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Décolonisation: le Comité spécial appelle à la reprise des négociations pour trouver une solution au conflit de souveraineté sur les Îles Falkland (Malvinas)

7e séance plénière,
matin
AG/COL/3361

Décolonisation: le Comité spécial appelle à la reprise des négociations pour trouver une solution au conflit de souveraineté sur les Îles Falkland (Malvinas)

Le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux (Comité spécial des Vingt-Quatre) a adopté sans mise aux voix, ce matin, un projet de résolution sur les Îles Falkland (Malvinas) qui demande aux gouvernements argentin et britannique de reprendre leurs négociations afin de trouver, dans les meilleurs délais, une solution pacifique au conflit de souveraineté sur le territoire.

Faisant valoir que le droit de souveraineté de l’Argentine sur les « îles Malvinas » a été hérité de l’Espagne en 1810, le Ministre des affaires étrangères, du commerce international et du culte de l’Argentine a souligné que la position de son pays demeure cohérente depuis des siècles, contrairement à la position britannique qui a changé au fil du temps, passant du rejet des négociations à leur acceptation, pour finalement les rejeter à nouveau en conditionnant leur reprise au consentement des habitants des îles. 

M. Santiago Andrés Cafiero a également accusé le « Gouvernement colonial britannique » d’accorder unilatéralement des permis de pêche dans les zones entourant les îles Malvinas, et d’y maintenir une présence militaire injustifiée et disproportionnée, dénonçant notamment la présence de navires capables de transporter et de lancer des armes nucléaires.  « Il est grand temps que le Royaume-Uni écoute la communauté internationale et reprenne les négociations en vue de parvenir à une solution pacifique au différend de souveraineté avec l’Argentine », a-t-il affirmé. 

Évoquant l’opposition de l’Argentine à une visite du Comité spécial sur place, deux représentants du Gouvernement des Îles Falkland ont accusé Buenos Aires de refuser au Comité la possibilité de se rendre compte du dynamisme et de l’autonomie de la population, rappelant que lors du référendum de mars 2013, quelque 99,8% des habitants du territoire ont voté pour le maintien de son statut actuel avec le Royaume-Uni.  « Ce sera le peuple des Îles Falkland et seulement le peuple des Îles Falkland qui décidera de son avenir politique », ont souligné les pétitionnaires qui ont en outre fustigé les attaques diplomatiques et économiques que lancerait selon eux l’Argentine contre le territoire.

Au cours du débat qui a suivi l’intervention des pétitionnaires, la trentaine d’États Membres présents a multiplié les appels à la reprise des négociations dès que possible pour parvenir à une solution pacifique, juste et pérenne.  La grande majorité des délégations d’Amérique latine et des Caraïbes a fait bloc autour de l’Argentine, à l’instar de la Bolivie qui, au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a appelé à trouver une solution pacifique et définitive à cette « situation coloniale anachronique » le plus rapidement possible. 

L’adoption de mesures unilatérales, notamment l’exploitation de ressources naturelles renouvelables et non renouvelables dans la zone qui fait l’objet du différend, a été dénoncée par plusieurs membres du Comité et États observateurs, dont le Venezuela, le Guatemala et la République dominicaine. 

De nombreuses délégations se sont en outre inquiétées des risques de militarisation de l’Atlantique Sud qui, ont-elles rappelé, a pour vocation d’être une zone de paix.

Le Comité spécial poursuivra ses travaux demain, vendredi 24 juin à partir de 10 heures.

QUESTION DES ÎLES FALKLAND (MALVINAS)

Déclarations liminaires

Mme LEONA ROBERTS, pétitionnaire, qui s’est présentée comme une représentante élue du Gouvernement des îles Falkland (Malvinas), a déclaré qu’elle défend son petit pays démocratique et épris de liberté contre les ambitions coloniales d’un voisin agressif.  Elle a invité le Comité spécial à envoyer une mission dans les Îles Falkland, tout en reconnaissant que l’Argentine y est opposée.  Elle a souligné que la population des Îles, composée de plus de 60 nationalités, regroupe 3 500 personnes et est doté d’une identité et d’une culture nationales distinctes, certaines familles remontant à neuf générations. 

La pétitionnaire a accusé l’Argentine de refuser au Comité de voir le dynamisme et l’autonomie des Îles Falkland qui ont voté en faveur du partenariat avec le Royaume-Uni.  Les Îles ont leur propre constitution, lois et démocratie, et sont financièrement indépendantes et autonomes.  Elle a ensuite dénoncé les tentatives de l’Argentine de restreindre la croissance sociale et économique, de perturber le commerce, les communications et les relations internationales des Falkland.  L’Argentine souhaiterait que nous n’existions pas et nous refuse le droit à l’autodétermination.  Mais le peuple des Îles Falkland ne cédera jamais à l’intimidation.  Le Comité spécial ne devrait pas, par son soutien ou son silence, tolérer les menaces et les désirs coloniaux de notre voisin intimidateur, a exhorté la pétitionnaire. 

Se présentant également comme un représentant élu du Gouvernement des îles Falkland (Malvinas), M. GAVIN SHORT, pétitionnaire, a indiqué que ces îles sont un territoire d’outre-mer du Royaume-Uni et que lors du référendum de mars 2013, 99,8% des électeurs ont voté pour le maintien de ce statut.  Il a dénoncé les membres du Comité qui refusent le droit à l’autodétermination des Îles Falkland et soutiennent l’ambition coloniale de l’Argentine, invitant ensuite le Comité spécial à se rendre sur place.  S’agissant des appels à la tenue de pourparlers, il a dénoncé le fait que la Constitution argentine stipule que toute négociation ne peut avoir qu’un seul résultat: les Îles Falkland et leur peuple deviennent argentins.  Le pétitionnaire a également accusé l’Argentine de s’attaquer par des moyens diplomatiques et économiques aux Îles Falkland, et de refuser les demandes d’autorisation de survol, même pour les vols humanitaires.  Elle refuse également d’appuyer la création d’une zone régionale de gestion des pêches dans l’Atlantique du sud-ouest, préférant voir l’écosystème ruiné par une pêche irresponsable plutôt que d’essayer de conserver la vie dans les mers pour le bénéfice de tous.  Ce sera le peuple des Îles Falkland et seulement le peuple des Îles Falkland qui décidera de son avenir politique, a souligné le pétitionnaire. 

Mme MARIA CLARA VERNET, pétitionnaire, une éducatrice argentine qui travaille avec des jeunes aux Malvinas et descendante d’une famille argentine de ces îles, a dénoncé le refus du Royaume-Uni de reconnaître qu’il y avait bien un peuple aux Malvinas au moment de leur occupation, des Argentins comme sa famille.  L’Argentine ne cesse de revendiquer sa souveraineté sur ces îles, a-t-elle martelé en refusant l’option que le pouvoir du plus fort et les intérêts économiques puissent retirer tout espoir à son peuple. 

Mme MARIA MERCEDES MOYANO WALKER, pétitionnaire et descendante d’une famille argentine des Malvinas, est venue témoigner de l’expérience de ce peuple après l’occupation britannique de ces îles.  Elle a concédé qu’il y a eu depuis 1971 des négociations entre le Royaume-Uni et l’Argentine et a souligné l’engagement permanent de l’Argentine à trouver une solution pacifique à ce différend particulier de décolonisation.  Ce n’est pas le cas du Royaume-Uni qui n’accepte même pas qu’il y ait des vols directs entre les Malvinas et l’Argentine, a-t-elle déploré, l’exhortant à revenir à la table de négociations. 

Déclarations

Mme PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) a réitéré son appui aux droits souverain et légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas, les îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud et les zones maritimes environnantes.  Elle a réaffirmé la nécessité pour les gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni de reprendre les négociations afin de trouver, dès que possible, une solution pacifique et définitive au différend de souveraineté, conformément aux résolutions pertinentes des Nations Unies, de l’Organisation des États américains (OEA) et d’autres instances multilatérales.  Elle a exhorté les parties à s’abstenir de toute décision qui pourrait provoquer des modifications unilatérales de la situation pendant que les îles suivent le processus recommandé par l’ONU. 

M. SANTIAGO ANDRÉS CAFIERO, Ministre des affaires étrangères, du commerce international et du culte de l’Argentine, a fait part de son engagement indéfectible en faveur du rétablissement de l’exercice effectif de la souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas, notant que son pays a hérité de ce droit de l’Espagne en 1810.  La position de l’Argentine demeure cohérente depuis des siècles, contrairement à la position britannique qui a changé au fil du temps, passant du rejet des négociations à leur acceptation conformément aux dispositions de la résolution 2065 (XX) de l’Assemblée générale de 1965, pour finalement les rejeter à nouveau.  À partir de 1966 et pendant 16 ans, a-t-il rappelé, les deux parties ont négocié pour parvenir à une solution diplomatique au différend, mais le Royaume-Uni a alors décidé d’interrompre les négociations, conditionnant leur reprise au consentement des habitants des îles.  Pour le Ministre, la population des îles est le résultat de la colonisation initiée par le Royaume-Uni en 1833 qui cherchait par tous les moyens à préserver le « caractère britannique » de cette population.  Par conséquent, le droit à l’autodétermination ne s’applique pas à la question des îles Malvinas, a-t-il argué, exhortant au respect de l’intégrité territoriale de l’Argentine.  Il a également souligné que le conflit de 1982 n’a pas modifié la nature du conflit de souveraineté entre l’Argentine et le Royaume-Uni. 

Poursuivant, le Ministre a invité le Royaume-Uni à reprendre les négociations pour mettre fin au différend.  Les îles Malvinas ne sont pas seulement une cause nationale, c’est une cause mondiale, a-t-il lancé, notant en outre que sur les 17 situations coloniales en attente de résolution, 10 impliquent le Royaume-Uni.  Après avoir renouvelé son intérêt pour la mission de bons offices confiée au Secrétaire général, le Ministre a ensuite fait savoir que l’Argentine envisage de rétablir un vol régulier vers les îles Malvinas et qu’elle garantit aux habitants du territoire l’accès au système de santé publique et d’éducation fourni sur le continent.  De même, l’Argentine a offert aux habitants des îles des fournitures médicales et un accès à des traitements médicaux sur le continent durant les moments forts de la pandémie de COVID-19.  Elle a également assuré des vols humanitaires.

En revanche, a indiqué le Ministre, le Royaume-Uni continue de bafouer la résolution 31/49 de l’Assemblée générale.  Il a également accusé le Gouvernement colonial britannique d’accorder unilatéralement des permis de pêche dans les zones entourant les îles Malvinas, et de maintenir une présence militaire injustifiée et disproportionnée dans les îles, menant régulièrement des manœuvres et des exercices, y compris des tirs de missiles.  À cela s’ajoute la présence de navires capables de transporter et de lancer des armes nucléaires, a dénoncé le Ministre.  Il est grand temps que le Royaume-Uni écoute la communauté internationale et reprenne les négociations en vue de parvenir à une solution pacifique au différend de souveraineté avec l’Argentine.  N’ayez pas peur de la paix, a lancé le Ministre. 

M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) qui s’exprimait au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) a réaffirmé le plein appui des membres de la CELAC à la position argentine sur les îles Malvinas, en appelant à la reprise des négociations directes entre l’Argentine et le Royaume-Uni pour trouver une solution pacifique et définitive à cette situation « coloniale et anachronique » le plus rapidement possible.  Cela s’inscrit dans la volonté de la CELAC de faire de la zone d’Amérique latine et des Caraïbes une zone de paix, a expliqué le représentant, donnant lecture de la dernière déclaration de la CELAC au sujet de ce différend de souveraineté.

À titre national, il a rappelé que la Bolivie a toujours coparrainé la résolution sur les îles Malvinas.  Le représentant a exhorté le Royaume-Uni et l’Argentine à reprendre leurs négociations bilatérales en toute bonne foi afin de permettre à l’Argentine de retrouver sa souveraineté sur ces îles. 

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a souscrit à la déclaration de la CELAC et à celle du G77/Chine et a soutenu les revendications légitimes de souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas.  Il a également fait savoir que le 10 juin marque désormais la Journée de solidarité de l’Amérique centrale avec les îles Malvinas.  Il a espéré que les gouvernements argentin et britannique parviendront rapidement à une solution pacifique et durable sur la question des Malvinas par le biais de la négociation et conforme aux résolutions pertinentes de l’ONU.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a appelé à favoriser un environnement propice à un dialogue constructif et à une négociation directe entre les parties, notamment en mettant fin à toute mesure ou action unilatérale visant à saper les efforts dans ce sens.  Il a demandé au Royaume-Uni de mettre immédiatement un terme à l’exploration et à l’exploitation des ressources naturelles dans le territoire contesté et ses espaces maritimes environnants.  La présence militaire dans la région et les exercices militaires doivent également cesser, ces activités allant directement à l’encontre de la proclamation de l’Amérique latine et des Caraïbes comme zone de paix. 

M. SARHAD SARDAR ABDULRAHMAN FATAH (Iraq) a exhorté l’Argentine et la Grande-Bretagne à parvenir à une solution pacifique et finale à ce conflit le plus tôt possible.  Il a aussi souligné l’importance des bons offices du Secrétaire général.  L’intérêt de la communauté internationale réside dans la reprise des négociations et des bonnes relations entre l’Argentine et le Royaume-Uni, a-t-il insisté, appelant en outre à préserver les intérêts des habitants du territoire. 

M. KARLITO NUNES (Timor-Leste) a déclaré que l’existence du colonialisme sous ses différentes formes met en péril le droit au développement.  Il a appelé à redoubler d’effort pour mettre en œuvre les résolutions pertinentes afin d’en venir à bout, constatant que depuis le retrait du Timor-Leste de la liste des territoires non autonomes en 2002, il n’y a plus eu de changements.  S’agissant des Îles Falkland (Malvinas), il a appelé l’Argentine et le Royaume-Uni à parvenir à une solution pacifique et durable conforme aux résolutions pertinentes. 

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur), a espéré d’emblée que la résolution sur les îles Malvinas sera de nouveau adoptée par consensus.  Il a appuyé le droit légitime de souveraineté de l’Argentine sur ces îles et a rejeté les tentatives visant à appliquer le principe d’autodétermination à ce différend de colonisation spécial.  Il a encouragé les deux pays concernés, l’Argentine et le Royaume-Uni, à parvenir à une solution pacifique, juste et durable par la négociation, conformément aux principes et objectifs de la Charte des Nations Unies et des résolutions pertinentes. 

Mme YUMIRKA FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a souligné que le différend autour des îles Malvinas ne pourra être résolu que par une négociation entre l’Argentine et le Royaume-Uni, rappelant que la CELAC a exigé la reprise des négociations pour trouver une solution pacifique le plus rapidement possible.  Elle a souligné l’importance de la mission de bons offices du Secrétaire général sur la question afin de rapprocher les deux parties et les amener à la table des négociations.  Elle a aussi prié les parties d’éviter les actions unilatérales qui saperaient la reprise des négociations. 

M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a exhorté les deux parties à participer à des négociations directes conformément aux résolutions de l’Assemblée générale.  Elles doivent faire montre de responsabilités et de courage et respecter leur engagement en faveur des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, a souligné le représentant, saluant la volonté constructive de Buenos Aires à cet égard.  Il s’est inquiété des risques de militarisation de l’Atlantique Sud dans le cadre de ce différend et a exhorté les parties à faire montre de responsabilité et honorer leurs engagements internationaux au titre du Traité visant l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Mme ALI (République arabe syrienne) a rappelé que les résolutions de l’Assemblée générale confirment que la situation des îles Malvinas constitue une question coloniale spéciale qui doit être réglée par la négociation.  Elle a reproché au Royaume-Uni son obstination à ne pas vouloir reprendre ses négociations avec l’Argentine ainsi que ses activités unilatérales et ses exercices militaires dans la région.  Cela va à l’encontre des résolutions pertinentes sur la question des îles Malvinas et de la volonté de faire de l’Atlantique Sud une zone de paix.  Elle a appelé à respecter l’intégrité territoriale de l’Argentine et sa souveraineté sur les îles Malvinas, en faisant le parallèle avec les territoires syriens occupés par Israël depuis 1967. 

M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a estimé que la question des Îles Falkland (Malvinas) est complexe et que sa solution passe impérativement par le dialogue entre l’Argentine et le Royaume-Uni en vue de trouver une solution pacifique et durable.  Il a réitéré son plein appui aux activités de bons offices du Secrétaire général pour parvenir à une solution en coopération avec toutes les parties. 

M. SPENCER (Antigua-et-Barbuda) a demandé aux parties de reprendre leurs négociations afin de parvenir à une solution pacifique, insistant sur le rôle des bons offices du Secrétaire général pour appuyer un dialogue entre les parties.  La région d’Amérique latine et des Caraïbes doit être une région à l’abri de la colonisation et l’occupation. 

Mme LASANA ANDREWS (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a souligné que la question des îles Malvinas ne saurait être réglée que grâce à des négociations bilatérales conformément aux résolutions et principes des Nations Unies et en tenant compte des intérêts et du bien-être dans la population des îles.  Préoccupée par l’incapacité à progresser sur la question, elle a exhorté l’Argentine et le Royaume-Uni à se réengager en faveur des négociations bilatérales dans un esprit de coopération afin de parvenir à une solution pacifique et juste.  La représentante a également appelé les deux gouvernements à éviter toute mesures visant à des modifications unilatérales quant à la situation des îles. 

Mme MA YUANCHUN (Chine) a soutenu d’emblée les droits légitimes de souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas et a appelé à un règlement pacifique de cette question par des négociations directes.  Le Royaume-Uni, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, doit respecter les principes de la Chartes des Nations Unies, a souligné la représentante en l’invitant à reprendre au plus vite les négociations bilatérales avec l’Argentine  

Mme VICTORIA MANGAY SULIMANI (Sierra Leone) a estimé que les besoins et attentes des 17 territoires non autonomes sont différents et qu’il incombe au C24 de les traiter au cas par cas en tenant compte des intérêts des populations de ces territoires, y compris de leur droit à l’autodétermination.  Cela s’applique également au cas des Îles Falkland (Malvinas), a estimé la représentante qui a souhaité que ce différend de souveraineté soit réglé par des moyens pacifiques.  Elle a ensuite appelé l’Argentine et le Royaume-Uni à créer les conditions propices à l’exercice du droit l’autodétermination des habitants de ces îles. 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a jugé indispensable que l’Argentine et le Royaume-Uni reprennent les négociations en toute bonne foi pour progresser vers une solution juste, pacifique, définitive et mutuellement acceptable sur la question des îles Malvinas.  Les parties doivent s’abstenir d’adopter des décisions entraînant l’introduction de modifications unilatérales dans la situation tant que les négociations n’auront pas mené à une solution définitive du différend.  Il a fait part de son ferme appui envers les droits légitimes de l’Argentine sur les îles Malvinas.  Il a appelé le Secrétaire général à poursuivre sa mission de bons offices afin que reprenne les négociations visant à trouver une solution pacifique aux différends.

Au nom du Marché commun du Sud (MERCOSUR), M. MANUEL ALCIBÍADES RUIZ DÍAZ (Paraguay) a estimé qu’une solution pacifique et négociée entre les deux parties est le seul moyen de mettre fin à cette situation coloniale spéciale.  Il a appuyé les droits légitimes de l’Argentine dans ce différend et a appelé à trouver le plus rapidement possible une solution conformément aux résolutions des Nations Unies et des déclarations du MERCOSUR, entre autres.  L’adoption de mesures unilatérales, y compris l’exploitation de ressources naturelles renouvelables et non renouvelables dans la zone qui fait l’objet du différend n’est pas compatible avec ce qui a été décidé aux Nations Unies, a souligné le délégué qui a validé le droit de l’Argentine d’entreprendre une action juridique contre les activités non autorisées dans cette région. 

Intervenant ensuite en sa capacité nationale, le représentant du Paraguay a appelé les gouvernements d’Argentine et du Royaume-Uni à reprendre le plus rapidement possible les négociations sur ce différend de souveraineté.  Il a salué la volonté du Gouvernement argentin de continuer d’explorer tous les moyens possibles pour trouver une solution pacifique au différend ainsi que de son attitude constructive en faveur des habitants des îles Malvinas. 

M. FERNANDEZ DE SOTO VALDERRAMA (Colombie) a réaffirmé son appui au droit de l’Argentine dans le différend de souveraineté qui l’oppose au Royaume-Uni sur les îles Malvinas.  Il a souligné l’importance de mettre fin à cette question coloniale spéciale de longue date par une solution pacifique et négociée.  Pour cela il faut respecter la résolution 3149 de l’Assemblée générale qui demande aux parties de s’abstenir de prendre des décisions unilatérales, a-t-il rappelé. 

M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA (Guatemala) a vu dans la présence du Ministre des affaires étrangères de l’Argentine une preuve supplémentaire de l’attachement de l’Argentine au multilatéralisme.  Il a rappelé que le différend de souveraineté sur les îles Malvinas remonte au moment où l’intégrité territoriale de l’Argentine a été violée par le Royaume de Grande-Bretagne.  Il s’agit d’un territoire colonisé et non pas d’un peuple colonisé, a-t-il tranché, ce disant d’avis qu’une mission de visite du Comité spécial n’est pas indiquée.  Soutenant les revendications de souveraineté de l’Argentine sur ces îles, il a plaidé pour la négociation et le dialogue, tout en reprochant au Royaume-Uni son refus de reprendre les négociations ainsi que sa présence militaire sur ces îles et son exploitation de leurs ressources naturelles.  Cela va à l’encontre d’une solution pacifique négociée, a-t-il mis en garde.

M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a appelé l’Argentine et le Royaume-Uni à mener des négociations bilatérales pour trouver une solution à leur différend, notant que plus de 60 ans se sont écoulés depuis que l’Assemblée générale a lancé un appel pour mettre fin rapidement et sans aucune condition au colonialisme.  La situation des îles Malvinas constitue une enclave coloniale, a dénoncé le représentant se disant convaincu que l’Argentine et le Royaume-Uni pourraient trouver une solution constructive. 

M. JOSÉ ALFONSO BLANCO CONDE (République dominicaine) a réaffirmé son appui à la juste revendication de l’Argentine d’exercer sa souveraineté sur les îles Malvinas et a encouragé des négociations pacifiques pour trouver une solution au différend.  Il a souligné l’importance de la mission de bons offices du Secrétaire général et lancé un appel pour qu’il utilise tous les recours à sa disposition pour encourager la reprise des négociations et parvenir à un accord pacifique et définitif.  Il a appelé le Royaume-Uni à s’abstenir d’actions unilatérales d’exploration et l’exploitation des ressources renouvelables et non renouvelables dans la zone faisant l’objet du différend.  Le délégué a ensuite salué l’attitude constructive du Gouvernement de l’Argentine pour parvenir par la voie des négociations à une solution définitive. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a rappelé que son pays soutient les revendications de l’Argentine concernant le différend de souveraineté relatif aux îles Malvinas.  Il a fait sienne la déclaration du MERCOSUR sur les Malvinas du 25 juin 1996, et a également soutenu la résolution 37/9 de l’Assemblée générale qui demande que les gouvernements de l’Argentine et de Grande-Bretagne reprennent instamment les négociations directes.  Il a également demandé au Secrétaire général de redoubler ses efforts de bons offices en ce sens. 

M. CARLOS EFRAÍN SEGURA ARAGÓN (El Salvador) a réaffirmé son plein appui au droit légitime de souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas et souligné que le principe d’autodétermination des peuples ne s’applique pas à cette question coloniale spéciale.  Il s’agit d’un différend de souveraineté qui doit être réglé par le dialogue entre les deux parties, a déclaré le représentant.  Il a fait valoir la volonté manifestée par l’Argentine pour reprendre les négociations et son engagement en faveur du multilatéralisme.  Le représentant a également insisté sur l’importance de la mission de bons offices du Secrétaire général pour faire avancer les négociations sur cette question, avant de dénoncer les actes unilatéraux du Royaume-Uni qui vont à l’encontre de la résolution 31/49 de l’Assemblée générale. 

Mme ZORAYA DEL CARMEN CANO FRANCO (Panama) a soutenu les droits légitimes de l’Argentine concernant sa souveraineté sur les îles Malvinas et a appelé à la reprise du dialogue entre les parties afin de trouver une solution pacifique.  Elle a rappelé que le dialogue qui avait eu lieu entre 1966 et 1981 avait analysé des solutions éventuelles au différend et était parvenu à des accords provisoires.  La représentante a ensuite appelé les parties à s’abstenir de décisions introduisant des modifications unilatérales dans la situation tant qu’une solution n’aura pas été trouvée au différend.  Elle a aussi souligné l’importance de la mission de bons offices du Secrétaire général.

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a appuyé les droits légitimes de l’Argentine sur les îles Malvinas.  Elle a constaté que l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations s’est traduite par une augmentation de la militarisation de la région, s’inquiétant notamment de la présence militaire britannique croissante et injustifiée.  Elle a demandé au Royaume-Uni d’éliminer sa présence militaire et de ne pas introduire d’armes nucléaires ou d’autres armes de destructions massives dans la zone de l’Atlantique Sud.  La déléguée a martelé que le seul moyen de résoudre ce différend est la diplomatie et le respect strict du droit international.  Elle a ensuite demandé au Secrétaire général de reprendre sa mission de bons offices pour aider les gouvernements de l’Argentine et du Royaume-Uni à reprendre les négociations.  La représentante a par ailleurs salué les efforts déployés par l’Argentine pour rétablir des vols réguliers entre l’Argentine et les Malvinas afin de créer de nouvelles possibilités économiques et touristiques et renouer le dialogue. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a réaffirmé son appui historique au droit de souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas et a appelé à l’application du principe de l’intégrité territoriale des États à ce cas.  Les deux parties doivent reprendre leurs négociations visant à permettre à l’Argentine de retrouver sa souveraineté sur ces îles, a poursuivi le représentant.  Il a demandé au Royaume-Uni de s’abstenir de mener des exercices militaires dans la zone qui fait l’objet de ce différend en rappelant que l’Atlantique Sud a pour vocation d’être une zone de paix.  Le représentant a également appelé le Secrétaire général à poursuivre ses efforts de bons offices. 

Mme YOLANNIE CERRATO (Honduras), en tant qu’État observateur auprès du Comité spécial, a dit soutenir l’Argentine pour ce qui est du différend colonial sur les îles Malvinas.  Elle a réaffirmé la nécessité pour l’Argentine et le Royaume-Uni de reprendre sans tarder leurs négociations pour parvenir à une solution pacifique et durable conformément à la résolution 20/65 de l’Assemblée générale.  Elle a également appelé les deux parties à éviter les actes unilatéraux tant que ce différend n’a pas été réglé. 

M. TIYANI RAYMOND SITHOLE (Afrique du Sud) a fait observer que la résolution sur les Îles Falkland (Malvinas) a été adoptée sans mise aux voix par le Comité spécial depuis 1993 avant d’appeler à sa pleine mise en œuvre.  Il a réitéré son engagement en faveur du règlement pacifique des différends, de la coopération internationale, du respect de l’intégrité territoriale et de l’ordre international fondé sur les règles.  Les parties doivent faire montre de détermination pour reprendre les négociations bilatérales, a exhorté le délégué. 

Mme SANDRA PEJIC-GLYMPH (Serbie) a dit que toutes les questions de décolonisation en suspens doivent être résolues de manière pacifique en respectant la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les États.  Selon elle, les deux parties doivent poursuivre les négociations qui sont le seul moyen acceptable de parvenir à une solution pacifique, juste et pérenne.  Ces négociations doivent se dérouler dans la compréhension mutuelle, le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies ainsi qu’un engagement ferme en faveur des principes de souveraineté et d’intégrité territoriale de tous les États. 

M. KHAN (Pakistan) qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et la Chine, a indiqué que dans sa dernière déclaration sur la question des îles Malvinas, qui remonte au 30 novembre 2021, le Groupe appelle l’Argentine et le Royaume-Uni à reprendre leurs négociations afin de parvenir à une solution pacifique au différend de souveraineté relatif à ces îles.  Le Groupe y réitère en outre l’applicabilité du principe d’intégrité territoriale et rappelle le droit de prise de décision de l’Argentine par rapport à l’exploitation non autorisée des ressources de la région qui fait l’objet de ce différend, a souligné le représentant.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale débat de la responsabilité de protéger et voit dans la prévention « la clef » pour garantir la sécurité des enfants et des jeunes

Soixante-seizième session,
86e & 87e séances – matin & après-midi
AG/12429

L’Assemblée générale débat de la responsabilité de protéger et voit dans la prévention « la clef » pour garantir la sécurité des enfants et des jeunes

Le débat 2022 de l’Assemblée générale sur la responsabilité de protéger, centré cette année sur les enfants et les jeunes victimes, a donné lieu à des échanges vigoureux entre les États Membres, illustrant le consensus fragile qui perdure depuis près de 20 ans entre les délégations quant à son interprétation et sa portée.  Dans le Document final du Sommet mondial de 2005, les États Membres ont reconnu que chaque État avait la responsabilité de protéger ses populations contre les atrocités criminelles, à savoir le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité.

Mme Alice Wairimu Nderitu, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, a présenté le rapport du Secrétaire général intitulé « Responsabilité de protéger: donner la priorité aux enfants et aux jeunes ».  Le Secrétaire général y met en lumière les besoins particuliers des enfants et des jeunes dans de tels contextes et la manière dont ils sont pris pour cible et touchés par ces crimes, qui diffère selon qu’il s’agit d’une situation de conflit armé ou non.  

Le Secrétaire général encourage les États Membres à faire de la protection des enfants et des jeunes face aux atrocités criminelles une priorité et un impératif dans tous les domaines de l’action publique.  La prévention est l’aspect le plus important de la responsabilité de protéger les populations, ce qui implique de construire des sociétés dans lesquelles ces crimes sont peu susceptibles d’être commis, a souligné Mme Nderitu.  Pour ce faire, les gouvernements doivent s’attaquer aux facteurs de risque en identifiant les signes précurseurs et en respectant les principes et obligations juridiques relatifs à la protection des enfants, tout en favorisant leur inclusion socioéconomique et en s’opposant aux discours de haine.  

Une cinquantaine de délégations se sont exprimées aujourd’hui et ont reconnu que la prévention est en effet la clef pour garantir la sécurité des enfants et des jeunes face à de telles exactions, même si un grand nombre d’entre elles ont affiché leurs divergences sur un concept qu’elles jugent trop controversé pour être institutionnalisé.  Sur fond de guerre en Ukraine, plusieurs d’entre elles, notamment les pays voisins, se sont toutefois alarmées de la hausse de la violence et des atrocités perpétrées contre des jeunes et des enfants.  Dans différentes régions du monde, des hôpitaux et des écoles continuent de faire l’objet d’attaques aveugles où des enfants sont tués, mutilés, violés et recrutés de force par des forces et des groupes armés. 

Au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, composé de 55 États Membres et de l’Union européenne, le Costa Rica a noté qu’en 2021, l’ONU a rapporté 266 000 cas confirmés de violations graves contre des enfants dans plus de 30 situations de conflit au cours des 16 dernières années, tout en déplorant que les atrocités criminelles touchent les enfants et les jeunes de manière disproportionnée.  

