En cours au Siège de l'ONU

Désarmement: les délégations de la Première Commission examinent le rôle de la Conférence du désarmement et des centres regionaux

Soixante-douzième session,
21e séance – après-midi
AG/DSI/3587

Désarmement: les délégations de la Première Commission examinent le rôle de la Conférence du désarmement et des centres regionaux

Les délégations de la Première Commission (désarmement et sécurité internationale) ont entendu, cet après-midi, le « message constructif » et l’« appel à la patience » du Président de la Conférence du désarmement et la Présidente de la Commission du désarmement.  Les deux hauts fonctionnaires des Nations Unies ont notamment indiqué que si ces deux organes peinent encore à réaliser leur mandat, négocier des traités de désarmement et soumettre à l’Assemblée générale des recommandations sur les armes classiques et nucléaires, l’une et l’autre ont obtenu des résultats tangibles en 2017.

La Première Commission a également poursuivi son débat thématique sur le désarmement régional et la sécurité au cours duquel plusieurs délégations ont souligné le rôle des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, en particulier ceux de l’Afrique et de la région de l’Asie-Pacifique. 

Présentant le rapport 2017 de la Conférence du désarmement, M. Julio Herráiz, qui préside cet organe en 2017, a signalé que si la paralysie perdure à Genève depuis plus de 20 ans, « l’heure est venue de faire passer un message constructif ».  

« Le Secrétaire général des Nations Unies l’a rappelé, nous n’avons pas d’autres options que la Conférence du désarmement pour mettre en place les instruments nécessaires au renforcement de la sécurité internationale », a-t-il ainsi rappelé. 

M. Herráiz a rapporté que les 27 États membres de la Conférence ont discuté au cours de l’année de questions de fond, et débattu notamment, sur la base des rapports de pays transmis à la Conférence, des moyens à mettre en œuvre pour avancer vers un monde sans armes nucléaires, en plaçant la discussion aux points de vue juridique et institutionnel.  Il a également fait savoir qu’un important travail d’examen des définitions relatives à un traité interdisant la production des matières fissiles avait aussi été effectué pendant l’année.  « L’examen du volet politique d’un éventuel traité de ce type, vous ne l’ignorez pas, a démontré le besoin de discuter du sujet sous tous ses aspects, y compris technique », a ajouté le Président de la Conférence du désarmement.

Partisan d’une vision « constructive et commune » pour redonner un mandat de négociations à la Conférence du désarmement, M. Herráiz a, en outre, souligné que l’analyse poussée d’un traité interdisant la production « passée et à venir de matières fissiles à des fins militaires et qui serait non discriminatoire, vérifiable et juridiquement contraignant », permettrait de relancer « ce mécanisme essentiel de désarmement qu’est la Conférence ».

De son côté, Mme Gabriela Martinic, Présidente de la Commission du désarmement, a salué le fait que la Commission, qui est un organe délibérant qui a été créé pour fournir des recommandations à l’Assemblée générale, était partiellement sortie de l’impasse en 2017.  « La patience a été payante puisque nous sommes parvenus à nous entendre sur des mesures de confiance dans le domaine des armes classiques », a-t-elle dit, regrettant néanmoins que la paralysie ait perduré pour ce qui concerne des recommandations sur les armes nucléaires. 

En ce qui concerne le désarmement régional et la sécurité, les délégations du Togo et du Népal ont défendu l’utilité des activités des centres pour le désarmement et la paix qu’abritent leurs capitales.

« Le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique de Lomé joue un rôle important dans le contexte africain où la possession et la circulation illicites des armes de tout genre par des acteurs non étatiques posent d’énormes défis sécuritaires à nos États », a notamment indiqué le délégué togolais, qui a en outre salué l’appui du Centre à la Commission de l’Union africaine dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, plus particulièrement l’ambition de faire « taire les armes d’ici à 2020 ».  La contribution du Centre a également été remarquable dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel à travers la fourniture d’une assistance technique visant à améliorer la lutte contre la circulation illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC), a-t-il ajouté. 

« Les approches régionale et globale du désarmement et de la non-prolifération sont complémentaires et devaient à ce titre être poursuivies simultanément pour promouvoir la paix et la sécurité régionales et internationales », a expliqué pour sa part le représentant népalais.  Il a indiqué que c’est dans cet esprit que son pays encourage les travaux du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique de Katmandou.

Les deux représentants ont également appelé au renforcement des capacités, notamment financières, des centres régionaux et du partage des bonnes pratiques entre ces centres, les États Membres, en particulier ceux de leur région, ainsi que les ONG et les fondations internationales, étant invités à verser des contributions volontaires, « qui sont les seules ressources des centres », pour renforcer leurs programmes d’activité et en faciliter l’exécution.

Par ailleurs, l’Algérie a attiré l’attention sur les risques associés à la prolifération de tous les types d’armes classiques en Afrique du Nord et au Sahel, son représentant ayant souligné le lien étroit entre groupes terroristes, crime transnational organisé, trafic de drogue et réseaux de contrebande.  « Compte tenu de la gravité de la situation dans ces régions, l’assistance technique et financière fournie par les Nations Unies et les organisations internationales compétentes est essentielle pour renforcer les capacités des pays du Sahel pour lutter contre le trafic illicite des armes classiques, et, partant, pour démanteler les réseaux terroristes organisés », a-t-il insisté.

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 25 octobre, à 15 heures.

QUESTIONS A L’ORDRE DU JOUR ET PRESENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RESOLUTION ET DE DECISION DEPOSES AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Mécanisme de désarmement

Table ronde

M. JULIO HERRÁIZ, Président de la Conférence du désarmement, a présenté le rapport 2017 de la Conférence du désarmement, en signalant que si la paralysie perdurait à Genève depuis plus de 20 ans, l’heure était venue de faire passer un message constructif et de lancer un nouvel appel à la patience.  Le Secrétaire général des Nations Unies l’a rappelé, nous n’avons pas d’autres options que la Conférence du désarmement pour mettre en place les instruments nécessaires au renforcement de la sécurité internationale, a-t-il souligné.  Le Président de la Conférence du désarmement a ainsi indiqué que cette année, les 27 États membres de la Conférence avaient insisté sur la nécessité d’étendre sa composition pour que ses travaux reflètent les aspirations d’un nombre plus grand d’acteurs ainsi que l’évolution de l’environnement sécuritaire global. 

Le rapport 2017 de la Conférence du désarmement est certes un document de procédure qui ne comporte pas de recommandations, mais cela n’a pas empêché nos discussions d’aborder des questions de fond, a fait remarquer M. Herráiz.  Sur la base des rapports transmis à la Conférence, nous avons débattu des moyens à mettre en œuvre pour avancer vers un monde sans armes nucléaires, en plaçant la discussion aux points de vue juridiques et institutionnels, a-t-il ainsi dit.  Appelant à davantage de travail exploratoire en 2018, cela en tenant compte du fait que le désarmement nucléaire est une priorité pour les États Membres, il a indiqué qu’un important travail d’examen des définitions relatives à un traité interdisant la production des matières fissiles avait été effectué en 2017.  L’examen du volet politique d’un éventuel traité de ce type, vous ne l’ignorez pas, a démontré le besoin de discuter du sujet sous tous ses aspects, y compris technique, a ajouté le Président de la Conférence du désarmement.

Concernant les garanties négatives de sécurité, il a signalé que les débats avaient surtout porté sur l’étude des garanties qui sont fournies actuellement, et, qu’au chapitre de la prévention d’une course aux armements dans l’espace, des divergences très nettes persistaient, « en dépit de la reconnaissance de la nécessité d’un consensus pour améliorer l’utilisation pacifique et à des fins de développement de l’espace extra-atmosphérique ».  M. Herráiz a conclu son intervention en appelant au renforcement d’une vision constructive et commune pour redonner un mandat de négociations à la Conférence du désarmement.  Il a estimé à cet égard que l’analyse poussée d’un traité interdisant la production passée et à venir de matières fissiles à des fins militaires et qui serait non discriminatoire, vérifiable et juridiquement contraignant, permettrait de relancer « ce mécanisme essentiel de désarmement qu’est la Conférence ».

Mme GABRIELA MARTINIC, Présidente de la Commission du désarmement, a fait une brève intervention en rappelant que la Commission, un organe délibérant qui a été créé pour fournir des recommandations à l’Assemblée générale, était partiellement sortie de l’impasse en 2017.  La patience a porté ses fruits puisque nous sommes parvenus à nous entendre sur des mesures de confiance dans le domaine des armes classiques, a-t-elle dit, regrettant néanmoins que la paralysie ait perduré pour ce qui concerne des recommandations sur les armes nucléaires.  Pour Mme Martinic, le dialogue, l’écoute mutuelle et la compréhension des préoccupations de tout un chacun sont les moyens de sortir de l’impasse et de retrouver la voie du compromis.  « Cette année, nos débats ont été approfondis et, au final, nous nous sommes entendus: c’est cela le multilatéralisme, un cadre qui permet toujours de trouver des solutions acceptables par tous », a-t-elle déclaré.

M. TREVOR FINDLAY, Président du Conseil consultatif pour les questions de désarmement, a indiqué que le Secrétaire général avait demandé au Conseil consultatif de se pencher sur les questions technologiques liées aux attaques cybernétiques.  À cet égard, la décision a notamment été prise de mettre en place un groupe consultatif scientifique pour se tenir au courant des évolutions dans ce domaine.  Le Conseil a aussi décidé de se renforcer en faisant entrer des spécialistes des technologies de l’information et des communications, et une attention toute particulière a été portée sur les menaces cybernétiques visant les centrales nucléaires.  Il a indiqué que le Conseil voudrait que l’ONU prenne des décisions sur la question du cyberterrorisme.  À ses yeux, tout l’enjeu consiste à renforcer la cybersécurité tout en préservant les libertés civiles.  En matière de sécurité nucléaire, il a signalé que le Conseil avait besoin davantage de ressources.  

Le Président du Conseil consultatif a ensuite estimé que « l’intelligence artificielle est à la fois une difficulté et une occasion à saisir pour les États Membres ».  Il a reconnu que la mise en place de systèmes d’armes létales autonomes remet pas mal de choses en question, et a fait savoir que le Conseil a proposé que les États Membres demandent à l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) de réaliser une étude sur les conséquences de l’intelligence artificielle à l’échelle internationale.

Pour ce qui est de l’éducation en matière de désarmement, a-t-il enchainé, le Conseil pense que l’étude de 2002 en la matière est toujours pertinente et propose qu’elle soit de nouveau publiée et distribuée lors de toutes les réunions pertinentes des Nations Unies.  Il s’est dit impressionné par la qualité des recherches de l’UNIDIR et le nombre de projets initiés, ajoutant que le conseil d’administration a demandé qu’une subvention soit validée, pour que le financement de l’institut soit garanti.  Rappelant que l’UNIDIR a besoin d’effectifs nécessaires pour mener à bien ses missions, M. Findlay a considéré qu’une subvention annuelle devrait couvrir tous les frais de fonctionnement.

M. JARMO SAREVA, Directeur de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), a d’abord salué l’engagement sans faille du personnel de l’UNIDIR pour lui permettre de poursuivre ses activités.  « Aucun financement n’aurait été suffisant, sans la participation et la souplesse dont tout le monde fait preuve dans ce petit institut ou les problèmes surgissent à l’improviste », a-t-il indiqué.  Il a expliqué que le travail de l’Institut s’axe autour de cinq questions principales: les armes de destruction massive, les armes classiques, les problèmes émergents de sécurité, la sécurité et la société et, enfin, la machinerie de désarmement.

Rappelant que le financement du fonctionnement opérationnel de l’UNIDIR ne pouvait pas être tenu pour acquis, il a appelé à faire preuve de vigilance pour garantir son autonomie, précisant que même si l’UNIDIR avait réussi à mobiliser des financements affectés, il fait toujours face à des difficultés de financement de l’infrastructure.  Il a déploré que les États rechignent à financer autre chose que des activités limitées dans le temps, précisant que 80% du surplus du 1,1 million de dollars qui figure dans les états financiers de l’Institut reflètent des engagements pris pour l’année prochaine et pas une cagnotte affectable à loisir.  Il a insisté sur l’importance d’attribuer une subvention à l’UNIDIR, appelant les États à débattre de cette possibilité, qui pourrait garantir l’avenir de l’UNIDIR, devant la Cinquième Commission. 

M. Sareva a ensuite rappelé que l’UNIDIR mène des recherches et effectue des analyses factuelles afin de contribuer à la paix et à la sécurité en aidant la communauté internationale à améliorer ses pratiques en matière désarmement.  Il a aussi indiqué qu’en 2017, le programme d’armes classiques de l’UNIDIR est entré en partenariat avec 76 entités publiques, dont un grand nombre opère dans les pays du sud.  « Cinq des 13 gouvernements avec lesquels nous travaillons sont en Afrique subsaharienne », a-t-il précisé. 

Suite du débat thématique sur le désarmement régional et la sécurité

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a déploré que les situations dans le nord-est de l’Asie et au Moyen-Orient restent extrêmement tendues et imprévisibles.  Concernant la République populaire démocratique de Corée (RPDC), il a considéré que le rôle de médiateur joué par le Secrétaire général ne devait pas être sous-estimé.  Il a ensuite insisté sur la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, y voyant « une étape vitale », et « un des moyens les plus efficaces d’empêcher la prolifération ».  Le délégué a aussi mis en évidence les bienfaits du Plan d’action global commun, qui, a-t-il indiqué, a un impact significatif sur la normalisation de la situation dans la région et peut même entraîner une revitalisation économique.  « Si nous sauvons le Plan d’action global commun et que nous nous assurons de sa mise en œuvre appropriée, nous pouvons montrer à Pyongyang la bonne voie à suivre, avec une solution juridique qui peut aussi fonctionner de manière pragmatique » a-t-il estimé.  

Le représentant a par ailleurs indiqué que le Kazakhstan avait étendu sa coopération avec le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique pour soutenir la portée de leurs activités de vulgarisation, ajoutant qu’il contribuait également au Programme de bourses d’études des Nations Unies sur le désarmement.

M. OSAMA ESMAIL ABOHEGAZY HASSAN (Égypte) a déclaré que son pays continuerait à œuvrer à la mise en œuvre de la résolution de 1995 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) cherchant à porter création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Nous croyons fermement que les Nations Unies et le Secrétaire général ont un rôle central à jouer dans l’appui nécessaire et urgent à la relance de ce processus politique, a-t-il ajouté.  À ses yeux, convoquer une conférence sur la création d’une telle zone au Moyen-Orient devrait être considéré par tous les États Membres comme une chance historique à saisir pour progresser vers la réalisation de la paix durable et de la sécurité collective pour tous les pays de la région.  

M. AMIR SAEED (Pakistan) a rappelé que les mesures de confiance avaient prouvé leur efficacité au niveau régional et sous-régional, soulignant qu’elles étaient adaptées au contexte spécifique.  Il a estimé qu’elles devaient d’abord constituer de simples arrangements sur la transparence, l’ouverture et la réduction des risques, avant que les États concernés se trouvent eux-mêmes dans une position leur permettant d’aller plus loin dans des mesures concrètes de contrôle des armes et de désarmement.  Il a insisté sur le fait que ces mesures de confiance pouvaient créer les conditions favorables à une résolution pacifique des conflits ou faciliter des solutions dans des situations pouvant déboucher sur des frictions internationales.

Le représentant a ensuite indiqué que son pays présenterait ses trois projets de résolution annuels qui reconnaissent l’importance d’une approche régionale du contrôle des armes, du désarmement et des mesures de confiance destinées à renforcer la paix et la stabilité.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a indiqué que face à l’exode sans précèdent de Rohingya venant du Myanmar, les États Membres devraient reconsidérer tout transfert d’armes vers des États susceptibles de les utiliser en violation du droit militaire.  Il a poursuivi en affirmant que la notion de stabilité stratégique fondée sur la dissuasion nucléaire est une source de préoccupation.  À ses yeux, le dialogue et la diplomatie sont les moyens les plus efficaces pour créer des conditions propices à de véritables progrès en matière de sécurité, évoquant notamment la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Le Bangladesh a parlé du rôle de premier plan joué par les centres régionaux pour la paix et le désarmement, citant notamment leur capacité à réunir des experts et à discuter d’intérêts régionaux.  Il a précisé que grâce à l’assistance technique fournie par ceux-ci, le Bangladesh avait pu combler des lacunes persistantes pour se mettre en conformité avec le Traité sur le commerce des armes et relever certains des défis liés aux armes légères et de petit calibre.  Il a ensuite appelé les centres régionaux à redoubler d’efforts pour disséminer les travaux de recherche en matière de désarmement.

M. MICHEL TOMMO MONTHE (Cameroun) s’est exprimé en sa qualité de Président en exercice du Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale (UNSAC).  Il a présenté le projet annuel de résolution intitulé « Mesures de confiance à l’échelon régionale: activité de l’UNSAC », qui rappelle les principes directeurs d’un désarmement général et complet, ainsi que le rôle de l’UNSAC dans le désarmement, la non-prolifération et le développement de la sous-région.  Il a indiqué comme élément nouveau du texte, la prise en compte de la revitalisation des activités de l’UNSAC et l’entrée en vigueur, le 8 mars 2017, de la Convention de Kinshasa sur le contrôle des armes légères et de petit calibre.  Le projet de résolution encourage d’ailleurs les États membres de l’UNSAC et autres États intéressés à soutenir financièrement l’application de la Convention.  

Le représentant a précisé que le texte réaffirme aussi le soutien de l’UNSAC pour promouvoir des mesures de confiance au niveau régional et sous-régional afin d’atténuer les tensions et les conflits, qu’il salue aussi l’adoption d’un plan d’action pour la mise en œuvre d’une stratégie régionale contre le terrorisme et le trafic d’armes légères et de petit calibre en Afrique centrale.  Le projet appelle aussi la communauté internationale à soutenir les États concernés pour mettre en œuvre les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, appelant aussi le Conseil de sécurité à mandater la MINUSCA afin que celle-ci appuie les forces de défense et de sécurité centrafricaines.

Appelant par ailleurs les États Membres à honorer leurs engagements financiers pour assurer le fonctionnement du Centre interrégional de coordination pour la sécurité maritime dans le Golfe de Guinée et le Centre régional de sécurisation maritime de l’Afrique centrale (CRESMAC), le projet de résolution prie aussi le Secrétaire général et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) de continuer d’aider les pays d’Afrique pour faire face aux problèmes des réfugiés, « fardeau pour des économies déjà très faibles ». 

Enfin, le texte salue les efforts déployés par l’UNSAC pour faire face aux menaces qui pèsent sur la sécurité transfrontalière en Afrique centrale, notamment les activités de Boko Haram et de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), ainsi que les actes de piraterie ou de vols à main armée commis en mer dans le Golfe de Guinée.

Mme SÁNCHEZ RODRÍGUEZ (Cuba) a déclaré que la région de son pays, « en tant que région de paix », s’engageait depuis des décennies en faveur du multilatéralisme pour ce qui est de la réalisation du désarmement général et complet, y compris au plan régional.  Les efforts régionaux de désarmement doivent prendre en compte les particularités de chaque région en matière de désarmement et se concentrer sur le renforcement de la confiance étatique à cette échelle, a-t-elle ajouté.  La représentante a ainsi considéré que la mise en œuvre régionale de telles mesures de confiance contribue à éviter les conflits et à apaiser les tensions naissantes.  Il faut, a-t-elle poursuivi, garantir le respect des décisions régionales visant, comme les zones exemptes d’armes nucléaires, à l’instauration d’une paix durable.  Forts de l’expérience du Traité de Tlatelolco ayant instauré une telle zone en Amérique latine et les Caraïbes, nous plaidons pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, a-t-elle dit.  Elle a conclu en appelant à l’allocation de ressources suffisantes au bon fonctionnement des Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement. 

M. REDHA (Iraq) a réitéré l’importance que revêt pour son pays la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, y voyant la pierre angulaire du désarmement dans la région, ainsi qu’une mesure essentielle pour arriver à une paix et une sécurité nationales et internationales.  Il a regretté qu’aucun consensus n’ait été trouvé lors la Conférence d’examen de 2015.  « Si nous échouons sur cette question, a-t-il averti, l’instabilité et les tensions dans la région se poursuivront, et le régime de non-prolifération encourra des dangers, ce qui nuira à l’universalité du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) ».  Pour l’Iraq, l’adhésion d’Israël au Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et le placement de ses installations nucléaires sous la surveillance de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sont, à cet égard, des prérequis incontournables pour désamorcer les tensions au Moyen-Orient.

M. ABDELKARIM AIT ABDESLAM (Algérie) a mis l’accent sur la dégradation de la situation sécuritaire dans l’environnement voisin de son pays.  L’Algérie a alerté la communauté internationale sur les risques associés à la prolifération incontrôlée de tous les types d’armes classiques en Afrique du Nord et au Sahel, a-t-il dit, soulignant le lien étroit entre groupes terroristes, crime transnational organisé, trafic de drogue et réseaux de contrebande.  Le représentant algérien a estimé que, compte tenu de la gravité de la situation dans ces régions, l’assistance technique et financière fournie par les Nations Unies et les organisations internationales compétentes était essentielle pour renforcer les capacités des pays du Sahel pour lutter contre le trafic illicite des armes classiques, et, partant, pour démanteler les réseaux terroristes organisés.  Au sujet de la situation en Libye, il a estimé que la solution à la crise dans ce pays ne pourrait être trouvée qu’à travers le dialogue et la réconciliation entre « nos frères et voisins libyens ».  Il a également réaffirmé l’engagement de son pays, très impliqué dans le dialogue inter-malien, à parvenir à un accord complet de paix et de réconciliation nationale entre le Gouvernement et les autres parties maliennes.  Par ailleurs, il a annoncé que son pays présenterait cette année encore le projet de résolution sur le renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région méditerranéenne.  

Mme SANDRA OWEIDA (Émirats arabes unis) a insisté sur le droit de chaque État à développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, notant que les Émirats arabes unis sont considérés à cet égard comme « un modèle dans la région ».  Elle a affirmé que son pays soutenait le dialogue, la consultation et tous les efforts pour parvenir à des progrès dans la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  La représentante a aussi fait part de son espoir que des « pas positifs et sérieux » soient accomplis dans la mise en œuvre des mécanismes et des résultats de la Conférence des parties chargée de l’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires de 2010.  Elle a ensuite demandé de s’assurer que la conférence sur la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient se tienne avec la participation de tous les pays de la région.  À cet égard, Mme Oweida a demandé à Israël d’accéder au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ».  

Poursuivant, la représentante a souligné l’importance de l’adhésion et de l’engagement entier de l’Iran aux clauses du Plan d’action global commun, alors que ses activités nucléaires et balistiques continuent d’être « une source de préoccupation qui mine la sécurité et la stabilité dans la région ».  Elle a espéré que la mise en œuvre de ces instruments se reflètera dans le comportement de l’Iran dans la région, affirmant par ailleurs le soutien de son pays à la stratégie annoncée par les États-Unis pour « mettre fin aux activités iraniennes qui sapent la sécurité et la stabilité de la région ».  La conformité et la mise en œuvre pleine et transparente du Plan d’action global commun sont essentielles au renforcement de la confiance, a-t-elle à nouveau insisté.

M. ENRI PRIETO (Pérou) a appelé à une coordination accrue dans la conduite des actions internationales de désarmement, lesquelles « ne sauraient être menées séparément de la réalisation du développement durable ».  Il a ajouté que son pays soutenait les travaux du centre régional pour la paix et le désarmement de Lima, grâce auquel, cette année, a-t-il dit, les pays de la région ont enregistré d’importants progrès dans l’application des normes de désarmement et de non-prolifération, y compris la résolution 1540 du Conseil de sécurité sur les armes de destruction massive et le Programme d’action de l’ONU de lutte contre les armes légères et de petit calibre (ALPC).  Au Pérou, le centre régional nous a aidés à détruire 450 armes légères et à sensibiliser les jeunes au lien entre désarmement des communautés et mise en œuvre des objectifs de développement durable à ce niveau, a-t-il indiqué.  Il a souligné que son pays présentait cette année encore le projet de résolution sur « le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes » de Lima.

M. ESSOHANAM PETCHEZI (Togo) a déclaré que le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique, « que le Togo a l’honneur d’abriter », jouait un rôle important dans le contexte africain « où la possession et la circulation illicites des armes de tout genre par des acteurs non étatiques posent d’énormes défis sécuritaires à nos États ».  Il a salué les actions du Centre, notamment l’appui qu’il a continué d’apporter en 2017 à la Commission de l’Union africaine dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, plus particulièrement l’ambition de faire « taire les armes d’ici à 2020 ».  La contribution du Centre a également été remarquable dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel à travers la fourniture d’une assistance technique visant à améliorer la lutte contre la circulation illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC), a-t-il ajouté. 

Le représentant a par ailleurs signalé que le Togo avait apporté un appui technique pour le marquage et l’enregistrement des armes, une formation aux normes internationales sur le contrôle des armes légères et l’outil d’évaluation qui s’y rapporte ayant été organisée à Lomé, en novembre 2016, à l’intention des responsables du département chargé de la sécurité.  Enfin, il a appelé les délégations à adopter par consensus le projet de résolution présenté par le Nigéria sur le centre régional de Lomé et qui lance un appel pressant aux États Membres à honorer leurs contributions afin de lui permettre de mener à bien ses activités.  

M. NICOLAS COUSSIÈRE (France) a souligné que les outils de coopération de l’Union européenne (UE) dans le domaine du désarmement étaient fortement imprégnés de la dimension régionale.  À titre d’exemple, a-t-il dit, la France participe activement au programme d’assistance de l’Union destiné à favoriser l’entrée en vigueur, l’universalisation rapide et la mise en œuvre effective du Traité sur le commerce des armes.  Cela concerne le Sénégal, le Burkina Faso, la Sierra Leone et les Philippines, a-t-il précisé.  Le représentant a également rappelé l’implication active de son pays dans la montée en puissance de la Force conjointe du G5 Sahel, la France tâchant de renforcer la présence militaire du Tchad, du Niger, du Burkina Faso, du Mali et de la Mauritanie dans les zones frontalières en améliorant leur coordination grâce à une chaine de commandement unique.  Il a assuré que ce mode d’action était efficace dans la lutte contre le terrorisme mais aussi pour limiter les nombreux trafics transfrontaliers, en tout premier lieu celui des armes, des munitions et des explosifs.  Par ailleurs, il a indiqué que la France, comme les autres États Membres de l’Union européenne, apportait un fort soutien à l’établissement de mesures de transparence et de renforcement de la confiance adaptées à la situation géostratégique de la région, ainsi qu’à tous les instruments ayant recueilli le consensus au sein de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  M. Coussière a en outre estimé que la lutte contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) était un exemple d’application complémentaire d’initiatives mondiales, régionales et sous-régionales de non-prolifération et de désarmement.

M. TALAL S. S. S. AL FASSAM (Koweït) a insisté sur l’importance de créer des zones exemptes d’armes nucléaires, estimant qu’elles constituent des pas importants vers un monde sans armes létales et la mise en œuvre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Il a indiqué que depuis 1995, le Koweït a participé avec les États arabes à 13 réunions des comités préparatoires, à 22 réunions de la Première Commission et à trois Conférences des Parties chargés de l’examen du TNP ».  En dépit des efforts déployés, a-t-il déploré, la résolution de 1995 appelant à créer une zone exempte au Moyen-Orient n’est toujours pas entrée en vigueur.  « Quand je regarde cette salle, a-t-il poursuivi, je vois des collègues qui savent pertinemment que nous étions prêts en 2010 à répondre à l’aspiration de nos peuples et à tenir une conférence visant à créer cette zone ».  Il a accusé Israël d’empêcher la création de cette zone, se disant également préoccupé face au refus d’Israël de signer les accords de garantie généralisée de l’AIEA et le TNP

M. PYE SOE AUNG (Myanmar) s’est dit alarmé par la vaste étendue des conséquences humanitaires et socioéconomiques provoquées par la prolifération des armes de destruction massive.  Pour lui, l’approche régionale joue « un rôle pivot » dans la mise en œuvre du désarmement global et des instruments de non-prolifération par le biais du renforcement des capacités nationales et des initiatives de vulgarisation et plaidoyer.  La transparence et les mesures de confiance entre les pays de la région sont aussi une clef pour empêcher l’escalade des tensions, a noté le représentant.  Il a ensuite salué l’assistance apportée par le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique, pour appuyer les efforts nationaux et régionaux de contrôle des armes, de désarmement et de la non-prolifération, ainsi que pour promouvoir le dialogue, des mesures de confiance, et l’éducation à la paix et au désarmement.

Présentant ensuite les efforts réalisés au plan national, le représentant du Myanmar a cité l’organisation d’une table ronde sur la mise en œuvre de la résolution 1540 du Conseil de sécurité, en partenariat avec le Bureau des affaires de désarmement de l’ONU, ou encore la mise en place d’un atelier de renforcement des capacités sur les armes légères et de petit calibre, deux événements organisés au début de l’année 2016.  M. Pye a ensuite souligné l’importance des zones exemptes d’armes nucléaires, en particulier de la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est, qui « contribuent significativement au renforcement du désarmement nucléaire mondial ».  Il s’est également réjoui des négociations fructueuses ayant mené au Plan d’action global commun.  

M. FARID JABRAYILOV (Azerbaïdjan) a déclaré que les efforts de désarmement de son pays étaient largement sapés par l’agression continue de l’Arménie contre son pays.  Mon pays est en état de guerre, a-t-il ajouté, une guerre qu’il n’a pas déclenchée et qu’il s’efforce de faire cesser en s’engageant de manière constructive en faveur de la restauration de son intégrité territoriale.  Le représentant a condamné « l’occupation par l’Arménie de territoires reconnus internationalement comme faisant partie de l’Azerbaïdjan », cette occupation constituant, selon lui, une violation flagrante du Traité sur les forces armées conventionnelles dans la région du Caucase du Sud.  Il a accusé l’Arménie de fournir à l’ONU de fausses informations sur ses dotations et activités militaires vis-à-vis de la région et de saper les mesures de confiance établies pour faciliter le retour à la stabilité.  La confiance entre nos deux pays ne sera restaurée qu’à partir du moment où l’Arménie aura retiré ses forces armées des territoires occupés d’Azerbaïdjan, et que ce pays se sera résolu à participer de manière constructive à des négociations sur le règlement du conflit en cours, a-t-il souligné.

M. THAPA (Népal) a estimé que les approches régionale et globale en matière de désarmement et de non-prolifération étaient complémentaires et devaient à ce titre être poursuivies simultanément pour promouvoir la paix et la sécurité régionales et internationales.  Il a expliqué que c’est ainsi que le Népal encourageait les travaux de centres régionaux qui combinent les deux approches et appuient le rôle des femmes, des jeunes, de la société civile, du secteur privé et des universités pour renforcer la confiance mutuelle des acteurs de terrain du désarmement et du développement.  Il a par conséquent appelé au renforcement des capacités, notamment financières, des centres régionaux et du partage des bonnes pratiques entre ces centres.  Selon lui, l’accent doit être notamment mis sur l’éducation aux enjeux du désarmement, afin de changer les mentalités tant des populations que des décideurs politiques en ce qui concerne la paix et la sécurité et les principes onusiens qui sous-tendent l’action à ce niveau.  Le délégué a indiqué qu’en tant que pays hôte, à Katmandou, du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique, le Népal présenterait, cette année encore, un projet de résolution engageant les États Membres, en particulier ceux de la région, ainsi que les organisations gouvernementales et non gouvernementales et les fondations internationales, à verser des contributions volontaires, « qui sont les seules ressources du centre », pour renforcer son programme d’activité et en faciliter l’exécution.

M. ANDRIY TSYMBALIUK (Ukraine) s’est dit fermement attaché à l’amélioration des mesures de confiance en matière de contrôle des armes classiques.  « En dépit de la situation tendue causée par l’agression russe, nous continuons à nous acquitter de nos obligations en matière de désarmement, de contrôle et de renforcement des mesures de confiance », a assuré le délégué.  Parmi les mesures d’établissement de la confiance bilatérale au niveau régional, le délégué a cité l’observation d’activités militaires au niveau tactique, l’interdiction de conduire des exercices militaires à moins de 10 kms de la frontière, et l’application des mesures de confiance aux activités des forces armées et aux autres agences de maintien de l’ordre.  Il a aussi cité la possibilité d’étendre les inspections à une période plus longue.  

Le délégué a déploré que les nombreuses propositions de l’Ukraine pour trouver des accords équivalents avec la Russie aient été rejetées.  Il a trouvé également regrettable que les Russes aient mis à mal plusieurs mesures de confiance et de coopération militaires entre les États bordant la Mer Noire.  Il a enfin reproché à la Russie de se soustraire aux contrôles de vérification et aux échanges d’information, tout spécialement dans le district militaire sud de la Russie, précisant que l’accumulation de personnel militaire dans cette zone avait permis l’invasion de la Géorgie et l’agression récente contre l’Ukraine.

M. NOJEM (Bahreïn) a plaidé pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient et, à cette fin, a exhorté Israël, seul pays de la région à ne pas l’avoir fait, à adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et à placer ses installations nucléaires sous le régime juridique de contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).  L’entêtement d’Israël de ne pas adhérer au Traité compromet l’instauration de la stabilité et d’une paix durable dans la région, a-t-il dénoncé.

M. VLADIMIR YERMAKOV (Fédération de Russie) a déploré les ingérences des occidentaux dans les affaires intérieures de son pays et dans les pays voisins de la Russie.  Il a ajouté qu’en dépit de ces agissements regrettables, la Russie restait convaincue que seule la voie politico-diplomatique permettrait de régler les différends et apaiser les tensions en Europe.  Appelant à la tenue d’un dialogue structurel, le représentant a estimé que le Forum pour la coopération en matière de sécurité de l’OSCE pouvait devenir une plateforme efficace de promotion du dialogue, même si son potentiel est actuellement affaibli par les actions unilatérales menées par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).  Il a mis en garde contre la persistance d’une rhétorique antirusse et assuré que son pays faisait tout son possible pour normaliser la situation, ses efforts portant notamment sur la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre (ALPC), le contrôle des exportations d’armes, l’échange d’expérience en ce qui concerne l’élimination d’armes classiques et la mise en œuvre d’instruments de prévention des incidents aériens et maritimes.  Il a d’autre part rejeté en bloc les « allégations injustifiées » formulées contre la Russie, d’après lesquelles d’importantes forces armées seraient concentrées à la frontière entre son pays et l’Ukraine.  D’intenses observations aériennes ont prouvé que ces allégations contre la Russie étaient totalement infondées, ce dont nos partenaires occidentaux ont peu ou pas parlé, a-t-il affirmé.

Mme SALOME IMNADZE (Géorgie) a affirmé que son pays a participé aux mécanismes d’échange d’informations.  Elle a indiqué que le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre est une préoccupation pour les régions de Géorgie et d’Ossétie du sud qui sont toujours sous occupation.  Cette région est hautement militarisée avec la présence d’armes offensives et de 6 000 militaires, a indiqué la déléguée, qui a précisé que la structure et le déploiement de ces troupes vont au-delà des objectifs défensifs, sapent les efforts de résolution pacifiques et sont destinés à déstabiliser la région.

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a déploré la hausse continue des dépenses militaires du régime israélien, ce qui contribue à déstabiliser la région du Moyen-Orient.  Il a également fustigé le comportement similaire de « deux pays du Golfe persique soutenus par les États-Unis » et qui, a-t-il jugé, ont déclenché une véritable course aux armements régionale.  Ces deux pays ont, avec leurs armes, semé la mort et la destruction au Yémen, a-t-il affirmé.  Il a estimé que pour restaurer la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient, l’élimination de toutes les armes de destruction massive d’Israël était un prérequis, et que les pays « les plus belliqueux » du Golfe persique devaient réduire drastiquement leurs dépenses militaires, y compris celles servant à importer des armes israéliennes. 

Droits de réponse

Le représentant de la République arabe syrienne a affirmé que le représentant de l’Union européenne tente désespérément d’accuser son pays au nom des États de l’UE qui sont membres de l’OTAN alors que ce sont ces États qui ont attaqué l’armée syrienne, tout en tuant des milliers de civils et « détruisant une école de sourd muets à Raqqa ». Nombre de ces pays ont accueilli des terroristes sur leur territoire, a-t-il poursuivi, leur ont fourni des informations, des armes et même du matériel toxique et chimique qui a été utilisé contre mon pays.  « Les aéroports de certains membres de l’UE sont devenus des centres de distribution pour les organisations terroristes qui sévissent dans mon pays », a-t-il encore asséné.  À ses yeux, certains membres de l’UE et du Conseil de sécurité se sont impliqués dans cette guerre et ont appuyé des groupes terroristes.  Pour lui, ce sont les mesures unilatérales prises par les pays de l’Union européennes qui sont à l’origine des souffrances.

Réagissant à l’intervention du Bangladesh, le représentant du Myanmar a affirmé que la situation humanitaire à la frontière des deux pays n’a rien à voir avec la question du désarmement.  « Nous déployons actuellement tous les moyens et ressources pour traiter la situation humanitaire à la frontière », a-t-il assuré.

Le représentant de l’Arménie a ensuite accusé l’Azerbaïdjan de dépeindre la situation de façon étrange en la liant au désarmement et à la non-prolifération. Il a notamment affirmé que le recours systématique de l’Azerbaïdjan à l’arme lourde illustre aux yeux de la communauté internationale pourquoi le leadership de ce pays a rejeté la création de tout mécanisme d’enquête sur les violations du cessez-le-feu.  L’Azerbaïdjan a également oublié le droit à l’autodétermination que le Haut-Karabagh a exercé il y a 20 ans.  Selon lui, ce pays a toujours rejeté les mécanismes d’enquête ou les questions des mesures de confiance, mais aussi échoué à donner des explications raisonnables.  « Nous ne pouvons pas accepter les violations du cesser le feu par l’Azerbaïdjan, a-t-il insisté, il doit régler le conflit de façon pacifique. »

Dans une longue réponse, le représentant de la Fédération de Russie a regretté d’entendre « autant d’accusations très étranges» sur le non-respect des accords de Minsk par la Russie.  « On a l’impression que certains ne lisent que de vieux documents et ne comprennent pas de quoi il s’agit », a-t-il affirmé.  Après être revenu sur l’ensemble des évènements qui ont secoué l’Ukraine ces dernières années, il a estimé que les États-Unis et l’Union européenne n’ont rien à voir avec les accords de Minsk.  « Si certains disent que la Russie ne respecte pas les accords de Minsk, alors ces gens n’ont jamais lu le texte des accords », a-t-il affirmé. Selon lui, non seulement « la Russie ne peut pas respecter les accords de Minsk puisque ces points ne la concernent pas », mais « la Russie ne peut pas retirer ses troupes d’Ukraine puisqu’elle n’en a pas déployé ».  Revenant sur les accusations d’agression contre la Géorgie, le représentant russe a assuré que « nos partenaires géorgiens ne nous en parlent plus ».  Il a affirmé que la Russie a fait preuve d’une « patience sans précédent » dans cette affaire et a en fait forcé l’ancien Président géorgien, Mikheil Saakashvili, à accepter la paix.  Je ne comprends pas comment on peut porter de telles accusations envers la Russie, a-t-il conclu.

Le représentant des États-Unis a déclaré que son homologue russe avait proféré de nombreuses allégations qui démontrent qu’il est temps que la Russie se conforme au droit international.  L’élargissement de l’OTAN ne se fait pas contre la Fédération de Russie, cette politique de porte ouverte ayant assuré la paix, la sécurité et la prospérité en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a-t-il notamment fait observer.  Il a également indiqué que la conclusion du Traité Ciel ouvert a découlé de l’échec des relations bilatérales impulsées dans le cadre de l’OSCE.  La Russie doit cesser d’intervenir dans les affaires intérieures de ses voisins, et ce ne sont pas les États Unis qui sont intervenus dans le territoire souverain de l’Ukraine, a-t-il aussi dit.

Le représentant de l’Azerbaïdjan s’est dit perplexe en écoutant les condamnations de l’emploi de la force de la part d’un pays « qui adopte depuis des décennies un comportement destructeur ».  L’Arménie mène un nettoyage ethnique dans un territoire occupé, a-t-il affirmé.  Elle doit respecter le droit international et retirer ses troupes militaires de mon pays afin qu’il puisse retrouver son intégrité territoriale, a-t-il aussi noté.

Le représentant du Bangladesh a répondu à son homologue du Myanmar que des informations erronées n’aidaient pas à régler la situation dans l’État de Rakhine.  La situation à notre frontière commune n’est pas gérée, dire le contraire équivaut à énoncer des contrevérités, a-t-il déclaré.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Fédération de Russie s’oppose à la prorogation immédiate du Mécanisme d’enquête sur l’utilisation des armes chimiques en Syrie

8073e séance – matin
CS/13040

Conseil de sécurité: la Fédération de Russie s’oppose à la prorogation immédiate du Mécanisme d’enquête sur l’utilisation des armes chimiques en Syrie

Affichant une fois de plus ses divisions sur le dossier syrien, le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure, ce matin, d’adopter un projet de résolution qui aurait renouvelé, pour une période d’un an, le mandat du Mécanisme d’enquête conjoint de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et de l’Organisation des Nations Unies (OIAC-ONU), arrivant à expiration le 16 novembre. 

Le texte, qui a recueilli 11 voix pour, n’a pu être adopté en raison du droit de veto exercé par la Fédération de Russie, prérogative des cinq membres permanents du Conseil.  La Bolivie, qui a également voté contre, a expliqué que ce « vote n’est pas un vote contre le Mécanisme d’enquête conjoint mais bien contre son instrumentalisation ».

La mise aux voix avait été précédée d’une motion d’ordre de la Fédération de Russie pour reporter la décision sur le projet de résolution.  Le représentant russe a défendu la séquence suivante: prendre d’abord connaissance du rapport du Mécanisme d’enquête sur les incidents de Khan Cheikhoun et de Um Housh, lequel sera publié le 26 octobre, « soit après-demain »; discuter ensuite des conclusions du rapport; et se prononcer enfin sur le mandat du Mécanisme, par exemple le 7 novembre, date que le Conseil avait déjà retenue pour examiner la question des armes chimiques en Syrie. 

« Pourquoi quelques jours à peine avant la publication du rapport du Mécanisme, on propose déjà le renouvellement de son mandat, à coups de campagnes médiatiques “intensives” », s’est demandé le représentant russe.  « Ne faisons pas semblant de ne pas comprendre ce qui se passe ici et ce qui se passe ici ne sent pas très bon », a-t-il commenté, après le rejet de sa motion d’ordre par huit voix contre, quatre voix pour et trois abstentions. 

Créé par le Conseil le 7 août 2015, le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU est « chargé d’identifier les personnes, entités, groupes ou gouvernements qui ont perpétré, organisé ou commandité l’utilisation comme armes, en République arabe syrienne, de produits chimiques, y compris le chlore ou d’autres produits toxiques ». 

Le Mécanisme est distinct de la Mission d’établissement des faits de l’OIAC, mandatée quant à elle pour enquêter sur les allégations d’utilisation de produits chimiques comme armes et identifier la substance utilisée, et non pour établir les responsabilités.  Jusqu’à présent, le Mécanisme a attribué trois attaques à l’arme chimique aux forces gouvernementales syriennes et une à Daech.

« Ce Mécanisme est-il attaqué aujourd’hui parce qu’il a échoué à déterminer la vérité ou parce que ses conclusions déplaisent à certains? » s’est demandé la représentante américaine, coauteur du projet de résolution.  Souhaitant une « nouvelle mise aux voix » très prochainement, elle a argué que « les accusations de partialité ne résistent pas à l’épreuve des faits » et que le rejet de ce texte équivaut à protéger « les auteurs des pires crimes » commis en Syrie.  Son homologue de la France a jugé que le Conseil s’était privé « de la possibilité de documenter les cas d’emploi des armes chimiques par l’armée syrienne, mais aussi par des acteurs non étatiques ».

« Ne déformez pas notre position », a rétorqué le représentant russe, en contestant également les propos du Royaume-Uni, qui a conclu que Moscou aurait « mis un terme » au Mécanisme.  La Fédération de Russie, a martelé son représentant, n’est pas « opposée » au Mécanisme mais tout simplement à une décision « précipitée ».  « Les États-Unis auraient-ils déjà lu le rapport et constaté que les preuves collectées ne résisteraient pas à la critique? » s’est-il interrogé. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations avant le vote

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a invoqué le point 3 de l’article 33 du Règlement intérieur provisoire du Conseil de sécurité, qui prévoit d’« ajourner la séance à un jour ou à une heure déterminés », en l’occurrence, au 7 novembre prochain.  « Ne faisons pas semblant de ne pas comprendre de quoi il s’agit ici.  Quel objectif sert cette résolution intempestive?  Il est clair pour beaucoup dans ce Conseil et dans cette salle, mais aussi pour les auteurs de la résolution, que l’intention de ce texte “indélicat” est de diaboliser la Russie », a accusé le représentant.  Il a réitéré la position de sa délégation selon laquelle il faut d’abord prendre connaissance du rapport du Mécanisme d’enquête conjoint de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et de l’Organisation des Nations Unies (OIAC-ONU) sur les incidents de Khan Cheikhoun et de Um Housh, lequel sera rendu public le 26 octobre, « soit après-demain ».

Le Conseil pourra alors après engager une discussion sur les conclusions du rapport et se prononcer enfin sur le mandat du Mécanisme.  « Il ne faut pas laisser accroire que le destin du Mécanisme dépend de la réunion d’aujourd’hui », a insisté le représentant.  Il a dit ne voir aucune raison pour laquelle les États-Unis avanceraient le vote.  Nous proposons donc de reporter la séance au 7 novembre, a dit M. Nebenzia, au moment où la présidence italienne a prévu de discuter du dossier chimique syrien.  Nous pourrons alors prendre une décision « pondérée » et non sous une « pression injustifiée ». 

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a rejeté la proposition de la Fédération de Russie.  Nous voulons, a-t-elle insisté, que le vote ait lieu aujourd’hui pour que le Mécanisme poursuive ses activités sans interruption.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a dénoncé « le cynisme » de la proposition russe qui veut lier deux éléments distincts: le mandat du Mécanisme et son rapport qui doit être bientôt publié.  Voter aujourd’hui est la seule manière d’éviter la politisation du Mécanisme, a-t-il argué.  Le non-renouvellement du mandat du Mécanisme ne bénéficierait qu’à ceux qui ont utilisé des armes chimiques en Syrie, à savoir Daech et le Gouvernement syrien, a martelé le représentant.

Préoccupé par le « message négatif » que le Conseil pourrait envoyer au monde avec la mise aux voix du projet de résolution, M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a approuvé la proposition russe car il est crucial que le Conseil présente un front uni sur le dossier des armes chimiques.  Le délégué a dénoncé la mise aux voix d’un texte qui ne fait certainement pas l’objet d’un consensus.

« Ce qui se passe aujourd’hui ne sent pas très bon », a commenté M. NEBENZIA (Fédération de Russie), après le rejet de sa proposition.  Il a dit ne pas comprendre pourquoi quelques jours à peine avant la publication du rapport du Mécanisme, on propose déjà le renouvellement de son mandat, soutenu par une campagne médiatique intensive de plusieurs semaines.  L’article publié dans le New York Times le 21 octobre, annonçant une « confrontation » à l’ONU, était en fait des « préparatifs de tirs d’artillerie ». 

Le représentant a tenu à rappeler que si la Mission d’établissement des faits n’avait pas été en mesure « de faire son travail », c’est parce qu’elle ne s’est pas rendue sur place.  Il a souligné que le Mécanisme d’enquête conjoint a été créé à la demande de son pays et des États-Unis et que contrairement à ce qu’affirme la déléguée américaine, Mme Nikki Haley, la Fédération de Russie ne sait rien du contenu du rapport attendu le 26 octobre.  « Pourquoi se précipiter pour proroger un mandat, qui expire le 16 novembre, avant la publication du rapport?  Pourquoi mettre la charrue avant les bœufs? » 

Le représentant est revenu sur un fait: le 4 avril dernier, un incident s’est produit à Khan Cheikhoun, poussant les États-Unis à accuser Damas et a décidé de tirer « illégalement » des missiles contre les forces syriennes.  Ni l’absence de preuves, ni les méthodes de travail du Mécanisme ne semblent vous intéresser, a lancé le représentant russe à sa collègue américaine.  Il est toujours plus commode « d’accuser la Russie » lorsqu’elle exerce son droit de veto.

