidente de l’ECOSOC, ne peut être qu’encourageante.  Tirant parti des quatre sessions du Forum de haut niveau pour le développement durable et du Sommet de septembre dernier, les États Membres ont lancé une « Décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable ». 

Le rapport de l’ECOSOC, a dit sa Présidente, vous transmet les messages du thème de 2019 « Autonomiser les peuples et assurer l’inclusion et l’égalité » et reconnaît que le monde est mal parti pour réaliser les objectifs de développement durable d’ici à 2030 mais qu’il peut inverser la tendance.  Mme Rhonda King en a voulu pour preuve les 49 examens nationaux volontaires qui montrent clairement à quel point les gouvernements s’efforcent de renforcer leurs institutions pour maximiser les synergies requises par l’agenda transformateur. 

Le Forum politique de haut niveau a aussi révélé que le monde doit encore comprendre la manière d’assurer des progrès dans certains des objectifs du Programme 2030, en particulier l’objectif 10 sur la réduction des inégalités.  Le Segment sur les activités opérationnelles a, quant à lui, fourni une orientation stratégique du repositionnement du système des Nations Unies pour le développement de manière à renforcer son impact dans les pays. 

Au vu du nombre sans précédent des déplacements forcés, des crises prolongées de plus en plus complexes et des catastrophes naturelles dévastatrices, la Présidente de l’ECOSOC a mis en avant le travail du Segment humanitaire, en prévision du soixante-dixième anniversaire de la Convention de Genève de 1949 et dans la perspective du Sommet Action Climat, de septembre dernier.  La manifestation commune des Segments « activités opérationnelles » et « humanitaire » sur la transition des secours au développement a fait le bilan des derniers progrès et des meilleures pratiques mais aussi des problèmes qui subsistent.  L’ECOSOC a d’ailleurs tenu une réunion spéciale après le passage de l’ouragan Idai au Mozambique, au Malawi et au Zimbabwe.

La collaboration entre les Présidents de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC s’est renforcée, s’est félicitée Mme Rhonda King, qui a décrit le Conseil comme la « destination par excellence » pour recevoir des analyses solides et des conseils sur les politiques à mettre en œuvre pour accélérer l’action en faveur des objectifs de développement durable.  C’est un espace ouvert où décideurs et autres parties prenantes parlent de cet agenda intégré, de sa mise en œuvre et des moyens transformateurs de répondre à notre objectif commun de développement.  Les Nations Unies, a-t-elle conclu, ont besoin d’un ECOSOC et d’un Forum de haut niveau pour le développement durable plus forts mais aussi stratégiques, dotés d’une vision à long terme et produisant des résultats concrets.  « L’écosystème » de l’ECOSOC et du Forum sont « promis à un bel avenir ».

L’Assemblée générale reprendra ses travaux demain, vendredi 1er novembre, à 10 heures pour entendre le Président du Conseil des droits de l’homme. 

* A/74/3

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sahara occidental: le Conseil de sécurité reconduit la MINURSO et renoue avec le cycle de renouvellement annuel de la Mission

8651e séance – après-midi 
CS/14003

Sahara occidental: le Conseil de sécurité reconduit la MINURSO et renoue avec le cycle de renouvellement annuel de la Mission

Le Conseil de sécurité a décidé, cet après-midi, de proroger pour une durée d’un an le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), reprenant ainsi le cycle de renouvellement annuel de la Mission, qui avait été interrompu en avril 2018 au profit de prorogations seulement semestrielles.

Jusqu’en 2017 inclus, le mandat de la MINURSO était renouvelé par cycle de 12 mois.  En avril 2018, les États-Unis, pays porte-plume, avaient obtenu un renouvellement semestriel, l’idée étant que la Mission devait soutenir les bons offices de l’Envoyé spécial du Secrétaire général et qu’un renouvellement plus court était un moyen de démontrer la détermination du Conseil en ce sens.

Cette position avait été contestée notamment par la France, pour laquelle l’existence et le mandat de la Mission ne devaient pas être conditionnés aux progrès dans les discussions politiques, la MINURSO y contribuant en créant les conditions propices sur le terrain.  Déplorant la brièveté des cycles semestriels, source, selon elle, « d’incertitude » pour la Mission, la France avait alors demandé de revenir à la formule antérieure dans le cadre du renouvellement suivant. 

Avec l’adoption, aujourd’hui, de la résolution 2494 (2019), par 13 voix pour et 2 abstentions (Fédération de Russie et Afrique du Sud), c’est désormais chose faite.  « La France se réjouit tout particulièrement du retour à un mandat d’un an, qui doit rester la norme en matière de maintien de la paix », a salué la délégation, estimant que la Mission y gagnerait en visibilité et en continuité. 

« Ce renouvellement pour une durée de 12 mois ne signifie pas le retour au statu quo », ont toutefois mis en garde les États-Unis, porte-plume de la résolution.  Washington a ainsi appelé les parties à retourner à la table des négociations et à faire montre de créativité pour accélérer le processus.  Il faudrait d’ailleurs maintenir cette durée d’un an jusqu’à ce que des progrès tangibles aient effectivement lieu, a proposé la Pologne.

Justement, a noté la République dominicaine, l’allongement de la durée du mandat de la Mission devrait donner suffisamment de temps aux acteurs concernés pour faire avancer la situation.  De ce point de vue, ce pays a jugé le texte « équilibré » et conforme à l’esprit de « compromis », un avis secondé par le Royaume-Uni, pour qui la résolution reflète bien l’impératif de réalisme et de pragmatisme dans la recherche de solutions.

En grande partie similaire, sur le fond, à ses précédentes moutures, le texte adopté aujourd’hui plaide en effet en faveur d’une solution politique « réaliste, pragmatique et durable » à la question du Sahara occidental et propose d’adapter l’action stratégique et les ressources de la MINURSO de façon à faciliter un tel « compromis ».

Outre l’allongement de la durée du mandat de la Mission, jusqu’au 31 octobre 2020, il fait passer de trois à six mois avant l’expiration de ce mandat le délai à partir duquel le Secrétaire général est tenu de présenter au Conseil un état d’avancement sur la situation.  La réunion d’aujourd’hui faisait précisément suite à la publication, le 2 octobre, du dernier rapport d’António Guterres (S/2019/787) sur la question, dans lequel il indique que la situation au Sahara occidental est restée « relativement calme, malgré quelques incertitudes ».

Tout en saluant, à son tour, l’élan que ce mandat de 12 mois devrait permettre d’insuffler au processus politique pour parvenir à un règlement accepté par toutes les parties, le Koweït a cependant regretté l’absence de consensus lors du vote.

La reconduite de la MINURSO en avril dernier avait déjà été marquée par l’abstention de la Fédération de Russie et de l’Afrique du Sud.  Nous sommes de nouveau, aujourd’hui, face à un texte « déséquilibré », qui ne fournit aucune réflexion sur ce qui a été entrepris par les deux parties, a déploré la délégation sudafricaine.  D’après elle, en effet, la référence aux notions de « réalisme » et « compromis » constitue une « tentative de saper certains principes », dont le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, « qui a pourtant été consacré par l’Assemblée générale ».

Nous aurions aussi préféré le maintien d’une durée de six mois pour permettre au Conseil d’évaluer régulièrement les progrès, a poursuivi le pays, avant de renouveler sa demande d’amender le mandat de la MINURSO pour lui permettre de réaliser un suivi des violations des droits de l’homme perpétrées par les deux parties.  Frustré par le manque de prise en compte de ses propositions, l’Afrique du Sud a enfin dénoncé l’approche « à prendre ou à laisser » adoptée lors des négociations du texte.

Il n’est en effet pas bon d’essayer de « prédéfinir » le processus de négociation entre les parties ou de « modifier les approches convenues précédemment », a renchéri la Fédération de Russie.  Pour Moscou, les résolutions adoptées par le Conseil sur la question au cours des dernières années ont en effet eu tendance à remettre en cause la neutralité du Conseil, par le biais de « modifications arbitraires » et l’emploi d’expressions « générales » et « ambiguës » qui nuisent, selon le pays, aux perspectives du processus. 

Face aux interventions sudafricaine et russe, la Chine, qui a voté en faveur de la résolution, a appelé à mener à l’avenir des « consultations plus adéquates » pour parvenir à un texte « encore plus équilibré » et consensuel.

Par ailleurs, dans la résolution, le Conseil salue le nouvel élan impulsé par les tables rondes qui ont eu lieu en décembre 2018 et en mars 2019, avec la participation du Maroc, du Front POLISARIO, de l’Algérie et de la Mauritanie.  Il salue également ce processus de tables rondes, né des efforts de l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, M. Horst Köhler, qui a démissionné de ses fonctions en mai dernier.  Le Conseil note que M. Köhler, dont le successeur n’a toujours pas été nommé, avait l’intention d’inviter les participants à se réunir de nouveau selon les mêmes modalités.

Plusieurs membres du Conseil, en tête desquels le Pérou et l’Allemagne, ont appelé le Secrétaire général à désigner sans tarder un successeur à M. Köhler.  La personne choisie devra être « acceptable et crédible » pour l’ensemble des parties, a précisé à cette occasion l’Indonésie.

Le Conseil demande aux parties de reprendre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, « sans conditions préalables et de bonne foi », afin de parvenir à une solution politique « juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies ». 

De ce point de vue, la Côte d’Ivoire, la République dominicaine, le Koweït et la France ont estimé que le plan d’autonomie proposé par le Maroc en 2007 constituait une base « sérieuse et crédible » de discussions, en vue de parvenir à une solution négociée du différend.  Dans le même ordre d’idées, la Guinée équatoriale a salué le Maroc pour ses « efforts visant à promouvoir les droits de la personne » dans la zone.

Texte du projet de résolution (S/2019/847)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant et réaffirmant toutes ses résolutions antérieures sur le Sahara occidental,

Réaffirmant son ferme appui aux efforts que le Secrétaire général et son Envoyé personnel font pour mettre en application ses résolutions 1754 (2007), 1783 (2007), 1813 (2008), 1871 (2009), 1920 (2010), 1979 (2011), 2044 (2012), 2099 (2013), 2152 (2014), 2218 (2015), 2285 (2016), 2351 (2017), 2414 (2018), 2440 (2018) et 2468 (2019),

Rendant hommage à Horst Köhler, l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, et saluant les efforts qu’il a déployés pour organiser le système des tables rondes, qui a imprimé un nouvel élan au processus politique,

Se félicitant du nouvel élan impulsé par la première table ronde tenue les 5 et 6 décembre 2018 et la deuxième table ronde tenue les 21 et 22 mars 2019, et de la volonté du Maroc, du Front POLISARIO, de l’Algérie et de la Mauritanie de participer, d’une manière sérieuse et respectueuse, au processus politique engagé par l’Organisation des Nations Unies sur le Sahara occidental afin de trouver des terrains d’entente,

Encourageant la reprise des consultations entre le nouvel Envoyé personnel et le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à cet égard pour faire fond sur les progrès accomplis,

Réaffirmant sa volonté d’aider les parties à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, basée sur le compromis, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et notant le rôle et les responsabilités dévolus aux parties à cet égard,

Demandant de nouveau au Maroc, au Front POLISARIO, à l’Algérie et à la Mauritanie de coopérer plus intensément les uns avec les autres, notamment en renforçant davantage la confiance, et avec l’Organisation des Nations Unies, ainsi que de participer davantage au processus politique et de progresser sur la voie d’une solution politique,

Considérant que la solution politique de ce différend de longue date et le renforcement de la coopération entre les États membres de l’Union du Maghreb arabe contribueraient à la stabilité et à la sécurité dans la région du Sahel, ce qui créerait des emplois et favoriserait la croissance ainsi que des possibilités pour tous les habitants de la région,

Se félicitant des efforts que fait le Secrétaire général pour suivre de près toutes les opérations de maintien de la paix, y compris la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), et soulignant que le Conseil doit adopter une approche rigoureuse et stratégique en matière de déploiement au service du maintien de la paix et de gestion efficace des ressources,

Rappelant sa résolution 2378 (2017), dans laquelle il avait prié le Secrétaire général de veiller à ce que les données relatives à l’efficacité des opérations de maintien de la paix, y compris celles portant sur l’exécution de ces opérations, soient utilisées pour améliorer l’analyse et l’évaluation des opérations des missions sur la base de critères précis et bien définis, et rappelant également sa résolution 2436 (2018), dans laquelle il avait prié le Secrétaire général de veiller à ce que soient prises sur la base de mesures objectives de la performance les décisions visant à reconnaître l’excellence des performances ou à inciter à l’excellence et les décisions ayant trait aux déploiements, à la remédiation, à la formation, au gel des remboursements et au rapatriement de personnel en tenue ou au renvoi de personnel civil,

Rappelant sa résolution 2242 (2015), dans laquelle il avait émis le souhait que les femmes soient plus nombreuses dans les contingents militaires et les effectifs de police des opérations de maintien de la paix des Nations Unies,

Constatant que la MINURSO joue un rôle important sur le terrain, s’agissant notamment d’aider l’Envoyé personnel à trouver une solution politique mutuellement acceptable, et qu’elle doit pouvoir s’acquitter pleinement de son mandat,

Se déclarant préoccupé par les violations des accords en vigueur, réaffirmant qu’il importe que soient pleinement respectées les dispositions de ces accords afin de maintenir la dynamique du processus politique au Sahara occidental, et prenant note des engagements pris par le Front POLISARIO auprès de l’ancien Envoyé personnel, et se félicitant à cet égard de savoir que, selon l’évaluation faite par le Secrétaire général le 2 octobre 2019, la situation au Sahara occidental est restée relativement calme, le cessez-le-feu tient toujours et les parties respectent le mandat de la MINURSO,

Prenant note de la proposition marocaine présentée au Secrétaire général le 11 avril 2007 et se félicitant des efforts sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller de l’avant vers un règlement, et prenant note également de la proposition du Front POLISARIO présentée au Secrétaire général le 10 avril 2007,

Engageant les parties, dans ce contexte, à faire preuve d’une plus grande volonté politique de parvenir à une solution, notamment en examinant de façon plus approfondie leurs propositions respectives et en renouvelant leur engagement en faveur de l’action menée par les Nations Unies en faisant preuve de réalisme et d’un esprit de compromis, et encourageant en outre les pays voisins à contribuer au processus politique,

Encourageant les parties à poursuivre leur coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de définir et d’appliquer des mesures de confiance susceptibles de susciter la confiance nécessaire à la réussite du processus politique,

Soulignant qu’il importe d’améliorer la situation des droits de l’homme au Sahara occidental et dans les camps de Tindouf, et encourageant les parties à collaborer avec la communauté internationale pour élaborer et appliquer des mesures indépendantes et crédibles qui garantissent le plein respect des droits de l’homme, en gardant à l’esprit leurs obligations découlant du droit international,

Encourageant les parties à persévérer dans les efforts qu’elles mènent chacune pour renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme au Sahara occidental et dans les camps de réfugiés de Tindouf, y compris les libertés d’expression et d’association,

Se félicitant à cet égard des mesures et initiatives prises par le Maroc, du rôle joué par les commissions du Conseil national des droits de l’homme à Dakhla et à Laayoune et de l’interaction entre le Maroc et les mécanismes relevant des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies,

Encourageant vivement à renforcer la coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, y compris en facilitant des visites dans la région,

Prenant note avec une vive préoccupation des souffrances persistantes endurées par les réfugiés sahraouis et de leur dépendance à l’égard de l’aide humanitaire extérieure et notant également avec une vive préoccupation l’insuffisance des fonds alloués à celles et ceux qui vivent dans les camps de réfugiés de Tindouf et des risques associés à la diminution de l’aide alimentaire,

Demandant à nouveau que l’enregistrement des réfugiés dans les camps de réfugiés de Tindouf soit envisagé, et soulignant qu’il convient de déployer des efforts à ce sujet,

Rappelant ses résolutions 1325 (2000) et 2250 (2015) et ses résolutions connexes, soulignant l’importance de l’engagement pris par les parties de poursuivre les négociations dans le cadre des pourparlers tenus sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies et encourageant une participation pleine, réelle et effective des femmes ainsi qu’une participation réelle et active des jeunes à ces pourparlers,

Considérant que le statu quo n’est pas acceptable, et notant en outre qu’il est essentiel que les négociations progressent pour que la qualité de vie des habitants du Sahara occidental s’améliore dans tous les domaines,

Affirmant son plein appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour le Sahara occidental et Chef de la MINURSO, Colin Stewart,

Ayant examiné le rapport du Secrétaire général en date du 2 octobre 2019 (S/2019/787),

1.    Décide de proroger le mandat de la MINURSO jusqu’au 31 octobre 2020;

2.    Souligne qu’il convient de parvenir à une solution politique réaliste, pragmatique et durable à la question du Sahara occidental, qui repose sur le compromis, et qu’il importe d’adapter l’action stratégique de la MINURSO et d’affecter les ressources des Nations Unies à cette fin;

3.    Appuie pleinement les efforts que font le Secrétaire général et son nouvel Envoyé personnel pour maintenir le processus de négociation afin de parvenir à un règlement de la question du Sahara occidental, note que l’ancien Envoyé personnel avait l’intention d’inviter le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à se réunir de nouveau selon les mêmes modalités, et se félicite de la volonté du Maroc, du Front POLISARIO, de l’Algérie et de la Mauritanie de rester engagés, en faisant preuve de réalisme et d’un esprit de compromis, tout au long de la durée du processus, de sorte qu’il aboutisse;

4.    Demande aux parties de reprendre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts consentis depuis 2006 et des faits nouveaux survenus depuis, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et prend note du rôle et des responsabilités dévolus aux parties à cet égard;

5.    Invite les États Membres à prêter le concours voulu à ces négociations;

6.    Réaffirme que les accords militaires conclus avec la MINURSO concernant le cessez-le-feu doivent être pleinement respectés et exhorte les parties à y adhérer pleinement, à honorer les engagements qu’elles ont pris auprès de l’ancien Envoyé personnel et à s’abstenir de toute action qui pourrait compromettre les négociations facilitées par l’ONU ou déstabiliser la situation au Sahara occidental;

7.    Demande à toutes les parties de coopérer pleinement avec la MINURSO, y compris en ce qui concerne sa liberté d’interagir avec tous ses interlocuteurs, et de prendre les mesures voulues pour garantir la sécurité, ainsi qu’une totale liberté de circulation et un accès immédiat au personnel des Nations Unies et au personnel associé dans l’exécution de leur mandat, conformément aux accords existants;

8.    Souligne qu’il importe que les parties s’engagent à nouveau à faire avancer le processus politique dans la perspective de nouvelles négociations, rappelle qu’il fait sienne la recommandation formulée dans le rapport daté du 14 avril 2008 (S/2008/251), selon laquelle il est indispensable que les parties fassent preuve de réalisme et d’un esprit de compromis pour aller de l’avant dans les négociations, et encourage les pays voisins à apporter une contribution importante et active à ce processus;

9.    Demande aux parties de faire preuve de volonté politique et de travailler dans une atmosphère propice au dialogue afin de faire avancer les négociations et de garantir ainsi l’application de ses résolutions 1754 (2007), 1783 (2007), 1813 (2008), 1871 (2009), 1920 (2010), 1979 (2011), 2044 (2012), 2099 (2013), 2152 (2014), 2218 (2015), 2285 (2016), 2351 (2017), 2414 (2018), 2440 (2018) et 2468 (2019) et le succès des négociations;

10.   Prie le Secrétaire général de lui faire régulièrement, à chaque fois qu’il le jugera utile au cours de la période du mandat, et d’inclure dans les six mois avant le renouvellement du présent mandat et avant son expiration, des exposés sur l’état d’avancement des négociations tenues sous ses auspices, l’application de la présente résolution, les difficultés auxquelles se heurtent les opérations de la MINURSO et les mesures prises pour les surmonter, déclare son intention de se réunir pour entendre ces exposés et les examiner et, à cet égard, prie également le Secrétaire général de lui présenter un rapport sur la situation au Sahara occidental bien avant la fin du mandat de la Mission;

11.   Se félicite des initiatives lancées par le Secrétaire général pour instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, et se déclare de nouveau favorable à l’élaboration d’un dispositif de gestion de la performance complet et intégré qui définisse des normes de performance claires pour l’évaluation de l’ensemble du personnel civil et en tenue des Nations Unies qui travaille dans les opérations de maintien de la paix ou les appuie, qui permette la bonne et pleine exécution des mandats et qui prévoie des méthodes complètes et objectives fondées sur des critères précis et bien définis pour sanctionner les résultats insuffisants et récompenser ou reconnaître les résultats exceptionnels, et demande au Secrétaire général d’appliquer ce dispositif à la MINURSO comme indiqué dans la résolution 2436 (2018), prie le Secrétaire général de s’employer à augmenter le nombre de femmes à la Mission et de veiller à ce que ces dernières participent pleinement, réellement et effectivement à tous les aspects des opérations;

12.   Exhorte les parties et les États voisins à collaborer de manière productive avec la MINURSO afin de considérer la manière dont les nouvelles technologies peuvent servir à réduire les risques, à améliorer la protection de la force et à l’aider à mieux s’acquitter de son mandat;

13.   Incite les parties à coopérer avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés afin que des mesures de confiance soient prises et appliquées et notamment à encourager la participation des femmes et des jeunes, et incite les États voisins à contribuer à ces efforts;

14.   Exhorte les États Membres à verser des contributions volontaires ou à les augmenter pour financer les programmes alimentaires, afin de s’assurer que les besoins humanitaires des réfugiés sont dûment pris en compte et d’éviter des réductions dans les rations alimentaires;

15.   Prie le Secrétaire général de continuer à prendre les mesures qui s’imposent pour s’assurer que tout le personnel de la MINURSO respecte pleinement la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de le tenir pleinement informé des progrès faits par la Mission à cet égard dans ses rapports, et prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de continuer de prendre des mesures de prévention appropriées, notamment la vérification des antécédents de tous les membres du personnel et l’organisation d’une formation de sensibilisation avant et pendant le déploiement, et de faire en sorte que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes aient à en répondre pleinement en ouvrant rapidement des enquêtes conjointement avec la Mission, selon qu’il conviendra;

16.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: le Haut-Commissaire pour les réfugiés justifie l’urgence et la pertinence du Pacte mondial sur les réfugiés

Soixante-quatorzième session,
38e & 39e séances plénières, matin & après-midi
AG/SHC/4277

Troisième Commission: le Haut-Commissaire pour les réfugiés justifie l’urgence et la pertinence du Pacte mondial sur les réfugiés

Près d’un an après l’adoption du Pacte mondial sur les réfugiés, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M. Filippo Grandi, a dressé aujourd’hui un bilan d’étape devant la Troisième Commission, chargée des questions sociales, culturelles et humanitaires, estimant que l’année écoulée n’a fait que mettre en évidence « l’urgence et la pertinence » de ce nouvel instrument.

Dans un monde qui compte à présent 71 millions de personnes déplacées suite à des conflits ou en raison de la violence et de la persécution, un chiffre en constante progression, le Pacte mondial permet d’offrir à ces populations un « nouveau modèle de réponse » dans la mesure où il préserve l’impératif humanitaire, tout en y agrégeant la consolidation de la paix, l’action en faveur du développement et les investissements du secteur privé, a souligné M. Grandi.  De plus, le Pacte mondial insuffle, selon lui, un « nouvel élan » à l’engagement collectif envers le partage des responsabilités internationales qui sous-tendent le régime de protection des réfugiés. 

Le Haut-Commissaire a fait observer, à cet égard, que l’impact le plus notable des déplacements forcés se fait ressentir dans les pays hôtes pauvres ou à revenu intermédiaire, dont les 14 pays d’Amérique latine et des Caraïbes qui accueillent actuellement près de 4,5 millions de Vénézuéliens.  Là ou ailleurs, l’interface entre l’action humanitaire et en faveur du développement demeure essentielle, a-t-il dit, y voyant l’un des principaux préceptes du Pacte. 

M. Grandi a aussi évoqué les défis complexes liés aux flux mixtes de réfugiés et de migrants.  Il a notamment relevé que les craintes légitimes au sujet de l’emploi, de la sécurité et de l’identité sont exploitées à des fins politiques, incitant les personnes qui sont elles-mêmes exclues des retombées de la mondialisation à se monter contre les migrants et les réfugiés.  On dresse l’exclusion contre l’exclusion sans offrir la moindre solution pratique, a-t-il déploré.

Selon lui, les mesures prises pour endiguer les flux migratoires, comme les refoulements, l’externalisation des processus de demande d’asile ou les politiques de dissuasion, ne permettent pas de répondre aux racines de ces flux, comme l’atteste le cas du Mexique, où des exemples notables d’intégration sont couplés à des pressions migratoires de plus en plus importantes venant de la région, mais aussi de l’Afrique. 

Il a par ailleurs parlé des mouvements vers l’Afrique du Nord et au-delà de la Méditerranée, qui, a-t-il reconnu, représentent un dilemme pour le HCR, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et leurs partenaires, lesquels cherchent à assurer la sûreté des plus vulnérables tout en gérant des risques énormes et en luttant contre l’impact mortel de « l’industrie » des passages clandestins.  Il a appelé à renforcer la confiance du public dans les institutions d’asile en établissant des procédures rapides et équitables et en adoptant un bon système de gestion. 

Autre point noir, le conflit en Syrie demeure la plus importante crise de déplacement au monde, a rappelé M. Grandi, notant que l’escalade des dernières semaines dans le nord-est du pays a encore aggravé la situation.  Dans le contexte des crises prolongées, a-t-il fait remarquer, l’accent que place le Pacte sur l’inclusion, la résilience et l’action en faveur du développement est essentiel.  Il s’est en outre soucié des retours volontaires, notamment en l’absence de règlement définitif des conflits.  Selon lui, tout retour de réfugiés vers des pays comme la Syrie, le Burundi et le Myanmar demeure la meilleure solution à condition que celui-ci soit volontaire, sûr et dignifié.

Le Haut-Commissaire a également indiqué que l’urgence climatique est dorénavant l’un des principaux moteurs des déplacements dans le monde, expliquant en outre que le terme « réfugié climatique » ne permet pas de saisir la complexité de l’interaction entre le climat et la mobilité humaine.  Il a ajouté que le HCR se mobilise pour attirer l’attention sur les écarts de protection provoqués par les déplacements transfrontières dans le contexte des changements climatiques. 

En début de journée, le Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a mis en garde la Troisième Commission quant aux effets sexospécifiques, sur les droits de la personne, des activités des sociétés militaires et de sécurité privées. 

M. Chris Kwaja a expliqué que ces structures privées laissent une « empreinte de genre » significative dans les communautés où elles opèrent, notamment dans les pays où il n’existe pas de normes ou de surveillance régissant leurs activités.  Constatant que les femmes et les filles constituent la majorité des victimes de violences sexuelles et sexistes et de discrimination de la part du personnel des entreprises militaires et de sécurités privées, le Président du Groupe de travail a appelé ces sociétés à intégrer systématiquement des approches qui favorisent une véritable égalité et la parité tout au long de leurs opérations. 

La Troisième Commission a également entendu le Président-Rapporteur du Comité spécial du Conseil des droits de l’homme chargé d’élaborer des normes complétant la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale alerter que le Comité peine à honorer son mandat en raison de la divergences entre les États sur la façon de traiter les manifestations contemporaines de racisme et de discrimination raciale. 

M. Taonga Mushayavanhu a notamment expliqué que deux camps ont émergé dans ce débat: d’un côté, des États défavorables à l’élaboration de normes complémentaires à la Convention au motif que celle-ci est un instrument « adéquat et vivant », capable de s’adapter aux réalités contemporaines; de l’autre côté, un groupe d’États jugeant nécessaire de combler des lacunes substantielles et procédurales apparues dans la Convention. 

La Troisième Commission poursuivra son débat général demain, jeudi 31 novembre, à partir de 10 heures.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE (A/74/18)

Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée (A/74/253)

Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/74/274, A/74/312, A/74/321, A/74/173, A/74/308)

DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION (A/74/244, A/74/309)

Exposé du Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires

M. CHRIS KWAJA, Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, s’est penché sur les effets sexospécifiques, sur les droits de la personne, des activités des sociétés militaires et de sécurité privées.

Il a expliqué que ces dernières laissent une « empreinte de genre » significative dans les communautés où elles opèrent.  La grande variété de contextes dans lesquels elles opèrent et les types de services qu’elles fournissent impliquent différents niveaux de risque sexospécifique en matière de jouissance des droits de l’homme.  Ces risques sont particulièrement élevés dans les situations de conflits armés, d’après conflits ou de transition, notamment dans les pays où il n’existe pas de normes ou de surveillance régissant leurs activités.

En général, a souligné M. Kwaja, les situations où du personnel militaire et de sécurité privé a des contacts réguliers avec des membres du public comportent certains risques.  Il a également décrit des risques liés à certaines situations, notamment lorsque le personnel de sécurité privé supervise une prison ou un poste de contrôle, ou agit comme gardien pour l’accès à un centre de santé de détention pour migrants.  La nature des services fournis par ces entreprises a également une incidence sur la dimension sexospécifique des droits de l’homme . 

La présence d’une entreprise de sécurité privée militarisée et majoritairement masculine peut générer des sentiments de malaise que les hommes, femmes, garçons et filles peuvent ressentir différemment.  Le Président du Groupe a notamment cité le cas de femmes qui ont fait état de difficultés lorsqu’elles se déplaçaient pour accéder aux lieux de travail, aux marchés et aux établissements de soins de santé afin d’éviter les routes gardées par du personnel militaire et de sécurité privé.  Elles ont également signalé des harcèlements sexuels répétés, avoir subi des attouchements inappropriés ou avoir vécu dans la crainte d’être victimes de violence sexuelle. 

Il a indiqué que les femmes et les filles constituent la majorité des victimes de violence sexuelle et sexiste et de discrimination de la part du personnel des entreprises militaires et de sécurités privées, les auteurs étant principalement des hommes.  Les femmes ayant un statut socioéconomique inférieur, issues de communautés autochtones ainsi que les défenseuses des droits de l’homme sont confrontées en plus à des risques particuliers.

Le Groupe de travail a également examiné les principaux abus passés de discrimination fondée sur le sexe et de violence sexuelle et sexiste.  « Nous sommes préoccupés par le fait que la responsabilité et les recours des victimes de ces abus ont été limités », a-t-il fait savoir.  Ceci est d’autant plus inquiétant pour lui que rarement signalés, les auteurs de ces abus profitent en plus de l’absence des rares contrôles de ces entreprises militaires et de sécurité privées par les États, la société civile, les organes des Nations Unies ou d’autres acteurs. 

Le Groupe de travail a également examiné des exactions passées et s’est inquiété de l’absence de reddition de comptes et de recours pour les victimes, ainsi que du manque de suivi des agissements des sociétés militaires et de sécurité privées, que ce soit de la part des États ou de l’ONU.

Au sein même des entreprises militaires et de sécurités privées, a poursuivi M. Kwaja, il reste beaucoup à faire pour lutter contre l’inégalité et la discrimination fondées sur le genre dans cette industrie dominée par les hommes.  Il est nécessaire d’augmenter le nombre de femmes, de personnes LGBTI ainsi que d’autres groupes sous-représentés.  Afin de travailler progressivement à un changement culturel organisationnel, une plus grande diversité dans la composition du personnel doit s’accompagner d’actions fondées sur des principes, fermes et rapides pour lutter contre la violence sexuelle et sexiste, les inégalités structurelles et les discriminations sous-jacentes. 

Le Président du Groupe de travail a aussi appelé les sociétés à mettre en place des politiques et des procédures pour résoudre ces problèmes et intégrer systématiquement des approches qui favorisent une véritable égalité et la parité tout au long de leurs opérations. 

Il a signalé que les cas de discrimination et de violence sexuelle et sexiste par les sociétés militaires et de sécurité privées et leur personnel se déroulent le plus souvent en l’absence de cadres juridiques et réglementaires.  L’action de l’État est nécessaire dans les domaines de la réforme juridique, des organismes de réglementation et de surveillance, ainsi que des mécanismes de responsabilisation et de recours.  Ce qui importe c’est de disposer de mesures fondées sur une analyse comparative entre les sexes et d’adopter une approche sexospécifique, a-t-il insisté. 

Il a également jugé urgent d’approfondir la recherche et l’action sur ce sujet afin de mettre en lumière les risques et les impacts sexospécifiques, ainsi que les expériences des personnes affectées.  La collecte de données ventilées par sexe ainsi qu’un suivi sexospécifique des abus présumés représentent donc des étapes cruciales. 

Pour que les changements nécessaires soient mis en marche, M. Kwaja a préconisé la promotion de programmes sexospécifiques au sein de l’industrie, appelant à des initiatives multipartites pour appuyer ce processus.  

Dialogue interactif

Notant que le Groupe de travail se fonde sur une définition claire de ces activités, au regard du droit international humanitaire, l’Union européenne a jugé inquiétant qu’il élargisse son mandat pour y inclure les activités des sociétés militaires et de sécurité privées.  L’industrie est un fournisseur de services essentiel qui peut promouvoir des activités humanitaires dans des environnements complexes partout dans le monde, a-t-elle souligné, avant d’inviter le Groupe de travail à clarifier son cadre de travail. 

La Fédération de Russie a jugé nécessaire de revoir le cadre qui régit les sociétés militaires et de sécurité privées, estimant notamment nécessaire de prévoir un système de certification de ces structures ainsi qu’un mécanisme de supervision.  Pour l’heure, s’est-elle inquiétée, l’absence de normes pour superviser les activités des sociétés de sécurité privées ne permet pas aux États de garantir les normes des droits de l’homme.  Elle s’est en outre prononcée pour la création d’une base normative internationale qui réglementerait les activités de ces sociétés privées. 

Les États-Unis ont appelé les États à redoubler d’efforts pour garantir le respect des droits de l’homme par les sociétés militaires et de sécurité privées, estimant que le Document de Montreux concernant les activités de ces structures privées lors de conflits armés est un exemple positif de régulation.  Une autre initiative a abouti à l’adoption d’un code de conduite pour les prestataires de services en matière de sécurité, ont-ils ajouté, assurant que la collaboration entre les États, les partenaires de l’industrie et la société civile permet d’appliquer des politiques respectueuses des droits de l’homme.  Qu’est-il possible de faire de plus? a demandé la délégation. 

Dans un premier temps, le Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a souligné que son mandat porte également sur les sociétés militaires et de sécurité privées.  Le Groupe de travail s’est ainsi intéressé aux mécanismes de supervision afin de réguler leurs activités, a-t-il indiqué.

M. Kwaja a ensuite souligné que les États sont des acteurs importants, et qu’ils ont la possibilité d’apaiser des préoccupations présentées dans le rapport.  Il a toutefois signalé que nombre des documents mentionnés, comme celui de Montreux, sont avant tout non contraignants, ce qui peut s’avérer problématique lorsqu’il s’agit de faire respecter les droits de l’homme en raison du fait que nombre des sociétés susmentionnées travaillent dans un environnement où il n’y a pas de mécanisme régulant leurs activités.  Le Groupe œuvre donc à l’adoption d’un plan d’action pour adopter des règles contraignantes afin de réguler les activités des sociétés militaires et de sécurité privées. 

Exposé du Président-Rapporteur du Comité spécial chargé d’élaborer des normes complémentaires

M. TAONGA MUSHAYAVANHU, Président-Rapporteur du Comité spécial du Conseil des droits de l’homme chargé d’élaborer des normes complétant la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a expliqué que le Comité peine à honorer son mandat en raison de divergences entre les États sur la façon de traiter les manifestations contemporaines de racisme et de discrimination raciale. 

Deux camps ont émergé, a-t-il expliqué.  D’un côté, un groupe d’États n’étant pas favorable à l’élaboration de normes complémentaires à la Convention au motif que celle-ci est un instrument adéquat et « vivant », capable de s’adapter aux réalités contemporaines.  Pour eux, la seule lacune qui existe concerne la pleine mise en œuvre de la Convention. 

De l’autre côté, un groupe d’États penche pour élaborer des normes complémentaires à la Convention afin de combler des lacunes substantielles et procédurales, comme énoncé dans la décision du Conseil des droits de l’homme 3/103 du 8 décembre 2006.

Il a indiqué qu’au cours de 10 sessions de travaux, le Comité avait pu s’entretenir avec plus de 60 experts regroupant plusieurs disciplines afin de répondre à ces divergences de vues.  Cependant, a-t-il déploré, l’absence de volonté politique empêche le Comité d’aller de l’avant.  Il a rappelé que l’Assemblée générale a adopté, en 2017 et 2018, deux résolutions qui ont chacune fait état de la frustration à l’égard du manque de progrès réalisés par le Comité spécial. 

Ce dernier s’est cependant réjoui des progrès accomplis durant la dernière session, qui s’est tenue du 8 au 18 avril, et au cours de laquelle le Comité a discuté de la protection des migrants contre les pratiques racistes, discriminatoires et xénophobes; de la cybercriminalité raciste; et de l’élaboration de lois antidiscrimination.  En ce qui concerne la cybercriminalité raciste, le Comité a relevé l’existence de lacunes en matière de protection.