Trop souvent, ont encore dénoncé des délégations, la responsabilité de protéger les populations se heurte à des considérations géopolitiques, qui se traduisent notamment par un usage abusif du droit de veto par les membres permanents du Conseil de sécurité.  Il est temps « d’élever la voix », a lancé le Mexique, coauteur avec la France d’une initiative, soutenue par 106 États Membres, visant à encadrer l’usage du droit de veto au Conseil de sécurité en cas d’atrocités de masse.  Lorsque les autorités nationales ne sont plus en mesure de protéger leurs populations ou sont empêchées de le faire par d’autres États, il incombe au Conseil de sécurité de prendre des actions « décisives et opportunes » pour prévenir de telles atrocités, a fait valoir le Danemark.  « Suggérer le contraire attenterait à l’esprit et aux objectifs de la Charte des Nations Unies », a renchéri l’Australie.  Pour des États comme Singapour, qui attendent du Conseil de sécurité qu’il tienne ses promesses en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, l’initiative franco-mexicaine et le projet de code de conduite du Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence et transparence) ne peuvent que rendre cet organe plus responsable.

Dans le même esprit, des pays comme la Croatie ou le Bangladesh ont salué la résolution, adoptée sans vote le 26 avril dernier par l’Assemblée, qui oblige à l’avenir les cinq membres permanents du Conseil de sécurité à justifier leur recours au veto.  

L’interventionnisme « sélectif » et les atteintes à la souveraineté des États au nom de la responsabilité de protéger ont causé la désintégration de pays entiers et entraîné des souffrances indicibles pour leurs populations, a au contraire dénoncé le Nicaragua, rejoint par le Pakistan, tout en réitérant son soutien à la communauté internationale et à l’ONU pour lutter contre les crimes de masse.  Une position partagée par le Venezuela et Cuba, qui ont jugé « erroné » de parler de la responsabilité de protéger comme d’un principe, estimant que cette notion ne fait pas l’objet d’un consensus entre les États Membres et ne constitue pas un fondement du droit international, ou encore par l’Iran qui a dénoncé les « manipulations » de la presse.

« À certains moments de l’histoire il faut faire preuve d’audace, et nous vivons présentement l’un de ces moments », a pourtant fait valoir le Canada, en référence au conflit en Ukraine, estimant que la responsabilité de protéger ne constitue pas un outil d’ingérence contre la souveraineté des États, mais bien un instrument de renforcement de la souveraineté « responsable » des États.  Un sentiment partagé par les pays baltes pour qui « aucun État n’a le droit d’invoquer la responsabilité de protéger de mauvaise foi comme le fait la Fédération de Russie en proférant de fausses accusations de génocide pour justifier son agression ». 

L’Assemblée terminera son débat sur la question demain, vendredi 24 juin.

LA RESPONSABILITÉ DE PROTÉGER ET LA PRÉVENTION DU GÉNOCIDE, DES CRIMES DE GUERRE, DU NETTOYAGE ETHNIQUE ET DES CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ - RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL (A/76/844)

Débat sur la question

Déclaration liminaire

Mme ALICE WAIRIMU NDERITU, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide et la responsabilité de protéger, venue présenter au nom du Secrétaire général son rapport sur la question, a déclaré que les États Membres et l’ONU ont réalisé des progrès et opérationnalisé davantage la responsabilité de protéger depuis l’adoption de ce concept lors du Sommet mondial de 2005.  Des cadres ont été élaborés pour identifier les risques et instaurer des mécanismes d’alerte précoce et de mise en œuvre.  

Ainsi, le rapport de cette année accorde la priorité aux enfants et aux jeunes dans la responsabilité de protéger, a poursuivi la Conseillère spéciale, et met en exergue leurs besoins particuliers dans les contextes de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Il décrit les voies et moyens qui permettent d’aborder la situation des enfants particulièrement ciblés par ce type de crimes en situation de conflit comme de paix.  Il appelle également à des actions concertées de la part des gouvernements, notamment en érigeant des sociétés dans lesquelles ces crimes atroces ne risquent pas d’être perpétrés.  

Pour ce faire, a expliqué Mme Nderitu, le rapport exhorte les gouvernements à mettre en place des mesures pour détecter les risques, promouvoir l’inclusion socioéconomique et l’égalité, lutter contre les discours de haine.  Les gouvernements doivent mettre à profit le secteur de l’éducation afin de favoriser la diversité et la cohésion sociale, de même que l’application du principe de responsabilité, en puisant dans les richesses des jeunes eux-mêmes.  La Conseillère spéciale a insisté sur la responsabilité particulière des États Membres de protéger leurs populations des crimes atroces afin que le droit à la protection devienne une réalité non seulement pour les enfants et les jeunes mais pour toute la population, de façon concrète et à l’aide de jalons mesurables.  Elle a insisté à cet égard sur le rôle particulier des acteurs multilatéraux dans le combat contre les crimes atroces afin de garantir la sécurité et le développement des populations, notamment les Nations Unies à travers les mesures offertes par la Charte.  Ces dimensions multiples doivent faire partie intégrante de notre examen collectif et de notre action commune en faveur de la responsabilité de protéger, a-t-elle conclu.  

Déclarations

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique), au nom de son pays et de la France, a déclaré que pour prévenir des crimes atroces il convient d’éviter que l’usage du veto ne paralyse le Conseil de sécurité dans l’accomplissement de son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  C’est dans cet esprit que l’initiative franco-mexicaine de suspendre volontairement et collectivement l’usage du droit de veto au Conseil de sécurité en cas d’atrocités de masse a été lancée en 2015, a-t-elle rappelé.  La représentante a indiqué que cette initiative est aujourd’hui soutenue par 106 États, lesquels demandent que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité s’engagent à ne pas user du droit de veto en cas de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, « afin de permettre au Conseil de sécurité d’agir efficacement ».  Selon elle, il est grand temps d’élever la voix dans un contexte international où le multilatéralisme et le droit international sont mis à rude épreuve.  Elle a également expliqué que l’approche franco-mexicaine respecte strictement les prérogatives du Conseil de sécurité et de ses membres et ne nécessite pas de révision de la Charte, « seulement un engagement politique fort ».  Nous saisissons donc cette occasion pour appeler tous les États qui ne l’ont pas encore fait, y compris des membres permanents du Conseil, à se joindre à cette initiative.  Enfin, la représentante a annoncé que la France et le Mexique envisagent d’organiser une réunion du Conseil de sécurité selon la formule Arria au cours de la soixante-dix-septième session de l’Assemblée générale afin d’examiner les moyens par lesquels le Conseil de sécurité peut agir de façon rapide et efficace à la fois pour prévenir et mettre fin aux situations de massacres lorsque des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre à grande échelle sont perpétrés.  L’impunité doit cesser, a-t-elle conclu, en appelant tous les États à se joindre aux instruments internationaux clefs en la matière. 

Au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, composé de 55 États Membres et de l’Union européenne, M. RODRIGO A. CARAZO ZELEDON (Costa Rica) a constaté, en premier lieu, que des millions d’enfants dans le monde courent le risque d’être victimes d’atrocités de masse.  Il a rappelé que la résolution 1261 (1999) du Conseil de sécurité a identifié différentes violations contre les enfants en situation de conflit armé, à savoir le recrutement et l’utilisation, l’enlèvement, le meurtre et la mutilation, le viol et d’autres formes de violence sexuelle.  En fonction des circonstances, ces violations peuvent constituer des atrocités criminelles ou indiquer qu’un tel crime peut être commis, a-t-il noté, relevant qu’en 2021, l’ONU a rapporté 266 000 cas confirmés de violations graves contre des enfants dans plus de 30 situations de conflit au cours des 16 dernières années.  Appelant à entendre la voix et l’expertise des jeunes pour mieux prévenir ces crimes, il a relevé que, plus largement, le monde est actuellement confronté à des niveaux alarmants de violence, d’atrocités et de déplacement.  À ses yeux, la responsabilité de protéger reste le principe clef autour duquel la communauté internationale peut fusionner lorsque des populations vulnérables sont menacées de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité. 

Saluant les progrès réalisés par l’ONU, les États Membres et les autres parties prenantes, notamment la société civile, pour prévenir les atrocités aux niveaux local, national, régional et international, le délégué s’est aussi félicité des initiatives des États Membres visant à traduire en justice les auteurs de ces crimes, y compris par l’exercice de la compétence universelle.  Les mesures nationales de responsabilisation pour les atrocités figurent parmi les moyens de prévention les plus efficaces, a-t-il soutenu, ajoutant que les missions d’établissement des faits, les mécanismes d’enquête et les tribunaux hybrides et internationaux, en particulier la Cour pénale internationale (CPI), offrent des voies complémentaires quand les options prévues par la législation nationale s’avèrent insuffisantes.  Des plus, des cadres ont été créés pour identifier les déclencheurs et les risques en amont, tout en institutionnalisant des mécanismes d’alerte précoce et de prévention, a-t-il relevé, avant d’applaudir les initiatives de réseaux d’États « engagés », comme le Groupe des Amis de la responsabilité de protéger et le Réseau mondial des points focaux pour la responsabilité de protéger.  

Alors que, « faute d’unité, le Conseil de sécurité n’est pas toujours en mesure de prendre une action rapide et décisive face aux atrocités », les États Membres ont insisté sur le rôle important que l’Assemblée générale et le Conseil des droits de l’homme peuvent jouer dans la prévention et la réponse à ces crimes, a poursuivi le représentant.  Il a noté que des mécanismes mandatés par le Conseil des droits de l’homme, tels que la Commission d’enquête sur le Burundi et la Mission d’établissement des faits sur le Myanmar, ont utilisé le Cadre d’analyse des atrocités criminelles des Nations Unies pour identifier les facteurs de risque et les déclencheurs potentiels d’atrocités, contribuant au développement de stratégies pour prévenir la récidive ou une nouvelle escalade.  Toutefois, a-t-il concédé, malgré les efforts nationaux et mondiaux pour prévenir les conflits et protéger les populations, plus de 100 millions de personnes sont aujourd’hui déplacées en raison de conflits, de persécutions et d’atrocités.  C’est pourquoi la responsabilité de protéger doit être au cœur de notre mission commune de faire progresser la paix et la sécurité, les droits de l’homme et le développement, a plaidé le délégué.  Il a appelé le Conseil de sécurité à examiner le plus rapidement possible les situations où existe un risque d’atrocités de masse, par des séances d’analyse et d’information et de réunions selon la formule Arria, en invitant les conseillères spéciales ainsi que la Haute-Commissaire aux droits de l’homme.  Il a également exhorté les membres du Conseil à tenir compte du Code de conduite sur l’usage du droit de veto en cas de génocide, de crimes de guerre ou contre l’humanité du Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence et transparence) et de l’initiative franco-mexicaine sur l’usage du droit de veto en cas de atrocités de masse. 

Le représentant a d’autre part salué le rôle important que la société civile peut jouer pour soutenir la mise en œuvre de la responsabilité de protéger, notamment en faisant entendre la voix d’acteurs locaux et communautaires directement touchés par les atrocités.  Nous soutenons également une approche inclusive de prévention tenant compte du rôle essentiel que jouent les femmes et les jeunes dans l’alerte, le maintien et la consolidation de la paix, le renforcement des capacités et le développement de sociétés résilientes, a-t-il dit, souhaitant à cet effet que des mesures concrètes soient prises pour mettre fin à toutes les formes de discrimination et de violence fondées sur le genre et pour autonomiser les femmes et les jeunes en tant qu’agents du changement.  Enfin, il a dit attendre de ce débat que les États Membres y présentent leurs meilleures pratiques pour mettre fin au climat actuel d’impunité et d’inaction en matière d’atrocités criminelles à travers le monde. 

Mme KRISTEL LÕUK (Estonie), s’exprimant également au nom de la Lettonie et de la Lituanie, s’est inquiétée du fait que les hôpitaux et les écoles continuent de faire l’objet d’attaques aveugles et les enfants d’être tués, mutilés, violés et recrutés de force par des forces et des groupes armés.  Il incombe à chaque État de prendre des mesures pour remplir leurs obligations au regard du droit international, qui prévoit une protection spéciale pour les enfants et les jeunes, tant lors de conflits qu’en temps de paix, a-t-elle argué.  Toutefois, « aucun État n’a le droit d’invoquer la responsabilité de protéger de mauvaise foi, comme le fait la Russie en proférant de fausses accusations de génocide qui serait commis par l’Ukraine dans le Donbass pour justifier son invasion ».  La déléguée a dénoncé la poursuite de l’agression russe caractérisée par des violations systématiques du droit international, équivalant à des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, voire à un génocide, ajoutant qu’elle a causé des dommages profonds et durables aux enfants et aux jeunes.  Au moins 300 enfants ukrainiens ont été tués et près de 600 blessés; des centaines de milliers d’autres ont été déportés de force en Russie et risquent maintenant d’y être adoptés illégalement.  La déléguée a exprimé son plein appui aux efforts visant à assurer l’application du principe de responsabilité, notamment par le biais de la Cour pénale internationale (CPI), tout en plaidant en faveur d’une législation pénalisant les violations du droit international relatives à la protection des enfants dans les conflits armés. 

S’exprimant au nom des pays du Benelux (Belgique, Luxembourg, Pays-Bas), M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a rappelé que ces trois États ont voté l’an dernier en faveur de la résolution inscrivant la responsabilité de protéger à l’ordre du jour de l’Assemblée générale de manière permanente. Une décision opportune selon lui car, hélas, le nombre d’atrocités criminelles continue d’augmenter et de toucher l’ensemble de la communauté internationale, notamment les enfants et les jeunes.  En Ukraine, a constaté le représentant, des centaines d’enfants et de jeunes sont morts à la suite du bombardement d’infrastructures civiles par les forces armées russes, tandis qu’en Afghanistan, des enfants et des jeunes sont victimes de violences sexuelles.  Ces crimes peuvent aussi se produire même en dehors d’un conflit armé, a-t-il noté, comme dans la région du Xinjiang où des enfants ouïgours sont séparés de force de leurs parents.  Regrettant que la communauté internationale n’ait pas encore réussi à adapter la prévention des atrocités aux enfants et aux jeunes, il a jugé essentiel de placer cette partie de la population au centre des efforts.  La contribution des jeunes à la prévention des conflits et à la création de sociétés tolérantes a déjà été reconnue par le Conseil de sécurité à travers le programme « jeunesse, paix et sécurité », s’est-il félicité, avant d’encourager le Secrétaire général à inclure une évaluation des risques de crimes d’atrocités dans ses rapports annuels, ainsi qu’une analyse de la mise en œuvre des recommandations des rapports précédents.  Enfin, il a souhaité que des ONG comme le Global Centre for the Responsibility to Protect et les autres organisations regroupées au sein de l’International Coalition for R2P appuient les pays dans l’application de leurs obligations internationales.

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a déclaré que la guerre que livre la Fédération de Russie à l’Ukraine est une guerre d’agression contre les enfants ukrainiens: les forces russes déportent des enfants par milliers et s’efforcent de détruire l’identité même de l’Ukraine.  Le représentant a invoqué la Convention sur la prévention du génocide qui interdit formellement la déportation d’un groupe.  Il a rappelé que la CIJ, dont la Fédération de Russie est membre, a ordonné la suspension des opérations militaires russes en Ukraine.   À certains moments de l’histoire, il faut faire preuve d’audace et nous vivons précisément un tel moment, a estimé M. Rae.  Nous comprenons mieux maintenant, a-t-il aussi estimé, ce que veut dire ou ne veut pas dire « responsabilité de protéger ».  Ce n’est en aucun cas un instrument d’ingérence dans les affaires intérieures des États.  Bien au contraire, c’est l’instrument d’une souveraineté nationale responsable, grâce, entre autres, à la prévention.  Le représentant a réclamé l’analyse des aspects pratiques de ce concept pour pouvoir passer de la théorie à la pratique.  À cet égard, il a dénoncé la paralysie du Conseil de sécurité qui résulte du recours abusif au droit de veto, un instrument « anachronique » qui empêche la pleine application de la responsabilité de protéger.

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a adressé ses condoléances au peuple de l’Afghanistan à la suite du tremblement de terre meurtrier dans ce pays.  Appelant la communauté internationale à agir rapidement, elle a aussi invité les pays qui ont confisqué ou gelé des avoirs afghans à les débloquer « au nom de l’humanité ».  Faute de consensus sur le champ d’application du concept de la responsabilité de protéger depuis le Sommet mondial de 2005, des analyses juridiques et humanitaires approfondies sont nécessaires, selon elle, pour surmonter les divergences.  Pour cela, les États Membres doivent apporter des assurances en ce qui concerne la non-ingérence dans les affaires intérieures d’autres États et le non-recours à la force, a dit la déléguée.  Toutefois, l’Iran considère que le fait de ne pas prévenir efficacement les atrocités criminelles peut être attribué davantage aux échecs du Conseil de sécurité qu’à l’absence d’un cadre normatif pertinent.  La déléguée a plaidé pour que cet organe soit impartial, indépendant et capable d’évaluer toutes les situations sans sélectivité.  Elle a par ailleurs dénoncé la « manipulation » à laquelle se livrent certains médias aux mains d’États et de groupes de pression, qui consiste à exagérer des événements particuliers et à passer sous silence des situations critiques, notamment en Afghanistan, en Palestine et au Yémen.  Ces agissements sont une provocation et incitent à la violence et au terrorisme, comme en témoigne la situation dans de nombreux pays du Moyen-Orient, a-t-elle affirmé, avant de s’interroger sur la portée et l’applicabilité du concept de la responsabilité de protéger, ainsi que sur ses interprétations arbitraires.  Notant que ce concept n’est pas encore un principe établi, elle a souhaité que la question fasse l’objet d’un rapport du Secrétaire général et que l’ONU prenne en compte les positions de tous les États Membres. 

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a estimé qu’il ne peut y avoir de discussion sur la responsabilité de protéger, « un concept qui ne repose sur aucune règle établie du droit international ».  Ladite responsabilité de protéger n’est donc qu’une « idée », dont le champ d’application ne fait pas l’objet d’un consensus entre États Membres, a-t-il insisté, lui déniant toute légitimité ou légalité.  Il a rappelé que le concept de la responsabilité de protéger en tant que substitut pour l’intervention humanitaire a été rejeté car contraire aux principes de souveraineté et d’intégrité territoriale, qui sont les pierres angulaires des relations internationales.  De plus, cette « approche destructive » a joué un rôle indéniable dans le déclenchement de conflits armés et la montée du terrorisme, selon lui.  Il a appelé l’ONU à ne tolérer aucun concept encourageant l’ingérence dans les affaires d’autres États sous prétexte de responsabilité de protéger.  Les efforts internationaux visant à prévenir les crimes contre l’humanité sont des objectifs que partage la Syrie, a assuré le représentant, qui a jugé que l’un des moyens de prévention les plus efficaces consiste à lever les mesures coercitives unilatérales.  À ses yeux, les partisans de telles mesures ignorent les risques de conflit qu’elles entraînent et utilisent la politique du deux poids, deux mesures en fermant les yeux sur des crimes commis dans d’autres parties du monde, notamment en Palestine. 

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a déclaré que son pays continue de considérer la responsabilité de protéger comme une notion qui ne fait pas l’objet d’un consensus au sein de l’ONU et qui inquiète de nombreux pays, en particulier les petits États et les États en développement.  L’interventionnisme et les atteintes à la souveraineté des États au nom de la responsabilité de protéger ont causé la désintégration de pays entiers et entraîné de grandes souffrances à leurs populations, a-t-il dénoncé, tout en réitérant son soutien ferme à la communauté internationale et aux Nations Unies pour lutter contre les crimes de génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité.  Il est urgent de résoudre les causes profondes de ces situations, a poursuivi le représentant, telles que la pauvreté, l’ordre économique international injuste, l’extrémisme, l’inégalité et l’exclusion sociale, tout en s’attaquant aux problèmes structurels à la source des conflits.  Pour sa part, le Nicaragua entend « continuer sur la voie du multilatéralisme », en promouvant la paix et l’éradication de la pauvreté.

Mme MARIA-IULIANA NICULAE (Roumanie) a notamment indiqué qu’en tant que pays candidat au Conseil des droits de l’homme pour la période 2023-2025, la Roumanie, si elle est élue, appuiera le travail en cours de développement des procédures spéciales en matière de prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité.  Elle a ajouté que son pays étant très préoccupé par le signalement de crimes de génocide et des crimes contre l’humanité commis en Ukraine, il s’est joint à d’autres États parties au Statut de Rome pour saisir le Procureur de la CPI et demander la conduite d’enquête sur « tout acte de crime de guerre, de crime contre l’humanité et de génocide survenu sur le territoire de l’Ukraine ». 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a estimé qu’en matière de responsabilité de protéger, les succès de la communauté internationale doivent se mesurer concrètement et non par le nombre de rapports, débats et résolutions sur le sujet, lesquels « sont des moyens et non des fins en soi ».  Il a ainsi déclaré que, pour améliorer l’action du Conseil de sécurité en vue de prévenir des atrocités criminelles, l’initiative franco-mexicaine sur le droit de veto est l’une des voies à suivre.  Nous espérons également que les discussions tenues devant cette Assemblée après chaque veto du Conseil contribueront à éviter son utilisation dans des situations de menaces de crimes atroces, a ajouté le représentant.  Il a également encouragé le Secrétaire général à veiller à ce que ses rapports futurs comprennent des évaluations des risques d’atrocités dans des situations spécifiques à chaque pays, ainsi que des recommandations pour y répondre. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a déploré le fait que malgré l’adoption unanime par la communauté internationale de résolutions relatives à la responsabilité de protéger les populations en cas d’atrocités criminelles, le monde est aujourd’hui confronté à des niveaux sans précédent de violence, d’atrocités et de déplacements.  Pour y remédier, nous devons redoubler d’efforts et agir, tant en termes de prévention que de réponse, notamment en poursuivant l’opérationnalisation de la responsabilité de protéger.  Le délégué a encouragé les États Membres à adhérer au Code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre, Code de conduite présenté par le Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence et transparence) et à l’initiative franco-mexicaine sur l’utilisation du droit de veto en cas d’atrocités de masse.  De même, il a souhaité que les rapports du Secrétaire général incluent des évaluations des risques d’atrocités criminelles et des recommandations pour y répondre.  Il a préconisé le renforcement de la collecte d’éléments de preuve, notamment par le biais de la Cour pénale internationale (CPI) et des juridictions nationales.  S’agissant de la prévention, il a précisé que l’Union européenne utilise des outils d’analyse des conflits et un système d’alerte précoce pour mettre en œuvre une réponse rapide.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a constaté que, 17 ans après le Sommet mondial de 2005, la nécessité d’assumer la responsabilité collective de protéger les populations en danger est plus urgente que jamais.  Il a souligné à ce propos le lien existant entre l’augmentation du nombre de civils en situation de déplacement forcé et l’incapacité à prévenir ou à arrêter les atrocités de masse dans des pays comme la Syrie, le Myanmar, la République démocratique du Congo et l’Ukraine.  Dans ces pays, les enfants et les jeunes risquent d’être déplacés de force, recrutés, enlevés, tués, mutilés, violés ou de subir d’autres formes de violences sexuelles et sexiste.  Le délégué a dénoncé la multiplication des attaques contre des civils, des travailleurs humanitaires, des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des soldats de la paix, ainsi que contre les lieux de culte, les hôpitaux, les écoles et autres infrastructures civiles.  Il est de la responsabilité des États d’empêcher de tels actes, a-t-il martelé, exprimant son soutien à une approche de prévention non sexiste et centrée sur les survivants.  Si les États ont également la responsabilité première d’enquêter et de poursuivre les crimes commis dans leur juridiction, l’ONU et le Conseil de sécurité ont, eux, l’obligation de prévenir et de répondre aux atrocités, a fait valoir le délégué.  Il a encouragé en particulier les membres du Conseil à davantage intégrer la prévention des atrocités de masse dans leur ordre du jour et à mieux utiliser leurs méthodes de travail pour y répondre. 

M. FELIX DIMBARE TUGHUYENDERE (Namibie) a considéré que beaucoup reste à faire pour rendre opérationnelle la responsabilité de protéger et assurer son application.  Des préoccupations légitimes demeurent, les divergences dans l’interprétation de la doctrine continuant d’entraver les discussions sur la question, en particulier dans le contexte du troisième pilier de la doctrine de la « responsabilité de protéger », a-t-il ajouté.  Il a ensuite attiré l’attention sur le rapport du Secrétaire général qui souligne que les enfants et les jeunes continuent d’être la cible particulière de crime d’atrocités.  Le sort des enfants dans les situations de conflit armé, en particulier, qui a été abondamment documenté, demeure une grave préoccupation, a-t-il dit.  M. Tughuyendere a considéré à cette aune que les écoles doivent être traitées comme des sanctuaires et qu’il est de notre responsabilité commune de veiller à ce que chaque enfant ait accès à une éducation, même en période de conflit. 

Mme JASNA PONIKVAR VELÁZQUEZ (Slovénie) s’est félicitée du leadership dont ont fait preuve les enfants et les jeunes pendant les dernières crises mondiales, dont les changements climatiques et la pandémie de COVID-19.  Ils ont inspiré un mouvement qui a mené à des actions concrètes pour construire des sociétés plus pacifiques.  Les enfants, a poursuivi la représentante, comptent toutefois parmi les groupes les plus vulnérables dans les conflits armés, et devraient, à ce titre, être au centre de nos efforts de protection et de prévention des atrocités, notamment la violence sexuelle et sexiste.  La lutte contre l’impunité pour les crimes les plus graves doit devenir une composante essentielle de la prévention des conflits armés et de la protection des civils mais aussi de l’édification d’une paix durable.  Alors que la prévention demeure la clef de la protection des populations contre les situations susceptibles de mener à des atrocités de masse, la représentante a estimé que seuls des investissements à long terme dans le développement sont à même de briser le cycle des conflits.

M. YURI ARIEL GALA LÓPEZ (Cuba) a jugé « erroné » de parler de la responsabilité de protéger comme d’un principe, estimant que cette notion ne constitue pas un fondement du droit international.  Sa portée, ses règles de mise en œuvre et ses mécanismes d’évaluation sont encore bien loin d’être agréés et définis par les États Membres.  « En l’absence de consensus sur l’applications de cette idée, nous ne pouvons pas parler de la consolidation de la mise œuvre », a-t-il argué.  Alors que le rapport du Secrétaire général emploie des expressions « erronées » telles que « crimes atroces » et « atrocités de masse », il a noté que de nombreuses délégations ont exprimé leur désaccord face l’utilisation de ces termes.  Le représentant a dénoncé l’utilisation sélective ou à des fins politiques ou interventionnistes de notions comme la protection, estimant que la responsabilité de la communauté internationale consiste à encourager et aider les États à exercer leurs propres responsabilités en matière de protection, notamment les petits États en développement.  D’après lui, la lutte contre les fléaux de la pauvreté et de l’inégalité n’est pas promue avec la même vigueur par ceux qui prônent la mise en œuvre de la responsabilité de protéger, « un nouvel outil d’ingérence dans les affaires internes des petits États en développement ». 

Mme RABAB FATIMA (Bangladesh) a condamné les atrocités criminelles, en particulier celles qui touchent des enfants et des jeunes.  La représentante s’est déclarée favorable à une action multilatérale en matière de prévention et de réponse, avec l’ONU comme coordonnateur principal.  En tant que grand fournisseur de contingents et de forces de police aux opérations de paix de l’ONU, le Bangladesh est en première ligne en ce qui concerne la protection des populations civiles, a-t-elle fait valoir.  Mais le Conseil de sécurité reste l’organe principal lorsqu’il s’agit de répondre aux menaces à la paix et à la sécurité internationales et de prévenir des crimes atroces.  Réitérant à cet égard sa position en faveur d’une limitation du droit de veto au Conseil de sécurité, elle s’est félicitée de l’adoption récente d’une résolution de l’Assemblée générale obligeant les membres permanents y ayant recours à justifier leur décision.  Elle a d’autre part réaffirmé son appui à la CPI et à l’universalisation du Statut de Rome.  Toutefois, à ses yeux, la responsabilité de protéger est avant toute celle des États.  Il importe donc de renforcer les capacités des organismes nationaux pour les aider à contrer les risques d’atrocités et à assurer l’application du principe de responsabilité, a-t-elle plaidé.  La représentante a attiré l’attention de l’Assemblée sur la situation des minorités, en particulier les Rohingya du Myanmar réfugiés au Bangladesh.  Regrettant qu’aucun progrès n’ait été réalisé pour garantir leur retour en toute sécurité, elle a exhorté le Conseil de sécurité à assumer son rôle pour assurer la protection de ces personnes. 

Pour Mme SHILPA KADAMBARI PULLELA (Australie), il est clair que la Russie a commis des crimes de guerre flagrants en Ukraine.  C’est pourquoi, a-t-elle dit, l’Australie soutient fermement l’enquête de la CPI sur l’étendue de ces crimes.  Et une fois de plus, a-t-elle martelé, nous demandons à la Russie de retirer immédiatement ses forces armées du territoire ukrainien, conformément à la décision juridiquement contraignante de la Cour internationale de Justice du 16 mars.  Pour la représentante, l’agression brutale de la Russie contre l’Ukraine et ses conséquences dramatiques sur la sécurité alimentaire dans le monde rappellent combien les atrocités criminelles sapent les piliers de la responsabilité de protéger.  Elle a alors souligné que la prévention des atrocités et les réponses qui doivent leur être apportées quand elles sont commises doivent être une priorité mondiale et un élément essentiel des activités principales de l’ONU.  « Suggérer le contraire attenterait à l’esprit et aux objectifs de la Charte des Nations Unies », a-t-elle dit. 

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a constaté qu’en dépit des références de plus en plus fréquentes à la responsabilité de protéger dans les résolutions et débats de l’ONU, « l’écart persiste entre notre engagement réitéré à protéger les populations civiles et notre action collective ».  Selon elle, l’opérationnalisation de la responsabilité de protéger dépend à la fois d’un leadership politique fort et d’une action opportune.  La représentante a ainsi rappelé la responsabilité première de chaque État de protéger sa population contre les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, le génocide et le nettoyage ethnique.  Elle a aussi souligné l’importance de l’engagement de la communauté internationale à aider et assister les États dans la prévention de tels crimes et la protection des populations à risque, jugeant que la responsabilité de protéger reste trop souvent un « concept insaisissable ».  Les situations au Myanmar, en Syrie et au Yémen nous rappellent quotidiennement que de tels échecs ont un coût élevé pour les civils, a encore déclaré Mme Oehri, qui a souligné le rôle crucial que doit pouvoir tenir la CPI en matière de reddition des comptes et de lutte contre l’impunité. 

M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a réaffirmé son engagement en faveur de la responsabilité de protéger, en regrettant que la Russie dénature aujourd’hui ce principe par ses « allégations infondées de génocide contre la population russophone de l’est de l’Ukraine ».  Ce faisant, a-t-il noté, la Russie tente de légitimer son agression militaire non provoquée et injustifiée contre l’Ukraine.  Mais elle reste obligée de respecter la responsabilité de protéger dans les territoires ukrainiens qu’elle occupe, a-t-il fait valoir.  Il a rappelé que le premier pilier de cette responsabilité ne repose pas seulement sur un concept politique mais aussi sur des obligations juridiques internationales spécifiques, qui résultent des accords internationaux et du droit international coutumier.  Or, a-t-il ajouté, la Russie viole de manière flagrante ces obligations en Ukraine, notamment à l’égard des enfants et des jeunes.  Il a donc plaidé pour que le Conseil de sécurité renvoie à la CPI la situation en Ukraine, tout en regrettant que ses actions soient bloquées par l’utilisation du droit de veto par la Russie.  Le représentant a ensuite soulevé la question urgente de la protection des enfants et des jeunes des atrocités.  Il a recommandé notamment d’investir dans l’éducation, la formation professionnelle et les opportunités d’emploi.  C’est ce que fait la Pologne en fournissant une aide aux étudiants de pays en développement, y compris ceux touchés par des conflits, et à 196 000 enfants réfugiés qui fuient la guerre en Ukraine, s’est-il enorgueilli.

