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Conseil de sécurité: appels à la cessation immédiate des hostilités dans le nord-ouest de la Syrie pour protéger trois millions de personnes d’une catastrophe humanitaire

8715e séance – après-midi 
CS/14100

Conseil de sécurité: appels à la cessation immédiate des hostilités dans le nord-ouest de la Syrie pour protéger trois millions de personnes d’une catastrophe humanitaire

Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont obtenu aujourd’hui du Conseil de sécurité une réunion pour appeler à une cessation immédiate des hostilités dans la province d’Edleb, du nord-ouest de la Syrie, où une catastrophe risque de s’abattre sur trois millions de civils.  C’est un impératif humanitaire et un moyen de lutter contre le terrorisme qui va dans l’intérêt de la paix et de la sécurité régionales et internationales.  C’est aussi la base essentielle d’une voie durable vers la fin d’un conflit qui s’approche de sa dixième année, a plaidé l’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie qui s’est exprimé avant le Coordonnateur des secours d’urgence. 

Entre le 1er et le 5 février, 49 personnes ont perdu la vie dans la province d’Edleb, s’est alarmé, M. Mark Lowcock.  Il a dénoncé les combats dans les centres urbains où, ces deux derniers mois, au moins 19 civils auraient perdu la vie et plus de 60 autres auraient été blessés, et d’où 586 000 civils auraient fui.  La vaste majorité des gens continuent d’avancer vers le nord et l’ouest de la province dans de petites enclaves désormais surpeuplées.  Les gens se dirigent aussi dans des zones contrôlées par la Turquie.  Les Nations Unies et la communauté humanitaire, a assuré le Coordonnateur des secours d’urgence, continuent de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour répondre aux besoins de quelque trois millions de personnes, dans ce qui est l’opération transfrontalière la plus importante depuis les premières en 2014.  Un nouveau plan de réponse humanitaire a été lancé pour collecter la somme de 336 millions de dollars et aider pendant les six prochains mois une population en détresse.  Si les pauses humanitaires négociées avec la Fédération de Russie se sont avérées utiles, le temps presse, a prévenu M. Lowcock: la ligne de front se déplace rapidement à quelques kilomètres de la ville d’Edleb, le plus grand centre urbain de la province du même nom. 

Le caractère alarmant de la situation a été confirmé par l’Envoyé spécial des Nations Unies.  M. Geir Otto Pedersen a parlé des bombardements aériens et terrestres, de la violation du nouveau cessez-le feu que la Fédération de Russie et la Turquie ont conclu le 12 janvier dernier, de l’offensive terrestre des forces syriennes dans le sud-est de la zone de désescalade et de leur avancée vers le nord.  Dans le même temps, Hay’at Tahrir el-Cham (HTS), l’organisation terroriste inscrite sur la Liste du Conseil de sécurité, et des groupes armés de l’opposition lancent attaques et contre-attaques, y compris dans l’ouest et dans le nord d’Alep.  Des bombardements sont signalés dans des zones civiles ainsi que le lancement de drones armés contre les installations militaires syriennes et russes dans le sud-ouest de la province.  À ce sombre tableau, il faut ajouter les affrontements, du 3 janvier dernier, entre forces turques et syriennes. 

Mais nous avons appris de l’expérience, a rappelé l’Envoyé spécial, que l’approche militaire ne résoudra pas le problème.  L’accord sur les zones de désescalade du 4 mai 2017 peut permettre de longues périodes de calme.  C’est ce message que j’ai lancé à Moscou et à Damas et c’est ce message que je lancerai dans les jours à venir à Téhéran, a annoncé l’Envoyé spécial, en citant les garants du processus d’Astana.  Il a appelé à la cessation immédiate des hostilités et à un effort international sérieux pour coopérer sur Edleb. 

Que faut-il faire pour que les autorités syriennes acceptent enfin un cessez-le-feu? s’est demandé le Royaume-Uni.  La question syrienne suscite décidément de nombreuses réunions au Conseil de sécurité, a ironisé la Fédération de Russie, comptant les séances ordinaires et d’autres, comme celle-ci, qui sont généralement convoquées quand le Gouvernement syrien semble prendre l’avantage militaire sur les terroristes.  La lutte contre le terrorisme, s’est indignée la France, ne saurait justifier le sacrifice des populations civiles et les violations répétées du droit international humanitaire.  Elle a prévenu que la poursuite des hostilités ne fera qu’amplifier la menace terroriste, parce qu’elle favorise la radicalisation des combattants et entraîne un véritable risque de dissémination de terroristes à la faveur des mouvements de populations. 

Ces violations constantes du cessez-le-feu, s’est impatienté le Royaume-Uni, montrent que ce sont bien les Nations Unies et non les garants du processus d’Astana qui devraient mener le processus de paix en Syrie.  L’ampleur des destructions facilitées par la Russie, ont renchéri les États-Unis, prouve à suffisance que ni elle, ni l’Iran, et encore moins le « régime d’Assad », ne peuvent garantir un cessez-le-feu.  Ils ont donc appelé l’Envoyé spécial des Nations Unies à tourner son attention vers des efforts visant à faire taire les armes dans le nord-ouest de la Syrie.  Il est essentiel, ont repris en chœur les délégations, que toutes les parties s’emploient à mettre en œuvre la résolution 2254, adoptée « à l’unanimité » en 2015, ont rappelé les États-Unis.

Il est bon, a ironisé, à son tour la Syrie, que le Conseil convoque une séance pour dénoncer « les agressions, les pillages et les vols commis par le régime turc ».  Nous n’avons fait qu’exercer notre droit de légitime défense, s’est défendue la Turquie, appuyée fermement par les États-Unis.  Elle a argué que ses forces sont dans la province d’Edleb, dans le cadre d’un mémorandum signé avec la Fédération de Russie en septembre 2018 pour stabiliser la région et préserver son statut de zone de désescalade.  Elle a demandé à ses amis et à tous les membres de la communauté internationale de tenir compte de ses inquiétudes sécuritaires légitimes.  Êtes-vous prêts à revivre la crise des réfugiés de 2015 quand plus d’un million de Syriens se sont déversés sur l’Europe? a demandé la Turquie, avant de réclamer une désescalade immédiate à Edleb au risque de courir inévitablement à l’échec du processus politique.  La situation dans la province ne peut être résolue que par des moyens politiques, dans le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de l’indépendance politique de la Syrie, a souligné l’Iran qui a annoncé la prochaine réunion des garants d’Astana, bientôt à Téhéran. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. GEIR OTTO PEDERSEN, Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie, a confirmé le caractère alarmant de la situation dans le nord-ouest de la Syrie laquelle s’est encore aggravée la semaine dernière.  Les bombardements aériens et terrestres ont causé des vagues de déplacements massifs et de grandes pertes en vies humaines, créant une catastrophe humanitaire, des souffrances humaines « inacceptables » et de réelles menaces à la paix et à la sécurité internationales.  Cette situation, a estimé l’Envoyé spécial, peut, et en conséquence doit, cesser maintenant. 

Le 12 janvier, a-t-il rappelé, la Fédération de Russie et la Turquie ont annoncé un accord sur un nouveau cessez-le-feu dans le nord-ouest.  Pourtant, les affrontements et les bombardements se sont poursuivis et deux jours plus tard, les frappes aériennes du Gouvernement syrien et leurs alliés ont repris.  Depuis lors, les forces gouvernementales ont lancé une offensive terrestre dans le sud-est de la zone de désescalade d’Edleb.  Elles font des progrès importants et viennent de prendre le contrôle de la ville de Maarret el-Nouman dont la population a fui dès les premières attaques. 

Les forces gouvernementales continuent à pousser vers le nord, atteignant la ville de Saraqeb, à la jonction des autoroutes M5 et M4 et près de la ville d’Edleb.  Dans la ville même, les frappes aériennes du Gouvernement se poursuivent et les hostilités se sont intensifiées sur d’autres fronts, en particulier dans l’ouest d’Alep où les forces gouvernementales ont avancé.  Pendant la même période, Hay’at Tahrir el-Cham (HTS), l’organisation terroriste inscrite sur la Liste du Conseil de sécurité, et des groupes armés de l’opposition ont lancé plusieurs attaques et contre-attaques sur ces fronts, y compris dans l’ouest et dans le nord d’Alep.  L’on signale des bombardements dans des zones civiles et le lancement de drones armés contre les installations militaires syriennes et russes dans le sud-ouest d’Edleb.  Le Ministre russe des affaires étrangères a d’ailleurs confirmé des morts parmi les soldats. 

Les forces turques et celles du Gouvernement syrien se sont directement affrontées sur le sol syrien, provoquant des morts, de part et d’autre.  Jusqu’ici, s’est désolé l’Envoyé spécial, les appels du Secrétaire général à la cessation des hostilités sont restés vains.  Il semble que l’on perde de vue le principe de proportionnalité alors que les attaques contre les personnes et infrastructures civiles restent « inacceptables », a martelé l’Envoyé spécial.  Les gens à Edleb, en particulier les femmes, vivent dans la peur et se sentent complètement ignorés.  La société civile, le meilleur antidote contre le radicalisme, est plongée dans le désespoir et se sent abandonnée.  La population a explosé, atteignant désormais les trois millions de personnes.  Mais Edleb est aussi l’endroit où se sont réfugiés les combattants.  Le HTS et d’autres groupes terroristes listés par le Conseil de sécurité, y sont une force réelle. 

Mais nous avons appris de l’expérience, a souligné l’Envoyé spécial, que l’approche militaire ne résoudra pas le problème et coûtera très cher.  L’approche militaire, nous le savons, ne fera qu’approfondir les divisions internationales, en affaiblissant la perspective d’une dynamique graduelle de rétablissement de la confiance.  Les événements de ces derniers jours où les armées de deux États Membres des Nations Unies, la Syrie et la Turquie, se sont affrontées sur le sol syrien augurent d’une déflagration dans la région, voire au-delà. 

Mais nous savons aussi, a poursuivi l’Envoyé spécial, qu’il est possible, grâce à un accord, de stabiliser des régions de la Syrie et de travailler à une sortie de crise.  L’accord sur la zone de désescalade de mai 2017 peut permettre de longues périodes de calme.  C’est ce message que j’ai lancé à Moscou et à Damas et auprès des hauts responsables turcs et des Coprésidents du Groupe de travail humanitaire.  C’est ce message que je lancerai dans les jours qui viennent à Téhéran, a annoncé l’Envoyé spécial. 

Je ne prétends pas, a-t-il avoué, avoir une formule magique pour Edleb.  Mais je suis convaincu qu’avec un recours sérieux à la coopération internationale, une solution peut être trouvée, en s’appuyant sur les accords existants mais aussi en les renforçant.  Ce qu’il faut, a énuméré l’Envoyé spécial, c’est un cessez-le-feu durable et un accès humanitaire immédiat.  Il faut aussi contenir la situation pour donner du temps à la recherche d’une solution et consulter plus systématiquement la population.  La question des combattants étrangers doit être examinée et la fourniture d’un appui à des groupes terroristes listés doit être interdite.  Il faut également faire en sorte que toute utilisation de la force contre ces groupes soit ciblée avec la plus grande précision.  Il faut enfin réfléchir à une présence internationale renforcée, avec le consentement des autorités syriennes.  La communauté internationale doit mettre à la disposition de ces efforts les ressources nécessaires.

J’appelle, a conclu l’Envoyé spécial, à la cessation des hostilités et à un effort international sérieux pour coopérer sur Edleb.  C’est un impératif humanitaire et c’est un moyen efficace de lutter contre le terrorisme qui va dans l’intérêt de la paix et de la sécurité régionales et internationales.  C’est aussi, a-t-il ajouté, la base essentielle d’une voie durable vers la fin d’un conflit qui approche sa dixième année.  Le Conseil l’a reconnu dans la résolution 2254 (2015) dont les dispositions demeurent la seule voie pour sortir du conflit.  Les principaux acteurs et les membres du Conseil doivent peser de tout leur poids pour appuyer cette logique.

À ce jour, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) décompte 373 morts parmi les civils depuis le 1er décembre 2019, a indiqué M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence.  Il a ajouté que 49 morts ont été confirmés entre le 1er et le 5 février à Edleb.  Il s’est inquiété des combats dans les centres civils du nord-ouest où, ces deux derniers mois, au moins 19 civils auraient perdu la vie et plus de 60 autres auraient été blessés.  Plus de 95% des morts parmi les civils ont été enregistrés dans les zones contrôlées par le Gouvernement, a-t-il souligné.  Ces deux derniers mois, on estime à 586 000 le nombre de civils qui ont fui.  Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) précise que quelque 300 000 enfants ont fui depuis le 1er décembre et la vaste majorité des gens continuent d’avancer vers le nord et l’ouest dans de petites enclaves contrôlées par des groupes non gouvernementaux.  Ces enclaves sont désormais surpeuplées et quelque 80 000 personnes vivent dans des maisons ou des immeubles en construction.  Les gens se dirigent aussi dans des zones contrôlées par la Turquie et leur nombre est désormais estimé à 144 000. 

Les Nations Unies, a indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence, continuent, avec la Fédération de Russie, à se mettre d’accord sur des pauses sur des routes identifiées pour permettre aux gens de fuir dans un minimum de sécurité.  Entre le 27 janvier et le 2 février, les ONG locales ont profité de ces pauses pour accompagner quelque 4 000 personnes dans des zones plus proches de la Turquie.  De son côté, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a indiqué que 53 centres médicaux ont cessé leurs activités après les frappes aériennes et les bombardements.  Quelque 26 centres de vaccination ont fermé depuis le 1er décembre. 

Il faut, a plaidé à son tour le Secrétaire général adjoint, une cessation immédiate des hostilités.  Si les pauses sont en effet utiles et bienvenues, n’oublions pas, a-t-il rappelé, que des millions de gens continuent de vivre dans l’insécurité la plus totale.  Un cessez-le-feu élargi est la seule façon d’assurer leur protection. 

Les Nations Unies et la communauté humanitaire continuent de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour répondre aux besoins de quelque trois millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, dans ce qui est l’opération transfrontalière la plus importante depuis les premières en 2014.  Nous avons aussi cette semaine, a rappelé le Secrétaire général adjoint, lancé un autre plan de réponse humanitaire pour le nord-ouest visant une somme de 336 millions de dollars pour les six prochains mois.  Le Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF) a déjà débloqué 44 millions de dollars pour toute la Syrie, ce qui est sa plus grande contribution depuis le début de la crise.  Aujourd’hui même, une autre somme de 30 millions sera ponctionnée du Fonds pour le nouveau plan à Edleb.  Mais le Fonds a une capacité limitée, a prévenu M. Lowcock, en regardant du côté des donateurs.

Le temps presse, a-t-il alerté.  La ligne de front se déplace rapidement à quelques kilomètres de la ville d’Edleb, le plus grand centre urbain du nord-ouest de la Syrie.  Il faut, a-t-il répété, une cessation immédiate des hostilités et un effort international sérieux pour coopérer sur Edleb.  C’est un impératif humanitaire, a-t-il souligné à son tour.  Mais ce qu’il faut surtout, c’est un véritable dialogue entre toutes les parties au conflit pour trouver une solution politique durable conforme à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, a-t-il souligné. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est alarmée de ce que « le pire cauchemar » soit en train de se réaliser à Edleb.  La zone de désescalade est prise pour cible, n’épargnant pas les civils.  Les attaques des forces syriennes, russes et iraniennes ont provoqué le déplacement de près de 250 000 personnes, alors que les Turcs font tout pour éviter l’escalade, a-t-elle énuméré.  Elle s’est inquiétée des combats entre les forces turques et syriennes, avant d’expliquer qu’avec la France et les États-Unis, son pays a demandé cette réunion du Conseil de sécurité pour appeler à un cessez-le-feu immédiat.  Que faut-il faire pour que les autorités syriennes acceptent enfin un cessez-le-feu? s’est-elle demandé.  Expliquez-nous, a-t-elle dit à l’adresse du représentant syrien dans la salle, pourquoi aucun cessez-le-feu n’a jamais été respecté?  Ces violations constantes, a-t-elle tranché, montrent que ce sont bien les Nations Unies et non les garants du processus d’Astana qui devraient mener le processus de paix en Syrie. 

Mon pays, a-t-elle assuré, est prêt à soutenir toute action de l’ONU pour obtenir le respect d’un cessez-le-feu.  Nous avons, a-t-elle souligné, déboursé pas moins de 50 millions de dollars pour l’aide humanitaire en Syrie en 2019.  Au total, c’est plus de 3 milliards de dollars qui ont été dépensés en Syrie depuis le début de la crise.  Pourquoi ce conflit se poursuit-il? a-t-elle demandé au représentant syrien. 

Les États-Unis se sont joints au Royaume-Uni et à la France pour demander la convocation de cette réunion compte tenu de notre sentiment d’horreur devant l’escalade du « régime d’Assad » dans le nord-ouest de la Syrie, a dit Mme KELLY CRAFT.  La représentante américaine a condamné, dans le termes les plus fermes, l’offensive militaire « injustifiée et barbare » du « régime d’Assad », de l’Iran, du Hezbollah et de la Russie.  Soyons clairs, a-t-elle dit: nous sommes devant une violence meurtrière et délibérée contre des milliers d’innocents.  C’est une violence qui non seulement terrorise et soumet mais qui envoie aussi un message effrayant: le « régime d’Assad » et ses alliés rejettent les efforts du Conseil de sécurité pour rétablir la stabilité en Syrie, grâce à un processus politique facilité par l’ONU. 

Si ce Conseil, a prévenu la représentante, veut maintenir un semblant de crédibilité, il ne peut tout simplement pas ignorer les résolutions qu’il adopte.  En 2015, il n’a pas seulement adopté la résolution 2254, il l’a fait à l’unanimité.  Pour les États-Unis, a poursuivi la représentante, la situation en Syrie exige donc un cessez-le-feu immédiat, global et vérifiable.  Nous savons, a-t-elle averti, que l’on ne peut faire confiance au forum d’Astana pour garantir le cessez-le-feu.  Nous le savons parce que ce sont les avions russes qui violent régulièrement les cessez-le-feu que la Russie elle-même a conclu.  Nous savons que ce sont les bombes russes qui ont détruit des hôpitaux syriens et qui poussent les enfants syriens sur les routes.  L’ampleur des destructions facilitées par la Russie montre que ni elle, ni l’Iran, et encore moins le “régime d’Assad”, ne peuvent garantir un cessez-le-feu et certainement pas une solution politique.  Nous appelons donc l’Envoyé spécial, a dit la représentante, à tourner son attention vers des efforts visant à obtenir un cessez-le-feu dans le nord-ouest de la Syrie pour préserver les progrès de la Commission constitutionnelle. 

Il est essentiel que toutes les parties s’emploient à mettre en œuvre la résolution 2254 et commencent par donner leur plein appui aux efforts de l’ONU pour établir un cessez-le-feu dans toute la Syrie et assurer l’aide humanitaire transfrontalière autorisée par la résolution 2504.  Les Nations Unies, a ajouté la représentante, doivent faire valoir leur neutralité et leur impartialité pour obtenir un cessez-le-feu dans le nord-ouest de la Syrie.  En lançant son assaut, le « régime d’Assad » n’a pas seulement exacerbé la situation humanitaire, il a aussi ouvert la voie à une escalade plus large, mettant les Syriens en danger et menaçant l’espoir d’une solution politique conforme à la résolution 2254.  Alors que « le régime » paraît immunisé contre la honte ou la culpabilité pour les souffrances qu’il cause, il ne devrait pas se faire d’illusion, a menacé la représentante.  Sa cruauté et sa violence ne resteront pas impunies.  La Turquie, « notre alliée de l’OTAN », a notre plein appui, a-t-elle souligné, en voyant chez son alliée un acte de légitime défense contre les attaques « injustifiées » du « régime d’Assad » contre ses postes d’observation.  Les États-Unis, a-t-elle prévenu, ne débourseront pas le moindre argent pour la reconstruction dans les zones contrôlées par « le régime ».  L’Administration Trump n’épargnera aucun effort dans sa compagne pour isoler « le régime d’Assad » économiquement et diplomatiquement aussi longtemps qu’il continuera à rejeter le processus politique énoncé dans la résolution 2254, a encore prévenu la représentante. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que nous sommes entrés ces derniers mois dans un nouvel acte de la stratégie impitoyable du régime syrien.  Après l’horreur de la destruction d’Alep fin 2016, après celle de la bataille de la Ghouta en 2018, nous assistons à un scénario militaire similaire à Edleb, mais cette fois-ci, d’une ampleur inédite puisque trois millions de Syriens sont concernés, a-t-il précisé.  Face à ce constat, il a jugé urgent de faire taire les armes, sans oublier de condamner les bombardements intenses de l’aviation du régime et de ses alliés qui visent de manière indiscriminée les populations et les infrastructures civiles.  Trois millions de personnes, dont près de 80% de femmes et d’enfants, et près de 600 000 personnes nouvellement déplacées depuis décembre, sont exposées aux attaques quotidiennes. 

Le représentant a prévenu que la lutte contre le terrorisme ne saurait justifier le sacrifice des populations civiles et les violations répétées du droit international humanitaire.  Il a aussi prévenu que la poursuite des hostilités sur le terrain ne fera qu’amplifier la menace terroriste, parce qu’elle favorise la radicalisation des combattants et parce qu’elle entraîne un véritable risque de dissémination de terroristes à la faveur des mouvements de populations.  Il a appelé les signataires de l’accord de Sotchi de septembre 2018, en premier lieu la Russie, à assurer une véritable cessation des hostilités dans le nord-ouest. 

Par ailleurs, le représentant a jugé inacceptable que les infrastructures de santé et les écoles continuent d’être la cible d’attaques au mépris du droit international humanitaire.  Dans ce contexte, il a appelé à tout mettre en œuvre pour garantir un accès humanitaire immédiat, sûr, durable et sans entrave à l’ensemble des personnes ayant besoin d’aide.  Il a estimé que l’urgence de la situation à Edleb ne doit pas nous faire oublier l’urgence politique.  La France, a-t-il rappelé, souligne que seule une solution politique pourra stabiliser durablement la Syrie.  Il est plus que jamais urgent de remettre sur les rails le processus politique en vue de la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Il faut, a ajouté le représentant, travailler en parallèle à la conclusion d’un cessez-le-feu, au lancement de travaux de la Commission constitutionnelle et aux autres volets de la résolution 2254 (2015).  Le représentant a assuré que la France et ses partenaires européens seront prêts à financer la reconstruction et à lever les sanctions, dès lors qu’un règlement politique sera solidement et irréversiblement engagé. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a réitéré son ferme soutien aux « efforts authentiques » visant à instaurer une paix durable en Syrie, et ce, pour tous les Syriens.  Tant que des civils ont besoin de protection, nous devons être présents, a-t-il affirmé.  Tant que les accords de cessez-le-feu sont violés par l’une ou l’autre des parties, tant que des informations font état d’enfants tués ou forcés de quitter leur foyer ou leur école, nous devons être présents.  Mais il est également fondamental de protéger le processus politique, a argué le représentant, déplorant toutefois que les atteintes au droit international en Syrie empêchent de progresser vers une solution politique négociée. 

Au regard des développements récents sur le terrain, le délégué a demandé à l’Envoyé spécial de préciser au Conseil quelles sont les étapes nécessaires pour parvenir à la cessation immédiate des hostilités et éviter une confrontation totale entre toutes les parties engagées à Edleb.  À ses yeux, une inaction sur ce point, avec les conséquences imaginables pour la population civile, resterait comme un « point noir » dans l’histoire de l’humanité.  Jugeant « inacceptable » que la Commission constitutionnelle ne parvienne pas à avancer dans ses travaux, il a interrogé M. Pedersen sur les « perspectives réelles de progression ».  Si ces travaux ne sont pas une fin en soi, a-t-il souligné, ils constituent tout de même la clef pour entrer dans un large processus politique.  Il a conclu son propos en appelant les parties au conflit à garantir la protection des civils et l’accès de l’aide humanitaire à l’ensemble des personnes dans le besoin.  

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a constaté que le cessez-le-feu négocié par le processus d’Astana a échoué, et que les zones de désescalade sont désormais des zones de guerre, avec les bombardements quotidiens du régime syrien et de la Fédération de Russie.  Il a salué la présence du représentant turc au Conseil, souhaitant obtenir de sa part des éclaircissements sur les récents développements en Syrie.  Il a relevé que six soldats turcs ont été tués par des tirs d’artillerie syrienne lundi dernier.  Est-ce cela que l’on appelle une désescalade? s’est-il indigné.  Le représentant a appelé à une pause humanitaire sur tout le territoire syrien afin d’empêcher la catastrophe qui se prépare.  Mettre fin à la violence est une condition préalable à un dialogue sérieux.  La poursuite des opérations du régime et de ses alliés, a-t-il prévenu, bloque cette perspective et sape la confiance du peuple syrien dans le Conseil de sécurité. 

Personne ici ne nie qu’il y ait des éléments radicaux à Edleb, a-t-il reconnu.  Mais, a-t-il tonné, cela ne justifie pas les attaques aveugles contre les populations civiles.  Les auteurs de ces attaques doivent rendre des comptes à la justice, a-t-il martelé, avant de demander que des voix autres que celles des représentants du régime syrien soient également entendues au Conseil de sécurité.  Après tout, la Commission constitutionnelle compte bien des représentants de l’opposition, a rappelé le représentant qui a conclu en estimant que la solution à la crise syrienne passe par une transition politique, en droite ligne de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

Gravement préoccupé par les hostilités dans le nord-ouest de la Syrie, M. PHAM HAI ANH (Viet Nam) a insisté sur le fait que la protection des civils doit rester la priorité des priorités pour toutes les parties, tout comme le maintien et le fonctionnement des établissements sanitaires et des activités humanitaires.  Le représentant a appelé les parties à cesser immédiatement les hostilités, à faire preuve d’un maximum de retenue et à respecter scrupuleusement le droit international, y compris le droit international humanitaire et les résolutions des Nations Unies.  M. Pham a souligné que le conflit en Syrie ne peut être réglé que par une solution politique, conforme au droit international et aux buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Il a exhorté le Gouvernement de la Syrie et toutes les parties à redoubler d’efforts pour désamorcer la situation et ouvrir la voie à une solution globale et durable.  Le délégué a aussi appelé les partenaires internationaux à intensifier les efforts diplomatiques bilatéraux et multilatéraux afin de créer des conditions favorables à la paix et à la stabilité en Syrie. 

M. MARTHINUS VAN SHALKWYK (Afrique du Sud) a noté avec préoccupation l’escalade des tensions dans le nord-ouest de la Syrie et exhorté les parties à œuvrer pour éviter toute aggravation de la situation.  Toute action contre le terrorisme doit respecter le droit international et tout appui extérieur aux groupes armés doit immédiatement cesser.  Les parties doivent respecter le droit international en ce qui concerne la protection des personnes et infrastructures civiles, a insisté le représentant.  L’affrontement militaire doit être évité à tout prix au profit d’un dialogue, sous les auspices de l’Envoyé spécial, a-t-il plaidé.  Il a espéré que la troisième session de la Commission constitutionnelle se déroulera bientôt et que les discussions seront empreintes de sincérité. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est dite, à son tour, profondément troublée par les informations faisant état de violences et d’une escalade des tensions dans le nord-ouest de la Syrie.  Elle a fait écho aux appels à la cessation immédiate de toutes les hostilités afin de prévenir d’autres souffrances humaines.  Elle a condamné les attaques contre les personnes et infrastructures civiles, en particulier les établissements sanitaires et scolaires.  Mme King a imploré toutes les parties au conflit à un cessez-le-feu.  Elle a salué les étapes franchies par la Fédération de Russie et la Turquie pour améliorer la coordination de leurs actions en Syrie.  Ces efforts devraient promouvoir la désescalade et contribuer à la protection des civils.  Les opérations militaires et celles contre le terrorisme doivent respecter les principes fondamentaux du droit international, a martelé, à son tour, la représentante.  Le principe de distinction, de proportionnalité et de précaution doit guider toutes les opérations car les atrocités commises en violation du droit international ne seront pas être ignorées et leurs auteurs répondront de leurs actes.  Avant de terminer, la représentante a souligné la nécessité d’une solution politique menée et dirigée par les Syriens eux-mêmes. 

M. ROLLIANSYAH SOEMIRAT (Indonésie) a tout d’abord rappelé que sa délégation avait précisé sa position sur la situation humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie et sur les travaux de la Commission constitutionnelle lors des deux réunions tenues le même jour, la semaine dernière.  Si nous accordons une grande importance à chaque réunion du Conseil, il nous paraît préférable qu’elles aient lieu lorsque que cela est nécessaire, sans creuser le fossé entre les membres du Conseil.  En ce moment, a estimé le représentant, la meilleure approche et la priorité des priorités est de rester face aux dossiers syriens.  Le représentant a ensuite réaffirmé la position de son pays sur trois points essentiels, à commencer par la nécessité d’une cessation immédiate des hostilités dans le nord-ouest de la Syrie et l’urgence, pour toutes les parties, de respecter leur obligation de protéger les civils, au titre du droit international humanitaire. 

Il a ensuite rappelé que la population civile a besoin d’une assistance humanitaire immédiate, 390 000 personnes ayant fui leur domicile dans le nord-ouest du pays depuis début décembre pour échapper aux combats.  La plupart de ces personnes ont déjà fui à de multiples reprises et sont vulnérables, a-t-il martelé.  Enfin, le délégué a exhorté les parties syriennes à poursuivre leurs efforts pour faire progresser les travaux de la Commission constitutionnelle.  Il a émis le vœu sincère qu’un accord se fera jour prochainement afin que les membres de la Commission puissent entrer dans la « partie cruciale » de ce processus politique.  « La clef, c’est la confiance entre les parties syriennes », a-t-il souligné. 

Au nom des porte-plume humanitaires, M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) s’est inquiété du « carnage » que l’on observe à Edleb, où 34 civils ont été tués entre le 1er et le 4 février alors que 83 avaient déjà été tués entre le 20 et le 30 janvier.  Il a noté que 586 000 personnes ont été déplacées par les dernières offensives autour d’Edleb et que 6 500 enfants doivent fuir chaque jour.  Nous devons faire la lumière sur les conséquences humanitaires en Syrie, a souhaité le représentant de l’Allemagne en notant que la densité de la population augmente chaque jour à la frontière turque où les populations fuient les combats.  Il a rappelé l’obligation pour les belligérants de protéger les populations.  Il a avoué qu’il est de plus en plus difficile de fournir de l’aide médicale aux trois millions de personnes dans le besoin.  Les responsables de cette situation doivent rendre compte de leurs actes, a martelé le représentant qui s’est particulièrement inquiété des attaques syriennes contre des postes d’observation turcs, lesquelles ont coûté la vie à sept soldats turcs. 

M. RABII ZENATI (Tunisie) a condamné toutes les attaques contre les civils et a demandé que toutes les parties respectent leurs obligations en vertu du droit international.  Il a plaidé pour un cessez-le-feu et a invité toutes les parties à œuvrer en faveur de la désescalade à Edleb.  Il faut, a-t-il pressé, trouver une solution pratique à la présence de groupes terroristes à Edleb.  La seule façon de mettre fin à la crise humanitaire, a-t-il dit à son tour, est d’avancer dans le règlement politique de la crise syrienne, en vertu de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

M. WU HAITAO (Chine) a déclaré que le règlement politique est le seul moyen de mettre un terme au conflit en Syrie.  L’indépendance des travaux de la Commission constitutionnelle doit être préservée, sans ingérence extérieure, a tranché le représentant.  Les organisations terroristes doivent être combattues dans le respect du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Le représentant a d’ailleurs appelé à la création d’une base de données sur les combattants terroristes pour leur barrer l’accès à d’autres pays.  L’ONU, a-t-il conclu, doit être dotée de suffisamment de fonds et de ressources pour fournir un aide humanitaire à toutes les personnes qui en ont besoin en Syrie. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a constaté que la question syrienne suscite de nombreuses réunions au Conseil de sécurité, certaines, ordinaires et d’autres, comme celle-ci, dites réunions d’urgence, sont généralement convoquées quand les terroristes sont combattus et que le Gouvernement semble prendre l’avantage.  Ce sont les terroristes qui ont lancé des tirs de roquettes ces derniers jours, ce qui a été confirmé mais ignoré par certains membres du Conseil.  Durant le mois de janvier, l’on a décompté 1 000 attaques, sans compter celles des terroristes près de Homs.  Mais cela n’a pas empêché le Secrétaire d’État américain de publier, le 4 février dernier, une déclaration pour condamner « les attaques du régime syrien et de ses alliés contre le peuple d’Edleb ».  Le « peuple d’Edleb », a rectifié, M. Nebenzia, n’existe pas.  Les gens de cette région font partie intégrante du peuple syrien.  Le représentant s’est aussi étonné que les groupes terroristes d’Edleb soient présentés comme des groupes de l’opposition modérée, alors que la résolution 2254 (2015), dont plusieurs délégations ont fait mention, souligne la nécessité de lutter contre le terrorisme en Syrie.

Mon pays, a assuré le représentant, entend travailler avec la Turquie pour maintenir la désescalade.  Nous avons travaillé, a-t-il aussi assuré, dans le respect des normes du droit international humanitaire.  Nos opérations militaires sont ciblées et proportionnelles.  Ce sont les terroristes qui transforment les sites civils en positions militaires, a affirmé le représentant qui s’est insurgé « contre ceux qui nous accusent de barbarie » pour leur rappeler que les opérations de Mossoul et Raqqa n’avaient en leur temps pas suscité les mêmes critiques.  Pourtant, Raqqa avait été entièrement détruite, y compris ses infrastructures médicales, comme l’avait confirmé OCHA.  On disait à l’époque, s’est souvenu le représentant, que les opérations étaient nécessaires pour lutter contre les terroristes.  Qu’en était-il des 55 000 habitants de la ville?  Que faut-il dire des actions similaires menées par la coalition internationale en Afghanistan et en Somalie?  Les critiques contre mon pays sont infondées, a tranché le représentant qui s’est dit consterné que les initiateurs de cette « campagne cynique » invoquent le droit humanitaire. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) s’est dit gravement préoccupé par l’escalade militaire en Syrie.  Nous soutenons la lutte contre le terrorisme, mais jamais, jamais les efforts de lutte contre le terrorisme ne peuvent exonérer les parties de leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, y compris les principes de distinction, de précaution et de proportionnalité, s’est-il indigné.  Il a regretté que l’externalisation des travaux relatifs au cessez-le-feu au format Astana n’ait pas fonctionné, et, au vu des nombreux civils qui en payent le prix, il a demandé aux parties de faire preuve de la plus grande retenue.  La Belgique, a-t-il dit, s’attend à ce que l’ONU, et en particulier son Envoyé spécial, ne ménage aucun effort pour rétablir le calme.  La Belgique appelle à une cessation des hostilités à l’échelle nationale ainsi qu’à une solution négociée afin de relever durablement les défis complexes dans le nord-ouest, comme dans l’ensemble de la Syrie.  La seule voie vers la stabilité est une solution politique crédible, a-t-il martelé, une solution facilitée par les Nations Unies, conformément à la résolution 2254 (2015).

Constatant l’impact dévastateur des armes explosives à large portée sur les civils dans les zones habitées, le représentant s’est demandé comment la Syrie peut bombarder des infrastructures civiles en zones urbaines comme des écoles, des hôpitaux, des réseaux d’électricité et de distribution d’eau.  Comment peut-elle faire cela et demander en même temps que la communauté internationale paye pour la reconstruction.  Conformément à la politique européenne, la Belgique, a prévenu le représentant, ne participera pas au processus de reconstruction tant qu’une solution politique ne sera pas solidement en place.