Le Comité a également consacré beaucoup de temps aux premières négociations sur les éléments qui constitueraient un protocole additionnel à la Convention et a adopté par consensus un document final.  Il a précisé que les questions examinées portaient sur la pénalisation des actes racistes et xénophobes commis en ligne et hors ligne, notamment les discours de haine, les incitations, l’aide et la complicité, ainsi que la dissémination.  Les technologies de l’information et des communications, notamment les réseaux de médias sociaux et les plateformes Internet, ont été l’objet d’une attention particulière.

En outre, le problème de la discrimination basée sur la religion ou les croyances continue d’être un sujet central pour le Comité.  Les avis ont divergé sur l’inclusion de cette question par principe, la référence à des religions spécifiques, et si ce sujet devait être l’objet d’une norme internationale complémentaire.  Le Comité s’est aussi penché sur les mesures préventives dans l’éducation, le profilage racial et la discrimination des droits économiques et sociaux.

M. Mushayavanhu a ensuite annoncé que la onzième session du Comité spécial aura lieu du 20 avril au 1er mai 2020 à Genève.

Dialogue interactif

L’Union européenne a fait valoir que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale n’a pas de lacunes, et qu’il n’est donc pas nécessaire d’élaborer un protocole additionnel ou un instrument juridiquement contraignant en la matière.  Elle a dit espérer que la prochaine réunion des experts juridiques permettra de clarifier la situation. 

L’Angola a estimé que l’examen par des experts juridiques des éléments d’un protocole additionnel à la Convention serait une étape importante pour les travaux du Comité spécial.  Il a ensuite demandé à M. Mushayavanhu son avis sur la possibilité d’une initiative concertée relative à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. 

Le Zimbabwe a déclaré attendre du Comité des solutions pratiques pour lutter contre le racisme et toutes les formes d’intolérance, notamment en ce qui concerne des voies de recours efficaces pour les victimes.  Il s’agit de garantir que des cas similaires ne se reproduiront plus en cette ère de mise en œuvre des objectifs de développement durable, a-t-il dit, avant d’interroger le Président-Rapporteur sur la voie à suivre pour éliminer le racisme dans le sport, dont il a souligné le rôle unificateur. 

Réagissant à ces questions et commentaires, le Président-Rapporteur du Comité spécial chargé d’élaborer des normes complémentaires est revenu sur la question du racisme dans le monde du sport, soulignant qu’il s’agit d’une des questions sur laquelle le Comité spécial a beaucoup travaillé.  Le sport est une activité largement diffusée, et est un vecteur qui peut être utilisé pour faire passer notre message, a-t-il indiqué.  C’est également un domaine dans lequel il est possible d’incriminer certains actes en imposant des sanctions, comme par exemple des interdictions de stade.  Il est aussi important d’avoir recours à des outils éducatifs, a ajouté M. Mushayavanhu, ainsi qu’à des lignes directrices internationales contraignantes que tous pourraient utiliser, et ce, dans tous les domaines sportifs.

Débat général

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, Mme NADYA RIFAAT RASHEED, de l’État de Palestine, a réitéré que, 18 ans après la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, qui s’est tenue à Durban, cette lutte reste essentielle pour l’exercice des droits de l’homme.  Favorable à une application accélérée du Programme d’action de Durban, le Groupe estime que, face à l’augmentation des attitudes racistes et xénophobes, la communauté internationale doit travailler de concert pour permettre la mise en œuvre totale de la Déclaration. 

Dans ce cadre, la déléguée a déploré que la mauvaise utilisation des technologies de l’information et des communications favorise la propagation des discours de haine.  Certains dirigeants politiques et religieux y recourent systématiquement, a-t-elle constaté, soulignant la nécessité de lutter contre le racisme et la xénophobie en adoptant des positions claires et sans équivoque.  À cet égard, l’éducation joue un rôle critique pour lutter contre les préjugés et les stéréotypes, a fait valoir la représentante.  Il importe aussi de favoriser les dialogues interculturels et d’encourager les citoyens et les institutions à ne pas utiliser de discours négatifs. 

La lutte contre la discrimination raciale nécessite également des financements adéquats, a-t-elle plaidé, avant de saluer le programme de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.  À cet égard, le Groupe des 77 et de la Chine déposera un projet de résolution sur les efforts mondiaux visant à l’élimination totale du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance.

M. DAVID TSHISHIKU TSHIBANGU (République démocratique du Congo), au nom du Groupe des États d’Afrique, a déploré que 18 ans après l’adoption de la Déclaration de Durban, les discriminations, les formes contemporaines de racisme et les inégalités résultant de la non-élimination des répercussions de l’esclavage et du colonialisme persistent.

Il a appelé les gouvernements à renforcer leurs protections, en garantissant à toutes les personnes l’accès à des recours efficaces et adéquats, et le droit de demander justice et réparation aux tribunaux nationaux et autres institutions nationales pour tout dommage résultant d’une discrimination. 

Les réparations pour l’esclavage et le colonialisme comprennent non seulement la justice et la responsabilité pour les torts historiques, mais également l’élimination des traces de l’inégalité raciale, de la subordination et de la discrimination, qui ont été construites sous l’esclavage, l’apartheid et le colonialisme, a-t-il insisté. 

M. Tshibangu a regretté que dans de nombreux pays, les moyens de subsistance traditionnels des personnes d’ascendance africaine soient menacés, et qu’elles fassent l’objet de déplacements et migrations forcés, dus à des grands projets d’infrastructure et de développement, l’extraction de ressources ou le tourisme.  Elles font face à une inégalité importante dans l’accès à un emploi convenable, subissent davantage le chômage et sont surreprésentées dans les emplois peu rémunérés. 

Pour le représentant, la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine de 2015 à 2024 est une occasion unique de rappeler que les programmes scolaires font parfois l’objet de stéréotypes négatifs, et que les personnes d’ascendance africaine sont aussi discriminées pour leur utilisation de coiffures ou de vêtements traditionnels ou culturels. 

M. Tshibangu a aussi appelé à promouvoir une meilleure connaissance du patrimoine culturel des personnes d’ascendance africaine et des nombreuses contributions fondamentales qu’elles ont apporté à l’humanité, et à adopter des mesures spéciales, comme des actions positives en faveur de l’éducation et de l’emploi, afin de surmonter des inégalités persistantes. 

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. GLENTIS THOMAS (Antigua-et-Barbuda) s’est inquiété de constater que la légitimation du racisme et de la xénophobie intellectuels par des universitaires et les médias reste forte, Malheureusement, ceux qui endossent des rôles de dirigeants et sont censés montrer l’exemple se dérobent à leurs responsabilités, a-t-il déploré.  Tout en respectant les droits à la liberté d’expression, d’association et de rassemblement, les États doivent veiller à ce que la discrimination, le racisme et la xénophobie ne prennent pas racine dans la société. 

La CARICOM voit avec inquiétude la résurgence de groupes de haine et de tenants d’idéologies politiques extrémistes, sous couvert de patriotisme et de nationalisme. 

Il a rappelé l’installation, sur l’esplanade des visiteurs, de l’Arche du retour, « rappel d’un sombre passé », et a appelé à ne pas effacer les « pages souillées de cette histoire ».  La lutte mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée ne sera gagnée que si toutes les parties prenantes agissent de manière responsable et décisive, a conclu M. Thomas. 

Mme DORTHE WACKER, de l’Union européenne, a reconnu, à l’instar de la présentation de certains titulaires de mandat, que la xénophobie est en essor au sein de l’Union européenne et que diverses communautés, notamment les Roms, musulmans et personnes d’ascendance africaine, sont l’objet de discrimination.  L’Union européenne a adopté une directive sur l’égalité raciale pour lutter contre ces problèmes, ainsi qu’une décision-cadre qui permet de pénaliser le racisme et la xénophobie et qui appelle les États membres à considérer la haine raciale comme une circonstance aggravante.  L’Union européenne a également reconnu qu’il est nécessaire de renforcer la sensibilisation et la formation.  Elle a aussi cité les travaux du Groupe de haut niveau de l’Union européenne sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et d’autres formes d’intolérance.

La représentante a également insisté sur l’importance des données et a jugé important d’adopter une approche fondée sur les droits de l’homme dans la collecte des données.

Mme Wacker a ensuite souligné qu’il n’existe aucun accord, ni aucune preuve que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale pâtisse de lacunes, ni qu’elle échoue à répondre aux forces actuelles de racisme, y compris en ce qui concerne la pénalisation des actes racistes et xénophobes.  Elle s’est également préoccupée du fait que les rapports périodiques de 65 États présentent un retard, dont certains de plus de 10 ans, voire 40 ans, et a encouragé les États à utiliser les procédures simplifiées de présentation des rapports.  Enfin, l’Union européenne a attiré l’attention sur l’amendement technique de l’article 8 de la Convention et a appelé à ce que cet amendement soit approuvé et entre en vigueur.  Elle a par ailleurs fait part de son opposition à la « prolifération » d’instruments et de mécanismes de suivi du Programme d’action de Durban.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador), qui s’exprimait au nom du Système d’intégration de l’Amérique centrale (SICA), a rappelé les États membres de ce groupe régional ont des populations multiethniques et multiculturelles et a estimé qu’encourager la pleine participation de ces populations est un moyen important pour atteindre les objectifs de développement durable.  Il importe par conséquent d’adopter des politiques et programmes d’inclusion afin d’avoir un monde sans discrimination raciale, où les droits fondamentaux de tous les êtres humains sont respectés.  Toutefois, cette reconnaissance de la dignité humaine est encore loin d’être une réalité partout dans le monde puisque la possibilité de jouir de ces droits dépend souvent de la citoyenneté ou du statut migratoire, a relevé la déléguée. 

Dans ce contexte, a-t-elle poursuivi, le SICA rejette toutes les formes de racisme, de xénophobie ou d’intolérance et s’engage à assurer le suivi de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.  En Amérique centrale, on estime en effet à 30 le nombre des groupes d’ascendance africaine, ce qui représente 18% de la population de la région, a-t-elle précisé.  Le SICA s’engage à promouvoir des politiques publiques qui contribuent à l’amélioration des conditions de vie des personnes d’ascendance africaine en y intégrant une approche sexospécifique pour répondre aux besoins spécifiques des femmes, a-t-elle indiqué. 

Mme González López a par ailleurs reconnu le rôle primordial de l’éducation, meilleur moyen, selon elle, pour prévenir et éliminer la discrimination raciale, et a souligné les efforts de son groupe pour améliorer l’accès à la justice pour les personnes d’ascendance africaine.  Enfin, affirmant soutenir le principe d’une déclaration pour ces personnes afin d’approfondir les objectifs de la Décennie internationale, elle a exhorté le système des Nations Unies ainsi que les organisations régionales, la société civile et le secteur privé à redoubler d’efforts dans le cadre de la lutte contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance, plaidant en faveur de ressources accrues pour la mise en œuvre des actions liées à la Décennie internationale. 

« Le droit à l’autodétermination est érigé dans la Charte des Nations Unies », a rappelé Mme MALEEHA LODHI (Pakistan), qui a regretté que de nombreuses personnes continuent de ne pas en bénéficier.  Le tribut de cet échec est payé dans le sang par des générations occupées, notamment « au Cachemire » qui a connu 70 ans d’occupation, lors desquels 11 résolutions du Conseil de sécurité ont pourtant été prises le concernant, a-t-elle indiqué.

Elle a dénoncé, « au Cachemire », des cas de torture, d’arrestations arbitraires, s’inquiétant en outre de la pénurie de médicaments dans les hôpitaux.  Les médias et la société civile ont exprimé leurs préoccupations quant à la situation humanitaire.  La représentante a ensuite déclaré que le Pakistan continuera d’être la voix « du Cachemire » jusqu’à ce que ce peuple puisse exercer ses droits légitimes.  « Les jours de la tyrannie sont comptés », a-t-elle déclaré.

M. ISAAC CAVERHILL (Canada) a rappelé que des milliers de Canadiens avaient trouvé la mort pendant la Seconde Guerre mondiale lors du combat contre l’idéologie raciste du nazisme.  Il s’est ensuite inquiété du fait que les systèmes fortement ancrés de racisme, legs historique du colonialisme et de l’esclavage, sont en train de ronger les institutions et les comportements publics.  Le racisme alimente le terrorisme et l’extrémisme violent et exacerbe d’autres formes d’exclusion, a-t-il constaté.

Le représentant a ensuite indiqué que son gouvernement s’est doté d’une nouvelle stratégie nationale de lutte contre le racisme, la « Canada’s Anti-Racism Strategy », qui a été initiée après des consultations qui ont réuni les peuples autochtones et d’autres parties prenantes, dans le but d’autonomiser les communautés et de sensibiliser le public. 

Pour célébrer la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, le Canada a consacré des fonds supplémentaires aux initiatives de soutien aux communautés canadiennes noires. 

M. AL-BANDER (Iraq) a salué l’action des Nations Unies en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme, notamment les sacrifices de ses personnels de terrain.  Malheureusement, a-t-il dit, on déplore des conflits armés partout dans le monde et ce sont les civils qui en paient le prix.  Il convient par conséquent d’accroître les efforts diplomatiques afin d’obtenir davantage d’engagements des États Membres pour la paix et la sécurité.  Se disant favorable à l’établissement de relations pacifiques entre les États, le représentant a fait valoir que ce processus doit s’appuyer sur les principes de respect réciproque et de non-ingérence. 

Il a par ailleurs condamné toutes les politiques de colonisation, qui sont prises en violation du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale de l’ONU.  Ces politiques, contraires à l’esprit et à la lettre de la Charte de l’Organisation, empêchent l’exercice du droit des peuples à l’autodétermination, a souligné M. Al-Bander, accusant la Puissance occupante israélienne de semer la haine dans la région.  Pour le délégué, il faut davantage soutenir le peuple palestinien dans sa lutte pour l’autodétermination et appuyer la cause juste de la solution des deux États. 

M. RODRIGO A. CARAZO (Costa Rica) a réaffirmé l’engagement du Costa Rica en faveur du respect total des droits des personnes d’ascendance africaine, précisant que son gouvernement a pris des mesures afin de réparer des injustices historiques.  Il a indiqué que les personnes d’ascendance africaine représentaient 1% de la population totale en 2001, et 7,8% 10 ans plus tard.  Le représentant a expliqué que cette hausse est due à la conscientisation de ces personnes quant à leurs origines, leur culture, ce qui les a poussées à se déclarer comme telles.  Par ailleurs, la Constitution du pays stipule que le Costa Rica est multiculturel.

Face à la montée du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance religieuse, Mme ANEL BAKYTBEKKYZY (Kazakhstan) a appelé les États Membres à mettre pleinement en œuvre les diverses conventions internationales qu’ils ont ratifiées, et à adopter une législation nouvelle et pertinente pour mettre fin à ces fléaux.  Elle a également jugé important de surveiller et de procéder à une évaluation comparative des instruments juridiques mis en œuvre et d’incorporer des sanctions rigoureuses et prohibitives dans les codes pénaux et civils. 

Le Kazakhstan s’est engagé à prévenir l’escalade de toutes sortes de fanatisme et a donc pris de nombreuses mesures pour la promotion de la paix et de la tolérance.  « Nous sommes fiers d’avoir plus de 120 communautés ethniques et 18 religions, et d’abriter toutes sortes de lieux de culte », a-t-elle dit.  Tous les groupes raciaux, ethniques et religieux jouissent d’un statut et d’une liberté sur un même pied d’égalité et sont pleinement inclus dans la Stratégie 2050 du Kazakhstan, a-t-elle ajouté.

Mme NADYA RIFAAT RASHEED, de l’État de Palestine, a rappelé que depuis 1967, Israël, Puissance occupante, avait transféré plus de 600 000 colons en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est, en violation avec la quatrième Convention de Genève, ce qui constitue un crime selon la Cour pénale internationale (CPI).  Durant les six premiers mois de 2019, plus de 6 000 unités de logement étaient en cours de construction ou de planification en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.  Il est clair que cette occupation est en violation avec le droit international et les droits de l’homme du peuple palestinien, y compris leur droit à l’autodétermination, a-t-elle souligné. 

Dénonçant également les expropriations, la construction d’un mur et la fragmentation des terres palestiniennes, elle a déclaré que cette situation « d’occu-annexion » pouvait durer indéfiniment à moins d’une intervention décisive de la communauté internationale, en raison du déséquilibre criant des forces sur le terrain.  « La reddition de comptes est la clef pour ouvrir cette cage en titane qu’est l’occupation sans fin.  Il est temps pour la communauté internationale de tourner cette clef », a-t-elle conclu.

Abordant également le problème du racisme et de la discrimination, Mme Rasheed a dénoncé le racisme institutionnel de la Puissance occupante Israël et sa forme la plus « vicieuse », à savoir l’occupation militaire étrangère prolongée.  Elle a pointé le vote, l’an dernier, de la loi sur l’« État-nation » à la Knesset, qui contient, a-t-elle affirmé, des éléments clefs d’une situation d’apartheid, non seulement immorale, mais illégale en droit international, entraînant une discrimination délibérée des Palestiniens vivant en Israël.  Les actes racistes et xénophobes dirigés contre les Palestiniens et leurs possessions ont augmenté de façon alarmante, surtout de la part des colons israéliens, et ce, dans une totale impunité, a décrié la représentante.  Elle a ajouté que l’occupation de l’État de Palestine par Israël s’était imposée comme une réalité catastrophique faite de racisme et d’apartheid pour le peuple palestinien.

M. LUKIANTSEV (Fédération de Russie) a souligné que les divergences majeures quant aux interprétations sur les questions de racisme, discrimination raciale, xénophobie et intolérance nuisent à la mise en œuvre des mesures adoptées.

Il a affirmé qu’au lieu de lutter contre ces phénomènes, les autorités de certains États d’Europe orientale font ouvertement preuve de complaisance à l’égard d’anciens combattants nazis et de leurs collaborateurs, qui sont érigés en tant que héros nationaux, citant plus particulièrement la Lettonie et l’Ukraine.  Il a également décrié la discrimination linguistique dont est l’objet la langue russe en Ukraine.

M. Lukiantsev a par ailleurs souligné que l’exercice du droit des peuples à l’autodétermination ne concerne pas uniquement la lutte contre le colonialisme.  Le droit de chaque peuple à choisir son avenir politique ne peut être réalisé qu’en prenant en compte tous les peuples, sans double langage, ni promotion des intérêts opportunistes d’États, a-t-il affirmé.

Mme AHLEM SARA CHARIKHI (Algérie) a fait valoir que l’exercice du droit à l’autodétermination est essentiel pour l’exercice de tous les autres droits, y compris le droit au développement.  Elle a souligné que depuis son indépendance en 1962, l’Algérie a toujours défendu le droit à l’autodétermination et en a fait l’un des piliers de sa politique étrangère.  Malgré les progrès réalisés, il reste des obstacles à surmonter, a-t-elle déploré, appelant la communauté internationale à redoubler d’efforts pour mettre en œuvre les résolutions adoptées dans le cadre de la Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, notamment pour que les peuples non autonomes puissent exercer leur droit à l’autodétermination. 

La représentante a par ailleurs estimé que la lutte contre le fléau du racisme devrait être érigé en priorité par les Nations Unies.  Elle s’est déclarée convaincue que la Déclaration et le Programme d’action de Durban demeurent des jalons importants pour y parvenir.  Elle a constaté que des défis multiples persistent, citant notamment les discours de haine, le populisme et les idéologies de supériorité raciale.  Pour la déléguée, les formes contemporaines de racisme semblent avoir acquis une certaine légitimité morale et politique, ce qui s’est traduit par l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir dans de nombreux pays. 

Mme Charikhi a ensuite indiqué que le code pénal algérien a été amendé et compte de nouvelles dispositions pour combattre la discrimination raciale.  De plus, les programmes scolaires ont été revus en 2017 afin de promouvoir l’élimination du racisme, et un plan d’action national est appliqué depuis 2015 pour lutter contre l’extrémisme violent et promouvoir la déradicalisation. 

M. CHAN AYE (Myanmar) s’est inquiété de la montée du racisme et de la xénophobie dans le monde.  Il a souligné qu’alors que le Myanmar poursuit sa transition vers une société démocratique, la clef de la réussite du processus d’édification de l’état repose sur le principe « d’unité dans la diversité ».  Le pays s’attelle à améliorer sa législation et ses cadres institutions pour combattre le racisme et la discrimination.  Un projet de loi interdisant les discours de haine envers les races ou les religions est en cours de rédaction.  Un comité a également été établi pour promouvoir la responsabilité des médias et la culture du numérique.  Un programme de formation est aussi prévu pour les enseignants, tandis qu’au niveau communautaire, les ONG et les organisations de la société civile promeuvent l’unité et la tolérance parmi les communautés religieuses et ethniques.

M. BENTLEY (États-Unis) a mis en avant les projets de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), pour ensuite insister sur l’importance de la participation des jeunes, citant en exemple le programme « Jeunes contre le racisme » en Israël.  Il s’agit d’un projet, parmi neuf autres, qui vise à renforcer la concorde entre jeunes arabes et jeunes juifs, a-t-il expliqué.

Le représentant a dénoncé la situation dans laquelle vivent des millions de Ouïghours et de Kazakhs en Chine, pour ensuite souligner que la meilleure manière de lutter contre le discours de haine est le plaidoyer.

Mme NATHALIA SÁNCHEZ GARCÍA (Colombie) a souligné que son pays, qui est un État pluriethnique et multiculturel, a mis en place une série de mesures pour protéger les groupes sociaux susceptibles d’être victimes de discrimination, et ce, afin de garantir leur jouissance des droits fondamentaux et la pleine application du principe d’égalité.  Grâce à l’autonomisation politique et à l’augmentation des capacités dans le domaine des droits de l’homme, a poursuivi la représentante, la Colombie a réussi à surmonter les barrières qui existent entre les différentes régions du pays.  En outre, elle a mis en place une stratégie nationale 2014-2024 qui vise à garantir les droits de tous les citoyens, y compris les personnes en situation de vulnérabilité ou historiquement discriminées.  Le pays dispose également d’un cadre juridique en la matière, avec différents outils qui interdisent la discrimination et la ségrégation raciales. 

Rappelant d’autre part que la Déclaration et le Programme d’action de Durban constituent la manifestation d’un engagement pour lutter contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance, la représentante a observé que la poussée des idéologies extrémistes montre combien il est nécessaire de trouver des éléments communs pour faire front collectivement.  Avant de conclure, elle a indiqué qu’au mois de janvier, un « chapitre ethnique » a été ajouté au plan national de développement 2018-2022 afin de mieux intégrer les peuples autochtones, les communautés d’ascendance africaine et les Roms.  Plus de 300 propositions ont été présentées par les communautés concernées, s’est-elle félicitée. 

Intervenant d’abord sur le racisme, M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) s’est déclaré convaincu que la promotion de l’unité et de la tolérance est la seule solution viable.  Il est tout particulièrement préoccupé par l’utilisation des nouvelles technologies à des fins contraires aux droits de l’homme.  Il a jugé essentiel pour les États d’appliquer le Programme d’action de Durban, et d’adopter des mesures législatives et pratiques en la matière. 

M. Mabhongo a par ailleurs souligné que le droit à l’autodétermination constitue une condition sine qua non de la réalisation de tous les autres droits de l’homme. 

M. ODD INGE KVALHEIM (Norvège) a regretté la persistance de discours de haine, de harcèlement, et d’attaques à l’encontre de minorités ethniques et religieuses.  Il a rappelé les attaques terroristes qui ont eu lieu en 2011 en Norvège, ainsi que la fusillade, en août dernier, contre une mosquée près d’Oslo.  Dans ce dernier cas, a-t-il précisé, l’assaillant avait tué, avant l’attaque, sa sœur adoptive qui était originaire de Chine. 

« Nous ne devons pas permettre au racisme et aux préjugés et stéréotypes ethniques et religieux de définir nos sociétés ou de limiter la liberté d’expression ou le sentiment de sécurité de nos citoyens », a affirmé le représentant.  Il a appelé les États Membres à redoubler d’efforts pour combattre les idées fausses et la stigmatisation des minorités religieuses.

Il a souligné que l’école est une arène importante pour prévenir l’intolérance, les stéréotypes négatifs et les préjugés.

Mme NOUR ALI (République arabe syrienne) a constaté que, malgré les efforts des Nations Unies, des millions de personnes souffrent encore de racisme et d’occupation étrangère qui les empêchent d’exercer leurs droits fondamentaux.  Le Moyen-Orient souffre depuis des décennies des crimes perpétrés par la Puissance occupante israélienne dans le Golan syrien et d’autres territoires.  Il s’agit du racisme sous sa forme plus haineuse, a-t-elle affirmé, et cette situation ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui sans l’appui militaire et politique apporté par certains États Membres.  Elle a jugé, à cet égard, que la reconnaissance de la souveraineté israélienne sur le Golan syrien par les États-Unis constitue une violation flagrante de la Charte et des résolutions de l’ONU.  Elle a souligné que le Golan occupé fait partie du territoire de la Syrie « qui le récupérera tôt ou tard ».  Enfin, elle a rappelé le soutien inconditionnel de son pays au peuple palestinien et à son aspiration à un État sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale. 

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a observé avec regret la multiplication, parfois sous de nouvelles formes, des incidents à caractère raciste partout dans le monde, à cause notamment de la résurgence des activités d’associations fondées sur des programmes et des chartes racistes visant, entre autres, les personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses ou linguistiques.  Parce que pays multiethnique où cohabitent pacifiquement plus de 250 ethnies, plusieurs groupes religieux et un nombre important de réfugiés, le Cameroun ne saurait rester indifférent face à ces maux.  Le Gouvernement camerounais a ainsi pris de nombreuses mesures pour lutter contre le racisme, l’intolérance et la xénophobie, comme par exemple la pratique visant à accorder aux réfugiés le même traitement réservé aux nationaux dans le bénéfice de la plupart des droits économiques, sociaux et culturels.

Mme LAHYA SHIKONGO (Namibie) a estimé que l’on ne pourra pas prétendre vivre dans un monde sans laissés-pour-compte tant que les Palestiniens subiront l’occupation israélienne.  Cette position, a-t-elle souligné, est celle de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), qui, étant donné le passé anticolonialiste de ses membres, a également exprimé de manière constante sa solidarité avec le peuple sahraoui et appelé les parties en conflit au Sahara occidental à mettre en œuvre de manière inconditionnelle les efforts des Nations Unies.  La représentante a demandé, à cet égard, au Secrétaire général de finaliser la désignation d’un nouvel envoyé spécial, suite à la démission de M. Hörst Köhler.  La représentante a demandé la mise en œuvre de l’ensemble des résolutions qui répondent à la volonté du peuple du Sahara occidental et de la population du Territoire occupé de Palestine. 

M. FREDRIK HANSEN, du Saint-Siège, s’est inquiété de la montée des comportements racistes, discriminatoires et xénophobes à l’encontre des migrants et des réfugiés.  Il a appelé à faire preuve d’une plus grande vigilance face aux nouveaux comportements racistes et xénophobes.

M. Hansen s’est également préoccupé de la montée de la discrimination et de l’intolérance qui ciblent les personnes en raison de leur religion ou conviction.  Il a souligné que les engagements pris en matière de tolérance et de non-discrimination ne doivent pas être dissociés des obligations en matière de liberté de religion ou de conviction.

Il a encouragé à changer les attitudes pour lutter contre l’indifférence et surmonter les peurs.  L’une des places les plus appropriées pour promouvoir cette démarche est « chez-soi » car c’est au sein des familles que l’on apprend dès le plus jeune âge les valeurs du partage, de la fraternité et de la solidarité, a-t-il indiqué.

Mme EKA KIPIANI (Géorgie) après être revenue sur les réalisations, notamment législatives, de son pays en matière de lutte contre la discrimination raciale, a déploré que l’occupation russe de « deux régions géorgiennes », l’Abkhazie et Tskhinvali, empêche son gouvernement d’en faire bénéficier les citoyens qui demeurent de l’autre côté des frontières barbelées illégalement érigées.  Mme Kipiani a également accusé la Puissance occupante de poursuivre sa politique de violation des droits de l’homme en ciblant ethniquement des Géorgiens vivant dans les régions occupées, citant notamment des restrictions contre la liberté de mouvement et des problèmes en matière de propriété.

Elle a aussi averti du risque d’une crise humanitaire, notamment dans le district d’Akhalgori en raison du bouclage de la ligne d’occupation.  Pas plus tard qu’hier, une femme de 70 ans qui nécessitait des soins médicaux d’urgence est morte suite au refus du régime d’occupation d’ouvrir à titre temporaire un point de passage.

Mme Kipiani a expliqué que la population géorgienne dans la région occupée d’Abkhazie est forcée de s’enregistrer en tant que citoyen étranger pour retirer un permis de résidence pour étranger.  De plus, les Géorgiens résidant en Abkhazie sont obligés de changer leur nom de famille et leur identité ethnique en des noms et identités abkhazes pour pouvoir jouir de droits de l’homme basiques qui leur seraient sinon inaccessibles. 

La représentante a souligné sa préoccupation quant à la prohibition de l’éducation dans leur langue maternelle dont sont victimes les Géorgiens des régions d’Abkhazie et de Tskhinvali depuis 2015.  Elle s’est également vivement inquiétée du fait qu’en Abkhazie, les enfants des écoles maternelles et primaires sont contraints de chanter des chants militaires russes et de participer à des jeux militaires hostiles aux Géorgiens.

M. MOHAMMAD AL HAFIZ BIN MOHD NADZIR (Malaisie) a condamné fermement les discours haineux et autres actes d’intolérance.  Il a souligné le rôle critique de l’éducation dans la prévention et l’éradication du racisme, tout particulièrement parmi les jeunes.

Il a indiqué que la Malaisie continuera de participer activement aux dialogues facilités par l’ONU et a appelé la communauté internationale à célébrer la diversité et à se rassembler en dépit des différences religieuses.

M. MATTHEW EDBROOKE (Liechtenstein) a insisté sur le droit à l’autodétermination comme condition préalable à la pleine jouissance des droits de l’homme.  Le Liechtenstein produit d’ailleurs actuellement un guide de référence qui met en avant des recommandations pour les États, les médiateurs et les communautés concernées qui souhaitent prévenir et résoudre des conflits dans lesquels les revendications d’autodétermination sont un facteur déterminant.  Ce manuel considère l’autogouvernance comme mesure de prévention de la sécession ou encore encourage l’inclusion de voix extérieures aux acteurs armés dans les processus de paix.

Mme AYŞE INANÇ ÖRNEKOL (Turquie) a fait part de sa vive préoccupation avec la montée du racisme, de la xénophobie et des discours de haine à travers le monde.  Ces fléaux menacent nos valeurs démocratiques communes et la paix dans nos sociétés, a-t-elle déploré, précisant en outre que des membres de la communauté turcs établis en Europe ont été les victimes de ces actes. 

Elle a accusé les populistes d’alimenter l’islamophobie et la xénophobie avec leurs discours sectaires.  Ces menaces ne doivent plus être ignorés et requièrent des mesures urgentes à tous les niveaux, a-t-elle estimé.  L’initiative de l’Alliance des civilisations, lancée par son pays et l’Espagne, est un outil important à cet égard.  Elle s’est également félicitée du lancement du Plan d’action développé par l’Alliance pour prévenir les attaques contre les sites religieux. 

Mme FLOR DE LIS VASQUEZ MUÑOZ (Mexique) a exprimé la préoccupation de son pays face à la prolifération des discours d’incitation à la haine, qui alimentent des sentiments xénophobes et peuvent mener à des incidents violents, comme ce fut le cas récemment à l’encontre des communautés musulmanes ou juives, par exemple.

Le Mexique est également préoccupé par la prolifération de sites Internet radicaux qui propagent des idées xénophobes et incitent à la violence, et qui ciblent notamment les jeunes.  Mme XXX a appelé les gouvernements à se mobiliser, soulignant que la communauté internationale doit consentir un effort coordonné mondial pour contrer ce phénomène dangereux.

M. MOZAFFARPOUR (République islamique d’Iran) a défendu le multilatéralisme qui a mis fin au colonialisme et a mis en garde contre les graves répercussions, pour la communauté internationale et l’humanité, en cas de repli à cet égard.  Il s’est élevé contre les mesures coercitives unilatérales qui non seulement privent les États ciblés de leurs droits inaliénables mais alimentent des cycles de conflit, où les États rejettent le multilatéralisme et utilisent le terrorisme économique pour engranger des gains politiques.

Il s’est dit gravement préoccupé du « racisme systématique profondément enraciné » à l’encontre des Palestiniens.  En effet, a-t-il poursuivi, en l’espace d’une année, quelque 100 Palestiniens ont été tués, terrorisés ou mutilés sous les yeux de la communauté internationale. 

Mme PAULOMI TRIPATHI (Inde) a rappelé que son pays est une société multireligieuse, multiethnique et multilingue basée sur l’égalité et la tolérance.  Après avoir vécu pendant près de deux siècles sous un régime colonial, l’Inde est douloureusement consciente des effets néfastes du racisme et de la discrimination raciale.  De plus, le fléau de l’esclavage a coûté la vie à plusieurs millions d’Indiens, a renchéri la représentante, assurant que pour prévenir la récurrence de telles pratiques, le pays s’est doté d’une constitution interdisant expressément la discrimination fondée sur la race. 

En tant qu’ancienne colonie, l’Inde a toujours été à la pointe du combat pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a poursuivi la déléguée, observant que si des progrès importants ont été réalisés sur cette question, certaines situations restent sans solution.  Dans ce contexte, elle a réaffirmé le plein soutien de son pays au droit des Palestiniens à l’autodétermination.  Soulignant enfin le cadre essentiel que représentent la Déclaration et le Programme d’action de Durban pour lutter contre le racisme et la discrimination raciale, elle a estimé qu’il existe des interconnexions évidentes entre ces défis et la mise en œuvre des objectifs de développement durable. 

M. JULIO DA COSTA FREITAS (Timor-Leste) a estimé que le respect et la protection des droits de l’homme dans tous les aspects de la vie sont d’une importance cruciale et qu’il est de l’intérêt de tous de travailler collectivement à leur matérialisation, conformément au Programme 2030.  Cela étant dit, il convient que tous les pays respectent les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale, d’indépendance politique et de non-ingérence, a souligné le représentant, appelant les États à promouvoir l’entente mutuelle et la coopération afin de mettre en œuvre les droits de l’homme et le droit international, sans recourir ni à la violence ni à la confrontation.  Il a également exhorté toutes les parties aux conflits à se conformer à l’état de droit ainsi qu’aux valeurs et principes de la Charte des Nations Unies sans perdre de vue le fait que chaque pays peut régler ses problèmes intérieurs par le biais de sa législation, dans le plein respect des droits de la personne. 

Mme MARIE GNAMA BASSENE (Sénégal) a mis l’accent sur la question du droit à l’autodétermination, jugeant qu’elle devrait rappeler à la communauté internationale sa responsabilité à l’égard du peuple palestinien.  C’est pourquoi, a-t-elle dit, le Sénégal, en tant que président en exercice du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, souhaite attirer l’attention sur la situation des territoires palestiniens occupés depuis plus de 50 ans.  Il est, selon elle, de la responsabilité de l’ONU de trouver une solution pacifique à ce conflit afin de répondre aux aspirations sécuritaires d’Israël ainsi qu’à celles légitimes des Palestiniens. 

S’agissant du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, la représentante a relevé que les victimes de ces phénomènes sont principalement des personnes d’ascendance africaine, des peuples autochtones, des minorités linguistiques, ethniques et religieuses ainsi que des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés.  Tout en prônant un dialogue interculturel ouvert, permanent et respectueux de toutes les composantes de la société pour combattre ces fléaux, elle a jugé impératif que les gouvernements mettent en place des programmes dans l’esprit et la lettre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Dans le même ordre d’idées, elle a appelé les États Membres à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et à mettre en œuvre le Pacte de Marrakech sur les migrations. 

M. AHSAN (Bangladesh) a déploré que trop de peuples souffrent de discrimination dans le monde, y compris les Rohingya au Myanmar.  Il a dénoncé les discours de haine qui sont à l’origine des incitations à violence dans l’État rakhine, rappelant qu’il avait été recommandé au Gouvernement du Myanmar de lutter contre les discours d’incitation à la haine et d’y mettre un terme.  Citant les propos du Secrétaire général, il a affirmé n’avoir « jamais vu de communauté aussi discriminée dans le monde que les Rohingya ».  L’épuration ethnique risque de se poursuivre! a alerté le délégué.