M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a déclaré que les agressions et les atrocités criminelles touchent les enfants et les jeunes de manière disproportionnée.  Il s’est félicité de l’accent mis sur l’obligation de rendre des comptes dans le rapport du Secrétaire général, insistant sur la nécessité de mener des enquêtes et d’intenter des poursuites contre les responsables, notamment par le biais de la CPI.  Il a encouragé le Secrétaire général à intensifier ses efforts pour fournir aux États Membres des informations en temps réel sur des situations spécifiques concernant la manière de mettre en œuvre les trois piliers de la responsabilité de protéger, notamment en procédant à des analyses dans des pays particuliers.  Lorsque les autorités nationales ne sont plus en mesure de protéger leurs populations ou sont empêchées de le faire par d’autres États, le Conseil de sécurité doit prendre des actions décisives et en temps opportun pour prévenir les atrocités criminelles.  Il s’est félicité à cet égard de l’adoption récente de l’initiative relative à l’utilisation du droit de veto qui ne peut que renforcer la transparence au sein du Conseil.  

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a constaté qu’en Ukraine, en Syrie, au Yémen, en Afghanistan, en République démocratique du Congo et au Myanmar, des enfants et des jeunes risquent d’être tués ou mutilés, ou alors d’être recrutés, enlevés, détenus, torturés, violés et soumis à d’autres formes de violence sexuelle.  Elle a rappelé que certaines atrocités peuvent être dirigées spécifiquement contre les enfants et les jeunes, notamment le crime de guerre consistant à cibler des écoles.  Elle a donc appelé à renforcer les mécanismes de prévention et d’alerte précoce, e qui suppose une implication de toute la société, y compris des organisations de la société civile.  La responsabilité doit également être une priorité, tant pour la justice que pour la dissuasion, a poursuivi le représentant, avant de réitérer son soutien à la CPI.  Le Conseil de sécurité, au sein duquel Malte siégera pendant la période 2023-2024, a aussi un rôle crucial à jouer, a-t-elle poursuivi, non sans préciser que son pays soutient le Code de conduite sur l’usage du droit de veto en cas de génocide, de crimes de guerre ou contre l’humanité du Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence et transparence), ainsi que l’initiative franco-mexicaine sur l’usage du veto en cas d’atrocités de masse.  De même, a affirmé le délégué, nous continuerons à soutenir la Coalition mondiale pour la protection de l’éducation contre les attaques, le Groupe des Amis des enfants dans les conflits armés et la Coalition mondiale pour la réintégration des enfants soldats. 

Mme ANDREA BARBARA BAUMANN-BRESOLIN (Suisse) a salué le fait que la responsabilité de protéger soit désormais inscrite à l’ordre du jour annuel de l’Assemblée générale.  En tant que membre du groupe d’amis de la responsabilité de protéger, la Suisse réaffirme son plein soutien à ce principe ainsi qu’à la déclaration conjointe, a-t-elle ajouté, invitant tous les États Membres à souscrire au Code de Conduite du Groupe ACT relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Elle a attiré l’attention sur le fait que la prévention des atrocités doit être ancrée au niveau national car il appartient à chaque pays de trouver les mécanismes adaptés à sa situation.  La Suisse œuvre notamment au sein de l’Action globale contre les atrocités de masse pour renforcer le dialogue entre États et d’autres acteurs afin de renforcer les mécanismes et structures nationales de prévention, a-t-il ainsi expliqué.  La représentante a aussi souligné l’importance de promouvoir la participation pleine, égale et significative des femmes dans tous les processus de paix, ainsi que la protection de leurs droits est essentielle, tant elles « sont exposées de manière disproportionnée aux violences sexuelles et sexistes, y compris dans les cas de génocide ».  Pour la représentante, les femmes et les jeunes jouent un rôle fondamental dans la prévention des atrocités.  Enfin, elle a estimé que l’éducation est primordiale pour diminuer les facteurs de risques et prévenir la violence.  En dernier lieu, elle s’est élevée contre les attaques ciblant des écoles, qui continuent d’augmenter, et rappelé que la Suisse a signé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, appelant tous les États Membres à y souscrire et à faire preuve de volonté politique pour la traduire en actes. 

M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA (Guatemala) a estimé que le contexte international actuel nous impose de revitaliser le concept de la responsabilité de protéger, qui est lié inextricablement au maintien de la paix et de la sécurité internationales ainsi qu’aux droit de l’homme.  Il a jugé que la tenue annuelle de débats sur la responsabilité de protéger est la preuve de l’intérêt des États Membres pour sensibiliser et améliorer, collectivement et individuellement, leurs capacités de prévenir la commission d’atrocités criminelles et de violations des droits de l’homme à grande échelle.  Pour atteindre cet objectif, le délégué a reconnu la nécessite de mettre en œuvre des changements progressifs destinés à consolider le système international de protection des droits de la personne, particulièrement s’agissant des enfants et des jeunes. 

M. GVARAM KHANDAMISHVILI (Géorgie) a déclaré que « l’occupation russe des régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali » empêche les autorités de son pays de protéger les droits de l’homme « de nos compatriotes qui se trouvent de l’autre côté de la ligne d’occupation, où ils vivent dans des conditions désastreuses ».  Il a ensuite évoqué les discriminations ethniques, les enlèvements, la torture, les mauvais traitements, les détentions illégales et la restriction à la liberté de mouvement, qui, dans ces régions, entraînent les pires souffrances humaines.  Le représentant a déploré que, malgré les appels répétés de la communauté internationale, y compris dans la dernière résolution du Conseil des droits de l’homme sur la Géorgie, ces deux régions occupées par la Russie restent inaccessibles aux organes internationaux de défense des droits de l’homme, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.  Il a ajouté que l’interdiction de l’enseignement de leur langue maternelle dans les territoires de Géorgie occupés par la Russie « prive chaque année jusqu’à 5 000 enfants d’un droit consacré par l’ONU ».  Le représentant a estimé à l’aune de ces atrocités que la communauté internationale se doit d’adopter une position résolue face à la Russie. 

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a dénoncé une notion « manipulée pour promouvoir et justifier des agendas interventionnistes et bellicistes », « hautement politisée » et qui est source d’inquiétude pour de nombreux États en l’absence d’accord sur sa définition et sa portée.  Qui détermine qu’un État ne protège pas sa population et sur quelle base?  Pourquoi parler de la responsabilité de protéger alors que le peuple palestinien est massacré depuis plus de 70 ans? s’est interrogé le délégué.  Et si le véritable objectif est de protéger la population, pourquoi est-on incapable de promouvoir la coopération et la solidarité internationales dans la lutte contre la pauvreté, la faim et les inégalités?  Plus grave encore, à ses yeux, les principaux promoteurs de la responsabilité de protéger sont ceux-là mêmes qui exécutent aujourd’hui une politique criminelle d’agression contre le Venezuela, avec l’application illégale de mesures coercitives unilatérales.  Ces mêmes pays, a-t-il accusé, ont donné « carte blanche » à Israël, Puissance occupante, pour qu’elle poursuive en Palestine sa politique d’apartheid, de génocide, de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité.  Le délégué a fustigé l’action des puissances occidentales, lesquelles veulent maintenir leur domination au travers de guerres néocoloniales contre des pays qui ont choisi d’être libres, indépendants et souverains.  « La première responsabilité en matière de protection des peuples serait de mettre fin immédiatement à l’utilisation de l’économie comme arme de destruction massive contre au moins un tiers de l’humanité. » 

M. BAE JONGIN (République de Corée) a tout d’abord exhorté la communauté internationale à placer les enfants et les jeunes au centre de ses efforts liés à la responsabilité de protéger.  Il a ensuite souligné l’importance de la prévention et de l’alerte précoce, arguant que les discours de haine, la marginalisation, l’exclusion et la propagation de l’intolérance précèdent souvent les atrocités.  Afin d’opérationnaliser un meilleur système d’alerte précoce, il est impératif, selon lui, que la voix des enfants et des jeunes soit entendue et leur rôle dans la prévention, reconnu.  Il a également réitéré la détermination de son pays à garantir l’établissement des responsabilités pour les atrocités criminelles et à mettre fin à l’impunité. 

L’établissement des responsabilités est un devoir, pas un choix.  C’est aussi l’un des moyens les plus efficaces de prévenir la répétition des crimes graves, a-t-il souligné, avant de rappeler que les États ont la responsabilité principale de traduire en justice les auteurs de tels crimes.  Il a aussi réaffirmé son soutien aux tribunaux internationaux et aux tribunaux hybrides, y compris la CPI.  S’agissant de la responsabilité de la communauté internationale de protéger lorsqu’un État ne le fait pas, troisième pilier du concept, il a soutenu qu’elle doit être assumée avant tout par le Conseil de sécurité.  Il a cependant constaté que ce dernier est fréquemment empêché d’agir en raison du recours au droit de veto.  L’adoption à l’unanimité de la résolution 76/262 de l’Assemblée générale sur cette question constitue, selon lui, un appel clair des États à la modération dans l’exercice de ce droit.  Enfin, après avoir encouragé les membres du Conseil à soutenir activement le Code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine d’encadrement du veto en cas d’atrocités, il les a appelés à redoubler d’efforts pour faire face au risque ou à la commission d’atrocités de masse. 

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a déclaré que la pleine jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales devrait être au cœur de la lutte contre les atrocités et la protection des jeunes.  Il s’est alarmé de l’implication d’enfants dans la propagande de haine de certains États contre une ethnie ou une religion particulière, estimant que c’est cette propagande qui sème les germes des atrocités criminelles.  Notant que l’ignorance des crimes commis par le passé est souvent la source des violences aujourd’hui, il a fait valoir que l’éducation, notamment aux droits de l’homme et au génocide, peut jouer un rôle de prévention important.  Il a dénoncé les efforts délibérés pour nier le génocide arménien, servis par une « réinterprétation » du droit international.  Pour sa part, a-t-il conclu, l’Arménie continue d’œuvrer à la mise en œuvre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avec, entre autres, le Bureau des Nations Unies de la prévention du génocide et la responsabilité de protéger.

M. GYULA MIKE (Hongrie) a attiré l’attention sur quelques-unes des mesures que prend son gouvernement pour mettre en œuvre le concept de responsabilité de protéger, qui ont en leur cœur l’alerte précoce.  Il a ainsi détaillé les efforts de médiation politique, d’indemnisation des victimes, de renforcement des capacités nationales dans la lutte contre l’impunité et de recherche de nouvelles solutions.  Il s’agit également, a-t-il dit, de mettre l’accent sur la résilience des sociétés et en la matière, les mécanismes des droits de l’homme peuvent s’avérer très efficaces.  Le représentant s’est dit favorable aux mécanismes mis en place par le Conseil des droits de l’homme.

M. JONATHAN SAMUEL HOLLIS (Royaume-Uni) a constaté que des millions d’enfants dans le monde sont aujourd’hui confrontés au risque d’atrocités de masse.  Leur sécurité, leur protection, leur dignité et leur bien-être sont fondamentaux pour l’humanité et la responsabilité de protéger fournit un cadre pour les aider, a-t-il soutenu, plaidant pour que la voix des jeunes, qui sont de puissants agents de paix et de sécurité, soit entendue et exploitée pour éclairer les efforts de prévention.  Pour le représentant, nous pouvons tous contribuer à la prévention des atrocités, en identifiant les moteurs, les déclencheurs et les risques, en institutionnalisant l’alerte précoce et les mécanismes de prévention, et en s’unissant pour briser ce cycle de la violence. 

Il a indiqué, à ce propos, que, dans le cadre du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, le Royaume-Uni soutient les efforts de l’ONU visant à contraindre les parties à un conflit à adopter des plans d’action concrets.  Il a ensuite estimé que la communauté internationale ne peut plus accepter l’hésitation ou inaction.  Évoquant les souffrances et les violences épouvantables subies par les enfants en Ukraine, au Myanmar, en Syrie et au Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, il a réclamé des poursuites nationales et internationales, y compris celles de la CPI, contre les auteurs de ces atrocités.  Il a conclu en attirant l’attention sur l’appel à l’action lancé en novembre dernier par son gouvernement pour garantir les droits et le bien-être des enfants nés de violences sexuelles en période de conflit. 

M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée) s’est dit profondément préoccupé par le fait que certains pays occidentaux, au nom de la responsabilité de protéger, ciblent de manière unilatérale et pour des raisons politiques, économiques et militaires des États souverains.  Cette ingérence illégale dans les affaires intérieures des États provoque de grands bouleversements au Moyen-Orient et en Afrique, tels que les conflits armés, le terrorisme, le génocide et les destructions massives.  On ne saurait imputer le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité à l’incapacité d’un État de protéger son peuple.  Ces fléaux résultent au contraire des violations « flagrantes » de la souveraineté nationale.  Le respect de cette souveraineté est sacré et inviolable, a martelé le représentant, tout comme l’est celui de l’intégrité territoriale et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, pierre angulaire des relations internationales.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a constaté que, 17 ans après le Sommet mondial, aucun consensus n’existe sur la définition et la portée de la notion de responsabilité de protéger dont les promoteurs militent pour qu’elle soit appliquée au-delà des paramètres établis en 2005.  L’on a voulu en outre l’appliquer à des situations où l’on ne pouvait prouver que l’État concerné avait échoué à assumer sa responsabilité.  Cette notion, a regretté le représentant, est parfois appliquée en l’absence même d’une décision du Conseil de sécurité, ce qui est contraire à la lettre et à l’esprit de la Charte des Nations Unies.  Le délégué a également dénoncé la sélectivité qui entoure la mise en œuvre du concept, visant le plus souvent des pays en développement et écarté dans d’autres situations, notamment dans les cas d’occupation étrangère.  On ne parle jamais de la responsabilité de protéger, s’est-il expliqué, quand il s’agit des populations de la Palestine ou du Jammu-et-Cachemire, un territoire contesté dans lequel l’Inde commet pourtant des crimes graves. 

L’an dernier, a rappelé le représentant, mon pays a publié un rapport circonstancié faisant état de 3 432 crimes de guerre avérés au Jammu-et-Cachemire commis par des responsables de l’armée indienne depuis 1989.  Or, ces crimes sont plus nombreux encore depuis août 2019, date à laquelle les dirigeants indiens ont décidé d’appliquer la « solution finale ».  Le représentant s’est étonné du « silence assourdissant » des partisans de la responsabilité de protéger sur ces faits.  Il a fait état d’une campagne de répression systématique de l’Inde contre les Musulmans et le riche héritage de l’islam.  Affirmant que le crime de génocide perpétré par l’Inde a été attesté par différentes autorités, il a appelé les chantres de la responsabilité de protéger à se pencher sur le sort de la population du Jammu-et-Cachemire occupé et des minorités opprimées en Inde.  Le respect universel des principes de la Charte est impératif pour appuyer la responsabilité de protéger et garantir l’établissement des responsabilités pour les violations systématiques du droit international et des droits de l’homme, a-t-il martelé. 

M. RAMSÉS RADHAMÉS LAGOS VALLE (Honduras) a jugé pertinent de ne pas dissocier la responsabilité de protéger des efforts visant à parvenir à une paix durable.  Après avoir salué la contribution de la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, il a souligné l’importance de respecter l’appel en faveur d’un cessez-le-feu mondial lancé par le Secrétaire général dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Il a ajouté que la protection des enfants et des jeunes est au centre des efforts du Honduras pour éviter les crimes atroces.  Illustrant son propos, il a cité la mise en place d’une politique publique visant à protéger les enfants migrants non accompagnés et des mesures prises en partenariat avec le secteur privé pour inclure la question de la prévention du génocide et d’atrocités criminelles dans les programmes de la police et l’armée.  Enfin, il a cité des initiatives de son pays dans le cadre du Réseau interaméricain sur la prévention du génocide et des crimes atroces. 

M. JUN LIANG MARK SEAH (Singapour) a estimé qu’il incombe à chaque État de protéger sa population contre les atrocités de masse, mais que la communauté internationale doit être prête à agir collectivement et de manière décisive pour assurer la protection contre de tels crimes si les autorités nationales ne sont pas en mesure de le faire.  Or, près de 20 ans après son adoption, le consensus sur la responsabilité de protéger reste ténu.  Il a réaffirmé l’interprétation de son pays des trois piliers de la responsabilité de protéger, tout en notant que la communauté internationale doit contribuer à l’édification de sociétés pacifiques et inclusives.  Les petits États comme Singapour attendent du Conseil de sécurité qu’il tienne sa promesse en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il noté, alors que le veto a trop souvent été utilisé pour empêcher l’action face à des activités criminelles.  Il s’est félicité à cet égard de l’initiative franco-mexicaine et du projet de code de conduite du Groupe ACT qui visent à rendre le Conseil plus responsable. 

M. ÖNCÜ KEÇELI (Türkiye) a souhaité se concentrer sur l’incitation à la violence et les discours de haine qui sont des facteurs de risque et des indicateurs potentiels d’alerte précoce pour les atrocités criminelles.  Malheureusement, les discours de haine, le racisme, la xénophobie et l’islamophobie sont en hausse dans le monde entier, s’est-il inquiété.  Ces menaces nécessitent une action urgente tant au niveau national qu’international.  En ce qui concerne la protection des enfants et des jeunes pendant les conflits armés, le délégué a appelé à redoubler d’efforts pour veiller à ce que les équipes de pays des Nations Unies chargées de surveiller et de signaler les violations graves commises à l’encontre des enfants disposent des ressources adéquates pour remplir leur mandat.  Il faut, a-t-il conclu, veiller à ce que les dispositions et les capacités en matière de protection des enfants soient incluses dans tous les mandats pertinents des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales de l’ONU.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a observé qu’en dépit des efforts de la communauté internationale pour protéger les populations des atrocités criminelles, rien n’a changé et l’efficacité des Nations Unies continue d’être entravée par des intérêts politiques partisans.  Le Bureau du Conseil des droits de l’homme et le Bureau des Nations Unies de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger, a-t-il fait observer, ont publié une déclaration sur les discours de haine à l’égard des Tutsis en République démocratique du Congo (RDC).  La Cheffe de la MONUSCO a elle-même joint sa voix à cette déclaration qui prend toute sa valeur, au vu de la haine déversée, ces dernières semaines, sur les réseaux sociaux.  Dénonçant cette véritable « idéologie du génocide », il a parlé des gens stigmatisés et violentés voire du « massacre » d’un groupe de Tutsis en RDC, au mois de mai dernier.  Un groupe se faisant appeler « Brigade spéciale des jeunes » a même manifesté à Kinshasa, machettes en main. 

À la lumière de ces événements, le délégué s’est félicité de la réunion du 20 juin à Nairobi, à l’issue de laquelle les chefs d’État de la région ont lancé un appel au Gouvernement de la RDC pour qu’il lutte contre la propagation des discours de haine, lesquels constituent les signes précurseurs d’un génocide.  Les Nations Unies devraient dénoncer plus rapidement ces violations.  Au Rwanda, a affirmé le représentant, la prévention du génocide est une priorité plus importante que jamais.  Nous sommes attachés au maintien de la paix et à la protection des civils, en tenant compte du contexte historique.  Le génocide des Tutsis n’a pu être empêché et il est temps d’intensifier les efforts de protection.  Le représentant a appelé les Conseillères spéciales pour la prévention du génocide et pour la responsabilité de protéger à publier leurs analyses et le Secrétaire général, à formuler des recommandations concrètes pour prévenir un acte de génocide en RDC. 

M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a cité 21 situations préoccupantes dans le monde s’agissant de la situation des enfants dans les conflits armés.  Il a mis notamment l’accent sur la situation en Ukraine où les forces russes ont tué de nombreux enfants et reconnu avoir « évacué » 300 enfants ukrainiens en Russie, « très certainement contre leur gré ».  Le représentant a appelé à renforcer la prévention afin de protéger les enfants d’atrocités en Ukraine et partout dans le monde.  À cet égard, il a estimé que le mandat sur la question des enfants dans les conflits armés est essentiel pour prévenir les atrocités.  Il faut en outre renforcer l’application du principe de responsabilité pour dissuader les auteurs de tels crimes.  

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a constaté que l’ONU est traversée de conflits d’intérêt ou idéologiques qui mettent en péril les promesses de paix et de sécurité internationales.  Alors que les enfants sont particulièrement touchés par les crises actuelles, qui donnent lieu à des déplacements et des atrocités de masse, il a jugé impérieux d’agir.  À ses yeux, les jeunes ont un rôle important à jouer dans la prévention des conflits, notamment en participant à l’activation des mécanismes d’alerte précoce et à la sensibilisation.  Il a rappelé l’intervention militaire de l’ONU dans son pays, en 2011, qui a permis de « préserver l’essentiel ».  Le représentant a réaffirmé l’adhésion de la Côte d’Ivoire à la responsabilité de protéger et sa participation aux forces de maintien de la paix dans divers pays.  Enfin, il a invité l’ONU à s’appuyer sur les organisations régionales dans ses efforts de prévention des atrocités criminelles afin d’éviter de devoir recourir à la force.

M. VASILIKI ROMPOTI (Grèce) a plaidé en faveur de la prévention qui reste la clef de l’élimination des atrocités criminelles.  Toutefois, a-t-il ajouté, si nous ne parvenons pas à prévenir de telles atrocités, la promotion de la justice et de la responsabilité reste la seule alternative pour s’assurer qu’aucun crime et qu’aucun criminel n’échappent à la justice.  Le délégué s’est dit préoccupé par le bien-être des groupes les plus vulnérables, notamment les enfants et les jeunes, parmi les victimes de crimes atroces.  À cet égard, il a encouragé la mise en œuvre d’outils et mécanismes internationaux robustes afin de les protéger.  Pour conclure, il a assuré l’assistance du soutien de la Grèce, en partenariat avec l’Union européenne, pour la promotion et la mise en œuvre de la responsabilité de protéger, ainsi que la protection et le plein respect des droits des enfants et des jeunes.

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a indiqué que le sujet à l’examen revêt une importance particulière pour son pays et sa région.  Il a ainsi rappelé qu’à la fin des années 80, plus de 200 000 Azerbaïdjanais ont été expulsés de leur patrie historique en Arménie.  Plusieurs centaines ont été tués et leurs biens ont été saisis.  Ces actions, a-t-il poursuivi, ont été suivies d’une guerre à grande échelle déclenchée par l’Arménie contre l’Azerbaïdjan au début des années 90.  En conséquence, une partie importante de l’ancienne province autonome du Karabakh a été prise et est restée sous occupation illégale pendant près de 30 ans, en violation des résolutions du Conseil de sécurité, a relaté le représentant, dénonçant de multiples crimes de guerre et un nettoyage ethnique massif.  Notant que cette tragédie a été condamnée internationalement comme un crime contre l’humanité ou un acte de génocide, il a affirmé que la tactique délibérée consistant à cibler la population civile a de nouveau été utilisée par les forces arméniennes lors des hostilités de l’automne 2020, une guerre de 44 jours qui a mis fin à trois décennies d’agression.  Depuis, a-t-il expliqué, les territoires libérés ont fourni des preuves irréfutables de l’étendue des violations du droit international et le sort de près de 4 000 citoyens de l’Azerbaïdjan reste inconnu.  En outre, malgré la fin du conflit, de nombreux civils ont été tués ou blessés par l’explosion de mines, l’Arménie refusant de partager des informations sur ces armes dispersées sur le territoire azerbaïdjanais.  À l’exception de quelques individus traduits en justice par l’Azerbaïdjan pour crimes de guerre, activités terroristes et mercenariat, la plupart des auteurs continuent de jouir de l’impunité car l’Arménie ne les poursuit pas, s’est-il encore indigné, dénonçant également l’absence de mesures pour empêcher la haine et la désinformation. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) s’est dit préoccupé de constater que la responsabilité de protéger n’est pas mieux appliquée aujourd’hui qu’il y a 70 ans.  Il a cité l’exemple du coup d’État militaire au Myanmar qui s’est traduit par une violence horrible contre la population civile.  Il a aussi dénoncé des pratiques consistant à saisir le prétexte de responsabilité de protéger pour justifier ses propres crimes et atrocités comme cela a pu être observé à Boutcha, au nord de Kiev.  Mettons de côté nos différences et mettons l’accent sur la responsabilité de protéger comme nous nous y sommes engagés en adoptant le document du Sommet mondial de 2005, a-t-il martelé.  Il a ensuite appelé à appliquer les processus de paix sans politisation et créer un environnement propice à la contribution sûre de la société civile aux niveaux national, régional et international.   

Mme AMAL MUDALLALI (Liban) a rappelé que la responsabilité première de la protection des personnes incombe aux États.  Mais, s’est-elle interrogée, que se passe-t-il si l’État est l’auteur de tels crimes contre sa population?  Qui la protège?  C’est là où le troisième pilier, en vertu duquel la responsabilité de protéger incombe alternativement à la communauté internationale des États dans son ensemble, suscite la controverse et soulève des inquiétudes concernant le respect des principes de souveraineté et de non-intervention dans les affaires intérieures des États.  Or la question de la souveraineté est sacrée pour l’écrasante majorité des États, a souligné la représentante.  Elle a cité à cet égard l’ancien Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, selon lequel « la souveraineté et la responsabilité sont des principes qui se renforcent mutuellement ».  La réponse est très clairement entre les mains du Conseil de sécurité, a poursuivi la représentante, mais quand le Conseil n’assume pas sa responsabilité, ou qu’il va au-delà des principes de la Charte, qui protège les populations et sauve des vies? 

À cet égard, le Liban a soutenu l’initiative franco-mexicaine sur la restriction du droit de veto ainsi que le projet d’un code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre.

M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie) a assuré que la protection des enfants et des jeunes est une des priorités de la politique étrangère de son pays, qui est Vice-Président du Conseil d’administration de l’UNICEF cette année.  Voyant dans la prévention la partie la plus importance de la responsabilité de protéger face aux atrocités, il a salué la création de systèmes d’alerte précoce sur les plans national et international.  Il s’est également réjoui de la mise en place du Cadre d’analyse des atrocités criminelles des Nations Unies.  Toutefois, a-t-il relevé, le recours croissant des enfants et des jeunes à Internet et aux technologies numériques les rend plus vulnérables.  C’est pourquoi il s’est dit favorable à une mise à jour de ce cadre.  Plus généralement, a-t-il poursuivi, les informations sur les atrocités doivent être signalées le plus rapidement possible afin de permettre une réponse immédiate.  En l’absence de réaction, le Conseil de sécurité doit pouvoir mener une action internationale, a précisé le délégué, se disant favorable au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine encadrant le recours au veto en cas d’atrocités de masse.  Pour le représentant, un autre aspect essentiel est la bonne mise en œuvre du droit pénal international.  À cet égard, il a souligné le rôle fondamental de la CPI, organe judiciaire indépendant et impartial, avant d’encourager les États qui ne l’ont pas encore fait à signer le Statut de Rome.  Enfin, il a évoqué la situation en Ukraine, où des atrocités sont commises à l’encontre d’enfants.  « La cessation immédiate des activités militaires de la Russie dans ce pays serait le moyen le plus facile de les protéger. » 

M. VINÍCIUS FOX DRUMMOND CANÇADO TRINDADE (Brésil) s’est dit fier que son pays ait coparrainé la résolution de l’année dernière sur l’inscription de ce point à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Cette résolution reflète, selon lui, le fait que les États Membres ont reconnu la nécessité de discuter collectivement de la protection des populations contre les crimes graves, de faire le point des progrès, et d’identifier les échecs et les moyens de rectifier le tir.  Le représentant s’est alarmé de la situation particulièrement désastreuse des enfants déplacés, en raison d’un conflit armé.  Ils représentent, a-t-il rappelé, plus de 40% de l’ensemble des personnes déplacées.  Il a aussi rappelé que les enfants apatrides, réfugiés et déplacés sont les plus exposés aux violations et aux abus.  En tant que membre du Conseil de sécurité, le Brésil, a annoncé le représentant, organisera, pendant sa présidence, au mois d’août, le débat annuel de haut niveau sur les enfants et les conflits armés pour offrir aux États membres l’occasion d’examiner les conclusions du rapport du Secrétaire général.

M. FABIÁN ODDONE (Argentine) a noté qu’aucune société n’est à l’abri des atrocités de masse et que son pays l’a appris au travers de « sa propre tragédie ».  C’est pourquoi la prévention et la lutte contre toutes les formes de discrimination sont au cœur de nos politiques d’État, a-t-il dit, assurant que son pays soutient toutes les initiatives intergouvernementales menées dans ce sens, tout en accordant une grande importance à la coopération avec la société civile.  Dans cet esprit, a ajouté le représentant, l’Argentine a créé en 2014, aux côtés du Costa Rica, de l’Australie, du Danemark, de la Suisse et de la Tanzanie, le Réseau d’action contre les crimes et les atrocités de masse (GAAMAC).  Par ce réseau mondial inclusif, aujourd’hui sous présidence argentine, nous avons pu avancer dans la construction d’architectures nationales et régionales de prévention, s’est-il félicité, ajoutant que cette initiative est ouverte à tous les États.  Le représentant a également mentionné le Réseau latino-américain pour la prévention du génocide et des atrocités de masse, lancé en 2012 et qui bénéficie de l’appui de la société civile, notamment de l’Institut Auschwitz pour la prévention du génocide et des atrocités de masse.  Cet effort commun a permis la formation de plus de 800 fonctionnaires dans les pays membres.

M. STEFANO STEFANILE (Italie) a mis l’accent sur le rôle crucial de l’éducation, outil le plus puissant contre la haine, capable de développer la capacité de discernement, de conscience des droits fondamentaux et de lutte contre les abus, condition préalable de l’établissement des responsabilités pour crimes graves.  Le prochain Sommet « Transformer l’éducation », a-t-il estimé, sera une occasion unique de promouvoir une telle approche.  Dans ce contexte, le représentant a jugé particulièrement important de promouvoir le rôle des écoles, en tant qu’environnements sûrs et propices à l’apprentissage de la tolérance.  Dans le même esprit, il a souligné l’importance de l’Envoyé pour la jeunesse dont le bureau est un outil précieux pour promouvoir la participation active des jeunes générations à la prise des décisions internationales, y compris sur la consolidation de la paix et la réconciliation.  Le représentant a aussi appuyé les efforts de toutes les ONG qui travaillent sans relâche, en Italie et ailleurs, pour jeter des ponts et former les jeunes leaders à la prévention des conflits et au rôle d’ambassadeur de la culture de paix.

M. DAMIANO BELEFFI (Saint-Marin) s’est inquiété de la situation en Ukraine, en République démocratique du Congo (RDC), au Myanmar et au Soudan du Sud, entre autres, et a encouragé la Conseillère spéciale pour la prévention du génocide à continuer d’analyser la situation dans divers pays et formuler des recommandations sur les signes précoces d’atrocités de masse. 