M. BASHAR JA’AFARI (Syrie) a rappelé que cela fait huit ans qu’il y a une volonté de « diaboliser » le Gouvernement syrien pour provoquer l’escalade.  Non sans une pointe d’ironie, le représentant a remercié le Conseil de sécurité d’avoir convoqué cette réunion « pour dénoncer les agressions, les pillages et les vols commis par le régime turc en Syrie ».  Il a dénoncé les agissements des milices « ottomanes du Caucase » installées sur le territoire syrien à la frontière de la Turquie pour provoquer un changement démographique, comme ce que fait Israël en Palestine.  Il y a quelques heures à peine, une réunion a eu lieu à l’aéroport d’Alep entre les groupes terroristes Jabhat el-Nosra et les troupes turques.  Le Conseil devrait chercher à en savoir plus sur une réunion entre des forces turques et des groupes terroristes.  Mais, chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil s’est transformé en un forum de l’OTAN pour discréditer la Syrie et justifier les campagnes « interventionnistes et agressives » des grandes puissances. 

Lorsque la représentante des États-Unis juge utile de qualifier la Turquie « d’alliée de l’OTAN », nous ne sommes plus au Conseil de sécurité de l’ONU mais dans une annexe de l’OTAN, a fustigé le représentant.  Le règlement politique de la crise en Syrie passe d’abord, a-t-il martelé, par l’examen des politiques d’agression de certaines puissances étrangères.  Toutes les forces étrangères présentes à Edleb doivent quitter le territoire syrien, a-t-il réclamé. 

Dans une motion d’ordre, le représentant de la Fédération de Russie a réagi à l’interjection du Président du Conseil de sécurité qui demandait au représentant syrien de respecter le temps de parole.  Nous parlons, a dit le représentant, de la situation de la Syrie.  Faites au moins preuve d’un minimum de respect et laissez le représentant du pays dont on parle aujourd’hui s’exprimer. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a indiqué que le 3 février dernier, le régime syrien qui contrôle certaines régions du pays a délibérément ciblé des forces turques, faisant sept morts parmi les soldats turcs ainsi qu’un personnel civil.  Agissant en légitime défense, les forces armées turques ont répliqué.  Les soldats turcs sont à Edleb, a-t-il rappelé, dans le cadre d’un mémorandum signé par la Turquie et la Fédération de Russie en septembre 2018 afin de stabiliser la région et préserver son statut de zone de désescalade.  Tous les déploiements des forces armées turques, y compris les plus récents, ont été faits en coordination avec les autorités russes.  En dépit de toutes nos notifications, le régime a ouvert le feu sur nos positions turques, a dénoncé le représentant.  Certains postes d’observation sont aujourd’hui encerclés par les amis du régime.  Les autorités turques ont donc été obligées de déployer des troupes supplémentaires pour protéger ses soldats dans les postes d’observation et prévenir de nouvelles escalades à Edleb, en vertu de leurs responsabilités de garant du processus d’Astana.

Le représentant a rappelé que la Turquie accueille quatre millions de réfugiés Syriens, soit le cinquième de la population syrienne d’avant le début d’un conflit qui est né du fait que le « tyran de Damas » n’a pas voulu que son peuple jouisse de ses droits les plus élémentaires.  Maintenant, « il veut entraîner mon pays dans cette sale guerre en ciblant les forces armées turques », a-t-il dénoncé.  Tout acte contre les forces et les civils turcs sera sévèrement puni, a-t-il averti, ajoutant que son pays ne va pas hésiter à user de son droit de légitime défense.  « Je ne trace pas une ligne rouge », a-t-il tempéré, « mais je lance un avertissement ».  Le représentant a rappelé que son Président a demandé au « régime syrien » de retirer ses troupes de ses positions actuelles d’ici à la fin du mois.  Nous espérons que « le régime » et ses alliés prendront des mesures en ce sens.  La Turquie attend également de ses amis et de tous les membres de la communauté internationale qu’ils tiennent compte de ses inquiétudes sécuritaires légitimes. 

M. Sinirlioğlu a rappelé qu’en vertu du mémorandum de Sotchi, la Fédération de Russie est censée, en tant que garant, empêcher toute attaque militaire à Edleb et maintenir le statu quo.  Un nouveau cessez-le-feu a été signé le 12 janvier dernier après la visite du Président Putin en Turquie, a rappelé le délégué, ajoutant que depuis lors, il a été violé plus de 6 500 fois.  Avec plus de trois millions de civils regroupés dans des quartiers étroits à Edleb, la lutte contre le terrorisme ne peut y être menée qu’en violation claire du droit international humanitaire, a tranché le représentant.  La volonté réelle du « régime syrien », a-t-il soupçonné, n’est pas de lutter contre le terrorisme, mais de punir son peuple et de museler l’opposition. 

La Turquie, a averti le représentant, ne retirera pas ses troupes et n’évacuera pas ses postes d’observation.  Quand les bombes tombent, les civils continuent d’affluer vers la frontière turque et cette escalade provoque des réactions en chaîne qui n’affectent pas seulement la Turquie, mais qui vont même au-delà.  Le représentant a donc demandé si le monde est prêt à revivre la crise des réfugiés de 2015 quand plus d’un million de Syriens sont arrivés en Europe.  Il a réclamé des actions concrètes, déplorant le fait que la crise humanitaire d’Edleb n’attire pas assez l’attention des gouvernements et des médias.  Il faut, a-t-il conclu, une désescalade immédiate à Edleb sinon nous courrons inévitablement à l’échec du processus politique. 

M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a indiqué que la lutte contre les terroristes doit se faire dans le respect de la vie des civils, comme cela a été rappelé dans les documents du processus d’Astana.  Il a demandé la mise en œuvre de l’accord de Sotchi sur Edleb, ajoutant qu’il faut s’assurer que cette crise soit réglée par les moyens politiques.  Mais, a-t-il prévenu, les terroristes ne doivent pas exploiter le contexte actuel pour consolider leurs positions et transformer Edleb en refuge sûr, ou pour tuer plus de civils encore et continuer de prendre de larges pans de la population en otage.  Le représentant a conseillé la vigilance pour ne pas confondre protection des civils et protection des terroristes. 

En tant que l’un des garants du processus d’Astana, l’Iran, a-t-il dit, est prêt à user de ses bons offices pour contribuer au règlement politique des différends entre la Turquie et la Syrie sur Edleb.  La prochaine réunion des garants d’Astana, qui aura bientôt lieu à Téhéran, offrira l’occasion d’examiner la situation syrienne.  L’Iran va également recevoir l’Envoyé spécial des Nations Unies, samedi prochain, pour discuter entre autres de la Commission constitutionnelle.  Pour l’Iran, a conclu le représentant, la lutte contre le terrorisme doit se poursuivre et des efforts doivent être faits pour protéger les civils.  La situation à Edleb ne peut être résolue que par des moyens politiques, dans le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de l’indépendance politique de la Syrie, a estimé le représentant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la crise ukrainienne, loin d’être réglée, sera au cœur des efforts du Président en exercice de l’OSCE en 2020

8714e séance – matin
CS/14099

Conseil de sécurité: la crise ukrainienne, loin d’être réglée, sera au cœur des efforts du Président en exercice de l’OSCE en 2020

« Souhaitez-moi bonne chance », a lancé, ce matin, aux membres du Conseil de sécurité le Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. Edi Rama, en invoquant ses efforts de médiation dans l’est de l’Ukraine.  Il a indiqué que la priorité de sa présidence en 2020 sera le règlement de la situation en Ukraine qu’il a qualifiée de « très perturbante » et « d’apocalyptique ».  Lors du débat qui a suivi, cette situation a été l’occasion d’échanges très vifs entre le délégué de la Fédération de Russie et celui de l’Allemagne.

M. Rama, Premier Ministre et Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, présentait les priorités pour 2020 de l’OSCE, plus vaste organisation de sécurité régionale au monde et « partenaire naturel » de l’ONU. Outre la promotion du dialogue et la lutte contre la corruption, M. Rama a indiqué que l’un des objectifs de sa présidence sera de « faire de réelles différences sur le terrain », en premier lieu s’agissant de la crise ukrainienne, qui est « le défi sécuritaire le plus impérieux en Europe. »

Alors que l’OSCE compte une mission d’observation sur le terrain, M. Rama a indiqué que 20 000 incidents se sont produits et que 69 personnes ont trouvé la mort depuis que le cessez-le-feu a été approuvé par les parties.  « Pendant que nous parlons, des hommes et des femmes continuent de mourir en Ukraine », a-t-il déclaré.  Il a demandé à ne pas exclure la création d’une mission de la paix de l’ONU, « car il y a des faits très perturbants qui se déroulent en Ukraine ».

Dès que la nuit tombe, les tirs reprennent, a expliqué le Président en exercice de l’OSCE.  Selon lui, une telle mission pourrait être un outil supplémentaire pour faire respecter le cessez-le feu.  L’OSCE joue son rôle d’observateur mais ne pourra peut-être pas changer la donne pour la population qui souffre, a déploré M. Rama, lors d’une reprise de parole.

Sur le plan diplomatique, à l’instar des délégués, M. Rama a salué la reprise du dialogue dans le cadre du format Normandie, qui réunit la Russie, l’Ukraine, la France et l’Allemagne.  La réunion du 9 décembre 2019, selon ce format, a permis l’adoption de plusieurs mesures de confiance, notamment l’échange de prisonniers, la création de nouvelles zones de désengagement et l’ouverture de nouveaux points de passage le long de la ligne de contact.

« Je ne veux pas prendre parti mais il y des faits dont il convient de tenir compte », a déclaré le Président en exercice de l’OSCE.  Alors que le délégué des États-Unis a qualifié « d’extraordinaire » l’engagement du Président ukrainien pour la paix, M. Rama a aussi salué les efforts de ce dernier en vue de parvenir à un « dialogue plus fructueux ».  Il a, par ailleurs, exhorté la Russie à peser de tout son poids sur les acteurs sur le terrain.

La Russie doit en faire davantage, a appuyé le délégué américain, en appelant ce pays à cesser de livrer des armes, à retirer ses troupes en Ukraine et à respecter les Accords de Minsk.  « Nous ne reconnaîtrons jamais l’annexion de la Crimée par la Russie et les sanctions contre ce pays resteront en place tant que la Russie n’aura pas rendu la Crimée à l’Ukraine et ne respectera pas ses engagements au titre des Accords de Minsk », a-t-il déclaré.

Même son de cloche du côté de ses homologues de l’Allemagne, de l’Estonie et du Royaume-Uni, qui ont dénoncé l’annexion illégale de l’Ukraine par la Russie. Tout en se félicitant que la première visite de M. Rama se soit déroulée en Ukraine, le délégué allemand a exhorté la Russie à respecter les Accords de Minsk. Le travail de la Mission spéciale de l’OSCE est constamment entravé, et ce, principalement dans la zone non contrôlée par le Gouvernement, a-t-il accusé, à l’instar du représentant de la France.

Le Gouvernement de l’Ukraine ne s’est pas acquitté de ses engagements et continue de brandir la soi-disant agression russe, sans présenter aucune preuve de cette agression, a rétorqué le représentant de la Russie.  Indiquant que la crise est loin d’être réglée, il a aussi accusé Kiev de bafouer les droits des minorités russophones et de vouloir revenir sur les Accords de Minsk, endossés par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2202 (2015).

Reprenant la parole, le représentant de l’Allemagne s’est dit « sans voix » après avoir entendu le « conte de fées » narré par son collègue russe.  « Si l’on poursuivait les discussions, la Russie dirait sûrement que c’est l’Ukraine qui a envahi la Russie et non l’inverse », a-t-il ironisé.  Revenant de nouveau sur la « soi-disant agression russe » à l’encontre de l’Ukraine lors d’une reprise de parole, le délégué russe a fait valoir que, « dans l’histoire récente, le seul exemple d’agression est celui du 22 juin 1941 », menée par un pays dont il a tu le nom. 

Si le dossier ukrainien a été au cœur du débat, certaines délégations ont tenu à discuter d’autres enjeux sécuritaires, comme celle du Niger qui a évoqué les conséquences pour la paix et la sécurité en Europe de la dynamique en Afrique subsaharienne.  C’est pourquoi le Niger a appelé au renforcement de la coopération entre l’OSCE et le G5 Sahel, en vue de rechercher des solutions aux défis actuels qui se posent dans la région.

Parmi les autres priorités que s’est donnée l’Albanie à la présidence de l’OSCE figure la promotion du rôle des femmes dans les processus de paix: elle souhaite que ce dossier soit au cœur de la coopération renforcée entre l’OSCE et l’ONU.  Une direction qu’ont approuvée plusieurs membres du Conseil, dont le Viet Nam qui a suggéré d’accentuer cette coopération dans l’agenda « femmes, paix et sécurité ».

La Belgique a souligné à ce sujet le bon exemple du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes, dont ONU-Femmes et l’OSCE partagent la présidence, qui constitue à son avis un « modèle innovant » en participant d’un « multilatéralisme efficace ».  « Il gagnerait à être reproduit dans l’ensemble du système des Nations Unies », a conclu le représentant belge. 

EXPOSÉ DU PRÉSIDENT EN EXERCICE DE L’ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE

Déclarations

M. EDI RAMA, Premier Ministre et Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a dévoilé les priorités de l’OSCE pour 2020, en présentant l’organisation comme un « partenaire naturel » de l’ONU.  Plus large organisation de sécurité régionale au titre du Chapitre VIII de la Charte, l’OSCE est un pilier important d’un ordre international reposant sur des règles, a-t-il souligné.  M. Rama a expliqué qu’il avait l’intention en 2020, en tant que Président en exercice de l’OSCE, de maximiser la coopération pratique avec l’ONU, en vue de remédier aux défis sécuritaires et de promouvoir les droits de l’homme et l’état de droit.  Il a ajouté que le but stratégique de son pays, à la barre de l’OSCE, sera de défendre le multilatéralisme, qui est aujourd’hui attaqué. 

La Présidence sera articulée autour de trois priorités, la première étant de faire de réelles différences sur le terrain.  Ainsi, les efforts de règlement des conflits seront tout en haut de notre ordre du jour, a-t-il assuré.  Évoquant la crise en Ukraine, « le défi sécuritaire le plus impérieux en Europe », M. Rama a indiqué avoir redit au Président ukrainien, lors de sa récente visite en Ukraine, sa détermination à faire avancer les efforts de paix et à pleinement mettre en œuvre les Accords de Minsk.  Il a appuyé les efforts du Groupe de contact trilatéral et du format Normandie, voyant dans la reprise du dialogue dans ce cadre-là, « des pas dans la bonne direction ».  Lors de ses entretiens en Ukraine, M. Rama a reçu une requête pour une extension de la surveillance de l’OSCE dans l’est du pays, dans le cadre du mandat de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine.  Il a appuyé la pleine application du mandat de celle-ci, estimant qu’elle est une contribution essentielle à la paix.  Pour que cela puisse continuer, néanmoins, il a souligné le besoin d’assurer un accès sûr à son équipe sur le terrain et la nécessité de voir une volonté politique des deux côtés.  « Je ne cesserai de plaider pour cela. »  M. Rama a ajouté que le volet sécuritaire est indissociable du volet humanitaire dans le conflit ukrainien. 

Le Président en exercice a indiqué que l’OSCE œuvre également à un possible règlement du conflit au Nagorno-Karabakh et a fait de la désescalade et du dialogue en Géorgie une priorité.  Il a aussi appuyé le processus de règlement transnistrien et les résultats obtenus dans le format « 5+2 ».  Ces résultats devraient contribuer à aboutir à un règlement complet sur la base du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriales de la République de Moldova, avec un statut spécial pour la Transnistrie.  L’Albanie, à la présidence de l’OSCE, veut aussi insuffler un nouvel élan à la promotion du rôle des femmes dans les processus de paix, a-t-il dit, en espérant que ce dossier soit au cœur de la coopération renforcée entre l’OSCE et l’ONU.  Il a également parlé de la lutte contre l’extrémisme violent en indiquant que des efforts renforcés sur cette question pourraient aussi être de mise auprès des deux organisations. 

La seconde priorité de l’Albanie dans son mandat sera la mise en œuvre des engagements pris, a-t-il poursuivi.  Il a indiqué que l’une des priorités sera la lutte contre la corruption, qui « érode les fondements mêmes de nos sociétés ».  Une conférence de haut niveau devrait être organisée sur le sujet à Tirana.  L’OSCE est en passe de devenir un acteur mondial dans la lutte contre la traite des êtres humains, a-t-il ajouté, précisant que l’OSCE compte là encore maximiser son action en partenariat avec l’ONU.  M. Rama a affirmé que l’OSCE mettra aussi l’accent sur la lutte contre la circulation des armes légères et de petit calibre et sur la destruction des excédents de munitions. 

Enfin, la troisième priorité sera le dialogue,  qui serait, selon beaucoup, le but ultime de l’OSCE, a déclaré M. Rama.  « Les divisions dans notre région montrent combien le dialogue est nécessaire. »  Alors que cette année marque le trentième anniversaire de la Charte de Paris pour une nouvelle Europe, M. Rama a fait de la promotion du dialogue au sein des membres de l’OSCE un « engagement personnel ».  Nous redoublerons d’efforts pour promouvoir la tolérance et la non-discrimination, a-t-il assuré.  Alors que le monde marque le soixante-quinzième anniversaire de la libération des camps de concentration nazis, M. Rama a mentionné la récente tenue à Tirana d’une conférence sur la lutte contre l’antisémitisme, en rappelant le sanctuaire que l’Albanie a pu offrir aux Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.  L’Albanie a été l’un des rares pays européens à compter plus de Juifs après la guerre qu’avant, a rappelé M. Rama. 

En conclusion, le Président en exercice a affirmé que l’OSCE est un partenaire fiable de l’ONU, œuvrant pour que la « coopération entre grandes puissances » remplace la « compétition entre grandes puissances ».  Les principes de base de l’Acte final d’Helsinki –respect pour la souveraineté, intégrité territoriale et défense des droits humains– n’ont jamais été autant d’actualité, a-t-il conclu.  « Ensemble, l’ONU et l’OSCE peuvent agir de manière décisive pour la paix.  Aujourd’hui plus que jamais. »

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a salué le programme de la présidence albanaise de l’OSCE, en particulier l’accent mis sur la crise en Ukraine et sur les conflits prolongés dans la région du Caucase et en Transnistrie.  Il s’est également félicité des priorités accordées par l’OSCE à la lutte contre la corruption, à la promotion du dialogue et au combat contre les discours de haine.  En cette année marquant le vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et le vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000), il a jugé important que cette organisation se concentre sur le programme « femmes, paix et sécurité » et sur la lutte contre les violences sexuelles.  Il a, par ailleurs, rappelé qu’en tant que membre fondateur, l’Allemagne contribue financièrement et humainement à son fonctionnement.  À ses yeux, l’OSCE et les Nations Unies ont de nombreuses valeurs en commun, ce qui rend crucial le renforcement de leur partenariat et de leur coopération, conformément au Chapitre VIII de la Charte de l’ONU. 

Abordant la question ukrainienne, le représentant a rappelé l’attachement de son pays à la souveraineté et à l’intégrité territoriales de l’Ukraine.  Dénonçant l’annexion illégale de l’Ukraine par la Fédération de Russie, violation flagrante du droit international, il s’est félicité que la première visite de la présidence albanaise de l’OSCE soit allée en Ukraine.  Cela fait six ans que l’Allemagne, avec la France, au sein du format Normandie, s’emploie à favoriser l’amélioration de la situation, a-t-il dit, notant que des progrès ont été enregistrés à cet égard lors du sommet de Paris, en décembre dernier.  Le délégué a ensuite salué l’action du Président Zelensky depuis son élection, notamment ses efforts en faveur de la restauration du pont de Stanytsia Louhansk, dans la région disputée de Louhansk.  Dans ce contexte, M. Heusgen a exhorté la Russie à respecter les Accords de Minsk et appelé l’ensemble des parties au conflit à permettre l’accès sans entrave à la Mission spéciale d’observation de l’OSCE, dont le travail est constamment entravé, et ce, principalement dans la zone non contrôlée par le Gouvernement.  Le représentant a ainsi regretté que des outils de la Mission aient récemment été la cible d’attaques. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a encouragé une coopération accrue entre le Conseil de sécurité et les arrangements régionaux.  De l’ASEAN le mois dernier, à l’OSCE aujourd’hui et l’Union européenne plus tard ce mois-ci, les contributions des organisations régionales aux travaux du Conseil ne sauraient être assez soulignées, a estimé le représentant.  Selon lui, ces organisations régionales sont en bonne position pour répondre aux crises par des moyens et des solutions adaptées au contexte régional.  Elles peuvent jouer un rôle essentiel dans la prévention des conflits, les bons offices, la médiation, la conciliation et d’autres moyens pacifiques de règlement de conflits, a fait valoir le représentant, en insistant sur le fait qu’elles doivent cependant le faire conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Quant aux domaines de coopération à renforcer entre l’OSCE et le Conseil de sécurité, le Viet Nam a suggéré l’agenda « femmes, paix et sécurité ».  Il a, enfin, salué le rôle positif de l’OSCE dans le suivi de l’application des Accords de Minsk.

Mme HALIMAH DESHONG (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a souligné la nécessité de tenir compte de l’insécurité née des changements climatiques.  C’est pourquoi la délégation salue l’Initiative Environnement et Sécurité (ENVSEC) de l’OSCE et d’autres partenaires, qui a pour but de promouvoir la coopération transfrontière pour la gestion de l’environnement et l’adaptation aux changements climatiques.  De plus, elle a souligné combien l’implication des femmes est cruciale dans les processus politiques, ainsi que ceux liés à la paix et la sécurité.  Alors que la communauté internationale commémore le vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, la représentante a salué les efforts visant à renforcer la mise en œuvre du programme de l’OSCE sur les femmes, la paix et la sécurité. 

En ce qui concerne la crise en Ukraine, Mme Deshong a salué les récentes mesures de confiance adoptées par les parties, y compris les échanges de prisonniers et la détermination de nouvelles zones de désengagement.  La déléguée a dit souhaiter qu’en 2020, toutes les parties puissent œuvrer à la pleine mise en œuvre des Accords de Minsk, sous les auspices du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral.  Au sujet d’autres conflits frontaliers, y compris les situations du Haut-Karabakh et de la Transnistrie, elle a plaidé pour que soient appliqués les principes de la Charte des Nations Unies tels que l’intégrité territoriale et l’autodétermination pour les populations non implantées.

Mme Deshong a terminé son propos en rappelant que Saint-Vincent-et-les Grenadines est un petit État insulaire en développement (PEID) avec une économie ouverte et sans armée pour se défendre contre les nombreux défis sécuritaires complexes de nos jours.  Le pays doit donc son existence pacifique au système multilatéral basé sur des règles.  Un système qui voit toutes les organisations régionales et sous-régionales et leurs membres travailler de concert pour le respect des intérêts communs de paix et de prospérité. 

M. TAREK LADEB (Tunisie) a indiqué que l’OSCE est la plus vaste organisation de sécurité régionale au titre du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.  Il a redit l’importance d’un partenariat renforcé entre l’OSCE et l’ONU, en vue, notamment, de promouvoir la diplomatie préventive, dans le respect des principes de souveraineté et d’intégrité territoriales.  Le délégué tunisien a insisté sur le rôle majeur de l’OSCE pour régler la situation dans l’est de l’Ukraine.  Il a plaidé pour un règlement de la crise en application des Accords de Minsk et appuyé les résultats engrangés dans le cadre du format Normandie.  Il a aussi appelé au règlement des défis émergents en Méditerranée, par le biais notamment d’une coopération stratégique entre l’OSCE et les partenaires régionaux.  Enfin, le représentant de la Tunisie a salué les efforts de l’OSCE en vue de nourrir une culture de dialogue et de paix. 

Pour M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), le règlement du conflit dans l’est de l’Ukraine doit rester la première priorité partagée avec l’OSCE, car il constitue « l’une des violations les plus graves et les plus meurtrières des principes d’Helsinki » qui sont à la base de l’OSCE.  Il a salué le rôle déterminant joué par cette organisation dès le début de cette crise, avant de passer en revue les domaines d’action de sa Mission spéciale d’observation en Ukraine.  La France a saisi cette occasion pour condamner toute action qui porte atteinte à la sécurité du personnel engagé sur le terrain et qui vise à entraver la Mission.  Le mandat de celle-ci doit pouvoir pleinement être mis en œuvre sur l’ensemble du territoire ukrainien, y compris à proximité de la frontière russo-ukrainienne, a exigé M. de Rivière.  Il a également souligné le rôle de l’OSCE pour faciliter le dialogue entre les parties dans le cadre du Groupe de contact trilatéral, un processus qui progresse conjointement avec les discussions politiques au sein du format Normandie, qui bénéficient aujourd’hui d’une nouvelle dynamique depuis le sommet du 9 décembre à Paris.  Il a rappelé que la France, en lien avec l’Allemagne, s’était fortement mobilisée pour que se tienne ce sommet au niveau des chefs d’État, le premier depuis 2016.  Elle attend maintenant de nouveaux progrès opérationnels dans le cadre du Groupe de contact trilatéral afin que le prochain sommet Normandie puisse être organisé au printemps.  S’agissant de la Crimée, la France déplore la militarisation croissante dont la péninsule fait l’objet, ainsi que les violations des droits de l’homme qui visent les minorités, en particulier les Tatars de Crimée.

Au-delà du conflit en Ukraine, la France salue la contribution de l’OSCE au règlement des conflits « prolongés » qui continuent de menacer la paix et la stabilité en Europe et pèsent douloureusement sur la vie quotidienne des populations.  À ce titre, le représentant a salué la récente visite du représentant spécial de l’OSCE en Moldova pour le règlement du conflit de Transnistrie.  Il a également assuré que la France poursuit activement ses efforts de médiation dans le cadre de sa coprésidence du Groupe de Minsk, aux côtés de la Russie et des États-Unis, s’agissant du Haut-Karabakh.

Revenant sur certains thèmes transversaux qui constituent des défis communs et essentiels à l’efficacité de l’OSCE et de l’ONU, il a souligné l’importance de l’égalité femmes-hommes et de l’agenda « femmes, paix et sécurité », un axe fort de la présidence albanaise.  La France réitère en outre son attachement à l’approche multidimensionnelle de la sécurité qui prévaut au sein de l’OSCE et aux engagements pris dans le cadre de la dimension humaine.   Le représentant a salué le travail unique fait par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) et par Harlem Désir en tant que représentant de la liberté des médias.  Il a également salué la place faite par l’Albanie aux questions environnementales ayant un impact sur la sécurité.  « Dans la coopération étroite entre l’ONU et les organisations régionales comme l’OSCE, nous pouvons réinventer un multilatéralisme rénové et revitalisé à même de répondre aux grands défis de notre temps », a conclu M. de Rivière.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a fait valoir que, tout comme l’ONU, l’OSCE est un « pilier de notre système international ».  Dans le cadre de la mise en œuvre de cette responsabilité, il importe, selon la représentante, que l’OSCE change la donne sur le terrain, notamment en Ukraine.  Le peuple de ce pays en ressent le besoin, a-t-elle assuré, se félicitant que le nouveau Président en exercice de l’OSCE ait choisi l’Ukraine pour sa première visite.  Face à cette réalité, le Royaume-Uni appuie un accès sûr et sans entrave à la Mission spéciale d’observation de l’OSCE, qui doit être dotée de ressources adéquates pour s’acquitter de son mandat, a-t-elle déclaré.  Mme Pierce a ajouté qu’à l’instar de ses partenaires du format Normandie, son pays est inquiet du recul des droits fondamentaux en Crimée depuis son annexion illégale par la Fédération de Russie. 

Appelant les autorités russes à libérer les prisonniers politiques détenus en Crimée, la représentante a observé que les mesures de renforcement de la confiance prises par l’Ukraine ont donné lieu à des échanges de détenus.  Elle a par ailleurs exhorté la Russie à travailler au désengagement tout en garantissant le plein accès de la communauté internationale aux zones non contrôlées par le Gouvernement.  Pour la représentante, il convient de rappeler que la Russie a enfreint les règles du droit international et que la Crimée et le Donbass appartiennent à l’Ukraine. 

Après s’être réjouie que la présidence albanaise de l’OSCE ait mis l’accent sur l’importance du respect des Accords de Minsk et sur l’action du Groupe trilatéral de contact, Mme Pierce a rappelé que le Royaume-Uni contribue aux efforts de l’organisation en assumant la présidence de son comité de sécurité.  Notant également avec satisfaction que la coopération de l’OSCE avec l’ONU pour la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme est solide, elle s’est félicitée de la conférence à venir avec le Bureau de lutte contre le terrorisme.  Enfin, elle a souhaité insister sur l’importance de la préservation des mécanismes de renforcement de la confiance, notamment les documents de Vienne et sur le rôle des femmes dans le règlement des conflits. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a dit la nécessité d’appuyer tous les mécanismes et institutions de l’OSCE et ses travaux libres et indépendants.  À cet égard, il a regretté les restrictions imposées à la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine dans les territoires qui ne sont pas contrôlés par le Gouvernement.  Il a déploré les menaces, intimidations et harcèlent dont sont victimes les personnels de cette mission et la destruction de matériel.  M. Jürgenson a condamné l’annexion illégale de la Crimée et de Sébastopol ainsi que l’agression de l’est de l’Ukraine.  Il a jugé indispensable que les organisations de droits de l’homme et les organisations non gouvernementales aient accès à la Crimée conformément aux résolutions des Nations Unies.  Il s’est particulièrement inquiété de la situation au Donbass où une bande de 400 kilomètres de territoire ukrainien le long de la frontière russe reste perméable aux armes et aux personnes.  Dans ce contexte, il a exhorté la Fédération de Russie, en tant que partie au conflit, à mettre en œuvre ses engagements au regard des Accords de Minsk, dont ceux pris dans le cadre du sommet au format Normandie à quatre le 9 décembre 2019.  Il a rappelé que ces Accords comprennent l’imposition d’un cessez-le-feu total et le retour des territoires ukrainiens sous le contrôle du Gouvernement ukrainien, dans l’intérêt de la sécurité régionale. 

Par ailleurs, le représentant s’est inquiété de la consolidation de la présence militaire russe dans les régions occupées en Géorgie, en violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de ce pays.  Il a exhorté la Fédération de Russie à respecter l’accord de cessez-le-feu du 12 août 2008 et de retirer ses forces des territoires géorgiens de l’Abkhazie et des régions de Tskhinvali/Ossétie du Sud.  Il a fustigé les actions russes de déstabilisation en Géorgie et rappelé que la mission d’évaluation de l’Union européenne restait la seule présence internationale sur le terrain.  Il a appuyé les efforts de règlement des conflits du Président de l’OSCE en soulignant l’urgence de permettre une présence transversale de l’OSCE sur tout le territoire géorgien afin de pouvoir prévenir tout incident et renforcer la confiance.  En outre, il a appuyé les efforts de l’OSCE pour résoudre le conflit Transnistrien au Moldova et les travaux du Groupe de Minsk de l’OSCE pour résoudre le conflit de Nagorno-Karabakh. 

M. AOUGUI NIANDOU (Niger) a estimé que la propagation du discours de haine, lequel attise l’extrémisme violent conduisant au terrorisme, constitue un défi stratégique face auquel la communauté internationale doit davantage se mobiliser.  Et cette mobilisation devrait se traduire, a-t-il noté, par des efforts concertés dans les domaines du développement durable, du renforcement des institutions, de l’état de droit et de la bonne gouvernance.

En rappelant le rôle primordial des organisations régionales et sous-régionales dans la gestion et la prévention des conflits, et conformément au principe de subsidiarité, le Niger se félicite des conclusions de la réunion du 9 décembre 2019 sur l’Ukraine, selon le format Normandie, qui a permis l’adoption de plusieurs mesures de confiance, notamment l’échange de prisonniers, la création de nouvelles zones de désengagement et l’ouverture de nouveaux points de passage le long de la ligne de contact.  M. Niandou a souhaité que la lutte contre le terrorisme, les menaces à la paix et à la sécurité, les changements climatiques et la gestion des flux migratoires soient des espaces de coopération à renforcer davantage entre l’OSCE et les autres organisations régionales et sous-régionales, notamment africaines.  Il a rappelé que les dynamiques sécuritaires en Afrique subsaharienne impactent la paix et la sécurité en Europe.  C’est pourquoi le Niger a appelé à l’élargissement et au renforcement de la coopération entre l’OSCE et ces organisations, y compris avec le G5 Sahel, en vue de rechercher des solutions aux défis actuels qui se posent dans la région en matière de paix, de sécurité et de lutte contre la pauvreté.

M. MICHAEL BARKIN (États-Unis) a affirmé que l’OSCE est un partenaire crucial pour défendre la démocratie et les droits humains, notant que les institutions démocratiques sont en péril, en raison des défis liés à la cybersécurité et au non-respect des libertés de croyance, d’expression et de rassemblement pacifique.  Il a aussi dénoncé le non-respect de l’intégrité territoriale de certains pays.  Le délégué a salué les efforts du Président de l’OSCE en exercice pour remédier à ces défis, ainsi que ceux visant à nourrir la confiance entre les 57 États membres de l’OSCE.  Il a insisté sur l’importance de la lutte contre la circulation des armes légères et de petit calibre et contre la corruption.  Nous avons besoin d’un dialogue structuré sur la sécurité, a-t-il dit.

Le représentant a ensuite affirmé que l’agression de la Russie en Ukraine, toujours en cours, a fait 13 000 morts et représente la plus grande menace en Europe depuis la fin de la guerre froide.  Il a salué les récents échanges de prisonniers entre la Russie et l’Ukraine, qui ont été la résultante de « l’engagement extraordinaire du Président ukrainien pour la paix ».  La Russie doit en faire plus, a-t-il déclaré.  Il a appelé ce pays à cesser de livrer des armes, à retirer ses troupes en Ukraine et à respecter les Accords de Minsk.  La Russie, a-t-il ajouté, doit cesser de s’ingérer dans le travail de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine et respecter la souveraineté de l’Ukraine, y compris sur ses eaux territoriales.  « Nous ne reconnaîtrons jamais l’annexion de la Crimée par la Russie et les sanctions contre ce pays resteront en place tant que la Russie n’aura pas rendu la Crimée à l’Ukraine et ne respectera pas ses engagements au titre des Accords de Minsk », a-t-il indiqué.

Le délégué a aussi dénoncé les violations commises contre la souveraineté de la Géorgie et accusé la Russie de ne pas avoir respecté ses engagements en Transnistrie en ne retirant pas ses troupes, empêchant la République de Moldova de se tourner vers l’Europe.  La préservation de la démocratie exige des efforts robustes, a-t-il conclu, ajoutant que les États-Unis continueront d’œuvrer en ce sens.