Mme RASHA MOH’D KHEIR OMAR SHOMAN KHOT (Jordanie) a averti que les terroristes et les extrémistes exploitent la pauvreté, le chômage, l’injustice sociale, l’exclusion, les inégalités, de mauvais systèmes éducatifs, le manque de sensibilisation du public, l’oppression et la discrimination, et abusent de la technologie et des médias sociaux pour susciter l’intolérance, le racisme, les discours de haine et la xénophobie.  S’attaquer à ces facteurs exige des efforts conjugués aux niveaux national, régional et international, a indiqué la représentante, qui a cité en exemple la réunion de haut niveau organisée en septembre par la Jordanie sur les réponses stratégiques aux discours terroristes et extrémistes violents, en partenariat avec la France, la Nouvelle-Zélande et le Bureau de lutte contre le terrorisme de l’ONU.

En venant au point sur le droit des peuples à l’autodétermination, la délégation a affirmé qu’aucune excuse ne peut être invoquée pour priver un peuple de ce droit, ce que confirment la jurisprudence et les décisions de références juridiques internationales, comme la Cour internationale de Justice.  La Jordanie soutient fermement le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à établir un État indépendant, souverain et viable avec Jérusalem-Est pour capitale.  Elle a appelé la communauté internationale à en finir avec l’occupation israélienne.

Mme ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) s’est déclarée préoccupée par le fait que, dans de nombreuses régions du monde, le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie continuent d’être évidents.  C’est tout particulièrement le cas aux États-Unis, où une rhétorique raciste et xénophobe est alimentée par l’Administration actuelle, laquelle s’échine à vouloir construire des murs et à séparer les familles.  C’est ainsi que l’on assiste à l’émergence d’expressions de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie qui coûtent la vie à des migrants, comme lors des récents massacres perpétrés au Texas, a souligné la représentante.  Face à ce fléau, a-t-elle ajouté, Cuba réaffirme son engagement à contribuer à la lutte au-delà de ses frontières, grâce à la coopération altruiste de ses collaborateurs, toujours à tendre la main aux autres indépendamment des critères raciaux et des statuts sociaux. 

En ce qui concerne le droit à l’autodétermination, il a beau faire partie des objectifs et principes des Nations Unies, il reste un vœu pieux, a poursuivi la déléguée.  Cuba n’oublie pas que des terroristes comme Luis Posada Carriles, le cerveau de l’attentat contre un vol de la Cubana de Aviación le 6 octobre 1976, qui a fait 73 morts, n’ont jamais répondu de leurs actes devant la justice, et ce, parce que les États-Unis les ont protégés jusqu’à la fin de leurs jours, a-t-elle décrié.  Pour sa part, après près de 60 ans d’un blocus économique, commercial et financier décidé par les États-Unis, le peuple cubain a déjà payé au prix fort l’exercice de son droit à l’autodétermination, a-t-elle conclu. 

M. DAVIT KNYAZYAN (Arménie) a déclaré attacher une grande importance à la défense et la promotion du droit inaliénable à l’autodétermination.  Selon lui, les approches sélectives et les tentatives visant à créer une hiérarchie arbitraire en vue d’empêcher la réalisation de ce droit sont inacceptables et doivent être rejetées par la communauté internationale.  Le représentant a indiqué à cet égard que le peuple du Nagorno-Karabakh a exercé son droit légitime à l’autodétermination en plein conformité avec le droit international et la législation applicable.  Malgré les efforts visant à le priver de ce droit, il a réussi à renforcer ses institutions démocratiques, à protéger les droits de l’homme et à garantir l’état de droit.  Dans ces conditions, a-t-il souligné, l’Arménie réitère son ferme soutien au droit inaliénable du peuple du Nagorno-Karabakh à déterminer librement son avenir sans limitation ni coercition et à poursuivre son développement économique, social et culturel. 

Mme PETRA MIJIĆ (Croatie) s’est inquiétée de la montée des populismes dans le monde et a plaidé pour une politique de « tolérance zéro » face au racisme et à la xénophobie afin de garantir l’égalité des traitements et la dignité pour l’ensemble des êtres humains.  Elle a expliqué que dans son pays, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale demeure parmi les instruments des droits de l’homme les plus pertinents. 

Pour lutter contre les crimes de haine, la Croatie a mis en place un groupe de travail chargé du suivi des incidents et crimes liés à la haine en coordination avec le Bureau des droits de l’homme et des droits des minorités, un organe central chargé de la collecte et de la publication des données liées au crime de haine.  Elle a indiqué que la promotion du multiculturalisme et les discours de tolérance à l’intérieur comme à l’extérieur des pays sont parmi les plus hautes priorités de la Croatie. 

Mme KSHENUKA DHIRENI SENEWIRATNE (Sri Lanka) a rappelé que, le 21 avril de cette année, la paix à laquelle son pays goûtait depuis l’éradication du terrorisme en 2009 a été ébranlée par les attentats terroristes qui ont coûté la vie à 250 personnes et blessé des centaines d’autres.  En dépit de ces tentatives visant à détruire le tissu social du pays, l’expérience d’une nation multiethnique, multiculturelle et multireligieuse, façonnée par les enseignements et la foi du bouddhisme, de l’hindouisme, de l’islam et du christianisme ont démontré que la religion et la culture pouvaient promouvoir l’harmonie et la confiance au sein de la population, a-t-elle souligné.

Condamnant le terrorisme et l’extrémisme sous toutes leurs formes, la déléguée a appelé les États à réaffirmer leur détermination à combattre ces menaces mondiales et à répondre aux défis lancés à la dignité humaine et à la sécurité.  Pour Sri Lanka, a-t-elle indiqué, la stratégie des Nations Unies sur le discours de haine est la bienvenue.

M. FRED SARUFA (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a rappelé que dans moins d’un an, la Décennie internationale de l’élimination du colonialisme arrivera à son terme.  Or, a-t-il déploré, peu de progrès ont été accomplis alors même que la lutte pour l’autodétermination demeure d’actualité pour des millions de personnes qui sont encore dans l’ombre du colonialisme.  En tant que membre du Comité spécial de la décolonisation, a indiqué le représentant, la Papouasie-Nouvelle-Guinée travaille en concertation avec les puissances administrantes des territoires non autonomes afin de souligner les difficultés auxquelles sont confrontés les peuples réclamant l’autodétermination.  Soulignant l’importance du dialogue pacifique et inclusif à cette fin, il s’est félicité de la tenue, le 4 novembre 2018, en Nouvelle-Calédonie, d’un deuxième référendum sur l’autodétermination.  À cette occasion, a-t-il relevé, 81% des électeurs admissibles ont pu exercer ce droit légitime.  Cette consultation ayant été entachée de problèmes divers, il a souhaité que la question soit abordée par les autorités locales et la Puissance administrante d’ici au prochain référendum programmé en 2020. 

M. BISMARK ANYANAH (Ghana) s’est préoccupé de la résurgence du racisme et de l’intolérance dans le monde, qui ciblent particulièrement les migrants et réfugiés ainsi que les peuples d’ascendance africaine.

Il a affirmé que l’État et les institutions indépendantes du Ghana ont tous été à l’avant-garde des efforts de lutte contre l’intolérance, afin de susciter la prise de conscience et de promouvoir des sociétés pacifiques et inclusives.  La Commission nationale des médias et l’Autorité nationale de la communication, parmi d’autres, ont aussi été établies pour réguler les espaces médiatiques contre ces vices, y compris les discours haineux.

De plus, l’initiative « Justice pour tous », qui a été introduite par le Gouvernement en 2007 pour décongestionner les prisons au travers de cours spéciales, a été étendue à toutes les 16 régions du Ghana en 2019.  Cette initiative contribue à améliorer l’administration de la justice, et à lutter contre la discrimination à l’égard des prisonniers, a-t-il expliqué.

M. VICTOR MORARU (République de Moldova) a réaffirmé que le droit à l’autodétermination est un droit fondamental qui concerne en premier lieu ceux qui souffrent de la colonisation et d’autres formes de domination étrangère.  Néanmoins, il a soutenu que l’on ne peut abuser du droit à l’autodétermination pour encourager la sécession et saper les États pluralistes et démocratiques.  Ainsi, la République de Moldova ne reconnaît pas de droit de sécession en dehors du contexte de la décolonisation.  Selon M. Moraru, le concept de droit à l’autodétermination n’est pas d’utilité pour résoudre les problèmes des sociétés multiethniques.  Il a également appelé à exercer avec précaution le concept de revendication d’autodétermination communautaire, tout particulièrement quand de telles revendications sont utilisées pour justifier des déclarations unilatérales d’indépendance ou la tenue de référendums illégaux de sécession.

Mme DARYNA HORBACHOVA (Ukraine) a indiqué que la Constitution de son pays garantit l’exercice des libertés fondamentales pour tous les citoyens sans aucune distinction.  Hélas, a-t-elle déploré, le racisme et ses manifestations perdurent aux quatre coins du monde et de nombreux groupes vulnérables en font les frais.  Face à ces tendances, il faut de toute urgence renforcer les capacités et associer tous les acteurs dans le cadre d’action pour changer la donne, a-t-elle estimé. 

Elle a dénoncé l’occupation de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol et rejeté les campagnes menées contre les Tatars et les Ukrainiens de souche.  Ces campagnes ont souvent une dimension raciale et culturelle, a-t-elle précisé.  Elle a rappelé que son pays a saisi la Cour internationale de Justice (CIJ) au sujet de l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et a appelé la Fédération de Russie à respecter l’arrêt rendu par la CIJ dans cette affaire.

Mme Horbachova s’est également dite profondément préoccupée par la campagne « massive » de propagande et d’incitation à la haine contre l’Ukraine et les Ukrainiens véhiculée par les médias et les figures politiques russes.  Elle a également accusé le Gouvernement russe d’appuyer des mouvements d’extrême droite et leur participation dans l’agression contre son pays.

La représentante a par ailleurs indiqué que l’Ukraine s’est dotée d’une stratégie pour la protection et l’intégration des minorités roms dans le but de répondre au problème de l’apatridie.

M. SAMSON SUNDAY ITEGBOJE (Nigéria) a fait valoir que toute doctrine professant la supériorité raciale est scientifiquement erronée, moralement répugnante, socialement injuste et dangereuse, soulignant qu’il n’existe aucune justification à la discrimination raciale, ni en théorie ni en pratique.  Pour le représentant, il importe de condamner ces aberrations mais aussi de travailler ensemble à les combattre en vue d’un monde meilleur, conformément au Programme 2030.  Pour sa part, a-t-il indiqué, le Nigéria s’attaque à ce fléau partout où il sévit, qu’il affecte des Nigérians, des Africains, des personnes d’ascendance africaine ou autres. 

Notant que cette année marque la fin de la première moitié de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, le délégué a constaté que beaucoup reste à faire pour garantir reconnaissance, justice et développement aux personnes concernées.  De plus, a-t-il souligné, le Nigéria ne peut se vanter d’être pleinement développé quand des frères et des sœurs, à la fois sur le continent africain et au sein de la diaspora, souffrent de la faim, de privations et d’autres formes de dépendance.  C’est pourquoi il a appelé la communauté internationale à joindre ses forces pour lutter contre la discrimination visant les Africains et les personnes d’ascendance africaine, en particulier les migrants dont les vulnérabilités rappellent celles des esclaves d’hier.  Il a conclu son propos en réitérant l’appui de son pays au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

Droit de réponse

Le représentant de la Chine a dénoncé les allégations infondées des États-Unis.  Les mesures antiterroristes adoptées dans le Xinjiang ne sont pas différentes des mesures antiterroristes prises par les États-Unis en Europe, et elles ne visent pas une ethnie ou religion, a-t-il déclaré.  Rappelant qu’hier, 54 pays ont fait l’éloge du bilan des droits de l’homme de la Chine, la délégation a appelé les États-Unis à réfléchir au problème endémique de discrimination et de discours haineux chez eux. 

RAPPORT DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS, QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES (A/74/12, A/74/12/ADD.1, A/74/322)

Exposé du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a indiqué que le monde compte à présent 71 millions de personnes déplacées suite à des conflits ou en raison de la violence et de la persécution, un chiffre qui, a-t-il ajouté, ne fait qu’augmenter.  Il a expliqué que cette mobilité humaine est alimentée par plusieurs facteurs, notamment la compétition pour les ressources, la faiblesse de la gouvernance, le creusement des inégalités, l’effondrement des écosystèmes et les catastrophes climatiques ou encore l’exploitation des divisions ethniques, religieuses ou autres par des « politiciens sans scrupules ».  Il a prévenu que répondre aux défis des déplacements forcés et à leur causes sous-jacentes « complexes » appelle à faire preuve d’une ambition plus importante que dans le passé.

M. Grandi a indiqué que le Pacte mondial sur les réfugiés est à l’origine des efforts visant à mettre en œuvre un nouveau modèle de réponse pour ces derniers.  Il a insisté sur le fait que le Pacte préserve l’impératif humanitaire auquel s’ajoutent la consolidation de la paix, l’action en faveur du développement et les investissements du secteur privé.  Il insuffle également un nouvel élan à l’engagement collectif envers le partage des responsabilités internationales qui sous-tendent le régime de protection des réfugiés. 

L’année écoulée n’a fait que mettre en évidence l’urgence et la pertinence du Pacte, a signalé le Haut-Commissaire.  Il a notamment fait observer que l’impact le plus notable des déplacements forcés se fait ressentir dans les pays hôtes pauvres ou à revenu intermédiaire, dont les 14 pays d’Amérique latine et des Caraïbes qui accueillent actuellement près de 4,5 millions de Vénézuéliens.

Que ce soit là ou ailleurs, l’interface entre l’action humanitaire et en faveur du développement demeure essentielle, a-t-il souligné, et c’est là l’un des principaux préceptes du Pacte.  Il a expliqué que l’action humanitaire est de plus en plus fréquemment complétée par l’inclusion systématique des réfugiés et des communautés hôtes dans les plans nationaux de développement et le financement.  Des progrès énormes ont été réalisés, mais il ne faut pas perdre de vue les défis, notamment en termes de modalités, de timing et de ressources, a-t-il ajouté.

M. Grandi a aussi parlé des défis complexes liés aux flux mixtes de réfugiés et de migrants.  Il a relevé que les craintes légitimes au sujet de l’emploi, de la sécurité et de l’identité sont exploitées à des fins politiques, incitant les personnes qui sont elles-mêmes exclues des retombées de la mondialisation à se monter contre les migrants et les réfugiés.  On dresse l’exclusion contre l’exclusion sans offrir la moindre solution pratique, a-t-il déploré.  Il a également averti que les mesures prises pour endiguer les flux migratoires, comme les refoulements, l’externalisation des processus de demande d’asile ou les politiques de dissuasion, ne permettent pas de répondre aux racines des flux mixtes, ni aux défis de l’intégration.

Ces situations sont extrêmement compliquées, a-t-il poursuivi, citant notamment le cas du Mexique, où des exemples notables d’intégration sont couplés à des pressions migratoires de plus en plus importantes venant de la région, mais aussi de l’Afrique.  Des défis similaires existent dans d’autres régions du nord de l’Amérique centrale et à la frontière sud des États-Unis, ainsi qu’en Afrique australe, et en Asie du Sud-Est. 

Le Haut-Commissaire a aussi parlé des mouvements vers l’Afrique du Nord et au-delà de la Méditerranée qui, a-t-il reconnu, représentent un important dilemme pour le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et leurs partenaires qui cherchent à assurer la sûreté des plus vulnérables tout en gérant des risques énormes et en luttant contre l’impact mortel de « l’industrie » des passages clandestins.  Il a appelé à renforcer la confiance du public dans les institutions d’asile en établissant des procédures rapides et équitables et en adoptant un bon système de gestion afin d’empêcher que l’abus du système d’asile ne se substitue aux voies de migration.  Il importe également d’investir dans ceux qui ont le droit de rester, a-t-il ajouté.

M. Grandi s’est ensuite inquiété de la persistance de crises de déplacement récurrentes et de longue durée, comme en Afghanistan ou en Somalie.  Il a aussi cité la République arabe syrienne qui demeure, a-t-il rappelé, la plus importante crise de déplacement au monde, notant que l’escalade du conflit dans le nord-est du pays a provoqué des dizaines de milliers de déplacements au cours des dernières semaines.  Il a souligné que dans le contexte de crises prolongées, l’accent que place le Pacte sur l’inclusion, la résilience et l’action en faveur du développement est essentiel.

Il s’est en outre préoccupé de la question des retours volontaires, notamment en l’absence de règlement définitif des conflits.  Selon M. Grandi, tout retour de réfugiés vers des pays comme la République arabe syrienne, le Burundi et le Myanmar demeure la meilleure solution à condition que celui-ci soit volontaire, sûr et dignifié.  Le HCR continuera de travailler avec les gouvernements pour surmonter les obstacles, appuyer les mesures de rétablissement de la confiance et contribuer à créer les conditions propices au retour.  Mais en attendant, la générosité remarquable des pays d’accueil doit être appuyée, a insisté M. Grandi.  Le Haut-Commissaire a de plus signalé que les évolutions positives au Soudan, au Soudan du Sud et en Éthiopie pourraient ouvrir la voie à des solutions pour des millions de réfugiés et déplacés internes.

Abordant la question de la réinstallation, le Haut-Commissaire a fait observer que cette option n’est valable que pour un nombre limité de personnes.  Il a de plus déploré que le nombre de programmes établis par les pays à cette fin tombe au plus bas.  La réinstallation permet de sauver des vies et d’offrir une stabilité aux réfugiés qui sont les plus vulnérables et à risque, a-t-il souligné.  Le HCR s’attellera pour sa part à mettre en œuvre sa nouvelle stratégie de trois ans visant à intensifier les efforts de réinstallation et à élargir l’implication du secteur privé et des communautés.

M. Grandi a expliqué que le HCR renforce également son action auprès des 41 millions de personnes déplacées que compte le monde.  Une nouvelle politique met l’accent sur le leadership et l’identification de solutions, a-t-il indiqué, précisant que les opérations prioritaires en Iraq, en République arabe syrienne, au Yémen, dans le bassin du lac Tchad, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo et en Ukraine demeurent parmi les plus complexes, tant sur le plan opérationnel que politique.

Poursuivant, le Haut-Commissaire a souligné que l’urgence climatique est dorénavant l’un des principaux moteurs des déplacements dans le monde.  Il a fait observer que le terme « réfugié climatique » n’est pas consacré par le droit international, et ne permet pas de saisir la complexité de l’interaction entre le climat et la mobilité humaine, tout en reconnaissant que l’image qu’il véhicule a su saisir l’attention du public.  Il a expliqué que le HCR se mobilise pour attirer l’attention sur les écarts de protection provoqués par les déplacements transfrontières dans le contexte des changements climatiques et orienter le débat politique et normatif dans ce domaine.  Il a ajouté que selon les circonstances, des besoins de protection internationale pourraient être justifiés.

Le HCR mettra également davantage l’action sur la réduction de l’impact environnemental des crises de réfugiés, notamment en promouvant l’utilisation de l’énergie renouvelable, les activités de reboisement et l’accès à des carburants et technologies propres pour la cuisson.

M. Grandi a par ailleurs jugé nécessaire d’accorder une plus grande attention à la situation des apatrides.  À mi-chemin de la campagne décennale « I Belong », le HCR continuera de travailler auprès des États à cette fin.  Il a aussi divulgué qu’en 2019, les fonds disponibles devaient atteindre 4,82 milliards de dollars, tout en signalant que l’écart entre les besoins et les ressources disponibles persiste.  Il a de plus anticipé une augmentation de 11% des contributions du secteur privé par rapport à l’an dernier, pour atteindre 470 millions de dollars. 

Le Haut-Commissaire a aussi touché mot du processus de réforme du HCR, précisant que les mesures de régionalisation et de décentralisation ont permis aux bureaux de pays de jouir d’une plus grande autorité et de plus de souplesse.  La dernière étape des changements structurels sera mise en œuvre dans les mois à venir, et le HCR continue par ailleurs de rationaliser et d’améliorer ses systèmes et processus, en ligne avec le Grand Bargain (pacte relatif au financement de l’action humanitaire).  Il a précisé que le nouveau centre conjoint de données HCR/Banque mondiale permettra d’appuyer ces efforts.

Avant de conclure, M. Grandi a vu dans le Pacte un outil puissant, capable de servir de tremplin pour le travail collectif de la communauté internationale.

Dialogue interactif

Le Canada a relevé que le rapport du Haut-Commissaire insiste sur l’importance des principes de solidarité internationale et d’humanité pour promouvoir le partage des responsabilités.  Comment le HCR contacte-t-il les différents partenaires à cette fin? a-t-il demandé.  Et comment les États peuvent-ils aider à mettre en œuvre cette nouvelle politique? a renchéri l’Irlande.

L’Union européenne a demandé davantage d’informations sur le processus de décentralisation du HCR ainsi que sur la coopération entre les différentes agences pour une riposte efficace.  Comment le HCR peut-il protéger les réfugiés contre les violences des acteurs non étatiques et aider les gouvernements à lutter contre les racines des déplacements forcés? a demandé à son tour l’Afghanistan, qui s’est en outre interrogé sur les conditions propices à un rapatriement volontaire.

Affirmant faire tout son possible pour venir en aide aux enfants et aux femmes réfugiés, la Grèce a souligné qu’aucun pays ne peut faire face à la crise des migrants seul.  L’Italie a plaidé de son côté pour une coopération intégrée fondée sur les responsabilités partagées et a demandé au Haut-commissaire quels résultats et quelles mesures de suivi il souhaite voir à l’issue du forum de Genève prévu en décembre.

Le Mexique s’est préoccupé pour sa part de la xénophobie et les discours d’incitation à la haine et voudrait savoir dans quelle mesure cette propagande a pu avoir une incidence sur le travail du HCR. 

Quelles sont les appréciations du HCR quant à l’incidence des sanctions sur les réfugiés? a demandé à son tour la République islamique d’Iran, qui a rappelé qu’elle vit une situation de réfugiés des plus prolongées au monde.  Elle a toutefois alerté qu’en raison des mesures coercitives imposées, elle ne peut fournir les services de bases à ces populations, jugeant déraisonnable qu’elle ait à assumer seul ce fardeau.

Le déficit chronique de financement du HCR a inquiété la République de Corée qui a appelé à élargir le nombre des donateurs et d’avoir des fonds plus prévisibles et durables, tandis que le Maroc a voulu en savoir plus sur les mesures prises pour enregistrer les personnes dans les camps de réfugiés.

À son tour, la Roumanie a indiqué qu’elle avait accueilli des personnes expulsées de Malte et d’Italie et avait d’ores et déjà fixé le quota pour 2021, qui a doublé par rapport à l’année précédente.  Le Bangladesh a rappelé pour sa part qu’il héberge 1,1 million de déplacés de force, dont 700 000 qui sont arrivés durant le seul mois d’août 2017.  Il a plaidé pour un retour rapide des réfugiés et exhorté le Myanmar à réunir les conditions propices à cette fin, l’appelant notamment à mettre en œuvre les projets à impact rapide prévus dans le cadre du mémorandum d’accord entre le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le HCR et le Myanmar.  Le Paraguay a par ailleurs décrié des cas où des personnes accusées de crime se seraient vu accorder le statut de réfugiés.

La Suisse a voulu savoir en quoi le Forum mondial sur les réfugiés qui se tiendra à Genève en décembre contribuera aux indicateurs du pacte, tandis que le Qatar a souligné la nécessité de trouver des solutions politique d’urgence aux crises qui sont à l’origine des flux de réfugiés et déplacés.

Quelles sont les conséquences économiques et sociales de la présence de réfugiés dans les pays en développement? a demandé à son tour l’Algérie, qui a par ailleurs souhaité obtenir un complément d’information au sujet du nombre de réfugiés sahraouis cité dans le rapport, relevant une divergence. 

Le Chili a fait observer qu’avec l’afflux de migrants vénézuéliens, pour la première fois, l’Amérique latine connaît une crise migratoire majeure, avant que le Danemark, au nom des pays nordiques, n’appelle à fournir davantage de fonds aux pays en développement pour accueillir les réfugiés.

Les États-Unis, en tant que plus grand bailleur de fonds, ont souligné que les besoins croissants ne peuvent pas être satisfaits par un seul donateur et ont appelé les autres pays à leur emboîter le pas.  Le Japon a demandé au Haut-Commissaire son avis sur la façon dont les États Membres peuvent mieux appuyer la mise en œuvre de solutions, tandis que le Costa Rica s’est enorgueilli d’avoir été le premier pays à octroyer la nationalité à un apatride. 

La République arabe syrienne s’est déclarée ouverte à négocier avec le HCR pour répondre aux besoins des déplacés et réfugiés syriens qui reviennent dans le pays.  Des idées pratiques ont été présentées par la Syrie au HCR, mais, a regretté cette dernière, le pays n’a reçu aucune réponse positive de la part du HCR.  La délégation a aussi appelé le HCR à revoir sa position selon laquelle les conditions ne seraient pas réunies pour un retour des réfugiés.  À son tour, le Venezuela a accusé les États-Unis d’être à l’origine de la crise que connaît son pays, et s’est par ailleurs déclaré préoccupé par l’instrumentalisation de la question des migrants.

L’Égypte a fait le point sur la situation des réfugiés présents en Égypte et la protection dont ils bénéficient, insistant sur l’importance d’un partage équitable des responsabilités.  La protection des réfugiés doit se faire dans le respect de la neutralité, a insisté pour sa part la Chine.

Dans ses réponses, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés a rappelé que le mandat de son bureau est strictement humanitaire et non politique.  « J’insiste lourdement sur cet aspect », a-t-il dit, ajoutant: « je réfute catégoriquement » l’idée exprimée selon laquelle « nous politisons la question des réfugiés ».  Il a invité les États Membres à saisir cette occasion pour se concentrer sur l’aide et la protection à apporter aux réfugiés afin de trouver des solutions, ce qui est dans « notre intérêt à tous ».  Il a exhorté l’ensemble à dégager un consensus pour approuver la résolution omnibus, avertissant que toute absence de compromis affaiblirait son mandat. 

Abordant, par ailleurs, le problème des discours de haine, il a averti de l’impact immense de ce phénomène en matière de stigmatisation, et souligné que le HCR participe aux travaux du Secrétaire général à cet égard.  S’agissant des déplacements climatiques, il a indiqué « vouloir intervenir au plan opérationnel » et annoncé avoir constitué une petite équipe au sein du HCR chargée de travailler sur cette question. 

Quant à la problématique du rapatriement, il a expliqué qu’il fallait surmonter les obstacles et impliquer la responsabilité des pays d’origine.  Il a expliqué que le HCR travaille avec le Gouvernement du Myanmar pour créer des conditions favorables au retour.  Il a insisté sur l’importance de disposer de données sur les réfugiés, afin de mobiliser les ressources appropriées, surtout dans les situations où il peut y avoir possibilité de rapatriement.  La responsabilité première incombe cependant aux pays d’accueil, car c’est à eux que revient le devoir de recueillir les données et de les partager avec le HCR afin, a-t-il expliqué, d’améliorer le type d’assistance fournie aux réfugiés. 

M. Grandi est aussi revenu sur la question du partage de responsabilités, saluant à ce propos l’Iran, un pays hôte « exemplaire » qui assure l’accès des réfugiés aux soins de santé, à l’éducation et à l’emploi.  Il s’est par ailleurs inquiété de la sécurité des personnels humanitaires, évoquant l’assassinat de trois d’entre eux qui travaillaient pour le compte de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) au Soudan du Sud.  Pour finir, il a indiqué que le Forum mondial sur les réfugiés, prévu en décembre à Genève, posera le premier jalon pour examiner et présenter des solutions à la question des réfugiés.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: après l’avis consultatif sur l’archipel des Chagos, des délégations rappellent la CIJ à ses fondements dont le consentement des parties

Soixante-quatorzième session,
20e et 21e séances plénières – matin & après-midi
AG/12207

Assemblée générale: après l’avis consultatif sur l’archipel des Chagos, des délégations rappellent la CIJ à ses fondements dont le consentement des parties

Après l’avis consultatif qu’elle a rendu au début de l’année sur l’archipel mauricien des Chagos, sous Administration britannique, la Cour internationale de Justice (CIJ) a été rappelée aujourd’hui à ses fondements dont le consentement des parties et la stricte séparation entre ses compétences contentieuse et consultative.  L’Assemblée générale examinait le rapport annuel de la CIJ « véritable guide pour l’interprétation du droit international », selon les délégations dont de nombreuses ont déploré que sur 193 États, seuls 74 aient fait une déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de l’organe judiciaire principal de l’ONU.

En cette période de crise de confiance dans le multilatéralisme et les institutions internationales, a souligné Djibouti, la place de la Cour est plus que jamais cruciale.  Dans un monde caractérisé par la volatilité des relations internationales et les actes d’unilatéralisme et d’intimidation d’un certain État qui plonge le droit international dans des problèmes inédits et l’assaille d’attaques diverses et variées, la CIJ, a renchéri la Chine, a un rôle plus important que jamais à jouer pour défendre le règlement pacifique des différends.  Si ces décisions ne sont obligatoires que pour les parties concernées, sa jurisprudence a un impact qui va bien au-delà, ont renchéri les pays nordiques, arguant que la Cour est devenue « un véritable guide pour l’interprétation du droit international ». 

Ces remarques ont été faites après l’intervention du Président de la CIJ qui présentait son rapport d’activités couvrant la période du 1er août 2018 au 31 juillet 2019.  M. Abdulqawi A. Yusuf a fait part d’un rôle très fourni avec 16 affaires contentieuses pendantes, et ce, alors même que la Cour s’est prononcée sur plusieurs affaires.  Il s’est attardé sur les motifs de l’avis consultatif du 25 février dernier sur les « Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965 », en réponse à la demande de cette Assemblée-même.  Cette dernière lui avait posé deux questions: « le processus de décolonisation de Maurice avait-il été validement mené à bien au regard du droit international? » et « quelles sont les conséquences découlant, en droit international, du maintien de l’archipel des Chagos sous Administration britannique ».  La Cour ayant répondu « non » à la première question, du fait du détachement « illicite » de l’archipel et de son incorporation dans une nouvelle colonie, elle a tranché sur la seconde, en estimant que le Royaume-Uni est tenu, dans les plus brefs délais, de mettre fin à son administration. 

Comme l’a rappelé Maurice, l’Assemblée a, par une large majorité de 116 États contre 6, entériné, le 22 mai dernier, l’avis consultatif de la Cour que l’Argentine a vu comme une décision réaffirmant le rôle central de la Quatrième Commission chargée des questions de décolonisation laquelle a, à son ordre du jour, la question des « Îles Malvinas ».  L’Espagne, également présente à la Quatrième Commission avec la question de Gibraltar, a plutôt parlé d’une Cour qui a réitéré l’importance « potentielle » des résolutions adoptées « par consensus » par l’Assemblée, comme des instruments capables de déclarer, cristalliser ou créer des obligations internationales, relevant du droit international coutumier.  Mais, a-t-elle tempéré, l’adoption par consensus d’une résolution ne génère pas automatiquement une obligation internationale car la clef réside dans l’intention des États concernés de reconnaître l’existence d’une disposition du droit international coutumier.  La Cour elle-même, a argué l’Espagne, a montré qu’elle privilégie un examen au cas par cas.

Moins théorique, le Royaume-Uni a confirmé sa souveraineté sur l’archipel des Chagos et dénoncé le fait que cette affaire ait été portée devant la CIJ, sans son consentement.  La Cour ne saurait régler un différend sans le consentement des parties, lequel est un de ses « fondements essentiels », a asséné l’Allemagne.  Le recours à la CIJ repose en effet sur le consentement des États, a ajouté la France, qui a aussi rappelé que les avis consultatifs ne sont pas obligatoires et qu’ils ont une fonction différente de celles des arrêts, « auxquels ils n’ont pas vocation à se substituer ». 

Dire qu’un avis consultatif n’est pas aussi contraignant qu’un jugement est correct en théorie, a concédé Maurice, mais c’est une majorité de 13 juges sur 15 qui a émis cet avis, ce qui lui confère un caractère contraignant.  L’avis consultatif de la CIJ est « une décision juridique » qui fait autorité sur la légalité ou non du comportement du Royaume-Uni, a martelé Maurice.  La Cour, a rétorqué l’Allemagne, a une double compétence et elle est tenue de maintenir la frontière entre ses fonctions contentieuse et consultative.  Elle ne devrait en aucun cas, a prévenu l’Allemagne, « céder à la tentation » de transformer ce qui est fondamentalement un différend entre deux États en une question juridique « abstraite ». 

L’Assemblée générale reprendra ses travaux demain, 31 octobre, à partir de 10 heures pour examiner le rapport du Conseil économique et social.

RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE (CIJ) (A/74/4) ET (A/74/316)

En présentant son rapport qui couvre la période allant du 1er août 2018 au 31 juillet 2019, M. ABDULQAWI A. YUSUF, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a fait part d’un rôle très fourni avec 16 affaires contentieuses pendantes, et ce, alors même que la Cour s’est prononcée sur plusieurs affaires.  Les affaires portées devant elle, a-t-il précisé, l’ont été par des États de toutes les régions du monde et concernent un large éventail de sujets, notamment les questions relatives à la protection consulaire, la formation des règles coutumières de droit international en matière de décolonisation et les différends maritimes et territoriaux.  Durant l’année écoulée, la Cour a tenu des audiences dans cinq affaires contentieuses et une procédure consultative.  Il s’agit de deux instances introduites par l’Iran contre les États-Unis pour violations alléguées d’un traité d’amitié bilatéral datant de 1955; de l’affaire opposant l’Inde au Pakistan sur les violations alléguées des droits consulaires d’un ressortissant indien; de la demande en indication de mesures conservatoires présentée par les Émirats arabes unis dans une affaire relative à des allégations de discrimination raciale dont le Qatar a saisi la Cour; des exceptions préliminaires soulevées par la Fédération de Russie dans une instance introduite par l’Ukraine concernant le financement du terrorisme et la discrimination raciale; et enfin des exposés des participants à la procédure concernant le statut de l’archipel des Chagos (Maurice/Royaume Uni). 

La Cour a rendu trois arrêts, donné un avis consultatif et rendu deux ordonnances en indication de mesures conservatoires.  Le 1er octobre 2018, elle a rendu son arrêt au fond en l’affaire relative à l’« Obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique dans le contentieux (Bolivie c. Chili) ».  Le 13 février 2019, elle a statué sur les exceptions préliminaires en l’affaire relative à « Certains actifs iraniens (Iran c. États-Unis) ».  Le 25 février 2019, elle a donné un avis consultatif sur les « Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965 » et enfin le 15 juillet 2019, elle s’est prononcée sur le fond en l’affaire « Jadhav (Inde c.Pakistan ».  La Cour a aussi rendu deux ordonnances en indication de mesures conservatoires: la première, le 3 octobre 2018, en l’affaire relative à des « Violations alléguées du traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1995 (Iran c. États-Unis) » et la seconde, le 14 juin 2016, en l’affaire relative à l’« Application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Qatar c. Émirats arabes unis) ». 

Exposant le contenu des décisions que la Cour a rendues, le Président s’est attardé sur l’avis consultatif relatif aux « Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965 », en réponse à la demande soumise par l’Assemblée générale dans sa résolution 72/296 du 22 juin 2017.  Il a fait observer qu’au total, 31 États ont déposé des exposés écrits et 22, des exposés oraux.  L’Union africaine a également participé aux deux phases de la procédure. 

Pour répondre à la question de savoir si le processus de décolonisation de Maurice avait été validement mené à bien au regard du droit international, la Cour a d’abord dû déterminer le contenu du droit applicable à ce processus.  Elle a rappelé que le respect du principe de l’égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes a été consacré dans la Charte des Nations Unies, laquelle comporte des dispositions permettant à terme aux territoires non autonomes de s’administrer eux-mêmes.  C’est dans ce contexte que la Cour a dû rechercher à quel moment le droit à l’autodétermination est devenu une règle de droit international ayant force obligatoire pour tous les États.

La Cour a précisé que la résolution 1514 intitulée « Déclaration relative à l’octroi de l’indépendance », adoptée en 1960, revêt un caractère déclaratoire s’agissant du droit à l’autodétermination en tant que norme coutumière.  Elle a également observé que la nature et la portée du droit des peuples à l’autodétermination ont été réitérées dans la déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte.  En incluant le droit à l’autodétermination parmi les « principes fondamentaux du droit international », la Déclaration a confirmé son caractère normatif en droit international coutumier.  La Cour en a conclu que, du point de vue du droit applicable, le droit à l’autodétermination constituait, au milieu des années 1960, une règle coutumière du droit international.  La Cour a aussi noté que la pratique des États et l’« opinio juris », au cours de la période, ont confirmé le caractère coutumier du droit à l’intégrité territoriale d’un territoire non autonome, en tant que corolaire du droit à l’autodétermination.  Les peuples non autonomes sont donc habilités à exercer leur droit à l’autodétermination sur l’ensemble de leur territoire, dont l’intégrité doit être respectée par la Puissance administrante. 