Certes, a-t-il poursuivi, il incombe au premier chef aux États d’enquêter sur les crimes commis sur leur territoire, mais il est important aussi de créer des commissions d’enquête et des missions d’établissement des faits qui contribuent à la collecte des éléments de preuve sur les atrocités.  Ces instruments jouent donc un rôle fondamental dans la reddition des comptes.

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a souligné que son pays, en tant que membre du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT), défend le Code de conduite sur l’usage du droit de veto en cas de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité.  De même, l’Équateur soutient l’initiative franco-mexicaine sur la suspension de ce droit en cas d’atrocités de masse.  En effet, a précisé le représentant, l’Équateur juge fondamentale l’application du paragraphe de l’Article 27 de la Charte des Nations Unies selon lequel une partie à un différend doit s’abstenir de voter.  À la veille de la commémoration en 2024, des 75 ans des Conventions de Genève, le représentant a insisté sur la nécessité de rechercher des synergies pour promouvoir la protection des civils, l’établissement des responsabilités et des mesures orientées vers l’action.

M. LIM (Indonésie) a rappelé que son pays a rejoint le consensus sur la responsabilité de protéger lors du Sommet mondial de 2005, et qu’il a maintenu cette position lors de la réunion plénière de 2021.  Il a cependant estimé que ce principe ne doit pas en rester au statu quo et qu’il faut à présent l’appliquer au niveau national.  Il a ensuite souligné que les gouvernements se doivent de protéger les enfants et les jeunes contre les atrocités.  Dans ce cadre, la réponse établie en 2005 pour les cas de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de nettoyage ethnique se révèle solide et doit rester le principal critère de la discussion, a jugé le représentant, selon lequel il ne servirait à rien de renégocier les conclusions du document final de 2005.  À ses yeux, il importe à présent de les mette en œuvre, même si des vues divergentes se font jour sur la portée de la responsabilité de protéger.  Rappelant à ce propos que le troisième pilier de ce principe requiert une riposte conforme aux Chapitres VI et VII de la Charte des Nations Unies, il a souligné la nécessité, en toute circonstance, de protéger les enfants et les jeunes contre les crimes d’atrocités.  Sur ce point, a-t-il précisé, notre politique nationale se reflète dans notre ratification de différents instruments, à commencer par la Convention sur les droits de l’enfant. 

Droit de réponse

Réagissant à la déclaration du Pakistan, l’Inde a dénoncé une exploitation abusive de la tribune de l’Assemblée générale pour déverser la haine et propager de fausses informations sur le Jammu-et-Cachemire, lequel relève d’une affaire intérieure indienne.  Elle a accusé le Pakistan d’être l’un des épicentres du terrorisme et une force déstabilisatrice.  

La désinformation est plutôt la spécialité de l’Inde, a rétorqué le Pakistan, arguant que la délégation indienne est plutôt mal placée pour faire la leçon, alors que son pays a lancé un plan de destruction des mosquées et des sanctuaires musulmans, faisant des Musulmans, des citoyens de seconde zone.  Le Jammu-et-Cachemire n’a jamais fait partie et ne fera jamais partie de l’Inde, a martelé le Pakistan qui a réclamé la pleine mise en œuvre des résolutions pertinentes des Nations Unies.  Insistant sur l’organisation d’un plébiscite ou d’un référendum, il a accusé l’Inde d’être coupable de terrorisme au Jammu-et-Cachemire et de financer des groupes terroristes pour le déstabiliser et freiner son développement économique.

L’Arménie s’est, pour sa part, élevée contre le discours fallacieux et la désinformation de l’Azerbaïdjan, un affront à cette noble assemblée pour essayer de justifier les agressions, notamment celles d’octobre 2020 menée avec l’appui de combattants étrangers.  L’Azerbaïdjan, s’est-elle étonnée, se pose en victime et veut jeter un flou entre l’agresseur et l’agressé.  Les nombreuses violations commises au Nagorno-Karabakh parlent d’elles-mêmes, tout comme la stratégie très claire de nettoyage ethnique pour prévenir toute velléité d’autodétermination.  Nous avons assisté, a martelé l’Arménie, au premier crime de masse commis en Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale et nous rejetons catégoriquement toute manipulation à laquelle se livre l’Azerbaïdjan. 

Mensonges, s’est exclamé l’Azerbaïdjan, devant un pays qui n’honore pas ses obligations.  Nous avons, a-t-il affirmé, accordé la priorité à la consolidation de la paix, à la reconstruction postconflit et à la délimitation des frontières.  Pendant ce temps-là, l’Arménie continue de véhiculer des slogans alors qu’elle est en crise et que ses citoyens protestent et réclament la démission du Gouvernement.

Nous avons effectivement des institutions représentatives et une société dynamique qui exerce ses droits et libertés fondamentales, notamment la liberté d’opinion et d’assemblée, a répondu l’Arménie.  C’est peut-être surprenant pour un régime autoritaire, a-t-elle dit comprendre, arguant que le discours public est utile pour consolider des sociétés justes, équitables et inclusives.  L’Arménie a dénoncé les discours anti-arméniens de l’Azerbaïdjan et a rappelé que plusieurs organes de l’Union européenne ont fait état d’un système de dénigrement et de discrimination systématiques des personnes d’origine arménienne en Azerbaïdjan où le terme même d’« arménien » est utilisé comme une insulte.  Ce pays, a-t-elle accusé, dépeint le Haut-Karabakh comme une région « nettoyée de ses insectes » et il est tout aussi hypocrite quand il parle des allégations relatives aux minorités.  En Arménie, nous avons de très nombreuses minorités qui peuvent promouvoir leurs traditions et leurs religions dans le respect des droits de l’homme.  

Les attaques contre un État Membre et ses dirigeants montrent l’irresponsabilité de l’Arménie, a commenté l’Azerbaïdjan.  Au lieu de faire des leçons de morale, l’Arménie ferait mieux de prendre conscience que l’édification d’une région pacifiée exige l’élimination des discours de haine.  Notre conflit a été réglé et il ne nous reste plus qu’à honorer nos obligations internationales et pérenniser la paix dans la région, a-t-il martelé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: Divergences d’approche entre les membres du Conseil de sécurité, entre partisans de la stabilité et défenseurs des droits humains

9075e séance - matin
CS/14946

Afghanistan: Divergences d’approche entre les membres du Conseil de sécurité, entre partisans de la stabilité et défenseurs des droits humains

Le Conseil de sécurité a examiné aujourd’hui la situation en Afghanistan, toujours en proie à une situation alarmante.  Si une partie des membres du Conseil s’est surtout préoccupée des contraintes de plus en plus lourdes imposées aux Afghanes, d’autres ont mis l’accent sur le besoin de stabilité du pays, y compris pour lutter contre le terrorisme islamique, et ont réclamé le dégel des avoirs bloqués à l’étranger.

La séance intervenait au lendemain d’un violent séisme dont le bilan encore provisoire dépassait déjà les 800 morts.  Les membres du Conseil ont observé une minute de silence à la mémoire des victimes et les différents membres ont tous présenté leurs condoléances au début de leur intervention.  Représentant spécial adjoint, Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire des Nations Unies à la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), M. Ramiz Alakbarov a vu dans cette nouvelle catastrophe « un nouveau rappel tragique de la myriade de dangers auxquels le peuple afghan est confronté en ce moment ».

C’est toutefois sur d’autres urgences que M. Alakbarov a concentré son exposé: la situation humanitaire, la crise économique et la nécessité d'un engagement continu avec les « autorités de facto » dans un contexte de violations multiples des droits de l'homme, et notamment de ceux des femmes et filles.  Des urgences auxquelles les membres du Conseil n’accordent pas le même ordre de priorité.

Le Secrétaire général adjoint et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, a insisté sur trois aspects qui réduisent la capacité des organisations humanitaires à répondre aux besoins d’un nombre croissant de personnes, dont 6,6 millions sont au bord de la catastrophe dans le pays.  Il a déploré une prudence excessive des autorités chargées d’autoriser les transferts de fonds vers l’Afghanistan dans le cadre des exemptions humanitaires aux sanctions prises contre les Taliban, ce qui limite les liquidités disponibles pour les organisations humanitaires, les exigences imposées à ces dernières par les « autorités de facto », mais aussi le manque de fonds pour financer les appels humanitaires.  Lors du débat, plusieurs membres du Conseil ont mis en avant leurs contributions financières mais M. Griffiths a rappelé que la réponse humanitaire n’était financée qu’à 33% des besoins et qu’il manquait près de 3 milliards de dollars pour les six derniers mois de 2022, tandis que les 2,4 milliards de dollars de promesses de dons récemment cités lors d’une conférence de donateurs correspondent à une combinaison d'engagements passés, présents et à venir, qui incluent les réfugiés afghans à l’étranger et dont bon nombre restent à concrétiser. 

Ces crises humanitaires risquent de se répéter si l’économie afghane ne se redresse pas, a averti M. Alakbarov, qui a mentionné une contraction de celle-ci de 30 à 40% depuis la conquête du pouvoir par les Taliban en août 2021 et a énuméré les chiffres alarmants.  C’est au nom de la relance de l’économie que plusieurs membres du Conseil –la Fédération de Russie et la Chine, mais aussi le Brésil- ont demandé que soit autorisé le rapatriement des avoirs afghans gelés à l’étranger.  Une position adoptée aussi par certains voisins de l’Afghanistan, comme l’Iran ou l’Ouzbékistan, au nom de la stabilité régionale.  Ainsi, le représentant ouzbèque a estimé que le « Gouvernement intérimaire afghan » avait besoin « d’un certain temps » pour mettre en œuvre concrètement ses promesses et obligations internationales, que des pressions ne pourraient que renforcer les extrémismes et que l’annonce d’une interdiction de la culture du pavot devrait contribuer à priver divers groupes terroristes opérant dans le pays d’une source de revenus provenant du trafic de drogue.   

Les représentantes du Mexique, du Kenya et des Émirats arabes unis ont néanmoins demandé comment l’économie pourrait se redresser si en était exclue la moitié de la population constituée par les femmes, de plus en plus « effacées » de la vie du pays, selon les termes de Mme Yalda Royan, représentante de la société civile afghane.  Plusieurs membres du Conseil ont violemment dénoncé les mesures de plus en plus dures prises par les Taliban qui, après avoir interdit aux filles de se rendre à l’école, ont récemment imposé aux femmes sortant de chez elles de se voiler intégralement la face.  La représentante de l’Irlande a dénoncé le bilan « honteux » du régime des Taliban et celle de la France y a vu une illustration que, malgré toutes leurs promesses, les Taliban n’avaient « pas changé » depuis leur premier exercice du pouvoir entre 1998 et 2001. 

L’Irlande a donc exhorté le Conseil de sécurité à trouver la volonté politique nécessaire pour garantir le respect des droits humains et la participation effective des femmes à la société afghane, plutôt que d'accepter le statu quo.  L’Albanie a souhaité que le Conseil parle d’une seule voix et le Ghana a suggéré que le Secrétaire général nomme de nouveau une femme à la tête de la MANUA pour succéder à Mme Lyons. 

Le rôle de la Mission en matière de protection des droits de l'homme, et de ceux des femmes en particulier, a été évoqué car son mandat, modifié par la résolution 2625 (2022) adoptée le 17 mars, lui confère de nouveaux pouvoirs en la matière.  Estimant que « le respect des droits de l’homme et en particulier des femmes et des filles ne peut pas être une variable d’ajustement dans nos discussions et dans la réponse des Nations Unies à la crise afghane », la représentante de la France a dit attendre que la Mission « remplisse sa tâche ».  Mme Royan, qui a accusé la Mission d’avoir « trahi » les Afghans par le passé, a souhaité que la MANUA reprenne la publication régulière de rapports ouverts au public et a demandé aux membres du Conseil de « tenir leur parole ».  Après avoir déclaré que les Afghanes lui demandaient souvent si le monde les avait oubliées ou, sinon, ce qu’il était prêt à faire pour elles, une autre intervenante de la société civile, journaliste afghane travaillant pour la BBC, a quant à elle invité les membres du Conseil de sécurité à se poser la même question. 

LA SITUATION EN AFGHANISTAN (S/2022/485)

Déclarations liminaires

M. RAMIZ ALAKBAROV, Représentant spécial adjoint, Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire des Nations Unies à la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), qui s’adressait au Conseil depuis Kaboul, est revenu sur le tremblement de terre meurtrier qui a frappé hier la province de Paktika aux premières heures du jour.  Jusqu’à présent, selon ses informations, au moins 770 personnes ont été tuées, plus de 1 400 blessées, dont beaucoup grièvement, et plusieurs milliers de maisons ont été détruites ou endommagées.  Les opérations de recherche et de sauvetage se poursuivent et l’on s’attend à ce que le nombre de victimes augmente encore dans les jours à venir, tout comme le nombre de communautés touchées, a-t-il expliqué.  Au lendemain de la secousse, les acteurs humanitaires ont mobilisé une réponse immédiate aux côtés de leurs homologues des autorités de facto, dont le Ministère de la défense est le chef de file.

Des équipes d’évaluation interagences étaient également sur le terrain en quelques heures et restent en place pour aider à coordonner et à informer la réponse humanitaire.  M. Alakbarov a dit avoir l’intention de se rendre lui-même, demain, dans la zone touchée pour rencontrer les familles et les intervenants, y compris les groupes de femmes de la société civile qui s’efforcent de faire en sorte que l’aide parvienne aux femmes et aux filles, et pour soutenir l’ensemble des efforts de secours.  « Vous conviendrez tous que la journée d’hier a été un nouveau rappel tragique de la myriade de dangers auxquels le peuple afghan est confronté en ce moment », a-t-il déploré.

M. Alakbarov a toutefois concentré son exposé sur les autres urgences auxquelles la population afghane est confrontée, notamment la situation des droits de l’homme, la crise économique, l’urgence humanitaire actuelle et enfin, la nécessité d’un engagement continu avec les autorités de facto. 

Le Coordonnateur résident a décrit une situation des droits de l’homme précaire, malgré une décision d’amnistie générale et les assurances répétées des autorités de facto quant à son respect.  La MANUA continue de recevoir des allégations crédibles de meurtres, de mauvais traitements et d’autres violations visant des personnes associées à l’ancien Gouvernement afghan, ainsi que des allégations crédibles de violations commises par les autorités de facto contre des personnes accusées d’être affiliées à l’État islamique d’Iraq et du Levant-Khorassan (EIIL-K), a-t-il expliqué.  Il a exhorté les autorités de facto à faire davantage pour prévenir ces violations et à rendre leurs auteurs comptables.

M. Alakbarov a aussi accusé ces dernières de restreindre de plus en plus l’exercice des droits humains fondamentaux, visant en particulier les droits et libertés des femmes et des filles afghanes, limitant leur participation à la vie sociale, politique et économique.  Il s’agit notamment de l’interdiction de l’enseignement secondaire pour les filles et de la décision d’imposer le port du voile aux femmes, a-t-il dénoncé, en pointant le coût immense de ces politiques sur l’économie.  Les femmes sont collectivement exclues de la société d’une manière unique au monde, a-t-il dit, tout en assurant ce Conseil que la MANUA restera une voix claire et visible pour sauvegarder les droits du peuple afghan, en particulier ceux des femmes et des filles.  

Évoquant la situation actuelle de l’économie, qui s’est contractée de 30 à 40% depuis le mois d’août 2021, le Coordonnateur résident a précisé que la production et les revenus avaient diminué de 20 à 30%, tandis que le nombre de ménages recevant des transferts de fonds a diminué de 50%.  Le chômage pourrait même atteindre 40% cette année, contre 13% en 2021, et certaines projections indiquent que le taux de pauvreté pourrait atteindre 97% à la fin de l’année 2022.  82% des ménages sont aujourd’hui endettés, ce qui est encore plus alarmant, alors que la détérioration de l’économie offre peu de chances de s’en sortir.  Si l’économie n’est pas en mesure de se redresser et de croître de manière significative et durable, le peuple afghan sera confronté à des crises humanitaires répétées, ce qui pourrait provoquer des migrations massives et créer des conditions propices à la radicalisation et à un nouveau conflit armé, a-t-il mis en garde. 

Dans le même temps, l’Afghanistan reste très vulnérable aux changements climatiques et aux chocs géopolitiques à venir.  « Nous devons contribuer à la relance de l’économie agricole, qui repose sur la création de chaînes de valeur et le développement de liens entre les agriculteurs et les producteurs alimentaires et les marchés locaux, a plaidé M. Alakbarov.  Cela ouvrira également la voie à une agriculture de substitution pour remplacer la culture du pavot, ce qui permettra de tirer parti de l’interdiction récente par les autorités de facto de la culture du pavot et des stupéfiants.  

Ce faisant, le Coordonnateur résident a appelé à continuer à accorder une attention suffisante à l’élimination des munitions de guerre non explosées. 

Lorsque lui-même et d’autres membres de l’équipe dirigeante des Nations Unies voyagent dans le pays et rencontrent les communautés touchées, celles-ci formulent trois demandes directes, simples et sincères, a expliqué M. Alakbarov: ils veulent des emplois, une réponse à plus long terme à la crise économique et la sécurité.  Entre janvier et fin avril 2022, les partenaires humanitaires ont apporté au moins une forme d’aide humanitaire à 20 millions de personnes, dont 19,3 millions de personnes vulnérables ayant des besoins humanitaires, 247 000 rapatriés transfrontaliers, 75 000 réfugiés et 95 000 personnes touchées par des inondations et d’autres phénomènes météorologiques, a-t-il rappelé.

Malgré les difficultés décrites, M. Alakbarov a dit continuer de croire fermement qu’une stratégie d’engagement et de dialogue continus reste la seule voie à suivre pour le bien du peuple afghan, ainsi que pour la sécurité régionale et internationale. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a appelé à s’attaquer à la paralysie économique et bancaire qui continue de bloquer la vie des femmes, des hommes et des enfants, à continuer d’étendre et améliorer la qualité de l’aide humanitaire dans les zones mal desservies, et à résister à l’établissement de systèmes de prestation de services parallèles aux institutions nationales.  Il a prévenu que 6,6 millions de personnes sont au bord de la catastrophe en Afghanistan en raison d’un déficit de 3 milliards de dollars pour les besoins humanitaires en 2022.

Illustrant son propos, M. Griffiths a mis l’accent sur trois domaines qui présentent des obstacles à la capacité des organisations humanitaires de répondre aux besoins d’un nombre croissant de personnes.   

M. Griffiths a d’abord regretté que le système bancaire formel continue de bloquer les transferts en raison d’une volonté excessive de réduction des risques, ce qui a un impact sur les canaux de paiement et provoque des blocages dans les chaînes d’approvisionnement.  Près de la moitié des organisations ayant répondu à une enquête de suivi de l’OCHA ont ainsi signalé des difficultés à transférer des fonds vers l’Afghanistan, contre 87% en octobre de l’année dernière.  « Même si la situation s’est améliorée, des défis persistent », a dit le représentant de l’OCHA, tout en notant qu’environ 80% des organisations sont confrontées à des retards dans le transfert de fonds, et que plus de 60% d’entre elles citent le manque de liquidités disponibles dans le pays comme un obstacle programmatique. 

« Le deuxième obstacle auquel nous sommes confrontés concerne l’engagement entre les organisations humanitaires et les autorités de facto », a poursuivi le Coordonnateur des secours d’urgence, en précisant que les autorités nationales et locales cherchent de plus en plus à jouer un rôle dans la sélection des bénéficiaires et à acheminer l’aide aux personnes figurant sur leurs propres listes prioritaires.  M. Griffiths a noté que les autorités de facto demandent davantage de données et d’informations concernant le budget et les contrats de personnel, alors que les ONG sont confrontées à des difficultés persistantes lorsqu’elles essaient d’embaucher des femmes dans certaines fonctions.  Il a constaté davantage d’ingérences aujourd’hui qu’au cours des mois précédents, ajoutant que la plupart des difficultés étaient toutefois résolues grâce à un dialogue avec les autorités de facto compétentes.  « Cependant, pour chaque problème résolu, un autre problème similaire apparaît, parfois au même endroit avec les mêmes services », a-t-il regretté, avant de souligner la frustration des organisations humanitaires, des communautés et des autorités locales 

« Troisièmement, nous n’avons tout simplement pas assez de fonds », a insisté M. Griffiths en ajoutant que seul un tiers des ressources nécessaires à la réponse humanitaire de cette année a été reçu.  Il a noté que les organisations alimentaires ont la capacité d’apporter de la nourriture dans le pays, malgré la crise ukrainienne.  Mais il a ajouté qu’un financement et une action précoces seront essentiels pour éviter une catastrophe cet hiver.  Il a précisé que la conférence des donateurs de haut niveau de mars, qui a généré 2,4 milliards de dollars de promesses de dons, concernait une combinaison d’engagements de financement passés, présents et futurs pour l’Afghanistan ainsi que pour les réfugiés afghans dans les pays voisins en 2022 et au-delà.  Notant que bon nombre de ces promesses n’ont pas encore été concrétisées en financement confirmé pour la réponse humanitaire, il a précisé que la réponse humanitaire était confrontée à un déficit de financement de 66%, soit près de 3 milliards de dollars pour les six derniers mois de 2022.

Mme YALDA HAKIM, journaliste, a expliqué qu’elle était la correspondante de BBC News et qu’elle avait couvert l’Afghanistan, où elle est née, depuis 15 ans.  Elle a mis l’accent sur les privations de libertés dont sont victimes les femmes afghanes, et en premier lieu sur l’interdiction faite « depuis 279 jours » à des millions de filles d’aller à l’école.  L’éducation n’est pas un privilège, c’est un droit de l’homme fondamental, qui continue pourtant d’être refusé aux filles afghanes, a-t-elle rappelé.

La prise de contrôle du pays par les Taliban le 15 août dernier avait réellement été un événement transformateur pour le pays, a expliqué la journaliste, qui a cité en exemple une enseignante de 42 ans, Sheila Dost, elle-même privée dans son enfance d’éducation sous la première domination des Taliban, et qui voit aujourd’hui sa fille de 12 ans subir le même sort.  Mme Hakim a fait état des menaces que des femmes qui manifestent contre les interdictions dont elles sont victimes disent être l’objet: mises en joue, arrosées de gaz au poivre, insultées.  Elle a fait état d’informations inquiétantes faisant état de disparitions de manifestantes et rappelé que, depuis le 9 mai, femmes et filles ont reçu l’ordre de se couvrir la face lorsqu’elles sortent et ont été incitées à ne pas sortir du tout, les punitions en cas d’infraction étant infligées aux hommes de leur famille. 

Mme Hakim a insisté sur le caractère unique de la situation afghane ainsi que sur la rapidité avec laquelle la situation des femmes dans le pays a changé.  Il y a un an encore, les fillettes afghanes allaient à l’école et des Afghanes avaient des postes de responsabilité dans tous les secteurs du pays, a-t-elle rappelé.  Expliquant qu’elle dirige aussi une fondation qui offre des bourses à des étudiantes afghanes dans plusieurs universités étrangères, Mme Hakim a assuré que la demande d’éducation des Afghanes était plus élevée que jamais alors que l’offre s’est dramatiquement réduite.  Elle a ajouté que l’une des questions qu’on lui posait le plus souvent portait sur la possibilité pour la communauté internationale d’accorder davantage de bourses et sur les moyens que pourrait offrir la technologie pour aider les Afghanes qui ne peuvent quitter le pays à apprendre.  Tout en remerciant la présidence albanaise du Conseil de l’avoir invitée, Mme Hakim a conclu en expliquant qu’une autre des questions que lui posent souvent les Afghanes consiste à savoir si elles sont oubliées ou si le monde s’inquiète de leur sort et dans ce cas, ce qu’il est prêt à faire.  Je voudrais vous demander de vous interroger vous-mêmes, a-t-elle conclu. 

Mme YALDA ROYAN, consultante pour l’organisation féministe humanitaire VOICE Amplified, a d’entrée regretté que la communauté internationale n’ait pas entendu les mises en garde des femmes afghanes, qui avaient averti que les promesses des Taliban sur le respect des droits des femmes ne seraient pas tenues en Afghanistan, pire pays au monde pour les femmes.

« Vous nous avez ignorées, et aujourd’hui nous devons payer le prix fort des négligences de la communauté internationale, y compris celles des personnes assises à cette table », a-t-elle déploré. 

Mme Royan, qui est également une des fondatrices du Groupe de plaidoyer des femmes afghanes (Afghan Women’s Advocacy Group), a rappelé que, depuis août dernier, les Taliban avaient annoncé plus de 30 décrets, dont seulement quelques-uns ont été rapportés par les médias internationaux, qui effacent systématiquement les femmes de toutes les sphères de la société.  Les Taliban imposent ces décrets en utilisant des manœuvres d’intimidation et la violence.  En avril, ils ont brutalement torturé et exécuté une jeune sage-femme à Mazar-e-Sharif, ils lui ont coupé les jambes et l’ont poignardée, avant de lui tirer 12 balles — simplement parce qu’elle était une femme et une Hazara, a-t-elle accusé.  De plus, des centaines d’anciens fonctionnaires, ainsi que toute personne qui s’oppose au régime taliban, ont été ciblés, torturés ou exécutés.  Les Tadjiks des provinces du Panchir, Baghlan et Takhar continuent de faire face à des arrestations aléatoires: ils sont tués, torturés et déracinés.  Mme Royan a cité le cas d’un étudiant tadjik, Zamanuddin, et de son frère, arrêtés le 10 juin dans le Panchir, torturés et tués par les Taliban pour n’avoir pas révélé l’emplacement de la base du Front national de résistance (FNR).  C’est ça, le vrai visage des Taliban, ceux-là même qui veulent à tout prix être reconnus comme légitimes, s’est-elle écriée.

Décrivant le quotidien insoutenable en Afghanistan, Mme Royan est revenue sur l’attaque en mars dernier des Kouchis dans les districts de Behsud, Malistan, Jaghori et Shaikh Ali, où ils ont tué et blessé 31 personnes, brûlé des centaines de maisons et pris en otage 21 personnes, dont la plupart sont encore portées disparues, selon des activistes de la région.  Alors que les Hazaras ont été ciblés dans huit explosions rien qu’en avril, la MANUA, en condamnant ces attaques, n’a fait aucune référence aux origines des victimes, « comme si cela n’avait aucune importance », a-t-elle fait observer.

Combien de Hazaras doivent mourir, afin que ces actes puissent être reconnus officiellement comme un génocide, s’est interrogée Mme Royan en s’adressant aux Membres du Conseil.

Elle a, de même, interrogé le rôle de la MANUA dans la gestion de la crise actuelle, estimant que, bien que la MANUA nous « ait trahies » par le passé, elle a dorénavant une opportunité importante de servir le peuple afghan.  Or, et malgré les nombreuses violations choquantes telles que celles qu’elle a énumérées précédemment, la MANUA ne les avait jusqu’à présent jamais condamnées publiquement, ni publié de rapport sur la protection des civils depuis juillet 2021.  Pire, a-t-elle dénoncé, à de nombreuses reprises, les chiffres publiés par la MANUA étaient erronés.  De nombreux Afghans craignent que la MANUA n’ait pas fait preuve de neutralité lors de collaborations avec les Taliban et qu’elle ait minimisé leurs exactions, a accusé la consultante.

Pour finir, Mme Royan a enjoint à la MANUA de reprendre sans plus attendre la publication régulière de rapports ouverts au public, et d’assurer que tous les rapports en question contiennent des informations exactes et vérifiées qui reflètent le quotidien vécu dans le pays. 

Or, elle a dit n’avoir jusqu’à présent constaté aucun effort significatif de la part de la Mission pour faciliter un dialogue inclusif entre les Afghans, les Taliban et la communauté internationale qui puisse favoriser la paix en Afghanistan. 

S’adressant aux Membres du Conseil, Mme Royan les a exhortés, s’ils veulent être pris au sérieux par les Taliban ou par qui que ce soit d’autre, à « tenir leur parole, soutenir les droits des femmes et garantir la mise en œuvre du mandat de la MANUA, et faire payer les Taliban » pour leur traitement atroce des femmes.  Cessez de rabaisser les femmes afghanes avec des récompenses et des louanges sans importance! s’est-elle emportée. 

Déclarations

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a invité le Conseil à exhorter les Taliban à faire plus pour répondre à la crise humanitaire et à faire moins pour créer une crise des droits humains.  Faisant écho aux inquiétudes suscitées par les attaques, les meurtres et les disparitions signalés d’anciens responsables gouvernementaux, de membres des forces de sécurité, de procureurs et de juges, de journalistes et de professionnels des médias et de tous ceux qui dénoncent une société régie par la peur plutôt que par la loi, elle a souligné la responsabilité des autorités de facto à mettre fin aux détentions arbitraires, à la torture et aux exécutions extrajudiciaires.  Elle a notamment demandé qu’une enquête sur la disparition d’Alia Azizi, directrice de la prison pour femmes d’Hérat, soit ouverte.  

La représentante s’est dite alarmée par les attaques terroristes contre des civils, souvent dans des communautés ethniques ou religieuses minoritaires, et a appelé toutes les parties à mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants dans les conflits armés.  Elle a demandé à la MANUA de surveiller et signaler les atteintes aux droits et de dialoguer avec les parties pour qu’elles s’engagent à mettre fin à ces violations.  « Sans dialogue avec les autorités de facto, la communauté mondiale perdra ses principaux moyens d’influencer la trajectoire inquiétante de l’avenir de l’Afghanistan », a-t-elle prévenu.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a concentré son propos sur la situation sécuritaire en Afghanistan, que son pays suit de « très près ».  L’inde, a-t-il ajouté, s’engage activement auprès de la communauté internationale pour assurer un consensus sur les questions de sécurité, de paix et de stabilité.  

Le représentant a fermement condamné l’attaque terroriste contre le Gurudwara Dashmesh Pita Sahibji à Kaboul le 18 juin, soulignant que les récentes conclusions du rapport de l’équipe de soutien analytique et de surveillance des sanctions du Comité 1998 du Conseil indiquent que les autorités actuelles doivent prendre des mesures beaucoup plus fermes pour respecter leurs engagements en matière de lutte contre le terrorisme.  

On constate une augmentation significative de la présence de l’État islamique d’Iraq et du Levant-Khorassan (EIIL-K) dans le pays et de sa capacité à mener des attaques, a poursuivi M. Tirumurti.  L’EIIL-K, dont la base se trouverait en Afghanistan, continue d’être une menace dans d’autres pays.  Le rapport note également, a-t-il poursuivi, que les Taliban doivent encore se dissocier d’autres groupes terroristes tels qu’Al-Qaida, qui restent actifs.  Pour lui, il existe donc de sérieuses préoccupations qui requièrent l’attention immédiate du Conseil de sécurité et une action unifiée afin de garantir que l’Afghanistan ne devienne pas un refuge pour d’autres organisations terroristes.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a dressé un « bilan honteux » de la scolarisation refusée aux filles afghanes alors que nous sommes au deux cent soixante-dix-neuvième jour de cette privation.  Après avoir rappelé que la communauté internationale avait prévenu en août dernier que les Taliban seraient jugés d’après leur actions et non leurs paroles, la représentante a regretté de devoir constater que les promesses avaient été « creuses » et que les droits humains sont aujourd’hui érodés en Afghanistan, que les femmes sont « effacées », que les minorités sont attaquées, les journalistes ciblés, l’économie en chute libre, l’aide humanitaire détournée. 