Le représentant a dit ne pas comprendre pourquoi l’on ne tiendrait pas compte du délai du 16 novembre pour présenter le projet de résolution sur la prorogation du mandat du Mécanisme, jugeant « bizarre » la hâte avec laquelle la séance d’aujourd’hui a été convoquée.  Cherchant une explication, il s’est demandé si les États-Unis ont déjà pris connaissance du rapport et savent que les preuves collectées ne résisteraient pas aux critiques.  « Peut-être que le Mécanisme n’a pas fait le travail que l’on attendait de lui? »

Ce que nous avons toujours dit, a répété le représentant, c’est que nous attendons une enquête impartiale du Mécanisme, lequel ne doit pas suivre la voie de la Mission d’établissement des faits, même s’il est « à craindre que les mêmes erreurs ne se répètent ».  Il s’est en effet montré préoccupé par les méthodes de travail du Mécanisme qui rendent « impossibles » des conclusions étayées.  Mais, a-t-il insisté, nous avons toujours affirmé qu’il faut attendre la publication du rapport avant de se prononcer.  Nous sommes d’accord avec la représentante américaine quand elle disait: « nous ne pouvons pas choisir qui est coupable ou non ».  « Quelqu’un a-t-il déjà pensé que Damas ne veut surtout pas être accusé de tels crimes? » a fait observer le représentant.  « Avec ce texte, vous détruisez l’unité du Conseil, en affirmant urbi et orbi que c’est la Fédération de Russie qui est responsable de la situation d’aujourd’hui.  Nous refusons cette présentation des faits et nous appelons la délégation américaine à renoncer à mettre aux voix le projet de résolution. »

Explications de vote

« Ce n’est pas tous les jours que le Conseil examine une question aussi choquante que les armes chimiques », a affirmé Mme SISON (États-Unis), en reprenant la parole.  Elle a insisté sur la cruauté de ces armes dont l’utilisation ne peut être justifiée.  Elle est revenue sur le niveau de coopération qui a permis la création du Mécanisme.  « Ce Mécanisme est-il attaqué aujourd’hui parce qu’il a échoué à déterminer la vérité ou parce que ses conclusions ne plaisent pas à certains? »  Défendant la « qualité » du Mécanisme, la représentante a mis l’accent sur le travail qu’il reste à abattre en Syrie.  Nous voulons connaître la vérité, a-t-elle affirmé, en regrettant le vote négatif d’un membre permanent du Conseil dont les raisons « ne trompent personne ».  Les accusations de partialité, s’est-elle expliquée, ne résistent pas aux faits: le Mécanisme s’est rendu à plusieurs reprises en Syrie.  Le rejet du texte, a estimé la déléguée, revient à protéger les auteurs des pires crimes commis en Syrie.  Dans ce contexte, elle a rappelé que le Mécanisme est le symbole même de la nécessité de faire rendre des comptes aux criminels syriens.  Elle a espéré un nouveau vote sur le renouvellement du mandat du Mécanisme. 

M. RYCROFT (Royaume-Uni) a dénoncé le neuvième veto de la Fédération de Russie sur le dossier syrien, craignant que le Mécanisme n’arrive à des conclusions prématurées, en raison du vote d’aujourd’hui.  « Pourquoi la Fédération de Russie met-elle fin à une enquête alors que le travail n’est pas achevé?  Pourquoi tire-t-elle sur le messager? »  Le représentant a dénoncé cette utilisation « abusive » du droit de veto pour appuyer un régime qui ne respecte aucune règle.  Quel message le Conseil envoie-t-il aujourd’hui? s’est emporté le représentant, assurant que le travail du Mécanisme ne restera pas vain et que tout recours aux armes chimiques en Syrie fera l’objet d’une enquête. 

M. LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a condamné l’utilisation d’armes chimiques, quels qu’en soient les auteurs et les motivations.  Il a réitéré qu’il ne s’oppose pas au renouvellement du mandat du Mécanisme.  Mais au sein de ce Conseil, a-t-il rappelé, des préoccupations ont été exprimées par certains membres au sujet des méthodes de travail de ce Mécanisme dont les activités ont déjà pâti « à deux reprises ».  Le représentant s’est aussi attardé sur une autre « action grave » qui affaiblit le mandat: « ce sont les actions militaires unilatérales qui portent atteinte au droit international ».  « Pourquoi mettre aux voix des projets de résolution qui vont se heurter à un véto? »  « Quel est l’objectif politique derrière une telle décision? »  Sur une question de cette importance, aucune « pression indue » ne saura être acceptée.  « Un vote contre ce projet de résolution n’est pas un vote contre le Mécanisme d’enquête conjoint, c’est un vote contre son instrumentalisation », s’est résumé M. Llorentty Solíz.

M. KORO BESSHO (Japon) a rappelé que les responsabilités dans plusieurs cas d’allégations d’utilisation d’armes chimiques en Syrie n’avaient toujours pas été établies.  Il a rappelé que son pays s’est porté coauteur du texte parce qu’il juge important de proroger le mandat du Mécanisme.  Regrettant son rejet, le représentant a néanmoins dit comprendre que la Fédération de Russie et la Bolivie ne s’opposent pas en soi au renouvellement du mandat.

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a indiqué, à son tour, que son pays s’est porté coauteur du projet pour que le Mécanisme puisse poursuivre son enquête, laquelle ne devrait en aucun cas être entravée.  Malgré l’appui écrasant du Conseil de sécurité, un de ses membres permanents « continue de bloquer », a accusé le délégué, ajoutant: « nous savons » qu’il n’est pas nécessaire que le Mécanisme se rende sur le terrain pour pouvoir étayer ses conclusions.  « Le mandat s’achève le 16 novembre.  Il reste donc trois semaines pour le préserver.  Nous ne pouvons pas nous permettre d’envoyer un mauvais message », a-t-il conclu.

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a pleinement appuyé le travail du Mécanisme, ainsi que le renouvellement de son mandat.  Un tel renouvellement aurait permis de conserver en l’état « l’équipe fantastique » de ce Mécanisme, a-t-il dit.  Il a appelé le Conseil à surmonter les divisions affichées aujourd’hui.  Le rapport, qui doit être bientôt rendu public, sera la preuve de l’impartialité et du professionnalisme du Mécanisme, a-t-il conclu.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a rappelé que le Mécanisme était un instrument important pour identifier les auteurs étatiques et non étatiques des attaques à l’arme chimique commises en Syrie.  Le délégué a exhorté le Conseil, malgré le résultat du vote aujourd’hui, à parvenir à un consensus et à renouveler le mandat du Mécanisme.  Notre vote, aujourd’hui, ne doit pas être interprété comme une approbation automatique du futur rapport du Mécanisme, a-t-il dit.  Les responsables des attaques chimiques devront être punis sur la base de preuves irréfutables, a poursuivi le délégué.  Enfin, le délégué éthiopien a dit comprendre les préoccupations de la Bolivie et de la Fédération de Russie concernant l’impartialité du Mécanisme.  Ce Mécanisme, a-t-il martelé, doit être scrupuleux car nous n’accepterons pas un travail bâclé.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan), qui s’est abstenu au moment du vote, a rappelé son opposition aux armes chimiques et son soutien au Mécanisme.  Étant donné la poursuite des attaques chimiques, le mandat du Mécanisme doit être « maintenu et prorogé ».  Nous pensons qu’il est logique d’examiner les résultats du travail du Mécanisme d’enquête et de réfléchir aux difficultés auxquelles il est confronté, a-t-il dit, avant d’exprimer « sa tristesse » que le Conseil n’ait pu parvenir à une position commune.  Appelant à la volonté politique, il a encouragé le Conseil à s’exprimer d’une seule voix, convaincu que le mandat du Mécanisme sera renouvelé. 

M. OLOF SKOOG (Suède) a jugé regrettable que le Conseil n’ait pas pu se rallier à un renouvellement technique du mandat.  « Le veto d’aujourd’hui marque un recul », a-t-il estimé, en prévenant que ce n’est pas le moment de croiser les bras, alors qu’il y a 60 cas d’utilisation d’armes qui font toujours l’objet d’une enquête.

M. FODÉ SECK (Sénégal) s’est dit déçu du résultat du vote et a souligné la nécessité qui s’attache à la poursuite des travaux du Mécanisme.  Il a souhaité que le Conseil, à la faveur de la publication du rapport du Mécanisme dans les 48 heures, renoue avec l’esprit de consensus qui a prévalu par le passé. 

« On dit que l’homme est le seul animal qui trébuche deux fois sur la même pierre », a déclaré M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay), qui a rappelé que le Mécanisme est composé d’hommes et de femmes qui doivent désormais savoir de quoi sera fait leur avenir.  « Soyons pragmatiques, renouvelons le mandat du Mécanisme au plus tôt et ne trébuchons pas une nouvelle fois sur la même pierre », a-t-il conclu. 

M. WU HAITAO (Chine) s’est dit gravement préoccupé par l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.  Il s’est félicité qu’il y ait au moins un consensus sur la nécessité d’enquêter et sur certains éléments du texte présenté aujourd’hui.  Le représentant a tout de même estimé que l’on aurait pu attendre d’examiner d’abord le rapport du Mécanisme pour pouvoir proposer un texte plus susceptible de recueillir l’assentiment de tous les membres du Conseil.  « Malheureusement, on a agi avec précipitation », a-t-il regretté, avant d’appeler le Conseil de sécurité à ne pas perdre de vue la nécessité de parvenir à un règlement juste, durable et global du dossier syrien. 

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a dit avoir voté en faveur du texte, « en raison de notre volonté d’identifier les personnes impliquées dans les attaques à l’arme chimique en Syrie ».  Il faut renforcer la lutte contre l’impunité et faire face à la menace urgente que posent les armes chimiques à l’échelle régionale, a-t-il plaidé.  Il a cependant jugé nécessaire d’améliorer le modus operandi du Mécanisme, de même que celui de la Mission d’établissement des faits, qui doivent pouvoir se rendre sur le terrain pour étayer « solidement » leurs conclusions.  Il a lancé un appel à l’unité du Conseil sur cette question. 

M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a regretté que les auteurs du texte aient choisi la confrontation.  La politisation et le cynisme, dont parlait la déléguée des États-Unis, sont évidents ici, a-t-il affirmé.  Le vote d’aujourd’hui n’a aucun sens car il n’a pas d’incidence sur le Mécanisme qui continuera de fonctionner, a-t-il poursuivi.  « Nous n’y avons pas mis fin, contrairement à ce qu’a pu dire le délégué du Royaume-Uni. »  Répondant à son homologue de l’Uruguay, le délégué a déclaré que ce n’était pas le lieu pour discuter de l’avenir des employés du Mécanisme.  Il a dénoncé les déclarations rédigées à l’avance critiquant « une utilisation abusive » du droit de veto.  « C’est un spectacle bien rôdé », a-t-il ironisé, celui « où mon pays est accusé de tous les maux ».  « Ne déformez pas notre position, nous n’avons pas mis un terme au Mécanisme », a insisté le représentant, prédisant que le Conseil se penchera de nouveau sur la prorogation du mandat du Mécanisme après la publication du rapport. 

Regrettant profondément le résultat du vote, M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a jugé qu’« en ne renouvelant pas le mandat du Mécanisme, nous nous privons de la possibilité de documenter les cas d’emploi des armes chimiques par l’armée syrienne, mais aussi par des acteurs non étatiques ».  La France, a promis le représentant, ne baissera pas les bras à l’approche des conclusions finales du Mécanisme.  « Mon pays ne se résignera pas à tolérer la déconstruction du régime de non-prolifération », a-t-il dit.  Le délégué a souligné que la violation des engagements pris en matière de non-prolifération constituait en effet « un danger pour nous tous ».  « Nous devons envoyer un message de fermeté, qui passe par l’établissement des responsabilités de ces crimes. »  M. Delattre a solennellement appelé l’ensemble des États membres du Conseil à bâtir le consensus nécessaire d’ici à l’échéance du mandat du Mécanisme. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Deuxième Commission débat de la souveraineté des peuples palestinien et syrien sur les ressources naturelles de leurs territoires occupés

Soixante-douzième session,
21e séance – après-midi
AG/EF/3485

La Deuxième Commission débat de la souveraineté des peuples palestinien et syrien sur les ressources naturelles de leurs territoires occupés

« Cinquante ans d’occupation de terres palestiniennes et syriennes ont gravement ralenti le développement social et économique du Territoire palestinien occupé et du Golan arabe syrien occupé », a déclaré, cet après-midi, M. Mohamed Ali Alhakim, Secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), en présentant devant la Deuxième Commission (économique et financière) le rapport* sur les « répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe du Golan syrien occupé ».

Partant des constatations du rapport, qui a pourtant été jugé partial par Israël et incomplet par d’autres délégations, de nombreux intervenants ont plaidé pour que ces peuples prennent pleinement possession de leurs ressources afin de pouvoir réaliser les objectifs de développement durable.  Cela implique, selon eux, qu’Israël cesse sa politique expansionniste et se conforme au droit international.  La Puissance occupante a notamment été appelée à cesser d’exploiter, d’endommager ou de mettre en danger les ressources naturelles de ces territoires, ainsi que de détruire les propriétés des Palestiniens.

Parmi les voix qui se sont fait entendre pour dénoncer, comme le fait le rapport, les pratiques et politiques israéliennes en territoires occupés, le délégué du Yémen, parlant au nom de la Ligue des États arabes, y a vu la cause de la pauvreté d’un grand nombre de Palestiniens.  L’observateur de la Palestine a aussi averti qu’au rythme des évènements, l’économie palestinienne allait devenir de plus en plus dépendante de l’économie israélienne, puisque les importations de produits de consommation proviennent pour la plupart d’Israël, ce qui crée une balance commerciale déficitaire vis-à-vis de ce pays.

Devant cet état de fait, l’observateur de la Palestine n’a pas hésité à solliciter la communauté internationale pour qu’elle boycotte les produits issus des colonies israéliennes ainsi que ceux d’entreprises israéliennes impliquées dans l’exploitation des ressources des territoires palestiniens occupés, une mesure qui serait tout à fait conforme au droit international selon lui.

Selon le rapport de la CESAO, la population de la bande de Gaza, par exemple, subit encore les répercussions du conflit militaire de 2014, en termes d’accès aux infrastructures d’approvisionnement en eau et d’assainissement.  De même dans le Golan syrien occupé où la consommation d’eau moyenne des Palestiniens de Cisjordanie se situait à 73 litres d’eau par personne et par jour en juin 2016, soit bien moins que la consommation de 100 litres recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), et considérablement moins que les 240 litres auxquels chaque Israélien a accès, note la CESEAO.

L’observateur de la Palestine s’est toutefois montré critique vis-à-vis du rapport qu’il a trouvé « moins long et moins étoffé que le précédent », lui reprochant aussi de « s’aligner parfois sur des positions israéliennes ou encore d’utiliser un langage ambigu ».  La représentante syrienne, elle, a jugé surprenant que le rapport mentionne des investissements de l’occupant en faveur des populations syriennes, « comme si celles-ci ne souffraient pas de cette occupation injuste ».

« Le rapport décrit les faits de manière partielle afin d’incriminer Israël », a de son côté jugé le délégué de ce pays.  Il s’est dit surpris de voir que ce rapport ne mentionne pas des accords qui ont été passés entre Palestiniens et Israéliens sur l’eau ou l’électricité.  Toutes ces observations ont conduit la représentante de l’Équateur, parlant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, à déplorer la « détérioration de la qualité du rapport de la CESAO ». 

La déléguée syrienne a saisi l’occasion de ce débat pour dénoncer également les lois racistes passées par la Puissance occupante pour discriminer les populations syriennes.  Du côté des Palestiniens, le représentant du Qatar, qui parlait en sa qualité de Coordonnateur du Groupe de travail sur le développement de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), a lancé un appel pour qu’ils ne soient pas « la seule exception à la responsabilité de protéger les civils contre les atrocités et les violations flagrantes du droit international ».

Beaucoup ont réitéré leur conviction qu’il fallait avant tout se concentrer sur la solution des deux États, le délégué de l’Indonésie faisant valoir que le problème du développement économique dans le Territoire palestinien occupé est avant tout de nature politique et non technique.

En attendant que ces vœux se concrétisent, le délégué de la Malaisie a prié le système des Nations Unies de renforcer ses programmes d’assistance pour atténuer les souffrances des Palestiniens et de la population arabe du Golan syrien occupé, notamment par le biais du soutien aux activités de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).

La Deuxième Commission poursuivra ses travaux mercredi 25 octobre, à 10 heures, par un débat sur les activités opérationnelles de développement.

* A/72/90*–E/2017/71*

SOUVERAINETÉ PERMANENTE DU PEUPLE PALESTINIEN DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST, ET DE LA POPULATION ARABE DANS LE GOLAN SYRIEN OCCUPÉ SUR LEURS RESSOURCES NATURELLES (A/72/90–E/2017/71)

Discussion générale

Suite à la présentation du rapport de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) sur les répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, l’observateur de l’État de Palestine, M. ABDULLAH ABU SHAWESH, a noté que ce rapport était moins long et moins étoffé que le précédent.  Concrètement, le rapport 2017 comporte 16% de mots de moins que celui de 2016, a-t-il en effet relevé.  Sur le fond, la délégation palestinienne a des réserves sur les paragraphes 6, 11, 15, 21, 22, 43, 45, a dit l’observateur en reprochant au rapport de, parfois, s’aligner sur des positions israéliennes ou encore d’utiliser un langage ambigu.  Il a ensuite reproché à Israël de continuer de priver les Palestiniens des minéraux de la mer Morte, alors que ces ressources pourraient permettre une augmentation de 10% du PIB palestinien ainsi que la création de nombreux emplois.  Ce rapport est également vague sur les difficultés rencontrées par les Palestiniens à Jérusalem-Est, notamment en termes d’éducation, a-t-il estimé avant d’annoncer que la délégation soumettrait ses commentaires par écrit.

L’observateur de l’État de Palestine, M. ABDULLAH ABU SHAWESH, a rappelé qu’Israël contrôlait certaines ressources palestiniennes comme l’eau et les minerais de la mer Morte.  Il a averti que l’économie palestinienne allait devenir de plus en plus dépendante de l’économie israélienne, puisque les importations de produits de consommation proviennent pour la plupart d’Israël, ce qui crée une balance commerciale déficitaire vis-à-vis de ce pays.  Un autre élément qui permet à Israël de contrôler l’économie palestinienne résulte du fait que l’Accord sur la facilitation des échanges de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne peut bénéficier à la Palestine, puisqu’Israël contrôle tous les points d’accès aux territoires palestiniens et les opérations commerciales en Palestine. 

L’observateur a rappelé que la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité faisait bien la distinction entre l’État d’Israël et les territoires occupés.  Invoquant d’autres résolutions en ce sens adoptées par les Nations Unies, il a constaté qu’Israël se refusait toujours à respecter le droit international.  De ce fait, l’observateur a préconisé à la communauté internationale de boycotter les produits issus des colonies israéliennes ainsi que ceux des entreprises israéliennes impliquées dans l’exploitation des ressources des territoires palestiniens occupés, arguant que cela serait tout à fait conforme au droit international.

Mme HELENA YÁNEZ LOZA (Équateur), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77), a déploré la « détérioration de la qualité du rapport de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) ».  Pour le G77, le développement durable n’est pas possible sans la paix et la sécurité, de même que la paix et la sécurité seraient menacées sans développement durable.  Le G77 appelle à des actions efficaces, en conformité avec le droit international, afin d’éliminer tout obstacle à la réalisation du droit à l’autodétermination des peuples vivant sous la colonisation ou sous occupation étrangère.  Cette occupation, a expliqué le représentant, continue de saper le développement socioéconomique desdits peuples et d’affecter leur environnement, diminuant ainsi leurs chances de réaliser les objectifs de développement durable.

Rappelant la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, la représentante a indiqué que le G77 réaffirme que l’établissement, par Israël, de colonies de peuplement dans les territoires palestiniens occupés en 1967, y compris Jérusalem-Est, n’avait aucune validité sur le plan légal et constituait en outre une violation flagrante du droit international.  De plus, ces colonies posent un obstacle majeur à la solution des deux États et à une paix durable.  Le G77 appelle Israël à cesser immédiatement et complètement toutes ses activités de colonisation, invitant par la même occasion tous les États à faire la distinction, dans toutes leurs affaires, entre l’État d’Israël et les territoires palestiniens occupés depuis 1967.

Le G77 est en outre inquiet de l’exploitation, par Israël, la Puissance occupante, des ressources naturelles des territoires palestiniens occupés, y compris à Jérusalem-Est, et dans d’autres territoires arabes occupés par Israël depuis 1967.  Le G77 se dit aussi inquiet de la destruction, par Israël, de terres agricoles et de vergers situés dans les territoires palestiniens occupés, ainsi que du grave impact environnemental et économique qui en résulte.  Il condamne la destruction d’infrastructures vitales telles que des canalisations d’eau, des réseaux d’égouts et des infrastructures électriques.  Le G77 demande qu’Israël cesse d’exploiter, d’endommager ou de mettre en danger les ressources naturelles de ces territoires, a lancé la représentante avant de reconnaître le droit du peuple palestinien de réclamer la restitution de ses ressources illégalement acquises par Israël. 

Pour M. AHMED AL-KUWARI (Qatar), qui s’exprimait en qualité de Coordonnateur du Groupe de travail sur le développement de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), le rapport de la CESAO prouve -par les chiffres, les statistiques et les faits- la tendance systématique à la hausse des violations des droits de l’homme, du droit international et du droit international humanitaire, ce qui est le fruit des politiques illégales menées par Israël, la Puissance occupante.  À ce titre, il a cité les pratiques discriminatoires de cet État et l’usage excessif qu’il fait de la force, notamment dans le cadre du blocus de Gaza, l’expansion des colonies de peuplement, la destruction des propriétés palestiniennes ou encore l’exploitation de ressources palestiniennes par Israël.  Les effets cumulés de telles pratiques exacerbent des conditions de vie économiques ou sociales déjà difficiles pour les Palestiniens, a affirmé le représentant.

En dépit des appels répétés de la communauté internationale pour qu’Israël cesse ces politiques et pratiques, et en dépit du fait que les colonies de peuplement représentent le plus grand obstacle à la concrétisation de la solution des deux États, Israël a intensifié ses actions illégales, s’est indigné le représentant.  Il a avancé le chiffre « conservateur » selon lequel la construction de colonies de peuplement israéliennes aurait augmenté de 85% en 2017 par rapport à l’année précédente.  Plus de 56 projets de nouvelles colonies ont été autorisés par le Gouvernement israélien depuis janvier 2017, ce qui représente 5 000 logements de colons dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, sans compter les 3 000 logements additionnels prévus dans des colonies érigées sur des territoires palestiniens confisqués en Cisjordanie, y compris au cœur même de Hébron/Al Khaleel.

Le représentant a également dénoncé la démolition de structures financées par la communauté des donateurs, notamment dans la zone C, comme cela résulte d’un rapport du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Aux yeux de l’OCI, « Israël est plus intéressé par la consolidation de son régime colonial que par la paix et la sécurité ».  L’Organisation exige qu’Israël mette un terme à ses activités illégales dans le territoire palestinien et respecte le droit international.  Sa revendication se base sur le fait que « les Palestiniens ne peuvent pas être la seule exception à la responsabilité de protéger les civils contre les atrocités et les violations flagrantes du droit international ».  La question de la responsabilité est aussi urgente que celle de la crise humanitaire, selon l’OCI, parce qu’à défaut, « Israël continuera d’opérer en toute impunité ».  Pour l’OCI il est « moralement, légalement et politiquement inacceptable » que cet état de fait se poursuive.

M. TALAL ALI RASHED ALJAMALI (Yémen), qui s’exprimait au nom de la Ligue des États arabes, a repris les conclusions du rapport de la CESAO, à savoir que 50 années d’occupations ont largement sapé toute perspective de développement économique et social dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  Les pratiques et politiques israéliennes constituent une violation flagrante du droit international, du droit international humanitaire et de la quatrième Convention de Genève, a-t-il poursuivi en expliquant, entre autres, que les Palestiniens ne peuvent utiliser en toute liberté leurs ressources naturelles de base et que l’occupation israélienne entrave les échanges commerciaux.  Cela explique en partie qu’un grand nombre de Palestiniens vivent sous le seuil de pauvreté, a ajouté le représentant.

Il a précisément reproché à Israël d’exploiter et de polluer les ressources palestiniennes, en particulier l’eau, ce qui augmente la vulnérabilité économique des Palestiniens vivant sous occupation.  Il en va de même du blocus de Gaza qui a provoqué une augmentation du taux de chômage et un appauvrissement de la population locale.  Dénonçant également l’expansion constante des colonies de peuplement dans le territoire, la confiscation des terres palestiniennes et la destruction de propriétés palestiniennes, il a affirmé que ces « politiques israéliennes illégales » avaient créé une situation « intenable » dans laquelle les Palestiniens sont privés de tous leurs droits.  La Ligue des États arabes exhorte la communauté internationale à faire pression sur Israël pour qu’il respecte le droit international, le droit international humanitaire et la quatrième Convention de Genève, a conclu le représentant en appelant aussi à reconnaître la souveraineté des Palestiniens sur leurs ressources.

M. MOHD SUHAIMI AHMAD TAJUDDIN (Malaisie) s’est grandement inquiétée des tensions et des poussées de violence dans le Territoire palestinien occupée, en particulier en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, en raison de la frustration grandissante des Palestiniens due à la longue occupation, à l’expansion des colonies et à la violation du statu quo concernant les lieux saints, autant d’éléments qui mettent à mal la viabilité d’un État palestinien et la capacité des Palestiniens à vivre dans la dignité.  La Malaisie condamne le « traitement impitoyable et asymétrique infligé aux Palestiniens par les politiques discriminatoires d’Israël » et les violations des droits de l’homme.  Les effets catastrophiques de la démolition de maisons et de la violence des colons ont particulièrement touché les enfants, physiquement et psychologiquement, a fait remarquer le représentant.  « Grandir en ne connaissant que l’occupation, la répression et la violence aura des répercussions négatives non seulement sur l’avenir de ces enfants, mais aussi dans la recherche de la paix au Moyen-Orient », a-t-il prévenu.

Le représentant a prié le système des Nations Unies de renforcer ses programmes d’assistance pour atténuer les souffrances des Palestiniens et de la population arabe du Golan syrien occupé.  Il a aussi appelé la communauté internationale à s’assurer que les agences onusiennes comme l’UNRWA disposent des fonds nécessaires à l’accomplissement de leurs mandats.  Enfin, il a exhorté les États Membres à faire preuve d’une volonté politique suffisante pour inverser d’urgence les tendances négatives sur le terrain, car celles-ci sont en train d’imposer une réalité à un État plutôt qu’une solution des deux États.

Mme ROUA SHURBAJI (République arabe syrienne) a cité divers cas de violations du droit international dans le Golan syrien occupé.  L’occupant, a-t-elle dénoncé, continue d’appliquer des lois racistes vis-à-vis des populations syriennes de ces territoires.  Les autorisés d’occupation, a-t-elle ajouté, continuent aussi de promouvoir les activités de peuplement en accordant des incitations fiscales aux Israéliens qui décident de s’installer dans le Golan syrien occupé.  En outre, les entreprises étrangères, notamment les sociétés israéliennes, continuent d’exploiter des ressources minérales du Golan syrien occupé, a-t-elle dénoncé en citant en particulier une entreprise des États-Unis.  La représentante a donc appelé la communauté internationale à adopter une position responsable dans ce dossier en demandant à Israël de respecter le droit international. 

Venant au rapport examiné, Mme Shurbaji a condamné les paragraphes qui mentionnent des investissements de l’occupant en faveur des populations syriennes, « comme si celles-ci ne souffraient pas de cette occupation injuste », a—t-elle relevé.  Elle a aussi dénoncé le fait que le rapport ne fasse pas mention de détentions arbitraires de Syriens par Israël.  « Personne ne doit se faire d’illusion », a-t-elle mis en garde en assurant que « la guerre terroriste contre mon pays ne va pas nous faire renoncer à notre demande pour récupérer le Golan syrien occupé ».

M. ROODGAR (République islamique d’Iran) a vivement critiqué la violation des droits et de la dignité des Palestiniens par la Puissance occupante, qui leur a aussi refusé le droit inaliénable à l’autodétermination.  La délégation a souligné que le régime israélien continue à encourager la confiscation des terres par les colons, par le biais de politiques qui violent le droit international et toutes les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité sur la question.  L’occupation du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et du Golan syrien occupé affecte gravement la situation économique, sociale et environnementale des populations, a dénoncé le représentant en s’inquiétant qu’Israël ait en outre intensifié les démolitions punitives de maisons de Palestiniens à une échelle qui équivaut à une punition collective, selon lui.

Le rapport indique que les peuples palestinien et syrien seront laissés de côté et ne bénéficieront pas des fruits du développement durable tant qu’ils ne disposent pas de la souveraineté sur leurs ressources naturelles, a relevé la délégation, estimant que de telles mesures de punition collective par Israël représentent une grave entorse au droit international humanitaire, constituent un crime contre l’humanité et sont une menace sérieuse à la paix et à la sécurité ainsi qu’à la stabilité régionale.  Toute solution à la crise, notamment la mobilisation des moyens de parvenir au développement durable et à la croissance économique dans les territoires palestiniens occupés comme prévu dans le Programme 2030, requiert l’arrêt immédiat de la colonisation et la restauration des droits inaliénables du peuple palestinien à l’autodétermination.  Cela exige aussi la mise en place d’un État indépendant et viable, et la pleine souveraineté sur les ressources naturelles, a conclu la délégation iranienne.

M. KHASHAAN (Arabie saoudite), a accusé les forces d’occupation israéliennes de  continuer de violer le droit international et le droit humanitaire international dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  Sa délégation s’est notamment dite outrée par l’attaque perpétrée délibérément contre la mosquée d’Al Aqsa et par l’érection de barrières aux alentours par les forces israéliennes.  Le représentant a précisé que l’Arabie saoudite avait contribué à la réouverture de cette mosquée et à la levée des barrières.

Sa délégation espère que la communauté internationale pourra faire avancer les chances d’un accord de paix israélo-palestinien qui prévoie la restitution des droits spoliés par Israël.  À ce titre, il a exhorté Israël à arrêter de polluer l’environnement et de spolier les ressources palestiniennes.   Pour l’Arabie saoudite, il est urgent de trouver une solution au conflit israélo-palestinien sur la base de l’initiative arabe présentée il y a 15 ans par l’Arabie saoudite, a rappelé le représentant.

Mme DIPU MONI (Bangladesh) a exprimé un « profond sentiment de frustration » face à l’occupation du Territoire palestinien qui dure depuis près de 50 ans, notant les violations de droits de l’homme, les attaques contre les civils et l’expansion des colonies de peuplement par Israël, qui constituent des affronts aux droits du peuple palestinien et qui aggravent les conditions économiques et sociales.  Elle a dénoncé le manque d’accès à l’eau et aux services d’assainissement, notant avec inquiétude que 95% de l’eau à Gaza n’est pas potable, ainsi que l’acheminement illégal de déchets dangereux vers la Cisjordanie, avec pour conséquence des dégâts sur l’agriculture, la santé, les animaux et la biodiversité.

La représentante a insisté sur les effets de ces conditions sur la population en termes de chômage, de pauvreté et d’insécurité alimentaire, notamment.  Le manque d’accès des enfants à l’éducation et les démolitions de maisons et d’exploitations sont d’autres sources de préoccupation pour le Bangladesh qui a appelé à régler ces problèmes de développement.  Elle a tenu à préciser que ce sujet relève bien de l’ordre du jour de la Deuxième Commission, avant de réitérer son soutien à l’autodétermination du peuple palestinien.

M. SHERWIN LUMBAN TOBING (Indonésie) a rappelé que si le Programme 2030 s’engage à ne laisser personne de côté, il est encore impossible pour les Palestiniens sous occupation israélienne de prendre les mesures nécessaires à la réalisation des objectifs de développement durable.  La destruction de maisons et d’infrastructures, la confiscation de terres, l’expansion illégale des colonies ainsi que les restrictions aux mouvements et au commerce, qui se sont accumulées, peuvent renverser la trajectoire de développement de la Palestine, a mis en garde la délégation.  Ainsi, des mesures doivent être prises pour mettre effectivement un terme à l’exploitation et à l’épuisement des ressources naturelles des Palestiniens par les autorités et les colons israéliens.  Elle a aussi plaidé pour que les restrictions à la liberté de mouvement des personnes et des biens soient levées, afin de permettre à l’économie palestinienne de réaliser son potentiel.

La délégation a ensuite demandé à la communauté internationale de redoubler d’efforts pour mettre un terme à l’occupation israélienne, arguant que le problème du développement économique dans le Territoire palestinien occupé est de nature politique et non technique.  L’Indonésie, qui reste convaincue que tous les efforts doivent se concentrer sur la solution des deux États, continuera à apporter son soutien au développement palestinien par le biais d’accords bilatéraux ou dans le cadre du Nouveau Partenariat stratégique Asie-Afrique et de la Coopération entre les pays d’Asie de l’Est pour le développement de la Palestine.  L’Indonésie a déjà mené 157 programmes de renforcement des capacités qui ont bénéficié à près de 2 000 Palestiniens dans les domaines des petites et moyennes entreprises, des infrastructures, de l’énergie, des ressources minières, de la bonne gouvernance et de l’administration publique et de la réduction de la pauvreté.  Elle a aussi contribué à la fourniture de services de base grâce à la construction du Centre Cardiac à Gaza en collaboration avec la Banque islamique de développement.

Mme LINDA ANNE SCOTT (Namibie) a appelé le Gouvernement israélien à lever immédiatement les restrictions imposées aux Palestiniens et à interrompre la construction de colonies de peuplement et du mur de séparation.  En outre, la Namibie prie Israël de respecter ses obligations juridiques, telles que l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice rendu voici 12 ans.  Elle le prie aussi de cesser de détruire les maisons et les propriétés des Palestiniens, de même que d’exploiter illégalement leurs ressources naturelles.  Mme Scott a souligné la nécessité de préserver la continuité territoriale, l’unité et l’intégrité du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de garantir la liberté de mouvement des personnes et des biens.

La représentante a également demandé le respect du Protocole sur les relations économiques entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).  Elle a rappelé que la Namibie se tient aux côtés du peuple palestinien pour soutenir ses efforts visant à faire respecter son droit inaliénable à l’autodétermination, à la justice, à la liberté et à l’indépendance, par des moyens politiques, diplomatiques et non violents.  Ce n’est que par l’établissement légal d’un État que la normalité sociale, l’égalité, les opportunités économiques et le développement durable deviendront une réalité, a conclu la représentante, qui s’est par ailleurs dite encouragée par l’Accord de réconciliation signé le 12 octobre entre le Hamas et l’Autorité palestinienne.

Mme NOOFALSHAMARI (Qatar) a dénoncé les pratiques israéliennes qui violent le droit international et le droit international humanitaire dans les territoires occupés en Palestine et au Golan syrien.  Elle a plaidé en faveur de la protection des établissements scolaires dans le Territoire palestinien occupé, afin de garantir le droit à l’éducation des enfants palestiniens.  Pour le Qatar, il est inadmissible qu’Israël continue de construire des colonies dans le Territoire palestinien occupé et dans le Golan syrien occupé.  La représentante a donc appelé Israël à mettre un terme à ses politiques qui vont à l’encontre du droit international, et à donner la possibilité au peuple palestinien de jouir de ses droits sur son territoire, y compris ceux occupés.  Le Qatar entend poursuivre ses efforts en faveur de la paix et la sécurité au Moyen-Orient, a promis la déléguée.

M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a souligné que le Gouvernement israélien ne respecte pas les résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale relatives à la fin de l’occupation et de la construction de colonies dans le Territoire palestinien occupé.  Les mesures répressives telles que la destruction de maisons, la confiscation de terres et les restrictions à la liberté de circulation sont d’évidentes violations des droits humains des Palestiniens, a poursuivi la délégation.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par la démolition de structures de propriétés palestiniennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est et par la construction du « mur de l’indignité », alors que la Cour internationale de Justice a jugé qu’il s’agissait d’une mesure violant le droit international. Toutes ces actions illégales visent à fragmenter l’unité politico-territoriale de l’État palestinien, au détriment de son indépendance et de sa souveraineté, s’est plaint le représentant.

Déplorant par ailleurs l’exploitation illégale des ressources naturelles palestiniennes, le représentant a souligné le coût économique énorme de l’occupation israélienne pendant 50 années.  Cette situation, a-t-il estimé, met en danger l’existence même de l’État palestinien.  Il a rappelé que l’ONU dispose d’un arsenal juridique relatif au droit des peuples à la souveraineté permanente sur leurs richesses et leurs ressources naturelles, qui a été ratifié par le Programme d’action d’Addis-Abeba et le Programme 2030, et qui doit s’exercer dans l’intérêt du développement national et du bien-être du peuple qui en est propriétaire.  La délégation exige des actions plus fortes de la part de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité afin qu’Israël cesse sa politique expansionniste et se conforme au droit international.

M. AL KHAFAJI (Iraq) a indiqué que la question palestinienne restait une priorité de son gouvernement et cela, en dépit de la crise que son pays a traversée.  Il a dénoncé l’incidence économique négative sur les Palestiniens de l’occupation israélienne du Territoire palestinien occupé depuis 50 ans, ainsi que sur le Golan syrien occupé.  Il a revendiqué le droit du peuple palestinien à disposer de ses ressources ainsi que son droit à des indemnisations face à l’exploitation et la spoliation de ces ressources par Israël.

L’Iraq salue les efforts menés par des organisations internationales et des ONG pour alléger les souffrances du peuple palestinien, mais estime que la communauté internationale doit aller plus loin.  Conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, l’Iraq espère que l’État palestinien indépendant sera créé dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale.

Mme AL JAZI (Jordanie) a rappelé que les autorités israéliennes appliquent depuis 50 ans des mesures qui sapent le développement du Territoire palestinien occupé et du Golan arabe syrien occupé.  Elle a évoqué des pratiques israéliennes qui consistent à détruire des terres arables et des ressources naturelles dans ces territoires, ajoutant que les décisions de construction de nouvelles colonies de peuplement, prises par Israël, sont autant d’obstacles à une paix durable dans la région.  La déléguée a aussi noté que le développement durable d’un peuple ne peut se faire si celui-ci vit sous occupation, raison pour laquelle la Jordanie demande à la communauté internationale d’assumer ses responsabilités en faisant pression sur Israël, afin de permettre au peuple palestinien d’accéder pleinement à l’autodétermination.

M. OMAR A. A. ANNAKOU (Libye) a appuyé les conclusions du rapport de la CESAO, notamment en ce qui concerne la poursuite de la construction du mur de séparation par Israël qui se fait malgré l’avis de la Cour internationale de Justice sur l’illicéité de ce mur.  Il a évoqué le fait que les citoyens palestiniens continuent d’être déplacés en raison du tracé de ce mur, en rappelant par ailleurs que la démolition des maisons palestiniennes augmente de façon alarmante en Cisjordanie, que l’approvisionnement alimentaire et en eau est irrégulier et insuffisant, alors que parallèlement les colonies de peuplement ne cessent de se développer.  Il a également dénoncé le blocus de Gaza qui équivaut selon lui à faire de cette région une grande prison, avec pour conséquence un taux de chômage de plus de 40%.

Rappelant que les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 s’appliquent également aux Palestiniens, le représentant s’est demandé comment il sera possible d’éliminer la pauvreté dans le Territoire palestinien occupé et comment faire pour qu’il n’y ait pas de laissés pour compte quand on sait que Gaza reste bloquée avec plus de deux millions de personnes privées de toute mobilité.  Pour conclure, il a affirmé qu’Israël détruit tous les moyens de subsistances des Palestiniens et que cela constitue une violation flagrante des droits de l’homme et du droit international.  La Libye soutient les aspirations légitimes du peuple palestinien à un État palestinien indépendant.

M. ABHAR AHMAD (Brunei Darussalam) a déploré que, selon les conclusions du rapport, les Palestiniens risquent d’être laissés de côté dans la réalisation du Programme 2030, en raison de l’occupation qui continue à saper tous leurs efforts de développement.  Le blocus illégal imposé à Gaza a eu pour effet de diminuer la disponibilité des services essentiels, d’empirer la crise humanitaire et d’affecter négativement la croissance économique, a relevé le représentant, préoccupé par la hausse du taux de pauvreté et de la dépendance accrue à l’aide qui en découle.

L’ONU porte la responsabilité essentielle d’encourager les efforts internationaux pour parvenir à une solution juste et durable à cette question, a fait observer M. Ahmad.  Il a réitéré le soutien de Brunei Darussalam aux résolutions de l’Assemblée générale qui encouragent les États concernés et les organisations internationales à prendre de justes mesures afin de garantir le respect du droit international en ce qui concerne toutes les pratiques illégales dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, en particulier les colonies illégales et l’exploitation des ressources naturelles.  À ce propos, il a réaffirmé son soutien aux droits inaliénables du peuple palestinien et de la population du Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles.

M. TIBOR SHALEV SCHLOSSER (Israël) a rapporté les propos d’un dirigeant du Hamas qui vient de déclarer publiquement que « la question n’est plus la reconnaissance d’Israël, mais son élimination complète ».  Il a prédit que ce souhait de mort émis par un dirigeant du Hamas ne se retrouverait pas dans le rapport de la CESAO l’année prochaine.  En mentionnant le rapport de cette année, il a parlé de « rapport partial qui décrit les faits de manière partielle afin d’incriminer Israël ».  Il a par exemple dénoncé le fait que le rapport ne souligne pas que le Hamas, « une organisation terroriste » qui gère la bande de Gaza, est responsable du déclenchement des hostilités de l’été 2014.  « On ne voit pas non plus dans le rapport des éléments sur les actes de violence à l’encontre des populations israéliennes, menées par des Palestiniens sous inspiration de leurs dirigeants », a-t-il déploré. 

Le représentant se dit en outre surpris de voir que ce rapport de la CESAO ne mentionne pas des accords passés entre Palestiniens et Israéliens, comme celui sur l’augmentation des capacités d’accès à l’eau, ou encore ceux sur l’électricité.  Le fait que des milliers de Palestiniens ont des emplois en Israël n’est pas non plus souligné dans le rapport, a-t-il noté, tout en rappelant que la récente pénurie d’électricité dans la bande de Gaza avait résulté d’une demande expresse de baisse du tiers de la fourniture d’électricité faite par l’Autorité palestinienne auprès d’Israël.  Le délégué a enfin dénoncé les propos tenus par la délégation syrienne contre Israël, expliquant que « la population du Golan syrien se porte bien, et qu’on ne peut pas en dire autant des milliers de Syriens tués ces dernières années ».

M. MOHAMED OMAR GAD (Égypte) a noté qu’au fil des décennies les rapports du Secrétaire général sur ce point de l’ordre du jour continuent de rendre compte de la situation déplorable pour la population palestinienne du Territoire palestinien occupé et du Golan syrien occupé, ajoutant que cette situation ne cesse de se dégrader.  Au moment où le monde cherche à réaliser les objectifs de développement durable, le vécu des Palestiniens tel que présenté dans le rapport de la CESAO laisse perplexe quant à la possibilité de réaliser ces objectifs sur place, a reconnu le délégué.  Il a dénoncé les pratiques et politiques israéliennes qui portent atteinte au droit international humanitaire et au droit international, disant regretter que certaines de ces pratiques s’apparentent au transfert forcé de personnes protégées.  Il a aussi fait remarquer que les obstacles imposés par Israël en Cisjordanie et à Gaza ont mené à la paupérisation du peuple palestinien, avant de dénoncer la démolition de maisons, la violence des colons, le blocus de Gaza ainsi que les activités de peuplement qui menacent l’unité du territoire palestinien selon lui.  Pour sa délégation, la seule manière de mettre fin à ces pratiques israéliennes est de mettre un terme à l’occupation israélienne et de faire appliquer le droit international.

M. MAHLATSE MMINELE (Afrique du Sud) a déclaré qu’après 50 années d’une occupation dévastatrice pour le développement socioéconomique de la Palestine, la situation sur le terrain ne pouvait en rester là.  Les activités de peuplement d’Israël sapent sérieusement la solution des deux États et constituent un obstacle à la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il argué.  Il a dénoncé un taux de chômage parmi les plus élevés au monde, une pauvreté croissante et un produit intérieur brut en diminution de 71% depuis l’instauration du blocus en 1990.  « Une économie palestinienne forte sera essentielle pour la viabilité d’un État palestinien dans le cadre de la solution des deux États », a-t-il estimé.  Il a espéré que la communauté internationale continuerait d’apporter son soutien politique et économique à la juste cause palestinienne, rappelant que personne ne devait être laissé de côté.

Pour Mme AL AWADI (Émirats arabes unis), la question israélo-palestinienne reste une priorité, et ce, malgré les défis socioéconomiques et sécuritaire à relever dans le monde arabe.  Or les pratiques israéliennes dans le Territoire palestinien occupé entravent les efforts internationaux destinés à atteindre les objectifs de développement durable, a-t-elle regretté.  Elle a mentionné à ce titre l’expansion des activités de peuplement d’Israël, la construction du mur de séparation et la dégradation de la situation humanitaire à Gaza en raison du blocus israélien.  Sa délégation estime qu’il faut éliminer les obstacles au développement socioéconomique du peuple palestinien.  Il faut, selon elle, lui permettre de maîtriser ses ressources naturelles et d’exercer son droit à l’autodétermination.  Les Émirats exigent la solution des deux États et exhorte la communauté internationale à appuyer l’UNRWA en attendant que cette solution devienne une réalité. 

M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) a indiqué que les valeurs telles que la liberté, l’indépendance et la souveraineté nationale étaient constamment violées dans le Territoire palestinien occupé et dans le Golan syrien occupé.  Il a remarqué que les politiques d’occupation israéliennes conduisent à l’adoption de lois discriminatoires qui empêchent aux populations d’accéder à leur terre et à leurs ressources naturelles, les empêchant ainsi de jouir de leur droit au développement.  Les Maldives réitèrent leur soutien sans faille aux droits des Palestiniens et à une solution des deux États qui est une étape majeure vers l’exercice éventuel du droit à l’autodétermination.  Les Maldives condamnent également l’usage de la force et les exécutions illégales pratiquées par les forces israéliennes.  Le représentant a invité Israël à respecter la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, laquelle demandait à Israël de cesser immédiatement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est. 

Droits de réponse

La représentante de la Syrie a exercé son droit de réponse suite à l’intervention de la délégation israélienne.  Elle a accusé celle-ci de ne pas reconnaître le droit international.  Soulignant que la guerre contre le terrorisme a été menée en Syrie, elle a assuré que les fausses accusations ne porteront pas atteinte à la détermination de son gouvernement de défendre les droits spoliés des habitants du Golan syrien occupé et du Territoire palestinien occupé.  Sa délégation tient à poursuivre les discussions sur les répercussions économiques des pratiques israéliennes, a-t-elle assuré.

Le représentant de la République islamique d’Iran a également réagi aux propos de la Puissance occupante, Israël.  Il a accusé ce pays de vouloir détourner l’attention internationale de ses pratiques illégales en dénonçant d’autres pays de façon sinistre.  Il a réitéré que l’Iran tient à contribuer à la lutte contre les groupes extrémistes au Moyen-Orient, tout en affirmant qu’Israël est en partie responsable des conflits dans la région.

Lui répondant, le représentant d’Israël a dit que tant que les dirigeants iraniens exprimeraient le souhait d’éliminer Israël, l’Iran serait considéré comme un régime de terreur.  À son homologue syrienne, il a demandé de donner des explications sur les bombes placées par son régime dans un marché.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: les procédures spéciales mettent en évidence l’insuffisance et l’hétérogénéité des engagements des États

Soixante-douzième session,
26e & 27e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4209

Troisième Commission: les procédures spéciales mettent en évidence l’insuffisance et l’hétérogénéité des engagements des États

De l’alimentation à l’éducation, en passant par le logement, la santé physique et mentale, l’eau potable et l’assainissement, des droits économiques et sociaux fondamentaux sont battus en brèche du fait notamment de l’engagement insuffisant de la communauté internationale: tel est le constat alarmant dressé aujourd’hui devant la Troisième Commission par plusieurs Rapporteurs spéciaux dans le cadre de l’examen de la protection et la promotion des droits de l’homme sous tous ses aspects.

Les échanges ont pris une dimension politique dès l’intervention de Mme Hilal Elver, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, qui a présenté un rapport sur les situations sévères d’insécurité alimentaire dans plusieurs pays, particulièrement ceux affectés par les conflits internationaux.  Son but: sensibiliser sur les obligations des États et d’autres acteurs vis-à-vis des normes existantes ainsi que sur les manquements de la communauté internationale à répondre à des comportements criminels. 