Il en découle que tout détachement par cette puissance d’une partie d’un territoire non autonome, à moins d’être fondé sur la volonté librement exprimée et authentique du peuple du territoire concerné, est contraire au droit à l’autodétermination.  La Cour a donc constaté que du fait de détachement « illicite » de l’archipel des Chagos et de son incorporation dans une nouvelle colonie, le processus de décolonisation de Maurice n’a pas été validement mené à bien au moment de l’accession de ce pays à l’indépendance en 1968. 

Quant aux conséquences découlant, en droit international, du maintien de l’archipel sous l’Administration britannique, la Cour a estimé que ce maintien constitue un fait internationalement illicite.  Le Royaume-Uni est donc tenu, dans les plus brefs délais, de mettre fin à son administration de l’archipel.  La Cour a ajouté que le respect du droit à l’autodétermination étant une obligation « erga omnes », tous les États ont un intérêt juridique à ce que ce droit soit protégé et que, dans le même ordre d’idées, tous les États Membres doivent coopérer avec l’ONU pour la mise en œuvre des modalités nécessaires au parachèvement du processus de décolonisation. 

Le Président a commenté les autres décisions, avant de faire part des efforts pour assurer l’adéquation du Règlement et des méthodes de travail de la Cour à ses besoins évolutifs.  Il s’est dit heureux d’annoncer que la Cour s’est désormais pleinement associée au système de justice interne de l’ONU: les fonctionnaires du Greffe ont désormais accès à l’ensemble des services proposés dans le cadre de ce système.  Le Président a aussi rappelé que la part de la CIJ ne représente que 1% du budget ordinaire de l’ONU.  Conscient des contraintes financières, il a tout de même insisté sur l’importance de trouver le juste équilibre entre l’austérité budgétaire et le besoin « impérieux » d’assurer l’intégrité des fonctions judiciaires de la Cour.  À la différence d’autres organismes de l’ONU, a-t-il plaidé, la Cour ne dispose pas de programmes dont le financement peut être réduit ou augmenté: elle ne saurait refuser de se saisir de différends que lui soumettent les États, ni les mettre en attente pendant plusieurs années, sous le prétexte des coupes budgétaires.  Quant au programme relatif aux « Judicial Fellows », le Président a indiqué que, pour favoriser la diversité parmi les jeunes juristes, la Cour a approuvé l’idée de créer un fonds d’affectation spéciale qu’elle demande à l’Assemblée générale d’approuver à son tour. 

Le Président a conclu en rappelant que la présence d’amiante dans le Palais de la paix a été constaté depuis 2016.  Il fait état de la lettre qu’il a reçu, le 14 octobre, du Ministre néerlandais des affaires étrangères, indiquant que tant qu’un accord n’aura pas été trouvé entre son gouvernement et la Fondation Carnegie, propriétaire du Palais, les préparatifs des travaux de rénovation seront suspendus.  Le Ministre a toutefois précisé que, pendant cette période transitoire, son cabinet est disposé à examiner avec la Cour les arrangements permettant de procéder sans encombre à la réinstallation du Greffe et des autres services nécessaires au bon fonctionnement de l’organe judiciaire. 

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a, compte tenu du volume croissant des affaires dont la Cour est saisie, regretté que le budget n’ait pas augmenté dans les mêmes proportions et que les problèmes financiers de l’ONU rendent plus difficile encore le bon fonctionnement de l’organe judiciaire.  Il a donc exhorté les États Membres qui n’ont pas encore payé leur contribution à l’ONU de le faire rapidement.  Il a par ailleurs remercié les Pays-Bas pour les efforts de désamiantage du Palais de la paix, avant de féliciter la Cour pour avoir lancé une application pour téléphone mobile qui offre des informations en temps réel sur son travail.  En conclusion, M. Gafoor s’est réjoui que le Président de la Cour se soit adressé à d’autres organes de l’ONU, notamment en octobre au Conseil de sécurité, où il a rappelé que « l’état de droit reste la raison d’être de la Cour internationale de Justice ».

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a noté que le Conseil de sécurité n’a ni saisi ni requis l’avis consultatif de la CIJ depuis 1970 et l’a exhorté d’y recourir davantage pour l’interprétation du droit international.  Lors de leur dernière réunion ministérielle à Caracas en juillet dernier, a indiqué le représentant, les membres du Mouvement ont pris l’engagement de saisir plus souvent la Cour, surtout pour les cas de mesures coercitives unilatérales non autorisées par les organes de l’ONU et contraires au droit international ou à la Charte.  Il a invité l’Assemblée générale, les autres organes de l’ONU et les agences, fonds et programmes à faire de même. 

Le représentant a particulièrement insisté sur l’avis de la Cour sur l’illégalité de la menace d’utiliser ou l’utilisation des armes nucléaires.  La Cour, a-t-il affirmé, avait le 8 juillet 1996 consacré l’obligation de négocier de bonne foi le désarmement nucléaire.  Le représentant a d’ailleurs appelé Israël, « Puissance occupante » au plein respect de l’avis consultatif du 9 juillet 2004 sur les conséquences juridiques de la construction d’un mur dans le Territoire palestinien occupé. 

Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), Mme VICTORIA HALLUM (Nouvelle-Zélande) a prié les États qui ne l’ont pas encore fait, à accepter la juridiction obligatoire de la CIJ.  Plus le nombre d’États qui l’acceptent sera élevé, plus les chances de règlement pacifique et rapide des différends se multiplieront, « ce qui est dans l’intérêt de tous », a martelé la représentante.  La diversité géographique des affaires dont la Cour est saisie a prouvé, s’est-elle réjouie, de la confiance dont elle jouit.  Les règles internationales qui régissent les interactions des États Membres évoluant, la Cour, a-t-elle poursuivi, pourrait être appelée à fournir plus fréquemment une interprétation « transparente et impartiale » des questions de droit international.  La représentante a encouragé la Cour à trouver un équilibre entre les problèmes urgents et moins urgents pour pouvoir rendre ses décisions et avis consultatifs en temps voulu. 

Au nom du Groupe des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), M. HELGE SELAND (Norvège) a dit que la diversité des activités de la Cour témoigne du caractère universel de sa juridiction, de sa spécialisation accrue dans des aspects complexes du droit international et, encore plus important, de la volonté des États de la saisir de leurs différends.  La saisine de la Cour, a-t-il estimé, n’est pas un acte hostile et ne doit en aucun cas être considérée comme tel.  Il s’agit plutôt d’un acte relevant de l’obligation de tous les États de promouvoir le règlement pacifique de leurs différends.  Les pays nordiques, a dit le représentant, rappellent que l’Assemblée générale ne cesse de prier les États qui ne l’ont pas encore fait d’envisager d’accepter la juridiction de la CIJ. 

Si les décisions de la Cour ne sont obligatoires que pour les parties concernées, sa jurisprudence a un impact qui va bien au-delà.  Elle est devenue un véritable guide pour l’interprétation du droit international.  Nous devons, a conclu le représentant, veiller à ce que la Cour soit dotée des ressources nécessaires pour remplir son mandat.  Les pays nordiques ont fait des contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale destiné à aider les États à porter leurs différends devant la Cour.  Le représentant n’a pas manqué de féliciter la CIJ pour les améliorations apportées à son site Internet. 

Au nom de la Communauté des pays de langue portugaise, M. JOSÉ LUIS FIALHO ROCHA (Cabo Verde) a rappelé que l’importance de la Cour repose sur son caractère universel, son pouvoir juridictionnel général et son rôle crucial dans le système juridique international.  Il s’est félicité de ce que tous les États Membres soient parties au Statut de la Cour et que 74 d’entre eux reconnaissent le caractère obligatoire de sa juridiction, ajoutant qu’elle peut interpréter quelque 300 traités.  Décrivant la contribution exceptionnelle de la CIJ au développement du droit international et au règlement pacifique des différends entre États, le délégué a jugé très encourageant le respect que les États ont pour les décisions de la Cour.  Le délégué a plaidé pour le renforcement des moyens de la Cour, avant d’insister sur l’importance que la Communauté attache à l’état de droit et à ses relations avec l’ONU.

Au nom du Groupe de Visegrad, M. PETR VÁLEK (République tchèque) a confirmé le soutien résolu de son Groupe à la CIJ, saluant son rôle central dans le règlement pacifique des différends et sa contribution au maintien de la paix et de la sécurité internationales, depuis près de 75 ans.  La force principale de la Cour, a-t-il estimé, réside dans son caractère universel, reflété par la diversité géographique de ses affaires et le large éventail de sa jurisprudence allant des différends territoriaux ou maritimes à la responsabilité internationale, en passant par l’interprétation des traités et des droits de l’homme.  Par son travail, la Cour contribue au développement du droit international et au renforcement de l’état de droit dans le système onusien, a ajouté le représentant.

Les demandes d’avis consultatifs, a-t-il mis en garde, ne devraient pas se substituer à la procédure du contentieux.  Le strict respect, s’est-il expliqué, des obligations liées au règlement pacifique des différends est une condition préalable au maintien de la paix et de la sécurité, tant du point de vue de la procédure que de l’application de bonne foi des décisions.  Le Statut de la Cour, a poursuivi le délégué, offre différents moyens pour accepter sa juridiction.  Il a donc encouragé les États à y recourir, à prévoir une clause de règlement pacifique des différends par la Cour et à retirer leurs réserves.

Mme SANDRA ERICA JOVEL POLANCO, Ministre des relations extérieures du Guatemala, a mis en exergue le caractère transcendantal du travail des 15 juges de la Cour.  Elle a qualifié de « tournant historique pour le Guatemala, l’Amérique latine et le monde » le renvoi à la CIJ du contentieux relatif à la « Revendication territoriale, insulaire et maritime du Guatemala (Guatemala c. Belize), après les referendums organisés dans les deux pays.  La Cour a prévu d’entendre le Guatemala, le 8 juin 2020, et de se saisir du contre-mémoire de Belize, un an plus tard.  La Ministre a affirmé que, depuis lors, les relations entre les deux pays se sont améliorées et qu’ils sont même tombés d’accord pour les renforcer.  Elle a noté les problèmes financiers auxquels se heurte la CIJ résultant des problèmes de liquidités que l’ONU connaît depuis 2018.  La Ministre a dénoncé une situation qui risque d’entraver le bon fonctionnement de la Cour.  Les États, a-t-elle martelé, doivent honorer leurs obligations financières. 

M. GEORGE RODRIGO BANDEIRA GALINDO, Conseiller juridique principal auprès du Ministère des affaires étrangères du Brésil, a estimé que l’accent mis par le Secrétaire général sur la nécessité pour l’ONU de se concentrer sur la prévention des conflits est intrinsèquement lié au règlement pacifique des différends.  Or, la CIJ est au cœur de ces efforts car elle est davantage qu’un autre moyen prévu par le Chapitre VI de la Charte.  La Cour, a souligné le représentant, est le principal organe judiciaire de l’ONU et la seule Cour internationale à caractère universel et juridiction générale.  Ses décisions forment un guide « fondamental » dont les États s’inspirent pour interpréter les normes internationales, y compris les traités multilatéraux comme la Charte. 

M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a encouragé la Cour à traiter dans les meilleurs délais des affaires dont elle est saisie, et les États qui ne l’ont pas encore fait, à reconnaître sa juridiction.  À l’instar d’autres intervenants, il a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas saisi cette institution depuis 1970.  Il a insisté sur l’impartialité constante de la Cour depuis sa création. 

M. ALEJANDRO CELORIO (Mexique) est revenu sur l’avis de la Cour au sujet de l’archipel des Chagos, qui servira au suivi de cette question à l’Assemblée générale.  Il a aussi appuyé la décision prise dans l’affaire Jadhav qui a permis d’élargir la jurisprudence de la Cour sur le droit consulaire.  La CIJ, a estimé le représentant, s’est située dans le prolongement de son avis dans l’affaire Avena, du 31 mars 2004, « un des précédents les plus importants en la matière ».  Les normes du droit consulaire, a souligné le représentant, ne sont pas des règles « facultatives » que les États ont le loisir de respecter ou pas.  Ce sont des normes du droit international qui sont là pour protéger les relations entre États dans leur dimension la plus élémentaire: leurs citoyens.  Le représentant a d’ailleurs profité du débat pour rappeler la résolution 73/257 par laquelle l’Assemblée générale demande l’application immédiate de l’avis sur l’affaire Avena. 

M. CARLOS JIMÉNEZ PIERNAS (Espagne) a estimé que l’augmentation de la charge de travail de la Cour est le reflet de la confiance dont elle jouit auprès des États.  Le représentant est, à son tour, revenu sur l’avis consultatif relatif à l’archipel des Chagos en vertu duquel la Cour réitère l’importance « potentielle » des résolutions adoptées par consensus par l’Assemblée générale, comme des instruments capables de déclarer, cristalliser ou créer des obligations internationales, relevant du droit international coutumier.  Le lien entre ces résolutions et le droit international coutumier, a poursuivi le représentant, réaffirme le principe d’autonomie des sources juridiques du droit public international et souligne la fonction normative de l’Assemblée générale aussi longtemps que les résolutions adoptées par consensus reflètent fidèlement la volonté des États.  Mais, a tempéré le représentant, l’adoption par consensus d’une résolution ne génère pas automatiquement une obligation internationale relevant du droit international coutumier.  La clef réside dans l’intention des États concernés de reconnaître l’existence d’une disposition de ce droit.  La Cour elle-même a montré qu’elle privilégie un examen au cas par cas et fait preuve de la plus grande prudence tout comme l’a fait la Commission du droit public international dans ses conclusions sur la « Détermination du droit international coutumier ». 

Si le représentant s’est félicité de ce que la Cour soit de plus en plus fréquemment saisie d’affaires contenant une dimension « droits de l’homme », il a tenu à souligner que ni cette Cour ni le Tribunal du droit de la mer ne sont des cours internationales des droits de l’homme avec juridiction universelle.  Le représentant a conclu en rappelant que, lors de la dernière session, son pays avait fait plusieurs propositions pour faire des « économies » dans toutes les phases du travail de la Cour, compte tenu de ses ressources humaines et financières limitées. 

Alors que 74 pays ont signé des déclarations d’acceptation de la jurisdiction obligatoire de la Cour et que 300 traités bilatéraux et multilatéraux reconnaissent cette juridiction sur les différends concernant leur interprétation et leur application, M. HAMAMOTO (Japon) a reconnu que les États d’Asie-Pacifique semblent toujours réticents à actionner ce mécanisme.  Au 1er octobre 2019, seuls huit de ces pays ont signé une déclaration.  Pour encourager les États, le représentant a espéré que la Cour continuera à rendre des décisions et des avis consultatifs « crédibles ». 

M. MOHAMED KHALIFA (Libye) a insisté sur l’illégalité de la construction par la Puissance occupante israélienne d’un mur dans le Territoire palestinien occupé et sur la nécessité d’indemniser les Palestiniens lésés.  Comme rien n’a été fait pour appliquer les divers aspects de l’avis consultatif de la CIJ, le représentant a dirigé la partie vers le Conseil de sécurité qui, il est vrai, « n’a pris aucune mesure pour assurer justice et équité ». 

Mme OKSANA ZOLOTAROVA (Ukraine) a rappelé l’ordonnance de la Cour sur la demande en indication de mesures conservatoires présentées par son pays, dans laquelle il est demandé à la Fédération de Russie de « s’abstenir de maintenir ou d’imposer des limites à la capacité de la communauté tatare de Crimée de préserver ses institutions représentatives, y compris le Mejlis ».  Deux ans se sont écoulés, s’est offusquée la représentante, et la Fédération de Russie ne reconnaît toujours pas qu’elle doit suspendre les restrictions « discriminatoires » imposées au Mejlis.  L’ordonnance continue d’être ignorée malgré son caractère obligatoire, comme l’a souligné l’Assemblée générale qui a fermement condamné le mépris persistant et total de la Fédération de Russie à l’égard de ses obligations découlant de la Charte des Nations Unies et du droit international. 

La représentante a cité une autre disposition de l’ordonnance de la Cour: « faire en sorte de rendre disponible un enseignement en langue ukrainienne ».  Cette disposition n’a toujours pas été appliquée, a-t-elle dénoncé, bien au contraire la situation s’aggrave; le russe semblant devenir la langue administrative.  Vendredi prochain, a rappelé la représentante, la CIJ se prononcera sur les exceptions préliminaires soulevées par la Fédération de Russie dans l’affaire relative à l’interprétation et à l’application des Conventions contre la discrimination et le financement du terrorisme.  La décision sera d’une importance « capitale » pour l’Ukraine et son peuple, a-t-elle souligné. 

Mme YOLANNIE CERRATO (Honduras) a appuyé le travail de la CIJ en tant que principal organe judiciaire des Nations Unies, se déclarant convaincue que le respect des décisions d’une cour internationale compétente et la mise en œuvre des engagements pris en vertu des traités sont les moyens de garantir la paix, l’harmonie et la sécurité entre les peuples et les États. 

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a prévenu que le non-respect d’une décision de la Cour s’apparente à une violation de la Charte des Nations Unies et peut être assimilé à un acte d’agression.  Elle a évoqué le blocus illégal et les mesures économiques coercitives dont son pays est victime depuis plus de deux ans mais aussi l’affaire relative à l’« Application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes discrimination raciale (Qatar c. Émirats arabes unis) ».  Elle a salué l’ordonnance en indication de mesures conservatoires rendu par la Cour et lui a réitéré le soutien de son pays « pour voir triompher le droit international ». 

M. KOKOU KPAYEDO (Togo) a rappelé que son pays fait partie des 74 États ayant reconnu la juridiction obligatoire de la Cour.  C’est ainsi que le 12 avril 2019, le Togo a déposé une déclaration auprès du Secrétaire général de l’ONU, afin de marquer son choix sur la CIJ comme l’un des deux moyens judiciaires à sa disposition pour le règlement d’éventuels différends relatifs à l’interprétation ou à l’application de la Convention de Montego Bay.  M. Kpayedo a en outre salué le lancement, en mai 2019, de l’application gratuite pour appareil mobile dénommée « CIJ-ICJ », lequel permet désormais à ses utilisateurs de se tenir informés en temps réel de l’activité de la Cour dans ses deux langues officielles que sont le français et l’anglais. 

M. JIA GUIDE (Chine) a décrit une situation mondiale caractérisée par la volatilité des relations internationales et par les actes d’unilatéralisme et d’intimidation de la part d’un certain État qui plongent le multilatéralisme et le droit international dans des problèmes inédits, devenant les cibles des attaques au grave détriment de tous les autres États.  Dans ce contexte, a estimé le représentant, la CIJ a un rôle plus important que jamais à jouer pour défendre le droit international et le règlement pacifique des différends.  Le représentant a souhaité que l’avis consultatif de la Cour sur les « Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965 » aide les parties à trouver une solution négociée et adéquate à ce « grave » différend.  Il a vu dans l’affaire des « Violations alléguées du traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1995 (Iran c. États-Unis) » la preuve que la Cour se soucie grandement de l’impact négatif des sanctions unilatérales sur l’État sanctionné et son peuple.

Mme UMA SEKHAR (Inde) a comptabilisé que, depuis avril 1946 et le premier cas soumis en mai 1947, la Cour qui était saisie de 177 cas jusqu’en juillet 2019, a rendu plus de 120 décisions et 27 avis consultatif.  Dans son travail, s’est-elle félicitée, la Cour est restée « sensible » aux réalités politiques et aux sentiments des États, tout en agissant conformément aux dispositions de la Charte, de son propre Statut et des autres règles du droit international.  La représentante a souligné que son pays appuie fermement le travail de la Cour et reconnaît l’importance que la communauté internationale attache à son rôle de guide.

Mme ANET PINO RIVERO (Cuba) a dénoncé le fait que certains pays, dont des titulaires du droit de veto au Conseil de sécurité, refusent d’exécuter les décisions de la Cour lorsqu’elles leur sont défavorables.  Cette situation révèle l’imperfection des mécanismes d’exécution de la CIJ et appelle à une réforme des Nations Unies pour que les pays en développement aient davantage de garanties face aux grandes puissances.  Cuba a salué la diffusion par la Cour de ses publications et autres ressources en ligne, ce qui est « fondamental » pour ouvrir l’accès à tous les pays en développement aux informations sur le droit international.  Cuba était en effet privée de cet accès, à cause du blocus « obsolète et absurde » imposé par les États-Unis et rejeté à une majorité écrasante par la communauté internationale. 

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a appelé à l’acceptation universelle de la juridiction obligatoire de la Cour, laquelle est essentielle à sa fonction première de règlement des différends entre États.  Les Pays-Bas, a-t-il dit, se plient eux-mêmes à cette juridiction, avec une seule réserve « ratione temporis »:  ils accepteront de régler tous les différends résultant de situations ou de faits qui ne remontent pas à plus de 100 ans avant qu’ils ne soient portés devant la Cour.  Les Pays-Bas, a dit le représentant, regrettent que beaucoup d’Etats aient maintenu toutes leurs réserves et s’inquiètent d’ailleurs de la tendance à la hausse de ces réserves, ces dernières années.  Le représentant a ensuite tenu à expliquer la situation liée au Palais de la paix.  Il a confirmé que son gouvernement a débloqué une somme de 150 millions d’euros pour des travaux qui ont été retardés à cause de problèmes complexes de propriété.  La Cour en est informée mais pour le moment, le Gouvernement néerlandais met en œuvre une série de mesures pour garantir la sécurité et le bon fonctionnement de la Cour: renforcement du périmètre de sécurité, atténuation des risques d’incendie et évaluations régulières pour exclure la présence d’amiante. 

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) n’a pu que constater qu’au fur et à mesure que le nombre d’affaires traitées par la CIJ augmente, son budget, lui, ne suit pas puisque la Cour n’a reçu cette année que 64% des fonds qui lui reviennent.  Tout en reconnaissant que d’autres organes sont aussi confrontés à des difficultés financières, le représentant a néanmoins argué qu’il faut prendre en considération le fait que le règlement pacifique des différends est « le socle même » du maintien de la paix et de l’état de droit.  Sans le travail de la CIJ, le système judiciaire international s’effondrerait et la confiance dans ce système s’évaporerait, a-t-il prévenu, arguant aussi que ce que fait la Cour a un impact « fondamental » sur le travail des autres organes, dont l’Assemblée générale.  Il a cité à cet égard l’exemple concret de l’avis consultatif sur les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965.  Il a, d’autre part, salué l’amélioration de la coordination entre la CIJ et le Secrétariat de l’ONU et les efforts de la Cour pour exploiter au mieux les nouvelles technologies de l’information et des communications.  Il a également lancé un appel à l’augmentation des contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale destiné à aider les États à porter leurs différends devant la CIJ. 

Mme MARIA ANGELA ABRERA PONCE (Philippines) a salué le rôle de la CIJ dans le règlement pacifique des différends et rappelé l’adoption, en 1982, de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux qui consacre le rôle éminent de la Cour.  Elle a salué le recours accru à la Cour par des États de plus en plus divers géographiquement, précisant que les 16 affaires contentieuses pendantes devant la Cour concernent cinq États africains, sept États asiatiques, neuf États américains et cinq États européens.  C’est un plébiscite de confiance en faveur de la Cour, a-t-elle dit.  Le règlement de plus en plus rapide des affaires est sans doute un facteur qui explique ce recours accru mais aussi la détermination de la Cour à ne pas se laisser submergée par les pressions politiques ou à ne pas politiser les affaires, « contrairement à d’autres cours », a noté Mme Ponce.  Elle a aussi exhorté le Conseil de sécurité à considérer sérieusement l’Article 96 de la Charte et à demander plus fréquemment l’avis consultatif de la Cour.  Notant que le Conseil n’a plus sollicité de tel avis depuis 1970, elle a vu dans cet état de fait « l’affirmation d’une souveraineté collective qui se veut l’exception à l’acceptation générale de la compétence de la Cour ».

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a souligné que le rôle de la Cour est encore plus significatif maintenant que l’ordre international fondé sur des règles doit traiter des défis émergents.  Certains de ces défis viennent de la volonté d’ignorer ou de compromettre les normes du droit international et d’autres de l’évolution des choses, comme les avancées rapides des technologies de l’information et des communications (TIC) ou des processus naturels dont les changements climatiques ou l’élévation du niveau de la mer.  En clarifiant le droit international et en contribuant à son développement, la Cour a un rôle important à jouer pour faire en sorte que l’ordre fondé sur des règles résiste aux épreuves actuelles et répondent aux besoins d’adaptation aux changements technologiques et naturels.  Pour respecter le rôle de la Cour et renforcer sa base juridictionnelle, les États doivent accepter sa juridiction, comme la Roumanie l’a fait en 2015, a souligné la représentante.

Après avoir relevé une nette augmentation du nombre de décisions rendues par la CIJ sur le fond et sur les procédures incidentes, et une diversité croissante des affaires, M. DIAKITE (Sénégal) a constaté que le nombre et l’importance des affaires témoignent de la préférence accordée au règlement pacifique des différends conformément au droit international et leur diversité géographique illustre le caractère universel de la compétence de l’organe judiciaire principal de l’ONU.  Il a aussi noté que la Cour est de plus en plus saisie de différends ayant trait à des sujets très divers tels les droits de l’homme, les relations diplomatiques ou la protection de l’environnement.  Par son travail, a-t-il ajouté, la Cour poursuit la promotion des valeurs fondamentales d’humanité avec une incidence, directe et concrète sur la vie quotidienne des peuples et des relations entre États.  Le Sénégal a appelé la Cour à toujours accorder une attention « minutieuse et impartiale » à toutes les affaires, et à constamment continuer à remplir avec la plus grande intégrité, célérité et efficacité la mission qui lui est confiée par la Charte.  

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA (Équateur) a noté, à son tour, que le volume des affaires dont la Cour est saisie a considérablement augmenté au cours des 20 dernières années, ce qui prouve la confiance des États.  Il a salué le rôle fondamental du Greffe de la CIJ en termes qualitatifs et d’efficacité, ce qui favorise une réponse rapide aux causes et situations urgentes.  À cet égard, il a jugé nécessaire que la Cour ait les ressources qu’il faut pour lui permettre de s’acquitter de sa mission

Mme MARIANA DURNEY (Chili) a noté que durant la période couverte par le rapport, la Cour a rendu trois arrêts, dont un dans lequel le Chili est partie prenante, ainsi qu’un avis consultatif sur les « Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965 ».  Soulignant le rôle fondamental de la Cour, le Chili a jugé que ce rôle doit être mis en valeur, que ce soit le règlement des contentieux, ou les avis consultatifs, même si ces derniers n’ont pas de valeur contraignante.  Le représentant a rappelé que son pays est partie prenante dans deux affaires, dont l’une où la Cour a rendu un arrêt.  Sa décision sur l’« Obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique dans le contentieux (Bolivie c. Chili) » a en effet confirmé l’inexistence d’une obligation de négocier.  La deuxième affaire fait actuellement l’objet d’une procédure que le représentant n’a pas commentée.  Il a tout de même réaffirmé l’engagement de son pays à respecter le droit international et le règlement pacifique des différends, « deux principes centraux encadrant la politique étrangère du Chili ».

Mme KATHY-ANN BROWN (Jamaïque) a rappelé que, dans l’affaire opposant la Colombie et le Nicaragua sur leurs frontières maritimes, la CIJ est parvenue à un jugement in extremis grâce à la voix prépondérante de son Président.  Elle a constaté que, dans le différend entre le Bangladesh et le Myanmar, le Tribunal du droit de la mer avait argué qu’elle ne pouvait statuer sur la délimitation des frontières maritimes tant que la Commission des limites du plateau continental n’avait pas terminé son travail.  Pour éviter un conflit de juridictions, la représentante a souhaité que la CIJ traite des différends maritimes quand elle en est saisie, même si les États parties concernés optent pour un mécanisme alternatif.  L’évolution du droit ne peut que bénéficier d’une collaboration étroite entre la CIJ et le Tribunal du droit de la mer.  Elle a donc déploré qu’aucune mention du Tribunal n’a été faite dans le rapport de la CIJ. 

M. CHRISTOPHE EICK (Allemagne) a rappelé qu’avec la Cour pénale internationale, le Tribunal international du droit de la mer et la Cour internationale d’arbitrage, la CIJ représente un pilier majeur de l’ordre international fondé sur des règles qui a pour colonne vertébrale le droit international.  Il a mis en avant deux aspects significatifs, selon lui, pour la CIJ: le consentement des États et le respect par ces derniers des décisions rendues par la Cour.  L’Allemagne, qui a reconnu la juridiction obligatoire de la Cour, insiste sur le fait, a dit le représentant, que cette dernière ne peut régler un différend sans le consentement des parties.  Il a aussi prévenu que dévoyer le principe « mutatis mutandis » mettrait gravement en péril l’acceptation du rôle de la Cour et constituerait une menace susceptible de compromettre son efficacité.  La Cour a une double compétence et, à cet égard, elle est obligée de maintenir la frontière entre ses fonctions contentieuse et consultative.  La Cour ne devrait en aucun cas « céder à la tentation » de transformer ce qui est fondamentalement un différend entre deux États en une question juridique « abstraite ». 

M. MARIO OYARZÁBAL (Argentine) a fait ressortir la célérité de la CIJ dans des affaires qui exigeaient des mesures conservatoires pour éviter des préjudices irrémédiables comme dans l’affaire « Jadhav ».  À d’autres occasions, la Cour a imposé aux deux parties de s’abstenir d’actes risquant d’aggraver le contentieux ou de rendre son règlement plus difficile encore comme dans les affaires concernant l’interprétation et l’application des Conventions contre le financement du terrorisme et la discrimination raciale ou celle relative aux violations alléguées du traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955.  Le représentant a aussi mis en avant la décision adoptée par 13 voix pour et une voix contre reconnaissant l’illégalité de la séparation de l’archipel des Chagos.  Le représentant s’en est félicité car, pour son pays, cette décision réaffirme le rôle central de l’Assemblée générale et de la Quatrième Commission chargée des questions de décolonisation laquelle a, à son ordre du jour, la question des Îles Malvinas. 

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a regretté l’augmentation du coût de saisine de la Cour, ce qui rend l’accès à la justice internationale chaque fois plus onéreux.  Elle a attiré l’attention sur la situation des pays à faible revenu ou fortement endettés qui ne peuvent pas accéder à cette forme de justice.  Elle a réclamé des solutions, sans oublier de plaider pour que la CIJ ait des ressources adéquates.  Elle a aussi plaidé pour que les promotions de la Cour soient accordées en fonction de tous les systèmes juridiques du monde, de la représentation géographique équitable et de la parité entre hommes et femmes.  La représentante a également demandé que les publications de la Cour soient disponibles dans les six langues officielles de l’ONU. 

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a insisté sur le fait que le recours à la CIJ repose sur le consentement des États qui peut être exprimé à travers les différents modes d’acceptation de sa compétence contentieuse, conformément aux dispositions du Statut.  Si les décisions de la Cour s’imposent aux parties en raison de l’autorité de la chose jugée qui leur est attachée, leur respect et leur bonne exécution par les États tiennent à leur qualité.  La Cour joue également un rôle important par l’exercice de sa fonction consultative.  Bien qu’ils ne soient pas obligatoires pour les États et qu’ils aient une fonction différente de celles des arrêts, auxquels ils n’ont pas vocation à se substituer, les avis consultatifs permettent d’assurer une meilleure compréhension du droit international et donc d’en affermir l’autorité.  Le représentant a aussi rappelé l’importance que son pays attache à la représentation de différentes langues et cultures juridiques au sein de la Cour car cette diversité contribue à la qualité de ses travaux ainsi qu’à l’autorité de sa jurisprudence.  Dans cette période de défis pour le multilatéralisme, la CIJ demeure une institution essentielle pour la paix et l’ordre juridique international, a conclu le représentant. 

M. ANDREAS MAVROYIANNIS (Chypre) a estimé que la communauté internationale doit être « fière » du travail de cet organe principal de l’ONU qu’est la CIJ.  Il a plaidé pour l’augmentation du nombre d’États reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour, arguant que cela devrait permettre de renforcer la crédibilité de cette dernière.  Il a souhaité que les avis consultatifs de la Cour soient davantage recherchés, afin que cette dernière puisse jouer un rôle encore plus grand dans le travail des autres organes et institutions.  À cet égard, il a rappelé l’avis de la CIJ du 25 février dernier sur la question de l’archipel des Chagos.  Le délégué a enfin souhaité que des mesures soient prises pour assurer les ressources nécessaires au bon fonctionnement de la CIJ.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a déploré que la composition de la CIJ ne reflète pas la diversité des systèmes juridiques du monde, notamment l’Amérique latine, et ce, malgré le fait qu’un nombre important d’affaires proviennent de cette région.  Il a aussi recommandé le multilinguisme car les pays qui soumettent un différend n’ont pas toujours une bonne interprétation des documents.  Il a favorablement accueilli la décision de la Cour sur les limites imposées aux juges quant à la participation à d’autres tribunaux ou tribunaux d’arbitrage, pendant leur mandat, et ce, par souci d’intégrité. 

Sur le fond de l’affaire « Obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique », qui l’oppose au Chili, la Bolivie, a dit le représentant, estime que la décision de la Cour a résolu les normes juridiques relatives à l’obligation de négocier mais pas le différend lui-même. 

Mon pays, a-t-il assuré, assume avec sérieux et bonne foi tous les termes de cette décision.  Il a d’ailleurs pris l’initiative d’entamer un dialogue constructif avec le Chili.  Nous espérons, a confié le représentant, que le droit prévaudra et la justice aussi, au-delà des visions strictement positivistes ou des constructions dispersées du droit international coutumier qui n’est pas toujours utile pour l’application du droit international.  Nous souhaitons une solution « concrète » à notre enclavement, a dit le représentant, voulant de la Cour une décision qui réponde à l’aspiration des peuples à la justice et à la paix. 

M. ABBAS BAGHERPOUR ARDEKANI (Iran) a accusé les membres permanents du Conseil de sécurité de violer la Charte des Nations Unies, en pénalisant et sanctionnant les nations du monde, non pas parce qu’elles violent les résolutions du Conseil de sécurité, mais parce qu’elles mettent en œuvre la résolution 2231 (2015) sur le Plan d’action global commun.  C’est cet état de fait qui nous a poussés à saisir la CIJ, a expliqué le représentant.  Ainsi, par son ordonnance du 3 octobre 2018, la Cour a accepté la demande en indication de mesures conservatoires par l’Iran, enjoignant les États-Unis de supprimer toute entrave aux exportations vers le territoire iranien.  En réponse à ce jugement, les États-Unis ont imposé d’autres sanctions, a dénoncé le représentant, voyant là un mépris vis-à-vis de la Cour.  Les mesures conservatoires sont contraignantes, a-t-il martelé, avant de dénoncer également le gel des avoirs financiers des individus, du Gouvernement et de la Banque centrale d’Iran. 

M. ANDREA TIRITICCO (Italie) a estimé que le recours à un mécanisme judiciaire est une option solide et sérieuse pour les États qui ont foi en une communauté internationale ancrée dans les normes internationales.  Pour cette raison, l’Italie a accepté, en 2014, la juridiction obligatoire de la Cour et encourage les autres États à faire de même.  Mais comme la communauté internationale s’élargit à de nouvelles parties prenantes et à un réseau complexe de relations juridiques, nous devons reconnaître, a estimé le représentant, les appels de plus en plus nombreux à la primauté d’une série de principes.  Ces principes doivent constituer les piliers de la paix et de la stabilité dans un ordre mondial nouveau et changeant.  Un de ces principes qui émerge dans le droit international est le « droit inaliénable à la dignité humaine ».  Ce droit puise sa force non seulement dans la vertu de l’universalité mais aussi dans le fait que les États le reconnaissent, soit dans leur constitution soit dans leur jurisprudence nationale.  Pour l’Italie, la souveraineté nationale et les prérogatives légitimes des États, en vertu du droit international, doivent toujours aller de pair avec la nécessité de préserver la dignité humaine et les droits de l’homme fondamentaux. 

Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a indiqué que son pays a toujours été un fervent partisan de la CIJ et du principe de règlement pacifique des différends.  La Cour joue un rôle critique dans la prévention des conflits par ses avis consultatifs, renforçant la sécurité juridique, ce qui contribue en retour à la prévention des différends.  Nous avons témoigné de notre confiance dans la Cour en acceptant dès 1994 sa juridiction obligatoire, a souligné la représentante.  Elle a néanmoins regretté que seulement 74 États aient accepté cette juridiction et exhorté les autres États à leur emboîter le pas.  Se conformer aux décisions de la Cour est un élément essentiel pour la préservation de l’ordre juridique international, a conclu la déléguée.