Mme Byrne Nason a exhorté la communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité, à trouver la volonté politique nécessaire pour garantir le respect des droits humains et la participation effective des femmes à la société afghane, plutôt que d’accepter le statu quo.  Nous ne pouvons pas faire comme si les choses étaient normales, a-t-elle averti.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a souligné le travail important de la MANUA pour ramener une paix durable et la stabilité dans le pays.  La Mission demeure un élément essentiel des efforts collectifs de la communauté internationale qui visent un relèvement de l’Afghanistan, a ajouté le représentant, pour qui il faut que le Conseil puisse porter d’une seule voix un message de soutien au mandat de la Mission.

Le représentant a estimé que la nomination au poste de Représentant spécial du Secrétaire général en Afghanistan d’une nouvelle femme pour succéder à Mme Lyons constituerait un message clair de la communauté internationale aux Taliban, à savoir que les femmes et les filles afghanes sont des parties prenantes légitimes aux plans politique, social et économique du pays.

Le représentant a pressé les institutions humanitaires d’intensifier leurs interventions pour apporter un secours indispensable aux populations, notamment aux femmes, aux enfants et aux groupes vulnérables qui paient actuellement un lourd tribut.  Il a lancé un appel aux donateurs et partenaires de l’Afghanistan pour qu’ils respectent leurs engagements, afin d’éviter une catastrophe humanitaire. 

Mme TRINA SAHA (États-Unis) a condamné sans équivoque l’annonce faite le 23 mars par les Taliban d’interdire l’école pour les femmes et le décret du 7 mai imposant de nouvelles restrictions aux femmes et aux filles.  « Régler par décret mène à l’instabilité » à prévenu la représentante, avant de préciser que les États-Unis restent le principal soutien financier de l’aide humanitaire en Afghanistan avec 720 millions de dollars d’aide depuis août 2021.  Elle a rappelé que son pays a appuyé l’adoption de la résolution 2615 (2021) établissant l’exemption humanitaire pour faciliter l’acheminement de l’aide.  Alors que près de la moitié de la population est en situation d’insécurité alimentaire, la représentante a exhorté les autres États membres à assumer leur part en matière d’aide humanitaire mais aussi à respecter leurs engagements affichés en matière de lutte contre le terrorisme.  

Mme ALLEGRA PAMELA R. BONGO (Gabon) a exhorté les autorités de facto d’Afghanistan à revenir sur leurs restrictions et à respecter les assurances données à la communauté internationale concernant les droits des femmes et des filles.  Il en va de leur responsabilité et de leur crédibilité, a-t-elle martelé.  La représentante a rappelé que les droits de l’homme sont universels et qu’on ne peut y déroger sous aucun prétexte.  Elle a donc a invité les autorités de facto à se conformer aux normes internationales et à garantir leur respect. 

Mme Bongo s’est inquiétée de l’instabilité de la situation sécuritaire en Afghanistan et a condamné toutes les attaques, appelant les autorités de facto à intensifier leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme et dans la protection des populations, charges qui leur incombent.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a estimé que le dialogue restait le meilleur moyen de soutenir le peuple afghan, avant d’exhorter les autorités de facto afghanes à promouvoir une forme de gouvernance plus inclusive.  Elle a souhaité que l’on ne conditionne pas l’aide humanitaire à des considérations politiques avant d’appeler tous les acteurs à garantir un accès humanitaire sans entrave et sans discrimination.  Elle a dit la nécessité de créer des emplois et des moyens de subsistance.  Elle s’est demandée comment l’économie afghane pourra se relever si la moitié de sa population n’est pas autorisée à travailler.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a relevé « l’absence totale » de progrès dans tous les domaines où les Taliban ont pris des engagements envers la communauté internationale, y voyant la confirmation qu’ils n’avaient « pas changé ».  La représentante, qui a rappelé l’engagement continu de la France et de l’Union européenne pour répondre, sans délai ni condition, à la crise humanitaire, a rappelé les cinq conditions imposées par la communauté internationale pour permettre aux Taliban de sortir l’Afghanistan de l’isolement « imposé par les Taliban eux-mêmes », pour constater qu’« à ce jour, aucune n’est pleinement remplie ».  Elle a notamment jugé inacceptables les récentes décisions prises en violation des droits des femmes et des filles, en particulier l’exclusion de ces dernières de l’école secondaire.  Ces décisions montrent que les promesses des Taliban sont vaines, a accusé la représentante, pour qui « la confiance a été rompue ».  C’est pourquoi le Comité 1988 a révoqué les exemptions à l’interdiction de voyager aux deux ministres chargés de l’éducation, a-t-elle justifié.  La France est également déçue par le fait que les liens des Taliban avec les groupes terroristes n’ont pas été rompus.  La représentante a jugé encourageantes leurs annonces concernant le trafic de drogue mais rappelé qu’il ne s’agissait à ce stade que de promesses. 

La représentante a dénoncé l’inacceptable multiplication de graves violations des droits de l’Homme, dont les femmes afghanes sont les premières victimes, véritables prisonnières dans leur propre pays alors qu’elles ont contribué ces 20 dernières années au développement de leur pays, qui ne pourra se poursuivre sans elles.  « Le respect des droits de l’homme et en particulier des femmes et des filles ne peut pas être une variable d’ajustement dans nos discussions et dans la réponse des Nations Unies à la crise afghane », a-t-elle affirmé.  Rappelant que le mandat que le Conseil a accordé à la MANUA lui donne les moyens d’agir dans ce domaine, elle a dit attendre que la MANUA « remplisse sa tâche ».

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a estimé qu’un leadership fort de l’ONU reste essentiel pour coordonner le soutien de la communauté internationale et négocier efficacement avec les Taliban, afin de garantir un accès humanitaire de principe à travers le pays.  Le Royaume-Uni reste engagé envers le peuple afghan, comme en témoigne la conférence des Nations Unies sur les promesses de dons humanitaires, qu’il a coorganisée le 31 mars, ce qui a permis de collecter 2,4 milliards de dollars, a fait observer le représentant.  Il a rappelé l’engagement de son pays à hauteur de 380 millions de dollars pour la période 2022-2023, afin de répondre aux besoins humanitaires et aux besoins humains fondamentaux.  La stabilité économique et la fourniture de services de base sont essentielles pour mettre fin au cycle des besoins humanitaires et de la souffrance en Afghanistan, a-t-il rappelé.  

M. Kariuki a souligné la nécessité pour les Taliban de respecter leurs engagements envers le peuple afghan et la communauté internationale.  Il s’est élevé contre les restrictions inacceptables à la liberté de mouvement et à l’accès à l’éducation, à l’emploi et aux services, auxquelles sont confrontées les femmes et les filles en Afghanistan.  De même, il a fait part de sa profonde préoccupation aux graves allégations d’exécutions extrajudiciaires, de détentions et de disparitions d’Afghans, notamment de militants de la société civile et d’anciens membres des forces de sécurité et du Gouvernement.  Le représentant s’est également inquiété des attaques terroristes et de la menace du trafic de narcotique qui menacent la région.

M. Zhang Jun (Chine) a estimé que le peuple afghan avait une opportunité historique de prendre en main son destin malgré les difficultés économiques et sociale actuelles.  Il a exhorté la MANUA à agir d’urgence pour faire face aux conséquences du récent tremblement de terre.  Il a souhaité que le peuple afghan ne soit pas oublié et que le pays puisse devenir un État autonome et efficace en gardant à l’esprit que l’Histoire avait démontré que les modèles étrangers ne fonctionnent pas en Afghanistan.  

Le représentant a invité la communauté internationale à renforcer les contacts avec le Gouvernement afghan de manière pragmatique pour envisager un modèle de gouvernance correspondant aux spécificités nationales de l’Afghanistan.  Il l’a invitée également à restituer sans condition les avoirs afghans bloqués à l’étranger, avant de déclarer que les problèmes de la drogue et du terrorisme étaient liés aux difficultés faites à l’Afghanistan.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a rappelé que l’aide humanitaire au peuple afghan ne constitue pas et ne devrait pas constituer une violation du régime des sanctions.  Tout en reconnaissant que des efforts ont été déployés pour remédier aux difficultés rencontrées par les organisations humanitaires et les agences des Nations Unies pour envoyer des ressources financières en Afghanistan, il a appelé une fois de plus tous les pays concernés à continuer d’examiner de près cette question.  Les exemptions humanitaires pour toute sanction doivent être strictement respectées, afin de garantir qu’elles ne compromettent pas l’accès à la nourriture, aux abris et aux fournitures médicales essentielles pour les personnes qui en ont le plus besoin.  Cette compréhension s’applique à l’Afghanistan mais aussi à d’autres crises humanitaires, a ajouté le représentant.  Enfin, M. Costa Filho s’est fait l’écho des appels lancés aux membres de la communauté internationale pour qu’ils envisagent de dégeler les avoirs des institutions afghanes.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a demandé aux Taliban de veiller à ce que le territoire de l’Afghanistan ne soit plus jamais utilisé par des groupes pour exporter le terrorisme vers d’autres régions.  Face à la crise économique, la représentante a prévenu que la sous-utilisation et l’exclusion des talents et de la main-d’œuvre féminine continueraient de restreindre la croissance économique de l’Afghanistan.  Elle a particulièrement regretté que 279 jours se soient écoulés depuis que les Taliban ont suspendu l’école pour les filles avant de prévenir qu’il n’y avait aucune justification possible à la discrimination des femmes et des filles.  Enfin, Mme Toroitich a salué les voisins de l’Afghanistan qui ont ouvert leurs frontières au cours des derniers mois en cette période difficile pour leur générosité, avant d’exhorter la communauté internationale à soutenir les efforts de ces pays grâce à un financement prévisible.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a jugé impératif d’accorder une attention suffisante à l’aggravation de la situation humanitaire en Afghanistan car, a-t-elle insisté, si une catastrophe humanitaire a été évitée l’hiver dernier, la pauvreté et la faim continuent de sévir.  L’Afghanistan est malheureusement un exemple de la façon dont la hausse des prix des denrées alimentaires, des engrais et du gaz plonge des millions de personnes dans l’insécurité alimentaire.  Pour la représentante, l’avertissement lancé par le Chef du Programme alimentaire mondial (PAM), M. David Beasley, à la fin du mois de mars, est déjà devenu une réalité en Afghanistan: la nourriture est prise à ceux qui ont faim pour être donnée à ceux qui sont affamés.  

Mme Alhefeiti a réaffirmé que les conséquences humanitaires potentielles des sanctions devraient être systématiquement prises en compte dans la conception de chaque régime de sanctions.  En outre, les Émirats arabes unis encouragent tous les donateurs à déployer tous les efforts raisonnables pour veiller à ce que les personnes figurant sur la liste des sanctions du Comité 1998 ou ayant des liens avec des terroristes ne puissent pas bénéficier de l’aide destinée au peuple afghan.  

Les chances de redressement de l’Afghanistan sont condamnées si la moitié de sa population continue d’être marginalisée, a estimé la représentante, qui a exhorté le Conseil à continuer d’exiger que la décision des Taliban d’exclure les filles de l’enseignement secondaire soit annulée et que la participation pleine, égale et significative des femmes à la société soit rétablie.  

Enfin, la représentante s’est inquiétée des multiples attaques terroristes au cours des derniers mois et que certains groupes terroristes, comme l’EIIL-K, renforcent leurs capacités et leurs ressources financières.  L’Afghanistan ne doit pas être un refuge pour les terroristes.  C’est pourquoi les Émirats arabes unis exhortent les Taliban à s’engager dans un dialogue sérieux et significatif avec la communauté internationale sur la lutte contre le terrorisme.  

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a exhorté les donateurs occidentaux à cesser de spéculer sur l’Afghanistan, à restituer au pays les fonds bloqués et à commencer de fournir une assistance sans conditions préalables propice à la normalisation de la situation socioéconomique et humanitaire dans le pays.  Il a estimé que la situation actuelle relève de la responsabilité des pays occidentaux qui ont été présents dans ce pays pendant 20 ans.  Rappelant que la stabilité de l’Afghanistan est au cœur des efforts régionaux pour la paix, le représentant a prévenu qu’une déstabilisation de ce pays bénéficierait aux groupes terroristes comme l’État islamique, le Mouvement islamique du Turkestan oriental (ETIM) et le Mouvement islamique d’Ouzbékistan et Jamaat Ansarullah.  

La Fédération de Russie, en tant qu’amie et voisine de l’Afghanistan, fournit traditionnellement l’aide humanitaire au pays par l’intermédiaire des agences compétentes des Nations Unies et par voies bilatérales, notamment de la nourriture, des vêtements chauds et des médicaments, a déclaré M. Nebenzia.  Le représentant a regretté que l’imposition de sanctions illégales contre son pays affecte sa capacité de coopérer avec les organisations humanitaires, avant d’affirmer la volonté de la Russie d’aider l’Afghanistan par des approvisionnements en céréales.  

La Russie continuera à contribuer à la promotion de la paix et la réconciliation nationale en Afghanistan et soutiendra un dialogue régulier avec les autorités de facto, axé sur les problèmes clés du pays, dont les menaces liées à la drogue, l’inclusivité politique, l’aide humanitaire et les droits humains, a assuré le représentant, qui a dit l’intention de son pays de continuer à fournir au peuple afghan et aux représentants des autorités de facto toute l’aide possible pour atténuer les conséquences de la crise économique.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé que le mois dernier, le chef des Taliban avait appelé les pays à s’engager avec l’Afghanistan sur la base du « respect mutuel ».  Mais le respect « n’est pas un don », il se mérite, a affirmé le représentant; et d’abord, en respectant les engagements pris, non en les trahissant.  Malheureusement, a regretté M. Hoxha, les actions des Taliban vont dans la direction opposée, au détriment de la population, au détriment du pays.  Le représentant, qui a dit avoir « chercher une chose positive » dans la situation actuelle de l’Afghanistan, a ajouté qu’il « continuait de chercher » avant de dresser un bilan catastrophique de l’état du pays.  

Pour le représentant et actuel Président en exercice du Conseil de sécurité, il est donc de la plus haute importance que ce dernier reste uni et parle fort, en disant clairement et sans équivoque aux Taliban que, s’ils ne changent pas de cap, les portes du monde leur resteront fermées, qu’ils ne seront pas les bienvenus et resteront les « parias » qu’ils ont choisi d’être.  

Il est donc grand temps qu’un processus politique significatif et inclusif soit initié, de bonne foi et avec bonne volonté, a poursuivi M. Hoxha.  En disant appuyer « grandement » tous les efforts déployés par la MANUA, il a exhorté la Mission à faire tous les efforts possibles pour continuer à s’engager avec les Taliban dans la mise en œuvre du mandat donné par ce Conseil, pour le bien et au nom du peuple afghan.  

M. NASEER AHMED FAIQ (Afghanistan) a souligné les difficultés croissantes du peuple afghan malgré le soutien des Nations Unies et d’autres donateurs.  Il a noté que 80% de la population est confrontée à la pauvreté et a dénoncé les limitations de tous les droits humains, notamment le droit d’expression et les difficultés faites aux femmes, mais aussi la disparition d’opposants et d’anciens membres des forces de sécurité.  Il s’est inquiété de la présence accrue de groupes terroristes en Afghanistan et de la multiplication d’attaques terroristes visant des centres religieux et éducatifs.  

Le représentant a suggéré l’élaboration d’une feuille de route qui permettrait aux Afghans de s’entendre sur des points fondamentaux en préservant les acquis obtenus de haute lutte ces 20 dernières années.  « Si nous abandonnons l’Afghanistan nous risquons de réduire à néant les progrès acquis au cours des 20 dernières années », a-t-il mis en garde, avant d’exhorter les membres du Conseil de sécurité à envoyer un message uni dans ce sens.  

Le représentant a exhorté les Taliban à respecter les engagements en matière d’amnistie et a demandé que soit garantie la sécurité des anciens membres du Gouvernement, des cadres militaires et des fonctionnaires indépendamment de leur ethnie et de leur genre.  Il a également exhorté les Taliban à favoriser l’émergence d’un gouvernement représentatif et responsable, à permettre la réouverture des écoles pour les filles et à respecter leurs engagements en matière de droits humains.  

M.  MAJID TAKHT RAVANCI (République islamique d’Iran) a souligné qu’en tant que voisin de l’Afghanistan, l’Iran avait utilisé ses capacités et ses ressources pour aider le peuple afghan à surmonter les défis auxquels il a été confronté.  L’Iran a ainsi accueilli des millions de réfugiés, qui ont malheureusement reçu une aide internationale minimale au cours des 40 dernières années a fait observer le représentant, qui a ajouté que le dernier exemple en date de l’aide apportée par son pays aux réfugiés afghans était la vaccination à grande échelle contre la pandémie de COVID-19 des Afghans vivant en Iran.  Mais les voisins de l’Afghanistan, y compris l’Iran, ne devraient pas supporter l’ensemble du fardeau lié à l’accueil des réfugiés afghans et d’autres États devraient également accueillir ces réfugiés, a ajouté M. Ravanci, qui a rappelé qu’au cours des derniers mois, son pays avait fourni plus de 30 envois d’aide humanitaire au peuple afghan.  

M. Ravanci a déclaré que les avoirs gelés de l’Afghanistan à l’étranger appartiennent au peuple afghan et ajouté que leur dégel était crucial pour aider l’économie afghane et sauver des vies.  Cette mesure ne devrait pas être, par conséquent, politisée ou conditionnée de quelque manière que ce soit.

Le représentant s’est inquiété des activités terroristes attribuées à Daech et Al-Qaida et exhorté la communauté internationale à presser les Taliban de lutter contre le terrorisme et à faire en sorte que l’Afghanistan ne soit plus un refuge pour les terroristes.  Tout aussi essentiels à ses yeux, les efforts pour combattre le trafic de drogue doivent être une priorité.  Chaque année, l’Iran est directement touchée par cette menace et en paie le prix fort, a conclu M. Ravanci.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a estimé que les deux civiles afghanes intervenues au début de la séance ne représentent qu’elles-mêmes.  Pour le représentant, la communauté internationale assiste à un tournant de l’histoire turbulente de l’Afghanistan et l’objectif prioritaire est de parvenir à la paix et à la stabilité.  M. Akram a estimé que l’accès de l’Afghanistan à ses ressources sera essentiel pour éviter un effondrement avant d’appeler à débloquer les avoirs afghans bloqués à l’étranger.  Il a jugé indispensable de s’assurer que les sanctions en place ne menacent pas la bonne distribution de l’aide humanitaire.  

Le représentant a souhaité que le territoire afghan ne puisse servir de refuge à des groupes terroristes.  Soulignant la détermination de l’Organisation de coopération islamique (OCI) à soutenir la paix, la sécurité, un règlement politique durable et le développement en Afghanistan, il s’est dit préoccupé par la persistance d’attaques terroristes contre le Pakistan depuis l’Afghanistan, a fait état de financements étrangers et a dénoncé les agissements d’un membre non permanent du Conseil de sécurité, qu’il a accusé d’être un parrain du terrorisme.   

Notant qu’il n’y a plus autant de victimes civiles qu’autrefois en Afghanistan grâce à une certaine stabilité, le représentant a invité la communauté internationale à appuyer un processus de réconciliation nationale pour mettre définitivement fin à quatre décennies de souffrance.

M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a estimé que le Gouvernement intérimaire afghan avait besoin d’un certain temps pour mettre en œuvre concrètement ses promesses et ses obligations internationales.  Exercer des pressions ou appliquer des interdictions ne ferait qu’exacerber la situation déjà désastreuse de l’Afghanistan, a-t-il argué.  L’aggravation de la situation socioéconomique pourrait conduire à la radicalisation de la société, à des confrontations entre différents groupes et au renforcement des positions des forces extrémistes.  Dans le même temps, la communauté internationale devrait continuer à exiger des Taliban qu’ils ne reviennent pas sur leurs promesses de former un gouvernement inclusif, de garantir les droits de l’homme, y compris ceux des femmes et des minorités nationales, et de permettre aux filles afghanes d’accéder à l’éducation scolaire, a poursuivi le représentant.  

L’Ouzbékistan part du principe que, dans un avenir prévisible, l’Afghanistan restera un facteur important de la sécurité régionale, qui affectera directement les intérêts nationaux des pays de la région, en premier lieu ceux de ses voisins immédiats, a expliqué M. Ibragimov.  Il se félicite de la récente décision du Gouvernement intérimaire de l’Afghanistan d’interdire la culture du pavot ainsi que la production, la vente, le transport et la contrebande de toutes sortes de substances narcotiques, ce qui, a estimé le représentant, devrait contribuer à priver divers groupes terroristes opérant dans le pays d’une source de revenus provenant du trafic de drogue.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: inquiétudes face aux violations du cessez-le-feu en République centrafricaine « au bord du chaos » selon la société civile

9074e séance - matin
CS/14945

Conseil de sécurité: inquiétudes face aux violations du cessez-le-feu en République centrafricaine « au bord du chaos » selon la société civile

La Cheffe de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) s’est inquiétée, ce matin, au Conseil de sécurité, de la persistance des violations du cessez-le-feu par toutes les parties, soulignant que la cessation des hostilités sur l’ensemble du territoire centrafricain reste un objectif immédiat.

Mme Valentine Rugwabiza a également expliqué que la MINUSCA a réajusté son concept d’opérations pour privilégier une approche préventive centrée sur les populations civiles, qui favorisera l’émergence d’un environnement sécuritaire propice au processus de paix, dont le respect du cessez-le-feu et la restauration intégrale de l’autorité et des services de l’État.  La Représentante spéciale a aussi assuré de la volonté de la Mission d’accroître son soutien au Gouvernement « aussi longtemps » que prendra la reconstruction des capacités requises pour des forces de défense et de sécurité « encore plus professionnelles et efficientes ».  

Si Mme Valentine Rugwabiza a également invité le Gouvernement à mettre en œuvre les 217 recommandations issues du dialogue républicain qui s’est tenu en mars pour promouvoir l’espace démocratique, la représentante de la société civile a en revanche qualifié ce dialogue d’« occasion manquée  », déplorant le caractère non inclusif de ce processus qui, selon elle, a montré que la seule motivation du régime est de réviser la Constitution pour étendre le mandat présidentiel.   

Tous les ingrédients politiques, socioéconomiques et sécuritaires sont réunis pour plonger le pays dans le chaos malgré l’Accord politique pour la paix et la réconciliation, a prévenu la Présidente du Réseau pour le leadership de la femme en Centrafrique (RELEFCA) qui a appelé le Conseil à considérer la République centrafricaine comme une « situation d’urgence » nécessitant des « mesures d’urgence », dont la condamnation d’un mode de gouvernance caractérisé par une violence généralisée contre la population, les partis politiques d’opposition, les groupes ethniques et les dirigeants de la société civile.  De même, Mme Lina Ekomo a plaidé en faveur d’un « cadre de concertation des forces vives de la nation », sous observation de l’ONU et de l’Union africaine (UA) garantissant que les femmes puissent jouer un rôle moteur.    

La situation des droits humains a également été abordée à de nombreuses reprises, la Norvège, les États-Unis et la France s’inquiétant des agissements du groupe Wagner, accusé de nombreuses exactions.  Les États-Unis se sont notamment déclarés profondément préoccupés par les informations selon lesquelles les forces de Wagner auraient détenu et tué d’anciens combattants qui avaient volontairement participé aux processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), réarmé des ex-combattants, créant ainsi leurs propres milices par procuration, et interféré avec les opérations de la MINUSCA. 

Réagissant à ces interventions, la Fédération de Russie a souligné que des instructeurs russes travaillent avec succès dans le pays à l’invitation des autorités centrafricaines légitimes.  Elle a également appelé à atténuer l’embargo sur les armes qui vise la République centrafricaine, arguant que cela porte atteinte aux efforts du Gouvernement dans sa lutte contre les groupes armés. 

Il est manifeste que les mercenaires de Wagner ne se contentent pas d’appliquer des méthodes brutales largement documentées, mais qu’ils les inculquent aussi à leurs partenaires centrafricains, a dénoncé la France.  C’est dans ce contexte que doit s’apprécier toute évolution de l’embargo sur les armes, a ajouté la délégation pour qui la République centrafricaine n’a pas encore su apporter les garanties suffisantes, qu’il s’agisse du processus de paix, du contrôle des armements ou du professionnalisme de ses forces armées. 

À cet égard, la République centrafricaine a dit être en peine de tenir un plaidoyer sur « l’injustice des sanctions » contre son pays alors que le monde observe une « avalanche de distribution d’armes sur un terrain de conflit ».  Assurant la volonté de son gouvernement de parvenir à la stabilisation par la neutralisation de tous les groupes armés, le représentant a ainsi imputé à un « embargo immoral » la difficulté de son pays à faire face à des groupes armés mieux équipés que les soldats centrafricains.

En écho à cette déclaration, le représentant du Gabon, au nom des A3 (Gabon, Ghana, Kenya), a insisté sur l’importance de lever l’embargo sur les armes imposé aux autorités centrafricaines et a appelé le Conseil de sécurité à se focaliser sur les sources et chaînes d’approvisionnement des groupes rebelles qui ont « étonnamment » un accès libre à des armes de plus en plus sophistiquées.  L’action du Conseil devrait également se concentrer sur le renforcement des capacités des Forces armées centrafricaines (FACA) et sur le soutien aux autorités centrafricaines démocratiquement élues, dans le cadre de la protection des populations, a-t-il ajouté.

Enfin sur une note d’optimisme, l’ensemble des délégations ont jugé que la deuxième réunion de suivi de la feuille de route de Luanda, le 4 juin dernier à Bangui, était une étape importante, avec la participation du Président centrafricain et des Ministres des affaires étrangères de la République centrafricaine, de l’Angola et du Rwanda.  Ils ont souhaité que cette mobilisation au plus haut niveau se traduise par les avancées prévues par la feuille de route, avec un cessez-le-feu respecté par toutes les parties, un dialogue entre le Gouvernement et les groupes armés et un processus de DDR unique mené dans la transparence, en lien avec la région et la MINUSCA. 

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (S/2022/449, S/2022/491)

Déclarations liminaires

Mme VALENTINE RUGWABIZA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), a déclaré que la tenue de la réunion de revue stratégique du processus politique devrait faire du 4 juin une date de référence et un tournant décisif tant elle a enregistré une participation de haut niveau avec la présence du Chef de l’État, des Ministres des affaires étrangères de l’Angola et du Rwanda, des garants et facilitateurs de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation du 6 février 2019 et des partenaires internationaux pour une évaluation participative des progrès et défis majeurs dans la mise en œuvre de la « feuille de route conjointe ».  

Elle s’est réjouie que cette revue stratégique ait atteint tous les objectifs qui lui ont été assignés, notamment la remobilisation des acteurs de la région; l’appropriation nationale du processus politique pour la mise en œuvre des composantes de la « feuille de route conjointe »; et l’impératif de poursuive l’harmonisation des engagements politiques.  Elle a également cité la création des conditions indispensables au réengagement des partenaires internationaux autour de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation; et la décision des autorités centrafricaines de convoquer tous les trois mois à compter du 4 juin une plateforme permanente de revue stratégique du processus politique.  

Elle a salué la décision du Président de la République de s’impliquer directement dans les engagements politiques avec les leaders des groupes armés et de conduire les revues stratégiques inclusives et sectorielles du processus de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement (DDRR) entre autres.  Elle a ensuite invité le Gouvernement à mettre en œuvre les 217 recommandations du dialogue républicain afin de promouvoir l’élargissement de l’espace démocratique et un climat politique, sollicitant dans la foulée le soutien politique du Conseil de sécurité conformément aux dispositions de la résolution 2605 (2021).  

Poursuivant, la Représentante spéciale s’est préoccupée de la persistance des violations du cessez-le-feu par toutes les parties qui poursuivent leurs opérations et actes de belligérance, notant que la cessation des hostilités sur toute l’étendue du territoire centrafricain reste à la fois un objectif immédiat et un gage de crédibilité de la « feuille de route conjointe ».  Elle a fait savoir que la MINUSCA a réajusté son concept d’opérations, privilégiant une approche préventive et centrée sur les populations civiles.  Cette posture de la MINUSCA conditionne notamment la création et le maintien d’un environnement sécuritaire propice au déroulement du processus de paix y compris le respect du cessez-le-feu et la restauration intégrale de l’autorité et des services de l’État, a-t-elle précisé.  En outre, malgré la crise du carburant qui l’affecte, la MINUSCA planifie, pour exécution immédiate, des opérations en réponse à la nouvelle posture des groupes armés qui profitent du contexte de crise pour un repositionnement tactique.

Mme Rugwabiza a assuré de la volonté de la MINUSCA d’accroître son soutien et sa coopération avec le Gouvernement aussi longtemps que prendra la reconstruction des capacités requises pour des forces de défense et de sécurité encore plus professionnelles et efficientes.

La MINUSCA maintien en outre un dialogue constructif avec le Gouvernement pour le respect des droits de l’homme et la lutte contre l’impunité.  

La Représentante spéciale s’est ensuite inquiétée de la persistance de la stigmatisation et l’incitation publique à la violence contre des leaders de l’opposition ou à l’égard de certains partenaires de la République centrafricaine en prévenant que ces comportements risquent de se traduire en actes de violence et sont de nature à saper le processus de réconciliation nationale.  

Mme EKOMO LINA, Présidente du Réseau pour le leadership de la femme en Centrafrique (RELEFCA), a fait état d’une véritable « culture de la violence criminelle » dans son pays.  La population est prise en étau entre la rébellion, l’armée nationale, les mercenaires et des milices qui sèment la terreur et la mort, a-t-elle alerté, dénonçant en particulier les tueries de masse perpétrées par la Coalition des patriotes pour le changement centrafricains (CPC) mais aussi par l’armée nationale et les milices du régime appelées « requins ».  Ces dernières exercent des menaces physiques à l’encontre des opposants, torturent à mort des citoyens et enlèvent et assassinent les personnes qu’elles ciblent.  Si le déploiement des alliés du régime dans les provinces a d’abord été bien accueilli par les populations, qui y voyaient l’espoir de mettre fin à l’activisme des groupes armés, très vite il s’est transformé en graves inquiétudes, a-t-elle expliqué, évoquant des violations massives des droits humains.  Mme Lina s’est dite scandalisée par le déni de la situation sociopolitique et sécuritaire extrêmement dangereuse qui prévaut dans son pays.  Lançant un cri d’indignation au nom des nombreuses victimes innocentes de RCA, elle a rappelé que les femmes ont participé, en mars dernier, au dialogue républicain pour contribuer à la baisse des tensions.  Elle a toutefois déploré que le caractère non inclusif de ce dialogue n’ait pas favorisé des discussions de fond sur les vrais problèmes du pays.  Le seul message qui en ressort est la détermination du régime à réviser la Constitution en vue d’étendre le mandat présidentiel, a-t-elle relevé, parlant d’une « occasion manquée ».  