M. SHAOJUN YAO (Chine) a salué l’action de l’OSCE qui, a-t-il dit, agit dans une « situation complexe », marquée par l’incertitude.  Pour le représentant, la tendance actuelle de l’isolationnisme est contraire au droit international.  De fait, a-t-il mis en garde, aucun pays n’est à l’abri des risques et défis qui en découlent.  Dans ce contexte préoccupant, les organisations régionales et sous-régionales ont un rôle essentiel à jouer pour permettre le règlement de conflits locaux, a-t-il souligné, appelant de ses vœux un renforcement de la coopération des Nations Unies avec ces structures, comme prévu par le Chapitre VIII de la Charte de l’ONU.  Cette coopération est d’autant plus importante qu’elle peut permettre de mener une diplomatie préventive et ainsi empêcher que des conflits se produisent, a fait valoir le délégué.  Il a cependant indiqué que l’action de ces organisations doit se faire dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie), saluant les objectifs de l’Albanie à la présidence de l’OSCE, a tenu à souligner trois points.  En premier lieu, les activités des organisations sous-régionales et régionales doivent être conformes au droit international et respecter les principes de non-ingérence, de souveraineté nationale et d’intégrité territoriale.  Tout le monde doit aussi respecter le principe de non-recours à la force dans le règlement des conflits, a ajouté le représentant.  En deuxième lieu, la diplomatie préventive et le dialogue inclusif doivent être la priorité avec l’appui total de tous les acteurs pertinents, a-t-il souligné en expliquant que tous les efforts doivent être menés pour consolider la confiance et résoudre les conflits pacifiquement.  Troisièmement, selon le représentant, les processus politiques visant à trouver des solutions amicales et durables aux conflits et aux tensions devraient être menés sur une base intra et interrégionale.  M. Syihab a déclaré qu’il apprécie l’engagement de l’OSCE à soutenir le mandat des Nations Unies au niveau régional.  Selon lui l’OSCE a un grand potentiel pour aider à réduire les tensions, à rétablir la confiance et à favoriser la coopération sur des problèmes de sécurité partagés. 

M. MARTHINUS VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud) a salué les efforts réalisés pour améliorer la coopération entre les Nations Unies et l’OSCE.  Il a précisé que cette dernière intervient au Conseil de sécurité conformément à l’Article 54 du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies qui appelle à une forte coopération entre le Conseil et les organisations régionales dans l’intérêt de la paix et de la sécurité internationales.  Il a souligné combien est pertinente la coopération entre les organisations régionales pour partager les expériences et meilleures pratiques en matière de gestion des nouvelles menaces.  Dans ce contexte, il a jugé important d’avoir une coopération plus poussée entre l’Union africaine, et plus particulièrement son Conseil de paix et de sécurité et l’OSCE pour faire face aux défis en matière de sécurité du continent africain.

Pour le représentant, une telle coopération serait aussi de nature à promouvoir la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 16 (ODD16) consacré à « la paix, la justice et des institutions fortes » et l’ODD 17 consacré aux partenariats.  Par ailleurs, M. Van Schalkwyk a salué la tenue de la réunion des ministres des affaires étrangères des quatre pays –France, Russie, Ukraine et Allemagne– à Paris en décembre 2019, avant de se féliciter des efforts de l’OSCE en Ukraine pour la mise en œuvre des Accords de Minsk de 2015 avalisés par la résolution du Conseil de sécurité 2202 (2015). 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a reconnu que les priorités de l’OSCE sont cohérentes avec le travail qui se fait aux Nations Unies et au Conseil de sécurité, par exemple pour garantir la continuité des engagements politiques, la prévention des escalades, l’amélioration de la sécurité et le renforcement du dialogue.  Il a aussi apprécié sa vision qui est également en ligne avec le multilatéralisme, la sécurité régionale et les attentes en matière de paix par le dialogue politique.  Le représentant a salué la tenue, le 9 décembre dernier à Paris, de la réunion du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral, qui a abouti à un échange de 200 prisonniers entre la Russie et l’Ukraine le 29 décembre sous le contrôle et la facilitation de l’OSCE.  La récente visite de M. Rama en Ukraine a aussi été une reconnaissance importante des efforts de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE dans le pays, selon le représentant.  Il a émis l’espoir de voir le règlement de ce conflit rester un objectif prioritaire pour l’OSCE, en vue d’avancer, comme le souhaite aussi le Conseil de sécurité, vers une sortie pacifique du conflit en appliquant les Accords de Minsk. 

Le représentant a aussi apprécié que la lutte contre la violence contre les femmes soit inscrite à l’agenda de l’OSCE parmi les thèmes urgents.  L’organisation est un « axe régional » important qui peut atteindre des millions de personnes et, ainsi, les aligner sur les intérêts les plus élevés des Nations Unies, a-t-il relevé.  De même, il a salué sa disposition à promouvoir des dialogues pour renverser la tendance à l’augmentation des crimes et discours de haine et promouvoir la tolérance.  Enfin, M. Singer Weisinger a réitéré son appui aux efforts que déploie l’OSCE, avec les coprésidents du Groupe de Minsk, sur le conflit du Nagorno-Karabakh, de même que pour le processus de solution en Transnistrie. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a souhaité un renforcement de la coopération entre l’OSCE et l’ONU.  Il a invité la Présidence albanaise à se conformer strictement à son mandat et à jouer le rôle de « courtier honnête », en étant neutre.  Il a insisté sur le potentiel de renforcement du rôle de l’OSCE, notamment dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  Il a dénoncé les « approches consensuelles » prônées par certains pays dans la lutte contre l’extrémisme violent.  Le délégué a souhaité l’élaboration d’un accord universel pour un comportement responsable dans le domaine de l’information et de l’Internet.

Il a appuyé  les efforts de l’OSCE s’agissant de la situation au Nagorno-Karabakh et ajouté que son pays œuvre à un rapprochement des positions en Transnistrie.  Il a loué le rôle constructif de l’OSCE dans la crise en Ukraine, avant d’insister sur l’importance des Accords de Minsk de 2015, endossés par le Conseil de sécurité dans la résolution 2202 (2015).  Il a appelé la Mission spéciale d’observation de l'OSCE en Ukraine à rester en contact étroit avec les autorités locales du Donbass.  Il a exhorté la Mission à faire en sorte que les rapports sur les victimes dans le Donbass soient bien publiés.  « Nous sommes loin d’une solution », a-t-il convenu.

Il a dénoncé les déclarations émanant de Kiev attestant selon lui d’une volonté de revenir sur les Accords de Minsk et la résolution précitée.  Il a demandé la réaction de ses collègues français et allemand sur les visées révisionnistes de Kiev.  Le Gouvernement de l’Ukraine, a-t-il déclaré, ne s’est pas acquitté de ses engagements et continue de brandir la soi-disant agression russe, sans présenter aucune preuve de cette agression.  Alors que l’Ukraine semble vouloir continuer dans cette voie, le délégué a invité à relire les Accords de Minsk.  Il est plus facile de dire que la Russie est partie au conflit et donner carte blanche aux Ukrainiens pour leurs discriminations contre les minorités et les absoudre de leurs engagements, a-t-il estimé.  Il a indiqué que la Crimée est un territoire ouvert, qui a accueilli sept  millions de touristes. Le délégué a insisté sur l’importance de l’implication directe de la population locale pour régler la situation dans l’est de l’Ukraine, comme cela se fait ailleurs, au Yémen ou en Colombie.  Il a balayé les mesures de nature à nourrir les confrontations et dénoncé les attaques contre les droits de certaines minorités russophones.  Il faut faire l’inverse et rétablir la confiance, a-t-il plaidé, en faisant observer que l’OSCE peut contribuer à ce processus.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a estimé que, « en tant que plus grande organisation régionale de sécurité, l’OSCE joue un rôle clef dans la promotion du dialogue, le renforcement de la confiance et la prévention des conflits, et ce, des Balkans occidentaux à l’Asie centrale ».  Saluant la priorité accordée par l’OSCE à la crise ukrainienne, il a estimé que cette dernière constitue l’une des plus importantes violations des principes fondateurs de l’organisation, mais aussi de la Charte de l’ONU.  Après avoir souligné le rôle constructif que joue l’OSCE dans ce dossier, notamment au travers de sa Mission spéciale d’observation, le représentant a souhaité que le mandat de cette mission soit respecté, ce qui suppose un accès sûr, inconditionnel et sans entrave à tout le territoire ukrainien, y compris en Crimée et le long de la frontière avec la Russie.  Il a appelé toutes les parties à travailler en faveur d’une solution durable, fondée sur le respect de la souveraineté, de l’indépendance de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, plaidant à cette fin pour le dialogue, tant en format Normandie que dans le cadre du Groupe de contact trilatéral.

M. Pecsteen de Buytswerve a ensuite salué la volonté de l’OSCE de combattre la violence contre les femmes et les filles et de promouvoir leur rôle en matière de paix et de sécurité.  Vingt ans après l’adoption de la résolution 1325, l’intégration de la dimension genre dans toutes nos activités est une priorité, a-t-il dit, se félicitant que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales tienne une place essentielle dans le concept de sécurité globale de l’OSCE.  Il a cependant constaté une inquiétante dégradation de la situation des droits humains dans de nombreuses régions où l’OSCE est active, notamment due à la montée des discours de haine.  Enfin le délégué a salué la bonne coopération entre l’OSCE et l’ONU en matière de lutte contre les menaces transnationales, comme le terrorisme, le crime organisé et la traite des êtres humains.  Il a estimé à cet égard que le Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes, dont ONU-Femmes et l’OSCE partagent la présidence, constitue un « modèle innovant » et participe d’un « multilatéralisme efficace ».  « Il gagnerait à être reproduit dans l’ensemble du système des Nations Unies », a-t-il conclu. 

Reprenant la parole, le représentant de l’Allemagne s’est dit « sans voix » après avoir entendu le « conte de fées » narré par son collègue russe.  « Si l’on poursuivait les discussions, la Russie dirait sûrement que c’est l’Ukraine qui a envahi la Russie et non l’inverse », a-t-il ironisé.  Il a ensuite invité son homologue russe à dire ce qui s’est passé après la signature des Accords de Minsk, « alors que la disposition principale était le cessez-le-feu qui n’a pas été appliqué ».  Pour le représentant allemand, la poursuite des opérations russes empêche les Ukrainiens d’être convaincus de l’utilité de ces accords.  Il a d’autre part regretté que son collègue russe n’ait pas évoqué le sort du vol MH17, abattu en 2014 dans l’est de l’Ukraine, faisant 298 morts.  « Certains avaient célébré la chute de cet avion et aucune réparation n’a été offerte depuis », a-t-il observé.

En réponse, le représentant de la Fédération de Russie s’est déclaré « impressionné par la mémoire institutionnelle » de son homologue allemand s’agissant des Accords de Minsk.  Revenant sur la « soi-disant agression russe » à l’encontre de l’Ukraine, il a fait valoir que, « dans l’histoire récente, le seul exemple d’agression est celui du 22 juin 1941 », menée par un pays dont il a tu le nom.  Dans ce contexte, il a appelé l’Allemagne à faire montre de responsabilité, comme elle le fait au travers de ses propositions très utiles, notamment sur le programme « femmes, paix et sécurité ».  Pour le délégué russe, « l’absence de volonté des autorités ukrainiennes de discuter avec leur population est contraire à ces principes ».

Reprenant la parole, le Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a fait remarquer que, « pendant que nous parlons, des hommes et des femmes continuent de mourir en Ukraine ».  M. Rama a indiqué que 20 000 incidents se sont produits et que 69 personnes ont trouvé la mort depuis que le cessez-le-feu a été approuvé par les parties, même si le nombre de victimes est à la baisse.  Il a salué les efforts du Président ukrainien, qui essaye de parvenir à un dialogue plus fructueux.  « Je ne veux pas prendre parti mais il y a des faits dont il convient de tenir compte », a-t-il dit.  Il a exhorté la Russie à peser de tout son poids sur les acteurs sur le terrain.

Sur le terrain précisément, la situation est apocalyptique, a dit M. Rama, en évoquant notamment des malades en phase terminale dans l’incapacité de traverser des points de passage, un pont notamment, pour se rendre à l’hôpital.  Il ne doit pas être difficile de reconnaître que ces personnes sont des sujets de Dieu, avant d’être russes ou ukrainiennes, a-t-il dit.  « Souhaitez-moi bonne chance sur ce dossier. »  Il a demandé à ne pas exclure la création d’une mission de la paix de l’ONU « car il y a des faits très perturbants qui se déroulent en Ukraine ».  Dès que la nuit tombe, les tirs reprennent, a-t-il expliqué.  Une telle mission pourrait être un outil supplémentaire pour faire respecter le cessez-le feu.  L’OSCE joue son rôle d’observateur mais ne pourra peut-être pas changer la donne pour la population qui souffre, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur les océans: la réunion préparatoire s’achève à New York en ayant donné les grandes lignes de la déclaration à adopter en juin à Lisbonne

Soixante-quatorzième session, Réunion préparatoire à la Conférence sur les océans,
Matin & après-midi
MER/2123

Conférence sur les océans: la réunion préparatoire s’achève à New York en ayant donné les grandes lignes de la déclaration à adopter en juin à Lisbonne

Au deuxième jour de la réunion préparatoire de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les océans, les discussions se sont poursuivies sur les éléments essentiels du texte à adopter à Lisbonne en juin.  De nombreux participants ont demandé que la future déclaration s’appuie sur les deux rapports scientifiques faisant référence en la matière, pour justifier une action urgente en matière de protection des océans et encourager tous les secteurs à s’impliquer, notamment les jeunes, les communautés locales et les autochtones.

C’est aussi ce qu’a dit, en faisant le bilan de la réunion, M. Miguel de Serpa Soares, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, en rappelant qu’il faut plaider, dans la déclaration, pour une action concertée mondiale axée sur la science.  Il faut également que le futur texte tienne compte des connaissances des populations autochtones, a confirmé M. Alexander Trepelkov, Directeur de la Division des objectifs de développement durable, qui s’exprimait au nom du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales.  Selon le Directeur, « nous sommes habités par un sentiment d’urgence », étant donné que quatre des cibles de l’objectif de développement durable 14 (ODD 14) arrivent à échéance en 2020.  Il a donc souhaité que les résultats de la conférence de Lisbonne soient ambitieux et s’alignent sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur les changements climatiques. 

La Conférence, qui se tiendra du 2 au 6 juin, doit aboutir à une « déclaration, convenue au niveau intergouvernemental, brève et concise, orientée vers l’action et mettant clairement l’accent sur les domaines d’action reposant sur la science et l’innovation qui favorisent la réalisation de l’objectif 14 », l’ODD consacré aux océans, mers et ressources marines.

D’emblée la Chine a jugé utile de rappeler que cette déclaration doit être adoptée par consensus au niveau intergouvernemental, déduisant qu’elle devra donc se limiter à l’ODD 14 et précisant qu’elle ne sera pas juridiquement contraignante.  Cet appel a reçu un écho différent auprès de Monaco pour qui la Conférence sur les océans n’est pas déconnectée d’autres processus et « n’opère pas dans un vacuum ».  La délégation monégasque a toutefois demandé de veiller à ne pas dupliquer ces autres processus. 

Concrètement, pour que le consensus prévale, le représentant chinois a recommandé que le document final n’aborde pas de questions délicates, un point de vue partagé par son homologue russe pour lequel la déclaration devrait éviter de diviser et surtout mettre en avant la science au service de tous.  Elle devrait aussi inciter la communauté internationale à mettre en place le concept de communauté marine et de planète bleue, a poursuivi le représentant de la Chine, en arguant que « nous sommes une communauté de pays reliés par les mers et, par conséquent, nous devons développer la coopération, les échanges technologiques et les économies bleues en optant pour des approches ancrées sur la science et des données scientifiques ».  Il a toutefois insisté sur le caractère volontaire de ce processus.

Face à la détérioration constante et alarmante de la santé des océans qui a été documentée dans deux récents rapports scientifiques -les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et de la Plateforme intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)-, son homologue du Royaume-Uni a demandé que le document final prenne acte de ces rapports en arguant qu’il s’agit précisément de données scientifiques.  Monaco a renchéri en disant qu’« il n’est pas question de les ignorer ».  Ils apportent une très large base scientifique là où le doute n’est plus permis, a tranché le représentant en refusant l’idée de délais supplémentaires pour une action tangible.  À cet égard, il s’est dit préoccupé par l’incapacité flagrante de réaliser les cibles fixées pour 2020 en termes d’action pour les océans, et a appelé à redoubler d’efforts notamment pour s’attaquer à la pollution plastique marine et promouvoir les modes de production et de consommation durables. 

Pour le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), les rapports du GIEC et de l’IPBES sont clairs: nous devons revoir nos modèles, passer à une économie circulaire et opter pour des solutions vertes.  Cela suppose que l’on se base sur la science et l’innovation.  La déclaration pourrait appeler à une gestion efficace des océans pour une bonne mise en œuvre des ODD, a proposé le PNUE, en les ancrant dans la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes.

Pour insuffler un esprit plus proactif, les Émirats arabes unis ont proposé d’intégrer à la déclaration une série de solutions.  En outre, les Émirats ont appelé à s’appuyer sur les engagements volontaires pris à ce jour en faveur des océans, notamment dans les domaines de la lutte contre la pollution plastique.  Les Émirats arabes unis et la Barbade encouragent l’implication des jeunes et des communautés locales dans ces efforts, d’autres délégations ajoutant les communautés autochtones. 

S’agissant du financement, notamment pour la mise en place des aires marines protégées, les Émirats arabes unis ont recommandé d’adopter des approches novatrices à l’instar de ce qui s’est fait aux Seychelles.  De manière plus générale, ils ont demandé au monde de la finance d’intégrer l’aspect « résilience » dans leurs financements.  Cuba a même proposé la mise en place d’un fonds mondial pour financer les recherches sur les océans en partant du principe qu’il s’agit d’un patrimoine commun de l’humanité. 

De nombreuses délégations, notamment celles de petits États insulaires, comme Tonga, ont à nouveau insisté sur le lien qui existe entre changements climatiques et océans.  Elles ont mis l’accent sur l’importance de la science pour orienter les politiques de protection de la santé des océans et la préservation des écosystèmes marins.  Le Honduras a conseillé de mettre l’accent sur des technologies de traitement et d’assainissement des eaux usées qui sont déversées dans les océans, tout en soulignant les efforts à faire pour que ces technologies soient accessibles et abordables pour les pays en développement.  Israël a, lui aussi, insisté sur la priorité à accorder à la lutte contre la pollution marine en utilisant la technologie, celle-ci permettant de remédier à la pollution de manière plus durable et de lutter contre les espèces marines nocives pour l’environnement marin. 

L’Islande a demandé que le processus en cours entérine les mécanismes et accords existants comme la Convention sur le droit de la mer et le Comité préparatoire à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (le « BBNJ »), sans préjuger des résultats de ce processus.  Son représentant a souligné l’énorme avantage que représentent des océans sains, pour la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté.  Il a demandé que cela soit mis en exergue dans la déclaration.  S’agissant des défis à relever, il a pointé du doigt le manque d’investissements et de volonté politique.  La déclaration doit, selon l’Islande, appeler à des actions urgentes dans tous les secteurs et dans tous les pays.  De son côté, le Mexique a plaidé pour l’opérationnalisation du mécanisme en ligne pour les échanges technologiques.

Certaines entités onusiennes sont également intervenues pour apporter leur concours à la Conférence sur les océans de Lisbonne.  Le PNUE travaille déjà aux préparatifs de la Conférence où il sera représenté au plus haut niveau, a assuré son représentant.  L’UNESCO a insisté sur l’importance des données fiables sur les océans et les écosystèmes marins.  L’organisation a aussi souligné la nécessité de bien traiter ces données pour favoriser une action en pleine connaissance de cause.  Le représentant de l’Université de Lisbonne, qui est partenaire de l’UNESCO pour ce qui est du patrimoine culturel sous-marin, a insisté sur le fait qu’il s’agit d’un patrimoine commun de l’humanité.  Il a souhaité que cette question du patrimoine culturel sous-marin soit également abordée à Lisbonne en juin.

La représentante du Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) s’est, elle aussi, appuyée sur le rapport du GIEC, en insistant sur les liens entre l’ODD 14 et la lutte contre les changements climatiques.  La CCNUCC appelle à limiter l’augmentation des températures et à lutter contre l’acidification des océans, a-t-elle rappelé.  Son Secrétariat entend appuyer les parties et assurer la liaison avec d’autres entités des Nations Unies, notamment avec la Conférence sur les océans.

L’organisation « Ocean Unite » et les 25 partenaires de « Rise-Up for the Ocean » ont appelé à lancer une véritable révolution en restaurant la vie dans les océans, en investissant dans un avenir à zéro émission carbone et en misant sur une économie durable et circulaire, un appel appuyé par « Ocean Conservacy ».  Pour réussir à relever le défi que pose la santé des océans, le Fonds mondial pour la nature a fait un plaidoyer en faveur de la participation des communautés autochtones aux efforts de préservation et de protection de la mer et des écosystèmes côtiers.

Dans l’après-midi, les représentants d’États Membres et de la société civile ont poursuivi leur plaidoyer en faveur d’une déclaration ministérielle qui soit à la hauteur des enjeux, sachant que, comme l’a rappelé la Suède, 2020 est une année charnière, puisque quatre des cibles de l’ODD 14 arriveront à échéance.

Le Costa Rica a demandé un document ambitieux, qui solidifie les alliances et promeuve le renforcement des capacités, notamment en faveur des pays en développement.  Dans le même esprit, l’Italie a promis de contribuer au fonds d’affectation spéciale dédié à soutenir la participation à la Conférence des délégations des pays en développement, notamment les petits États insulaires en développement (PEID). 

Les délégations sont revenues sans cesse sur le lien étroit qui existe entre santé des océans et changements climatiques.  L’Italie a ainsi souhaité que la déclaration établisse des synergies entre les changements climatiques et toutes les autres questions de la sphère environnementale, y compris la question cruciale des émissions de gaz à effet de serre par le transport maritime. 

Il faut aussi se concentrer sur la pollution causée par les outils et équipements de pêche, a exigé l’organisation non gouvernementale « Global Ghost Gear Initiative » en alertant sur les centaines de tonnes de matériels de pêche qui dérivent dans les océans et contribuent à la destruction de la faune et la flore marines.  C’est pour y remédier que « Monterey Bay Aquarium » a insisté sur l’aquaculture de petite échelle et une action vigoureuse contre la pollution des plastiques, en commençant par réduire leur production.  Le Pérou a, quant à lui, rappelé qu’il fallait, dans la déclaration, mentionner la pêche durable et l’utilisation durable des ressources biologiques marines.

Le représentant des îles Vierges britanniques a aussi souligné l’importance, dans la déclaration, de tenir compte des collectivités locales dans la conservation des ressources biologiques marines.  Il est vrai, ont renchéri les Fidji, que la déclaration politique doit être faite « pour les peuples ».  Elle ne doit pas être prisonnière des lourdeurs onusiennes.  Le délégué de ce pays a souhaité que ce texte vienne résoudre les questions existentielles des populations, citant par exemple Ana, une Fidjienne obligée d’acheter du poisson en conserve pour pallier la pénurie de poisson dans les eaux environnantes où elle a coutume de pêcher. 

Comme dans la matinée, des orateurs ont souligné que la science, la technologie et l’innovation doivent être prioritaires pour trouver des solutions aux principaux problèmes des océans.  C’est ce qu’a dit par exemple l’organisation « Shorab Ali Dewan Cultural Society ».  Le problème est que le secteur des recherches océaniques représente à peine 0,4% des dépenses mondiales relatives à la recherche scientifique, a déploré la France en recommandant une plus grande implication des États dans le financement de ce secteur.

L’organisation « Observatory for Marine and Coastal Governance-Center for Social and Environmental Studies » a insisté pour que la science soit accessible au public, y compris aux populations autochtones, de même que l’ONG « Children for the Oceans », qui a conseillé de s’atteler à la vulgarisation des connaissances océanographiques.  C’est une question sur laquelle travaille d’ailleurs la « National Marine Educators Association ».

En conclusion de ces deux journées de réunion préparatoire, les deux cofacilitateurs du processus préparatoire et des négociations sur le texte de la déclaration de la Conférence sur les océans de 2020, M. Martin Bille Hermann (Danemark) et Mme Ngedikes Olai Uludong (Palaos), ont mis l’accent sur l’urgence mondiale à laquelle les océans font face.  Ils ont signalé que le projet de déclaration serait disponible avant que ne commencent les consultations officieuses à la mi-mars, étant donné que le projet de déclaration final doit être prêt début mai.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité se prononce pour un renforcement des efforts de contrôle et de traçage des armes légères et de petit calibre

8713e séance – matin
CS/14098

Le Conseil de sécurité se prononce pour un renforcement des efforts de contrôle et de traçage des armes légères et de petit calibre

À l’occasion du rapport biennal du Secrétaire général sur les armes légères et de petit calibre (ALPC), les membres du Conseil de sécurité ont apporté, ce matin, leur soutien aux efforts déployés ces deux dernières années aux niveaux national, sous-régional, régional et mondial pour renforcer le contrôle de ces armes, tout en jugeant que des progrès doivent être faits pour empêcher que l’accumulation déstabilisante, le transfert illicite et le détournement des ALPC continue à alimenter les conflits armés et la criminalité généralisée. 

Comme l’a souligné en introduction Mme Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, la majorité des actes de violence dans les situations de conflit et de post-conflit sont perpétrés à l’aide d’armes légères et de petit calibre.  À l’échelle mondiale, les ALPC étaient à l’origine de près de 50% des morts violentes entre 2010 et 2015, ce qui représente plus de 200 000 morts par an, a-t-elle précisé, ajoutant que, d’après les estimations, un milliard de ces armes sont en circulation dans le monde et que leur utilisation, en situation de conflit ou non, est généralisée dans les régions et les sous-régions d’Amérique, d’Afrique et d’Europe du Sud. 

De fait, a-t-elle souligné, de nombreuses crises aujourd’hui traitées par le Conseil de sécurité, de la République démocratique du Congo à Haïti en passant par le Mali, ont été aggravées par la disponibilité et la circulation incontrôlée des ALPC et de leurs munitions.  Mme Nakamitsu s’est déclarée particulièrement préoccupée par le détournement de ces armes au bénéfice d’organisations criminelles et de groupes terroristes.  Les armes légères illicites, a-t-elle indiqué, proviennent des stocks mal gérés dans les pays pauvres, des champs de bataille où elles sont saisies ou encore d’États faillis.  Leur circulation a des impacts forts sur l’extrémisme violent, notamment au Sahel et dans la sous-région d’Afrique centrale.  La Haute-Représentante a également jugé alarmante l’entrée continue d’armes en Libye, de même que les flux de ces armes au Soudan du Sud.  Elle a noté par ailleurs, qu’en Haïti, où plus de 270 000 armes illicites sont aux mains des civils, la criminalité violente a atteint des niveaux record. 

Après d’être félicitée de la priorité donnée par le Secrétaire général au « désarmement qui sauve des vies », Mme Nakamitsu a souligné les efforts menés à tous les niveaux en faveur du contrôle des ALPC.  Ces efforts, a-t-elle relevé, comprennent les travaux réalisés dans le cadre du Programme d’action sur les ALPC et de son Instrument international de traçage, notamment les conclusions de la Troisième Conférence d’examen, le Protocole sur les armes à feu se rapportant à la Convention contre la criminalité transnationale organisée et le Traité sur le commerce des armes.  Elle a aussi applaudi les efforts menés sur les plans régional et sous-régional, en particulier l’initiative de l’Union africaine (UA) visant à « Faire taire les armes ».  Une « importante initiative » à laquelle le Conseil de sécurité a apporté son soutien dans la résolution 2457 (2019).

Saluant à son tour l’initiative de l’UA, la Belgique, Présidente du Conseil de sécurité pour le mois de février, a estimé qu’un accent particulier serait des plus nécessaires dans la région du Sahel et en Afrique centrale.  Le Niger s’est d’emblée réjoui de l’attention toute particulière que le Secrétaire général porte au Sahel, où l’impact du trafic des armes légères s’est amplifié avec la crise libyenne.  « Continuer à livrer des armes à la Libye, malgré l’embargo, c’est continuer à inonder le Sahel d’armes, c’est contribuer à la déstabilisation de la région et c’est encourager les graves atteintes à la sécurité humaine et aux droits de l’homme », a-t-il mis en garde, appelant, de fait, au strict respect de l’embargo en Libye, condition indispensable pour le retour de la sous-région à la paix et à la stabilité. 

Un appel repris par la France qui a, par ailleurs, estimé que les engagements pris par les États, lors de la Troisième Conférence d’examen du Programme d’action qu’elle a présidée en 2018, devraient permettre de renforcer concrètement la prévention et la lutte contre le détournement des ALPC, ce sujet étant l’objet principal de la prochaine Réunion biannuelle en juin prochain.  Favorable au renforcement du rôle de l’ONU dans les efforts de lutte contre la circulation illicite des ALPC, la Fédération de Russie a jugé que les efforts en matière de traçage sont pour l’heure insuffisants.  Elle a cité sa « législation étoffée » qui pourrait servir d’exemple.  Adopté en 2005, l’Instrument international de traçage pourrait être complété, a estimé la Belgique, par une annexe qui tienne compte de l’augmentation du nombre d’armes en polymère et d’armes modulaires.

Les Nations Unies doivent aussi tenir compte des instruments comme le Recueil de modules concernant la maîtrise des armes légères et les Directives techniques internationales sur les munitions, ce, afin de promouvoir les meilleures pratiques dans la gestion des stocks, a fait valoir le Royaume-Uni, se disant prêt à participer au Groupe d’experts gouvernementaux sur la question des stocks d’armement et de la destruction des excédents.  Beaucoup reste toutefois à faire pour créer un commerce réglementé, a reconnu le Royaume-Uni, appelant à l’universalisation du Traité sur le commerce des armes.  Le Secrétaire général, ont commenté les États-Unis, doit établir une distinction claire entre la possession légale d’armes légères, l’utilisation illégale de telles armes en dehors des conflits et le trafic illicite des ALPC qui alimentent les conflits et l’instabilité. 

Tenter de contrôler la prolifération, la circulation et le trafic illicites des ALPC, sans avoir une bonne compréhension du problème, c’est tenter de contrôler la propagation d’une maladie infectieuse sans en connaître les origines ni les vecteurs de transmission, a souligné le Directeur adjoint de « Conflict Armament Reseach (CAR) », en se réjouissant du débat que le Conseil a tenu aujourd’hui.  Il a vanté le travail de son institut de recherche qui, grâce à la collecte et à la ventilation des données, peut offrir une image « globale et dynamique » des chaînes d’approvisionnement en armes et détecter les faiblesses qui facilitent les détournements vers des utilisateurs non-autorisés.  Une bonne évaluation des risques de détournement, a-t-il poursuivi, doit pouvoir s’appuyer sur des preuves concrètes.  Le Directeur adjoint a ainsi attiré l’attention sur le projet « iTrace » qui a permis de documenter plus de 6 000 armes et 590 000 munitions.  Il s’est enorgueilli d’une base de données « considérable et holistique » propre à renforcer l’efficacité des régimes des sanctions et des mécanismes de surveillance. 

ARMES LÉGÈRES ET DE PETIT CALIBRE – (S/2019/1011)

Déclarations

Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, a rappelé qu’au vu de la gravité des défis engendrés par les armes légères et de petit calibre, le Conseil de sécurité a demandé, à partir de 2008, au Secrétaire général de faire rapport tous les deux ans sur cette question.  Depuis lors, six rapports du Secrétaire général ont été présentés.  À l’occasion du dernier en date, elle a souhaité s’attarder sur deux thèmes d’importance pour le Conseil de sécurité: le rôle des armes légères et de petit calibre illégales et leurs munitions dans les conflits d’une part, l’impact transversal et la grande portée des flux illicites de telles armes d’autre part, deux thèmes abordés par les résolutions 2117 (2013) et 2220 (2015).

Tout d’abord, a souligné Mme Nakamitsu, l’accumulation déstabilisatrice, les transferts illégaux et le détournement des ALPC continuent de provoquer, d’attiser et d’exacerber les conflits armés et la criminalité.  Dans les situations de conflit et de post-conflit, a-t-elle relevé, la majorité des actes de violence sont perpétrés à l’aide de ces armes.  À l’échelle mondiale, les armes de petit calibre étaient à l’origine de près de 50% des morts violentes entre 2010 et 2015, ce qui représente plus de 200 000 morts par an.  D’après les estimations, un milliard de ces armes seraient en circulation dans le monde et leur utilisation en situation de conflit ou non est généralisée dans les régions et les sous-régions d’Amérique, d’Afrique et d’Europe du Sud.  De fait, a-t-elle noté, aucun État n’est à l’abri de ce fléau.  De nombreuses crises actuelles ou passées traitées par le Conseil de sécurité, de la RDC à Haïti en passant par le Mali, ont été aggravées par la disponibilité et la circulation incontrôlée d’armes légères et de petit calibre. 

Notant que les mandats de neuf opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales prennent en compte les questions liées aux armes classiques, et donc par voie de conséquence, aux ALPC et à leurs munitions, la Haute-Représentante a mis l’accent sur le mandat du nouveau Bureau intégré des Nations Unies en Haïti, qui présente une fonction consultative en matière de violence des gangs, de réduction de la violence communautaire et de gestion des armes et munitions.  Sa création atteste, selon elle, de l’importance d’une bonne gestion de ces questions si l’on veut réduire les violences. 

Mme Nakamitsu s’est déclarée particulièrement préoccupée par le détournement des armes au bénéfice des gangs, d’organisations criminelles et de groupes terroristes.  Les armes légères illicites proviennent des stocks mal gérés dans les pays pauvres, des champs de bataille où elles sont saisies ou encore d’États faillis.  Leur circulation a des impacts forts sur l’extrémisme violent, notamment au Sahel et dans certaines zones de la sous-région d’Afrique centrale.  L’entrée continue d’armes en Libye reste un sujet d’inquiétude, de même que les flux de ces armes au Soudan du Sud, qui mettent en péril la sécurité des personnels des Nations Unies sur place et empêchent la mission onusienne de mener à bien son mandat.  Par ailleurs, en Haïti, où plus de 270 000 armes illicites sont aux mains des civils, la criminalité violente a atteint des niveaux record, a-t-elle observé. 

Abordant le thème de l’impact négatif des flux illicites d’ALPC, la Haute-Représentante a fait valoir, en écho à la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité de 2007, que l’accumulation excessive, le commerce illicite et le détournement de ces armes a des conséquences pour l’ensemble des piliers de l’ONU, à savoir la paix et la sécurité, les droits de l’homme, l’état de droit et le développement.  Les armes de petit calibre continuent de faciliter une large gamme d’actes qui constituent des violations des droits humains, notamment la mort ou la mutilation d’enfants, le viol ou d’autres formes de violence sexuelle.  La violence armée perpétrée au moyen de ces armes sape les mécanismes de règlement pacifiques des conflits et représente un facteur d’insécurité alimentaire et de déplacement des populations.  C’est ainsi qu’au Yémen, quelque quatre millions de personnes sont aujourd’hui déplacées dans un conflit alimenté par les flux illicites d’armes. 

Avec l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030, la communauté internationale a reconnu que ce développement ne pourra être réalisé sans paix et sans sécurité, a poursuivi Mme Nakamitsu.  De plus, grâce à l’adoption de la cible 16.4, qui prévoit une réduction significative des flux d’armes illicites, les États ont pris acte du rôle effectif du contrôle des armes de petit calibre dans la réduction de la violence armée et, donc, dans les chances qu’ont les communautés de parvenir au développement durable.  Dans son Programme de désarmement, a-t-elle poursuivi, le Secrétaire général donne la priorité au « désarmement qui sauve des vies », notamment par le biais d’efforts sur les ALPC au niveau national.  À cette fin, le Bureau des affaires de désarmement fait équipe avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour soutenir les initiatives nationales.  L’ONU prévoit en outre de mettre en œuvre en 2020, au niveau des pays, des projets pilotes complets financés grâce au fonds « Sauver des vies ».  La Haute-Représentante s’est par ailleurs félicitée de l’attention accordée par le Conseil de sécurité à la place importante de la dimension genre dans la lutte contre les armes légères et de petit calibre. 