M. JAGDISH DHARAMCHAND KOONJUL (Maurice) a déploré qu’il y ait encore des pays qui ne « se sentent pas obligés de respecter la Cour et ses avis ».  Il est revenu sur l’avis du 25 février concernant l’archipel des Chagos.  Il a rappelé que l’Assemblée générale, par une large majorité de 116 États contre 6, a entériné l’avis de la Cour et demandé que le Royaume-Uni mette fin à son administration « illégale » du territoire de Maurice dans un délai maximum de six mois expirant le 22 novembre 2019.  M. Koonjul a regretté que la puissance coloniale ait choisi de défier la Cour et l’Assemblée générale, déclarant même qu’elle ne partage pas l’approche adoptée par la CIJ et qu’elle se sent libre de ne pas appliquer l’avis, sous prétexte qu’il n’est pas de nature contraignante.  L’avis de la CIJ est « une décision juridique », qui fait autorité sur la légalité ou non du comportement du Royaume-Uni.  Ce dernier, a martelé le représentant, refuse au peuple mauricien le droit à l’autodétermination.  L’avis de la CIJ mentionne bien l’obligation, pour le Royaume-Uni, de mettre fin à son administration coloniale le plus rapidement possible, a rappelé le représentant.

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a noté que le nombre d’affaires contentieuses dont est saisie la Cour depuis 2014 traduit la confiance grandissante des pays en développement en ses capacités, en sa crédibilité et son impartialité.  Cela reflète aussi la confiance placée dans les normes et les valeurs de la Charte des Nations Unies, dont la plus fondamentale est le refus de la menace de recourir ou de recourir à la force.  L’augmentation des affaires portées devant la Cour, s’est inquiété le représentant, reflète également l’incapacité des États Membres à régler leurs différends de manière diplomatique.  La Cour a beaucoup à partager avec les autres cours internationales et régionales en termes d’expérience, et par son manque de parti pris, elle peut aussi partager sa manière d’approcher ses fonctions judiciaires.

La confiance des États qui ont porté leurs différends devant la CIJ montre leur profond désir de trouver une solution pacifique et juste à leurs différends, s’est réjoui M. NARCISO SIPACO RIBALA (Guinée équatoriale).  Il s’est félicité de l’étroite collaboration entre la Cour et le Secrétariat de l’ONU dans le domaine de l’information publique et du lancement, en mai 2019, de l’application mobile de la Cour.  Il a aussi loué la façon « méticuleuse, objective, impartiale et indépendante » dont elle mène ses procédures et a exhorté les États à reconnaître sa juridiction.  L’Assemblée générale et le Conseil de sécurité doivent solliciter davantage la Cour, a-t-il estimé, à son tour. 

M. MOUSSA MOHAMED MOUSSA (Djibouti) a constaté la persistance des différends, notamment frontaliers, découlant de la colonisation ou encore la difficulté de certains États à asseoir leur autorité effective sur l’ensemble de leur territoire.  En cette période de crise de confiance dans le multilatéralisme et les institutions internationales, le rôle et la place de la Cour sont plus que jamais cruciaux, a estimé le représentant.  Pour lui, la diversité des différends traités par la Cour témoigne de sa centralité et du gage qu’elle donne aux petits États comme Djibouti.  « Dire le droit et rien que le droit », telle est la fonction de la Cour, a résumé le représentant, en invitant tous les États Membres de l’Organisation à veiller à ce que la Cour disposer des ressources nécessaires. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a jugé révélateur que sur les 16 affaires contentieuses pendantes devant la CIJ, 5 soient liés à un différend maritime ou à une délimitation maritime, des questions au cœur de la souveraineté des États.  Cela signifie que les États soumettent chaque fois des questions encore plus complexes et plus sensibles politiquement à la Cour, s’est-il réjoui, soulignant que, jusqu’à présent, plus de 70 États ont signé des déclarations d’acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour, et que plus de 300 traités bilatéraux ou multilatéraux incluent des dispositions prévoyant cette juridiction.  S’agissant des avis consultatifs, le représentant a appelé l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et les autres organes habilités à saisir davantage la CIJ pour des avis consultatifs sur des questions d’ordre juridique.  Le Viet Nam, a-t-il dit, a participé aux procédures écrites sur les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos et voté en faveur de la résolution de l’Assemblée générale saluant l’avis de la Cour. 

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a mis en exergue le rôle fondamental de la CIJ dans un système international fondé sur des règles.  La Cour, s’est-il félicité, s’acquitte remarquablement du mandat qui lui a été confié par l’interprétation qu’elle fait du droit international et la sensibilisation de l’opinion publique à ses principes, sans compter ses avis consultatifs et son rôle dans le règlement pacifique des différends.  En 1957, a rappelé le représentant, l’Égypte avait reconnu la juridiction de la Cour s’agissant des accords sur le canal de Suez et, depuis, elle ne cesse d’apporter son appui au mandat et aux responsabilités de la CIJ. 

Concernée par deux affaires actuellement devant la CIJ, les Émirats arabes unis, a dit sa représentante, Mme MAHA YAQOOT JUMA YAQOOT HARQOOS, jugent que ses demandes sont conformes aux principes du droit international et à l’appui qu’ils apportent à la lutte contre le terrorisme et son financement.  Les mesures prises par les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, le Bahreïn et l’Égypte ont été dictées, a expliqué la représentant, par le soutien que le Qatar offre au terrorisme et à l’extrémisme violent et à son ingérence dans les affaires intérieures des États.  Elle a regretté que le Qatar ait tenté de porter atteinte à la réputation, à l’intégrité et à la crédibilité de la CIJ.  Acceptez les décisions de la Cour, a conseillé la représentante. 

M. MAJED S. F. BAMYA, observateur de l’État de Palestine, a déclaré que depuis la création des Nations Unies, nous débattons pour savoir qui, du Conseil de sécurité ou de l’Assemblée générale, est la véritable pierre angulaire de cet édifice: le premier a l’avantage du pouvoir, une fois le consensus des puissances acquis, l’autre à celui de la représentativité.  Pour le représentant, la véritable pierre angulaire est la Cour internationale de Justice qui « n’est pas l’expression des puissances, ni celle de la majorité mais la voix de la justice qui doit nous guider tous ».  Il a appelé les organes cités à faire appel à la CIJ pour guider leurs décisions et assurer leur conformité avec le droit international.  La justice, a-t-il dit, est le seul fondement acceptable d’un ordre multilatéral qui se veut et se doit d’être fondé sur le droit international et placé à son service.  Prenant l’exemple de la Palestine qui a « connu une des pires injustices de l’ère qui a suivi la création des Nations Unies », il a confirmé l’attachement de son État aux vertus de l’ordre international, tout en en reconnaissant les limites de ce même ordre.  En dépit de la clarté des valeurs et des règles, l’injustice est toujours là, compte tenu des failles qui émaillent les processus de prise de décisions et d’exécution.  L’erreur des pères fondateurs n’a pas été de vouloir une juridiction obligatoire mais de la soumettre à la bonne volonté des États. 

Si l’avis consultatif de la Cour sur les effets juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé avait été respecté, la paix aurait été une réalité.  L’observateur a rappelé les États tiers à leurs obligations, y compris celles de ne pas reconnaître et contribuer à des actes illégaux et de tenir pour responsables leurs auteurs.  La Palestine n’a pas hésité à saisir la Cour de la question « si importante et si sensible » de Jérusalem, a dit le représentant. 

Droits de réponse

La représentante de la Fédération de Russie a dit avoir constaté que la délégation ukrainienne a confondu l’Assemblée générale à New York avec le Palais de la Paix de La Haye.

Son homologue du Chili a rappelé à la Bolivie que l’arrêt de la Cour a bien noté qu’il n’y a pas d’obligation juridique de négocier.  Il est donc regrettable, s’est-il impatienté, que la Bolivie répande son interprétation biaisée.

La déléguée du Royaume-Uni a affirmé que son pays n’a aucun doute sur sa souveraineté sur l’archipel des Chagos qui fait partie du territoire britannique depuis l’année 1840.  Elle a déploré que la Cour ait été saisie de cette question sans le consentement de son pays.  Elle a aussi souligné que les avis consultatifs de la Cour ne sont pas de nature contraignante. 

Le représentant du Qatar a répondu aux Émirats arabes unis, en rappelant les faits et notamment les abus subis par les Qataris sur le territoire émirati.  Les premières décisions de la CIJ confortent notre position, s’est-il réjoui. 

Son homologue de Maurice a dénoncé la remise en cause des arrêts et avis de la CIJ.  Il est vrai que l’issue a été décevante pour le Royaume-Uni, qui a également été débouté par l’Assemblée générale, mais rien n’explique pourquoi il croit qu’en insistant sur sa prétendue souveraineté légitime sur l’archipel des Chagos, son vœu sera exaucé, s’est étonné le représentant.  Ce sont bien 13 juges de la CIJ qui ont conclu que l’archipel fait partie intégrante de Maurice et que la puissance coloniale a l’obligation légale de mettre fin à son occupation le plus rapidement possible.  Dire qu’un avis consultatif n’est pas aussi contraignant qu’un arrêt est correct en théorie mais la Cour a émis son avis à la majorité, ce qui lui confère un caractère contraignant.  Le droit international fait partie du Common Law et nonobstant sa position actuelle, le Royaume-Uni ne saurait rester en porte-à-faux. 

Le Qatar, a commenté le représentant des Émirats arabes unis, veut ignorer ses engagements en vertu de l’Accord de Ryad et fait semblant de respecter les mécanismes internationaux alors qu’il interprète incorrectement les avis de la Cour.  Le Qatar prétend combattre le terrorisme en signant des accords alors que, parallèlement, il maintient son appui actif à des groupes terroristes, a accusé le représentant. 

Chacun sait, a rétorqué le représentant du Qatar, que les Émirats arabes unis ne cessent de répéter leurs allégations, frustrés par la réponse de la CIJ.  Il a demandé au Greffe de la CIJ de confirmer ses dires et appelé les Émirats arabes unis à prendre immédiatement des mesures pour appliquer l’arrêt de la CIJ.  Le représentant s’est réservé le droit de poursuivre son droit de réponse par écrit. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: le manque d’argent nuit à l’architecture de désarmement, mais aussi la volonté politique

Soixante-quatorzième session,
19e séance – après-midi
AG/DSI/3637

Première Commission: le manque d’argent nuit à l’architecture de désarmement, mais aussi la volonté politique

La Première Commission (Désarmement et sécurité internationale) a, cet après-midi, conclu son débat sur le désarmement régional avant d’entamer celui consacré au renforcement du mécanisme de désarmement des Nations Unies.  Les délégations ont souligné l’importance des activités que l’Organisation des Nations Unies mène à l’échelon régional pour faire progresser le désarmement et accroître la stabilité et la sécurité de ses États Membres, mais elles se sont inquiétées du manque de financement tant des centres régionaux que des mécanismes centraux.  D’autres ont toutefois estimé que l’argent était moins en cause que le manque de volonté politique.

Plusieurs délégations ont salué l’assistance technique et juridique apportés depuis plus de 30 ans aux États Membres par les centres régionaux -pour l’Afrique, l’Asie-Pacifique et l’Amérique latine et les caraïbes, situés respectivement à Lomé, Katmandou et Lima- dans la mise en œuvre des traités régionaux et internationaux et autres instruments.  Ces centres appuient ainsi les efforts de désarmement, de maîtrise des armements et de non-prolifération par l’organisation de séminaires, de conférences et d’activités de renforcement des capacités et de formation, la fourniture d’un appui dans le domaine des politiques et d’une expertise technique, et la conduite d’activités d’information et de sensibilisation aux niveaux mondial, régional et national. 

Toutefois, l’argent manque.  Dans une déclaration liminaire, Mme Mary Soliman, Chef du Service régional du désarmement, de l’information et de la sensibilisation, Bureau des affaires de désarmement, avait alerté sur les besoins financiers du Bureau des affaires de désarmement et des centres régionaux et du Centre de Vienne.  Et les mêmes difficultés affectent le mécanisme central de désarmement.  Au nom des présidents des conventions de désarmement, le représentant de la France a reconnu que des efforts avaient été faits mais aussi rappelé que la seule option viable consistait à s’attaquer au non-paiement de leurs contributions par les États, et ce, avant la tenue des réunions.  Tant qu’il y aura des arriérés, les problèmes persisteront, a-t-il affirmé, soutenu par l’Union européenne.  De même, au nom du groupe d’experts francophones de désarmement à Genève, la représentante de l’Autriche a déploré que certaines réunions des conventions aient récemment été organisées sans interprétariat, avant de demander que le Programme de formation sur le désarmement et la non-prolifération nucléaire soit préservé et puisse se tenir dans un environnement multilingue.

Pour de nombreuses délégations, il ne s’agit pourtant pas seulement d’une question d’argent.  Ainsi, le Mouvement des pays non alignés, qui s’est dit inquiet de l’érosion continue du multilatéralisme dans le domaine du désarmement, de la non-prolifération et le contrôle des armements, a estimé que la source du problème était le manque de volonté politique de certains États d’avancer dans le domaine du désarmement, en particulier du désarmement nucléaire. 

La situation est particulièrement grave à la Conférence du désarmement à Genève, bloquée depuis près de 20 ans.  Mais, comme l’a noté notamment le Mexique, voilà que la Commission du désarmement, organe universel qui siège à New York, est à son tour prise en otage politiquement, rendue incapable, en début d’année, de mener sa session de fond.  Quant au représentant de la Suisse, il a noté que les travaux de la Première Commission aussi étaient non seulement marqués par de profondes divergences, mais également par des questions organisationnelles qui restreignent le temps disponible pour traiter les questions de fond.

Pourtant, les efforts en vue de surmonter les blocages affectant les organes de désarmement sont aujourd’hui plus importants que jamais, du fait d’un contexte international tendu illustré encore aujourd’hui par de vifs échanges, en particulier entre les délégations de la Chine, des États-Unis et de la Fédération de Russie, qui se sont rejeté les responsabilités des tensions actuelles au niveau mondial. 

C’est parce que la Chine est le membre le moins transparent en matière d’armement, parmi les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, qu’on ne peut pas lui faire confiance en matière de désarmement, a ainsi accusé le représentant des États-Unis.  Un peu plus tôt, son homologue chinois avait estimé que les États-Unis étaient la source de tous les maux, en provoquant l’extinction de l’accord sur forces nucléaires à portée intermédiaire et en se retirant du Plan d’action global conjoint avec l’Iran.

Le débat sur le désarmement régional a, quant à lui, une fois encore illustré les désaccords relatifs à la convocation d’une conférence régionale destinée à créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, réclamée par la plupart des pays de la région mais à laquelle Israël a déjà opposé une fin de non-recevoir.  Aujourd’hui, les États-Unis, arguant du fait que tous les pays de la région n’y seraient pas présents, ont également refusé de se rendre à la conférence ont, d’avance, rejeté tout ce qui pourrait en sortir.

La situation au Moyen-Orient n’a pas manqué de provoquer d’autres accusations, telles celles proférées par la République islamique d’Iran, déclarations qui ont présenté les États-Unis comme un soutien de « groupes terroristes » dans la région et Israël comme la principale source de prolifération d’armes de destruction massive au Moyen-Orient. 

Les tensions dans d’autres régions ont, elles aussi, suscité quelques échanges acrimonieux.  Le représentant du Pakistan a estimé que l’Asie du Sud rencontrait une série de défis liés aux « prétentions hégémoniques » d’un État voisin.  En Europe, le représentant russe a accusé l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) de menacer la stabilité européenne, notamment du fait des élargissements successifs de l’organisation.  Ce à quoi la Pologne a répliqué que la présence de troupes de l’OTAN dans les pays baltes et plusieurs pays d’Europe de l’Est, à leur demande, relevait d’une politique de dissuasion face aux agressions russes en Crimée et dans l’est de l’Ukraine. 

La Commission poursuivra son débat thématique demain, jeudi 31 octobre, à 15 heures après avoir tenu en matinée une séance commune avec la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation.

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS

Exposé du Chef du Service régional du désarmement, de l'information et de la sensibilisation du Bureau des affaires de désarmement

Mme MARY SOLIMAN, Chef du Service régional du désarmement, de l’information et de la sensibilisation, Bureau des affaires de désarmement, a précisé que les travaux du Bureau, de ses trois centres régionaux et du Centre de Vienne continuaient de se laisser guider par les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, les objectifs de développement durable et par le Programme de désarmement du Secrétaire général.  Depuis octobre 2019, le Centre régional pour l’Amérique latine et des Caraïbes couvre 33 États, celui de Katmandou 43 États de la région Asie-Pacifique, alors que le Bureau de Lomé au Togo est engagé aux côtés de 54 pays du continent africain, a précisé Mme Soliman.

Les centres régionaux continuent de travailler avec les États Membres, les organisations régionales et les organisations non gouvernementales pour promouvoir, faciliter et renforcer la coopération régionale, le dialogue et le renforcement de la confiance.  Mme Soliman a précisé leur rôle.  Ils fournissent formation et assistance technique et juridique aux États Membres dans la mise en œuvre des traités régionaux et internationaux et autres instruments.  Ils aident aussi les États dans leurs efforts visant à lutter contre la prolifération des armes légères et de petit calibre (ALPC) et contre leur détournement vers des groupes non étatiques, à assurer la sécurité physique des stock d’ALPC et de leurs munitions, à entreprendre des réformes du secteur de la sécurité, à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité ou encore à promouvoir le rôle des femmes en matière de paix et de sécurité.  Ces activités couvrent les armes de tout type, classiques comme de destruction massive. 

Mme Soliman a également rappelé que le financement des trois bureaux régionaux du désarmement comme du bureau de liaison de Vienne dépendait de fonds extrabudgétaires. 

Désarmement et sécurité sur le plan régional (suite)

Déclarations

M. JOHN BRAVACO (États-Unis) a assuré que son pays soutenait les efforts régionaux de désarmement nucléaire.  Il a cité le cas des efforts de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), avant de dénoncer le programme nucléaire militaire de la Chine, qu’il a notamment accusée de développer de nouveaux types de missiles à faible portée. 

Par ailleurs, le représentant a assuré que son pays continuait d’appuyer l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, mais a ajouté qu’un tel objectif, pour être valable, devait être poursuivi par tous les États concernés de la région, de manière inclusive et en prenant en compte les préoccupations légitimes de chacun.  Il a regretté l’adoption, l’an dernier, de la résolution de l’Assemblée générale présentée par le Groupe des États arabes décidant de la tenue d’une conférence visant à la création d’un instrument juridiquement contraignant établissant une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Il a jugé « profondément regrettable » qu’une telle décision ait été prise du fait d’une résolution à la suite d’un vote très partagé qui reflétait les profondes divisions constatées sur la question à la Première Commission.  En l’absence de certains des États de la région concernée à la conférence, les États-Unis n’y participeront pas et considèreront tout document final comme illégitime, a annoncé M. Bravaco. 

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a déploré le comportement d’acteurs qui mettent à mal la sécurité régionale, laquelle est un élément de la paix et de la sécurité internationales.  S’il a appuyé la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, il a estimé que les activités destructrices et nocives de la Syrie et de l’Iran dans la région sapaient la poursuite d’un tel objectif.  Il a, par ailleurs, souligné le fait que la Russie, en annexant illégalement la Crimée et en raison de son agression contre l’Ukraine, déstabilisait l’Europe.  La Russie doit respecter les normes internationales de contrôle des armements, a-t-il dit. 

M. GHANSHYAM BHANDARI (Népal) a suggéré de mettre simultanément en œuvre les mesures régionales et internationales de désarmement, qui se renforcent mutuellement.  Le représentant a également préconisé que les centres régionaux de l’ONU pour la paix et le désarmement s’adressent plus volontiers et plus souvent aux populations locales pour les sensibiliser aux enjeux en matière de désarmement régional.  Les centres doivent être dotés des ressources nécessaires à la conduite de leurs missions, a-t-il ajouté, appelant les délégations à appuyer par le consensus le plus large possible le projet de résolution sur les centres régionaux, présenté cette année par l’Indonésie mais dont son pays est l’un des auteurs « historiques ». 

Pour M. PANGERAN IBRANI SITUMORANG (Indonésie), les progrès en Indonésie et dans la région sont la preuve de l’efficacité d’un certain nombre de mécanismes de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour promouvoir la coopération, les relations de bon voisinage et des relations mutuellement bénéfiques dans différents domaines, dont la diplomatie préventive, la non-prolifération et le désarmement, notamment dans le cadre de ses forums régionaux.  L’Indonésie reste engagée, aux côtés d’autres pays de la région, en faveur de la signature et de la ratification du Protocole au Traité de Bangkok établissant la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est par les puissances nucléaires le plus rapidement possible.  Dans un souci de « cohérence », le représentant a également plaidé pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient « attendue depuis longtemps ».  L’Indonésie encourage tous les pays de la région à participer de manière significative à la conférence sur cette question qui aura lieu le mois prochain.  Le représentant a également soutenu le projet de tenir la quatrième conférence sur les zone exempte d’armes nucléaires en Mongolie l’année prochaine.

Soulignant l’importance de la dénucléarisation de la péninsule coréenne, M. Situmorang a souligné les mérites d’un dialogue constructif, « l’un des principaux facteurs du processus de paix ».  L’implication de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), en tant qu’institution indépendante et compétente pour le processus de vérification est de bon augure, selon lui, pour la concrétisation de la dénucléarisation de la péninsule.  Toutes les parties concernées doivent renforcer leur dialogue, a estimé le représentant, en vue de parvenir à des relations de confiance et honorer leurs engagements à maintenir la paix et la sécurité régionales.  Avant de conclure, M. Situmorang a appelé les parties au Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien à respecter les engagements pris, en soulignant le rôle primordial de l’AIEA en termes de vérification.

M. HUSHAM AHMED (Pakistan) a fait observer que l’Assemblée générale avait reconnu depuis longtemps que la paix et la sécurité internationales étaient codépendantes de la stabilité aux niveaux régional et sous-régional.  Compte tenu de ce lien « inextricable », la Charte des Nations Unies reconnaît les mérites des arrangements régionaux, y compris en matière de désarmement et de contrôle des armes, a poursuivi le représentant.  Les mesures de confiance sur le plan régional doivent être ajustées en fonction des spécificités de chaque région, a-t-il estimé, et devraient commencer avec de « simples arrangements » de transparence, d’ouverture et de réduction des risques, avant même que les États ne soient en mesure de poursuivre des arrangements plus substantiels sur le contrôle des armes et le désarmement.  Cependant, alors que les mesures de confiance mutuellement acceptées peuvent créer des conditions propices, elles ne doivent pas devenir une fin en soi, a-t-il ajouté.

L’Asie du Sud connaît une série de défis liés aux « prétentions hégémoniques » d’un pays de la région, a affirmé M. Ahmed.  Le représentant a accusé ce pays de continuer de se doter de capacités conventionnelles et stratégiques déstabilisantes et de développer des stratégies militaires offensives tout en refusant de s’engager dans un dialogue bilatéral sur les mesures de confiance et la réduction des risques.  Pour le représentant, cette attitude met en évidence le « danger évident et réel » posé non pas uniquement au Pakistan mais à toute la région, ainsi qu’à la paix et la sécurité internationales.  « Le Pakistan souhaite la paix », a affirmé son représentant, mais la paix et la stabilité en Asie du Sud ne seront possibles qu’une fois les différends sous-jacents réglés.  À cet égard, les propositions du Pakistan restent sur la table.  Le pays est ouvert à toute initiative bilatérale ou régionale qui consolide la confiance, réduit les risques et qui soit conforme aux principes cardinaux de la sécurité égale et non diminuée pour tous, a encore assuré M. Ahmed.

Le représentant a enfin annoncé que, comme par le passé, son pays présenterait trois projets de résolution qui reconnaissent l’importance des approches régionales en termes de contrôle des armes, de désarmement et de mesures de confiance en faveur de la paix et la stabilité internationales, ainsi que sur la complémentarité des approches régionales et internationales.

Mme KHADIJA AL MAZROUE (Émirats arabes unis) a déclaré que la région du Moyen-Orient devait redoubler d’efforts pour parvenir au désarmement.  Elle a salué la tenue en novembre d’une conférence, sous la présidence jordanienne, visant à aboutir à une zone exempte d’armes nucléaires dans la région.  Elle a appelé à tenir compte des trois piliers du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires –désarmement, non-prolifération et coopération sur les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire- afin de renforcer la paix et la sécurité internationales.  Elle a présenté son pays comme un bon exemple d’accès à l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Elle a appelé à respecter les normes de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). 

Pour M. MANZI KARBOU (Togo), les centres régionaux pour la paix et le désarmement ont un vaste potentiel, dans une large mesure inexploré, pour faire avancer la cause du désarmement au niveau régional.  Citant le cas du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique (UNREC), situé dans son pays, le représentant a souligné son rôle important dans un contexte où les défis sont décuplés par des conflits asymétriques et où des individus utilisent de manière illégale les armes légères et de petit calibre.  L’UNREC a notamment fourni un appui technique aux initiatives d’États africains dans la mise en œuvre de mesures essentielles relatives à la paix et à la limitation des armements, a expliqué M. Karbou.  Il a également contribué à la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel à travers la fourniture d’une assistance technique visant à améliorer la lutte contre la circulation illicite des armes de petit calibre. 

Les défis auxquels sont confrontés les centres régionaux restent, dans une large mesure, financiers, a aussi remarqué M. Karbou, qui a invité les États Membres et les contributeurs à davantage soutenir l’UNREC pour lui permettre de renforcer leurs capacités opérationnelles.

Mme ELEA AGLADZE (Géorgie) a dénoncé la militarisation accrue des régions occupées par la Fédération de Russie dans son pays.  Elle a expliqué que la présence de bases militaires russes dans les régions occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali était contraire à l’accord de cessez-le-feu du 12 août 2008.

M. NAZIM KHALDI (Algérie) s’est dit attaché à la résolution de la crise libyenne « dans le cadre du processus inclusif d’Alger ».  Par ailleurs, il a souhaité que la prochaine conférence sur un traité juridiquement contraignant établissant une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient soit couronnée de succès, la condition pour cela étant que toutes les parties de la région y participent dans un esprit constructif. 

M. ENRI PRIETO (Pérou) a indiqué que les mesures de paix et de confiance dans la région étaient destinées à créer les conditions du développement socioéconomique, désarmement et développement étant étroitement liés.  Le Centre régional de l’ONU pour la paix et le désarmement de Lima a tenu, en 2019, 70 ateliers d’assistance juridique pour aider les États de la région à combattre efficacement et de manière transparente la prolifération et la présence excessive des armes légères et de petit calibre, a expliqué le représentant.  La dimension du genre est incluse dans les opérations conduites par le Centre, a-t-il aussi fait valoir, en appelant les délégations à appuyer le projet de résolution sur les activités du Centre régional de Lima que sa délégation présentera cette année encore pour adoption. 

M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) s’est élevé contre la « volonté antirusse » de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), l’accusant de saper les fondements des accords de désarmement européens.  Les activités de l’OTAN en mer Noire sont préoccupantes, et nous appelons à l’abaissement des tensions à travers un dialogue structuré et renouvelé sur la sécurité en Europe, a-t-il ajouté.  Le représentant a, d’autre part, souligné l’importance que le Document de Vienne de 2011 soit respecté, une refonte technique n’ayant, selon lui, aucun sens.  L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) est importante dans le règlement des conflits, a-t-il encore indiqué, avant de conclure en affirmant que la Fédération de Russie n’était partie à aucun conflit dans le monde. 

Mme DANIELA ALEJANDRA RODRÍGUEZ MARTÍNEZ (Venezuela) a jugé fondamental de respecter le multilatéralisme et la recherche de décisions concertées pour mettre fin aux tensions et au climat de méfiance que nous vivons actuellement.  L’Amérique latine est la première région densement peuplée à avoir signé un traité visant l’interdiction des armes nucléaires, a rappelé la représentante, qui a ensuite mis l’accent sur l’importance des zones exemptes d’armes nucléaires.  Dans ce cadre, elle s’est félicitée de la convocation en novembre d’une conférence visant à parvenir à une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, conformément à la décision 73/546 de l’Assemblée générale. 

Mme NUR ATHIRA HANI ABDUL RAHMAN (Malaisie) a dit la détermination de son pays à coopérer avec les États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN).  Elle a aussi mis en avant la nécessité de parvenir à une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. 

M. ANDRES FIALLO (Équateur) a noté à son tour que l’Amérique latine était la première région densement peuplée du monde à avoir signé un traité visant l’interdiction des armes nucléaires.  Il a appuyé les activités du Centre régional du désarmement pour l’Amérique latine et les Caraïbes.

M. OFER MENASHE MORENO (Israël) a affirmé qu’une lutte centrale se jouait entre les pays qui défendent la stabilité et ceux, ainsi que les acteurs non étatiques, soutiennent le terrorisme, ajoutant que les seconds cherchaient à déstabiliser le Moyen-Orient pour promouvoir leurs programmes extrémistes, prenant la sécurité régionale en otage.

Depuis les années 1970, le « régime extrémiste d’Iran » a exporté son programme révolutionnaire vers d’autres États du Moyen-Orient et même au-delà, a accusé le représentant, qui a ensuite présenté une série d’exemples des « actes malveillants » de l’Iran, citant des attaques dans le Golfe ou encore l’établissement de bases de missiles hors de son territoire.  Faire comme si de rien n’était dégradera la situation sécuritaire dans la région, a-t-il ajouté.

Pour Israël, la prolifération est un problème majeur dans la région.  Le représentant a cité l’Iran et la Syrie comme des exemple d’États fournissant des « armes meurtrières », comme des missiles sol-sol et des armes légères, à des organisations terroristes.  Il a regretté que le Moyen-Orient souffre d’une « culture de non-application » des traités sur le contrôle des armes et de non-prolifération, en violation des obligations légales que les pays eux-mêmes ont endossées.  Tant que cette culture persistera, il sera impossible de promouvoir le moindre processus région, a-t-il conclu. 

M. HEIDAR ALI BALOUJI (République islamique d’Iran) a rappelé que, dans son récent discours devant l’Assemblée générale, le Président Rouhani avait prévenu que la région était au bord de l’explosion et que la moindre erreur pouvait mettre le feu aux poudres.  Pour l’Iran, la présence militaire américaine et les actes d’agression d’Israël sont les principaux facteurs de cette situation. 

Le représentant a estimé que le but principal des États-Unis était d’obtenir des bases militaires pour pouvoir vendre plus d’armes et faciliter les agressions et l’occupation par le « régime israélien ».  Bien que les États-Unis prétendent soutenir certains pays de la région, les développements récents montrent que leur politique régionale irréfléchie est la cause de l’insécurité et de l’instabilité dans la région, a-t-il ajouté. 

Pour le représentant, le Moyen-Orient ne sera pas sûr tant que les troupes américaines ne se seront pas retirées.  Il a dénoncé l’interventionnisme des États-Unis et ce qu’il a qualifié de « terrorisme économique ».  La politique agressive des États-Unis au Moyen-Orient a coûté la vie à des centaines de milliers de civils innocents, a-t-il assuré, qualifiant les États-Unis de « force du mal, de mort et de destruction ».  Il les a accusés d’avoir créé et soutenu des groupes terroristes pour mener des guerres par procuration, entraînant, selon lui, « des catastrophes ». 

De la même façon, Israël tente de répandre le chaos et l’hostilité entre les pays du Moyen-Orient », a poursuivi M. Balouji, qui a accusé Israël de mener une politique « d’occupation brutale et illégale, de terrorisme éhonté et d’agression militaire ».  Il a aussi qualifié Israël de « première source de prolifération d’armes de destruction massive », l’accusant de se moquer des instruments internationaux interdisant de telles armes. 

Pour le représentant, la principale leçon des récents développements régionaux est que la sécurité ne devrait pas être recherchée avec des armes américaines et qu’on ne peut l’acheter à des gouvernements étrangers.  Il a appelé à une coopération régionale évoquant la Coalition pour l’espoir et l’Initiative de paix d’Ormuz, deux projets iraniens. 

Droits de réponse

Le représentant de la République arabe syrienne a estimé que la déclaration de l’Union européenne était remplie d’informations faussées.  La Syrie coopère de manière étroite avec l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et nous respectons les conventions en vigueur, a-t-il assuré.  Dès lors, les affirmations irrespectueuses des Européens se fondent sur un manque frappant de connaissances de la situation, a-t-il ajouté.  Pour le représentant, l’Union européenne, si elle a des preuves de ce qu’elle avance, « doit les présenter à La Haye au lieu de nous faire perdre notre temps ici ».  Il a, en outre, indiqué que son pays avait envoyé un nombre important de lettres au Conseil de sécurité, lettres dans lesquelles figurent les noms des personnes et pays ayant fait entrer des terroristes en Syrie, en particulier dans le nord-ouest du pays.  Les États-Unis sont le seul pays à avoir utilisé toutes les armes de destruction massive, a en outre rappelé le représentant, accusant ce pays d’avoir violé à maintes reprises la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.  Il a également jugé qu’Israël était la principale cause d’insécurité au Moyen-Orient.

La représentante de la Chine a estimé que les États-Unis déformaient la réalité en accusant son pays d’être un trouble-fête de la paix et de la sécurité internationales.  Les États-Unis rompent d’importants accords bilatéraux, ce qui aggrave l’érosion des instruments de sécurité collective, a accusé la représentante.  La Chine a toujours fourni des garanties négatives de sécurité aux États non dotés de l’Asie du Sud, ce qui n’est pas le cas des autres puissances nucléaires, a-t-elle aussi fait observer.

Le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé les initiatives et rhétoriques antirusses de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).  « Contrairement à l’OTAN, la Russie mène ses activités militaires uniquement sur son territoire », a-t-il ajouté.  Réagissant aux propos de la représentante de la Géorgie, il a rappelé que ce sont les « activités criminelles » de la Géorgie et la menace d’une invasion en Abkhazie et en Tskhinvali qui ont poussé ces deux républiques à choisir l’indépendance.  La présence russe en Abkhazie et en Tskhinvali est aujourd’hui un gage de stabilité et de sécurité, a-t-il ajouté.  À ceux qui parlent d’agressions russes, le représentant a répondu que les réelles agressions avaient eu lieu avec les bombardements de la Serbie en 1999, l’invasion de l’Iraq en 2003, celle de la Libye en 2010 et l’invasion de la Syrie en 2014. 

Intervenant au nom des 29 États membres de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), le représentant de la Pologne a répondu que l’annexion illégale par la Fédération de Russie de la Crimée et la déstabilisation en cours de l’Ukraine constituaient une source d’instabilité sans précédent en Europe.  Il a précisé que la présence de troupes de l’OTAN dans les États baltes, ainsi qu’en Pologne, Bulgarie et Roumanie, à la demande de ces pays, faisait partie de la politique de dissuasion de l’OTAN pour réagir aux agressions russes.  « Nous voulons un dialogue authentique avec la Russie pour renforcer la prévisibilité et la transparence et éviter des erreurs », a insisté le représentant.

Le représentant des États-Unis a conseillé à l’Iran de changer de comportement, un comportement marqué par la violence, en Arabie saoudite notamment.  Il a également conseillé à la Syrie, qu’il a accusée d’avoir utilisé des armes au chlore dans la région de Lattaquié, de prendre des mesures concrètes de paix et de sécurité.  À la Chine, il a assuré que son pays est attaché au respect des accords de contrôle des armements, des accords que la Chine, qui élargit ses arsenaux et tente d’asseoir sa domination en Asie du Sud, sape et remet en question.  La Chine est le moins transparent des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, il est par conséquent difficile de croire en sa bonne foi en matière de désarmement, a encore jugé le représentant des États-Unis. 

Le représentant de la Libye a répondu aux « accusations fausses » de la Syrie, ce pays continuant de présenter son pays, qui a placé toutes ses installations sous l’égide de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), « comme si elle n’avait pas de compte à rendre en matière d’armes chimiques ».

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu à la Libye que jamais elle n’avait dit que les armes chimiques « transportées par avions civils en Syrie depuis la Libye » étaient d’origine libyenne.  Israël est le fournisseur principal en armes de destruction massive des terroristes dans la région du Moyen-Orient et les États-Unis sont mal placés pour lancer des accusations en tous sens, leur mensonge sur les armes de destruction massive en Iraq étant à l’origine du chaos dans la région et ailleurs, a ensuite lancé le représentant. 

La représentante de la Géorgie a contesté la déclaration russe laissant entendre que la Fédération Russie n’était partie à aucun conflit.  Elle a rappelé que la Fédération de Russie avait envahi la Géorgie et s’était rendue responsable de l’expulsion de centaines de milliers de Géorgiens de leurs foyers.

Le représentant de la Fédération de Russie a fait observer que l’OTAN avait connu quatre vagues d’élargissement depuis 1996, alors que l’Alliance avait promis de ne pas s’élargir.  Il a accusé l’OTAN de mener à la frontière russe des exercices militaires à caractère offensif et non défensif. 

La représentante de la Chine a dénoncé les clichés véhiculés et les accusations infondées proférées par le représentant des États-Unis à l’encontre de son pays. 