Sur le plan social, a poursuivi Mme Lina, tous les indicateurs sectoriels sont dans le rouge.  Plus de la moitié de la population centrafricaine vit dans l’insécurité alimentaire et l’accès aux soins de santé primaires est difficile.  De plus, les écoles ne fonctionnent pas dans de nombreuses régions et l’aide humanitaire est rare dans les zones touchées par la violence armée.  Malgré les appels de détresse des femmes dirigeantes dans l’arrière-pays, aucune réponse n’est venue des autorités nationales, a regretté la militante.  Dans ce contexte, qui voit la société civile réduite au silence et soumise à des intimidations, la majorité à l’Assemblée nationale soutient le régime politique en place et les scandales de corruption et d’achat de voix des députés deviennent une pratique courante, a-t-elle encore dénoncé.  À ses yeux, tous les ingrédients politiques, socioéconomiques et sécuritaires sont réunis pour plonger son pays dans le chaos, et ce, malgré l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine et les efforts déployés par l’ONU, l’Union africaine (UA), la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et la Conférence internationale sur la région des Grand Lacs (CIRGL).  Pour y remédier, elle a appelé le Conseil de sécurité à considérer la République centrafricaine comme une « situation d’urgence » nécessitant des « mesures d’urgence ».  Parmi celles-ci, elle a cité la condamnation d’un mode de gouvernance caractérisé par une violence généralisée contre la population, les partis politiques d’opposition, les groupes ethniques et les dirigeants de la société civile.  Elle a également plaidé en faveur d’un « cadre de concertation des forces vives de la nation », sous observation de l’ONU et de l’UA.  Enfin, elle a souhaité que la société civile ait accès à cette concertation et que les femmes puissent y jouer un rôle moteur dans l’intérêt de la population.  

Déclarations

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a insisté sur l’importance de la deuxième réunion de suivi de la feuille de route de Luanda, qui s’est tenue le 4 juin dernier à Bangui, avec la participation du Président centrafricain et des Ministres des affaires étrangères de la République centrafricaine, de l’Angola et du Rwanda.  Il faut que cette mobilisation au plus haut niveau se poursuive et se traduise par les avancées prévues par cette feuille de route, avec un cessez-le-feu respecté par toutes les parties, un dialogue entre le Gouvernement et les groupes armés et un processus de DDR unique mené dans la transparence, en lien avec la région et la MINUSCA.  Il a également résolument encouragé les autorités centrafricaines à mettre un terme à l’option exclusivement militaire, et à renouer avec l’accord de paix du 6 février 2019.

Le représentant s’est ensuite dit préoccupé par les informations alarmantes sur la conduite des forces centrafricaines.  Il est manifeste que les mercenaires de Wagner ne se contentent pas d’appliquer des méthodes brutales largement documentées, mais qu’ils les inculquent aussi à leurs partenaires centrafricains, a-t-il indiqué.  C’est dans ce contexte, a-t-il ajouté, que doit s’apprécier toute évolution de l’embargo sur les armes.  Il a rappelé que les autorités centrafricaines peuvent obtenir en toute légalité les équipements dont elles font la demande, le régime en place étant un régime de contrôle, et non d’interdiction.  Il a estimé toutefois que la République centrafricaine n’a pas encore su apporter les garanties suffisantes, qu’il s’agisse du processus de paix, du contrôle des armements ou du professionnalisme de ses forces armées.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), qui s’exprimait au nom des A3 (Kenya, Ghana et Gabon), a souligné la nécessité pour le Conseil de continuer à soutenir les autorités centrafricaines par un appui multidimensionnel, y compris financier, matériel, économique, politique, afin de faire progresser les efforts de paix initiés par le Gouvernement et soutenus par la communauté internationale.  Au niveau politique, l’organisation du dialogue national en mars dernier, conformément à la feuille de route de Luanda, reflète la volonté du Gouvernement centrafricain de respecter les engagements pris en 2019, a-t-il fait valoir, estimant que le Conseil de sécurité a le devoir de soutenir les espoirs et les efforts du peuple centrafricain dans sa recherche de la paix.  Il s’est félicité de l’adoption par l’Assemblée nationale centrafricaine de la loi abolissant la peine de mort et le recours à la torture, y voyant une démonstration forte de la volonté des autorités centrafricaines de lutter contre les violations des droits de l’homme.  Il s’est dit encouragé par toutes les mesures prises par les autorités centrafricaines pour l’organisation des élections locales en 2023 dans un environnement politique pacifique et inclusif.  Il a également estimé que la formation des femmes et des jeunes aux questions électorales, initiée par la force de l’ONU, pourrait permettre une plus grande implication de ces derniers aux premières élections locales depuis plus de 30 ans.  Il est essentiel de fournir un financement adéquat à l’Autorité nationale des élections (ANE) et les promesses faites par la communauté internationale, en novembre 2021 dans le cadre du financement des élections en République centrafricaine, doivent se concrétiser.  

Le représentant a ensuite salué les gains en matière de sécurité de ces derniers mois.  Il s’est cependant inquiété des attaques contre les civils et les activités criminelles de groupes armés qui se multiplient dans certaines régions du pays.  Il a appelé le Conseil de sécurité à se focaliser sur les sources et chaînes d’approvisionnement des groupes rebelles qui ont étonnamment un accès libre à des armes de plus en plus sophistiquées.  Toutes les personnes et entités impliquées dans les trafics illicites de ressources et d’armes qui alimentent les réseaux de groupes armés doivent être punies, a exigé le délégué.  L’action du Conseil devrait également se concentrer sur le renforcement des capacités des Forces armées centrafricaines (FACA) et sur le soutien aux autorités centrafricaines démocratiquement élues, dans le cadre de la protection des populations.  Notant que la MINUSCA n’a pas vocation à s’éterniser en République centrafricaine, il a souligné que l’autorité de l’État centrafricain doit être rétablie dans tout le pays par des forces centrafricaines bien formées et bien équipées.  Se faisant écho à l’appel de |’Union africaine, il a insisté sur l’importance de lever l’embargo sur les armes imposé aux autorités centrafricaines.  Il a ensuite lancé un appel au respect des engagements financiers en faveur du Plan de réponse humanitaire pour la République centrafricaine.

M. JOÃO GENESIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a salué l’importance du dialogue républicain organisé en mars dernier pour promouvoir une participation des représentants de la société civile et de l’opposition.  Il a souligné le rôle clef du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) dans la mise en œuvre de l’accord de paix de 2019.  Il a encouragé les autorités centrafricaines à persévérer dans ce domaine et à travailler avec la MINUSCA pour créer des programmes de réduction de la violence communautaire.  Par ailleurs, le représentant a jugé essentiel de renforcer l’état de droit, à la lumière des différents rapports sur les droits de l’homme et les violations du DIH, tels que le recrutement d’enfants soldats.  Il a salué les recommandations du Groupe de travail du Conseil sur les enfants et les conflits armés, les efforts des autorités locales pour la tenue en avril du premier procès de la Cour pénale spéciale et les travaux de la MINUSCA pour aider à l’opérationnalisation de la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation.  Après avoir salué l’engagement renouvelé de la CIRGL en faveur de la mise en œuvre de la feuille de route commune, il s’est félicité de l’accord conclu par la République centrafricaine et le Cameroun pour travailler ensemble à la démarcation de leurs frontières communes.

M. DAI BING (Chine) a constaté que la situation politique et sécuritaire s’améliore en République centrafricaine.  Il s’est félicité de la tenue de la réunion d’examen stratégique et a exprimé son soutien aux efforts déployés par les organisations régionales pour faciliter la mise en œuvre de la feuille de route conjointe et promouvoir le processus politique.  Pour le représentant, la MINUSCA devrait aider le Gouvernement centrafricain à faire face aux risques et à protéger les civils.  Observant toutefois que la Mission ne peut pas être déployée indéfiniment, il a appelé dans l’immédiat au renforcement de ses capacités.  La MINUSCA, a-t-il ajouté, devrait également aider le Gouvernement à rétablir l’autorité de l’État, améliorer le renforcement des institutions, soutenir le désarmement, la démobilisation et la réintégration, et favoriser le développement local.  Notant que les pénuries de pétrole et de nourriture ont eu un impact sur les efforts consentis par la Mission dans le cadre de son mandat, il a appelé à une prise en charge internationale de l’aide humanitaire à ce pays.  Le délégué a par ailleurs invité la communauté internationale à investir dans les infrastructures de sécurité alimentaire, exprimant l’espoir que la Représentante spéciale continuera d’écouter le pays hôte, d’améliorer l’efficacité du maintien de la paix et de favoriser le retour de la stabilité.  Le Conseil, quant à lui, devrait tenir compte de l’appel du pays et lever l’embargo sur les armes au plus tôt, a-t-il recommandé.  

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a constaté des évolutions positives en République centrafricaine, en dépit des difficultés, qui devraient ouvrir la voie à la paix et à la stabilité dans le pays.  L’examen stratégique du processus politique, qui s’est tenu le 4 juin à Bangui, constitue une étape importante vers la revitalisation de l’Accord politique de 2019, a-t-elle commenté.  La représentante a souligné l’importance de l’inclusion dans tous les efforts de rétablissement de la paix, y compris par la participation des femmes.  Elle a salué la nomination de cinq femmes sur les 12 membres du cadre consultatif pour les élections.  En ce qui concerne la situation sécuritaire aggravée par la poursuite des activités des groupes armés, la déléguée a insisté sur le fait qu’une solution politique demeure un pilier essentiel de la stabilisation du pays.  Il faut protéger les civils, en particulier les femmes et les enfants, contre les violences sexuelles et sexistes, a-t-elle ajouté avant d’exprimer ses préoccupations quant à la menace constante que représentent les engins explosifs, tant pour les civils que pour les soldats de la paix.  La déléguée a pointé du doigt les graves risques pour la sécurité posés par les informations fausses et trompeuses dans le pays.  Elle a attiré l’attention sur la détérioration continue des conditions humanitaires et économiques, mises à rude épreuve par les prix élevés des produits de base.  La situation est exacerbée par le fait que le pays est toujours confronté à la pandémie de COVID-19 ainsi qu’à d’autres défis de santé publique, a-t-elle constaté.  

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a déclaré que la tenue du dialogue républicain avec la participation de la majorité de l’opposition a élargi l’espace démocratique.  Notant le report des élections locales, il a insisté sur l’importance de la mise en place d’institutions démocratiques et salué le soutien de la MINUSCA à l’Autorité nationale des élections.  Il a dénoncé les effets néfastes des activités des groupes armés sur la vie des civils ordinaires, en particulier des femmes et des enfants, et s’est inquiété de la découverte de mines terrestres antipersonnel et l’augmentation de l’utilisation d’engins explosifs par les groupes armés.  L’opposition et les groupes armés signataires de l’accord de paix doivent cesser les combats et dialoguer avec les autorités pour trouver une solution pacifique, a-t-il plaidé.  

Le représentant a aussi appelé le Gouvernement centrafricain à veiller à ce que la sûreté et la sécurité des Casques bleus de l’ONU ne soient en aucun cas compromises.  Il a ensuite recommandé à la MINUSCA de hiérarchiser ses priorités conformément aux exigences de la République centrafricaine.  Le délégué a attiré l’attention sur le double fardeau de la hausse des prix et de la baisse de l’offre de pétrole et de céréales alimentaires pour les pays en développement et a appelé la communauté internationale à apporter son appui financier au plan d’intervention humanitaire.  Il a par ailleurs vu dans l’augmentation des exportations officielles de diamants bruts de la République centrafricaine une évolution positive potentielle pour le pays.  La République centrafricaine est sur une trajectoire positive.  Il faut maintenant aller de l’avant et capitaliser sur les gains réalisés jusqu’à présent, a exhorté le représentant.  

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a félicité les autorités centrafricaines d’avoir organisé le dialogue républicain en mars.  Même s’il aurait dû être plus inclusif, elle a espéré que ses conclusions et recommandations serviront à donner un nouvel élan au processus de paix, rappelant que ce processus doit avoir en son cœur l’accord de paix de 2019 et la feuille de route de la CIRGL.  Le Gouvernement, l’opposition et les groupes armés partagent tous la responsabilité de remettre le processus de paix sur les rails, a-t-elle souligné.  Encouragée par l’engagement renouvelé de la région, en particulier de l’Angola et du Rwanda, et par la réunion du 4 juin à Bangui, Mme Heimerback a estimé qu’il est important que la CIRGL, la CEEAC et l’UA restent activement impliquées.  Pour que le processus de paix et de réconciliation réussisse, il est crucial qu’il soit aussi inclusif que possible, a-t-elle estimé, ce qui signifie que tous les segments de la société doivent être impliqués, y compris l’opposition politique, les groupes armés qui ont renoncé à la violence et la société civile.  La Norvège encourage la MINUSCA à apporter un soutien logistique aux préparatifs des élections locales et à promouvoir le dialogue local et la réconciliation, a ajouté la représentante.  Quant aux violences et abus des droits humains, y compris aux mains des forces Wagner, la représentante a demandé aux autorités centrafricaines d’enquêter sur tous les incidents et de tenir les auteurs responsables.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué les progrès réalisés dans le cadre du processus de dialogue républicain, ainsi que les efforts régionaux dans le cadre de la feuille de route conjointe de Luanda à l’appui de l’Accord politique.  La clef du succès à long terme réside selon lui dans la cessation de la violence et un processus inclusif et crédible, incluant la société civile et les groupes d’opposition.  Le représentant a aussi exhorté toutes les parties à respecter le cessez-le-feu.  Il a dit être préoccupé par les violations continues du DIH et des droits humains commises par toutes les parties au conflit, en particulier par les meurtres de civils non armés par les FACA et le groupe de mercenaires russes Wagner, celui-ci continuant de jouer un rôle déstabilisateur dans le pays.  Le délégué a appelé le Gouvernement centrafricain à se coordonner avec tous les acteurs de la sécurité opérant dans le pays, à veiller à ce qu’ils respectent le DIH et les droits humains et à veiller à ce que tous les auteurs de violations ou d’abus soient poursuivis en justice. 

Le représentant a poursuivi son intervention en déplorant les conséquences de l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie sur la République centrafricaine: les pénuries de nourriture et de carburant entravent la réponse humanitaire et les opérations de la MINUSCA.  Il a appelé le Gouvernement du Cameroun à autoriser l’exportation de carburant et d’autres articles humanitaires de Douala pour répondre aux besoins humanitaires urgents de la RCA.  En ce qui concerne la MINUSCA, le délégué a jugé inacceptable l’augmentation des violations de l’accord sur le statut des forces, y compris avec la participation d’autres membres du personnel de sécurité.  Il a exhorté le Gouvernement à respecter ledit accord et à partager les résultats de son enquête sur l’attaque par les forces de la garde présidentielle contre un bus des Nations Unies le 1er novembre 2021.  Il a enfin rappelé l’objectif de l’embargo sur les armes qui doit empêcher que des armes ne tombent entre les mains de groupes armés et n’alimentent la violence.  

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande), quoiqu’extrêmement préoccupée par la situation en République centrafricaine, s’est félicitée du dialogue républicain qui représente un pas important dans le processus de paix.  Elle a jugé particulièrement encourageant que de nombreuses recommandations s’alignent sur l’Accord politique de 2019.  Soutenant l’appel du Secrétaire général au Gouvernement de transmettre cet esprit de dialogue à toutes les parties de l’opposition et aux groupes armés signataires de l’Accord politique, Mme Byrne Nason a espéré voir un nouvel élan dans la mise en œuvre de la feuille de route et de l’Accord politique.  À cet égard, elle s’est félicitée de l’engagement d’organiser des réunions trimestrielles de suivi, mais a exprimé son regret de voir le report des élections locales, en dépit des souhaits de la population.  Elle a plaidé pour que soit mis fin aux abus et violations des droits de l’homme et pour que justice soit faite pour les atrocités commises.  Elle a salué le travail de la MINUSCA pour enquêter sur ces abus perpétrés par le FPRC et l’UPC, parce que « mettre fin à l’impunité est essentiel pour mettre fin aux violations ».  Dans cet esprit, la représentante a exhorté le Gouvernement de la RCA à enquêter systématiquement sur toutes les allégations de violations et d’abus des droits humains et de violations du DIH et à poursuivre les auteurs indépendamment de leur nationalité ou de leur affiliation.  Avant de conclure, elle a regretté les violations de l’accord sur le statut des forces et rendu hommage au personnel civil et en uniforme « dévoué » de la MINUSCA, en demandant de soutenir leur travail.  Elle s’est aussi félicitée de la structure de coordination mise en place par le Ministre des affaires étrangères, M. Baipo-Temon.

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) s’est dit préoccupé que les Forces armées centrafricaines, « probablement sous la direction du groupe Wagner », aient violé à 23 reprises l’accord sur le statut des forces ces quatre derniers mois.  Rappelant qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise centrafricaine, il a appelé à mettre en œuvre l’accord de paix de 2019 et a jugé urgent d’assoir l’autorité de l’État dans l’ensemble du pays.  Il a salué les progrès réalisés en matière de DDR et a appelé tous les acteurs à respecter ce processus.  De même, il a dit la nécessité de faire respecter le cessez-le-feu, de renforcer les relations entre la République centrafricaine et ses voisins, et de garantir la reddition de comptes pour toutes les violations des droits de la personne.  

Le représentant a ensuite accusé le groupe Wagner de figurer parmi les principaux auteurs d’incidents et d’abus de la personne, faisant état d’exécutions sommaires, de torture et de passage à tabac de civils dans tout le pays.  Il a exhorté les Gouvernements russe et centrafricain à enquêter sur ces faits.  Le délégué s’est également déclaré profondément préoccupé par les informations selon lesquelles les forces de Wagner auraient détenu et tué des artisans de la paix et d’anciens combattants qui avaient volontairement participé aux processus de DDR, évoquant notamment l’assassinat de Zakaria Demane en février dernier.  Les forces de Wagner ont également réarmé les ex-combattants, créant leurs propres milices par procuration, et interféré avec les opérations de la MINUSCA, entravant la capacité des soldats de la paix à mettre en œuvre les tâches prescrites.  Relevant en outre que le groupe Wagner est impliqué dans l’extraction illicite des richesses minérales de la République centrafricaine, il a souligné que la gestion responsable des ressources naturelles et la lutte contre la corruption qui y est associée sont essentielles pour la paix et la prospérité.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a salué les progrès dans la coordination entre la MINUSCA et les autorités centrafricaines.  La mise en place du mécanisme de coordination pour la mise en œuvre de l’accord sur le statut des forces devrait assurer la libre circulation de la MINUSCA et à faciliter la communication entre la Mission et les autorités.  S’agissant de l’embargo sur les armes, la représentante a dit qu’elle est ouverte à discuter d’alternatives pour répondre efficacement au trafic illicite d’armes.  Elle a avoué être préoccupée par les mines antipersonnel, signe que les flux d’armes vers la République centrafricaine se poursuivent et se diversifient avec des effets de plus en plus meurtriers sur la population civile. 

La coopération de la communauté internationale reste nécessaire pour que les autorités se dotent d’un système de gestion des armes et des munitions qui réponde aux normes de sécurité, a-t-elle souligné.  Elle a demandé à faire des progrès dans le fonctionnement de la Commission nationale de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre.  Saluant à son tour le dialogue républicain sur l’Accord politique, la représentante a exhorté les partenaires régionaux de la République centrafricaine à se mobiliser pour assurer le financement du programme de DDR au-delà de 2023.  Elle a ajouté que la réponse militaire seule est insuffisante pour mettre fin à la violence.  Il faut un dialogue politique et une justice qui fait en sorte que les coupables d’atrocités soient punis et que les victimes du conflit obtiennent réparation.  La représentante a enfin salué l’élimination de la peine de mort en République centrafricaine.  

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a estimé que la situation en République centrafricaine est relativement stable.  Le pays s’emploie à assurer une présence étatique, à renforcer les structures administratives alors que l’Accord de Khartoum de 2019 reste la base pour parvenir à la stabilité et à la sécurité.  Elle a appelé les parties à respecter le cessez-le-feu annoncé par le Président Touadéra en octobre 2021, et a salué la tenue à Bangui du dialogue républicain.  La représentante a engagé toutes les parties qui restent en dehors de l’accord de paix à mettre fin aux effusions de sang inutiles et à entamer un véritable dialogue avec les autorités, arguant qu’il n’y a pas d’alternative à un règlement par des moyens politiques et diplomatiques.  La représentante a salué les développements positifs dans les relations entre la MINUSCA et Bangui en faisant valoir que les relations constructives de la Mission avec les autorités du pays hôte sont la clef du succès du travail des Casques bleus.  Il est également important que les Casques bleus se concentrent sur leurs missions principales, notamment la facilitation des processus de réconciliation, le rétablissement d’une présence étatique dans toutes les régions du pays et la protection des civils, a-t-elle souligné.  

La déléguée a ensuite appelé à atténuer l’embargo sur les armes qui vise la République centrafricaine, arguant que cela porte atteinte aux efforts du Gouvernement dans sa lutte contre les groupes armés.  Pour sa part, la Russie cherche à aider Bangui à renforcer le potentiel de combat des structures officielles du pouvoir, a-t-elle expliqué en précisant, qu’avec l’accord du Comité des sanctions, son pays a fourni à la République centrafricaine des articles militaires et que des instructeurs russes travaillent avec succès dans le pays à l’invitation des autorités centrafricaines légitimes.  Dès lors, la Russie regrette la campagne « politiquement motivée » qui vise à la discréditer, a déclaré la représentante en affirmant que son pays respecte strictement les restrictions imposées par le Conseil de sécurité à la République centrafricaine.  La déléguée a également rappelé que le choix des partenaires dans un domaine particulier, en particulier lorsqu’il s’agit des services de sociétés militaires privées, est la prérogative des autorités nationales.  

La représentante a par ailleurs jugé inapproprié la présence dans le rapport d’une référence aux événements ukrainiens comme étant la cause de la crise alimentaire et énergétique en République centrafricaine.  Elle a également reproché à certains de « ses collègues » au Conseil de sécurité de parler systématiquement de la Russie, en faisant valoir que la République centrafricaine a réussi à sortir du cycle d’instabilité au point où la question de la levée de l’embargo sur les armes est plus actuelle aujourd’hui que jamais.  L’aide de l’ONU et des partenariats bilatéraux ont joué un rôle important dans les progrès engrangés par la République centrafricaine, a-t-elle souligné en fustigeant la campagne de dénigrement dans l’intervention des États-Unis.

Mme ALBANA DAUTLLAR (Albanie) a estimé que le dialogue républicain organisé en mars dernier nécessitera davantage d’inclusivité, garantissant une participation structurée des représentants de la société civile et de l’opposition.  Elle a ajouté que les 217 recommandations issues de ce dialogue renforcent les engagements du Forum national de Bangui 2015 et l’Accord politique de 2019.  Regrettant le report à janvier 2023 des élections locales prévues en septembre 2022, elle a fait sien l’appel du Secrétaire général pour mobiliser les ressources financières nécessaires.  Elle a souligné l’importance d’atteindre le quota de 35% de femmes et d’adopter la loi sur la délimitation des circonscriptions administratives. 

Citant « une situation sécuritaire désastreuse », la représentante s’est dite alarmée par la recrudescence des activités des groupes armés, les attaques contre les Peuls, ainsi que les violations répétées des droits humains et violences sexuelles commises par les forces armées.  En ce qui concerne l’embargo sur les armes, elle a encouragé le Gouvernement centrafricain à respecter tous les critères de référence sur la voie de la pleine conformité et de la réforme de son secteur de la sécurité.  Elle s’est dite encouragée par la réintégration réussie de plus d’un millier d’anciens combattants au 1er juin.  Elle s’est en revanche dite préoccupée par les violations continues de l’accord sur le statut des forces, qui entravent le travail de la MINUSCA.  Elle a accueilli avec satisfaction les 27 enquêtes en cours par les autorités judiciaires nationales sur des attentats contre les soldats de la paix.  

M. MARIUS ARISTIDE HOJA NZESSIOUE (République centrafricaine), qui s’exprimait au nom de la Ministre centrafricaine des affaires étrangères, de la francophonie et des Centrafricains de l’étranger, a tout d’abord regretté que cette dernière n’ait pu intervenir par visioconférence, avant de constater que tous les États Membres « ne sont pas traités de manière équitable ».  À cet égard, il a dit être en peine de tenir un plaidoyer sur « l’injustice des sanctions » contre son pays alors que le monde observe une « avalanche de distribution d’armes sur un terrain de conflit » et une campagne médiatique pour le respect des principes de la Charte des Nations Unies.  Il a ensuite rappelé que la République centrafricaine détient le record des missions d’opérations de maintien de la paix sur le sol africain, soit 13 au total, et qu’elle n’a connu que trois élections démocratiques depuis son indépendance en 1960 et l’instauration du multipartisme et de la démocratie en 1991.  La dernière en date a eu lieu en 2020-2021 grâce à la résilience d’une population lassée par les conflits et l’utilisation de la force pour accéder au pouvoir, a-t-il dit, affirmant que son pays continue de subir le poids d’une histoire mouvementée marquée par les épidémies, la traite esclavagiste, la colonisation et, aujourd’hui, la tyrannie et la terreur des groupes armés.  Il a remercié à cet égard tous ceux qui ont apporté leur expérience et leurs compétences pour ramener la paix en RCA, notamment la communauté internationale, à travers les opérations de maintien de la paix des Nations Unies telles que la MINUSCA, mais aussi les organisations africaines continentales, avec la revitalisation de l’Accord politique pour la paix signé en février 2019.  

Pour le représentant, les défis de la RCA restent nombreux, à commencer par la stabilité, au travers de la neutralisation des groupes armés.  Assurant que son pays a pleinement conscience de ses devoirs et de ses responsabilités de protection de la population et de son territoire, il s’est toutefois interrogé sur le déséquilibre des forces sur le terrain, avec des hommes en tenue sans équipements adaptés face à des ennemis lourdement armés du fait d’un embargo immoral et contre-productif.  Malgré cela, la RCA a mis en œuvre sa loi de 2020 portant sur le régime général des armes classiques et a installé par un décret de 2021 un comité de coordination de la gestion des armes et munitions.  Le Gouvernement a également procédé aux opérations de traitement du cycle de vie des armes et dispose désormais des équipements et des compétences adéquats pour réaliser les opérations prescrites par la résolution 2127 (2013) du Conseil, a précisé le délégué, en saluant l’appui du Service de la lutte antimines de l’ONU (UNMAS) et de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).  Il a ajouté que la RCA a sollicité l’expertise de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) afin de procéder à une évaluation indépendante sur les progrès réalisés en matière de gestion des armes et munitions.  

Dans le domaine de la justice et de la lutte contre l’impunité, le représentant a indiqué que la Cour pénale spéciale a procédé à l’ouverture de procès cette année.  Il a ajouté qu’un cadre de communication et de concertation entre le Parquet spécial de la Cour et le Ministère de la justice est en cours de formalisation afin de faciliter la traduction des personnes sous mandat de justice.  De même, a-t-il poursuivi, la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation est opérationnelle et une réunion d’examen stratégique du processus politique pour la paix en RCA s’est tenue le 4 juin dernier à Bangui, en présence de l’ensemble des partenaires engagés, à savoir les Ministres des affaires étrangères de l’Angola et du Rwanda, et les garants, facilitateurs et partenaires techniques et financiers de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation, parmi lesquels l’UA, la CEEAC, la MINUSCA, la Banque mondiale et les États-Unis.  Dans ce contexte positif, il a noté que, malgré les efforts qu’elle consent, la MINUSCA reste aussi confrontée à « certaines réalités du terrain dues à la complexité de la situation ».  C’est pourquoi, a-t-il souligné, il serait légitime que l’armée centrafricaine soit en « avant-garde » afin de remplir sa mission régalienne, en dépit des faibles moyens dont elle dispose face aux groupes armés.  Le délégué a enfin suggéré au Conseil que la fonction de porte-plume pour la RCA soit dévolue au groupe des A3 (Gabon, Ghana et Kenya) afin que soient mieux prises en compte les « priorités et réalités africaines ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Session humanitaire de l’ECOSOC: les délégations insistent sur le respect du DIH et la levée des obstacles à l’acheminement de l’aide en temps de conflit

27e séance plénière,
matin
ECOSOC/7091

Session humanitaire de l’ECOSOC: les délégations insistent sur le respect du DIH et la levée des obstacles à l’acheminement de l’aide en temps de conflit

La deuxième journée de session consacrée aux affaires humanitaires du Conseil économique et social (ECOSOC) s’est tenue aujourd’hui dans la matinée avec une table ronde de haut niveau sur le thème suivant: « Atteindre les personnes dans le besoin, faciliter l’assistance humanitaire en temps de conflit et promouvoir les bonnes pratiques s’agissant de l’application du droit international humanitaire (DIH) ».  Cette discussion a été l’occasion de détailler les moyens de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire par temps de conflit dans le respect des principes fondamentaux de neutralité et d’impartialité de cette aide.  En outre, de nombreux appels ont été entendus en faveur du respect, par toutes les parties belligérantes, des obligations découlant du droit international humanitaire.  Une autre question soulevée fréquemment a porté sur les risques que font peser les sanctions sur les populations des pays en conflit.

Ouvrant les débats, M. Janez Lenarčič, Commissaire européen à la gestion des crises de l’Union européenne, a axé son intervention sur le DIH.  Il a d’emblée recommandé de créer un mécanisme permettant d’assurer un suivi de l’application de ce droit.  « L’inimaginable vient de se produire » avec la guerre en Ukraine, a-t-il rappelé en soulignant que les personnes les plus vulnérables payent le tribut le plus lourd.  Il a dénoncé cette agression de la Russie, ainsi que les violations commises par les groupes armés non étatiques.  Le respect du DIH par les parties belligérantes n’est pas négociable, a-t-il martelé, en demandant que justice soit rendue en cas de violation.  Il a indiqué que l’Union européenne défend l’application de ce droit et fait son possible pour protéger les civils.  « C’est le moment de renouveler notre engagement en faveur de la protection des civils et des infrastructures civiles », a-t-il lancé.

Dans un contexte de conflits persistants et de crise climatique, l’acuité des besoins humanitaires en Afrique, en particulier au Sahel, a été soulignée par Mme Fatima Mohammed, Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies.  Elle a dès lors appelé à la levée des entraves au bon acheminement de l’aide humanitaire en citant l’exemple du Niger, où une action forte du Gouvernement a permis d’améliorer l’accès humanitaire.  Elle a insisté sur le rôle prééminent des États dans l’acheminement de l’aide et souhaité le renforcement de leurs capacités.  Quant aux parties belligérantes, elles doivent aussi s’atteler à garantir un accès humanitaire sans entraves, a plaidé Mme Mohammed avant de s’adresser à la communauté internationale en lui enjoignant d’endosser une partie du fardeau humanitaire.  Elle a demandé en particulier de placer les filles et les femmes au cœur de l’action humanitaire.  Pour elle, il est important de miser sur la transition des efforts humanitaires vers des efforts de développement et de remédier aux causes profondes des conflits.

Replaçant le débat dans son cadre juridique, M. Peter Maurer, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rappelé que le DIH est « un corps vivant » du droit que les parties belligérantes doivent respecter.  Il a souhaité que les États prennent des mesures audacieuses pour le faire appliquer.  Fort de l’expérience du CICR, il a fait remarquer que les guerres se déroulent de plus en plus souvent dans des zones urbaines, avec son cortège de victimes civiles et de destructions d’infrastructures.  Mais les États doivent œuvrer pour limiter l’emploi d’armes dans des zones densément peuplées, a-t-il recommandé.  Il a aussi demandé aux parties belligérantes de mettre en place un mécanisme de suivi de l’application du DIH, avant de souligner les conséquences néfastes des sanctions sur les efforts humanitaires.  Les États doivent limiter de telles conséquences et mettre en place des exemptions humanitaires bien pensées, selon ses recommandations.  M. Maurer a, enfin, exhorté les États à faciliter le travail des organisations humanitaires, dont le CICR.