Mme Elver a ainsi rappelé qu’en mars de cette année, pas moins de 20 millions de personnes dans le nord-est du Nigéria, en Somalie, au Soudan du Sud et au Yémen avaient été confrontées à une insécurité alimentaire dévastatrice.  Par ailleurs, 70 millions de personnes dans 45 pays ont un besoin urgent d’assistance alimentaire, soit une augmentation de 40% par rapport à 2015, a-t-elle souligné, évoquant également la détérioration de la situation humanitaire des 500 000 musulmans rohingya qui fuient le Myanmar vers le Bangladesh.

Dans ce contexte, la Rapporteuse spéciale a jugé crucial que la famine, en tant qu’arme de guerre, soit interdite dans tous les cas de conflit, et que les belligérants assument la responsabilité première de répondre aux besoins des populations sous leur contrôle, y compris en matière d’eau et de nourriture. 

Certaines délégations ont reproché à Mme Elver la « politisation » de son rapport, ce, à quoi elle a répondu en parlant de situation « extrêmement politique ».  La République arabe syrienne lui a ainsi demandé de faire davantage preuve de neutralité, regrettant qu’il ne soit fait mention dans ce rapport ni des ravages causés à ses récoltes par les groupes terroristes Jabhat el-Nosra et Daech, ni de la situation « désastreuse » causée par Israël en Palestine, ni du blocus imposé à l’Iran, à Cuba et au Venezuela.  L’Arabie saoudite a, elle, déploré que le rapport « manque de clarté ».

Pointant lui aussi des carences généralisées en matière de protection des droits fondamentaux, M. David Alston, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a constaté que les acteurs des droits de l’homme et du développement n’analysaient pas suffisamment les droits civils et politiques des personnes vivant en situation de pauvreté.  Il a donc enjoint la communauté internationale de changer d’approche en cherchant à disposer de données, à la fois sur les faits matériels et sur l’état des droits civils et politiques, d’autant que ces derniers peuvent être violés de plusieurs manières, comme par le biais de lois neutres face aux effets de la pauvreté, de faibles allocations de ressources ou encore la passivité des gouvernements.

M. Alston a ainsi évoqué la situation dans les villes chinoises des travailleurs en provenance de zones rurales du pays, lesquels ont besoin d’un « houkou » ou permis de résidence pour bénéficier d’une protection sociale.  La Chine a répliqué en assurant que ce système n’était aucunement un obstacle pour lutter efficacement contre la pauvreté et a invité le Rapporteur spécial à « se concentrer sur son mandat plutôt que les questions civiles et politiques ».

Tout aussi critique à l’égard des acteurs du développement, M. Leo Heller, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a présenté un rapport examinant la façon dont les contributeurs peuvent aider à la réalisation de ce droit fondamental. Il en ressort, selon lui, que l’engagement des six bailleurs de fonds étudiés (France, Japon, Union européenne, Banque mondiale, Banque interaméricaine de développement et UNICEF) est hétéroclite.  Alors que certains ont intégré les droits de l’homme dans le cadre de leur politique d’aide, d’autres n’en tiennent compte que de manière sporadique, révélant des degrés divers de clarté dans leur implication dans la coopération.

Quant à la financiarisation, elle est au cœur des travaux de Mme Leilani Farha, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, qui a présenté un rapport sur le droit au logement convenable pour les personnes handicapées.  Pour celles-ci, a observé Mme Farha, choisir où et avec qui vivre, faire partie d’une communauté et avoir accès à un logement sûr et accessible constitue trop souvent une « question de vie ou de mort ».  Dans ses recommandations figure la reconnaissance par les États de l’obligation de mettre en œuvre le droit au logement des personnes handicapées et de lier cette obligation à l’objectif 11.1 de développement durable visant l’accès de tous à des services de base, y compris l’eau et l’assainissement. 

Dernier intervenant de la séance, M. Danius Pūras, Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a précisé que son rapport portait sur la corruption et le droit à la santé, compte tenu des effets dévastateurs de la corruption sur la bonne gouvernance, l’état de droit, le développement et la jouissance équitable de tous les droits de l’homme.  Il y constate que ce fléau a des conséquences sur l’égalité et la non-discrimination lorsqu’il touche les populations les plus vulnérables ou marginalisées.  Il observe aussi que la crise actuelle au sein des milieux universitaires de la psychiatrie, alimentée par des relations troubles avec l’industrie pharmaceutique, a contribué à ce que l’on appelle « la corruption des savoirs » et représente un signal d’alerte.

Demain, mardi 24 octobre, la Troisième Commission poursuivra à partir de 10 heures son dialogue avec des titulaires de mandat de procédures spéciales et des organes conventionnels de droits de l’homme. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME (A/72/40 ET A/C.3/72/9)

Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux

Déclarations liminaires, suivies de dialogues interactifs

Mme HILAL ELVER, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, a expliqué que son dernier rapport, son quatrième depuis sa désignation à ce mandat, était présenté dans le contexte d’un retour de la faim dans le monde, comme l’a aussi observé le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence devant le Conseil de sécurité le 10 mars dernier.  Ce rapport, a-t-elle expliqué, traite des situations sévères d’insécurité alimentaire dans plusieurs pays, particulièrement ceux affectés par les conflits internationaux.  Il élabore sur l’architecture existante en matière de droits de l’homme, de droit international humanitaire et de droit pénal international.  Son but est de sensibiliser sur les obligations des États et d’autres acteurs vis-à-vis des normes existantes.  Il sensibilise aussi sur les manquements de la communauté internationale à répondre à des comportements criminels. 

Mme Elver a ensuite rappelé qu’en mars de cette année, pas moins de 20 millions de personnes dans le nord-est du Nigéria, en Somalie, au Soudan du Sud et au Yémen avaient été confrontées à une insécurité alimentaire dévastatrice.  Par ailleurs, 70 millions de personnes dans 45 pays ont un besoin urgent d’assistance alimentaire, soit une augmentation de 40% par rapport à 2015.  En outre, et selon un rapport récent du Programme alimentaire mondiale (PAM), environ 80 000 enfants de moins de 5 ans souffrent d’émaciation, une maladie pouvant résulter de la malnutrition et provoquer une perte rapide de poids.  Les 500 000 musulmans rohingyas qui fuient le Myanmar pour la frontière avec le Bangladesh connaissent aussi une situation humanitaire qui se détériore et exige une position ferme des Nations Unies, a ajouté la Rapporteuse spéciale.

Mme Elver a également cité le rapport 2017 de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition, qui montre que 815 millions de personnes sont sous-alimentées, plus qu’en 2015, quand elles n’étaient que 777 millions.  La moitié de ces personnes, soit 489 millions, vivent dans les zones de conflit.  En outre, sur les 155 millions d’enfants en retard de croissance, 122 millions vivent dans ces mêmes zones, a encore rappelé la Rapporteuse spéciale, ajoutant que, contrairement à une idée répandue, le nombre de victimes résultant de combats ne représente qu’une infime proportion du nombre de morts résultant d’un conflit.  En conséquence, se pencher sur la question de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition dans des situations de conflit ne doit pas être considéré comme une « affaire habituelle », a-t-elle encore dit.

Mme Elver a également rappelé que le droit à l’alimentation était un droit fondamental, indispensable à la jouissance de tous les autres droits.  Être libéré de la faim est considéré comme faisant partie du droit coutumier international et, de ce fait, s’applique à tous les États, partie ou non au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a-t-elle affirmé, ajoutant que ledit Pacte s’applique en temps de guerre comme en temps de paix. 

Dans ce contexte, Mme Elver a déclaré que la famine en tant qu’arme de guerre devait être interdite dans tous les cas de conflit, et que les parties en conflit avaient la responsabilité première de répondre aux besoins des populations sous leur contrôle, y compris en matière d’eau et de nourriture.  Elles doivent également faciliter l’arrivée de l’aide humanitaire et prendre toutes les mesures pour un passage libre des acteurs humanitaires, a poursuivi Mme Elver.  Elle a également souligné la nécessité de garantir que les auteurs d’actes criminels aient à rendre des comptes, ajoutant qu’il était possible de traduire devant la Cour pénale internationale les personnes qui affament les populations civiles dans le contexte des conflits armés. 

Lors du débat interactif avec Mme Elver, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, l’Union européenne a insisté sur le mandat fondamental de la Rapporteuse spéciale et sur l’importance du droit à l’alimentation dans les situations d’urgence.  Rappelant que plus de 20 millions de personnes sont en état d’insécurité alimentaire en 2017, l’Union européenne s’est dite préoccupée par la situation au Soudan du Sud, au Yémen et dans le nord du Nigéria.  L’Union européenne entend allouer 1,8 milliard d’euros, soit 80% de l’appel des Nations Unies, mais estime que le financement n’est qu’une partie de la solution, et qu’il faut s’attaquer aux moteurs de la vulnérabilité.  La famine ne peut être prévenue que si tous les individus peuvent se déplacer vers les agences humanitaires, ce qui implique que l’accès de ces dernières soit garanti conformément au droit international.  L’Union européenne aimerait connaître l’avis de la Rapporteuse spéciale sur les mesures à prendre pour que l’assistance alimentaire atteigne toutes les populations dans les zones de conflit.  Elle voudrait aussi savoir comment les États Membres peuvent aider la Rapporteuse spéciale dans son travail et comment les ressources alimentaires peuvent être distribuées sans discrimination.

La Norvège a insisté sur la nécessité d’apporter des solutions à long terme aux crises.  La Norvège rappelle en outre que la législation nationale des États devrait fournir le cadre permettant d’aider les États à respecter le cadre international.  Il faut donc s’assurer que les lois nationales reflètent le droit international. 

Le Maroc a insisté sur l’interdépendance entre conflit armé et insécurité alimentaire et sur la situation toujours tragique aujourd’hui, 72 ans après la création de la FAO dont le but est de « construire un monde libéré de la faim ».  Le Maroc a demandé à la Rapporteuse spéciale si elle pouvait élaborer davantage sur la nécessité -soulignée dans son rapport- de conclure une convention mondiale afin de prévenir les famines et protéger le droit à une alimentation adéquate.  Le Maroc aimerait notamment en savoir plus sur la faisabilité de la création d’un nouveau traité international contraignant dans un contexte où de nombreux traités internationaux attendent encore leur mise en œuvre effective.  L’Indonésie aimerait en savoir davantage sur la corrélation entre l’insécurité alimentaire et les conflits et notamment sur la formation d’un groupe d’étude spécial sur la création d’instruments juridiquement contraignant pour limiter les situations de famine.  Elle a en outre expliqué qu’en novembre 2016, son agriculture se classait au vingt-cinquième rang dans le monde pour la durabilité et que le pays avait atteint 87% de ses objectifs.

Cuba a déclaré que le droit à une alimentation saine devait être assuré dans toutes les circonstances même si cela était « malheureusement une utopie » au vu des quelque 800 millions de personnes ayant faim dans le monde.  Cuba présentera à la Troisième Commission un projet de résolution intitulé « droit de l’alimentation » qui donnera ainsi à l’Assemblée générale l’opportunité de réaffirmer que la faim est un « outrage ».

Le Cameroun a fait état des dégâts causés par Boko Haram dans le pays, par exemple par le vol de bétail.  Il a également fait état de l’afflux de réfugiés, qui a doublé le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire dans le pays.  Le Cameroun a par ailleurs expliqué prendre des mesures pour lutter contre cette insécurité alimentaire, telles que l’autonomisation des réfugiés par le biais d’un appui aux activités génératrices de revenus.  Enfin, le Cameroun aimerait lui aussi des précisions sur la convention mondiale que la Rapporteuse spéciale appelle de ses vœux.

La Turquie a souligné la dimension critique de l’alimentation dans les conflits, qui affecte les populations les plus vulnérables et a déploré que la faim soit utilisée comme une arme de guerre.  Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale quelles étaient ses recommandations par rapport à un système d’alerte rapide pour lutter contre la faim et comment l’ONU pouvait établir et gérer un tel système d’alerte.

Le Myanmar s’est dit à la recherche d’une solution durable pour aider les communautés du pays, ajoutant que des mesures avaient été prises pour tenir les engagements pris.

Certaines délégations ont reproché à Mme Elver une « politisation » de son rapport.  Ainsi la République arabe syrienne lui a demandé plus de neutralité, de transparence et moins de politisation dans son travail et l’a appelée à ne pas se baser sur des sources telles que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  La République arabe syrienne a aussi demandé à Mme Elver pourquoi elle avait « balayé d’un revers de la main » les consultations du Gouvernement syrien avec la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge et pourquoi elle n’avait pas mentionné le rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sur le pays.  Le Gouvernement syrien a toujours assuré que la nourriture soit distribuée à la population et a laissé passer les convois humanitaires.  Par ailleurs, la République arabe syrienne a déploré que les catastrophes causées par Jabhat el-Nosra et Daech, qui ont « détruit nos récoltes », n’aient pas été mentionnées, pas plus d’ailleurs que la situation « désastreuse » causée par Israël en Palestine ou encore le blocus imposé à l’Iran, à Cuba et au Venezuela.  Elle a enfin déploré que ne soit pas fait état du « crime terrible » commis au Yémen par certains pays, notamment ceux de la coalition menée par l’Arabie saoudite. 

Pour sa part, et tout en rappelant son engagement à travailler avec l’ONU et avec la Rapporteuse spéciale, l’Arabie saoudite a déploré que le rapport « manque de clarté » et ne fournisse pas les informations nécessaires sur ce qui devait être fait pour assurer le droit à l’alimentation.  L’Arabie saoudite rejette en outre l’idée, présente dans le rapport de Mme Elver, que le pays avait intentionnellement tenté de détruire la base agricole du Yémen, alors que Riyad ne faisait que lutter contre les milices qui détruisent le pays.  Elle a aussi déploré que le rapport ne mentionne pas l’aide que l’Arabie saoudite apporte « au monde entier depuis 20 ans », aide grâce à laquelle plus de 80 pays ont pu surmonter la faim, se présentant comme le quatrième bailleur de fonds le plus généreux, avec 17 milliards de dollars d’aide humanitaire.

Dans ses réponses aux délégations, Mme Hilal Elver, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, a remercié l’ensemble des délégations pour leurs remarques, observant qu’il en ressort que « la situation est extrêmement politique ».  Répondant aux critiques formulées par plusieurs délégations, elle dit avoir fait de son mieux pour être objective, indépendamment des parties en conflit.  Toutefois, a-t-elle ajouté, les situations sont partout différentes et il est souvent difficile, dans les situations de conflit, de distinguer les adversaires.  Ce dont nous sommes sûrs, a-t-elle souligné, c’est que, dans cette configuration, la population souffre.  Ce qui importe, c’est donc l’action menée pour atténuer la souffrance de ces populations.  Pour la Rapporteuse spéciale, « peu importe » que cette action provienne d’acteurs extérieurs au pays ou de pays voisins.

Sur un plan méthodologique, Mme Elver a indiqué s’être basée sur les rapports de l’ONU et non pas sur des articles parus dans la presse ou sur des discussions au sein d’organisations non gouvernementales (ONG) éloignées.  En réponse aux délégations qui trouvaient son rapport « injuste », elle a rappelé n’avoir pu se rendre dans plusieurs pays, notamment au Myanmar et en République arabe syrienne, et avoir dû s’appuyer sur les informations des ONG internationales.  Face à l’utilisation de la faim dans les conflits, nous avons besoin « non pas d’un pays de rêve mais d’orientations pour que la communauté internationale reconnaisse qu’il s’agit d’un crime contre l’humanité et que chacun aura à y répondre individuellement », a ajouté la Rapporteuse spéciale, qui a répété que « la famine ne doit pas devenir une arme de guerre ». 

À ce sujet, Mme Elver a précisé que son rapport faisait une « suggestion » au Conseil des droits de l’homme pour qu’il crée un groupe d’étude et relève les points importants permettant de mieux prévenir ces situations.  Elle a ajouté que, dans la future convention mondiale dédiée à cette question, devrait être incluse une réflexion sur les causes profondes et sur un système d’alarme rapide.  Mais il faut patienter pour que les choses prennent forme, a-t-elle reconnu.  Observant d’autre part que « lorsque la famine s’installe, il est difficile d’y remédier », elle a appelé à la coopération internationale pour protéger les civils.  À cause des conflits et des changements climatiques, nous ne pourrons pas faire cesser la famine et parvenir à la « faim zéro » dans l’immédiat, c’est « quasiment impossible », a-t-elle encore constaté.

Mme Elver a conclu en reconnaissant n’avoir « pas pu tout inclure dans son rapport, ce document étant soumis à des « règles de longueur ».  Cela explique que certains pays ne soient pas mentionnés, a-t-elle poursuivi, notant à propos de l’État de Palestine que « mieux vaut un rapport complet sur le sujet que quelques phrases dans un autre rapport ».  

Mme KOUMBOU BOLY BARRY, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, a déclaré que le secteur de l’éducation avait vu s’améliorer significativement les chiffres de la scolarisation dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), même si quelque 263 millions d’enfants et de jeunes ne vont pas à l’école, dont 61 millions d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire.  L’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud sont représentées à plus de 70% parmi les enfants non scolarisés dans l’enseignement primaire et secondaire à l’échelle mondiale, a-t-elle précisé.

Les objectifs de développement durable ont étendu à l’enseignement secondaire le droit universel à une éducation primaire gratuite et de qualité, sans discrimination, a rappelé Mme Boly Barry.  Mais les élèves handicapés, pauvres, ruraux, les filles, les minorités et d’autres groupes vulnérables sont confrontés à des difficultés supplémentaires qui nécessitent une assistance particulière pour assurer leur réussite.  Dans ce contexte, il est important de distinguer l’équité de l’égalité dans l’éducation.  L’égalité signifie traiter tous les élèves de la même façon, tandis que l’équité signifie que l’on fournit à tous les élèves ce dont ils ont besoin pour réussir, a expliqué la Rapporteuse spéciale.  Pour elle, une éducation équitable exige une éducation inclusive, qui élimine les discriminations et apporte à chaque élève le soutien nécessaire.

En outre, l’éducation inclusive signifie qu’un environnement d’apprentissage de qualité est fourni aux élèves de diverses origines et aux capacités variables.  Bien que l’éducation inclusive renvoie souvent à l’inclusion des élèves handicapés dans la classe, elle peut également inclure la réintégration des élèves plus âgés qui ont été déscolarisés pendant un temps, des étudiants de différentes cultures et langues et, plus généralement, tout élève qui a besoin d’un soutien supplémentaire pour réussir dans le système scolaire, a estimé Mme Boly Barry.  L’inclusion effective doit être mise en œuvre par les lois et politiques en matière d’éducation, mais elle doit également être incorporée dans la culture et la pratique des écoles.  Pour cela, les enfants doivent recevoir l’assistance particulière dont ils ont besoin pour répondre à leurs nécessités individuelles.

L’éducation doit être inclusive sur le plan ethnique, culturel et linguistique, a encore rappelé la Rapporteuse spéciale.  Ainsi, l’enseignement des langues secondaires, pour les bilingues, et des langues maternelles devrait être dispensé dans les écoles comptant un nombre important d’élèves appartenant à des minorités linguistiques.  Ceci est particulièrement pertinent dans les écoles établies pour les migrants et les réfugiés, a précisé Mme Boly Barry.  En vivant et en apprenant ensemble, l’éducation inclusive permet de s’attaquer directement à la discrimination et aux préjugés, et elle enseigne la tolérance et la valorisation de la diversité, a-t-elle ajouté.  

Les enfants pauvres et ruraux, les filles, les personnes handicapées, les minorités, les peuples autochtones et les nomades sont souvent surreprésentés parmi les enfants non scolarisés, a souligné la Rapporteuse spéciale.  Les obstacles auxquels ils sont confrontés doivent être surmontés si l’on souhaite atteindre les objectifs de développement durable d’ici à 2030.  Les migrants, les réfugiés, les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et les apatrides ont tous besoin d’aménagements et de soutien qui ne font normalement pas parties des systèmes éducatifs standards, a encore fait observer Mme Boly Barry.  La Rapporteuse spéciale a donc proposé de revoir les lois, les politiques, les données ventilées sur l’éducation et les financements et actions ciblées pour répondre à leurs besoins spécifiques.  Les ministères de l’éducation doivent réviser leurs politiques et leurs orientations nationales pour y inclure l’équité et l’inclusion.  Ils devraient également soutenir la recherche et l’innovation, en partenariat avec les universités et les instituts pédagogiques, afin de développer de nouvelles approches qui répondent aux réalités locales. 

De même, à tous les niveaux, la participation des enfants et de leurs familles est essentielle pour trouver des solutions qui fonctionnent, a plaidé la Rapporteuse spéciale, pour qui les écoles privées doivent en outre se voir appliquer les mêmes normes que les écoles publiques, sachant que les difficultés financières ne doivent jamais servir d’excuse pour ne pas satisfaire à ces normes.  La Rapporteuse spéciale a également invité la communauté internationale à fournir un appui politique, financier et technique ciblé pour aider les gouvernements à mettre en œuvre des politiques éducatives inclusives et équitables. 

Lors du dialogue avec Mme Boly Barry, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, l’UNESCO s’est félicitée qu’elle appelle dans son rapport à un enseignement inclusif et équitable.  Pour l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), c’est là un élément clef pour s’assurer de la réalisation du droit à l’éducation et plus généralement du droit au développement.  L’UNESCO souhaite des progrès pour garantir le droit à l’éducation pour tous les enfants, et notamment pour les plus désavantagés et vulnérables d’entre eux.  L’Organisation souhaite aussi que l’enseignement devienne un « pouvoir de transformation ».  L’UNESCO publiera jeudi, avec Mme Boly Barry, un rapport évaluant le rôle de la responsabilisation en matière d’éducation.  Elle souhaite d’ailleurs l’avis de la Rapporteuse spéciale sur les mesures incitatives que les gouvernements pourraient prendre en ce sens, ainsi que sur les mesures que pourraient prendre toutes les parties prenantes en faveur d’une éducation durable, étant donné que le rôle premier en matière de droit à l’éducation relève des gouvernements.

La Norvège, qui voit dans le droit à l’éducation un droit fondamental, s’est félicitée que le rapport se concentre sur l’élimination des discriminations à l’école et établisse une différence utile entre l’équité et l’égalité.  Elle a demandé quelles mesures pratiques les États pourraient adopter afin de mieux identifier les besoins en matière d’éducation.

L’Union européenne a dit reconnaître pleinement le droit à l’éducation et son importance pour la mise en œuvre de tous les droits fondamentaux et du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  À propos de la question de l’équité, elle a souhaité en savoir davantage sur la situation des filles, dont beaucoup ne vont même pas l’école primaire.  Elle a également demandé à connaître les pratiques optimales permettant dans le court terme l’accès des réfugiés à l’enseignement primaire et élémentaire.

Le Burkina Faso a salué le diagnostic de la Rapporteuse spéciale mettant l’accent sur les groupes les plus vulnérables.  Il s’est aussi dit conscient que la mise en œuvre des objectifs de développement durable est tributaire de l’objectif 4 –une éducation de qualité- et a attiré l’attention sur l’état préoccupant de la sécurité au Sahel, qui complique sa tâche aussi dans le domaine éducatif.  Soulignant aussi l’importance d’un partenariat public-privé dans ce secteur, le Burkina Faso a souhaité connaître le point de vue de la Rapporteuse spéciale sur les moyens d’enregistrer les progrès réalisés en vue de mieux orienter les actions futures.

Le Mexique s’est félicité des mesures comprises dans le rapport pour garantir un enseignement de qualité aux jeunes femmes et aux filles, aux autochtones et aux personnes vivant dans la pauvreté.  Disant se concentrer au plan national sur la qualité de l’enseignement dispensé dans les régions défavorisées, il a souhaité connaître les stratégies permettant de promouvoir un enseignement de qualité dans les zones rurales.  Il a aussi demandé quelles sont les meilleures politiques prenant en considération la participation de la société civile.  Cuba a estimé que la collaboration internationale en faveur du droit à l’éducation pouvait impulser un meilleur enseignement au niveau national grâce à des échanges de bonnes pratiques dans ce domaine.

Le Maroc a affirmé que le droit à l’éducation se situait au cœur de son projet de société en vue de la réalisation des objectifs de développement durable.  De plus, un cadre interministériel relatif à l’égalité des sexes a été mis en place et vise à créer une forte synergie tenant compte de la problématique hommes-femmes dans le développement.  Dans ce cadre, il a souhaité savoir quelles mesures permettraient la mise en place d’instruments fiables de suivi de la mobilisation et des réalisations s’agissant du droit à l’éducation.

L’Afrique du Sud a souhaité mettre en exergue la situation d’exclusion que vivent les enfants forcés de travailler pour le profit d’entreprises transnationales alors que ce travail est dangereux.  Pour eux, l’enseignement n’est pas possible.  L’Afrique du Sud souhaite donc des commentaires de la Rapporteuse spéciale à ce sujet.  Elle a aussi demandé à en savoir plus sur les liens intrinsèques unissant droit à l’éducation et droit au développement. 

L’Indonésie s’est réjouie que les objectifs de développement durable offrent la possibilité d’intégrer le droit à l’éducation dans les législations nationales et contribuent à renforcer l’éducation pour les groupes les plus marginalisés et vulnérables.  En Indonésie, 196 écoles ont été créées pour répondre à ces besoins spécifiques.  L’Indonésie aimerait des précisions sur la collecte de données ventilées aux niveaux national et local évoquée par la Rapporteuse spéciale. 

Les Maldives ont affirmé que le droit à une éducation sans discrimination constituait l’un des droits principaux garantis par la constitution nationale.  Ainsi, l’enseignement secondaire est gratuit, cette démarche visant à ce qu’aucun enfant ne soit laissé-pour-compte.  Conscientes de l’importance de données ventilées pour une éducation inclusive et équitable, les Maldives aimeraient connaître les solutions techniques retenues par d’autres États.

L’Iraq a assuré que l’éducation est l’un des droits fondamentaux pour tout citoyen iraquien.  La stratégie nationale du pays pour l’éducation supérieure 2012-2020 comprend plusieurs axes: relever le niveau pour se conformer aux normes internationales, garantir l’égalité des sexes et prévoir des loisirs dans les écoles, tels que le théâtre.  En ce qui concerne les régions récemment libérées de Daech, l’Iraq a mis en place des projets avec le financement de fonds pour la reconstruction.  Il a appelé le secteur privé à accorder un soutien aux régions libérées, notamment pour y promouvoir le droit à l’éducation.

Soulignant lui aussi l’importance de l’objectif 4 du Programme 2030, le Qatar a mis l’accent sur ses efforts au plan national mais aussi en matière de coopération internationale.  Il a ainsi rappelé que, dans les classements internationaux, le Qatar était le premier État arabe en matière de qualité de l’enseignement.  Mais il a aussi constaté des obstacles, qu’il a attribué aux mesures prises à son encontre, et ont notamment empêché 213 étudiants qataris de poursuivre leurs études dans des pays qui le boycottent, tout en faisant remarquer qu’il n’avait pas imposé de mesures équivalentes en représailles.  Il a d’autre part souhaité savoir quelles mesures sont prises pour les réfugiés en matière d’éducation.

La Fédération de Russie a plaidé pour une inclusion pour tous en matière éducative afin de faciliter la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Elle a souligné à cet égard le statut particulier de certains apprenants appartenant à des minorités, évoquant à titre d’« exemple frappant » la loi récemment adoptée en Ukraine, « qui va à l’encontre du droit à l’éducation de millions de personnes et notamment des russophones ».  Pour la Fédération de Russie, cette loi impose des limitations à l’enseignement des langues dans les établissements scolaires, au mépris du droit des minorités à l’éducation.  Appelant l’Ukraine à respecter ses obligations, en particulier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, elle a dit espérer que la Rapporteuse spéciale collaborera avec cet État pour mettre fin à cette situation discriminatoire.

La Hongrie est, elle aussi, préoccupée par la nouvelle loi adoptée en Ukraine sur l’éducation des personnes appartenant à des minorités, notamment s’agissant de l’enseignement du hongrois en Transcarpatie.  Rappelant qu’elle s’est engagée dans sa Constitution à protéger le droit des minorités à une éducation de qualité, la Hongrie estime que la loi ukrainienne va à l’encontre des normes internationales et d’instruments comme la Convention relative aux droits de l’enfant.  Elle a donc demandé à la Rapporteuse spéciale comment permettre une meilleure mise en œuvre de l’accès à l’éducation pour les personnes appartenant à des minorités.  

Afin de répondre à « certains commentaires », l’Ukraine a rappelé que son territoire abrite 735 écoles où les enfants des minorités nationales peuvent être éduqués dans leur langue, ajoutant que 700 000 enfants étaient éduqués dans leur propre langue maternelle.  L’Ukraine a précisé qu’elle offrait une éducation dans cinq langues: le moldave, le polonais, le russe, le hongrois et l’ukrainien.

Dans ses réponses, Mme Boly Barry, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, est revenue sur les questions portant sur la qualité de l’éducation et notamment sur celles sur la prise en compte des langues maternelles ainsi que celles sur la motivation et la formation des enseignants en milieu rural.  À ce propos, elle a insisté sur l’importance de l’utilisation des langues maternelles de l’enfant, qui lui permettent d’acquérir plus rapidement les notions enseignées, un constat « que l’on retrouve dans toutes les recherches sur la question ».  Cet enseignement dans la langue maternelle permet aussi à l’enfant d’avoir accès à sa culture et ses valeurs fondamentales, a-t-elle rappelé, en encourageant l’ensemble des États à s’assurer que les premières années de l’apprentissage des enfants se fassent bien dans leur première langue.

Sur l’éducation en milieu rural, la Rapporteuse spéciale a insisté sur la nécessité de mettre en place un système éducatif décentralisé.  Pour elle, les décisions ne doivent pas être adoptées au sommet de façon arbitraire.  Pour Mme Boly Barry, si les systèmes d’enseignement étaient suffisamment décentralisés, il serait possible de prendre des décisions au niveau local, ce qui faciliterait à la fois la participation et, « d’abord et avant tout », l’écoute.

Prenant en exemple le Burkina Faso, la Rapporteuse spéciale a expliqué que ce pays avait veillé à ce que les écoles rurales soient visitées et leurs enseignants ainsi que les communautés soient consultés, afin de s’assurer que les mesures prises répondraient bien à la demande locale. De même, Mme Boly Barry a recommandé l’utilisation d’outils innovants comme Internet ou encore la mise en place de mesures gratifiantes pour les enseignants.

Aux questions ayant trait à la gouvernance, notamment la manière d’assurer la prise en charge des réfugiés ou des jeunes filles, la Rapporteuse spéciale a, là aussi, répondu en préconisant la décentralisation du système éducatif.  Il faut prendre les décisions à la base et non au sommet, impliquer chaque acteur -enseignants, apprenants, société civile, dirigeants locaux- et mettre en place un système participatif, a-t-elle insisté.

M. DAVID ALSTON, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a expliqué que son rapport était consacré, cette année, à la pleine jouissance des droits civils et politiques par les personnes vivant en situation de pauvreté extrême.  Le rapport cherche à démontrer que les pauvres font face à des violations de leurs droits de manière disproportionnée et sous différentes formes; que leurs droits civils et politiques sont le plus souvent négligés par les acteurs traditionnels des droits de l’homme et du développement; que cette situation cause des questions quant à l’indivisibilité de tous les droits de l’homme et enfin que des changements sont nécessaires, de façon à ce que les  droits de l’homme des personnes vivant en situation de pauvreté soient davantage incorporés dans les cadres d’action, a-t-il précisé.  

Pour le Rapporteur spécial, les acteurs des droits de l’homme et du développement n’analysent pas suffisamment, voire ignorent souvent, les droits civils et politiques des personnes vivant en situation de pauvreté.  Ils se concentrent davantage sur des questions matérielles ou le manque de ressources.  Cette tendance est même renforcée au plan international avec une attention accrue aux fameux seuils de la Banque mondiale, pour qui une personne vivant désormais en dessous de 1,90 dollar des États-Unis par jour (contre 1,25 auparavant) se trouve dans l’extrême pauvreté et que la solution consiste à augmenter ses revenus.  Bien sûr, a-t-il dit, il y a des exceptions à cette tendance, mais la règle est qu’il y a plus de théorie que de pratique. 

Dans ce contexte, M. Alston a expliqué que la communauté internationale devrait avoir une approche différente de celles de ces acteurs, car la réalité est que ces partenaires n’accordent pas assez d’attention aux détails, ni même à la vérification de leurs estimations, en particulier lorsqu’elles concernent les personnes vivant en situation de pauvreté.  Le résultat est que ni le diagnostic, ni même les recommandations ne sont taillés pour répondre aux défis de ces personnes.

Pour changer d’approche, la communauté internationale devrait, en résumé, chercher à disposer de données, à la fois sur les faits matériels, mais aussi sur l’état de leurs droits civils et politiques, d’autant que ces derniers peuvent être violés de plusieurs manières, a fait valoir le Rapporteur spécial.

Pour M. Alston, parmi les manières de violer ces droits figurent l’adoption de lois neutres face aux effets de la pauvreté, le manque de ressources allouées aux lois qui abordent ces questions ou encore la passivité des gouvernements face aux situations de pauvreté.  Sur la base de ces constats, le rapport contient une série de recommandations, qui promeuvent des solutions pour la prise en compte de tous les facteurs qui mènent à la pauvreté et vont au-delà des solutions et mesures généralement proposées, a conclu M. Alston.  

Lors du dialogue avec M. Alston, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, la Chine a dit donner la priorité à l’élimination de la pauvreté tout en protégeant le mode de vie de chacun et a rappelé qu’elle avait réduit la pauvreté « la plus importante du monde » qui a touché jusqu’à 700 millions de Chinois, soit 70% de la population du pays.  La Chine a ensuite rappelé au Rapporteur spécial qu’il devait respecter l’esprit de la Charte de l’ONU, déplorant que son rapport fasse état de demandes formulées par cette dernière, lors de sa visite dans le pays en 2016, qui auraient été « négligées ».  La Chine était alors dans une « situation difficile » et a fait de son mieux pour répondre aux demandes du Rapporteur spécial.  Elle aimerait connaître les recommandations spécifiques de M. Alston pour l’élimination de la pauvreté en Chine.

L’Iraq a demandé au Rapporteur spécial s’il avait pris en compte dans son rapport les contextes de crise, notamment les attentats terroristes qui amènent à une pauvreté extrême.  Ainsi, à cause de Daech, la pauvreté est remontée dans le pays pour atteindre 22%.  L’Iraq aimerait savoir quelles mesures peuvent être prises pour s’attaquer à cette problématique.  Pour sa part, l’Iraq, dans le cadre de sa stratégie 2017-2021, a mis en place un fonds pour reconstruire les zones détruites par les groupes terroristes en coopération avec la Banque mondiale, qui permet de soutenir les familles les plus pauvres.

L’Union européenne a mentionné que la pauvreté extrême empêchait tout un chacun de jouir de leurs droits économiques et sociaux mais également politiques et civils.  Constant que le Rapporteur spécial appelle à une nouvelle approche pour mettre en exergue les liens entre pauvreté extrême et droits politiques et civils, l’Union européenne lui a demandé comment les indicateurs de pauvreté extrême pouvaient être modifiés pour mieux prendre en compte la violation disproportionnée des droits des populations les plus vulnérables.

Le Maroc, qui a déploré que le rapport ne soit pas en ligne sur le site de la Troisième Commission et qu’il n’ait, de fait, pas pu y avoir accès avant la réunion de ce matin, a ensuite vanté son initiative nationale du développement humain (INDH), lancé en 2005, et considérée comme le « troisième meilleur programme d’action dans le monde », qui a « amélioré la qualité de vie de 10 millions d’habitants, dont 50% en milieu rural ».  Avec 40 milliards de dirhams (4,23 milliards de dollars des États-Unis) investis dans le projet, le pays a vu l’incidence de la pauvreté multidimensionnelle baisser dans toutes les régions du Royaume entre 2004 et 2014. 

Cuba a mentionné que les droits sociaux et culturels ne pouvaient être respectés que si les droits politiques et civiques l’étaient aussi, mentionnant que l’expert n’était pas outillé pour répondre à des questions qui nécessitent une approche holistique.  Le représentant a également souligné que, seul un examen profond des causes de la pauvreté, pouvait amener une solution durable.

Les États-Unis ont insisté sur le renforcement de l’égalité hommes-femmes dans les couches de populations les plus vulnérables partout dans le monde, ce qui implique d’aller à l’encontre de certaines pratiques traditionnelles qui bafouent les droits des populations les plus vulnérables.

En réponse aux délégations, M. Alston, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a présenté ses excuses quant à la soumission tardive de son rapport et s’est dit désolé qu’il n’ait pu être rendu disponible plus tôt.  Il a estimé que la réussite de la Chine dans l’élimination de la pauvreté extrême « mérite nos louanges ».  Lorsqu’on se penche sur la situation des zones rurales en Chine, la préoccupation principale n’est plus la pauvreté, a-t-il insisté, notant que cette question se pose désormais surtout dans les zones urbaines, vers lesquelles convergent des dizaines de millions de migrants venus des campagnes.  Ces individus devraient normalement recevoir un soutien social de la part de leur village d’origine.  Or, ce n’est pas faisable quand ces personnes travaillent en zone urbaine, les ruraux ayant besoin d’un « houkou » ou permis de résidence, a-t-il constaté, émettant l’espoir que le Gouvernement chinois se penche sur le sujet.

Le Code de conduite des Nations Unies n’interdit pas à un rapporteur spécial d’agir sans l’aval du gouvernement visité et n’empêche pas des individus de le rencontrer, a assuré M. Alston, qui s’est dit préoccupé par les informations faisant état d’arrestation à la suite de sa visite en Chine.  Il a ainsi évoqué le cas d’un avocat des droits de l’homme qui a été interpellé puis « traité de façon scandaleuse en prison », et attend désormais un jugement.

M. Alston a par ailleurs dit aller dans le sens de l’Iraq s’agissant du lien entre terrorisme et pauvreté.  À ses yeux, la pauvreté est souvent le résultat de l’exclusion spécifique de groupes et cette exclusion peut « faire le lit du terrorisme ».  Dès lors, il est absolument crucial de garder à l’esprit que les politiques d’exclusion peuvent devenir « le terreau fertile menant à l’apparition d’autres problèmes ». 

En réponse à l’Union européenne, qui évoquait l’augmentation significative des inégalités, M. Alston a constaté que peu de pays se souciaient réellement de ce problème, alors que les conséquences de ces inégalités ont des effets sur l’exercice des droits civils et politiques.  Lorsque les capitaux et les revenus sont thésaurisés par une minorité infime, les droits civils et politiques sont sapés et déviés pour satisfaire les intérêts des plus puissants, a-t-il dénoncé, observant que même la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) sont préoccupés par la possibilité d’une baisse de la croissance économique due aux inégalités croissantes.

Faisant rapidement allusion au lien existant entre violence et pauvreté, sujet sur lequel se concentre notamment son rapport, il a constaté que l’écrasante majorité des personnes victimes de violences, en particulier de la part de la police, étaient des « cibles faciles », à commencer par les plus pauvres.

Revenant sur sa suggestion faite, en juin dernier, au Conseil des droits de l’homme d’un revenu de base qui pourrait être octroyé à tous les citoyens du monde, le Rapporteur spécial a jugé essentiel de trouver un moyen d’assurer une protection sociale pour tous.  Or, a-t-il fait remarquer, les pauvres doivent « remplir beaucoup de cases » pour bénéficier de cette assistance, ce qui va à l’encontre du droit de bénéficier d’une protection sociale minimale.

S’adressant d’autre part aux États-Unis, où il effectuera une visite en décembre, le Rapporteur spécial a salué le comportement « très coopératif » de ce pays « pour l’instant ». 

M. Alston est enfin revenu sur la question de l’égalité homme-femme, se disant convaincu qu’au niveau mondial, les femmes et les jeunes filles restaient moins bien loties que les hommes, notamment en ce qui concerne les revenus.  Selon lui, les piliers politiques et économiques néo-libéraux empêchent le transfert des ressources vers les femmes.

Deux États sont ensuite de nouveau intervenus au titre de leur droit de réponse.  La Chine a reconnu qu’en dépit de ses réussites en matière de lutte contre la pauvreté, beaucoup restait à faire et a indiqué qu’un effort était fait pour remédier au problème de la pauvreté dans les villes.  Sur ce point, elle a assuré que le système du « houkou » n’était pas un obstacle.  La Chine a en outre insisté sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États, y compris dans un rapport traitant de la pauvreté et des droits de l’homme.  « Concentrez-vous sur votre propre mandat, qui concerne la pauvreté, plutôt que de vous intéresser aux questions civiles et politiques, d’autres rapporteurs s’en occupent déjà », a lancé le représentant au Rapporteur spécial.  Pour sa part, l’Iraq a réaffirmé qu’il était un État fédéral respectant les minorités.  Certes, le pays a une importante diversité, mais sa Constitution garantit des droits égaux aux différentes composantes de la population.

En réponse à ces deux pays, M. Alston, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a dit partager entièrement l’affirmation que les activités de terroristes étrangers ont des conséquences graves pour le pays, en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté.  Concernant la Chine, le Rapporteur spécial a dit avoir appris « avec plaisir » que le système « houkou » faisait l’objet de réformes.  Le travail n’est pas encore achevé mais le Gouvernement chinois se concentre sur les problèmes dès lors qu’ils sont recensés, a-t-il observé.  Il s’est également dit optimiste s’agissant des mesures en faveur des travailleurs migrants.  Quant à savoir pourquoi un rapporteur spécial sur la pauvreté ne pourrait pas s’intéresser aux droits civils et politiques, M. Alston a estimé qu’il serait stupide de les séparer, la démarche de son mandat étant « intégrée ».  Au final, a-t-il conclu, « ce qui importe est que ceux qui vivent dans la pauvreté aient une expérience différente pour ce qui est de leurs droits ».

M. LEO HELLER, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, qui présentait cette année son deuxième rapport, a déclaré que ce dernier reposait sur celui de l’année précédente et dans lequel il abordait la question de l’eau et de l’assainissement dans le contexte de la coopération et du développement.  L’an passé, il analysait le cadre théorique conceptuel.  Cette année, il a examiné la façon dont les contributeurs peuvent aider à la réalisation du droit à l’eau et à l’assainissement. 

Le Rapporteur spécial a expliqué qu’il avait, à cette fin, utilisé une analyse empirique et étudié six cas: la France, le Japon, l’Union européenne, la Banque mondiale, la Banque interaméricaine de développement et l’UNICEF.  Pour chacun des cas, il a évalué le soutien apporté par ces contributeurs, notamment des crédits et des prêts.  Les informations recueillies ont été complétées d’entretiens dans les sièges de ces bailleurs de fonds.  Il a également analysé leurs procédures opérationnelles, en plus de visiter personnellement les installations et discuté avec les équipes opérationnelles et les bénéficiaires. 

À la suite du constat fait dans son analyse théorique, M. Heller constate aussi aujourd’hui que l’engagement des six contributeurs de fonds qu’il a étudié vis-à-vis des droits de l’homme est hétéroclite.  Alors que certains ont intégré les droits de l’homme dans le cadre de leurs politiques d’aide, y compris celles liées à l’eau et à l’assainissement, d’autres n’en tiennent compte que de manière sporadique, révélant des degrés divers de clarté dans leur implication dans la coopération.  Par ailleurs, et même dans les situations où les droits de l’homme sont intégrés aux politiques, le rapport constate des lacunes dans la mise en œuvre de cet engagement dans la réalisation des projets.  Certains ne sont pas réalisés avec une approche « droits de l’homme », constate le Rapporteur spécial.

Dans son rapport, M. Heller recommande aux bailleurs de fonds d’incorporer des normes et principes des droits à l’eau potable et à l’assainissement, d’établir des stratégies spécifiques en accord avec leurs cadres politiques, et à garantir les droits à l’eau potable et à l’assainissement pour les personnes vulnérables, notamment les femmes et les enfants.  Quant aux outils opérationnels, le Rapporteur spécial leur recommande de traduire l’engagement qu’ils ont pour les droits de l’homme dans les pratiques opérationnelles et de les adapter de manière à atteindre les objectifs escomptés.  Il leur suggère aussi d’utiliser ces outils ainsi modifiés comme conditions préalables pour toutes leurs opérations, afin de garantir la pleine application des cadres à tous les stades des projets. 

M. Heller demande aussi à ces six bailleurs de fonds de trouver un équilibre entre projets en zones rurales et en zones urbaines, afin de s’assurer d’une couverture universelle et d’une réalisation du droit à l’eau potable et à l’assainissement dans toutes les situations, de garantir la viabilité à long terme des projets menés ou encore de veiller à ce que ces projets privilégient les plus vulnérables.  Il recommande enfin aux bailleurs de fonds de systématiquement évaluer leurs projets et d’en améliorer les protocoles de suivi et d’évaluation ou encore de préparer des études d’évaluation à tous les stades des projets.

Lors du dialogue des délégations avec M. Heller, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, le Brésil est revenu sur l’objectif 6 de développement durable (Eau propre et assainissement) ainsi que sur l’importance des meilleures pratiques, comme soulignée dans le rapport, aussi bien pour les pays donateurs que bénéficiaires.  Il a demandé comment il était possible de participer aux discussions concernant les programmes pour de meilleures politiques d’assainissement et d’eau potable. 

L’Union Européenne a insisté sur l’approche « droits de l’homme » en matière d’eau et d’assainissement comme une condition sine qua non du développement.  Elle a demandé quelle était la meilleure façon d’atteindre cet objectif et de participer à sa durabilité sur le long terme.  De même, l’Allemagne a demandé quelles étaient les causes principales des lacunes dans la mise en œuvre des droits de l’homme en matière d’eau et d’assainissement.  Quelles sont les pratiques optimales permettant de s’assurer que la mise en œuvre des projets dans le cadre des droits fondamentaux de l’eau et de l’assainissement bénéficie aux personnes les plus vulnérables? a-t-elle demandé.

L’Espagne a insisté sur le rôle des bailleurs de fonds comme protecteurs des droits de l’homme à l’eau et à l’assainissement et sur la nécessité d’élaborer des projets de façon transparente avec les parties compétentes.  La Suisse a demandé quelle place accorder aux services d’approvisionnement en eau du secteur privé dans ces processus inclusifs, comment mieux servir les populations vivant dans les communautés rurales dispersées et enfin comment mieux intégrer la vision du Programme 2030 dans les services de l’eau et de l’assainissement.

La France a demandé au Rapporteur spécial comment sa mission pouvait renforcer la mise en œuvre de l’objectif de développement durable relatif à l’eau.  Rappelant l’importance du droit à l’eau et à l’assainissement en période de crise humanitaire, la Norvège a demandé au Rapporteur spécial de donner des orientations pour assurer le droit à l’eau et à l’assainissement en période de crise.

Revenant sur l’exécution des projets qui incorporent les droits de l’homme à l’eau et à l’assainissement, le Maroc a demandé quels outils opérationnels pouvaient être utilisés pour faire preuve de plus d’efficience.

L’Iraq a mis en avant les progrès du pays en matière d’eau et d’assainissement et rendu responsable du manque d’eau dans le pays Daech, qui contrôle certains barrages sur l’Euphrate, et qu’il a accusé d’en limiter le flux.

L’Afrique du Sud a jugé décevant que la coopération s’accompagne de conditions dans le cadre de l’aide au développement et a demandé plus d’informations sur les meilleures façons de canaliser l’engagement du secteur privé afin d’améliorer la coopération en matière d’eau potable et d’assainissement.

Les Maldives ont expliqué que le pays assurait le droit à l’accès à l’eau et à l’assainissement dans toutes les îles habitées du pays.  Ainsi, fin 2016, 41% de la population avait accès à l’eau potable.  Toutefois, fournir une eau potable à un coût abordable reste un défi pour le pays. 

Dans ses réponses, M. Heller, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a déclaré que, compte tenu de l’ambition des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et notamment l’objectif 6 relatif à l’eau potable et à l’assainissement et des cibles 6.1 et 6.2, la coopération internationale était inéluctable.  Sans celle-ci, aucun de ces objectif et cibles ne sera atteint, a-t-il averti.  S’agissant des lacunes dans les cadres de cette coopération, le Rapporteur spécial a dit avoir observé que nombre de bailleurs de fonds n’avaient pas encore incorporé les droits de l’homme dans leurs politiques de coopération.  Or, sans une telle prise en compte, les objectifs de cette coopération ne pourront pas aider à la pleine réalisation des droits de l’homme et donc du droit à l’eau potable et à l’assainissement. 