Avant de conclure, Mme Nakamitsu a tenu à rappeler l’ensemble des efforts menés aux niveaux mondial, régional, sous-régional et national en faveur du contrôle des ALPC.  Ces efforts, a-t-elle relevé, comprennent les travaux accomplis dans le cadre du Programme d’action sur les ALPC et de son Instrument international de traçage, notamment les conclusions de la Troisième Conférence d’examen, le Protocole sur les armes à feu se rapportant à la Convention contre la criminalité transnationale organisée et le Traité sur le commerce des armes.  Elle a aussi salué les efforts menés sur les plans régional et sous-régional, en particulier l’initiative de l’Union africaine visant à « Faire taire les armes ».  Le Conseil de sécurité, a-t-elle rappelé, a apporté son soutien à cette importante initiative en adoptant la résolution 2457 (2019).  À cela s’ajoute le soutien apporté par l’ONU à l’UA pour l’aider à atteindre son objectif d’un continent à l’abri des conflits, notamment en appuyant le « Mois de l’amnistie en Afrique » en septembre prochain afin de permettre la remise, le stockage et la destruction des armes illicites.  Dans le même temps, a-t-elle précisé, le Bureau des affaires de désarmement et le Département des opérations de paix soutiennent les initiatives de gestion des armes et de leurs munitions dans des contextes de désarmement, de démobilisation ou de réintégration.  Ces deux dernières années, un appui dans ce sens a été apporté à la République centrafricaine, à la République démocratique du Congo (RDC) et au Mali.

Tenter de contrôler la prolifération, la circulation et le trafic illicites des armes légères et de petit calibre, sans avoir une bonne compréhension du problème, c’est tenter de contrôler la propagation d’une maladie infectieuse sans en connaître les origines ni les vecteurs de transmission, a prévenu M. DAMIEN SPLEETERS, Directeur adjoint de « Conflict Armament Reseach (CAR) ».  Dans les théâtres des conflits, a-t-il affirmé, le CAR réunit les preuves, plaçant « l’arme » au centre de ses enquêtes.  Nous collectons des informations uniques et traçables sur les armes, les munitions et autres matériels lesquelles permettent d’identifier un élément dans les documents sur la production, les ventes et les transferts.  Avec la coopération des exportateurs d’armes et leur gouvernement, nous étudions le cheminement de l’usine au point de détournement.  Grâce à la ventilation des données sur des milliers d’éléments tracés dans les conflits, le CAR peut offrir une image globale et dynamique des chaînes d’approvisionnement en armes et détecter les faiblesses qui facilitent les détournements vers des utilisateurs non-autorisés. 

Ces faiblesses, a expliqué M. Spleeters, tiennent souvent à l’incapacité des gouvernements de prévenir les vols et les pillages; à la défaite des armées qui donne lieu à la perte massive d’armes; à la falsification des documents liés au contrôle des exportations, aux transferts non-autorisés des armes importées, ou encore à la fourniture délibérée d’armes à des rebelles, des insurgés ou des groupes terroristes.  Même si les enquêtes du CAR portent d’abord et avant tout sur les armes, elles mènent souvent à des documents sur les transferts, aux comptes en banques, aux sociétés écrans, aux trafiquants, au financement des conflits ou encore aux réseaux d’appui aux trafiquants.  Dans son travail, le CAR promeut les mécanismes des Nations Unies et fournit des informations aux Groupes d’experts des Comités des sanctions du Conseil de sécurité.  Par sa documentation et ses opérations de traçage, le CAR offre à ses partenaires nationaux des services qui sinon ils n’auraient pas accès. 

Une bonne évaluation des risques de détournement, a poursuivi M. Spleeters, doit pouvoir s’appuyer sur des preuves concrètes collectées pendant les enquêtes.  Le CAR a donc développé en 2013, grâce au soutien financier de l’Union européenne, le projet « iTrace » qui est le socle de son travail et de sa méthodologie mais aussi un recueil de toutes ses données.  Le CAR a ainsi documenté plus de 6 000 armes et 590 000 munitions.  Il a travaillé dans plus de 30 États affectés par les conflits, développant une base de données considérable et holistique qui peut servir à élaborer des sanctions et une surveillance de ces sanctions plus efficaces mais aussi à faire les ajustements requis aux régimes de sanctions.

C’est exactement ce que l’Union européenne a fait, s’est réjoui M. Spleeters.  Les données du CAR sur l’Afrique de l’Est ont par exemple permis à un pays européen de refuser une licence à un État de la région que le CAR avait identifié comme détourneur d’armes.  Pour appuyer le respect des embargos et des sanctions, le CAR a fourni aux agences chargées du maintien de l’ordre dans plusieurs pays des informations détaillées sur les marchands d’armes qui violent les embargos de l’Union européenne.  Le CAR a également travaillé avec des pays touchés par les embargos.  Il a, par exemple, aidé la Somalie à identifier les routes d’acheminement des armes vers les Chabab, en violation de l’embargo. 

Les armes légères et de petit calibre alimentent la criminalité organisée et les activités terroristes, s’est alarmé M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine).  Il a appelé à une coopération renforcée pour contrôler ces armes, jugeant important de détruire les excédents et d’améliorer le traçage.  Faisant un lien entre armes et violences sexuelles, le représentant a estimé qu’il faut à tout prix intégrer la perspective sexospécifique dans les instruments internationaux de contrôle des armes.  Dénonçant les nombreuses violations des embargos sur les armes, comme en Libye, il a aussi estimé que la question des armes légères et de petit calibre doit dûment être prise en compte lorsque le Conseil de sécurité élabore les mandats des opérations de maintien de la paix.  Il a d’ailleurs  exhorté le Conseil à débattre davantage de cette question et demandé une actualisation de la résolution 2220 (2015). 

M. MUHSIN SHYIHAB (Indonésie) a d’abord souligné la responsabilité première des États dans le contrôle des armes et a attiré l’attention sur le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et sur l’Instrument international de traçage.  Il a aussi rappelé la résolution 2117 (2013) du Conseil de sécurité qui souligne l’importance de l’appui international pour améliorer la faculté des États à mettre en œuvre ces deux instruments.  Pour aller de l’avant, nous devons garantir l’adéquation, l’efficacité et la viabilité de cette aide internationale, a estimé le représentant.  Combattre le commerce illicite des armes légères exige la coopération entre États, a-t-il poursuivi, en insistant sur le rôle des organisations régionales, conformément à la résolution 2457 (2019). 

L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a-t-il souligné, soutient la mise en œuvre du Programme d’action de l’ONU.  Il a aussi insisté, une nouvelle fois, sur une approche inclusive et globale pour combattre le trafic d’armes: un défi multidimensionnel qui exige une réponse multipartite.  Les gouvernements, s’est-il expliqué, doivent renforcer substantiellement leur participation et s’approprier les efforts, lesquels doivent s’inscrire dans les efforts plus larges de consolidation de la paix et d’édification des États.  La souveraineté nationale, l’état de droit, l’appropriation nationale et la coopération internationale sont les clefs du succès, a conclu le représentant. 

M. DMITRY A.  POLYANSKIY (Fédération de Russie) a demandé le renforcement du rôle de l’ONU dans les efforts de lutte contre la circulation illicite des armes légères et de petit calibre.  S’agissant du traçage des armes, a-t-il estimé, les progrès sont insuffisants.  Il faut barrer l’accès des acteurs non-étatiques aux armes et renforcer le contrôle sur la production.  Nous avons, a dit le représentant, une législation nationale étoffée qui pourrait d’ailleurs servir d’exemple.  Le représentant a, à cet égard, jugé que certains éléments du rapport du Secrétaire général sont sujets à caution.  Il s’est d’emblée opposé à l’idée d’ajouter au Registre des armes classiques des Nations Unies une huitième catégorie d’armes.  Par le passé, un ajout avait déjà exploité pour porter préjudice à des pays comme l’Iran ou la République populaire démocratique de Corée.  Un nouvel ajout pourrait aussi entraver l’action des États dans la mise en œuvre de l’Article 51 de la Charte, a estimé le représentant.  Les références au Traité sur le commerce des armes sont également « douteuses », a-t-il tranché, arguant que ledit Traité est loin d’être universel et que certains de ses signataires continuent de déverser des armes dans les zones de conflit. 

M. HAITAO WU (Chine) a constaté que, dans une situation internationale complexe, le trafic illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) aggrave les conflits et alimente le terrorisme et la criminalité organisée, ce qui a pour effet d’entraver le développement durable.  Face à ce fléau, le Conseil de sécurité a fait des efforts, comme en atteste ses résolutions 2117 (2013) et 2220 (2015), et continue d’examiner les effets des ALPC dans différents points chauds du globe.  Pour la Chine, a indiqué le représentant, cette question constitue une priorité.  C’est pourquoi elle soutient les initiatives de l’ONU, à commencer par le fonds « Sauver des vies », initié par le Secrétaire général.  Pour remédier à cette situation alarmante, la Chine propose, a-t-il dit, de se concentrer sur le règlement politique des conflits, qui est la clef contre le trafic illicite des ALPC.  Deuxièmement, a poursuivi le délégué, il convient de renforcer la responsabilité des États.  Les Gouvernement doivent mettre en place des lois et réglementations, tout en mettant en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

Il importe également de renforcer le rôle de chef de file des Nations Unies, notamment par le biais de la Troisième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis dans l’exécution du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.  Quatrièmement, a ajouté le représentant, il est essentiel d’accroître la coopération internationale, via le renforcement des capacités des États pour la gestion des stocks et l’élimination des excédents.  La Chine, qui a toujours prôné une gestion responsable des armes, a mis en place des procédures nationales, prouvant ainsi sa plein adhésion au multilatéralisme pour combattre le trafic illicite des ALPC et son attachement à la paix et à la stabilité internationales. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a déclaré que les armes légères et de petit calibre, relativement bon marché, sont souvent les armes de premier choix dans les guerres civiles, les attaques terroristes, la criminalité organisée et les activités des gangs.  Cette question doit être abordée dans les aspects du travail du Conseil.  L’aide au bon respect des embargos sur les armes doit être incluse dans les mandats des opérations de maintien de la paix.  Le représentant a, à son tour, établi le lien entre armes légères et de petit calibre et agenda « femmes, paix et sécurité ».  Jugeant cruciale la pleine application des différents instruments internationaux, le délégué a plaidé pour l’universalisation du Traité sur le commerce des armes.  Pleinement mis en œuvre, ce Traité, a-t-il estimé, pourrait conduire à des transferts d’armes plus responsables et plus transparents.  Enfin, le délégué a insisté sur l’importance des efforts régionaux dont ceux de l’Union européenne. 

M. MARTHINUS VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud) a voulu, à son tour, que la question des armes légères et de petit calibre soit dûment prise en compte lorsque le Conseil élabore les mandats des opérations de maintien de la paix et les embargos sur les armes.  Il faut, a-t-il insisté, aider les pays à mettre en œuvre la résolution 2220 (2015).  La protection des civils dans les conflits exige que les Casques bleus puissent combattre avec plus d’efficacité la circulation illicite des armes légères et de petit calibre, a ajouté le représentant.  Il a aussi insisté sur les liens entre cette circulation et l’agenda « femmes, paix et sécurité ».  Le Conseil, a-t-il suggéré, doit examiner comment associer activement les femmes à la prévention du commerce illicite d’armes légères et de petit calibre.  Le délégué a rappelé que l’Union africaine a fait de cette question l’une de ses priorités pour « Faire taire les armes » comme le prévoit l’Agenda 2063. 

M. DAVID CLAY (Royaume-Uni) a jugé que les Nations Unies ont un rôle important à jouer pour lutter contre les flux illicites d’armes légères et de petit calibre.  Il est essentiel, a-t-il dit, d’impliquer toutes les parties prenantes, en particulier les femmes qui travaillent dans le domaine du désarmement.  Les Nations Unies doivent aussi tenir compte des instruments existants, comme le Recueil de modules concernant la maîtrise des armes légères et les Directives techniques internationales sur les munitions, ce afin de promouvoir les meilleures pratiques dans la gestion des stocks.  À cet égard, a indiqué le délégué, nous sommes prêts à participer au Groupe d’experts gouvernementaux sur la question des stocks d’armement et de la destruction des excédents.  Toutefois, a-t-il noté, beaucoup reste à faire pour créer un commerce réglementé.  C’est pourquoi, a-t-il ajouté, l’universalisation du Traité sur le commerce des armes reste une priorité pour le Royaume-Uni. 

Le représentant a salué l’appel du Secrétaire général en faveur du respect des embargos sur les armes.  Tout en mettant l’accent sur la nécessité de se montrer souple en la matière, il s’est dit d’avis que les embargos sont le plus souvent levés pour des raisons politiques, sans tenir comptes des dégâts causés par les conflits, notamment sur le plan humanitaire.  Rappelant que le Royaume-Uni a toujours appuyé les approches régionales, le représentant a félicité l’Union africaine pour son initiative « Faire taire les armes ».  L’appropriation nationale des secteurs de la sécurité sera essentielle pour parvenir à ce but, de même que l’augmentation du rôle des femmes dans les processus de règlement des conflits, a-t-il souligné. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) a estimé que la mobilisation de tous les États était nécessaire aujourd’hui pour parvenir à l’universalisation et à la mise en œuvre au niveau national des mesures collectivement agréés pour lutter contre la dissémination et le commerce illicites des armes légères et de petit calibre (ALPC).  Illustrant son propos, elle a cité la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes, du Protocole additionnel à la Convention de Palerme contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, et surtout le Programme d’action des Nations Unies sur les ALPC et l’Instrument international sur le marquage et le traçage des armes.  Elle a estimé que les engagements pris par les États lors de la Troisième Conférence d’examen du Programme d’action, que la France a présidée en 2018, devraient permettre de renforcer concrètement la prévention et la lutte contre le détournement des ALPC qui devrait former l’objet principal de la prochaine Réunion biannuelle en juin prochain.  Elle a jugé plus que jamais nécessaire que les États Membres respectent les embargos sur les armes imposés par ce Conseil et se coordonnent pour en renforcer l’efficacité. 

Par ailleurs, la représentante a appelé à renforcer l’action opérationnelle qui repose sur deux piliers: la prévention, par le renforcement de capacités nationales de contrôle, de marquage et de sécurisation des dépôts d’armes et la répression des trafics par le biais de la coopération entre les États.  Elle a mis l’accent aussi sur la nécessité d’évaluer notre action et d’en tirer les enseignements nécessaires en vue de permettre à chaque pays de s’approprier les objectifs fixés.  Mais nos efforts seraient incomplets s’ils n’étaient pas déclinés, coordonnés et calibrés à l’échelle régionale, a-t-elle prévenu en citant en exemple les efforts déployés par la France contre le détournement des armes dans les Balkans occidentaux.  Elle a indiqué que la France était aussi pleinement engagée à soutenir des initiatives engagées dans d’autres régions, en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel.  Enfin, la représentante a estimé que les liens multiples avec d’autres questions au cœur des activités du Conseil de sécurité appellent à renforcer l’efficacité des travaux et limiter les « compartimentations ».  À cet effet, elle a salué l’appel du Secrétaire général à développer une approche globale, en particulier au sein du système, avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), en coopération avec Interpol et l’Organisation mondiale des douanes, autour du nexus de lutte contre les trafics illicites, le crime organisé et le terrorisme. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a demandé que la question des armes légères et de petit calibre soit incluse dans les mandats des missions de maintien de la paix.  Toutes les 15 minutes, l’emploi de ces armes fait un mort, a-t-il dit.  « Cela n’est pas acceptable. »  Il a demandé une mise à jour de la résolution 2220 (2015) et insisté sur l’importance des initiatives régionales, comme celles conduites par l’Allemagne et la France dans les Balkans occidentaux.  Il est de la responsabilité des États, a-t-il asséné, de mieux contrôler la circulation des armes légères et de petit calibre.  Il a réclamé le plein respect des embargos sur les armes, regrettant les violations comme en Libye.  « Cela n’est pas acceptable », a-t-il répété.  Enfin, le délégué a expliqué la réticence de son pays à la levée de l’embargo sur les armes en République centrafricaine, compte tenu de la sécurisation insuffisante des dépôts d’armes.

M. MONCEF BAATI (Tunisie) a indiqué que la question des armes légères et de petit calibre est très importante en Afrique.  Il s’est dit vivement préoccupé par le transfert de ces armes en Libye et au Sahel et a rappelé que la lutte contre la circulation illicite d’armes légères et de petit calibre permet d’œuvrer à la stabilisation des zones de tension.  Cette lutte est l’une des priorités de l’Union africaine, a-t-il poursuivi, en rappelant son initiative visant à « Faire taire les armes ».  La Tunisie, a-t-il souligné, est un pays pacifique qui ne produit pas d’armes.  Le délégué a souligné l’importance d’une bonne mise en œuvre des instruments internationaux pour un meilleur contrôle des armes légères et de petit calibre.  Il a ainsi souligné la pertinence du Traité sur le commerce des armes, avant d’appeler à une coopération étroite entre les États.  Un appui doit être fourni aux pays en développement dans leurs efforts pour un meilleur contrôle des armes légères et de petit calibre. 

M. ABDOU ABARRY (Niger) a constaté que l’impact de la prolifération des armes légères et de petit calibre demeure toujours un sujet de vive préoccupation car elles alimentent plusieurs conflits.  Cette thématique revêt un caractère très important pour le Sahel en général et le Niger en particulier, au regard de la situation sécuritaire qui prévaut actuellement.  Au Niger, a ajouté le représentant, depuis sa création en 1994, la Commission nationale pour la collecte et le contrôle des armes illicites a significativement contribué au contrôle même si la porosité des frontières ne facilite pas la tâche.  Les efforts se poursuivent, a assuré M. Abarry, grâce à l’appui des partenaires bilatéraux et multilatéraux dont les Nations Unies. 

Le Niger se réjouit de l’attention toute particulière que le Secrétaire général porte à la région d’Afrique centrale et surtout au Sahel où l’impact du trafic des armes légères s’est amplifié avec la crise libyenne, a poursuivi le représentant.  Continuer à livrer des armes à la Libye, malgré l’embargo, c’est continuer à inonder le Sahel d’armes, c’est contribuer à la déstabilisation de la région et c’est encourager les graves atteintes à la sécurité humaine et aux droits de l’homme, a encore déclaré le délégué qui a lancé un appel au strict respect de l’embargo sur les armes en Libye, lequel constitue l’une des conditions indispensables pour le retour à la paix et à la stabilité tant dans le pays qu’au Sahel. 

Soulignant l’impact des conflits sur la réalisation des objectifs de développement durable, M. Abarry a indiqué que l’ampleur des dégâts occasionnés par la prolifération et la circulation des armes légères et de petit calibre interpelle tous les États du monde.  Il a appelé à une plus grande mobilisation de la communauté internationale sur la problématique afin de réduire les impacts néfastes de la circulation des armes légères sur la sécurité humaine en général et le développement en particulier.  Le Niger encourage et soutient toutes les initiatives sous-régionales, régionales et internationales sur cette question.  En conclusion, il a aussi appelé les États Membres à prendre davantage en compte l’implication des femmes et des enfants dans les stratégies nationales et la mise en place de système efficace de contrôle et de gestion de ces types d’armes et de leurs munitions. 

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a regretté que la mauvaise utilisation des armes légères et de petit calibre continue de menacer de nombreuses régions et nombreux pays du monde, comme au Sahel, en Libye et au Soudan, et ce, malgré tous les efforts internationaux.  Il a appuyé le rôle central des Nations Unies pour prévenir et combattre le commerce illicite des ALPC.  Il a estimé que ces activités doivent respecter les principes de base du droit international et de la Charte de l’ONU, sans oublier le plein respect de la souveraineté nationale, de l’intégrité territoriale et du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États.  Ces mesures ne doivent pas non plus affecter le droit légitime des États de se défendre, a-t-il ajouté. 

Mettant l’accent sur trois préoccupations, le représentant a d’abord rappelé que la première responsabilité de la lutte contre les ALPC illicites repose sur les États eux-mêmes dans le respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont la résolution 2220.  Il a ensuite invité le Conseil de sécurité à améliorer la définition des mandats des opérations de maintien de la paix afin de mieux aider les pays et de garantir l’efficacité des embargos sans restreindre la capacité des pays de se défendre.  Dans ce processus, la priorité doit être la protection des civils, la sécurité du personnel des opérations de paix, la lutte contre le terrorisme et le crime organisé et la promotion des femmes en tant qu’agents de paix, a-t-il insisté.  Enfin, le représentant a souligné l’importance de l’échange des pratiques exemplaires et a invité les organismes des Nations Unies, et les organisations internationales et régionales à mieux travailler ensemble et à montrer la cohésion et la complémentarité nécessaires à la réalisation des objectifs communs. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a déclaré que son pays est bien placé pour parler de la question des armes légères et de petit calibre.  En effet, même si les Caraïbes ne produisent pas d’armes, leur trafic illégal affecte profondément la région.  Elle a estimé que ce trafic est similaire à d’autres qui provoquent des tensions entre groupes rivaux qui se font concurrence par appétit du pouvoir et du profit.  Ainsi, le trafic illégal et le commerce des ressources naturelles et des espèces animales font partie de la même politique économique que le trafic illicite des armes.  La représentante a relevé que ces réseaux ne florissent qu’en l’absence d’un cadre de gouvernance bien organisé.  C’est pourquoi les organisations régionales et sous-régionales et leurs membres doivent travailler collectivement pour gérer leur frontière commune et réglementer les mouvements des personnes. 

Mme King a ensuite rappelé que sur le continent africain, le trafic illicite des armes légères et de petit calibre a fait des ravages sur un bon nombre de générations.  Saint-Vincent-et-les Grenadines salue donc l’initiative « Faire taire les armes », tout en rappelant que les mécanismes comme le Protocole de Nairobi ou la Convention de Kinshasa ne peuvent être efficaces que s’ils sont accompagnés d’un développement économique structurel.  Saint-Vincent, qui est partie au Traité sur le commerce des armes, souligne, a dit la représentant, que les États ont le droit de gérer leurs affaires intérieures selon leur convenance, y compris en ce qui concerne le contrôle des armes.  Néanmoins, a ajouté la déléguée, ce droit n’est pas absolu quand les politiques nationales ont des implications négatives au-delà des frontières nationales.  Au vu de la nature du trafic des armes légères, la coopération régionale s’avère donc cruciale, et c’est dans ce cadre que la Communauté des Caraïbes (CARICOM) at adopté la Déclaration sur les armes légères et de petit calibre en 2011, a-t-elle rappelé en appelant à une plus grande responsabilisation sur la question. 

M. MICHAEL BARKIN (États-Unis) a rappelé qu’en 2001, l’Assemblée générale a adopté par consensus un Programme d’action visant à prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.  Les États-Unis, a-t-il dit, demeurent attachés à ce Programme d’action, ainsi qu’à l’Instrument international de traçage adopté en 2005, et travaillent côte à côte avec d’autres pays et organisations internationales et régionales pour lutter contre ce fléau.  Le programme américain de destruction d’armes classiques a ainsi fourni 3,6 milliards de dollars d’assistance à plus d’une centaine de pays depuis 1993.  Il s’agit d’une aide à la gestion des stocks d’armes et à la destruction des excédents, a précisé le représentant.  Pour la délégation américaine, il faut que la communauté internationale se penche sur les causes profondes du commerce illicite des ALPC.  Pour cela, a estimé le représentant, les Nations Unies doivent veiller à ce qu’il y ait une coordination effective de leurs efforts en la matière, en y intégrant les questions relatives aux agendas « femmes, paix, sécurité » et « protection des civils ». 

En dépit de la situation alarmante, le représentant a jugé, à l’instar du Secrétaire général, qu’il existe des raisons d’être optimiste.  Il a ainsi mis l’accent sur la reconnaissance en 2018 par les États du lien entre la mise en œuvre du Programme d’action et lutte contre les violences sexuelles.  Il a également salué les initiatives prises sur le plan régional pour parvenir à un plus grand contrôle des ALPC, notamment celle de l’Union africaine « Faire taire les armes » et la feuille de route 2024 des Balkans occidentaux.  Notant que le rapport du Secrétaire général souligne les difficultés rencontrées pour faire respecter les engagements des États concernant les ALPC, le délégué a plaidé pour la pleine mis en œuvre des régimes des sanctions, afin d’améliorer les résultats en termes de gestion des stocks d’armes, lesquels constituent des sources d’armement pour les groupes armés dans les pays fragiles, en particulier la République centrafricaine, le Soudan du Sud et la République démocratique du Congo (RDC).  Il a d’autre part estimé qu’archiver les armes ne suffit pas mais qu’il faut néanmoins plus d’efforts dans ce domaine.  Enfin, le représentant s’est dit préoccupé par les commentaires faits dans le rapport du Secrétaire général au sujet de la possession d’armes à feu par des civils.  Il a appelé le Secrétaire général à faire une claire distinction entre possession légale d’armes légères et utilisation illégale de telles armes en dehors des conflits, d’une part, et trafic illicite des ALPC qui alimente les conflits et l’instabilité, d’autre part. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a rappelé que plus d’un milliard d’armes légères et de petit calibre seraient en circulation dans le monde, dont 85% aux mains des civils.  L’Afrique comptabiliserait quelque 100 millions, a-t-il poursuivi, ajoutant que les conséquences d’une telle situation sont dramatiquement prévisibles.  Il a ainsi relevé que chaque année, ces armes tuent des centaines de milliers de personnes et sont responsables de 90% des victimes de conflits armés, principalement des civils et trop souvent des femmes et des enfants.  Il faut donc stopper les flux d’armes illicites, et les embargos sur les armes représentent un instrument efficace, pour autant qu’ils soient pleinement appliqués.  Le délégué a estimé que le cas libyen constitue un contre-exemple dramatique en la matière.  Selon lui, un sursaut collectif du Conseil de sécurité est aujourd’hui nécessaire, afin de réaffirmer son autorité et le caractère catégorique des embargos qu’il décide. 

Par ailleurs, le représentant a affirmé qu’une réponse satisfaisante au trafic illicite de ces armes suppose la prise en compte de leur cycle de vie complet, mais aussi des munitions qui les alimentent.  C’est pourquoi, la Belgique s’engage fermement depuis plusieurs années en faveur d’un traçage plus systématique des armes illicites en zones de conflit et de post-conflit.  M. Pecsteen de Buytswerve a expliqué que le traçage constitue la pierre angulaire d’une approche efficace et informée par la réalité du terrain.  Il a aussi noté que le traçage contribue à la lutte contre les détournements et à l’amélioration des politiques de sécurisation des stocks, tout en permettant de mesurer la mise en œuvre des embargos et de démanteler les réseaux des trafiquants. 

En outre, il a indiqué que le monitoring, mais aussi les enquêtes directes sur le terrain permettent aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies de prévenir plus efficacement la résurgence de la violence.  Les groupes d’experts chargés de contrôler les embargos et les missions de maintien de la paix doivent renforcer leur coopération, a-t-il souhaité, ajoutant que c’est pourquoi la Belgique plaide pour que le monitoring et le traçage des armes illicites soient inclus dans les mandats des opérations de maintien de la paix pertinentes.  Reconnaissant le rôle des organisations régionales dans la lutte contre le trafic illicite d’armes, le représentant a salué l’initiative « Faire taire les armes » de l’Union africaine.  Il a estimé qu’un accent particulier serait des plus nécessaires dans la région du Sahel et en Afrique centrale.  Il a terminé en jugeant urgent de compléter l’Instrument international de traçage, adopté en 2005, par une annexe qui tienne compte de l’augmentation du nombre d’armes en polymère et d’armes modulaires.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité des droits du peuple palestinien: rejet massif du « plan du siècle » des États-Unis

399e séance – après-midi
AG/PAL/1429

Comité des droits du peuple palestinien: rejet massif du « plan du siècle » des États-Unis

Le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a tenu, cet après-midi, une séance d’organisation*, au cours de laquelle l’Observateur de l’État de Palestine a vivement rejeté le plan de paix récemment présenté par l’administration américaine.  M. Riyad Mansour a également indiqué que le Conseil de sécurité pourrait se prononcer dès la semaine prochaine sur l’adoption d’un projet de résolution y relatif et a exhorté les États Membres à s’en faire coauteur.

« Ce plan est une menace pour nous tous, y compris l’ONU », a notamment averti l’Observateur qui a vivement fustigé le « poison » que l’on retrouve dans ce « plan contre la paix » qui, a-t-il affirmé, « ne ferait qu’encourager le conflit et offrirait à Israël la possibilité d’annexer 30% de la Cisjordanie »

De l’Indonésie au Liban, en passant par la Namibie, la Bolivie, la Tunisie, l’Égypte, l’Iraq et bien d’autres, le rejet du « plan du siècle » américain par les membres du Comité a été quasi unanime.  La Jordanie a notamment estimé que l’initiative américaine avait franchi une ligne rouge, tandis que l’Organisation de la coopération islamique (OCI) a décrié un plan qui sape la paix, viole les droits du peuple palestinien, encourage l’occupation israélienne et ne répond pas aux aspirations des Palestiniens. 

« Jamais l’horizon politique n’a été si incertain », a déploré de son côté le Président du Comité, M. Cheikh Niang qui a constaté que « la réalité sur le terrain, en plus d’être volatile, renvoie de plus en plus à celle d’un seul État ».

Rappelant que 139 États Membres de l’ONU ont à ce jour reconnu officiellement l’État de Palestine, M. Niang a jugé le moment venu de traduire en actes concrets l’engagement de la communauté internationale en faveur de la solution des deux États.  « Nous devons œuvrer, dans l’esprit du multilatéralisme, à la relance du processus de paix, sur la base des résolutions pertinentes de l’ONU, en mettant sur la table toutes les questions en suspens comme les colonies de peuplement, le statut de Jérusalem, les réfugiés, la sécurité ainsi que la situation à Gaza », a-t-il notamment insisté.

Cette séance a également été marquée par l’intervention du Secrétaire général de l’ONU qui a souligné que la question de Jérusalem reste une question de statut final et que l’avenir de la ville ne peut être résolu que sur la base du droit international et par le biais de négociations entre les parties dans le but d’aboutir à la solution des deux États. 

M. António Guterres a également appelé les dirigeants palestiniens à s’engager de manière constructive avec l’Égypte et d’autres pour faire avancer le processus de réconciliation intrapalestinien.  Il a en outre souligné que la tenue d’élections générales sera une étape cruciale vers la réunification du peuple palestinien sous un gouvernement national palestinien unique, légitime et démocratique.  Aussi, a-t-il appelé les autorités palestiniennes à publier le décret planifiant les élections législatives et présidentielle, et Israël à autoriser la tenue du vote à Jérusalem-Est.

En début de séance, le Comité a par ailleurs pris note de la décision du Gouvernement ukrainien de quitter le Comité, avec effet au 1er janvier 2020.  Il a ensuite adopté son projet de programme de travail*.

Le Président a aussi indiqué que les 28 et 29 février, le Comité organisera une conférence internationale en Malaisie, sur le thème « Soutien de l’Asie du Sud-Est aux droits du peuple palestinien ».  À l’issue de la conférence, une délégation du Comité effectuera une visite en Inde les 2 et 3 mars 2020, un déplacement qui a notamment pour but d’améliorer la coordination dans le cadre des projets de renforcement des capacités de l’État de Palestine dans le contexte de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire.

M. Niang a également annoncé que le 14 février, la Division des droits des Palestiniens tiendra sa réunion annuelle d’information.  Le 2 avril, le Comité organisera au Siège, à New York, un forum qui aura pour but de mettre en lumière l’actualité de la question de Palestine dans le contexte la conjoncture actuelle d’instabilité géopolitique. 

Le Comité prévoit aussi d’organiser, au premier semestre, un séminaire à huis clos consacré à la communication stratégique sur la question de Palestine.

M. Cheikh Niang a été réélu à la présidence du Comité en début de séance.  Mme Adela Raz (Afghanistan), Mme Ana Silvia Rodríguez (Cuba), M. Dian Triansyah Djani (Indonésie), M. Neville Melvin Gertze (Namibie) et M. Jaime Castillo Hermida (Nicaragua) assureront la vice-présidence.  Il a également été décidé que la représentante de l’Afghanistan occuperait les fonctions de rapporteur par intérim en attendant la candidature d’un autre membre du Comité.

La prochaine réunion du Comité sera annoncée dans le Journal de l’ONU.

*A/AC.183/2020/L.2  

PREMIÈRE RÉUNION DE LA SESSION 2020

Questions diverses

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que les événements récents dans la région soulignent qu’une paix durable ne peut être instaurée au Moyen-Orient sans résoudre le conflit israélo-palestinien.  Il s’est dit découragé de constater qu’aucun progrès n’a été accompli et que la situation sur le terrain s’est détériorée, érodant encore plus la possibilité d’un État palestinien viable et contigu, fondé sur la solution des deux États.

Dans un contexte marqué par l’impasse politique et l’incapacité des États Membres et du Conseil de sécurité à mettre en œuvre la solution des deux États convenue, le multilatéralisme a été mis à l’épreuve et l’occupation des territoires palestiniens s’est poursuivie sans relâche, accompagnée d’une accélération et d’une augmentation des activités de colonisation, notamment à Jérusalem-Est, ce qui a conduit récemment à des appels à l’annexion de la vallée du Jourdain et de certaines parties de la Cisjordanie, a constaté M. Guterres.

Il a réitéré que toutes les activités de peuplement sont illégales au regard du droit international pour ensuite avertir que l’annexion de l’ensemble ou d’une partie de la zone C, si elle est mise en œuvre, porterait un coup dévastateur au potentiel de faire avancer la solution des deux États et aux perspectives de paix. 

La question de Jérusalem reste une question de statut final et l’avenir de la ville ne peut être résolu que sur la base du droit international et par le biais de négociations entre les parties dans le but d’aboutir à la solution des deux États, a-t-il insisté, avant de rappeler que les mesures unilatérales visant à changer le statut de la ville sont contraires au droit international et aux résolutions de l’ONU.

M. Guterres s’est également préoccupé des deux millions de Palestiniens qui vivent dans la bande de Gaza, confrontés à d’immenses défis.  Il a indiqué que les problèmes fondamentaux de Gaza sont politiques et nécessitent des solutions politiques et la levée complète du blocus.  Il a appelé les dirigeants palestiniens à s’engager de manière constructive avec l’Égypte et d’autres pour faire avancer le processus de réconciliation intrapalestinien.  Il a également appelé les États Membres à assurer le financement fiable du mandat récemment renouvelé de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).

Le Secrétaire général a en outre souligné que la tenue d’élections générales attendues depuis longtemps dans l’État de Palestine, y compris Jérusalem-Est, sera une étape cruciale vers la réunification du peuple palestinien sous un gouvernement national palestinien unique, légitime et démocratique.  Il a appelé les autorités palestiniennes à publier le décret planifiant les élections législatives et présidentielle, et Israël à autoriser la tenue du vote à Jérusalem-Est.