Un autre appel à faire jouer la responsabilité des États pour garantir un accès humanitaire sans entraves est venu de M. Manuel Fontaine, du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).  Il a demandé l’élimination des obstacles tels que la non-délivrance de visas.  Il s’est félicité des exemptions humanitaires aux régimes de sanctions, avant de détailler l’action de l’UNICEF s’agissant de l’application du programme du Conseil de sécurité sur les enfants dans les conflits armés.  Toutes les parties belligérantes doivent s’acquitter de leurs obligations au titre du DIH, a déclaré M. Fontaine.

De son côté, M. Julien Schopp, représentant de l’organisation non gouvernementale Interaction, a donné la perspective des ONG.  Il a fait valoir que celles-ci respectent les règles des pays hôtes, mais que ces règles changent par temps de conflit et visent souvent à restreindre le travail des ONG.  Il a aussi souligné la multiplication des régimes de sanctions et les problèmes que cela engendre.  M. Schopp a affirmé que les principes humanitaires sont un outil pour parvenir à des résultats.  « Si nous sommes neutres et impartiaux, alors nous pouvons aider les plus vulnérables. »  Il a rappelé que le DIH met la « barre relativement bas » puisqu’une puissance militaire peut très bien y contrevenir.  Il a donc prôné une approche éthique afin d’y remédier.

Une autre représentante de la société civile, Mme Françoise Bouchet-Saulnier, de Médecins sans frontières (MSF), a précisé que plus de la moitié des projets de MSF sont liés à un conflit.  « Depuis 2015, nous avons perdu 26 de nos membres en raison d’incidents intentionnels », a-t-elle déploré.  Elle a dénoncé les attaques grandissantes contre les centres médicaux, ces attaques ayant par ailleurs changé de nature: ce ne sont plus des bombardements massifs mais des attaques pernicieuses contre les agents de santé, comme du harcèlement, qui vient entraver l’action humanitaire.  Elle a déclaré que les lois des pays hôtes sont souvent silencieuses sur les opérations médicales humanitaires, ce qui fait que celles-ci sont perçues comme étant illégitimes.  En d’autres termes, « nous sommes souvent perçus comme aidant l’ennemi, ce qui a de lourdes conséquences pour notre personnel », a-t-elle fait remarquer.  La représentante de MSF a donc demandé de réaffirmer la légitimité et la neutralité de ces opérations, dénonçant au passage la rhétorique antiterroriste de certains États.  Selon elle, ces États invoquent la lutte antiterroriste pour ne pas respecter le DIH.  Elle a d’ailleurs regretté l’érosion du statut protecteur du DIH.  Enfin, Mme Bouchet-Saulnier a rappelé que le « DIH est la seule alternative à la violence ».

M. Santiago Andrés Cafiero, du Ministère des affaires étrangères de l’Argentine, a ensuite détaillé l’action humanitaire de son pays en Amérique latine, dans le but de ne laisser personne sur le côté. 

Le débat avec les délégations a été animé par Mme Ghada Eltahir Mudawi, Directrice par intérim de la Division des opérations et du plaidoyer au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Comme les panélistes, plusieurs délégations sont intervenues pour appeler à une meilleure application du DIH, dont l’Égypte, le Canada et la Suisse, ce pays soulignant l’importance d’adopter des législations nationales sur ce sujet.  Toutes les violations de ce droit doivent être dûment recensées et faire l’objet d’un établissement des responsabilités, a déclaré le Maroc.  « Nous devons exiger de tous nos partenaires un respect scrupuleux du DIH », a renchéri le délégué canadien.  Appuyée par l’Islande, l’Afrique du Sud a exhorté les parties belligérantes à le respecter, avant de mettre en garde contre la politisation de l’aide humanitaire.

Cette inquiétude relative à une certaine politisation de l’aide a été partagée par la Norvège, qui a souligné que les premières victimes en sont les personnes en attente d’aide humanitaire.  « Les agents humanitaires doivent pouvoir parler à toutes les parties », a donné comme solution la déléguée norvégienne en indiquant par la suite que son pays veille au bon respect des exemptions humanitaires aux régimes des sanctions.  Ces sanctions ont été au cœur de l’intervention de la Syrie.  Les sanctions viennent de frapper l’aéroport de Damas alors que cet aéroport était une plateforme cruciale pour l’acheminement de l’aide, a regretté la déléguée syrienne.

Les États-Unis ont, de leur côté, demandé l’élimination des obstacles bureaucratiques qui entravent l’acheminement de l’aide, comme en Syrie.  Les travailleurs humanitaires ne doivent pas être pris pour cible, a rebondi le Maroc, en rappelant que leur protection doit être au cœur de l’action humanitaire.  Les délégations d’El Salvador ou encore de l’Islande ont, enfin, demandé une protection spécifique pour les femmes et les filles.

La dernière journée de session humanitaire de l’ECOSOC se tiendra demain, jeudi 23 juin, à partir de 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil fixe la date du 4 novembre 2022 pour l’élection au siège vacant à la CIJ à la suite du décès du juge Cançado Trindade

9073e séance - matin
CS/14944

Le Conseil fixe la date du 4 novembre 2022 pour l’élection au siège vacant à la CIJ à la suite du décès du juge Cançado Trindade

Déplorant le décès du juge Antônio Augusto Cançado Trindade de la Cour internationale de Justice, survenu le 29 mai 2022, le Conseil de sécurité a adopté ce matin sans vote la résolution 2638 (2022) par laquelle il décide que l’élection au siège devenu vacant aura lieu à des séances tenues le 4 novembre 2022 par lui-même et par l’Assemblée générale. 

Texte du projet de résolution S/2022/495

     Le Conseil de sécurité,

     Déplorant le décès du juge Antônio Augusto Cançado Trindade, survenu le 29 mai 2022,

     Notant que, de ce fait, un siège est devenu vacant à la Cour internationale de Justice et qu’il faut le pourvoir pour le reste du mandat du juge décédé, conformément aux dispositions du Statut de la Cour,

     Notant en outre que, selon l’article 14 du Statut, c’est à lui qu’il revient de fixer la date de l’élection,

     Décide que l’élection au siège devenu vacant aura lieu à des séances tenues le 4 novembre 2022 par lui-même et par l’Assemblée générale à sa soixante-dix-septième session.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité reconduit le mandat du Procureur du Mécanisme résiduel pour les Tribunaux pénaux internationaux jusqu’au 30 juin 2024 

9072e séance - matin
CS/14943

Le Conseil de sécurité reconduit le mandat du Procureur du Mécanisme résiduel pour les Tribunaux pénaux internationaux jusqu’au 30 juin 2024 

En adoptant ce matin par 14 voix pour la résolution 2637 (2022), avec l’abstention de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité a décidé de reconduire M. Serge Brammertz au poste de Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, pour un mandat courant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2024.  Le Mécanisme a été créé en 2010 en vue de la fermeture du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et de celui pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), qui ont cessé leurs fonctions respectivement le 31 décembre 2015 et le 31 décembre 2017.   

Présenté par le Gabon, le texte exhorte tous les États, en particulier ceux où des fugitifs sont soupçonnés de se trouver, de renforcer leur coopération avec le Mécanisme et de lui prêter tout le concours dont il a besoin, notamment pour appréhender et lui remettre le plus rapidement possible tous les fugitifs restants mis en accusation par le TPIR. 

À cet égard, le Conseil note que le Procureur a annoncé en mai dernier le décès de deux fugitifs, MM. Protais Mpiranya et Phénéas Munyarugarama.  Il précise que M. Mpiranya était le dernier fugitif du TPIR devant être jugé par le Mécanisme.  Les quatre derniers fugitifs mis en accusation par le TPIR sont toujours en fuite et devront être jugés par le Rwanda, sous réserve des conditions énoncées dans les décisions portant renvoi des affaires.

Plus généralement, le Conseil exhorte les États à coopérer à l’exécution des peines prononcées par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme, tout en se félicitant de l’appui que les États ne cessent déjà d’apporter à cet égard.   

Le Conseil relève par ailleurs que le Mécanisme continue d’avoir des difficultés à pourvoir à la réinstallation des personnes acquittées et des personnes condamnées ayant exécuté leur peine.  Appelant à trouver des solutions rapides et durables à ces problèmes, y compris dans le cadre d’un processus de réconciliation, il considère qu’il convient de considérer notamment si l’État d’origine est prêt à accueillir ses ressortissants, si les personnes devant être réinstallées y consentent et s’il existe d’autres États possibles pour leur réinstallation. 

En outre, le Conseil accueille avec satisfaction le rapport (S/2022/319) que lui a soumis le Mécanisme à qui il demande, dans le cadre de sa stratégie d’achèvement des travaux, de présenter en temps voulu des solutions pour le transfert des activités qu’il lui faut encore exécuter. 

Le Mécanisme, qui était entré en fonction en 2012 à Arusha (République-Unie de Tanzanie), « a été conçu pour être une petite entité efficace à vocation temporaire, dont les fonctions et la taille iront en diminuant, et dont le personnel peu nombreux sera à la mesure de ses fonctions restreintes », n’a pas manqué de rappeler le Conseil dans la résolution adoptée ce jour.

Texte du projet de résolution (S/2022/501)

Le Conseil de sécurité,

     Réaffirmant qu’il est déterminé à combattre l’impunité des auteurs de crimes graves de droit international et que toutes les personnes mises en accusation par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) doivent être traduites en justice, et rappelant à cet égard le mandat du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (le Mécanisme), établi par la résolution 1966 (2010) du 22 décembre 2010,

     Rappelant les articles 25 et 26 du Statut du Mécanisme, lequel figure à l’annexe 1 de la résolution 1966 (2010), qui portent respectivement sur l’exécution des peines et sur la grâce et la commutation de peine,

     Ayant à l’esprit le paragraphe 4 de l’article 14 du Statut du Mécanisme,

     Rappelant que dans sa résolution 2529 (2020), adoptée le 25 juin 2020, il a nommé un procureur pour la période allant du 1er juillet 2020 au 30 juin 2022 et décidé que, par la suite, le procureur pourrait être nommé ou reconduit dans ses fonctions pour un mandat de deux ans, sans préjudice des dispositions du paragraphe 4 de l’article 14 du Statut du Mécanisme,

     Ayant examiné la proposition du Secrétaire général de nommer M. Serge Brammertz aux fonctions de Procureur du Mécanisme (S/2022/...),

     Rappelant qu’il est absolument nécessaire que les États coopèrent avec le Mécanisme pour appréhender et lui remettre le plus rapidement possible tous les fugitifs restants mis en accusation par le TPIR et, à cet égard, rappelant la résolution 74/273 de l’Assemblée générale adoptée le 21 avril 2020,

     Rappelant qu’il a décidé, dans sa résolution 1966 (2010), que le Mécanisme resterait en fonctions pendant une période initiale de quatre ans qui commencerait à la première des dates d’entrée en fonctions indiquées au paragraphe 1 de la résolution, d’examiner l’avancement de ses travaux, y compris l’achèvement des tâches qui lui ont été confiées, avant la fin de cette période initiale puis tous les deux ans, et qu’il resterait en fonctions pendant de nouvelles périodes de deux ans commençant après chacun de ces examens, sauf décision contraire de sa part,

     Notant que la période de fonctionnement actuelle du Mécanisme prend fin le 30 juin 2022,

     Ayant examiné, pour la période écoulée depuis le dernier examen du Mécanisme effectué en juin 2020, l’avancement des travaux du Mécanisme, y compris l’achèvement des tâches qui lui ont été confiées, en application du paragraphe 17 de la résolution 1966 (2010) et conformément à la procédure définie dans la déclaration de sa présidente du 31 mars 2022 (S/PRST/2022/2),

     Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

     1.  Décide de nommer M. Serge Brammertz Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, pour un mandat courant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2024;

     2.  Exhorte les États à coopérer pleinement avec le Mécanisme;

     3.  Continue à exhorter tous les États, en particulier ceux sur le territoire desquels des fugitifs sont soupçonnés de se trouver, de renforcer leur coopération avec le Mécanisme et de lui prêter tout le concours dont il a besoin, notamment pour appréhender et lui remettre le plus rapidement possible tous les fugitifs restants mis en accusation par le TPIR, ainsi que de coopérer à l’exécution des peines prononcées par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme, et se félicite de l’appui que les États ne cessent déjà d’apporter à cet égard;

     4.  Note avec préoccupation qu’en dépit de l’accord qui a été conclu, le Mécanisme continue d’avoir des difficultés à pourvoir à la réinstallation des personnes acquittées et des personnes condamnées ayant exécuté leur peine, souligne qu’il importe de trouver des solutions rapides et durables à ces problèmes, y compris dans le cadre d’un processus de réconciliation, encourage tous les efforts déployés à cette fin et, à cet égard, demande à nouveau à tous les États de coopérer avec le Mécanisme dans ce domaine et de lui prêter tout le concours dont il a besoin;

     5.  Note que, dans les décisions portant sur la réinstallation de personnes acquittées ou de personnes ayant exécuté leur peine, il convient de considérer notamment si l’État d’origine est prêt à accueillir ses ressortissants, si les personnes devant être réinstallées y consentent ou émettent éventuellement des objections et s’il existe d’autres États possibles pour leur réinstallation;

     6.  Prend note des jugements et arrêts rendus récemment par le Mécanisme et des progrès réalisés dans la recherche des fugitifs, salue la coopération entre le Mécanisme, les États et les organisations internationales, qui a contribué à ces progrès, et reconnaît qu’il s’agit là d’étapes importantes dans la coopération avec le Mécanisme, conformément au paragraphe 3 de la résolution 2529 (2020), et note également que le Procureur a annoncé, le 12 mai 2022, le décès de Protais Mpiranya, survenu le 5 octobre 2006, et, le 18 mai 2022, celui de Phénéas Munyarugarama, survenu le 28 février 2002, que Mpiranya était le dernier fugitif du TPIR devant être jugé par le Mécanisme et que les quatre derniers fugitifs mis en accusation par le TPIR sont toujours en fuite et devront être jugés par le Rwanda, sous réserve des conditions énoncées dans les décisions portant renvoi des affaires;

     7.  Souligne que les fonctions résiduelles étant sensiblement limitées, le Mécanisme a été conçu pour être une petite entité efficace à vocation temporaire, dont les fonctions et la taille iront en diminuant, et dont le personnel peu nombreux sera à la mesure de ses fonctions restreintes, et tenant compte à cet égard de l’adhésion sans réserve du Mécanisme à ces critères, le prie de continuer à être guidé par ceux-ci dans l’exécution de ses activités;

     8.  Accueille avec satisfaction le rapport (S/2022/319) que lui a soumis le Mécanisme conformément à la déclaration de sa présidente (S/PRST/2022/2), en vue de l’examen de l’avancement des travaux du Mécanisme, notamment de l’achèvement de ses fonctions, conformément au paragraphe 17 de la résolution 1966 (2010), et le rapport du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) sur l’évaluation des méthodes de travail du Mécanisme (S/2022/148), en prenant note des conclusions du BSCI sur la mise en œuvre de ses recommandations par le Mécanisme et du paragraphe 9 de la résolution 2529 (2020);

     9.  Prend note des travaux réalisés par le Mécanisme à ce jour, en particulier l’élaboration d’un cadre juridique et réglementaire, de procédures et de méthodes de travail conformes à son statut et s’inspirant des enseignements tirés du fonctionnement du TPIY, du TPIR et des autres tribunaux ainsi que de leurs bonnes pratiques, dont l’utilisation de listes de réserve pour garantir qu’il n’est fait appel aux juges qu’en cas de nécessité, le travail à distance dans toute la mesure possible pour les juges, et le recours minimal aux formations plénières lors de la phase préliminaire et de la phase de mise en état en appel, pour que ses activités judiciaires coûtent sensiblement moins cher que celles du TPIY et du TPIR, et félicite le Mécanisme des efforts qu’il a déployés dans ce sens;

     10. Prend note également des vues et des recommandations formulées par le Groupe de travail informel sur les tribunaux internationaux, qui sont reflétées dans la présente résolution, et prie le Mécanisme de tenir compte de ces vues et d’appliquer les recommandations, et de continuer de prendre des mesures pour renforcer encore l’efficacité, l’efficience et la transparence de sa gestion, notamment: i) de veiller à la pleine application des recommandations restantes faites par le BSCI; ii) d’établir, le plus tôt possible, des prévisions précises et ciblées pour l’achèvement de toutes ses activités, dont en particulier les activités touchant les affaires en cours et le contrôle de l’exécution des peines, et de s’y tenir; iii) de continuer à garantir la représentation géographique et l’équilibre entre les sexes parmi le personnel, tout en maintenant les compétences professionnelles; iv) de continuer à appliquer une politique de ressources humaines compatible avec le caractère temporaire de son mandat; v) de procéder à de nouvelles réductions des coûts, y compris mais pas seulement, en optant pour la modulation des effectifs; et vi) de coordonner et de mettre en commun les informations entre ses trois organes sur les questions qui les concernent de manière égale, afin d’assurer une réflexion et une planification systématiques sur l’avenir;

     11. Demande au Mécanisme, dans le cadre de sa stratégie d’achèvement des travaux, de présenter en temps voulu des solutions pour le transfert des activités qu’il lui faut encore exécuter;

     12. Demande de nouveau au Mécanisme d’inclure dans les rapports qu’il lui présente tous les six mois des informations sur les progrès accomplis dans l’application de la présente résolution, ainsi que des informations détaillées sur ses effectifs et l’ensemble de ses postes, la charge de travail respective et les coûts connexes, ventilés par division, ainsi que des prévisions détaillées de la durée des tâches résiduelles, établies sur la base des données disponibles;

     13. Rappelle qu’il importe de faire respecter les droits des personnes détenues sur l’ordre du Mécanisme conformément aux normes internationales applicables, y compris les normes relatives aux soins de santé;

     14. Encourage à nouveau le Mécanisme, comme il l’a fait dans sa résolution 2422 (2018), à rechercher une solution satisfaisante à la libération anticipée des personnes condamnées par le TPIR, et note qu’au cours de la période allant du 1er juillet 2018 au 30 juin 2020, les conditions relatives à la libération anticipée dans les cas qui s’y prêtaient ont été mises en place et que le Mécanisme a affiné ses procédures à cet égard;

     15. Rappelle la conclusion qu’il a formulée à l’issue de l’examen, pour la période écoulée depuis l’examen précédent en juin 2020, de l’avancement des travaux du Mécanisme, notamment de l’achèvement des tâches qui lui ont été confiées, conformément à la résolution 1966 (2010);

     16. Rappelle qu’en vue de renforcer le contrôle indépendant du Mécanisme, comme indiqué dans la déclaration de sa présidente (S/PRST/2022/2), les examens qui seront effectués conformément au paragraphe 17 de la résolution 1966 (2010) devront inclure les rapports d’évaluation des méthodes et des travaux du Mécanisme qui auront été demandés au BSCI;

     17. Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’inquiétude des « mégacrises » mondiales domine l’ouverture de la session de l’ECOSOC sur les affaires humanitaires

25e et 26e séances plénières,
matin & après-midi
 ECOSOC/7090

L’inquiétude des « mégacrises » mondiales domine l’ouverture de la session de l’ECOSOC sur les affaires humanitaires

La séance d’ouverture de la session « affaires humanitaires » du Conseil économique et social (ECOSOC) a été dominée par la vive inquiétude affichée par les différents intervenants, dont le Secrétaire général, devant la survenue de « mégacrises » mondiales.  Ces crises découlent des conflits qui font rage dans le monde, du risque grandissant de famine, de la crise climatique et du coût élevé de la vie, a expliqué M. António Guterres.

« La situation est gravissime », a renchéri le Président de l’ECOSOC, M. Collen Vixen Kelapile, tandis que le Président de l’Assemblée générale, M. Abdulla Shahid, s’est inquiété pour les 46 pays au bord de la famine.  De son côté, M. Martin Griffiths, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a relevé que les mégacrises mondiales actuelles se développent à une vitesse et à une échelle qui menacent de défaire des décennies de progrès durement acquis. 

« Nous assistons presque partout à une recrudescence de la souffrance humaine », s’est-il désolé, en notant que le système humanitaire subit une énorme pression.  Cette inquiétude a été largement partagée par la trentaine de délégations qui se sont exprimées le matin.  Un chiffre, résumant l’ampleur des défis, a été abondamment cité: les 274 millions de personnes qui auront besoin d’une aide humanitaire en 2022.  Elles étaient 235 millions en 2021, a rappelé le Groupe des 77 et la Chine.

« Perdre espoir n’est pas cependant la bonne stratégie », a néanmoins déclaré M. Guterres, en appelant à un renforcement du système humanitaire, tandis que M. Kelapile en a appelé à la solidarité internationale.  De son côté, M. Diego Pary Rodríguez (Bolivie), Vice-Président de l’ECOSOC, a sonné la mobilisation de tous les acteurs du système humanitaire afin de faire face à la crise alimentaire, sécuritaire, sanitaire et climatique mondiale.

« Nous devons de toute urgence changer de tactique », a appuyé M. Griffiths, en appelant de ses vœux une nouvelle approche.  Le Coordonnateur des secours d’urgence a plaidé pour le financement des appels humanitaires et une libre circulation des aliments à travers la planète en mettant à disposition des stocks excédentaires et en supprimant tout blocage commercial.  « Il nous faut vraiment écouter et changer de cap », a martelé M. Griffiths. 

Les délégations ont insisté sur les enjeux financiers en demandant, à l’instar de l’Afrique du Sud, que les promesses faites au titre du financement climatique soient honorées.  Le délégué du Pakistan a, lui, demandé un financement pérenne pour l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  L’Union européenne a insisté sur son engagement en faveur de la protection des plus vulnérables, tandis que les États-Unis ont rappelé que leur assistance humanitaire en 2021 s’est élevée à 13 milliards de dollars.

Une table ronde de haut-niveau s’est tenue l’après-midi sur l’assistance humanitaire et les leçons à tirer de la pandémie de COVID-19, avec un accent mis sur la protection des femmes et des enfants.  La seconde table ronde de haut-niveau portera sur l’acheminement de l’aide humanitaire en temps de conflit et l’application du droit international humanitaire.  Elle aura lieu demain, mercredi 22 juin, à 10 heures.

ASSISTANCE ÉCONOMIQUE SPÉCIALE, AIDE HUMANITAIRE ET SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE - E/2022/50

Déclarations liminaires

M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ, Représentant permanent de la Bolivie et Vice-Président de l’ECOSOC, a campé les enjeux de cette discussion générale en appelant à la mobilisation de tous les acteurs du système humanitaire face à la crise alimentaire, sécuritaire, sanitaire et climatique mondiale.

M. COLLEN VIXEN KELAPILE, Président de l’ECOSOC, a souligné l’ampleur des défis que la communauté humanitaire doit relever, dont l’insécurité alimentaire croissante.  Il a dénoncé les entraves à l’accès humanitaire, ainsi que le harcèlement qui vise les travailleurs humanitaires.  La situation est gravissime, a dit le Président.  Il a appelé la communauté internationale à faire preuve de solidarité avec les personnes dans le besoin dans la Corne de l’Afrique, en proie à la famine, et ailleurs.  Il a aussi appelé à tirer les leçons de la pandémie de COVID-19 et à préserver l’espace de l’action humanitaire afin de faire face aux futures menaces. 

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a mentionné la « mégacrise » qui se profile, produit de la conjonction des conflits, de la famine, de la crise climatique et du coût élevé de la vie.  Perdre espoir n’est pas la bonne stratégie, agir est la bonne stratégie, a dit M. Guterres, en appelant à un renforcement du système humanitaire.  Les acteurs de ce système doivent travailler de concert avec les acteurs du développement et du maintien de la paix, a-t-il ajouté.  Il a demandé un meilleur respect du droit international humanitaire (DIH) et plaidé pour un financement pérenne du système humanitaire.  Il faut régler les différents conflits, comme au Yémen ou en Ukraine, a dit M. Guterres.  Il a enfin invité les pays développés à honorer leurs engagements en ce qui concerne le financement climatique.

M. ABDULLA SHAHID, Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, a souligné que les actions humanitaires sont une lueur d’espoir pour des millions de personnes se trouvant dans les zones de conflit et pour les personnes sinistrées.  Énumérant les défis contemporains qui aggravent les crises préexistantes et augmentent les besoins humanitaires, il a prôné des solutions plus durables et une diversification de l’aide humanitaire en faisant appel à l’expertise des communautés locales.  C’est une « approche pangouvernementale et pansociétale » qu’il faut, selon lui.  Soulignant le déplacement de plus de 13 millions de personnes causé par la guerre en Ukraine, ainsi que les problèmes mondiaux de sécurité alimentaire que celle-ci entraîne, M. Shadid s’est inquiété pour les 46 pays qui se rapprochent de la famine.  Il a aussi rappelé que des travailleurs humanitaires à travers le monde sont souvent tués, blessés, agressés sexuellement, kidnappés ou détenus.  « C’est inacceptable et cela doit s’arrêter! », a-t-il lancé en appelant à redoubler d’efforts pour protéger les humanitaires.  Il a aussi appelé la communauté internationale à venir en aide aux plus de 300 millions de personnes qui ont besoin d’assistance humanitaire. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a présenté le rapport du Secrétaire général sur le « renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies » (E/2022/50).  Il a relevé que les mégacrises mondiales actuelles se développent à une vitesse et à une échelle qui menacent de défaire des décennies de progrès durement acquis.  Nous assistons presque partout à une recrudescence de la souffrance humaine, s’est-il désolé, précisant que le nombre de personnes qui ont besoin d’aide humanitaire, plus de 300 millions, n’a jamais été aussi élevé, tandis que la faim et l’insécurité alimentaire atteignent des niveaux record.  Énumérant les autres grands défis à surmonter, il a parlé des milliers de personnes qui sont au bord de la famine en Afghanistan, en Éthiopie, en Somalie, au Soudan du Sud et au Yémen; des plus de 100 millions de déplacés et réfugiés; des femmes et des filles qui connaissent une « pandémie fantôme de violence » et un recul de leurs droits; de la crise climatique et écologique qui s’aggrave rapidement; et des conséquences de la guerre en Ukraine (crise du coût de la vie, hausse des prix du carburant, des engrais et de la nourriture).

Inquiet pour le système humanitaire qui subit une énorme pression, le Coordonnateur des secours d’urgence a plaidé pour une nouvelle approche.  En ce qui concerne le financement, il a prévenu que seulement un peu plus de la moitié du total des appels humanitaires (actuellement 46 milliards de dollars) sont généralement financés.  « On ne peut pas continuer comme ça.  Nous devons de toute urgence changer de tactique. »  M. Griffiths a d’abord recommandé une libre circulation des aliments à travers la planète en mettant à disposition des stocks excédentaires et en supprimant tout blocage du commerce des denrées alimentaires et des engrais.  Il a ensuite appelé à « vraiment écouter et changer de cap, en fonction de ce que disent les personnes concernées ». 

Une autre recommandation a été de rejeter toutes les barrières artificielles qui empêchent les communautés humanitaires, de développement et de rétablissement de la paix de travailler ensemble pour trouver des solutions et renforcer la résilience.  M. Griffiths a également demandé de travailler davantage sur les négociations humanitaires relatives à l’accès, que ce soit en Éthiopie, au centre du Sahel, en Ukraine ou au Yémen.  Le secteur humanitaire, a-t-il ajouté, doit être aussi anticipatif que possible.  Enfin, il a demandé d’accorder un plus grand rôle aux ONG locales et aux agences d’aide présentes sur le terrain.  Il a conclu en appelant à construire une nouvelle génération d’agences humanitaires capables d’aider à supporter le fardeau de l’escalade des crises mondiales.  Et il a prévenu qu’il reviendrait ici, l’an prochain, avec une ardoise plus salée pour les besoins humanitaires si nous n’agissons pas aujourd’hui.

De son côté, Mme EMELINE SIALE ILOLAHIA, Pacific Islands Association of Non-governmental Organizations (PIANGO), a indiqué que la résilience des îles du Pacifique s’enracine dans la relation avec la nature.  Or, a-t-elle reconnu, la crise climatique est venue bouleverser cette relation.  Face à cette crise, il faut renforcer la coopération internationale et le système humanitaire, a-t-elle dit, en rappelant que la crise climatique est aussi une crise humanitaire.  Elle a aussi regretté que le financement ne soit pas à la hauteur.  Elle a insisté sur l’importance d’une transition des efforts d’urgence à des efforts de développement.

Mme HAWA COULIBALY, jeune activiste malienne, a indiqué qu’elle a du mal depuis la crise à payer ses frais de scolarité.  Soulignant la gravité de l’insécurité alimentaire, elle a exhorté l’ONU à y remédier.

Enfin, M. DARÍO JOSÉ MEJÍA MONTALVO, Président de l’Instance permanente sur les questions autochtones, a demandé la pleine reconnaissance des droits des peuples autochtones, dans les 90 pays dans lesquels ils résident.  Il a mentionné la « dette historique » du monde envers ces peuples s’agissant des droits, avant d’insister sur les conséquences de la crise climatique sur ces peuples, citant en particulier leurs déplacements.  Rappelant que 19% des autochtones vivent dans une pauvreté extrême, il a dénoncé les mesures gouvernementales qui appauvrissent ces peuples.  Il a plaidé pour un changement de paradigme s’agissant de la lutte contre cette pauvreté et des autres politiques publiques en direction des peuples autochtones, dans le respect de leurs spécificités culturelles.

Débat général

Lors du débat général, le Pakistan, au nom du Groupe des 77 et la Chine, a rappelé que 274 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire en 2022 alors qu’elles étaient 235 millions en 2021.  Appuyé par son homologue de la République islamique d’Iran, le délégué du Pakistan a dénoncé les conséquences négatives des sanctions sur les capacités de réponse humanitaire des États et plaidé pour une meilleure application du DIH.  À l’instar de l’Algérie ou encore de l’Afrique du Sud, il a rappelé l’importance de la lutte contre les changements climatiques et invité les pays développés à honorer leurs engagements en termes de financement de l’action climatique.  Un appel entendu par la France qui, s’exprimant au nom de l’Union européenne, a rappelé l’engagement de cette dernière en faveur de la protection des plus vulnérables.  La déléguée a dénoncé le mépris du DIH, comme cela se passe en Ukraine, et le meurtre de travailleurs humanitaires.  « Nous devons tous renouveler nos engagements. »  Elle a ainsi appelé tous les États à rejoindre les instruments clefs du DIH et à renforcer la lutte contre l’impunité. 

De son côté, la Türkiye, au nom du Groupe MIKTA, a demandé des efforts accrus pour remédier à la question des migrations et des déplacements.  Elle a défendu un meilleur partage du fardeau en ce qui concerne l’aide humanitaire et souhaité que l’accent soit mis sur la prévention des crises humanitaires.  Nous devons changer notre approche s’agissant de l’action humanitaire, a rebondi le Pérou, en demandant une meilleure prise en compte des risques de catastrophe et en invitant à œuvrer pour leur réduction.  Le délégué a appelé à une meilleure prévention des catastrophes par une analyse plus fine des risques. 

À l’instar de la Norvège et du Japon, la délégation des États-Unis a mentionné les graves conséquences de la guerre en Ukraine, notamment sur la sécurité alimentaire, et plaidé pour un renforcement du système humanitaire.  L’aide humanitaire ne bénéficie pas toujours aux personnes qui en ont le plus besoin, a dit la déléguée américaine, avant de demander une réforme du système onusien.  Enfin, elle a rappelé que l’assistance humanitaire des États-Unis s’est élevée à 13 milliards de dollars en 2021, tandis que son homologue de l’Arabie saoudite a mentionné le soutien apporté par son pays face aux catastrophes naturelles. 