Pour M. Heller, les causes profondes de ces lacunes tiennent au fait que certains bailleurs ont souvent à l’esprit des objectifs non nécessairement liés à des résultats.  Certains veulent tout simplement que « l’argent sorte », a-t-il dit, ajoutant que parfois cela reflète le manque de préparation ou d’inclusion de ces projets.   

Mme LEILANI FARHA, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, a commencé par rappeler qu’elle avait présenté, en mars dernier, au Conseil des droits de l’homme un précédent rapport consacré à la financiarisation et au droit au logement, lequel appelait les États à modifier leur rapport au secteur financier afin que les marchés puissent remplir leur fonction sociale dans le domaine du logement.  Elle a ajouté qu’à cette fin, elle avait lancé un nouveau mouvement baptisé The Shift, qui exhorte les États à réduire leur financiarisation à l’horizon 2030 afin de rendre les villes plus inclusives en termes de logements adéquats, bon marché et sûrs pour tous.

Revenant au rapport présenté ce jour, consacré cette fois au droit au logement convenable pour les personnes en situation de handicap, Mme Farha a souligné le caractère central du logement pour la dignité et l’égalité des droits de ces personnes.  Choisir où et avec qui vivre, faire partie d’une communauté et avoir accès à un logement sûr et accessible constituent trop souvent pour elles une « question de vie ou de mort », a-t-elle affirmé.

Observant que les personnes handicapées souffrent de discriminations dans presque tous les aspects du logement, la Rapporteuse spéciale a relevé qu’elles sont aussi victimes de formes extrêmes de stigmatisation qui les obligent à rester chez elles de crainte de subir des violences ou des abus.  Elle a ainsi noté que le voisinage s’opposait régulièrement à l’établissement de logements pour les personnes souffrant d’un handicap psychosocial ou mental.  De même, a-t-elle poursuivi, les habitants handicapés sont fréquemment ostracisés au sein des communautés. 

Mme Farha a également noté que le placement forcé de ces personnes en institutions restait une pratique systémique dans le monde, les handicapés psychosociaux et mentaux étant les premiers concernés par ces mesures.  Ces pratiques impliquent souvent une privation de liberté à tous les niveaux de l’existence ainsi que des traitements cruels et inhumains.  De plus, a poursuivi la Rapporteuse spéciale, les conditions de vie sont les pires imaginables, en raison notamment de la surpopulation et d’un accès limité ou totalement absent à des toilettes ou à des installations hygiéniques.

Hors des institutions, les possibilités de logement des personnes handicapées ne sont guère meilleures, a constaté la Rapporteuse spéciale.  Le fait de se retrouver sans domicile fixe est souvent le résultat d’une désinstitutionalisation sans le soutien adéquat de la communauté pour trouver un logement convenable et abordable.  Un cercle vicieux veut que le handicap conduise à cette situation, qui elle-même entraîne une exacerbation des obstacles facteurs de stigmatisation et d’isolement, a souligné Mme Farha.

C’est ainsi que, dans les villes, les personnes handicapées en situation de pauvreté vivent le plus souvent dans des campements de sans-abri, voire sur les trottoirs.  En complément de ce constat général, la Rapporteuse spéciale a déclaré avoir vu, lors de visites de campements, des personnes handicapées -parmi lesquelles figuraient des enfants et des personnes âgées– isolées du reste de la communauté, parfois dans des pièces sans électricité et hors de la vue des autres.

Face à cette situation, la Rapporteuse spéciale a précisé que son rapport soulignait la nécessaire fusion entre le paradigme des droits humains des handicapés et les principes qui se sont développés dans la jurisprudence du droit au logement, en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.  Elle a rappelé à cet égard que la Convention relative aux droits des personnes handicapées faisait de la dignité, de l’autonomie et de la liberté de choix des critères essentiels pour le droit au logement.  S’agissant de ces personnes, seule une fusion des droits civils et politiques et des droits économiques, sociaux et culturels permettrait de créer les conditions d’une réponse effective des États face à leurs carences, a-t-elle insisté.

Dans le même ordre d’idées, Mme Farha a rappelé que la Convention prônait le droit à la non-discrimination, lequel peut aussi se révéler être un « droit positif » enjoignant les États de prendre des mesures permettant aux handicapés de bénéficier du droit au logement.  Cette même Convention, a-t-elle poursuivi, reconnaît le droit à l’accessibilité des personnes handicapées ainsi que le droit de ces personnes à participer, ce droit faisant partie intégrante du droit au logement de ces personnes.

Mme Farha a conclu en formulant des recommandations, parmi lesquelles la reconnaissance par les États de l’obligation de mettre en œuvre le droit au logement des personnes handicapées et de lier cette obligation à l’objectif 11.1 de développement durable visant l’accès de tous à des services de base, y compris l’eau et l’assainissement. 

Lors du débat avec Mme Farha, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, le Brésil a déclaré que son gouvernement avait une politique spécifique pour le logement décent des personnes handicapées, à qui il réserve 3% des logements sociaux disposant d’aménagement adaptés.  Les Maldives ont jugé totalement évitables les défis rencontrés par les personnes handicapées dans le domaine du logement, notamment si les acteurs pertinents changent de mentalité et si on assure une meilleure inclusion des personnes handicapées elles-mêmes.  L’Union européenne a souhaité avoir des données sur des cas de discrimination touchant les personnes dans le cadre du logement convenable.

L’Iraq a déclaré que sa politique de logement pour la période 2010-2016 avait ciblé les zones détruites par la guerre en plus des mesures spécifiques en faveur des personnes handicapées.  Mais différents facteurs, comme les agissements des groupes terroristes ou les changements climatiques, ont des conséquences sur le logement en Iraq, justifiant une aide de la communauté internationale.  L’Iraq a souhaité savoir s’il existait des cadres internationaux pour aider les pays à construire des logements adaptés aux changements climatiques.

L’Afrique du Sud a déclaré que l’affaire citée en référence à son pays, dans le rapport, était actuellement dans les mains de la justice.  Par conséquent, il ne faut présager de rien et respecter les décisions de la justice sud-africaine.  La délégation estime aussi que la question du logement et des personnes handicapées devrait être abordée par un autre titulaire de mandat.  Elle souhaite cependant savoir quel rôle peut jouer le secteur privé dans le domaine du logement.

L’État de Palestine a déclaré que le droit au logement des Palestiniens était bafoué « encore et encore » depuis plus d’un demi-siècle par l’occupation israélienne, et ce, en dépit des nombreuses résolutions des Nations Unies condamnant et demandant l’arrêt de la colonisation.  L’an dernier, celle-ci a progressé à un rythme quatre fois plus rapide qu’auparavant.  L’État de Palestine aimerait savoir si la Rapporteuse spéciale dispose d’informations sur les démolitions de maisons palestiniennes par Israël et connaître son avis sur les moyens de les faire cesser.

Dans ses réponses, Mme Farha, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, a exprimé son accord avec le Brésil quant à la nécessité d’un changement culturel pour assurer un logement adéquat aux personnes handicapées.  C’est là, une tâche « titanesque », a-t-elle reconnu.  Pour la Rapporteuse spéciale, il faut changer la façon de réfléchir pour répondre aux besoins très divers des personnes handicapées.  Quant au rôle du secteur privé, elle a mentionné la possibilité d’imposer un pourcentage minimal de bâtiments adaptés aux besoins des handicapés. 

Suite à l’intervention de l’Iraq, Mme Farha a insisté sur le logement en situation d’après catastrophe naturelle ou en période de conflit.  À l’Afrique du Sud, elle a exprimé son admiration pour les politiques du pays en matière d’accès au logement, estimant qu’elles faisaient office de « figure de proue » en la matière.

Face à la question de l’Union européenne, Mme Farha s’est dite déçue que le Groupe de Washington n’ait toujours pas commencé à collecter des statistiques en lien avec le logement.  Concernant la question sur les retombées positives des droits de l’homme vis à vis des personnes handicapées, elle a rappelé l’importance des objectifs de développement durable, notamment l’objectif 11 relatif aux « villes et communautés durables » ainsi que le Nouveau Programme pour les villes.  Elle a aussi demandé que soient mis en place des mécanismes de réclamation pour ceux qui se voient refuser le droit à un logement décent. 

Mme Farha a enfin estimé qu’il ressortait clairement de ses travaux ce qu’elle pensait des démolitions de logements en Palestine ou ailleurs: « C’est une violation du droit international et des droits de l’homme ».  Pour la Rapporteuse spéciale, ces destructions ne peuvent avoir lieu que dans des conditions exceptionnelles et doivent se dérouler dans un cadre très strict de respect des droits de l’homme.

M. DANIUS PŪRAS, Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a déclaré que son rapport portait sur la corruption et le droit à la santé, compte tenu des effets dévastateurs de la corruption sur la bonne gouvernance, l’état de droit, le développement et la jouissance équitable de tous les droits de l’homme, y compris le droit à la santé.  Ainsi le rapport constate que, dans divers pays, la santé est également touchée par le phénomène de la corruption.  Celle-ci a des conséquences sur l’égalité et la non-discrimination lorsqu’elle touche en particulier les populations les plus vulnérables ou marginalisées.  Le rapport se concentre donc à la fois sur les formes de corruption et les pratiques dans le secteur médical, a expliqué M. Pūras.

Alors que le droit à la santé offre un cadre approprié pour examiner toutes les questions y relatives et les obligations des États en la matière, la corruption empêche les États de mettre le maximum de ressources à la disposition du droit à la santé, a poursuivi M. Pūras.  Dans ce contexte, il est important de renforcer les systèmes médicaux, de façon à ce que toutes les couches de la population puissent leur faire confiance et à y recourir pour toute considération d’ordre médical.  Ce renforcement serait l’un des moyens efficaces de lutter contre la corruption.  Le Rapporteur spécial a aussi estimé que la réalisation du droit à la santé reposait certes sur les États, mais aussi sur tous les acteurs publics ou privés, dont les industries de l’eau, de l’automobile, d’extraction minière ou les compagnies de tabac ou l’industrie agroalimentaire.  De fait, nombre d’acteurs peuvent être tenus responsables en cas de violation du droit à la santé, a encore estimé le Rapporteur spécial, ajoutant que changer la perception de la corruption dans les institutions et les sociétés est un moyen de lutter contre elle.

Le rapport se penche aussi sur la corruption dans le secteur de la santé mentale.  Il constate que les politiques et services dans ce domaine sont susceptibles de favoriser la corruption, en raison notamment du manque de responsabilisation de la relation entre l’industrie pharmaceutique, le secteur de la santé, et le monde universitaire.  Sur ce point, le rapport identifie trois domaines dans lequel la corruption est à l’œuvre: les processus de développement et de promotion des diagnostics de maladies mentales, la recherche sur les médicaments psychotiques et les lignes directrices des pratiques cliniques.  La crise actuelle au sein des milieux universitaires de la psychiatrie, alimentée par des relations troubles avec l’industrie pharmaceutiques a contribué à ce que l’on appelle « la corruption des savoirs » et représente un signal d’alerte, non seulement dans la santé mentale, mais aussi dans d’autres secteurs, a insisté le Rapporteur spécial.

Pour remédier à ces défis, le rapport suggère que les États mettent pleinement en œuvre la Convention des Nations Unies contre la corruption et s’assurent que les politiques et législations pertinentes intègrent bien les normes du droit à la santé, y compris les dénonciations pour faits de corruption.  Les États devraient aussi s’assurer que le secteur de la santé est bien ancré aux principes de base des droits de l’homme, dont la transparence.  Les États doivent mettre sur pied des mécanismes de prévention des doubles pratiques, veiller à ce que les travailleurs de la santé exercent dans des conditions décentes ou encore que les hôpitaux n’aient pas recours à des facturations inappropriées, recommande encore le rapport.

Lors des interventions avec M. Pūras, Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, la Lituanie a demandé quelles mesures devaient être adoptées par les États pour veiller à ce que les services et politiques de santé soient adossées aux droits de l’homme et préservées de la corruption.  L’Union européenne a demandé si le Rapporteur spécial avait des exemples d’inégalité entre les sexes dans le domaine de la santé.  Quelles mesures peuvent en outre être prises pour prévenir et lutter contre la corruption dans le domaine de la santé?  Enfin, le Rapporteur spécial a-t-il des exemples de bonnes pratiques quant à la participation des autres acteurs dans la lutte contre la corruption, notamment la société civile.

L’Afrique du Sud a estimé que chaque partie, État ou secteur privé, devait jouer son rôle en raison de la transversalité entre droit à la santé, lutte contre la corruption et redevabilité.  Que préconise le Rapporteur spécial pour participer au plaidoyer sur l’accessibilité du droit à la santé dans le cadre des droits sociaux économique et culturels, a-t-elle demandé.  Cuba a demandé comment le Rapporteur spécial voit l’implication des réseaux économiques occidentaux dans les faits de corruption.

L’Indonésie, visitée par le Rapporteur spécial en mars dernier, a réaffirmé son engagement à mettre en œuvre ses recommandations mais a souhaité savoir comment la communauté internationale pouvait aider à lutter contre le phénomène de la corruption sur la base de pratiques optimales.

Les Maldives, qui offrent des soins de santé gratuits à leur 340 000 ressortissants répartis sur 188 îles habitées de l’archipel, ont expliqué être confrontées à des problèmes logistiques et des coûts très élevés.

Dans ses réponses, M. Pūras, Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a expliqué que la corruption en tant que phénomène avait diverses facettes qui pouvaient mettre à mal le Programme 2030, et notamment l’objectif 3 –« Bonne santé et bien-être »- « mais pas seulement ».

Revenant sur la santé mentale, il a expliqué qu’elle « sortait de l’ombre » au XXIsiècle.  

Concernant les inégalités hommes-femmes et le droit des femmes en général, le Rapporteur spécial a rappelé que les femmes étaient les principales victimes des violences intrafamiliales et que, dès lors, on leur prescrivait plus souvent des antidépresseurs, alors même qu’aujourd’hui on comprend mieux les origines sociales de la santé mentale.  Les traitements médicamenteux sont bien sûr parfois nécessaires, mais ils sont aujourd’hui bien trop utilisés, a estimé M. Pūras. 

Le Rapporteur spécial a expliqué que le Conseil des droits de l’homme avait adopté une résolution soutenue par le Brésil et le Portugal portant sur la santé mentale et sur les droits fondamentaux découlant de la surutilisation des traitements médicamenteux.  L’utilisation excessive des traitements médicamenteux peut avoir des effets délétères, voire entraîner de la corruption médicale dans les centres de santé mentale, a estimé M. Pūras.

Dans de nombreuses régions du monde, certaines personnes préfèrent les spécialistes aux professionnels de soins primaires, a fait observer le Rapporteur spécial.  Or, les centres de santé spécialisés peuvent avoir une incidence négative s’ils ne sont pas nécessaires, a estimé M. Pūras, pour qui, dans 70% des cas, ce dont les personnes ont besoin, c’est de soins primaires de bonne qualité.

Enfin, concernant la coopération internationale, M. Pūras a estimé qu’il ne fallait pas davantage d’aide au développement mais qu’il fallait plutôt aider les pays à créer des soins de santé mentale pour les handicapés ainsi que pour les personnes souffrant de maladies mentales dites mineures comme la dépression.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission entame l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international

Soixante-douzième session,
18e séance – matin
AG/J/3554

La Sixième Commission entame l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a entamé ce matin l’examen des premiers chapitres thématiques du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI), en abordant notamment les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité et les projets de directives sur l’application provisoire des traités.

En début de séance, le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations Unies, M. João Miguel Ferreira de Serpa Soares, s’est félicité que la Commission du droit international et la Sixième Commission soient réunies à l’occasion de la Semaine du droit international.  « Une grande part du droit international a peut-être déjà été codifiée, mais celui-ci continue de se développer progressivement dans des directions jusqu’ici imprévues », a-t-il noté. 

Le Président de la Commission du droit international, M. Georg Nolte, venu présenter ce rapport de 270 pages, a vanté « la tradition d’interaction et de collaboration » entre la CDI et la Sixième Commission dans le développement progressif du droit international et sa codification.  Il a fait le point sur un premier groupe de chapitres du rapport de la Commission sur les travaux de sa soixante-neuvième session, à savoir les chapitres introductifs I à III, le chapitre IX portant sur les décisions et conclusions de la commission, le chapitre IV consacré aux crimes contre l’humanité, et le chapitre V sur l’application provisoire des traités.

Alors que le crime de génocide et les crimes de guerre font l’objet de conventions, il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’instrument international juridiquement contraignant consacré à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité et à la promotion de la coopération entre États en la matière.  En 2013, dans le cadre de sa soixante-cinquième session, la CDI s’est donné pour objectif d’élaborer des projets d’articles devant mener à l’adoption d’une convention sur les crimes contre l’humanité.  Cette année, elle a adopté en première lecture un ensemble complet de projets d’articles, a relevé M. Nolte.

S’exprimant au nom des pays nordiques, la Suède a accueilli avec satisfaction le texte des projets d’articles sur les crimes contre l’humanité, insistant sur la nécessité de « redoubler d’efforts pour mettre fin à l’impunité de ces crimes haineux ».  Elle s’est notamment félicitée de l’obligation contenue dans le projet d’article 6, qui stipule que « tout État prend les mesures nécessaires pour que les crimes contre l’humanité constituent des infractions au regard de son droit pénal ».

Les projets d’articles doivent compléter le cadre juridique établi par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) et la Convention de Vienne, ont insisté l’Italie et l’Australie.  Plusieurs délégations ont d’ailleurs relevé que la définition des crimes contre l’humanité est conforme à celle donnée par le Statut de Rome.

La Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), par la voix d’El Salvador, a mis l’accent sur le projet de liste de crimes pour lesquels l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État n’est pas admissible. 

Soulignant que les projets d’articles relatifs à l’extradition et à l’entraide judiciaire réservent le droit interne lorsque nécessaire, la Suisse, comme l’Autriche, s’est déclarée en faveur du projet d’article 13, qui, a-t-elle résumé, précise à juste titre que les infractions constitutives de crimes contre l’humanité ne peuvent en aucun cas être considérées comme des infractions politiques qui justifieraient un refus de l’extradition.  

Pour sa part, le représentant de la Chine a regretté que des projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité ne tiennent pas compte de la pratique existante et de l’opinio juris des États.  Il a cité en exemple les dispositions relatives à l’extradition, à l’entraide judiciaire et à la protection des droits des victimes et des témoins, qui ne sont pas, selon lui, corroborées par la pratique des États.

Par définition, a souligné le représentant de la France, les projets de la commission doivent reposer sur l’étude de la pratique internationale.  « On peut se demander dès lors dans quelle mesure les 11 projets de directives sur l’application provisoire des traités adoptés à ce jour reflètent la large pratique recensée par le Secrétariat, dont la commission a décidé de reporter l’examen à l’année prochaine », a-t-il regretté.

L’Union européenne a quant à elle salué la décision de la Commission d’élargir la portée des projets de directives afin d’inclure les traités entérinés par les organisations internationales.  Elle a invité la CDI à clarifier le lien entre l’application provisoire des traités et les autres dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités. 

La Sixième Commission poursuivra son examen du rapport annuel de la Commission du droit international mardi 24 octobre, à partir de 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Déclarations

Le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations Unies, M. JOÃO MIGUEL FERREIRA DE SERPA SOARES, s’est félicité que la Commission du droit international et la Sixième Commission soient réunies à l’occasion de la Semaine du droit international.  Comme le prévoit l’Article 13 de la Charte des Nations Unies, ces deux commissions jouent un rôle important dans le développement progressif du droit international et sa codification, a-t-il noté, rappelant que leur action a mené à la création de la Cour pénale internationale (CPI). 

Dans le cadre de son soixante-dixième anniversaire, en 2018, la Commission du droit international tiendra ses premières réunions à New York, a indiqué M. de Serpa Soares, avant de convoquer une conférence sur le travail de la CDI et sa coopération avec les États Membres, en juillet.  « Une grande part du droit international a peut-être déjà été codifiée, mais celui-ci continue de se développer progressivement dans des directions jusqu’ici imprévues », a-t-il conclu. 

M. GEORG NOLTE, Président de la Commission du droit international, a présenté le premier groupe de chapitres du Rapport de la Commission sur les travaux de sa soixante-neuvième session à l’étude, à savoir les chapitres introductifs I à III, le chapitre IX intitulé « Autres décisions et conclusions de la commission », le chapitre IV consacré aux crimes contre l’humanité, et le chapitre V sur l’application provisoire des traités.

« La commission chérit la tradition d’interaction et de collaboration entre la Commission du droit international (CDI) et la Sixième Commission dans le développement progressif du droit international et sa codification », a déclaré le Président.

En ce qui concerne les chapitres introductifs et ses autres décisions et conclusions, la CDI a fait d’importants progrès, a résumé M. Nolte.  Elle a également achevé son travail concernant le sujet des crimes contre l’humanité avec l’adoption d’un ensemble complet de projets d’articles.  La commission a en outre travaillé sur les questions de l’application provisoire des traités, de la protection de l’atmosphère, de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, et des normes impératives du droit international général (jus cogens).

La question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés est en transition, a-t-il expliqué.  La commission a déjà commencé à travailler sur le thème de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.

Pour faciliter le travail de la Commission, le Chapitre III du rapport attire l’attention sur des points sur lesquels des observations des gouvernements seraient particulièrement intéressantes.

Pour marquer le soixante-dixième anniversaire de la CDI, des commémorations seront organisées sous le thème « 70 ans de la Commission du Droit International, dresser le bilan pour l’avenir » à Genève et à New York.

Le chapitre IV sur les crimes contre l’humanité est une des réalisations importantes de la commission, a insisté M. Nolte, car il reconnaît que les crimes contre l’humanité n’ont pas de traité qui se concentre sur la mise en place d’un droit national, sur les juridictions nationales et la coopération interétatique dans la lutte contre l’impunité.  Les commentaires et observations sur ces questions doivent être soumis au Secrétariat général le 1er décembre 2018, a-t-il précisé. 

En particulier, a relevé le Président, le projet d’article 5 expose la notion de « non-refoulement » qui oblige un État à ne pas extrader un étranger en cas de risque spécifique.  Le paragraphe 5 du projet d’article 6 indique que la position officielle d’une personne ne constitue pas un motif d’exonération de la responsabilité pénale.  Les paragraphes suivants demandent aux États de prendre les mesures nécessaires pour que les infractions visées soient passibles de peines appropriées.

Le projet d’article 13 indique les droits, obligations et procédures applicables à l’extradition d’un auteur présumé coupable selon ces articles.  Les questions qui sont soulevées sont souvent les mêmes concernant la nature de l’extradition.  Le projet d’article 14 aborde la question de l’entraide judiciaire, car il n’y a actuellement pas de convention en ce qui concerne les crimes contre l’humanité.  Comme c’est le cas pour l’extradition, tout État n’a souvent pas de traité en la matière, lorsque cette coopération est nécessaire.  Le projet d’article cherche à fournir un cadre juridique, a expliqué M. Nolte.  Le projet d’article 15 aborde la question du règlement des différends entre États sur la question des crimes contre l’humanité.

Abordant le chapitre V sur l’application provisoire des traités, qui contient le texte des projets de directives provisoirement adoptés à ce jour par la commission, le Président a souligné que le projet de directive 1 concernant le champ d’application doit être lu avec le projet de directive 2 sur l’objet des projets.  Le projet de directive 4 porte sur les accords provisionnels qui peuvent s’appliquer.  Le projet de directive 5, lui, prévoit que l’application à titre provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité prend effet à la date et suivant les conditions et les modalités fixées par le traité.  En outre, l’application provisoire d’un traité par un État ou une organisation internationale cesse quand l’intention de le cesser est communiquée.

Enfin, le projet de directive 11 intitulé « Accord relatif à l’application à titre provisoire avec les limites découlant du droit interne des États ou des règles des organisations internationales » prévoit de limiter provisoirement cette application pour prendre en compte les dispositions constitutionnelles des États, a-t-il ajouté.

Intervenant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. HECTOR ENRIQUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador) a salué la décision de la Commission du droit international (CDI) de tenir sa soixante-dixième session à New York et à Genève.  D’après lui, la session qui aura lieu du 30 avril au 1er juin 2018 à New York devrait contribuer à renforcer l’interaction entre la Sixième Commission et la Commission du droit international.  Il a encouragé un débat fructueux entre les membres de la Sixième Commission, en tant qu’organe composé de représentants gouvernementaux, et les membres de la Commission du droit international, en sa qualité d’organe composé d’experts juridiques indépendants.  Il a souhaité que cette initiative se poursuive à l’avenir.

Dans ses remarques au sujet de la dernière session, M. Celarie Landaverde a pris note du texte des projets d’articles adoptés en première lecture sur la question des crimes contre l’humanité et des commentaires, ainsi que des paragraphes du préambule.  Il a noté à ce propos l’interdiction des crimes contre l’humanité en tant que norme impérative du droit international général.  Il a aussi mis l’accent sur le projet de liste des crimes pour lesquels l’immunité ratione materiae n’est pas admissible dans le contexte de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Il a ensuite mentionné le premier rapport présenté sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.

Par ailleurs, le représentant a reconnu les efforts déployés pour adopter des projets de directives qui reflètent un développement progressif sur des thèmes tels que l’application provisoire des traités ou la protection de l’atmosphère.  Il a salué l’adoption des projets de conclusion 2 et 4 à 7 concernant les normes impératives du droit international général (jus cogens).

M. Celarie Landaverde a pris note des questions spécifiques identifiées dans le rapport qui exigent des observations de la part des gouvernements, qu’il a exhortés à coopérer.  Enfin, il s’est félicité de l’inscription de nouveaux sujets au programme de travail de la CDI, à savoir les principes généraux du droit et la preuve devant les juridictions internationales.

M. LUCIO GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, a salué la décision de la Commission du droit international (CDI) d’élargir la portée des projets de directives sur l’application provisoire des traités afin d’inclure les traités entérinés par les organisations internationales.  Notant que les commentaires relatifs au projet de directive 4 sur la forme de l’accord ne font pas usage du terme « unilatéral » en référence à une déclaration d’un État ou d’une organisation internationale, il a appelé la CDI à élaborer sur cette question afin d’améliorer la cohérence du droit international à cet égard. 

Le délégué a souligné les efforts de la CDI visant à clarifier le lien entre l’application provisoire des traités et les autres dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Cependant, a-t-il noté, la position de l’Union européenne diffère de celle de la commission sur la mise en œuvre de l’article 60 de la Convention portant sur l’extinction d’un traité ou la suspension de son application comme conséquence de sa violation.  Il a invité la CDI à clarifier les règles du droit international portant sur la suspension de l’application provisoire sur la base de l’article 60.  S’il s’est ensuite félicité de la décision de la CDI de clarifier l’effet de la référence au droit interne des États dans l’application provisoire des traités, il a toutefois estimé que les projets de directives 9 et 11 sont non opposables. 

S’agissant du Mémorandum du Secrétariat en date du 24 mars 2017, M. Gussetti a apprécié le fait que les suggestions émises par l’Union européenne l’an dernier aient été prises en compte.  Il a estimé que la portée et la fin de l’application provisoire ainsi que l’analyse juridique des accords bilatéraux et multilatéraux contenus dans le Mémorandum doivent faire l’objet d’un examen minutieux.

Mme ELINOR HAMMARSKJOLD (Suède), s’exprimant au nom des pays nordiques, a déploré que les auteurs de crimes contre l’humanité ne soient pas toujours traduits en justice.  « Il faut redoubler d’efforts pour mettre fin à l’impunité de ces crimes haineux », a-t-elle déclaré.  Elle a donc accueilli avec satisfaction le texte des projets d’articles sur les crimes contre l’humanité adoptés par la Commission du droit international (CDI) en première lecture.

La représentante a apprécié de voir la question du non-refoulement figurer après l’obligation de prévention dans le texte, un placement logique selon elle.  Le projet d’article 5 intitulé « non-refoulement » est une disposition importante pour empêcher les personnes d’être exposées à des crimes contre l’humanité, a-t-elle insisté.

Par ailleurs, les pays nordiques soutiennent pleinement l’obligation contenue dans le projet d’article 6 qui porte sur l’incrimination en droit interne et stipule que « tout État prend les mesures nécessaires pour que les crimes contre l’humanité constituent des infractions au regard de son droit pénal ».  La représentante a déclaré accorder la plus grande importance au droit des victimes et au droit à réparation de ces victimes.  Seuls les crimes contre l’humanité n’ont pas de traité propre, a-t-elle noté, indiquant qu’elle va continuer à soutenir ces avancées.

Passant au thème de l’application provisoire des traités, la représentante a déclaré soutenir les efforts du rapporteur spécial et de la commission.  Cependant, certaines questions méritent d’être examinées plus avant.  Des défis existent eu égard à la diversité des systèmes nationaux.  Les clauses types pourraient être utiles et nous sommes heureux de découvrir que celles-ci ont été intégrées et que d’autres vont être intégrées, a-t-elle déclaré.  Enfin, elle a jugé essentielle la question des principes généraux de droit.  Cependant, les juridictions internationales les appliquent en tant que source de droit, ce qui pose parfois problème.  À cet égard, la CDI pourrait donner des indications, a-t-elle estimé.

M. HELMUT TICHY (Autriche) a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur les crimes contre l’humanité.  Il s’est déclaré en faveur de l’élaboration d’une convention portant sur l’extradition et l’entraide judiciaire, tout en suggérant que les accords internationaux portant sur la coopération judiciaire soient pris en compte par la CDI.  Il a noté que le projet d’article 13 portant sur l’extradition stipule que l’extradition peut être refusée par un État si ses lois nationales l’interdisent.  Toutefois, a-t-il relevé, dans le cas de crimes contre l’humanité, « cela ne devrait pas mener à l’impunité », ce que le droit autrichien interdit.

Concernant l’entraide judiciaire, le représentant a fait remarquer qu’elle doit être mise en œuvre en accord avec le droit interne, sans préjudice des données personnelles.  Concernant le projet d’article 15 sur le règlement des différends, le représentant s’est demandé pourquoi le paragraphe 2 ne prévoit pas une limite de temps des négociations avant qu’une affaire ne soit renvoyée à la Cour internationale de Justice (CIJ), afin d’en faciliter la mise en œuvre.  Au sujet de l’application provisoire des traités, il a salué le projet de directive 4 portant sur la forme de l’accord relatif à l’application provisoire, tout en notant qu’un accord sur l’application provisoire d’un traité distinct peut avoir des implications sur la résiliation d’une application provisoire.  À cet égard, il s’est prononcé pour une approche flexible dans la cessation d’une application provisoire.

Les crimes contre l’humanité choquent la conscience de l’humanité, a déclaré M. MICHAEL BLISS (Australie).  Les États doivent respecter leurs obligations internationales dans ces situations et condamner les autres États où de tels crimes peuvent être commis. 

Le représentant a salué la contribution des projets d’articles pour ce qui est de compléter le cadre juridique établi par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  La définition des « crimes contre l’humanité » est directement reprise du Statut de Rome et le commentaire général souligne que les projets d’articles évitent tout conflit avec les obligations découlant du Statut de Rome, a-t-il noté.  Pour sa part, l’Australie a érigé en infractions les crimes contre l’humanité dans son droit interne.  Il a encouragé les États à mette en œuvre de façon effective les mesures administratives, législatives et judiciaires et autres mesures préventives telles qu’envisagées dans le projet d’article 4.

M. Bliss s’est félicité de l’approche de la CDI en ce qui concerne l’interaction entre le droit interne des États et l’application provisoire des traités, et qui met l’accent sur leurs obligations au niveau international.  Il a précisé que les projets d’articles 9 et 10 sont sans préjudice des articles 27 et 46 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Il a préconisé de la souplesse pour permettre aux États de mettre en œuvre les aspects procéduraux et d’évaluer les conséquences de l’application provisoire.

Mme SUSANA VAZ PATTO (Portugal) a souhaité que la Commission du droit international (CDI) poursuive son travail sur la base du consensus.  Toutefois, le souhait d’un consensus ne devrait pas bloquer la Commission, a-t-elle dit, avant d’insister sur la clarté des règles de vote.  « Voter n’est pas un échec. »  Notant avec satisfaction l’inclusion de deux sujets, les principes généraux de droit et la preuve devant les juridictions internationales, elle a estimé que le premier sujet était suffisamment mûr pour faire partie du travail de long terme de la commission.

S’agissant des crimes contre l’humanité, Mme Vaz Patto a invité la commission à se montrer prudente dans l’adoption de solutions qui se sont révélées fructueuses pour d’autres types de crimes.  « Nous devons éviter la tentation de transposer des régimes existants qui n’ont pas été pensés à la lumière du contexte spécifique et de la nature juridique des crimes contre l’humanité. »  Elle a ensuite commenté le projet d’article 12 « Victimes, témoins et autres personnes » et estimé qu’il bénéficierait de voir la question des réparations traitée dans un article séparé.  Cela serait plus clair et un article traitant de la seule question des réparations donnerait plus de poids aux droits des victimes, a-t-elle poursuivi.

Se tournant vers l’application provisoire des traités, la représentante a rappelé que le but de la commission était de clarifier le régime juridique de l’application provisoire des traités visée par les Conventions de Vienne de 1969 et de 1986 sur le droit des traités, « sans succomber à la tentation d’en élargir le champ d’application ».  De plus, une telle clarification ne peut, dans tous les cas, contraindre un Etat à changer sa pratique constitutionnelle, a-t-elle dit, ajoutant que les conventions précitées ne l’imposaient nullement. En conclusion, si elle a indiqué avoir lu avec grand intérêt le mémorandum préparé par le Secrétariat, Mme Vaz Patto a souhaité qu’il soit complété par une étude comparative des pratiques et législations nationales en la matière.

Mme DAMARIS CARNAL (Suisse) a salué le fait que le projet de préambule de la future convention sur les crimes contre l’humanité mette l’accent sur la prévention et fasse mention du Statut de Rome.  Elle a également salué le fait que les projets d’articles se fondent sur un cadre juridique international existant.  Soulignant que les projets d’articles relatifs à l’extradition et à l’entraide judiciaire réservent le droit interne lorsque nécessaire, elle s’est déclarée en faveur du projet d’article 13 qui précise que les « infractions constitutives de crimes contre l’humanité ne peuvent en aucun cas être considérées comme des infractions politiques qui justifieraient un refus de l’extradition ». 

La représentante a estimé que le projet de convention devrait prévoir des dispositions sur le concours de requêtes, comme le fait la Convention européenne d’extradition.  Elle s’est également demandé si la convention ne devrait pas considérer une disposition prévoyant l’extradition vers un pays où la peine de mort est pratiquée si des assurances sont données qu’elle ne sera pas requise.

Soulignant la responsabilité des États de poursuivre les auteurs de crimes contre l’humanité, M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique) a déclaré croire en la pertinence des principes fondamentaux du droit international repris dans le projet de préambule.  Il a jugé tout à fait opportun l’article 5 sur le non-refoulement.  Il s’est également félicité du projet d’article 12 concernant le droit des victimes, notamment sur le fait que la réparation peut être individuelle ou collective, ce qui reprend les règles de procédure et de preuve de la Cour pénale internationale (CPI).  Concernant les articles 13 et 14 sur l’extradition et l’entraide judiciaire, il a estimé que leur valeur ajoutée est l’obligation de sanctionner les crimes contre l’humanité et de s’aider mutuellement entre États.  Le projet d’article 15 prévoit quant à lui l’arbitrage de la Cour internationale de Justice (CIJ). 

Par ailleurs, le représentant a réaffirmé l’inquiétude de sa délégation concernant certains projets d’articles.  Ainsi, il a estimé nécessaire de réviser le commentaire du projet d’article 3 sur la définition des crimes contre l’humanité afin qu’il reflète la réalité des débats.  « Cela doit être plus équilibré », a-t-il déclaré.  Puis, il a réaffirmé que le projet d’article 6 concernant l’incrimination en droit interne mérite une plus grande réflexion, eu égard à la grande diversité des systèmes juridiques.

Concernant le chapitre V sur l’application provisoire des traités, M. Alday a estimé que les projets de directives reflètent de façon satisfaisante une réflexion pragmatique, tandis que les commentaires reflètent le travail d’enquête profond qui a été fait.  Les directives présentées sont compatibles avec la Convention de Vienne et d’autres instruments pertinents internationaux sur le droit des traités.  Compte tenu des progrès réalisés sur ce thème, nous sommes confiants que le rapport suivant pourra compléter efficacement ce catalogue de directives, a-t-il dit.  Enfin, il a préconisé un modèle uniforme de clauses particulières concernant l’application provisoire des traités, qui seront d’une grande utilité aux États au moment de négocier les traités internationaux et permettront de donner de la consistance à cette question.

M. XU HONG (Chine) a estimé que de nombreuses dispositions des projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité péchaient dans leur analyse empirique.  Ces dispositions découlent pour la plupart de dispositions analogues contenues dans des conventions internationales existantes sur la lutte contre les crimes internationaux et se basent sur la pratique d’organes de la justice pénale internationale, a-t-il expliqué.  Il a regretté qu’elles ne prennent pas en compte un examen attentif de la pratique existante et de l’opinio juris des États.  Par exemple, les dispositions relatives à l’extradition, à l’entraide judiciaire et à la protection des droits des victimes et des témoins ne sont pas corroborées par la pratique des États, a-t-il poursuivi.

Le délégué a mentionné le projet de paragraphe 3 du préambule affirmant que l’interdiction des crimes contre l’humanité constitue une norme impérative de droit international (jus cogens).  Pour justifier une telle classification, le commentaire du projet de paragraphe s’appuie notamment sur des décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ), du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie ou de la Cour européenne des droits de l’homme, a-t-il affirmé, en regrettant qu’une analyse détaillée de la pratique des États ne soit pas prise en compte.  Le délégué a indiqué que les éléments avancés dans le commentaire ne suffisaient pas pour prouver que l’interdiction des crimes contre l’humanité satisfait le critère prévu par l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités pour identifier une norme impérative de droit international (jus cogens), c’est-à-dire « une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble. »  Le délégué a donc souhaité une analyse plus fouillée du concept de jus cogens avant de l’inclure dans des projets d’articles.

Se tournant vers l’application provisoire des traités, le délégué chinois a pris note du projet de directive 6 établissant une « règle par défaut », selon laquelle l’application provisoire des traités produirait le même effet juridique qu’un traité entré en vigueur, à moins que les parties en aient décidé autrement.  « Parce que cette formulation constitue un développement majeur des règles gouvernant l’application provisoire des traités définies par la Convention de Vienne sur le droit des traités, nous invitions la commission à faire montre de la plus grande prudence. »  Il a, en conclusion, estimé que l’élément clef en la matière était de déterminer la véritable intention des parties et d’examiner la pratique des États.

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a commencé par saluer l’adoption des projets d’articles sur les crimes contre l’humanité et de directives sur l’application provisoire des traités dans les deux langues officielles des Nations Unies.  Un tel effort garantit, selon lui, « une meilleure qualité rédactionnelle ». 

En second lieu, l’inscription de deux nouveaux sujets au programme de travail de la Commission du droit international (CDI) allonge la liste déjà longue des sujets à l’étude, a-t-il regretté.  Le nombre élevé de sujets ne favorise pas l’achèvement des travaux dans des délais raisonnables; il ne facilite pas non plus l’examen approfondi des projets par les États.  Selon lui, la CDI devrait se limiter à trois ou quatre sujets chaque année afin d’éviter la précipitation.

Concernant l’application provisoire des traités, M. Alabrune s’est félicité qu’un groupe de travail ait été constitué afin d’aider à la préparation des commentaires et projets de directives.  Par définition, a-t-il souligné, les projets de la commission doivent reposer sur l’étude de la pratique internationale.  « On peut se demander dès lors dans quelle mesure les 11 projets de directives adoptés cette année reflètent la large pratique recensée par le Secrétariat, dont la commission a décidé de reporter l’examen à l’année prochaine », a-t-il dit.

Le représentant a rappelé que les projets de la commission ne sont pas des textes juridiquement contraignants, et que, selon la logique du droit des traités, les États demeurent libres de s’accorder librement.  S’agissant du projet de directive 4, M. Alabrune a soutenu la proposition selon laquelle l’application provisoire d’un traité peut être convenue par tout moyen ou arrangement.  Une telle solution présente l’avantage de la souplesse et apparait compatible avec l’article 25 de la Convention de Vienne.

En ce qui concerne le projet de directive 6 sur les effets juridiques de l’application à titre provisoire, le représentant a invité la CDI à préciser si l’application provisoire d’un traité constitue une application à la lettre du traité ou bien une application mutatis mutandis.  Au sujet des projets de directives 7, 9 et 10, il a estimé que les travaux de la commission auraient gagné à s’appuyer sur la pratique et la jurisprudence internationales, auxquelles il n’est pas fait référence.  Il a douté que l’ensemble de ces articles reflètent le droit international coutumier.  Enfin, il a jugé souhaitable que la CDI « ne procède pas par des déductions abstraites, ou par analogie, et qu’elle fonde en droit les projets qu’elle adopte ». 

M. ANDREA TIRITICCO (Italie) a remercié le Rapporteur spécial pour son traitement de la question des crimes contre l’humanité.  Il a rappelé que son pays a toujours été à l’avant-garde des initiatives pour renforcer l’état de droit et combattre l’impunité pour les crimes qui heurtent la conscience de l’humanité.  « Les débats que nous avons et le projet sont une excellente base pour la conclusion d’une possible convention qui pourrait aussi couvrir la promotion de la coopération interétatique », a-t-il déclaré. 

Ceci étant, le représentant a jugé important qu’il n’y ait aucun conflit entre le projet d’articles sur les crimes contre l’humanité et les droits et obligations des États eu égard aux instruments pertinents, à savoir la Cour pénale internationale (CPI), ainsi que la Convention de Vienne.  Il s’est prononcé pour l’ajout d’un libellé qui pourrait être: « En cas de conflit entre les droits et obligations d’un État en droit interne avec ses droits et obligations au titre d’un instrument international, celui-ci prévaudra ». 

Pour ce qui est de la protection des droits de l’accusé et des personnes détenues provisoirement, M. Tiriticco a pensé que le projet d’article 11, intitulé « traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction » pourrait être amélioré en appliquant les normes les plus élevées, en indiquant par exemple que la loi nationale s’applique « si et seulement si elle est pleinement compatible avec les droits humains intentionnellement reconnus ».  Il s’est félicité des dispositions relatives à l’extradition et l’entraide judiciaire qui sont contenues dans ce projet d’articles.

Passant à la question de la protection de l’atmosphère, le représentant a reconnu l’importance cruciale de la communauté scientifique dans la rédaction du projet d’articles.  En outre, il a estimé que les projets de directives font partie intégrante du débat général concernant le droit de la protection environnementale.  Il a félicité le Rapporteur pour avoir su éviter tout chevauchement concernant ces questions.  Le représentant s’est félicité des paragraphes 1 et 2 du projet de directive 9.  Il a considéré que la dimension intergénérationnelle est importante concernant le développement durable.  Il faut trouver un équilibre entre le développement durable et le développement économique, a-t-il souligné

Concernant l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le délégué a pris bonne note que le débat concernant les limitations reflète largement le manque de consensus qui existe entre les États concernant les exceptions originellement proposées lors de ces débats.  Mais les exceptions concernant un bien privé ne peuvent faire l’objet d’exception.  Il a salué la décision de réduire la liste de crimes pour lesquels l’immunité « ratione materiae » ne s’applique pas.

M. LIONEL YEE WOON CHIN (Singapour) a insisté sur la complexité et l’aspect sensible du sujet “crimes contre l’humanité”.  Le résultat final de la commission sur ce sujet devra prendre pleinement en compte les vues des États sur les projets d’articles, a-t-il dit.

Se tournant vers l’application provisoire des traités, le délégué a commenté le projet de directive 6 qui dispose que « l’application à titre provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité produit les mêmes effets juridiques que si le traité était en vigueur entre les États ou organisations internationales concernés, à moins que le traité en dispose autrement ou qu’il en soit autrement convenu ».  Il a souhaité une reformulation de ce texte, afin de remplacer l’expression « effets juridiques » qui peut avoir plusieurs sens, par une expression consacrant la forme « juridiquement contraignante » d’une telle application provisoire.  Il a également demandé que la Commission fournisse des exemples permettant d’illustrer la disposition suivante: « à moins que le traité en dispose autrement ou qu’il en soit autrement convenu ».

M. Chin a noté avec satisfaction l’inclusion du sujet « les principes généraux de droit » dans le programme de travail de la commission.  Il a en revanche jugé moins pertinente l’inclusion de « la preuve devant les juridictions internationales » en raison de l’abondance des études sur ce sujet.  Enfin, il a approuvé le programme commémoratif visant à marquer le soixante-dixième anniversaire de la commission.  « Le travail de la commission ne doit pas non seulement refléter les besoins des États mais aussi refléter les nouveaux développements en droit international et les préoccupations pressantes de la communauté internationale dans son ensemble », a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le cyberespace, « nouvelle frontière de la sécurité stratégique », au cœur des préoccupations de la Première Commission

Soixante-douzième session,
19e & 20e séances – matin & après-midi
AG/DSI/3586

Le cyberespace, « nouvelle frontière de la sécurité stratégique », au cœur des préoccupations de la Première Commission

L’utilisation malveillante des technologies de l’information et des communications (TIC) a longuement mobilisé, aujourd’hui, l’attention de la Première Commission (désarmement et sécurité internationale) au cours d’une séance qui a notamment été marquée par le constat d’échec des derniers travaux du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications.

Devant la Commission, le Président du Groupe d’experts, M. Karsten Diethelm Geier, a indiqué que les points de divergence concernaient l’application du droit international en matière des TIC, raison pour laquelle les experts ne sont pas parvenus à dégager un consensus au moment d’établir un rapport.  Il a estimé que ces divergences sont « réelles et préoccupantes » et a exhorté les États Membres à les régler pour pouvoir bénéficier d’un environnement stable en matière de TIC.  « Chaque État Membre a sa part de responsabilité », a-t-il insisté à ce propos.

Pour aller de l’avant, il a estimé nécessaire d’établir une compréhension commune des menaces qui existent en matière des TIC et de la manière d’y faire face, mais aussi d’envisager de modifier le format actuel du Groupe d’experts, et qu’un point sur les TIC soit inscrit à l’ordre du jour de la soixante-treizième session de l’Assemblée générale.

De son côté, la représentante de la Suisse s’est inquiétée de ce que certains États hésitent, selon elle, à reconnaître le rôle déterminant que joue le droit international en faveur d’une approche pacifique et coopérative de la cybersécurité.  Le droit international constituant le cadre de l’action des États doit s’appliquer au cyberspace, « qui n’est pas un champ d’activité nouveau, dépourvu de toute règle et de toute norme », a-t-elle souligné. 

Le délégué allemand n’a pas signifié autre chose lorsqu’il a expliqué qu’une attaque cybernétique attribuable aux actes d’un État sur un autre État -pour attaquer une centrale nucléaire par exemple- « ne se produit pas dans le cyberespace, mais dans un endroit précis ».  Cette situation, a-t-il souligné, est donc déjà régie par le droit international dans le cadre, notamment, des accords bilatéraux entre les deux pays, tandis que la difficulté d’identifier les acteurs et responsabilités dans le cyberespace « ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a pas de critère juridique du tout ». 

Le représentant de la Fédération de Russie a toutefois confié avoir l’impression que la défense, « en petit comité », de l’application du droit international existant au cyberspace est un moyen de couvrir des actions de force dans le domaine sensible de l’information d’origine spatiale.  À ses yeux, invoquer la nécessité d’appliquer de manière inconditionnelle le droit international existant pour régir l’utilisation des technologies de l’information et des communications permet d’éviter de se pencher sur des questions d’ordre strictement technique.  Ce faisant, a-t-il argué, il est facile d’attribuer à tel ou tel État la responsabilité de cyberattaques ou encore d’imposer des sanctions en court-circuitant le Conseil de sécurité. 

Relativisant quelque peu l’échec des travaux du GGE de cette année, le représentant de la France a appelé, pour sa part, à ne pas « perdre de vue » les accords trouvés en 2013 et 2015 concernant le contrôle des exportations de ressources cybernétiques offensives, ainsi que pour empêcher les acteurs non étatiques, dont les entreprises privées, de conduire des activités offensives pour eux-mêmes ou pour le compte d’autres acteurs non étatiques.

« L’idée est d’éviter que des entreprises, sous prétexte de se défendre contre des cyberattaques, ne répliquent en prenant le risque de causer des dommages sur un autre État et d’entraîner une escalade », a-t-il expliqué. 