« Alors que nous célébrons le soixante-quinzième anniversaire de notre Organisation cette année, nous avons besoin d'un engagement renouvelé pour défendre les valeurs de la Charte en tant que cadre commun de coopération pour la réalisation des droits des générations futures d’Israéliens et de Palestiniens et du peuple de la région dans son ensemble », a-t-il déclaré. 

M. CHEIKH NIANG (Sénégal) Président du Comité des Nations Unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a déclaré que si les paramètres d’une solution définitive au différend israélo-palestinien sont clairement identifiés et connus de l’ensemble des acteurs, « jamais l’horizon politique n’a été si incertain ».  Soixante-treize ans après l'adoption de la résolution 181 et un quart de siècle après la signature des Accords d’Oslo, censés aboutir à l’autodétermination et à l’indépendance du peuple palestinien, force est de reconnaître que la réalité sur le terrain, en plus d’être volatile, renvoie de plus en plus à celle d’un seul État, a-t-il constaté. 

Il a également relevé que la colonisation et l’occupation, la violence, l’incitation, la situation catastrophique à Gaza, les dissensions entre acteurs politiques palestiniens, entre autres, sont autant de facteurs qui sapent la confiance entre les parties.  L’adoption de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, réaffirmant le caractère illégal de la colonisation et de l’occupation, n’a pas empêché la poursuite des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés, y compris à Jérusalem-Est, a en outre dénoncé le Président du Comité.

Le meilleur moyen de favoriser les conditions d’une paix et d’une sécurité durables entre Israéliens et Palestiniens, c’est de renoncer à toute forme de violence et de politique du fait accompli, et de retourner à la table de négociations, en vue d’une solution globale, qui assigne à chaque partie le droit à un État souverain, a-t-il conseillé. 

Sur Jérusalem, a-t-il ajouté, l’appel du Comité au respect du statu quo en attendant une solution définitive à cette question relevant du statut final, sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies, reste plus que pertinent au regard des développements sur le terrain.

Le Président du Comité a également prévenu qu’en dépit des efforts de l’ONU et de l’Égypte pour préserver le fragile cessez-le-feu en cours depuis 2014, le risque d’une quatrième confrontation militaire existe toujours à Gaza, où le regain de violence intervenu en mars dernier a entraîné un nombre très élevé de victimes, y compris des enfants.

Préoccupé par les incertitudes qui continuent de planer sur la situation budgétaire de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), M. Niang a exhorté les États Membres à poursuivre les efforts visant à garantir à l’Office un accès à des ressources prévisibles, suffisantes et soutenues, ajoutant que le Comité doit rester mobilisé en faveur du renouvellement du mandat de l’UNRWA. 

Rappelant aussi que 139 États Membres de l’ONU ont à ce jour reconnu officiellement l’État de Palestine, M. Niang a jugé le moment venu de traduire en actes concrets l’engagement de la communauté internationale en faveur de la solution des deux États, en tant que seule option viable car garantissant, sécurité, paix, indépendance et souveraineté à la fois aux Israéliens et aux Palestiniens.  « Nous devons œuvrer, dans l’esprit du multilatéralisme, à la relance du processus de paix, sur la base des résolutions pertinentes de l’ONU, en mettant sur la table toutes les questions en suspens comme les colonies de peuplement, le statut de Jérusalem, les réfugiés, la sécurité ainsi que la situation à Gaza », a-t-il insisté.

Il a invité les acteurs tels que le Quatuor, le Conseil de sécurité et les pays influents de la région à œuvrer pour relancer ce processus, sur la base des plateformes existantes: la feuille de route du Quatuor, la Déclaration de Principe de Madrid, les Accords d’Oslo, le principe de la terre contre la paix et l’Initiative de paix arabe, en vue de doter le peuple palestinien d’un État souverain, viable et indépendant, à l’intérieur de frontières internationalement reconnues et garanties, vivant côte à côte avec l’État d’Israël, en paix et en sécurité.

M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a dénoncé les récents assauts politiques du Gouvernement Trump contre les droits politiques des Palestiniens.  Il a estimé que ces assauts ont commencé avec le déplacement de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem.  Il a ensuite décrié le fait qu’aucune mention d’un État palestinien souverain ne figure dans les 181 pages du plan pour lequel, a-t-il ajouté, les préoccupations sécuritaires d’Israël sont le souci majeur.

M. Mansour a fustigé le « poison » que l’on retrouve dans ce « soi-disant plan » qui est un « plan contre la paix » et un « plan pour la soumission du peuple palestinien ».  Nous sommes un peuple fier qui est là depuis la nuit des temps et nous voulons garantir la souveraineté de la Palestine qui comprend la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem-Est, a-t-il rappelé.

Il a annoncé le rejet par toutes les nations arabes de ce plan qui, selon l’Observateur permanent, « ne ferait qu’encourager le conflit et offrirait à Israël la possibilité d’annexer 30% de la Cisjordanie.  Il ne s’agit pas d’une simple modification des frontières comme suggéré par les précédentes administrations américaines et israéliennes, a-t-il déploré.

L’Observateur permanent a ensuite indiqué que le Président Abbas prendra prochainement la parole devant le Conseil de sécurité, en espérant la présentation en début de semaine d’un projet de résolution en réaction au plan proposé par le Gouvernement américain.  Il a précisé qu’une ébauche du projet de résolution est déjà en cours de négociation et a appelé les États Membres à s’en faire coauteur.  « Si nous savons que le texte sera bloqué par le droit de veto d’un membre du Conseil de sécurité, nous souhaitons saisir l’occasion de ce projet de résolution pour montrer la solidarité de la communauté internationale », a-t-il expliqué. 

M. Mansour a ensuite insisté sur l’impératif de signifier à ceux qui se détournent du consensus mondial qu’ils doivent modifier leur trajectoire.  C’est une bataille menée en faveur de la défense du multilatéralisme, de notre approche collective et de notre maison commune qu’est l’ONU.  Ce plan, a-t-il averti, est une menace pour nous tous, y compris l’ONU.  Et nous sommes fiers d’être en première ligne de la défense des Nations Unies et du multilatéralisme, a conclu M. Mansour.

Plusieurs délégations ont pris la parole après ces interventions dans le cadre d’un point consacré au résumé des activités menées et prévues.

L’Indonésie a rejeté le plan de paix américain et exhorté le Comité à faire avancer les efforts de sensibilisation pour faire connaître les implications potentiellement négatives dudit plan.  Cela appelle à redoubler d’efforts pour que le peuple palestinien puisse défendre son droit à l’autodétermination, ainsi que pour mettre un terme à l’occupation et appuyer la solution des deux États, a estimé le Liban.  La Namibie s’est alarmée des événements récents qui ont creusé le fossé entre les deux parties et représentent un nouveau revers dans la recherche de perspectives justes et durables pour une solution des deux États.

L’Organisation de la coopération islamique (OCI) a souligné que l’Initiative de paix arabe reste la seule voie pour mettre fin au conflit, et a prévenu que tout plan qui ignore ce principe ne fera qu’attiser les tensions.  La délégation a aussi indiqué que le comité exécutif de l’OCI s’était réuni hier et avait rejeté le « plan du siècle » qui, a-t-elle affirmé, encourage l’occupation et va à l’encontre du processus de paix. 

À l’instar de la Tunisie, l’Égypte a également insisté sur l’importance de la solution des deux États et a indiqué qu’elle poursuivra ses efforts pour mettre un terme aux divisions intrapalestiniennes.  Si la solution des deux États semble enterrée, personne ne peut enterrer le droit qu’a le peuple palestinien de lutter contre la politique israélienne, a souligné à son tour la Bolivie pour qui le « plan des États-Unis » vise à nuire à la solution des deux États.

Le règlement juste du conflit ne peut se faire sans la création d’un État palestinien indépendant, a insisté de son côté l’Iraq qui a ajouté qu’aux yeux de la Ligue des États arabe le plan des États-Unis n’est pas un plan de paix car il ne se base pas sur les résolutions de l’ONU.  Le plan de paix américain a franchi une ligne rouge, c’est-à-dire la sacralité de la triple identité religieuse de Jérusalem, a déploré à son tour la Jordanie.  Estimant que 2020 sera une année difficile, le Nicaragua a appelé à mettre en œuvre les résolutions de l’ONU, à réaliser la solution des deux États et à respecter les droits inaliénables du peuple palestinien.  La Malaisie a pour sa part insisté sur l’importance des négociations lors de cette série d’intervention à laquelle a également participé l’Afghanistan.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Coup d’envoi de la réunion préparatoire de la Conférence des Nations Unies sur les océans de 2020 qui se tiendra à Lisbonne en juin

Soixante-quatorzième session,
Réunion préparatoire à la Conférence sur les océans, Matin & après-midi
MER/2122

Coup d’envoi de la réunion préparatoire de la Conférence des Nations Unies sur les océans de 2020 qui se tiendra à Lisbonne en juin

Ce matin a marqué le démarrage des travaux de la réunion préparatoire de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les océans.  Comme en 2017, l’édition 2020 a pour mission d’appuyer les efforts entrepris pour atteindre l’objectif de développement durable no 14: conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable.  Cette conférence aura lieu du 2 au 6 juin, à Lisbonne.  Elle est organisée conjointement par les Gouvernements du Kenya et du Portugal.

La Conférence sur les océans constitue l’un des premiers jalons de la Décennie d’action pour atteindre les objectifs de développement durable, lancée par le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres.  Elle devra contribuer à trouver des solutions innovantes fondées sur la science afin d’ouvrir un nouveau chapitre de l’action mondiale en faveur des océans.  En effet, c’est un appel à une action d’urgence qui a été lancé aujourd’hui pour améliorer la « santé des océans ». 

Cette conférence s’inscrit directement dans le cadre de la réalisation des 17 objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030, un point soulevé par la plupart des délégations pour lesquelles la santé des océans a un impact direct sur la plupart des autres objectifs.  Comme l’a dit l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour les océans, M. Peter Thomson, d’une part, les océans sont malades, et d’autre part, la science des océans reste très imparfaite.  Et pourtant, a remarqué l’Union européenne, l’un des prérequis de toute économie bleue durable est d’avoir des océans propres et sains.

La montée du niveau des mers, la pollution plastique marine, le réchauffement des océans qui deviennent de plus en plus acides, ainsi que la surexploitation des stocks de poissons sont autant de défis urgent auxquels la communauté internationale doit faire face, a fait remarquer l’un des deux cofacilitateurs du processus préparatoire et des négociations sur le texte de la déclaration de la Conférence sur les océans de 2020, M. Martin Bille Hermann (Danemark), pour souligner l’ampleur du problème. 

Les océans produisent la moitié de l’oxygène que nous respirons et nourrissent 3,2 milliards de personnes.  En outre, près de 350 millions d’emplois sont liés au secteur de la pêche.  Alors comment rester les bras croisés en particulier devant les 8 millions de tonnes de déchets plastiques déversés chaque année dans les océans, s’est indigné le Président de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande, en rappelant à quel point la vie sous les mers et la vie sur terre sont « symbiotiques ».  À ce rythme, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans d’ici à 2050, a renchéri la délégation des Maldives.

C’est d’autant plus alarmant qu’il ne reste plus à prouver que les océans, les mers et les ressources marines sont essentiels pour le développement durable.  Ils sous-tendent la lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire ainsi que le bien-être des humains et de la planète en jouant notamment un rôle de régulateur du climat mondial.  Dès lors il faut plus d’approches innovantes, entrepreneuriales et basées sur la science pour nous rapprocher de l’objectif 14, a dit le cofacilitateur danois, en vue de permettre la restauration et la protection des océans et des écosystèmes côtiers. 

Même si de nombreuses mesures ont été prises depuis la première Conférence sur les océans en 2017, les progrès sont inégaux entre les pays et les régions, a constaté l’autre cofacilitateur, Mme Ngedikes Olai Uludong (Palaos).  Les progrès se font en fonction de l’accès non seulement à la science et à l’innovation, mais aussi aux financements et à la coopération interdisciplinaire et intersectorielle.  Un autre obstacle majeur à la réalisation de l’objectif 14 est, selon elle, la collecte insuffisante de données marines et les déficiences dans leur ventilation.  C’est la raison pour laquelle l’édition 2020 de la Conférence sur les océans a opté pour le thème « Intensification de l’action fondée sur la science et l’innovation aux fins de la mise en œuvre de l’objectif 14: bilans, partenariats et solutions ».

Les délégations attendent un document final ambitieux et fort pour aller de l’avant dans l’action marine.  Elles ont fait leurs les huit thèmes proposés par le Secrétaire général pour les dialogues interactifs de la Conférence.

La réunion préparatoire se poursuivra demain, mercredi 5 février, à 10 heures, pour discuter des éléments d’une déclaration, convenue au niveau intergouvernemental, « brève et concise, orientée vers l’action et mettant clairement l’accent sur les domaines d’action reposant sur la science et l’innovation qui favorisent la réalisation de l’objectif 14 ».

RÉUNION PRÉPARATOIRE À LA CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES DE 2020 VISANT À APPUYER LA RÉALISATION DE L’OBJECTIF DE DÉVELOPPEMENT DURABLE N14: CONSERVER ET EXPLOITER DE MANIÈRE DURABLE LES OCÉANS, LES MERS ET LES RESSOURCES MARINES AUX FINS DU DÉVELOPPEMENT DURABLE (A/RES/73/292, A/74/630)

Déclarations d’ouverture

Mme NGEDIKES OLAI ULUDONG (Palaos), en qualité de cofacilitateur du processus préparatoire et des négociations sur le texte de la déclaration de la Conférence sur les océans de 2020, a encouragé toutes les parties prenantes à enregistrer de nouveaux engagements volontaires pour contribuer au succès de la Conférence 2020.  Si 2020 a été qualifiée de « super-année » pour la nature, l’Ambassadrice a rappelé que « nous sommes tous sur un même canoë naviguant vers des océans viables et durables ».  Elle a comparé le processus de cette deuxième conférence à une « rame puissante mais une rame moins avancée que les autres rames », à savoir les processus de la Convention sur la diversité biologique et du Comité préparatoire à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (le « BBNJ »).  Cependant, les cofacilitateurs comptent sur toutes les parties prenantes à ce processus pour « hisser les voiles » avec leur soutien.

M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark), le deuxième cofacilitateur du processus préparatoire et des négociations sur le texte de la déclaration de la Conférence sur les océans de 2020, a mis l’accent sur l’urgence mondiale à laquelle les océans font face: le niveau des mers monte, la pollution plastique augmente, les océans se réchauffent et deviennent de plus en plus acides, et pendant ce temps, les stocks de poissons sont surexploités.  Pourtant les océans, les mers et les ressources marines sont essentiels pour le développement durable et le Programme de développement à l’horizon 2030 dans sa totalité.  Ils sous-tendent la lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire ainsi que le bien-être des humains et de la planète puisqu’ils réglementent notamment le climat mondial.  Or l’acidification, la désoxygénation et le réchauffement des océans ont des conséquences de plus en plus néfastes en particulier sur leurs ressources, a relevé le cofacilitateur.

Dès lors, M. Hermann a appelé à prendre conscience de l’urgence qu’il y a à agir, et à agir résolument pour réussir le défi de l’objectif 14 de développement durable (ODD 14).  Il faut plus d’approches innovantes, entrepreneuriales et basées sur la science pour nous rapprocher de cet objectif, a-t-il dit, en vue de permettre la restauration et la protection des océans et des côtes.  Il a espéré que tous les États Membres étaient venus préparés à la réunion d’aujourd’hui et de demain, avec des idées concrètes et ambitieuses. 

Même si de nombreuses mesures ont été prises depuis la première Conférence sur les océans en 2017, les progrès sont inégaux entre les pays et les régions, a rappelé Mme ULUDONG: les progrès se font en fonction de l’accès non seulement à la science et à l’innovation, mais aussi aux financements et à la coopération interdisciplinaire et intersectorielle.  Elle a mis en exergue la collecte insuffisante de données et des déficiences dans leur ventilation en tant qu’obstacle majeur à la réalisation de l’objectif 14 de développement durable.  C’est la raison pour laquelle la Conférence sur les océans de 2020 a opté pour le thème « Intensification de l’action fondée sur la science et l’innovation aux fins de la mise en œuvre de l’objectif 14: bilans, partenariats et solutions ».

La science est essentielle pour lever les défis de l’ODD 14, et cette année, nous avons l’opportunité de transformer les défis en possibilités à saisir, en redoublant d’efforts dans différents domaines et en misant sur la science, l’accès aux données pertinentes et l’innovation.  Les cofacilitateurs comptent sur l’engagement constructif des toutes les parties prenantes: États Membres, société civile, milieu académique, secteur privé, communauté scientifique et organisations philanthropiques. 

M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, Président de la soixante-quatorzième session de l’Assemblée générale, a rappelé que les océans produisent la moitié de l’oxygène que nous respirons et nourrissent 3,2 milliards de personnes.  En outre, près de 350 millions d’emplois sont liés au secteur de la pêche.  Fort de ces données, il a appelé à atteindre, en 2020, les différentes cibles de l’objectif 14 de développement durable (ODD 14), voyant dans cette conférence l’occasion d’intensifier les actions à cette fin.  Rappelant à quel point la vie sous les mers et la vie sur terre sont « symbiotiques », le Président a indiqué que 8 millions de tonnes de plastique sont déversées dans les océans chaque année.  La déclaration ministérielle adoptée l’an dernier appelle à la réduction des produits plastiques à usage unique, a-t-il rappelé à cet égard, en invitant à s’appuyer sur ce texte pour agir.  Il a aussi fait remarquer que la montée du niveau de la mer causée par les changements climatiques pose une menace existentielle à l’humanité, avant d’appeler à une transition vers une nouvelle économie verte pour y remédier. 

« Nous avons les outils pour éviter toute destruction supplémentaire et préserver les océans pour les prochaines générations », a assuré le Président.  Il a demandé une mise en œuvre accélérée des engagements volontaires pris en 2017 dans le cadre de la Conférence sur les océans et exhorté les États Membres à présenter des engagements plus ambitieux encore pour la conférence de juin.  Cela passe aussi par un renforcement des capacités des pays pour faire en sorte qu’ils soient plus à même de faire respecter le droit international, a-t-il expliqué.  Le Président s’est dit confiant que les négociations seront constructives, en vue d’aboutir à une déclaration présidentielle concise et axée sur l’obtention de résultats.  « Il est temps d’agir. »

Pour le Ministre de la mer du Portugal, M. RICARDO SERRÃO SANTOS, dont le pays est coorganisateur et hôte de la Conférence sur les océans de 2020, cette réunion est une étape importante sur la route vers la deuxième Conférence sur les océans.  Il s’agit d’examiner les thèmes proposés pour les dialogues interactifs et de planter le décor de cette conférence.  Comme l’a dit le Secrétaire général, « les peuples du monde ne veulent pas de demi-mesures et de promesses vides de sens.  Ils souhaitent un changement. »  Or les efforts en faveur de l’objectif 14 de développement durable (ODD 14) sont insuffisants, a remarqué le Ministre, en soulignant l’urgence qu’il y a à agir.  Il s’agit selon lui de renforcer la coopération à tous les niveaux et de veiller à la mise en œuvre de l’ODD 14 à travers des mesures transformatives.  La communauté internationale semble prête et l’élan est là, s’est-il félicité.

La science et l’innovation jouent des rôles essentiels et transversaux pour tous les dialogues interactifs, a-t-il noté, tout comme le renforcement de la coopération notamment pour la collecte et le traitement de données pertinentes.  Le Ministre a également mis l’accent sur l’importance du transfert de technologies marines.  À ses yeux, la priorité accordée par les cofacilitateurs sur des politiques axées sur la science et l’innovation est un signe prometteur.  Il espère que cette négociation produira un document qui apporte de la valeur ajoutée aux autres processus intergouvernementaux dans ce domaine. 

Deux des principaux moteurs des objectifs de développement durable (ODD) sont la consommation et la production durables et l’équité, a rappelé le Ministre, pour lequel ces éléments doivent être repris dans le texte de la future déclaration.  Notant que les ODD rappellent que la justice environnementale va de pair avec la justice sociale, il a insisté sur la participation sur un pied d’égalité de toutes les parties prenantes à tous les processus internationaux et intergouvernementaux.

La Conférence et ses documents finaux doivent être suffisamment forts pour garantir leur impact au-delà de 2020, a souhaité le Ministre, en mettant en exergue la notion de responsabilité mondiale.  Le Portugal restera aux avant-postes du plaidoyer en faveur de mesures transformatives pour l’utilisation durable des océans, a-t-il assuré.

Le Secrétaire principal à la pêche, à l’aquaculture et à l’économie bleue du Kenya, M. MICHENI J. NTIBA, dont le pays est coorganisateur de la Conférence sur les océans de 2020, a fait valoir que son pays est le champion d’une utilisation durable des ressources marines.  La première Conférence sur les océans de 2017 a changé la donne et abouti à un appel à agir, a-t-il rappelé.  En ce qui concerne la prochaine conférence, il a estimé qu’elle devrait permettre de conduire à l’adoption des mesures nécessaires pour préserver les océans et d’approfondir les résultats engrangés en 2017.  M. Ntiba a rappelé que les engagements volontaires pris par le passé, comme à Nairobi ou encore à Oslo, n’ont pas été honorés.  « Agissons pour les océans », a-t-il lancé.

M. Ntiba a souhaité que l’accent soit mis sur la science des océans lors de la prochaine conférence en vue de réaliser les cibles de l’objectif 14 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a mentionné diverses initiatives prises récemment, dont la réunion organisée en 2019 à Mombasa sur la pêche illégale dans l’océan Indien.  Enfin, il a plaidé pour des démarches régionales afin de relever les défis liés aux océans.  « Faisons de la conférence de Lisbonne un succès pour le bien de l’humanité », a-t-il exhorté.

M. STEPHEN D. MATHIAS, Sous-Secrétaire général aux affaires juridiques, a assuré que les dispositions organisationnelles et autres sont traitées par le Secrétariat de l’ONU, grâce à la coordination assurée par le Département des affaires économiques et sociales (DESA), en coopération avec le Département des affaires juridiques.  Il a rappelé que M. Liu Zhenmin, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a été nommé Secrétaire général de la Conférence 2020 sur les océans, alors que M. Miguel de Serpa Soares, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, a été nommé Conseiller spécial des présidents de la Conférence pour les questions juridiques. 

M. Mathias a ensuite fait une synthèse de la note de fond publiée par le Secrétaire général sous la côte A/74/630, notamment sur les huit thèmes retenus pour les dialogues interactifs et les possibilités de nouveaux partenariats à développer.  Cette note n’a pas l’ambition d’être exhaustive et doit être lue parallèlement avec les autres rapports du Secrétaire général sur les océans, le droit de la mer et d’autres publications pertinentes du système des Nations Unies, a-t-il précisé.

S’agissant des préparatifs logistiques de la Conférence, M. Mathias a indiqué que M. Liu Zhenmin, en tant que Secrétaire général de la Conférence, a mis en place une équipe interdépartementale qui supervise et coordonne les arrangements logistiques de cette conférence.  Un site Internet de la Conférence 2020 a été mis en place par DESA (www.un.org/oceanconference).  Ce site, qui regroupe les informations clefs et présente le logo officiel de la Conférence, sera disponible dans toutes les langues officielles de l’ONU. 

Pour faciliter l’accréditation et l’enregistrement de toutes les catégories de participants à la réunion préparatoire et à la Conférence, le Secrétariat a mis en place des procédures expliquées dans la section « Participer » du site Internet.  À ce jour, 174 organisations ont été accréditées, et un deuxième cycle d’accréditation est ouvert jusqu’au 10 mars 2020.  Au-delà de cette date, le Secrétariat tiendra des réunions informelles avec les États Membres sur toutes les questions d’ordre logistique et organisationnelles, jusqu’à la tenue de la Conférence en juin. 

M. PETER THOMSON, Envoyé spécial du Secrétaire général pour les océans, a plaidé pour que « l’inclusion » soit la marque de fabrique de la prochaine conférence.  Pollution, pêche intensive, acidification, désoxygénation et réchauffement sont les défis à relever s’agissant des océans, les trois derniers étant les plus complexes, a-t-il souligné.  Les océans sont malades, a-t-il dit, tandis que la science des océans est très imparfaite.  Il a aussi souhaité évoquer les éléments positifs, notamment le fait qu’une révolution verte est en cours, avec un recours accru à des combustibles moins polluants, comme il a pu le constater récemment à Davos.  Le monde de la finance et celui des porteurs de projets n’arrivent pas à communiquer, a-t-il regretté, ajoutant que la Conférence essaiera précisément d’y remédier, au service de l’économie bleue.  « Science, planification, finance », voilà les trois axes à suivre, a-t-il dit.  « 2020 est une année cruciale. »  Enfin, il a rappelé que « si nous prenons soin des océans, alors les océans prendront soin de nous ».

Discussion sur les thèmes des dialogues interactifs

Après la séance d’ouverture de la réunion préparatoire, les participants se sont penchés sur les huit thèmes proposés par le Secrétaire général pour les dialogues interactifs de la Conférence 2020 qui sont les suivants: Remédier à la pollution marine (cible 14.1); Gérer, protéger, conserver et restaurer les écosystèmes marins et côtiers (cibles 14.2 et 14.5); Réduire au minimum l’acidification des océans et y remédier (cible 14.3); Rendre la pêche durable et permettre aux petits pêcheurs artisanaux d’avoir accès aux ressources et aux marchés marins (cibles 14.4, 14.6 et 14.b); Assurer le développement et le renforcement d’économies océaniques durables, en particulier pour les petits États insulaires en développement et les pays les moins avancés (cible 14.7 et autres cibles applicables); Approfondir les connaissances scientifiques et renforcer les moyens de recherche et le transfert de techniques marines (cible 14.a); Améliorer la conservation et l’utilisation durable des océans et de leurs ressources en appliquant les dispositions du droit international énoncées dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (cible 14.c); Tirer parti des liens entre l’objectif 14 et les autres objectifs aux fins de la mise en œuvre du Programme 2030.

Les délégations ont pleinement soutenu le thème général de la Conférence « Intensification de l’action fondée sur la science et l’innovation aux fins de la mise en œuvre de l’objectif 14: bilans, partenariats et solutions », ainsi que les huit thèmes proposés pour les dialogues interactifs qui reflètent les différents aspects et les cibles de cet objectif.  Elles ont dit attendre de ces dialogues qu’ils permettent des échanges fructueux, la Conférence de 2020 devant être l’occasion de tirer certains bilans et d’intensifier l’action en favorisant toujours plus de partenariats multipartites.  Il faudra étendre et en répliquer les partenariats existants et en promouvoir de nouveaux. 

Plusieurs délégations ont mis en exergue les nombreux liens qui existent entre l’objectif 14 et les autres ODD comme, par exemple, l’ODD 13, qui porte sur la lutte contre les changements climatiques.  En effet, la résilience des écosystèmes marins est particulièrement affectée par les effets des changements climatiques.  S’agissant de l’ODD 7, l’océan peut être une source de plusieurs énergies propres, comme l’énergie éolienne offshore, l’énergie thalasso-thermique et l’énergie houlomotrice, ont souligné notamment l’Estonie et Monaco.  Compte tenu de ces liens, le Canada a suggéré que d’autres ODD soient intégrés dans tous les dialogues interactifs lors de la conférence de Lisbonne.  D’autres, comme l’Indonésie, ont attiré l’attention sur la question de la viabilité des économies océaniques et sur l’importance des transferts de technologies marines dans ce contexte. 

Si l’objectif commun est de parvenir à une gouvernance mondiale holistique et durable des océans, les délégations ont validé le lien évident qui existe avec la science et l’innovation pour pouvoir développer des approches pertinentes sur la base de données fiables.  « L’océan ne doit pas être un nouveau champ de bataille pour une nouvelle exploitation intensive », a prévenu la représentante de la Suède, après avoir mis l’accent sur l’importance des données scientifiques pour mieux comprendre la conjugaison de toutes les pollutions et tous les phénomènes qui menacent la durabilité de nos océans.

À ce sujet, les Maldives ont tiré la sonnette d’alarme en rappelant les dangers des déchets d’origine plastique pour la durabilité des océans: « nous en rejetons 8 millions de tonnes par an et, à ce rythme, les océans contiendront plus de plastique que de poissons en 2050 », a affirmé la représentante, alors que son homologue de la Finlande a mis en garde contre l’impact climatique sur l’Antarctique.  Compte tenu de la situation alarmante des océans, Malte a réitéré son plaidoyer pour que les fonds marins deviennent un héritage commun de l’humanité. 

Discussion sur les éléments d’une déclaration, convenue au niveau intergouvernemental, brève et concise, orientée vers l’action et mettant clairement l’accent sur les domaines d’action reposant sur la science et l’innovation qui favorisent la réalisation de l’objectif 14

Cet après-midi, les discussions ont porté sur les éléments à incorporer dans le document final de la Conférence sur les océans, une déclaration qui se veut brève et concise.  Parmi les domaines d’action prioritaires à refléter dans la déclaration, le Groupe des 77 et de la Chine a cité le rôle important des océans pour le climat mondial, la lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire.  Cette déclaration doit notamment mettre en exergue l’état actuel de l’environnement marin à cause des pressions anthropiques notamment qui induisent des niveaux de stress insoutenables pour les océans, les mers et les ressources marines.  L’issue de la Conférence devra élargir les horizons de la recherche scientifique marine en vue d’aider les pays à exploiter de manière durable les ressources marines.  Compte tenu du fait que les pays en développement ne sont pas sur un pied d’égalité avec le monde développé, il faut que cette déclaration mette également l’accent sur l’importance de la coopération et des transferts de technologies. 

L’Union européenne a regretté l’insuffisance des mesures pour la mise en œuvre de l’ODD 14, alors que des océans propres et sains sont un prérequis pour toute économie bleue.  À cet effet l’Allemagne a proposé de se concentrer dans un premier temps sur des zones marines protégées et la coopération transfrontière et intersectorielle, tandis que le Japon a appelé à intégrer dans la déclaration un appel à tous les pays du monde pour unir leurs efforts en vue de réduire à zéro la pollution plastique marine d’ici à 2050 par le biais de solutions novatrices.  Plus de 50 pays se sont déjà approprié cette vision qui doit devenir un engagement mondial, a rappelé le représentant japonais.  Ce souci a été partagé par la Finlande pour laquelle la déclaration doit aussi demander une évaluation des effets cumulés de ce fléau sur les écosystèmes océaniques et braquer les projecteurs sur l’importance des données marines et leur partage.

Pour la République de Corée, la pêche illégale non déclarée et non réglementée représente un domaine d’action prioritaire, car elle exerce une lourde pression sur la viabilité de la pêche en général.  La déclaration devra adopter une position ferme et appeler à renouveler l’engagement international pour appliquer la législation existante dans ce domaine, a plaidé la délégation.

Une économie bleue durable nécessitera une transformation de la relation qui existe entre l’humanité et les océans, a ajouté la représentante de l’Australie.  Le Canada a encouragé les partenariats dans ce domaine, notamment avec les populations autochtones. 

Pour Monaco, cette déclaration devrait souligner les liens entre l’océan et les changements climatiques, ainsi que le lien essentiel entre la science et la prise de décisions.  Justement, en vue d’assurer une meilleure prise de décisions et d’adopter des solutions novatrices adaptées à une action océanique efficace et performante, la Nouvelle-Zélande a suggéré que la déclaration mette l’accent sur la valeur des mécanismes existants pour une évaluation mondiale des océans.  Il faut aussi, a ajouté la délégation néo-zélandaise, que la déclaration encourage les principes d’économie circulaire. 

À l’instar de l’Australie, certaines déclarations ont demandé que la déclaration appelle à redoubler d’efforts pour atteindre les cibles de l’ODD 14 qui devaient être atteintes en 2020. 

De leur côté, si les États-Unis ont soutenu l’approche visant à parvenir à une déclaration consensuelle et concise, ils ont fait remarquer qu’à la lumière des déclarations de cet après-midi, il sera difficile d’arriver à une déclaration brève qui se limiterait à l’ODD 14.  Dès lors, la délégation américaine a appelé les cofacilitateurs à éviter les doublons avec d’autres travaux et à produire un texte « clair et facile à comprendre pour le citoyen lambda ».  Il faudrait, selon elle, ajouter des mesures incitatives pour que l’action océanique devienne de plus en plus populaire, notamment au sein du système des Nations Unies.  Les États-Unis ont aussi précisé qu’ils ne soutiendraient pas un appel à tenir des conférences donnant suite à l’ODD 14 étant donné « les doublons qui existent déjà au sujet des objectifs de développement durable ». 

Outre les délégations d’États Membres, la parole a été donnée à d’autres acteurs, des représentants d’organisations non gouvernementales qui sont nombreuses à être inscrites pour participer à ce processus préparatoire.

En fin de séance, un représentant de Youth of India Foundation a demandé aux représentants dans la salle de se lever et de collectivement s’engager à réduire l’usage des plastiques à usage unique, un appel que la salle a suivi en répétant l’engagement après lui.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale salue la mémoire du Sultan Qabus ibn Saïd d’Oman, « messager de la paix, de la compréhension et de la coexistence entre les peuples »

Soixante-quatorzième session,
57e séance plénière – matin
AG/12240

L’Assemblée générale salue la mémoire du Sultan Qabus ibn Saïd d’Oman, « messager de la paix, de la compréhension et de la coexistence entre les peuples »

Un messager de la paix, de la compréhension et de la coexistence entre les peuples; l’Assemblée générale a rendu, aujourd’hui, un hommage appuyé à la mémoire du Sultan Qabus ibn Saïd, décédé le 10 janvier à l’âge de 79 ans, après avoir dirigé Oman pendant 50 ans.

Le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a salué les nombreuses routes que le Sultan a construites: la route du dialogue, la route de la compréhension et la route de la paix.  Sous la direction de Qabus ibn Saïd, a-t-il rappelé, le Sultanat d’Oman est resté largement à l’abri des tensions et des troubles de la région, assurant plutôt des lignes de communication entre les parties à un différend.

Le Sultan n’a jamais cessé de contribuer au rapprochement des pays qui ne se parlaient plus, ont confirmé les États-Unis, avant que Brunei, au nom du Groupe des États d’Asie et du Pacifique, ne tire son chapeau à « un médiateur de confiance ».  Sa politique de neutralité a fait qu’Oman est perçu aujourd’hui comme « l’ami de tous et l’ennemi de personne ».  Cette approche de la politique étrangère consistant à « jeter les ponts de la paix et de la stabilité » a été saluée par le Danemark, au nom des Groupe des États d’Europe occidentale et autres États.  Le Sultan a accordé la priorité à la coopération et au multilatéralisme et a conduit son pays à rejoindre les Nations Unies, la Ligue des États arabes et le Conseil de coopération du Golfe, a ajouté le Secrétaire général. 

En un demi-siècle de règne, il a transformé Oman en « ce pays remarquable qu’il est aujourd’hui » où sa vision a élevé le niveau d’éducation de la population, multipliant le nombre des écoles, des hôpitaux et des routes.  Comme il a en financés un peu partout en Afrique, a confirmé le Togo, au nom du Groupe des États d’Afrique.  C’est ce type de leadership qui a assuré la prospérité du Sultanat d’Oman, a renchéri l’Azerbaïdjan, au nom du Groupe des États d’Europe orientale.  L’espérance de vie qui, en 50 ans, est passée de 50 à 77 ans, a été brandie par la Jamaïque, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), comme la preuve de cette prospérité. 