En sa capacité nationale, le Pakistan a appelé à un financement pérenne de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), tandis que l’Éthiopie a rappelé que 17% seulement de la population africaine a été vaccinée et plaidé pour un accès égal aux vaccins.  La délégation a aussi rappelé que plus de 110 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire en Afrique, dont une partie conséquente dans la Corne de l’Afrique.  La Colombie a, elle, demandé un accès humanitaire sans entrave et une meilleure protection pour les travailleurs humanitaires, avant de détailler sa campagne de vaccination menée contre la COVID-19.  Il est crucial de vacciner les populations migrantes, a déclaré le délégué colombien, tandis que son homologue du Mexique a souhaité que la santé mentale fasse partie des efforts humanitaires.  Enfin, de nombreuses délégations, telles que l’Arménie ou encore l’Algérie, ont demandé le renforcement des capacités du système onusien et rappelé les principes encadrant l’acheminement de l’aide humanitaire, dont ceux de neutralité et d’impartialité.

ACTION HUMANITAIRE ET ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE LA PANDÉMIE DE COVID-19: TRAVAILLER ENSEMBLE POUR GARANTIR QUE LES ENFANTS ET LES FEMMES NE SONT PAS LAISSÉS À LA TRAÎNE

Table ronde de haut niveau

Cette première des trois tables rondes du segment humanitaire était animée par Mme HELI UUSIKYLA, Directrice de la Division du financement des activités humanitaires et de la mobilisation des ressources au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Les échanges ont permis de relever l’impact humanitaire de la pandémie de COVID-19, notamment sur des populations vulnérables, dont les enfants et les femmes, tout en mettant en avant les enseignements pour la préparation à de futures pandémies.

La Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme CATHERINE RUSSELL, a indiqué que parmi les enseignements tirés de la pandémie, son agence a noté que les enfants n’ont jamais été aussi vulnérables.  En effet, 100 millions d’enfants de plus vivent dans la pauvreté à travers le monde depuis 2020 du fait de la pandémie.  De même, 10 millions de filles supplémentaires sont exposées au mariage précoce, tandis que la santé mentale des enfants a été gravement affectée.  La Directrice exécutive a aussi évoqué une crise éducative avec tant d’écoles fermées du fait de la pandémie.  Elle a appelé à mettre l’accent sur les enfants les plus vulnérables, y compris les handicapés. 

« N’oublions surtout pas les femmes », a renchéri le Sous-Secrétaire général et Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).  M. IB PETERSEN a insisté pour un accompagnement sanitaire des femmes qui tienne compte de l’aspect psychosocial et de la santé reproductive.  Le FNUAP est en train de renforcer ces services dans ces domaines sur le terrain, en collaboration avec d’autres agences onusiennes telles que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’UNICEF.  Pour y parvenir, le FNUAP a besoin d’un financement adéquat, a-t-il réclamé en donnant l’exemple du Yémen pour lequel, sur les 100 millions de dollars demandés, l’agence n’a reçu que 13 millions.  Il a également demandé de mettre l’accent sur la coopération et l’alerte précoce.  Ces deux concepts sont justement au centre de la politique indonésienne de gestion des catastrophes, a indiqué le Représentant permanent de l’Indonésie auprès des Nations qui s’est également exprimé en tant que Président du G20.  M. ARMANATHA CHRISTIAWAN NASIR a en effet indiqué que son pays est particulièrement exposé aux catastrophes du fait de son relief volcanique.  Avec ses 17 000 îles, apporter l’assistance humanitaire est une véritable gageure, a-t-il expliqué, tout en se félicitant que le plan national d’assistance humanitaire soit décliné selon l’approche sexospécifique.  Il a également relevé l’importance de la coopération, assurant que la présidence indonésienne du G20 est placée dans cette optique, avec le thème « nous relever ensemble et devenir plus forts ».

Devenir plus fort passe par la préparation des sociétés aux futures pandémies, a argué M. XAVIER CASTELLANOS, Sous-Secrétaire général de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.  Intervenant par visioconférence, il a déploré que de nombreuses personnes soient mortes à cause de leur solitude pendant la pandémie.  Cette dernière a conduit les gens à un regain d’anxiété et de stress, ce qui a favorisé une nouvelle pandémie de santé mentale, doublée d’une pandémie de violence contre les femmes.  Il a donc appelé à investir dans les mécanismes de protection sociale pour les plus vulnérables, notamment grâce à des systèmes de santé plus résilients.  Il faut également continuer d’investir dans la numérisation, a-t-il suggéré, notant que cela a permis aux sociétés de réagir au confinement en poursuivant la scolarisation des enfants grâce à l’enseignement à distance.  Intervenant également par visioconférence, Mme YASMINE SHERIF, Directrice de « Education Cannot wait », a déploré le fait que 222 millions d’enfants et d’adolescents vivent dans des zones de conflit et n’ont pas accès à l’école.  De même, les adolescentes afghanes ne peuvent plus aller à l’école, a-t-elle déploré en appelant la communauté internationale à agir. 

La Présidente-Directrice générale de « Save the Children » aux États-Unis a poursuivi dans le même sens, en déplorant aussi que les enfants ne reçoivent pas tous les soins dont ils ont besoin.  Mme JANTI SOERIPTO a ainsi relevé que, dans le monde, on dépense plus pour s’acheter des gommes à mâcher que pour l’épanouissement des enfants.  Elle a aussi dénoncé le fait que des sanctions unilatérales empêchent parfois la communauté humanitaire d’aider les populations dans le besoin.  Devant ces difficultés, elle a plaidé pour des innovations, comme ces panneaux solaires installés à dos de chameaux pour aider à scolariser des enfants de communautés nomades dans les zones désertiques. 

Les États membres ont ensuite insisté sur la préparation aux futures pandémies.  Ainsi, pour les États-Unis, la première action à faire pour aider les enfants est de leur fournir des documents qui permettent de les comptabiliser.  La prévention de la violence sexiste requiert un investissement de long terme, a ajouté la délégation, avant qu’El Salvador ne demande à l’ONU de prendre les devants en faisant des propositions concrètes aux pays pour que ceux-ci soient mieux préparés à de futures pandémies.  Il faut surtout renforcer le rôle des femmes qui représentent tout de même 70% du personnel de santé, a proposé la Thaïlande, suivie par l’Afrique du Sud qui a aussi insisté sur la préparation aux futures pandémies.  La Norvège a déploré le fait que les écoles soient ciblées pendant les conflits armés, alors que l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a demandé de renforcer la couverture vaccinale des migrants dont la majorité est constituée de femmes.  L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a enfin promis qu’elle allait continuer à aider les gouvernements à gérer la crise alimentaire qui affecte surtout les pays les plus vulnérables.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale encourage l’ONU et l’Union interparlementaire à resserrer leur coopération

85e séance,
après-midi
AG/12428

L’Assemblée générale encourage l’ONU et l’Union interparlementaire à resserrer leur coopération

L’Assemblée générale a encouragé, cet après-midi l’Union interparlementaire (UIP) et l’ONU à resserrer la coopération au service de leurs objectifs communs, notamment en associant les parlementaires aux efforts déployés pour continuer de soutenir l’application des accords et des résolutions de l’Organisation. 

En adoptant sans vote la résolution intitulée « Interaction entre l’Organisation des Nations Unies, les parlements nationaux et l’Union interparlementaire », qui était présentée par le Portugal, l’Assemblée générale  encourage notamment l’UIP et les organismes de l’ONU à resserrer encore leurs liens de coopération avec les parlements nationaux et régionaux, en vue notamment de renforcer les capacités parlementaires, y compris pour ce qui est de l’allocation de ressources budgétaires à la réalisation du Programme 2030.  Elle les invite également à renforcer leur coopération en vue d’aider les gouvernements à mettre en place des politiques migratoires planifiées et bien gérées.

L’Assemblée générale demande en outre aux parlements nationaux, agissant avec le soutien de l’ONU et de l’UIP, de se coordonner davantage de sorte que leur riposte à la pandémie de COVID-19 soit axée sur l’être humain et donne accès, en toute égalité et sans discrimination à des médicaments essentiels, à des vaccins, à des moyens de dépistage et de diagnostic ainsi qu’à des équipements de protection individuelle et à du matériel médical, tout en veillant à ce que cette pandémie n’affecte pas de manière disproportionnée les femmes et les filles.

« Les programmes mondiaux ne peuvent être couronnés de succès sans le travail des parlements au sein desquels les résolutions des Nations Unies peuvent être transformées en loi nationale », a souligné le Président de l’Assemblée générale, M. Abdulla Shahid, tandis que l’Observateur de l’Union interparlementaire (UIP), a fait observer que les gouvernements ne pourraient pas s’acquitter de leur tâche sans l’appui des parlements. 

M. M.D Pacheco a par ailleurs insisté sur l’importance d’établir un dialogue interparlementaire, précisant que l’UIP s’attèle à cette tâche depuis le début du conflit en Ukraine.  Un groupe de travail a été créé pour trouver des solutions à ce qui s’apparente à un échec du dialogue et de la politique, et l’UIP enverra une délégation de haut niveau à Moscou et à Kiev pour promouvoir le dialogue entre les deux pays afin de faire émerger une solution à ce conflit, a-t-il notamment fait savoir. 

De son côté, la Fédération de Russie, appuyée par le Bélarus, a jugé inacceptable d’imposer des sanctions aux parlementaires, soulignant que les États qui organisent des événements internationaux sur leur territoire doivent donner aux élus la possibilité d’y participer et de présenter leurs points de vue sur une base non discriminatoire. 

On retiendra également l’intervention du Myanmar qui a souhaité que les Nations Unies et l’UIP continuent de renforcer leur engagement avec le Comité représentant Pyidaungsu Hluttaw qui a été formé avec des parlementaires élus lors des élections générales de novembre 2020.  L’UIP et de nombreux parlements dans le monde ont joué un rôle essentiel en soutenant les représentants légitimement élus du Myanmar, a indiqué l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale.

Au cours de cette séance, l’Assemblée générale a par ailleurs décidé de convoquer en 2022, à Genève, la deuxième session du groupe de travail à composition non limitée chargé de définir un ensemble d’engagements politiques devant constituer un nouveau cadre mondial qui permettra de remédier aux déficiences existantes dans la gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie, suivi d’une troisième session qui se déroulera à New York.

L’Assemblée générale a également invité le Comité des pêches pour le centre-ouest du golfe de Guinée à participer aux travaux de l’édition 2022 de la Conférence sur les océans.

Enfin, elle a décidé de reporter l’examen de la question intitulée « Les diamants, facteur de conflits » et d’inscrire cette question à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-dix-septième session.

L’Assemblée générale se réunira de nouveau jeudi 23 juin à partir de 10 heures.

INTERACTION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES, LES PARLEMENTS NATIONAUX ET L’UNION INTERPARLEMENTAIRE (IUP)

Déclarations

M. ABDULLA SHAHID, Président de l’Assemblée générale, a insisté sur la crise complexe qui pèse sur l’existence humaine à commencer par la pandémie de COVID-19 et les conflits au Yémen, en Libye, en Palestine et en Ukraine.  Il a également cité les catastrophes naturelles, les événements météorologiques extrêmes, l’insécurité économique et la pression sur les chaînes alimentaires, ainsi que la prolifération des armes de destruction massive, et le terrorisme.  Notant que ces questions graves ne relèvent pas de la compétence d’un seul État ou d’une seule organisation, il a appelé à travailler en collaboration en tirant partie de l’énergie et de l’expertise de tous les États et parties prenantes, notant que les parlements jouent un rôle essentiel à cet égard. 

Il a indiqué que les programmes mondiaux ne peuvent être couronnés de succès sans le travail des parlements au sein desquels les résolutions des Nations Unies peuvent être transformées en loi nationale.  Les parlements aident également à transmettre les préoccupations des communautés locales.  Cette synergie est importante dans le contexte de crise majeure alimenté par les changements climatiques, la COVID-19, et les conflits, a-t-il indiqué, notant que ces problèmes s’alimentent les uns les autres et nécessitent des solutions sur le plan politique.  Les parlements permettent de relever tous ces défis et utiliser notre savoir-faire collectif qui nous permet de trouver la paix, de renforcer les démocraties et d’appuyer le bien-être économique de nos communautés.  Le Président s’est félicité de l’élargissement de la collaboration entre le système des Nations Unies, les organisations parlementaires et les parlements nationaux en dépit des défis posés par la pandémie.  Cette collaboration a été grandement facilitée par le travail très efficace de l’UIP dont les efforts doivent être renforcés plus avant, a-t-il dit.

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) qui s’exprimait au nom des délégations du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a déclaré que les parlements et les assemblées législatives sont des partenaires indispensables pour l’ONU, car ils ont notamment le pouvoir de ratifier les traités internationaux et d’établir les budgets nationaux et le financement requis pour le Programme 2030.  Les parlementaires sont responsables devant leurs électeurs et les citoyens et forment souvent la première ligne de défense contre ceux qui préféreraient l’isolement ou l’unilatéralisme face aux défis de notre époque.  Le représentant a ensuite encouragé les États Membres à renforcer la participation des parlementaires au sein de leurs délégations nationales prenant part aux activités des Nations Unies.  Parallèlement, il a incité les parlementaires à veiller à ce que les budgets nationaux fassent progresser la mise en œuvre du Programme 2030, de l’Accord de Paris, du Pacte mondial pour les migrations, de même que le paiement intégral et dans les délais prescrits des contributions aux Nations Unies, et de tout arriéré de paiement.  Les parlements devraient en outre renforcer leur rôle à l’égard de la promotion et de la protection des droits de la personne, y compris en surveillant les mesures et les politiques des gouvernements en matière de droits de la personne.  Enfin, le délégué a enjoint les Nations Unies à renforcer leur collaboration avec les parlementaires afin de faire respecter les engagements portant sur l’aide internationale au développement, le financement et l’allègement de la dette et la mobilisation des ressources afin de préserver la santé, les droits et le bien-être des personnes les plus touchées par les répercussions économiques de la COVID-19. 

Mme KAJAL BHAT (Inde) a estimé que l’UIP, par son attachement à la Déclaration universelle sur la démocratie et à la promotion de systèmes pluralistes et représentatifs de gouvernement, est un allié important des Nations Unies pour relever les défis auxquels est confrontée la communauté mondiale aujourd’hui.  En tant qu’organisation mondiale regroupant plus de 150 parlements nationaux, l’UIP a rendu d’excellents services au cours des deux dernières décennies en favorisant une cohérence et une interaction plus étroites avec l’ONU et ses activités, a-t-elle souligné, citant notamment la consolidation de la paix, les droits humains, l’égalité des sexes, le développement économique et social, le droit international et la protection des intérêts des pays les moins avancés.  Le rôle que l’UIP et ses membres jouent et devraient continuer à jouer dans les années à venir est particulièrement important pour cimenter une culture du multilatéralisme et un ordre international fondé sur des règles, a souligné la déléguée. 

M. CARLOS SEGURA ARAGON (El Salvador) a déclaré que la collaboration entre les Nations Unies et les parlements favorise la réalisation d’objectifs communs d’autant plus pertinents aujourd’hui dans le cadre de la pandémie de COVID-19.  Il a approuvé l’approche adoptée par le Secrétaire général dans son rapport, qui propose de renforcer les alliances au moyen d’une plus grande interaction entre les parlements, afin de parvenir à un multilatéralisme inclusif et efficace permettant l’actualisation des systèmes de gouvernance.  Le représentant a salué l’inclusion d’une « perspective parlementaire » au travail des Nations Unies et de la législation nationale aux accords internationaux tels que le développement durable et l’Accord de Paris.  Les parlementaires, a poursuivi le délégué, jouent un rôle important en traduisant des instruments multilatéraux en « réalités concrètes », notamment le renforcement de la participation des femmes à la vie politique et publique ainsi que l’élimination des barrières structurelles. 

M. FERNANDO DE LA MORA SALCEDO (Mexique) a indiqué que les parlementaires du monde entier se sont heurtés ces dernières années à des problèmes considérables découlant de la pandémie de COVID-19 et de ses répercussions économiques.  Les parlements nationaux sont des alliés importants de l’Assemblée générale, car c’est d’eux que dépend l’harmonisation entre la législation nationale et les traités auxquels ont adhéré les États, l’établissement de cadres juridiques permettant de mettre en œuvre le Programme 2030, ainsi que les lois pour protéger les droits humains et lutter contre les changements climatiques.  Le représentant a aussi salué la participation de parlementaires dans le processus de révision du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, l’adoption de la première déclaration de progrès du Forum d’examen des migrations internationales.  Le délégué a par ailleurs indiqué que le Mexique dispose d’une parité entre hommes et femmes au Parlement, mais qu’au niveau internationale, les femmes représentent uniquement 25,6% des parlementaires.  Il a appelé toutes les délégations à tenir dûment compte des recommandations du Secrétaire général sur la participation des femmes aux parlements nationaux. 

Mme EKATERINA MOZGOVAYA (Bélarus) a déclaré que face aux nombreux défis actuels, d’une complexité sans précédent, un dialogue non politisé et mutuellement respectueux, y compris par le biais de la diplomatie parlementaire, est peut-être le seul outil pour parvenir au compromis et à la solidarité.  Elle a appelé à approfondir et élargir l’interaction et le partenariat entre l’ONU, les parlements nationaux et l’UIP afin d’assurer la mise en œuvre du Programme 2030 notamment.  La contribution des parlementaires au renforcement de la démocratie, au maintien de la paix et de la sécurité est incontestable, a-t-elle souligné. 

Dans ce contexte, la représentante a jugé inacceptable d’appliquer des sanctions de quelque nature que ce soit à l’encontre des parlementaires.  Elle a appelé les États qui ont l’honneur d’accueillir des manifestations internationales sur leur territoire, y compris par l’intermédiaire de l’UIP, à garantir aux parlementaires de tous les États Membres un accès sans entrave et sur une base non discriminatoire pour assurer leur participation pleine et effective.  La déléguée a également affirmé qu’il est inadmissible de politiser les activités de l’UIP et de soumettre à l’examen de son assemblée des documents dont le but est de faire pression sur des États souverains et de répliquer des accusations infondées qui déforment la réalité.  De telles initiatives ne font qu’exacerber la confrontation et vont à l’encontre des valeurs de l’UIP qui cherche à trouver une compréhension mutuelle, à résoudre les différends et à renforcer la paix, a-t-elle estimé.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a relevé que les parlements ont joué un rôle essentiel pendant la pandémie notamment en promulguant des législations d’urgence et budgétaires.  Il a appelé à renforcer l’engagement et les interactions entre le système des Nations Unies, l’UIP et les parlements nationaux dans le contexte post pandémie afin de mieux relever les défis de la mise en œuvre du Programme 2030. 

Rappelant que le Myanmar a connu un coup d’État militaire en 2020, le représentant a expliqué que depuis lors, la junte militaire illégale a commis des atrocités généralisées et systématiques contre la population, équivalant à des crimes contre l’humanité.  Il a rappelé que le peuple avait voté majoritairement en faveur de la Ligue nationale pour la démocratie dirigée par la Conseillère d’État Daw Aung San Suu Kyi.  Depuis, les parlementaires démocratiquement élus continuent néanmoins de représenter la volonté du peuple.  Cependant, a regretté le représentant, nombreux d’entre eux sont toujours détenus illégalement par l’armée et font l’objet de menaces et de confiscation de leurs biens.  Décrivant ce qui se passe actuellement au Myanmar comme une catastrophe humanitaire aggravée par un coup d’État militaire, il a souhaité que les Nations Unies et l’UIP continuent de renforcer la coopération et leur engagement avec le Comité représentant Pyidaungsu Hluttaw qui a été formé avec des parlementaires élus lors des élections générales de novembre 2020. 

M. MAXIM V. BIRYUKOV (Fédération de Russie) a déclaré que l’assemblée législative de son pays participe activement aux structures universelles et régionales, y compris l’ONU, notamment au moyen de contacts et de relations commerciales qui font partie intégrante de sa politique étrangère.  Il a noté avec satisfaction le rôle d’intermédiaire joué par l’UIP dans l’établissement de relations entre les parlements de différents pays et l’ONU, ce qui contribue au renforcement de la coopération internationale. 

Un échange de vues non politisé, respectueux et constructif entre parlementaires permet en effet de trouver des solutions pratiques afin de résoudre un large éventail de problèmes internationaux urgents, a fait valoir le représentant, en estimant que l’adoption par consensus de la présente résolution aura pour effet de renforcer le rôle des institutions parlementaires, la compréhension mutuelle et le dialogue entre les États.  Il a ensuite souligné qu’il est inacceptable d’imposer des sanctions aux parlementaires, jugeant essentiel que les États qui organisent des événements internationaux sur leur territoire donnent aux élus la possibilité d’y participer et de présenter leurs points de vue sur une base non discriminatoire. 

M. M.D PACHECO, Observateur de l’Union interparlementaire (UIP), a souligné que les gouvernements ne pourraient pas s’acquitter de leur tâche sans l’appui des parlements.  Les assemblées les obligent à respecter le principe de redevabilité et à répondre de leurs actes, des réussites et échecs au nom de leur peuple, a rappelé l’Observateur.  C’est aux parlements de suivre de près les faits et gestes du gouvernement en posant des questions, en préparant des auditions et en rédigeant des rapports indépendants et en dialoguant avec les électeurs.  Cependant, cette tâche de supervision est un combat difficile car de nombreux parlements manquent de ressources.  Pourtant, les parlementaires jouent un rôle essentiel pour ce qui est de l’adoption et de la mise en œuvre des déclarations et des résolutions qui sont adoptées à l’Assemblée générale.  En outre, il est important que l’ONU entretienne une bonne relation avec les parlements et l’Union interparlementaire. 

Le monde a besoin d’un dialogue interparlementaire comme un axe incontournable du système de gouvernance multilatérale de l’ONU, a enchainé l’Observateur renvoyant au conflit en Ukraine qui est un signe de l’instabilité du monde.  Cette instabilité prouve que l’on ne peut pas se fier uniquement aux gouvernements, et l’UIP avec ses 178 membres est en première ligne de l’organisation d’un dialogue interparlementaire depuis le début du conflit en Ukraine.  Ses membres ont créé un groupe de travail pour trouver des solutions à ce qui s’apparente à un échec du dialogue et de la politique, et l’UIP enverra une délégation de haut niveau à Moscou et à Kiev pour promouvoir le dialogue entre les deux pays afin de faire émerger une solution à ce conflit.  L’Observateur a également dit que pour lutter contre les effets pervers de la mondialisation qui affaiblit les gouvernements et les organisations multilatérales comme l’ONU, il faut un travail conjoint permettant de parvenir à la paix, à la démocratie et au développement.  Beaucoup reste également à faire pour renforcer le partenariat stratégique ONU-UIP qui va déjà dans la bonne direction, a-t-il ajouté. 

M. MARCUS BRAND, Directeur de programme Myanmar de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale, a expliqué qu’en tant qu’organisation intergouvernementale qui rassemble 34 États membres dédiés au renforcement de la démocratie, l’Institut soutient fermement la coopération parlementaire en tant qu’élément clef de l’aide à la démocratie.  Il a également parlé de l’importance des législatures pour faire progresser la paix et la sécurité, le développement durable et les droits humains.  L’efficacité des processus et des institutions parlementaires, en termes de représentation, de contrôle, d’élaboration des lois, de processus budgétaires, est au cœur de l’évaluation de la qualité de la démocratie, comme en témoignent les rapports et indices établis par l’Institut, a-t-il fait valoir.  Depuis 2019, l’organisation appuie la mise en œuvre d’INTER PARES, le programme phare de l’Union européenne pour le renforcement parlementaire, qui à ce jour facilite 15 partenariats entre les parlements des États membres de l’UE et les parlements partenaires du monde entier, a encore expliqué M. Brand.  Il a indiqué que l’Institut et l’UIP collaborent étroitement à la mise en œuvre de priorités communes, a-t-il précisé.  Il s’agit notamment de mettre la technologie numérique au service de l’innovation parlementaire et de créer des indicateurs permettant aux parlements d’évaluer et de renforcer eux-mêmes leur rôle fondamental en tant qu’institutions par excellence de la gouvernance démocratique. 

Se penchant sur la situation du Myanmar au lendemain du coup d’État, M. Brand a souligné que le Parlement sur place a continué de fonctionner dans des circonstances extraordinairement difficiles.  L’UIP et de nombreux parlements dans le monde ont joué un rôle essentiel en soutenant les représentants légitimement élus du Myanmar.  Cela souligne l’importance d’apporter protection et assistance aux parlements et aux parlementaires menacés, a estimé le Directeur qui a salué le leadership de l’UIP à cet égard. 

M. QAZI SHAUKAT FAREED, Assemblée parlementaire de la Méditerranée (APM), a indiqué que l’APM, qui regroupe 27 nations de la région euro-méditerranéenne faisant partie de la communauté de l’UIP, adhère pleinement aux principes inclus dans la résolution.  Le parlementarisme constitue l’âme de la démocratie, a-t-il poursuivi, en se réjouissant de voir l’ONU et les États Membres reconnaître son rôle.  S’agissant des parlements et des parlementaires, il a noté que l’UIP a un rôle important à jouer pour aider les États Membres à appliquer les mesures prévues dans la résolution, tout comme les organes parlementaires régionaux qui facilitent l’échange d’informations, une meilleure coordination et des mécanismes de consultation.  L’APM a en outre un rôle stratégique essentiel à jouer pour promouvoir la paix et la sécurité, la protection de la démocratie et de l’état de droit, le développement durable, la lutte contre les changements climatiques et les droits humains, a-t-il ajouté. 

Explication de position

Suite à l’adoption de la résolution, la représentante de la Hongrie s’est dissociée du paragraphe 16 de la résolution qui fait référence au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les enfants, l’embargo sur les armes et le financement des Chabab au centre des activités du Comité des sanctions pour la Somalie

9071e séance, après-midi
CS/14942

Conseil de sécurité: les enfants, l’embargo sur les armes et le financement des Chabab au centre des activités du Comité des sanctions pour la Somalie

Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, l’exposé trimestriel de la Présidente du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 751 (1992) concernant la Somalie, l’occasion pour Mme Geraldine Byrne Nason, de l’Irlande, de faire état d’activités centrées pour l’essentiel sur la situation alarmante des enfants dans ce pays en transition, l’embargo sur les armes et le financement du groupe armé des Chabab, qui a poursuivi ses attaques meurtrières pendant la période à l’examen.

Détaillant les travaux de son Comité, Mme Byrne Nason -dont c’était la dernière intervention à ce titre- a indiqué que ses membres se sont réunis deux fois entre le 25 février et le 21 juin: la première fois en visioconférence à huis clos, le 27 mai, pour entendre un exposé de la Représentant spéciale pour les enfants et les conflits armés, Mme Virginia Gamba; la seconde fois, le 3 juin, en consultations informelles, pour entendre un exposé du Groupe d'experts sur la mise à jour de son rapport à mi-parcours et les recommandations qui y sont contenues.

Selon la Présidente, Mme Gamba a informé le Comité 751 des tendances relatives aux violations commises contre les enfants en Somalie, qui, a-t-elle précisé, restent à des niveaux élevés et préoccupants.  La Représentante spéciale a également présenté des recommandations au Comité.  S’agissant du Groupe d'experts, Mme Byrne Nason a précisé que ses travaux ont couvert les questions liées à l'embargo sur les armes, le financement des Chabab, les questions humanitaires et l’exportation de charbon de bois impliquant le navire MV Fox.  Elle a ajouté que le Comité examine actuellement les cinq recommandations que lui a adressées le Groupe d’experts. 

À ces deux occasions, a poursuivi la Présidente, les membres du Comité ont exprimé l'avis que la conclusion heureuse de l’élection présidentielle, qui a porté au pouvoir M. Hassan Sheikh Mohamud, le 15 mai dernier, a offert une occasion renouvelée de coopérer et de collaborer avec le Gouvernement fédéral afin de faire avancer les questions relevant du mandat du Comité.

Au cours de la période considérée, le Comité a communiqué avec plusieurs États Membres.  Il a notamment écrit à Oman concernant le charbon de bois que recèle le navire MV Fox ancré dans les eaux territoriales de cet État et répondu à deux questions de l'Égypte sur des questions connexes à l’embargo sur les armes.  À ce propos, outre les demandes de dérogation et les notifications qu’il a reçues, le Comité a également pris connaissance du premier rapport semestriel du Gouvernement fédéral de Somalie, en application du paragraphe 44 de la résolution 2607 (2021). 

Le Comité a par ailleurs reçu deux notifications concernant les restrictions relatives aux composants des engins explosifs improvisés et a chargé le Groupe d'experts de mettre à jour sa note d’assistance No 3, qui sert de guide sur le sujet pour les États Membres.  Enfin, le Comité a reçu un rapport du Groupe d'experts sur une liste de personnes susceptibles de répondre aux critères de désignation des sanctions, a expliqué Mme Byrne Nason, avant de remercier les membres du Comité pour leur coopération avec elle ces 18 derniers mois. 

Réagissant à cet exposé, le représentant du Ghana s’est à son tour félicité de l’issue positive du processus politique en Somalie et de la formation d’un gouvernement pour restaurer l’ordre et la sécurité.  Il a cependant fait part de son inquiétude face aux attaques imputables aux Chabab, notamment pendant la période électorale, qui ont forcé plus de 17 000 personnes à fuir leurs foyers dans le sud-ouest du pays.  Il s’est aussi alarmé des attaques menées par ce groupe terroriste contre des troupes de maintien de la paix, en particulier celle lancée en mai contre des Casques bleus burundais, qui a fait plusieurs morts et blessés.  Il a formé le vœu que le soutien international aidera les autorités somaliennes à assumer l'entière responsabilité de la sécurité du pays, conformément au plan de transition.

Il s’est d’autre part déclaré préoccupé par les rapports de Mme Gamba faisant état de quelque 3 500 violations graves impliquant plus de 2 600 enfants, dont plus de 600 filles, en Somalie.  Face à ce constat, il a demandé que des mesures correctives soient prises par le Conseil et les organismes compétents des Nations Unies, avant d’exhorter toutes les parties concernées, notamment les Chabab et Daech, mais aussi l’armée fédérale et les forces de police de plusieurs États fédérés, à mettre en œuvre les plans d’action interdisant le recrutement, l'utilisation, le meurtre et la mutilation d’enfants.  À ses yeux, une action unifiée du Conseil est nécessaire pour assurer le strict respect des sanctions et exercer une pression sur toutes les parties afin de prévenir les violations graves contre les enfants.   

Sur cette même ligne, le représentant du Gabon a renouvelé son soutien aux efforts déployés par Mme Gamba pour lutter contre les violences sexuelles et autres formes d’abus dont sont victimes les enfants dans les conflits.  Il a aussi appuyé les recommandations du Groupe d’experts mandaté par le Comité 751, qui visent à assécher les sources de financement des Chabab à travers des mesures d’interdiction et de saisie d’espèces.  Toutefois, a-t-il averti, ces efforts ne seront efficaces que s’ils s’appuient sur un partage d’informations et une coopération entre le Gouvernement, les pays voisins et les partenaires internationaux. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.