Le représentant des États-Unis a déclaré que le régime syrien paierait tôt ou tard le recours à des armes chimiques contre son peuple.  Il a invité les pays démocratiques à dénoncer l’utilisation par la Chine de certains satellites.   

Le représentant d’Israël a répondu à la Syrie que 10 000 personnes avaient été visées au début des années 1980 par des armes chimiques en Syrie, alors que ce pays était dirigé par Hafez el-Assad.  « Tel père, tel fils? » a-t-il demandé, déplorant que les massacres se poursuivent en Syrie, faisant des centaines de milliers de morts civils.  Le « régime de Bachar » a accédé à la Convention sur l'interdiction des armes chimiques alors qu’il utilise ces armes, si bien qu’il faudra qu’il rende des comptes, a encore déclaré le représentant.

Le représentant de la République arabe syrienne a qualifié d’absurde la déclaration israélienne, en raison des crimes constants commis par Israël contre les populations d’un « pays sans défense, la Palestine ».  Les larmes de crocodile d’Israël ne trompent plus personne, a ajouté le représentant syrien.

Mécanisme pour le désarmement

Déclarations

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. PANGERAN IBRANI SITUMORANG (Indonésie) a dit la volonté du Mouvement de renforcer le dispositif des Nations Unies en matière de désarmement.  Le Mouvement des pays non alignés est inquiet de l’érosion continue du multilatéralisme dans le domaine du désarmement, de la non-prolifération et le contrôle des armes, a expliqué le représentant, qui a ensuite assuré de la détermination du Mouvement à promouvoir le multilatéralisme comme principe clef des négociations. 

Pour le Mouvement des pays non alignés, la source du problème est le manque de volonté politique de certains États d’avancer dans le domaine du désarmement, en particulier du désarmement nucléaire.  Le Mouvement réaffirme l’importance primordiale de la Conférence du désarmement, en tant que seul organe multilatéral de négociation sur le désarmement. 

Le représentant a aussi salué la pertinence de la Commission du désarmement des Nations Unies, dont la composition est universelle et qui a pour mandat de formuler des recommandations en matière de désarmement à l’Assemblée générale.  Il a estimé que la tenue d’une quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le désarmement serait de nature à trouver des moyens de faire face aux questions les plus critiques et de remobiliser la communauté internationale et l’opinion publique sur les questions du désarmement nucléaire, des armes de destruction massive et sur la nécessité d’un meilleur contrôle des armes classiques. 

Au nom du Groupe des États arabes, M. MOEZZ LAOUANI (Tunisie) a appelé à l’universalisation du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  « Réaliser un monde exempt d’armes nucléaires est notre priorité », a-t-il dit avant de s’inquiéter des échecs en matière de non-prolifération.  Illustrant son propos, il a cité l’incapacité de parvenir à un consensus lors de la Conférence d’examen 2015 du TNP.  Il a jugé indispensable de réussir la Conférence d’examen 2020 et d’avancer vers l’objectif d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  

Mme SHEILA GWENETH CAREY (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a plaidé pour une revitalisation sans délais de la Conférence du désarmement et de la Commission du désarmement, pour sortir d’une impasse qui empêche de conclure des accords dans les domaines clefs du désarmement multilatéral.  Elle a, par ailleurs, salué le rôle décisif des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement ainsi que celui des zones exemptes d'armes nucléaires en tant que mesures essentielles de confiance entre États et moyens de renforcer concrètement le désarmement et la non-prolifération nucléaires.  Par ailleurs, la représentante a reconnu les contributions « vitales » de la société civile, en particulier les organisations non gouvernementales, en faveur du maintien de la paix et de la sécurité.  Il sera nécessaire à l’avenir d’impliquer dans nos délibérations des parties prenantes à l’industrie de l’armement, notamment pour avancer dans la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes, a-t-elle souligné.

M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a notamment encouragé tous les États Membres à faire preuve de la volonté nécessaire pour que la Conférence du désarmement soit de nouveau en mesure de remplir son important mandat.  Nous souhaitons que, rapidement, la Conférence voit sa composition élargie et qu’elle intensifie ses interactions avec toutes les parties prenantes dans le domaine du désarmement et de la sécurité internationale, cela pour donner à cet organe des perspectives nouvelles, a ajouté le représentant.  Il a par ailleurs préconisé que la cause du désarmement soit davantage intégrée dans le cadre onusien du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. YANN HWANG (France), s’exprimant au nom des présidents des conventions de désarmement, s’est inquiété des difficultés financières qui affectent ces conventions et leurs organes de suivi.  Bien que des efforts aient été faits, ils sont insuffisants, a-t-il estimé.  Pour le représentant, la seule option viable consiste à s’attaquer au non-paiement et les États doivent payer avant que les réunions n’aient lieu.  Appelant une fois de plus les États à payer à temps et intégralement leurs contributions, le représentant a rappelé que, tant qu’il y aurait des arriérés, les problèmes persisteraient.

Mme ELISABETH ELISABETH TICHY-FISSLBERGER (Autriche), au nom du groupe d’experts francophones de désarmement à Genève, a fait observer qu’en raison des problèmes récurrents de liquidités dont souffre l’ONU, certaines réunions des conventions avaient récemment été organisées sans interprétariat, ce qu’elle a regretté.  La représentante a ensuite demandé que le Programme de formation sur le désarmement soit préservé et à ce que ces formations puissent être délivrées dans un environnement multilingue.

Mme MARKETA HOMOLKOVA, de l’Union européenne, a estimé que la Première Commission devrait privilégier l’élaboration de projets de résolution biennaux ou triennaux sur les questions de désarmement et de non-prolifération, au lieu d’adopter chaque année et mécaniquement des projets de résolution.  Elle a appelé à l’élargissement de la composition de la Conférence du désarmement et à un dialogue accru de celle-ci avec la société civile et les institutions du monde de l’industrie et de la recherche.  La représentante a, par ailleurs, demandé aux États Membres de s’acquitter de leurs obligations financières afin de relancer les instruments du mécanisme onusien de désarmement « dont nous dépendons tous ici ».

M. LAURENT MASMEJEAN (Suisse) s’est dit préoccupé par les blocages affectant les différents organes de désarmement.  La Conférence du désarmement n’a pas été en mesure de capitaliser sur les développements positifs intervenus en 2018 et la Commission du désarmement de l’ONU a été dans l’incapacité de tenir sa session de fond cette année, s’est-il inquiété.  Il a aussi noté que les travaux de la Première Commission étaient non seulement marqués par de profondes divergences mais également par des questions organisationnelles qui restreignent le temps à disposition pour traiter les questions de fond.

Le représentant a jugé indispensable que la communauté internationale puisse s’appuyer sur une machinerie multilatérale pleinement fonctionnelle, alors que les défis auxquels elle est confrontée dans les domaines du désarmement et de la sécurité internationale sont de plus en plus complexes.  Dans ce contexte, les efforts en vue de surmonter les blocages affectant les organes de désarmement sont aujourd’hui plus importants que jamais, a insisté M. Masmejean.  Le représentant a souhaité que les présidences successives de 2020 de la Conférence du désarmement approfondissent les différentes options identifiées afin de la revitaliser.  Pour la Suisse, il serait opportun pour la Conférence du désarmement de poursuivre le débat entamé cette année sur la possibilité d’en revenir à la manière dont elle abordait son programme de travail jusqu’au milieu des années 1990. 

Le représentant a aussi regretté les arriérés de paiements qui affectent plusieurs conventions et traités de désarmement.  Il a appelé à mettre en place des procédures qui permettent d’améliorer la situation en termes de trésorerie.  Enfin, M. Masmejean a salué les réformes institutionnelles mises en œuvre par l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) pour lui permettre de mieux répondre aux attentes des États Membres de l’ONU.  Il a appelé à une augmentation de la contribution du budget ordinaire de l’ONU pour l’UNIDIR.  

Mme NATASHA SMITH (Royaume-Uni) a affirmé que la Conférence du désarmement était la seule instance où des mesures efficaces pourraient être décidées.  Elle a regretté que des blocages, imputables selon elle à quelques États, aient empêché de réelles avancées lors des précédentes réunions.  Elle a aussi regretté que la Commission du désarmement n’ait pas pu se réunir cette année.

Pour M. MOHAMED ELHOMOSANY (Égypte), la regrettable absence de résultats en matière de désarmement n’est pas due au manque d’efficacité des mécanismes en place mais à la volonté de certains États.  Le représentant a demandé que la Conférence du désarmement soit revitalisée. 

M. SARMAD AL-TAIE (Iraq) a souhaité que la Conférence du désarmement puisse être en mesure de négocier de nouveau des traités multilatéraux répondant aux intérêts de tous les États Membres.  Il a plaidé pour que les États Membres fassent preuve de la volonté politique et de la souplesse nécessaires pour revitaliser cet instrument essentiel, avant de souligner l’importance d’un démarrage rapide des négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et autres dispositifs explosifs nucléaires dans le cadre de cette Conférence du désarmement revitalisée.

M. TOMASZ ZBIGNIEW TOKARSKI (Pologne) a déclaré que les instruments en vigueur du désarmement devraient permettre, s’ils étaient utilisés à plein, de réduire les sources d’instabilités actuelles.  La Conférence du désarmement revitalisée ne devrait plus être coupée des réalités actuelles, a-t-il ajouté.  Il s’est dit disposé à l’ouverture de discussions, dès 2020, sur un réexamen des procédures de fonctionnement de cet instrument, ainsi qu’aux suggestions de la société civile. 

Mme RACHITA BHANDARI (Inde) a affirmé que la Conférence du désarmement était l’institution centrale sur le désarmement, mais ajouté aussitôt que des questions se posaient sur son efficacité.  Regrettant le manque de progrès réalisé depuis 20 ans par la Conférence, la représentante a toutefois ajouté qu’elle restait l’instrument le plus indiqué pour mener les négociations sur le désarmement puisque tous les grands États y sont présents, notamment ceux dotés de l’arme nucléaire. 

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a regretté le peu d’avancées positives dans le domaine du désarmement.  Il en a appelé à un renforcement de l’équilibre homme-femmes au sein des instances en charge du dossier, notamment au sein du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. 

Mme LILIANNE SÁNCHEZ RODRÍGUEZ (Cuba) a souligné l’importance de préserver les accords de désarmement, fruits de longues négociations de la communauté internationale.  Les tentatives délibérées de mettre fin à certains de ces accords doivent être dénoncés et condamnées, a-t-elle ajouté.  La représentante a estimé qu’un programme équilibré et complet permettrait à la Conférence du désarmement de sortir de l’impasse et de la politisation de ses travaux à l’origine de cette impasse. 

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique) a reconnu que le mécanisme du désarmement se trouvait à la croisée des chemins, depuis notamment que la Conférence du désarmement est au point mort.  Et voilà que la Commission du désarmement, prise en otage politiquement, n’a pas pu, cette année, conduire de session de fond et émettre, conformément à son mandat, de recommandations, a-t-elle déploré.  Selon elle, les blocages actuels, qui menacent à présent la Première Commission, ont des conséquences néfastes sur l’environnement international de sécurité.  L’heure est venue de s’interroger sur les conditions d’adaptation des rouages du mécanisme onusien de désarmement aux réalités actuelles, a-t-elle conclu. 

M. NIRUPAM DEV NATH (Bangladesh) a dit partager les préoccupations des autres délégations autour de la Conférence du désarmement en raison de l’absence de consensus sur le programme de travail qui dure depuis 20 ans.  Il s’est aussi inquiété du blocage de la Commission sur le désarmement.  Nous devons redoubler d’efforts pour surmonter cette paralysie, a-t-il insisté.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À l’approche des élections de 2020 au Burundi, les 15 membres ne sont pas unanimes sur le maintien du pays à l’agenda du Conseil de sécurité

8652e séance – après-midi
CS/14004

À l’approche des élections de 2020 au Burundi, les 15 membres ne sont pas unanimes sur le maintien du pays à l’agenda du Conseil de sécurité

Alors que s’approchent les échéances électorales de mai 2020 au Burundi, les membres du Conseil de sécurité ont montré des avis opposés sur le rôle que les Nations Unies sont appelées à jouer, au cours d’une séance d’information cet après-midi, l’occasion pour l’Envoyé spécial du Secrétaire général Michel Kafando d’annoncer qu’il cesse ses fonctions.

Après deux ans et demi de service et une unique rencontre avec le Président du Burundi, Pierre Nkurunziza, M. Kafando a regretté que « les espoirs nés de cette première rencontre n’aient malheureusement pas encore abouti ».  Cependant, il a jugé que l’appui de son Bureau et son engagement personnel avaient souvent contribué à lever certains blocages politiques ou techniques et permis la poursuite du processus de paix.

Dans son rapport, le Secrétaire général note que la situation s’est améliorée sur le plan de la sécurité mais que la situation des droits de l’homme reste préoccupante et que des incidents violents continuent d’émailler la vie politique.

Rien qui menace la paix et la sécurité internationales, ont cependant avancé la Chine et la Russie, cette dernière estimant qu’il est temps de retirer le Burundi du programme « déjà surchargé » du Conseil de sécurité.

Le représentant russe s’est même dit « étonné » de la précipitation dans la préparation du rapport de M. Kafando alors que l’ONU traverse une crise financière et a appelé le Secrétariat « à respecter les décisions du Conseil de sécurité » d’autant que, selon lui, le pays est calme avec une tendance à la stabilisation. 

La Ministre de la coopération et des relations internationales de l’Afrique du Sud a fait valoir les nombreux progrès enregistrés par les autorités, tandis que le représentant de la Guinée équatoriale a salué « l’esprit de réconciliation et de tolérance qui anime actuellement le Burundi », avec le retour au pays de dirigeants politiques exilés, la reconnaissance de partis politiques de l’opposition ou la libération de plus de 3 000 prisonniers.

Avis partagé par le représentant burundais pour qui l’Envoyé spécial du Secrétaire général laisse derrière lui un « pays calme, stable et définitivement réconcilié » dans lequel plus de 79 000 réfugiés, dans les pays voisins, ont commencé à rentrer volontairement chez eux.  Il a « regretté que certaines délégations gardent le langage de 2015 au lieu de prendre acte des événements survenus au Burundi ».  Par conséquent, la présence du Burundi à l’agenda du Conseil de sécurité est « inopportune et viole la Charte des Nations Unies », a-t-il affirmé, ajoutant que « son maintien est en train de créer un mauvais précédent ».

En revanche, la France, la Belgique, l’Allemagne, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Pologne ont insisté sur la « nécessité absolue » de conserver le Burundi au programme du Conseil car, à l’approche des élections dans un environnement précaire, il reste une menace à la paix et la sécurité dans la région, ont-ils estimé.  Pour la France, ces élections seront une étape cruciale sur la voie de l’apaisement et il est essentiel qu’elles puissent se préparer dans le consensus et en confiance.  La délégation française a donc appelé à condamner et à faire cesser les violences exercées à l’encontre de militants, les arrestations arbitraires de journalistes et de membres de l’opposition, ainsi que les actes de vandalisme contre les permanences de partis politiques d’opposition.

Inquiète, elle aussi, pour l’organisation du scrutin compte-tenu des violations des droits de l’homme rapportées par le Secrétaire général, l’Allemagne a défendu le maintien du Bureau des Nations Unies.  Une inquiétude réitérée par la Belgique à la lecture du dernier rapport de monitoring de l’Union africaine qui fait état, en septembre, d’un nombre croissant d’enlèvements brutaux commis par les forces de l’ordre et par les groupes paramilitaires comme les Imbonerakure, ainsi que d’arrestations arbitraires de membres de l’opposition.  Pour la Belgique, alors que la voie vers les élections de 2020 est encore longue, il est primordial que le Bureau de l’Envoyé spécial puisse continuer de travailler et qu’il ait un accès direct aux autorités burundaises, au moins jusqu’au scrutin.

Dans son rapport, le Secrétaire général assure que l’ONU demeure un partenaire du Burundi et fera tout son possible pour appuyer le pays dans sa recherche de solutions durables à ses difficultés d’ordre politique et socioéconomique.

De même, Jürg Lauberg, Président de la Configuration Burundi de la Commission de consolidation de la paix, a insisté pour que l’ONU reste engagée au Burundi « avec une approche intégrée » afin de garantir des élections pacifiques, libres, justes et inclusives.  La Commission, a-t-il suggéré, peut servir de plateforme pour identifier les activités pouvant contribuer à un environnement propice au processus, tandis que le Gouvernement du Burundi, les partis politiques et les autres parties prenantes doivent aussi y contribuer.

La Côte d’Ivoire enfin, a encouragé l’ONU et l’Union africaine à continuer de soutenir les initiatives de la Communauté d’Afrique de l’Est pour « revitaliser » le dialogue interburundais d’ici aux élections. Il a aussi appelé le Gouvernement de Bujumbura et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à « régler leurs différends » après la fermeture des bureaux du Commissariat au Burundi.

LA SITUATION AU BURUNDI (S/2019/837)

Déclarations

M. MICHEL KAFANDO, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Burundi, a constaté que la situation sur place demeure tendue: au cours de la période considérée, il a observé une montée de l’intolérance politique et des atteintes aux libertés civiques et politiques.  Le Gouvernement a réagi en mettant en place un cadre de dialogue politique avec les partis politiques, les administrateurs locaux et les représentants des forces de sécurité.  Cette initiative selon lui « mérite d’être encouragée et soutenue ».  À l’approche des élections prévues en 2020, il a souhaité que le processus soit transparent sous peine de ranimer le conflit.  Il a également observé que la situation sécuritaire s’était améliorée sur l’ensemble du territoire mais que la situation humanitaire, elle, demeure préoccupante.  Le haut fonctionnaire a également salué le retour volontaire de milliers de réfugiés.

Cependant, le dialogue interburundais n’a toujours pas eu lieu sous les auspices de la Communauté de l’Afrique de l’Est, quatre ans après son lancement, faute de volonté politique des uns et des autres et faute aussi du manque d’engagement des États de la région, a constaté à regret M. Kafando.  Malgré les engagements du médiateur, « les choses n’ont pas bougé », a-t-il insisté.  Dans cette inquiétude, il a indiqué avoir entrepris de nouvelles concertations avec le Médiateur, le Président Yoweri Museveni, qui a assuré qu’il entendait poursuivre la médiation avec M. Kagamé et d’autres chefs d’État.  L’Envoyé spécial a annoncé comme il en avait l’intention déjà depuis juin qu’il quittait ses fonctions d’Envoyé spécial au Burundi.  Il a précisé que depuis sa nomination le 5 mai 2017, et à l’issue de nombreuses visites sur place et dans la région, il n’a été reçu qu’une seule fois par le Président du Burundi, Pierre Nkurunziza, et que « les espoirs nés de cette première rencontre n’ont malheureusement pas encore abouti ».  Cependant, l’appui de son Bureau et son engagement personnel auprès du Facilitateur et du Médiateur ont souvent contribué à lever certains blocages politiques et techniques et permis la poursuite du processus de paix, a-t-il estimé.

M. JÜRG LAUBER, Président de la Configuration Burundi de la Commission de la consolidation de la paix, a promis que la Configuration continuera de servir comme plateforme de dialogue sur la coopération entre le Burundi et ses partenaires internationaux, en appui à la mise en œuvre du plan national de développement du pays.  Le Président a souligné l’importance de prévenir le ralentissement des programmes économiques à l’approche des élections de 2020.  De même, il a mis l’accent sur la nécessité d’élections pacifiques, libres, justes et inclusives, suggérant que la Commission puisse servir de plateforme pour identifier les activités d’appui à un environnement favorable à un tel processus.  Concernant la situation dans le pays, M. Lauber a indiqué que les préparatifs des élections générales de 2020 continuent de dominer le contexte politique.  Le Gouvernement souligne le fait que le Président Nkurunziza ne se présentera pas aux prochains scrutins.  Le parti au pouvoir CNDD-FDD devrait choisir son candidat à la présidentielle début 2020.  Dans le même temps, des rapports faisant état de violations des droits de l’homme et d’autres incidents qui ont endommagé les infrastructures des partis politiques ont soulevé des préoccupations quant à l’espace démocratique préélectoral.  Le 19 juin dernier, le représentant permanent du Burundi a présenté l’avancée des préparatifs des élections, notamment l’adoption de la feuille de route de Kayanza par le Gouvernement, la constitution de la Commission électorale nationale indépendante ainsi que l’adoption du code électoral et du calendrier électoral.  La Commission a été informée de l’adoption du budget 2019-2020 qui prévoit le financement des élections par les fonds propres du Burundi.  M. Lauber a aussi noté le retour volontaire des réfugiés burundais des pays voisins, y compris de la Tanzanie.  Les États Membres ont appelé pour que ces retours respectent le principe du retour volontaire, digne et sûr.  Pour ce qui est de la coopération socioéconomique, elle reste la clef pour réduire les vulnérabilités, renforcer la résilience et améliorer la préparation aux catastrophes et la réponse au Burundi.  Les États Membres de la Commission ont exprimé leur souhait d’intensifier le dialogue aux niveaux stratégiques et sectoriels pour assurer les priorités de développement.  Enfin, l’intégration effective des femmes et des jeunes dans la vie publique et leur participation au processus de décisions sur l’avenir du pays sont un facteur clef de la paix durable. 

La Commission, a dit le Président de la Configuration, peut jouer un rôle en soutenant les initiatives visant à prévenir le conflit et à réduire les tensions au niveau communautaire.  L’importance de ces initiatives pour promouvoir le dialogue et la réconciliation va au-delà de la période électorale, a noté M. Lauber, en invitant à renforcer la résilience et à préserver les acquis grâce à l’accord de paix et de réconciliation d’Arusha.  Avant de terminer, il a formulé cinq observations et recommandations.  En premier lieu, il a encouragé l’ONU à rester engagée au Burundi avec une approche intégrée.  En deuxième lieu, le Gouvernement du Burundi, les partis politiques et les autres parties prenantes doivent créer un environnement favorable pour des élections pacifiques, libres, crédibles et inclusives.  M. Lauber a en troisième lieu appelé les États Membres à accroître leur appui aux projets et initiatives visant à réduire la violence et atténuer les tensions.  Quatrièmement, le financement urgent du plan de retour et de réintégration des réfugiés de 2019 est nécessaire.  Le Président a appelé à cet égard les États Membres à donner l’appui nécessaire à ce plan qui est exemplaire en tirant parti des synergies entre les plans humanitaires et de développement existant, y compris le plan national de développement du Burundi.  Et en cinquième lieu, il a promis de poursuivre ses efforts pour un appui international durable pour la mise en œuvre du plan national de développement et pour soutenir le dialogue entre le Gouvernement du Burundi et ses partenaires bilatéraux et internationaux autour des priorités nationales. 

Mme NALEDI PANDOR, Ministre de la coopération et des relations internationales de l’Afrique du Sud, a pris acte des suggestions d’améliorer le dialogue en amont des élections générales du 20 mai 2020, pour doper les efforts de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) chargée de superviser le processus.  Elle a aussi pris note du document officieux en trois points qui évoque un renforcement de la médiation conduite par M. Museveni.  L’Afrique du Sud exhorte le Conseil à continuer de coordonner ses positions avec le Conseil de paix et sécurité de l’UA quand il s’agit de l’Afrique, a dit la Ministre.  Ce n’est que par le biais d’un dialogue sans exclusive qu’on pourra sortir de l’impasse au Burundi, a-t-elle aussi déclaré avant d’appeler la communauté internationale à coopérer en ce sens avec la CAE.

Mme Pandor a félicité le Gouvernement burundais pour les progrès faits sur la voie des élections avec l’adoption d’un code et d’un calendrier électoral, ainsi que la création de nouveaux partis politiques: tous doivent pouvoir parcourir le pays sans obstacle, a-t-elle recommandé en estimant qu’il ne devrait pas exister de zone inaccessible pour les politiciens, d’où qu’ils soient.  Les Burundais doivent pouvoir bénéficier d’élections libres et justes.  La Ministre a aussi encouragé les autorités à travailler étroitement avec l’UA et la CAE pour créer un environnement conforme à l’Accord d’Arusha. 

Vivement préoccupée cependant par la situation humanitaire dans le pays, qui touche 1,8 million de personnes, elle a appelé la communauté internationale à faire plus pour surmonter ces difficultés et appuyer la mise en œuvre du Plan national de développement, ainsi que le rapatriement volontaire des réfugiés.  Le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent appuyer le Gouvernement du Burundi et la médiation de la CAE pour créer un environnement propice à la transition démocratique, a-t-elle conclu.

Pour M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), le Burundi doit pouvoir bénéficier de la dynamique en cours dans la région des Grands Lacs et parvenir à mettre un terme aux tensions politiques qui l’agitent.  Les élections de 2020 seront une étape cruciale sur cette voie, selon lui car « seule l’organisation d’élections libres, pacifiques et inclusives permettra de retrouver le chemin de la stabilité ».  Il est essentiel que ces échéances puissent se préparer dans le consensus, avec la confiance de tous les acteurs politiques et de la population.  Les violences exercées à l’encontre de militants, les arrestations arbitraires de journalistes et de membres de l’opposition et les actes de vandalisme contre les permanences de partis politiques d’opposition doivent être condamnés et cesser, a exigé le représentant: les autorités doivent en poursuivre les auteurs et tout faire pour que de tels actes ne se reproduisent pas.  Il a suggéré des mesures visant à garantir la liberté d’expression pendant la campagne, l’ouverture de l’espace politique, ainsi que la sécurité des candidats et partisans des différents partis.  Des mesures techniques telle que l’observation électorale citoyenne, la transparence dans le dépouillement des votes, peuvent également contribuer à bâtir cette confiance, de l’avis de la France. 

Le représentant s’est néanmoins dit préoccupé par la persistance des violations des droits de l’homme et des violences dans ce pays, y compris les violences sexuelles, ainsi que par la fermeture du bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Le représentant a encouragé les autorités burundaises à respecter leurs engagements internationaux en matière de protection des droits de l’homme, arguant que cela est nécessaire à la tenue d’élections inclusives et apaisées.  À ce titre, la France continuera à suivre la situation humanitaire avec beaucoup d’attention, a prévenu le délégué qui a insisté sur la nécessité du dialogue politique dans l’esprit de l’Accord d’Arusha, pour permettre une normalisation de la situation au Burundi.  Le représentant a encouragé la CAE à poursuivre ses efforts de médiation et appelé les autorités burundaises à dialoguer avec l’Envoyé spécial du Secrétaire général.  Dans la période charnière qui s’ouvre, avec en point de mire les élections générales de mai 2020, il est important que l’ONU reste engagée, a-t-il souligné en mettant en garde contre le risque régional que ferait peser une éventuelle dégradation de la situation au Burundi.  C’est pourquoi le Conseil de sécurité ne peut pas se désintéresser de la situation au Burundi, a conclu M. de Rivière.

Mme KELLY KRAFT (États-Unis) a salué le travail de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Burundi notant que le Conseil, pour œuvrer à la paix et la sécurité, devait souvent investir dans la population: ainsi, les élections de 2020 sont la clef de l’avenir et doivent être inclusives, libres et équitables.  Les femmes, les jeunes, l’opposition et la société civile, les militants politiques et les réfugiés, chacun a un rôle à jouer dans ces élections selon elle.  Mme Kraft a encouragé le Gouvernement à prendre des mesures tangibles pour garantir le bon déroulement des scrutins, comme d’autoriser des observateurs internationaux.  Les candidats de tous les partis doivent être libres de mener campagne sans craindre des représailles: alors qu’elle s’est dit préoccupée par les violences commises contre les opposants et leaders de la société civile, qui sapent la liberté d’expression elle a appelé les partis à rejeter la violence dans la campagne.  Elle a exhorté le Gouvernement du Burundi à s’acquitter de ses obligations de respecter la liberté d’expression: tous les citoyens doivent pourvoir prendre part au processus électoral sans crainte, a-t-elle insisté.  Le retour volontaire des réfugiés demeure également une priorité et elle a appelé les Gouvernements du Burundi et de Tanzanie à collaborer avec le HCR pour garantir un retour en toute sécurité et sans harcèlement. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a dit qu’il était étonné de la précipitation dans la préparation du rapport de M. Kafando alors que l’ONU traverse une crise financière.  Le représentant a appelé le Secrétariat à respecter les décisions du Conseil de sécurité à l’avenir.  Sur le fond, le représentant a relevé que la situation sécuritaire n’avait pas été modifiée depuis le mois d’août, le pays étant calme avec une tendance à la stabilisation.  Il a salué la signature de l’accord avec la République-unie de Tanzanie sur le retour des réfugiés.  Le représentant a noté que le Gouvernement continue de préparer les élections générales en prévoyant le financement national du processus.  Il a aussi remarqué que le nombre des partis souhaitant participer aux scrutins s’allonge.  Le représentant a jugé utile la campagne d’information pour expliquer le travail de la commission électorale auprès de la population.

Sur les cas de violence mentionnés dans le rapport, le délégué a suggéré d’établir des statistiques et de les examiner attentivement, tout en portant un regard sur la situation en général.  Pour lui, la situation d’ensemble n’est pas aussi sombre qu’on le dit.  Le délégué a aussi noté que les différents candidats aux élections avaient prévu de se déclarer au début de l’année 2020.  Il s’est dit satisfait de l’annonce faite par le Gouvernement de dialoguer avec l’opposition notamment à Nairobi.  Il faut respecter la souveraineté du Burundi, surtout en cette veille des élections, a recommandé le représentant pour lequel il faut aussi soutenir les efforts de développement du Burundi.  Avant de terminer, il a exprimé sa conviction qu’il n’est pas utile de maintenir l’attention du Conseil de sécurité sur le Burundi: il faut retirer ce pays du programme de travail du Conseil déjà chargé.

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a salué l’esprit de réconciliation et de tolérance qui anime actuellement le Burundi, avec le retour au pays de dirigeants politiques exilés, la reconnaissance de partis politiques de l’opposition ou la libération de plus de 3 000 prisonniers.  La Guinée équatoriale se félicite donc, comme l’avait fait aussi l’UA lors du trente-deuxième sommet ordinaire de ses chefs d’État et de gouvernement tenu le 10 février dernier à Addis-Abeba, de la volonté politique de ramener et de consolider le calme et la stabilité dans ce pays.  Dans ce contexte, la délégation encourage le Gouvernement du Burundi à continuer de renforcer le dialogue inclusif et à établir des mécanismes de transparence et d’inclusivité pour les élections de 2020, dans la droite ligne de l’Accord d’Arusha, de la Feuille de route de Kayansa et des valeurs et principes démocratiques, tout en rendant prioritaire le respect des droits de l’homme, a dit le représentant. 

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) a invité tous les acteurs burundais à créer un environnement pacifique pour la tenue des élections.  Par-dessus tout, il faut éviter tout type de violation des droits de l’homme, et en particulier le droit à la liberté d’expression, a dit le représentant, appelant le Gouvernement burundais à coopérer avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme pour mieux protéger les droits de l’homme.  La République dominicaine note aussi que la situation socioéconomique continue de ne pas s’améliorer de manière tangible, avec une augmentation de l’inflation, tout comme du déficit des comptes publics.

Par ailleurs, le représentant a jugé particulièrement préoccupant le nombre de personne atteintes de malaria ou décédées des suites du choléra.  Ainsi, près de 6,5 millions de personnes ont contracté la malaria au cours des huit premiers mois de cette année, un chiffre très supérieur à celui de la même période l’an dernier.  Cela dit, la délégation a salué les efforts de préparation et d’atténuation face à la maladie à virus Ébola, ainsi que les résultats atteints dans la réduction du taux de malnutrition, qui est passé de 56 à 54% en moins de deux ans.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a appuyé le lancement du dialogue interburundais sous les auspices de la Communauté d’Afrique de l’Est: ce dialogue est nécessaire pour instaurer la confiance, y compris celle de la communauté internationale, et pour créer des conditions propices à garantir des élections transparentes et inclusives.  Il a demandé que soit renforcée l’aide humanitaire au Burundi en faveur des 1,8 million de Burundais dans le besoin, sans compter les dizaines de milliers de réfugiés qui vont rentrer alors que les cas de malaria et de choléra ont dramatiquement augmenté de 125% l’an dernier.  C’est décourageant à cet égard d’entendre que le Plan régional de soutien au retour des réfugiés est l’un des moins financés au monde, a-t-il insisté.  Il faut enfin garantir que le Burundi ne rechute pas, même après 2020 et pour cela, ce pays doit continuer de travailler avec l’ONU et les autres partenaires, a-t-il ajouté en conclusion.

M. PAUL DUCLOS (Pérou) a salué les progrès réalisés dans la préparation du processus électoral, en particulier la publication d’un chronogramme détaillé.  La délégation a émis l’espoir que ces élections se dérouleront de manière transparente, inclusive et crédible.  Pour cette raison, le Pérou a jugé « fondamental » d’éradiquer toute manifestation d’intolérance et d’ouvrir l’espace politique afin de garantir la pleine participation de tous les acteurs de la vie politique du pays.  Il est à cet effet « impératif » de revitaliser le dialogue interburundais, a déclaré le représentant.  Sa délégation estime aussi que la situation sécuritaire doit faire l’objet de mesures « urgentes ».  Pour cela, il faut faire reculer les groupes paramilitaires comme les Imbonerakure, dont les actions sont sources de perturbations et d’instabilité politique au Burundi, a ajouté le représentant.

M. HAITAO WU (Chine) a noté que la situation est stable et que la commission électorale poursuit ses préparatifs des scrutins et que les réfugiés rentrent au pays en grand nombre.  La situation humanitaire s’améliore, a estimé le représentant, qui a demandé que la communauté internationale respecte la souveraineté du Burundi et le choix du peuple burundais.  Les partenaires doivent aider au retour des réfugiés et appuyer le plan de développement national du Gouvernement, a ensuite préconisé le représentant.  La coopération doit reprendre le plus rapidement possible, a souhaité le délégué, en estimant que la situation dans ce pays ne devrait plus être inscrite à l’ordre du jour du Conseil.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a encouragé la population burundaise à participer de manière paisible aux élections, estimant que la libération de prisonniers politiques et la levée des poursuites judiciaires contre les dirigeants politiques et leaders de la société civile qui veulent rentrer au Burundi constitueraient des avancées majeures.  Il s’est dit préoccupé des incidents violents qui émaillent la période préélectorale, appelant les médias à faire preuve de responsabilité pour que cette période ne soit pas entachée par des discours de haine.  À propos des droits de l’homme, le représentant s’est dit préoccupé à la lecture du dernier rapport de monitoring de l’Union africaine qui fait état, en septembre, d’un nombre croissant d’enlèvements brutaux commis par les forces de l’ordre et par les Imbonerakure, ainsi que d’arrestations arbitraires de membres du CNL (opposition).  Alors que la voie vers les élections de 2020 est encore longue, a—il conclu, il est primordial selon lui que le Bureau de l’Envoyé spécial puisse continuer de travailler et maintienne ses activités et qu’il ait un accès direct aux autorités burundaises au moins jusqu’au scrutin.

Mme KAROLINA DOROTA JANIAK (Pologne) s’est inquiétée de l’augmentation de l’intolérance politique et du vandalisme contre les membres et bureaux de l’opposition au Burundi.  À l’approche des élections, elle a appelé les autorités à ouvrir l’espace politique pour que tous les partis puissent prendre part à la campagne.  Malgré l’amélioration de la situation en matière de sécurité, la population reste exposée à de nombreuses difficultés dont des violences et discours de haine contre lesquels les autorités doivent se dresser, a-t-elle recommandé.  Elle a aussi souhaité que le Gouvernement prenne des mesures tangibles pour rétablir la coopération avec les organes internationaux de défense des droits de l’homme.  La représentante a conclu que la mission du Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme devait se poursuivre pour que le travail de M. Kafondo ne soit pas perdu et pour permettre une amélioration de la vie des Burundais au travers des élections.

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a dit se réjouir de l’environnement sociopolitique globalement stable au Burundi.  Cependant, seuls un environnement apaisé et un processus inclusif marqué par une plus grande ouverture de l’espace politique, pourront garantir la crédibilité du scrutin, a-t-il mis en garde.  Il s’est félicité à cet égard des efforts déployés par les autorités burundaises pour sensibiliser les acteurs concernés.  Il a en outre encouragé les parties prenantes à s’inscrire dans une dynamique positive, y compris par la reprise du dialogue politique interburundais, dans l’esprit de l’Accord d’Arusha.  La Côte d’Ivoire appelle à cet effet l’ONU et l’UA à continuer de soutenir les initiatives de la CAE, en vue de revitaliser ce dialogue.

Le représentant a ensuite salué l’Accord tripartie, entre le Burundi, la République-Unie de Tanzanie et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés qui a favorisé, depuis sa signature en 2017, le retour volontaire d’au moins 75 000 réfugiés burundais depuis la Tanzanie.  Cela dit, en dépit des efforts déployés par les autorités burundaises, les agences humanitaires et les partenaires du Burundi, il reste encore 325 671 réfugiés burundais dans les pays voisins, a dit le représentant, avant d’appeler sur un autre sujet, le Gouvernement du Burundi et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à « régler leurs différends ».