Le Sultan n’a pas oublié les femmes, a fait observer le Soudan, au nom du Groupe des États arabes.  Il avait proclamé le 17 octobre, Journée de la femme omanaise et ses succès ne sont pas passés inaperçus.  En 2010, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) classait Oman parmi les pays qui avaient le plus avancé, au cours des 40 dernières années, ont encore indiqué les États-Unis.

Le Sultan était aussi un dirigeant progressif dans la lutte contre les changements climatiques, a ajouté le Président de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad Bande, en parlant du Prix Sultan Qabus ibn Saïd et UNESCO pour la préservation de l’environnement.  Depuis 1991, le Prix doté d’une récompense de 100 000 dollars, est décerné tous les deux ans à des particuliers, groupes de particuliers, instituts ou organisations qui ont apporté, dans les domaines de l’aménagement et de la préservation de l’environnement, une contribution éminente.  Alors que l’Assemblée générale s’engage dans la « Décennie d’action en faveur des objectifs de développement durable », son Président a invité les États Membres à rendre hommage à la mémoire du Sultan en intensifiant leurs efforts pour la protection de notre planète. 

Il nous a légué un patrimoine éternel, s’est ému Oman.  Pendant 50 ans, il a tout sacrifié pour construire notre pays et jeter des ponts avec tous les peuples ».  Il a aimé son peuple et son peuple le lui a bien rendu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

République centrafricaine: même sans le consensus attendu, le Conseil de sécurité renouvelle l’embargo sur les armes pour une période de six mois

8712e séance – matin 
CS/14096

République centrafricaine: même sans le consensus attendu, le Conseil de sécurité renouvelle l’embargo sur les armes pour une période de six mois

En adoptant, ce matin, la résolution 2507 (2020) par 13 voix pour et 2 abstentions (Chine et Fédération de Russie), le Conseil de sécurité de sécurité a renouvelé pour six mois le régime de sanctions contre la République centrafricaine.

Ainsi, le Conseil de sécurité a décidé que, jusqu’au 31 juillet 2020, tous les États Membres devront continuer de prendre les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects d’armements à la République centrafricaine, à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires battant leur pavillon ou d’aéronefs immatriculés chez eux. 

Ces dispositions s’appliquent aux armements et matériel connexe de tous types, y compris les armes et les munitions, les véhicules et les matériels militaires, les équipements paramilitaires et les pièces détachées correspondantes.  Elles concernent aussi toute assistance technique ou formation et toute aide financière ou autre en rapport avec les activités militaires ou la fourniture, l’entretien ou l’utilisation de tous armements et matériel connexe, y compris la mise à disposition de mercenaires armés venant ou non de leur territoire.  Ces mesures ne s’appliquent toutefois pas à une série d’exceptions stipulées dans le texte.

Pour la France, délégation porte-plume de cette résolution, ce texte est un « bon compromis ».  Dès lors elle regrette qu’il n’y ait pas eu un vote unanime, un regret partagé par la plupart de ses homologues autour de la table.  Pourtant, le Conseil est pleinement à l’écoute des autorités centrafricaines en ce qui concerne leurs préoccupations légitimes sur la sécurité de leur pays, a noté la France, ce dont témoignent notamment les deux « assouplissements significatifs » de l’embargo sur les armes autorisés par le Conseil de sécurité, en septembre et aujourd’hui, et les procédures d’exemption prévues par le Comité des sanctions. 

Le Royaume-Uni a émis des réserves quant au fait que le régime de sanctions n’ait été prorogé que de six mois.  Il s’est inquiété en effet du « mauvais message » que cela envoie aux groupes armés en République centrafricaine.  La Fédération de Russie, l’une des deux délégations à s’être abstenues, lui a rétorqué que sa délégation aurait voulu un assouplissement plus significatif de l’embargo sur les armes.  Or, nos vues, comme celles de Bangui, n’ont pas été prises en compte, s’est plaint le délégué russe.  Il a souligné que cet embargo fait obstacle au réarmement de l’armée centrafricaine, alors que celle-ci a la responsabilité de protéger les civils, ajoutant que les autorités légitimes de la République centrafricaine demandent la levée de l’embargo.  Cela a été confirmé par la délégation centrafricaine ce matin. 

En effet, après avoir salué le nouvel allégement de l’embargo, la représentante centrafricaine a expliqué que ce sont les activités criminelles, menées sur une grande part du territoire national, qui conduisent son gouvernement à insister sur une levée totale de l’embargo sur les armes.  C’est d’autant plus justifié, a relevé la Fédération de Russie, que dans tous les cas rien n’empêche les fauteurs de troubles de s’armer grâce à la contrebande.  Dès lors, la Fédération de Russie a dit qu’elle souhaitait un réexamen de la situation par le Conseil au mois de juillet prochain.

Les délégations favorables au renouvellement du régime de sanctions, dont les États-Unis, la Belgique et l’Allemagne, ont justifié leur position par le fait qu’à l’aube de l’échéance électorale de 2020 en République centrafricaine, il est plus urgent que jamais de créer des conditions propices à la paix et à la stabilité dans le pays, en soulignant que les mesures d’embargo sur les armes restent indispensables pour cela.  « Pour être clair, notre désir n’est pas de punir la République centrafricaine mais d’appuyer l’État alors qu’il restaure son autorité et assume sa responsabilité de protection des civils », a fait valoir la représentante de Saint-Vincent-et-les Grenadines. 

Allant dans le même sens, le Niger, la Tunisie et l’Afrique du Sud, « les A3 » du Conseil de sécurité, ont ajouté que ces sanctions ne sont pas une fin en soi, mais plutôt l’expression de « notre engagement pour une transition du pays vers la stabilité et la paix ».  Pour ces pays, l’adoption de cette résolution constitue ainsi une réponse à la demande légitime formulée par les autorités de la République centrafricaine de continuer vers la levée définitive de l’embargo sur les armes, sur la base des progrès accomplis dans le domaine du stockage des armes et de la gestion de leur non-prolifération. 

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (S/2019/930)

Texte du projet de résolution (S/2020/79)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures, les déclarations de sa présidence et les déclarations à la presse sur la situation en République centrafricaine,

Se félicitant des efforts faits par les autorités centrafricaines, en coordination avec leurs partenaires internationaux, pour faire avancer la réforme du secteur de la sécurité, notamment le déploiement en cours des forces de défense et de sécurité centrafricaines, les encourageant à mettre en œuvre leur plan national de défense, leur concept d’emploi des forces et leur politique nationale de sécurité, et sachant que les autorités centrafricaines ont besoin de former et d’équiper de toute urgence leurs forces de défense et de sécurité pour être en mesure d’apporter une réponse proportionnée aux menaces contre la sécurité de l’ensemble des citoyens de la République centrafricaine,

Se félicitant également de l’engagement dont font preuve les autorités centrafricaines et leurs partenaires internationaux et des progrès qu’ils ont accomplis vers la réalisation des objectifs de référence définis dans la déclaration de son président en date du 9 avril 2019 (S/PRST/2019/3), prenant note de la lettre que les autorités centrafricaines ont adressée à son Président (S/2020/57), et les encourageant à poursuivre leurs efforts pour résoudre les difficultés qui subsistent,

Se félicitant en outre du rapport du Secrétaire général du 15 octobre 2019 (S/2019/822) présenté en application de la résolution 2448 (2018),

Prenant note de la lettre du Secrétaire général datée du 31 décembre 2019 adressée à la Présidente du Conseil de sécurité (S/2019/1008) conformément au paragraphe 7 de la résolution 2488 (2019), et du rapport des autorités de la République centrafricaine adressé au Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine (« le Comité ») conformément au paragraphe 6 de la résolution 2488 (2019),

Prenant note également du rapport à mi-parcours (S/2019/608) et du rapport final (S/2019/930) du Groupe d’experts sur la République centrafricaine créé en application de la résolution 2127 (2013), dont le mandat a été élargi par la résolution 2134 (2014) et prorogé en application de la résolution 2454 (2019) (« le Groupe d’experts »), et prenant note en outre des recommandations du Groupe d’experts,

Constatant que la situation en République centrafricaine continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide que, jusqu’au 31 juillet 2020, tous les États Membres devront continuer de prendre les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à la République centrafricaine, à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires battant leur pavillon ou d’aéronefs immatriculés chez eux, d’armements et de matériel connexe de tous types, y compris les armes et les munitions, les véhicules et les matériels militaires, les équipements paramilitaires et les pièces détachées correspondantes, ainsi que de toute assistance technique ou formation et de toute aide financière ou autre en rapport avec les activités militaires ou la fourniture, l’entretien ou l’utilisation de tous armements et matériel connexe, y compris la mise à disposition de mercenaires armés venant ou non de leur territoire, et décide également que ces mesures ne s’appliquent pas:

a)    aux fournitures destinées exclusivement à l’appui de la MINUSCA et aux missions de formation de l’Union européenne déployées en République centrafricaine, aux forces françaises dans les conditions prévues au paragraphe 52 de la résolution 2499 (2019), et aux forces d’autres États Membres qui assurent une formation ou prêtent assistance sur notification préalable conformément à l’alinéa b) du paragraphe 1 ci-après, ou à leur utilisation par ces missions et forces;

b)    aux livraisons de matériel non létal et à la fourniture d’une assistance, y compris les activités de formation opérationnelle et non opérationnelle dispensée aux forces de sécurité de la République centrafricaine, dont les services publics civils chargés du maintien de l’ordre, exclusivement destinés à soutenir le processus de réforme du secteur de la sécurité en République centrafricaine, ou à être utilisés dans le cadre de celui-ci, en coordination avec la MINUSCA, et sur notification préalable au Comité, et demande à la MINUSCA de lui faire rapport sur la contribution de cette dérogation au processus de réforme du secteur de la sécurité, dans le cadre des rapports périodiques qu’elle lui soumet;

c)    aux fournitures apportées en République centrafricaine par les forces soudanaises ou tchadiennes pour leur usage exclusif dans le cadre des patrouilles internationales de la force tripartite créée le 23 mai 2011 à Khartoum par la République centrafricaine, le Soudan et le Tchad, pour renforcer la sécurité dans leurs zones frontalières communes, en coopération avec la MINUSCA, telles qu’approuvées préalablement par le Comité;

d)    aux livraisons de matériel militaire non létal destiné exclusivement à un usage humanitaire ou de protection et à l’assistance technique ou à la formation connexes, sur notification préalable au Comité;

e)    aux vêtements de protection, dont les gilets pare-balles et les casques militaires, temporairement exportés en République centrafricaine, pour leur usage personnel uniquement, par le personnel des Nations Unies, les représentants des médias et les agents humanitaires et d’aide au développement et le personnel connexe;

f)    aux livraisons d’armes légères et autre matériel connexe destinés exclusivement à être utilisés dans le cadre des patrouilles internationales qui assurent la sécurité dans l’aire protégée du Trinational de la Sangha et par les gardes forestiers armés du Projet Chinko et du Parc national de Bamingui-Bangoran afin de lutter contre le braconnage, la contrebande d’ivoire et d’armes, et d’autres activités contraires au droit interne de la République centrafricaine ou aux obligations que lui impose le droit international, dont le Comité aura préalablement reçu notification;

g)    aux livraisons d’armes de calibre égal ou inférieur à 14,5 mm et de munitions et composants spécialement conçus pour ces armes, de véhicules militaires terrestres non armés et de véhicules militaires terrestres montés d’armes de calibre égal ou inférieur à 14,5 mm, destinés aux forces de sécurité centrafricaines, dont les services publics civils chargés du maintien de l’ordre, et devant être utilisés exclusivement aux fins de la réforme du secteur de la sécurité ou de l’appui à celle-ci, dont le Comité aura préalablement reçu notification;

h)    aux livraisons d’armes et autre matériel létal connexe qui ne sont pas énumérés à l’alinéa g) du paragraphe 1 de la présente résolution, destinés aux forces de sécurité centrafricaines, dont les services publics civils chargés du maintien de l’ordre, et devant être utilisés exclusivement aux fins de la réforme du secteur de la sécurité ou de l’appui à celle-ci, sous réserve de l’approbation préalable du Comité; ou

i)    aux autres ventes ou livraisons d’armes et de matériel connexe, ou à la fourniture d’une assistance ou de personnel, sous réserve de l’approbation préalable du Comité;

2.    Décide qu’il incombe au premier chef à l’État Membre fournisseur de donner notification au Comité et que cette notification doit avoir lieu au moins 20 jours avant la livraison de tout matériel autorisé en application des alinéas d), f) et g) du paragraphe 1 de la présente résolution, et déclare qu’il incombe au premier chef à l’organisation internationale, régionale ou sous-régionale fournisseuse de donner notification au Comité et que cette notification doit être donnée au moins 20 jours avant la livraison de tout matériel autorisé en application des alinéas d), f) et g) du paragraphe 1 de la présente résolution;

3.    Décide de reconduire jusqu’au 31 juillet 2020 les mesures et les dispositions énoncées aux paragraphes 4 et 5 de la résolution 2488 (2019) et rappelle les paragraphes 8 et 9 de la résolution 2488 (2019);

4.    Décide de reconduire jusqu’au 31 juillet 2020 les mesures et les dispositions énoncées aux paragraphes 9, 14 et 16 à 19 de la résolution 2399 (2018) et prorogées par le paragraphe 1 de la résolution 2454 (2019) et rappelle les paragraphes 10 à 13 et 15 de la résolution 2399 (2018);

5.    Réaffirme que les mesures énoncées aux paragraphes 9 et 16 de la résolution 2399 (2018) s’appliquent aux personnes et entités désignées par le Comité, conformément aux dispositions des paragraphes 20 à 22 de la résolution 2399 (2018) et telles que prorogées par le paragraphe 2 de la résolution 2454 (2019);

6.    Décide de proroger jusqu’au 31 août 2020 le mandat du Groupe d’experts, tel qu’il l’a énoncé aux paragraphes 30 à 39 de la résolution 2399 (2018) et reconduit au paragraphe 3 de la résolution 2454 (2019), exprime son intention de réexaminer le mandat et de faire le nécessaire concernant sa nouvelle reconduction le 31 juillet 2020 au plus tard, et prie le Secrétaire général de prendre dès que possible les dispositions administratives voulues pour reconduire le Groupe d’experts, en consultation avec le Comité, en faisant au besoin appel aux compétences des membres actuels du Groupe d’experts;

7.    Prie le Groupe d’experts de lui remettre d’ici au 15 juillet 2020, après concertation avec le Comité, un rapport final, et de lui adresser au besoin des rapports d’étape;

8.    Se déclare particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles des réseaux transnationaux de trafiquants continuent de financer et d’approvisionner les groupes armés en République centrafricaine, et demande au Groupe d’experts de prêter une attention particulière à l’analyse de ces réseaux dans le cadre de l’exécution de son mandat, en coopération, selon que de besoin, avec les autres groupes d’experts qu’il a créés;

9.    Exhorte toutes les parties, et tous les États Membres, ainsi que les organisations internationales, régionales et sous-régionales, à coopérer avec le Groupe d’experts et à assurer la sécurité de ses membres;

10.   Exhorte également tous les États Membres et tous les organismes compétents des Nations Unies à permettre au Groupe d’experts de consulter toutes personnes et d’accéder à tous documents et sites, afin qu’il puisse s’acquitter de son mandat, et rappelle qu’il est utile que la MINUSCA et le Groupe d’experts mettent en commun les informations dont ils disposent;

11.   Réaffirme les dispositions relatives au Comité et les dispositions concernant la présentation de rapports et la révision des mesures prises énoncées dans la résolution 2399 (2018) et prorogées par la résolution 2454 (2019);

12.   Prie les autorités centrafricaines de faire rapport au Comité, d’ici au 30 juin 2020, sur les progrès accomplis dans la réforme du secteur de la sécurité, le processus de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement, et la gestion des armes et des munitions;

13.   Prie le Secrétaire général, en étroite consultation avec la MINUSCA, y compris le Service de la lutte antimines, et le Groupe d’experts, de procéder, au plus tard le 30 juin 2020, à une évaluation des progrès accomplis par les autorités de la République centrafricaine quant aux principaux objectifs de référence relatifs à l’embargo sur les armes établis dans la déclaration de son Président en date du 9 avril 2019 (S/PRST/2019/3);

14.   Affirme qu’il continuera de suivre l’évolution de la situation en République centrafricaine et se tiendra prêt à réexaminer l’opportunité des mesures énoncées dans la présente résolution, à tout moment selon les besoins, à la lumière de la situation en matière de sécurité dans le pays, des progrès réalisés quant au processus de réforme du secteur de la sécurité, au processus de DDRR et à la gestion des armes et des munitions, notamment en ce qui concerne le rapport et l’évaluation demandés aux paragraphes 12 et 13 de la présente résolution;

15.   Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations

Après s’être félicitée de l’adoption de la résolution renouvelant le régime de sanctions sur la République centrafricaine, Mme ANNE GUEGUEN (France) a indiqué que son pays, en tant que porte-plume, considère ce texte comme un « bon compromis ».  Sa rédaction a donné lieu à des négociations au cours desquelles la France a joué, de bout en bout, un rôle d’intermédiaire constructif, a-t-elle précisé.  Remerciant les membres du Conseil de sécurité pour leur flexibilité, elle a toutefois regretté qu’il n’y ait pas eu un vote unanime sur le texte.  

Selon la représentante, le Conseil est pleinement à l’écoute des autorités centrafricaines en ce qui concerne leurs préoccupations légitimes sur la sécurité de leur pays.  À cet égard, a-t-elle relevé, la MINUSCA, qui constitue un « engagement majeur » des Nations Unies, assure la sécurité des populations sur l’ensemble du territoire du pays et accompagne le redéploiement progressif des forces armées centrafricaines. 

Mme Gueguen a par ailleurs indiqué que, soucieux de faciliter l’équipement et de renforcer la mobilité et la sécurité des forces de sécurité centrafricaines, le Conseil a autorisé deux « assouplissements significatifs » de l’embargo sur les armes entre septembre et aujourd’hui.  Elle a aussi rappelé que les autorités centrafricaines peuvent bénéficier des procédures d’exemption prévues par le Comité des sanctions des Nations Unies. 

Dans un contexte sécuritaire qui demeure instable, la représentante juge important de conserver une approche responsable et de veiller à accompagner les autorités centrafricaines dans leurs progrès non seulement en matière de réforme du secteur de la sécurité, mais aussi de désarmement, de démobilisation et de réintégration des anciens membres des groupes armés, et de gestion des armes et des munitions.  Il s’agit en effet d’un élément clef pour une paix et une sécurité durables en République centrafricaine, a-t-elle conclu. 

M. ABDOU ABARRY (Niger), qui s’exprimait également au nom de l’Afrique du Sud et de la Tunisie, a salué et appuyé les efforts et l’ensemble des mesures prises par le Gouvernement centrafricain pour rétablir la paix et la stabilité dans le pays.  Le représentant a souligné que le régime de sanctions ne devait pas représenter un objectif en soi, mais plutôt « notre engagement pour une transition du pays vers la stabilité et la paix ».  L’adoption de cette résolution, a ajouté M. Abarry, constitue ainsi une réponse à la demande légitime formulée par les autorités de la République centrafricaine de continuer vers la levée définitive de l’embargo sur les armes, sur la base des progrès accomplis dans le domaine du stockage des armes et de la gestion de leur non-prolifération. 

Cette résolution, a espéré le délégué, ouvrira la voie au rééquipement de l’ensemble du dispositif de défense et de sécurité, afin que les autorités de la République centrafricaine puissent reprendre le contrôle de l’ensemble du pays.  Cela leur permettra aussi d’affronter les groupes armés qui représentent toujours une menace pour la paix et la stabilité, a-t-il ajouté.  Le représentant a terminé en soulignant la nécessité d’accompagner l’État centrafricain, en coordination avec tous les partenaires régionaux, dans ses efforts de stabilisation et de relèvement socioéconomique du pays, et de l’encourager à multiplier la coopération avec les partenaires. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a indiqué que les sanctions, si elles sont un outil imparfait, peuvent produire les résultats escomptés avec des effets collatéraux minimaux.  « Pour être clair, notre désir n’est pas de punir la République centrafricaine mais d’appuyer l’État alors qu’il restaure son autorité et assume sa responsabilité de protection des civils. »  Tout en prenant note des demandes de la République centrafricaine de voir lever la composante des sanctions relative aux armes, elle a indiqué qu’à son avis, le moment n’est pas encore venu d’accéder à cette demande, en raison des lacunes qui subsistent dans le contrôle des armes et des munitions dans le pays.  Elle a enfin invité le Conseil à demeurer objectif et pragmatique, les positions idéologiques et les jeux d’intérêt ne devant jamais l’emporter sur les besoins du peuple centrafricain. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a regretté qu’en dépit des efforts de la délégation porte-plume, la France, l’unité du Conseil n’ait pas pu être pleinement réalisée en fin de compte sur le texte adopté ce matin.  Les efforts de mise en œuvre de l’accord de paix et le processus politique en République centrafricaine sont des signes positifs, selon l’Allemagne qui appuie la République centrafricaine.  Cependant, le représentant s’est dit préoccupé par la violence et les attaques visant les civils qui perdurent en République centrafricaine.  Le régime de sanctions reste un élément important pour accompagner le Gouvernement centrafricain sur la voie de la paix, a-t-il estimé.  Il a appelé à inscrire cette question dans le débat plus large sur le thème « Faire taire les armes en Afrique ».  L’Allemagne encourage le Gouvernement centrafricain à contrôler strictement toutes les armes qui lui seront acheminées et à empêcher tout risque de prolifération.  Elle l’encourage en outre à progresser selon les indicateurs de la réforme du secteur sécuritaire et de désarmement, démobilisation et réintégration.

Mme MELANIE HIDALGO (République dominicaine) a encouragé tous les acteurs de la République centrafricaine à mettre en œuvre les mesures visées dans la Déclaration présidentielle du Conseil d’avril 2019 en vue d’une levée des sanctions.  Les parties doivent redoubler d’efforts pour appliquer l’accord de paix signé en février 2019, a-t-elle conclu. 

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie) a jugé regrettable l’absence de consensus sur le dossier de la République centrafricaine.  Nous devrions être unis pour aider le pays à mettre un terme aux massacres, comme celui qui s’est récemment produit à Bria, a exhorté le délégué.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) s’est dite convaincue que les mesures d’embargo sur les armes en République centrafricaine restent indispensables pour créer les conditions d’une paix pérenne dans le pays.  Elle a encouragé les autorités centrafricaines à miser sur la réforme du secteur de la sécurité.  La Belgique, a-t-elle assuré, est prête à les accompagner sur cette voie.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a salué les efforts de la République centrafricaine, notamment ceux qui visent à respecter les indicateurs fixés.  Les sanctions ne sont pas une fin en soi et elles ne sont pas en place pour toujours, a-t-il souligné expliquant qu’il s’agit d’un moyen pour créer les conditions propices à la paix et la stabilité en République centrafricaine.  L’Indonésie appelle l’ensemble des États Membres à maintenir leur appui à la République centrafricaine et se dit prête à œuvrer pour l’unité au sein du Conseil de sécurité sur cette question, a conclu le délégué.

M. WU HAITAO (Chine) a rappelé que les sanctions ne sont pas une fin en soi.  Constatant que la situation s’améliore sur le terrain, il a appelé le Conseil à lever les sanctions le plus rapidement possible.  La Chine n’a pas eu d’autre choix que de s’abstenir, a-t-il dit en expliquant que la résolution ne reflète pas la position de tous les États Membres.

M. DAVID CLAY (Royaume-Uni) a regretté que le consensus n’ait pas été obtenu sur la résolution adoptée ce matin en dépit des efforts de la France.  La délégation déplore en outre que la période de renouvellement du régime de sanctions ne soit que de six mois, ce qui envoie selon elle un « mauvais message » aux groupes armés.  Les procédures de notification doivent permettre aux autorités centrafricaines de garder le contrôle sur l’acheminement et d’éviter la prolifération des armes dans le pays, a poursuivi le représentant.  Il a salué à cet égard les progrès en ce qui concerne la gestion des armes et des munitions pour que les armes ne tombent pas entre les mains de groupes armés.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que son pays n’a pas pu appuyer la résolution.  En effet, a-t-il indiqué, tous les points de vue n’ont pas été pris en compte.  « Nous voulions un assouplissement plus sensible de l’embargo sur les armes, et nos vues, comme celles de Bangui, n’ont pas été prises en compte », a-t-il regretté.  Selon la Fédération de Russie, cet embargo fait obstacle au réarmement de l’armée, alors que celle-ci a la responsabilité de protéger les civils.  Quant aux fauteurs de troubles, rien ne les empêche de s’armer par le biais de la contrebande, a-t-il fait remarquer.  Le délégué a rappelé que les autorités légitimes de la République centrafricaine demandent la levée de l’embargo sur les armes.  Il a donc souhaité un réexamen de la situation par le Conseil en juillet.  La Fédération de Russie continuera d’appuyer la République centrafricaine, a-t-il assuré.

Pour Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis), le régime de sanctions en République centrafricaine exercera la pression nécessaire sur les groupes armés en République centrafricaine.  Cette résolution ne doit cependant pas faire oublier la dynamique des négociations, y compris ce qui s’est fait à Bangui, a-t-elle souhaité.  Il y a été dit que certains gouvernements, dont celui des États-Unis, ne veulent pas la paix en République centrafricaine, « or rien ne pourrait être plus faux », s’est-elle indignée.  « Nous souhaitons tous promouvoir les intérêts des habitants de la République centrafricaine et promouvoir la paix et la stabilité dans le pays. »  Sachant que le Gouvernement américain est le plus grand donateur humanitaire de la République centrafricaine -avec 140 millions de dollars en 2019- et qu’il aide le pays à reconstruire les institutions chargées de la sécurité, la représentante a demandé à la Fédération de Russie si elle estime que l’aide humanitaire est contraire aux intérêts de la population locale.  « Cela ne serait pas la première fois qu’elle le fait au Conseil de sécurité », a-t-elle dit tout en constatant que cela ne veut pas pour autant dire que c’est vrai. 

Mme Norman-Chalet a estimé que le Conseil de sécurité pourrait répondre favorablement à des demandes d’exemption émanant du Gouvernement centrafricain afin d’importer de nouvelles armes, mais elle a dit que le Conseil n’avait pas reçu de telle requête depuis le dernier assouplissement de l’embargo en septembre.  Elle a dit espérer des progrès d’ici à la prochaine résolution, avant de dénoncer la « propagande qui sème la discorde » de la Fédération de Russie, qui entraîne sur un chemin dangereux.  Il est du devoir de l’ensemble de la communauté internationale d’accompagner la République centrafricaine sur la voie de la stabilité et de la désescalade, a-t-elle plaidé, d’autant plus que le pays a une échéance électorale en 2020.  Recommandant pour cela d’agir de concert avec l’Union africaine, elle a encouragé la Fédération de Russie à rejoindre le consensus au sein du Conseil de sécurité sur ce dossier, pour soutenir le renforcement des institutions d’une manière transparente et coordonnée.

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a indiqué que la résolution de ce jour témoigne de l’attention que le Conseil porte à la situation en République centrafricaine.  L’objectif ultime du régime de sanctions est d’ouvrir la voie à un règlement pacifique du conflit, a-t-il rappelé.  Le délégué a enfin salué l’évolution positive de la situation sur le terrain et souhaité le maintien des conditions pour la réussite du dialogue.

Mme AMBROISINE KPONGO (République centrafricaine) s’est à son tour félicitée de l’adoption de la résolution renouvelant le régime de sanctions à l’encontre de son pays.  Elle s’est réjouie en particulier du consensus et du compromis qui ont prévalu lors des négociations car, a-t-elle dit, « le sort de tout un peuple dépend des décisions que vous prenez dans cette enceinte ».  À la France, porte-plume de la résolution, la représentante a adressé toutes ses félicitations pour sa flexibilité tout au long des consultations, lesquelles ont produit un « texte concis et acceptable par tous ».  La délégation centrafricaine salue le nouvel allégement de l’embargo sur les armes en ce qui concerne les véhicules de transport, a-t-elle précisé. 

La représentante a indiqué que les activités de groupes armés dans le nord du pays, notamment dans la préfecture de Vakaga, restent une source de profonde inquiétude pour les populations.  « Doter les forces de défense et de sécurité de moyens roulants leur permettra une mobilité assurée dans les zones d’insécurité et facilitera une intervention rapide auprès des civils en détresse », a-t-elle assuré.  Ce sont ces activités criminelles, menées sur une grande part du territoire national, qui conduisent le Gouvernement à insister pour une levée totale de l’embargo sur les armes, a expliqué la représentante. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: le Représentant spécial s’inquiète des violations de l’embargo sur les armes et de l’escalade militaire, en dépit des engagements pris à Berlin

8710e séance – matin 
CS/14092

Libye: le Représentant spécial s’inquiète des violations de l’embargo sur les armes et de l’escalade militaire, en dépit des engagements pris à Berlin

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) a fait part, ce matin au Conseil de sécurité, de son inquiétude face aux nombreuses violations de l’embargo sur les armes et à la reprise des combats, alors même que les parties avaient décidé, le 19 janvier dernier à la Conférence de Berlin sur la Libye, de respecter le cessez-le-feu et de s’engager dans un processus politique. 

Intervenant depuis Brazzaville, en République du Congo, où il a participé au huitième Sommet des chefs d’État du Comité de haut niveau sur la Libye de l’Union africaine, M. Ghassan Salamé a expliqué qu’à Berlin, les pays et les organisations régionales ont convenu de ne pas interférer dans les affaires intérieures de la Libye et de se conformer à l’embargo sur les armes imposé par l’ONU.  Les 55 points du Communiqué final prennent en compte l’ensemble des questions relatives au problème libyen, un dispositif renforcé par le plan opérationnel détaillé de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL). 

La Conférence a eu lieu dans un contexte marqué par la trêve obtenue le 8 janvier par les Présidents Vladimir Putin et Recep Tayyip Erdoğan et acceptée par les deux parties au conflit.  Mais cette trêve a fait long feu, en particulier à Tripoli où s’abattent tirs d’artillerie et pilonnages aveugles.  Des combats font également rage à l’extérieur de la capitale.  Le 26 janvier, l’Armée nationale libyenne (ANL) a lancé une offensive contre les forces du Gouvernement d’entente nationale.  Des renforts militaires sont enregistrés dans les deux camps, ce qui fait craindre un embrasement régional.  Les belligérants reçoivent des pays étrangers, équipements sophistiqués, combattants et conseillers, en violation fragrante de l’embargo sur les armes et des engagements pris à Berlin. 

« Je partage la colère de M. Salamé devant le comportement cynique de certains États », a avoué l’Allemagne, puisque parmi les fournisseurs, on compte plusieurs pays qui ont participé à la Conférence de Berlin, ont dénoncé les États-Unis.  « Le temps est venu pour ceux qui ont violé les résolutions existantes du Conseil de sécurité d’en subir les conséquences », ont-ils annoncé.  Les ingérences étrangères et les appuis militaires doivent cesser, s’est impatientée, à son tour, la France, en pensant « en particulier à la Turquie ».  Elle a jugé important que les pays voisins de la Libye, au-delà de ceux présents à Berlin, comme l’Algérie ou l’Égypte, soient associés au suivi et à la mise en œuvre des conclusions de la Conférence.  La France a dit penser particulièrement à la Tunisie, au Maroc, au Tchad et au Niger.  Ce dernier a prévenu que sans une solution à la crise libyenne, le Sahel restera exposé aux affres du terrorisme, d’autant plus que « l’internationale terroriste » y envoie ses adeptes les plus dangereux et les plus aguerris. 

Le Niger a appelé le Conseil à prendre en compte les conclusions de la réunion du Comité de haut niveau de Brazzaville lesquelles seront validées par le prochain Sommet de l’Union africaine prévu dans quelques jours à Addis-Abeba.  Le Conseil, a acquiescé la Tunisie, soutenue par la Libye, doit associer l’Union africaine au processus car « la concertation des efforts est cruciale ».  L’idée du Représentant spécial d’obtenir du Conseil une résolution approuvant les conclusions de Berlin a été soutenue par toutes les délégations, afin d’envoyer un signal fort aux « fauteurs de troubles ».  La « crédibilité » du Conseil a été mise en avant par la Fédération de Russie car « le règlement de la crise libyenne ne doit pas servir à se lancer dans une compétition ».  Nous avons des contacts avec toutes les parties, mais n’en soutenons aucune en particulier, a-t-elle souligné. 

Les deux parties, a indiqué le Représentant spécial, ont transmis à Berlin les noms de leurs représentants à la Commission militaire mixte « 5+5 » à Genève, dont les travaux doivent être lancés dès que possible, mais la délégation de l’ANL n’a pas encore confirmé sa participation.  M. Salamé a dit son intention de rencontrer dans deux jours, le général Khalifa Haftar, chef de l’ANL, « un individu assoiffé de pouvoir », a tranché la Libye.  Le peuple libyen, a-t-elle prévenu, perd confiance devant une communauté internationale qui semble placer « l’agresseur et l’agressé sur un pied d’égalité ». 

Comment, s’est-elle indignée, les forces du général Haftar, responsables des bombardements, peuvent-elles se prétendre « nationales » alors qu’elles tuent des jeunes libyens, multipliant assassinats et enlèvements?  La Libye a dénoncé l’influence des Émirats arabes unis et même de l’Égypte, « grande sœur du monde arabe », sans oublier « les forces spéciales françaises ».  Le meilleur moyen de régler la crise est de respecter la volonté du peuple libyen, a pronostiqué la Libye, en saluant les efforts de la Turquie et de la Fédération de Russie. 

Il est impératif, a souligné le Représentant spécial, que la Commission militaire mixte se réunisse sous les auspices de l’ONU pour transformer la trêve en cessez-le-feu et discuter des modalités d’un mécanisme de contrôle du cessez-le-feu, un processus pour lequel le soutien collectif du Conseil de sécurité est « vital ».  Consolider la trêve est indispensable pour assurer le lancement du Forum politique libyen, qui doit permettre aux parties de préparer la transition institutionnelle.  « Les Libyens doivent avoir l’espoir que la communauté internationale ne les abandonne pas », a insisté M. Salamé. 

LA SITUATION EN LIBYE (S/2020/41)

Déclarations

Intervenant depuis Brazzaville, en République du Congo, où il a participé au huitième Sommet des chefs d’État du Comité de haut niveau sur la Libye de l’Union africaine, M. GHASSAN SALAMÉ, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a tout d’abord informé les membres du Conseil de sécurité sur les événements survenus depuis le compte rendu du Secrétaire général, le 21 janvier dernier, consacré aux conclusions de la Conférence de Berlin sur la Libye.  Quand ont débuté les consultations préparatoires à cette conférence, nous savions que nous devions nous mobiliser pour enrayer la spirale du chaos et de la guerre civile en Libye, a-t-il précisé, remerciant au passage la Chancelière allemande, Angela Merkel, pour ses inlassables efforts en amont de la Conférence organisée le 19 janvier. 

À Berlin, a poursuivi M. Salamé, les représentants des pays concernés et des organisations régionales ont convenu de ne pas interférer dans les affaires intérieures de la Libye et de se conformer à l’embargo sur les armes imposé par l’ONU.  Les 55 points du Communiqué final prennent en compte l’ensemble des questions relatives au problème libyen, a-t-il assuré, ajoutant que ce dispositif est renforcé par le plan opérationnel détaillé de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL).  Cet effort conséquent visait à unifier la communauté internationale sur la question libyenne et à offrir aux Libyens la perspective d’une protection internationale, a indiqué le Représentant spécial. 