Parmi les recommandations qui ont été faites, l’Union européenne s’est prononcée en faveur de la mise en place de cadres stratégiques basés sur le droit international existant, et en particulier sur la Charte des Nations Unies, pour assurer la prévention des conflits, la coopération et la stabilité dans le cyberespace.  Une proposition secondée par l’Estonie qui a estimé que le cadre européen instauré par la réponse diplomatique conjointe face aux actes de cybermalveillance contribue non seulement à la prévention des conflits, mais représente une réelle avancée vers un cyberespace stable.

Voyant le cyberespace comme « la nouvelle frontière de la sécurité stratégique », la Chine a, de son côté, appelé toutes les parties à travailler ensemble à l’élaboration d’une communauté d’intérêts communs dans laquelle le cyberspace serait utilisé à des fins pacifiques.

Ce débat thématique sur les autres mesures de désarmement a par ailleurs été l’occasion pour la représentante d’Antigua-et-Barbuda, au nom de la Communauté des Caraïbes, de longuement insister sur l’importance fondamentale d’associer les femmes à la lutte contre les armes classiques. 

« Si les hommes sont souvent les victimes directes de ces armes dans la région des Caraïbes, ce sont les femmes qui en subissent les conséquences mentales et matérielles en devenant l’unique gagne-pain de leur famille avec tous les risques de pauvreté que cela comporte », a-t-elle notamment indiqué.  Lui emboitant le pas, le représentant du Canada a en outre fait observer que dans de nombreuses cultures, la possession d’armes est liée à un discours de masculinité et facilite la perpétuation d’actes de violences sexuelles et domestiques.

Cette séance a également été l’occasion, pour la Première Commission d’entamer son débat sur le désarmement et la sécurité sur le plan régional et entendre les Directeurs des différents centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement faire le compte rendu de leurs activités.

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 24 octobre, à partir de 15 heures.

DISCUSSION THÉMATIQUE DES QUESTIONS À L’ORDRE DU JOUR ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DÉPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Exposé

M. KARSTEN DIETHELM GEIER, Président du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale, a indiqué que lors de ses délibérations, le Groupe avait relevé plusieurs orientations concrètes et points importants capables d’avoir un impact sur la multiplication des utilisations malveillantes des technologies de l’information et des communications (TIC).  Parmi celles-ci, il a souligné l’importance de la confidentialité et de l’intégrité des données.  Les experts ont également cherché à formuler des directives concrètes pour aider les États à mettre en œuvre les recommandations contenues dans les rapports précédents.  Les discussions ont aussi porté sur l’usage malintentionné des TIC par certains acteurs non étatiques et l’impact néfaste que cela pourrait avoir sur le système mondial des TIC.  Il a aussi noté des inquiétudes quant à l’utilisation des TIC par certains États pour interférer dans les affaires d’autres États. L’utilisation des TIC pour mener des activités criminelles a également été abordée.

La portée de certains incidents liés aux TIC a également fait l’objet d’évaluations très concrètes, a-t-il poursuivi.  Au cours des discussions, les experts ont débattu des normes régissant le comportement des États et formulé des suggestions pour empêcher les acteurs non étatiques d’utiliser les TIC à mauvais escient.  Afin d’améliorer la coordination et aux fins de renforcement de la confiance, les experts ont suggéré des procédures pour établir des « notifications officielles entre États » et fait des propositions concrètes incluant « des points de contact appropriés ».  Des observations très concrètes ont enfin été faites sur le lien entre paix et sécurité, portant notamment sur le renforcement de la promotion de l’éducation à la sécurité, ainsi que sur l’implication de toutes les sphères de la société dans ce travail.

En dépit de l’existence de plusieurs points de convergences, le Président a constaté la persistance d’un certain nombre de divergences au cours des débats, notamment en ce qui concerne l’application du droit international en matière des TIC.  Il a déploré que les experts ne soient pas parvenus à s’accorder au sujet d’un rapport consensuel lors de leur dernière journée de travaux, et que les tentatives d’identification des éléments positifs de ce travail commun n’aient pas non plus abouti.  Rappelant que les discussions des Nations Unies au sujet des TIC se poursuivent depuis 1998, il a estimé que les divergences sont aujourd’hui « réelles et préoccupantes » et a exhorté à les régler pour pouvoir bénéficier d’un environnement stable en matière de TIC.  « Chaque État Membre a sa part de responsabilité », a-t-il insisté à ce propos.

Plaidant pour le maintien des progrès réalisés jusqu’à présent, la poursuite des discussions et un accroissement de la transparence, il a insisté sur l’importance d’établir une compréhension commune des menaces qui existent en matière des TIC et de la manière d’y faire face.  Pour aller de l’avant, il a estimé nécessaire d’envisager de modifier le format actuel du Groupe d’experts.  Il s’est notamment demandé si le nombre actuel de 25 experts était trop élevé ou trop réduit pour pouvoir représenter efficacement les Nations Unies.  Il a aussi émis le souhait qu’un point sur les TIC soit inscrit à l’ordre du jour de la soixante-treizième session de l’Assemblée générale pour permettre de réelles avancées.

Suite du débat thématique sur les armes classiques

Mme LORATO LUCKY MOTSUMI (Botswana) a exhorté les parties aux conflits en cours à trouver, sur le terrain, un équilibre entre la conduite d’opérations militaires et le respect du droit international humanitaire.  Il est à déplorer que des civils non armés, des femmes et des enfants soient souvent les principales victimes humanitaires collatérales des conflits, a-t-elle ajouté.  La représentante a ensuite réitéré son appui aux travaux menés dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques, saluant à cet égard l’établissement d’un Groupe d’experts gouvernementaux sur les systèmes d’armes létales autonomes ainsi que l’adoption de la Déclaration sur les engins explosifs improvisés.  Cette déclaration, a-t-elle dit, permettra d’intensifier la sensibilisation du public aux dangers posés par ces engins.  D’autre part, la représentante a souhaité que la Conférence d’examen de 2018 du Programme d’action de l’ONU sur les ALPC aboutisse à des mesures pratiques tenant compte des progrès technologiques qui compliquent le marquage et l’identification des armes illégales.

M. RY TUY (Cambodge) a rappelé qu’après la guerre civile, qui dura de 1975 à 1979, son pays s’était tourné vers les Nations Unies pour qu’elles développent des programmes de réhabilitation des innombrables victimes du régime de Pol Pot.  Depuis, nous attachons la plus haute importance à la promotion et à la mise en œuvre des instruments et accords de désarmement, a-t-il ajouté.  Il a expliqué que, dans le cadre de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), son pays s’efforçait de contribuer activement à la lutte contre la contrebande des armes légères et de petit calibre (ALPC) au niveau régional, cela à travers l’alimentation d’une banque de données et la tenue régulière de séminaires d’information technique.  Sur ce dernier point, il a annoncé qu’un séminaire régional sur le trafic et le détournement d’armes légères et autres armes classiques serait organisé, à Phnom Penh, du 19 au 20 décembre prochain.  Au cours des deux dernières décennies, le nettoyage des mines a été une priorité constante du Cambodge, a rappelé le représentant.  Il s’est réjoui que grâce à l’aide internationale et des donateurs, l’essentiel des terres agricoles ait été déminé.  Notre message à l’ONU reste toujours: « halte à la production de mines, sauvez des vies! », a déclaré le délégué. 

Mme WENDBIGDA HONORINE BONKOUNGOU (Burkina Faso) s’est félicitée de l’adoption, en 2014, du Traité sur le commerce des armes, « afin d’apporter une réponse appropriée et collective qui permettra de réguler et d’assainir les transferts internationaux d’armes classiques ».  Elle a appelé à la pleine mise en œuvre de cet instrument ainsi qu’à son universalisation.  La représentante a par ailleurs souligné la complémentarité du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre (ALPC), l’Instrument international de traçage, le Registre des armes classiques et la Convention de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur les armes légères.  La représentante a également remercié le Bureau des affaires de désarmement et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime pour le partenariat qu’ils entretiennent avec le Burkina Faso dans le cadre de la lutte contre les armes légères.  Elle a en outre appelé à l’universalisation de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et de la Convention sur les armes à sous-munitions.  Elle a par ailleurs souligné que la recherche de solutions durables à l’apparition de nouveaux défis résultant des systèmes d’armes autonomes s’impose à tous. 

M. MAYTHAM SAMAN DAWOOD AL-RIKABI (Iraq) a souligné que le défi des armes classiques est aussi préoccupant que celui des armes de destruction massive.  Rappelant que l’Iraq a adhéré à beaucoup de conventions sur ce thème comme la Convention sur certaines armes classiques (CCAC), il s’est inquiété de l’impact de la propagation et du stockage de ces armes sur la sécurité des États et des peuples.  « Des milliers de vies sont perdues, ce qui mène à la déstabilisation et l’insécurité », a-t-il indiqué.  Il a donc appelé à des efforts concertés pour réactiver le Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre (ALPC).  « Nous appuyons l’échange volontaire d’informations entre États Membres pour s’attaquer à ces menaces », a-t-il notamment expliqué, avant de demander aux États de faire preuve de « souplesse et de volonté politique » afin de faire aboutir, l’an prochain, la Conférence d’examen de ce programme d’action.  Soulignant que son pays se trouve « à l’avant-plan de la menace représentée par les mines antipersonnel », il a déploré que les terroristes de l’EIIL aient planté nombre de ces engins pour empêcher l’avancée des troupes iraquiennes, tuant du même coup de nombreux civils.  Si son pays apprécie grandement les efforts internationaux visant à aboutir à un monde sans mines, ni munitions non explosées, il a tout de même demandé aux États de se coordonner pour veiller à ce que l’aide parvienne à ceux qui en ont besoin.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a rappelé que le Traité sur le commerce des armes vise à mettre un terme au commerce et transferts irresponsables des armes classiques, précisant que l’Argentine a joué un rôle actif dans la rédaction de mesures de renforcement de la confiance et participé à la mise en place du registre des armes classiques.  Rappelant qu’en juin prochain se tiendra l’examen du Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre (ALPC), il a exhorté la communauté internationale à trouver un accord.  Le représentant a ensuite expliqué que sur le plan national, la restriction des armes à feu figure parmi « les 100 objectifs » de son gouvernement.  « Nous avons adopté plusieurs normes positives sur l’exportation et le transit des armes à feu, munitions et pièces de rechange, a-t-il détaillé, normes qui incluent des documents d’homologation et des certificats d’utilisateur final ».  L’Argentine a aussi lancé un programme national de remise volontaire des armes.  En tant qu’État partie aux traités sur les armes classiques, l’Argentine adhère à l’universalisation des instruments juridiques et demande la création d’un cadre idoine pour lutter contre les mines antipersonnel et les armes létales autonomes.  « La perte en vies civiles causée par des mines antipersonnel nécessite l’action de la communauté internationale », a clamé le délégué, avant de rappeler que son pays est un acteur important en matière de déminage.

M. KINGSLEY WEINOH (Nigéria) a rappelé combien son pays expérimentait de manière douloureuse les conséquences du commerce illicite des armes légères et de petits calibres aux mains de gangs criminels, de terroristes et de militants armés.  « Ces armes continuent à saper des sociétés pacifiques, à causer des déplacements internes, et sont responsables de centaines de morts chaque jour », a-t-il déploré. La délégation du Nigéria s’est aussi félicitée des résultats positifs de la troisième Conférence du Traité sur le commerce des armes et a réaffirmé « le besoin d’une mise en œuvre solide et efficace des nombreux instruments existant, comme moyens de réguler le transfert global des armes classiques ».  Sur le plan national, le Nigéria a redoublé d’efforts pour renforcer ses frontières nationales et la coopération pour la sécurité de toute la région ouest-africaine.  Le délégué a particulièrement mis en évidence le travail du comité présidentiel sur les armes légères et de petit calibre, mis en place par le gouvernement fédéral en avril 2013, et dont le travail a permis de mener une enquête nationale sur ces armes, créer un programme global national de marquage, établir une base de données, et rédiger une nouvelle loi sur les armes à feu.

M. ISSA OUMAR (Niger) a indiqué que la région sahélo-saharienne se trouve déstabilisée, depuis 2012, du fait de la prolifération incontrôlée des armes légères et de petit calibre, du terrorisme, et du trafic de drogues.  Il a souligné que le contrôle des armes à feu était donc « un objectif transversal » dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits armés, de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée.  Le représentant a mis en évidence le rôle joué par la Commission nationale pour la collecte et le contrôle des armes illicites chargée de mettre en œuvre, au niveau de son pays, tous les traités, conventions et résolutions auxquels il a souscrit, et particulièrement le programme national de déminage humanitaire, cofinancé par le Niger, le Programme des Nations Unies pour le développement et l’Union européenne.  Ce dernier a permis de déminer certains axes routiers et autres routes secondaires dans la zone de l’Aïr, a-t-il précisé.  M. Oumar a également mentionné le partenariat de cette commission avec le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique et le Bureau des affaires de désarmement de l’ONU, qui mènent actuellement un vaste programme de sécurisation et de gestion des stocks d’armes détenus par les arsenaux nationaux des forces de défense et de sécurité nationales.  Il s’agit de prévenir le détournement des armes légères et de petit calibre et des munitions détenues par les gouvernements, ainsi que leur trafic illicite en améliorant la sécurité physique et la gestion des stocks, a précisé le représentant.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a expliqué que son pays continuait de souffrir des conséquences de la circulation illégale et de l’emploi des armes légères et de petit calibre (ALPC), cela en raison de frontières poreuses, de la présence de camps de réfugiés et la vaste étendue de son territoire, qui, a-t-elle indiqué, limite les possibilités de contrôle efficace.  Elle a ajouté que des groupes terroristes utilisaient ces armes pour sévir dans la région, et que, dans ce contexte, le cadre instauré par le Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et l’Instrument international de traçage devait être rigoureusement préservé.  À cet égard, elle a souhaité que la troisième Conférence d’examen du Programme d’action, qui aura lieu en mars 2018, soit assortie de mesures de renforcement de la mise en œuvre de cet outil.  Nous plaiderons, à la Conférence, pour une amélioration de la fourniture de l’assistance technique et pour le renforcement des capacités de mise en œuvre du Programme d’action des pays en développement, a-t-elle notamment annoncé.  Concernant la lutte antimines, la représentante a déploré le manque de financement destiné à assurer le bon fonctionnement des activités entreprises dans le cadre de la Convention d’Ottawa.  L’appui actif de la communauté internationale est indispensable à la poursuite de la pleine mise en œuvre de la Convention, a-t-elle ainsi rappelé.  

M. NOËL DIARRA (Mali) a déploré que son pays connaisse « les effets dévastateurs des armes légères », qui peuvent être comparées aux armes de destruction massive au vu « du nombre élevé des victimes, des traumatismes et de l’impact qu’elles ont sur la vie des communautés ».  Depuis 2012, a rappelé le représentant, le Mali est victime de groupes terroristes, alliés à des groupes criminels organisés, qui visent sans discrimination « les enfants, les femmes, les forces de défense et de sécurité nationale, ainsi que les forces internationales amies », et « sapent tous les efforts de développement entrepris par le gouvernement ».  Malgré le travail de la Commission nationale de la lutte contre la prolifération des armes légères, les activités de ces groupes criminels posent de véritables défis, a poursuivi le représentant, pointant le fait qu’ils exploitent la porosité des frontières pour faire circuler des armes qui ont souvent servi sur plusieurs foyers de tension antérieures.  À cet égard, il s’est félicité de la Conférence régionale sur la situation sécuritaire au Sahel et en Afrique de l’Ouest, qui s’est tenue à Bamako le 14 octobre 2017, et au terme de laquelle les participants ont convenu de renforcer la lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre et la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes.  Ils ont notamment appelé au respect scrupuleux de l’interdiction des transferts d’armes aux acteurs non étatiques y compris par les pays fabricants et fournisseurs, au renforcement du contrôle des transferts légaux d’armes vers la région, et à l’amélioration de la gestion et la sécurisation physique des stocks d’armes et munitions, a-t-il précisé.

M. Diarra s’est aussi montré satisfait par la prise en compte, dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, du « lien inextricable entre le développement, la paix et la sécurité ».  « Cela devrait nous aider à dépasser la vision strictement sécuritaire de la lutte contre le flux illicite des armes légères et à envisager une approche plus globale en traitant également les facteurs qui facilitent l’utilisation de ces armes à des fins criminelles », a-t-il estimé.  Enfin, il a indiqué que son pays se réjouissait de la tenue, en 2018, de la troisième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis dans l’exécution du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.  Le Mali espère particulièrement que la troisième Conférence apportera des réponses aux défis liés au marquage, à la tenue de registres et le traçage, la durabilité ainsi qu’à l’efficacité de l’assistance technique et financière.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a indiqué que son pays était en train d’avancer sur le plan législatif pour ratifier le Traité sur le commerce des armes, précisant qu’il dispose déjà d’un système conforme aux obligations de l’Instrument et que le processus est en cours pour l’aligner définitivement.  Appelant à l’universalisation du traité, il a jugé que l’adhésion des grands exportateurs d’armes est absolument essentielle.  Le Brésil s’est aussi dit très attaché à la Convention sur certaines armes classiques, étant d’avis que cette convention fournit un cadre utile pour relever les défis humanitaires actuels et futurs dans les conflits armés.  Se félicitant que le Brésil n’ait jamais utilisé de mines antipersonnel sur son territoire, le délégué a rappelé que son pays fut l’un des principaux défenseurs de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et qu’il participait à des opérations de déminage en Amérique latine et en Afrique.  Le représentant s’est aussi attardé sur les défis humanitaires posés par les engins explosifs improvisés, déplorant que ces engins soient utilisés de manière croissante contre les civils.  Établissant un lien entre le Programme de développement durable à l’horizon 2030, le Traité sur le commerce des armes et le Programme d’action sur les ALPC, il a appelé à une coopération internationale renforcée pour combattre le trafic illicite de ces armes.

M. ESHAG AL HABIB (République islamique d’Iran) a déploré la hausse croissante des dépenses militaires, en particulier au Moyen-Orient, « où, en plus des armes nucléaires et autres armes de destruction massive, l’arsenal sophistiqué d’armes classiques du régime juridique israélien continue de menacer la paix et la sécurité au niveau régional et au-delà ».  Le représentant iranien a ajouté qu’alors même que certains États critiquent l’Iran pour le lancement d’une « poignée de missiles » conçus pour transporter des ogives classiques, l’insécurité régionale s’intensifie en raison de cette véritable course aux armements que connaît le Moyen-Orient.  Il a insisté sur le fait que le programme de missiles iraniens a été développé pour répondre aux besoins sécuritaires de l’Iran et pour assurer sa défense nationale.  D’autre part, il a indiqué que pendant la guerre contre l’Iraq, les États-Unis n’avaient eu de cesse de soutenir financièrement, logistiquement et économiquement le régime de Saddam Hussein tout en faisant en sorte que l’Iran ne soit pas en mesure de se défendre.  Cela fait 300 ans que l’Iran n’a agressé aucun autre pays, a-t-il encore lancé, tandis que le régime juridique sioniste, aidé en cela par son allié américain, n’a de cesse d’investir des milliards de dollars en organisant le transfert d’armes qui ont transformé le Moyen-Orient en une véritable poudrière.  Il a ensuite de nouveau souligné que le caractère du programme de missiles iraniens était purement défensif et dissuasif.

Débat thématique sur les autres mesures de désarmement et sécurité internationale

M. DANNY RAHDIANSYAH (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a parlé des avantages socioéconomiques que présentent les TIC, s’inquiétant toutefois des situations où leur utilisation illégale avait été néfaste pour certains États.  Il a estimé que l’élaboration d’un cadre juridique pour répondre à de telles violations doit se faire au sein de l’ONU, sur la base du plein respect des principes de souveraineté, de non-ingérence et de coexistence pacifique entre États.

Il a estimé que les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux doivent se faire dans la transparence et sur la base du strict respect de la représentation géographique équitable.  Il a regretté que la demande des pays développés de pouvoir y participer n’ait pas été considérée.

Le représentant a ensuite indiqué que, cette année, le Mouvement des pays non alignés présenterait des projets de résolutions sur le respect des normes environnementales dans l’élaboration et la mise en œuvre des accords de désarmement et de contrôle des armes, sur la mise en œuvre de la Déclaration faisant de l’océan Indien une zone de paix, sur la promotion du multilatéralisme dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération et sur la relation entre désarmement et développement.

M. MARWAN ALI NOMAN AL-DOBHANY (Yémen), au nom du Groupe des États arabes, a estimé que les cadres multilatéraux sont les seuls moyens de traiter des questions de sécurité internationale.  Soulignant le rôle des Nations Unies en matière de désarmement et de non-prolifération, il s’est inquiété de l’augmentation des dépenses militaires, ressources qui pourraient, selon lui, autrement servir à combattre la pauvreté.  Le délégué a souhaité, à cet égard, que soit étudié l’impact des dépenses militaires sur la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Constatant que la prolifération des armes de destruction massive menace la planète, il a jugé indispensable de se focaliser sur la dimension écologique des Traités relatifs au désarmement.  Il a par ailleurs exprimé son inquiétude quant à l’utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) pour nuire à l’intégrité des États, tout en se félicitant de l’action des Nations Unies qui, à ses yeux, luttent contre ces problèmes en dépit de nombreux défis.

M. JOSEPH TEO CHOON HENG (Singapour), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a estimé que le renforcement des capacités était essentiel à l’amélioration de la réponse des pays de la région aux menaces posées par la criminalisation du cyberespace.  Le représentant a souligné que la cybersécurité est une question nécessitant de mettre au point une expertise spécifique croisant plusieurs champs de compétence.  Les gouvernements n’ont pas toutes les réponses à cette question, a-t-il dit, rappelant que l’infrastructure, les ressources et l’expertise dans le domaine du cyberespace sont, pour l’essentiel, entre les mains du secteur privé.  Il est de notre devoir d’initier au plan international d’échanges réguliers et constructifs avec ce secteur sur ces questions d’intérêts national, régional et international, a souligné le représentant.  Il a assuré que son pays s’efforçait de développer un cyberespace sûr, résilient et respectueux du droit international et des normes internationales en vigueur.  Il a aussi plaidé pour le renforcement de la coopération internationale pour appréhender efficacement et rapidement les défis posés par les cybermenaces.

Mme JUDIT KÖRÖMI de l’Union européenne, a loué les efforts du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale, regrettant toutefois qu’il ne soit pas parvenu, en 2017, à s’accorder sur un rapport consensuel.  Elle s’est prononcée en faveur de la mise en place de cadres stratégiques basés sur le droit international existant, et en particulier sur la Charte des Nations Unies, pour assurer la prévention des conflits, la coopération et la stabilité dans le cyberespace.  « Nous supportons le développement et la mise en œuvre de normes universelles de comportement responsable des États, soutenues par des mesures régionales propres à accroître la confiance entre eux », a-t-elle précisé, en mettant en évidence la manière dont les États devraient utiliser les technologies de l’information et des communications.  

La représentante a notamment appelé au respect du principe de non-intervention dans les affaires internes des États, au règlement des disputes par des moyens pacifiques, ainsi qu’au droit de répondre, y compris en utilisant des contre-mesures non coercitives, à des actes délictueux commis à travers l’utilisation des TIC.  Le développement de mesures de confiance régionales est un élément essentiel pour augmenter la coopération, la transparence, et réduire le risque de conflits, a souligné Mme Körömi.  À cet égard, elle a insisté sur l’importance du renforcement des capacités, l’Union européenne étant prête à fournir l’aide nécessaire à des pays tiers pour répondre aux menaces et améliorer les capacités d’enquête et de poursuite des cybercrimes par les forces de l’ordre.  L’Union européenne a en outre adopté un « cadre de travail pour une réponse diplomatique coordonnée aux cyberactivités malveillantes », afin de mieux prévenir et de mieux répondre à ces menaces.

Mme CHALLENGER (Antigua-et-Barbuda), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a salué la résolution 1325 du Conseil de sécurité qui rappelle le rôle des femmes dans la prévention et la résolution des conflits.  Elle a aussi rappelé que la résolution 65/69 de l’Assemblée générale exhorte les États Membres à favoriser l’égalité des chances pour les femmes dans le désarmement et les processus de décision.  Rappelant que cette résolution est présentée tous les deux ans par la CARICOM à la Première Commission, elle a souligné qu’elle restait la seule à pointer les liens vitaux qui existent entre les femmes et le désarmement.

La représentante a longuement insisté sur l’importance fondamentale des femmes dans la lutte contre les armes classiques.  Si les hommes sont souvent les victimes de ces armes dans la région des Caraïbes, ce sont les femmes qui en subissent les conséquences mentales et matérielles en devenant l’unique gagne-pain de leur famille avec tous les risques de pauvreté que cela comporte, a-t-elle notamment indiqué.  La CARICOM est convaincue que l’examen continu de la perspective de genre est pertinent pour aborder la question de désarmement.  Même si la région de la CARICOM n’est pas touchée par des conflits armés, a-t-elle rappelé, l’usage des armes est un problème conséquent puisque 70% des homicides entraînent l’utilisation d’armes à feu dans les Caraïbes.  Ce sont des ressources qui ne peuvent pas être affectées au développement, a-t-elle notamment déploré, et les retombées de cette violence peuvent plonger des familles et des communautés entières dans la pauvreté, provoquant des dommages considérables aux efforts de développement à long terme des pays.  Elle a également précisé que dans la région, le problème des armes illégales est étroitement lié au crime transnational organisé, notamment au trafic de drogue et au blanchiment d’argent.

Rappelant que les pays en développement subissent davantage les effets néfastes liés à l’utilisation et au commerce d’armes à feu, et qu’aucun État Membre de la CARICOM n’en produit, elle a estimé que la sous-représentation des pays à faible revenu au sein des instances internationales de désarmement est un problème qui doit être traité de façon holistique.  À ce titre, elle a apporté son soutien à la résolution L.30 portée par l’Indonésie visant à allouer les ressources économiques dégagées par la mise en œuvre des programmes de désarmement à la réduction du fossé entre pays développés et pays en développement.

Mme SABRINA DALLAFIOR MATTER (Suisse) a expliqué qu’à l’occasion de sa participation aux travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale, elle avait pu constater combien cette initiative est « une formidable occasion de contribuer au développement d’un cadre stratégique pour la stabilité internationale du cyberespace ».  La Suisse en a profité pour défendre l’idée d’un cyberespace fondé sur l’application du droit international, des normes, des règles et des principes volontaires de comportement responsable des États, et sur des mesures visant à instaurer la confiance et le renforcement des capacités, a-t-elle précisé.  À cette aune, elle a déploré que le Groupe d’experts n’ait pas été en mesure, cette année, d’adopter un rapport de consensus formulant des recommandations de fonds à l’Assemblée générale.  

La Suisse s’inquiète de ce que certains États hésitent à reconnaître le rôle déterminant que joue le droit international en faveur d’une approche pacifique et coopérative de la cybersécurité, a déclaré la représentante.  Elle a ainsi insisté sur le fait que, le droit international constituant le cadre juridique de l’action des États, doit s’appliquer au cyberspace, « qui n’est pas un champ d’activité nouveau, dépourvu de toute règle et de toute norme ».  Le droit doit s’appliquer à l’utilisation par les États des technologies de l’information et des communications, a-t-elle poursuivi, appelant à élargir le débat sur la manière dont les principes du droit international s’appliquent au cyberespace.  À cet égard, elle a souhaité que l’ONU s’implique dans la réflexion sur le rôle du droit international et de son volet humanitaire pour assurer une approche pacifique et coopérative de la cybersécurité.

M. VISHAL KAPUR (Canada) a rappelé que les conflits alimentés par la prolifération d’armes et les violences armées affectaient les individus de manière différente en fonction de leur genre, soulignant que les armes légères et de petit calibre accentuent encore plus les violences ou les menaces de violence sexiste.  Il a indiqué que les armes légères font davantage de victimes directes parmi les hommes et les garçons, et que dans de nombreuses cultures, la possession d’armes est liée à un discours de masculinité.  Ces armes, a-t-il poursuivi, facilitent la perpétuation de violence sur les femmes et les filles, en particulier les violences sexuelles et domestiques.  Il a également rappelé que ce sont aussi les femmes qui portent la responsabilité de s’occuper des survivants et des victimes indirectes des armes légères et de petit calibre.  La disparition ou l’incapacité de leurs conjoints ou d’autres membres masculins de leur famille fait que les femmes font face à une discrimination et à des difficultés persistantes, a-t-il indiqué.

Mais les femmes ne sont pas simplement des victimes d’armes légères, a poursuivi le représentant, qui a demandé que soit pleinement prise en compte cette dimension, comme le rôle des femmes dans certains conflits, où elles peuvent aussi être utilisées comme soldates, passeuses d’armes, soutien à des forces armées.  Dans ce contexte, il a mis en avant la nécessité de les impliquer systématiquement dans les phases de résolution des conflits, de processus de paix, de démobilisation ou de réintégration.  Prenant en compte ces dimensions, il a souhaité que les femmes soient intégrées de manière croissante comme partenaires dans les discussions touchant la sécurité, le désarmement et le contrôle des armes.  « Le fait que la problématique de genre ait été introduite dans le Traité sur le commerce des armes est un signe clair du pouvoir de mobilisation pour amener ce thème sur le devant », a-t-il ajouté, avant de souhaiter que cette problématique soit toujours plus portée par les États Membres dans leurs travaux, en particulier la mise en œuvre de cadres juridiques sur la non-prolifération, le contrôle des armes et le désarmement.

Mme RACHEL HICKS (États-Unis) a déclaré que son objectif est de créer un environnement de « cyberstabilité ».  À cet égard, la déléguée a exhorté tous les États à adopter un comportement responsable dans le cyberespace.  Estimant que le Groupe d’experts gouvernementaux chargé de cette question a été un lieu productif où travailler sur ces questions, elle a regretté que cette année, le Groupe ne soit pas parvenu à dégager un consensus.  Mais cet échec ne doit pas minorer l’importance et la pertinence des discussions et rapports précédents qui ont démontré la valeur du consensus dans le travail de ces experts, a-t-elle signalé.

Rappelant ensuite que les États-Unis sont coauteurs du projet de résolution L.7 sur le respect des accords et obligations en matière de non-prolifération, de limitation des armements et de désarmement, la représentante a jugé que l’adhésion aux traités internationaux visant à empêcher la prolifération de ces armes était un élément essentiel de l’architecture de sécurité internationale.  Elle a par ailleurs qualifié de « dangereux » le comportement de la « Corée du Nord » affirmant que ce pays a utilisé son programme nucléaire et balistique pour faire pression sur les autres États Membres.  « En raison du comportement de la Corée du Nord et de son incapacité à se conformer aux obligations de non-prolifération, cet organe doit prendre ses responsabilités en apportant son appui au projet de résolution L.7 », a jugé la déléguée qui a précisé que cette année, le texte ne comprend que quelques ajouts mineurs.

M. AMANDEEP SINGH GILL (Inde) a présenté le projet de résolution L.52 sur l’usage des nouvelles technologies de l’information dans le contexte de la sécurité internationale et du désarmement.  Il a souligné que le texte propose la création d’un panel d’experts sur les sciences et la sécurité qui serait chargé de faire une étude sur l’état de développement des sciences et technologies de l’information dans les secteurs de la biotechnologie, de l’espace extra-atmosphérique, de l’intelligence artificielle et des systèmes autonomes, en mettant l’accent sur les applications civiles pouvant être redéployées à des fins militaires.  Ce groupe devrait également évaluer les défis et les domaines de préoccupation liés à l’usage de ces technologies à des fins militaires, tout en gardant à l’esprit les impératifs de sécurité nationales et de légitime défense.  Les travaux du groupe permettraient également de renforcer l’évaluation des défis émergeants liés à ces nouvelles technologies.

Le représentant a ensuite proposé que le panel soit constitué d’un maximum de 18 experts, et qu’ils se réunissent deux fois par an.

M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a déclaré que son pays avait récemment adopté, au terme d’un processus consultatif de deux ans, son plan national en faveur d’un cyberspace à des fins de développement socioéconomique.  Secteur Internet, secteur éducatif, organisations non gouvernementales, assemblées citoyennes: la consultation n’a omis aucune partie, a-t-il assuré.  Il a expliqué que l’application de ce plan national renforcera la sécurité des actifs critiques et permettra à la science de contribuer au développement d’un cyberespace participatif, sûr, stable et durable.  Le représentant a ensuite insisté que l’importance de la coopération internationale dans la mise en œuvre des mesures de prévention des menaces pesant sur le développement d’un cyberespace à des fins pacifique et d’inclusion sociale et économique. 

Mme LARISSA SCHNEIDER CALZA (Brésil) a indiqué que pour assurer l’utilisation pacifique du cyberespace, le Brésil plaidait pour le renforcement des normes et principes devant régir la conduite des États dans le domaine de l’information et des technologies des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale.  Cela, néanmoins, ne peut s’effectuer aux dépens de la libre circulation de l’information et du plein respect des droits de l’homme, en particulier le droit à la vie privée, a-t-elle ajouté.  La représentante a estimé que le droit international en vigueur et les principes de la Charte des Nations Unies ouvraient la voie à l’instauration d’un environnement numérique accessible, pacifique, sûr et stable.  En outre, la communauté internationale doit examiner s’il est nécessaire de développer un cadre juridique spécifique, a-t-elle ajouté.  La représentante a estimé que les États Membres devraient adopter une norme destinée à réduire la possibilité d’une course aux armements liée au développement des technologies.  Il faut empêcher que les technologies soient mises au service d’instruments d’agression, a-t-elle insisté. 

Mme GONSALVES (Pays-Bas) a considéré qu’Internet était un bien global qui implique tous les aspects de l’activité humaine et qu’il doit donc rester ouvert et libre pour tous.  À cet égard, la déléguée a estimé qu’il fallait utiliser les technologies de l’information et des communications (TIC) pour protéger les droits et valeurs fondamentaux.  Elle a déploré que, malgré ses efforts, le Groupe d’experts gouvernementaux ne soit pas parvenu à un consensus sur les règles, normes et mesures de renforcement de la confiance dans le cyberespace.  Mais certains progrès ont été réalisés qui méritent, selon elle, de verser dans l’optimisme.  « L’absence de consensus de cette année ne doit pas saper les bases de ces réunions », a-t-elle ajouté.

Elle a rappelé que dans son rapport de 2013, le Groupe a conclu que la loi internationale et la Charte des Nations Unies étaient applicables et essentielles pour maintenir un environnement ouvert, stable, accessible et pacifique dans les TIC.  « Après tout, elles forment un cadre juridique pour les interactions entre États sur mer, sur terre, dans les airs, et donc aussi dans le cyberespace qui n’est après tout qu’un vecteur d’interactions interétatiques comme l’était le ciel il y a un siècle », a-t-elle complété.  Elle a également noté des progrès entre 2013 et 2015 en matière de normes, règles, principes de comportement responsables et mesures de renforcement de la confiance qui sont autant de blocs pour construire des interactions plus stables et prévisibles entre États.

La représentante a indiqué que de nouveaux progrès semblaient à portée de main en matière de droit inhérent à l’autodéfense, de mise en place de contre-mesures contre des États responsables d’actions contraires au droit international, mais aussi de contributions à l’application du droit international dans le cadre des TIC.  Malgré cette absence de progrès, a-t-elle répété, l’optimisme est de mise et les Pays-Bas souhaitent inclure à l’ordre du jour de la soixante-treizième Assemblée Générale un point sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale.

M. MUSTAPHA ABBANI (Algérie) a déploré que le rapport du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale n’ait pas pu être adopté par consensus.  Il a estimé que persistait le besoin d’établir des normes de transparence et de confiance pour mieux encadrer les usages des technologies et les télécommunications à des fins pacifiques et de développement.  Le représentant a signalé qu’en Algérie une démarche d’ensemble pour lutter contre la cybercriminalité et mieux comprendre les défis en ce domaine avait été mise au point.  Il a en outre appelé à l’amélioration de la coordination interétatique des actions de prévention et de lutte contre la cybercriminalité « qui appuie l’activité d’entités terroristes ».  Le représentant algérien a également plaidé pour la conclusion d’un accord pour lutter contre les crimes numériques touchant les États et les individus.  La communauté internationale doit adopter des législations claires pour encadrer le développement de l’intelligence artificielle, a-t-il aussi dit, rappelant la nécessité que soit prise en compte l’importance du respect des normes environnementales dès les premières étapes de la négociation des traités et accords de désarmement.

M. JEHAZEB KHAN (Pakistan) a jugé que la mise au point d’armes autonomes létales est contraire aux droits de l’homme et menace la sécurité internationale.  Selon lui, les nouveautés dans le domaine de l’intelligence artificielle doivent être gérées et réglementées.  À cet égard, il a considéré que l’utilisation transfrontalière de drones armés en dehors de conflits internationaux représente une violation des principes du droit.  « Leur utilisation ne devrait être limitée qu’à la légitime défense », a-t-il estimé, considérant que les États qui les utilisent procèdent à des assassinats non judiciaires.  Il a aussi insisté sur les répercussions que la guerre dans le cyberespace peut avoir lorsqu’elle touche des infrastructures critiques.  « Ces cyberattaques pourraient même être utilisées comme des armes de destruction massive », a notamment averti le délégué.

Droits de réponse

Le représentant d’Israël a affirmé que l’Iran était « le principal parrain du terrorisme dans le monde », y compris en Syrie « où sont utilisées des armes de destruction massive et classiques particulièrement destructrices ».

Le représentant des États-Unis a déclaré que « l’Iran utilise les conflits régionaux pour accroître son influence, cela par le biais d’un soutien actif et connu de tous apporté à plusieurs groupes terroristes dans plusieurs régions ainsi qu’au régime de Bashar al-Assad ».  L’Iran menace Israël de destruction et les États-Unis de cyberattaques, a-t-il ajouté, qualifiant de « suspect » son programme de missiles.

Le représentant de l’Iran a rejeté les allégations du représentant israélien, son pays, « qui a mené 15 guerres dans la région », représentant « la pire menace à la paix et à la sécurité du Moyen-Orient ».  Israël dispose de toutes les catégories d’armes de destruction massive, refuse d’adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et donc s’oppose à l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, a-t-il encore noté.  Il a également fait observer à son homologue des États-Unis qu’Israël, « qui est l’un des principaux fournisseurs d’armes dans le monde », était le pays qui reçoit le plus d’assistance militaire des États-Unis. 

Désarmement et sécurité sur le plan régional

Mme MARY SOLIMAN, Chef du Service du désarmement régional, a expliqué que les centres régionaux permettent de renforcer la coopération régionale ainsi que l’assistance juridique et technique pour aider les États Membres à appliquer les accords.  Ils vont continuer de promouvoir cette coopération pour empêcher le trafic illicite des armes légères, améliorer la gestion de ces armes et appuyer les résolutions du Conseil de sécurité, a-t-elle ajouté, avant de préciser que leurs activités et prérogatives vont des armes classiques aux armes de destruction massive.  Elle s’est dite persuadée que l’approche synergique que privilégient les centres va leur permettre de délivrer le maximum de bénéfices aux États Membres.  Dans l’immédiat, ces centres vont continuer de travailler pour identifier les priorités stratégiques dans chaque région, tout en prenant en compte les tendances globales, les défis et les opportunités.  Mme Soliman a ensuite indiqué que si le coût opérationnel des trois centres régionaux est financé par les Nations Unies, leurs activités et programmes sont financés par d’autres voies.  Elle a exhorté tous les États Membres à maintenir et accentuer leur appui financier et politique.

M. ANSELME YABOURI, Directeur du Centre régional pour la paix et le désarmement en Afrique, a fait le point de ses activités sur l’année écoulée, précisant que le Centre avait notamment aidé l’Union africaine à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le projet « Faire taire les fusils à horizon 2020 ».  Au Sahel, il a continué d’aider à la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies en fournissant un appui technique pour améliorer le contrôle des armes.  En Afrique centrale, a poursuivi M. Yabouri, le Centre a apporté une aide substantielle au Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale.  Le centre régional a également fourni de l’expertise technique à un atelier pour les parlementaires des pays lusophones sur la ratification et la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes.  Le Centre régional a en outre aidé les États Membres à mettre en place des instruments de contrôle du commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  Il a aussi travaillé avec le Gouvernement du Togo pour l’appuyer dans le déploiement d’un programme spécifique visant à marquer les armes.  

En vue d’améliorer la capacité des États à lutter contre l’acquisition d’armes par des groupes terroristes et acteurs non étatiques, le Directeur a rapporté que le Centre régional a appuyé la mise en œuvre de la résolution 2178 du Conseil de sécurité sur l’élimination des conditions propices à la prolifération du terrorisme.  En août, il a encore organisé une réunion de 50 représentants du Cameroun, Tchad, Niger et Nigéria pour empêcher l’acquisition d’armes légères et de petit calibre par des terroristes dans ces quatre États.  Un atelier de renforcement des capacités a également été organisé à Yaoundé pour former des hauts responsables à la lutte contre les armes légères et de petit calibre.

Le Centre régional a également appuyé les efforts régionaux de lutte contre les armes de destruction massive en sensibilisant notamment les États africains à la mise en œuvre de la résolution 1540 du Conseil de sécurité.  En matière d’éducation pour la paix et d’information publique, il a fait publier un guide pratique en français pour que les diplomates francophones puissent renforcer la capacité de leur pays en termes de paix et de sécurité.  Aux yeux du Directeur, le nombre croissant de requêtes d’assistance démontre l’importance de ce centre dans le contrôle des armes et du renforcement de la sécurité.  Toutefois, a-t-il contrebalancé, on doit faire plus pour promouvoir la paix et la sécurité en Afrique, notamment dans la zone du Sahara et du Sahel où la traite d’êtres humains a atteint un pic inadmissible après la crise libyenne.  C’est pourquoi le Centre régional, aidé par le service de désarmement régional, va encore améliorer la synergie avec d’autres organes de l’ONU, a assuré le directeur.

Mme MELANIE REGIMBAL, Directrice du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Amérique latine et dans les Caraïbes, a fait remarquer que l’assistance la plus visible et tangible qu’apporte le Centre concerne la gestion et la destruction des stocks d’armes, cela notamment dans le cadre de la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 16.  Elle a noté que le Centre avait eu le privilège d’accompagner le retour à la paix en Colombie en fournissant une aide technique à la Mission de l’ONU déployée dans ce pays.  Il a été particulièrement gratifiant pour nos équipes de contribuer à la destruction, à ce stade, de près de 9 000 armes et 70 tonnes de munitions, a-t-elle indiqué, ajoutant que le Centre avait également aidé le Gouvernement du Pérou à détruire un surplus de 18 000 petites armes, et ce, en partenariat avec le secteur privé, qui, a-t-elle précisé, a mis à disposition des fonderies pour transformer et recycler ces armes meurtrières en matériel de construction.  La collaboration avec le secteur privé est essentielle pour assurer la pérennité des mesures de sécurité adoptées et mises en œuvre par nos centres, a-t-elle souligné.

L’intervenante a d’autre part insisté sur le fait que, sans la participation des citoyens, les objectifs de développement durable ne pourraient être pleinement réalisés, c’est-à-dire en tenant compte du lien entre développement et sécurité.  S’agissant de la lutte contre le trafic illicite des armes légères, elle a indiqué que le Centre avait mis au point sa propre technique de traçage des armes faisant l’objet d’un tel trafic.  Presque immédiatement après la mise en route de ce dispositif et l’organisation d’ateliers de formation sur son fonctionnement, le nombre de saisies a nettement augmenté, en particulier au Costa Rica, a-t-elle fait savoir.  Par ailleurs, Mme Régimbal a signalé que le Centre était devenu leader dans l’assistance apportée aux pays de la région pour appliquer les dispositions de la résolution 1540 du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive.  En 2017, nous nous sommes efforcés de renforcer la mise en œuvre synergétique de cette résolution et des conventions interdisant les armes chimiques et biologiques, a-t-elle indiqué.

M. YURIY KRYVONOS, Directeur du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique, a expliqué que le Centre avait concentré ses efforts sur le renforcement des capacités nationales, par le biais de nombreux projets d’assistance aux États Membres, dont le Cambodge, les Philippines, la République démocratique populaire lao, le Timor-Leste et la Mongolie, désireux de mettre en œuvre les engagements pris au titre du Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre (ALPC) et la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité.  L’intervenant a mentionné le projet conjoint du Bureau des affaires de désarmement et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) d’appui régional à la mise en œuvre de la résolution 1540 lancée en juillet 2016.  Il s’agit là d’un véritable catalyseur, a-t-il expliqué, qui privilégie la tenue de réunions consacrées aux pays auxquelles participent les acteurs clefs que sont les agences spécialisées, les groupes d’experts, les scientifiques et les équipes régionales d’assistance.  Il a fait savoir qu’au cours de ces réunions, le rôle joué par les points de contact nationaux pour améliorer les mécanismes de mise en œuvre coordonnée de la résolution 1540 avait été souligné.  Il a estimé que l’application de cette résolution devait être couplée à la mise en œuvre des conventions sur les armes chimiques et sur les armes biologiques, la non-prolifération des armes de destruction massive devant faire l’objet d’une approche unifiée.  C’est également dans cet esprit qu’il a souligné l’importance des activités menées localement par le Centre conjointement avec l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.  

Suite du débat thématique sur les autres mesures de désarmement

M. SIMON CLEOBURY (Royaume-Uni) a notamment déclaré que son pays avait dépêché des experts aux travaux de tous les groupes d’experts gouvernementaux sur le cyberespace.  S’il a déploré l’absence de consensus autour des travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale en 2017, il a assuré la Commission que son pays continuerait de mettre en œuvre les accords ayant découlés des rapports rédigés par ce groupe en 2010, 2013 et 2015, et qui ont été approuvés par l’Assemblée générale.  Le représentant a par ailleurs estimé que la conduite responsable des États dans le cyberespace était un engagement mutuel respectueux du droit international, y compris le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.  De même, les opérations militaires sous cybercommandement doivent respecter le droit humanitaire international et les principes de la Charte des Nations Unies, a souligné le délégué. 

Mme MARJA LEHTO (Finlande) a concentré son intervention sur la question des menaces de cyberattaques, soulignant l’importance d’intégrer la cybersécurité aux questions de paix, de stabilité et sécurité internationales.  Elle a salué les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale, rappelant que dans son rapport final sur ses activités 2013-2015, le Groupe avait réaffirmé que le droit international et son applicabilité dans ce domaine étaient indispensables pour maintenir la sécurité, la paix et la stabilité et promouvoir un environnement des sciences et technologies « ouvert et pacifique ».

La représentante a regretté que le consensus n’ait pu être atteint lors des derniers travaux du Groupe d’experts.  Elle a appelé à la poursuite des discussions internationales en matière de droit international et des TIC, faisant notamment observer que cela est déjà pertinent pour le droit international humanitaire, des moyens cybernétiques étant déjà utilisés dans le contexte de conflits armés.  Elle a aussi estimé que ces échanges de vues sont nécessaires en ce qui concerne « les cyberattaques d’envergure en deçà du niveau des attaques armées », tant pour ce qui a trait de leur prévention que pour ce qui a trait aux outils à la disposition des États qui en sont victimes pour y répondre.

Après avoir mis en avant les résultats des travaux du Groupe qui ont abouti au Manuel de Tallinn de 2013 et de 2017, la représentante a ensuite rappelé les recommandations quant à un comportement responsable des États, estimant qu’elles ne portaient pas préjudices aux droits et obligations des États dans le cadre du droit international.  Elle a souligné que ces recommandations pouvaient être des contributions pratiques à la clarification de ce qu’un État peut ou doit faire, afin que son territoire ne soit pas la base d’activités portant atteinte à d’autres États.

Les évolutions dans le domaine de la cybersécurité sont rapides, complexes et difficiles à prédire, a-t-elle poursuivi, et il importe donc non seulement de prêter attention à la cybersécurité, mais aussi d’être « cyber intelligent » afin de suivre le rythme des changements de l’environnement sécuritaire international.  Elle a insisté sur l’importance de poursuivre les travaux pour relever les défis posés par la cybersécurité, notamment via la confiance entre les États.  Elle a cité en exemple les efforts déployés par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour adopter des mesures de confiance dans ce domaine.