M. BASHAR A. A. A. E. ALDUWAISAN (Koweït) a relevé l’amélioration du processus politique depuis la dernière séance du Conseil de sécurité sur le Burundi, notant que le Gouvernement s’était efforcé de maintenir le calme.  Cette évolution positive devrait être maintenue jusqu’aux élections de 2020, a souhaité le représentant pour lequel ces mêmes élections devraient être justes et crédibles.  Les femmes et les jeunes doivent pouvoir y participer, a-t-il ajouté.  L’annonce par le Président actuel qu’il ne se représentera pas à la présidentielle montre la maturité du Gouvernement, qui prépare les élections avec sérieux, a constaté le représentant.  Sur le plan de la sécurité, il a noté l’amélioration des conditions en dépit des activités des groupes armés.   Il a espéré que ces conditions continueront de s’améliorer et que le Gouvernement redoublera d’effort pour maintenir le calme.  La situation humanitaire s’est améliorée, a encore estimé le représentant qui a demandé que les violations des droits de l’homme cessent et que les auteurs soient jugés.  Le Gouvernement doit redoubler d’effort pour la réintégration socioéconomique des réfugiés qui reviennent, a-t-il dit avant de conclure.

M. DAVID CLAY (Royaume-Uni) a souligné que le Bureau de l’Envoyé spécial jouait un rôle essentiel.  Il a insisté pour que ses rapports continuent d’être présentés régulièrement au Conseil de sécurité.  En ce qui concerne la CAE, il l’a encouragée à redoubler d’efforts en faveur d’un dialogue inclusif pour préserver les acquis de l’Accord d’Arusha.  Les États de la région doivent tenir leurs engagements, a-t-il aussi demandé.  Malgré l’amélioration de la situation sécuritaire, les violations graves des droits et les incidents violents se poursuivent ainsi que les atteintes à la liberté de la presse, a poursuivi le représentant qui a voulu que les réfugiés puissent rentrer sur une base volontaire et avoir la garantie de vivre dans la sécurité après leur retour.  Avec les élections prévues l’an prochain dans un environnement encore précaire, le Burundi reste une menace à la paix et la sécurité dans la région, selon le Royaume-Uni qui estime que le pays doit demeurer au programme du Conseil de sécurité.

En réaction à l’intervention de son homologue de la Fédération de Russie, M. MATHIAS LICHARZ (Allemagne) a dit que les conditions de sécurité au Burundi sont préoccupantes, prenant à témoin les détails contenus dans le rapport du Secrétaire général.  La situation ne fait que renforcer nos inquiétudes et implique de maintenir le Burundi à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, a estimé le représentant pour lequel la crise ne peut être résolue qu’avec les acteurs régionaux.  Il a également reconnu qu’il était préoccupé par la crise humanitaire au Burundi.  À cet égard, il a appelé le Gouvernement à coopérer avec les partenaires internationaux pour améliorer notamment l’accès humanitaire, ainsi que pour appuyer le retour volontaire, digne et sûr des réfugiés. 

M. ALBERT SHINGIRO (Burundi) a rappelé que le Secrétaire général et le Ministre burundais des affaires étrangères s’étaient rencontrés en marge de l’Assemblée générale et avaient convergé sur le constat de la fin du mandat de l’Envoyé spécial en novembre 2019: il laisse derrière lui un « pays calme, stable et définitivement réconcilié ».  Il a dès lors « regretté que certaines délégations gardent le langage de 2015 au lieu de prendre acte des événements survenus au Burundi ».  La situation politique est dominée par la préparation des élections de 2020, a-t-il dit en faisant remarquer que les mécanismes sont déjà opérationnels: la Commission électorale nationale indépendante, le code électoral révisé, le financement du scrutin sans recours aux ressources extérieures, la publication du calendrier électoral - dont la période d’enregistrement partiel des électeurs du 9 au 12 décembre prochain.

Le représentant a rappelé « à ceux qui essaient de se mêler de ce processus », qu’il s’agit d’une affaire interne qui relève exclusivement de la souveraineté nationale.  Si accompagnement il y a, il ne doit pas donner droit à des interférences caractérisées, a-t-il prévenu.  Il a rappelé que le Président avait maintes fois assuré qu’il ne se représenterait pas en 2020, et noté que des leaders politiques de l’opposition qui avaient fui sont rentrés.  En outre, plus de 2 000 prisonniers « jeunes casseurs » ont été libérés au début de l’année.  Les citoyens jouissent de leurs droits politiques dans la tranquillité sur tout le territoire et tous se sentent en sécurité, a aussi affirmé le délégué avant de parler du plan de sécurisation du processus électoral et du plan de formation en cours d’exécution.

En matière de sécurité collective, le Burundi continue de lutter contre le terrorisme et a déployé plus de 6 000 hommes sur le terrain, notamment en Somalie et en République centrafricaine, une contribution qui devrait être reconnue et appréciée, a-t-il estimé.  Le plus grand défi de l’heure est la lutte contre la pauvreté, selon le représentant qui a demandé des ressources pour compléter les efforts menés par le pays.  Plus de 79 000 réfugiés sont rentrés volontairement depuis 2017, ce qui est une manifestation évidente du retour à la paix dans le pays, a-t-il déduit malgré « les propos de certains acteurs qui gonflent artificiellement le nombre des réfugiés à l’étranger pour préserver leurs emplois ». 

Reconnaissant, le représentant a dit que le Burundi s’engageait à collaborer avec l’équipe de pays des Nations Unies pour réaliser ses objectifs de développement.  En revanche, la présence du Burundi à l’agenda du Conseil de sécurité est inopportune et viole la Charte des Nations Unies, a-t-il affirmé, estimant que la situation actuelle n’est pas une menace à la paix et la sécurité internationales.  Il a donc réitéré sa demande de retrait de son pays de l’ordre du jour du Conseil, prévenant que « son maintien est en train de créer un mauvais précédent ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les membres africains du Conseil de sécurité demandent une coopération renforcée entre le Conseil et l’Union africaine, y compris sur la Libye

8650e séance – matin
CS/14001

Les membres africains du Conseil de sécurité demandent une coopération renforcée entre le Conseil et l’Union africaine, y compris sur la Libye

À l’occasion du débat sur la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales, débat centré aujourd’hui sur l’Union africaine (UA), les trois pays africains membres non permanents du Conseil de sécurité, les A3 -Côte d’Ivoire, Guinée équatoriale et Afrique du Sud– ont jugé « impératif » que le Conseil de sécurité prenne en compte le rôle et la contribution du Conseil de paix et de sécurité de l’UA dans ses efforts pour résoudre le conflit en Libye, y compris sa requête de nommer un envoyé spécial conjoint.

La coopération entre les deux organisations n’a pas cessé de progresser depuis la signature, en avril 2017, du Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, ont d’abord souligné les deux intervenantes de la séance, en visioconférence depuis Djibouti: l’Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies, Mme Fatima Kyari Mohammed, et la Représentante spéciale du Secrétaire général auprès de l’Union africaine, Mme Hanna Serwaa Tetteh.

Le Cadre commun offre des mécanismes pour résoudre les défis en présence, comme l’échange d’informations, la mise en commun des systèmes d’alerte précoce, les bons offices, la médiation et les visites conjointes.  Ces dernières, très importantes, doivent se systématiser car elles permettent des analyses conjointes de la situation, a plaidé la Représentante spéciale .  La République dominicaine a d’ailleurs espéré voir l’adoption d’un protocole sur les modalités des visites conjointes en Afrique.

Détaillant les succès des efforts communs de l’ONU et de l’UA, Mme Mohammed a signalé qu’ils ont permis la signature d’un accord de paix en République centrafricaine, ce qui a entraîné une réduction de la violence.  Au Soudan, ils ont permis une gestion pacifique de la transition et le retrait du pays de la liste des États soutenant le terrorisme.  En Somalie, ils ont permis l’adoption d’une loi électorale avec la mise en place d’un système constitutionnel devant conduire à la tenue d’élections en 2020-2021.

Sur la base de ces succès, il faudrait renforcer la coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), y compris sur la Libye, ont plaidé les A3, déplorant l’aggravation de la situation dans ce pays. En effet le rapport* du Secrétaire général dont était saisi le Conseil affirme que la Libye connaît une escalade de la violence et une augmentation des flux entrants d’armes et de munitions sophistiquées, ce qui fait peser une menace permanente à la paix et la sécurité dans le pays et le Sahel.  De plus, le blocage du processus politique et les conditions de sécurité actuelles ont compromis davantage les possibilités d’organiser des élections, a encore dit le rapport.

Ces défis, et d’autres similaires que l’on retrouve sur le continent africain, justifient que cette coopération soit davantage renforcée et étendue.  Sur la question de la Libye en particulier, « l’UA doit être davantage impliquée et non pas mise à l’écart », a insisté Mme Mohammed, jugeant « impératif d’avoir une approche coordonnée ».

Cette approche a été soutenue par quelques délégations, dont celles de la Fédération de Russie, pour laquelle « le meilleur moyen » de relever les défis liés à la sécurité en Afrique est de s’appuyer sur le principe « des solutions africaines aux problèmes africains ».  Les organisations africaines sont les plus à même de connaître le terrain et ses spécificités, a dit le représentant, estimant que pour autant le Conseil de sécurité ne doit pas totalement se retirer ni laisser les organisations africaines porter le fardeau en la matière.  Du même avis, la Pologne a jugé « de la plus haute importance » de permettre aux deux organisations de faire face aux nouvelles menaces et de s’attaquer aux sources complexes d’instabilité en Afrique.

Un tel partenariat revêt même aujourd’hui une « importance stratégique » pour la France, tandis que l’Allemagne, qui défend fermement le bilatéralisme et le multilatéralisme, a estimé que cette coopération devait même aller au-delà et inclure l’Union européenne.  Celle-ci, qui est « voisine du continent africain », doit être un partenaire actif dans les efforts de paix.

Cette coopération renforcée doit inclure la médiation, la diplomatie préventive, le maintien de la paix et la consolidation de la paix, ont précisé les A3.  Elle doit par ailleurs se baser sur trois principes clefs: la collaboration inclusive et significative, des approches communes, et des mécanismes consultatifs efficaces.

Les membres du Conseil de sécurité ont également discuté du financement des opérations de maintien de la paix décidées par l’UA et autorisées par le Conseil de sécurité.  La Chine a recommandé que l’ONU aide l’UA à mettre en place un mécanisme viable et prévisible de financement de ces opérations qui, à son avis, sont aujourd’hui une « solution efficace » face aux crises du continent.  La France, qui a dit soutenir « pleinement » cette approche, a suggéré de puiser dans les contributions obligatoires.  Elle reste disposée à trouver une solution qui réponde aux besoins opérationnels et fasse consensus au Conseil de sécurité.

Les États-Unis ont aussi plaidé pour un financement « sûr, prévisible et durable » pour de telles opérations à l’avenir.  Ils souhaitent cependant que leurs préoccupations « de longue date » soient prises en compte, notamment l’exigence de transparence et le respect des conditions posées par les résolutions 2320 (2016) et 2378 (2017).  Mais « il reste encore du travail », a observé leur représentante.  Pour le Royaume-Uni en revanche, un tel soutien doit se faire « au cas par cas ». 

De manière générale, cette même délégation a appelé à « faire preuve de franchise quand nous ne sommes pas d’accord » pour voir comment avancer ensemble.  Il faut « des discussions plus franches et plus honnêtes » entre les deux organisations, a renchéri l’Indonésie qui a aussi réclamé un partenariat complété par la communauté internationale « de bonne foi, honnête et sincère », ainsi qu’un meilleur respect des accords conclus dans différentes situations.

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES (S/2019/759)

Déclarations

Mme HANNA SERWAA TETTEH, Représentante spéciale du Secrétaire général auprès de l’Union africaine, a déclaré que la nature des conflits en Afrique étant complexe, aucune organisation à elle seule ne peut prétendre les résoudre toute seule.  Ce qui justifie donc une coopération renforcée entre les Nations Unies, l’Union africaine et les organisations sous-régionales, qui n’a cessé de progresser ces dernières années, est fructueuse: les efforts conjoints ont abouti en République centrafricaine à la conclusion d’un accord de paix qui a permis une réduction significative des violences; au Soudan, ils ont permis l’adoption d’une déclaration constitutionnelle et la signature de l’accord régissant la transition.

Cependant, tout n’est pas réglé et des défis demeurent, justifiant une amélioration de cette coopération.  Parmi les défis à relever sur le continent, Mme Tetteh a cité la persistance de la discrimination, la mauvaise gouvernance et la mauvaise gestion des institutions, la corruption ou encore les effets des changements climatiques.  Entre tous les pays touchés par ces défis, le Soudan du Sud inquiète particulièrement, comme ont pu le constater les membres du Conseil de sécurité qui se sont rendus sur place, a-t-elle dit.  Dans ce pays en effet les progrès sont lents dans la mise en œuvre de l’accord de paix, a précisé Mme Tetteh en parlant notamment des retards pris dans la formation d’un gouvernement.  La date butoir du 12 novembre pour sa mise en place doit être maintenue selon elle, au risque de voir la situation s’aggraver à nouveau.

S’agissant de la Somalie, elle a également souhaité que les réformes se poursuivent, notamment par l’adoption d’une loi électorale et la mise en place d’un système constitutionnel, et ce, avant décembre 2020.  La situation en Libye aussi reste préoccupante pour la communauté internationale, dans la mesure où environ 255 000 personnes se trouvent dans les zones impactées par le conflit, dont des migrants.  De plus, a encore relevé Mme Tetteh, les membres du Conseil de sécurité ont entendu les préoccupations quant à la violation de l’embargo sur les armes qui détériore gravement la situation sécuritaire, avec des conséquences au Sahel.

Poursuivant son intervention, elle a estimé que le Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, signé en avril 2017, offre des mécanismes pour résoudre ces défis, notamment avec l’échange d’informations, la mise en commun des systèmes d’alerte précoce, le recours des bons offices, la médiation et les visites conjointes.  Ces dernières sont importantes et elles doivent se systématiser, car elles permettent des analyses conjointes de la situation, a plaidé la Représentante spéciale.

Elle a ensuite reconnu que la question du financement des opérations de paix en Afrique reste un défi à relever.  Pour cette raison, elle s’est félicitée que le Fonds pour la paix de l’Union africaine soit actuellement doté de 131 millions de dollars.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, Observatrice permanente de l’Union africaine (UA) auprès des Nations Unies, a fait valoir que depuis la signature du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, en 2017, les efforts communs sont devenus plus fréquents.  Elle a souligné les progrès engagés ainsi que les visites de terrain conjointes dont la plus récente dans la Corne de l’Afrique qui avait pour thème « femmes, paix et sécurité ».  En République centrafricaine, les efforts conjoints ont permis la signature d’un accord de paix et de réconciliation, a-t-elle rappelé en signalant qu’une visite conjointe avait pu être effectuée, au début du mois, sur place.

De même, les efforts ont contribué à des progrès au Soudan mais le retrait du Soudan de la liste des États parrainant le terrorisme est absolument essentiel pour le relèvement du pays, a-t-elle dit.  Parlant ensuite du Soudan du Sud, Mme Mohammed a indiqué que les deux organisations essaient de soutenir les deux parties et de parvenir à des élections à la fin de la période de transition, en insistant sur la mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  En Somalie, l’Union africaine et les Nations Unies ont repris leurs efforts pour permettre la tenue d’élections en 2020-2021.  Quant à la Libye, la situation demeure inquiétante, a mis en garde Mme Mohammed en expliquant que l’Union africaine insiste sur la nécessité d’être davantage impliquée et non pas mise à l’écart.  Elle a jugé impératif d’avoir une approche « coordonnée » dans ce pays.

Enfin au Sahel, les partenaires doivent continuer d’appuyer la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali  (MINUSMA) et d’apporter ressources et finances au G5 Sahel, a-t-elle prôné car, malgré les efforts concertés, la situation reste marquée par des graves et complexes atteintes à la paix et la sécurité dans la région.  Elle a cité notamment la prolifération des armes, la propagation du crime organisé et transfrontalier ainsi que les affrontements violents qui y ont lieu et qui sont exacerbés par les effets des changements climatiques dans la région.

Pour l’Union africaine, il est d’ailleurs impératif de renforcer en général les efforts régionaux face aux effets des changements climatiques, de « l’insécurité climatique », a-t-elle insisté, faisant valoir que ces problèmes exacerbent les tensions intercommunautaires et les affrontements de plus en plus fréquents sur le continent.  L’Union africaine a déjà déployé d’importants efforts mais il faut aussi mettre l’accent sur la prévention.  La coopération entre les deux organisations doit être encore renforcée en matière de maintien de la paix et de redressement après conflit, dans la gestion et la planification, ainsi que dans le financement des missions et la reddition de la justice.

Pour l’UA, le partenariat avec les Nations Unies doit s’appuyer sur le respect mutuel et l’analyse commune.  Le fait de ne pas pouvoir intervenir ensemble est une frustration pour les deux organisations, a estimé la représentante.  Mme Mohammed a regretté que l’évaluation conjointe des missions comme la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) constitue encore un point de friction, avec des désaccords entre les deux organisations.  La position des Nations Unies prend souvent le dessus, a-t-elle regretté.  On peut avoir des divergences mais la perception selon laquelle la positon de l’Union africaine ne compte pas sape la confiance, comme c’est notamment le cas dans la crise libyenne, a-t-elle illustré.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE, (France) a déclaré que son gouvernement soutenait le partenariat entre l’ONU, l’UA et les organisations sous-régionales africaines, qui revêt aujourd’hui une « importance stratégique » pour la prévention et la résolution des crises en Afrique.  Il a aussi soutenu le développement de la coopération trilatérale entre l’ONU, l’UA et l’Union européenne (UE).  Ce partenariat a fait ses preuves à plusieurs reprises, notamment à Madagascar, en République démocratique du Congo (RDC), au Soudan, en Éthiopie ou encore en République centrafricaine.  Au Sahel, l’action conjointe entre l’ONU et l’UA est « indispensable » pour la mise en œuvre complète de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, a rappelé le représentant en expliquant, dans ce cadre, avoir proposé la mise en œuvre d’un nouveau partenariat pour la sécurité et la stabilité au Sahel, une initiative franco-allemande, lancée cet été lors du Sommet du G7 de Biarritz.

Il a ajouté que son pays juge « utile et nécessaire » que le travail engagé par les Nations Unies et l’Union africaine puisse se poursuivre pour faire avancer les problématiques clefs pour le développement des organisations africaines de paix.  Il a pensé aux cadres budgétaires et financiers, aux cadres de conformité en matière de droits de l’homme ou encore aux cadres de présentation de rapports. Pour cette raison, la France soutient pleinement le développement et le financement durable et prévisible d’opérations de paix de l’UA et de l’ONU, y compris en ayant recours aux contributions obligatoires.  La France reste à l’écoute de ses partenaires de l’UA et du A3 pour trouver une solution qui réponde aux besoins opérationnels et fasse consensus au Conseil de sécurité, a conclu son représentant.

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a déclaré qu’en tant que membre de l’Union européenne (UE), l’Allemagne estime que la coopération entre les Nations Unies, l’Union africaine et les organisations sous-régionales doit s’étendre au-delà.  En tant que fervent défenseur du bilatéralisme et du multilatéralisme, sa délégation estime que l’Union européenne peut être invitée à cette coopération, en tant que partenaire déjà actif dans les efforts de paix et en tant que voisin du continent africain.  Cette coopération tri ou quadri partite doit se faire à tous les niveaux, tant politique, tactique que stratégique, a recommandé le représentant. Par ailleurs, la délégation a invité les pays en situation de conflit à saisir la Commission de consolidation de la paix.

Pour Mme JOANNA WRONECKA (Pologne), l’ONU, l’UA ainsi que les communautés économiques régionales et les mécanismes régionaux doivent élargir leur coopération à tous les niveaux et sur un large éventail de questions comme le développement, l’élaboration de politiques et les opérations de réponse aux crises.  Une coopération étroite ne signifie cependant pas qu’il faut laisser la responsabilité aux organisations régionales et sous-régionales, a-t-elle précisé.  L’ONU, a-t-elle recommandé, doit contribuer à résoudre les conflits de manière complète en utilisant tous les instruments à sa disposition comme la prévention, le règlement de différend, le maintien de la paix et le relèvement après conflit. 

La représentante a en outre estimé essentiel l’appui constant de l’ONU aux efforts de l’UA en matière de capacité, d’outils et de moyens nécessaires pour une action efficace.  Il est de la plus haute importance de permettre aux deux organisations de faire face aux nouvelles menaces et de s’attaquer aux sources complexes d’instabilité en Afrique, a encore déclaré Mme Wronecka qui a considéré les interactions régulières entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA comme un instrument important pour élargir leur partenariat.  Elle a souligné l’importance du Bureau des Nations Unies auprès de l’Union africaine en offrant son soutien et en assurant une action concertée entre les deux Conseils.

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a déclaré avoir vu de ses propres yeux, lors de sa visite au Soudan du Sud, l’implication et la capacité de l’Union africaine (UA) à résoudre les crises en Afrique, continent qui concentre à lui seul près de 80% du budget consacré au maintien de la paix.  Mais selon la représentante, l’UA pourrait faire davantage et apporter son soutien à la paix, notamment au Burundi ou au Cameroun, en invitant les gouvernements de ces pays au dialogue.  Les États-Unis estiment d’ailleurs que l’ONU et l’UA devraient envisager une visite conjointe au Cameroun.  Reconnaissant ensuite que la situation en Libye impacte de nombreux autres pays africains, Mme Craft a salué dans ce contexte l’appui apporté par l’UA à l’Envoyé spécial du Secrétaire général.  Mais elle s’est dit très préoccupée par la violation de l’embargo sur les armes en Libye et a enjoint les États responsables à cesser ces livraisons d’armes.

Les États-Unis soutiennent les efforts de l’ONU et de l’UA pour assurer un financement prévisible, durable et fiable des opérations futures en Afrique, a poursuivi Mme Craft.  Mais ils souhaitent que les préoccupations qu’ils expriment « de longue date » soient pris en compte, notamment en ce qui concerne la transparence financière et les mesures commerciales, le partage adéquat du fardeau et le respect des normes de l’ONU pour la conduite des opérations de maintien de la paix.  Ils souhaitent également que les conditions posées par les résolutions 2320 (2016) et 2378 (2017) soient d’emblée respectées.  « Il reste encore du travail », a conclu la représentante.

M DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a insisté sur l’importance de maintenir la communication entre l’UA et l’ONU, arguant qu’un partenariat entre les deux organisations est essentiel pour faire face aux défis complexes du continent.  Il a appelé à des « discussions plus franches et plus honnêtes » entre les deux et à un meilleur respect des accords conclus dans différentes situations en réfléchissant à des opérations hybrides entre les deux organisations.  Il a insisté sur le rôle des « A3 » [les trois pays africains membres élus du Conseil de sécurité] pour apporter une perspective africaine au Conseil.  Le développement des capacités est une condition sine qua non si l’on veut une paix durable en Afrique, a fait valoir le représentant en plaidant pour que l’UA et l’ONU travaillent à davantage de collaboration et de synergies.  Il faut pour cela une meilleure coordination entre les deux organisations, d’une part, et avec les institutions financières internationales, d’autre part.

L’Indonésie appuie le Fonds pour la consolidation de la paix et soutient le travail de la Commission de consolidation de la paix des Nations Unies, qui se penche sur des causes profondes des conflits et s’emploie à les prévenir par le biais du développement.  Mais ce partenariat entre les Nations Unies et l’Union africaine doit être complété par la communauté internationale, « de bonne foi, honnête et sincère », a demandé le représentant. Il a rappelé que, pour sa part, l’Indonésie compte actuellement 3 000 personnels déployés dont 128 femmes dans les missions de paix en Afrique.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que « le meilleur moyen » de relever les défis liés à la sécurité en Afrique au titre du Chapitre VIII de la Charte est de s’appuyer sur le principe « des solutions africaines aux problèmes africains ». Les organisations africaines sont les plus à même de connaître le terrain et ses spécificités, a dit le représentant.  Dans le même temps, la délégation russe reste d’avis que le Conseil de sécurité ne doit pas totalement se retirer ni laisser les organisations africaines porter le fardeau en la matière.  Pour ce qui est du financement des opérations de maintien de la paix en Afrique, la délégation reste disposée à discuter et à faciliter les résolutions sur le sujet.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a appuyé le soutien des Nations Unies aux opérations de l’UA au cas par cas, jugeant également que l’engagement de l’UA à financer 25% de ses opérations est un symbole important.  Il a insisté sur l’importance des normes concernant le cadre et en matière de conduite et de discipline, regrettant que la création de postes relatifs à ces questions au sein de l’AMISOM n’ait pas été appuyée par les membres du Groupe des États d’Afrique à la Cinquième Commission.  Il est essentiel, de son point de vue, de continuer de renforcer le partenariat entre l’UA et les organisations sous-régionales, notamment pour mettre en œuvre les accords au Soudan du Sud, appelant à cet égard à respecter le délai du 12 novembre.  Les Nations Unies –« et l’Union africaine aussi sans doute »- ont exprimé leur engagement à mettre en œuvre tout ce qui est nécessaire dans la poursuite des tâches relatives à cet accord, « tout en restant déterminés à débusquer les fauteurs de troubles », a-t-il dit. 

Concernant la Libye, il s’est dit « très inquiet », estimant très important que l’Union africaine soit représentée en tant qu’acteur clef dans le processus de Berlin.  Une coopération plus étroite entre Union africaine, Nations Unies et organisations régionales devrait aussi permettre de déployer une action plus rapide et plus efficace pour empêcher les crises à basse intensité de dégénérer en conflit: en ce sens, l’initiative de l’UA « Faire taire les armes d’ici à 2020 » est essentielle.  Enfin, a conseillé le représentant, il faut « faire preuve de franchise quand nous ne sommes pas d’accord » pour voir comment avancer ensemble.  Il a conclu en souhaitant que les canaux de communication restent ouverts.

M. YAO SHAOJUN (Chine) a estimé que la relation entre les deux organisations est particulièrement fructueuse sur les questions de paix.  Elle a également salué le fait que des programmes de développement se mettent en place, améliorant la paix et la sécurité sur le continent.  Mais il faut faire davantage, a plaidé le représentant souhaitant que cette coopération soit renforcée, non affaiblie.  Il a appelé la communauté internationale à soutenir la recherche de solutions africaines aux problèmes africains en s’appuyant sur la connaissance qu’ont les acteurs régionaux des situations locales.  Les opérations de paix de l’Union africaine sont aujourd’hui une solution efficace face aux crises du continent et complètent les opérations des Nations Unies, aussi l’ONU devrait-elle aider l’UA à mettre en place un mécanisme viable et prévisible de financement de ces opérations, a estimé la Chine.  Le représentant a aussi demandé que la coopération entre les deux organisations s’améliore sur les questions de développement, afin de mieux prévenir les causes profondes des conflits.

Mme SANDRA RODRÍGUEZ (Pérou) a vu dans le Plan d’action de l’Union africaine (UA) pour « faire taire les armes » d’ici à 2020 un exemple d’engagement et de responsabilité des pays africains pour construire un continent exempt de conflits, ce qui implique en premier lieu de faire face à leurs causes profondes, comme la pauvreté, les inégalités, les changements climatiques et la faiblesse institutionnelle.  Dans ce contexte, les synergies et la complémentarité entre l’ONU et l’UA sont évidentes, a dit la représentante. 

Se félicitant de la constitution du Réseau de femmes africaines dans la prévention et la médiation des conflits, la représentante a estimé que des mécanismes pourraient être mis en place pour en tirer parti dans les opérations de maintien de la paix, en particulier dans les pays qui organisent des élections l’année prochaine.  En outre, elle a jugé possible d’augmenter la coopération existante à partir des expériences de terrain dans la lutte contre le terrorisme, soulignant que des initiatives novatrices comme la Force multinationale mixte contre Boko Haram ou la Force conjointe du G5 Sahel méritent une meilleure attention.

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) a salué les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Cadre commun de l’ONU et de l’UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité tout en s’inquiétant des défis posés par l’extrémisme violent, le terrorisme, la criminalité organisée, la corruption, l’impunité, les effets adverses des changements climatiques, qui menacent la stabilité politique et socioéconomique dans une grande partie de l’Afrique.  Cette situation exige un soutien plus solide et des initiatives plus proactives et mieux coordonnées de prévention, a-t-il ajouté.  Il est nécessaire d’investir dans l’éducation, la création d’emplois et des initiatives bénéficiant en particulier aux femmes et aux jeunes, qui jouent un rôle comme médiateurs et promoteurs de la paix. 

S’agissant du renforcement de la coordination entre l’ONU et les organismes régionaux, le représentant a espéré voir l’adoption d’un protocole sur les modalités des visites conjointes en Afrique.  Il s’est félicité de l’approbation de la Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et a souhaité l’adoption de procédures visant à augmenter la prévisibilité, la durabilité et la flexibilité du financement des opérations de maintien de la paix ou des forces conjointes dirigées par l’UA et autorisées par le Conseil.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a jugé que le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine (UA) a fait des progrès considérables, grâce à une stratégie visant à relever les défis complexes à la paix et la sécurité en Afrique, et qu’il constitue un exemple à suivre en matière de coopération régionale.  D’autant que l’Afrique est omniprésente dans les activités de l’ONU et de ses fonds et programmes.  Les opérations de paix sont les vitrines les plus importantes de cette coopération, a rappelé le représentant.  Sur les 14 opérations de paix en Afrique, sept sont celles de l’UA.  Il a appelé à consolider les acquis pour que ces opérations soient plus efficaces et mieux équipées.

Le délégué s’est félicité de l’engagement de l’UA à couvrir 25% des coûts de ces opérations de manière permanente, saluant le fait que le Fonds pour la consolidation de la paix dispose de 124 millions de dollars, et a appelé de ses vœux à une résolution du Conseil de sécurité qui autoriserait à financer les opérations de paix de l’UA.  Alors qu’une aube nouvelle se lève sur le Soudan, et que la réconciliation est aboutie entre l’Éthiopie et l’Érythrée, il est essentiel que le Conseil poursuive son appui au partenariat entre les deux organisations, a-t-il conclu.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a souligné l’intérêt des approches communes entre l’Union africaine (UA) et l’ONU dans le contexte de la prévention des conflits et des opérations de maintien de la paix, que ce soit en République centrafricaine ou en Somalie avec l’AMISOM, mais aussi dans la consolidation de l’état de droit.  Cependant ce partenariat crucial doit être renforcé davantage a-t-elle estimé, en appelant à financer adéquatement « l’impressionnante » architecture de paix et de sécurité façonnée par l’UA, sur la base d’une revitalisation du Fonds pour la consolidation de la paix.  « Les opérations de paix de l’Union africaine doivent pouvoir disposer d’un financement plus prévisible, plus durable et plus souple », a-t-elle insisté.  Enfin, la collaboration entre les deux organisations doit aussi être renforcée au niveau thématique, qu’il s’agisse de la jeunesse, des femmes, ou du lien entre climat et sécurité, ainsi qu’au niveau opérationnel avec une meilleure coordination des agendas des deux conseils.  Leur collaboration sera d’autant plus importante lors des élections prévues en 2020 dans 14 pays africains, a relevé la représentante.

Mme NOSIVIWE NOLUTHANDO MAPISA-NQAKULA, Ministre de la défense et des vétérans de l’Afrique du Sud, s’exprimant au nom des trois pays africains membres non permanents du Conseil de sécurité (Côte d’Ivoire, Guinée équatoriale et Afrique du Sud), les A3, a assuré que l’Union africaine et les organisations et communautés économiques sous-régionales du continent étaient toutes engagées à la résolution des conflits en Afrique.  L’Union africaine a ainsi développé un cadre de paix et de sécurité pour s’assurer une paix durable en Afrique.  Mais l’engagement actif de l’UA et de ses partenaires internationaux a également contribué à la résolution de conflits, notamment au Soudan, en Somalie, et en République centrafricaine, a cité la représentante, ajoutant que beaucoup a été fait depuis avril 2017 avec la signature et les effets positifs de Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité.

Les A3 reconnaissent et saluent donc ces efforts et progrès.  Ils cherchent même à les renforcer par un partenariat encore plus stratégique, incluant la médiation, la diplomatie préventive, le maintien de la paix et la consolidation de la paix.  Les principes qui doivent guider cette coopération sont les suivants: une collaboration inclusive et significative, des approches communes, et des mécanismes consultatifs efficaces.  Pour les A3, l’un des domaines où cette coopération doit continuer d’être renforcée est celle qui existe entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, d’autant que si les deux organes ont des vues communes sur certains sujets comme la situation au Soudan, il y a encore des divergences, en particulier sur la Libye.

Sur ce dernier point, les A3 estiment qu’il est « impératif » que le Conseil de sécurité prenne en compte le rôle et la contribution du Conseil de paix et de sécurité de l’UA dans ses efforts pour résoudre le conflit en Libye, y compris sa requête de nommer un envoyé spécial conjoint pour la Libye.  Il est de la même manière « impératif » que le Conseil de sécurité continue d’analyser l’efficacité du partenariat entre les deux conseils, sur la base de l’expérience et des conclusions de la treizième réunion consultative conjointe, a conclu la Ministre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: les délégations débattent de la liste des normes impératives du droit international général dressée par la CDI dans son rapport

Soixante-quatorzième session,
25e séance – après-midi
AG/J/3607

Sixième Commission: les délégations débattent de la liste des normes impératives du droit international général dressée par la CDI dans son rapport

« Peu utile », « restrictive », « trop condensée », les délégations n’ont pas ménagé leurs critiques, cet après-midi, devant la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, à l’endroit de la liste non exhaustive des normes impératives du droit international général (jus cogens), contenue dans le rapport de la Commission du droit international (CDI), soumis à l’examen de la Commission depuis cette semaine.  Elles ont été nombreuses aussi à proposer des pistes en vue d’amender cette liste.  

Selon cette liste, qui figure en annexe des projets de conclusion sur le sujet, les normes impératives sont: l’interdiction de l’agression; l’interdiction du génocide; l’interdiction des crimes contre l’humanité; les règles fondamentales du droit international humanitaire; l’interdiction de la discrimination raciale et de l’apartheid; l’interdiction de l’esclavage; l’interdiction de la torture et le droit à l’autodétermination. 

Ouvrant le débat, le délégué de l’Allemagne a indiqué que son pays n’est pas convaincu par la nécessité d’une telle liste, tandis que son homologue de la Fédération de Russie a jugé « inopportune » son inclusion en tant qu’annexe.  Cette liste peut avoir pour conséquence d’affaiblir les travaux de la CDI, a prévenu la déléguée russe. 

Si elle a souligné « l’utilité » de cette liste, la déléguée suisse a regretté son « caractère restrictif » et encouragé la Commission à analyser la pratique des États, dont celle de la Suisse, pour l’élargir.  Elle l’a appelée à considérer les principes suivants comme faisant partie du jus cogens: le principe d’égalité des États, l’interdiction de la piraterie, l’interdiction du châtiment collectif, l’interdiction de l’inégalité de traitement, ainsi que le principe du caractère personnel et individuel de la responsabilité pénale.

L’interdiction de l’agression devrait être remplacée par une formulation alignée sur l’Article 2 de la Charte des Nations Unies, a, de son côté, déclaré la déléguée croate, à savoir l’interdiction « de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ». 

Si elle a souhaité l’inclusion de « l’interdiction du terrorisme », la déléguée croate a, en revanche, plaidé pour que le droit à l’autodétermination soit exclu de la liste, le contenu de ce droit et ses bénéficiaires n’étant en effet pas clairement établis par le droit international. 

Dans cette veine, la déléguée de la Fédération de Russie a déclaré que la CDI n’avait pas suffisamment étudié les normes incluses dans la liste.  De son côté, la déléguée du Portugal a jugé cette liste trop « condensée », certaines normes de jus cogens largement reconnues n’y figurant pas.  Une référence aux normes environnementales impératives, comme l’obligation de protéger l’environnement, aurait été appréciée, a déclaré la déléguée du Portugal. 

Une note plus approbatrice est venue de la délégation de Cuba, qui a salué la tentative de parvenir à un document qui renforce le cadre juridique établi par la Charte et d’autres normes du droit international, dans un contexte actuel marqué par la transformation par certains États des actes unilatéraux contraires à la Charte et au droit international en « pratique légitime ». 

De manière plus générale, le représentant du Mexique a appelé à renouveler le débat sur les facultés du Conseil de sécurité en matière de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité internationales, en particulier au regard de ces normes impératives qui imposent l’interdiction des crimes contre l’humanité et autres atrocités.  La question de la compatibilité des résolutions du Conseil de sécurité avec le jus cogens est purement « théorique », a réagi la représentante russe.