La Conférence a eu lieu dans un contexte marqué par la trêve obtenue le 8 janvier par les Présidents Vladimir Putin et Recep Tayyip Erdoğan et acceptée par les deux parties au conflit, a rappelé M. Salamé.  Après le lancement de cette trêve, le 12 janvier, la réduction sensible de la violence a offert un répit aux habitants de Tripoli.  Mais au vu des récents développements sur le terrain, cette trêve a fait long feu, a-t-il déploré, faisant état d’une intensification des échanges de tirs d’artillerie à Tripoli ces derniers jours et d’une augmentation du nombre de victimes en raison de pilonnages aveugles.  Depuis le 6 janvier, a-t-il dit, les incidents liés au conflit ont fait au moins 18 morts et trois blessés parmi la population civile.  Quatre enfants, tous âgés de moins de 12 ans, ont notamment péri dans le bombardement de la zone de Hadba. 

Des combats font également rage à l’extérieur de Tripoli, a poursuivi le Chef de la MANUL.  Le 26 janvier, l’Armée nationale libyenne (ANL) a ainsi lancé une offensive contre les forces du Gouvernement d’entente nationale dans la zone d’Abou Grain, au sud de Misrata, faisant des dizaines de victimes de part et d’autre.  Ces affrontements se sont accompagnés de frappes opérées par des aéronefs à voilure fixe de l’ANL et des drones des deux parties.  Le Représentant spécial s’est aussi déclaré préoccupé par les renforts militaires enregistrés par les deux camps, ce qui fait craindre un embrasement plus large de la région.  Les belligérants ont continué de recevoir de pays étrangers des équipements sophistiqués, des combattants et des conseillers, en violation fragrante de l’embargo sur les armes et des engagements pris à Berlin.  L’ANL a renforcé ses positions le long de la ligne de front à Tripoli, avec notamment l’appui de combattants étrangers, a-t-il indiqué, ajoutant que des avions cargo acheminent quotidiennement des équipements à cette partie dans l’est de la Libye. 

Dans le même temps, plusieurs milliers de combattants étrangers pro-Gouvernement d’entente nationale ont été envoyés à Tripoli et déployés aux côtés des forces libyennes, a encore précisé M. Salamé, selon lequel ces forces, soutenues par une puissance étrangère, ont aussi installé des systèmes de défense antiaérienne dans tout l’ouest du pays.  Ces manœuvres de renforcement, qui violent l’esprit et la lettre de la Conférence de Berlin, risquent de provoquer une conflagration plus dangereuse, a-t-il mis en garde, appelant les parties et leurs alliés étrangers à s’abstenir de toute action irresponsable et à renouveler leur engagement en faveur d’un cessez-le-feu. 

Comme le Secrétaire général l’a expliqué le 21 janvier, les deux parties ont transmis à Berlin les noms de leurs représentants à la Commission militaire mixte à Genève, dont les travaux doivent être lancés dès que possible, a-t-il ajouté.  Selon lui, les représentants du Gouvernement d’entente nationale sont prêts à s’y engager mais la délégation de l’ANL n’a pas encore confirmé sa participation.  M. Salamé a cependant déclaré qu’il prévoit de rencontrer le général Khalifa Haftar, chef de l’ANL, dans deux jours à Rajma afin d’évoquer cette question.  Pour le Représentant spécial, il est impératif que la Commission se réunisse sous les auspices de l’ONU pour transformer la trêve en cessez-le-feu et discuter des modalités d’un mécanisme de contrôle du cessez-le-feu, un processus pour lequel le soutien collectif du Conseil de sécurité est, selon lui, « vital ». 

Consolider la trêve est en effet indispensable pour assurer le lancement du Forum politique libyen, qui doit permettre aux parties de préparer la transition institutionnelle.  Toutefois, a-t-il dit, le processus de sélection des délégués n’est pas encore achevé, en dépit du soutien apporté par la MANUL.  Si les profondes divisions de la Chambre des représentants ont jusqu’à présent empêché la désignation des délégués, le processus de sélection a néanmoins pu débuter hier. 

M. Salamé a ensuite indiqué que le comité de suivi de la Conférence de Berlin sera opérationnel dans les prochains jours avec la formation de quatre groupes de travail centrés sur les volets politique, militaire et économique ainsi que sur le droit international humanitaire et les droits de l’homme.  Ces mécanismes permettront de faire en sorte que ceux qui font obstacle au processus, à l’intérieur ou à l’extérieur de la Libye, seront tenus pour responsables, a-t-il souligné.  S’agissant de l’économie libyenne, elle est de plus en plus instable en raison du conflit, a-t-il signalé, précisant notamment que la compagnie pétrolière nationale (NOC) a déclaré l’état de force majeure sur ses exportations depuis les ports de l’est du pays à la suite de manifestations hostiles.  Le 20 janvier, cet état a été étendu à tous les ports du fait des pressions exercées par les forces proches de l’ANL pour stopper la production dans les champs de Sharara, Hamada et al-Feel.  Ce blocus entraîne des pertes évaluées à 55 millions de dollars par jour, a-t-il précisé, évoquant une perte totale qui atteint aujourd’hui 622 millions de dollars. 

S’agissant de la situation humanitaire, le Représentant spécial a indiqué que, depuis le début du conflit en avril dernier, plus de 149 000 personnes ont dû fuir de la zone de Tripoli.  Le 22 janvier, plus de 120 écoles restaient fermées dans les secteurs d’Ain Zara et Abou Salim de Tripoli, privant d’éducation au moins 70 000 enfants.  De plus, 26 infrastructures de santé ont subi des dommages dans cette zone, dont 12 ont dû être fermées.  Par ailleurs, au moins 953 migrants ont regagné la Libye au cours des deux premières semaines de 2020 et la plupart ont été placés dans des centres de détention où leurs droits sont bafoués.  Ces personnes font partie du millier de migrants qui ont quitté le pays par la mer le 1er janvier, a-t-il expliqué, se disant inquiet compte tenu des faibles capacités de recherche en Méditerranée. 

M. Salamé s’est également déclaré préoccupé par les disparitions forcées et les détentions arbitraires signalées à Syrte et imputées à des groupes armés depuis la prise de la ville par l’ANL le 6 janvier.  La MANUL a d’autre part été informée de la libération de centaines de prisonniers, en contradiction avec la loi libyenne, afin qu’ils combattent dans les rangs du Gouvernement d’entente nationale.  Le Représentant spécial a aussi salué l’appel lancé par plusieurs États Membres le 17 janvier en faveur de la libération immédiate de Mme Siham Sergewa, membre de la Chambre des représentants arrêtée à son domicile de Benghazi.  Enfin, il a exprimé l’espoir que l’élan créé le 19 janvier à Berlin et aujourd’hui à Brazzaville sera repris à son compte par le Conseil et par les parties libyennes.  « Les Libyens doivent avoir l’espoir que la communauté internationale ne les abandonne pas », a-t-il conclu, estimant que l’adoption d’une résolution reprenant les conclusions de Berlin enverrait un « signal décisif ». 

S’exprimant en sa qualité de Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye, M. MATHIAS LICHARZ (Allemagne) a présenté son rapport qui couvre la période allant du 5 septembre 2019 au 29 janvier 2020, au cours de laquelle le Comité a tenu trois consultations informelles et mené des travaux additionnels en vertu d’une procédure d’approbation tacite. 

Le Président a rappelé que, lors de la plus récente des trois consultations, le Comité a entendu une présentation du Groupe d’experts à propos de son rapport final soumis en application de la résolution 2441 (2018).  Les membres du Comité ont exprimé leurs préoccupations face à la non-mise en œuvre de l’embargo sur les armes en particulier, aux violations constatées et aux attaques commises contre les civils.  Sur les quatre recommandations soumises par le Groupe d’experts, le Comité a décidé d’en mettre deux en œuvre, l’une sur le gel des avoirs et l’autre sur la mise à jour de la liste des sanctions.  Depuis la présentation au Conseil du rapport final, le Groupe d’experts a présenté au Comité une mise à jour de l’accord de sécurité signé entre la Libye et la Turquie, compte tenu de son rôle dans la surveillance de l’embargo.

Le 12 septembre dernier, a poursuivi le Président, le Comité a reçu, à la demande de la Libye, un exposé du Président du Conseil d’administration de l’Autorité libyenne d’investissement, une entité figurant sur la Liste.  Lors de la discussion qui a suivi, les membres du Comité ont souligné la nécessité de préserver l’intégrité et la valeur des avoirs libyens gelés, « au profit du peuple libyen ».  S’agissant des interdictions de voyager, le Comité a, au cours de la période considérée, approuvé deux demandes d’exemption présentées par Mme Aicha Qadafi et Mme Safia Farkash Al-Barassi, au titre du paragraphe 16 a) de la résolution 1970 (2011).  En ce qui concerne le gel des avoirs, aucune décision négative n’a été prise par le Comité relativement à la notification, soumise par Bahreïn, au sujet des dépenses de base de l’Autorité libyenne d’investissement.  Enfin, en ce qui concerne les mesures visant à prévenir les exportations illicites de pétrole, y compris le pétrole brut et les produits raffinés, le Comité étudie un projet de notice d’aide à la mise en œuvre de ces mesures, préparé par le Groupe d’experts, pour aider les États Membres. 

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a salué le processus de Berlin et demandé que les engagements pris soient honorés.  Néanmoins, la situation s’est aggravée, la Libye étant au bord du désastre, a-t-il regretté.  Inquiet des violations de l’embargo sur les armes, il a appelé tous les pays à le respecter et exhorté les parties libyennes à s’accorder sur un cessez-le-feu et à se réunir au sein de la Commission militaire mixte « 5+5 ».  Le représentant s’est en outre dit préoccupé par les frappes contre des zones résidentielles.  La Conférence de Berlin, a-t-il conclu, a été cruciale en ce qu’elle a réuni les acteurs clefs.  Mais la situation sur le terrain est extrêmement préoccupante et il est essentiel que le Conseil présente un front uni sur ce dossier.  Le représentant a apporté un appui « sans équivoque » à la MANUL et au processus politique.  Il n’y a pas d’autre solution, a-t-il prévenu. 

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a rappelé qu’il y a moins de deux semaines, les dirigeants du monde se sont réunis à Berlin pour débattre de la situation en Libye et qu’ils ont appelé à un cessez-le-feu durable surveillé par l’ONU.  Les dirigeants, a-t-elle affirmé, ont rejeté toute ingérence étrangère « toxique ».  Malheureusement, la promesse de Berlin est déjà menacée, s’est lamentée la représentante, devant les nouvelles violations flagrantes de l’embargo sur les armes, y compris le déploiement de combattants et de mercenaires étrangers et les livraisons d’armes, de munitions et de systèmes de défense avancés.  Parmi les fournisseurs, on compte plusieurs pays qui ont participé à la Conférence de Berlin, s’est-elle étonnée.

« Le temps est venu pour ceux qui ont violé les résolutions existantes du Conseil de sécurité d’en subir les conséquences », a-t-elle averti.  Elle a appelé au strict respect de l’embargo sur les armes et exhorté les parties libyennes à honorer la trêve fragile qu’elles ont elles-mêmes respectée au cours des dernières semaines.  L’engagement en faveur des pourparlers « 5+5 » prévus par la MANUL sera un signal important de la détermination de chaque partie à trouver une solution qui évite une inutile effusion de sang.  Mme Craft a précisé que le cessez-le-feu est certes une étape cruciale, mais il ne devrait pas être l’objectif final.  De ce fait, tout cessez-le-feu doit créer un espace pour des discussions sérieuses et concrètes entre les Libyens sur la façon de résoudre les problèmes qui ont conduit au conflit. 

Parmi les tâches difficiles à mener, elle a parlé du démantèlement des milices extrémistes, de l’enracinement de l’économie libyenne dans la transparence et l’état de droit, au profit de tous les Libyens, et de l’assurance qu’aucun groupe ou saboteur ne prendra en otage le processus politique.  Aucun groupe ne devrait être autorisé à détourner la production nationale de pétrole.  C’est le peuple libyen qui souffre de l’effondrement des revenus du pays, a-t-elle rappelé.  Le blocus actuel de la production de pétrole doit donc être levé.  Les menaces contre les civils doivent cesser, a demandé Mme Craft qui a plaidé pour que les personnes déplacées soient autorisées à rentrer volontairement et en toute sécurité dans leurs foyers.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a estimé que la Conférence de Berlin a permis de renforcer le consensus international nécessaire à une sortie de crise.  L’embargo sur les armes doit être respecté et nous déplorons que plus de 50 violations aient été recensées par la MANUL la semaine dernière, a dit la représentante.  Les interférences étrangères et les appuis militaires alimentent le conflit et doivent cesser, a-t-elle poursuivi, en pensant « en particulier à la Turquie ».  Elle s’est dite vivement préoccupée par la présence croissante de combattants syriens et étrangers qui continuent à affluer dans le pays, en contravention avec les engagements pris à Berlin, laissant craindre une escalade régionale du conflit libyen.  Elle a en outre jugé important que les pays voisins de la Libye, au-delà de ceux présents à Berlin, comme l’Algérie ou l’Égypte, soient associés au suivi et à la mise en œuvre de la Conférence.  « Nous pensons particulièrement à la Tunisie, au Maroc, au Niger et au Tchad. »

Elle a qualifié l’escalade des tensions sur le terrain, après deux semaines de trêve, « d’extrêmement préoccupante ».  Elle doit cesser immédiatement, a exhorté Mme Gueguen, avant de plaider pour une solution politique répondant aux attentes de tous les Libyens.  Afin de maintenir la dynamique positive de Berlin et d’accompagner la reprise du processus politique, le Conseil de sécurité doit envoyer, à l’unisson, un message fort à tous les acteurs concernés en Libye, a poursuivi la déléguée française.  Mme Gueguen a appelé le Conseil à endosser rapidement et sans détours les conclusions de la Conférence de Berlin par une résolution robuste, qui apportera un soutien fort et sans équivoque à la médiation onusienne en Libye.  Ce soutien devra être substantiel et opérationnel, qu’il s’agisse de la surveillance du cessez-le-feu, du respect de l’embargo sur les armes ou plus largement de la mise en œuvre simultanée des six volets de Berlin. 

Mme BERIOSKA ILUMINADA MORRISON GONZÁLEZ (République dominicaine) a fait part de son inquiétude devant les attaques contre des cibles civiles en Libye.  Elle a invité les parties à agir de bonne foi et à respecter le cessez-le-feu, arguant que le peuple libyen ne peut pas continuer à pâtir de l’incapacité du Conseil de sécurité à faire respecter l’embargo sur les armes.  Elle a appelé le Conseil à afficher son unité et a rappelé que cela fait six mois que la députée Siham Sergewa a disparu à Benghazi, avant de demander que la lumière soit faite sur la question.  Toute attaque contre les représentants du peuple est une attaque contre la démocratie, a-t-elle martelé, avant de demander au Gouvernement libyen de mettre fin aux détentions arbitraires, notamment celles d’enfants, et d’améliorer les conditions de vie dans les centres de détention. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est déclarée troublée par les difficultés à trouver une solution à un conflit qui fait rage depuis neuf ans.  Si la priorité doit aller au bien-être des Libyens, il importe de ne pas oublier tous les pays voisins, du Sahel à l’Europe, qui sont affectés par le conflit.  Aux yeux de la représentante, il est urgent de parvenir à une désescalade.  La Conférence de Berlin, a-t-elle rappelé, a permis de lancer un clair message en faveur de l’arrêt des violences, à commencer par les attaques contre les populations civiles.  La représentante s’est félicitée de ces efforts et a encouragé l’implication de tous les voisins de la Libye et des autres parties affectées dans le processus.  Réitérant l’importance d’un dialogue libyen sous les auspices de l’ONU, elle a également salué les efforts de dialogue menés à Moscou, à Alger et à Brazzaville. 

Elle a d’autre part applaudi la décision des parties au conflit de nommer des représentants à la Commission militaire mixte.  Elle les a appelées à entamer des négociations pour parvenir à un cessez-le-feu permanent.  Dans le même temps, a-t-elle ajouté, tous les États Membres doivent se conformer et mettre en œuvre l’embargo sur les armes, conformément à la résolution 1970 (2011) du Conseil.  Depuis 2011, a-t-elle déploré, 19 résolutions sur la situation en Libye ont été adoptées mais nous savons tous que l’embargo sur les armes continue d’être violé en toute impunité.  En conséquence, la situation libyenne ne pourra être résolue que si les États Membres respectent leurs obligations au regard du droit international, a-t-elle conclu, réaffirmant qu’il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a salué le processus de Berlin, comme étant complémentaire des efforts onusiens.  Appuyer les Libyens relève de la responsabilité de tous, pas seulement de ceux qui étaient présents à Berlin ou de ceux qui sont au Conseil de sécurité.  Le représentant a appelé la communauté internationale à fournir un appui « honnête et sans arrière-pensées » et à éviter d’aggraver la situation.  Jugeant prioritaire la protection des Libyens, il a voulu que cessent les bombardements contre les zones résidentielles et les infrastructures civiles.  « Cela doit cesser », a-t-il insisté, avant d’appeler les Libyens à soutenir, à leur tour, les efforts internationaux.  Le rôle des voisins et des organisations régionales est très important, a-t-il ajouté, plaidant pour la prise en compte de leur perspective « unique ».  Rappelant ensuite que la mission du Conseil de sécurité est de « sauver des vies », le représentant a estimé qu’il est temps d’agir.  Dix mois après le début de l’agression, le Conseil n’est toujours pas parvenu à une réponse « formelle » pour y remédier.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a fait part de sa préoccupation face aux violations de l’embargo sur les armes, ce qui déstabilise la situation en Libye et dans tout le Sahel.  Il a rappelé que la Libye ne s’est pas retrouvée au seuil de la catastrophe ces derniers jours, mais bien depuis 2011 quand ses institutions ont été détruites.  Nous avons pris part aux préparatifs de Berlin, après avoir invité les parties libyennes à Moscou le 13 janvier dernier, en collaboration avec la Turquie, a rappelé le représentant.  C’est aux Libyens de régler leurs problèmes, a-t-il souligné, ajoutant que son pays a des contacts avec toutes les parties et n’en soutient aucune en particulier.  Il est « indispensable », a-t-il jugé, de savoir ce que les parties libyennes pensent de tous les aspects des conclusions de Berlin.  Le représentant a espéré le démarrage rapide de la Commission militaire mixte « 5+5 ». 

Quant à la crédibilité évoquée par le Représentant spécial, il a espéré que les décisions du Conseil de sécurité seront effectivement empreintes de cette crédibilité, car « le règlement de la crise libyenne ne doit pas servir à se lancer dans une compétition ».  Il faut tenir compte des préoccupations des pays voisins et de l’avis des organisations régionales.

M. WU HAITAO (Chine) a jugé constructifs les derniers efforts internationaux et appelé à une bonne mise en œuvre des engagements pris à la Conférence de Berlin.  Le Conseil doit adopter une résolution concrète le plus rapidement possible, a-t-il estimé, jugeant que la priorité des priorités est d’aboutir à un cessez-le-feu durable.  À cette fin, le délégué a encouragé la convocation rapide de la Commission militaire mixte « 5+5 ».  La communauté internationale, a-t-il insisté, doit soutenir l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Libye et appuyer la MANUL.  Tous les efforts doivent être faits contre le terrorisme, a poursuivi le représentant, en appelant, en particulier, à la lutte contre le déploiement de combattants terroristes étrangers.  La Libye ne doit pas devenir une « pépinière à terroristes », a-t-il mis en garde, avant de rappeler que les sanctions sont là pour favoriser une solution politique.  Il faut donc respecter l’embargo sur les armes et maintenir l’unité du Conseil de sécurité sur le dossier libyen, a-t-il conclu.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a indiqué que son pays soutient le plan du Représentant spécial dans tous ses aspects, y compris économique et politique, sachant que ce plan est complémentaire au cessez-le-feu.  La Belgique salue également les conclusions du processus de Berlin, lesquelles furent entérinées par l’ensemble des participants, le 19 janvier dernier.  La représentante a estimé que ces conclusions constituent la meilleure chance d’éviter un conflit régional et d’obtenir une solution politique pour l’ensemble du peuple libyen.  Elle a rappelé qu’au cours des derniers mois, la Belgique a systématiquement dénoncé les violations flagrantes de l’embargo sur les livraisons d’armes et appelé à un cessez-le-feu durable.  La Belgique espère désormais que l’appel répété du Conseil de sécurité à la non-ingérence des acteurs extérieurs, au dialogue intralibyen et au respect de l’embargo sur les armes sera enfin concrétisé dans les faits.

Mme Van Vlierberge a ensuite fait part de sa préoccupation face aux informations qui indiquent que du matériel militaire et des renforts en mercenaires étrangers ont été fournis aux deux parties, et ce, même après la Conférence de Berlin.  Elle s’est aussi dite préoccupée par le blocage de la production pétrolière, ce qui entraîne des conséquences désastreuses pour l’économie du pays et la population dans son ensemble.  La Belgique appelle donc les parties libyennes, en particulier le général Haftar, à soutenir les conclusions de Berlin et à s’engager constructivement avec la MANUL dans les préparatifs du Forum politique.  La représentante a dit espérer que la réunion de Berlin permettra de mettre fin à l’ingérence de certains États, et qu’au contraire, ces derniers joueront désormais de leur influence auprès des parties libyennes de manière positive, en les encourageant sur la voie du dialogue. 

La représentante a dénoncé les deux mémorandums d’accord signés entre le Gouvernement d’entente nationale et la Turquie, le premier parce qu’il enfreint les droits souverains d’autres États et le second parce qu’il renforce la dynamique militaire et porte en lui le potentiel d’une violation massive de l’embargo sur les armes.  Elle a salué la nomination des délégués de chaque partie à la Commission militaire mixte « 5+5 » et les a exhortés à tenir une réunion productive.  Elle a dit attendre avec impatience la reprise rapide d’un dialogue direct entre les parties libyennes au Forum politique proposé par le Représentant spécial. 

Mme KGAUGELO THERMINA MOGASHOA (Afrique du Sud) a estimé que la prolongation du conflit en Libye exige du Conseil qu’il examine avec franchise ses origines et les raisons pour lesquelles il est devenu une guerre par procuration.  La fragmentation de l’ordre et de la sécurité assurés par l’État a donné lieu à une prolifération d’innombrables groupes armés rivalisant pour le contrôle du pays et de ses ressources.  Il s’agit là d’une des pires crises humanitaires à laquelle fait face notre continent, compte tenu des effets sur les civils libyens, les migrants et les réfugiés, a constaté à regret la représentante, en réitérant qu’il n’existe aucune solution militaire au conflit.

Elle a attiré l’attention sur l’insécurité dans la région du Sahel, conséquence de l’instabilité en Libye, les flux d’armes dans ce pays finissant aussi entre les mains de groupes armés opérant au Niger, au Tchad, en Mauritanie, au Mali et au Burkina Faso.  Plus d’un million de personnes ont été déplacées dans ces pays après l’insurrection jihadiste en Afrique subsaharienne, a rappelé Mme Mogashoa.  Soulignant ensuite l’impact de ce conflit sur les migrants et les réfugiés en Libye, la déléguée s’est dite préoccupée des frappes aériennes ayant pris pour cibles des centres de détention.  Elle a ensuite salué l’Allemagne pour avoir accueilli la Conférence de Berlin à l’appui du processus en trois étapes de la MANUL.  Elle a appelé à une coopération renforcée avec l’Union africaine, soulignant qu’une paix et une stabilité durables en Libye ne peuvent découler que d’une paix inclusive.  À cet égard, la représentante a plaidé pour l’unification des institutions nationales libyennes, à commencer par ses forces armées, et pour le respect de l’embargo sur les armes, qui doit être appliqué « sans exception ».

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a appuyé, à son tour, les efforts du Représentant spécial et partagé sa « frustration » face à la situation actuelle en Libye.  À l’instar de M. Salamé, il a dénoncé le fait que les pays qui se sont engagés à Berlin à s’abstenir de toute ingérence acheminent maintenant des armes et des combattants en Libye.  « Je partage la colère de M. Salamé devant le comportement cynique de certains États », a avoué le représentant, avant d’appeler tous les efforts pour que les parties libyennes se réunissent au sein de la Commission militaire mixte « 5+5 ».  Le Conseil, a-t-il conclu, doit adopter rapidement une résolution entérinant les engagements pris à Berlin.  Nous devons envoyer aux Libyens un message clair pour leur dire que « nous ne les abandonnons pas ».  Une telle résolution serait aussi un signal fort aux « fauteurs de troubles », a ajouté le représentant.

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie) s’est aussi félicité des engagements pris à Berlin lors d’une conférence qui a été une étape importante vers un processus politique intralibyen.  Cette conférence a été un succès, a estimé le représentant, qui a jugé que des mesures concrètes doivent désormais être prises par les participants pour respecter leurs engagements.  La mesure la plus urgente est de mettre un terme aux violations de l’embargo sur les armes, puisque l’implication des acteurs extérieurs ne fait qu’exacerber le conflit.  Il ne saurait y avoir de solution militaire au conflit car « le peuple libyen mérite mieux que cela », a dit le représentant.  Il a demandé au Conseil de sécurité d’imposer des sanctions aux « fauteurs de troubles ».  Il a ensuite salué la désignation des membres de la Commission militaire mixte « 5+5 » et a espéré que la première réunion aura lieu au plus vite.  Une Libye stable ne sera possible que grâce à un processus politique mené par les Libyens eux-mêmes et pour assurer le succès, ce processus doit être ouvert à tous, y compris aux femmes et aux jeunes. 

Voisin de la Libye, a dit M. NIANDOU AOUGI (Niger), mon pays est directement concerné par la crise.  Nous sommes plus que jamais disposés à contribuer aux efforts internationaux et régionaux pour le règlement pacifique du conflit.  Le représentant a condamné « avec vigueur » l’ingérence étrangère et la violation « continue et manifeste » de l’embargo sur les armes, ajoutant que cet état de fait est caractérisé par une détérioration dangereuse de la situation humanitaire dans le pays.  Il a prévenu que sans une solution à la crise libyenne, le Sahel restera exposé aux affres du terrorisme, d’autant plus que « l’internationale terroriste » y envoie ses adeptes les plus dangereux et les plus aguerris. 

La Libye n’a pas besoin qu’on lui transfère d’autres armes et d’autres terroristes: elle a besoin de paix, a martelé le délégué.  Il a réitéré la demande de l’Union africaine pour un cessez-le-feu entre toutes les parties, le retour au processus politique inclusif, le respect de l’embargo sur les armes et l’imposition de sanctions aux contrevenants.  Il a enfin salué la tenue aujourd’hui-même de la réunion du Comité de haut niveau de l’Union africaine à Brazzaville, invitant le Conseil à prendre en compte les conclusions qui en découleront et qui seront validées par le prochain Sommet de l’Union africaine prévu dans quelques jours à Addis-Abeba. 

M. MONCEF BAATI (Tunisie) a indiqué qu’il n’y a pas de solution militaire en Libye.  Le chaos, l’instabilité et les affrontements militaires ont aggravé les souffrances du peuple libyen, s’est-il désolé, avant de lancer un appel aux parties libyennes pour qu’elles respectent la trêve.  « Il n’y a pas de solution militaire en Libye », a-t-il répété, soulignant les résultats engrangés à la Conférence de Berlin et appelant à la poursuite des efforts.  Le Conseil de sécurité doit assumer ses responsabilités et associer l’Union africaine au processus.  La concertation des efforts est cruciale, a souligné le représentant, qui a insisté aussi sur le respect de l’embargo sur les armes et la levée des obstacles à la production de pétrole.  Préservons l’élan de la Conférence de Berlin, a-t-il conclu. 

M. PHAM HAI ANH (Viet Nam) a insisté sur un processus politique mené par les Libyens eux-mêmes, affirmant que c’est la seule solution viable pour mettre fin au conflit.  Il a invité la communauté internationale à soutenir les conclusions de la Conférence de Berlin, appelant à une résolution du Conseil de sécurité en ce sens.  Le représentant a ensuite condamné les attaques contre les civils, avant de prier les parties au conflit de faire preuve de retenue et de permettre le déploiement de l’aide humanitaire.  Il a fermement appuyé le rôle des Nations Unies et des organisations régionales, sans oublier les voisins de la Libye qui sont directement affectés par la crise.  À son tour, il a insisté sur le respect des sanctions arrêtées par le Conseil de sécurité, dont l’embargo sur les armes.  Ces sanctions, a-t-il dit, doivent être bien ciblées afin de ne pas affecter le quotidien des populations, et elles doivent être levées quand les conditions le permettront.

M. TAHER M. T. ELSONNI (Libye) a insisté sur la perte de confiance du peuple libyen devant une communauté internationale qui semble placer « l’agresseur et l’agressé sur un pied d’égalité ».  L’agression contre Tripoli n’est qu’un nouveau chapitre du chaos et la résilience de la ville est un symbole vivace de celle du peuple libyen.  Ce sont ceux qui ont peur d’une Libye libérée de toute influence extérieure qui sapent la situation.  Six représentants spéciaux se sont succédé depuis neuf ans, sans résultat tangible.  Le Conseil, s’est impatienté le représentant, est « incapable » de mettre un terme à l’agression qui se poursuit depuis 10 mois.  Cette agression, a-t-il confessé, était en préparation depuis de longues années, comme en témoigne l’afflux de mercenaires du Groupe Wagner, du Tchad et du Soudan.  Les forces du général Haftar, a-t-il accusé, sont responsables des bombardements, dont le tout récent contre l’Académie militaire de Tripoli qui a fait 32 morts.  Comment cette armée peut-elle se prétendre « nationale » alors qu’elle tue des jeunes libyens, multipliant par ailleurs assassinats et enlèvements?

Pourtant, s’est étonné le représentant, l’agresseur et l’agressé sont placés sur un pied d’égalité, grâce aux pressions de pays comme les Émirats arabes unis.  Le délégué s’est aussi étonné de l’implication de l’Égypte, « grande sœur du monde arabe ».  « Vous allez perdre votre pari », a-t-il pronostiqué aux pays qui soutiennent l’agression, en pensant aussi aux forces spéciales françaises.  Que font-elles là?  Ont-elles reçu l’autorisation du Conseil?  Notre lutte contre l’agression est « légitime », a souligné le représentant.  Il en a profité pour mettre en garde contre la marginalisation de l’Union africaine dont le général Haftar « fait fi ». 

Le délégué a salué les efforts de la Turquie et de la Fédération de Russie pour un véritable cessez-le-feu, ajoutant que les violations de l’agresseur depuis la Conférence de Berlin confirment qu’il ne veut pas la paix.  Le représentant a appelé le Conseil à adopter une résolution pour appuyer les conclusions de Berlin et menacer les « fauteurs de troubles ».  Le meilleur moyen de régler la crise est de respecter la volonté du peuple libyen, a-t-il déclaré.  Il a mis en garde contre toute velléité de tutelle des ressources libyennes.  Nous tendons la main à tous les amoureux de la paix.  Nous nous approchions de cette paix, avant l’agression actuelle.  La guerre n’est pas une guerre entre l’est et l’ouest de la Libye, c’est la guerre d’un seul individu assoiffé de pouvoir.  « Mais personne ne réussira à nous diviser », a martelé le représentant. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Au Conseil de sécurité, la « voie » de l’ASEAN est à l’honneur pour son rôle en faveur de la paix et de la sécurité en Asie du Sud-Est

8711e séance – après-midi
CS/14093

Au Conseil de sécurité, la « voie » de l’ASEAN est à l’honneur pour son rôle en faveur de la paix et de la sécurité en Asie du Sud-Est

Au Conseil de sécurité cet après-midi, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a été abondamment saluée, y compris par le Secrétaire général de l’ONU, qui a cité cette organisation sous-régionale en modèle de multilatéralisme.

Rappelant les efforts diplomatiques, de prévention des conflits et de consolidation de la paix de l’ASEAN déployés depuis sa création en 1967, M. António Guterres a loué sa contribution de longue date aux opérations de paix de l’ONU.  « Près de 5 000 militaires et policiers, provenant de sept de ses États membres, sont actuellement déployés dans le monde, le nombre de femmes en leur sein étant en hausse », a-t-il souligné.  De son côté, l’Indonésie, où l’Association a son siège, s’est enorgueillie de la création du Registre des femmes pour la paix, un « vivier d’expertes » œuvrant à la promotion des perspectives de genre dans les processus de paix.

Le Secrétaire général de l’ASEAN, M. Lim Jock Hoi, a plaidé pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, car c’est sur elles que s’arc-boute la prospérité économique, un objectif auquel œuvre l’Association depuis ses débuts.  « Dans notre partie du monde, nous l’appelons “la voie de l’ASEAN”, une manière unique de répondre aux problèmes, qui, aux yeux de certains observateurs extérieurs, est difficile à comprendre, et ne peut être comprise que par nous.  En d’autres termes, la voie de l’ASEAN est devenue une way of life pour l’ASEAN », a déclaré M. Hoi. 

En 2011, le Conseil de sécurité a appuyé les efforts de l’ASEAN pour régler pacifiquement les différends frontaliers entre la Thaïlande et le Cambodge, a poursuivi M. Guterres, avant de mettre en valeur l’engagement de l’Association s’agissant de la situation dans l’État rakhine au Myanmar, qu’il a jugé crucial pour contribuer à l’avancement de mesures concrètes, dans le respect des principes humanitaires et des recommandations de la Commission consultative sur l’État rakhine.

M. Guterres a aussi salué le dialogue constructif entre l’ASEAN et la Chine pour le maintien de la paix et de la sécurité maritime dans la région, souhaitant la finalisation d’un « code de conduite » en mer de Chine méridionale afin de prévenir les différends maritimes.  Un code de conduite qui a été évoqué par plusieurs membres du Conseil, dont la Belgique, le Royaume-Uni, l’Estonie et la France, laquelle s’est félicitée de la coopération entre Beijing et l’ASEAN pour le concrétiser.

Les États-Unis se sont, pour leur part, déclarés préoccupés par les activités jugées « provocatrices et déstabilisatrices » de la Chine visant à « faire pression » sur les États d’Asie du Sud-Est pour qu’ils concluent des accords de développement conjoints pour les ressources marines.  « L’exemple le plus récent de ce type de coercition est la présence d’une grande flotte de pêche battant pavillon chinois avec des escortes armées à proximité d’une île d’un pays de l’ASEAN », a soutenu la délégation américaine.

Quel crédit, selon elle, accorder à un tel code de conduite, s’il est utilisé par certains pour légitimer un comportement flagrant et des revendications maritimes illégales, ou s’il est incompatible avec le droit international?  Des accusations rejetées par le représentant chinois, qui après avoir considéré que l’ONU n’est pas l’enceinte appropriée pour discuter de la situation en mer de Chine méridionale, « qui s’améliore », a affirmé que le « vrai danger », ce sont les États-Unis, qui dépêchent des bâtiments militaires près d’un État côtier, et non son pays, comme l’a affirmé la représentante américaine.

La Fédération de Russie s’est, elle aussi, interrogée sur les raisons pour lesquelles certains membres du Conseil ont abordé les situations au Myanmar et en mer de Chine méridionale, alors que le point à l’ordre du jour était la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Alors que 93% du premier plan d’action ONU-ASEAN a été mené à bien sur la période 2016-2020, M. Guterres a identifié de multiples domaines potentiels d’une coopération renforcée pour le prochain.  Il a tout d’abord cité le maintien de la paix, en particulier s’agissant de la formation ou de l’élargissement de la participation des femmes aux processus de paix.  En outre, l’ONU renforcera encore son soutien technique à l’ASEAN dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent et pour améliorer la gestion des frontières en vue de remédier aux menaces sécuritaires transfrontalières, a-t-il annoncé.