Mme MINNA-LIINA LIND (Estonie) a indiqué que son pays avait participé activement aux travaux du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale.  Elle a déploré que le Groupe n’ait pas pu réaliser de progrès supplémentaires dans l’analyse du droit international appliqué aux technologies de l’information et des communications, en particulier pour ce qui est du principe de précaution, des contre-mesures n’impliquant pas l’emploi de la force, du droit à la légitime défense ou encore du droit international humanitaire.  Toutefois, il nous faut reconnaître que, sous l’égide du Groupe d’experts, la réflexion a avancé s’agissant de l’analyse des nouvelles menaces, des mesures de confiance et des normes de comportement responsable des États.  Pour la déléguée, rien n’empêche les États de mettre en œuvre les recommandations du Groupe sur ces points.  Elle a ajouté que l’Estonie soutenait la création d’un cadre stratégique de prévention des conflits et de stabilité du cyberespace basé sur le droit international et la Charte des Nations Unies.  Le cadre européen instauré par la réponse diplomatique conjointe face aux actes de cybermalveillance contribue non seulement à la prévention des conflits, mais représente une réelle avancée vers un cyberespace stable, a-t-elle estimé.

Mme SÁNCHEZ RODRÍGUEZ (Cuba) a proposé, entre autres mesures concrètes la création d’un fonds des Nations Unies dans lequel serait versée la moitié des dépenses militaires actuelles afin d’aider les États à atteindre les objectifs de développement durable.  Rappelant que le multilatéralisme est la seule façon efficace de sauvegarder la paix internationale, elle a appelé à promouvoir des stratégies pour prévenir et faire face aux menaces réelles dans le domaine de la sécurité de l’information.  À ses yeux, la coopération entre États est le seul moyen d’éviter que le cyberespace ne devienne pas un espace militaire.  À ce titre, il faudrait, selon elle, créer un cadre réglementaire interne propre aux technologies de l’information et des communications (TIC) qui soit juridiquement contraignant.

« L’utilisation des TIC pour mettre à mal un État est une violation du droit qui suppose une utilisation illégale de moyens pouvant produire des tensions négatives sur l’intégrité des structures des États », a-t-elle expliqué.  À ce titre, elle s’est dite « extrêmement préoccupée » par l’utilisation illégale des systèmes informatiques d’autres nations pour agresser des pays tiers, déplorant notamment que Cuba fasse l’objet « d’attaques permanentes » venant de l’extérieur: selon elle, le pays est la cible d’ondes radios et télévisuelles qui diffusent des programmes pour inciter au soulèvement du peuple cubain.  En 2016, a-t-elle poursuivi, 1 875 heures par semaine de matériel illégal utilisant pas moins de 25 fréquences ont été diffusées à Cuba depuis le territoire des États-Unis.  « Cette politique agressive doit être arrêtée immédiatement », a-t-elle asséné avant d’appeler à la levée du blocus contre son pays.

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a souligné que son pays avait signé et ratifié le Convention sur la sûreté nucléaire et adhéré aux instruments associés, notamment la Convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière.  Elle a considéré ce dernier instrument comme un passage obligé vers l’instauration de pratiques absolument transparentes en matière d’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  La représentante a par ailleurs rappelé que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) jouait un rôle vital dans le renforcement des capacités des États à assurer que les utilisations de l’énergie atomique à des fins pacifiques sont entreprises dans des conditions de sécurité maximales et de protection des populations comme de l’environnement.  Nous exhortons les États Membres à mettre pleinement en œuvre les lignes directrices et recommandations de sécurité nucléaire de l’Agence, et à recourir à tous les services consultatifs mis à la disposition par celle-ci, a déclaré Mme Theofili.

M. WANG QUN (Chine) a déclaré que le cyberespace était la nouvelle frontière de la sécurité stratégique.  Toutes les parties devraient travailler ensemble à l’élaboration d’une communauté d’intérêts communs dans laquelle le cyberspace serait utilisé à des fins pacifiques, a-t-il estimé.  Le représentant a invité les États Membres à utiliser le cyberespace en respectant les principes de la Charte des Nations Unies, notamment le principe de souveraineté, de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays et de non-utilisation de la menace de la force.  Soulignant ensuite que la cybersécurité est une question globale, il a mis l’accent sur l’importance de renforcer la coopération internationale entre États et de multiplier les prises de décisions conjointes, cela dans le cadre de l’ONU, « qui est l’organisation internationale la plus représentative et jouissant de la plus grande autorité ».  Il a également estimé que la discussion sur les codes de conduite et règles internationales en matière de gouvernance du cyberespace doit être conduite sous l’égide des Nations Unies, afin de permettre à tous les pays de faire entendre leur voix.

M. LOUIS RIQUET (France) a rappelé que la cybersécurité était une priorité légitime pour les gouvernements, soulignant l’importance pour les États Membres de répondre à ces enjeux par la coopération et le droit.  Il a réitéré que le droit international existant, et notamment la Charte des Nations Unies et le droit international humanitaire s’appliquent au cyberespace.  « Chaque État est tenu de respecter l’obligation de régler ses différends par la coopération et la négociation, sans remise en cause de son droit à prendre des mesures techniques et proportionnelles pour répondre à une cyberattaque », a-t-il ajouté, soulignant que dans certains cas, une attaque informatique majeure pouvait constituer une agression armée au sens du l’article 51 de la Charte qui ouvre la possibilité d’exercer son droit à la légitime défense.

Saluant les travaux des Groupe d’experts gouvernementaux sur la cybersécurité de 2013 et 2015, en matière d’applicabilité du droit international, il a appelé chaque État à mettre en œuvre leurs recommandations, en dépit de l’absence de consensus sur le rapport du dernier Groupe d’experts de 2017.  Il a souhaité que cet échec ne fasse pas « perdre de vue » les accords trouvés sur plusieurs points, en mettant deux en avant tout particulièrement.  Le premier concerne une norme encourageant le contrôle des exportations d’outils et de techniques cybernétiques offensifs, « premier jalon d’une réglementation du commerce mondial des outils offensifs ».  Le second concerne une norme visant à empêcher les acteurs non étatiques, dont les entreprises privées, de conduire des activités offensives pour eux-mêmes ou pour le compte d’autres acteurs non étatiques, afin d’éviter que des entreprises, sous prétexte de se défendre contre des cyberattaques, ne répliquent de manière autonome, prenant le risque de causer des dommages sur un autre État et entraînant une escalade. 

Le représentant a estimé aussi que les différences d’approches entre pays ne pouvaient pas prendre le pas sur des avancées concrètes à rechercher pour renforcer la régulation, encourageant des travaux entre États, avec le secteur privé et le monde de la recherche.  « Le travail normatif visant à renforcer la stabilité et la sécurité internationales du cyberespace ne doit pas prendre fin avec l’échec des dernières négociations du Groupe d’experts », a-t-il encore insisté, avant de rappeler la responsabilité commune des États Membres de défendre les cadres et normes mis en place collectivement.

M. THOMAS FITSCHEN (Allemagne) a estimé que si des attaques cybernétiques sont attribuables aux actes d’un État dans un autre état -pour attaquer une centrale nucléaire par exemple-, « cela ne se produit pas dans le cyberespace, mais dans un endroit précis ».  À ses yeux, cette situation est déjà régie par le droit international dans le cadre, notamment, des accords bilatéraux entre les deux pays, les attributions d’un acte à un État étant donc, selon lui, prévues dans le droit.  Tout en concédant qu’il est plus compliqué de s’en assurer dans le cadre du cyberespace, il a souligné que « cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a pas de critères du tout ».  Compte tenu de l’évolution rapide de l’informatique et des risques d’opérations cybernétiques d’un État contre un autre, il a dit comprendre que la prudence soit de mise.  Une cyberopération d’un État contre un autre peut représenter un recours à la force, a-t-il expliqué, et les experts de la Première Commission peuvent facilement considérer que c’est aussi grave qu’une attaque armée. 

Tournant ensuite son attention sur les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux, il a souhaité l’élaboration d’un cadre prévisible qui empêche les actes illicites dans le cyberespace, appelant la communauté internationale à faire du cyberespace un espace plus sûr.

Pour Mme LINYAMA (Zambie) a noté que l’utilisation grandissante des technologies de l’information et des communications, à travers Internet, avait conduit à une augmentation des crimes tels que les attaques sur les systèmes informatiques des institutions et les activités liées au terrorisme.  « L’utilisation de ces technologies permet à des associations criminelles et terroristes de franchir les barrières spatiales de chaque État pour commettre des crimes sans être à proximité, ce qui rend difficile l’identification des auteurs et la localisation de la scène du crime avec les méthodes d’enquête traditionnelles » a déploré le représentant.  Elle s’est également préoccupée de la vulnérabilité des infrastructures en raison des connections de plus en plus importantes, qu’il s’agisse des banques, du transport ou de la distribution de l’eau, dans les secteurs privé et public.  Pour le Gouvernement zambien, lutter contre la cybercriminalité et les autres activités criminelles liées aux technologies constitue un véritable défi, « car ces nouvelles technologies sont devenues disponibles si rapidement que les lois et les politiques permettant de se prémunir des abus ne peuvent suivre le rythme ».

Son pays a néanmoins pris des mesures, a fait savoir la représentante, citant la régulation des cafés Internet et des fournisseurs de service, la création d’équipes d’intervention d’urgence, d’unités spécialisées et de plate-forme interinstitutionnelle pour les forces de l’ordre, ainsi que l’utilisation, par ces mêmes forces de l’ordre, des technologies pour la surveillance et la détection de transactions financières frauduleuses.  « Enquêter et engager des poursuites pour de tels crimes restent néanmoins une gageure, car cela nécessite d’avoir la capacité de collecter et d’analyser des preuves numériques et de les utiliser, tout en restant conscient de l’importance de protéger la vie privée, les droits humains, et les libertés fondamentales », a toutefois fait observer Mme LINYAMA.  Sur un autre plan, la déléguée a mis en évidence combien les connections entre les développements scientifiques et technologiques offraient une opportunité de créer davantage de compréhension et de coopération entre les États Membres, sur des questions tels que le contrôle des armes nucléaires et le désarmement.  « La communauté globale doit coopérer pour s’assurer que les avancées technologiques et scientifiques se fassent au bénéfice de l’humanité et non pour la détruire », a-t-elle lancé.

M. VLADIMIR YERMAKOV (Fédération de Russie) a déploré que les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale se soient concentrés, en 2017, sur des « questions non prioritaires et de faible importance ».  Il a ajouté que cet instrument n’avait pas résisté à l’imposition de vues unilatérales dans le domaine numérique par certains pays ne cherchant que la défense de leurs intérêts propres.  Il a ainsi estimé que les règles promues par ces États ne reposent que sur le droit du plus fort, à savoir celui des détenteurs des technologies les plus performantes.  C’est pour cela que le rapport du Groupe d’experts n’a pas pu être adopté par un consensus universel, a-t-il affirmé.  Pour le représentant, invoquer la nécessité d’appliquer de manière inconditionnelle le droit international existant pour régir l’utilisation des technologies de l’information et des communications permet d’éviter de se pencher sur les questions d’ordre strictement technique.  Il a estimé que, ce faisant, il était facile d’attribuer à tel ou tel État la responsabilité de cyberattaques ou encore d’imposer des sanctions et lesdites contre-mesures en court-circuitant le Conseil de sécurité.  Nous avons, a-t-il confié, l’impression que la défense, en petit comité, de l’application du droit international existant au cyberspace est un moyen de couvrir des actions de force dans le domaine sensible de l’information d’origine spatiale.  Le représentant a souligné que les tentatives de certains pays d’établir, en dehors du cadre de l’ONU, « un club de débat restreint », devaient cesser: « l’ONU, avec sa légitimité universelle, reste la pierre angulaire à la recherche de toute solution aux questions internationales les plus pressantes, y compris les questions d’information », a-t-il dit.  Il a indiqué que c’était en ce sens que sa délégation avait présenté un projet de décision demandant à l’Assemblée générale d’inscrire à son ordre du jour de sa soixante-treizième session un point relatif aux développements dans le domaine de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale. 

S’associant à la Hongrie, M. HAJNOCZI (Autriche) a salué les travaux des groupes d’experts gouvernementaux sur la cybersécurité, déplorant toutefois l’absence de consensus lors des négociations du dernier GGE et souhaitant que les travaux précédents continuent de servir de base au travail des Nations Unies pour renforcer la stabilité et la sécurité dans un usage pacifique d’Internet.

Il a rappelé en particulier les conclusions des GGE 2013 et 2015 sur les mesures de confiance entre les États, indiquant que l’OSCE avait de son côté effectué un travail significatif sur ce sujet ces dernières années.  Il a précisé qu’en 2012, un groupe de travail informel avait ainsi était constitué pour renforcer les mesures de transparence et réduire les mauvaises interprétations pouvant entraîner une escalade, avec l’adoption de 16 mesures de confiance précises.  Il a estimé que le manque de consensus lors du GGE 2016-2017 avait rendu « urgente », la mise en œuvre de ces mesures de l’OSCE. 

Le représentant a indiqué ensuite que sous l’actuelle présidence autrichienne, l’OSCE organisait trois conférences consacrées à la cybersécurité.  Après la première organisée en février 2017 et consacrée à la mise en œuvre des 16 mesures de confiance, la seconde se tiendra le 3 novembre, à Vienne, avec pour thème principal le renforcement de la coopération pour répondre aux usages terroristes ou criminels des nouvelles technologies de l’information et des communications, protéger les infrastructures critiques contre des activités technologies malicieuses, et veiller au respect des droits de l’homme sur Internet.  Il a appelé les États Membres à s’engager avec force pour mettre en œuvre le droit international dans le domaine de la cybersécurité. 

À propos de la cybercriminalité, il a également rappelé que la Convention du Conseil de l’Europe sur le cybercrime (Convention de Budapest) restait un outil important pour adopter des politiques communes visant à protéger les sociétés contre ce type de criminalité, appelant également les États qui ne l’ont pas encore fait à signer et ratifier ce texte qui « contribue à renforcer le cadre normatif international ». 

M. ISAAC MORALEZ (Mexique) a estimé que les Nations Unies ont un rôle à jouer pour créer un espace cybernétique sûr et stable.  Il a à cet égard reconnu la qualité des précédents travaux des groupes d’experts gouvernementaux qui sont parvenus à définir des éléments concrets pour renforcer les capacités internationales et proposer des normes et principes.  Pour le Mexique, tous les efforts déployés pour parvenir à un équilibre en matière cybernétique doivent reposer sur le renforcement de l’ouverture et de la disponibilité des technologies de l’information et des communications (TIC) pour en faire des catalyseurs du développement.  Il a aussi appelé à privilégier la diffusion des idées et des droits de l’homme via ces TIC et à parvenir à une utilisation des TIC qui soit sûre pour les usagers, le secteur privé et les gouvernements.

Mme VANESSA WOOD (Australie) a déploré l’absence de consensus au sein du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale en 2016-2017, estimant toutefois que les travaux cumulés des précédents groupes d’experts, en 2013 et 2015, avaient « considérablement » approfondi la compréhension des normes régissant le comportement responsable des États dans le cyberespace, ainsi que des mesures d’établissement de la confiance et de renforcement des capacités.  Elle a réaffirmé le soutien de son pays à « un usage libre, ouvert, pacifique et sécuritaire du cyberespace », rappelant la nécessité d’un comportement responsable des États dans le cyberespace ainsi que l’applicabilité du droit humanitaire international aux opérations cybernétiques menées dans le cadre de conflits armés.

Elle a également reconnu que l’accroissement des activités dans le cyberespace augmentait le risque de mauvaise interprétation, de mauvais calculs, d’escalade, voire de conflits.  « Pour renforcer un cyberenvironnement pacifique et stable, il est vital de mettre en place des attentes claires en ce qui concerne le comportement des États dans le cyberespace », a-t-elle poursuivi, appelant les États « à se soumettre au droit international, dont le droit international humanitaire, et de s’abstenir de répondre ou d’adopter tout comportement inacceptable ».

M. AZADI (République islamique d’Iran) a affirmé que les questions relatives aux technologies de l’information et aux télécommunications ne pouvaient être appréhendées que de manière ouverte et par l’ensemble des États Membres de l’ONU.  Il a plaidé à cette fin pour l’établissement d’un groupe de travail spécial à composition non limitée chargé de réfléchir aux questions de sécurité liées aux technologies ainsi qu’à la nature, la portée et la sévérité des menaces émanant de ces technologies et les moyens à mettre au point pour y remédier.  Il a d’autre part souligné que la sécurité en matière de technologie de l’information et des télécommunications relève de la responsabilité exclusive des États.  Ces mêmes États doivent toutefois coopérer activement à la prévention des menaces résultant de l’usage malveillant des technologies de l’information et des communications, a-t-il indiqué.

Le représentant du Bangladesh, M. FAIYAZ MURSHID KAZI,  a notamment estimé que si le Groupe d’experts gouvernementaux avait fourni un travail important, il avait échoué à rallier un consensus universel autour de son rapport final de 2017.  Par conséquent, le Bangladesh appuie le projet de décision russe demandant à l’Assemblée générale d’inscrire à l’ordre du jour de sa soixante-treizième session un point relatif aux développements dans le domaine de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale. 

Débat thématique sur le désarmement et sécurité sur le plan régional

Mme ANGGI SAZIKA JENIE (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a exprimé son inquiétude face au retard de 20 ans sur l’application de la résolution de 1995 sur le Moyen-Orient et a demandé à tous les États de prendre les mesures nécessaires pour la faire appliquer dans son intégralité.  Les pays non alignés signataires du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) expriment par ailleurs leur profonde déception face à l’échec de la mise en œuvre du plan d’action visant à établir une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  La déléguée a notamment déploré que l’opposition des États-Unis, du Royaume Uni et du Canada, lors la Conférence d’examen de 2015, ait eu raison du consensus visant à établir de nouvelles mesures pour la réalisation de cette zone.  Elle a averti que cette opposition pourrait saper les bases du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) dans son ensemble.  Elle a ensuite exhorté Israël à renoncer à ses armes nucléaires, d’adhérer au TNP et de placer ses installations nucléaires sous la surveillance de l’AIEA.  Prenant pour exemple l’accord sur le nucléaire iranien, elle a estimé que celui-ci est la preuve que le dialogue et la diplomatie peuvent régler ce genre de différends.  

M. MARWAN ALI NOMAN AL-DOBHANY (Yémen) a souligné l’importance des accords visant à créer des zones exemptes d’armes nucléaires, y compris au Moyen-Orient, appelant à prendre des mesures immédiates à cet égard.  Il a aussi indiqué que les pays arabes présenteront comme chaque année leur projet de résolution sur la menace de la prolifération nucléaire au Moyen-Orient.  En 1995, a-t-il rappelé, une conférence qui visait à sortir de l’impasse a reçu l’assentiment de « l’écrasante majorité des États », mais trois pays s’y sont « opposés en sapant la continuité du traité », a-t-il regretté.  Le délégué s’est par ailleurs dit très préoccupé par les conséquences du refus d’Israël d’adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et de fournir des informations sur ses normes en matière de sécurité et de matériel nucléaire.  « Nous aimerions souligner que les retards continus dans la mise en œuvre de la résolution de 1995 représente un pas en arrière dangereux en matière de non-prolifération », a-t-il averti, avant d’espérer des résultats positifs et une nouvelle dynamique lors des prochaines rencontres internationales.

S’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme LOIS YOUNG (Belize) s’est longuement attardée sur son partenariat avec le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, « un des plus importants pour mettre en œuvre le contrôle des armes et les obligations de non-prolifération ».  Elle a notamment mis en évidence le projet pluriannuel de renforcement des capacités dans la lutte contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, grâce à une gestion améliorée du stock et des procédures de destruction.  Elle s’est aussi réjouie de la mise en œuvre réussie du projet opérationnel en balistique, et de l’organisation des sessions de formation qui se sont achevées en août 2017 et qui visaient à augmenter la capacité des autorités nationales et incluaient la livraison de matériel de laboratoire balistique spécialisé et des équipements permettant de renforcer la traçabilité.  Disant sa gratitude aux États-Unis et au Canada pour leur soutien dans ces formations, Mme Young a également remercié le Gouvernement de Suède qui, avec le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, a organisé un atelier régional en juillet 2017 afin d’aider les États Membres de la CARICOM à remplir leurs obligations de rapportage liées au Traité sur le commerce des armes. 

Poursuivant, la représentante a affirmé que la CARICOM soutenait particulièrement le renforcement du rôle des femmes dans le désarmement, citant la résolution bisannuelle initiée par Trinité-et-Tobago.  À cet égard, elle a à nouveau souligné le rôle du Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes et des volontaires des Nations Unies, cette fois dans la création d’espaces pour les jeunes visant à améliorer leur connaissance de l’objectif 16 de développement durable et à les impliquer dans des discussions critiques sur la paix et la participation civique.  Elle a également mentionné un partenariat, toujours avec le Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, pour des activités diverses concernant la non-prolifération des armes de destruction massive, citant en exemple la récente publication d’un guide sur le développement de listes nationales de contrôle.

Mme JUDIT KÖRÖMI, de l’Union européenne, après avoir condamné les essais nucléaires conduits par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et appelé ce pays à retourner à la table des négociations, a indiqué que l’Union européenne restait prête à contribuer à la création d’un environnement propice à l’instauration, dans le cadre du Plan d’action global commun, d’un environnement sécuritaire apaisé en Iran.  La représentante a également condamné les attaques chimiques perpétrées en Syrie, soulignant que l’emploi d’armes chimiques en Syrie constitue un crime de guerre et appelant à ce que les auteurs de ces actes soient identifiés et traduits en justice.  Estimant que la Syrie n’avait pas fourni de preuves claires du démantèlement irréversible de son programme d’armes chimiques, la représentante a fermement appuyé les travaux menés par l’Équipe d’évaluation des déclarations. 

La représentante a ensuite rappelé que l’Union européenne appuyait pleinement la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Elle a par ailleurs rappelé que la Russie s’était engagée à s’abstenir de toute menace ou de tout usage de la force contre l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine, conformément au mémorandum de Budapest de 1994 sur les garanties de sécurité et compte tenu de l’adhésion de l’Ukraine au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en tant qu’État non doté de l’arme nucléaire.  Elle a appelé la Russie à remplir ses obligations, mais aussi à user de son influence dans la région pour faire en sorte que les séparatistes, qu’elle soutient, respectent les engagements contractés dans le cadre des accords de Minsk.  Elle a par ailleurs assuré que l’Union européenne continuerait d’appuyer toutes les activités conduites par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe aux fins de mise en œuvre de la résolution 1540 du Conseil de sécurité, de prévention des risques chimiques en Ukraine et de lutte contre le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre (ALPC) en ex-République yougoslave de Macédoine et en Géorgie.

Mme DELFINA JANE ALOYSIUS DRIS (Malaisie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a noté l’importance de renforcer les efforts de désarmement nucléaire, de non-prolifération et de lutte contre les stocks d’armes de destruction massive, ajoutant que la transparence et les mesures de renforcement de la confiance sont essentielles.  Saluant les efforts des centres régionaux, notamment celui d’Asie, la déléguée a expliqué que ce centre a travaillé sans relâche pour lancer des initiatives destinées à renforcer la mise en œuvre du Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre.  L’ASEAN a également réitéré son engagement à maintenir sa zone exempte d’armes nucléaires et profité de l’occasion pour rappeler l’importance de la création de ces zones, y compris au Moyen-Orient.  Se disant engagé dans l’opérationnalisation de son Centre d’action régional contre les mines elle a assuré qu’un directeur général avait été recruté.  Elle a également parlé de la tenue, en mars, à Auckland, du neuvième forum de l’ASEAN sur la non-prolifération précisant que cela avait été l’occasion d’accroître la coopération et les obligations de chacun en matière de désarmement et de non-prolifération.

M. ROBERT A. WOOD (États Unis) a souligné qu’au plan régional l’union, sans faille des États voisins, était essentielle pour lutter contre des programmes illégaux comme celui de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  La Corée du Nord ne réalisera pas la sécurité et la prospérité auxquelles elle prétend ambitionner tant qu’elle n’aura pas rempli toutes ses obligations internationales, a-t-il ajouté, assurant que, compte tenu de la menace croissante à la paix et à la sécurité posée par les agissements de ce pays, les États-Unis ne céderont rien sur la protection qu’ils apportent à leurs alliés, en particulier la République de Corée et le Japon.  Par ailleurs, il a indiqué que les États-Unis, avec leurs partenaires internationaux, s’efforceront de corriger les lacunes du Plan d’action global commun, tout en exigeant que l’Iran respecte pleinement son engagement au titre de cet accord.

M. ENRIQUE JOSÉ MARÍA CARRILLO GÓMEZ (Paraguay) a expliqué que son pays a renoncé à l’usage de la force sur le plan international.  Rappelant que le Paraguay a respecté ses engagements en fournissant des informations à l’ONU sur ses dépenses militaires, il a demandé aux États Membres de collaborer avec les Nations Unies dans leurs efforts pour parvenir à plus de transparence et pour faire baisser les dépenses militaires en Amérique Latine et aux Caraïbes.  Il a également engagé les délégations à fournir des ressources économiques et intellectuelles à la région pour lui permettre de faire face aux défis rencontrés.  « Saper les initiatives en matière de désarmement, revient à saper la sécurité mondiale », a-t-il lancé en guise de conclusion.

Droits de réponse

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a déclaré que les États-Unis avaient tenus des propos mensongers inacceptables à l’encontre de son pays.  Ce sont historiquement les États-Unis qui violent de manière éhontée les accords qu’ils s’engagent à respecter, a-t-il accusé.  « Nous rejetons avec force les observations sans fondement formulées par les États-Unis, et nous voterons contre le projet de résolution L.7 sur le respect des accords et des obligations en matière de non-prolifération, de limitation des armements et de désarmement, présenté à la Première Commission par ce pays, car il n’a pas d’autres objectifs que politiques », a-t-il de plus annoncé.

Le représentant des États-Unis a réagi en rappelant que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) était plus isolée que jamais, et qu’elle avait englouti des milliards de dollars dans le développement de programmes militaires au lieu de se consacrer à la satisfaction des besoins fondamentaux de son peuple.

Ces propos ont été rejetés par le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) qui a demandé au délégué des États-Unis de bien vouloir « méditer » de ce qu’il avait dit dans sa première intervention. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: Lancé en 2002, le plan de rénovation du Siège de l’ONU à New York accuse un dépassement budgétaire de 20%

Soixante-douzième session,
7e séance – matin
AG/AB/4247

Cinquième Commission: Lancé en 2002, le plan de rénovation du Siège de l’ONU à New York accuse un dépassement budgétaire de 20%

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a examiné, ce matin, les rapports sur la rénovation du Siège de l’ONU à New York, « plan-cadre d’équipement », conduisant le Groupe des 77 et la Chine à demander que l’on tire soigneusement les enseignements d’un projet qui a coûté plus de 20% du budget initial et duré quatre ans de plus.

Approuvé par l’Assemblée générale en 2002, pour un budget de 1,8 milliard de dollars couvrant les travaux jusqu’en 2013, le plan-cadre d’équipement, qui se termine enfin cette année, aura finalement coûté la somme de 2,3 milliards.  Ce projet « complexe à forte valeur ajoutée » visait à moderniser les bâtiments du Siège de l’ONU et à en rationaliser l’utilisation sans perturber les activités courantes.  Les bâtiments du Secrétariat, de l’Assemblée générale et des conférences ont été rendus mais en raison de difficultés « insurmontables » à satisfaire aux normes de sécurité, la Bibliothèque Dag Hammarskjöld et l’annexe sud ont été retirés du cahier des charges en 2015.

D’ici à décembre 2017, le coût des travaux restant à accomplir, à savoir la démolition et l’aménagement paysager de la pelouse nord et la sécurisation des entrées situées au niveau des 42e et 48e rues, sont estimés à 37,3 millions de dollars, soit un dépassement de 1,2 million de dollars.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, l’Équateur a jugé « impératif » que l’on tire « systématiquement et de manière approfondie » les leçons du plan-cadre d’équipement pour pouvoir les appliquer à d’autres projets et surtout, éviter des pertes à l’ONU.  L’Équateur a insisté sur la recommandation du Comité des commissaires aux comptes (CCC) visant à quantifier avec précision les économies réalisées après clôture des contrats de construction.

Il s’est d’ailleurs dit préoccupé par le nombre élevé des recommandations du CCC qui n’ont pas été mises en œuvre, alors même que le projet entre dans sa phase finale.  Sur les 12 recommandations du Comité restant à appliquer, 2 ont été appliquées intégralement et 10 partiellement.

Pour l’examen de cette question, la Cinquième Commission était en effet saisie des rapports du CCC, du Secrétaire général et du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB)*.

L’Équateur a mis l’accent sur les dernières recommandations du CCC qui préconise d’abord une enquête auprès des utilisateurs concernant l’efficacité des mesures pour l’accès physique aux bâtiments afin de déceler les éventuelles lacunes.  Le CCC recommande aussi de régler les problèmes liés au système de communication des informations sur l’énergie (EDART) en ce qui concerne les données sur la consommation de vapeur, de gaz et d’eau, afin d’en permettre le suivi en temps réel.  Une analyse de faisabilité devrait être menée pour trouver des possibilités d’amélioration de l’efficacité énergétique.  En 2016 et en 2017, la consommation énergétique aurait diminué de 75%.

Le CCC recommande également la mise en place du module « Entretien des installations » d’Umoja, le progiciel de gestion intégré, pour permettre un examen rapide des pratiques en la matière et un plan d’entretien à long terme couvrant toutes les lacunes. 

La Cinquième Commission tiendra une autre séance publique demain mardi 24 octobre à partir de 10 heures. 

*A/72/5 (Vol. V), A/72/294, A/72/355 et A/72/536

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: comment obtenir la ratification universelle des conventions sur les disparitions forcées ou les droits des migrants

Soixante-douzième session,   
24e & 25e séances – matin & après-midi                     
AG/SHC/4208

Troisième Commission: comment obtenir la ratification universelle des conventions sur les disparitions forcées ou les droits des migrants

La Troisième Commission a poursuivi, aujourd’hui, l’examen de la protection et la promotion des droits de l’homme sous tous ses aspects en se penchant sur les thèmes des disparitions forcées, des migrants, des personnes déplacées internes et de la vie privée.  Les Présidents des organes conventionnels concernés ont insisté sur l’importance d’une ratification universelle des traités concernés, ce qui est loin d’être actuellement le cas, voire de nouveaux instruments.  Certaines des délégations ont exprimé leur opposition.

Ainsi, la Présidente du Comité des disparitions forcées, Mme Suela Janina, et le Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, M. Bernard Duhaime, ont-ils tous deux appelé les États Membres à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée il y aura bientôt 11 ans et qui ne compte encore que 57 États parties.  Tous deux ont rappelé l’objectif fixé par le Haut-Commissaire aux droits de l’homme de doubler ce nombre dans les cinq prochaines années.

Pour preuve de l’urgence de cet appel, M. Duhaime est revenu sur le nombre « inacceptable » de signalements de disparitions forcées transmises l’an dernier à son Groupe de travail: 1 094 cas concernant 36 États, soit deux fois plus que l’année précédente.  M. Duhaime a déploré que les États tentent de justifier les disparitions forcées dans le cadre de la lutte contre le crime et le terrorisme: « Il n’existe aucune justification qui favoriserait les disparitions forcées », s’est-il insurgé, en rappelant que de nombreux États parties étaient en outre en retard dans la remise de leur rapport périodique.

Autre forme, « moins visible » de disparitions forcées, celles en lien avec les migrations.  Certaines personnes migrent parce qu’elles sont menacées de disparition forcée dans leur pays ou disparaissent pendant leur voyage, voire dans leur pays de destination, a expliqué M. Duhaime.

Abondant dans son sens, Mme Cecilia Jimenez-Damary, Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, a ajouté qu’il ne fallait pas oublier ceux qui sont déplacés à l’intérieur de leur propre pays, parmi lesquels figurent souvent les plus vulnérables et marginalisés.  Une situation « extrêmement préoccupante » pour la Rapporteuse spéciale qui a rappelé qu’en 2016, 40,3 millions de personnes étaient ainsi déplacées internes du fait de conflits ou de violences.  Or, beaucoup ne bénéficient pas, dans leur pays d’origine, de la sécurité, de l’assistance et des conditions de subsistance qui leur permettraient de rester.

Autre population vulnérable, les plus de 224 millions de migrants que compte le monde, dont la moitié est des femmes et quelque 30 millions des enfants, et dont on estime que 20% sont en situation irrégulière.  Pour le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, M. Felipe Gonzáles Morales, cette situation des migrants requiert de nouvelles réponses de la part de la communauté internationale.  M. Jose Brillantes, Président du Comité sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a déploré que le potentiel de la Convention, adoptée en 1990, ne soit pas totalement déployé, compte tenu du faible nombre de ratifications –51 à ce jour– lesquelles concernent surtout des pays d’origine.  Des propos appuyés par le Maroc et l’Indonésie, qui ont rappelé que la Convention était, à ce jour, le seul traité à portée universelle concernant la protection des travailleurs migrants et leur famille.

Tout en reconnaissant que les types de violations des droits des migrants variaient selon les États concernés, M. Brillantes a cependant observé des similitudes qui justifient à ses yeux une ratification universelle de la Convention, qui permettrait en outre de mettre en place une migration légale et de lutter ainsi contre l’immigration illégale, source de nombreuses violations des droits de l’homme.

Cette position a suscité de nombreuses réserves.  L’Union européenne, qui n’est pas partie à la Convention, a rappelé son engagement à protéger les droits fondamentaux de tous les migrants mais plaide pour un renforcement de la coopération internationale et une « approche équilibrée » reconnaissant l’existence de pays d’origine, de transit et de destination.  La Fédération de Russie a insisté sur la distinction à faire entre migrants et réfugiés.  Quant aux États-Unis, ils ont rappelé qu’il revient aux États de contrôler et de gérer leurs propres frontières et que tout mécanisme envisagé dans le cadre du projet de pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières ne pourra être accepté que sur une base purement volontaire.  M. Brillantes a, pour sa part, souhaité que les dispositions de la Convention soient reflétées dans le futur pacte mondial, qui devrait être adopté en 2018.

Par ailleurs, la Troisième Commission a dialogué avec le Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, M. Joseph Cannataci, qui a expliqué que les seuls domaines où le droit à la vie privée ne pouvait être absolu étaient la détection, la prévention, l’investigation et les poursuites d’actes criminels ainsi que ce qui touche à la sécurité nationale.  Rappelant la difficulté à concilier les avantages offerts par les nouvelles technologies de l’information avec les risques qu’elles font peser sur le droit fondamental à la vie privée, M. Cannataci a lancé l’idée d’un instrument juridique que l’ONU pourrait adopter pour protéger la vie privée.

La proposition a été aussitôt combattue par les États-Unis, pour qui un nouvel instrument juridiquement contraignant est inutile car les mécanismes internationaux existants suffisent.  Dans le même sens, l’Union européenne a en outre estimé qu’un tel texte n’aurait pas forcément d’impact sur la collecte des données par les sociétés privées.  L’Union européenne et les États-Unis ont partagé une même inquiétude face à l’interférence de gouvernements dans la vie privée des opposants politiques, membres de la société civile ou défenseurs de droits de l’homme.

Lundi 23 octobre, la Troisième Commission poursuivra son examen de la protection et la promotion des droits de l’homme et son dialogue avec plusieurs rapporteurs spéciaux sur des questions relatives à des droits économiques, sociaux et culturels.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME (A/72/40 ET A/C.3/72/9)

Questions relatives aux droits de l’homme, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Situations relatives aux droits de l’homme et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux

Déclarations liminaires, suivies de dialogues interactifs

Mme SUELA JANINA, Présidente du Comité des disparitions forcées, qui présentait son premier rapport en tant que Présidente de cet organe conventionnel, a tout d’abord souligné que le Comité se voulait le « gardien juridique » de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.  À cet égard, elle s’est dite « encouragée » par le résultat de la Conférence des États parties à la Convention, qui s’est tenue le 19 décembre 2016 à Genève et au cours de laquelle les États parties ont tous salué l’efficacité du Comité.  Rappelant qu’à ce jour, 57 États sont parties à la Convention pour 97 signataires, elle a aussi relevé qu’à l’occasion des célébrations du dixième anniversaire de la Convention, le 17 février dernier, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme s’était fixé pour objectif de doubler le nombre des ratifications lors des cinq prochaines années, le but ultime étant sa ratification universelle.

Revenant à ses travaux, Mme Janina a noté que le Comité était préoccupé par le nombre de retards dans la présentation de rapports des États parties.  Elle a constaté que les rapports de plusieurs des États ayant ratifié parmi les premiers la Convention avaient accusé des retards ces cinq dernières années.  C’est pourquoi, un premier rappel a été adressé, le 17 janvier dernier, au Lesotho et au Togo, a-t-elle précisé, faisant état de plusieurs autres rappels: un deuxième au Cambodge et au Maroc; un troisième à la Mauritanie; un quatrième au Costa Rica; et un cinquième à la Bolivie, au Brésil, au Chili, au Mali, au Nigéria, au Panama et à la Zambie.  Face à ce problème récurrent, a-t-elle ajouté, le Comité a décidé en septembre qu’en cas de retard de plus de cinq ans, il pourrait examiner la situation des États parties en l’absence de rapport.

S’agissant des demandes d’action urgente, le Comité en a enregistré 359 entre 2012 et le 17 mars dernier.  Mme Janina a précisé que la plupart émanait du Mexique et de l’Iraq.  Au 10 octobre de cette année, a-t-elle poursuivi, un total de 414 demandes d’actions urgentes avait été enregistré.  La Présidente du Comité a expliqué à ce sujet que son organe limitait son rôle à celui que lui prévoit l’article 30 de la Convention.  Il ne considère donc les poursuites criminelles et la responsabilité des auteurs de disparitions forcées que sur la base de preuves pouvant se révéler pertinentes pour la recherche et la localisation des victimes.  Mme Janina a relevé que les États parties répondaient à la grande majorité des demandes d’action présentées par le Comité.  À défaut, le Comité envoie des rappels.

Au cours de la période considérée, a encore indiqué Mme Janina, le Comité a suspendu trois actions urgentes liées à la disparition de personnes qui ont été localisées en détention et a mis un terme à 24 autres liées à la disparition de personnes retrouvées vivantes et libérées (huit cas) ou retrouvées mortes (deux cas).

Pendant cette même période, le Comité a reçu quatre plaintes individuelles soumises en vertu de l’article 31 de la Convention.  Toutefois, elles se référaient à des faits survenus dans des États non parties et n’ont donc pu être enregistrées, a-t-elle dit, notant que seuls 23 des 57 États parties ont jusqu’alors accepté la compétence du Comité en ce qui concerne les communications individuelles au titre de cet article.  Elle y a vu un « signe de réticence » à reconnaître la compétence du Comité et, en conséquence, a appelé les États parties et ceux qui vont le devenir à accorder au Comité le plein exercice de cet instrument important prévu par la Convention.

Faisant état, comme à chacune des sessions du Comité, des échanges de correspondance commencés en mai 2013 avec le Mexique concernant la possibilité d’une visite du Comité au titre de l’article 33 de la Convention, Mme Janina a dit regretter d’annoncer que cet État avait refusé la requête du Comité.

Enfin, la Présidente du Comité a souligné l’importance des échanges avec toutes les parties prenantes, souhaitant à cet égard que le Comité renforce sa coopération avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, ces deux organes travaillant dans le même sens et pour la même mission.

Lors du débat avec Mme Janina, Présidente du Comité des disparitions forcées, l’Iraq a affirmé qu’il répondait toujours positivement aux demandes du Comité, mais a ajouté que, dans le cas des personnes enlevées par des terroristes, notamment pour les victimes de Daech, le pays avait besoin de l’appui de la communauté internationale.

La France a relayé l’appel du Haut-Commissariat aux droits de l’homme à doubler le nombre de ratifications en cinq ans pour atteindre le nombre de 150 États parties en 2022.  La représentante a demandé à la Présidente quelles étaient les pistes à poursuivre pour renforcer ses activités de contrôle et de suivi.  L’Union européenne a souligné le rôle de relai que pouvaient jouer les organisations régionales et a demandé à la Présidente comment elle envisageait son mandat et quelles étaient ses pistes pour analyser les rapports des États.  L’Union européenne a également demandé quelles étaient les meilleures voies pour réussir à doubler le nombre de ratifications de la Convention.  L’Argentine a salué la ratification de la Convention, l’année dernière, par de nouveaux pays et a demandé à tous les États d’y adhérer.  L’Argentine, la France et le Maroc présenteront deux projets de résolution en ce sens.

Le Japon a lui aussi demandé ce que le Comité pouvait faire pour augmenter le nombre d’États parties à la Convention.  Il a rappelé qu’il avait, pour sa part, soumis son premier rapport au Comité, dont l’examen aura lieu l’année prochaine et a insisté sur la nécessité de coopération entre toutes les agences de l’ONU pour faire face à ce « crime grave » qu’est la disparition forcée.

Le Mexique a rappelé le cadre législatif dont il s’est doté et notamment le protocole sur la recherche des personnes disparues en 2015 ainsi que la nouvelle loi sur les personnes disparues de mars 2017.  Affirmant avoir progressé sur l’enregistrement des données sur les personnes recherchées, le Mexique a toutefois appelé à la création d’un registre international des personnes disparues.  Il a enfin demandé quelles étaient les perceptions les plus communes des États Membres quant à la Convention et comment progresser quant à son universalisation.

La Colombie a rappelé les nombreuses disparitions forcées générées par le conflit armé qu’a connu le pays pendant un demi-siècle et a cité des mesures mises en œuvre par le pays contre ce « crime », notamment l’inscription dans la Constitution de 1981 de l’interdiction des disparitions forcées, la création en 2007 de la Commission de la recherche des personnes disparues et l’adoption d’une loi qui rend hommage aux victimes de disparitions forcées.  La Colombie a fait état d’une réduction de 80% de disparitions forcées sur une décennie.  Elle a aussi rappelé que l’Accord final de paix conclu avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP), en 2016, avait permis de mettre en place une action humanitaire de recherche des personnes disparues.

Dans ses réponses, Mme Janina, Présidente du Comité des disparitions forcées, a déclaré que, malheureusement, les disparitions forcées ne relevaient pas du passé, mais restaient un phénomène connu largement dans le monde.  C’est pourquoi, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées reste l’outil adapté pour répondre à ce défi et rechercher les personnes disparues.  Elle a aussi indiqué que, parmi les cas rapportés au Comité, 10% avaient pu être vérifiés.  Parmi les personnes recherchées, 34% ont été retrouvées vivantes.

La Présidente a également estimé que la Convention était un instrument moderne et nouveau, qui par ailleurs n’oblige pas à des rapports cycliques qui mènent à une routine.  Le Comité souhaite éliminer le phénomène de la disparition forcée, aider les pays à appliquer la Convention et non créer une monotonie dans la présentation des rapports.  C’est pour cela aussi qu’il considère que cette Convention doit être ratifiée universellement pour parvenir à éliminer ce phénomène, a conclu la Présidente.

M. BERNARD DUHAIME, Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, qui présentait aussi son premier rapport en cette qualité, a commencé par s’interroger sur le caractère « acceptable » des disparitions forcées en 2017.  Il a expliqué poser cette question en raison du nombre « inacceptable » de signalements de disparitions forcées adressés, chaque jour, à son Groupe de travail.  Au cours de la période du rapport, celui-ci a ainsi transmis 1 094 nouveaux cas de disparitions forcées à 36 États, a-t-il expliqué, précisant que, sur ce total, 260 avaient été transmis au titre de la procédure d’urgence à 23 États, un nombre selon lui « totalement inadmissible ».

Soulignant que le spectre des raisons ou justifications données aux disparitions forcées était aujourd’hui plus large que lorsque cette pratique honteuse a commencé à attirer l’attention de la communauté internationale, voilà plusieurs décennies, M. Duhaime a noté que ces disparitions étaient le plus souvent utilisées pour réprimer des opposants politiques mais aussi en situation de conflit ou de violence, ainsi que pour combattre le crime organisé et le terrorisme.

S’agissant de ce dernier contexte, le Groupe de travail a constaté ces dernières années une forte hausse des disparitions prétendument de « courte durée », qui consistent en une privation de liberté hors de la protection de la loi pendant une période de temps limitée, assortie d’interrogatoires et souvent de torture.  Si dans de nombreux cas, la victime finit par réapparaître, il se peut aussi qu’elle fasse l’objet d’une exécution extrajudiciaire, a-t-il relevé.  Face à ces pratiques « préoccupantes », M. Duhaime a appelé à l’éradication de toutes les formes de disparitions forcées, ajoutant que, quelle que soit la durée, toutes les informations concernant une personne privée de liberté devaient être communiquées promptement aux membres de sa famille.

Le Président du Groupe de travail a également mis l’accent sur d’autres formes « peut-être moins visibles » de disparitions forcées, en lien notamment avec les migrations.  Il a jugé à cet égard que la communauté internationale dans son ensemble ne prêtait pas suffisamment attention à ce problème, certains États préférant renvoyer la responsabilité à d’autres États.  Or, a-t-il dénoncé, des personnes migrent parce qu’elles sont menacées de disparition forcée dans leur pays ou disparaissent pendant leur voyage, voire dans leur pays de destination.  Cela peut résulter d’un enlèvement pour motif politique, d’un placement en détention ou d’une procédure d’expulsion, ou encore d’un trafic d’êtres humains, a-t-il expliqué.

Lorsque les disparitions de migrants sont perpétrées par des acteurs non étatiques mais avec l’implication directe ou indirecte d’autorités étatiques, ces actes relèvent clairement de la disparition forcée, a poursuivi M. Duhaime, notant que, dans certains autres cas, ces disparitions étaient aussi la conséquence directe, bien qu’involontaire, d’actions d’États consistant à refouler les migrants.  Si ces dernières ne sont pas, au sens strict, des disparitions forcées, elles engagent néanmoins la responsabilité des États au regard de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

M. Duhaime a par ailleurs réaffirmé son inquiétude quant à la question des menaces, intimidations et représailles à l’encontre de victimes de disparitions forcées, y compris les membres de leur famille, les témoins et les défenseurs des droits de l’homme.  Des appels à l’action urgente sont régulièrement adressés au Groupe de travail à ce sujet, a-t-il dit, évoquant le cas de M. Ibrahim Metwally, avocat et père d’une personne disparue, arrêté le mois dernier alors qu’il se rendait à Genève pour rencontrer le Groupe de travail et assister à une session du Conseil des droits de l’homme.  Appelant tous les États à prendre des mesures pour prévenir de tels actes et protéger ceux qui travaillent sur des disparitions forcées, M. Duhaime s’est félicité que M. Andrew Gilmour, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, ait été chargé de mener ces efforts au sein du système des Nations Unies. 

M. Duhaime a enfin souligné l’importance cruciale des visites que peut effectuer son Groupe de travail dans le cadre de son mandat, remerciant l’Albanie et la Gambie pour leur récent accueil et se disant impatient de se rendre, en novembre, au Soudan et, en juin 2018, en Ukraine., Tous les États auxquels une demande de visite a été adressée sont priés de répondre favorablement, a-t-il conclu, saluant également le Chili et l’Espagne pour leur coopération dans le cadre de rapports de suivi.

Lors du débat avec M. Duhaime, Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, les États-Unis ont constaté que le Groupe de travail affirmait avoir reçu 1 094 nouveaux cas de disparitions forcées, concernant 36 États, c’est-à-dire deux fois plus de cas que l’année précédente.  Ils ont aussi noté que l’Observatoire syrien des droits de l’homme faisait état d’un nombre important de cas de disparitions forcées impliquant les forces de sécurité gouvernementales.  Ils ont par ailleurs relevé que le Groupe de travail avait été saisi de cas de disparitions forcées en Chine impliquant le Gouvernement.  Les États-Unis ont demandé au Groupe de travail comment il entendait résoudre la question des disparitions forcées dans ces pays mentionnés et ailleurs.

L’Argentine a demandé s’il était possible au Groupe de travail de coordonner ses travaux avec d’autres mécanismes du Conseil des droits de l’homme pour aborder la question des représailles contre les victimes de disparitions forcées et leurs familles.  Elle a demandé l’avis du Groupe de travail sur les moyens de lutter contre cette pratique.  L’Union européenne a, elle aussi, condamné cette pratique des représailles à l’encontre des victimes de disparitions forcées et a souhaité savoir quelles sont les nouvelles tendances que le Groupe de travail constate en matière de disparitions forcées dans le monde.  L’Union européenne a également demandé à M. Duhaime si le Groupe de travail collaborait avec les groupes régionaux.

Le Japon, pour qui les disparitions forcées constituent une des pires formes de violation des droits de l’homme et se confondent avec la torture, a soulevé la question de l’enlèvement de ressortissants japonais par la République populaire démocratique de Corée, ajoutant que cette question concernait aussi la communauté internationale.  La République de Corée a demandé quel rôle pouvait jouer la société civile dans le cadre de la lutte contre les disparitions forcées et comment renforcer ce rôle.