Enfin, plusieurs délégations, dont celles d’El Salvador, ont, une nouvelle fois, questionné l’existence d’un jus cogens régional.  La représentante de la Fédération de Russie s’est, à ce titre, félicitée que le jus cogens régional ne fasse pas l’objet d’un projet de conclusion dans le rapport de la CDI.

La Sixième Commission reprendra ses travaux demain, jeudi 31 octobre, à 10 heures. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE ET ONZIÈME SESSION - A/74/10

Suite des déclarations sur les chapitres I à V et XI du rapport

M. EICK (Allemagne) a résolument appuyé la recommandation de l’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, de préférence par le biais d’une convention diplomatique.  Ce projet ne contient pas d’obligations « trop lourdes » ou « inusuelles » pour les États et demeure dans le cadre « familier » de la coopération pénale internationale. 

Le délégué a ensuite pris note de la liste non exhaustive des normes impératives du droit international général (jus cogens), tout en ajoutant qu’il n’est pas convaincu par « la nécessité et l’utilité » d’une telle liste.  Il a commenté le projet de conclusion 7 qui dispose que « l’acceptation et la reconnaissance par une très large majorité d’États sont requises aux fins de détermination d’une norme en tant que norme impérative du droit international général (jus cogens) ».  Il a souhaité que l’expression « très large majorité d’États » soit comprise à la lumière de la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) comme « majorité écrasante ».  Il a par ailleurs partagé les doutes de certaines délégations par rapport à la procédure suivie par la CDI sur ce point. 

Enfin, le délégué a estimé, s’agissant de l’inclusion de nouveaux points au programme de travail à long terme de la CDI, que la juridiction pénale universelle est digne d’intérêt. 

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) s’est félicité que le travail de la CDI sur la question des crimes contre l’humanité se soit matérialisé par des projets d’article qui pourraient éventuellement être adoptés sous forme de convention.  Pour le Mexique, l’obligation primordiale de réprimer conformément au droit ce type de crimes incombe toujours aux États.  En cas d’incapacité ou de manque de volonté pour assumer cette responsabilité, il existe des organismes internationaux ayant pour mandat d’éviter l’impunité, comme la Cour pénale internationale (CPI). 

Passant aux normes impératives du droit international général (jus cogens), le délégué a rappelé que, par nature, seules des normes de même nature et postérieures peuvent déroger aux normes du jus cogens.  « Aucune disposition du droit conventionnel, et pas même la Charte des Nations Unies, ni les organes qui en émanent, ne peuvent déroger à ce corps de normes. »  Selon le délégué, les réflexions de la CDI permettent de renouveler le débat sur les facultés du Conseil de sécurité en matière de maintien et de consolidation de la paix et de la sécurité internationales, en particulier au regard des normes impératives qui imposent l’interdiction des crimes contre l’humanité et autres atrocités comme le génocide, les crimes de guerre et le nettoyage ethnique, ainsi que les limites imposées à l’usage de la force. 

S’agissant des autres décisions et conclusions de la Commission, M. Arrocha Olabuenaga a considéré que les projets de clause type sur l’application provisoire des traités peuvent être d’une grande utilité pour négocier des traités.  S’il s’est félicité de la décision de la Commission de former un groupe d’étude sur le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, il l’a aussi appelée à intégrer dans son programme de travail la question relative à la juridiction pénale universelle.

M. MANUEL DE JESÚS PIREZ PÉREZ (Cuba) a salué le projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, estimant qu’il devrait jouer un rôle essentiel dans la prévention de l’impunité.  Le projet devrait intégrer clairement le principe fondamental suivant lequel la responsabilité première de prévenir et punir les graves crimes internationaux commis dans une juridiction incombe en premier lieu à l’État concerné.  En vertu de l’un des principes fondamentaux du droit pénal international, les États ont la prérogative souveraine d’exercer leur compétence devant les tribunaux nationaux sur les crimes contre l’humanité commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants.  Par ailleurs, a continué le représentant, une convention internationale sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité devrait éviter les conflits avec les instruments internationaux déjà adoptés et veiller à la cohérence avec les règles et les institutions de droit pénal international existantes.  En termes de cadres théorique et conceptuel, Cuba aimerait que la CDI évalue l’opportunité de classer l’interdiction de crimes contre l’humanité comme norme impérative du droit international général.

Au sujet des normes du jus cogens, le représentant a fait observer que les 23 projets de conclusion et l’annexe pourraient devenir un guide, avant tout méthodologique, permettant aux États et aux organisations internationales d’identifier l’émergence de normes impératives du droit international et leurs conséquences juridiques.  Les projets de conclusion ne devraient pas être absolus ou restrictifs dans leur contenu et leur portée, a précisé le représentant.  Il a également salué la tentative de parvenir à un document qui renforce le cadre juridique établi par la Charte et d’autres normes du droit international, en particulier dans le contexte actuel qui veut que certains États transforment des actes unilatéraux contraires à la Charte et au droit international en pratique « légitime ». 

Pour ce qui a trait aux autres sujets, le représentant cubain a estimé que la question de l’élévation du niveau de la mer était « de la plus haute importance » pour son pays, vu sa situation géographique d’archipel. 

Mme PACAS (El Salvador), traitant du thème des crimes contre l’humanité, a particulièrement apprécié, dans les commentaires relatifs aux projets d’article, la référence au non-refoulement d’une personne, dans la mesure où cela permet d’éviter « un crime contre l’humanité » à son encontre.  De plus, la déléguée a souhaité que le terme « disparition forcée » d’individus soit interprété de manière plus large, sur la base d’autres instruments internationaux telle la Convention internationale pour la protection de toutes personnes contre les disparitions forcées, ce qui faciliterait l’harmonisation des législations nationales comme celle du Salvador.  Le délégué a réitéré le soutien de son pays à une convention pour la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.

Sur la question des normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme Pacas a rappelé l’importance de prendre en compte les commentaires et pratiques législatives, judiciaires et exécutives qui informent les États et les organisations internationales, y compris régionales.  Quant à la preuve de l’acceptation et de la reconnaissance des normes du jus cogens, la déléguée a suggéré d’ajouter la mention des résolutions approuvées par une organisation régionale.  Il n’est pas possible de déroger à de telles normes en raison de leur acceptation par la communauté internationale dans son ensemble.  Enfin, la déléguée a considéré que la notion de jus cogens régional risquait de créer une ambiguïté sur la nature universelle de ces normes.

Au nombre des autres sujets soumis à la CDI, elle a réaffirmé son appui à celui de la réparation due aux personnes victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire.

M. BORUT MAHNIČ, Directeur du Département de droit international du Ministère des affaires étrangères de la Slovénie, s’est prononcé en faveur d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité afin de combler les lacunes de la codification existante, tout en saluant un certain nombre de modifications du projet d’articles à l’issue de consultations avec les États, des organisations internationales et des organisations non gouvernementales.  À l’instar des pays nordiques, il a trouvé la définition de « genre » obsolète.  Il a aussi appuyé l’accélération des procédures d’extradition comme le propose le Rapporteur spécial. 

M. Mahnič a apprécié le nouveau paragraphe 9 de l’article 14 dans lequel est envisagée la possibilité de conclure des accords ou arrangements avec des mécanismes internationaux établis par l’ONU ou par d’autres organisations internationales et ayant pour mandat de recueillir des éléments de preuve concernant les crimes contre l’humanité; il a jugé peu convaincante l’idée d’exclure les cours et tribunaux internationaux de ce nouveau paragraphe.  La Slovénie étant parmi les initiateurs de l’Initiative « Mutual Legal Assistance (MLA) », son représentant a expliqué que MLA  est désormais appuyé par 68 États, qui poursuivent leurs efforts concertés tendant à l’adoption d’un cadre moderne d’entraide judiciaire et d’extradition dans les cas des crimes les plus graves au regard du droit international. 

L’ordre du jour de la CDI est surchargé, a estimé Mme ELENA A. MELIKBEKYAN (Fédération de Russie).  L’objectif de la Commission n’est pas de trancher toutes les questions mais de faire en sorte que son programme de travail soit basé sur les demandes des États.  Il y a neuf points à son programme, a-t-elle dit, en demandant « une pause ».  Elle a aussi appelé la CDI à conduire ses travaux de manière impartiale. 

À son avis, il faut prendre le temps d’examiner soigneusement l’idée d’élaborer une convention internationale sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité à partir du projet d’articles préparé par la CDI.  La déléguée russe a indiqué son désaccord avec le préambule du projet d’articles, selon lequel les crimes contre l’humanité sont une menace à la paix et à la sécurité internationales et constituent une norme impérative du droit international général (jus cogens).  L’objectif de la convention doit être plus clair, à savoir le renforcement de la coopération des États sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Elle a aussi regretté la politisation des travaux de la Cour pénale internationale (CPI), qui a « discrédité » la justice pénale internationale. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme Melikberyan s’est félicité que le jus cogens régional ne fasse pas l’objet d’un projet de conclusion.  Elle a indiqué que la question de la compatibilité des résolutions du Conseil de sécurité avec le jus cogens est purement « théorique ».  Elle a jugé peu « opportune » l’inclusion de la liste non exhaustive en annexe du projet de conclusion 23.  Les normes n’ont pas été identifiées et étudiées par la conclusion, a-t-elle regretté.  Cette liste peut avoir pour conséquence d’affaiblir les travaux de la CDI, a-t-elle prévenu, en ajoutant qu’il fallait partir de la Charte des Nations Unies pour identifier de telles normes plutôt que d’en dresser une liste. 

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens) Mme GORDANA VIDOVIC MESAREK (Croatie) a souhaité la reformulation du projet de conclusion 14 paragraphe 3, selon lequel la règle de l’objecteur persistant ne s’applique pas aux normes impératives du droit international général (jus cogens).  Elle a appuyé l’idée d’une liste non exhaustive de ces normes, tout en souhaitant des modifications de cette liste contenue en annexe du rapport.  L’interdiction de l’agression devrait être remplacée par une formulation alignée sur l’Article 2 de la Charte, à savoir l’interdiction de « la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ».  Elle a souhaité que le droit à l’autodétermination soit exclu de cette liste, dans la mesure où le contenu de ce droit et ses bénéficiaires ne sont pas clairement établis par le droit international.  Elle a en revanche souhaité l’inclusion de « l’interdiction du terrorisme ».

Mme SUSANA VAZ PATTO (Portugal) a partagé les préoccupations de plusieurs délégations au sujet du rôle de la Sixième Commission dans la codification du droit international, estimant qu’elle devait faire davantage d’efforts pour considérer favorablement, comme principe, les recommandations de la CDI, sans quoi les États intéressés se tourneront vers d’autres cadres pour négocier et adopter des conventions internationales.  En outre, même s’il est souhaitable, le consensus paralyse souvent l’action et bloque les résultats attendus à une large majorité, a regretté la représentante.

En passant à l’adoption, en seconde lecture, des projets d’articles sur les crimes contre l’humanité, Mme Vaz Patto a salué une grande avancée, confirmant sa conviction selon laquelle il est possible d’élaborer un cadre juridique international contraignant.  Elle a soutenu la recommandation d’élaborer une convention internationale sur la base du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Cela dit, elle a émis quelques réserves sur la définition de « crimes contre l’humanité », qu’elle aurait préféré voir alignée sur celle du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), et a regretté que l’approche du « genre » comme construction sociale ne figure que dans les commentaires et n’ait pas été intégrée dans le projet d’article 2. 

Mme Vaz Patto a estimé que la discussion sur les normes impératives du droit international général(jus cogens) contribue à maintenir la stabilité du système juridique international et que davantage de clarté est essentiel pour aider les États à mieux identifier ces normes et à les respecter.  Selon elle, la liste de normes du rapport semble trop condensée et certaines normes de jus cogens largement reconnues n’y figurent pas.  Elle aurait apprécié une référence aux normes environnementales impératives, comme l’obligation de protéger l’environnement.

Mme BUHLER (Suisse) a résolument appuyé la recommandation de l’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Une telle convention permettrait de combler une lacune dans le cadre juridique existant et de participer à la lutte contre l’impunité.  Elle a souhaité qu’une telle convention n’affaiblisse pas les obligations existantes du droit international et ne contredise pas une éventuelle convention générale sur l’entraide judiciaire dans la poursuite des crimes internationaux. 

La déléguée suisse a, en outre, souligné l’utilité d’une liste illustrative des normes impératives du droit international général (jus cogens), tout en regrettant son « caractère restrictif ».  La Suisse considère les principes suivants comme faisant partie du jus cogens: le principe d’égalité des États, l’interdiction de la piraterie, l’interdiction du châtiment collectif, l’interdiction de l’inégalité de traitement ainsi que le principe du caractère personnel et individuel de la responsabilité pénale.  À cette aune, la déléguée a encouragé la Commission à analyser soigneusement la pratique des États, dont celle de la Suisse pour élargir sa liste. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: viabilité et sécurité des activités spatiales, deux éléments essentiels au service du développement durable et du bien-être de tous

Soixante-quatorzième session,
14e séance – matin
CPSD/703

Quatrième Commission: viabilité et sécurité des activités spatiales, deux éléments essentiels au service du développement durable et du bien-être de tous

La Quatrième Commission (questions de politiques spéciales et décolonisation) a, ce matin, entamé l’examen de la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace, l’occasion pour de nombreuses délégations de brosser un tableau de leurs programmes spatiaux respectifs, mais aussi d’insister sur le potentiel que recèle l’espace pour le développement durable.  Dès lors, il est apparu comme impératif, pour celles-ci, d’assurer la viabilité et la sécurité des activités spatiales à des fins exclusivement pacifiques et au bénéfice de tous.

À l’ouverture du débat, le Président du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) a souligné que le Comité poursuit actuellement l’élaboration du nouvel agenda et du plan de mise en œuvre de « Espace 2030 » dans le but de maximiser les avantages des activités spatiales et de leurs applications pratiques pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

L’idée de l’espace au service du développement durable, mais surtout des économies nationales, a été défendue par de nombreuses délégations ce matin.  Qu’il s’agisse des applications spatiales en matière de télécommunication, de navigation, de gestion des catastrophes naturelles, de météorologie ou encore d’observation de la Terre et de l’imagerie, le quotidien de tous dépend aujourd’hui de l’espace, ont noté les intervenants.  C’est ce qui explique, pour la RPDC, qu’autant de nations se lancent de nos jours à la conquête de l’espace, dans la mesure où l’exploration de l’espace devient de plus en plus partie intégrante de toute économie nationale.

Le monde émergent n’est d’ailleurs pas à la traîne puisque l’Union africaine a décidé de créer une agence spatiale africaine, installée au Caire, alors qu’un groupe arabe a également été créé pour promouvoir la recherche et la coopération régionale dans les activités spatiales, pour ne citer que deux exemples.  Pour donner un ordre d’idée du potentiel spatial en tant que vecteur de la croissance économique et du développement, l’Union européenne a avancé le chiffre de 90 milliards de dollars pour l’économie européenne au cours des 20 premières années d’exploitation de son système Galilée, qui sera pleinement opérationnel en 2020 avec une constellation de 30 satellites.

L’augmentation frappante du nombre d’États membres du COPUOS, qui sont passés de 77 à 92 en quatre ans et celui des organisations observatrices de 34 à 41, est bien la preuve, pour le Président du Comité, de l’intérêt accru pour les discussions en son sein.  Le Comité se penche désormais sur un large éventail de nouveaux sujets, tels que l’exploration et l’innovation spatiales, les activités liées aux petits satellites, la dépollution des débris spatiaux, la gestion du trafic spatial, le régime juridique de la gouvernance de l’espace, mais surtout pour la coopération internationale sur les dossiers spatiaux.

Si toutes ces questions revêtent un intérêt certain pour les délégations, la menace de la militarisation et d’une nouvelle course aux armements dans l’espace est celle qui les préoccupe le plus.  Face aux annonces publiques faites par certains États de vouloir se doter de capacités offensives dans l’espace pour protéger leur sécurité nationale, de nombreuses délégations ont exigé un régime juridiquement contraignant pour l’interdiction de toute forme d’armes dans l’espace et de son utilisation à des fins belliqueuses.  La promotion de mesures internationales de confiance et de transparence et de codes de conduite ou encore d’accords bilatéraux et multilatéraux est certes nécessaire mais cela ne représente que des mesures intermédiaires qui ne sauraient, selon ces délégations, se substituer à un régime juridiquement contraignant.

L’Union européenne ne semble pas être sur la même « orbite » puisqu’elle a préconisé plutôt une approche sur une base volontaire, ce qui lui semble plus réaliste à court terme pour parvenir à des comportements responsables dans l’espace.  Des discussions sur un instrument ou des normes volontaires pour gouverner les activités humaines dans l’espace viendraient complémenter, selon l’Union, les 21 principes directeurs sur la viabilité à long terme des activités spatiales adoptés par le COPUOS, cette année, par un engagement politique supplémentaire et en créant un cadre de coopération plus structuré.  Ces principes directeurs, dont s’est félicitée l’UE, viendront renforcer la transparence et la confiance dans ce domaine, même si, comme l’a remarqué l’Argentine, leur mise en œuvre dépendra en grande partie de la coopération internationale.

Se faisant l’écho de nombreuses interventions, l’Afrique du Sud a mis en exergue que les bénéfices de l’espace extra-atmosphérique devaient être partagés entre tous les États, quel que soit leur niveau de développement scientifique, technique et économique, et pas seulement entre puissances spatiales.

La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 31 octobre, à partir de 10 heures.

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE - A/74/20, A/C.4/74/L.7

Déclaration liminaire

Dans son discours introductif, le Président du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), M. ANDRÉ JOÃO RYPL (Brésil) a présenté le rapport annuel du Comité qui donne un aperçu complet des travaux et des réalisations du Comité et de ses organes subsidiaires cette année.  Le Comité a adopté le préambule et les 21 lignes directrices pour la viabilité à long terme des activités spatiales du COPUOS et pris des décisions importantes concernant les travaux ultérieurs.  Le Président a saisi cette occasion pour souhaiter la bienvenue à Chypre, à l’Éthiopie, à la Finlande, à Maurice et au Paraguay en tant que nouveaux membres du Comité, ce qui porte à 92 le nombre de membres.  L’Union européenne est devenue observatrice permanente auprès du Comité, ainsi que l’Organisation internationale de normalisation (ISO), CANEUS-International et For All Moonkind, les toutes dernières organisations non gouvernementales internationales dotées du statut d’observateur auprès du Comité.

Rappelant que 2018 a marqué le cinquantième anniversaire de la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, M. Rypl a affirmé être déjà en mesure de faire le point sur les premiers résultats du processus UNISPACE+50 depuis son lancement en 2015, à savoir une forte croissance depuis quatre ans, le nombre de membres du Comité étant passé de 77 à 92 États membres et de 34 à 41 organisations observatrices.  Cela s’est accompagné d’un intérêt accru pour les discussions au sein du Comité et de ses sous-comités, qui comprennent désormais un large éventail de nouveaux sujets, tels que la santé mondiale, l’exploration et l’innovation spatiales, les activités liées aux petits satellites, la dépollution des débris spatiaux, la gestion du trafic spatial, le régime juridique de la gouvernance dans l’espace, ainsi que la gouvernance et les méthodes de travail du Comité et de ses organes subsidiaires.

Le Comité poursuit actuellement l’élaboration du nouvel agenda et du plan de mise en œuvre de « Espace 2030 » dans le but de maximiser les avantages des activités spatiales pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réalisation des objectifs de développement durable, en tenant compte des besoins particuliers des pays en développement, a rappelé le Président.  Ce comité et ses sous-comités, appuyés par le Bureau des affaires spatiales, constituent des plateformes uniques pour la coopération internationale dans le domaine de l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques, pour la gouvernance mondiale de ces activités, pour le développement du droit spatial international, pour la promotion du dialogue entre les nations spatiales émergentes et spatiales et pour la promotion d’une implication accrue de tous les pays dans les activités spatiales, y compris par le renforcement des capacités.  Il est important de renforcer encore le rôle du Comité et de ses sous-comités, a estimé M. Rypl, en tant qu’instance permettant de promouvoir le dialogue et la coopération entre les États membres et les organisations dotées du statut d’observateur permanent auprès du Comité et de renforcer les partenariats entre les États, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, les entreprises et des entités du secteur privé.

« Cette année marque le cinquantième anniversaire de la mission Apollo 11, lorsque l’homme a, pour la première, fois marché sur la surface d’un autre corps céleste.  Cet alunissage était un événement emblématique qui témoigne du pouvoir que l’exploration et l’innovation spatiales ont sur notre imagination », a confié M. Rypl.

Les activités dans l’espace extra-atmosphérique se développent avec l’émergence de nouvelles technologies et de nouveaux acteurs à un rythme sans précédent.  L’espace est véritablement devenu pluriel et cela devrait nous inciter à constater que la plupart des États représentés au sein du Comité sont désormais engagés dans des activités spatiales d’une manière ou d’une autre, a-t-il souligné.  Il est de notre devoir de continuer à coopérer pour favoriser le développement de l’exploration, des sciences et des technologies spatiales et préserver l’environnement spatial, a conclu le Président.

Déclarations

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), et en sa capacité nationale, a souligné que l’amélioration de l’accès de tous les pays aux technologies spatiales doit être une priorité du Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique, l’ASEAN encourageant le Bureau des affaires spatiales à poursuivre ses activités de renforcement des capacités, en particulier dans les pays en développement.  Il a ajouté que l’ASEAN attache une grande importance à l’utilisation des technologies spatiales pour la réduction des risques de catastrophe, cela en appuyant le Cadre d’action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 ainsi que rôle dévolu aux technologies spéciales pour réaliser les objectifs fixés par l’Accord de Paris sur le climat.  S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, le délégué a indiqué que son pays fait siens les 21 principes du Comité sur la durabilité des activités spatiales durables et souhaite que se poursuivent les discussions sur leur mise en œuvre au sein du nouveau groupe de travail pertinent.  

« Une large partie du budget européen est consacrée à nos systèmes de navigation satellitaire Galilée et EGNOS, ainsi qu’au système d’observation terrestre Copernic », a expliqué Mme CARINE CLAEYS, de l’Union européenne, avant de préciser que 7% de l’économie européenne dépend des systèmes de navigation satellitaires.  Le système Galilée sera pleinement opérationnel en 2020 avec une constellation de 30 satellites, a-t-elle annoncé.  D’après des études indépendantes, il devrait générer 90 milliards de dollars pour l’économie européenne au cours de ses 20 premières années d’exploitation.  La représentante a souligné l’importance d’un « comportement responsable » dans l’espace extra atmosphérique: « Nous pensons que le scénario le plus réaliste à moyen terme est de se mettre d’accord sur un instrument juridique ou des normes volontaires », a-t-elle ajouté.  « Les sujets abordés pourraient inclure la limitation et la dépollution des débris spatiaux, qui sont en partie créés par les tests d’armes antisatellites, ainsi que la prévention des collisions », a suggéré Mme Claeys.

M. TONG HAI LIM (Singapour) a annoncé que son pays s’était porté candidat pour devenir membre du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, afin de participer pleinement au dialogue et à la coopération internationaux sur la promotion des usages pacifiques et durables des activités spatiales.  Selon lui, il convient de renforcer la pertinence du cadre de gouvernance mondiale de l’espace, notamment en restant en phase avec les dernières avancées technologiques.  Le représentant a aussi signalé l’intérêt des travaux de l’Organisation pour la science, la technologie et l’innovation, qui aide les petits États à contribuer à leur niveau à la promotion des usages pacifiques de l’espace extra-atmosphérique.

M. KITTITHEP DEVAHASTIN NA AYUTHAI (Thaïlande) a réaffirmé l’appui inconditionnel de sa délégation au droit de tous aux usages pacifiques de l’espace extraatmosphérique.  Son pays, membre actif du Comité des utilisations pacifiques de l'espace extra-atmosphérique, réitère, a-t-il dit, la responsabilité collective des États de résoudre les problèmes de gestion des débris spatiaux et du trafic spatial susceptibles d’entraver la bonne conduite des activités spatiales.  Le représentant a, par ailleurs, signalé que son pays élabore actuellement une loi sur l’espace qui ouvrira la voie à la création d’une agence spatiale nationale.  Cet instrument permettra à la Thaïlande de concrétiser ses aspirations en garantissant la conduite systématique, cohérente et responsable de ses activités spatiales, a-t-il indiqué.

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique) s’est félicitée de la recommandation pour que Singapour, le Rwanda et la République dominicaine deviennent membres du COPUOS.  L’augmentation du nombre de membres du Comité est la preuve, à ses yeux, de l’importance accordée par les États à la coopération internationale dans les activités spatiales pacifiques.  Elle a fait part de ses inquiétudes par rapport à la possibilité d’une nouvelle course aux armements et d’une militarisation de l’espace extra-atmosphérique.  « Certains États ont publiquement annoncé qu’ils cherchaient à se doter de capacités offensives dans l’espace pour protéger leur sécurité nationale », s’est-elle indignée.  Dès lors, la promotion de mesures internationales de confiance et de transparence et de codes de conduite ou encore d’accords bilatéraux et multilatéraux est nécessaire mais ne représente que des mesures intermédiaires.  Elles ne sauraient, selon la délégation, se substituer à un régime juridiquement contraignant pour l’interdiction de toute forme d’armes dans l’espace et de son utilisation à des fins belliqueuses, a tranché la déléguée.  Il est inacceptable que de façon délibérée ou accidentelle, les systèmes de télécommunication, météorologiques et de navigation dont dépendent les activités quotidiennes de la planète entière soient mis en péril, a-t-elle souligné.  Les agences spatiales et les experts sont des acteurs indispensables pour la lutte contre les changements climatiques et les catastrophes naturelles, a poursuivi la représentante, en demandant à la communauté internationale de tout faire pour assurer la viabilité et la sécurité à long terme des activités pacifiques dans l’espace.  Le Mexique est fier qu’une femme de l’agence spatiale mexicaine ait présidé le COPUOS en 2018.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a reconnu l’intérêt commun pour toute l’humanité et le droit de tous les États à participer à l’exploration et à l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques et au service du développement humain.  Le Traité de 1967 sur les activités spatiales reste, selon le représentant, essentiel pour maintenir la paix et la sécurité internationales et promouvoir la coopération internationale dans ce domaine.  Ce Traité est la pierre angulaire du régime juridique international qui régit l’espace, a affirmé le représentant, mais il a reconnu néanmoins que la communauté internationale doit trouver des solutions communes aux nouveaux défis.  À cet égard, l’Argentine a salué les 21 lignes directrice relatives aux activités spatiales durables du COPUOS, soulignant que leur mise en œuvre exigera la coopération internationale.

Pour éviter une course aux armements dans l’espace, les négociations, dans le cadre de la Conférence du désarmement, d’un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une telle course sont nécessaires, a affirmé le représentant.  En attendant, a poursuivi le représentant, il faudra adopter des mesures internationales de confiance et de transparence pour les activités spatiales.  L’Argentine développe pour sa part un programme spatial à des fins exclusivement pacifiques, a assuré M. García Moritán, y compris des satellites et des lanceurs de satellites.  L’an dernier, elle a mis sur orbite le premier satellite de la mission SAOCOM, développé pour le compte de la Commission nationale des activités spatiales (CONAE).  La constellation sera complète en principe au début de l’année 2020 avec le lancement du deuxième satellite SAOCOM chargé de l’observation de la Terre et de collecte de données météorologiques, a précisé le représentant en conclusion.

M. FRANCISCO JAVIER GUTIÉRREZ PLATA (Colombie) a estimé que les débats sur l’espace extra-atmosphérique doivent continuer de se dérouler dans « un cadre multilatéral inclusif prenant en compte les intérêts de tous les États ».  Il a estimé que le COPUOS était l’enceinte dans laquelle devaient avoir lieu ces débats, avant d’indiquer qu’elle occupera une vice-présidence du Comité l’an prochain.

M. ADEL ALFAWZAN (Arabie saoudite) a déroulé les réalisations spatiales de son pays.  « En 1976, le royaume d’Arabie saoudite a contribué à la création d’Arab Sat », a-t-il expliqué.  « Arab Sat, le premier satellite de la constellation a été lancé en 1995.  Depuis, 16 autres ont été mis sur orbite », s’est-il enorgueilli.  Le représentant a indiqué que l’Institut saoudien de l’Espace avait été créé fin 2018 et que celui-ci avait signé un accord ce mois-ci avec son homologue russe.  « Nous avons aussi des accords de coopération dans ce domaine avec l’Europe et les États-Unis », a-t-il précisé.  L’Arabie saoudite a également mis sur orbite deux satellites d’observation nommés A5 et B5 en décembre 2018 ainsi qu’un satellite d’observation de la terre, a-t-il ajouté.

M. KIM IN CHOL (République populaire démocratique de Corée - RPDC) a expliqué que l’exploration de l’espace devient de plus en plus partie intégrante de toute économie nationale.  Voilà pourquoi on peut constater une augmentation du nombre d’États qui se lancent à la conquête de l’espace, ce qui prouve que les applications pratiques de l’utilisation pacifique de l’espace sont cruciales pour les économies nationales, a souligné le représentant.  Dans ce contexte, la promotion de la coopération internationale des activités spatiales à des fins pacifiques sera essentielle à la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il soutenu, en reconnaissant les efforts du COPUOS et du Bureau des affaires spatiales dans ce contexte.

Cependant, la coopération internationale en vertu du Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 est confrontée à des difficultés liées à « l’obstruction de certaines puissances » selon lui.  Le délégué en a voulu pour preuve l’impossibilité pour la RPDC d’obtenir un statut d’observateur auprès du COPUOS à cause de l’opposition de certains pays et de leurs politiques de « deux poids, deux mesures ».  Pourtant la RPDC, a-t-il argué, est une nation spatiale qui conçoit des satellites et a ratifié le Traité de 1967 et d’autres instruments internationaux dans ce domaine.  La délégation n’a donc vu aucune raison pour que la RPDC, en tant que pays qui met sur orbite des satellites et État partie aux instruments précités, ne puisse participer aux réunions du COPUOS.  Dès lors, il a reproché aux pays qui soulèvent des objections pour la participation du sien aux travaux du COPUOS d’avoir des motivations politiques qui ne devraient plus être tolérées.

« Les retombées positives de l’espace extra-atmosphérique doivent être partagées par tous les pays, pas seulement par ceux qui disposent de capacités spatiales », a expliqué M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud).  Il s’est félicité de la décision de l’Union africaine de créer une agence spatiale africaine, installée au Caire.  Selon lui, « l’économie africaine dépend de plus en plus de l’espace ».  « Nous nous félicitons de la décision de créer un groupe de travail sur la viabilité des activités spatiales » au sein du COPUOS, a-t-il ajouté.  Il a finalement insisté sur la nécessité de passer par un cadre multilatéral pour définir les nouvelles normes spatiales internationales.

Mme SARA ALMUHAIRI (Émirats arabes unis) a appelé à promouvoir le dialogue sur les activités pacifiques dans l’espace.  L’an dernier, les Émirats arabes unis ont entamé une nouvelle phase dans l’exploration spatiale avec la participation du premier astronaute émirati à une mission spatiale.  La poursuite des activités spatiales et l’investissement dans ces activités à des fins pacifiques sont essentiels, a souligné la représentante, qui a annoncé que les Émirats avaient rédigé la première loi sur les activités spatiales au Moyen-Orient, et que son pays avait mis des satellites en orbite.  Mille cinq cents personnes travaillent désormais dans le secteur spatial aux Émirats, dont 47% de femmes, a-t-elle fait valoir, en précisant que l’une des ambitions du programme émirati est l’exploration de la planète Mars.  Il faut promouvoir la coopération internationale dans ce domaine, a-t-elle dit, ce qui a amené les Émirats à signer des accords de coopération avec certaines nations, notamment avec la Fédération de Russie, ainsi qu’avec des institutions spéciales.  Un groupe arabe a été créé pour promouvoir la recherche et la coopération régionale dans le domaine spatial, a encore annoncé la représentante.  L’un de ses premiers projets sera de lancer un satellite météorologique pour les pays arabes.  Les Émirats arabes unis plaident en faveur de cadres juridiques pour assurer la viabilité de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, a précisé Mme Almuhairi, qui a conclu en disant que son pays accueillera la soixante et onzième Conférence internationale sur la navigation spatiale en 2020.

« Toutes les règles spatiales devraient être édictées au sein du COPUOS et non en dehors », a soutenu M. ELTON KHOETAGE HOESEB (Namibie), ajoutant que « l’objectif est d’éviter une course aux armements dans l’espace ».  Il a affirmé que son pays est fier d’accueillir « le plus grand système de télescopes optiques au monde », avec cinq télescopes et des scientifiques en provenance de 13 pays.  Le représentant a insisté sur l’importance des technologies spatiales pour observer et lutter contre les changements climatiques.

M. WISAM ALQAISI (Iraq) a salué les applications positives des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique sur le quotidien des personnes, notamment dans les domaines de la communication, la gestion des catastrophes naturelles, la navigation et la météorologie.  Nul n’ignore que l’Iraq fait partie du COPUOS, a déclaré le représentant, pour lequel le cinquantenaire de la Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et le programme « Espace 2030 » témoignent d’une vision commune du potentiel de l’espace en tant que vecteur de développement durable pour tous.  Le représentant a souligné que les lacunes technologiques ne devaient pas pénaliser les États concernés ni les empêcher de tirer parti des applications pacifiques des sciences spatiales.  Pour sa part, l’Iraq a accordé une priorité aux activités pacifiques dans l’espace extra-atmosphérique.  En coopération avec le Gouvernement italien et l’UNIDO, le premier satellite iraquien type universitaire a pu être développé, a confié le représentant.  L’Iraq utilise également les données spatiales pour mesurer la présence de gaz dans l’air et se sert de l’imagerie spatiale pour mesurer l’impact du conflit dans les zones libérées de Daech, a ajouté M. Alqaisi.  Il a rendu hommage à toutes les institutions spatiales qui lui ont fourni des données dans ce cadre.  En conclusion, il a condamné et refusé toute militarisation de l’espace extra-atmosphérique et appelé à développer un régime international juridiquement contraignant pour garantir les usages strictement pacifiques de l’espace.

M. KENTARO KANETO (Japon) a appelé la communauté internationale à coopérer plus activement sur la question de la menace que font peser les débris spatiaux, le Japon développant des projets technologiques pour permettre leur retrait actif.  Une agence spécialisée sur cette question s’efforce, en lien avec les services de l’État, de mettre au point des systèmes efficaces de retrait, a-t-il ajouté.  Le représentant a, d’autre part, souligné l’aide apportée par le Japon, aux côtés du Bureau des affaires spatiales, aux pays en développement, parmi lesquels le Kenya, le Guatemala, Maurice, l’Indonésie et la Moldavie, pour que ceux-ci puissent renforcer leurs capacités d’exploitation de l’espace à des fins socioéconomiques.  Pour ce qui est de la coopération régionale, le délégué a signalé que son pays organise chaque année, dans le cadre du Forum régional Asie-Pacifique des agences spatiales, une conférence majeure sur l’apport des technologies spatiales dans la résolution des problèmes régionaux tels que la gestion des catastrophes.

« L’Inde s’est lancée dans les technologies spatiales, il y a 50 ans, et 160 applications spatiales ont été mise au point jusqu’à présent », a expliqué M. DEEPAK MISRA (Inde), avant de détailler les succès enregistrés par le programme spatial de son pays en 2019.  Un centre dédié à la réalisation d’un vol habité a été créé cette année et une conférence sur ce sujet se tiendra à Bangalore en 2020, a-t-il poursuivi.  Le représentant a ensuite détaillé la série d’accords bilatéraux et multilatéraux qu’a conclus son pays qui, en tant que membre de l’initiative UNISPACE+50, a lancé un programme de renforcement de capacité sur la réalisation de petits satellites, baptisé UN Space Nano-satellite Assembly and Training (UNNATI).  Selon lui, ce programme de développement de nanosatellites constitue « une contribution unique offrant d’excellentes opportunités aux entités dans les pays en développement » pour renforcer leurs capacités spatiales.  Le délégué a conclu en affirmant que « La coopération internationale et le consensus » sont indispensables pour mettre en place de nouvelles normes et règlements dans l’espace extra-atmosphérique.

M. MOHANNAD ADNAN MOUSA SHADDAD (Jordanie) a rappelé qu’un centre régional pour les sciences et techniques spatiales avait été créé en 2012 en Jordanie.  Il est chargé, entre autres, de favoriser la coopération régionale dans ce domaine, mais également d’offrir des cours de formation.  La Jordanie a lancé en 2018 l’un des plus petits satellites du monde, CUBE-SAT, conçu par des experts locaux alors que le satellite GY1 l’a été par des étudiants jordaniens formés à la NASA et à l’agence spatiale des Émirats arabes unis, a expliqué le représentant.

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