Après avoir suggéré la création de mécanismes d’alerte précoce et d’analyse de menaces, le Secrétaire général de l’ONU a plaidé en faveur du renforcement des liens avec les pays de l’ASEAN « dans l’adoption de mesures urgentes en vue de renforcer leur adaptation et résilience face aux désastres climatiques ».  Le Viet Nam, autre membre de l’Association, avec l’Indonésie, à siéger au Conseil, a proposé d’ailleurs la convocation d’un dialogue de haut niveau sur le développement durable entre l’ONU et l’ASEAN dans le cadre du Sommet ONU-ASEAN qui se tiendra plus tard cette année. 

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Coopération entre l’Organisation des Nations Unies et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (S/2020/30)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a noté la contribution de longue date des membres de l’ASEAN aux missions de maintien de la paix de l’ONU.  Près de 5 000 éléments militaires et policiers, venant de sept pays membres, sont déployés dans le monde, le nombre de femmes en leur sein étant en augmentation, a-t-il dit.  « Les 10 États membres de l’ASEAN ont rejoint l’initiative Action pour le maintien de la paix et nous continuons de collaborer étroitement pour mettre en œuvre les engagements communs et faire en sorte que le maintien de la paix réponde toujours aux objectifs arrêtés. »

Il a ensuite rappelé les efforts diplomatiques, de prévention des conflits et de consolidation de la paix de l’ASEAN depuis sa création en 1967.  En 2011, le Conseil de sécurité a appuyé les efforts de l’ASEAN pour régler pacifiquement les différends frontaliers entre la Thaïlande et le Cambodge.  Plus récemment, l’engagement de l’ASEAN s’agissant de la situation dans l’État rakhine au Myanmar a été d’une importance considérable pour l’ONU.  Il a d’ailleurs souligné la nécessité de trouver une solution au sort des personnes déplacées et des réfugiés vivant dans des conditions précaires.  « Notre coopération renforcée avec l’ASEAN est cruciale pour contribuer à l’avancement de mesures concrètes, dans le respect des principes humanitaires et des recommandations de la Commission consultative sur l’État Rakhine », a dit le Secrétaire général.

M. Guterres a aussi salué le dialogue constructif entre l’ASEAN et la Chine pour le maintien de la paix et de la sécurité maritime dans la région et souhaité la conclusion du « code de conduite » en mer de Chine méridionale afin de prévenir les différends maritimes. 

Il a ensuite évoqué la situation « profondément préoccupante » dans la péninsule coréenne, avant de saluer les efforts de l’ASEAN en vue de promouvoir la paix et une dénucléarisation complète et vérifiable.  Alors que l’Indonésie et le Viet Nam seront membres actifs de ce Conseil en 2020, il a espéré que des liens plus forts seront forgés entre l’ASEAN et l’ONU afin de renforcer les efforts diplomatiques dans la péninsule. 

Le Secrétaire général a identifié de multiples domaines potentiels d’une coopération pratique entre l’ASEAN et l’ONU, en citant d’abord le maintien de la paix, en particulier s’agissant de la formation ou du renforcement de la participation des femmes aux processus de paix.  Deuxièmement, l’ONU est prête, concrètement, à renforcer sa coopération technique, en particulier avec l’Institut pour la paix et la réconciliation de l’ASEAN.  En troisième lieu, l’ONU va renforcer encore son soutien technique à l’ASEAN dans la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent, a-t-il dit.  Quatrièmement, le Secrétaire général a indiqué que les deux organisations reconnaissent l’urgence d’améliorer la gestion des frontières pour remédier aux menaces sécuritaires transfrontalières.  Pour son cinquième point, le Secrétaire général a indiqué que l’ASEAN et l’ONU pourraient explorer des mécanismes d’alerte précoce et d’analyse de menaces, que ces menaces découlent des inégalités économiques ou qu’elles soient émergentes, comme celles liées aux discours haineux ou à la cybersécurité.  Sixièmement, la crise climatique, a déclaré M. Guterres, en rappelant que quatre États membres de l’ASEAN figurent parmi les 10 pays les plus touchés par les changements climatiques au monde.  « Nous espérons renforcer nos liens avec les pays de l’ASEAN dans l’adoption des mesures urgentes en vue de renforcer leur adaptation et résilience face aux désastres », a-t-il ajouté.

« Je suis profondément convaincu de la valeur de la coopération entre l’ONU et l’ASEAN pour la paix, la sécurité et le développement durable, a conclu le Secrétaire général. 

M. LIM JOCK HOI, Secrétaire général de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a déclaré que la communauté internationale est confrontée à de nombreux défis, mais qu’en définitive, la paix et la sécurité doivent être maintenues, car c’est sur elles que s’arc-boute la prospérité économique, un objectif auquel œuvre l’ASEAN depuis sa création.  Au-delà de l’engagement politique de ses États membres à poursuivre et promouvoir la coopération, cette organisation sous-régionale s’ancre dans le dialogue et les consultations pour parvenir au consensus, a-t-il expliqué.  « Dans notre partie du monde, nous l’appelons la voie de l’ASEAN, une manière unique de répondre aux problèmes, qui, aux yeux de certains observateurs extérieurs, est difficile à comprendre, et ne peut être comprise que par nous.  En d’autres termes, la voie de l’ASEAN est devenue une way of life pour l’ASEAN », a indiqué M. Hoi. 

Au nombre des contributions de l’Association pour nourrir un environnement propice à la paix et à la stabilité, figure sa capacité à lancer et à piloter des mécanismes et des cadres régionaux pour promouvoir le dialogue, la coopération et le renforcement de la confiance, non seulement entre ses États membres mais aussi pour ses partenaires: le Forum régional de l’ASEAN, la Réunion ministérielle de l’ASEAN plus trois et le Sommet de l’Asie de l’Est sont devenus des arènes de premier plan pour promouvoir la culture de paix, a souligné le haut fonctionnaire.  Les réalisations de l’organisation dans l’élaboration et la promotion de normes qui gouvernent les relations interétatiques dans la région ont également été reconnues de longue date, a-t-il ajouté. 

Le maintien de la paix et de la sécurité internationales a permis à l’ASEAN d’engranger des dividendes, s’est félicité M. Hoi, qui a rappelé que cette région représente à elle seule la cinquième plus forte économie mondiale, avec un taux de croissance annuel de 5,3%.  Dotée d’une population de presque 650 millions de personnes, d’une classe moyenne en pleine expansion, et d’une population dont la moitié est âgée de moins de 35 ans, l’ASEAN représente la quatrième place boursière au monde.  En dépit de ces atouts, l’Association, a souligné son Secrétaire général, considère qu’il est indispensable de combler les disparités persistantes, comme en témoignent certaines de ses initiatives, comme la zone de croissance de l’ASEAN orientale. 

Les efforts de l’ASEAN sont complétés et soutenus par des partenariats extérieurs robustes, y compris celui de l’ONU, a poursuivi le haut fonctionnaire, en citant la Feuille de route des complémentarités (2020-2025) pour promouvoir la synergie entre les Grandes orientations de la Communauté de l’ASEAN à l’horizon 2025 et le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Par ailleurs, depuis la mise en place du Plan de mise en œuvre de la Déclaration conjointe sur un partenariat global entre l’ASEAN et l’ONU (2016-2020), des résultats tangibles ont été atteints à 93%, soit 96 actions menées à bien sur les 103 prévues.  La réduction et la gestion des risques de catastrophe demeurent l’un des domaines prioritaires de coopération entre nos deux organisations, a insisté le Secrétaire général, en expliquant l’importance du Centre de coordination de l’aide humanitaire de l’ASEAN pour la gestion des catastrophes (Centre AHA). 

Par ailleurs, l’ASEAN a pris la mesure de l’importance des approches globales dans la lutte antiterroriste et dans la prévention de l’extrémisme violent, a assuré M. Hoi, en portant à l’attention du Conseil de sécurité la Déclaration de l’ASEAN sur la culture de la prévention pour une société pacifique, inclusive, résiliente, robuste et harmonieuse, adoptée en 2017, et qui consacre les efforts de l’organisation pour se pencher sur les causes profondes de ces phénomènes. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a commencé par rappeler que, comme le souligne la note conceptuelle, l’Asie du Sud-Est était le théâtre de différends constants avant la création de l’ASEAN en 1967.  Aujourd’hui, avec une population totale de 650 millions de personnes, nous sommes l’une des économies les plus florissantes et le moteur de la croissance mondiale, a observé le représentant.  De plus, les pays membres de l’ASEAN contribuent à hauteur de plus de 5 000 hommes aux missions de maintien de la paix des Nations Unies, a-t-il ajouté, ajoutant que les efforts collectifs et la culture du dialogue et du consensus propres à l’ASEAN ont permis d’ouvrir un cycle remarquable de paix, confiance et prospérité.  Dans ce contexte, a-t-il dit, nous pensons que l’ASEAN sera en mesure de s’adapter à des nouveaux défis si un dialogue permanent est instauré entre les Nations Unies et les organisations régionales. 

Pour le délégué, l’action de l’ASEAN est complémentaire de celle de l’ONU dans trois grands domaines.  Tout d’abord, dans sa contribution collective à la paix et à la sécurité.  C’est pourquoi, a-t-il dit, la Communauté de l’ASEAN a été créée en 2015, reposant sur trois piliers: politique-sécuritaire, économique et socioculturel.  En outre, le Traité d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est, auquel ont accédé plus de 40 pays, et le Forum régional de l’ASEAN (ARF) contribuent à la consolidation de la paix, à la diplomatie préventive et au règlement des conflits, a-t-il souligné. 

Le second point de convergence est la contribution aux solutions face aux défis sécuritaires qui émergent, a poursuivi le délégué, notant que les différentes plateformes de coopération de l’ASEAN, qui couvrent des questions telles que la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent, la cybercriminalité et les trafics de stupéfiants, ont permis de rendre la région plus sûre.  Quant aux catastrophes naturelles qui frappent régulièrement les pays de la région, l’organisation y a répondu grâce au Centre AHA qui facilite la coopération et la coordination des efforts d’assistance. 

Enfin, le représentant a souligné la contribution de l’ASEAN au cadre « femmes, paix et sécurité ».  Selon lui, il est crucial de garantir la participation pleine et effective des femmes à tous les stades des processus de paix.  À cet égard, a-t-il indiqué, l’ASEAN a établi le Registre des femmes pour la paix, un vivier d’expertes œuvrant à la promotion des perspectives de genre dans les processus de paix et de réconciliation.  L’Indonésie s’emploie également à créer un réseau de négociatrices et médiatrices en Asie du Sud-Est, a-t-il ajouté, souhaitant que ces deux forums puissent faire partie de l’Alliance mondiale des réseaux régionaux de négociatrices.  « Ce ne sont là que quelques exemples du rôle de l’ASEAN dans le maintien de la paix et de la sécurité », a-t-il conclu, jugeant que « ce n’est pas un hasard si les armes se sont tues voilà 53 ans en Asie du Sud-Est ». 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a indiqué que l’Union européenne élabore actuellement un partenariat stratégique avec l’ASEAN, afin de refléter la contribution essentielle de l’ASEAN à la stabilité d’une région clef.  Il a mentionné le Traité d’amitié et de coopération signé en novembre 2019 entre son pays et l’ASEAN, jalon important du renforcement des relations entre l’Allemagne et les pays de l’ASEAN.  L’Allemagne et l’ASEAN coopèrent étroitement pour combattre les changements climatiques.  Il a appelé de ses vœux une coopération plus étroite entre l’ASEAN et l’ONU et salué, à cette fin, les efforts visant à développer un nouveau plan d’action entre les deux organisations. 

Évoquant la récente décision de la Cour internationale de Justice (CIJ) à l’encontre du Myanmar, le délégué a appelé ce pays à faire en sorte que les crimes et graves violations commis en 2016 et 2017 ne restent pas impunis.  Il a aussi soutenu le mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar créé par le Conseil des droits de l’homme.  « Nous encourageons respectueusement les membres de l’ASEAN à chercher des voies supplémentaires, au moyen de la coopération régionale, pour remédier avec efficacité à de tels événements dans la région et éviter qu’ils ne se reproduisent. »

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a indiqué que l’approfondissement des relations économiques entre les États-Unis et l’ASEAN a entraîné une croissance explosive et des avantages tangibles des deux côtés du Pacifique, avec des investissements américains dans les États membres de l’ASEAN d’un montant total de 271 milliards de dollars.  De plus, les États-Unis collaborent pour faire progresser le développement d’infrastructures de haute qualité via le Blue Dot Network.  L’ASEAN, a poursuivi la représentante, joue un rôle essentiel dans le renforcement de l’ordre international fondé sur des règles, rôle plus important que jamais pour le maintien de la paix et de la stabilité internationales.  « Alors que nous voyons des tentatives d’empêcher l’exercice licite des droits et libertés de navigation découlant du droit international, nous devons fermement respecter ces droits et libertés », a dit Mme Norman-Chalet en estimant que « la mer de Chine méridionale est l’un des endroits où la liberté des mers est la plus menacée ».  « Notre position dans la mer de Chine méridionale -et ailleurs dans le monde- est simple: les droits et les intérêts de toutes les nations –quelles que soient leur taille, leur puissance ou leurs capacités militaires– doivent être respectés ».

Alors que Washington a constamment exprimé son soutien à l’élaboration d’un « code de conduite » qui engage toutes les parties à s’abstenir de tout comportement provocateur et déstabilisateur, la délégation s’est dite préoccupée par le fait que la Chine se serait engagée à plusieurs reprises dans une activité « provocatrice et déstabilisatrice » visant à faire pression sur les États d’Asie du Sud-Est pour qu’ils concluent des accords de développement conjoints pour les ressources marines.  « L’exemple le plus récent de ce type de coercition est la présence d’une grande flotte de pêche battant pavillon chinois avec des escortes armées à proximité d’une île d’un pays de l’ASEAN », a soutenu Mme Norman-Chalet.  Un tel comportement, en particulier dans le cadre des négociations en cours sur le code de conduite, soulève de sérieux doutes quant à l’intention de la Chine de l’accepter une fois qu’il sera finalisé.  « Si un code de conduite est utilisé par certains pour légitimer un comportement flagrant et des revendications maritimes illégales, ou s’il est incompatible avec le droit international, il s’avérera préjudiciable à la région et à tous ceux qui apprécient la liberté des mers », a-t-elle mis en garde.

Évoquant ensuite le sort des Rohingya, la représentante a « exhorté le Gouvernement de la Birmanie à s’attaquer aux causes profondes de la situation, à créer des conditions propices à des retours sûrs, volontaires, dignes et durables, à rendre justice aux victimes et à tenir les auteurs de graves violations des droits de l’homme pour comptables de leurs actes ».  La représentante a salué les efforts de l’ASEAN pour faire face à la situation dans l’État rakhine.  Les agences de l’ONU ont une expertise et des capacités uniques, a relevé Mme Norman-Chalet en demandant instamment au Centre d’assistance humanitaire de l’ASEAN et à l’équipe de soutien ad hoc du Secrétariat de l’ASEAN récemment créée de travailler en étroite collaboration avec les agences onusiennes et de soutenir leurs efforts en cours.  « L’appui à une ASEAN forte et solidaire reste au cœur de notre stratégie indopacifique », a-t-elle ajouté, en indiquant que le Président Trump accueillera les dirigeants de l’Association aux États-Unis au premier trimestre de cette année.

M. MONCEF BAATI (Tunisie) s’est exprimé également au nom de l’Afrique du Sud et du Niger, les deux autres pays africains du Conseil de sécurité.  Il a jugé important que ce dernier continue à entretenir des rapports réguliers avec les organisations régionales, notamment dans le cadre du maintien de la paix et la sécurité internationales et en vertu du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.  Il a rappelé qu’à plusieurs occasions, les arrangements régionaux et sous-régionaux s’étaient avérés efficaces pour faire face aux défis locaux.  Leur compréhension des dynamiques locales et des causes profondes des événements fait parfois la différence, a-t-il relevé.  De ce fait, avec une coopération renforcée, l’ONU et les organisations régionales peuvent utiliser leurs avantages comparatifs afin de rechercher des solutions efficaces aux défis de plus en plus complexes en matière de paix et de sécurité à travers le monde.

Le représentant a salué les progrès dans la coopération entre l’ONU et l’ASEAN, notamment depuis l’adoption en novembre 2011 de la Déclaration conjointe sur un partenariat global entre l’ASEAN et l’ONU, ainsi que l’adoption, en 2016, du premier plan d’action entre les deux organisations pour la période 2016-2020.  M. Baati a relevé que l’ASEAN joue un important rôle dans la prévention des conflits à travers sa diplomatie préventive et sa manière de régler les conflits.  Il a ainsi salué l’approche adoptée par l’ASEAN pour faire face à la crise des réfugiés rohingya, avant de plaider pour un retour digne et sûr de ces derniers chez eux.  Le délégué a ensuite salué la contribution de l’ASEAN aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, notamment avec ses 5 000 militaires et personnels de police et l’organisation de programmes de formation. 

Après avoir évoqué la collaboration entre les deux organisations en matière de lutte contre le terrorisme, M. Baati a estimé que dans le cadre de son processus de prise de décisions, le Conseil de sécurité devrait davantage consulter des organisations telles que l’ASEAN, la Ligue des États arabes, l’Union européenne et l’Union africaine.  Il a salué le partenariat que l’ONU entretient avec cette dernière, notamment en matière de maintien de la paix et de la sécurité.  Cependant, a-t-il estimé, en dépit des progrès de la coopération avec les organisations régionales, il reste beaucoup à faire si l’on veut que les outils contenus dans le Chapitre VIII soient pleinement utilisés par le Conseil de sécurité.  Le représentant a terminé en apportant le soutien des trois délégations à la demande de l’Union africaine de voir financer les opérations de paix qu’elle initie au nom de l’ONU par des contributions de base de l’Organisation. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a relevé que la coopération régionale est un des piliers de la politique étrangère de son pays.  Observant que les organisations régionales sont souvent les mieux placées pour comprendre les défis et les vulnérabilités spécifiques de leur région, il a indiqué que, dans cet esprit, la Belgique prévoit d’organiser, sous sa présidence du Conseil de sécurité le mois prochain, un briefing sur la coopération entre l’ONU et l’Union européenne.

Revenant au thème de la présente réunion, le représentant a noté que l’Asie du Sud-Est est une région globalement stable et que « la coopération régionale y est pour beaucoup ».  Félicitant l’ASEAN pour son action en faveur de la diplomatie préventive, M. Pecsteen de Buytswerve a estimé que le Conseil peut « beaucoup apprendre » de cette organisation en matière de promotion du dialogue, de renforcement de la confiance et de prévention des conflits.  Il a aussi souligné la contribution des pays de l’ASEAN à la paix et à la stabilité en dehors de leurs frontières, par la mise à disposition généreuse de soldats de la paix au bénéfice des missions de Nations Unies.  Selon lui, le travail de formation effectué à un niveau régional, conformément au plan d’action ASEAN-ONU 2016-2020, est à cet égard d’une « importance capitale ». 

Dans ce contexte, la Belgique attend avec intérêt le nouveau plan d’action ASEAN-ONU.  Parmi les domaines d’activité envisagés, les changements climatiques, la criminalité transnationale organisée et les droits humains revêtent une pertinence notable, a souligné le représentant.  Affirmant soutenir l’engagement des Nations Unies auprès de la Commission intergouvernementale des droits de l’homme de l’ASEAN, ainsi que sa Commission des droits de la femme et de l’enfant, il a noté que les pays de l’ASEAN sont parmi les plus vulnérables aux impacts des changements climatiques, en particulier face à l’élévation du niveau de la mer.  Une coopération régionale est donc déterminante en la matière, notamment pour des stratégies de réduction des risques et des impacts, a-t-il plaidé. 

Il a par ailleurs estimé que l’ASEAN peut jouer un rôle positif dans deux domaines spécifiques, à commencer par la résolution des différends relatifs à la mer de Chine méridionale.  Les efforts actuels des États membres de l’ASEAN et de la Chine pour conclure un code de conduite sur cette question démontrent que ce vœu est « à portée de main », a déclaré le délégué.  Enfin, soulignant la participation de l’ASEAN, par l’intermédiaire de son Centre de coordination de l’aide humanitaire pour la gestion des catastrophes (Centre AHA), à la résolution de la crise dans l’État rakhine, au Myanmar, il a estimé qu’un rôle renforcé de l’organisation régionale pour l’acheminement de l’aide humanitaire, complémentaire à celui de l’ONU, serait très utile.  Il a encouragé le Centre AHA à œuvrer pour faciliter un retour volontaire, digne et sûr des réfugiés rohingya, tout en rappelant l’importance de s’attaquer aux causes profondes de ce conflit et de lutter contre l’impunité.  Avant de conclure, M. Pecsteen de Buytswerve a assuré que son pays continuera de soutenir le renforcement et l’approfondissement des synergies entre l’ONU et l’ASEAN, deux organisations « éminemment complémentaires » qui partagent les objectifs de stabilité et de paix, mais aussi de promotion du multilatéralisme et d’un ordre international fondé sur des règles. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a expliqué que, pour des petits États insulaires en développement comme le sien, la coopération régionale crée « des zones de tampon des plus nécessaires » pour les protéger des rigueurs d’une économie politique globale « très changeante et souvent tumultueuse ».  Elle a ensuite affirmé que pour l’ASEAN, comme pour la Communauté des Caraïbes (CARICOM), le plein respect de la souveraineté est une condition essentielle de la paix.  Ce qui différencie l’ASEAN des autres organisations du même type est sa méthode unique de prévention et de règlement des conflits, connue sous le vocable de « manière de faire de l’ASEAN », a-t-elle continué. 

En s’appuyant sur des valeurs de pragmatisme, de réciprocité, de compromis, de discrétion et sur un style de négociation qui évite l’affrontement, l’ASEAN a été capable de créer une zone de paix et de stabilité, sans transcender l’échelon étatique que le régionalisme pourrait encourager, a-t-elle dit.  La « manière de faire de l’ASEAN » pourrait servir de modèle pour l’ONU en matière de règlement des différends, à son avis.  De même, la CARICOM, dont le credo est « unité dans la diversité », pourrait insuffler au sein de l’ONU un esprit de rassemblement tout en permettant aux cultures locales et aux valeurs nationales de prospérer.  Elle a appelé, « par-dessus tout », au plein respect du droit à l’autodétermination de chaque pays, peu importe son choix politique, social ou économique.  Enfin, alors « que certaines parties du monde brûlent et que d’autres essuient des déluges », Mme King a appelé à l’union de tous, que ce soit au niveau national, régional et international, pour répondre à la crise climatique. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) a souligné l’importance de la coopération entre les Nations Unies et l’ASEAN, tout particulièrement dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales et régionales.  Ce sont aujourd’hui, a-t-elle rappelé, 5 000 personnels des États membres de l’ASEAN qui sont déployés au sein des opérations de paix de l’ONU.  La France contribue d’ailleurs à l’activité de deux écoles de formation des futurs Casques bleus, au Cambodge et au Vietnam, en particulier pour la formation au français en vue de déploiements dans des théâtres francophones.  L’ASEAN, a poursuivi la représentante, est aussi devenue un partenaire essentiel des Nations Unies dans la lutte contre le terrorisme et contre la criminalité organisée.  La participation active de l’ASEAN dans la mise en œuvre de la stratégie antiterroriste mondiale, qui sera renégociée cette année, est une des conditions de son succès.  La représentante a qualifié « d’atout primordial » la coordination de l’ONU avec les organisations régionales dans l’accomplissement de la mission de l’ONU en faveur de la paix et de la sécurité.  C’est un des succès majeurs de la réforme engagée par le Secrétaire général, que la France soutient pleinement. 

La proximité et la connaissance des situations locales donnent toute leur légitimité aux organisations sous-régionales et régionales pour être parties prenantes dans la résolution des crises qui leur sont proches.  Le Conseil de sécurité comme l’ASEAN, a estimé la représentante, doivent être pleinement mobilisés pour que les crimes commis en « Birmanie », notamment dans l’Arakan, ne restent pas impunis.  C’est un impératif moral et de justice.  La France, a dit la représentante, prend note de l’ordonnance du 23 janvier de la Cour internationale de Justice dans l’instance relative aux violations alléguées de la Convention contre le génocide par la « Birmanie » et des mesures conservatoires.  Pour finir, la représentante a salué les négociations en cours entre l’ASEAN et la Chine afin de participer à un code de conduire en mer de Chine méridionale.  La France, a-t-elle conclu, souhaite devenir « partenaire de développement » de l’ASEAN afin de renforcer encore son action en faveur du multilatéralisme, du développement durable, de la paix et de la sécurité en Asie du Sud-Est. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a cité l’ASEAN comme un modèle de multilatéralisme, avant de rappeler que le partenariat stratégique de Moscou avec cette organisation sous-régionale existe depuis 24 ans.  Il a précisé qu’en 2016, un Sommet s’était tenu à Sotchi, à l’issue duquel a été adopté le Plan d’action de coopération entre l’ASEAN et la Russie.  Le représentant a noté que, lors de la séance d’aujourd’hui, certaines situations ont été jugées de manière sélective à l’aune du droit international.  On nous dit que la région indopacifique serait plus ouverte que l’Asie du Sud-Est, et on comprend bien que la Chine n’en ferait pas partie, s’est étonné M. Polyanskiy, qui a trouvé cela regrettable, considérant que ces propos étaient davantage sources de division que de rapprochement.  Le délégué a ensuite considéré que tout différend territorial concernant la mer de Chine méridionale doit être réglé à titre bilatéral par les pays concernés, jugeant « inacceptable » l’expression d’« opinions » générales sur le sujet, en particulier de la part d’États situés à des milliers de kilomètres de la région.  Il n’a pas davantage compris pourquoi la situation des Rohingya était évoquée dans le cadre du point inscrit à l’ordre du jour.

Mme BERIOSKA ILUMINADA MORRISON GONZÁLEZ (République dominicaine) a rappelé qu’une étroite coopération entre organisations régionales, comme l’ASEAN, rend le système multilatéral international plus robuste et efficace sur la base de la diversité, de l’entraide mutuelle et des responsabilités partagées.  Aussi s’est-elle félicitée de la contribution des États membres de l’Association aux opérations de paix de l’ONU, notamment par un déploiement de femmes de plus en plus nombreuses.  La représentante a indiqué que sa propre région, les Caraïbes, qui est elle aussi confrontée aux effets des changements climatiques, s’identifie aux efforts déployés par l’ASEAN pour renforcer les capacités locales d’atténuation et d’adaptation aux catastrophes naturelles, en particulièrement en milieu urbain.  La coopération ASEAN-ONU pour des communautés plus résilientes est un exemple important de multilatéralisme en ce domaine, s’est félicitée la déléguée, avant de reconnaître l’assistance humanitaire fournie par l’Association dans le processus de rapatriement des Rohingya, de même que ses efforts de coopération dans ce processus.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a indiqué que son pays entretient une « longue relation » avec l’ASEAN.  Le Royaume-Uni a ainsi adhéré au Traité d’amitié et de coopération de l’organisation régionale, noué avec elle de nombreux partenariats et participe aux travaux de son Centre AHA.  Depuis sa création, a constaté le représentant, l’ASEAN a joué un rôle essentiel dans la promotion de la paix et de la sécurité en Asie du Sud-Est et dans toute la région de l’Asie-Pacifique.  Au-delà de son rayonnement régional, elle apporte une contribution à la paix et à la sécurité mondiales, a-t-il constaté. 

Saluant les actions de l’ASEAN dans le domaine du maintien de la paix, le délégué a rappelé que l’organisation régionale déploie quelque 5 000 soldats de la paix dans différentes missions des Nations Unies.  Dans ce cadre, il a souhaité que les partenariats de formation se multiplient avec son pays.  Il s’est par ailleurs félicité de la création du Registre des femmes médiatrices en Asie du Sud-Est et a applaudi l’engagement pris par le Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie pour la mise en œuvre des politiques onusiennes de renforcement de la participation des femmes. 

S’agissant de la lutte contre les changements climatiques, domaine où l’ASEAN est très active, M. Allen a fait observer que son pays présidera la prochaine Conférence des Parties à Glasgow.  Le Royaume-Uni prendra ses responsabilités pour que des engagements concrets soient pris afin de réduire les émissions, a-t-il assuré.  Évoquant ensuite la crise du Myanmar, il a souligné l’importance d’une reddition des comptes dans le processus de règlement, appelant ce pays à se conformer au récent arrêt de la CIJ et à tenir compte des conclusions de la Commission d’enquête.  À cet égard, il a souhaité que les recommandations de cette commission soient mises en œuvre afin de permettre le retour sûr, digne et volontaires des réfugiés rohingya.  En ce qui concerne le différend sur la mer de Chine méridionale, il a appelé les pays de la région à promouvoir le dialogue et s’est félicité des négociations sur un code de conduite engagées par l’ASEAN et la Chine.  Enfin, il a estimé que l’ASEAN et la communauté internationale dans son ensemble devaient présenter un front uni pour maintenir les sanctions imposées à la République populaire démocratique de Corée, le temps que ce pays s’engage sur la voie de la dénucléarisation. 

« Depuis 52 ans, l’ASEAN joue un rôle significatif dans le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité, en Asie du Sud-Est et dans le monde », a souligné M. SVEN JÜRGENSON (Estonie), saluant l’engagement de l’ASEAN en faveur d’une promotion de ces questions dans la région Asie-Pacifique et d’un règlement pacifique des différends, y compris par la voie de la diplomatie.  Conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, a poursuivi le délégué, l’Estonie soutient le renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales afin de garantir une prévention et une atténuation des conflits plus effectives.  Elle considère en outre que la coopération multilatérale est cruciale pour contribuer à la paix et à la sécurité régionales. 

Le représentant a également salué le travail de l’ASEAN dans le traitement des questions de sécurité émergentes, telles que les changements climatiques, ainsi que son action de promotion de la cybersécurité.  À cet égard, il s’est félicité des mesures prises par l’ASEAN dans l’établissement d’un cyberespace s’appuyant sur des règles, notamment l’application de 11 normes volontaires et non contraignantes pour le comportement des États, comme prévues dans le rapport de 2015 du Groupe d’experts gouvernementaux.  Il a par ailleurs appuyé les efforts déployés par les États membres de l’ASEAN pour négocier avec la Chine un code de conduite sur la mer de Chine méridionale.  « Nous encourageons les deux parties, ASEAN et Chine, à mettre en œuvre la Déclaration de 2002 sur la conduite des parties en mer de Chine méridionale dans son intégralité », a-t-il dit, affirmant compter sur l’organisation régionale pour jouer un rôle actif dans le règlement des différends par des moyens pacifiques.  Enfin, il a souhaité que le Myanmar, État membre de l’ASEAN, se conforme au récent arrêt de la Cour internationale de Justice l’enjoignant de prendre des mesures provisoires pour assurer la protection des réfugiés rohingya. 

M. ZHANG JUN (Chine) a rappelé que l’ASEAN n’a pas ménagé ses efforts pour promouvoir la paix et la sécurité dans la sous-région qu’elle représente.  Pour que les organisations régionales renforcent leur coopération avec l’ONU, il est important, selon la délégation, qu’elles tirent le meilleur parti de leurs avantages propres dans la résolution des problèmes auxquels font face leurs États membres, dont le terrorisme, le trafic de stupéfiants ou la pauvreté.  Dans cette perspective, l’ONU devrait renforcer son aide et favoriser les synergies, a plaidé le délégué.  La Chine accorde une grande importance au renforcement de ses relations avec l’ASEAN, a assuré le représentant, qui a rappelé que son pays avait été par exemple le premier à adhérer à l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud.

Le représentant a ensuite rappelé que la réunion d’aujourd’hui porte sur la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales, « pas sur la situation au Myanmar ».  Le dossier de l’État rakhine est complexe, et il faut appuyer les efforts en cours afin de privilégier une médiation, a-t-il recommandé.  Certaines délégations, dont les États-Unis, ont lancé des « accusations infondées » contre la Chine, selon le représentant qui a rejeté ces accusations.  En outre, l’ONU n’est pas l’« enceinte appropriée » pour discuter de la situation dans la mer de Chine, « qui est stable et s’améliore », a argué M. Zhang.  Il a affirmé que les États-Unis, sous prétexte de navigation maritime, dépêchent des bâtiments militaires près de l’État côtier: « voilà le vrai danger », a-t-il tranché.  Ce sont les États-Unis, qui disposent de centaines de bases militaires partout dans le monde, qui demandent de respecter le droit international, alors qu’ils ont refusé d’adhérer au traité sur le droit de la mer et qu’ils sont « la cause des problèmes du monde », a avancé le représentant.  « Comment un tel pays peut-il être en position de tenir de tels propos, sauf à les tenir pour lui-même? »

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a estimé que pour l’ONU, l’ASEAN est un partenaire important, actif et fiable, aux résultats « remarquables » dans le domaine de la paix et de la sécurité.  L’ASEAN, s’est-il enorgueilli, est reconnue pour le succès qu’elle a connue en transformant l’Asie du Sud-Est en une région d’amitié et de coopération, jouant un rôle crucial dans le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans la région et au-delà.  Nous sommes convaincus qu’avec son dévouement, ses efforts et une expérience qui s’étale sur plus de cinq décennies, l’ASEAN peut apporter une contribution encore plus grande au travail des Nations Unies, a confessé le représentant.  Il s’est félicité de la Déclaration conjointe de 2011 sur le partenariat global entre les deux institutions et le Plan d’action sur la mise en œuvre de ladite Déclaration pour la période 2016-2021.  Le fait que plus de 90% du Plan d’action ait déjà été appliqué témoigne de l’engagement ferme de l’ONU et de l’ASEAN d’élargir l’ampleur et d’approfondir le niveau de leur coopération, s’est réjoui le représentant. 

Des problèmes comme le terrorisme, la criminalité transnationale organisée, la traite des êtres humains, la cybersécurité ou encore les changements climatiques nécessitent une collaboration effective et efficace entre l’ONU et l’ASEAN que ce soit dans le renforcement des capacités ou l’échange d’informations, des enseignements tirés de l’expérience et des pratiques exemplaires.  On ne saurait surestimer la « centralité » de l’ASEAN dans l’architecture régionale comme on ne saurait celle de l’ONU dans le système multilatéral.  Il est essentiel d’appuyer l’ONU et l’ASEAN dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de la Vision 2025.  Président de l’ASEAN en 2020 et membre du Conseil de sécurité, le Viet Nam entend travailler à un partenariat plus fructueux entre l’ONU et l’ASEAN.  Il appelle à un soutien aux trois priorités de 2020, à savoir une participation renforcée des membres de l’ASEAN aux opérations de paix de l’ONU; la promotion de l’agenda femmes, paix et sécurité aux niveaux régional et national; et la mise en œuvre de feuilles complémentaires sur le Programme 2030 et la Vision 2025.  Le Viet Nam propose d’ailleurs la convocation d’un dialogue de haut niveau sur le développement durable entre l’ONU et l’ASEAN dans le cadre du Sommet ONU-ASEAN qui se tiendra plus tard dans l’année, a indiqué le représentant. 

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