La France a voulu savoir quelles étaient les mesures que les États pouvaient mettre en place pour faire face au lien que le Groupe de travail établit entre migrations et disparitions forcées.

La Chine a affirmé que sa loi interdisait les disparitions forcées et que, de fait, personne n’en était victime.  Elle a donc appelé le Groupe de travail à respecter la souveraineté des États et à se conformer au Code de conduite des procédures spéciales, notamment en se fondant sur des informations fiables et crédibles.  Par ailleurs, la délégation a rejeté les déclarations « totalement infondées » des États-Unis

Dans ses réponses, M. Duhaime, Président du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a déclaré que les représailles à l’encontre des familles de personnes disparues faisaient partie de ses préoccupations principales et qu’il essayait d’élargir les initiatives du Groupe de travail pour lutter contre ce phénomène.  Il a insisté sur l’importance de condamner ces actions au sein des Nations Unies mais aussi par les États Membres eux-mêmes. 

Aux États-Unis, le Président du Groupe de travail a dit accorder une importance toute particulière à l’impact des disparitions forcées sur les familles et les communautés, notamment en ce qui concerne l’obligation des États.  Souvent, les réparations ne peuvent pas se concentrer sur les individus et il faut mettre en place des mesures telles que la reconnaissance publique des violations dont les familles ont souffert ou encore des mentions dans les manuels scolaires.

En réponse à l’Union européenne, M. Duhaime a déploré que le nombre de disparitions forcées soient en augmentation, notamment en ce qui concerne les actions des États dans le cadre de la lutte contre le crime et le terrorisme.  Expliquant qu’il ne s’agissait pas d’un phénomène nouveau, il a néanmoins constaté qu’aux yeux des autorités, de telles disparitions forcées se justifiaient dans certains contextes.  Or, s’est-il insurgé, « il n’existe aucune justification qui favoriserait les disparitions forcées; même dans des circonstances objectives difficiles, on ne peut pas justifier ce crime ».

M. Duhaime a également estimé que les États pouvaient prendre en considération la nature transnationale du crime de disparition forcée dans le cadre de la migration, a insisté sur la nécessité de la coopération transnationale et a invité les États Membres à coopérer à ce sujet.  Enfin, il a rappelé que les mécanismes du Groupe de travail trouvaient leurs origines dans les luttes de la société civile et dans celle, quotidienne, des familles des personnes disparues.  Rendant hommage à celles-ci, il a déclaré que c’était grâce à elles que « nous étions réunis ici pour dénoncer ces pratiques persistantes et faire des recommandations plus larges pour pousser la communauté internationale à se concentrer en permanence sur ces crimes ».

Mme CECILIA JIMENEZ-DAMARY, Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, s’est déclarée honorée de présenter son premier rapport et a rappelé que 2018 marquera le vingtième anniversaire de l’adoption des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays.  Elle s’est également félicitée que la première Conférence des États parties à la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique -Convention de Kampala- organisée cette année, ait débouché sur un plan d’action pour la mise en œuvre de cette Convention.  

Malgré ces points positifs, la situation mondiale reste « extrêmement préoccupante », a souligné la Rapporteuse spéciale, rappelant qu’à la fin de 2016, on estimait à 40,3 millions le nombre de personnes vivant en déplacement interne du fait de conflits ou de violences.  Un chiffre deux fois plus important qu’en 2000 et qui s’accroît « à hauteur de plusieurs millions chaque année », 6,5 millions de nouveaux déplacés internes pour cause de conflits ou de violences ayant été comptabilisés pour la seule année 2016.  À ce total, s’ajoutent les 24,2 millions de nouveaux déplacés en raison de catastrophes, a poursuivi Mme Jimenez-Damary, expliquant que ces chiffres ne prenaient pas en compte les millions de personnes déplacées dans leur propre pays du fait de risques naturels ou de projets nationaux de développement. 

Alors que l’ONU met l’accent sur le sort des réfugiés et des migrants dans le monde, il ne faut pas oublier ceux qui sont déplacés à l’intérieur de leur pays, parmi lesquels figurent souvent les plus vulnérables et marginalisés, a encore souligné Mme Jimenez-Damary.  La Rapporteuse spéciale a d’ailleurs fait observer que ceux qui finissent par traverser ont souvent entamé leur périlleux voyage en tant que déplacés internes pour fuir des conflits ou des violences.  Beaucoup ne bénéficient pas, dans leur pays d’origine, de la sécurité, de l’assistance et des conditions de subsistance qui leur permettraient de rester, a-t-elle ajouté.  Tout doit être fait par la communauté internationale pour prévenir et réduire ce type de situation, tout en veillant à protéger les droits de l’homme des déplacés internes, a plaidé la Rapporteuse spéciale.

Mme Jimenez-Damary a ensuite évoqué les questions sur lesquelles elle comptait travailler dans le cadre de son mandat, à commencer par l’inclusion des déplacés internes dans les processus judiciaires afin qu’ils aient accès à des voies de recours et de réparations pour les violations des droits de l’homme subies.  Elle a aussi appelé à une meilleure protection des enfants déplacés dans leur pays, indiquant qu’elle souhaitait promouvoir le principe de responsabilité des États dans le cadre d’un projet mené en collaboration avec l’UNICEF en vue d’un rapport en 2019.

La Rapporteuse spéciale s’est, d’autre part, prononcée pour un renforcement du rôle des institutions nationales des droits de l’homme dans la protection des déplacés internes mais aussi de la participation effective de ceux-ci dans les décisions qui les affectent.  Outre le fait qu’elle accroît leurs capacités et les rend plus résilients, une telle participation permet aux déplacés internes d’être mieux compris et intégrés dans des plans de long terme.  Mme Jimenez-Damary recommande donc que les États s’engagent à soutenir ces processus participatifs en collaboration avec la société civile, les Nations Unies et les partenaires humanitaires et de développement.  Ils contribuent, selon elle, à accroître la responsabilisation des États à l’égard des déplacés internes, tout en améliorant la gouvernance, mais doivent être menés à toutes les étapes du déplacement, et si possible avant, par souci d’efficacité.

Évoquant par ailleurs la visite effectuée au titre de son mandat à El Salvador en août 2017, la Rapporteuse spéciale a rappelé que ce pays était confronté à une « tragédie cachée » de déplacements forcés provoqués par des bandes armées, « un problème plus grave et plus large que ce que prétend le Gouvernement ».  Elle s’est réjouie, à ce sujet, que les autorités salvadoriennes aient entrepris une étude sur la situation des déplacés à l’intérieur du pays et les a remerciées pour leur pleine collaboration.  Adressant également des remerciements au Guatemala pour son invitation à une visite en 2019, elle a en revanche indiqué attendre toujours une réponse positive de la part du Bangladesh, de la Colombie, d’Haïti, de la Libye, du Malawi, du Mexique, du Népal, de la République arabe syrienne et du Yémen.    

Lors du débat avec Mme Jimenez-Damary, Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, les États-Unis ont estimé que les priorités thématiques de la Rapporteuse spéciale avaient une grande valeur et lui ont demandé comment elle voyait le rôle des communautés touchées par les déplacements.

L’Union européenne et l’Autriche ont demandé comment utiliser le vingtième anniversaire des principes directeurs relatifs aux déplacements internes, qui sera célébré l’an prochain, pour accentuer les efforts envers les personnes déplacées, notamment au sein des Nations Unies.  La Norvège a demandé quelles devaient être les priorités pour que les personnes déplacées internes ne soient pas laissées sur le bord du chemin.  Le Royaume-Uni a souhaité savoir ce qui pouvait être fait pour encourager les États à intégrer les besoins des personnes déplacées dans leurs politiques nationales.

La Suisse a demandé quels étaient les éléments critiques à changer dans la manière de traiter de la question des déplacés internes et comment la communauté internationale pouvait y contribuer.  La Suisse aimerait également savoir comment s’assurer que les déplacés et les communautés d’accueil ont réellement accès aux mécanismes de participation et quelles sont les bonnes pratiques et les leçons apprises dans ce domaine.

Le Maroc a souligné la nécessité de disposer de données fiables en ce qui concerne les personnes déplacées internes et a demandé à la Rapporteuse spéciale quels moyens elle proposait pour collecter ces données, ainsi que pour prévenir les déplacements internes.

Parmi les pays les plus affectés par les déplacements internes de populations, l’Iraq a rappelé qu’il comptait 3,6 millions de ces personnes à cause du groupe terroriste Daech.  Il a affirmé qu’il n’épargnait aucun effort pour leur apporter une aide adéquate, en dépit de la situation sécuritaire et de la baisse de revenus pétroliers, et a par ailleurs rendu hommage à l’aide que lui ont apportée la communauté internationale et la société civile.

L’Azerbaïdjan a souhaité savoir comment la question des déplacés internes pouvait être intégrée au pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.  La Géorgie a déploré que des centaines de milliers de personnes restent déplacées en Abkhazie et en Ossétie du Sud, à cause de l’occupation russe, malgré les résolutions des Nations Unies réaffirmant la souveraineté de la Géorgie sur ces deux territoires.

L’Afghanistan a demandé à la Rapporteuse spéciale comment elle entendait apporter des solutions aux causes profondes qui sont à l’origine des déplacements et pour apporter une aide à ces personnes.

La République arabe syrienne a réfuté le rapport de la Rapporteuse spéciale, estimant qu’elle aurait dû consacrer quelques pages aux causes des déplacements internes dans le pays, à savoir le terrorisme et les groupes armés soutenus par certains États Membres des Nations Unies connus et présents à cette réunion.  La République arabe syrienne aurait aussi aimé voir la Rapporteuse spéciale s’intéresser aux déplacements internes au Yémen, provoqués par la coalition arabe menée par l’Arabie saoudite.  Ces déplacements représentent aujourd’hui une des pires crises humanitaires au monde, aggravée par les risques de choléra qui menace ces populations à cause de l’embargo décrété par cette coalition.

L’Éthiopie a estimé que les communautés touchées par les déplacements devaient elles-mêmes être intégrées aux processus et programmes qui les concernent, ajoutant qu’il appartient aux États de veiller à cette participation.

Enfin, la République populaire démocratique de Corée est revenue sur la question des enlèvements de certains de ses ressortissants par le Japon dans le passé, accusant ce pays de ne rien faire pour assumer ses responsabilités historiques.  Son représentant a également demandé à la République de Corée de libérer 12 ressortissantes nord-coréennes qui y seraient retenues prisonnières.

Répondant aux délégations, Mme Jimenez-Damary, Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays, a expliqué qu’elle devait organiser des visites dans certains pays pour répondre à certaines questions particulières, notamment celles de la République arabe syrienne.  Elle a insisté sur la nécessité de mettre en exergue l’approche humanitaire et le développement dans la promotion des personnes déplacées internes.

La Rapporteuse spéciale a également insisté sur le fait que, sans statistiques adaptées, il était impossible de fournir un diagnostic pertinent et donc des recommandations valables aux États.  Il est essentiel que les bureaux de statistiques de vos pays s’engagent, car sans eux nous n’arriverons pas à nos objectifs, a-t-elle déclaré, ajoutant que ses services avaient besoin de données en permanence.

Mme Jimenez-Damary a par ailleurs expliqué que certains mécanismes de participation des personnes déplacées au sein de leurs propres pays avaient été mis en place mais que leurs voix n’atteignaient pas les autorités chargées de prendre les décisions qui les concernent.

La Rapporteuse spéciale a aussi insisté sur le fait que la question des déplacés internes devait être abordée au niveau international, tout ne pouvant être traité au niveau des agences des Nations Unies.  Il faut renforcer la collaboration des agences, mais il faut surtout que les pays agissent de concert, notamment ceux qui accueillent des déplacés internes, a-t-elle précisé.  Elle a cité comme un « excellent exemple » de traité régional la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique, dite Convention de Kampala, y voyant un instrument susceptible de faire la différence sur le terrain.

Enfin, Mme Jimenez-Damary a estimé que, pour s’assurer que les personnes déplacées internes n’étaient pas laissées-pour-compte, il fallait s’assurer que leurs voix étaient entendues aussi au niveau national.  Les autorités nationales et locales doivent accorder la priorité aux droits des personnes déplacées et créer des structures adaptées au niveau national, telles que des points focaux, a-t-elle encore ajouté.  La coopération nationale, régionale et internationale est essentielle car la responsabilité en incombe d’abord aux États, a-t-elle conclu.

M. JOSE BRILLANTES, Président du Comité sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a déclaré que la migration restait une réalité aujourd’hui et que les travailleurs migrants et les membres de leurs familles devaient être protégés comme le veut la Convention pertinente.  Pour M. Brillantes, la Convention établit la meilleure stratégie pour protéger et prévenir les abus commis à leur encontre, tout en se penchant sur les défis qu’ils affrontent.  Elle fournit également des lignes directrices pour l’élaboration de législations et de politiques sur les migrations, de même que les principes de coopération internationale basés sur le respect des droits de l’homme et de l’état de droit.

Alors qu’il existe plus de 224 millions de migrants dans le monde, dont la moitié sont des femmes et quelque 30 millions des enfants, on estime qu’environ 20% sont en situation irrégulière, a déclaré le Président du Comité.  Ce dernier estime qu’il faut se mobiliser rapidement et apporter des solutions concrètes.  À cet égard, il espère que le futur pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, qui devrait être adopté en 2018, aidera à résoudre les questions clefs de ces défis afin que tous puissent vivre dans la dignité.  Le Comité souligne aussi que tout engagement envers la migration doit être soutenu par la Convention et doit assurer une protection à tous les travailleurs migrants et aux membres de leur famille, détenteurs de documents ou non.  M. Brillantes a également estimé que si les États ont des préoccupations légitimes en termes de sécurité et de contrôle des frontières, celles-ci ne doivent pas l’emporter sur leurs obligations internationales.

Le Président du Comité a rappelé qu’à ce jour, 51 États étaient désormais parties à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.  La République du Congo, Sao Tomé-et-Principe et le Venezuela y ont adhéré dans les 12 derniers mois.  En outre, la Gambie a signé la Convention le 20 septembre dernier; 16 des signataires de la Convention ne l’ont pas encore ratifiée. 

Concernant le Comité lui-même, il a tenu en avril et septembre derniers ses vingt-cinquième et vingt-sixième sessions, durant lesquelles il a examiné sept rapports et adopté ses conclusions finales sur ceux-ci, de même que cinq listes de questions au titre de la procédure simplifiée de présentation de rapports.  Le Comité a également poursuivi ses efforts de mise en œuvre de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement des organes de traités, notamment en continuant d’harmoniser ses méthodes de travail avec d’autres mécanismes et en promouvant la procédure simplifiée de présentation de rapports.  Il a aussi adopté les lignes directrices d’Addis-Abeba sur l’indépendance et l’impartialité des membres des organes de traités des droits de l’homme et celles de San José contre les intimidations et représailles.

Par ailleurs, le Comité observe qu’alors que le système des droits de l’homme ne cesse de croître, les ressources ne suivent pas ce mouvement.  À cet égard, il demande à l’Assemblée générale de considérer cette réalité et de pourvoir les ressources nécessaires au fonctionnement des organes, a déclaré son Président.

Le Comité a également poursuivi son travail de coopération avec des partenaires du système des Nations Unies, dont ONU-Femmes, l’Organisation internationale du Travail (OIT), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) ou encore le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.  Ses membres ont également participé à des rencontres internationales organisées par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme ou des États Membres, comme en décembre dernier au Forum mondial sur la migration et le développement tenu à Dhaka en Indonésie.  Le Comité a en outre développé sa stratégie médiatique en publiant plusieurs communiqués de presse, liés par exemple aux femmes dans le contexte de la migration ou encore lors de la célébration de la Journée internationale des migrants, le 18 décembre. 

En outre, le Comité a poursuivi ses activités d’élaboration de commentaires généraux, a rappelé M. Brillantes.  À sa vingt et unième session et conjointement avec le Comité des droits de l’enfant, il a élaboré un commentaire général sur les droits de l’enfant dans le contexte de la migration.  Les deux organes ont en outre décidé d’élaborer deux autres commentaires généraux, portant l’un sur les principes généraux et l’autre sur les obligations des États vis-à-vis des droits de l’enfant dans le contexte de la migration.  Ces deux commentaires ont été publiés récemment et seront officiellement lancés à la session d’avril 2018.  

En conclusion, M. Brillantes a déclaré que le potentiel de la Convention n’était pas encore totalement déployé, compte tenu du faible nombre de ratifications.  Cependant, la Convention a déjà permis quelques avancées, a insisté le Président du Comité, qui a souhaité un fois encore que les dispositions de la Convention soient reflétées dans le futur pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

Lors du dialogue avec M. Brillantes, Président du Comité sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, le Mexique a salué les efforts du Comité en faveur d’une sensibilisation aux dispositions du futur pacte mondial sur les migrations.  Soulignant la réalité multidimensionnelle des migrations, il a jugé qu’après la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, adoptée en septembre 2016, le problème ne pourra être traité qu’en s’attaquant à l’ensemble de ces dimensions.  À ce sujet, le Mexique aimerait connaître les violations les plus systématiques auxquelles font face les migrants au niveau mondial et s’il existe des bonnes pratiques en matière d’engagement des États, permettant un travail décent pour les migrants.  

L’Union européenne a rappelé son engagement à protéger les droits fondamentaux de tous les migrants, plaidant pour un renforcement de la coopération internationale et une approche équilibrée reconnaissant l’existence de pays d’origine, de transit et de destination.  Elle a souhaité savoir quelles bonnes pratiques, au niveau du dialogue international, permettraient de minimiser les coûts pour les pays de transit et de destination.  S’agissant de la traite des êtres humains, qui continue de représenter un défi considérable dans le contexte des migrations, l’Union européenne a demandé à connaître les meilleures pratiques en matière de normes internationales concernant les migrants et en particulier les enfants. 

Le Maroc a souligné le fait que la Convention était, à ce jour, le seul traité à portée universelle concernant la protection des travailleurs migrants et leur famille.  Déplorant le faible nombre d’États parties à ce texte pourtant crucial, il a souhaité savoir quelles mesures le Comité préconisait pour relever le défi d’une augmentation du nombre des ratifications dans une conjoncture marquée par la xénophobie et les discriminations à l’encontre des travailleurs migrants dans le monde.

L’Indonésie a précisé être un pays d’origine et noté que la plupart des États parties à la Convention l’étaient également.  Qualifiant d’« essentielles » l’adoption de la Déclaration de New York et la préparation des futures conclusions d’un pacte sur les migrations, elle a appelé la communauté internationale à poursuivre sur cet élan.  En ce qui concerne la Convention, dont elle a regretté, elle aussi, le faible niveau de ratification, elle a demandé au Comité de formuler des recommandations pratiques permettant une mise en œuvre efficace sur le terrain.

Dans ses réponses, M. Brillantes, Président du Comité sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a rappelé au Mexique que les types de violations des droits des migrants étaient assez spécifiques aux États concernés.  Par exemple les problèmes constatés au Qatar sont différents de ceux rencontrés dans la région de la Méditerranée.  On observe cependant des similitudes dans les problèmes rencontrés.  Cela justifie en tout cas que la Convention soit universellement ratifiée, notamment par les pays de destination.  Actuellement les États parties sont essentiellement des États d’origine de la migration, a-t-il rappelé.

Par ailleurs, le Président du Comité s’est dit heureux que l’Union européenne soit intervenue, d’autant qu’elle n’a pas ratifié la Convention.  Il lui a rappelé que l’un des avantages de la ratification serait non seulement de progresser vers l’universalité de la Convention, mais aussi que l’on pourrait alors mettre en place une migration régulière qui découragerait la migration irrégulière et le trafic des migrants.  Elle permettra aussi aux États de développer des politiques plus appropriées et coordonnées.

Répondant à l’Indonésie, le Président a expliqué que le Comité utilisait tous les outils à sa disposition –États, société civile, institutions nationales des droits de l’homme- pour parvenir à une ratification universelle.  Il a dit espérer que ce dialogue aura été utile à cette fin et que le pacte mondial y contribuera aussi. 

M. FELIPE GONZÁLES MORALES, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, qui se présentait pour la première fois devant la Commission, a déclaré qu’il entendait travailler à renforcer les droits de l’homme des migrants et travailler de manière constructive avec les États et les autres partenaires et mécanismes des Nations Unies.  Comme les membres de la Troisième Commission le savent déjà, la situation des migrants partout dans le monde requiert de nouvelles réponses de la part de la communauté internationale, a-t-il ensuite rappelé.  À cet égard, il a indiqué s’être impliqué dès le début de son mandat dans diverses initiatives internationales, dont le projet de pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, mais aussi dans des consultations régionales en Amérique latine et dans les Caraïbes, tenues en août dernier à Santiago du Chili.  Il a également expliqué qu’il avait participé à des réunions informelles sur la migration irrégulière, la semaine dernière à Genève.

Revenant à son mandat, le Rapporteur spécial a expliqué qu’il entendait se pencher sur les questions portant sur le retour, la réintégration et l’accès à la justice pour tous les migrants.  Il a dit avoir constaté des problèmes majeurs dans ces domaines, ajoutant que les migrants n’étaient pas protégés comme le sont les réfugiés au titre de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés.  Ils sont également victimes de travail forcé, d’exploitation sexuelle, de torture et de retour forcé, sans respect des procédures en vigueur dans ce domaine.

À cet égard, le Rapporteur spécial s’est déclaré préoccupé par l’augmentation des accords de réadmission.  Il a aussi annoncé qu’il se pencherait sur la vulnérabilité des femmes, des enfants et des mineurs non accompagnés, ajoutant que leur situation particulière exigeait des procédures et des mesures de sauvegarde spécifiques.  Son premier rapport thématique traitera de la question du retour et de la réintégration et sera présenté au Conseil des droits de l’homme à sa session de juin 2018.  Pour élargir sa compréhension de ce problème, le Rapporteur spécial a demandé à se rendre au Mali, au Népal et au Niger et compte visiter ces pays au cours de l’année prochaine.  Il présentera aussi un rapport sur l’accès à la justice pour tous les migrants à l’Assemblée générale en 2018.

Lors du dialogue avec M. Gonzáles Morales, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, l’Érythrée a déploré qu’alors que les migrations font partie de l’histoire humaine et qu’on ne peut les empêcher, on traite de la question des migrants comme d’une crise.  En tant que pays ayant une forte diaspora, l’Érythrée est préoccupée par le sort fait aux migrants dans certains pays, notamment dans un pays de l’Union européenne qui a empêché la tenue d’une réunion de jeunes érythréens.  L’Érythrée a demandé au Rapporteur spécial comment s’assurer que le droit des migrants à maintenir un lien avec le pays d’origine soit préservé et encouragé.

Le Mexique a déclaré qu’alors que les migrants comptent pour 3,3% de la population mondiale, ils produisent 9% de sa richesse, tout en étant dépeints de manière négative dans certains discours politiques.  Comment, dès lors, combler ce fossé entre l’image réelle et l’image véhiculée?  Et comment assurer et garantir le suivi des engagements pris dans le futur pacte mondial?  Le Brésil s’est, lui aussi, demandé comment effacer cette image erronée des migrants alors qu’ils représentent un apport positif, avant de demander au Rapporteur spécial quelles seraient ses futures priorités de travail.

Le Qatar a assuré qu’il apportait un soutien aux migrants, citant en exemple les mesures législatives adoptées pour réglementer les relations entre employeurs et travailleurs domestiques.  Le Qatar a en outre adopté la Convention no 189 de l’Organisation internationale du Travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques.

Après avoir observé que l’expérience du Rapporteur spécial s’est essentiellement forgée dans la région d’Amérique latine, la Suisse lui a aussi demandé s’il pensait pouvoir étendre cette expérience à d’autres régions et si les leçons apprises dans cette région pouvaient servir dans le cadre du pacte mondial.  La Suisse a par ailleurs demandé à M. Gonzáles Morales s’il entendait poursuivre la proposition de son prédécesseur d’un « programme pour faciliter la mobilité humaine à l’horizon 2035 » et s’il pensait que l’initiative était susceptible d’appuyer le projet de pacte mondial.  L’Union européenne et le Maroc ont eux aussi souhaité savoir quels avantages pourrait apporter ce programme.

Pour sa part, la Fédération de Russie a estimé que la proposition d’un programme supplémentaire fera doublon avec d’autres mécanismes internationaux.  La Fédération de Russie estime en outre qu’il faut faire une différence entre migrants et réfugiés et ne partage donc pas le point de vue du Rapporteur spécial, qui affirme que nul ne doit être refoulé.  Pour la Fédération de Russie, il faut à la fois lutter contre la criminalité des migrants et refuser qu’ils soient instrumentalisés par des groupes terroristes ou des États.

Le Canada a demandé quels étaient les principaux défis à relever et comment le faire dans le contexte du pacte mondial, compte tenu des divergences entre États sur cette question.  L’Éthiopie a souligné l’importance d’intégrer les apports du Rapporteur spécial dans le cadre du processus de négociation du pacte mondial. 

Les États-Unis ont dit être préoccupés par les généralisations du rapport.  Ils estiment qu’il revient aux États de contrôler et de gérer leurs propres frontières.  Ils estiment en outre que tout mécanisme envisagé dans le cadre du pacte mondial devra se faire sur une base purement volontaire.  Par ailleurs, les États-Unis souhaitent avoir des données sur la population « protéiforme » des migrants.

L’Afrique du Sud a souhaité savoir quel rôle jouent les inégalités et la pauvreté dans le phénomène migratoire. 

Le Chili a voulu savoir quelles mesures peuvent prendre les États pour faciliter l’accès à la justice par les migrants.

Dans ses réponses, M. González Morales, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, a souhaité mettre en exergue la question de la régularisation des migrants.  Quand ils sont en situation irrégulière et que leur vie est menacée, il leur est difficile de garder contact avec leur pays d’origine, a-t-il souligné.  Mais une fois régularisés, ils ont la capacité de s’organiser et de reprendre contact.  Sur le continent américain, les situations sont ainsi très disparates: dans certains pays de destination, il existe de grandes facilités au sein de la société civile pour aider les migrants à conserver un lien alors que, dans d’autres, ce n’est pas le cas.  Il a aussi jugé que le droit aux services consulaires, également évoqué par la délégation érythréenne, était fondamental pour accéder à la justice.  Il a toutefois estimé qu’il pourrait être renforcé.

Au Mexique, M. González Morales a répondu que la xénophobie dissimulait souvent le rôle des autorités de l’État et les perceptions sociales au sein de la culture des différents pays.  Les États doivent donc prévenir et lutter contre ces pratiques discriminatoires.  À cet égard, a-t-il dit, le futur pacte mondial doit être un document pratique, avec des indicateurs lui permettant d’être véritablement efficace.  Il a ajouté qu’il faudrait en garantir le suivi. 

M. González Morales a aussi indiqué qu’il comptait rédiger un rapport sur la réintégration et sur l’accès à la justice.  Il s’emploie à cet égard à prendre en considération les recommandations de son prédécesseur pour l’élaboration du pacte mondial.  Le Rapporteur spécial a aussi souhaité que toute personne connaisse clairement son statut légal.  À cet égard, bien que son mandat ne fasse pas mention des réfugiés, il a dit vouloir se pencher sur la question de la détermination du statut de migrant ou de réfugié.

Le Rapporteur spécial a par ailleurs déclaré partager la remarque du Qatar sur les contributions apportées par les migrants.

M. González Morales a rappelé que le projet de pacte mondial est un processus doté d’une date de conclusion, à savoir l’automne 2018.  Sans préjuger d’un mécanisme de suivi, il est important de maintenir une approche à moyen et à long termes, a-t-il fait valoir, notant à cet égard que le projet de « programme pour faciliter la mobilité humaine à l’horizon 2035 », lancé par son prédécesseur, permettrait d’intégrer de nouveaux éléments abordés par la communauté internationale.  Quant aux facteurs qui poussent les personnes à migrer, il a mentionné les accords bilatéraux qui, selon lui, ne doivent pas être contraires aux accords internationaux. 

M. González Morales a relevé que la question de l’exploitation des travailleurs migrants dans de nombreux pays était liée à celle des migrations régulières et irrégulières, ces dernières générant davantage de victimes d’exploitation.  C’est pourquoi, a-t-il dit, il faut établir des canaux permettant une migration régulière.

Le Rapporteur spécial a d’autre part mentionné les doublons éventuels dans les mécanismes, jugeant qu’il fallait essayer de les éviter.  À ses yeux, a-t-il indiqué aux délégations américaine et russe, les différentes initiatives doivent être complémentaires et ne pas se chevaucher.  Parfois, différents mécanismes travaillent sur les mêmes questions mais sur des prismes distincts, a-t-il encore souligné.  Quant aux statistiques relatives aux populations de migrants, il a fait état de « l’invisibilité réelle » des migrants.  Selon lui, la régularisation des migrants contribuerait à les faire sortir de l’ombre.  « Nous serions alors en mesure de les prendre en considération dans les statistiques et de leur donner accès aux services sociaux », a-t-il commenté.  

Abordant la lutte contre la stigmatisation des migrants, M. González Morales a répété que les États avaient un rôle important à jouer pour contrer les comportements hostiles mais devaient eux-mêmes s’abstenir de stigmatiser et d’avoir une approche positive pour valoriser les contributions des migrants.  À propos des inégalités et de la pauvreté, qui concernent les migrants au premier chef, il a réaffirmé que la communauté internationale, avec l’aide des mécanismes internationaux, se devait de protéger les droits de l’homme des migrants. 

Concernant l’accès des migrants à la justice, le Rapporteur spécial a souligné le rôle clef des fonctionnaires de l’administration auxquels les migrants ont accès.  C’est d’autant plus important que, si certains problèmes administratifs peuvent facilement être réglés par les ressortissants nationaux, ce n’est pas le cas pour les migrants.  M. González Morales a fait observer que, pour ces derniers, le problème se posait notamment quand il s’agit d’obtenir un nouveau statut, d’être régularisé ou de bénéficier d’une représentation légale.  Sur ce dernier point, la probabilité pour un migrant d’obtenir un statut de réfugié est multipliée par trois dans certains pays s’il bénéficie des services d’un avocat, a-t-il observé. 

M. González Morales a aussi confirmé que la coopération internationale était essentielle pour traiter la question des migrants, « question internationale par nature ».  Les mécanismes des Nations Unies ont ici un rôle à jouer, a-t-il ajouté, notant que le futur pacte mondial devrait permettre un nouveau programme international en vue de donner forme au « programme 2035 ».  Le Rapporteur spécial a indiqué qu’il aborderait plus en profondeur le pacte mondial dans ses débats thématiques.  

Enfin, le Rapporteur spécial a constaté que le nombre des États de transit pays avait évolué de manière significative ces dernières années.  Certains États qui n’étaient ni des États d’origine ni des États de destination sont devenus des États de transit, avec les responsabilités et les obligations que cela implique, a-t-il conclu.  

M. JOSEPH CANNATACI, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, a expliqué que les seuls domaines où le droit à la vie privée ne pouvait être absolu étaient la détection, la prévention, l’investigation et les poursuites d’actes criminels ainsi que ce qui touche à la sécurité nationale.  Il a également précisé que la surveillance avait été la question centrale qui a abouti à la création de son mandat en 2015.

De fait, le Rapporteur a dit avoir identifié, dans les lacunes laissées par le droit international à l’égard de la surveillance et de la cybercriminalité, de sérieux obstacles à la protection de la vie privée.  De fait, M. Cannataci envisage de recommander au Conseil des droits de l’homme l’adoption d’un instrument juridique au sein de l’ONU.  D’un côté, cet instrument fournirait aux États Membres un ensemble de principes et dispositions types qui pourraient être intégrés dans les législations nationales pour incarner et mettre en œuvre les principes supérieurs des droits de l’homme, et notamment le droit à la vie privée face à la surveillance, de l’autre côté, il offrirait un certain nombre d’options à prendre en compte pour aider à combler les lacunes du droit international en matière de vie privée et de surveillance dans le cyberespace.

M. Cannataci s’est défendu de sous-estimer les défis d’une telle initiative.  Si le besoin d’un tel instrument juridique est clair, sa portée, son contenu et sa forme ne le sont pas, a-t-il reconnu.  Pour lui, un tel instrument juridique, s’il était adopté, constituerait le progrès le plus important que les Nations Unies pourraient faire pour aider les États Membres et faire avancer la protection du droit de l’homme le plus fondamental.

Le Rapporteur spécial a ensuite présenté ses activités des derniers 12 mois et a expliqué que la présentation de son premier rapport thématique avait pris du retard (de fait, avant son intervention, le Secrétariat a expliqué à la Troisième Commission qu’il n’était pas encore disponible dans toutes les langues officielles, du fait d’une réception tardive). 

Un des principaux défis des sociétés de l’information modernes est de réconcilier les avantages offerts par les nouvelles technologies de l’information et les risques que cela fait peser sur les droits fondamentaux tel que celui à la vie privée, a-t-il expliqué.  C’est pourquoi son rapport reconnaît l’information comme un avantage économique pour les sociétés, de la même manière que le travail ou le capital.  Le Rapporteur spécial a également précisé que les informations personnelles étaient une composante majeure des économies de l’information, et que leur lien avec le droit à la vie privée invoquait de facto le cadre en lien avec ce droit fondamental.

S’attardant sur le big data, M. Cannataci a rappelé qu’un grand nombre de données étaient collectées auprès d’usagers ordinaires sans leur consentement, qu’elles étaient ensuite vendues et connectées à des données provenant d’autres sources, et ce, afin de produire des bases de données complexes sur la vie des individus.

Autre point abordé par le Rapporteur spécial, l’open data, qui a gagné en popularité ces dernières années, aspire à ce que les secteurs public et privé communiquent leurs données pour encourager la transparence et l’ouverture, particulièrement celles des gouvernements.  Or, l’open data a évolué à tel point qu’en 2017, il inclut la communication des données personnelles.  Il existe une documentation de plus en plus abondante sur les problèmes que le big data et l’open data peuvent causer en termes d’intrusion injustifiée dans la sphère privée et la dégradation de la protection de la vie privée, a expliqué M. Cannataci.

Enfin, le Rapporteur spécial a insisté sur le fait que les pratiques en évolution des secteurs privé et public ne rendent que plus pertinentes les dispositions réglementaires actuelles.  Il a expliqué que son rapport soulignait l’importance d’un contrôle accru des individus sur leurs informations personnelles, de façon à renforcer le niveau de confiance des communautés vis-à-vis des initiatives des gouvernements en matière de données et de s’assurer de la qualité des informations personnelles transmises. 

Lors du dialogue avec M. Cannataci, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, les États-Unis ont dit prendre très au sérieux la question de la surveillance de la vie privée.  C’est pourquoi, ils ont revu leur cadre de collecte de données et de surveillance.  Les États-Unis espèrent que ces avancées seront prises en compte dans les prochains rapports.  Mais ils estiment qu’il n’est pas nécessaire d’envisager un instrument juridiquement contraignant sur la surveillance et la vie privée, car les mécanismes internationaux existants suffisent amplement.  En revanche, ils sont préoccupés par les gouvernements qui restreignent et s’en prennent à la vie privée des individus en raison de leurs opinions politiques, de leur religion ou de leur orientation sexuelle.

L’Union européenne, elle non plus, n’est pas convaincue par la proposition du Rapporteur spécial d’élaborer un instrument juridiquement contraignant sur le droit à la vie privé, jugeant en outre qu’il n’aurait pas forcément d’impact sur la collecte des données par les sociétés privées.  Mais la délégation est, comme d’autres, préoccupée par l’interférence de gouvernements dans la vie privée des opposants politiques, de membres de la société civile ou de défenseurs de droits de l’homme.  Même inquiétude de la part de l’Allemagne, et même position face à l’idée d’un instrument juridiquement contraignant: s’il faut protéger les individus de l’intrusion dans leur vie privée, il faut mettre en œuvre les cadres des droits de l’homme existants. 

La Suisse a déclaré que la pratique mondiale tendant à restreindre fortement la vie privée sous prétexte d’accroître la sécurité est inadaptée en plus d’être très souvent contraire aux constitutions des États.  Elle pense comme le Rapporteur spécial qu’au lieu de chercher à tout savoir sur chaque citoyen pour constituer des bases de données, la véritable solution reste la surveillance ciblée et le traitement contrôlé des données par les services compétents, dans le respect de l’état de droit.  Le Liechtenstein a demandé au Rapporteur spécial de fournir plus d’informations sur les moyens de mieux protéger la vie privée.

L’Afrique du Sud a souhaité savoir comment le droit à la vie privée peut être protégé dans le cadre des nouvelles technologies, alors que la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et le Pacte international sur les droits civils et politiques de 1966 ne pouvaient pas les prévoir.  L’Afrique du Sud ne partage pas, par ailleurs, certains points de vue exprimés ce jour et estime aussi que le droit à la vie privée doit être protégé en ligne et hors ligne.  Dans ce contexte, l’Afrique du Sud est d’avis que les lacunes constatées dans le droit international en matière de droit à la vie privée, de surveillance ou de collecte de données personnelles doivent être complétées par des normes complémentaires.  Le Brésil a demandé au Rapporteur spécial d’élaborer davantage sur les lacunes éventuelles dans le droit international que pourrait combler l’instrument juridiquement contraignant qu’il envisage.

L’Iraq a voulu savoir comment combattre les technologies utilisées par les groupes terroristes, notamment sur Internet.

Dans ses réponses, M. Cannataci, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, a assuré que sa suggestion d’un nouvel instrument juridique n’était encore qu’une orientation.  Si le champ d’application est clair, le véhicule ne l’est pas encore, a-t-il expliqué, espérant pouvoir être plus précis à ce sujet d’ici à mars 2018.  Des consultations publiques sont en cours avec tous les pays, lesquels sont invités à participer, a-t-il dit.  

Le Rapporteur spécial a confirmé que des lois prévoient bien la protection de la vie privée au niveau international.  Mais, a-t-il noté, plaquer sur Internet des protections qui existent dans la vie physique n’est pas toujours possible.  À ses yeux, les développements technologiques ont donné lieu à des situations où les parties prenantes ont besoin de directives plus détaillées que celles qui existent actuellement.  En outre, de nombreux problèmes ne sont, aujourd’hui, pas pris en considération par les législations et les réglementations, comme ceux liés aux compétences, à l’utilisation des données et à l’échelle même de cette problématique, a fait observer M. Cannataci.

M. Cannataci a ainsi expliqué que, parmi les modifications intervenues depuis 1948, figure la capacité technologique à suivre chacun d’entre nous, notamment via nos téléphones portables.  Il a également constaté que l’Internet avait largement été utilisé à des fins xénophobes.  Par ailleurs, a-t-il confié, à chaque fois que nous faisons des recherches et que nous parlons à des citoyens, nous observons que nombre d’entre eux sont préoccupés par le respect de la vie privée mais aussi par les risques de diffamation.  Or, a-t-il poursuivi, il est très coûteux de défendre son droit à la réputation et à la vie privée.  De fait, « ce droit devient un droit d’homme ou de femme riche ».

Pour le Rapporteur spécial, de nombreux exemples montrent que le droit à la vie privée est parallèle au droit à la liberté d’expression.  Ainsi, dans certains pays, la loi est utilisée comme un prétexte pour poursuivre les journalistes et empêcher leur liberté d’expression.  Nous avons besoin de davantage de réglementations détaillées, surtout quand il y a des conflits de compétences, a insisté M. Cannataci, observant que le système juridique actuel n’offrait pas de solution pour les personnes qui se retrouvent victimes de violation du droit à la vie privée sur Internet.

Répondant à l’Union européenne, M. Cannataci a observé que la Convention no 108 du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel faisait apparaître un besoin des États membres.  Ces derniers veulent des détails sur les dispositions nécessaires pour protéger la vie privée, a-t-il noté, ajoutant que le projet d’instrument juridique vise en priorité les systèmes de surveillance mis en place par les gouvernements et non pas les entreprises privées.

Au Liechtenstein, le Rapporteur spécial a rappelé que le premier Forum international de contrôle des services de renseignement, qui s’est tenu à Bucarest, en Roumanie, les 11 et 12 octobre 2016, avait été très utile en termes d’échanges d’expériences.  Il a indiqué que la prochaine édition se tiendrait à Bruxelles, en Belgique, les 20 et 21 novembre prochains.  L’un des principaux éléments constatés à cette occasion est la grande disparité entre les différents régimes de contrôle dans le monde, a-t-il dit. 

Abordant la question des données de santé, M. Cannataci a dit avoir soulevé cette question lors de sa visite aux États-Unis et a émis l’espoir que les travaux de l’équipe spéciale sur ce thème se poursuivent.  Il a cependant assuré qu’il y aurait un suivi dans le cadre du comité de contrôle et qu’un rapport était susceptible d’être mis en ligne après Pâques de l’an prochain.

À l’Iraq, qui dénonçait l’utilisation d’Internet par des groupes criminels, le Rapporteur spécial a rappelé que les usagers de la toile pouvaient être des criminels et des terroristes comme des citoyens ordinaires.  Les outils utilisés à des fins de surveillance le sont pour tous, a-t-il souligné.  Dans certains pays, un même téléphone portable peut être piraté par trois différentes agences avec le même logiciel, a-t-il encore relevé, appelant à la plus grande prudence vis-à-vis de ces évolutions technologiques et juridiques.  Il faut s’assurer que toutes les sauvegardes nécessaires sont garanties par la loi, a insisté M. Cannataci.

Enfin, en réponse à la Suisse, qui soulevait la question des preuves, le Rapporteur spécial a rappelé que des surveillances ciblées étaient réalisées en cas de preuves concrètes faisant apparaître qu’une personne constitue un danger pour la société.  Il a ajouté que son mandat examinait le développement d’un instrument juridique en gardant ce fait à l’esprit.  Il a par ailleurs fait état d’un besoin, dans le cadre du droit international, de mesures rapides pour garantir des voies de recours et un dédommagement aux victimes.  Soulignant que les procureurs, les forces de police et les services de renseignement utilisent des moyens d’entraide mutuelle, il a constaté qu’il fallait 13 mois en moyenne pour que ces informations soient communiquées d’une juridiction à une autre.  Une solution, a-t-il dit en conclusion, serait de créer un mandat d’accès international à ces données. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

​​​​​​​NEPAD: L’investissement dans le capital humain, la mobilisation des ressources et la prévention des conflits, gages du succès de l’Afrique

Soixante-douzième session,
33e séance plénière – matin
AG/11964

​​​​​​​NEPAD: L’investissement dans le capital humain, la mobilisation des ressources et la prévention des conflits, gages du succès de l’Afrique

Aucun appui au développement ne mènera au changement sans des efforts contre les causes sous-jacentes des conflits comme aucune violence ne sera évitée sans la matérialisation des promesses du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  C’est ce qu’a affirmé, aujourd’hui, le Président de l’Assemblée générale, M. Miroslav Lajčák, en ouvrant le débat sur le NEPAD et la Décennie pour l’élimination du paludisme.

« Un accord commercial ne veut rien dire pour une mère dont un enfant est menacé de mort par le paludisme.  L’investissement étranger direct (IED) n’est pas vraiment le souci de quelqu’un qui ploie sous une pluie de balles », a poursuivi le Président de l’Assemblée, ajoutant une dimension humaine au débat.

Le NEPAD, a dit M. Lajčák, qui a été « comme une sorte de précurseur » du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, a donné une « vision claire » à l’Afrique, une vision où toutes les couches de la société jouissent de la croissance et du développement, où le paludisme et les autres maladies ne condamnent pas à la peine de mort des centaines de milliers de personnes chaque année, où les signes précoces d’un conflit mènent à la médiation plutôt qu’à la violence, où les institutions sont fortes, où les femmes et les jeunes participent et dirigent la vie publique et où la bonne gouvernance est la norme. 

Dans son rapport, le Secrétaire général indique que le NEPAD constitue un « cadre voulu par les pays africains et piloté par eux en vue de la relance socioéconomique du continent ».  Cette notion d’appropriation a été maintes fois soulignée au cours du débat.  L’appropriation africaine du processus de développement « n’est pas un simple concept », comme l’ont montré les progrès remarquables enregistrés par les pays africains dans la mise en œuvre des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a commenté l’Égypte, au nom des États d’Afrique.  La Turquie a dit fonder sa coopération sur le principe de « solutions africaines aux problèmes africains ».

Problèmes africains?  Le Directeur général de l’Agence du NEPAD, M. Ibrahim Assane Mayaki, en a relevé trois: l’emploi des jeunes dans un continent où l’âge moyen est de 20 ans et où 440 millions de jeunes devraient entrer sur le marché du travail d’ici à 2030; le commerce et la nécessité d’améliorer les procédures douanières, d’alléger les restrictions à l’octroi de visas et d’aboutir enfin au « passeport africain », sans oublier celle de faire mieux s’agissant de la forme, la qualité et la diversité des biens et services à l’exportation; et, enfin, les inégalités dans la répartition des richesses et l’accès à la terre.

Ce qu’il faut, c’est donner « un sens concret » à la mobilisation des ressources domestiques, a prescrit l’Algérie, alors que dans son rapport, le Secrétaire général met en garde contre le « spectre d’un nouveau piège de la dette en Afrique ».  La Fédération de Russie a rappelé avoir annulé 20 milliards de dollars de la dette des pays pauvres très endettés.

Le Président de l’Assemblée, à l’instar d’autres intervenants, a mis l’accent sur l’aide publique au développement (APD), dont l’« augmentation modeste » est à attribuer, selon le Mozambique, aux coûts de l’assistance humanitaire et de l’accueil des réfugiés dans les pays donateurs.  D’autres pays ont attiré l’attention sur les pertes dues aux flux financiers illicites.  La Libye, qui a dénoncé les paradis fiscaux, a appelé à un mécanisme mondial contre ces flux « car, malheureusement, seulement 3% des avoirs clandestinement expatriés ont été restitués ».

L’accent a également été mis sur diverses formes de partenariats, en particulier la coopération Sud-Sud.  L’Inde s’est enorgueillie que les échanges avec l’Afrique soient montés à près de 72 milliards de dollars l’année dernière, faisant d’elle le quatrième plus grand partenaire commercial de l’Afrique.  Devenue la partenaire commerciale numéro 1 de l’Afrique, et numéro 3, pour ce qui est des investissements, la Thaïlande a parlé de son désir d’exporter la « Philosophie nationale de l’économie de l’autosuffisance (SEP) ».  La Turquie s’est vantée d’un réseau réunissant 39 ambassades, les agences de développement, la compagnie Turkish Airlines et l’association des entrepreneurs turcs qui met en lumière le potentiel économique de l’Afrique. 

L’Asie et l’Afrique sont les continents des opportunités et des défis, a souligné le Myanmar.  L’Afrique est toujours la deuxième région à la croissance économique la plus rapide au monde, obligeant les sceptiques à la reconnaître comme « le continent de l’espoir et l’étoile montante », s’est réjouie l’Éthiopie.  « L’Afrique doit être respectée et vue comme un partenaire et non comme une source de problèmes ou une menace pour le confort des autres », a ajouté l’Algérie.  « Nous attendons de vous coopération, respect mutuel, véritable partenariat et solidarité », a-t-elle conclu.

L’Assemblée générale reprendra ses travaux le jeudi 26 octobre à 10 heures pour examiner le rapport de la Cour internationale de Justice.

NOUVEAU PARTENARIAT POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE ET DÉCENNIE POUR FAIRE RECULER LE PALUDISME

Pour l’examen de cette question, l’Assemblée générale était saisie du Rapport de synthèse du Secrétaire général sur les progrès de la mise en œuvre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et sur l’appui international (A/72/223) et d’un autre Rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique (A/72/269-S/2017/780).

Déclarations

M. MIROSLAV LAJČÁK (Slovaquie), Président de l’Assemblée générale, a d’abord souligné l’importance du NEPAD comme une sorte de précurseur qui, avec plus de 10 ans d’avance, a précédé le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  Beaucoup de priorités du NEPAD figurent dans ces nouveaux cadres de travail dont le développement des infrastructures, le développement humain, la sécurité alimentaire, l’éducation et la formation et la santé.

Depuis son adoption en 2001, le NEPAD a mené à un changement transformateur, a affirmé M. Lajčák, voulant pour exemple le fait que le Programme détaillé pour le développement de l’agriculture africaine a amélioré la productivité agricole du continent et changé la vie de beaucoup de fermiers africains.  Le NEPAD a permis de grands pas dans l’intégration du commerce africain et la finalisation, cet été, de l’Accord tripartite de libre-échange a marqué un jalon car il harmonisera les trois blocs sous-régionaux qui avaient jusqu’ici leurs propres règles et modèles commerciaux.  La Zone de libre-échange continentale n’est plus un rêve », s’est réjoui le Président de l’Assemblée.

Mettant un bémol, M. Lajčák a rappelé qu’il y a bien des obstacles à surmonter et qu’il faudrait des progrès plus rapides pas seulement dans les deux secteurs de l’agriculture et du commerce, mais dans une large gamme de secteurs déterminants, y compris les infrastructures, l’industrie, la diversification économique et l’élimination de la pauvreté.  Le NEPAD, le Programme 2030 et l’Agenda 2063 ont des plans très clairs sur les moyens d’y parvenir et il est crucial que ces deux cadres soient harmonisés et intégrés, notamment en termes de rapport, de suivi et d’examen.

Le Président de l’Assemblée a aussi répété un message qu’il a fréquemment entendu: le développement de l’Afrique ne deviendra une réalité que s’il est mené de l’intérieur même du continent, comme le confirme d’ailleurs l’Agenda 2063.  Le rôle de l’Union africaine, des communautés économiques régionales et des organisations a été indispensable car elles ont agi comme des « moteurs » des progrès dans le développement durable et le renforcement des capacités africaines dans les domaines de la paix et la sécurité.  Au niveau local, les pays africains ont aussi renforcé leurs capacités de mobilisation des ressources domestiques et se sont attaqués aux flux illicites de capitaux.

Mais, a reconnu le Président, dans un monde où aucun pays, aucune région ne peut agir seul, les efforts déployés par l’Afrique doivent être appuyés par un partenariat revitalisé au développement.  L’aide publique au développement (APD) et les autres formes d’engagement, a insisté le Président, sont essentielles pour augmenter les financements, accélérer le transfert de technologie et assurer l’accès aux marchés.  Les investissements doivent aussi être encouragés aux niveaux national, régional et international.

Enfin, le Président a souligné que le développement de l’Afrique n’est pas une entreprise isolée.  Aucun appui au développement ne mènera au changement sans des efforts pour traiter des causes sous-jacentes des conflits comme aucune violence ne sera évitée si l’on ne traduit pas en actes concrets les promesses du NEPAD.  Un accord commercial ne veut rien dire pour une mère dont un enfant est menacé par le paludisme.  L’investissement étranger direct (IED) n’est pas vraiment le souci de quelqu’un qui ploie sous une pluie de balles.

L’Afrique a une vision claire, a conclu le Président, une vision où toutes les couches de la société jouissent de la croissance et du développement, où le paludisme et les autres maladies ne condamnent pas à la peine de mort des centaines de milliers de personnes chaque année, où les signes précoces d’un conflit mènent à la médiation plutôt qu’à la violence et où les institutions sont fortes, les femmes et les jeunes participent et dirigent la vie publique et où la bonne gouvernance est la norme.  Cette vision, a estimé le Président, s’approche de la réalité et ce débat conjoint nous permet d’effectuer un autre pas dans la bonne direction.

Au nom du Groupe des Amis du développement industriel inclusif et durable, M. PHILIPP CHARWATH (Autriche) a d’abord rappelé que son groupe est directement lié à l’objectif 9 du Programme 2030, avant de souligner que parvenir à une transformation structurelle par des efforts accélérés et coordonnés d’industrialisation doit être une des priorités de l’Afrique en matière de développement.  Il s’est donc félicité des efforts de l’Agence du NEPAD qui, avec le Conseil sud-africain de la recherche scientifique et industrielle, travaille à l’élaboration d’une feuille de route des objectifs d’industrialisation à court, moyen et long termes, conformément au Plan d’action pour le développement industriel accéléré de l’Afrique.  Le représentant s’est aussi félicité des initiatives du G20 pour appuyer les efforts d’industrialisation des pays africains par des investissements dans la promotion et le renforcement des capacités dans les domaines de la science, des technologies et de l’innovation, conformément à l’Agenda 2063. 

La communauté internationale, dont le système de l’ONU, a poursuivi le représentant, doit jouer un rôle essentiel pour soutenir les pays dans leur processus d’industrialisation.  La proclamation par l’Assemblée générale de la Troisième Décennie 2016-2025 pour le développement industriel de l’Afrique demande expressément à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) de jouer un rôle de chef de file dans la promotion d’un développement industriel inclusif et durable en Afrique, en collaboration avec l’Union africaine, la Commission économique pour l’Afrique, la Banque africaine de développement et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique.  Le représentant a salué le travail de l’ONUDI et s’est dit confiant qu’il jouera un rôle important dans le développement industriel de l’Afrique, en restant fidèle aux priorités continentales, régionales et nationales.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. IHAB MOUSTAFA AWAD MOUSTAFA (Égypte) a jugé impératif de veiller à ce que les besoins spécifiques de l’Afrique, en particulier l’élimination de la pauvreté, reçoivent l’attention qu’ils méritent au sein du système des Nations Unies.  Nos efforts, a souligné le représentant, doivent se concentrer sur les moyens de mise en œuvre, à savoir les ressources financières, le transfert de technologie et le renforcement des capacités.  Les pays développés doivent respecter les engagements énoncés dans le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement.  Ceci dit, le représentant a tenu à insister sur le fait que l’appropriation africaine du processus de développement « n’est pas un simple concept », comme l’ont montré les progrès remarquables enregistrés par les pays africains dans la mise en œuvre des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Mais mobiliser un appui fort est plus important que jamais, maintenant que l’Afrique a lancé son Agenda 2063.

Les défis du continent sont la paix, la sécurité et le développement, a poursuivi le représentant, en appelant à un appui fort à l’initiative de l’Union africaine « Faire taire les armes d’ici 2020 ».  Il s’est réjoui du partenariat « exemplaire » entre les Nations Unies et l’Afrique, en particulier l’appui à la création et à l’opérationnalisation de l’Architecture africaine de paix et de sécurité.  Il a rappelé la signature entre ces deux entités du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, en avril dernier.  Le représentant a, dans ce cadre, appuyé l’accent mis par le Secrétaire général sur la prévention en tant que pivot renforçant le lien entre les trois piliers du travail de l’ONU, à savoir la paix et la sécurité, le développement et les droits de l’homme. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. DATO ABDUL GHAFAR ISMAIL (Brunei Darussalam) a indiqué que l’ASEAN aussi est en train d’explorer les voies et moyens de promouvoir des synergies et des complémentarités entre sa Communauté de l’ASEAN à l’horizon 2025 et le Programme 2030.  Cette année, en marge du débat général de l’Assemblée générale, l’ASEAN et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ont lancé « ASEAN My World Survey », visant à capturer les vues des populations sur les progrès dans les objectifs de développement durable et à maintenir le dialogue entre eux et les décideurs pour élaborer des politiques sur la meilleure manière de mettre en œuvre le Programme 2030. 

L’ASEAN et les pays africains, a poursuivi le représentant, vivent des relations d’amitié qui remontent à la Conférence de Bandung de 1955.  Il y a deux ans, ces pays se sont revus en Indonésie pour commémorer le soixantième anniversaire de cette Conférence « historique » et revitaliser leur coopération politique, économique et socioculturelle.  Le renforcement des liens entre les peuples est une dimension importante de ce partenariat, pour rapprocher professionnels, hommes d’affaires, étudiants et les touristes de ces deux régions.  L’ASEAN, a conclu le représentant, est prête à échanger idées et expériences avec ses partenaires africains dans des domaines tels que l’agriculture, l’éducation, les technologies de l’information et des communications, le commerce et le développement des infrastructures.

M. SURYANARAYAN SRINIVAS PRASAD (Inde) a souligné que la coopération internationale demeure un « élément essentiel » des efforts de l’Afrique pour réaliser la paix et la prospérité envisagées dans l’Agenda 2063 et le Programme 2030.  L’Afrique, a-t-il dit, avant de les passer en revue, a fait des progrès rapides ces dernières années, malgré un environnement économique mondial difficile.  L’Afrique est aujourd’hui un continent « de jeunes » dont le dividende démographique peut être un grand avantage si les jeunes ont accès à l’éducation et à la formation nécessaires aux opportunités économiques.  En la matière, le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement demeure « crucial », en particulier les efforts de lutte contre les flux financiers illicites et le blanchiment d’argent.   

Aujourd’hui, a poursuivi le représentant, l’Afrique et l’Inde sont des sociétés jeunes et dynamiques et des économies qui intensifient leur collaboration pour la prospérité de leurs peuples.  L’objectif principal de ce partenariat est le renforcement des capacités, la mobilisation de l’appui financier et le partage de l’expertise technique, lesquels renforcent les liens commerciaux et d’investissement en croissance rapide.  En effet, le commerce indo-africain a été multiplié par 20 ces 15 dernières années et a doublé ces cinq dernières années, pour atteindre près de 72 milliards de dollars l’année dernière, faisant de l’Inde le quatrième plus grand partenaire commercial de l’Afrique.  L’Inde a investi massivement dans les secteurs des télécommunications, des technologies de l’information et des communications, de l’énergie, de l’ingénierie, de la chimie, de la pharmacie et de l’automobile.  

Le représentant s’est aussi enorgueilli du fait que la Banque africaine de développement ait tenu son Conseil d’administration cette année en Inde, ce qui a donné l’occasion au Premier Ministre indien de lancer le « Corridor de croissance Asie-Afrique », en partenariat  avec le Japon.  Le représentant a aussi rappelé que lors du troisième Forum Inde-Afrique, il y a deux ans, son pays a annoncé 10 milliards de dollars de prêts concessionnels, en plus d’un don de 600 millions de dollars et de 50 000 bourses d’études, sur une période de cinq ans.  Au sein du G20 et du groupe BRICS, l’Inde est aussi active dans toutes les questions relatives aux priorités de développement de l’Afrique.  Après avoir souligné les efforts de l’Inde dans les domaines de la paix et de la sécurité en Afrique, le représentant a précisé que le partenariat de son pays avec le continent africain s’appuie sur la solidarité et le respect mutuel, sans chercher à imposer ni à exploiter.  C’est la coopération Sud-Sud dans toutes ses dimensions, une coopération qui contribue à la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et au Programme 2030, a-t-il insisté.

M. BADER ABDULLAH AL-MUNAYEKH (Koweït) a rappelé que l’Afrique s’est lancée dans deux programmes historiques il y a deux ans, le Programme 2030 et le NEPAD.  Mais, a prévenu le représentant, le manque de ressources financières, la circulation illicite des armes et l’environnement économique mondial risquent de saper les acquis de l’Afrique dans le développement durable.  Le représentant a souligné que son pays est membre observateur de l’Union africaine et qu’il entend accorder des prêts concessionnels à certains pays africains.  Le pays entend aussi débloquer une somme annuelle de 500 000 dollars pour les chercheurs africains qui travaillent dans le domaine du développement.  Convaincu du caractère essentiel de l’éducation, le Koweït entend également aider la Somalie dans ce domaine.

Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a salué les efforts du NEPAD pour renforcer les capacités et veiller au succès dans la mise en œuvre du Programme 2030, de l’Agenda 2063, du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques.  Elle a aussi salué l’Union africaine pour avoir finalisé, en juillet dernier, l’Accord de libre-échange tripartite et a noté ses efforts visant la responsabilité mutuelle de la Plateforme de partenariat du Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) et de la Déclaration de Malabo sur la croissance et la transformation accélérées de l’agriculture en Afrique pour une prospérité partagée et de meilleures conditions de vie.  La représentante a aussi estimé que le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité est une importante feuille de route pour assurer la coordination entre les deux organisations.  Elle s’est aussi félicitée que les Nations Unies et l’Union africaine aient lancé des réformes pour devenir véritablement capables d’appuyer les efforts collectifs des pays africains visant à réaliser le Programme 2030 et l’Agenda 2063. 

M. OMAR A. A. ANNAKOU (Libye) a souligné l’importance de la coordination et de l’intégration africaine.  Malgré les efforts et les progrès dans certains domaines, a-t-il reconnu, l’Afrique fait face à de nombreux défis dans la réalisation du Programme 2030, dont la pauvreté, les changements climatiques, la migration, la fuite des capitaux, la faiblesse de l’éducation et le manque de services de base comme l’assainissement.  La communauté internationale doit aider l’Afrique à les surmonter et impliquer efficacement le secteur privé pour faciliter le transfert de technologie et l’acquisition des compétences, a estimé le représentant.

S’agissant de la paix et de la sécurité, il a regretté que certains pays, dont la Libye, souffrent de conflits armés et d’instabilité politique.  Il a demandé le soutien de la communauté internationale car le continent ne peut aller de l’avant sans affermir la primauté du droit, le respect des droits de l’homme et la bonne gouvernance.  La Libye, a ajouté le représentant, souffre des flux migratoires et de la difficulté de contrôler ses frontières.  Rappelant que la migration est un problème international qui doit faire l’objet d’une responsabilité partagée par tous, et pas seulement les pays d’origine et de transit, il a réclamé que la communauté internationale s’attaque aux causes de cette migration dont la pauvreté.

Quant aux ressources financières, a-t-il poursuivi, force est de constater que de nombreux pays, dont la Libye, souffrent de la perte d’une partie de leurs richesses en raison de la fuite de capitaux.  Les pays qui abritent ces fonds doivent collaborer à la lutte contre ce fléau, a martelé le représentant, dénonçant les paradis fiscaux et appelant à un mécanisme mondial contre les flux illicites car, malheureusement, seulement 3% des avoirs clandestinement expatriés ont été restitués.

Avec ses abondantes ressources naturelles et son grand potentiel, l’Afrique est désormais le continent à la croissance la plus rapide au monde, a constaté M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande).  Il s’est félicité du NEPAD qui a renforcé l’intégration et le développement du continent mais a reconnu que la violence, le terrorisme et l’instabilité sont venus ces dernières années saper les progrès de nombreux pays et régions, dont l’Afrique.  Il a estimé qu’il est plus que temps de traiter des causes profondes de ces problèmes, à savoir la pauvreté et les inégalités sociales.  Il est impératif que la communauté internationale s’unisse pour aider les pays postconflit à négocier une transition sans heurt et à consolider la paix. 

La Thaïlande, qui est désormais un pays donateur, s’est engagée à élargir son assistance à l’Afrique.  Devenue la partenaire commerciale numéro 1 de l’Afrique, et numéro 3, pour ce qui est des investissements, la Thaïlande a redéfini sa coopération avec l’Afrique sur la base de la confiance et des intérêts mutuels dans le « Partenariat Thaïlande-Afrique pour le développement durable », dont l’objectif principal est de partager l’approche thaïlandaise du développement durable que feu le Roi Bhumibol a explicitée dans « La Philosophie de l’économie de l’autosuffisance (SEP) ».  Aujourd’hui, 21 pays mettent en œuvre des projets « SEP pour le développement durable » grâce à leur coopération avec la Thaïlande, dont le Lesotho, le Swaziland, le Mozambique et le Sénégal, a souligné le représentant.  

Mme NOA FURMAN (Israël) a souligné les similitudes entre les défis de l’Afrique et d’Israël qui, lui, exploite le capital humain pour trouver des solutions.  Pour son développement durable, Israël compte en effet sur « l’économie du savoir », à savoir l’intelligence de sa population.  Quand on sait que 60% de la population africaine a moins de 24 ans, il devient évident, a argué la représentant, qu’il faut investir dans les capacités humaines plutôt que dans des ressources limitées.  Grâce à l’Agence israélienne de coopération au développement « MASHAV », Israël travaille avec ses partenaires africains, les agences de l’ONU, la société civile et le secteur privé dans les domaines de l’éducation et de la formation.  Les programmes épousent l’approche « former les formateurs » pour le renforcement des capacités humaines et institutionnelles, avec des cours dispensés en Israël et dans les pays mêmes. 

En décembre 2016, Israël a organisé une conférence des ministres africains de l’agriculture, suivie d’une session de formation à la recherche appliquée pour les experts agricoles.  En mars de cette année, en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Israël a accueilli une grande délégation africaine pour une visite d’étude sur la croissance verte dans les terres arides.  Les informations collectées serviront à la vision de l’Union africaine qui est d’aider avec des pratiques résilientes aux changements climatiques les 25 millions de petits exploitants agricoles d’ici à 2025.  Que ce soit dans l’éducation, l’émancipation économique des femmes ou la création d’unités de traumatologie, le Gouvernement d’Israël et la société civile font vraiment la différence dans la vie des gens dans toute l’Afrique, en particulier les jeunes.  La représentante n’a pas voulu conclure sans attirer l’attention sur l’ONG « Innovation Africa » qui apporte des technologies d’énergie solaire et hydraulique dans les villages isolés d’Afrique, ayant ouvert l’accès à l’électricité et à l’eau à un million de personnes dans plus de huit pays. 

M. SERGEY B. KONONUCHENKO (Fédération de Russie) a relevé les grands efforts effectués en Afrique dans la conception de stratégies nationales et l’assouplissement des lois sur les investissements.  Se disant préoccupé par la baisse de l’investissement étranger direct (IED), le représentant a jugé nécessaire d’apporter un appui à l’Afrique, au risque de lui faire perdre ses acquis.  La Fédération de Russie apporte une aide au continent.  Elle a par exemple annulé 20 milliards de la dette des pays pauvres très endettés.  En outre, plusieurs pays africains ont bénéficié de l’appui de la Fédération de Russie à la sécurité alimentaire.  Le pays a également réagi rapidement à l’épidémie d’Ebola et financé, par ailleurs, à hauteur de 5 millions de dollars, une campagne de vaccination en Angola.  La Fédération de Russie a aussi l’intention d’organiser les 16 et 17 novembre prochains une conférence sur la lutte contre la tuberculose.

L’avenir du continent dépend du développement de son potentiel de production et la Fédération de Russie part du principe que l’ONUDI joue un rôle essentiel car l’industrialisation n’est pas possible si le continent n’a pas accès aux hautes technologies.  Estimant que l’Afrique a un potentiel énorme, le représentant a déclaré que ce serait une grave erreur de ne pas l’aider à réaliser le Programme 2030 et l’Agenda 2063.

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) a souhaité que le Cadre du nouveau partenariat entre l’ONU et l’Union africaine pour le programme d’intégration et de développement de l’Afrique 2017-2027, qui constituera la feuille de route pour le renforcement de la coordination entre les deux organisations, bénéficie des moyens de suivi efficaces pour atteindre les aspirations du développement fixées par l’Agenda 2063.  Il a dit sa conviction que seule une action africaine commune basée sur une forte intégration régionale permettrait de surmonter les défis du développement durable, de la paix et de la sécurité.  Au titre des obstacles, M. Laassel a pointé le financement de la mise en œuvre du NEPAD, qui risque d’entraver la réalisation des deux programmes car les capacités de financement de la majorité des gouvernements africains sont limitées.  Il a fait remarquer que cette situation est accentuée par un environnement difficile, marqué par la raréfaction des financements, le difficile accès aux marchés financiers internationaux et la diminution de l’aide publique au développement. 

Il a jugé important d’établir avec les pays africains une « nouvelle phase » de coopération internationale et de partenariat pour le développement durable dans ses trois dimensions, fondée sur le principe de responsabilité commune mais différenciée afin de créer davantage d’opportunité pour la mobilisation de ressources financières nécessaires.  M. Laassel a encore estimé que la promotion des investissements, le développement des infrastructures, l’amélioration de l’accès aux marchés, le transfert de technologie et l’allègement de la dette sont autant d’éléments clefs pour « atteindre l’émergence économique des pays africains ».

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie) a estimé que les efforts du développement durable en Afrique devraient participer d’un travail collectif.  Pour ce faire, il faut renforcer la coopération internationale en mobilisant les financements, ce qui implique l’apport d’une assistance technique et le renforcement des capacités pour mobiliser les ressources nationales, y compris lutter contre les flux financiers illicites, obtenir la restitution des avoirs détournés, élargir l’assiette fiscale et attirer les investissements.  Le respect des engagements en matière d’APD est crucial ainsi que les prêts concessionnels.  Des efforts doivent aussi être déployés pour garantir la viabilité de la dette. 

Il faut ensuite, a poursuivi la représentante, promouvoir les initiatives qui génèrent une croissance inclusive et durable, comme les infrastructures pour accélérer l’intégration à l’économie mondiale et l’appui à l’industrialisation.  Il faut enfin renforcer la collaboration entre l’ONU et le continent africain dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  La représentante a d’ailleurs dit attendre avec intérêt de voir la manière dont le NEPAD, l’Agenda 2063 et le Programme 2030 seront intégrés dans les activités opérationnelles du système de développement de l’ONU et le rapport du Secrétaire général sur la manière dont l’ONU doit se repositionner pour mieux appuyer les efforts nationaux, y compris ceux de l’Afrique, dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable.

La représentante a conclu en soulignant que son pays est un vrai partenaire depuis la Conférence de Bandung de 1955.  L’Indonésie fait partie des pays qui ont initié le Nouveau Partenariat stratégie Asie-Afrique.  Elle est active dans la coopération Sud-Sud et, au Sommet du G20, elle a annoncé son intention de transformer ses liens politiques avec l’Afrique en des liens économiques concrets.  L’Indonésie accueillera donc, en 2018, le Forum Indonésie-Afrique pour explorer les opportunités économiques, renforcer la coopération technique et améliorer le partenariat existant.

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a souligné que l’appui des partenaires au développement est essentiel pour veiller à ce que l’Afrique surmonte ses défis.  Il s’est donc dit encouragé par l’« augmentation modeste » de l’aide publique au développement à l’Afrique qui est passée de 54,3 milliards de dollars, en 2014, à 56,61 milliards l’année suivante.  Mais il s’est dit préoccupé que, depuis 2010, cette hausse est surtout attribuable aux coûts de l’assistance humanitaire et de l’accueil des réfugiés dans les pays donateurs.  L’Afrique continue en outre de souffrir du déclin des flux d’investissement étranger direct, ce qui est préoccupant compte tenu de leur rôle dans le développement des infrastructures.  L’agriculture continuant d’être le moteur du développement et une source de survie pour le continent, surtout dans les zones rurales, les efforts doivent porter sur la modernisation de ce secteur, a dit le représentant.  Il a fait part des initiatives prises par son pays dont le plan quinquennal 2015-2019 qui porte aussi sur le secteur de la santé dans un pays où le paludisme menace les efforts de développement. 

M. FERIDUN H. SINIRLIOĞLU (Turquie) a indiqué que le partenariat de la Turquie avec l’Afrique embrasse totalement le principe « solutions africaines aux problèmes africains ».  La Turquie, a dit son représentant, a multiplié son aide publique au développement à l’Afrique subsaharienne par plus de 100 depuis 2005.  Elle se focalise sur le renforcement des capacités humaines et institutionnelles, l’éducation, la formation professionnelle et le développement des infrastructures.  Hier, la Turquie a d’ailleurs organisé la Conférence Turquie-Afrique des ministres de l’éducation.  Tous les ans, le pays offre 1 000 bourses d’études aux étudiants africains.  La Turquie offre aussi son expertise dans le secteur de l’agriculture, « un secteur clef pour le développement de l’Afrique ».  Insistant sur l’aide au développement des infrastructures, le représentant a attiré l’attention sur les facilités offertes par EXIMBANK.  Il s’est enorgueilli d’un réseau composé des 39 ambassades, des agences de développement, de la compagnie Turkish Airlines et de l’Association des entrepreneurs turcs qui mettent en lumière le potentiel économique de l’Afrique pour créer un environnement favorable à la paix et à la sécurité. 

L’Asie et l’Afrique sont les continents des opportunités et des défis, a déclaré M. HAU DO SUAN (Myanmar) qui a souligné « le potentiel énorme » de la collaboration entre ces deux régions dans de nombreux domaines d’intérêt commun, grâce à la coopération Sud-Sud et au Nouveau Partenariat stratégie Asie-Afrique (NAASP).  Rappelant l’historique Conférence de Bandung, le représentant a affirmé que son pays se tiendra toujours fermement aux côtés de l’Afrique.  Comme dans de nombreux pays africains, au Myanmar, les conflits sapent les progrès du développement.  Depuis que le nouveau Gouvernement est entré en fonctions en mars 2016, le pays a fait de la paix et de la réconciliation nationale, la priorité des priorités.  Sur le front économique, il a ouvert ses portes aux investissements étrangers et sa politique économique en 12 points a été élaborée pour réaliser de nombreux objectifs de développement durable.  Le Myanmar appelle la communauté internationale à une nouvelle approche pour approfondir la coopération aux niveaux bilatéral et multilatéral.  Il compte donc renforcer sa coopération avec ses « amis africains », par le biais de la coopération Sud-Sud.

Ce qu’il faut surtout, a estimé M. SABRI BOUKADOUM (Algérie), c’est donner « un sens concret » à la mobilisation des ressources domestiques dans les pays africains.  Ce qu’il faut aussi, c’est que la communauté internationale aide l’Afrique à parvenir à une croissance durable fondée sur une production nationale, une collecte efficace des impôts et des capacités de qualité.  L’Afrique a besoin d’un meilleur accès aux marchés, en particulier ceux des pays développés.  Le représentant s’est dit inquiet des appels à des mesures de stabilisation économiques dans ces pays car elles pourraient ériger de nouveaux obstacles à une contribution effective de l’Afrique à l’économie mondiale.  Il a aussi regretté que le transfert de technologie demeure un problème.  La résilience de l’Afrique peut et doit être renforcée, a-t-il martelé, appelant la communauté internationale à fermement appuyer l’Union africaine et le NEPAD. 

Le représentant a souligné que son pays a fait sa part dans le projet de Route transsaharienne, reliant l’Algérie au Nigéria.  Cette route désenclavera des zones sans littoral et isolées et sera essentielle pour le libre-échange entre le nord et le sud de la région sahélo-saharienne.  Il a aussi parlé du projet « Lien de la fibre optique entre l’Algérie et le Nigéria via le Niger » qui implique l’installation de 4 500 kilomètres de fibres optiques.  Des progrès ont également été faits dans le Programme détaillé pour le développement de l’agriculture africaine dans lequel 50 États africains sur les 55 se sont engagés, s’agissant en particulier de l’agriculture et la sécurité alimentaire.  Grâce à son immense potentiel, tant en ressources humaines qu’en ressources naturelles, « l’Afrique est l’avenir du monde », a proclamé M. Boukadoum.  L’Afrique doit être respectée et vue comme un partenaire et non comme une source de problèmes ou une menace pour le confort des autres.  « Nous attendons de vous, coopération, respect mutuel, véritable partenariat et solidarité », a conclu le représentant.

L’Afrique est toujours la deuxième région à la croissance économique la plus rapide au monde, obligeant les sceptiques à la reconnaître comme « le continent de l’espoir et l’étoile montante » s’est enorgueillie Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie).  Ceci ne veut pas dire, a-t-elle tout de même concédé, que l’Afrique a échappé à l’impact de la récession de 2008 ou à celui de la volatilité des cours des matières premières.  L’Afrique, a-t-elle reconnu, a beaucoup de défis à relever et c’est la raison pour laquelle elle a couché sur le papier son Agenda 2063.  Mais cet Agenda exige de l’Afrique qu’elle « fasse taire les armes », qu’elle transforme et qu’elle diversifie son économie par une industrialisation durable.  Il faudrait encore pour cela qu’elle puisse jouir d’un environnement mondial favorable, a prévenu la représentante, en insistant sur des efforts renforcés et mieux coordonnés pour augmenter les financements et accélérer le renforcement des capacités humaines et technologiques.  À cet égard, elle s’est félicitée de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine; l’agenda de la réforme de la première devant tenir dûment compte des besoins en développement spécifiques de l’Afrique. 

M. MODEST JONATHAN MERO (République-Unie de Tanzanie) a insisté sur la détermination de l’Afrique, grâce à ses partenariats, à mettre en œuvre le Programme 2030 et l’Agenda 2063; à mettre également en œuvre l’Accord de Paris sur les changements climatiques; à appuyer l’agenda de la réforme du Secrétaire général; à relever les défis de la paix et de la sécurité, par le biais des initiatives régionales, y compris les partenariats avec la communauté internationale; à développer ses infrastructures et à investir dans l’industrialisation.  « L’appui des partenaires au développement n’est pas vain.  Il est apprécié et reconnu par nous tous », a rassuré le représentant.

M. HAMID MOHAMED ELNOUR AHMED (Soudan) a salué l’accent enfin mis sur les peuples pour parvenir au développement, gage de la paix et de la sécurité.  Au cours de ces 20 dernières années, l’Afrique a accusé quelques retards mais elle revit toujours car elle est le berceau de l’humanité.  Le représentant a déploré la multiplication des conflits armés sur le continent et a voulu que l’on s’attaque sérieusement aux causes de cette instabilité qui fragilise les peuples.  Hormis les différents développements et les nouvelles donnes des changements climatiques, surtout dans les pays subsahariens, l’Afrique, a-t-il insisté, doit aussi s’attaquer aux causes profondes des conflits si elle espère bâtir des démocraties solides, a-t-il affirmé.  Le Soudan pour sa part est passé à la consolidation de la paix durable au Darfour.  L’Accord de paix a fait de cette région une zone de paix et de stabilité, s’est-il félicité, saluant aussi les gouvernements qui ont favorisé la conclusion de cet accord porteur d’une vision claire pour régler les problèmes politiques et économiques.  Il a appelé à un renforcement des partenariats pour une stabilité durable en Afrique. 

M. IBRAHIM ASSANE MAYAKI, Directeur général de l’Agence du NEPAD, a voulu mettre l’accent sur trois questions qui sous-tendent les avancées socioéconomiques de l’Afrique.  Il a d’abord parlé du facteur démographique, et en particulier la question des jeunes et de leur emploi.  Avec une population dont l’âge moyen est de 20 ans et qui devrait monter à 25 ans d’ici à 2050, mais rester en dessous de la moyenne mondiale de 36 ans, l’Afrique doit impérativement briser le cycle de la pauvreté qui continue d’étouffer de larges segments de sa population.  Avec une croissance moyenne de 2,5% par an, ces 10 dernières années, le facteur démographique sera essentiel pour identifier les questions prioritaires et affiner les politiques publiques.  Le dernier Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine s’est emparé du problème et a reconnu que « les jeunes ne sont pas un problème à éliminer.  C’est une ressource, une ressource économique qui doit être exploitée ». 

En Afrique, 440 millions de jeunes entreront sur le marché du travail d’ici à 2030, et la situation sera particulièrement critique dans les zones rurales où l’absence d’opportunités d’emploi est généralisée.  La Commission de l’Union africaine, l’Agence du NEPAD et les communautés économiques régionales sont à la recherche de solutions.  L’Afrique doit à tout prix renforcer sa capacité à offrir des formations à ses jeunes et à ses filles.  Elle doit de toute urgence tendre la main au secteur privé pour faire monter le taux et améliorer la forme de la transformation socioéconomique qu’elle veut. 

La deuxième question, a poursuivi le représentant, est le commerce.  La nécessité d’améliorer les procédures douanières, d’alléger les restrictions à l’octroi de visas et d’aboutir enfin au « passeport africain » ne saurait être sous-estimée, ni celle d’améliorer la forme, la qualité et la diversité des biens et services à l’exportation.  L’Agence du NEPAD y travaille et le continent fait déjà des progrès. 

Ma troisième et dernière question est celle des inégalités, a conclu M. Mayaki, en parlant de la répartition inégale des richesses.  Une croissance non inclusive n’est bonne ni pour les affaires, ni pour la stabilité politique, ni pour la cohésion sociale, ni pour l’économie, ni pour la paix et encore moins pour la sécurité.  La question est de savoir quelle action décisive faut-il prendre?  L’Agence du NEPAD entend répondre à cette question, sans oublier celle des inégalités dans l’accès à la terre qui est une réalité africaine aux conséquences graves pour le développement.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission est en majorité opposée à l’élaboration d’une convention sur les effets des conflits armés sur les traités

Soixante-douzième session,
17e séance – matin
  AG/J/3553

La Sixième Commission est en majorité opposée à l’élaboration d’une convention sur les effets des conflits armés sur les traités

La Sixième Commission (chargée des affaires juridiques) a examiné ce matin la question des effets des conflits armés sur les traités.  Le projet d’articles sur les effets des conflits armés sur les traités, tel qu’adopté en 2011 par la Commission du droit international (CDI), offre des orientations pratiques pour les États, mais il serait « prématuré » de s’en servir pour élaborer une convention sur la question.  C’est en résumé ce qui est ressorti du débat auquel ont participé une vingtaine de délégations.

Appelés à examiner la forme qui pourrait être donnée à ces articles, divers États, dont l’Algérie, au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Australie et le Bangladesh, ont indiqué que la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969), entrée en vigueur en 1980, doit demeurer la principale source de droit en la matière.  « Le projet d’articles risque de fragmenter le droit international car il porte à la fois sur le droit des traités et sur le droit international humanitaire », a fait remarquer le délégué algérien.  L’Iran a estimé que le mandat de la CDI consiste à compléter et non pas à modifier le droit international des traités.

Les pays nordiques ont plaidé pour un développement progressif du droit en la matière plutôt que pour une codification.  Plusieurs délégations ont rappelé le principe général selon lequel l’existence d’un conflit armé n’entraîne pas ipso facto l’extinction des traités ni la suspension de leur application.

La Fédération de Russie et les États-Unis ont exprimé des réserves sur la définition de « conflit armé ».  Selon la Russie, les conflits armés non internationaux ne devraient pas être inclus dans le cadre de l’effet des conflits armés sur les traités.  Pour sa part, l’Estonie a estimé que l’occupation est « une forme de conflit armé » qui devait être inclue dans ce projet.

D’autres intervenants sont revenus sur la liste indicative de traités qui figure en annexe au projet, traités dont la matière implique qu’ils continuent de s’appliquer, en tout ou en partie, au cours d’un conflit armé.  Par exemple, pour Israël, il faudrait plutôt compiler la liste des critères généraux que nécessite un traité pour continuer de s’appliquer en cas de conflit armé.

Seuls le Portugal et la Grèce se sont dits prêts à envisager d’élaborer une convention sur la base du projet d’articles.  El Salvador, qui ne s’est pas non plus opposé à l’adoption d’un instrument contraignant à une date ultérieure, a convenu que ces articles contribueront à combler certaines des lacunes qui existent au niveau international.

En début de séance la représentante de l’Autriche a introduit deux projets de résolution*, portant l’un sur la Loi type sur les documents transférables électroniques de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international, et l’autre sur le rapport de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international sur les travaux de sa cinquantième session. 

La Sixième Commission entamera son examen du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI) lundi 23 octobre, à partir de 10 heures.

*A/C.6/72/L.11 et A/C.6/72/L.10

EFFETS DES CONFLITS ARMÉS SUR LES TRAITÉS (A/72/96)

Déclarations

M. SABRI BOUKADOUM (Algérie), au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé qu’un projet de convention devait être envisagé sur la question des effets des conflits armés sur les traités, et que la question a été examinée en 2014.  Saluant les travaux de la Commission du droit international (CDI), il s’est prononcé pour que la Convention de Vienne sur le droit des traités reste le principal instrument pour régler les questions en la matière.  Par ailleurs, il a estimé que la définition de « conflit armé » dans le projet d’articles est différente de la définition que donne le droit international humanitaire.  Or une nouvelle définition ne devrait pas s’écarter des règles préexistantes, a-t-il souligné. 

Ainsi, « Nous n’appuyons pas la conversion de ce projet d’articles en un instrument juridiquement contraignant.  Le projet d’articles risque de fragmenter le droit international car il porte à la fois sur le droit des traités et sur le droit international humanitaire », a déclaré le représentant.  Selon lui, il faut éviter que la liste des situations telles que définies puissent changer au fil du temps.  Le principe fondamental selon lequel un conflit armé ne mène pas à la suspension d’un traité se trouve déjà dans le droit international coutumier et devrait être contraignant sur les États.  En résumé, il a considéré que le projet d’articles devrait se contenter de compléter ce qui se trouve déjà dans le droit international existant.

Mme NIINA NYRHINEN (Finlande), s’exprimant au nom du Groupe des pays nordiques, a rappelé que la Commission du droit international (CDI) a adopté, en 2011, un projet de 18 articles et un commentaire concernant l’effet des conflits armés sur les traités.  Elle a précisé que les rapporteurs spéciaux de la CDI ont estimé que la portée et les définitions des dispositions du projet relatives aux traités en cas de conflits internes devraient faire l’objet d’un développement progressif du droit plutôt que d’une codification.  Le Groupe des pays nordiques considère que la tenue d’une conférence diplomatique sur l’élaboration d’une convention à ce sujet n’est pas pertinente pour le moment. 

Mme CARRIE MCDOUGALL (Australie) a exprimé son appui à la poursuite du travail de la Commission du droit international sur l’effet des conflits armés sur les traités.  Elle a toutefois réitéré la position de son pays voulant qu’en raison de la diversité des effets des conflits armés sur les traités, il n’est pas possible d’adopter un mécanisme international contraignant sur cette question.  Elle a estimé que l’impact de ces principes sur le droit des conflits armés et sur le droit international en général, notamment le droits de l’homme, doit être étudié davantage. 

Toutefois, a poursuivi la représentante, le projet d’articles demeure un guide utile, en complément de la Convention de Vienne sur le droit des traités, qui devrait demeurer la principale source de droit sur l’effet des conflits armés sur les traités.  Enfin, elle a encouragé les gouvernements à exprimer leur avis sur cette question. 

M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a mis l’accent sur l’importance du droit international humanitaire.  Il a estimé que le champ d’application du projet d’articles ne devrait pas incorporer les conflits armés non internationaux.  La Convention de Vienne doit être la référence sur ces questions, car la question des effets des troubles et conflits internes est déjà prise en compte par la Convention de Vienne.  En conséquence, nous ne l’approuvons pas, a-t-il déclaré.

Le représentant a trouvé que les projets d’articles 4 et 5 sont en contradiction.  En particulier, il n’a pas appuyé le deuxième paragraphe de l’article 5 concernant l’application des règles sur l’interprétation des traités qui propose de spécifier le nom des différents traités.  Cette liste ne devrait pas être définitive, selon lui.  Il a préféré des principes généraux plutôt qu’une liste trop précise qui devrait évoluer.  Par contre, il a estimé qu’il faut préserver tel quel le projet d’article 13 sur l’application des règles sur l’interprétation des traités.

En résumé, il a jugé prématuré de discuter de la forme finale de ces articles.  « Nous n’appuyons pas la proposition que ces débats puissent mener à une convention mais nous en acceptons les principes directeurs », a-t-il conclu.

Mme SERAPHINA FONG (Singapour) a été d’avis que le projet d’articles et leurs commentaires sont un abrégé précieux sur cette question complexe du droit des traités et devrait conserver leur forme actuelle.  Elle s’est toutefois dite peu convaincue de la nécessité, à ce stade, d’approuver officiellement ou de codifier les projets d’articles en convention.  Sa délégation a considéré les projets d’articles 2, 5, 6 et 7, ainsi que l’Annexe, comme un développement positif du droit international.

Mme ELENA A. MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a reconnu l’aspect pratique de l’examen de l’effet des conflits armés sur les traités.  Elle a relevé que le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) mentionne que les conflits armés ne conduisent pas systématiquement à l’annulation d’un traité international.  Selon elle, les conflits armés non internationaux ne devraient pas être inclus dans le cadre de l’effet des conflits armés sur les traités. 

La représentante a également mis en doute la définition de ce qui constitue un conflit armé.  Elle a estimé que ce projet d’articles peut servir aux États mais qu’il serait prématuré de s’en servir comme base pour l’élaboration d’un document international contraignant.

D’après M. HECTOR ENRIQUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador), le projet d’articles contribuera à combler certaines des lacunes juridiques qui existent au niveau international.  Il a relevé le principe général énoncé à l’article 3, selon lequel l’existence d’un conflit armé n’entraîne pas ipso facto l’extinction des traités ni la suspension de leur application.  Il a aussi estimé qu’il est essentiel d’interpréter l’article 7 en liaison avec la liste indicative de traités figurant en annexe, dans la mesure où seule leur mise en œuvre conjointe permettra d’établir des règles claires en ce qui concerne la continuité des traités.  En conclusion, le représentant s’est dit ouvert à un débat sur la forme que pourraient prendre ces articles.

Mme MARK A. SIMONOFF (États Unis) a déclaré que le projet d’articles reflète la continuation des obligations des États lorsqu’il s’agit de déterminer si un traité doit demeurer en vigueur lors d’un conflit.  Comme l’a noté l’Assemblée générale, elle a estimé que le projet d’articles devrait être utilisé en tant que ressource et guide par les États lorsqu’ils examinent l’effet des conflits armés sur les traités. 

La représentante s’est déclarée contre l’élaboration d’une convention en la matière, s’interrogeant notamment sur la pertinence des définitions contenues dans le projet d’articles.  Elle a réitéré son appui aux résolutions de l’Assemblée générale de 2011 et 2014 préconisant l’utilisation non contraignante des dispositions du projet d’articles.

Se félicitant de l’examen des effets des conflits armés sur les traités, M. MOHAMMED HUMAYUN KABIR (Bangladesh) a considéré la Convention de Vienne comme étant l’instrument principal sur le droit des traités.  Il a souscrit à la proposition contenue dans l’article 3 du projet qui pose le principe général de la stabilité et la continuité juridiques.  En ce qui concerne la portée d’un traité, il a pris note des vues divergentes sur la question et a estimé utile de poursuivre les discussions.  La référence aux conflits armés internationaux n’est pas uniforme, a-t-il dit.

Le délégué a rappelé que la liste de traités visée à l’article 7 est indicative et non exhaustive.  Étant donné les différences de vue sur ces questions, il a conclu que le moment n’est pas venu pour envisager d’élaborer une codification sous la forme d’un traité contraignant.

Devant la multiplication des conflits dans le monde, notamment les conflits internes, M. THEMBILE ELPHUS JOYINI (Afrique du Sud) a estimé que la question de l’effet des conflits armés sur les traités demeure pertinente.  Il a salué les efforts de la Commission du droit international (CDI) visant à clarifier ce domaine du droit, ajoutant cependant que la Convention de Vienne sur le droit des traités demeure le cadre de référence pour l’interprétation des traités. 

Le représentant a cependant rejeté la « définition divergente » d’un conflit armé contenue dans le projet d’articles.  Notant les contradictions avec la Convention de Vienne et le droit international humanitaire, M. Joyni a jugé que, bien que les articles puissent servir d’orientation à l’intention des États, il n’est pas souhaitable d’en faire un instrument international contraignant tel qu’une convention internationale.  Cela pourrait avoir pour effet de « fragmenter » le droit international, a-t-il averti, insistant sur le principe voulant qu’un conflit armé ne mène pas nécessairement à l’annulation ou à la suspension d’un traité, comme le stipule le droit international coutumier.

M. DAVID GOLDFARB (Israël) a estimé que la question de la forme que doivent prendre les articles est prématurée, dans la mesure où les questions les plus importantes soulèvent des préoccupations majeures et posent des difficultés fondamentales qui doivent être résolues.  Pour sa délégation, l’inclusion d’une liste de traités indicatifs n’est pas l’approche la plus souhaitable.  Selon Israël, il faudrait lui privilégier une approche consistant à compiler une liste de critères généraux que nécessite un traité pour continuer de s’appliquer en cas de conflit armé.  De plus, les difficultés émanant du projet d’article 15 sur l’interdiction pour l’État qui commet une agression d’en tirer avantage demeurent, a souligné le représentant, avant de préciser que même la définition d’« agression » posait problème.

M. ABBAS BAGHERPOUR ARDEKANI (République islamique d’Iran) a déclaré approuver certains articles du projet, comme l’article 3 qui établit un principe général, à savoir que l’existence d’un conflit armé n’entraîne pas ipso facto l’extinction des traités ni la suspension de leur application.  Mais tenter de définir ce qu’est un conflit armé irait au-delà de l’objectif que nous nous fixons, a-t-il déclaré.  La définition est trop floue, a-t-il souligné.  Ainsi le projet d’articles n’inclut-il pas de référence explicite au conflit armé international ou au conflit armé non international.  Les divergences qui existent entrainent des difficultés, a-t-il souligné.

D’après le représentant, la manière dont a été rédigé l’article 9 sur la notification de l’intention de mettre fin à un traité, de s’en retirer ou d’en suspendre « crée des lacunes ».  En revanche, il s’est félicité de l’article 14 sur les effets de l’exercice du droit de légitime défense sur un traité et de l’article 15 sur l’interdiction pour l’État qui commet une agression d’en tirer avantage.

Le mandat de la Commission du droit international consiste à compléter et non pas à modifier le droit international des traités, a conclu M. Ardekani.  « Nous pensons donc que le projet d’article doit être indicatif pour les États et non pas un instrument juridique contraignant. »

Mme Xxxxx (Uruguay) a déclaré que l’existence d’un conflit armé n’implique pas nécessairement la suspension ou l’annulation d’un traité, comme le stipule la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Selon elle, les États ne peuvent pas non plus ignorer les règles et principes du droit international sous le prétexte d’un conflit armé. 

L’annulation ou la suspension des traités doit demeurer l’exception et non la règle, a fait valoir la représentante, sauf en cas de commun accord des parties sans préjudice à un État tiers.  Elle a souligné l’importance d’appliquer les traités relatifs au droit international humanitaire ainsi que ceux conclus précisément aux fins d’un conflit armé.  De plus, les traités relatifs aux frontières, terrestres et maritimes, ainsi qu’au commerce, ne devraient pas être affectés par l’émergence d’un conflit armé, a-t-elle relevé.

Mme ANNELI LEEGA PIISKOP (Estonie) a estimé que le projet d’articles sur les effets des conflits armés sur les traités est une base utile pour une discussion théorique mais qui a aussi des implications réelles.  Ainsi, toute orientation ou accord sur les règles à suivre en situation de conflit armé trouvera sa propre utilité.  Elle a argué que « l’occupation est une forme de conflit armé » qui devait être inclue dans ce projet.

Pour ce qui est de la forme, la représentante a reconnu que peu d’États appuient un projet de convention et que le projet d’articles ainsi que les débats en cours devraient en conséquence être considérés comme une contribution importante au droit positif.

Mme DIYANA AHAMAD (Malaisie) a partagé le point de vue des autres États Membres pour qui les projets d’articles offrent des orientations pratiques, avant d’affirmer qu’il serait prématuré de codifier ces derniers en une convention, dans la mesure où certaines questions doivent être encore discutées.  Selon elle, également, l’annexe de l’article 7 sur le maintien en vigueur de traités en raison de leur matière n’est pas claire.  La délégation a jugé que, de manière générale, la Sixième Commission devrait discuter davantage des articles en question pour mieux comprendre leur contexte.

M. HASSAN SAEED H. ALJOMAE (Arabie saoudite) a souligné que la Convention de Vienne sur le droit des traités doit demeurer la source principale pour l’interprétation des conflits armés.  Nous ne devons pas négliger les règles du droit international humanitaire dans l’examen de l’effet des conflits armés sur les traités, a-t-il averti.  Soulignant la nécessité de déterminer le type de traités qui ne doivent pas être suspendus pendant un conflit armé, il a noté qu’il est difficile pour les États Membres de parvenir à un accord sur ce sujet.  Selon lui, le projet d’articles sur l’effet des conflits armés sur les traités devrait être considéré à titre de lignes directrices à l’intention des États.

Mme ZINOVIA STAVRIDI (Grèce) a été d’avis que l’Assemblée générale devrait adopter à ce stade une résolution prenant note des projets d’articles et les fasse figurer en annexe de ce texte, de manière à encourager les États Membres à y recourir dans des situations spécifiques.  « Nous estimons qu’il s’agit de la manière la plus adéquate de progresser sur cette question », a-t-elle dit.  L’Assemblée devrait en outre envisager, ultérieurement, l’élaboration d’une convention sur la base des projets d’articles, qui constituerait un instrument complémentaire aux effets normatifs, comparable à la Convention de vienne sur le droit des traités. 

Il faut trouver des mesures par lesquelles les États peuvent remplir leurs obligations telles que prévues par un traité en cas de survenance d’un conflit armé sur la base de la confiance mutuelle, a fait valoir Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal).  Or le caractère de la question à l’examen appelle à une certaine prudence, a-t-elle déclaré.  « Nous sommes d’accord sur le projet d’articles en général et avec leur compatibilité avec une convention internationale.  Nous comprenons aussi qu’il suscite des préoccupations et des doutes », a-t-elle indiqué.

La représentante a recommandé de trouver un équilibre entre la préservation du travail de la Commission du droit international (CDI) et la nécessité d’assurer la stabilité du droit international en adoptant une convention, a-t-elle déclaré.  Elle a suggéré la création d’un groupe de travail afin de trouver une solution sur l’élaboration éventuelle d’un projet de convention sur les effets des conflits armés sur les traités. 

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